Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PCF FACE À <strong>1956</strong> : RUPTURE OU CONTINUITÉ ?<br />
Jacques GIRAULT<br />
Au suj<strong>et</strong> de c<strong>et</strong>te question du partage des tâches, je donne la parole à<br />
Alban Liechti avant de proposer à Axelle Brodiez de réagir.<br />
Alban LIECHTI<br />
Marcel Zaidner vient effectivement d'aborder une question que je souhaitais<br />
soulever. <strong>Le</strong> rôle du Secours populaire a été extrêmement important. Mais<br />
il ne faut pas oublier qu’il s’agissait d’une organisation de masse dépendant au<br />
départ du PCF. Celui-ci avait en quelque sorte délégué la défense politique au<br />
Secours populaire à ce moment-là ; ce que je n'avais pas très bien compris d'ailleurs<br />
à l'époque. L'avocat du Secours populaire qui est venu me défendre s'appelait<br />
Marcel Amblard. Il n’était pas membre du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>, mais faisait<br />
partie du groupe des avocats qui travaillaient sur l'Algérie. La première fois qu'il<br />
m'a défendu, j’attendais qu'il me défende sur le fond politique, puisque je refusais<br />
de combattre un peuple qui luttait pour son indépendance. Mais il a plaidé<br />
en faisant beaucoup plus appel à l’émotion, soulignant par exemple que j'étais<br />
l'aîné d'une famille nombreuse de neuf enfants, <strong>et</strong>c. Il s’est plus situé dans le<br />
registre social que politique, <strong>et</strong> cela m'a vraiment choqué parce que moi je pensais<br />
qu’il prendrait des positions beaucoup plus politiques. Mais le Secours<br />
populaire était un peu gêné parce que le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> l’avait en quelque<br />
sorte obligé à prendre des positions politiques que lui, le parti, ne voulait pas<br />
prendre. Il faut quand même préciser que le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> essayait de continuer<br />
à agir <strong>et</strong> à s’exprimer alors que planait la menace de son interdiction <strong>et</strong> de<br />
celle de l’Humanité. L’Humanité a été le journal le plus saisi pendant toute la<br />
guerre d'Algérie, particulièrement durant c<strong>et</strong>te année <strong>1956</strong>. Face à ce danger, le<br />
<strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> estimait qu'il fallait pouvoir continuer d’exister justement<br />
pour continuer à lutter contre la guerre d'Algérie. Il convient donc d’être nuancé<br />
dans son appréciation de ces réalités. Moi-même je ne l'ai pas très bien compris<br />
à l'époque. D’ailleurs, la deuxième fois que je suis repassé devant le tribunal<br />
militaire, en 1958, j'ai été défendu sur un mode très politique par ce même avocat<br />
<strong>et</strong> par le bâtonnier Thorp, qui n'était pas non plus membre du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>.<br />
De ce point de vue, la situation avait considérablement changé entre <strong>1956</strong><br />
<strong>et</strong> 1958.<br />
Axelle BRODIEZ<br />
<strong>Le</strong> partage des tâches est évident jusqu'en 1954. Il apparaît clairement à la<br />
lecture parallèle des directives du PCF <strong>et</strong> des initiatives du Secours populaire<br />
qui répondent toujours à ces directives : la direction du PCF décide de « dire au<br />
Secours populaire de faire ceci, dire au Secours populaire de faire cela… » <strong>et</strong><br />
le Secours populaire le fait. <strong>Le</strong> fait nouveau, à partir de là, c'est que le Secours<br />
populaire fait quelque chose alors qu'on ne lui a pas demandé de le faire. Julien<br />
Lauprêtre m’a indiqué qu’en plusieurs circonstances, pour animer l’aide aux<br />
sinistrés, le PCF avait eu la velléité de constituer un comité ad hoc, comme il<br />
l’avait toujours fait. <strong>Le</strong> Secours populaire avait rétorqué qu’il ambitionnait<br />
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