f2ges d'Egy. - L'esprit des pierres

ETHNO-HERPETOLOGIE et MYI'HOLOGIE
contre les piqûres de taons, abeilles et guêpes ainsi que pour guérir les morsures de vipères, mais il faut
pour ce faire "arracher et mettre à bouillir la touffe tout entière, parce qu'il n'y a, dit-on, qu'une seule
feuille qui ait de la vertu, et qu'on ne peut savoir laquelle" 28. Rappelons qu'en Loire-Atlantique, la
molène constitue "la véritable panacée du venin" 53. On raconte à Aigrefeuille et dans les cantons voisins
qu'une belette luttant contre une vipère "aurait été vue se frottant après chaque coup de croc sur un pied
de molène. Sans crainte sur l'effet du venin, elle revenait alors à la charge avec un nouveau courage. Un
spectateur ayant arraché la précieuse plante, la belette mordue en aurait vainement cherché un autre pied
dans le voisinage, et, faute d'en trouver, serait tombée morte" 53.
Le Dr Coubard écrit qu'il connaît un guérisseur vendéen qui traite les morsures de reptiles avec
des feuilles de Vipérine [Echium vulgare], vulgairement appelée "oreilles de souris". Ces feuilles doivent
être roulées en quatre ou cinq boulettes qu'on fait avaler au malade. Avec les mêmes indications, on se
sert aussi d'un patea de poràie (cataplasme de poireaux) appliqué sur la morsure. Il est intéressant de
remarquer que ce patea de poràie sert aussi à lutter contre le dépot de lét (dépôt de lait), c'est à dire
l'engorgement laiteux des seins. soit à la première montée consécutive à l'accouchement, soit à l'époque
du sevrage 28.
Dans le Bocage, la recette suivante est utilisée contre les morsures de vipère :
Racines de narperun [Arctium Lappa L.] }
et Seconde écorce de hêtre } env. une poignée
Une gousse d'ail
Une once de thériaque
pilez avec
Une chopine de vin blanc
passez 53.
Le Docteur Bourgeois, de La Verrie, relata à son confrère Viaud-Grand-Marais, le cas suivant:
"En Août 1857, Marianne Brochard, âgée de 12 ans, habitant à la Gaubretière, fut mordue par un aspic;
ses parents demandèrent de suite un empirique de Chambretaud, renommé dans tout le Bocage pour SOn
habileté à constater par la simple vue, si une plaie doit sa spécificité au venin du capaud, du lézard-vert,
de la rinsoire ou salamandre, du quatre-épées 55, au venin d'eau ou à un venin composé de plusieurs des
éléments précédents. Le guérisseur rangea en cercle la famille de la malade ct entonna une hynme
d'église que l'assistance répéta en choeur avec la plus grande gravité. Le lendemain, même cérémonie;
mais cette fois la pauvre fille n'attendit pas la fin de cette misérable jonglerie: elle mourut à la deuxième
strophe" 53.
A la fin du siècle dernier, une vieille femme des Moutiers-les-Mauxfaits, administrait un
spécifique "dans lequel entrait beaucoup de naperon et de bardane" 53.
Dans toute la Vendée, les chiens mordus par des vipaeres sont soignés par flagellation de la
partie enflée avec un rameau de gruselàe (groseillier) muni de ses épines 1. Le venin de la vipère
immunise les chiens contre la rage 53. Tout chat trop maigre est, de son côté, accusé de s'être nourri de
vipères, et on dit de lui: l'at manjhai dau vrim (il a mangé du venin) 53.
En 1869, le Docteur Viaud-Grand-Marais s'indigne de ce que dans plusieurs localités de Vendée
(et aussi en Loire-Atlantique) "on trempe encore de nos jours les lames de faux dans une macération de
têtes de serpents, de crapauds et d'autres animaux immondes, sous prétexte de rendre leur fil plus délié:
elles deviennent des armes dangereuses et peuvent donner lieu à des blessures empoisonnées" 53.
Dans le Sud-Vendée et vers St-Etienne-du-Bois, on parle souvent d'une farce qui consiste à offrir
la "goutte" à quelqu'un, dans une bouteille enveloppée d'un papier journal. Quand l'invité a bu, on ôte le
papier, ct le dégustateur s'aperçoit avec effroi qu'une vipère était conservée dans la liqueur : c'est ce
qu'on appelle "l'alcool de vipère" 2.
Enfin, pour obtenir la guérison de l'érysipèle, Jean de la Chesnaye rapporte qu'il suffit de
"prendre une vipère vivante. lui couper la tête, envelopper celle-ci dans une petite poche, et l'appliquer
sur la partie du corps où s'est déclaré l'érysipèle" 13. Le "fil de taupe", c'est à dire le fil passé au travers
du corps d'une taupe vivante est, selon Madame Bonneau de La Roche-sur-Yon, radical contre les
piqûres de vipères, comme il l'est contre les rhumatismes et l'érysipèle 34.
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