Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
eff<strong>et</strong> le « bastion assiégé », au sens propre du terme, après la seconde intervention<br />
soviétique en Hongrie, quand les sièges de son comité central <strong>et</strong> de son<br />
journal furent attaqués <strong>et</strong> saccagés par des groupes de manifestants extrémistes.<br />
La direction du parti face à l’intervention soviétique du 4 novembre<br />
Tout au long de la semaine qui suivit la première intervention de l’Armée<br />
rouge, le 23 octobre, l’issue de la situation en Hongrie resta imprévisible. Après<br />
avoir rendu publique, le 30 octobre, sa décision de réviser ses relations avec les<br />
démocraties populaires, que l’Humanité rapporta également, la présidence soviétique<br />
accomplit soudain une volte-face <strong>et</strong> se prononça, le 31 octobre, en faveur<br />
de l’intervention. Il est impossible de savoir quand <strong>et</strong> de quelle manière Thorez<br />
fut mis au courant de l’opération soviétique baptisée « tourbillon », ni quand il<br />
prit connaissance de la désignation de János Kádár au poste de Premier ministre<br />
en Hongrie. Il n’est d’ailleurs pas exclu qu’il encouragea la solution militaire du<br />
« problème hongrois », soit de manière directe, à l’instar de Chou-en-Lai, soit de<br />
manière indirecte, à l’instar de Palmiro Togliatti. Celui-ci décrivait en eff<strong>et</strong> au<br />
comité central soviétique le désarroi dans son parti <strong>et</strong> les conséquences prévisibles<br />
pour le mouvement si le communisme s’effondrait en Hongrie. 85<br />
<strong>Le</strong> 1 er novembre, le comité central du parti <strong>français</strong> vota une résolution sur<br />
la Pologne <strong>et</strong> sur la Hongrie. Dans celle-ci, il accusa sans distinction Imre Nagy<br />
<strong>et</strong> János Kádár de couvrir le massacre des <strong>communiste</strong>s par les fascistes <strong>et</strong><br />
refusa d’ouvrir un échange de vues avec eux, expliquant que : « le recul du pouvoir<br />
populaire devant la révolte réactionnaire n’est pas propice aux discussions<br />
entre partis ouvriers marxistes ». 86 Que la direction du PCF ait été sensiblement<br />
en r<strong>et</strong>ard sur les événements en Hongrie apparaît aussi dans le fait qu’elle a présenté<br />
c<strong>et</strong>te résolution devant les militants parisiens le 2 novembre, alors que<br />
Kádár se trouvait déjà à Moscou. Et elle l’a publiée le lendemain, après que<br />
Kádár ait été présenté devant la présidence soviétique comme le chef du nouveau<br />
gouvernement hongrois. 87 <strong>Le</strong> bureau politique <strong>français</strong> se rattrapa néanmoins<br />
après l’intervention soviétique. Il exprima son soulagement que le peuple<br />
hongrois eut barré la route à la réaction que « le traître Imre Nagy » avait<br />
installée au gouvernement <strong>et</strong> qu’il eut formé un « gouvernement prolétaire » -<br />
dirigé par János Kádár - ayant fait appel à l’armée soviétique pour rétablir l’ordre<br />
dans le pays. 88<br />
L’ensemble de la direction du parti souscrivit à c<strong>et</strong>te interprétation des<br />
événements. Personne ne prit la défense de Pierre Courtade à la réunion du<br />
85 Antonio Elorza: « <strong>Le</strong>s télégrammes de Togliatti au CC du PCUS ». Communisme, N° 88/89,<br />
2006/2007. pp. 205-211.<br />
86 La situation internationale. <strong>Le</strong>s événements de Pologne <strong>et</strong> de Hongrie. Allocution <strong>et</strong> rapport du<br />
Comité central du PCF devant 5000 militants parisiens le 2 novembre <strong>1956</strong>. Paris, Impr. Bd.<br />
Poissonnière, <strong>1956</strong>.<br />
87 Roger Gough : A Good Comrade: Kadar, Communism and Hungary. London, I. B. Tauris & Co.<br />
Ltd, 2006.<br />
88 L’Humanité, 5 novembre <strong>1956</strong>.