Notre-Dame de l'Epine, le monument de 1543 ... - PATZINAKIA
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<strong>Notre</strong>-<strong>Dame</strong> <strong>de</strong> l’Epine, <strong>le</strong> <strong>monument</strong> <strong>de</strong> <strong>1543</strong>: Usages, transformations, enjeux<br />
dans <strong>le</strong>s mains du curé, sont à la fabrique 86 . Le lieu <strong>de</strong> présentation <strong>de</strong>s<br />
reliques était donc hors du chœur ; avait-on déjà imaginé <strong>le</strong> <strong>monument</strong>,<br />
pensé comme lieu <strong>de</strong> conservation <strong>de</strong>s reliques dans <strong>le</strong> plan <strong>de</strong> l’église ? On<br />
ne peut <strong>le</strong> savoir mais sans doute <strong>de</strong>s reliques d’une tel<strong>le</strong> importance<br />
<strong>de</strong>mandaient un lieu pour une ostention aux fidè<strong>le</strong>s dans toute <strong>le</strong>ur gloire,<br />
un lieu bien évi<strong>de</strong>nt, sur <strong>le</strong> passage <strong>de</strong>s fidè<strong>le</strong>s, et dans la proximité du<br />
maître-autel, dédié comme on l’a vu à la Croix. L’importance <strong>de</strong>s reliques <strong>de</strong><br />
la Croix et <strong>le</strong> développement du pè<strong>le</strong>rinage a ainsi mené à la construction<br />
d’un lieu spécial pour l’ostention <strong>de</strong>s reliques et dans <strong>le</strong> but <strong>de</strong> susciter <strong>le</strong>s<br />
offran<strong>de</strong>s.<br />
On revient ainsi à l’usage du <strong>monument</strong> comme reliquaire avec une<br />
fonction dévotionnel<strong>le</strong> et <strong>de</strong> pénitence. Le pè<strong>le</strong>rin y pénétrait peut-être pour<br />
être associé à ce lieu. Cela renvoie aussi à l’idée <strong>de</strong> sépulcre – on y pénétrait<br />
pour être soi-même enterré, et ressortir après avoir fait pénitence vers une<br />
nouvel<strong>le</strong> vie. En faveur <strong>de</strong> cette hypothèse témoignent l’espace (porte, siège,<br />
éventuel<strong>le</strong>ment l’ouverture sous l’autel) et aussi l’ornementation <strong>de</strong>s murs. Il<br />
y a un souci esthétique indéniab<strong>le</strong>, sans doute à l’intention <strong>de</strong>s fidè<strong>le</strong>s qui<br />
<strong>de</strong>vraient y pénétrer en grand nombre. De plus, la richesse du décor reflétait<br />
l’importance <strong>de</strong>s objets contenus. Le pè<strong>le</strong>rin entrait, s’asseyait, regardait et<br />
vénérait <strong>de</strong>s reliques qui pouvaient être vues aussi d’en <strong>de</strong>hors, <strong>de</strong>puis la<br />
fenêtre. Ce rituel a du avoir lieu pendant suffisamment longtemps, <strong>de</strong>puis la<br />
construction <strong>de</strong> l’édicu<strong>le</strong> (<strong>1543</strong>, ou 1527, si on admet une construction en<br />
<strong>de</strong>ux temps), pendant la recharge « maria<strong>le</strong> », avec la fresque, et jusqu’à la<br />
fermeture du <strong>monument</strong> vers la fin du XVII e sièc<strong>le</strong>.<br />
Un autre usage possib<strong>le</strong> ?<br />
Avant <strong>de</strong> conclure on doit encore explorer la relation que pourrait avoir <strong>le</strong><br />
<strong>monument</strong> avec la pratique <strong>de</strong>s mirac<strong>le</strong>s à répit, c’est-à-dire la résurrection<br />
<strong>le</strong> temps <strong>de</strong> l’onction baptisma<strong>le</strong> <strong>de</strong>s enfants morts-nés, afin qu’ils puissent<br />
être sauvés. L’Eglise a toujours eu une attitu<strong>de</strong> ambiguë envers ces<br />
pratiques, laissant faire pour apaiser la dou<strong>le</strong>ur <strong>de</strong>s parents, tout en restant<br />
pru<strong>de</strong>nte face à <strong>de</strong>s manifestations populaires superstitieuses 87 . Au XIV e<br />
sièc<strong>le</strong> s’opère un changement essentiel, l’Eglise établissant un cadre public et<br />
sacré pour ces manifestations : on passe ainsi du mirac<strong>le</strong> à répit au<br />
sanctuaire à répit 88 . Un lieu et une pratique sont ainsi définis.<br />
Cette pratique a été très répandue dans la France du Nord, <strong>de</strong> l’Est<br />
et du Centre 89 . Le phénomène se développe en rapport avec <strong>de</strong>s images<br />
86 Ibid., I, f° 3.<br />
87 Didier Lett, L’enfant <strong>de</strong>s mirac<strong>le</strong>s : enfances et famil<strong>le</strong>s au Moyen Âge, XIIe-XIVe sièc<strong>le</strong>s, Paris,<br />
Aubier, 1997, p. 206-207.<br />
88 Ibid., p. 207.<br />
89 Jacques Gélis, Les enfants <strong>de</strong>s limbes : Mort-nés et parents dans l’Europe chrétienne, Paris,<br />
Audibert, 2006, p. 88.<br />
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