Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
rapport Khrouchtchev, en fonction de mon expérience de la situation <strong>français</strong>e.<br />
Ce qui m'avait frappé au suj<strong>et</strong> de l'intervention en Hongrie, ce n'est pas ce qui<br />
s'était passé en Hongrie, mais ce qui se passait en France. J’ai vu ce qu'on appelait<br />
à l'époque « les hordes fascistes » - <strong>et</strong> cela y ressemblait quand même beaucoup<br />
- accompagnées de dirigeants socialistes, car les manifestations qui ont<br />
conduit à incendier le siège du comité central <strong>et</strong> à attaquer l’Humanité étaient<br />
encouragées par la présence de certains d'entre eux. Cela a représenté quelque<br />
chose de très fort pour le jeune militant que j’étais, <strong>et</strong> a dissipé toute interrogation.<br />
Je dis cela pour expliquer les choses, pas pour les justifier mais pour les<br />
resituer dans l’atmosphère de l'époque.<br />
De la même façon, je n'ai pas du tout été sensible, à l'époque, au deuxième<br />
rapport de Khrouchtchev. J'en suis resté pendant de nombreuses années à la première<br />
partie du congrès du PCUS <strong>et</strong> n’ai pas été du tout frappé par les discussions<br />
dans le parti qui me passaient par dessus la tête. J’avais 26 ans à l’époque, je n'étais<br />
pas un dirigeant <strong>et</strong> je n'étais pas intéressé par cela. J'ai lu le rapport de Khrouchtchev<br />
plus tard, après avoir été élu au comité central du PCF, <strong>et</strong> cela a eu sur moi<br />
un eff<strong>et</strong>, mais c'était en 1965. Tout cela pour dire que si on veut comprendre les<br />
choses, il faut prendre en compte - en dehors des archives <strong>et</strong> des textes - le fait que<br />
les militants de l'époque - qui n'étaient pas des dirigeants - étaient immergés dans<br />
un contexte marqué par les dernières étapes de la guerre froide, même si les choses<br />
commençaient à bouger, <strong>et</strong> le souvenir encore récent de la guerre.<br />
La deuxième question que je souhaitais aborder a trait à la guerre d'Algérie.<br />
J’ai travaillé avec Hélène Cuénat <strong>et</strong> d’autres sur c<strong>et</strong>te question. Nous ne<br />
sommes pas toujours d'accord entre nous, mais ce n'est pas grave. Je crois que<br />
cela a représenté un travail intéressant. Au suj<strong>et</strong> de la guerre d’Algérie, donc, il<br />
me semble qu'on ne peut pas vraiment comprendre ce qui s’est passé si on fractionne<br />
la réalité. La communication sur le Secours populaire m’a beaucoup intéressé<br />
mais amène une remarque de ma part. Je crois qu'il y a effectivement un<br />
rôle autonome du Secours populaire, qui va s’accentuer sous la direction de<br />
Lauprêtre. Mais on ne peut pas le considérer pour autant indépendamment des<br />
décisions du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>. Ma conviction est que le Secours populaire agit<br />
dans le cadre d’un partage de tâches <strong>et</strong> de responsabilités avec le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong>.<br />
<strong>Le</strong> <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> veillant, lui, à ce que son activité - notamment dans<br />
ses rapports au Front de libération nationale (FLN) <strong>et</strong> à d’autres - ne puisse<br />
entraîner la remise en cause de sa sécurité <strong>et</strong> de sa capacité à continuer de lutter.<br />
On peut discuter de la question, mais le <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> prend les mesures<br />
aptes à lui perm<strong>et</strong>tre de poursuivre les luttes, dont celles pour la paix en<br />
Algérie. Un partage des rôles aura donc lieu, en particulier avec le Secours<br />
populaire. Celui-ci jouera un rôle important, qu’il est justifié, de mon point de<br />
vue, de m<strong>et</strong>tre à l'actif non seulement des militants <strong>communiste</strong>s qui y sont<br />
investis, mais également du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> lui-même. D'ailleurs, certaines<br />
orientations ou initiatives relèvent de décisions politiques, même si on n’en<br />
trouvera pas de trace écrite. Julien Lauprêtre, lui-même, vient directement du<br />
<strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> où il était secrétaire de Raymond Guyot. Ce dernier s'occupait<br />
justement beaucoup des questions touchant à l'armée, à l’activité contre la<br />
guerre, <strong>et</strong>c. Je crois qu’on peut lire une certaine filiation.