Le Parti communiste français et l'année 1956 - Fondation Gabriel Péri
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LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS ET L’ANNÉE <strong>1956</strong><br />
non contre lui. On le voit bien lors de la réunion du 23 février 1961 : Thorez dit<br />
qu’il envisage de se r<strong>et</strong>irer, <strong>et</strong> tous l’en dissuadent tour à tour en lui montrant à<br />
quel point les conséquences d’un tel acte pourraient être désastreuses.<br />
Thorez dirigeant après <strong>1956</strong><br />
<strong>Le</strong> culte<br />
<strong>1956</strong> marque une rupture n<strong>et</strong>te dans un domaine : celui du culte de la personnalité.<br />
Nous l’avons vu, ce problème a donné lieu à des décisions fermes de<br />
la part de Thorez, qui sont suivies d’eff<strong>et</strong>s. Cependant Thorez ne s’est pas vraiment<br />
livré à une « autocritique » : il ne se présente jamais comme étant une des<br />
causes du développement de ce phénomène, mais critique le comportement des<br />
autres, des membres du parti. Cela n’est pas très étonnant dans la mesure où,<br />
devant le CC les 9 <strong>et</strong> 10 mai, il avait prononcé la phrase suivante : « il est très<br />
vrai que le BP est un organisme collectif, <strong>et</strong> ceci malgré quelques difficultés qui<br />
ont tenu à la maladie du secrétaire général ». Il est indirectement responsable :<br />
c’est parce qu’il n’était pas là qu’il a pu y avoir des dérives, <strong>et</strong> sa présence est<br />
celle qui rem<strong>et</strong> tout le monde dans la droite ligne.<br />
<strong>Le</strong>s doutes du secrétaire général<br />
Nous l’avons évoqué, Thorez a pensé se r<strong>et</strong>irer en 1961 - du moins a-t-il<br />
dit qu’il pensait se r<strong>et</strong>irer. Que cela signifie-t-il : a-t-il besoin de se rassurer, en<br />
faisant croire à son départ pour mieux entendre les réactions affolées des autres<br />
membres ? Ou se pose-t-il réellement la question ? Ce n’est pas la première fois<br />
que l’on trouve ce suj<strong>et</strong> dans les archives de Thorez : dans son journal, à la date<br />
du 2 décembre 1958, il écrit : « je propose la réorganisation du secrétariat<br />
(auquel j’ai été nommé il y a juste 33 ans aujourd’hui) en me déchargeant des<br />
fonctions de secrétaire général » 176 . En 1959, on peut également lire ses interrogations<br />
dans un cahier de notes diverses. (« je resterai / comprenant bien les raisons<br />
indiquées / sur répercussions <strong>Parti</strong> <strong>et</strong> extérieur »). Mais ces réflexions<br />
sont-elles la conséquence des remises en cause de l’année <strong>1956</strong> ou simplement<br />
les questionnements d’un homme fatigué <strong>et</strong> sans doute usé par ses fonctions ?<br />
L’autorité de Thorez<br />
Depuis les années 1930, Thorez tire sa légitimité du fait qu’il assure un<br />
équilibre entre les liens étroits du PCF avec l’URSS <strong>et</strong> son ancrage bien réel<br />
dans la société <strong>français</strong>e. Comme l’écrit Stéphane Sirot, « l’année <strong>1956</strong>, avec le<br />
séisme créé dans le mouvement <strong>communiste</strong> avec la dénonciation des crimes de<br />
Staline, perturbe c<strong>et</strong> édifice. Mais, là encore, Thorez exerce une fonction unificatrice<br />
<strong>et</strong> parvient de la sorte à éviter momentanément, au PCF <strong>et</strong> à une génération<br />
dirigeante légitimée dans les années trente, une remise en cause de leurs<br />
pratiques. La cohésion peut perdurer autour du secrétaire général » 177 .<br />
Khrouchtchev, dans son rapport, insistait sur deux tâches auxquelles les partis<br />
<strong>communiste</strong>s devaient tout particulièrement s’attacher : développer la démocra-<br />
176 Archives Thorez, 626 AP 228.<br />
177 Stéphane Sirot, Maurice Thorez, Paris, Presses de Sciences Po, 2000, p. 246.