Antoine Blondin UN SINGE EN HIVER

quinze ifs à jets de couleur, accompagnée d’un assaut de
quarante bombes orientales. » Elle reconnut son mari et
Fouquet dans ces silhouettes saccadées et fuligineuses qui
passaient en un instant de l’ombre à la lumière, galopaient
sous un éclairage panique, entre les blockhaus, boutaient
l’étincelle aux postes de feu. L’image imposait si
fortement le spectre de la guerre, malgré les
chrysanthèmes au magnésium, que quelqu’un ne put
s’empêcher de reparler des mines et qu’il s’ensuivit une
grande confusion jusqu’à ce que des volontaires se fussent
proposés pour aller rechercher les artificiers téméraires.
Fouquet s’activait à combiner une batterie de
chandelles romaines, en admirant de temps en temps
Quentin, le torse ruisselant de sueur, le visage barré de
fumée, qui disposait les éléments du « Grand Bouquet
moderne final » : une centaine de bombes tous calibres et
toutes catégories (sic) ; lorsque son compagnon l’attrapa
aux épaules :
— Regarde, foutons le camp.
Sur le sable, les sauveteurs menaçants s’amenaient de
front pour leur couper la retraite et, légèrement derrière
eux, on distinguait Suzanne prête à parlementer. À l’abri
de l’écran provoqué par l’éclat éblouissant du Grand
Bouquet, Quentin entraîna Fouquet vers les rochers. Le
départ tournoyant des comètes au-dessus de leurs têtes
leur dessinait des auréoles de saints. Landru avait disparu
depuis longtemps.
— Si tu en as la force, on va essayer d’escalader la