03.07.2013 Views

Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

<strong>1956</strong> : QUE COMMÉMORE-T-ON ? PROBLÉMATIQUES ET ENJEUX HISTORIOGRAPHIQUES<br />

aux trois fameux « I » des sciences sociales : les idées, les intérêts <strong>et</strong> les institutions,<br />

peut s’avérer opératoire.<br />

Premier élément, les idées. Comme l’a dit Roger Martelli, la position de<br />

Thorez est fondée sur un ensemble d’éléments doctrinaux fondamentaux à<br />

l’époque. Il est vrai qu’aujourd’hui, nous avons tendance à relativiser c<strong>et</strong>te<br />

importance de la doctrine, mais elle est essentielle, comme cela a été relevé au<br />

suj<strong>et</strong> de la dictature du prolétariat. Ajoutons aussi la conviction, la croyance, qui<br />

fonde chez, disons les « thoréziens » pour aller vite, une perception, une représentation<br />

du monde qui ne perm<strong>et</strong> pas de procéder à une remise en cause d’ensemble,<br />

même si la direction du PCF reconnaît un certain nombre d’éléments<br />

critiques.<br />

Deuxième élément, la défense des intérêts. Il est très clair que la préoccupation<br />

manifestée en <strong>1956</strong>, c’est celle de sauver l’institution partisane, de défendre<br />

le parti, l’esprit de parti. Et de ce point de vue là, c’est tout à fait intéressant<br />

à observer, il est indispensable de préserver le parti de toute contamination<br />

externe <strong>et</strong> interne, de sauver la pur<strong>et</strong>é de l’organisation. Nous aurons peut-être<br />

l’occasion de revenir sur les eff<strong>et</strong>s qui en découleront pour l’ensemble du <strong>Parti</strong><br />

<strong>communiste</strong>, aussi je ne veux pas trop développer c<strong>et</strong> aspect ici. Mais, il y a<br />

aussi le souci de préserver les intérêts du groupe dirigeant. Je n’exclus pas complètement,<br />

même si ce n’est qu’une hypothèse, que, dans le groupe thorézien se<br />

soit manifestée une inquiétude quant à une éventuelle contestation - même si<br />

apparemment elle ne se manifeste pas <strong>et</strong> n’est pas non plus combattue explicitement<br />

- ou au moins quant à un risque de perturbation de l’emprise du groupe<br />

thorézien sur le PCF. Je signale que, au PCI, c’est le cas. Palmiro Togliatti va<br />

être confronté, en particulier au cours de l’été <strong>1956</strong> <strong>et</strong> surtout après la première<br />

intervention soviétique en Hongrie, à une réelle difficulté. On r<strong>et</strong>rouve c<strong>et</strong>te<br />

situation dans une moindre mesure dans le cas de la CGT <strong>français</strong>e, lorsque la<br />

CGIL (Confederazione generale italiana de lavoro) <strong>et</strong> le leader historique du<br />

syndicalisme italien, Giuseppe Di Vittorio, condamnent la première intervention<br />

soviétique. Et comment réagit alors Togliatti ? Il en appelle aux Soviétiques<br />

pour une intervention en Hongrie tout en exposant qu’il est contesté dans son<br />

parti. Cela ressort de documents qui ont été publiés dans la dernière livraison de<br />

la revue Communisme par notre collègue espagnol Antonio Elorza. « Di Vittorio,<br />

dit en substance Togliatti, est en train de me contester ». C'est dire qu’il y<br />

a un affrontement, en tout cas perçu ou utilisé par Togliatti. « Mon pouvoir risque<br />

d’être mis en cause », poursuit-il. Di Vittorio a toujours affirmé qu’il n’avait<br />

jamais tenté de prendre la direction du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> italien. Mais telle est<br />

la perception de Togliatti <strong>et</strong>, surtout, telle est la manipulation togliattienne pour<br />

préserver son pouvoir.<br />

Troisième élément, le système des institutions. A travers tout ce blocage<br />

que nous venons d’évoquer : résistance sur le 20 e congrès, sur les événements de<br />

Poznan, sur l’octobre hongrois, sur l’insurrection hongroise, on peut déceler<br />

selon moi la tentative - désespérée - de préserver ce que l’on a pu appeler le système<br />

<strong>communiste</strong> mondial. C’est-à-dire, même si on peut discuter ensuite de<br />

toutes ces notions, l’articulation URSS-démocraties populaires-<strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong><br />

<strong>français</strong>. Cela fait système mais, à l’époque, risque de se déliter. Et sur ce<br />

43

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!