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Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />

lectuels <strong>et</strong> progressistes <strong>et</strong> contribuera, à terme, à une perte sensible de son<br />

influence au sein de ces milieux. Or toutes les questions sont liées <strong>et</strong> la<br />

condamnation de la lutte pour la contraception rejoint l’incapacité plus générale<br />

du PCF à prendre en compte les grands changements de l’époque, comme<br />

le dit aussi très justement Sylvie Chaperon : « Au demeurant, le raisonnement<br />

qui consiste à faire diversion en s’opposant à la libéralisation de la contraception…<br />

montre à quel point les dirigeants [du PCF] restent ignorants des changements<br />

sociaux du pays. Refuser la remise en question de Staline, partir en<br />

guerre contre la contraception, <strong>et</strong> traiter de fascistes les émeutiers hongrois,<br />

c’est tout un <strong>et</strong> à chaque fois c’est le résultat d’une crispation sur des schémas<br />

idéologiques obsolètes ».<br />

Je ferai quelques remarques pour conclure. Tous ces départs illustrent le<br />

trouble profond ressenti par de nombreux intellectuels <strong>communiste</strong>s tout au<br />

long de ces douze mois de <strong>1956</strong> puis dans les années qui suivent. Ces départs<br />

différent sensiblement de ceux qui les ont précédés. Ils s’opèrent pour l’essentiel,<br />

on l’a vu, dans le milieu des intellectuels. L’examen du parti le montre :<br />

<strong>1956</strong> n’a pas eu de conséquences dans d’autres secteurs : ni les militants de<br />

« l’appareil », ni ceux qui sont en charge des nombreuses municipalités alors<br />

dirigées par le PCF, ni les syndicalistes de la CGT <strong>et</strong> moins encore les adhérents<br />

du « parti profond » ne font alors défection. <strong>Le</strong> 20 e congrès ne suscite<br />

guère de débat dans la CGT qui fait pourtant partie de « l’écosystème » <strong>communiste</strong><br />

; en revanche l’intervention en Hongrie pose problème à un certain<br />

nombre de militants <strong>et</strong> suscite des débats que Benoît Frachon sait circonscrire,<br />

en laissant chaque organisation syndicale prendre la position qui lui convient.<br />

Il est d’ailleurs frappant de voir combien <strong>1956</strong> est une date majeure dans l’histoire<br />

du PCF mais ne l’est pas dans celle de la CGT ; ce qui montre que tout<br />

en étant liées, les deux organisations ont aussi leur spécificité <strong>et</strong> que voir uniquement<br />

la centrale syndicale dans son rapport au PCF est complètement<br />

réducteur. <strong>Le</strong>s limites de la dissidence de <strong>1956</strong> sont n<strong>et</strong>tes : réduite sur le plan<br />

numérique, elle reste pour l’essentiel dans le cadre du groupe sociologique des<br />

intellectuels.<br />

Pourtant, par l’importance des questions qu’elles soulèvent tant sur le plan<br />

politique qu’en ce qui concerne l’absence de démocratie au sein du PCF, ces<br />

dissidences montrent bien que <strong>1956</strong> inaugure une période nouvelle de l’histoire<br />

du PCF : plus que jamais, la question du stalinisme continue de se poser mais<br />

les blocages devant c<strong>et</strong>te discussion sont nombreux. Dès lors, l’immobilisme,<br />

l’absence totale de démocratie qui y règne entraîneront, en réaction, la formation,<br />

d’autres oppositions qui rencontreront parfois, selon des processus complexes,<br />

certains groupements constitués à partir de <strong>1956</strong>. On le verra avec Tribune<br />

<strong>communiste</strong> <strong>et</strong> la Voie <strong>communiste</strong> à partir de 1958 puis la crise de l’Union<br />

des étudiants <strong>communiste</strong>s de 1962 à 1965. <strong>Le</strong> rapport du PCF aux intellectuels,<br />

puis à d’autres couches plus larges de la société, ne sera jamais plus comme<br />

avant. De ce point de vue, <strong>1956</strong> constitue bien un tournant fondamental dans<br />

l’histoire générale du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> <strong>français</strong>.

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