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Licence de Chimie - UPMC - Université Pierre et Marie CURIE

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<strong>Université</strong> <strong>Pierre</strong> <strong>et</strong> <strong>Marie</strong> Curie<br />

<strong>Université</strong> <strong>Pierre</strong> <strong>et</strong> <strong>Marie</strong> Curie<br />

<strong>Licence</strong> <strong>de</strong> <strong>Chimie</strong> – 2 ème année (L2)<br />

LC 205 – Année 2007-2008 – Chapitre I<br />

<strong>UPMC</strong> – <strong>Licence</strong> <strong>de</strong> <strong>Chimie</strong><br />

Année 2005-2006<br />

Cours <strong>de</strong> <strong>Chimie</strong> Inorganique<br />

LC205


CHIM 205 : <strong>Chimie</strong> Inorganique<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Chapitre I. Principes généraux<br />

I. A. La structure électronique <strong>de</strong>s éléments<br />

I.A.1. Des « hydrogénoï<strong>de</strong>s » aux atomes polyélectroniques<br />

On se souviendra qu’en mécanique quantique, une particule, par exemple un électron, est<br />

décrite entièrement par une « fonction d’on<strong>de</strong> » ψ(x,y,z) définie en tout point <strong>de</strong> l’espace <strong>et</strong><br />

renseignant sur la probabilité <strong>de</strong> présence <strong>de</strong> la particule en ce point : P(x,y,z) = ψ 2 (x,y,z). On<br />

trouve ψ(x,y,z) en résolvant l’équation <strong>de</strong> Schrödinger, qui fait intervenir explicitement l’énergie<br />

potentielle <strong>de</strong> l’électron. Le processus mathématique est détaillé en LC202.<br />

Cela concerne aussi les électrons dans les atomes <strong>et</strong> les molécules. Ces électrons sont soumis<br />

à une interaction électrostatique avec le noyau (<strong>de</strong> charge +Ze), qui est attractive <strong>et</strong> ne dépend que<br />

<strong>de</strong> la distance r entre l’électron <strong>et</strong> le noyau. S’il y a plusieurs électrons, ils subissent aussi entre eux<br />

<strong>de</strong>s interactions électrostatiques, répulsives c<strong>et</strong>te fois, ce qui complique beaucoup la résolution du<br />

problème.<br />

On commence donc par résoudre l’équation <strong>de</strong> Schrödinger pour <strong>de</strong>s édifices<br />

monoélectroniques « hydrogénoï<strong>de</strong>s », composés d’un seul électron interagissant avec un noyau.<br />

Les solutions sont <strong>de</strong>s fonctions d’on<strong>de</strong> monoélectroniques appelées orbitales atomiques (OA).<br />

I.A.1.a Atome monoélectronique <strong>et</strong> Orbitales Atomiques<br />

* La solution est plus facile en coordonnées radiales, (r, θ, ϕ). On peut alors séparer les<br />

variables :<br />

ψ(r, θ, ϕ) = R(r) Y(θ,ϕ).<br />

R(r) donne la dépendance radiale <strong>de</strong> la fonction d’on<strong>de</strong>, Y(θ, ϕ) sa dépendance angulaire.<br />

* La solution <strong>de</strong> l’équation <strong>de</strong> Schrödinger fait apparaître une quantification : les solutions<br />

dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> paramètres qui ne peuvent prendre que <strong>de</strong>s valeurs discrètes, les nombres<br />

quantiques. R(r) dépend du nombre quantique principal, n, <strong>et</strong> du nombre quantique azimuthal, l.<br />

Y(θ, ϕ) dépend du nombre quantique azimuthal, l, <strong>et</strong> du nombre quantique magnétique, ml .<br />

l peut varier <strong>de</strong> 0 à n - 1.<br />

ml peut varier <strong>de</strong> -l à +l.<br />

Une fonction d’on<strong>de</strong> sera in<strong>de</strong>xée par les valeurs <strong>de</strong>s 3 nombres quantiques n, l, <strong>et</strong> ml, ou<br />

indiquée par une désignation conventionnelle, par exemple :<br />

ψ1,0,0 ou ψ1s ou (1s) : correspond à n=1, l=0 (<strong>et</strong> donc ml = 0 ).<br />

* Mais on « réarrange » parfois <strong>de</strong>ux fonctions d’on<strong>de</strong> <strong>de</strong> même énergie pour obtenir <strong>de</strong>s<br />

fonctions à valeurs réelles, au lieu <strong>de</strong> fonctions à variables complexes. Par exemple, dans le tableau<br />

1,<br />

! 2 p =<br />

x 1<br />

2 ! ( 2,1,1 +! 2,1,"1)<br />

<strong>et</strong> ! 2 p =<br />

y 1<br />

2i ! ( 2,1,1 " ! 2,1,"1 ).<br />

1


Nom <strong>de</strong> la<br />

fonction d’on<strong>de</strong><br />

(1s)<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

R(r) Y(θ, ϕ)<br />

! Zr<br />

N1 e a°<br />

!Zr<br />

(2s)<br />

N2 e 2a° Zr<br />

(2 !<br />

a° )<br />

1<br />

(2pz) !Zr<br />

N2 e 2a° Zr<br />

(<br />

a° )<br />

cosθ<br />

(2px) « sinθ cosϕ<br />

(2py) « sinθ sinϕ<br />

(3s)<br />

! Zr<br />

N3 e 3a° Zr " Zr%<br />

2<br />

(27 ! 18 + 2$ ' )<br />

a° # a° &<br />

1<br />

(3pz) ! Zr<br />

N' 3 e 3a° Zr Zr<br />

(6 ! )(<br />

a° a° )<br />

cosθ<br />

(3px) « sinθ cosϕ<br />

(3py) « sinθ sinϕ<br />

(3dz2) !Zr<br />

3a° Zr<br />

N" 3 e (<br />

a° )2<br />

3cos2θ - 1<br />

(3d xz) « sinθ cosθ cosϕ<br />

(3d xz) « sinθ cosθ sinϕ<br />

(3d x 2 -y 2) « sin 2 θ cos2ϕ<br />

(3d xy) « sin 2 θ sin 2ϕ<br />

a° « rayon <strong>de</strong> Bohr » = 52,9 pm ; N 1 , N 2 … constantes numériques ; Z, numéro atomique <strong>de</strong> l’atome.<br />

Tableau 1 – Dépendances radiales <strong>et</strong> angulaires <strong>de</strong>s premières orbitales hyperboloï<strong>de</strong>s<br />

* L’énergie d’une orbitale ne dépend que du nombre quantique principal, n :<br />

E n,l,ml = !<br />

me 4<br />

Z 2 # & # &<br />

% ( % (<br />

2 2<br />

8" o h n 2 % (<br />

$ '<br />

= !13,6eV Z 2<br />

n 2 % (<br />

$ '<br />

(1 eV = 96,485 kJ.mol-1 ). Elle est toujours<br />

négative (par rapport au niveau d’un « électron libre » dans le vi<strong>de</strong>), ce qui signifie qu’un électron<br />

lié au noyau est effectivement plus stable qu’un électron libre. On représente généralement les<br />

énergies <strong>de</strong>s orbitales sur <strong>de</strong>s diagrammes monodimensionnels, avec une échelle verticale<br />

d’énergie.<br />

I.A.1.b. Taille <strong>de</strong>s orbitales<br />

Il est particulièrement important <strong>de</strong> pouvoir visualiser une OA dans l’espace. Deux critères<br />

peuvent être distingués : la taille <strong>de</strong> l’OA, dépendant essentiellement <strong>de</strong> la fonction R(r), <strong>et</strong> sa<br />

forme, dépendant <strong>de</strong> la partie angulaire Y(θ, ϕ). Nous allons les examiner successivement.<br />

2 2<br />

La fonction <strong>de</strong> distribution radiale ou F.D.R : P(r) = 4"r # (r) donne la probabilité <strong>de</strong><br />

trouver l’électron considéré à une distance r du noyau.<br />

Les figures 1 <strong>et</strong> 2 (p.3) représentent les FDR <strong>de</strong> quelques orbitales atomiques <strong>de</strong> l’hydrogène.<br />

1<br />

2


LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Figure 1: FDR <strong>de</strong>s OA (1s), (2s) <strong>et</strong> (3s) <strong>de</strong> l’hydrogène.<br />

Figure 2: FDR <strong>de</strong>s OA (3s), (3p) <strong>et</strong> (3d) <strong>de</strong> l’hydrogène.<br />

Ces diagrammes suggèrent plusieurs observations :<br />

• plus le nombre quantique principal est élevé, plus l’électron peut se trouver loin du noyau. •<br />

• plus le nombre quantique azimuthal est élevé, plus l’électron est proche du noyau ; c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong><br />

est moins important que le précé<strong>de</strong>nt.<br />

• Si (n-l) > 1, il existe <strong>de</strong>s valeurs <strong>de</strong> r où la F.D.R. (<strong>et</strong> donc la fonction d’on<strong>de</strong>) s’annulent,<br />

<strong>et</strong> donc, où il est interdit <strong>de</strong> trouver l’électron. Ces lieux définissent <strong>de</strong>s surfaces nodales (en<br />

l’occurence, <strong>de</strong>s surfaces sphériques).<br />

• Dans un atome polyélectronique, c<strong>et</strong>te tendance est encore accentuée par la diminution du numéro atomique effectif<br />

Z* (§I.A.1.d): les électrons <strong>de</strong>s couches internes ressentent l’eff<strong>et</strong> d’une charge positive plus élevée, ce qui contracte<br />

encore l’orbitale.<br />

3


• La valeur attendue du rayon peut être considérée comme une mesure du rayon atomique.<br />

Elle vaut :<br />

2<br />

n<br />

r =<br />

Z a " 3 l(l + 1) %<br />

o # ! &<br />

$ 2 '<br />

2n 2<br />

; elle varie donc en sens inverse <strong>de</strong> l’énergie (un électron fortement<br />

lié est aussi très proche du noyau en moyenne).<br />

Une autre mesure approximative <strong>de</strong> la taille peut être utilisée : la valeur <strong>de</strong> r au maximum <strong>de</strong><br />

la FDR.<br />

I.A.1.c. Forme <strong>de</strong>s orbitales<br />

Dans les représentations les plus détaillées, on présentera <strong>de</strong>s courbes d’iso<strong>de</strong>nsité ou<br />

diagrammes <strong>de</strong> contour; mais en général, il suffit <strong>de</strong> représenter une surface à l’intérieur <strong>de</strong> laquelle<br />

on a une probabilité élevée, disons 95% ou 99%, • <strong>de</strong> trouver l’électron considéré : surface limite ou<br />

« enveloppe » <strong>de</strong> l’orbitale.<br />

La forme d’une OA dépend <strong>de</strong>s nombres quantiques l <strong>et</strong> m l . Ainsi, une orbitale s possè<strong>de</strong><br />

une partie angulaire constante. Elle a donc une forme sphérique puisque la valeur <strong>de</strong> la fonction<br />

d’on<strong>de</strong> ne dépend que <strong>de</strong> la distance au noyau.<br />

Une autre caractéristique est importante : le signe <strong>de</strong> la fonction d’on<strong>de</strong>, qui peut être positif<br />

ou négatif. Cela ne change aucune gran<strong>de</strong>ur directement observable (la probabilité <strong>de</strong> présence étant<br />

proportionnelle à ψ 2 ), mais cela détermine néanmoins les propriétés <strong>de</strong> symétrie <strong>de</strong>s OA, <strong>et</strong> par là la<br />

façon dont elles pourront se combiner dans une molécule (voir §I.B.2). Généralement, on indique<br />

un signe positif dans une région en hachurant ou en ombrant c<strong>et</strong>te région. L’absence <strong>de</strong> hachurage<br />

signifie donc un signe négatif (malheureusement, certains ouvrages utilisent une convention<br />

exactement inverse).<br />

Les figures qui suivent schématisent les orbitales <strong>de</strong> type s, p <strong>et</strong> d. Pour les six premières<br />

orbitales, le plan <strong>de</strong> représentation est Oyz, l’axe Ox étant perpendiculaire à ce plan. Le noyau est à<br />

l’origine.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

x<br />

Orbitales s<br />

z<br />

• La valeur précise choisie ne change pas notoirement les représentations. On ne peut pas représenter une surface à<br />

l’intérieur <strong>de</strong> laquelle on serait sur <strong>de</strong> trouver l’électron (probabilité <strong>de</strong> 100%), car les fonctions R(r) ne ten<strong>de</strong>nt<br />

qu’asymptotiquement vers zéro. Même pour <strong>de</strong>s r très élevés, il n’est donc jamais absolument impossible <strong>de</strong> trouver<br />

l’électron à une distance r.<br />

y<br />

4


x<br />

z<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

y<br />

Orbitales p :<br />

p z : plan nodal Oxy p y : plan nodal Oxz p x : plan nodal Oyz<br />

x<br />

z<br />

Orbitales d :<br />

d z 2 (surfaces nodales coniques) d yz : plans nodaux Oxy <strong>et</strong> Oxz<br />

y<br />

Attention, les trois représentations suivantes sont orientées différemment pour la facilité du <strong>de</strong>ssin:<br />

y<br />

z<br />

y<br />

z<br />

x<br />

d xy : plans nodaux Oyz <strong>et</strong> Oxz d xz : plans nodaux Oyz <strong>et</strong> Oxy d x 2 -y 2 (plans nodaux à 45° <strong>de</strong>s axes)<br />

Le nombre <strong>de</strong> surfaces nodales vaut n - 1. Certaines <strong>de</strong> ces surfaces sont <strong>de</strong>s plans.<br />

y<br />

I.A.1.d. Atomes polyélectroniques<br />

Dans la plupart <strong>de</strong>s édifices réellement intéressants (presque tous les atomes <strong>et</strong> ions), il y a<br />

plusieurs électrons. L’équation <strong>de</strong> Schrödinger comprend donc un terme <strong>de</strong> répulsion<br />

supplémentaire. Les orbitales (fonctions d’on<strong>de</strong> monoélectroniques!) ne sont en toute rigueur plus<br />

<strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te nouvelle équation. Mais le problème est généralement trop compliqué pour<br />

être résolu rigoureusement. On tente donc <strong>de</strong> conserver la simplicité <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription du cas<br />

précé<strong>de</strong>nt :<br />

x<br />

x<br />

z<br />

z<br />

y<br />

x<br />

5


Approximation orbitalaire : on suppose que les termes <strong>de</strong> répulsion interélectronique sont<br />

assez faibles pour être traités comme <strong>de</strong>s perturbations. On peut alors séparer les variables <strong>et</strong> écrire<br />

la fonction d’on<strong>de</strong> totale comme combinaison <strong>de</strong> fonctions d’on<strong>de</strong>s monoélectroniques. En d’autres<br />

termes, on peut supposer que chaque électron « occupe » une orbitale bien définie.<br />

Attention ! Les énergies ne dépen<strong>de</strong>nt plus seulement <strong>de</strong> n. En eff<strong>et</strong>, un électron dans une orbitale<br />

ns, par exemple, subit un potentiel électrostatique différent d’un électron dans une orbitale np, si les<br />

orbitales <strong>de</strong> la couche (n-1) sont occupées.<br />

On peut approximer l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong>s autres électrons en remplaçant dans les formules le numéro<br />

atomique Z par un « numéro atomique effectif » Z *, qui tient compte <strong>de</strong> « l’eff<strong>et</strong> écran » <strong>de</strong>s<br />

autres électrons sur la charge nucléaire. Pour calculer le Z * d’un électron dans une orbitale donnée,<br />

il faut soustraire au Z <strong>de</strong> l’atome les « eff<strong>et</strong>s écrans » exercés par tous les autres électrons. Ces<br />

valeurs, largement empiriques, sont résumées au tableau 2 :<br />

Electron Ecranteur<br />

Electron<br />

Ecranté<br />

1 s 2s, 2p 3s, 3p 3d 4s, 4p 4d 4f<br />

1 s 0,31 0 0 0 0 0 0<br />

2s, 2p 0,85 0,35 0 0 0 0 0<br />

3s, 3p 1 0,85 0,35 0 0 0 0<br />

3d 1 1 1 0,35 0 0 0<br />

4s, 4p 1 1 0,85 0,85 0,35 0 0<br />

4d 1 1 1 1 1 0,35 0<br />

4f 1 1 1 1 0,85 0,85 0,35<br />

Tableau 2 : Calcul approximatif <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s-écrans σ pour <strong>de</strong>s électrons dans les OA d’élements <strong>de</strong>s<br />

pério<strong>de</strong>s 1 à 4. Z*= Z – Σσ.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Exemple d’utilisation.<br />

Na. (1s) 2 (2s) 2 (2p) 6 (3s) 1<br />

Electron (3s) : somme <strong>de</strong>s eff<strong>et</strong>s écrans = 2x1 + 8x0,85 = 8,8.<br />

Z* = Z – 8,8 = 2,2 pour un électron dans l’orbitale (3s).<br />

Des calculs plus précis peuvent être effectués. Ils donnent <strong>de</strong>s valeurs légèrement différentes<br />

<strong>de</strong>s Z* (voir Tableau 3).<br />

H He<br />

Z 1 2<br />

Z*(1s) 1 1,69<br />

Li Be B C N O F Ne<br />

Z 3 4 5 6 7 8 9 10<br />

Z*(1s) 2,69 3,68 4,68 5,67 6,66 7,66 8,65 9,64<br />

Z*(2s) 1,28 1,91 2,58 3,22 3,85 4,49 5,13 5,76<br />

Z*(2p) - - 2,42 3,14 3,83 4,45 5,10 5,76<br />

Na Mg Al Si P S Cl Ar<br />

Z 11 12 13 14 15 16 17 18<br />

Z*(1s) 10,63 11,61 12,59 13,57 14,56 15,54 16,52 17,51<br />

Z*(2s) 6,57 7,39 8,21 9,02 9,82 10,63 11,43 12,23<br />

Z*(2p) 6,80 7,83 8,96 9,94 10,96 11,98 12,99 14,01<br />

Z*(3s) 2,51 3,31 4,12 4,90 5,64 6,37 7,07 7,76<br />

Z*(3p) - - 4,07 4,29 4,89 5,48 6,12 6,76<br />

Tableau 3 : Valeurs <strong>de</strong>s Z* <strong>de</strong>s électrons dans les OA d’élements <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s 2 <strong>et</strong> 3<br />

(Version plus précise).<br />

Pour l’exemple <strong>de</strong> l’électron (3s) du sodium : la valeur <strong>de</strong> Z * est ici 2,51 au lieu <strong>de</strong> 2,2.<br />

6


" Z * %<br />

Moyennant quoi, on peut écrire p.ex., En,l,ml = !13,6eV$ '<br />

# n * &<br />

(Pour les premières couches, n*=n)<br />

L’intérêt principal du calcul précis est d’indiquer, correctement <strong>et</strong> conformément à<br />

l’expérience, que les orbitales s, p <strong>et</strong> d d’une même couche ne sont pas dégénérées dans un atome à<br />

plusieurs électrons (cf. § I.A.2).<br />

I.A.2. L’édification <strong>de</strong>s configurations électroniques<br />

Ayant admis l’approximation orbitalaire (§I.A.1.d), on va caractériser la distribution <strong>de</strong>s<br />

électrons dans un atome ou un ion par une configuration électronique : c’est à dire une liste <strong>de</strong>s<br />

orbitales atomiques, indiquant pour chacune le nombre d’électrons qui l’occupent.<br />

La configuration fondamentale est celle qui correspond à l’état le plus stable<br />

énergétiquement. Des configuration excitées peuvent exister temporairement mais elles auront<br />

toujours tendance à revenir vers la configuration fondamentale, par exemple en se débarrassant <strong>de</strong><br />

l’excès d’énergie par émission d’un photon.<br />

Principe d’édification (ou « <strong>de</strong> contruction », ou « d’Aufbau ») : On obtient la configuration<br />

fondamentale en remplissant les orbitales, électron par électron, dans l’ordre d’énergie croissante :<br />

E<br />

4s<br />

3s<br />

2s<br />

1<br />

1s<br />

Figure 3: Energies relatives <strong>de</strong>s OA dans un atome polyélectronique.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

niveau du vi<strong>de</strong><br />

4d<br />

4p 3d<br />

3p<br />

2p<br />

4f<br />

pour Z < 21<br />

pour Z ! 21<br />

• Règles <strong>de</strong> Klechkowsky…classer d’abord par ordre <strong>de</strong> (n+l) croissant, puis, à l’intérieur<br />

d’un groupe, par ordre <strong>de</strong> n croissant. Le schéma mnémotechnique <strong>de</strong> la figure 4 est utile<br />

(voir p.8).<br />

• Principe d’exclusion <strong>de</strong> Pauli : il y a 2 places par orbitale,<br />

En eff<strong>et</strong>, <strong>de</strong>ux électrons différents doivent se distinguer par la valeur d’au moins un nombre<br />

quantique. Or, l’orbitale définit les trois nombres n, l, m l ; à l’intérieur d’une même orbitale, il<br />

reste <strong>de</strong>ux valeurs possibles du nombre quantique <strong>de</strong> spin, m s = +1/2 ou –1/2.<br />

• Règle <strong>de</strong> Hund : lorsqu’il y a plusieurs orbitales <strong>de</strong> même énergie, la configuration <strong>de</strong> spin<br />

maximum est adoptée.<br />

NB : La règle <strong>de</strong> Klechkovsky n’est qu’un gui<strong>de</strong> approximatif, pas un principe absolu.<br />

Parmi les exceptions :<br />

1) les configurations fondamentales <strong>de</strong>s atomes Cr (…3d 5 4s 1 ), Cu (…3d 9 4s 1 ).<br />

2<br />

7


2) Surtout, dans les ions positifs <strong>de</strong>s métaux <strong>de</strong> transition, les orbitales (nd) sont<br />

stabilisées, <strong>et</strong> remplies avant les orbitales (n+1)s (cf. Chapitre III).<br />

Les <strong>de</strong>ux autre règles sont basées sur <strong>de</strong>s principes fondamentaux.<br />

Figure 4: Ordre d’énergie <strong>de</strong>s OA, schéma mnémotechnique<br />

Une orbitale atomique peut être vacante, partiellement occupée (un électron) ou occupée<br />

(<strong>de</strong>ux électrons).<br />

Une couche peut être ouverte (partiellement occupée) ou fermée (totalement<br />

occupée/totalement vi<strong>de</strong>). La couche <strong>de</strong> valence est la couche, occupée ou partiellement occupée, la<br />

plus haute en énergie (dans l’état fondamental). Les couches occupées plus basses en énergie sont<br />

dites « <strong>de</strong> cœur ».<br />

Pour éviter les énumérations fastidieuses, on peut résumer l’ensemble <strong>de</strong>s couches fermées<br />

d’un élément par le symbole du premier élément <strong>de</strong> la classification périodique qui complète toutes<br />

ces couches, écrit entre croch<strong>et</strong>s.<br />

Exemple : L’Argon (Ar, Z=18) est le premier élément à avoir les couches 1, 2 <strong>et</strong> 3 (s <strong>et</strong> p) complètes.<br />

La configuration électronique fondamentale du Nickel (Z = 28), qui est (1s) 2 (2s) 2 (2p) 6 (3s) 2 (3p) 6 (4s) 2 (3d) 8 , peut<br />

donc s’écrire <strong>de</strong> façon plus con<strong>de</strong>nsée [Ar] (4s) 2 (3d) 8 .<br />

C<strong>et</strong>te procédure est vivement recommandée.<br />

I.A.3. Classification périodique <strong>et</strong> périodicité <strong>de</strong>s propriétés<br />

I.A.3.a. Généralités : interprétation orbitalaire <strong>de</strong> la périodicité.<br />

La classification périodique <strong>de</strong> Mendéléev a été proposée avant qu’on ne dispose d’une<br />

théorie satisfaisante <strong>de</strong> la structure électronique <strong>de</strong>s atomes, sur base <strong>de</strong> la similitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s propriétés<br />

chimiques <strong>et</strong> physiques <strong>de</strong>s éléments. On avait observé qu’en rangeant les éléments par ordre <strong>de</strong><br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

8


masse atomique croissante dans <strong>de</strong>s « blocs » successifs, les éléments d’une même colonne<br />

présentaient <strong>de</strong>s propriétés assez semblables. L’interprétation mo<strong>de</strong>rne se base sur les notions<br />

d’orbitales atomiques <strong>et</strong> <strong>de</strong> couches. L’ordre <strong>de</strong>s masses croissantes correspond en fait à <strong>de</strong>s valeurs<br />

croissantes <strong>de</strong> Z, donc du nombre total d’électrons.<br />

Chaque bloc correspond alors au remplissage d’une sous-couche particulière. La première<br />

pério<strong>de</strong> ne contient que le « bloc s » car les OA <strong>de</strong> nombre quantique n =1 ne peuvent avoir que l<br />

= 0. La secon<strong>de</strong> contient <strong>de</strong>s éléments du « bloc s » (remplissage <strong>de</strong> la sous-couche (2s)), puis du<br />

« bloc p » (remplissage <strong>de</strong> la sous-couche (2p)), <strong>et</strong> ainsi <strong>de</strong> suite, en tenant compte <strong>de</strong>s règles<br />

d’édification.<br />

Le passage à la ligne (« pério<strong>de</strong> ») suivante se fait après qu’une couche soit complètement<br />

remplie. Deux éléments situés dans la même colonne (« groupe »), mais appartenant à <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s<br />

successives, auront le même nombre d’électrons <strong>de</strong> valence, <strong>et</strong> la même répartition en sous-couches,<br />

mais le nombre quantique principal augmentera d’une unité.<br />

Ex : Le carbone (C, Z = 6) a pour configuration [He] (2s) 2 (2p) 2 .<br />

Le silicium (Si, Z = 14) a pour configuration [Ne] (3s) 2 (3p) 2 .<br />

Quant au germanium (Ge, Z = 32), il a pour configuration [Ar] (4s) 2 (3d) 10 (4p) 2 . Dans ce cas, la<br />

sous-couche (3d), complètement remplie, influe peu sur la réactivité chimique. On considérera que<br />

le nombre d’électrons <strong>de</strong> valence est <strong>de</strong> 4 pour ces trois éléments, répartis en (ns) 2 (np) 2 , <strong>et</strong> on<br />

observera comme prévu une similitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> comportement chimique.<br />

Une bonne partie du chapitre II consistera en l’exploration systématique <strong>de</strong>s ressemblances <strong>et</strong><br />

différences <strong>de</strong> comportement chimique au sein <strong>de</strong>s groupes du bloc p.<br />

I.A.3.b. Evolution <strong>de</strong> la taille <strong>de</strong>s atomes.<br />

Les rayons atomiques <strong>de</strong>s éléments successifs sont représentés en fonction du numéro<br />

atomique à la figure 5. La périodicité <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te propriété est évi<strong>de</strong>nte.<br />

Remarquer – l’augmentation considérable <strong>et</strong> soudaine du rayon atomique lorsqu’on passe à une<br />

nouvelle pério<strong>de</strong> (car n augmente ; cf. discussion du § I.A.1.b)<br />

- la diminution régulière au long d’une pério<strong>de</strong> (car Z* augmente)<br />

0 20 40 60 80 100<br />

Figure 5 : évolution du rayon atomique en fonction du numéro atomique Z.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

9


Le rayon atomique concerne un atome isolé. Le rayon covalent, r cov,, est calculé sur la base<br />

<strong>de</strong>s distances interatomiques dans <strong>de</strong>s molécules à liaison covalente. Il concerne un atome combiné<br />

<strong>et</strong> n’est pas exactement égal au rayon atomique; mais son évolution avec Z suit <strong>de</strong>s tendances très<br />

semblables.<br />

On définit aussi <strong>de</strong>s rayons ioniques (pour les cations <strong>et</strong> pour les anions), d’après les<br />

distances entre les centres <strong>de</strong>s ions mesurées dans <strong>de</strong>s soli<strong>de</strong>s ioniques (cf. § I.C). Ces paramètres<br />

suivent eux aussi la même évolution périodique. Pour un élément donné, le rayon anionique est<br />

toujours supérieur au rayon atomique, qui est supérieur au rayon cationique.<br />

On notera une difficulté dans la définition <strong>de</strong>s rayons covalents <strong>et</strong> ioniques. Ils ne sont pas<br />

individuellement mesurables : on n’a accès qu’à <strong>de</strong>s distances (interatomiques ou interioniques),<br />

c’est à dire à <strong>de</strong>s sommes <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux rayons. Il faut donc fixer a priori un rayon particulier pour<br />

pouvoir déterminer les autres <strong>de</strong> proche en proche. Ainsi, une échelle populaire <strong>de</strong> rayons ioniques<br />

se base sur la valeur <strong>de</strong> 1,40 Å pour le rayon <strong>de</strong> l’anion oxy<strong>de</strong>, O 2- . Un point <strong>de</strong> référence différent<br />

fournirait <strong>de</strong>s valeurs légèrement différentes pour tous les rayons ioniques, seules les sommes<br />

restant constantes.<br />

I.A.3.c. Descripteurs <strong>de</strong> réactivité<br />

Il est intéressant <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> paramètres caractéristiques <strong>de</strong>s éléments du tableau<br />

périodique, capables <strong>de</strong> prédire certains aspects <strong>de</strong> leur comportement chimique, comme la<br />

tendance à former <strong>de</strong>s cations (ou <strong>de</strong>s anions), ou la tendance à polariser les électrons d’une liaison<br />

covalente... De nombreux <strong>de</strong>scripteurs <strong>de</strong> ce type ont été proposés, dont nous ne mentionnerons que<br />

quelques-uns. Ils exhibent souvent une périodicité évi<strong>de</strong>nte.<br />

i) Potentiels d’ionisation.<br />

Pour un élément A, le potentiel <strong>de</strong> (première) ionisation est défini comme l’énergie<br />

nécessaire pour arracher un électron à un atome <strong>de</strong> A isolé à l’état gazeux :<br />

PI ou P.I. = <strong>de</strong>f<br />

!U <strong>de</strong> la réaction Agaz ! A + gaz + e " •<br />

Figure 6 : évolution du potentiel d’ionisation en fonction du numéro atomique Z.<br />

• NB : Vous trouverez parfois une définition en termes <strong>de</strong> différence d’enthalpie plutôt que d’énergie (ΔH au lieu <strong>de</strong><br />

ΔU). En fait, la différence entre les <strong>de</strong>ux vaut Δ(PV) = (Δn gaz)RT = 1.RT (car on passe d’une espèce en phase gazeuse à<br />

<strong>de</strong>ux, en comptant l’électron). Les <strong>de</strong>ux échelles sont simplement décalées d’un facteur constant.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

10


C<strong>et</strong>te quantité est positive (il faut toujours fournir <strong>de</strong> l’énergie pour arracher un électron).<br />

L’évolution en fonction <strong>de</strong> Z est exactement inverse <strong>de</strong> celle qui est observée pour les rayons<br />

atomiques. Le P.I. augmente quand on parcourt une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> gauche à droite, <strong>et</strong> diminue quand on<br />

<strong>de</strong>scend dans le tableau périodique:<br />

Interprétation orbitalaire: le P.I. est à peu près égal à l’énergie <strong>de</strong> l’orbitale <strong>de</strong> valence d’où on<br />

arrache l’électron lors <strong>de</strong> l’ionisation :<br />

E<br />

niveau du vi<strong>de</strong><br />

orbitale<br />

<strong>de</strong> valence<br />

} orbitales<br />

<strong>de</strong> coeur<br />

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E<br />

électron libre<br />

Or on a vu aux §§ I.A.1.a <strong>et</strong> I.A.1.b que c<strong>et</strong>te énergie varie en sens inverse du rayon<br />

atomique.<br />

Utilité: Déterminer les gran<strong>de</strong>s tendances d’ionisation. Les éléments ayant les P.I. les plus faibles<br />

seront facilement transformés en les cations correspondants. Ainsi, la chimie <strong>de</strong>s alcalins est<br />

essentiellement cationique: Na + , K + , Rb + , Cs + . Inversément, l’espèce F + n’est jamais rencontrée en<br />

conditions normales.<br />

Attention: ne pas tenter d’utiliser c<strong>et</strong>te gran<strong>de</strong>ur pour <strong>de</strong>s prévisions quantitatives concernant une<br />

réaction en solution aqueuse. Pour la réactivité chimique, l’environnement moléculaire est<br />

important. Une gran<strong>de</strong>ur thermodynamique <strong>de</strong> réaction en phase aqueuse peut être très différente<br />

<strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur correspondante en phase gazeuse.<br />

ii) Affinités électroniques.<br />

Pour un atome A,<br />

AE ou A.E. = <strong>de</strong>f<br />

! "U <strong>de</strong> la réaction A gaz + e ! " A ! gaz<br />

C<strong>et</strong>te quantité est généralement positive (ΔU négatif) : la fixation d’un électron dégage <strong>de</strong><br />

l’énergie. Cela est prévisible d’après l’interprétation orbitalaire du phénomène :<br />

Toutefois, les AE sont n<strong>et</strong>tement plus faibles que les PI correspondants. En eff<strong>et</strong>, dans l’état<br />

final (A -<br />

gaz ), les électrons sont soumis à d’importantes répulsions qui ren<strong>de</strong>nt c<strong>et</strong> état moins stable<br />

que prévu par le diagramme.<br />

Les tendances en fonction <strong>de</strong> Z (non représentées) sont les mêmes que pour les P.I.<br />

11


Utilité : déterminer la tendance à former <strong>de</strong>s anions. Par exemple, le fluor se rencontrera souvent<br />

sous forme <strong>de</strong> F - , car son AE est élevée. Inversement, on ne rencontre jamais Cs - .<br />

iii) Electronégativité.<br />

Ce <strong>de</strong>scripteur, souvent noté χ, est le résultat d’une intuition <strong>de</strong> Linus Pauling qui cherchait à<br />

quantifier « le pouvoir d’un atome, au sein d’une molécule, d’attirer à lui les électrons ». Des<br />

dizaines d’échelle d’électronégativité ont été proposées. Dans tous les cas, l’électronégativité<br />

évolue dans le tableau périodique comme le PI <strong>et</strong> l’AE.<br />

- Echelle <strong>de</strong> Pauling χ P<br />

La plus courante. Elle est basée sur l’observation que dans une molécule hétéroatomique (X-<br />

Y), la liaison est plus stable que la moyenne <strong>de</strong>s liaisons homoatomiques (X-X <strong>et</strong> Y-Y). A partir <strong>de</strong>s<br />

énergies <strong>de</strong> dissociation D, on définit une différence <strong>de</strong> stabilité Δ :<br />

! = DXY " DXX + DYY 2<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

, <strong>et</strong> <strong>de</strong> là on estime la différence d’électronégativité entre les éléments X<br />

( ) X " ( ! P ) Y = # avec Δ exprimé en eV.<br />

<strong>et</strong> Y par la formule ! P<br />

C<strong>et</strong>te formule ne fournit que <strong>de</strong>s différences d’électronégativité. On choisit donc<br />

arbitrairement un point <strong>de</strong> référence : l’électronégativité du fluor, posée égale à 3,98. On notera que<br />

l’évaluation <strong>de</strong> l’électronégativité <strong>de</strong> Pauling nécessite <strong>de</strong> disposer <strong>de</strong> données énergétiques sur les<br />

molécules diatomiques.<br />

- Echelle <strong>de</strong> Mulliken χ M<br />

C<strong>et</strong>te échelle est basée par contre sur les propriétés électroniques <strong>de</strong> l’atome isolé, potentiel<br />

d’ionisation <strong>et</strong> affinité électronique :<br />

PI + AE<br />

! M =<br />

2<br />

Elle se prête à une interprétation intuitive : l’électronégativité <strong>de</strong> Mulliken est l’énergie<br />

moyenne <strong>de</strong>s électrons <strong>de</strong> valence.<br />

On constate qu’elle est bien corrélée à l’expression <strong>de</strong> Pauling : ! P = 1,35 ! M " 1,37<br />

- Echelle d’Allred-Rochow χAR Egalement basée sur les propriétés électroniques d’un atome ou d’un ion, plus précisément<br />

sur la force électrostatique exercée par le noyau « en périphérie » <strong>de</strong> l’atome.<br />

3590Z *<br />

! AR = 2 + 0,744<br />

( rcov )<br />

(r cov en pm ; les constantes sont choisies pour avoir directement une échelle superposable à celle <strong>de</strong><br />

Pauling).<br />

- Electronégativités absolues (Parr) χabs Définition la plus fondamentale <strong>et</strong> la plus récente. Contrairement aux autres, elle est<br />

applicable non seulement aux atomes, mais aux ions, ou à tout édifice moléculaire.<br />

! abs = " #E $ '<br />

&<br />

% #N(<br />

Signification : variation <strong>de</strong> l’énergie (E) <strong>de</strong> l’atome ou <strong>de</strong> la molécule lorsqu’on lui ajoute <strong>de</strong>s<br />

électrons (N : nombre d’électrons), sans changer le potentiel électrostatique V exercé par le(s)<br />

noyau(x). Noter que l’utilisation <strong>de</strong> la dérivée signifie qu’on traite le nombre d’électrons comme<br />

une variable continue (interprétation <strong>de</strong> la liaison comme transfert partiel d’électrons).<br />

) V<br />

12


Séduisant théoriquement, difficile à calculer !<br />

- Applications <strong>de</strong>s échelles d’électronégativité<br />

• Prédire les énergies <strong>de</strong> stabilisation additionnelle <strong>de</strong> liaisons partiellement covalentes dues à<br />

( ) 2 (en eV). Cela peut paraître tautologique<br />

la polarisation <strong>de</strong> la liaison : E = ! A " ! B<br />

d’après la définition <strong>de</strong> Pauling. Notons toutefois que, si l’on s’intéresse à un ensemble <strong>de</strong><br />

(n+1) éléments chimiques, la définition <strong>de</strong> l’échelle d’électronégativité nécessite <strong>de</strong><br />

mesurer seulement n valeurs <strong>de</strong> l’énergie <strong>de</strong> dissociation, mais perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> calculer c<strong>et</strong>te<br />

valeur pour les (n+1) 2 - n couples restants.<br />

• Evaluer les charges partielles formées sur les atomes suite à la polarisation <strong>de</strong> la liaison, ou<br />

la quantité dérivée qu’est le pourcentage <strong>de</strong> caractère ionique <strong>de</strong> la liaison. Les manuels<br />

donnent souvent une dépendance linéaire entre le pourcentage d’ionicité <strong>et</strong> la différence<br />

d’électronégativité : % ion = 29.4 ! A " ! B . Il faut user <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te relation avec pru<strong>de</strong>nce ;<br />

en réalité, le caractère ionique/covalent dépend aussi <strong>de</strong>s valeurs absolues <strong>de</strong>s<br />

électronégativités, pas seulement <strong>de</strong> leurs différences.<br />

• Evaluer le Moment dipolaire électrique d’une liaison A-B (produit <strong>de</strong> la charge partielle<br />

par la distance interatomique) : on a très approximativement µ e = χ A – χ B si on exprime µ e<br />

en Debye (1D= 3,3*10 -30 Coulomb.m) <strong>et</strong> qu’on utilise l’échelle <strong>de</strong> Pauling. On verra au §<br />

I.B.1 l’importance du moment dipolaire pour déterminer les forces intermoléculaires<br />

(cohésion entre molécules différentes).<br />

• Déterminer les <strong>de</strong>grés d’oxydation (D.O., ou nombres d’oxydation, N.O.) d’un élément<br />

dans un compoosé, nécessaires notamment pour étudier les réactions d’oxydoréduction.<br />

Pour calculer le D.O. d’un élément A dans une structure moléculaire donnée, on considère<br />

chaque liaison dans laquelle c<strong>et</strong> élément est impliqué, <strong>et</strong> on attribue les <strong>de</strong>ux électrons <strong>de</strong><br />

c<strong>et</strong>te liaison entièrement à l’élément le plus électronégatif. La charge partielle sur A<br />

résultant <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te procédure fournit le D.O.<br />

Il existe une procédure apparemment plus simple pour déterminer les D.O. sur base <strong>de</strong> la<br />

formule brute <strong>de</strong> la molécule, mais elle se heurte à <strong>de</strong>s difficultés lorsqu’une molécule contient<br />

plusieurs atomes chimiquement non équivalents (elle n’aboutit qu’à un « D.O. moyen »<br />

Ex : D.O. <strong>de</strong>s atomes d’azote dans la molécule N 2O ?<br />

Procédure simple : ΣD.O. = 0 (molécule électriquement neutre). D.O. <strong>de</strong> l’oxygène = -II<br />

Donc, 2*D.O. (N) = +II <strong>et</strong> D.O. moyen (N) = +I.<br />

Procédure moléculaire : Structure <strong>de</strong> Lewis : N N O .<br />

Attribution <strong>de</strong>s électrons à l’atome le plus électronégatif :<br />

Conclusion : un atome <strong>de</strong> N est au D.O. 0, l’autre au D.O. +II.<br />

I.A.3.d. Polarisabilité<br />

La polarisabilité (d’un atome, d’un ion ou d’une molécule) décrit la tendance <strong>de</strong> c<strong>et</strong> édifice à<br />

se polariser sous l’eff<strong>et</strong> d’un champ électrique. Ainsi, une molécule comme I 2 (diio<strong>de</strong>) ne possè<strong>de</strong><br />

pas <strong>de</strong> moment électrique permanent, mais le voisinage d’une charge positive par exemple<br />

“aspirera” le nuage électronique, créant dans la molécule une zone <strong>de</strong> charge partielle négative.<br />

Comme on le verra, ces dipôles induits jouent eux aussi un rôle dans la cohésion intermoléculaire.<br />

Le moment dipolaire induit est proportionnel au champ électrique ressenti, la constante <strong>de</strong><br />

proportionnalité étant la polarisabilité α :<br />

µ induit = α Ε.<br />

Les molécules, ions... les plus polarisables sont ceux qui sont riches en électrons <strong>et</strong> possè<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong>s OA vacantes peu élevées en énergie. Si l’on se limite aux anions, on obtient les règles <strong>de</strong><br />

Fajans: - les anions les plus chargés sont les plus polarisables (α (S 2- ) > α (Cl - )),<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

+<br />

13


- la polarisabilité augmente quand on <strong>de</strong>scend dans une colonne<br />

(α (I - ) > α (Cl - ) > α (F - )).<br />

I.B. Les liaisons chimiques<br />

L’objectif <strong>de</strong> ce paragraphe est <strong>de</strong> fournir une vue d’ensemble <strong>de</strong>s interactions chimiques,<br />

incluant aussi bien les liaisons ioniques <strong>et</strong> covalentes qui assurent la cohésion d’une molécule que<br />

les interactions entre molécules différentes. Ces diverses interactions seront classées suivant<br />

plusieurs critères : énergies d’interaction, caractère directionnel ou non, spécificité, rayon d’action.<br />

Un point <strong>de</strong> comparaison utile est l’énergie thermique moyenne, k BT pour une particule,<br />

N Ak BT = RT pour une mole (k B : constante <strong>de</strong> Boltzmann, N A : nombre d’Avogadro, R : constante<br />

<strong>de</strong>s gaz parfaits). A température ambiante, RT vaut environ 2,5 kJ/mol. Toute interaction m<strong>et</strong>tant<br />

en jeu <strong>de</strong>s énergies n<strong>et</strong>tement plus élevées pourra donc assurer la cohésion <strong>de</strong> la matière, <strong>et</strong><br />

inversement.<br />

I.B.1. Panorama <strong>de</strong>s interactions<br />

La chimie est entièrement régie par une seule <strong>de</strong>s interactions physiques fondamentales,<br />

l’interaction électrostatique. L’expression donnant l’énergie d’interaction entre <strong>de</strong>ux charges q 1 <strong>et</strong><br />

q 2 séparées d’une distance r est très simple : q1q2<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

4!"R<br />

- mais ses manifestations sont multiples :<br />

a. L’interaction électrostatique entre les électrons <strong>et</strong> le noyau central est responsable <strong>de</strong> la<br />

cohésion <strong>de</strong>s atomes, comme nous l’avons vu au § I.A.1.<br />

b. Les liaisons covalentes se forment lorsque <strong>de</strong>ux atomes s’approchent suffisamment pour<br />

que le noyau <strong>de</strong> l’un exerce une influence notable sur les électrons <strong>de</strong> l’autre. Le phénomène sera<br />

traité rigoureusement au § I.B.2, mais il est déjà implicite quand on écrit une formule aussi simple<br />

que A-B (ou toute structure <strong>de</strong> Lewis plus complexe) : le tir<strong>et</strong> représente <strong>de</strong>ux électrons qui « font<br />

le lien » entre le noyau <strong>de</strong> A <strong>et</strong> celui <strong>de</strong> B, parce qu’ils sont attirés simultanément par ces <strong>de</strong>ux<br />

noyaux. L’interaction électrostatique est donc responsable <strong>de</strong>s liaisons intramoléculaires (au sein<br />

d’une molécule) covalentes.<br />

L’ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s énergies <strong>de</strong> liaison covalente est typiquement <strong>de</strong> 100 à 400 kJ/mol<br />

(valeurs extrêmes : 57 à 565 kJ/mol pour une liaison simple). Ces liaisons sont directionnelles,<br />

puisque l’interaction dépend <strong>de</strong> la position mutuelle <strong>de</strong>s atomes <strong>et</strong> impose une géométrie à la<br />

molécule. Elles ont un rayon d’action limité puisque toute élongation d’une liaison covalente résulte<br />

rapi<strong>de</strong>ment en sa rupture. On peut dire aussi qu’elles sont spécifiques : les possibilités <strong>de</strong> liaison<br />

covalente ne sont pas les mêmes si l’on change <strong>de</strong> partenaire atomique.<br />

c. Il arrive souvent, aussi bien en solution qu’à l’état soli<strong>de</strong>, que <strong>de</strong>s espèces stables possè<strong>de</strong>nt<br />

une charge électrique n<strong>et</strong>te : on parlera <strong>de</strong> cations si c<strong>et</strong>te charge est positive, d’anions si elle est<br />

négative. En général, on peut assimiler les ions à <strong>de</strong>s répartitions <strong>de</strong> charge sphériques, donc entre<br />

un cation <strong>de</strong> charge + Z1e <strong>et</strong> un anion <strong>de</strong> charge -Z2e, on aura une énergie d’interaction<br />

électrostatique !Z1Z2 e 2<br />

(négative car l’interaction est attractive), tout comme si les charges<br />

4"#r<br />

étaient concentrées au centre <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ions, séparés <strong>de</strong> la distance r. Le traitement <strong>de</strong>s interactions<br />

entre ions est celui <strong>de</strong> la physique classique.<br />

- Si l’interaction se fait à travers le vi<strong>de</strong>, ε = ε o (permittivité électrique du vi<strong>de</strong>). Le cas <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>ux ions en phase gazeuse diluée est assez exotique (plasmas ?), mais la formule vaut aussi pour<br />

<strong>de</strong>s ions « empilés » dans un cristal, qui ne sont pas séparés par <strong>de</strong> la matière.<br />

14


- Si l’interaction se fait à travers un milieu con<strong>de</strong>nsé comme une solution, ! = !o!r(εr:<br />

permittivité électrique relative ou constante diélectrique du milieu). Dans une solution aqueuse<br />

diluée à température ambiante, εr est <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 80 • ; donc l’attraction électrostatique entre <strong>de</strong>ux<br />

charges est diminuée d’un facteur 80. Cela explique que l’eau soit un bon solvant dissociant pour<br />

les soli<strong>de</strong>s ioniques.<br />

Les interactions électrostatiques entre ions sont non directionnelles (elles ne dépen<strong>de</strong>nt que <strong>de</strong><br />

la séparation <strong>de</strong>s ions, pas <strong>de</strong> leur disposition dans l’espace) <strong>et</strong> non spécifiques (elles ne dépen<strong>de</strong>nt<br />

que <strong>de</strong> la charge <strong>de</strong>s ions, pas <strong>de</strong> leur nature chimique).<br />

Il est difficile <strong>de</strong> donner un ordre <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur typique pour une liaison électrostatique puisque<br />

son intensité varie <strong>de</strong> façon continue (<strong>et</strong> décroissante) avec la séparation <strong>de</strong>s ions. On calcule que<br />

l’interaction atomique entre <strong>de</strong>ux charges élémentaires est <strong>de</strong> (1388/R) kJ/mol si leur séparation est<br />

<strong>de</strong> R Å. Par exemple, dans un cristal <strong>de</strong> NaCl, R = r Na + + r Cl - = 2,36 Å : l’énergie d’interaction entre<br />

un Na + <strong>et</strong> son voisin Cl - est <strong>de</strong> -588 kJ/mol. •• En solution, par contre, on peut considérer la valeur <strong>de</strong><br />

50 kJ/mol comme un maximum pour la contribution <strong>de</strong> l’énergie électrostatique à l’énergie totale<br />

d’une molécule.<br />

d. Même si un assemblage moléculaire ne porte pas <strong>de</strong> charge électrique globale, la répartition<br />

<strong>de</strong>s charges à l’intérieur <strong>de</strong> la molécule fait apparaître <strong>de</strong>s zones <strong>de</strong> charge partielle positive <strong>et</strong><br />

d’autres <strong>de</strong> charge négative. Il en résulte l’existence <strong>de</strong> forces intermoléculaires (entre molécules<br />

différentes). Ces forces jouent un rôle important pour assurer la cohésion <strong>de</strong> la matière ; sans elles,<br />

presque toutes les molécules se trouveraient à l’état gazeux.<br />

Lors d’une transition <strong>de</strong> phase, par exemple l’ébullition (transition liqui<strong>de</strong> → gaz), il y a<br />

rupture <strong>de</strong>s liaisons intermoléculaires, mais pas <strong>de</strong>s liaisons intramoléculaires (sinon, on aurait une<br />

véritable réaction chimique avec changement <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s composants).<br />

Le traitement compl<strong>et</strong> <strong>de</strong> ces interactions intermoléculaires est très complexe, <strong>et</strong> il est<br />

pertinent d’y distinguer la superposition <strong>de</strong> plusieurs eff<strong>et</strong>s que l’on désigne par <strong>de</strong>s noms<br />

différents. Il faut toutefois se souvenir que tous ces eff<strong>et</strong>s résultent in fine <strong>de</strong> l’action d’une seule<br />

interaction physique fondamentale, l’interaction électrostatique.<br />

- interaction dipôle-dipôle.<br />

Nous avons vu qu’une liaison (iono)covalente hétéroatomique A-B constitue un dipôle<br />

électrique µ, où la charge partielle négative (δ - ) est portée par l’atome le plus électronégatif, disons<br />

l’atome A :<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

!-<br />

µ e<br />

A B<br />

L’interaction entre <strong>de</strong>ux dipôles µ1 <strong>et</strong> µ2 est donée par la formule:<br />

Vdip"dip= 1<br />

! +<br />

µ µ 2<br />

3 4#$oR<br />

f( % 1,%<br />

2,&)<br />

•••<br />

!1<br />

R<br />

•<br />

78,3 à 298 K.<br />

••<br />

Toutefois, c<strong>et</strong>te énergie ne concerne que l’interaction entre un ion donné <strong>et</strong> un seul <strong>de</strong> ses voisins, alors que, dans<br />

l’assemblage constitué par les cristal <strong>de</strong> NaCl, chaque ion a un grand nombre <strong>de</strong> voisins. Pour obtenir la valeur globale<br />

<strong>de</strong> l’énergie d’interaction électrostatique, il faut sommer sur tous les voisins (cf. § I.B.3).<br />

•••<br />

Où f( 1<br />

", " 2,#)=(2cos"<br />

1cos"<br />

2$sin"sin<br />

1 " 2cos#)<br />

.<br />

"<br />

! 2<br />

15


C<strong>et</strong>te interaction est fortement directionnelle à cause <strong>de</strong> la dépendance angulaire f(θ1,θ2,φ). On<br />

peut se convaincre qu’elle est maximale quand les <strong>de</strong>ux dipôles sont alignés (θ1 = θ2 = φ = 0).<br />

Il s’agit d’une interaction assez faible, puisqu’elle vaut typiquement 5 à 10 kJ/mol quand les<br />

molécules sont très proches <strong>et</strong> décroît rapi<strong>de</strong>ment avec leur distance (dépendance en 1/R 3 ). Elle peut<br />

être considérée comme spécifique puisque <strong>de</strong>ux molécules différentes n’ont généralement pas le<br />

même moment dipolaire.<br />

- Un type particulier d’interaction dipôle/dipôle est la liaison hydrogène (ou liaison H) entre un<br />

groupe donneur constitué d’une liaison D-H dans une molécule, <strong>et</strong> un groupe accepteur A possédant<br />

une paire électronique libre. • Si les <strong>de</strong>ux atomes D <strong>et</strong> A sont fortement électronégatifs, d’une part la<br />

liaison D-H sera fortement polarisée avec une charge partielle positive sur l’hydrogène, d’autre part<br />

l’atome A portera une charge partielle négative importante. Ces <strong>de</strong>ux facteurs concourront à créer<br />

<strong>de</strong>s dipôles électriques élevés, qui auront tendance à s’aligner avec l’extrêmité positive du premier<br />

dipôle (c.a.d. le noyau d’hydrogène) pointant vers l’extrêmité négative du second (une paire<br />

électronique <strong>de</strong> l’atome A) :<br />

D H A<br />

Si d’autres contraintes existent, l’angle D-H-A peut s’éloigner quelque peu <strong>de</strong> 180°. Une liaison<br />

hydrogène peut représenter une énergie d’environ 20 kJ/mol. L’hydrogène s’approche <strong>de</strong> l’atome<br />

accepteur davantage que ce ne serait possible d’après la taille <strong>de</strong>s molécules (par exemple, un<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

180°<br />

critère pour une liaison Hydrogène D-H … O est que la distance H-O soit inférieure à 2,7Å).<br />

En général, les mêmes atomes du tableau périodique peuvent jouer le rôle du donneur <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />

l’accepteur <strong>de</strong> liaison H :<br />

Groupes donneurs : FH, R-COOH, R-OH, R 2NH<br />

Groupes accepteurs : H-F, R-(CO)-OH, R-OH, ROR (éther), R 3N…<br />

Contre-exemple : un hydrocarbure ne peut pas engager <strong>de</strong> liaisons hydrogène, ni comme<br />

donneur (la liaison C-H n’est pas assez polarisée), ni comme accepteur (pas <strong>de</strong> paire électronique<br />

libre).<br />

e. Même <strong>de</strong>s molécules non chargées, non dipolaires ont entre elles <strong>de</strong>s interactions non<br />

négligeables (ainsi, I 2 est un soli<strong>de</strong> à température ambiante). Cela peut être dû à plusieurs raisons<br />

distinctes, suivant les cas (quadripôles électriques, dipôles instantanés suite à <strong>de</strong>s fluctuations <strong>de</strong><br />

charge, dipôles induits par polarisation…). On groupe ces interactions sous le nom <strong>de</strong> « forces <strong>de</strong><br />

van <strong>de</strong>r Waals » ; plusieurs d’entre elles ont une dépendance en " C 6 (R : distance<br />

R<br />

intermoléculaire). Elles sont assez faibles (


La figure 7 représente la somme <strong>de</strong>s énergies potentielles dues aux interactions <strong>de</strong> van <strong>de</strong>r<br />

Waals <strong>et</strong> <strong>de</strong> Born (ces eff<strong>et</strong>s existent pour toutes les molécules). Deux molécules qui s’approchent<br />

passent par un « puits <strong>de</strong> potentiel » peu profond pour une distance R équilibre, mais rencontrent ensuite<br />

un « mur » infranchissable interdisant toute approche plus intime (s’il n’y a pas réaction chimique).<br />

Fig. 7 – Evolution <strong>de</strong> l’énergie potentielle due aux interactions <strong>de</strong> van <strong>de</strong>r Waals <strong>et</strong> <strong>de</strong> Born entre<br />

<strong>de</strong>ux molécules en fonction <strong>de</strong> la distance R qui les sépare.<br />

Signalons enfin un développement récent très important, celui <strong>de</strong> la chimie<br />

supramoléculaire. En eff<strong>et</strong>, certaines <strong>de</strong>s interactions que nous avons mentionnées aboutissent à la<br />

formation d’agrégats stables (à température ambiante) entre plusieurs molécules différentes, qui<br />

gar<strong>de</strong>nt toutefois leur individualité (pas <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> nouvelles liaisons covalentes). Le cas le<br />

plus fréquent est une combinaison <strong>de</strong> complémentarité <strong>de</strong> forme <strong>et</strong> <strong>de</strong> plusieurs liaisons hydrogène,<br />

fournissant un réseau <strong>de</strong> « points d’ancrage » entre les molécules partenaires. Les assemblages<br />

ainsi formés ont une très gran<strong>de</strong> spécificité, <strong>et</strong> l’on peut parler <strong>de</strong> phénomènes <strong>de</strong> reconnaissance<br />

moléculaire. Il existe donc un niveau d’organisation <strong>de</strong> la matière hiérarchiquement plus élevé que<br />

celui <strong>de</strong>s molécules, c’est celui <strong>de</strong>s assemblages supramoléculaires. Une bonne partie <strong>de</strong> la<br />

biochimie dépend <strong>de</strong> ce niveau d’organisation, <strong>et</strong> la chimie inorganique commence à s’intéresser à<br />

<strong>de</strong>s structures du même ordre <strong>de</strong> complexité.<br />

I.B.2. Structure électronique <strong>de</strong>s molécules<br />

Revenons à un niveau plus fondamental <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong> la matière <strong>et</strong> <strong>de</strong>mandons-nous<br />

pourquoi les atomes se lient entre eux pour former <strong>de</strong>s molécules. D’un point <strong>de</strong> vue théorique, la<br />

liaison est due à un réarrangement <strong>de</strong>s électrons <strong>de</strong> valence sous l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’approche d’autres<br />

atomes, <strong>de</strong> sorte que l’assemblage moléculaire soit plus stable que les atomes isolés. Le traitement<br />

rigoureux <strong>de</strong> ce problème est complexe, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s modèles simplifiés, dont celui <strong>de</strong> Lewis, perm<strong>et</strong>tent<br />

d’obtenir une compréhension intuitive <strong>de</strong> la liaison chimique dans beaucoup <strong>de</strong> molécules – mais<br />

pas toutes.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

17


I.B.2.a Modèle <strong>de</strong> Lewis (Rappels)<br />

Ce modèle très simple est basé sur le décompte <strong>de</strong>s électrons <strong>de</strong> valence <strong>de</strong>s atomes<br />

participant à la liaison. Toute liaison covalente (impliquant <strong>de</strong>ux atomes) se traduit par la mise en<br />

commun <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux électrons, chacun <strong>de</strong>s atomes partenaires en fournissant un : on parlera d’une<br />

liaison « <strong>de</strong>ux électrons, <strong>de</strong>ux centres ». Les <strong>de</strong>ux électrons constituent alors un doubl<strong>et</strong> liant (ou<br />

paire électronique liante), localisé entre les <strong>de</strong>ux atomes partenaires. On représente ce doubl<strong>et</strong> par<br />

un p<strong>et</strong>it tir<strong>et</strong> joignant les <strong>de</strong>ux atomes. On continue le procédé <strong>de</strong> façon à connecter tous les atomes<br />

du composé, si possible en « réalisant l’oct<strong>et</strong> » sur chacun d’eux (cf. infra). On n’oublie pas <strong>de</strong><br />

représenter sur chaque atome les électrons <strong>de</strong> valence n’ayant pas participé à la liaison : doubl<strong>et</strong>s<br />

libres (paires électroniques libres), éventuellement électrons célibataires.<br />

La règle <strong>de</strong> l’oct<strong>et</strong> affirme que, dans leurs composés, les atomes sont particulièrement stables<br />

s’ils ont huit électrons dans la couche <strong>de</strong> valence (un oct<strong>et</strong>). C<strong>et</strong>te règle se base sur le fait que<br />

l’occupation complète <strong>de</strong>s sous-couches (ns) <strong>et</strong> (np) est réalisée lorsqu’il y a huit électrons (cf.<br />

règles d’édification, § I.A.2). Implicitement, on suppose donc que les règles <strong>de</strong> répartition <strong>de</strong>s<br />

électrons dans un atome libre ne sont pas bouleversées si c<strong>et</strong> atome participe à la formation d’une<br />

molécule. Il peut y avoir dépassement <strong>de</strong> l’oct<strong>et</strong> dès que la couche <strong>de</strong> valence contient une souscouche<br />

(nd) ; la règle <strong>de</strong> l’oct<strong>et</strong> n’est donc rigoureusement obéie que pour les éléments <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux<br />

premières pério<strong>de</strong>s. Les éléments <strong>de</strong> la 3 ème pério<strong>de</strong> peuvent déjà dépasser l’oct<strong>et</strong>, en raison <strong>de</strong><br />

l’accessibilité <strong>de</strong>s orbitales (3d) : 10 places supplémentaires !<br />

Exemple : structure <strong>de</strong> Lewis <strong>de</strong> l’aci<strong>de</strong> phosphorique, H3PO4. H<br />

O<br />

H<br />

O P<br />

O O<br />

H<br />

Le phosphore est entouré <strong>de</strong> 5 doubl<strong>et</strong>s liants, soit 10 électrons <strong>de</strong> valence.<br />

I.B.2.b Limitations du modèle <strong>de</strong> Lewis<br />

Le modèle <strong>de</strong> Lewis est assez facile à appliquer, <strong>et</strong> intuitivement satisfaisant (« atomes<br />

crochus »). Malheureusement, il est insuffisant <strong>et</strong> on ne peut pas faire l’économie d’une <strong>de</strong>scription<br />

plus fondamentale <strong>de</strong>s électrons <strong>de</strong> liaisons.<br />

i) Formes <strong>de</strong> résonance<br />

Fréquemment, on ne rend pas compte correctement <strong>de</strong>s propriétés d’une molécule en écrivant<br />

une seule structure <strong>de</strong> Lewis. Par exemple, dans la molécule <strong>de</strong> NO 2, les <strong>de</strong>ux liaisons N-O sont<br />

expérimentalement équivalentes, alors que la structure <strong>de</strong> Lewis indique une liaison dative simple <strong>et</strong><br />

une liaison double. On peut pallier ce défaut en écrivant <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> résonance:<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

O N O<br />

O N O<br />

dont la molécule réelle serait une sorte <strong>de</strong> moyenne pondérée. C<strong>et</strong>te notion est beaucoup utilisée en<br />

chimie organique. Elle alourdit la représentation <strong>de</strong> la structure.<br />

ii) Dépassement <strong>de</strong> l’oct<strong>et</strong><br />

Comme nous l’avons déjà indiqué au §I.B.2.a, la règle <strong>de</strong> l’oct<strong>et</strong> n’est strictement applicable<br />

qu’aux éléments <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième pério<strong>de</strong> (<strong>de</strong> Li à Ne). L’hydrogène (1 ère pério<strong>de</strong>) est limité à 2<br />

électrons <strong>de</strong> valence. Pour les molécules ne contenant que <strong>de</strong>s éléments p, on peut malgré tout<br />

dénombrer facilement les électrons <strong>de</strong> valence <strong>et</strong> les grouper en paires électroniques liantes <strong>et</strong> non<br />

liantes (ce qui perm<strong>et</strong> notamment d’évaluer la géométrie par la métho<strong>de</strong> VSEPR). Par contre, c<strong>et</strong>te<br />

approche ne donne pas <strong>de</strong> résultats satisfaisants pour les composés <strong>de</strong>s métaux <strong>de</strong> transition, qui ne<br />

18


sont pas tenus non plus <strong>de</strong> réaliser l’oct<strong>et</strong>. •<br />

iii) Liaisons non localisées: au-<strong>de</strong>là du p<strong>et</strong>it tir<strong>et</strong><br />

Toutes les liaisons ne sont pas localisées entre <strong>de</strong>ux atomes, même si c’est le cas le plus<br />

courant dans les cours élémentaires <strong>de</strong> chimie. Ainsi, les composés du bore <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’hydrogène (les<br />

boranes) comportent souvent <strong>de</strong>s liaisons « 2 électrons, 3 centres » où une paire électronique assure<br />

la liaison entre 3 atomes à la fois. On ne peut donc pas utiliser pour ces molécules les<br />

représentations familières <strong>de</strong> Lewis, où un p<strong>et</strong>it tir<strong>et</strong> indique une liaison localisée entre <strong>de</strong>ux<br />

atomes ! (cf aussi II.B.3.c, i) )<br />

I.B.2.b : Les orbitales moléculaires (OM) : principe <strong>de</strong> base<br />

L’approximation orbitalaire donne <strong>de</strong> bons résultats pour comprendre les propriétés<br />

électroniques <strong>de</strong>s atomes (§I.A.1.d). On peut l’appliquer également aux molécules : les électrons<br />

dans une molécule seront décrits par <strong>de</strong>s fonctions d’on<strong>de</strong> monoélectroniques, en d’autres termes ils<br />

occuperont <strong>de</strong>s Orbitales Moléculaires (OMs).<br />

Intuitivement, on s’attend à ce que les électrons <strong>de</strong> cœur d’un atome donné soient peu<br />

perturbés par l’existence <strong>de</strong>s autres noyaux, <strong>et</strong> leurs OMs seront pratiquement semblables aux<br />

orbitales atomiques (OAs) <strong>de</strong> c<strong>et</strong> atome. Par contre, les électrons <strong>de</strong> valence seront fortement<br />

perturbés.<br />

Une fois établi le diagramme énergétique <strong>de</strong>s OMs, on y placera les électrons en respectant<br />

les mêmes principes d’édification que pour l’établissement <strong>de</strong>s configurations atomiques (§ I.A.2).<br />

I.B.2.c :Construction <strong>de</strong>s OMs : La métho<strong>de</strong> OM-CLOA ••<br />

En principe, les orbitales moléculaires <strong>de</strong>vraient être obtenues par résolution <strong>de</strong> l’équation<br />

<strong>de</strong> Schrödinger, en tenant compte du potentiel électrique dû à l’interaction avec tous les noyaux <strong>de</strong><br />

la molécule. C<strong>et</strong>te procédure lour<strong>de</strong> n’est applicable qu’à un ou <strong>de</strong>ux cas simples. On a besoin<br />

d’une procédure plus simple pour construire les OMs.<br />

C<strong>et</strong>te procédure est fournie par la métho<strong>de</strong> « OM-CLOA » (Orbitales Moléculaires comme<br />

Combinaisons Linéaires d’Orbitales Atomiques), basée sur l’idée suivante :<br />

Une orbitale moléculaire peut s’exprimer comme une combinaison linéaire<br />

d’orbitales atomiques centrées sur les atomes participant à la liaison.<br />

Pour appliquer la métho<strong>de</strong> OM-CLOA, il faut :<br />

-déterminer quelles orbitales atomiques combiner entre elles ;<br />

-déterminer les coefficients <strong>de</strong> pondération <strong>de</strong> ces OAs dans la combinaison qui fournit une OM.<br />

i) Le dihydrogène, H 2 : présentation mathématique simplifiée<br />

Pour bien les différencier, on notera ψ (psi) les orbitales moléculaires, φ les orbitales<br />

atomiques.<br />

Soient <strong>de</strong>ux atomes d’hydrogène H A <strong>et</strong> H B susceptibles <strong>de</strong> former une liaison. Dans l’état<br />

fondamental, l’unique électron <strong>de</strong> chaque atome est décrit par une orbitale (1s). Les <strong>de</strong>ux OA<br />

décrivant les électrons <strong>de</strong> valence <strong>de</strong>s atomes participants sont donc φ 1s,A <strong>et</strong> φ 1s,B , que nous noterons<br />

simplement φ A <strong>et</strong> φ B .<br />

- Le principe <strong>de</strong> base <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> OM-CLOA veut que toute OM ψ dans la molécule H 2 puisse<br />

s’écrire :<br />

ψ = Ν(c Aφ A + c Bφ B), où :<br />

• NB: Il existe bien, pour ces composés, une règle équivalente dite “<strong>de</strong>s 18 électrons <strong>de</strong> valence”. Mais elle doit être<br />

employée avec précaution, <strong>et</strong> ne vous sera utile que si vous étudiez la chimie organométallique. Par contre, la règle <strong>de</strong><br />

l’oct<strong>et</strong> est particulièrement appropriée en chimie organique puisque son domaine <strong>de</strong> validité couvre les éléments C, N,<br />

O !<br />

•• En anglais : LCAO-MO<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

19


c A <strong>et</strong> c B sont les coefficients <strong>de</strong> pondération, Ν est une éventuelle constante <strong>de</strong><br />

normalisation. ♣<br />

Combien <strong>de</strong> combinaisons différentes <strong>de</strong> φ A <strong>et</strong> φ B faut-il construire ? Un principe <strong>de</strong> base <strong>de</strong> la<br />

formation d’OMs est le suivant:<br />

I. On doit obtenir autant d’OMs qu’il y avait d’OAs au départ.<br />

Appliqué à la situation présente : on doit former <strong>de</strong>ux OMs ψ différentes.<br />

- La mécanique quantique perm<strong>et</strong> d’évaluer l’énergie associée à une fonction d’on<strong>de</strong> ψ par :<br />

" , ou E ! = " !H! dV si l’on se limite à <strong>de</strong>s fonctions d’on<strong>de</strong><br />

E ! = ! * H! dV<br />

espace<br />

réelles.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

espace<br />

L’application <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te relation à la fonction définie plus haut aboutit à :<br />

[ #<br />

#<br />

# ] (1)<br />

E ! = N 2 2 2<br />

cA " AH" A dV + c B " B H" B dV + 2c Ac B " A H" B dV<br />

* La quantité " ! A H! A dV est appelée intégrale <strong>de</strong> Coulomb <strong>et</strong> notée αA . Elle est en<br />

rapport avec l’énergie <strong>de</strong>s OAs <strong>de</strong> départ. Dans notre cas αA = αB (atomes i<strong>de</strong>ntiques).<br />

* La quantité " ! A H! B dV est appelée intégrale <strong>de</strong> résonance <strong>et</strong> notée β. C’est une quantité<br />

négative.<br />

* Et plus loin, on aura besoin <strong>de</strong> la quantité S = ! A! B dV , appelée intégrale <strong>de</strong><br />

recouvrement, parce qu’elle est d’autant plus gran<strong>de</strong> que les <strong>de</strong>ux OAs se recouvrent<br />

efficacement. C’est une quantité positive.<br />

Avec ces notations, la relation (1) <strong>de</strong>vient :<br />

[ ] (2)<br />

E ! = N 2 2 2<br />

" ( cA + c B ) + 2#c Ac B<br />

- L’optimisation <strong>de</strong>s coefficients c A <strong>et</strong> c B peut être réalisée par une technique mathématique<br />

rigoureuse • <strong>et</strong> aboutit aux <strong>de</strong>ux OMs suivantes :<br />

! + =<br />

1<br />

2(1+ S) (" A + " B )<br />

"<br />

(c.a.d. c A = c B =<br />

1<br />

2(1+ S) )<br />

Les <strong>de</strong>ux orbitales interviennent avec <strong>de</strong>s coefficients <strong>de</strong> même signe : « combinaison en phase ».<br />

! " =<br />

1<br />

2(1" S) (# A " # B )<br />

Les <strong>de</strong>ux orbitales interviennent avec <strong>de</strong>s coefficients <strong>de</strong> signes opposés : « combinaison hors<br />

phase ».<br />

♣<br />

Condition <strong>de</strong> normalisation : si ψ est une fonction d’on<strong>de</strong>, il faut que ! *! dV = 1.<br />

espace<br />

• nd<br />

Pour le raisonnement compl<strong>et</strong>, voir cours d’atomistique, ou : P.W. Atkins, Molecular quantum mechanics, 2<br />

edition, Oxford University Press, 1992, pp.252 sq.<br />

"<br />

20


Et les énergies associées, d’après la relation (2), vaudront :<br />

E + =<br />

! + "<br />

1 + S , E ! =<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

" ! #<br />

. (3)<br />

1 ! S<br />

ii) OMs <strong>de</strong> H 2 : Visualisation <strong>et</strong> présentation intuitive<br />

Les expressions exactes ci-<strong>de</strong>ssus perm<strong>et</strong>tent<br />

- <strong>de</strong> se représenter graphiquement les <strong>de</strong>ux OMs.<br />

- <strong>de</strong> les situer sur un diagramme d’énergie.<br />

Aspect <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux OMs<br />

Ainsi, ψ + est une somme <strong>de</strong>s orbitales (1s) sphériques <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux atomes, <strong>et</strong> ressemblera à ceci :<br />

On peut se contenter d’une représentation approximative:<br />

A B<br />

Ou encore, cas le plus fréquent, on peut représenter les <strong>de</strong>ux contributions c Aφ A <strong>et</strong> c Bφ B , sans<br />

essayer <strong>de</strong> représenter l’aspect <strong>de</strong> leur somme:<br />

A B<br />

(attention au hachurage qui indique un signe + <strong>de</strong> la fonction d’on<strong>de</strong>)<br />

Quant à ψ - , elle est obtenue en combinant φ A avec un signe positif à φ B avec un signe négatif :<br />

21


ou bien:<br />

Ou encore:<br />

A B<br />

Il est important <strong>de</strong> remarquer qu’il y a un plan nodal à mi-chemin entre les <strong>de</strong>ux noyaux<br />

d’hydrogène (cf. paragraphe suivant).<br />

iii) OMs <strong>de</strong> H2 : Diagramme d’énergie<br />

Les formules (3) perm<strong>et</strong>tent <strong>de</strong> représenter les OMs par rapport aux OAs constitutives sur un<br />

diagramme d’énergie :<br />

E<br />

$ -<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

!<br />

$ +<br />

" A<br />

= (1s) A<br />

# -<br />

# +<br />

" B<br />

= (1s) B<br />

On voit que ψ + est stabilisée (plus basse en énergie que les OAs ; souvenez-vous que β est<br />

< 0 !) ; on l’appelle donc O.M. liante. A l’inverse, ψ - est déstabilisée (plus haute en énergie que<br />

les OAs) <strong>et</strong> donc appelée antiliante. On peut même aller plus loin <strong>et</strong> montrer que la déstabilisation<br />

<strong>de</strong> ψ - est plus gran<strong>de</strong> en valeur absolue que la stabilisation <strong>de</strong> ψ + .<br />

On peut aussi appliquer les principes d’édification, comme pour les édifices atomiques, <strong>et</strong><br />

écrire la configuration fondamentale <strong>de</strong> la molécule H 2 : (ψ + ) 2 (ψ - ) 0 .<br />

Pourquoi les <strong>de</strong>ux atomes sont-ils liés ?<br />

La réponse la plus correcte est déduite du diagramme d’énergie :<br />

la liaison entre l’atome H A <strong>et</strong> l’atome H B sera favorisée parce que la formation <strong>de</strong>s OMs perm<strong>et</strong> un<br />

abaissement <strong>de</strong> l’énergie électronique du système (si les <strong>de</strong>ux électrons passent du niveau <strong>de</strong>s<br />

orbitales atomiques (1s) au niveau <strong>de</strong> l’OM liante ψ + , leur énergie est abaissée). • En appliquant le<br />

même raisonnement à <strong>de</strong>ux atomes d’hélium (4 électrons <strong>de</strong> valence), on peut voir que la formation<br />

d’une molécule He 2 ne sera pas favorisée.<br />

• Il faut bien reconnaître qu’il s’agit d’une approximation. Vous savez déjà que la <strong>de</strong>scription orbitalaire néglige les<br />

interactions entre électrons. Or, si <strong>de</strong>ux électrons précé<strong>de</strong>mment séparés occupent la même orbitale, donc la même<br />

région <strong>de</strong> l’espace, leur répulsion augmente. Il faudra donc, pour calculer l’énergie réelle, ajouter une « énergie<br />

d’appariement » P positive. Adm<strong>et</strong>tons sans démonstration que cela ne changera pas la conclusion…<br />

22


Mais, sans calculer exactement les énergies, on peut avoir une idée sur l’existence ou non<br />

d’une liaison en considérant la forme <strong>de</strong>s OMs. Ainsi, les électrons dans l’orbitale ψ + vont-ils<br />

passer une bonne partie <strong>de</strong> leur temps dans la région <strong>de</strong> l’espace située entre les <strong>de</strong>ux atomes (cf.<br />

schémas <strong>de</strong> la p.21) : cela correspond bien à l’image classique (Lewis, § II.A) d’une « paire liante »<br />

représentée par un tir<strong>et</strong> entre les <strong>de</strong>ux atomes.<br />

Au contraire, s’il y avait <strong>de</strong>s électrons dans l’orbitale ψ - , ils ne se trouveraient quasiment<br />

jamais entre les atomes (il y a un plan nodal à mi-chemin entre A <strong>et</strong> B) <strong>et</strong> il est logique qu’ils ne<br />

puissent pas les « lier ». De façon générale, l’existence <strong>de</strong> surfaces nodales entre les atomes trahit le<br />

caractère antiliant d’une OM.<br />

iv) Hydrures simples<br />

Un hydrure est un composé avec l’hydrogène, par exemple LiH. Les orbitales atomiques <strong>de</strong><br />

valence <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux atomes participant à la liaison sont : la (1s) <strong>de</strong> l’hydrogène, <strong>et</strong> la (2s) du lithium.<br />

Qualitativement, le traitement est le même que pour H 2. On a formation d’une ψ + liante <strong>et</strong> d’une<br />

ψ - antiliante. Quantitativement, il faut tenir compte du principe suivant :<br />

II. Seules <strong>de</strong>s orbitales atomiques d’énergies comparables peuvent se combiner en OMs ; la<br />

combinaison est d’autant plus efficace qu’elles sont proches en énergie.<br />

Le diagramme d’énergie qui en résulte est le suivant (on a représenté schématiquement les<br />

contributions <strong>de</strong>s OAs à chaque OM) :<br />

-5,4eV<br />

-13,6eV<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

!A<br />

= (1s)H<br />

"+:<br />

H Li<br />

!B<br />

= (2s)Li<br />

H Li<br />

Les <strong>de</strong>ux OAs à combiner sont séparées <strong>de</strong> 8,2 eV (alors qu’elles étaient <strong>de</strong> même énergie<br />

dans H 2). Par conséquent, la stabilisation <strong>de</strong> ψ + est ici moins considérable ; il en va <strong>de</strong> même pour<br />

la déstabilisation <strong>de</strong> ψ - .<br />

Une autre observation importante est que ψ + ressemble davantage à φ A (la contribution <strong>de</strong><br />

φ A est plus gran<strong>de</strong>, ce qui correspond à c A > c B dans la combinaison linéaire). On dit parfois que<br />

ψ + a un « caractère hydrogène ». Inversement, ψ - ressemble davantage à φ B . En général, toute<br />

OM ressemble davantage à l’OA dont elle est la plus proche en énergie.<br />

v) Molécules diatomiques <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> pério<strong>de</strong> : <strong>de</strong> Li 2 à Ne 2<br />

Les OAs à considérer sont les orbitales <strong>de</strong> valence <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux atomes : (2s) <strong>et</strong> (2p), soit 2 fois<br />

(1+3) = 8 OAs ; on formera donc 8 OMs.<br />

Quelles sont les OAs susceptibles <strong>de</strong> se combiner entre elles ? On peut tout d’abord se<br />

convaincre que certaines combinaisons ne seront pas « efficaces » pour lier les atomes. Par<br />

exemple, essayons <strong>de</strong> combiner la (2p x) d’un atome avec la (2p z) <strong>de</strong> l’autre :<br />

"- :<br />

23


(2p x) A<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

recouvrement hors phase<br />

(2p z) B<br />

recouvrement en phase<br />

axe z<br />

Pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> symétrie, tout recouvrement en phase (constructif) est exactement<br />

compensé par un recouvrement hors phase (<strong>de</strong>structif). Globalement, l’interaction est nulle (S = 0,<br />

β = 0). On peut généraliser :<br />

III. Seules <strong>de</strong>s orbitales atomiques <strong>de</strong> même symétrie peuvent se combiner pour former <strong>de</strong>s<br />

orbitales moléculaires.<br />

Dans ce cas-ci, les orbitales <strong>de</strong> même symétrie peuvent être repérées intuitivement. Mais pour<br />

avoir une métho<strong>de</strong> généralement valable, il faudra formaliser la notion <strong>de</strong> symétrie (cf. cours <strong>de</strong><br />

chimie théorique).<br />

Il faut également tenir compte du principe II (les OA doivent avoir <strong>de</strong>s énergies comparables).<br />

A titre d’exemple, on va comparer les OMs <strong>de</strong> F 2 (difluor) <strong>et</strong> N 2 (diazote).<br />

-18,6eV<br />

-40,1eV<br />

(2p)A<br />

(2s)A<br />

Diagramme d’OM du difluor :<br />

1 !g:<br />

2 !"u:<br />

2 !g:<br />

1 !"u:<br />

1 #"g<br />

1 #u:<br />

(2s)B<br />

<strong>et</strong><br />

(2p)B<br />

<strong>et</strong><br />

24


Ici, la différence d’énergie (ΔE) entre les OAs (2s) <strong>et</strong> (2p) est assez gran<strong>de</strong> (21,5 eV). En<br />

première approximation, les OAs (2s) ne se combinent qu’entre elles. Elles donnent comme dans les<br />

exemples précé<strong>de</strong>nts une OM liante <strong>et</strong> une OM antiliante. On les notera respectivement: 1σ g <strong>et</strong><br />

1σ∗ u. Dans ces symboles, la p<strong>et</strong>ite étoile désigne une OM antiliante; σ g <strong>et</strong> σ u sont <strong>de</strong>s “étiqu<strong>et</strong>tes <strong>de</strong><br />

symétrie” (cf. § II.B.4), “σ” signifiant “symétrique par rotation autour <strong>de</strong> l’axe”, l’indice “g”<br />

signifiant “symétrique par inversion par rapport au point central <strong>de</strong> la molécule”, <strong>et</strong> l’indice “u”,<br />

“antisymétrique par inversion par rapport au point central <strong>de</strong> la molécule”. Quant au chiffre initial<br />

(facultatif), il sert simplement à distinguer <strong>de</strong>s OMs qui auraient sans cela le même symbole.<br />

La combinaison <strong>de</strong>s OAs (2p) est plus originale. Seules les (2p z ) sont suceptibles <strong>de</strong> donner<br />

un recouvrement axial (σ). Les (2p x ) <strong>et</strong> (2p y ), aux lobes perpendiculaires à l’axe interatomique,<br />

peuvent se recouvrir latéralement; les OMs résultantes auront une “symétrie π”. Vous connaissez<br />

sans doute la différence entre liaison σ <strong>et</strong> liaison π en chimie organique…<br />

Le dioxygène O 2 (ΔE = 16,5eV) a un diagramme d’OMs très semblable à celui du difluor (cf.<br />

Ch. III).<br />

Par contre, dans le diazote N2 (ΔE = 12,7eV), le dicarbone C2 (ΔE = 8,7eV) <strong>et</strong> le dibore B2 (ΔE = 9eV), les OAs (2s) <strong>et</strong> (2p) sont d’énergies assez proches pour pouvoir interagir entre elles.<br />

Comme (2s) <strong>et</strong> (2pz ) sont toutes <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> symétrie σ, on obtiendra un diagramme qualitativement<br />

différent, illustré ci-<strong>de</strong>ssous pour N2: 2 !"u:<br />

-12,9eV<br />

-25,6eV<br />

(2p)A<br />

(2s)A<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

1 !g:<br />

2 !g:<br />

1 !"u:<br />

1 #"g<br />

1 #u:<br />

(2s)B<br />

(2p)B<br />

On remarquera: i) l’inversion <strong>de</strong>s niveaux 2σ g <strong>et</strong> 1π u; ii) le changement <strong>de</strong> forme <strong>de</strong>s OMs σ<br />

dû au mélange entre les OAs (2s) <strong>et</strong> (2p).<br />

Une comparaison OM / Lewis<br />

La <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> la liaison en termes d’OMs n’est pas contradictoire avec celle <strong>de</strong> Lewis,<br />

mais elle est plus précise. Prenons l’exemple <strong>de</strong> F 2 : le modèle <strong>de</strong> Lewis indique une paire<br />

électronique liante <strong>et</strong> 2 fois (3 paires libres) ; le modèle d’OMs indique 4 paires dans <strong>de</strong>s orbitales<br />

liantes <strong>et</strong> trois paires dans <strong>de</strong>s orbitales antiliantes. Le nombre n<strong>et</strong> <strong>de</strong> paires liantes est donc (4-3) =<br />

1. Ce nombre est appelé indice <strong>de</strong> liaison ou ordre <strong>de</strong> liaison (O.L.). La répartition électronique<br />

globale dans c<strong>et</strong>te molécule est décrite <strong>de</strong> façon assez équivalente par les <strong>de</strong>ux modèles (cf. infra,<br />

25


cas <strong>de</strong> H 2O). Mais on verra plus loin (Ch. II, cas <strong>de</strong> O 2) que le modèle d’OMs peut parfois expliquer<br />

certaines propriétés incompréhensibles dans le modèle <strong>de</strong> Lewis.<br />

vi) Application <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> OM-CLOA à un cas non trivial : Les orbitales <strong>de</strong> l’eau<br />

(Hors programme en 2006-2007)<br />

H 2O possè<strong>de</strong> 8 électrons <strong>de</strong> valence ; les orbitales atomiques <strong>de</strong>s différentes couches <strong>de</strong><br />

valence sont au nombre <strong>de</strong> 6 (orbitales (1s) A <strong>et</strong> (1s) B <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux atomes d’hydrogène, orbitales (2s),<br />

(2p x), (2p y), (2p z) <strong>de</strong> l’oxygène).<br />

Il y a 6 OAs : les Principes I <strong>et</strong> II nous indiquent donc qu’on formera 6 orbitales moléculaires.<br />

Le Principe III (compatibilité <strong>de</strong>s symétries) est plus difficile à appliquer, car les OAs <strong>de</strong><br />

l’hydrogène ne possè<strong>de</strong>nt pas toute la symétrie <strong>de</strong> la molécule. Il existe une procédure rigoureuse <strong>et</strong><br />

élégante pour résoudre ce problème, mais il faut pour cela disposer d’une théorie mathématique <strong>de</strong><br />

la symétrie <strong>de</strong>s molécules (celle <strong>de</strong>s groupes ponctuels <strong>de</strong> symétrie) qui ne sera pas vue ici.<br />

En bref, il faut traiter « en groupe » les <strong>de</strong>ux orbitales atomiques (1s) A <strong>et</strong> (1s) B. Plus<br />

précisément, on remplace les orbitales atomiques <strong>de</strong>s atomes d’hydrogène individuel par <strong>de</strong>s<br />

combinaisons appelées les OSATs (orbitales symétriques d’atomes terminaux). Ce sont elles qui<br />

vont participer à la formation d’OMs. Elles se trouveront à la même énergie que les OAs<br />

constituantes, c.a.d. (1s) A <strong>et</strong> (1s) B, mais elles sont délocalisées sur les <strong>de</strong>ux atomes d’hydrogène. Les<br />

<strong>de</strong>ux OSATs sont représentées ci-<strong>de</strong>ssous (leurs noms viennent <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s groupes):<br />

combinaison “A1”<br />

(en phase)<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

combinaison “B2”<br />

(hors phase)<br />

Ensuite, on voit que ces « OSAT » peuvent donner <strong>de</strong>s combinaisons <strong>de</strong> symétrie compatible<br />

avec les différentes OA <strong>de</strong> l’oxygène. On construit ainsi une liste d’orbitales moléculaires <strong>de</strong> l’eau,<br />

qui sont schématisées ci-<strong>de</strong>ssous ; on donne à chaque fois la combinaison d’OSAT <strong>et</strong> d’OM qui a<br />

été utilisée (attention au signe <strong>de</strong> la fonction d’on<strong>de</strong> !), <strong>et</strong> une représentation <strong>de</strong> l’OM ainsi obtenue<br />

(parfois dans une orientation différente). Par ordre d’énergies croissantes :<br />

OM A 1 liante :<br />

ou<br />

obtenue en combinant principalement la (2s) <strong>de</strong> l’oxygène <strong>et</strong> l’OSAT A 1.<br />

H<br />

H<br />

O<br />

26


OM B 2 liante :<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

ou<br />

OM A 1 (faiblement) liante :<br />

H<br />

ou<br />

O<br />

(en première approximation, c’est l’OA (2p) z; si l’on veut être plus précis, il y a une p<strong>et</strong>ite<br />

contribution <strong>de</strong> l’OSAT <strong>de</strong>s hydrogènes, prise avec un signe négatif).<br />

B 1 non liante :<br />

ou<br />

C<strong>et</strong>te “OM” est tout simplement une <strong>de</strong>s orbitales (2p) <strong>de</strong> l’oxygène, qui n’a pas été modifiée car<br />

elle n’a pas trouvé <strong>de</strong> partenaire <strong>de</strong> symétrie adaptée sur les autres atomes<br />

A 1 antiliante :<br />

H<br />

H<br />

H<br />

H<br />

O<br />

O<br />

H<br />

27


B 2 antiliante :<br />

En indiquant ces OMs sur un diagramme d’énergie:<br />

-13,6eV<br />

-15,9eV<br />

-32,4eV<br />

(2p)<br />

A1+B1+B2<br />

(2s)<br />

A1<br />

OAs <strong>de</strong><br />

l’oxygène<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

ou<br />

ou<br />

B2<br />

A1<br />

B2<br />

B1<br />

A1<br />

A1<br />

OMs <strong>de</strong><br />

H2O H<br />

H<br />

O<br />

O<br />

H<br />

H<br />

A1+B2<br />

OSATs <strong>de</strong>s<br />

hydrogènes<br />

28


Comparaison <strong>de</strong>s modèles OMs / Lewis pour l’eau<br />

O<br />

Dans le modèle <strong>de</strong> Lewis <strong>de</strong> H2O, , les électrons <strong>de</strong> valence se répartissent en<br />

H H<br />

<strong>de</strong>ux paires liantes <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux paires libres (non liantes), représentées comme équivalentes. Dans le<br />

modèle d’OMs, on a <strong>de</strong>ux paires n<strong>et</strong>tement liantes, une paire faiblement liante, <strong>et</strong> une paire nonliante<br />

(l’énergie <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux électrons, dans l’orbitale (2p) x <strong>de</strong> l’oxygène, n’est pas affectée par la<br />

formation <strong>de</strong> la molécule).<br />

Une différence notable rési<strong>de</strong> dans le caractère localisé ou non <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription : dans le<br />

modèle <strong>de</strong> Lewis, chaque paire liante est localisée entre l’oxygène <strong>et</strong> un hydrogène bien précis ;<br />

dans le modèle d’OMs, chaque paire liante est délocalisée sur l’ensemble du squel<strong>et</strong>te, <strong>et</strong> participe<br />

simultanément à la liaison entre les trois atomes. Mais beaucoup <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>urs observables, par<br />

exemple la <strong>de</strong>nsité électronique, sont invariantes qu’on utilise une <strong>de</strong>scription localisée ou<br />

délocalisée. Le caractère plus rigoureux <strong>de</strong> la <strong>de</strong>scription par les OMs, à lui seul, ne justifierait sans<br />

doute pas l’effort intellectuel nécessaire. •<br />

Par contre, les <strong>de</strong>ux modèles aboutissent à <strong>de</strong>s prévisions différentes, <strong>et</strong> testables, sur les<br />

niveaux d’énergie électronique. Comme nous l’avons dit, le modèle <strong>de</strong> Lewis suggère un niveau<br />

électronique correspondant aux paires liantes, doublement dégénéré, occupé par 4 électrons, <strong>et</strong> un<br />

autre niveau doublement dégénéré, occupé par 4 électrons. Soit <strong>de</strong>ux niveaux. Le modèle OM<br />

prévoit au contraire 4 niveaux clairement séparés en énergie correspondant à <strong>de</strong>s orbitales occupées.<br />

Il existe une technique qui perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> mesurer directement les énergies <strong>de</strong> liaison (E B) <strong>de</strong>s<br />

électrons dans la matière : la spectroscopie <strong>de</strong> photoélectrons. On envoie sur l’échantillon <strong>de</strong>s<br />

photons ayant tous la même énergie hν. Ces photons peuvent être absorbés par les électrons <strong>de</strong><br />

valence <strong>et</strong>, si hν est assez élevé, les électrons seront éjectés dans le vi<strong>de</strong> avec une énergie cinétique<br />

EK. La loi <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong> l’énergie fournit hν = E B + EK ; on peut donc obtenir E B par une<br />

mesure <strong>de</strong> EK. Le résultat <strong>de</strong> ces mesures est très clair : il y a bien 4 niveaux d’énergie électronique<br />

séparés, correspondant à 4 valeurs différentes <strong>de</strong> l’énergie <strong>de</strong> liaison dans la molécule d’eau. En<br />

conséquence, dès qu’on s’intéresse à la mesure <strong>de</strong> propriétés physiques précises d’une molécule<br />

(notamment, <strong>de</strong>s propriétés spectroscopiques), une théorie d’OMs est indispensable, même pour une<br />

molécule aussi simple que H 2O. Par contre, le modèle <strong>de</strong> Lewis est souvent suffisant pour une étu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>s propriétés chimiques (p.ex. mécanismes réactionnels), surtout en chimie organique.<br />

II.B.3 L’état soli<strong>de</strong><br />

Tous le soli<strong>de</strong>s ne sont pas cristallins, mais l’état cristallin est bien plus qu’une curiosité <strong>de</strong><br />

minéralogie. Beaucoup <strong>de</strong> soli<strong>de</strong>s sont en fait microcristallins : ils ne révèlent pas leur organisation<br />

à l’échelle macroscopique, mais sont constitués <strong>de</strong> la juxtaposition <strong>de</strong> p<strong>et</strong>its cristaux dont la taille<br />

peut aller <strong>de</strong> quelques nanomètres à une fraction <strong>de</strong> millimètre. La structure d’un cristal peut être<br />

entièrement déterminée par une métho<strong>de</strong> puissante, la diffraction <strong>de</strong>s rayons X (cf. cours LC222).<br />

Une bonne partie <strong>de</strong>s notions <strong>de</strong> ce paragraphe est traitée en LC101 <strong>et</strong> peut être considérée<br />

comme une révision.<br />

II.B.3.a Organisation <strong>de</strong> l’état cristallin<br />

i) Systèmes cristallographiques, réseaux <strong>de</strong> Bravais<br />

Fondamentalement, l’état cristallin est caractérisé par la propriété <strong>de</strong> périodicité. Si l’on<br />

choisit un point quelconque dans la structure d’un soli<strong>de</strong> cristallin (généralement, on prendra ce<br />

point <strong>de</strong> base sur un atome, mais ce n’est pas obligatoire), il existera un vecteur r<br />

a tel que, si l’on se<br />

• Question subsidiaire: Quel est l’état d’hybridation <strong>de</strong> l’oxygène dans H2O? La seule réponse satisfaisante à c<strong>et</strong>te<br />

question est “sp”, car l’orbitale (2s) <strong>de</strong> l’oxygène ne peut se combiner, pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> symétrie, qu’avec l’orbitale<br />

(2p z); <strong>et</strong> encore s’agit-il d’un eff<strong>et</strong> secondaire, non représenté dans les schémas d’OM que nous avons montrés. Dans<br />

certains ouvrages, vous trouverez l’affirmation que c<strong>et</strong>te molécule est dans un état d’hybridation sp 3 ; il s’agit à nouveau<br />

d’une application “forcée” du modèle localisé, les paires électroniques non liantes étant supposées se trouver dans <strong>de</strong>s<br />

orbitales “directionnelles”.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

29


déplace <strong>de</strong> r<br />

a dans la structure, on r<strong>et</strong>rouvera un autre point exactement équivalent (avec le même<br />

environnement atomique, dans la même orientation...). De même si l’on se déplace <strong>de</strong> 2 r<br />

a , 3 r<br />

a ,...<br />

u r<br />

a , avec u entier.<br />

Dans r la plupart <strong>de</strong>s cas, la périodicité est tridimensionnelle : on pourra trouver <strong>de</strong>ux autres<br />

vecteurs b <strong>et</strong> r<br />

c , linéairement indépendants <strong>de</strong> r<br />

a , tels que tout point situé en u r<br />

a + v r<br />

b + w r<br />

c soit<br />

équivalent au point d’origine (où u, v, w sont trois nombres entiers). L’ensemble <strong>de</strong>s points<br />

équivalents ainsi engendrés s’appelle le réseau cristallin, <strong>et</strong> ces points sont les noeuds du réseau.<br />

r r<br />

a , b <strong>et</strong> r<br />

c sont les vecteurs <strong>de</strong> base du réseau.<br />

Figure 8 : Une p<strong>et</strong>ite partie d’une structure cristalline. r<br />

a <strong>et</strong> r<br />

b sont indiqués sur la figure; il faut<br />

imaginer la structure continuée également suivant un vecteur r<br />

c perpendiculaire au plan.<br />

Si l’on construit sur les trois vecteurs <strong>de</strong> base r<br />

a , r<br />

b <strong>et</strong> r<br />

c un parallélépipè<strong>de</strong> (il n’est pas<br />

toujours rectangle!), on voit qu’on pourra engendrer l’ensemble du cristal en reproduisant<br />

exactement c<strong>et</strong>te “brique” sur chaque noeud du réseau. On l’appellera maille élémentaire du<br />

cristal. Le cristal est complétement déterminé si l’on connaît les paramètres <strong>de</strong> base du réseau, <strong>et</strong> le<br />

contenu <strong>de</strong> la maille élémentaire.<br />

Il suffit <strong>de</strong> six paramètres pour caractériser les trois vecteurs <strong>de</strong> base • : les normes <strong>de</strong>s<br />

vecteurs, a, b <strong>et</strong> c, <strong>et</strong> les angles α, β <strong>et</strong> γ qu’ils font entre eux.<br />

r<br />

c<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

!<br />

"<br />

• car une rotation ou une translation du référentiel n’introduisent pas <strong>de</strong> différence physiquement significative.<br />

#<br />

r<br />

b<br />

r<br />

a<br />

30


Sur la base <strong>de</strong>s relations entre ces paramètres, on distinguera sept systèmes cristallographiques :<br />

- a, b, c, α, β , γ quelconques : système triclinique<br />

- a, b, c quelconques, α = γ 90 (<strong>et</strong> β ≠ 90°):<br />

- a, b, c quelconques, α = β = γ 90 : orthorhomb (la maille<br />

élémentaire est un parallélépipè<strong>de</strong> rectangle).<br />

- a = b ≠ c, α = β = 90°, γ = 120 : hexagonal<br />

- a = b = c, α = β = γ < 90 : rhomboédrique (la maille élémentaire est<br />

un rhombe: un parallélépipè<strong>de</strong> dont les faces sont <strong>de</strong>s losanges)<br />

- a = b ≠ c, α = β = γ 90 : quadrat (la maille élémentaire est un<br />

prisme à base carrée)<br />

- a = b = c, α = β = γ 90 : cubique (la maille élémentaire est un cube)<br />

Plus le système est symétrique, moins il faut <strong>de</strong> paramètres pour le décrire. Ainsi, le système<br />

cubique est entièrement déterminé par la valeur du seul paramètre a.<br />

Certains <strong>de</strong> ces sytèmes adm<strong>et</strong>tent plusieurs mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> centrage. En eff<strong>et</strong>, il arrive que la<br />

symétrie du réseau ne se révèle complètement que si on le décrit par une maille multiple,<br />

comprenant plusieurs nœuds. On distinguera les mo<strong>de</strong>s suivants :<br />

- Mo<strong>de</strong> P (primitif) : les nœuds se trouvent uniquement à l’origine <strong>de</strong> chaque maille. Il faut<br />

remarquer que, à cause <strong>de</strong> la périodicité du réseau, chaque somm<strong>et</strong> <strong>de</strong> la maille élémentaire<br />

porte un nœud ; mais chacun <strong>de</strong> ces nœuds est partagé entre les huit mailles qui se<br />

rencontrent en ce somm<strong>et</strong>. Dans le mo<strong>de</strong> P, le nombre <strong>de</strong> nœuds par maille est donc 8x(1/8)<br />

=1.<br />

- Mo<strong>de</strong> C : outre les nœuds situés sur les somm<strong>et</strong>s, il y a <strong>de</strong>s nœuds supplémentaires au centre<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux faces opposées. Ceux-ci sont donc partagés entre <strong>de</strong>ux mailles <strong>et</strong> on compte 8x(1/8)<br />

+ 2x(1/2) = 2 nœuds par maille.<br />

- Mo<strong>de</strong> I (Innenzentriert) : un nœud supplémentaire au centre géométrique <strong>de</strong> la maille ; soit 2<br />

nœuds par maille.<br />

- Mo<strong>de</strong> F (Flächenzentriert) : <strong>de</strong>s nœuds supplémentaires aux centres <strong>de</strong>s 6 faces <strong>de</strong> la maille.<br />

Soit 8x(1/8) + 6x(1/2) = 4 nœuds par maille.<br />

La combinaison <strong>de</strong>s systèmes cristallographiques <strong>et</strong> <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> centrage, compte tenu <strong>de</strong>s<br />

contraintes <strong>de</strong> symétrie du réseau, aboutit à 14 réseaux <strong>de</strong> Bravais.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

31


Cubique : a = b = c<br />

α = β = γ = 90°<br />

Les 7 systèmes cristallins: forme <strong>de</strong>s mailles<br />

(les mailles P sont représentées)<br />

Monoclinique : a ≠ b ≠ c<br />

α = γ = 90° β ≠ 90°<br />

β<br />

Rhomboédrique : a = b = c<br />

α = β = γ ≠ 90°<br />

β α<br />

γ<br />

Quadratique : a = b ≠ c<br />

α = β = γ = 90°<br />

r<br />

a<br />

r<br />

c<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

r<br />

b<br />

Orthorhombique : a ≠ b ≠ c<br />

α = β = γ = 90°<br />

Triclinique : a ≠ b ≠ c<br />

α ≠ β ≠ γ ≠ 90°<br />

Hexagonal : a = b ≠ c<br />

α = β = 90° γ =<br />

120°<br />

r<br />

a<br />

r<br />

c<br />

γ<br />

r<br />

b<br />

32


ii) Description du contenu <strong>de</strong> la maille<br />

Une <strong>de</strong>scription complète d’une structure cristalline doit comporter : - le type <strong>de</strong> réseau <strong>et</strong> la<br />

valeur <strong>de</strong>s paramètres <strong>de</strong> réseau (ou paramètres <strong>de</strong> maille), - le motif, c’est à dire la liste <strong>de</strong>s atomes<br />

contenus dans une maille (nature chimique <strong>et</strong> position), à l’exclusion <strong>de</strong> ceux qui résultent <strong>de</strong><br />

l’opération <strong>de</strong>s translations périodiques.<br />

On spécifie la position <strong>de</strong>s atomes du motif par rapport au référentiel naturel que constituent<br />

les trois vecteurs <strong>de</strong> base r r<br />

a , b <strong>et</strong> r<br />

c . Le vecteur position <strong>de</strong> l’atome considéré est proj<strong>et</strong>é sur la<br />

direction r<br />

r<br />

a parallèlement à b <strong>et</strong> r<br />

c , fournissant une coordonnée X (en Å p.ex.). On obtient <strong>de</strong><br />

même les coordonnées Y <strong>et</strong> Z. Il est d’usage <strong>de</strong> renseigner plutôt les coordonnées réduites : x =<br />

X/a, y = Y/b, z = Z/c, sous forme d’un tripl<strong>et</strong> (x,y,z). Ces trois valeurs sont par définition<br />

comprises entre 0 <strong>et</strong> 1 pour tout point situé à l’intérieur <strong>de</strong> la maille.<br />

II.B.3.b Nature <strong>de</strong> la liaison dans les cristaux<br />

L’organisation cristalline (c.à.d. périodique) se rencontre indépendamment <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> la<br />

liaison entre éléments constitutifs <strong>de</strong> la structure. C’est ainsi qu’on pourra rencontrer :<br />

- Des cristaux moléculaires, dont la cohésion est assurée par <strong>de</strong>s liaisons intermoléculaires<br />

telles que les liaisons hydrogène (ex. H 2O (glace) : réseau périodique tridimensionnel <strong>de</strong><br />

molécules d’eau, chacune liée à quatre voisines par liaisons hydrogène)<br />

- Des cristaux ioniques (§ II.B.3.d), <strong>de</strong> formule A aX x, dont la cohésion est assurée par une<br />

interaction électrostatique entre <strong>de</strong>s cations A Z A + <strong>et</strong> <strong>de</strong>s anions X Z X - . Ces assemblages sont<br />

astreints à une condition globale d’électroneutralité : la charge électrique globale doit être<br />

nulle, ce qui se traduit par a.z A - x.z X = 0. On rencontre ces structures ioniques lorsque la<br />

différence d’électronégativité entre les éléments A <strong>et</strong> X est élevée (cf. § I.A.3.e).<br />

- Des cristaux covalents (ex. carbone diamant), où on peut considérer que chaque atome<br />

forme avec ses voisins un nombre bien défini <strong>de</strong> liaisons localisées (2 électrons, 2 centres).<br />

Un cristal covalent peut être considéré comme une « super-molécule » <strong>de</strong> taille<br />

potentiellement infinie. Il s’agit d’un cas limite : comme dans les p<strong>et</strong>ites molécules, la<br />

liaison peut avoir un caractère partiellement covalent <strong>et</strong> partiellement ionique (liaison<br />

ionocovalente).<br />

- Enfin, <strong>de</strong> nombreux éléments (surtout du bloc s <strong>et</strong> du bloc d) ou composés sont susceptibles<br />

<strong>de</strong> former <strong>de</strong>s cristaux métalliques, dont la <strong>de</strong>scription nécessite <strong>de</strong> considérer une<br />

délocalisation <strong>de</strong>s électrons sur l’ensemble <strong>de</strong> la structure. Ce cas, étant caractéristique <strong>de</strong><br />

la chimie du soli<strong>de</strong>, est décrit plus en détail au paragraphe suivant.<br />

II.B.3.c Le soli<strong>de</strong> métallique<br />

i) Nature <strong>de</strong> la liaison métallique<br />

Les métaux présentent une série <strong>de</strong> caractéristiques qui les différencient n<strong>et</strong>tement <strong>de</strong>s autres<br />

soli<strong>de</strong>s : interaction avec la lumière (« éclat métallique »), ductilité… Deux propriétés physiques<br />

notamment correpon<strong>de</strong>nt à <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>urs facilement mesurables : une conductivité électrique élevée<br />

(σ, en Ω -1 .m -1 ), <strong>et</strong> une conductivité thermique (κ, en W.K -1 .m -1 ) également élevée.<br />

En 1900 (avant le développement <strong>de</strong> la mécanique quantique), Dru<strong>de</strong> proposa un modèle du<br />

« gaz d’électrons » • où le cristal métallique est considéré comme un assemblage dont les atomes<br />

m<strong>et</strong>tent en commun tous leurs électrons <strong>de</strong> valence : on a donc une disposition périodique <strong>de</strong> cœurs<br />

d’atomes ionisés positivement, entre lesquels circulent <strong>de</strong>s électrons qui ne sont plus localisés. Il ne<br />

s’agit pas vraiment d’électrons libres puisqu’ils sont contraints à rester dans le soli<strong>de</strong>, mais à<br />

l’intérieur du soli<strong>de</strong> leur énergie potentielle est constante (« boîte <strong>de</strong> potentiel »). En traitant ces<br />

électrons suivant les équations <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong>s gaz, on obtient <strong>de</strong>s estimations assez précises<br />

<strong>de</strong> κ <strong>et</strong> <strong>de</strong> σ: le modèle doit donc contenir <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> vérité.<br />

• ou modèle <strong>de</strong> Dru<strong>de</strong>-Lorentz.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

33


En 1928, Sommerfeld a repris ce modèle <strong>et</strong> lui a appliqué un traitement quantique. Les<br />

niveaux d’énergie <strong>de</strong>s électrons dans la boîte sont quantifiés, mais vu leur grand nombre, la <strong>de</strong>nsité<br />

<strong>de</strong>s états sur l’échelle d’énergie est très élevée. Immédiatement au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong>s niveaux effectivement<br />

occupés par les électrons existent un grand nombre d’états permis mais vacants, ce qui perm<strong>et</strong> une<br />

excitation facile <strong>de</strong>s électrons, <strong>et</strong> par là un mouvement <strong>de</strong>s charges (un courant électrique) sous<br />

l’eff<strong>et</strong> d’un champ appliqué.<br />

Enfin, dans les années 1930, Bloch <strong>et</strong> Brillouin ont décrit l’état <strong>de</strong>s électrons dans le métal au<br />

moyen d’une extension <strong>de</strong> la théorie <strong>de</strong>s orbitales moléculaires. On peut former, par combinaison<br />

linéaire <strong>de</strong>s orbitales atomiques <strong>de</strong> tous les atomes du cristal, <strong>de</strong>s orbitales <strong>de</strong> cristal (OCs)<br />

délocalisées sur l’ensemble <strong>de</strong> la structure – ici aussi, le cristal doit être considéré comme une<br />

« supermolécule ». Puisque le nombre total d’orbitales doit être conservé dans c<strong>et</strong>te procédure, on<br />

obtient ainsi un nombre d’OCs très élevé (<strong>de</strong> l’ordre du nombre d’Avogadro !) sur un intervalle<br />

d’énergie <strong>de</strong> 4β ( β : intégrale <strong>de</strong> recouvrement, cf. §I.B.2.d, p.17). A partir <strong>de</strong> chaque type d’OA,<br />

on forme donc une ban<strong>de</strong> d’énergie extrêmement <strong>de</strong>nse en niveaux d’énergie permis : chaque<br />

valeur <strong>de</strong> l’énergie dans l’intervalle correspondant correspond à une OC existante. Les différentes<br />

ban<strong>de</strong>s permises sont séparées par <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s interdites : aucune OC n’a son énergie dans<br />

l’intervalle correspondant. Comme le nombre total d’électrons mis en jeu est connu, il est facile<br />

d’évaluer le <strong>de</strong>gré d’occupation d’une ban<strong>de</strong> par les électrons, qui est indiqué par un hachurage.<br />

Le schéma <strong>de</strong> ban<strong>de</strong>s perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> prédire les propriétés <strong>de</strong> conductivité électrique du cristal :<br />

seule une ban<strong>de</strong> partiellement remplie perm<strong>et</strong>tra l’excitation <strong>de</strong>s électrons pour transporter le<br />

courant électrique (cf. supra, <strong>et</strong> figure 9 ci-<strong>de</strong>ssous).<br />

A titre d’exemple, un cristal <strong>de</strong> sodium (Na) constitué <strong>de</strong> N atomes donnera lieu à la<br />

formation <strong>de</strong> N orbitales <strong>de</strong> cristal par combinaison <strong>de</strong>s orbitales (3s), ce qui fait 2N états permis en<br />

tenant compte du spin. Comme la configuration électronique fondamentale du sodium est [Ne](3s) 1<br />

(chaque atome <strong>de</strong> sodium fournit un électron <strong>de</strong> valence à la structure), N <strong>de</strong> ces états seront<br />

occupés par <strong>de</strong>s électrons. La ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> conduction sera donc à moitié remplie : Na est<br />

effectivement un métal.<br />

métal<br />

EF<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

ban<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

conduction<br />

(autres<br />

ban<strong>de</strong>s<br />

éventuelles)<br />

OAs OCs<br />

Figure 9 : Structures <strong>de</strong> ban<strong>de</strong>s typiques d’un métal <strong>et</strong> d’un isolant. Dans un métal, la ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> conduction est<br />

partiellement remplie, jusqu’à un niveu d’énergie appelé niveau <strong>de</strong> Fermi (EF). Dans un isolant, une ban<strong>de</strong><br />

complètement remplie est séparée d’une ban<strong>de</strong> complètement vi<strong>de</strong> par une ban<strong>de</strong> interdite (« gap ») large. Un semiconducteur<br />

présente la même structure, mais la largeur <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> interdite (Egap) est plus faible ; à température<br />

assez élevée, quelques électrons pourront être excités thermiquement dans la ban<strong>de</strong> supérieure <strong>et</strong> conduire l’électricité.<br />

EF<br />

isolant<br />

OCs<br />

34


ii)empilements compacts.<br />

La plupart <strong>de</strong>s éléments métalliques cristallisent selon quelques structures simples, que l’on<br />

peut visualiser comme <strong>de</strong>s empilements d’atomes sphériques. C<strong>et</strong>te façon <strong>de</strong> voir les choses peut<br />

paraître contradictoire avec les modèles <strong>de</strong> liaisons métalliques proposés au paragraphe précé<strong>de</strong>nt,<br />

où l’on considérait que les atomes <strong>de</strong> métal per<strong>de</strong>nt partiellement leur individualité en m<strong>et</strong>tant en<br />

commun tous leurs électrons <strong>de</strong> valence. En fait, un modèle est toujours une simplification <strong>de</strong> la<br />

réalité <strong>et</strong> les <strong>de</strong>ux modèles présentés successivement sont complémentaires : celui <strong>de</strong> l’empilement<br />

<strong>de</strong> sphères perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> rendre compte facilement <strong>de</strong> l’aspect structural (disposition <strong>de</strong>s atomes dans<br />

l’espace), mais est inutile pour prédire les niveaux d’énergie électronique <strong>et</strong> ne doit pas être<br />

appliqué dans ce cas.<br />

La Figure 10 indique comment disposer <strong>de</strong>s sphères i<strong>de</strong>ntiques <strong>de</strong> façon compacte dans un<br />

plan. On voit que les centres <strong>de</strong>s sphères (points A) <strong>de</strong>ssinent un réseau hexagonal. Les tria<strong>de</strong>s<br />

(groupes <strong>de</strong> trois sphères adjacentes) définissent <strong>de</strong>ux autres ensembles <strong>de</strong> points, notés « B » <strong>et</strong><br />

« C » sur la figure.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

b<br />

a<br />

B B B B B<br />

C C C C<br />

B B B B<br />

Figure 10 : empilement compact bidimensionnel <strong>de</strong> sphères équivalentes<br />

Si l’on commence à construire un second plan compact en « déposant » <strong>de</strong>s sphères au-<strong>de</strong>ssus<br />

du premier plan, on se rend compte qu’on doit occuper, soit tous les points B, soit tous les points C.<br />

A<br />

A A A<br />

B<br />

B<br />

A<br />

C C<br />

B<br />

C<br />

A A<br />

Un choix similaire se répète à chaque nouveau plan, ce qui donne lieu à <strong>de</strong>s empilements<br />

compacts différents :<br />

- empilement A-B-A-B-… : empilement compact hexagonal (hc).<br />

35


Dans ce cas, les atomes du troisième plan éclipsent exactement les atomes du premier plan. La<br />

figure 11 montre que c<strong>et</strong> empilement périodique peut être décrit par une maille hexagonale P, dont<br />

les vecteurs <strong>de</strong> base r r<br />

a <strong>et</strong> b sont situés dans un plan compact, tandis que le vecteur r<br />

c lui est<br />

perpendiculaire.<br />

b<br />

a<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

b<br />

a<br />

z = 0;<br />

z = 1<br />

z = 1/2<br />

b a<br />

Figure 11 : construction d’un empilement compact A-B-A-B… <strong>et</strong> <strong>de</strong>scription par une maille<br />

hexagonale<br />

La maille primitive ne contient qu’un seul nœud du réseau, mais le motif contient <strong>de</strong>ux<br />

atomes métalliques : l’un est centré en (0,0,0), l’autre en (1/3, 2/3, 1/2). Le nombre Z d’atomes par<br />

maille est <strong>de</strong> 2. La coordinence (nombre <strong>de</strong> plus proches voisins) <strong>de</strong> chaque atome métallique est<br />

<strong>de</strong> 12 : six dans le même plan, trois dans le plan supérieur, trois dans le plan inférieur.<br />

- empilement A-B-C-A-B-C…<br />

Dans ce cas, ce n’est que dans le quatrième plan compact <strong>de</strong> l’empilement tridimensionnel que l’on<br />

revient aux positions éclipsant le premier plan. Le réseau cristallin ainsi formé est <strong>de</strong> symétrie<br />

cubique.<br />

A<br />

C<br />

B<br />

A<br />

a/3<br />

2b/3<br />

A B<br />

Figure 12 : construction d’un empilement compact A-B-C-A-B-C… <strong>et</strong> <strong>de</strong>scription par une maille<br />

cubique. A gauche, vue en projection ; au centre <strong>et</strong> à droite, vue « éclatée »<br />

Il faut un certain effort <strong>de</strong> visualisation dans l’espace pour réaliser ce fait, car aucun <strong>de</strong>s<br />

vecteurs <strong>de</strong> base du réseau cubique n’est parallèle aux plans compacts. En fait, les directions <strong>de</strong><br />

tangence <strong>de</strong>s atomes métalliques (assimilés à <strong>de</strong>s sphères <strong>de</strong> rayon r M ) sont les diagonales <strong>de</strong>s faces<br />

du cube. La longueur d’une <strong>de</strong> ces diagonales étant égale à a 2 , on trouve a 2 = 4r M ; le<br />

paramètre cristallin a est donc fixé par la valeur du rayon atomique.<br />

A<br />

C<br />

36


La maille la plus symétrique décrivant c<strong>et</strong> empilement périodique est une maille cubique F<br />

(aussi appelée cfc). Il s’agit d’une maille quadruple, comportant <strong>de</strong>s nœuds aux positions (0,0,0),<br />

(0,0,1/2), (0,1/2, 0), (1/2, 0, 0). Le motif consiste en un atome métallique sur chaque nœud. Le<br />

nombre Z d’atomes par maille est donc <strong>de</strong> 4.<br />

On peut calculer la compacité C <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te structure, c’est à dire le rapport entre le volume<br />

occupé par les atomes <strong>et</strong> le volume total du cristal. Sur base d’une maille, on obtient :<br />

C = Z(4 3 !(rM )3 )<br />

a 3<br />

En introduisant dans c<strong>et</strong>te équation les relations a 2 = 4rM <strong>et</strong> Z=4, on trouve :<br />

C = ! 2<br />

= 0,740...<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

6<br />

C<strong>et</strong>te valeur <strong>de</strong> la compacité est maximale : il n’est pas possible <strong>de</strong> réaliser un empilement <strong>de</strong><br />

sphères utilisant plus efficacement l’espace (le calcul sur l’empilement A-B-A-B « compact<br />

hexagonal » fournit exactement le même valeur).<br />

L’espace disponible dans une maille n’est cependant pas utilisé à 100% par les atomes<br />

métalliques <strong>de</strong> l’empilement. Entre ceux-ci se trouvent <strong>de</strong>s espaces vacants, appelés sites<br />

intersticiels, qui peuvent éventuellement accueillir un autre atome. La figure 13 montre la position<br />

<strong>de</strong>s sites octaédriques :<br />

Ces sites se trouvent au centre <strong>de</strong> la maille (1/2, 1/2, 1/2) <strong>et</strong> au milieu <strong>de</strong> chaque arète : (1/2,<br />

0, 0), (0, 1/2, 0), (0, 0, 1/2). Ils sont au nombre <strong>de</strong> 1 + 12x(1/4) = 4 par maille.<br />

O<br />

Figure 13 : sites intersticiels octaédriques dans une maille cubique F. A gauche : site central, à<br />

droite : sites d’arètes (une partie <strong>de</strong>s atomes avoisinants ne se situent pas dans la maille)<br />

On peut estimer la taille d’un site vacant (r site ) en fonction <strong>de</strong> la taille <strong>de</strong>s atomes métalliques<br />

(r M ) :<br />

O<br />

37


LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

r M<br />

2r site a<br />

r M<br />

Figure 14 :Visualisation, en encombrement réel, <strong>de</strong> certains atomes voisins d’un site intersticiel<br />

octaédrique (les atomes <strong>de</strong> la maille ne sont pas tous représentés pour <strong>de</strong>s raisons <strong>de</strong> clarté du<br />

<strong>de</strong>ssin)<br />

On a : a = 2 r M + 2 r site . Compte tenu <strong>de</strong> la relation <strong>de</strong> tangence a 2 = 4r M , on trouve :<br />

r site = r M ( 2 !1)= r M . 0,414…<br />

L’insertion d’un atome dans un site intersticiel se fait toujours « avec forcement » : un atome<br />

dont le rayon est inférieur à r site ne serait pas stable dans ce type <strong>de</strong> site où il « flotterait » ; un atome<br />

<strong>de</strong> taille un peu supérieure à c<strong>et</strong>te valeur, au contraire, pourra occuper le site octaédrique, mais cela<br />

nécessitera un écartement <strong>de</strong>s atomes métalliques qui ne seront plus exactement tangents selon la<br />

diagonale d’une face.<br />

La maille cubique F contient également 8 sites tétraédriques par maille :<br />

a/2<br />

T<br />

Figure 15 : Un <strong>de</strong>s sites intersticiels tétraédriques dans une maille cubique F<strong>et</strong> son environnement<br />

immédiat<br />

Ils se trouvent aux centres <strong>de</strong> huit p<strong>et</strong>its cubes d’arète a/2 :<br />

(1/4, 1/4, 1/4) (3/4, 1/4, 1/4) (1/4, 3/4, 1/4) (3/4, 3/4, 1/4)<br />

(1/4, 1/4, 3/4) (3/4, 1/4, 3/4) (1/4, 3/4, 3/4) (3/4, 3/4, 3/4)<br />

38


On montre facilement que la taille du site vaut dans ce cas : r site = r M ( 3<br />

2 !1)<br />

= 0,2247 r M .<br />

iii) un empilement non compact : la structure cubique I.<br />

La maille <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te structure est double : elle contient un nœud en (0, 0, 0) <strong>et</strong> un autre en (1/2,<br />

1/2, 1/2). Le motif consiste en un atome <strong>de</strong> métal sur chaque nœud.<br />

La coordinence <strong>de</strong> chaque atome est <strong>de</strong> 8 (cela est particulièrement facile à voir pour l’atome<br />

central). La distance d’approche la plus intime entre atomes est selon la gran<strong>de</strong> diagonale du cube ;<br />

s’il y a tangence, on obtient la relation : a 3 = 4r M .<br />

La compacité C vaut encore une fois<br />

différente, on aura c<strong>et</strong>te fois : C = ! 3<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

8<br />

Z( 4 3 !(rM )3 )<br />

a 3<br />

, mais la relation entre a <strong>et</strong> rM étant<br />

= 0,680..., soit une valeur inférieure à celle <strong>de</strong>s<br />

empilements compacts.<br />

La structure cubique I contient <strong>de</strong>s sites intersticiels, mais leur géométrie est moins régulière<br />

que dans la structure cubique F. Ainsi, au centre <strong>de</strong> chaque face, se trouve un site octaédrique<br />

déformé : il est à distance a/2 <strong>de</strong>s atomes centraux <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux mailles qui partagent c<strong>et</strong>te face, mais à<br />

distance a 2<br />

2<br />

aplati ».<br />

<strong>de</strong>s 4 atomes situés aux somm<strong>et</strong>s <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te face. Il s’agit donc d’un « octaèdre<br />

Un examen attentif révèle que <strong>de</strong>s sites semblables se trouvent aux milieux <strong>de</strong>s arètes, pour un total<br />

<strong>de</strong> (6x1/2 + 12x1/4) = 6 sites octaédriques déformés par maille.<br />

39


Il existe également <strong>de</strong>s sites tétraédriques déformés à raison <strong>de</strong> 4 par face carrée, soit<br />

4x(6x1/2) = 12 par maille. Ils se situent en (1/2, 0, 1/4), (1/4, 0, 1/2), (1/2, 0, 3/4), (3/4, 0, 1/2)…<strong>et</strong>c<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

(1/2, 1/4, 0)<br />

Empilement <strong>et</strong> système cristallographique<br />

Les cours <strong>de</strong> cristallographie élémentaire commencent souvent par une <strong>de</strong>scription détaillée<br />

<strong>de</strong>s structures ci-<strong>de</strong>ssus, qui peuvent être assez facilement comprises comme <strong>de</strong>s empilements<br />

réguliers <strong>de</strong> sphères i<strong>de</strong>ntiques. Cela amène les étudiants à généraliser abusivement les « modèles<br />

d’empilement » <strong>et</strong> par suite à vouloir les utiliser pour décrire n’importe quelle structure cristalline.<br />

Il faut souligner que ces modèles sont restreints à quelques cas simples, appartenant généralement à<br />

la catégorie <strong>de</strong>s soli<strong>de</strong>s métalliques ; les seules notions d’application générale sont celles vues au §<br />

II.B.3.a (systèmes cristallographiques <strong>et</strong> réseau <strong>de</strong> Bravais). Il peut exister par exemple <strong>de</strong>s cristaux<br />

appartenant au système cubique, dont le motif est constitué <strong>de</strong> molécules <strong>de</strong> forme irrégulière <strong>et</strong> qui<br />

ne peuvent absolument pas être considérés comme <strong>de</strong>s empilements <strong>de</strong> sphères.<br />

En résumé : un empilement donné (compact ou non) appartient forcément au système<br />

cristallographique correspondant ; mais la donnée du système cristallin n’impose absolument pas<br />

que la structure puisse être décrite comme un empilement.<br />

II.B.3.d Le soli<strong>de</strong> ionique<br />

- Structures AX<br />

Lorsque la liaison dans un cristal est essentiellement ionique (forte différence<br />

d’électronégativité entre les partenaires), on peut généralement considérer ce cristal comme un<br />

empilement, c<strong>et</strong>te fois <strong>de</strong> cations <strong>et</strong> d’anions. Le nombre <strong>de</strong> structures possibles est n<strong>et</strong>tement plus<br />

élevé que dans le cas <strong>de</strong>s soli<strong>de</strong>s métalliques, puisqu’on empile c<strong>et</strong>te fois <strong>de</strong>ux types <strong>de</strong> sphères (au<br />

moins) <strong>de</strong> tailles différentes, les cations <strong>et</strong> les anions. Il faut tenir compte <strong>de</strong> la stoechiométrie<br />

(A aX x, cf. supra) <strong>et</strong> <strong>de</strong> la nature <strong>de</strong>s voisinages : un cation préfère être entouré d’anions, <strong>et</strong><br />

réciproquement.<br />

Nous traiterons ici quelques types <strong>de</strong> structures « AX », ayant un rapport stoechiométrique<br />

1 :1 (ce qui implique bien sûr que les charges <strong>de</strong> l’anion <strong>et</strong> du cation sont égales en valeur absolue).<br />

i) Structure CsCl .<br />

La maille est illustrée ci-<strong>de</strong>ssous (figure 16).<br />

CsCl cristallise dans le réseau cubique simple (P). • Si l’on choisit <strong>de</strong> fixer les nœuds du réseau sur<br />

les Cl - , le motif consiste en un ion Cl - centré en (0, 0, 0) <strong>et</strong> un ion Cs + centré en (1/2, 1/2, 1/2). On<br />

• Attention : une erreur fréquente est <strong>de</strong> croire que la structure CsCl est cubique centrée (I), parce qu’il y a un atome au<br />

centre <strong>de</strong> la maille. Mais en fait, la condition pour avoir un cubique I est l’existence d’un nœud du réseau (un point<br />

équivalent par translation au point origine) au centre <strong>de</strong> la maille. Si l’on a choisi <strong>de</strong> placer le nœud origine sur un Cl - ,<br />

tous les autres noeuds doivent se trouver aussi sur <strong>de</strong>s Cl - . La maille n’est donc pas centrée dans ce cas.<br />

40


peut alternativement fixer les nœuds sur les Cs + : dans ce cas, le motif consiste en un Cs + en (0, 0,<br />

0) <strong>et</strong> un Cl - en (1/2, 1/2, 1/2).<br />

Figure 16 Structure CsCl. Deux types <strong>de</strong> mailles sont représentés, l’une où les nœuds sont situés<br />

sur les ions Cs + , l’autre où ils sont situés sur les Cl - .<br />

Il est facile <strong>de</strong> voir que la coordinence du Cs + est <strong>de</strong> 8 (il se trouve à égale distance <strong>de</strong>s 8 ions<br />

Cl - situés aux somm<strong>et</strong>s <strong>de</strong> la maille). La coordinence <strong>de</strong> Cl - est <strong>de</strong> 8 également. C<strong>et</strong>te égalité est<br />

caractéristique <strong>de</strong>s structures AX tridimensionnelles ; en général, pour <strong>de</strong>s stoechiométries plus<br />

complexes A aX x, le rapport <strong>de</strong>s coordinences est l’inverse du rapport stoechiométrique (coordinence<br />

A / coordinence X = x/a).<br />

Il existe une condition géométrique simple pour déterminer si un composé ionique AX peut<br />

cristalliser dans la structure CsCl. En eff<strong>et</strong>,<br />

i) Il y a tangence entre les cations <strong>et</strong> les anions selon la gran<strong>de</strong> diagonale du cube :<br />

2r X ! + 2r A + = a 3 .<br />

ii) Le cation central doit avoir une taille suffisamment élevée. En eff<strong>et</strong>, si l’on imagine<br />

qu’on « rétrécit » progressivement la structure en diminuant le rayon du cation r A +, les<br />

anions vont se rapprocher jusqu’à un point limite où ils entrent en contact, mais ils ne<br />

peuvent pas s’interpénétrer. Mathématiquement, on doit avoir : 2r X ! " a.<br />

La combinaison <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux relations donne :<br />

r +<br />

A<br />

rayons ioniques ( ), cela revient à :<br />

r !<br />

X<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Cl -<br />

Cs +<br />

ρ ≥ 0,732…<br />

r A +<br />

r X !<br />

" 3 !1. Si on note ρ le rapport <strong>de</strong>s<br />

41


ii) Structure NaCl .<br />

C<strong>et</strong>te structure est très fréquemment observée lorsque le rapport ρ est plus faible. NaCl<br />

cristallise dans le réseau cubique à faces centrées (F), lequel contient 4 nœuds par maille. En<br />

prenant le nœud origine au centre d’un ion Cl - , le motif peut être décrit comme : un Cl - en (0, 0,<br />

0), un Na + en (1/2, 0, 0). La maille <strong>de</strong> NaCl contient donc 4 ions Cl - <strong>et</strong> 4 ions Na + .<br />

Figure 17 Structure NaCl. En inversant les positions <strong>de</strong>s ions Na + <strong>et</strong> Cl - , on obtient une<br />

<strong>de</strong>sription alternative <strong>de</strong> la même structure<br />

Dans c<strong>et</strong>te structure, la coordinence <strong>de</strong>s cations, <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s anions, est <strong>de</strong> 6. On dit souvent que<br />

les ions Cl - définissent une structure c.f.c., <strong>et</strong> que les ions Na + en occupent tous les sites<br />

octaédriques. Attention toutefois : les Cl - ne forment pas un empilement compact, car ils ne sont pas<br />

au contact les uns <strong>de</strong>s autres (cf. infra).<br />

Dans la structure NaCl, l’environnement <strong>de</strong>s cations comme celui <strong>de</strong>s anions est octaédrique.<br />

On connaît une autre structure, celle <strong>de</strong> l’arséniure <strong>de</strong> nickel NiAs, où le cation est environné <strong>de</strong> 6<br />

anions disposés aux somm<strong>et</strong>s d’un octaèdre tandis que l’anion est environné <strong>de</strong> 6 cations disposés<br />

aux somm<strong>et</strong>s d’un prisme à base triangulaire : dans ce cas, bien que les coordinences soient égales,<br />

les géométries du polyèdre <strong>de</strong> coordination sont différentes.<br />

Comme dans le cas précé<strong>de</strong>nt, il existe une condition géométrique sur ρ.<br />

La tangence anion/cation selon les arètes donne : 2r X ! + 2r A + = a, <strong>et</strong> l’interdiction<br />

d’interpénétration <strong>de</strong>s anions : 4r X ! " a 2 . En combinant, on obtient :<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

r A +<br />

r X !<br />

" 2 !1. C<strong>et</strong>te<br />

quantité doit aussi être ! 3 "1, sinon le composé adopterait la structure CsCl. La structure NaCl<br />

est donc théoriquement favorisée si :<br />

0,414... ≤ ρ ≤ 0,732…<br />

Toutefois, il ne s’agit pas d’une règle absolue. On connaît <strong>de</strong> nombreux composés qui<br />

adoptent la structure NaCl bien que le rapport ρ soit supérieur à 0,732.<br />

iii) Structure blen<strong>de</strong><br />

Le sulfure <strong>de</strong> zinc, ZnS, présente le phénomène <strong>de</strong> polymorphisme : • il peut cristalliser<br />

selon <strong>de</strong>ux structures cristallines différentes. La blen<strong>de</strong> est une <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> ZnS. Elle cristallise<br />

dans un réseau cubique F.<br />

• Lorsque ce phénomène se manifeste pour un élément chimique pur, on l’appelle aussi allotropie. Les différentes<br />

formes cristallines adoptées sont <strong>de</strong>s allomorphes. Ce vocabulaire est parfois utilisé plus généralement par abus <strong>de</strong><br />

langage.<br />

Cl -<br />

Na +<br />

42


LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Figure 18 StructureZnS (blen<strong>de</strong>)<br />

On peut décrire c<strong>et</strong>te structure comme suit : les anions S 2- définissent une structure c.f.c., <strong>et</strong> les<br />

cations Zn 2+ en occupent la moitié <strong>de</strong>s sites tétraédriques (la figure indique le polyèdre<br />

<strong>de</strong>coordination tétraédrique d’un <strong>de</strong>s sites occupés par le zinc). Le motif comprend <strong>de</strong>ux ions : un<br />

S 2- en (0, 0, 0) <strong>et</strong> un Zn 2+ en (1/4, 1/4, 1/4). La coordinence du zinc (<strong>et</strong> celle du soufre) est <strong>de</strong> 4.<br />

iii) Structure wurtzite<br />

Dans c<strong>et</strong>te secon<strong>de</strong> forme <strong>de</strong> ZnS, les anions S 2- définissent une structure hexagonale<br />

comparable à celle d’un empilement hexagonal compact, <strong>et</strong> les cations Zn 2+ occupent la moitié <strong>de</strong>s<br />

sites tétraédriques. La wurtzite appartient donc au réseau hexagonal simple (P).<br />

Figure 19 StructureZnS (wurtzite)<br />

Le motif est constitué <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux S 2- en (0, 0, 0) <strong>et</strong> (2/3, 1/3, 1/2) <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux Zn 2+ en (0, 0, 3/8) <strong>et</strong><br />

(2/3, 1/3, 7/8).<br />

Comme dans la structure précé<strong>de</strong>nte, la coordinence <strong>de</strong>s S 2- , <strong>et</strong> celle <strong>de</strong>s Zn 2+ , est <strong>de</strong> 4.<br />

- Une structure complexe : la perovskite<br />

Il existe bien sûr d’autres structures <strong>de</strong> composés ioniques que celles du paragraphe<br />

précé<strong>de</strong>nt, correspondant à d’autres rapport stoechiométriques cation : anion. Les cours spécialisés<br />

<strong>de</strong> cristallographie présentent une typologie <strong>de</strong>s structures AX 2 ; un exemple particulier, la fluorite,<br />

est vu en LC101.<br />

Nous décrivons ici la structure perovskite, correspondant à une formule plus complexe<br />

ABX 3 , où A z A +<br />

S 2-<br />

Zn 2+<br />

est un « gros » cation, B z b +<br />

un p<strong>et</strong>it cation <strong>et</strong> X z x -<br />

un anion. La condition<br />

43


d’électroneutralité s’écrit ici z A + z B - 3 z X = 0. Par exemple, CaTiO 3 (contenant les ions Ca 2+ <strong>de</strong><br />

rayon r = 0,99Å <strong>et</strong> Ti 4+ <strong>de</strong> rayon r = 0,68Å) adopte la structure perovskite ; on peut citer aussi<br />

l’enstatite MgSiO 3, composant important du manteau terrestre.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

Figure 20 : La structure perovskite, illustrée par CaTiO 3.<br />

Le lecteur pourra se convaincre i) que la maille contient bien un ion A, un ion B <strong>et</strong> trois<br />

anions X – c’est donc une maille cubique simple – ii) que chaque cation B z b +<br />

est environné <strong>de</strong> 6<br />

anions en géométrie octaédrique, tandis que chaque cation A z A + est environné <strong>de</strong> 12 anions. Quant à<br />

l’environnement <strong>de</strong>s anions, il consiste en quatre cations A z A + <strong>et</strong> <strong>de</strong>ux cations B z B +<br />

.<br />

Le motif <strong>de</strong> la maille cubique simple est :<br />

Un ion B en (0, 0, 0)<br />

Un ion A en (1/2, 1/2, 1/2)<br />

Trois anions X en (1/2, 0, 0); (0, 1/2, 0) ; (0, 0, 1/2)<br />

Certaines perovskites, comme BaTiO 3, présentent la propriété intéressante <strong>de</strong> ferroélectricité.<br />

• Cela signifie que chaque maille présente un moment dipolaire électrique non nul, <strong>et</strong> d’orientation<br />

bien définie. Par conséquent, l’ensemble du cristal possè<strong>de</strong> lui aussi, spontanément (c.a.d. en<br />

l’absence <strong>de</strong> champ électrique) un moment électrique non nul, <strong>et</strong> même élevé à l’échelle<br />

macroscopique, résultant <strong>de</strong> l’addition cohérente <strong>de</strong>s p<strong>et</strong>its dipôles <strong>de</strong> toutes les mailles. De<br />

nombreuses applications électroniques en découlent.<br />

Un composé soli<strong>de</strong> présentera un moment dipolaire électrique permanent si le centre <strong>de</strong><br />

charges positives <strong>de</strong> la maille ne coïnci<strong>de</strong> pas avec le centre <strong>de</strong> charges négatives. Or, dans une<br />

structure perovskite régulière, comme on peut s’en convaincre d’après la figure 17, ces <strong>de</strong>ux centres<br />

sont bien coïnci<strong>de</strong>nts.<br />

D’où vient dès lors la propriété <strong>de</strong> ferroélectricité ? De ce que le cation Ba 2+ (r = 1,34Å)<br />

cause une telle expansion du réseau perovskite que la cavité octaédrique entre les anions oxy<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>vient trop large pour la taille <strong>de</strong>s ions Ti 4+ . Ceux-ci se déplacent donc par rapport au centre <strong>de</strong><br />

l’octaèdre, <strong>et</strong> la direction <strong>de</strong> ce déplacement a tendance à être la même pour tous les ions voisins<br />

(du moins à température assez basse). Le centre <strong>de</strong>s charges positives n’est alors plus au centre <strong>de</strong> la<br />

maille, <strong>et</strong> la ferroélectricité se manifeste.<br />

• Ce terme peut paraître curieux puisque le composé en question ne contient pas <strong>de</strong> fer. Il vient en fait <strong>de</strong> l’analogie <strong>de</strong><br />

traitement physique du phénomène <strong>de</strong> ferroélectricité <strong>et</strong> <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> ferromagnétisme, qui a été étudié plus tôt – <strong>et</strong><br />

implique souvent quant à lui <strong>de</strong>s composés du fer.<br />

44


- Aspects énergétiques <strong>de</strong> la liaison ionique<br />

Les enthalpies standard <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> nombreux composés ioniques sont connues.<br />

L’enthalpie standard <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> KCl, par exemple, correspond à la réaction <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> ce<br />

composé à partir <strong>de</strong>s éléments dans leur état le plus stable à 298 K, c’est à dire le potassium soli<strong>de</strong><br />

<strong>et</strong> le dichlore gazeux :<br />

K soli<strong>de</strong> + 1/2 Cl 2 gaz → KCl soli<strong>de</strong> Δ fH° = -438 kJ.mol -1 .<br />

D’après les principes <strong>de</strong> la thermodynamique, si l’on réalise c<strong>et</strong>te réaction <strong>de</strong> formation en<br />

plusieurs étapes, on doit obtenir la même valeur en sommant les différences d’enthalpie pour<br />

chaque étape successive (puisque l’enthalpie est une fonction d’état).<br />

On peut envisager les étapes suivantes pour réaliser un tel cycle <strong>de</strong> Born-Haber :<br />

1. Atomisation <strong>de</strong>s éléments (formation d’atomes isolés à l’état gazeux):<br />

Ksoli<strong>de</strong> → Kgaz ΔrH° = + 89 kJ.mol -1 (enthalpie <strong>de</strong> sublimation du potassium)<br />

1/2 Cl2 gaz → Clgaz ΔrH° = + 122 kJ.mol -1 (1/2 enthalpie <strong>de</strong> dissociation <strong>de</strong> Cl2) 2. Ionisation <strong>de</strong>s éléments gazeux :<br />

Kgaz → K +<br />

gaz + 1e ΔrH° = + 425 kJ.mol -1 (énergie d’ionisation du potassium, ou P.I. du<br />

potassium cf. § I.A.3.c., i)<br />

Clgaz + 1e → Cl -<br />

gaz ΔrH° = - 355 kJ.mol -1 (opposé <strong>de</strong> l’affinité électronique du chlore,<br />

cf. § I.A.3.c., ii)<br />

3. association <strong>de</strong>s ions gazeux pour former l’édifice ionique soli<strong>de</strong><br />

K +<br />

gaz + Cl -<br />

gaz → KClsoli<strong>de</strong> ΔrH° = ? kJ.mol -1<br />

Le ΔrH° <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière étape est appelé l’énergie réticulaire Erét du cristal ionique. • Elle<br />

n’est pas mesurable directement mais l’utilisation du cycle <strong>de</strong> Born-Haber fournit :<br />

(+ 89 + 122 + 425 - 355) kJ. mol -1 + Erét = - 438 kJ.mol -1 , soit Erét = - 719 kJ.mol -1 . C<strong>et</strong>te quantité<br />

représente l’énergie qui serait dégagée si l’on assemblait 1 mole <strong>de</strong> K +<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

<strong>et</strong> une mole <strong>de</strong> Cl - ,<br />

initialement isolés, suivant la structure du cristal (i<strong>de</strong>ntique à la structure NaCl dans ce cas). Un tel<br />

processus est une vue <strong>de</strong> l’esprit ; il n’est évi<strong>de</strong>mment pas réalisable en pratique. Mais il a pourtant<br />

un sens bien compréhensible intuitivement, puisqu’il correspond à l’énergie qui serait dégagée si on<br />

empilait les ions isolés suivant la structure du cristal ; E rét , définie comme ci-<strong>de</strong>ssus, est une énergie<br />

<strong>de</strong> stabilisation <strong>et</strong> son signe est négatif. ••<br />

Si l’on suppose que la liaison entre les éléments constitutifs du cristal est purement ionique,<br />

on peut esssayer d’évaluer théoriquement l’énergie réticulaire. Le problème n’est pas trivial parce<br />

que chaque ion interagit électrostatiquement avec un nombre infini <strong>de</strong> voisins. On peut remarquer<br />

qu’un ion donné est entouré <strong>de</strong> 6 ions <strong>de</strong> signe opposé à la distance d (d = r K + + r Cl -), ce qui<br />

apporte une contribution à son énergie électrostatique <strong>de</strong> !6 e2<br />

. L’examen <strong>de</strong> la structure<br />

4"# °d<br />

montre que ses seconds voisins sont 12 ions <strong>de</strong> même signe situés à une distance d 2<br />

(contribution répulsive +12<br />

e 2<br />

) ; on trouve ensuite 8 ions <strong>de</strong> signe opposé à une distance<br />

4!" °d 2<br />

d 3 , <strong>et</strong>c… En sommant toutes les contributions correspondantes, on trouve que l’énergie<br />

• NB : En toute rigueur, il s’agit encore une fois d’une confusion entre « énergie » <strong>et</strong> « enthalpie ». Mais la différence<br />

entre les <strong>de</strong>ux est assez minime puisqu’elle vaut 2RT (cf. note p. 10)<br />

•• Vous trouverez dans certains ouvrages une définition exactement inverse <strong>de</strong> l’énergie réticulaire : elle sera définie<br />

comme la différence d’énergie correspondant à la séparation <strong>de</strong>s ions du cristal pour donner <strong>de</strong>s ions isolés en phase<br />

gazeuse. Elle aura évi<strong>de</strong>mment dans ce cas le signe opposé, c’est à dire positif. Ne vous en faites pas trop – certaines<br />

notations scientifiques ne sont pas encore complétement standardisées. Dans le cadre du LC205, utilisez la définition<br />

donnée ici.<br />

45


d’interaction électrostatique entre l’ion choisi <strong>et</strong> l’ensemble <strong>de</strong> ses voisins vaut :<br />

!e 2<br />

12 8 6 24<br />

6 ! + ! +<br />

4"#°d 2 3 4 5 ...<br />

$<br />

'<br />

&<br />

%<br />

(<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

) .<br />

La série donnée entre parenthèses converge lentement vers une valeur qui a pu être calculée<br />

pour c<strong>et</strong>te structure, comme pour un certain nombre d’autres structures simples. Elle est appelée<br />

constante <strong>de</strong> Ma<strong>de</strong>lung (M) <strong>et</strong> vaut 1,747… pour la structure NaCl. L’expression se simplifie<br />

donc en E électrostatique (un ion) = !e2 M<br />

4"#°d .<br />

Une mole <strong>de</strong> KCl contient 2N A ions (N A : nombre d’Avogadro). Mais il faut remarquer que si<br />

l’on additionnait simplement toutes les énergies électrostatiques par ion, l’interaction entre chaque<br />

paire d’ions serait comptée <strong>de</strong>ux fois. Au total, l’énergie électrostatique par mole <strong>de</strong> KCl vaut donc<br />

!N Ae 2 M<br />

4"#°d .<br />

C<strong>et</strong>te expression ne peut pas correspondre à l’énergie totale. En eff<strong>et</strong>, toute décroissance <strong>de</strong> la<br />

distance interionique d rend visiblement l’énergie électrostatique totale plus négative. Si le cristal<br />

ne s’effondre pas, c’est que la répulsion <strong>de</strong> Born (§I.B.1.f, p.16) entre les nuages électroniques <strong>de</strong>s<br />

ions s’y oppose. L’expression <strong>de</strong> l’énergie associée a été donnée précé<strong>de</strong>mment en fonction <strong>de</strong> la<br />

séparation R entre les nuages électroniques, mais il est possible <strong>de</strong> l’exprimer aussi en fonction <strong>de</strong><br />

la distance d entre les centres <strong>de</strong>s ions :<br />

EBorn = + NA B<br />

d<br />

n , où n est un coefficient empirique (9,1 dans NaCl). L’énergie totale d’une mole du<br />

composé KCl cristallin, c’est à dire l’énergie réticulaire, est donc la somme d’un terme attractif<br />

électrostatique <strong>et</strong> d’un terme répulsif (Born) : Erét = !N Ae 2 M<br />

+<br />

4"#°déq N AB<br />

désigne la<br />

( déq) n , où déq distance d’équilibre, celle qui correspond à l’état le plus stable parce qu’elle rend l’énergie<br />

réticulaire le plus négative possible.<br />

On peut éliminer la constante B <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te équation par le raisonnement suivant : Erét est<br />

fonction <strong>de</strong> d, <strong>et</strong> déq est la valeur <strong>de</strong> d qui minimise c<strong>et</strong>te fonction ; donc, en ce point, la dérivée <strong>de</strong><br />

Erét par rapport à d doit être nulle : !E " rét %<br />

$ ' = 0 . La résolution <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te équation fournit une<br />

# !d & déq<br />

relation entre B, d éq <strong>et</strong> n d’où l’on tire finalement : Erét = !N Ae 2 M<br />

4"#°d éq<br />

(1 ! 1<br />

n ).<br />

Pour KCl, l’application numérique donne une valeur proche <strong>de</strong> la valeur expérimentale<br />

obtenue d’après le cycle <strong>de</strong> Born-Haber : -719 kJ.mol -1 . Par contre, pour AgCl qui cristallise dans la<br />

même structure, la valeur calculée par c<strong>et</strong>te approche est <strong>de</strong> -700 kJ.mol -1 , alors que la valeur<br />

expérimentale (Born-Haber) est n<strong>et</strong>tement différente : -916 kJ.mol -1 . Cela signifie que le modèle<br />

utilisé pour le calcul est peu approprié dans ce cas : en fait, la liaison dans AgCl n’est pas purement<br />

ionique, mais présente un caractère covalent non négligeable.<br />

46


I.C <strong>Chimie</strong> <strong>de</strong>s Solutions<br />

I.C.1 Eau <strong>et</strong> solvants non aqueux<br />

I.C.1.a Généralités; propriétés physiques <strong>de</strong>s solvants<br />

L’eau possè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s propriétés assez particulières qui favorisent la solubilisation <strong>de</strong><br />

nombreuses molécules <strong>et</strong> l’ont fait surnommer “solvant universel”. La meilleure façon <strong>de</strong> les<br />

comprendre est <strong>de</strong> comparer H 2O à d’autres solvant apparentés. On notera ressemblances <strong>et</strong><br />

différences concernant la réactivité <strong>de</strong> molécules en solution. Nous nous intéresserons surtout à NH 3<br />

<strong>et</strong> HF liqui<strong>de</strong>s; le tableau suivant compare quelques propriétés physiques pertinentes <strong>de</strong> ces<br />

solvants, températures <strong>de</strong> fusion <strong>et</strong> d’ébullition, moment dipolaire électrique, constante diélectrique,<br />

<strong>de</strong>nsité relative.<br />

Solvant H 2O HF NH 3<br />

T fus (°C) 0 -83,5 -33<br />

T éb (°C) 100 19,5 -78<br />

µ e (Debye) 1,8 1,86 1,46<br />

ε r 78 (à 25°C) 83,6 (à T éb) 22 (à T éb)<br />

ρ 1,00 1,002 0,683<br />

I.C.1.b Températures <strong>de</strong> stabilité du solvant<br />

Certaines propriétés <strong>de</strong> l’eau, comme les points <strong>de</strong> fusion <strong>et</strong> d’évaporation élevés (l’eau<br />

liqui<strong>de</strong> existe sur une large gamme <strong>de</strong> températures, couvrant les conditions typiques à la surface <strong>de</strong><br />

la terre <strong>et</strong> favorisant donc l’existence <strong>de</strong> la vie) sont attribuables à l’existence <strong>de</strong> liaisons hydrogène<br />

fortes, potentiellement quatre par molécule (<strong>de</strong>ux où la molécule agit comme donneur, <strong>de</strong>ux comme<br />

accepteur), qui peuvent assurer la cohésion <strong>de</strong> l’eau dans les trois directions <strong>de</strong> l’espace.<br />

L’arrangement aléatoire présent dans les « clusters » (H 2O) n en phase liqui<strong>de</strong> est moins efficace<br />

(moins <strong>de</strong> liaisons) mais plus <strong>de</strong>nse que l’arrangement régulier présent dans la glace (soli<strong>de</strong><br />

cristallin). La fusion <strong>de</strong> l’eau s’accompagne donc d’une augmentation <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>nsité, contrairement à<br />

le plupart <strong>de</strong>s autres substances.<br />

La force <strong>de</strong>s liaisons hydrogène est corrélée avec l’existence d’un moment dipolaire<br />

électrique élevé (1,8 Debye), suite à la polarisation <strong>de</strong>s liaisons O-H :<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

! "<br />

O<br />

µ<br />

accepteurs<br />

H H donneurs<br />

! +<br />

Le fluorure d’hydrogène HF peut lui aussi établir <strong>de</strong>s liaisons hydrogène fortes, mais il ne<br />

possè<strong>de</strong> qu’un seul groupe donneur. Les liaisons H ne peuvent se faire qu’en « chaînes »<br />

monodimensionnelles, ce qui est moins efficace pour maintenir la cohésion du solvant liqui<strong>de</strong> dont<br />

le domaine <strong>de</strong> stabilité est déplacé vers <strong>de</strong>s températures n<strong>et</strong>tement plus basses que H 2O. •<br />

Quant à NH 3, c’est un moins bon donneur <strong>de</strong> liaisons hydrogène car la liaison covalente N-H<br />

est moins polarisée. Son domaine <strong>de</strong> stabilité à l’état liqui<strong>de</strong> est plus restreint.<br />

• Les liaisons hydrogène jouent asussi un rôle important dans la structuration <strong>de</strong> HF à l’état soli<strong>de</strong> (chaînes infinies … H-<br />

F … H-F … ) <strong>et</strong> à l’état gazeux (hexamères cycliques (HF) 6, d’où <strong>de</strong>nsité élevée <strong>de</strong> la vapeur).<br />

47


I.C.1.c Dissociation <strong>de</strong>s soli<strong>de</strong>s ioniques<br />

Une autre conséquence du moment dipolaire important <strong>de</strong> l’eau est la valeur élevée <strong>de</strong> la<br />

constante diélectrique (permittivité électrique relative, ε r) <strong>de</strong> l’eau: 78,3 à 25°C. En présence d’une<br />

charge électrique, les dipôles constitués par les molécules d’eau s’orientent <strong>de</strong> façon à faire écran à<br />

c<strong>et</strong>te charge: la force électrostatique entre <strong>de</strong>ux charges opposées diminue très rapi<strong>de</strong>ment avec la<br />

distance, ce qui fait <strong>de</strong> l’eau un solvant efficace pour les composés ioniques, un solvant dissociant.<br />

Suivant le même type <strong>de</strong> raisonnement, plus les ions sont fortement chargés, moins leurs composés<br />

seront solubles: toutes choses égales d’autre part, la solubilité décroît dans l’ordre M + X - > M 2+ (X - ) 2<br />

> M 3+ (X - ) 3 .<br />

L’ammoniac est un solvant moins dissociant que l’eau (ε r = 22), par contre HF est aussi un<br />

très bon dissociant. Cela vaut surtout pour les fluorures, car l’anion F - s’associe à une molécule <strong>de</strong><br />

HF par une liaison hydrogène particulièrement forte (formant (FHF) - ), ce qui stabilise davantage les<br />

produits <strong>de</strong> dissociation. On peut ainsi préparer <strong>de</strong>s solutions d’électrolytes très concentrées : 100g<br />

<strong>de</strong> fluorure d’hydrogène dissolvent jusqu’à 580g <strong>de</strong> TlF à 285K!<br />

I.C.1.d. Propriétés acido-basiques, autoprotolyse<br />

L’eau est amphotère ou amphiprotique : elle peut se comporter comme aci<strong>de</strong> <strong>et</strong> comme<br />

base <strong>de</strong> Brönsted. Deux molécules d’eau peuvent notamment réagir ensemble en une réaction acidobasique<br />

d’autoprotolyse :<br />

(1) H 2O + H 2O = H 3O + + OH<br />

- •<br />

C<strong>et</strong>te réaction est défavorisée thermodynamiquement : K w = 10 -14 M 2 à 298K. Cela signifie<br />

qu’en l’absence <strong>de</strong> toute autre molécule aci<strong>de</strong> ou basique en solution, [H 3O + ] = [OH - ] = 10 -7 mol.L -1<br />

à 298K.<br />

On se souviendra que le pH est défini comme -log[H 3O + ] •• ; le pH <strong>de</strong> l’eau pure est donc <strong>de</strong><br />

7. En pratique, l’échelle <strong>de</strong> pH en solution aqueuse s’étend <strong>de</strong> 0 à 14 (on peut facilement préparer<br />

<strong>de</strong>s solutions d’aci<strong>de</strong> où [H 3O + ] = 1 mol.L -1 ou <strong>de</strong>s solutions <strong>de</strong> base où [OH - ] = 1 mol.L -1 <strong>et</strong> donc<br />

[H 3O + ] = 10 -14 mol.L -1 ).<br />

L’eau est un solvant ionisant puisqu’elle convertit les aci<strong>de</strong>s HA suffisamment forts en<br />

leur base conjuguée A - <strong>et</strong> les bases B suffisamment fortes en leur aci<strong>de</strong> conjugué HB + . Il en résulte<br />

aussi un eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> nivellement <strong>de</strong> la force acido-basique: en solution aqueuse, il ne peut pas exister<br />

d’aci<strong>de</strong> plus fort que H 3O + , ni <strong>de</strong> base plus forte que OH - .<br />

L’ammoniac, comme l’eau, est amphotère, <strong>et</strong> agit donc comme solvant ionisant. NH 3<br />

constitue une base plus forte, <strong>et</strong> un aci<strong>de</strong> beaucoup plus faible que H 2O. En conséquence, on peut<br />

préparer <strong>et</strong> utiliser en solution dans l’ammoniac <strong>de</strong>s bases plus fortes qu’en solution aqueuse. Pour<br />

une même base A - par exemple, la réaction:<br />

A -<br />

aq + H 2O aq<br />

= HA aq + OH –<br />

aq<br />

sera beaucoup plus déplacée à droite que la réaction:<br />

A -<br />

amm + NH 3 amm = HA amm + NH 2<br />

–<br />

amm .<br />

L’ammoniac donne aussi lieu à un équilibre d’autoprotolyse, encore moins déplacé à droite<br />

que celui <strong>de</strong> l’eau:<br />

+ -<br />

(2) NH3 + NH3 = NH4 + NH2 Kw = 10 -33 M 2 à 223K<br />

On peut définir une échelle <strong>de</strong> pH dans l’ammoniac liqui<strong>de</strong>; mais, alors que l’échelle <strong>de</strong> pH<br />

dans l’eau ne comporte que 14 unités, celle <strong>de</strong> l’ammoniac liqui<strong>de</strong> en comporte 33.<br />

•<br />

Anciennement écrite H2O = H + + OH - , ce qui fait apparaître la réaction comme une dissociation, alors qu’il<br />

s’agit plutôt d’un échange <strong>de</strong> proton (réaction acido-basique au sens <strong>de</strong> Brönsted)<br />

••<br />

Plus exactement, c<strong>et</strong>te relation <strong>de</strong>vrait être écrite en termes d’activité <strong>de</strong> l’ion H3O + : pH = -log(aH3O +) ; cf. cours <strong>de</strong><br />

LC201.<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

48


(3)<br />

Le fluorure d’hydrogène pur peut également subir une autoprotolyse :<br />

HF + HF = H2F + + F - Kw = 8.10 -12 M 2 à 273K<br />

NB: Nous avons déjà signalé que l’ion fluorure est fortement associé à une molécule <strong>de</strong> HF,<br />

<strong>de</strong> sorte qu’il est sans doute plus correct d’écrire l’autoprotolyse comme:<br />

(3’) 3 HF = H2F + + (FHF) -<br />

A l’inverse <strong>de</strong> l’ammoniac liqui<strong>de</strong>, HF liqui<strong>de</strong> est un aci<strong>de</strong> plus fort que l’eau, <strong>et</strong> une base<br />

beaucoup plus faible. Il constitue donc un solvant particulièrement approprié pour manipuler <strong>de</strong>s<br />

aci<strong>de</strong>s forts sans causer leur dissociation. Inversement, même <strong>de</strong>s bases très faibles comme l’ion<br />

chlorure y seront protonées:<br />

(4) NaClsoli<strong>de</strong> + HFliq = HClgaz + Na +<br />

solution + F -<br />

solution .<br />

Les aci<strong>de</strong>s carboxyliques ne sont pas assez forts pour cé<strong>de</strong>r leur proton à une molécule <strong>de</strong> HF. Au<br />

contraire, ils manifesteront paradoxalement une réactivité basique en fixant un second proton:<br />

(5) R-COOH solution HF + HFliq =<br />

+<br />

R-COOH2 solution HF + F -<br />

solution .<br />

I.C.1.e. Propriétés d’oxydoréduction.<br />

L’eau, ou plutôt ses produits d’autoprotolyse H + <strong>et</strong> OH - , participe à <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>mi-réactions<br />

redox importantes :<br />

(6) 1/2 O 2 + H 2O + 2 e - = 2 OH - E°’ = 1,23V – τpH.<br />

(7) H + + 1 e - = 1/2 H 2 E°’ = 0V – τpH.<br />

(où τ = 0,059 Volt à 298K. Les E°’ sont <strong>de</strong>s « potentiels redox standard apparents », dépendant du<br />

pH; cf. cours <strong>de</strong> thermodynamique <strong>et</strong> électrochimie)<br />

Ces <strong>de</strong>ux équations redox définissent les limites thermodynamiques <strong>de</strong> stabilité du solvant<br />

H 2O. L’expression <strong>de</strong>s E°’ perm<strong>et</strong> d’établir un diagramme <strong>de</strong> stabilité <strong>de</strong> l’eau, définissant une<br />

ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> stabilité large <strong>de</strong> 1,23 Volts.<br />

E<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

/H<br />

En-<strong>de</strong>hors <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te zone, l’eau est thermodynamiquement instable ; un oxydant trop fort<br />

sera réduit en produisant un dégagement <strong>de</strong> O2, <strong>et</strong> un réducteur trop fort sera oxydé en produisant<br />

un dégagement <strong>de</strong> H2. Il existe donc un nivellement <strong>de</strong>s propriétés oxydoréductrices, quelque peu<br />

comparable à celui <strong>de</strong>s propriétés acido-basiques <strong>de</strong>s espèces en solution. Toutefois, <strong>de</strong> nombreuses<br />

réactions redox thermodynamiquement favorables sont très lentes, <strong>et</strong> certains oxydants plus forts<br />

que O2 peuvent survivre longtemps en solution aqueuse.<br />

Comme l’eau, l’ammoniac peut participer à <strong>de</strong>s réactions redox en tant qu’oxydant <strong>et</strong> en<br />

tant que réducteur; les <strong>de</strong>mi-réactions correspondantes s’écrivent en milieu aci<strong>de</strong> :<br />

+<br />

(8) 3 NH4 + 1/2N2 + 3 e - → 4 NH3 E° = 0,04 V.<br />

+ -<br />

(9) NH4 + 1 e → NH3 + 1/2 H2 E° = 0,0 V.<br />

pH<br />

49


Ces valeurs laissent à penser que la ban<strong>de</strong> <strong>de</strong> stabilité redox <strong>de</strong> l’ammoniac est<br />

particulièrement étroite (0,04 V) : aucun oxydant plus fort que N2 ne pourrait y exister (ni aucun<br />

réducteur plus fort que H2). En pratique, elle est n<strong>et</strong>tement plus large à cause <strong>de</strong>s cinétiques lentes<br />

<strong>de</strong>s réactions concernées. Ainsi, on peut dissoudre certains métaux alcalins dans l’ammoniac liqui<strong>de</strong><br />

pour obtenir <strong>de</strong>s “métaux liqui<strong>de</strong>s”:<br />

Nasoli<strong>de</strong> → (Na + ).(NH3) x + (e - ).(NH3) y (électron solvaté: serait extrêmement instable dans H2O • ).<br />

Dans le fluorure d’hydrogène, les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>mi-réactions à considérer sont :<br />

(10) 1/2 F 2 + 1 e - → F - E° = 2,71 V à 273K.<br />

(11) H 2F + + 1 e - → 1/2 H 2 + HF E° = 0,0 V.<br />

Le potentiel d’oxydation <strong>de</strong> ce solvant est très élevé, on pourra donc y travailler dans <strong>de</strong>s conditions<br />

très oxydantes sans causer sa décomposition. Par exemple, l’électrolyse <strong>de</strong> (NH 4) + (F - ) dans HF<br />

liqui<strong>de</strong> fournit les produits NF 2H <strong>et</strong> NF 3, difficiles à obtenir autrement.<br />

I.C.2 <strong>Chimie</strong> aqueuse <strong>de</strong>s cations<br />

Le but <strong>de</strong> ce paragraphe est d’attirer l’attention sur la richesse <strong>et</strong> la complexité <strong>de</strong>s<br />

phénomènes qui peuvent se produire lorsqu’un composé apparemment simple est dissous dans une<br />

solution aqueuse ; les textes classiques <strong>de</strong> chimie négligent souvent c<strong>et</strong>te complexité, qui n’a pu être<br />

révélée que par <strong>de</strong>s techniques sophistiquées.<br />

I.C.2.a. Sphères <strong>de</strong> solvatation<br />

Il convient d’abord <strong>de</strong> réaliser qu’un cation en phase aqueuse ne se présente jamais « nu »,<br />

c’est à dire non associé. Il est toujours entouré d’une première sphère <strong>de</strong> solvatation (d’hydratation<br />

en solution aqueuse) qui contient <strong>de</strong>s molécules <strong>de</strong> solvant liées assez fortement, <strong>et</strong> disposées<br />

suivant une géométrie bien définie. On verra au chapitre III qu’on peut rationnaliser c<strong>et</strong>te<br />

association en termes <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> liaisons datives ou liaisons <strong>de</strong> coordination : les molécules <strong>de</strong><br />

solvant, par exemple H 2O, possè<strong>de</strong>nt une paire électronique libre <strong>et</strong> constituent donc <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong><br />

Lewis ; dès lors, elles vont se lier aux aci<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Lewis (espèces électrodéficientes) que constituent<br />

les cations métalliques. La réaction d’association :<br />

(12) Al 3+ + 6 H 2O → [Al(H 2O) 6] 3+<br />

est très favorisée <strong>et</strong> se fait instantanément dès la mise en solution, <strong>de</strong> sorte que la notation <strong>de</strong>s<br />

thermodynamiciens <strong>et</strong> chimistes <strong>de</strong>s solutions « Al 3+<br />

aq » doit en fait se comprendre comme<br />

désignant <strong>de</strong>s espèces [Al(H 2O) 6] 3+ , en l’occurrence <strong>de</strong> géométrie octaédrique.<br />

On verra que c<strong>et</strong>te espèce chimique complexe est en équilibre avec d’autres ; la répartition<br />

d’un élément entre espèces chimiques distinctes est désignée sous le nom <strong>de</strong> spéciation.<br />

Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te première sphère <strong>de</strong> solvatation, on peut encore i<strong>de</strong>ntifier une secon<strong>de</strong> sphère<br />

<strong>de</strong> solvatation contenant <strong>de</strong>s molécules d’eau plus ou moins solidaires <strong>de</strong> l’espèce complexe. Ces<br />

molécules sont toutefois beaucoup plus labiles : elles passent très peu <strong>de</strong> temps dans la secon<strong>de</strong><br />

sphère <strong>de</strong> solvatation, s’échangeant rapi<strong>de</strong>ment avec les molécules <strong>de</strong> solvant libre. Il est donc<br />

difficile <strong>de</strong> connaître précisément la stoechiométrie <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> sphère <strong>de</strong> solvatation <strong>et</strong> pour c<strong>et</strong>te<br />

raison on n’en tient normalement pas compte dans l’écriture <strong>de</strong> l’espèce.<br />

On use parfois <strong>de</strong> nomenclatures un peu différente : la première sphère est nommée sphère <strong>de</strong><br />

coordination, <strong>et</strong> la secon<strong>de</strong> simplement sphère <strong>de</strong> solvatation ; ou encore, « sphère interne » <strong>et</strong><br />

« sphère externe ».<br />

• Sans doute faut-il insister sur c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière remarque. Les « électrons solvatés » font partie <strong>de</strong> la chimie assez<br />

exotique dans le solvant NH 3. En solution aqueuse, ces espèces n’existent pas, <strong>et</strong> si vous écrivez une réaction chimique<br />

(bilan) faisant intervenir <strong>de</strong>s électrons libres, vous vous trompez !<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

50


H 2O<br />

H 2O 3 +<br />

H2O Al<br />

H 2O<br />

OH 2<br />

OH 2<br />

Figure21 : Deux représentations semi-réalistes <strong>de</strong> l’espèce « Al 3+<br />

aq »; la première m<strong>et</strong> en évi<strong>de</strong>nce<br />

les liaisons <strong>de</strong> coordination, la secon<strong>de</strong> la géométrie du polyèdre <strong>de</strong> coordination (un octaèdre) <strong>et</strong><br />

l’existence d’une sphère <strong>de</strong> solvatation.<br />

I.C.2.b. Spéciation acido-basique<br />

Une solution 0,1 mol.L -1 <strong>de</strong> nitrate d’aluminium (Al(NO3) 3 . xH2O) a un pH <strong>de</strong> 2,95 environ.<br />

L’anion nitrate n’étant pas aci<strong>de</strong>, cela signifie que les espèces [Al(H2O) 6] 3+ le sont ; effectivement,<br />

l’eff<strong>et</strong> attracteur d’électrons du p<strong>et</strong>it cation Al 3+ sur les molécules d’eau <strong>de</strong> la sphère <strong>de</strong> coordination<br />

polarise n<strong>et</strong>tement les liaisons O-H <strong>de</strong> celles-ci, ce qui les rend plus susceptibles <strong>de</strong> cé<strong>de</strong>r un proton<br />

que <strong>de</strong>s molécules d’eau libres ; elles constituent donc <strong>de</strong>s aci<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Brönsted plus forts.<br />

C’est ainsi qu’on observe les réactions :<br />

(13) [Al(H2O) 6] 3+<br />

= [Al(H2O) 5OH] 2+ + H +<br />

pKa1 = 5,0<br />

(14) [Al(H2O) 5OH] 2+ = [Al(H2O) 4(OH) 2] + + H +<br />

pKa2 = 10,1<br />

Encore une fois, on peut représenter la stoechiométrie <strong>de</strong> ces espèces <strong>de</strong> façon plus ou moins<br />

précise <strong>et</strong> les ouvrages <strong>de</strong> chimie <strong>de</strong>s solutions écrivent souvent ces réactions comme :<br />

(13’) Al 3+ + H2O = « AlOH 2+ » + H +<br />

(14’) « AlOH 2+ + +<br />

» + H2O = « Al(OH) 2 » + H<br />

H 2O<br />

H 2O<br />

H2O Al<br />

H 2O<br />

OH 2<br />

OH<br />

2+<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

H 2O<br />

H 2O<br />

Al<br />

H2O Al<br />

H 2O<br />

Figure 22 : Représentation « semi-réaliste » <strong>de</strong>s espèces « AlOH 2+ +<br />

» <strong>et</strong> « Al(OH) 2 ».<br />

En poursuivant la déprotonation, on doit obtenir une espèce électriquement neutre :<br />

(15) [Al(H 2O) 4(OH) 2] + = [Al(H 2O) 3(OH) 3] 0 + H +<br />

C<strong>et</strong>te espèce est peu soluble <strong>et</strong> participe à un équilibre <strong>de</strong> précipitation :<br />

(16) [Al(H 2O) 3(OH) 3] 0 aqueux = Al(OH) 3 soli<strong>de</strong> + 3 H 2O<br />

On peut résumer les <strong>de</strong>ux équations précé<strong>de</strong>ntes, en négligeant la p<strong>et</strong>ite quantité <strong>de</strong><br />

[Al(H 2O) 3(OH) 3] 0 aqueux , ce qui donne :<br />

(17) [Al(H 2O) 4(OH) 2] + = Al(OH) 3 soli<strong>de</strong> + H + + 3 H 2O<br />

Si l’on continue à alcaliniser la solution, qui coexiste maintenant avec une phase soli<strong>de</strong><br />

Al(OH) 3, on peut redissoudre celle-ci selon :<br />

(18) Al(OH) 3 soli<strong>de</strong> + H2O = [Al(OH) 4] -<br />

aqueux + H +<br />

qui peut aussi s’écrire :<br />

OH<br />

OH<br />

+<br />

51


(18’) Al(OH) 3 soli<strong>de</strong> + OH - = [Al(OH) 4] -<br />

aqueux<br />

Cela perm<strong>et</strong> <strong>de</strong> comprendre pourquoi l’oxy<strong>de</strong> Al2O3 est parfois appelé oxy<strong>de</strong> amphotère (voir<br />

Ch. II.C). En eff<strong>et</strong>, l’hydroxy<strong>de</strong> Al(OH) 3 soli<strong>de</strong> peut être considéré comme un produit d’hydratation <strong>de</strong><br />

Al2O3 soli<strong>de</strong> selon :<br />

(19) Al2O3 soli<strong>de</strong> + 3 H2O = 2 Al(OH) 3 soli<strong>de</strong><br />

En combinant c<strong>et</strong>te <strong>de</strong>rnière réaction avec l’ équation (18’), on obtient<br />

(20) Al2O3 soli<strong>de</strong> + 2 OH - + 3 H2O = 2 [Al(OH) 4] -<br />

aqueux<br />

Et en la combinant avec l’ équation (17),<br />

(21) Al2O3 soli<strong>de</strong> + 2 H + + 9 H2O = 2 [Al(H2O) 4(OH) 2] +<br />

Al2O3 peut se dissoudre aussi bien en présence <strong>de</strong> solutions basiques (il se comporte alors<br />

comme un aci<strong>de</strong>) qu’en présence <strong>de</strong> solutions aci<strong>de</strong>s (il se comporte comme une base).<br />

I.C.2.c. Polymérisation : polycations <strong>et</strong> polyanions.<br />

Les réactions du § I.C.2.b suffisent à décrire la chimie <strong>de</strong> l’aluminium en solutions aqueuses<br />

diluées. Si la concentration totale d’aluminium cAl augmente, on observe <strong>de</strong>s réactions <strong>de</strong><br />

polymérisation <strong>de</strong>s espèces aluminiques, à commencer par<br />

(22) 2 [Al(H2O) 5OH] 2+<br />

= [Al2(H2O) 8(OH) 2] 4+ + 2 H2O. H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

OH2<br />

H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

+<br />

H2O<br />

H2O<br />

H2O<br />

OH2<br />

H2O<br />

OH2<br />

OH2<br />

4+<br />

OH2<br />

+ 2 H 2O<br />

On observe dans c<strong>et</strong>te réaction la formation <strong>de</strong> groupes OH (ou « ols ») pontants entre <strong>de</strong>ux<br />

ions Al 3+ ; pour c<strong>et</strong>te raison, on l’appelle une olation.<br />

On peut combiner c<strong>et</strong>te réaction avec les équations (13) <strong>et</strong> (14), pour rendre compte <strong>de</strong><br />

l’acidification <strong>de</strong> solutions concentrées :<br />

(22) 2 [Al(H2O) 6] 3+<br />

= [Al2(H2O) 8(OH) 2] 4+ + 2 H3O +<br />

La polymérisation peut progresser vers <strong>de</strong>s espèces plus complexes que le dimère ci-<strong>de</strong>ssus.<br />

Un trimère a été signalé, <strong>et</strong> la liste n’est sans doute pas close. Mais le produit <strong>de</strong> polymérisation le<br />

plus caractéristique est le tridécamère « Al13 » qui se forme dans les solutions concentrées. Le<br />

mécanisme <strong>de</strong> sa formation n’est pas encore parfaitement connu, mais la réaction globale peut<br />

s’écrire :<br />

(23) 13 [Al(H2O) 6] 3+ = [Al13O4(OH) 24(H2O) 12] 7+ + 32 H3O + + 6 H2O Sa structure moléculaire a été résolue car il est possible <strong>de</strong> le précipiter sous forme d’un sel <strong>de</strong><br />

sulfate. Elle porte le nom <strong>de</strong> «ε-Keggin » <strong>et</strong> est représentée schématiquement sur la figure 23 :<br />

52


LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

H2O<br />

Al 3+<br />

OH-<br />

O 2-<br />

Figure23 : Structure du polycation « Al 13 ε-Keggin », m<strong>et</strong>tant en évi<strong>de</strong>nce les polyèdres <strong>de</strong><br />

coordination <strong>de</strong> l’aluminium. Remarquer que l’aluminium central est en coordinence 4<br />

(tétraédrique) tandis que les douze autres sont en coordinence 6 (octaédrique)<br />

La polymérisation en phase aqueuse n’est pas limitée aux espèces cationiques comme Al 3+ ,<br />

mais elle concerne aussi les espèces anioniques. Dans la chimie du Mo VI par exemple,<br />

(24) 7 (MoO 4) 2- + 8 H + = [Mo 7O 24] 6- + 4 H 2O,<br />

avec formation d’un polyanion ou polyoxométallate (POM). La chimie <strong>de</strong>s polyoxométallates est<br />

extrêmement riche <strong>et</strong> variée ; elle est abordée dans les cours <strong>de</strong> spécialisation du master <strong>de</strong> chimie.<br />

III.C.2 Réactions <strong>de</strong> complexation<br />

II.C.2.a Définition, exemples<br />

Un complexe métallique est une entité formée par un ion central d'un métal (souvent <strong>de</strong><br />

transition), entouré d'un ou plusieurs ligands qui forment avec lui <strong>de</strong>s liaisons datives. Les<br />

molécules pouvant agir comme ligands sont donc celles qui portent <strong>de</strong>s paires électroniques libres<br />

(H 2O, NH 3, halogénures, <strong>et</strong>c...). La nature <strong>de</strong> ces liaisons sera traitée au Chapitre III ; il suffit<br />

d’adm<strong>et</strong>tre ici qu’il se forme <strong>de</strong>s complexes associant ion métallique <strong>et</strong> ligand dans une<br />

stoechiométrie précise. Par exemple, l’entité [Al(H 2O) 4(OH) 2] + est un ion complexe <strong>de</strong> l’aluminium,<br />

où les ligands sont (H 2O) <strong>et</strong> (OH - ).<br />

Notation <strong>de</strong>s réactions:<br />

M + L ↔ ML (première complexation)<br />

ML + L ↔ ML 2 (<strong>de</strong>uxième complexation)<br />

...<br />

ML i-1 + L ↔ ML i (général)<br />

L'espèce notée M est en général déjà complexée, par <strong>de</strong>s molécules d'eau si on est en<br />

solution aqueuse (voir discussion p.46). Les réactions <strong>de</strong> complexation sont donc en fait <strong>de</strong>s<br />

réactions <strong>de</strong> substitution <strong>de</strong> ligands!<br />

On peut écrire pour les différents complexes <strong>de</strong>s constantes <strong>de</strong> formation<br />

K f ,i =<br />

ML ( i )<br />

( )(L)<br />

ML i!1<br />

. Plus la constante <strong>de</strong> formation est élevée, plus le complexe est stable par<br />

53


apport à ses éléments constituants. Lorsque plusieurs ligands sont susceptibles <strong>de</strong> s’associer<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

( )<br />

successivement, on définit aussi <strong>de</strong>s constantes globales d'association notées β: ! i = MLi ( M)<br />

L<br />

Elles dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s constantes <strong>de</strong> formation :! i = " i<br />

j=1 K f ,i .<br />

Lorsqu’on réalise un titrage complexométrique d’un élément en solution aqueuse, on doit<br />

trouver un ligand qui s’associe à l’ion <strong>de</strong> c<strong>et</strong> élément pour former un complexe ayant une constante<br />

<strong>de</strong> formation aussi élevée que possible, <strong>de</strong> sorte que la réaction <strong>de</strong> complexation soit aussi déplacée<br />

que possible vers la droite. Pour ce faire, on utilise souvent <strong>de</strong>s ligands chélatants, c’est à dire <strong>de</strong>s<br />

ligands capables <strong>de</strong> se lier à un même cation par plusieurs atomes en même temps (il faut donc<br />

qu’ils portent sur chacun <strong>de</strong> ces atomes une paire électronique libre). Un exemple typique est<br />

l’EDTA, anion <strong>de</strong> l’aci<strong>de</strong> éthanediamin<strong>et</strong>étraacétique. Il est intéressant <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r pourquoi les<br />

constantes <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s complexes avec <strong>de</strong>s ligands chélatants sont élevées. Suivant un résultat<br />

<strong>de</strong> base <strong>de</strong> la thermochimie, la valeur <strong>de</strong> la constante d’équilibre dépend <strong>de</strong> l’enthalpie libre<br />

!"rG°<br />

standard <strong>de</strong> réaction ΔrG° selon : K f = e RT , avec ΔrG° = ΔrH°-TΔrS°. Si l’on écrit la réaction <strong>de</strong> complexation p.ex. <strong>de</strong> Fe 3+ par l’EDTA :<br />

(25) [Fe(H 2O) 6] 3+ + (EDTA) 4- → [Fe(EDTA)] - + 6 H 2O ,<br />

on se rend compte qu’elle se traduit par une augmentation du nombre total <strong>de</strong> molécules (<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux à<br />

sept), donc une augmentation du désordre, donc une augmentation <strong>de</strong> l’entropie : Δ rS°>>0, d’où<br />

Δ rG°


O<br />

C<br />

O<br />

O<br />

H 2C<br />

C<br />

O<br />

a<br />

N<br />

CH2<br />

H2<br />

C CH2<br />

LC 205 – Année 2006-2007 – Chapitre I<br />

O<br />

C<br />

N<br />

CH2<br />

O<br />

O<br />

O<br />

C<br />

H2<br />

O<br />

C<br />

O<br />

O<br />

O<br />

O<br />

HN<br />

O<br />

C<br />

O<br />

HN O<br />

Figure 24 : Structure <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ligands chélatants : a. (EDTA) 4- , ion éthanediamin<strong>et</strong>étraacétate; les<br />

atomes susceptibles <strong>de</strong> se lier à l’ion central sont ombrés, b. entérobactine ; les trois « bras » <strong>de</strong> la<br />

molécule se replient autour d’un ion ferrique <strong>et</strong> le complexent par les groupes phénolates.<br />

b<br />

O<br />

55

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