auteurs latins - Notes du mont Royal

108
qui roulent des hautes montagnes 'appitent au
loin f de leur voix éclatante f les bêtes altérées.
Et pulsf ils trouvaient dans leurs courses et
in vahissaient les asiles champêtres des nymphes :
là, elles déchaînaient leurs eaui jaillissantes,
longs épnchements qui lavaient les rocs, les rocs
humides, ruisselants de la tooisse verdoyante,
ou qui d'un vif et bouillonnant essor allaient gagner
la plaine.
Ils ne savaient pas encore dompter les choses
avec le feu, ni employer des peaux, et vêtir leur
corps de la dépouille des bêtes : ils habitaient les
bols, le creux des montagnes, les grandes forêts;
et ils cachaient dans les broussailles leurs membres
incultes, obligés de fuir les coups du vent
ou la pluie.
Incapables de songer au bien commun, ils
ignoraient entre eux l'usage des lois et des mœurs
réglées. La proie que le hasard offrait à chacun,
chacun s v en emparait, instruit par la Nature à
se conserver et à vivre pour lui-même.
Ténus, unissait dans ies bois les corps des
amants ; car toute femme cédait soit à un penchant
mutuelf soit au brutal emportement et à la
passion furieuse de l'homme, soit à Tappas de
ses dons : quelques glands, des arbouses, des
poires choisies.
Se fiant à la vigueur extraordinaire de leurs
mains et de leurs pieds, ils poursuivaient les animaux
féroces des bois; ils venaient à bout de la
plupart, et ne se cachaient que pour en éviter un
petit nombre. Pareils aux sangliers couverts de
soies, quand la nuit les surprenait t ils étendaient
LUC1ÈCE.
Ut Dune montïbus a raagnîa decursus aquai
daru* citât late dlieotia secla ferarnni.
Denique, nota vageis, sylvestria templa tenebant
Njmpbarum > quibus eicibaat taumori luenta
Lubrica, proluvie larga lavere Itumida saxi ,
Humlda saia super ?iridi stillantia muse© ;
945
Et partim piano scatere atqoeerampere camp.
Necdum res igni scibanttraetare, neque ttti
Pellibns 9 et spoliis corpus veslire feraram ;
950
Sed nemora atque eavos montas sfltasque colebaiit;
Et frulices inter condebant squalida membra,
Verbera ventorum vitare imbreisque coactel. 955
Mec commune bonom poterant spectare, neque ullis
Moribus inter se scibant nec kglbns uti.
Qnod quoique obluleral praedœ forttina 9 ferebat ;
Sponle sua sibi quisque valere el vlvere doetns.
Et Venus in sjlvis jtmgebat corpora aroanlum :
Cunciliabat enim vel mutua quamque eupido,
Vel violenta f iri vis atqne impensa libido;
Tel pretium y glandes atque arbata , vel pira lecta.
Et mannum mira frétai virtute pedomque9
960
€onsectabantur sjrlvestria secla feraram 96S
llissUibus saxis, et magno pondère clmm ;
Multaque vincefaant, vitaba&t poca latebris :
Sellgerêisque parts soibosfjlvestria tnembra
leurs membres tout nus sur la terre, en s 9 invtloppant
de rameaux et de feuilles.
Et ils n f erraient point avec de grandes lamentations
dans les campagnes, épouvantés et cherchant
le jour et le soleil au milieu des ombres;
mais silencieux, et ensevelis dans le sommeilf ils
attendaient que le lambeau de l'aurore vint dorer
le ciel de sa rose lumière. Car, accoutumés dès
l'enfance à voir naître alternativement le jour et
les ténèbres, ils n'avaient pas lieu de s'étonner
qu'ils pussent le fairet ou de craindre qu'une nuit
éternelle s'emparât du monde, lui étant à jamais
la lumièredu soleil. Ils étaient bien autrement inquiétés
par les bêtes sauvages, qui rendaient souvent
le repos fatal à ces tristes humains : chassés
de leur demeure 9 ils se réfugiaient sous un
abri de pierre, à rapproche d'un sanglier écornant
ou d'un lion fougueux; et, pleins d'alarmes,
au milieu de la nuit, ils cédaient à ces terribles
hôtes leur couche de feuillage.
Pourtant, alors, le troupeau des hommes ne quittait
goèreen plusgrandnombrequedenos joursf an
milieu des pleurs, la douce lumière de la vie. Sans
doute chacun, plus exposé aux surprises des bêtes
féroces, leur offrait une vivante pâture, consumé
par leur dent, et remplissait les bois, |$s montagnes,
les forêts de lamentations, en voyant ses en*
trailleseosevilies toutes vives dans une tombe vivante.
Sans doute ceux que dérobait la fuite, le
corps à demi rongé, et couvrant leurs plaies affreuses
de leurs mains tremblantes, applaient
la mort avec des cris épouvantables, et perk
daient enfin la vie dans d'horribles convulsions,
Miidabant terr», nœtuno tempore captei 9
Circum se foliis ac frondibm involuentes.
Nec plangore diem magno mhmqm par agros
Quttrebant pvldei, plantes noctis in umbris;
Sed tacitei respectabant somnoque sepultei,
Dura rosea face sol inferret lumina cuelo.
970
A parvis qnod enim consuerant cernere semper,
Alterno tenebras et lucetn tenipore gigni 9
Non erat9 al ierl posset9 mlrarierunqaam,
Nec dïfîdere, ne terras Kterna teneret
Nox , in perpetoum detracto lumine sois :
975
Sed magis illud erat enrœ y quod secla ferarnm
Infestam miserais ikelebant saepe quietem ;
Ejecteique doino 9 fugiebant saiea tocta
Spumigeri suis adventn validiqueleonis;
Atque intempesta cedebant nocte pventes
Mo
Hospitibus sœveis instrata cubilia fronde. §m
Nec nlmio tum plus9 quam unie, raortala secla
Dtilcia iinquebant lamentis lumina vit».
Unus enim tum qulsque magls deprensus eorum
Fabula v iva ferais praebebat f dentibus baustus :
Et nemora ac monteis gemitu sfl?asque teplebat f
Viva videns vivo sepliri viscera bisto :
ât quos efTogium servant 9 corpore adeso9
Poêterius tremilis super ukert tetrt tenentes
990