Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
le plus emblématique au sein de la direction du PCF, qu’est Pierre Courtade.<br />
Mais il y a des gens aussi dans la périphérie, notamment quelques intellectuels,<br />
qui prennent la parole pour dire « il y a d’autres possibilités précisément». Bernard<br />
Pudal a présenté un modèle explicatif postulant l’inéluctabilité de la culture<br />
<strong>communiste</strong> stalinienne qui ne pouvait aboutir qu’à c<strong>et</strong>te décision du PCF.<br />
Il a raison par définition, puisque tel a été le choix. Mais en même temps, c’est<br />
vrai qu’il y a des discordances, des divergences, je n’irai évidemment pas<br />
jusqu’à employer le mot de dissidence.<br />
Cela nous amène évidemment à soulever la question des intellectuels.<br />
L’année <strong>1956</strong> est communément considérée comme le grand moment de<br />
l’exode des intellectuels <strong>communiste</strong>s <strong>français</strong>, <strong>et</strong> on peut citer à l’appui les<br />
noms fameux de François Fur<strong>et</strong>, Annie Kriegel, Emmanuel <strong>Le</strong>roy Ladurie, <strong>et</strong>c.<br />
Sarolta Klenja’nsky, qui interviendra c<strong>et</strong> après-midi, nuance ce point de vue<br />
dans la thèse qu’elle effectue sous ma direction. Jeannine Verdès-<strong>Le</strong>roux l’avait<br />
fait aussi. De fait, l’ensemble des intellectuels du parti est loin de quitter l’organisation,<br />
en particulier dans ce monde que nous connaissons encore très mal<br />
malgré les travaux de Jacques Girault <strong>et</strong> d’autres, le milieu des enseignants <strong>et</strong><br />
des instituteurs. Si on opère la terrible opposition entre « haute intelligentsia »<br />
<strong>et</strong> « moyenne <strong>et</strong> p<strong>et</strong>ite intelligentsia » - je précise tout de suite que je m’en<br />
démarque, mais c’est pour me faire comprendre - on obtient un tableau beaucoup<br />
plus nuancé. Et ce que montre très bien Sarolta, elle le dira elle-même mais<br />
je me perm<strong>et</strong>s de le dire à sa place, conforte le point de vue de Bernard Pudal.<br />
L’attitude de la direction est à la fois faite de ferm<strong>et</strong>é, il y a un certain nombre<br />
de gens exclus, comme Jacques-Francis Rolland, par exemple, mais en même<br />
temps d’une grande prudence, parce qu’elle comprend qu’il existe désormais<br />
une sorte de groupe organisé dont il faut tenir compte.<br />
Troisième élément dans ce système d’action <strong>communiste</strong>, les organisations<br />
de masse. Je crois qu’il reste des travaux à effectuer à ce suj<strong>et</strong>. Il y a un grand<br />
débat dans la CGT. Il faudra un jour essayer, grâce aux archives, de comprendre<br />
les faits à l’échelle de l’ensemble de la confédération. <strong>Le</strong> Mouvement de la paix<br />
est touché profondément, le Comité national des écrivains aussi. Axelle Brodiez<br />
montre également les eff<strong>et</strong>s de <strong>1956</strong> dans son livre récent sur le Secours populaire<br />
<strong>français</strong>. On constate que ces eff<strong>et</strong>s irradient en quelque sorte l’ensemble<br />
des organisations de masse. Mais ce qui me semble le plus frappant, en tout cas<br />
dans l’état actuel des connaissances, c’est la question des effectifs du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>.<br />
<strong>Le</strong> travail qu’avait effectué Philippe Buton à ce suj<strong>et</strong> n’est pas dépassé.<br />
Il nous montre qu’il y a un très faible fléchissement en 1957 <strong>et</strong> que - au regard<br />
du turn-over des adhérents - elle reste une des années qui connaissent les plus faibles<br />
pertes. La masse du parti reste fidèle, elle n’est pas touchée profondément,<br />
ce qui est confirmé par des enquêtes d’opinions réalisées aussi bien en Italie<br />
qu’en France. Il me semble que cela conforte la pertinence de la notion de contresociété<br />
forgée par Annie Kriegel, ici on discerne bien une contre-société <strong>communiste</strong><br />
qui se différencie de tout le reste des électeurs. Par exemple, lorsqu’on interroge<br />
sur les causes de l’insurrection hongroise, les sympathisants <strong>communiste</strong>s