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Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri

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LE PCF FACE À <strong>1956</strong> : RUPTURE OU CONTINUITÉ ?<br />

Pour ce qui est de la littérature romanesque, la situation est radicalement<br />

différente. A partir de 1949, Louis Aragon obtient la direction les Editeurs <strong>français</strong><br />

réunis. Mais s’il est effectivement soutenu par la direction, c’est un soutien<br />

relatif. En eff<strong>et</strong>, il a à ses côtés deux hommes dont les fonctions réduisent sa<br />

liberté d’éditeur. D’une part, il est secondé par Raymond Hallery, directeur<br />

effectif des EFR, qui contrôle la bonne marche de la maison sur le plan matériel.<br />

D’autre part, il est forcé d’agir avec Jean Jérôme, qui n’a aucune fonction<br />

officielle mais qui intervient sur le plan financier <strong>et</strong> donc politique, puisque son<br />

avis pèse sur les moyens alloués à la maison d’édition. Enfin, Louis Aragon est<br />

coiffé comme les autres maisons d’édition par François Billoux, chargé de suivre<br />

les affaires d’édition au sein du secrétariat du PCF. Au travers de sa direction<br />

des EFR, on mesure à nouveau le pouvoir relatif d’Aragon, grand romancier<br />

du parti, membre du comité central, <strong>et</strong> éditeur sans pouvoir réel.<br />

Car les EFR sont la première <strong>et</strong> principale victime des conséquences de la<br />

guerre froide. Entre 1950 <strong>et</strong> <strong>1956</strong>, le tirage moyen baisse de 39 % <strong>et</strong> la production<br />

de 37 %. Sa situation est donc a priori moins grave que celle des Editions<br />

sociales. Alors pourquoi une telle fragilité politique ? Du point de vue qualitatif,<br />

c’est elle <strong>et</strong> non les Editions sociales qui s’est chargée de la littérature<br />

pamphlétaire, la plus éphémère par définition <strong>et</strong> celle qui marque le plus une<br />

maison d’édition auprès du public. Elle a ensuite défendu un genre esthétique,<br />

le réalisme socialiste, que la direction du <strong>Parti</strong> <strong>communiste</strong> soutient de moins en<br />

moins à partir de 1952-1953. C<strong>et</strong>te fragilité est accentuée par le fait que le PCF<br />

n’a jamais accordé fondamentalement la priorité politique à l’édition romanesque.<br />

L’insuffisance des ventes <strong>et</strong> la fin de mobilisation de la guerre froide rem<strong>et</strong>tent<br />

donc en cause l’existence même des EFR. A partir de 1952, l’éditeur Aragon<br />

ne va pas cesser de se battre pour sa maison d’édition <strong>et</strong> pour son droit à<br />

mener, lui aussi, une véritable politique éditoriale avec des moyens financiers.<br />

Or, c’est à un mur qu’il se heurte. En 1954, il commence à abandonner la<br />

partie. Il fait appel à un jeune militant, poète <strong>et</strong> professionnel de l’édition, François<br />

Monod, qui plein d’optimisme se lance dans l’élaboration d’une politique<br />

éditoriale du PCF. Il rencontre la même incompréhension 188 . La direction du<br />

PCF n’a plus besoin des EFR, puisque la crise de la guerre froide est passée…<br />

Or, en septembre <strong>1956</strong>, F. Monod alerte la direction du PCF sur un point qui<br />

rétrospectivement paraît essentiel. <strong>Le</strong>s EFR n’attirent pas les jeunes auteurs <strong>et</strong><br />

surtout se montrent incapables de r<strong>et</strong>enir les auteurs les plus prom<strong>et</strong>teurs : les<br />

jeunes romanciers <strong>communiste</strong>s quittent les EFR pour les éditeurs bourgeois 189 .<br />

La fuite ?<br />

Nous avons voulu vérifier la réalité de c<strong>et</strong>te menace. Il est vrai que le catalogue<br />

connaît un profond renouvellement. <strong>Le</strong>s maisons d’édition du PCF<br />

188 Pierre Daix. J’ai cru au matin. R. Laffont, 1976, pp. 348-349.<br />

189 François Monod. Note complémentaire sur les EFR, 11 septembre <strong>1956</strong>. Fonds Elsa Triol<strong>et</strong> Louis<br />

Aragon, CNRS.<br />

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