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Chanson du vitrier Jacques Prévert Comme c'est beau ce qu'on peut ...

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<strong>Chanson</strong> <strong>du</strong> <strong>vitrier</strong> <strong>Jacques</strong> <strong>Prévert</strong><br />

<strong>Comme</strong> c’est <strong>beau</strong><br />

<strong>ce</strong> qu’on <strong>peut</strong> voir comme ça<br />

à travers le sable à travers le verre<br />

à travers les carreaux<br />

tenez regardez par exemple<br />

comme c’est <strong>beau</strong><br />

<strong>ce</strong> bûcheron<br />

là-bas au loin<br />

qui abat un arbre<br />

pour faire des planches<br />

pour le menuisier<br />

qui doit faire un grand lit<br />

pour la petite marchande de fleurs<br />

qui va se marier<br />

avec l’allumeur de réverbères<br />

qui allume tous les soirs les lumières<br />

pour que le cordonnier puisse voir clair<br />

en réparant les souliers <strong>du</strong> cireur<br />

qui brosse <strong>ce</strong>ux <strong>du</strong> rémouleur<br />

qui affûte les ciseaux <strong>du</strong> coiffeur<br />

qui coupe le ch’veu au marchand d’oiseaux<br />

qui donne ses oiseaux à tout le monde<br />

pour que tout le monde soit de bonne humeur.<br />

In Histoires


Le dormeur <strong>du</strong> val<br />

C'est un trou de ver<strong>du</strong>re où chante une rivière,<br />

Accrochant follement aux herbes des haillons<br />

D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,<br />

Luit : <strong>c'est</strong> un petit val qui mousse de rayons.<br />

Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,<br />

Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,<br />

Dort ; il est éten<strong>du</strong> dans l'herbe, sous la nue,<br />

Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.<br />

Les pieds dans les glaïeuls, il dort. Souriant comme<br />

Sourirait un enfant malade, il fait un somme :<br />

Nature, ber<strong>ce</strong>-le chaudement : il a froid.<br />

Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;<br />

Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,<br />

Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.<br />

Arthur RIMBAUD (1854-1891)


Rêvé pour l'hiver<br />

L'hiver, nous irons dans un petit wagon rose<br />

Avec des coussins bleus.<br />

Nous serons bien. Un nid de baisers fous repose<br />

Dans chaque coin moelleux.<br />

Tu fermeras l'oeil, pour ne point voir, par la gla<strong>ce</strong>,<br />

Grima<strong>ce</strong>r les ombres des soirs,<br />

Ces monstruosités hargneuses, popula<strong>ce</strong><br />

De démons noirs et de loups noirs.<br />

Puis tu te sentiras la joue égratignée...<br />

Un petit baiser, comme une folle araignée,<br />

Te courra par le cou...<br />

Et tu me diras : " Cherche ! " en inclinant la tête,<br />

- Et nous prendrons <strong>du</strong> temps à trouver <strong>ce</strong>tte bête<br />

- Qui voyage <strong>beau</strong>coup...<br />

Arthur RIMBAUD (1854-1891)


L’enfant<br />

L'enfant, voyant l'aïeule à filer occupée,<br />

Veut faire une quenouille à sa grande poupée.<br />

L'aïeule s'assoupit un peu; <strong>c'est</strong> le moment.<br />

L'enfant vient par derrière et tire dou<strong>ce</strong>ment<br />

Un brin de la quenouille où le fuseau tournoie,<br />

Puis s'enfuit triomphante, emportant avec joie<br />

La belle laine d'or que le safran jaunit,<br />

Autant qu'en pourrait prendre un oiseau pour son<br />

nid.<br />

Victor Hugo<br />

Les Contemplations<br />

Cauterez, août 1843


Un jour je vis<br />

Un jour je vis, debout au bord des flots mouvants,<br />

Passer, gonflant ses voiles,<br />

Un rapide navire enveloppé de vents,<br />

De vagues et d'étoiles ;<br />

Et j'entendis, penché sur l'abîme des cieux,<br />

Que l'autre abîme touche,<br />

Me parler à l'oreille une voix dont mes yeux<br />

Ne voyaient pas la bouche :<br />

« Poète, tu fais bien ! Poète au triste front,<br />

Tu rêves près des ondes,<br />

Et tu tires des mers bien des choses qui sont<br />

Sous les vagues profondes !<br />

La mer, <strong>c'est</strong> le Seigneur, que, misère ou bonheur,<br />

Tout destin montre et nomme ;<br />

Le vent, <strong>c'est</strong> le Seigneur ; l'astre, <strong>c'est</strong> le Seigneur ;<br />

Le navire, <strong>c'est</strong> l'homme. »<br />

Victor Hugo<br />

Les Contemplations<br />

juin 1839


J’eus toujours de l’amour<br />

J'eus toujours de l'amour pour 1es choses ailées.<br />

Lorsque j'étais enfant, j'allais sous les feuillées,<br />

J'y prenais dans les nids de tout petits oiseaux.<br />

D'abord je leur faisais des cages de roseaux<br />

Où je les élevais parmi des mousses vertes.<br />

Plus tard je leur laissais les fenêtres ouvertes.<br />

Ils ne s'envolaient point; ou, s'ils fuyaient aux bois,<br />

Quand je les rappelais ils venaient à ma voix.<br />

Une colombe et moi, longtemps nous nous aimâmes.<br />

Maintenant je sais l'art d'apprivoiser 1es âmes.<br />

Victor Hugo<br />

Les Rayons et les ombres<br />

12 avril 1840

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