Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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L’ANNÉE <strong>1956</strong> VÉCUE PAR DES MILITANTS COMMUNISTES<br />
Marc GIOVANINETTI<br />
J’adresserai ma première question à Monsieur Coubard. Je sais que, au<br />
début de 1957, une délégation du comité central du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> <strong>français</strong><br />
va rencontrer une délégation du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> polonais. Parmi les motifs de<br />
c<strong>et</strong>te rencontre, les reproches qu’adressent les Français aux Polonais pour avoir<br />
laissé passer dans la presse <strong>et</strong> dans certaines maisons d’édition polonaises des<br />
articles ou des livres défavorables au PCF. Notamment un ouvrage de Pierre<br />
Hervé, qui avait été exclu du PCF au début de l’année <strong>1956</strong>, <strong>et</strong> quelques écrits<br />
d’Auguste <strong>Le</strong>cœur, exclu également deux ans auparavant. Vous <strong>et</strong> vos confrères<br />
polonais aviez-vous vent de ces accusations ? Régnait-il réellement une certaine<br />
liberté de publication dans la presse polonaise ?<br />
Je poserai immédiatement une deuxième question destinée à Monsieur<br />
Cordillot. Vous m’aviez dit, il y a quelque temps, que vous aviez accompagné<br />
Raymond Guyot à la réception de l’ambassade d’Union soviétique, le 7 novembre,<br />
pour l’anniversaire de la révolution soviétique, soit deux jours après l’intervention<br />
en Hongrie. J’aimerais savoir quelle était l’ambiance <strong>et</strong> si on se glorifiait<br />
de l’intervention contre les « fascistes hongrois », puisque telle était la<br />
version officielle. Plusieurs autres membres du bureau politique du PCF étaient<br />
présents, eux-mêmes étaient-ils réjouis ?<br />
Jacques COUBARD<br />
Oui, je confirme qu’une liberté nouvelle de la presse polonaise régnait<br />
alors. Dans ce contexte, des journalistes font référence à des textes qui paraissent<br />
en France ou en Italie après le 20 e congrès du PCUS, ils peuvent dénoncer<br />
librement des scandales touchant le pouvoir politique ou des institutions, <strong>et</strong>c.<br />
C'est ce que les membres du <strong>Parti</strong> ouvrier polonais ont appelé à l’époque « la<br />
révolution d’octobre polonaise », vous mesurez la force de c<strong>et</strong>te référence. On<br />
pouvait effectivement constater toute une effervescence de ce point de vue là.<br />
Il est exact que des désaccords se sont exprimés entre le parti <strong>français</strong> <strong>et</strong><br />
le parti polonais. C’est la raison de l’invitation d’une délégation <strong>français</strong>e par<br />
Gomulka, en 1957 me semble-t-il. Dirigée par Raymond Guyot, c<strong>et</strong>te délégation<br />
comprend quatre membres qui effectuent une visite en avion à travers la<br />
Pologne <strong>et</strong> rencontrent la direction du parti polonais. Il y avait Raymond Guyot,<br />
Gustave Ansart <strong>et</strong> deux autres dont j’ai oublié les noms, bien que j’ai accompagné<br />
c<strong>et</strong>te délégation <strong>et</strong> que j’ai assisté aux discussions. <strong>Le</strong> programme était tout<br />
à fait ancré dans la réalité, je dirais de terrain, c'est-à-dire que les discussions<br />
n’avaient pas lieu seulement avec les dirigeants locaux du <strong>Parti</strong> ouvrier, mais<br />
directement avec les gens : des mineurs, ici, ou des métallurgistes, là, <strong>et</strong>c. Tous<br />
soutenaient les réformes de Gomulka <strong>et</strong> quand ils nous montraient comment les<br />
choses se passaient dans leurs entreprises, nous constations que c’était absolument<br />
différent de tout ce que nous avions pu penser. Ce genre de choses n’était<br />
jamais apparues auparavant parce que, habituellement, quand les délégations -<br />
<strong>et</strong> j’en ai accompagnées - traversaient une usine, elles ne pouvaient certainement<br />
pas apprendre grand chose sur ce qui s’y passait réellement. Raymond<br />
Guyot <strong>et</strong> les autres camarades de la délégation ne m’ont pas paru bouleversés<br />
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