Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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L’ANNÉE <strong>1956</strong> : UNE BORNE DE PÉRIODISATION OPÉRATIONNELLE POUR LA RECHERCHE ?<br />
pouvoirs spéciaux demandés par Guy Moll<strong>et</strong> mais dès octobre, il commence à<br />
prendre de la distance à son égard. Et surtout, le PC doit affronter le choc des révélations<br />
du 20 e congrès <strong>et</strong> du « rapport attribué à Khrouchtchev », dont la publication,<br />
qui commence le 6 juin <strong>1956</strong> dans <strong>Le</strong> Monde, a un r<strong>et</strong>entissement énorme.<br />
Comme on le sait, le PCF <strong>et</strong> d’abord Maurice Thorez, son secrétaire général,<br />
font tout pour en limiter les eff<strong>et</strong>s : c<strong>et</strong>te stratégie est immédiatement défendue<br />
lors d’un comité central tenu le 22 mars <strong>1956</strong>, en l’absence d’ailleurs de<br />
Maurice Thorez. <strong>Le</strong> rapport introductif présenté par Jacques Duclos reste mu<strong>et</strong><br />
sur la question du « rapport secr<strong>et</strong> » <strong>et</strong> tente d’élucider les questions qu’il pose.<br />
Pourtant, première nouveauté, plusieurs intervenants parmi lesquels Jean Pronteau,<br />
Maurice Kriegel-Valrimont, André Pierrard, Florimond Bonte, Benoît Frachon<br />
<strong>et</strong> Waldeck Roch<strong>et</strong> s’expriment. Seconde nouveauté, la résolution finalement<br />
adoptée diffère de celle proposée par la direction, ce qui est contraire à<br />
tous les usages en cours dans l’histoire du PCF. C’est la première fois que,<br />
depuis des décennies, il y a eu à ce niveau une réelle discussion au-delà du cadre<br />
imposé par le bureau politique : l’événement n’est pas mince. Puis, la tactique<br />
de blocage suivie par Maurice Thorez est entérinée lors du 14 e congrès du PCF<br />
tenu au Havre en juill<strong>et</strong> <strong>1956</strong> : c<strong>et</strong>te tactique semble donc d’abord payante.<br />
Pourtant, ce raidissement va s’avérer rapidement désastreux : il est en<br />
eff<strong>et</strong> heurté de plein fou<strong>et</strong> par les événements de Pologne <strong>et</strong> de Hongrie qui surviennent<br />
trois mois seulement après le congrès du Havre. Je ne reviens pas sur<br />
c<strong>et</strong>te chronologie bien connue. Mais je souligne le fait que ce raidissement, qui<br />
aurait peut-être pu contenir efficacement les eff<strong>et</strong>s du rapport Khrouchtchev,<br />
s’avère complètement incapable d’apporter une réponse aux réactions <strong>et</strong> aux<br />
interrogations nombreuses suscitées par les événements de Pologne <strong>et</strong> de Hongrie<br />
; ce qui se passe dans ce dernier pays est qualifié de « contre-révolution fasciste<br />
» par Maurice Thorez. Par ailleurs, est réaffirmé lors d’un comité central<br />
tenu à Ivry le 21 novembre <strong>1956</strong>, la nécessité de la dictature du prolétariat dont<br />
le modèle « a été <strong>et</strong> reste fourni par le pays de la Révolution d’Octobre ».<br />
Aucune mention n’est faite alors des crimes de Staline ni du rapport Khrouchtchev<br />
qui les dénonce.<br />
Devant ce blocage, les réactions se multiplient chez les intellectuels <strong>et</strong><br />
vont susciter plusieurs dissidences. A la veille du comité central tenu en novembre,<br />
de nombreux intellectuels en vue du PCF protestent dans une l<strong>et</strong>tre contre<br />
l’intervention soviétique <strong>et</strong> plus généralement la politique d’ensemble du PCF.<br />
Remise au comité central par Hélène Parmelin, c<strong>et</strong>te l<strong>et</strong>tre, signée notamment<br />
par Georges Besson, Marcel Cornu, Francis Jourdain, Picasso, Edouard Pignon,<br />
Paul Tillard, Henri Wallon <strong>et</strong> René Zazzo, critique « la pauvr<strong>et</strong>é invraisemblable<br />
d’informations…, les ambiguïtés plus ou moins voulues » inspirées par la<br />
direction du PCF <strong>et</strong> réclame la convocation d’un congrès extraordinaire pour<br />
débattre des « problèmes innombrables posés aux <strong>communiste</strong>s ». Une telle initiative<br />
est aussitôt dénoncée comme « fractionnelle » <strong>et</strong> aucun congrès n’est<br />
organisé ; cependant, dans un premier temps, la direction du PCF n’exclue pas<br />
les signataires qu’elle cherche plutôt à récupérer. Toutefois, il faut remonter à<br />
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