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03.07.2013 Views

« Pardon, fit Pounze. Ça n’a pas l’air de marcher. » Ils s’affaissèrent à nouveau. « Vous sentez donc rien de rien ? demanda Ridculle. — Aucune impression de tomber en poussière et d’être emporté par le vent ? fit le major de promo, la voix pleine d’espoir. — J’ai le nez qui a tendance à peler si je reste trop longtemps au soleil, dit Vindelle. Je ne sais pas si ça peut vous aider. » Il essaya de sourire. Les mages échangèrent un regard et haussèrent les épaules. « Sortez », ordonna l’archichancelier. Ils sortirent en groupe. Ridculle les suivit. Il s’arrêta à la porte et agita un doigt à l’adresse de Vindelle. « Ce manque de coopération, Vindelle, ça vous avance à rien », dit-il avant de claquer le battant derrière lui. Quelques secondes plus tard, les quatre vis qui tenaient la poignée de la porte se dévissèrent très lentement toutes seules. Elles s’élevèrent et tournèrent un instant en rond près du plafond, puis elles tombèrent. Vindelle réfléchit un moment au phénomène. Des souvenirs. Il en avait à foison. Cent trente ans de souvenirs. De son vivant, il n’arrivait pas à se rappeler le centième de ce qu’il savait, mais maintenant qu’il était mort, l’esprit débarrassé de tout ce qui n’était pas le fil d’argent unique de ses pensées, il retrouvait la moindre chose qu’il avait apprise. Tout ce qu’il avait lu, tout ce qu’il avait vu, tout ce qu’il avait entendu. Tout était là, soigneusement rangé. Rien n’était oublié. Tout à sa place. Trois phénomènes inexplicables en une seule journée. Quatre, en comptant son existence prolongée. Vraiment inexplicable, ça. Une explication s’imposait. Bah, ça n’était pas son problème. Rien n’était plus son problème désormais, c’était celui des autres. Les mages s’accroupirent devant la porte de Vindelle Pounze. « Vous avez tout ? s’enquit Ridculle. - 52 -

— Pourquoi on ne demande pas à des serviteurs de s’en charger ? marmonna le major de promo. Ça manque de dignité. — Parce que je veux qu’ce soit fait correctement et avec dignité, répliqua sèchement l’archichancelier. S’il faut enterrer un mage à un croisement de routes et lui enfoncer un pieu dans l’corps, c’est à ses collègues de s’en charger. Après tout, on est ses amis. — C’est quoi, cette chose, d’ailleurs ? lança le doyen en examinant l’outil dans ses mains. — On appelle ça une pelle, répondit le major de promo. J’ai vu les jardiniers s’en servir. On enfonce le bout aiguisé dans la terre. Après, ça devient un brin technique. » Ridculle lorgna par le trou de serrure. « Il se recouche », dit-il. L’archichancelier se remit debout, s’épousseta les genoux et saisit la poignée de porte. « Bon, fit-il. En même temps que moi. Un… deux… » Modo le jardinier poussait bruyamment une brouette remplie d’émondes de haie vers un feu derrière le bâtiment de recherche de la magie des hautes énergies, lorsqu’une demi-douzaine de mages le dépassèrent à grande vitesse – enfin, grande vitesse pour des mages. Ils portaient Vindelle Pounze au-dessus d’eux. Modo entendit Vindelle demander : « Dites, archichancelier, vous croyez vraiment que cette fois ça va marcher… ? — Vos intérêts nous tiennent à cœur, fit Ridculle. — Ça, je n’en doute pas, mais… — Bientôt, vous vous retrouverez comme avant, dit l’économe. — Non, souffla le doyen. Justement ! — Bientôt, vous ne vous retrouverez pas comme avant, justement », bafouilla l’économe alors qu’ils tournaient à l’angle du bâtiment. Modo reprit les poignées de la brouette et la poussa d’un air songeur vers le secteur à l’écart qu’occupaient son feu, ses tas de compost et de terreau de feuilles, ainsi que la petite cabane où il allait s’asseoir quand il pleuvait. Avant, il était aide-jardinier au palais, mais il trouvait ce boulot-ci drôlement plus passionnant. Il en voyait vraiment des vertes et des pas mûres. - 53 -

« Pardon, fit Pounze. Ça n’a pas l’air de marcher. »<br />

Ils s’affaissèrent à nouveau.<br />

« Vous sentez donc rien de rien ? demanda Ridculle.<br />

— Aucune impression de tomber en poussière et d’être<br />

emporté par le vent ? fit le major de promo, la voix pleine<br />

d’espoir.<br />

— J’ai le nez qui a tendance à peler si je reste trop longtemps<br />

au soleil, dit Vindelle. Je ne sais pas si ça peut vous aider. » Il<br />

essaya de sourire.<br />

Les mages échangèrent un regard et haussèrent les épaules.<br />

« Sortez », ordonna l’archichancelier. Ils sortirent en groupe.<br />

Ridculle les suivit. Il s’arrêta à la porte et agita un doigt à<br />

l’adresse de Vindelle.<br />

« Ce manque de coopération, Vindelle, ça vous avance à<br />

rien », dit-il avant de claquer le battant derrière lui.<br />

Quelques secondes plus tard, les quatre vis qui tenaient la<br />

poignée de la porte se dévissèrent très lentement toutes seules.<br />

Elles s’élevèrent et tournèrent un instant en rond près du<br />

plafond, puis elles tombèrent.<br />

Vindelle réfléchit un moment au phénomène.<br />

Des souvenirs. Il en avait à foison. Cent trente ans de<br />

souvenirs. De son vivant, il n’arrivait pas à se rappeler le<br />

centième de ce qu’il savait, mais maintenant qu’il était mort,<br />

l’esprit débarrassé de tout ce qui n’était pas le fil d’argent unique<br />

de ses pensées, il retrouvait la moindre chose qu’il avait apprise.<br />

Tout ce qu’il avait lu, tout ce qu’il avait vu, tout ce qu’il avait<br />

entendu. Tout était là, soigneusement rangé. Rien n’était oublié.<br />

Tout à sa place.<br />

Trois phénomènes inexplicables en une seule journée. Quatre,<br />

en comptant son existence prolongée. Vraiment inexplicable, ça.<br />

Une explication s’imposait.<br />

Bah, ça n’était pas son problème. Rien n’était plus son<br />

problème désormais, c’était celui des autres.<br />

Les mages s’accroupirent devant la porte de Vindelle Pounze.<br />

« Vous avez tout ? s’enquit Ridculle.<br />

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