Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
vernement en mai <strong>1956</strong>, en désaccord avec la politique algérienne de Guy Moll<strong>et</strong>.<br />
C<strong>et</strong>te prise de distance se fait jour dans une mouvance chrétienne relativement<br />
large, qui ne se satisfait pas des solutions mises en oeuvre en Algérie ; également<br />
dans une partie indécise de l'opinion de gauche, aux contours<br />
relativement flous, au début, mais qui recueille une audience de plus en plus<br />
importante ; c<strong>et</strong>te opinion est en opposition de plus en plus forte à la politique<br />
menée par Guy Moll<strong>et</strong> ; elle s'éloigne alors pour longtemps de la « gauche de<br />
gouvernement ».<br />
En d'autres termes, en se coupant, dans une logique de fuite en avant, de<br />
toute possibilité de négocier, en s'en rem<strong>et</strong>tant de plus en plus exclusivement au<br />
pouvoir des militaires dans la conduite de la guerre, les dirigeants socialistes se<br />
privent de toute possibilité d'action véritablement politique ; la solution politique<br />
ne peut désormais passer par la SFIO. Pour faire vite, on peut dire que, se<br />
coupant de toute possibilité d'action, la SFIO , en tant que parti de gouvernement<br />
cesse progressivement d'exister ; désormais, la voie est ouverte à d'autres<br />
forces ; comme on le sait, c'est au général de Gaulle que reviendra la tâche historique<br />
de trouver une solution à la question algérienne.<br />
La disparition de la SFIO comme parti de gouvernement s'accompagne de<br />
sa disparition en tant que force centrale à gauche ; le discrédit durable de Guy<br />
Moll<strong>et</strong> auprès de l'opinion de gauche, l'opposition qu'il rencontre, voire la haine<br />
qu'il suscite, contribuent à délégitimer profondément c<strong>et</strong>te gauche là ; elle cesse<br />
d'exister comme référence. C<strong>et</strong>te disparition contribue durablement à l'éclatement<br />
des forces de gauche. La gauche non <strong>communiste</strong> se recomposera plus<br />
tard, lentement, sur d'autres bases, en intégrant d'autres éléments idéologiques,<br />
d'autres forces issues pour une part de la lutte anti-coloniale. Il faudra attendre<br />
1972 - 16 ans - pour qu'un proj<strong>et</strong> de gouvernement de gauche émerge à nouveau,<br />
autour d'un parti socialiste rénové. De ce point de vue, <strong>l'année</strong> <strong>1956</strong> représente<br />
donc bien un tournant.<br />
L'année <strong>1956</strong> doit également être considérée du point de vue des rapports<br />
entre le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> <strong>et</strong> le <strong>Parti</strong> socialiste SFIO. Pour le PCF, <strong>l'année</strong> <strong>1956</strong><br />
est <strong>l'année</strong> de la réintégration dans le jeu politique national. Une réintégration que<br />
le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> <strong>français</strong> veut décisive après les années 1948-1953 qui ont<br />
été celles de la guerre froide, de la culmination de la guerre froide, <strong>et</strong> de l'alignement<br />
sur l'Union soviétique ; années où le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> s'est enfermé dans<br />
une position d'isolement total ; années d'une indécision stratégique très grande,<br />
due en partie, en partie seulement, aux flottements au somm<strong>et</strong> de l'appareil.<br />
Il s'agit donc de rompre avec c<strong>et</strong> isolement, le soutien au gouvernement<br />
de Front républicain dirigé par Guy Moll<strong>et</strong> est, pour les dirigeants du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>,<br />
la seule issue à c<strong>et</strong>te situation. <strong>Le</strong>s divergences éventuelles sur la<br />
conduite de la guerre en Algérie sont considérées comme secondaires ; aussi<br />
bien les souvenirs d'Etienne Fajon que les rapports des Renseignements généraux<br />
sur les réunions publiques animées par les dirigeants du PCF ne laissent<br />
aucun doute à ce suj<strong>et</strong> : le vote des pouvoirs spéciaux est justifié par la néces-