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Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />

principaux canaux de diffusion de la « mémoire historique », entendue comme<br />

la production d’une historiographie partisane 233 . Celle-ci a toujours fait l’obj<strong>et</strong><br />

d’un contrôle strict de la part des dirigeants, compte tenu de ses enjeux politiques<br />

<strong>et</strong> stratégiques. En eff<strong>et</strong>, comme le souligne si justement Bernard Pudal, «<br />

le travail d’affiliation historique, d’interprétation <strong>et</strong> de réinterprétation des<br />

récits généalogiques partisans constitue un aspect essentiel <strong>et</strong> classique de l’homogénéisation<br />

partisane » 234 .<br />

En procédant par coups de sonde, nous analyserons donc les évolutions<br />

des interprétations historiographiques véhiculées sur le 20 e congrès du PCUS au<br />

sein du PCF. Nous nous focaliserons notamment sur les changements intervenus<br />

entre les analyses consignées dans le manuel d’histoire du PCF de 1964 <strong>et</strong><br />

celles publiées dans divers ouvrages d’historiens <strong>communiste</strong>s à partir de la fin<br />

des années 1970. C<strong>et</strong>te étude de cas très limitée s’intègre dans une réflexion<br />

plus générale sur les eff<strong>et</strong>s de « la déstalinisation » (expression contestée <strong>et</strong><br />

contestable mais qui perm<strong>et</strong> de désigner un ensemble d’évolutions, tant stratégiques<br />

qu’idéologiques, entamées à partir de la fin des années 1950) sur les productions<br />

des historiens <strong>communiste</strong>s <strong>et</strong>, plus largement, sur les conditions de la<br />

production théorique au sein du PCF.<br />

En eff<strong>et</strong>, à partir de l’année <strong>1956</strong>, l’édifice théorique bâti durant les années<br />

de guerre froide se lézarde rapidement. La théorie des deux sciences (science<br />

bourgeoise versus science prolétarienne) n’a bientôt plus droit de cité au sein du<br />

PCF tant elle est associée au stalinisme. <strong>1956</strong> ouvre ainsi une véritable « crise<br />

dans la théorie », point de départ d’un long <strong>et</strong> complexe processus de rénovation<br />

stratégique <strong>et</strong> doctrinale. En cela, la période ouverte par les événements de<br />

<strong>1956</strong> constitue un terrain d’analyse privilégié pour étudier « ce que les crises<br />

font aux théories, c’est-à-dire ce qu’elles rendent pensable <strong>et</strong> inversement ce<br />

qu’elles déclassent, <strong>et</strong> ce qu’elles font aux mouvements théoriques, c’est-à-dire<br />

qui elles déclassent <strong>et</strong> qui elles promeuvent » 235 . A partir d’une analyse des évolutions<br />

de ce qui est pensable <strong>et</strong> dicible sur le 20 e congrès du PCUS, en lien avec<br />

les évolutions stratégiques du PCF, l’hypothèse esquissée ici consiste à réfléchir<br />

aux conditions politiques qui ont rendu possible dans les années 1970 une nouvelle<br />

façon d’appréhender l’histoire du communisme, portée par de jeunes historiens<br />

<strong>communiste</strong>s, soucieux de rompre avec une vision hagiographique <strong>et</strong><br />

apologétique du passé partisan.<br />

<strong>1956</strong>-1964 … où il est question de « surmonter le culte de la personnalité »<br />

A partir de la fin des années 1950, les critiques du stalinisme, qui se développent<br />

y compris dans les rangs <strong>communiste</strong>s, impliquent de modifier sensi-<br />

233 Marie-Claire Lavabre, <strong>Le</strong> fil rouge. Sociologie de la mémoire <strong>communiste</strong>, PFNSP, 1994.<br />

234 Bernard Pudal, « <strong>Le</strong>s identités “totales”: quelques remarques à propos du FN », dans Jacques<br />

Chevalier (dir.), L’identité politique, PUF, 1989, p. 200.<br />

235 Frédérique Matonti <strong>et</strong> Daniel Mouchard, « Théories en crise », Introduction du dossier de Raisons<br />

politiques, n°18, mai 2005, p. 5.

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