dossier presse - Galerie Bertrand Grimont
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++<br />
guillaume constantin<br />
++++++++++++++++++++++++++++++++<br />
travaux - 12/2010
je veux voir, me taire et entendre 2010<br />
liège d’isolation, praticables en bois<br />
4 modules : 220x105x64 cm / 212x110x192 cm / 218x108x126 cm / 124x100 cm<br />
production ateliers des arques photographies/ Simon Boudvin
le champ a deS yeux, le BoiS a deS oreilleS 2010<br />
t-shirt sérigraphié<br />
édition de 100<br />
production —— ateliers des arques
a Split Single 2008<br />
carlène blanc et orange soudé à chaud<br />
538x280x292cm<br />
(photographie : marc domage)<br />
« split singles» est la réunion de deux pièces (a split single ci-dessus et Sonate hoboken) présentée suite à une<br />
invitation de claude lévêque à l’occasion de son exposition « down the street » réalisée pour les 10 ans du<br />
Frac haute-normandie, 2008.
meaSured trouBleS come By 2010<br />
adhésif mat sur altuglass<br />
4,30x2,50 m<br />
don’t think that it waS eaSy 2010<br />
aluminium découpé 41x29,7cm<br />
everyday ghoSt 2009/2010<br />
rallonge modifiée, bougie électrique photographies / aurélien mole<br />
i am So Sorry. i am So Sorry. goodBye<br />
2010<br />
sac en toile (de h. & i. morison), bâton de plexiglas,<br />
crochet en aluminium.
epyramidage 2009<br />
papier calque, ruban de cuivre adhésif<br />
201x 105 cm<br />
«plus réel que l’herbe #2» Zoo galerie - nantes<br />
deux pièces présentés dans la pénombre dont everyday ghoSt une<br />
rallonge qui s’infiltre dans l’exposition en servant pour l’alimentation<br />
des enceintes de la vidéo d’armand morin...<br />
le dessin (tiré d’une étude de j.Bellini) mural évoque un puzzle. un<br />
flux circulatoire de rubans de cuivre est ainsi assemblés et irisé par la<br />
présence lumineuse de la vidéo.<br />
everyday ghoSt 2009<br />
rallonge électrique modifiée.<br />
photographies : armand morin
a move Beneath my Feet 2009<br />
adhésif mat sur altuglass brillant<br />
228x152cm<br />
(au fond: claude rutault/pierre malphettes/cédric alby<br />
la générale 3-6 juillet 2009)<br />
photographies © moshi moshi studio<br />
pieceS oF clotheS 2009<br />
adhésif sur plastiques<br />
(forex, polycristal, altuglass, acrylique imprimé)<br />
90x210 cm<br />
a move Beneath my Feet 2009<br />
déS nomperS 2009-2010<br />
pâte polymère,<br />
empreintes de billes de plomb.<br />
dés dont la face 6 (ou 5) est dédoublée.
SanS titre (i’ll Be your Support) 2008- 2009<br />
volume en carlène soudé à chaud, écran et vidéo d’armand morin<br />
11ox79x65 cm<br />
oBjet trouvé 2005<br />
plâtre, crayon rouge, vernis<br />
30x18x18cm<br />
pattern iii 2009<br />
adhésif mural<br />
raphaël Zarka anti emmental 2008<br />
thibaut eSpiau 10x15 2008<br />
les cratères du futur 2009<br />
une exposition d’ernesto Sartori, Zoo galerie, nantes<br />
Shell oF evidence ii 2008<br />
carapace de tortue de mer, élastiques<br />
27,5x32x9,5cm<br />
pattern ii 2009<br />
adhésif mural argenté<br />
travaux d’ernesto Sartori
everyday ghoStS depuis 2008<br />
photographies numériques réunies sous le titre «everyday ghost»<br />
et diffusées via diverses interfaces numériques.<br />
http://retroactivepictures.tumblr.com/
copieS cachéeS 2009<br />
vue de l’installation<br />
galerie du collège de dornes, hors-les-murs en collaboration avec le parc Saint léger<br />
centre d’art contemporain<br />
let’S juSt imitate the real until we Find a Better one 2009<br />
plexiglas peint, carton plume noir, supports acryliques,<br />
câbles électriques et prise murale.<br />
400x 200 cm.
Sonate hoBoken 2007<br />
document sonore 4’54<br />
sonate de joseph haydn interprétée au casque par caroline cren<br />
l’enregistrement restitue tous les sons périphériques à l’interprétation de cette sonate dont nous ne percevons pas<br />
les notes.<br />
édition en vinyl gravé (2008), 75 exemplaires dont un tirage de tête de 10 numérotés et signés.
dépôtS 2004<br />
système son, enceintes (à l’intérieur de la structure) diffusant un enregistrement de craquements d’un parquet<br />
ancien issus des pas d’ onenn danveau, danseuse. Son mis en forme par arnaud riviere.<br />
dimensions structure suspendue 230x130x75 cm<br />
« horizons synthétiques » commissariat : Cecilia Becanovic & Maxime Thieffine, Mains d’Oeuvres, Saint Ouen, 2006<br />
photographies : paolo code
aérolithe 2006<br />
gravat, barrières vauban pour maquette, étagère, miroir<br />
gravat : 12x8x6 cm
un Bloc erratique 2007<br />
carlene (pvc) soudé à chaud, barrières de sécurité.<br />
5,50x 2,15x3,10 m.<br />
« Les siècles ont passé. Les descendants lointains des constructeurs démunis disposent d’un pouvoir<br />
quasi illimité. Ils peuvent lire dans ces pierres, rien que pierres mises à l’aplomb du sol et<br />
que leur science déconcertée désigne d’un terme grec, le premier témoignage d’une ambition<br />
obscure, la leur, aussi démesurée, aussi mal dégrossie, et aussi solitaire qu’elles. »<br />
r. caillois (extrait de pierres, gallimard)
don’t let the light eScape<br />
2007<br />
carlène soudé à chaud<br />
graffiti de Shuck 2<br />
(don’t let the light escape)<br />
400x150x140 cm<br />
photographies : patrice goasduff/40mcube
un voyage d’hiver 2007<br />
projet réalisé en collaboration avec raphaël Zarka. espace diderot, rezé, 2007.<br />
dimensions : 18 x 4 x 3,5 mètres.<br />
carlène soudé à chaud, bois, marbre, bois de coffrage, photographie couleur.<br />
un voyage d’hiver 2007<br />
photographie dc raphaël Zarka<br />
l’espace diderot, rezé (44),<br />
conçu par m.Fuksas.
À partir d’oeuvres s’imbriquant les unes dans les autres, guillaume constantin et raphaël Zarka ont conçu un paysage intérieur,<br />
pour ne pas dire mental. la montagne découpée de guillaume constantin est une sculpture fragmentaire, réplique<br />
d’un mont rocheux enneigé. elle accueille dans le magma rougeoyant de ses entrailles une forme géométrique, comme<br />
une concrétion géologique. cette sculpture de raphaël Zarka, un tétraèdre tronqué en bois de coffrage incrusté de marbre<br />
de carrare, est la réplique d’un volume issu d’une photographie de la série «les formes du repos».<br />
«la galerie de l’espace diderot est bien connue pour son architecture : murs obliques peints en noir et sans fenêtre. cette<br />
grande pièce, plus proche de la salle de spectacle que de l’espace d’exposition, fait immanquablement penser à une camera<br />
obscura géante, un lieu hermétiquement clos capable de cristalliser le monde par fragment, de le découper et faire que<br />
l’extérieur se retrouve à l’intérieur. c’est ainsi que nous proposons ce paysage d’intérieur : le sommet d’un mont enneigé,<br />
ouvert comme un corps et qui renferme un étrange fossile : un tétraèdre de bois et de marbre. À l’entrée une pancarte, à<br />
demi plantée dans la montagne, supporte la photographie d’un autre paysage de neige, hésitant entre l’urbain et le naturel.»<br />
(g.c. et r. Z.)
… /… (tourneZ la page) 2008 - 2009<br />
galerie cardenas Bellanger, paris.<br />
avec comme point de départ une photographie de guillaume constantin prise au musée d’histoire naturelle<br />
de Berlin, ... /... est un projet inédit où avec raphaël Zarka, ils explorent leur intérêt commun pour les textes<br />
de roger caillois.
myStery Board 2008<br />
liège découpé 400x500 cm<br />
cretto 2007<br />
photographie de raphaël Zarka<br />
vitrine 2008<br />
contreplaqué bakélisé fraisé, altuglass, sol pvc<br />
143x240x4,1 cm<br />
one Side longer than the other<br />
to preServe continuity 2008<br />
dérouleur modifié, sol PVC, dimensions variables
paradoxe du tréSor 2008 - 2009<br />
galerie interface-dijon.<br />
cette exposition fait suite à ... / ... une exposition présentée chez cardenas Bellanger à paris où guillaume<br />
constantin & raphaël Zarka explorent leur intérêt commun pour les textes de roger caillois.<br />
paradoxe du trésor, titre d’un texte issu de «cases d’un échiquier» (1970), est un ensemble inédit de travaux des<br />
deux artistes choisis par guillaume constantin.<br />
«Il m’est arrivé d’insister sur la double nature des trésors : ils sont secrets, d’où la cachette ; d’autre part, ils sont<br />
talismans, c’est-à-dire constitués de matières non seulement précieuses en elles-mêmes, mais encore chargées de<br />
légendes et d’histoire, presque de superstitions, sinon de malédictions.» r. caillois
aphaël Zarka :<br />
piSte du pendu 2008<br />
tirage lambda<br />
BûcheS 2008<br />
tirage lambda<br />
(a liSt oF which i could tediouSly extend<br />
aS inFinitum) 2008<br />
adhésif, extrait de l’index des parenthèses<br />
courtesy galerie michel rein, paris<br />
pattern recognition 2008/2009<br />
tubes pmma soudés, adhésif de masquage<br />
131x109x58 cm<br />
headleSS 2005<br />
liège, contreplaqué, colle thermofusible<br />
62x30x30 cm
paradoxe du tréSor 2008 - 2009<br />
galerie interface-dijon.<br />
(Sa voix n’était pluS<br />
qu’un murmure)<br />
2008<br />
crâne de licorne,<br />
impression offset,<br />
carlène noir soudé à chaud<br />
168x127x95 cm
oBjet trouvé 2005<br />
plâtre, crayon rouge, vernis<br />
30x18x18cm<br />
Shell oF evidence ii 2008<br />
carapace de tortue de mer, élastiques<br />
27,5x32x9,5cm<br />
collection personnelle.<br />
raphaël Zarka :<br />
giBellina 2005-2008<br />
tirage lambda<br />
courtesy galerie michel rein, paris
*SuppoSition FileS depuis 2008<br />
les Supposition files sont des pièces issues d’une collection de spams. Spécifiquement choisis, ces spams sont<br />
autant de titres potentiels que de formules signigfiantes ou absurdes qui génèrent différents types de travaux<br />
(pièces fabriquées, accidentelles, ready-mades...) numérotés dans leur ordre d’apparition.<br />
cette série a commencé en 2008. remerciements à yoann gourmel.<br />
*aBSolute Silence on that topic (Sp#1) 2008<br />
répertoire, impressions jet d’encre<br />
18x24 cm, 20 pages.<br />
Répertoire pour une forme, la Vitrine, Paris<br />
photographies : Aurélien Mole
*columnar inSulin deSire<br />
(core emerge roadBed expectation) (Sp#2) 2008<br />
pâte à modeler pour tête de poupée, fragment de roche, 8x7,4x7cm collection particulière.<br />
*conSider reality (Sp#4) 2008<br />
encre indélébile sur t-shirt<br />
collection partculière.<br />
don’t think that it was easy (SP#10)<br />
2010<br />
aluminium brossé<br />
format 42x 29,7 cm<br />
*don’t think that it waS eaSy (Sp#10) 2010<br />
aluminium brossé<br />
format 42x 29,7 cm<br />
*cavernouS gaS-Shell cryStal (Sp#3) 2008<br />
pâte polymère brûlée, feutre synthétique, ficelle<br />
*deStroying nature, good point<br />
(Sp#6) 2008<br />
pierre, rouleau de ruban adhésif.<br />
9x8x4 cm<br />
en cours de réalisation :<br />
*duplicate Spaghetti (Sp#7)<br />
*can’t rewind (Sp#8)<br />
*on the Bat’S Back i do Fly, BaBy!<br />
(Sp#9)
*SuppoSition FileS archive 2008-2009<br />
portable document file.<br />
format a4<br />
documentation virtuelle fabriquée à partir des données réelles de réalisations des *SuppoSition FileS,<br />
archives, textes, images.<br />
le document évolue avec la série de pièces.
l’excuSe du vide 2007<br />
portable document file<br />
cahier virtuel de travaux réalisés (dont il fait partie) pendant une résidence chez astérides à marseille.<br />
touteS SorteS d’omiSSionS 2007<br />
fichier numérique, 21x29.7 cm<br />
SanS titre 2004<br />
photocopies couleur réalisées sans document original.<br />
20 pages reliées. Format fermé 18x27 cm.<br />
couverture en papier glacé perforé.<br />
édité à 8 exemplaires (+1ea).
a retroactive titleS index<br />
*absolute Silence on that topic<br />
a consulter Sur place<br />
a move Beneath my Feet<br />
another piece of cloth<br />
a Split Single<br />
avec lesquelles j’exerçais dans l’ombre<br />
a usage personnel<br />
*Back in the pentagon<br />
Blackcarboncopy<br />
*can’t rewind<br />
*cavernous gas-Shell crystal<br />
cloth<br />
*columnar insulin desire (core emerge roadbed expectation)<br />
*consider reality<br />
copies cachees<br />
corps et Biens<br />
cover me<br />
deafen<br />
depots<br />
*destroying nature, good point<br />
don’t let the light escape<br />
don’t let the darkness Swallow you<br />
*don’t think that it was easy<br />
dracula’s mountain<br />
*duplicate Spaghetti<br />
embedded<br />
emporte-pièces<br />
equipements<br />
everlast<br />
everyday ghost<br />
headless<br />
i Find the key But i return to Find an open door<br />
i’m so sorry. i’m so sorry. goodbye<br />
je veux voir, me taire et entendre<br />
le champ a des yeux, le bois a des oreilles<br />
l’état des objets collés<br />
let’s just imitate the real until we Find a Better one<br />
l’excuse du vide<br />
one Side longer than the other to preserve continuity<br />
*on the Bat’s Back i do Fly little Baby<br />
paradoxe du tresor<br />
pattern non-recognition<br />
pattern recognition<br />
pieces detachees<br />
pieces of cloth<br />
plus de lumiere<br />
portoir<br />
print it Black<br />
receptacle<br />
restes<br />
Shell of evidence ii<br />
Something old Something new Something Borrowed Something Blue<br />
*Supposition Files<br />
tablecloth<br />
the white patch had Become a place of darkness<br />
toutes Sortes d’omissions<br />
…/…
a géométrie variaBle<br />
mathilde villeneuve : je voudrais commencer par parler de la dimension collective dont est empreint ton travail. je<br />
pense notamment à l’exposition à la galerie villa des tourelles, à nanterre où des graffeurs étaient invités à tagger<br />
le titre de ta sculpture sur la pièce elle-même. je pense aussi à « the white patch had become a place of darkness<br />
», qui a eu lieu en avril-mai 2008, à la galerie ho, à marseille, pour laquelle tu avais demandé à des artistes et des<br />
commissaires de te proposer des pièces ou des éléments de pièces que tu prolongeais librement. est-ce en partie du<br />
fait de ta double pratique d’artiste et de commissaire d’exposition ?<br />
Guillaume Constantin : En fait, les collaborations sont assez récentes, elles ne sont pas systématiques et sont une manière<br />
d’élargir mon travail plastique originellement lié à la sculpture. Effectivement, mon rôle de commissaire aux Instants<br />
Chavirés1 à Montreuil m’a permis d’aborder les questions d’emprunt, de manipulation, d’assemblage, d’installation de<br />
travaux et de pratiques d’autres artistes. Questions que j’applique également à ma pratique personnelle. Elles se posent<br />
de manière différente selon les contextes et les invitations. A la Villa des Tourelles, j’ai conçu des sculptures spécifiquement<br />
pour qu’elles soient taggées 2 . A Marseille, la question était celle d’un commissariat « à géométrie variable ». J’ai<br />
travaillé différemment avec chaque artiste invité, soit en faisant simplement l’accrochage d’une pièce, en fabriquant des<br />
supports, des socles (une étagère pour Maxime Thieffine par exemple), en réalisant un objet à partir de données écrites<br />
ou photographiques (texte de Leonor Nuridsany, images de livres de Cécilia Becanovic, une collection de spams de<br />
Yoann Gourmel 3 …) ou ‘en augmentant’ les pièces choisies, en fabricant par exemple, un décor sculptural décalé pour<br />
un petit miroir de Pierre Ardouvin (i’ll be your mirror, 2007). Il s’agissait au final d’une exposition réalisée plus en tant<br />
qu’artiste que commissaire bien que j’endossais volontiers ce rôle à plusieurs niveaux (choix d’œuvres, accrochage,<br />
conception et réalisation du catalogue) tout en essayant de déployer un univers proche, une sorte de « double amplifié »<br />
de mes préoccupations.<br />
mv : pour certaines pièces, tu franchis une étape et au-delà de rejouer les pièces des autres dans de nouveaux<br />
contextes, tu les pousses dans leur retranchement. par exemple, tu produis un fac simile d’un catalogue des Black<br />
paintings d’ad reinhardt de 1970 à l’encre noire sur papier noir. et fais ainsi passer le document de l’œuvre à l’œuvre,<br />
annulant la distinction clamée à l’origine entre les deux. tu mets à mal sa théorie qui déclarait l’impossibilité de<br />
produire une reproduction égale à sa copie, appauvris son œuvre tout en la mettant en valeur ne serait-ce que par le<br />
choix d’en consacrer une des tiennes.<br />
c’est aussi ce que tu as fait en reprenant artisanalement un néon de claude lévêque que tu as « éteint ». tu reproblématises<br />
la pièce d’origine, voire tu la singes en la faisant revenir à son seuil de fabrication. Tu modifies l’œuvre<br />
elle-même et ses modes de présentation habituels, quitte à risquer d’en modifier le sens. Comment te positionnes-tu<br />
vis-à-vis des citations qui sont en jeu dans plusieurs de tes œuvres ? y a-t-il la volonté de laisser visible la référence<br />
de départ ou de l’engloutir ? ou bien te situes-tu à mi-chemin : sans renier la citation, la manipuler à l’intérieur de<br />
ton travail suivant les problématiques qui te préoccupent ?<br />
GC : Mon rapport à la citation est aussi à géométrie variable, c’est à la fois un détournement, une lecture plus ou moins<br />
ironique de leurs supports et aussi un hommage à l’œuvre. Sans être essentiellement tournées vers l’histoire de l’art, ces<br />
références viennent d’elles-mêmes et souvent s’extraient d’un certain quotidien : ce sont des œuvres, des chansons, des<br />
expressions, des phrases, des textes, des fragments qui me frappent, c’est donc principalement émotionnel. L’intérêt réside<br />
surtout dans le regard que j’y porte.<br />
Par exemple, pour la reprise du néon de Claude Lévêque qui s’intitule et figure l’expression Plus de lumière (1999), j’ai<br />
tiré profit des deux acceptions possibles qu’offre la pièce : à la fois plus de lumière dans l’idée d’une intensité accrue (ce<br />
que le néon allumé restitue parfaitement) mais aussi dans le sens de plus de lumière du tout. J’ai par ailleurs appris que<br />
l’artiste avait emprunté ces mots à Goethe (expression qu’il aurait prononcé sur son lit de mort si l’on en croit la rumeur…),<br />
ce qui dédouble encore le jeu de la citation. Via les matériaux assez standards que j’ai alors choisi d’employer,<br />
tels que le plexiglas, le carton recyclé, des câbles électriques et de vrais supports pour néon, je reproduis sensiblement<br />
l’œuvre de Lévêque et continue à faire exister l’objet tout en le dépouillant pourtant de l’essentiel : sa lumière.<br />
Ici, tu as produit une autre pièce d’après Ad Reinhardt<br />
Oui, pour cette pièce, j’ai utilisé simplement quelques préceptes énoncés par l’artiste pour la réalisation des Black paintings<br />
(qui deviennent le titre de l’œuvre : formless, no top, no bottom, directionless) qui pouvaient très bien s’appliquer<br />
à un rocher, effectivement sans forme, sans haut ni bas, ni direction précise. Dans l’espace de la galerie, il devient une<br />
sculpture noire accrochée au mur comme une peinture.<br />
petitS totemS tautologiqueS<br />
mv : en repensant aux pièces que l’on vient d’évoquer, je me dis qu’il y a dans ton travail toute une série d’objets qui<br />
se mordent la queue. par exemple, des photocopies des faces vides du photocopieur (Sans titre, 2006) ou un disque<br />
vinyle qui n’a de gravé que les sons périphériques d’une sonate jouée au casque par une pianiste (sonate hoboken,<br />
2007). ou encore les oeuvres réalisées à la suite de ta résidence à astérides, réunies dans un catalogue intitulé « l’excuse<br />
du vide » (2007) – une exposition qui n’existe autrement que sous cette forme de documentation d’interventions<br />
réalisées à même les objets du mobilier qui t’entouraient, que tu avais coffrés pour les rendre faux et en faire des «<br />
objets impasses » qui dysfonctionnent. poster l’objet là où ne l’attend pas, un credo de ton œuvre ?<br />
GC : Ces mises en boucle, ces formes de tautologies sont depuis le début une partie importante de mon travail : des moulages<br />
de dents en chewing-gums (restes 2001), des cerveaux en pains (pains 2000) ou une multiprise qui, branchée sur<br />
elle-même, s’auto-consume (autoprise 2004). Pour moi, ce sont à la base des idées très simples, presque littérales, voire<br />
drôles mais qui, dès lors qu’elles s’incarnent, prennent une dimension toute particulière. Ainsi autoprise devient comme<br />
une petite figure de l’entropie.<br />
Après, annuler les fonctions des objets n’est évidemment pas une règle que je m’impose, c’est juste un mode possible de<br />
réappropriation. Par moments, j’utilise ces objets pour leur fonction, laissant le résultat parler autrement (blackcarboncopy<br />
2004, sans titre 2006). C’est surtout cet ‘autrement’ qui m’intéresse, les formes de paradoxe qu’il introduit. Souvent,<br />
on se préoccupe beaucoup de ce qu’est l’œuvre conceptuellement, mais pour ma part son effet, ce qu’elle produit, m’importent<br />
particulièrement. C’est pourquoi les méthodes combinatoires qui induisent une lecture collective de mes pièces<br />
et la détermination à les remettre en selle à l’intérieur de nouveaux contextes tiennent une place si importante dans ma<br />
pratique.
mv : tes pièces sont amenées à se comporter tels des corps en milieu étranger, qui éprouveraient l’espace, le sonderaient<br />
et par effet de boomerang modifierait son écosystème…<br />
coquille et coquillage<br />
mv : il y a une forme qui habite régulièrement ton travail : un volume fragmentaire en carlène soudé à chaud. a<br />
Saumur, tu as installé un de ces rochers géants sur un rond-point (un bloc erratique 2007), entourée de barrières de<br />
protection. cette pièce était la duplication inversée d’une oeuvre de 2006 réalisée au format maquette : aérolithe qui,<br />
au lieu de figurer un faux rocher géant planté au beau milieu d’un vrai rond-point, présentait un vrai petit caillou entouré<br />
de barrières miniatures. pourrais-tu expliciter cette belle citation de r. caillois (extrait de pierres, gallimard)<br />
que tu mets en relation avec ta pièce : « les siècles ont passé. les descendants lointains des constructeurs démunis<br />
disposent d’un pouvoir quasi illimité. ils peuvent lire dans ces pierres, rien que pierres mises à l’aplomb du sol et<br />
que leur science déconcertée désigne d’un terme grec, le premier témoignage d’une ambition obscure, la leur, aussi<br />
démesurée, aussi mal dégrossie, et aussi solitaire qu’elles. »<br />
GC : Cette citation, je la comprends comme une certaine critique des savoirs dans le sens où malgré notre degré d’évolution,<br />
planent encore bien des mystères, où rien ne se résout vraiment et où tout se complexifie. Tout reste hypothétique<br />
et fragile. Elle définit aussi cet art (le mégalithisme) ou du moins cette intention comme quelque chose de mystérieux, de<br />
difficile à cerner.<br />
Un bloc erratique est un clin d’œil au mégalithisme : ces blocs sont de gros fragments pierreux qui voyagent dans des<br />
glaciers et se déposent aléatoirement lors de la fonte de ces derniers. Ainsi ils se perchent de manière étonnante et deviennent<br />
quasiment des sculptures. Les sentiments que dégagent ces blocs ont pour moi nettement à voir avec ceux générés<br />
par des sites non-naturels tels que Stonehenge ou Carnac.<br />
Cette sculpture de rond-point aborde ces notions sauf qu’effectivement c’est de prime abord l’inversion d’une pièce précédente,<br />
Aérolithe, que tu as décrite. Ensuite, l’évocation d’une sorte de menhir fendu rejoint le cadre particulièrement<br />
pittoresque du contexte (à savoir un château, un rond-point de centre ville). L’utilisation de vraies barrières municipales<br />
de sécurité créait une ambiguïté anti-décorative, chose à laquelle il est usuellement difficile d’échapper en intervenant<br />
sculpturalement en extérieur. Cette pièce ouverte à plus d’un titre me permet finalement d’évoquer tout ce qui m’intéresse<br />
périphériquement à elle, du mégalithisme jusqu’à la question du 1% en passant par l’occupation d’un tel contexte.<br />
mv : dans l’exposition « un voyage d’hiver » à l’espace diderot, (rezé) en 2007 où tu avais collaboré avec raphaël<br />
Zarka, cette même forme rocheuse apparaissait mais cette fois en servant d’écrin autour de la sculpture de Zarka.<br />
C’était comme un rocher artificiel fendu qui, après éclosion, aurait fait naître une forme tétraédrique aux contours<br />
étonnamment réguliers, mais aussi un décor, empruntant une esthétique « fait main » qui rentrait en tension avec<br />
l’esthétique plus léchée de la sculpture qu’elle entourait. l’étroite corrélation entre vos deux pièces rendait une véritable<br />
idée de gestation, comme si on assistait à la découverte (au sens archéologique) de minéraux.<br />
GC : Ce que tu dis pourrait être aussi une jolie définition de la notion de collaboration qui, d’un truchement de pratiques,<br />
donne souvent naissance à des choses inespérées, insoupçonnables ou imprévisibles. Cette collaboration avec Raphaël<br />
Zarka s’est prolongée dernièrement avec deux expositions quasi-simultanées à Paris et à Dijon, « …/… » et « Paradoxe<br />
du trésor » 4 où nous avons travaillé autour de notre intérêt commun pour Roger Caillois chez qui on connaît l’importance<br />
des minéraux.<br />
mv : a la fois silex contemporain - entre l’objet utilitaire et le bijou - le rocher condense plusieurs problématiques de<br />
ton travail. cette forme vient comme une évidence dans les espaces où tu es invité à exposer. est-ce qu’elle constitue<br />
une balise de ton œuvre, un point de repère, une manière d’installer ton paysage ?<br />
GC : Le terme de balise, c’est-à-dire un dispositif de guidage facilitant la marche à suivre, résume assez bien le rôle de ces<br />
volumes que je fabrique. Ils peuvent être des supports pour d’autres œuvres, des occupations d’espaces, des outils.<br />
mv : au fur et à mesure de ses apparitions dans ton travail, cette forme semble se doter d’une identité mystérieuse<br />
qui se densifie au gré des espaces qu’elle traverse et en fonction desquels elle se transforme. On dirait un coquillage,<br />
une forme archaïque qui porte la marque de son temps et qui contient une ouverture, supposant un intérieur et un<br />
espace habité. la notion d’archéologie se retrouve d’ailleurs dans la photo d’une bouteille d’eau en plastique prise de<br />
tellement près qu’elle fait oublier l’objet d’origine et y figure à la place un paysage montagneux (dracula’s mountain<br />
2006).<br />
GC : Les associer à l’idée d’un coquillage ouvert que l’on pourrait remplir et ainsi créditer de nouvelles fonctions ou de<br />
nouveaux statuts est aussi très juste, exactement comme ces différents exemples qui souvent illustrent et nuancent une<br />
définition de dictionnaire.<br />
C’est une manière de réinterpréter certains archétypes concernant l’objet : son immanence, sa fonction, son obsolescence<br />
… c’est ce que je fais en faisant des copies de rochers, des faux néons, ou une reprise d’une sonate de Joseph Haydn sans<br />
la musique gravée sur un vinyle …<br />
mv : raphaël Zarka parle de « migration de formes », mais il s’agit chez lui de formes existantes qui portent avec<br />
elles une histoire particulière qu’il vient remodeler. chez toi, on pourrait aussi parler de procédé de migration de<br />
formes mais de formes plus génériques que tu aurais toi-même générées et qui se déplacent à l’intérieur de ton<br />
propre travail.<br />
GC : Mon travail plastique était à l’origine très lié à la notion de patrons (de vêtements comme pour headless 2005 -<br />
portoir 2004), à des motifs simples, lisibles, figuratifs, l’enjeu se situant davantage aujourd’hui dans le déplacement des<br />
matériaux … Les « formes génériques que je génère » pour reprendre ta formulation sont très conditionnées par leur<br />
mode de fabrication, et laissent une part importante au geste, à l’accident, à la trouvaille sans pour autant être une<br />
apologie de ces modes de travail.
oBjetS FlottantS<br />
MV : C’est intéressant que tu joues souvent « l’in situ » dans le sens où tu prends en compte l’espace, le laisse apparaître<br />
tel qu’il est, ou même le révèle davantage tout en y résistant. et ainsi prends le contre-pied de beaucoup d’artistes<br />
qui seraient tentés de s’y intégrer au maximum.<br />
GC : Cela dépend souvent de la neutralité des espaces en question. Des particularités sur lesquelles je pourrais compter<br />
pour m’y greffer. Parfois je rejoue les contraintes qui m’étaient soumises lors d’expositions précédentes : par exemple<br />
celle de faire avec un carrelage plutôt beau mais omniprésent dans l’espace. Je cultive ainsi l’astreinte qui caractérisait<br />
ce précédent projet en exportant ce carrelage sous une forme fantomatique, partielle et d’un autre temps 6.<br />
mv : pourquoi avoir choisi des motifs en grille pour le carrelage ?<br />
GC : Pour cette occupation « sectorielle » du sol, je me suis inspiré de motifs médiévaux de carrelage. J’ai recomposé une<br />
surface plane à partir de différentes plaques, que j’ai agencées de manière à ce qu’elles reconstituent un motif. Il s’agit<br />
d’un renvoi indirect aux dalles funéraires, à quelque chose de décoratif et aussi à ce regard bien particulier de scrutateur<br />
que l’on adopte quand il s’agit de regarder par terre.<br />
mv : Ça me fait penser à la photo « partition »… cette manière de plaquer rétroactivement une grille sur un espace<br />
existant.<br />
GC : Le cas de Partition n’est pas très éloigné de cela, il s’agit effectivement d’un placage physique et temporel, sur une<br />
photographie d’un volume rocheux, d’un autre motif extrait des expériences de Chladni qu’on avait retravaillé avec<br />
Raphaël Zarka pour une pièce commune («Mystery Board», 2008).<br />
“i Find the key But i return to Find an open door” 7<br />
ce titre me rappelle celui de « l’excuse du vide » qui comportait la même idée d’une action vaine, qui a besoin d’un<br />
prétexte pour s’accomplir. est-ce qu’on peut considérer cette phrase comme une métaphore de ta pratique artistique<br />
? les titres, il me semble, installent une distance vis-à-vis de ta production.<br />
GC : Les titres que je choisis restent très connectés à une certaine réalité. En général je ne les invente pas (« L’excuse du<br />
vide » reste en ce sens une exception), je les prélève. Ce sont de bons outils de lecture et de recul sur les pièces, et ils ont à<br />
chaque fois un rôle très précis. Ils fonctionnent comme des modulateurs. Un peu comme quand j’envisage un commissariat<br />
« à géométrie variable » : ils peuvent être littéraux (« headless - portoir - a split single »…), des prétextes, des détours,<br />
des vecteurs, des indices (« pattern recognition, toutes sortes d’omissions » …) qui restent très souvent métaphoriques («<br />
let’s just imitate the real until we find a better one - absolute silence on that topic, yes - avec lesquelles j’exerçais dans<br />
l’ombre » …).<br />
mv : pour associer deux réalités distinctes…<br />
GC : Dans la préface de « Cosmos » de Witold Gombrowicz, il y a des extraits de son journal et notamment un passage<br />
qui questionne la réalité : « serait-elle, dans son essence, obsessionnelle ? Etant donné que nous construisons nos mondes<br />
en associant des phénomènes, je ne serais pas surpris qu’au tout début des temps il y ait eu une association gratuite et<br />
répétée fixant une direction dans le chaos et instaurant un ordre.<br />
Il y a dans la conscience quelque chose qui en fait un piège pour elle-même. »<br />
Le personnage dépeint par Gombrowicz dans ce roman, prénommé Witold comme l’auteur, se retrouve piégé par ses<br />
obsessions qu’il associe comme des éléments de rébus et qui ne constituent finalement qu’une sorte de mystère vide qu’on<br />
voudrait boucher « comme le doigt dans la bouche du pendu ».<br />
«I find the key but i return to find an open door» rejoint ce sentiment d’un remplissage mystérieux du vide - une clef pour<br />
ouvrir une porte déjà ouverte.<br />
mv : il y a en effet un écho entre cette conscience piégée qu’évoque gombrowicz et l’inertie qui guette tes pièces.<br />
Sauf que si le manque et l’entropie signent en partie tes pièces, ces dernières cherchent à s’en dégager et à y résister.<br />
Résistance de l’expérience, du faire avec, du « s’y coller ». La manière dont les œuvres effleurent les espaces sans<br />
jamais y adhérer totalement atteste d’une fusion impossible. chacun reste cantonné à ce qu’il est tout en s’afférant à<br />
la rencontre. on pourrait dire que tes œuvres formulent une réponse positive et joyeuse à la vision de gombrowicz,<br />
davantage tournée vers un ordre prédéterminé du malgré soi. Si obsession il y a, notamment dans le ressassement<br />
des codes que tu rejoues à l’intérieur de ton travail, elle reste ouverte et friande d’alliances externes. le mensonge<br />
accueille volontiers celui des autres. ta pratique fait en sorte de se laisser déborder par les logiques qu’elle a pourtant<br />
élaborées, de ne contrôler qu’avec parcimonie sa production, au risque de se faire engloutir par elle.<br />
avril 2009.<br />
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notes :<br />
1. http : www.instantschavires.com<br />
2. « avec lesquelles j’exerçais dans l’ombre » 2007 exposition collective avec FatBoris, Shuck2 et Olivier Soulerin, <strong>Galerie</strong> Villa<br />
des Tourelles, Nanterre.<br />
3. «Une histoire vraie», 2008 Leonor Nuridsany, «l’inertie du héros», 2008 un recueil de Cécilia Becanovic, «absolute silence on<br />
that topic, yes» 2008 d’après la collection de spams de Yoann Gourmel. Ils sont tous trois commissaires d’expositions.<br />
4. « …/… » 2008-2009, Cardenas Bellanger, Paris, « Paradoxe du trésor » 2008-2009, Interface, appartement-galerie , Dijon.<br />
5. « let’s just imitate the real until we find a better one » février-mars 2009 <strong>Galerie</strong> Bonneau-Samames, Marseille.<br />
6. « a move beneath my feet » juin 2009<br />
7. exposition chez Charlie Jeffery, “toilet encounters n°2”, octobre – novembre 2009
© guillaume constantin - 2010