Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
peut-être aussi y voir l’eff<strong>et</strong> des vicissitudes de la vie de la Revue progressiste<br />
de droit <strong>français</strong> dont il était le directeur, dont le dernier numéro date de 1955<br />
<strong>et</strong> qui a sans doute été empêchée de poursuivre pour cause de débats entre juristes<br />
<strong>communiste</strong>s sur la guerre d’Algérie.<br />
Quant à ses camarades <strong>et</strong> confrères, ils gardèrent le silence tout en se satisfaisant<br />
sans doute des révélations du 20 e congrès. On trouve malgré tout la trace<br />
dans les archives de Paul Vienney d’une polémique interne entre les avocats<br />
<strong>communiste</strong>s. Ces derniers protestèrent, semble-t-il, à la suite de l’exclusion de<br />
Lyon-Caen <strong>et</strong> votèrent le 19 décembre une motion sur le fonctionnement du<br />
PCF. Certains d’entre eux se désolidarisèrent ensuite de ce texte <strong>et</strong> le critiquèrent<br />
dans France-Nouvelle 208 . Pour comprendre c<strong>et</strong>te attitude de r<strong>et</strong>enue, il faut<br />
avoir à l’esprit que dans les mois <strong>et</strong> les années qui suivirent le militantisme des<br />
avocats s’intensifia en Algérie <strong>et</strong> en France avec la recrudescence des affaires<br />
comme l’atteste la flambée des poursuites contre la presse <strong>communiste</strong> 209 .<br />
C<strong>et</strong>te hypothèse d’un accord profond mais d’abord silencieux avec l’esprit<br />
du 20 e congrès est confirmée par leur réaction aux conséquences judiciaires<br />
de l’intervention en Hongrie, au procès <strong>et</strong> à l’exécution de Nagy comme si,<br />
jusqu’à c<strong>et</strong>te date, les premières décisions de réhabilitation judiciaire en URSS<br />
<strong>et</strong> les rapports publics se suffisaient à eux-mêmes.<br />
Dès janvier 1957 210 , le secrétariat de l’AIJD dans lequel Nordmann jouait<br />
un rôle essentiel affirmait qu’il lui était impossible de soutenir le droit de l’URSS<br />
<strong>et</strong> du Pacte de Varsovie à intervenir dans un Etat souverain. En novembre 1957,<br />
Nordmann lors du conseil de l’AIJD déclara « à titre personnel, ne pouvoir souscrire<br />
à une affirmation contenue dans le rapport, relative “au droit incontestable”<br />
qu’aurait tout Etat “d’appliquer des mesures d’internement administratif<br />
contre des individus antisociaux dans l’intérêt de la protection de l’ordre constitutionnel<br />
<strong>et</strong> de la sécurité publique” » 211 . Il s’agit à ma connaissance de la seule<br />
déclaration publique de contestation de Joë Nordmann, elle en est ainsi très<br />
démonstrative du malaise des juristes <strong>communiste</strong>s <strong>français</strong>. Ce malaise atteignit<br />
son apogée mais resta totalement interne quand la cellule du palais de justice prit<br />
majoritairement position contre l’exécution de Nagy provoquant quelques<br />
remous dans la section « Intellectuels » du PCF 212 . Il semble qu’aucune sanction<br />
ne fut prise puis les choses rentrèrent progressivement dans l’ordre.<br />
Conclusion<br />
Ainsi les réactions des juristes <strong>communiste</strong>s demeurèrent circonscrites <strong>et</strong><br />
internes - à l’exception du cas d’un professeur de droit - comme si dans ce qui<br />
208 France-Nouvelle, n°576 du 27 décembre <strong>1956</strong>.<br />
209 Genevée Fédérick, La répression, poursuites <strong>et</strong> saisies de l’Humanité 1949-1962, pp. 265-281 in<br />
l’Humanité de Jaurès à nos jours, C. Delporte, C. Penn<strong>et</strong>ier, JF. Sirinelli, S. Wolikow (dir.), 419<br />
p. Notamment à partir des archives de Paul Vienney déposées au musée de l’Histoire vivante à<br />
Montreuil <strong>et</strong> des archives de l’Humanité déposées aux Archives départementales de la Seine-<br />
Saint-Denis.<br />
210 Bull<strong>et</strong>in de l’AIJD, n°29, janvier 1957.<br />
211 Idem n° 32, décembre 1957.<br />
212 Archives Paul Vienney.