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Février - Nervure

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www.nervure-psy.com<br />

■ EDITORIAL G. Massé<br />

Pourquoi une<br />

dérogation de plus<br />

pour la psychiatrie<br />

sur l’interdiction<br />

du tabac ?<br />

Le décret qui précise les conditions d’application<br />

de l’interdiction de fumer dans<br />

les lieux affectés à un usage collectif,<br />

paru au Journal Officiel le 16<br />

novembre 2006, est<br />

entré en vigueur le 1 er<br />

février 2007. Il s’applique<br />

aux services<br />

et aux hôpitaux psychiatriques<br />

comme aux<br />

autres lieux de soins.<br />

Après les établissements généraux<br />

ceux de santé mentale<br />

sont donc enfin rattrapés par la question<br />

du tabagisme en pleine évolution en France.<br />

Le tabagisme est un problème de santé publique.<br />

Que ce problème s’impose à tous à<br />

commencer par les malades mentaux, n’est<br />

certainement pas une découverte.<br />

Les interventions de l’Etat se sont fondées jusqu’à<br />

maintenant sur plusieurs justifications normatives<br />

: le consommateur peut être mal informé<br />

de ses choix pour lui-même et pour les<br />

autres, la consommation de tabac induit des<br />

effets supportés par les non fumeurs comme<br />

le tabagisme passif, des consommateurs peuvent<br />

prendre des décisions irrationnelles et marquées<br />

par un déficit du contrôle de soi (1). Quant<br />

à l’intervention publique proprement dite, elle<br />

a pris trois voies : l’information, la taxation, et<br />

l’interdiction.<br />

On a vu poindre rapidement des critiques ou<br />

des réticences du milieu psy relevant que le<br />

recours au tabac est un aspect quasi obligatoire<br />

de la maladie mentale. Effectivement une étude<br />

anglaise (2) indique que 70% des patients hospitalisés<br />

en psychiatrie fument (dont 50% de<br />

gros fumeurs avec plus de 20 cigarettes par<br />

jour) et que de nombreux soignants pensent<br />

que cet état de fait a une fonction thérapeutique,<br />

relaxante, apaisante, de réponse à l’apragmatisme<br />

qui facilite le contact en tant que<br />

(suite page 5 )<br />

Une table ronde sur les troubles bipolaires, une<br />

de plus si nous osons dire, et pourtant à chaque<br />

fois que l’occasion est donnée à des spécialistes de la<br />

question, les débats qui en découlent amènent leur lot<br />

d’intérêts nouveaux. Le concept de trouble bipolaire,<br />

même s’il va chercher ses racines dans les arcanes<br />

de la psychiatrie clinique, prend depuis deux décennies<br />

des colorations bien plus diversifiées que la sacrosainte<br />

psychose maniaco-dépressive. C’est sur cette<br />

base de l’évolution du concept et de sa confrontation<br />

aux réalités de terrain que NERVURE a décidé de<br />

réunir cette table ronde qui était modérée par Philippe<br />

Carrière, psychiatre en Bretagne et Jean-Paul Chabannes,<br />

psychiatre à Grenoble. Elle rassemblait en<br />

outre : Jean-Michel Azorin, professeur de psychiatrie<br />

à Marseille, Béatrice Beaufils-Laffy, praticien hospitalier,<br />

chef de service, à Issy-les-Moulineaux, Michel<br />

Dubec, expert auprès des tribunaux et psychiatre<br />

libéral à Paris, Frédéric Rouillon, professeur de psychiatrie<br />

à Paris.<br />

Jean-Paul Chabannes : Le trouble bipolaire est dans<br />

l’actualité au même titre que la schizophrénie d’ailleurs.<br />

Hippocrate a été le premier auteur à décrire les<br />

réactions transitoires d’allure psychotique qui<br />

surviennent pendant les suites de couches. Désigné par<br />

l’expression « fièvre du lait » au cours du XIXème siècle,<br />

le blues (qui signifie littéralement idées noires ou<br />

cafard) du post-partum est aussi connu sous les termes<br />

de blues ou de « syndrome du troisième jour », de<br />

post-partum blues et surtout de maternity blues, terme<br />

de référence de la littérature anglo-saxonne.<br />

Facteurs de risque<br />

Avant le début de la grossesse, des antécédents psychiatriques<br />

personnels (de dépression gravidique,<br />

postnatale, de toxicomanie…) ou familiaux sont à<br />

rechercher. On interroge la patiente sur d’éventuels<br />

antécédents médicaux ou obstétricaux (facteurs de<br />

risque pour le foetus ou la grossesse comme une<br />

Une nouvelle encyclopédie<br />

psychanalytique<br />

Michel Sanchez-Cardenas : Quelle est l’histoire de<br />

cette nouvelle encyclopédie psychanalytique ?<br />

Ross Skelton : Les Edinburgh University Press m’ont<br />

contacté en 1998 à propos de l’Encyclopédie et j’ai<br />

commencé à travailler dessus cette même année. Je<br />

ne me représentais pas bien ce que cela représentait<br />

comme charge et j’ai téléphoné à deux collègues qui<br />

avaient déjà colligé des encyclopédies. Le premier<br />

m’a répondu : « Vous ne savez pas dans quoi vous<br />

vous engagez, quelle masse de travail cela va vous<br />

donner ! ». Ce que je n’étais pas préparé à entendre<br />

(et, d’un autre point de vue, si j’ai pu craindre m’ennuyer<br />

dans la réalisation de ce travail, je dois vous dire<br />

qu’en fait, cela n’est jamais arrivé !). Le deuxième<br />

m’a dit : « Faites-vous envoyer les notes par les différents<br />

auteurs et constituez, vous même, la liste des entrées ».<br />

Mais là, je ne voulais pas que les entrées aient toutes<br />

l’air d’avoir été écrites par la même personne et je me<br />

Trouble bipolaire -<br />

Environnement<br />

rappelais de ce que le poète irlandais Louis Mac-<br />

Neice appelait « L’ivresse des choses variées ». Suivant<br />

donc le même poète, je décidais d’être « incurablement<br />

pluriel » et donc de faire figurer dans ce<br />

travail des érudits académiques (comme Laplanche ou<br />

Sandler) tout autant que des rebelles (comme Masud<br />

Khan) ou que des « accidents » de la psychanalyse<br />

(comme Tausk et Reich) : tous on apporté d’importantes<br />

contributions. On notera que l’on peut trouver,<br />

également, dans l’Encyclopédie des références à l’impact<br />

du régime nazi ou communiste soviétique sur la<br />

psychanalyse, toujours dans cette optique « plurielle<br />

»… Puis, je me suis entretenu avec James Grotstein,<br />

à Los Angeles, qui m’a fourni quelques indications<br />

intéressantes. De retour en Irlande, je lui ai<br />

demandé s’il aimerait participer à l’aventure. Il a pris<br />

une ou deux semaines de réflexion avant de me dire<br />

oui. Et, en fait, il a supervisé presque tout ce qui<br />

Mais ce trouble a-t-il cessé d’être dans l’actualité et ne<br />

le sera-t-il pas de manière durable ? Les concepts<br />

évoluent, la réalité clinique est là et les questions qui<br />

se posent se multiplient. Qu’en est-il de leurs classements<br />

catégoriels ? Qu’en est-il de leurs aspects dimensionnels<br />

? Comment le concept a-t-il progressé ?<br />

Comment est-il repris en matière médico-légale ? Où<br />

en est la collaboration médecine hospitalière, médecine<br />

de cabinet chez les patients porteurs de tels<br />

troubles ? Les nouvelles avancées thérapeutiques ontelles<br />

un intérêt ? Quelles articulations également avec<br />

le THADA ? Je propose que nous commencions par<br />

un repérage clinique et classificatoire que nous allons<br />

demander à Frédéric Rouillon.<br />

Frédéric Rouillon : Avant tout, je crois nécessaire de<br />

mentionner la place du trouble bipolaire dans le<br />

« hit parade » des maladies. En 1992, l’Ecole de<br />

Santé d’Harvard, conjointement avec l’Organisation<br />

Mondiale de la Santé et la Banque Mondiale, ont<br />

classé toutes les maladies. Ceci grâce à un indice<br />

simple : le nombre d’années perdues entièrement ou<br />

Les troubles psychiques durant la<br />

grossesse et le post-partum<br />

Entretien avec Ross Skelton<br />

(suite page 10 )<br />

■ TABLE RONDE<br />

(suite page 5 )<br />

■ FMC<br />

M. Pellegrin<br />

maladie héréditaire, une mort fœtale in utero ainsi que<br />

des antécédents d’hypofertilité, de fausse couche<br />

spontanée, d’interruption volontaire de grossesse…).<br />

Les facteurs psychosociaux sont à recenser : tout<br />

d’abord, les facteurs environnementaux, une situation<br />

économique et sociale compliquée, des événements<br />

de vie difficiles (décès, problèmes au travail…),<br />

puis des facteurs internes, mauvaise estime de soi,<br />

âge de la mère inférieur à 20 ans, et pour finir des facteurs<br />

relationnels, notamment des difficultés de la<br />

relation mère fille.<br />

Les antécédents psychiatriques sont bien évidemment<br />

centraux et notamment les schizophrénies qui constituent<br />

un facteur de risque spécifique du fait de la<br />

découverte souvent tardive de la grossesse (liée à une<br />

aménorrhée sous neuroleptique et une non connaissance<br />

par la patiente des signes de grossesse), mais<br />

(suite page 8 )<br />

FÉVRIER 2007 1<br />

ISSN 0988-4068<br />

n° 1 - Tome XX - 02/2007<br />

Tirage : 10 000 exemplaires<br />

Directeur de la Publication et de la<br />

Rédaction : G. Massé<br />

Rédacteur en chef : F. Caroli<br />

Rédaction : Hôpital Sainte-Anne,<br />

1 rue Cabanis - 75014 Paris<br />

Tél. 01 45 65 83 09 - Fax 01 45 65 87 40<br />

Abonnements :<br />

54 bd La Tour Maubourg - 75007 Paris<br />

Tél. 01 45 50 23 08 - Fax 01 45 55 60 80<br />

Prix au numéro : 9,15 €<br />

E-mail : info@nervure-psy.com<br />

AU SOMMAIRE<br />

S’ABONNER<br />

à<br />

ÉDITORIAL<br />

Pourquoi une dérogation<br />

de plus pour la psychiatrie<br />

sur l’interdiction du<br />

tabac ? p.1<br />

TABLE RONDE<br />

Trouble bipolaire -<br />

Environnement p.1<br />

FMC<br />

Les troubles psychiques<br />

durant la grossesse et<br />

le post-partum p.8<br />

PSYCHANALYSE<br />

Une nouvelle encyclopédie<br />

psychanalytique p.10<br />

URGENCES<br />

La psychiatrie des<br />

urgences p.11<br />

ÉTHIQUE<br />

A propos du secret p.12<br />

HOMMAGE À<br />

Louis Bertagna p.13<br />

PHÉNOMÉNOLOGIE<br />

Pour une théorie de<br />

la pratique p.14<br />

ANNONCES EN BREF p.17<br />

HOMMAGE À<br />

Louis Bertagna p.13<br />

THÉRAPEUTIQUE<br />

Suivi et réinsertion de<br />

patients psychotiques<br />

présentant une addiction<br />

au cannabis, traités<br />

par RisperdalConsta p.18<br />

La rémission : une<br />

évolution possible<br />

de la schizophrénie p.19<br />

ANNONCES<br />

PROFESSIONNELLES p.22<br />

mais aussi<br />

à la Revue,<br />

c’est si simple<br />

Bulletin d’abonnement p.18


2<br />

LIVRES<br />

Symboles, cryptes et<br />

fantômes<br />

Nicolas Abraham et Maria Torok<br />

Le Coq-Héron, septembre 2006 n°186,<br />

Erès, 16 €<br />

Le dossier présenté a pour ambition de<br />

donner un aperçu - au moyen de huit<br />

contributions qui touchent tant à la théorie<br />

qu’à la clinique et au regard que les<br />

psychanalystes peuvent accorder aux<br />

productions culturelles - de la richesse<br />

et de la diversité des travaux qui prennent<br />

pour repères les recherches de Nicolas<br />

Abraham et de Maria Torok sur<br />

le « symbole psychanalytique » et sur les<br />

« ennemis de l’introjection » que représentent<br />

les « inclusions », voire les « cryptes »<br />

constituées dans le Moi à la suite d’expériences<br />

rendues indicibles par la honte<br />

et la peur, et les « fantômes dans l’inconscient<br />

», construits sous l’influence<br />

transgénérationnelle de ces traumas<br />

psychiques.<br />

La créativité dont les articles témoignent<br />

ne signifie cependant pas que l’œuvre<br />

de Nicolas Abraham et de Maria Torok<br />

et que les recherches de leurs « continuateurs<br />

» aient été accueillies à bras<br />

ouverts dans le monde analytique. Les<br />

travaux doivent essentiellement leur<br />

audience à l’ouverture d’esprit de certains<br />

éditeurs et directeurs de revues et,<br />

surtout, au nombre croissant de psychanalystes<br />

qui se tournent vers l’œuvre<br />

d’Abraham et de Torok parce qu’ils y<br />

trouvent plus d’éléments pour « penser »<br />

leur pratique.<br />

L’enfant autiste et le<br />

modelage<br />

De l’empreinte corporelle a<br />

l’empreinte psychique<br />

Sophie Krauss<br />

Préface de Bernard Golse<br />

Erès, 25 €<br />

Le travail présenté dans cet ouvrage<br />

montre les modalités d’expression de<br />

la construction et de l’évolution de<br />

l’image du corps chez des enfants autistes<br />

et psychotiques à travers le modelage.<br />

Plus généralement il cherche à<br />

étudier les processus psychiques en jeu<br />

dans l’utilisation du modelage, notamment<br />

les mécanismes de la symbolisation<br />

primaire.<br />

Le guide du prescripteur<br />

Collection Psychopharmacologie<br />

essentielle<br />

Stephen M. Stahl<br />

Traduit de l’américain par Marc-<br />

Antoine Croq, Thierry Faivre et Eric<br />

Tran<br />

Sous la direction de Patrick<br />

Lemoine<br />

Médecine- Sciences<br />

Flammarion, 95 €<br />

Ce guide complète l’approche conceptuelle<br />

de Psychopharmacologie essentielle,<br />

paru en 2002. Avec au moins<br />

quatre pages pour chacun des 102<br />

psychotropes présentés, Stephen Stahl<br />

fournit les informations dont un prescripteur<br />

a besoin. Pour chaque médicament,<br />

l’information se répartit en cinq<br />

rubriques : thérapeutique, dosage et utilisation,<br />

effets indésirables, populations<br />

particulières et palmarès.<br />

Thérapeutique précise la classe thérapeutique,<br />

pourquoi le médicament est<br />

communément prescrit, comment le<br />

produit agit, combien de temps il prend<br />

pour agir, que faire s’il est efficace ou<br />

pas, les associations à envisager pour<br />

augmenter la réponse si celle-ci est partielle<br />

ou lors le résistance, et les examens<br />

à prévoir.<br />

Dosage et utilisation précise la fourchette<br />

habituelle des doses, les formes galéniques,<br />

la manière de doser et les conseils<br />

d’utilisation, les signes de surdosage,<br />

l’utilisation au long cours, comment interrompre<br />

le traitement, la pharmacocinétique,<br />

les interactions, ainsi que les<br />

autres mises en garde ou précautions.<br />

Effets indésirables couvre les mécanismes,<br />

propose une liste des effets indésirables<br />

notables, explique ce qu’il faut faire en<br />

cas d’effets indésirables et décrit les<br />

agents à associer. Populations particulières<br />

aborde l’insuffisance rénale, hépatique<br />

ou cardiaque, les personnes<br />

âgées, les enfants et adolescents. Palmarès<br />

énumère les avantages et inconvénients<br />

potentiels et, enfin, recommande<br />

certaines lectures. Pour<br />

chaque médicament, des tableaux sont<br />

placés en face des éléments clé.<br />

Le livre se termine par plusieurs index :<br />

une liste des noms génériques et com-<br />

merciaux des médicaments présentés,<br />

une classification des produits génériques<br />

par indication, et une liste les<br />

substances par classe pharmacologique.<br />

Dans sa préface à cette édition françaisen,<br />

Patrick Lemoine relève qu’« il est<br />

important de savoir comment font nos<br />

confrères d’outre-Atlantique, découvrir<br />

leurs différences en matière de traitements<br />

médicamenteux, comprendre comment<br />

ils prescrivent, à qui, à quelles doses, savoir<br />

ce qu’ils savent. Il ne s’agit en aucun<br />

cas de copier, singer les pratiques américaines,<br />

mais plutôt de s’enrichir de pratiques<br />

différentes, en un mot dé métisser<br />

notre médecine ».<br />

Quatre « Jésus » délirants<br />

Essai de compréhension<br />

Emile Meurice<br />

L’Harmattan, 18,50 €<br />

Ce livre de psychiatrie écrit par un psychiatre<br />

évoque des personnes qui ont<br />

prétendu avoir la personnalité de Jésus<br />

alords que l’on voit naître assez de sectes<br />

dont les gourous s’attribuent des qualifications<br />

de nature religieuse. Ce n’est<br />

pas le cas ici : en effet, les « Jésus » dont<br />

il est question sont des malades mentaux.<br />

Ce livre est donc un ouvrage de<br />

psychopathologie qui raconte de façon<br />

vivante la trajectoire de vie, captivante,<br />

de quatre hommes qui sont devenus<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

malades et ont développé le délire d’être<br />

Jésus ou Dieu. L’un d’entre eux était un<br />

paranoïaque, les trois autres des schizophrènes.<br />

Mais au-delà de la narration,<br />

on tente aussi d’approcher la question<br />

: pourquoi sont-ils devenus<br />

psychotiques ? Et pourquoi le thème<br />

d’être « Jésus » ? Le cheminement des<br />

quatre personnes dont il est question,<br />

est examiné sous un jour particulièrement<br />

humain et il s’ouvre aux préoccupations<br />

spirituelles de ceux qui finiront<br />

par s’identifier à Jésus. Le fait d’être<br />

malade n’enlève pas leur humanité et<br />

ne les empêche pas de rechercher, chacun<br />

à sa façon, un sens spirituel à leur<br />

existence.


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Le Génie et la Folie<br />

en peinture, musique, littérature<br />

Philippe Brenot<br />

Odile Jacob<br />

La vieille idée de la parenté entre génie<br />

et folie trouve des éléments de<br />

réponse dans notre conception des<br />

troubles de l’humeur qui éclaire le mystère<br />

de la créativité et enrichit la lecture<br />

psychanalytique du mouvement créatif.<br />

La psychiatrie contemporaine distingue<br />

l’humeur et la personnalité comme deux<br />

axes de la complexité de l’humain. Si<br />

la personnalité est fortement construite<br />

par l’histoire personnelle, accessible aux<br />

thérapies et à l’analyse, l’humeur et ses<br />

troubles sont plus constitutionnels. Les<br />

variations maniaco-dépressives qui sont<br />

très présentes chez les artistes et créateurs,<br />

sont aujourd’hui connues pour<br />

être fortement liées à des facteurs génétiques,<br />

et font partie de ce facteur humain<br />

qui semble avoir été présent dans<br />

tous les grands moments lors des révolutions<br />

et des grandes découvertes.<br />

L’œuvre semble naître d’un mélange<br />

de la difficulté d’être et d’un principe<br />

énergétique constitutionnel, qui a animé<br />

tous les créateurs.<br />

Les biographies, autobiographies et pa-<br />

thobiographies livrent des témoignages<br />

directs, des analyses ou des opinions<br />

psychiatriques.<br />

Cette lecture des destinées hors du commun<br />

induit des conclusions surprenantes<br />

: l’humeur géniale des créateurs<br />

semble se distribuer très différemment<br />

entre les arts du langage - poésie, littérature<br />

- et les arts non verbaux - plastiques<br />

et musicaux.<br />

Les premiers connaissent une grande<br />

proximité avec les troubles mentaux, la<br />

dépression. L’écrivain s’origine de luimême<br />

et prend un pseudonyme.<br />

Les seconds ont moins de liens avec la<br />

folie, la dépression y est peu fréquente<br />

et on constate que, pratiquement, aucun<br />

peintre ni musicien classique ne<br />

porte de pseudonyme.<br />

Au-delà des critiques que peut soulever<br />

une telle analyse des êtres d’exception,<br />

la cohérence des faits paraît suffisamment<br />

explicite pour accepter l’évidence<br />

d’un facteur propre au génie des créateurs,<br />

que Philippe Brenot a nommé<br />

« facteur humain », et d’une fonction sociale<br />

qu’il qualifie de « fonction chamanique<br />

», tant l’originalité de la démarche<br />

créatrice connaît de points communs<br />

avec le rôle, provocateur et catalyseur,<br />

de la société, du chaman des tribus nomades<br />

de l’ancien monde.<br />

Les territoires face au<br />

vieillissement en Europe<br />

Géographie - Politique -<br />

Prospective<br />

Coordination Gérard-François<br />

Dumont<br />

Ellipses<br />

3<br />

Ce livre montre combien le vieillissement<br />

est, au XXI e siècle, un phénomène<br />

majeur pour les populations et les territoires,<br />

ce qui suppose d’abord de présenter<br />

le concept du vieillissement, sa<br />

nature polysémique (pas moins de quatorze<br />

types de vieillissement et sept<br />

types de gérontocroissance) et ses évolutions<br />

polyformes selon les territoires<br />

français considérés dans leur ensemble,<br />

puis en Europe. La deuxième partie approfondit<br />

les composantes des disparités<br />

géographiques du vieillissement,<br />

que l’on considère cette question selon<br />

les départements français ou selon une<br />

approche spatio-économique à partir<br />

de la notion d’aire urbaine définie par<br />

l’INSEE. Une analyse des diversités territoriales<br />

permet de mieux comprendre<br />

le caractère différencié des situations<br />

et d’insister sur une approche géographique,<br />

éclairée par divers exemples,<br />

comme la Bretagne, la Bourgogne, la<br />

région Centre ou encore la Réunion. Ce<br />

vieillissement, qui concerne la très grande<br />

majorité des territoires français, présente<br />

des conséquences en termes de<br />

logement, de santé, de besoins de population<br />

active, de productivité. Une<br />

troisième partie se tourne vers les territoires<br />

européens, avec des dossiers<br />

traitant de différents pays selon un ordre<br />

alphabétique. Elle montre, notamment,<br />

que l’Allemagne est toujours divisée...<br />

par le vieillissement, celui-ci étant influencé<br />

en Belgique par les migrations<br />

des aînés et demeurant important dans<br />

le contexte post-communiste avec<br />

l’exemple de la Bulgarie. Pour l’Espagne,<br />

on peut se demander si le retournement<br />

récent du mouvement migratoire et son<br />

intensité enraye ou non le vieillissement<br />

des communautés autonomes, avec de<br />

fortes disparités territoriales. Les régions<br />

du pays le plus vieilli au monde, l’Italie,<br />

méritent un examen partticulier, tandis<br />

que la Pologne et ses territoires<br />

connaissent des singularités. Enfin, un<br />

regard doit porter au-delà de la France<br />

et l’Europe, en considérant comment<br />

évolue la réflexion internationale sur le<br />

vieillissement de la population.<br />

Tendresse et cruauté<br />

Dominique Cupa<br />

Dunod, 27 €<br />

L’auteur expose une pensée clinique de<br />

la cruauté et de la tendresse. Ces deux<br />

formes de pulsions d’autoconservation,<br />

les pulsions de cruauté (liées à Thanatos)<br />

et les pulsions de tendresse (liées<br />

à Éros) sont préambivalentes et leur but<br />

commun est la préservation de la vie<br />

somatique et psychique.<br />

Pulsion de cruauté et pulsion de tendresse<br />

étant enchevées dans la vie psychique,<br />

l’auteur rend compte de<br />

cette intrication. De nombreux cas cliniques<br />

servent d’appui pour élaborer<br />

une métapsychologie propre à chacune<br />

de ces deux pulsions. La métapsychologie<br />

de la cruauté est construite à partir<br />

de la pulsion de cruauté de l’enfant,<br />

mais aussi de la cruauté maternelle dont<br />

une des figures est celle du surmoi cruel.<br />

Est proposée une analyse de la cruauté<br />

meurtrière comme destin de la cruauté<br />

primaire, une étude clinique de la relation<br />

vampirique et une réflexion sur le<br />

besoin de se scarifier. La métapsychologie<br />

de la tendresse conduit à reconsidérer<br />

ce que Freud appelait « le courant<br />

tendre » de la pulsion et à discerner<br />

les diverses composantes de la pulsion<br />

de tendresse. Est ainsi montré comment<br />

la tendresse et le sexuel émergent et<br />

s’agencent dans la vie psychique. Le<br />

dernier chapitre, Les rythmes de la tendresse,<br />

aborde les enjeux techniques de<br />

cette conceptualisation pour le psychanalyste.


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

partiellement vis-à-vis de l’espérance<br />

majeure d’existence. Ce travail, extrêmement<br />

sérieux, fait apparaître 5 maladies<br />

mentales dans les 10 plus lourdes.<br />

Les « dépressions » arrivent en 4 ème<br />

position. L’étude s’est poursuivie par<br />

une analyse prospective qui montre<br />

qu’en 2020 les dépressions seront en<br />

2 ème position en terme de coût morbimortalité.<br />

Le trouble bipolaire proprement<br />

dit se classe, lui, en 6 ème position,<br />

et, toutes maladies confondues, il représente<br />

à lui seul 1% des années de vie<br />

perdue. Au plan de la prévalence, nous<br />

oscillons entre 1 et 2% selon les acceptations<br />

critériologiques. Ceci permet<br />

d’embrayer sur ta question qui relie,<br />

ce qui est indiscutable, clinique et nosographie.<br />

Commençons par la nosographie qui a<br />

bien changé. D’abord, parce que nous<br />

avons quitté le cœur de cible de la<br />

maladie décrit depuis 150 ans par Kraepelin,<br />

Baillarger et autres, Falret. Cible<br />

faite de maniaques et de dépressifs<br />

francs pour en arriver à des types diversifiés.<br />

Le type I reste assez proche de<br />

cette ancienne PMD mais viennent<br />

s’ajouter le type II à accès hypomaniaques<br />

comme seule exaltation de<br />

l’humeur, puis le III avec accès pharmacologiquement<br />

induits, le type IV,<br />

etc., etc. Peut-on y voir une boulimie<br />

classificatoire.<br />

Nous n’allons pas tarder à en arriver<br />

au type n° VII. Types I et II sont bien<br />

entrés dans les classifications officielles,<br />

les autres restent encore dans le champ<br />

des hypothèses. Les 2 lignées définies,<br />

l’une par Angst, l’autre par Akiskal diffèrent<br />

sur des détails. Mon impression<br />

est que la multiplication des sous-types<br />

élargit nettement le spectre pouvant<br />

alors donner des chiffres épidémiologiques<br />

déraisonnables allant jusqu’à<br />

20%. Nous glissons également du catégoriel<br />

(type DSM) vers du dimensionnel<br />

avec les notions de tempérament<br />

(hyperthymique). Peut-on décemment<br />

introduire les personnes à tempérament<br />

enjoué dans le champ de la<br />

pathologie, au même titre que les<br />

maniaco-dépressifs francs ? La question<br />

reste en suspens. Intéressante sur<br />

le plan abstrait, cette approche amène<br />

à plein de réserves quand il s’agit<br />

d’aborder un pronostic et des thérapeutiques<br />

peut-être pas du même ordre<br />

d’un bout à l’autre du spectre. Pour<br />

ma part, en s’arrêtant à type I et II,<br />

nous avons déjà bien de quoi faire.<br />

Jean-Paul Chabannes : Et le type III à<br />

états maniaques ou hypomaniaques<br />

pharmacologiquement induits ?<br />

Frédéric Rouillon : Oui, à la rigueur,<br />

mais il faut arrêter la prolifération diagnostique<br />

qui dessert notre pratique et<br />

nos recommandations. Essayer déjà de<br />

bien traiter les types I et II pas assez<br />

pris en charge même dans les pays<br />

occidentalisés, 1 sur 3 serait bien traité<br />

et encore avec 10 années de retard<br />

par rapport au début de la maladie.<br />

Au titre des changements réels dans la<br />

pathologie, je pense que les maniaques<br />

sont moins maniaques que par le passé.<br />

Peut-être est-ce dû aux traitements et à<br />

l’encadrement social (une manie furieuse<br />

est vite prise en compte aujourd’hui).<br />

Mais peut-être y a-t-il un vrai changement,<br />

cela se voit sur les nouveaux cas,<br />

moins caricaturaux qu’avant. Par contre,<br />

plus certainement, et ceci est attesté<br />

par l’épidémiologie, l’âge de début est<br />

de plus en plus jeune. Ce fait n’est pas<br />

uniquement dû au meilleur dépistage.<br />

Cette même épidémiologie montre<br />

aussi des cycles plus courts pour lesquels<br />

l’allongement de la vie joue un<br />

rôle du fait du « dérèglement » constaté<br />

avec le vieillissement. Mais, là encore,<br />

ces dérèglements semblent plus précoces.<br />

Que doit-on mettre en cause :<br />

l’abus d’antidépresseurs, de toxiques<br />

ou d’autres causes plus ou moins élucidées<br />

?<br />

Permettez-moi encore de faire une<br />

remarque sur le thème clinique bipolaire<br />

et actes médico-légaux. Il me<br />

semble que ces derniers sont moins<br />

fréquents et essentiellement liés aux<br />

10 premières années pendant lesquelles<br />

le traitement n’a pas été institué. Cela<br />

valide les efforts de prise en charge, ce<br />

d’autant que les coûts directs de soins<br />

sont faibles par rapport aux coûts indirects,<br />

ce qui n’est pas aisé à faire comprendre<br />

à nos gouvernants.<br />

Jean-Paul Chabannes : Peux-tu donner<br />

une proportion entre coût direct et<br />

coût indirect ?<br />

Frédéric Rouillon : Oui, bien sûr : quand<br />

on investit 2 millions d’euros, on en<br />

gagne 8 si on soigne bien et ce pour<br />

l’ensemble de la psychiatrie, mais pour<br />

les bipolaires (chiffres sérieux), pour 7<br />

Pourquoi une dérogation de plus pour la psychiatrie<br />

sur l’interdiction du tabac ?<br />

lien transactionnel et automédication,<br />

intimement inscrite dans l’institution (3).<br />

On n’est donc pas surpris, du doute,<br />

voire du pessimisme de certains<br />

quant à la possibilité ou l’intérêt de<br />

voir les services de psychiatrie devenir<br />

non fumeurs. Les risques allégués<br />

sont une trop grande dureté pour les<br />

patients, une réactivation de l’agressivité,<br />

ce que les expériences menées<br />

d’interdiction du tabac en milieu psychiatrique<br />

ne confirment en aucune<br />

façon. Dans notre expérience, dans<br />

leur grande majorité les patients<br />

fumeurs souhaitent être mieux informés<br />

et arrêter de fumer.<br />

En fait, le décret du 16 novembre<br />

2006, donne aux services de psychiatrie<br />

un excellent moyen de<br />

prendre en compte la santé physique<br />

de leurs patients, notamment psychotiques,<br />

dont on connaît la surmortalité,<br />

d’aborder une démarche<br />

d’éducation pour la santé, de réduire<br />

le différentiel quant au droit à la santé<br />

avec la population générale, bref de<br />

privilégier une approche globale de la<br />

personne malade comme leur qualité<br />

de vie.<br />

La prévalence du tabagisme chez de<br />

Trouble bipolaire –<br />

Environnement<br />

Table Ronde du 29 novembre 2006<br />

organisée avec le soutien des laboratoires ORGANON et PFIZER<br />

nombreux patients psychiatriques et<br />

chez ceux qui les soignent nécessite<br />

une réflexion collective concernant<br />

la conception de la plupart des<br />

aspects du soin mais aussi de la perception<br />

de la maladie elle-même.<br />

Toute sensibilisation au tabac ne peut<br />

être efficace que si elle s’appuie sur<br />

une alliance thérapeutique, à partir<br />

d’une lecture clinique spécifique, associant<br />

les aspects somatiques de façon<br />

exigeante. L’éthique du soin rencontre<br />

ainsi le respect de la loi qui<br />

s’impose à tous, dont aucun patient,<br />

fusse-t-il psychiatrique ne peut être<br />

exclu avec, en outre, le risque d’une<br />

stigmatisation accrue (4). ■<br />

(1) ETILE F., L’analyse économique des<br />

politiques publiques du tabagisme, Psychotropes<br />

2006, 12, 1, 25-55.<br />

(2) JOCHELSON K., Smoke-free legislation<br />

and mental health units: the challenges<br />

ahead, British Journal of Psychiatry 2006,<br />

189, 479-480.<br />

(3) JARDEL V., Smoking, no smoking...,<br />

Santé Mentale 2006, 112, 14.<br />

(4) LALY Ph., Une affaire d’équilibre...,<br />

Réflexion d’un expert visiteur, Pratique en<br />

santé mentale 2005, 4, 17-18.<br />

milliards investis, 38 économisés, le<br />

rapport est de 1 à 5,5.<br />

Jean-Paul Chabannes : Peux-tu évoquer<br />

ce qu’il y a dans les coûts indirects<br />

?<br />

Frédéric Rouillon : Tout, de la perte de<br />

productivité au coût de la prison.<br />

Jean-Paul Chabannes : Peut-on demander<br />

à d’autres participants leur avis sur<br />

ce qui vient d’être dit ?<br />

Michel Dubec : L’augmentation des<br />

cycleurs rapides me semble aussi due à<br />

un réel changement de structure de<br />

personnalité chez « l’homme moderne ».<br />

Cela se voit souvent chez les jeunes,<br />

ambitieux, réussissant leur carrière en<br />

passant rapidement d’une entreprise à<br />

l’autre... Cette pression sociale ne nous<br />

fabrique-t-elle pas des « hyperactifs obligés<br />

» qui peuvent dans une phase ultérieure<br />

se déprimer et ainsi de suite. Il<br />

me semble que ces personnalités, très<br />

narcissiques, finalement assez fragiles,<br />

centrées sur la nécessité de réussir correspondent<br />

à des caricatures du cinéma<br />

américain où l’on doit faire bonne figure<br />

toute la journée et où on pleure en<br />

rentrant le soir. Il me semble voir ce<br />

genre de cas assez fréquemment en<br />

clientèle.<br />

Jean-Paul Chabannes : Evoquerais-tu<br />

la présence de stresseurs modernes précipitant<br />

certains dans des troubles qui<br />

ne seraient pas apparus dans le cadre<br />

d’une autre organisation sociale ?<br />

Michel Dubec : C’est ça, mais doublé de<br />

cette nécessité d’apparaître fort, autonome,<br />

adaptable, désengagé de toute<br />

relation affective aux choses et aux<br />

êtres. Ceci génère un retrait de la vie<br />

familiale, de la vie affective et rend<br />

peut-être plus sensible aux variations<br />

incontrôlables de l’humeur.<br />

Béatrice Beaufils : J’ai des réserves par<br />

rapport au point de vue de Frédéric<br />

Rouillon. Je vois, moi, de vraies manies,<br />

intenses, à n’importe quel âge et même<br />

comme premier épisode.<br />

Frédéric Rouillon : Oui, mais as-tu l’impression<br />

que c’est aussi fréquent<br />

qu’avant ?<br />

Béatrice Beaufils : Il me semble que<br />

oui.<br />

Frédéric Rouillon : Je ne pense pas que<br />

ça ait disparu mais plutôt que ça se soit<br />

un peu raréfié.<br />

Béatrice Beaufils : On retrouve aussi<br />

assez fréquemment la présence de véritables<br />

caractéristiques psychotiques,<br />

hallucinatoires notamment, peut-être<br />

en rapport avec la prise associée de<br />

cannabis et plus fréquemment dans<br />

certains groupes ethniques. A l’inverse,<br />

nous voyons, de plus en plus souvent,<br />

des troubles du comportement associant<br />

instabilité, impulsivité, labilité thymique<br />

et alcoolisme compulsif… S’agitil<br />

alors de trouble bipolaire ou de<br />

trouble de la personnalité type état<br />

limite, histrionique ou narcissique ?<br />

J’irais plus, dans ces cas, du côté du<br />

diagnostic d’état limite mais ai-je raison<br />

ou tort ? Ces patients posent, en<br />

tout cas, de lourds problèmes en hospitalisation<br />

alors qu’ils arrivent avec un<br />

simple diagnostic de trouble bipolaire.<br />

Philippe Carrière : Est posé là le problème<br />

des limites du diagnostic. Soit<br />

nous sommes devant une extension<br />

indéfinie des concepts, soit nous avons<br />

des problèmes de diagnostic différentiel.<br />

Pour aller encore un peu plus loin, je<br />

pense que nous pouvons évoquer un<br />

vrai changement anthropologique avec<br />

une expression différente de la folie<br />

humaine, aussi d’ailleurs retrouvée dans<br />

la schizophrénie. De plus, les thèmes<br />

délirants ne sont pas les mêmes qu’autrefois.<br />

Jean-Paul Chabannes : Je suivrais assez<br />

Frédéric Rouillon quand il dit qu’on<br />

voit moins de cas caricaturaux et à<br />

expression explosive, et nous avons<br />

quelques décennies de recul dans notre<br />

pratique pour pouvoir comparer. Mais<br />

quand j’écoute Béatrice Beaufils, je<br />

trouve également qu’elle a raison car les<br />

cas qu’elle décrit me semblent être plutôt<br />

récents. Qu’en pense Jean-Michel<br />

Azorin ?<br />

Jean-Michel Azorin : Je voudrais réagir<br />

à partir de l’histoire même du concept.<br />

Deux grandes portes d’entrée apparaissent<br />

pour la psychose maniacodépressive<br />

qui va conduire aux troubles<br />

bipolaires.<br />

- La 1 ère, celle du lien entre dépression<br />

et mélancolie qui n’a pas toujours été<br />

retenu. Etabli dans l’antiquité, il a été<br />

très largement oublié jusqu’à Kraepelin<br />

qui promeut une conception extensive<br />

de l’endogénicité des dépressions.<br />

- La 2 ème, celle du lien entre endogénicité<br />

et bipolarité quasi automatique<br />

que l’on voit arriver de façon plus<br />

moderne. Derrière toute dépression<br />

pourrait se cacher, du fait de causes<br />

génétiques entre autres, une potentialité<br />

maniaque. Toute dépression serait<br />

potentiellement à risque bipolaire.<br />

A ce jour, les choses s’éclaircissent,<br />

nous sommes sensibilisés au fait que<br />

l’unipolarité n’est jamais sûre et ceci<br />

ne serait pas simplement un effet de<br />

mode.<br />

Mais je m’aventurerais un peu sur un<br />

autre aspect, celui de l’histoire de la<br />

psychose. Dans l’antiquité, la psychose<br />

n’existe pas, c’est la folie qui fait loi<br />

avec un continuum normalité/folie et<br />

des tempéraments qui prédisposent à la<br />

folie. Jusqu’à Kraepelin, cette idée reste<br />

présente, la folie maniaco-dépressive<br />

est un continuum avec des tempéraments.<br />

Au début du XX ème siècle, avec<br />

Deny et Camus, la folie maniacodépressive<br />

devient psychose maniacodépressive.<br />

Kleist en 1953 parlera de<br />

psychose bipolaire. Cela psychiatrise<br />

fortement la bipolarité, et la seule continuité<br />

retenue est alors celle avec la<br />

schizophrénie. Aujourd’hui, avec les<br />

divers types et sous-types, cette continuité<br />

maniaco-dépression/normalité<br />

est à nouveau sur le devant de la scène.<br />

Si l’on accepte cette idée, nous n’avons<br />

plus vraiment affaire à une maladie<br />

mais à une potentialité qui peut mal<br />

tourner et devenir maladie mentale.<br />

Ce serait une forme de folie qui aurait<br />

des soubassements dans la normalité.<br />

Jean-Paul Chabannes : Est-ce à dire que<br />

nous serions dans un registre et que<br />

nous pourrions alors passer, grâce à<br />

l’apparition d’un champ symptomatique,<br />

de la norme vers la psychose ?<br />

Jean-Michel Azorin : C’est un peu ça,<br />

d’ailleurs Kraepelin, dans son dernier<br />

article en 1920, emploie le terme de<br />

« registre » en le situant sur le même<br />

plan que l’hystérie ou la paranoïa. Ce<br />

serait des modalités de réactions de<br />

l’être humain et elles pourraient s’autonomiser<br />

chez certains d’où l’idée<br />

<br />

LIVRES<br />

TABLE RONDE ■ 5<br />

Psychothérapies cognitives<br />

des troubles de la<br />

personnalité<br />

Jean Cottraux et Ivy Marie<br />

Blackburn<br />

Masson<br />

Il s’agit de la seconde édition revue<br />

et corrigée de cet ouvrage. Le trouble<br />

de la personnalité, dans une perspective<br />

historicoclinique, devient une<br />

« nouvelle frontière du vingt et unième<br />

siècle ». Afin de définir de façon précise<br />

la notion de personnalité, les auteurs<br />

ont choisi d’en développer plusieurs<br />

aspects. Ils citent les différents<br />

modèles des troubles de la personnalité<br />

: dimensionnels, catégoriels et<br />

structuraux.<br />

Ils reprennent, ensuite, en détails les<br />

théories cognitives axées sur la notion<br />

de schémas proposées par Beck,<br />

Linehan et Young.<br />

Un inventaire des outils permettant<br />

l’évaluation des troubles est également<br />

présenté.<br />

La partie sur la pratique des thérapies<br />

cognitives et les études concernant<br />

la validité de leurs résultats a<br />

été développée. Diverses méthodes :<br />

spécifiques, affectives, cognitives, interpersonnelles<br />

sont exposées.<br />

Des descriptions précises d’études de<br />

cas cliniques ont aussi été ajoutées.<br />

On trouve des illustrations de thérapies<br />

pour chaque groupe de personnalité<br />

selon le DSM IV : excentriques<br />

et bizarres, dramatiques, émotionnelles<br />

et désorganisées, anxieuses et<br />

peureuses.<br />

Le dernier chapitre est nouveau et<br />

récapitule les bases générales de la<br />

thérapie cognitive et comportementale.<br />

L’auteur y détaille la supervision<br />

dispensée aux thérapeutes en formation<br />

à Lyon.<br />

Cet ouvrage didactique constitue un<br />

outil et une aide très complets pour<br />

les professionnels face au pessimisme<br />

que peut susciter le diagnostic de<br />

trouble de la personnalité.<br />

A. Cossin<br />

« Psy » des catastrophes<br />

Dix années auprès des victimes<br />

Préface du Pr Louis Crocq<br />

Christian Navarre<br />

Imago<br />

A partir de nombreux exemples, le<br />

docteur Christian Navarre relate l’histoire<br />

des cellules d’urgence médicopsychologique<br />

dont il a été l’un des<br />

pionniers. Il analyse les différents<br />

troubles pathologiques et décrit les<br />

recours thérapeutiques proposés aux<br />

victimes. Il nous offre ainsi, à travers<br />

son expérience et son parcours, un<br />

témoignage sur la vocation et la passion<br />

de l’aide humanitaire.<br />

L’affirmation de soi par le<br />

jeu de rôle<br />

En thérapie comportementale et<br />

cognitive<br />

Sous la direction de Anne-Marie<br />

Cariou-Rognant, Anne-Françoise<br />

Chaperon, Nicolas Duchesne,<br />

Stéphane Rusinek<br />

Dunod, 22 €<br />

Le jeu de rôle vise à améliorer la communication,<br />

l’aisance sociale, la découverte<br />

de soi. Son animation thérapeutique<br />

ou pédagogique est<br />

complexe et nécessite d’en maîtriser<br />

la méthodologie.<br />

Ce guide propose un panel d’outils<br />

validés immédiatement utilisables et<br />

opérationnels. Ils permettent de monter<br />

des groupes d’affirmation de soi<br />

et d’aider individuellement des personnes<br />

à maîtriser leurs difficultés à<br />

communiquer.


6<br />

LIVRES<br />

■ TABLE RONDE<br />

Espace de réflexion, espace<br />

d’action en santé mentale<br />

au travail<br />

Enquêtes en psychodynamique<br />

du travail au Québec<br />

Institut de psychodynamique du<br />

travail au Québec<br />

Les Presses de l’Université de Laval<br />

Cet ouvrage fait état des travaux réalisés<br />

par les membres de l’Institut de<br />

psychodynamique du travail du Québec,<br />

des chercheurs issus de différentes<br />

disciplines qui partagent une<br />

compréhension commune du lien<br />

entre le travail et la santé mentale.<br />

En mettant l’accent sur les processus<br />

psychiques mobilisés par le travail,<br />

les enquêtes présentées apportent<br />

un éclairage particulièrement intéressant<br />

sur l’organisation collective<br />

des métiers et les mécanismes que<br />

les personnes développent pour faire<br />

face aux nouvelles exigences d’un<br />

travail en profonde mutation. En ouvrant<br />

davantage d’espace à la subjectivité,<br />

d’espace à la réflexion, ces<br />

enquêtes offrent des leviers pour l’action<br />

vers une transformation du travail<br />

et de son organisation.<br />

Le livre se termine par les propos de<br />

Christophe Dejours portant sur la<br />

question de l’action qui apparaît dans<br />

toute clinique et dans toute recherche<br />

en santé mentale au travail. Dans un<br />

monde où tout porte l’individu au<br />

passage rapide en mode de résolution<br />

de problèmes, les chercheurs en<br />

psychodynamique du travail n’échappent<br />

pas aux pressions qui viennent<br />

des milieux de travail, de la communauté<br />

des chercheurs, des organismes<br />

subventionnaires et, finalement, de<br />

leurs propres désirs de contribuer à<br />

changer ces espaces qui leur semblent<br />

trop souvent attaquer la santé<br />

mentale au travail.<br />

Psychosociologie et<br />

intervention<br />

Jean Dubost<br />

Avant-propos de Dominique<br />

Fablet<br />

L’Harmattan, 15 €<br />

Fréquent dans le langage courant, le<br />

vocable intervention - ainsi que des<br />

termes voisins : consultation, recherche-action<br />

- sert à désigner dans<br />

une acception plus technique un type<br />

d’activités proche mais distinct de la<br />

formation, des études ou d’autres<br />

formes encore d’expertise. En fonction<br />

des systèmes de références théoriques<br />

privilégiés et/ou des démarches<br />

préconisées, on distingue plusieurs<br />

types d’intervention : stratégique institutionnelle,<br />

socioanalytique, sociopédagogique,<br />

sociopsychanalytique...<br />

Cet ouvrage rassemble plusieurs textes<br />

qui traitent de l’intervention psychosociologique.<br />

Après des « remarques<br />

sur l’origine et l’évolution d’une pratique<br />

d’intervention psychosociologique<br />

» un second texte est consacré<br />

à des interventions en milieu ouvert.<br />

Le troisième présente un essai de clarification<br />

théorique des pratiques qui<br />

a d’abord été nourri par le travail en<br />

milieu ouvert avant de l’être par le<br />

retour à des activités de formation et<br />

d’intervention dans les organisations.<br />

Le quatrième texte complète le précédent<br />

en réfléchissant aux sources<br />

techniques où puisent intervenants<br />

et formateurs et aux relations qu’ils<br />

entretiennent avec les notions de méthode,<br />

de technique, de technologie<br />

ou d’ingénierie. Enfin, celui qui clôt<br />

ce recueil réfléchit aux rapports et<br />

disjonctions entre la sphère universitaire<br />

(recherche et enseignement)<br />

et la sphère professionnelle (études,<br />

formation, consultation, intervention),<br />

sur leurs apports respectifs à la discipline<br />

en tant que science sociale<br />

spécifique.<br />

<br />

d’un diagnostic dimensionnel. Cela<br />

répondrait assez efficacement au problème<br />

des personnalités. Par exemple,<br />

une note bipolaire chez un schizoïde<br />

n’aurait rien à voir avec une tendance<br />

bipolaire sur une personnalité mieux<br />

structurée.<br />

Jean-Paul Chabannes : Du coup, le<br />

trouble bipolaire type 1 serait une<br />

extrémité du registre.<br />

Jean-Michel Azorin : Oui, et c’est une<br />

autre manière de voir le problème.<br />

Cela a une consistance historique et,<br />

du coup, le terme psychose devient<br />

un lapsus de l’histoire.<br />

Jean-Paul Chabannes : Et pourtant les<br />

auteurs justifient assez bien leur définition<br />

de psychose en cela que, pendant<br />

l’accès, le patient est vraiment projeté<br />

dans un monde en rupture avec le<br />

réel.<br />

Jean-Michel Azorin : Certes, mais il s’agit<br />

d’une acception peu spécifique du<br />

terme psychose. En tout cas, nous<br />

sommes loin de la conception actuelle<br />

qui se limite à une présence de « délire<br />

» ou « hallucinations ».<br />

Frédéric Rouillon : En remontant l’histoire<br />

jusqu’à Kraepelin et au-delà, le<br />

lien dépression/manie ne laisse pas de<br />

place à l’unipolarité.<br />

Jean-Michel Azorin : Oui, mais dans la<br />

PMD, il y a, outre les bipolaires d’aujourd’hui,<br />

toutes les dépressions.<br />

Frédéric Rouillon : Si on résume, c’est<br />

Kraepelin qui conceptualise les troubles<br />

de l’humeur, Falret, Baillarger et<br />

consorts apportent leur contribution et<br />

un siècle plus tard (vers 1950), Angst,<br />

Perry puis Akiskal affirment que bipolaire<br />

et unipolaire, ce n’est pas forcément<br />

le même registre. Dans le DSM,<br />

nous retrouvons cette tendance : les<br />

troubles bipolaires et les dépressions<br />

récidivantes (dysthymie, états dépressifs<br />

majeurs récurrents, états dépressifs<br />

récurrents brefs). Il n’en reste pas moins<br />

que, dans la pratique, chez les dépressifs<br />

récidivants, nous avons toujours<br />

l’inquiétude d’un trouble bipolaire non<br />

encore révélé. Ceci a des conséquences<br />

en matière de traitement pharmacologique,<br />

c’est d’ailleurs un des moteurs<br />

de l’apparition des antipsychotiques<br />

dans le trouble bipolaire.<br />

Qui aujourd’hui a raison, des détenteurs<br />

de l’approche Kraepelinienne ou<br />

des disciples de Angst ? Les troubles<br />

de l’humeur forment-ils une entité ou<br />

doit-on considérer deux pools : les<br />

troubles bipolaires et les dépressions<br />

unipolaires.<br />

Reste la question subsidiaire des<br />

troubles de la personnalité dans certains<br />

cas de dépression, troubles de la<br />

personnalité à mon sens de plus en<br />

plus courants.<br />

Philippe Carrière : Il reste que, même si<br />

le terme psychose a été mis à toutes les<br />

sauces, nous voyons aujourd’hui réapparaître<br />

des rapprochements entre psychoses<br />

(schizophrénie en tête) et<br />

troubles bipolaires, ne serait-ce que<br />

dans la recherche génétique.<br />

Jean-Michel Azorin : Question intéressante<br />

mais dans la psychose maniacodépressive,<br />

le terme psychose est uniquement<br />

descriptif. Historiquement, il<br />

veut dire « qui atteint l’ensemble de la<br />

personnalité » sans en préciser la cause.<br />

En revanche, le sens moderne, qui provient<br />

des études américaines réalisées<br />

dans les années 1970, doit sa validité,<br />

au fait notamment que des symptômes<br />

dits de 1 er rang de la schizophrénie :<br />

hallucinations, délires, syndrome d’influence<br />

peuvent se retrouver dans les<br />

troubles bipolaires. Ultérieurement, il<br />

a été décrit la présence possible de ces<br />

symptômes dans d’autres pathologies<br />

(certains troubles anxieux), si bien que<br />

le terme psychose est devenu une<br />

dimension et non une spécificité liée à<br />

une maladie. Ceci permet de poser<br />

aujourd’hui qu’il existe des troubles<br />

bipolaires avec signes psychotiques,<br />

mais aussi des apparentés de 1er degré<br />

avec une certaine propension à faire<br />

des délires, indépendante de la présence<br />

de la bipolarité. L’idée moderne<br />

de psychose serait : « propension à<br />

délirer, à halluciner face à un stress ».<br />

Si cette dimension « psychotique » est<br />

indépendante du trouble, il est possible<br />

d’admettre que d’autres dimensions<br />

telles que les troubles de personnalité<br />

puissent venir marquer de leur<br />

empreinte le trouble affectif. Ainsi, à<br />

la limite un sujet qui aurait une personnalité<br />

très forte pourrait parvenir à<br />

endiguer la propension bipolaire. On en<br />

revient donc à l’idée de spectre ou de<br />

registre découlant du continuum normalité/bipolarité.<br />

Béatrice Beaufils : J’ai une interrogation<br />

ou plutôt une remarque. Je suis réservée<br />

sur ce thème du continuum. Etre<br />

médecin implique que l’on s’occupe<br />

de malades. Je pense que l’hyperthymique,<br />

qui n’a pas eu d’épisode clairement<br />

pathologique, n’entre pas dans<br />

le champ de la médecine.<br />

Le trouble bipolaire, s’il débute à l’adolescence<br />

ou chez le jeune adulte, s’accompagne<br />

très souvent de caractéristiques<br />

psychotiques (hallucinations<br />

notamment) ; l’erreur de diagnostic, au<br />

profit du trouble schizophrénique est<br />

courante justement parce que les symptômes<br />

psychotiques sont au premier<br />

plan. Pourtant, ces patients ont un<br />

trouble bipolaire et ne reçoivent alors<br />

pas le traitement idoine.<br />

Philippe Carrière : Je ne suis pas certain<br />

que ton point de vue soit en opposition<br />

avec celui de Jean-Michel Azorin.<br />

Vous êtes seulement sur deux terrains<br />

différents : l’histoire et l’épistémologie<br />

pour Jean-Michel Azorin, la pratique<br />

clinique pour toi.<br />

Béatrice Beaufils : Oui, oui, mais moi je<br />

me démarque assez nettement de l’idée<br />

de spectre.<br />

Frédéric Rouillon : Il est possible d’admettre<br />

qu’un phénomène peut être<br />

dimensionnel et l’intervention médicale<br />

se faire à partir d’un seuil, c’est le<br />

modèle de l’HTA. Je vais d’ailleurs être<br />

à la fois d’accord avec toi et avec Jean-<br />

Michel Azorin. Je remets en cause l’idée<br />

de pathologies mentales caractérisées et<br />

je suis plus pour la notion d’enchevêtrement<br />

de dimensions variées et multiples,<br />

dépassant un seuil qui les rendrait<br />

pathologiques. Ainsi, Béatrice, tu<br />

pourrais convenir qu’il existe des schizotypies,<br />

des schizoïdies, des schizophrénies,<br />

des schizophrénies gravissimes<br />

et de l’autre côté des hyperthymiques,<br />

des cyclothymiques, des<br />

maniaques type I, type II.<br />

Béatrice Beaufils : Oui, mais hélas ça<br />

ne m’aide pas vraiment à conceptualiser.<br />

Frédéric Rouillon : Pour moi, c’est l’inverse,<br />

les dimensions m’aident à<br />

conceptualiser et également à chercher.<br />

D’ailleurs en génétique, nous nous<br />

orientons vers les endophénotypes<br />

(dimensions transmissibles). Au fond,<br />

une catégorie ne serait qu’un patchwork<br />

de dimensions.<br />

Jean-Michel Azorin : La pratique clinique<br />

nous éclaire un peu dans ce<br />

domaine car les patients n’adhèrent<br />

pas à notre discours trop attaché à des<br />

catégories et à des modèles fermés.<br />

Béatrice Beaufils : Là, je vous rejoins<br />

car la validité de nos cadres nosographiques<br />

doit nous inspirer beaucoup<br />

d’humilité. Par contre, nous avons<br />

besoin de repères, pour moi il est<br />

nécessaire que les gens soient clairement<br />

dans le champ de la maladie.<br />

Permettez-moi un aparté concernant<br />

un intérêt personnel, celui de la peinture.<br />

Etonnamment de 1530 à 1620,<br />

de très nombreux peintres souffrent<br />

de mélancolie et leur histoire se termine<br />

souvent par un suicide ou dans le<br />

retrait. C’est la seule fois dans l’histoire<br />

que l’on retrouve ce phénomène de<br />

manière aussi massive. Ne serait-ce pas<br />

lié au contexte culturel : la Réforme, le<br />

sac de Rome, la contestation massive<br />

de la religion catholique.<br />

Philippe Carrière : Cela amène à un<br />

élargissement du débat. La Réforme<br />

c’est quoi ? C’est le fait que l’homme,<br />

même sans l’Eglise, peut avoir un rapport<br />

direct avec Dieu, qu’il doit « faire<br />

avec » sa culpabilité, mais aussi qu’il<br />

peut se sauver par ses actes.<br />

Béatrice Beaufils : C’est vrai pour les<br />

catholiques mais les protestants croient<br />

au salut par la grâce et à la prédestination<br />

; la culpabilité n’est pas forcément<br />

présente pas plus que la certitude<br />

de solutions aux douleurs humaines.<br />

Jean-Michel Azorin : Mis à part cet<br />

aspect, le lien créativité/bipolarité est<br />

un fait.<br />

Jean-Paul Chabannes : Les épidémiologies<br />

faites par M. Asberg et H. Akiskal<br />

montrent 27 à 32% de troubles<br />

bipolaires chez les artistes, chiffre très<br />

au-dessus de ceux retrouvés en population<br />

générale.<br />

Philippe Carrière : Cela va permettre<br />

une transition intéressante. Quand tu te<br />

poses en clinicienne, quels seraient les<br />

outils dont tu aurais besoin ? Et pour<br />

quels types de prises en charge : hôpital,<br />

psycho-éducation, groupes de parole...<br />

?<br />

Béatrice Beaufils : Je dirais que le trouble<br />

bipolaire me pose peu de problèmes<br />

dans l’exercice quotidien. Les choses<br />

paraissent assez codifiées et finalement<br />

assez simples dans 90 % des cas. Ce<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

qui m’ennuie plus, c’est ce diagnostic de<br />

schizophrénie posé indûment dès qu’il<br />

y a des hallucinations.<br />

Philippe Carrière : Comment incluraistu<br />

les bouffées délirantes aiguës ?<br />

Béatrice Beaufils : Certaines ne sont<br />

pas une entrée dans la schizophrénie<br />

mais un véritable accès maniaque et<br />

pourtant beaucoup de nos collègues<br />

vont vers la schizophrénie, à mon sens,<br />

à tort et trop rapidement.<br />

Philippe Carrière : Dans ce cas, tu serais<br />

contre la prescription d’antipsychotiques<br />

?<br />

Béatrice Beaufils : Pas toujours, mais<br />

par contre je favorise le thymorégulateur.<br />

L’antipsychotique devient, éventuellement,<br />

un complément pour un<br />

temps. Les benzodiazépines ont aussi<br />

une place en cas d’agitation.<br />

Philippe Carrière : Chez un jeune de<br />

17 ans, en état de BDA, tu évoquerais<br />

le lithium ?<br />

Béatrice Beaufils : Peut-être, le valproate,<br />

la carbamazépine ou ses dérivés en<br />

première intention.<br />

Frédéric Rouillon : Le lithium rentre de<br />

plus en plus dans les tiroirs. 10% des<br />

troubles bipolaires seulement en reçoivent.<br />

Mais uniquement 1/5 ème de la<br />

cible (tous les troubles bipolaires) est<br />

traité par thymorégulateur. Et pourtant,<br />

le lithium a quand même largement<br />

fait ses preuves.<br />

Jean-Paul Chabannes : Et en libéral,<br />

comment se passent les choses ?<br />

Michel Dubec : Les patients sous lithium<br />

qui vont bien ne sont suivis par nous<br />

que pour la surveillance.<br />

Frédéric Rouillon : Restent quelques<br />

contre-exemples. Je pense à ce patient<br />

1ère Journée Nationale des Equipes Mobiles<br />

Spécialisées en Psychiatrie<br />

le 16 mars 2007<br />

organisée par le Service d’Appui<br />

« Santé Mentale et Exclusion Sociale » (SMES) et<br />

le Centre Hospitalier Sainte-Anne sur le thème<br />

Echanges de pratiques<br />

Les Equipes Mobiles Spécialisées en Psychiatrie ont été créées pour répondre<br />

aux besoins des personnes les plus démunies et présentant une souffrance<br />

psychique on une pathologie mentale. Qu’elles soient récentes ou plus anciennes<br />

toutes font émerger une pratique issue de celle des secteurs psychiatriques,<br />

de structures associatives, caritatives ou pas, ou encore d’organisations<br />

humanitaires.<br />

Le recul de ces années d’expérimentations quotidiennes sur le terrain et<br />

d’avancées, le plus souvent sur un mode empirique, permet aujourd’hui de<br />

pouvoir échanger ces expériences, espoirs, déceptions, limites et contraintes.<br />

La circulaire du 23 novembre 2005 « relative à la prise en charge des besoins<br />

en santé mentale des personnes en situation de précarité et d’exclusion et à la<br />

mise en œuvre d’équipes mobiles spécialisées en psychiatrie » précise maintenant<br />

les publics visés, les missions et les principes d’action ainsi que la palette<br />

d’actions mises en œuvre ou à mettre en œuvre par les équipes. En ce qui<br />

concerne ces dernières, les actions doivent être dirigées :<br />

- en direction des personnes en situation de précarité et d’exclusion (permanences,<br />

entretiens individuels, accueils, orientations et accompagnements,<br />

groupe d’échange, ateliers thérapeutiques)<br />

- en direction des acteurs de première ligne (actions de formation et de reconnaissance<br />

et d’échanges de pratiques et de savoirs, développement du<br />

travail en réseau à partir de situation cliniques, soutien des équipes par informations,<br />

conseils, supervisions) ;<br />

- en direction d’un réseau formalisé de partenaires, dans une fonction d’interface,<br />

au sein de l’établissement de rattachement de l’équipe ( accord préalable<br />

de tous sur les modalités d’intervention, projet d’établissement, protocole,<br />

règlement intérieur,...) mais également formalisation de partenariats à<br />

J’extérieur de l’établissement (SAU, PASS,...) voire création de réseaux de<br />

santé.<br />

Cette « 1ère Journée Nationale des Equipes Mobiles Spécialisées en Psychiatrie »<br />

s’inscrit dans cet échange de pratiques et de savoirs. Posters, communications<br />

en ateliers, toutes formes d’échanges et de supports seront bienvenus afin<br />

que l’on apprenne tous des avancées des uns et des autres : limites, pièges,<br />

pierres d’achoppement ou axes de développement,...<br />

Inscriptions par e-mail à : smes@ch-sainte-anne.fr ou par courrier à : Service SMES, Centre<br />

Hospitalier Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75674 Paris Cedex 14.


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

qui va parfaitement bien, il est sous<br />

lithium depuis 15 ans et décide d’arrêter.<br />

Après quelques réticences, on<br />

accepte et finalement on découvre<br />

quelque temps après une manie furieuse.<br />

Michel Dubec : On cède parfois sous la<br />

pression et j’évoquerais en particulier la<br />

volonté de grossesse.<br />

Philippe Carrière : Si on revient à la<br />

prise en charge hospitalière et aux<br />

comorbidités, au-delà des troubles de la<br />

personnalité, que peut-on dire des<br />

addictions ?<br />

Béatrice Beaufils : C’est aussi pour moi<br />

un problème. Comment conceptualiser<br />

tous ces troubles comportementaux :<br />

crises clastiques, états d’agitation que<br />

l’on pourrait considérer comme des<br />

états maniaques mais qui sont souvent<br />

secondaires à une prise d’alcool ou de<br />

toxiques ? Faut-il les retenir comme<br />

bipolaires ? Je ne pense pas car leur<br />

suivi me semble plus complexe, je les<br />

vois plutôt comme des troubles de la<br />

personnalité type état limite alors que<br />

quelques collègues « modernes » évoquent<br />

un trouble bipolaire de type III.<br />

Vraiment comment conceptualisezvous<br />

ces cas ?<br />

Jean-Paul Chabannes : Le bipolaire de<br />

1970 et celui de 2007, avez-vous l’impression<br />

qu’il s’agit des mêmes ?<br />

Frédéric Rouillon : Mais est-ce que ce<br />

sont les malades qui ont changé ou<br />

est-ce que ce sont nos conceptions qui<br />

ont amené à faire du trouble bipolaire<br />

un fourre-tout un peu trop large ?<br />

Béatrice Beaufils : Tous ces patients que<br />

j’évoquais me font poser la question<br />

suivante : comment les soigne-t-on ?<br />

Que met-on en place d’un peu novateur<br />

et efficace ? Le bipolaire type I ça<br />

va, c’est simple, mais tous ces cas moins<br />

typiques qui se rapprochent plus des<br />

troubles de la personnalité ?<br />

Jean-Paul Chabannes : Question à<br />

Michel Dubec : vois-tu ces cas en cabinet<br />

? Et quelle en est leur gestion ?<br />

Michel Dubec : En cabinet, nous voyons<br />

des « psychopathes socialisés » avec qui<br />

il est possible de négocier et si un traitement<br />

les soulage, ils adhèrent. Les<br />

psychopathes vrais sont plus pour l’hôpital<br />

ou la prison. Ils ressemblent plus à<br />

des desperados aux perspectives de vie<br />

nihiliste. Les nôtres, souvent cadres,<br />

parfois ambitieux, adhèrent à un traitement<br />

qui les régule car ils en tirent<br />

avantages.<br />

Béatrice Beaufils : Et si on abordait un<br />

concept un peu nouveau, mais à mon<br />

sens pertinent dans ces cas : l’hyperactivité.<br />

Jean-Paul Chabannes : J’ai lu l’ouvrage<br />

de François Bange, c’est très intéressant.<br />

Si cela ne correspond pas encore<br />

à grand-chose dans ma pratique clinique,<br />

je suis quand même confronté à<br />

cette réalité dans une collaboration<br />

avec un confrère libéral qui s’y intéresse<br />

et les patients que nous voyons en<br />

commun sont vraiment bien décrits<br />

dans le livre de François Bange.<br />

Béatrice Beaufils : Comment tu les<br />

décrirais ?<br />

Jean-Paul Chabannes : Ceux que j’ai<br />

vus sont cadres, assez haut placés, ils<br />

décrivent des passages d’instabilité,<br />

d’énervement, de difficultés à se<br />

concentrer et pourtant ils font mille<br />

choses. Leur socialisation reste correcte<br />

mais ils ont des problèmes pour garder<br />

des copains, une compagne. L’un<br />

d’eux m’a dit « quand je me regarde, je<br />

ne me supporte pas ». J’aurais pu les<br />

prendre pour des hypomanes, mon<br />

confrère me propose de les voir<br />

comme hyperactifs et de les traiter<br />

comme tels et oh ! surprise, ça marche.<br />

Béatrice Beaufils : Moi j’en vois d’un<br />

autre type : à la limite du retard mental,<br />

déchaînés et rejetés depuis leur plus<br />

jeune âge, boucs émissaires depuis toujours.<br />

Leurs familles n’en veulent plus.<br />

Leur insertion est impossible. Le traitement<br />

spécifique peut être miraculeux.<br />

Frédéric Rouillon : Je ne vois pas ceci<br />

comme un trouble caractérisé. Ne<br />

serait-ce pas une mode ? Ceux que j’ai<br />

pu approcher m’ont plus donné l’impression<br />

d’une caractéristique de fonctionnement<br />

cognitif avec déficit de l’attention<br />

leur donnant une modalité de<br />

zapping particulière. Si c’est une maladie,<br />

il faudrait m’expliquer pourquoi<br />

elle est arrivée en 2000 et pourquoi<br />

elle serait absente de l’histoire de la<br />

médecine. De plus, tous ceux qui font<br />

du THADA n’ont pas la même<br />

approche clinique.<br />

Jean-Paul Chabannes : Ce dont je peux<br />

témoigner c’est de la révolution qu’ils<br />

décrivent après un an de traitement<br />

spécifique mais cela ne concerne pour<br />

moi que 5 ou 6 personnes.<br />

Frédéric Rouillon : Je vais te proposer<br />

une métaphore : « un individu ne peut<br />

pas grimper le Ventoux à bicyclette, tu le<br />

charges en EPO et il grimpe ». Ceci ne<br />

signifie pas que le fait de ne pouvoir<br />

monter est une maladie.<br />

Jean-Paul Chabannes : Mon idée était<br />

plus simple et se limitait au plan pharmacologique<br />

sur des cas déjà très épurés<br />

en amont.<br />

Frédéric Rouillon : Oui, mais la validation<br />

par la pharmacologie ne me paraît<br />

pas concevable ni convenable.<br />

Béatrice Beaufils : Cette efficacité thérapeutique<br />

ne nous pousse-t-elle pas à<br />

réfléchir un peu plus avant au problème<br />

?<br />

Frédéric Rouillon : Je ne souscris pas à<br />

l’analyseur nosographique que serait<br />

le médicament, même si l’intervention<br />

médicamenteuse n’est pas sans intérêt.<br />

En tout cas, si le THADA est aussi fréquent<br />

(4% selon les américains), alors<br />

qu’il n’existait pas il y a 20 ans, c’est<br />

que nous sommes devant une épidémie<br />

et nous pouvons affirmer que la<br />

société a vraiment fait quelque chose<br />

pour que cela se développe.<br />

Philippe Carrière : Je vais encore essayer<br />

une transition mais cette fois-ci vers<br />

l’aspect médico-légal. Il n’y a pas si longtemps,<br />

dans un Congrès des SMPR,<br />

on a pu entendre qu’il n’y avait pas de<br />

maniaco-dépressifs en prison. En fait,<br />

si on fait des enquêtes (voir Falissard et<br />

Rouillon), il y a des bipolaires en prison.<br />

Est-ce dû aux nouvelles limites du<br />

concept ? Il y a quelques années,<br />

Suzanne Mc Elroy décrivait la cleptomanie<br />

comme étant dans 30% des cas<br />

liée à un trouble bipolaire. Ceci est vrai<br />

pour bien d’autres troubles du comportement.<br />

Mais la bipolarité n’est pas<br />

vue d’emblée et se révèle en prison.<br />

Michel Dubec : La grande mode du<br />

jour c’est de dénoncer la présence de<br />

malades mentaux en prison. Je vais<br />

vous surprendre mais la grande nouvelle<br />

c’est qu’il n’y aurait pas de troubles<br />

bipolaires en prison. Dans un numéro<br />

récent de l’Information Psychiatrique,<br />

un article de référence, fait par d’éminents<br />

confrères, donne des recommandations<br />

cliniques en psychiatrie<br />

médico-légale. Il faudrait faire très attention<br />

pour ne rien occulter et pourtant<br />

le trouble bipolaire n’est jamais évoqué.<br />

C’est extraordinaire. Peut-être que<br />

le trouble bipolaire est la maladie de<br />

l’homme normal sauf pendant les accès.<br />

Si je schématisais dans le champ médico-légal,<br />

je dirais que l’échelle de référence<br />

n’est plus le crime mais la dan-<br />

gerosité. Dans ce cadre, il y a des psychopathes<br />

qui vont crescendo de l’impolitesse<br />

au pire. Or, l’instabilité, l’impulsivité,<br />

l’incapacité à freiner son désir<br />

sont communs au psychopathe et à<br />

l’hypomane. Mais si un psychopathe<br />

était hypomane, cela majorerait sa dangerosité.<br />

A l’autre bout, il y a ceux qui<br />

commettent des crimes atroces mais<br />

qui ne sont pas dangereux. C’est celui<br />

qui, après avoir tué sa femme, ses<br />

enfants, monte à l’étage tuer ses parents<br />

et au passage tue le chien. C’est le cas<br />

des mélancoliques d’ailleurs ils tentent<br />

souvent de se suicider. Certaines affaires<br />

célèbres ont laissé dans ce domaine<br />

des débats judiciaires et sociaux très<br />

contrastés. Même les experts ont de la<br />

peine à déresponsabiliser une mère<br />

mélancolique qui a tué ses enfants.<br />

En prison, les troubles bipolaires ne<br />

sont pas trop difficiles à gérer. Les dissociés,<br />

eux, sont ingérables car pour le<br />

surveillant ils n’ont pas un contact<br />

logique et la relation de force ne<br />

marche pas. D’ailleurs, on les retrouve<br />

souvent au mitard, coupés des<br />

autres, dans un espace de 5 m 2 comme<br />

à l’isolement. Il y en a même un qui est<br />

mort de faim il y a quelques années.<br />

Chez les bipolaires, la relation de force<br />

marche sauf pour les grandes manies.<br />

Se pose également le problème de l’article<br />

D398. Les services d’accueil voient<br />

toujours venir d’un meilleur œil un<br />

mélancolique ou un maniaque qui<br />

repartira en prison dans 15 jours ou 3<br />

semaines qu’un schizophrène, surtout<br />

s’il a décapité un surveillant…<br />

Pour ce qui est du traitement, il est<br />

plus aisé en prison avec les bipolaires,<br />

qui acceptent de se soigner, qu’avec<br />

les schizophrènes.<br />

En prison, par ailleurs, la dépression<br />

est quasi normale et tout le monde fait<br />

quotidiennement avec. Ce qui est plus<br />

difficile, ce sont les comorbidités<br />

troubles bipolaires et troubles de la personnalité.<br />

Il arrive qu’on ne voit plus<br />

que le côté psychopathique et qu’on<br />

oublie la bipolarité. Ainsi, le sujet est<br />

moins considéré comme un malade et<br />

plus comme un gêneur sociopathe.<br />

Autre phénomène qui relève de l’exercice<br />

expertal : la difficulté à retrouver,<br />

à ressentir, à décrire ce qui s’est passé<br />

dans le moment aigu d’un trouble bipolaire,<br />

alors que chez le schizophrène<br />

l’atmosphère de discordance est toujours<br />

présente. La surexcitation, par<br />

exemple, est fréquente dans les crimes<br />

passionnels : « je lui ai donné 3 coups de<br />

couteau » , en fait, il y a 40 impacts.<br />

Cette obnubilation est-elle secondaire<br />

à l’acte ou est-elle le moteur de l’acte ?<br />

Et pourtant, c’est souvent le sujet luimême<br />

qui a appelé la police.<br />

Toujours dans ce registre des troubles<br />

de l’humeur, je vois parfois des dépressions<br />

profondes mais liées à des phénomènes<br />

exogènes. Pour exemple, le<br />

sujet qui voit sa femme partir, le<br />

pavillon à vendre, les enfants résider<br />

ailleurs, en un mot un univers qui<br />

s’écroule et qui plonge le sujet dans<br />

une humeur dépressive grave mais pas<br />

mélancolique. Je pense qu’il faut pouvoir<br />

atténuer sa responsabilité pour les<br />

actes qu’il peut commettre.<br />

J’ai passé sous silence les hypomanes<br />

prodigues que l’on arrive à protéger<br />

par la loi du 3 janvier 1968 même si,<br />

lors du 1er accès, ils perdent une partie<br />

de leur patrimoine. Le psychiatre<br />

peut dans ce cas jouer un rôle capital.<br />

Philippe Carrière : Sauf peut-être dans<br />

les cas de délits où les experts ne sont<br />

pas appelés. On sait qu’il y a plus<br />

d’actes de délinquance chez les bipolaires<br />

: cleptomanie, abus sexuels, etc…<br />

et pourtant, souvent, tout est fait<br />

comme s’il s’agissait de sujets normaux<br />

ce qui fait d’ailleurs « râler » les familles.<br />

Michel Dubec : J’émettrais une réserve<br />

sur les abus sexuels. L’idéal normothymique<br />

est toujours présent chez les<br />

grands pervers. Je n’ai jamais vu un<br />

grand abuseur varier dans son humeur,<br />

il s’équilibre autour de la gêne qu’il<br />

produit à autrui. Ce n’est pas la même<br />

chose que l’hypomane qui met 10 fois<br />

de suite la main aux fesses des femmes<br />

qui l’entourent et se retrouve arrêté.<br />

Hélas, tout est mis dans le même sac<br />

mais nous, psychiatres, nous devons<br />

montrer les nuances.<br />

Jean-Paul Chabannes : Je viendrais poser<br />

une autre question. Celle du devenir en<br />

vieillissant des bipolaires. Il me semble<br />

que nous voyons de plus en plus de<br />

catastrophes évolutives la soixantaine<br />

entamée. Peut-on réintroduire la notion<br />

de démence vésanique ?<br />

Jean-Michel Azorin : Il y a plusieurs<br />

études dans ce domaine, certaines<br />

montrent par exemple que l’élargissement<br />

ventriculaire est proportionnel<br />

au nombre d’accès. Il y a beaucoup<br />

d’arguments pour valider l’impression<br />

de dégradations cognitives.<br />

Frédéric Rouillon : Dégradations préfrontales<br />

et hippocampiques également.<br />

Mais cela vaut aussi pour les schizophrènes.<br />

Michel Dubec : Une impression sensible,<br />

mais je pense qu’avec les traitements,<br />

les évolutions sont globalement<br />

moins catastrophiques que ce que je<br />

voyais il y a 30 ans.<br />

Frédéric Rouillon : Il ne s’agit pas de<br />

savoir si les vieux malades mentaux<br />

sont mieux ou moins bien qu’il y a 30<br />

ans mais de savoir quel est l’impact du<br />

traitement ou de son absence sur l’évolution<br />

d’un malade. L’évolution d’aujourd’hui<br />

est moins mauvaise que celle<br />

d’il y a 30 ans. Mais la population dans<br />

son ensemble vit mieux, plus longtemps.<br />

Les malades mentaux ont<br />

quand même une espérance de vie de<br />

8 à 9 ans inférieure à la population<br />

générale. Ils meurent tous avant nous<br />

(suicide exclu) de maladies somatiques.<br />

Béatrice Beaufils : Ils rentrent aussi plus<br />

tôt en maison de retraite, entre 50 et<br />

60 ans pour certains malades psychiatriques,<br />

pour la population générale<br />

vers 85 ans.<br />

Jean-Michel Azorin : Je pense que, de<br />

surcroît, nous reculons sur l’intégration<br />

et la socialisation des malades mentaux<br />

sévères. La tolérance sociale diminue.<br />

Frédéric Rouillon : Il faut aussi rajouter<br />

là-dessus les nombreux facteurs de<br />

risques : alcool, tabac, toxiques, etc…<br />

Tous influent sur la longévité.<br />

Philippe Carrière : J’aimerais qu’on<br />

revienne un peu sur les nosographies<br />

pour demander à Jean-Michel Azorin<br />

s’il ne voit pas l’ouverture d’un nouveau<br />

chantier si on ne considère pas<br />

le trouble bipolaire comme une maladie<br />

autonome ?<br />

Jean-Michel Azorin : Si la dimension<br />

bipolaire me paraît autonome, elle peut<br />

susciter un certain nombre de symptômes<br />

psychotiques. Mais je crois surtout<br />

qu’il existe des hypomanies brèves<br />

récurrentes, des mélancolies brèves<br />

récurrentes… L’idée d’un temps minimum<br />

comme indexé au DSM ne me<br />

paraît pas justifiée.<br />

Il faut vraiment sensibiliser les gens à la<br />

reconnaissance de cette altération qualitative<br />

qu’est le trouble bipolaire. Par<br />

ailleurs, il faut également les sensibiliser<br />

au fait que cette dimension peut être<br />

comorbide à un trouble de personnalité<br />

et éventuellement indépendant du<br />

trouble bipolaire lui-même. Mais cette<br />

altération bipolaire peut aussi laisser<br />

des séquelles au niveau de la personnalité.<br />

Les formes reconnues aujourd’hui<br />

sont peut-être caricaturales et<br />

insuffisantes.<br />

Jean-Paul Chabannes : Il me semble<br />

qu’il y a là quelque chose auquel nous<br />

pouvons tous adhérer avec une néces-<br />

TABLE RONDE ■ 7<br />

sité de réappréciation clinique des cas<br />

en fonction des circonstances. Nous<br />

reconnaissons un concept : le trouble<br />

bipolaire ; valide certes mais pour<br />

autant loin d’être uniforme.<br />

Jean-Michel Azorin : Reconnaissant<br />

cette dimension, nous pouvons<br />

admettre qu’il existe diverses stratégies<br />

d’adaptation : des obsessionnelles, des<br />

paranoïaques… mais aussi des stratégies<br />

stériles.<br />

Par ailleurs, les structurations de personnalité<br />

vont interagir avec le trouble<br />

bipolaire et ce trouble bipolaire peut<br />

susciter, à terme, une vulnérabilité psychotique.<br />

Béatrice Beaufils : Quel serait l’intérêt<br />

principal de ce type de repérage ?<br />

Jean-Michel Azorin : L’orientation dans<br />

les thérapeutiques.<br />

Philippe Carrière : D’ailleurs, nous<br />

n’avons pas beaucoup parlé de traitements.<br />

Jean-Michel Azorin : Si, nous avons évoqué<br />

les normothymiques mais il faudrait<br />

aussi aborder les antidépresseurs.<br />

Frédéric Rouillon : Je vais venir en soutien<br />

de Jean-Michel Azorin, le trouble<br />

bipolaire est probablement une des<br />

dimensions les plus incontestables de la<br />

psychopathologie et celle-ci peut s’enraciner<br />

dans toutes les pathologies. En<br />

faire une catégorie rendrait le trouble<br />

bipolaire mutuellement exclusif et visiblement<br />

ça ne tiendrait pas vraiment<br />

debout.<br />

Une telle pertinence cadre bien mieux<br />

avec le fait que l’on possède dans cette<br />

dimension les traitements les plus spectaculairement<br />

efficaces, aussi bien pour<br />

les phases aiguës que pour la stabilisation<br />

au long cours.<br />

Philippe Carrière : Pourrait-on dire un<br />

mot de la TMS (stimulation magnétique<br />

transcrânienne) ?<br />

Jean-Paul Chabannes : Sur Grenoble,<br />

avec le Docteur David Szekely du<br />

CHU et en lien avec les spécialistes<br />

français de Ste-Anne, Bordeaux et<br />

Lyon, un travail se fait sur des cas difficiles,<br />

non stabilisables par seul traitement<br />

médicamenteux et quelques<br />

résultats positifs sont à retenir.<br />

Béatrice Beaufils : Ceci m’intéresse car<br />

il y a des patients pour lesquels nous<br />

sommes en difficultés.<br />

Jean-Michel Azorin : Je n’ai pas bien<br />

d’expérience dans ce domaine.<br />

Frédéric Rouillon : J’ai une expérience<br />

mitigée. Pour certains cas, j’ai eu des<br />

résultats spectaculaires, pour d’autres<br />

des échecs retentissants comme s’il<br />

s’agissait d’une loi du tout ou rien.<br />

Jean-Paul Chabannes : Je pense que<br />

nous en sommes encore à affiner et la<br />

technique et les indications.<br />

Philippe Carrière : Nous allons conclure<br />

là en disant que, même si nous<br />

sommes déjà assez efficaces, il reste un<br />

grand champ de développement pour<br />

des traitements novateurs. ■<br />

Jean-Michel Azorin (1),<br />

Béatrice Beaufils-Laffy (2),<br />

Philippe Carrière (3),<br />

Jean-Paul Chabannes (4),<br />

Michel Dubec (5),<br />

Frédéric Rouillon (6).<br />

(1) Psychiatre, CH Sainte-Marguerite, Secteur<br />

13G04, 13274 Marseilles cedex 09<br />

(2) Psychiatre, CH Corentin-Celton, 92133<br />

Issy-les-Moulineaux<br />

(3) Psychiatre, CH Bon Sauveur, 22140 Bégard<br />

(4) Psychiatre, CH, 38521 St-Egrève<br />

(5) Expert-Psychiatre, 75004 Paris<br />

(6) Psychiatre, CH Sainte-Anne, CMME, 75674<br />

Paris


8<br />

LIVRES<br />

■ FMC<br />

Le Livre noir de la garde<br />

alternée<br />

Jacqueline Phélip<br />

Avec la collaboration de<br />

M. Berger, M.-E. Breton, M. Hayat-<br />

Soria, P. Lévy-Soussan,<br />

M.-H. Mathioudakis, H. Rottman,<br />

F. Vauthier-Marin<br />

Préface de Maurice Berger<br />

Dunod, 18 €<br />

La loi du 4 mars 2002 relative à l’autorité<br />

parentale a donné aux juges le<br />

pouvoir d’imposer une résidence alternée,<br />

au nom de « l’intérêt supérieur<br />

de l’enfant ». Cette loi n’a prévu aucun<br />

garde-fou qui pourrait éclairer<br />

leurs décisions. Cet « intérêt supérieur »<br />

constitue une formule théorique qui<br />

désigne essentiellement l’intérêt des<br />

parents. Ces enfants de moins de 6<br />

ans le plus souvent, mais aussi plus<br />

âgés, sont très souvent traités comme<br />

des biens indivis qui relèveraient d’un<br />

droit de propriété. Ils sont donc partagés,<br />

condamnés à mener une double<br />

vie, sans repère fixe affectif ni géographique,<br />

avec des conséquences<br />

sur la construction de leur personnalité.<br />

Malgré les travaux anglo-saxons qui<br />

nous ont précédés dans la voie de la<br />

résidence alternée et en constatent<br />

souvent les méfaits chez nombre d’enfants,<br />

la loi définitive a durci sur certains<br />

points la proposition initiale. Ce<br />

livre, qui s’appuie sur de nombreux<br />

témoignages de parents et sur les<br />

analyses d’avocats, de pédopsychiatres<br />

et de psychanalystes, a pour objet de<br />

provoquer, si possible, une réaction<br />

politique pour modifier le texte de<br />

loi.<br />

Dispositifs cliniques et<br />

changements culturels<br />

Sous la direction de Claude<br />

Wacjman et de Virginie Vaysse<br />

Psychologie Clinique 2006, n°22<br />

L’Harmattan<br />

Le dossier central de ce numéro montre<br />

comment l’approche d’autrui permet<br />

la compréhension de la culture qui<br />

le fait s’exprimer de telle ou de telle<br />

façon, qui nous est lointaine et dont<br />

les avatars heurtent tant le psychologue<br />

que le sujet. Ce travail se centre<br />

aussi bien sur la langue et le langage,<br />

oral, écrit, actuel, ancré temporellement<br />

dans les expressions les plus<br />

anciennes et les plus archaïques du<br />

récit ou du rêve. Ces occurrences sont<br />

portées tant par les cliniciens que par<br />

leurs patients, ainsi que par ceux qui<br />

théorisent à partir de textes une élaboration.<br />

Traité d’hypnothérapie<br />

Fondements, méthodes,<br />

applications<br />

Sous la direction d’Antoine Bioy<br />

et Didier Michaud<br />

Dunod, 42 €<br />

Depuis plusieurs années, l’hypnose<br />

connaît un renouveau dans le champ<br />

de la santé. Il s’explique, par l’intérêt<br />

de ses applications dans le traitement<br />

de la douleur, et par un renouvellement<br />

de ses pratiques qui permet le<br />

développement d’une multiplicité<br />

d’approches thérapeutiques. Cet ouvrage<br />

rassemble un exposé complet<br />

des principales approches l’hypnose<br />

ericksonienne, l’hypno-analyse, le<br />

rêve éveillé en hypnose...; un développement<br />

autour de notions centrales<br />

: hypnose et théorie de l’attachement,<br />

la dimension de la régression<br />

en hypnose, l’approche corporelle...;<br />

les principales indications chez l’adulte<br />

et l’enfant : douleurs , troubles psychosomatiques,<br />

traumatismes, dépression,<br />

anxiété, troubles de comportements<br />

alimentaires, sevrage<br />

tabagique, troubles de la sexualité.<br />

<br />

aussi du fait d’un suivi obstétrical<br />

souvent erratique. Par ailleurs, la prise<br />

de psychotrope peut entraîner une augmentation<br />

du risque pour l’enfant de<br />

malformations in utero et de sevrage à<br />

la naissance. Pour la mère, l’utilisation<br />

de tocolytiques bêta-mimétiques doit<br />

être discutée car elle peut favoriser une<br />

résurgence anxio-délirante.<br />

Au cours de la grossesse, il est important,<br />

afin de prévenir les troubles psychiques<br />

du post-partum, d’être attentif<br />

à tout signe de détresse mais aussi à la<br />

survenue de diagnostic préjudiciable à<br />

l’enfant (malformations…) et d’événements<br />

médicaux graves pouvant affecter<br />

le cours normal de la grossesse. Une<br />

attitude ambivalente de la mère à<br />

l’égard de la grossesse est à noter et à<br />

surveiller.<br />

Après l’accouchement, il est habituel<br />

de considérer comme facteurs de<br />

risque un accouchement dystocique,<br />

une séparation précoce mère–enfant<br />

mais aussi la primiparité, les troubles<br />

de la personnalité, les difficultés relationnelles<br />

entre la future mère et sa<br />

propre mère.<br />

Les patientes présentant un épisode<br />

dépressif modéré décrivent souvent,<br />

dans leurs antécédents, une enfance<br />

empreinte de carences affectives, de<br />

séparations précoces et une grossesse<br />

émaillée d’événements douloureux<br />

(deuils, séparations) ou de conditions<br />

psychologiques difficiles (solitude,<br />

conflits conjugaux, soutien insuffisant<br />

ou inadéquat). Il est donc important<br />

lorsque de tels éléments ont été repérés<br />

au cours de la grossesse, de prévoir<br />

un suivi rapproché de la mère et<br />

de son futur bébé.<br />

Troubles psychiques<br />

pendant la grossesse<br />

Pendant la grossesse, les troubles sont<br />

généralement rares et modérés. En<br />

effet, celle-ci a tendance à atténuer les<br />

symptômes des pathologies psychiatriques<br />

chroniques ainsi que le nombre<br />

d’incidents aigus.<br />

On peut cependant observer au cours<br />

du premier trimestre des manifestations<br />

comportementales mineures,<br />

comme des troubles du caractère avec<br />

irritabilité, dysphorie, une labilité émotionnelle<br />

avec sentiment d’élation intense,<br />

des troubles anxieux isolés, des<br />

troubles du comportement alimentaire<br />

(boulimie principalement), des troubles<br />

du sommeil.<br />

Les troubles anxieux, phobiques ou<br />

obsessionnels sont fréquemment observés,<br />

on note le plus souvent une diminution<br />

des troubles paniques mais une<br />

augmentation de l’agoraphobie. Une<br />

psychothérapie de soutien est habituellement<br />

suffisante. Quant aux TOC,<br />

si la pathologie était importante avant<br />

le début de la grossesse, il est fréquent<br />

qu’elle s’aggrave au cours de celle-ci.<br />

Les troubles hystériques se traduisent<br />

par une asthénie importante, un comportement<br />

infantile avec refus de la<br />

sexualité, des plaintes somatiques et<br />

des vomissements persistant au deuxième<br />

trimestre de la grossesse.<br />

Les syndromes dépressifs sont assez<br />

fréquents (10% des grossesses), transitoires<br />

et d’intensité importante. Parfois,<br />

exacerbations de troubles préexistants,<br />

ils peuvent aussi apparaître au moment<br />

de la grossesse. Ils surviennent préférentiellement<br />

au premier trimestre et<br />

sont plus fréquemment constatés chez<br />

des femmes ayant un environnement<br />

peu aidant. Ils resurgissent parfois lors<br />

des dernières semaines de grossesse.<br />

Au cours du deuxième et début du<br />

troisième trimestre, ils ont tendance à<br />

s’amender. Le tableau est souvent atypique.<br />

On note une dysphorie permanente<br />

avec tristesse, une asthénie, des<br />

plaintes somatiques, une grande<br />

demande d’attention, une ambivalence<br />

au sujet de la grossesse, des inquiétudes<br />

souvent sans fondement au sujet<br />

du devenir de l’enfant à naître. Les<br />

troubles dépressifs modérés nécessitent<br />

parfois un traitement antidépres-<br />

seur. Le choix de la molécule ne fait<br />

pas l’unanimité (clomipramine, en raison<br />

de l’ancienneté de cette molécule<br />

ou fluoxétine, employée dans bon<br />

nombre de cas sans alerte de la pharmacovigilance).<br />

Une hospitalisation en<br />

unité mère-enfant est parfois nécessaire.<br />

Quand l’évolution est mauvaise malgré<br />

le traitement antidépresseur, des<br />

séances d’électroconvulsivothérapie<br />

peuvent se montrer efficaces.<br />

Les états maniaques de novo et les<br />

états mixtes sont exceptionnels et ne<br />

présentent pas de particularités cliniques.<br />

Ils régressent rapidement avec<br />

des séances d’électroconvulsivothérapie.<br />

La prise en charge de patientes présentant<br />

un trouble bipolaire prend en<br />

compte les spécificités de la pathologie<br />

de la patiente c’est-à-dire la réponse<br />

aux traitements, la durée d’évolution<br />

des troubles, le nombre de rechute,<br />

leur intensité… Les traitements thymorégulateurs<br />

ne sont pas d’utilisation<br />

facile durant la grossesse, quant aux<br />

psychotropes et aux anxiolytiques, ils<br />

doivent être manipulés avec précautions.<br />

Quant aux épisodes délirants aigus, ils<br />

sont rares mais apparaissent principalement<br />

au premier trimestre. Ils sont<br />

Etudes psychiatriques<br />

Volume I<br />

Tome I<br />

Historique - Méthodologie - Psychopathologie<br />

générale<br />

Tome II<br />

Aspects séméiologiques<br />

Volume II<br />

Tome III<br />

Structure des psychoses aiguës et déstructuration de<br />

la conscience<br />

Henri Ey<br />

CREHEY<br />

Cercle de Recherche et d’Edition Henri Ey<br />

Prix de souscription : 112 €<br />

Il convient de saluer l’excellente réédition (en deux volumes)<br />

des Études psychiatriques d’Henri Ey initialement publiées en<br />

3 tomes, successivement en 1948, 1950, 1954, qui se situe<br />

dans le prolongement de l’action de l’Association pour la<br />

Fondation Henri Ey (APFHEY) qui a permis, sous l’impulsion<br />

de son secrétaire général et initiateur, Robert Michel Palem,<br />

de son président J. Garrabé et de son vice président J. Chazaud,<br />

le renouveau des études eyiennes, en organisant le<br />

sauvetage et la conservation par Perpignan des archives et<br />

de la bibliothèque qu’Henri Ey avait rassemblées dans sa<br />

maison de Banyuls dels Aspres, son lieu de naissance et de<br />

retraite. Claude-Jacques Blanc avait assumé au sein du collège<br />

d’épistémologie Karl Popper (Asso. France-Copsyrep) les<br />

années où l’œuvre d’Henri Ey fut l’objet d’un oubli.<br />

Le texte présenté est la reprise typographique intégrale du<br />

texte original de la deuxième édition revue et augmentée<br />

publiée chez Desclée de Brouwer dont les trois tomes totalisaient<br />

1630 pages.<br />

Ont été corrigés les quelques éléments typographiques erronés<br />

que comportait l’original, en particulier a été uniformisée<br />

la hiérarchie des titres et intertitres sans compromettre<br />

la pagination de l’original. Dans les marges, des « reports »<br />

strictement conformes au texte original sont ajoutés. Henri<br />

Ey qui était soucieux d’un pragmatisme éditorial, l’avait préconisé<br />

et mis en œuvre pour les éditions successives de son<br />

« Manuel » de psychiatrie.<br />

Ce texte très dense nécessitait un meilleur repérage, sans<br />

répéter pour autant les titres et intertitres du texte original.<br />

Au premier coup d’œil, le lecteur trouve, dans ces « citations<br />

de marge » l’occasion d’une découverte de la richesse du<br />

texte. Ces « citations de marge » ont fait l’objet d’une double<br />

réévaluation critique par les membres du comité de rédaction.<br />

A été également ajouté en marge de la zone titre de<br />

chaque Étude la liste de l’ensemble des études du tome dont<br />

elle fait partie, afin d’avoir facilement en mémoire le plan<br />

général de l’ouvrage. Chaque fois que cela a été possible<br />

sont signalées par des notes de l’éditeur les rééditions actuelles<br />

des ouvrages en référence.<br />

Enfin, la reprise typographique intégrale a permis un index<br />

général des noms propres, qui ne figurait pas dans le texte<br />

original.<br />

De courtes préfaces font le point des connaissances actuelles<br />

cinq fois moins fréquents que dans le<br />

post-partum. Ils n’imposent pas l’interruption<br />

de la grossesse et sont généralement<br />

traités par électroconvulsivothérapie<br />

ou par antipsychotique.<br />

Pour ce qui est des patientes schizophrènes,<br />

on ne note pas particulièrement<br />

d’évolution de leur maladie<br />

durant leur grossesse.<br />

C’est au deuxième trimestre qu’on<br />

observe le plus souvent des accès<br />

mélancoliques, qui sont malgré tout<br />

rares durant la grossesse. La symptomatologie<br />

est essentiellement marquée<br />

par des éléments confusiogènes ou délirants.<br />

Elles peuvent être traitées soit<br />

par antidépresseur, soit par électroconvulsivothérapie.<br />

Le recours à une<br />

unité d’hospitalisation conjointe mèreenfant<br />

est recommandé. Si le délire de<br />

la mère est centré sur l’enfant et qu’il y<br />

a un risque de passage à l’acte hétéroagressif<br />

sur l’enfant, une séparation de<br />

la mère et de son bébé s’impose, tout<br />

en veillant à la maintenir le moins longtemps<br />

possible afin de favoriser le développement<br />

d’une bonne relation mèreenfant.<br />

Au cours du dernier trimestre, à l’approche<br />

du terme, on note l’apparition<br />

d’anxiété concernant l’état de l’enfant,<br />

l’accouchement, une insomnie mais<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Les troubles psychiques durant<br />

la grossesse et le post-partum<br />

aussi parfois une symptomatologie<br />

confuso-délirante. Les troubles délirants<br />

aigus et transitoires, associant souvent<br />

un délire à une confusion, sont habituellement<br />

un mode d’entrée dans la<br />

schizophrénie.<br />

Les dénis de grossesse ont une incidence<br />

faible (3/1000 grossesses), ils<br />

sont potentiellement associés à d’autres<br />

troubles psychiatriques chez la mère.<br />

Ces grossesses se caractérisent par une<br />

absence de suivi obstétrical, entraînant<br />

ainsi des taux élevés de prématurité,<br />

de mortalité périnatale, de complications<br />

obstétricales diverses. On note<br />

une ambivalence de la mère vis-à-vis<br />

de l’enfant et parfois la constitution<br />

d’un trouble de la relation mère enfant.<br />

Dans la majorité des cas, on n’observe<br />

pas de trouble du développement affectif<br />

de l’enfant après deux ans d’évolution,<br />

et ce à l’exception des enfants de<br />

mères psychotiques.<br />

Troubles du post-partum<br />

Dans les premiers jours suivant l’accouchement,<br />

les mères connaissent de<br />

grands changements affectifs, somatiques<br />

et cognitifs. Cette phase est de<br />

faible intensité et de brève durée. On<br />

diagnostique un post-partum blues<br />

sur ce que fût l’enseignement d’Henri Ey, sur la « situation »<br />

des Études psychiatriques dans son projet d’une « Histoire<br />

naturelle de la folie », et sur la « refonte du savoir psychiatrique<br />

» à partir des travaux internationaux sur lesquels s’appuient<br />

les Études.<br />

Est mis en lumière leur rôle de creuset au sein du travail éditorial<br />

de la Bibliothèque Neuro-Psychiatrique de Langue Française<br />

dans laquelle elles ont été initialement publiées chez<br />

l’éditeur Desclée de Brouwer ainsi qu’au sein du projet encyclopédique<br />

à auteurs multiples : le traité de psychiatrie<br />

clinique et thérapeutique de l’Encyclopédie Médico- Chirurgicale.<br />

Contenu des Études psychiatriques d’Henri Ey.<br />

Volume I : 900 p.<br />

- Préfaces par Jean Garrabé, Président de l’Association pour<br />

la Fondation Henri Ey : Situation des Etudes psychiatriques,<br />

au confluent des travaux internationaux et par Patrice Belzeaux,<br />

Président du Cercle de Recherche et d’Edition Henri<br />

Ey : Situation des Études psychiatriques dans l’œuvre d’Henri<br />

Ey ou le devenir du Plan de l’Histoire naturelle de la Folie.<br />

- Études du tome I dans sa 2ème édition de 1952 : Introduction<br />

par Henri Ey. 1. La folie et les valeurs humaines. 2.<br />

Rythme mécano-dynamiste de l’histoire de la médecine. 3.<br />

Le développement mécaniciste de la psychiatrie à l’abri du<br />

dualisme cartésien. 4. La position de la psychiatrie dans le<br />

cadre des sciences médicales : La notion de « maladie mentale<br />

». 5. Une théorie mécaniciste : La doctrine de De Clérambault.<br />

6. Une conception psychogénétiste : Freud et<br />

l’école psychanalytique. 7. Principes d’une conception Organo-dynamiste<br />

de la psychiatrie. 8. Le Rêve fait primordial<br />

de la psychopathologie.<br />

- Études du tome II de 1950 : 9. Les troubles de la mémoire.<br />

10. La catatonie. 11. Impulsions. 12. Exhibitionnisme. 13.<br />

Perversité et perversions. 14. Le suicide pathologique. 15.<br />

Anxiété morbide. 16. Délire des négations. 17. Hypochondrie.<br />

18. Jalousie morbide. 19. Mégalomanie.<br />

Index du tome I et Index du tome Il<br />

Volume Il : 850 p.<br />

- Études du tome III de 1954 : Introduction par Henri Ey. 20.<br />

La classification des M. mentales. 21. Manie. 22. Mélancolie.<br />

23. Bouffées délirantes et psychoses hallucinatoires aiguës.<br />

24. Confusion et délire confusoonirique. 25. Psychoses<br />

périodiques maniaco-dépressives. 26. Epilepsie. 27. Structure<br />

et destructuration de la conscience.<br />

- Index du tome III, Table générale des matières. Index général<br />

des Noms propres des tomes I, Il et III<br />

Le Cercle de Recherche et d’Edition Henri Ey, CREHEY, est<br />

une Association 1901 fondé par P. Belzeaux, Ch. Alezrah,<br />

Ed. Mahieu, Ph. Raynaud, P. Chenivesse et Annie Galaup-<br />

Belzeaux, J. Garrabé, M. De Boucaud, J.P. Pécastaing, H. Casarotti,<br />

S. Delmas-Arbiols, R. Belzeaux... dont le but est de<br />

« Promouvoir sur les plans culturels et scientifiques la préservation<br />

et la mise à disposition du public et de la recherche du<br />

« Trésor clinique » et de la « psychopathologie », patrimoine de<br />

la psychiatrie et de ses champs connexes aujourd’hui menacé<br />

de disparition ».<br />

CERCLE DE RECHERCHE ET D’ÉDITION HENRI EY (CREHEY) , 2 rue Léon Dieudé,<br />

66000 Perpignan tél./fax 04 68 34 34 12. patrice. belzeaux@wanadoo.fr


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

quand les symptômes perdurent et<br />

deviennent plus bruyant. Il concerne,<br />

selon les auteurs, 30 à 80% des<br />

femmes. Il survient dans les tous premiers<br />

jours après l’accouchement (du<br />

3 ème au 10 ème), au moment de la montée<br />

laiteuse. Son apparition semble être<br />

indépendante des facteurs culturels ou<br />

psychosociaux. Il associe de façon transitoire<br />

irritabilité, labilité de l’humeur,<br />

sentiment d’élation, trouble du sommeil,<br />

trouble du comportement alimentaire<br />

(anorexie) et parfois même<br />

des plaintes somatiques. Les préoccupations<br />

anxieuses du début de la grossesse<br />

réapparaissent, souvent associées<br />

à l’angoisse de ne pas savoir s’occuper<br />

du bébé. Ce tableau est de faible intensité<br />

et ne doit pas être considéré<br />

comme une dépression, mais plutôt<br />

comme une phase brève d’hypersensibilité<br />

émotionnelle. En effet, on considère<br />

que c’est un processus d’adaptation<br />

de la mère face à son enfant,<br />

favorisant le développement des interactions<br />

précoces. Les modifications<br />

endocriniennes liées à l’accouchement<br />

semblent capables de provoquer à elles<br />

seules cet état, dont la cinétique et la<br />

temporalité différent de celles des<br />

mécanismes engendrant la dépression.<br />

Le post-partum blues dure entre un et<br />

sept jours au maximum. Une forte<br />

intensité de l’épisode est un facteur de<br />

risque de développement ultérieur de<br />

dépression du post-partum, alors<br />

qu’une persistance au-delà du 7 ème jour<br />

marque l’entrée dans une dépression<br />

du post-partum. Une patiente présentant<br />

un post-partum blues ne nécessite pas<br />

de traitement médicamenteux. La relation<br />

avec les soignants ainsi qu’avec<br />

l’entourage suffit le plus souvent à l’aider.<br />

L’insomnie peut être traitée si elle<br />

persiste ou s’intensifie.<br />

Les dépressions non mélancoliques du<br />

post-partum concernent 10 à 20% des<br />

femmes. Comme le post-partum blues<br />

se termine au plus tard le dixième jour,<br />

le diagnostic de dépression ne peut<br />

être envisagé avant. Elles surviennent<br />

dans la majorité des cas entre le deuxième<br />

mois et la fin de la première année<br />

suivant l’accouchement. 20% d’entre<br />

elles seraient le prolongement ou la<br />

récurrence d’une dépression gravidique.<br />

L’intensité est souvent modérée. On<br />

observe un tableau anxio-dépressif atypique<br />

avec asthénie et plaintes somatiques<br />

inhabituelles, voire hypochondriaques.<br />

L’épisode dépressif est<br />

fréquemment marqué par l’apparition<br />

de phobies d’impulsion, d’évitement<br />

du contact avec le bébé et d’absence de<br />

plaisir à s’en occuper. Les idées de suicide<br />

sont très rares. L’humeur est fréquemment<br />

labile, altérée le soir. Ces<br />

patientes consultent peu et ont tendance<br />

à s’isoler, ce qui est une des<br />

grandes caractéristiques de la dépression<br />

postnatale. La profonde culpabilité<br />

éprouvée par ces mères qui pensent<br />

n’avoir aucune raison d’être tristes peut<br />

expliquer ce phénomène. Il s’agit donc,<br />

si elles ne viennent pas aux consultations<br />

prévues, de les rappeler et de les<br />

soutenir. Ici, comme souvent la qualité<br />

des échanges et des liens entre l’équipe<br />

obstétricale et les psychiatres joue un<br />

rôle majeur. La prise en charge des difficultés<br />

sociales est central. Le recours<br />

aux services sociaux (PMI, réseaux<br />

entre services de psychiatrie adulte et<br />

de pédopsychiatrie, ASE…) devra éventuellement<br />

être déclenché même si l’intéressée<br />

banalise la situation. L’association<br />

d’une prise en charge sociale<br />

et l’utilisation d’antidépresseurs suffisent<br />

généralement à améliorer l’état<br />

clinique de ces patientes. L’impact des<br />

troubles dépressifs du post-partum sur le<br />

développement psychique chez l’enfant<br />

est difficilement évaluable, mais<br />

on sait que quelques mois d’altérations<br />

de la relation précoce mère enfant suffisent<br />

pour avoir une influence néfaste<br />

sur le développement psychoaffectif<br />

de l’enfant. La prise en charge doit<br />

donc être efficace afin que l’épisode<br />

ne se prolonge pas et que les interactions<br />

précoces mère-bébé s’effectuent<br />

dans les meilleures conditions. Pour les<br />

patientes non traitées, on observe dans<br />

la majorité des cas une résolution spontanée<br />

des troubles dans les trois à six<br />

mois, mais aussi des récurrences fréquentes<br />

et parfois une évolution à bas<br />

bruit pendant des années.<br />

Pour les femmes présentant une pathologie<br />

bipolaire connue, le risque de<br />

rechute lors du post-partum est d’environ<br />

20%, le plus souvent lors de leur<br />

premier accouchement.<br />

Les dépressions de type mélancolique<br />

parfois appelées mélancolies puerpérales<br />

se déclarent dans le mois qui suit<br />

l’accouchement. Les signes cliniques<br />

habituels sont ceux d’une mélancolie<br />

délirante, avec un délire essentiellement<br />

centré sur l’enfant (sentiment<br />

d’indignité, d’incapacité, de ruine, idée<br />

délirante de la mort du bébé), associés<br />

à une confusion et à une grande anxiété.<br />

Le risque suicidaire ou le risque d’infanticide<br />

est important. On observe<br />

parfois des éléments de mixité de l’humeur.<br />

L’évolution de ce type de dépression<br />

est variable. Certaines patientes<br />

présenteront à nouveau des épisodes<br />

dépressifs, pour d’autres ce sera la première<br />

manifestation d’un trouble bipolaire.<br />

Pour le majorité d’entre elles, cet<br />

épisode restera isolé. Le diagnostic différentiel<br />

de la mélancolie du post-partum<br />

est la psychose puerpérale.<br />

La manie puerpérale débute brutalement<br />

dans les 15 jours après l’accouchement.<br />

On observe alors des idées<br />

délirantes (à thématique de persécution,<br />

érotomaniaque, mégalomaniaque,<br />

mystique, érotomaniaque) avec hallucinations<br />

diverses, associées à une agitation<br />

importante. La labilité de l’humeur<br />

est souvent importante. Un virage<br />

dépressif survient dans 50% des cas<br />

au décours de cet épisode. Il marque<br />

parfois l’entrée dans un trouble bipolaire.<br />

Le diagnostic différentiel est la<br />

psychose puerpérale.<br />

Les troubles psychotiques chroniques,<br />

et notamment les troubles schizoaffectifs,<br />

connaissent souvent des<br />

rechutes, voire des aggravations dans la<br />

phase de suite de couches. Le tableau<br />

clinique est typique. La présence de<br />

l’enfant est en quelques sortes un facteur<br />

de stress, nécessitant une adaptation<br />

souvent difficile de la patiente et de<br />

son entourage à ce nouveau mode de<br />

vie.<br />

Les troubles schizophréniformes du<br />

post-partum apparaissent dans les 6<br />

semaines suivant l’accouchement et<br />

durent moins de 6 mois. Le tableau<br />

de cette maladie est proche de celui<br />

d’une schizophrénie dysthymique, c’està-dire<br />

une association d’une excitation<br />

atypique ou d’un repli autistique à un<br />

délire paranoïde, accompagné d’un état<br />

dissociatif. La conduite de la mère est<br />

inappropriée avec son enfant. L’évolution<br />

est habituellement favorable en<br />

6 mois dans le cas contraire, cet épisode<br />

marque le plus souvent une<br />

entrée dans une schizophrénie ou un<br />

trouble bipolaire.<br />

La psychose puerpérale confuso-délirante<br />

survient assez brutalement dans la<br />

semaine qui suit la naissance (pic de<br />

fréquence au dixième jour après l’accouchement).<br />

Son incidence a nettement<br />

diminuée dans les pays industrialisés<br />

et ce grâce à l’amélioration du<br />

suivi obstétrical, mais aussi des conditions<br />

sanitaires ayant permis l’éradication<br />

de toxi-infections responsables<br />

d’états confuso-délirants. Aujourd’hui<br />

une psychose puerpérale se déclare<br />

pour un accouchement sur mille. La<br />

pathogénie est plurifactorielle (modifications<br />

hormonales, facteurs psychologiques,<br />

complications obstétricales ou<br />

néonatales, antécédents psychiatriques<br />

personnels ou familiaux). Un post-partum<br />

blues sévère avec confusion en est<br />

souvent le prodrome, associant insomnie,<br />

cauchemars, bizarrerie du comportement,<br />

anxiété en fin de grossesse.<br />

Le tableau clinique est celui d’un<br />

trouble délirant aigu. Il comporte une<br />

obnubilation voire une réelle confusion<br />

mentale.<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Les nouveaux rapports à<br />

l’enfant<br />

Numéro coordonné par Régnier<br />

Pirard et Emmanuelle Bouey-Petit<br />

Erès, 23 €<br />

Les nouveaux rapports à l’enfant ont<br />

été le thème d’une Journée d’étude à<br />

l’université de Nantes (avril 2003), dont<br />

plusieurs interventions sont ici publiées.<br />

Depuis cette date, d’autres articles sur<br />

le même thème complètent ce dossier.<br />

Les rapports à l’enfant se transforment.<br />

Relevons : le désir d’enfant poussé jusqu’au<br />

droit à l’enfant, mais en même<br />

temps une promotion des droits de<br />

l’enfant ; le développement de la scolarité<br />

qui ne résorbe pas les difficultés<br />

d’apprentissages, même de base ; le<br />

glissement des comportements turbulents<br />

vers l’hyperactivité et des troubles<br />

caractériels plus ou moins sévères ;<br />

des violences qui paraissent gratuites<br />

et ne semblent avoir pour fonction que<br />

de regonfler un narcissisme défaillant ;<br />

des addictions et des troubles alimentaires<br />

de plus en plus précoces ; une<br />

recherche de plaisirs « hard » jusqu’au<br />

trompe-la-mort ; une surenchère d’actes<br />

pédophiles suivis de meurtres ; la confusion<br />

des rapports générationnels et<br />

des places dans les systèmes de parenté,<br />

etc. La liste n’est pas close. Les<br />

« nouveaux pères » savent pertinemment<br />

qu’il leur en coûte bien davantage<br />

en investissement psychique et<br />

qu’il ne suffit plus de commander ou<br />

de déléguer à la manière paternaliste.<br />

Il s’agit de prendre la mesure, autant<br />

que possible, de notre contemporanéité<br />

pour l’habiter au mieux. Or, de<br />

cette post-modernité qui s’impose avec<br />

ses caractères inédits, animée par les<br />

techno-sciences et le marché, il semble<br />

que les rapports à l’enfant constituent<br />

un baromètre particulièrement sensible.<br />

Car, à travers la question de la<br />

transmission, c’est celle du Sujet, de<br />

son être et de son non-être, qui se pose.<br />

Varia<br />

Enfance octobre 2006 n°4,<br />

PUF, 22 €<br />

Ce numéro représente la variété des<br />

thématiques de la revue Enfance.<br />

Le premier article, écrit par Patrick Perret<br />

et Sylvie Faure, défend, sous la forme<br />

d’une revue argumentée, l’idée que la<br />

psychopathologie développementale<br />

est un paradigme pour l’étude du développement<br />

et de ses troubles : c’est<br />

l’option qui a poussé la revue à étendre<br />

son champ de publication du développement<br />

ordinaire à la psychopathologie<br />

du développement.<br />

Olivier Luminet et Véronique Lenoir<br />

montrent l’influence d’une difficulté<br />

des parents à percevoir et représenter<br />

l’émotion sur les performances des enfants<br />

quand il s’agit d’interpréter des<br />

scénarios sur la base d’expressions<br />

On observe une désorientation temporo-spatiale,<br />

une fluctuation de la vigilance<br />

avec recrudescence vespérale<br />

associée à une activité délirante polymorphe<br />

hallucinatoire, essentiellement<br />

de persécution, ou mégalomaniaque<br />

centrée sur l’enfant (déni de grossesse<br />

et d’accouchement, délire de filiation...).<br />

L’humeur de ces patientes est labile.<br />

Le risque suicidaire et/ou d’infanticide<br />

est très élevé.<br />

Comme diagnostics différentiels, nous<br />

notons des urgences médicochirurgicales,<br />

comme les thrombophlébites<br />

cérébrales, les infections, les rétentions<br />

placentaires.<br />

Les patientes présentant une psychose<br />

puerpérale doivent être hospitalisées.<br />

Un traitement médicamenteux par un<br />

psychotrope est instauré précocement.<br />

Si le tableau est sévère, des séances<br />

d’électroconvulsivothérapie sont à prévoir<br />

car les antipsychotropes sont alors<br />

peu efficaces. Une hospitalisation dans<br />

des unités mère-bébé (situées le plus<br />

émotionnelles.<br />

L’article suivant, écrit par Leïla Bensalah,<br />

Benjamin Paty et Marie Olivier,<br />

s’intéresse aux représentations sociales<br />

que se font les enfants de leurs relations<br />

avec les autres enfants et montre<br />

une différence entre garçons et filles,<br />

ces dernières se révélant plus sensibles<br />

à des échanges égalitaires.<br />

Les différences entre filles et garçons<br />

sont également examinées dans les<br />

deux articles qui terminent le numéro.<br />

Ces articles sont une suite au n°3, 2006,<br />

coordonné par Diane Poulin-Dubois et<br />

consacré aux stéréotypes féminin/masculin.<br />

Caroline Bouchard, Richard Cloutier<br />

et France Gravel recherchent à quoi<br />

attribuer les divergences d’estimation<br />

des enseignants et des enfants quant<br />

à la supériorité supposée des filles en<br />

matière de prosocialité.<br />

Enfin, Thérèse Bouffard, Carole Vezeau<br />

et Geneviève Simard montrent que les<br />

déterminants motivationnels de la réussite<br />

scolaire ne distinguent pas les garçons<br />

des filles, à la différence des matières<br />

préférées.<br />

Thérapie familiale<br />

2006 n°4<br />

Editions Médecine et Hygiène<br />

Ce numéro regroupe deux thèmes<br />

concernant les modalités de la rencontre<br />

entre le systémicien et son<br />

« client » : les objets flottants et le recadrage.<br />

Un article de Florence Calicis<br />

vient appeler les objets flottants dans<br />

l’approche des pans les plus douloureux<br />

de l’histoire des familles. Exemple<br />

à l’appui, elle montre comment elle<br />

trace un chemin singulier avec une famille.<br />

Les temps forts de la thérapie<br />

sont des temps de ralentissement du<br />

processus plutôt que d’accélération<br />

d’un changement impensable.<br />

Elle souligne les vertus des objets flottants<br />

dans les situations de douleurs<br />

trop vives pour être abordées frontalement,<br />

notons au passage qu’elle vient<br />

plaider pour les vertus de la résistance<br />

moins menaçants, ils autorisent les<br />

zones d’ombre. Leur dimension ludique<br />

rassure. Pour autant il ne faut les utiliser<br />

que lorsque la famille se sent suffisamment<br />

en confiance.<br />

Dans la continuité de son travail avec<br />

les familles monoparentales, Jean-Pierre<br />

Le Goff utilise la construction d’un «Totem<br />

». Libre adaptation des poteaux<br />

sculptés par les Amérindiens de la côte<br />

nord-ouest de l’Amérique du nord qui<br />

représentent les ancêtres sous des<br />

formes animales auxquelles sont attribuées<br />

des qualités, c’est la représentation<br />

graphique de trois ou quatre<br />

générations de sa famille, par l’enfant<br />

ou les enfants de la famille. Après une<br />

mise en perspective des totems dans<br />

l’imaginaire mondial et après l’histoire<br />

de Manu qui induisit la production de<br />

ce premier totem, Jean-Pierre Le Goff<br />

propose une analyse critique de cette<br />

modalité de rencontre créative en thé-<br />

souvent au sein d’hôpital spécialisé) est<br />

à favoriser si l’état de la mère le permet.<br />

Parfois, la symptomatologie maternelle<br />

pourra justifier la séparation de la mère<br />

et de l’enfant et notamment lorsqu’il<br />

existe un risque suicidaire ou d’infanticide<br />

élevé. L’enfant pourra, alors, être<br />

confié au père, à la famille ou encore<br />

être hospitalisé transitoirement en<br />

pédiatrie. Il est souhaitable dès que possible<br />

de soutenir le lien mère-bébé en<br />

mettant à nouveau l’enfant en présence<br />

de sa mère. Des relais après l’hospitalisation<br />

sont souvent nécessaires<br />

pour permettre une bonne qualité de<br />

relation entre la mère et son bébé et<br />

notamment l’accueil dans une crèche<br />

thérapeutique ou un hôpital de jour<br />

permettant un travail sur la relation<br />

mère-enfant avec une équipe pluridisciplinaire<br />

compsée de psychiatres, de<br />

psychologues, d’assistantes sociales et<br />

d’infirmières.<br />

Le pronostic maternel à long terme est<br />

variable. L’épisode délirant peut rester<br />

FMC ■ 9<br />

rapie familiale. Et comme il s’interroge<br />

sur la possibilité de considérer un totem<br />

comme un objet flottant, la question<br />

a été posée à Philippe Caillé qui<br />

a bien voulu répondre, sa réponse est<br />

présentée après l’article.<br />

Thérapeute recevant des familles ou<br />

clinicien du travail et intervenant en<br />

organisation, Daniel Faul traite des<br />

conflits dans les systèmes. Au lieu d’étudier<br />

le conflit il se penche sur les moyens<br />

de le traiter. Le recadrage, ainsi qu’il<br />

est utilisé par Michel Monroy, est le<br />

support de cette solution : il s’élabore<br />

progressivement au fil des rencontres<br />

plutôt que ponctuer la fin d’une séance.<br />

Les modes d’entrée du recadrage sont<br />

divers : la relation figée dans le temps<br />

peut avoir connu des jours meilleurs ;<br />

les protagonistes peuvent être les «ambassadeurs<br />

» de leurs systèmes d’appartenance<br />

; ou de leurs légitimités ;<br />

comprendre les vulnérabilités de « l’ennemi<br />

» le réhumanise ; questionner la<br />

fonction du conflit ou prendre la mesure<br />

des coûts investis permet de s’en<br />

distancier...<br />

A l’aide d’exemples qui laissent entrevoir<br />

la complexité des relations, l’auteur<br />

fait un tableau de la richesse des<br />

motifs de conflits...<br />

Christophe Panichelli, dans un article<br />

documenté, tisse pas à pas les définitions<br />

et les caractéristiques de l’humour<br />

et du recadrage : c’est une façon nouvelle<br />

de présenter la réalité, ou de modifier<br />

le point de vue selon lequel une<br />

situation est vécue... Il expose les liens<br />

qui les unissent : la position d’observation,<br />

l’étonnement, la réinterprétation,<br />

pour finalement faire l’éloge du<br />

« rire ensemble » vecteur de joining et<br />

ingrédient de la relation thérapeutique.<br />

La danse-thérapie<br />

Histoire, techniques, théories<br />

Jocelyne Vaysse<br />

L’Harmattan, 23 €<br />

Après avoir retracé l’évolution historique<br />

et culturelle de la danse occidentale<br />

jusqu’aux travaux actuels de<br />

numérisation, d’analyse et de systèmes<br />

de lecture des mouvements dansés,<br />

l’auteur expose l’essor de sa fonction<br />

thérapeutique : les pionnières, l’éventail<br />

des techniques et pratiques jusqu’aux<br />

innovations contemporaines,<br />

les processus psycho-dynamiques et<br />

les références théoriques qui fédèrent<br />

cette diversité et qui permettent son<br />

introduction au sein des thérapies, selon<br />

diverses modalités adaptées aux<br />

sujets en souffrance (handicapés physiques<br />

ou mentaux, enfants, adultes,<br />

3 ème âge,...) ou simplement en désir de<br />

développement personnel.<br />

Au travers du corps dansant et au-delà<br />

des improvisations, la danse-thérapie<br />

cherche à induire, dans l’univers mental,<br />

une mouvance interne émotionnelle,<br />

idéique, symbolisante et structurante.<br />

isolé, dans 80% des cas. On note tout<br />

de même 20% de récidives lors de<br />

grossesses ultérieures, le risque est augmenté<br />

lorsque les grossesses sont rapprochées.<br />

L’évolution vers un trouble<br />

bipolaire ou une schizophrénie est possible.<br />

D’ailleurs les débuts plus tardifs (1-<br />

2 mois) sont de plus mauvais pronostic<br />

et révèlent plus fréquemment une schizophrénie.<br />

Au décours de certains accouchements<br />

particulièrement difficiles, on observe<br />

parfois un syndrome de stress post traumatique.<br />

L’évolution est proche de ce<br />

qu’elle est aux autres moments de la<br />

vie, c’est-à-dire une rémission en 3 à<br />

6 mois ou une chronicisation des<br />

troubles. On peut noter a l’approche<br />

des accouchements suivants une recrudescence<br />

anxieuse, nécessitant un suivi<br />

psychologique et obstétrical. ■<br />

M. Pellegrin<br />

Service Dr. Caroli, C.H. Sainte-Anne, 75014<br />

Paris


10<br />

LIVRES<br />

■ PSYCHANALYSE<br />

Développements de la<br />

clinique de Winnicott<br />

Avatars des régressions et<br />

masochisme féminin<br />

Jean-Pierre Lehmann<br />

Erès, 23 €<br />

Ce que Michael Balint avait dénommé<br />

« régression maligne » peut se produire<br />

au cours d’une analyse. Faisant suite<br />

au livre précédent La clinique analytique<br />

de Winnicott (érès, 2003), qui<br />

portait sur la genèse de la théorie de<br />

Winnicott et ses principaux concepts,<br />

cet ouvrage traite d’une question touchant<br />

aux avatars des régressions à<br />

la dépendance, à propos du récit circonstancié<br />

d’une histoire clinique.<br />

Cela amène Jean-Pierre Lehmann à<br />

reconsidérer dans les textes littéraires<br />

et analytiques ce qui concerne les<br />

passions amoureuses pour examiner<br />

un point controversé dans la communauté<br />

analytique celui du masochisme<br />

féminin. Ce qu’avaient avancé<br />

les psychanalystes femmes de l’entourage<br />

immédiat de Freud, à ce sujet,<br />

a été rejeté par les analystes des<br />

générations suivantes. Ce point n’est<br />

pas anodin car il touche au destin de<br />

la féminité des filles qui, soutient Jean-<br />

Pierre Lehmann, dépend de leur élaboration<br />

de la position dépressive<br />

telle que la pensait Winnicott. Pour<br />

étayer cette thèse, il part des éléments<br />

de la théorie winnicottienne du féminin,<br />

du masculin et de la position<br />

dépressive, pour en développer les<br />

conséquences théoriques et cliniques.<br />

Un livre blanc pour la<br />

psychanalyse<br />

Pascal Hachet<br />

L’Harmattan, 29 €<br />

La parution, en septembre 2005, du<br />

Livre noir de la psychanalyse a suscité<br />

de nombreuses réactions. Pascal Hachet<br />

contre cette offensive cognitivocomportementaliste<br />

au moyen d’un<br />

panorama de travaux psychanalytiques<br />

récents (1990-2005). Ces recherches<br />

montrent que de nombreux<br />

psychanalystes, toutes « écoles »<br />

confondues, continuent d’interroger<br />

les formes renouvelées de la souffrance<br />

psychique. Les investigations<br />

qui portent sur les deuils pathologiques,<br />

les secrets de famille, les abus<br />

sexuels, l’adolescence et les personnes<br />

longtemps considérées comme « incurables<br />

» ou encore atteintes de maladies<br />

somatiques graves, le témoignage<br />

impliqué de quelques collègues<br />

et l’intérêt accru pour divers aspects<br />

de vie quotidienne, ainsi que pour<br />

les œuvres culturelles marquantes,<br />

réalisent des avancées.<br />

La folie du transfert<br />

Solal Rabinovitch<br />

Erès, 15 €<br />

Solal Rabinovitch, membre de l’école<br />

de psychanalyse Sigmund Freud, livre<br />

ici ses réflexions et ses élaborations<br />

sur le transfert. Reprenant ce qu’en<br />

a dit Freud dans le cas de la névrose<br />

(« les traces mnésiques refoulées des<br />

expériences vécues originaires ne sont<br />

pas présentes en nous à l’état lié et sont<br />

en fait (...) inaptes au processus secondaire<br />

») elle montre bien en quoi<br />

le transfert peut être un obstacle à la<br />

cure : « Ces traces (...) qui ne peuvent<br />

pas se penser (...) il leur faut, auprès de<br />

l’analyste, s’éprouver, telles qu’aucune<br />

interprétation ne puisse en épuiser l’ardeur.<br />

Elles font ainsi obstacle à une fin<br />

de cure ». Citant Lacan, le transfert devient<br />

paradoxal : « Comment expliquer<br />

le retour du refoulé ? Si paradoxal<br />

que ce soit, il n’y a qu’une façon de le<br />

faire - ça ne vient pas du passé, mais<br />

de l’avenir... ». Par la suite, plus de la<br />

moitié de l’ouvrage est consacrée aux<br />

constructions de la théorie Lacanienne...<br />

M. Goutal<br />

<br />

concerne les relations d’objet (à l’exception<br />

de ce qui touche à Winnicot,<br />

partie qui a été coordonnée par Jennifer<br />

Johns, du London Bi-logic Group,<br />

groupe qui travaille sur Matte Blanco).<br />

Howard Bacal a traité la Self Psychology<br />

; Elinor Fairbairn et David Scharff se<br />

sont occupés de Fairbairn. Etc, etc..<br />

Je ne peux citer ici tout le monde car<br />

au total, presque trois cents contributeurs<br />

ont participé… dont deux seulement<br />

par courrier ordinaire !<br />

A part eux, cette encyclopédie a été<br />

rassemblée par mail, signe des temps et<br />

d’un travail réellement international et<br />

facilité par les communications<br />

actuelles.<br />

Les participants à l’Encyclopédie viennent<br />

ainsi de quarante-sept pays. C’est<br />

très intéressant car chaque zone géographique<br />

et culturelle a « mis l’analyse<br />

à sa sauce ». En URSS, Trotski a de<br />

façon étonnante tenté de favoriser une<br />

jonction psychanalyse/Pavlov. Au Japon<br />

et en Corée, le Boudhisme teinte l’analyse<br />

; en Inde c’est l’Indouhisme. Dans<br />

mon propre pays, la République Irlandaise,<br />

on peut légitimement douter de<br />

ce que l’analyse eût pu prendre racine<br />

si elle n’avait pas été « mélangée » à<br />

Jésus par Jonathan Hanaghan, qui fut à<br />

la fois un penseur marqué par la foi<br />

chrétienne et un pacifiste (il a d’ailleurs<br />

écrit un livre qui s’appelle Freud and<br />

Jesus). Trois pacifistes anglais étaient<br />

venus rejoindre ce dernier avant que la<br />

Seconde Guerre Mondiale n’éclate.<br />

Leur pratique dans les années quarante<br />

et cinquante de la post-guerre tient<br />

compte que l’Eglise Romaine Catholique<br />

de cette époque était très sévère<br />

et ces analystes irlandais de la première<br />

heure travaillèrent beaucoup sur la<br />

sévérité du surmoi. L’Eglise Catholique,<br />

à cette époque, voyait l’analyse comme<br />

une « religion » rivale… ce qui, rétrospectivement,<br />

s’est montré exact. De<br />

nombreux prêtres et religieuses firent<br />

des psychothérapies et un certain<br />

nombre d’entre eux se formèrent<br />

même à l’analyse lacanienne sous l’égide<br />

d’un jésuite qui quitta les ordres,<br />

Cormac Gallagher. En Irlande, les lignes<br />

de forces des courants analytiques suivirent<br />

d’assez près les influences religieuses<br />

et ceci, bien qu’on ne puisse<br />

en faire une règle générale, les Protestants<br />

étant plus volontiers éclectiques et<br />

les Catholiques plus « doctrinairement »<br />

lacaniens (ensuite, comme on pouvait<br />

s’y attendre, avec l’essor du capitalisme<br />

et le déclin de l’Eglise, nous avons<br />

vu fleurir tout un choix de thérapies<br />

ici). Quoiqu’il en soit, pour ce qui<br />

concerne les contacts avec les différents<br />

auteurs, l’expérience m’a montré<br />

que j’avais intérêt à entrer directement<br />

en contact avec les « pontes » de l’analyse.<br />

Au début, je craignais qu’ils ne<br />

soient trop occupés pour me répondre<br />

mais ce fut, en fait, bien rare que j’essuie<br />

un refus de leur part.<br />

Et, selon les pays, les réponses m’étaient<br />

rendues avec des délais très divers :<br />

celles des Américains, presque par<br />

retour de courrier ; les Britanniques<br />

me disaient souvent : « N’hésitez pas<br />

à me rappeler ceci de temps, à autre,<br />

you know » ; les Allemands avaient tendance<br />

à me demander : « J’ai combien<br />

de temps ? ». En réalité, solliciter une<br />

grande diversité de contributeurs m’a<br />

été suggéré par deux faits. Tout<br />

d’abord, comme Wallerstein l’a montré,<br />

il n’y a pas de preuve montrant qu’une<br />

quelconque école de psychanalyse ait<br />

de meilleurs résultats qu’une autre. Par<br />

ailleurs, comme me l’avait dit Masud<br />

Khan – bien que ce fut dans une<br />

ambiance alcoolisée ! – en fait, personne<br />

ne sait totalement ce qui se passe<br />

lors des séances, du fait de leur privauté.<br />

Bien des analystes d’une école<br />

donnée se conforment en surface aux<br />

règles de cette dernière mais, en pratique,<br />

ils ont recours à leur propre<br />

« mélange » d’idées.<br />

Ceci suggère qu’en privé les analystes<br />

« font ce qui marche » et qu’ils ont en<br />

général une ouverture réelle aux<br />

diverses influences.<br />

Une nouvelle encyclopédie<br />

psychanalytique<br />

Entretien avec Ross Skelton*<br />

M S-C : Vous avez opté pour des entrées<br />

se suivant en ordre alphabétique…<br />

RS : J’avais le choix entre deux mises<br />

en ordre : par écoles ou par ordre<br />

alphabétique. Comme j’ai eu l’impression<br />

que tous les analystes faisaient en<br />

fait un travail bien moins « pur » qu’ils<br />

ne le prétendaient vis-à-vis de leurs<br />

écoles d’appartenance, j’ai choisi cette<br />

formule. Ainsi, le freudien qui cherchera<br />

« Working through » (élaboration)<br />

trouvera en face le mot « Zeigarnik<br />

effect », tout aussi bien que le<br />

junguien qui cherchera « Inflation »<br />

trouvera à la suite « Infinite », et il sera<br />

peut-être tenté d’enchaîner la lecture de<br />

ce nouvel article à celle du précédent.<br />

M S-C : Pourquoi une nouvelle encyclopédie<br />

? D’autres existaient déjà…<br />

RS : Celle-ci ( 518 pages) est plus vaste<br />

que celle que nous avions en langue<br />

anglaise. Celles de Moore and Fine<br />

(USA) ou de Rycroft (Angleterre) ne<br />

comportent qu’environ deux cents<br />

pages. Et notre Encyclopédie est moins<br />

orientée spécifiquement sur le seul<br />

Freud, ou presque, que le Laplanche<br />

et Pontalis (un classique en langue<br />

anglaise aussi). Elle se veut conviviale<br />

pour son utilisateur et orientée vers les<br />

différentes chapelles, toutes grandes<br />

écoles incluses. Ceci fait que vous y<br />

trouvez abordés les champs avec lesquels<br />

l’analyse a des intersections : la littérature<br />

autant que les neurosciences.<br />

L’éthologie aussi, qui a eu une grande<br />

influence sur Bowlby et les théoriciens<br />

de l’attachement. L’antropologie, passant<br />

par Lévi-Bruhl, Lévi-Strauss a laissé<br />

des traces importantes chez Jung et<br />

Lacan. Par ailleurs, un nombre limité<br />

mais significatifs d’analystes placent<br />

l’analyse au rang de science et la neuropsychanalyse<br />

s’inspirant des neurosciences<br />

s’est développée ces dernières<br />

années (elle a même son journal,<br />

Neuro-Psychoanalysis). La religion, bien<br />

que Freud fût athée et que Jung ait<br />

donné une place spéciale à la religion,<br />

a souvent été discutée en parallèle de<br />

l’analyse, quoique le joint religion-analyse<br />

reste difficile à faire. Par exemple,<br />

de nombreux analystes ont pu être attirés<br />

vers le boudhisme, cette « religion »<br />

sans Dieu.<br />

MS-C: Vous mentionnez Lacan. Justement,<br />

presque une page entière de l’in-<br />

dex de votre ouvrage, sur les quatorze<br />

qu’il comporte, lui est consacrée : c’est<br />

impressionnant. En France, Lacan est<br />

déifié par certains analystes (nombreux)<br />

mais en général, dans la littérature anglosaxonne,<br />

il occupe par contre simplement<br />

le rang d’un auteur parmi d’autres.<br />

D’un auteur qui a apporté quelques<br />

concepts intéressants sans être pour<br />

autant le centre du monde. Il est donc<br />

surprenant de le trouver si commenté<br />

dans votre travail, pourtant paru en<br />

anglais.<br />

RS : Il est bien connu que les idées de<br />

Lacan ont rencontré un grand succès<br />

dans les pays catholiques et l’Irlande<br />

ne fait pas exception. Un analyste français<br />

distingué, apprenant que l’analyse<br />

lacanienne était si bien établie dans<br />

mon pays, remarqua : « Je ne savais<br />

pas qu’il y avait une colonie en Irlande!».<br />

Et, il est intéressant de savoir<br />

que les idées lacaniennes n’ont presque<br />

pas d’écho en Ulster, la partie nord et<br />

majoritairement protestante du pays.<br />

Je ne sais pas d’où vient cette<br />

connexion Lacan/catholicisme, si ce<br />

n’est peut-être qu’aucun des deux ne<br />

semble très à l’aise avec le corps. J’ai<br />

moi-même effectué une analyse et une<br />

formation lacaniennes dont j’ai tiré de<br />

grands bénéfices, et j’ai été très investi<br />

dans ce mouvement dans les années<br />

80-90 à Dublin. Mais, voyant que l’école<br />

lacanienne n’était pas ouverte aux<br />

autres idées, j’en suis parti, pour fonder<br />

avec d’autres collègues qui partageaient<br />

ma façon de voir un programme de<br />

formation éclectique qui inclut l’étude<br />

de Klein, Winnicot et Bion tout autant<br />

que celle de Lacan. Alors, s’il y a autant<br />

d’entrées en rapport avec Lacan dans<br />

l’Encyclopédie, c’est qu’il est, à mon avis,<br />

un commentateur très intelligent de<br />

l’œuvre de Freud et que, je pense que<br />

son influence sur la psychanalyse pourrait<br />

bien rester considérable. Quand la<br />

culture change, la psychanalyse doit<br />

être ré-écrite en permanence car avec<br />

les changements sociaux la nature des<br />

problèmes des patients change aussi.<br />

Et, si l’on peut contester les idées de<br />

Lacan, on ne peut dénier son influence<br />

sur les universités de par le monde,<br />

où sa pensée a pénétré mieux que celle<br />

de n’importe quel analyste auparavant,<br />

Freud inclus. Son travail est étudié par<br />

les féministes, par ceux qui s’intéressent<br />

au cinéma (certains disent que la<br />

théorie des films est de la psychanaly-<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

se lacanienne) ; par les critiques littéraires<br />

et en particulier par la « Cultural<br />

Theory » dont Slavoj Zizek est actuellement<br />

le porte-parole lacanien le plus<br />

influent. Au passage, à mon avis, les<br />

universités sont importantes pour l’analyse<br />

car les instituts ont été exposés,<br />

en tant qu’« églises », à mettre en jeu<br />

des esprits de fermeture et d’ouverture.<br />

Une figure aussi importante de l’establishment<br />

psychanalytique que l’est<br />

Kernberg, a écrit une critique inquiète<br />

des formations dispensées par les instituts.<br />

C’est pourquoi les universités,<br />

maintenant plus investies dans la formation<br />

analytique, pourraient en dernier<br />

lieu connaître plus de succès que<br />

les instituts pour cette raison. Les<br />

chasses aux sorcières y sont plus difficiles<br />

à poursuivre devant des non analystes<br />

qui, dans les comités universitaires,<br />

peuvent demander à ce que des<br />

jugements plus sobres s’exercent. De<br />

plus, depuis la chute de l’Empire Soviétique,<br />

des penseurs de l’Est, formés à la<br />

pensée marxiste, ont été attirés par<br />

Lacan qui, comme Marx, avait luimême<br />

été fortement influencé par<br />

Hegel. Lacan, un penseur anthropologique,<br />

si ce n’est social, est sympathique<br />

aux ex-marxistes accoutumés à une<br />

pensée socio-culturelle et dont de nombreux<br />

s’étaient formés à Paris.<br />

MS-C: Bion a aussi une place importante<br />

dans l’Encyclopédie…<br />

RS : Je pense que Bion est probablement<br />

le seul penseur intellectuel et clinicien<br />

qui soit l’égal de Lacan. Il n’a<br />

pas les talents littéraires de Lacan mais<br />

sa saisie de la logique et des mathématiques<br />

est excellente, là où celle de<br />

Lacan ne l’est pas, malgré ses nombreuses<br />

spéculations en la matière.<br />

Bion, le post-kleinien, est bien dans la<br />

tradition de Money Kyrle (lui-même<br />

un analysant de Schlick, le fondateur<br />

viennois du positivisme logique). Mais<br />

Bion ouvre Klein sur un public beaucoup<br />

plus large, quoiqu’à part en ce<br />

qui concerne la psychanalyse groupale,<br />

il n’ait pas eu la grande influence culturelle<br />

qui a été celle de Lacan (ou<br />

même celle de Winnicot).<br />

Ainsi, son Memoir of the Future, bien<br />

que provocant et énigmatique n’a pas<br />

le charisme des écrits énigmatiques de<br />

Lacan.<br />

Mais quoiqu’il en soit, les lectures de


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Bion par Grostein et Eigein continuent<br />

à avoir une large influence sur<br />

la clinique psychanalytique.<br />

M S-C : Vous avez fait une place aux<br />

neurosciences dans l’Encyclopédie, une<br />

branche de l’analyse qui reste encore<br />

assez peu commentée en France.<br />

RS : Il est trop tôt pour statuer mais<br />

en ce domaine, effectivement, les<br />

résultats obtenus sont stimulants.<br />

En général la psychanalyse s’est montrée<br />

ambivalente à l’égard des études<br />

développementales (Jung et Lacan,<br />

par exemple ont montré peu d’intérêt<br />

à cet égard). Quoiqu’il en soit,<br />

une opinion croissante, hors de France<br />

en tout cas, est que les théories<br />

psychanalytiques sont trop étroites<br />

et volontiers en opposition avec les<br />

découvertes qui ont été faites dans le<br />

domaine de la croissance du système<br />

nerveux central. Si l’on veut élargir<br />

cette question vers celle de l’analyse<br />

comme « science » il semble<br />

maintenant clair qu’elle n’est pas l’une<br />

des sciences « dures » comme Popper<br />

l’a montré. Elle n’est pas une théorie<br />

à partir de laquelle on peut prédire<br />

des résultats futurs ou même à partir<br />

de laquelle on peut établir des contreexemples<br />

qui mèneraient à abandonner<br />

ou pas ladite théorie (mais<br />

souvenons-nous que Popper ne<br />

considérait pas non plus que les théories<br />

de Darwin fussent scientifiques).<br />

Ahumada a montré de façon appropriée<br />

que l’interprétation de l’analyste<br />

peut être vue comme offrant<br />

un contre-exemple au système des<br />

croyances inconscientes du patient<br />

et ce à partir de ce qu’il dit lui-même.<br />

Par ailleurs, le langage n’est pas qu’un<br />

fait humain, comme l’a montré le<br />

célèbre chimpanzé américain Washoe<br />

qui avait appris le langage américain<br />

des signes avec lequel il « parlait »<br />

avec les personnes qui s’occupaient<br />

de lui. D’autre part, l’interdit de l’inceste<br />

existe chez les chimpanzés, ce<br />

qui remet en question la notion lévistraussienne<br />

qui veut que ce tabou ne<br />

soit imposé que par le père (humain).<br />

Eh bien, si vous acceptez Darwin, et<br />

l’éthologie, vous devez accepter les<br />

conséquences de notre héritage animal.<br />

Enfin, si l’on veut continuer à<br />

parler de « sciences » à propos de<br />

l’analyse, on doit mentionner les<br />

études de résultats : ces dernières<br />

montrent que l’analyse est efficace…<br />

mais elles ne semblent pas différencier<br />

les résultats obtenus d’une école<br />

à l’autre ! Tous ces points figurent<br />

dans l’Encyclopédie, bien entendu.<br />

M S-C : Et, mention surprenante, on y<br />

trouve celle de Léon Trotski (sous l’entrée<br />

Russie) : que vient-il faire ici ?<br />

RS : Bien que cela puisse paraître<br />

étrange, il y a un lien entre lui et<br />

l’analyse. En Russie, l’Institut d’Etat<br />

de Psychanalyse fut fondé en 1923<br />

par Luria et ses collaborateurs. Deux<br />

années après, Luria et Vitgotsky, le<br />

linguiste, écrivirent un article : « La<br />

synthèse du freudisme et du marxisme<br />

sur la base de la théorie pavlovienne<br />

des réflexes conditionnés ». Trotski<br />

écrivit à Pavlov (qui avait eu le prix<br />

Nobel) lui conseillant de mêler sa<br />

physiologie à l’analyse freudienne.<br />

Trostki pensait que les deux chercheurs<br />

regardaient dans le même<br />

puits humain : Freud d’en dessus, et<br />

Pavlov d’en dessous. Puis, la chute<br />

de la psychanalyse en Russie suivit<br />

celle de Trotski, sous Staline.<br />

Vous voyez donc, encore une fois,<br />

combien le sort de la psychanalyse<br />

est tributaire de l’endroit où elle est<br />

implantée ! ■<br />

*Ross Skelton qui est Senior Lecturer en psychanalyse<br />

et philosophie à Trinity College<br />

(Dublin, Irlande), est l’Editor in Chief de la<br />

récente Edinburgh International Encyclopaedia<br />

of Psychoanalysis (Edinburgh University<br />

Press).<br />

La psychiatrie des urgences<br />

Entretien avec Marie-Jeanne Guedj<br />

Gérard Massé : La passion de l’urgence<br />

saisit de plus en plus de psychiatres.<br />

A qui s’adresse ce nouvel ouvrage ?<br />

Marie-Jeanne Guedj : La préoccupation<br />

de l’urgence psychiatrique est<br />

plus ancienne qu’on ne le croirait puisqu’elle<br />

était la préoccupation majeure<br />

de Duchêne et Daumezon dès les<br />

années 60. Cependant, il a fallu<br />

attendre encore une trentaine d’années<br />

pendant lesquelles les slogans étaient<br />

plutôt : « il n’y a pas d’urgence en psychiatrie<br />

», « il est urgent d’attendre »,<br />

« on attend la demande ». De nombreux<br />

facteurs ont sensibilisé l’ensemble de<br />

la profession et des usagers : la réduction<br />

des durées d’hospitalisation, la<br />

reconnaissance des urgences médicopsychiatriques<br />

et l’efficacité des interventions<br />

de crise. L’urgence psychiatrique<br />

est, aujourd’hui, reconnue à part<br />

entière et nécessite un traitement noble.<br />

Cet ouvrage s’adresse à l’ensemble des<br />

professionnels de l’urgence. Des<br />

équipes de la France entière y ont participé.<br />

GM : Cet ouvrage présente une originalité<br />

certaine et une nouvelle approche<br />

au-delà des diagnostics. Peux-tu nous le<br />

présenter ?<br />

M-J G : Il a pour but d’aider au raisonnement<br />

déductif en situation d’urgence<br />

en apportant un certain nombre<br />

d’informations et en permettant d’explorer<br />

la question centrale de l’urgence :<br />

« pourquoi ici et maintenant ? ».<br />

La pratique de l’urgence est essentiellement<br />

clinique, mais le patient se présente<br />

avec des signes ou des demandes<br />

motivant l’urgence, plus rarement avec<br />

un diagnostic catégoriel établi. Nous<br />

avons insisté sur cet aspect dimensionnel.<br />

L’originalité de l’ouvrage tient à 2 parties<br />

inédites qui répondent à des questions<br />

bien embarrassantes en urgence,<br />

quoique non cliniques : ce sont d’abord<br />

les situations particulières péri-urgence<br />

telles que la présence d’enfants avec<br />

le patient, les soins à donner à un<br />

patient célèbre ou à un patient du<br />

LIVRES<br />

Nouveau dictionnaire critique<br />

d’action sociale<br />

Edition mise à jour sous la direction<br />

de Jean-Yves Barreyre et Brigitte<br />

Bouquet<br />

Bayard, 34 €<br />

Ce Nouveau dictionnaire critique d’action<br />

sociale donne accès à des théories<br />

sélectionnées dans différents champs<br />

disciplinaires, aux concepts de base,<br />

dont il s’efforce de discuter la valeur et<br />

de montrer le maniement, les applications<br />

envisageables et utiles, les recommandations<br />

méthodologiques.<br />

Aux dimensions fondamentales et pratiques<br />

déjà présentes dans la première<br />

édition, les rédacteurs de la nouvelle<br />

mouture se sont efforcés d’ajouter différentes<br />

analyses des enjeux sociaux.<br />

Ainsi, un certain nombre de termes nouveaux<br />

accompagnent la production de<br />

textes réglementaires parus dans les<br />

années 2000 et particulièrement les lois<br />

de janvier et mars 2002, celle de 2004<br />

sur les libertés locales et la loi du 11 février<br />

2005, ainsi que les décrets, arrêtés<br />

et circulaires qui en découlent.<br />

Pour exemple, si l’entrée « citoyenneté »<br />

était présente dans le dictionnaire de<br />

1995, elle a été revisitée et elle s’interroge<br />

aujourd’hui avec les notions d’« usagers<br />

et de rapports sociaux d’usage », de<br />

« participation » ou de « situations sociales<br />

», mais aussi de « dépendance »,<br />

milieu médical, ou encore que faire si<br />

le patient est accompagné d’un animal.<br />

Ces situations ne sont pas anecdotiques,<br />

elles prennent beaucoup de temps,<br />

même une fois établi le diagnostic.<br />

GM : Pourquoi un livre sur les urgences<br />

psychiatriques traite-il des appels téléphoniques<br />

?<br />

M-J G : Par ailleurs, il ne saurait exister<br />

d’urgence psychiatrique sans l’appel<br />

téléphonique, et nous avons tenté de<br />

recenser les grandes catégories d’appels.<br />

GM : De nouvelles demandes existentelles<br />

aux urgences psychiatriques ?<br />

La psychiatrie des urgences<br />

Direction de la rédaction Marie Jeanne Guedj, Jean-<br />

Claude Pascal<br />

Eisai Editions de l’Interligne<br />

Depuis une quinzaine d’années, l’ampleur croissante prise,<br />

en France, par les demandes adressées aux services d’urgences<br />

et, au sein ou à la périphérie de ceux-ci, les demandes<br />

psychiatriques, font du sujet une question importante<br />

de santé publique. Ils entraînent une augmentation<br />

du nombre d’articles et d’ouvrages traitant de différents<br />

aspects de la question. Il est toutefois assez rare de trouver<br />

avec réussite, concentrée en un seul ouvrage, ramassée<br />

dans un volume contenu (315 pages) la description<br />

d’une matière qui peut appeler autant de développements<br />

différents. C’est donc quasiment une petite encyclopédie<br />

rigoureuse et concise sur la psychiatrie en urgence que<br />

les auteurs réunis par Marie Jeanne Guedj et Jean Charles<br />

Pascal, auteurs eux-mêmes, nous proposent. L’intitulé laisse<br />

entendre, et la lecture le vérifie, que ce n’est pas uniquement<br />

de description classique des pathologies aiguës dont<br />

il va être question. L’ouvrage traite également de situations<br />

graves, complexes, ou très inhabituelles, abordées<br />

dans un contexte d’urgence, c’est-à-dire lorsque le temps<br />

manque et que le clinicien doit s’ingénier à le créer en suscitant,<br />

si possible, des modalités d’alliance thérapeutique.<br />

Il est rare également qu’un ouvrage réunisse autant d’auteurs<br />

intervenant de points de vue différents et pourtant<br />

assez convergents, de cliniciens également psychanalystes,<br />

systémiciens, comportementalistes, entre autres. Pour qui<br />

connaît un peu le domaine on retrouve, dans ce livre, les<br />

signatures de ce qui ce fait de reconnu, d’expérimenté, en<br />

France, dans le domaine de l’urgence psychiatrique, parfois<br />

depuis fort longtemps, à une époque où, comme le<br />

de « compensation » ou d’« empowerment<br />

», notices qui explorent l’effectivité<br />

de cette citoyenneté pour chacun,<br />

et notamment pour les plus vulnérables.<br />

Ce dictionnaire tient compte du nouveau<br />

cadre de l’action sanitaire et<br />

sociale et des débats qui l’ont accompagné,<br />

avec les notices « qualité », « référentiels<br />

», « intervention sociale » ou «réseaux<br />

de santé ».<br />

Enfin, dans le contexte de « décentralisation<br />

» ou « déconcentration » de l’action<br />

sociale, ce nouveau dictionnaire<br />

interroge les notions de « subsidiarité »<br />

et de « gouvernance ».<br />

Dix ans plus tard, des secteurs entiers<br />

de l’action sociale sont revisités comme<br />

celui de la famille, avec les nouvelles<br />

entrées de « médiation familiale », de<br />

« pluriparentalité », d’« homoparentalité »,<br />

de « familialisme », ou d’« intergénérationnel<br />

» qui indiquent les nouveaux<br />

questionnements à propos de l’institution<br />

familiale, liés aux évolutions économiques,<br />

sociales et culturelles récentes.<br />

De la même manière, la question du<br />

travail est aussi explorée sous l’angle<br />

de l’« employabilité » ou du « sous-emploi<br />

». De nouveaux secteurs de l’intervention<br />

sont abordés comme ceux de<br />

la « téléphonie sociale », l’aide aux « victime(s)<br />

», la « médiation sociale » ou encore<br />

la lutte contre les « sectes ».<br />

La question des femmes est introduite<br />

notamment par les deux nouvelles notices<br />

de « genre » et de « parité ».<br />

M-J G : Indépendamment du diagnostic,<br />

il existe des populations particulières<br />

pour lesquelles une vigilance<br />

accrue s’impose actuellement : les adolescents,<br />

les personnes âgées, les<br />

patients en grande précarité.<br />

De nouvelles demandes arrivent, pour<br />

des pathologies anciennement connues<br />

et traitées jusque là en dehors de l’urgence,<br />

par exemple les troubles du<br />

comportement alimentaire, les troubles<br />

obsessionnels et toutes sortes de dépressions,<br />

les troubles liés à l’orientation<br />

sexuelle.<br />

Enfin, les situations de stress de la vie<br />

sociale convergent aussi vers les<br />

urgences : stress lié au harcèlement au<br />

travail, au rythme effréné des change-<br />

Les violences sexuelles sur<br />

mineurs<br />

La justice peut-elle contribuer à la<br />

reconstruction des victimes ?<br />

Caroline More<br />

L’Harmattan, 22 €<br />

La prise en compte des abus sexuels<br />

sur mineurs et de leurs répercussions<br />

psychologiques est récente. Pourtant,<br />

les enfants abusés ont besoin à la fois<br />

du soutien d’adultes non défaillants, et<br />

de la reconnaissance de la société. Caroline<br />

More observe le cheminement<br />

de jeunes filles violées et maltraitées,<br />

qui essayent de retrouver un sens dans<br />

leur vie. En s’appuyant sur des études<br />

de cas et des témoignages publiés, cet<br />

ouvrage vise à une compréhension des<br />

violences sexuelles sur mineurs et de<br />

l’interrelation entre justice et psychothérapie<br />

pour la reconstrucion des victimes.<br />

Les problématiques d’autodestruction,<br />

de retournement de l’agressivité contre<br />

soi dans un mouvement de honte et de<br />

culpabilité, sont très féminines. Les<br />

conséquences des circonstances de<br />

l’abus et des réponses judiciaires : classement,<br />

non-lieu, relaxe, acquittement,<br />

condamnation pourraient être déterminées.<br />

Enfin, dans notre société, les<br />

difficultés psychologiques s’expriment<br />

plus souvent par des passages à l’acte.<br />

On assiste à un affaiblissement général<br />

des limites, entre fantasme et réalité,<br />

entre permis et interdit.<br />

Or, les problématiques de l’agir, avec<br />

URGENCES ■ 11<br />

ments sociaux, ou à l’extrême à des<br />

catastrophes psychosociales.<br />

Il s’y ajoute, et c’est une bonne chose,<br />

la demande accrue d’informations de la<br />

part des patients et des familles mais<br />

aussi, et nous avons un devoir de réserve,<br />

celle de renseignements dans le<br />

cadre d’enquêtes négligeant le secret<br />

médical.<br />

GM : Ne crains-tu pas que l’évolution<br />

rapide de la société, qui touche aussi la<br />

psychiatrie, rende cet ouvrage rapidement<br />

dépassé ?<br />

M-J G : Bien sûr, c’est pourquoi il sera<br />

évolutif et donnera lieu aux rééditions<br />

nécessaires. J’en profite pour rendre<br />

hommage, une nouvelle fois, à la centaine<br />

d’auteurs qui se sont astreints à un<br />

plan et à un format contraignants et<br />

pour remercier le laboratoire EISAI et<br />

les Editions Interligne d’avoir assuré le<br />

support logistique. ■<br />

fait remarquer Marie Jeanne Guedj dans sa préface, cette<br />

question relevait plutôt de quelques initiés militants. La<br />

moitié des régions françaises, les plus importantes, celles<br />

qui font « école », y contribuent, que ce soit des cliniciens<br />

universitaires ou du secteur psychiatrique, des praticiens<br />

exerçant dans le privé, des travailleurs sociaux ou des infirmiers,<br />

d’où l’expression d’une richesse clinico-géographique<br />

et catégorielle assez remarquable.<br />

L’ouvrage est divisé en six parties : la première est consacrée<br />

aux principes généraux, qui traitent de la psychopathologie,<br />

de l’éthique, de l’organisation des soins, du droit,<br />

de l’évaluation, des principes de traitement, etc. La deuxième<br />

traite des situations cliniques selon le mode d’arrivée :<br />

crise suicidaire, familiale, les comorbidités, les troubles du<br />

comportement alimentaire, l’épuisement professionnel,<br />

les troubles cardio-vasculaires, le stress et les catastrophes,<br />

etc. Un troisième chapitre aborde les questions selon les<br />

grandes catégories nosographiques : troubles obsessionnels,<br />

phobiques, anxieux, troubles de la personnalité, psychoses<br />

et schizophrénies... Un quatrième traite des situations<br />

selon l’âge : l’adolescent, la femme enceinte, le sujet<br />

âgé. Un cinquième chapitre, assez original, traite des situations<br />

particulières : parmi celles-ci, le patient célèbre,<br />

ou sans argent, armé, SDF, etc. Enfin, l’ouvrage aborde la<br />

question du travail au téléphone et de l’intervention à domicile,<br />

et se clôt sur des modèles de certificat.<br />

Chaque chapitre est clair, concis, accompagné d’une courte<br />

bibliographie. Il constitue une source d’information très<br />

riche pour un public large, et apprendra beaucoup aux<br />

praticiens du champ. Nous félicitons les directeurs de la<br />

publication, outre leur contribution, propre, pour leur talent<br />

à réunir des compétences aussi variées. Il s’agit donc<br />

d’un ouvrage hautement recommandé.<br />

S. Kannas<br />

des symptômes tels que l’automutilation,<br />

se retrouvent chez les victimes avec<br />

lesquelles l’auteur a été en contact ; en<br />

revanche, elles apparaissent peu dans<br />

les témoignages publiés par des victimes<br />

d’agressions dans les années 1950<br />

ou 1980. On peut donc se demander<br />

quelle est l’influence du contexte socioculturel<br />

et de l’évolution des psychopathologies<br />

sur la forme que prend<br />

le syndrome post-traumatique.<br />

En tout état de cause, alors que les violences<br />

sexuelles entraînent toujours des<br />

perturbations majeures, il est important<br />

de développer notre connaissance à ce<br />

sujet, de manière à prévenir et repérer<br />

ces situations, mais aussi à améliorer<br />

les prises en charge.<br />

Langue(s) maternelle(s)<br />

Sous la direction de Anne Bourgain<br />

et Marie-Claude Fourment-<br />

Aptekman<br />

Cahiers de l’Infantile<br />

L’Harmattan, 20,50 €<br />

Ce numéro, consacré aux langues maternelles,<br />

tente d’explorer l’étrange rapport<br />

à cette langue qui nous confronte<br />

toujours à la fois à l’intime et à l’étranger.<br />

Si la langue dite maternelle est le<br />

premier idiome dans lequel baigne l’enfant<br />

- l’infans étant parlé avant qu’il ne<br />

parle - elle est aussi la langue de l’oubli,<br />

du refoulement, ou celle de l’interdit,<br />

du tabou, comme l’illustre le célèbre<br />

cas de Louis Wolfson plusieurs fois évoqué<br />

dans ce numéro.


12<br />

LIVRES<br />

■ ÉTHIQUE<br />

Parents et professionnels<br />

face au dévoilement du<br />

handicap<br />

Dires et regards<br />

Serge Ebersold<br />

Erès, 23 €<br />

Plus qu’il ne s’annonce, le handicap<br />

se dévoile tout au long d’un processus<br />

diagnostique qui exige des soignants<br />

une grande humanité et qui<br />

confronte les parents à une succession<br />

de vérités traumatiques. Pour<br />

ces derniers, le diagnostic ne constitue<br />

pas un aboutissement. Il ouvre<br />

une incertitude quant au futur de<br />

l’enfant, aux soutiens qu’ils vont trouver,<br />

à leur devenir. Le handicap est<br />

indissociable des multiples stigmates<br />

qui jalonnent la vie quotidienne et<br />

qui leur signifient qu’avant d’être des<br />

parents, ils sont désormais des parents<br />

d’enfants handicapés, voire des<br />

parents handicapés.<br />

La première partie de cet ouvrage<br />

rapporte le dévoilement du handicap<br />

aux grilles de lecture de la déficience,<br />

puis sont mis en lumière les différents<br />

modes de qualification de l’annonce<br />

alors que le chapitre 2 met en exergue<br />

diverses configurations susceptibles<br />

de la régir. Le chapitre suivant relie<br />

le registre de cohérence des parents<br />

à celui des soignants et distingue le<br />

registre anthropologique des premiers<br />

de celui de la sollicitude médicale<br />

qu’adoptent les soignants.<br />

La seconde partie rapporte le dévoilement<br />

du handicap aux conséquences<br />

de l’événement pour les familles. Est<br />

ensuite montré le processus de désidentification<br />

et de disqualification<br />

que doivent affronter les parents. Les<br />

mécanismes de disqualification sociale<br />

sont reliés aux preuves de reconnaissance<br />

qu’ils trouvent auprès<br />

des professionnels.<br />

Enfin, sont présentées les grilles de<br />

lecture qu’ont les professionnels de<br />

l’accompagnement et leur aptitude<br />

à faire de celui-ci un vecteur de reconnaissance<br />

sociale.<br />

La psychologie de la vie<br />

Alfred Adler<br />

Traduit de l’anglais, introduit,<br />

commenté et annexé par Régis<br />

Viguier<br />

L’Harmattan, 19 €<br />

Régis Viguier travaille depuis de nombreuses<br />

années à l’explicitation de<br />

l’œuvre d’Adler et est l’un des spécialistes<br />

d’Adler en France qui occupe<br />

une place importante dans la psychologie<br />

des profondeurs que démontre<br />

son succès, dès 1920, dans<br />

beaucoup de pays d’Europe et aux<br />

Etats-Unis.<br />

L’adlérisme apporte une contribution<br />

à la compréhension du comportement<br />

humain et de ses motivations<br />

inconscientes : la formation de la personnalité<br />

autour d’une grille de lecture<br />

qui s’installe très tôt, la possibilité<br />

de comprendre cette grille de<br />

lecture et ses déviations pathologiques,<br />

le sens à attribuer à la vie, la<br />

tendance universelle à tout faire pour<br />

se développer le mieux ou le moins<br />

mal possible face aux difficultés de<br />

l’existence qui ravivent le sentiment<br />

de vulnérabilité et de limitations de<br />

la personnalité.<br />

Un certain nombre de ses idées ont<br />

pénétré la psychologie actuelle, sans<br />

que l’on signale toujours leur origine,<br />

comme le rôle de la fratrie dans la<br />

construction de la personnalité, les<br />

principes d’une éducation fondée sur<br />

la psychologie, les attitudes assurant<br />

des relations et des échanges équilibrés<br />

et satisfaisants entre les personnes<br />

et les groupes.<br />

Thème abordé aux journées de<br />

l’Ecole de la Cause Freudienne en<br />

novembre dernier, il rebondit dans<br />

l’abord qu’en font d’autres journées,<br />

celles de L’association française de psychiatrie<br />

et psychologie sociales en<br />

décembre.<br />

La société d’aujourd’hui revendique<br />

une totale transparence des sources<br />

d’informations qui lui sont données,<br />

et cela s’applique à tous et pour tout<br />

Cependant quand il s’agit du secret<br />

médical, confidentialité nécessaire et<br />

incontournable pour soigner au mieux<br />

un sujet souffrant, la société tend à<br />

objecter sous les auspices d’une redoutable<br />

respectabilité de bonne intentionnalité<br />

soupçonneuse, la vulnérabilité<br />

dudit sujet souffrant.<br />

Et un tiers n’a alors de cesse que de<br />

pousser ce secret à être dévoilé par<br />

celui-là même qui y est tenu ; ce qu’il<br />

ne souhaiterait pas pour lui-même bien<br />

entendu. Des formules comme : «De<br />

secret, point tant s’en faut et surtout pas<br />

qu’on me l’objecte », ou encore : « Du<br />

secret oui, mais qu’à mon usage », résument<br />

la place du secret dans notre<br />

société.<br />

Se dégage donc l’idée du secret à préserver<br />

dans l’intérêt de chacun mais<br />

qui peut s’opposer aux intérêts de certains<br />

autres, de la collectivité aussi dont<br />

tout un chacun dépend cependant.<br />

Conflits d’intérêts que ce secret ! Ce<br />

dont certains ont l’idée qu’on pourrait<br />

en abuser ! Force est alors de penser à<br />

celui auquel il profite le plus et d’en<br />

débattre dans l’intérêt de tous.<br />

Qu’en est-il du secret en<br />

psychiatrie ? Et si tel est le cas quelle<br />

serait sa particularité ?<br />

Outre que la maladie psychiatrique ne<br />

s’objective pas, et tant que les symptômes<br />

ne la révèlent pas d’une façon<br />

incontestable, l’expression des<br />

croyances d’un sujet à partir desquelles<br />

il choisit de se positionner, est avant<br />

tout un choix subjectif qui ne gêne que<br />

lui ; c’est son domaine privé, son jardin<br />

secret, son secret. Quand par ses<br />

croyances, ce même sujet implique les<br />

autres sans qu’ils y consentent, de secret<br />

il n’y a plus. Ce secret est tombé dans<br />

le domaine public qui alors le traite, le<br />

domaine public sommé qu’il est de le<br />

faire pour une société solidaire. Voilà<br />

une façon d’aborder la maladie psychiatrique<br />

déclarée et le jardin secret du<br />

patient qui ne l’est plus, puisque le sujet<br />

malade ne le gére plus lui-même, ni<br />

même aidé s’il a choisi de l’être. Mais<br />

au fond là tout est simple et peu à<br />

même de susciter des conflits, car de<br />

secret violé il n’y a pas.<br />

Que peut donc bien susciter l’idée<br />

d’un secret ?.... à ceux qui ne sont<br />

pas mis dans ce secret, s’entend<br />

L’essence du secret, son ressort, ce<br />

autour de quoi une polémique naît,<br />

c’est comme dirait Monsieur de La<br />

Palisse qu’il n’est pas partagé, et qu’il y<br />

en a qui en sont exclus.<br />

Le problème du secret, c’est justement<br />

quand il est violé, quand il est dévoilé<br />

alors que le sujet n’y consent pas, question<br />

de moment ou de destinataire.<br />

Là est le ressort du secret, d’être dévoilé,<br />

avec des effets pas forcément mesurables<br />

ou prévisibles, tant pour celui<br />

qui le détient que pour celui qui le<br />

recueille, tant pour celui qui en est le<br />

confident que pour celui auquel il est<br />

adressé.<br />

Il faut, en effet, être au minimum deux<br />

pour qu’il y ait secret, un qui sait et<br />

l’autre qui ne sait pas, mais qui sait qu’il<br />

ne sait pas. Si on y réfléchit bien, cette<br />

position duelle préside déjà à la naissance<br />

de tout être humain dans le<br />

monde des hommes, être humains<br />

doués du langage et d’un savoir qu’ils<br />

transmettent de multiples façons, mais<br />

toujours de façon plus ou moins<br />

consciente ou inconsciente. Le secret se<br />

révèle maintenant sous un autre aspect,<br />

le secret comme faute, faute par défaut<br />

de transmission, faute par refus de<br />

transmission, faute par vice de transmission,<br />

etc.….faute car jouissance d’un<br />

savoir dévoilé à des fins privées.<br />

Qu’en est-il alors du secret exclu du<br />

savoir, soit parce qu’il est<br />

inconscient et en attente de<br />

déchiffrement, soit parce qu’il est<br />

simplement indicible ?<br />

Indicible, ce secret travaille à notre insu<br />

et contribue à nos particularités. Il est le<br />

lot de tout un chacun et un fardeau<br />

pour tout un chacun. Personne ne se le<br />

dispute, et en somme il ne fait pas<br />

secret pour les autres mais pour soi.<br />

C’est un objet d’étude pour la psychanalyse,<br />

ou de contrôle pour les psychothérapies,<br />

selon que le sujet préfère<br />

le mettre en lumière ou l’enfouir. Il<br />

choisit dans les deux cas d’en faire un<br />

symptôme qu’il circonscrit pour pou-<br />

L’ÉTUDE SOHO (Schizophrenia Outpatients Health<br />

Outcomes study)<br />

A propos du secret<br />

L’étude SOHO (Schizophrenia Outpatients Health Outcomes) est une étude<br />

européenne prospective, non interventionnelle et observationnelle, portant sur<br />

des patients venant consulter à l’hôpital et en cabinet de ville et soumis à une<br />

thérapeutique antipsychotique pour schizophrénie. Tous les patients étudiés<br />

ont reçu un nouveau médicament au début de l’étude, soit comme premier<br />

traitement soit en remplacement du précédent.<br />

L’inclusion des patients a commencé en septembre 2000 et s’est terminée en<br />

décembre 2001. La dernière consultation a eu lieu en janvier 2005. Les patients<br />

ont été suivis sur 3 ans.<br />

Dix pays européens ont participé à l’étude : Allemagne, Danemark, Espagne,<br />

France, Grèce, Irlande, Italie, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni. Les cinq principaux<br />

contributeurs étaient l’Allemagne (ayant inclus 29% des patients), l’Italie<br />

(28%), l’Espagne (20%), la France (9%) et la Grèce (7%).<br />

10 972 patients vus en consultation, correspondant aux critères d’admission<br />

et justifiant une prescription thérapeutique, ont été inclus. Parmi eux, 10 204<br />

patients (dont 42% de femmes) ont été inclus dans l’analyse des données.<br />

L’état clinique a été évalué par l’échelle d’impression clinique globale de la<br />

schizophrénie (CGI-SCH : Clinical Global Impression-Schizophrenia). L’échelle<br />

CGI-SCH évalue l’ensemble des symptômes (positifs, négatifs, cognitifs et dépressifs)<br />

de la schizophrénie et fournit une appréciation sur la sévérité globale<br />

de la maladie.<br />

La qualité de vie a été évaluée en utilisant l’échelle européenne de qualité de<br />

vie (EuroQol/EQ-5D : European quality of Life scale). L’EQ-5D est un questionnaire<br />

rempli par les patients. Portant sur 5 domaines qui leur permettent<br />

d’apprécier leur état de santé, c’est un instrument reconnu d’auto-évaluation<br />

de la qualité de vie.<br />

La tolérance a été évaluée par les psychiatres à l’aide d’un interrogatoire. La<br />

dystonie, l’akathisie et le syndrome extra-pyramidal ont été mesurés sur une<br />

échelle de 4 points (« absent » ; « présent sans interférer sur le fonctionnement<br />

et la qualité de vie » ; « présent et interférant sur le fonctionnement et la qualité<br />

de vie » ; « présent et l’emportant sur les effets thérapeutiques »).<br />

L’hyperprolactinémie et le dysfonctionnement sexuel ont aussi été recherchés<br />

voir le dire ou au contraire le cacher,<br />

symptôme dont notre sujet cherche<br />

à s’accommoder pour se sentir en<br />

accord avec lui-même et mieux avec les<br />

autres. Inconscient, ce secret est dépendant<br />

des dires et des non-dits d’une<br />

histoire familiale dans laquelle naît chacun<br />

d’entre nous. Le secret fait lien car<br />

il fait consister le roman familial, le<br />

roman de chacun quand à sa place<br />

dans l’histoire de ses parents, et pour les<br />

parents dans l’histoire de leurs propres<br />

parents. Les secrets font le nid d’histoires<br />

conflictuelles entre les générations<br />

(1), histoires qui font nouages ou<br />

qui font des nœuds parce qu’emmêlés.<br />

Car, c’est bien dans la vie d’une<br />

famille constituée d’un père, d’une<br />

mère et d’un enfant, une famille inscrite<br />

un temps, même s’il a été fugitif,<br />

dans une relation à l’autre sexe, que<br />

l’identité d’un sujet va voir le jour, identité<br />

sexuée aussi puisque le sexe biologique<br />

n’y suffit pas à lui tout seul. Il a<br />

fallu pour cela qu’une femme soit pour<br />

un homme un objet cause de son désir,<br />

désir doué d’une certaine profondeur<br />

affective au risque sinon d’effets destructeurs.<br />

Lacan définit le père à partir<br />

de sa capacité à faire d’une femme<br />

l’objet cause de son désir et de son<br />

amour, une femme symptomatique de<br />

sa vie inconsciente. L’enfant peut ensuite<br />

rencontrer à son tour un objet que<br />

fait valoir le désir du père, et qui peut<br />

contrer les objets et les semblants de la<br />

marchandise (2).<br />

A défaut de cas cliniques les romans de<br />

François Mauriac illustrent les modalités<br />

que peuvent prendre le secret de<br />

chacun traité ici dans le cercle fermé<br />

des mésalliances familiales.<br />

« Thérèse Desqueyroux » ne sera<br />

pas pour Bernard son mari « à la<br />

voie, comme ses carrioles »<br />

Bernard avait besoin de ses ornières,<br />

écrit Mauriac, autrement dit de gestes<br />

et de paroles qu’il est d’usage d’échanger<br />

tous les jours, depuis des générations.<br />

Deux secrets co-existent, s’interpénètrent<br />

et se déclinent, chacun avec leur<br />

logique mais sans jamais trouver de<br />

juste milieu. Si « se mettre à la voie »,<br />

est naturel pour Bernard, un homme<br />

inscrit naturellement dans les lois du<br />

groupe des hommes et de ce qu’ils<br />

font tous dans son milieu, c’est ce que<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

ne peut pas faire d’emblée Thérèse,<br />

une femme qui comme chaque femme<br />

n’attend pour s’y inscrire à son tour<br />

que d’être aimée de Bernard pour ce<br />

qu’elle est (3).<br />

Le secret de ce couple, c’est qu’il ne<br />

peut faire couple, sauf à ce que l’un<br />

des deux meure. Et si ce qu’il faut avant<br />

tout pour vivre dans cette microsociété<br />

de province, c’est garder sauves les<br />

apparences de leur couple, Thérèse le<br />

pourra en vivant loin de Bernard et à<br />

Paris, ce qu’il consent.<br />

Le drame de Louis dans Le nœud<br />

de Vipères, trahi dans son amour<br />

non partagé pour Isabelle, c’est de<br />

croire n’être qu’une valeur<br />

marchande pour la famille de sa<br />

femme et sa femme<br />

Isabelle restera amoureuse d’un seul<br />

homme mais il l’a éconduite. Pour sa<br />

famille elle est à marier au plus vite,<br />

mais dans un milieu qui ne peut plus<br />

être celui auquel elle appartient. Louis<br />

reste un parti possible parce qu’il est<br />

riche. Mais il est aussi riche de l’amour<br />

de sa mère puis ensuite de deux<br />

enfants : Marie sa nièce et Luc son fils,<br />

qui l’aiment en retour mais que leurs<br />

morts lui retirent. C’est vers l’amour<br />

de Dieu qu’il se tourne à la fin de sa<br />

vie, amour infini et indéfectible sauf à<br />

le refuser ou à en douter, amour pour<br />

ce qu’on est et quoi que l’on soit,<br />

amour auquel Louis consent à rouvrir<br />

son cœur. Ce trésor d’amour qu’il renferme<br />

et que sa femme et ses enfants<br />

lui dénient parce qu’ils ne l’aiment pas,<br />

il n’en fera plus son secret. Il leur livrera<br />

posthume dans son journal.<br />

Cette question de l’amour, sa force,<br />

son essence, son pouvoir sur les<br />

êtres, taraude toute l’œuvre de<br />

Mauriac<br />

Dans L’agneau un jeune homme prêt<br />

à entrer au Séminaire, accepte de donner<br />

sa vie pour sauver un enfant et<br />

une femme, des tourments d’un<br />

homme, le mari de cette femme et le<br />

père adoptif « à l’essai » de ce garçon.<br />

Cet homme donc qui l’invite chez lui,<br />

a pressenti ce don de soi qu’il veut<br />

éprouver jusqu’au sacrifice, sacrifice<br />

ultime de sa vie par amour. Comme le<br />

Christ pour sauver les hommes du<br />

péché de jouissance, cet « Agneau » va<br />

renoncer à l’amour d’une femme et à<br />

celui d’un enfant, pour sauver son bourreau.<br />

Ce sacrifice pourra-t-il faire le<br />

pendant au désert d’amour de cet<br />

homme devenu ce bourreau là, après<br />

par l’interrogatoire.<br />

Menée durant 3 ans auprès de 933 patients schizophrènes en France débutant<br />

un traitement (ou changeant de traitement) antipsychotique, l’étude a recueilli<br />

régulièrement plusieurs séries de données. Pour chaque patient, les psychiatres<br />

investigateurs ont notamment fourni des données sur le profil du<br />

patient, la prise en charge (hospitalisation, traitement psychotrope...), la situation<br />

clinique avec une évaluation de la sévérité du trouble schizophrénique,<br />

globalement et par type de symptôme (échelles ICGSCH, cotée de 1 à 6 par<br />

ordre croissant de sévérité des troubles) et une évaluation des troubles du comportement<br />

(usage de drogue...).<br />

Les patients ont répondu à un questionnaire sur la satisfaction à 2 reprises (à<br />

l’inclusion et après 6 mois de suivi). Le taux de réponse au questionnaire de<br />

satisfaction est de 80,6%. L’opinion du patient sur le traitement psychotrope<br />

était mesurée à travers une question unique comportant 4 modalités de réponses<br />

: « très satisfait », « plutôt satisfait », « pas vraiment satisfait », « pas du<br />

tout satisfait ».<br />

La cohorte française en comparaison avec les résultats européens, met en évidence<br />

les données suivantes :<br />

- Un taux d’interruption de traitement de 42%. La raison la plus fréquente est<br />

le manque d’efficacité (47%), suivie par la demande du patient (33%), le<br />

manque d’observance (29,6%) et l’intolérance (17,7%). Les principaux facteurs<br />

influençant le risque d’interrompre le traitement sont la sévérité des symptômes,<br />

le changement pour un nouvel antipsychotique en début d’étude et<br />

l’abus de toxiques.<br />

- Un taux de rechute de 49%. Les principaux facteurs associés aux rechutes<br />

sont la sévérité des symptômes dépressifs et la prescription concomitante d’antipsychotiques<br />

et d’anxiolytiques lors de l’entrée dans l’étude.<br />

- Un taux de rémission de 60,6% . La sévérité générale du score CGI-SCH, les<br />

scores de symptomatologie positive et négative plus élevés et le traitement par<br />

les autres antipsychotiques que Zyprexa ® offrent moins de chances de rémission.<br />

A l’inverse, présenter un épisode de schizophrénie pour la première fois,<br />

exercer un emploi rémunéré, avoir des symptômes moins sévères et être traité<br />

par Zyprexa ® sont autant de facteurs qui pourraient augmenter les chances<br />

de rémission. ■<br />

G.M.


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

avoir été un adolescent déçu par la<br />

mère qu’il avait idéalisée ? Le secret<br />

de cet homme devenu ce bourreau<br />

là, c’est d’avoir découvert que sa<br />

mère ne l’aimait pas autant qu’il le<br />

pensait et autant qu’il l’aimait. Sa<br />

mère aimait son amant plus que son<br />

fils, et son fils aimait sa mère plus<br />

que tout. Et c’est dans Le baiser au<br />

lépreux que Mauriac donne à Jean<br />

le choix de mourir par amour et non<br />

plus par jouissance, afin de libérer<br />

d’un mariage arrangé sa femme<br />

Noémi qui ne l’aime pas. Elle ne supporte<br />

un contact physique avec lui<br />

que quand il est malade, sinon c’est<br />

elle qui se meurt.<br />

C’est enfin dans Destins que<br />

s’enchevêtrent des amours<br />

traversés par des voluptés<br />

coupables<br />

Plutôt que de perdre Paule la femme<br />

qu’il aime, Robert va se suicider. Le<br />

secret de sa vie dissolue révélé par<br />

Pierre, son ami jaloux, à Paule, fait<br />

vaciller l’amour qu’elle a pour lui. Et<br />

Pierre le moins aimé, y compris par<br />

sa mère, choisit la voie de Dieu.<br />

« Pierre fut toujours celui des deux qui<br />

aime plus qu’il n’est aimé et qui souffre.<br />

Ces cœurs éternellement trompés sont<br />

ici bas, du gibier pour Dieu », écrit<br />

Mauriac.<br />

Le secret de tous ces secrets de<br />

familles livrés dans les romans de<br />

Mauriac, naît de cette quête éperdue<br />

d’un amour qui toujours échappe<br />

et ne comble rien, et des efforts de<br />

chacun pour le capturer enfin.<br />

L’amour penche par nature du côté<br />

de « l’être », dans le sens d’être amoureux<br />

ou d’être aimé, et non pas de<br />

l’avoir, dans le sens de le capturer et<br />

de le garder pour toujours. Mauriac<br />

fait apparaître la foi comme pendant<br />

à cette fondamentale déception<br />

qu’est l’amour humain qui penche<br />

plutôt du côté de « l’avoir », que du<br />

côté de « l’être ». Ce n’est pas sans<br />

rappeler les formules de la sexuation<br />

de Lacan dans Télévision qui reprennent<br />

cette question de « l’avoir » et de<br />

« l’être », de l’avoir ou pas le phallus<br />

et du risque fantasmatique de le<br />

perdre pour les hommes, et pour les<br />

femmes de perdre l’amour et non<br />

pas le phallus qu’elles n’ont pas et<br />

de ne pas être aimée.<br />

Cet accès à l’amour du divin permettrait-il<br />

à l’homme d’aimer en<br />

retour ses semblables sans vouloir de<br />

retour puisqu’il est assuré d’être aimé<br />

et donc assuré d’un « avoir » après<br />

la mort? Cette forme d’amour<br />

détournée de l’objet immédiat qui le<br />

cause, rejoint en partie celui de toute<br />

mère pour quelque chose d’autre<br />

que son enfant. Ce « défaut » inhérent<br />

à l’amour maternel est nécessaire à<br />

tout être humain pour que se crée un<br />

espace de désir, un espace de désir<br />

vers un homme, vers une femme,<br />

vers une cause... Par contre, cette<br />

question de « l’avoir » donne à penser<br />

que la religion monothéiste a été<br />

dès son origine une affaire<br />

d’hommes. Dieu serait-il un choix<br />

ultime des personnages mis en scène<br />

par Mauriac, pour la garantie qu’il<br />

donne « d’un avoir » après la mort,<br />

pour la garantie de n’avoir rien perdu<br />

à aimer, un pari par delà la vie ?<br />

C’est à ce questionnement que<br />

conduisent les romans de Mauriac,<br />

à ce secret, secret qui se dévoile et se<br />

révèle aux lecteurs à force de s’écrire.<br />

■<br />

Dr. Joëlle Skriabine<br />

76, Bd Saint Marcel, 75005 Paris<br />

Bibliographie<br />

(1) SOLANO-SUAREZ E., Les secrets de<br />

famille, La Lettre Mensuelle n°252,<br />

nov.2006, p.5.<br />

(2) LA SAGNA P., La famille et la<br />

fabrique du sexe, La Lettre Mensuelle<br />

n°252, nov. 2006, p3-4.<br />

(3) LACAN J., Télévision, Seuil, 1974,<br />

p.63.<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Facteurs de risque des<br />

épisodes dépressifs en<br />

population générale<br />

Etudes et Résultats<br />

Décembre 2006 n°545<br />

DIrection de la Recherche des Etudes<br />

de l’évaluation et des Statistiques<br />

Cette étude se fonde sur trois enquêtes<br />

en population générale qui proposent<br />

chacune un outil de caractérisation de<br />

l’épisode dépressif. Deux de ces outils<br />

relèvent d’une approche catégorielle<br />

(systèmes diagnostiques du DSM-IV et<br />

de la CIM 10) et l’autre d’une approche<br />

dimensionnelle. Malgré ces différences<br />

de définition et de questionnaire, les<br />

corrélations entre caractéristiques socio-démographiques<br />

et épisode dépressif<br />

sont souvent du même ordre. Ainsi, les<br />

femmes présentent, toutes choses égales<br />

par ailleurs, entre 1,5 et 2 fois plus de<br />

risques de vivre un épisode dépressif<br />

que les hommes. Les troubles dépressifs<br />

apparaissent également étroitement<br />

liés à la situation conjugale (vie maritale,<br />

vie en couple, célibat) et notamment<br />

au fait d’avoir vécu ou non une<br />

rupture (divorce, séparation ou décès<br />

du conjoint). Il en est de même pour la<br />

situation professionnelle : les chômeurs<br />

déclarent un épisode dépressif entre<br />

1,4 et 2,1 fois plus souvent que les actifs<br />

occupés. Par ailleurs, deux enquêtes<br />

mettent en évidence une corrélation<br />

négative entre niveau d’étude et risque<br />

d’épisode dépressif. Enfin, de façon<br />

moins nette, l’âge semble avoir un impact<br />

sur ces risques, les 60-75 ans présentant<br />

une « dépressivité » moindre<br />

toutes choses égales par ailleurs.<br />

La mélancolie<br />

Etudes cliniques<br />

Marie-Claude Lambotte<br />

Economica Anthropos, 23 €<br />

A partir du discours mélancolique, M-<br />

Cl. Lambotte élabore des hypothèses<br />

métapsychologiques concernant la maladie,<br />

hypothèses qui, au cours de leur<br />

validation clinique progressivement<br />

confirmée, ont fait l’objet de nombreux<br />

articles dont ce recueil propose une sélection.<br />

A la progression chronologique des articles,<br />

a été préférée une progression<br />

thématique qui confirme la spécificité<br />

du discours mélancolique par rapport<br />

au discours dépressif, et qui, sur cette<br />

base clinique, montre les mécanismes<br />

psychiques sous-jacents de la maladie<br />

pour en déduire une figure particulière<br />

de la castration, celle que M-Cl. Lambotte<br />

a décrite comme un « déni d’intention<br />

», et qui incite à penser une structure<br />

originale de la maladie. Amené à<br />

justifier les effets d’une symptomatologie<br />

essentiellement caractérisée par<br />

un négativisme et une inhibition généralisés,<br />

le discours mélancolique laisse<br />

apparaître une figure psychique toutepuissante,<br />

celle d’un monde constitué<br />

du Sens et de la Vérité absolus qui se<br />

situerait derrière les choses, autrement<br />

dit derrière une réalité quotidienne rendue,<br />

de ce fait, totalement dénuée d’intérêt.<br />

Les derniers chapitres portent témoignage<br />

d’un mode d’organisation esthétique<br />

propre à la disposition mélancolique<br />

qui consiste à élire des objets<br />

de contemplation métonymiques de la<br />

jouissance ou de l’absolu supposé derrière<br />

les choses. La réalité quotidienne<br />

peut, dès lors, abandonner sa fonction<br />

d’écran et retrouver un certain relief,<br />

celui des projections narcissiques qui<br />

redonnent aux objets une valeur particulière.<br />

Les investissements à nouveau rendus<br />

possibles semblent, en un premier temps,<br />

concerner des objets inertes, ceux-là<br />

mêmes qu’on appelle des objets esthétiques,<br />

avec lesquels on peut, selon<br />

Freud, établir des relations affectives.<br />

Louis Bertagna : soulager la douleur<br />

morale, l’obsession d’une vie<br />

Il n’est jamais trop tard pour saluer la disparition d’un<br />

grand homme. Le docteur Louis Bertagna nous a quittés<br />

il y a déjà près de trois mois, le 27 octobre 2006. Il était âgé<br />

de 86 ans, et aura continué d’exercer jusqu’à ses derniers<br />

jours. Louis Bertagna n’était pas un psychiatre conventionnel.<br />

On en jugera par cette brève notice biographique<br />

(qu’il n’aurait sans doute pas encouragée car il détestait les<br />

honneurs). Ayant eu la chance de nouer avec lui une collaboration<br />

étroite, nous nous devions de lui exprimer ici un<br />

dernier adieu, empreint de reconnaissance, d’affection et<br />

d’un très grand respect.<br />

Né le 24 mars 1920 à Sarrebruck où son père travaillait<br />

comme ingénieur des mines, Louis Bertagna fait ses études<br />

secondaires dans un collège de jésuites de Metz. Il entreprend<br />

des études de médecine à Paris qui sont interrompues<br />

par la guerre. Il s’engage dans la résistance, participe à des<br />

activités de renseignement et aide au sauvetage des pilotes<br />

alliés tombés en zone occupée au sein du réseau « Comète<br />

». Son domicile parisien abrite une édition clandestine de<br />

Témoignage Chrétien, un hebdomadaire fondé par un jésuite,<br />

le père Chaillet, pour lutter contre le nazisme et l’antisémitisme,<br />

auquel collaborent Georges Bernanos et Jacques<br />

Maritain. Après la guerre, il reprend ses études, est nommé<br />

Interne des Hôpitaux de Paris au concours de 1946, et<br />

devient en 1950 Chef de Clinique à la faculté de médecine,<br />

dans le service du Professeur Jean Delay où il côtoie Pierre<br />

Pichot, Pierre Deniker et Thérèse Lempérière. Au terme<br />

de son clinicat, il s’installe en exercice libéral à Paris, rue de<br />

Courcelles, tout en conservant pendant trente ans (1955-<br />

1985) une activité hospitalière comme attaché de psychiatrie<br />

à l’hôpital Cochin, dans le service de rhumatologie.<br />

Louis Bertagna a toujours suivi une voie personnelle, celle<br />

dans laquelle il croyait, et non celle qui pouvait lui valoir les<br />

faveurs des uns et des autres. Il n’avait pas le sens de la « carrière<br />

», il a refusé de concourir pour être médecin des hôpitaux<br />

car cela imposait, à l’époque, un simulacre de connaissances<br />

générales sur des questions très éloignées de ses<br />

intérêts et de ses compétences, et il se méfiait des écoles de<br />

pensée qui construisent des systèmes théoriques séduisants<br />

mais éloignés de la pratique. Lorsqu’on lui demandait quelle<br />

était son école, il répliquait qu’il appartenait à la moins fréquentée<br />

des académies, celle du bon sens. Il aurait pu ajouter:<br />

celle de l’humour. C’est en effet avec un humour sans<br />

égal qu’il nous contait ses innombrables expériences. Il se flattait<br />

d’ailleurs d’avoir été à plusieurs reprises au cours de<br />

son Internat « économe » de la salle de garde !<br />

L’index levé comme un élève scrupuleux mais un brin<br />

facétieux, un large sourire fixé aux lèvres, soutenu par un<br />

regard à l’éclat noir malicieux mais toujours bienveillant<br />

derrière les verres épais de ses lunettes, le docteur Bertagna<br />

évoquait volontiers ses souvenirs, mais il n’enseignait rien :<br />

pas de chaire, peu de titres de gloires (l’homme restait toujours<br />

discret sur ses faits de guerre... comme de paix), et<br />

jamais un mot pour faire la leçon à quiconque, sauf les<br />

prétentieux et les sots. Mais à ceux qui avaient la chance de<br />

pouvoir l’écouter, il apprenait bien plus que les classifications<br />

à la mode : l’énigme de l’humain, plus sensible encore dans<br />

les déformations variées que révèle la clinique ; la difficulté<br />

de notre art qui exige beaucoup plus que nous ne pouvons<br />

donner (dans les cas difficiles, il aimait à citer cet<br />

aphorisme : « Il n’y a pas de problème auquel l’absence de<br />

remède ne finisse par apporter une solution » et avant tout, le<br />

respect de la souffrance.<br />

C’est au nom de cette souffrance qu’il s’était battu, en équipe<br />

avec trois de ses fidèles amis et disciples, pour initier<br />

en France le Lithium dans les années 68, époque à laquelle<br />

ce traitement était inconnu ou difficilement accepté.<br />

Dès le début de son activité, l’intérêt de L. Bertagna s’était<br />

porté sur la pharmacothérapie. S’étant orienté d’emblée<br />

vers les troubles de l’humeur, il fut l’un des premiers à<br />

prescrire les toutes nouvelles molécules antidépressives :<br />

tricycliques, IMAO. Il en avait pris connaissance très tôt<br />

grâce à ses lectures et ses contacts à l’étranger, et s’y était rallié<br />

avec enthousiasme. Bertagna comprit immédiatement<br />

quel espoir représentaient ces nouveaux traitements pour<br />

les soins médicaux des dépressifs. Comme clinicien, il participa<br />

ainsi activement au développement de la psychopharmacologie<br />

naissante, dont l’enseignement se mettait<br />

en place en s’organisant autour de la référence internationale<br />

que constituait la classification Delay-Deniker.<br />

Faut-il déduire de cet enthousiasme pour la pharmacothérapie<br />

que, dans l’esprit de Louis Bertagna, la psychiatrie se<br />

résumait à traiter les dérèglements d’une machinerie neurobiologique<br />

? Nous ne le pensons pas. Sa clairvoyance et<br />

son souci d’efficacité lui ont fait choisir très tôt les voies<br />

les plus appropriées pour soulager de leur immense désespoir<br />

les patients déprimés, sans s’égarer dans les débats<br />

théoriques qui dominaient alors la pensée psychanalytique.<br />

Mais il n’ignorait pas que d’autres aspects de la souffrance<br />

des patients sont inaccessibles à la chimie. Il travaillait en collaboration<br />

avec des psychanalystes et des psychothérapeutes<br />

de formations variées, auxquels il adressait les nombreux<br />

patients dont le mal de vivre impose de s’émanciper<br />

d’un passé trop lourd, ainsi que ceux dont les troubles de<br />

l’humeur se mélangent à d’autres symptômes que des techniques<br />

comportementales peuvent alléger. Lui qui a suivi des<br />

patients pendant plus de cinquante ans ne pouvait naturellement<br />

prendre à la légère l’importance de la relation, et<br />

il savait plus que tout autre qu’un médecin, a fortiori un psychiatre,<br />

représente bien davantage qu’une signature en bas<br />

d’une ordonnance.<br />

La clef de la pratique de Louis Bertagna : pas de systèmes<br />

de pensée qui enferment dans des convictions, mais une préoccupation<br />

humaine qui donne à la clinique tout son prix<br />

en maintenant entière jusqu’au bout la curiosité pour autrui.<br />

Louis Bertagna avait une vraie tendresse pour le genre<br />

humain. Au nom de ce souci de l’humain, le docteur Bertagna<br />

ne se contentait pas de soigner des patients célèbres,<br />

il restait également fidèle à tous ceux qu’il avait connus<br />

lors de ses longues années de pratique, notamment à l’hôpital<br />

Cochin en rhumatologie, où, psychiatre de liaison<br />

avant l’heure, il avait appris à concilier psychiatrie et médecine.<br />

Esprit libre, parfaitement athéorique et en cela tout à fait<br />

contemporain, Louis Bertagna n’aura été finalement tout au<br />

long de sa carrière dépendant que de la seule chose qui<br />

compte pour un médecin : le mal-être de ses patients. ■<br />

Jean-Paul Mialet, Jean-Marc Peyrouzet,<br />

Anne-Marie Quétin<br />

HOMMAGE ■ 13<br />

La mélancolie, par ce mode d’organisation<br />

qui semble lui appartenir,<br />

rendrait compte des conditions d’émergence<br />

d’une visée intentionnelle esthétique<br />

qui, aux plans clinique et phénoménologique,<br />

instaure et garantit<br />

un rapport au monde.<br />

Deuil et somatisations<br />

Coordination par Philippe Jaeger et<br />

Claire Rueff-Escoubès<br />

Revue Française de Psychosomatique<br />

2006, n°30<br />

Presses Universitaires de France, 26 €<br />

Qualifier les deuils, depuis les pertes<br />

précoces d’êtres indispensables à notre<br />

survie jusqu’à la confrontation à notre<br />

propre disparition, en retenant ceux qui<br />

infligent des blessures à la représentation<br />

de soi, idéale ou non ; évoquer les<br />

voies « choisies » pour répondre à ces<br />

événements toujours traumatiques, des<br />

voies élaboratives de l’identification et<br />

de la sublimation à celles de la somatisation,<br />

en passant par la capture de<br />

la psychose ; s’arrêter sur la voie la plus<br />

risquée parce que la moins « psychisée »,<br />

celle de la somatisation, pour mieux en<br />

saisir l’origine, le parcours et le devenir<br />

; sont les grandes lignes de ce numéro.<br />

Le deuil est, lui aussi, le propre<br />

de l’homme. Expériences toujours singulières,<br />

formes multiples, les deuils mobilisent<br />

des forces venues du plus lointain<br />

de son histoire personnelle et<br />

collective. Forces constructives et forces<br />

destructives, mouvements de vie et mouvements<br />

de mort, les deuils enrichissent,<br />

démantèlent, immobilisent ou<br />

« tuent » notre vie psychique, de façon<br />

passagère ou durable, selon les voies<br />

empruntées pour y faire face, c’est-àdire<br />

selon qu’un travail psychique accompagne<br />

ou non le deuil. Au destin<br />

de l’objet perdu pourrait répondre celui<br />

des fondements de la mentalisation,<br />

dont le travail du deuil est un des témoins,<br />

et partant, de la constitution du<br />

moi.<br />

Transformer la violence des<br />

élèves<br />

Cerveau, motivation,<br />

apprentissage<br />

Daniel Favre<br />

Dunod, 26 €<br />

Faisant le bilan de dix ans de recherches<br />

sur la prévention de la violence, l’auteur<br />

montre que les enseignants, tant<br />

au primaire qu’au secondaire, peuvent<br />

aider les jeunes à transformer leur violence<br />

en un désir d’apprendre renouvelé.<br />

Il propose, en ce sens, six outils<br />

théoriques et pratiques : apprendre à<br />

l’élève à mieux gérer les nécessaires déstabilisations<br />

cognitives et affective ;<br />

décontaminer l’erreur de la faute dans<br />

les apprentissages ; construire un mode<br />

d’autorité distinct de la domination-soumission<br />

; choisir l’affirmation de soi nonviolente,<br />

l’écoute, l’empathie et renoncer<br />

à la manipulation ; associer la<br />

transmission des savoir et la socialisation<br />

des élèves ; dépasser un conflit de<br />

valeurs de notre société et favoriser<br />

l’émergence de l’humain.<br />

Freud écrivant la<br />

psychanalyse<br />

Jean-François de Sauverzac<br />

Aubier, 22 €<br />

Des traducteurs, des psychanalystes,<br />

des philosophes et d’autres commentateurs,<br />

français, anglo-saxons, germanistes,<br />

ont particulièrement interrogé<br />

durant la seconde moitié du XX e siècle<br />

la manière dont Freud a pensé et<br />

exposé sa théorie. Pour relever les<br />

contraintes spécifiques qui se sont imposées<br />

à son écriture, Jean-François de<br />

Sauverzac en a relu de nombreux et<br />

écouté leurs interprétations du rêve de<br />

Freud : son désir de fonder la connaissance<br />

rationnelle de l’inconscient. D’où<br />

un retour au texte freudien, à quelques<br />

figures plus particulièrement importantes<br />

de la rhétorique et des stratégies<br />

mises en œuvre.


14<br />

LIVRES<br />

■ PHÉNOMÉNOLOGIE<br />

Crime ou folie : un cas de<br />

tueur en série au XIXe siècle<br />

L’affaire Joseph Vacher<br />

Olivier Chevrier<br />

L’Harmattan<br />

A partir de l’affaire Vacher, premier<br />

cas de tueur en série français avéré,<br />

cette étude interroge les courants criminologiquescontemporains,notamment<br />

la notion de « crime langage<br />

» issue de l’apport des sciences<br />

psychologiques et psychiatriques, qui<br />

font du crime un « hiéroglyphe » à décrypter.<br />

Les contextes de l’époque où se déroule<br />

l’affaire Vacher sont présentés,<br />

puis la série des crimes, leur mode<br />

opératoire, les rapports d’autopsie...<br />

Les trois discours explicatifs (du<br />

criminel, médical et juridique) sont<br />

questionnés dans leur préoccupation<br />

commune : Vacher est-il un monstre<br />

ou un insensé irresponsable de ses<br />

actes ?<br />

Enfin, l’auteur tente de franchir cette<br />

impasse inconfortable pour la pensée,<br />

à partir de sa pratique professionnelle<br />

et d’« une rencontre avec le<br />

crime ».<br />

Est ainsi étudié comment se déroule<br />

le passage à l’acte criminel, qui se situe<br />

le plus souvent dans une sorte<br />

de « zone rêve » où le crime ne devient<br />

conscient qu’après sa consommation.<br />

Le « réveil » du criminel prend<br />

corps lorsque le tueur s’aperçoit qu’il<br />

est placé « au bord du crime » à la façon<br />

d’un marcheur cheminant sur un<br />

sentier sinueux de montagne, tout<br />

absorbé et qui prend conscience, d’un<br />

coup et avec effroi, de la profondeur<br />

du ravin qui est là, sous ses pieds à<br />

quelques centimètres.<br />

Le crime serait donc inaccessible aux<br />

mots et aux modèles théoriques. Il<br />

ne serait pas nécessairement synonyme<br />

du psychisme de son auteur.<br />

Force est de constater que dans l’acception<br />

criminologique, la mise en<br />

évidence de l’existence d’une pathologie<br />

mentale démontre un rapport<br />

au monde inadapté donnant<br />

« naturellement » du sens à un acte<br />

inadapté. Mais cette croyance a son<br />

revers. En l’absence de troubles décelés,<br />

il n’y a pas d’inadaptation sociale<br />

constatée ou supposée et donc<br />

pas d’explicatifs au crime.<br />

Ce n’est qu’un nom sur une<br />

liste, mais c’est mon<br />

cimetière<br />

Traumas, deuils et transmission,<br />

chez les enfants juifs cachés en<br />

France pendant l’occupation<br />

Yoram Mouchenik<br />

La Pensée Sauvage, 20 €<br />

Ce livre décrit le cheminement contemporain<br />

d’un groupe d’enfants juifs,<br />

orphelins de la Shoah, qui ont survécu<br />

au génocide, cachés et traqués.<br />

Soixante ans plus tard, la communauté<br />

de destin de leurs parents déportés<br />

par le même convoi, partis de<br />

France pour Auschwitz en 1942, sera<br />

le lien pour la création d’une association.<br />

Leurs récits permettent de<br />

percevoir les multiples itinéraires où<br />

chacun avait encore à élaborer les<br />

traumas d’une enfance saccagée.<br />

Mais au-delà des douleurs, cet ouvrage,<br />

dans son approche, explore<br />

les dynamiques personnelles et collectives,<br />

étayées par le groupe, qui<br />

transforment les anciens « enfants cachés<br />

» en passeurs de mémoire et<br />

d’histoire pour ne pas les figer comme<br />

le dernier maillon d’une chaîne brisée.<br />

L’épreuve extrême vécue par ces<br />

enfants, alors même qu’ils étaient enfants<br />

et donc vulnérables du fait de<br />

leur processus de développement,<br />

est une modification brutale, radicale,<br />

jamais anticipable. Etre caché dans<br />

une famille d’un autre monde que le<br />

sien pour ne pas être tué est une sorte<br />

d’exil absolu interne et externe.<br />

« Ce qui est bon pour le corps est bon<br />

pour le cerveau » (1)<br />

Cette assertion ponctue les conclusions,<br />

au demeurant non dénuées d’humour,<br />

de la très contemporaine science alzheimérologique<br />

quant aux bienfaits de<br />

l’activité physique chez la « souris transgénique<br />

alzheimérisée ». La stabilisation<br />

de la quantité de plaques amyloïdes<br />

dans le cerveau, plaques présumées<br />

responsables de la démence d’Alzheimer,<br />

serait corrélée à l’exercice physique.<br />

Il a, en effet, été observé que<br />

ces plaques étaient significativement<br />

moins abondantes dans le cerveau du<br />

rongeur sportif que dans celui de son<br />

double plus sédentaire.<br />

Une telle conclusion recèle cependant<br />

à nos yeux un double mystère.<br />

Le premier : comment la description<br />

des lésions et autres anomalies, ici cérébrales<br />

disséquées chez la souris, acquièrent-elles<br />

le statut d’explication de la<br />

pathologie, en l’occurrence de la première<br />

cause de démence chez l’homme<br />

?<br />

Le second mystère concerne le statut<br />

singulier que les scientifiques éminemment<br />

spécialisés confèrent de facto<br />

à l’organe cérébral. En énonçant « ce<br />

qui est bon pour le corps est bon pour<br />

le cerveau », fut-ce en souriant, les chercheurs<br />

situeraient-ils donc peu ou prou<br />

le cerveau hors du corps ? Si tel était le<br />

cas, quelle serait donc la nature de cet<br />

organe particulier qui ne ferait pas stricto<br />

sensu partie du même ensemble que<br />

les organes corporels non cérébraux ?<br />

Les tentatives d’élucidation du premier<br />

mystère, c’est-à-dire des modes de passage<br />

de la description à l’explication<br />

dans les sciences, ont fait l’objet de<br />

nombreux travaux. Sans les développer,<br />

nous nous contenterons d’indiquer la<br />

direction de cette enquête à chaque<br />

fois que la seconde question nous y<br />

mènera.<br />

Pour le dire autrement, nous n’interrogerons<br />

l’éventuel glissement de la<br />

description à l’explication, donc la place<br />

de la causalité face à la pathologie<br />

humaine, qu’à partir de la question de<br />

la nature de l’unité disons « cérébrocorporelle<br />

» de l’homme.<br />

Cette question très contemporaine<br />

devra rapidement être rapportée à sa<br />

filiation c’est à dire à la question psychosomatique<br />

dont elle n’est, selon<br />

nous, qu’une transposition.<br />

Mais, avant d’aborder la question de<br />

l’unité naturelle de l’homme par son<br />

histoire, quelques précisions terminologiques<br />

sont requises.<br />

Alors qu’il paraît indiscutable que les<br />

neuroscientifiques spécialistes de la<br />

démence d’Alzheimer utilisent des<br />

notions aussi précisément établies que<br />

leur science le leur permet quant aux<br />

mécanismes du fonctionnement cérébral,<br />

à quel concept de cerveau, de<br />

corps, et, si possible, de psychisme ou<br />

encore de personne se réfèrent-ils<br />

donc ? Partagent-ils particulièrement<br />

ce concept avec les praticiens auxquels<br />

ils adressent leurs résultats afin que<br />

ceux-ci s’approprient leurs découvertes<br />

et en fassent le meilleur usage thérapeutique<br />

possible ?<br />

Une telle question revient à se demander<br />

non seulement comment les résultats<br />

de la recherche bio-médicale peuvent<br />

rejoindre les pratiques mais encore<br />

si les pratiques présentent elles-aussi<br />

quelque lien, quelque intérêt pour la<br />

recherche.<br />

Face à l’extension exponentielle des<br />

connaissances sur le cerveau et sur le<br />

corps, et à la sur-spécialisation de la<br />

recherche, s’accroît pour le chercheur<br />

en sciences biologiques et médicales<br />

le risque de s’éloigner fortement de<br />

l’homme malade, voire de l’homme.<br />

En cela nous estimons nécessaire de<br />

faire de cette dernière question, celle<br />

des échanges entre la recherche, la<br />

théorie avec la pratique, la première<br />

en droit.<br />

Appréhender les conditions d’un tel<br />

dialogue entre recherche scientifique,<br />

alzheimérologique ou autre, au sujet<br />

de l’homme malade, et pratique clinique,<br />

nous ramène ainsi en première<br />

instance à la question de l’élucidation<br />

des présupposés conceptuels que nous<br />

avions soulevée plus haut.<br />

Dans le cadre de notre travail, nous<br />

voulons appréhender, au prétexte<br />

d’une impasse clinique que nous considérons<br />

comme paradigmatique, certaines<br />

modalités de l’échange potentiel<br />

entre chercheurs, théoriciens et<br />

praticiens. Nous cherchons à préciser,<br />

peut-être, même à construire, l’espace<br />

de confrontation des principaux repères<br />

conceptuels des uns et des autres.<br />

L’impasse clinique que nous interpellons,<br />

vis à vis de laquelle les théorisations<br />

multiples ont reconduit autant<br />

d’inadéquations que d’obstacles, obstacles<br />

pratiques comme théoriques, est<br />

celle de la question du lien entre corps<br />

et psychisme, et de l’unité ainsi constituée<br />

; il s’agit donc de la question psychosomatique.<br />

Dans un premier temps nous allons<br />

nous efforcer de situer la question psychosomatique,<br />

les principaux moments<br />

de son histoire jusqu’aux caractéristiques<br />

essentielles de sa situation actuelle,<br />

ceci afin de documenter la nécessité<br />

de l’évolution de son traitement ;<br />

dans un second temps nous envisagerons<br />

les moyens nécessaires pour structurer<br />

cette évolution et, particulièrement,<br />

les modes d’articulation possible<br />

entre philosophie des sciences et psychiatrie<br />

phénoménologique ; enfin nous<br />

tenterons, dans une troisième partie,<br />

de fournir un aperçu des champs de<br />

réflexion pratique, théorique, puis théorico-pratique,<br />

autrement dit un aperçu<br />

du champ de recherche auquel<br />

nous semble ouvrir une telle articulation..<br />

La question<br />

psychosomatique<br />

Pour montrer en quoi la question psychosomatique<br />

est paradigmatique du<br />

problème des relations entre recherche<br />

et clinique et, plus encore, théorie et<br />

pratique, pour développer comment à<br />

partir d’elle il nous semble possible,<br />

voire souhaitable, de faire évoluer le<br />

cadre conceptuel qui régit les échanges<br />

entre théoriciens et praticiens, nous<br />

devons d’abord dire quelques mots de<br />

l’histoire clinique de cette question,<br />

non sans renvoyer à l’abondante littérature<br />

qui lui est consacrée.<br />

L’histoire clinique de la question psychosomatique<br />

est longue et complexe.<br />

Nous la situerons succinctement par<br />

rapport à la psychiatrie d’abord, pour<br />

elle-même ensuite.<br />

Psychosomatique et psychiatrie<br />

Rappelons tout d’abord que le mot<br />

« psychiatrie » est attesté en français<br />

depuis 1842, qu’il s’est formé à partir<br />

du terme de « psychiatre » apparu en<br />

Allemagne vers 1802 en même temps<br />

que l’expression « aliénation mentale ».<br />

Historiquement liés dans le relevé de<br />

leurs premières occurrences germaniques,<br />

le terme de « psychiatrie » ainsi<br />

que celui de « psychosomatique » sont<br />

attribués à Heinroth<br />

(2, 3).<br />

Nous nous situons à cette période de<br />

réaction vis à vis de la radicalisation de<br />

l’organicisme qui tentait de réduire<br />

« l’aliénation à une étiologie et à une<br />

pathogénie mécanistes » (4, p.20, 5). Organicisme<br />

dont l’attrait est renouvelé<br />

aujourd’hui par les techniques<br />

modernes d’exploration cérébrale<br />

notamment.<br />

Mais, si la psychiatrie moderne tend à<br />

être matérialiste moniste au plan théorique,<br />

suivant un palette de réductionnismes<br />

plus ou moins radicaux du mental<br />

au neuronal (6), elle demeure, et ce<br />

n’est pas là le moindre de ses paradoxes,<br />

au plan clinique tout à fait tributaire<br />

du « postulat dualiste de la dichotomie<br />

corps esprit » (7, p.764). De ce fait,<br />

organogenèse et psychogenèse demeurent<br />

les deux piliers, plus ou moins<br />

antagonistes, des références théoriques<br />

de la clinique.<br />

Chez Heinroth, dès l’origine de la<br />

notion de psychosomatique et au<br />

moment de l’apparition de cette opposition,<br />

relative donc, de psychogenèse et<br />

d’organogenèse, il semble qu’il ait été<br />

aussi bien question des passions que<br />

de la médecine de l’âme (psychè /<br />

iatros). Et cette « école psychiste » pourrait<br />

avoir constitué le berceau de ce<br />

qu’on a appelé la psychiatrie psychodynamique<br />

(4) et les théories « psychogénétiques<br />

» dont, au premier chef, la<br />

psychanalyse.<br />

C’est donc par quelques mots rapides<br />

sur la place de la psychanalyse que<br />

nous entrons dans l’histoire clinique de<br />

la question psychosomatique ellemême.<br />

Moments d’histoire de la question<br />

psychosomatique<br />

Psychosomatique psychanalytique<br />

Diverses écoles post-freudiennes ont<br />

tenté de faire au corps une place qui ne<br />

lui aurait pas été initialement accordée.<br />

Il ne s’agit pas pour nous dire ce que<br />

l’on trouverait de plus ou moins corporel<br />

chez Freud, chez Lacan, chez<br />

Jung ou chez quelque autre, ce dont<br />

nous n’avons aucunement les moyens.<br />

Nous constatons seulement que, selon<br />

les recensements, probablement partiels,<br />

on peut dénombrer huit modèles<br />

« généraux » de la question psychoso-<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Pour une théorie de la pratique<br />

A propos de l’abord phénoménologique de l’unité<br />

psychosomatique (1ère partie)<br />

Equilibre de l’Institut Lilly<br />

matique avec des références psychanalytiques<br />

faibles (8) ou six modèles<br />

plus radicalement psychanalytiques (9).<br />

Un des modèles les plus connus et les<br />

plus développés est celui de Pierre<br />

Marty.<br />

Marty dépasse, dans les années 80, la<br />

notion de « maladies psychosomatiques »<br />

qu’il décrivait à partir des années 60<br />

(après l’Ecole de Paris et avec la fondation<br />

de l’Institut de Psychosomatique,<br />

l’I.P.S.O.) chez des patients porteurs<br />

d’une « pensée opératoire », factuelle,<br />

dépourvue d’affects et de fantasmes.<br />

Il ménage, depuis lors, une certaine<br />

place à la sensori-motricité chez l’adulte,<br />

à l’allergie, à l’immunologie, à divers<br />

paramètres physiologiques. Cependant<br />

Pierre Marty continue de donner à la<br />

psychanalyse, qu’il inclut d’ailleurs dans<br />

ce qu’il en vient à appeler la « science<br />

psychosomatique », une place pivot.<br />

Ainsi, lorsqu’il décrit les deux modes<br />

de « somatisation » qu’il nomme la<br />

« régression » et la « désorganisation progressive<br />

», s’il différencie l’équipement<br />

psychique du malade somatique de<br />

celui du névrosé, il voit toujours dans la<br />

somatisation une « défaite du psychisme<br />

». Bien qu’à distance du conflit mental<br />

de la névrose, il situe cette défaite<br />

dans le cadre d’un « déplacement économique<br />

» « de la psyché dans le<br />

soma » (10) d’une grande analogie avec<br />

la théorie freudienne.<br />

Considérant le psychisme humain<br />

comme l’aboutissement de la phylogenèse,<br />

il décrit les mécanismes explicatifs<br />

de ce qu’il nomme dès lors<br />

« régression ». Celle-ci réactiverait « des<br />

réponses somatiques primitives telles<br />

qu’elles se sont constituées à travers les<br />

aléas de la relation parentale en particulier<br />

la relation mère-enfant », réponses<br />

qui prennent la forme des troubles<br />

(fonctionnels) et maladies (lésionnelles)<br />

psychosomatiques.<br />

La thérapeutique psychanalytique vise<br />

Parfois préoccupante pour les patients et leur entourage, la prise de poids<br />

liée à la prise d’un traitement psychotrope est variable d’un patient à l’autre.<br />

Equilibre, initiative de l’Institut Lilly lancée en janvier 2006, consiste, à travers<br />

des ateliers, à accompagner les patients tout au long de leur traitement,<br />

en les aidant à connaître et à appliquer les conseils d’hygiène alimentaire et<br />

de vie, pour les aider à limiter leur prise de poids. En pratique, ces ateliers<br />

animés par les équipes soignantes s’adressent aux patients de plus de 18 ans<br />

souffrant de maladies psychiatriques et qui sont en général stabilisés. En<br />

moyenne, 3 à 5 patients assistent aux 8 ateliers.<br />

Les critères de sélection des participants - le poids, l’état de santé général du<br />

patient ou encore sa motivation - varient d’un centre à l’autre.<br />

Emmanuelle Patri, psychiatre à l’hôpital Paul Brousse (Villejuif) qui a supervisé<br />

le programme, souligne que la prise de poids chez les patients en psychiatrie<br />

n’est pas une fatalité. « Les ateliers Equilibre permettent au patient de<br />

mieux se nourrir et de prendre soin de son corps. L’initiative repose sur l’implication<br />

du personnel soignant et sur la responsabilisation du patient. Soyons tous<br />

persuadés soignants, patients et entourage : une prise en charge associant des<br />

conseils nutritionnels et des règles simples d’hygiène de vie peut avoir un effet<br />

bénéfique sur le contrôle du poids ».<br />

Mise en place : formation des équipes soignantes à l’animation d’ateliers<br />

Dans un premier temps, les délégués médicaux Lilly proposent l’instauration<br />

d’Equilibre dans les services hospitaliers, des hôpitaux de jour et des CMP.<br />

Les équipes soignantes souhaitant le mettre en place dans leur service bénéficient<br />

d’une formation initiale de 3 heures délivrée par des diététiciens<br />

qui les accompagnent au cours de la mise en œuvre de cette initiative.<br />

Les équipes peuvent alors animer les 6 ateliers pédagogiques et ludiques, à<br />

raison d’un atelier par semaine d’une durée de 1h30, par groupe de 4 à 6<br />

patients. Deux ateliers supplémentaires permettent de faire le point et de<br />

mettre en pratique les connaissances acquises un mois et deux mois après le<br />

6ème atelier.<br />

L’Institut Lilly continue le déploiement en France des centres Equilibre en<br />

2007 suite aux retours des équipes soignantes : 96,7% estiment que le programme<br />

est intéressant ou très intéressant pour leurs patients. En 2006, 400<br />

centres ont été ouverts alors que 300 avaient été prévus. Près de 1700 patients<br />

ont participé aux ateliers. L’Institut propose cette année d’ouvrir 150<br />

centres supplémentaires et soutiendra l’activité des 400 centres existants. ■<br />

F.C.


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Chaire psychanalyse<br />

santé - travail<br />

Enseignant :<br />

Christophe Dejours<br />

Année 2006-2007 :<br />

TRAVAIL ET PSYCHOSOMATIQUE<br />

Ces cours, de niveau post-universitaire,<br />

sont destinés aux praticiens<br />

intervenant dans le champ de la<br />

santé qui souhaitent, après quelques<br />

années d’exercice, revenir sur les<br />

concepts et les théories qui sont au<br />

fondement scientifique de leurs<br />

pratiques et élargir leurs connaissances<br />

dans le domaine de la psychanalyse<br />

et des rapports entre travail<br />

et santé mentale.<br />

42 heures de cours - le mercredi de 18 h<br />

à 21 h à partir du 28.02.2007<br />

Renseignements :<br />

Chaire psychanalyse - santé - travail<br />

Virginie Hervé 41 rue Gay Lussac<br />

75005 Paris<br />

E-mail : herve@cnam.fr<br />

alors à restaurer si possible ad integrum<br />

l’activité « la plus élaborée » spécifiant<br />

l’homme, c’est-à-dire l’activité psychique.<br />

Aujourd’hui des échanges multidisciplinaires<br />

de plus en plus fréquents<br />

réunissant chercheurs en sciences cognitives,<br />

aussi bien qu’en sciences biologiques,<br />

et cliniciens, ont recours, pour<br />

approcher peut-être l’humanité de<br />

l’homme, à la science psychosomatique<br />

ou plus largement à la psychanalyse,<br />

dont ce serait d’ailleurs là l’espace<br />

contemporain de renouveau. Dans ces<br />

échanges, non rarement, la possibilité<br />

de la santé pour l’homme en vient à<br />

être posée comme dépendant des<br />

« aléas de l’organisation psychique au<br />

cours du processus de différenciation et<br />

d’intégration progressive »<br />

(11, p.24-25).<br />

Pour le dire autrement, avec la reconduction<br />

de la notion de pulsion,<br />

comme de celle de conflit, sont de nouveau<br />

requis les principes dualistes des<br />

sciences naturelles évolutionnistes qui<br />

conservent au corps un statut inférieur<br />

dont l’expression par le symptôme<br />

somatique ne s’entend dès lors qu’en<br />

correspondance régressive avec une<br />

carence de fonctionnement des strates<br />

psychiques supérieures. La santé, voire<br />

la normalité de ce psychisme, doit<br />

garantir dans cette hypothèse le silence<br />

présumé normal du corps objet.<br />

Sans entrer en cela aucunement dans la<br />

polémique récurrente au sujet des us et<br />

abus de la psychanalyse comme pratique,<br />

qu’il nous paraît devoir être tout<br />

à fait dissociée d’une critique épistémologique<br />

de la théorie psychanalytique,<br />

nous constatons donc que, malgré<br />

leur évolution au cours du siècle, les<br />

pré-requis conceptuels des théorisations<br />

psychosomatiques psychanalytiques<br />

ne contribuent pas à la compréhension<br />

de l’unité spécifique<br />

psychosomatique.<br />

Le lien entre histoire de vie et fonctions<br />

vitales, cette biologie singulière<br />

de l’homme est ici ramenée au point<br />

de l’appareil psychique de l’homo natura.<br />

Aujourd’hui : athéorisme et troubles<br />

somatoformes<br />

Mais la place de la psychanalyse, même<br />

si celle-ci reste la théorie de référence<br />

dans la plupart des écrits sur ce qui est<br />

nommé question psychosomatique, est<br />

aujourd’hui beaucoup plus limitée en<br />

clinique que voici seulement quarante<br />

ans.<br />

Ce recul a pour pendant non pas tant,<br />

en France du moins et c’est sans doute<br />

moins vrai aux Etats-Unis, le développement<br />

des Thérapies Cognitivo-Comportementales<br />

que la prévalence du<br />

recours par une psychopathologie<br />

quantitative aux classifications internationales<br />

dites athéoriques qui inscrivent<br />

la pathologie dans un discours catégoriel.<br />

Et pourtant, bien que présentées<br />

comme formes d’« entités naturelles »,<br />

les catégories du Diagnostic and Statistical<br />

Manual (DSM) (12) ne doivent, bien<br />

évidemment, leur présence ou absence<br />

dans le manuel qu’à la culture pour<br />

ne rien dire aujourd’hui de la politique<br />

et/ou du lobbying de l’industrie pharmaceutique.<br />

L’athéorisme auquel ce classement prétend<br />

est clairement, progressivement<br />

mais sûrement, depuis plusieurs décennies,<br />

venu modeler la clinique, les<br />

échanges, les discours et sans doute les<br />

savoirs (13). La psychiatrie biologique,<br />

cette psychiatrie qui place la rigueur<br />

de sa démarche sous l’égide du déterminisme<br />

des sciences de la nature et de<br />

leurs applications techniques est l’instrument<br />

de la mise en œuvre de cette<br />

modélisation de la pathologie.<br />

Qu’en est-il donc de la place de la<br />

question psychosomatique dans les<br />

classifications internationales ?<br />

Il n’est peut-être pas inutile de rappeler<br />

que ce que la clinique médicale reconnaît<br />

comme « psychosomatique » correspond<br />

aujourd’hui le plus souvent,<br />

en dehors des pratiques très spécialisées<br />

telle celle de l’I.P.S.O., à une caractérisation<br />

symptomatique imprécise,<br />

effectuée en général par défaut de diagnostic<br />

objectif possible.<br />

La dixième révision de la Classification<br />

Internationale des Maladies actuellement<br />

en usage (14), équivalent francophone<br />

du DSM IV, dénomme<br />

« troubles somatoformes » la description<br />

de tels troubles sans support organique<br />

quantifiable. Cette catégorie est ainsi<br />

documentée : « la caractéristique essentielle<br />

est l’apparition de symptômes physiques<br />

associés à une quête médicale<br />

insistante, persistant en dépit de bilans<br />

négatifs répétés et de déclarations faites<br />

par les médecins selon lesquelles les<br />

symptômes n’ont aucune base organique.<br />

S’il existe un trouble physique authentique,<br />

ce dernier ne permet de rendre<br />

compte ni de la nature ou de la gravité<br />

des symptômes, ni de la détresse ou des<br />

préoccupations du sujet » (Catégorie<br />

F45).<br />

Sans examiner ici le détail des diverses<br />

sous-catégories de la rubrique, notons<br />

dès le paragraphe introductif, la présence<br />

de paramètres subjectifs : la<br />

« quête médicale » effectuée par le<br />

patient est en effet « insistante » et « persiste<br />

en dépit de bilans négatifs répétés »<br />

et des « déclarations des médecins ».<br />

Nous retrouvons sans doute, ici, entre<br />

autres, formalisé à l’état de critères classificatoires<br />

quelque chose de l’axiologie<br />

psycho-somatique séculaire qui exige<br />

d’un corps objet une lisibilité organique<br />

conforme aux critères en vigueur à<br />

défaut de laquelle la symptomatologie<br />

concernée risque d’être dévalorisée.<br />

Pour tenir cette hiérarchie psychosomatique<br />

empreinte notamment de<br />

l’opposition classique sujet/objet et de<br />

schémas déterministes et évolutionnistes,<br />

les critères classificatoires qui<br />

modélisent actuellement la question<br />

psychosomatique effectuent donc un<br />

saut qualitatif vers un registre qu’on<br />

pourrait presque qualifier de moral (15)<br />

Ainsi, soit le corps organique est normal<br />

et la plainte subjective devient anormale,<br />

soit le trouble physique est<br />

« authentique » mais il ne peut pas être<br />

« rendu compte » de la plainte puisqu’apparemment<br />

excessive par rapport<br />

au dysfonctionnement physique dit<br />

objectif.<br />

Dans les deux cas non seulement le<br />

corps vécu, le corps personnel est totalement<br />

méconnu, mais les critères d’appartenance<br />

à cette catégorie clinique,<br />

statistiquement établie, rappelons-le,<br />

jugent de la qualité de la plainte subjective<br />

en fonction des paramètres<br />

quantitatifs de la maladie organique.<br />

De par sa modélisation quantitative, le<br />

fonctionnement organique limité au<br />

corps objet, cérébro-corporel disionsnous<br />

en introduction, tend aujourd’hui<br />

à être visé comme l’index du fonc-<br />

tionnement de l’homme normal dans<br />

sa globalité.<br />

La référence quantitative et biologique<br />

est en effet porteuse d’un « triomphalisme<br />

thérapeutique supposé garanti par<br />

un savoir unitaire » (16) ce qui lui permet<br />

de se répandre aisément non sans risquer<br />

de dominer c’est à dire d’altérer la<br />

réflexion.<br />

Au terme de ce rapide tableau de l’histoire,<br />

de la situation actuelle et des principaux<br />

pré-supposés qui bornent la clinique<br />

psychosomatique de la fin du<br />

XX ème siècle, il nous semble avoir<br />

ouvert le débat en faveur de la nécessité<br />

de son évolution.<br />

Quels moyens pour<br />

une évolution du<br />

cadre conceptuel de la<br />

question<br />

psychosomatique<br />

Nécessité d’une attitude critique<br />

Nous venons d’observer, en effet, que<br />

la question de l’intrication des symptômes<br />

psychiques et corporels telle<br />

qu’elle se pose en clinique au moins<br />

depuis des siècles, question qui renvoie<br />

à la problématique philosophique<br />

millénaire des rapports de l’âme et du<br />

corps, s’est trouvée reconduire les prérequis<br />

conceptuels, pour le dire vite,<br />

essentiellement dualistes et déterministes,<br />

hier psycho-somatiques, aujourd’hui<br />

cérébro-corporels, creusant l’écart<br />

entre théories et pratiques.<br />

Nous proposons donc de nous adresser<br />

maintenant à un autre cadre conceptuel<br />

pour aborder cette question. Quittant la<br />

clinique du lien psycho-somatique,<br />

sous-tendue par la recherche des lois et<br />

des chaînes causales psychogénétiques<br />

ou organogénétiques, nous allons nous<br />

adresser à une pensée de l’unité psychosomatique,<br />

c’est à dire en termes<br />

psychiatriques phénoménologiques la<br />

corporéité. Cette évolution opère un<br />

double saut : elle se place à distance<br />

de tout finalisme comme de tout causalisme,<br />

elle s’adresse au plus à des<br />

ordres, des régularités, à des types.<br />

Les interlocuteurs concernés sont aussi<br />

bien des théoriciens que des praticiens,<br />

c’est-à-dire, à tout le moins, les philosophes,<br />

les scientifiques, les cliniciens.<br />

S’agissant de la clinique, nous nous<br />

situons ici toujours dans le cadre particulier<br />

de la psychiatrie. Même si la<br />

question psychosomatique n’est pas<br />

l’objet premier de cette discipline médicale<br />

plutôt dévolue à la folie, aux psychoses<br />

ou aux névroses selon les<br />

époques, l’on sait l’extension continue<br />

de ses missions, missions médicales<br />

quand ce n’est pas sociales, mais nous<br />

n’ouvrons pas cet autre vaste débat.<br />

Les objets comme les méthodes de la<br />

psychiatrie, cet « être de la culture »<br />

selon la formule de Georges Lanteri-<br />

Laura reprise à Husserl, sont divers et<br />

évolutifs.<br />

Pour préciser encore un peu la spécificité<br />

de la spécialité, Lanteri-Laura soulignait<br />

que « sauf à professer un dogmatisme<br />

dont peu possèdent à la fois le<br />

courage, l’aveuglement et l’impérantisme,<br />

le champ théorique et pratique de<br />

notre discipline continue à paraître divers,<br />

polymorphe, multicentrique, répondant<br />

un peu à l’introduction de quelque dictionnaire<br />

qui s’annoncerait ainsi : a<br />

comme ambidextre ; b comme bicépha-<br />

le ; c comme caméléon,… »<br />

(17, p.147).<br />

Tenter d’élucider les pré-requis conceptuels<br />

à l’œuvre dans les échanges existant<br />

entre la psychiatrie, les sciences et<br />

la (faut-il dire les) philosophie avec lesquels<br />

elle dialogue ne revient cependant<br />

pas à édifier « un métalangage »<br />

qui vienne « unifier au second degré » les<br />

ordres de connaissance auxquels la psychiatrie<br />

emprunte.<br />

Ces ordres de connaissance s’avèrent,<br />

disait encore Lanteri-Laura, « divers<br />

voire disparates, en tout cas bien hété-<br />

rogènes »<br />

(op.cit. p.274).<br />

Que ce soit pour penser la question<br />

psychosomatique, ou la folie, ou encore<br />

plus récemment la cognition, l’élucidation<br />

conceptuelle n’a pas vocation<br />

à lisser les champs de recherche par<br />

quelque idéal d’homogénéisation, pas<br />

plus qu’à ériger un savoir absolu et totipotent<br />

ou seulement systématique,<br />

mais plutôt à opérer une ou des commutativités.<br />

L’établissement de concepts transversaux<br />

facilitant la commutativité au sein<br />

de la question psychosomatique vise<br />

à garder ouverte et active la vérité de<br />

Les résultats d'une enquête sur la santé des<br />

aidants familiaux<br />

Le premier numéro de La lettre de l'Observatoire des dispositifs de prise en<br />

charge et d'accompagnement de la maladie d'Alzheimer éditée par la Fondation<br />

Médéric Alzheimer* présente les résultats d'une enquête réalisée entre<br />

avril et juin 2006 auprès de 187 consultations mémoire pour mieux connaître<br />

« la réalité et la diversité de la prise en charge de la santé des aidants ».<br />

L'enquête distingue deux types de centres: ceux qui ont mis en place une<br />

consultation médicale destinée aux aidants et les autres. Les 42 centres qui<br />

ont mis en place une consultation médicale spécifique identifient presque<br />

tous (98%) des états dépressifs « parmi les diagnostics portés pour les aidants<br />

reçus ». Ils citent, également, les problèmes cardio-vasculaires (19%) ou nutritionnels<br />

(5%). « Ces situations pathologiques trouvent leur origine dans l'intensité<br />

du stress émotionnel et dans la répétition de sollicitations physiques épuisantes<br />

pour les aidants ».<br />

Parmi ces 42 centres, 62% d'entre eux assurent le suivi des aidants « en interne<br />

». Lorsque le suivi n'est pas assuré, l'aidant est orienté vers le médecin<br />

traitant (57%) ou vers un psychiatre (17%) ou encore vers un psychologue<br />

(21%) ou une association (19%) en complément. Les aidants, vus en consultation<br />

en 2005, sont « essentiellement des femmes et en majorité des conjointes<br />

de personnes malades ».<br />

Pour les centres qui n'ont pas mis en place de consultation médicale spécifique,<br />

le suivi des aidants est « ponctuel » et réalisé à « l'occasion de la consultation<br />

de la personne malade ». La majorité des centres rapporte « la fatigue et<br />

l'épuisement psychologique ou physique » (54%), « un état dépressif » (34%) et<br />

des « troubles du sommeil » (16%).<br />

Gratuite et accessible sur le site internet de la fondation, cette lettre sera publiée<br />

tous les trimestres et développera « une approche pluridisciplinaire et de<br />

terrain à partir d'une enquête » concernant « la prise en charge et l'accompagnement<br />

des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de maladie apparentées<br />

et de leurs aidants ».<br />

Le deuxième numéro, à paraître en mars, sera consacré à « l'implication des<br />

familles dans les établissements d'hébergement accueillant à l'entrée les personnes<br />

atteintes de la maladie d'Alzheimer ». ■<br />

B.L.<br />

* Créée en 1999, la Fondation Médéric Alzheimer a pour objectif « d'accroître les connaissances<br />

médico-sociales de la maladie d'Alzheimer ou de maladies apparentées, favoriser le développement<br />

d'initiatives locales d'aide aux personnes malades et à leurs aidants (familiaux, bénévoles<br />

et professionnels) et susciter une réflexion sur la prise en charge de la maladie ».<br />

<br />

PHÉNOMÉNOLOGIE ■ 15<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Conscience<br />

De la Phénoménologie à la<br />

Neurophilosophie.<br />

Textes rassemblés par RM. Palem<br />

Les Cahiers Henri Ey n°16-17<br />

Publicatin de l’Association pour la<br />

Fondation Henri Ey<br />

L’association pour la Fondation Henri<br />

Ey poursuit sa réflexion sur la conscience,<br />

inspirée par les livres d’ Henri Ey (La<br />

Conscience et le Traité des hallucinations).<br />

Si la Conscience doit se décrire d’abord<br />

comme l’organisation de l’actualité<br />

de son vécu, c’est qu’elle vise, audelà,<br />

l’organisation de l’être conscient :<br />

cet être qui actualise sa propre expérience<br />

en fonction de sa personne.<br />

Les structures de l’être ou du « devenir<br />

conscient » sont la forme du « corps<br />

psychique » : être de temps, de devenir,<br />

tendant par son autoconstruction<br />

à sa propre finitude. La conscience<br />

ainsi incarnée devient la possibilité<br />

pour le Sujet de disposer d’un modèle<br />

personnel de son monde. « La<br />

conscience est au temps ce que le corps<br />

est à l’espace ».<br />

La tradition scientifique<br />

Méthode et histoire<br />

Mohamad K. Salhab<br />

L’Harmattan, 16 €<br />

L’auteur s’interroge sur les éléments<br />

d’une tradition scientifique et met à<br />

l’épreuve la pertinence de cette notion<br />

afin de connaître la science dans<br />

son histoire, ainsi que l’intérêt qu’elle<br />

peut présenter pour réfléchir son actualité.<br />

Son enquête conduit dans la<br />

Grèce antique, non pas que la science<br />

n’ait pas pu exister avant, mais parce<br />

que nous n’avons pas aujourd’hui de<br />

tradition qui en atteste. Sont examinées<br />

les questions de méthode<br />

posées par l’étude des traditions scientifiques<br />

en suivant leur développement<br />

dans la science grecque ainsi<br />

que la science arabe. La science ainsi<br />

découverte est étonnamment ouverte,<br />

en même temps qu’elle tend vers son<br />

unité. Est proposé, enfin, de revenir<br />

sur ces traditions à partir de la science<br />

expérimentale. Claude Bernard a posé,<br />

dans le cadre de la science actuelle,<br />

des interrogations de base sur l’histoire<br />

des sciences, ouvrant à cette histoire<br />

de nouvelles perspectives qui<br />

sont examinées dans ce livre.<br />

Le cadavre<br />

Etudes sur la Mort, Thanatologie<br />

2006 n°129<br />

L’Esprit du Temps, 21 €<br />

Etudes sur la Mort est une revue publiée<br />

sous l’égide de la Société Française<br />

de Thanatologie. Son comité<br />

scientifique composé d’historiens, anthropologues,<br />

psychologues et médecins<br />

permet l’ouverture intellectuelle<br />

nécessaire à un sujet aussi<br />

sensible. Ce numéro est consacré au<br />

cadavre qui, après la mort, devient<br />

une chose (ce n’est plus une personne)<br />

- le cadavre - qui conserve sa dignité<br />

et mérite le respect. Il en est de même<br />

pour les cendres après la crémation,<br />

autre avatar du cadavre. Dignité et<br />

respect s’expriment autant dans l’exposition<br />

du corps du défunt que dans<br />

les cérémonies des funérailles et dans<br />

la sépulture. Mais le cadavre est aussi<br />

le représentant de la mort : à ce titre<br />

il peut faire peur. Aussi les rites qui<br />

visent, en particulier, à séparer les vivants<br />

et les morts permettent de relier<br />

les devoirs dus au mort présent<br />

par son corps/cadavre à la nécessité<br />

pour les vivants de le tenir à distance.<br />

Le cadavre brille aussi par son absence<br />

: sa disparition est insoutenable,<br />

le dérobant aux devoirs que veulent<br />

remplir ses proches laissés ainsi dans<br />

l’incertitude de sa mort.


16<br />

LIVRES<br />

■ PHÉNOMÉNOLOGIE<br />

L’enseignement supérieur<br />

en France<br />

Maria Vasconcellos<br />

La Découverte<br />

Dans le prolongement de la description<br />

du système d’enseignement français<br />

réalisée dans Le Système éducatif<br />

paru dans la collection « Repères »<br />

(Vasconcellos, 2004), cet ouvrage propose<br />

une présentation synthétique<br />

de l’enseignement supérieur avec,<br />

d’un côté, les grandes écoles et les<br />

écoles professionnelles relevant de<br />

filières sélectives et, de l’autre, les universités,<br />

composées majoritairement<br />

de filières ouvertes à tous les bacheliers.<br />

Pour chacune est proposé un<br />

tableau présentant le type de public<br />

recruté, les modalités de fonctionnement<br />

et l’organisation des études, les<br />

débouchés possibles. Au-delà de la<br />

description de ces segments d’un système<br />

complexe en pleine évolution,<br />

on est renvoyé à la question des relations<br />

qui se nouent entre l’enseignement<br />

supérieur et les diverses<br />

sphères de la société (culture, emploi,<br />

famille), qui soulèvent de larges interrogations.<br />

Les bouleversements récents de ces<br />

institutions ne doivent pas cacher que<br />

leurs structures s’enracinent dans un<br />

passé ancien. Sont donc présentés<br />

les grands traits, historiquement déterminés,<br />

de cette structure d’ensemble,<br />

qui oppose, sous les termes<br />

« écoles » et « universités », deux types<br />

d’institutions : les unes proposent une<br />

formation professionnelle plus ou<br />

moins étroitement définie, et les autres,<br />

une formation culturelle plus générale<br />

(susceptible de déboucher sur<br />

l’enseignement ou la recherche) ; il<br />

faut noter que ces lignes traditionnelles<br />

de démarcation sont aujourd’hui<br />

en partie bousculées. Les chapitres<br />

II et III présentent l’ensemble<br />

formé par les classes préparatoires<br />

aux grandes écoles (CPGE), les « grandes<br />

écoles » et les autres écoles professionnelles,<br />

les formations de techniciens<br />

des lycées (STS) et des universités<br />

(IUT). Les chapitres qui suivent<br />

sont consacrés aux filières d’études<br />

plus « ouvertes » des universités, dont<br />

l’offre d’enseignement s’est transformée<br />

sous la pression du nombre et<br />

des nouvelles attentes des étudiants,<br />

ainsi qu’au nouveau public qu’elles<br />

accueillent.<br />

Pensons ailleurs<br />

Nicole Lapierre<br />

Folio essais n°482<br />

Gallimard<br />

Nicole Lapierre nous entraîne sur les<br />

pas de ces intellectuels déplacés qui<br />

s’en sont allés, penser ailleurs, sortant<br />

des sentiers battus, passant les<br />

bornes, enjambant les barrières sociales,<br />

sans y être invités ni conviés.<br />

Le lecteur découvre, à travers une galerie<br />

de portraits, de Georg Simmel à<br />

Edward Said, de Walter Benjamin à<br />

Paul Gilroy, en passant par Devereux,<br />

Deleuze et tant d’autres, un musée<br />

imaginaire où les idées prennent vie,<br />

où la figure de l’intellectuel est celle<br />

de l’étranger, dont l’expérience décalée<br />

favorise les interrogations et<br />

stimule la pensée.<br />

D’où, comme une sorte de mise en<br />

pratique, une invitation à suivre une<br />

réflexion itinérante, dans l’entre-deux<br />

des textes et des histoires, entre idées<br />

et expériences, aux frontières des disciplines<br />

et aux confins des territoires.<br />

Y compris quand l’auteur se risque,<br />

à imaginer une rencontre impossible<br />

mais cependant plausible. Car jouer<br />

un peu avec la tentation de la fiction<br />

permet de prendre quelques libertés<br />

avec des potentialités qui n’ont pas<br />

pu se réaliser, offrant de fugaces aperçus<br />

sur une histoire non advenue.<br />

<br />

cette question complexe dans son<br />

hétérogénéité même. Car la clinique<br />

quotidienne se nourrit du repérage de<br />

facteurs non pas seulement catégoriels<br />

mais aussi dimensionnels et même subjectifs<br />

et intersubjectifs qui président à<br />

l’établissement du diagnostic et du pronostic.<br />

Elle suppose de tenir ensemble dans<br />

un certain savoir-faire, une compréhension<br />

de l’être malade et une<br />

connaissance des maladies.<br />

De ce qui apparaît là comme un décalage<br />

entre une théorie de la pratique,<br />

c’est à dire ce qui se situe entre savoir<br />

et faire, et les théories, mais sans doute<br />

aussi la pratique elle-même avec ses<br />

influences complexes, que dire, que<br />

penser ?<br />

Le clinicien, du moins jusqu’à l’expansion<br />

de l’observation standardisée, pouvait<br />

faire abstraction des présupposés<br />

théoriques appris lorsque ceux-ci se<br />

révélaient non congruents à sa pratique.<br />

En voulant limiter cette inadéquation,<br />

il pouvait tomber dans un<br />

autre excès, celui d’une pratique autosuffisante,<br />

auto-référée.<br />

Cependant, grâce à la succession, et<br />

juxtaposition partielle, des paradigmes<br />

ayant historiquement construit la psychiatrie<br />

(aliénation mentale, maladies<br />

mentales, structures) se maintenait<br />

encore une circulation conceptuelle<br />

propre au « relativisme partiel » (encore<br />

un mot de Lanteri-Laura) favorisant<br />

l’adaptation clinique. Le gain contemporain<br />

d’apparente scientificité des protocoles<br />

quantitatifs, et leur pendant<br />

économique, a eu pour corrélat une<br />

réduction de cette adaptation. .<br />

Même si la psychopathologie catégorielle<br />

dite athéorique, donc quant à elle<br />

auto-référée, valide aujourd’hui l’illusion<br />

de l’objectivité par la standardisation<br />

statistique en attente de preuve<br />

neuro-scientifique, face à ce qui ne<br />

peut être ni statistiquement prouvé ni<br />

scientifiquement expliqué, la capacité<br />

d’adaptation du clinicien dans un espace<br />

qui va de sa pratique à sa ou à ses<br />

théories de référence reste essentielle.<br />

Cet espace est celui de la théorie de<br />

la pratique.<br />

C’est donc la critique de la théorie de<br />

la pratique, c’est-à-dire de la régulation<br />

des rapports entre savoir et faire,<br />

aujourd’hui quasi inexistante, qui nous<br />

paraît constituer le premier outil d’évolution<br />

de notre paradigme, la question<br />

psychosomatique.<br />

Or une telle attitude critique, appartient<br />

à la tradition phénoménologique<br />

en psychiatrie.<br />

La psychiatrie phénoménologique traditionnelle<br />

s’est, pour l’essentiel, tournée<br />

vers la clinique des psychoses, plus<br />

récemment vers d’autres pathologies.<br />

Nous estimons que cette tradition<br />

apporte cependant des moyens adaptés<br />

à la nécessaire évolution de notre<br />

problème et ce à double titre.<br />

Elle contient, en effet, selon nous en<br />

germe les concepts transversaux ouverts<br />

et commutatifs de la pensée de l’unité<br />

psychosomatique, notamment par les<br />

apports de l’anthropologie phénoménologique<br />

sur la corporéité.<br />

C’est de plus le seul courant en psychiatrie<br />

qui ait développé une attitude<br />

critique de ses pré-supposés et un examen<br />

des conditions de possibilité du<br />

savoir clinique, interrogeant ensemble<br />

l’être-malade et l’être-psychiatre. Ce<br />

courant a maintenu ouvert, sans toujours<br />

le nommer, l’espace de la théorie<br />

de la pratique.<br />

C’est ce que nous allons examiner<br />

maintenant en nous demandant comment<br />

cette double attitude peut s’articuler<br />

avec une réflexion liée à la philosophie<br />

des sciences.<br />

Situation par rapport à la<br />

philosophie des sciences<br />

Une telle recherche au sujet de la vérité<br />

de la question psychosomatique<br />

comme question biologique et médicale<br />

s’inscrit, de fait, dans une démarche<br />

de philosophie des sciences.<br />

En effet, dès lors qu’elle procède selon<br />

une démarche localiste, c’est à dire<br />

appréhende les sciences in vivo, la philosophie<br />

des sciences aujourd’hui tend<br />

à « se rapprocher autant qu’il est<br />

raisonnable du front même des<br />

recherches »<br />

(18, p.399).<br />

En prenant pour objet le traitement de<br />

la question psychosomatique en psychiatrie,<br />

nous ne cherchons cependant<br />

pas à établir les traits communs aux<br />

différentes sciences concernées par<br />

cette question que ce soit « sur le plan<br />

de la méthode ou de l’ontologie » comme<br />

ce serait le cas par un examen « localiste<br />

général ».<br />

En effet, nous ne nous intéressons<br />

aujourd’hui qu’aux rapports susceptibles<br />

de s’établir entre les sciences<br />

concernées par l’unité psychosomatique<br />

et la clinique. Nous menons en<br />

cela un examen de ce qui donne à la<br />

psychiatrie comme science, et particulièrement<br />

science de la question psychosomatique,<br />

« (son) individualité, ce<br />

qui [la] constitue concrètement (...) » (op.cit.<br />

p.23) et ce dans toute sa paradoxale<br />

hétérogénéité. Il s’agit là d’un examen<br />

« localiste régional ».<br />

Si l’on considère avec Anne Fagot-Largeault<br />

que la philosophie de la nature<br />

qui, s’interroge sur « ce qui est » en<br />

appréhendant le « monde naturel » et le<br />

« sujet connaissant » (op.cit. p.135), cette<br />

philosophie de la nature est aujourd’hui<br />

philosophie des sciences, nous<br />

soutenons de plus avec elle la conviction<br />

que la philosophie des sciences<br />

« doit être une interrogation surgie des<br />

sciences elles-mêmes, qui, en tant qu’elles<br />

sont une recherche de la vérité, sont phi-<br />

losophiques »<br />

(op.cit. p.128).<br />

Et ce, tout en sachant, pour ce qui<br />

concerne notre démarche, que le statut<br />

de la psychiatrie comme science reste<br />

relatif.<br />

En effet, même la somme des scientificités<br />

des sciences fondamentales auxquelles<br />

elle ne peut pas ne pas se référer,<br />

ne lui confère pas, sauf de façon<br />

illusoire, une assise monolithique scientifique.<br />

Ainsi, si le relativisme partiel<br />

reste aujourd’hui de mise en psychiatrie,<br />

c’est bien que les connaissances y « restent<br />

disparates et incertaines » (19).<br />

Notre tentative de rapprochement de<br />

la philosophie des sciences avec la psychiatrie<br />

en général, phénoménologique<br />

en particulier, est-elle destinée à avorter<br />

ici prématurément ? Comment un<br />

examen localiste régional au sujet d’une<br />

science qui n’en est pas vraiment une<br />

est-il possible ?<br />

La philosophie des sciences n’est plus<br />

une réflexion sur la science en général<br />

comme à l’époque du Cercle de Vienne.<br />

Elle s’adresse à des disciplines particulières<br />

sans que l’unité de la science soit<br />

le souci majeur (18, p.16). Elle ne vise pas,<br />

pour autant, à évaluer des hypothèses<br />

cadres trop récentes, mais examine plus<br />

volontiers au sein de recherches particulières<br />

comment celles-ci nous permettent<br />

de connaître.<br />

Examiner, de plus, le fait théorique à<br />

l’aune du fait clinique a le double intérêt<br />

d’une part de faire travailler les<br />

sciences naturelles sur la marge de l’indéterminé<br />

et les sciences humaines sur<br />

leur objectivité (op.cit. p.716) et de l’autre de<br />

faire réfléchir la pratique sur les conditions<br />

de son savoir. Ce que met en évidence<br />

l’examen localiste régional c’est<br />

qu’il est possible d’interpeller les différentes<br />

sciences concernées à partir de<br />

cet échange.<br />

Appliquons ce raisonnement à notre<br />

question paradigmatique : l’examen de<br />

l’objet naturel commun à de nombreuses<br />

sciences biologiques et médicales,<br />

objet qui est pour nous l’unité<br />

psychosomatique, montre qu’« il n’est<br />

pas indispensable qu’existent des lois<br />

“universelles“, il peut y avoir des lois dif-<br />

férentes selon les “ordres“ »<br />

(op.cit. p.136).<br />

Chez l’être humain, compris comme<br />

être naturel, coexistent ainsi l’ordre<br />

physico-chimique, l’ordre vivant, l’ordre<br />

humain, ces derniers obéissant plus à<br />

des régularités qu’à un déterminisme<br />

linéaire.<br />

Ce constat des sciences naturelles ouvre<br />

au débat philosophique, entre autres,<br />

du rapport entre déterminisme et liberté<br />

au sein de la nature humaine.<br />

De telles considérations théoriques<br />

issues des sciences naturelles et des<br />

sciences humaines peuvent être reliées<br />

à l’observation clinique car les maladies,<br />

les modes de réactivité de<br />

malades, les modes d’être qui ont bien<br />

sur à voir avec la biologie autant<br />

qu’avec la personne, avec le contrôle et<br />

avec la liberté, suivent aussi des tendances,<br />

des styles, lisibles selon une<br />

régularité typologique. Nous allons<br />

revenir dans un instant sur ces dernières<br />

notions.<br />

Pour le dire autrement, l’articulation<br />

des lectures naturelles et philosophiques,<br />

et l’échange entre ces théories<br />

et la prise en compte de l’unité<br />

biologique et personnelle du sujet malade<br />

revient donc en psychiatrie à, tout à<br />

la fois, expliquer et comprendre et ceci,<br />

selon une herméneutique post-diltheyienne<br />

c’est à dire dans un « cycle<br />

indéfini d’approximations successives,<br />

la saisie partielle des éléments, ou (...)<br />

des moments, alternant avec des<br />

représentations provisoires de la totali-<br />

té »<br />

(op.cit. p.708).<br />

Structurer un discours clinique qui interpelle<br />

la communauté scientifique naturelle<br />

et philosophique, suppose donc<br />

de tenir une attitude particulière ouverte<br />

à ces interrogations. La nosographie<br />

comme écriture descriptive traditionnelle<br />

des maladies, les classifications<br />

syndromiques aujourd’hui statistiques<br />

ne sont pas les outils de la mise en<br />

place de cette attitude.<br />

La posture de « relativisme partiel » préconisée<br />

par Georges Lanteri-Laura permet<br />

de poser que si « la psychiatrie<br />

n’est pas sans rapport avec les cultures -<br />

celle où elle est apparue et les autres-<br />

(…) par son effort vers une connaissance<br />

rigoureuse, elle ne s’y réduit<br />

pas »<br />

(20, p.19).<br />

Tatossian fait également valoir en psychiatrie<br />

l’intérêt de cette attitude phénoménologique.<br />

Elle permet, en effet, l’abord de l’homme<br />

sans préjugés tout en intégrant les<br />

sciences particulières et ceci « (…) [pour<br />

les] pré-penser (“vor-denken“) dans ce<br />

que Husserl appelait les “ontologies régionales“<br />

c’est à dire les pré-jugés, les présupposés<br />

aprioriques essentiels qui régissent<br />

la région -psychique, corporelle,<br />

historique, physique, …- propre à chaque<br />

science et qu’elle oublie pendant son développement<br />

» (21, p.178).<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Si elle est possible, une telle épistémologie<br />

peut « (…) satisfaire les tenants<br />

d’une épistémologie moins normative<br />

et définitive qu’historique et descriptive<br />

de l’évolution et de l’état actuel des<br />

sciences »<br />

(op.cit. p.191).<br />

Assumer la fonction critique nécessaire<br />

à l’évolution de notre question, c’est<br />

donc bien assumer une fonction épistémologique<br />

historique et descriptive<br />

centrée sur la question psychosomatique,<br />

cet objet limite du champ d’investigation<br />

classique de la discipline<br />

psychiatrique est l’objet central de la<br />

médecine et peut-être même le lien<br />

entre l’ensemble des disciplines médicales<br />

et biologiques et à ce titre paradigmatique.<br />

Pour ce faire, la psychiatrie phénoménologique<br />

doit s’efforcer de structurer<br />

la rencontre critique de son anthropologie,<br />

des sciences naturelles et des<br />

sciences humaines auxquelles elle se<br />

réfère.<br />

Etant entendu que ce dialogue entre<br />

explication et compréhension de l’unité<br />

psychosomatique, demeurera à tout<br />

jamais ouvert et inachevé puisque<br />

dépendant de ces données toujours<br />

évolutives que sont la compréhension<br />

de l’inscription de l’homme dans le<br />

monde et les explications des sciences<br />

naturelles.<br />

Nous venons de tenter de montrer,<br />

trop rapidement sans doute, comment<br />

la nécessité de l’évolution du cadre<br />

conceptuel de la question psychosomatique<br />

s’articulait avec un examen<br />

venu de la philosophie des sciences.<br />

Cet examen localiste régional mené<br />

au sujet de la psychiatrie, discipline<br />

médicale non scientifique en ellemême,<br />

passe en effet selon nous par<br />

un premier temps clinique nourri par<br />

l’anthropologie phénoménologique de<br />

la corporéité et renforcé ensuite par<br />

l’attitude critique phénoménologique<br />

la plus propre à alimenter une épistémologie<br />

régionale.<br />

Nous allons maintenant exposer<br />

quelques aspects de l’application de<br />

ces principes ; recherche encore largement<br />

programmatique, qui tente<br />

cependant déjà de tenir ensemble<br />

explication et compréhension de l’unité<br />

psychosomatique par des concepts<br />

transversaux, mais aussi à préciser le<br />

cadre susceptible de permette la continuité<br />

de l’échange entre théories et<br />

pratique.<br />

Nous allons donc envisager, et ce sera<br />

notre troisième partie, les avancées<br />

successivement pratiques, théoriques<br />

et théorico-pratiques que l’attitude<br />

Séminaires CTNERHI 2007<br />

Lundi 14 mai 2007<br />

Polyhandicap et grande dépendance. Intervenant : Elisabeth Zucman,<br />

Médecin et Présidente honoraire du GPF - Groupe Polyhandicap France -<br />

en collaboration avec Elisabeth Cataix-Nègre et Laurence Deseigne.<br />

Vendredi 25 mai 2007 ou<br />

Vendredi 21 septembre 2007<br />

Emploi, plutôt qu’allocations. Les nouvelles politiques du handicap en<br />

Europe. Intervenant : Dominique Velche, chargé de recherche au CTNERHI.<br />

Vendredi 22 juin 2007 ou<br />

Lundi 17 septembre 2007<br />

L’évaluation dans le nouveau système de compensation français.<br />

Intervenant : Jésus Sanchez, Directeur de recherche du CTNERHI.<br />

Mardi 11 septembre 2007<br />

Classifications du handicap et enquêtes en population générale.<br />

Intervenants : Pascale Roussel, chargée de recherche, Marie Cuenot,<br />

attachée de recherche et Jésus Sanchez, Directeur de recherche au<br />

CTNERHI.<br />

Vendredi 28 septembre 2007<br />

Nouveaux rebonds de l’accessibilité. Intervenant : Jésus Sanchez, Directeur<br />

de recherche et Marc Maudinet, Directeur du CTNERHI.<br />

Renseignements et inscriptions : Régine Martinez : 01 45 65 59 40<br />

r.martinez@ctnerhi.com.fr - www.ctnerhi.com.fr (rubrique séminaires)


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

clinique et critique de la psychiatrie<br />

phénoménologique nous paraît pouvoir<br />

permettre.<br />

Armelle GRENOUILLOUX<br />

Praticien contractuel, Psychiatrie V, Hôpital<br />

Saint Jacques, 44093 Nantes.<br />

Bibliographie<br />

(1) CHRISTEN Y., Le sport briseur de<br />

plaques, Alzheimer Actualités, Mai-Juin<br />

2005 ; n°180 : p.1<br />

(2) KAMIENIECKI H., Histoire de la psychosomatique,<br />

Paris 1994, PUF.<br />

(3) LANTERI-LAURA G., Une approche<br />

historique et critique des problèmes épistémologiques<br />

en psychiatrie, Annales Médico-<br />

Psychologiques 1999, 157, 2, 74-83<br />

(4) EY H., Des idées de Jackson à un<br />

modèle organodynamique en psychiatrie,<br />

Toulouse, Privat-Rhadamanthe 1973.<br />

(Réed. 1997, Paris, L’Harmattan, Coll.<br />

Trouvailles et retrouvailles).<br />

(5) LANTERI-LAURA G., Les localisations<br />

imaginaires, L’Evolution Psychiatrique<br />

1984, 49, 2, 379-402.<br />

(6) ANDRIEU B., La neurophilosophie,<br />

Paris 1998, PUF.<br />

(7) ALLILAIRE J.Fr., A propos de plus<br />

vaste que le ciel, une nouvelle théorie générale<br />

du cerveau, Annales Médico-Psychologiques<br />

2004, 162, 764-769.<br />

(8) ANDRIEU B., Le corps dispersé. Une<br />

histoire du corps au XXème siècle, Paris<br />

1993, L’Harmattan.<br />

(9) WOLF M., Théorie de l’action psychothérapique,<br />

Paris 1995, PUF, coll. Psychopathologie.<br />

(10) MARTY P., Psychosomatique et psychanalyse,<br />

Revue Française de Psychanalyse<br />

1990, 3, 615-624.<br />

(11) Somatisation, psychanalyse, science<br />

du vivant, Coord. I. BILLIARD, Condésur-Noireau,<br />

E.S.H.E.L 1994.<br />

(12) Diagnostic and Statistical Manual<br />

(IV), Washington DC, APA 1994.<br />

(13) MALEVAL J.Cl., Limites et dangers<br />

des D.S.M., L’Evolution Psychiatrique<br />

2003, 68, 39-61.<br />

(14) Classification des troubles mentaux<br />

et des troubles du comportement. Critères<br />

diagnostiques pour la recherche, Paris, Masson<br />

1994.<br />

(15) GRENOUILLOUX A., Un abord<br />

phénoménologique de la question psychosomatique,<br />

Neuro-psy 2000, 15, 3, 136-<br />

141.<br />

(16) LANTERI-LAURA G., Les principales<br />

théories à l’œuvre dans la psychiatrie<br />

contemporaine, E.M.C., Paris, Psychiatrie<br />

1992 et 2004, 37006 A10.<br />

(17) LANTERI-LAURA G., Psychiatrie et<br />

connaissance, Paris 1991, Sciences en<br />

situation.<br />

(18) ANDLER D., FAGOT-LARGEAULT<br />

A., SAINT-SERNIN B., Philosophie des<br />

sciences, Paris 2002, Folio-Essais.<br />

(19) FAGOT-LARGEAULT A., Souvenirs<br />

cristolliens, L’Evolution Psychiatrique<br />

2005, 70, 395-397.<br />

(20) LANTERI-LAURA G., Culture et<br />

sémiologie psychiatrique, L’Evolution psychiatrique<br />

2004, 69, 3-21.<br />

(21) TATOSSIAN A., La phénoménologie<br />

: une épistémologie pour la psychiatrie<br />

?, Confrontations Psychiatriques<br />

1996, 37, 177-195<br />

(22) LANTERI-LAURA G., La psychiatrie<br />

phénoménologique, Paris 1963, PUF.<br />

(à suivre)<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Le quartier<br />

Enjeux scientifiques, actions<br />

politiques et pratiques sociales<br />

Sous la direction de Marie-Hélène<br />

Bacque, France Guérin-Pace et<br />

jean-Yves Authier<br />

La Découverte, 26 €<br />

Cet ouvrage se veut, à la fois, un outil<br />

de réflexion et un bilan critique des travaux<br />

sur le quartier, en articulant débats<br />

théoriques et travaux empiriques<br />

récents. C’est pourquoi a été fait le choix<br />

d’une bibliographie commune. L’ouvrage<br />

est structuré en trois parties. La<br />

première traite du quartier des sciences<br />

sociales, du quartier des politiques (des<br />

responsables politiques, de leurs discours<br />

et de leurs actions) et des rapports<br />

entre les constructions savantes et les<br />

constructions politiques du quartier. La<br />

deuxième porte sur les représentations<br />

et les usages du quartier des habitants,<br />

les formes d’attachement et d’investissement<br />

qui s’y exercent et les logiques<br />

identitaires qui le constituent et qu’il<br />

contribue à développer. Enfin, la troisième<br />

partie interroge les forces et faiblesses<br />

du quartier. Par son histoire, sa<br />

morphologie, sa localisation, ou bien<br />

encore par les caractéristiques sociales<br />

de ses habitants, le quartier peut constituer<br />

une ressource pour leurs habitants,<br />

influencer leurs pratiques et leurs sociabilités,<br />

ou contribuer à leur stigmatisation.<br />

Mais, en même temps, le quartier<br />

ne constitue pas le seul espace de<br />

vie et bien des déterminants sociaux se<br />

jouent hors du quartier. Dans chaque<br />

partie, une place importante est accordée<br />

à des contributions traitant les questions<br />

abordées à partir d’autres contextes<br />

nationaux (Amérique du Nord, Amérique<br />

du Sud, Afrique...). La discussion<br />

sur « le quartier » est loin de se limiter à<br />

l’hexagone. Ainsi, pour ne citer qu’un<br />

exemple, en Amérique du Nord, le débat<br />

sur les effets de quartier est particulièrement<br />

vif et son importation en<br />

France n’est pas sans influence sur certains<br />

travaux récents.<br />

De ces différentes approches se dégage<br />

une image contrastée des quartiers qui<br />

renvoie à une pluralité d’espaces, de<br />

configurations sociales, de trajectoires,<br />

de temporalités d’usage, de modes d’intervention<br />

politique et d’imaginaires.<br />

Dans ce contexte, les rapports au quartier<br />

s’expriment de façon multiple, en<br />

se différenciant selon les groupes sociaux,<br />

les générations, les histoires individuelles<br />

et les parcours géographiques.<br />

L’hôpital en mouvement<br />

Esprit<br />

Janvier 2007 n°331, 21 €<br />

Pour ce dossier, Esprit a sollicité des acteurs<br />

exerçant des responsabilités hospitalières.<br />

Jean-Paul Saint-André et Isabelle Richard,<br />

doyen et vice-doyenne de la faculté<br />

de médecine d’Angers, démontent<br />

l’illusion d’une crise démographique<br />

tout en déplaçant le regard vers d’autres<br />

sujets, plus difficiles à traiter : liberté de<br />

choix des spécialités par les étudiants,<br />

liberté d’installation géographique, liberté<br />

de choix du secteur (public ou<br />

privé), répartition des missions entre<br />

médecins et personnels non médicaux.<br />

Si le nombre de médecins n’est pas l’enjeu<br />

critique de nos hôpitaux, leur liberté<br />

géographique d’installation, leur liberté<br />

de choisir leur discipline, leur liberté de<br />

choisir leur condition d’exercice, la répartition<br />

de certaines tâches entre médecins<br />

et personnels soignants, enfin<br />

l’offre de conditions variées d’exercice<br />

de la médecine générale sont des questions<br />

politiques majeures.<br />

Jacques Dubin, médecin conciliateur du<br />

CHU d’Angers, montre que l’information<br />

doit contribuer à trouver une juste<br />

place pour le patient à l’hôpital, tandis<br />

qu’Antoine Garapon, Jean-Marc Morin,<br />

Didier Dreyfuss et Guillaume Le Blanc<br />

clarifient les processus en cours en ce<br />

qui concerne la tentation de recours au<br />

droit et l’évolution de la notion de responsabilité.<br />

Si la judiciarisation n’est pas<br />

le fléau du moment, la transparence<br />

vis-à-vis des patients, y compris dans<br />

les situations les plus critiques et jusqu’à<br />

la reconnaissance de la faute éventuelle<br />

et l’appui à l’obtention de réparations<br />

(financières ou autres) est la<br />

condition pour maintenir un climat de<br />

confiance entre les patients et le corps<br />

médical et, au-delà, l’hôpital comme<br />

institution. François Crémieux et Marie<br />

Deugnier, directeurs d’hôpital spécialistes<br />

des sujets de financement, présentent<br />

la tarification à l’activité.<br />

Jean-Pierre d’Halluin, François Maury,<br />

Jean-Claude Petit et Chantal de Singly<br />

sont les directeurs et présidents des CME<br />

de l’hôpital Saint-Antoine à Paris et de<br />

l’hôpital de Roubaix. Ils analysent le<br />

fonctionnement hospitalier et l’impact<br />

des évolutions épidémiologiques qui<br />

ont progressivement transformé l’hôpital<br />

d’un lieu d’accueil pour patients<br />

hébergés au long cours en un lieu de<br />

passage pour malades hospitalisés<br />

quelques jours seulement. Le progrès<br />

scientifique et la spécialisation grandissante<br />

des soins apportés par l’hôpital<br />

constituent la deuxième évolution<br />

de ces dernières années qui permet aux<br />

auteurs de poser les enjeux de pouvoirs<br />

internes et de s’interroger sur l’évolu-<br />

ANNONCES EN BREF<br />

9 mars 2007. Paris. Colloque organisé<br />

par le Collège International de<br />

l’Adolescence et le Laboratoire de psychologie<br />

clinique et de psychopathologie<br />

(Paris V) sur le thème : Alcool<br />

et adolescence. Renseignements et inscriptions<br />

: Valérie Discour, Boîte A 5,<br />

8 rue des Portes Blanches, 75018 Paris.<br />

Tél. : 01 42 23 44 12. E-mail : v.discour@wanadoo.fr<br />

13 mars 2007. Grenoble. Journée<br />

d’étude organisée par l’Association<br />

nationale des villes pour le développement<br />

de la santé publique sur le<br />

thème : Le maire et le psychiatre : ensemble<br />

pour la santé mentale. Elus, santé<br />

publique et territoires, 11 rue des Anciennes<br />

Mairies, 92000 Nanterre. Inscriptions<br />

par mail en contactant :<br />

espt.asso@orange.fr<br />

16 au 18 mars 2007. 22 ème Congrès<br />

annuel de l’Union Syndicale de la Psychiatrie<br />

sur le thème : Pour une pratique<br />

indisciplinaire : l’équipe indisciplinaire.<br />

Inscriptions : U.S.P., 52 rue Galliéni,<br />

92240 Malakoff. Tél. : 01 46 57 85 85.<br />

Fax : 01 46 57 08 60. E-mail : uspsy@<br />

free.fr. Site : www.uspsy.fr<br />

19 et 20 mars 2007. Marseille. Colloque<br />

organisé par l’association AN-<br />

THEA sur le thème : Quand la sexualité<br />

devient délit. Renseignements : Ass.<br />

ANTHEA, 7 Pl. des Herbes, 83300 Draguignan.<br />

Tél. : 04 94 68 98 48. Fax :<br />

04 94 68 28 74. E-mail : anthea@clubinternet.fr.<br />

Site : anthea.fr<br />

22 et 23 mars 2007. Brest. Journées<br />

sur le thème : « Regards croisés sur l’autisme<br />

» du Dr Fombonne et du Dr Constant.<br />

Renseignements : Centre hospitalier<br />

régional et universitaire de Brest,<br />

IMEBO, Institut Mère-Enfant de Bretagne<br />

Occidentale, CERDEA, Centre<br />

d’Etudes et de Recherche sur le Développement<br />

de l’Enfant et de l’Adolescent,<br />

Hôpital de Bohars, 29820 Bohars.<br />

Tél. : 02 98 01 50 46. Fax :<br />

02 98 01 52 98.<br />

23 et 24 mars 2007. Agen. XVII èmes<br />

Journées de l’AFERUP sur le thème :<br />

Urgences psychiatriques et dangerosité.<br />

De la psychiatrie à la criminologie.<br />

Inscriptions : Actour 47, 271 rue de<br />

Péchabout, BP 80304, 47008 Agen<br />

Cédex. Tél. : 05 53 66 14 14. Fax :<br />

05 53 68 25 42. E-mail : actour47@<br />

wanadoo.fr<br />

28 mars 2007. Toulouse. Journée de<br />

formation organisée par Le Furet,<br />

l’ACEPP, l’ESSSE, l’IFRASS, La Fondation<br />

van Leer, le CIPE et les éditions<br />

érès sur le thème : Le défi de la diversité<br />

pour les jeunes enfants. Inscriptions :<br />

Association Le Furet, 6 quai de Paris,<br />

tion des organisations. Yves Deugnier,<br />

président de la délégation régionale de<br />

la recherche clinique du CHU de Rennes<br />

présente les évolutions récentes de la<br />

recherche clinique et son inquiétude sur<br />

le devenir de la recherche dans un<br />

contexte de concurrence exacerbée au<br />

niveau mondial, et de relatif « désamour »<br />

des jeunes médecins pour la recherche<br />

clinique. Alain Lepape, responsable du<br />

comité de lutte contre les infections nosocomiales<br />

des hospices civils de Lyon,<br />

montre en quoi la lutte contre les infections<br />

et pour la qualité des soins déterminera<br />

la relation patient-médecin<br />

et, de manière plus générale, la confiance<br />

des usagers dans l’hôpital.<br />

Didier Dreyfuss et François Lemaire, réanimateurs<br />

médicaux, analysent l’emprise<br />

de la mort et de la prise en charge<br />

de la fin de vie sur le quotidien des professionnels<br />

et l’organisation de l’hôpital.<br />

Paulette Guinchard, députée du<br />

Doubs et ancienne secrétaire d’Etat aux<br />

personnes âgées, et Sylvie Legrain, professeur<br />

de gériatrie, posent les termes<br />

du débat entre déni de la vieillesse, absence<br />

de volonté politique et difficultés<br />

au quotidien de services de gériatrie<br />

mal aimés du reste de l’hôpital.<br />

Les participants de la table ronde sur<br />

les urgences, Laurent El Ghozi, Agnès<br />

Ricard, Alain Tyrode et Patrick Brun,<br />

67000 Strasbourg. Tél. : 03 88 21 96 62.<br />

Fax : 03 88 22 68 37. E-mail : mireille.lefuret@noos.fr<br />

28 mars 2007. Paris. Journée organisée<br />

par le Département de Formation<br />

Continue des Médecins Assistance Publique-Hôpitaux<br />

de Paris sur le thème :<br />

Actualités sur l’accompagnement et la prise<br />

en charge des conduites suicidaires. Inscriptions<br />

: fax : 01 40 27 39 25. E-mail :<br />

didier.lacapelle@sap.aphp.fr<br />

29 mars 2007. Charleville-Mézières. Premier<br />

Séminaire Tabac et Psychiatrie organisé<br />

par le Comité Local de Prévention<br />

du Tabagisme du Centre Hospitalier<br />

Bélair, établissement public de santé<br />

mentale du département des Ardennes.<br />

Inscriptions : Catherine Fournier, service<br />

Formation Continue, CH Bélair, 1<br />

rue Pierre Hallali, 08013 Charleville-Mézières<br />

Cédex. Pour tout renseignement<br />

administratif : Catherine Fournier. Tél. :<br />

03 24 56 87 23. E-mail : cfournier@chbelair.fr.<br />

Pour tout renseignement lié à<br />

l’organisation : Christophe Bailly. Tél.:<br />

03 24 56 87 27. E-mail : cbailly@ch-belair.fr<br />

31 mars 2007. Boulogne-Billancourt.<br />

9 ème Journée sur l’examen psychologique<br />

de l’enfant et de l’adolescent organisée<br />

par l’Association Clinique des<br />

Apprentissages et le Laboratoire de psychologie<br />

clinique et de psychopathologie<br />

de l’Institut de Psychologie (Université<br />

Paris Descartes) sur le thème : Regards<br />

cliniques sur les troubles dits « instrumentaux<br />

». Inscriptions : Institut de Psychologie,<br />

Université Paris Descartes, Bureau<br />

1031, 71 ave Edouard Vaillant, 92774<br />

Boulogne Billancourt Cédex.<br />

11 mai 2007 ou 1 er octobre 2007. Paris.<br />

Séminaire du CTNERHI sur le thème :<br />

CIF et enquête HID : quels apports à la<br />

connaissance du handicap psychique. Inscriptions<br />

: CTNERHI, 236 bis rue de Tolbiac,<br />

75013 Paris. Tél. : 01 45 65 59 40.<br />

Fax : 01 45 65 44 94. E-mail : r.martinez@ctenerhi.com.fr<br />

- Site : www.ctnerhi.fr<br />

17 au 29 mai 2007. Paris. 67 e Congrès<br />

des Psychanalystes de Langue Française<br />

sur le thème : La cure de parole. Il y aura<br />

deux rapports principaux : « L’écoute de<br />

la parole », Dominique Clerc, APF, « La<br />

force du langage », Laurent Danon-Boileau,<br />

SPP ; ainsi que de nombreux ateliers.<br />

Inscriptions : SPP, 187 rue St-Jacques,<br />

75005 Paris. Tél. : 01 43 29 66 70.<br />

23 au 26 mai 2007. Lyon. 10 èmes Journées<br />

Francophones de Thérapie Familiale<br />

Systémique de Lyon sur le thème :<br />

Autonomie et dépendances. Renseignements<br />

: http://www.therafam.com<br />

24 au 26 mai 2007. Bruxelles. Congrès<br />

International sur le thème : Jusqu’ici tout<br />

va bien... Mouvements en Santé Mentale<br />

17<br />

exercent sur un même territoire, le nord<br />

des Hauts-de-Seine. Tous sont médecins<br />

et voient l’hôpital d’un angle différent<br />

: maire adjoint chargé de la prévention<br />

de la santé et des personnes<br />

handicapées à la ville de Nanterre ; responsable<br />

du Smur de l’hôpital Beaujon<br />

à Clichy ; directeur des centres de santé<br />

de la ville de Gennevilliers ; chef de service<br />

des urgences de l’hôpital Louis-<br />

Mourier à Colombes. Le constat est le<br />

même : l’hôpital n’est rien sans la ville<br />

et son devenir dépendra de ses relations<br />

avec les autres acteurs impliqués<br />

dans la santé des populations du territoire.<br />

Après le suicide d’un proche<br />

Vivre le deuil et se reconstruire<br />

Christophe Faure<br />

Albin Michel, 15 €<br />

A partir de témoignages, qui sont autant<br />

de reflets de la diversité des situations,<br />

Christophe Faure s’adresse à celui<br />

qui reste lorsque l’autre est parti, et<br />

à son entourage, si démuni pour le soutenir.<br />

Ces paroles sur l’indicible aident<br />

le lecteur non pas à oublier, mais à nommer<br />

sa souffrance afin que la cicatrisation<br />

s’opère, lentement, en sachant que<br />

cette blessure ne guérira jamais tout à<br />

fait.<br />

entre clinique, social et politique organisé<br />

par la Ligue Bruxelloise Francophone<br />

pour la Santé Mentale en collaboration<br />

avec l’Union Internationale d’Aide à la<br />

Santé Mentale, l’Association Française<br />

de Psychiatrie, le Comité Européen :<br />

Droit Ethique et Psychiatrie, l’Observatoire<br />

National des pratiques en Santé<br />

Mentale et Précarité et avec le soutien<br />

de la Commission Communautaire Française<br />

de la Région de Bruxelles-Capitale.<br />

Renseignemets : Secrétariat de la<br />

Ligue Bruxelloise Francophone pour la<br />

Santé Mentale, 53 rue du Président,<br />

1050 Bruxelles, Belgique. Personnes à<br />

contacter : Dr Charles Burquel et Eric<br />

Messens. Tél. : 0032 (0)2 511 55 43.<br />

Fax : 0032 (0)2 511 52 76. E-mail : emessens@skynet.be<br />

8 et 9 juin 2007. Auxerre. XI ème Congrès<br />

de psychothérapie de groupe d’enfants<br />

et d’adolescents sur le thème : « Le thérapeutique<br />

dans les groupes » avec la participation<br />

de B. Golse, R. Kaës, C. Néri et<br />

l’équipe du CIRPPA. Contact : Centre<br />

d’Information et de Recherche en Psychologie<br />

et Psychanalyse Appliquées.<br />

Tél./Fax : 01 42 40 41 12. E-mail :<br />

cirppa@wanadoo.fr<br />

12 au 15 juin 2007. Nice. Troisièmes<br />

rencontres internationales du Centre<br />

Collaborateur de l’Organisation Mondiale<br />

de la Santé pour la Recherche et<br />

la Formation en Santé Mentale (CCOMS,<br />

Lille) sur le thème : Vaincre les discriminations<br />

en santé mentale. Renseignements<br />

: CCOMS. Tél. : 03 20 43 71 00.<br />

Fax : 03 20 43 71 15. E-mail : ccoms@<br />

epsm-lille-metropole.fr. Programme et<br />

fiche d’inscription téléchargeables sur<br />

le site internet : www.epsm-lille-metropole.fr/rubrique<br />

CCCOMS.<br />

15 et 16 juin 2007. Fontevraud. 22 èmes<br />

Journées Psychiatriques du Val de Loire<br />

conjointe aux 39 èmes Journées du Groupement<br />

d’Etudes et de Prévention du<br />

Suicide sur le thème : Alliance thérapeutique<br />

et refus de soins. Renseignements<br />

et inscriptions : Anne-Marie Guyot,<br />

Josiane Le Marec, Janine Raimbault,<br />

Secteur 7, Cesame, Sainte Gemmes sur<br />

Loire, BP 50089, 49137 Les Ponts de<br />

Cé Cedex. Tél. : 02 41 80 79 93. Fax :<br />

02 41 80 79 63. E-mail : s7.secretariat@<br />

ch-sesame-angers.fr. http\\www. med.<br />

univ-angers.fr/services/AARP.<br />

29 juin 2007. Paris. Journées Internationales<br />

de la Société Française de neurologie<br />

2007 présidées par le Pr Michel<br />

Clanet sur le thème : Sclérose en plaques.<br />

Secrétariat d’Organisation : BCA,<br />

6 bd du Général Leclerc, 92115 Clichy<br />

Cédex. Tél. : 01 41 06 67 70. Fax :<br />

01 41 06 67 79. Site : www.b-c-a.fr/<br />

sfninter2007


18<br />

LIVRES<br />

■ THÉRAPEUTIQUE<br />

Le travail<br />

Une sociologie contemporaine<br />

Michel Lallement<br />

Folio essais n°484<br />

Gallimard, 10,30 €<br />

On observe une remise en cause apparente<br />

du travail : chômage massif,<br />

délocalisation des industries et des<br />

services, flexibilité, pluriactivité semblent<br />

concourir à la fin du travail, à<br />

la disparition des statuts, à la mort<br />

du lien social par l’emploi. Désaffilié,<br />

le travailleur d’hier est devenu le sansdroit<br />

d’aujourd’hui. A cette crise, beaucoup<br />

de sociologues répondent par<br />

la mise en perspective historique du<br />

monde du travail que nous avons<br />

perdu.<br />

Michel Lallement, en contre-pied, dans<br />

ce livre inédit, fait une sociologie<br />

contemporaine de la crise, s’attaquant<br />

aux dimensions inédites des transformations<br />

de la production. De fait,<br />

les recherches et analyses de la sociologie<br />

peuvent aider à comprendre<br />

des conditions collectives de travail<br />

et de vie trop souvent vécues sur un<br />

mode subjectif et individuel. Le travail,<br />

moteur et révélateur des mutations<br />

contemporaines, garde sa place<br />

centrale d’institution sociale.<br />

Toxicos, le goût et la peine<br />

Patricia Bouhnik<br />

La Découverte, 24 €<br />

Patricia Bouhnik, maître de conférences<br />

en sociologie à l’université<br />

d’Amiens, travaille sur les questions<br />

relatives aux consommations de<br />

drogues. Elle montre que ces quinze<br />

dernières années, la mort de milliers<br />

d’usagers de drogues illicites n’a pas<br />

résulté uniquement de l’usage des<br />

produits.<br />

La vie à la rue, les incarcérations et<br />

l’errance, les contaminations par le<br />

virus du sida et les hépatites liées au<br />

partage des seringues et aux conditions<br />

précaires d’injection ont contribué<br />

à la dégradation générale de leur<br />

état de santé et à la multiplication<br />

des maladies opportunistes. La criminalisation<br />

a aussi contribué à les<br />

surexposer à l’égard des risques (accidents,<br />

polyconsommations hasardeuses,<br />

suicides...).<br />

Ce livre permet de comprendre les<br />

inflexions ayant marqué leur histoire.<br />

Derrière les plaintes, regrets et peurs<br />

qui émaillent leurs récits, ils évoquent<br />

leur condition sociale et leur confrontation<br />

grandissante à des risques rarement<br />

recherchés. Les trajectoires,<br />

les fonctions assignées à la consommation<br />

et les styles de vie adoptés<br />

sont très divers, mais découlent de<br />

ce que l’auteur désigne comme des<br />

« systèmes de vie avec les drogues ».<br />

Cette notion permet d’intégrer les facteurs<br />

socio-économiques, les interactions<br />

avec les institutions ainsi que<br />

les rapports sociaux au monde des<br />

usagers de drogues. Elle permet d’interroger<br />

les politiques publiques, l’ambivalence<br />

du rapport à la loi et les<br />

contradictions nées de la mise en<br />

œuvre des dispositifs de soins, de réduction<br />

des risques et de substitution.<br />

Ce travail s’est déroulé pendant une<br />

quinzaine d’années sur différents territoires<br />

: les cités de la banlieue nord<br />

parisienne, de la fin des années 1980<br />

jusqu’au début des années 2000 ; les<br />

quartiers dits populaires du nord de<br />

Paris ensuite, avec les formes de<br />

consommation propres à la seconde<br />

moitié des années 1990 et des regroupements<br />

d’usagers très précarisés<br />

; la prison, enfin, où une partie<br />

de ces mêmes publics - surtout ceux<br />

issus de milieux populaires - allaient<br />

passer à un moment ou à un autre<br />

de leur histoire.<br />

Suivi et réinsertion de patients<br />

psychotiques présentant une addiction au<br />

cannabis, traités par RisperdalConsta ® LP<br />

Il est actuellement classique de considérer<br />

que 50% des patients psychotiques<br />

consomment des toxiques et<br />

notamment du cannabis (1).<br />

L’usage de ces produits contribue à<br />

majorer ou aggraver la symptomatologie<br />

clinique (2), à compliquer le traitement<br />

du fait d’une certaine résistance<br />

qui peut nécessiter des doses<br />

plus importantes pour un résultat<br />

moindre, mais aussi à participer (du<br />

fait des personnalités sous-jacentes et<br />

des troubles du comportement) à un<br />

manque de compliance aux soins,<br />

voire à un échappement, générateur<br />

de rechutes, de réhospitalisations et<br />

donc d’un coût élevé en matière de<br />

santé publique.<br />

Les revues de la littérature montrent<br />

l’intérêt depuis plusieurs années de la<br />

prescription des antipsychotiques atypiques,<br />

et notamment du Risperdal-<br />

Consta, seul antipsychotique atypique<br />

bénéficiant d’une forme injectable à<br />

action prolongée.<br />

Objectifs et méthodes<br />

Dans le cadre de notre pratique de<br />

psychiatrie de secteur dans un service<br />

destiné à des patients adultes, nous<br />

avons suivi l’évolution d’une cohorte<br />

de patients psychotiques traités par RisperdalConsta<br />

afin de dégager les caractéristiques<br />

concernant le suivi et les<br />

possibilités de réinsertion psychosociale<br />

des patients souffrant de la double<br />

pathologie, à savoir psychose et addiction.<br />

D’Octobre 2002 à Mai 2006, 60<br />

patients psychotiques ont été traités<br />

par Risperdal per os relayé par RisperdalConsta.<br />

Le traitement per os a été<br />

continué pendant les 3 ou 4 semaines<br />

après la première injection, les doses<br />

ont varié en fonction de la symptomatologie<br />

clinique et de l’expérience<br />

des praticiens.<br />

Ces patients étaient soit hospitalisés en<br />

unité de soins intrahospitalière, soit suivis<br />

au CMP.<br />

Un projet thérapeutique prévoyant leur<br />

réhabilitation psychologique, familiale,<br />

sociale et professionnelle a été élaboré<br />

pour chacun d’eux, le plus tôt possible,<br />

utilisant toutes les structures intermédiaires<br />

du service : hopital de jour intra<br />

et extra-muros (HDJ), centre d’activités<br />

à temps partiel (CATTP), cliniquerelais,<br />

chantiers thérapeutiques.<br />

Les patients ont été suivis régulièrement<br />

en consultation par leur psychiatre<br />

référent et ont bénéficié de<br />

soins infirmiers, à un rythme bimensuel<br />

correspondant à leur injection.<br />

45 €*<br />

pour un an<br />

75 €*<br />

pour 2 ans<br />

Tarif<br />

étudiant et internes<br />

30 €*<br />

*supplément étranger<br />

et DOM/TOM =30 €/an<br />

Résultats<br />

Parmi les 60 patients psychotiques traités<br />

par RisperdalConsta, 27 ont présenté<br />

des conduites addictives à différents<br />

toxiques et notamment au<br />

cannabis.<br />

Ces 27 patients étaient composés de<br />

21 hommes et 6 femmes, agés de<br />

27,7+ou-6,12 (19 à 42) ans, dont la<br />

durée moyenne d’évolution de la maladie<br />

est de 6,3 +ou- 6,09 (1 à 26) ans ;<br />

25 étaient célibataires, 2 ont vécu en<br />

couple (dont 1 séparé) ; 23 patients<br />

ont été hospitalisés et le traitement initié<br />

en intrahospitalier, 4 ont été suivis<br />

uniquement au CMP. Parmi les 23, 17<br />

ont été hospitalisés en hospitalisation à<br />

la demande d’un tiers (HDT) et suivis<br />

ensuite pour la plupart en sortie d’essai,<br />

6 ont été pris en charge en hospitalisation<br />

libre (HL). Pour 2 d’entre eux, il<br />

s’agissait de la 1 ère hospitalisation, pour<br />

14 d’entre eux, la 1 ère hospitalisation<br />

avait eu lieu 1à 2 ans plus tôt, pour 6<br />

d’entre eux, la 1 ère hospitalisation<br />

remontait à 3 à 7 ans plus tôt. Une<br />

mesure de protection des biens sous<br />

forme de curatelle article 512 a été<br />

mise en place pour 8 d’entre eux.<br />

La symptomatologie psychotique a<br />

été marquée par son caractère souvent<br />

très aigu au moment du début des<br />

soins :<br />

- symptomatologie clinique positive :<br />

délire souvent à thème de persécution,<br />

hallucinations, dissociation, désorganisation<br />

psychique souvent très marquée<br />

;<br />

- mais aussi symptomatologie négative<br />

pour certains : retrait, perte des<br />

investissements, désinsertion sociale,<br />

familiale, professionnelle, voire claustration<br />

;<br />

- troubles du comportement parfois<br />

sévères : crises clastiques, comportements<br />

délictueux ;<br />

- troubles de l’humeur, notamment<br />

dépression ;<br />

- insomnie ;<br />

- angoisse majeure.<br />

Le diagnostic retenu, selon les critères<br />

du DSM-IV est :<br />

- schizophrénie paranoïde : 22 patients<br />

- schizophrénie désorganisée : 1 patient<br />

- trouble schizo-affectif : 2 patients<br />

- état délirant aigu : 2 patients<br />

Les troubles de personnalité associés<br />

étaient le plus souvent :<br />

- état limite : 9<br />

- schizoïdie : 11<br />

- traits paranoïaques : 7<br />

Nom :<br />

Prénom :<br />

Adresse :<br />

Au niveau des antécédents :<br />

- personnels : 13 avaient des antécédents<br />

psychiatriques avant l’éclosion<br />

du trouble nécessitant le soin. 5 avaient<br />

des antécédents somatiques ;<br />

- familiaux : 16 patients avaient des<br />

antécédents familiaux.<br />

Addictions retrouvées :<br />

- cannabis : 27 patients<br />

- cocaïne : 4 patients<br />

- héroïne : 1 patient<br />

- ecstasy : 2 patients<br />

- LSD : 1 patient<br />

- alcool : 12 patients<br />

Traitement :<br />

25 patients parmi les 27 avaient été<br />

traités antérieurement par :<br />

- antipsychotiques classiques : 7 patients<br />

- antipsychotiques atypiques : 7 (autres<br />

que Rispéridone et Clozapine)<br />

- Rispéridone avant le traitement<br />

actuel : 10<br />

- Clozapine : 1<br />

- thymorégulateurs : 4<br />

- antidépresseurs : 7<br />

- anxiolytiques, somnifères : à peu près<br />

tous<br />

- ECT : 2<br />

Tous les patients ont été traités par Risperdal<br />

per os à dose variable de 4 à 8<br />

mg. Ce traitement a été relayé par RisperdalConsta<br />

et la 1ère injection a eu<br />

lieu avant la sortie de service, le traitement<br />

per os étant poursuivi pendant<br />

3 ou 4 semaines. Les injections suivantes<br />

ont eu lieu au CMP ou en intrahospitalier,<br />

en fonction du lieu de<br />

consultation de chaque patient et de<br />

la nécessité de maintien d’un cadre<br />

thérapeutique plus contenant (22 sont<br />

actuellement suivis au CMP et 5 en<br />

intra-hospitalier).<br />

Les posologies initiales prescrites ont<br />

évolué au cours du temps :<br />

- 25mg : 3 patients : 1 est resté à 25mg,<br />

2 sont passés à 50mg<br />

- 37,5mg : 2 patients : 1 est passé à<br />

50mg, 1 est passé à 50mg puis retour<br />

à 37,5mg<br />

- 50mg : 22 patients : 13 sont restés à<br />

50mg, 6 sont passés à 37,5mg, 3 sont<br />

passés à 25mg.<br />

Les posologies actuelles sont donc :<br />

- 25mg : 4 patients<br />

- 37,5mg : 7 patients<br />

- 50mg : 16 patients<br />

Peu de traitements sont associés (antidépresseurs,<br />

anxiolytiques). Une psychothérapie<br />

est proposée quand elle<br />

est possible. Une prise en charge en<br />

service spécialisé d’addictologie peut<br />

être aussi proposée aux patients<br />

(groupes et prises en charge individuelles).<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Les motifs de l’utilisation du RisperdalConsta<br />

les plus fréquents ont été :<br />

- la mauvaise tolérance des traitements<br />

précédents,<br />

- le manque d’efficacité générateur de<br />

rechutes,<br />

- le déni des troubles et l’opposition<br />

aux soins, particulièrement fréquents,<br />

- la mauvaise compliance est l’argument<br />

essentiel, cause de rechute et souvent<br />

de réhospitalisation.<br />

Evolution :<br />

Le traitement a généralement été bien<br />

supporté, on a repéré peu d’effets<br />

secondaires de type extra-pyramidal.<br />

Un seul patient a interrompu le traitement<br />

du fait d’effets secondaires insuffisamment<br />

contrôlés par le traitement<br />

correcteur, très peu de patients ont reçu<br />

un traitement antiparkinsonien associé.<br />

Avec le recul du temps, variant de 6<br />

mois à 3 ans, un patient a interrompu<br />

du fait d’une mauvaise tolérance neurologique,<br />

et un a rechuté sur un mode<br />

toxicomaniaque malgré un traitement,<br />

nécessitant plusieurs réhospitalisations.<br />

Resocialisation- Réhabilitation :<br />

Les mesures de réinsertion psychosociales<br />

ont été mises en place le plus<br />

souvent dès le début des soins, par le<br />

biais de la participation à des activités<br />

thérapeutiques notamment avec les<br />

psychomotriciennes, mais aussi du fait<br />

de la mise en œuvre de mesures avec<br />

l’aide des assistantes sociales. Ces<br />

mesures se sont poursuivies au-delà de<br />

l’hospitalisation, et elles se sont succédées<br />

en utilisant les différentes structures<br />

intermédiaires du service, mais<br />

aussi pour certains patients, ultérieurement,<br />

dans des structures de réinsertion<br />

extérieures au service. Certains<br />

ont ainsi pu bénéficier de formations,<br />

de reprise de travail en milieu protégé<br />

ou normal.<br />

- Centre d’activités thérapeutiques à<br />

temps partiel (CATTP) : 7 patients<br />

- Hôpital de jour intra et extra-muros<br />

(HDJ) : 3 patients<br />

- Clinique-relais : 4 patients<br />

- Formation professionnelle, mission<br />

locale : 5<br />

- Retour en famille : 3<br />

- HDJ + famille : 2<br />

- HDJ + Clinique-relais : 1<br />

- CATTP + Clinique-relais : 2<br />

- HDJ puis Centre d’aide par le travail<br />

(CAT) : 1<br />

- CATTP puis CAT : 1<br />

- Hôpital de semaine (HDS) de façon<br />

séquentielle : 1<br />

- Domicile personnel : 7<br />

- Chantiers thérapeutiques : 1<br />

- Reprise de travail : 3<br />

Discussion<br />

Je m’abonne pour : 1 an 2 ans<br />

Dans le cadre de la prise en charge de<br />

patients souffrant de pathologie psychotique<br />

associée à une addiction<br />

notamment au cannabis, le traitement<br />

Bulletin d’abonnement<br />

Le Journal de <strong>Nervure</strong> + La Revue<br />

CHÈQUE À L’ORDRE DE MAXMED à envoyer avec ce bulletin,<br />

54, boulevard de la Tour Maubourg, 75007 Paris<br />

Téléphone : 01 45 50 23 08<br />

Je souhaite recevoir une facture acquittée justifiant de mon abonnement.<br />


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

par RisperdalConsta associé à la mise<br />

en place de mesures de réinsertion<br />

psychosociale le plus tôt possible dans<br />

la prise en charge, a permis une évolution<br />

favorable pour 25 des 27<br />

patients concernés, avec un recul de :<br />

- 6 mois : 2 patients<br />

- 6 mois à 1 an : 11 patients<br />

- 1 à 2 ans : 8 patients<br />

-> 2 ans : 4 patients<br />

Il semble que l’action du Risperdal<br />

Consta soit liée :<br />

- à son efficacité sur les symptômes<br />

positifs, mais aussi négatifs, et sur les<br />

troubles de l’humeur ;<br />

- mais aussi sur les symptômes de<br />

désorganisation conceptuelle particulièrement<br />

présents dans cette population,<br />

peut-être en rapport avec l’action<br />

déjà signalée sur les dimensions<br />

d’hostilité-excitation, d’anxiété-tension<br />

et le contrôle des impulsions (3) ;<br />

- sur certains troubles de la personnalité,<br />

notamment paranoïaques.<br />

On peut proposer de rapporter cette<br />

efficacité clinique au profil pharmacologique<br />

particulier de la molécule<br />

et à son activité très spécifique déjà<br />

discutée dans des publications précédentes<br />

:<br />

- par rapport à la schizophrénie : intérêt<br />

du blocage des récepteurs sérotoninergiques<br />

5HT2A et dopaminergiques<br />

D2 (3) ;<br />

- par rapport aux addictions : rôle par<br />

rapport aux récepteurs D4 et<br />

5HT2c (4).<br />

La dose la plus fréquemment utilisée<br />

est celle de 50 mg et elle est de plus<br />

en plus prescrite dès la 1 ère injection.<br />

Il semble que la nécessité de renouvellement<br />

de l’injection toutes les 2<br />

semaines, avec consultation par le psychiatre<br />

référent et suivi infirmier à<br />

l’occasion de l’injection, participe à<br />

l’alliance thérapeutique et finalement<br />

favorise la compliance ; cela pourrait<br />

expliquer le faible taux d’interruption<br />

(2 patients sur 27) et de rechute (1<br />

patient parmi les 2 pré-cités).<br />

L’importance du programme de réhabilitation<br />

sous forme de projet thérapeutique<br />

initié dès le début des soins<br />

et adapté à chaque patient en fonction<br />

de sa pathologie mais aussi de sa réactivité<br />

et de ses capacités, est bien enten-<br />

du également destinée à prévenir les<br />

rechutes, à intervenir sur la qualité de<br />

vie et le devenir à long terme (5).<br />

Conclusion<br />

Au total, 27 patients présentant des<br />

troubles psychotiques associés à une<br />

addiction parmi 60 patients psychotiques<br />

traités par RisperdalConsta ont<br />

présenté une évolution globalement<br />

favorable (2 seulement ont interrompu<br />

leurs soins), et ont pu bénéficier<br />

de mesures de réinsertion mais aussi<br />

d’un suivi au long cours qui semble<br />

devoir être rapporté à l’activité clinique<br />

liée au profil pharmacologique<br />

du RisperdalConsta, mais aussi à l’alliance<br />

que ses conditions d’utilisation<br />

favorisent. ■<br />

A.Viala, N.Benathzmane,<br />

F.Cornic et M.N.Vacheron<br />

Bibliographie<br />

Quand la sexualité devient délit<br />

Colloque organisé par l’association ANTHEA<br />

à Marseille les 19 et 20 Mars 2007<br />

(1) RUBIO G., MARTINEZ I., PONCE<br />

G., JIMENEZ-ARRIERO M.A. , LOPEZ-<br />

MUNOZ F., ALAMO C., Long-acting<br />

injectable Risperidone versus Zuclopenthixol<br />

in the treatment of schizophrenia with<br />

substance abuse comorbidity, Can. J.<br />

Psychiatry 2006, 51, 531-9.<br />

(2) KREBS M.O., GOLDBERGER C.,<br />

DERVAUX A., Cannabis use and Schizophrenia,<br />

Am. J. Psychiatry 2005, 162, 2,<br />

401-2.<br />

(3) MARDER S.R., DAVIS J.M.,<br />

CHOUINARD G., The effects of risperidone<br />

on the five dimensions of<br />

schizophrenia derived by factor analysis:<br />

combined results of the North American<br />

trials, J. Clin. Psychiatry 1997, 58, 538-<br />

546.<br />

(4) VIALA A., AYMARD N., VACHE-<br />

RON M.N., CAROLI F., Risperidone in<br />

treatment of substance abusing schizophrenic<br />

patients: two cases reports with<br />

pharmacoclinical follow-up over one year,<br />

Int. J. Neuropsychopharmacol. 2005, 5,<br />

1, 180-181.<br />

(5) LIEBERMAN J.A., STROUP T.S.,<br />

MCEVOY J.P., SWARTZ M.S., ROSEN-<br />

HECK R.A., PERKINS D.O., Effectivenesss<br />

of antipsychotic drugs in patients<br />

with chronic schizophrenia, N. Engl. J.<br />

Med. 2005, 353, 1209-23.nnnnnnnnnn<br />

Il n’est plus à démontrer combien les abus sexuels, qu’ils soient intra ou extra-familiaux,<br />

qu’ils concernent les enfants mais aussi les adultes, ont des répercussions<br />

psychiques, graves le plus souvent.<br />

La prise en compte par la Justice de tels actes s’approche parfois de son idéal :<br />

levée de la loi du silence, clarification des places de chacun, déculpabilisation<br />

et reconstruction pour la victime, prise de conscience et élaboration pour le<br />

coupable. Punition, prévention dans leurs aspects structurants.<br />

Toutefois, on ne peut qu’être stupéfait devant l’ampleur de la place prise par<br />

ces affaires au sein de nos sociétés : surenchère médiatique, intérêt des politiques,<br />

développement des mesures judiciaires et sanitaires...<br />

Alors, une des questions serait : y-a-t-il plus d’abus sexuels de nos jours, ou<br />

bien sont-ils plus dénoncés, ou encore est-on plus prompt à user de cette étiquette<br />

?<br />

Les professionnels intervenant en prison (mais aussi au dehors) savent à quel<br />

point l’amalgame est grand et dévastateur : le vocable de « délinquant sexuel »<br />

recouvre des personnalités très diverses allant du « prédateur » aux prises avec<br />

ses pulsions incontrôlables et une empathie au plus bas, au père incestueux<br />

sous l’emprise amoureuse ; en passant par le grand père aux caresses déplacées<br />

au comble de la culpabilité, le jeune embarqué par la loi du groupe, ou<br />

encore le psychotique qui agit par son délire.<br />

Les grandes classifications nosographiques n’empêchent pas la considération<br />

au cas par cas qui reste la seule démarche clinique et rend singulier chaque<br />

acte.<br />

Que se passe-t-il pour que la délinquance sexuelle soit à ce point au premier<br />

plan en matière de dangerosité dans une société qui, par ailleurs, prône la liberté,<br />

en particulier sexuelle et présente par elle même bien des dangers ?<br />

Peut-être est-il temps de nous souvenir que pour la psychanalyse la sexualité<br />

est toujours complexe et dérangeante, voir traumatique, que les frontières<br />

entre le normal et le pathologiques sont loin d’être aussi « sécuritairement »<br />

définies qu’on pourrait le souhaiter ? Que la déviance se définit toujours par<br />

rapport à des normes dont on sait qu’elles sont contingentes d’une époque<br />

et d’une société données ?<br />

Ce colloque aimerait questionner cette place accordée à l’auteur d’infraction<br />

sexuelle par les professionnels du soin et de la justice, les politiques et les<br />

médias mais aussi le simple citoyen.<br />

Association ANTHEA, 7 Place aux Herbes - BP 219 - 83006 Draguignan Cedex<br />

Tél. 04 94 68 98 48 - Fax. 04 94 68 28 74 anthea@club-internet.fr<br />

Les neuroleptiques classiques, certes<br />

efficaces sur la dimension positive<br />

de la schizophrénie (délire, agitation,<br />

trouble du comportement) se sont avérés<br />

peu capables de restaurer les capacités<br />

cognitives mises à mal tout en<br />

induisant de nombreux effets secondaires<br />

invalidants. Le développement<br />

d’antipsychotiques dits de « seconde<br />

génération » a permis d’appréhender la<br />

maladie sous un angle prometteur et il<br />

semble exister une voie menant au<br />

rétablissement. Outre leur efficacité largement<br />

comparable, voire supérieure,<br />

aux neuroleptiques classiques, ils possèdent<br />

un meilleur profil de tolérance<br />

neurologique.<br />

L’absence de phénomène délirant couplée<br />

à une stabilisation durable des<br />

fonctions supérieures et émotionnelles,<br />

sans parler évidemment de guérison,<br />

a conduit tout de même certains cliniciens<br />

à parler de rémission. Du latin<br />

remissio signifiant pause, la rémission est<br />

classiquement définie comme la diminution<br />

temporaire d’un mal par une<br />

maîtrise des principaux symptômes. Le<br />

concept de rémission est scientifiquement<br />

validé en cancérologie mais aussi<br />

en psychiatrie dans la dépression ou<br />

l’anxiété généralisée.<br />

L’évolution naturelle, ou sous traitement,<br />

de la schizophrénie, est variable<br />

d’un individu à l’autre. A quel moment<br />

est-il légitime de parler de rémission ?<br />

En 2005, un groupe de travail dirigé<br />

par Nancy Andreasen et composé d’experts<br />

(Weinberger, Kane, Carpenter) a<br />

défini un certain nombre de critères<br />

indispensables au diagnostic. Huit symptômes-clés<br />

ont été extraits de la PANSS<br />

et leur niveau de sévérité doit être<br />

simultanément inférieur ou égal à trois.<br />

Les items issus de l’échelle sont les suivants<br />

: idées délirantes, contenu inhabituel<br />

de la pensée, activité hallucinatoire,<br />

désorganisation conceptuelle,<br />

maniérisme et trouble de la posture,<br />

émoussement de l’expression des émotions,<br />

repli social passif et apathie,<br />

absence de spontanéité et de fluidité<br />

dans la conversation. Si ce score minime<br />

de sévérité est maintenu au moins<br />

six mois pour chacun des huit symptômes-clés,<br />

le patient est considéré en<br />

rémission. Ainsi, la notion de « patient<br />

stable », amélioration subjective communément<br />

adoptée par les psychiatres,<br />

laisse la place à un concept objectivable<br />

par des critères pragmatiques.<br />

Au-delà des discussion sémantiques,<br />

les échelles de diagnostic de rémission<br />

mises à notre disposition permettent<br />

de mesurer, plus précisément, les effets<br />

des traitement médicamenteux et des<br />

interventions psychosociales sur le cours<br />

de la maladie. Elles nous conduisent,<br />

par ailleurs, vers une nouvelle approche<br />

psychopathologique de la psychose.<br />

Parvenir à freiner, voire à stopper le<br />

processus pathogène en cours implique<br />

une relecture de la physiopathologie<br />

de la schizophrénie. L’évolution classique<br />

déficitaire, conception purement<br />

kraepelinienne de la maladie disparaît<br />

au profit d’une description plus optimiste<br />

telle qu’elle a été décrite jadis<br />

par Bleuler.<br />

C’est toute la dimension du soin aux<br />

schizophrènes que l’on bouscule. Quels<br />

sont nos objectifs thérapeutiques ?<br />

Atteindre un niveau de stabilité suffitil<br />

à satisfaire les exigences du patient<br />

et de sa famille ? Viser la rémission,<br />

c’est améliorer la qualité de vie et le<br />

fonctionnement social de nos patients,<br />

à la recherche d’un réel mieux-être<br />

synonyme d’autonomie. Viser la rémission,<br />

c’est faire un pari sur l’avenir où la<br />

maîtrise de la maladie devient un objectif<br />

accessible.<br />

La première Biennale Janssen-Cilag en<br />

Psychiatrie (2-4 février 2007) consa-<br />

crée très largement à la rémission fut<br />

l’occasion de synthétiser les avancées<br />

cliniques et thérapeutiques dans ce<br />

domaine. « La rémission contribue à<br />

faire évoluer les mentalités et le regard<br />

que nous portons sur la schizophrénie »<br />

affirme Nancy Andreasen. Selon elle,<br />

un tel concept doit être réaliste et<br />

mesurable par des outils appropriés<br />

susceptibles d’évoluer à long terme.<br />

Lors de l’élaboration de la grille de diagnostic<br />

évoquée en introduction, trois<br />

domaines ont été explorés : les activités<br />

cognitives, le fonctionnement psycho-social<br />

et, surtout, la symptomatologie<br />

clinique sur laquelle le groupe de<br />

consensus a finalement concentré son<br />

attention. L’activité psychotique, la<br />

désorganisation mentale et la symptomatologie<br />

négative ont fourni les huit<br />

critères de diagnostic. Dans une étude<br />

concernant 293 patients suivis depuis<br />

15 ans, Nancy Andreasen diagnostique<br />

17% de patients en rémission face à<br />

19% de non-répondeurs (2). Ce qui a<br />

différencié, probablement, le potentiel<br />

évolutif de ces deux cohortes appartient<br />

au registre de l’adaptation sociale :<br />

l’intensité des relations familiales, la<br />

qualité de l’entourage, la valorisation<br />

professionnelle, la diversité des loisirs<br />

sont autant de facteurs favorables. L’âge<br />

de début, l’état pré-morbide et la sévérité<br />

des symptômes négatifs influencent<br />

eux-aussi très nettement la capacité<br />

de rémission. D’un point de vue neuroanatomique,<br />

les mesures des volumes<br />

cérébraux confirment l’existence d’un<br />

effet neuroprotecteur d’origine encore<br />

inconnue chez les patients en rémission<br />

dont la perte en tissu cérébral est<br />

statistiquement inférieure. « C’est tout le<br />

challenge des prochaines années » s’enthousiasme<br />

Nancy Andreasen dont la<br />

curiosité s’affiche sans limite : « découvrir<br />

quels sont les facteurs neuroprotecteurs<br />

et développer des critères de mesure<br />

des effets des antipsychotiques sur le<br />

fonctionnement psychosocial et la qualité<br />

de vie sont mes priorités ». Ces questions<br />

ont été discutées lors d’un atelier<br />

conduit par le Docteur François Caroli,<br />

Chef de Service au CHS Sainte-Anne<br />

et animé par le Docteur Marie-Noëlle<br />

Vacheron. Les orateurs ont notamment<br />

insisté sur la déperdition cognitive liée<br />

à la répétition des rechutes et à la<br />

nécessité d’information des risques<br />

d’une mauvaise observance du traitement<br />

neuroleptique. Traiter l’aigu pour<br />

préserver l’avenir. En effet, l’inobservance<br />

croît de 35% à 6 semaines de<br />

traitement à 75% à 2 ans. La non-compliance<br />

médicamenteuse est un phénomène<br />

subtil et d’origine multifactorielle.<br />

Certaines explications émergent<br />

tout de même : la complexité de la<br />

prise, les effets secondaires délétères<br />

et parfois stigmatisants, l’isolement social<br />

et affectif, la sévérité de la schizophrénie,<br />

l'étendue des troubles cognitifs, les<br />

addictions associées, la recherche d’un<br />

contrôle personnel de la maladie, les<br />

relations médécin-malade, les changements<br />

d’équipe... sont autant de raisons<br />

à un arrêt du traitement. Les NAP<br />

(neuroleptiques à action prolongée)<br />

constituent une alternative séduisante<br />

mais ils ne sont pourtant prescrits que<br />

chez moins de 20% des patients à travers<br />

le monde. Dans une étude effectuée<br />

en 2001 auprès de 6000 malades,<br />

Adams (1) constate une importante<br />

diminution du taux d’attrition. Schooler<br />

(7) en 2003 enregistre un taux de<br />

rechute à un an de 42% sous traitement<br />

per-os alors qu’il diminue à 27%<br />

pour les patients sous NAP. Malgré les<br />

contraintes et le caractère parfois stigmatisant<br />

de l’injection, 60% des schizophrènes<br />

ont une préférence pour<br />

cette forme galénique. Ainsi, les APAP<br />

(antipsychotiques à action prolongée)<br />

ne devraient plus être réservés à la<br />

THÉRAPEUTIQUE ■ 19<br />

La rémission : une évolution<br />

possible de la schizophrénie<br />

deuxième ou à la troisième rechute<br />

mais être aussi administrés à de jeunes<br />

candidats nouvellement diagnostiqués.<br />

La première étape vers la rémission<br />

implique de la part de nos patients une<br />

meilleure conscience morbide traduite<br />

par une vision lucide de la maladie.<br />

Un antipsychotique à action prolongée<br />

ne doit pas être considéré comme une<br />

stratégie stigmatisante mais comme un<br />

outil de soin efficace à long terme.<br />

Le Professeur Robin Emsley est Président<br />

du département de Psychiatrie à<br />

l’Université Stellenbosch à Cape Town<br />

en Afrique du Sud. Ses recherches sont<br />

principalement axées sur les aspects<br />

cliniques et psychopharmacologiques<br />

de la schizophrénie. Il s’est attelé plus<br />

particulièrement à examiner l’incidence<br />

et la nature des facteurs de rechute.<br />

Selon lui, 82% des patients vont rechuter<br />

dans les 5 ans qui suivent le premier<br />

épisode, récidive aux conséquences<br />

familiales, professionnelles et<br />

surtout cognitives extrêmement péjoratives.<br />

A chaque décompensation, c’est<br />

une partie des capacités fonctionnelles<br />

qui s’érode. Le facteur prédictif le plus<br />

important d’une telle situation est à<br />

rechercher dans une prise irrégulière<br />

des traitements médicamenteux. « Ne<br />

laissons plus la répétition des récidives<br />

faire prendre conscience au patient de la<br />

nécessité d’un traitement retard stabilisant<br />

mais persuadons-le, dès le premier épisode,<br />

de son intérêt et de son efficacité »<br />

propose le Professeur Emsley. Il étaye<br />

son exposé par les résultats d’une<br />

étude (3) conduite sur douze mois comparant,<br />

lors d’un premier épisode psychotique,<br />

l’efficacité du Risperdal-<br />

Consta ® LP versus Risperdal ® per os.<br />

Le taux de maintien à un an est de<br />

76% pour la forme injectable face à<br />

53% pour la forme orale. Toutes les<br />

dimensions de la PANSS (positive,<br />

négative, désorganisation) sont en<br />

faveur de l’APAP qui permet d’atteindre<br />

un taux de rémission, à un an,<br />

de 50% selon les critères d’Andreasen.<br />

Ces données sont confirmées par la<br />

revue de la littérature effectuée par le<br />

Professeur Pierre-Michel Llorca de l’Université<br />

d’Auvergne à Clermont-Ferrand<br />

: dans les études Kujawa<br />

(n=316) (5), Kissling (n=715) (4) et Lasser<br />

(n=578) (6), le taux moyen de rémission<br />

après un an de traitement par RisperdalConsta<br />

® LP est en moyenne de<br />

40%. Dans ces populations, plusieurs<br />

déterminants cliniques semblent prédictifs<br />

de la rémission chez les schizophrènes<br />

: le fonctionnement global<br />

avant l’épisode, l’intensité de la symptomatologie<br />

initiale et les capacités<br />

d’insight. Le sexe influe, lui aussi, sur<br />

l’avenir : les femmes bénéficient de<br />

meilleures dispositions pour répondre<br />

31 ème Festival<br />

International Ciné-<br />

Vidéo-Psy de Lorquin<br />

Du 12 au 14 juin 2007<br />

Le 31ème Festival sera, cette année<br />

encore, par l’intermédiaire des<br />

films les plus récents, un lieu de formation<br />

unique où se montre l’actualité<br />

de nos disciplines professionnelles<br />

qui concourent au vaste champ<br />

de la santé mentale.<br />

Des expositions, du théâtre, de la<br />

musique seront au rendez-vous pour<br />

créer la convivialité nécessaire à la<br />

rencontre et au dialogue.<br />

Renseignements et inscriptions :<br />

Association Festival Psy, 5 rue du<br />

Général De Gaulle, 57990 Lorquin. Tél. :<br />

03 87 23 14 12. Fax : 03 87 23 15 84.<br />

www.cnasm.prod.fr


20<br />

■ THÉRAPEUTIQUE<br />

à leurs besoins essentiels et parviennent<br />

ainsi à évoluer plus favorablement.<br />

La disparition constatée des perturbations<br />

thymiques, dont les idées<br />

suicidaires, peut être mise en corrélation<br />

avec l’amélioration de la qualité de vie.<br />

Comment, en effet, gérer ce changement<br />

d’état ? « Pour le patient, c’est le<br />

retour dans une vie que la maladie a<br />

transformée et dont il a été en quelque<br />

sorte absent, en tant que lui-même. Comment<br />

réinvestir tant de choses perdues<br />

ou métamorphosées ? », s’interroge le<br />

Professeur Jean-Louis Terra du CHS le<br />

Vinatier à Bron. « La schizophrénie a<br />

des effets comme des ronds dans l’eau :<br />

elle touche le corps, la vie psychique, la<br />

relation à soi, les relations duelles, les<br />

relations avec l’entourage, les relations<br />

avec la société, les valeurs de référence<br />

». Il est important de comprendre<br />

que les personnes qui vivent avec un<br />

handicap ne sont pas réhabilitées au<br />

sens où une voiture est réglée ou une<br />

télévision est réparée. Ces personnes<br />

ne sont pas les cibles passives de la<br />

réhabilitation. Au contraire, au fur et<br />

à mesure de leur rétablissement, elles<br />

font elles-mêmes l’expérience d’une<br />

image de soi et d’une motivation nouvelles,<br />

au sein et au-delà du handicap.<br />

Selon J-L. Terra, « être acteur de la rémission<br />

nous mobilise profondément dans<br />

de multiples dimensions. Nous avons de<br />

nombreux deuils à faire : celui de la certitude<br />

de la maladie, de la régression et de<br />

la dépendance du patient. Nous devons<br />

affronter plus côte à côte que face à face<br />

avec le patient, les réussites, les limites de<br />

la rémission et de la réhabilitation ».<br />

Bien comprendre la rémission passe<br />

par un meilleur diagnostic. Toute la<br />

difficulté est là : comment parler de ce<br />

stade de la maladie du schizophrène<br />

quand ce qui le décrit habituellement a<br />

disparu. Le groupe de travail d’experts<br />

français FROGS (Functional Remission<br />

Observatory Group in Schizophrenia)<br />

propose le développement d’une échelle<br />

multi-axiale, en hétéro-évaluation, et<br />

tenant compte du niveau de fonctionnement<br />

initial du sujet. Le Professeur<br />

Philip Gorwood du CHU Louis Mourier,<br />

membre du comité scientifique,<br />

exprime de nombreuses réserves quant<br />

à l’utilisation des différents outils déjà<br />

existants d’évaluation du fonctionnement<br />

social et de mesure de la qualité<br />

de vie. Certes ces mesures sont proches<br />

de notre niveau d’attente mais elles<br />

présentent de nombreux biais du fait de<br />

la forte hétérogénéité du milieu de vie<br />

des patients, du manque de considération<br />

de leur potentiel d’aptitude et<br />

de l’intrication majeure avec l’évaluation<br />

du niveau de symptômes résiduels. Progressivement<br />

s’est construit une grille<br />

composée d’items opérationnels,<br />

consensuels, pratiques, atteignables et<br />

mesurables. Cinq domaines sont<br />

balayés par le questionnaire : vie quotidienne<br />

(hygiène, alimentation,<br />

argent…), vie relationnelle (famille,<br />

amis…), santé et traitement, activités<br />

et qualité de l’adaptation. L’originalité<br />

de ce questionnaire consiste à ne pas<br />

tenir compte de la psychopathologie.<br />

De plus, les informations sont recueillies<br />

auprès du patient mais aussi de son<br />

entourage. Le mérite de ces grilles est<br />

d’inclure dans l’évaluation les facteurs<br />

La Société Française de Thérapie Familiale Psychanalytique annonce son<br />

6 e COLLOQUE :<br />

LA RECONNAISSANCE DANS LES LIENS DE FAMILLE<br />

23 et 24 juin 2007 à l’Espace des Diaconesses,<br />

18 rue Sergent Bouchat, 75012 Paris<br />

Avec : F. André-Fustier, F. Baruch-Alberto, M.-Y. Barraband, H.-P. Bass, A.<br />

Bauleo, A.-M. Blanchard, F. Boudou-Orliac, A. Carel, F. Cattarossi, P. Cuynet,<br />

E. Darchis, G. Decherf, Ch. Diamante, M. Drevon, J.-P. Dumont, R. Durastante,<br />

A. Eiguer, I. Gambini, E. Grange, E. Granjon, B. Guéry, E. Haulé-<br />

Taffo, R. Jaitin, Ch. Joubert, R. Kaës, A. Lafage, C. Leprince, A. Loncan, M.<br />

Mercier, F. et G. Mevel, M.-R. Moro, H. Popper, Ph. Robert, B. Savin, R. Sefcick,<br />

S. Tisseron, A. Yahyaoui, etc.<br />

La famille est traversée par des crises et des mésententes liées à la difficulté<br />

que ses liens trouvent à s’épanouir. Ces derniers sont sous-tendus par des affects<br />

passionnels et par le caractère incertain de l’unité de la famille comme<br />

dans la fusion ou la symbiose. En fait, dans ces derniers états, l’autre est reconnu<br />

avec peine dans sa singularité. Il est vécu comme un inconnu bien<br />

qu’il soit réclamé sans arrêt et peut-être pour cette même raison. Il est l’objet<br />

de projections ou de manipulations. Lorsque la fiabilité des liens fait défaut,<br />

l’humiliation d’autrui n’est pas exceptionnelle. Sont impliquées dans cet<br />

état de méconnaissance des forces groupales trans-subjectives marquées par<br />

l’omnipotence ; celle-ci alimente des mythes dont le caractère défensif crée<br />

un nouveau désordre.<br />

Mais reconnaître l’autre ne signifie pas le connaître à la perfection ; au contraire,<br />

le reconnaître c’est juste une tentative, un vœu pour identifier ses émotions,<br />

son besoin de présence, de chaleur, de soutien, d’accompagnement. L’autre<br />

conservera toujours du mystère. Il n’en est ainsi que plus attractif. Le sujet<br />

pourra se sentir solidaire de sa situation et concerné par ses peines. Il agira<br />

avec détermination quand cela sera nécessaire, à condition de ne pas nier<br />

l’autonomie de l’autre.<br />

Reconnaître l’autre prédispose celui-ci à reconnaître le sujet et, ensemble, les<br />

liens familiaux. Le défaut de reconnaissance affaiblit à la longue l’estime de<br />

soi de l’autre et de soi ; c’est l’une des raisons de l’appauvrissement du sentiment<br />

partagé de valeur de la famille, si fréquent aujourd’hui.<br />

Reconnaître autrui comme un proche n’exclut pas de le détester ni même<br />

de le trahir. Le lien familial subsistera. De même, la reconnaissance implique<br />

un combat et un conflit entre les membres de la famille. Il arrive que l’on se<br />

révolte contre une injustice ressentie, parfois sous l’effet de l’émulation dans<br />

la rivalité ou la jalousie entre frères et sœurs, par exemple.<br />

Dans la famille, un geste majeur est celui de la reconnaissance de l’enfant<br />

par le parent, qui comprend la nomination : « Tu es mon fils ». Cette reconnaissance<br />

organise psychiquement le lien de filiation. Nommer l’enfant n’est<br />

pas uniquement un acte de langage qui l’inclut dans la communauté des<br />

hommes, mais un acte qui l’intègre dans une généalogie et une parenté. Cet<br />

acte rassure et modifie, à la fois, l’enfant et le parent ; il est à l’origine du sentiment<br />

d’identité chez le premier et remodèle le sien chez le second, en même<br />

temps qu’il rappelle leur référence commune à la loi symbolique. Une large<br />

palette de troubles peut se manifester dès lors que cet acte de reconnaissance<br />

filiale fait défaut.<br />

Renseignements et inscriptions : Société Française de Thérapie Familiale Psychanalytique<br />

154 rue d’Alésia, 75014 Paris. Téléphone et Fax : 01 45 43 97 05<br />

www.psychanalyse-famille.org - sftfp@noos.fr - sftfp@free.fr<br />

Numéro de Formation Professionnelle : 11 752 477 575<br />

limitants (financiers, contraintes matérielles),<br />

les nécessités et goûts du patient,<br />

son niveau socio-culturel, ses habitudes<br />

antérieures, les mesures de protection<br />

dont il fait l’objet ou son cadre de vie.<br />

L’année 2007 sera celle de la validation<br />

de l’échelle dans une population de<br />

500 patients en rémission symptomatique.<br />

En marge du congrès, deux productions<br />

cinématographiques ont été<br />

récompensées. Charade, réalisé par<br />

Alexandre Moix d’après une histoire<br />

du Dr. Marie-Hélène Braudo, nous<br />

conte le parcours de Rémi, schizophrène<br />

d’une trentaine d’année qui,<br />

lettre après lettre (d’où le titre), reprend<br />

le chemin de la vie. Bruno Lochet y<br />

campe avec justesse un malade en voie<br />

de rémission. Apre et poignant. Affection,<br />

un film de Frédérick Vin sur un<br />

scénario du Dr. Benoît Chabot dresse<br />

le portrait d’une jeune femme schizophrène<br />

qui s’identifie aux personnages<br />

féminins des tableaux d’Edward Hopper.<br />

Esthétique, enivrant, sophistiqué,<br />

l’œuvre inspire, par d’habiles fondus–enchaînés,<br />

une sensualité mélancolique.<br />

Bref, deux courts-métrages<br />

impeccables.<br />

Longtemps, l’évolution favorable d’un<br />

patient a conduit les cliniciens à réfuter<br />

le diagnostic de schizophrénie en lien<br />

avec les représentations péjoratives que<br />

nous avons de la maladie. L’amélioration<br />

ou la guérison est contraire au profil<br />

évolutif tel qu’il est défini dans le<br />

DSM-III, la rémission complète est<br />

extrêmement rare selon le DSM-IV.<br />

Les nouveaux outils de mesure de la<br />

rémission, qu’ils soient anglo-saxons<br />

(échelle d’Andreasen) ou franco-français<br />

issus du groupe d’experts FROGS, permettent<br />

de souligner objectivement<br />

une évolution pouvant être perçue<br />

comme importante pour les patients<br />

et pour leur famille. Malgré l’absence de<br />

définition consensuelle internationale,<br />

tous s’accordent pour soutenir ce<br />

concept de rémission dans une perspective<br />

de modification du regard porté<br />

sur la pathologie schizophrénique. La<br />

rémission dans la schizophrénie est un<br />

objectif que nous devons tous rendre<br />

réaliste et accessible. A cet effet, l’administration<br />

d’un antipsychotique à<br />

action prolongée s’est avérée être une<br />

stratégie thérapeutique appropriée et<br />

performante. ■<br />

Eric HENSGEN<br />

Psychiatre, Service du Docteur C. Schaal, Centre<br />

Hospitalier, Rouffach.<br />

Bibliographie<br />

(1) ADAMS CE, FENTON MK, QURAISHI<br />

S, DAVID AS, Systematic meta-review of<br />

depot antipsychotic drugs for people with<br />

schizophrenia, Br J Psychiatry 2001, 179,<br />

290-9.<br />

(2) ANDREASEN NC, CARPENTER WT<br />

JR, KANE JM, LASSER RA, MARDER SR,<br />

WEINBERGER DR, Remission in schizophrenia:<br />

proposed criteria and rationale for<br />

consensus, Am J Psychiatry 2005, 162, 3,<br />

441-9.<br />

(3) EMSLEY R, OOSTHUIZEN P, KOEN L<br />

et al., Remission in schizophrenia: results<br />

from a 12 month analysis of long-acting risperidone<br />

in patients with first episode psychosis,<br />

Poster presentation: 5th International<br />

Conderence on Early Psychosis:<br />

International Early Psychosis Association.<br />

Bermingham, England. Oct 2006.<br />

(4) KISSLING W, LLOYD K, SACCHETTI<br />

F, BOUHOURS P, MEDORI R, LLORCA<br />

PM, Direct transition to long-acting risperidone<br />

– analysis of long-term efficacity, J Psychopharmacology<br />

2005, 19, S1, 15-21.<br />

(5) KUJAWA M et al., Poster at 13th Biennial<br />

Winter Workshop on Schizophrenia<br />

Research, Davos, Switzerland, February 4-<br />

10, 2006.<br />

(6) LASSER RA, BOSSIE CA, GHARA-<br />

BAWI GM, KANE JM, Remission in schizophrenia:<br />

Results from a 1-year study of<br />

long-acting risperidone injection, Schizophrenia<br />

Res 2005, 77, 215-27.<br />

(7) SCHOOLER NR, Relapse and rehospitalization:<br />

comparing oral and depot antipsychotics,<br />

J Clin Psychiatry 2003, 64 Suppl<br />

16, 14-7.<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007


22 ■ ANNONCES PROFESSIONNELLES<br />

N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

Pour vos annonces professionnelles<br />

contactez Madame Susie Caron au<br />

01 45 50 23 08<br />

ou par e-mail<br />

info@nervure-psy.com<br />

Le Centre Hospitalier<br />

d’Oloron (64400)<br />

recherche<br />

un médecin psychiatre<br />

attaché (30%) au Service de Médecine Polyvalente,<br />

complété par un temps partiel (40%) auprès<br />

de deux structures médico-sociales associatives pour<br />

adultes handicapés mentaux en Vallée d’Aspe.<br />

Fonctions à pourvoir au 1er juillet 2007 (départ à la<br />

retraite du seul psychiatre libéral du secteur).<br />

***<br />

Renseignements auprès du Dr. BERGES - Tél. : 05 59 39 07 12<br />

Candidature à adresser à :<br />

Direction du Centre Hospitalier d’Oloron,<br />

Avenue Fléming - 64400 Oloron-Sainte-Marie<br />

EPSM LA L ROCHE<br />

(74)<br />

OCHE-SUR-F SUR-FOR<br />

ORON ON (74)<br />

recrute<br />

un Praticien Hospitalier temps plein<br />

pour le Secteur UCSA (Maison d'Arrêt de Bonneville - 74)<br />

Cadre de vie très agréable entre lacs et montagnes.<br />

***<br />

Candidature et CV à adresser à :<br />

M. DUMOUTET, Directeur Adjoint<br />

Tél. 04 50 25 43 05<br />

La Clinique Médico-Universitaire<br />

Georges Heuyer<br />

68, rue des Grands Moulins - 75013 Paris<br />

Tél : 01 45 85 25 17<br />

recherche<br />

2 MEDECINS SPECIALISES EN PSYCHIATRIE à temps plein,<br />

1 MEDECIN SPECIALISE EN PSYCHIATRIE à temps partiel,<br />

pour travailler en service d'hospitalisation temps complet auprès de patients de 16 à<br />

25 ans, dans le cadre d'une prise en charge soins-études. Participation aux astreintes<br />

médicales.<br />

Rémunération : selon les dispositions de la Convention Collective d'Octobre 1951.<br />

CV et lettre de motivation à adresser à Mme Francine AUBRY, Directeur<br />

Renseignements complémentaires auprès du Dr Hélène LIDA-PULIK, Médecin Coordonnateur<br />

L’I.M.P ’I.M.P ST-JOSEPH<br />

ST-JOSEPH<br />

21 rue Paul-Louis Lande • 33000 BORDEAUX<br />

recherche un psychiatre quart temps,<br />

à partir d’octobre 2007,<br />

orientation analytique souhaitée<br />

Contacts : Dr J. Bénazet,<br />

05 56 92 72 36 ou 05 56 06 34 45<br />

L’ARI accompagne plus de 1000 enfants,<br />

adolescents et adultes dans ses établissements<br />

et services (ITEP, IME, EEAP, Foyers, CAT) et près<br />

de 3500 enfants suivis en CMPP, CAMSP et<br />

Hôpitaux de Jour.<br />

Notre projet consiste à promouvoir et faciliter le soutien à l’intégration de<br />

ces personnes dans le milieu social, scolaire, culturel et professionnel, en les<br />

accompagnant de la nécessaire dimension de soins. Notre souci permanent<br />

d’adaptation induit la reconnaissance de la diversité des pratiques et des<br />

modes de prises en charge ainsi que la promotion des approches plurielles.<br />

C’est pourquoi, nous privilégions les structures adaptatives, pluri-professionnelles,<br />

souples, réduites et mobiles, organisées autour de la personne.<br />

Si ce projet associatif vous intéresse et si vous aimez travailler en équipe,<br />

nous recrutons des :<br />

Médecins Psychiatres h/f Réf. MP/NV<br />

Pédopsychiatres h/f Réf. PP/NV<br />

Pédiatres h/f Réf. PE/NV<br />

Postes à temps partiel ou temps complet<br />

à pourvoir dans les Bouches du Rhône et le Vaucluse<br />

Vous travaillez dans l’ensemble de nos structures et assurez la prise en charge<br />

individuelle des enfants ou adultes et de leur famille.<br />

Vous soutenez et participez aux réflexions des équipes pluridisciplinaires,<br />

notamment autour de la construction et la mise en œuvre des projets<br />

individuels.<br />

Adressez-nous votre dossier de candidature,<br />

en précisant le type d’établissement, le lieu et le<br />

temps de travail recherchés à : Yolande OBADIA<br />

Directeur Général - 26 rue Saint Sébastien<br />

13006 MARSEILLE<br />

ou par mail à la Direction des Ressources<br />

Humaines : f-decourbeville@ari.asso.fr<br />

www.ari.asso.fr<br />

Partagez notre projet médico-social<br />

dans le Sud de la France<br />

URGENT<br />

Association Régionale<br />

pour l'Intégration<br />

LE CENTRE HOSPITALIER SPÉCIALISÉ<br />

DE SARREGUEMINES (MOSELLE)<br />

Recherche<br />

1 PRATICIEN CONTRACTUEL<br />

Secteur Psychiatrie Adulte (57G11)<br />

Rémunération 4ème échelon majoré de 10%<br />

Possibilité de logement<br />

2 à 3 gardes mensuelles rémunérées comme telles<br />

Adresser candidature + CV + copies<br />

du Doctorat en Médecine et du DES de psychiatrie à :<br />

Monsieur le Directeur du<br />

Centre Hospitalier Spécialisé • BP 10629<br />

57206 Sarreguemines Cedex<br />

Association Hospitalière de Franche-Comté<br />

www.ahfc.asso.fr<br />

Etablissement Privé participant au Service Public Hospitalier, recrute<br />

pour le site de Montbéliard - Psychiatrie Infanto-Juvénile<br />

2 Psychiatres à temps plein (h/f)<br />

postes disponibles à pourvoir dans les meilleurs délais.<br />

Conditions statutaires : CCN 1951 (FEHAP) sous CDI<br />

ou Praticien Hospitalier en détachement.<br />

Pour tout renseignement sur ces postes, contacter :<br />

Monsieur le docteur Ph. BOUNIOL, Médecin Chef, tél. 03 81 37 71 20<br />

Envoyer lettre + cv + photo à AHFC - Direction des Affaires Médicales<br />

CHS de Saint Rémy et Nord Franche-Comté, 70160 Saint Rémy.<br />

Tél. 03 84 97 24 14 Fax 03 84 68 25 09<br />

sylvie.lemarquis@ahfc.fr prbcom.fr<br />

LE CENTRE<br />

HOSPITALIER<br />

UNIVERSITAIRE<br />

DE NANTES (44)<br />

Recrute<br />

Psychiatre<br />

à<br />

Temps Plein<br />

Pour tout renseignement<br />

s’adresser à :<br />

Monsieur le Docteur<br />

DELVIGNE<br />

Chef de Service de<br />

Psychiatrie III<br />

Tél. : 02 40 84 63 15<br />

Monsieur le Docteur<br />

BELONCLE<br />

Directeur du<br />

Pôle Psychiatrie<br />

Tél. : 02 40 84 61 52<br />

***<br />

Adresser CV et candidature à :<br />

Monsieur le Directeur des<br />

Affaires Médicales<br />

Centre Hospitalier<br />

Universitaire de Nantes<br />

Immeuble Deurbroucq<br />

5, allée de l’Ile Gloriette<br />

44093 Nantes Cedex 01<br />

Secteur 16 de<br />

Psychiatrie Adulte<br />

Recrute<br />

PH temps<br />

plein<br />

Pour travail en<br />

EXTRA -<br />

HOSPITALIER<br />

Contacter Mme le<br />

Dr Roche-Rabreau<br />

01.64.30.72.08


N°1 - TOME XX - FÉVRIER 2007<br />

REVUES<br />

Former à l’accompagnement<br />

des personnes handicapées<br />

Marcel Nuss<br />

Préface de Patrick Gohet et Jean-<br />

Claude Cunin<br />

Dunod, 23 €<br />

Marcel Nuss, qui est Président de la Coordination<br />

Handicap et Autonomie, a<br />

été chargé par le ministère, en 2003,<br />

d’une mission de médiation et de communication,<br />

il en a démissionné et critique<br />

actuellement les insuffisances de<br />

la nouvelle loi de février 2005.<br />

Les enjeux que représentent les nouveaux<br />

modes d’accompagnement, induits<br />

et encouragés par cette loi, ainsi<br />

que les répercussions inévitables que<br />

vont avoir sur la formation des accompagnants<br />

ces nouveaux modes<br />

d’accompagnement, ne sont pas négligeables.<br />

L’auteur pense qu’on ne pourra<br />

pas échapper, par exemple, à une revalorisation<br />

des salaires, sauf à vouloir<br />

se contenter d’un accompagnement au<br />

rabais et, par conséquent, prendre le<br />

risque d’avaliser de façon consciente,<br />

donc cynique, des maltraitances prégnantes<br />

et récurrentes. En ce qui concerne<br />

la réforme des formations, la quasitotalité<br />

des personnes consultées esti-<br />

ment qu’une remise à plat du système<br />

est primordiale. Elles sont pour l’instauration<br />

d’un tronc commun englobant<br />

les métiers de l’accompagnement<br />

des personnes. Ce qui signifie qu’elles<br />

adhèrent à l’idée d’une formation de<br />

base unique pour ces professionnels<br />

de l’accompagnement, débouchant<br />

sur des spécialisations optionnelles.<br />

Elus des villes et santé<br />

mentale<br />

Rhizome n°24, Bulletin national santé<br />

mentale et précarité<br />

Jean Furtos et Christian Laval n’imaginaient<br />

pas, lorsqu’ils ont pensé le thème<br />

de ce numéro, il y a 2 ans, qu’il sortirait<br />

dans un agenda politique bouleversant<br />

où les maires se verraient proposer<br />

une extension de leurs pouvoirs<br />

de police pour faire basculer une mesure<br />

thérapeutique, l’hospitalisation d’office,<br />

en mesure de lutte contre la délinquance.<br />

C’est dans ce contexte que<br />

l’interview du Ministre délégué aux collectivités<br />

territoriales appelle à un débat<br />

où les éléments du soin, du prendre<br />

soin et de la tranquillité publique doivent<br />

être jaugés sans précipitation. Il<br />

s’agissait, et il s’agit toujours de publiciser<br />

le rôle croissant des élus municipaux<br />

dans des pratiques de santé mentale<br />

multiples ; l’une d’elles est la possibilité<br />

23<br />

légale d’ordonner des hospitalisations<br />

d’office en cas de troubles imminents<br />

pour la sûreté des personnes. Une étude<br />

DIV-ONSMP (2003-2006) permet d’aborder<br />

ces pratiques avec une matière substantielle.<br />

Pour les professionnels de la<br />

santé mentale, il n’est pas toujours facile<br />

de reconnaître le rôle des élu(e)s locaux<br />

dont la mission ouvre une perspective<br />

d’emblée politique où la question<br />

du comment vivre ensemble se pose<br />

avec acuité. L’histoire rappelle pourtant<br />

qu’en France, pays très centralisé, la<br />

Santé Publique s’est vraiment développée<br />

dans les villes qui l’ont concrètement<br />

voulu, et il semble qu’il en soit de<br />

même pour la Santé Mentale. Certes,<br />

comme tous les élus, les maires sont<br />

souvent contraints par le calendrier électoral<br />

; mais dans le même temps, ils se<br />

trouvent dans une proximité généraliste<br />

avec leurs concitoyens et avec les<br />

professionnels. Percutés par les paroles,<br />

les cris et les silences des uns et des<br />

autres, ils gardent la capacité d’initier<br />

des actions à visée individuelle et collective<br />

dont on lira quelques développements<br />

dans ce numéro.<br />

RHIZOME est téléchargeable sur le Web: www.chlevinatier.fr/orspere<br />

Un singulier pluriel<br />

La psychanalyse à l’épreuve du<br />

groupe<br />

René Kaës<br />

Dunod, 26 €<br />

Ce livre détaille l’approche psychanalytique<br />

des groupes. René Kaës montre<br />

comment le sujet singulier est aussi un<br />

sujet « pluriel » dont l’inconscient est<br />

tenu et façonné dans les liens intersubjectifs,<br />

dans les alliances inconscientes,<br />

dans les espaces psychiques<br />

partagés avec d’autres.<br />

Directeur de la rédaction :<br />

Gérard Massé<br />

Rédacteur en chef : François Caroli<br />

Comité de rédaction : Centre Hospitalier<br />

Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75014 Paris.<br />

Tél. 01 45 65 83 09.<br />

Botbol M., Carrière Ph., Dalle B., Goutal M.,<br />

Guedj M.-J., Jonas C., Lascar Ph., Martin A.,<br />

Paradas Ch., Sarfati Y., Spadone C.,<br />

Tribolet S., Weill M.<br />

Comité scientifique : Bailly-Salin P.<br />

(Paris), Besançon G. (Nantes), Bourgeois<br />

M. (Bordeaux), Buisson G. (Paris), Caillard<br />

V. (Caen), Chabannes J.-P. (Grenoble),<br />

Chaigneau H. (Paris), Christoforov B.<br />

(Paris), Colonna L. (Rouen), Cornillot P.<br />

(Paris), Dufour H. (Genève), Dugas M.<br />

(Paris), Féline A. (Paris), Ginestet D.<br />

(Paris), Guelfi J.-D. (Paris), Guyotat J.<br />

(Lyon), Hochmann J. (Lyon), Koupernik<br />

C. (Paris), Lambert P. (Chambéry), Loo H.<br />

(Paris), Marcelli D. (Poitiers), Marie-<br />

Cardine M. (Lyon), Mises R. (Paris),<br />

Pequignot H. (Paris), Plantade A. (Paris),<br />

Ropert R. (Paris), Samuel-Lajeunesse B.<br />

(Paris), Scotto J.-C. (Marseille), Sechter D.<br />

(Lille), Singer L. (Strasbourg), Viallard A.<br />

(Paris), Zarifian E. (Caen).<br />

Comité francophone : Anseau M.<br />

(Belgique), Aubut J. (Canada), Bakiri M.-A.<br />

(Algérie), Cassan Ph. (Canada), Douki S.<br />

(Tunis), Held T. (Allemagne), Lalonde P.<br />

(Canada), Moussaoui D. (Maroc), Romila A.<br />

(Roumanie), Simon Y.-F. (Belgique), Stip E.<br />

(Canada), Touari M. (Algérie).<br />

Publicité<br />

médical<br />

SUPPORTER<br />

promotion<br />

Renata Laska - Susie Caron,<br />

54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris.<br />

Tél. 01 45 50 23 08.<br />

Télécopie : 01 45 55 60 80<br />

E-mail : info@nervure-psy.com<br />

Edité par Maxmed<br />

S.A. au capital de 40 000 €<br />

54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris<br />

Maquette : Maëval. Imprimerie Fabrègue<br />

Directeur de la Publication :<br />

G. Massé<br />

www.nervure-psy.com

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