Antoine Blondin UN SINGE EN HIVER

verdure.
Malgré lui, Fouquet lui emboîta le pas et en s’écartant
mutuellement des fils de fer, ils parvinrent à l’abri des
arbres jusque devant la porte strictement verrouillée.
— Avec un obusier de 37, on en viendrait à bout,
décréta Quentin et il s’oublia à frapper de grands coups
dans le battant.
Une lampe s’alluma sous la marquise ; la porte s’ouvrit
presque aussitôt ; Solange Dillon, la nièce, apparut dans
une robe de chambre écossaise. Elle n’était pas fardée et
son visage altier se durcissait sous ses cheveux tirés pour
la nuit, qui avaient la teinte du granit. La dernière marche
du perron lui faisait comme un socle. Elle toisa de haut ces
deux individus débraillés, dont l’attelage disparate
donnait à flairer le drame.
— C’est vous, monsieur Quentin, qui provoquez ce
tapage à cette heure respectable et vous introduisez dans
les propriétés privées. J’avais cru entendre que vous
poursuiviez une convalescence souhaitable. Vous serait-il
arrivé malheur ?
— Quartier-maître Quentin Albert du corps
expéditionnaire d’Extrême-Orient, détaché à Tchoungking,
fit Quentin en esquissant un garde-à-vous. Nous
venons prendre livraison de la fillette. Veuillez nous la
remettre dans un délai de trois minutes à compter de
maintenant ou vous aurez effectivement des nouvelles de
ma santé.
Il était difficile de mesurer jusqu’où allait la