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TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

DÉFINITION, CLASSIFICATION<br />

ET ASPECTS ÉPIDÉMIOLOGIQUES<br />

Définition, classification<br />

Pathologies auto-immunes<br />

Aspects épidémiologiques, diagnostiques<br />

et principes de traitement<br />

Pr Marc Michel, Dr Nicolas Limal<br />

Service de médecine interne, centre de référence pour les cytopénies auto-immunes de l’adulte,<br />

CHU Henri-Mondor, 94010 Créteil Cedex<br />

marc.michel@hmn.aphp.fr<br />

Bien qu’il n’existe pas de définition universelle<br />

des maladies auto-immunes (MAI), on<br />

regroupe sous ce terme un ensemble de maladies, systémiques<br />

ou spécifiques d’organes, dont la physiopathologie fait intervenir<br />

un dérèglement du système immunitaire à l’origine d’une<br />

rupture de la tolérance au « soi » (soi = ensemble de motifs antigéniques,<br />

éléments cellulaires et/ou facteurs solubles propres à<br />

chaque individu et normalement peu ou pas immunogènes). Si<br />

l’on sait désormais qu’un faible niveau d’«auto-immunité» est<br />

physiologique et concourt au maintien même de l’homéostasie<br />

du système immunitaire, les maladies auto-immunes (MAI) ont<br />

certaines caractéristiques parmi les suivantes :<br />

— existence d'une réaction humorale et/ou cellulaire dirigée<br />

contre un ou plusieurs tissu(s)/organe(s) cible(s) à l'origine des<br />

manifestations cliniques ;<br />

— présence de lésions inflammatoires faites d’infiltrats lymphocytaires<br />

dans le(s) tissu(s) cible(s) sans cause infectieuse ou<br />

toxique retrouvée ;<br />

— présence dans le sang circulant et/ou au sein des tissus cibles<br />

d'auto-anticorps spécifiques d’organes ou non, dont certains ont<br />

un pouvoir pathogène direct ;<br />

— induction d'une maladie auto-immune expérimentale par l'administration<br />

d'un auto-antigène de l'organe cible ;<br />

— transfert possible de la maladie par transfert passif d'autoanticorps<br />

de patients (ou animaux atteints pour les modèles<br />

expérimentaux) à des sujets/animaux sains ou par allogreffe de<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008<br />

Objectifs<br />

I-00-Q000 I-8-Q116<br />

• Expliquer l’épidémiologie, les facteurs favorisants et l’évolution<br />

des principales pathologies auto-immunes d’organe et systémiques<br />

• Interpréter les anomalies biologiques les plus fréquentes observées<br />

au cours des pathologies auto-immunes<br />

• Argumenter les principes du traitement et de la surveillance au long<br />

cours d’une maladie auto-immune<br />

lymphocytes T d’animaux atteints à des animaux sains préalablement<br />

irradiés ;<br />

— possibilité de prévention et/ou guérison de la maladie autoimmune<br />

expérimentale par l'induction d'une tolérance vis-à-vis<br />

de l'antigène cible (modèle de la souris NOD pour le diabète de<br />

type 1 par exemple).<br />

Au-delà de leur définition, on distingue habituellement les MAI<br />

spécifiques d’organes des MAI systémiques (tableau 1). Si cette<br />

classification est utile et pertinente d’un point de vue clinique,<br />

elle ne reflète pas forcément les différents mécanismes physiopathologiques<br />

en cause. Certaines MAI peuvent relever d’un<br />

défaut global d’élimination (sélection négative) et/ou de l’activation<br />

anormale et de la survie de clones de cellules T ou B autoréactives<br />

(du fait par exemple d’une mutation du gène Fas). Dans<br />

de nombreux autres cas, la MAI résulte d’une réaction ciblée et<br />

aberrante vis-à-vis d’un antigène particulier, qu’il s’agisse d’un<br />

auto-antigène (exemple : récepteur à l’acétylcholine dans la myasthénie)<br />

ou d’un antigène de l’environnement (syndrome de Guillain-<br />

Barré faisant suite à une infection par Campylobacter jejuni). Si<br />

les mécanismes en cause dans les manifestations cliniques et/ou<br />

biologiques sont, au moins en partie, élucidés dans la plupart des<br />

MAI, la séquence et la nature même des événements qui surviennent<br />

en amont et qui sont à l’origine de la perte de tolérance<br />

au soi restent en revanche en grande partie méconnues.<br />

909


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Épidémiologie<br />

À l’exception des thyroïdites auto-immunes et de la poly -<br />

arthrite rhumatoïde, les MAI prises isolément sont des maladies<br />

relativement rares. Elles représentent néanmoins, lorsqu’on les<br />

regroupe, un vrai problème de santé publique. Dans les pays<br />

occidentaux à haut niveau de développement économique, les<br />

MAI concernent entre 5 et 10 % de la population générale, et<br />

représentent ainsi (si l’on exclut les accidents et les suicides) la<br />

troisième cause de morbi-mortalité après les maladies cardiovasculaires<br />

et les cancers. Indépendamment des facteurs de<br />

susceptibilité génétique, la prévalence et l’incidence des MAI<br />

peuvent néanmoins varier de façon notable en fonction des zones<br />

géographiques considérées. Si certaines MAI comme la poly -<br />

arthrite rhumatoïde (PR) sont nettement plus fréquentes dans<br />

les zones tempérées et dans le nord de l’Europe (gradient Nord-<br />

Sud), d’autres en revanche, comme le lupus systémique (LS),<br />

sont plus fréquentes dans les zones intertropicales et en Asie du<br />

Sud-Est (gradient Sud-Nord). À titre indicatif, les taux de prévalence<br />

établis ou estimés en Europe et/ou en Amérique du Nord<br />

de certaines maladies auto-immunes sont mentionnés dans le<br />

tableau 2.<br />

910<br />

I-8-Q116<br />

FACTEURS FAVORISANTS<br />

Les MAI sont des maladies multifactorielles faisant intervenir<br />

notamment des facteurs génétiques, des facteurs hormonaux et<br />

des facteurs environnementaux.<br />

Facteurs de susceptibilité génétique<br />

Pathologies auto-immunes : aspects épidémiologiques, diagnostiques et principes de traitement<br />

Parmi les différents facteurs de risque de développer une MAI,<br />

la susceptibilité génétique est de loin le plus important pour la<br />

majorité des MAI. L’importance des facteurs génétiques a été<br />

suspectée de longue date à la suite de la constatation de formes<br />

familiales dans de nombreuses MAI, avec un risque relatif de<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Cas clinique<br />

Une jeune femme de 22 ans consulte<br />

pour des douleurs des mains et des<br />

poignets associées à un gonflement des<br />

doigts évoluant depuis deux mois.<br />

Elle n’a aucun antécédent médicochirurgical<br />

ni obstétrical. Elle prend<br />

une contraception œstroprogestative<br />

par Jasmine et fume 1 paquet de cigarettes/jour.<br />

Elle signale également une<br />

éruption érythémateuse du décolleté<br />

Tableau 1<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple de cas clinique,<br />

pourrait concerner l’item « Pathologies auto-immunes ».<br />

survenue deux mois auparavant pour<br />

laquelle on lui avait prescrit des dermocorticoïdes.<br />

La prise d’AINS ne<br />

soulage que très partiellement ses<br />

douleurs.<br />

Cliniquement, il existe une polyarthrite<br />

symétrique des mains et des poignets.<br />

Biologiquement : 5 600 globules blancs<br />

dont 4 800 PNN et 600 lymphocytes,<br />

hémoglobine 11,2 g/dL, VGM 88, plaquettes<br />

156 000, CRP 14 mg/L.<br />

Classification des maladies<br />

auto-immunes*<br />

Glandes exocrines<br />

❚ syndrome de Gougerot-Sjögren<br />

Glandes endocrines<br />

❚ thyroïdite de Hashimoto<br />

❚ maladie de Basedow<br />

❚ diabète de type 1<br />

❚ maladie d'Addison<br />

Appareil neuromusculaire<br />

❚ sclérose en plaques<br />

❚ myasthénie<br />

❚ syndrome de Guillain-Barré<br />

Atteintes hématologiques<br />

❚ purpura thrombopénique<br />

immunonologique<br />

❚ anémies hémolytiques<br />

auto-immunes<br />

❚ maladie de Biermer<br />

MAI SPÉCIFIQUES D’ORGANE<br />

Atteintes hépatiques<br />

❚ cirrhose biliaire primitive<br />

❚ hépatites auto-immunes<br />

Atteintes digestives<br />

❚ maladie de Crohn<br />

❚ rectocolite hémorragique<br />

Atteintes cutanées<br />

❚ psoriasis<br />

❚ vitiligo<br />

❚ formes cutanées<br />

de lupus<br />

❚ pemphigoïde bulleuse<br />

❚ pemphigus<br />

Rhumatologiques<br />

❚ polyarthrite rhumatoïde<br />

❚ spondylarthropathies<br />

❚ rhumatisme psoriasique<br />

MAI NON SPÉCIFIQUES D’ORGANES<br />

❚ lupus systémique<br />

❚ polyarthrite rhumatoïde<br />

❚ vascularites systémiques à ANCA (anticorps anti-cytoplasme<br />

des polynucléaires neutrophiles)<br />

❚ autres connectivites : sclérodermie, dermatopolymyosites<br />

* liste non exhaustive<br />

développer la MAI considérée variant, selon les cas, de 10 à 40<br />

chez des sujets apparentés au premier degré à un sujet atteint.<br />

Le deuxième argument en faveur d’une prédisposition génétique<br />

découle des études comparant les taux de concordance entre<br />

jumeaux monozygotes et dizygotes. En effet, pour les MAI les<br />

plus fréquentes, pour lesquelles des études chez les jumeaux<br />

Quel diagnostic évoquez-vous, et sur<br />

quels arguments ?<br />

Quels autres symptômes et/ou signes<br />

cliniques compatibles avec le diagnostic<br />

évoqué recherchez-vous ?<br />

Quels examens biologiques demandezvous<br />

pour confirmer le diagnostic et<br />

compléter le bilan de la maladie ?<br />

En cas de confirmation du diagnostic,<br />

quelles mesures thérapeutiques allez-vous<br />

mettre en place ?<br />

Quelle surveillance instituez-vous ?<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

sont possibles, il a été observé que le taux de concordance<br />

(probabilité pour que deux jumeaux soient atteints de la même<br />

maladie) était significativement plus élevé entre jumeaux monozygotes<br />

qu’entre jumeaux dizygotes exposés au même environnement<br />

(tableau 3).<br />

La difficulté pour l’analyse et l’identification précise des facteurs<br />

de susceptibilité génétique tient au fait que, dans la très<br />

grande majorité des cas, les MAI ne sont pas des maladies monogéniques<br />

transmises selon un mode mendélien, mais des maladies<br />

polygéniques à mode de transmission complexe. Pour certaines<br />

MAI, comme par exemple dans le lupus systémique, la complexité<br />

est accrue par le fait qu’à la grande hétérogénéité d’expression<br />

clinique (« phénotypique ») de la maladie correspond une hétérogénéité<br />

génétique qui rend plus difficile encore l’identification<br />

de gènes de susceptibilité. Ces dernières années, des études d’envergure<br />

soit portant sur l’analyse étendue ou screening du<br />

génome à partir d’un grand nombre de formes familiales, soit<br />

réalisées à l’aide de méthodes d’analyse mises au point spécifiquement<br />

pour l’étude des maladies polygéniques ont permis<br />

d’identifier certains gènes et/ou régions génétiques de susceptibilité<br />

pour des MAI telles que la maladie de Crohn, le lupus<br />

systémique ou la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Facteurs hormonaux<br />

Dans la majorité des MAI, les femmes sont préférentiellement<br />

atteintes (sex-ratio allant de 2 à 3 femmes pour 1 homme dans<br />

la polyarthrite rhumatoïde jusqu’à 8 à 9 femmes pour 1 homme<br />

dans le lupus systémique ou le syndrome de Gougerot-Sjögren),<br />

notamment les femmes en période d’activité génitale. En outre,<br />

il a été constaté, particulièrement dans le lupus systémique, que<br />

la prise d’œstro gènes ou des situations comme la grossesse pouvaient<br />

favoriser la survenue de poussées de la maladie. L’influence<br />

délétère de facteurs hormonaux et notamment des œstrogènes<br />

a par ailleurs été bien démontrée expérimentalement dans des<br />

modèles murins de lupus.<br />

Tableau 2<br />

Exemples de taux de prévalence<br />

(par ordre décroissant) de certaines<br />

maladies auto-immunes<br />

Thyroïdite auto-immunes : . . . . . . . . . . . 1 % de la population féminine<br />

Polyarthrite rhumatoïde . . . . . . . . . . 0, 5 % de la population féminine<br />

Syndrome de Gougerot-Sjögren . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 à 5/1 000<br />

Diabète de type 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 2 à 3/1 000<br />

Maladie cœliaque . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . de 1/300 à 1/1 000<br />

Lupus systémique, sclérose en plaques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1/2 000<br />

Maladie de Crohn . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1/10 000<br />

Myasthénie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14/100 000<br />

Sclérodermie (forme cutanée diffuse) . . . . . . . . . . . . . . . . . 5/100 000<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008<br />

à retenir<br />

Les maladies auto-immunes résultent d’un ensemble<br />

de réactions aberrantes et/ou excessives du système<br />

immunitaire dirigées contre certains constituants de son<br />

propre organisme (« antigènes du soi »). Cette rupture<br />

de la tolérance au « soi » relève de mécanismes<br />

complexes impliquant une prédisposition génétique<br />

sous-jacente associée à des facteurs environnementaux<br />

et/ou hormonaux « facilitateurs ».<br />

La présence d’anticorps antinucléaires doit être<br />

interprétée à la lumière de leur titre, de leur spécificité<br />

éventuelle contre les différents constituants du noyau,<br />

et bien sûr des manifestations cliniques associées.<br />

Les atteintes viscérales des connectivites et des<br />

vascularites se traitent par l’association d’une<br />

corticothérapie initialement à forte dose et d’un<br />

immunosuppresseur. Un traitement d’entretien prolongé<br />

permet de prévenir les rechutes.<br />

La corticothérapie prolongée, les traitements<br />

immunosuppresseurs « classiques » et les biothérapies<br />

exposent à différents degrés à un risque accru d’infection,<br />

et le rapport bénéfice-risque de chaque traitement doit être<br />

apprécié au mieux en fonction du profil de chaque patient<br />

et de la MAI considérée.<br />

Facteurs environnementaux<br />

POINTS FORTS<br />

Il a été démontré que certains facteurs toxiques comme le tabac<br />

avaient un effet néfaste et potentiellement aggravant comme<br />

notamment dans les atteintes cutanées du lupus ou dans la maladie<br />

de Crohn. À l’inverse, le tabac aurait un effet « protecteur » dans<br />

la rectocolite hémorragique.<br />

D’autres facteurs physiques, tels que l’exposition aux rayonnements<br />

ultraviolets chez les patients atteints de lupus systémique,<br />

sont réputés délétères, et cette constatation a été corroborée<br />

par de nombreux travaux expérimentaux.<br />

Parmi les facteurs environnementaux, l’implication d’infections<br />

virales (virus du groupe herpès, rétrovirus endogènes, virus de<br />

l’hépatite C…) ou bactériennes (Helicobacter pylori, mycobactéries…)<br />

dans le déclenchement du processus auto-immun a été<br />

suggérée dans bon nombre de MAI, même si un lien évident n’a<br />

été que rarement démontré. Parmi les mécanismes potentiellement<br />

en cause, l’existence de motifs antigéniques communs à<br />

certains agents infectieux et à des constituants cellulaires de<br />

l’hôte (mimétisme moléculaire) peut parfois donner lieu à la production<br />

d’auto-anticorps en excès. Enfin, bien que n’étant pas à<br />

proprement parler des facteurs environnementaux, de nombreux<br />

médicaments ont été impliqués dans la survenue de manifestations<br />

auto-immunes (lupus induits, anémies hémolytiques autoimmunes<br />

post-médicamenteuses, thyroïdites…).<br />

R Q 116<br />

911


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Tableau 3<br />

912<br />

I-8-Q116<br />

ASPECTS DIAGNOSTIQUES, ANOMALIES<br />

BIOLOGIQUES<br />

Pathologies auto-immunes : aspects épidémiologiques, diagnostiques et principes de traitement<br />

Exemples de taux de concordance<br />

clinique entre jumeaux monozygotes<br />

et dizygotes au cours de certaines<br />

maladies auto-immunes<br />

MONOZYGOTES DIZYGOTES<br />

Polyarthrite rhumatoïde 12-32 % 4-9 %<br />

Lupus systémique 23-57 % 3-10 %<br />

Diabète de type 1 30-54 % 2-13 %<br />

Sclérose en plaques 9-20 % 0-4 %<br />

Maladie de Crohn 44 % 4 %<br />

Dans certains cas, le diagnostic de MAI est soit évident (exemple :<br />

diabète de type 1 survenant chez un adolescent), soit fortement<br />

suspecté d’emblée devant des manifestations cliniques très<br />

évocatrices (exemple : sclérodermie, maladie de Basedow…).<br />

Lorsque les manifestations cliniques ou biologiques (hypothyroïdie,<br />

anémie hémolytique…) ne sont pas suffisamment spécifiques<br />

pour affirmer le diagnostic, la recherche d’auto-anticorps<br />

Tableau 4<br />

MALADIE AUTO-IMMUNE AUTO-ANTICORPS<br />

est indispensable au diagnostic (LS, vascularites à ANCA, polyarthrite<br />

rhumatoïde débutante, anémie hémolytique autoimmune…).<br />

Les principales MAI pour lesquelles la recherche<br />

d’auto-anticorps a un intérêt diagnostique et le type d’auto-anticorps<br />

correspondants sont résumés dans le tableau 4.<br />

La sensibilité et la spécificité des différents auto-anticorps<br />

sont hautement variables. Si certains d’entre eux comme les anticorps<br />

antinucléaires (AAN) peuvent être observés à taux faible<br />

ou modéré chez environ 10 % des sujets sains (préférentiellement<br />

dans la population féminine et/ou chez les sujets âgés),<br />

d’autres sont au contraire très spécifiques d’une MAI donnée (anticorps<br />

anti-endomysium pour la maladie cœliaque par exemple).<br />

Pour le sous-groupe de MAI systémiques parfois encore<br />

regroupées sous le vocable de « connectivites », la recherche<br />

d’AAN est une étape clé du diag nostic. La recherche d’AAN s’effectue<br />

par un test classique d’immunofluorescence (IF) indirecte.<br />

Bien que la mise en évidence d’AAN soit en elle-même peu spécifique,<br />

il s’agit d’une technique très sensible pour le diagnostic<br />

de LS (sensibilité 95 %). Une fois la présence d’AAN à un titre<br />

significatif (titre > 1/80) confirmée, la recherche d’une ou plusieurs<br />

cibles antigéniques « spécifiques » à l’aide de techniques<br />

complémentaires est la deuxième étape clé de la démarche diagnostique.<br />

La mise en évidence (inconstante) d’une spécificité<br />

des AAN (soit contre l’ADN soit contre des antigènes nucléaires<br />

solubles) permet d’affiner le diagnostic (figure).<br />

Type d’auto-anticorps préférentiellement observés en fonction des MAI considérées*<br />

Polyarthrite rhumatoïde ❚ facteurs rhumatoïdes<br />

❚ anticorps antipeptides cycliques citrullinés (anti-CCP)<br />

Lupus systémique ❚ anticorps antinucléaires, anti-ADN natif, anti-Sm<br />

Syndrome des antiphospholipides ❚ anticorps anticardiolipides (IgG/IgM), anticoagulant circulant de type lupique (antiprothrombinase),<br />

❚ anticorps anti-β2-gpI<br />

Syndrome de Gougerot-Sjögren ❚ anticorps antinucléaires, anti-Ro/SSA, anti-SSB<br />

Connectivite mixte (syndrome de Sharp) ❚ anticorps antinucléaires de spécificité anti-RNP<br />

Sclérodermie systémique ❚ anticorps antinucléaires, anti-Scl70<br />

Dermato-polymyosites ❚ anticorps antinucléaires, anti-aminoacyl-t-RNA-synthétase (anti-JO1, anti-PL7, anti-PL12…),<br />

Vascularites systémiques à ANCA<br />

❚ granulomatose de Wegener ❚ c-ANCA, fluorescence cytoplasmique. Spécificité anti-protéinase (3 = PR3)<br />

❚ polyangéite microscopique ❚ p-ANCA, fluorescence périnucléaire. Spécificité anti-myéloperoxydase = Mpo<br />

❚ syndrome de Churg et Strauss ❚ p- ou c-ANCA (antimyélopéroxydase = Mpo)<br />

Cirrhose biliaire primitive ❚ anticorps antimitochondries de type II<br />

Hépatites auto-immunes ❚ anticorps antimuscles lisses, antireticulum endoplasmique (LKM)<br />

Maladie cœliaque ❚ anticorps anti-endomysium (IgG, IgA), antitranglutaminase<br />

Maladie de Biermer ❚ anticorps anti-estomac, anti-facteur intrinsèque<br />

Thyroïdite de Hashimoto ❚ anticorps antithyroperoxydase (TPO), ant-thryroglobuline (TG)<br />

Maladie de Basedow ❚ anticorps antirécepteurs de la TSH (TRAK)<br />

Myasthénie ❚ anticorps antirécepteur à l’acétylcholine, anti-muscles striés<br />

Anémie hémolytique auto-immune ❚ anticorps anti-érythrocytaires (IgG, IgM) mis en évidence par un test de Coombs direct<br />

(spécificité IgG et/ou complément).<br />

* Liste non exhaustive. ANCA = anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008


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Figure<br />

Anti-ADN<br />

natifs +<br />

➤ lupus<br />

systémique<br />

Anti-Sm<br />

➤ lupus<br />

systémique<br />

Spécificité des antinoyaux (ANN).<br />

Lorsque la recherche d’auto-anticorps est peu sensible<br />

et/ou peu spécifique, le diagnostic de certaines MAI (polymyosites,<br />

dermatoses bulleuses, certains lupus cutanés…), évoqué par les<br />

manifestations cliniques, peut reposer sur l’analyse histologique<br />

du tissu ou organe cible de lésions inflammatoires de topographie<br />

plus ou moins spécifique associées à la présence de dépôts d’anticorps<br />

spécifiques et/ou de complexes immuns en IF.<br />

Indépendamment de la recherche d’auto-anticorps, qui peut<br />

avoir un intérêt diagnostique, de multiples anomalies biologiques<br />

souvent peu spécifiques peuvent s’observer au cours des MAI en<br />

fonction des tissus ou organes cibles.<br />

PRINCIPES DU TRAITEMENT ET MODALITÉS<br />

DE LA SURVEILLANCE AU LONG COURS<br />

D’UNE MALADIE AUTO-IMMUNE<br />

Principes généraux de la prise en charge<br />

thérapeutique<br />

Au cours des maladies auto-immunes (MAI) spécifiques d’organes<br />

entraînant une perte de fonction irréversible de l’organe<br />

ou du tissu cible, le traitement est purement substitutif et doit<br />

être généralement poursuivi à vie :<br />

— substitution par L-thyroxine en cas d’hypothyroïdie séquellaire<br />

d’une thyroïdite de Hashimoto ;<br />

— insulinothérapie dans le diabète de type 1 ;<br />

— apport de vitamine B12 dans la maladie de Biermer.<br />

Au cours des MAI spécifiques d’organes entraînant des lésions<br />

réversibles ou encore dans les MAI non spécifiques d’organes, le<br />

traitement vise en revanche au minimum à diminuer l’intensité de la<br />

réaction inflammatoire, et au mieux à rétablir la tolérance au « soi ».<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008<br />

Ro/SSA<br />

SSB<br />

➤ syndrome<br />

de Gougerot-<br />

Sjögren<br />

AAN +<br />

Anti-extrait de cellules thymiques (ENA pour early nuclear antigens)<br />

dirigés contre des antigènes nucléaires solubles<br />

RNP<br />

➤ syndrome<br />

de Sharp<br />

Scl 70 Jo 1<br />

➤ sclérodermie<br />

systémique<br />

Sans spécificité (polyarthrite<br />

rhumatoïde, maladies auto-immunes,<br />

infections, lymphomes)<br />

➤ dermatopolymyosites<br />

Les principaux objectifs du traitement « curatif » sont les<br />

suivants :<br />

— à court terme, contrôler les poussées de la maladie considérée<br />

afin d’en atténuer les symptômes et d’en limiter les conséquences<br />

fonctionnelles (exemple : déformations et/ou destructions<br />

articulaires au cours de la PR, insuffisance rénale séquellaire<br />

en cas de néphropathie lupique…),<br />

— à plus long terme, prévenir les poussées, limiter les séquelles<br />

de la maladie et améliorer la qualité de vie, voire guérir la maladie.<br />

Parallèlement au traitement « curatif », des mesures préventives<br />

visant à éviter des poussées de la maladie doivent être<br />

systématiquement envisagées dans certains cas : arrêt du tabac<br />

dans le LS et la maladie de Crohn, mesures de protection vis-àvis<br />

des rayons UV et arrêt des œstrogènes chez les patientes<br />

atteintes de LS par exemple.<br />

La stratégie thérapeutique doit être conditionnée par la sévérité<br />

de l’atteinte initiale et tenir compte du terrain sous-jacent<br />

(âge du patient, comorbidités éventuelles, capital osseux, désir<br />

de grossesse éventuel…).<br />

1. Traitements « symptomatiques »<br />

Anticentromères<br />

➤ CREST<br />

Ce sont les anti-inflammatoires non-stéroïdiens (AINS), et la<br />

colchicine.<br />

Bien qu’ils soient parfois un élément essentiel du traitement<br />

(comme par exemple les AINS dans les spondylarthropathies),<br />

ils ont une action purement anti-inflammatoire et un effet essentiellement<br />

symptomatique.<br />

2. Traitements « immunomodulateurs »<br />

Ce sont l’hydroxychloroquine, la salazopyrine, les interférons,<br />

les immunoglobulines intraveineuses…<br />

R Q 116<br />

913


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Leurs mécanismes d’action sont loin d’être clairement élucidés.<br />

L’hydroxychloroquine (Plaquenil) est un antipaludéen de<br />

synthèse qui a prouvé son intérêt en prise prolongée pour le traitement<br />

et la prévention des poussées dans les formes systémiques<br />

et cutanées de lupus, et qui est également utilisé au cours<br />

de la polyarthrite rhumatoïde par certains. Il peut et doit être<br />

poursuivi pendant la grossesse chez les patientes lupiques, et<br />

nécessite une surveillance ophtalmologique en raison du risque<br />

de toxicité rétinienne à long terme.<br />

Alors même que l’interféron alpha prescrit notamment dans<br />

le traitement de l’hépatite C est susceptible d’entraîner des manifestations<br />

auto-immunes (thyroïdites…), l’interféron de type bêta<br />

est utilisé dans la sclérose en plaques pour prévenir les poussées<br />

évolutives.<br />

Les immunoglobulines polyvalentes intraveineuses (IgIV) sont<br />

utilisées pour leur effet « immunomodulateur » et leur rapidité d’action,<br />

notamment dans le traitement du purpura thrombopénique<br />

immunologique (PTI) à la phase aiguë en cas de thrombopénie sévère<br />

(< 20 000/mm 3 ) associé à un syndrome hémorragique. Elles sont<br />

également utilisées dans d’autres MAI plus rares comme la rétinopathie<br />

de Birdshot, les myasthénies graves ou encore au cours des<br />

dermato-polymyosites avec atteinte respiratoire et/ou troubles de<br />

la déglutition. Compte tenu de leur demi-vie d’élimination (environ<br />

2 à 3 semaines), leur efficacité est le plus souvent transitoire, et leur<br />

administration peut être renouvelée en moyenne toutes les 3 semaines.<br />

La posologie habituelle dans les MAI est de 2 g/kg répartie sur<br />

2 jours consécutifs. Une surveillance rapprochée est nécessaire lors<br />

de la première administration, notamment en raison du risque de<br />

réaction immuno-allergique immédiate, et leur administration (dose<br />

totale, vitesse de perfusion) doit être particulièrement prudente<br />

chez les sujet âgés et/ou insuffisants rénaux.<br />

3. Corticoïdes<br />

Ils restent très largement utilisés dans les MAI du fait de leurs<br />

propriétés à la fois anti-inflammatoires et « immuno suppressives ».<br />

Ils sont utilisés initialement à forte dose par voie orale (1 mg/kg/j<br />

d’équivalent prednisone) ou intraveineuse (méthylprednisolone :<br />

15 mg/kg pendant 1 à 3 jours) en cas d’atteinte viscérale potentiellement<br />

grave dans certaines MAI et à dose plus faible en traitement<br />

d’entretien à distance d’une poussée. Ils sont également utilisés<br />

à visée anti-inflammatoire et symptomatique à plus faible<br />

dose (12,5 mg/j de prednisone) dans la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Quelle que soit la MAI concernée, l’objectif est d’atteindre la dose<br />

minimale efficace, idéalement 10 mg/j de prednisone, afin de<br />

limiter les effets secondaires bien connus de la corticothérapie<br />

au long cours.<br />

La corticothérapie prolongée justifie une supplémentation<br />

vitamino-calcique associée à un traitement par bisphosphonates<br />

en prévention de l’ostéoporose, ainsi qu’une supplémentation en<br />

potassium. En cas de prise concomitante d’un antiagrégant plaquettaire<br />

et/ou d’antécédent avéré d’ulcère, un traitement par<br />

inhibiteur de la pompe à protons est recommandé.<br />

Une activité physique régulière doit être encouragée autant<br />

que possible, et des mesures diététiques doivent être systéma-<br />

914<br />

I-8-Q116<br />

Pathologies auto-immunes : aspects épidémiologiques, diagnostiques et principes de traitement<br />

Tableau 5<br />

Caractéristiques principales des immunosup-<br />

IMMUNO-<br />

SUPPRESSEUR<br />

PROPRIÉTÉS<br />

PHARMACOLOGIQUES<br />

Méthotrexate ❚ antimétabolite<br />

(Novatrex ) ❚ inhibe la dihydrofolate<br />

réductase<br />

Léflunomide ❚ immunomodulateur<br />

(Arava)<br />

Cyclophosphamide ❚ alkylant<br />

(Endoxan)<br />

Azathioprine ❚ antiprolifératif<br />

(Imurel) ❚ blocage de la synthèse<br />

des purines (ADN/ARN)<br />

Mycophénolate mofétil ❚ antiprolifératif par blocage<br />

(Cellcept) de la synthèse des purines<br />

(inhibition IMPDH), sélective<br />

des lymphocytes<br />

Ciclosporine ❚ inhibiteur de la calcineurine<br />

(Neoral)<br />

GN = glomérulonéphrite, ANCA = anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutro<br />

tiquement associées afin de limiter la prise de poids et la rétention<br />

hydrosodée et de limiter ainsi, notamment, les risques de diabète<br />

cortico-induit et d’hypertension artérielle.<br />

4. Immunosuppresseurs (tableau 5)<br />

Les traitements immunosuppresseurs proprement dits sont<br />

réservés d’emblée pour des MAI et/ou atteintes particulièrement<br />

sévères. À titre d’exemple, les atteintes viscérales graves des<br />

connectivites (exemple : glomérulonéphrite lupique de classe IV)<br />

et des vascularites systémiques relèvent habituellement d’un<br />

traitement d’attaque par cyclophosphamide (Endoxan) : de 3 à<br />

6 perfusions à la dose unitaire de 0,5 à 0,7 g/m2 , espacées de<br />

deux à quatre semaines. Au terme de ce traitement, toujours<br />

prescrit en association à une corticothérapie à forte dose, et<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

presseurs ou apparentés utilisés dans les maladies auto-immunes<br />

PRINCIPALES<br />

INDICATIONS<br />

une fois la rémission obtenue, le relais est pris par un immunosuppresseur<br />

oral moins toxique : azathioprine (Imurel), mycophénolate<br />

mofétil (Cellcept) ou méthotrexate. Ce traitement d’entretien<br />

est habituellement poursuivi pour une période de 18 mois<br />

en moyenne.<br />

Les immunosuppresseurs peuvent également être utilisés à<br />

visée d’« épargne cortisonique » lorsque la MAI est cortico-dépendante,<br />

c'est-à-dire lorsque la poursuite d’une dose d’équivalent<br />

prednisone 10-15 mg/j s’avère nécessaire pour le contrôle de<br />

la maladie. Les patients sous immunosuppresseurs doivent être<br />

informés du risque accru d’infections communautaires et/ou<br />

opportunistes, et une prophylaxie primaire de la pneumocystose<br />

pulmonaire doit être systématiquement envisagée (Bactrim<br />

simple : 1 cp/j). Les vaccins contre la grippe et le pneumocoque<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008<br />

POSOLOGIE HABITUELLE<br />

(VOIE D’ADMINISTRATION)<br />

PRÉCAUTIONS<br />

D’EMPLOI<br />

❚ polyarthrite rhumatoïde ❚ 0,25 à 0,3 mg/kg/ semaine (PO) ❚ supplémentation en acide folique ❚ hépatotoxicité<br />

❚ spondylarthropathies ❚ pneumopathie<br />

❚ lupus systémique ❚ jusqu’à 30-40 mg/semaine (IM) ❚ éviter association à Bactrim ❚ stomatite<br />

(forme articulaire) ❚ agranulocytose<br />

❚ dermato-polymyosites<br />

❚ vascularites à ANCA ❚ contraception chez la femme<br />

en âge de procréer<br />

❚ polyarthrite rhumatoïde ❚ dose de charge 100 mg/j J1-J3 ❚ contraception ❚ hépatotoxicité<br />

puis 10 à 20 mg/j (PO)<br />

PRINCIPAUX EFFETS SECONDAIRES<br />

(HORS GROSSESSE)<br />

❚ lupus systémique (rein, système ❚ 500 à 750 mg/m 2 ( 1500 mg) ❚ hydratation protecteur ❚ leucopénie<br />

nerveux central, cytopénies) toutes les 2 à 4 semaines (IV) vésical (Uromitexan) ❚ cystite hémorragique<br />

❚ vascularites systémiques graves ❚ contraception ❚ tumeur de vessie<br />

❚ atteintes pulmonaire ❚ cryopréservation du sperme ❚ infertilité<br />

de la sclérodermie ❚ 2 à 3 mg/kg/j (PO) ❚ infections<br />

❚ pneumopathies interstitielles<br />

fibrosantes associées<br />

aux dermato-polymyosites<br />

❚ vascularites systémiques ❚ dosage activité TPMT* ❚ insuffisance médullaire/cytopénies<br />

❚ dermato-polymyosites ❚ 3 mg/kg/j (PO) ❚ ne pas associer à Zyloric ❚ pancréatite<br />

❚ lupus systémique (rein) ❚ peut être prescrit durant ❚ intolérance digestive<br />

❚ maladies inflammatoires la grossesse<br />

chroniques de l’intestin<br />

❚ hépatites auto-immunes<br />

❚ uvéites chroniques<br />

❚ lupus systémique ❚ contraception ❚ leucopénie<br />

(rein, cytopénies) ❚ intolérance digestive (diarrhée)<br />

❚ cytopénies auto-immunes ❚ 1 g 2/j (PO)<br />

❚ vascularites systémiques<br />

❚ polyarthrite rhumatoïde ❚ 3-5 mg/kg/j (p.o.) ❚ dosage préalable ❚ néphrotoxicité<br />

❚ uvéites réfractaires à diluer dans une boisson froide et surveillance de la créatinine ❚ hypertension artérielle<br />

❚ syndrome néphrotique si solution buvable ❚ ciclosporinémie ❚ hirsutisme<br />

hiles, vascularites, PO = per os, IV = voie intra-veineuse, IM = intramusculaire,* = activité thiopurine méthyltransférase (si basse, risque accru de toxicité hématologique).<br />

sont conseillés, même si leur immunogénicité est moindre dans<br />

ce contexte et si, en dehors de la polyarthrite thumatoïde et du<br />

lupus systémique, leur innocuité n’a pas été formellement démontrée.<br />

Les vaccins vivants atténués sont en revanche contre-indiqués<br />

chez les patients traités par immunosuppresseurs.<br />

Les caractéristiques des immunosuppresseurs utilisés pour<br />

la prise en charge des MAI sont résumées dans le tableau 5.<br />

5. Biothérapies ou biomédicaments<br />

Ces dernières années, les biothérapies, encore appelées biomédicaments,<br />

qui ont la capacité de cibler spécifiquement certains<br />

acteurs cellulaires et/ou médiateurs de la réponse immunitaire<br />

(cytokines, signaux de costimulation T-B…) ont connu un essor<br />

considérable dans la prise en charge des MAI.<br />

R Q 116<br />

915


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

916<br />

I-8-Q116<br />

Pathologies auto-immunes : aspects épidémiologiques, diagnostiques et principes de traitement<br />

Les anti-TNFα (Tumor Necrosis Factor) ont été le premiers<br />

biomédicaments spécifiquement développés pour le traitement<br />

des MAI, et plus particulièrement de la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Trois molécules appartenant à cette classe thérapeutique sont<br />

disponibles en France et ont l’AMM pour le traitement de la polyarthrite<br />

rhumatoïde : l’infliximab (Remicade) et l’adalimumab<br />

(Humira), anticorps monoclonaux anti-TNFα, et l’étanercept<br />

(Enbrel), récepteur soluble du TNF.<br />

Outre la polyarthrite rhumatoïde, certains anti-TNFα ont également<br />

une efficacité et des indications reconnues dans les spondylarthrites<br />

ankylosantes sévères, les maladies inflammatoires<br />

chroniques de l’intestin en poussée, ou encore les formes sévères<br />

de rhumatisme psoriasique et de psoriasis.<br />

Les anti-TNFα sont contre-indiqués en cas d’infection évolutive,<br />

de néoplasie, de maladie démyélinisante. Sachant qu’ils exposent<br />

les patients à un risque modérément accru d’infections et<br />

notamment à un risque de réactivation de tuberculose, le bilan<br />

préthérapeutique implique la réalisation systématique d’une<br />

IDR à la tuberculine et d’une radiographie thoracique à la<br />

recherche d’une tuberculose latente.<br />

L’anakinra (Kineret) est un antagoniste du récepteur de l’inter -<br />

leukine 1 qui a également l’AMM dans la polyarthrite rhumatoïde.<br />

L’abatacept (CTLA4-Ig, Orencia) est une protéine de fusion qui<br />

inhibe la stimulation du lymphocyte T par les cellules présentatrices<br />

d’antigène et qui a montré un très bon rapport efficacitétolérance<br />

dans la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Le rituximab (Mabthera) est un anticorps monoclonal chimérique<br />

dirigé contre le CD20, antigène exprimé à la surface des<br />

lymphocytes B matures. Initialement développé pour le traitement<br />

de lymphomes malins non hogdkiniens de type B en association<br />

à la chimiothérapie, le rituximab a connu un essor considérable<br />

dans les MAI ces dernières années. Il est utilisé dans la<br />

polyarthrite rhumatoïde, dans laquelle il a récemment obtenu<br />

une AMM, et hors AMM dans les cytopénies auto-immunes, et<br />

dans certaines atteintes viscérales (notamment rénales) réfractaires<br />

du lupus, ou encore au cours des manifestations systémiques<br />

des cryoglobulinémies. Il s’administre soit en 4 perfusions hebdomadaires<br />

à la dose de 375 mg/m 2 , soit à raison de 2 perfusions<br />

à la dose fixe de 1 g espacées de 15 jours. Selon la MAI considérée,<br />

son effet peut être plus ou moins rapide (de 1 à 12 semaines<br />

après la première perfusion), et sa durée d’efficacité chez les<br />

patients répondeurs est également variable (de 6-9 mois à plusieurs<br />

années par exemple chez certains patients atteints de cyto -<br />

pénies auto-immunes). Si une lymphopénie B profonde est quasi<br />

constante après traitement par rituximab pendant 6 à 9 mois en<br />

moyenne, le traitement n’entraîne habituellement pas d’hypogammaglobulinémie<br />

chez l’adulte et de risque nettement accru<br />

d’infections. Les patients qui rechutent après une première<br />

réponse au rituximab peuvent être traités à nouveau avec succès,<br />

mais la périodicité idéale d’administration de traitement (uniquement<br />

en cas de rechute avérée ou intérêt de doses « d’entretien<br />

» tous les 9 à 12 mois ?) n’est pas clairement établie à ce<br />

jour dans les différentes MAI considérées.<br />

Modalités de surveillance<br />

Il n’est bien évidemment pas possible d’envisager toutes les<br />

situations compte tenu de la grande hétérogénéité des manifestations<br />

et du pronostic selon les MAI considérées. Si l’on prend<br />

l’exemple du lupus systémique, la surveillance se fait, à distance<br />

d’une poussée, à un rythme moyen de 3 à 4 consultations annuelles.<br />

Outre la recherche à l’interrogatoire et à l’examen clinique<br />

complet d’arguments pour une poussée évolutive et/ou la survenue<br />

d’effets secondaires liés au traitement, la surveillance biologique<br />

porte essentiellement sur les paramètres hématologiques<br />

et rénaux et sur le contrôle de la glycémie chez les patients sous<br />

corticoïdes au long cours. L’intérêt de contrôler périodiquement<br />

le titre des anticorps anti-ADN natifs est controversé et non<br />

consensuel. La surveillance biologique pour dépister d’éventuels<br />

effets indésirables des traitements varie selon les traitements en<br />

cause (v. tableau 5). Enfin, tout patient traité par corticoïdes <br />

immunosuppresseur et/ou biothérapie doit être sensibilisé au<br />

risque infectieux et vivement incité à consulter rapidement en<br />

cas de syndrome fébrile. En cas de fièvre persistante chez un<br />

patient traité par anti-TNF, la possibilité d’une tuberculose doit<br />

être systématiquement envisagée. ■<br />

dp5_couv:rdp couv gab 29/02/08 15:26 Page 465<br />

La Revue du Praticien • • 15 mars 2008 • Tome 58 • N° 5 (<br />

Traitement du cancer du sein Effets neuropsychiatriques des corticoïdes VASCULARITES<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

LA REVUE DU<br />

PRATICIEN<br />

1 5 M A R S 2 0 0 8 / T O M E 5 8 N º 5<br />

Vascularites<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

MIEUX CLASSÉES, MIEUX TRAITÉES<br />

OUVERTURES<br />

B Traitement adjuvant<br />

du cancer du sein et thérapie<br />

ciblée B Corticoïdes et effets<br />

neuropsychiatriques B<br />

Maladie de Rendu-Osler<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

Mais aussi…<br />

◗ Pneumopathies<br />

interstitielles des connectivites<br />

Cottin V (Rev Prat<br />

2007;57[201]:2235-48)<br />

◗ Critical self epitopes are<br />

key to the understanding<br />

of self-tolerance and<br />

autoimmunity<br />

Dighiero G, Rose NR<br />

(Immunol Today<br />

1999;29:423-8).<br />

◗ Autoimmune diseases<br />

Davidson A, Diamond B<br />

(New Engl J Med<br />

2001;345:340-9)<br />

Pour en savoir plus<br />

Les informations sur la qualité des soins et les patients B Qu’est-ce qui peut<br />

tomber à l’examen ? B Trouble de la personnalité B Cancer de l’enfant<br />

B Responsabilités médicale, civile, administrative, pénale et disciplinaire B<br />

Tumeurs intracrâniennes<br />

www.larevuedupraticien.fr p u bli c a tio n bime n s u e l l e de f o r m a t i o n méd i c a l e co n t inue<br />

◗ Vascularites<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2008;55[5]:479-546)<br />

◗ Epidemiology<br />

and estimated population<br />

burden of selected<br />

autoimmune diseases<br />

in the United States<br />

Jacobson DL, Gange SJ,<br />

Rose NR, Graham NM<br />

(Clin Immunol<br />

Immunopathol<br />

1997;84:223-43)<br />

◗ Systemic lupus<br />

erythematosus<br />

Rahman A, Isenberg DA<br />

(N Engl J Med<br />

2008;358:929-39)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Les anticorps antinucléaires sont spécifiques<br />

du lupus.<br />

Les ANCA sont fréquemment positifs dans<br />

la périartérite noueuse.<br />

La présence d’anticorps antinucléaires exclut<br />

le diagnostic de polyarthrite rhumatoïde.<br />

Les anticorps anti-CCP sont spécifiques<br />

de la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Au cours du lupus...<br />

1 L’exposition au soleil peut favoriser une poussée.<br />

2 Les facteurs de susceptibilité génétique jouent un<br />

rôle tout à fait mineur dans la survenue d’un lupus.<br />

1<br />

2<br />

3<br />

1<br />

2<br />

3<br />

1<br />

2<br />

3<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 AVRIL 2008<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

3<br />

4<br />

La grossesse augmente le risque de poussée<br />

de la maladie.<br />

Les progestatifs sont contre-indiqués.<br />

C / QCM<br />

Parmi les suivants, quels médicaments sont autorisés<br />

pendant la grossesse ?<br />

1 Hydroxychloroquine (Plaquenil).<br />

2 Méthotrexate (Novatrex).<br />

3 Azathioprine (Imurel).<br />

4 Cyclophosphamide (Endoxan).<br />

Réponses : A : F, F, F, V / B : V, F, V, F / C : 1, 3.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 249, p. 889<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

L’insuffisance aortique, même sévère, est souvent<br />

bien tolérée pendant des années.<br />

L’électrocardiogramme et la radiographie de thorax<br />

peuvent être normaux en cas d’insuffisance aortique.<br />

L’échographie transœsophagienne permet, d’une<br />

part de préciser les lésions, d’autre part et surtout<br />

de quantifier la fuite de manière objective.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 140, p. 899<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Une tumeur maligne est bien limitée.<br />

Les marqueurs sont nécessaires au dépistage<br />

des cancers.<br />

Le diagnostic de cancer est fait par l’examen<br />

anatomopathologique.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

L’ACE est un marqueur nécessaire à la surveillance<br />

du cancer du sein.<br />

Un syndrome paranéoplasique est dû<br />

à la compression des organes par un cancer.<br />

Les signes généraux liés au cancer (amaigrissement,<br />

fièvre, indice de performance) sont d’excellents<br />

facteurs de pronostic (dans le sens de la gravité).<br />

4 Le traitement curatif de l’insuffisance aortique<br />

est médical.<br />

5 L’apparition de symptômes est une indication<br />

opératoire claire.<br />

Parmi les affirmations suivantes, lesquelles<br />

sont justes ?<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

C / QCM<br />

Réponses : V, V, F, F, V<br />

Un cancer peut entraîner des métastases viscérales,<br />

en particulier hépatiques.<br />

Une tumeur bénigne métastase dans les ganglions<br />

de voisinage mais jamais dans le foie.<br />

Le diagnostic de cancer est fait sur l’examen<br />

anatomopathologique.<br />

Il n’y a aucun marqueur de dépistage du cancer.<br />

On informe le malade uniquement lorsqu’on a tous<br />

les résultats : examen anatomopathologique et bilan<br />

d’extension, en effet il ne faut pas l’inquiéter par des<br />

informations incomplètes.<br />

Réponses : A : F, F, V / B : F, F, V / C : 1, 3, 4.<br />

R Q 116<br />

917


LUPUS ÉRYTHÉMATEUX<br />

DISSÉMINÉ<br />

Le lupus érythémateux systémique (ou disséminé) est une maladie<br />

auto-immune de cause inconnue, touchant préférentiellement la<br />

femme jeune, et responsable d’une atteinte polyviscérale.<br />

L’atteinte d’un ou plusieurs viscères peut être simultanée ou<br />

isolée et cumulative. L’évolution se fait par poussées. La maladie<br />

est caractérisée par la présence d’auto-anticorps. Le traitement<br />

est basé sur les corticoïdes.<br />

Épidémiologie<br />

L’incidence du lupus est de 1 à 10 nouveaux cas par an pour<br />

100 000 habitants. Le lupus touche préférentiellement la femme<br />

jeune. En Afrique, aux Caraïbes et en Asie, l’incidence est 9 fois<br />

plus fréquente que dans les pays européens. Il existe 5 % de formes<br />

familiales. Certains facteurs aggravants sont connus : la prise d’œstro<br />

gènes, la grossesse et l’exposition au soleil, notamment aux<br />

ultraviolets B (UVB). Certains médicaments peuvent entraîner des<br />

lupus ; ce sont les lupus induits : anticonvulsivants (phénytoïne), isoniazide,<br />

quinidine, minocycline, chlorpromazine, D-pénicillamine,<br />

bêtabloquants, antithyroïdiens de synthèse (PTU), alphaméthyldopa,<br />

sulfasalazine, interféron α, anti-TNF.<br />

La survie des malades est de 95 % à 5 ans. La mortalité est<br />

liée aux infections favorisées par les traitements immunosuppresseurs,<br />

aux thromboses et à l’athérosclérose accélérée.<br />

Manifestations cliniques<br />

La fréquence des manifestations cliniques et des anomalies<br />

biologiques est rapportée dans le tableau 1 à titre indicatif.<br />

1. Manifestations articulaires<br />

Elles sont inaugurales dans 50 % des cas. Il peut s’agir d’arthrites<br />

pouvant ressembler à une polyarthrite rhumatoïde ou d’arthralgies<br />

I-00-Q000 I-8-Q117<br />

Lupus érythémateux disséminé<br />

Syndrome des antiphospholipides<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008<br />

P r Olivier Fain<br />

Service de médecine interne, CHU Jean-Verdier (AP-HP), université Paris-13, 93140 Bondy, France<br />

olivier.fain@jvr.aphp.fr<br />

Objectifs<br />

• Diagnostiquer un lupus érythémateux disséminé et un syndrome<br />

des antiphospholipides.<br />

touchant préférentiellement les articulations métacarpophalangiennes,<br />

interphalangiennes proximales, les genoux, les chevilles.<br />

À la différence de la polyarthrite rhumatoïde, les déformations<br />

sont exceptionnelles et il n’y a jamais d’érosion ou de destruction<br />

articulaire. Les anticorps antipeptides citrullinés (anti-CCP), marqueurs<br />

de la polyarthrite rhumatoïde, sont absents au cours du lupus.<br />

Les ostéonécroses aseptiques (tête humérale ou fémorale)<br />

surviennent dans 10 % des cas et sont essentiellement la conséquence<br />

de la corticothérapie.<br />

2. Manifestations cutanées<br />

L’éruption en aile de papillon, ou vespertilio, est une éruption<br />

érythémateuse discrètement squameuse siégeant sur le visage,<br />

dans les régions malaires (fig. 1).<br />

Tableau 1<br />

Fréquence des atteintes<br />

au cours du lupus<br />

MANIFESTATIONS CLINIQUES (%) ANOMALIES BIOLOGIQUES (%)<br />

❚ Fièvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60<br />

❚ Atteinte articulaire . . . . . . . 90<br />

❚ Peau . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 80<br />

❚ Rein . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70<br />

❚ Pleurésie . . . . . . . . . . . . . . . . 40<br />

❚ Péricardite . . . . . . . . . . . . . . 30<br />

❚ Atteinte neurologique . . . . 20<br />

❚ Troubles psychiatriques . . . 25<br />

❚ Adénopathies . . . . . . . . . . . . 30<br />

❚ Splénomégalie . . . . . . . . . . . 35<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

❚ Leucopénie . . . . . . . . . . . . . . 50<br />

❚ Thrombopénie . . . . . . . . . . . 30<br />

❚ Anémie hémolytique . . . 10<br />

❚ FAN . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 98<br />

❚ Anti-ADN . . . . . . . . . . . . . . . . 75<br />

❚ Anti-Sm . . . . . . . . . . . . . . . . . 30<br />

❚ Anti-SSA . . . . . . . . . . . . . . . . 30<br />

❚ Anti-SSB . . . . . . . . . . . . . . . . . 10<br />

1935


La photosensibilité est plus le fait des UVB que des UVA.<br />

Le lupus discoïde est une lésion localisée, atrophique au centre<br />

et infiltrée en périphérie, siégeant principalement sur le visage.<br />

Il peut se voir dans des lupus essentiellement cutanés.<br />

Le lupus cutané subaigu est caractérisé par des lésions papulosquameuses<br />

annulaires, photosensibles, prédominant le plus<br />

souvent dans le dos, sur le tronc et les parties externes des bras.<br />

(fig. 2). Les anticorps anti-SSA sont présents dans 80 % des cas.<br />

L’alopécie est habituellement la conséquence d’une localisation<br />

du cuir chevelu du lupus ; elle est circonscrite en plaques (fig. 3).<br />

L’atteinte muqueuse se manifeste par des ulcérations buccales<br />

ou nasales.<br />

D’autres manifestations cutanées non spécifiques sont décrites :<br />

le syndrome de Raynaud, les lésions de vascularite, notamment<br />

distales des mains, l’urticaire ainsi que le livedo.<br />

La biopsie de lésions cutanées met en évidence un infiltrat<br />

inflammatoire. L’étude en immunofluorescence révèle des dépôts<br />

d’immunoglobulines et de complément à la jonction dermo-épidermique<br />

en peau malade et en peau saine exposée (bande<br />

lupique).<br />

3. Manifestations rénales<br />

Elles font toute la gravité de la maladie.<br />

L’atteinte histologique est très fréquente lorsque des biopsies<br />

rénales sont réalisées de façon systématique (70 à 80 % des<br />

lupus). L’atteinte rénale survient dans les premières années d’évolution<br />

(plus de 50 % la première année). Il s’agit essentiellement<br />

de glomérulopathies révélées par une protéinurie (allant jusqu’au<br />

syndrome néphrotique), une hématurie et plus rarement une<br />

insuffisance rénale, une hypertension artérielle. Les signes orientant<br />

vers une forme grave d’atteinte rénale (glomérulo néphrite<br />

proliférative) sont la présence d’une hématurie, d’une insuffisance<br />

rénale ou d’une hypertension artérielle associée à une<br />

augmentation des anticorps anti-DNA et un abaissement du<br />

1936<br />

I-8-Q117<br />

Lupus érythémateux disséminé — Syndrome des antiphospholipides<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici, à titre d’exemple, les dossiers qui<br />

pourraient être posés aux Épreuves classantes<br />

nationales :<br />

➜ une cytopénie auto-immune (purpura<br />

thrombopénique immunologique ou anémie<br />

hémolytique) révélant un lupus érythémateux<br />

disséminé avec la discussion diagnostique<br />

devant un purpura, une thrombopénie,<br />

quand et comment évoquer un<br />

lupus dans ce contexte ;<br />

➜ diagnostic et prise en charge d’une<br />

polyarthrite, diagnostic différentiel avec la<br />

polyarthrite rhumatoïde ;<br />

Figure 1<br />

Voici une série de questions qui pourrait concerner l’item<br />

« Lupus érythémateux disséminé — Syndrome des antiphospholipides ».<br />

complément (C3). Cependant, il n’y a pas de corrélation absolue<br />

entre la clinique, la biologie et l’histologie, d’où l’intérêt de réaliser<br />

une biopsie rénale en cas d’anomalies.<br />

Six stades d’atteinte rénale sont décrits (v. encadré 1). La gravité<br />

vient des formes prolifératives stade III et IV, avec une évolution<br />

possible vers l’insuffisance rénale terminale. Le traitement est basé<br />

sur l’association de corticoïdes et d’immunosuppresseurs.<br />

4. Atteintes des séreuses<br />

➜ diagnostic d’un lupus, puis des compli -<br />

cations infectieuses des traitements corticoïdes<br />

et immunosuppresseurs ;<br />

➜ prise en charge d’une thrombose veineuse,<br />

bilan biologique, traitement anticoagulant,<br />

quand rechercher un SAPL ?<br />

➜ complications de la grossesse, fausses<br />

couches et pertes fœtales : évoquer un<br />

SAPL.<br />

Cas clinique<br />

Une femme de 36 ans, mariée, sans<br />

enfants, consulte pour des arthralgies<br />

des doigts (interphalangiennes proxi-<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Vespertilio apparu en fin de grossesse.<br />

La pleurésie est habituellement unilatérale. La ponction pleurale<br />

montre un exsudat lymphocytaire, les FAN sont augmentés<br />

dans le liquide pleural, et le complément y est abaissé.<br />

La péricardite est responsable de douleurs thoraciques et est<br />

objectivée par l’échographie. Elle est exceptionnement compliquée<br />

de tamponnade ou de constriction.<br />

males et métacarpophalangiennes) évoluant<br />

depuis 6 mois, survenant préférentiellement<br />

le matin.<br />

Quelles sont les 2 principales maladies<br />

pouvant être à l’origine des symptômes<br />

de cette patiente ?<br />

Donner les arguments cliniques,<br />

biologiques et radiologiques permettant<br />

de différencier ces 2 affections.<br />

Quel diagnostic évoquez-vous ?<br />

Que proposez-vous ?<br />

Quelle est votre hypothèse ?<br />

Quel traitement instituez-vous ?<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008


5. Manifestations neuropsychiatriques<br />

Ce sont les crises comitiales, des troubles psychiatriques<br />

(psychose) et certaines complications du syndrome des antiphospholipides<br />

(accident vasculaire cérébral, chorée, migraines,<br />

myélopathie).<br />

D’autres manifestations sont plus rares (méningite aseptique<br />

sous AINS, trouble de l’humeur et du comportement). Les neuropathies<br />

périphériques sont exceptionnelles (v. encadré 2).<br />

6. Autres signes cliniques<br />

Ce sont la fièvre (sa présence doit faire rechercher en premier<br />

lieu une complication infectieuse), des adénopathies, une<br />

splénomégalie, qui sont cependant rarement au premier plan, et<br />

rarement volumineuses.<br />

Anomalies biologiques<br />

1. Anomalies biologiques non spécifiques<br />

Peuvent être présents un syndrome inflammatoire avec une<br />

VS modérément élevée, une anémie inflammatoire. La CRP est<br />

habituellement normale, sauf dans les formes séreuses. Une CRP<br />

très élevée (> 100 mg/L) doit faire rechercher une infection (favorisée<br />

par le traitement corticoïde et immunosuppresseur).<br />

2. Marqueurs immunologiques<br />

(tableau 1, tableau 2, fig. 4)<br />

La sensibilité des facteurs antinucléaires est élevée au cours<br />

du lupus, mais leur spécificité est faible, alors que la sensibilité<br />

des anti-DNA est moins élevée mais leur spécificité meilleure.<br />

La présence d’anti-Sm est pathognomonique du lupus (spécificité<br />

100 %), mais la sensibilité faible.<br />

Les anticorps antinucléosomes sont présents chez 80 à 90 %<br />

des lupiques et notamment dans les formes sans anti-ADN, ils<br />

sont très spécifiques.<br />

1 / CLASSIFICATION DES ATTEINTES<br />

RÉNALES DU LUPUS*<br />

Classe I ➜ glomérulonéphrite mésangiale minime<br />

(glomérules optiquement normaux, dépôts<br />

en immunofluorescence [IF])<br />

Classe II ➜ glomérulonéphrite mésangiale<br />

Classe III ➜ glomérulonéphrite proliférative focale<br />

Classe IV ➜ glomérulonéphrite proliférative diffuse<br />

Classe V ➜ glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

Classe VI ➜ glomérulonéphrite sclérosante avancée<br />

(plus de 90 % des glomérules sont le siège<br />

d’une sclérose globale)<br />

* International Society of Nephrology 2004<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

Le lupus érythémateux systémique (LES) :<br />

— est une maladie de la femme jeune, œstrogénodépendante<br />

(aggravée par les œstrogènes, la grossesse) et photosensible ;<br />

— peut donner une atteinte de tous les systèmes (maladie<br />

systémique) : reins, peau, articulations, lignées sanguines… ;<br />

— l’atteinte rénale et neurologique domine le pronostic ;<br />

— les FAN sont toujours présents (98 %) mais peu<br />

spécifiques, les anti-ADN sont plus rares mais plus<br />

spécifiques ;<br />

— les corticoïdes (et les immunosuppresseurs) sont<br />

efficaces mais favorisent les infections ;<br />

— l’hydroxychloroquine est le traitement de fond.<br />

Le SAPL peut être isolé ou associé à un LES.<br />

La recherche d’APL fait partie de l’enquête étiologique<br />

des thromboses veineuses ou artérielles sans facteurs<br />

de risque évidents et des accidents obstétricaux.<br />

La présence d’anticorps antiglobules rouges détectée par test<br />

de Coombs (habituellement IgG et complément) est responsable<br />

d’une anémie hémolytique auto-immune (anémie régénérative<br />

avec baisse de l’haptoglobine, augmentation des LDH et de<br />

la bilirubine libre). La présence d’anticorps antileucocytes peut<br />

entraîner une leucopénie, une neutropénie, une lymphopénie. La<br />

présence d’anticorps antiplaquettes peut être à l’origine d’une<br />

thrombopénie périphérique semblable au purpura thrombo -<br />

pénique immunologique.<br />

Système nerveux central<br />

◗ Méningite aseptique<br />

◗ Atteinte cérébrovasculaire<br />

(athérosclérose accélérée<br />

et antiphospholipides)<br />

◗ Atteinte démyélinisante<br />

(pseudo-SEP)<br />

◗ Céphalées (migraines)<br />

◗ Mouvements anormaux<br />

(chorée)<br />

Système nerveux périphérique<br />

◗ Guillain-Barré<br />

◗ Neuropathie autonome<br />

◗ Mononévrite<br />

◗ Myasthénie<br />

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2 / CLASSIFICATION DES ATTEINTES<br />

NEUROLOGIQUES ACR 1999<br />

◗ Myélopathie<br />

(myélite transverse)<br />

◗ Épilepsie<br />

◗ Confusion<br />

◗ Anxiété<br />

◗ Troubles cognitifs<br />

◗ Troubles de l’humeur<br />

◗ Psychose<br />

◗ Atteinte des nerfs<br />

crâniens<br />

◗ Atteinte plexique<br />

◗ Polynévrite<br />

R Q 117<br />

1937


1938<br />

I-8-Q117<br />

Lupus érythémateux disséminé — Syndrome des antiphospholipides<br />

Figure 2 Lupus cutané subaigu et présence d’anticorps anti-SSA.<br />

Figure 3 Plaque d’alopécie au cours du lupus.<br />

Tableau 2<br />

Anomalies immunologiques<br />

au cours du lupus<br />

Différents anticorps anti-antigènes nucléaires solubles<br />

au cours du lupus<br />

❚ Anti-Sm : lupus (pathognomique)<br />

❚ Anti-SSA : lupus, risque BAV néonatal, lupus cutané subaigu, Sjögren<br />

❚ Anti-SSB : Sjögren, lupus<br />

❚ Anti-RNP : Sharp ou connectivite mixte<br />

Anomalies immunologiques au cours du lupus<br />

❚ FAN + isolés<br />

❚ FAN + anti-DNA +<br />

❚ FAN + anti-DNA + anti-Sm +<br />

❚ FAN + anti-DNA + anti-SSA +<br />

❚ FAN – anti-DNA – anti-SSA + (2 % des lupus)<br />

SENSIBILITÉ<br />

(présent dans<br />

le lupus )<br />

SPÉCIFICITÉ<br />

(absent dans d’autres<br />

pathologies)<br />

FAN <br />

98 % lupus<br />

—<br />

56 % Sjögren<br />

44 % PR<br />

50 % MNI<br />

10 % normaux<br />

Anti-DNA <br />

75 % lupus 7 % Sjögren<br />

0 % normaux<br />

Anti-Sm <br />

30 % lupus<br />

<br />

0 % Sjögren<br />

0 % normaux<br />

Tableau 3<br />

Critères de l’American College<br />

of Rheumatology (1982, modifiés en 1997)<br />

Lupus si au moins 4 critères sont présents<br />

➙ éruption malaire<br />

➙ lupus discoïde<br />

➙ photosensibilité<br />

➙ ulcérations buccales ou nasopharyngées<br />

➙ polyarthrite non érosive<br />

➙ pleurésie ou péricardite<br />

➙ atteinte rénale : protéinurie 0,5 g/24 heures<br />

➙ atteinte neurologique : convulsions ou psychose<br />

➙ atteintes hématologiques :<br />

anémie hémolytique<br />

ou leucopénie 4 000/mm 3<br />

ou lymphopénie 1 500/mm 3<br />

ou thrombopénie 100 000/mm 3<br />

➙ anti-DNA<br />

ou anti-Sm<br />

ou antiprothrombinase<br />

ou anticorps anticardiolipines IgG, IgM<br />

ou fausse sérologie syphilitique positive<br />

(VDRL, TPHA —)<br />

➙ présence de facteurs antinucléaires<br />

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LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008


Le complément augmente dans tout syndrome inflammatoire.<br />

Sa diminution est observée en cas d’atteinte rénale (C3),<br />

ou du fait de la présence d’une cryoglobulinémie (C4). Le C3<br />

est inversement corrélé au degré d’insuffisance rénale et à la<br />

protéinurie. La baisse du C3 et l’augmentation des anticorps<br />

anti-ADN sont prédictifs d’une atteinte rénale. Les déficits<br />

congénitaux en certaines fractions complément sont associés<br />

au lupus : le déficit en C4 s’observe dans 50 % des lupus, le<br />

déficit en C2 est plus rare et essentiellement le fait de lupus<br />

familiaux.<br />

Diagnostic et diagnostics différentiels<br />

Le diagnostic est établi sur l’association de manifestations<br />

cliniques et biologiques : 4 critères de l’American College of<br />

Rheumatology sont requis (tableau 3).<br />

À un instant donné, toutes les manifestations ne sont pas présentes,<br />

mais elles peuvent apparaître au cours de l’évolution. Il faut<br />

donc savoir évoquer ce diagnostic devant un certain nombre de<br />

situations : polyarthrite, glomérulopathie, cytopénie auto-immune,<br />

sérite… Se pose alors le problème des diagnostics différentiels de<br />

ces atteintes (tableau 4).<br />

Tableau 4<br />

Diagnostics différentiels lupus et SAPL<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008<br />

DIAGNOSTICS DIFFÉRENTIELS Quest. ECN<br />

Polyarthrite ❚ polyarthrite rhumatoïde 121, 307<br />

chronique ❚ syndrome de Sjögren 116, 270<br />

❚ rhumatisme psoriasique 123<br />

Lésions cutanées ❚ rosacée 232<br />

visage, vespertilio ❚ dermite séborrhéique<br />

Raynaud ❚ autres connectivites 327<br />

❚ cryoglobulinémie<br />

Glomérulopathies ❚ selon le type histologique 264, 328<br />

Pleurésie ❚ infectieuses, néoplasiques 312<br />

❚ embolie pulmonaire<br />

Péricardite ❚ virales, néoplasiques,<br />

tuberculeuses… 274<br />

Cytopénies ❚ AHAI (Ac chauds) 297, 316<br />

auto-immunes médicaments,<br />

hémopathies lymphoïdes…<br />

❚ thrombopénie périphérique 335<br />

Lymphopénie ❚ VIH<br />

SAPL thrombotique ❚ autres causes de thrombophilie 135<br />

SAPL obstétrical ❚ pertes fœtales, grossesses 17, 21, 23, 29<br />

compliquées<br />

Ac anti-antigènes<br />

nucléaires solubles<br />

ECT (ENA)<br />

anti-Sm<br />

anti-SSA<br />

anti-SSB<br />

anti-RNP<br />

Figure 4<br />

Cytoplasme<br />

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Noyau<br />

FAN<br />

Antigènes<br />

Noyau<br />

ADN<br />

Ag nucléaires<br />

solubles<br />

ADN<br />

Anticorps<br />

FAN<br />

Anti-ADN<br />

Anticorps anti Ag<br />

nucléaires<br />

solubles<br />

anti-ADN<br />

Antigène nucléaire<br />

soluble<br />

Anticorps détectés dans le lupus et cibles antigéniques.<br />

Certaines manifestations sont très spécifiques du lupus érythémateux<br />

: absence d’érosions osseuses devant une poly arthrite,<br />

anti-ADN et anti-Sm, baisse du C3, dépôts d’immunoglobulines<br />

et de complément sur la biopsie cutanée et rénale.<br />

Lupus, contraception et grossesse<br />

Les œstrogènes et la grossesse entraînent des poussées<br />

lupiques. Le lupus peut être révélé au cours d’une grossesse ou<br />

dans le post-partum.<br />

Le lupus peut entraîner une diminution de fertilité en cas d’insuffisance<br />

rénale. L’augmentation des pertes fœtales est la conséquence<br />

d’un syndrome des antiphospholipides associé.<br />

Les enfants nés de mère lupique ont plus de risque d’être<br />

hypotrophes ou de développer dans certains cas un lupus néonatal.<br />

Le lupus néonatal associe des lésions cutanées (éruption,<br />

photosensibilité), des atteintes hématologiques survenant habituellement<br />

entre la 2e et la 5e semaine de vie et régressant dans<br />

les 6 mois. La présence d’anticorps anti-SSA chez la mère expose<br />

à la survenue d’une myocardite fœtale avec bloc auriculoventriculaire<br />

(BAV) pouvant aboutir soit à une mort fœtale, soit à un<br />

bloc auriculoventriculaire irréversible.<br />

Une grossesse au cours du lupus doit être programmée. Un<br />

délai de 1 an après une poussée viscérale sévère, notamment<br />

rénale, et uniquement si la poussée est contrôlée, est indispensable.<br />

Les traitements du lupus (prednisone et hydroxychloroquine)<br />

ne doivent pas être arrêtés.<br />

La contraception est indispensable, surtout lorsque la maladie<br />

n’est pas contrôlée et sous immunosuppresseurs (cyclophosphamide<br />

et mycophénolate mofétil).<br />

La contraception œstroprogestative est contre-indiquée :<br />

seuls sont autorisés les macroprogestatifs (acétate de chlormadinone<br />

[Lutéran]). Le stérilet est déconseillé du fait du risque infectieux<br />

sous corticothérapie et traitement immunosuppresseur, et<br />

du risque hémorragique sous anticoagulant (SAPL associé). Le<br />

traitement hormonal substitutif de la ménopause est contreindiqué<br />

(risque de poussée lupique et de thrombose).<br />

R Q 117<br />

1939


Traitement<br />

Le traitement et le suivi n’étant pas au programme, ils ne sont<br />

signalés que dans les encadrés 3 et 4.<br />

Le traitement est basé sur la corticothérapie et l’hydroxychloroquine<br />

(les immunosuppresseurs sont utilisés essentiellement dans<br />

les formes rénales).<br />

L’arrêt brutal du traitement, par défaut d’observance, peut être<br />

responsable d’une poussée sévère de la maladie.<br />

1940<br />

I-8-Q117<br />

3 / TRAITEMENT DU LUPUS<br />

Les corticoïdes<br />

sont le traitement de base du lupus, à des<br />

posologies variables suivant le type d’atteinte,<br />

au long cours à des doses de prednisone<br />

entre 5 et 10 mg/j, à des posologies plus<br />

élevées (1/2 mg/kg/j) dans les atteintes des<br />

séreuses (plèvre, péricarde), à 1 mg/kg/j<br />

dans les manifestations hématologiques, et en<br />

association avec les immunosuppresseurs<br />

dans l’atteinte rénale et du SNC<br />

La méthylprednisolone, en IV à de fortes<br />

posologies, 500-1 000 mg/j 1 à 3 jours, permet<br />

une action rapide dans les formes graves.<br />

Les dermocorticoïdes sont utilisés dans<br />

certaines lésions cutanées, et les corticoïdes<br />

intra-articulaires dans les arthrites.<br />

4 / SUIVI DU LUPUS<br />

Lupus érythémateux disséminé — Syndrome des antiphospholipides<br />

Lupus Traitement*<br />

Clinique Peau, œdèmes HTA<br />

Articulations Ostéoporose<br />

Plèvre Infections<br />

Péricarde Ostéonécrose<br />

Thromboses<br />

Biologie Hémogramme<br />

Vitesse CRP<br />

de sédimentation<br />

Créatininémie Glycémie<br />

ECBU Kaliémie<br />

Protéinurie<br />

FAN<br />

Anti-ADN<br />

CH 50 C3 C4<br />

Examens Électrorétinogramme<br />

complémentaires (hydroxychloroquine)<br />

Les antipaludéens de synthèse :<br />

hydroxychloroquine à la posologie de<br />

6,5 mg/kg/j, soit en moyenne 400 mg/j,<br />

sont le traitement de fond du lupus, ils évitent<br />

les poussées et ne doivent pas être<br />

arrêtés.<br />

La toxicité des antipaludéens de synthèse<br />

est essentiellement rétinienne et nécessite<br />

la réalisation régulière d’un électrorétinogramme.<br />

Les immunosuppresseurs<br />

sont indiqués essentiellement dans les<br />

atteintes rénales prolifératives (glomérulonéphrite<br />

stade III et IV) et les atteintes<br />

neurologiques sévères.<br />

(* corticoïdes et immunosuppresseurs)<br />

SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES<br />

Le syndrome des antiphospholipides est l’association d’une manifestation<br />

clinique (thrombose artérielle, thrombose veineuse,<br />

pathologie obstétricale) et d’un marqueur biologique : anticoagulant<br />

circulant lupique (ACC) ou anticorps anticardiolipines<br />

(ACL) (tableau 5).<br />

Le syndrome des antiphospholipides (SAPL) peut être isolé<br />

(SAPL primaire), ou associé à une autre pathologie, le plus souvent<br />

auto-immune et notamment un lupus (SAPL secondaire).<br />

Épidémiologie<br />

Un à 5 % des sujets contrôles ont des ACL ; 15 à 30 % des<br />

lupiques ont un ACC ; 50 à 80 % un ACL. 30% des lupiques ont<br />

un SAPL.<br />

Le risque de thrombose est de 50 % à 20 ans au cours du<br />

lupus, s’il existe un ACC.<br />

Le risque de pertes fœtales est multiplié par 26 en cas d’APL.<br />

Un APL est trouvé dans 15 % des échecs de grossesse récurrents.<br />

Manifestations cliniques<br />

1. Thromboses<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

➙ Le cyclophosphamide<br />

est utilisé par voie IV en perfusion mensuelle.<br />

Un relais par azathioprine à 2<br />

mg/kg/j peut être proposé.<br />

➙ Le mycophénolate mofétil<br />

est indiqué dans les formes rénales de<br />

lupus. Il semble aussi efficace que le cyclophosphamide<br />

avec moins de toxicité,<br />

notamment gonadique et infectieuse.<br />

La place du rituximab<br />

(anticorps monoclonal anti-CD20) doit<br />

être précisée.<br />

Les thromboses veineuses sont les plus fréquentes. Elles sont<br />

localisées aux membres inférieurs et peuvent être associées ou<br />

non à des embolies pulmonaires. Certaines localisations inhabituelles<br />

sont décrites : les thromboses des membres supérieurs,<br />

les thromboses du système hépatobiliaire et les thromboses<br />

veineuses rénales.<br />

Les thromboses artérielles sont responsables d’atteintes<br />

neurologiques : accident vasculaire cérébral, accident ischémique<br />

transitoire. Elles peuvent toucher tous les territoires.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008<br />


La recherche d’APL fait partie des examens à demander<br />

devant une thrombose sans facteur favorisant retrouvé, ce<br />

d’autant qu’il s’agit d’un sujet jeune.<br />

2. Manifestations obstétricales<br />

Elles sont la conséquence d’une ischémie placentaire et sont<br />

dominées par les fausses couches spontanées : 3 précoces<br />

( 10 semaines d’aménorrhée), et les morts fœtales : une mort<br />

fœtale tardive ( 10 semaines d’aménorrhée), une mort néo -<br />

natale inexpliquée (tableau 5).<br />

3. Autres manifestations cliniques<br />

D’autres anomalies sont décrites :<br />

— cardiaques : épaississement valvulaire mitral ou aortique avec<br />

sténose ou insuffisance ;<br />

— livedo reticularis, purpura nécrotique, ulcères de jambes ;<br />

— neurologiques : chorée, surdité, myélite transverse, pseudosclérose<br />

en plaques ;<br />

— néphropathies : microangiopathie thrombotique ;<br />

— thrombocytopénie périphérique ;<br />

— anémie hémolytique auto-immune.<br />

Formes cliniques<br />

Le SAPL semble constitué de plusieurs entités distinctes : les<br />

SAPL avec thromboses veineuses ; les SAPL avec thromboses<br />

artérielles et atteintes microvasculaires (livedo, comitialité,<br />

néphropathie, valvulopathies) ; les SAPL obstétricaux.<br />

Un sujet ayant fait une thrombose veineuse sera à risque de<br />

thrombose veineuse, et ainsi pour les thromboses artérielles et<br />

les manifestations obstétricales.<br />

Le syndrome catastrophique des antiphospholipides est une<br />

défaillance multiviscérale, avec souvent hypertension artérielle<br />

maligne, secondaire à des thromboses multiples touchant plus<br />

de 3 organes : reins, poumons, système nerveux central, peau,<br />

associée à une thrombopénie, une coagulation intravasculaire<br />

disséminée.<br />

Les facteurs déclenchants sont les infections, l’arrêt des<br />

traitements anticoa gulants ou antiagrégants.<br />

La mortalité à court terme est de 50 %.<br />

Détection des anticorps<br />

antiphospholipides<br />

Les anticorps antiphospholipides (APL) regroupent l’anticoagulant<br />

circulant (ACC) de type lupique (antiprothrombinase) qui<br />

est détecté par des tests de coagulation recherchant une activité<br />

fonctionnelle (laboratoire d’hémostase) et les anticorps anticardiolipines<br />

(ACL) mis en évidence par des tests immunologiques<br />

ELISA (laboratoire d’immunologie).<br />

La présence d’un anticoagulant circulant de type lupique est<br />

suspecté sur un TCA allongé. Cependant, un TCA normal n’élimine<br />

pas sa présence. Après avoir éliminé un déficit en facteur<br />

de la coagulation, l’anticorps inhibiteur est mis en évidence<br />

par l’absence de correction de l’allongement du TCA après<br />

mélange entre le plasma du malade et celui du témoin. Le test<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 NOVEMBRE 2008<br />

de confirmation est un test de neutralisation qui corrige le temps<br />

de coagulation par l’adjonction de phospholipides.<br />

Contrairement à sa dénomination, l’anticoagulant circulant<br />

de type lupique, même s’il allonge le TCA, n’a pas d’effet anticoagulant,<br />

mais une action prothrombotique.<br />

Les tests immunologiques détectent les anticardiolipines IgG<br />

et IgM, anticorps anti-bêta-2-GP1 IgG et IgM.<br />

Au cours du SAPL, l’anticoagulant circulant de type lupique<br />

peut être présent isolément, ou associé aux CL.<br />

Les réactions sérologiques syphilitiques peuvent être faussement<br />

positives de façon dissociée VDRL positif mais TPHA<br />

négatif, la cardiolipine étant utilisée dans le VDRL. Un tel résultat<br />

de sérologie syphilitique impose la recherche d’un ACC et d’ACL.<br />

Intérêt de la recherche<br />

d’anticorps antiphospholipides<br />

et diagnostics différentiels<br />

La recherche d’APL fait partie des examens à demander<br />

devant une thrombose artérielle ou veineuse sans facteur favorisant,<br />

surtout si la localisation est inhabituelle et qu’il s’agit<br />

d’un sujet jeune, au même titre pour les thromboses veineuses<br />

que l’antithrombine III, la protéine C et S, la mutations Leiden<br />

du facteur V et la mutation de la prothrombine.<br />

Cette recherche est également utile devant des manifestations<br />

obstétricales (tableau 5), notamment des pertes fœtales lorsqu’il<br />

n’existe pas de causes anatomiques, hormonales ou chromosomiques<br />

évidentes.<br />

La présence d’anticorps antiphospholipides se rencontre dans<br />

de nombreuses circonstances (tableau 6).<br />

Tableau 5<br />

Définition du SAPL<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Association d’un signe clinique<br />

❚ thrombose artérielle ou veineuse (thrombose superficielle exclue)<br />

❚ pathologie obstétricale*<br />

avec un marqueur biologique<br />

❚ anticoagulant type lupique = antiprothrombinase<br />

❚ et/ou anticardiolipines à taux moyen ou élevé (AC IgG 40 GPL)<br />

contrôlé à 12 semaines (critères de Sydney)<br />

❚ moins de 5 ans entre événement clinique et positivité APL<br />

* Manifestations obstétricales :<br />

➙ 1 mort fœtale tardive 10 SA (fœtus morphologiquement normal)<br />

➙ 3 fausses couches spontanées 10 SA (sans anomalies anatomiques,<br />

hormonales ou chromosomiques de la mère et du père)<br />

➙ 1 naissance prématurée (fœtus morphologiquement normal)<br />

34 semaines du fait<br />

d’éclampsie ou de prééclampsie,<br />

ou de signes d’insuffisance placentaire : anomalies doppler<br />

suggérant une hypoxie fœtale, oligohydramnios, retard de croissance<br />

intra-utérin (poids de naissance 10e percentile âge gestationnel),<br />

hématome rétroplacentaire.<br />

R Q 117<br />

1941


Offre valable jusqu’au 01/09/09<br />

Tableau 6<br />

I-8-Q117<br />

Traitement<br />

Lupus érythémateux disséminé — Syndrome des antiphospholipides<br />

Causes d’anticorps antiphospholipides<br />

❚ Pathologies auto-immunes ou systémiques : lupus,<br />

syndrome de Sjögren, maladie de Horton…<br />

❚ Hémopathies lymphoïdes (lymphomes, LLC…)<br />

❚ Infections (virales VIH, CMV, syphilis, endocardite…)<br />

❚ Vaccinations<br />

❚ Médicaments : chlorpromazine, hydantoïnes, quinine, quinidines, anti-TNF<br />

❚ Néoplasies<br />

La présence des anticorps antiphospholipides peut être asymptomatique<br />

ou entrer dans le cadre d’un syndrome des antiphospholipides.<br />

Le traitement du SAPL, n’étant pas au programme de l’ECN,<br />

n’est pas détaillé. Toutefois, le traitement des thromboses veineuses<br />

ou artérielles est le même que celui de toute thrombose, avec<br />

cependant des durées prolongées. La prévention des complications<br />

obstétricales fait appel à l’association aspirine à faibles doses<br />

et héparine de bas poids moléculaire à doses préventives. ■<br />

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Maladies systémiques<br />

Kahn MF, Piette JC, Peltier AP, Meyer O.<br />

Paris : Flammarion<br />

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MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Au cours du LED :<br />

1 l’atteinte articulaire est responsable d’érosions<br />

articulaires ;<br />

2 l’atteinte cutanée est essentiellement bulleuse ;<br />

3 les signes ophtalmologiques sont fréquents ;<br />

4 la pleurésie est exsudative.<br />

Au cours du SAPL :<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

le livedo est fréquent ;<br />

le diagnostic est retenu s’il existe 2 fausses couches<br />

précoces ;<br />

les ACC sont toujours associés aux ACL ;<br />

le traitement des thromboses veineuses profondes<br />

est de 3 mois.<br />

C / QCM<br />

Parmi les signes cliniques et biologiques, quels sont<br />

ceux qui sont fréquents au cours du LED ?<br />

1 l’éruption cutanée érythémato-squameuse<br />

localisée aux coudes et aux genoux ;<br />

2 les arthralgies ;<br />

3 la lymphopénie ;<br />

4 les anticorps anticentromères ;<br />

5 la CRP 80 mg/L.<br />

Réponses : A : F, F, F, V / B : V, F, F, F / C : 2, 3.<br />

✁À renvoyer à : Global Média Santé. Service abonnements :<br />

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RDP0908


OBJECTIFS<br />

Seule thérapeutique de certaines défaillances terminales<br />

d’organe, la transplantation a connu un développement<br />

important au cours des vingt dernières années. Malgré<br />

l’augmentation du nombre de prélèvements, le développement<br />

de la transplantation est freiné par la pénurie de donneurs. Une<br />

transplantation d’organe nécessite un acte chirurgical parfois<br />

lourd et la prise au long cours d’un traitement immunosuppresseur,<br />

elle ne peut donc être proposée qu’à des malades dont<br />

l’état permet d’envisager cet acte et ce traitement.<br />

Épidémiologie et résultats de la transplantation<br />

d’organes<br />

Généralités<br />

Des transplantations de poumon, de cœur, de foie, de pancréas,<br />

d’intestin et de rein sont réalisées couramment en<br />

France. Certains patients relèvent d’une transplantation combinée<br />

de plusieurs organes : rein-pancréas, foie-rein, cœurpoumon,<br />

foie-intestin. Plus exceptionnellement, des patients<br />

ont pu bénéficier d’une greffe de tissus composites : mains ou<br />

partie du visage.<br />

Transplantation d’organes thoraciques<br />

I - 8 Q 127<br />

TRANSPLANTATION<br />

D’ORGANES<br />

Aspects épidémiologiques<br />

et immunologiques ; principes de traitement<br />

et surveillance ; complications et pronostic ;<br />

aspects éthiques et légaux<br />

EXPLIQUER les aspects épidémiologiques<br />

et les résultats des transplantations d’organes<br />

et l’organisation administrative.<br />

EXPLIQUER les principes de choix<br />

dans la sélection du couple donneur-receveur<br />

et les modalités de don d’organes.<br />

ARGUMENTER les principes thérapeutiques,<br />

et les modalités de surveillance d’un sujet<br />

transplanté.<br />

ARGUMENTER les aspects médico-légaux<br />

et éthiques liés aux transplantations d’organes.<br />

Dr Jean-Michel Rebibou<br />

Service de néphrologie et transplantation rénale, CHU de Dijon, 21034 Dijon, France<br />

Université de Bourgogne & INSERM UMR 645<br />

jmrebibou@gmail.com<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

RR<br />

1. Greffe pulmonaire et cardiopulmonaire<br />

Épidémiologie : plus de 200 greffes pulmonaires ou cardiopulmonaires<br />

sont réalisées chaque année. Ce nombre demeure inférieur<br />

aux besoins, puisque plus de 250 nouveaux patients sont<br />

inscrits tous les ans, et plus de 40 malades décèdent pendant la<br />

période d’attente.<br />

Indications et résultats : la greffe pulmonaire ou cardiopulmonaire<br />

est indiquée chez les patients présentant une insuffisance respiratoire<br />

chronique avancée avec une dyspnée stade III ou IV et un<br />

pronostic vital estimé à moins de 18 mois. Les principales pathologies<br />

nécessitant une greffe sont la mucoviscidose, l’emphysème<br />

et les fibroses pulmonaires. L’hypertension artérielle pulmonaire<br />

constitue 40 % des indications de greffe combinée<br />

cœur-poumons.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009 279


RR Q 127 I - 8<br />

TRANSPLANTATION D’ORGANES<br />

Les résultats des greffes pulmonaires et cardiopulmonaires<br />

s’améliorent, les survies atteignent 65 % à 1 an et 45 % à 5 ans.<br />

2. Greffe cardiaque<br />

Épidémiologie : plus de 350 greffes cardiaques sont réalisées<br />

chaque année. Malheureusement, cela ne permet pas de couvrir<br />

les besoins, car, près de 500 nouveaux patients sont inscrits,<br />

chaque année, sur la liste nationale d’attente, et environ<br />

70 malades inscrits décèdent avant d’avoir pu être greffés.<br />

Indications et résultats : la greffe cardiaque est indiquée chez des<br />

patients présentant une insuffisance cardiaque sévère avec une<br />

dyspnée stade III ou IV, mais aussi parfois chez des patients<br />

atteints de cardiomyopathie s’accompagnant d’un risque élevé<br />

de mort subite.<br />

Avec le développement des dispositifs d’assistance circulatoire,<br />

les modalités de prise en charge de l’insuffisance cardiaque<br />

aiguë sont en évolution constante. Les résultats de la greffe cardiaque<br />

s’améliorent, les pourcentages de survie atteignent 75 %<br />

à 1 an et 65 % à 5 ans.<br />

Transplantation d’organes abdominaux<br />

1. Greffe hépatique<br />

Épidémiologie : plus de 1000 patients bénéficient d’une greffe<br />

hépatique chaque année. Plus de 1300 nouveaux patients sont<br />

inscrits chaque année et plus de 100 patients décèdent chaque<br />

année pendant leur période d’attente.<br />

Indications et résultats : la majorité des patients sont transplantés<br />

pour un carcinome hépatocellulaire ou une insuffisance hépatique<br />

sévère sur cirrhose, que celle-ci soit liée à une intoxication<br />

alcoolique, une infection virale, une atteinte auto-immune, une<br />

maladie génétique… Mais la greffe de foie peu également être<br />

indiquée pour des hépatites aiguës fulminantes, pour d’autres<br />

tumeurs hépatiques ou pour certaines<br />

maladies métaboliques.<br />

La survie des patients après transplantation<br />

hépatique est bonne: 83 % à un an,<br />

73 % à 5 ans.<br />

2. Greffe pancréatique<br />

Entre 90 et 100 greffes pancréatiques<br />

sont réalisées chaque année. Ce sont<br />

essentiellement des greffes combinées<br />

pancréas-rein pour un diabète de type 1<br />

compliqué d’insuffisance rénale. La greffe<br />

préemptive, à un stade d’insuffisance rénale ne nécessitant pas<br />

encore la dialyse, semble être la méthode de choix. Les résultats<br />

de la greffe pancréatique sont assez bons, avec 85 % environ<br />

des pancréas fonctionnels à un an.<br />

3. Greffe intestinale<br />

Très peu de greffes intestinales sont réalisées en France. Elles<br />

sont essentiellement proposées à des enfants atteints d’une<br />

pathologie digestive imposant une alimentation parentérale au<br />

long cours et qui présentent des complications sévères de cette<br />

alimentation: sepsis répétés ou atteinte hépatique.<br />

280<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009<br />

son<br />

Écoutez sur www.larevuedupraticien.fr<br />

l’interview du Dr Alain Tenaillon ancien<br />

responsable pôle stratégie-greffe, direction<br />

médicale et scientifique de l’Agence<br />

de la biomédecine. Réagissez et posez<br />

vos questions en ligne.<br />

Greffe rénale<br />

Épidémiologie : environ 2500 greffes rénales sont réalisées<br />

chaque année, mais 3000 nouveaux patients sont inscrits chaque<br />

année sur la liste d’attente. Les médianes d’attente augmentent,<br />

pour dépasser 18 mois en 2007. En France, moins de 10 % des<br />

patients sont greffés avec un rein de donneur vivant, ce pourcentage<br />

dépasse 40 % aux États-Unis.<br />

Indications : la greffe rénale est indiquée pour les patients insuffisants<br />

rénaux chroniques nécessitant la prise en charge en épuration<br />

extrarénale. Elle peut également être proposée à des<br />

patients avant ce stade (clairance de la créatinine < 20 mL/min),<br />

avec des résultats très satisfaisants. Il est donc important, chez<br />

l’insuffisant rénal chronique, de discuter la possibilité d’une greffe<br />

rénale et de réaliser un bilan précoce (clairance de la créatinine<br />

< 30 mL/min).<br />

Résultats: la survie des patients après greffe rénale dépasse 95 %<br />

à 1 an. La survie des greffons est proche de 95 % à 1 an et atteint<br />

80 % à 5 ans.Les meilleurs résultats sont observés dans les<br />

greffes à partir de donneurs vivants. La greffe rénale apporte aux<br />

patients un bénéfice en termes d’espérance et de qualité de vie.<br />

Donneurs d’organes<br />

Donneurs cadavériques<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1. Donneurs décédés en mort encéphalique<br />

Définition de la mort encéphalique: elle survient du fait d’un arrêt brutal<br />

ou progressif de la circulation cérébrale. Cet état très particulier<br />

doit son existence à la réanimation et surtout à la ventilation artificielle<br />

qui permettent au sujet en mort encéphalique de conserver<br />

transitoirement une hémodynamique satisfaisante. Cliniquement,<br />

en l’absence de facteur confondant tel qu’une hypothermie profonde<br />

ou une intoxication majeure aux psychotropes,<br />

elle est caractérisée par trois éléments:<br />

coma aréactif avec absence totale de<br />

conscience et d’activité motrice spontanée;<br />

abolition des réflexes du tronc cérébral; et<br />

absence de ventilation spontanée.<br />

Pour porter le diagnostic de mort encéphalique,<br />

la loi demande que soit contrôlée l’absence<br />

d’activité cérébrale soit par deux électro-encéphalogrammes<br />

avec un tracé plat et<br />

aréactif, soit par une angiographie montrant<br />

l’absence de vascularisation cérébrale.<br />

Épidémiologie : les décès en mort encéphalique sont rares,<br />

moins de 1 % des décès hospitaliers. Plus de 3000 décès en<br />

mort encéphalique sont recensés annuellement, environ<br />

1500 donneurs sont prélevés. Les principales causes de nonprélèvement<br />

sont l’opposition manifestée par le défunt ou son<br />

entourage, et l’existence d’une contre-indication médicale. Il<br />

n’existe pas d’âge limite pour un prélèvement d’organe, seul<br />

l’état physiologique de l’organe est pris en considération, notamment<br />

pour les prélèvements de foie et de rein.


TABLEAU<br />

Bilan avant inscription pour éventuelle<br />

transplantation d’organe<br />

Groupe ABO<br />

Phénotypage complet en cas de transfusion<br />

Phénotype ou génotype HLA<br />

Recherche d’Ac anti-HLA<br />

À plusieurs reprises de façon systématique et après tout événement<br />

immunisant<br />

Recherche de pathologies infectieuses<br />

Sérologies VIH 1 et 2, VHC, VHB, HTLV, syphilis, toxoplasmose, CMV<br />

Sérologie EBV réalisée systématiquement<br />

Autres recherches en fonction du contexte clinique<br />

Recherche de pathologie néoplasique<br />

En fonction du sexe, de l’âge et des antécédents<br />

Évaluation cardiovasculaire<br />

Fonction de l’organe attendu, de l’urgence de la greffe, de l’âge<br />

et des antécédents du receveur<br />

Bilan spécifique lié à l’organe attendu<br />

2. Donneurs décédés par arrêt cardiaque<br />

Dans des circonstances bien définies, des organes peuvent<br />

être prélevés après arrêt cardiaque. Actuellement, en France,<br />

seuls les reins sont prélevés chez ce type de donneurs et uniquement<br />

dans quelques centres pilotes.<br />

Donneurs vivants<br />

Des greffes rénales ou hépatiques sont réalisées à partir de<br />

donneurs vivants. Le cercle des personnes susceptibles de<br />

donner un organe à un malade est défini par la loi de bioéthique.<br />

Ce sont le père ou la mère du receveur et par dérogation les<br />

frères, sœurs, conjoint, fils, filles, grands-parents, oncles, tantes,<br />

cousins germains, conjoints du père ou de la mère et toute personne<br />

pouvant apporter la preuve d’une vie commune d’au<br />

moins deux ans avec le receveur.<br />

Les candidats au don sont reçus par un comité spécifique qui<br />

s’assure de l’information reçue par le candidat, notamment sur le<br />

rapport bénéfice/risque de l’intervention et qui délivre l’autorisation<br />

de réaliser le prélèvement. Le candidat doit également exprimer<br />

sa volonté de donner un organe ou une partie d’organe<br />

devant un magistrat.<br />

1. Donneurs vivants de rein<br />

Les candidats potentiels doivent faire l’objet d’exploration<br />

complète pour :<br />

– évaluer le fonctionnement rénal et le retentissement prévisible<br />

de la néphrectomie;<br />

– écarter toute pathologie potentiellement transmissible infectieuse<br />

ou cancéreuse;<br />

– écarter toute pathologie augmentant le risque opératoire de<br />

façon significative;<br />

– réaliser les examens morphologiques nécessaires pour l’intervention.<br />

2. Donneurs vivants de foie<br />

Il est possible de réaliser une greffe à partir d’une partie du foie<br />

d’un donneur vivant. Une partie du foie est prélevée, soit le lobe<br />

gauche pour les receveurs pédiatriques soit le lobe droit ou le foie<br />

droit pour un adulte. Le potentiel de régénération du parenchyme<br />

hépatique permet au donneur et au receveur de disposer d’une<br />

masse hépatique suffisante. Le donneur doit, bien entendu, bénéficier<br />

des mêmes investigations pour le risque de pathologie transmissible<br />

et le risque opératoire et d’un bilan hépatique complet.<br />

Receveurs<br />

Tout candidat à une greffe d’organe doit faire l’objet d’un bilan<br />

spécifique (tableau) et éventuellement de gestes préparatoires<br />

pour la transplantation d’organe. Ce bilan a pour but: d’éliminer<br />

les contre-indications à la greffe telles qu’une infection active,<br />

une pathologie néoplasique évolutive ou une pathologie psychiatrique<br />

grave pouvant compromettre l’adhésion au traitement; de<br />

s’assurer de la faisabilité chirurgicale; d’évaluer le risque cardiovasculaire;<br />

et enfin d’évaluer le rapport bénéfice/risque. Dans<br />

certains cas, des gestes invasifs peuvent être nécessaires avant<br />

l’inscription sur la liste d’attente (exemple : angioplastie coronaire<br />

avant greffe rénale ou hépatique).<br />

Ce bilan comprend obligatoirement les sérologies dites de<br />

« sécurité sanitaire » (VIH 1+2, HTLV 1 et 2, VHC, VHB, TPHA,<br />

toxoplasmose, CMV) et une recherche de foyer infectieux. Le but<br />

est de traiter toute infection pouvant être aggravée par le traitement<br />

immunosuppresseur et menacer la vie du patient. Bien que<br />

les sérologies de VHB, VHC et VIH soient obligatoires, l’infection<br />

par ces virus ne constitue pas une contre-indication absolue<br />

à une greffe.<br />

À l’exception des cancers cutanés non mélaniques, une pathologie<br />

néoplasique évolutive constitue une contre-indication à la<br />

transplantation. Le carcinome hépatocellulaire est une indication<br />

fréquente de greffe hépatique. Pour les autres pathologies néoplasiques,<br />

il faut, pour une transplantation rénale, envisager un<br />

délai entre le traitement curatif et l’inscription sur la liste d’attente.<br />

Pour une transplantation d’organe vital, ce type de délai est rarement<br />

envisageable.<br />

Principes du choix d’un receveur<br />

Généralités<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR127<br />

L’attribution des organes est réalisée, sauf exception rare, en<br />

isogroupe ABO afin de protéger l’accès à la greffe des patients de<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009 281


RR Q 127 I - 8<br />

TRANSPLANTATION D’ORGANES<br />

groupe O. In fine, la décision de transplantation appartient<br />

toujours au(x) médecin(s) de l’équipe de greffe.<br />

Ces attributions sont réalisées selon des règles qui peuvent<br />

être consultées sur le site de l’Agence de la biomédecine<br />

(www.agence-biomedecine.fr).<br />

Immunisation anti-HLA<br />

Chaque individu porte à la surface de l’ensemble des cellules<br />

de son organisme des protéines de surface appelées antigènes<br />

(Ag) d’histocompatibilité ou Ag HLA pour human leukocytes<br />

antigens. Ces molécules jouent un rôle essentiel dans la distinction<br />

par le système immunitaire du « soi » et du « non-soi ».<br />

Lorsqu’un individu rencontre des Ag HLA d’un autre individu, il<br />

peut développer des Ac (anti-HLA) contre les Ag qui sont différents<br />

de ses propres Ag. La grossesse est la seule situation naturelle qui<br />

puisse engendrer une immunisation anti-HLA. Pendant une<br />

grossesse, le système immunitaire de la mère entre en contact<br />

avec des cellules de son enfant dont les antigènes HLA sont<br />

(pour la moitié d’entre eux) différents des siens. Elle peut donc<br />

développer une immunisation contre ces antigènes différents<br />

(qui sont ceux du père de l’enfant). Une immunisation peut aussi<br />

être acquise dans d’autres circonstances: transfusion sanguine,<br />

précédente transplantation d’organe, greffe de tissus allogénique.<br />

Des Ac anti-HLA dirigés contre le donneur peuvent provoquer<br />

un rejet suraigu. Dans ce type de rejet, le greffon peut être<br />

nécrosé en quelques heures.<br />

Pour prévenir le rejet suraigu, il est nécessaire d’éviter les transplantations<br />

avec un greffon portant un Ag HLA contre lequel le<br />

receveur potentiel est immunisé.<br />

En greffe rénale, le délai d’ischémie froide admissible permet la<br />

réalisation d’un cross-match avant la greffe. C’est un test biologique<br />

qui consiste à incuber les lymphocytes du receveur avec le<br />

sérum du donneur et du complément. Si cette incubation entraîne<br />

une mort cellulaire significative, cela signe la présence chez le<br />

receveur potentiel d’Ac dirigés contre les Ag du donneur, et il est<br />

préférable de ne pas réaliser la greffe. Le délai d’ischémie froide<br />

toléré en greffe rénale est plus long que pour le foie et les organes<br />

thoraciques, ce qui autorise la réalisation de ce test. Il est essentiel<br />

de réaliser des recherches d’Ac anti-HLA chez tout candidat à la<br />

greffe, d’éviter chez ces patients les stimulations allogéniques<br />

comme les transfusions sanguines. Si une transfusion sanguine<br />

est impérative, elle doit être suivie de recherches répétées d’Ac<br />

anti-HLA.<br />

Choix du receveur en greffe pulmonaire<br />

En greffe pulmonaire, le délai entre le prélèvement et la greffe<br />

(appelé ischémie froide, car l’organe est plongé dans un liquide<br />

de conservation à 4 °C) doit être le plus bref possible. Le choix du<br />

receveur repose donc essentiellement sur le groupe sanguin et<br />

sur des critères morphologiques dont le périmètre thoracique du<br />

donneur et du receveur.<br />

282<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009<br />

Choix du receveur en greffe cardiaque<br />

Lors d’une greffe cardiaque, la durée d’ischémie froide doit<br />

également demeurer extrêmement brève. Le choix du receveur<br />

pour un organe donné repose donc sur le groupe sanguin et sur<br />

des critères morphologiques tels que poids et taille.<br />

Choix du receveur pour une greffe hépatique<br />

Pour une partie importante des foies prélevés, l’attribution des<br />

organes est réalisée par une attribution directe à un patient en<br />

fonction d’un score. Ce score prend en compte des paramètres<br />

biologiques tels que l’INR et la créatininémie mais aussi l’étiologie<br />

de la maladie hépatique, l’indication de la greffe (notamment<br />

pour les cancers hépatocellulaires) et la durée d’attente.<br />

Choix d’un receveur en greffe rénale<br />

Le délai d’ischémie froide admissible pour une greffe rénale est<br />

plus long. Mais la fréquence des immunisations impose la réalisation<br />

quasi systématique d’un cross-match. La compatibilité<br />

pour les Ag HLA a un impact sur le devenir à long terme des greffons<br />

rénaux.<br />

L’attribution des greffons prend en compte la compatibilité HLA<br />

entre donneur et receveur, la durée d’attente et les possibilités<br />

d’accès à la greffe du donneur en fonction de ses caractéristiques<br />

immunologiques.<br />

Traitement immunosuppresseur<br />

et suivi d’un transplanté<br />

Généralités<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Il n’existe pas à l’heure actuelle de traitement immunosuppresseur<br />

de référence. Le traitement utilisé peut varier en fonction<br />

de l’organe greffé, des caractéristiques du patient (première<br />

greffe ou retransplantation, âge, diabète, etc.) et de l’équipe de<br />

greffe. De manière générale, l’immunosuppression est plus<br />

intense au cours des premières semaines de greffe quand le<br />

risque de rejet est maximal. Le traitement est ensuite diminué<br />

très progressivement. Ce traitement doit être poursuivi à vie ou<br />

jusqu’au retour en dialyse pour les greffés rénaux. Tout arrêt ou<br />

diminution brutale entraîne un risque de rejet aigu et de destruction<br />

du greffon. Toute modification du traitement immunosuppresseur<br />

doit être discutée avec l’équipe de greffe qui prend en<br />

charge le patient.<br />

Les différents traitements immunosuppresseurs<br />

Tous les médicaments utilisés freinent globalement la réponse<br />

immune. Ceci entraîne une augmentation du risque infectieux et<br />

du risque de cancer.<br />

1. Traitements d’induction<br />

Ce sont des anticorps mono- ou polyclonaux utilisés lors des<br />

premiers jours de greffe lorsque le risque de rejet est maximal. En<br />

greffe rénale, ils permettent une introduction retardée des anticalcineurines,<br />

qui sont néphrotoxiques.


Transplantation d’organes<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

Il existe une pénurie considérable d’organes, et certains<br />

patients décèdent faute de greffon.<br />

Les transfusions doivent, si possible, être évitées<br />

chez les patients susceptibles d’être transplantés.<br />

Les traitements immunosuppresseurs ont<br />

une pharmacocinétique complexe qui doit rendre prudent<br />

lors de l’introduction de tout nouveau médicament.<br />

Toute interruption du traitement immunosuppresseur<br />

expose à un risque de rejet sévère.<br />

Les patients transplantés peuvent développer<br />

des infections sévères.<br />

Le traitement immunosuppresseur augmente le risque<br />

de néoplasie.<br />

Les transplantés rénaux ont un risque cardiovasculaire<br />

multiplié par cinq.<br />

Les Ac monoclonaux les plus utilisés sont dirigés contre le<br />

récepteur de l’IL2, ils bloquent l’action de cette cytokine dont le<br />

rôle est essentiel dans la réponse immune. Plus rarement, c’est<br />

un Ac anti-CD3 qui bloque l’interaction entre le lymphocyte T et la<br />

cellule présentatrice de l’Ag. Des Ac polyclonaux dirigés contre<br />

les lymphocytes ou les thymocytes humains sont très utilisés, ils<br />

ont une action de déplétion lymphocytaire et bloquent certaines<br />

molécules de surface.<br />

2. Anticalcineurines<br />

Deux médicaments sont actuellement utilisés, la ciclosporine<br />

et le tacrolimus. Ils bloquent la cascade d’événements intracellulaires<br />

engendrés par l’activation du lymphocyte T.<br />

Ces médicaments ont un indice thérapeutique étroit nécessitant<br />

un suivi régulier du taux sanguin. Leur métabolisme hépatique<br />

utilise les cytochromes CYP3A4 et CYP3A5. Les médicaments<br />

agissant sur ces cytochromes peuvent modifier de façon<br />

très importante la pharmacocinétique des anticalcineurines et<br />

exposer au risque du surdosage (médicaments inhibiteurs tels<br />

que les dérivés azolés, la carbamazépine, la pristinamycine, certains<br />

macrolides) ou à celui de sous-dosage et de rejet (médicaments<br />

inducteurs tels que la rifampycine).<br />

Ces drogues ont de nombreux effets secondaires tels que diabète,<br />

HTA ou hyperlipidémie. Ils ont une toxicité rénale certaine qui<br />

peut conduire certains patients à l’insuffisance rénale terminale.<br />

3. Inhibiteurs de mTOR<br />

Ces médicaments (sirolimus et évérolimus) inhibent la prolifération<br />

des lymphocytes T engendrée par la stimulation du récepteur<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR127<br />

de l’IL2. Ils ont également un métabolisme hépatique avec de<br />

nombreuses interférences médicamenteuses. Ils peuvent entraîner,<br />

entre autres effets secondaires, un retard de cicatrisation,<br />

des hypertriglycéridémies sévères, des thrombo pénies, des<br />

œdèmes localisés, des aphtes et des pneumo pathies.<br />

En raison de la pharmacocinétique complexe des anticalcineurines<br />

et des inhibiteurs de m-TOR, il est nécessaire de rechercher<br />

une interaction avec ces drogues avant l’introduction de tout<br />

nouveau traitement.<br />

4. Inhibiteurs des purines<br />

Les dérivés de l’acide mycophénolique agissent par inhibition de la<br />

synthèse de novo des purines.<br />

Leurs effets secondaires sont essentiellement hématologiques<br />

et digestifs. Leur administration chez la femme en âge de procréer<br />

impose une contraception.<br />

L’azathioprine est moins utilisé depuis l’apparition des dérivés<br />

de l’acide mycophénolique, il inhibe la synthèse des nucléotides<br />

puriques. Sa toxicité est essentiellement hématologique et<br />

hépatique.<br />

5. Corticoïdes<br />

Ils sont en général utilisés à des doses élevées lors des premiers<br />

jours de la transplantation, puis diminués de façon progressive.<br />

Les transplantés sont donc exposés aux complications de la corticothérapie<br />

: rétention hydrosodée, diabète, HTA, ostéoporose,<br />

fragilité cutanée.<br />

Complications et modalités de suivi d’un patient<br />

immunodéprimé<br />

1. Rejets<br />

Rejet suraigu : ce type de rejet est devenu très rare, il est le plus<br />

souvent secondaire à la présence d’Ac préformés contre le greffon.<br />

Il conduit à la destruction du greffon en quelques heures.<br />

Rejet aigu : la fréquence du rejet aigu varie suivant l’organe transplanté<br />

(15 à 20 % en greffe rénale). Ce type de rejet est le plus<br />

souvent réversible, il se manifeste par une augmentation de la<br />

créatininémie en greffe rénale, une élévation des enzymes hépatiques<br />

en greffe de foie, une dysfonction échocardiographique<br />

dans les greffes cardiaques, une toux, une dyspnée et/ou des<br />

anomalies radiologiques ou gazométriques chez les transplantés<br />

pulmonaires. Quel que soit l’organe greffé, il n’existe pas de<br />

signe clinique, radiologique ou biologique spécifique du rejet, et<br />

le diagnostic de certitude ne peut être qu’histologique. Le traitement<br />

repose le plus souvent sur des doses très élevées de corticoïdes,<br />

éventuellement sur l’utilisation d’Ac monoclonaux (anti-<br />

CD3, anti CD-20) ou polyclonaux.<br />

Rejet chronique : le rejet chronique est un processus de destruction<br />

progressive des greffons dont certains déterminants ne sont<br />

pas immunologiques. Le diagnostic est histologique, et il<br />

n’existe pas de traitement réellement efficace de cette altération<br />

progressive du greffon. En greffe rénale, il se manifeste par une<br />

hypertension artérielle, une détérioration de la fonction rénale et<br />

une protéinurie. En greffe hépatique, les manifestations sont une<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009 283


RR Q 127 I - 8<br />

TRANSPLANTATION D’ORGANES<br />

fibrose centrolobulaire avec destructions des canaux biliaires.<br />

En greffe cardiaque, le rejet chronique se manifeste sous forme<br />

d’un athérome coronarien. En greffe pulmonaire, les lésions de<br />

bronchiolite oblitérante sont les manifestations classiques du<br />

rejet chronique.<br />

2. Infections<br />

En raison de l’immunosuppression, les patients transplantés<br />

présentent des infections de façon plus fréquente que la population<br />

générale. Ces infections sont en générale plus sévères et<br />

peuvent prendre un caractère fulgurant. Certaines infections peu<br />

ou pas symptomatiques dans la population générale peuvent<br />

s’avérer sévères chez le transplanté.<br />

Tout syndrome infectieux chez le transplanté doit faire l’objet<br />

d’une évaluation rapide afin d’en identifier la cause. Il est recommandé<br />

de contacter l’équipe de greffe pour tout syndrome infectieux<br />

sévère ou inexpliqué.<br />

Infections bactériennes : la fréquence des infections à germes<br />

banaux est plus élevée, et les transplantés sont particulièrement<br />

sensibles à certaines infections bactériennes telles que la tuberculose,<br />

la légionellose et la listériose.<br />

Infections virales : l’infection à cytomégalovirus est une complication<br />

classique de la transplantation. Elle se manifeste par de la<br />

fièvre associée à une leucopénie et à une élévation des enzymes<br />

hépatiques. Dans certains cas, des manifestations viscérales<br />

sévères (pneumopathie, colite) peuvent apparaître. La plupart<br />

des équipes effectuent un suivi systématique de l’antigénémie<br />

virale ou de la PCR. Son traitement repose sur le ganciclovir, sa<br />

fréquence diminue depuis l’utilisation de traitements prophylactiques.<br />

La varicelle est souvent grave chez le transplanté et peut être à<br />

l’origine de pneumopathies ou d’hépatites sévères.<br />

284<br />

Qu’est-ce qui peut tomber<br />

à l’examen ?<br />

La transplantation d’organe n’est plus tout à fait une<br />

thérapeutique d’exception.<br />

D’éventuelles questions dans un cas clinique peuvent<br />

porter sur le diagnostic de la mort encéphalique<br />

et la possibilité de prélèvement dans la prise en charge<br />

d’un coma grave.<br />

La transplantation peut être abordée dans des cas<br />

cliniques sur des défaillances graves d’organe (cirrhose,<br />

insuffisance rénale terminale, insuffisance cardiaque).<br />

Enfin, dans la prise en charge d’un transplanté,<br />

il peut être important de s’assurer que le candidat<br />

connaît les erreurs à ne pas commettre.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 février 2009<br />

Les transplantés sont également susceptibles de développer<br />

des infections sévères à Herpesvirus 1 et 2.<br />

Infections parasitaires et fongiques : l’infection à Pneumocystis est<br />

fréquente et grave chez le transplanté, ce qui justifie une prophylaxie<br />

sytématique. Les infections à Candida, Apergillus, et les<br />

cryptococcoses ont également une fréquence accrue.<br />

3. Pathologies néoplasiques<br />

Le traitement immunosuppresseur multiplie le risque de pathologie<br />

néoplasique par trois.<br />

Cette augmentation est plus importante chez les transplantés<br />

d’un organe thoracique que chez les transplantés rénaux ou<br />

hépatiques.<br />

Elle porte essentiellement, mais pas seulement, sur les pathologies<br />

néoplasiques viro-induites.<br />

L’incidence des cancers cutanés est très élevée avec, contrairement<br />

à la population générale, une incidence des spinocellulaires<br />

plus élevée que celle des basocellulaires. Tout transplanté<br />

doit bénéficier d’une surveillance dermatologique annuelle et de<br />

conseils de photoprotection.<br />

Les syndromes lymphoprolifératifs sont une des complications<br />

néoplasiques les plus fréquentes après greffe. Il existe un lien<br />

étroit entre infection à EBV et syndrome lymphoprolifératif après<br />

transplantation.<br />

Le sarcome de Kaposi est beaucoup plus fréquent dans certaines<br />

populations de transplantés, il s’agit également d’une tumeur<br />

viro-induite, le virus en cause étant le HHV8.<br />

Les néoplasies muqueuses ont aussi une incidence accrue, ce<br />

qui justifie une surveillance systématique.<br />

4. Complications cardiovasculaires<br />

Elles sont particulièrement fréquentes, notamment en raison<br />

du diabète, de l’hyperlipidémie et de l’hypertension artérielle<br />

induits par les immunosuppresseurs.<br />

Les transplantés rénaux ont un risque cardiovasculaire cinq<br />

fois plus élevé que la population générale.<br />

La maladie cardio vasculaire constitue la première cause de<br />

décès chez le transplanté rénal, elle est également à l’origine<br />

d’une morbidité très importante.<br />

La prévention du risque cardiovasculaire doit être particulièrement<br />

stricte chez les patients transplantés.<br />

5. Complications osseuses<br />

Elles sont essentiellement secondaires à la corticothérapie prolongée,.<br />

Elles sont plus complexes chez les transplantés rénaux, car<br />

elles viennent s’ajouter aux pathologies osseuses secondaires à<br />

l’insuffisance rénale.<br />

Organisation administrative<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

La greffe d’organe ne peut être réalisée que dans des établissements<br />

publics par des équipes autorisées.<br />

L’Agence de la biomédecine a été créée pour gérer différents<br />

aspects de l’organisation de la transplantation.


Offre valable jusqu’au 01/12/09<br />

Parmi ces missions :<br />

– la gestion de la liste d’attente;<br />

– la répartition et l’attribution des greffons;<br />

– l’évaluation des activités de prélèvement et de greffe;<br />

– la promotion de la greffe et l’information du public;<br />

– la gestion du registre national du refus.<br />

Aspects éthiques et médicaux légaux<br />

Aspects éthiques<br />

La loi énonce quatre principes majeurs :<br />

– le consentement: le prélèvement d’organe sur une personne<br />

décédée ne peut être envisagé que si cette personne n’a pas<br />

fait connaître de son vivant le refus d’un tel prélèvement (notion<br />

de consentement présumé);<br />

– l’anonymat : elle est imposée à toute personne détentrice d’informations<br />

relatives au donneur et au receveur;<br />

– la gratuité;<br />

– l’interdiction de toute forme de publicité.<br />

Aspects médico-légaux<br />

1. Conditions cliniques du prélèvement d’organe<br />

Elles ont été abordées plus haut.<br />

2. Règles de sécurité sanitaire et de traçabilité<br />

Avant le prélèvement, il est essentiel de reconstituer au mieux<br />

l’histoire clinique du donneur pour dépister toute pathologie<br />

potentiellement transmissible qui contre-indiquerait celui-ci.<br />

La recherche de certaines infections est obligatoire: VHB,<br />

VHC, VIH 1 et 2, HTLV, syphilis, CMV, toxoplasmose. La pré-<br />

BULLETIN D’ABONNEMENT<br />

OUI,<br />

Je règle mon abonnement au prix de 125 € par :<br />

Chèque à l’ordre de Global Média Santé<br />

Carte bancaire<br />

Validité : CW :<br />

Signature obligatoire :<br />

(3 derniers chiffres figurant<br />

au dos de votre carte bancaire)<br />

Pour tous renseignements : abo@gmsante.fr - Tél. : 01 55 62 69 75 - Fax : 01 55 62 69 56<br />

POUR EN SAVOIR<br />

Q RR127<br />

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données publiées<br />

dans cet article.<br />

Calmus Y. Transplantation hépatique pour cancer. Rev Prat 2008;58:1745-8.<br />

Kimmoun E, Samuel D. Transplantation hépatique. Rev Prat 2004;54:15-6.<br />

Haloun A, Despins P. Transplantation pulmonaire dans la mucoviscidose. Rev<br />

Prat 2003;53:167-70.<br />

Menasché P, Pavie A.Traitements chirurgicaux et transplantations de<br />

l'insuffisance cardiaque. Rev Prat 2002:1679-82.<br />

Durand D, Abbal M, Rischmann P, Rostaing L, Sarramon JP. Transplantation<br />

rénale. Résultats et indications. Rev Prat 2001 ;51 :404-9.<br />

✁À renvoyer à : Global Média Santé. Service abonnements :<br />

114, avenue Charles-de-Gaulle, 92522 Neuilly-sur-Seine Cedex<br />

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7 ANS<br />

D’ARCHIVES<br />

EN LIGNE<br />

SUR<br />

EGORA.FR<br />

❏ M. ❏ Mme ❏ Mlle<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

sence d’un Ag HBs, une sérologie VIH ou HTLV positive constituent<br />

une contre-indication absolue à la greffe. Dans des conditions<br />

encadrées par des protocoles stricts, les greffons de donneurs<br />

Ac anti-HBc ou VHC positifs peuvent être utilisés.<br />

Les éléments permettant une traçabilité optimale du greffon<br />

doivent être mis en place par les équipes médicales réalisant le<br />

prélèvement et la greffe.<br />

3. Transplantation à partir d’un donneur vivant<br />

Différents aspects concernant le prélèvement sur donneur<br />

vivant ont été abordés précédemment. Il convient d’insister sur<br />

l’importance d’une information exhaustive du donneur potentiel<br />

sur les risques et les conséquences éventuels du prélèvement.<br />

Un registre de suivi des donneurs vivants est géré par l’Agence<br />

de la biomédecine. •<br />

soit près de 21 % de réduction<br />

Nom :............................................................................................................ Prénom :.....................................................................<br />

Adresse : n° . Rue :................................................................................<br />

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SUPPLÉMENT Spécialité HÔPITAL:............................................................................................................................................................................................... Ã PANORAMA DU MÉDECIN Ã N° XXXX DU X XXXXXXXXXXX 2008<br />

RDP0109


L’ hypertension<br />

artérielle (HTA) est un<br />

problème de santé publique par sa<br />

prévalence (> 30 % après 50 ans) et<br />

la fréquence de ses complications cardiovasculaires.<br />

Elle est primaire (ou essentielle),<br />

c’est-à-dire sans cause définie, dans 95 %<br />

des cas. Du fait de la variabilité de la pression<br />

artérielle, il faut répéter les mesures avant d’en<br />

retenir le diagnostic, éventuellement sur plusieurs mois si l’élévation<br />

tensionnelle est modérée.<br />

Un bilan clinique et de laboratoire minimal est obligatoire avant<br />

traitement, pour évaluer la gravité de l’HTA, chercher une cause<br />

curable, et guider le traitement. Ce dernier ne sera pas entrepris<br />

sur le seul critère tensionnel. Il ne le sera que si le risque individuel<br />

global est jugé suffisant, en tenant compte des facteurs de<br />

risque cardiovasculaire concomitants, du retentissement viscéral,<br />

ainsi que des accidents cardiovasculaires antécédents.<br />

Le but du traitement est de diminuer le risque de complication<br />

cardiovasculaire. Il inclut systématiquement des précautions<br />

d’hygiène de vie (poids, sel, alcool, activité physique, tabac,<br />

graisses saturées). Le traitement médicamenteux commence par<br />

une monothérapie faiblement dosée dans l’HTA légère, en tenant<br />

compte des indications et contre-indications liées aux pathologies<br />

associées. L’association de plusieurs principes actifs différents<br />

est souvent nécessaire dans l’HTA plus sévère, ou en cas de diabète<br />

ou d’insuffisance rénale associés.<br />

ÉPIDÉMIOLOGIE<br />

Définition<br />

Les études épidémiologiques ont montré que la relation entre<br />

le niveau tensionnel et le risque de complication cardiovasculaire<br />

était continu : l’augmentation du risque ne se fait pas à partir d’un<br />

niveau particulier de pression artérielle (PA), lequel correspondrait<br />

au seuil de l’HTA. En conséquence, la définition de l’HTA, indispensable<br />

pour la pratique médicale, ne peut être qu’arbitraire.<br />

I-00-Q000 I-9-Q130<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55<br />

Pr Hugues Milon, Pr Pierre Lantelme, Dr Marie-Odile Rial<br />

Service de cardiologie, hôpital de la Croix-Rousse, hospices civils de Lyon<br />

et faculté de médecine Lyon-Nord, et UMR-MA 103, 69317 Lyon Cedex 04<br />

hugues.milon@chu-lyon.fr<br />

Objectifs<br />

• Expliquer l’épidémiologie, les principales causes et l’histoire naturelle<br />

de l’hypertension artérielle de l’adulte.<br />

• Réaliser le bilan initial d’une hypertension artérielle de l’adulte.<br />

• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.<br />

• Décrire les principes de la prise en charge au long cours.<br />

On admet la présence d’une HTA lorsque la pression artérielle<br />

systolique (PAS) est habituellement 140 mmHg et (ou) que la<br />

PA diastolique (PAD) est habituellement 90 mmHg. Cependant,<br />

pour tenir compte de la relation continue PA-risque, les récentes<br />

recommandations européennes (2003) proposent une classification<br />

plus détaillée des niveaux tensionnels (tableau 1). Elle<br />

traduit le fait que l’HTA est un phénomène quantitatif plus qu’une<br />

maladie présente ou absente et que le critère de 140/90 est à<br />

moduler selon le contexte clinique.<br />

Tableau 1<br />

Optimale < 120 < 80<br />

Normale 120 à 129 80 à 84<br />

Normale haute 130 à 139 85 à 89<br />

HTA<br />

Classification des niveaux<br />

de pression artérielle<br />

CATÉGORIE PAS<br />

(mmHg)<br />

PAD<br />

(mmHg)<br />

❚ légère 140 à 159 90 à 99<br />

❚ modérée 160 à 179 100 à 109<br />

❚ sévère 180 110<br />

❚ systolique isolée 140 < 90<br />

423


Prévalence<br />

La prévalence de l’HTA est évidemment très dépendante du<br />

critère de PA servant de définition, mais aussi du nombre de<br />

mesures devant atteindre ce critère. En outre, elle augmente avec<br />

l’âge dans les deux sexes, mais plus rapidement chez la femme,<br />

à partir de 50 ans environ. Pour cette raison, la prévalence de<br />

l’HTA aux âges élevés est plus forte chez les femmes.<br />

En France, il a été estimé que 37 % des hommes et 29 % des<br />

femmes de 50 à 64 ans étaient hypertendus. Au-delà de cet âge,<br />

la prévalence continue de croître rapidement faisant de l’HTA un<br />

véritable problème de santé publique.<br />

Contrôle de l’HTA dans la population<br />

Dans tous les pays occidentaux, les enquêtes ont montré que<br />

l’HTA est non seulement très prévalente, mais aussi qu’elle est<br />

souvent méconnue, souvent non traitée lorsqu’elle est connue,<br />

et souvent insuffisamment contrôlée lorsqu’elle est traitée. En<br />

France, il a été estimé que seulement la moitié des femmes et le<br />

tiers des hommes hypertendus avaient leur PA correctement<br />

contrôlée.<br />

Facteurs favorisant l’HTA primaire<br />

Dans 95 % des cas au moins, l’HTA n’a pas de cause précise<br />

unique et l’on parle d’HTA essentielle ou primaire.<br />

Cependant, les données cliniques, expérimentales et épidémiologiques<br />

ont permis de mettre en évidence le rôle favorisant<br />

indiscutable des facteurs suivants : excès de poids, consommation<br />

excessive de sel, d’alcool (> 20-30 g/j), consommation<br />

insuffisante de potassium. Ces faits sont importants, car ils<br />

permettent une approche thérapeutique non médicamenteuse<br />

de l’HTA et constituent aussi la base de sa prévention. La<br />

génétique joue aussi un rôle. Sans parler de très rares cas d’HTA<br />

monogéniques, il est acquis que certains phénotypes intermédiaires<br />

favorisant l’HTA, tels que l’obésité, sont souvent des<br />

traits héréditaires.<br />

424<br />

I-9-Q130<br />

CAUSES : HTA SECONDAIRES<br />

La fréquence de l’HTA secondaire est surestimée dans les<br />

services hospitaliers du fait d’un biais de sélection (les cas suspects<br />

d’une cause particulière y sont plus fréquemment adressés). Leur<br />

fréquence est de l’ordre de 5 % de l’ensemble des HTA et les formes<br />

curables ne représentent qu’une fraction d’entre elles.<br />

Causes rénales<br />

1. Insuffisance rénale chronique<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

C’est la plus fréquente des causes (4 %). L’HTA est une cause<br />

d’altération de la fonction rénale. Mais inversement, l’insuffisance<br />

rénale s’accompagne presque inévitablement d’HTA. Il est souvent<br />

difficile de distinguer lequel des deux processus a été premier.<br />

En faveur d’une cause rénale, plaident un long passé de protéinurie,<br />

l’élévation graduelle de la créatininémie, et bien entendu<br />

les antécédents néphrologiques (glomérulopathie, néphropathie<br />

diabétique, pyélonéphrite, polykystose, etc.). Au stade d’insuffisance<br />

rénale terminale, la dialyse ou la greffe permettent le plus<br />

souvent un contrôle tensionnel correct.<br />

2. Néphropathie unilatérale<br />

Plusieurs pathologies peuvent être en cause : hypoplasie<br />

congénitale, petit rein vasculaire, hydronéphrose, tumeur (dont<br />

l’exceptionnelle tumeur de l’appareil juxtaglomérulaire réalisant<br />

un hyperréninisme primaire). Dans quelques cas, l’HTA est réninodépendante<br />

et la néphrectomie peut être utile. En général cependant,<br />

l’HTA est liée à la réduction de la masse néphronique et il<br />

n’y a pas d’indication de néphrectomie, sauf pour des raisons<br />

urologiques ou néphrologiques.<br />

3. HTA rénovasculaire<br />

On entend ici l’HTA causée par la sténose artérielle rénale, à<br />

distinguer de l’HTA avec sténose de l’artère rénale ne jouant pas<br />

de rôle étiologique. La sténose peut être uni- ou bilatérale. En<br />

général, il s’agit de sténose par athérosclérose (chez l’homme<br />

après 50 ans surtout). Plus rarement, il peut s’agir de dysplasie<br />

fibro-musculaire (chez la femme jeune surtout). Au point de vue<br />

physiopathologique, l’HTA résulte d’un hyperaldostéronisme<br />

secondaire. Une HTA sévère, résistante, ou d’installation rapide,<br />

un souffle épigastrique, une artériopathie des membres inférieurs,<br />

ou l’augmentation franche de la créatinine sous traitement par<br />

inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou antagoniste des<br />

récepteurs de l’angiotensine II (ARA II) sont des éléments d’orientation<br />

diagnostique. Plus rarement, des œdèmes pulmonaires<br />

itératifs orientent vers une sténose bilatérale.<br />

L’artériographie conventionnelle par Seldinger est la méthode<br />

de référence (fig. 1), mais pour le dépistage seules les techniques<br />

non invasives sont utilisées de nos jours. L’écho-doppler des artères<br />

rénales a une bonne valeur diagnostique, bien qu’ayant le désavantage<br />

d’être dépendant de l’échogénicité du patient et de<br />

l’expérience de l’opérateur. Selon les disponibilités propres à<br />

chaque centre, on pourra aussi utiliser l’artériographie digitalisée<br />

par voie veineuse, l’angioscanner spiralé, ou l’angiographie par<br />

A B<br />

Figure 1 Sténose de l’artère rénale.<br />

A — Dysplasie fibro-musculaire dans sa forme la plus<br />

fréquente (succession d’anévrysmes et rétrécissements<br />

sur la partie non proximale de l’artère)<br />

B — Sténose athéromateuse caractéristique par son<br />

siège proximal.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55


ésonance magnétique (ARM). Ces deux dernières techniques font<br />

l’objet de perfectionnements constants qui rendent les images<br />

désormais fiables, avec l’avantage pour l’ARM de ne pas utiliser de<br />

produit de contraste iodé mais le gadolinium, sans inconvénient<br />

sur la fonction rénale.<br />

Dans certains cas (dysplasie fibro-musculaire, œdème aigu du<br />

poumon [OAP] à répétition avec sténose bilatérale), la revascularisation<br />

peut être décidée sans examen complémentaire. Dans<br />

les autres cas, le rôle étiologique de la sténose artérielle rénale<br />

peut être étayé par la recherche d’un hyperaldostéronisme<br />

secondaire (hypokaliémie, aldostérone haute et rénine haute),<br />

une scintigraphie rénale avec test au captopril. L’urographie intraveineuse<br />

et les dosages de rénine dans les veines rénales sont<br />

moins pratiqués.<br />

Le traitement consiste en la revascularisation rénale par<br />

angioplastie transcutanée avec ou sans pose d’endoprothèse ou,<br />

plus rarement aujourd’hui, par chirurgie. Les résultats sont régulièrement<br />

bons dans la dysplasie. Ils sont variables dans l’athérosclérose,<br />

mais l’optique est aussi de préserver la fonction rénale<br />

sur le long cours.<br />

Causes surrénales<br />

1. Hyperaldostéronismes primaires<br />

Il s’agit de la sécrétion exagérée d’aldostérone par la zone glomérulée<br />

de la corticosurrénale, entraînant HTA et hypokaliémie<br />

(fig. 2). Trois formes anatomiques sont possibles : adénome, en<br />

général unilatéral (syndrome de Conn) ; hyperplasie bilatérale,<br />

micro- ou macronodulaire ; cancer (adénocarcinome), exceptionnel.<br />

Cette étiologie concerne moins de 1 % des HTA. Toutefois,<br />

cette prévalence de l’hyperaldostéronisme primaire est probablement<br />

sous-estimée, les progrès de l’imagerie (scanner) rendant<br />

actuellement le diagnostic plus facile. Les adénomes sont<br />

deux fois plus fréquents que les hyperplasies mais ces dernières<br />

sont reconnues avec une fréquence croissante.<br />

Les symptômes (faiblesse musculaire, crampes, polyurie) sont<br />

rares et c’est en général l’hypokaliémie qui attire l’attention :<br />

vérifiée inférieure à 3,7 mmol/L à deux reprises au moins, elle<br />

doit faire évoquer le diagnostic, en l’absence d’autre cause de<br />

déperdition potassique (vomissements, diarrhée, diurétique).<br />

Pour la prise de sang, chez un sujet à jeun, le garrot pendant un<br />

temps bref est possible, mais la contraction du poing est à éviter<br />

car elle majore la kaliémie.<br />

La confirmation du diagnostic est fournie par les dosages plasmatiques<br />

d’aldostérone et de rénine. Si nécessaire, le traitement<br />

antihypertenseur par antagoniste calcique, central, ou α-bloquant<br />

peut être maintenu. En revanche, les autres antihypertenseurs<br />

doivent être interrompus depuis 2 semaines et la spironolactone<br />

depuis 6 semaines. En position couchée depuis au moins 1 heure,<br />

l’aldostéronémie est élevée et la rénine est basse. Le rapport<br />

aldostérone sur rénine (exprimées dans les mêmes unités) est<br />

donc augmenté et constitue un bon moyen de dépistage, avec<br />

un seuil dépendant des méthodes de dosage utilisées.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55<br />

Volume plasmatique<br />

Natrémie<br />

Ag II : angiotensine II.<br />

HTA Rénine-Agll<br />

La tomodensitométrie des surrénales, sans puis avec injection,<br />

est le meilleur examen de distinction entre adénome et hyperplasie.<br />

En cas d’adénome, il s’agit typiquement de petites tumeurs (fig. 3),<br />

mesurant de 1 à 2 cm de diamètre en général. Si l’imagerie est<br />

douteuse, un taux d’aldostérone peu stimulable par l’orthostatisme<br />

et peu freinable par un test de charge sodée est en faveur d’un<br />

très petit adénome plutôt que d’une hyperplasie. Un prélèvement<br />

sélectif de sang veineux surrénal, pour dosage de l’aldostérone<br />

et du cortisol, constitue cependant le meilleur moyen de latéralisation,<br />

s’il paraît indiqué d’écarter plus formellement un adénome.<br />

On considère le rapport aldostérone sur cortisol, pour s’affranchir<br />

du problème de dilution par du sang extra-surrénal.<br />

Le traitement est en principe la surrénalectomie en cas d’adénome<br />

unilatéral (fig. 4), surtout avant la cinquantaine. La spironolactone<br />

(2 mg/kg) constitue un bon test prédictif du résultat chirurgical<br />

(et dans certains cas une thérapeutique de remplacement).<br />

Dans l’hyperplasie, le traitement est médicamenteux, incluant<br />

spironolactone (Aldactone) ou un autre épargneur du potassium<br />

comme l’amiloride (Modamide).<br />

2. Phéochromocytome<br />

Na<br />

K<br />

Hypokaliémie<br />

Aldostérone<br />

Paralysies Alcalose Polyurie<br />

Figure 2 Physiopathologie de l’hyperaldostéronisme<br />

primaire. L’aldostérone produite en quantité excessive<br />

par la surrénale entraîne au niveau du tubule rénal<br />

une fuite de potassium (d’où hypokaliémie) et une rétention<br />

de sodium (d’où HTA). Dans le cas d’un adénome<br />

il n’y a pas de rétrocontrôle de la production d’aldostérone<br />

lié à la diminution de l’angiotensine II (ligne pointillée).<br />

Très rare, il s’agit dans 90 % des cas d’une tumeur de la médullosurrénale.<br />

Dans les autres cas, le développement se fait à partir<br />

de tissus d’origine neuro-ectodermique de localisations diverses<br />

(le plus souvent le long de la chaîne sympathique para-aortique).<br />

La tumeur est maligne dans 10 % des cas. Le diagnostic peut être<br />

orienté par des poussées tensionnelles paroxystiques accompagnées<br />

d’une triade évocatrice faite de sueurs, céphalées, palpitations.<br />

Exceptionnellement, le phéochromocytome se situe dans le cadre<br />

d’une polyendocrinopathie (NEM IIa, NEM IIb) avec ou sans cas familiaux.<br />

R Q 130<br />

425


Le diagnostic est confirmé par les dosages sanguins ou urinaires<br />

des catécholamines et de leurs dérivés. Le dosage des métanéphrines<br />

plasmatiques est le test le plus performant. La localisation<br />

est précisée par la tomodensitométrie des loges surrénales, complétée<br />

si elle est normale par celle des étages thoracique, abdominal,<br />

et pelvien. La scintigraphie à la métaiodobenzylguanidine (MIBG)<br />

est surtout utile pour localiser un phéochromocytome extrasurrénal<br />

ou rechercher des métastases.<br />

L’affection est d’évolution spontanée sévère, et le traitement<br />

est l’exérèse chirurgicale. Celle n’est pas sans risque (troubles du<br />

rythme, poussées tensionnelles majeures, choc hypovolémique)<br />

et doit être pratiquée par une équipe entraînée. Le diagnostic<br />

des formes malignes est difficile histologiquement et n’est souvent<br />

affirmé que par la survenue ultérieure de métastases, c’est-à-dire<br />

de récidive dans un organe initialement dépourvu de tissu d’origine<br />

neuro-ectodermique.<br />

3. Syndrome de Cushing<br />

L’HTA s’intègre habituellement dans un tableau clinique évocateur.<br />

Le dosage du cortisol urinaire, éventuellement complété par le test<br />

de suppression par la dexaméthasone, confirme le diagnostic.<br />

Hypertension gravidique<br />

L’HTA est la première cause de mortalité et de morbidité périnatales.<br />

L’HTA gravidique résulte d’un défaut de placentation<br />

dont les mécanismes impliquent une ischémie placentaire due à<br />

une anomalie des artères spiralées du myomètre. Elle se voit à<br />

partir de la 20 e semaine de gestation, souvent chez une nullipare.<br />

On l’oppose à l’HTA chronique qui n’est que la persistance<br />

pendant la grossesse d’une HTA antérieure, de sorte qu’une HTA<br />

découverte dans le premier trimestre est probablement une HTA<br />

chronique.<br />

426<br />

I-9-Q130<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

Figure 3 Tumeur surrénale gauche<br />

caractéristique d’un adénome corticosurrénal.<br />

Tomodensitométrie.<br />

Les complications se voient surtout en cas de prééclampsie,<br />

définie par une protéinurie supérieure à 0,3 g/24 h, à rechercher<br />

systématiquement. Elle sont rarement maternelles (éclampsie<br />

avec œdèmes, crises convulsives, coma) et souvent fœtales<br />

(retard de croissance, mort in utero). L’hématome rétroplacentaire<br />

met en jeu le pronostic vital du fœtus et de la mère, de même<br />

que le très rare syndrome HELLP (HEmolysis, Liver enzymes,<br />

Low Platelet count) associant hémolyse intravasculaire, élévation<br />

des transaminases, thrombopénie progressive. Le doppler<br />

utérin peut identifier des anomalies précoces de placentation et<br />

étayer le risque de prééclampsie.<br />

Les modalités du traitement sont décidées par un spécialiste<br />

obstétricien et l’extraction de l’enfant est le meilleur traitement<br />

étiologique.<br />

Figure 4 Adénome corticosurrénal,<br />

pièce de surrénalectomie totale.<br />

La couleur jaune chamois est caractéristique.<br />

Toxiques et médicaments<br />

1. Anticonceptionnels oraux<br />

L’augmentation de PA presque constante qui en résulte est<br />

suffisante pour atteindre les critères d’HTA (> 140/90) chez 5 %<br />

des femmes, avec le rôle favorisant de l’âge (> 35 ans) et du surpoids.<br />

Le composé œstrogénique est tenu pour responsable de cette<br />

élévation. L’incidence de l’HTA est peut-être moins importante depuis<br />

l’usage très large des pilules peu dosées en œstrogène. L’HTA<br />

est généralement modérée, mais la morbidité est accrue si d’autres<br />

facteurs de risque cardiovasculaire sont associés (tabac, hyperlipidémie).<br />

En pratique, la surveillance de la PA doit être régulière<br />

tous les 6 mois, et la contraception orale interrompue en cas d’HTA.<br />

La réversibilité de cette HTA peut prendre plusieurs mois et être<br />

incomplète, justifiant alors des examens complémentaires.<br />

2. Glycyrrhizine<br />

La glycyrrhizine peut être consommée sous forme de réglisse<br />

solide (cachous, bonbons) ou de boisson contenant de la réglisse<br />

(antésite, pastis sans alcool). Elle a des effets proches des minéralocorticoïdes<br />

et entraîne une HTA avec hypokaliémie, rénine basse,<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55


mais avec aldostérone basse. L’HTA peut être sévère, voire maligne.<br />

Cependant, elle est généralement modérée. La régression est habituelle<br />

àl’arrêt de la consommation, en quelques semaines à quelques mois.<br />

3. Médicaments<br />

Certains médicaments peuvent jouer un rôle étiologique, au<br />

moins adjuvant, et doivent être recherchés par l’interrogatoire :<br />

sympathicomimétiques, corticoïdes, anti-inflammatoires non stéroïdiens,<br />

ciclosporine.<br />

HISTOIRE NATURELLE<br />

Phases évolutives<br />

L’HTA secondaire peut s’installer rapidement, tandis que l’HTA<br />

primaire s’installe habituellement de façon progressive et insidieuse.<br />

La variabilité des chiffres est susceptible de créer un « bruit de<br />

fond » masquant l’élévation sur le long cours, au fil de consultations<br />

occasionnelles. Cela est d’autant plus fréquent qu’il n’y a habituellement<br />

aucun symptôme concomitant et que l’élévation initiale<br />

se fait dans les limites de la normale (< 140/90 mmHg), avec seulement<br />

quelques poussées. Les facteurs mentionnés plus haut<br />

(poids, sel, alcool) jouent ici leur rôle favorisant.<br />

L’élévation tensionnelle avec l’âge n’est pas un phénomène<br />

obligatoire : chez au moins 30 % des individus, la PA reste basse<br />

au cours de la vie. Dans certaines populations, qui ont une consommation<br />

de sodium faible, l’HTA est virtuellement inconnue.<br />

Une fois l’HTA installée, l’élévation tensionnelle continue généralement,<br />

en l’absence de traitement. Cependant, la PAD, à partir<br />

de 60 ans, a tendance à rester stable en moyenne, puis à diminuer<br />

à partir de 70 ans, tandis que la PAS continue d’augmenter. Cela<br />

explique la grande fréquence de l’HTA systolique isolée (PAS 140<br />

et PAD < 90 mmHg) chez les personnes âgées. L’accroissement<br />

de la rigidité artérielle avec l’âge (processus fibrotique et athéromateux)<br />

est responsable de cette évolution vers l’augmentation<br />

de la pression pulsée (PAS-PAD) et explique la grande fréquence<br />

dans ce contexte des complications cliniques.<br />

Lésions artérielles et artériolaires<br />

L’HTA cause ou accélère des altérations artérielles et<br />

artériolaires responsables de complications cliniques : sclérose<br />

artériolaire, anévrismes miliaires des artérioles cérébrales<br />

pénétrantes (hémorragies cérébrales), nécrose fibrinoïde (formes<br />

aiguës/malignes), média nécrose kystique des grosses artères<br />

(dissections artérielles). Surtout l’HTA favorise la formation des<br />

plaques d’athérosclérose, à l’origine des nombreux accidents<br />

ischémiques, dans divers territoires (myocarde surtout, mais<br />

aussi cerveau et membres inférieurs).<br />

Complications cliniques<br />

Les complications de l’HTA peuvent être schématiquement<br />

classées en 2 catégories (tableau 2) : celles directement liées à<br />

l’HTA et celles dépendant de l’athérosclérose. Dans l’ensemble, la<br />

fréquence des premières a diminué avec les progrès du dépistage<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55<br />

Tableau 2<br />

❚ Insuffisance cardiaque<br />

❚ Éclampsie<br />

Complications de l’HTA<br />

COMPLICATIONS DIRECTEMENT<br />

DUES À L’HTA<br />

❚ Accident vasculaire cérébral<br />

hémorragique<br />

❚ Rétinopathie maligne<br />

❚ Encéphalopathie hypertensive<br />

❚ Insuffisance rénale<br />

(néphroangiosclérose)<br />

❚ Coronaropathie<br />

❚ Infarctus du myocarde<br />

❚ Angor<br />

COMPLICATIONS<br />

DE L’ATHÉROSCLÉROSE<br />

❚ Accident vasculaire cérébral<br />

ischémique<br />

❚ Artériopathie des membres<br />

inférieurs<br />

❚ Insuffisance rénale (maladie<br />

vasculo-rénale ischémique)<br />

et du traitement. Il en est ainsi de l’HTA maligne définie par la<br />

présence d’une rétinopathie stade III (hémorragies et [ou]<br />

exsudats) ou stade IV (œdème papillaire) qui est devenue très<br />

rare, de même que l’encéphalopathie hypertensive (céphalées,<br />

troubles de conscience, crises comitiales). L’HTA chronique de la<br />

grossesse peut se compliquer, comme l’HTA gravidique, d’une<br />

prééclampsie (protéinurie > 0,3 g/24 h), d’un retard de croissance<br />

fœtale ou d’un hématome rétroplacentaire, mais elle est habituellement<br />

bien tolérée. En revanche, l’insuffisance cardiaque,<br />

souvent de mécanisme diastolique prédominant du fait de l’HVG,<br />

est fréquente, surtout chez les personnes âgées avec HTA<br />

systolique isolée.<br />

En fait, les complications liées à l’athérosclérose sont très prédominantes,<br />

au premier rang desquelles l’infarctus du myocarde,<br />

qui constitue le risque principal de mortalité chez l’hypertendu.<br />

Tout hypertendu ne sera pas nécessairement victime d’une<br />

complication. C’est la raison pour laquelle l’HTA peut être considérée<br />

comme un facteur de risque plus que comme une maladie.<br />

Le surcroît de risque est cependant considérable, avec une amputation<br />

de la durée de vie de 10 à 20 ans, en l’absence de traitement.<br />

Au niveau individuel, le risque est variable. Il est fonction du<br />

niveau tensionnel, mais ce dernier n’est pas le seul déterminant.<br />

En effet, le risque de complication par athérosclérose peut varier<br />

de 1 à 20 pour un même niveau tensionnel, selon la présence ou<br />

l’absence d’autres facteurs de risque ou de retentissement sur<br />

les organes cibles.<br />

L’évaluation du risque individuel est la base de la décision de<br />

traitement. Il importe pourtant de réaliser que le poids médical,<br />

social, ou économique imposé à la société par les complications<br />

cliniques de l’HTA provient davantage des très nombreuses<br />

personnes à faible surcroît de risque que de la minorité à risque<br />

très élevé. Cela souligne l’importance de la prévention de l’HTA<br />

par action sur les facteurs favorisants.<br />

R Q 130<br />

427


428<br />

I-9-Q130<br />

BILAN INITIAL DE L’HTA<br />

Par les mesures de PA, l’interrogatoire, l’examen clinique, et<br />

quelques examens de laboratoire, on recueille des informations qui<br />

renseignent sur 4 points : 1) sévérité et retentissement viscéral<br />

de l’HTA ; 2) probabilité d’une cause curable ; 3) évaluation du risque<br />

individuel global ; 4) orientation du traitement (inefficacité et [ou]<br />

intolérances à certains médicaments). Des examens complémentaires<br />

sont indiqués selon les anomalies de ce bilan minimal initial.<br />

Évaluer le niveau tensionnel<br />

L’objectif est de s’assurer du caractère permanent de l’élévation<br />

tensionnelle et d’évaluer son niveau.<br />

✓ Mesures cliniques : elles doivent être soigneuses, utilisant un manomètre<br />

à mercure, un appareil anéroïde étalonné, ou un appareil<br />

électronique à affichage digital validé. Le sujet doit être allongé<br />

ou assis depuis 5 minutes, et la taille du brassard doit être adaptée<br />

à celle du bras. Le sujet comme l’observateur doivent éviter de<br />

parler pendant la mesure. Avec la méthode auscultatoire, on retient<br />

la disparition des sons (phase V) comme définition de la PAD.<br />

Plusieurs mesures à différentes consultations sont nécessaires<br />

pour affirmer une HTA permanente. Quelques mesures seront suffisantes<br />

si la PA est très élevée, tandis que l’on peut se donner<br />

plusieurs mois de surveillance si elle n’est que modérément élevée.<br />

✓ Mesure ambulatoire et automesure : par les mesures de consultation,<br />

il est facile de faire le diagnostic par excès d’HTA, essentiellement<br />

à cause de la fréquente réaction d’alarme susceptible<br />

d’induire l’HTA « de la blouse blanche ». Les mesures en dehors<br />

du milieu médical sont très utiles à cet égard — mesure ambulatoire de<br />

la pression artérielle (MAPA) et automesure — à condition d’utiliser<br />

des appareils validés (et des protocoles corrects pour l’automesure).<br />

Elles fournissent des résultats généralement plus bas que la mesure<br />

clinique, d’où des critères d’HTA plus bas : 135 mmHg pour la<br />

PAS et (ou) 85 mmHg pour la PAD, en période d’activité ; avec<br />

des valeurs respectives pendant le sommeil (MAPA) de 120 et 75.<br />

En dehors de la suspicion d’une HTA « de la blouse blanche »,<br />

la MAPA est utile en cas d’HTA résistante ou de symptômes évoquant<br />

une hypotension orthostatique.<br />

Interrogatoire et examen clinique<br />

Ils s’enquièrent des points suivants (une check-listpeut être utile).<br />

1. Antécédents<br />

Sont recueillis ici : les antécédents cardiovasculaires ; les antécédents<br />

néphrologiques, urologiques, gravidiques ; les notions<br />

de surcharge pondérale antécédente, de diabète, de dyslipidémie ;<br />

les antécédents d’HTA ou cardiovasculaires précoces chez les<br />

parents au premier degré.<br />

2. Symptômes<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

Doivent être recherchés les symptômes traduisant une atteinte<br />

viscérale (dyspnée anormale, angor, claudication intermittente)<br />

ou ceux orientant vers une étiologie, p. ex. la triade symptomatique<br />

du phéochromocytome.<br />

Parmi les symptômes classiques de l’HTA (bourdonnements,<br />

mouches volantes, faux vertiges, etc.), seules les céphalées sont<br />

plus fréquentes chez l’hypertendu. La plupart des hypertendus<br />

sont asymptomatiques. L’HTA est donc habituellement découverte<br />

lors d’un examen systématique, ou pour symptômes ou affection<br />

non reliés, ou encore à l’occasion d’une complication cardiovasculaire.<br />

3. Habitudes et traitements<br />

Des facteurs favorisant l’HTA (consommation de sel ou d’alcool),<br />

ou pouvant jouer un rôle étiologique (réglisse, alcool, pilule), ou<br />

encore contribuant au risque individuel global (tabac) sont notés.<br />

Les traitements en cours permettent d’interpréter les chiffres<br />

tensionnels ou les résultats biologiques (antihypertenseurs, diurétiques<br />

hypokaliémiants, hypolipémiants, etc.). Certains ont un<br />

effet majorateur sur les chiffres de PA ou diminuent l’efficacité<br />

des antihypertenseurs (corticoïdes, vasoconstricteurs nasaux,<br />

anti-inflammatoires non stéroïdiens, tricycliques).<br />

L’expérience de traitements antihypertenseurs antérieurs,<br />

telle que ressentie par le patient, est enfin un élément très utile<br />

pour l’adaptation du traitement.<br />

4. Examen physique<br />

En plus de la mesure de PA, l’examen clinique cardiovasculaire<br />

doit être complet avec notamment recherche des pouls des membres<br />

inférieurs, auscultation des trajets ilio-fémoraux, de la ligne épigastrique,<br />

et des gouttières cervicales. La mesure du poids et de<br />

la taille permettent le calcul de l’indice de masse corporelle : IMC<br />

= poids (kg)/taille 2 (m). On parle de surcharge pondérale pour un<br />

IMC 25 et d’obésité pour une IMC 30.<br />

Examens complémentaires systématiques<br />

Leur liste est donnée dans le tableau 3. Tous sont utiles pour<br />

apprécier le retentissement viscéral (créatinine, protéinurie),<br />

pour rechercher une cause (potassium), pour évaluer le risque<br />

individuel global (lipides, glucose, créatinine, ECG), ou encore pour<br />

guider le traitement en faisant préférer certains médicaments<br />

(glucose, créatinine, protéinurie).<br />

Le taux de créatinine permet une évaluation de sa clairance<br />

glomérulaire par la formule de Cockcroft et Gault (pour un homme :<br />

clairance = [140 – âge (ans) × poids (kg)]/[7,2 × créatinine (mg/L)].<br />

Pour une femme résultat à multiplier par 0,85. Si la créatinine<br />

est en µmol/L remplacer le coefficient 7,2 par le coefficient 0,814.<br />

Une valeur < 60 mL/min indique une insuffisance rénale). L’ECG<br />

permet de détecter une hypertrophie ventriculaire gauche (indices<br />

de Sokolov ou de Cornell). En cas de positivité de la recherche de<br />

protéinurie à la bandelette, un dosage sur 24 heures sera effectué.<br />

Les récentes recommandations européennes (2003) ajoutent à<br />

cette liste : acide urique, hémoglobine, et hématocrite. Elles proposent<br />

de compléter ces examens de routine par le dosage de<br />

la protéine C-réactive, une échocardiographie, une échographiedoppler<br />

des carotides, une recherche de microalbuminurie (surtout<br />

en cas de diabète), et un fond d’œil dans l’HTA sévère. La microalbuminurie<br />

est un facteur de risque de néphropathie chez le diabétique<br />

et d’accident cardiovasculaire chez le non diabétique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55


Tableau 3<br />

Dans le sang<br />

❚ Glucose<br />

❚ Cholestérol total<br />

❚ Cholestérol HDL<br />

❚ Triglycérides<br />

❚ Créatinine<br />

❚ Potassium<br />

ATTITUDE THÉRAPEUTIQUE<br />

Le traitement antihypertenseur ne fait pas que diminuer les<br />

chiffres tensionnels. Son effet préventif vis-à-vis des complications<br />

cliniques a été démontré pour les grandes classes de médicaments<br />

suivantes : diurétiques, β-bloquants, IEC, antagonistes calciques,<br />

ARA II. Pour les diurétiques et les β-bloquants, cette démonstration<br />

est ancienne. Pour les 3 autres classes, elle date des 5 dernières<br />

années.<br />

Décision de traitement<br />

C’est une décision qui doit être soigneusement pesée car le<br />

traitement est chronique et ses effets indésirables ne sont pas<br />

rares. Elle ne doit plus être fondée sur un critère tensionnel isolé<br />

mais sur l’évaluation du risque individuel global. Le principe est<br />

de réserver le traitement médicamenteux aux personnes les plus<br />

exposées au risque de complications car ce sont elles qui bénéficient<br />

le plus du traitement.<br />

Cette évaluation peut se faire en utilisant le tableau 4 qui<br />

indique aussi l’orientation générale du traitement : médicamenteux<br />

sans délai particulier en cas de risque élevé ; conseils d’hygiène<br />

de vie si le surcroît de risque est modeste ; abstention en l’absence<br />

de surcroît de risque. Les éléments à prendre en compte dans<br />

Tableau 4<br />

Bilan initial systématique<br />

en complément de la clinique<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55<br />

Dans les urines :<br />

❚ Protéinurie, hématurie<br />

(bandelette)<br />

ECG<br />

Stratification du risque pour décider de la prise en charge<br />

AUTRE FACTEUR DE RISQUE<br />

ET HISTOIRE DE LA MALADIE<br />

HTA « LÉGÈRE »<br />

PAS 140-159 OU PAD 90-99<br />

l’évaluation du risque individuel global comprennent les facteurs<br />

de risque autres que l’HTA, l’atteinte des organes cibles, et les<br />

antécédents cardiovasculaire personnels (tableau 5). Le diabète<br />

tient une place particulière dans cette stratification étant donné<br />

l’importance de son impact pronostique chez l’hypertendu.<br />

Mesures non pharmacologiques<br />

et traitement des cofacteurs de risque<br />

Les mesures non pharmacologiques sont susceptibles de freiner<br />

l’élévation de la PA, de retarder la nécessité des antihypertenseurs,<br />

ou d’en réduire les posologies. Elles font donc partie de tout traitement<br />

antihypertenseur et peuvent parfois le résumer. Le traitement<br />

des cofacteurs de risque s’intègre dans la stratégie de<br />

réduction du risque individuel global.<br />

En pratique, il faut recommander :<br />

— une réduction du poids en cas de surcharge pondérale ou<br />

d’obésité ;<br />

— une augmentation raisonnable de l’activité physique si elle<br />

est insuffisante, en privilégiant les exercices d’endurance (p. ex.<br />

30-45 min de marche rapide plusieurs fois par semaine) ;<br />

— une diminution des apports sodés par un usage modéré du<br />

sel de cuisine et de table et en évitant les aliments les plus salés :<br />

charcuterie, conserves, et fromages ;<br />

— une diminution de la consommation d’alcool à moins de 30 g<br />

d’alcool pur par jour, soit moins de 3 unités usuelles d’une boisson<br />

alcoolique donnée ;<br />

— la consommation régulière de fruits et légumes qui contribue<br />

à augmenter les apports en potassium ;<br />

— l’arrêt du tabagisme en prescrivant si besoin des substituts<br />

nicotiniques et en veillant à contrôler une éventuelle prise<br />

pondérale ;<br />

— la réduction de la consommation de graisses saturées et les<br />

médicaments hypolipémiants si besoin ;<br />

— le traitement d’un diabète par la diététique, le contrôle du<br />

poids, et les médicaments si besoin.<br />

HTA « MODÉRÉE »<br />

PAS 160-179 OU PAD 100-109<br />

HTA « SÉVÈRE »<br />

PAS 180 OU PAD 110<br />

Pas d’autre facteur de risque ❚ Surcroît de risque faible ❚ Surcroît de risque moyen ❚ Surcroît de risque élevé<br />

➙ surveillance PA 6-12 mois** ➙ surveillance PA 3-6 mois** ➙ traitement médicamenteux**<br />

1-2 facteurs de risque ❚ Surcroît de risque moyen ❚ Surcroît de risque moyen ❚ Surcroît de risque élevé<br />

➙ surveillance PA 3-6 mois** ➙ surveillance PA 3-6 mois** ➙ traitement médicamenteux**<br />

3 facteurs de risque ou plus, ❚ Surcroît de risque élevé ❚ Surcroît de risque élevé ❚ Surcroît de risque élevé<br />

ou atteinte d’un organe-cible, ➙ traitement médicamenteux** ➙ traitement médicamenteux** ➙ traitement médicamenteux**<br />

ou diabète*<br />

* Dans le cas de maladie cardiovasculaire associée, le patient doit être considéré comme à risque très élevé, quel que soit son niveau tensionnel, et faire l’objet<br />

d’une prise en charge spécifique.<br />

** Dans tous les cas, les conseils appropriés d’hygiène de vie sont donnés.<br />

R Q 130<br />

429


Tableau 5<br />

Suivi initial<br />

La fréquence et le contenu des consultations de suivi d’un<br />

hypertendu dépendent de plusieurs facteurs : la qualité du<br />

contrôle tensionnel sous traitement et la qualité du contrôle des<br />

facteurs de risque associés (tabagisme, hyperlipidémie, diabète).<br />

Elle dépend aussi de la présence ou non de complications cardiovasculaire.<br />

Pour un hypertendu indemne de complication, dont le traitement<br />

est bien équilibré, deux ou trois consultations par an sont une<br />

fréquence appropriée. Le contrôle de la créatininémie, de la kaliémie,<br />

et de la protéinurie est annuel (ainsi qu’avant et peu après la mise<br />

en route d’un traitement par diurétique, IEC, ou ARA II). S’ils<br />

étaient initialement normaux, la glycémie et les lipides sanguins<br />

sont contrôlés tous les 3 ans.<br />

En principe, le traitement antihypertenseur est de longue durée,<br />

sans terme défini. Un excellent contrôle tensionnel, à plusieurs<br />

consultations successives, autorise cependant une tentative de<br />

diminution progressive du traitement, sous surveillance soigneuse,<br />

dans l’hypothèse d’un diagnostic initial d’HTA par excès.<br />

Dans une majorité de cas cependant, la PA s’élève à nouveau<br />

dans les mois suivants, conduisant à la reprise du traitement<br />

antérieur.<br />

430<br />

I-9-Q130<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

Eléments à prendre en compte<br />

dans l’évaluation du risque individuel<br />

global (adapté de Recommandations ANAES 2000)<br />

❚ Âge : > 45 ans (homme), > 55 ans (femme)<br />

❚ Antécédent coronaire avant 55 ans chez un parent masculin<br />

du premier degré, avant 65 ans chez un parent féminin du 1 er degré<br />

❚ Tabagisme<br />

❚ Diabète<br />

❚ Cholestérol LDL > 4,9 mmol/L (> 1,90 g/L), HDL < 0,9 mmol (< 0,35 g/L)<br />

❚ Obésité abdominale<br />

❚ Absence d’activité physique régulière<br />

❚ Consommation excessive d’alcool<br />

❚ Atteinte d’un organe cible<br />

❚ Antécédent personnel de maladie cardiovasculaire<br />

PRISE EN CHARGE AU LONG COURS<br />

Observance et éducation thérapeutique<br />

Un défaut d’observance est la première cause d’échec du<br />

traitement. Un dialogue confiant et une écoute attentive de la<br />

part du médecin quant aux effets indésirables du traitement,<br />

réels ou supposés, sont des facteurs essentiels de bonne observance.<br />

Comme dans toute affection chronique, un effort particulier<br />

d’éducation thérapeutique doit être fait. L’automesure tensionnelle,<br />

correctement enseignée et pratiquée, en fait partie et, en impliquant<br />

le patient dans la conduite de son traitement, elle contribue à<br />

une meilleure observance.<br />

Objectif tensionnel<br />

L’objectif est de normaliser la pression artérielle, donc de<br />

l’abaisser à moins de 140/90 mmHg. Le risque de complication<br />

est diminué au prorata de la baisse tensionnelle.<br />

Chez les personnes âgées avec hypertension systolique isolée,<br />

cet objectif peut être difficile à atteindre et l’on peut se contenter<br />

d’une PAS autour de 160 mmHg. Chez ces malades, il faut se<br />

méfier de l’hypotension orthostatique et mesurer la PA en position<br />

debout. Le traitement doit éviter les baisses tensionnelles<br />

rapides, mal supportées sur le plan cérébral.<br />

En cas de diabète ou d’insuffisance rénale, un objectif tensionnel<br />

plus strict est recommandé pour un effet préventif optimal :<br />

inférieur à 130/80 et même à 125/75 si la protéinurie est supérieure<br />

à 1 g/24 h. Pour atteindre ou approcher cet objectif, plusieurs<br />

médicaments sont généralement nécessaires.<br />

Médicaments de l’HTA<br />

On distingue 8 classes de médicaments antihypertenseurs<br />

(tableau 6). Toutes ces classes pharmacologiques ont le même<br />

effet antihypertenseur en moyenne mais peuvent avoir des effets<br />

sensiblement différents au niveau individuel. On admet que<br />

l’essentiel de leur effet préventif à l’égard des complications<br />

cardiovasculaires (démontré pour les 5 premières classes) est lié<br />

à leur effet antihypertenseur. Cependant, des différences entre<br />

classes pharmacologiques ont été décrites, selon ces complications<br />

ou les groupes de patients considérés, suggérant pour certaines<br />

un effet bénéfique supplémentaire, indépendant de la<br />

baisse tensionnelle.<br />

Il faut préférer les médicaments ayant un effet antihypertenseur<br />

progressif et prolongé. C’est ainsi que les premières dihydropyridines,<br />

d’action rapide et brève sont à proscrire. On vise à<br />

atteindre l’objectif tensionnel en quelques semaines.<br />

Traitement initial<br />

En principe le traitement initial consiste en un seul produit<br />

actif, faiblement dosé. Il permettra d’atteindre les objectifs tensionnels<br />

dans 1 cas sur 4 environ, et beaucoup plus si l’HTA est<br />

légère. Si elle plus sévère, ou si un diabète ou une insuffisance<br />

rénale lui sont associés, un deuxième produit actif devra probablement<br />

être ajouté. Dans ces cas, il est donc licite de commencer<br />

d’emblée par une bithérapie faiblement dosée disposant d’une<br />

AMM dans cette indication.<br />

Le choix du premier médicament est souvent guidé par le jeu<br />

des indications et contre-indications liées aux comorbidités. Le<br />

tableau 7 fournit quelques exemples.<br />

En l’absence de contexte particulier, un médicament appartenant<br />

à l’une des 5 premières familles du tableau 6 peut être<br />

prescrit en première intention. Les diurétiques et les β-bloquants<br />

sont alors très compétitifs compte tenu de leur efficacité, leur<br />

bonne tolérance, et leur faible coût.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55


Suivi au long cours<br />

Le résultat clinique est vérifié après 1 mois ou 2, ou plus tôt<br />

en cas d’effet indésirable. Si l’efficacité et la tolérance sont<br />

correctes, la surveillance se fera ensuite tous les 4 à 6 mois.<br />

En cas d’intolérance avérée, il faut changer de classe médicamenteuse.<br />

En cas de baisse tensionnelle insuffisante, plusieurs<br />

options sont licites : augmenter la posologie du médicament<br />

initial, le remplacer par un médicament d’une autre classe (en<br />

préférant un diurétique si le premier n’en était pas un), ou encore<br />

ajouter un deuxième médicament (en préférant là aussi un diurétique<br />

si le premier n’en était pas un). Cette dernière option est<br />

probablement la plus efficace. La préférence est donnée aux<br />

associations les plus synergiques (fig. 5). Les associations fixes,<br />

dont la majorité comportent une petite dose de diurétique, permettent<br />

de simplifier le traitement et d’améliorer l’observance.<br />

Tableau 6<br />

Médicaments de l’HTA<br />

CLASSE PHARMACOLOGIQUE MÉDICAMENTS<br />

Diurétiques<br />

❚ diurétiques thiazidiques ➙ hydrochlorothiazide (Esidrex)<br />

➙ Indapamide (Fludex LP)<br />

❚ diurétiques de l’anse ➙ furosémide (Lasilix)<br />

❚ diurétiques distaux ➙ spironolactone (Aldactone)<br />

β-bloquants ➙ acébutolol (Sectral)<br />

➙ aténolol (Ténormine)<br />

➙ bisoprolol (Détensiel, Soprol)<br />

➙ céliprolol (Célectol)<br />

Antagonistes calciques<br />

❚ dihydropyridines ➙ nifédipine (Chronadalate)<br />

➙ nitrendipine (Baypress, Nidrel)<br />

➙ amlodipine (Amlor)<br />

➙ félodipine (Flodil)<br />

➙ lacidipine (Caldine)<br />

➙ lercanidipine (Zanidip)<br />

❚ diltiazem ➙ Monotildiem<br />

❚ vérapamil ➙ Isoptine<br />

Inhibiteurs de l’enzyme ➙ énalapril (Rénitec)<br />

de conversion (IEC) ➙ lisinopril (Zestril)<br />

➙ ramipril (Triatec)<br />

➙ trandolapril (Odrik )<br />

Antagonistes des récepteurs ➙ losartan (Cozaar)<br />

de l’angiotensine II (ARA II) ➙ irbésartan (Aprovel)<br />

Antihypertenseurs centraux ➙ rilménidine (Hyperium)<br />

➙ monoxidine (Physiotens)<br />

α-bloquants ➙ prazosine (Alpress)<br />

* Pour chaque classe pharmacologique, est indiquée une sélection de produits<br />

couramment employés dans le traitement de l’HTA.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55<br />

à retenir<br />

Porter le diagnostic d’HTA est lourd de conséquences<br />

puisqu’il signifie souvent traitement à vie.<br />

Il est donc primordial de s’assurer du caractère permanent<br />

de l’élévation tensionnelle par des mesures répétées,<br />

avec l’aide éventuelle de la MAPA ou de l’automesure,<br />

et sur une période de plusieurs semaines si l’élévation<br />

tensionnelle est labile ou modérée.<br />

Le bilan minimal, qui doit être systématique, contribue<br />

à évaluer le risque individuel, lequel constitue la base<br />

de la décision de traitement : en effet, l’objectif<br />

est de ne traiter que les individus dont le risque<br />

d’accident cardiovasculaire est jugé substantiel.<br />

Outre les mesures non pharmacologiques (poids, sel, alcool,<br />

activité physique), plusieurs classes pharmacologiques<br />

sont disponibles. Il est souvent nécessaire d’en donner<br />

au moins deux simultanément pour atteindre ou s’approcher<br />

raisonnablement de la cible de 140/90. Dans ce cas,<br />

la prescription d’un diurétique est en général très efficace<br />

si le premier médicament n’en était pas un.<br />

Cas particuliers<br />

POINTS FORTS<br />

✓ Résistance au traitement : on considère que tel est le cas si l’objectif<br />

tensionnel n’est pas atteint malgré un traitement associant 3 principes<br />

actifs différents (parmi les 8 cités plus haut), dont un diurétique.<br />

Il faut alors s’assurer de l’observance puis rechercher des facteurs<br />

de résistance : consommation d’alcool excessive, syndrome d’apnée<br />

du sommeil, traitement associé antagoniste (AINS p. ex.). Un avis<br />

spécialisé et un bilan extensif, à la recherche d’une étiologie curable<br />

notamment, sont nécessaires.<br />

✓ Urgences hypertensives : il importe de bien distinguer l’urgence<br />

hypertensive de la poussée tensionnelle simple. Dans cette dernière,<br />

il n’y a aucun signe d’atteinte viscérale. Il s’agit souvent d’hypertendus<br />

connus, volontiers âgés, dans un contexte émotionnel, douloureux,<br />

ou traumatique. Il faut rassurer, conseiller le repos quelques<br />

heures, instituer un traitement antihypertenseur ou le poursuivre,<br />

avec l’objectif d’un contrôle tensionnel en quelques semaines. Un<br />

médicament oral ou sublingual d’action rapide n’est pas recommandé.<br />

Au contraire, l’urgence hypertensive est caractérisée par la<br />

coexistence d’une HTA très élevée (PAD > 110 mmHg) et de signes<br />

de souffrance viscérale : insuffisance coronaire aiguë, insuffisance<br />

cardiaque, accident vasculaire cérébral, dissection aortique,<br />

éclampsie. Elle nécessite une hospitalisation rapide dans une<br />

structure spécialisée et adaptée. En attendant le transport médicalisé,<br />

il ne faut pas prescrire d’antihypertenseur en cas d’accident<br />

vasculaire cérébral (risque d’aggraver les lésions s’il s’agit d’un<br />

accident ischémique). Il faut se limiter aux nitrés, par voie sublinguale<br />

ou intraveineuse, en cas de douleur coronaire, associé<br />

au furosémide (Lasilix) en cas d’œdème pulmonaire.<br />

✓ Traitement de l’HTA chez les patients avec insuffisance rénale :<br />

en présence d’une insuffisance rénale, le traitement de l’HTA doit<br />

viser à un contrôle < 130/80 mmHg. Cela requiert l’association<br />

de plusieurs principes actifs, en commençant par un IEC ou un<br />

R Q 130<br />

431


Tableau 7<br />

432<br />

I-9-Q130<br />

CLASSE<br />

PHARMACOLOGIQUE<br />

Hypertension artérielle de l’adulte<br />

Principales indications<br />

et contre-indications des grandes<br />

familles d’antihypertenseurs<br />

INDICATION<br />

PRÉFÉRENTIELLE<br />

Diurétique ❚ Insuffisance ❚ Goutte ?<br />

thiazidique cardiaque avec stase<br />

❚ Sujet âgé<br />

β-bloquants ❚ Angor ❚ Asthme<br />

❚ Post-infarctus ❚ BPCO<br />

du myocarde<br />

❚ Troubles du rythme<br />

Inhibiteurs ❚ Insuffisance ❚ Grossesse<br />

de l’enzyme cardiaque ❚ Sténose bilatérale<br />

de conversion ❚ Néphropathie des artères rénales<br />

du diabète de type 1<br />

❚ Post-infarctus<br />

du myocarde<br />

Antagonistes ❚ Néphropathie<br />

des récepteurs du diabète de type 2<br />

de l’angiotensine II ❚ Microalbuminurie<br />

et diabète<br />

Antagonistes ❚ Angor<br />

calciques ❚ Sujet âgé<br />

(dihydropyridines) ❚ HTA systolique<br />

isolée<br />

DIURÉTIQUES<br />

IEC — ARA II<br />

CONTRE-<br />

INDICATION<br />

β-BLOQUANTS<br />

ANTAGONISTES<br />

CALCIQUES<br />

Figure 5 Associations d’antihypertenseurs. Les associations<br />

en trait plein sont celles avec un meilleur effet additif.<br />

ARA II, sous surveillance de la créatininémie et de la kaliémie.<br />

Un diurétique de l’anse est seul approprié en principe, les thiazidiques<br />

étant peu efficaces et la spironolactone (Aldactone)<br />

exposant au risque d’hyperkaliémie.<br />

✓ Traitement de l’HTA chez les patients diabétiques : là encore, le<br />

contrôle tensionnel doit être strict < 130/80 mmHg. Les mesures<br />

non pharmacologiques, notamment le perte de poids et une alimentation<br />

peu salée, sont essentielles. Tous les antihypertenseurs<br />

peuvent être utilisés. Pour la prévention de la néphropathie<br />

diabétique, les IEC dans le diabète de type 1 et les ARA II dans le<br />

diabète de type 2 ont fait la preuve de leur efficacité. ■<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Une pression artérielle > 140/90 mmHg sert<br />

de définition de l’HTA parce que c’est à partir<br />

de ce niveau que le risque de complication apparaît.<br />

2 L’HTA systolique isolée se définit par une pression<br />

systolique > 140 mmHg et une pression diastolique<br />

< 90 mmHg.<br />

3 Les formes curables d’HTA représentent environ 5 %<br />

de tous les cas d’HTA.<br />

4 Les complications les plus fréquentes chez les hypertendus<br />

sont celles liées à l’athérosclérose.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 C’est le niveau de risque cardio-vasculaire global<br />

encouru par un hypertendu qui doit logiquement<br />

conduire à la décision de traitement antihypertenseur.<br />

2 Dans le choix d’un antihypertenseur, l’efficacité<br />

hypotensive est accessoire à côté des autres propriétés,<br />

propres à chaque produit.<br />

3 Une urgence hypertensive se distingue<br />

d’une simple poussée tensionnelle par l’existence<br />

de signes de souffrance viscérale.<br />

4 Une hypertension est considérée résistante lorsqu’elle<br />

ne peut être contrôlée malgré l’association de 3 principes<br />

actifs différents dont un diurétique.<br />

C / QCM<br />

Un hyperaldostéronisme primaire par adénome<br />

de Conn doit être évoqué chez un hypertendu en cas de :<br />

1 Hypokaliémie < 3,7 mmol/L.<br />

2 Taux de rénine plasmatique élevé.<br />

3 Taux d’aldostérone élevé (dans le sang ou les urines).<br />

4 Tumeur surrénale < 2 cm de diamètre au scanner.<br />

5 Tumeur para-aortique > 3 cm de diamètre au scanner.<br />

◗ Hypertension artérielle<br />

Numéro spécial<br />

(Arch Mal Cœur 2000 ;<br />

93 [suppl] : 124p)<br />

◗ Hypertension artérielle<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2004 ; 54 [6] :<br />

599-648)<br />

◗ Surveiller et traiter<br />

l’hypertension<br />

Paris : Odile Jacob<br />

Médecine, 2003 : 176p<br />

Réponses : A : F, V, F, V / B : V, F, V, V / C : 1, 3, 4.<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Prise en charge de patients<br />

adultes atteints dHTA<br />

Recommandations pour la<br />

pratique clinique (avril 2000)<br />

De nouvelles recommandations<br />

françaises concernant<br />

le diagnostic et le traitement<br />

de l’HTA vont être publiées<br />

au cours du premier semestre<br />

2005 par l’Agence Nationale<br />

d’Evaluation et d’Accréditation<br />

en Santé.<br />

Elles pourront être consultées<br />

sur le site www.anaes.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2005 : 55


Les néphropathies vasculaires regroupent<br />

un grand nombre d’entités ayant un symptôme<br />

commun, l’hypertension artérielle<br />

(HTA). Parmi elles, la néphroangiosclérose est la plus fréquente ;<br />

elle est responsable, avec le diabète, de la majorité des causes<br />

d’insuffisance rénale chronique terminale en France.<br />

Par ailleurs, l’athérosclérose peut être à l’origine de sténose<br />

des artères rénales responsable d’HTA, d’insuffisance rénale ou,<br />

plus rarement, d’embolies de cristaux de cholestérol.<br />

Enfin, l’association d’une insuffisance rénale aiguë, d’une anémie<br />

hémolytique et d’une thrombopénie conduira au diagnostic nosologique<br />

de syndrome urémique et hémolytique ou microangiopathie<br />

thrombotique.<br />

NÉPHROANGIOSCLÉROSE<br />

La néphroangiosclérose est la néphropathie vasculaire la plus<br />

fréquente.<br />

Classiquement, la néphroangiosclérose « bénigne » complique<br />

les hypertensions artérielles mal ou insuffisamment contrôlées<br />

pendant plusieurs années (soit 0 à 3 % des HTA après plus de<br />

20 ans d’évolution). Elle représente une des deux premières<br />

causes d’insuffisance rénale terminale (avec le diabète) en France.<br />

Chez les sujets originaires d’Afrique subsaharienne ou afroantillais,<br />

elle apparaît plus précocement (20-40 ans) et peut être<br />

d’évolution plus rapide.<br />

Diagnostic positif<br />

Néphropathie vasculaire<br />

Dr Xavier Belenfant, Dr Marie Briet<br />

Service de néphrologie-dialyse, centre hospitalier André-Grégoire, 93100 Montreuil, France<br />

xavier.belenfant@chi-andre-gregoire.fr<br />

Le diagnostic présomptif repose sur un faisceau d’arguments :<br />

— HTA « ancienne » et souvent mal contrôlée ;<br />

— insuffisance rénale d’aggravation lente (baisse du débit de filtration<br />

glomérulaire [DFG], estimé d’environ 2 mL/min/an) associée<br />

à l’absence de protéinurie ou une protéinurie de faible débit non<br />

néphrotique (taux d’albumine plasmatique normal), l’absence<br />

d’hématurie et des reins de taille habituellement diminuée et de<br />

contours réguliers ;<br />

— fréquemment associée à une cardiopathie hypertrophique ;<br />

— sans argument pour une autre néphropathie.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008<br />

Objectifs<br />

• Diagnostiquer une néphropathie vasculaire.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

I-00-Q000 I-9-Q134<br />

Figure 1 Néphroangiosclérose. La figure du haut montre une<br />

artère de moyen calibre normal (large lumière, un endothélium<br />

constitué d’une seule couche de cellules endothéliales, média<br />

peu épaisse). La figure du bas montre une artère siège de<br />

néphroangiosclérose (réduction de la lumière vasculaire,<br />

prolifération myo-intimale, et épaississement de la média).<br />

2045


La biopsie rénale n’est pas nécessaire au diagnostic. Elle ne<br />

se discute qu’en cas de doute diagnostique avec une autre<br />

néphropathie. L’examen histologique (fig. 1) montrerait :<br />

— une diminution du calibre de la lumière des artères interlobulaires<br />

et préglomérulaires secondaire à une fibrose sous-intimale<br />

et une hyperplasie de la média responsable par ailleurs d’une<br />

augmentation du diamètre externe des vaisseaux ;<br />

— en aval, les glomérules apparaissent ischémiques : le flocculus<br />

est rétracté au pôle vasculaire, la membrane basale est fripée,<br />

— à un stade avancé, certaines artères apparaissent occluses, de<br />

plus en plus de glomérules deviennent scléreux (glomérulo -<br />

sclérose, puis fibrose en « pain à cacheter »), l’interstitium présente<br />

une fibrose, et les tubes sont atrophiques.<br />

Traitement<br />

✓ Préventif, il repose sur le dépistage et le traitement de toute<br />

HTA et la prise en compte de l’ensemble des facteurs de risque<br />

cardiovasculaire.<br />

✓ Curatif, il repose sur le contrôle strict de l’HTA ( 130/80 mmHg<br />

en cas d’insuffisance rénale et/ou protéinurie) en associant systématiquement<br />

:<br />

— des règles hygiéno-diététiques : régime restreint en sel ( 6 g/j),<br />

activité physique régulière (30 min/j), suppression du tabac, lutte<br />

contre l’obésité… ;<br />

— un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) en première<br />

intention à dose progressivement croissante ; en cas de contrôle<br />

insuffisant, association aux diurétiques thiazidiques (diurétiques<br />

de l’anse si DFG 30 mL/min). Le choix de l’escalade thérapeutique<br />

dépend ensuite des comorbidités associées ;<br />

— et la prise en compte de l’ensemble des facteurs de risque<br />

cardiovasculaires.<br />

NÉPHROANGIOSCLÉROSE MALIGNE<br />

Diagnostic positif<br />

Elle s’inscrit habituellement chez un patient ayant une HTA<br />

négligée ( 70 %), dans un contexte d’HTA maligne associant :<br />

— une HTA à chiffres souvent élevés (grade 3, 180/110 mmHg) ;<br />

2046<br />

I-9-Q134<br />

Néphropathie vasculaire<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

— une insuffisance rénale rapidement évolutive associée à une<br />

protéinurie de débit variable et une hématurie microscopique<br />

inconstante (60 %) ;<br />

— une insuffisance cardiaque gauche : dyspnée, galop…, voire<br />

œdème pulmonaire ;<br />

— une rétinopathie hypertensive de stade 3 (exsudats et/ou<br />

hémorragie rétinienne bilatérale) ou stade 4 (œdème papillaire<br />

bilatéral) ;<br />

— une encéphalopathie : apathie, confusion, déficit systématisé,<br />

convulsion, coma ;<br />

— une microangiopathie biologique : anémie hémolytique à<br />

Coombs négatif (augmentation de LDH, bilirubine, baisse de<br />

l’haptoglobine) avec présence de shizocytes, thrombopénie périphérique<br />

;<br />

— un syndrome polyuro-polydypsique ;<br />

— une hypokaliémie secondaire à une stimulation de l’axe rénineangiotensine-aldostérone.<br />

La biopsie rénale n’est pas systématique. Elle montrerait une<br />

obstruction de la lumière des artères, secondaire à une hyperplasie<br />

myo-intimale, des dépôts sous-endothéliaux, une prolifération<br />

des cellules musculaires lisses de la média et synthèse de<br />

collagène réalisant un aspect en « bulbe d’oignon ». Une nécrose<br />

fibrinoïde est rarement observée.<br />

Diagnostic différentiel<br />

L’HTA maligne secondaire à une néphroangiosclérose maligne<br />

est l’apanage du sujet originaire d’Afrique subsaharienne ou afroantillais.<br />

Chez le sujet caucasien, il convient de rechercher :<br />

— une sténose des artères rénales, une maladie des embolies de<br />

cristaux de cholestérol ;<br />

— une glomérulonéphrite sous-jacente, surtout si le sujet est<br />

jeune ;<br />

— une cause toxique : ecstasy, cocaïne, amphétamine... ;<br />

— une sclérodermie : à suspecter en cas de syndrome de Raynaud,<br />

de sclérodactylie.<br />

Traitement<br />

La prise en charge diagnostique et thérapeutique d’un patient hypertendu<br />

ancien présentant une insuffisance rénale modérée est un « sujet bateau ».<br />

Savoir argumenter le diagnostic de<br />

néphroangiosclérose, de sténose athéromateuse<br />

des artères rénales est un classique.<br />

Les examens morphologiques de dépistage<br />

d’une sténose des artères rénales (échodoppler,<br />

angio-TDM spiralé avec injection)<br />

ne doivent pas être confondus avec l’examen<br />

de confirmation que constitue l’artériographie,<br />

examen couplé dans ce cas à une<br />

angioplastie.<br />

Il faut savoir identifier une microangiopathie<br />

thrombotique à partir de contextes<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Le traitement urgent impose une hospitalisation en milieu<br />

spécialisé pour contrôler l’HTA.<br />

cliniques très divers : devant une insuffisance<br />

rénale aiguë, un syndrome confusionnel,<br />

une diarrhée invasive chez un<br />

jeune enfant, un purpura…, dans tous<br />

ces cas, le diag nostic sera orienté par la<br />

découverte d’une anémie dont on<br />

confirmera l’origine hémolytique et une<br />

thrombopénie.<br />

●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008


STÉNOSE/THROMBOSE DES ARTÈRES<br />

RÉNALES<br />

Physiopathologie<br />

La sténose des artères rénales est responsable, lorsqu’elle est<br />

serrée (diminution de calibre de la lumière vasculaire de plus de<br />

50 à 75 %), d’une baisse du débit sanguin rénal homolatéral qui<br />

a pour conséquence une hypoperfusion glomérulaire et une stimulation<br />

de la synthèse de rénine responsable in fine d’une augmentation<br />

de l’angiotensine 2, expliquant une HTA.<br />

Si la sténose serrée est bilatérale ou sur rein unique, une insuffisance<br />

rénale peut apparaître progressivement ou brutalement<br />

lors d’un traitement inhibant le système rénine-angiotensine (IEC<br />

ou sartans) ou les prostaglandines (AINS, coxib).<br />

Circonstances de découverte<br />

Cela peut être :<br />

— lors du bilan initial d’une HTA récente devant l’association : HTA<br />

et souffle abdominal ou lombaire, HTA et hypokaliémie chez un<br />

patient à haut risque cardiovasculaire, ou chez une femme jeune<br />

présentant des souffles vasculaires diffus ;<br />

— une HTA résistante au traitement médical associant règles<br />

hygiéno-diététiques et 3 traitements pharmacologiques antihypertenseurs<br />

dont un diurétique ;<br />

— une HTA maligne ;<br />

— un œdème aigu du poumon (OAP) flash chez un patient à haut<br />

risque cardiovasculaire sans cause cardiaque documentée ;<br />

— une insuffisance rénale aiguë lors de l’initiation d’un traitement<br />

par inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC), ou par antagoniste<br />

de récepteurs de l’angiotensine 2 (sartans, ARA2) et/ou AINS ;<br />

— une insuffisance rénale rapidement évolutive chez un patient<br />

à haut risque vasculaire sans autre néphropathie documentée<br />

et surtout si les reins sont de taille asymétrique (différence de<br />

taille 1,5 cm).<br />

Étiologie<br />

1. Athérosclérose<br />

Le plus souvent, il s’agit d’un patient de sexe masculin cumulant<br />

les facteurs de risque cardiovasculaire. La probabilité d’une<br />

sténose augmente parallèlement au nombre d’atteintes athéromateuses<br />

(cardiopathie ischémique, AVC-AIT, artériopathie oblitérante<br />

des membres inférieurs, anévrisme de l’aorte).<br />

2. Fibrodysplasie<br />

Le terrain est la femme jeune, HTA de novo. La sténose siège<br />

le plus souvent à droite ( 90 %), et peut être bilatérale ( 40 %).<br />

3. Causes exceptionnelles<br />

Il s’agit de :<br />

— la maladie de Takayashu ;<br />

— une dissection post-traumatique ;<br />

— une sténose post-radique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008<br />

à retenir<br />

Néphroangiosclérose<br />

Néphropathie vasculaire la plus fréquente.<br />

Diagnostic d’élimination chez un patient hypertendu<br />

de longue date.<br />

Insuffisance rénale d’aggravation lente.<br />

Sans autres causes d’insuffisance rénale identifiées<br />

Le traitement : contrôle strict de la PA ( 130/80 mmHg).<br />

Sténose/thrombose des artères rénales<br />

Chez un patient à haut risque cardiovasculaire, penser<br />

à une sténose athéromateuse des artères rénales devant :<br />

— HTA souffle lombaire ou abdominal hypokaliémie ;<br />

— HTA résistante, HTA maligne ;<br />

— insuffisance rénale aiguë sous IEC ou sartans, ou AINS ;<br />

— OAP flash sans cause cardiaque.<br />

Sténose par fibrodysplasie : y penser chez une femme<br />

jeune, HTA de novo.<br />

Examen de dépistage : échodoppler des artères rénales.<br />

Traitement (à discuter) : angioplastie de la sténose.<br />

Infarctus rénal<br />

Y penser devant : douleur de colique néphrétique sans<br />

lithiase documentée.<br />

En présence d’un trouble de rythme.<br />

Examen de confirmation : angioscanner (en l’absence<br />

d’insuffisance rénale).<br />

Examens complémentaires<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

POINTS FORTS<br />

Embolies de cristaux de cholestérol<br />

Le diagnostic repose sur une triade :<br />

— terrain à risque : homme de plus de 60 ans, cumulant<br />

les facteurs de risque cardiovasculaire + athérome<br />

symptomatique + insuffisance rénale chronique ;<br />

— facteurs déclenchants (> 90 % des cas) : cathétérisme<br />

artériel (artériographie)-traitement anticoagulant-chirurgie<br />

cardiaque ou vasculaire ;<br />

— insuffisance rénale + orteils pourpres/livedo<br />

ischémie mésentérique.<br />

SHU/MAT<br />

Y penser devant :<br />

— insuffisance rénale aiguë + anémie hémolytique<br />

+ thrombopénie ;<br />

— étiologie : infectieuse (enfant)/adulte<br />

(VIH, cancer/traitement… ) ;<br />

— traitement : étiologie + contrôle HTA + discussion<br />

échanges plasmatiques.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 2077)<br />

La suspicion diagnostique impose de dépister une éventuelle<br />

sténose par un examen non invasif :<br />

— l’échodoppler des artères rénales a une sensibilité de 91 % et<br />

une spécificité de 96 % entre les mains d’examinateurs expérimentés.<br />

Les critères en faveur d’une sténose serrée sont : au niveau<br />

de la sténose, un pic de vélocité 200 cm/s, une vélocité en fin de<br />

diastole 150 cm/s associée à une baisse des résistances distales.<br />

R Q 134<br />

2047


La tomodensitométrie spiralée avec injection de produit de<br />

contraste iodé est possible mais uniquement en l’absence d’insuffisance<br />

rénale.<br />

L’angio-IRM n’est pas actuellement considérée comme un examen<br />

de dépistage compte tenu de nombreux faux positifs.<br />

Traitement<br />

Le traitement a pour objectif :<br />

— de normaliser ou de mieux contrôler l’HTA (diminuer le nombre<br />

de traitements anti-HTA) ;<br />

— d’éviter l’aggravation rapide d’une insuffisance rénale. Cet<br />

objectif est rarement atteint, le parenchyme rénal en aval de la<br />

sténose étant souvent le siège de lésions fibreuses irréversibles<br />

(en cas de sténose athéromateuse).<br />

La revascularisation rénale est, dans plus de 90 à 95 % des<br />

cas, effectuée par voie endoluminale (angioplastie). Elle doit être<br />

si possible réalisée à distance d’un épisode de décompensation.<br />

Un stent est mis en place d’emblée en cas de sténose ostiale<br />

athéro mateuse.<br />

Les indications de l’angioplastie sont :<br />

— en cas de fibrodysplasie : s’il existe une HTA et une sténose de<br />

75 % au moins ;<br />

— en cas de sténose athéromateuse supérieure à 75 % s’il existe une<br />

HTA résistante, une HTA maligne, un OAP flash, une insuffisance<br />

rénale d’aggravation rapide sous condition que la taille du rein en<br />

aval de la sténose soit supérieure à 8 cm. Dans tous les autres cas,<br />

le bénéfice de l’angioplastie n’est pas démontré. De même, en cas<br />

de résistances distales évaluées au doppler 0,8, de protéinurie,<br />

de taille de rein inférieure à 8 cm, le risque de complications est<br />

majoré, et le bénéfice de l’angioplastie reste hypothétique.<br />

Les complications de l’angioplastie sont :<br />

— les complications locales au point de ponction (les plus fréquentes)<br />

: hématome, fistule artérioveineuse ;<br />

— les complications rénales : insuffisance rénale aiguë (IRA)<br />

secondaire à l’injection de produit de contraste (définie par augmentation<br />

du taux de créatinine plasmatique de plus de 44 μmol/L<br />

à 48-72 heures après l’artériographie), embolies de cristaux de choles<br />

térol (athérosclérose), dissection/thrombose de l’artère rénale.<br />

Leur fréquence est variable : inférieure à 5 % en cas de fibrodysplasie,<br />

supérieure à 5-40 % en cas de sténose athéromateuses.<br />

Ce risque augmente parallèlement au degré de sévérité<br />

de l’insuffisance rénale.<br />

La resténose est rare en cas de fibrodysplasie (10 %), fréquente<br />

en cas de sténose ostiale athéromateuse ( 30 % en l’absence<br />

de stent, 15-20 % en cas de stent).<br />

Pronostic<br />

1. Sténose athéromateuse<br />

Le pronostic à moyen terme est dominé par la survenue d’événement<br />

cardiovasculaire. La survenue d’une insuffisance<br />

rénale terminale est rare. La prise en charge au long cours des<br />

patients ayant une sténose des artères rénales est donc avant<br />

tout celle d’un patient à haut risque cardiovasculaire.<br />

2048<br />

I-9-Q134<br />

Néphropathie vasculaire<br />

2. Fibrodysplasie<br />

L’angioplastie permet d’obtenir un excellent résultat morphologique<br />

dans plus de 90 % des cas, et la guérison de l’HTA dans<br />

environ 60 à 90 % des cas. Le taux de guérison est plus élevé<br />

en cas d’HTA récente.<br />

Le risque de resténose est faible ( 7 % à 6 mois). Le risque<br />

de thrombose ou d’insuffisance rénale est exceptionnel.<br />

INFARCTUS RÉNAL<br />

Physiopathologie<br />

L’infarctus rénal est secondaire à l’obstruction aiguë d’une<br />

artère rénale ou plus souvent d’une de ses branches.<br />

Étiologie<br />

L’infarctus rénal peut être secondaire à :<br />

— une pathologie de l’artère rénale : athérosclérose, fibrodysplasie,<br />

périartérite noueuse (PAN) ou dissection/thrombose post-traumatique<br />

(lors d’une artério graphie) ;<br />

— une pathologie aortique : dissection/plaque d’athérosclérose.<br />

Le diagnostic est clinique et radiologique (échographie transœsophagienne<br />

[ETO] ou angio-IRM ou angio-TDM injecté) ;<br />

— une pathologie cardiaque : cardiopathie emboligène (trouble<br />

de rythme, valvulopathie, endocardite). Le diagnostic nécessite<br />

un examen clinique, un électrocardiogramme (ECG) et une échographie<br />

cardiaque ;<br />

— une thrombophilie : syndrome des antiphospholipides (temps<br />

de céphaline kaolin [TCK] allongé, anticorps anticardiolipine),<br />

déficit en antithrombine III, en protéine S, ou en protéine C…<br />

Diagnostic<br />

Il est le plus souvent asymptomatique.<br />

S’il est symptomatique, on peut retrouver :<br />

— une douleur lombaire (mimant une colique néphrétique +++] ;<br />

— une hématurie micro- ou macroscopique ;<br />

— une fièvre modérée ;<br />

— une HTA de novo ou l’aggravation d’une HTA préexistante.<br />

La biologie montre une insuffisance rénale inconstante et une<br />

augmentation des LDH.<br />

L’imagerie retrouve :<br />

— au TDM spiralé avec injection : l’infarctus apparaît comme un<br />

triangle à base externe ne prenant pas le contraste. L’examen<br />

spiralé peut mettre en évidence le siège de l’obstruction ;<br />

— à l’échodoppler, mise en évidence de l’obstruction, plus difficilement<br />

de l’infarctus.<br />

Traitement<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

La traitement comprend :<br />

— une anticoagulation à dose efficace (sauf en cas de dissection<br />

aortique) ;<br />

— le traitement étiologique.<br />

Dans certains cas, il convient de discuter une reperméabilisation<br />

par voie endoluminale.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008


EMBOLIES DE CRISTAUX DE CHOLESTÉROL<br />

Les embolies de cristaux de cholestérol compliquent les lésions<br />

d’athérosclérose ulcérées de l’aorte et des branches. Ce phénomène<br />

physiologique peut être à l’origine d’une maladie potentiellement<br />

mortelle à court terme. Cette maladie, dans plus de<br />

70 à 90 %, est d’origine iatrogène.<br />

Diagnostic<br />

Le diagnostic repose sur une triade :<br />

— la notion d’un « terrain » à haut risque cardiovasculaire : patient<br />

de sexe masculin, de plus de 60 ans, cumulant les facteurs de risque<br />

cardiovasculaire et présentant une athérosclérose multi focale :<br />

cardiopathie ischémique et/ou artérite oblitérante des membres<br />

inférieurs et/ou antécédents d’accidents vasculaires cérébraux<br />

et/ou anévrisme de l’aorte et/ou sténose des artères rénales ;<br />

— l’exposition à un ou des facteurs déclenchants : artériographie/angioplastie,<br />

traitement anticoagulant, fibrinolytique, chirurgie<br />

cardiaque ou vasculaire ;<br />

— une atteinte systémique pouvant associer :<br />

• une insuffisance rénale rapidement évolutive (en quelques jours<br />

ou semaines), associée à une protéinurie de débit variable, une<br />

hématurie microscopique dans plus de la moitié des cas, et l’aggravation<br />

d’une HTA préexistante,<br />

• une ischémie cutanée : coloration pourpre de la pulpe des orteils<br />

(fig. 2), livedo de la plante des pieds, des jambes, des cuisses ou<br />

de l’abdomen, plus rarement plaques de nécrose cutanée,<br />

• une ischémie mésentérique (un tiers des cas) suspectée devant<br />

des douleurs abdominales, une intolérance alimentaire, une<br />

hémorragie digestive,<br />

• une décompensation cardiaque,<br />

• une atteinte rétinienne souvent asymptomatique : présence de<br />

cristaux de cholestérol au FO,<br />

• une multinévrite,<br />

• dans un contexte d’altération de l’état général, de perte de poids.<br />

Le diagnostic clinique est souvent retardé de plusieurs jours<br />

ou semaines (en moyenne 2 mois) après l’exposition au(x) facteur(s)<br />

déclenchant(s).<br />

La biologie est aspécifique : syndrome inflammatoire, hyperéosinophilie<br />

précoce et transitoire, et, exceptionnellement, baisse<br />

du complément (précoce et transitoire).<br />

La preuve histologique n’est nécessaire qu’en cas de doute<br />

diagnostique.<br />

Diagnostic différentiel<br />

Un patient âgé présentant une insuffisance rénale d’aggravation<br />

rapide associée à une protéinurie, une hématurie, dans un<br />

contexte d’atteinte systémique, conduira à discuter les vascularites<br />

systémiques (micropolyangéite, plus rarement granulomatose<br />

de Wegener, vascularite infectieuse).<br />

L’analyse du contexte clinique, la présence de facteurs déclenchants,<br />

la chronologie d’apparition des symptômes seront des<br />

arguments qui pourront plaider en faveur de la maladie des embolies<br />

de cristaux de cholestérol.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008<br />

Traitement<br />

Il comprend :<br />

— le traitement symptomatique des défaillances d’organe : nutrition,<br />

prévention des complications de décubitus, traitement antihypertenseur,<br />

de l’anémie, de l’insuffisance rénale (dialyse)… ;<br />

— l’éviction des facteurs déclenchants : proscrire les artériographies,<br />

les angioplasties artérielles, les traitements anticoagulants,<br />

les interventions vasculaires à la phase initiale ;<br />

— une corticothérapie est proposée de plus en plus souvent<br />

(1/3 mg/kg/jour).<br />

Pronostic<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Figure 2 « Orteils poupres » témoignant d’embolies<br />

distales de cristaux de cholestérol au niveau des artérioles<br />

de la pulpe des orteils.<br />

Pendant les 3 premiers mois, la surmortalité (17 %) est due à<br />

la récidive des embolies de cristaux de cholestérol (ischémie mésentérique<br />

surtout) et aux séquelles des atteintes neurologiques<br />

ou trophiques.<br />

La mortalité tardive (mortalité 20 % à 1 an) est celle de tout<br />

patient ayant un haut risque cardiovasculaire : événements coronariens,<br />

cérébraux vasculaires et cancers (vessie, poumon, ORL).<br />

La morbidité est avant tout liée aux séquelles rénales (dialyse<br />

définitive) ou aux gestes d’amputation distale des membres inférieurs.<br />

MICRO-ANGIOPATHIE THROMBOTIQUE (MAT)<br />

ET SYNDROME URÉMIQUE ET HÉMOLYTIQUE<br />

Physiopathologie<br />

La microangiopathie thrombotique est l’expression d’une<br />

dysfonction des cellules endothéliales et de l’activité d’agrégation/adhésion<br />

plaquettaire. L’obstruction des capillaires ou des<br />

artères de petit calibre entraîne une ischémie responsable des<br />

atteintes organiques. L’hémolyse serait due à une fragilisation<br />

des membranes des hématies secondaire à l’adhésion de facteur<br />

R Q 134<br />

2049


Tableau<br />

von Willebrand polymérisé. Lorsque l’atteinte rénale est au premier<br />

plan, le terme de syndrome urémique et hémolytique est souvent<br />

utilisé, en cas de signes neurologiques au premier plan ou de thrombopénie<br />

majeure, le terme de purpura thrombopénique thrombocytopénique<br />

est préféré (PTT ou syndrome de Moschovitz).<br />

Diagnostic clinico-biologique<br />

Le diagnostic repose sur l’association :<br />

— d’une insuffisance rénale d’aggravation souvent rapide ;<br />

— d’une HTA, inconstante ;<br />

— d’une anémie hémolytique à Coombs négatif, avec présence<br />

de schizocytes : chute du taux d’hémoglobine, de l’haptoglobine,<br />

augmentation des LDH, de la bilirubine et des réticulocytes ;<br />

— d’une thrombopénie périphérique ;<br />

— parfois associés à un purpura, une atteinte neurologique (déficit<br />

focal, confusion, convulsion, parfois coma), une atteinte mésentérique<br />

(douleur, hémorragie digestive, pancréatite, fièvre<br />

modérée).<br />

Étiologie (tableau)<br />

Le diagnostic nosologique repose sur l’analyse du contexte<br />

clinique et de l’anamnèse.<br />

En cas de symptomatologie digestive précédant le diagnostic,<br />

le rôle des bactéries responsables de diarrhée invasive est évoqué.<br />

Elle représente la première cause ( 90 %) chez l’enfant.<br />

2050<br />

I-9-Q134<br />

Néphropathie vasculaire<br />

Cause des microangiopathies<br />

thrombotiques (syndrome urémique<br />

et hémolytique, SHU)<br />

Infections<br />

❚ Escherichia coli O 157H :7<br />

(Shiga Toxine)<br />

➙ la bactérie peut être mise<br />

en évidence dans les selles,<br />

la Shiga-toxine dans le sang)<br />

❚ Pneumocoque (sécréteur<br />

de neuraminidase)<br />

❚ Shiguelle, salmonelle,<br />

Campylobacter jejuni<br />

❚ Virus : VIH, CMV, adénovirus,<br />

coxakie, echo-virus, rotavirus,<br />

parvovirus B19<br />

Médicaments<br />

En cancérologie/hématologie<br />

❚ Mitomycine C, gemcitabine<br />

❚ Radiothérapie<br />

❚ Allogreffe de moelle osseuse<br />

❚ Bevacizumab (2008),<br />

anti-angiogénique, IFN alpha<br />

En transplantation<br />

❚ Ciclosporine, tacrolimus<br />

En cardiologie<br />

❚ Ticlopidine, Clopidogrel<br />

En gynécologie<br />

❚ Pilule estroprogestative<br />

Maladie de système<br />

❚ Sclérodermie +++<br />

❚ Syndrome catastrophique<br />

des antiphospholipides +++<br />

❚ Lupus érythémateux<br />

disséminé<br />

❚ Granulomatose<br />

de Wegener<br />

Héréditaire (enfant)<br />

❚ Déficit en facteur H<br />

❚ Déficit en métalloprotéase<br />

ADAMTS 13<br />

Cancer métastatique<br />

Divers<br />

❚ Hypertension artérielle<br />

maligne<br />

En cancérologie et hématologie seront évoqués les cancers<br />

métastasés, les effets secondaires des traitements.<br />

En cas de grossesse en cours (troisième trimestre) sera évoqué<br />

le diagnostic de prééclampsie ; en période post-partum (vers le<br />

troisième mois), le diagnostic de syndrome urémique et hémolytique<br />

du post-partum.<br />

En cas de syndrome de Raynaud, de sclérodactylie sera évoquée<br />

la sclérodermie.<br />

En l’absence d’orientation diagnostique chez l’adulte, il convient<br />

de ne pas oublier l’infection par le VIH.<br />

Traitement<br />

Chez l’enfant, en cas de micro-angiopathie thrombotique<br />

post-infectieuse, seul le traitement symptomatique sera proposé<br />

en première intention : dialyse si défaillance rénale sévère, traitement<br />

anti-HTA.<br />

Chez l’adulte, le traitement symptomatique sera systématique.<br />

L’étiologie conditionnera le traitement causal. Dans les formes<br />

idiopathiques, d’évolution rapidement défavorable, sera discutée<br />

la réalisation de plasmaphérèse en utilisant des PVI (plasma viroinactivé).<br />

Chez l’enfant, en cas de cause infectieuse, les autorités sanitaires<br />

doivent être rapidement alertées (déclaration obligatoire).<br />

Pronostic<br />

Chez l’enfant, le risque de décès est de 2 % (atteinte neurologique).<br />

Soixante pour cent des enfants guérissent sans séquelles.<br />

Les autres auront une HTA permanente, plus rarement une insuffisance<br />

rénale chronique.<br />

Chez l’adulte, le pronostic est lié à l’étiologie. Globalement, le<br />

pronostic vital est moins bon, le risque de séquelles important<br />

(insuffisance rénale chronique et HTA).<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

0_couv_2205 15/12/05 16:21 Page 2205<br />

La Revue du Praticien • • 31 décembre 2005 • Tome 55 • N° 20 (2205 23<br />

Maladie de Willebrand INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE CHEZ LE SUJET ÂGÉ<br />

LA REVUE DU<br />

PRATICIEN<br />

3 1 D É C E M B R E 2 0 0 5 / T O M E 5 5 N º 2 0<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

Insuffisance rénale chronique i<br />

chez le sujet âgé<br />

COMMENT RALENTIR SA PROGRESSION? SIO<br />

OUVERTURES<br />

B Maladie de Willebrand B<br />

Fibrome pleural B Presse :<br />

Risques des hypnotiques après<br />

60 ans • Moins de diabète<br />

chez les femmes qui allaitent<br />

Pour en savoir plus<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

Études sur les étudiants et les internes B Qu’est-ce qui peut tomber à<br />

l’examen? B Troubles de la marche et de l’équilibre B Retard de croissance<br />

B Lésions dentaires et gingivales B Troubles de la fonction auditive<br />

DE MÉMOIRE DE MÉDECIN Le paludisme et la grande peur des marais<br />

p u b l i c a tion bimensuelle de for m a tion mé d ica le co ntinu e<br />

◗ Insuffisance rénale chronique<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2001;51[4]:361-419)<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

◗ Insuffisance rénale<br />

chronique chez<br />

le sujet âgé<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2005;55[20]:<br />

2221-2280)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 NOVEMBRE 2008


OBJECTIFS<br />

DIAGNOSTIQUER un myélome<br />

multiple des os.<br />

Le myélome multiple est caractérisé par une prolifération<br />

clonale de plasmocytes tumoraux, qui s’accumulent au<br />

sein de la moelle osseuse hématopoïétique. Cette prolifération<br />

s’accompagne, en général, de la sécrétion d’une immunoglobuline<br />

monoclonale, véritable marqueur tumoral. L’immunoglobuline<br />

peut être complète, le plus souvent de type IgG ou IgA,<br />

ou parfois constituée uniquement d’une chaîne légère (kappa ou<br />

lambda). Il est important de connaître les circonstances de<br />

découverte et les éléments du diagnostic positif du myélome<br />

multiple.<br />

Épidémiologie<br />

Le myélome multiple est la deuxième hémopathie maligne par<br />

ordre de fréquence après les lymphomes non hodgkiniens. Il<br />

représente 12 % des hémopathies malignes et 1 % de tous les<br />

cancers. L’incidence du myélome multiple est de l’ordre de 4<br />

nouveaux cas par an pour 100 000 habitants dans les pays<br />

développés, soit environ 3 000 nouveaux cas annuels en France.<br />

Son incidence moyenne est plus élevée chez les hommes que<br />

chez les femmes (4,7 vs 3,2 pour 100 000 respectivement). Le<br />

myélome s’observe rarement avant 40 ans (moins de 2 % des<br />

cas), et son incidence augmente progressivement avec l’âge<br />

(âge moyen au diagnostic de 65 à 70 ans). Il est deux fois plus<br />

fréquent chez les Noirs américains et plus rare chez les Asiatiques.<br />

La raison de l'inégale distribution en fonction du sexe et<br />

de la race est inconnue. En 2009, le pronostic des patients<br />

atteints de myélome multiple reste médiocre, avec une médiane<br />

de survie de l’ordre de 5 ans. Les cas de guérison restent exceptionnels.<br />

Moins de 5 % des patients vivent plus de 12 ans. Le<br />

myélome est responsable de 1 à 2 % de la mortalité par cancer<br />

en Europe et en Amérique du Nord.<br />

Facteurs de risque environnementaux<br />

L’exposition aux radiations ionisantes est un facteur de risque<br />

établi. Concernant les activités professionnelles, deux facteurs<br />

de risque ont été décrits, l’un lié à l’agriculture, principalement à<br />

l’activité de fermage, ainsi qu’à l’utilisation des pesticides, l’autre,<br />

plus discuté, est l’exposition au benzène.<br />

Facteurs génétiques<br />

Plusieurs cas familiaux de myélome ont été décrits, mais leur<br />

fréquence est beaucoup plus faible que pour d’autres lympho -<br />

pathies chroniques comme la leucémie lymphoïde chronique. De<br />

même, plusieurs cas de myélome multiple ont été décrits chez des<br />

jumeaux homozygotes. Aucune association significative n’a été<br />

retrouvée avec les groupes sanguins du système ABO. Il pourrait<br />

exister un risque accru chez les individus HLAB5 (risque relatif :<br />

1,7) et peut-être chez les individus HLACw2. Enfin, une fréquence<br />

anormale de HLACw5 est notée chez les Noirs américains.<br />

Physiopathologie<br />

I - 10 Q 166<br />

MYÉLOME MULTIPLE<br />

DES OS<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Dr Murielle Roussel 1 , Dr Thomas Gastinne 2 , Dr Xavier Leleu 3<br />

1. Hématologie clinique, CHU Purpan, Toulouse, France<br />

2. Hématologie clinique, CHU Hôtel-Dieu, Nantes, France<br />

3. Service des maladies du sang, CHRU Huriez, Lille, France<br />

roussel.m@chu-toulouse.fr<br />

RR<br />

Le myélome multiple est lié à l’accumulation de plasmocytes<br />

(fig. 1) monoclonaux (même chaîne lourde et/ou légère) dans la<br />

moelle osseuse. Ils peuvent ne pas avoir d’anomalies cytologiquement<br />

décelables. La cellule à l’origine du myélome est vraisemblablement<br />

dérivée de cellules B post-germinatives ganglionnaires,<br />

présentant une (ou plusieurs) anomalie(s) de son<br />

génome, mais restant apte à migrer dans la moelle osseuse et à<br />

se différencier en plasmocyte.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009 1143


RR Q 166 I - 10<br />

MYÉLOME MULTIPLE DES OS<br />

Sur la base de données cliniques et génétiques, il a été démontré<br />

qu’une gammapathie monoclonale précédait systématiquement<br />

l’apparition du myélome multiple. Cet état « prénéoplasique »,<br />

asymptomatique, est appelé gammapathie monoclonale de<br />

signification indéterminée (ou MGUS pour les Anglo-Saxons).<br />

C’est une pathologie fréquente dans la population de plus de 50 ans<br />

(3 %). Sa prévalence augmente avec l’âge et dépasse 5 % chez<br />

le sujet de plus de 70 ans. Le taux d’évolution vers un myélome<br />

est de 1 % par an. Il n’existe pas à l’heure actuelle de paramètres<br />

biocliniques permettant de distinguer les gammapathies de<br />

signification indéterminée qui évolueront vers un myélome et<br />

celles qui resteront stables. Néanmoins, compte tenu du risque<br />

de transformation qui persiste à plus de 30 ans, les individus doivent<br />

être surveillés toute leur vie.<br />

Dans le modèle général de la pathogénie du myélome, la progression<br />

vers le myélome symptomatique passe par une phase<br />

asymptomatique ou « myélome indolent » (smoldering myeloma<br />

pour les Anglo-Saxons). Il est important de noter que, chez de<br />

nombreux patients, ces stades indolents sont le plus souvent<br />

non diagnostiqués en raison de leur caractère asymptomatique.<br />

Le myélome est la conséquence d’événements oncogéniques<br />

touchant la lignée lymphocytaire B au stade de plasmocyte.<br />

Parmi les événements à l’origine de la cancérisation cellulaire,<br />

certains sont des translocations impliquant le gène codant pour<br />

la synthèse des chaînes lourdes d’immunoglobulines, situé sur le<br />

chromosome 14. Les progrès technologiques récents ont montré<br />

que des anomalies cytogénétiques sont présentes chez tous<br />

les patients atteints de myélome multiple, tels que des gains ou<br />

pertes de chromosomes. Certaines de ces anomalies chromosomiques<br />

sont d’importants facteurs pronostiques. L’hyperdiploïdie<br />

(augmentation du nombre de chromosomes) est associée<br />

à un meilleur pronostic. La délétion du chromosome 17p13<br />

(trouvée chez 10 % des patients) ainsi que les translocations<br />

impliquant le chromosome 14q32.3, avec soit le chromosome<br />

4p16.3 (trouvé chez 15 % des patients) soit le chromosome<br />

16q23 (trouvé chez 5 % des patients), sont associées à un moins<br />

bon pronostic. Une grande variété d'autres modifications génétiques<br />

se produisent à des stades ultérieurs de la maladie.<br />

D’un point de vue immunologique, les plasmocytes malins<br />

expriment tous à leur surface la même chaîne lourde et/ou la<br />

même chaîne légère, et sécrètent dans le sérum une immunoglobuline<br />

toujours identique, ce qui donne l’aspect de pic monoclonal<br />

sur l’électrophorèse des protides sériques (fig. 2).<br />

Ainsi, plus de 80 % des myélomes multiples produisent une<br />

immunoglobuline de type G (60-65 %) ou A (20 %) monoclonale<br />

complète avec également un excès fréquent de chaînes légères,<br />

excrétées dans les urines. Dans 15 % des cas, seules les chaînes<br />

légères sont excrétées et passent dans les urines ; la chaîne<br />

lourde est alors soit produite mais non assemblée, soit non produite.<br />

Dans moins de 5 % des cas, le myélome multiple présente<br />

un type immunochimique inhabituel IgD, IgM, IgE, biclonal ou<br />

non excrétant.<br />

1144<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009<br />

La croissance des plasmocytes malins est sous la dépendance<br />

de plusieurs facteurs de croissance sécrétés par les cellules du<br />

microenvironnement médullaire, principalement l’interleukine 6.<br />

La prolifération plasmocytaire s’accompagne :<br />

– d’une inhibition de la lymphopoïèse B normale avec diminution<br />

des immunoglobulines normales et donc une susceptibilité<br />

accrue vis-à-vis des infections bactériennes ;<br />

– d’une inhibition de l’hématopoïèse normale, principalement<br />

l’érythropoïèse ;<br />

– d’une augmentation de la résorption ostéoclastique (destruction<br />

osseuse) et d’une inhibition de la fonction reconstructrice<br />

osseuse des ostéoblastes responsables de fractures, douleurs<br />

et parfois d’une hypercalcémie.<br />

Circonstances de découverte : principaux aspects<br />

cliniques, biologiques et morphologiques<br />

Lorsque le myélome multiple est symptomatique, c'est souvent<br />

l'altération de l'état général et les douleurs osseuses qui<br />

dominent le tableau clinique.<br />

Symptomatologie osseuse<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

FIGURE 1 Plasmocytes monoclonaux. Frottis médullaire avec infiltration<br />

plasmocytaire.<br />

Le myélome se caractérise par la présence presque constante,<br />

d’emblée ou au cours de l’évolution, de manifestations<br />

osseuses.<br />

1. Syndrome douloureux<br />

Les douleurs osseuses sont présentes au diagnostic chez 70 %<br />

des patients et touchent habituellement l’ensemble du squelette,<br />

principalement au niveau des sites d'hématopoïèse active (os<br />

plats et longs), notamment le rachis, les côtes, le bassin, le<br />

sternum, le crâne et les extrémités proximales des fémurs et


humérus. Ce sont des douleurs rebelles, non mécaniques. Elles<br />

nécessitent des antalgiques majeurs et retentissent sur les capacités<br />

fonctionnelles des patients. Le site de fracture spontanée le<br />

plus fréquent est le rachis dorsolombaire (55 à 70 % des cas).<br />

Les tassements vertébraux sont très fréquents (80 % des<br />

patients) et peuvent être graves, raison pour laquelle ils ne doivent<br />

pas être confondus avec les tassements entrant dans le<br />

cadre d’une ostéoporose bénigne ; ainsi, tout tassement vertébral<br />

dorsal doit être jugé suspect.<br />

2. Sémiologie radiologique<br />

Le bilan comprend des clichés standard du crâne (face et profil),<br />

du rachis complet (face et profil), du bassin (face), du thorax<br />

(face) et des grils costaux, des humérus et fémurs bilatéraux. Une<br />

douleur osseuse brutale justifie à tout moment la réalisation<br />

d'une nouvelle radiographie sur le site douloureux.<br />

Les signes radiologiques (fig. 3) essentiels sont la déminéralisation<br />

(ostéopénie), les lésions ostéolytiques (géodes ou lacunes)<br />

et les fractures. Ces anomalies sont souvent associées, mais il<br />

peut exister des cas d’ostéoporose isolée, difficile à différencier<br />

d'une ostéoporose commune (6 à 9 % des patients).<br />

Différents aspects radiographiques sont possibles :<br />

– multiples lésions ostéolytiques de contours nets, « à l’emportepièce<br />

», caractéristiques de la maladie ;<br />

– lésions osseuses expansives. Une masse des parties molles<br />

est parfois objectivée, notamment en regard de lésions vertébrales,<br />

costales ou dans le bassin ;<br />

– ostéopénie diffuse sans lésion ostéolytique associée ;<br />

– fractures et tassements vertébraux d’allure ostéoporotique,<br />

avec parfois importante cyphose thoracique.<br />

Il faut noter que les radiographies peuvent être normales.<br />

Une imagerie en résonance magnétique nucléaire (IRM) rachidienne<br />

et du bassin est le plus souvent réalisée de manière systématique<br />

au diagnostic. L’IRM du rachis est importante pour le<br />

Q RR166<br />

FIGURE 3 A : crâne de profil : lacunes à l’emporte-pièce de la voûte crânienne.<br />

B : rachis thoracique de profil : tassements vertébraux dorsaux étagés avec<br />

accentuation de la cyphose dorsale.<br />

C : diaphyse humérale de face : lacunes à l’emporte-pièce.<br />

D : rachis lombaire de profil : lésions osseuses expansives avec respect de la<br />

corticale.<br />

diagnostic des complications ostéoneurologiques, compressions<br />

médullaires ou radiculaires. L'IRM du rachis et du bassin renseigne<br />

sur le signal de la médullaire des corps vertébraux, l’état du mur<br />

postérieur de la vertèbre, l'existence d'une épidurite et l'état du<br />

cordon médullaire. Dix à 20 % des patients n'ont pas de lésions<br />

osseuses en radiologie standard. Chez ces patients, l'IRM met<br />

en évidence des lésions myélomateuses dans 50 % des cas,<br />

définissant un groupe de patients dont la progression se fait plus<br />

rapidement vers un stade plus avancé.<br />

Protéines sériques Pic monoclonal<br />

Fraction (%) (g/L) Normales (g/L)<br />

Albumine 62,7 42,6 30,0-48,0<br />

Alpha 1 3,7 2,5 1,8-4,8<br />

Alpha 2 9,3 6,3 3,3-11,0<br />

Bêta 9,9 6,7 5,4-12,8<br />

Gamma 14,5 9,9 6,6-17,6<br />

Total 68 60,0-75,0<br />

A/G : 1,68<br />

FIGURE 2 Électrophorèse des protides sériques.<br />

Fraction (%) (g/L) Normales (g/L)<br />

Albumine 32,2 32,5 30,0-48,0<br />

Alpha 1 1,8 1,9 1,8-4,8<br />

Alpha 2 8,8 8,8 3,3-11,0<br />

Bêta 9,7 9,8 5,4-12,8<br />

Gamma 47,5 48,0 6,6-17,6<br />

Total 68 60,0-75,0<br />

A/G : 0,47<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

A B<br />

C D<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009 1145


RR Q 166 I - 10<br />

MYÉLOME MULTIPLE DES OS<br />

Les lésions sont (fig. 4) :<br />

– lésions focales arrondies, multiples, hypo-intenses en T1,<br />

hyperintenses en T2 et se rehaussant après injection de gadolinium<br />

;<br />

– aspect « poivre et sel » avec anomalies de signal discrètes,<br />

punctiformes, secondaires à la présence de multiples petits<br />

îlots graisseux ;<br />

– infiltration diffuse de la moelle.<br />

L’examen tomodensitométrique osseux (sans injection de produit<br />

de contraste iodé de principe) garde une indication dans le<br />

bilan préopératoire, avant des gestes chirurgicaux de stabilisation<br />

rachidienne notamment. Il est aussi utilisé chez les patients qui<br />

ont une contre-indication à l’IRM (fig. 5)<br />

Complications liées à l’atteinte osseuse<br />

1. Hypercalcémie<br />

L’hypercalcémie est en grande partie liée à l’hyper-résorption<br />

osseuse. Un tableau clinique d’hypercalcémie (associant initialement<br />

anorexie, douleurs abdominales, constipation, puis nausées,<br />

syndrome polyuro-polydipsique, déshydratation, troubles de<br />

1146<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009<br />

conscience et troubles du rythme et de conduction cardiaque)<br />

est une circonstance de diagnostic dans près de 20 % des cas. Il<br />

s’agit d’une urgence thérapeutique.<br />

2. Atteintes neurologiques<br />

La complication neurologique majeure dans le myélome reste<br />

l’atteinte médullaire centrale, le plus souvent par compression<br />

liée à une fracture vertébrale mais aussi par épidurite tumorale.<br />

La symptomatologie, d’apparition brutale, se manifeste par un<br />

syndrome rachidien, un syndrome lésionnel avec radiculalgies et<br />

un syndrome sous-lésionnel. L’IRM médullaire constitue l’examen<br />

de choix pour confirmer le diagnostic, établir l’étiologie et servir de<br />

base à la décision thérapeutique (radiothérapie ou neurochirurgie).<br />

Les atteintes du nerf périphérique ne sont pas à négliger, du fait<br />

de leur fréquence élevée, de la morbidité qu’elles impliquent et<br />

de leur caractère parfois irréversible. Il s’agit le plus souvent<br />

d’une polyneuropathie sensitive plus ou moins associée à des<br />

douleurs de type neuropathique, en rapport avec l’immunoglobuline<br />

monoclonale. Dans l’évolution de la maladie, les polyneuropathies<br />

iatrogènes sont les plus fréquentes, liées aux différents<br />

traitements spécifiques utilisés. D’autres causes de neuropathies<br />

A B C<br />

FIGURE 4 IRM médullaires de profil.<br />

A : séquence T1 sans injection : atteinte vertébrale hétérogène diffuse avec tassements vertébraux étagés.<br />

B : séquence T1 injectée avec gadolinium : épidurite tumorale de niveau T3 se développant aux dépens de l’arc vertébral postérieur.<br />

C : séquence T2: infiltration osseuse diffuse et tassement de T11.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN


périphériques, liées à la dysglobulinémie, doivent être évoquées,<br />

notamment une amylose AL et une activité cryoglobulinémique<br />

de l’immunoglobuline monoclonale.<br />

Présentation « hématologique » avec cytopénies<br />

1. Syndrome anémique<br />

Le syndrome anémique, associant asthénie, pâleur, tachycardie,<br />

dyspnée d’effort, est un motif de découverte fréquent. Il<br />

s’agit d’une anémie normocytaire, normochrome, arégénérative<br />

avec sur le frottis sanguin des hématies en rouleaux. Cette anémie<br />

est de cause multifactorielle, et ne s’explique pas seulement<br />

par l’infiltration médullaire (tableau 1). La survenue d’autres cytopénies<br />

liées à l’insuffisance médullaire est tardive dans l’histoire<br />

de la maladie myélomateuse.<br />

2. Syndrome hémorragique<br />

Il peut résulter de plusieurs phénomènes : thrombopénie,<br />

thrombopathie induite par l’hyperprotidémie et trouble de coagulation<br />

induit par les propriétés d’une immunoglobuline monoclonale<br />

(notamment une maladie de Willebrand acquise).<br />

3. Syndrome infectieux<br />

Le myélome n'est pas, en dehors de sa phase terminale, une<br />

maladie fébrile. Toute fièvre témoigne a priori d'un état infectieux,<br />

dont le traitement est urgent. L'infection est présente au diagnostic<br />

chez environ 10 % des patients, les infections récidivantes<br />

à pneumocoques, notamment les pneumonies, restant une circonstance<br />

de découverte classique. C’est la première cause de<br />

décès, favorisée par la diminution des immunoglobulines polyclonales.<br />

Le risque infectieux est majoré par la chimiothérapie<br />

quand elle induit des phases neutropéniques. Les localisations<br />

les plus fréquentes sont pulmonaires (également favorisées<br />

par les fractures costales et les tassements vertébraux, responsables<br />

d’insuffisance respiratoire restrictive) et urinaires. Les<br />

infections sont surtout bactériennes, voire virales (HSV, VZV),<br />

rarement parasitaires (Pneumocystis jiroveci) en dehors des traitements.<br />

Tous les germes peuvent être en cause, avec prédominance<br />

d’infections à Streptococcus pneumoniæ et Hæmophilus<br />

influenzæ (à la phase initiale), Staphylococcus aureus et les<br />

bacilles Gram négatifs (dans les épisodes plus tardifs).<br />

Complications liées au composant monoclonal<br />

1. Insuffisance rénale<br />

La fréquence de l'insuffisance rénale est variable selon les critères<br />

utilisés pour la définir, le mode de recrutement des patients<br />

et l'ancienneté des études prises en compte. Si l'on considère la<br />

clairance de la créatinine, c'est environ 50 % des patients qui ont,<br />

au diagnostic, une clairance anormale. Cinq à 10 % des patients<br />

doivent recourir à l'hémodialyse à la phase initiale. L'insuffisance<br />

rénale est multifactorielle, l'excrétion de la protéine de Bence<br />

Jones, l'hypercalcémie, la déshydratation et la iatrogénie étant<br />

les facteurs les plus importants, retrouvés dans plus de 90 % des<br />

cas. D’autres causes peuvent expliquer cette insuffisance rénale,<br />

ce qui nécessite souvent un suivi néphrologique (tableau 2).<br />

FIGURE 5 Images TDM en fenêtres osseuses.<br />

A : lésions osseuses lytiques confluentes des ailes iliaques.<br />

B : lésions osseuses lytiques du corps vertébral.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR166<br />

2. Complications thromboemboliques<br />

Le risque thromboembolique est élevé (incidence entre 3 et 10 %)<br />

chez les patients atteints de myélome en raison de la sécrétion<br />

de cytokines pro-inflammatoires par les plasmocytes tumoraux,<br />

de la présence d’une immunoglobuline aux propriétés prothrombotiques,<br />

de l’âge souvent élevé des patients, de la présence<br />

d’un dispositif veineux central, de l’utilisation d’érythropoïétine<br />

et de certains agents immunomodulateurs, d’une<br />

mobilité réduite liée aux complications neurologiques, voire à la<br />

présence d’un syndrome néphrotique chez certains patients.<br />

3. Syndrome d’hyperviscosité<br />

Le syndrome d'hyperviscosité est rare dans le myélome. Il<br />

s'observe lorsque le taux du composant monoclonal sérique est<br />

très élevé. Ses signes cliniques sont neurologiques (troubles<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009 1147<br />

A<br />

B


RR Q 166 I - 10<br />

MYÉLOME MULTIPLE DES OS<br />

TABLEAU 1<br />

TABLEAU 2<br />

1148<br />

Principales causes d’anémie dans le myélome<br />

Causes fréquentes<br />

❚ Apoptose des lignées érythroblastiques par les plasmocytes<br />

❚ Fausse anémie par dilution (hyperprotidémie)<br />

❚ Infiltration médullaire osseuse<br />

❚ Insuffisance rénale (chronique)<br />

❚ Iatrogénie (chimiothérapie, nouveaux agents ciblants :<br />

les IMiDs [thalidomide, lénalidomide])<br />

Causes rares<br />

❚ Syndrome anémique auto-immun : lié aux propriétés<br />

de l’immunoglobuline monoclonale, telle la maladie<br />

des agglutinines froides<br />

❚ Syndrome carentiel : carence martiale liée à un saignement<br />

(facilité par les troubles de l’hémostase), carence en vitamine B12<br />

❚ Syndrome infectieux<br />

❚ Syndrome myélodysplasique (induite par les traitements<br />

tels que les alkylants)<br />

Causes d’insuffisance rénale dans le myélome<br />

Rénale<br />

Prérénale<br />

(insuffisance rénale<br />

fonctionnelle)<br />

Tubulaire<br />

Glomérulaire<br />

Post-rénale<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009<br />

TABLEAU 3<br />

❚ par déshydratation extracellulaire au cours de :<br />

➙ hypercalcémie<br />

➙ pertes digestives (vomissements)<br />

Bilan Initial<br />

❚ Antécédents, histoire de la maladie, examen clinique<br />

❚ Hémogramme (anémie ?)<br />

❚ Myélogramme avec étude cytogénétique (pourcentage de plasmocytes)<br />

❚ Créatinine sérique, calcémie<br />

❚ Électrophorèse des protéines sériques et immunofixation<br />

(mise en évidence d’un pic monoclonal, puis caractérisation<br />

de son isotype : Gk, Gl, Ak, Al…)<br />

❚ Dosage pondéral des immunoglobulines<br />

(baisse des immoglobulines normales)<br />

❚ Électrophorèse des protéines urinaires et immunofixation,<br />

protéinurie des 24 heures (mise en évidence des chaînes légères<br />

monoclonales, caractérisation de l’isotype)<br />

❚ Dosage des chaînes légères libres dans le sérum<br />

pour les myélomes non sécrétants<br />

❚ Bilan radiologique de l'ensemble du squelette axial + os longs,<br />

le plus souvent complété par une IRM (la scintigraphie osseuse<br />

n’est pas un bon examen)<br />

❚ β2-microglobuline sérique (β2m), protéine C réactive (CRP)<br />

et lactico-déshydrogénase (LDH) (reflet de la masse tumorale)<br />

❚ Nécrose tubulaire aiguë (notamment après utilisation de produits de contraste iodés)<br />

❚ Tubulopathie myélomateuse (tubes distaux)<br />

❚ Syndrome de Fanconi : traduction clinique d’une atteinte tubulaire proximale<br />

(tubulopathie « microcristalline » proximale)<br />

❚ Amylose AL<br />

❚ Maladie à dépôts monotypiques (de chaînes légères et/ou lourdes) non organisés = syndrome de Randall<br />

❚ Dépôts organisés non amyloïdes : ces dépôts glomérulaires ont une organisation microtubulaire<br />

(glomérulonéphrite immunotactoïde)<br />

❚ Atteintes glomérulaires au décours des cryoglobulinémies (de type I ou II)<br />

❚ Lithiase (secondaire à une hypercalciurie chronique)<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN


visuels ou auditifs, céphalées, vertiges, convulsions, coma) et<br />

hémorragiques (hémorragies au fond d'œil, épistaxis). Le diagnostic<br />

est confirmé par la réalisation en urgence d’un fond d’œil.<br />

Un traitement par plasmaphérèse est indiqué en complément du<br />

traitement spécifique du myélome.<br />

Diagnostic fortuit<br />

Le diagnostic de myélome est évoqué de plus en plus souvent<br />

chez des patients asymptomatiques (20 à 30 % des cas), par<br />

exemple lors d'un « bilan biologique de santé » réalisé à titre systématique,<br />

découvrant une anémie, une augmentation de la<br />

vitesse de sédimentation (VS), une dysglobulinémie monoclonale<br />

à l’électrophorèse des protéines sériques ou une protéinurie.<br />

Cas particuliers<br />

1. Plasmocytome solitaire<br />

Il s’agit d’une tumeur plasmocytaire solitaire (parfois multiple),<br />

osseuse ou extra-osseuse (tissus mous) associée ou non aux<br />

mêmes anomalies biologiques que dans le myélome (plasmocytome<br />

sécrétant). Le plasmocytome osseux prédomine, par ordre<br />

de fréquence décroissant, au rachis dorso-lombaire (50 % des<br />

cas), au bassin, au crâne, au sternum et aux côtes. Il est rare et<br />

affecte typiquement des sujets plus jeunes que le myélome (50 ans<br />

en moyenne). Il est volontiers associé à des signes neurologiques<br />

par un mécanisme de compression (25 % des cas). L’aspect<br />

radiographique est évocateur en cas de lésion ostéolytique<br />

expansive avec une corticale ou coque périostée respectée,<br />

voire épaissie (elle peut être discontinue par endroits) et quelques<br />

cloisons intratumorales épaisses. Au niveau du rachis, le plasmocytome<br />

siège essentiellement dans le corps vertébral. Il peut se<br />

compliquer d’un tassement d’importance variable, d’une extension<br />

épidurale ou infiltrer une vertèbre adjacente en passant par<br />

le disque. L’évolution vers le myélome est fréquente, dans les<br />

5 ans en moyenne.<br />

2. Myélome condensant (3-4 % des myélomes)<br />

Il se traduit par des lésions ostéocondensantes plurifocales, ou<br />

plus souvent par une ostéocondensation diffuse. Il survient chez<br />

des patients plus jeunes et est volontiers associé à une neuropathie<br />

périphérique (85 % des cas). Il peut s’intégrer dans le<br />

POEMS syndrome (pour polyneuropathies, organomégalie,<br />

endocrinopathie, dysglobulinémie monoclonale et anomalie<br />

cutanée [Skin]). La raison de cette condensation reste encore<br />

incertaine. La scintigraphie, si elle est utilisée, est habituellement<br />

positive, avec parfois un aspect d’hyperfixation diffuse du squelette<br />

contrastant avec l’absence de fixation rénale.<br />

Diagnostic positif<br />

Devant une suspicion de myélome, un bilan hématologique,<br />

osseux et biochimique va confirmer le diagnostic. Le diagnostic<br />

repose sur la triade : plasmocytose médullaire, pic monoclonal,<br />

retentissement organique.<br />

Myélome multiple des os<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR166<br />

Le myélome multiple est une hémopathie qui atteint le plus<br />

souvent le sujet âgé (moyenne d’âge au diagnostic 65-70 ans)<br />

et dans laquelle les manifestations osseuses (douleurs non<br />

soulagées par les antalgiques usuels, fractures pathologiques)<br />

dominent le tableau clinique.<br />

Le diagnostic est simple et repose sur l’association<br />

d’une plasmocytose médullaire excessive (> 10 %)<br />

et d’une immunoglobuline monoclonale sérique et/ou urinaire.<br />

Près d’un tiers des patients sont asymptomatiques<br />

au diagnostic.<br />

Le diagnostic de myélome multiple symptomatique<br />

utilise la classification CRAB : C (calcium), R (rein), A (anémie),<br />

B (lésions osseuses).<br />

Le bilan iconographique est basé sur la recherche de<br />

lésions osseuses lytiques, ainsi que des critères de gravité de<br />

ces lésions (risque fracturaire et complications neurologiques).<br />

Les complications fréquentes sont les infections,<br />

l’insuffisance rénale et les complications osseuses<br />

et neurologiques.<br />

Le traitement symptomatique est essentiel, quel que soit<br />

le traitement antitumoral choisi : atteinte osseuse, douleur,<br />

épidurite et compressions médullaires, épisodes<br />

hypercalcémiques, infection, insuffisance rénale, anémie,<br />

syndrome d’hyperviscosité.<br />

Le bilan initial permet (tableau 3) :<br />

– de connaître l’importance de la plasmocytose médullaire (à<br />

noter : les plasmocytes peuvent ne pas avoir d’anomalies cytologiquement<br />

décelables) ;<br />

– d’identifier le composant monoclonal et d’en mesurer le taux<br />

dans le sérum et dans les urines ;<br />

– de rechercher l’existence de manifestations cliniques ou biologiques<br />

en lien avec le myélome : ces manifestations clinico-biologiques<br />

sont regroupées sous l’acronyme anglo-saxon CRAB<br />

(hyperCalcemia, Renal insufficiency, Anemia and Bone lesions).<br />

Quand le tableau clinico-biologique est complet, le diagnostic<br />

ne pose guère de problème. La situation est plus difficile quand la<br />

triade n’est pas complète. Le tableau 4 présente les définitions<br />

du myélome multiple, de la gammapathie monoclonale, du myélome<br />

indolent et du plasmocytome.<br />

L’évaluation de la masse tumorale a été établie par Durie et Salmon<br />

en 1975. Leur classification distingue 3 stades au potentiel<br />

évolutif croissant. Cette classification reste largement utilisée sur<br />

le plan international (tableau 5).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009 1149


RR Q 166 I - 10<br />

MYÉLOME MULTIPLE DES OS<br />

TABLEAU 4<br />

TABLEAU 5<br />

1150<br />

Critères diagnostiques<br />

Myélome multiple (MM)<br />

❚ Présence dans le sérum et/ou les urines<br />

d’une protéine monoclonale (sauf dans le cas<br />

d’un myélome non sécrétant)<br />

❚ ET d’une plasmocytose médullaire ≥ 10 %<br />

❚ ET présence d’au moins 1 des critères CRAB :<br />

➙ Calcémie > d’au moins 0,25 μmol/L<br />

à la limite supérieure de la normale<br />

ou > 2,75 mmol/L<br />

➙ Créatinine sérique > 173 mmol/L<br />

➙ Anémie avec Hb < de 2 g/dL à la limite<br />

inférieure de la normale ou < 10 g/dL<br />

➙ Lésions osseuses : lyses osseuses,<br />

ostéopénie sévère ou fractures<br />

pathologiques<br />

Classification de Durie et Salmon*<br />

Stade Critères<br />

I Tous ces critères sont présents : < 0,6<br />

❚ Hémoglobine > 10 g/dL (faible)<br />

❚ Calcémie normale<br />

( 120 mg/L-3 mmol/L)<br />

❚ Os normal ou plasmocytome isolé<br />

❚ Taux d'Ig monoclonale faible :<br />

IgG < 50 g/L, IgA < 30 g/L,<br />

Ig monoclonale urinaire < 4 g/24 h<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009<br />

➙ Autres : syndrome d’hyperviscosité,<br />

amylose, infections bactériennes<br />

récidivantes (> 2 épisodes en 1 an)<br />

Gammapathie monoclonale de<br />

signification indéterminée (MGUS)<br />

❚ Présence d’une protéine monoclonale dans<br />

le sérum < 3 g/100 mL<br />

❚ ET d’une plasmocytose médullaire < 10 %<br />

❚ ET absence de critères CRAB<br />

II Aucun des critères du stade III 0,6-1,2<br />

Ni du stade I (intermédiaire)<br />

III L'un au moins des critères suivants : > 1,2<br />

❚ Hémoglobine < 8,5 g/dL (élevée)<br />

❚ Calcémie > 120 mg/L (3 mmol/L)<br />

❚ Multiples lésions lytiques (lésions<br />

destructrices ou fractures pathologiques)<br />

❚ Taux élevé d'Ig monoclonale :<br />

IgG > 70 g/L, IgA > 50 g/L,<br />

Ig monoclonale urinaire 12 g/24 h<br />

* Regroupement des patients en fonction de la masse tumorale<br />

estimée (stades de pronostic de plus en plus péjoratif).<br />

Sous-classification :<br />

A - Fonction rénale normale (créatininémie < 20 mg/L).<br />

B - Fonction rénale anormale (créatininémie 20 mg/L).<br />

Myélome indolent ou Smoldering<br />

myeloma (myélome asymptomatique)<br />

❚ Présence d’une protéine monoclonale<br />

dans le sérum 3 g/100 mL<br />

Masse tumorale<br />

(× 10 12 /m 2 )<br />

TABLEAU 6<br />

❚ ET/OU d’une plasmocytose médullaire 10 %<br />

❚ ET absence de critères CRAB<br />

Plasmocytome solitaire :<br />

quatre critères<br />

❚ Une unique localisation de plasmocytes<br />

monoclonaux au niveau osseux ou tissulaire<br />

qui doit être confirmée par une biopsie<br />

❚ ET une moelle osseuse normale avec<br />

une absence de plasmocytes monoclonaux<br />

❚ ET une IRM du rachis et du pelvis sans<br />

autres lésions (à l’exception de l’atteinte<br />

unique si rachidienne ou pelvienne)<br />

❚ ET une absence de critères CRAB<br />

Principaux facteurs de mauvais pronostic<br />

Liés à l'hôte ➙ Âge élevé<br />

Liés à la tumeur<br />

❚ Masse tumorale ➙ β2m sérique élevée<br />

➙ Hémoglobine basse /Thrombopénie<br />

➙ Calcémie élevée<br />

➙ Lésions lytiques étendues<br />

➙ Créatinine sérique élevée<br />

➙ Plasmocytose médullaire élevée<br />

❚ Malignité intrinsèque ➙ Anomalies chromosomiques<br />

• t(4;14) • del(17p)<br />

•13/13q- • hypodiploïdie<br />

➙ Albumine sérique basse<br />

➙ CRP élevée<br />

➙ Taux de LDH élevé<br />

➙ Cytologie plasmablastique<br />

= immature**<br />

Traitement : ➙ Chimiorésistance<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

* Paramètres pris en compte dans la classification historique<br />

de Durie et Salmon.<br />

** Analyses réservées à des laboratoires spécialisés


Diagnostics différentiels<br />

POEMS syndrome<br />

Ce syndrome est caractérisé par la combinaison d’une Polyneuropathie<br />

sensitivomotrice à prédominance distale, d’une Organomégalie<br />

(hépatosplénomégalie), d’une atteinte Endocrinienne<br />

(hypogonadisme, atteinte hypophysaire, hypothyroïdie, diabète<br />

essentiellement), de la présence d’un composant Monoclonal<br />

(IgA ou IgG et de chaînes légères lambda) et d’une atteinte cutanée<br />

(= Skin) (de type mélanodermie, hypertrichose ou sclérodermiforme).<br />

Les lésions osseuses sont quasi constantes mais, à la différence<br />

du myélome, celles-ci sont habituellement condensantes.<br />

Amylose AL<br />

L’amylose AL systémique est une maladie monoclonale primitive<br />

isolée, et le diagnostic de myélome doit être écarté. L’amylose AL<br />

est une maladie pouvant toucher tous les organes, principalement<br />

le rein (80 % des cas, diagnostic souvent posé dans le bilan<br />

d’un syndrome néphrotique lié à une atteinte glomérulaire), le<br />

cœur (pronostic le plus sombre par cardiomyopathie restrictive<br />

avec troubles de conduction), le système nerveux (neuropathie<br />

périphérique sensitivo-motrice progressive distale et symétrique,<br />

canal carpien ou dysautonomie), le tube digestif (macroglossie,<br />

syndrome sec et douleurs abdominales) et les articulations (polyarthrite<br />

avec aspect hypertrophique des articulations). La chaîne<br />

légère d’immunoglobuline est le plus souvent lambda.<br />

Diagnostics différentiels en radiologie<br />

Les métastases ostéolytiques constituent le principal diagnostic<br />

différentiel, surtout dans les cancers du rein, du sein, de la thyroïde,<br />

de la prostate et du poumon. On citera également parmi les diagnostics<br />

différentiels l’ostéoporose sévère (notamment les fracturestassements<br />

vertébraux bénins).<br />

Facteurs pronostiques<br />

Il est classique de distinguer les facteurs liés à l’hôte et ceux liés<br />

à la tumeur, en distinguant dans ce dernier cadre des facteurs de<br />

masse tumorale et de malignité intrinsèque (notion de temps différents<br />

pour constituer une masse tumorale donnée). Un facteur pronostique<br />

important est également la chimiosensibilité de la tumeur<br />

qui n’est, par définition, pas connue au moment du diagnostic.<br />

Les principaux facteurs de mauvais pronostic sont décrits dans<br />

le tableau 6. La β 2-microglobuline (β 2m) est un facteur pronostique<br />

essentiel, quel que soit le traitement mis en place. Une β 2m<br />

élevée est associée à une masse tumorale importante et à une<br />

survie plus courte, qu’elle soit considérée comme une variable<br />

linéaire ou à différents seuils (les données publiées font état de<br />

seuils variables, entre 2,5 et 10 mg/L). La valeur pronostique de<br />

la β 2m reste discriminante dans les 2 ans suivant le diagnostic.<br />

Des modèles pronostiques robustes sont obtenus en associant<br />

la β 2m à d’autres paramètres tels l’albumine sérique (comme<br />

TABLEAU 7<br />

Indice pronostique international<br />

(ISS pour les Anglo-Saxons)<br />

Stade Critère<br />

cela est fait dans le récent Indice pronostique international,<br />

tableau 7), la CRP ou les anomalies chromosomiques.<br />

La classification historique de Durie et Salmon a une valeur pronostique<br />

inférieure à celle de la β 2m, des anomalies chromosomiques<br />

et de l’IPI.<br />

Les anomalies chromosomiques du clone tumoral, fréquentes et<br />

souvent complexes, prennent une importance pronostique croissante.<br />

Elles sont le plus souvent identifiées par la technique d’hybridation<br />

in situ en fluorescence (FISH). On retrouve un impact négatif sur la<br />

survie sans progression et sur la survie de la translocation t(4 ;14)<br />

(p16 ;q32), de la délétion 17p [del(17p)] et, dans une moindre mesure,<br />

de la délétion totale ou partielle du chromosome 13 (-13/13q-).<br />

Principes de traitement<br />

Seuls doivent être traités les myélomes symptomatiques selon<br />

la classification CRAB.<br />

Traitements symptomatiques<br />

Ils ciblent :<br />

– la douleur : antalgiques majeurs toujours, radiothérapie localisée<br />

parfois ;<br />

– l’hypercalcémie : bisphosphonates, hyperhydratation, corticothérapie,<br />

éventuellement calcitonine ;<br />

– les infections : antibiothérapie ciblée sur les bactéries Gram+,<br />

perfusions de gammaglobulines ;<br />

– l’anémie : transfusions et érythropoïétine recombinante ;<br />

– l’hyperviscosité : échanges plasmatiques ;<br />

– traitement chirurgical d’une lésion osseuse menaçante ou<br />

compres sive ;<br />

– l’insuffisance rénale : hydratation alcaline, hypo-uricémiants,<br />

éviter les néphrotoxiques, hémodialyse.<br />

Traitements spécifiques<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR166<br />

Survie médiane<br />

(mois)<br />

I β2m < 3,5 mg/L et albumine 35 g/L 62<br />

II β2m < 3,5 mg/L et albumine < 35 g/L, 44<br />

ou β2m 3,5 mg/L et < 5,5 mg/L<br />

III β2m 5,5 mg/L 29<br />

La chimiothérapie associant melphalan et prednisone a été longtemps<br />

la référence, avec des résultats décevants tant en termes de<br />

réponse que de survie. L’autogreffe de cellules souches hématopoïétiques<br />

précédée d’une chimiothérapie d’induction a été intro-<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009 1151


RR Q 166 I - 10<br />

MYÉLOME MULTIPLE DES OS<br />

duite dans les années 1990 chez les patients de moins de 65 ans.<br />

Cette stratégie a constitué un premier progrès considérable en<br />

démontrant que le myélome est une maladie chimiosensible et surtout<br />

que la durée de réponse et la survie sont liées au niveau de<br />

réduction tumorale. Ce constat a changé l’approche thérapeutique<br />

jusque-là limitée à une perspective palliative à court terme. Ces<br />

progrès ont été facilités par l’introduction à partir des années 2000<br />

de nouvelles molécules telles que la thalidomide et ses dérivés<br />

(lenalidomide), inhibiteurs du protéasome (bortezomib), et les<br />

multiples combinaisons qui en résultent.<br />

Indications<br />

Chez les sujets de moins de 65 ans, le traitement comprend<br />

une première ligne basée sur l’utilisation de combinaisons type<br />

bortezomib + dexaméthasone, complétée par une intensification<br />

par melphalan forte dose avec autogreffe de cellules souches<br />

hématopoïétiques. Chez les sujets plus âgés, le traitement de<br />

référence conventionnel est l’association melphalan + prednisone +<br />

1152<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?<br />

Un homme âgé de 63 ans consulte son médecin traitant pour asthénie, nausées,<br />

vomissements et confusion depuis 24 heures avec des lombalgies basses<br />

récidivantes pour lesquelles il prend régulièrement des AINS. L'interrogatoire<br />

retrouve une pneumopathie communautaire il y a 6 mois et un tassement vertébral<br />

lombaire ancien après une chute. L'examen clinique retrouve une pâleur cutanéomuqueuse,<br />

un pli cutané, des douleurs lombaires diffuses sans point douloureux<br />

exquis, et aucun signe digestif. Il n’y a pas d’organomégalie. La pression artérielle<br />

est à 120/70 mmHg et le pouls à 120 batt/min. La température est à 37,5 °C.<br />

L'auscultation cardiopulmonaire est sans particularité.<br />

QUESTION N° 1<br />

Que suspectez-vous cliniquement<br />

chez ce patient et quels examens<br />

complémentaires simples<br />

demandez-vous pour préciser<br />

votre diagnostic ?<br />

Le bilan biologique montre :<br />

un taux d’hémoglobine à 8,9 g/dL,<br />

VGM 90 fl, CCMH 32,<br />

réticulocytes 20 G/L,<br />

des plaquettes à 226 G/L,<br />

des leucocytes à 8 500/mm3 avec une formule normale<br />

et une vitesse de sédimentation<br />

à 160 mm la première heure.<br />

La créatinine est à 290 μmol/L<br />

et l’urée à 28 mmol/L, protides totaux<br />

à 95 g/L, CRP à 12 mg/L.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 octobre 2009<br />

thalidomide. Dans cette indication, l’association lenalidomide<br />

+ dexaméthasone est en cours d’évaluation. Est également utilisée<br />

l’association bortezomib, melphalan et prednisone. L’âge avancé<br />

n’est pas en soi un motif d’abstention thérapeutique.•<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données<br />

publiées dans cet article.<br />

POUR<br />

LA REVUE DU<br />

EN SAVOIR PRATICIEN<br />

QUESTION N° 2<br />

Quelles sont les anomalies relevées<br />

biologiquement ? Quels examens sont<br />

manquants ? Le patient a été hospitalisé<br />

via les urgences en néphrologie pour<br />

insuffisance rénale aiguë avec hypercalcémie<br />

à 3,5 mmol/L, hyperkaliémie à 5,5 mmol/L<br />

et signes de déshydration.<br />

QUESTION N° 3<br />

Quels moyens thérapeutiques ont été<br />

mis en place et comment le bilan<br />

étiologique a-t-il été complété ?<br />

L'électrophorèse des protéines montre<br />

un pic d'allure monoclonale évalué à 20 g/L<br />

dans la zone des bêtaglobulines et une<br />

hypogammaglobulinémie. Le diagnostic<br />

de myélome multiple est évoqué.<br />

OUVERTURES<br />

B Helicobacter pylori chez<br />

l’enfant B Cryoglobulinémie<br />

B Presse : Prévention<br />

des varices œsophagiennes •<br />

Cannabis et accidents<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1 5 J A N V I E R 2 0 0 6 / T O M E 5 6 N º 1<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

Immunoglobulines Immunogl monoclonales<br />

QUEL RAISONNEMENT ADOPTER ?<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

Louis et la méthode numérique B Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen?<br />

B Voyage en pays tropical B Leucémies aiguës B Facteurs de risque<br />

cardiovasculaire B Consommation médicale B Otalgies et otites B Oreillons<br />

DE MÉMOIRE DE MÉDECIN Paracelse, médecin, alchimiste, philosophe<br />

publication bimensuelle de formation médicale continue<br />

Monographie<br />

Immunoglobulines<br />

monoclonales<br />

Rev Prat 2006;<br />

56(1):15-52<br />

QUESTION N° 4<br />

Quel examen permet de confirmer<br />

ce diagnostic ? Quels autres examens<br />

doit comporter le bilan initial ?<br />

QUESTION N° 5<br />

Que pourraient retrouver<br />

les radiographies osseuses ?<br />

QUESTION N° 6<br />

Quelles autres complications<br />

aurait-on pu rencontrer ?<br />

QUESTION N° 7<br />

Déterminez le stade de la maladie.<br />

Selon quels critères le patient<br />

justifie-t-il d’un traitement spécifique ?<br />

QUESTION N° 8<br />

Comment annoncer le diagnostic ?<br />

Retrouvez toutes les réponses<br />

et les commentaires sur<br />

www.larevuedupraticien.fr<br />

onglet Références Universitaires<br />

OK


INTRODUCTION<br />

Les diurétiques, stricto sensu, « augmentent<br />

le volume des urines ».<br />

En fait, ils servent surtout à majorer l’élimination urinaire de<br />

sodium : ils sont natriurétiques. Ils sont utilisés pour lutter contre<br />

les œdèmes liés à une rétention de sodium ; dans ce cadre, ils entrent<br />

dans le traitement de l’insuffisance cardiaque, de sa complication<br />

aiguë (l’œdème aigu du poumon), de l’hypertension portale. Ils sont<br />

aussi indiqués dans le traitement de l’hypertension artérielle,<br />

améliorée par la limitation du capital sodique cellulaire.<br />

Deux classes de diurétiques sont employées dans des indications<br />

ne relevant pas de leur effet natriurétique :<br />

— les diurétiques osmotiques, qui visent l’élimination d’eau intracellulaire<br />

;<br />

— les substances inhibitrices de l’anhydrase carbonique, qui ont<br />

actuellement des indications en lien avec la production du liquide<br />

intra-oculaire et du liquide céphalo-rachidien.<br />

LA FONCTION URINAIRE, RAPPEL<br />

PHYSIOLOGIQUE<br />

La fonction urinaire est la fonction principale mais non exclusive<br />

du rein. Sa compréhension est nécessaire au bon usage des diurétiques.<br />

La diurèse est le résultat du fonctionnement épurateur<br />

rénal. Le rein est constitué d’unités fonctionnelles, les néphrons<br />

(fig. 1), faits d’un glomérule et d’un tubule se déversant dans un<br />

tube collecteur.<br />

Glomérule<br />

Prescription et surveillance<br />

des diurétiques<br />

C’est l’interface sang/urine où se forme le liquide tubulaire<br />

qui est un ultra-filtrat ; 1 500 litres de plasma sont ultra-filtrés<br />

chaque 24 heures. Le liquide passe dans la lumière tubulaire sous<br />

I-11-Q176 I-00-Q000<br />

Pr Germain Bessard1 , Dr Sandrine Bacquaert2 , Dr Audrey Revol3 1. Laboratoire de pharmacologie, hôpital Michallon CHU BP 217, 38043 Grenoble Cedex 9, France<br />

2. Brigade des sapeurs-pompiers, 75017 Paris, France<br />

3. Service départemental incendie et secours de Vaucluse, esplanade Armée d’Afrique 84018 Avignon, France<br />

gbessard@chu-grenoble.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008<br />

Objectifs<br />

• Prescrire et surveiller un médicament appartenant aux principales<br />

classes de diurétiques.<br />

l’effet d’une pression qui est la différence entre la pression dans<br />

le capillaire glomérulaire d’une part, les pressions oncotique plasmatique<br />

et hydrostatique, d’autre part. La nature de la membrane<br />

glomérulaire permet le passage des substances ayant un poids<br />

moléculaire inférieur à 70 000 daltons. À la sortie du glomérule, le<br />

liquide tubulaire ne contient ni protéines ni éléments figurés, mais a,<br />

pour le reste, une composition proche de celle du sang.<br />

Glomérule<br />

Liquide<br />

tubulaire<br />

180<br />

litres<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

TCP Anse<br />

de Henlé<br />

TCD Tube<br />

collecteur<br />

1,5<br />

litre<br />

% de sodium résorbé 50-65 25-30 10-15 1-25<br />

Figure 1 Représentation schématique du néphron, unité de<br />

base de la fonction urinaire rénale, avec évolution de la<br />

quantité du liquide tubulaire et rôle des différentes parties<br />

dans la réabsorption du sodium.<br />

2155


2156<br />

I-11-Q176<br />

Tubule<br />

Prescription et surveillance des diurétiques<br />

C’est le siège d’une adaptation en eau et en électrolytes de<br />

cette urine primitive qui va se faire par des réabsorptions, sécrétions<br />

d’eau et d’électrolytes, pour aboutir à la formation de 1,5 à 2 litres<br />

d’urine définitive. Les mouvements d’électrolytes sont sous la<br />

dépendance de systèmes de transport cellulaires passifs, liés aux<br />

gradients transmembranaires, ou actifs, agissant contre un gradient,<br />

et consommateurs d’énergie sous forme d’ATP.<br />

Le tubule est schématiquement composé de 3 parties, le tube<br />

contourné proximal (TCP), l’anse de Henlé (AH), dont la branche<br />

descendante s’enfonce de la zone corticale vers la médullaire<br />

rénale, l’ascendante remontant vers la corticale et se continuant<br />

par le tube contourné distal (TCD) qui se déverse dans le tube<br />

collecteur (TC). La nature des mouvements de l’eau et du sodium<br />

sur l’AH crée un gradient d’osmolarité croissante dans le parenchyme<br />

rénal, de la corticale vers la médullaire.<br />

Les différents tubules des néphrons se déversent dans des<br />

tubes collecteurs recueillant l’urine définitive.<br />

La figure 2 résume les mouvements du sodium et du potassium<br />

le long du tubule. Chacune des portions du tubule est le siège de<br />

mouvements spécifiques qui sont les cibles d’action des diurétiques<br />

disponibles.<br />

1. Tube contourné proximal<br />

C’est le siège d’une réabsorption obligatoire et importante<br />

d’eau et de sodium, en particulier 50 à 65 % du sodium filtré, et<br />

de plus de la moitié des substances filtrées par le glomérule. Ces<br />

mouvements se font grâce à une perméabilité importante du<br />

TCP, et de la partie descendante de l’AH. Le TCP est le siège d’une<br />

réabsorption de bicarbonates sous l’action de l’anhydrase carbonique<br />

des cellules tubulaires (fig. 3). Elle catalyse la formation<br />

d’acide carbonique —H2CO3 – à partir d’eau et de gaz carbonique<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple de cas clinique,<br />

pourrait concerner l’item « Prescription et surveillance des diurétiques ».<br />

Une question concernant les diurétiques<br />

peut intervenir dans le cadre d’un dossier<br />

clinique concernant une utilisation aiguë.<br />

Exemple de cas clinique :<br />

M. X, 59 ans, en surpoids de 92 kg pour<br />

1,75 m, tabagique de longue date,<br />

présente un tableau de dyspnée aiguë<br />

nocturne. À votre arrivée, le patient est<br />

polypnéique à 32/minute, en sueur, avec<br />

de francs signes de tirage, une saturation<br />

en air ambiant à 88 %, une tachycardie<br />

à 110 batt/min et une tension<br />

symétrique aux 2 bras à 140/90 mmHg.<br />

ATP<br />

ase<br />

ATP<br />

ase<br />

Na +<br />

Na + K + 2Cl —<br />

K + K + K +<br />

Cl —<br />

ATP<br />

ase<br />

Diurétiques<br />

de l’anse<br />

Le patient est apyrétique. L’électrocardiogramme<br />

montre un rythme sinusal,<br />

des complexes QRS normaux et pas de<br />

trouble de la repolarisation.<br />

À l’auscultation cardiopulmonaire, vous<br />

retrouvez des crépitants jusqu’à mi-champs.<br />

Quel est le diagnostic le plus pro -<br />

bable ? [OAP cardiogénique]<br />

Quelle conduite thérapeutique ?<br />

[Asseoir le patient.<br />

Installer une oxygénothérapie par masque<br />

haute concentration.<br />

Poser une voie veineuse périphérique .<br />

Prescrire dérivés nitrés et furosémide.]<br />

Na +<br />

Thiazides<br />

Na +<br />

Pôle<br />

apical<br />

Segment de dilution<br />

Branche ascendante anse de Henlé Tube contourné distal<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Pôle<br />

basal<br />

Diurétiques<br />

distaux<br />

Figure 2 Mode et lieu d’action cellulaire des différentes<br />

classes de diurétiques. Les différents diurétiques bloquent<br />

des transports ioniques différents situés au pôle urinaire de<br />

la cellule tubulaire ; le transport du sodium au pôle vasculaire<br />

est sous la dépendance d’une pompe ATPase, consommant<br />

une grande partie de l’énergie des cellules du néphron, et<br />

n’est pas affecté par les diurétiques.<br />

K +<br />

Na +<br />

Na +<br />

diffusant de la lumière tubulaire vers les cellules du tubule. L’acide<br />

carbonique est ensuite dissocié en ions bicarbonate et protons. Les<br />

bicarbonates sont ensuite réabsorbés et entraînent du sodium.<br />

2. Anse de Henlé<br />

Elle plonge dans la médullaire rénale. Le sodium est réabsorbé<br />

à 25 % à son niveau. Elle est perméable à l’eau dans sa<br />

branche descendante, mais imperméable dans sa branche ascendante<br />

où seuls les électrolytes sont réabsorbés. À la fin de l’anse<br />

de Henlé, l’urine devient hypo-osmotique par rapport au plasma,<br />

et la fin de l’AH et le début du TCD constituent ce que l’on nomme<br />

le « segment de dilution ».<br />

À côté des développements concernant oxygéno<br />

thérapie et vasodilatateurs, il y aura lieu<br />

de citer la prescription de furosémide, donner<br />

sa voie d’administration (veineuse), sa<br />

posologie (40 mg), indiquer l’attente d’un<br />

effet rapide, prévoir un renouvellement de<br />

la dose en cas contraire.<br />

Dans le cadre d’une utilisation de diurétiques<br />

en mode chronique, les questions pourront<br />

porter sur le choix d’une classe de diurétiques<br />

plutôt qu’une autre, sur les risques de<br />

perturbation de l’équilibre hydro-électrolytique<br />

et sur les mesures correctives à apporter.<br />

Les principaux types d’effet secondaire<br />

pourront aussi faire l’objet de questions,<br />

dans la mesure où ils orientent le choix d’un<br />

diurétique en fonction du terrain existant.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008


Par un mécanisme dit de « contre-courant », il se produit au<br />

niveau de l’anse, une augmentation progressive de l’osmolarité<br />

tissulaire rénale au fur et à mesure que l’on s’enfonce dans la<br />

partie médullaire. Cette concentration osmolaire croissante joue<br />

un rôle important dans l’adaptation du volume urinaire.<br />

3. Tube contourné distal<br />

Il s’y produit une réabsorption de sodium faible (5 %) constituant<br />

un ajustement. Sur cette partie, le sodium réabsorbé est échangé<br />

contre du potassium sous l’effet de l’aldostérone (ce qui explique<br />

l’hypokaliémie engendrée par un excès d’aldostérone).<br />

4. Tube collecteur<br />

C’est le siège d’une adaptation du volume urinaire par modulation<br />

hormonale de la perméabilité de sa paroi lorsqu’elle traverse<br />

la médullaire fortement hypertonique. L’eau est réabsorbée<br />

en fonction du gradient osmolaire entre médullaire rénale et<br />

lumière du TC. La perméabilité du TC est modulée par l’hormone<br />

antidiurétique (ce qui explique l’existence d’une polyurie en cas<br />

de déficit hormonal).<br />

GRANDES CLASSES DE DIURÉTIQUES<br />

Afin de mieux comprendre les choix de prescription, un bref rappel<br />

des grandes catégories de diurétiques disponibles est nécessaire<br />

(tableau 1).<br />

Diurétiques osmotiques<br />

Ce sont des substances filtrées par le glomérule et non réabsorbées.<br />

Elles retiennent l’eau dans le tubule par un mécanisme<br />

osmotique et provoquent une diurèse aqueuse.<br />

Lumière vasculaire<br />

Pôle vasculaire<br />

Pôle urinaire<br />

Lumière tubulaire<br />

H +<br />

H 2O<br />

H 2CO 3<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008<br />

HCO 3 —<br />

anhydrase carbonique<br />

CO 2<br />

Na +<br />

Cellule TCP<br />

Figure 3 Schéma de la réabsorption du sodium dans le tube<br />

contourné proximal sous l’effet de l’anhydrase carbonique.<br />

à retenir<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

POINTS FORTS<br />

Les diurétiques sont utilisés pour augmenter<br />

l’élimination du sodium dont l’excès dans l’organisme<br />

induit des œdèmes.<br />

Thiazidiques et diurétiques de l’anse sont hypokaliémiants,<br />

alors que les diurétiques distaux sont hyperkaliémiants.<br />

Les indications les plus fréquentes des diurétiques<br />

sont l’insuffisance cardiaque congestive, sa complication<br />

l’œdème aigu du poumon, l’hypertension artérielle.<br />

En intervenant sur l’élimination des électrolytes<br />

et de l’eau, les diurétiques perturbent l’homéostasie<br />

du milieu intérieur ; le maintien des constantes hydroélectrolytiques<br />

doit être surveillé de façon régulière.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 2186)<br />

Le mannitol représente cette classe ; il s’utilise par voie veineuse<br />

; il n’est pas transformé dans l’organisme et s’élimine<br />

presque totalement par voie rénale. L’augmentation de diurèse<br />

qu’il provoque s’accompagne d’une légère augmentation de la<br />

natriurèse. Il entraîne une diurèse aqueuse, et il produit un transfert<br />

d’eau du milieu cellulaire vers le liquide extracellulaire. Il en<br />

résulte une diminution du volume intracellulaire, utilisée en neurologie<br />

pour réduire la pression intracrânienne en cas d’œdème cérébral<br />

ou d’hypertension intracrânienne. Les posologies employées<br />

sont de 1 à 2 g/kg. Il s’utilise en urgence ou sur un mode aigu et<br />

son effet est rapide. Son emploi nécessite un contrôle étroit du<br />

bilan électrolytique.<br />

Dans certaines circonstances, le mannitol peut être utilisé<br />

pour maintenir un débit urinaire et éviter l’anurie, mais un essai<br />

doit être réalisé avec une dose test (obtention de 50 mL/h durant<br />

3 heures après 12,5 mg de mannitol par voie veineuse).<br />

De façon anecdotique, lorsque, au cours du diabète, la glycosurie<br />

dépasse le seuil de réabsorption maximal du glucose, ce<br />

dernier se comporte comme un diurétique osmotique et explique<br />

la polyurie observée.<br />

Inhibiteurs de l’anhydrase carbonique<br />

L’acétazolamide est le représentant de cette classe et n’est<br />

plus utilisé pour ses effets rénaux.<br />

Dans le glaucome, il permet de lutter contre l’hypertension<br />

intra-oculaire. L’anhydrase carbonique des corps ciliaires permet<br />

la déshydratation de H2CO3 en bicarbonates sécrétés dans l’humeur<br />

aqueuse. Les inhibiteurs de l’anhydrase carbonique réduisent<br />

cette sécrétion d’humeur aqueuse.<br />

Par un mécanisme identique sur les plexus choroïdes, l’inhibition<br />

de l’anhydrase carbonique réduit la sécrétion de liquide céphalorachidien.<br />

Ce mécanisme est utilisé pour lutter contre le mal aigu<br />

des montagnes.<br />

R Q 176<br />

2157


Diurétiques de l’anse<br />

Ainsi nommés en raison de leur lieu d’action, leur chef de file<br />

est le furosémide.<br />

Ils sont puissants, entraînant une importante natriurèse. Ils<br />

bloquent le cotransport Na + /K + /2 Cl — sur la branche ascendante<br />

de l’AH (fig. 2). Leur action est rapide, une heure après prise<br />

orale, quelques minutes en cas d’utilisation par voie veineuse ;<br />

cet effet est bref, ne dépassant pas 3 à 7 heures selon la voie<br />

d’administration. Ils ont un effet dose-dépendant non limité par la<br />

diminution de la charge sodée et la chute du débit de filtration<br />

glomérulaire. Ils peuvent être utilisés à forte dose si nécessaire,<br />

en cas d’insuffisance rénale. L’action des diurétiques de l’anse<br />

entraîne une charge accrue de sodium dans le TCD, provoquant<br />

la réabsorption de sodium sous l’action de l’aldostérone avec<br />

fuite obligatoire de potassium ; ceci explique l’action hypokaliémiante<br />

de ces diurétiques.<br />

L’hypernatriurie s’accompagne d’une augmentation de l’élimination<br />

du calcium qui peut être utilisée dans le traitement<br />

aigu des états d’hypercalcémie.<br />

Thiazidiques et apparentés<br />

L’hydrochlorothiazide a été le premier dérivé de cette série.<br />

Ils agissent sur le segment de dilution en bloquant le cotransport<br />

électroneutre Na + /Cl — , ce qui entraîne une diurèse chloro-sodée<br />

modérée (fig. 2).<br />

L’action diurétique des benzothiazides a été découverte en<br />

recherchant des inhibiteurs de l’anhydrase carbonique. Ils en<br />

conservent une action d’épargne des bicarbonates et une tendance<br />

à élever le pH urinaire. D’autres composés, ayant la même<br />

action diurétique, sans noyau benzénique, avec ou sans groupe<br />

ment sulfamide non substitué, sont communément désignés<br />

« apparentés ».<br />

Les diurétiques thiazidiques sont résorbés par voie digestive,<br />

donc utilisables par voie orale. Pour être actifs, ils doivent diffuser<br />

dans les cellules du tubule, par un mécanisme actif commun aux<br />

acides organiques. Ils entrent en compétition avec l’acide urique<br />

dont ils peuvent gêner l’élimination en utilisation chronique. L’emploi<br />

d’acides organiques exogènes peut également interférer avec<br />

leur action ; c’est le cas notamment pour le probénécide, hypouricémiant<br />

(qui n’est plus guère employé).<br />

2158<br />

I-11-Q176<br />

Tableau 1<br />

CLASSE<br />

DIURÉTIQUES<br />

OSMOTIQUES<br />

Prescription et surveillance des diurétiques<br />

INHIBITEURS<br />

DE L’ANHYDRASE<br />

CARBONIQUE<br />

DIURÉTIQUES<br />

DE L’ANSE<br />

L’action des thiazidiques apparaît avec quelques heures de<br />

latence et se poursuit quelques heures à l’arrêt du traitement.<br />

La natriurèse induite par les thiazidiques est modérée, dans la<br />

mesure où une grande partie de la réabsorption sodique a eu<br />

lieu en amont, et ils n’agissent donc que sur une charge sodée<br />

réduite. Leur action est diminuée par la réduction des apports<br />

sodés et par la baisse du débit glomérulaire. Ils sont inefficaces<br />

et contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale. Ils augmentent<br />

l’élimination urinaire du magnésium mais abaissent la calciurie,<br />

ce qui peut avoir un intérêt pour l’emploi d’un natriurétique chez<br />

un sujet âgé à risque ostéoporotique. En utilisation chronique,<br />

ils n’augmentent pas la diurèse de façon significative.<br />

Leur utilisation empirique dans le diabète insipide a montré<br />

qu’ils pouvaient limiter la polyurie sans qu’une explication précise<br />

soit donnée.<br />

Diurétiques distaux<br />

Encore nommés « épargneurs potassiques », ce sont les<br />

diurétiques :<br />

— à effet antialdostérone d’une part ;<br />

— amiloride et triamtérène d’autre part.<br />

1. Diurétiques antialdostérone<br />

Le chef de file est la spironolactone. Leur effet natriurétique<br />

est modeste, inférieur à celui des diurétiques de l’anse et des<br />

thiazidiques. Ils augmentent la sécrétion de sodium et limitent<br />

la fuite potassique. De ce fait, ils sont hyperkaliémiants.<br />

L’homéostasie potassique de l’organisme s’ajuste au niveau<br />

du tube contourné distal sous l’effet de l’aldostérone. Les diurétiques<br />

distaux — anti-aldostérone — sont des substances à structure<br />

stéroïde qui bloquent le mécanisme d’action de l’aldostérone.<br />

Cette action passe par la stimulation d’une expression de<br />

gènes. Il en résulte une latence d’action des antagonistes de un<br />

à deux jours, et l’action se poursuit un à deux jours à l’arrêt du<br />

traitement. Afin de limiter les risques de déshydratation lors de<br />

l’assèchement d’œdèmes, un arrêt anticipé du traitement doit<br />

en tenir compte. L’action de ces diurétiques est d’autant plus<br />

importante que l’imprégnation en aldostérone est marquée.<br />

Inversement, ils sont inactifs en l’absence de sécrétion d’aldo -<br />

stérone.<br />

Principales classes de diurétiques et principaux produits qui les composent<br />

THIAZIDIQUES<br />

ET APPARENTÉS (*)<br />

ANTI-<br />

ALDOSTÉRONE<br />

NON ANTI-<br />

ALDOSTÉRONE<br />

Produits ❚ Mannitol ❚ Acétazolamide ❚ Furosémide ❚ Hydrochlorothiazide ❚ Spironolactone ❚ Amiloride<br />

❚ Bumétanide ❚ Indapamide (*) ❚ Canrénoate ❚ Triamtérène<br />

❚ Pirétanide ❚ Ciclétanine (*) de potassium<br />

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❚ Éplérénone<br />

DIURÉTIQUES DISTAUX<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008


2. Diurétiques distaux sans action antialdostérone<br />

Ces substances – amiloride et triamtérène – ont une action<br />

natriurique et hyperkaliémiante comme les antialdostérone, au<br />

même endroit sur le tubule, mais cette action est indépendante<br />

de l’état d’imprégnation hormonale.<br />

Association de diurétiques<br />

Thiazidiques et diurétiques de l’anse ont un effet natriurétique<br />

plus important que les diurétiques distaux, mais ils sont<br />

hypokaliémiants tandis que les diurétiques distaux sont des épargneurs<br />

potassiques. L’association de ces deux classes permet<br />

d’obtenir une action natriurétique significative tout en limitant<br />

les risques de dyskaliémie. Des associations existent sous forme<br />

de spécialités pharmaceutiques. Les risques de déséquilibre<br />

électrolytique ne sont pas complètement écartés par ces associations,<br />

et un contrôle hydro-électrolytique régulier, de la kaliémie<br />

en particulier, doit être effectué.<br />

INDICATIONS<br />

Diurétiques et insuffisance cardiaque<br />

L’emploi des diurétiques est indiqué pour lutter contre les<br />

manifestations congestives liées à une rétention hydro-sodée<br />

(œdèmes importants, pression veineuse centrale élevée). À ce<br />

titre, leur emploi est discuté aux stades II mais surtout III et IV<br />

de la classification de la New York Heart Association. Ils n’ont<br />

pas d’action démontrée sur la survie mais réduisent la morbidité.<br />

Diurétiques de l’anse, thiazidiques et antialdostérone peuvent<br />

être employés ; si la surcharge sodée est importante, la préférence<br />

ira aux diurétiques de l’anse (furosémide en dose<br />

progressive, de 20 à 40 mg/j). En cas d’insuffisance rénale, ou<br />

de signes récurrents, les doses peuvent être augmentées (jusqu’à<br />

500 mg/j si nécessaire), avec éventuelle utilisation de la<br />

voie veineuse pour une action plus rapide. Si les symptômes sont<br />

plus discrets, les thiazides sont utilisables mais uniquement avec<br />

une fonction rénale correcte (clairance à la créatinine 30<br />

mL/min). Un problème d’accoutumance aux diurétiques de l’anse<br />

peut s’instaurer, et l’association avec thiazidiques peut alors être<br />

utile. Cette association nécessite une surveillance rénale attentive.<br />

La posologie des diurétiques doit être la plus faible possible<br />

pour contenir les manifestations congestives, en surveillant le<br />

poids de façon journalière si besoin.<br />

Les antialdostérones peuvent être utiles en association (25 à<br />

50 mg/j) sous réserve d’une kaliémie 5 mmol/L ; ils possèdent<br />

une légère action tonicardiaque, et l’étude RALES leur attribue<br />

un effet bénéfique sur la mortalité, en association avec les IEC.<br />

Ils limitent l’hyper-aldostéronisme induit par les diurétiques de<br />

l’anse.<br />

L’association digitalo-diurétique doit être proscrite en raison<br />

des risques de troubles du rythme générés par l’association digitaliques<br />

et hypokaliémie.<br />

Les diurétiques sont employés dans le traitement de l’OAP,<br />

complication aigüe de l’insuffisance cardiaque.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008<br />

Diurétiques et OAP<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Ils font partie du traitement classique de l’OAP avec l’oxygénothérapie,<br />

les vasodilatateurs, et éventuellement les cardio -<br />

toniques.<br />

Il s’agit d’un traitement d’urgence nécessitant une action<br />

rapide et intense, d’où le choix des diurétiques de l’anse : furosémide<br />

par voie veineuse — 20/40 mg.<br />

L’effet bénéfique arrive avant l’effet diurétique, en 5 à 20 minutes,<br />

sans doute lié à une action relaxante vasculaire veineuse. En cas<br />

de besoin, la dose est renouvelée au bout de 20 minutes.<br />

Si l’état sévère le nécessite, une posologie supérieure peut<br />

être utilisée, mais un risque de vasoconstriction réflexe existe<br />

au-dessus de 1 mg/kg en bolus, par activation des systèmes<br />

rénine-angiotensine et sympathique entraînant une élévation de<br />

la post-charge.<br />

Diurétiques et hypertension artérielle<br />

Les diurétiques thiazidiques font partie des 5 principales classes<br />

de médicaments utilisés dans le traitement de l’hypertension<br />

artérielle, avec les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC), les<br />

bêtabloquants, les antagonistes des récepteurs AT2 de l’angiotensine<br />

II (ARA2) et les inhibiteurs calciques. Ces médicaments sont<br />

utilisés en association aux règles hygiéno-diététiques adéquates.<br />

Les thiazidiques sont utilisés plutôt que les diurétiques de<br />

l’anse, qui ne sont pas indiqués en raison de leur courte durée<br />

d’action, ne permettant pas un effet couvrant le nycthémère par<br />

une prise quotidienne. Les diurétiques épargneurs potassiques<br />

peuvent être associés aux thiazidiques pour limiter la fuite potassique<br />

et l’intolérance au glucose induite par l’hypokaliémie.<br />

Les thiazidiques provoquent, en début de traitement, une<br />

hypovolémie avec chute du débit cardiaque qui s’atténue largement<br />

en une huitaine de jours bien que l’effet anti-hypertenseur<br />

persiste. La persistance de cet effet semble liée à une déplétion<br />

cellulaire en sodium qui limite l’effet vasculotonique d’un certain<br />

nombre de facteurs hormonaux ou cellulaires (catécholamines,<br />

endothéline, angiotensine II…) et, par voie de conséquence, diminue<br />

les résistances vasculaires avec baisse consécutive de la<br />

pression artérielle.<br />

Pour une réduction des chiffres tensionnels obtenue identique,<br />

le bénéfice d’une classe thérapeutique par rapport aux<br />

autres est faible. Le choix d’une classe d’antihypertenseurs est<br />

orienté par l’expérience préalable éventuelle du patient pour une<br />

classe particulière, son profil de risque, l’existence de troubles<br />

cliniques associés, la nature des médicaments associés pris par<br />

ce patient, le coût du traitement à bénéfice identique.<br />

Le choix préférentiel d’un thiazidique est représenté par l’hypertension<br />

systolique isolée, notamment chez le sujet âgé, l’existence<br />

de signes associés d’insuffisance cardiaque, la prescription à un<br />

sujet noir.<br />

Les diurétiques distaux minimisent aussi les effets de l’activation<br />

du système rénine-angiotensine induite par la baisse de la volémie.<br />

La plus faible dose de thiazidiques pour obtenir l’effet tensionnel<br />

souhaité est recherchée, mais le plus souvent, même « à dose<br />

pleine » la monothérapie s’avère insuffisante. Dans ce cas, les<br />

R Q 176<br />

2159


thiazidiques peuvent être associés aux IEC, ARA2 et calcium-bloquants.<br />

Des présentations pharmaceutiques de ces associations<br />

existent et permettent de simplifier la prise du traitement, et<br />

donc d’améliorer l’observance, ce qui est important car il s’agit<br />

d’un traitement au long cours. En revanche, les doses associées<br />

de chaque médicament sont imposées dans ce cas.<br />

L’association thiazidiques-bêtabloquants est classique et elle<br />

a démontré son efficacité, mais il est établi que les effets indésirables<br />

dysmétaboliques de chaque classe se renforcent et proscrivent<br />

son utilisation.<br />

Autres indications des diurétiques<br />

1. Ascite par hypertension portale<br />

L’ascite est une complication de l’hypertension portale. Elle<br />

traduit, entre autres, une rétention d’eau et de sodium où l’hyper -<br />

aldostéronisme joue un rôle. Son traitement utilise, à côté du<br />

régime désodé, la prescription de diurétiques anti-aldostérone,<br />

à dose progressive (spironolactone 75 à 300 mg/j). Si nécessaire,<br />

des diurétiques de l’anse peuvent être associés (furosémide<br />

40 mg/j, jusqu’à 120 mg/j maximum). Un arrêt avant la résorption<br />

complète de l’ascite permet d’éviter une action au-delà de l’assèchement,<br />

en raison de l’effet retardé des anti-aldostérones.<br />

2. Hypercalcémie<br />

L’hypercalcémie aiguë sévère (3 mmol/L avec signes cliniques)<br />

et/ou d’apparition rapide peut bénéficier, à côté de l’emploi des<br />

diphosphonates, de l’utilisation des diurétiques de l’anse (furosémide<br />

40 à 80 mg/j). Cet emploi nécessite la compensation des<br />

pertes en eau et des autres troubles ioniques, ce qui impose une<br />

hospitalisation en soins intensifs.<br />

3. Œdèmes d’origine rénale<br />

Dans le syndrome néphrotique, anti-aldostérone et accessoirement<br />

diurétiques de l’anse peuvent être utilisés dans les poussées<br />

œdémateuses (et arrêtés dès la diminution de la protéinurie) et<br />

pendant les cures de corticothérapie à forte dose.<br />

Surveillance d’un traitement diurétique<br />

L’utilisation de diurétiques modifie l’équilibre hydro-électrolytique.<br />

Une surveillance doit veiller à éviter des troubles de cet<br />

équilibre. Elle dépend du mode d’emploi des diurétiques.<br />

✓ En utilisation aiguë, dans un contexte d’urgence, elle repose<br />

sur le contrôle de la diurèse, du poids, de l’état d’hydratation<br />

cutanée, de la pression artérielle, et la réalisation régulière d’ionogrammes,<br />

pour suivre la disparition des œdèmes et éviter la<br />

survenue de déshydratation.<br />

✓ En utilisation chronique, l’examen clinique et le bilan biologique<br />

surveilleront le maintien de l’équilibre hydro-ionique interne et l’apparition<br />

d’effets indésirables soit communs à l’utilisation de tous les<br />

diurétiques, soit spécifiques à la classe utilisée (tableau 2). ■<br />

2160<br />

I-11-Q176<br />

Prescription et surveillance des diurétiques<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

Tableau 2<br />

Principaux effets indésirables<br />

susceptibles de survenir au cours<br />

d’un traitement diurétique<br />

Effets communs à tous les diurétiques<br />

❚ Hypovolémie<br />

❚ Déplétion sodée excessive avec hyponatrémie et déshydratation<br />

(surtout en cas de traitement par les diurétiques de l’anse associé<br />

à un régime désodé trop strict)
<br />

❚ Hypotension orthostatique chez le sujet âgé
<br />

❚ Hyperuricémie par augmentation de la réabsorption proximale<br />

et diminution de la sécrétion tubulaire<br />

Thiazidiques<br />

❚ Hypokaliémie et alcalose métabolique
<br />

❚ Hypomagnésémie
<br />

❚ Hypercalcémie par augmentation de la réabsorption tubulaire
<br />

❚ Hyperglycémie
<br />

❚ Anomalies du profil lipidique (augmentation cholestérol total,<br />

triglycérides, LDL-cholestérol, diminution HDL-cholestérol)
<br />

❚ Diminution de la filtration glomérulaire
<br />

Diurétiques de l’anse<br />

❚ Hypokaliémie et alcalose métabolique<br />

❚ Hypomagnésémie<br />

❚ Hypercalciurie<br />

❚ Hyperglycémie
<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

❚ Ototoxicité, d’autant plus fréquente que les posologies sont élevées,<br />

surtout en cas d’association aux aminosides<br />

Diurétiques distaux<br />

❚ Acidose hyperkaliémique, favorisée par insuffisance rénale<br />

ou association aux IEC<br />

❚ Spironolactone : hypercalciurie, gynécomastie, impuissance<br />

(structure stéroïde)<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Pharmacologie fondamentale et clinique<br />

Katzung BG<br />

Traduction dirigée par G Lagier<br />

Piccin Nuova Libraria ed. Padoue, Italie : 2006<br />

◗ Guidelines for the management of arterial hypertension<br />

Mancia G, De Backer G, Dominiczak A, et al.<br />

(J Hypertens 2007;25:1105-87)<br />

◗ Executive summary of the guidelines on the diagnosis and<br />

treatment of acute heart failure<br />

Nieminen MS, Bölm MR, Cowie M, et al.<br />

(Eur Heart J 2005;26:384-416 )<br />

(Ital Heart J Suppl 2005;6:218-54)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 DÉCEMBRE 2008


DÉFINITION-ÉPIDÉMIOLOGIE<br />

La iatrogénie (du grec « iatros », le médecin et<br />

« genes », entraîné par), d’après le glossaire des<br />

vigilances de l’AFSSAPS (Agence française de<br />

sécurité sanitaire des produits de santé) est<br />

« l’ensemble des conséquences néfastes pour la santé, potentielles<br />

ou avérées, résultant de l’intervention médicale (erreurs<br />

de diagnostic, prévention ou prescription inadaptée, complications<br />

d’un acte thérapeutique) ou de recours aux soins ou de<br />

l’utilisation d’un produit de santé ». Cela comprend donc non seulement<br />

les complications des traitements médicamenteux, mais<br />

aussi les complications de la chirurgie et des techniques instrumentales,<br />

les infections nosocomiales et, par extension, tout ce qui<br />

est provoqué par les soignants. Néanmoins, le terme iatrogénie<br />

inclut deux types très différents d’« accidents », l’aléa thérapeutique<br />

(non fautif) et la faute.<br />

Une enquête nationale sur les effets indésirables graves liés<br />

aux soins (ENEIS) réalisée en 2004 dans 71 établissements de<br />

santé, représentant plus de 35 000 journées d’hospitalisation,<br />

soit 8 754 séjours patients, a identifié 1 848 événements indésirables<br />

dont 450 événements graves ayant nécessité une hospitalisation<br />

ou une prolongation d’hospitalisation. Près de 50 %<br />

des événements indésirables graves ayant motivé une hospitalisation<br />

étaient associés à des produits de santé, la moitié d’entre<br />

eux étant considérée comme évitables. Les actes invasifs, et<br />

notamment chirurgicaux, sont à l’origine de l’autre moitié des<br />

événements indésirables graves. Il faut noter que parmi les causes<br />

de iatrogénie, les questions d’organisation arrivent en tête.<br />

Une étude américaine de 2004 étudiant plus de 30 000 dossiers<br />

retrouve 3,7 % d’accidents iatrogéniques pendant l’hospitalisation,<br />

dont 27 % dus à des négligences (surtout chez la personne<br />

âgée), la mortalité étant de 13,6 %.<br />

L’aphorisme « primum non nocere » (d’abord ne pas nuire)<br />

attribué à Hippocrate est une preuve, s’il en faut, que la iatrogénie<br />

Iatrogénie<br />

Diagnostic et prévention<br />

et sa prise de conscience par les soignants existent depuis que<br />

la thérapeutique existe.<br />

En France, la loi n° 98-535 du 1 er juillet 1998, relative au renforcement<br />

de la veille sanitaire et de la sécurité sanitaire des produits<br />

destinés à l’homme, inscrit comme une des priorités absolues<br />

de santé publique la lutte contre la iatrogénie.<br />

Schématiquement, on distingue habituellement deux types<br />

d’accidents iatrogènes : médicamenteux ou non médicamenteux.<br />

Afin de prévenir et de gérer le risque iatrogène, des systèmes de<br />

vigilance ont été mis en place : la pharmacovigilance pour les<br />

accidents médicamenteux et, pour les accidents non médicamenteux,<br />

la matériovigilance, la bactériovigilance, l’hémo -<br />

vigilance…<br />

DIAGNOSTIC<br />

I-11-Q181 I-00-Q000<br />

Dr Raphaël Favory, Pr Alain Durocher<br />

Urgences respiratoires, réanimation médicale, hôpital Calmette, CHRU de Lille, 59037 Lille Cedex, France<br />

Thérapeutique- Faculté de médecine, Université Lille 2, 59045, Lille, France<br />

r-favory@chru-lille.fr alain.durocher@univ-lille2.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 OCTOBRE 2008<br />

Objectifs<br />

• Identifier le caractère iatrogène de manifestations pathologiques.<br />

• Prendre en compte et prévenir le risque iatrogène lors d’une décision<br />

médicale.<br />

• Expliquer les objectifs et les principes du fonctionnement<br />

de la pharmaco- et de la matériovigilance.<br />

Copyright 2008- La revue du Praticen<br />

Le diagnostic de iatrogénie est parfois difficile, car les symptômes<br />

ou signes peuvent être atypiques et difficiles à différencier des<br />

symptômes ou signes de la maladie initiale elle-même et/ou de<br />

ses complications.<br />

Le diagnostic de iatrogénie médicamenteuse doit être systématiquement<br />

évoqué, c’est ce qu’on appelle le « réflexe iatrogénique<br />

», dans les cas suivants :<br />

— évolution atypique d’une maladie traitée ;<br />

— symptômes nouveaux difficilement compatibles avec la maladie<br />

de départ ou symptômes non expliqués par une maladie identifiable<br />

;<br />

— prescription à risque, c’est-à-dire si le traitement administré ou<br />

l’examen réalisé sont connus pour la fréquence de leurs effets<br />

1723


secondaires (par exemple pneumothorax et voie veineuse centrale<br />

sous-clavière, hypokaliémie et diurétiques…) ;<br />

— patient à risque : femme enceinte, sujet âgé. Ceci est particulièrement<br />

important pour les médicaments chez le patient âgé<br />

de plus de 65 ans, dont la physiologie est plus fragile et la pharmacodynamie<br />

plus aléatoire, et qui peut se tromper dans l’administration<br />

de ses traitements ;<br />

— situation pathologique à risque pouvant s’accompagner d’une<br />

atteinte des émonctoires physiologiques (insuffisance rénale,<br />

insuffisance hépatique) ou d’une susceptibilité particulière de<br />

certains organes (insuffisance cardiaque, insuffisance circulatoire<br />

cérébrale…).<br />

La présomption diagnostique repose sur la méthode d’imputabilité<br />

:<br />

— intrinsèque : critères séméiologiques (éruption cutanée et bêtalactamines,<br />

photosensibilité et fluoroquinolones, insuffisance<br />

rénale après injection de produit de contraste iodé) et chronologiques<br />

(intervalle compatible, arrêt des symptômes à l’arrêt d’un<br />

médicament, récidive à la réintroduction) ;<br />

— extrinsèque : les données de la littérature rendent-elles plausibles<br />

les effets observés et la iatrogénie pour une molécule<br />

donnée (effet notoire ou non) ?<br />

1724<br />

I-11-Q181<br />

SITUATION CARACTÉRISTIQUE DE IATROGÉNIE :<br />

LA IATROGÉNIE MÉDICAMENTEUSE<br />

Définition<br />

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) définit comme<br />

iatrogénie médicamenteuse « toute réaction nocive et non<br />

recherchée liée à la prise d’un médicament et survenant de façon<br />

fortuite ».<br />

Tous les médicaments peuvent potentiellement entraîner des<br />

effets indésirables. Ceux-ci peuvent parfois être prévisibles, voire<br />

prévenus (supplémentation en potassium et corticothérapie).<br />

Épidémiologie<br />

Iatrogénie : diagnostic et prévention<br />

La fréquence de cette iatrogénie médicamenteuse est variable<br />

d’une étude à l’autre. En effet, elle est probablement sous-estimée<br />

à cause d’un diagnostic difficile, d’une part, d’un sentiment de<br />

culpabilité et de la peur d’être poursuivi en cas de déclaration<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Les points qui peuvent faire l’objet d’une question sont :<br />

➜ Les éléments du diagnostic de pathologie<br />

iatrogène dans un cas clinique.<br />

➜ Le type d’accident iatrogène médicamenteux<br />

décrit dans un cas clinique.<br />

➜ L’identification au sein d’un cas clinique<br />

des facteurs ayant favorisé ou risquant de<br />

favoriser un accident iatrogène médicamenteux.<br />

➜ Les éléments de la prescription et de la<br />

surveillance qui auraient pu éviter la survenue<br />

d’un accident médicamenteux.<br />

➜ Les conseils à prodiguer à un patient<br />

Copyright 2008- La revue du Praticen<br />

d’événements indésirables, d’autre part. Par ailleurs, les critères<br />

diagnostiques d’imputabilité du médicament peuvent varier d’une<br />

étude à l’autre. Néanmoins, on peut retenir qu’environ 5 à 10 %<br />

des admissions et 1 à 2 % des consultations seraient induites par<br />

de la iatrogénie. Vingt pour cent des admissions dans des services<br />

d’urgence comportent un risque iatrogène. Cette iatrogénie<br />

se développerait chez 10 à 15 % des patients hospitalisés, et le<br />

taux de mortalité hospitalière imputable à la iatrogénie serait de<br />

2 à 12 %. On estime que 60 % des accidents médicamenteux<br />

iatrogènes sont évitables.<br />

Différents types d’accidents iatrogènes<br />

médicamenteux<br />

1. Accidents immunologiques<br />

Les accidents immunologiques ne sont pas dose-dépendants<br />

et ont en général un intervalle libre de durée fixe, avec des manifestations<br />

générales de type fièvre, arthralgies, œdème de<br />

Quincke, choc anaphylactique, toxidermie, hyperéosinophilie et<br />

des témoins biologiques d’une réaction immunologique cellulaire<br />

ou humorale.<br />

2. Accidents par surdosage<br />

Les accidents par surdosage sont liés à la toxicité directe du<br />

médicament, sont dose-dépendants avec une incidence élevée<br />

chez les patients exposés et ont des témoins anatomiques d’une<br />

toxicité directe (réaction cellulaire).<br />

3. Accidents par interaction médicamenteuse<br />

On appelle interactions médicamenteuses les réponses qui<br />

résultent de la prise d’un ou plusieurs médicaments et qui sont<br />

différentes des effets connus ou attendus de chacun d’entre eux<br />

pris séparément. Les mécanismes possibles de ces interactions<br />

sont :<br />

— l’addition des effets. Par exemple, les actions de deux anti -<br />

coagulants, deux hypnotiques, deux produits contenant du paracétamol<br />

vont s’ajouter partiellement ou totalement ;<br />

— la potentialisation des effets : au lieu de s’additionner, les effets<br />

se multiplient ;<br />

— l’inhibition des effets : l’efficacité d’un médicament est amoindrie,<br />

voire annulée par l’administration d’un second.<br />

pour minimiser la survenue d’un accident<br />

iatrogène médicamenteux.<br />

➜ Les obligations des médecins liées aux<br />

lois des 9 et 13 août 2004.<br />

➜ La conduite à tenir en matière de<br />

déclaration d’un événement indésirable<br />

lié à un médicament ou à l’utilisation d’un<br />

matériel. ●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 OCTOBRE 2008


Facteurs favorisants<br />

1. Facteurs propres au patient<br />

✓ Le patient est à risque dans certaines situations :<br />

— l’âge élevé (risque de 20 % par médicament avant 70 ans contre<br />

25 % après 70 ans), avec des modifications de la pharmacodynamie<br />

et une marge de sécurité plus étroite, les patients âgés<br />

représentent une population tout particulièrement à risque d’accident<br />

médicamenteux iatrogène : en effet, 30 % des médicaments<br />

prescrits sont consommés après 70 ans, 90 % des personnes<br />

âgées prennent des médicaments, 10 % des personnes<br />

âgées sont victimes de iatrogénie, 40 % de la iatrogénie est<br />

observée après 65 ans. Les médicaments le plus souvent en<br />

cause chez les personnes âgées sont les médicaments à visée<br />

cardiovasculaire et les psychotropes ;<br />

— le sexe : fréquence plus importante chez la femme que chez<br />

l’homme ;<br />

— la grossesse : les facteurs de risque d’origine maternelle comprennent<br />

l’âge, les états carentiels (vitamine A, acide folique) et<br />

les pathologies maternelles (diabète, hypertension artérielle, obésité,<br />

épilepsie). En fonction du terme de la grossesse, les risques<br />

pour le fœtus et le nouveau-né sont différents :<br />

• de 0 à 7 jours, période de blastogenèse, c’est la loi du tout (avortement)<br />

ou rien,<br />

• de 7 jours à 3 mois, période d’embryogenèse, le risque malformatif<br />

est majeur pour le cœur, l’œil, le cerveau et les membres,<br />

• de 3 à 8 mois, période de fœtogenèse, le risque est variable et<br />

concerne surtout les organes génitaux externes et le cerveau,<br />

• de 8 à 9 mois, période périnatale, le risque est néonatal et<br />

consiste essentiellement en accident de surdosage ou de sevrage<br />

chez le nouveau-né.<br />

✓ La situation pathologique est à risque s’il s’agit :<br />

— d’une polypathologie ;<br />

— d’une pathologie grave ;<br />

— d’un terrain allergique ;<br />

— d’une dénutrition (baisse de l’albumine qui transporte de nombreux<br />

produits pharmaceutiques dans le plasma) ;<br />

— de modifications des conditions d’élimination naturelle (insuffisance<br />

hépatique et/ou rénale, déficit en enzymes de détoxification)<br />

ou artificielle (épuration extrarénale) des médicaments.<br />

Pour le rein, citons les aminosides, les antidiabétiques, les bêtabloquants<br />

hydrosolubles, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion<br />

(IEC), la digoxine, les anti-H2, et, pour le foie, les anticoagulants<br />

oraux, les antidiabétiques, les bêtabloquants liposolubles,<br />

les psychotropes, la digitoxine.<br />

✓ Les comportements à risque sont :<br />

— la mauvaise observance ;<br />

— l’automédication non raisonnée, non guidée et non contrôlée<br />

par le médecin.<br />

2. Facteurs liés aux médicaments<br />

Ce sont :<br />

— le nombre de médicaments : le risque passe de 20 % pour 2 à<br />

4 médicaments et à 32 % pour 10 médicaments ;<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 OCTOBRE 2008<br />

à retenir<br />

Copyright 2008- La revue du Praticen<br />

POINTS FORTS<br />

La iatrogénie englobe toutes les complications des actes<br />

médicaux (diagnostiques, thérapeutiques ou de prévention),<br />

que le médecin soit fautif ou non.<br />

Le diagnostic se fait sur des arguments d’imputabilité<br />

(critères sémiologiques, chronologiques, données<br />

de la littérature) : de façon générale, il faut avoir<br />

le « réflexe iatrogénique » dès que l’évolution de la maladie<br />

n’est pas habituelle.<br />

On estime que 60 % environ de la iatrogénie est évitable.<br />

La iatrogénie est une des priorités de la santé publique<br />

depuis la loi du 1er juillet 1998.<br />

Le nombre important de médicaments prescrits<br />

en même temps, l’âge du patient, sont des facteurs<br />

de risque majeurs de iatrogénie médicamenteuse.<br />

Une prescription courte, raisonnée, avec estimation du<br />

rapport bénéfice/risque doit réduire le nombre d’accidents.<br />

Le développement des systèmes de vigilance<br />

(pharmacovigilance, matériovigilance…), la formation<br />

continue et l’évaluation des pratiques professionnelles<br />

rendues obligatoires sont des pistes d’amélioration<br />

de la prévention du risque iatrogène.<br />

La déclaration d’accidents iatrogènes est obligatoire pour<br />

les professions de santé.<br />

— le type de classe médicamenteuse : médicaments à marge<br />

étroite de sécurité (digitaliques, immunosuppresseurs…), médicaments<br />

inducteurs enzymatiques (barbituriques, rifampicine,<br />

anesthésiques…), médicaments les plus susceptibles d’accidents<br />

allergiques (anti-infectieux, notamment les bêtalactamines, vaccins<br />

et sérums, AINS…), médicaments à toxicité directe ou interactions<br />

médicamenteuses notoires (aminosides, antidiabétiques,<br />

digitaliques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion…) ;<br />

– les médicaments susceptibles d’induire une situation de<br />

dépendance ou de sevrage (benzodiazépines, morphiniques …).<br />

3. Facteurs liés aux prescripteurs<br />

Ce sont :<br />

— la mauvaise connaissance du médicament ;<br />

— le non-respect des contre-indications ;<br />

— la non-prise en compte des interactions médicamenteuses,<br />

— la non-écoute du patient,<br />

— l’erreur d’indication,<br />

— la mauvaise surveillance.<br />

Les classes de médicaments le plus souvent responsables<br />

d’accidents iatrogènes sont les psychotropes (15 à 60 %), les<br />

médicaments cardiovasculaires (12 à 30 %), les antibiotiques (8 à<br />

15 %), les anti-inflammatoires (4 à 15 %), les antalgiques (2 à 10 %),<br />

les antidiabétiques (6 à 10 %), les anticoagulants (1 à 11 %).<br />

R Q 181<br />

1725


1726<br />

I-11-Q181<br />

Iatrogénie : diagnostic et prévention<br />

PRÉVENTION DE LA IATROGENÈSE<br />

Rôle du médecin<br />

1. Règles de bonne pratique de prescription<br />

Ce sont :<br />

— la sobriété de la prescription : limiter le nombre de produits<br />

prescrits et les durées de traitement, déprescrire les traitements<br />

injustifiés ;<br />

— la sécurité thérapeutique : rechercher les contre-indications<br />

d’ordre général ou propres au malade, respecter les recommandations<br />

d’utilisation, tenir compte de l’âge, du poids, de la fonction<br />

rénale (clairance de la créatinine) et hépatique, des antécédents<br />

et des traitements associés ;<br />

— la surveillance thérapeutique adaptée : surveillance des effets<br />

induits, mesure de l’effet biologique, surveillance des taux<br />

sériques si nécessaire.<br />

Ces règles de bonne pratique de prescription sont grandement<br />

facilitées par l’informatisation de la prescription et de la<br />

délivrance des médicaments, et l’utilisation de systèmes d’aidemémoire<br />

(reminders). À ce titre, la généralisation de l’utilisation<br />

de la carte Vitale et du dossier médical informatisé semble<br />

intéressante.<br />

2. Utilisation des recommandations de bonne<br />

pratique<br />

Le médecin doit participer à la formation médicale continue,<br />

et utiliser les recommandations de bonne pratique proposées<br />

par les sociétés savantes ou des structures comme la Haute<br />

Autorité de santé (HAS). Ces recommandations se réfèrent habituellement<br />

à des études de la littérature classées selon leur niveau<br />

de preuve scientifique (médecine fondée sur les preuves ou evidence-based<br />

medicine des Anglo-Saxons). Ces recommandations<br />

donnent lieu à des référentiels, bases de l’évaluation des pratiques<br />

professionnelles (EPP). L’EPP est une démarche qualité qui a<br />

pour but d’améliorer les pratiques. Il s’agit, pour les médecins,<br />

de fonder leur exercice clinique sur des recommandations professionnelles,<br />

de comparer et d’analyser leurs pratiques professionnelles<br />

avec des référentiels issus de ces recommandations.<br />

Il faut noter que la loi du 9 août 2004 confirme l’obligation de<br />

formation continue et que la loi du 13 août 2004 de réforme de<br />

l’Assurance maladie soumet tous les médecins, quelles que soient<br />

leurs modalités d’exercice, à une obligation d’évaluation de leurs<br />

pratiques professionnelles.<br />

Systèmes de vigilances sanitaires<br />

1. Pharmacovigilance<br />

Tout effet indésirable grave ou inattendu d’un médicament ou<br />

produit requiert une déclaration au centre régional de pharmacovigilance<br />

(CRPV). Cette déclaration est obligatoire pour les<br />

médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens<br />

concernés. On entend par effet indésirable inattendu (ou effet<br />

nouveau) un effet dont la nature ne correspond pas aux infor-<br />

Copyright 2008- La revue du Praticen<br />

mations contenues dans le résumé des caractéristiques du produit.<br />

Les centres régionaux de pharmacovigilance transmettent<br />

les informations recueillies à l’Agence française de sécurité sanitaire<br />

des produits de santé (AFSSAPS).<br />

2. Matériovigilance<br />

La matériovigilance consiste dans le suivi des dispositifs médicaux<br />

après leur mise sur le marché pour détecter d’éventuels<br />

dysfonctionnements. Sur le plan européen, le marquage CE des<br />

dispositifs médicaux signifie que les produits des fabricants<br />

répondent aux exigences essentielles de sécurité et de normes<br />

européennes. Le système français de matériovigilance comprend<br />

: sur le plan national, l’AFSSAPS et la Commission nationale<br />

des dispositifs médicaux, et, sur le plan local, les correspondants<br />

locaux de matériovigilance des établissements de santé, les fabricants<br />

et quiconque ayant connaissance d’un incident ou d’un<br />

risque d’incident.<br />

Les textes réglementaires imposent de déclarer les incidents<br />

« sans délai » ; néanmoins une fois le dossier complet, tout en<br />

prenant des mesures sécuritaires et conservatoires pour le<br />

patient en cause et pour les éventuels futurs patients. Cette<br />

démarche peut paraître laborieuse, voire fastidieuse, et entraîne<br />

probablement une sous-déclaration des accidents, notamment<br />

s’ils sont « mineurs ».<br />

3. Autres vigilances<br />

L’hémovigilance, la cosmétovigilance, la biovigilance (dons de<br />

tissus ou cellules), la surveillance et la lutte contre les infections<br />

nosocomiales sont autant d’autres vigilances qui ont été mises<br />

en place par les pouvoirs publics pour prévenir et gérer les accidents<br />

iatrogènes lors des actes de soins, de diagnostic ou de prévention.<br />

Éducation du patient<br />

L’éducation thérapeutique du patient est une part importante<br />

de la prévention des accidents, notamment médicamenteux. Les<br />

points principaux des recommandations de la Haute Autorité de<br />

santé concernant l’éducation thérapeutique du patient sont :<br />

— élaborer un diagnostic éducatif,<br />

— définir un programme personnalisé d’éducation thérapeutique<br />

(ETP) avec priorités d’apprentissage,<br />

— planifier et mettre en œuvre les séances d’ETP individuelle ou<br />

collective, ou en alternance,<br />

— réaliser une évaluation des compétences acquises et du déroulement<br />

du programme.<br />

Rôle des industriels<br />

Le rôle de l’industrie pharmaceutique et des fabricants de<br />

matériels médicaux est primordial lui aussi. Conditionner les<br />

médicaments en petites quantités, faire des notices d’utilisation<br />

claires et explicites, fabriquer des formes galéniques adaptées à<br />

un moindre risque de toxicité, avoir une information et une publicité<br />

éthiques sont des exemples de leur missions dans cette prévention.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 15 OCTOBRE 2008


Rôle des médias<br />

Les médias doivent apporter aux patients des réponses claires<br />

adaptées à leur niveau de compréhension. L’ère de l’informatique<br />

et d’Internet permet aux patients et/ou à leur famille de<br />

s’informer sur la pathologie et les conséquences des actes iatrogènes,<br />

mais parfois de façon parcellaire avec un risque de mauvaise<br />

compréhension, de quiproquo avec les soignants et de<br />

dégradation de la relation médecin-malade.<br />

Rôle des patients<br />

Les patients ont un rôle non négligeable eux aussi, en apportant<br />

au médecin des renseignements aussi précis que possible<br />

sur leurs antécédents et allergies. Leur observance ou une automédication<br />

peuvent influencer grandement la iatrogénie.<br />

IATROGÉNIE ET DÉDOMMAGEMENT<br />

DES ALÉAS THÉRAPEUTIQUES<br />

L’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des<br />

affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM)<br />

est un établissement public administratif sous tutelle du ministère<br />

de la Santé, qui a en charge le dédommagement des patients<br />

subissant des aléas thérapeutiques. Créé en 2002, l’Office a une<br />

mission double : l’organisation effective du dispositif de règlement<br />

amiable des accidents médicaux prévu par la loi et l’indemnisation<br />

des victimes d’aléa thérapeutique entrant dans le champ de la loi<br />

et des victimes de vaccinations obligatoires. En 2006, 735 demandes<br />

de réparation ont été recensées. Sur ces 735 demandes, 404 se<br />

sont réglées à l’amiable, 331 de façon juridictionnelle. Le ratio<br />

faute/aléa est de 1,6. Le délai le plus courant entre l’accident et<br />

le règlement définitif est de 2 à 3 ans. Ce sont bien sûr les actes<br />

de soins qui arrivent en tête avec 80 % des demandes. Les décès<br />

représentent 15 % des demandes. Les complications chirurgicales<br />

sont de loin les premières pourvoyeuses de dossiers (50 % des<br />

demandes). Les infections nosocomiales représentent 19 % des<br />

demandes. ■<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

La déclaration d’un accident de dispositif médical<br />

est obligatoire dans un délai de 24 heures.<br />

Le risque d’accident iatrogène médicamenteux est<br />

de 32 % pour une ordonnance de 10 médicaments.<br />

La iatrogénie est une priorité de santé publique<br />

en France.<br />

L’aléa thérapeutique ne fait pas partie des accidents<br />

iatrogènes.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

Les accidents aux anticoagulants sont les plus<br />

fréquents des accidents médicamenteux.<br />

La personne âgée est moins susceptible d’être<br />

victime d’un accident médicamenteux.<br />

Les centres régionaux de pharmacovigilance<br />

déclarent les accidents médicamenteux à l’Agence<br />

française de sécurité sanitaire des produits de santé<br />

(AFSSAPS).<br />

Déprescrire les traitements injustifiés peut diminuer<br />

la iatrogénie médicamenteuse.<br />

Le critère chronologique est le seul critère<br />

d’imputabilité d’un médicament dans la survenue<br />

d’un accident iatrogène.<br />

C / QCM<br />

Parmi ces propositions, lesquelles sont vraies ?<br />

1 Les infections nosocomiales ne sont pas<br />

des accidents iatrogéniques.<br />

2 40 % de la iatrogénie est observée après 65 ans.<br />

3 Les critères d’imputabilité intrinsèque représentent<br />

les données connues de la littérature.<br />

4 Le « réflexe iatrogénique » est le fait d’évoquer<br />

comme diagnostic la iatrogénie devant toute<br />

évolution anormale d’une pathologie.<br />

5 Les psychotropes sont la classe la plus pourvoyeuse<br />

de iatrogénie médicamenteuse.<br />

Réponses : A : F, V, V, F / B : F, F, V, V, F / C : 2, 4, 5.<br />

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Copyright 2008- La revue du Praticen<br />

INFECTIONS AIGUËS DES VOIES RESPIRATOIRES DE L’ENFANT. 1I. Infections basses • 15 novembre 2007 • Tome 57 • N° 17 (1857-1972)<br />

R Q 181<br />

LA REVUE DU<br />

PRATICIEN<br />

1 5 N O V E M B R E 2 0 0 7 / T O M E 5 7 N º 1 7<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

Infections aiguës<br />

des voies respiratoires de l’enfant<br />

II. INFECTIONS BASSES<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

t tomber à l’examen ? B Cataracte


OBJECTIFS<br />

Introduction et physiologie mictionnelle<br />

La miction est une fonction physiologique qui permet l’émission<br />

de l’urine vésicale à travers l’urètre. Son but est la vidange vésicale.<br />

C’est un acte réflexe soumis à un contrôle volontaire acquis<br />

(apprentissage de la propreté). Elle doit être volontaire (déclenchée,<br />

retenue à volonté), contrôlée, indolore, complète, efficace (jet fort,<br />

vessie vide après chaque miction), diurne. Une miction normale<br />

dure environ 30 secondes et permet d’évacuer 350 cc environ.<br />

Elle met en jeu la contraction du détrusor (muscle vésical) et le<br />

relâchement du système sphinctérien (qui comprend le col vésical<br />

et le sphincter strié) ; en présence d’un urètre perméable<br />

(sans sténose).<br />

La rétention aiguë d’urine se définit comme l’impossibilité complète,<br />

brutale d’uriner malgré une envie impérieuse, concomitante<br />

d’une douleur sus-pubienne plus ou moins associée à un état<br />

d’agitation ou confusionnel. Elle est à évoquer devant toute confusion<br />

et toute suspicion d’anurie. Le diagnostic est clinique et facile<br />

en recherchant un globe vésical douloureux. C’est une urgence<br />

thérapeutique. La survenue d’une rétention aiguë d’urine dans un<br />

contexte de rétention chronique à vessie distendue peut être plus<br />

difficile à diagnostiquer, elle est envisagée face à un patient décrivant<br />

une vidange vésicale incomplète avec résidu post-mictionnel<br />

qui s’est majorée jusqu’à la rétention complète, ou chez un patient<br />

ayant déjà une incontinence urinaire par rengorgement.<br />

Interrogatoire<br />

Le sexe et l’âge du patient orientent d’emblée vers des causes<br />

différentes.<br />

Antécédents urologiques<br />

Les troubles mictionnels préexistants ou épisodes identiques peuvent<br />

être d’origine :<br />

– obstructive : le signe clinique est alors une dysurie (difficulté de<br />

miction caractérisée par une attente du jet, un effort de poussée,<br />

un jet mictionnel faible, des gouttes retardataires, un<br />

résidu post-mictionnel) ;<br />

– irritative : il s’agit d’une pollakiurie (augmentation de la fréquence<br />

des mictions) nocturne (nombre de levers par nuit pour<br />

aller uriner = nycturie), diurne, ou des impériosités (urgenturie :<br />

besoin brutal, irrésistible et urgent d’uriner sans possibilité de<br />

l’inhiber).<br />

Les autres antécédents sont les brûlures mictionnelles, les infections<br />

du système urinaire, les fuites urinaires évoquant une incontinence<br />

par rengorgement, les épisodes d’hématurie, notamment<br />

caillotante, une hypertrophie bénigne de prostate (dernier dosage<br />

de PSA chez l’homme) connue ou un cancer prostatique, un<br />

sondage endo-urétral, récent ou non<br />

Antécédents chirurgicaux<br />

Ce sont essentiellement les traumatismes du bassin et les<br />

antécédents de chirurgie pelvienne, urologique, gynécologique,<br />

colorectale.<br />

Il faut aussi s’enquérir des conditions de la grossesse et de<br />

l’accouchement, éventuellement.<br />

Antécédents médicaux<br />

Dans les antécédents, il faut rechercher un tabagisme actif,<br />

ancien (préciser la date de sevrage), et le quantifier en paquetsannées<br />

; un diabète ; une maladie neurologique (sclérose en<br />

plaques, maladie de Parkinson, accident vasculaire cérébral) ;<br />

une constipation.<br />

Traitements actuels<br />

I-11 Q 216<br />

RÉTENTION AIGUË D’URINE<br />

DIAGNOSTIQUER une rétention<br />

aiguë d’urine.<br />

IDENTIFIER les situations d’urgence<br />

et PLANIFIER leur prise en charge.<br />

Dr Mélanie Fouquet, Pr Olivier Haillot<br />

Service d’urologie, hôpital Bretonneau, CHRU de Tours, 37044 Tours Cedex 9, France<br />

melaniefouquet@hotmail.fr<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

RR<br />

L’instauration d’un nouveau traitement, notamment anticholinergique,<br />

alphastimulant (vasoconstricteurs nasaux), doit être<br />

recherchée.<br />

Un traitement par anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire<br />

interfère avec la prise en charge.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mai <strong>2011</strong> 723


RR Q 216 I-11<br />

RÉTENTION AIGUË D’URINE<br />

Examen clinique<br />

Histoire de la maladie<br />

L’anamnèse doit préciser :<br />

– la localisation de la douleur, l’envie d’uriner ;<br />

– l’ancienneté des troubles mictionnels et leur chronologie<br />

jusqu’à l’épisode de rétention ;<br />

– l’horaire de la dernière miction ;<br />

– les circonstances d’apparition de la rétention ;<br />

– la recherche de facteurs favorisants : station assise prolongée,<br />

alcool, effort de retenue, constipation.<br />

Examen physique<br />

Dès que le diagnostic de rétention aiguë d’urine est suspecté, il<br />

faut être systématique et ne pas perdre de temps, il s’agit d’une<br />

urgence thérapeutique.<br />

1. Recherche de signes généraux<br />

Elle comprend la prise des constantes (pouls, pression artérielle,<br />

température) pour rechercher de la fièvre, un choc hémodynamique<br />

sur sepsis ou hémorragie, d’autres signes infectieux (frissons)<br />

2. Examen abdominal et périnéal avec touchers pelviens<br />

L’inspection, la palpation, et la percussion de la zone hypogastrique<br />

retrouvent :<br />

– une voussure sus-pubienne pouvant remonter jusqu’à l’ombilic ;<br />

– une masse régulière tendue, ovale, douloureuse (ou non) avec<br />

un réveil douloureux de l’envie d’uriner à la palpation ;<br />

724<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mai <strong>2011</strong><br />

– une matité sus-pubienne convexe vers le haut qui reste hypogastrique<br />

en décubitus latéral (permet de la différencier de la<br />

matité hypogastrique concave vers le bas de l’ascite) contrastant<br />

avec le tympanisme épigastrique.<br />

La palpation des organes génitaux externes recherche une<br />

urétrite, une orchi-épididymite, une sténose du méat urétral.<br />

Le toucher rectal permet de palper la prostate (hypertrophie,<br />

nodule, douleur à la palpation), de rechercher des signes de prostatite,<br />

de rechercher un fécalome et d’évaluer le tonus sphinctérien.<br />

Il doit être refait après le drainage des urines vésicales.<br />

Chez la femme, il faut apprécier la trophicité de la vulve, rechercher<br />

un prolapsus spontané ou après un effort de poussée et<br />

réaliser un toucher vaginal à la recherche d’une masse pelvienne.<br />

3. Autres examens<br />

L’examen neurologique est essentiel, surtout si le sujet est jeune :<br />

sensibilité périnéale superficielle et recherche des réflexes ostéotendineux<br />

des membres inférieurs et des réflexes périnéaux.<br />

Il faut enfin rechercher un contact lombaire évoquant un retentissement<br />

de la rétention sur la voie excrétrice<br />

Après cet examen clinique, s’il persiste un doute diagnostique, il<br />

faut faire une échographie abdominale (il est formellement contreindiqué<br />

de tenter une pose de cathéter sus-pubien s’il persiste un<br />

doute, le risque étant de faire une plaie digestive ou vasculaire).<br />

Les examens complémentaires nécessaires en urgence sont<br />

un ionogramme sanguin avec créatininémie, un hémogramme et<br />

un bilan de coagulation.<br />

Avantages et inconvénients des techniques de drainage<br />

Cathéterisme sus-pubien<br />

Contre-indications :<br />

– doute diagnostique (s’aider d’une<br />

échographie si nécessaire) ;<br />

– trouble de la coagulation : spontané<br />

ou secondaire à un traitement anticoagulant<br />

ou anti-agrégant ;<br />

– antécédents de tumeur de vessie (risque de<br />

dissémination tumorale le long du trajet du<br />

cathéter) ;<br />

– hématurie ou suspicion d’hématurie : car les<br />

caillots risquent de boucher le cathéter de<br />

petit calibre et toute hématurie<br />

(concomitante de l’épisode de rétention<br />

aiguë d’urine ou dans les antécédents) est<br />

une tumeur urothéliale jusqu’à preuve du<br />

contraire ;<br />

– laparotomie sous-ombilicale (contreindication<br />

relative, mais nécessite<br />

que la pose du cathéter soit faite sous<br />

contrôle échographique) ;<br />

– pontage artériel extra-anatomique<br />

rétropubien (pontages croisés) ;<br />

– cellulite cutanée en regard du point<br />

de ponction ;<br />

– patient non observant.<br />

Avantages :<br />

– respect de l’urètre ;<br />

– permet de réaliser des épreuves<br />

de clampage pour juger de l’efficacité<br />

de la reprise mictionnelle.<br />

Inconvénients :<br />

– drainage non déclive ;<br />

– drainage non optimal à long terme.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Sondage urétral<br />

Contre-indications :<br />

– notion de sténose, rétrécissement<br />

urétral ;<br />

– suspicion de traumatisme de l’urètre ;<br />

– prostatite aiguë ;<br />

– jeune garçon.<br />

Avantages :<br />

– simple ;<br />

– assure un drainage efficace<br />

car déclive.<br />

Inconvénients :<br />

– pourvoyeur de traumatisme de l’urètre<br />

et de sténoses ;<br />

– 10 % de risque d’infection du tractus<br />

urinaire par jour de sondage ;<br />

– pas d’épreuve de clampage possible.


Rétention aiguë d’urine<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

La rétention aiguë d’urine est une urgence thérapeutique.<br />

Elle nécessite un drainage vésical adapté en urgence.<br />

Pas de cathéter sus-pubien si doute diagnostique.<br />

Le plus souvent, elle est l’évolution naturelle de<br />

l’hypertrophie bénigne de la prostate.<br />

L’épisode de rétention aiguë d’urine est toujours suivi<br />

d’un bilan étiologique.<br />

Conduite à tenir devant un globe vésical : drainage<br />

des urines vésicales en urgence<br />

Pour soulager le patient et éviter une altération du haut appareil<br />

urinaire et de la fonction rénale, deux techniques sont possibles :<br />

le sondage urétral et le cathétérisme sus-pubien. Le plus souvent,<br />

ces deux techniques sont réalisables.<br />

1 re étape : choix du mode de drainage<br />

Le premier sondage urétral d’un homme est un acte médical,<br />

ce n’est pas un geste anodin, puisque 50 % des sténoses urétrales<br />

sont secondaires à un sondage urétral. Le choix de la technique<br />

dépend des habitudes du médecin, du matériel à disposition<br />

et des conditions locales, mais le cathéter sus-pubien doit être<br />

préféré chez l’homme (en l’absence de contre-indication, cf. infra)<br />

en raison de l’absence de manœuvre endo-urétrale, diminuant le<br />

risque septique et celui de sténose urétrale. Le sondage urétral<br />

est le plus souvent préféré chez la femme pour sa facilité.<br />

Pour choisir le mode de drainage adapté, il faut en rechercher<br />

les contre-indications par un interrogatoire minutieux et en<br />

connaître les avantages et inconvénients (encadré).<br />

En cas d’hématurie macroscopique, une sonde urétrale à double<br />

courant est mise en place, permettant ainsi une irrigation continue<br />

de la vessie par du sérum physiologique, un décaillotage ayant<br />

été réalisé au préalable.<br />

La notion d’un adénome prostatique volumineux ne contreindique<br />

pas le sondage urétral, il faut alors préférer une sonde<br />

urétrale de bon calibre (CH 18).<br />

2 e étape : techniques des drainages vésicaux<br />

1. Cathéter sus-pubien<br />

Cette technique ne doit pas être mise en œuvre s’il existe un<br />

doute diagnostique. Les différentes étapes sont :<br />

1) une asepsie rigoureuse : antisepsie cutanée de la région pelvienne<br />

jusqu’au nombril et champ stérile troué ;<br />

2) une ponction de l’aiguille pour l’anesthésie locale sur la ligne<br />

médiane 2 travers de doigt au-dessus du pubis, en s’enfonçant<br />

perpendiculairement à la paroi de cm en cm. À chaque centimètre,<br />

épreuve de reflux et injection de Xylocaïne jusqu’à ce<br />

qu’on obtienne un reflux d’urine (ne pas injecter si reflux sanglant<br />

ou différent des urines) ;<br />

3) une incision au bistouri froid en regard du point de ponction<br />

de l’aiguille d’anesthésie locale puis introduction du trocart<br />

(avec le cathéter prêt dedans) selon le même trajet ;<br />

4) quand il existe un efflux d’urine, pousser le cathéter dans la vessie,<br />

retirer le trocart en le pelant et finir par la fixation cutanée du cathéter.<br />

2. Sondage urétral<br />

Cette technique est interdite si fièvre avec suspicion de prostatite.<br />

Les différentes étapes sont :<br />

1) antisepsie pour les muqueuses au niveau et autour du méat,<br />

pose d’un champ troué ;<br />

2) choix de la sonde : toujours commencer par une sonde urinaire<br />

droite simple courant (double courant si hématurie, béquillée si<br />

antécédent de sondage difficile ou hypertrophie bénigne de la<br />

prostate), un gros calibre pour les hommes (au moins une charrière<br />

18), une charrière plus petite pour les femmes (14) ;<br />

3) lubrifier abondamment en intra-urétral et sur toute la longueur<br />

de la sonde ;<br />

4)chezl’homme:2courburesàpasser:lasous-pubienneest<br />

franchie en verticalisant la verge à son zénith, le bulbe urétral<br />

est passé en rabattant la verge vers le bas, en tirant doucement<br />

dessus et en repoussant la sonde ;<br />

5) gonfler le ballonnet uniquement arrivé à la garde. Le ballonnet<br />

n’a pas besoin d’être gonflé à plus de 10 cc avec de l’eau stérile<br />

(pas de sérum physiologique qui risque de cristalliser, et le ballonnet<br />

ne pourra plus être dégonflé).<br />

3 e étape : surveillance<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR216<br />

Il faut toujours noter le volume du globe urinaire, important pour<br />

connaître le pronostic de reprise mictionnelle spontanée après<br />

sondage. Une fois le patient soulagé, il faut reprendre le même<br />

interrogatoire et refaire l’examen clinique, notamment les touchers<br />

pelviens et observer l’aspect macroscopique des urines drainées.<br />

Le patient doit être surveillé pour prévenir et traiter les 2 complications<br />

précoces du drainage : le syndrome de levée d’obstacle<br />

et l’hémorragie a vacuo.<br />

1. Syndrome de levée d’obstacle<br />

Il survient quand la rétention a été responsable d’une dilatation<br />

des cavités rénales, et se manifeste par une polyurie à la levée de<br />

l’insuffisance rénale avec un risque majeur de déshydratation. Il faut<br />

alors surveiller la diurèse horaire et compenser en intraveineux les<br />

pertes urinaires par du sérum physiologique, volume pour<br />

volume, dès que la diurèse dépasse 500 cc toutes les 6 heures.<br />

2. Hémorragie a vacuo<br />

C’est la conséquence d’une ischémie de la muqueuse vésicale<br />

lorsque la pression intravésicale dépasse la pression de perfusion.<br />

À la levée du globe, il se produit un afflux sanguin pouvant donner<br />

une hématurie. Cette complication est prévenue en réalisant une<br />

vidange progressive de la vessie : 500 cc toutes les 15 min.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mai <strong>2011</strong> 725


RR Q 216 I-11<br />

RÉTENTION AIGUË D’URINE<br />

Étiologie et examens complémentaires<br />

Il y a quatre types de causes à une rétention urinaire : infectieuses,<br />

mécaniques, neurologiques et psychogènes.<br />

Infection<br />

Il faut toujours faire une bandelette urinaire et/ou un ECBU sur<br />

les urines drainées après une rétention aiguë d’urine, même en<br />

l’absence de fièvre. Chez la femme et la petite fille, une cystite<br />

peut donner une rétention.<br />

Mécanique<br />

Les examens nécessaires sont surtout l’échographie rénovésico-prostatique<br />

(avec temps abdominal et endorectal), l’urétrocystoscopie<br />

et, de moins en moins, l’urétrographie. Il faut aussi<br />

faire un dosage des PSA. Les causes mécaniques sont :<br />

1) vésicales : sclérose du col vésical (homme jeune, ou contexte<br />

post-chirurgical), caillotage de vessie, obstruction du col vésical<br />

par une tumeur ou un calcul ;<br />

2) prostatiques chez l’homme : hypertrophie bénigne de la<br />

prostate, cancer de prostate ;<br />

726<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mai <strong>2011</strong><br />

3) urétrales : sténose de l’urètre (secondaire à une infection, un<br />

geste endo-urétral, post-traumatique, tumeur), rupture complète<br />

de l’urètre, compression urétrale ;<br />

4) chez la femme : prolapsus, diverticule sous-urétral abcédé,<br />

herpès génital, tumeur de voisinage, tumeur de l’urètre ;<br />

5) chez le garçon : valves de l’urètre postérieur, calcul de vessie<br />

enclavé dans l’urètre, sténose du méat urétral, sarcome du<br />

sinus urogénital ;<br />

6) chez la petite fille : hydrocolpos.<br />

Neurologique<br />

L’item rétention aiguë d’urine ne permet pas de faire un dossier complet à lui seul.<br />

Cet item sera donc envisagé dans un dossier transversal qui débute ou finit par ce<br />

diagnostic. Cet item peut se retrouver mêlé aussi bien à un dossier de gériatrie<br />

qu’à un dossier de neurologie (début d’une sclérose en plaques) ou d’urologie...<br />

Le premier élément d’orientation est l’âge et le sexe du patient.<br />

On vous demandera quel moyen de drainage est indiqué et de le justifier : donc<br />

bien lire le dossier en entier à la recherche d’une contre-indication.<br />

La difficulté est d’évaluer si cette rétention entre dans le cadre d’une rétention<br />

vésicale chronique incomplète (sensation de vidange incomplète de vessie,<br />

résidu post-mictionnel, dysurie, pollakiurie, impériosités), mais ces éléments<br />

auront été donnés dans le texte ou seront à rechercher dans votre interrogatoire.<br />

Exemple de cas clinique<br />

Un patient de 80 ans est transféré aux urgences par sa maison de retraite<br />

pour agitation. Son traitement comporte un alphabloquant depuis 2 ans pour<br />

une « grosse » prostate et du Préviscan depuis 3 mois pour une phlébite,<br />

il n’a pas uriné depuis 16 heures.<br />

QUESTION N° 1<br />

Quel est votre diagnostic ? Quelles<br />

sont les causes possibles ?<br />

QUESTION N° 2<br />

Que recherchez-vous<br />

à l’interrogatoire ?<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Une cause neurologique est surtout à rechercher chez les<br />

sujets jeunes.<br />

Le bilan urodynamique à distance est instructif et peut orienter<br />

la recherche étiologique :<br />

1) sclérose en plaques ;<br />

2) compression rachidienne (post-traumatique ou métastatique)<br />

ou des racines nerveuses (hernie discale) ;<br />

3) pathologie infectieuse, notamment les myéloradiculites herpétiques<br />

;<br />

4) syndrome de Guillain-Barré.<br />

QUESTION N° 3<br />

Que recherchez-vous à l’examen<br />

physique ?<br />

QUESTION N° 4<br />

Quelle prise en charge thérapeutique<br />

effectuez-vous ?<br />

QUESTION N° 5<br />

Quels examens complémentaires<br />

demandez-vous ?<br />

QUESTION N° 6<br />

Quels sont les avantages de chacune<br />

des techniques de drainage vésical ?<br />

Retrouvez toutes les réponses<br />

et les commentaires sur<br />

www.larevuedupraticien.fr<br />

onglet ECN<br />

OK


Psychogène<br />

Une des causes majeures de rétention aiguë d’urine chez la<br />

femme est l’abus sexuel.<br />

Gravité<br />

Pour le bilan de gravité d’une rétention, l’échographie rénovésicale<br />

est l’examen de choix à la recherche d’une dilatation des<br />

cavités pyélocalicielles ou d’une rupture des voies excrétrices.<br />

Diagnostic différentiel<br />

Le diagnostic est difficile quand le patient est obèse, opéré<br />

récemment, neuropathe, avec des troubles mictionnels anciens<br />

(notamment dysurie avec un résidu post-mictionnel).<br />

Le principal diagnostic différentiel est l’anurie : il faut demander<br />

une échographie devant tout doute diagnostique, sauf chez la<br />

femme chez qui un sondage urétral minute peut être réalisé pour<br />

poser le diagnostic.<br />

L’occlusion intestinale à cause du tympanisme abdominal diffus<br />

qu’elle provoque est une gêne au diagnostic.<br />

Carrières Santé<br />

Traitement<br />

Étiologique<br />

Il faut tour à tour envisager :<br />

– l’arrêt des médicaments favorisant la rétention ;<br />

– un traitement médicamenteux à instaurer selon la cause retrouvée<br />

: antibiotiques si infection, alphabloquant si hypertrophie<br />

bénigne de la prostate ;<br />

– un traitement chirurgical pour les tumeurs vésicales ou prostatiques.<br />

Pour l’adénome de la prostate, un traitement chirurgical<br />

est envisagé s’il est responsable d’une insuffisance rénale, si le<br />

globe urinaire était non douloureux, s’il y a un échec de reprise<br />

de mictions spontanées.<br />

Préventif<br />

Q RR216<br />

Il comprend la lutte contre la constipation, l’éducation à des<br />

mictions régulières, le traitement des infections urinaires et la prévention<br />

des sténoses urétrales.•<br />

M. Fouquet déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts.<br />

O. Haillot n’a pas fourni de déclaration de conflit d’intérêts.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mai <strong>2011</strong> 727


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

INTERPRÉTATION D’UN GAZ<br />

DU SANG<br />

L’étude de l’équilibre acido-basique repose sur<br />

l’étude des gaz du sang artériel (PCO 2) et de<br />

la concentration plasmatique en bicarbonates<br />

(HCO3 — ). Les variations de PCO 2 et d’HCO 3 —<br />

peuvent être associées à une modification de la valeur de pH,<br />

mais ce n’est pas nécessaire pour définir un trouble acido-basique.<br />

Si le pH est inférieur à 7,38, on parle d’acidose avec acidémie (ou<br />

acidose non compensée), s’il est supérieur à 7,42, on parle d’alcalcose<br />

avec alcalémie (ou alcalose non compensée). Si le pH est<br />

normal, le trouble acido-basique est dit compensé. Ainsi, ce n’est<br />

pas le pH qui définit le trouble acido-basique, mais son analyse est<br />

malgré tout indispensable pour 1) définir le caractère compensé<br />

ou non de l’acidose, 2) établir l’origine primitivement métabolique<br />

ou respiratoire du trouble, 3) évaluer la profondeur du trouble et<br />

son risque.<br />

Quatre perturbations simples de l’équilibre acido-basique peuvent<br />

être individualisées (fig. 1) :<br />

— l’acidose respiratoire correspond schématiquement aux situations<br />

d’hypoventilation, et est provoquée par une augmentation<br />

primitive de la PCO 2 qui diminue le rapport [HCO 3 — ]/PCO2 (A).<br />

En situation chronique, l’hypercapnie chronique est compensée<br />

en 3 à 5 jours par une augmentation de l’excrétion rénale d’ions<br />

H + et une réabsorption rénale tubulaire de bicarbonates (B). La<br />

compensation rénale est en général partielle, le pH restant légèrement<br />

inférieur à 7,4 ;<br />

— l’alcalose respiratoire correspond schématiquement aux situations<br />

d’hyperventilation et est provoquée par une diminution primitive<br />

de la PCO 2 qui augmente le rapport [HCO 3 — ]/PCO2 (C). En situation<br />

d’hypocapnie chronique, l’excrétion urinaire des bicarbonates en<br />

I-11-Q219 I-00-Q000<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique<br />

et désordres hydro-électrolytiques<br />

1 re partie<br />

D r Martin Flamant, D r Hiba Azar, D r Marcel Bonay<br />

Service de physiologie explorations fonctionnelles, CHU Bichat-Claude-Bernard, 75722 Paris Cedex 18, France<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

martin.flamant@bch.aphp.fr<br />

Objectifs<br />

• Prescrire et interpréter un examen des gaz du sang en fonction<br />

d’une situation clinique donnée.<br />

• Savoir diagnostiquer et traiter : une acidose métabolique,<br />

une acidose ventilatoire.<br />

excès augmente. La diminution du rapport [HCO 3 — ]/PCO2<br />

normalise le pH (alcalose respiratoire compensée) [D] ;<br />

— l’acidose métabolique correspond à une diminution initiale des<br />

bicarbonates aboutissant à une baisse du rapport [HCO 3 — ]/PCO2<br />

et du pH. La compensation respiratoire se fait rapidement par<br />

augmentation de la ventilation (grâce à l’action des ions H + sur les<br />

chémorécepteurs périphériques), permettant de réduire la PCO 2<br />

et par conséquent d’augmenter le rapport [HCO 3 — ]/PCO2 (E). La<br />

valeur attendue de PCO 2 en cas d’abaissement du pH peut être<br />

calculée suivant la relation PCO 2 (mmHg) théorique = 1,5 . [HCO 3 — ]<br />

(mEq/L) + 8 2 ;<br />

— dans l’alcalose métabolique, une augmentation des bicarbonates<br />

augmente le rapport [HCO 3 — ]/PCO2 et le pH (F). La compensation<br />

respiratoire est inconstante et souvent faible.<br />

Les situations mixtes respiratoires et métaboliques sont fréquentes.<br />

SAVOIR DIAGNOSTIQUER ET TRAITER<br />

UNE ACIDOSE MÉTABOLIQUE<br />

Diagnostic positif biologique et clinique (fig. 2)<br />

L’acidose métabolique se définit donc par l’association d’une<br />

baisse primitive de la bicarbonatémie, s’accompagnant secondairement<br />

d’une diminution de la PCO 2.<br />

1363


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1364<br />

I-11-Q219<br />

RAPPELS PHYSIOLOGIQUES<br />

L’organisme régule de manière<br />

fine la concentration plasmatique de<br />

H + . Le maintien du pH à une valeur<br />

physiologique est en effet une condition<br />

indispensable au fonctionnement<br />

cellulaire normal.<br />

La valeur physiologique du pH<br />

plasmatique est de 7,38-7,42, correspondant<br />

à des concentrations<br />

extrêmement faibles de H + puisque<br />

d’environ 40 nmoles/L. De façon<br />

parallèle, l’organisme subit quotidiennement<br />

une charge acide très<br />

importante provenant :<br />

1) de la respiration cellulaire (environ<br />

14 000 mmol de CO 2 correspondant<br />

aux acides dits volatils) ;<br />

2) du métabolisme des acides aminés<br />

soufrés contenus dans les protéines<br />

alimentaires (environ 60 mmol de H + ).<br />

Les acides volatils sont éliminés<br />

par la respiration et ne constituent pas<br />

en soi de charge acide fixe. Le rôle du<br />

rein est d’éliminer la charge acide fixe<br />

provenant de l’alimentation, afin d’en<br />

assurer l’homéo stasie (sorties acides<br />

égales aux entrées). À la différence<br />

d’autres électrolytes, tel le Na + , la<br />

quantité d’H + entrant quotidiennement<br />

dans le milieu intérieur est plusieurs<br />

milliers de fois la quantité totale<br />

présente dans l’organisme. Le maintien<br />

du pH à une valeur stable nécessite<br />

en conséquence que cette charge<br />

acide soit prise en charge en continu<br />

par des systèmes tampons, le rein restant<br />

au final l’organe éliminant cette<br />

charge acide fixe.<br />

Un système tampon est un couple<br />

acide-base (A — /AH) constitué d’une<br />

forme accepteuse de protons (A — ) et<br />

une forme donneuse de protons<br />

(AH). Dans la zone tampon (valeur<br />

de pH proche du pKa), de fortes<br />

concentrations de H + ajoutées au<br />

milieu n’entraînent qu’une faible<br />

variation du pH. Le pouvoir tampon<br />

d’un système tampon est d’autant<br />

meilleur que :<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (1 re partie)<br />

1) sa concentration dans le liquide<br />

biologique correspondant est importante<br />

;<br />

2) le pKa est proche du pH.<br />

Le plus important tampon extracellulaire<br />

est le couple HCO 3 —<br />

/H2CO 3, dont le pKa est de 6,1 et<br />

dont la concentration plasmatique est<br />

importante (24 mmol/L). L’équation<br />

d’Henderson-Hasselbalch décrit la<br />

relation de ce système tampon avec le<br />

pH sanguin, de la façon suivante :<br />

pH = 6,1 + log [HCO 3 – ]/[H2CO 3]<br />

ou<br />

pH = 6,1 + log [HCO 3 – ]/0,03 PCO2.<br />

Une troisième caractéristique propre<br />

au système tampon bicarbonate<br />

est son caractère ouvert. En effet,<br />

l’hydrogénocarbonate formé par tamponnement<br />

de l’apport d’H + est lui<br />

même en équilibre avec le CO 2 suivant<br />

la relation :<br />

HCO 3 — + H +➙H 2C03➙H 2O + CO 2<br />

➙<br />

➙<br />

Le CO 2 ainsi formé est éliminé par<br />

le système ventilatoire, ce qui augmente<br />

considérablement le pouvoir<br />

tampon du couple. Il est important de<br />

noter que ce système ouvert aboutit<br />

au final à la consommation de HCO 3 — ,<br />

et il reviendra in fine au rein de<br />

reformer du tampon bicarbonate<br />

(ce qui revient à éliminer la charge<br />

acide).<br />

On peut ainsi résumer le rôle de<br />

l’organisme comme celui de maintenir<br />

stable le pH intra- et extracellulaire<br />

en assurant :<br />

1) l’élimination de la charge acide<br />

volatile provenant du métabolisme<br />

cellulaire ;<br />

2) la prise en charge de la charge acide<br />

fixe alimentaire en deux temps : à<br />

court terme, par les systèmes tampon,<br />

dont le tampon bicarbonate ouvert<br />

vers le système respiratoire et, à<br />

moyen terme, par l’excrétion nette de<br />

cette charge acide par le rein.<br />

Schématiquement, on peut ainsi définir<br />

les rôles du rein et du poumon<br />

dans l’équilibre acide-base comme<br />

organes régulant respectivement la<br />

bicarbonatémie et la pCO 2, le pH sanguin<br />

artériel ne changeant pas tant<br />

que le rapport [HCO 3 — ]/0,03 PCO2<br />

est égal à 20.<br />

Rôle du rein<br />

Pour maintenir constante la<br />

concentration plasmatique de bicarbonates,<br />

le rein doit :<br />

1) régénérer les bicarbonates librement<br />

filtrés ;<br />

2) éliminer la charge acide fixe.<br />

Régénération des bicarbonates<br />

filtrés<br />

Comme tous les électrolytes qui<br />

sont des substances dissoutes, le<br />

HCO 3 — est passivement filtré par<br />

le glomérule. Pour un débit de filtration<br />

glomérulaire normal, la quan -<br />

tité de bicarbonate filtrée est ainsi<br />

d’environ 4 300 mmol par jour<br />

(24 mmol/L 180 L/j), soit plusieurs<br />

fois la quantité totale présente<br />

dans le plasma. Il est ainsi indispensable<br />

que ces bicarbonates soient<br />

entièrement réabsorbés par le système<br />

tubulaire après filtration (on<br />

parle de régénération, car ce n’est pas<br />

un transport direct de substance à travers<br />

l’épithélium). La régénération<br />

des bicarbonates filtrés est une fonction<br />

du tubule proximal. Il existe une<br />

sécrétion d’H + dans le fluide tubulaire<br />

qui s’associe au HCO 3 — filtré. Le<br />

H 2CO3 formé est dissocié par<br />

l’anhydrase carbonique présente sur<br />

la bordure en brosse épithéliale. Le<br />

CO 2, produit de cette réaction, passe<br />

librement dans la cellule pour former<br />

par réaction inverse du bicarbonate.<br />

Le HCO 3 — formé est extrudé au versant<br />

basolatéral dans le capillaire<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

péritubulaire par des transporteurs<br />

spécifiques.<br />

Dans cette partie du néphron, le<br />

bilan en HCO 3 — et H + est donc nul.<br />

En effet, la sécrétion d’H + sert à régénérer<br />

un HCO 3 — . Il y a sécrétion mais<br />

non excrétion nette de H + , ce qui rend<br />

compte du fait que le tube contourné<br />

proximal ne participe pas directement<br />

physiologiquement à l’élimination de<br />

la charge acide fixe.<br />

A contrario, une modification<br />

primitive pathologique des capacités<br />

de réabsorption des bicarbonates<br />

conduit à un gain ou une perte de<br />

tampon disponible et respectivement<br />

à une alcalose ou une acidose métabolique<br />

(v. infra, acidose tubulaire<br />

de type 2).<br />

Excrétion rénale des H +<br />

La fonction de contrôle de<br />

l’homéostasie protonée est une<br />

fonction du tubule distal. Dans le<br />

canal collecteur, la sécrétion de H +<br />

se fait majoritairement par l’inter -<br />

médiaire d’une pompe consommant<br />

de l’ATP (H + ATPase). Cette excrétion<br />

d’H + est sous la dépendance de<br />

l’aldostérone et de la réabsorption<br />

de Na + (créant une différence de<br />

potentiel lumière négative).<br />

Ici, la sécrétion de H + dans le<br />

fluide tubulaire aboutit à une excrétion<br />

nette de H + et de Cl — (bilan non<br />

nul) et à la génération d’un HCO 3 —<br />

dans le milieu intérieur. Ce proton<br />

sera éliminé dans l’urine définitive<br />

sous trois formes :<br />

— sous forme de NH 4 + , produit de<br />

l’acceptation d’un proton par le NH 3.<br />

Ce système tampon urinaire est le<br />

plus important. Deux tiers de l’élimination<br />

de la charge acide quoti -<br />

dienne (40 mmol/j) le sont sous<br />

cette forme. En outre, le pKa du<br />

couple est supérieur à 9, ce qui<br />

explique qu’il est, quel que soit le pH<br />

urinaire, sous forme de NH 4 + . Enfin,<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

la production de NH 3 par le rein est<br />

adaptable (jus qu’à un facteur 6), et<br />

l’excrétion de H + sous forme de NH 4 +<br />

augmente donc en situation d’acidose<br />

extrarénale ;<br />

— sous forme d’acidité titrable<br />

(H 2PO 4 — et H2SO 4 entre autres), correspondant<br />

physiologiquement à un<br />

tiers de l’excrétion d’acide (soit environ<br />

20 mmol quotidiens). Le pKa de<br />

ces systèmes tampons est proche du<br />

pH urinaire (d’où leur caractère<br />

titrable), ce qui rend cette forme<br />

d’excrétion de H + dépendante du pH<br />

urinaire. Par ailleurs, elle n’est pas<br />

modulable et dépend, en particulier<br />

pour HPO 4 2— , du seul apport alimentaire<br />

en phosphate ;<br />

— sous forme de H + libre (pH urinaire).<br />

Cette forme d’excrétion de<br />

H + est négligeable quantitativement,<br />

mais l’abaissement du pH urinaire<br />

est nécessaire à la prise en charge du<br />

H + par les accepteurs de protons<br />

(NH 3, HPO 4 2— ).<br />

Rôle du poumon<br />

Organe ouvert sur le milieu extérieur,<br />

le poumon permet l’apport<br />

d’oxygène de l’air ambiant vers le<br />

sang capillaire pulmonaire et l’élimination<br />

du gaz carbonique en sens<br />

inverse.<br />

La ventilation totale d’un sujet<br />

(V’E) est le produit de la fréquence<br />

respiratoire (FR) par le volume<br />

courant (VT).<br />

V’E a 2 composantes : la ventilation<br />

alvéolaire (V’A), qui contribue à<br />

l’élimination du CO2, et la ventilation<br />

de l’espace mort, qui ne participe pas<br />

à cette élimination.<br />

À l’état stable, la production de<br />

CO2 (V’CO2) est égale à la quantité<br />

totale de CO2 expirée. La quantité<br />

de CO2 éliminée est déterminée par<br />

la ventilation alvéolaire (V’ A) et<br />

la concentration fractionnaire de<br />

CO2 dans le gaz alvéolaire (FACO2). L’espace mort n’intervient pas, car il ne<br />

participe pas aux échanges gazeux.<br />

Ainsi :<br />

V’CO 2 = V’ A • F ACO 2.<br />

Cette équation peut être modifiée<br />

et exprimée avec les unités de mesure<br />

habituelles :<br />

V’ A (L/min) = K • V’CO 2 mL/min)/<br />

PaCO 2 (mmHg).<br />

Dans cette équation, la PACO 2<br />

alvéolaire est assimilée à la PCO 2<br />

(PCO 2 artérielle).<br />

La relation entre la ventilation<br />

alvéolaire et la PaCO 2 montre, p. ex.,<br />

que lorsque la ventilation alvéolaire<br />

est divisée par deux, la PaCO 2 double<br />

(si V’CO 2 reste inchangée). Ainsi, la<br />

ventilation alvéolaire intervient dans<br />

la régulation acido-basique par le biais<br />

de son rôle majeur dans l’élimination<br />

du CO 2. Cette régulation met en jeu<br />

la stimulation des chémorécepteurs<br />

centraux et périphériques.<br />

Les chémorécepteurs centraux<br />

sont localisés au niveau du tronc cérébral<br />

en contact étroit avec le liquide<br />

céphalorachidien (LCR). Le pH du<br />

LCR est lié à la PCO 2, car ce milieu<br />

contient peu de tampons non bicarbonates.<br />

La barrière hémato-encéphalique<br />

étant beaucoup plus perméable<br />

au CO 2 qu’aux ions H + et<br />

HCO 3 — , la PCO2 sanguine contrôle la<br />

ventilation par son effet sur le pH du<br />

LCR. La réponse des chémorécepteurs<br />

périphériques, localisés au niveau des<br />

corpuscules carotidiens et de la crosse<br />

aortique, est moins importante mais plus<br />

rapide que celle des récepteurs centraux,<br />

lors des variations brutales de<br />

PaCO 2 par exemple. Les corpuscules<br />

carotidiens sont directement sensibles<br />

aux modifications du pH sanguin,<br />

qu’elles soient d’origine métabolique<br />

ou respiratoire. ●<br />

R Q 219<br />

1365


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

L’existence d’une acidémie (pH diminué) affirme le caractère<br />

au moins partiellement métabolique du trouble et définit le caractère<br />

non compensé de l’acidose par la réponse ventilatoire.<br />

Lorsque l’acidose métabolique n’est pas totalement compensée<br />

(pH acide), il est important d’évaluer si cela est en rapport<br />

avec une anomalie de la réponse respiratoire (PCO 2 supérieure<br />

à la PCO 2 théorique, traduisant « paradoxalement », malgré l’hypocapnie,<br />

le caractère mixte de l’acidose), d’une charge acide<br />

dépassant les capacités de compensation (PCO 2 égale à la PCO 2<br />

théorique).<br />

Lorsque le pH est normal, il est parfois difficile de distinguer<br />

une acidose métabolique compensée d’une alcalose respiratoire<br />

compensée. Les éléments contextuels permettent en général de<br />

trancher. La valeur du pH est également un élément d’orientation<br />

(normal haut dans l’alcalose respiratoire et normal bas dans l’acidose<br />

métabolique).<br />

Les signes cliniques d’acidose métabolique varient en fonction<br />

du degré d’acidose, du degré d’acidémie et de l’ancienneté du<br />

trouble. Plus le trouble est ancien, moins il est symptomatique.<br />

En outre, la symptomatologie est relativement peu spécifique et<br />

il est parfois difficile de distinguer les signes liés à l’acidose de<br />

ceux en rapport avec la pathologie causale :<br />

— hyperpnée d’origine centrale et compensatrice de l’acidose, de<br />

type Kussmaul (ample, régulière et lente) ;<br />

— troubles de la conscience d’intensité graduelle avec la baisse<br />

du pH (risque de coma pour un pH inférieur à 7,2) ;<br />

— hypotension artérielle d’origine mixte :<br />

• diminution du débit cardiaque,<br />

• vasodilatation artérielle périphérique ;<br />

— ischémie tissulaire par baisse des débits régionaux malgré la<br />

vasodilatation (rénal, hépatique, digestif, coronarien) ;<br />

— troubles de la coagulation ;<br />

— hyperkaliémie par transfert de potassium vers le secteur extracellulaire,<br />

concernant surtout les acidoses hyperchlorémiques ;<br />

— perte minérale osseuse (ostéopénie) avec risque fracturaire,<br />

au cours de l’acidose chronique.<br />

1366<br />

I-11-Q219<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (1 re partie)<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

À l’exception des acidoses tubulaires rénales primitives, les troubles acidobasiques<br />

ne sont souvent qu’une partie d’un tableau clinico-biologique large.<br />

Un dossier spécifiquement et uniquement<br />

centré sur la physiopathologie de l’équilibre<br />

acide-base est peu probable. En revanche,<br />

la caractérisation d’un trouble acide base<br />

peut être demandée 1) à titre d’orientation<br />

diagnostique (ex. : enfant de 10 ans<br />

hospitalisé en urgence pour troubles de la<br />

conscience avec hyperpnée et acidose<br />

métabolique hyperchlorémique comme<br />

éléments d’orientation diagnostique d’une<br />

acidocétose diabétique) ; 2) dans le cadre<br />

[HCO 3 — ] plasmatique (mmol/L)<br />

d’une question spécifique mais isolée.<br />

Voici une liste non exhaustive des tableaux<br />

clinico-biologiques associant un trouble<br />

acido-basique et pouvant faire l’objet de<br />

questions à l’examen. Cette liste est bien<br />

entendu donnée à titre indicatif :<br />

• syndrome de Fanconi au cours d’un myélome<br />

à chaînes légères • acidocétose diabétique<br />

comme mode d’entrée dans un<br />

diabète de type 1 chez l’enfant • acidose<br />

lactique chez un patient sous biguanide<br />

56<br />

48<br />

40<br />

32<br />

24<br />

16<br />

8<br />

120 110 100 90 80 70 60 50 40<br />

Acidose<br />

respiratoire<br />

chronique<br />

Acidose respiratoire aiguë<br />

A<br />

Acidose métabolique<br />

E<br />

B<br />

0<br />

7,0 7,1 7,2 7,3 7,4 7,5 7,6 7,7 7,8<br />

ph artériel<br />

Diagnostic mécanistique et étiologique<br />

La connaissance du mécanisme de la charge acide est d’un<br />

intérêt capital, car celui-ci réduit de façon importante le champ<br />

des diagnostics étiologiques, et il peut être conduit rapidement<br />

à partir de données ioniques simples plasmatiques et urinaires.<br />

La démarche dichotomique qui est décrite ici en détail est résumée<br />

dans la figure 3.<br />

1. Trou anionique plasmatique (TAp)<br />

Le trou anionique plasmatique se définit comme TAp =<br />

Na + —(HCO— 3 Cl — ). En situation d’équilibre électrolytique, il est<br />

de 12 4 mM.<br />

Normal<br />

Alaclose<br />

respiratoire<br />

chronique<br />

Alcalose<br />

métabolique<br />

Alcalose<br />

respiratoire aiguë<br />

Figure 1 Diagramme de Davenport représentant la relation<br />

entre le pH, la concentration en bicarbonate plasmatique et<br />

la PCO2. Les situations qui correspondent aux zones A et F<br />

sont décrites dans le chapitre « Interprétation d’un gaz du sang ».<br />

D<br />

avec un facteur de décompensation<br />

• acidose métabolique après sevrage corticoïde<br />

par insuffisance surrénalienne<br />

• acidose respiratoire sur décompensation<br />

d’une BPCO.<br />

Enfin, la prise en charge thérapeutique de<br />

l’acidose métabolique aiguë en réanimation<br />

ayant fait l’objet d’une conférence de<br />

consensus modifiant profondément les<br />

habitudes antérieures, on ne peut exclure<br />

une question spécifique sur ce point (p. ex.<br />

au cours d’un dossier réanimatoire avec<br />

une acidose métabolique normochlorémique<br />

par acidose lactique). ●<br />

F<br />

C<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

35<br />

30<br />

25<br />

20<br />

15<br />

10<br />

PCo 2<br />

(mmHg)


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Le trou anionique n’a pas de réalité physiologique, puisque le<br />

plasma est électroneutre. Il est un simple outil diagnostique permettant<br />

de distinguer parmi les acidoses métaboliques celles<br />

pour lesquelles l’anion accompagnant la charge protonée est le<br />

chlore (HCl) des autres (AH).<br />

✓ Un TAp augmenté indique que l’anion accompagnant la charge<br />

protonée n’est pas le chlore (anion indosé). L’acidose métabolique<br />

est normochlorémique et répond à trois situations cliniques.<br />

Les acidocétoses (présence de corps cétoniques) : l’acidocétose<br />

diabétique complique le diabète de type 1 dont il peut être<br />

un mode d’entrée. Les anions associés sont l’hydroxybutyrate et<br />

l’acétoacétate, dosables dans les urines (corps cétoniques urinaires).<br />

L’acidocétose diabétique s’accompagne fréquemment d’une déshydratation<br />

extra-cellulaire d’origine rénale (natriurèse osmotique)<br />

et d’une hyperkaliémie par transfert potassique du secteur<br />

intra- vers le secteur extracellulaire. L’acidocétose alcoolique<br />

complique l’alcoolisme chronique. L’anion présent en excès est<br />

l’hydroxybutyrate.<br />

L’acidose lactique : l’acide lactique est le produit du métabolisme<br />

anaérobie du pyruvate au cours de la glycolyse. L’acidose<br />

lactique est favorisée par :<br />

1) toutes les situations d’hypoxie tissulaire, qu’elles soient hypoxémiques<br />

(insuffisance respiratoire, intoxication au CO) ou hémodynamiques<br />

(choc septique, hémorragique ou cardiogénique) ou<br />

par trouble de la dissociation de l’oxygène (hypothermie) ;<br />

2) les situations de lyse cellulaire (rhabdomyolyse, lyse tumorale,<br />

crises convulsives, leucémie) ;<br />

3) les anomalies de la néoglucogenèse hépatique (insuffisance<br />

hépatique, prise de biguanide).<br />

Le dosage des lactates plasmatiques ( 5 mM) permet aisément<br />

d’établir l’origine lactique de l’acidose.<br />

Les intoxications aux acides non chlorés : aspirine (anion salicylate<br />

et éventuellement lactate dosables dans le plasma), éthylène<br />

glycol (anions glycolate et oxalate dosables dans les urines),<br />

méthanol (anion formate).<br />

Une fois établie l’existence d’un anion indosé supplémentaire,<br />

la conduite diagnostique est d’ordre étiologique et associe des<br />

éléments contextuels (diabète connu, prise de médicaments ou<br />

de toxiques, insuffisance d’organe, alcoolisme) et des éléments<br />

biologiques (corps cétoniques, sang et urines, lactates, glycémie,<br />

syndrome de lyse, toxiques).<br />

✓ Un TAp normal indique que l’anion accompagnant la charge<br />

protonée est le chlore (HCl). L’acidose métabolique est hyperchlorémique,<br />

et répond à trois situations cliniques :<br />

— une perte d’HCO 3 — par l’épithélium digestif (diarrhées) ;<br />

— un défaut de sécrétion d’H + par le rein (acidoses tubulaires<br />

rénales) ;<br />

— une intoxication aux acides chlorés tels l’acide chlorhydrique<br />

(HCl) ou le chlorure d’ammonium (NH4Cl).<br />

Au cours de l’insuffisance rénale chronique avancée, le Tap<br />

est souvent intermédiaire, ce qui s’explique par le fait qu’il s’associe<br />

dans cette situation une diminution de la capacité d’excrétion de<br />

H + et d’une diminution de la clairance rénale de certains anions<br />

indosés, dont le phosphate.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

à retenir<br />

Le diagnostic positif de désordres acido-basiques repose<br />

sur l’analyse de la pCO2 du HCO —<br />

3 et du pH.<br />

Un pH normal n’exclut pas l’existence d’une acidose<br />

ou d’une alcalose.<br />

Devant une acidose métabolique, l’analyse des seuls<br />

ionogrammes plasmatique et urinaire permet de resserrer<br />

de façon très importante le champ des diagnostics étiologiques.<br />

Le traitement des acidoses métaboliques est avant<br />

tout étiologique. L’alcalinisation doit être réservée<br />

aux acidoses chroniques et aux acidoses aiguës graves<br />

ou par perte primitive de bicarbonates.<br />

2. Trou anionique urinaire (TAu)<br />

Au cours des acidoses métaboliques hyperchlorémiques (TAp<br />

normal), il est possible d’avancer encore sur le mécanisme de la<br />

charge acide avant d’envisager une démarche étiologique. L’élément<br />

de dichotomie est celui du caractère adapté ou non du rein<br />

à la situation d’acidose. Si le rein n’est pas à l’origine de l’acidose,<br />

il va augmenter l’excrétion de H + sous sa forme adaptable, le<br />

NH 4 + . Ainsi, une ammoniurie supérieure à 70 mmol/24 h traduit<br />

une réponse rénale adaptée et évoque l’origine digestive de l’acidose.<br />

A contrario, une ammoniurie inférieure ou égale à 40 mmol/24 h<br />

traduit l’incapacité du rein à augmenter la charge acide et évoque<br />

l’origine rénale de cette acidose.<br />

Il est important de noter ici le risque lié à l’utilisation du pHu<br />

comme élément diagnostique de l’origine rénale de l’acidose<br />

métabolique, car un pHu normal ne permet pas d’écarter l’origine<br />

rénale du trouble. A contrario, un pHu augmenté à jeun évoque<br />

une anomalie de sécrétion distale de H + (v. infra).<br />

Le dosage de l’ammoniurie n’étant pas effectué en routine,<br />

on peut indirectement apprécier les variations de NH4+ dans les<br />

urines en calculant le trou anionique urinaire qui se définit comme<br />

Tau = Na + + K + — Cl — .<br />

En situation habituelle, le TAu est discrètement positif.<br />

Là encore, le TAu n’a pas de réalité physiologique. Il est un<br />

outil diagnostique permettant de distinguer parmi les acidoses<br />

métaboliques hyperchlorémiques celles pour lesquelles le NH 4 +<br />

(cation indosé) a augmenté des autres.<br />

✓ Un TAu négatif indique une augmentation des cations indosés,<br />

suggérant une réponse rénale adaptée et donc l’origine digestive<br />

du trouble. Ceci bien entendu sous réserve que le cation<br />

indosé supplémentaire soit le NH 4 + .<br />

POINTS FORTS<br />

Les pertes digestives de bicarbonates sont observées au cours<br />

des diarrhées profuses, des fistules digestives et de façon particulière<br />

au cours des entérocystoplasties, où il existe un échange<br />

Cl — /HCO 3 — épithélial digestif à partir du chlore urinaire.<br />

✓ Un TAu qui reste positif indique l’absence de cation indosé supplémentaire,<br />

suggérant une réponse rénale inadaptée au trouble acidobasique<br />

et donc l’origine rénale de l’acidose (acidose tubulaire rénale).<br />

R Q 219<br />

1367


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1368<br />

I-11-Q219<br />

Figure 2<br />

Figure 3<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (1 re partie)<br />

pH 7,42<br />

Alcalose respiratoire non compensée ou alcalose mixte<br />

Alcalose respiratoire<br />

compensée<br />

Contexte clinique<br />

Hyper K +<br />

PCO 2 40 mmHg / HCO3 — 22 mmol/L<br />

Acidose métabolique<br />

compensée<br />

Diagnostic positif de l’acidose métabolique.<br />

TAp 16<br />

Acidose normochlorémique<br />

➲ Acidose lactique<br />

➲ Acidocétose (diabétique<br />

ou alcoolique)<br />

➲ Intoxications aux acides<br />

non chlorés<br />

➲ Insuffisance rénale<br />

chronique<br />

Acidose tubulaire hyperK +<br />

(type 4)<br />

➲ Hypoaldostéronisme<br />

➲ Pseudo-hypoaldostéronisme<br />

(dont défaut de résorption de<br />

Na collecteur — Voltage defect)<br />

Acidose métabolique<br />

TA plasmatique<br />

NH 4 + 40 mmol/j<br />

TA u 0<br />

Acidoses tubulaires<br />

rénales<br />

[K]p<br />

pH artériel<br />

Normal<br />

Acidose métabolique<br />

non compensée<br />

Acidose métabolique — Démarche diagnostique<br />

Hypercalciurie<br />

Hypocitraturie<br />

pHu 6<br />

Acidose tubulaire distale<br />

(type 1)<br />

➲ Pump defect<br />

➲ Gradient defect<br />

Démarche diagnostique mécanistique de l’acidose métabolique.<br />

PCO 2 PCO 2théorique PCO 2 PCO 2théorique<br />

TAp 16<br />

Acidose hyperchlorémique<br />

NH 4 + urinaire<br />

TA urinaire<br />

Pertes digestives<br />

[K]p normal ou bas<br />

pH 7,38<br />

PCO 2<br />

NH 4 + 70 mmol/j<br />

TA u 0<br />

Normocalciurie<br />

Fuite rénale Pi, glucose, AA<br />

pHu normal<br />

Acidose tubulaire proximale<br />

(type 2)<br />

Acidose mixte<br />

Intoxication aux acides<br />

chlorés (NH 4CI, HCI)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

On distingue ici :<br />

— les acidoses tubulaires distales de type 1, conséquence de l’incapacité<br />

du rein à abaisser le pH urinaire dans le canal collecteur<br />

(pHu à jeun 6). Elles s’associent à une hypokaliémie (ce<br />

qui est inhabituel en présence d’une acidose profonde), à une<br />

hypercalciurie et à une hypocitraturie.<br />

Ces deux derniers éléments rendent compte d’un risque lithiasique<br />

majeur. Ceci peut correspondre :<br />

• à un défaut de la sécrétion d’H+ (pump defect) soit d’origine<br />

génétique, soit secondaire ;<br />

• à une perméabilité anormale de l’épithélium du canal collecteur<br />

aux protons, qui rétrodiffusent dans le capillaire péritubulaire.<br />

Ici la sécrétion d’H + est normale, mais le pH ne peut être maintenu<br />

bas (gradient defect). Cette anomalie est le fait du traitement par<br />

amphotéricine B ;<br />

— les acidoses tubulaires distales de type 4, conséquence d’une<br />

anomalie de l’effet rénal de l’aldostérone, expliquant qu’à l’acidose<br />

métabolique s’associe une hyperkaliémie. L’acidose est ici<br />

en rapport à la fois avec une diminution de la sécrétion distale<br />

d’H + , hormono-dépendante, et avec une inhibition de la synthèse<br />

rénale de NH 3 par l’hyperkaliémie. La diminution de l’activité<br />

minéralocorticoïde peut être en rapport avec :<br />

• un déficit primitif de synthèse d’aldostérone (rénine élevée et<br />

aldostérone basse) ;<br />

• un déficit de synthèse d’aldostérone secondaire (rénine et aldostérone<br />

basses) ;<br />

• une diminution de la sensibilité du canal collecteur à l’aldostérone<br />

(pseudohypoaldostéronisme avec rénine et aldostérone élevées),<br />

par atteinte directe du récepteur minéralocorticoïde (MR),<br />

ou indirectement par atteinte du transport du Na+ (ENaC) nécessaire<br />

à l’activité de l’aldostérone ;<br />

— les acidoses tubulaires distales de type 2, conséquence d’une<br />

anomalie de réabsorption des bicarbonates dans le tube<br />

contourné proximal (Tm bas). Le principal élément évocateur de<br />

ce type d’acidose rénale est son association variable avec une<br />

Tableau 1<br />

Principales causes d’acidoses<br />

tubulaires proximales (AT2)<br />

Maladies systémiques<br />

❚ Myélome à chaînes légères<br />

❚ Hyperparathyroïdie primitive<br />

❚ Maladie de Sjögren (atteinte distale plus fréquente)<br />

Maladies génétiques<br />

❚ Cystinose (AR)<br />

❚ Maladie de Wilson (AR)<br />

❚ Ostéopétrose par mutation du gène ACII (AR)<br />

Toxiques<br />

❚ Chimiothérapie par Ifosfamide<br />

❚ Métaux lourds (Pb, Cu, Hg)<br />

❚ Inhibiteur de l’AC (acétazolamide)<br />

❚ Ténofovir<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

Tableau 2<br />

atteinte d’autres transports proximaux, pouvant réaliser au maximum<br />

un syndrome de Fanconi (diabète phospho-gluco-aminé).<br />

Il s’y associe une tendance à l’hypokaliémie.<br />

Ceci peut correspondre à une atteinte primitive des transports<br />

proximaux d’origine génétique, ou secondaire.<br />

Les principales causes associées aux acidoses tubulaires<br />

rénales sont détaillées dans les tableaux 1, 2 et 3.<br />

Traitement<br />

Principales causes d’acidoses<br />

tubulaires distales (AT1)<br />

Maladies systémiques<br />

❚ Maladie de Sjögren (AT1 ➙ AT2)<br />

❚ Sarcoïdose<br />

❚ Drépanocytose<br />

Maladies génétiques<br />

❚ H + ATPase avec surdité (AR)<br />

❚ Ovalocytose héréditaire (AD)<br />

Toxiques<br />

❚ Amphotéricine B<br />

Néphropathie<br />

❚ Uropathies obstructives<br />

❚ Néphrocalcinose<br />

❚ Autres néphropathies interstitielles<br />

Le traitement est avant tout étiologique lorsqu’il est possible,<br />

ce qui souligne l’importance de la démarche diagnostique présentée<br />

précédemment. Ce peut être, suivant les cas, l’arrêt d’un<br />

traitement médicamenteux (IEC, ARA II, biguanide…), une opothérapie<br />

substitutive (insuline, minéralocorticoïdes), un traitement<br />

ralentisseur du transit ou autre. Un traitement symptomatique<br />

par administration de solutés tampons peut être discuté<br />

au cas par cas, les principaux éléments de discussion étant la nature<br />

de la charge acide, le caractère aigu ou chronique du trouble et<br />

l’importance de l’acidose.<br />

1. Différents solutés tampons<br />

Le principal soluté tampon est le bicarbonate de Na (molaire<br />

84 ‰ semi-molaire 42 ‰ ou isotonique 14 ‰), efficace sur le<br />

pH, mais qui présente plusieurs inconvénients :<br />

— il entraîne une augmentation parallèle du CO2 qui, en diffusant<br />

rapidement dans les cellules, peut provoquer une acidose intracellulaire<br />

paradoxale ;<br />

— il constitue une charge sodée importante ;<br />

— il augmente la glycolyse et, ce faisant, la production de lactate.<br />

Il existe des tampons non bicarbonatés, sans effet sur la pCO2 et donc sans risque d’acidose intracellulaire paradoxale : le THAM<br />

est un tampon aminé dont l’utilisation en réanimation peut être<br />

rendu difficile par un effet vasodilatateur périphérique et déprésseur<br />

respiratoire ; le citrate de potassium est utilisé spécifiquement<br />

dans les acidoses tubulaires distales de type 1.<br />

R Q 219<br />

1369


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

2. Conduite thérapeutique<br />

Au cours de l’acidose aiguë, on réserve le traitement alcalinisant<br />

par HCO 3Na :<br />

— aux pertes nettes de bicarbonates (diarrhées) ;<br />

— aux acidoses sévères (pH < 7,2) ou neurologiquement symptomatiques.<br />

Il n’y a pas d’indication à corriger les acidoses organiques<br />

asymptomatiques (acidose lactique en particulier), compte tenu<br />

des risques volémiques et d’acidose intracellulaire.<br />

L’objectif dans les acidoses sévères est de ramener le pH aux<br />

alentours de 7,3 et la bicarbonatémie aux alentours de 15<br />

mmol/L. La quantité de bicarbonate à administrer pour un tel<br />

objectif peut être calculée suivant la formule suivante : (15 —<br />

[HCO 3 — ]) (0,5 poids en kg). On utilise le bicarbonate isotonique<br />

à 14 ‰, sur 8 heures, en surveillant la tolérance hémodynamique.<br />

En cas de trouble neurologique majeur ou de risque de surcharge<br />

volémique, l’alcalinisation peut être effectuée par épuration<br />

extrarénale au bicarbonate.<br />

1370<br />

I-11-Q219<br />

Tableau 3<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (1 re partie)<br />

Principales causes d’acidoses<br />

tubulaires distales de type 4 (AT1)<br />

Hypoaldostéronisme « primaire » (rénine élevée)<br />

Insuffisance surrénalienne<br />

❚ Tuberculose<br />

❚ Auto-immune<br />

❚ Amylose<br />

❚ Blocs enzymatiques (21OHase, 11OHase, 17OHase)<br />

Toxiques<br />

❚ IEC et ARA II<br />

❚ Héparine<br />

Hypoaldostéronisme secondaire (rénine basse)<br />

Maladies génétiques<br />

❚ Syndrome de Gordon (AD)<br />

Maladies systémiques<br />

❚ HIV<br />

❚ Diabète<br />

Toxiques<br />

❚ Bêtabloquants<br />

❚ AINS et Coxib<br />

❚ Inhibiteurs de la calcineurine<br />

Pseudohypoaldostéronisme (rénine et aldostérone élevées)<br />

Maladies génétiques<br />

❚ PHA de type 1a par mutation inhibitrice de ENaC (AR)<br />

❚ PHA de type 1b par mutation inhibitrice de MR (AD)<br />

Toxiques<br />

❚ Antialdostérone (Aldactone)<br />

❚ Amiloride<br />

❚ Inhibiteurs de la calcineurine<br />

❚ Bactrim<br />

Les acidoses métaboliques chroniques ne correspondent en<br />

réalité qu’à quelques situations cliniques, regroupant pour l’essentiel<br />

les acidoses tubulaires rénales, l’insuffisance rénale chronique<br />

et les entérocystoplasties. Ces acidoses chroniques doivent<br />

être systématiquement corrigées, compte tenu de<br />

l’important risque osseux associé. Dans l’acidose tubulaire hyperkaliémique<br />

(type 4), le traitement étiologique résume souvent la<br />

prise en charge, consistant selon les cas en une substitution minéralocorticoïde<br />

ou en l’arrêt d’un traitement. Dans les acidoses<br />

tubulaires proximales ou distales de type 1, en l’absence de cause<br />

curable, un apport alcalin chronique est nécessaire. L’alcalinisation<br />

peut se faire soit sous forme de gélules de HCO 3Na, de THAM<br />

oral, ou par une eau de boisson bicarbonatée. Dans l’acidose<br />

tubulaire distale de type 1, on utilise spécifiquement le citrate<br />

de K + qui corrige l’hypokaliémie et diminue le risque lithiasique<br />

en augmentant la citraturie.<br />

SAVOIR DIAGNOSTIQUER ET TRAITER<br />

UNE ACIDOSE RESPIRATOIRE<br />

Diagnostic positif biologique<br />

et clinique<br />

Tout déséquilibre entre ventilation alvéolaire et production<br />

de CO 2 entraîne une modification de PaCO 2. L’hypoventilation<br />

alvéolaire peut être définie comme un défaut de renouvellement<br />

des gaz alvéolaires nécessaire au maintien d’une PaCO 2 normale.<br />

L’acidose respiratoire est provoquée par une augmentation de<br />

la PaCO 2 qui diminue le rapport [HCO 3 — ]/PaCO2. En situation<br />

chronique, la compensation rénale est normalement partielle, le<br />

pH restant légèrement inférieur à 7,4.<br />

L’hypoventilation alvéolaire associe hypoxémie et hypercapnie.<br />

Ces 2 anomalies ont des effets vasculaires et neurologiques. Une<br />

vasodilatation cérébrale avec augmentation des pressions intracrâniennes<br />

peut être secondaire à l’hypercapnie et responsable<br />

de céphalées, voire d’un coma. Une hypercapnie aiguë peut<br />

entraîner sueurs, hypertension artérielle, astérixis ou confusion<br />

mentale. Un ralentissement psychomoteur et une somnolence<br />

peuvent accompagner l’hypercapnie chronique.<br />

Étiologie<br />

L’hypoventilation alvéolaire peut survenir en cas de défaillance<br />

de la pompe ventilatoire (commande nerveuse et/ou effecteurs<br />

musculaires) ou en cas d’augmentation des résistances ventilatoires<br />

supérieure aux capacités d’adaptation neuromusculaire.<br />

1. Hypoventilation alvéolaire avec défaillance<br />

de la pompe ventilatoire<br />

Dans ce cas, il n’existe pas d’anomalie initiale des échanges<br />

gazeux pulmonaires. Le gradient alvéolo-artériel en O 2 [P(A-a)O 2]<br />

est normal, témoin de l’efficacité des échanges gazeux. L’histoire<br />

clinique, les examens neurologiques et l’imagerie permettent<br />

d’orienter le diagnostic étiologique (tableau 4).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Tableau 4<br />

2. Hypoventilation alvéolaire avec augmentation<br />

des résistances ventilatoires<br />

En cas d’insuffisance respiratoire d’origine bronchopulmonaire,<br />

les capacités d’adaptation neuromusculaires peuvent être<br />

dépassées. Le gradient alvéolo-artériel en O2 est le plus souvent<br />

augmenté, témoin d‘une anomalie associée des échanges gazeux<br />

(hypoventilation alvéolaire mixte) [tableau 4].<br />

Traitement<br />

Principales causes d’hypoventilation alvéolaire<br />

Défaillance du contrôle ventilatoire<br />

Dysfonction cérébrale<br />

❚ Infection (encéphalite)<br />

❚ Traumatisme<br />

❚ Tumeur<br />

❚ Accident vasculaire avec atteinte bulbaire<br />

❚ Atteinte centrale des pathologies<br />

neurologiques chroniques<br />

❚ Surdosage sédatif ou narcotique<br />

Dysfonction des centres respiratoires<br />

Perte de contrôle<br />

❚ Hypoventilation alvéolaire du syndrome<br />

d’Ondine<br />

❚ Syndrome obésité-hypoventilation<br />

❚ Syndrome d’apnées du sommeil<br />

de type central<br />

❚ Hypothyroïdie<br />

❚ Alcalose métabolique<br />

❚ Drogues déprimant le système nerveux central<br />

(narcotiques, sédatifs…)<br />

❚ Syndrome de Parkinson<br />

❚ Tétanos<br />

❚ BPCO sévère<br />

❚ Emphysème pulmonaire sévère<br />

Le traitement de l’hypoventilation alvéolaire aiguë ou chronique<br />

rejoint les questions 198 et 254. Une détresse respiratoire<br />

aiguë est une urgence nécessitant une démarche de prise en<br />

charge diagnostique et thérapeutique. Le traitement sera évidemment<br />

adapté au diagnostic, mais la réanimation cardio -<br />

circulatoire symptomatique peut précéder le diagnostic suivant<br />

les situations. Dans l’hypoventilation alvéolaire chronique, souvent<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008<br />

HYPOVENTILATION ALVÉOLAIRE NON PULMONAIRE<br />

Lésions des voies afférentes et efférentes :<br />

❚ Cordotomie bilatérale cervicale haute<br />

❚ Traumatisme médullaire cervical<br />

(au-dessus de C5)<br />

❚ Myélite transverse<br />

❚ Sclérose en plaques<br />

❚ Maladie de Parkinson<br />

Dysfonction des récepteurs périphériques<br />

❚ Destruction des corpuscules carotidiens<br />

(endartérectomie carotidienne bilatérale)<br />

❚ Syndrome d’Arnold-Chiari avec syringomyélie<br />

❚ Dysautonomie familiale<br />

❚ Neuropathie diabétique<br />

❚ Tétanos<br />

Défaillance de la pompe ventilatoire<br />

Altération de la fonction neuro-musculaire<br />

Corne antérieure médullaire<br />

❚ Poliomyélite<br />

❚ Sclérose latérale amyotrophique<br />

HYPOVENTILATION ALVÉOLAIRE PULMONAIRE<br />

(associée à une autre cause d’hypoxémie)<br />

❚ Restriction parenchymateuse<br />

(l’hypoventilation alvéolaire ne survient<br />

qu’en cas d’amputation majeure) : résection<br />

chirurgicale, lésions cicatricielles étendues<br />

(tuberculose…)<br />

Nerfs périphériques, polyradiculonévrites :<br />

❚ Atteintes des nerfs phréniques<br />

(compression, envahissement tumoral)<br />

❚ Syndrome de Guillain-Barré<br />

❚ Porphyrie aiguë intermittente<br />

❚ Toxiques<br />

Jonction neuromusculaire<br />

❚ Myasthénie<br />

❚ Intoxication à la toxine botulinique,<br />

aux anticholinestérasiques<br />

Muscles respiratoires (diaphragme)<br />

❚ Myopathies, myosites inflammatoires<br />

❚ Poliomyélite<br />

❚ Hypokaliémie<br />

❚ Hypophosphatémie<br />

❚ Hypermagnésémie<br />

Pathologie de la cage thoracique<br />

❚ Cyphoscoliose, spondylarthrite ankylosante,<br />

thoracoplastie<br />

❚ Fibrose ou calcification pleurale,<br />

épanchement pleural liquidien ou gazeux<br />

❚ Obésité<br />

❚ Pneumopathies inflammatoires<br />

avec myosite diaphragmatique (lupus<br />

systémique, dermatopolymyosite)<br />

bien tolérée, la perte de compensation de l’acidose est un bon<br />

indicateur de décompensation respiratoire. Le traitement est<br />

essentiellement symptomatique et palliatif, à l’inverse de l’hypo -<br />

ventilation alvéolaire aiguë. ■<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Conférence de consensus SFAR :<br />

Correction de l’acidose métabolique en réanimation<br />

Juin 1999<br />

R Q 219<br />

1371


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1372<br />

I-11-Q219<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (1 re partie)<br />

Parmi les items suivants, quels sont ceux<br />

qui sont justes ?<br />

L’élimination de la charge acide d’origine alimentaire<br />

est une fonction du rein.<br />

Au cours de l’insuffisance surrénale, il existe<br />

une acidose hyperchlorémique.<br />

La forme adaptable d’élimination d’H + par le rein<br />

est le NH4 + 1<br />

2<br />

3<br />

.<br />

4 Un pH urinaire normal écarte l’hypothèse<br />

d’une acidose tubulaire.<br />

5 Toutes les acidoses aiguës ne doivent pas être<br />

traitées par alcalinisation.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / QCM B / QCM<br />

Devant les examens suivants :<br />

GDS : pH 7,35 pCO2 35 mmHg PO2 90 mmHg HCO —<br />

3 16 mM<br />

Ionogramme plasmatique : Na + 138 mM Cl — 112mM<br />

Quels sont les items justes ?<br />

1 Il s’agit d’une acidose mixte.<br />

2 L’acidose est compensée.<br />

3 La réponse pulmonaire est celle attendue.<br />

4 Le diagnostic d’acidose lactique peut être écarté.<br />

5 Le diagnostic d’intoxication acide peut être écarté.<br />

Réponses : A : 1, 2, 3, 5 / B : 3, 4.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 42, page 1373<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

1 L’anorexie mentale de type restrictif ne comprend<br />

pas de vomissements.<br />

2 Un des critères de la boulimie nerveuse<br />

est la survenue de crises en moyenne au moins<br />

3 fois par semaine pendant 2 mois.<br />

3 L’anorexie mentale est une pathologie<br />

exclusivement féminine.<br />

4 L’indice de masse corporel correspond au poids<br />

divisé par la taille.<br />

5 Dans la boulimie, l’estime de soi est<br />

influencée de manière excessive par le poids<br />

et la forme corporelle.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 La phosphorémie est à surveiller lors<br />

de la renutrition chez l’anorexique.<br />

2 Une hypokaliémie à 3,5 mmol/L constitue<br />

un des critères de gravité biologique dans les troubles<br />

des conduites alimentaires.<br />

3 Le syndrome de Mallory-Weiss correspond<br />

à une dilatation aiguë de l’œsophage.<br />

4 De 4, 5 à 10 % des adolescentes décèdent des suite<br />

de l’anorexie mentale.<br />

5 Le retard à la prise en charge constitue un facteur<br />

de mauvais pronostic dans l’anorexie mentale.<br />

C / QCM<br />

Une jeune fille de 16 ans se présente aux urgences,<br />

car elle pèse 32 kg pour 1,60 m. En outre, elle vous<br />

indique vomir 2 fois par jour depuis plusieurs<br />

semaines. Ses extrémités sont froides et elle vous<br />

semble peu couverte pour la saison.<br />

1 Vous l’adressez à un pédiatre pour une consultation<br />

en ville.<br />

2 Vous lui prélevez un bilan complet dont une kaliémie.<br />

3 Vous procédez à un examen clinique complet<br />

avec prise des constantes.<br />

4 Vous l’hospitalisez en service de soins intensifs<br />

en urgence.<br />

5 Vous programmez avec elle une hospitalisation<br />

en service psychiatrique spécialisé.<br />

Réponses : A : V, F, F, F, V / B : V, F, F, V, V / C : 2, 3, 4.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 30 JUIN 2008


DYSNATRÉMIE<br />

Rappels physiologiques<br />

La membrane plasmique est une membrane semi-perméable<br />

qui ne laisse diffuser librement ni les électrolytes ni les macromolécules,<br />

mais est perméable à l’eau. Ces solutés non diffusibles<br />

génèrent des mouvements d’eau transmembranaires pour<br />

tenter d’en équilibrer les concentrations. Ce mouvement d’eau<br />

est dit par osmose, et les substances non librement diffusibles<br />

à l’origine de ce mouvement d’eau des osmoles efficaces. Les<br />

solutés qui diffusent librement sont des osmoles inefficaces ;<br />

ils n’ont pas de pouvoir tonique et ne participent pas aux mouve -<br />

ments d’eau.<br />

L’urée diffuse librement dans les cellules, mais de façon lente,<br />

c’est donc une osmole inefficace, même en situation d’hyper -<br />

urémie chronique. Les solutés de perfusion glucosés isotoniques<br />

(G5 %), administrés par voie parentérale, n’entraînent pas de<br />

modification de l’osmolalité. Néanmoins, le glucose administré va<br />

être rapidement métabolisé. Il faut donc considérer au final cet<br />

apport comme uniquement hydrique et non osmotique. Cela<br />

explique à la fois qu’un apport important de G5 % puisse participer<br />

à une hyponatrémie, et qu’il soit utilisé en tant que soluté<br />

hypotonique pour corriger les hypernatrémies.<br />

L’osmolalité plasmatique efficace se définit comme la somme<br />

des concentrations par volume d’eau de chacune des osmoles<br />

efficaces présentes dans le plasma (en mOsmol/kg d’H20), pour<br />

l’essentiel le sodium. Toute modification aiguë de l’osmolalité<br />

plasmatique va entraîner un mouvement d’eau entre les secteurs<br />

intracellulaire (SIC) et extracellulaire (SEC). L’osmolalité plas-<br />

I-11-Q219 I-00-Q000<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique<br />

et désordres hydro-électrolytiques<br />

2 de partie<br />

Dr Martin Flamant, Dr Hiba Azar, Dr Henri Boulanger<br />

Service de physiologie explorations fonctionnelles, CHU Bichat-Claude-Bernard, 75722 Paris Cedex 18, France<br />

martin.flamant@bch.aphp.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

Objectifs<br />

• Prescrire et interpréter un ionogramme sanguin en fonction d’une<br />

situation clinique donnée.<br />

• Savoir diagnostiquer et traiter : une dysnatrémie, une dyskaliémie.<br />

matique et par approximation la natrémie définissent donc indirectement<br />

l’état du secteur intracellulaire. L’hypo-osmolalité plasmatique<br />

s’accompagne d’une expansion du secteur intracellulaire,<br />

par mouvement d’eau du secteur extracellulaire vers le<br />

secteur intracellulaire ; l’hyperosmolalité, d’une contraction de<br />

ce même secteur intracellulaire, par un mouvement en sens<br />

opposé. L’osmolalité ne reflète jamais l’état de réplétion du secteur<br />

extracellulaire, qui dépend de la quantité totale de sodium<br />

présente dans ce secteur. Les modifications de l’osmolalité plasmatique<br />

peuvent ainsi s’accompagner diversement d’une perte<br />

ou d’un gain de sodium, ou d’un bilan nul.<br />

L’osmolalité plasmatique peut être déterminée directement<br />

en mesurant l’abaissement du point de congélation, qui est d’autant<br />

plus bas que la concentration osmolaire est importante. L’osmolalité<br />

peut également être calculée à partir de la concentration<br />

des différentes osmoles présentes dans le plasma :<br />

— osmolalité plasmatique = ([Na] [K]) 2 [urée] [glucose],<br />

[ ] exprimée en osmole par litre d’eau<br />

— osmolalité plasmatique efficace = ([Na] + [K]) 2 + [glucose],<br />

[ ] exprimée en osmole par litre d’eau.<br />

Lorsque le calcul est fait à partir des concentrations exprimées<br />

par litre de plasma, on parle d’osmolarité. Ainsi, l’osmolarité est<br />

une approximation de l’osmolalité, qui est la variable réellement<br />

régulée. Cela est important, car il existe des situations cliniques<br />

particulières au cours desquelles l’osmolalité et l’osmolarité ne<br />

varient pas parallèlement (v. infra Pseudohyponatrémie).<br />

1601


1602<br />

I-11-Q219<br />

Rôle du rein<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

Le maintien de l’osmolalité plasmatique à une valeur normale<br />

est conditionné par l’obtention d’un bilan hydrique nul (sorties<br />

et entrées d’eau équivalentes). Les sorties comme les entrées<br />

d’eau peuvent être modulées, en réponse aux variations d’osmolalité.<br />

Les osmorécepteurs hypothalamiques perçoivent les<br />

variations d’osmolalité, entraînant une variation dans le même<br />

sens de la libération par la post-hypophyse de l’hormone antidiurétique<br />

(ADH) et une modulation de la sensation de soif.<br />

L’ADH est un peptide de 9 acides aminés synthétisé par les<br />

noyaux supraoptiques et paraventriculaires hypothalamiques.<br />

La fixation de l’ADH à ses récepteurs situés sur la membrane basolatérale<br />

du canal collecteur rénal (CC) conduit à une augmen -<br />

tation de la perméabilité de ce segment à l’eau et, compte tenu de<br />

l’existence d’une concentration osmolaire interstitielle importante<br />

à ce niveau, d’une réabsorption massive d’eau. La modulation de<br />

Figure 1<br />

normale ( 600 mOsmol/j)<br />

➤ Buveur de bière<br />

➤ Potomanie<br />

Hyponatrémie hypo-osmotique<br />

basse ( 100 mOsmol/L)<br />

Déséquilibre des apports hydro-osmotiques<br />

Déshydratation<br />

extracellulaire<br />

élevée ( 20 mM)<br />

Osmo U des 24 heures<br />

➤ Insuffisance surrénale<br />

➤ Diurétiques (thiazidiques)<br />

➤ Néphropathies avec perte de sel<br />

➤ Diurèse osmotique<br />

➤ Cerebral Salt Wasting Syndrome<br />

basse<br />

➤ Syndrome “tea and toast”<br />

➤ Apports osmolaires faibles<br />

SIADH<br />

(v. tableau 1)<br />

[Na U]<br />

Osmo U<br />

la sécrétion d’ADH permet de fixer l’osmolarité urinaire à une valeur<br />

permettant d’assurer un bilan nul à la fois d’eau et d’osmoles. L’osmolarité<br />

urinaire peut ainsi physiologiquement varier de 60 mOsmol/L<br />

(dilution maximale obtenue lorsque la concentration d’ADH<br />

est nulle) à 1 200 mOsmol/L (concentration maximale obtenue<br />

lorsque la concentration d’ADH est élevée).<br />

L’entrée d’eau (boissons), bien que sous le contrôle des centres<br />

de la soif, reste un acte volontaire, discontinu, et également modulé<br />

par d’autres facteurs, sociaux en particulier (on peut boire une<br />

bière à la terrasse d’un café sans avoir soif…). En outre, si l’hyper -<br />

osmolalité s’accompagne rapidement d’une sensation de soif<br />

intense, le dégoût de l’eau (qui serait la sensation opposée) en<br />

situation d’hypo-osmolalité est variable et peu sensible. La régulation<br />

physiologique fine de l’osmolalité se fait donc avant tout<br />

par adaptation des sorties aux entrées d’eau, et c’est donc le rein<br />

qui est, au final, l’organe régulateur.<br />

élevée<br />

➤ Insuffisance<br />

rénale chronique<br />

Hyperhydratation<br />

extracellulaire<br />

basse ( 20 mM)<br />

➤ Perte extrarénale<br />

élevée ( 100 mOsmol/L)<br />

Créatininémie<br />

Démarche diagnostique mécanistique et étiologique de l’hyponatrémie hypo-osmotique.<br />

➤ Thiazidique<br />

➤ Âge<br />

normale<br />

Volume<br />

extracellulaire<br />

➤ Cirrhose<br />

➤ Syndrome<br />

néphrotique<br />

➤ Insuffisance<br />

cardiaque<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


Diagnostic et traitement<br />

d’une hyponatrémie<br />

1. Diagnostic positif biologique et clinique<br />

La natrémie n’est pas une variable régulée, seule l’osmolalité<br />

l’est. Une variation de la natrémie n’a de retentissement clinique<br />

ou métabolique que si elle traduit une variation parallèle (ou plus<br />

rarement antiparallèle) de l’osmolalité. Une hyponatrémie vraie<br />

est définie par une natrémie inférieure ou égale à 135 mmol/L et<br />

une hypo-osmolalité (OsmoP 280 mOsmol/kg d’H20). On parle<br />

d’hyponatrémie hypo-osmolaire.<br />

La baisse de la natrémie peut s’accompagner d’une osmolalité<br />

normale ou élevée, dans deux situations :<br />

— l’ajout dans le plasma d’une osmole différente du Na + , auquel<br />

cas l’hyponatrémie est « paradoxalement » associée à une hyperosmolarité<br />

(réabsorption du glycocolle présent dans les solutés de<br />

lavage utilisés au cours des résections transuréthrales de prostate,<br />

perfusion de mannitol),<br />

— une diminution de la fraction hydrique du plasma, en particulier<br />

en cas d’hyperprotidémie, d’hypertriglycéridémie ou d’hyperglycémie.<br />

Ici, la natrémie (en mmol/L) et l’osmolarité (en mOsmol/L) sont basses<br />

mais l’osmolalité (en mOsmol/kg d’H20). On parle alors de pseudohyponatrémie.<br />

Cette erreur n’existe pas avec le dosage de la natrémie<br />

partechnique potentiométrique, qui est désormais la plus répandue.<br />

En cas de dosage par technique photométrique, on peut également<br />

corriger la natrémie pour prendre en compte ces solutés<br />

en excès, selon la formule :<br />

[Na]corr = [Na]mes 0,025 protidémie (en g/L) 0,2 trigly -<br />

céridémie (en g/L).<br />

En dehors de ces situations particulières, l’hyponatrémie est donc<br />

hypo-osmotique, et les signes cliniques sont ceux de l’augmentation<br />

du volume cérébral par excès d’eau intracellulaire. Ils varient en<br />

fonction de l’importance de l’hyponatrémie, mais surtout de la<br />

vitesse d’installation et de l’ancienneté du trouble. Au cours de<br />

l’hyponatrémie chronique, il existe une adaptation cellulaire par<br />

extrusion cellulaire d’osmolytes organiques, permettant de limiter<br />

l’augmentation du volume cellulaire malgré l’hypo-osmolarité.<br />

Les signes cliniques de l’hyponatrémie aiguë sont :<br />

— nausées, vomissements ;<br />

— dégoût de l’eau ;<br />

— céphalées ;<br />

— troubles de la conscience allant du coma vigile au coma profond<br />

avec comitialité.<br />

De façon générale, il faut considérer comme potentiellement<br />

grave toute hyponatrémie inférieure à 120 mmol/L, ce d’autant<br />

qu’elle est d’installation rapide, avec une morbi-mortalité supérieure<br />

chez la femme jeune.<br />

2. Diagnostic mécanistique et étiologique (fig. 1)<br />

L’hyponatrémie aiguë est dans la grande majorité des cas en<br />

rapport avec une incapacité du rein à éliminer la charge hydrique<br />

pour une charge osmolaire donnée (hyponatrémie de dilution).<br />

L’incapacité à éliminer la charge hydrique peut correspondre à<br />

plusieurs situations distinctes (fig. 2).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

Normal<br />

Situation A<br />

➲ Pouvoir<br />

de dilution<br />

conservé<br />

➲ Apports<br />

hydroosmotiques<br />

déséquilibrés<br />

Situation B<br />

➲ Altération<br />

du pouvoir<br />

de dilution<br />

0<br />

60<br />

200 450<br />

2<br />

0 300<br />

1200<br />

0 60<br />

1200<br />

50<br />

t3<br />

t<br />

200<br />

t<br />

450<br />

t<br />

1200<br />

Osmo U<br />

Osmo U<br />

Osmo U<br />

Figure 2 Valeurs d’osmolarité urinaire attendue lors de variations des<br />

apports hydriques (AH) et osmolaires (AO), à partir de 3 exemples :<br />

1 / AO 600 mOsmol/j AH 1,5L/j<br />

2 / AO 600 mOsmol/j AH 3L/j<br />

3 / AO 600 mOsmol/j AH 12L/j (potomanie)<br />

et conséquences respectives sur le bilan de l’eau en fonction de<br />

situations pathologiques. La flèche indique la valeur attendue<br />

d’OsmoU. Une flèche rouge indique l’impossibilité d’obtenir cette<br />

valeur d’OsmoU (entraînant une hyponatrémie de dilution). Une<br />

flèche verte indique qu’un bilan hydrique nul peut être obtenu.<br />

✓ Situation A : un apport hydro-osmolaire déséquilibré (apports<br />

hydriques élevés et/ou apports osmolaires faibles) pour lequel<br />

l’osmolarité urinaire théorique nécessaire pour obtenir un bilan<br />

hydro-osmolaire nul est inférieure au pouvoir de dilution maximal<br />

du rein (60 mOsmol/kg d’H20) : potomanie (apports hydriques<br />

excessifs et apports osmolaires normaux), syndrome « tea and<br />

toast » (apports osmolaires très faibles et apports hydriques<br />

conservés, situation fréquente chez les personnes âgées). Ici,<br />

l’osmolarité urinaire et l’ADH sont basses, et il n’y a pas d’insuffisance<br />

rénale.<br />

✓ Situation B : une capacité maximale de dilution du rein altérée<br />

avec une sécrétion d’ADH variable :<br />

➙ situation B1 : la sécrétion d’ADH est abaissée de façon adaptée<br />

au cours de l’insuffisance rénale chronique avancée avec, au<br />

maximum, une osmolarité urinaire minimale fixée à la valeur de<br />

l’ultrafiltrat plasmatique (soit environ 300 mOsmol/L) ou par<br />

altération des fonctions tubulaires de dilution sans insuffisance<br />

rénale, en particulier au cours du traitement diurétique thiazidique<br />

ou au cours du vieillissement rénal ;<br />

➙ situation B2 : la sécrétion d’ADH est élevée de façon inadaptée<br />

à l’hypo-osmolarité. On distingue alors 3 situations :<br />

— la sécrétion d’ADH répond à un stimulus volémique par hypovolémie<br />

vraie. Ainsi, toute situation de déshydratation extra -<br />

cellulaire expose au risque d’hyponatrémie de dilution (que les<br />

pertes sodées soient rénales ou extra-rénales). La mesure de la<br />

natriurèse permet d’orienter vers l’origine rénale ou extrarénale<br />

de la perte sodée ;<br />

t<br />

2 1<br />

1<br />

2 1<br />

R Q 219<br />

1603


1604<br />

I-11-Q219<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

— la sécrétion d’ADH répond à un stimulus volémique par hypovolémie<br />

efficace, au cours du syndrome néphrotique, de la cirrhose<br />

ou de l’insuffisance cardiaque droite ;<br />

— la sécrétion d’ADH ne répond pas à un stimulus volémique. Elle<br />

est inappropriée à l’osmolarité et à la volémie. On parle alors de<br />

sécrétion inappropriée d’ADH.<br />

Le SIADH se définit donc comme une hyponatrémie hypoosmotique<br />

avec osmolarité urinaire non abaissée et volume extracellulaire<br />

normal. En outre, il est retenu comme critère supplémentaire<br />

l’absence d’argument pour une insuffisance surrénale<br />

ou thyroïdienne (qui peut stimuler la sécrétion d’ADH de façon<br />

indépendante de la natrémie ou de la volémie). L’existence d’une<br />

sécrétion persistante et inadaptée d’ADH, bien qu’évoquée par<br />

le nom du syndrome, n’est pas obligatoire. Le SIADH s’accompagne<br />

souvent d’une hypo-uricémie. Cet élément biologique est d’autant<br />

plus discriminant que les hyponatrémies associées à une contraction<br />

volémique s’accompagnent souvent d’une élévation de l’uricémie.<br />

Les principales causes de SIADH sont résumées dans le tableau 1.<br />

Dans tous les cas, l’hyponatrémie n’apparaît que si la charge<br />

hydrique dépasse les capacités d’élimination d’eau par le rein.<br />

Cette capacité d’élimination de l’eau est d’autant plus importante<br />

que la charge osmolaire est elle-même importante. Il y a ici deux<br />

notions physiopathologiques majeures permettant de comprendre<br />

l’hyponatrémie de dilution : 1/ le bilan du sodium et le bilan de<br />

l’eau sont dissociés mais interdépendants, puisque la capacité<br />

d’élimination d’eau libre varie avec la charge osmolaire, 2/ hormis<br />

pour la situation A, les autres situations ne sont que des prédispositions<br />

à l’hyponatrémie, par modification du seuil minimal<br />

de dilution, et l’hyponatrémie a d’autant plus de chances d’apparaître<br />

que les apports osmolaires sont faibles et/ou que les<br />

apports hydriques sont élevés.<br />

Au total, la démarche diagnostique mécanistique et étiologique<br />

d’une hyponatrémie hypo-osmotique nécessite de préciser<br />

les éléments suivants :<br />

— apports hydriques et osmolaires (sel) (en milieu hospitalier, cela<br />

comprend l’étude du volume et la composition des solutions<br />

perfusées) ;<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

En revanche, ces troubles métaboliques<br />

peuvent apparaître :<br />

soit comme élément d’orientation<br />

diagnostique dans la partie initiale d’un<br />

dossier :<br />

➙ HTA avec alcalose hypokaliémique<br />

(dossier de sténose de l’artère rénale),<br />

Tableau 1<br />

Les troubles métaboliques présentés ici ne sont le plus souvent qu’une partie<br />

d’un tableau biologique et clinique large. Une question entièrement<br />

consacrée à une dysnatrémie ou une dyskaliémie semble peu probable.<br />

➙ hyperkaliémie comme élément d’orientation<br />

diagnostique d’une insuffisance surrénale<br />

(sevrage stéroïde par exemple) ;<br />

soit en question isolée comme<br />

complication d’une pathologie systémique,<br />

avec pour objet une question sur le<br />

mécanisme en cause :<br />

Principales causes de SIADH<br />

Affections pulmonaires<br />

❚ Tuberculose<br />

❚ Légionellose<br />

❚ Pneumocystose<br />

❚ Autre infection pulmonaire<br />

Affections néoplasiques<br />

❚ Cancer bronchique (petites cellules +++)<br />

❚ Adénocarcinome gastrique, pancréatique, prostatique<br />

❚ Cancer de vessie et ORL<br />

Affections du système nerveux<br />

❚ Tumeurs cérébrales<br />

❚ Abcès et méningoencéphalites<br />

❚ Accidents vasculaires cérébraux<br />

❚ Sclérose en plaques<br />

❚ Polyradiculonévrite (Guillain-Barré)<br />

Médicaments et toxiques<br />

❚ Antidépresseurs (fluoxétine +++ tricycliques)<br />

❚ Neuroleptiques (halopéridol, chlorpropamide)<br />

❚ Opiacés, ecstasy, barbituriques<br />

❚ Analogues de l’ADH (desmopressine, vasopressine ocytociques)<br />

❚ Antinéoplasiques (cyclophosphamide, vincristine, cisplatine, ifosfamide)<br />

❚ Autres (AINS, amiodarone, clofibrate, ciprofloxacine…)<br />

Autres<br />

❚ VIH<br />

❚ Syndrome d’activation macrophagique<br />

— prise de médicaments (diurétiques et médicaments pourvoyeurs<br />

de SIADH en particulier) ;<br />

— antécédents néoplasique, endocrinien ou néphrologique ;<br />

— biologie du plasma : créatininémie, uricémie, kaliémie, protidémie ;<br />

— biologie des urines : osmolalité sur échantillon et osmolalité des<br />

24 heures, Na, K, urée, débit urinaire.<br />

– diagnostic de SIADH devant une hyponatrémie<br />

(dossier de cancer bronchique),<br />

– discussion diabète insipide central ou<br />

néphrogénique devant une hypernatrémie<br />

au cours d’une sarcoïdose,<br />

soit de façon indirecte comme<br />

trouble métabolique à prendre en charge<br />

(question traitement) :<br />

– traitement de l’hyperkaliémie dans une<br />

question sur l’insuffisance rénale aiguë ou<br />

chronique. ●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


3. Prise en charge thérapeutique<br />

La prise en charge thérapeutique de l’hyponatrémie n’est pas<br />

forcément simple.<br />

Dans les situations d’hyponatrémie chronique où l’adaptation<br />

cellulaire cérébrale a permis la normalisation du volume cellulaire,<br />

au prix de la diminution de la quantité d’osmoles organiques,<br />

la correction trop rapide de l’hypo-osmolarité peut entraîner<br />

paradoxalement une sortie d’eau des cellules à l’origine de lésions<br />

du tronc cérébral par déshydratation (myélinolyse). Dans cette<br />

perspective, il est important de définir le caractère aigu ou chronique<br />

de l’hyponatrémie. Plus que la notion absolue de temps<br />

(supérieur ou inférieur à 48 heures), c’est le caractère symptomatique<br />

qui est discriminant.<br />

✓ Une hyponatrémie symptomatique traduit l’œdème cérébral et<br />

donc l’absence d’adaptation cérébrale. Elle nécessite une prise<br />

en charge active et rapide, en ne dépassant pas malgré tout une<br />

augmentation de la natrémie de 8 mmol les premières 24 heures.<br />

La correction peut se faire soit par hémodialyse, soit par administration<br />

intraveineuse de soluté hypertonique (NaCl à 30 ‰).<br />

On peut y associer des diurétiques de l’anse (furosémide), qui<br />

vont induire une diurèse hypotonique.<br />

✓ Une hyponatrémie chronique doit être corrigée lentement, et les<br />

moyens employés sont fonction du mécanisme de l’hyponatrémie :<br />

— en cas d’hyponatrémie avec déshydratation extracellulaire<br />

(DEC) associée, le traitement est avant tout celui de la DEC, par<br />

administration de sérum salé isotonique (NaCl 9 ‰). La normalisation<br />

de la volémie, en permettant la freination de l’ADH,<br />

va restaurer la capacité de dilution du rein, qui va être en mesure<br />

d’éliminer la charge hydrique en excès par lui-même ;<br />

— en cas d’hyponatrémie avec hyperhydratation extracellulaire<br />

(HEC), le traitement repose sur une restriction hydrique et sodée,<br />

associée aux diurétiques de l’anse, même si les conditions hémodynamiques<br />

rendent parfois difficile leur utilisation, notamment<br />

au cours de la cirrhose ou de l’insuffisance cardiaque ;<br />

— au cours des SIADH, le traitement repose essentiellement sur<br />

la restriction hydrique et le traitement étiologique si possible<br />

(arrêt d’un traitement, traitement d’une infection, tumorectomie).<br />

Dans les SIADH sévères, pour lesquels l’osmolarité urinaire<br />

est très élevée, on peut y associer un traitement par diurétique<br />

de l’anse qui va diminuer la sensibilité à l’ADH, ou un traitement<br />

par déméclocycline, qui induit un diabète insipide néphrogénique.<br />

Le calcul de la perte nette d’eau nécessaire à la correction<br />

théorique de la natrémie, parfois proposé, n’a pas d’intérêt évident<br />

dans l’hyponatrémie. En effet, le principe général de la<br />

correction de l’hyponatrémie de dilution est de permettre au<br />

rein d’assurer un bilan hydrique nul, soit en restaurant une capacité<br />

maximale de dilution normale (par exemple en corrigeant<br />

une hypovolémie ou en arrêtant un diurétique thiazidique), soit<br />

en modulant les apports hydro-osmotiques pour que l’osmo -<br />

larité urinaire nécessaire au bilan hydrique nul soit placée dans<br />

l’intervalle résiduel de concentration-dilution du rein (par exemple<br />

par une restriction hydrique et/ou une augmentation des<br />

apports osmolaires). C’est donc le rein qui au final va éliminer<br />

l’excès d’eau.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

En dehors des pseudo-hyponatrémies, l’hyponatrémie<br />

traduit l’existence d’une hypoosmolalité et donc d’une<br />

hyperhydratation intracellulaire.<br />

Les hyponatrémies aiguës sont presque toujours<br />

de dilution, par incapacité à assurer un bilan nul d’eau.<br />

Devant une hyponatrémie hypo-osmotique, les deux<br />

principaux éléments d’orientation diagnostique sont<br />

l’osmolarité urinaire et l’état du volume extracellulaire.<br />

L’hyponatrémie est le plus souvent multifactorielle, associant<br />

déséquilibre des apports hydro-osmotiques et trouble des<br />

fonctions de dilution, lui-même d’origine multiple.<br />

Un trouble des fonctions de concentration ne se complique<br />

d’hypernatrémie que si coexiste une atteinte des centres<br />

de la soif ou un non-accès à l’eau.<br />

Les fausses hyperkaliémies sont fréquentes,<br />

justifiant de contrôler toute hyperkaliémie inexpliquée<br />

par un prélèvement sans garrot.<br />

L’hypokaliémie est un trouble métabolique fréquent<br />

et rarement isolé, et est un élément d’orientation<br />

étiologique important.<br />

La correction d’une hypokaliémie par perte rénale<br />

de K + est impossible en cas de persistance d’une<br />

hypomagnésémie associée.<br />

La prise en charge thérapeutique de ces troubles<br />

métaboliques est avant tout d’ordre étiologique, d’où<br />

l’importance de la démarche diagnostique étiologique.<br />

Savoir diagnostiquer et traiter<br />

une hypernatrémie<br />

1. Diagnostic positif biologique et clinique<br />

L’hypernatrémie est définie par une natrémie supérieure à<br />

145 mmol/L.<br />

L’hypernatrémie est toujours hyperosmotique.<br />

L’hypernatrémie est une anomalie biologique rare, à la différence<br />

de l’hyponatrémie, et ne se voit que lorsqu’il coexiste une<br />

atteinte des centres de la soif, ou qu’il n’y a pas d’accès à l’eau<br />

(nourrisson, vieillard, coma naturel ou artificiel, apports parentéraux<br />

hypertoniques imposés, désert).<br />

Les symptômes associés à l’hypernatrémie sont d’origine<br />

neurologique avant tout : agitation, troubles de la conscience<br />

allant de la confusion au coma, mais sans risque comitial compte<br />

tenu de la déshydratation cellulaire. La sensation d’une soif intense<br />

est limitée aux personnes n’ayant pas accès à l’eau libre ; dans les<br />

autres cas, c’est parce que la sensation de soif a disparu (atteinte<br />

des centres de la soif) qu’il a pu se développer une hypernatrémie.<br />

Les autres symptômes sont fonction du mécanisme ou de la<br />

cause de l’hypernatrémie.<br />

R Q 219<br />

1605


1606<br />

I-11-Q219<br />

2. Diagnostic mécaniciste et étiologique<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

L’hypernatrémie est la conséquence d’un bilan hydrique négatif,<br />

correspondant schématiquement à trois situations, en fonction<br />

du bilan sodé associé : une perte d’eau pure, qui est l’apanage<br />

d’une anomalie primitive ou secondaire des fonctions tubulaires<br />

rénales de concentration (diabètes insipides), une perte hydrosodée<br />

hypotonique ou un apport hydrosodé hypertonique.<br />

✓ Perte d’eau pure : au cours du diabète insipide, il existe une<br />

anomalie des capacités de concentration des urines (abaissement<br />

du pouvoir maximal de concentration). Ce diagnostic est<br />

évoqué par l’association d’une polyurie et d’une osmolarité<br />

urinaire basse, et peut correspondre :<br />

— à un déficit de sécrétion de l’ADH (diabète insipide central :<br />

DIC), dont les causes sont résumées dans le tableau 2 ;<br />

— à une insensibilité du rein à l’ADH (diabète insipide néphrogénique<br />

: DIN) qui peut être en rapport avec un déficit constitutionnel<br />

héréditaire en récepteur V2 (lié à l’X) ou en aquaporine 2 (autosomal<br />

récessif) ; avec un déficit fonctionnel d’expression des<br />

récepteurs V2 à la membrane (hypercalcémie, hypokaliémie,<br />

toxicité du lithium) ; plus ou moins associé à une anomalie de l’établissement<br />

du gradient cortico-papillaire (insuffisance rénale<br />

chronique, néphropathies interstitielles, diurèse osmotique).<br />

La réponse rénale à l’injection exogène de ddAVP (Minirin)<br />

permet formellement de différencier une origine centrale (augmentation<br />

de l’OsmoU) d’une origine néphrogénique (l’OsmoU<br />

reste basse).<br />

✓ Pertes hydrosodées hypotoniques : elles peuvent être digestives<br />

(laxatifs osmotiques tel le lactulose), cutanées (brûlures étendues),<br />

ou rénales (diurèse osmotique induite par le mannitol ou le glucose,<br />

syndrome de levée d’obstacle, diurétiques de l’anse). Il faut noter<br />

ici que les pertes rénales hypotoniques sont en réalité au moins<br />

en partie associées à une insensibilité à l’ADH par disparition du<br />

gradient cortico-papillaire (diurétique de l’anse, diurèse osmotique),<br />

et le mécanisme de l’hypernatrémie est en conséquence mixte.<br />

✓ Apports hypertoniques : cela correspond le plus souvent à des<br />

situations accidentelles (perfusion hypertonique) ou extraphysiologiques<br />

(ingestion d’eau de mer). On y associe les apports<br />

hydriques très faibles et prolongés (traversée du désert). Il n’y a<br />

pas dans cette situation d’anomalie du pouvoir maximal de<br />

concentration, mais le déséquilibre hydro-osmotique est trop<br />

important pour assurer un bilan hydrique et osmotique nul (miroir<br />

de la potomanie).<br />

De façon similaire mais opposée à la problématique exposée<br />

pour l’hypo-osmolarité, ces situations ne conduisent à une hypernatrémie<br />

que si l’osmolarité urinaire nécessaire pour assurer un<br />

bilan hydrique et osmotique nul est au-delà de la capacité maximale<br />

de concentration du rein, que celle-ci soit normale ou abaissée.<br />

3. Prise en charge thérapeutique<br />

La distinction entre caractère aigu ou chronique de l’hypernatrémie<br />

est important.<br />

En situation chronique, la formation de novo d’osmoles inorganiques<br />

intracellulaires prévient la déshydratation intracellulaire.<br />

Une correction trop rapide de l’hypernatrémie expose en<br />

Tableau 2<br />

Principales causes de diabète<br />

insipide central<br />

Traumatique<br />

❚ Traumatisme crânien<br />

❚ Séquelle de chirurgie hypophysaire ou suprahypophysaire<br />

Tumorale<br />

❚ Adénome hypophysaire à extension suprasellaire<br />

❚ Méningiome<br />

❚ Craniopharyngiome<br />

❚ Pinéalome<br />

❚ Métastase (cancer du sein)<br />

Infiltration granulomateuse<br />

❚ Sarcoïdose<br />

❚ Histiocytose X<br />

Héréditaire<br />

❚ Forme autosomale dominante la plus fréquente<br />

❚ Syndrome de Wolfram (surdité et atrophie optique)<br />

autosomique récessif<br />

Autre<br />

❚ Séquelles de méningite ou d’encéphalite<br />

❚ Anévrisme<br />

Idiopathique<br />

❚ 50 % des cas<br />

conséquence à un risque d’œdème cérébral par déséquilibre<br />

osmotique avec le secteur extracellulaire. A contrario, l’hypernatrémie<br />

aiguë peut et doit être corrigée rapidement.<br />

✓ En cas d’hypernatrémie par perte d’eau pure, il faut corriger le<br />

déficit en eau par apport d’eau libre, sous forme de glucosé à 5 %<br />

seul, et si possible rendre au rein la capacité de concentrer les<br />

urines, soit en corrigeant une cause non organique de DIN, soit,<br />

en cas de DIC, par l’apport exogène de Minirin (forme nasale ou<br />

orale encapsulée).<br />

La quantité d’eau théorique à administrer pour corriger une<br />

hypernatrémie aiguë peut se calculer de la manière suivante<br />

(pour un objectif de natrémie de 140 mM) : quantité d’eau =<br />

(natrémie – 140)/140 0,6 poids corporel (kg).<br />

✓ En cas d’hypernatrémie aiguë par apport hypertonique, le traitement<br />

passe par l’association de diurétiques et d’apports hypotoniques<br />

(glucosé à 5 %). Les diurétiques de l’anse permettent<br />

une natriurèse et une aquarèse adaptées à la rétention d’eau et<br />

de sodium, mais le caractère hypotonique de la diurèse sous furosémide<br />

(environ 70 mmol/L) justifie qu’un apport hypotonique<br />

important y soit associé.<br />

✓ En cas d’hypernatrémie aiguë par perte hypotonique, le traitement<br />

est à la fois étiologique (arrêt d’un médicament, traitement<br />

d’une diarrhée) et symptomatique par apport de soluté hypotonique<br />

(NaCl 4,5 ‰).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


DYSKALIÉMIE<br />

Rappels physiologiques<br />

Le potassium est l’osmole cationique majoritaire du milieu intracellulaire<br />

(100 à 150 mmol/L), ce qui lui confère un rôle important<br />

dans le maintien du volume intracellulaire. Sa concentration dans<br />

le liquide extracellulaire est en revanche très faible (3,5 à 5 mmol/L).<br />

La différence de concentration, de part et d’autre de la membrane,<br />

est maintenue par une entrée cellulaire active de K + via la Na/K<br />

ATPase. Le rapport des concentrations intra- et extracellulaire<br />

de potassium est essentiel au maintien du potentiel de membrane<br />

de repos de la cellule. La concentration intracellulaire de potassium<br />

est faiblement modifiable en raison de sa forte concentration.<br />

C’est donc la valeur de la kaliémie qui conditionne le potentiel de<br />

repos et, par voie de conséquence, l’état d’excitabilité des cellules<br />

cardiaques et la transmission neuromusculaire.<br />

Les apports alimentaires quotidiens de potassium varient<br />

entre 50 et 150 mmol, soit environ 2 à 6 g. L’excrétion extrarénale<br />

de potassium (pertes fécales obligatoires et pertes sudorales)<br />

est faible (10 %) et non modulable. L’excrétion rénale est<br />

majoritaire (90 %) et modulable. C’est en conséquence le rein<br />

qui assure l’homéostasie potassique en adaptant les sorties aux<br />

entrées. L’élimination rénale du potassium est cependant lente<br />

et retardée. Les variations aiguës post-prandiales de kaliémie<br />

sont évitées par un transfert du potassium dans les cellules, qui<br />

jouent ainsi transitoirement un rôle tampon. Ce transfert est favorisé<br />

par l’hyperinsulinémie et l’alcalose post-prandiale.<br />

Rôle du rein<br />

Le potassium est filtré par le glomérule puis majoritairement<br />

réabsorbé par voie paracellulaire dans le tube contourné proximal<br />

avec la réabsorption d’eau et de sodium (65 %), et dans la<br />

branche large ascendante de l’anse de Henle (30 %) par voie<br />

transcellulaire (cotransport Na + /K + /2Cl — ) et paracellulaire. À l’arrivée<br />

dans les parties distales du néphron, 95 % de la charge filtrée<br />

a été réabsorbée, et la quantité délivrée au canal collecteur<br />

(CC) est le plus souvent inférieure à la charge à excréter. Il y a<br />

donc dans ce segment tubulaire une sécrétion nette de K + qui<br />

s’effectue par un transport vectoriel utilisant une Na/K ATPase<br />

basolatérale et un canal potassique apical. Cette sécrétion est<br />

soumise à régulation pour permettre l’homéostasie potassique.<br />

Les facteurs qui la stimulent sont l’augmentation du Na + et du<br />

débit urinaire délivrés dans le tube distal, l’aldostérone, la présence<br />

de bicarbonates ou d’un anion différent du chlore (anion<br />

non réabsorbable) dans les urines. L’aldostérone est une hormone<br />

stéroïde synthétisée par la corticosurrénale. Elle est principalement<br />

sous la dépendance de la kaliémie, dont la baisse<br />

freine sa synthèse et l’augmentation la stimule (rétrocontrôle<br />

négatif), et de la rénine, une hormone d’origine rénale sensible<br />

aux variations de volémie (stimulée par l’hypovolémie). La sécrétion<br />

de K + dans la lumière tubulaire peut être évaluée par le calcul<br />

du gradient transtubulaire rénal de potassium (GTTK =<br />

(OsmoP/OsmoU). ([K + ]U/[K + ]P).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

Savoir diagnostiquer et traiter<br />

une hypokaliémie<br />

1. Diagnostic positif biologique et clinique<br />

L’hypokaliémie se définit par une valeur inférieure à 3,5 mmol/L.<br />

Une pseudo-hypokaliémie peut survenir au cours des leucémies,<br />

par captation cellulaire de K + secondaire à la prolifération cellulaire<br />

dans le tube de prélèvement. Les signes cliniques d’hypokaliémie<br />

sont les suivants :<br />

✓ Muscle cardiaque :anomalies à l’électrocardio gramme avec sousdécalage<br />

de ST, diminution puis négativation de l’amplitude de<br />

l’onde T, apparition d’une onde U et pseudo- allongement de QT. Hyperexcitabilité<br />

avec tachycardie sinusale, extrasystolie supra-ventriculaire<br />

ou ventriculaire, fibrillation auriculaire, extrasystole ventriculaire,<br />

pouvant aller jusqu’à la tachycardie ventriculaire, la torsade<br />

de pointe et la fibrillation ventriculaire (arrêt cardiocirculatoire).<br />

✓ Muscle squelettique : faiblesse musculaire (atteinte neuromusculaire)<br />

pouvant au maximum se manifester par une paralysie<br />

flasque avec aréflexie touchant les membres inférieurs, mais également<br />

les muscles du tronc et respiratoires. Les troubles sont uniquement<br />

moteurs. Les troubles sensitifs et les crampes sont à<br />

rattacher aux anomalies métaboliques associées (alcalose métabolique,<br />

hypocalcémie).<br />

✓ Vaisseaux : baisse des chiffres de pression artérielle, hypotension<br />

orthostatique.<br />

✓ Muscle lisses : ralentissement du transit intestinal (constipation),<br />

iléus paralytique, parésie vésicale.<br />

✓ Troubles métaboliques : dysglycémie par diminution de la<br />

sécrétion d’insuline.<br />

✓ Atteinte rénale : polyurie secondaire à un diabète insipide<br />

néphrogénique par insensibilité à l’ADH (v.hypernatrémie), alcalose<br />

métabolique par augmentation de la réabsorption proximale des<br />

bicarbonates, rétention hydrosodée parfois responsable d’œdèmes,<br />

protéinurie de type tubulaire, néphropathie interstitielle.<br />

2. Diagnostic mécaniciste et étiologique (fig. 3)<br />

Le premier élément d’orientation diagnostique au cours d’une<br />

hypokaliémie est l’évaluation de la sécrétion rénale de K + . Une<br />

diminution de la sécrétion de K + (kaliurèse 20 mmol/j et/ou<br />

GTTK 2) traduit une réponse rénale adaptée et donc une cause<br />

extrarénale. Une sécrétion élevée de K + (kaliurèse 40 mmol/j<br />

et/ou un GTTK 8) traduit une réponse rénale inadaptée et par<br />

là même une origine rénale.<br />

L’hypokaliémie d’origine extrarénale répond schématiquement<br />

à trois mécanismes : une carence d’apport, une redistribution<br />

interne du pool potassique par transfert intracellulaire, une perte<br />

extrarénale de K + .<br />

✓ Carence d’apport : le rein est capable d’abaisser l’excrétion<br />

potassique jusqu’à 5 mmol/j. Une carence d’apport au cours d’un<br />

jeûne prolongé (anorexie) est donc rarement responsable d’une<br />

hypokaliémie, sauf si le jeûne est spécifiquement dépourvu de<br />

potassium.<br />

En dehors de cette situation, une autre cause associée doit être<br />

recherchée, comme par exemple l’existence de vomissements<br />

provoqués en cas d’anorexie.<br />

R Q 219<br />

1607


1608<br />

I-11-Q219<br />

Figure 3<br />

Carence<br />

d’apports<br />

Bas<br />

➤ Diurétiques<br />

de l’anse<br />

➤ Diurétique<br />

thiazidique<br />

➤ Syndrome<br />

de Bartter<br />

➤ Syndrome<br />

de Gitelman<br />

➤ Vomissements<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

[K + ] U 20 mmol/j<br />

Origine extra-rénale<br />

Transfert :<br />

iatrogène +++<br />

✓ Transfert intracellulaire : il est généralement lié à une action<br />

thérapeutique. L’administration d’insuline pour corriger une<br />

acidocétose, le traitement de la crise aiguë d’asthme ou la prévention<br />

de la menace d’accouchement prématuré par les bêtamimétiques<br />

peuvent entraîner une hypokaliémie par transfert<br />

de potassium dans les cellules. L’intoxication au baryum (utilisé<br />

en pyrotechnie, métallurgie) provoque également une hypokaliémie<br />

de transfert par inhibition des canaux potassiques sortants.<br />

Il peut exceptionnellement être lié à la maladie de Westphal ou<br />

paralysie périodique familiale (hypokaliémie secondaire à l’entrée<br />

excessive de K + dans les cellules rythmée par les repas et l’exercice<br />

musculaire). L’alcalose respiratoire et métabolique entraîne<br />

aussi une hypokaliémie de transfert. La responsabilité de l’alcalose<br />

métabolique dans la survenue d’une hypokaliémie doit cependant<br />

être interprétée avec prudence. L’hypokaliémie par elle-même<br />

peut en effet entraîner une alcalose métabolique en augmentant<br />

la réabsorption proximale de bicarbonates. Certaines causes peuvent<br />

par ailleurs être responsables d’une hypokaliémie et d’une<br />

alcalose métabolique par un effet tubulaire et non de transfert<br />

(hyperaldostéronisme, vomissements).<br />

Hypokaliémie [K + ] P 3,5 mmol/L<br />

Non<br />

[K + ] U<br />

Alcalose Normal Acidose<br />

Volume<br />

extracellulaire<br />

Normal<br />

➤ Perfusion<br />

d’alcalin<br />

Perte extra-rénale<br />

Diarrhées<br />

Maladie des laxatifs<br />

État acide base<br />

Hypomagnésémie<br />

Anion en excès<br />

sans acide<br />

(pénicilline)<br />

Démarche diagnostique mécanistique et étiologique de l’hypokaliémie.<br />

Bas Variable<br />

➤ Acidose tubulaire<br />

de type 1 ou 2<br />

Volume<br />

extracellulaire<br />

[K + ] U 40 mmol/j<br />

Origine rénale<br />

HTA<br />

➤ Syndrome<br />

de levée<br />

d’obstacle<br />

➤ Amphotéricine B<br />

➤ Cisplatine<br />

➤ Anion<br />

en excès<br />

avec acide<br />

(toluène)<br />

✓ Pertes intestinales de K + : au cours des diarrhées aiguës, l’hypo -<br />

kaliémie est associée à une acidose métabolique hyperchlorémique<br />

par perte digestive de bicarbonates. Au cours des diarrhées chroniques<br />

(maladie des laxatifs, tumeur endocrine, tumeur villeuse),<br />

l’hypokaliémie profonde et prolongée associée à une contraction<br />

des volumes extracellulaires peut induire une alcalose métabolique.<br />

✓ Pertes rénales de K + : dans cette situation, l’élément d’orientation<br />

étiologique est l’existence ou non d’une hypertension artérielle.<br />

Une hypertension artérielle évoque une modification primitive<br />

des transports de K + et de Na + dans le tube distal, par hyperaldo -<br />

stéronisme ou pseudo-hyperaldostéronisme. Il s’y associe généralement<br />

une alcalose métabolique. Elle peut correspondre à<br />

trois situations :<br />

— l’hyperaldostéronisme primaire (HAIaire) (rénine basse, aldostérone<br />

élevée) dont les deux principales causes sont l’adénome<br />

de Conn (non freinable par le test de décubitus) et l’hyperplasie<br />

(freinable), et de manière beaucoup plus rare, une forme génétique<br />

(HA sensible aux corticoïdes) ;<br />

— l’hyperaldostéronisme secondaire (HAIIaire) (rénine élevée,<br />

aldostérone élevée) à une sténose de l’artère rénale (SAR), une<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


Rénine ➘<br />

Aldostérone ➚<br />

Oui<br />

Rénine<br />

Aldostérone<br />

Rénine ➚<br />

Aldostérone ➚<br />

coarctation aortique, une HTA maligne essentielle, une sclérodermie,<br />

ou exceptionnellement une tumeur à rénine ;<br />

— les pseudo-hyperaldostéronismes (PHA) (rénine basse, aldo -<br />

stérone basse), soit par hypercorticisme endogène (syndrome de<br />

Cushing) ou exogène (traitements corticoïdes), soit par blocage<br />

intracellulaire de la conversion du cortisol en cortisone génétique<br />

ou acquise (prise de réglisse), soit par une augmentation<br />

de la sensibilité à l’aldostérone du récepteur minéralocorticoïde,<br />

génétique (PHA de type 2) ou acquise (ciclosporine), soit encore<br />

par hyperactivité génétique du canal sodique épithélial (syndrome<br />

de Liddle ou PHA de type 1).<br />

En l’absence d’hypertension artérielle, l’appréciation du<br />

volume extracellulaire permet d’orienter le mécanisme de la fuite<br />

potassique.<br />

Une contraction du volume extracellulaire oriente vers une<br />

perte sodée rénale, l’hypokaliémie étant ici en rapport avec l’augmentation<br />

du Na + délivré au distal et l’hyperaldostéronisme<br />

secondaire à l’hypovolémie.<br />

La perte sodée rénale peut correspondre à une diminution de<br />

la réabsorption tubulaire de NaCl dans l’anse de Henle (d’origine<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

Rénine ➘<br />

Aldostérone ➘<br />

HAIaire HAIIaire PseudoHA<br />

➤ Adénome<br />

➤ Hyperplasie<br />

➤ Sténose des<br />

artères rénales<br />

➤ Coarctation<br />

➤ HTA maligne<br />

➤ Sclérodermie<br />

➤ Syndrome de<br />

Liddle<br />

➤ PHA type 2<br />

➤ Hypercorticisme<br />

➤ Réglisse<br />

génétique au cours des syndromes de Bartter ou médicamenteuse<br />

lors de la prise de diurétiques de l’anse type Furosémide) ou dans<br />

le tube contourné distal (d’origine génétique au cours du syndrome<br />

de Gitelman ou médicamenteuse due aux diurétiques thiazidiques<br />

type hydrochlorothiazide). Les hyperaldostéronismes secondaires<br />

à une hypovolémie avec natriurèse basse (hypovolémies efficaces<br />

avec œdèmes : cirrhose, insuffisance cardiaque, syndrome<br />

néphrotique) ne s’accompagnent généralement pas en revanche<br />

d’hypokaliémie franche, sauf si des diurétiques sont rajoutés.<br />

La perte sodée rénale peut également se faire sous forme de<br />

HCO 3 — Na + . La perte de potassium est majorée dans ces situations,<br />

car le bicarbonate est moins réabsorbable que le Cl — . Cela s’observe<br />

au cours des vomissements et au cours des acidoses tubulaires<br />

distales de type 1 (non associées à un défaut de sécrétion<br />

distale de K + ) et proximales.<br />

La présence d’un anion non réabsorbable délivré en excès<br />

dans le tube distal (bêta-hydroxyburyrate en cas d’acidocétose,<br />

hyppurate en cas d’intoxication au toluène, pénicillinate en cas<br />

d’apport massif de bêta-lactamines) peut également entraîner une<br />

hypokaliémie. L’hypokaliémie, dans cette situation, est surtout marquéelorsqu’elle<br />

est associée à un hyperaldostéronisme, le couplage<br />

de l’anion non réabsorbable au sodium peut en effet entraîner<br />

une perte sodée et un hyperaldostéronisme secondaire).<br />

En l’absence de modifications du volume extracellulaire, la<br />

perte rénale de potassium peut être secondaire à une augmentation<br />

de la perméabilité épithéliale aux cations, responsable<br />

d’une acidose hypokaliémique et d’une hypomagnésémie<br />

(amphotéricine B et cisplatine) ; à une augmentation du débit de<br />

fluide tubulaire (polyurie) (syndromes de levée d’obstacle, résolution<br />

des nécroses tubulaires aiguës) ; à une hypomagnésémie.<br />

3. Prise en charge thérapeutique<br />

Le traitement de l’hypokaliémie est tout d’abord étiologique,<br />

ce qui rend compte de l’importance de la démarche diagnostique<br />

étiologique. Les hyperkaliémies de transfert ont pour seul traitement<br />

celui de leur cause. Le traitement substitutif potassique<br />

est réservé aux situations de carence d’apport ou de pertes de<br />

potassium rénales ou extrarénales.<br />

Si l’hypokaliémie est bien tolérée, la voie orale est suffisante.<br />

La forme chimique à utiliser est fonction du tableau acidobasique<br />

associé. En cas d’alcalose associée (cas le plus fréquent),<br />

on privilégiera le chlorure de potassium dans une forme à libération<br />

prolongée, limitant le risque de toxicité gastrique (Diffu-K<br />

ou Kaleorid). Les formes alcalines (citrate de K+) sont réservées<br />

aux acidoses tubulaires hypokaliémiques.<br />

L’apport parentéral de KCl est à réserver aux hypokaliémies<br />

sévères, symptomatiques, avec signes électriques ou en cas d’impossibilité<br />

d’apport oral.<br />

Si l’hypokaliémie est mal tolérée (formes symptomatiques,<br />

avec signes électriques) ou que l’apport oral est impossible, la<br />

voie veineuse avec perfusion de KCl est nécessaire. La perfusion<br />

de KCl doit respecter un certain nombre de règles : 1/ débit<br />

contrôlé obligatoire, au mieux par l’utilisation d’une seringue<br />

électrique ; 2/ administration sur veine de gros ou moyen calibre,<br />

R Q 219<br />

1609


1610<br />

I-11-Q219<br />

Figure 4<br />

Normal<br />

Pseudo-hyperkaliémie<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

Hyperkaliémie<br />

Contrôle sans garrot<br />

[K + ] U 40 mmol/j<br />

Origine extrarénale<br />

Excès d’apport Sorties cellulaires<br />

au mieux par cathéter central (toxicité veineuse) ; 3/ débit d’administration<br />

ne dépassant pas 1 g/heure (risque d’arrêt cardiaque<br />

au-delà de cette dose) ; 4/ surveillance électrique par scope.<br />

En cas d’hypomagnésémie associée (traitement diurétique<br />

de l’anse, tubulopathies primitives et toxicité de l’amphotéricine B<br />

ou du cisplatine en particulier), la correction parallèle de l’hypomagnésémie<br />

est nécessaire à l’efficacité du traitement substitutif<br />

potassique.<br />

Savoir diagnostiquer et traiter<br />

une hyperkaliémie<br />

1. Diagnostic positif biologique et clinique<br />

Élevé<br />

[K + ] U<br />

Élevée<br />

Insuffisance rénale<br />

aiguë ou chronique<br />

L’hyperkaliémie se définit par une valeur supérieure à 5 mmol/L.<br />

Une pseudo-hyperkaliémie peut être observée lorsqu’une hémolyse<br />

survient dans le tube de prélèvement, au cours des hyperplaquettoses<br />

ou d’une libération musculaire locale de K + . Devant<br />

une hyperkaliémie, il faut donc, de principe, contrôler le dosage<br />

[K + ] U 20 mmol/j<br />

Origine rénale<br />

Créatininémie<br />

Rénine ➘<br />

Aldostérone ➘<br />

VIH<br />

Diabète<br />

AINS<br />

Coxib<br />

Démarche diagnostique mécanistique et étiologique de l’hyperkaliémie.<br />

Normale<br />

Rénine<br />

Aldostérone<br />

Rénine ➚<br />

Aldostérone ➘<br />

Insuffisance<br />

surrénale<br />

Blocs<br />

enzymatiques<br />

IEC<br />

Sartan<br />

Rénine ➚<br />

Aldostérone ➚<br />

Pseudo-hypoaldostéronisme<br />

Aldactone<br />

Amiloride<br />

Bactrim<br />

Génétique<br />

en respectant les conditions de prélèvement suivantes : prélèvement<br />

sans garrot, à l’aiguille et sans vide, sur plasma, sans<br />

serrer le poing.<br />

Les signes d’hyperkaliémie sont avant tout électriques (électrocardiogramme).<br />

Ce sont, par ordre d’apparition avec l’élé vation<br />

de la kaliémie : des troubles de la repolarisation (ondes T pointues)<br />

au-delà de 6 mmol/L, des troubles de conduction (BAV et<br />

élargissement du QRS) au-delà de 7 mmol/L, des troubles du<br />

rythme ventriculaire (flutter, fibrillation ventriculaire et arrêt<br />

cardiaque).<br />

Les signes neuro-musculaires associant paresthésies et troubles<br />

moteurs (paralysie flasque) apparaissent en cas d’hyperkaliémie<br />

majeure.<br />

2. Diagnostic mécaniciste et étiologique (fig. 4)<br />

L’hyperkaliémie répond schématiquement à trois grands<br />

mécanismes : un excès d’apport, un transfert extracellulaire, et<br />

un défaut d’excrétion rénale de K + .<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


La capacité du rein à excréter la charge potassique est importante,<br />

ce qui rend compte du fait que même lorsqu’il existe une<br />

cause extrarénale à l’hyperkaliémie, il s’y associe souvent une<br />

anomalie de la réponse rénale, et que l’hyperkaliémie sévère et<br />

menaçante est avant tout l’apanage de l’insuffisance rénale oligoanurique.<br />

✓ Excès d’apport : le rein étant capable d’excréter jusqu'à 300 mmol<br />

de K + par 24 heures, seul un apport important ou survenant dans<br />

un contexte d’insuffisance rénale peut entraîner une hyper -<br />

kaliémie. L’excès d’apport peut être d’origine alimentaire (agrumes,<br />

fruits secs, chocolat) ou iatrogène (sels de K + , nutrition<br />

parentérale).<br />

✓ Sortie de K + de la cellule : les sorties de potassium de la cellule<br />

peuvent entraîner une hyperkaliémie dans la mesure où le principal<br />

mécanisme de protection à la charge aiguë en K + , l’entrée<br />

cellulaire, est supprimé. L’ensemble des mécanismes favorisant<br />

la sortie de potassium de la cellule peut être associé à une hyperkaliémie.<br />

Cela peut correspondre soit à une lyse cellulaire in vivo<br />

(rhabdomyolyse, lyse tumorale spontanée ou secondaire à la chimiothérapie),<br />

soit à une modification des transports membranaires<br />

(acidose métabolique; déficit en insuline au cours de l’acidocétose<br />

diabétique ; traitement bêtabloquant). Il existe enfin une forme<br />

génétique d’hyperkaliémie de transfert (maladie de Gamstorp).<br />

✓ Défaut rénal : cela traduit l’altération d’un ou plusieurs des<br />

mécanismes sécrétoires du potassium. L’hyperkaliémie d’origine<br />

rénale est définie par l’association d’une hyperkaliémie et d’un<br />

GTTK inférieur à 2, ou d’une kaliurèse inférieure à 20 mmol/j.<br />

Au cours de l’insuffisance rénale chronique, l’hyperkaliémie<br />

s’explique par la diminution du débit du fluide tubulaire et de Na +<br />

délivré au distal. Le défaut d’excrétion potassique survient assez<br />

tardivement (au stade 4 et 5 de l’insuffisance rénale chronique),<br />

mais peut être favorisé par l’utilisation d’un traitement néphroprotecteur<br />

type inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou sartan,<br />

ou par un hyporéninisme (néphropathie diabétique).<br />

Au cours de l’insuffisance rénale aiguë, l’hyperkaliémie se voit<br />

avant tout dans les formes oligo-anuriques. Elle doit faire rechercher<br />

une cause extrarénale associée (rhabdomyolyse en particulier).<br />

En l’absence d’insuffisance rénale, l’hyperkaliémie traduit une<br />

atteinte fonctionnelle du transport du K + dans le canal collecteur,<br />

par modification du contrôle hormonal avant tout. Le tableau est<br />

celui d’une acidose hyperchlorémique et hyperkaliémique par<br />

défaut de sécrétion d’H + et de K + . Elle correspond à l’acidose<br />

tubulaire distale de type 4 dont l’ensemble des causes est repris<br />

dans la question acidose métabolique.<br />

3. Prise en charge thérapeutique<br />

En dehors du traitement étiologique, à mettre en œuvre systématiquement,<br />

la prise en charge de l’hyperkaliémie repose sur<br />

trois types de traitement :<br />

— le calcium (1 ampoule de gluconate de Ca 10 % en IV lent) qui,<br />

en augmentant la valeur seuil de déclenchement du potentiel<br />

d’action, diminue le risque électrique associé à l’hyperkaliémie,<br />

sans modifier la valeur de kaliémie ;<br />

— le transfert intracellulaire du potassium, qui peut être obtenu :<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

• par l’insuline (30 unités d’insuline d’action rapide associé à 500 mL<br />

de G 30 % en 30 min), avec un effet rapide (15 min) et prolongé<br />

pendant plusieurs heures<br />

• par alcalinisation (HCO3Na 14 ‰), avec un effet retardé (60<br />

min) et prolongé pendant plusieurs heures. Il a été bien montré<br />

que ce traitement n’est efficace que lorsqu’à l’hyperkaliémie s’associe<br />

une acidose métabolique,<br />

• par les β2-mimétiques en aérosol avec un effet retardé (90 min)<br />

et prolongé. L’utilisation des formes IV est à éviter compte tenu<br />

de l’effet β1 partiel des β2 mimétiques ;<br />

— l’élimination nette de potassium de l’organisme :<br />

• par le rein (diurétiques de l’anse), avec un effet retardé et prolongé,<br />

mais suspendu à la réponse rénale,<br />

• digestive, par une résine échangeuse d’ions (extraction dans<br />

l’intestin d’un ion K + en échange de l’entrée d’un Na + ) [polystyrène<br />

sulfonate de sodium ou Kayexalate]. L’effet est retardé par<br />

voie orale (plusieurs heures) et plus rapide par lavement (30 min),<br />

• par épuration extrarénale (hémodialyse). L’effet est rapide après<br />

le début de l’hémodialyse, mais sa mise en œuvre est longue.<br />

Compte tenu de l’important arsenal thérapeutique disponible,<br />

il convient de définir quelques stratégies d’utilisation :<br />

— hyperkaliémie sévère (6,5 mmol/L) ; au cours de l’insuffisance<br />

rénale aiguë anurique ; ou en présence de signes électriques<br />

menaçants (trouble de conduction, trouble du rythme) : injection<br />

de gluconate de calcium, épuration extrarénale avec bain pauvre<br />

en K + , et en attendant la mise en œuvre de l’hémodialyse, transfert<br />

intracellulaire par insuline/glucose, et traitement diurétique<br />

intraveineux (furosémide IVSE) en cas de surcharge associée ;<br />

— hyperkaliémie aiguë modérée (5-6,5 mmol/L) non anurique :<br />

injection de gluconate de calcium si troubles électriques (choix<br />

d’une méthode de transfert (alcalinisation si acidose métabolique<br />

associée, insuline/glucose dans les autres cas), consolidation par<br />

résine échangeuse d’ions (Kayexalate) oral et traitement de la cause ;<br />

— hyperkaliémie de l’insuffisance rénale chronique : arrêt d’un<br />

traitement hyperkaliémiant (IEC), régime pauvre en potassium,<br />

résine échangeuse d’ions (Kayexalate) par voie orale, traitement<br />

diurétique de l’anse si surcharge hydrosodée ou alcalinisant si<br />

acidose métabolique (eau de La Salvetat pauvre en sodium à préférer<br />

à l’eau de Vichy). ■<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

DÉJÀ TRAITÉ : ● 1 re partie : Rev Prat 2008 ; 58 [12] : 1363-72<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Hyponatrémies, pour une attitude logique : la balance<br />

de la tonicité<br />

Mallié JP, Halperin ML, Bichet DG<br />

(Nephrologie 1998;19[8]:469-80)<br />

◗ Hypokalemia-consequences, causes, and correction<br />

Weiner ID, Wingo CS<br />

(J Am Soc Nephrol, 1997 Jul;8[7]:1179-88).<br />

R Q 219<br />

1611


1612<br />

I-11-Q219<br />

A / QCM<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique et désordres hydro-électrolytiques (2 de partie)<br />

Devant les examens suivants :<br />

➙ GDS : pH 7,45, pC02 45 mmHg, P02 90 mmHg,<br />

HCO3 — 35 mM ;<br />

➙ Ionogramme plasmatique : Na + 138 mM, Cl — 90 mM,<br />

K + 3 mM, protidémie 90 g/L ;<br />

➙ PA : 105/65 mmHg ;<br />

quelles sont les hypothèses diagnostiques<br />

envisageables ?<br />

1 Vomissements récents.<br />

2 Toxicité de l’amphotéricine B.<br />

3 Prise de diurétique de l’anse.<br />

4 Syndrome de Liddle.<br />

5 Maladie des laxatifs.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

L’hyponatrémie traduit toujours<br />

une hyperhydratation intracellulaire.<br />

L’hyponatrémie ne présume pas de l’état<br />

du secteur extracellulaire.<br />

Au cours de la potomanie, les fonctions de dilution<br />

du rein sont normales.<br />

Devant une hypernatrémie, l’ADH est<br />

toujours basse.<br />

Un régime sans sel expose au risque<br />

d’hyponatrémie.<br />

Réponses : A : 1, 3, 5 / B : F, V, V, F, V.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 179, p. 1591<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Le sujet diabétique doit exclure tous les glucides<br />

simples de son alimentation.<br />

2 L’activité physique est fondamentale dans la prise<br />

en charge du diabète et doit être encouragée.<br />

3 La part de glucides doit représenter moins<br />

de 50 % des AET (apports énergétiques totaux)<br />

du sujet diabétique.<br />

4 100 g de féculents (riz, pâtes, pommes de terre)<br />

apportent 20 g de glucides.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Les apports lipidiques ne doivent pas dépasser<br />

30-35 % des AET.<br />

2 En cas d’hypercholestérolémie, il est conseillé de<br />

baisser les apports en acides gras oméga 3.<br />

3 L’objectif du taux de LDL-C doit être fixé<br />

en fonction des différents facteurs de risque<br />

cardiovascualire.<br />

4 En cas de régime hypocholestérolémiant, il faut<br />

limiter la consommation de crustacés.<br />

C / QCM<br />

En cas de prescription d’une corticothérapie<br />

par voie générale à long terme il faut :<br />

1 surveiller les apports en vitamine D,<br />

en calcium par risque d’hypocalcémie ;<br />

2 limiter les apports en potassium par risque<br />

d’hyperkaliémie ;<br />

3 augmenter les apports en sel ;<br />

4 faire attention à ses apports<br />

en glucides simples ;<br />

5 respecter un régime enrichi en graisse.<br />

Réponses : A : F, V, F, V / B : V, F, V, V / C : 1, 4.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008


VRAI OU FAUX ?<br />

1 Les médicaments d’automédication sont<br />

des médicaments sans AMM.<br />

2 Les médicaments d’homéopathie sont des<br />

médicaments d’automédication.<br />

3 Les médicaments non remboursés sont des<br />

médicaments d’automédication.<br />

4 Les substituts nicotiniques sont des médicaments<br />

à prescription médicale facultative.<br />

5 Le traitement des infections urinaires est une<br />

situation tout à fait adaptée à l’automédication.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 30 SEPTEMBRE 2008<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 172, p. 1585<br />

Réponses : F, F, F, F, F.<br />

5. Faux : d’une manière générale, l’antibiothérapie n’est pas adaptée à l’automédication,<br />

pour éviter les pressions de sélection, pour ne pas traiter par<br />

antibiotique ce qui ne nécessite pas un traitement antibiotique, pour éviter un<br />

mauvais usage des antibiotiques : durée, posologie, choix de la molécule.<br />

4. Faux : ils ont depuis peu le statut de médicaments d’automédication. Ils peuvent<br />

être demandés en pharmacie par le patient et ne sont pas remboursés.<br />

En revanche, il a été décidé par la Commission de la transparence ou par choix<br />

de la firme qui les commercialise de ne pas les rembourser, ex. : Sildénafil (Viagra),<br />

Varénicline (Champix), Orlistat (Xenical)…<br />

3. Pas uniquement. Certains médicaments non remboursés sont malgré tout<br />

inscrit sur la liste I des produits vénéneux. De ce fait, ils doivent être prescrits<br />

par un médecin en raison d’un risque potentiel afin que celui-ci vérifie les<br />

précautions d’emploi et mette le patient en garde.<br />

2. Faux : les médicaments homéopathiques ont une AMM spécifique pour l’homéopathie<br />

; ces médicaments sont inscrits d’office sur la liste des médicaments<br />

remboursables à un taux de 35 %.<br />

1. Faux : tous les médicaments qui sont évalués par l’Afssaps ont une AMM.<br />

Celle-ci est spécifique des médicaments d’automédication pour lesquels il est<br />

exigé une grande sécurité. La notice explicative doit être particulièrement<br />

détaillée.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 96, page 1579<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Les méningites à méningocoque chez l’enfant sont<br />

plus fréquentes que les méningites à pneumocoque.<br />

2 Une méningite à pneumocoque peut survenir<br />

dès l’âge de 1 mois.<br />

3 Les méningites à Hæmophilus restent<br />

très fréquentes en France.<br />

4 Les méningites virales sont plus rares<br />

que les bactériennes.<br />

5 Un nourrisson présentant une méningite peut<br />

ne pas présenter de raideur de la nuque.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 L’hypoglycorachie n’est observée que dans<br />

les méningites tuberculeuses.<br />

2 Une formule du LCR avec une prédominance<br />

de polynucléaires n’est pas pathognomonique<br />

de méningite bactérienne.<br />

3 Une méningite virale chez l’enfant peut être<br />

due au virus herpès.<br />

4 Le traitement de première intention<br />

d’une méningite bactérienne de l’enfant associe<br />

habituellement une céphalosporine de troisième<br />

génération et un aminoside.<br />

5<br />

Un enfant présentant une méningite<br />

bactérienne doit être mis en restriction hydrique<br />

à la phase aiguë.<br />

C / QCM<br />

Chez un enfant présentant un syndrome<br />

méningé fébrile :<br />

1 une ponction lombaire (PL) s’impose<br />

en urgence,<br />

2 l’examen direct du LCR est de peu d’intérêt,<br />

car ne peut caractériser le germe,<br />

3 la culture du LCR donne le résultat en moins<br />

de 24 heures,<br />

4 l’antibiothérapie est mise en route<br />

en fonction des résultats de l’examen<br />

bactériologique du LCR,<br />

5 dans les cas peu graves, l’antibiothérapie peut<br />

être administrée par voie orale.<br />

Réponses : A : V, V, F, F, V / B : F, V, F, F, F / C : 1.<br />

1613


Les complications dégénératives chroniques<br />

et les complications aiguës font la<br />

sévérité des diabètes de type 1 et de type 2.<br />

Les complications chroniques sont pour la plupart<br />

cardiovasculaires, touchant soit les<br />

capillaires (micro-angiopathie), soit les artères<br />

(macro-angiopathie). Les complications dégénératives<br />

chroniques peuvent toucher d’autres territoires que<br />

les vaisseaux, par exemple le système nerveux périphérique<br />

(neuropathie diabétique). Les complications chroniques ont un<br />

dénominateur commun : « la dysglycémie » du diabétique avec<br />

ses deux composantes qui sont l’intensité et la durée de l’hyperglycémie<br />

chronique que l’on regroupe sous le terme d’« exposition<br />

à l’hyperglycémie ». Cette « dysglycémie » joue un rôle<br />

majeur dans les complications microvasculaires dont les deux<br />

localisations préférentielles, mais non exclusives, sont la rétine<br />

et le glomérule rénal. Les complications macro-angiopathiques<br />

sont également liées à la « dysglycémie » mais d’autres facteurs<br />

se surajoutent : les altérations lipidiques plasmatiques (« dyslipidémie<br />

» du diabétique), l’hypertension artérielle et les troubles<br />

de l’hémostase. Toutes ces perturbations sont, en partie, dépendantes<br />

de l’intensité du déséquilibre glycémique et de l’état d’insulino-résistance<br />

qui est constamment observé dans le diabète<br />

de type 2. L’âge venant se greffer sur ces facteurs, on dit classiquement<br />

que le diabète de type 2 est plus exposé aux complications<br />

macro-angiopathiques qu’aux complications micro-angiopathiques.<br />

À l’inverse, c’est la micro-angiopathie qui caractériserait<br />

le diabète de type 1. Cette distinction est en grande partie arbitraire,<br />

car un diabétique de type 1 est exposé aux complications macroangiopathiques<br />

quand il prend de l’âge et le diabétique de type 2<br />

risque de développer des complications micro-angiopathiques si<br />

son équilibre glycémique reste trop longtemps perturbé.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

Diabète sucré<br />

de type 1 de l’enfant et de l’adulte. Diabète sucré<br />

de type 2 de l’adulte. Complications du diabète<br />

3 e partie — Complications du diabète<br />

P r Louis Monnier, D r Jean-François Thuan<br />

Service des maladies métaboliques, Hôpital Lapeyronie, 34295 Montpellier Cedex 5<br />

l-monnier@chu-montpellier.fr<br />

Objectifs<br />

I-00-Q000 II-Q233<br />

• Diagnostiquer un diabète chez l’enfant et chez l’adulte.<br />

• Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.<br />

• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.<br />

• Décrire les principes de la prise en charge au long cours.<br />

Les complications aiguës, comme la céto-acidose et les hypoglycémies,<br />

sont surtout observées dans le diabète de type 1. Les<br />

céto-acidoses résultent d’une insulinopénie sévère qui n’est rencontrée<br />

que dans le diabète de type 1. Les hypoglycémies sont le<br />

plus souvent liées à un traitement insulinique inadapté. Toutefois,<br />

des hypoglycémies, bien que moins fréquentes, peuvent survenir<br />

chez les diabétiques de type 2 traités par insuline ou par des antidiabétiques<br />

oraux quand ils agissent en stimulant l’insulinosécrétion<br />

: sulfonylurées et glinides. Les deux autres complications aiguës<br />

(comas hyperosmolaires et acidoses lactiques) sont l’apanage des<br />

diabètes de type 2. Le coma hyperosmolaire survient chez les diabétiques<br />

âgés ayant une altération des fonctions rénales et une<br />

insulinopénie relative souvent révélée au cours d’un épisode intercurrent.<br />

Les acidoses lactiques sont liées à la prise d’un biguanide<br />

chez un patient diabétique de type 2 pour lequel les contre-indications<br />

du médicament n’ont pas été respectées : insuffisance<br />

rénale, insuffisance hépatique, état d’hypoxie chronique.<br />

Au terme de cette introduction, il apparaît que les complications,<br />

qu’elles soient chroniques ou aiguës, relèvent de mécanismes<br />

complexes et intriqués. Dans ces conditions, il est impossible, sauf<br />

exception, d’établir une correspondance du type « telle variété<br />

de complication = telle cause spécifique = tel type de diabète… ».<br />

Pour clarifier les choses, les interactions entre complications,<br />

facteur causal prépondérant et type de diabète sont résumées<br />

dans le tableau 1.<br />

653


COMPLICATIONS CHRONIQUES<br />

Complications vasculaires<br />

1. La micro-angiopathie<br />

✓ Lésions anatomiques et biochimiques : le capillaire normal est<br />

constitué par une membrane basale, glycoprotéique, dont la couche<br />

interne est tapissée par les cellules endothéliales et dont la<br />

couche externe est entourée par les cellules murales ou péricytes.<br />

Le capillaire du diabétique est caractérisé par un épaississement<br />

des membranes basales qui accumulent un excès de<br />

matériel glycoprotéique. La conséquence est un rétrécissement<br />

de la lumière des capillaires et une désorganisation du tapis endothélial<br />

(fig. 1). Par ailleurs, les péricytes subissent des altérations<br />

pour disparaître dans un deuxième temps. En outre, la membrane<br />

basale, bien qu’épaissie est de mauvaise qualité, car elle est<br />

constituée d’un collagène anormal, fortement glycosylé, dénaturé<br />

et fragilisé par des liaisons croisées entre chaînes protéiques.<br />

Les conséquences de ces altérations anatomiques et biologiques<br />

sont de plusieurs ordres :<br />

— distension de la paroi des capillaires sous l’influence de la<br />

pression intracapillaire, avec formation de micro-anévrysmes tels<br />

qu’on peut les voir dans la rétinopathie du diabétique ;<br />

— porosité excessive de la membrane basale qui ne joue plus son<br />

rôle de barrière physiologique. Au niveau de la rétine, ceci se<br />

654<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple de cas clinique,<br />

pourrait concerner l’item « Complications du diabète ».<br />

Vous êtes appelé pour un patient qui<br />

vient de faire une perte de connaissance<br />

brutale en fin d'après-midi. Quand vous<br />

arrivez au domicile du patient, il est totalement<br />

inconscient. L'examen clinique<br />

montre une pression artérielle élevée :<br />

170/90 mmmHg. Le sujet est tachycardique<br />

: 96 pulsations/minute. Le visage<br />

est couvert de sueurs. La famille vous<br />

apprend que cet homme, âgé de 60 ans,<br />

est traité pour un diabète de type 2<br />

depuis 7 ans. Au départ son diabète a été<br />

traité par de la metformine (2 cp à 1g/j).<br />

Depuis quelques jours la famille vous<br />

apprend que son médecin traitant avait<br />

renforcé le traitement médicamenteux<br />

en ajoutant à la metformine une sulfonylurée<br />

: le glibenclamide à la dose de<br />

5 mg 3 fois/jour. Ce traitement avait été<br />

mis en route car l'HbA 1c avait été, à juste<br />

titre, jugée trop élevée par le médecin<br />

traitant (7,3 %). Par ailleurs, depuis la<br />

mise en train de ce nouveau traitement,<br />

le malade se plaignait de sueurs et de<br />

lipothymies pratiquement quotidiennes<br />

en fin d'après-midi.<br />

Quel est le premier diagnostic que<br />

vous devez évoquer ?<br />

Quel examen allez-vous faire en<br />

urgence, à domicile ?<br />

Si le diagnostic que vous avez<br />

évoqué est confirmé par l'examen que<br />

vous venez de faire, quel traitement<br />

allez-vous entreprendre en sachant que<br />

le malade avait sauté son repas de midi ?<br />

Pensez-vous que le coma présenté<br />

par ce patient est lié à la prise de l'un des<br />

deux médicaments : metformine ou glibenclamide<br />

? Si oui lequel ?<br />

Avec le traitement que vous avez appliqué<br />

le malade reprend connaissance au bout<br />

de quelques minutes.<br />

Vaisseau normal Vaisseau diabétique<br />

Figure 1 Schéma simplifié comparant un capillaire normal à<br />

un capillaire de diabétique ayant une micro-angiopathie.<br />

La membrane basale est épaissie, la lumière est rétrécie, le tapis<br />

endothélial est désorganisé, les cellules murales (péricytes)<br />

disparaissent.<br />

traduit pas des œdèmes ou des exsudats (passage d’eau et de<br />

fibrine). Au niveau des capillaires glomérulaires, la conséquence<br />

est un passage de protéines conduisant à la micro- ou la macroalbuminurie<br />

du diabétique ;<br />

— rupture de la paroi capillaire avec survenue d’hémorragies périvasculaires<br />

dont la conséquence la plus évidente sont les hémorragies<br />

rétiniennes ;<br />

Allez-vous dire au patient d'arrêter<br />

l'un des deux médicaments ou les deux<br />

médicaments (metformine et glibenclamide)<br />

?<br />

Si vous aviez été le médecin traitant<br />

de ce patient, quelle attitude auriez-vous<br />

eu devant une HbA 1c à 7,3 % chez un<br />

patient traité par metformine :<br />

➙ vous seriez-vous abstenu de prescrire<br />

un deuxième antidiabétique oral ?<br />

➙ auriez-vous prescrit un deuxième antidiabétique<br />

oral ? Si oui, quelle classe de<br />

médicament auriez-vous choisi en sachant<br />

que ce patient pèse 80 kg pour 170 cm ?<br />

Justifiez votre réponse.<br />

Dans les heures qui suivent quelles<br />

mesures allez-vous prendre en termes de<br />

surveillance et de traitement ? Justifiez<br />

votre réponse.<br />

Pensez-vous qu’il est préférable d’hospitaliser<br />

le patient plutôt que de le laisser à<br />

son domicile ? Justifiez votre réponse.<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


— thromboses des capillaires anormaux dont la lumière est rétrécie<br />

et dont le tapis endothélial est désorganisé. Les conséquences<br />

sont d'une part rétiniennes avec la présence de territoires<br />

ischémiques qui font le lit de la rétinopathie proliférante et d'autre<br />

part glomérulaires avec la présence d’occlusions vasculaires et<br />

disparition progressive des glomérules rénaux.<br />

✓ Physiopathologie des lésions micro-angiopathiques : la plupart des<br />

dommages résultent directement ou indirectement de l’hyperglycémie<br />

(v. encadré 1).<br />

✓ La rétinopathie diabétique est une complication fréquente du<br />

diabète. Sa prévalence est de l’ordre de 50 % après 15 ans d’évolution<br />

du diabète. Elle dépasse 75 % quand l’ancienneté du diabète<br />

est supérieure à 20 ans. Le risque d’apparition ou de progression de<br />

la rétinopathie augmente avec le niveau de l’hyperglycémie évalué<br />

par l’HbA 1c et la durée du diabète. Ce fait a été bien démontré par<br />

2 études : l’étude du DCCT (dans le diabète de type 1) et l’étude<br />

de l’UKPDS (dans le diabète de type 2).<br />

L’examen biomicroscopique du fond d’œil après dilatation<br />

pupillaire permet d’identifier les lésions suivantes (v. encadré 2).<br />

Cet examen doit être réalisé tous les ans dans le cadre du suivi<br />

régulier de la maladie. Il peut être réalisé plus fréquemment en<br />

cas de lésions évolutives.<br />

Toutes ces anomalies peuvent être précisées par l’angiographie<br />

à la fluorescéine. Cette exploration est particulièrement indiquée<br />

pour mettre en évidence les zones d’ischémie rétiniennes<br />

La glycation des protéines<br />

avec formation de produits<br />

de glycation avancée<br />

Le glucose peut se lier aux protéines en<br />

dehors de toute intervention enzymatique<br />

(glycation non enzymatique). Cette réaction<br />

évolue en plusieurs étapes :<br />

1re étape : liaison entre la fonction amine<br />

(NH2-) libre d’une protéine et le radical<br />

aldéhyde (CHO-) du glucose pour constituer<br />

une aldimine instable (base de Schiff).<br />

2e étape : remaniement d’Amadori pour<br />

transformer l’aldimine instable en un produit<br />

d’Amadori (céto-amine) qui est un composé<br />

beaucoup plus stable.<br />

3e étape : longue, au cours de laquelle il<br />

y a déshydratation lente et irréversible du<br />

produit d’Amadori, elle est suivie d’un réarrangement<br />

moléculaire qui conduit à des<br />

structures irréversibles appelées produits terminaux<br />

de la glycation ou produits de glycation<br />

avancée. Ces produits sont capables<br />

de former des ponts avec une protéine voisine<br />

pour donner des liaisons croisées entre chaînes<br />

protéines. Ces phénomènes conduisent<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

à une dénaturation et à un vieillissement du<br />

collagène des membranes basales des capillaires<br />

et du collagène du sous-endothélium<br />

des parois artérielles. Ces phénomènes sont<br />

proportionnels à l’intensité de l’hyperglycémie.<br />

C’est ce qui explique que les diabétiques<br />

les plus mal (ou les moins bien)<br />

équilibrés sont en général ceux qui développent<br />

les complications les plus précoces et<br />

les plus sévères.<br />

Théorie du stress oxydatif<br />

Cette élégante théorie unificatrice développée<br />

par M. Brownlee est basée sur le fait<br />

que sous l’effet de l’hyperglycémie, une<br />

partie du glucose pénètre passivement à l’intérieur<br />

des cellules sous l’influence d’une<br />

simple différence de gradient entre la concentration<br />

en glucose extra- et intracellulaire.<br />

L’excès de glucose qui a pénétré dans les cellules<br />

est soumis à l’action délétère de radicaux<br />

libres tels que l’anion superoxyde pour activer<br />

4 voies métaboliques qui sont impliquées<br />

dans les dommages vasculaires induits par<br />

l’hyperglycémie :<br />

secondaires à l’occlusion plus ou moins étendue des capillaires<br />

rétiniens, voire des artérioles rétiniennes. Sa forme la plus sévère<br />

est la maculopathie ischémique par occlusion étendue des<br />

capillaires maculaires. Le danger des zones d’ischémie réside<br />

dans le fait qu’elles font le lit de la prolifération des néovaisseaux,<br />

car elles synthétisent des facteurs de croissance angiogéniques,<br />

le principal d’entre eux étant le vascular endothelial cell growth<br />

factor (VEGF). D’autres techniques d’exploration ont été développées<br />

mais elles ne sont pas d’utilisation courante. Il s’agit de<br />

l’échographie et de la tomographie en cohérence optique.<br />

Il existe 2 classifications de la rétinopathie diabétique : la Classification<br />

internationale (2003) proposée par l’American Academy<br />

of Ophthalmology (5 stades sont individualisés pour la rétinopathie<br />

avec une classification parallèle pour la maculopathie diabétique<br />

qui peut être associée à n’importe quel stade de la rétinopathie<br />

diabétique [tableau 2]) et la Classification française (ALFEDIAM)<br />

[tableau 3] qui est très voisine de la Classification internationale.<br />

Le traitement médical est basé sur le bon contrôle de la glycémie<br />

et de la pression artérielle qui sont les éléments fondamentaux<br />

pour éviter la progression d’une rétinopathie diabétique (étude du<br />

DCCT pour le diabète de type 1 et UKPDS pour le diabète de type 2).<br />

Le traitement par laser peut prendre plusieurs formes :<br />

— la photocoagulation panrétinienne consiste à coaguler toute la<br />

surface rétinienne comprise entre l’arc des vaisseaux temporaux<br />

et l’équateur. Elle est indiquée dans toutes les rétinopathies<br />

1 / PHYSIOPATHOLOGIE DES LÉSIONS MICRO-ANGIOPATHIQUES<br />

➙ une augmentation de l’activité de la<br />

voie des polyols qui conduit à une accumulation<br />

de sorbitol et de fructose ;<br />

➙ une augmentation de production des<br />

produits de la glycation avancée ;<br />

➙ une activation de l’activité de la protéine<br />

kinase C et du facteur nucléaire kB ;<br />

➙ une augmentation de la production<br />

des hexosamines.<br />

Toutes ces anomalies conduisent aux<br />

complications diabétiques. La première anomalie,<br />

c’est-à-dire l’emballement de la production<br />

des polyols, contribue à la destruction<br />

des cellules murales par effet<br />

d’hyperosmolarité. En effet, c’est l’aldose<br />

réductase de ces cellules qui transforme le<br />

glucose en sorbitol et au-delà en fructose.<br />

Dans la mesure où les cellules murales participent<br />

à la résorption de l’excès des glycoprotéines<br />

produites au niveau des membranes<br />

basales sous l’effet de la glycation non<br />

enzymatique, on comprend que la destruction<br />

de ces cellules contribue à aggraver l’évolution<br />

progressive vers un épaississement inexorable<br />

des membranes basales. ●<br />

R Q 233<br />

655


proliférantes. Elle peut, dans certains cas, être indiquée dans les<br />

rétinopathies préproliférantes, en particulier quand il y a un risque<br />

d’aggravation rapide : puberté, adolescence, grossesse, équilibration<br />

rapide de la glycémie ;<br />

— la photocoagulation focale est indiquée sur les lésions microvasculaires<br />

responsables d’exsudation ;<br />

— la photocoagulation en grille est indiquée sur l’œdème maculaire<br />

diffus.<br />

Le traitement chirurgical (vitrectomie) est utilisé dans les<br />

hémorragies intravitréennes, les décollements de rétine par traction,<br />

les décollements mixtes associant déchirures de la rétine<br />

et traction.<br />

Les traitements alternatifs sont les injections intravitréennes<br />

de corticoïdes sur les œdèmes maculaires réfractaires et les<br />

injections intravitréennes d’anti-VEGF.<br />

✓ La néphropathie diabétique touche surtout les diabétiques de<br />

type 1 : 50 % en sont atteints. Son pic d’incidence se situe entre<br />

15 et 25 ans après le début du diabète. Au-delà, l’incidence décroît<br />

et l’on peut considérer qu’un diabétique de type 1, qui a « franchi<br />

sans encombre » le cap de la 25 e année, a peu de risques de<br />

développer une néphropathie. Les grands facteurs d’apparition et<br />

de progression de la néphropathie sont les mauvais contrôles<br />

glycémiques et tensionnels.<br />

La néphropathie évolue en plusieurs étapes (fig. 2). Au cours<br />

des premières années, il n’y a aucun signe de néphropathie ni clinique,<br />

ni biologique, la pression artérielle est normale (< 130/80<br />

mmHg), la micro-albuminurie est normale (< 30 mg/24 h ou < 30<br />

mg/g de créatinine), la filtration glomérulaire évaluée à partir de<br />

la clairance de la créatinine est soit normale (120 mL/mn), soit<br />

augmentée si le diabète n’est pas correctement équilibré.<br />

Le stade de la néphropathie incipiens survient au bout de<br />

quelques années. Il est caractérisé par une micro-albuminurie<br />

anormale comprise entre 30 mg/24 h et 299 mg/24 h (ou entre<br />

30 mg et 299 mg/g de créatinine). La pression artérielle et la filtration<br />

glomérulaire sont normales. La présence d’une microalbuminurie<br />

anormale traduit la présence de lésions anatomiques<br />

656<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

2 / LÉSIONS RÉTINIENNES<br />

◗ Les micro-anévrysmes rétiniens.<br />

◗ Les hémorragies rétiniennes punctiformes,<br />

en « flammèches » ou en « taches » : elles<br />

traduisent une rupture vasculaire d’un<br />

capillaire rétinien ou d’un micro-anévrysme.<br />

◗ Les signes de diffusion liés à un passage<br />

anormal de constituants plasmatiques. Ils<br />

sont matérialisés par l’œdème rétinien et<br />

les exsudats.<br />

◗ L’œdème maculaire est une accumulation<br />

de liquide extracellulaire dans la rétine<br />

maculaire. Il résulte d’une rupture de la<br />

Tableau 1<br />

barrière hématorétinienne interne, non<br />

compensée par les mécanismes de réabsorbtion<br />

au niveau des capillaires maculaires.<br />

L’œdème maculaire peut être localisé<br />

ou diffus. Dans ce dernier cas il peut<br />

être non cystoïde ou organisé en logettes<br />

cystoïdes. L’œdème maculaire menace la<br />

vision, car 90 % de la capacité visuelle est<br />

concentrée dans la macula.<br />

◗ Les nodules cotonneux encore appelés<br />

nodules dysoriques ou exsudats mous :<br />

lésions blanches superficielles et de petite<br />

taille qui traduisent une ischémie focale.<br />

Correspondance entre<br />

complications, type de diabète<br />

et facteur causal prépondérant<br />

COMPLICATIONS FACTEUR CAUSAL<br />

PRÉPONDÉRANT<br />

FRÉQUENCE<br />

Chroniques<br />

❚ Microvasculaires ❚ Exposition ❚ Surtout diabète<br />

à l’hyperglycémie de type 1<br />

(durée + intensité)<br />

❚ Macrovasculaires ❚ Exposition ❚ Surtout diabète<br />

à l’hyperglycémie de type 2<br />

+ autres facteurs<br />

(âge, dyslipidémies,<br />

HTA, troubles de<br />

l’hémostase)<br />

Aiguës<br />

❚ Céto-acidose ❚ Insulinopénie ❚ Surtout diabète<br />

de type 1<br />

❚ Hypoglycémies ❚ Excès d’insuline ❚ Surtout diabète<br />

de type 1<br />

❚ Coma ❚ Insulinopénie ❚ Surtout diabète<br />

hyperosmolaire relative + altération de type 2<br />

des fonctions rénales<br />

❚ Acidose lactique ❚ Traitement ❚ Diabète de type 2<br />

par biguanides chez<br />

l’insuffisant rénal,<br />

hépatique ou le sujet<br />

en état d’hypoxie<br />

au niveau des glomérules et biochimiques au niveau de la membrane<br />

basale des glomérules.<br />

Au stade de la néphropathie patente macro-albuminurique,<br />

le sujet devient symptomatique : hypertension artérielle, syndrome<br />

œdémateux avec évolution progressive vers une insuffisance<br />

rénale. Si rien n’est fait (mauvais contrôle des glycémies<br />

et de la pression artérielle), la filtration glomérulaire diminue de<br />

1,2 mL/mn/mois.<br />

◗ Les anomalies vasculaires intrarétiniennes<br />

(AMIR) ou néovaisseaux intrarétiniens.<br />

◗ Les néovaisseaux prérétiniens et prépapillaires<br />

correspondent à des proliférations<br />

néovasculaires à la surface de la<br />

rétine (prérétiniens) ou de la papille (prépapillaires).<br />

Ils apparaissent en réponse à<br />

l’ischémie rétinienne. Ces néovaisseaux<br />

sont fragiles. Ils peuvent se rompre et<br />

conduire à des hémorragies prérétiniennes<br />

ou intrarétinéennes.<br />

●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


À ce stade, le sujet est macro-albuminurique (albumine<br />

300 mg/24 h ou 300 mg/g de créatinine).<br />

Sur le plan anatomique, les glomérules rénaux sont le siège<br />

de lésions avancées décrites sous le terme de « glomérulosclérose<br />

de Kimmelstiel et Wilson ». À ce stade, de nombreuses glomérules<br />

disparaissent. Ceux qui persistent présentent des membranes<br />

basales épaissies et déformées, une accumulation de<br />

matériel membranoïde dans les axes mésangiaux et la présence<br />

de volumineux « nodules amyloïdes » qui écrasent et déforment<br />

la lumière des capillaires glomérulaires.<br />

À tous les stades le traitement de la néphropathie diabétique<br />

est basé sur le strict contrôle de la pression artérielle qui doit<br />

être maintenue en-dessous de 130/80 mmHg. Si le sujet est protéinurique,<br />

il est même conseillé de ramener la pression artérielle<br />

en-dessous de 125/75 mmHg (recommandation ALFEDIAM/Société<br />

française de cardiologie).<br />

L’équilibre glycémique du diabète doit être aussi strict que<br />

possible.<br />

Des mesures hygiéno-diététiques doivent être préconisées :<br />

arrêt du tabac, réduction des apports protéiques (< 0,6 g/kg de<br />

poids/jour) et sodés (< 5-6 g de NaCl/jour). La réduction des apports<br />

protéiques est souvent controversée en raison des contraintes<br />

qu’elle entraîne, pour des résultats aléatoires.<br />

2. Macro-angiopathie<br />

La macro-angiopathie du diabétique touche toutes les artères<br />

de l’organisme mais s’exprime surtout au niveau des artères coronaires<br />

et cérébrales, et des membres inférieurs. Les lésions sont<br />

identiques à celles de l’athérosclérose classique, à quelques nuances<br />

près. Compte tenu de la fréquence des lésions artérielles,<br />

tout sujet diabétique doit bénéficier de bilans cardiovasculaires<br />

réguliers : tous les 5 ans chez un diabétique de type 1 ou tous les<br />

2 ans chez le diabétique de type 2 ou chez le diabétique de type<br />

1 après plusieurs années d'évolution.<br />

Les lésions sont distales.<br />

Les dépôts de lipides sont accompagnés par une accumulation<br />

de dépôts glycoprotéiques dans l’intima des artères.<br />

Les lésions sont souvent calcifiées : médiacalcose du diabétique.<br />

Toutes choses étant égales par ailleurs, les lésions d’athérosclérose<br />

surviennent plus tôt chez le patient diabétique que chez<br />

le non-diabétique.<br />

✓ Physiopathologie des lésions macro-angiopathiques : de nombreux<br />

facteurs interviennent dans la genèse de la macro-angiopathie<br />

du diabétique. Trois territoires sont préférentiellement touchés :<br />

les artères coronaires, les artères cérébrales et les artères des<br />

membres inférieurs.<br />

Les différents facteurs concernés par la macro-angiopathie<br />

peuvent être regroupés dans 3 rubriques (v. encadré 3).<br />

✓ L’insuffisance coronaire : l’ischémie myocardique silencieuse,<br />

avec douleurs thoraciques moins fréquentes ou absentes, est<br />

plus répandue chez les diabétiques que chez les non-diabétiques.<br />

C’est pour cette raison qu’il est habituellement recommandé de<br />

faire un dépistage systématique de la maladie coronaire chez les<br />

diabétiques asymptomatiques, mais ayant un risque « élevé » de<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

Sur le chapitre complications aiguës<br />

Les complications aiguës du diabète sucré sont par ordre<br />

de fréquence décroissante :<br />

— les hypoglycémies fréquentes dans le diabète de type 1<br />

insuliné, moins fréquentes dans le diabète de type 2<br />

insuliné, assez rare dans le diabète de type 2 traité par des<br />

médications orales comme les sulfonylurées et les glinides ;<br />

— la céto-acidose est l'apanage du diabète de type 1.<br />

Elle peut être inaugurale ou survenir dans l'évolution<br />

d'un diabète connu à l'occasion d'un arrêt intempestif<br />

de l'insuline ou d'un épisode intercurrent ;<br />

— le coma hyperosmolaire survient chez le diabétique de type 2<br />

âgé. Il est rare mais grave. Il est souvent associé à un épisode<br />

intercurrent et à une altération des fonctions rénales ;<br />

— le coma par acidose lactique est grave mais exceptionnel.<br />

Il survient le plus souvent dans le cadre d'un traitement par<br />

metformine dont les contre-indications n'ont pas été respectées.<br />

Sur le chapitre des complications chroniques<br />

Les complications dégénératives chroniques du diabète :<br />

— touchent à la fois les microvaisseaux (capillaires) et les<br />

gros vaisseaux (artères) ;<br />

— la micro-angiopathie dépend surtout de l'hyperglycémie<br />

(intensité et durée). Elle atteint la rétine et les glomérules<br />

rénaux (néphropathie diabétique) ;<br />

— la macro-angiopathie dépend de l'hyperglycémie, mais<br />

également d'autres facteurs (hypertension artérielle,<br />

dyslipidémie, tabac) ;<br />

— la surveillance des complications micro-angiopathiques est<br />

annuelle : fond d'œil, micro-albuminurie. La fréquence peut<br />

être plus importante en cas de complications évolutives ;<br />

— la macro-angiopathie touche les artères coronaires, les<br />

artères cérébrales et les artères des membres inférieurs.<br />

Un bilan cardiovasculaire doit être effectué tous les ans ou<br />

tous les 2 ans chez les diabétiques de type 2 et chez les<br />

diabétiques de type 1 après plusieurs années d'évolution ;<br />

— la prévention des complications chroniques passe par le<br />

bon contrôle de l'équilibre glycémique : HbA1c < 6,5 %<br />

idéalement, HbA1c < 7% si l'objectif de 6,5 % n'est pas<br />

atteignable. Les autres facteurs de risque doivent être<br />

contrôlés : pression artérielle < 130/80 mmHg, LDL<br />

cholestérol < 1g/L, triglycérides < 1,5 g/L, arrêt du tabac.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 651)<br />

maladie coronarienne. Ce dépistage doit être réalisé par des<br />

épreuves d’effort (EEG et/ou scintigraphie myocardique), complétées<br />

par une coronarographie en cas d’épreuve positive ou<br />

évocatrice d’une ischémie myocardique.<br />

L’infarctus du myocarde lorsqu’il survient a un pronostic moins<br />

bon que chez les non-diabétiques, à court et à long terme. R<br />

657<br />

Q 233


658<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

La resténose après angioplastie est plus importante chez les<br />

diabétiques.<br />

La comparaison angioplastie versus pontage semble montrer<br />

que le pontage donne de meilleurs résultats que l’angioplastie<br />

chez les coronariens multitronculaires.<br />

✓ L’atteinte des troncs artériels supra-aortiques : l’atteinte des<br />

gros troncs vasculaires extracrâniens est responsable de la plupart<br />

des accidents vasculaires cérébraux comme dans la population<br />

non diabétique. Toutefois, l’atteinte des vaisseaux intracrâniens<br />

est plus fréquente chez le diabétique que chez le non-diabétique,<br />

expliquant la survenue d’accidents vasculaires cérébraux dont<br />

la taille est limitée (moins de 15 mm de diamètre). Ils se traduisent<br />

par des lacunes avec les méthodes d’exploration habituellement<br />

utilisées : scanner, IRM de diffusion et de perfusion, échodoppler<br />

continu et artériographie en dernière intention.<br />

✓ L’artériopathie des membres inférieurs : les lésions sont étagées<br />

tout le long de l’arbre artériel mais elles prédominent au niveau<br />

distal, ce qui explique que l’artériopathie du diabétique conduise<br />

fréquemment à des nécroses distales plus ou moins étendues.<br />

En raison de la neuropathie qui est fréquemment associée à<br />

l’artériopathie, le patient souffre peu ou pas.<br />

L'évolution de l'artériopathie passe habituellement par 4 étapes<br />

(classification de Leriche) : stade 1 : pas de symptôme ; stade 2 :<br />

claudication intermittente ; stade 3 : douleur de décubitus ; stade 4 :<br />

lésions trophiques avec nécrose.<br />

Chez le patient diabétique, les stades 2 et 3 sont souvent<br />

court-circuités, car non symptomatiques. C’est pour cette raison<br />

qu’une nécrose distale peut survenir en l’absence de symptomatologie<br />

prémonitoire. En raison du caractère distal des lésions<br />

artérielles, la survenue d’une gangrène distale (de orteil ou de<br />

l’avant-pied) conduit souvent à une chirurgie non conservatrice,<br />

Hyperglycémie<br />

Comme pour la macro-angiopathie,<br />

l’hyperglycémie crée des dommages<br />

macrovasculaires par 2 mécanismes : la<br />

glycation excessive des protéines avec formation<br />

de produits de la glycation avancée<br />

et l’activation du stress oxydatif. La<br />

différence réside dans le fait que dans la<br />

macro-angiopathie, c’est l’intima des artères,<br />

c’est-à-dire le sous-endothélium vasculaire,<br />

qui est soumis à ces phénomènes.<br />

Comme pour la micro-angiopathie, les<br />

lésions de la macro-angiopathie sont<br />

d’autant plus graves que l’hyperglycémie<br />

est plus prolongée et plus intense.<br />

L’UKPDS a démontré une relation<br />

directe entre complications macrovasculaires<br />

et HbA 1c.<br />

Tableau 2<br />

Classification de la rétinopathie<br />

et de la maculopathie diabétique<br />

(classification internationale proposée en 2003<br />

par l'American Academy of Ophthalmology)<br />

RÉTINOPATHIE MACULOPATHIE<br />

❚ Pas de rétinopathie ❚ Œdème maculaire minime<br />

❚ Rétinopathie non proliférante ❚ Œdème maculaire modéré<br />

➙ minime<br />

➙ modérée<br />

➙ sévère<br />

❚ Rétinopathie proliférante<br />

Hypertension artérielle<br />

Souvent associée au diabète sucré, elle<br />

est un facteur de complications macroangiopathiques<br />

comme l’a bien démontré<br />

l’UKPDS.<br />

Dyslipidémie du diabétique<br />

Présente chez près de 50 % des diabétiques<br />

de type 2, elle associe une augmentation<br />

des triglycérides, une diminution<br />

du HDL cholestérol et la présence<br />

de petits LDL denses fortement athérogènes.<br />

Cette dyslipidémie est fortement athérogène.<br />

Elle l’est encore plus lorsqu’elle<br />

est associée à une augmentation du LDL<br />

cholestérol. Dans ce dernier cas, il s’agit<br />

d’une hyperlipidémie combinée associant<br />

❚ Œdème maculaire sévère<br />

car la chirurgie de revascularisation est moins efficace que chez<br />

les sujets non diabétiques.<br />

Principes thérapeutiques : le traitement préventif primaire ou<br />

secondaire de la macro-angiopathie, pour éviter son installation<br />

ou sa progression, passe par 4 mesures fondamentales :<br />

— équilibrer au mieux du diabète en essayant de ramener l’HbA 1c<br />

en-dessous de 7 % (recommandations américaines de l’ADA) ou,<br />

mieux, en-dessous de 6,5 % (recommandations françaises de la<br />

HAS ou recommandations internationales de l’IDF) ;<br />

— traiter les désordres lipidiques en ramenant les triglycérides<br />

en-dessous de 1,5 g/L et le LDL cholestérol en-dessous de 1 g/L.<br />

Les mesures hygiéno-diététiques sont capitales pour atteindre<br />

des taux de triglycérides inférieurs à 1,5 g/L. L’obtention d’un LDL<br />

cholestérol < 1 g/L est souvent conditionnée par un traitement médicamenteux<br />

hypolipidémiant, le plus souvent par la prescription<br />

de statines ;<br />

3 / PHYSIOPATHOLOGIE DES LÉSIONS MACRO-ANGIOPATHIQUES<br />

une augmentation du cholestérol et des<br />

triglycérides.<br />

Tous ces facteurs n’ont pas la même<br />

influence sur les différents territoires<br />

vasculaires (v. tableau 4, d’après Laakso<br />

et al.).<br />

Les lésions coronaires sont surtout<br />

sous la dépendance des perturbations lipidiques.<br />

L’artérite des membres inférieurs<br />

est surtout conditionnée par les altérations<br />

de la glycémie. Pour les lésions des troncs<br />

artériels cervico-cérébraux, les 3 grands<br />

facteurs (hyperglycémie, hypertension<br />

artérielle et dyslipidémie) semblent avoir<br />

un poids identique.<br />

À noter que le tabac aggrave le risque<br />

de macro-angiopathie pour toutes les localisations.<br />

●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


— traiter l’hypertension artérielle : la réduction pondérale, par<br />

des régimes de restriction calorique chez des patients souvent<br />

obèses (diabète de type 2) et la réduction des apports sodés<br />

(moins de 6 g de NaCL par jour) sont les 2 premières mesures<br />

qui doivent être mises en train. Si elles ne sont pas suffisantes,<br />

il faut envisager un traitement médicamenteux anti-hypertenseur<br />

afin de ramener les valeurs de la pression artérielle endessous<br />

de 130/80 mmHg.<br />

Dans tous les cas, l’arrêt total du tabac est impératif.<br />

Autres complications chroniques<br />

1. Neuropathie du diabétique<br />

C’est la complication la plus fréquente et la plus précoce du<br />

diabète sucré. Elle touche surtout les nerfs périphériques où sa<br />

manifestation la plus commune est la polynévrite.<br />

✓ Les lésions anatomiques sont caractérisées par une démyélisation<br />

segmentaire des axones et une atteinte des cellules de<br />

Schwann avec dépôts lipidiques.<br />

✓ Physiopathologie : deux théories sont actuellement avancées.<br />

La théorie vasculaire évoque une atteinte des vasa nervorum,<br />

la théorie métabolique suspecte que les cellules de Schwann<br />

sont altérées par l’accumulation de sorbitol et de fructose synthétisé<br />

à partir du glucose par la voie de l’aldose réductase. Les<br />

cellules de Schwann jouent le rôle de péricytes au niveau des<br />

prolongations axonales des neurones. Comme les péricytes,<br />

elles sont équipées en aldose réductase, leur déterioration est<br />

responsable de phénomènes de démyélinisation segmentaire.<br />

✓ Les mononévrites et multinévrites sont assez fréquentes. L’atteinte<br />

motrice est précédée de douleurs musculaires intenses. Elle<br />

est suivie d’une amyotrophie dans le territoire concerné. L’atteinte<br />

sensitive est caractérisée par des douleurs intenses souvent nocturnes<br />

dans le territoire cutané correspondant. Sur le plan objectif,<br />

on note une hyperesthésie cutanée du territoire concerné et une<br />

anesthésie à la piqûre et à la chaleur. Les territoires touchés sont<br />

les suivants : atteinte du nerf fémoro-cutané (méralgie du diabétique)<br />

et surtout du crural (cruralgie). Les atteintes des nerfs des<br />

membres supérieurs sont possibles mais exceptionnelles. Les atteintes<br />

des nerfs crâniens sont à inclure dans ce cadre avec, par ordre<br />

décroissant de fréquence, le III, le VI et le IV. L’atteinte du nerf facial<br />

est plus fréquente chez le diabétique que chez le non-diabétique.<br />

L’évolution est caractérisée, mais pas toujours, par une amélioration<br />

ou une disparition des symptômes sur une période de plusieurs<br />

semaines.<br />

✓ La polynévrite du diabétique est beaucoup plus fréquente que<br />

les mono- ou multinévrites. L’atteinte est bilatérale et symétrique,<br />

distale au départ, pour remonter progressivement vers<br />

la partie proximale des membres. Elle porte presque exclusivement<br />

sur les nerfs des membres inférieurs. Elle débute par des<br />

paresthésies et des dysesthésies à prédominance nocturne. Au<br />

bout de quelques années, la symptomatologie peut devenir<br />

douloureuse avec des douleurs à exacerbation nocturne qui<br />

cèdent en général au cours de l’exercice physique. L’aréflexie<br />

ostéo-tendineuse est fréquente, les sensibilités profondes et<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

170<br />

100<br />

300<br />

30<br />

Figure 2 Les grandes étapes de l'évolution clinique<br />

de la néphropathie du diabétique.<br />

superficielles peuvent être altérées, les troubles moteurs sont<br />

exceptionnels et tardifs. Sur le plan électrophysiologique, les altérations<br />

sont d’abord sensitives puis motrices.<br />

✓ Les troubles trophiques compliquent la polynévrite diabétique<br />

et sont en général tardifs. Ils peuvent revêtir 2 aspects :<br />

— le mal perforant plantaire : il s’agit d’une ulcération cutanée<br />

qui survient en général au niveau des points de pression de la<br />

plante du pied. Dans près de 50 % des cas, la lésion siège en<br />

regard de la tête du premier métatarsien. Les bords de la plaie<br />

sont atones mais nets. La lésion est en général indolore en raison<br />

de la neuropathie. Le mal perforant plantaire a tendance à<br />

récidiver si les troubles de la statique du pied ne sont pas corrigés.<br />

Les pressions anormales, les frottements anormaux dans<br />

des chaussures inadaptées doivent être évités et corrigés ;<br />

Tableau 3<br />

Filtration glomérulaire (mL/min)<br />

Pas de néphropathie Néphropathie incipiens Néphropathie avérée<br />

Albuminurie (mg/j)<br />

▲ ▲ ▲ ▲ ▲<br />

Début de<br />

diabète<br />

Mauvais<br />

équilibre<br />

Classification de la rétinopathie<br />

et de la maculopathie diabétique<br />

(classification française de l'ALFEDIAM)<br />

Pas de rétinopathie<br />

Rétinopathie non proliférante<br />

❚ minime<br />

❚ modérée<br />

❚ sévère (ou préproliférante)<br />

Rétinopathie proliférante<br />

❚ minime<br />

❚ modérée<br />

❚ sévère<br />

❚ compliquée<br />

Macroalbuminurie<br />

permanente<br />

} R<br />

Maculopathie diabétique<br />

❚ maculopathie œdémateuse<br />

➙ œdème maculaire localisé entouré d’exsudats<br />

➙ œdème maculaire diffus de la région centrale<br />

(cystoïde ou non cystoïde)<br />

❚ maculopathie ischémique<br />

Évolution sous<br />

antihypertenseur<br />

— 0,5 mL/min/mois<br />

Évolution<br />

spontanée<br />

— 1,2 mL/min/mois<br />

Macroalbuminurie<br />

Années de diabète<br />

<br />

MACULOPATHIE<br />

DIABÉTIQUE<br />

659<br />

Q 233


Tableau 4<br />

— l’ostéo-arthropathie du diabétique : elle succède en général à<br />

un mal perforant plantaire dont les lésions ont pris un caractère<br />

térébrant avec une surinfection locale. Le foyer infectieux et<br />

ostéolytique s’accompagne d’une destruction articulaire et<br />

osseuse qui se situe en général au niveau des articulations métatarso-phalangiennes.<br />

La destruction se poursuit jusqu’à ce que<br />

l’infection ait disparu et jusqu’à ce que le séquestre osseux ait<br />

été totalement éliminé par le trajet fistuleux qui assure la communication<br />

entre le foyer profond et l’extérieur. La guérison s’accompagne<br />

d’un remaniement ostéo-articulaire avec déformation<br />

du pied : raccourcissement antério-postérieur, effondrement<br />

de la voûte plantaire.<br />

✓ Les atteintes végétatives comprennent :<br />

— les manifestations vasomotrices et sudorales : hypotension<br />

orthostatique, syndrome de dénervation cardiaque avec tachycardie<br />

sinusale et disparition de l’arythmie physiologique respiratoire,<br />

atteinte sudorale avec anhydrose plantaire, disparition<br />

des réactions pilomotrices ;<br />

— les manifestations génito-urinaires : atteinte génitale (éjaculation<br />

rétrograde et déficit génésique), atteinte vésicale (atonie<br />

de la paroi vésicale avec mictions espacées, laborieuses, prolongées,<br />

avec jet faible) ;<br />

— les manifestations digestives : gastroparésie du diabétique, diarrhée<br />

du diabétique, motrice, intermittente à prédominance nocturne.<br />

✓ Prise en charge de la neuropathie du diabétique : sa prévention<br />

passe par le bon contrôle de l’équilibre diabétique.<br />

Lorsque la neuropathie est installée, les signes sont plus incommodants<br />

et sont les plus douloureux. À ce stade ce sont les traitements<br />

symptomatiques qui sont utilisés : analgésiques, anticonvulsivants,<br />

antidépresseurs, benzodiazépines.<br />

2. Complications infectieuses<br />

Elles sont favorisées par l’hyperglycémie.<br />

✓ Infections cutanées : ce sont les staphylococcies donnant des<br />

furoncles, les surinfections des lésions trophiques des pieds, les<br />

mycoses cutanées ou portant sur les muqueuses buccales ou<br />

génitales.<br />

660<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

Facteurs de risque associés à la macro-angiopathie chez le diabétique de type 2<br />

FACTEUR<br />

DE RISQUE<br />

Hyperglycémie + ++ +++<br />

Durée du diabète + ++ +++<br />

Hypertension ++ <br />

Hypercholestérolémie ++ + +<br />

Baisse du HDL cholestérol +++ ++ <br />

Hypertriglycéridémie +++ ++ <br />

D'après Laakso et al. Diab Rev 1997;5:294-315.<br />

MALADIE<br />

CORONARIENNE<br />

ACCIDENT VASCULAIRE<br />

CÉRÉBRAL<br />

ARTÉRITE DES<br />

MEMBRES INFÉRIEURS<br />

✓ Infections dentaires : abcès dentaires, pyorrhée alvéolo-dentaire.<br />

✓ Infections urinaires : elles sont fréquentes, parfois symptomatiques<br />

(polynéphrite aiguë, ou subaiguë se traduisant par une fièvre<br />

traînante), souvent asymptomatiques. Dans tous les cas de figure,<br />

elles doivent être traitées, car elles déséquilibrent le diabète.<br />

3. Autres complications chroniques<br />

La cardiomyopathie du diabétique est caractérisée par un<br />

remodelage ventriculaire dont les mécanismes sont multiples et<br />

intriqués : mécanique avec déformation des cellules myocardiques,<br />

ischémique avec apoptose des cellules myocardiques et<br />

biochimique avec hypertrophie du collagène interstitiel par glycation<br />

excessive.<br />

✓ La cardiopathie du diabétique comporte plusieurs stades :<br />

— stade préclinique : il est reconnu par des explorations non invasives.<br />

À ce stade il existe un dysfonctionnement ventriculaire,<br />

asymptomatique, caractérisé par des altérations des indices systoliques<br />

du ventricule gauche avec en particulier une diminution<br />

de la fraction d'éjection ventriculaire. L'échocardiographie est<br />

une investigation importante à ce stade.<br />

— stade clinique : il est caractérisé par une hypertrophie ventriculaire<br />

gauche qui finit par conduire à une insuffisance cardiaque.<br />

✓ Le traitement dépend du stade :<br />

— chez les sujets dont le risque est de développer une insuffisance<br />

cardiaque mais qui n'ont pas d'anomalie apparente, le<br />

traitement consiste à administrer des inhibiteurs de l'enzyme<br />

de conversion (IEC) ou des antagonistes des récepteurs de l'angiotensine<br />

2.<br />

— chez les sujets qui ont des modifications structurelles du cœur,<br />

l'objectif du traitement est de ralentir la progression de l'insuffisance<br />

cardiaque. Les mesures diététiques (régimes hypocaloriques<br />

et hyposodés) doivent être méticuleusement respectées.<br />

Les traitements pharmacologiques sont constitués par les inhibiteurs<br />

de l'enzyme de conversion, les antagonistes de l'angiotensine<br />

2, les bêtabloquants, les diurétiques. À ce stade, certains<br />

médicaments doivent être proscrits : anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens et glitazones.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


✓ Néphroangiosclérose : à l'inverse de la glomérulosclérose, elle<br />

survient préférentiellement dans le diabète de type 2. Elle est<br />

caractérisée par une sclérose des artères rénales avec destruction<br />

progressive du floculus et atrophie rénale. Elle est liée à l'âge,<br />

au diabète et aux altérations de la pression artérielle. Son évolution<br />

est lente mais elle peut aboutir à une insuffisance rénale<br />

chronique terminale. Pour enrayer sa progression, il convient de<br />

contrôler au mieux les désordres glycémiques et tensionnels.<br />

L'arrêt du tabac est impératif.<br />

✓ Les complications oculaires en dehors de la rétinopathie diabétique<br />

sont multiples.<br />

La relation entre glaucome chronique à angle ouvert et diabète<br />

reste controversée.<br />

Le glaucome néovasculaire est lié à la prolifération de néovaisseaux<br />

dans l’angle irido-cornéen et sur l'iris. Générateur d'une hypertension<br />

oculaire marquée, de douleurs oculaires parfois intenses, il<br />

est de traitement difficile et peut évoluer rapidement vers la cécité.<br />

La cataracte est liée aux troubles métaboliques, en particulier<br />

à l'accumulation de sorbitol dans le cristallin.<br />

La névrite optique est associée à une intoxication éthylo-tabagique.<br />

Enfin, il existe des complications infectieuses palpébro-conjonctivales<br />

: blépharites, orgelets…<br />

COMPLICATIONS AIGUËS<br />

Céto-acidose diabétique<br />

Complication grave du diabète de type 1 (85 % des cas), elle<br />

existe aussi chez le diabétique de type 2 (15 %). Le taux de mortalité<br />

est de moins de 5 % dans les centres spécialisés. La présence<br />

d’un coma, d’une hypotension et les âges extrêmes grèvent<br />

ce pronostic. Sa fréquence a diminué grâce à l’éducation des diabétiques.<br />

Son incidence annuelle reste néanmoins élevée, entre<br />

4,6 et 8 pour 1 000 personnes diabétiques par an.<br />

1. Physiopathologie<br />

La céto-acidose est la conséquence d’une carence profonde en<br />

insuline associée à une élévation des hormones de contre-régulation<br />

glycémique (glucagon, catécholamines, cortisol et hormone de<br />

croissance).<br />

✓ Conséquences sur le métabolisme glucidique : l’association de ces<br />

2 mécanismes entraîne une stimulation de la production hépatique<br />

de glucose et une réduction de l’utilisation périphérique du glucose<br />

au niveau des muscles, du foie et du tissu adipeux. La conséquence<br />

est une hyperglycémie. Quand elle dépasse le seuil rénal du glucose<br />

(environ 1,80 g/L), elle est responsable d’une glycosurie qui, ellemême,<br />

entraîne une perte d’eau. C’est la diurèse osmotique. La<br />

conséquence finale est une déshydratation importante.<br />

✓ Conséquences sur le métabolisme lipidique : l’élévation des hormones<br />

de contre-régulation glycémique et l'insulinopénie stimulent<br />

la lipolyse. Les acides gras libérés sont ensuite captés par le foie<br />

qui les convertit en corps cétoniques : acide β-hydroxybutyrique<br />

et acide acéto-acétique. L'excès d’ions H+ qui en résulte contribue<br />

à l’installation d’une acidose métabolique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

2. Étiologie<br />

La céto-acidose peut être révélatrice d’un diabète de type 1<br />

(20 à 30 % des cas). Le plus souvent elle fait suite à une infection,<br />

à une pathologie cardiovasculaire, à un arrêt volontaire, ou<br />

par oubli de la prise d’insuline, à une grossesse ou à un traitement<br />

par corticoïdes.<br />

3. Clinique<br />

L'installation de la céto-acidose est brutale surtout chez l'enfant,<br />

la femme enceinte ou lors d'un dysfonctionnement d'une pompe<br />

à insuline (typiquement moins de 24 heures).<br />

✓ Phase de cétose simple : c’est l’association d'un syndrome polyuro-polydipsique,<br />

reflet de l'hyperglycémie, et de symptômes de<br />

cétose simple caractérisés par des troubles digestifs (douleurs<br />

abdominales, nausées, anorexie). À ce stade un diabétique bien<br />

éduqué peut, grâce à une prise en charge précoce et adaptée,<br />

éviter l'aggravation de cette cétose vers l'acidose.<br />

✓ Phase de céto-acidose : aux signes cliniques de cétose simple<br />

vont s'ajouter les symptômes liés à l'acidose métabolique :<br />

— des troubles de la conscience qui varient de la conscience normale<br />

(20 %) jusqu'au coma (10 %). Le plus souvent ils se manifestent<br />

par un état de stupeur et d'obnubilation ;<br />

— une dyspnée de Kussmaul qui est une polypnée ample et<br />

bruyante à 4 temps ;<br />

— des signes digestifs tels que nausées, vomissements (jusqu'à<br />

la gastrite hémorragique), douleurs abdominales avec possibilité<br />

de tableaux pseudo-chirurgicaux ;<br />

— une déshydratation liée à la diurèse osmotique et aggravée par<br />

les vomissements. Elle est globale mais prédomine sur le secteur<br />

extracellulaire (pli cutané, tachycardie, hypotension artérielle<br />

jusqu'au collapsus cardiovasculaire) ;<br />

— une hypothermie, favorisée par l'acidose, qui peut masquer un<br />

syndrome infectieux.<br />

4. Examens complémentaires<br />

Dès que le diagnostic de céto-acidose est suspecté, il faut<br />

réaliser en urgence une glycémie capillaire et rechercher les<br />

corps cétoniques urinaires ou plasmatiques.<br />

✓ Les examens complémentaires nécessaires en urgence sont :<br />

— l’ionogramme sanguin (Na+, K+, Cl-, RA), urée, créatinine, protides<br />

et glycémie veineuse ;<br />

— la numération formule sanguine ;<br />

— les gaz du sang ;<br />

— l’électrocardiogramme ;<br />

— et si nécessaire, hémocultures, examen cytobactériologique des<br />

urines, enzymes cardiaques, hépatiques, pancréatiques et radiographie<br />

thoracique.<br />

✓ Les perturbations biologiques de la céto-acidose sont :<br />

— glycémie plasmatique > 2,50 g/L ;<br />

— pH artériel < 7,30 ;<br />

— bicarbonates < 15 mmol/L ;<br />

— corps cétoniques plasmatiques présents ;<br />

— corps cétoniques urinaires ++ à ++++ ;<br />

— trou anionique (Na- (Cl + HCO3)) > 10 mmol/L.<br />

R Q 233<br />

661


✓ Les perturbations de la céto-acidose sévère sont :<br />

— les bicarbonates < 10 mmol/L ;<br />

— le pH < 7 ;<br />

— l’osmolarité > 330 mOsm/kg.<br />

5. Traitement<br />

Le but du traitement est de restaurer la volémie, de corriger<br />

les désordres hydro-électrolytiques, la céto-acidose et la carence<br />

insulinique. Il faut également traiter le facteur déclenchant.<br />

✓ La réhydratation hydro-électrolytique doit être adaptée selon<br />

l'âge, la fonction cardiaque et la tolérance hémodynamique. En<br />

moyenne, environ 6 litres sur 24 heures dont la moitié au cours<br />

des 6 premières heures avec la répartition suivante : 1 litre au<br />

cours de la première heure, 1 litre sur les 2 heures suivantes, puis<br />

1 litre sur 3 heures et enfin 1 litre toutes les 6 heures.<br />

Les solutés à utiliser sont des macromolécules en cas de collapsus,<br />

sinon du sérum salé isotonique (9 ‰) tant que la glycémie est<br />

supérieure à 2,50 g/L. Lorsqu’elle est inférieure à 2,50 g/L, utiliser<br />

du glucosé à 5 % avec du NaCl, voire du glucosé à 10 %. Il ne faut<br />

pas utiliser des bicarbonates si le pH est supérieur à 7 ; en-dessous<br />

son utilisation reste discutée.<br />

La quantité de potassium à apporter dépend de l'ionogramme<br />

sanguin initial, de l'électrocardiogramme et de la diurèse. La dose<br />

doit être adaptée à partir de l'ionogramme sans dépasser en<br />

général 2 g de KCl par heure. Il y a toujours un déficit potassique<br />

et le risque est celui de l’hypokaliémie qui se démasque rapidement<br />

après le début de la prise en charge de la céto-acidose (risque<br />

d’arythmie, d’arrêt cardiaque).<br />

✓ L’insulinothérapie doit être administrée à la pompe intraveineuse<br />

[5 à 10 UI/h (0,1 UI/kg/h)].<br />

Lorsque la cétose disparaît (après 2 contrôles successifs négatifs),<br />

il faut passer à l’insuline sous-cutanée.<br />

✓ Les autres traitements nécessaires sont, en dehors du traitement<br />

du facteur déclenchant, une héparinothérapie à dose préventive<br />

qui peut s'avérer nécessaire.<br />

La surveillance clinique doit être horaire (conscience, fréquence<br />

respiratoire, pouls, tension artérielle, diurèse, cétonurie<br />

et glycémie capillaire) et la surveillance biologique toutes les<br />

4 heures.<br />

Enfin, il faut réaliser les soins de nursing habituels à toute<br />

réanimation générale.<br />

6. Complications<br />

✓ Liées au traitement, ce sont :<br />

— une hypoglycémie et une hypokaliémie ;<br />

— un œdème cérébral, rare et associé à une mortalité importante ;<br />

— une surcharge hydrosodée due à une correction trop rapide de<br />

l’hypovolémie.<br />

✓ Liées à la céto-acidose, ce sont :<br />

— les infections qui sont favorisées par la déshydratation (pneumopathie,<br />

infections urinaires…) ;<br />

— les complications thromboemboliques ;<br />

— les complications digestives (vomissements hémorragiques,<br />

pancréatite aiguë).<br />

662<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

7. Prévention<br />

Elle passe par l’auto-surveillance quotidienne des glycémies<br />

capillaires, l’adaptation du traitement et le fait de ne jamais arrêter l’insuline.<br />

La cétonurie sera systématiquement recherchée si la glycémie<br />

capillaire dépasse 2,50 g/L ou en cas de symptômes cardinaux.<br />

Le patient doit savoir dépister les situations à risque (infections,<br />

intolérance digestive, chirurgie…) et savoir comment y faire face.<br />

En cas de cétonurie et de glycosurie importantes, il doit faire, en<br />

plus de son traitement habituel, un supplément de 4 à 8 UI d’insuline<br />

rapide ou ultrarapide. Ces injections seront répétées toutes<br />

les 3 h jusqu’à disparition de la cétonurie. En cas d’échec, il doit<br />

prendre contact rapidement avec son médecin. L’hospitalisation<br />

s’impose dès que les vomissements empêchent l’alimentation.<br />

Coma hyperosmolaire<br />

Le coma hyperosmolaire survient essentiellement chez le<br />

sujet âgé ayant un diabète de type 2 méconnu ou négligé. Bien<br />

que son incidence soit moindre que celle de la céto-acidose, elle<br />

reste une forme grave de décompensation avec une mortalité plus<br />

élevée d’environ 15 %. Il se définit par l’association d’une hyperglycémie<br />

> 33 mmol/L et d’une osmolarité supérieure à 350 mmol/L,<br />

en l’absence d’une acidose et d’une cétonémie notables.<br />

1. Physiopathologie<br />

Comme pour la céto-acidose, c’est l’action combinée du déficit<br />

relatif en insuline à une augmentation des taux d’hormones<br />

de la contre-régulation (glucagon, catécholamines, cortisol et<br />

hormone de croissance) qui entraîne une hyperglycémie majeure<br />

par stimulation de la production hépatique de glucose et la réduction<br />

de son utilisation périphérique. Cette hyperglycémie entraîne<br />

à son tour une diurèse osmotique qui, lorsqu’elle est insuffisamment<br />

compensée par les apports hydriques, est responsable<br />

d’une déshydratation majeure qui elle-même entraîne une insuffisance<br />

rénale aiguë fonctionnelle qui aggrave, à son tour, l’hyperglycémie<br />

créant un véritable cercle vicieux.<br />

En revanche, la lipolyse et la cétogenèse restent modérées, car<br />

persiste une insulino-sécrétion résiduelle. Cette décompensation<br />

s’exprime donc surtout par une hyperglycémie avec hyperosmolarité.<br />

2. Étiologie<br />

Le coma hyperosmolaire survient chez un sujet âgé avec plusieurs<br />

comorbidités, en institution, aux capacités physiques et mentales<br />

diminuées, ayant du mal à ressentir la soif. Il présente un diabète<br />

de type 2 méconnu ou négligé. Le coma hyperosmolaire est le<br />

plus souvent déclenché par une infection intercurrente, des troubles<br />

digestifs (diarrhée, vomissements), une pathologie cardiovasculaire<br />

ou par la prise de certains médicaments (corticoïdes, diurétiques…).<br />

3. Clinique<br />

Le coma hyperosmolaire s'installe de manière très progressive<br />

sur plusieurs jours, voire sur plusieurs semaines, au cours<br />

desquels se développent l'hyperglycémie, la polyurie osmotique<br />

et la déshydratation. Le patient passe d'une asthénie croissante<br />

à un état d'obnubilation.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


Le coma hyperosmolaire installé est caractérisé par :<br />

— des signes neurologiques avec altération importante de la conscience<br />

jusqu'au coma, avec possibilité de signes de focalisation<br />

et de crises convulsives ;<br />

— des signes de déshydratation globale majeure avec perte de<br />

poids importante, hyperthermie et hypotension artérielle allant<br />

jusqu'au collapsus cardiovasculaire.<br />

Les signes cliniques sont plus marqués que pour la cétoacidose<br />

mais sans acidose métabolique, sans cétose excessive<br />

et sans dyspnée de Kussmaul.<br />

4. Examens complémentaires<br />

Les résultats habituels sont :<br />

— une glycémie > 6 g/L ;<br />

— un pH artériel > 7,30 ;<br />

— des bicarbonates plasmatiques > 15 mmol/L ;<br />

— une cétonémie et une cétonurie faibles ;<br />

— une hyperosmolarité > 320 mOsm/kg.<br />

5. Traitement<br />

✓ Réhydratation hydroélectrolytique : les solutés à utiliser sont<br />

des macromolécules en cas de collapsus, sinon utiliser du sérum<br />

salé isotonique pour les premiers litres, puis du sérum salé à 4,5 pour<br />

1 000 ou du glucosé à 5 % avec 4 à 5 g de NaCl par litre dès que<br />

la glycémie est inférieure à 3 g/L. Le débit est à adapter à la tolérance<br />

clinique, la natrémie et à l'osmolarité du patient. Le déficit<br />

hydro-électrolytique est plus important que dans la céto-acidose.<br />

Au total, ce sont 6 à 10 litres qui seront perfusés au cours<br />

des 24 premières heures dont la moitié sur les 8 premières heures<br />

de la façon suivante : 1 litre au cours de la première heure, 1 litre<br />

sur les 2 heures suivantes, puis 1 litre toutes les 3 heures.<br />

La correction du déficit potassique par apport de KCl se fait<br />

en fonction de la kaliémie de départ mais en général après restauration<br />

des conditions hémodynamiques et reprise de la diurèse<br />

(en principe à partir du troisième litre de perfusion).<br />

✓ Insulinothérapie : il faut utiliser de l’insuline rapide à la pompe<br />

intraveineuse au débit initial de 5 à 10 UI/h (0,1 UI/kg/h), puis l’adapter<br />

en fonction de la glycémie qui ne doit pas s'abaisser trop<br />

vite dans les 12 premières heures.<br />

✓ Autres : en dehors du traitement du facteur déclenchant, une<br />

héparinothérapie à dose préventive peut être nécessaire. La surveillance<br />

clinique doit être horaire (conscience, fréquence respiratoire,<br />

pouls, tension artérielle, diurèse, cétonurie et glycémie capillaire)<br />

et la surveillance biologique toutes les 4 heures. Enfin, il faut réaliser<br />

les soins de nursing habituels à toute réanimation générale.<br />

6. Complications<br />

✓ Liées au coma hyperosmolaire, ce sont :<br />

— le collapsus cardiovasculaire avec oligo-anurie par nécrose<br />

tubulaire aiguë ;<br />

— les infections qui sont favorisées par la déshydratation<br />

(pneumopathie, infections urinaires…) ;<br />

— les complications thromboemboliques.<br />

✓ Liées au traitement : ce sont les mêmes que pour la céto-acidose.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007<br />

7. Prévention<br />

Elle passe par l'identification de situations à risque telles<br />

qu'une infection, une chirurgie, la prise d'un nouveau médicament<br />

(corticoïdes, diurétiques…), ou toute situation entraînant un<br />

risque de déshydratation chez un sujet diabétique.<br />

Ce risque est majoré lorsque le patient est âgé, en institution,<br />

avec des troubles des fonctions supérieures et lorsque son diabète<br />

est négligé ou sous antidiabétiques oraux. Dans ces situations<br />

à risque, il convient d'intensifier la surveillance du diabète<br />

au moyen de glycémie veineuse ou capillaire.<br />

Le choix du traitement chez le sujet âgé est aussi primordial.<br />

Le recours préférentiel à l'insulinothérapie dans ces situations<br />

permet une meilleure surveillance du patient grâce au passage<br />

quotidien d'une infirmière qui réalise une glycémie capillaire systématique.<br />

Acidose lactique<br />

L’acidose lactique par surdosage en metformine est rare et<br />

grave avec une mortalité élevée d’environ 50 %. Une contre-indication<br />

préalable à l’utilisation de la metformine est souvent en<br />

cause. Fréquemment, on retrouve comme facteur déclenchant un<br />

épisode d’insuffisance rénale aiguë. Le problème dominant est<br />

celui d’imputer à la metformine l’acidose lactique. Autrement dit,<br />

cela revient à distinguer les situations où la metformine induit<br />

une acidose lactique et celles beaucoup plus fréquentes où une<br />

acidose lactique de cause générale survient chez un patient diabétique<br />

traité par metformine.<br />

1. Physiopathologie et étiologie<br />

L’acidose lactique se définit par un taux de lactate sanguin<br />

supérieur à 5-6 mmol/L et un pH artériel 7,35. L’acidose lactique<br />

provient du catabolisme anaérobie du glucose. La lactatémie<br />

normale est d’environ 1 mmol/L. Elle résulte d’un équilibre<br />

entre sa production physiologique et sa métabolisation par le<br />

foie via la néoglucogenèse hépatique.<br />

✓ Acidose lactique de cause générale : l’hyperproduction d’acide<br />

lactique survient dans toutes les situations où l’oxygénation tissulaire<br />

est mauvaise tels que les états de choc, une anémie<br />

sévère, une intoxication à l’oxyde de carbone mais aussi dans<br />

certaines tumeurs malignes. L’acidose lactique peut également<br />

survenir suite à un défaut de métabolisation tel que dans l’insuffisance<br />

hépatique grave au cours d’une hépatite aiguë, d’une<br />

cirrhose au stade terminal ou d’un foie de choc.<br />

✓ Acidose lactique liée à la prise de metformine : elle est rare, car<br />

la metformine n'entraîne qu'une hyperproduction minime de lactates<br />

par l’intestin et qu'une inhibition modérée de la néoglucogenèse<br />

hépatique et rénale (effet anti-diabétique recherché).<br />

L’acidose lactique toxique n’apparaît qu'en présence de facteurs<br />

favorisants : insuffisance rénale, insuffisance hépatique, hypoxie,<br />

décompensation aiguë ou subaiguë d'une insuffisance rénale.<br />

Pour cette raison, les règles de prescription des biguanides doivent<br />

être strictement respectées. Pour prouver l’imputabilité de<br />

la metformine, il est essentiel en cas d’acidose lactique de doser<br />

la metforminémie.<br />

R Q 233<br />

663


2. Diagnostic<br />

L’acidose lactique débute par un syndrome douloureux avec<br />

crampes musculaires diffuses, douleurs abdominales et thoraciques<br />

et avec des troubles digestifs (nausées, vomissements…).<br />

Ultérieurement apparaissent une polypnée et des troubles de la<br />

conscience variables allant de l’agitation au coma. Enfin, viennent<br />

l’oligo-anurie et le collapsus.<br />

Sur le plan biologique, il existe une acidose métabolique sévère<br />

à trou anionique élevé et une hyperlactatémie. Là encore, le<br />

dosage de la metforminémie est un élément indispensable du<br />

diagnostic d’imputabilité.<br />

3. Traitement<br />

Il repose sur des mesures de réanimation générale et sur le<br />

traitement spécifique de l’accumulation de la metformine par<br />

hémodialyse. En effet, cette dernière est facilement dialysable.<br />

Hypoglycémies<br />

Les hypoglycémies sont fréquentes et quasiment obligatoires<br />

chez un diabétique de type 1 bien contrôlé. Un diabétique de<br />

type 1 ayant une HbA 1c de moins de 7 % passerait environ 10 %<br />

de son temps en hypoglycémie et ferait au moins deux hypoglycémies<br />

modérées par semaine. La fréquence des hypoglycémies<br />

sévères, c’est-à-dire nécessitant l’intervention d’une tierce<br />

personne, augmente quand le diabète de type 1 est bien contrôlé.<br />

Dans le diabète de type 2, le risque d'hypoglycémie grave est 10<br />

à 20 fois plus faible que dans le diabète de type 1.<br />

1. Étiologie<br />

Les principaux facteurs de risque sont liés :<br />

— au diabète et à son traitement (un diabète de type 1 ou 2, l’ancienneté<br />

du diabète, des antécédents de coma hypoglycémique,<br />

une mauvaise perception de l’hypoglycémie, un objectif glycémique<br />

strict avec utilisation d’un traitement intensif) ;<br />

— à des erreurs d’adaptation des doses d’insuline ou un repas ou<br />

une collation insuffisante, une mauvaise connaissance des équivalences<br />

glucidiques, un exercice physique non programmé, une<br />

prise concomitante d'alcool ;<br />

— à des erreurs dans la réalisation de l’injection de l’insuline, la<br />

présence de zones de lipodystrophies ;<br />

— à une prise de médicaments potentialisant les hypoglycémies.<br />

2. Clinique et diagnostic<br />

Les signes cliniques de l’hypoglycémie associent d’abord des<br />

symptômes neurovégétatifs liés à la stimulation du système nerveux<br />

autonome (sueurs, pâleur des extrémités, tachycardie, palpitations,<br />

nausées et vomissements) qui apparaissent en-dessous d’un seuil<br />

glycémique de 0,60 g/L. Ensuite, à partir d’un seuil < 0,50 g/L se<br />

révèlent des symptômes « neuroglycopéniques » liés à la souffrance<br />

du système nerveux central : sensation de malaise avec<br />

asthénie, troubles de la concentration, troubles visuels, troubles<br />

psychiatriques et neurologiques. Enfin, le coma hypoglycémique<br />

d’installation relativement brutale, précédé ou non de symptômes<br />

annonciateurs, associe un coma de profondeur variable avec des<br />

664<br />

II-Q233<br />

Complications du diabète<br />

signes d’irritation pyramidale, une tachycardie, des sueurs, la possibilité<br />

de crises convulsives et de signes de focalisation.<br />

La confirmation du diagnostic est apportée le plus souvent<br />

par la réalisation d’une glycémie capillaire. Sa réalisation ne doit<br />

jamais retarder le resucrage.<br />

3. Traitement<br />

Si le sujet est conscient et capable de déglutir, le resucrage<br />

doit être immédiat et comporter 15 à 20 g de sucre à renouveler<br />

au bout de 20 à 30 minutes, si la glycémie est toujours basse.<br />

Si le sujet est inconscient ou incapable de déglutir, chez les<br />

sujets insulinés, le glucagon peut être utilisé par la voie sous-cutané<br />

ou intramusculaire et peut être répété au bout de 10 minutes en<br />

cas d’inefficacité. Son action consiste à libérer les stocks hépatiques<br />

de glycogène. Dès que le sujet reprend conscience, il doit<br />

reconstituer ses stocks de glycogène pour éviter une nouvelle<br />

hypoglycémie en ingérant au moins 60 g de sucre.<br />

Dans tous les cas, la voie intraveineuse pourra être utilisée :<br />

2 à 4 ampoules de glucosé 30 % ou 2 ampoules de glucosé 50 %<br />

avec éventuellement mise en place secondaire d’une perfusion<br />

continue de glucosé à 5 ou 10 %.<br />

En cas d’hypoglycémie sévère sous sulfamides, il est recommandé<br />

d’hospitaliser le patient pour établir une surveillance et de<br />

mettre en place une perfusion de glucosé en raison de la demivie<br />

prolongée des sulfamides hypoglycémiants.<br />

4. Prévention<br />

Elle est basée sur le renforcement de l'éducation des sujets<br />

diabétiques insulinés ou traités par des sulfamides hypoglycémiants<br />

ou des glinides : adaptation des doses d'insuline, conduite<br />

à tenir face à un jeûne ou face à un effort physique inhabituel,<br />

introduction de collations glucidiques interprandiales ou avant<br />

le coucher. Il faut également que le patient et son entourage aient<br />

une bonne connaissance des symptômes de l'hypoglycémie ainsi<br />

que des différentes techniques de resucrage. La recherche de<br />

lipodystrophies ainsi que la réalisation de l'injection d'insuline<br />

par le patient seront aussi systématiquement revues. Enfin, un<br />

changement du schéma insulinique devra être discuté en cas<br />

d'hypoglycémies fréquentes ou sévères. ■<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

DÉJÀ TRAITÉ : ● 1 re partie :<br />

« Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte ».<br />

Rev Prat 2007;57[1]:71-8.<br />

● 2 e partie :<br />

« Diabète sucré de type 2 de l’adulte ».<br />

Rev Prat 2007;57[5]:531-6.<br />

◗ Traité de diabétologie<br />

Coord. André Grimaldi<br />

Paris : Médecine-Sciences,<br />

Flammarion<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Complications du diabète<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2007;57:<br />

à paraître)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 MARS 2007


GÉNÉRALITÉS<br />

Le diabète de type 1 (autrefois diabète insulinodépendant)<br />

résulte d’une destruction des cellules<br />

bêta des îlots de Langerhans du pancréas,<br />

responsable d’une carence en insuline.<br />

Cette forme de diabète concerne 1 diabétique<br />

sur 5. La prévalence en France est de 200 000 sujets, et<br />

l’incidence est de 10 cas pour 10 5 habitants/an avant l’âge de 15 ans.<br />

Il touche principalement l’enfant et l’adulte jeune avant 35 ans<br />

(sex-ratio = 1).<br />

Il nécessite habituellement le recours à l’insuline d’emblée.<br />

La gravité de cette forme de diabète s’explique par :<br />

— la durée d’exposition à l’hyperglycémie souvent associée à des<br />

complications touchant les petits vaisseaux (rétine, glomérule<br />

rénal, nerfs périphériques) ;<br />

— le risque d’hypoglycémie sévère plus fréquent au cours des<br />

traitements intensifiés ;<br />

— les problèmes liés à l’observance, du fait des contraintes diététiques,<br />

des injections multiples et de l’autosurveillance glycémique.<br />

DÉFINITION<br />

Diabète sucré<br />

de type 1 de l’enfant et de l’adulte. Diabète sucré<br />

de type 2 de l’adulte. Complications du diabète<br />

Le diabète sucré se définit par une glycémie à jeun sur sang veineux<br />

supérieure à 1,26 g/L à 2 reprises ou par une glycémie à n’importe<br />

quel moment de la journée > 2 g/L.<br />

Affirmer un diabète de type 1 repose sur :<br />

— l’âge jeune ;<br />

— l’absence d’obésité ;<br />

— le début rapide ou explosif des symptômes (en quelques semaines<br />

seulement) ;<br />

— des symptômes évoquant une carence en insuline (= syndrome<br />

cardinal) : perte de poids avec appétit conservé, syndrome polyuro-polydypsique<br />

brutal ;<br />

— un tableau clinique et biologique de cétose avec la présence<br />

de sucre et d’acétone dans les urines ou cétonémie augmentée.<br />

La recherche de marqueurs immunologiques (anticorps) est<br />

utile mais non nécessaire au diagnostic et à la mise en route du<br />

traitement par insuline.<br />

PHYSIOPATHOLOGIE<br />

I-00-Q000 II-Q233<br />

1 re partie — Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007<br />

D r Sophie Reffet, Pr Charles Thivolet<br />

Service endocrinologie-diabète-nutrition, hôpital Édouard-Herriot, CHU, 69437 Lyon Cedex 03<br />

charles.thivolet@chu-lyon.fr<br />

Objectifs<br />

• Diagnostiquer un diabète chez l’enfant et chez l’adulte.<br />

• Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.<br />

• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.<br />

• Décrire les principes de la prise en charge au long cours.<br />

La destruction des cellules bêta résulte le plus souvent (> 95 %)<br />

d’un mécanisme auto-immun sur un terrain génétique favorisant.<br />

Il existe des formes idiopathiques à anticorps négatifs regroupant<br />

le diabète du sujet noir originaire de l’Afrique équatoriale<br />

et le diabète MODY 3.<br />

✓ En faveur de la nature auto-immune, on retient :<br />

— la présence d’autoanticorps dans le sérum des patients : cytoplasmiques<br />

comme l’insuline ou le glutamate décarboxylase<br />

(GAD65), membranaires comme IA-2 (islet antigen 2 ou tyrosine<br />

phosphatase) ;<br />

— la présence d’un infiltrat lympho-monocytaire dans les îlots des<br />

patients, ou insulite ;<br />

— la récidive précoce du diabète après greffe d’un hémipancréas<br />

entre jumeaux monozygotes discordants pour le diabète ;<br />

71


72<br />

II-Q233<br />

— l’amélioration de la fonction des cellules bêta au cours des<br />

traitements immuno-suppresseurs ;<br />

— les modèles animaux de diabète auto-immun où il est possible<br />

de transférer la maladie à des animaux sains par l’injection de<br />

lymphocytes T provenant d’animaux diabétiques ;<br />

— la fréquence des maladies auto-immunes associées.<br />

✓ En faveur du terrain génétique prédisposant, on retient :<br />

— l’importance des associations avec le système HLA : fréquence<br />

des haplotypes DR3-DQB1*0201 et DR4-DQB1*0302 ;<br />

— le risque augmenté dans les fratries en fonction de l’identité<br />

HLA : < 1 % chez les sujets HLA-différents et 15 % en cas d’HLAidentité.<br />

✓ En faveur de l’environnement, on retient :<br />

— le gradient Nord-Sud d’incidence entre 0 et 15 ans (50 cas/10 5 /an<br />

en Finlande et 10 cas/10 5 /an en France) ;<br />

— l’augmentation de l’incidence depuis 20 ans ;<br />

— le taux de concordance du diabète de type 1 entre jumeaux<br />

monozygotes de l’ordre de 40 % ;<br />

— des facteurs suspectés mais non prouvés : infections virales à<br />

Cocksakie, modifications dans l’immunité muqueuse de l’intestin<br />

par les modifications des stratégies vaccinales, l’hygiène alimentaire<br />

ou les protéines du lait de vache.<br />

La destruction des cellules bêta est :<br />

— progressive et précoce au cours d’une longue phase asymptomatique<br />

appelée prédiabète où la glycémie à jeun est normale<br />

et où seuls les tests immunologiques sont positifs ;<br />

— corrélée chez des sujets génétiquement à risque (apparentés<br />

du 1 er degré) avec le nombre d’autoanticorps positifs (80 % de<br />

risque de diabète dans les 10 ans si présence initiale des anticorps<br />

anti-insuline, anti-GAD65 et anti-IA2) ;<br />

— quantifiable avec la perturbation des tests métaboliques<br />

comme la réduction de l’insulinémie au cours de l’hyperglycémie<br />

provoquée par voie intraveineuse ;<br />

— aggravée par l’hyperglycémie (glucotoxicité).<br />

DIAGNOSTIC<br />

Tableau typique chez un enfant<br />

ou un adulte jeune<br />

Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte<br />

Les manifestations s’installent habituellement sur un mode<br />

aigu. La carence en insuline provoque l’apparition d’une hyperglycémie,<br />

et dans les formes sévères une cétoacidose.<br />

On note :<br />

— une polyurie ;<br />

— un amaigrissement ;<br />

— une asthénie inhabituelle ;<br />

— des douleurs abdominales ;<br />

— des troubles visuels (anomalies de réfraction) ;<br />

— des modifications du caractère.<br />

Suspecté par la présence d’une glycosurie, la confirmation du<br />

diagnostic repose sur la constatation d’une hyperglycémie (en<br />

général > 3 g/L).<br />

La recherche d’une cétose est impérative à ce stade, soit par<br />

la présence d’acétone dans les urines (Kétodiastix, Kétodiabur<br />

5 000), soit par l’élévation de la cétonémie sur sang capillaire<br />

(bandelettes cétone Abbott).<br />

Le diagnostic de diabète 1 impose un traitement d’insuline<br />

d’emblée.<br />

Autres tableaux de présentation clinique<br />

1. Cétoacidose<br />

C’est souvent la manifestation inaugurale, notamment chez<br />

l’enfant. Elle est favorisée par un épisode infectieux aigu et/ou<br />

un retard de prise en charge. Les formes sévères d’acidoses<br />

(pH < 7,1) sont associées à un coma. Cette situation nécessite un<br />

traitement d’urgence en milieu hospitalier.<br />

2. Diabète type 1 lent ou LADA<br />

Le début est tardif et progressif comme le type 2. Les anticorps<br />

anti-GAD65 positifs. L’insulinodépendance s’installe après<br />

5 à 10 ans.<br />

En fait, 10 % des types 2 sont des LADA.<br />

3. Diabète du sujet noir d’origine africaine<br />

subsaharienne (bush diabetes)<br />

Le début est cétosique nécessitant un traitement d’insuline.<br />

L’évolution se fait vers l’insulino-indépendance mais avec un<br />

épuisement des réserves pancréatiques qui survient rapidement.<br />

Les anticorps anti-GAD65 et IA2 sont négatifs.<br />

4. Diabète MODY 3<br />

La carence en insuline nécessite de recourir à l’insulinothérapie.<br />

L’histoire familiale évoquant une transmission sur le mode<br />

autosomique dominant implique une recherche génétique pour<br />

la mutation du gène HNF1α<br />

5. Femme enceinte<br />

V. question Q17.<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER<br />

À L’EXAMEN ?<br />

De nombreux dossiers sont possibles du fait<br />

du caractère transversal du diabète.<br />

Décompensation acidocétosique chez un diabétique<br />

de type 1 connu (infection, arrêt insuline) : protocole de<br />

prise en charge, gestion de l’observance, d’une infection…<br />

Diabétique de type 1 compliqué (gestion d’une complication<br />

rétinienne, d’une anomalie rénale…) : prise en charge,<br />

objectifs d’équilibre, modalités de suivi…<br />

Femme enceinte diabétique : prise en charge, suivi…<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007


Évolution<br />

1. Phase de rémission partielle ou totale<br />

Elle survient dans près de 25 % des cas et est favorisée par<br />

l’insulinothérapie intensive et précoce (levée de la glucotoxicité).<br />

La rechute est inéluctable en quelques semaines à quelque<br />

mois (durée moyenne 8 mois).<br />

On constate pendant cette phase une réduction des besoins<br />

en insuline, qui peut être arrêtée transitoirement.<br />

2. Évolution ultérieure<br />

On distingue ensuite 2 phases de diabète de type 1 :<br />

— peptide C positif (insulinosécrétion résiduelle) pendant les 5 premières<br />

années : faibles besoins en insuline et équilibre facile ;<br />

— peptide C négatif : équilibre glycémique difficile avec plus grande<br />

instabilité.<br />

PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE<br />

ET SUIVI DU PATIENT<br />

Principes généraux<br />

Il faut souligner l’importance de l’éducation thérapeutique :<br />

transfert des connaissances par un enseignement collectif ou<br />

individuel, vérification des comportements, et définition des<br />

objectifs thérapeutiques personnalisés et acceptés.<br />

Le traitement s’appuie sur les principaux enseignements de<br />

l’étude DCCT. Une insulinothérapie intensifiée avec une hémoglobine<br />

glyquée (HbA1c) moyenne de 7 % pendant 9 ans réduit<br />

l’incidence et la progression de la rétinopathie, réduit l’incidence<br />

et la progression de la néphropathie, améliore le pronostic cardiovasculaire,<br />

mais multiplie le risque d’hypoglycémie sévère par<br />

trois en l’absence d’éducation appropriée.<br />

L’objectif idéal est une HbA1c < 7 %.<br />

Autosurveillance<br />

✓ Les objectifs sont d’avoir une idée de l’équilibre moyen du<br />

diabète, d’adapter les doses d’insuline et de gérer les situations<br />

d’urgence (hypoglycémie, hyperglycémie avec cétose).<br />

✓ L’autosurveillance glycémique est réalisée au moins 4 fois par jour<br />

(préprandial + coucher) et de temps en temps à 3 h du matin et<br />

en post-prandial. Les lecteurs glycémiques portables sont de plus<br />

en plus simples et rapides avec une exactitude de 15 % par rapport<br />

à la glycémie veineuse de laboratoire.<br />

✓ L’autosurveillance de l’acétonurie(BU) ou de la cétonémie capillaire<br />

sont réalisées en cas d’hyperglycémie > 2,50 g/L.<br />

Un carnet de surveillance du diabète bien tenu est fondamental.<br />

Surveillance<br />

✓ L’hémoglobine glyquée (HbA1c) doit être mesurée tous les 3<br />

mois avec la méthode la plus spécifique (HPLC) ou la plus rapide<br />

(immunologique [DCA 2000]) avec des normales entre 4 à 6 %.<br />

Elle reflète l’équilibre des 2 à 3 mois précédents (7 % = moyenne<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007<br />

à retenir<br />

Le diabète 1 est une maladie chronique touchant<br />

des sujets jeunes.<br />

Le traitement d’insuline doit être intensif et adapté<br />

avec l’utilisation fréquente des glycémies capillaires.<br />

La prévention des complications nécessite un bon contrôle<br />

glycémique défini par un chiffre moyen d’HbA1c à 7 %.<br />

Un bilan à la recherche d’anomalies précoce (fond d’œil,<br />

microalbuminurie) doit être très régulier pour mettre en<br />

place un traitement précoce.<br />

L’altération de la vision traduit un stade avancé de<br />

rétinopathie.<br />

La plupart des complications du diabète sont indolores<br />

et doivent être recherchées systématiquement.<br />

glycémique de 1,5 g/L, 9 % = moyenne glycémique 2,1 g/L). C’est<br />

le meilleur indicateur du risque de complications. Les causes d’erreur<br />

sont : anémie hémolytique, urémie, hémoglobinopathie.<br />

Elle peut être remplacée par le dosage de la fructosamine en<br />

cas de surveillance rapprochée tous les mois (grossesse) ou en<br />

cas d’hémoglobinopathie.<br />

✓ Une consultation spécialisée au moins 3 ou 4 fois par an est réalisée.<br />

✓ Des examens complémentaires sont indiqués : profil lipidique,<br />

créatinine, microalbuminurie, ECBU, ECG une fois par an.<br />

✓ L’examen ophtalmologique complet doit être réalisé au moins<br />

une fois par an (avec fond d’œil) à partir de la 5 e année.<br />

Traitement insulinique<br />

POINTS FORTS<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 78)<br />

Il s’agit d’un traitement symptomatique à vie.<br />

Les différentes variétés d’insuline (tableau 1) sont soit recombinante<br />

(strictement identique à l’insuline humaine) ou légèrement<br />

modifiée (analogues rapides : lispro, aspart et analogues lents :<br />

glargine, détémir). Elles sont toujours concentrées à 100 U/mL.<br />

Les insulines diffèrent par leur durée d’action :<br />

— les insulines ultrarapides (1 à 3 h) et rapides (1 à 5 h) couvrent<br />

les besoins prandiaux (proportionnels à la quantité de glucides<br />

ingérés) ;<br />

— les insulines intermédiaires NPH (9 à 16 h) et lente (environ 24 h)<br />

couvrent les besoins basaux (besoins insuliniques « pour vivre »<br />

indépendants de l’alimentation).<br />

Certains facteurs interviennent dans la résorption sous-cutanée<br />

: profondeur, zone (cuisses et lombes = zones de résorption<br />

lente/bras et abdomen = zones de résorption rapide), dose (variation<br />

intra-individuelle 15 à 50 %).<br />

Les vecteurs sont les stylos à insuline réutilisables ou jetables<br />

pour toutes les insulines solubles, les pompes portables (< 5 %<br />

des patients) et pour l’administration continue modulée sous-cutanée<br />

d’insuline rapide ou ultrarapide. C’est un traitement plus efficace,<br />

R Q 233<br />

73


plus flexible mais plus contraignant et plus cher, à réserver pour<br />

certains aux échecs de l’insulinothérapie optimisée ou dans des<br />

situations particulières.<br />

Le schéma thérapeutique est choisi suivant l’acceptation du<br />

patient et les objectifs. Idéalement, il s’agit d’un basal-bolus<br />

(figure) : bolus prandiaux par insuline ultrarapide + couverture<br />

basale par insuline lente ou intermédiaire, soit 4 à 5 injections/j.<br />

La dose totale est en général autour de 0,7 U/kg, avec une<br />

dose d’insuline lente autour de 0,3 U/kg.<br />

L’autoadaptation est fonction des glycémies (rétrospective et/ou<br />

instantanée), de l’activité physique, de l’alimentation prévue.<br />

Les effets secondaires sont les hypoglycémies (v. complications<br />

métaboliques), la prise de poids en cas de surdosage, l’allergie<br />

(rarissime), les lipodystrophies hypertrophiques en cas d’injections<br />

répétées en même endroit responsables d’une résorption aléatoire<br />

de l’insuline (facteur d’instabilité glycémique).<br />

Traitement non insulinique<br />

Il est important.<br />

✓ L’accompagnement et le soutien psychologique sont habituels<br />

pour toute maladie chronique.<br />

✓ L’alimentation doit être normocalorique, variée et sans interdits :<br />

— apprendre l’évaluation du contenu en glucides des aliments<br />

pour adapter les doses d’insuline prandiale : pâtes, riz, semoule,<br />

pommes de terre cuits (20 % glucides), pain (50 % glucides), légumineuses<br />

(lentilles, pois chiches, haricots secs : 30 % glucides) ;<br />

— privilégier la prise des glucides au sein d’un repas mixte ;<br />

— préférer les aliments à index glycémique bas (féculents, légumes<br />

secs et céréales) aux aliments à index glycémique rapide ;<br />

Tableau 1<br />

74<br />

II-Q233<br />

Les principales insulines<br />

Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte<br />

TYPE D’INSULINE DÉLAI D’ACTION DURÉE D’ACTION<br />

Insuline intermédiaire 1 h 18 à 24 h<br />

ou semi-lente (NPH)<br />

❚ Insulatard<br />

Analogue lent 90 min 24 h<br />

❚ Lantus ❚ Levemir<br />

Insuline rapide 30 min à 1 h 5 à 8 h<br />

ou rapide « humaine »<br />

❚ Actrapid<br />

Analogue rapide de l’insuline 10 à 15 min 3 à 5 h<br />

ou ultrarapide<br />

❚ Humalog ❚ NovoRapid<br />

Mélange fixe insuline 30 min 18 à 24 h<br />

rapide + NPH<br />

❚ Mixtard Profil<br />

Mélange fixe insuline 15 min 16 à 24 h<br />

ultrarapide + NPH<br />

❚ NovoMix 30<br />

❚ Humalog Mix 25<br />

— apprendre le resucrage oral en cas d’hypoglycémie mineure :<br />

15 g d’un glucide rapide (= 3 morceaux de sucre = 150 mL de jus<br />

de fruit ou de soda) font remonter la glycémie de 0,50 g/L ;<br />

— savoir prendre une collation en cas d’exercice physique non<br />

programmé.<br />

✓ L’exercice physique est à recommander et à prendre en compte<br />

pour les doses d’insuline du fait du risque d’hypoglycémie.<br />

✓ L’utilité des associations (AFD = Association française des diabétiques,<br />

AJD : Aide aux jeunes diabétiques) n’est pas à démontrer.<br />

Voies d’avenir<br />

Ce sont :<br />

— les pompes implantables plus ou moins rétrocontrôlées (pancréas<br />

artificiel) ;<br />

— les greffes de pancréas et d’îlots de Langerhans : réservées<br />

aux diabètes instables (greffe solitaire de pancréas ou d’îlots) et<br />

aux insuffisants rénaux (double greffe rein + pancréas) ;<br />

— l’insuline inhalée : durée d’action rapide, contre-indiquée chez<br />

les fumeurs, effets pulmonaires à long terme inconnus ;<br />

— les capteurs de mesure continue de la glycémie ;<br />

— la prévention par immunothérapie.<br />

CAS PARTICULIERS<br />

Diabète de l’enfant et de l’adolescent<br />

Les cétoacidoses révélatrices sont fréquentes. Le risque d’œdème<br />

cérébral est accru en cours de traitement.<br />

L’innocuité cérébrale des hypoglycémies sévères n’est pas<br />

prouvée chez l’enfant de moins de 5 ans.<br />

D’une manière générale, le diabète est difficile à équilibrer et<br />

mal accepté pendant l’adolescence. Il faut noter la fréquence<br />

croissante du diabète de type 2 chez l’enfant obèse aux États-<br />

Unis.<br />

Enfin, il existe une augmentation des besoins en insuline pendant<br />

la puberté d’au moins 50 %.<br />

Diabète au féminin<br />

1. Contraception<br />

Des précautions d’emploi pour les estroprogestatifs sont fonction<br />

du risque vasculaire, sauf en cas de diabète récent bien équilibré<br />

et sur une période courte. Les microprogestatifs sont autorisés.<br />

2. Grossesse<br />

Le pronostic est quasi normal si l’équilibre est parfait de la<br />

conception (grossesse programmée) à l’accouchement et si le<br />

diabète n’est pas compliqué.<br />

Il faut différencier cette situation du diabète gestationnel, qui<br />

est dépisté pendant la grossesse.<br />

Les effets de la grossesse sur le diabète sont la baisse physiologique<br />

de l’HbA 1c, l’augmentation des besoins en fin de grossesse,<br />

un risque d’aggravation de la rétinopathie et de la néphropathie.<br />

La seule contre-indication absolue est l’insuffisance coronaire.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007


Figure<br />

glycémies<br />

Les effets du diabète sur la grossesse sont : avortement, malformation,<br />

macrosomie, retard de maturation, hypoglycémie et<br />

hypocalcémie néonatales, hypertension gravidique et prééclampsie.<br />

Les objectifs glycémiques sont très stricts (à jeun < 0,9 g/L,<br />

post-prandial < 1,20 g/L), l’autosurveillance répétée, l’insulinothérapie<br />

optimisée, et le suivi diabéto-obstétrical mensuel.<br />

3. Ménopause<br />

rapide ou ultra-rapide Insuline<br />

lente<br />

réveil<br />

Schéma basal-bolus.<br />

Il n’y a pas de contre-indication à l’hormonothérapie substitutive.<br />

PRONOSTIC ET ÉVOLUTION<br />

Prévention et prise en charge<br />

des complications dégénératives<br />

1. Microangiopathie<br />

L’hyperglycémie chronique et sa durée ont un rôle majeur.<br />

L’hypertension artérielle est un facteur aggravant. Les principaux<br />

mécanismes de la microangiopathie sont la glycation des<br />

protéines, l’altération endothéliale, le stress oxydatif et la voie<br />

des polyols, avec, pour conséquence, un épaississement de la<br />

membrane basale et une hypercoagulabilité sanguine dans les<br />

microvaisseaux.<br />

✓ La rétinopathie touche près de 90 % des diabétiques de type 1.<br />

Ils sont porteurs d’une rétinopathie après 15 ans d’évolution. Il existe<br />

une fragilisation des parois capillaires avec microanévrismes et<br />

hémorragies, exsudats et œdème par extravasation ainsi que des<br />

micro-occlusions vasculaires induisant des territoires d’ischémie<br />

avec développement de néovaisseaux qui peuvent se compliquer<br />

d’hémorragie du vitré ou de décollement de rétine. Le mauvais<br />

équilibre glycémique, l’ancienneté du diabète et l’association à<br />

une hypertension artérielle ont un rôle péjoratif.<br />

Les recommandations pour le dépistage des complications<br />

oculaires sont un examen ophtalmologique dès le diagnostic puis<br />

annuel : acuité visuelle, fond d’œil (après dilatation et examen<br />

par verre à 3 miroirs, ou par rétinographe non mydriatique avec<br />

prise multichamps), angiographie si lésions au fond d’œil et en<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007<br />

Insuline lente : Lantus ou Levemir<br />

coucher<br />

fonction pression intra-oculaire (glaucome) et cristallin (cataracte).<br />

Une acuité visuelle normale n’élimine pas une rétinopathie, et l’altération<br />

de la vision traduit un stade avancé de rétinopathie.<br />

Les stades de la rétinopathie sont rappelés dans le tableau 2.<br />

✓ La néphropathie survient dans les 20 premières années d’évolution<br />

du diabète (25 à 35 % des diabétiques de type 1) mais très<br />

rarement après. Il existe un rôle prépondérant de l’équilibre glycémique<br />

et de l’ancienneté du diabète avec la notion de susceptibilité<br />

individuelle. Toute atteinte rénale chez un sujet diabétique<br />

est une néphropathie diabétique. En effet, la glomérulopathie<br />

est (presque) toujours associée à une rétinopathie. L’albumine<br />

est toxique pour le tubule rénal. L’essentiel du traitement est une<br />

action précoce pour réduire la quantité d’albumine excrétée. Les<br />

risques à long terme sont l’évolution vers l’insuffisance rénale<br />

terminale et l’augmentation du risque de complications macrovasculaires.<br />

L’histoire naturelle de la néphropathie comporte :<br />

— une phase silencieuse : albuminurie et pression artérielle normales,<br />

filtration glomérulaire augmentée ;<br />

— le stade initial de néphropathie incipiens (épaississement de la<br />

MB et expansion mésangiale) : microalbuminurie permanente<br />

(de 30 à 300 mg/24 h) avec filtration glomérulaire normale, la<br />

tension artérielle peut être discrètement augmentée avec perte<br />

de la baisse nocturne ;<br />

— un stade de néphropathie patente (hyalinisation artériolaire<br />

glomérulaire et dépôts mésangiaux nodulaires ou diffus) : macroprotéinurie<br />

> 300 mg/24 h, voire syndrome néphrotique, apparition<br />

d’une hypertension artérielle et diminution de la filtration<br />

glomérulaire ;<br />

— l’insuffisance rénale ;<br />

— le traitement et la prévention dépendent du stade (v. encadré).<br />

✓ La neuropathie la plus fréquente est la polyneuropathie symétrique<br />

des membres inférieurs. La fréquence est de 50 % des cas<br />

après 25 ans d’évolution. Cliniquement, il existe une perte des<br />

sensibilités tactiles (monofilament), thermiques et vibratoires<br />

(diapason). L’atteinte est bilatérale et distale avec parfois abolition<br />

des réflexes ostéotendineux. Il existe parfois des douleurs<br />

R Q 233<br />

75


Tableau 2<br />

76<br />

II-Q233<br />

Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte<br />

Stades de la rétinopathie diabétique<br />

STADE LÉSIONS ALTÉRATION DE LA VISION TRAITEMENT<br />

Non proliférante ❚ dilatation capillaire Non ❚ normalisation glycémique<br />

❚ microanévrismes ❚ contrôle tensionnel<br />

❚ exsudats<br />

❚ hémorragies<br />

Pré-proliférante et proliférante ❚ zones d’ischémie Possible ❚ contrôle tensionnel<br />

❚ puis néovaisseaux ❚ panphotocoagulation au laser<br />

❚ normalisation glycémique prudente<br />

Proliférante compliquée ❚ hémorragie du vitré Oui ❚ normalisation glycémique<br />

❚ décollement de rétine ❚ contrôle tensionnel<br />

❚ panphotocoagulation au laser<br />

❚ chirurgie<br />

Maculopathie ❚ œdème maculaire Oui ❚ normalisation glycémique<br />

❚ contrôle tensionnel<br />

❚ photocoagulation au laser (grid maculaire)<br />

Tableau 3<br />

Neuropathie végétative<br />

ORGANE ATTEINTE NEUROPATHIQUE SYMPTÔMES DIAGNOSTIC TRAITEMENT<br />

Estomac ❚ gastroparésie ❚ souvent absents ❚ transit isotopique antiémétiques<br />

❚ nausées ❚ fibroscopie érythromycine<br />

❚ vomissements<br />

❚ hypoglycémies<br />

post-prandiales précoces<br />

Grêle ❚ diarrhée motrice ❚ accélération du transit ❚ test au rouge carmin ❚ ralentisseurs du transit<br />

❚ antibiotiques<br />

Vessie ❚ vessie neurogène ❚ dysurie ❚ échographie vésicale ❚ autosondage<br />

❚ rétention urinaire post-mictionnelle ❚ chirurgie<br />

❚ infections urinaires ❚ débitmétrie<br />

❚ incontinence<br />

Cardiovasculaire ❚ neuropathie autonome ❚ hypotension orthostatique ❚ prise de la tension ❚ bas de contention<br />

cardiaque ❚ tachycardie permanente artérielle couché/debout (hypotension orthostatique)<br />

❚ caractère silencieux ❚ ECG<br />

de l’angor<br />

Organes génitaux ❚ impuissance ❚ impuissance ❚ pléthysmographie ❚ traitement médical<br />

(plurifactorielle) ❚ éliminer une pathologie ❚ injections<br />

associée intracaverneuses<br />

Glandes sudoripares ❚ anhydrose<br />

❚ hyperhydrose<br />

❚ éjaculation rétrograde ❚ infertilité ❚ recherche urinaire ❚ chirurgie<br />

de spermatozoïdes<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007


neuropathiques (paresthésies et crampes), l’atteinte motrice est<br />

exceptionnelle. Le risque est celui de troubles trophiques (mal<br />

perforant plantaire).<br />

L’EMG (électromyogramme) systématique est inutile.<br />

Le traitement, outre la normalisation glycémique, fait appel<br />

aux antalgiques spécifiques antiépileptiques (Rivotril, Tegretol),<br />

Neurontin), antidépresseurs tricycliques (Laroxyl, Anafranil) et<br />

aux morphiniques.<br />

Le dépistage est réalisé par un examen neurologique une fois<br />

par an avec évaluation de la sensibilité par diapason et monofilament,<br />

et l’examen régulier des pieds en cas de neuropathie.<br />

La mononévrite et la multinévrite ont un début brutal avec<br />

une évolution favorable en quelques semaines ou quelques mois<br />

(nerfs crânienset nerfs des membres plus fréquemment touchés).<br />

C’est un diagnostic d’élimination. Le traitement est la normalisation<br />

glycémique.<br />

Les formes de neuropathie végétative sont développées<br />

tableau 3.<br />

3. Macroangiopathie<br />

Les études d’observation ont montré que le niveau d’HbA 1c<br />

n’apparaît pas comme un facteur de risque associé aux complications<br />

cardiovasculaires dans le diabète de type 1.<br />

Les études d’intervention (DCCT) ont démontré que le traitement<br />

intensifié apporte un bénéfice statistiquement significatif<br />

sur l’incidence des complications macrovasculaires par l’abaissement<br />

de l’HbA 1c et la réduction de la microalbuminurie (facteur<br />

de risque d’athérosclérose chez le diabétique).<br />

L’HTA, chez le diabétique de type 1, est souvent secondaire à<br />

une néphropathie sous-jacente : le rein est la cause et non la<br />

victime de l’HTA.<br />

Le risque relatif de cardiopathie ischémique est égal à 10 chez<br />

les diabétiques de type 1 néphropathes par rapport aux nonnéphropathes.<br />

Il faut souligner l’importance du contrôle des facteurs de<br />

risque associés : hypertension artérielle (objectif < 130/80),<br />

dyslipidémie (LDL cible fonction du niveau de risque cardiovasculaire),<br />

tabagisme.<br />

Le caractère potentiellement silencieux de l’ischémie myocardique<br />

(neuropathie autonome cardiaque) impose le dépistage<br />

des sujets à haut risque.<br />

Prévention et prise en charge<br />

des complications métaboliques<br />

1. Hypoglycémies<br />

On distingue les hypoglycémies mineures des hypoglycémies<br />

sévères nécessitant l’intervention d’un tiers.<br />

Elles sont inévitables chez tout diabétique de type 1 « bien<br />

équilibré » (en moyenne 3 à 5 hypoglycémies mineures/semaine).<br />

La non-perception et/ou la perception tardive des signes adrénergiques<br />

d’hypoglycémie accroît le risque d’hypoglycémie<br />

sévère (facteurs favorisants = hypoglycémies mineures répétées,<br />

neuropathie végétative).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007<br />

Les causes d’hypoglycémie dans le diabète de type 1 sont :<br />

— le surdosage absolu ou relatif en insuline (erreur diététique,<br />

activité physique inhabituelle) ;<br />

— la résorption trop rapide (activité physique importante, bain<br />

chaud après injection) ;<br />

— la gastroparésie, responsable d’une vidange gastrique aléatoire<br />

pouvant entraîner des hypoglycémies post-prandiales ;<br />

— la prise d’alcool (par blocage de la néoglucogenèse hépatique).<br />

Le traitement, en l’absence de troubles de conscience ou de<br />

troubles digestifs, fait appel au resucrage per os par 15 g d’un<br />

glucide rapide (= 3 morceaux de sucre = 150 mL de jus de fruit<br />

ou de soda) qui font remonter la glycémie de 0,50 g/L. Il faut<br />

toujours en avoir sur soi et il est nécessaire de contrôler la glycémie<br />

capillaire 30 minutes plus tard.<br />

En cas de troubles de conscience, il faut administrer du glucagon<br />

1 mg (= 1 ampoule IM) puis resucrer per os après récupération<br />

d’un état de conscience normal. L’éducation de l’entourage aux<br />

injections est primordiale. L’alternative est le sérum glucosé à<br />

30 % : 3 ampoules IVD (intraveineuse directe) si voie veineuse<br />

périphérique puis relais par resucrage oral dès que possible.<br />

TRAITEMENT ET PRÉVENTION<br />

DE LA NÉPHROPATIE DIABÉTIQUE<br />

Au stade de microalbuminurie :<br />

– contrôle glycémique strict ;<br />

– objectifs tensionnels stricts < 130/80 ;<br />

– IEC (inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine).<br />

Quand l'insuffisance rénale commence à apparaître :<br />

– contrôler la tension artérielle : objectif < 130/80 ;<br />

– prescrire un régime hypoprotidique ;<br />

– améliorer le contrôle glycémique (même si à ce stade la<br />

régression de la néphropathie n’est plus possible quelle que<br />

soit la qualité de l’équilibre glycémique) ;<br />

– gérer l’anémie (précoce chez les diabétiques) ;<br />

– prescrire un traitement vitamino-calcique s’il existe une<br />

hyperparathyroïdie secondaire ;<br />

– préserver le capital veineux (fistule) ;<br />

– vacciner contre l'hépatite B ;<br />

– éradiquer les foyers infectieux (fréquence des infections<br />

urinaires basses asymptomatiques) ;<br />

– éliminer une neuropathie vésicale associée ;<br />

– éviter les injections d’iode (produits de constraste).<br />

Dépistage de la néphropathie :<br />

– microalbuminurie une fois par an ;<br />

– créatinine plasmatique et calcul de la clairance de la créatinine<br />

une fois par an ;<br />

– bandelette urinaire ECBU une fois par an (une infection<br />

urinaire peut fausser la recherche de protéines dans les urines) ;<br />

– mesure régulière de la pression artérielle. ●<br />

R Q 233<br />

77


2. Cétoacidoses<br />

C’est une hyperglycémie importante, > 3 g/L, associée à une<br />

glycosurie massive et à une cétonurie (ou cétonémie) avec bicarbonates<br />

< 15 mmol/L et pH sanguin < 7,30.<br />

Le coma vrai, au sens nosologique du terme, est rare, inférieur<br />

à 10 %. L’incidence est de 2 à 4 % par an par patient.<br />

Les causes sont la carence absolue en insuline : inaugural de<br />

type 1 (10 % des cas) ou arrêt volontaire ou non de l’insulinothérapie<br />

; la carence relative en insuline : facteur surajouté (infarctus,<br />

infection, corticothérapie) inconnue dans 25 % des cas.<br />

Le diagnostic associe une phase de cétose : syndrome cardinal<br />

aggravé + troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs<br />

abdominales) et une phase de cétoacidose : dyspnée de Kussmaul<br />

+ troubles de la conscience (état stuporeux), déshydratation<br />

mixte à prédominance extracellulaire.<br />

Le diagnostic doit être rapide par bandelette urinaire ou capillaire<br />

et mesure du pH veineux (et artériel). L’ionogramme en urgence est<br />

utile pour la kaliémie et la réserve alcaline. De nouvelles bandelettes<br />

capillaires existent pour le dosage des corps cétoniques sanguins.<br />

Les critères de gravité imposant l’hospitalisation en réanimation<br />

sont : sujet âgé ; pH < 7 ; kaliémie < 4 ou > 6 mmol/L ;<br />

coma profond ; instabilité tensionnelle ; non-reprise de diurèse<br />

après 3 heures ; vomissements incoercibles.<br />

Les diagnostics différentiels sont l’urgence abdominale, le<br />

coma hyperosmolaire (calcul de la natrémie corrigée : natrémie<br />

mesurée + 0,3 x glycémie en mmol/L).<br />

L’évolution se fait vers la régression sous traitement en 24 à<br />

48 heures. Les complications iatrogènes peuvent être l’œdème<br />

cérébral, la surcharge hydrosodée.<br />

Le traitement préventif est primordial : les règles éducatives<br />

en cas de cétose sont le maintien des injections même si inappétence,<br />

suppléments en insuline rapide, cétonurie ou cétonémie<br />

systématique si glycémie > 2,50 g/L.<br />

Le traitement curatif est basé sur l’insuline rapide ou ultrarapide<br />

à la seringue électrique IV à débit constant tant que dure<br />

la cétose (10 U/h), la rééquilibration hydroélectrolytique par<br />

sérum salé isotonique, apports potassiques à ajuster à la kaliémie<br />

répétée et les apports glucosés intraveineux, à la demande, pour<br />

maintenir la glycémie tant que persiste la cétose. ■<br />

78<br />

II-Q233<br />

Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte<br />

1<br />

2<br />

3<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Le diabète de type 1 est traité par des antidiabétiques<br />

oraux.<br />

L’apparition de la rétinopathie précède l’apparition<br />

de la néphropathie chez le diabétique de type 1.<br />

Une kaliémie basse lors d’une cétoacidose est un<br />

élément de bon pronostic.<br />

B / QCM<br />

Lors du « bilan annuel », quels sont les éléments<br />

indispensables chez un diabétique de type 1 ?<br />

1 Fond d’œil.<br />

2 Microalbuminurie.<br />

3 Doppler artériel.<br />

4 Cholestérol-LDL.<br />

5 Échographie abdominale.<br />

Réponses : A : F, V, F / B : 1, 2, 4.<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

À PARAÎTRE : ● 2 e et 3 e parties :<br />

« Diabète sucré de type 2 de l’adulte »<br />

« Diabète sucré : complications du diabète ».<br />

◗ The effect of intensive treatment<br />

of diabetes on the development<br />

and progression of long-term<br />

complications in insulindependant<br />

diabetes mellitus<br />

The Diabetes Control<br />

and Complications Trial<br />

Research Group (N Eng J<br />

Med 2003;329:977-86)<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Traité de diabétologie<br />

Coordonné par André<br />

Grimaldi<br />

Paris : Médecine-Sciences,<br />

Flammarion<br />

◗ Complications du diabète<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2007;57:à paraître)<br />

ABONNEZ-VOUS OU RÉABONNEZ-VOUS EN LIGNE SUR :<br />

Huveaux France<br />

www.huveaux.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 JANVIER 2007


OBJECTIFS<br />

DIAGNOSTIQUER un diabète chez l’enfant.<br />

IDENTIFIER les situations d’urgence<br />

et PLANIFIER leur prise en charge.<br />

ARGUMENTER l’attitude thérapeutique<br />

et PLANIFIER le suivi du patient.<br />

DÉCRIRE les principes de la prise en charge<br />

au long cours.<br />

Diagnostiquer un diabète sucré de type 1<br />

chez l’enfant<br />

Classification du diabète sucré de l’enfant<br />

Le diabète sucré correspond à un groupe de maladies métaboliques<br />

caractérisées par une hyperglycémie chronique due à<br />

un défaut de sécrétion ou d’action de l’insuline.<br />

Le diabète de type 1, secondaire à la destruction des cellules<br />

bêta pancréatiques, responsable d’une carence en insuline,<br />

représente 90 % des causes de diabètes de l’enfant et de l’adolescent<br />

dans les pays occidentaux.<br />

Le diabète de type 2, secondaire à une insulino-résistance<br />

associée à un déficit relatif en insuline puis à la prédominance<br />

d’un déficit sécrétoire en insuline, devient plus fréquent dans certaines<br />

populations à risque du fait de l’augmentation de l’obésité.<br />

Les diabètes de type MODY (Maturity onset diabetes of the<br />

young) correspondent à des défauts génétiques du fonctionnement<br />

des cellules β. Les plus fréquents correspondent à des<br />

mutations des gènes de la glucokinase (MODY 2) et du facteur<br />

de transcription HNF-1α (MODY 3). Les autres types de diabètes<br />

sucrés de l’enfant sont rapportés dans le tableau 1. La suite de<br />

notre article ne concernera que le diabète de type 1.<br />

Mécanismes physiopathologiques<br />

Le diabète de type 1 est dû à une destruction progressive<br />

lymphocytes T dépendante des cellules β des îlots de Langherans.<br />

Cette destruction devient cliniquement symptomatique<br />

lorsqu’approximativement 90 % des cellules β sont atteintes. Le<br />

processus auto-immun est révélé par la présence d’anticorps<br />

anti-îlots, anti-GAD, anti-IA2 ou anti-insuline dans 85 à 90 % des<br />

cas. La susceptibilité à ce diabète auto-immun est déterminée<br />

génétiquement par de nombreux gènes. Plus de 40 locus sont<br />

associés au diabète de type 1, mais les gènes du système HLA<br />

présentent l’association la plus forte. Les facteurs environnementaux<br />

qui initient la destruction des cellules β restent encore<br />

largement inconnus. Entre autres sont évoquées des infections<br />

virales (entérovirus) et l’introduction précoce du lait de vache. Le<br />

processus de destruction peut prendre plusieurs mois à plusieurs<br />

années avant de devenir symptomatique.<br />

Épidémiologie<br />

II Q 233<br />

DIABÈTE SUCRÉ<br />

DE TYPE 1 ET 2<br />

de l’enfant et de l’adulte. Complications<br />

Diabète sucré de type 1 de l’enfant<br />

Dr Pascal Barat<br />

Unité d’endocrinologie et de diabétologie, Hôpital des enfants, CHU de Bordeaux, 33076 Bordeaux Cedex, France<br />

pascal.barat@chu-bordeaux.fr<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

RR<br />

Le début du diabète de type 1 est défini par la date de la première<br />

mise sous insuline. Dans le monde, l’incidence annuelle<br />

moyenne varie entre 0,1 et 57,6 pour 100 000. En Europe, le taux<br />

d’incidence est étroitement corrélé à la fréquence des gènes<br />

HLA de susceptibilité dans la population générale. En France,<br />

l’incidence annuelle du diabète, mesurée de 1988 à 1997 dans<br />

un registre portant sur 15 % de la population française de moins<br />

de 20 ans, est passée de 7,4/100 000 à 9,5/100 000, soit un<br />

accroissement annuel de 3,7 % par an. En 2004, l’incidence du<br />

diabète de type 1 chez les enfants de moins de 15 ans mesurée<br />

en Aquitaine était de 13,4/100 000. L’incidence du diabète augmente<br />

de façon plus importante chez les enfants de moins de<br />

5 ans. La prévalence du diabète de type 1 est estimée à 0,1 %<br />

chez les enfants de moins de 15 ans, avec un sex-ratio de 1.<br />

Des variations saisonnières de présentation de nouveaux cas<br />

sont décrites avec des pics lors des mois d’hiver. Un diabète de<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong> 843


RR Q 233 II<br />

DIABÈTE SUCRÉ DE TYPE 1 DE L’ENFANT<br />

type 1 est retrouvé chez les apparentés dans environ 10 % des<br />

cas. Au sein d’une fratrie d’un enfant diabétique, le risque de<br />

devenir diabétique est de 4 % à l’âge de 20 ans et de 9,6 % à<br />

l’âge de 60 ans, comparé à un risque de 0,3 % dans la population<br />

générale. Ce risque s’élève à 36 % dans une fratrie de vrais<br />

jumeaux.<br />

Démarche diagnostique<br />

1. Circonstances de découverte<br />

Le plus souvent, les enfants présentent un syndrome cardinal :<br />

polyurie, polydipsie, polyphagie et amaigrissement. Des prises<br />

de biberons supplémentaires durant la nuit, des couches particulièrement<br />

remplies ou l’apparition d’une énurésie secondaire<br />

doivent faire penser au diagnostic chez les enfants de moins de<br />

5 ans. Les adolescents peuvent ne pas rapporter l’existence du<br />

syndrome polyuro-polydipsique, ce qui peut conduire à un retard<br />

au diagnostic.<br />

Dans environ 40 % des cas, le diagnostic est porté plus tardivement<br />

devant des symptômes d’acidocétose.<br />

Le diagnostic peut être évoqué fortuitement devant une hyperglycémie<br />

ou une glycosurie retrouvée lors d’un bilan biologique<br />

demandé pour une autre indication.<br />

2. Confirmer le diagnostic de diabète sucré<br />

Les critères du diagnostic biologique pour le diabète sucré sont<br />

rappelés dans le tableau 2. En pratique, tout symptôme évoquant<br />

un diabète doit faire rechercher une hyperglycémie. En cas d’association<br />

à une élévation des corps cétoniques dans le sang ou<br />

dans l’urine, le traitement peut être urgent, et il ne serait pas raisonnable<br />

de temporiser en attendant de confirmer l’hyperglycémie.<br />

TABLEAU 1<br />

844<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong><br />

3. Confirmer le diagnostic de diabète sucré de type 1<br />

Le diagnostic étiologique du diabète sucré repose sur :<br />

– l’enquête familiale : dans la grande majorité des cas, il n’est pas<br />

retrouvé d’antécédent de diabète de type 1 dans la famille. Des<br />

antécédents familiaux peuvent orienter vers un diabète monogénique.<br />

Une origine ethnique particulière et une obésité peuvent<br />

suggérer un diabète de type 2 ;<br />

– la recherche d’anticorps anti-GAD (glutamate décarboxylase),<br />

anti-IA2 (Islet-Antigen 2), anti-insuline, signant l’origine autoimmune<br />

du diabète. Les anticorps anti-îlots (ICA) ne sont plus<br />

demandés en routine ;<br />

– l’étude du système HLA : recherche des haplotypes associés<br />

au diabète DR4-DQB1*0302 et DR3-DQB1*0201.<br />

Situations d’urgence<br />

Deux grandes urgences concernent l’enfant diabétique. L’acidocétose<br />

est une urgence métabolique pouvant révéler le diabète<br />

ou rencontrée à l’occasion de décompensation intercurrente.<br />

L’hypoglycémie est possible une fois l’insulinothérapie mise en<br />

place chez l’enfant diabétique.<br />

Acidocétose<br />

Principales causes de diabète sucré de l’enfant et de l’adolescent<br />

1. Mécanismes physiopathologiques<br />

L’acidocétose résulte d’un déficit absolu ou relatif d’insuline circulante<br />

et des effets combinés des hormones contre-régulatrices<br />

: catécholamines, glucagon, cortisol et hormone de croissance.<br />

Cet état est caractérisé par une accélération de l’état<br />

catabolique avec augmentation de la production de glucose par<br />

Diabète de type 1 ❚ 90 % ❚ polygénique ❚ 6 mois-jeune adulte ❚ population générale<br />

Diabète de type 2 ❚ < 10 % ❚ polygénique ❚ > puberté ❚ augmentée<br />

Diabètes MODY* ❚ 1-3 % ❚ monogénique ❚ variable ❚ population générale<br />

Autres types de diabète<br />

❚ Défaut de la fonction de la cellule β : diabète mitochondrial, diabète néonatal<br />

❚ Défaut génétique de l’action de l’insuline : lepréchaunisme, diabète lipoatrophique<br />

❚ Maladies du pancréas exocrine : mucoviscidose<br />

❚ Endocrinopathies : syndrome de Cushing<br />

❚ Diabètes iatrogéniques : glucocorticoïdes, ciclosporine, tacrolimus<br />

Syndromes génétiques associés : trisomie 21, syndromes de Turner, de Klinefelter, de Wolfram<br />

* MODY : maturity onset of the young.<br />

Fréquence Génétique Âge de début Fréquence de l’obésité<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN


Diabète sucré de type 1 de l’enfant<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

Le diabète de type 1 peut survenir chez des enfants<br />

de moins de 5 ans.<br />

L’acidocétose reste encore une circonstance<br />

de découverte fréquente du diabète de type 1 chez l’enfant.<br />

La prise en charge diététique est indissociable<br />

de l’insulinothérapie.<br />

Les complications ne se recherchent qu’après 5 ans<br />

d’évolution ou à partir de la puberté.<br />

L’éducation thérapeutique est une approche essentielle<br />

en diabétologie pédiatrique.<br />

le foie et le rein (glycogénolyse et néoglucogenèse) et diminution<br />

de l’utilisation périphérique du glucose, responsables d’une<br />

hyperglycémie et d’une hyperosmolarité. L’augmentation de la<br />

lipolyse et de la cétogenèse entraîne une cétonémie et une acidose<br />

métabolique. L’hyperglycémie, lorsqu’elle dépasse le seuil<br />

de réabsorption du glucose (environ 1,8 g/L), et l’hypercétonémie<br />

provoquent une diurèse osmotique, une déshydratation et<br />

une perte d’électrolytes souvent aggravée par les vomissements.<br />

Ces perturbations stimulent la production d’hormones contrerégulatrices<br />

et induisent une insulino-résistance qui aggrave l’hyperglycémie<br />

et l’augmentation des corps cétoniques. L’acidocétose<br />

se caractérise aussi par une déshydratation et une déplétion en<br />

électrolytes des compartiments intra- et extracellulaires.<br />

2. Démarche diagnostique<br />

Circonstance de découverte : l’acidocétose reste dans environ 40 %<br />

des cas le mode de découverte du diabète de type 1. Un déficit<br />

relatif en insuline par augmentation des concentrations des hormones<br />

contre-régulatrices peut se voir lors d’un stress : infection,<br />

traumatisme, pathologies gastro-intestinales avec diarrhée<br />

et vomissement. Un déficit complet en insuline chez un patient<br />

connu peut survenir en cas d’arrêt volontaire de l’insulinothérapie,<br />

de problèmes de cathéter ou dysfonctionnement de pompe à<br />

insuline.<br />

Confirmer le diagnostic d’acidocétose : il dépend de caractéristiques :<br />

– clinique : syndrome cardinal, déshydratation (perte de poids, pli<br />

cutané, sécheresse des muqueuses, tachycardie, hypotension),<br />

troubles digestifs (nausée, vomissements, douleurs<br />

abdominales pouvant mimer une urgence chirurgicale), signes<br />

respiratoires (respiration de Küssmaul, rapide et profonde,<br />

odeur acétonémique de l’haleine), troubles neurologiques<br />

(somnolence, confusion, coma) ;<br />

– biologiques : hyperglycémie (> 11 mmol/L) et pH veineux < 7,3 ou<br />

bicarbonate < 15 mmol/L et acétonémie ou acétonurie.<br />

3. Prise en charge<br />

La réhydratation : elle se fait en hospitalisation (mise en place de<br />

deux voies veineuses, scope, sonde gastrique si trouble de la<br />

conscience). Le remplissage peut être nécessaire par du sérum<br />

physiologique (20 mL/kg sur 20 min). Sinon, elle fait appel au<br />

sérum physiologique (5-8 mL/kg/h) puis à un soluté poly-ionique<br />

(maximum 3L/m²/j), adaptée au ionogramme sanguin, en particulier<br />

à la kaliémie.<br />

L’insulinothérapie (analogue rapide d’insuline) est administrée par<br />

voie intraveineuse à la seringue électrique, après démarrage de la<br />

réhydratation. La posologie de départ est de 0,1 U/kg/h. Elle est<br />

adaptée aux débits aux glycémies capillaires.<br />

La surveillance est :<br />

– clinique : pression artérielle, fréquence cardiaque (scope),<br />

conscience, diurèse ;<br />

– biologique : glycémies capillaires horaires, ionogrammes sanguins<br />

répétés (natrémie, kaliémie).<br />

Les complications possibles sont l’hypokaliémie, l’inhalation de<br />

liquide gastrique, l’œdème cérébral (0,5 à 0,9 % des acido -<br />

cétoses, favorisé par une correction trop rapide de la natrémie, et<br />

suspecté devant l’apparition secondaire de céphalées, de troubles<br />

de la conscience ou autres signes neurologiques, traité par<br />

mannitol [1 g/kg sur 20 min]), le décès (0,15 à 0,30 % des<br />

acidocétoses).<br />

L’évolution se fait vers la régression sous traitement en 24 à<br />

48 heures. Le passage à l’insuline sous-cutanée est réalisé lors<br />

de la reprise alimentaire.<br />

Au décours d’une acidocétose chez un enfant diabétique connu, il<br />

convient de réévaluer les connaissances de l’enfant et de sa<br />

famille vis-à-vis de la prise en charge du diabète et des situations<br />

d’hyperglycémie, ainsi que le contexte psychosocial dans lequel<br />

l’enfant évolue.<br />

Hypoglycémie<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR233<br />

1. Mécanismes physiopathologiques<br />

L’hypoglycémie chez l’enfant diabétique est la conséquence<br />

d’une inadéquation entre la dose d’insuline, la prise alimentaire<br />

ou un exercice physique récent. Il s’agit donc d’une complication<br />

iatrogène secondaire à la mise sous insuline. À ce titre, une proportion<br />

importante d’hypoglycémies de l’enfant diabétique correspond<br />

à des hypoglycémies prévisibles. Certaines hypoglycémies<br />

sont inévitables chez un enfant considéré comme bien<br />

équilibré (3 à 5 hypoglycémies modérées en moyenne par<br />

semaine). Les hypoglycémies peuvent entraîner des convulsions,<br />

mais ne laissent pas de séquelles cérébrales (sauf les rares<br />

hypoglycémies profondes et prolongées). L’angoisse générée<br />

par les hypoglycémies chez l’enfant et son entourage peut<br />

contribuer à cibler des objectifs glycémiques plus élevés que<br />

ceux recherchés pour un bon contrôle du diabète. Les hypoglycémies<br />

mineures répétées contribuent à diminuer le seuil de perception<br />

de l’hypoglycémie par le patient et favorisent la survenue<br />

d’hypoglycémies plus sévères.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong> 845


RR Q 233 II<br />

DIABÈTE SUCRÉ DE TYPE 1 DE L’ENFANT<br />

2. Démarche diagnostique<br />

Les facteurs de risque d’hypoglycémie sont :<br />

– les modifications des modalités thérapeutiques : augmentation<br />

de l’insuline, diminution des prises alimentaires, augmentation<br />

de l’activité physique ;<br />

– le jeune âge de l’enfant ;<br />

– les lipodystrophies ;<br />

– une hémoglobine A1c basse ;<br />

– une fréquence importante de glycémies basses ;<br />

– la diminution des symptômes d’hypoglycémie ;<br />

– la nuit ;<br />

– la prise d’alcool.<br />

L’utilisation des analogues rapides d’insuline et de la pompe à<br />

insuline a diminué l’incidence des hypoglycémies.<br />

La confirmation du diagnostic d’hypoglycémie se fait sur :<br />

– des signes cliniques : une hypoglycémie est souvent accompagnée<br />

de symptômes d’activation adrénergique (tremblement,<br />

pâleur, sueurs froides…) et, si elle est profonde, de symptômes<br />

de neuroglucoplégie (irritabilité et pleurs inconsolables chez les<br />

plus jeunes, difficultés de concentration, troubles de la vision, difficulté<br />

d’élocution, confusion, convulsion). La faim, les céphalées,<br />

les nausées ou la fatigue peuvent se voir en situation d’hypo- ou<br />

d’hyperglycémie ;<br />

– des signes biologiques : mesurer la glycémie capillaire. Chez un<br />

enfant diabétique, une glycémie < 0,60 g/L (3,3 mmol/L) est une<br />

hypoglycémie. La limite inférieure du seuil de glycémie normale<br />

est de 0,70 g/L (3,9 mmol/L) chez l’enfant traité par insuline.<br />

3. Prise en charge<br />

Le traitement nécessite :<br />

– la mise au repos sans attendre. Si possible, réalisation d’une<br />

glycémie capillaire ;<br />

– un resucrage per os : 5 g de glucose pour 20 kg de poids<br />

(environ 0,3 g/kg) ;<br />

– en cas de troubles de la conscience nécessitant l’intervention<br />

d’un tiers : injection de glucagon, 0,5 mg (une demi-ampoule)<br />

si poids < 30 kg, 1 mg (1 ampoule) si poids > 30 kg ;<br />

– en l’absence de glucagon : perfuser du sérum glucosé à 30 %<br />

(0,3 g/kg) suivi d’une perfusion de sérum glucosé à 10 %.<br />

La prévention est essentielle.<br />

Au décours d’une hypoglycémie sévère, il convient de réévaluer<br />

les connaissances de l’enfant et de sa famille vis-à-vis de la<br />

prise en charge du diabète et des situations d’hypoglycémie,<br />

ainsi que le contexte psychosocial dans lequel l’enfant évolue.<br />

Les objectifs glycémiques du traitement par insuline doivent<br />

rester au dessus de 0,70 g/L.<br />

L’apprentissage par l’enfant, sa famille et son entourage (école)<br />

des symptômes précoces d’hypoglycémie et de son traitement<br />

est fondamental, de même que la connaissance des facteurs de<br />

risque d’hypoglycémie et la réalisation d’une glycémie capillaire<br />

avant une activité sportive.<br />

Lecteur de glycémie et apport de glucose doivent être en permanence<br />

à disposition de l’enfant.<br />

846<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong><br />

Critères de diagnostic biologique<br />

pour le diabète sucré<br />

Prise en charge initiale<br />

Procédures thérapeutiques<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

TABLEAU 2<br />

Symptômes du diabète et glycémie 11,1 mmol/L (2 g/L)<br />

à n’importe quel moment de la journée, quelle que soit l’heure<br />

du dernier repas<br />

Glycémie à jeun 7 mmol/L (1,26 g/L), le jeûne étant défini<br />

comme l’absence de prise calorique depuis au moins 8 heures<br />

Glycémie à H2 11 mmol/L (2 g/L) lors d’une hyperglycémie<br />

orale provoquée (charge en glucose de 1,75 g/kg de poids corporel<br />

avec un maximum de 75 g)<br />

1. Annonce du diagnostic<br />

Comme toute maladie chronique, un soin particulier doit être<br />

apporté à l’annonce du diagnostic : annonce faite par un médecin<br />

qualifié, si possible en présence des deux parents, lieu et temps<br />

d’échange adaptés, qualité de l’échange.<br />

2. Choix du schéma d’insulinothérapie<br />

Il existe de nombreux schémas thérapeutiques, apportant chacun<br />

leur part d’avantages et d’inconvénients. Le schéma thérapeutique<br />

choisi est adapté à l’âge de l’enfant, au contexte familial, à l’existence<br />

d’un mode de vie particulier, aux habitudes alimentaires et<br />

aux pratiques sportives. Il peut donc changer dans le temps.<br />

On distingue 3 grandes modalités d’administration de l’insuline :<br />

– schéma à 2 injections, comprenant matin et soir une injection<br />

d’analogue rapide d’insuline (durée d’action 3-5 heures) et<br />

d’insuline semi-lente (durée d’action 9-16 heures), mélangées<br />

dans une seringue ou faites au stylo à insuline. Ce schéma évite<br />

l’injection de midi, mais contraint l’enfant et sa famille à respecter<br />

les horaires et les prises alimentaires prévues ;<br />

– schéma à 4 injections, dit basal-bolus, avec une injection<br />

d’analogue rapide d’insuline avant chaque repas et une injection<br />

d’insuline lente (durée d’action 20-24 heures) dans la soirée.<br />

Ce schéma nécessite de nombreuses injections, mais permet<br />

une plus grande souplesse dans le rythme de vie et les<br />

prises alimentaires ;<br />

– pompe à insuline, permettant un apport constant et programmé<br />

en analogue rapide d’insuline et la réalisation de bolus<br />

de la même insuline lors des prises alimentaires. Ce traitement<br />

permet, chez le petit enfant, de mieux contrôler les apports de<br />

petites doses d’insuline. L’absence de piqûre lors des repas<br />

permet une meilleure adaptation au rythme de vie et aux prises<br />

alimentaires. Bien qu’un débranchement de la pompe soit possible<br />

en cas d’activité sportive ou de bain, le patient doit porter<br />

en permanence sa pompe. Un dysfonctionnement du système<br />

peut rapidement se traduire par une acidocétose.


3. Prise en charge diététique<br />

Elle est indissociable de l’insulino thérapie, car les prises de<br />

glucides doivent être adaptées au schéma d’insulinothérapie.<br />

Les pics glycémiques dus à la prise alimentaire doivent au maximum<br />

correspondre aux pics d’actions de l’insuline.<br />

L’alimentation doit être équilibrée et adaptée au poids et à l’âge<br />

de l’enfant. Les glucides représentent 50 % des apports caloriques<br />

quotidiens et sont consommés lors des trois principaux<br />

repas, essentiellement sous forme de glucides complexes. Une<br />

collation comprenant des glucides en milieu de matinée est habituellement<br />

proposée dans le schéma à 2 injections. Une collation<br />

glucidique est possible dans l’après-midi en cas d’injection supplémentaire<br />

d’analogue rapide d’insuline ou de bolus par pompe.<br />

Les grignotages apportant des glucides doivent être évités.<br />

Procédures préventives<br />

1. Recherche de comorbidités<br />

La découverte d’un diabète de type 1 doit faire rechercher<br />

l’existence d’autres pathologies auto-immunes :<br />

– hypothyroïdie (15 % des cas) : signes cliniques, dosages de<br />

TSH et d’anticorps antithyropéroxydase et antithyroglobuline ;<br />

– maladie cœliaque (5 % des cas) : signes cliniques, dosage<br />

d’anticorps anti-tranglutaminase ;<br />

– maladie d’Addison, beaucoup plus rare, pouvant être recherchée<br />

par l’étude des anticorps antisurrénales (anti-21 hydroxylase).<br />

Les facteurs de risque cardiovasculaire doivent être recherchés :<br />

hypertension artérielle, dyslipidémie, surpoids ou obésité, sédentarité,<br />

tabagisme, consommation d’alcool ou de drogues chez<br />

l’adolescent.<br />

2. Éducation thérapeutique initiale<br />

L’éducation thérapeutique initiale doit être assurée par une équipe<br />

spécialisée.<br />

Au moment du diagnostic, son objectif est l’acquisition des<br />

connaissances de base par l’enfant et sa famille afin de sécuriser<br />

le retour à domicile :<br />

– explications physiopathologiques : étiologie et symptômes<br />

observés ;<br />

– mode d’action de l’insuline et objectifs glycémiques ;<br />

– recommandations diététiques de base ;<br />

– pratique des injections d’insuline, des glycémies, des<br />

recherches de glycosurie et d’acétonurie/acétonémie ;<br />

– prise en charge des hypoglycémies et des hyperglycémies ;<br />

– gestion du diabète en cas de maladie, à l’école, en cas d’exercice ;<br />

– carte de diabétique, coordonnées téléphoniques en cas d’urgence.<br />

Plus précisément, l’apprentissage de l’autosurveillance comprend<br />

les points suivants :<br />

– les glycémies capillaires seront réalisées au moins 4 fois/j (préprandial<br />

+ coucher) et ponctuellement en post-prandial et en<br />

milieu de nuit. Elles sont réalisées avec un lecteur de glycémie<br />

capillaire et inscrites sur un carnet d’autosurveillance permettant<br />

de noter de façon conjointe les glycémies, les doses d’insuline<br />

et les événements particuliers de la vie quotidienne ;<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR233<br />

– la recherche d’une augmentation de l’acétone ne se fait pas<br />

systématiquement, mais lors de situations d’hyperglycémies,<br />

de troubles digestifs ou de maladies intercurrentes. Elle se fait<br />

dans les urines à partir de bandelettes urinaires ou, pour certains<br />

lecteurs, sur sang capillaire.<br />

3. Approche psychosociale<br />

Le contexte psychosocial doit être évoqué avec l’entourage<br />

afin d’adapter au mieux les objectifs d’éducation thérapeutique :<br />

scolarité de l’enfant, éventuels problèmes psychologiques ou<br />

troubles alimentaires, dynamique familiale et facilité d’adaptation,<br />

niveau d’éducation de l’entourage.<br />

En fonction des répercussions psychologiques provoquées<br />

chez l’enfant ou son entourage par l’annonce du diagnostic, un<br />

soutien psychologique peut être proposé.<br />

Le diabète de type 1 est une maladie prise en charge à 100 %<br />

au titre de l’ALD8.<br />

Le retour à la scolarité passera le plus souvent par la mise en<br />

place d’un projet d’accueil individualisé (PAI), rédigé par le médecin<br />

scolaire, à partir des indications thérapeutiques du pédiatre<br />

diabétologue.<br />

Les coordonnées d’association telle que l’Aide aux jeunes diabétiques<br />

(AJD) pourront être données aux familles.<br />

4. Planification du suivi du patient<br />

Au décours de l’hospitalisation initiale, le suivi de l’enfant sera<br />

planifié dans le centre spécialisé. Lors des 6 premiers mois de<br />

prise en charge, des contacts fréquents avec l’équipe spécialisée<br />

sont habituellement nécessaires (consultations, appels téléphoniques,<br />

mails…) pour gérer les besoins changeants du diabète.<br />

Qu’est-ce qui peut tomber<br />

à l’examen ?<br />

L’incidence du diabète augmente chez les enfants les plus<br />

jeunes, et l’acidocétose reste un mode de révélation<br />

fréquent et parfois piégeant : ne pas ignorer ce diagnostic<br />

dans un cas clinique d’un enfant de moins de 5 ans<br />

présentant des troubles digestifs aigus, voire des signes<br />

de détresse respiratoire.<br />

L’éducation thérapeutique est une approche en cours<br />

de reconnaissance par les institutions. Il convient<br />

de l’intégrer dans les réponses à une question<br />

se rapportant au diabète de l’enfant, en rappelant<br />

qu’il s’agit d’une approche continue, aidant l’enfant<br />

et son entourage à acquérir ou à maintenir<br />

les compétences nécessaires à la gestion du diabète<br />

dans la vie quotidienne, en s’adaptant aux modifications<br />

du mode de vie et à l’évolution des thérapeutiques.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong> 847


RR Q 233 II<br />

DIABÈTE SUCRÉ DE TYPE 1 DE L’ENFANT<br />

Par la suite, 3 ou 4 consultations par an seront proposées, voire<br />

plus si l’équilibre du diabète n’est pas satisfaisant.<br />

Principes de la prise en charge à long terme<br />

Objectifs<br />

Le but du traitement est de prévenir les complications à court<br />

(hypoglycémies) et à long terme (micro- et macroangiopathies).<br />

L’équilibre glycémique représente le principal objectif de la<br />

prise en charge.<br />

L’objectif est de maintenir l’HbA1c à moins de 7,5 % en prenant en<br />

compte le risque hypoglycémique. Cet objectif est modulé par le<br />

spécialiste en fonction des patients et des situations particulières.<br />

Éducation thérapeutique<br />

L’éducation thérapeutique initiale est complétée tout au long<br />

du suivi du patient, lors de consultations individuelles ou d’activités<br />

de groupe (thématiques communes abordées par les enfants<br />

d’un même groupe d’âge). Elle fait intervenir infirmière, diététicien(ne)<br />

et/ou médecin de l’équipe spécialisée assurant le suivi<br />

de l’enfant. Elle aide l’enfant et son entourage à acquérir ou à<br />

maintenir les compétences nécessaires à la gestion du diabète<br />

dans la vie quotidienne, en s’adaptant aux modifications du mode<br />

de vie et à l’évolution des thérapeutiques.<br />

Examens complémentaires<br />

L’HbA1c, 4 fois par an, est réalisée le plus souvent en microméthode<br />

lors de la consultation. Elle reflète l’équilibre glycémique<br />

des 2 à 3 mois précédents et représente le meilleur indicateur du<br />

risque de complications.<br />

Le dépistage des microangiopathies est indispensable après<br />

5 ans d’évolution du diabète ou à partir de la puberté.<br />

Le dépistage de la rétinopathie diabétique est réalisé par une<br />

photographie du fond d’œil, avec ou sans dilatation pupillaire ou<br />

par une ophtalmoscopie indirecte (fond d’œil).<br />

Les autres examens nécessaires sont une microalbuminurie 1<br />

fois par an, une créatininurie à jeun 1 fois par an, un bilan lipidique<br />

(cholestérol total et HDL, triglycérides) 1 fois par an et la TSH.<br />

848<br />

EXPRIMEZ-VOUS !<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Juin <strong>2011</strong><br />

Prévention<br />

Les conseils de prévention sont :<br />

– le contrôle des facteurs de risque cardiovasculaire ;<br />

– l’activité physique, à encourager ;<br />

– les vaccinations : le diabète n’est pas une contre-indication aux<br />

vaccinations. La vaccination contre la grippe est recommandée<br />

afin de limiter le risque de déséquilibre du diabète en cas<br />

de fièvre ;<br />

– une consultation dentaire annuelle.<br />

Suivi à l’âge adulte<br />

Des consultations de transition, communes aux équipes de<br />

diabétologie d’enfants et d’adultes, devraient être organisées au<br />

moment de l’adolescence, pour optimiser le passage des services<br />

d’enfants aux diabétologues d’adultes et garantir la poursuite<br />

du suivi spécialisé.•<br />

P. Barat déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts.<br />

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PRATICIEN<br />

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L’enfant à l’école<br />

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OUVERTURES<br />

B Rhizarthrose B Risques<br />

de l’endoscopie digestive B<br />

Phacomatoses B Presse :<br />

Maintien du bénéfice<br />

d’un régime amaigrissant<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

Qualité des soins B Opacités et masses intrathoraciques B Anomalies du<br />

cycle menstruel. Métrorragies B Exanthème, érythrodermie B Évaluation<br />

thérapeutique et niveau de preuve B Souffle cardiaque chez l’enfant<br />

DE MÉMOIRE DE MÉDECIN Le site histoire de la médecine de la BIUM<br />

www.larevuedupraticien.fr publication bimensuelle de formation médicale continue<br />

Wieliczko MC.<br />

Accueil de l’enfant<br />

diabétique<br />

à l’école.<br />

Rev Prat 2008;<br />

58(7):753-4<br />

Textes de recommandations ou conférences de consensus.<br />

ISPAD Clinical Practice Consensus Guidelines 2009 Compendium<br />

in Pediatric Diabetes.<br />

Diabète sucré de l’adulte et de l’enfant. Collège des enseignants<br />

d’endocrinologie, diabète et maladies métaboliques.<br />

Mise à jour décembre 2004.<br />

Diabète de type 1 de l’enfant et de l’adolescent. Guide Affection<br />

de longue durée. HAS 2007.<br />

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DIAGNOSTIC<br />

Le diagnostic du diabète du type 2 se fait en deux<br />

temps : affirmer le diabète ; en préciser le type.<br />

Affirmer le diabète<br />

Il s’agit d’un diabète, c’est-à-dire que la glycémie<br />

à jeun est à deux reprises supérieure ou égale à 7 mmol/L,<br />

soit 1,26 g/L (dosage à la glucose oxydase sur plasma veineux).<br />

Une glycémie à n’importe quel moment de la journée supérieure<br />

ou égale à 2 g/L permet également de poser le diagnostic.<br />

Lorsqu’il n’y a pas de symptôme, il faut deux dosages pour<br />

s’assurer de l’absence d’erreur. En revanche, en présence de<br />

symptômes évocateurs du diabète, en particulier d’un syndrome<br />

polyuro-polydipsique, l’existence d’une seule glycémie élevée, en<br />

général nettement supérieure à 2 g/L, suffit à porter le diagnostic.<br />

En pratique, on ne recourt donc plus à l’hyperglycémie provoquée<br />

orale, le dosage de la glycémie à jeun suffit. Néanmoins,<br />

« l’étalon-or » historique de la définition du diabète reste inchangé :<br />

une glycémie à la 2e heure de l’hyperglycémie provoquée orale<br />

supérieure ou égale à 11 mmol/L (2 g/L).<br />

Préciser le type de diabète<br />

Le diagnostic de diabète fait, il s’agit d’en préciser le type. Le<br />

diagnostic de diabète de type 2 est d’abord un diagnostic d’élimination.<br />

✓ Il ne s’agit pas d’un diabète de type 1, qu’on évoquerait d’emblée<br />

chez un sujet jeune, de moins de 20 ans, n’ayant pas de surpoids,<br />

présentant un syndrome cardinal avec polyurie, polydipsie, polyphagie,<br />

amaigrissement surtout s’il existe une cétonurie. Mais un<br />

diabète de type 1 lent ou diabète LADA peut prendre le masque<br />

initial d’un diabète de type 2. On y pensera plus volontiers chez<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007<br />

Diabète sucré<br />

de type 1 de l’enfant et de l’adulte. Diabète sucré<br />

de type 2 de l’adulte. Complications du diabète<br />

2 e partie — Diabète sucré de type 2 de l’adulte<br />

P r André Grimaldi<br />

Service de diabétologie-métabolisme, groupe hospitalier La Pitié–Salpêtrière, 75013 Paris<br />

andre.grimaldi@psl.aphp.fr<br />

Objectifs<br />

I-00-Q000 II-Q233<br />

• Diagnostiquer un diabète chez l’enfant et chez l’adulte.<br />

• Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.<br />

• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.<br />

• Décrire les principes de la prise en charge au long cours.<br />

un sujet de moins de 40 ans n’ayant pas d’obésité ou chez des<br />

personnes ayant des antécédents familiaux ou personnels de<br />

maladie auto-immune (dysthyroïdie, anémie de Biermer, vitiligo…).<br />

La présence d’anticorps anti-GAD et anti-IA2 permettrait d’affirmer<br />

le caractère auto-immun de ce diabète.<br />

✓ Le diabète de type 2 africain est également souvent atypique.<br />

Il peut se manifester plus tôt par des épisodes aigus de déséquilibre<br />

du diabète accompagnés d’une cétonurie suivis de<br />

rémissions alternant avec des récurrences. On ne trouve pas de<br />

marqueurs d’auto-immunité. L’évolution se fait le plus souvent<br />

en quelques années vers l’insulino-requérance définitive.<br />

✓ Il ne s’agit pas d’un diabète génétique qu’on suspecterait devant<br />

la découverte d’un diabète non cétosique avant l’âge de 20 ans<br />

chez un sujet ayant une hérédité familiale importante (1 membre<br />

sur 2 de la famille est diabétique, 3 générations successives sont<br />

atteintes). On chercherait alors une mutation susceptible d’affirmer<br />

un diabète MODY. Une hérédité maternelle et l’association à une<br />

surdité de perception feraient évoquer un diabète mitochondrial.<br />

✓ L’absence d’argument clinique évoquant un diabète endocrinien<br />

(acromégalie, cushing, phéochromocytome, voire thyrotoxicose<br />

ou maladie de Conn ou exceptionnellement somatostatinome ou<br />

glucagonome) doit être vérifiée.<br />

✓ Un diabète iatrogénique, notamment cortico-induit, a été éliminé.<br />

✓ Enfin, il ne s’agit pas d’un diabète pancréatique. La pancréatite<br />

chronique calcifiante survient le plus souvent dans un contexte<br />

531


d’alcoolisme et s’accompagne d’une insuffisance pancréatique<br />

externe à l’origine d’une stéatorrhée. Mais il peut s’agir d’une<br />

pancréatite chronique familiale et des calcifications pancréatiques<br />

diffuses peuvent être découvertes par l’imagerie pancréatique<br />

en l’absence d’antécédent de douleurs évocatrices. Une hémochromatose<br />

est évoquée en cas de maladie familiale connue ou<br />

d’atteinte clinique évocatrice, mais le dosage du fer sérique et de<br />

la transferrine avec détermination du coefficient de saturation<br />

est de toute façon systématique (ce n’est que si la saturation de<br />

la transferrine est élevée qu’il y a lieu de rechercher la mutation<br />

du gène HFE). Surtout, un diabète non insulinodépendant peut<br />

être l’occasion de découvrir un cancer du pancréas, survenant<br />

en général chez une personne de plus de 50 ans présentant un<br />

amaigrissement. Le plus souvent, le cancer est alors évolué audelà<br />

des possibilités chirurgicales curatrices.<br />

✓ Le plus souvent, le phénotype du patient est suffisamment typique<br />

pour affirmer le diagnostic de diabète de type 2, et ce n’est que dans<br />

les cas douteux que l’on est amené à demander des examens<br />

pour éliminer ces causes. Il s’agit d’un patient de plus de 40 ans<br />

ayant un surpoids avec un indice de masse corporelle supérieur<br />

ou égal à 30 (définition de l’obésité) ou en tout cas supérieur ou<br />

égal à 25 (définition du surpoids). Le périmètre abdominal augmenté<br />

à plus de 90 cm chez la femme, plus de 100 cm chez<br />

l’homme permet d’affirmer l’existence d’une obésité androïde<br />

franche (le périmètre abdominal se mesure avec un centimètre<br />

de couturière, le malade en position debout, à mi-hauteur entre<br />

la dernière côte et la crête iliaque). Il s’agit en réalité d’un continuum<br />

; certains proposent 94 cm pour les hommes et 80 cm<br />

pour les femmes. Dans 80 % des cas, il existe une hypertension<br />

artérielle et/ou une dyslipidémie associée permettant d’affirmer<br />

l’existence d’un syndrome métabolique. Une fois sur 3, on retrouve<br />

une hérédité familiale de 1 er degré. Lorsque ce tableau est évocateur,<br />

il n’y a pas lieu de demander d’examen complémentaire :<br />

pas de dosage de l’insulinémie, du peptide C, ou des anticorps<br />

532<br />

II-Q233<br />

Diabète sucré de type 2 de l’adulte<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Pourraient être proposées des observations de diabétiques de type 2<br />

avec un déroulé sur plusieurs années :<br />

Complications métaboliques<br />

➜ Diagnostic.<br />

➜ Hypoglycémiants oraux.<br />

➜ Déséquilibre prolongé (défaut d’observance<br />

ou évolution vers l’insulino-requérance<br />

ou existence d’une pathologie sous-jacente<br />

[cancer du pancréas, hyperthyroïdie,<br />

pathologie inflammatoire ou infectieuse]).<br />

➜ Diagnostic d’une maladie de Horton.<br />

➜ Prescription de corticoïdes.<br />

➜ Coma hyperosmolaire.<br />

➜ Insuline.<br />

➜ Hypoglycémie à l’arrêt des corticoïdes.<br />

Complications dégénératives<br />

➜ Pied diabétique.<br />

➜ Mal perforant plantaire indolore.<br />

➜Neuropathie (recherche des complications<br />

de microangiopathie).<br />

➜ Non-cicatrisation (non-respect de la<br />

décharge, ostéite, ischémie).<br />

➜ Artérite distale.<br />

➜ Artériographie.<br />

➜ Metformine.<br />

➜ Insuffisance cardiaque.<br />

➜ Infarctus silencieux.<br />

anti-GAD, anti-IA2, pas d’imagerie pancréatique. En revanche, il<br />

est habituel d’inclure dans le bilan systématique initial un dosage<br />

de TSH à la recherche d’une dysthyroïdie, un dosage du fer<br />

sérique et de la transferrine ainsi qu’une sérologie de l’hépatite C<br />

(l’augmentation modérée des transaminases témoigne en réalité<br />

souvent d’une stéatose hépatique, fréquente chez les patients<br />

présentant une obésité androïde).<br />

Reste que le diagnostic de diabète de type 2 est souvent fait<br />

avec retard, à l’occasion d’un bilan systématique, voire même<br />

lors de la découverte d’une complication. C’est pourquoi le bilan<br />

initial doit comprendre une recherche des facteurs de risque<br />

cardiovasculaire souvent associés et un dépistage systématique<br />

des complications de micro- et de macroangiopathies (v. article<br />

sur les complications du diabète).<br />

RECONNAÎTRE LES SITUATIONS D’URGENCE<br />

ET DÉFINIR LES GRANDES LIGNES DE LEUR<br />

PRISE EN CHARGE<br />

Les situations d’urgence, au cours du diabète de type 2, sont de<br />

deux ordres : il peut s’agir d’une part de complications métaboliques,<br />

d’autre part d’épisodes aigus secondaires aux complications<br />

de micro- et de macroangiopathies.<br />

Complications de micro-<br />

ou de macroangiopathies<br />

Encore une fois, c’est fréquemment à l’occasion d’un infarctus<br />

du myocarde ou d’un accident vasculaire cérébral que l’on découvre<br />

un diabète de type 2. Un diabète de type 2 peut être découvert<br />

à l’occasion d’un mal perforant plantaire avec ostéite ou à l’occasion<br />

d’une gangrène d’orteil compliquant une artérite distale<br />

longtemps méconnue en raison de l’absence de douleur due à la<br />

neuropathie diabétique. Il peut aussi être découvert à l’occasion<br />

d’une baisse de l’acuité visuelle ou d’une diplopie (v. complications).<br />

●<br />

Complications<br />

métaboliques<br />

Les complications d’urgence métaboliques<br />

sont au nombre de 4 : le coma<br />

hyperosmolaire, le coma acidocétosique,<br />

l’acidose lactique, l’hypoglycémie sévère.<br />

Les 2 dernières sont des complications<br />

iatrogènes.<br />

1. Coma hyperosmolaire<br />

Il peut compliquer un diabète de type 2<br />

connu, mais une fois sur deux il révèle un<br />

diabète méconnu. Il s’agit d’une grande<br />

déshydratation globale intra- et extracellulaire<br />

dont témoigne la triade : hyperglycémie<br />

à plus de 4 g/L, natrémie normale<br />

ou augmentée, insuffisance rénale fonctionnelle,<br />

avec classiquement une absence<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007


de cétonurie. Le terrain habituel est le sujet âgé, ressentant<br />

mal ou exprimant mal sa soif, développant un coma hyperosmolaire<br />

à l’occasion d’un épisode intercurrent (accident vasculaire,<br />

infection, prescription de corticoïdes ou de diurétiques,<br />

diarrhée, coup de chaleur…). Le coma hyperosmolaire peut<br />

aussi se rencontrer chez des sujets plus jeunes, grands buveurs<br />

de boissons sucrées (on a pu parler du « coma hyperosmolaire<br />

antillais »).<br />

Une trace ou une croix d’acétone dans les urines n’interdit<br />

pas le diagnostic, car elle peut très bien témoigner d’une simple<br />

cétose de jeûne. Le diagnostic erroné d’acidocétose serait<br />

grave s’il entraînait une diminution des apports hydriques. En<br />

effet, le traitement du coma hyperosmolaire repose sur une<br />

réhydration massive avec l’apport d’environ 8 à 12 litres en<br />

24 heures dont les 2 premiers litres en 2 heures. On débute<br />

toujours par du sérum physiologique pour éviter un choc hypovolémique.<br />

Une insulinothérapie par seringue électrique est<br />

mise en place à raison de 5 à 10 unités par heure. Un des<br />

points essentiels du traitement de ces grandes déshydratations<br />

survenant chez les sujets âgés concerne la prévention des complications<br />

de déshydratation et de décubitus (prévention des<br />

thromboses veineuses et artérielles, des obstructions bronchiques,<br />

des parotidites suppurées, des infections oculaires, des<br />

escarres) qui peuvent entraîner le décès secondaire du patient<br />

alors que le bilan hydroélectrolytique a été corrigé grâce à la<br />

réanimation.<br />

2. Coma acidocétosique.<br />

Il complique habituellement le diabète de type 1. Il est beaucoup<br />

plus rare au cours du diabète de type 2, mais il peut survenir dans<br />

des situations de stress majeur (accidents cardiovasculaires<br />

importants, infections générales graves…) entraînant une hypersécrétion<br />

des hormones de contre-régulation (catécholamines,<br />

cortisol, glucagon) augmentant la production hépatique de glucose.<br />

De plus, les catécholamines inhibent l’insulino-sécrétion.<br />

Le traitement repose sur l’insulinothérapie et la réhydratation,<br />

associées bien sûr au traitement de la cause déclenchante.<br />

3. Acidose lactique<br />

Elle est exceptionnelle mais particulièrement grave puisqu’elle<br />

entraîne le décès du patient 1 fois sur 2.<br />

La responsabilité de la metformine est controversée, mais justifie<br />

le respect des règles de prescription. Elle est contre-indiquée<br />

en cas d’insuffisance rénale, mais deux attitudes sont possibles.<br />

Tout le monde est d’accord pour exiger son arrêt absolu en cas<br />

d’insuffisance rénale sévère avec clairance de la créatinine<br />

inférieure à 30 mL/min. Certains pensent que cette interdiction<br />

est valable dès que la clairance de la créatinine est inférieure à<br />

60 mL/min (ce qui est le cas de nombreuses personnes âgées).<br />

D’autres estiment que lorsque la clairance est comprise entre<br />

30 et 60 mL/min, il suffit de réduire la posologie de metformine<br />

à moins d’1 g par jour.<br />

La metformine doit être arrêtée la veille d’une intervention<br />

chirurgicale avec une anesthésie générale. Elle sera reprise après<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007<br />

à retenir<br />

Définition du diabète : deux glycémies à jeun supérieures<br />

à 1,26 g/L (plasma veineux glucose oxydase).<br />

Le diagnostic de diabète de type 2 est un diagnostic<br />

d’élimination, mais si le phénotype est typique, il n’y a pas<br />

lieu de demander d’examen complémentaire à la recherche<br />

d’une cause.<br />

Le coma hyperosmolaire complique 1 fois sur 2 un diabète<br />

méconnu.<br />

Un coma acidocétosique est rare mais possible au cours<br />

d’un diabète de type 2 en situation de choc (accident<br />

cardiovasculaire, choc septique…).<br />

La metformine est contre-indiquée en cas d’insuffisance<br />

rénale modérée à sévère.<br />

Le risque principal des sulfamides hypoglycémiants<br />

et des glinides est l’hypoglycémie.<br />

Le régime diabétique n’est pas un régime pauvre en<br />

glucides mais pauvre en graisses.<br />

Le développement de l’activité physique d’endurance,<br />

au moins 30 minutes par jour 5 jours par semaine, fait<br />

partie intégrante du traitement.<br />

Le traitement médicamenteux est adapté en fonction<br />

du taux d’HbA1c qui a tendance à s’élever au fil<br />

des années en raison d’une carence insulino-sécrétoire<br />

progressive.<br />

L’HbA1c reflète la glycémie moyenne des deux mois<br />

précédant le prélèvement.<br />

Une HbA1c inférieure ou égale à 6,5 % témoigne d’un<br />

diabète parfaitement équilibré (absence de risque de<br />

microangiopathie).<br />

Une HbA1c inférieure ou égale à 7 % témoigne d’un diabète<br />

bien équilibré (risque faible de microangiopathie).<br />

l’opération, en même temps que l’alimentation. La metformine<br />

doit être arrêtée la veille d’une radiographie comportant une<br />

injection d’iode. Elle ne sera reprise que 2 jours après, en l’absence<br />

d’insuffisance rénale aiguë induite par l’iode. La metformine<br />

n’est pas toxique pour le rein, mais elle a une élimination<br />

rénale, et en cas d’insuffisance rénale son accumulation peut<br />

être à l’origine d’une acidose lactique.<br />

4. Hypoglycémie<br />

POINTS FORTS<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 536)<br />

Elle peut être provoquée par les médicaments insulino-sécréteurs<br />

sulfamides hypoglycémiants et glinides et bien sûr par l’insuline.<br />

Elle est beaucoup plus fréquente et doit être systématiquement<br />

prévenue. On distingue :<br />

R Q 233<br />

533


534<br />

II-Q233<br />

Diabète sucré de type 2 de l’adulte<br />

— les hypoglycémies minimes ou modérées où le malade peut se<br />

resucrer lui-même devant la survenue de symptômes neurovégétatifs<br />

évocateurs (sueurs, palpitations, tremblements,<br />

fringales, sensations de malaise) ;<br />

— les hypoglycémies sévères où le malade ne peut pas rétablir<br />

une glycémie normale seul et a besoin de l’aide d’une tierce<br />

personne ;<br />

— les comas hypoglycémiques nécessitant le recours à l’injection<br />

de glucose intraveineux. L’injection de glucagon est possible<br />

lorsque l’hypoglycémie est provoquée par l’insuline ; elle est<br />

contre-indiquée lorsque le coma hypoglycémique est secondaire<br />

à la prise de médicaments insulino-sécréteurs, dont le glucagon<br />

potentialise l’action ;<br />

— les hypoglycémies sous médicaments insulino-sécréteurs surviennent<br />

de préférence avant les repas, en particulier en fin d’après-midi<br />

et la nuit vers 3 h du matin. Lors de la prescription de<br />

médicaments insulino-sécréteurs, il est souhaitable que le malade<br />

pratique l’auto-mesure glycémique. En cas de malaise inexpliqué,<br />

il pourra mesurer sa glycémie de façon instantanée pour vérifier<br />

l’existence ou non d’une hypoglycémie. Il peut de toute façon être<br />

utile de demander un dosage systématique de la glycémie au<br />

laboratoire en fin d’après-midi pour vérifier l’absence d’hypoglycémie.<br />

L’existence de glycémies inférieures à 0,70 g/L vers<br />

18 h devrait entraîner une diminution de la posologie des sulfamides<br />

hypoglycémiants.<br />

Il faut enseigner aux malades les conditions favorisant la survenue<br />

d’une hypoglycémie : diminution ou retard des apports<br />

glucidiques, augmentation de l’activité physique, médicaments<br />

susceptibles de favoriser les hypoglycémies, seuls ou en interférant<br />

avec les sulfamides hypoglycémiants (inhibiteurs de<br />

l’enzyme de conversion, dextropropoxyphène, miconazole per os,<br />

cibenzoline, disopyramide…). Il faut se méfier du risque hypoglycémique<br />

lorsque l’on arrête un traitement hyperglycémiant<br />

(corticoïdes) ou lorsque l’on guérit une pathologie infectieuse ou<br />

inflammatoire qui avait conduit à augmenter la posologie des<br />

traitements hypoglycémiants.<br />

En réalité, le risque d’hypoglycémie est nettement majoré<br />

chez trois types de malades : les personnes âgées, les malades<br />

dénutris, les insuffisants rénaux. Chez ces patients, les hypoglycémies<br />

peuvent être responsables de neuroglycopénies avec<br />

accidents traumatiques, d’accidents cardiovasculaires secondaires<br />

à la poussée hypertensive et à l’hyperactivité plaquettaire<br />

induites par l’hypoglycémie.<br />

Il est conseillé au patient diabétique de type 2 ayant un traitement<br />

hypoglycémiant d’avoir toujours sur lui l’équivalent de<br />

3 sucres (15 g de glucides) à prendre immédiatement en cas de<br />

malaise. On doit recommander au malade de ne pas prendre de<br />

sulfamides hypoglycémiants ou de glinides s’il doit sauter un<br />

repas ou s’il a une activité physique inhabituelle. Il ne faut pas<br />

hésiter à diminuer la posologie des sulfamides hypoglycémiants,<br />

notamment lors de l’association aux autres classes d’hypoglycémiants<br />

(metformine, glitazone ou insuline). Il n’y a pas lieu d’associer<br />

deux sulfamides hypoglycémiants ni d’associer sulfamides<br />

hypoglycémiants et glinides.<br />

ARGUMENTER LE TRAITEMENT<br />

Généralités<br />

Le diabète de type 2 survient après plusieurs années d’insulinorésistance<br />

musculaire responsable d’un hyperinsulinisme. Cette<br />

insulino-résistance musculaire est secondaire à la sédentarité et<br />

à l’excès de graisses, provoquant augmentation des acides gras<br />

libres et entraînant des dépôts de triglycérides au sein même des<br />

fibres musculaires. Il existe également une insulino-résistance<br />

hépatique avec augmentation de la néoglucogenèse, activée par<br />

l’augmentation des acides gras libres. Cet afflux d’acides gras libres<br />

stimule la synthèse des VLDL à l’origine souvent d’une hypertriglycéridémie<br />

et parfois d’une stéatose hépatique. Cette augmentation<br />

des acides gras libres s’explique elle-même par l’insulino-résistance<br />

du tissu adipeux, en particulier du tissu adipeux<br />

viscéral. Après des années d’insulino-résistance, on assiste donc<br />

à un épuisement de l’insulino-sécrétion dont le mécanisme moléculaire<br />

reste débattu. Le traitement du diabète de type 2 vise à<br />

agir sur l’ensemble des cibles tissulaires et métaboliques :<br />

— réduire l’excès de graisses, grâce à un régime modérément hypocalorique<br />

avec réduction des apports en graisses saturées (graisses<br />

d’origine animale, en dehors des poissons), diminution ou arrêt de<br />

la consommation d’alcool et suppression des boissons sucrées. Le<br />

régime diabétique n’est donc pas un régime hypoglucidique mais<br />

normoglucidique et hypolipidique. À ce jour, aucun médicament<br />

de l’obésité n’est remboursé pour la prise en charge du diabète ;<br />

— augmenter la sensibilité musculaire à l’insuline grâce à une<br />

activité physique d’endurance quasi quotidienne (comme la marche<br />

rapide, au moins 30 minutes 5 jours par semaine en plus des<br />

activités quotidiennes). Deux classes de médicaments améliorent<br />

la sensibilité musculaire à l’insuline : d’une part les glitazones<br />

et d’autre part de façon plus modérée, la metformine ;<br />

— diminuer la production hépatique de glucose, ce que font de<br />

façon additive la metformine et les glitazones ;<br />

— augmenter la sécrétion d’insuline, ce que font les sulfamides<br />

hypoglycémiants et les glinides (les glinides agissent sur le même<br />

récepteur bêtacellulaire que les sulfamides hypoglycémiants mais<br />

au niveau d’un site de liaison distinct). Ils ont une durée d’action<br />

plus courte que les sulfamides. Lorsque ces médicaments insulino-sécréteurs<br />

n’agissent plus en raison de la maladie de la cellule<br />

B, on doit recourir aux injections d’insuline ;<br />

— enfin, on souhaiterait pouvoir stopper ou ralentir le déclin progressif<br />

de l’insulino-sécrétion, inexorable au fil des ans. Ni l’insulinothérapie,<br />

ni les sulfamides, ni la metformine ne s’en sont montrés<br />

capables. Les glitazones et une nouvelle classe d’hypoglycémiants,<br />

les analogues du GLP-1 (Glucagon Like Peptide-1) non<br />

encore commercialisés, prétendent ralentir la défaillance insulinosécrétoire,<br />

mais les preuves de cette action restent à apporter.<br />

Modalités<br />

Le traitement du diabète de type 2 repose donc sur une escalade<br />

thérapeutique pas à pas, fixée en fonction de l’évolution de la<br />

maladie. Cette évolution se juge sur le dosage de l’HbA1c reflétant<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007


la glycémie moyenne des deux mois précédant le prélèvement.<br />

Le taux normal d’HbA1c par un dosage validé standardisé se situe<br />

entre 4 et 6 %. On estime qu’un taux de 6 % correspond à une<br />

glycémie moyenne d’1,20 g/L. Un point d’HbA1c correspond en<br />

moyenne à 0,30–0,35 g de glycémie. Il existe une très forte corrélation<br />

entre le taux d’HbA1c et la survenue de complications<br />

de microangiopathie, avec pour un point en plus d’HbA1c, 30 %<br />

en plus de rétinopathie, de néphropathie et de neuropathie ainsi<br />

que d’artérite distale (au-dessous du genou). L’inverse est vrai :<br />

un point en moins d’HbA1c grâce au traitement, entraîne sur 5 à<br />

10 ans, 30 % en moins de rétinopathie, de néphropathie, de neuropathie,<br />

d’artérite distale. La corrélation entre l’HbA1c et la macroangiopathie<br />

(insuffisance coronaire, artérite cervico-cérébrale<br />

et artérite proximale des membres inférieurs) est moins forte.<br />

Pour un point d’HbA1c en plus ou en moins, on observe 10 à 15 %<br />

en plus ou en moins d’accidents vasculaires. En effet, si l’hyperglycémie<br />

est le facteur causal de la microangiopathie, dont l’évolution<br />

est aggravée par l’hypertension artérielle, l’hyperglycémie<br />

n’est qu’un des facteurs de risque de la macroangiopathie à<br />

côté de l’hypertension artérielle, de l’hyperlipémie, du tabagisme,<br />

du sexe masculin et de l’âge. Une étude a permis de montrer que<br />

lorsque l’HbA1c reste inférieure à 6,5 %, on peut prévenir l’apparition<br />

de la microangiopathie. Plus généralement, le risque de<br />

complications sévères du diabète augmente nettement lorsque<br />

l’HbA1c est supérieure à 7 %. On peut donc dire qu’un diabète<br />

est parfaitement équilibré lorsque l’HbA1c est inférieure à 6,5, qu’il<br />

est bien équilibré lorsque l’HbA1c est inférieure à 7 %.<br />

L’escalade thérapeutique fixée par les recommandations de<br />

l’HAS 2006 est donc la suivante : le traitement doit commencer<br />

par la mise en œuvre de mesures hygiéno-diététiques personnalisées<br />

(diététique et activité physique adaptées à chaque patient).<br />

Si au bout de 3 à 6 mois, ces mesures s’avèrent inefficaces avec<br />

une HbA1c supérieure à 6 %, il faut recourir à la prescription de<br />

metformine en utilisant des posologies très progressivement<br />

croissantes pour améliorer la tolérance digestive (nausées, douleurs<br />

épigastriques, diarrhée motrice) et en respectant la contreindication<br />

absolue de l’insuffisance rénale. En cas d’intolérance<br />

digestive, la metformine peut être remplacée par un inhibiteur<br />

des alphaglucosidases (acarbose ou miglitol) qui diminuent l’absorption<br />

intestinale du glucose, mais la tolérance digestive de<br />

cette classe médicamenteuse est également médiocre.<br />

Ce n’est qu’en cas d’hyperglycémie franche avec une HbA1c<br />

supérieure à 6,5 % chez un patient n’ayant pas de surpoids qu’on<br />

pourrait entreprendre un traitement par des sulfamides hypoglycémiants<br />

qui, contrairement à la metformine, comportent un<br />

risque d’hypoglycémie. Si malgré les mesures hygiéno-diététiques<br />

et la monothérapie initiale (le plus souvent la metformine),<br />

l’HbA1c devient ou reste supérieure à 6,5 %, il faut recourir à une<br />

bithérapie. La bithérapie classique associe metformine et sulfamides.<br />

La bithérapie plus récente associe metformine et glitazones. Elle<br />

a l’avantage d’agir sur l’insulino-résistance musculaire et hépatique<br />

sans comporter le risque d’hypoglycémie. Mais les glitazones<br />

favorisent la rétention hydrosodée et facilitent la prise de poids.<br />

Elles sont donc contre-indiquées en cas d’insuffisance cardiaque<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007<br />

et surtout elles coûtent plus cher, et le recul n’est que de quelques<br />

années. Enfin, si malgré les mesures hygiéno-diététiques et la<br />

bithérapie l’HbA1c reste supérieure à 7 %, il faut passer à une trithérapie<br />

(metformine-sulfamides-glitazones) ou envisager le<br />

recours précoce à l’insuline en commençant le plus souvent par<br />

une injection d’insuline retard le soir au coucher et en visant une<br />

glycémie à jeun inférieure à 1,20 g/L. La metformine et les sulfamides<br />

peuvent être associés à l’insuline, mais actuellement en<br />

Europe l’association insuline-glitazones est contre-indiquée en<br />

raison de la rétention hydrosodée. Lorsque l’HbA1c reste supérieure<br />

à 8 %, le recours à l’insulinothérapie s’impose.<br />

Ces objectifs concernent bien sûr les personnes ayant une<br />

espérance de vie suffisante pour justifier une prévention des<br />

complications de microangiopathie (rétinopathie, néphropathie,<br />

neuropathie), c’est-à-dire une espérance de vie supérieure à<br />

10 ans. Chez les personnes ayant une espérance de vie inférieure<br />

à 5 ans en raison du grand âge ou de pathologies sévères, l’objectif<br />

essentiel devient le confort métabolique et la prévention<br />

des complications infectieuses favorisées par le déséquilibre<br />

glycémique chronique Pour éviter le risque d’hypoglycémie, on<br />

peut se contenter d’une HbA1c inférieure à 9 % avec des glycémies<br />

préprandiales inférieures à 2 g/L.<br />

Dans tous les cas, le traitement du diabète comprend le traitement<br />

des facteurs de risque cardiovasculaire associés, avec<br />

pour objectif une pression artérielle inférieure à 130/80 mmHg<br />

et un LDL-cholestérol inférieur à 1,30 ou 1 g/L selon l’importance<br />

du risque cardiovasculaire. Dans chaque cas de figure, l’arrêt<br />

d’une intoxication tabagique s’impose.<br />

PLANIFIER LE SUIVI<br />

Le traitement du diabète de type 2 et les objectifs doivent en fait<br />

être individualisés en prenant en compte les facteurs personnels,<br />

biomédicaux mais aussi psychosociaux. Les objectifs doivent être<br />

négociés avec le patient et réalistes, et donc, si besoin est, réduits<br />

(« micro-objectifs »).<br />

En dehors de complications évolutives, le malade est suivi en<br />

consultation tous les 3 mois. Ce délai peut être raccourci si le<br />

diabète est mal équilibré ou au contraire allongé à 6 mois si le<br />

diabète est bien équilibré. L’HbA1c doit être dosée tous les 3 mois.<br />

À chaque consultation, on vérifie la pression artérielle, le poids<br />

et surtout on discute avec le patient des difficultés qu’il rencontre<br />

à suivre le traitement pour réévaluer si nécessaire les objectifs.<br />

L’auto-surveillance glycémique, c’est-à-dire la mesure de la<br />

glycémie capillaire par le malade lui-même grâce à une piqûre au<br />

bout du doigt, peut être utile si elle permet au malade d’adapter<br />

son traitement en fonction des résultats obtenus. Il faut donc définir<br />

avec le patient la fréquence des contrôles et les algorithmes thérapeutiques<br />

en fonction des résultats. Une simple auto-surveillance<br />

contemplative est en général inutile. L’auto-surveillance est en<br />

revanche indispensable lorsqu’on envisage le recours à l’insulinothérapie.<br />

C’est dire l’importance d’une éducation thérapeutique<br />

structurée utilisant les méthodes de pédagogie d’apprentissage<br />

R Q 233<br />

535


536<br />

II-Q233<br />

Diabète sucré de type 2 de l’adulte<br />

en petits groupes pour la résolution de problèmes. Cette éducation<br />

thérapeutique est au mieux réalisée par des équipes médicales<br />

et paramédicales ayant une double compétence : diabétologique<br />

et pédagogique.<br />

Tous les ans, doit être fait un bilan annuel comprenant un<br />

examen du fond d’œil ou une rétinographie (photo du fond d’œil).<br />

L’angiographie rétinienne ne doit pas être systématique. Son<br />

indication relève de l’ophtalmologiste en cas de lésion rétinienne<br />

susceptible de justifier un traitement par laser.<br />

Chaque année, sont systématiques : un électrocardiogramme,<br />

un bilan lipidique (cholestérol total, triglycérides, HDL-cholestérol,<br />

calcul du LDL-cholestérol selon la formule de Friedwald (LDLcholestérol<br />

= cholestérol total — HDL-cholestérol — triglycérides<br />

sur 5 à la condition d’un taux de triglycérides inférieur à 3 g/L),<br />

un dosage de la microalbuminurie avec recueil sur échantillon<br />

en exprimant le résultat en microalbuminurie sur créatininurie).<br />

L’examen podologique est annuel tant qu’il est normal, sans artérite<br />

ni neuropathie. La neuropathie est dépistée par le monofilament.<br />

L’artérite est confirmée par l’échodoppler en cas de suspicion<br />

clinique. S’il existe une neuropathie ou une artérite, l’examen<br />

podologique doit être fait à chaque consultation. Le malade doit<br />

alors bénéficier d’une éducation pour la prévention du risque<br />

podologique. Il doit savoir qu’il doit examiner ses pieds tous les<br />

jours et consulter en urgence en cas de plaie du pied, même<br />

minime.<br />

En cas de risque cardiovasculaire élevé, chez un homme de<br />

plus de 55 ans, ou chez une femme de plus de 60 ans, ayant un<br />

diabète depuis plus de 10 ans et deux autres facteurs de risque<br />

cardiovasculaire associés au diabète, ou chez les patients ayant<br />

une néphropathie (albuminurie supérieure à 300 mg/24 h) ou<br />

des lésions d’athérosclérose significatives (plaques sténosantes<br />

supérieures à 50 %), il convient de réaliser un dépistage de<br />

l’ischémie myocardique silencieuse grâce à un électrocardiogramme<br />

d’effort. Si l’effort maximal n’est pas possible, interdisant<br />

l’interprétation de l’électrocardiogramme d’effort, on<br />

demandera une scintigraphie myocardique effort – Persantine<br />

ou une « échographie cardiaque de stress ». Si le dépistage<br />

d’ischémie myocardique silencieuse est négatif, en l’absence de<br />

symptôme, l’examen ne sera renouvelé que 3 ans plus tard. De<br />

même, chez les patients à haut risque cardiovasculaire, il est<br />

nécessaire de demander un échodoppler des troncs supraaortiques<br />

à la recherche de sténoses significatives susceptibles<br />

de justifier un traitement. En revanche, l’échodoppler des membres<br />

inférieurs ne doit pas être systématique. Il n’est pas nécessaire<br />

si tous les pouls sont perçus normalement, sans souffle, en l’absence<br />

de tout trouble trophique. Il est en revanche indispensable<br />

au moindre doute d’artérite des membres inférieurs. ■<br />

L’auteur déclare participer ou avoir participé à des interventions<br />

ponctuelles (essais cliniques, activités de conseils, conférences)<br />

pour les entreprises : Merck Lipha, Servier, GSK, Takeda,<br />

Lilly France, Novo Nordisk, Sanofi-aventis, MSD.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Le diagnostic de diabète est porté si :<br />

1 un dosage de la glycémie à jeun est supérieur<br />

ou égal à 7 mmol/L ;<br />

2 un dosage de l’HbA1c est supérieur ou égal à 6 % ;<br />

3 une glycémie à jeun est supérieure ou égale<br />

à 7,7 mmol/L ;<br />

4 une glycémie à n’importe quel moment de la journée<br />

est supérieure ou égale à 11 mmol/L (2 g/L) ;<br />

5 l’hyperglycémie provoquée orale reste l’examen<br />

indispensable pour le diagnostic de diabète.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

Les sulfamides hypoglycémiants :<br />

1 ne provoquent pas plus d’hypoglycémies<br />

que la metformine ;<br />

2 restent efficaces tout au long de l’évolution<br />

du diabète ;<br />

3 peuvent être associés ;<br />

4 doivent être prescrits en association à la metformine<br />

lorsque l’HbA1c reste supérieure à 6,5 % ;<br />

5 ne doivent jamais être arrêtés, y compris lorsque<br />

le patient diabétique ne peut pas s’alimenter.<br />

C / QCM<br />

Le diagnostic du diabète de type 2 :<br />

1 se fait essentiellement sur le dosage de la glycémie,<br />

l’interrogatoire et l’examen clinique ;<br />

2 nécessite un dosage de l’insulinémie et du peptide C ;<br />

3 nécessite une échographie ou un scanner<br />

du pancréas ;<br />

4 nécessite un dosage des anticorps anti GAD<br />

et anti IA2 ;<br />

5 nécessite une recherche de mutation génétique.<br />

Réponses : A : F, F, F, V, F / B : F, F, F, V, F / C : 1.<br />

DÉJÀ TRAITÉ : ● 1 re partie :<br />

« Diabète sucré de type 1 de l’enfant et de l’adulte ».<br />

Rev Prat 2007;57[1]:71-8.<br />

À PARAÎTRE : ● 3 e partie :<br />

« Diabète sucré : complications du diabète ».<br />

◗ Traité de diabétologie<br />

Coord. André Grimaldi<br />

Paris : Médecine-Sciences,<br />

Flammarion<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Complications du diabète<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2007;57:<br />

à paraître)<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 MARS 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

rénale aiguë (IRA) se définit<br />

par une diminution rapide du débit de<br />

L’insuffisance<br />

filtration glomérulaire (DFG) avec pour<br />

conséquence une défaillance de la fonction<br />

rénale antérieurement stable. L'IRA se caractérise par l’apparition<br />

de complications qui résultent de l’impossibilité des reins à assurer<br />

l’homéostasie hydro-électrolytique et acido-basique et à éliminer<br />

les déchets produits par l’organisme.<br />

PHYSIOPATHOLOGIE<br />

Les déterminants du débit de filtration glomérulaire sont représentés<br />

sur la figure 1. Il dépend de trois paramètres : la pression<br />

capillaire intraglomérulaire (qui dépend de la pression de perfusion<br />

rénale et des résistances vasculaires des artérioles afférente<br />

et efférente), la perméabilité de la membrane glomérulaire et la<br />

pression urinaire.<br />

Le débit de filtration glomérulaire diminue :<br />

— quand la pression capillaire intraglomérulaire diminue (insuffisance<br />

rénale fonctionnelle [IRF], nécrose tubulaire aiguë [NTA]<br />

ischémique) ;<br />

Figure 1<br />

— quand la perméabilité de la membrane glomérulaire diminue<br />

(glomérulonéphrites aiguës [GNA]) ;<br />

— quand la pression urinaire s’élève : soit les tubules sont nécrosés<br />

(NTA), soit il y a un obstacle sur les voies urinaires (IRA obstructive).<br />

Devant un patient suspect de présenter une IRA, il convient<br />

simultanément d'établir le diagnostic positif d’IRA, de rechercher<br />

des complications immédiates qui nécessitent un traitement en<br />

urgence et d'établir un diagnostic étiologique. Un traitement<br />

adapté permet dans la plupart des cas d’obtenir une normalisation<br />

de la fonction rénale.<br />

DIAGNOSTIC POSITIF<br />

I-00-Q000 II-Q252<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

Pr Julien Bohé1 , Dr Laurent Juillard2 1. INSERM U. 870 / INRA U. 1235 / INSA / UCBL / HCL, Réanimation médicale, centre hospitalier Lyon-Sud, 69310 Pierre-Bénite.<br />

2. INSERM ERI 22, Université de Lyon, et service de néphrologie, hôpital Édouard-Herriot, 69437 Lyon Cedex 08.<br />

julien.bohe@chu-lyon.fr laurent.juillard@chu-lyon.fr<br />

ARTÉRIOLE EFFÉRENTE<br />

Résistance artériole efférente<br />

Principaux déterminants de la filtration glomérulaire.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007<br />

Objectifs<br />

• Diagnostiquer une insuffisance rénale aiguë et une anurie.<br />

• Identifier les situations d’urgence et planifier leur prise en charge.<br />

GLOMÉRULE<br />

Pression<br />

intraglomérulaire<br />

Perméabilité glomérulaire<br />

Pression<br />

voie urinaire<br />

TUBULE<br />

La définition de l'IRA n'est pas consensuelle. Le diagnostic d'insuf -<br />

fisance rénale est le plus souvent évoqué devant une diminution<br />

du débit urinaire et/ou la découverte d'une élévation de la créatinine<br />

plasmatique. Le caractère aigu est retenu si l’élévation de la créa-<br />

Perfusion rénale<br />

ARTÉRIOLE AFFÉRENTE<br />

Résistance artériole afférente<br />

1953


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

tinine plasmatique (et dans une moindre mesure de l’urée) est<br />

récente (classiquement moins de sept jours). L'IRA survient sur<br />

une fonction rénale antérieurement normale ou complique l'évolution<br />

d'une insuffisance rénale chronique (IRC). L'oligurie est<br />

définie par une diurèse (ou débit urinaire pendant 24 heures)<br />

inférieure à 500 mL ou un débit urinaire inférieur à 20 mL/h.<br />

L’anurie est l'arrêt complet de la filtration glomérulaire avec une<br />

diurèse inférieure à 300 mL.<br />

Moyens du diagnostic<br />

✓ L’interrogatoire du patient : recherche d’antécédent urologique<br />

ou néphrologique, recherche de résultats antérieurs de dosages<br />

sanguins de la créatinine et de l’urée, et d’examens d’imagerie<br />

des reins et des voies urinaires excrétrices.<br />

✓ Le dosage de la créatinine et de l’urée plasmatique, le ionogramme<br />

sanguin.<br />

✓ La mesure du débit urinaire : la pose d’une sonde vésicale à<br />

demeure est souvent indispensable pour quantifier le débit urinaire<br />

et suivre l’efficacité du traitement.<br />

Limites des critères utilisés pour définir<br />

l'insuffisance rénale aiguë<br />

1. Élévation de la créatininémie<br />

La créatinine, qui est un déchet produit par le catabolisme de<br />

la créatine musculaire, est utilisée pour évaluer le DFG. La créatininémie<br />

d’un patient est toujours interprétée en tenant compte<br />

du sexe, de l'âge et du poids (essentiellement la masse musculaire).<br />

Les formules de Cockcroft ou de MDRD intègrent ces paramètres<br />

et permettent, lorsque la fonction rénale est stable, de<br />

calculer la clairance de la créatinine, qui est une évaluation plus<br />

fiable du DFG (encadré). Il est important de noter que la relation<br />

entre la diminution du DFG et l’élévation de la créatininémie n’est<br />

1954<br />

II-Q252<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple de cas clinique,<br />

pourrait concerner l’item « Insuffisance rénale aiguë — Anurie ».<br />

Cas clinique<br />

Un patient âgé de 85 ans est amené aux<br />

urgences de l'hôpital par son fils pour<br />

un syndrome confusionnel apparu depuis<br />

quelques jours. Dans ses antécédents, on<br />

retrouve une obésité et une insuffisance<br />

cardiaque sur une cardiopathie hypertensive.<br />

Le traitement habituel comporte<br />

Amlor (5 mg/j), Lasilix (40 mg/j),<br />

Kardégic (75 mg/j) et Triatec (5 mg /j).<br />

Le patient a eu, une semaine auparavant,<br />

une gastro-entérite avec d’importants<br />

vomissements .<br />

FORMULES<br />

L'examen clinique montre : fréquence<br />

cardiaque à 120 battements par minute,<br />

pression artérielle à 100/80 mmHg. Pas<br />

de dyspnée et auscultation pulmonaire<br />

sans particularité. Pas de syndrome<br />

œdémateux et muqueuse buccale sèche.<br />

Le bilan biologique sanguin réalisé à<br />

l'admission montre : sodium 145 mmol/L,<br />

potassium 6,5 mmol/L, réserve alcaline<br />

16 mmol/L, urée 32 mmol/L, créatinine<br />

450 μmol/L.<br />

Quelles données du dossier vous<br />

orientent vers une insuffisance rénale<br />

● Formule de Cockcroft et Gault (1976)<br />

K x (140 — Âge) x Poids<br />

ClCréat =<br />

Créat<br />

➜ ClCréat : clairance de la créatinine (mL/min) ;<br />

➜ Créat : créatinine plasmatique (μmol/L) ;<br />

➜ âge (années) ;<br />

➜ poids (kg) ;<br />

➜ K = 1,04 si sexe féminin et 1,23 si sexe masculin<br />

● Formule MDRD (Modification of the Diet<br />

in Renal Disease), 1999<br />

Créat<br />

DFG = K x 186,3 x —1,154 Âge —0,203<br />

88,4<br />

➜ DFG : débit de filtration glomérulaire (mL/min/1,73m2 ) ;<br />

➜ Créat créatinine plasmatique (μmol/L) ;<br />

➜ âge (années) ;<br />

➜ K = 1 si sexe masculin et 0,742 si sexe féminin.<br />

Multiplier par 1,21 si origine africaine.<br />

pas linéaire (fig. 2). Chez le sujet dont la fonction rénale est normale,<br />

une diminution importante du DFG ne se traduit que par<br />

une élévation modérée de la créatininémie. À l’inverse, chez le<br />

sujet IRC, une petite diminution du DFG provoque une élévation<br />

plus marquée de la créatininémie. Par ailleurs, au cours de l’IRA,<br />

une mesure unique de la créatininémie ne permet pas de déterminer<br />

si la fonction rénale se dégrade ou récupère (fig. 3). Enfin,<br />

en l'absence d’IRA, la créatininémie s’élève au cours de la destruction<br />

musculaire, comme par exemple lors du crush syndrome.<br />

aiguë plutôt que vers une insuffisance<br />

rénale chronique ?<br />

Quel examen complémentaire manque<br />

dans ce dossier ?<br />

Quel traitement s'impose en urgence ?<br />

Comment peut-on préciser dans ce<br />

dossier s'il s'agit d'une insuffisance rénale<br />

aiguë fonctionnelle ou d'une nécrose<br />

tubulaire aiguë ischémique ?<br />

Donner les principes du traitement<br />

de la défaillance rénale.<br />

Comment juger de l'efficacité de la<br />

prise en charge ?<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

2. Élévation de l'urée plasmatique<br />

De nombreuses conditions font varier l’urée plasmatique en<br />

dehors de toute IRA. La concentration d'urée s’élève avec l’apport<br />

protéique alimentaire, au cours des hémorragies digestives<br />

(absorption intestinale) et des états d'hypercatabolisme (comme<br />

sous corticothérapie).<br />

3. Diminution de la diurèse<br />

La diurèse peut être réduite en dehors de l'IRA lorsque l’apport<br />

en eau est réduit.<br />

L’absence d’émission d’urine doit systématiquement faire évoquer<br />

une rétention aiguë d’urine. La vessie est alors pleine et<br />

incapable de s’évacuer. La palpation abdominale ou l’écho graphie<br />

retrouve un globe vésical. Le drainage de la vessie permet d’évacuer<br />

l’urine. Ce diagnostic différentiel ne doit pas être négligé<br />

chez le patient porteur d’un sondage vésical car l'obstruction de<br />

sonde n'est pas rare. Non traitée rapidement, la rétention aiguë<br />

d’urine se complique d’une IRA obstructive.<br />

Diagnostic différentiel entre IRA et IRC<br />

Devant la découverte d’une élévation de la créatininémie,<br />

plusieurs éléments orientent vers une IRC :<br />

— des antécédents familiaux de pathologie rénale (polykystose)<br />

ou personnels d’une maladie chronique responsable d’IRC (diabète,<br />

par exemple) ;<br />

— une anémie ;<br />

— une hypocalcémie ;<br />

— une atrophie rénale bilatérale (reins de moins de 10 cm en échographie<br />

ou TDM). L’atrophie est moins nette dans les IRC secondaires<br />

au myélome, au diabète et à la polykystose rénale.<br />

Toute IRC peut se compliquer d’une IRA, et seule la connaissance<br />

des créatininémies antérieures avec une élévation transi -<br />

toire permet d’affirmer un épisode aigu au cours d’une IRC.<br />

Créatininémie (μmol/L)<br />

700<br />

600<br />

500<br />

400<br />

300<br />

200<br />

100<br />

0<br />

0 20 40 60 80 100 120 140<br />

Débit de filtration glomérulaire (mL/min)<br />

Figure 2 Relation théorique (selon la formule de Cockcroft)<br />

entre la créatininémie et le DFG chez l’homme.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007<br />

Filtration glomérulaire (mL/min)<br />

Créatinine plasmatique (μmol/L)<br />

100<br />

50<br />

0<br />

500<br />

400<br />

300<br />

200<br />

100<br />

0 2 4 6 8 Jours<br />

Figure 3 Modélisation d’une IRA avec arrêt brutal<br />

de la filtration glomérulaire suivi d’une récupération<br />

progressive de la fonction rénale en six jours.<br />

La filtration glomérulaire est représentée en haut et la<br />

créatininémie en bas.<br />

Dans ce modèle, la créatininémie s’élève progressivement<br />

et atteint un maximum au troisième jour alors que la<br />

filtration glomérulaire est déjà sensiblement remontée.<br />

On constate que pour une même valeur de créatinine<br />

plasmatique, par exemple 300 μmol/L, la filtration<br />

glomérulaire est d’environ 15 mL par minute au cours du<br />

premier jour et de 90 mL par minute au cours du sixième<br />

jour (lignes en pointillé).<br />

Complications immédiates à traiter<br />

Deux complications surviennent fréquemment au cours de<br />

l’IRA et peuvent mettre en jeu le pronostic vital. Elles sont systématiquement<br />

recherchées et traitées en urgence.<br />

1. Hyperkaliémie<br />

Elle est plus fréquente chez le patient anurique et hypercatabolique.<br />

Le risque est l’arrêt cardiocirculatoire. Le diagnostic<br />

est évoqué sur l’ECG (fig. 4), qui retrouve des signes de cardiotoxicité<br />

(onde P plate, élargissement du complexe QRS, segment<br />

ST mal défini, onde T pointue et symétrique), et confirmé par la<br />

mesure de la kaliémie. La surveillance avec monitoring ECG et le<br />

traitement adapté sont mis en place dès que le diagnostic est<br />

posé, sans attendre le transfert du patient dans une unité qui<br />

peut réaliser en urgence une hémodialyse (réanimation ou soins<br />

intensifs). Le traitement repose sur l'arrêt des apports de potassium<br />

et des traitements hyperkaliémiants (comme les inhibiteurs<br />

de l’enzyme de conversion), l'injection intraveineuse lente de gluconate<br />

de calcium en cas de troubles du rythme ventriculaire<br />

R Q 252<br />

1955


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

ou d'arrêt cardiocirculatoire (effet stabilisant de membrane), l'administration<br />

par voie orale ou en lavement de résine échangeuse<br />

d'ions (chélation du potassium dans la lumière digestive), et<br />

l'administration intraveineuse d'une association insuline/glucose<br />

ou de bêta-2-mimétique (entrée du potassium dans la cellule). Si<br />

l’hyperkaliémie n’est pas rapidement corrigée avec la reprise de<br />

la diurèse, l’hémodialyse s'impose en urgence.<br />

2. Œdème aigu du poumon<br />

Le diagnostic est clinique devant une orthopnée et des crépitants<br />

déclives à l'auscultation des deux champs thoraciques. La<br />

radiographie thoracique montre une surcharge alvéolaire bilatérale<br />

qui prédomine au niveau des deux hiles. Le traitement repose<br />

sur l’arrêt des apports hydrosodés et l'injection intraveineuse de<br />

doses importantes de diurétiques de l’anse. En l'absence d’une<br />

reprise suffisante de la diurèse, une soustraction liquidienne au<br />

moyen d’une épuration extra-rénale (EER) s'impose en urgence.<br />

En l’absence de collapsus tensionnel, le patient est maintenu en<br />

position demi-assise. L’oxygénothérapie est adaptée à l’hypoxie.<br />

La détresse respiratoire impose un support ventilatoire non invasif<br />

ou invasif avec une fraction inspirée en O2 et une pression<br />

expiratoire positive élevées.<br />

1956<br />

II-Q252<br />

I<br />

II<br />

III<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

AVL<br />

AVR<br />

AVF<br />

Figure 4 Tracé ECG d’un patient en hyperkaliémie (7,2 mmol/L). Onde P aplatie, élargissement du complexe QRS, segment ST mal<br />

défini et onde T pointue, symétrique et diffuse.<br />

V1<br />

V2<br />

V3<br />

V4<br />

V5<br />

V6<br />

DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE<br />

La figure 5 donne les principales causes d’IRA. La démarche diagnostique<br />

recherche en premier des causes qui nécessitent un<br />

traitement curatif adapté urgent : un obstacle sur les voies urinaires,<br />

une occlusion aiguë des artères rénales, une glomérulonéphrite<br />

rapidement progressive.<br />

Causes d’IRA à évoquer initialement<br />

1. Insuffisance rénale aiguë obstructive<br />

Elle est responsable d’environ 10 % des IRA. L’obstacle sur les<br />

voies urinaires est une lithiase ou une tumeur urothéliale, une<br />

tumeur abdominale (cancer digestif, lymphome) ou pelvienne<br />

(cancer utérin ou tumeur prostatique), ou une fibrose rétropéritonéale.<br />

L'IRA obstructive peut être asymptomatique mais s'accompagne<br />

souvent de signes urologiques évocateurs : dysurie,<br />

douleurs lombaires, cystalgie, globe urinaire, hématuries macroscopiques.<br />

Le diagnostic est apporté par l'échographie abdomino-pelvienne<br />

qui recherche la dilatation des voies urinaires et identifie<br />

éventuellement l’obstacle (fig. 6). La dilatation pyélocalicielle<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

peut manquer lorsque l'examen est réalisé précocement ou être<br />

ancienne sans obstacle. Une symptomatologie évocatrice et des<br />

cavités excrétrices trop bien visibles à l'échographie doivent faire<br />

évoquer le diagnostic et répéter l'examen.<br />

Les autres examens qui peuvent être réalisés sont l’ASP et le<br />

scanner abdomino-pelvien. L’ASP peut montrer la présence de<br />

lithiases radio-opaques en regard des voies urinaires excrétrices,<br />

et le scanner, un processus tumoral qui comprime les voies<br />

urinaires. Pour ce dernier examen, l’injection de produit de<br />

contraste iodé radio-opaque est nécessaire mais peut être contreindiquée<br />

à cause du risque d’aggravation de l’IRA (NTA toxique).<br />

Les diurétiques sont contre-indiqués. Le traitement repose<br />

sur le drainage en urgence des urines. Si l’obstacle est situé au<br />

niveau ou au-dessous de la vessie, les urines sont drainées au<br />

moyen d’une sonde vésicale à demeure ou, en cas d’échec, au<br />

moyen d’un cathéter vésical sus-pubien. Pour les obstacles situés<br />

au-dessus de la vessie, soit l’urologue monte une sonde urétérale,<br />

soit le radiologue pose une néphrostomie percutanée (sous<br />

anesthésie locale et sous contrôle échographique ou TDM, et<br />

seulement si les cavités pyélocalicielles sont suffisamment dilatées).<br />

Le drainage des urines permet une reprise rapide de la<br />

fonction rénale. Ce drainage peut être transitoirement suivi d'un<br />

syndrome de levée d'obstacle caractérisé par une hyperdiurèse.<br />

Le débit urinaire est initialement compensé volume à volume<br />

toutes les heures (alternance de sérum physiologique et de<br />

sérum glucosé à 5 %) puis compensé partiellement afin de ne<br />

pas entretenir l'hyperdiurèse. Le traitement de l'obstacle est<br />

souvent réalisé dans un second temps (extraction ou destruction<br />

de calculs, exérèse chirurgicale ou traitement médical<br />

réducteur d'une tumeur).<br />

Figure 5<br />

PRÉRÉNALE<br />

➤ Hypovolémie<br />

vraie<br />

➤ Hypovolémie<br />

efficace<br />

➤ Médicaments<br />

(AINS,<br />

inhibiteurs<br />

de l’enzyme<br />

de conversion)<br />

Principales causes d’IRA.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007<br />

Nécrose tubulaire<br />

aiguë<br />

Ischémique Toxique<br />

➤ Endogène<br />

➤ Exogène<br />

Glomérulonéphrite<br />

aiguë<br />

➤ Glomérulonéphrite<br />

rapidement<br />

progressive<br />

➤ Glomérulonéphrite<br />

postinfectieuse<br />

A B<br />

Figure 6 Aspects échographiques d’un rein normal (A)<br />

et d’une dilatation des cavités pyélocalicielles (flèches)<br />

sur une obstruction urétérale (B).<br />

2. Occlusion aiguë des artères rénales<br />

On évoque cette étiologie dans deux circonstances :<br />

— chez un patient âgé et polyvasculaire où les artères rénales sont<br />

sténosées. L’occlusion est causée par une thrombose artérielle<br />

rénale et survient à l’occasion d’une hypotension artérielle ou<br />

d’une angioplastie ;<br />

— chez un sujet jeune dont les artères sont saines. L’occlusion est<br />

causée par une embolie artérielle (fibrillation auriculaire ou endocardite<br />

infectieuse avec végétations valvulaires), une dissection<br />

aortique ou un traumatisme.<br />

Le tableau est souvent brutal. L’IRA peut être précédée de douleurs<br />

lombaires, d’une poussée hypertensive et d’une hématurie<br />

macroscopique. L’anurie est présente si l’occlusion est bilatérale<br />

ou si elle survient sur un rein fonctionnellement unique. Le diagnostic<br />

est posé par l’écho-doppler, la scintigraphie rénale, le scanner injecté<br />

ou l’angio-IRM qui montrent l’absence de flux artériel rénal. L’artériographie<br />

reste l’examen de référence et permet une revascularisation<br />

en urgence (dans les 6 premières heures) par voie endovasculaire.<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË<br />

PARENCHYMATEUSE<br />

Vasculaire<br />

➤ Occlusion<br />

gros vaisseaux<br />

➤ Vascularites<br />

➤ Microangiopathies<br />

thrombotiques<br />

➤ Embolies<br />

de cholestérol<br />

➤ Hypertension<br />

artérielle maligne<br />

Néphropathie<br />

interstitielle aiguë<br />

➤ Médicaments<br />

(β-lactamines,<br />

AINS)<br />

➤ Pyélonéphrite<br />

POSTRÉNALE<br />

R Q 252<br />

1957


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3. Néphropathies parenchymateuses aiguës<br />

et glomérulonéphrites rapidement progressives<br />

Après élimination d’une cause obstructive des voies urinaires<br />

ou vasculaire, d’une cause fonctionnelle ou d’une nécrose tubulaire<br />

aiguë évidente (v. infra), une IRA parenchymateuse est systématiquement<br />

évoquée et sa cause recherchée.<br />

Une glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP) qui<br />

associe protéinurie glomérulaire, hématurie et élévation de la<br />

créatinine en quelques semaines est évoquée dans un contexte<br />

de maladie systémique (lupus, purpura rhumatoïde, cryoglo -<br />

bulinémie) et de syndrome pneumorénal (vascularites à ANCA<br />

avec anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles,<br />

syndrome de Goodpasture).<br />

Le lupus est évoqué en présence de signes cutanés (éruption<br />

érythémateuse, alopécie), articulaires (prédominant au niveau des<br />

mains et poignets) associés à une altération de l’état général<br />

avec fièvre. L’identification d’anticorps antinucléaires et anticorps<br />

anti-DNA-natifs, d’une hypocomplémentémie, d’une anémie<br />

avec lymphopénie et thrombopénie, de la présence d’un anticoagulant<br />

circulant affirme le diagnostic. Un syndrome des antiphospholipides<br />

est systématiquement recherché (allongement<br />

du temps de céphaline activée [TCA], anticardiolipines, anticorps<br />

anti-β2Gp1), surtout en présence de thromboses et de troubles<br />

neurologiques associés.<br />

Le purpura rhumatoïde est évoqué en présence d’un purpura<br />

nécrotique des membres inférieurs, de douleurs articulaires et<br />

abdominales et d’un syndrome inflammatoire non spécifique.<br />

Les biopsies cutanées montrent une vascularite leucocytoclasique,<br />

le plus souvent sans dépôt d’IgA.<br />

Dans le contexte d’une IRA associée à un syndrome glomérulaire,<br />

la recherche d’une cryoglobulinémie est systématique,<br />

surtout en présence d’un purpura nécrotique des membres inférieurs,<br />

d’une dysglobulinémie ou d’une hépatite virale C.<br />

Les vascularites à ANCA (maladie de Wegener et polyangéite<br />

microscopique) associent au syndrome glomérulaire une atteinte<br />

pulmonaire avec atteinte de l’état général, éventuellement des<br />

lésions ORL et neurologiques. Des anticorps anticytoplasmes<br />

des polynucléaires sont présents (plutôt de type PR3 dans le<br />

Wegener, plutôt de type MPO dans la micro-PAN). Enfin, un<br />

syndrome pneumorénal associant IRA, détresse respiratoire et<br />

anémie avec hémorragies alvéolaires peut correspondre à un<br />

syndrome de Goodpasture. La présence d’anticorps antimembrane<br />

basale glomérulaire affirme le diagnostic.<br />

Le diagnostic différentiel de ces GNRP est une glomérulonéphrite<br />

aiguë postinfectieuse, évoquée en présence d’un syndrome<br />

néphritique (hypertension artérielle, insuffisance rénale<br />

et œdèmes, protéinurie et hématurie), d’une hypocomplémentémie<br />

et d’anticorps antistrepto ou staphylococciques.<br />

Une microangiopathie thrombotique est également évoquée<br />

lors d’une IRA avec hypertension artérielle, le plus souvent<br />

sévère, en présence d’une thrombopénie (même relative, définie<br />

par une diminution des plaquettes supérieure à 50 %), d’une<br />

anémie hémolytique (augmentation des LDH et effondrement<br />

de l’haptoglobine) avec présence de schizocytes.<br />

1958<br />

II-Q252<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

Une dysglobulinémie (myélome, amylose) est systématiquement<br />

recherchée (électrophorèse des protéines sériques et urinaires)<br />

surtout en présence d’une hypercalcémie, de douleurs<br />

osseuses et d’une hyperprotidémie.<br />

Enfin, une néphropathie interstitielle aiguë (NIA) toxique (pénicillines,<br />

sulfamides et AINS), infectieuse (pyélonéphrite) ou tumorale<br />

(infiltration lymphomateuse) est possible. L’IRA est associée<br />

à une leucocyturie, une hématurie parfois macroscopique (NIA<br />

médicamenteuse), une protéinurie faible ( 1 g/24 h), une fraction<br />

excrétée en sodium supérieure à 1 % et une hyperéosinophilie<br />

avec éosinophilurie lorsque la cause est allergique.<br />

Dans toutes ces situations où une origine glomérulaire, vasculaire<br />

ou interstitielle de l’IRA est évoquée, la réalisation d’une<br />

ponction-biopsie rénale (PBR) doit être discutée sans délai avec<br />

le néphrologue (tableau 1). La PBR permet d’affirmer le diagnostic<br />

et d’évaluer la gravité et le pronostic pour démarrer en urgence<br />

un traitement étiologique adapté. Le risque principal de la<br />

ponction biopsie-rénale est le risque hémorragique. La biopsie<br />

est donc contre-indiquée en cas d’hypertension artérielle non<br />

contrôlée, de troubles de l’hémostase, de traitement anticoagulant<br />

ou anti-agrégant plaquettaire impossible à interrompre.<br />

En dehors des causes qui viennent d’être décrites, la grande<br />

majorité des IRA sont d’origine fonctionnelle ou par nécrose<br />

tubulaire aiguë.<br />

Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle<br />

(ou prérénale, IRF)<br />

1. Physiopathologie<br />

L'IRF est la première cause d'IRA. Normalement, une diminution<br />

de la perfusion rénale s'accompagne d’une autorégulation du<br />

débit plasmatique glomérulaire et d'une stimulation du système<br />

rénine angiotensine, responsable de la vasoconstriction de l'artériole<br />

efférente glomérulaire et de la production de prostaglandines<br />

E2 qui sont de puissants vasodilatateurs de l'artériole<br />

afférente glomérulaire. Par ces mécanismes, la pression intraglomérulaire<br />

et le DFG peuvent être maintenus lors de la diminution<br />

de la perfusion rénale. Au cours de l’IRF, ces mécanismes d'autorégulation<br />

sont dépassés et le débit de filtration glomérulaire<br />

diminue. L’IRF est causée soit par une diminution de la perfusion<br />

Tableau 1<br />

Indications de ponction-biopsie rénale<br />

au cours de l'insuffisance rénale aiguë<br />

❚ Absence de désordres hémodynamiques faisant suspecter<br />

une hypoperfusion rénale<br />

❚ Insuffisance rénale d’apparition progressive<br />

❚ Anomalie du sédiment urinaire<br />

❚ Signes extrarénaux évoquant une néphropathie vasculaire,<br />

glomérulaire ou interstitielle<br />

❚ Absence de récupération de la fonction rénale après 4 à 5 semaines<br />

d'évolution lorsqu’une nécrose tubulaire aiguë a été suspectée<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007


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rénale, soit par un trouble de l'hémodynamique intraglomérulaire.<br />

Au cours de l'IRF, et par opposition aux IRA organiques, il n'y a<br />

pas d'altération histologique du parenchyme rénal.<br />

La réponse au traitement permet d'affirmer le diagnostic, le<br />

traitement de la cause entraînant le retour très rapide à l'état<br />

basal de la fonction rénale. En l'absence de traitement, l'IRF évolue<br />

vers l’IRA organique : la nécrose tubulaire aiguë ischémique.<br />

2. Causes des insuffisances rénales aiguës<br />

fonctionnelles<br />

L'IRF peut compliquer toutes les situations d'hypovolémie,<br />

vraie ou efficace. Elle apparaît également lors de la prise de médicaments<br />

qui interfèrent avec l'hémodynamique intrarénale.<br />

✓ L’hypotension artérielle et les états de choc : toute hypotension<br />

artérielle, et en particulier les quatre types de choc (hémorragique,<br />

cardiogénique, anaphylactique et septique), peut s’accompagner<br />

d’une IRF. Le diagnostic est souvent évident lors de la mesure de<br />

la pression artérielle. Il faut se méfier d'une pression artérielle<br />

mesurée dans des valeurs normales chez un patient habituellement<br />

hypertendu.<br />

✓ La déshydratation extracellulaire : on la redoute surtout en saison<br />

chaude chez la personne âgée où la prescription d'une restriction<br />

hydrosodée et d'un diurétique est fréquente. En effet, la<br />

sensation de soif est souvent altérée chez la personne âgée.<br />

L'examen clinique recherche une baisse du poids, une hypotension<br />

orthostatique, une sécheresse des muqueuses et un pli<br />

cutané ; l'examen biologique, une hémoconcentration.<br />

✓ L'insuffisance cardiaque congestive : l'IRF survient à un stade<br />

avancé de l’insuffisance cardiaque. Le patient présente souvent<br />

un syndrome œdémateux diffus et une oligurie. Une défaillance<br />

hépatique avec une cytolyse biologique qui répond au même mécanisme<br />

d'hypoperfusion que l'atteinte rénale peut être associée.<br />

Le traitement repose sur l'amélioration de la fonction cardiaque.<br />

Les inhibiteurs de l'enzyme de conversion sont indiqués malgré<br />

leur effet hémodynamique intrarénal potentiellement délétère.<br />

✓ Le syndrome hépatorénal : le diagnostic est évoqué chez un<br />

patient cirrhotique après avoir éliminé les autres causes d'IRA<br />

comme un sepsis, un état de choc ou une cause médicamenteuse.<br />

On distingue classiquement deux types de syndrome hépatorénal.<br />

Le type 1 est caractérisé par l'installation de l’IRF sur une période<br />

courte (15 jours). Il peut survenir spontanément mais fait souvent<br />

suite à une hémorragie digestive, une hépatite alcoolique aiguë,<br />

une infection de liquide d'ascite ou une évacuation d'un volume<br />

trop important de l'ascite. Le pronostic est très sombre avec une<br />

survie de quelques semaines. Le type 2 se caractérise par une<br />

installation plus progressive, souvent sans facteur déclenchant.<br />

Le pronostic est un peu meilleur et la survie peut dépasser quelques<br />

mois. Les traitements sont limités et comportent la transplantation<br />

hépatique, des traitements vasoconstricteurs (Noradrénaline,<br />

Terlipressine) et la perfusion d'albumine. Le shunt portosystémique<br />

réalisé par voie transjugulaire n’est plus recommandé.<br />

✓ Le syndrome néphrotique et les hypoalbuminémies majeures : la<br />

diminution de l'albuminémie (diminution de la pression oncotique<br />

sanguine) entraîne une fuite liquidienne du secteur vasculaire<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007<br />

à retenir<br />

Il n'y a pas de définition consensuelle de l'IRA.<br />

La grande majorité sont des IRA fonctionnelles et des NTA.<br />

Deux complications sont à rechercher car elles nécessitent<br />

un traitement en urgence : l’hyperkaliémie et l'œdème aigu<br />

du poumon.<br />

Trois causes sont à rechercher systématiquement car<br />

imposant un traitement adapté rapide : l'obstacle sur les<br />

voies urinaires, l'obstruction des artères rénales et les<br />

glomérulonéphrites rapidement progressives.<br />

La prévention et le traitement de l'IRF et de la NTA<br />

reposent sur le maintien d'une volémie et d’une tension<br />

artérielle normales et sur l’utilisation la plus restreinte<br />

possible des médicaments néphrotoxiques.<br />

vers le secteur extracellulaire. L'hypovolémie s'accompagne d'un<br />

syndrome œdémateux. La restauration de la volémie nécessite<br />

la perfusion d'albumine.<br />

✓ L’insuffisance rénale aiguë fonctionnelle d'origine médicamenteuse<br />

: deux familles de médicaments perturbent l'hémodynamique<br />

intrarénale et sont responsables d’IRF : les anti-inflammatoires<br />

non stéroïdiens (AINS) et les inhibiteurs de l'enzyme de<br />

conversion de l'angiotensine (IEC) ou les antagonistes des récepteurs<br />

de l'angiotensine II (ARA II) [fig. 7]. L’IRF survient préférentiellement<br />

lorsque la perfusion rénale est déjà compromise<br />

par une hypovolémie vraie ou efficace. La personne âgée artéritique<br />

sous traitement diurétique et le patient en situation périopératoire<br />

où l’apport hydrosodé n’est pas toujours adapté aux<br />

besoins et aux pertes sont les plus exposés.<br />

Les AINS inhibent les cyclo-oxygénases et ainsi la synthèse<br />

des prostaglandines E2. En situation d'hypoperfusion rénale, les<br />

AINS entraînent une vasoconstriction de l'artère afférente glomé -<br />

rulaire responsable de la chute de la pression intraglomérulaire.<br />

Par leur effet hypotenseur systémique, les IEC et ARA II sont<br />

responsables d'une diminution de la perfusion rénale. Ils interfèrent<br />

aussi avec l'hémodynamique intraglomérulaire en inhibant la vasoconstriction<br />

de l'artère efférente glomérulaire. Le patient polyvasculaire<br />

avec une sténose uni- ou bilatérale des artères rénales<br />

ou un rein fonctionnel unique est particulièrement exposé. Le risque<br />

d’IRF est également accru lorsque ces traitements sont associés.<br />

La correction de l’IRF repose sur l'arrêt de ces médicaments<br />

et la réhydratation.<br />

Nécrose tubulaire aiguë<br />

POINTS FORTS<br />

C’est l’IRA organique la plus fréquente. On distingue les NTA<br />

ischémiques et les NTA toxiques, mais, pour un même patient,<br />

en particulier en réanimation, les agressions rénales sont souvent<br />

multiples, ischémiques et toxiques. À l’arrêt de l’agression,<br />

la fonction rénale récupère, le plus souvent sans séquelle mais<br />

en plusieurs semaines.<br />

R Q 252<br />

1959


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1960<br />

II-Q252<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

1. Nécrose tubulaire aiguë ischémique<br />

Il existe un continuum entre IRF et nécrose tubulaire aiguë<br />

ischémique. Les causes des NTA sont les mêmes que celles de<br />

l'IRF. C’est l’importance et la durée de l’agression, et un traitement<br />

insuffisant ou retardé qui transforment l’IRF en NTA ischémique.<br />

Certaines données biologiques peuvent aider pour distinguer<br />

IRF et nécrose tubulaire aiguë (tableau 2).<br />

2. Nécrose tubulaire aiguë toxique<br />

Le tableau 3 donne les principales causes.<br />

La nécrose tubulaire aiguë secondaire à l’administration de<br />

produits de contraste iodé est une des premières causes d’IRA<br />

acquises à l'hôpital. Le facteur de risque principal est l’IRC. Le<br />

risque est très faible si le débit de filtration glomérulaire résiduel<br />

est supérieur à 60 mL par minute. Les autres facteurs de risque<br />

sont la déshydratation extracellulaire, le myélome et le diabète.<br />

Le risque augmente avec le volume ou des administrations répétées<br />

et rapprochées. La créatininémie s’élève 48 à 72 heures<br />

après l'injection avec un pic entre le troisième et le cinquième<br />

jour et un retour à la normale au bout d'une semaine.<br />

Insuffisance rénale au cours<br />

des infections<br />

Au cours d’une infection, une IRA peut apparaître par différents<br />

mécanismes.<br />

Le plus fréquemment, les troubles hémodynamiques présents<br />

lors d’une infection sévère ou d’un choc septique font évoquer<br />

une IRF ou une nécrose tubulaire aiguë ischémique.<br />

L’IRA peut également être indirectement liée à l'agent infectieux<br />

lorsque ce dernier est responsable d'une rhabdomyolyse (grippe,<br />

légionellose) ou d'une hémolyse.<br />

La glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique (syndrome<br />

néphritique aigu survenant 3 semaines après une infection bacté -<br />

rienne) est devenue rare en France. D'autres glomérulonéphrites<br />

Tableau 2<br />

Principaux critères biologiques<br />

du diagnostic différentiel entre IRA<br />

prérénale et nécrose tubulaire aiguë<br />

INSUFFISANCE<br />

RÉNALE AIGUË<br />

PRÉRÉNALE<br />

NÉCROSE<br />

TUBULAIRE<br />

AIGUË<br />

Osmolalité urinaire/<br />

osmolarité plasmatique > 1,5 1<br />

Natriurèse (mmol/L) < 20 > 40<br />

Fraction excrétée Na (%) < 1 > 2<br />

Fraction excrétée Urée (%) < 35 > 35<br />

Fraction excrétée Na (%) = [Na] Urine/[Na] Sang x 100<br />

[Créatinine*] Urine/[Créatinine*] Sang<br />

* : en μmol/L.<br />

Attention : Ces critères ne sont pas utilisables en cas de prise d’un<br />

traitement diurétique ou au cours de l’insuffisance surrénalienne.<br />

Tableau 3<br />

Principales causes des nécroses<br />

tubulaires aiguës toxiques<br />

Toxiques exogènes<br />

❚ Aminosides<br />

❚ Anticalcineurines (ciclosporine, tacrolimus)<br />

❚ Amphotéricine B<br />

❚ Produit de contraste iodé<br />

❚ Anti-inflammatoires non stéroïdiens<br />

❚ Chimiothérapies (cisplatine, méthotrexate)<br />

Toxiques endogènes<br />

❚ Rhabdomyolyse (précipitation tubulaire de la myoglobine)<br />

❚ Hémolyse aiguë (incompatibilité transfusionnelle, accès pernicieux<br />

palustre)<br />

❚ Myélome (précipitation tubulaire des chaînes légères<br />

d’immunoglobulines)<br />

❚ Syndrome de lyse tumorale (spontané ou après le début d’une<br />

chimiothérapie, en particulier lorsque la masse tumorale est importante ;<br />

précipitation tubulaire de cristaux de phosphate de calcium)<br />

❚ Leucémies aiguës monoblastique ou myélomonocytaire (lysozyme)<br />

aiguës surviennent au cours de l'infection (staphylocoque doré,<br />

bacille Gram négatif) et sont causées par la formation et le dépôt<br />

de complexes immuns circulants.<br />

La leptospirose, dans sa forme grave ictéro-hémorragique, est<br />

responsable d’une néphropathie immuno-allergique. Classiquement,<br />

après une phase régressive en 4 à 10 jours qui comporte<br />

fièvre, myalgies, arthralgies, syndrome méningé et hépato -<br />

mégalie, il survient une phase d'hépatonéphrite fébrile avec<br />

atteinte méningée lymphocytaire. Le diagnostic repose sur la<br />

mise en évidence d'IgM sériques par méthode Elisa ou par<br />

l'isolement de leptospires dans l’urine.<br />

L’IRA complique l'évolution de 5 à 10 % des patients séro -<br />

positifs pour le VIH. Les causes sont multiples et l'indication de<br />

PBR est large. La plus spécifique des IRA est la HIV associated<br />

nephropathy (HIVAN). Il s’agit d’une glomérulonéphrite aiguë ou<br />

d’une GNRP avec une protéinurie explosive, souvent sans œdème<br />

et sans hypertension artérielle. L’HIVAN peut se rencontrer à<br />

tous les stades de la maladie.<br />

PRÉVENTION ET TRAITEMENT DE L’IRA<br />

FONCTIONNELLE ET DE LA NÉCROSE<br />

TUBULAIRE AIGUË<br />

La prévention de l’IRA est très importante, en particulier chez les<br />

patients à risque qui doivent être repérés.<br />

La prévention et le traitement de l’IRA reposent sur la normalisation<br />

de la volémie, de l’hydratation et de la pression<br />

artérielle, l’arrêt ou l’utilisation très réfléchie des traitements<br />

néphrotoxiques.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007


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Normalisation de la volémie,<br />

de l’hydratation et de la pression artérielle<br />

Le premier objectif de la prévention et du traitement est de<br />

normaliser la volémie et l’hydratation. La restauration de la volémie<br />

est guidée par l’examen clinique, la mesure de la PVC et l’échographie<br />

cardiaque transthoracique (tableau 4). Le soluté de remplissage<br />

de choix est le sérum salé isotonique. On évite les hydroxyléthylamidons<br />

qui pourraient présenter une toxicité rénale.<br />

Tableau 4<br />

artériole efférente<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007<br />

Glomérule<br />

Filtration glomérulaire<br />

Signes cliniques et écho -<br />

cardiographiques d’hypovolémie<br />

Clinique<br />

❚ Marbrures<br />

❚ Soif<br />

❚ Tachycardie<br />

❚ Diminution de la diurèse<br />

❚ Diminution de la pression artérielle moyenne, hypotension<br />

orthostatique<br />

❚ Pression veineuse centrale négative<br />

Échographie cardiaque<br />

❚ Diminution des pressions de remplissage des cavités<br />

cardiaques gauches<br />

❚ Diminution du diamètre de la veine cave inférieure pendant<br />

l’inspiration<br />

artériole afférente<br />

HYPOVOLÉMIE<br />

HYPOVOLÉMIE + AINS HYPOVOLÉMIE + IEC<br />

Figure 7 Physiopathologie de l’insuffisance rénale aiguë fonctionnelle au cours des traitements par anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens (AINS) et inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine II.<br />

La persistance de l’hypotension artérielle malgré l’optimisation<br />

du remplissage vasculaire nécessite un traitement adapté<br />

au mécanisme de l’hypotension : vasoconstricteur pur (noradrénaline),<br />

tonicardiaque (dobutamine) ou mixte (adrénaline).<br />

La dopamine n’a pas d’indication dans le traitement de l’IRA<br />

et ne devrait plus être utilisée.<br />

La normalisation de la diurèse (sans l’utilisation de diurétique)<br />

est un excellent signe que l’hypovolémie, la déshydratation et<br />

l’hypotension artérielle ont été corrigées efficacement.<br />

Gestion des traitements néphrotoxiques<br />

Le rapport bénéfice-risque est toujours calculé avant de<br />

prescrire un traitement potentiellement néphrotoxique. La posologie<br />

est adaptée à l’âge, au poids, à la fonction rénale résiduelle.<br />

Le traitement n’est jamais inutilement prolongé.<br />

1. Aminosides<br />

La néphrotoxicité dépend de la molécule utilisée avec, dans<br />

l'ordre d’une toxicité décroissante : gentamicine, nétilmicine,<br />

amikacine et tobramycine. Si l’efficacité antibiotique dépend<br />

de la concentration maximale obtenue après l'injection, la toxicité<br />

rénale dépend de l'accumulation de l'antibiotique au fil<br />

des jours.<br />

Même en cas d’IRA, le traitement débute avec une dose normale<br />

adaptée au poids et au volume de distribution (pour obtenir<br />

une concentration plasmatique bactéricide). Les injections<br />

suivantes ne sont réalisées que lorsque le taux résiduel de l'antibiotique<br />

est bas. L'espacement des injections réduit ainsi la<br />

néphrotoxicité.<br />

R Q 252<br />

1961


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2. Produit de contraste iodé (PCI)<br />

Chez le patient à risque, le rapport bénéfice-risque de réaliser<br />

un examen avec injection de PCI est discuté avec le radio -<br />

logue. Dans la mesure du possible, une technique d'imagerie<br />

sans injection de PCI est préférée. Si l'injection de PCI ne peut<br />

être évitée, les autres médicaments néphrotoxiques sont arrêtés<br />

48 heures avant la procédure. L’hypovolémie et la déshydratation<br />

sont évitées ou corrigées. On utilise le volume minimum du PCI<br />

le moins néphrotoxique (isoosmotique). La perfusion de sérum<br />

salé isotonique pendant les 24 heures qui encadrent la procédure<br />

est le seul traitement validé. Le bénéfice d'administrer de la N-<br />

Acétylcystéine n'est pas certain.<br />

Traitement diurétique<br />

Les diurétiques ne sont pas un traitement de l’IRA. Leur place<br />

est limitée au traitement en urgence de l’OAP. Le traitement diurétique<br />

ne doit jamais être utilisé chez un patient hypovolémique<br />

car il est alors un facteur supplémentaire d’agression rénale (NTA<br />

ischémique). S’il relance la diurèse, le diurétique peut contribuer<br />

au contrôle d’une surcharge hydrosodée ou permettre une administration<br />

moins restreinte de liquides, comme par exemple la<br />

nutrition. Au cours de l’IRA, seule la classe des diurétiques de<br />

l’anse peut être utilisée.<br />

Nutrition<br />

Par opposition à l’IRC, la nutrition n’est pas restreinte au cours<br />

de l’IRA. Comme pour tout patient agressé, la dénutrition est un<br />

facteur de mauvais pronostic et les besoins caloriques et protéiques<br />

doivent être couverts.<br />

Épuration extrarénale (EER)<br />

Il s’agit d’un traitement de suppléance qui n’accélère pas la<br />

récupération de l’IRA. Mal conduite, elle n’est pas dénuée de<br />

risque pour la fonction rénale (agression ischémique supplémentaire<br />

en cas d’hypotension artérielle) et pour le patient (collapsus<br />

tensionnel et trouble de conscience par œdème cérébral<br />

lors d’une épuration trop rapide).<br />

Deux indications d’épuration extrarénale sont formelles :<br />

l’hyperkaliémie menaçante chez un patient oligoanurique et<br />

l’œdème aigu du poumon lorsque la diurèse n’est pas relancée<br />

par les diurétiques.<br />

L’épuration extrarénale est également proposée en cas d'aci -<br />

dose métabolique profonde non corrigée par la perfusion de<br />

bicarbonate de sodium et lorsque l'urée est élevée (au minimum<br />

au-dessus de 30 mmol/L). Enfin, l’épuration extrarénale peut<br />

permettre la perfusion de l’apport nutritionnel sans risque de<br />

surcharge hydrique. ■<br />

1962<br />

II-Q252<br />

Insuffisance rénale aiguë — Anurie<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Insuffisance rénale aiguë fonctionnelle et nécrose<br />

tubulaire aiguë ischémique ont les mêmes causes.<br />

2 La ponction biopsie rénale est souvent nécessaire<br />

pour poser un diagnostic étiologique au cours<br />

d’une insuffisance rénale aiguë.<br />

3 Les deux complications majeures à redouter<br />

chez un patient en insuffisance rénale aiguë sont<br />

l’hyperkaliémie et l’acidose métabolique.<br />

4 L’obstruction d’une sonde vésicale à demeure peut<br />

entraîner une rétention aiguë d’urine mais pas une<br />

insuffisance rénale aiguë.<br />

5 Au cours d’une insuffisance rénale aiguë,<br />

l’absence de dilation des cavités pyélocalicielles<br />

objectivée à l’échographie rénale permet d’exclure<br />

une cause obstructive.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 La prise en charge de l’anurie repose<br />

sur les diurétiques.<br />

2 L’épuration extrarénale permet d’accélérer<br />

la récupération de la fonction rénale au cours<br />

de la plupart des insuffisances rénales aiguës.<br />

3 Le principal traitement préventif de la néphropathie<br />

aux produits de contraste iodés est la N-Acétylcystéine.<br />

4 Une nécrose tubulaire aiguë peut récupérer<br />

ad integrum après plusieurs semaines d’anurie.<br />

5 Quelle que soit la cause de l’insuffisance rénale<br />

aiguë, l’utilisation des médicaments néphrotoxiques<br />

doit toujours être limitée au maximum.<br />

C / QCM<br />

Parmi les suivantes, quelle proposition s’applique<br />

au diagnostic de l’insuffisance rénale ?<br />

1 La créatininémie est directement liée au débit<br />

de filtration glomérulaire.<br />

2 En général, la pose d’une sonde vésicale à demeure<br />

est indispensable pour poser un diagnostic d’anurie.<br />

3 Un aspect de petits reins dédifférenciés objectivé<br />

à l’échographie permet de poser le diagnostic<br />

d’insuffisance rénale chronique et d’exclure<br />

le diagnostic d’insuffisance rénale aiguë.<br />

4 Une natriurèse importante permet d’exclure une<br />

insuffisance rénale fonctionnelle.<br />

5 Une créatininémie supérieure à 120 μmol/L permet<br />

d’affirmer une insuffisance rénale.<br />

Réponses : A : V, F, F, F, F / B : F, F, F, V, V / C : 2.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 NOVEMBRE 2007


OBJECTIFS<br />

Définition<br />

DIAGNOSTIQUER une insuffisance<br />

rénale chronique.<br />

L’insuffisance rénale chronique est définie par une diminution<br />

progressive et irréversible du débit de filtration glomérulaire. Elle<br />

est la conséquence d’une maladie rénale chronique. Celle-ci est<br />

suspectée devant la présence pendant plus de 3 mois de marqueurs<br />

d’atteinte rénale biologiques (microalbuminurie, protéinurie,<br />

hématurie, leucocyturie) et/ou d’anomalies morphologiques<br />

des reins, et /ou histologiques.<br />

Elle implique un diagnostic étiologique et une surveillance<br />

néphrologique.<br />

Il est important de mettre en place les mesures pour ralentir la<br />

progression de la maladie rénale chronique, de rechercher le<br />

retentissement de l’insuffisance rénale chronique lorsque le débit<br />

de filtration glomérulaire est < 60 mL/min/1,73 m 2 , de prendre en<br />

charge les facteurs de risque cardiovasculaire et de préparer le<br />

patient à un traitement de suppléance avant le stade terminal de<br />

l’insuffisance rénale. Le début du traitement de suppléance se<br />

discute à partir d’une clairance de créatinine < 15 mL/min/1,73 m 2<br />

et le choix entre hémodialyse, dialyse péritonéale et/ou transplantation<br />

rénale est d’abord celui du patient en l’absence de contreindication<br />

médicale à l’une des techniques.<br />

Épidémiologie<br />

II Q 253<br />

INSUFFISANCE RÉNALE<br />

CHRONIQUE<br />

ARGUMENTER l’attitude thérapeutique<br />

et planifier le suivi du patient.<br />

DÉCRIRE les principes de la prise<br />

en charge à long terme.<br />

Pr Claire Pouteil-Noble<br />

Service de néphrologie, Centre hospitalier Lyon-Sud, université Lyon I, 69495 Pierre-Bénite Cedex, France<br />

claire.pouteil-noble@chu-lyon.fr<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Incidence de l’insuffisance rénale chronique<br />

terminale<br />

RR<br />

En 2008, en France, l’incidence standardisée globale de l’insuffisance<br />

rénale terminale était de 147 par million d’habitants<br />

(par an) pour 20 régions participant au registre de l’insuffisance<br />

rénale terminale (registre REIN).<br />

L’incidence de greffe avant dialyse (greffe préemptive) est de<br />

5 par million d’habitants par an.<br />

Elle est 2 à 3 fois plus fréquente chez l’homme que chez la<br />

femme.<br />

L’âge des nouveaux patients démarrant la dialyse augmente<br />

régulièrement : en 2008, en France, une personne sur 2 avait<br />

70 ans ou plus au début du traitement par dialyse ou greffe<br />

préemptive (âge médian).<br />

Les principales causes d’insuffisance rénale terminale sont :<br />

– les néphropathies vasculaires (environ 10 à 15 %) ;<br />

– les néphropathies diabétiques (environ 20 à 25 %, essentiellement<br />

diabète de type 2) ;<br />

– les glomérulonéphrites chroniques (environ 10 à 15 %) ;<br />

– les néphropathies héréditaires (environ 5 à 10 %, essentiellement<br />

polykystose rénale autosomique dominante) ;<br />

– les néphropathies interstitielles chroniques (moins de 5 %) ;<br />

– les néphropathies d’origine indéterminée (plus de 10 %).<br />

L’incidence augmente chaque année du fait d’une augmentation<br />

de l’incidence des néphropathies vasculaires et diabétiques.<br />

La population des nouveaux patients dialysés se caractérise<br />

par une fréquence toujours plus élevée du diabète (40 % en<br />

2008 vs 36 % en 2005), la présence d’au moins une comorbidité<br />

cardiovasculaire chez plus d’un malade sur deux, et la persistance<br />

d’un tabagisme actif chez 10 % d’entre eux. La prise en charge<br />

des facteurs de risque cardiovasculaire est donc essentielle dans<br />

le traitement des maladies rénales chroniques et le ralentissement<br />

de la progression de l’insuffisance rénale chronique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1431


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

Prévalence de l’insuffisance rénale chronique<br />

terminale<br />

Au 31 décembre 2008, en France, la prévalence de l’insuffisance<br />

rénale chronique terminale était de 577 par million d’habitants<br />

et la prévalence de la greffe de 483 par million d’habitants.<br />

Le nombre total de malades traités par dialyse ou greffe augmente<br />

de 4 % par an environ.<br />

Évolution vers l’insuffisance rénale chronique<br />

Le risque de développer une insuffisance rénale chronique est<br />

élevé :<br />

– chez les patients ayant une anomalie rénale : protéinurie,<br />

hématurie, uropathie, lithiase, infections urinaires hautes récidivantes,<br />

néphropathie connue (glomérulaire, tubulo-interstitielle,<br />

vasculaire), antécédent d’insuffisance rénale aiguë ;<br />

– chez des patients ayant un risque de maladie rénale : anté cédents<br />

de néphropathie familiale, sujet diabétique ou hypertendu,<br />

maladie athéromateuse, âge supérieur à 75 ans, prise<br />

prolongée de médicaments néphrotoxiques (lithium, antiinflammatoires<br />

non stéroïdiens, antiviraux, anti-calcineurines),<br />

consommation régulière d’antalgiques, maladie systémique<br />

avec atteinte rénale potentielle (amylose, sclérodermie, lupus,<br />

sarcoïdose), insuffisance cardiaque, insuffisance hépatique ;<br />

– dans certaines circonstances : avant et pendant la prescription<br />

d’aminosides, avant et après chimiothérapie néphrotoxique<br />

(cisplatine et dérivés), avant injection de produit de contraste<br />

iodé de haute osmolalité chez les sujets à risque de maladie<br />

rénale.<br />

Diagnostic de l’insuffisance rénale chronique<br />

et de la maladie rénale chronique<br />

Diminution du débit de filtration glomérulaire<br />

Le débit de filtration glomérulaire est le meilleur indicateur<br />

du fonctionnement rénal. La valeur normale est comprise entre<br />

90 et 120 mL/min /1,73 m 2.<br />

Un débit de filtration glomérulaire < 60 mL/min /1,73 m 2 correspond<br />

à une insuffisance rénale indiscutable, quel que soit l’âge<br />

ou qu’il existe ou non des marqueurs d’atteinte rénale.<br />

1. Mesure du débit de filtration glomérulaire<br />

La technique de référence fait appel à la clairance de l’inuline,<br />

ou à la clairance du iohexol, ou à la clairance du iothalamate ou<br />

à l’EDTA marqué au Cr 51.<br />

Du fait de la complexité et du coût de cette mesure, des techniques<br />

d’estimation ont été développées.<br />

En pratique médicale courante, il est préconisé d’utiliser une<br />

formule estimée. Cependant, dans toutes les circonstances cliniques<br />

nécessitant une évaluation précise, ou bien lorsque la<br />

créatininémie et donc la clairance de créatinine sont difficiles<br />

à interpréter (patients âgés, maigres ou au contraire obèses ou<br />

patients ayant une diminution de la masse musculaire), une<br />

mesure par une technique de référence est justifiée.<br />

1432<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

2. Estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

Afin d’améliorer la précision et la reproductibilité du dosage de<br />

la créatininémie, une standardisation des analyses en référence<br />

à la spectrométrie de masse par dilution isotopique (IDMS) est<br />

indispensable. En 2009, la préférence est donnée à des techniques<br />

raccordées directement à l’IDMS, comme le sont certaines<br />

techniques enzymatiques.<br />

Dans l’attente d’un standard de référence pour le dosage de la<br />

cystatine C, l’estimation du débit de filtration glomérulaire par les<br />

formules utilisant la cystatine C ne peut pas être préconisée.<br />

La formule MDRD (Modification of the Diet in renal Diseases)<br />

simplifiée a été définie avec la créatininémie IDMS et estime<br />

directement le débit de filtration glomérulaire indexé sur la surface<br />

corporelle (encadré 1).<br />

La formule de Cockroft et Gault estime la clairance de la créatinine<br />

et non le débit de filtration glomérulaire. Elle a été établie<br />

à partir de dosages de créatininémie non standardisée IDMS. Elle<br />

donne une valeur qui n’est pas indexée sur la surface corporelle<br />

(encadré 2).<br />

En France, les recommandations de la Haute Autorité de santé<br />

sur la prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire<br />

intègrent la fonction rénale évaluée par la formule de Cockcroft et<br />

Gault. De même, les études d’adaptation de dose de thérapeutique<br />

ont été établies, pour la plupart, à partir de la formule de<br />

Cockcroft et Gault. Toutefois, y compris dans ces circonstances,<br />

la formule MDRD apparaît plus performante dans l’estimation de<br />

la fonction rénale chez le sujet âgé, le sujet obèse et le sujet jeune<br />

ayant une diminution du débit de filtration glomérulaire.<br />

1. Formule MDRD simplifiée<br />

DFG = 175 (créatininémie) - 1,154 (âge) - 0,203<br />

(0,742 si femme) k<br />

Si créatininémie en μmol/L, diviser la créatininémie par 88,4.<br />

Si créatininémie en mg/L, diviser la créatininémie par 10.<br />

k : une multiplication par un facteur dépendant de l’origine du patient doit,<br />

s’il y a lieu, être effectuée par le médecin qui reçoit les résultats.<br />

Ce facteur correctif est en cours de validation en France.<br />

NB : k = 1,21 dans la formule MDRD initiale pour les sujets afro-américains.<br />

2. Formule de Cockcroft et Gault<br />

C (mL/min) = ([140-âge] poids/créatininémie en μmol/L) k<br />

Avec k = 1,23 chez l’homme, 1,04 chez la femme, poids en kg,<br />

âge en années.


TABLEAU 1<br />

Classification de la maladie rénale chronique en 5 stades<br />

Stade<br />

Débit de filtration glomérulaire<br />

(mL/min/1,73 m 2 )<br />

Une élévation de la créatininémie doit être confirmée par une<br />

deuxième estimation à partir d’un nouveau dosage de la créatininémie<br />

réalisé dans des conditions adéquates de dosage : en<br />

l’absence d’un traitement par céphalosporine, flucytosine, cimétidine,<br />

triméthoprime. Cette deuxième estimation est réalisée<br />

d’autant plus rapidement que le débit de filtration glomérulaire<br />

initial est diminué, pour éliminer une altération aiguë de la<br />

fonction rénale. Un débit de filtration glomérulaire estimé<br />

30 mg/mmol (> 300 mg/g) ;<br />

– ratio protéinurie/créatininurie > 50 mg/mmol (> 500 mg/g) ;<br />

– protéinurie des 24 heures > 0,3 g.<br />

Le ratio albuminurie/créatininurie est mesuré sur un échantillon<br />

d’urine prélevé préférentiellement le matin.<br />

Dans le cadre du dépistage d’une maladie rénale chronique, la<br />

bandelette urinaire peut être utilisée.<br />

Actuellement, une albuminurie de faible débit ou micro-albuminurie<br />

(ratio albuminurie/créatininurie de 3 à 30 mg/mmol) est considérée<br />

comme un marqueur de risque de maladie rénale chronique chez le<br />

diabétique de type 1 ou de type 2 et comme un marqueur indépendant<br />

de risque cardiovasculaire chez l’hypertendu.<br />

2. Anomalies du sédiment urinaire<br />

Les anomalies se recherchent sur un échantillon urinaire à<br />

partir d’une cytologie urinaire quantitative :<br />

– hématurie pathologique : GR > 10/mm 3 ou 10 000/mL ;<br />

– leucocyturie pathologique : GB > 10/mm 3 ou 10 000/mL.<br />

Définition<br />

Q RR253<br />

1 90 ❚ maladie rénale chronique* avec débit de filtration glomérulaire normal ou augmenté<br />

2 entre 60 et 89 ❚ maladie rénale chronique* avec débit de filtration glomérulaire légèrement diminué<br />

3 entre 30 et 59 ❚ insuffisance rénale chronique modérée<br />

4 entre 15 et 29 ❚ insuffisance rénale chronique sévère<br />

5 < 15 ❚ insuffisance rénale chronique terminale<br />

* Avec marqueurs d’atteinte rénale : protéinurie clinique, hématurie, leucocyturie, ou anomalies morphologiques ou histologiques, ou marqueurs de dysfonction tubulaire,<br />

persistant plus de 3 mois. Un patient dialysé est classé D sans stade. Selon son débit de filtration glomérulaire, un patient transplanté rénal est décrit : 1T, 2T, 3T, 4T, 5T.<br />

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3. Anomalies morphologiques<br />

L’échographie rénale recherche une asymétrie de taille, des<br />

contours bosselés, des reins de petite taille ou des gros reins<br />

polykystiques, une néphrocalcinose, un calcul, une hydronéphrose.<br />

Affirmer le caractère chronique de la maladie rénale<br />

et de l’insuffisance rénale<br />

Une maladie rénale chronique est une maladie rénale qui<br />

évolue depuis plus de 3 mois.<br />

La chronicité est évoquée :<br />

– sur les données de l’anamnèse : antécédents familiaux de<br />

néphropathie, antécédents personnels d’infections urinaires<br />

hautes récidivantes, d’uropathie, de diabète, d’hypertension<br />

artérielle, de maladie athéromateuse, notion de prise chronique<br />

ou antérieure de substance néphrotoxique ;<br />

– sur l’existence antérieure d’une protéinurie, d’une hématurie,<br />

d’une créatininémie élevée ;<br />

– sur des critères biologiques en cas d’insuffisance rénale évoluée<br />

: anémie normochrome normocytaire arégénérative<br />

secondaire au défaut de production d’érythropoïétine, hypocalcémie<br />

(carence en vitamine D active) ;<br />

– sur des critères morphologiques : diminution de la taille des<br />

reins à l’imagerie (< 10 cm de grand axe ou < 3 vertèbres sur un<br />

cliché d’abdomen sans préparation) ;<br />

– dans certains cas ces critères ne sont pas retrouvés. Une<br />

insuffisance rénale chronique peut être associée à des reins de<br />

taille normale, voire augmentée, si la maladie rénale initiale<br />

est un diabète, une amylose, une polykystose rénale autosomique<br />

dominante, une hydronéphrose bilatérale. Une insuffisance<br />

rénale chronique sans hypocalcémie peut être observée<br />

en cas de myélome, de métastase osseuse, de sarcoïdose,<br />

d’intoxication à la vitamine D ou d’hyperparathyroïdie autonomisée.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1433


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

TABLEAU 2<br />

Préciser le stade de maladie rénale chronique<br />

En vue d’une harmonisation avec les recommandations internationales,<br />

la classification est définie en 5 stades (tableau 1).<br />

Rechercher la cause de l’insuffisance rénale chronique<br />

Les éléments d’orientation diagnostique sont donnés par l’interrogatoire,<br />

l’examen clinique, les examens biologiques sanguins et<br />

urinaires et l’imagerie. Ils sont présentés dans le tableau 2.<br />

La conduite du diagnostic étiologique peut nécessiter d’autres<br />

examens comme une électrophorèse des protéines urinaires,<br />

une immunofixation des protéines urinaires, un écho-doppler des<br />

artères rénales, une ponction-biopsie rénale, une cystographie,<br />

une urographie intraveineuse, un scanner, avec ou sans injection,<br />

une IRM, avec ou sans gadolinium, une scintigraphie rénale, une<br />

artériographie rénale. Les examens sans injection de produit de<br />

contraste iodé sont à privilégier, car l’injection d’iode expose au<br />

risque d’aggravation d’une insuffisance rénale.<br />

L’artériographie rénale n’est préconisée qu’à visée thérapeutique<br />

devant une sténose de l’artère rénale (décision de revascularisation).<br />

L’orientation étiologique vers une cause glomérulaire, tubulointerstitielle,<br />

réno-vasculaire ou vasculaire parenchymateuse repose<br />

sur l’association des signes cliniques, biologiques et radiologiques<br />

(tableau 3)<br />

1434<br />

Bilan initial et orientation diagnostique<br />

Anamnèse Clinique Paraclinique<br />

Antécédents de néphropathie familiale<br />

❚ en particulier : polykystose rénale autosomique<br />

dominante et syndrome d’Alport<br />

Antécédents personnels de :<br />

❚ diabète, hypertension artérielle, maladie<br />

athéromateuse<br />

❚ infections urinaires hautes récidivantes,<br />

uropathie, lithiase, goutte<br />

❚ maladie systémique ou auto-immune<br />

Antécédents<br />

❚ d’hématurie, protéinurie à la médecine<br />

du travail ou scolaire<br />

Prise chronique ou intermittente<br />

de médicaments néphrotoxiques<br />

❚ AINS, antalgiques, lithium, anti-calcineurines<br />

(ciclosporine, tacrolimus), sels d’or,<br />

D-pénicillamine, chimiothérapie, antiviraux…<br />

Exposition à des toxiques professionnels<br />

❚ plomb, cadmium<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

❚ hypertension artérielle, souffle vasculaire<br />

sur les axes artériels, abolition de pouls<br />

périphériques, œdèmes, signes extrarénaux<br />

de maladie systémique,reins palpables,<br />

obstacle urologique (globe vésical,<br />

toucher pelvien)<br />

Bandelette urinaire lors de la consultation<br />

❚ hématurie, protéinurie, leucocyturie,<br />

nitrites en faveur d’une infection des urines<br />

à germes Gram négatifs.<br />

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Sanguins<br />

❚ glycémie à jeun<br />

❚ électrophorèse des protéines sériques<br />

Urinaires<br />

❚ cytologie urinaire quantitative<br />

❚ rapport protéinurie/créatininurie<br />

sur un échantillon d’urine<br />

ou protéinurie des 24 heures<br />

(avec créatininurie des 24 h)<br />

Imagerie<br />

❚ échographie rénale et vésicale<br />

❚ abdomen sans préparation<br />

Prendre en charge les facteurs de progression<br />

Le contrôle des facteurs de progression est important pour ralentir<br />

l’évolution de la maladie rénale chronique vers l’insuffisance rénale<br />

chronique puis vers l’insuffisance rénale chronique terminale.<br />

Pression artérielle<br />

La pression artérielle doit être inférieure à 130/80 chez tous les<br />

patients ayant une maladie rénale chronique.<br />

Le traitement de l’hypertension artérielle repose sur un apport<br />

sodé de 4-6 g maximum par jour et l’utilisation d’inhibiteurs du<br />

système rénine-angiotensine : antagonistes du récepteur de<br />

l’angiotensine 2 pour les diabétiques de type 2 et inhibiteurs de<br />

l’enzyme de conversion.<br />

Protéinurie<br />

Une protéinurie < 0,5 g/24 h ou un rapport protéinurie/créatininurie<br />

< 50 mg/mmol/L doivent être maintenus.<br />

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion et bloqueurs<br />

des récepteurs de type 1 de l’angiotensine 2<br />

Les bloqueurs du système rénine-angiotensine sont à utiliser<br />

en première intention, car ils permettent de contrôler la pression<br />

artérielle, de diminuer la protéinurie et de ralentir la progression<br />

de l’insuffisance rénale.


TABLEAU 3<br />

Orientation diagnostique devant une insuffisance rénale chronique<br />

Q RR253<br />

Néphropathie glomérulaire ❚ maladie générale (diabète, amylose, ❚ protéinurie > 3 g/24 h ou rapport<br />

maladie systémique auto-immune) protéinurie/créatininurie > 300 mg/mmol<br />

❚ hypertension artérielle ❚ protéinurie > 1 g/24 h ou rapport<br />

❚ œdèmes protéinurie/créatininurie > 1 g/g<br />

❚ antécédents de protéinurie, d’hématurie associé à une hématurie et/ou cylindres<br />

hématiques et/ou hématies déformées<br />

❚ reins symétriques, contours réguliers<br />

❚ atrophie harmonieuse à un stade évolué<br />

❚ indication de ponction-biopsie rénale<br />

Néphropathie tubulo-interstitielle ❚ hypertension artérielle absente ❚ protéinurie de faible débit (souvent < 1 g/24 h)<br />

ou modérée et tardive ou rapport protéinurie/créatininurie<br />

❚ antécédents d’infections urinaires < 100 mg/mmol de type tubulaire<br />

récidivantes, uropathie, goutte, ❚ leucocyturie sans germes<br />

maladie métabolique ❚ cylindres leucocytaires<br />

❚ consommation d’antalgiques ❚ acidose hyperchlorémique avec trou<br />

ou exposition à des toxiques anionique normal<br />

❚ atrophie rénale asymétrique, contours bosselés<br />

Atteinte vasculaire parenchymateuse ❚ hypertension artérielle ancienne ❚ protéinurie de faible débit<br />

❚ facteurs de risque cardiovasculaire ❚ reins de taille symétrique<br />

(tabagisme, diabète, hyperlipidémie)<br />

❚ antécédents cardiovasculaires<br />

(coronaropathie, accident vasculaire cérébral,<br />

artériopathie des membres inférieurs)<br />

❚ souffle vasculaire<br />

❚ rétinopathie hypertensive<br />

Atteinte réno-vasculaire ❚ hypertension artérielle sévère résistant ❚ protéinurie de faible débit<br />

à une bithérapie synergique ❚ reins de taille asymétrique<br />

❚ souffle péri-ombilical (de l’artère rénale) (petit rein du côté de la sténose)<br />

❚ facteurs de risque cardiovasculaire ❚ doppler des artères rénales :<br />

signes directs indirects de sténose<br />

Il est recommandé de :<br />

– commencer le traitement par une posologie faible ;<br />

– contrôler la kaliémie, la créatininémie, 1 semaine après l’introduction<br />

et après chaque augmentation de posologie ;<br />

– augmenter par paliers de 4 semaines jusqu’à l’obtention des<br />

cibles thérapeutiques ;<br />

– surveiller la créatininémie, la kaliémie et la protéinurie à la fin du<br />

premier mois, puis à un rythme dépendant de la clairance de<br />

créatinine.<br />

La posologie est augmentée progressivement jusqu’à l’obtention<br />

des cibles thérapeutiques, et un renforcement du traitement par<br />

diurétiques thiazidiques ou diurétiques de l’anse peut être nécessaire<br />

pour le contrôle tensionnel à condition que la restriction<br />

sodée soit correctement suivie.<br />

Arguments cliniques Arguments paracliniques<br />

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L’association inhibiteurs de l’enzyme de conversion-antagonistes<br />

des récepteurs de l’angiotensine 2 peut être nécessaire<br />

pour mieux contrôler la protéinurie sous réserve d’une surveillance<br />

très stricte de l’hyperkaliémie, en particulier chez le sujet<br />

diabétique.<br />

Les précautions d’emploi sont :<br />

– une augmentation de la créatininémie de plus de 30 % doit faire<br />

rechercher une sténose de l’artère rénale ;<br />

– une hyperkaliémie > 6 mmol/L doit conduire à l’arrêt temporaire<br />

et un écart diététique doit être recherché. L’utilisation<br />

conjointe de diurétiques hypokaliémants peut être discutée ;<br />

– une insuffisance rénale aiguë fonctionnelle à l’occasion d’une<br />

déshydratation aiguë doit conduire à l’arrêt temporaire du ou<br />

des traitement(s) (et des diurétiques associés).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1435


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

La prévention des épisodes surajoutés<br />

d’insuffisance rénale aiguë<br />

Devant l’aggravation d’une insuffisance rénale chronique, il faut<br />

rechercher un facteur de surcroît responsable d’une poussée<br />

d’insuffisance rénale chronique.<br />

Les facteurs à rechercher sont :<br />

– une déshydratation aiguë extracellulaire sous diurétiques ou<br />

à l’occasion de vomissements ou de diarrhée. Le traitement<br />

repose sur l’apport d’eau et de sel ;<br />

– la prescription de médicaments néphrotoxiques : aminosides,<br />

antiviraux par exemple nécessitant une adaptation posologique ;<br />

– la prescription de médicaments à effets hémodynamiques :<br />

anti-inflammatoires non stéroïdiens, bloqueurs du système<br />

rénine-angiotensine. Il faut corriger une hypovolémie associée<br />

et éliminer une sténose de l’artère rénale ou des lésions vasculaires<br />

intra-parenchymateuses évoluées ;<br />

– un obstacle sur les voies urinaires à découvrir par une échographie<br />

rénale et des touchers pelviens ;<br />

– une pyélonéphrite surajoutée ;<br />

– une néphropathie vasculaire surajoutée.<br />

La prise en charge des facteurs de risque<br />

cardiovasculaire<br />

Les patients ayant une insuffisance rénale chronique ou /et une<br />

protéinurie sont considérés comme des patients avec un risque<br />

cardiovasculaire très élevé et l’hypertension artérielle, le tabagisme,<br />

l’hyperlipidémie, le diabète, la surcharge pondérale, la sédentarité<br />

doivent être pris en charge très rigoureusement.<br />

Organiser le suivi selon le stade d’évolution de la maladie<br />

rénale chronique et de l’insuffisance rénale chronique<br />

Un avis néphrologique est recommandé pour le patient ayant<br />

une maladie rénale chronique, dans le but de traiter la cause, de<br />

rechercher et de corriger des facteurs éventuellement réversibles,<br />

d’optimiser la stratégie d’intervention et d’organiser le suivi<br />

du patient. La rythmicité et l’organisation du suivi entre néphrologue<br />

et médecin correspondant dépendent de la gravité de l’insuffisance<br />

rénale et des pathologies associées. Les interventions<br />

en fonction des stades de la maladie rénale chronique et de l’insuffisance<br />

rénale chronique sont décrites dans le tableau 4.<br />

Au stade 3 de la classification, le risque d’événement cardiovasculaire,<br />

de progression de l’insuffisance rénale chronique ou<br />

de survenue de complications métaboliques est augmenté par<br />

l’existence d’une protéinurie et/ou lorsque le débit de filtration<br />

glomérulaire est compris entre 30 et 44 mL/min/1,73 m 2 .<br />

Chez le sujet âgé de 75 ans et plus, lorsque le débit de filtration<br />

glomérulaire est entre 45 et 59 mL/min/1,73 m 2 , en l’absence de<br />

marqueurs d’atteinte rénale, le recours au néphrologue n’est pas<br />

d’emblée nécessaire. La stabilité de la fonction rénale et l’absence<br />

d’anomalies urinaires doivent être vérifiées 3 à 6 mois plus<br />

tard, avant le recours éventuel au néphrologue.<br />

1436<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

Complications de l’insuffisance rénale chronique<br />

et prise en charge<br />

Elles s’expliquent par l’atteinte des grandes fonctions rénales :<br />

– défaut d’élimination des toxines dérivées du catabolisme azoté ,<br />

se traduisant par une élévation de la créatinine, de l’urée et de<br />

l’acide urique ;<br />

– perturbation de la régulation du bilan hydroélectrolytique et de<br />

l’équilibre acido-basique ;<br />

– perturbation des fonctions endocrines avec synthèse de rénine,<br />

d’érythropoïétine et de vitamine D active.<br />

Conséquences cardiovasculaires<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1. Hypertension artérielle<br />

Elle est précoce dans la polykystose rénale autosomique dominante<br />

avant le stade d’insuffisance rénale, et dans les néphropathies<br />

glomérulaires et vasculaires.<br />

Elle accélère la progression de l’insuffisance rénale. Elle est<br />

volo-dépendante à un stade avancé de l’insuffisance rénale et est<br />

sensible à un régime pauvre en sel et aux diurétiques de l’anse.<br />

Une aggravation inexpliquée de l’hypertension artérielle au<br />

cours de l’évolution d’une maladie rénale chronique doit faire<br />

rechercher une sténose de l’artère rénale surajoutée.<br />

2. Athérosclérose accélérée<br />

Les complications cardiovasculaires – cardiopathies ischémiques,<br />

accidents vasculaires cérébraux et artériopathies des<br />

membres inférieurs – représentent la première cause de décès<br />

du patient insuffisant rénal.<br />

En plus des classiques facteurs de risque cardiovasculaire (hyperlipidémie,<br />

tabac, hypertension artérielle, diabète, sexe masculin,<br />

âge), des facteurs plus spécifiques expliquent la fréquence des<br />

complications cardiovasculaires : troubles du métabolisme<br />

phosphocalcique, hyperhomocystéinémie, anémie, insulinorésistance,<br />

toxines urémiques.<br />

3. Atteinte cardiaque<br />

L’hypertrophie ventriculaire gauche secondaire à l’hypertension<br />

artérielle, l’insuffisance ventriculaire gauche favorisée par l’anémie,<br />

les calcifications vasculaires et coronariennes sont les plus fréquentes,<br />

alors que la péricardite urémique devenue exceptionnelle<br />

est observée lorsque l’insuffisance rénale chronique a été longtemps<br />

méconnue et chez des patients insuffisamment dialysés.<br />

Anomalies du métabolisme phosphocalcique<br />

et osseux<br />

Elles sont caractérisées par :<br />

– un déficit en vitamine D active, secondaire à un défaut de production<br />

de la 1α−hydroxylase d’origine rénale ;<br />

– une hyperparathyroïdie secondaire, précoce au cours de l’évolution<br />

de l’insuffisance rénale ;<br />

– une hypocalcémie tardive ;<br />

– une hyperphosphorémie secondaire à la diminution de l’excrétion<br />

rénale de phosphore.


TABLEAU 4<br />

Les lésions osseuses sont aggravées par l’acidose métabolique.<br />

L’ostéodystrophie rénale est la conséquence de l’association<br />

de l’ostéomalacie et de l’ostéite fibreuse.<br />

L’ostéomalacie est secondaire à la carence en vitamine D<br />

active (diminution de la formation osseuse) et se manifeste par<br />

des douleurs osseuses, une déminéralisation osseuse avec des<br />

stries de Looser-Milkman, (radiographies) et une diminution de la<br />

concentration de la 1-25 (OH)2 D3.<br />

L’ostéite fibreuse est secondaire à l’hyperparathyroïdie (augmentation<br />

de la résorption osseuse).<br />

Les signes cliniques sont représentés par des douleurs<br />

osseuses et des fractures pathologiques, les signes radiologiques<br />

par une résorption des extrémités osseuses (houppes<br />

phalangiennes), des lacunes osseuses au niveau du crâne, des<br />

os plats, les signes biologiques par une élévation de la parathormone<br />

et une augmentation des phosphatases alcalines.<br />

La prévention et le traitement des anomalies phosphocalciques<br />

reposent sur :<br />

Q RR253<br />

Interventions selon le stade de la maladie rénale chronique et de l’insuffisance rénale chronique<br />

Stades Définitions Intervention*<br />

1 et 2 ❚ maladie rénale chronique ❚ diagnostic étiologique et traitement<br />

et DFG 60 mL/min/1,73 m 2 ❚ ralentir la progression<br />

❚ prise en charge des facteurs de risque cardiovasculaire<br />

et des comorbidités : hypertension artérielle, dyslipidémie,<br />

tabagisme, diabète<br />

❚ éviction des produits néphrotoxiques<br />

3 ❚ insuffisance rénale modérée ❚ idem stades 1, 2<br />

30 DFG 59 mL/min/1,73 m 2 ❚ diagnostic, prévention et traitement des complications,<br />

des comorbidités, des pathologies associées physiques<br />

ou cognitives : hypertension artérielle, déséquilibre nutritionnel<br />

protéino-énergétique, anémie, anomalie du métabolisme<br />

phosphocalcique et atteintes osseuses (ostéite fibreuse,<br />

ostéomalacie, ostéopathie adynamique), acidose métabolique<br />

et hyperkaliémie<br />

❚ préserver le capital veineux pour les futurs abords vasculaires<br />

❚ vaccination contre le virus de l’hépatite B<br />

4 ❚ insuffisance rénale sévère ❚ idem stade 1, 2 et 3<br />

15 DFG 29 mL/min/1,73 m 2 ❚ information et préparation au traitement de suppléance :<br />

dialyse péritonéale, hémodialyse en centre ou hors centre,<br />

transplantation rénale avec donneur cadavérique ou donneur vivant<br />

5 ❚ insuffisance rénale terminale ❚ traitement de suppléance (dialyse et /ou transplantation)<br />

DFG < 15 mL/min/1,73 m 2 ou traitement ou prise en charge palliative<br />

de suppléance (dialyse ou transplantation) L’indication du traitement de suppléance dépend du débit<br />

et du contexte clinique de filtration glomérulaire<br />

(*) Chaque stade inclut les interventions du ou des stades précédents. DFG : débit de filtration glomérulaire (mL/min/1,73 m 2 ).<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

– l’apport de calcium suffisant : 1 g élément par jour, sous forme<br />

de carbonate de calcium pour chelater le phosphore (Calcidia,<br />

Orocal) ;<br />

– les chélateurs du phosphore non calciques sont efficaces<br />

(sevelamer, carbonate de lanthanum). Il est préférable d’éviter les<br />

gels d’aluminium pour éviter la toxicité neurologique et osseuse ;<br />

– une diététique adaptée pour diminuer l’apport de phosphore<br />

(régime à 0,8 g/kg de protides) ;<br />

– des apports de vitamine D sous forme de 1-αOH-D3 (Un alfa)<br />

ou de 1-25 (OH)2 D3 (Rocaltrol). L’apport de vitamine D3 peut<br />

cependant s’avérer nécessaire en cas de carence très fréquente<br />

dans la population générale.<br />

Les objectifs de traitement sont : une calcémie entre 2,2 et<br />

2,6 mmol/L, une phosphorémie < 1,5 mmol/L, une PTH inférieure<br />

à 3 fois la normale.<br />

En cas d’hypercalcémie et d’hyperparathyroïdie autonomisée,<br />

donc non freinable (dite tertiaire), une parathyroïdectomie peut<br />

être nécessaire.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1437


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

Conséquences métaboliques endocriniennes<br />

et nutritionnelles<br />

1. Hyperuricémie<br />

Elle est le plus souvent asymptomatique et doit être traitée en<br />

cas de crise de goutte.<br />

2. Hyperlipidémie<br />

Une hypertriglycéridémie est habituelle, associée à une diminution<br />

du HDL-cholesterol au cours de l’insuffisance rénale chronique.<br />

En cas de syndrome glomérulaire, une hypercholesterolémie<br />

est fréquente avec augmentation du LDL et VLDL cholestérol.<br />

Il est souhaitable de traiter l’hyperlipidémie par des statines en<br />

surveillant la toxicité musculaire. Les fibrates sont contre-indiqués<br />

en cas d’insuffisance rénale.<br />

3. Dénutrition protéino-énergétique<br />

Elle est fréquente en raison :<br />

– de l’anorexie et des nausées, voire des vomissements en cas<br />

d’insuffisance rénale avancée ;<br />

– de l’augmentation du catabolisme protéique du fait de l’acidose<br />

métabolique ;<br />

– de la diminution de l’anabolisme protéique en raison de l’insulinorésistance<br />

;<br />

– de la diminution contrôlée des apports protéiques à 0,8 g/kg/j.<br />

Les marqueurs nutritionnels sont importants à surveiller, car<br />

une diminution de l’albuminémie est prédictive de mortalité chez<br />

ces patients. La prise en charge diététique est primordiale pour<br />

contrôler l’apport sodé, en potassium et en protéines.<br />

Complications hématologiques et immunologiques<br />

1. Anémie normochrome, normocytaire, arégénérative<br />

Elle apparaît lorsque le débit de filtration glomérulaire est<br />

< 60 mL/min/1,73 m 2 et est constante dès qu’il est inférieur<br />

à 40 mL/min.<br />

Elle est normochrome, normocytaire, arégénérative.<br />

Les mécanismes sont multiples : le principal est le défaut de<br />

production de l’érythropoïétine par le rein (traitement : érythropoïétine<br />

recombinante). La diminution de la demi-vie des globules<br />

rouges (hémolyse) est liée à des facteurs plasmatiques<br />

toxiques (la demi-vie des hématies de sujets normaux est diminuée<br />

en présence de plasma de sujets insuffisants rénaux).<br />

La spoliation sanguine surajoutée est à suspecter lorsque l’anémie<br />

est plus sévère que ne le voudrait le degré d’insuffisance<br />

rénale. La spoliation est fréquente en hémodialyse.<br />

Un degré d’insuffisance médullaire peut exister.<br />

La clinique retrouve : pâleur, teint caractéristique de l’insuffisant<br />

rénal (jaune paille) une anémie généralement bien tolérée +++ ;<br />

à un stade tardif : dyspnée d’effort, angor, asthénie et souffle systolique<br />

en écharpe par hyperdébit.<br />

L’échographie cardiaque peut montrer une hypertrophie ventriculaire<br />

gauche.<br />

Le traitement est instauré dès que l’hémoglobine est < 110 g/L :<br />

correction d’une carence martiale (apport de fer per os ou par<br />

1438<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

voie IV) ; érythropoïétine recombinante (traitement coûteux ;<br />

objectif hémoglobine entre 110 et 120 g/L et transfusions (seulement<br />

si l’anémie est mal tolérée en raison du risque d’immunisation<br />

anti-HLA si le patient doit être transplanté).<br />

2. Troubles de l’hémostase<br />

Ces anomalies sont fréquentes lors d’une insuffisance rénale<br />

chronique avancée. Elles se traduisent par une augmentation du<br />

temps de saignement et un défaut d’agrégation plaquettaire.<br />

Elles sont responsables d’hémorragies digestives, d’épistaxis.<br />

Elles sont corrigées partiellement par le traitement de suppléance.<br />

L’utilisation d’héparine de bas poids moléculaire est contreindiquée<br />

lorsque le débit de filtration glomérulaire est < 30 mL/min<br />

(élimination rénale et risque d’accumulation).<br />

3. Déficit immunitaire<br />

La réponse vaccinale est diminuée et la vaccination contre l’hépatite<br />

B doit être réalisée précocement.<br />

Troubles de l’équilibre acido-basique<br />

Le rein doit éliminer quotidiennement 60 à 90 meq d’ions H+.<br />

Au cours de l’insuffisance rénale chronique, cette élimination est<br />

insuffisante. L’acidose métabolique est précoce au cours de<br />

l’évolution. Elle a pour conséquence : une augmentation du catabolisme<br />

protéique, une aggravation des lésions osseuses et une<br />

augmentation du risque d’hyperkaliémie.<br />

Le but est de maintenir un dosage de bicarbonates > 22 mmol/L<br />

par l’apport de bicarbonates de sodium per os en étant vigilant<br />

vis-à-vis du risque de surcharge sodée et de fluorose à long<br />

terme avec l’eau de Vichy.<br />

Troubles hydroélectrolytiques<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1. Bilan hydrosodé<br />

L’adaptation du sodium se fait grâce à une diminution de la<br />

réabsorption tubulaire par les néphrons restants. La rétention<br />

sodée et les œdèmes ne sont donc pas un signe obligatoire de<br />

l’insuffisance rénale chronique. Les œdèmes peuvent apparaître<br />

cependant en cas de surcharge brutale et excessive en sel, en<br />

cas d’insuffisance cardiaque associée ou en cas de persistance<br />

de syndrome néphrotique.<br />

Il existe une polyurie du fait de la diurèse osmotique isotonique<br />

et une polydipsie nocturne, qui est un signe précoce d’insuffisance<br />

rénale. Le pouvoir de concentration des urines est altéré<br />

très précocement.<br />

À un stade ultime, (filtration glomérulaire < 10 mL/min), il est<br />

dangereux d’imposer une surcharge massive en eau, car le<br />

patient n’est plus capable de diluer encore ses urines et il existe<br />

un risque d’hyperhydratation avec hyponatrémie, source de<br />

vomissements et de troubles de conscience.<br />

2. Bilan du potassium<br />

L’adaptation se fait grâce à une augmentation de la fraction<br />

excrétée de potassium, ce qui explique que la kaliémie reste<br />

longtemps normale.


Insuffisance rénale chronique<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

L’insuffisance rénale chronique se définit<br />

par une diminution progressive et irréversible du débit<br />

de filtration glomérulaire. Il peut être soit mesuré, soit estimé<br />

à partir de la formule MDRD simplifiée utilisant le dosage<br />

de la créatininémie.<br />

L’insuffisance rénale chronique est secondaire<br />

à une maladie rénale chronique évoquée devant<br />

des anomalies urinaires : un rapport protéine/créatinine<br />

urinaire > 50 mg/mmol, ou/et une hématurie,<br />

ou/et une leucocyturie ou des anomalies morphologiques.<br />

Le caractère chronique est recherché sur l’interrogatoire,<br />

sur des critères biologiques, morphologiques et l’insuffisance<br />

rénale chronique est classée en 5 stades.<br />

Le diagnostic étiologique élimine un obstacle<br />

et recherche une cause glomérulaire, interstitielle, vasculaire<br />

ou une néphropathie héréditaire.<br />

Les mesures pour ralentir la progression de l’insuffisance<br />

rénale sont une protéinurie < 0,5 g/24 h et une pression<br />

artérielle < 130/80 mmHg et sont contrôlés par la prescription<br />

de bloqueurs du système rénine- angiotensine.<br />

Devant toute aggravation brutale de l’insuffisance rénale<br />

chronique, il faut rechercher un facteur aggravant surajouté.<br />

Les facteurs de risque cardiovasculaire sont pris en charge<br />

ainsi que les complications de l’insuffisance rénale chronique<br />

(cardiovasculaires, métabolisme phosphocalcique, anémie,<br />

acidose métabolique, hyperkaliémie).<br />

À chaque stade de maladie rénale chronique correspond<br />

une prise en charge spécifique. Le traitement de suppléance<br />

est démarré au stade V (clairance de créatinine < 15 mL/min)<br />

et la technique de suppléance repose avant tout sur le choix<br />

du patient après une information claire et détaillée de chaque<br />

technique et en l’absence de contre-indication médicale :<br />

hémodialyse, dialyse péritonéale, transplantation rénale.<br />

Une hyperkaliémie peut se voir à partir du stade IV de l’insuffisance<br />

rénale chronique et est favorisée par l’acidose métabolique,<br />

respiratoire ou mixte, les apports excessifs, et en cas de<br />

prescription médicamenteuse hyperkaliémante (diurétiques<br />

épargneurs du potassium, ou inhibiteur de l’enzyme de conversion<br />

ou antagoniste du récepteur de l’angiotensine 2). La correction<br />

de l’hyperkaliémie repose sur la correction de l’acidose métabolique<br />

et la prise de résine échangeuse d’ions.<br />

Q RR253<br />

Atteintes neurologiques<br />

1. Atteinte périphérique : polynévrite urémique<br />

Elle est d’installation progressive et est souvent latente.<br />

Elle se traduit par des troubles sensitifs subjectifs : fourmillements,<br />

sensation de pieds brûlants, « impatiences » et crampes<br />

dans les membres inférieurs.<br />

Les signes objectifs apparaissent plus tardivement : diminution de<br />

la force musculaire et abolition des réflexes achilléens et rotuliens.<br />

Les signes prédominent aux membres inférieurs et respectent<br />

généralement les membres supérieurs.<br />

Les signes s’améliorent après la prise en hémodialyse, témoignant<br />

d’une origine toxique.<br />

La surveillance peut s’effectuer par la mesure des vitesses de<br />

conduction nerveuse.<br />

2. Atteinte centrale<br />

Ce sont :<br />

– le coma urémique exceptionnel, régressif avec le traitement de<br />

suppléance ;<br />

– l’encéphalopathie hypertensive ;<br />

– les troubles de conscience et crises convulsives secondaires<br />

à des désordres hydro-électrolytiques (hyponatrémie) ;<br />

– les intoxications médicamenteuses évitables par l’ajustement<br />

de la posologie médicamenteuse.<br />

Troubles digestifs<br />

Ils ne sont pas spécifiques. Les nausées et vomissements sont<br />

des signes d’intolérance à l’urémie ou peuvent traduire des<br />

troubles hydroélectrolytiques (hyponatrémie).<br />

Les ulcères gastro-duodénaux et les hémorragies digestives<br />

ne sont pas rares et aggravent l’anémie.<br />

Manifestations cutanéo-muqueuses<br />

Elles sont fréquentes : pigmentation cutanée : couleur jaune<br />

paille, prurit, pseudo-porphyrie cutanée, odeur ammoniacale de<br />

l’haleine, sécheresse de la langue dépapillée, stomato-gingivite.<br />

Traitement conservateur de la fonction rénale<br />

Il se rajoute au traitement de l’anémie, à la prévention de l’ostéodystrophie<br />

rénale de l’acidose et des troubles hydroélectro -<br />

lytiques et à la prévention de la dénutrition.<br />

La préservation du capital veineux<br />

Les prises de sang s’effectuent au membre supérieur ayant le<br />

moins bon réseau veineux ou bien du côté non dominant, dans la<br />

perspective de la création d’une fistule artério-veineuse pour une<br />

hémodialyse éventuelle.<br />

La vaccination contre l’hépatite B<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Elle doit s’effectuer précocement au cours de l’évolution de<br />

l’insuffisance rénale chronique pour augmenter les chances de<br />

réponse vaccinale.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1439


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

Traitement de suppléance de la fonction rénale<br />

Techniques de suppléance de la fonction rénale<br />

Trois types de traitement sont proposés et peuvent se succéder<br />

au cours de l’évolution de l’insuffisance rénale chronique<br />

terminale chez un même patient.<br />

1440<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?<br />

Un patient âgé de 67 ans, pesant habituellement 75 kg, est adressé<br />

en consultation de néphrologie par son médecin traitant pour la découverte<br />

d’une créatininémie à 300 μmol/L associée à des œdèmes des membres inférieurs.<br />

Dans les antécédents, on retrouve la notion d’une albuminurie il y a 10 ans<br />

lors d’une visite en médecine du travail, d’un tabagisme encore poursuivi<br />

(40 paquets-années), d’une consommation intermittente d’anti-inflammatoires<br />

non stéroïdiens pour des douleurs articulaires anciennes et une hypertension<br />

artérielle traitée depuis 10 ans.<br />

L’examen clinique retrouve une pression artérielle à 170/100 mmHg,<br />

un poids de 82 kg, un souffle carotidien gauche. Les pouls périphériques<br />

sont perçus. L’auscultation cardiaque est normale.<br />

Les examens biologiques montrent :<br />

– dans le sang : K+ à 4 mmol/L, glycémie à 6 mmol/L, calcémie à 2 mmol/L,<br />

phosphorémie à 1,8 mmol/L, réserve alcaline à 16 mmol/L, cholestérol à 2,80 g/L,<br />

LDLc à 2 g/L, HDLc à 0, 80 g/L, triglycérides à 3 g/L, hémoglobine à 100 g/L ;<br />

– dans les urines de 24 heures : créatininurie à 8 mmol/L, protéinurie à 3 g/24 h,<br />

urée urinaire à 500 mmol, Na urinaire à 200 mmol, K urinaire à 80 mmol ;<br />

– cytologie urinaire : 200 GR/mm 3 , 2 GB/mm 3 , uroculture stérile.<br />

L’échographie rénale retrouve 2 reins mesurant 10 cm de diamètre bipolaire,<br />

symétriques. Le fond d’œil montre une rétinopathie hypertensive.<br />

QUESTION N° 1<br />

S’agit-il d’une insuffisance<br />

rénale aiguë ou chronique ?<br />

Sur quels arguments ?<br />

QUESTION N° 2<br />

Quel est le stade<br />

de cette insuffisance rénale ?<br />

QUESTION N° 3<br />

Quelle est la cause de cette<br />

insuffisance rénale chronique ?<br />

Sur quels arguments ?<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

1. La transplantation rénale<br />

Lorsqu’elle est possible, il s’agit de la meilleure méthode de<br />

suppléance par rapport à l’hémodialyse et à la dialyse péritonéale<br />

du fait : d’une meilleure qualité de vie ; d’une morbidité cardiovasculaire<br />

moindre ; d’une espérance de vie supérieure ; d’un<br />

coût de traitement très inférieur après la première année.<br />

QUESTION N° 4<br />

Quel est l’examen décisif et que devezvous<br />

vérifier avant de le pratiquer ?<br />

QUESTION N° 5<br />

Quelles sont les complications de cette<br />

insuffisance rénale chronique ?<br />

QUESTION N° 6<br />

Quelles sont les cibles thérapeutiques<br />

et les mesures thérapeutiques pour<br />

ralentir la progression de l’insuffisance<br />

rénale chez ce patient ?<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

QUESTION N° 7<br />

Citez les autres mesures<br />

thérapeutiques à prendre<br />

pour le traitement conservateur<br />

de cette insuffisance rénale<br />

et la préparation au traitement<br />

de suppléance.<br />

Deux ans plus tard,<br />

la créatininémie est mesurée<br />

à 600 μmol/L.<br />

QUESTION N° 8<br />

Donnez les arguments<br />

permettant au patient de s’orienter<br />

vers l’hémodialyse ou la dialyse<br />

péritonéale.<br />

QUESTION N° 9<br />

Citez les avantages<br />

pour le patient et la société<br />

de la transplantation rénale.<br />

Retrouvez toutes les réponses<br />

et les commentaires sur<br />

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onglet ECN<br />

OK


Dans la plupart des cas où elle est possible, elle peut être envisagée<br />

au stade d’insuffisance rénale chronique sévère, avant<br />

qu’un traitement dialytique ne soit institué.<br />

En France, en 2008, pour les personnes qui commencent une<br />

dialyse, la probabilité d’être inscrit sur la liste nationale d’attente<br />

de greffe de rein est de 25 % au bout de 3 ans, tous âges confondus<br />

; une personne sur 2 de moins de 60 ans qui démarre une<br />

dialyse est inscrite au bout de 15 mois.<br />

2. L’hémodialyse<br />

Généralités : c’est la technique de dialyse la plus utilisée en<br />

France (> 90 %), qui permet la durée de survie dans la technique<br />

la plus longue (jusqu’à 20 ans et plus) et la plus coûteuse.<br />

Elle peut être réalisée dans différentes structures : centre d’hémodialyse<br />

lourd avec présence médicale permanente ; unité de<br />

dialyse médicalisée avec présence médicale intermittente ; unité<br />

d’autodialyse assistée ou non sans présence médicale ; au<br />

domicile par des patients autonomes.<br />

Son coût varie suivant les structures de 25 000 à 50 000 euros<br />

par an environ.<br />

Principes : deux types d’échanges sont utilisés pour le traitement<br />

par hémodialyse :<br />

– des transferts diffusifs selon les gradients de concentration<br />

permettent la diffusion des molécules dissoutes au travers<br />

d’une membrane semi-perméable mettant en contact le sang<br />

et un bain de dialyse de composition contrôlée ;<br />

– des transferts convectifs des molécules dissoutes dans le sang<br />

sont réalisés par ultra-filtration résultant de l’application d’une<br />

pression hydrostatique positive au travers de la même membrane<br />

semi-perméable. Cela permet d’obtenir une soustraction<br />

nette de liquide, nécessaire chez les patients anuriques et<br />

l’élimination concomitante par convection des substances dissoutes.<br />

Modalités pratiques : les séances d’hémodialyse sont réalisées en<br />

général 3 fois par semaine, et durent chacune 4 à 6 heures.<br />

L’hémodialyse nécessite une circulation extracorporelle, un<br />

système (dialyseur et générateur d’hémodialyse) permettant la<br />

réalisation des échanges selon les principes définis ci-dessus et<br />

une installation de traitement de l’eau.<br />

La circulation extracorporelle nécessite un abord vasculaire<br />

(fistule artério-veineuse de préférence, anse prothétique artérioveineuse,<br />

cathéter tunnellisé ou non [pose en urgence]), une anticoagulation<br />

efficace du circuit extracorporel par héparine non<br />

fractionnée ou de bas poids moléculaire, un circuit extracorporel<br />

(à usage unique).<br />

Les échanges sont réalisés dans un dialyseur (jetable) en fibres<br />

capillaires le plus souvent, dont le principe est d’offrir une surface<br />

d’échange importante pour un volume de sang faible.<br />

Le générateur d’hémodialyse, matériel lourd, permet la réalisation<br />

et le contrôle de la circulation extracorporelle, la fabrication<br />

du bain de dialyse à partir de l’eau osmosée et le contrôle du<br />

débit et du volume d’ultrafiltrat soustrait au patient.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR253<br />

L’eau osmosée est obtenue à partir de l’eau de ville, par une<br />

chaîne de traitement complexe qui élimine bactéries et toxines,<br />

métaux toxiques (aluminium, plomb, etc.), calcium et autres ions.<br />

Clinique : l’hémodialyse chronique permet, grâce aux 3 séances<br />

hebdomadaires :<br />

– de contrôler les volumes liquidiens en ramenant le patient à un<br />

poids idéal théorique – dit poids sec – correspondant à un état<br />

d’hydratation et à une pression artérielle normaux ;<br />

– de soustraire les différentes molécules à élimination urinaire<br />

comme l’urée, la créatinine ou d’autres toxiques ;<br />

– de corriger les différentes anomalies électrolytiques induites<br />

par l’insuffisance rénale chronique (hyperkaliémie, acidose<br />

métabolique, hypocalcémie, dysnatrémies).<br />

Le régime alimentaire des patients hémodialysés comprend<br />

une restriction hydrique de 500 mL + la diurèse résiduelle, une<br />

alimentation peu salée, des apports protéiques de 1,2 g/kg/j et<br />

des apports caloriques de 35 kcal/kg/j.<br />

3. La dialyse péritonéale<br />

Généralités : c’est une technique de dialyse moins utilisée que<br />

l’hémodialyse en France : au 31 décembre 2008, parmi les personnes<br />

dialysées, 7 % étaient en dialyse péritonéale. Elle permet<br />

le traitement à domicile, et est mieux toléré sur le plan hémodynamique<br />

que l’hémodialyse. Elle a des performances d’épuration<br />

moindres que l’hémodialyse (difficultés techniques chez les<br />

patients de fort gabarit) et sa durée d’utilisation chez un patient<br />

est limitée à quelques années (5 ans) du fait de l’altération progressive<br />

des propriétés du péritoine. Elle est moins coûteuse que<br />

l’hémodialyse.<br />

Principes : la membrane péritonéale permet les échanges en<br />

dialyse péritonéale. Les transferts diffusifs selon les gradients de<br />

concentration transmembranaires permettent la diffusion des<br />

molécules dissoutes. L’’ultrafiltration est réalisée avec des solutions<br />

de dialyse péritonéale de forte osmolarité (glucose hypertonique)<br />

ou à pression colloïde élevée (polymère de glucose). Cela<br />

permet d’obtenir une soustraction nette de liquide, nécessaire<br />

chez les patients anuriques.<br />

Réalisation pratique : la dialyse péritonéale nécessite :<br />

– un cathéter de dialyse péritonéale inséré chirurgicalement, une<br />

extrémité étant dans le cul-de-sac de Douglas, l’autre étant<br />

tunnellisée dans un trajet sous-cutané latéro-ombilical ;<br />

– un système de connexion qui permet d’assurer les échanges<br />

de façon aseptique ;<br />

– des poches de dialysat stérile d’un volume d’environ 1,5 à<br />

2,5 litres.<br />

Les échanges peuvent être réalisés de deux façons :<br />

– par une technique manuelle permettant 3 à 5 échanges par jour.<br />

Une stase de quelques heures (4 en moyenne) permet les échanges<br />

diffusifs. Le liquide est ensuite drainé par simple gravité. Le plus<br />

souvent 8 à 10 litres d’échanges quotidiens sont nécessaires ;<br />

– par une technique automatisée, une machine assurant les<br />

échanges la nuit.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010 1441


RR Q 253 II<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

Le choix entre les deux techniques dépend de la nécessité<br />

d’assurer un volume d’échange plus important (patients de fort<br />

gabarit) et de celle de libérer le patient pendant la journée<br />

(enfants scolarisés, travail, déplacement professionnel).<br />

Clinique : comme l’hémodialyse, la dialyse péritonéale chronique<br />

permet, grâce aux échanges réalisés quotidiennement, de contrôler<br />

les volumes liquidiens, de soustraire les différentes molécules à<br />

élimination urinaire et de corriger les différentes anomalies électrolytiques<br />

induites par l’insuffisance rénale chronique terminale.<br />

Le régime alimentaire des patients traités par dialyse péritonéale<br />

comprend : une restriction hydrique souvent moins sévère<br />

qu’en hémodialyse, la diurèse résiduelle étant conservée plus<br />

longtemps, une alimentation peu salée, des apports protéiques<br />

importants comme en hémodialyse, soit 1,2 g de protéines/kg/jour,<br />

avec le problème supplémentaire d’une déperdition protéique<br />

liée à la technique, des apports caloriques de 35 kcal/kg/jour.<br />

Initiation du traitement de suppléance<br />

1. Information du patient et préparation au traitement<br />

de suppléance<br />

Les différentes techniques de suppléance de l’insuffisance<br />

rénale chronique sont expliquées au patient lorsque le débit de<br />

filtration glomérulaire est < 30 mL/min et le choix de la technique<br />

est celle du patient et de son entourage en fonction de ses choix<br />

de vie, en l’absence de contre-indication médicale pour une des<br />

techniques. Les conséquences psychologiques et sociales de<br />

l’IRC sont prises en charge (prise en charge à 100 %, reclassement<br />

professionnel).<br />

Si le patient choisit l’hémodialyse, la fistule artério-veineuse doit<br />

être créée au moins 1 mois avant son utilisation. S’il choisit la dialyse<br />

péritonéale, le cathéter de dialyse péritonéale est mis en<br />

place environ 2 semaines avant le début du traitement. Le bilan<br />

de prétransplantation rénale puis l’inscription sur la liste d’attente<br />

de transplantation peuvent s’effectuer avant le début du traitement<br />

de suppléance par dialyse. La transplantation « préemptive »<br />

(c’est-à-dire avant le début de la dialyse) offre des avantages<br />

médicaux et psychosociaux.<br />

2. Début du traitement de suppléance<br />

Il est envisagé lorsque le débit de filtration glomérulaire<br />

< 15 mL/min et est commencé en fonction des signes cliniques<br />

et biologiques, en cas d’intolérance urémique ou cardiaque :<br />

nausée, vomissement, dyspnée, hypertension artérielle mal<br />

contrôlée, rétention hydrosodée, dénutrition, hyperkaliémie.<br />

Survie en dialyse<br />

Actuellement, une personne sur 2 qui commence une dialyse<br />

est encore en vie 5 ans plus tard, tous âges confondus (survie<br />

médiane).<br />

Sept personnes de 75 ans ou plus sur 10 ayant commencé<br />

une dialyse sont en vie au bout d’un an.<br />

Neuf personnes sur 10 de moins de 45 ans ayant commencé<br />

une dialyse sont en vie au bout de 5 ans (rapport REIN 2008).<br />

1442<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 60<br />

20 décembre 2010<br />

Qualité de vie<br />

La comparaison avec les données issues de l’enquête décennale<br />

Santé et soins médicaux de l’Insee montre que les insuffisants<br />

rénaux chroniques traités par dialyse ont une moins bonne<br />

qualité de vie que la population générale française.<br />

Les analyses multivariées montrent que les femmes ont une<br />

moins bonne qualité de vie que les hommes, que la qualité de vie<br />

diminue avec l’âge et la durée de dialyse. Les patients inscrits sur<br />

la liste d’attente de greffe ont une meilleure qualité de vie que les<br />

patients noninscrits et les patients en dialyse péritonéale ont une<br />

meilleure qualité de vie que les patients en hémodialyse. •<br />

Remerciements au Pr Marc Froissart et au Pr Luc Frimat<br />

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données publiées<br />

dans cet article.<br />

POUR<br />

EN SAVOIR<br />

LA REVUE DU<br />

PRATICIEN<br />

3 1 D É C E M B R E 2 0 0 5 / T O M E 5 5 N º 2 0<br />

OUVERTURES<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

B Maladie de Willebrand B Études sur les étudiants et les internes B Qu’est-ce qui peut tomber à<br />

Fibrome pleural B Presse : l’examen? B Troubles de la marche et de l’équilibre B Retard de croissance<br />

Risques des hypnotiques après B Lésions dentaires et gingivales B Troubles de la fonction auditive<br />

60 ans • Moins de diabète<br />

chez les femmes qui allaitent DE MÉMOIRE DE MÉDECIN Le paludisme et la grande peur des marais<br />

publication bimensuelle de formation médicale continue<br />

Thevenet M, Juillard L, Fouque D. Conseils diététiques en cas de maladie<br />

rénale chronique. Rev Prat 2009;59:59-60.<br />

Hiesse C. Greffe de rein. Rev Prat 2007;57:269-79.<br />

Laville M. Particularités de l'hypertension artérielle du patient insuffisant rénal.<br />

Rev Prat 2004;54:641-5.<br />

Rapport du registre REIN 2008, Agence de la biomédecine.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

Insuffisance rénale chronique i<br />

chez le sujet âgé<br />

COMMENT RALENTIR SA PROGRESSION? SIO<br />

Monographie<br />

Insuffisance<br />

rénale chronique<br />

chez le sujet âgé<br />

Rev Prat 2005;<br />

55(20):2221-80<br />

Évaluation de la fonction rénale et de la protéinurie pour le diagnostic<br />

de la maladie rénale chronique chez l’adulte. Recommandations pour la<br />

pratique clinique. Néphrologie-Thérapeutique 2009:302-05.<br />

Groupe de travail de la société de néphrologie.<br />

Rapport qualité de vie – REIN volet dialyse 2005 réalisé en collaboration avec<br />

l’Inserm de Nancy et l’InVS.<br />

Livre collection « Réussir l’ECN ». Néphrologie, collège universitaire de<br />

néphrologie- Ellipses éd., 3 e édition.<br />

Les recommandations ANAES 2002 « Diagnostic de l’insuffisance rénale<br />

chronique ».<br />

Les recommandations ANAES 2004 « Moyens thérapeutiques pour ralentir la<br />

progression de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte ».<br />

Les recommandations HAS 2007 « Guide – Affection de longue durée.<br />

Néphropathie chronique grave ».<br />

Les recommandations HAS 2008 « Liste des actes et des prestations –<br />

Affection de longue durée. Néphropathie chronique grave ».


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Jusqu’à la fin du XIX esiècle, la lithiase urinaire<br />

était essentiellement vésicale, consti tuée<br />

de purines et de phosphate de calcium et<br />

touchait principalement les jeunes garçons.<br />

Aujourd’hui, elle est de siège rénal, oxalo-calcique dans près de<br />

80 % des cas et concerne environ 2 hommes pour 1 femme entre<br />

20 et 60 ans. La lithiase rénale est devenue une maladie des<br />

civilisations d’abondance et son incidence est en augmentation<br />

constante dans les pays industrialisés. La prévalence de la lithiase<br />

rénale dans la population générale varie selon les pays (en France<br />

11 %). La colique néphrétique (CNA), 120 000 à 150 000 épisodes<br />

chaque année en France, représente 1 à 2 % des consultations aux<br />

urgences (80 % des CNA sont d’origine lithiasique).<br />

Les avancées technologiques et les découvertes scientifiques<br />

de ces 20 dernières années ont mis à jour un nouvel arsenal thérapeutique,<br />

dominé par la lithotritie extracorporelle et l’endourologie,<br />

qui a supplanté sans concessions la chirurgie à ciel<br />

ouvert et diminué de façon spectaculaire la mortalité et la morbidité<br />

liées à la lithiase. Si les techniques et les indications du traitement<br />

urologique se sont modernisées et affinées, elles n’ont<br />

pas pour autant permis de prévenir la récidive lithiasique. Le coût<br />

engendré par cette prise en charge thérapeutique constitue un<br />

véritable problème de santé publique et est directement lié au<br />

caractère récidivant de la lithiase rénale.<br />

PHYSIOPATHOLOGIE<br />

Un calcul est composé de substances cristallines associées à une<br />

matrice protéique. Ces substances cristallines sont d’origine minérale<br />

(phosphates, oxalates, calcium, phosphates amoniacomagnésiens)<br />

ou organiques (acide urique, cystine).<br />

Lorsque les urines sont sursaturées en substances cristallisables<br />

elles deviennent insolubles et s’associent les unes aux<br />

autres, on parle de nucléation homogène. La taille de la lithiase<br />

dépend de l’importance de cette agrégation.<br />

On parle de nucléation hétérogène lorsque les substances<br />

cristallisables s’associent à des supports différents (cellules, protéines,<br />

autres structures cristallines).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007<br />

Lithiase urinaire<br />

Pr Olivier Traxer<br />

Service d’urologie, hôpital Tenon, 75020 Paris<br />

olivier.traxer@tnn.aphp.fr<br />

Objectifs<br />

I-00-Q000 II-Q259<br />

• Diagnostiquer une lithiase urinaire.<br />

• Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.<br />

Facteurs favorisant les phénomènes<br />

de nucléation-agrégation<br />

1. Augmentation de la concentration urinaire en<br />

substances cristallisables (seuil de solubilité dépassé)<br />

Elle peut être liée à :<br />

— la baisse de la diurèse (urines concentrées) par diminution des<br />

apports liquidiens ou par pertes extrarénales augmentées<br />

(transpiration) ;<br />

— l’augmentation de l’excrétion urinaire de substances cristal -<br />

lisables ;<br />

— la production excessive endogène (acide urique) ;<br />

— l’augmentation des apports exogènes (calcium, bases puriques).<br />

2. Facteurs anatomiques favorisant la stase urinaire<br />

des substances lithogènes<br />

Ce sont :<br />

— les diverticules caliciels, la mégacalicose, les diverticules vésicaux ;<br />

— le rein en fer à cheval, le rein pelvien, la malrotation rénale ;<br />

— la vessie neurologique hypo- ou acontractile ;<br />

— le méga-uretère, l’urétérocèle, le reflux vésico-urétéral ;<br />

— les obstacles cervico-prostatiques responsables de calculs vésicaux<br />

(adénome de la prostate) ;<br />

— la sténose acquise congénitale ou iatrogène de l’arbre urinaire :<br />

syndrome de la jonction pyélo-urétérale, compression ou sténose<br />

urétérale.<br />

3. Facteurs infectieux<br />

Ce sont les germes possédant une uréase (Proteus mirabilis,<br />

Klebsielle, Pseudomonas, staphylocoques) qui favorisent, préférentiellement<br />

en milieu basique, la formation des calculs de phos -<br />

phates amoniaco-magnésiens. Ils sont généralement coralliformes<br />

(en forme de corail moulant la totalité des cavités pyélo-calicielles).<br />

Escherichia coli ne possède pas d’uréase.<br />

1805


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1806<br />

II-Q259<br />

Lithiase urinaire<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

L’urologie n’est pas une spécialité complexe, …<br />

…les enseignants n’attendent pas des étudiants<br />

qu’ils sachent résoudre des énigmes<br />

diagnostiques ou qu’ils mettent en<br />

place des protocoles thérapeutiques compliqués.<br />

On ne demande pas, par exemple,<br />

à un étudiant de proposer un protocole<br />

de chimiothérapie pour un patient<br />

avec une tumeur testiculaire métastasée.<br />

De la même façon, on ne lui demande pas<br />

de faire le diagnostic d’une maladie de<br />

Dent responsable de lithiase rénale. À l’inverse,<br />

les enseignants d’urologie souhaitent<br />

que les étudiants soient capables<br />

de prendre en charge, selon les règles<br />

d’usage, les urgences urologiques et les<br />

pathologies courantes. Le meilleur conseil<br />

que l’on puisse donner à un étudiant est<br />

le suivant : «Soyez et faites simple », ce<br />

que les correcteurs veulent voir dans vos<br />

rédactions de questions, c’est avant tout<br />

du bon sens, de la logique et du sens pratique.<br />

Ils doivent avoir l’impression au travers<br />

de votre rédaction que vous avez déjà<br />

vécu ces situations cliniques et que vous<br />

êtes capables (et que vous SEREZ capables,<br />

une fois nommé) de prendre en<br />

charge ces patients.<br />

Lorsque vous rédigez vos réponses, imaginez<br />

que vous êtes en face d’un véritable<br />

patient, en consultation, aux urgences, ou<br />

en salle lors de la visite. Si vous arrivez à<br />

faire cet effort d’imagination, alors vous<br />

serez capables de réagir avec du sens pratique<br />

: c’est-à-dire avec logique et bon sens<br />

comme vous le faites au quotidien dans<br />

vos stages d’externes. Encore une fois : «<br />

soyez et faites simple ».<br />

Les urgences urologiques sont peu<br />

nombreuses mais leur prise en charge<br />

doit être irréprochable :<br />

La torsion du cordon spermatique<br />

(et non la torsion du testicule !) est<br />

exclusivement chirurgicale : cela sousentend<br />

que l’étudiant doit orienter la<br />

rédaction de son dossier clinique autour<br />

de cet impératif. Il ne demandera donc<br />

pas d’examens complémentaires inutiles,<br />

comme la classique échographie scrotale.<br />

De la même façon le bilan préopératoire<br />

est inutile chez un jeune homme sans<br />

antécédents médico-chirurgicaux qui<br />

consulte pour torsion du cordon<br />

spermatique. De façon générale, il faut<br />

retenir en chirurgie que le bilan<br />

préopératoire doit être motivé et réalisé<br />

en concertation avec l’anesthésiste. C’est<br />

la consultation d’anesthésie préopératoire<br />

qui est systématique et obligatoire, pas le<br />

bilan préopératoire.<br />

L’étudiant prendra soin également de placer<br />

dans une de ses réponses que le<br />

patient sera laissé à jeun (même si un<br />

patient non à jeun sera également opéré<br />

dans cette situation d’urgence), que l’anes -<br />

thésiste sera contacté, de même que le<br />

bloc opératoire. Ne pas oublier l’autorisation<br />

parentale et de prévenir du risque<br />

d’orchidectomie. À l’inverse, si le testicule<br />

doit être sacrifié, n’évoquez pas la cryoconservation<br />

de sperme préopératoire : si<br />

cela part d’un bon sentiment, vous comprendrez<br />

facilement que cela est impossible<br />

en urgence chez un patient qui hurle<br />

de douleur.<br />

La colique néphrétique : il s’agit de<br />

l’urgence urologique la plus fréquente<br />

(120 000 cas annuels). Une fois le<br />

diagnostic de CN affirmé (diagnostic<br />

clinique confirmé par les images<br />

d’échographie rénale), l’étudiant devra<br />

rechercher des signes de complications :<br />

fièvre et/ou anurie. Si tel est le cas, la CN<br />

sera intitulée « CN compliquée », qui<br />

nécessite alors une prise en charge<br />

médico-chirurgicale centrée sur le<br />

drainage des urines, en urgence au bloc<br />

opératoire et sous anesthésie (mêmes<br />

remarques que pour la torsion du<br />

cordon spermatique concernant la prise<br />

en charge au bloc opératoire).<br />

La rétention aiguë d’urines (RAU) :<br />

là encore, faites et soyez simple. Ne<br />

confondez jamais une anurie avec une<br />

rétention aiguë d’urines : il s’agit de deux<br />

pathologies différentes. Un patient en<br />

RAU nécessite avant tout d’être soulagé,<br />

le diagnostic est clinique, ne nécessite<br />

aucun examen complémentaire qui ne<br />

ferait que retarder le drainage des urines.<br />

Pensez toujours que la mise en place<br />

d’une sonde vésicale (et non « urinaire »)<br />

ou d’un cathéter vésical sus-pubien<br />

répond à des règles strictes, en respectant<br />

les indications et les contre-indications<br />

(la prostatite pour le cathéter sus-pubien<br />

par exemple).<br />

Pour ce qui est des pathologies dites<br />

« courantes », l’étudiant doit être capable<br />

de diagnostiquer une hypertrophie bénigne<br />

de la prostate et de mettre en place le<br />

traitement médical de première intention.<br />

Il doit également être capable de parler<br />

des alternatives chirurgicales. De la même<br />

façon, il doit être capable de diagnostiquer<br />

un cancer de la prostate et de proposer un<br />

traitement à visée curative ou un traitement<br />

palliatif, selon l’extension du cancer<br />

(cancer localisé ou métastatique), comme<br />

il doit être apte à diagnostiquer une<br />

incontinence urinaire à l’effort. Enfin, il est<br />

inconcevable de parler d’urologie sans<br />

connaître les « tumeurs de vessie ». Si cet<br />

item n’est pas clairement décrit dans la<br />

liste des questions, il s’intègre de façon<br />

plus générale dans la question « hématurie<br />

» : en clair pas « d’impasse » sur cette<br />

question.<br />

Pour terminer, il est indispensable de rappeler<br />

aux étudiants que le vocabulaire<br />

médical doit être utilisé avec précision :<br />

ainsi, une colique néphrétique répond à<br />

la définition suivante : « douleur rénale par<br />

distension des cavités pyélo-calicielles ».<br />

Cette définition ne présage pas de la cause<br />

de la CN. Il ne faut donc pas penser que<br />

toute CN est en rapport avec un calcul urinaire,<br />

même si les calculs représentent 80 %<br />

des cas. Autre exemple : une « hématurie<br />

initiale » correspond à l’émission de sang<br />

mélangé aux urines en début de miction.<br />

Elle n’a rien à voir avec une uréthrorragie<br />

(émission de sang par l’urèthre en dehors<br />

des périodes mictionnelles). ●<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

4. Influence du pH urinaire<br />

✓ pH acide (5-6), on note la formation de calcul d’acide urique,<br />

d’oxalate de calcium et de cystine.<br />

✓ pH basique, il s’agit de calculs phosphocalciques et infectieux.<br />

Différents types de calculs urinaires<br />

Ils sont :<br />

— calciques dans 80 % des cas (oxalate de calcium mono- ou<br />

dihydraté : 30 %, phosphate de calcium : 10 %, oxalo-phosphocalcique<br />

: 40 %) ;<br />

— phospho-amoniaco-magnésiens dans 10 à 15 % des cas ;<br />

— uriques dans 5 à 10 % des cas ;<br />

— autres (cystinique : 1 %, xanthique, médicamenteux : < 1 %).<br />

DIAGNOSTIC<br />

Diagnostic clinique<br />

Dans la plupart des cas, un calcul urinaire est totalement<br />

asymptomatique, découvert de façon fortuite sur un ASP ou une<br />

échographie demandés pour un autre motif.<br />

Les manifestations cliniques sont multiples, indépendantes<br />

de sa nature physico-chimique.<br />

Il peut se révéler par :<br />

— un syndrome douloureux ;<br />

— une hématurie ;<br />

— une infection urinaire avec risque de septicémie et de choc<br />

septique ;<br />

— une insuffisance rénale aiguë ou chronique ;<br />

— une HTA.<br />

1. Colique néphrétique<br />

C’est un symptôme et non une maladie !<br />

Tout obstacle, quelle que soit sa nature, gênant l’écoulement<br />

des urines peut provoquer une colique néphrétique.<br />

La douleur est classiquement lombaire, unilatérale, par mise<br />

en tension des cavités pyélo-calicielles (CPC) ou de l’uretère en<br />

amont de l’obstacle lithiasique. La forme typique est représentée<br />

par une douleur lombaire, intense, vive, paroxystique, spasmodique,<br />

irradiant en avant, en bas et en dedans, en direction<br />

des organes génitaux externes (correspondant au trajet de l’uretère)<br />

et de la face interne des cuisses, sans position antalgique.<br />

L’agitation des patients est fréquente. Il existe une prédominance<br />

estivale des crises.<br />

Les facteurs favorisants sont : les longs voyages, la restriction<br />

des apports hydriques, la chaleur.<br />

D’autres signes cliniques peuvent s’y ajouter et faire égarer<br />

le diagnostic vers une pathologie digestive : nausées-vomissements,<br />

iléus réflexe et météorisme abdominal, douleurs abdominales<br />

(réaction vagale). Une hématurie macroscopique ou<br />

microscopique peut compléter le tableau (irritation de l’urothélium).<br />

Des signes fonctionnels urinaires (SFU) peuvent être associés :<br />

pollakiurie, dysurie, brûlures mictionnelles. Il existe parfois des<br />

douleurs testiculaires isolées.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

La lithiase urinaire définit la maladie (capacité à faire<br />

des calculs urinaires).<br />

Le calcul urinaire représente l’expression clinique<br />

de la maladie lithiasique.<br />

Pathologie très fréquente : prévalence de 10 à 12 %<br />

dans la population française.<br />

Maladie des pays industrialisés : incidence augmentant<br />

avec le niveau de vie.<br />

Deux hommes pour une femme, essentiellement entre<br />

20 et 60 ans.<br />

Récidive : 40 à 60 % des cas dans les 5 ans et 60 à 80 %<br />

des cas dans les 10 ans.<br />

Prévention de la récidive : mesures hygiéno-diététiques.<br />

La colique néphrétique n’est que l’expression douloureuse<br />

de la lithiase.<br />

« Lithiase » et « CNA néphrétique » ne sont pas<br />

synonymes.<br />

Scanner spiralé sans injection : examen radiologique<br />

de référence.<br />

Analyse morpho-constitutionnelle par spectrophotométrie<br />

infrarouge du calcul.<br />

Enquête métabolique : urines des 24 heures et du réveil<br />

et enquête diététique.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 1844)<br />

Trois situations cliniques représentent une urgence médicochirurgicale<br />

:<br />

— la colique néphrétique fébrile : pyélonéphrite obstructive (à<br />

drainer en urgence) ;<br />

— la colique néphrétique hyperalgique ;<br />

— la colique néphrétique anurique (calculs bilatéraux, ou rein<br />

unique anatomique/fonctionnel).<br />

2. Hématurie<br />

Elle peut être isolée ou accompagner la colique néphrétique.<br />

Elle est micro- ou macroscopique.<br />

Il faut toujours rechercher une hématurie microscopique à la<br />

bandelette urinaire (sensibilité de 95 %).<br />

Le plus souvent, elle est intermittente, augmentée par la mobilisation<br />

et liée à l’irritation de l’urothélium par la lithiase.<br />

Lorsqu’elle est macroscopique, elle est généralement totale,<br />

parfois terminale (calcul vésical).<br />

3. Infection<br />

Il peut s’agir :<br />

— de bactériurie asymptomatique, de pyurie ;<br />

— d’une authentique cystite, parfois récidivante (calcul vésical) ;<br />

— d’une pyélonéphrite aiguë (urgence imposant le drainage des<br />

R Q 259<br />

1807


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Figure 1<br />

urines au plus vite) liée à la stase d’urines infectées en amont<br />

d’un obstacle : on parle de pyélonéphrite obstructive ou de colique<br />

néphrétique aiguë fébrile.<br />

4. Autres modes de révélation<br />

L’insuffisance rénale peut être aiguë ou chronique, développée<br />

alors à bas bruit.<br />

La découverte de la lithiase dans le cadre d’une hypertension<br />

artérielle (HTA) signe souvent la destruction à bas bruit du rein<br />

par la lithiase, à l’origine de l’HTA.<br />

Enfin, une anurie calculeuse est une urgence.<br />

5. Forme asymptomatique<br />

Dans la majorité des cas, les calculs urinaires sont asymptomatiques.<br />

Découverts sur un abdomen sans préparation ou au cours<br />

d’une échographie abdominale, ou sur un examen systématique<br />

des urines à la bandelette urinaire (fréquent en médecine du travail).<br />

Les calculs coralliformes, souvent volumineux, sont paradoxa -<br />

lement souvent asymptomatiques, car développés à bas bruit<br />

sur de longues périodes.<br />

Diagnostic radiologique<br />

1. Abdomen sans préparation (ASP) [fig. 1]<br />

Il recherche un calcul : image radio-opaque ou faiblement<br />

radio-opaque (90 % des cas).<br />

Il localise le calcul :<br />

— soit dans l’aire rénale : l’ombre rénale est visible sur l’ASP de<br />

D12 à L3, le hile rénal se projetant à hauteur de L1-L2, le rein gauche<br />

est anatomiquement plus haut que le droit (foie) ;<br />

— soit sur le trajet urétéral : l’uretère lombaire est vertical, croisant<br />

les apophyses transverses de L3-L4-L5 ; l’uretère iliaque<br />

passe en avant de l’aileron sacré, en dedans de l’articulation<br />

sacro-iliaque ; l’uretère pelvien est convexe en dehors et rejoint<br />

la vessie en s’incurvant vers la ligne médiane en regard des<br />

épines sciatiques ;<br />

— soit dans l’aire vésicale : centre du pelvis, à différencier d’un<br />

fibrome calcifié de l’utérus.<br />

1808<br />

II-Q259<br />

ASP calcul lombaire.<br />

Lithiase urinaire<br />

Figure 2<br />

Calcul pelvien (C) - phlébolite (P).<br />

Au niveau pelvien, il faut différencier les calculs des phlébolites<br />

qui eux sont multiples, bilatéraux, ronds, à centre clair et<br />

situés sur les axes vasculaires (fig. 2).<br />

Les clichés de trois quarts permettent de dégager l’uretère<br />

iliaque du cadre osseux.<br />

Les calculs d’acide urique et les xanthiques sont radiotransparents<br />

donc non visibles sur l’ASP.<br />

Figure 3 Échographie rénale : dilatation des cavités pyélocalicielles<br />

(rein gauche).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007


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Figure 4 UIV : calcul lombaire (flèche rouge) et dilatation<br />

Figure 5 Scanner spiralé sans injection. Calcul.<br />

des cavités pyélo-calicielles sus-jacentes (flèche bleue).<br />

2. Échographie réno-vésicale (fig. 3)<br />

Elle recherche une éventuelle dilatation des CPC témoin d’un<br />

obstacle. La différence entre une dilatation des CPC et une hypotonie<br />

des CPC (sans obstacle) ou une mégacalicose est parfois<br />

difficile à faire pour l’échographiste. De même, un kyste parapyélique<br />

peut en imposer pour une dilatation des CPC.<br />

À l’inverse, il existe des situations où l’obstruction n’entraîne<br />

pas de dilatation : CPC intrasinusales.<br />

On a l’habitude de dire que « dilatation » et « obstruction »<br />

ne sont pas synonymes.<br />

Elle détecte les calculs à partir de 3-4 mm de diamètre. Elle<br />

localise le calcul dans les calices, le pyélon, l’uretère lombaire<br />

proximal, ou la vessie. Elle n’est pas performante pour la localisation<br />

urétérale (lombaire et iliaque) en dehors de la localisation<br />

pelvienne juxta-méatique (vessie pleine : fenêtre acoustique).<br />

Elle visualise les calculs sous la forme d’une image hyperéchogène<br />

avec cône d’ombre postérieur (vide d’échos). Elle en note le nombre.<br />

Elle mesure l’épaisseur des deux reins à la recherche d’un retentissement<br />

sur le parenchyme rénal (cortex aminci).<br />

Elle permet le bilan du rein controlatéral.<br />

Elle recherche une lame d’épanchement péri-rénal en faveur<br />

d’une rupture de fornix.<br />

Elle fait le bilan de la cavité abdominale en cas de doute diagnostique.<br />

3. Urographie intraveineuse (UIV) [fig. 4]<br />

C’était l’examen de référence avant l’avènement du scanner<br />

hélicoïdal sans injection.<br />

Il est cependant très intéressant chez un patient lithiasique<br />

d’avoir dans son dossier médical une UIV pour connaître l’anatomie<br />

de ses voies excrétrices. Si l’UIV date de quelques années<br />

elle est suffisante et n’est pas demandée à nouveau. On cherche<br />

surtout à éliminer une anomalie anatomique qui pourrait favoriser<br />

la lithiase rénale et gêner le traitement d’un éventuel calcul. Si<br />

aucune UIV n’est disponible, il est recommandé de la prescrire<br />

sans urgence dans le cadre du bilan diagnostique ou étiologique<br />

de la maladie lithiasique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007<br />

Elle peut être fonctionnellement et morphologiquement<br />

normale, elle élimine alors le diagnostic.<br />

Au moment de la crise, on ne demande plus la réalisation<br />

d’une UIV. Aujourd’hui, si une opacification de la voie excrétrice<br />

est nécessaire, on demande un uroscanner. Lorsque l’UIV était<br />

réalisée, au moment de la CNA, elle objectivait les signes radiologiques<br />

suivants :<br />

— un retard de sécrétion du produit de contraste homolatéral au<br />

côté douloureux ;<br />

— une dilatation des cavités pyélo-calicielles (CPC) ;<br />

— un obstacle radio-opaque sur lequel s’arrête la colonne de produit<br />

de contraste.<br />

Ou un obstacle radiotransparent sous la forme d’une lacune<br />

entourée de produit de contraste.<br />

4. Scanner abdomino-pelvien (fig. 5)<br />

Il est de plus en plus souvent demandé dans le bilan de la<br />

lithiase urinaire et s’affiche désormais comme l’examen de référence<br />

pour la pathologie lithiasique avec une sensibilité et une<br />

spécificité de près de 100 %.<br />

Il visualise la quasi-totalité des calculs en précisant : nombre,<br />

localisation et retentissement.<br />

Couplé à une injection de produit de contraste, il renseigne<br />

sur la valeur fonctionnelle des deux reins et quelques clichés<br />

d’UIV peuvent être réalisés en fin d’injection (uroscanner) afin<br />

de préciser l’anatomie de la voie excrétrice : l’uroscanner remplace<br />

desormais l’UIV.<br />

Il permet également de prédire la nature du calcul et peut parfois<br />

aider pour le diagnostic différentiel d’un calcul radiotransparent<br />

et d’une tumeur urothéliale :<br />

— la densité d’un calcul d’acide urique au scanner est de 500 unités H ;<br />

— la densité d’une tumeur urothéliale est de 20 unités H ;<br />

— la densité d’un calcul de tonalité calcique est de 1000 unités H.<br />

Examens biologiques<br />

Il faut rechercher une infection associée à la lithiase par la<br />

réalisation d’un ECBU, et explorer la fonction rénale par le dosage<br />

de la créatinine sanguine.<br />

R Q 259<br />

1809


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La mesure du pH urinaire se fait 3 fois par jour à l’aide de bandelettes<br />

urinaires ou de papier pH.<br />

Si le calcul est récupéré il est analysé par spectrophotométrie<br />

infrarouge (seule méthode valable) permettant d’analyser la<br />

nature cristalline des calculs :<br />

— struvite : cristaux de phosphates amoniaco-magnésiens ;<br />

— whewellite : oxalate de calcium mono-hydraté ;<br />

— weddellite : oxalate de calcium di-hydraté ;<br />

— hydroxy-apatite et carbapatite : phosphate de calcium ;<br />

— cystine : cystinurie.<br />

La chromatographie des acides aminés urinaires permet d’authentifier<br />

la présence de cystine, et la réaction de Brandt dans<br />

les urines en cas de cystinurie.<br />

Le bilan métabolique de première intention figure dans les<br />

tableaux 1 et 2.<br />

Tableau 1<br />

1810<br />

II-Q259<br />

Urines des 24 h<br />

(samedi au dimanche soir)<br />

Lithiase urinaire<br />

Examens de première intention<br />

Sang<br />

(lundi matin)<br />

Urines du réveil<br />

(lundi matin)<br />

❚ créatinine ❚ créatinine ❚ densité<br />

❚ calcémie ❚ calcium ❚ pH par pHmétrie<br />

❚ acide urique ❚ acide urique ❚ cristallurie<br />

❚ urée ❚ bandelette urinaire<br />

❚ sodium et/ou ECBU<br />

❚ volume<br />

Tableau 2<br />

Interprétation des examens<br />

de première intention<br />

PARAMÈTRES SEUIL ORIENTATION ÉTIOLOGIQUE<br />

Calcémie > 2,61 mmol/L ❚ hyperparathyroïdie primaire<br />

❚ sarcoïdose<br />

❚ intoxication à la vitamine D<br />

❚ myélome<br />

❚ syndrome paranéoplasique<br />

Calciurie > 0,1 mmol/kg/j<br />

(> 4 mg/g/j)<br />

❚ hypercalciurie de débit<br />

> 3,8 mmol/L ❚ hypercalciurie de concentration<br />

Uricurie > 5 mmol/j ❚ hyperuricurie de débit<br />

> 2,5 mmol/L ❚ hyperuricurie de concentration<br />

Urée urinaire > 5,5 mmol/kg/j ❚ apport en protéines > 1 g/kg/j<br />

Natriurèse > 150 mmol/j ❚ apports en sel > 9 g/j<br />

Diurèse < 2 litres/j ❚ dilution insuffisante<br />

Densité > 1 025 g/L ❚ diurèse nocturne insuffisante<br />

PH > 6,5 ❚ acidose tubulaire distale<br />

❚ lithiase phosphocalcique<br />

❚ lithiase d’infection (uréase)<br />

< 5,2 ❚ lithiase urique ou oxalo-urique<br />

ETIOLOGIE<br />

Lithiase phospho-calcique<br />

1. Aspect radiologique<br />

Le calcul est radio-opaque de tonalité calcique.<br />

Il figure parmi les plus radio-opaques.<br />

2. Aspect macroscopique<br />

Il est jaune clair à brun, ovale ou rond.<br />

3. Aspect physico-chimique des urines<br />

Il existe un excès d’excrétion de calcium, de phosphates, d’oxalates,<br />

un pH alcalin et un déficit en citrates urinaires et inhibiteurs<br />

de la cristallisation calcique.<br />

4. Étiologie<br />

On parle d’hypercalciurie si la calciurie est 0,1 mmol/kg/j<br />

ou 4 mg/kg/j si les apports calciques sont de 1000 mg/j ou pour<br />

une calciurie 0,07 mmol/kg/j ou 3 mg/kg/j si les apports<br />

calciques sont de 400 à 500 mg/j. Elle peut être primaire ou<br />

secondaire (v. encadré 1).<br />

Il existe des formes d’hypercalciurie idiopathique.<br />

5. Traitement<br />

✓ Les mesures générales sont (tableau 3) :<br />

— boissons abondantes, au moins deux litres par jour d’une eau<br />

pauvre en calcium (Volvic) ;<br />

— limitation de la ration calcique en cas d’apport important (2 à<br />

3 produits laitiers/j) ;<br />

— limitation des apports en oxalates (chocolat, thé, poivre…) ;<br />

— limitation des apports en protéines animales : 1 g/kg de poids /j ;<br />

— diminution de l’apport sodique : 5 g/j ;<br />

— régimes riches en fibres naturelles qui complexent le calcium<br />

dans le tube digestif (acide phytique) et limitent son absorption.<br />

— éviter les traitements à base de vitamine D.<br />

✓ Le traitement spécifique en cas d’hypercalciurie secondaire est<br />

la calcitonine qui diminue l’hypercalciurie liée à la lyse osseuse<br />

dans les immobilisations prolongées.<br />

✓ Le traitement préventif est assuré par les diurétiques thiasidiques<br />

(effet hypocalciuriant par réabsorption tubulaire du calcium) :<br />

Esidrex 25 à 50 mg/j.<br />

Lithiases d’oxalate de calcium<br />

1. Aspects radiologique et macroscopique<br />

La lithiase est radio-opaque.<br />

Les calculs d’oxalate de calcium mono-hydratés (whewellite)<br />

sont plus denses, moins friables, de couleur noire, lisses et durs.<br />

Sur l’ASP ils apparaissent arrondis, homogènes et de densité<br />

supérieure à celle de la dernière côte, plus fréquemment situés<br />

au niveau de l’uretère pelvien.<br />

Les calculs d’oxalate de calcium di-hydratés (weddellite) sont<br />

moins radio-opaques, plus friables, de couleur jaune et spiculés.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007


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Sur l’ASP ils apparaissent spiculés, hétérogènes et de densité<br />

égale ou inférieure à celle de la côte, plus fréquemment situés<br />

au niveau de l’uretère lombaire.<br />

2. Caractéristiques physico-chimiques des urines<br />

Elles sont comparables à celles de la lithiase phosphocalcique<br />

en dehors du pH urinaire qui est plus acide.<br />

L’hyperuricosurie intervient dans la formation des calculs<br />

oxalo-calciques.<br />

Une hyperoxalurie est parfois associée, ainsi qu’une hypercalciurie.<br />

L’urée urinaire est élevée (témoin de la consommation excessive<br />

en protéines animales) et la natriurèse aussi (témoin de la<br />

consommation excessive en sel alimentaire).<br />

3. Étiologie<br />

Ce sont :<br />

— l’hypercalciurie primaire ou secondaire, de débit ou de concentration<br />

;<br />

— l’hyperoxalurie endogène ou d’origine alimentaire de débit ou<br />

de concentration (v. encadré 2) ;<br />

— la consommation excessive de protéines animales et de sel ;<br />

— l’hyperuricémie-uricurie ;<br />

— la diurèse insuffisante.<br />

4. Traitement<br />

✓ Les mesures générales sont :<br />

— celles de la lithiase phosphocalcique ;<br />

— un régime pauvre en oxalates (suppression du thé, de l’oseille,<br />

de la rhubarbe, des épinards, du chocolat [cacao]) ;<br />

— la suppression de l’eau de Vichy, de l’eau de Badoit ;<br />

— la normalisation de la prise de produits laitiers : 2 à 3 par jour<br />

(laitages, fromages).<br />

✓ Dans l’oxalose primaire de type I, le traitement est la transplantation<br />

hépato-rénale.<br />

✓ Le traitement d’une malabsorption digestive et d’une hypercalciurie<br />

éventuelle associée peut être nécessaire.<br />

Par hyperrésorption osseuse :<br />

– hyperparathyroïdie primaire, immobilisation<br />

prolongée (ostéopathie décalcifiante),<br />

syndrome de Cushing, hyper -<br />

thyroïdie, myélome, métastases osseuses.<br />

L’hyperparathyroïdie primaire se caractérise<br />

par une hypercalcémie (calcium ionisé),<br />

liée à la résorption osseuse induite par<br />

l’hormone parathyroïdienne, et une hypophosphorémie<br />

liée à la diminution de la<br />

réabsorption des phosphates ;<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007<br />

Tableau 3<br />

Règles diététiques à respecter<br />

pour la maladie lithiasique rénale<br />

Boissons 2,5 à 3 litres par jour, répartis sur la journée<br />

Calcium 800 à 1 000 mg /j<br />

Protéines 1 g/kg de poids/j<br />

Sel 3 à 5 g/j, ne jamais ajouter de sel<br />

Oxalate éviter les aliments riches en oxalate : chocolat +++<br />

Acide Urique éviter les aliments riches en purines<br />

Sucres éviter les sucres rapides, bonbons et pâtisseries<br />

Fibres augmenter l’apport en fibres alimentaires<br />

Ces règles diététiques doivent être simples et faciles à appliquer<br />

Elles doivent être respectées à vie<br />

Elles sont inutiles si la diurèse quotidienne de 2 litres<br />

n’est pas obtenue<br />

BOIRE BEAUCOUP, MANGER MIEUX et MANGER MOINS sont les mesures<br />

indispensables pour la prévention de la récidive lithiasique<br />

Lithiase urique<br />

1 / CAUSES DES HYPERCALCIURIES SECONDAIRES<br />

– la calciurie des 24 h est normale ou augmentée,<br />

la phosphaturie des 24 h est élevée.<br />

Le diagnostic est affirmé sur l’élévation du<br />

taux de PTH plasmatique (dosage radioimmunologique)<br />

et sur l’augmentation du<br />

taux d’AMP cyclique urinaire (sécrété par<br />

les cellules tubulaires proximales).<br />

Par hyperabsorption digestive :<br />

– excès d’apport alimentaire ;<br />

– intoxication à la vitamine D ;<br />

1. Aspects radiologique et macroscopique<br />

Le calcul est radio-transparent à l’état pur sur l’ASP, toujours<br />

visible sur un scanner sans injection. Il est faiblement radioopaque<br />

en cas de calcification secondaire (20 % des cas) et de<br />

couleur jaune ou ocre à gris beige ou brun orangé.<br />

2. Caractéristiques physico-chimiques des urines<br />

L’acide urique est le produit du métabolisme des bases<br />

puriques dont la solubilité urinaire dépend du pH.<br />

Lorsque le pH urinaire est acide (5-6) on note la cristallisation<br />

de l’acide urique.<br />

Une uricosurie supérieure à 750-800 mg/j dans les urines<br />

chez l’homme et 700-750 chez la femme est favorisante.<br />

– syndrome de Burnett (excès de lait et<br />

d’alcalin chez les patients porteurs d’ulcère<br />

gastro-duodénal) ;<br />

– sarcoïdose ;<br />

– déplétion phosphorée par l’utilisation<br />

d’anti-acides.<br />

Par défaut de réabsorption<br />

tubulaire du calcium :<br />

– acidose tubulaire de type II ;<br />

– maladie de Cacchi Ricci.<br />

R Q 259<br />

1811


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

1812<br />

II-Q259<br />

Lithiase urinaire<br />

3. Étiologie<br />

Elle est prédominante chez l’homme (50 ans), et de croissance<br />

rapide :<br />

✓ L’augmentation de l’excrétion sans augmentation de synthèse<br />

de l’acide urique (uricémie normale) peut être idiopathique ou<br />

d’origine médicamenteuse : salicylés, phénylbutazone, acide tiénilique<br />

(Diflurex).<br />

✓ Augmentation des apports alimentaires de purines à travers les<br />

abats, le thymus, le ris de veau.<br />

✓ Antécédents personnels ou familiaux de crise de goutte.<br />

✓ L’augmentation du catabolisme endogène des acides nucléiques<br />

est retrouvée dans les syndromes lympho- ou myéloprolifératifs,<br />

la chimiothérapie (lyse cellulaire massive avec risque de précipitation<br />

acide urique dans les deux voies excrétrices : colique<br />

néphrétique bilatérale avec anurie).<br />

✓ La synthèse excessive d’acide urique entre dans le cadre d’une<br />

enzymopathie : hyperactivité de la PRPP synthétase, Lesh-Nyhan<br />

(déficit en HGPRT).<br />

4. Traitement<br />

✓ Les mesures générales sont :<br />

— l’arrêt des médicaments uricosuriques : diurétiques thiazidiques,<br />

aspirine ;<br />

— une diurèse abondante alcaline : eau de Vichy (eau salée à éviter<br />

en cas d’hypertension artérielle). Il faut conseiller le vichy<br />

Célestin plus que le Saint-Yorre, car la quantité de fluor est<br />

moins importante dans le Célestin : de manière générale, il ne<br />

faut jamais prendre plus de 1,5 litre de vichy par jour (risque de<br />

fluorose osseuse). Au besoin, compléter par d’autres agents<br />

alcalinisants ;<br />

— l’alcalinisation des urines par le citrate de potassium : en préparation<br />

officinale (sachet de 6 à 8 g, 1 fois/j dilué dans un litre<br />

d’eau peu minéralisée : Volvic) ou Alcaphor 1 à 4 cuillères à<br />

soupe/jour ou Foncitril 4 000 (citrate de sodium et de potassium) :<br />

2 à 4 sachets/jour, ou bicarbonate de sodium (attention au sel)<br />

1 à 3 cuillères à soupe/jour, associée à une diurèse de 2 litres<br />

(boissons entre 2 et 3 litres) ; pour mémoire, le jus d’orange est<br />

conseillé pour alcaliniser les urines : deux verres par jour (mais<br />

attention au sucre). Le jus d’orange est une source naturelle de<br />

citrate, et ne contient que peu de vitamine C (65 mg dans deux<br />

verres) ;<br />

— le contrôle du pH urinaire 3 fois/j par bandelette urinaire ou<br />

papier pH (moins onéreux) et consigner les résultats sur un petit<br />

carnet (pH et volume urinaire).<br />

La quantité d’alcalinisant urinaire et de boissons est à adapter<br />

aux résultats du pH et du volume de la diurèse de chaque patient :<br />

il n’y a pas de règles strictes de prescription.<br />

✓ La lutte contre l’hyperuricurie passe par :<br />

— la suppression des abats : rognons, tripes, foie ;<br />

— la suppression des charcuteries, du gibier, des crustacés et de<br />

l’alcool ;<br />

— éviter les légumes secs : lentilles, pois, haricots blancs ;<br />

— un traitement médicamenteux : allopurinol (Zyloric) : 100 à<br />

300 mg/j ;<br />

CAUSES D’HYPEROXALURIE<br />

Oxalose primaire de type I<br />

Par déficit en alanine glyoxylate amino-transférase que l’on<br />

peut mettre en évidence sur une biopsie hépatique.<br />

Maladie héréditaire rare autosomique récessive. Elle<br />

aboutit à une néphrocalcinose dès l’enfance par formation<br />

de calculs d’oxalate de calcium multirécidivants et à l’insuf -<br />

fisance rénale dès l’adolescence. Maladie très rare.<br />

Hyperoxalurie secondaire à une malabsorption<br />

des graisses<br />

Augmentation de l’absorption colique de l’oxalate alimentaire<br />

resté libre dans la lumière digestive, car non complexé<br />

par le calcium et le magnésium, ces deux cations étant retenus<br />

par les micelles d’acides gras plus abondants du fait de<br />

la malabsorption. Elle se rencontre dans les pancréatites, la<br />

maladie de Crohn, dans les résections étendues du grêle,<br />

les by-pass intestinaux, la maladie cœliaque.<br />

Hyperoxalurie d’origine alimentaire<br />

Plus de 5 grammes par jour (consommation excessive de<br />

chocolat, cure de vitamine C, thé, poivre, noix-noisettes,<br />

rhubarbe, oseille, épinards…).<br />

Hyperoxalurie idiopathique<br />

— un traitement spécifique d’un syndrome myélo- ou lymphoprolifératif<br />

;<br />

— un traitement adjuvant des chimiothérapies par Fasturtec.<br />

La dissolution est obtenue dans plus de 80 % des cas en moins<br />

de 3 mois.<br />

En cas de traitement urgent, la mise en place d’une sonde<br />

urétérale ou d’une néphrostomie et l’alcalinisation des CPC par<br />

irrigation de bicarbonates à 14 ‰ sous contrôle du pH urinaire<br />

et du ionogramme sanguin est possible.<br />

Lithiase phospho-ammoniacomagnésienne<br />

Appelée également struvite, elle est rarement pure, souvent<br />

associée à des sels calciques indépendants de l’infection (oxalate<br />

de calcium, phosphate de calcium), ou infectieux-dépendant<br />

(carbapatite).<br />

Elle est prédominante chez la femme (80 %), favorisée par<br />

l’infection urinaire à germes uréase + : Proteus mirabilis dans<br />

60 % des cas (Escherichia coli n’en possède pas).<br />

1. Aspects radiologique et macroscopique<br />

De tonalité calcique, moulant les CPC, elle est souvent volumineuse,<br />

bilatérale et coralliforme : « calculs complexes du rein »<br />

est une meilleure appellation que coralliforme.<br />

Elle se présente parfois sous forme de strates concentriques,<br />

et est de couleur blanchâtre à brun.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007


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2. Caractéristiques physico-chimiques des urines<br />

Le pH est alcalin (supérieur à 7) et il existe une augmentation<br />

de la concentration en ions NH4, liée à l’activité uréase + des<br />

bactéries.<br />

3. Étiologie<br />

La formation de ces calculs est satellite d’infections urinaires<br />

à germes uréase + (Proteus mirabilis, Providencia, Klebsielles,<br />

Pseudomonas, Ureaplasma urealyticum, Corynebacterium D2,<br />

staphylocoques blancs).<br />

Il existe un rôle non négligeable d’uropathie malformative<br />

associée, de vessie neurologique ou d’obstacle acquis.<br />

4. Traitement<br />

✓ Mesures générales. Il s’agit :<br />

— de boissons abondantes (éviter les boissons alcalines) ;<br />

— de l’acidification des urines (difficile à maintenir) ;<br />

— du traitement d’une infection urinaire associée (primordial) ;<br />

— du traitement d’une anomalie urologique.<br />

✓ Le traitement chirurgical ou par lithotritie extracorporelle se fait<br />

toujours sous couverture antibiotique.<br />

Lithiase cystinique<br />

Elle concerne 1 % des lithiases. C’est une maladie génétique<br />

nécessitant conseil génétique et arbre généalogique.<br />

La notion d’antécédents familiaux et début précoce à la<br />

puberté est évocatrice.<br />

1. Aspects radiologique et macroscopique<br />

Les calculs sont bilatéraux (65 %), multiples, faiblement radioopaques<br />

en « taches de bougie ».<br />

Le caractère récidivant est retrouvé dans 95 % des cas.<br />

Le calcul est ovale, sphérique ou polyédrique, de couleur jaune<br />

brillant (caractéristique).<br />

2. Caractéristiques physico-chimiques des urines :<br />

Il existe une sursaturation des urines en cystine : supérieure<br />

à 1 250 micromol/L ou 300 mg/L.<br />

Le pH acide favorise la cristallisation, le pH alcalin la solubilité.<br />

3. Étiologie<br />

La cystinurie, tubulopathie héréditaire est caractérisée par<br />

un défaut de transport des acides aminés dibasiques. La cystine<br />

n’est pas réabsorbée par les cellules tubulaires rénales et est très<br />

faiblement soluble dans les urines.<br />

C’est la maladie génétique lithogène la plus fréquente (incidence<br />

1 pour 20 000 naissances), concernant 7 000 individus en<br />

France.<br />

La transmission sur le mode autosomique récessif et l’âge<br />

moyen au moment du diagnostic est de 23 ans.<br />

Le diagnostic se fait sur la chromatographie des acides aminés<br />

urinaires et sur la réaction de Brandt détectant la cystine<br />

urinaire. La réaction de Brandt colore les urines en pourpre par<br />

le nitroprussiate de Na+ en présence de cystine.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 OCTOBRE 2007<br />

4. Traitement<br />

Une diurèse alcaline abondante permet d’atteindre un pH<br />

optimum de 7,5 à 8 (v. lithiase urique) et un volume des urines<br />

supérieur à trois litres par jour.<br />

Le régime pauvre en méthionine, précurseur de la cystine, est<br />

difficile à maintenir du fait des contraintes diététiques et du risque<br />

de dénutrition.<br />

La prescription de médicaments thiolés favorise la solubilité<br />

urinaire de la cystine : Lopril, D-pénicillamine (Trolovol 1,5 g/j),<br />

se liant à la cystine pour former un complexe soluble. Il faut se<br />

méfier du risque d’agranulocytose sous Trolovol et associer alors<br />

de la vitamine B6 (50 mg/j).<br />

La cystinurie doit être maintenue en dessous de 200 micromol/L.<br />

Lithiase medicamenteuse<br />

Certaines molécules sont susceptibles de précipiter ellesmêmes<br />

dans les urines et de former les calculs. C’est le cas du<br />

triamtérène (Teriam), de l’allopurinol (Zyloric), des sulfamides<br />

(Bactrim), de l’amoxicilline (Clamoxyl), de l’indinavir (Crixivan)<br />

dans les trithérapies pour HIV.<br />

ÉVOLUTION ET PRONOSTIC<br />

L’évolution est simple dans le cas le plus fréquent, l’élimination<br />

du calcul se faisant spontanément. Le calcul restant asymptomatique,<br />

c’est le cas de la majorité des calculs caliciels.<br />

Complications mécaniques<br />

C’est la colique néphrétique : obstacle incomplet avec retentissement<br />

rénal à bas bruit aboutissant à un petit rein détruit.<br />

L’anurie calculeuse sur rein unique anatomique ou fonctionnel<br />

ou sur exceptionnelle lithiase bilatérale (acide urique) est une urgence.<br />

La rupture de la voie excrétrice correspond à la rupture de<br />

fornix au contact du calcul.<br />

Complications infectieuses<br />

Elles sont concomitantes ou non d’une colique néphrétique :<br />

— bactériurie asymptomatique (ne pas traiter) ;<br />

— infection urinaire basse (cystite sur calcul de vessie) ;<br />

— pyélonéphrite imposant le drainage des urines en urgence :<br />

il s’agit alors d’une pyélonéphrite sur obstacle ;<br />

— septicémie et choc septique à germes d’origine urinaire (gravis -<br />

sime) ;<br />

— pyélonéphrite xanthogranulomateuse ;<br />

— nécrose papillaire.<br />

Autres complications<br />

Ce sont :<br />

— l’hématurie ;<br />

— l’insuffisance rénale ;<br />

— l’hypertension artérielle ;<br />

— la récidive : 50 % des cas à 5 ans et 70 % des cas à 10 ans, en<br />

cas d’anomalies anatomiques et essentiellement biologiques persistantes<br />

: la lithiase rénale est une maladie, le calcul n’est que<br />

R Q 259<br />

1813


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Figure 6<br />

la traduction clinique de cette maladie. Il peut s’agir de la persistance<br />

d’un facteur exogène. Elle est possible y compris lorsque le<br />

bilan initial n’a retrouvé aucune cause (situation très rare : une<br />

anomalie métabolique est retrouvée chez plus de 95 % des<br />

patients et l’hypercalciurie est l’anomalie métabolique la plus<br />

fréquente retrouvée chez plus de 40 % des patients avec calculs<br />

calciques).<br />

1814<br />

II-Q259<br />

TRAITEMENT<br />

Lithiase urinaire<br />

Lithotritie extracorporelle.<br />

Figure 7 ASP : volumineux calcul complexe du rein droit extrait<br />

par néphrolithotomie percutanée.<br />

Il est symptomatique et étiologique, il concerne le calcul et ses<br />

complications.<br />

Les boissons abondantes (> 2 L par jour) représentent le traitement<br />

préventif le mieux adapté quel que soit le type de lithiase.<br />

Traitement symptomatique<br />

Il fait appel aux AINS, aux antispasmodiques, aux antalgiques<br />

simples associés au repos. la restriction hydrique n’est pas obligatoire,<br />

les boissons sont autorisées en fonction de la soif.<br />

Traitement spécifique en fonction de la nature chimique de<br />

la lithiase (v. étiologie)<br />

Traitement des complications<br />

Il s’agit de la colique néphrétique et de la pyélonéphrite aiguë :<br />

voir question spécifique.<br />

Figure 8<br />

Calcul corraliforme extrait par chirurgie à ciel ouvert.<br />

Figure 9 Drainage des urines : sonde double J (1), sonde<br />

urétérale (2), sonde de néphrostomie (3).<br />

Traitement du calcul<br />

1. Lithotriteurs et lithotritie extracorporelle<br />

La lithotritie extracorporelle (LEC) a plus de 25 ans. Elle permet<br />

le traitement de plus de 80 % des calculs, quelle que soit<br />

leur localisation. Le but est d’obtenir la fragmentation du calcul<br />

et son élimination par les voies naturelles. Tous les lithotriteurs<br />

sont conçus sur le même principe et possèdent un système de<br />

repérage et un générateur d’ondes de choc (fig. 6).<br />

Le repérage est échographique et/ou radiologique. La réussite<br />

de la LEC dépend de la qualité du repérage.<br />

Il existe plusieurs types d’ondes de choc différents mais la<br />

majorité des appareils utilisent les ondes de choc électrohydrauliques<br />

ou électromagnétiques. Les ondes de choc produites<br />

sont des ondes acoustiques de pression de forte puissance.<br />

Les contre-indications de la LEC sont l’infection urinaire non<br />

traitée, les troubles de l’hémostase (risque d’hématome rénal,<br />

hématurie) et/ou les traitements par anticoagulants per os, ou<br />

anti-agrégants plaquettaires, ainsi que la grossesse, en raison du<br />

risque de lésions fœtales.<br />

2. Urétéroscopie<br />

Une urétéroscopie est un acte endoscopique qui se réalise au<br />

bloc opératoire sous anesthésie. Le but est de traiter un calcul<br />

localisé dans l’uretère en le fragmentant grâce à des ondes de<br />

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Figure 10<br />

Sondes de néphrostomie bilatérale.<br />

choc (ultrasons ou ondes laser) et de retirer les fragments à l’aide<br />

de pinces. Les urines doivent être stériles (ECBU 1 semaine).<br />

3. Néphrolithotomie percutanée<br />

Le principe de la néphrolithotomie percutanée (NLPC) est de<br />

créer un tunnel dans la fosse lombaire pour extraire les calculs<br />

volumineux situés dans les CPC du rein (fig. 7).<br />

7 % des calculs urinaires sont actuellement traités par NLPC<br />

(environ 2 500 actes par an en France). La NLPC est réalisée<br />

sous anesthésie générale au bloc opératoire.<br />

4. Chirurgie a ciel ouvert<br />

Les indications de la chirurgie à ciel ouvert sont désormais<br />

rares, voire exceptionnelles (< 1 %) [fig. 8].<br />

5. Indications<br />

✓ Elles dépendent :<br />

— des caractéristiques du calcul : nombre, taille, localisation, composition<br />

et dureté prévisibles ;<br />

— des caractéristiques de la voie excrétrice : anomalie anatomique<br />

associée, dilatation, sténose ;<br />

— des caractéristiques du patient : âge, poids, morphotype, état<br />

général, traitement anticoagulant ;<br />

— des impératifs du patient ;<br />

— du plateau technique et des habitudes de l’opérateur.<br />

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✓ Calculs du rein :<br />

— calcul unique 20 mm : LEC ;<br />

— calcul unique 20 mm : NLPC ;<br />

— calculs ramifiés complexes ou coralliformes : NLPC complétée<br />

par LEC.<br />

✓ Calculs urétéraux :<br />

Le calcul urétéral obstructif est une urgence : il faut drainer<br />

les urines par une sonde urétérale ou une sonde double j, en cas<br />

d’échec par une sonde de néphrostomie (fig. 9 et 10). Le calcul<br />

est traité en différé.<br />

En dehors de l’urgence, l’expulsion spontanée concerne 70 %<br />

des calculs pelviens < à 5 mm.<br />

Calcul uretère lombaire de 6 à 15 mm : LEC. En cas d’échec :<br />

urétéroscopie.<br />

Calcul uretère iliaque de 6 à 15 mm : LEC ou urétéroscopie.<br />

Calcul urétéral supérieur à 15 mm de diamètre (lombaire ou<br />

iliaque) : l’urétéroscopie, souple ou rigide, est indiquée en première<br />

intention en fonction de la localisation du calcul.<br />

Calcul de l’uretère pelvien : urétéroscopie ou LEC représentent<br />

les 2 techniques de référence.<br />

Calculs de vessie : les calculs vésicaux sont rares dans les pays<br />

occidentaux. Ils peuvent être d’origine rénale ou vésicale liés à<br />

la stase des urines en raison d’un obstacle cervico-prostatique<br />

(hypertrophie bénigne de la prostate, sténose du col vésical),<br />

d’un diverticule vésical ou d’un dysfonctionnement neurologique.<br />

Chez la femme, il faut rechercher la présence d’un corps étranger.<br />

Chez l’enfant, les facteurs nutritionnels prédominent. Si la taille<br />

du calcul est inférieure à 30-40 mm, une lithotritie endo-vésicale<br />

est indiquée. Si le calcul est plus volumineux, l’ablation se fait par<br />

voie sus-pubienne (cystolithotomie à ciel ouvert). ■<br />

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Bilan métabolique d’une lithiase urinaire en pratique courante<br />

Comité de la lithiase de l’Afu (CLAFU)<br />

Travail commun des néphrologues et urologues du Comité de<br />

la Lithiase de l’Association française d’urologie<br />

(Prog Urol 1996;6:955-62)<br />

◗ Traitement médical de la lithiase calcique primitive<br />

Jungers P, Cathala N, Dussol B, Daudon M<br />

(Prog Urol 1999;9:38-42)<br />

◗ Conduite de l’enquête étiologique de la lithiase urinaire<br />

Jungers P, Cathala N, Lacour B, Daudon M<br />

(Prog Urol 1999;9:17-22)<br />

◗ 8e Conférence de consensus de la Société francophone<br />

d’urgences médicales<br />

Pak Cy. Kidney stones<br />

(Lancet 1998;351:1797-1801)<br />

◗ Prise en charge des coliques néphrétiques de l’adulte<br />

dans les services d’accueil et d’urgences<br />

23 avril 1999, Marseille<br />

(La Presse Médicale 2000;29:1007-101)<br />

R Q 259<br />

1815


RR Q 264<br />

866<br />

II<br />

NÉPHROPATHIE<br />

GLOMÉRULAIRE<br />

Dr Guillaume Bollée, Dr Dominique Joly<br />

Service de néphrologie adulte, hôpital Necker, 75015 Paris, France<br />

guillaume.bollee@nck.aphp.fr<br />

dominique.joly@nck.aphp.fr<br />

OBJECTIFS<br />

DIAGNOSTIQUER<br />

une néphropathie glomérulaire.<br />

ARGUMENTER l’attitude<br />

thérapeutique et PLANIFIER<br />

le suivi du patient.<br />

néphropathies glomérulaires constituent un groupe<br />

d’affections hétérogènes responsables d’environ 30 à 40 %<br />

ILes<br />

des causes d’insuffisance rénale terminale. Un diagnostic<br />

précoce est primordial, car la plupart d’entre elles peuvent faire<br />

l’objet d’un traitement susceptible d’entraîner la guérison, la stabilisation,<br />

ou au moins de ralentir la progression de l’insuffisance<br />

rénale. De plus, certaines d’entre elles sont la manifestation<br />

d’une maladie systémique qu’il est important de reconnaître.<br />

L’apprentissage des néphropathies glomérulaires est généralement<br />

considéré difficile à cause de la confusion entre trois types<br />

de diagnostic : le diagnostic syndromique (à la présentation du<br />

patient), le diagnostic histologique (après biopsie rénale), et enfin<br />

le diagnostic « étiologique » (au terme d’une enquête spécifique).<br />

Nous envisagerons dans ce chapitre les 5 syndromes révélateurs<br />

d’une néphropathie glomérulaire, les principales lésions histologiques<br />

décelables, les 11 principales maladies ou groupes de<br />

maladies glomérulaires à connaître, ainsi que leurs traitements.<br />

Anatomopathologie du glomérule<br />

Lésions élémentaires<br />

La structure du glomérule (fig. A) est bâtie autour d’un réseau<br />

de capillaires fenêtrés. Les cellules endothéliales sont recouvertes<br />

par la membrane basale glomérulaire, sur laquelle reposent<br />

des cellules épithéliales particulières : les podocytes. La barrière<br />

de filtration glomérulaire est donc formée par 3 « couches »<br />

de dedans en dehors : cellules endothéliales, membrane basale<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009<br />

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images<br />

Consultez sur www.larevuedupraticien.fr<br />

la photothèque Néphropathie glomérulaire<br />

glomérulaire et podocytes. Cette structure est soutenue par la<br />

matrice mésangiale, qui ne contient normalement qu’un petit<br />

nombre de cellules. L’ensemble forme le flocculus. Les néphropathies<br />

glomérulaires sont secondaires à l’atteinte d’un ou plusieurs<br />

de ces éléments constitutifs.<br />

Deux principaux types d’anomalie peuvent être observés :<br />

– les dépôts (fig. B), immuns ou non, qui peuvent se situer en<br />

position mésangiale, sous-endothéliale, intracapillaire ou extramembraneuse<br />

;<br />

– la prolifération cellulaire (fig. C), constituée de cellules épithéliales<br />

et/ou de cellules inflammatoires, qui peut intéresser le<br />

mésangium, la lumière des capillaires glomérulaires ou la<br />

chambre urinaire : on parlera donc, selon les cas, de prolifération<br />

mésangiale, endocapillaire et/ou extracapillaire.<br />

Syndromes glomérulaires<br />

Caractérisation de la néphropathie glomérulaire<br />

L’atteinte d’un ou plusieurs des éléments constitutifs du glomérule<br />

va entraîner l’apparition d’une protéinurie et/ou d’une<br />

hématurie. En pratique, l’absence de protéinurie et d’hématurie<br />

exclut une néphropathie glomérulaire.<br />

La protéinurie est composée majoritairement d’albumine, et on<br />

distingue parfois protéinurie sélective et non sélective selon que<br />

la protéinurie est constituée quasi exclusivement d’albumine ou<br />

bien qu’elle comporte également des protéines de haut poids<br />

moléculaire comme les immunoglobulines. Cette distinction a<br />

très peu d’intérêt en pratique. La bandelette urinaire permet de<br />

détecter avec une excellente sensibilité l’albuminurie. La protéinurie<br />

doit être mesurée sur les urines de 24 heures ; si elle est<br />

abondante, elle peut s’accompagner d’une hypoprotidémie et<br />

d’une hypoalbuminémie.<br />

L’hématurie peut être macroscopique ou microscopique selon<br />

qu’elle est visible à l’œil nu ou non. L’hématurie est définie par la<br />

présence d’au moins 10 hématies/μL. La présence de cylindres<br />

hématiques dans les urines est caractéristique de l’origine glomérulaire<br />

d’une hématurie. Lorsqu’elle est macroscopique, l’hématurie


est toujours totale et sans caillots. La bandelette urinaire permet<br />

également de détecter l’hématurie avec une excellente sensibilité<br />

et spécificité. Elle doit pour certains être confirmée sur un<br />

examen cytologique urinaire. La présence d’une hématurie traduit<br />

souvent une prolifération cellulaire dans le glomérule qui<br />

doit faire l’objet d’un diagnostic et d’un traitement rapides.<br />

Les autres signes d’atteinte glomérulaire peuvent être :<br />

– des œdèmes des membres inférieurs, ou de la face, ou diffus<br />

(voire anasarque) témoignant d’une rétention hydrosodée. Une<br />

prise de poids précède les œdèmes ;<br />

– une hypertension artérielle (HTA) ;<br />

– une insuffisance rénale, chronique, rapidement progressive ou<br />

aiguë.<br />

Les différents syndromes<br />

Quelques éléments simples (protéinurie, protidémie, albuminémie,<br />

hématurie, pression artérielle, fonction rénale estimée par la<br />

créatininémie) permettent de classer la présentation de la maladie<br />

en différents syndromes (tableau).<br />

Trois remarques :<br />

– faire un diagnostic syndromique ne permet pas, chez la plupart<br />

des patients, de prédire avec certitude le diagnostic histologique<br />

ni le diagnostic étiologique ;<br />

– deux ou plusieurs syndromes peuvent coexister chez un même<br />

patient (patient « néphritique et néphrotique » par exemple), ou<br />

parfois se suivre (glomérulonéphrite chronique, avec épisodes<br />

d’hématuries macroscopiques récidivantes) ;<br />

– il est parfois difficile de distinguer « syndrome néphritique » et<br />

« GNRP », notamment au début d’une néphropathie glomérulaire<br />

aiguë, mais cela est sans conséquence sur la conduite<br />

pratique (hospitalisation en urgence, biopsie rénale).<br />

Démarche diagnostique<br />

Il faut d’abord rechercher par l’interrogatoire et l’examen clinique :<br />

– les antécédents personnels et familiaux, et réaliser un arbre<br />

généalogique en cas de maladie héréditaire ;<br />

– la prise de médicaments ;<br />

– les signes extrarénaux, notamment en faveur d’une maladie<br />

infectieuse, néoplasique, hématologique ou dysimmunitaire.<br />

Les explorations minimales pour explorer une néphropathie glomérulaire<br />

sont :<br />

– bandelette urinaire (± cytologie urinaire), protéinurie des<br />

24 heures, albuminémie, protidémie, créatininémie pour caractériser<br />

le syndrome glomérulaire ;<br />

– échographie rénale, hémogramme, hémostase, groupe sanguin<br />

et RAI, en vue d’une biopsie rénale ;<br />

– selon le contexte (non systématiques) : sérologies virales,<br />

hémocultures, recherche d’auto-anticorps, complément sérique,<br />

électrophorèse des protides sériques et urinaires, cryoglobulinémie,<br />

etc. ;<br />

– la biopsie rénale est presque toujours nécessaire au diagnostic.<br />

Trois fragments de parenchyme rénal sont prélevés : l’un pour<br />

l’étude en microscopie optique, un autre pour l’étude en immuno-<br />

Podocyte<br />

Lumière capillaire<br />

Cellule<br />

endothéliale<br />

Mésangium<br />

Cellule mésangiale<br />

Artériole afférente<br />

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Q RR264<br />

Tube contourné proximal<br />

Cellule épithéliale tubaire<br />

Tube contourné distal<br />

Mésangiale<br />

Intracapillaire<br />

Chambre urinaire<br />

Cellule épithéliale<br />

pariétale<br />

Capsule<br />

de Bowman<br />

Membrane basale<br />

glomérulaire<br />

Artériole efférente<br />

« Humps »<br />

Extramembraneuse<br />

granuleuse (GEM)<br />

Sous endothéliale<br />

Mésangiale<br />

Intracapillaire<br />

Prolifération<br />

extracapillaire<br />

Prolifération<br />

endocapillaire<br />

FIGURE A – Représentation schématique d’un glomérule normal en coupe.<br />

B – Les différents types de dépôts glomérulaires et leur topographie (en rouge).<br />

C – Les différentes formes de prolifération cellulaire glomérulaire (en rouge).<br />

]<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009 867<br />

A<br />

B<br />

C


RR Q 264 II<br />

NÉPHROPATHIE GLOMÉRULAIRE<br />

TABLEAU<br />

fluorescence (pour rechercher et caractériser les dépôts), et un<br />

autre pour l’étude en microscopie électronique (en pratique,<br />

non réalisée systématiquement).<br />

La biopsie n’est pas indiquée dans certaines situations :<br />

– lorsqu’elle n’impliquerait aucun traitement (certaines hématuries<br />

microscopiques isolées) ;<br />

– lorsqu’un diagnostic « présomptif » est possible : syndrome<br />

néphrotique pur de l’enfant très évocateur de lésions glomérulaires<br />

minimes ; glomérulopathie diabétique ; glomérulopathie<br />

médicamenteuse ;<br />

– lorsque le diagnostic est fait par une biopsie autre que rénale<br />

(amylose).<br />

Différentes néphropathies glomérulaires<br />

et traitement spécifique<br />

On envisagera pour chaque maladie, définie le plus souvent<br />

par l’atteinte histologique, successivement :<br />

– la présentation clinique habituelle ;<br />

– les anomalies mises en évidence par la biopsie rénale ;<br />

– le diagnostic étiologique, c’est-à-dire les causes potentielles<br />

de la glomérulopathie ;<br />

– le traitement spécifique de la maladie. Le traitement non spécifique,<br />

parfois appelé improprement « symptomatique », sera<br />

traité dans la partie suivante.<br />

868<br />

Définition des syndromes glomérulaires<br />

Syndrome Définition Remarques<br />

Néphrotique (SN) Protéinurie > 3 g/24 heures* La notion de SN « pur » (ni HTA, ni hématurie, ni insuffisance rénale)<br />

(> 50 mg/kg/24 heures chez l’enfant) ou « impur » n’est réellement utile que chez l’enfant.<br />

et hypoalbuminémie < 30 g/L Le SN s’accompagne presque toujours d’un syndrome œdémateux,<br />

et hypoprotidémie < 60 g/L d’intensité variable, non indispensable au diagnostic positif de SN.<br />

Glomérulonéphrite chronique Associe à des degrés variables protéinurie, Souvent révélé par le dépistage (bandelette urinaire, PA)<br />

(GNC) hématurie, hypertension artérielle en situation de médecine professionnelle.<br />

et insuffisance rénale chronique.<br />

Hématuries macroscopiques Hématuries totales indolores et sans caillot, Souvent associé à un syndrome de GNC.<br />

récidivantes sans cause urologique retrouvée. Révèle le plus souvent une néphropathie à IgA.<br />

Glomérulonéphrite rapidement Insuffisance rénale rapidement progressive Classiquement, la protéinurie est rarement néphrotique<br />

progressive (GNRP) ou aiguë associée à des signes et la PA est peu élevée. Hospitalisation en urgence<br />

d’atteinte glomérulaire (hématurie pour suspicion de glomérulonéphrite extra-capillaire.<br />

micro- ou macroscopique, protéinurie).<br />

Syndrome néphritique aigu Anomalies brutales et transitoires : Parfois associé à un syndrome néphrotique.<br />

(SNA) oligurie (avec hématurie souvent Tout syndrome néphritique aigu avec insuffisance rénale<br />

macroscopique et protéinurie), œdèmes, non rapidement régressive évoque un syndrome de GNRP.<br />

HTA et insuffisance rénale aiguë.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Néphropathies à lésions glomérulaires<br />

minimes (LGM)<br />

1. Présentation clinique<br />

La néphropathie glomérulaire à LGM se présente généralement<br />

comme un syndrome néphrotique d’apparition brutale,<br />

parfois au décours immédiat d’un épisode infectieux. Il existe des<br />

œdèmes, souvent importants, touchant les membres inférieurs<br />

et la face. Le plus souvent, il s’agit d’un syndrome néphrotique<br />

pur. Rarement, il existe une insuffisance rénale aiguë, notamment<br />

chez les sujets âgés, probablement en rapport avec une hypovolémie<br />

efficace et une atteinte tubulaire aiguë favorisée par l’albuminurie<br />

massive. L’hématurie microscopique est rare (15 %).<br />

2. Anatomopathologie<br />

La biopsie rénale est toujours indiquée chez l’adulte, mais pas<br />

chez l’enfant en cas de syndrome néphrotique pur, en l’absence<br />

de signes extra-rénaux et de néphropathie familiale. En effet,<br />

avant l’âge de 8 ans, environ 80 % des syndromes néphrotiques<br />

sont secondaires à des LGM, contre seulement 10 à 15 % chez<br />

l’adulte. Chez l’enfant, une biopsie ne sera donc réalisée qu’en<br />

cas de corticorésistance.<br />

Comme le nom de la maladie l’indique, la biopsie rénale ne<br />

montre pas d’anomalie significative observable en microscopie<br />

optique, ni de dépôts. L’étude en microscopie électronique,<br />

lorsqu’elle est réalisée, ne montre que de minimes anomalies<br />

comme un effacement des pieds des podocytes.


3. Étiologie<br />

Les syndromes néphrotiques à LGM sont pratiquement toujours<br />

idiopathiques, et les mécanismes physiopathologiques demeurent<br />

mal connus. Il s’agit vraisemblablement d’une atteinte du podocyte,<br />

liée au moins en partie à des anomalies immunologiques et<br />

un facteur circulant qui pourrait être une cytokine.<br />

Rarement, les LGM sont secondaires à :<br />

– une prise médicamenteuse (AINS surtout, rifampicine, interféron…)<br />

;<br />

– un lymphome, notamment la maladie de Hodgkin ;<br />

– la mutation d’un gène codant une protéine importante du<br />

podocyte et nécessaire au maintien de l’intégrité de la barrière<br />

de filtration glomérulaire, comme par exemple la podocine<br />

et la néphrine (la mutation du gène codant la néphrine est<br />

responsable du « syndrome néphrotique congénital de type<br />

finlandais »).<br />

4. Traitement et évolution<br />

Le traitement spécifique des LGM repose sur la corticothérapie<br />

(1 mg/kg/jour de prednisone jusqu’à la rémission puis décroissance<br />

progressive), qui entraîne la rémission du syndrome<br />

néphrotique chez environ 70 % des adultes et 95 % des enfants,<br />

qui sont alors dits corticosensibles.<br />

Environ 50 % des patients présentent des rechutes multiples à<br />

la décroissance ou l’arrêt des corticoïdes et sont dits corticodépendants.<br />

Différents immunosuppresseurs peuvent être utilisés<br />

afin de limiter la dose de corticoïdes : ciclosporine, mycophénolate<br />

mofétil, cyclophosphamide et peut-être rituximab.<br />

Lorsque le syndrome néphrotique persiste malgré la corticothérapie,<br />

le patient est dit corticorésistant. Le traitement le plus<br />

utilisé est alors la ciclosporine, cependant peu efficace dans<br />

cette situation.<br />

Le pronostic est excellent pour les malades corticosensibles,<br />

très peu développant une insuffisance rénale. Au contraire, les<br />

corticorésistants développent fréquemment une insuffisance et<br />

ont une évolution péjorative.<br />

Hyalinoses segmentaires et focales (HSF)<br />

La hyalinose segmentaire et focale (HSF) désigne une lésion<br />

histologique, caractérisée par des dépôts hyalins (non immuns)<br />

et une sclérose sur une partie du glomérule (segmentaire) et sur<br />

seulement certains glomérules (focale).<br />

Cette lésion histologique, loin d’être spécifique, témoigne<br />

d’une atteinte du podocyte et peut être primitive (idiopathique) ou<br />

secondaire à de nombreuses causes d’atteinte du podocyte.<br />

1. Présentation clinique<br />

La présentation de la néphropathie type HSF primitive est<br />

proche de celle à LGM, avec une plus grande fréquence d’hypertension<br />

artérielle, d’hématurie microscopique et d’insuffisance<br />

rénale associées au syndrome néphrotique.<br />

Dans les néphropathies type HSF secondaires, la présentation<br />

est variable, réalisant un tableau de GNC, et le syndrome néphrotique<br />

est souvent absent.<br />

2. Anatomopathologie<br />

La biopsie rénale montre par définition des lésions d’HSF en<br />

microscopie optique, sans dépôts immuns significatifs en immunofluorescence.<br />

Il peut s’associer des lésions tubulo-interstitielles<br />

chroniques en fonction du retentissement de la glomérulopathie.<br />

3. Étiologie<br />

La néphropathie dite type HSF primitive correspond schématiquement<br />

à la forme sévère d’une maladie du podocyte dont le spectre<br />

recouvre les LGM et HSF idiopathiques. La frontière entre<br />

LGM et HSF primitive est floue, certains patients avec LGM évoluant<br />

secondairement vers une HSF. Les mécanismes physiopathologiques<br />

demeurent mal connus, mais des facteurs génétiques<br />

de prédisposition interviennent certainement et la néphro pathie<br />

type HSF est beaucoup plus fréquente chez les sujets d’ascendance<br />

africaine.<br />

Les néphropathies type HSF secondaires sont liées à d'autres causes<br />

très variées d'atteinte du podocyte, notamment :<br />

– infection virale, essentiellement par le VIH. Dans ce cas, il s’agit<br />

d’une forme histologique particulière d’HSF avec collapsus du<br />

flocculus ; on parle alors d’HIVAN, acronyme de « HIV associated<br />

nephropathy » ;<br />

– hyperfiltration glomérulaire au cours d’un processus de réduction<br />

néphronique : des lésions d’HSF peuvent être observées de<br />

façon non spécifique dans toutes les néphropathies évoluées<br />

quelle que soit leur cause ;<br />

– néphropathie du reflux vésico-urétéral ; les lésions d’HSF<br />

observées chez certains patients traduisent probablement une<br />

forme de dysplasie rénale associée au reflux, plutôt que des<br />

anomalies secondaires à la réduction néphronique ;<br />

– mutation d’un gène codant une protéine podocytaire (néphrine,<br />

podocine…) ;<br />

– autres : drépanocytose, obésité avec ou sans syndrome d’apnées<br />

du sommeil, toxicomanie intraveineuse à l’héroïne.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Le traitement de la néphropathie type HSF primitive est schématiquement<br />

le même que celui de la LGM. Cependant, la rémission<br />

du syndrome néphrotique est moins souvent obtenue et<br />

l’évolution est plus péjorative, bon nombre de patients développant<br />

une insuffisance rénale chronique. Les HSF secondaires<br />

sont en règle corticorésistantes et le traitement est principalement<br />

« symptomatique ».<br />

Néphropathie à IgA (maladie de Berger)<br />

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Q RR264<br />

1. Présentation clinique<br />

La néphropathie à IgA est la glomérulopathie la plus fréquente.<br />

La présentation est extrêmement variable. Dans environ 50 %<br />

des cas, la maladie se manifeste chez un sujet jeune par des<br />

hématuries macroscopiques récidivantes immédiatement après<br />

une infection le plus souvent respiratoire. Chez l’adulte, le mode<br />

de révélation le plus fréquent est le syndrome de GNC (avec<br />

hématurie microscopique isolée ou associée à une protéinurie et<br />

une hypertension artérielle). Les révélations « bruyantes » avec<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009 869


RR Q 264 II<br />

NÉPHROPATHIE GLOMÉRULAIRE<br />

syndrome néphritique aigu (SNA) ou glomérulonéphrite rapidement<br />

progressive (GNRP) sont très rares. Le dosage des IgA<br />

sériques (taux augmenté dans 50 % des cas) est sans intérêt<br />

pratique.<br />

2. Anatomopathologie<br />

Comme la présentation clinique, les lésions histologiques sont<br />

très variables, mais le dénominateur commun est la présence de<br />

dépôts caractéristiques d’IgA dans le mésangium, mis en évidence<br />

par l’immunofluorescence. Ces dépôts peuvent être isolés<br />

ou associés à des lésions glomérulaires (prolifération cellulaire<br />

mésangiale, lésions de nécrose capillaire segmentaires, prolifération<br />

extracapillaire ou lésions cicatricielles d’HSF) et parfois à des<br />

lésions chroniques tubulo-interstitielles et vasculaires témoignant<br />

du retentissement de la glomérulopathie sur le reste du parenchyme.<br />

3. Étiologie<br />

Dans l’immense majorité des cas, la maladie est idiopathique.<br />

La physiopathologie est complexe, faisant notamment intervenir<br />

des anomalies de production et de glycosylation des IgA. Il existe<br />

de rares formes familiales de néphropathie à IgA.<br />

Une néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA peut également<br />

survenir en cas de cirrhose, mais la traduction clinique est généralement<br />

modérée ou absente.<br />

La néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA est à différencier<br />

de l’atteinte rénale du purpura rhumatoïde. Cependant, l’atteinte<br />

histologique est très proche, et il existe des formes « frontières »<br />

entre ces deux maladies. Le purpura rhumatoïde est avant tout<br />

une maladie survenant chez l’enfant, et s’associent pratiquement<br />

toujours des signes extra-rénaux (purpura, atteinte digestive,<br />

arthralgies…).<br />

4. Traitement et évolution<br />

Certaines formes sévères peuvent faire l’objet d’un traitement<br />

par corticoïdes, voire immunosuppresseurs, mais l’utilisation de<br />

ces traitements est mal codifiée.<br />

La maladie reste stable ou lentement évolutive chez de nombreux<br />

patients. Cependant, environ 25 % des patients sont en insuffisance<br />

rénale terminale après 10 ans de suivi, et 40 % après 20 ans.<br />

Glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

1. Présentation clinique<br />

La glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM) est la première<br />

cause de syndrome néphrotique chez l’adulte. Une hématurie<br />

microscopique et une HTA sont fréquemment associées, et<br />

il existe parfois déjà une insuffisance rénale chronique au<br />

moment du diagnostic. Plus rarement, la protéinurie n’est pas<br />

néphrotique et la GEM est révélée par un syndrome de GNC.<br />

2. Anatomopathologie<br />

La microscopie optique met en évidence des dépôts caractéristiques<br />

sur le versant externe de la membrane basale glomérulaire,<br />

celle-ci présentant des remaniements variables. Il existe fréquemment<br />

un retentissement tubulo-interstitiel chronique plus<br />

ou moins marqué. L’immunofluorescence confirme la présence<br />

des dépôts, faits d’IgG et de C3.<br />

870<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009<br />

3. Étiologie<br />

La GEM est idiopathique dans 85 % des cas.<br />

Les formes secondaires (15 %) sont surtout liées à :<br />

– des cancers (10 %) : carcinomes du poumon, sein, côlon et<br />

rein notamment. Il est donc indispensable, surtout après<br />

50 ans, de faire un examen clinique soigneux, une radiographie<br />

pulmonaire, et au moindre doute d’autres examens (mammographie,<br />

scanner, fibroscopie bronchique, coloscopie…) ;<br />

– une maladie auto-immune, en particulier le lupus, (plus rarement<br />

d’autres connectivites) qui sera systématiquement<br />

recherché, surtout chez une femme jeune (recherche de signes<br />

extrarénaux, anticorps antinucléaires…) ;<br />

– plus rarement (du moins hors zones endémiques) une infection :<br />

hépatite B ou C, syphilis, schistosomiase, lèpre, paludisme,<br />

filariose… ;<br />

– rarement certains médicaments et toxiques : D-pénicillamine<br />

notamment, ou auparavant le captopril et les sels d’or qui ne<br />

sont plus utilisés.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Le traitement est avant tout « symptomatique » et néphroprotecteur.<br />

En cas de facteurs de mauvais pronostic, la GEM idiopathique<br />

peut être traitée par immunosuppresseurs et corticoïdes ;<br />

le bénéfice de ces traitements n’est toutefois pas complètement<br />

établi.<br />

Schématiquement, une rémission spontanée de la GEM est<br />

observée chez environ 25 % des patients ; une protéinurie persiste<br />

sans syndrome néphrotique chez 25 % des patients, et un<br />

syndrome néphrotique chez 50 % d’entre eux. Les patients chez<br />

lesquels persiste un syndrome néphrotique développent généralement<br />

une insuffisance rénale chronique d’évolution lente.<br />

En cas de syndrome néphrotique et d’un taux d'albumine inférieur<br />

à 20 g/L, il existe un risque de thrombose veineuse profonde,<br />

qui peut se compliquer d'embolie pulmonaire. Ces manifestations<br />

thrombo emboliques sont parfois révélatrices de la<br />

maladie. La thrombose peut intéresser pratiquement tous les<br />

territoires veineux, notamment les veines rénales. Il faut savoir<br />

penser à une thrombose veineuse rénale (éventuellement bilatérale)<br />

devant une hématurie microscopique ou une insuffisance<br />

rénale aiguë.<br />

Glomérulonéphrites extra-capillaires<br />

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1. Présentation clinique<br />

La présentation habituelle des glomérulonéphrites extra-capillaires<br />

(GNEC) est le syndrome de GNRP, qui est une urgence<br />

diagnostique et thérapeutique. Un tel tableau doit impérativement<br />

faire réaliser d’urgence une biopsie rénale et la recherche<br />

d’anticorps anti-cytoplasme des neutrophiles (ANCA) et anticorps<br />

dirigés contre la membrane basale glomérulaire (anti-<br />

MBG).<br />

Un amalgame est souvent fait entre GNRP et GNEC et il faut<br />

savoir que la présentation est parfois plus insidieuse, avec une<br />

insuffisance rénale d’évolution subaiguë ou chronique.


2. Anatomopathologie<br />

Les GNEC sont définies histologiquement par une prolifération<br />

cellulaire dans la chambre urinaire du glomérule (« croissants »)<br />

avec une nécrose des anses capillaires. Quelle qu’en soit la<br />

cause, il s’agit de la forme la plus sévère d’atteinte glomérulaire,<br />

nécessitant un diagnostic et un traitement d’urgence. En fonction<br />

de la maladie causale, d’autres anomalies peuvent éventuellement<br />

être observées en microscopie optique (dépôts…).<br />

Cependant, c’est l’immunofluorescence, réalisée en urgence<br />

sur la biopsie rénale, qui va permettre de classer la GNEC dans<br />

l’un des trois groupes étiologiques :<br />

– GNEC à anticorps anti-MBG : il existe une fixation linéaire<br />

d’IgG le long de la membrane basale glomérulaire ;<br />

– GNEC pauci-immune : il n’y a pas de dépôts immuns dans les<br />

glomérules ;<br />

– GNEC à complexes immuns : il existe des dépôts d’immunoglobulines<br />

et de complément de nature et de topographie<br />

variables selon la maladie causale.<br />

3. Étiologie<br />

Il faut distinguer les trois groupes étiologiques.<br />

GNEC à anticorps anti-MBG : il s’agit d’une maladie rare, liée à des<br />

auto-anticorps dirigés contre un épitope de la chaîne alpha 3 du<br />

collagène IV, qui est présente dans la MBG. Cet antigène est<br />

également exprimé dans le poumon, et il peut s’associer à l’atteinte<br />

rénale une hémorragie alvéolaire (réalisant un syndrome<br />

pneumo-rénal par maladie de Goodpasture) qu’il faut rechercher<br />

d’urgence par un scanner thoracique et, éventuellement, une<br />

fibroscopie bronchique avec lavage broncho-alvéolaire et des<br />

explorations fonctionnelles respiratoires.<br />

GNEC pauci-immune : il s’agit de l’atteinte rénale d’une vascularite<br />

des petits vaisseaux généralement associée à la présence<br />

d’ANCA. Les ANCA sont d’abord recherchés en immunofluorescence<br />

indirecte et on peut observer une fixation cytoplasmique<br />

(c-ANCA) ou périnucléaire (p-ANCA) sur les neutrophiles. Dans<br />

ce cas, la spécificité doit être étudiée par une technique ELISA,<br />

qui peut montrer des anticorps anti-myélopéroxidase (anti-MPO)<br />

ou anti-protéinase 3 (anti-PR3) qui correspondent généralement<br />

aux p-ANCA et aux c-ANCA respectivement.<br />

Il faut absolument rechercher des signes d’atteinte extrarénale<br />

de la vascularite, qui peut être :<br />

– une granulomatose de Wegener : il s’associe souvent des<br />

signes extra-rénaux pulmonaires ou ORL (sinusite, ulcérations<br />

nasales et pharyngées, otite…) ou pulmonaires (hémorragies<br />

alvéolaires, nodules, bulles excavées). La mise en évidence<br />

d’une inflammation granulomateuse de l’arbre respiratoire est<br />

très évocatrice. Des ANCA anti-PR3 sont le plus souvent présents<br />

;<br />

– une micropolyangéite : il n’y a pas d’atteinte ORL, mais il existe<br />

souvent d’autres atteintes : pulmonaire (fréquente), cardiaque,<br />

digestive et neurologique périphérique notamment. L’atteinte<br />

rénale est parfois isolée. Des ANCA anti-MPO sont le plus souvent<br />

présents ;<br />

– une maladie de Churg-Strauss : elle est caractérisée par la présence<br />

successive ou simultanée d’un asthme, d’une hyperéosinophilie<br />

(> 1 500/mm 3 ) et d’une vascularite systémique (pulmonaire,<br />

cutanée, digestive, cardiaque, rénale…). La mise en<br />

évidence sur une biopsie d’une inflammation granulomateuse<br />

riche en éosinophiles est très évocatrice. Des ANCA anti-MPO<br />

sont généralement présents.<br />

GNEC à complexes immuns : il s’agit de la forme sévère d’une glomérulonéphrite,<br />

la prolifération extracapillaire s’ajoutant à l’atteinte<br />

habituelle. Les causes sont variées :<br />

– vascularite infectieuse : endocardite, abcès profond, shunt<br />

atrio-ventriculaire infecté ;<br />

– glomérulonéphrite lupique ;<br />

– cryoglobulinémie avec atteinte rénale ;<br />

– purpura rhumatoïde ;<br />

– rarement, formes sévères de néphropathie à IgA, de glomérulonéphrite<br />

aiguë post-streptococcique, de GEM, de GNMP.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Il est fonction de la cause mais est dans tous les cas urgent.<br />

GNEC à anticorps anti-MBG : il repose sur l’administration de corticoïdes<br />

et de cyclophosphamide associée à des plasmaphérèses ;<br />

GNEC pauci-immune : il repose également sur les corticoïdes et<br />

les immunosuppresseurs, en particulier le cyclophosphamide,<br />

parfois associé à des plasmaphérèses ;<br />

GNEC à complexes immuns : il est fonction de la maladie causale.<br />

Le pronostic rénal est étroitement lié à la précocité du diagnostic<br />

et du traitement. Il ne faut pas oublier de rechercher les atteintes<br />

extra-rénales, qui peuvent mettre en jeu le pronostic vital.<br />

Néphropathie diabétique<br />

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Q RR264<br />

1. Présentation clinique<br />

Elle est fonction du stade de la maladie.<br />

Dans le diabète de type 1, le stade de « néphropathie débutante »,<br />

caractérisé par une microalbuminurie, survient généralement<br />

après au moins cinq ans d’évolution du diabète. Le stade suivant,<br />

dit de « néphropathie avérée », survient après dix à vingt<br />

ans et est caractérisé par une protéinurie, parfois un syndrome<br />

néphrotique, souvent une HTA, et l’apparition d’une insuffisance<br />

rénale. L’insuffisance rénale terminale peut survenir au-delà de<br />

vingt ans d’évolution.<br />

Dans le diabète de type 2, l’ancienneté est souvent inconnue ;<br />

cependant, l’évolution de la néphropathie diabétique est relativement<br />

similaire à celle du diabète de type 1. La microalbuminurie<br />

est associée à une forte élévation du risque d’événement cardiovasculaire.<br />

Une difficulté est de savoir poser l’indication d’une biopsie<br />

rénale chez un diabétique avec une protéinurie. La biopsie sera<br />

réalisée devant des éléments faisant suspecter une autre<br />

néphropathie :<br />

– une hématurie microscopique (présente dans seulement 15 %<br />

des cas) ;<br />

– une insuffisance rénale rapidement progressive ;<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009 871


RR Q 264 II<br />

NÉPHROPATHIE GLOMÉRULAIRE<br />

– l’absence de rétinopathie diabétique. La concordance rétinopathie-néphropathie<br />

est proche de 100 % dans le diabète de<br />

type 1, et environ 60 % dans le type 2 ;<br />

– présence de signes extra-rénaux non liés au diabète ;<br />

– diabète évoluant depuis moins de cinq ans.<br />

2. Anatomopathologie<br />

L’aspect caractéristique est une sclérose glomérulaire d’aspect<br />

nodulaire, sans dépôts immuns significatifs.<br />

3. Traitement et évolution<br />

Il repose sur le traitement néphroprotecteur indiqué dans toute<br />

glomérulopathie chronique et sur un équilibre strict du diabète.<br />

Le pronostic rénal est largement fonction de la précocité et de<br />

la bonne conduite du traitement. En cas de protéinurie et d’HTA<br />

mal contrôlées, le risque est l’évolution vers l’insuffisance rénale<br />

terminale en quelques années.<br />

L’amylose rénale<br />

L’amylose est une maladie liée à des dépôts fibrillaires, pouvant<br />

toucher de nombreux organes, formés d’un composant commun<br />

aux différentes amyloses (protéine SAP), associé à un composant<br />

variable selon le type d’amylose.<br />

Les deux principaux types à connaître sont l’amylose AL et AA.<br />

Les amyloses héréditaires, rares, ne seront pas évoquées ici.<br />

1. Présentation clinique<br />

La présentation habituelle est une protéinurie, souvent un syndrome<br />

néphrotique. Il n’y a pas d’hématurie microscopique. Une<br />

872<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?<br />

L'item « néphropathie glomérulaire »<br />

englobe une grande variété<br />

de situations cliniques.<br />

Les maladies traitées ici peuvent<br />

toucher uniquement le rein, ou bien<br />

la néphropathie peut s'intégrer dans<br />

le cadre d'une pathologie systémique<br />

susceptible d'atteindre d'autres<br />

organes également traités dans<br />

d'autres items. De plus, il existe des<br />

interactions notamment entre les<br />

maladies rénales, l'hypertension<br />

artérielle et le risque cardiovasculaire<br />

qu'il est indispensable de garder<br />

à l'esprit.<br />

Ainsi, l'item « néphropathie<br />

glomérulaire » peut intervenir à l'ENC<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009<br />

insuffisance rénale peut être présente dès le diagnostic. L’augmentation<br />

de la taille des reins est classique mais inconstante.<br />

Il faut rechercher des signes extra-rénaux d’atteinte d’autres<br />

organes :<br />

– cardiaque : cardiomyopathie hypertrophique, insuffisance<br />

cardiaque, troubles de la conduction ;<br />

– neurologique : neuropathie périphérique ou végétative, souvent<br />

à l’origine d’une hypotension orthostatique ;<br />

– digestive : diarrhée, malabsorption ;<br />

– hépatomégalie (avec élévation de la gamma GT), splénomégalie ;<br />

– autres : macroglossie, ecchymose périorbitaire, insuffisance<br />

surrénalienne, hypothyroïdie…<br />

Les atteintes cardiaque et neurologique sont fréquentes dans<br />

l’amylose AL, exceptionnelles dans l’amylose AA.<br />

2. Anatomopathologie<br />

Le diagnostic repose sur la mise en évidence de dépôts amyloïdes<br />

par la coloration rouge Congo. L’immunofluorescence permet<br />

ensuite de préciser le type d’amylose, AL ou AA.<br />

La biopsie rénale n’est pas nécessaire lorsque l’amylose a été<br />

prouvée par une biopsie moins invasive, notamment des glandes<br />

salivaires accessoires.<br />

3. Étiologie<br />

L’amylose AL est liée à la production d’une chaîne légère d’immunoglobuline<br />

par un clone plasmocytaire et peut être isolée (ou<br />

« primaire ») ou associée à une hémopathie lymphoïde, surtout<br />

un myélome, qu’il faut rechercher.<br />

dans un dossier « transversal »<br />

ou multidisciplinaire, faisant<br />

également intervenir des questions<br />

sur le diabète et ses complications,<br />

le lupus, le myélome, l'hypertension<br />

artérielle, les désordres<br />

hydroélectrolytiques…<br />

Toutes les néphropathies<br />

glomérulaires traitées dans cet item<br />

sont susceptibles de tomber<br />

à l'examen et doivent être connues<br />

par l'étudiant. Il est possible que des<br />

questions portent sur :<br />

– la reconnaissance<br />

des signes de néphropathie<br />

glomérulaire et les différents<br />

syndromes rencontrés ;<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

– les principales causes<br />

de néphropathie glomérulaire<br />

à évoquer en fonction<br />

de la présentation clinique<br />

et du contexte donné ;<br />

– la démarche diagnostique,<br />

l'indication de la biopsie rénale<br />

et les informations apportées<br />

par cet examen ;<br />

– le traitement « symptomatique »<br />

et les mesures générales<br />

mises en œuvre dans<br />

le traitement des néphropathies<br />

glomérulaires ;<br />

– l'évolution et les complications<br />

potentielles des néphropathies<br />

glomérulaires.


Néphropathie glomérulaire<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

Les éléments caractérisant une maladie glomérulaire<br />

sont l’existence d’une hypertension artérielle, d’œdèmes,<br />

d’une protéinurie, d’une hématurie, la fonction rénale<br />

et la présence de signes extrarénaux.<br />

Les causes sont nombreuses et la biopsie rénale<br />

est presque toujours indispensable pour un diagnostic précis.<br />

Il faut distinguer la présentation syndromique, la maladie<br />

« histologique », et l’étiologie de la néphropathie.<br />

Certaines glomérulopathies sont accessibles<br />

à un traitement spécifique, mais la réduction de la pression<br />

artérielle et de la protéinurie par les inhibiteurs<br />

de l’enzyme de conversion et les sartans sont les deux<br />

objectifs thérapeutiques majeurs communs à toutes les<br />

glomérulopathies chroniques.<br />

L’amylose AA est secondaire à une maladie inflammatoire chronique,<br />

notamment une polyarthrite rhumatoïde, une fièvre méditerranéenne<br />

familiale, une maladie inflammatoire intestinale, une<br />

infection bactérienne chronique, ou rarement une néoplasie.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Le traitement est celui de la maladie causale avant tout : chimiothérapie<br />

dans l’amylose AL, traitement de la maladie inflammatoire<br />

dans l’amylose AA. Un traitement récent, l’éprodisate, semble<br />

efficace sur les dépôts amyloïdes AA.<br />

Le risque est l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale<br />

chez de nombreux malades, et les complications des atteintes<br />

extrarénales de l’amylose. En particulier, la mortalité est très élevée<br />

chez les patients avec atteinte cardiaque de l’amylose AL.<br />

Glomérulonéphrite lupique<br />

1. Présentation clinique<br />

La présentation de la glomérulonéphrite lupique est très variable.<br />

Le syndrome néphrotique (50 % des cas) et le syndrome de<br />

GNRP dominent. L’hématurie est très fréquente en cas de glomérulonéphrite<br />

proliférative.<br />

2. Anatomopathologie<br />

La biopsie rénale est indispensable pour obtenir un diagnostic<br />

précis et guider le traitement.<br />

L’atteinte glomérulaire fait l’objet d’une classification internationale<br />

faisant schématiquement distinguer :<br />

– des dépôts immuns mésangiaux avec un rein « normal » en<br />

microscopie optique (classe I) ou une glomérulonéphrite<br />

mésangiale (classe II) ;<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Q RR264<br />

– une glomérulonéphrite proliférative endocapillaire ± extra-capillaire<br />

touchant une proportion variable de glomérules (classe III<br />

< 50 %, classe IV > 50 %) ;<br />

– une glomérulonéphrite extramembraneuse (classe V) ;<br />

– une atteinte cicatricielle sévère avec sclérose de plus de 90 %<br />

des glomérules (classe VI).<br />

Typiquement, on observe dans le glomérule des dépôts à la fois<br />

d’IgG, IgA, IgM, C3, C4 et C1q, ce qui est très évocateur du lupus.<br />

3. Étiologie<br />

Le lupus est une maladie systémique, et il faut rechercher des<br />

atteintes extra-rénales (cutanée, articulaire, neurologique, pulmo -<br />

naire, cardiaque, hématologique, etc.), mais l’expression du<br />

lupus est parfois uniquement rénale. Les tests immunologiques<br />

utiles sont les anticorps antinucléaires, les anti-DNA natifs, anti-Sm,<br />

le dosage du complément sérique CH50 et des fractions C3 et C4.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Les glomérulonéphrites classe I ou II ont un excellent pronostic<br />

et ne justifient pas de traitement immunosuppresseur.<br />

Les glomérulonéphrites prolifératives (classes III et IV) sont traitées<br />

par corticoïdes associés à un immunosuppresseur (cyclophosphamide,<br />

mycophénolate-mofétil, azathioprine, et parfois<br />

rituximab). Le traitement des glomérulonéphrites extra-membraneuses<br />

est mal codifié.<br />

Environ 25 % des glomérulonéphrites lupiques évoluent à long<br />

terme vers l’insuffisance rénale terminale.<br />

Glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique<br />

1. Présentation clinique<br />

La glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse survient habituellement<br />

chez l’enfant, mais peut également se rencontrer chez<br />

l’adulte.<br />

Elle survient typiquement une dizaine de jours après une infection<br />

des voies respiratoires ou cutanées à streptocoque et se<br />

manifeste par un syndrome néphritique aigu.<br />

La chute du CH50 et du C3, témoignant de l’activation de la<br />

voie alterne du complément, est constante à la phase aiguë<br />

avant un retour à la normale après environ huit semaines. La<br />

recherche d’anti-streptolysine est peu utile en pratique.<br />

2. Anatomopathologie<br />

La biopsie montre une prolifération cellulaire endocapillaire et<br />

mésangiale avec de nombreuses cellules inflammatoires dans<br />

les capillaires, et des dépôts extramembraneux caractéristiques,<br />

« en motte », appelés « humps ». L’immunofluorescence montre<br />

qu’il s’agit de dépôts de C3 et d’IgG.<br />

3. Étiologie<br />

La glomérulonéphrite est secondaire à une infection par un<br />

streptocoque du groupe A possédant un antigène néphritogène<br />

déclenchant l’activation du complément et l’inflammation.<br />

4. Traitement et évolution<br />

L’infection est généralement résolue au moment de la glomérulonéphrite,<br />

mais des cultures positives peuvent être observées<br />

chez des patients asymptomatiques, et il est important de prévenir<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009 873


RR Q 264 II<br />

NÉPHROPATHIE GLOMÉRULAIRE<br />

la contamination des sujets contacts. Même si elle ne semble<br />

pas beaucoup influencer l’évolution de la glomérulonéphrite, une<br />

antibiothérapie doit donc être administrée.<br />

Le pronostic est excellent, surtout chez les enfants, la guérison<br />

complète étant la règle. À long terme, une protéinurie et une<br />

hypertension artérielle peuvent être observées chez un petit<br />

nombre de patients.<br />

Glomérulonéphrite membranoproliférative (GNMP)<br />

1. Présentation clinique<br />

La glomérulonéphrite membranoproliférative est une maladie<br />

rare réalisant un tableau aspécifique de glomérulonéphrite chronique.<br />

2. Anatomopathologie<br />

La biopsie rénale montre une prolifération mésangiale et endocapillaire.<br />

Il existe des dépôts immuns (C3 et immunoglobulines),<br />

notamment sous-endothéliaux, et des remaniements de la membrane<br />

basale glomérulaire au contact des dépôts réalisant un<br />

aspect en « rail de chemin de fer ».<br />

Il existe d’autres formes rares de glomérulonéphrite membranoproliférative,<br />

qui ne seront pas traitées ici.<br />

3. Étiologie<br />

La maladie peut être idiopathique ou secondaire à des affections<br />

variées, notamment :<br />

– cryoglobulinémie mixte, le plus souvent secondaire à une<br />

hépatite C chronique ;<br />

– infections bactériennes subaiguës : endocardite, abcès profond,<br />

shunt atrioventriculaire infecté ;<br />

– lupus.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Le traitement des formes idiopathiques est controversé et peu<br />

efficace. L’évolution est chronique et le pronostic est variable, de<br />

nombreux patients développant une insuffisance rénale chronique.<br />

Syndrome d’Alport<br />

1. Présentation clinique<br />

Le syndrome d’Alport est une néphropathie héréditaire dont la<br />

forme classique est liée à l’X (85 %), rarement autosomique<br />

récessive (15 %). L’atteinte est plus sévère chez les hommes, qui<br />

présentent une glomérulonéphrite chronique avec hématurie<br />

(constante) et parfois une surdité. La maladie est moins sévère<br />

chez les femmes, qui peuvent parfois être asymptomatiques ou<br />

avoir une hématurie isolée.<br />

2. Anatomopathologie<br />

L’atteinte caractéristique est un amincissement de la membrane<br />

basale glomérulaire. L’immunofluorescence permet, avec<br />

des anticorps spécifiques, d’étudier l’expression des chaines<br />

alpha du collagène IV.<br />

3. Étiologie<br />

La forme liée à l’X est due à une mutation du gène COL4A5<br />

codant la chaîne alpha5 du collagène IV, ou plus rarement des<br />

874<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

20 juin 2009<br />

COL4A3 et COL4A4 codant les chaînes alpha3 et alpha4 du collagène<br />

IV pour les formes récessives. Le collagène IV, composant<br />

important de la membrane basale glomérulaire, est également<br />

exprimé dans la cochlée, expliquant l’atteinte rénale et auditive.<br />

4. Traitement et évolution<br />

Il n’y a pas de traitement spécifique, et l’évolution se fait<br />

constamment vers l’insuffisance rénale terminale chez les<br />

hommes. De nombreuses femmes peuvent rester asymptomatiques<br />

dans la forme liée à l’X.<br />

Traitement symptomatique et néphroprotecteur<br />

des néphropathies glomérulaires<br />

Le but du traitement est de ralentir la progression de la maladie<br />

rénale et de diminuer le risque de complications cardiovasculaires.<br />

Le risque cardiovasculaire est très augmenté chez tous les<br />

patients ayant une protéinurie et/ou une insuffisance rénale, surtout<br />

au cours du diabète.<br />

Qu’un traitement spécifique (corticoïdes, immunosuppresseur,<br />

traitement d’une infection…) soit disponible ou non, les mesures<br />

suivantes doivent être systématiquement entreprises en cas de<br />

glomérulopathie chronique :<br />

– réduction de la pression artérielle, avec un objectif inférieur à<br />

130/80 mmHg. Les IEC et les sartans doivent être utilisés en<br />

première intention, car outre leur action antihypertensive, ils ont<br />

également un important effet antiprotéinurique. Ils doivent être<br />

prescrits à doses progressives. Il est souvent nécessaire d’associer<br />

d’autres classes d’antihypertenseurs, notamment les<br />

diurétiques, pour atteindre la cible thérapeutique,<br />

– réduire la protéinurie, en utilisant un IEC et/ou un sartan, même<br />

en l’absence d’hypertension, en augmentant progressivement<br />

les doses en fonction de la tolérance de ces traitements. L’association<br />

IEC + sartan est controversée mais peut être discutée ;<br />

– traitement hypolipémiant par statines et correction des autres<br />

facteurs de risque cardiovasculaires ;<br />

– traitement symptomatique du syndrome œdémateux par restriction<br />

hydrosodée et diurétiques ;<br />

– anticoagulation efficace préventive en cas d’hypoalbuminémie<br />

< 20 g/L pour prévenir le risque de thrombose veineuse,<br />

notamment des veines rénales. Ce risque est plus élevé dans la<br />

GEM que dans d'autres glomérulopathies ;<br />

– éducation du patient sur l’éviction des néphrotoxiques (antiinflammatoires,<br />

produits de contraste iodés…) et l’adaptation<br />

des doses de médicaments à la fonction rénale.•<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données<br />

publiées dans cet article.<br />

POUR EN SAVOIR<br />

Maladies glomérulaires chroniques<br />

Monographie. Rev Prat 2003;53(18):1991-2050.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN


Mise à jour juin 2009.<br />

Question accompagnée d’un Focus (Rev Prat 2009;59:837).<br />

OBJECTIFS<br />

DIAGNOSTIQUER<br />

une polykystose rénale.<br />

La découverte de multiples kystes dans le parenchyme<br />

rénal est devenue fréquente depuis l'avènement de techniques<br />

d'imagerie performantes et simples d'accès.<br />

Le terme de polykystose rénale doit être réservé à deux maladies<br />

génétiques : la polykystose rénale autosomique dominante (PKD)<br />

et la polykystose rénale autosomique récessive (PKR). Le diagnostic<br />

d'une maladie génétique est un diagnostic grave, il engage<br />

l'individu et toute sa famille. Le diagnostic doit être certain. La<br />

PKD s'accompagne de manifestations extra-rénales graves. Il ne<br />

faut pas méconnaître ce diagnostic.<br />

Définitions<br />

Kyste rénal<br />

Un kyste rénal est une cavité remplie de liquide, limitée par une<br />

couche de cellules épithéliales, dont l’origine est une dilatation de<br />

n’importe quelle partie du néphron ou du tubule collecteur.<br />

La présence de kystes dans les reins est un événement banal.<br />

Dans des séries autopsiques, plus de 50 % des sujets de 50 ans<br />

présentent au moins un kyste rénal microscopique.<br />

Transmission autosomique dominante<br />

Le mode de transmission autosomique dominant se caractérise<br />

par la présence du trait phénotypique si un seul allèle muté<br />

est présent. La transmission est verticale, il n'y a pas de saut de<br />

génération. Le risque de transmission du trait phénotypique à la<br />

descendance est de 50 %.<br />

Transmission autosomique récessive<br />

Le mode de transmission autosomique récessif se caractérise<br />

par la présence du trait phénotypique si les deux allèles du gène<br />

sont mutés. Chaque parent apporte un allèle muté. Les parents<br />

sont indemnes de l'affection. Le risque d'apparition de la maladie<br />

dans la fratrie est de 25 %.<br />

Pour plus d'information sur les modes de transmission mendéliens<br />

et la réalisation d'un arbre généalogique, nous conseillons le<br />

site Orphaschool (http://www.orpha.net/orphaschool/elearn1.htm)<br />

Maladies kystiques rénales (MKR)<br />

L'origine des kystes rénaux peut être acquise, congénitale ou<br />

génétique.<br />

Kystes acquis du rein (tableau 1)<br />

II Q 277<br />

POLYKYSTOSE RÉNALE<br />

Dr Stéphane Burtey et Pr Yvon Berland<br />

Centre de néphrologie et transplantation rénale, hôpital de la Conception, 13005 Marseille, France<br />

StephaneB@ap-hm.fr<br />

RR<br />

La présence de kystes dans les reins est un événement fréquent<br />

chez l'homme.<br />

1. Les kystes simples du rein<br />

Il s'agit de kystes solitaires ou multiples. Ils sont de localisation<br />

corticale ou médullaire. Ils sont fréquents dans la population<br />

générale. Ils sont exceptionnels chez l'enfant et rares avant 30 ans.<br />

Après 50 ans ils deviennent fréquents. Leur fréquence augmente<br />

avec l'âge, ainsi plus de 25 % des hommes âgés de 75 ans présentent<br />

au moins un kyste rénal en échographie et dans 10 %<br />

des cas, ils sont bilatéraux.<br />

TABLEAU 1<br />

Kystes acquis et congénitaux du rein<br />

Kystes acquis Kystes congénitaux<br />

Kystes simples du rein Maladie de Cacchi et Ricci<br />

Multikystose acquise du dialysé Dysplasie multikystique<br />

Kystes du sinus rénal Diverticules pyélocaliciels<br />

Kystes multiloculaires<br />

Kyste hydatique<br />

Kystes de l’hypokaliémie chronique<br />

Néphropathie au lithium<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009 1


RR Q 277 II<br />

POLYKYSTOSE RÉNALE<br />

2<br />

TABLEAU 2<br />

TABLEAU 3<br />

I<br />

II<br />

IIF*<br />

III<br />

IV<br />

Classification de Bosniak<br />

Paroi du kyste Cloisons Calcifications Rehaussement<br />

❚ Fine et régulière<br />

❚ Épaississement régulier<br />

❚ Épaississement régulier<br />

❚ Épaississement régulier<br />

❚ Épaississement important<br />

et irrégulier<br />

Maladies kystiques rénales génétiques<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009<br />

❚ Non<br />

❚ Quelques-unes fines<br />

Multiples, épaississement<br />

régulier et fin<br />

❚ Mesurables et irrégulières<br />

❚ Très épaisses<br />

et irrégulières<br />

* : F pour follow-up : à surveiller. Un diamètre supérieur à 3 cm entraîne le passage en IIF.<br />

❚ Non<br />

❚ Lisses et fines<br />

❚ Nodulaires, épaisses<br />

❚ Nodulaires, épaisses, irrégulières<br />

❚ Nodulaires, épaisses,<br />

irrégulières<br />

❚ Non<br />

❚ Non<br />

❚ Non<br />

Maladie Signes associés Gène<br />

❚ Oui<br />

❚ Oui, tissu et kyste<br />

Transmission autosomique dominante<br />

Polykystose rénale autosomique dominante ❚ kystes hépatiques ❚ anévrismes des artères<br />

cérébrales<br />

❚ PKD1 (16p13) ❚ PKD2 (4q21)<br />

Maladie de von Hippel-Lindau ❚ Cancer du rein ❚ hémangioblastome (rétine,<br />

système nerveux central) ❚ kyste du pancréas<br />

❚ phéochromocytome<br />

❚ VHL (3p26)<br />

Sclérose tubéreuse de Bourneville ❚ Atteinte cutanée (tumeurs bénignes,<br />

taches café au lait) ❚ épilepsie ❚ retard mental<br />

❚ angiomyolipomes rénaux ❚ astrocytome<br />

❚ TSC1 (9q34) ❚ TSC2 (16p13)<br />

Maladie kystique de la médullaire ❚ hyperuricémie et goutte précoce ❚ petits reins ❚ UMOD (16p12.3) ❚ MCKD1 (1q21)<br />

Maladie glomérulokystique ❚ MODY V ❚ hypoplasie rénale ❚ HNF1 (17cen)<br />

Transmission autosomique récessive<br />

Polykystose rénale autosomique récessive ❚ fibrose hépatique périportale<br />

❚ hypertension portale<br />

❚ PKHD1 (6p21.1-p12)<br />

Néphronophtise ❚ petits reins ❚ kystes médullaire ❚ NPHP1 (2q13) ❚ INVS (9q31)<br />

❚ atteinte ophtalmologique possible ❚ NPHP3 (3q22) ❚ NPHP4 (1p36)<br />

❚ syndrome de Joubert ❚ NPHP5 (3q13) ❚ NPHP6 (12q21<br />

❚ AHI1 (6q23.3 ), ❚ GLIS2 (16p13.3)<br />

Syndrome de Bardet-Biedl ❚ obésité ❚ polydactylie ❚ hypogénitalisme ❚ BBS1 (11q13) ❚ BBS2 (16q21)<br />

❚ rétinite pigmentaire ❚ retard mental ❚ BBS3 (3p12-q13) ❚ BBS4 (15q22.3)<br />

❚ BBS5 (2q31) ❚ BBS6 (20p12)<br />

❚ BBS7 (4q27) ❚ BBS8 (14q32.11)<br />

❚ BBS9 (7p14) ❚ BBS10 (12q)<br />

❚ BBS11 (9q33.1) ❚ BBS12 (4q27)<br />

Transmission dominante liée à l’X<br />

Syndrome oro-facio-digital de type 1 ❚ dysmorphie faciale ❚ anomalies des membres<br />

❚ retard mental<br />

❚ OFD1 (Xp22.3-p22.2)


Leur physiopathologie est inconnue. Ils sont asymptomatiques<br />

le plus souvent. Une atypie échographique, paroi épaisse, cloison,<br />

calcification, devra faire réaliser un scanner rénal permettant<br />

de classer le kyste. La classification la plus utilisée est la classification<br />

de Bosniak (tableau 2). Le but est d'identifier les rares<br />

cancers rénaux kystiques.<br />

2. La multikystose acquise du dialysé et de l'insuffisance<br />

rénale chronique<br />

L'insuffisance rénale chronique (IRC) s'accompagne fréquemment<br />

de l'apparition de multiples kystes rénaux. Il ne faut pas<br />

confondre cette complication de l'IRC avec une maladie génétique<br />

rénale et en particulier avec la PKD. La présence de ces multiples<br />

kystes rénaux ne s'accompagne pas d'une augmentation du<br />

volume rénal, qui est constante quand la polykystose rénale<br />

autosomique dominante se complique d'insuffisance rénale. Sa<br />

fréquence est de 90 % après 10 ans d'hémodialyse. C'est un<br />

état précancéreux. Sa physiopathologie est inconnue.<br />

Kystes congénitaux (tableau 1)<br />

Maladies kystiques rénales génétiques (tableau 3)<br />

Il existe de nombreuses maladies rénales kystiques génétiques.<br />

Elles sont classées en fonction de leur mode de transmission.<br />

La plus fréquente est la polykystose rénale autosomique<br />

dominante. Le diagnostic différentiel repose sur l'analyse du<br />

mode de transmission (arbre généalogique), le volume rénal et<br />

les tumeurs associées (échographie et scanner rénal) et les<br />

manifestations cliniques associées (atteinte hépatique, cutanée<br />

et syndrome dysmorphique). Toutes les MKRG sont des ciliopathies.<br />

Il s'agit de maladies du cil primaire.<br />

Polykystose rénale autosomique dominante<br />

La polykystose rénale autosomique dominante est une maladie<br />

génétique fréquente de l'adulte. Elle se caractérise par la présence<br />

de nombreux kystes rénaux et un mode de transmission<br />

autosomique dominant.<br />

Épidémiologie et génétique<br />

1. Épidémiologie<br />

C'est la maladie génétique rénale la plus fréquente. Elle touche<br />

1 personne sur 800 dans la population générale. Elle est responsable<br />

de 8 % des cas d'insuffisance rénale chronique terminale<br />

en France.<br />

2. Génétique<br />

C'est une affection de transmission autosomique dominante.<br />

Deux gènes peuvent être mutés dans la PKD. Dans 85 % des cas<br />

il s'agit de PKD1 et dans 15 % des cas de PKD2. PKD1 est localisé<br />

en 16p13, c'est un gène de 52 Kb comportant 46 exons transcrits<br />

en un ARNm de 14 kb qui est traduit en une protéine membranaire<br />

de 4 302 amino-acides, la polycystine-1 (PC-1). Sa fonction précise<br />

est inconnue. PKD2 est localisé en 4q21, c'est un gène de 68 kb<br />

Q RR277<br />

comportant 15 exons transcrit en un ARNm de 5 kb traduit en une<br />

protéine membranaire de 968 amino-acides, la polycystine-2<br />

(PC-2). La polycystine-2 est un canal calcique de la famille TRP.<br />

Il existe une grande variabilité dans l'expression clinique de la<br />

PKD. Cette variabilité est génétiquement contrôlée. Les mutations<br />

sont privées, il n'y a pas de mutations récurrentes. Les<br />

patients mutés dans ont un âge moyen de mise en dialyse de<br />

54 ans contre 74 ans pour ceux mutés dans PKD2. Le siège de la<br />

mutation dans PKD1 a aussi un impact sur la sévérité de la maladie<br />

rénale et extrarénale. Le gène modificateur majeur de la<br />

symptomatologie clinique est PKD1. La présence d'une mutation<br />

faux sens ou un polymorphisme codant dans l'autre allèle de<br />

PKD1 peut aggraver le phénotype rénal. Le génotype a un<br />

impact important sur l'expression clinique de la maladie.<br />

La présence de gènes modificateurs n'explique pas toute la<br />

variabilité de l'expression clinique de la maladie rénale kystique.<br />

La physiopathologie de la kystogenèse apporte des informations<br />

pour mieux la comprendre. Un phénomène mal compris est, bien<br />

que toutes les cellules tubulaires rénales portent la mutation<br />

transmise (mutation germinale), les kystes ne se développent<br />

qu'à partir de 1 à 2 % des néphrons. Il a été proposé un modèle<br />

en deux coups qui s'est transformé en modèle en trois coups<br />

(fig. 1).<br />

Pour qu'une cellule acquiert un phénotype kystique, la mutation<br />

dans un seul allèle de PKD1 ne suffit pas. Il faut que la quantité de<br />

polycystine 1 et/ou 2 passe sous les 50 % (événement A sur le<br />

schéma). Il a été mis en évidence deux façons de diminuer la quantité<br />

de polycystine : la présence d'une mutation somatique (événement<br />

génétique) dans l'allèle non muté ou la diminution d'expression<br />

de la polycystine-2 par l'activation du récepteur du TNF, par<br />

exemple lors d'un syndrome inflammatoire. La perte d'un cil primaire<br />

fonctionnel est un événement critique après la perte des<br />

polycystines. La cellule tubulaire rénale est devenue après ce<br />

deuxième coup moléculaire une cellule kystique. Elle n'exprimera<br />

ce potentiel que s’il y a un signal de prolifération la forçant à se diviser.<br />

C'est le troisième coup (B sur le schéma). Il faut que la cellule<br />

déficiente en polycystine se divise, durant la régénération normale<br />

du rein (il y a très peu de mitoses dans le parenchyme rénal adulte<br />

expliquant l'accumulation des mutations somatiques) ou durant la<br />

réparation tubulaire après une agression comme une nécrose<br />

tubulaire aiguë. La cellule déficiente en polycystines est incapable<br />

d'arrêter sa prolifération et d'organiser correctement ses mitoses<br />

pour maintenir une architecture tubulaire normale. Le kyste se<br />

forme (C sur le schéma) et il va croître, détruisant le parenchyme<br />

alentour. La croissance kystique (E sur le schéma) se fait essentiellement<br />

par une sécrétion nette transépithéliale associée à des<br />

anomalies de la matrice extra-cellulaire et de la prolifération.<br />

Les polycystines sont des freins de la prolifération tubulaire<br />

rénale et les architectes de la tubulogenèse. Elles jouent un rôle<br />

majeur dans le rein par l'intermédiaire de leur fonction dans le cil<br />

primaire, mais aussi par leur rôle dans la mise en place des jonctions<br />

intercellulaires.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009 3


RR Q 277 II<br />

POLYKYSTOSE RÉNALE<br />

4<br />

Deuxième coup<br />

moléculaire<br />

FIGURE 1 Modèle en trois coups de la polykystose rénale autosomique dominante. Toutes les cellules tubulaires portent une mutation dans PKD1 par exemple.<br />

L'événement A, le deuxième coup moléculaire, ici une mutation somatique dans l'autre allèle de PKD1, transforme la cellule tubulaire en cellule kystique.<br />

Pour que cette cellule exprime pleinement son potentiel, il faut un troisième coup, la cellule doit proliférer par exemple après une nécrose tubulaire (B).<br />

La régénération va nécessiter la multiplication des cellules. La cellule sans polycystine va donner naissance à un kyste au lieu de former un tubule (C).<br />

Le kyste est initialement connecté à la lumière, en croissant, il se sépare de cette dernière (D). Initialement la prolifération n'est pas clonale. La croissance<br />

des kystes se fait essentiellement par une sécrétion transépithéliale nette (E). Les kystes « anciens » sont clonaux.<br />

Le modèle en trois coups permet de comprendre la variabilité<br />

d'expression de la PKD. La kystogenèse est un phénomène stochastique<br />

dépendant de la fréquence de survenue des deuxième<br />

et troisième coups moléculaires.<br />

Manifestations cliniques<br />

La polykystose rénale autosomique dominante est une maladie<br />

systémique. Il existe des manifestations secondaires à la présence<br />

des kystes ou d'une maladie du tissu élastique et du muscle lisse.<br />

Il existe des atteintes rénales et extra-rénales. Les deux complications<br />

majeures de la PKD sont le développement de l'insuffisance<br />

rénale chronique et les anévrismes des artères cérébrales. Le<br />

diagnostic peut être posé devant une de ces manifestations cliniques,<br />

mais de plus en plus lors du dépistage familial.<br />

1. Les kystes<br />

Les kystes rénaux sont constants. Leur augmentation de volume<br />

est lente, progressive et bilatérale. Ils sont responsables de l'ensemble<br />

des manifestations rénales de la PKD (fig. 1 et 2). La<br />

sévérité des symptômes rénaux et de l'insuffisance rénale est<br />

corrélée au volume kystique. Il se complique d'une augmentation<br />

du volume rénal qui est responsable de douleurs liées à la distension<br />

de la capsule. Les douleurs peuvent être le symptôme d'une<br />

hémorragie intrakystique (colique néphrétique, figure 2) d'une<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009<br />

Troisième coup<br />

moléculaire<br />

Régénération<br />

tubaire et<br />

mise en place<br />

du kyste<br />

Séparation du kyste de la lumière tubulaire<br />

A B C D<br />

Sécrétion<br />

Modification<br />

de la matrice<br />

extracellulaire<br />

Kyste<br />

clonal<br />

ancien<br />

Prolifération<br />

Kyste<br />

non clonal<br />

récent<br />

Croissance<br />

kystique<br />

migration lithiasique, d'infections (infections de kystes et pyélonéphrite).<br />

Les kystes rénaux peuvent être responsables d'épisodes<br />

d'hématurie macroscopique. L'insuffisance rénale est<br />

secondaire à la destruction du parenchyme rénal sain par les<br />

kystes. Elle peut survenir à tous les âges. Elle apparaît en général<br />

dans la quatrième décennie et 50 % des polykystiques sont en<br />

traitement de suppléance à 54 ans. Ensuite, tous les 10 ans, 10 %<br />

des patients restants développent une IRCT. Pour PKD2, cette<br />

séquence est décalée en général de 20 ans. La vitesse de dégradation<br />

du débit de filtration glomérulaire est approximativement<br />

de – 5 mL/an.<br />

Les kystes hépatiques apparaissent chez 70 % des patients, plus<br />

tardivement que les kystes rénaux et plus fréquemment chez<br />

les femmes. Ils sont le plus souvent asymptomatiques (fig. 3).<br />

La principale complication est liée à l'hépatomégalie et à la<br />

compression des organes de voisinage. Ils ne se compliquent<br />

pas d'insuffisance hépato-cellulaire. La complication la plus<br />

redoutable est l'infection.<br />

Les autres localisations kystiques sont rarement symptomatiques. Il<br />

existe des kystes pancréatiques chez 30 % des patients, des<br />

kystes arachnoïdiens chez 10 % des patients, tous les organes<br />

solides intra-abdominaux peuvent présenter des kystes. Les<br />

kystes de l'épididyme peuvent se compliquer de stérilité.<br />

E


2. Les atteintes non kystiques<br />

L'hypertension artérielle : sa physiopathologie est incomplètement<br />

comprise. Elle est secondaire à une stimulation du système<br />

rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA) par des modifications<br />

de la vascularisation rénale liées à la présence des kystes. Une<br />

perturbation du métabolisme du monoxyde d'azote joue peutêtre<br />

un rôle dans la physiopathologie de l'hypertension artérielle.<br />

Elle est précoce et apparaît avant le développement de l'IRC.<br />

Elle doit être systématiquement dépistée chez les patients porteurs<br />

de PKD ou à risque de PKD et cela dès l'enfance. Une<br />

prise tensionnelle annuelle doit être systématiquement proposée.<br />

Il s'agit d'un facteur important de progression de l'insuf -<br />

fisance rénale. Elle doit être prise en charge le plus précocement<br />

possible.<br />

Les anévrismes des artères cérébrales sont une complication qui<br />

touche 10 % des polykystiques tout-venant et 20 % de ceux présentant<br />

des antécédents familiaux d'anévrismes. Ils se compliquent<br />

de rupture plus précoce que dans la population générale.<br />

La symptomatologie n'est pas différente de celle des anévrismes<br />

de la population générale.<br />

Dans les familles à risque, un dépistage par angioIRM doit être<br />

proposé à partir de l'âge de 20 ans. Si l'angioIRM initiale est<br />

négative, un suivi tous les 10 ans semble raisonnable. La prise en<br />

charge de ces anévrismes n'est pas différente de ceux de la<br />

population générale. Il existe un risque plus important de dissection<br />

des vaisseaux lors des artériographies. La prise en charge<br />

de ces anévrismes doit être multidisciplinaire. La présence<br />

d'anévrisme sur d'autres artères de moyen calibre est possible,<br />

mais moins fréquente.<br />

L’atteinte cardiaque : la PKD se complique dans 20 % des cas<br />

d'une valvulopathie (insuffisance mitrale, prolapsus valvulaire<br />

mitral, insuffisance aortique). L'apparition d'une hypertrophie<br />

ventriculaire gauche est fréquente chez ces patients.<br />

L’atteinte pulmonaire : les patients polykystiques présenteraient<br />

plus de bronchectasies que les sujets de la population générale.<br />

C'est une manifestation radiologique de découverte récente.<br />

Son impact clinique doit encore être évalué.<br />

La diverticulose digestive : la symptomatologie est sans particularité<br />

par rapport à la population générale. Les deux points remarquables<br />

sont la précocité d'apparition des diverticules et le développement<br />

possible sur tout le tube digestif.<br />

L’hernie inguinale est plus fréquente que dans la population normale.<br />

Facteurs pronostiques<br />

Les deux facteurs pronostiques ayant le plus d'impact sur le<br />

développement d'une insuffisance rénale sont le génotype PKD1<br />

vs PKD2 et le volume rénal. Plus les reins sont gros, plus ils augmentent<br />

de volume rapidement, plus le risque d'insuffisance<br />

rénale chronique est important. Les autres facteurs de mauvais<br />

pronostic sont le sexe masculin, l'âge au diagnostic clinique, la<br />

précocité des épisodes d'hématurie macroscopique, la présence<br />

d'une HTA, la présence d'une microalbuminurie ou d'une<br />

protéinurie, le tabagisme. La présence de certains polymorphismes<br />

codants ou de mutation faux sens de pénétrance<br />

incomplète peuvent modifier l'expression clinique de la maladie.<br />

Prise en charge<br />

A B<br />

A : rein polykystique (scanner non injecté) compliqué d’une hémorragie<br />

intrakystique (flèche rouge). B : rein polykystique (scanner injecté) : les kystes ne sont pas rehaussés<br />

par le produit de contraste.<br />

Q RR277<br />

Il n'existe pas de traitement curatif de la polykystose rénale<br />

autosomique dominante. La seule mesure ayant montré son efficacité<br />

pour ralentir la progression de l'insuffisance rénale chronique<br />

est le contrôle de l'HTA. La décennie qui vient verra apparaître<br />

des traitements spécifiques qui permettront de ralentir la<br />

progression de cette affection. Pour l'instant, la mesure la plus<br />

importante reste le contrôle de l'HTA.<br />

Les médicaments en cours d'évaluation dans des essais thérapeutiques<br />

sont les antagonistes des récepteurs V2 de l'ADH, les<br />

inhibiteurs de mTOR, la somatostatine et le double blocage du<br />

système rénine-angiotensine aldostérone par les inhibiteurs de<br />

l'enzyme de conversion et les sartans.<br />

1. Dépistage de l’HTA<br />

Elle doit être systématiquement recherchée dès le plus jeune<br />

âge chez les sujets à risque ou les sujets présentant une PKD.<br />

Elle peut apparaître dès l'enfance. La prise tensionnelle se fera à<br />

un rythme annuel. Si une HTA est dépistée, l'objectif tensionnel<br />

FIGURE 2 FIGURE 3<br />

Scanner injecté d’une polykystose rénale<br />

autosomique dominante avec reins polykystiques et<br />

quelques kystes hépatiques.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009 5


RR Q 277 II<br />

POLYKYSTOSE RÉNALE<br />

6<br />

est de 130/80 mmHg. Aucun médicament n'a montré une supériorité<br />

en termes de néphroprotection. En cas d'HVG, de micro -<br />

albuminurie ou d'une protéinurie associée, le choix se fera en<br />

premier sur un bloqueur du SRAA : inhibiteur de l'enzyme de<br />

conversion ou antagoniste des récepteurs de l'angiotensine (sartans).<br />

L'arrêt du tabac est capital pour ralentir la vitesse de progression<br />

de l'IRC et limiter le risque cardiovasculaire.<br />

2. Dépistage des anévrismes intracrâniens<br />

Le dépistage des anévrismes intracrâniens sera systématique<br />

chez les patients porteurs d'une polykystose dont un des parents<br />

a déjà présenté un anévrisme, une hémorragie intracérébrale ou<br />

méningée ou un AVC. Il reposera sur la réalisation d'une angioIRM<br />

tous les 10 ans. Le contrôle tensionnel et l'arrêt du tabac sont deux<br />

points capitaux pour limiter le risque de rupture d'anévrisme.<br />

3. Information à la famille<br />

La PKD est une maladie génétique. Il est important d'informer<br />

le patient du risque de transmission à sa descendance. Il faut que<br />

le patient informe les membres de sa famille de sa maladie génétique<br />

et du risque pour eux d'en être atteints. Le risque de transmission<br />

à la descendance est de 50 %. Un individu non atteint ne<br />

transmet pas la maladie à sa descendance. Une échographie<br />

rénale ne doit être réalisée qu'en cas de signe clinique ou du<br />

désir d'un dépistage. La réalisation d'une échographie rénale<br />

doit être faite en informant le patient des résultats possibles.<br />

Polykystose rénale autosomique récessive<br />

La PKR est une maladie pédiatrique rare. Sa prévalence est de<br />

1/30 000 naissances. C'est une affection grave de transmission<br />

autosomique récessive. Le risque de récurrence dans la fratrie<br />

est de 25 %. Le gène muté est PKHD1 localisé sur le chromosome<br />

6p12. Il code pour une protéine de 4 074 amino-acides, la fibrocystine.<br />

Sa fonction est inconnue. La PKR se caractérise par une<br />

atteinte rénale et hépatique. La sévérité des deux atteintes est<br />

variable d'un patient à l'autre. La sévérité de la maladie est variable.<br />

La présentation néonatale peut être très sévère avec une hypoplasie<br />

pulmonaire conduisant au décès. Avant la première année, le diagnostic<br />

est souvent fait devant l'atteinte rénale. Durant la période<br />

infantile, l'atteinte rénale (gros rein ou HTA) est souvent sur le devant<br />

de la scène. Plus tard, c'est souvent devant l'atteinte hépatique<br />

que le diagnostic est porté ou devant la présence d'une HTA. Le<br />

diagnostic précoce est de mauvais pronostic rénal et vital.<br />

Maladie rénale<br />

La lésion rénale de base est une dilatation des tubes collecteurs.<br />

Cette dilatation peut ensuite donner naissance à des<br />

kystes. Le diagnostic peut être anténatal ou néonatal sur une<br />

échographie qui mettra en évidence des gros reins hyperéchogènes.<br />

Le volume rénal a ensuite tendance à se normaliser avec<br />

l'apparition de kystes rénaux. Il existe quelques cas d'augmentation<br />

du volume rénal. L'atteinte rénale se complique d'IRCT dans<br />

20 à 30 % des cas. L'HTA et fréquente.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009<br />

Maladie hépatique<br />

L'atteinte hépatique se caractérise par une fibrose hépatique<br />

se compliquant d'une hypertension portale associée à une prolifération<br />

des canaux biliaires. Les voies biliaires peuvent être<br />

dilatées. On parlera de maladie de Caroli qui prédispose aux<br />

cholangites. La complication principale de la fibrose hépatique<br />

périportale est le développement d'une hypertension portale qui<br />

se compliquera de varices œsophagiennes et d'une spléno -<br />

mégalie majeure.<br />

Diagnostic<br />

Le diagnostic de la polykystose rénale autosomique dominante<br />

est un diagnostic fréquent. Il est important de ne pas porter un<br />

diagnostic par excès. Le diagnostic d'une maladie génétique<br />

implique l'individu mais aussi toute sa famille.<br />

Les autres maladies kystiques rénales ont des complications<br />

spécifiques qui nécessiteront une prise en charge spécialisée<br />

(par exemple, la maladie de von Hippel-Lindau ou la sclérose<br />

tubéreuse de Bourneville et la fréquence des cancers rénaux<br />

associés). Il est indispensable d'avoir un avis spécialisé quand le<br />

diagnostic est suspecté.<br />

Circonstances du diagnostic<br />

La découverte de kystes rénaux peut se faire dans des circonstances<br />

variées :<br />

– devant des symptômes : douleur, hématurie, infection urinaire,<br />

organomégalie, bilan d'une HTA, bilan d'une insuffisance rénale<br />

chronique ;<br />

– lors d'un examen systématique ;<br />

– enfin, dans la PKD, le diagnostic est souvent fait lors d'un examen<br />

de dépistage dans la famille.<br />

Qu’est-ce qui peut tomber<br />

à l’examen ?<br />

Deux types de dossier sont possibles.<br />

➙ Le premier est un dossier diagnostic<br />

« classique » de PKD, avec des questions portant<br />

sur la maladie.<br />

➙ Le deuxième type de dossier serait<br />

un dossier transversal neurologie-néphrologie<br />

possible avec une rupture d'anévrisme<br />

chez un polykystique. Enfin, il est possible,<br />

chez un insuffisant rénal chronique présentant<br />

des kystes à l'échographie, de vous faire discuter<br />

PKD versus multikystose acquise.


Polykystose rénale<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

La polykystose rénale autosomique dominante est<br />

une maladie rénale génétique fréquente qui est responsable<br />

de 8 % des cas d'IRCT en France. Le diagnostic repose sur la<br />

présence de multiples kystes rénaux et sur une enquête familiale<br />

en faveur d'un mode de transmission autosomique dominant.<br />

La polykystose rénale autosomique dominante est une<br />

maladie systémique qui peut se compliquer d'HTA précoce et<br />

d'anévrismes des artères cérébrales. Ces complications sont<br />

dépistables et doivent bénéficier d'une sanction thérapeutique.<br />

La présence de kystes rénaux n'est pas synonyme de<br />

polykystose rénale autosomique dominante. Il existe d'autres<br />

maladies kystiques rénales. Le volume rénal est un élément<br />

important qui est une aide au diagnostic et un marqueur<br />

pronostique. Dans les cas difficiles, un avis spécialisé est<br />

indispensable.<br />

Informations indispensables<br />

La PKD se caractérise par la présence de kystes rénaux et par<br />

le mode de transmission autosomique dominant. Il faut évaluer le<br />

nombre de kystes, le volume du parenchyme rénal, l'absence de<br />

tumeurs associées et le mode de transmission. La recherche d'une<br />

atteinte cutanée, ophtalmologique, d'un syndrome malformatif<br />

permettra d'évoquer d'autres maladies plus rares (tableau 3). L'atteinte<br />

hépatique permet en général de faire le diagnostic de PKR.<br />

1. Présence de kystes et taille des reins<br />

L'échographie et le scanner permettront de mettre en évidence<br />

deux gros reins déformés par de multiples kystes corticaux et<br />

médullaires dans la PKD (fig. 2). Les critères échographiques<br />

retenus (critères de Ravine) pour porter le diagnostic de PKD<br />

chez un patient apparenté à un patient présentant une PKD<br />

associée à une mutation de PKD1 sont la présence :<br />

– avant 30 ans, d'au moins 2 kystes rénaux uni- ou bilatéraux ;<br />

– entre 30 et 60 ans, d'au moins 2 kystes dans chaque rein ;<br />

– après 60 ans, d'au moins 4 kystes dans chaque rein.<br />

Après 30 ans, l'absence de kystes dans les reins élimine le<br />

diagnostic de PKD.<br />

En l'absence de notion de liaison à PKD1 ou d'identification<br />

d'une mutation dans PKD1 (cas les plus fréquents), l'utilisation<br />

des critères récemment définis par Pei est recommandée. Pour<br />

porter le diagnostic de PKD, il faut la présence :<br />

– avant 40 ans, d'au moins 3 kystes unilatéraux ou bilatéraux ;<br />

– entre 40 ans et 59 ans, d'au moins 2 kystes dans chaque rein ;<br />

– après 60 ans, d'au moins 4 kystes dans chaque rein.<br />

Après 40 ans, la présence de moins de 2 kystes élimine le diagnostic<br />

de polykystose rénale autosomique dominante.<br />

S'il n'y a pas d'histoire familiale, il est indispensable d'évaluer le<br />

volume rénal et d'avoir un avis néphrologique avant d'affirmer le<br />

diagnostic. Chez un insuffisant rénal chronique, des kystes<br />

rénaux, sans augmentation du volume rénal, sans histoire familiale,<br />

éliminent quasiment une PKD, il sera retenu le diagnostic de<br />

multikystose acquise de l'IRC. Il devra être recherché une autre<br />

cause à l'insuffisance rénale.<br />

Il est indispensable de rechercher des kystes rénaux chez les<br />

descendants et les ascendants pour réaliser un arbre généa logique.<br />

2. Arbre généalogique<br />

Il est indispensable. Il existe 5 à 10 % de mutation de novo.<br />

Dans 90 % des cas de PKD, il existe une histoire familiale. Il est<br />

nécessaire de réaliser une échographie rénale à la recherche<br />

d'une maladie kystique rénale dans la famille pour préciser le<br />

mode de transmission.<br />

Diagnostic de certitude de la PKD<br />

Le seul examen assurant un diagnostic de certitude est l'identification<br />

d'une mutation dans le gène PKD1 ou PKD2 ou une analyse<br />

de liaison si la famille est informative. La recherche de ces<br />

mutations est difficile. L'interprétation des mutations identifiées<br />

est parfois complexe. Une imagerie rénale performante et une histoire<br />

familiale sont habituellement suffisantes pour porter le diagnostic.<br />

Le diagnostic moléculaire, s'il n'est pas indiqué du fait de<br />

la complexité de sa réalisation, peut permettre dans des cas difficiles<br />

de redresser le diagnostic. La différence de pronostic des<br />

formes liées à PKD1 ou PKD2 peut rendre légitime le génotypage<br />

par analyse de liaison ou recherche directe de la mutation. La<br />

présence de mutations supplémentaires dans les gènes PKD1<br />

ou PKD2 modulant l'expression clinique de la maladie rend d'autant<br />

plus aiguë la question du diagnostic moléculaire pour affiner<br />

le pronostic dans cette maladie génétique rénale fréquente.<br />

Conclusion<br />

Q RR277<br />

La polykystose rénale autosomique dominante est une maladie<br />

génétique rénale fréquente. Son diagnostic est important, car il<br />

est indispensable de dépister certaines complications qui peuvent<br />

engager le pronostic vital et rénal. Le diagnostic repose sur<br />

une analyse pertinente et attentive de l'arbre généalogique et de<br />

l'imagerie rénale. Chez un insuffisant rénal chronique, ce ne doit<br />

pas être un diagnostic par défaut devant la présence de quelques<br />

kystes.<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts concernant les données<br />

publiées dans cet article.<br />

POUR EN SAVOIR<br />

Association Polykystose France (http://www.polykystose.org/) et le blog Kystes et<br />

autres choses (http://kystes.blog.lemonde.fr/).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 59<br />

Juin 2009 7


Élévation de la créatininémie<br />

Orientation diagnostique<br />

La concentration sanguine de la créatinine<br />

(créatininémie) fluctue peu autour d’une<br />

valeur normale et demeure relativement<br />

constante au cours du temps chez un individu<br />

donné. Cette stabilité relative reflète parfaitement l’homéostasie<br />

du « milieu intérieur » et illustre bien l’équilibre qui s’établit entre<br />

production et élimination de créatinine, une situation métabolique<br />

qui caractérise tout être vivant en bonne santé. Partant du<br />

postulat que la production de créatinine est constante chez un<br />

individu, il devient alors facile de prouver que toute augmentation<br />

de créatinine sanguine est en fait due à une réduction de<br />

son élimination. C’est la raison pour laquelle toute augmentation<br />

de créatininémie doit être considérée, jusqu’à preuve du<br />

contraire, comme un signe d’altération de la fonction rénale et<br />

de baisse de la filtration glomérulaire.<br />

Dans ce chapitre, nous aborderons trois aspects : le métabolisme<br />

de la créatinine dans l’organisme ; l’utilisation de la créatininémie<br />

comme marqueur de fonction rénale ; l’orientation diagnostique<br />

face à une élévation de la créatininémie.<br />

MÉTABOLISME DE LA CRÉATININE DANS<br />

L’ORGANISME — SIGNIFICATION ET VALEUR<br />

DE LA CRÉATININÉMIE EN PRATIQUE<br />

Métabolisme de la créatinine<br />

✓ La créatinine est une substance de faible poids moléculaire,<br />

113 daltons (30 nm de diamètre), présente chez tous les mammifères.<br />

La créatinine provient d’une déshydratation non-enzymatique<br />

de la créatine musculaire. Le taux de conversion de créatine<br />

en créatinine est influencé par le pH cellulaire et la<br />

température. La créatine est synthétisée dans le foie puis<br />

libérée dans la circulation, puis récupérée par les muscles et les<br />

tissus demandeurs d’énergie ou éliminée dans les urines. Les<br />

muscles striés contiennent près de 98 % du « pool total » de<br />

I-00-Q000 III-Q310<br />

Pr Bernard Canaud<br />

Service de néphrologie, dialyse et soins intensifs, hôpital Lapeyronie, CHU de Montpellier, 34295 Montpellier Cedex 5, France<br />

b-canaud@chu-montpellier.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

Objectifs<br />

• Devant une élévation de la créatininémie, argumenter<br />

les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens<br />

complémentaires pertinents.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

créatine, dont 60 à 70 % est présente sous la forme de phosphocréatine.<br />

La phosphocréatine représente une forme de stockage<br />

énergétique du muscle strié et des tissus. La libération par la<br />

créatinine kinase de dérivés phosphorylés hautement énergétiques<br />

(ATP/ADP) contribue ainsi aux besoins énergétiques et<br />

mitochondriaux de la cellule, et en particulier du muscle.<br />

✓ La production endogène de créatinine est relativement constante<br />

au cours du temps chez un individu donné. La quantité de<br />

créatinine produite quotidiennement chez un sujet dépend de<br />

plusieurs facteurs : âge, sexe, masse musculaire, situation métabolique<br />

(anabolisme/catabolisme) et apports alimentaires. De<br />

façon schématique, retenons que la production de créatinine<br />

endogène est en moyenne de 25 mg/kg/jour chez un adulte, avec<br />

des extrêmes allant de 15 à 35 mg/kg/jour. Ainsi, chez un sujet<br />

sain de 70 kg, âgé de 40 ans, la quantité de créatinine produite<br />

est voisine de 1 750 mg/jour ( 15,5 mmol/jour). En vertu de la<br />

balance masse qui s’applique à tout individu et garantit la constance<br />

de la créatininémie, il est possible d’affirmer qu’en phase<br />

d’équilibre métabolique la quantité de créatinine produite par<br />

unité de temps est équivalente à celle éliminée dans les urines.<br />

Soulignons néanmoins qu’une faible quantité de créatinine exogène<br />

apportée par l’alimentation (viande) vient s’ajouter à celle<br />

produite par l’organisme et se retrouve excrétée dans les urines.<br />

✓ L’élimination de la créatinine est exclusivement rénale. La créatinine<br />

présente les caractéristiques biologiques d’un bon marqueur<br />

de filtration glomérulaire. Elle n’est pas liée aux protéines.<br />

Elle filtre librement le glomérule, elle n’est pas métabolisée par<br />

le rein et est éliminée sous forme relativement inerte. Elle subit<br />

au cours de son transit tubulaire les phénomènes de concentration<br />

urinaire. Une très faible quantité de créatinine est sécrétée<br />

par le tubule. La sécrétion tubulaire contribue relativement peu<br />

1837


(10 à 15 %) à la masse de créatinine excrétée en présence d’une<br />

filtration glomérulaire normale. Cela n’est plus vrai en présence<br />

d’une insuffisance rénale chronique, dans ce cas, la part sécrétée<br />

devient très significative et tend à surestimer le débit de filtration<br />

glomérulaire évalué par la clairance de la créatinine. C’est la raison<br />

pour laquelle la clairance de la créatinine endogène n’est plus<br />

représentative de la filtration glomérulaire en présence d’une<br />

insuffisance rénale chronique avancée (DFG 30 mL/min/1,73 m 2 ).<br />

Soulignons qu’il n’y a pas de créatininase digestive chez l’homme,<br />

si bien que la dégradation digestive n’intervient pas dans les causes<br />

d’erreurs d’évaluation du débit de filtration glomérulaire par<br />

la créatinine.<br />

Signification de la créatininémie<br />

La créatininémie est la concentration sanguine de la créatinine.<br />

Sa valeur demeure relativement constante au cours du temps<br />

chez un individu donné. La créatininémie normale chez un adulte<br />

sain est comprise entre 80 et 130 μmol/L.<br />

La créatininémie d’un individu résulte d’un équilibre dynamique<br />

liant la quantité produite et la quantité éliminée. En pratique, la<br />

créatininémie est égale au rapport de son taux de production<br />

1838<br />

III-Q310<br />

Élévation de la créatininémie — Orientation diagnostique<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple<br />

de cas clinique, pourrait concerner l’item « Élévation de la créatininémie —<br />

Orientation diagnostique ».<br />

Cas clinique<br />

M. L., jeune cadre dynamique de 45 ans,<br />

consulte pour une élévation de la créatininémie<br />

de découverte récente. M. L.<br />

se plaint depuis quelques mois d’une<br />

fatigabilité inhabituelle sans autres<br />

symptômes, si ce n’est une nycturie une<br />

fois par nuit sans dysurie. Il n’a pas d’antécédents<br />

personnels particuliers. Son<br />

médecin traitant a fait faire un bilan biologique<br />

sanguin de débrouillage qui<br />

retrouve une créatininémie à 160 μmol/L.<br />

L’interrogatoire vous apprend que sa<br />

mère, âgée de 67 ans, est dialysée et<br />

qu’un de ses frères cadets a fait un accident<br />

vasculaire cérébral.<br />

À l’examen clinique il apparaît en très<br />

bonne forme. Le poids est de 71 kg pour<br />

une taille de 1,78 m. La tension artérielle<br />

est de 148/85 mmHg et la fréquence<br />

cardiaque 72/min enregistrée avec un<br />

moniteur automatisé et après 15 minutes<br />

de repos. L’examen cardiopulmonaire<br />

est normal. Il n’y a pas d’œdèmes des<br />

Créatininémie (μmol/L)<br />

membres inférieurs. La palpation de<br />

l’abdomen ne retrouve pas d’anomalies.<br />

Les pouls périphériques sont tous perçus.<br />

L’état nutritionnel est parfaitement<br />

conservé.<br />

Le bilan biologique sanguin réalisé<br />

donne les éléments suivants :<br />

Sang Valeurs<br />

◗ Créatininémie (μmol/L) 160<br />

◗ Urée (mmol/L) 7,0<br />

◗ Glycémie (mmol/L) 5,1<br />

◗ Na (mmol/L) 138<br />

◗ K (mmol/L) 4,4<br />

◗ HCO3 (mmol/L) 22<br />

◗ Albuminémie (g/L) 41<br />

◗ Calcémie (mmol/L) 2,35<br />

◗ Phosphorémie (mmol/L) 1,08<br />

◗ Hémoglobine (g/dL) 13,5<br />

◗ Globules rouges, (n 106 ) 4,2<br />

◗ Leucocytes (n 103 ) 5,6<br />

◗ Plaquettes (n 103 ) 185<br />

◗ CRP (mg/L) 1,3<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

65 ans<br />

65 ans<br />

DFG (mL/min/1,73 m 2 )<br />

Figure 1 La créatininémie est un marqueur trompeur du débit<br />

de filtration glomérulaire.<br />

L’échographie abdominale retrouve des<br />

reins augmentés de taille (rein droit 15<br />

6,5 cm et rein gauche 16 7 cm) porteurs<br />

d’une dizaine de kystes liquidiens.<br />

Il n’y a pas de dilatation des bassinets ni<br />

de lithiase. Sur le foie, il est également<br />

retrouvé quelques kystes liquidiens.<br />

Quel est la néphropathie vraisemblable<br />

de ce patient ?<br />

Quels sont les arguments étiologiques<br />

retenus ?<br />

Calculer le débit de filtration glomérulaire<br />

par la formule de Cockroft et préciser le<br />

stade de la maladie rénale. Analyser le<br />

reste du bilan biologique.<br />

Que faut-il penser des chiffres de<br />

tension artérielle ?<br />

Quels sont les conseils hygiénodiététiques<br />

et les éléments thérapeutiques<br />

à mettre en place ? Quel suivi proposer ?<br />

Quelles sont les complications potentielles<br />

de ce type de néphropathie ?<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008


sur son taux d’élimination. Cela est exprimé dans l’équation suivante<br />

: [Créatininémie] = taux de production/taux d’élimination,<br />

ce qui se traduit par une valeur de créatininémie en μmol/L =<br />

[mmol/min]/[mL/min].<br />

Ainsi, pour un sujet qui produit 15 000 mmol/j (10,4 mmol/min)<br />

de créatinine et a un débit de filtration glomérulaire de 100 mL/min,<br />

la créatininémie à l’équilibre est égale au rapport 10,4/100, soit<br />

104 μmol/L.<br />

Cette expression permet de souligner que les deux termes de<br />

l’équation (numérateur et dénominateur) sont nécessaires pour<br />

interpréter correctement une augmentation de créatininémie :<br />

le taux de production (numérateur) dépend essentiellement de<br />

la masse musculaire du sujet ; le taux d’élimination (dénominateur)<br />

dépend essentiellement de la fonction rénale et du débit<br />

de filtration glomérulaire.<br />

La créatinine est facilement dosée dans le sang, les urines et<br />

les différents milieux par des méthodes biologiques. De façon<br />

schématique, le dosage de la créatinine repose sur deux méthodes<br />

principales : une méthode colorimétrique (dite méthode de<br />

Jaffé) ; une méthode enzymatique (dite méthode spécifique).<br />

Pour des raisons économiques, les méthodes colorimétriques<br />

sont les plus largement répandues. Ces différentes méthodes<br />

donnent des résultats fiables et reproductibles, mais qui ne sont<br />

cependant pas strictement superposables. La méthode cinétique<br />

de Jaffé, basée sur le picrate alcalin, permet de réduire les interférences<br />

chromogéniques, mais tend néanmoins à surévaluer la<br />

« vraie concentration » de créatinine. Les méthodes enzymatiques<br />

sont basées sur la dégradation de la créatinine (créatinine<br />

déaminase assurant la formation d’ammoniaque ; créatininase<br />

assurant la formation d’hydrogène peroxyde) et la mesure de<br />

son métabolite terminal. Ces méthodes enzymatiques sont, de<br />

façon générale, très spécifiques et donnent des résultats de 10<br />

à 20 % inférieurs à ceux obtenus avec les méthodes colorimétriques.<br />

La méthode de dosage est donc un élément critique dans<br />

l’interprétation de la créatininémie et des indices rénaux qui en<br />

dérivent. C’est le cas pour les formules simplifiées utilisées pour<br />

estimer le débit de filtration glomérulaire. Soulignons aussi qu’en<br />

présence de valeurs élevées de créatininémie ( 800 μmol/L)<br />

les dilutions appliquées pour conserver la linéarité et la précision<br />

des dosages peuvent être également sources d’erreurs dans des<br />

laboratoires non rompus à ce type de dosage.<br />

CRÉATININÉMIE, CLAIRANCE<br />

DE LA CRÉATININE ENDOGÈNE ET DÉBIT<br />

DE FILTRATION GLOMÉRULAIRE<br />

La créatininémie est un marqueur commode pour estimer la<br />

fonction rénale qui a néanmoins des limites, et s’avère trompeur<br />

dans certains cas. C’est la raison pour laquelle les groupes d’experts<br />

internationaux recommandent l’utilisation du débit de filtration<br />

glomérulaire comme marqueur de fonction rénale.<br />

L’exemple le plus classique d’erreur est présenté par les sujets<br />

âgés. Dans ce cas, la créatininémie relativement basse norma-<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

à retenir<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

POINTS FORTS<br />

La créatinine est une substance de faible poids moléculaire<br />

(113 daltons) qui est produite par les muscles striés<br />

et participe aux besoins énergétiques et mitochondriaux<br />

de la cellule musculaire.<br />

La créatininémie est le reflet permanent de l’équilibre<br />

entre production et élimination. La production endogène<br />

de créatinine est relativement constante au cours du<br />

temps chez un individu donné. Elle dépend de l’âge, du<br />

sexe, de la masse musculaire et de l’équilibre métabolique.<br />

L’élimination de la créatinine est exclusivement rénale<br />

et par filtration glomérulaire. La sécrétion tubulaire<br />

contribue relativement peu à la quantité de créatinine<br />

excrétée lorsque la fonction rénale est normale.<br />

Le débit de filtration glomérulaire est le marqueur<br />

de référence utilisé pour évaluer la fonction rénale.<br />

Il est préférable d’estimer le DFG à partir des formules<br />

simplifiées plutôt que d’utiliser la créatininémie<br />

isolément comme marqueur de fonction rénale.<br />

L’élévation de la créatininémie est, à défaut, un reflet<br />

indirect d’insuffisance rénale. Le doublement<br />

de créatininémie chez un individu traduit une perte<br />

approximative de 50 % de la fonction rénale.<br />

Face à une élévation de la créatininémie,<br />

le clinicien doit se poser une série de questions :<br />

S’agit-il d’une valeur réellement anormale ?<br />

L’élévation est-elle significative cliniquement ?<br />

S’agit-il d’une primo-découverte ? S’agit-il d’une élévation<br />

rapide et récente, traduisant une insuffisance rénale aiguë ?<br />

S’agit-il d’une élévation lente et ancienne, traduisant<br />

une insuffisance rénale chronique ? S’agit-il du suivi<br />

d’un patient porteur d’une insuffisance rénale chronique ?<br />

La prise en charge diagnostique et thérapeutique est<br />

spécifique à chacune de ces situations.<br />

lement observée résulte en fait d’une double altération physiologique<br />

liée à l’âge ; d’une part, une réduction du débit de filtration<br />

glomérulaire par perte néphronique et sénescence rénale ;<br />

d’autre part, une perte proportionnellement plus importante de<br />

masse musculaire et de production de créatinine, du fait d’une<br />

sarcopénie liée au vieillissement. Dans ce cas, l’utilisation isolée<br />

de la créatininémie comme marqueur de fonction rénale devient<br />

extrêmement hasardeuse (fig. 1). À titre d’exemple, il est facile de<br />

montrer qu’une créatininémie de 100 μmol/L correspond à un<br />

débit de filtration glomérulaire de 120 mL/min/1,73 m2 (fonction<br />

rénale normale) chez un rugbyman de 20 ans pesant 100 kg,<br />

alors qu’elle correspond à un débit de filtration glomérulaire de<br />

25 mL/min/1,73 m2 (insuffisance rénale chronique stade IV) chez<br />

une dame âgée de 80 ans pesant 45 kg.<br />

R Q 310<br />

1839


1840<br />

III-Q310<br />

Élévation de la créatininémie — Orientation diagnostique<br />

La mesure du débit de filtration glomérulaire (DFG) est donc<br />

dans tous les cas hautement préférable à celle de la créatininémie<br />

en pratique clinique pour évaluer la fonction rénale. Différentes<br />

méthodes de mesure du DFG sont utilisables chez<br />

l’homme. Les méthodes de référence font appel à des marqueurs<br />

exogènes (inuline, EDTA, Iohexol) qui présentent les caractéristiques<br />

idéales de marqueur de filtration glomérulaire. Ces méthodes<br />

sont néanmoins relativement complexes et coûteuses, et<br />

réservées habituellement aux travaux scientifiques. Les méthodes<br />

basées sur la créatinine endogène demeurent les plus commodes<br />

et préconisées en pratique clinique. Elles sont de deux<br />

types : celles qui consistent à mesurer la clairance de la créatine<br />

endogène en collectant les urines de 24 heures et en appliquant<br />

la relation classique Kr = UV/P, puis en normalisant la valeur obtenue<br />

par rapport à la surface corporelle 1,73 m 2 ; celles qui consistent<br />

à estimer le débit de filtration glomérulaire à partir de formules<br />

simplifiées utilisant la créatininémie et des facteurs de<br />

pondération anthropométrique (âge, sexe, ethnie, taille, poids)<br />

ou biologiques (urée, albumine).<br />

Le débit de filtration glomérulaire estimé par la formule de<br />

Cockroft et Gault est la plus classique et demeure la référence.<br />

Elle est utilisée et rapportée par les laboratoires de biologie lorsqu’un<br />

dosage de créatininémie est prescrit. Cette formule représente<br />

un net progrès dans l’estimation de la filtration glomérulaire,<br />

du fait de sa simplicité et des facteurs de pondération utilisés<br />

tenant compte du sexe, de l’âge et du poids.<br />

Le débit de filtration glomérulaire estimé (eDFG) est :<br />

— pour l’homme eDFG = [(140 – âge) poids 1,24]/[créatininémie] ;<br />

— pour la femme eDFG = [(140 – âge) poids 1,04]/[créatininémie],<br />

lorsque la créatininémie est exprimée en μmol/L.<br />

Le débit de filtration glomérulaire estimé (eDFG) par la formule<br />

de Levey, encore appelée formule MDRD (Modification of Diet in<br />

Renal Disease), représente un progrès indéniable dans cette estimation<br />

de la filtration glomérulaire. Le DFG a été établi dans le<br />

cadre d’une étude prospective contrôlée chez des patients insuffisants<br />

rénaux ayant bénéficié de mesures de filtration glomérulaire<br />

réalisées avec de l’inuline. Le calcul est également simple,<br />

dans la mesure où l’équation intègre déjà les paramètres anthropométriques<br />

(poids et taille) :<br />

eDFG = 32 788 Creat —1,154 âge —0,203 0,742 si femme 1,21 si<br />

sujet de race noire, et la créatininémie est en μmol/L.<br />

Si la formule de Cockroft représente la référence dans ce<br />

domaine, elle tend néanmoins à sous-estimer la filtration glomérulaire<br />

chez les sujets âgés et en présence d’une fonction<br />

rénale altérée. C’est la raison pour laquelle la formule MDRD est<br />

actuellement préférée dans beaucoup de cas.<br />

Il existe d’autres formules permettant d’estimer le DFG, que<br />

nous ne ferons qu’évoquer. Notamment la formule de Schwartz<br />

qui permet d’estimer le débit de filtration glomérulaire chez les<br />

enfants :<br />

eDFG = K Taille (cm) créatininémie (μmol/L), dans laquelle K<br />

est défini par l’âge :<br />

K = 29 (nouveau-né) ; 40 (nourrisson) ; 49 (enfant jusqu'à 12 ans) ;<br />

53 (fille de 12 à 21 ans) ; 62 (garçon de 12 à 21 ans).<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

D’autres marqueurs biologiques pouvant être utilisés en tant<br />

que substituts de la filtration glomérulaire sont en cours d’évaluation<br />

clinique. La bêta-2-microglobuline (B2M) est un marqueur<br />

anciennement connu de la filtration glomérulaire. L’augmentation<br />

sanguine de la B2M est bien corrélée à la baisse de la filtration<br />

glomérulaire. La Cystatine C est un marqueur plus récent et extrêmement<br />

sensible de la fonction rénale. Ces biomarqueurs rénaux<br />

sont hautement corrélés avec le débit de filtration glomérulaire.<br />

Ils sont sensibles, spécifiques, précoces et non affectés par la<br />

masse musculaire ou l’âge du sujet, mais ont un coût qui les rend<br />

difficilement utilisables en routine.<br />

La mesure ou l’estimation du débit de filtration glomérulaire est<br />

indispensable en pratique clinique pour évaluer la fonction rénale.<br />

Le débit de filtration glomérulaire permet de quantifier le<br />

degré d’altération fonctionnelle rénale, que ce soit en situation<br />

aiguë (insuffisance rénale aiguë) ou en situation chronique (insuffisance<br />

rénale chronique). Ce concept a été largement validé<br />

dans l’insuffisance rénale chronique. Par analogie, il est utilisé<br />

dans l’insuffisance rénale aiguë, mais sa validité n’est pas unanimement<br />

reconnue pour le moment. Les sociétés savantes internationales<br />

et les organismes d’accréditation médicale reconnaissent<br />

5 stades à l’insuffisance rénale chronique basés sur le<br />

DFG exprimé en mL/min : stade I : DFG 120 et 90 ; stade II<br />

DFG 90 et 60 ; stade III 60 et 30 ; stade IV 30 et<br />

15 ; stade V 15. En France, la Haute Autorité de santé (HAS)<br />

ne reconnaît pour le moment que 4 stades : les stades I et II étant<br />

en effet regroupés dans le cadre d’une maladie rénale chronique,<br />

l’insuffisance rénale chronique se définit par un débit de filtration<br />

glomérulaire inférieur à 60 mL/min (tableau 1). Rappelons<br />

aussi que la baisse du débit de filtration glomérulaire évolue de<br />

façon parallèle (et grossière) à celle de la perte de masse rénale. En<br />

d’autres termes, une baisse de 50 % du DFG (passage de 100 à<br />

50 mL/min par exemple) traduit en fait une amputation de la<br />

moitié de la masse néphronique active. La néphrectomie unilatérale<br />

chez un sujet à fonction rénale normale antérieurement<br />

est un très bel exemple d’amputation de 50 % de la masse rénale<br />

et de la fonction.<br />

Le vieillissement rénal se traduit par une perte annuelle de 1 %<br />

de la fonction rénale, ce qui équivaut à une perte de 1 mL/min<br />

par an du débit de filtration glomérulaire au-delà de 40 ans. La<br />

perte de fonction rénale liée au vieillissement rénal n’est cependant<br />

pas identique d’un sujet à l’autre. Certains sujets ont un déclin<br />

plus précoce et plus rapide que d’autres. Cela a été parfaitement<br />

montré dans des suivis de cohorte de sujets a priori sains. Cette<br />

observation suggère que le capital néphronique à la naissance<br />

et le phénomène de sénescence rénale ne sont pas identiques<br />

d’un sujet à l’autre.<br />

La créatinine urinaire est utilisée habituellement pour calculer<br />

le débit de filtration glomérulaire. Elle peut être utilisée aussi<br />

pour normaliser l’excrétion urinaire de différents solutés excrétés<br />

dans les urines en cas de difficulté à collecter les urines (nourrissons,<br />

enfants, sujets âgés…). L’exemple classique est représenté<br />

par le rapport microalbuminurie/créatininurie (mg/mmol)<br />

qui permet d’évaluer facilement l’excrétion protéinurique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008


Tableau 1<br />

CLASSIFICATION<br />

INTERNATIONALE<br />

Classification de l’insuffisance rénale chronique en fonction du DFG<br />

DÉBIT DE FILTRATION<br />

GLOMÉRULAIRE*<br />

ALGORITHME DIAGNOSTIQUE ET DÉCISIONNEL<br />

FACE À UNE ÉLÉVATION DE LA CRÉATININÉMIE<br />

La découverte d’une élévation de la créatininémie est une anomalie<br />

biologique relativement fréquente dans le cadre des bilans<br />

biologiques sanguins tout-venant réalisés à titre de débrouillage.<br />

La réelle difficulté pour le clinicien réside dans l’interprétation<br />

de cette valeur et dans la signification pathologique qu’il doit y<br />

attacher. De façon pratique, face à une élévation de la créatininémie,<br />

le clinicien doit se poser trois questions :<br />

— S’agit-il réellement d’une valeur de créatininémie anormale,<br />

autrement dit, la valeur observée traduit-elle une erreur de laboratoire<br />

ou une valeur marginalement élevée chez un patient<br />

donné ?<br />

— S’agit-il d’une primo-découverte, autrement dit, est-ce la première<br />

fois que l’on trouve une créatininémie élevée chez ce<br />

patient ?<br />

— S’agit-il d’un patient ayant déjà connaissance de valeurs élevées<br />

de créatininémie, autrement dit, est-ce un patient porteur<br />

d’une insuffisance rénale chronique ? (fig. 2)<br />

S’agit-il réellement d’une créatininémie<br />

anormale ?<br />

Dans ce cas, les questions à se poser sont de deux ordres :<br />

— L’augmentation de la créatininémie est-elle une erreur de laboratoire<br />

?<br />

— L’augmentation de la créatininémie est-elle significative et<br />

témoigne-t-elle d’une insuffisance rénale ?<br />

Une élévation de créatininémie est rarement en tant que telle<br />

une erreur de laboratoire. Cela dit, en fonction de la méthode de<br />

dosage, la valeur peut être surestimée (dosage colorimétrique)<br />

et faire porter à tort le diagnostic d’insuffisance rénale. En cas<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

DÉFINITION<br />

INTERNATIONALE<br />

CLASSIFICATION<br />

FRANÇAISE<br />

DÉFINITION<br />

ANAES<br />

Stade 0 DFG 90 mL/min/1,73 m 2 Patient à risque rénal** Stade I Maladie rénale chronique<br />

mais avec facteur de risque rénal<br />

Stade I DFG 90 mL/min/1,73 m2 Maladie rénale chronique<br />

avec DFG normal mais facteur<br />

de risque rénal<br />

Stade II DFG 60-89 mL/min/1,73 m2 IRC débutante<br />

Stade III DFG 30-59 mL/min/1,73 m2 IRC modérée Stade II IRC modérée<br />

Stade IV DFG 15-29 mL/min/1,73 m 2 IRC sévère Stade III IRC sévère<br />

Stade V DFG 15 mL/min/1,73 m 2 IRC terminale Stade IV IRC terminale<br />

ou dialysé ou dialysé<br />

ou transplanté<br />

* DFG : débit de filtration glomérulaire estimé par une formule simplifiée (Cockroft ou MDRD).<br />

** Risque rénal : protéinurie, microalbuminurie, hématurie, anomalie morphologique rénale.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

d’anomalie, un contrôle de créatininémie devra être réalisé par<br />

une méthode enzymatique plus spécifique et de préférence dans<br />

un laboratoire de référence. Si le doute persiste ou les résultats<br />

sont discordants, une mesure du débit de filtration glomérulaire<br />

par une méthode de référence sera pratiquée.<br />

Pour être significative, une élévation de la créatininémie doit être<br />

de 20 à 30 % supérieure aux limites supérieures de normalité<br />

du laboratoire et doit être confirmée par un deuxième dosage<br />

réalisé dans les 15 jours qui suivent.<br />

Les causes factices d’augmentation de créatininémie non liées<br />

à une altération vraie de fonction rénale devront être éliminées.<br />

C’est le cas, en particulier, de la prise récente de certains médicaments<br />

bloquant la sécrétion tubulaire de créatinine (cimétidine,<br />

triméthoprime, probénécide…).<br />

En présence d’une créatininémie anormalement élevée, le<br />

diagnostic d’insuffisance rénale se trouve alors confirmé et le<br />

débit de filtration glomérulaire doit être calculé pour en estimer<br />

la gravité. Un complément d’exploration néphrologique est alors<br />

nécessaire pour en identifier l’origine et proposer un traitement<br />

adapté.<br />

S’agit-il d’une primo-découverte<br />

d’une élévation de créatininémie ?<br />

Dans le cas d’une primo-découverte et après avoir confirmé<br />

qu’il s’agissait bien d’une altération significative de la fonction<br />

rénale, une enquête étiologique est nécessaire. Les questions<br />

que le clinicien doit se poser sont alors de trois ordres :<br />

— S’agit-il d’une insuffisance rénale aiguë ?<br />

— S’agit-il d’une insuffisance rénale chronique ?<br />

— S’agit-il d’une insuffisance rénale chronique décompensée par<br />

un facteur aigu, en somme, s’agit-il d’une « acutisation » brutale<br />

d’une insuffisance rénale chronique ancienne ?<br />

R Q 310<br />

1841


Figure 2<br />

1. Insuffisance rénale aiguë (IRA)<br />

C’est une pathologie d’expression variable qui dépend de la<br />

brutalité de l’agression rénale, de l’état clinique du patient et de<br />

la rapidité de sa découverte. L’IRA est l’expression d’une baisse<br />

relativement brutale de la filtration glomérulaire occasionnée<br />

par une agression rénale. Dans tous les cas, cela se traduit par<br />

une augmentation rapide de la créatininémie et une rétention<br />

parallèle des autres composés azotés (urée, uricémie), ainsi que<br />

par l’installation de désordres hydriques, sodés et électrolytiques<br />

(hyponatrémie, acidose métabolique, hyperkaliémie…). En dehors<br />

de formes particulières, l’IRA ne comporte habituellement pas<br />

d’anémie, d’hyperphosphorémie ou d’hypocalcémie. La baisse de<br />

la diurèse est habituelle dans l’insuffisance rénale aiguë, pouvant<br />

à l’extrême se traduire par une oligoanurie. La prise pondérale<br />

et la rétention sodée (œdèmes, hypertension) sont rapides et<br />

dépendent directement des apports alimentaires. L’augmentation<br />

de la créatininémie est rapide et importante (150 à 200 μmol/L<br />

par jour) dans ce cas. Le taux d’accroissement journalier de la<br />

créatininémie est fonction du degré d’IRA, de la masse musculaire<br />

et de l’âge du sujet. Dans les formes extrêmes, la créatinémie<br />

peut facilement doubler d’un jour à l’autre.<br />

De façon schématique, l’IRA comporte trois formes cliniques<br />

principales qui correspondent à des mécanismes d’agressions<br />

rénales spécifiques (fig. 3) : l’IRA fonctionnelle ou prérénale ;<br />

l’IRA obstructive ou post-rénale ; l’IRA organique ou rénale.<br />

✓ L’IRA fonctionnelle répond à un phénomène d’hypoperfusion<br />

rénale (hypovolémie, hypotension artérielle systémique ou rénale)<br />

qui réduit la filtration glomérulaire, ralentit le débit tubulaire urinaire<br />

1842<br />

III-Q310<br />

Insuffisance<br />

rénale<br />

aiguë<br />

Élévation de la créatininémie — Orientation diagnostique<br />

PRIMO-DÉCOUVERTE D’UNE AUGMENTATION<br />

DE CRÉATININÉMIE<br />

Insuffisance<br />

rénale<br />

chronique<br />

CRÉATININÉMIE ANORMALEMENT ÉLEVÉE<br />

VALIDATION DU RÉSULTAT<br />

2 e dosage de contrôle, mesure du DFG<br />

par méthode de référence<br />

CONFIRMATION D’UNE BAISSE SIGNIFICATIVE<br />

DU DÉBIT DE FILTRATION GLOMÉRULAIRE<br />

Insuffisance<br />

chronique<br />

« acutisée »<br />

Exploration étiologique et traitement spécifique adapté<br />

Algorithme décisionnel face à une élévation de créatininémie.<br />

Éliminer une erreur de laboratoire<br />

Valider la signification clinique<br />

Gestion, traitement et suivi spécifique<br />

de l’insuffisance rénale chronique<br />

et facilite la réabsorption passive de l’urée. L’augmentation des<br />

taux sanguins de l’urée traduit dans ce cas l’effet cumulé de la<br />

baisse de filtration glomérulaire et de la réabsorption tubulaire<br />

accrue de l’urée. C’est la raison pour laquelle, dans l’IRA fonctionnelle,<br />

l’augmentation des concentrations sanguines de l’urée<br />

et de la créatinine ne sont plus proportionnelles. L’azotémie augmente<br />

plus rapidement que la créatininémie. La proportionnalité<br />

du rapport des concentrations sanguines d’urée et de créatinine<br />

n’est plus respectée, le rapport de concentration sanguine<br />

urée/créatinine se dissocie et sa valeur excède 40. De façon<br />

Tableau 2<br />

Indices sanguins et urinaires<br />

permettant de différencier l’IRA<br />

fonctionnelle de l’IRA organique<br />

par tubulopathie<br />

INDICES SANGUINS<br />

ET URINAIRES<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

AUGMENTATION DE CRÉATININÉMIE CONNUE<br />

OU ANCIENNE<br />

Insuffisance rénale chronique<br />

IRA<br />

FONCTIONNELLE<br />

IRA ORGANIQUE<br />

(NTIA)<br />

[Urée]/[Créat]sang 50 40<br />

OsmU, mOsm/kg H2O 500 350<br />

[Urée]U/P 10 10<br />

[Créat]/U/P 30 30<br />

Na U (mmol/L) 20 40<br />

EFNa (%) 1 2<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008


Figure 3<br />

IRA FONCTIONNELLE<br />

« PRÉ-RÉNALE »<br />

Hypovolémie efficace<br />

Choc phase initiale<br />

Altération hémodynamique rénale<br />

(AINS, IEC…)<br />

concomitante, les indices urinaires mettent en évidence une conservation<br />

du pouvoir de concentration urinaire des solutés et de l’osmolalité<br />

([Urée]U/P 8, [Créatinine]U/P 20, [osmolarité]U 500<br />

mOsm/kh H 2O), une augmentation de la capacité de rétention<br />

sodique rénale ([Na]U 20 mmol/L ou EFNa 1 %) [ hypovolémie<br />

efficace] et une inversion du rapport urinaire sodium/potassium<br />

(hyperaldostéronisme secondaire) [tableau 2]. L’IRA fonctionnelle<br />

répond à différentes causes qu’il faudra identifier : déficit sodé<br />

et déshydratation extracellulaire d’origine digestive, rénale, thermique<br />

ou de carence d’apports ; déshydratation induite par un<br />

diurétique ; introduction d’un médicament perturbant l’hémodynamique<br />

rénale (inhibiteur d’enzyme de conversion, antagoniste<br />

des récepteurs de l’angiotensine 2, anti-inflammatoire non<br />

stéroïdien). Le traitement comporte la correction de la cause et<br />

la mise en place d’une recharge sodée et volémique prudente.<br />

✓ L’IRA organique répond à un phénomène lésionnel rénal comportant<br />

le plus souvent des lésions parenchymateuses de type tubulopathie<br />

(néphrite tubulo-interstielle aiguë) dont l’origine peut<br />

être ischémique, toxique ou mixte. Dans ce cas, l’IRA s’installe<br />

moins rapidement et fait suite à un épisode d’agression rénale<br />

caractérisé. La perte de filtration glomérulaire et de fonctionnalité<br />

tubulaire s’installe en quelques jours ou quelques semaines.<br />

Dans ce cas, la rétention de la créatinine et des produits azotés<br />

demeure proportionnelle, ce qui se traduit par une augmentation<br />

parallèle des concentrations sanguines de créatinine et d’urée<br />

et par une conservation relativement constante du rapport<br />

de concentrations azotémie/créatininémie avec une valeur comprise<br />

entre 30 et 40. De façon concomitante, les indices urinaires objec-<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË<br />

IRA OBSTRUCTIVE<br />

« POST-RÉNALE »<br />

Lithiase voies urinaires<br />

Néoplasie pelvienne<br />

Lymphome rétropéritonéal<br />

Fibrose rétropéritonéale<br />

(secondaire ou primitive)<br />

Anévrisme aortique<br />

Chirurgie rétropéritonéale<br />

Radiothérapie…<br />

Algorithme diagnostique étiologique face à une insuffisance rénale aiguë.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

IRA ORGANIQUE<br />

« RÉNALE »<br />

Néphropathie tubulo-interstitielle<br />

aiguë (tubulopathie)<br />

toxique, ischémique ou mixte<br />

Néphrite interstitielle aiguë<br />

Glomérulonéphrite aiguë<br />

ou rapidement progressive<br />

Embolie cholestérolique<br />

Syndrome hémolytique urémique<br />

Gammapathie monoclonale…<br />

90%<br />

10%<br />

tivent une perte de capacité de concentration urinaire des solutés<br />

([Urée]U/P 3, [Créatinine]U/P 20, [osmolarité]U <br />

350mOsm/kg H20), une perte de la capacité de rétention sodique<br />

rénale ([Na]U 40 mmol/L ou EFNa 1 %) et une conservation<br />

du rapport urinaire sodium/potassium (tableau 2). L’IRA organique<br />

répond à différentes causes qu’il est commode de rassembler<br />

en trois groupes : les causes ischémiques pures représentées<br />

par les états de choc (septique, cardiogénique,<br />

traumatique, opératoire…) ; les causes toxiques d’origine exogène<br />

(médicament néphrotoxique reconnu, produits de contraste<br />

iodés, métaux lourds…) ou d’origine endogène (hémolyse intravasculaire<br />

aiguë, rhabdomyolyse…) ; les causes mixtes associant<br />

une composante ischémique et toxique qui sont les plus fréquentes<br />

en pratique clinique. De façon beaucoup plus rare, les<br />

lésions parenchymateuses peuvent toucher d’autres composants<br />

rénaux, nécessitant une prise en charge très spécifique qui ne<br />

sera pas abordée ici. Dans ce cadre rentrent notamment les glomérulopathies<br />

(glomérulonéphrites aiguës, glomérulonéphrites<br />

rapidement progressives) caractérisées par une protéinurie ou<br />

les néphropathies ischémiques (thrombose ou embolie artérielle<br />

rénale) d’installation brutale et douloureuse.<br />

La gradation de la prise en charge thérapeutique répond à la<br />

gravité et à l’urgence de la situation. Face à une IRA organique<br />

d’installation récente ne présentant pas de signes de gravité<br />

immédiate, une prise en charge médicale visant à relancer la diurèse<br />

et améliorer la perfusion rénale peut être tentée. Cette<br />

épreuve thérapeutique sera conduite pendant les 24 à 48 premières<br />

heures, mais interrompue en cas d’échec. Face à une IRA<br />

R Q 310<br />

1843


Figure 4<br />

organique avérée ou présentant des signes de gravité immédiats<br />

(œdème pulmonaire, surcharge sodée, hyperkaliémie, acidose…),<br />

la prise en charge médicale sera plus agressive et recourra à la<br />

mise en place immédiate d’un traitement de suppléance extrarénal<br />

par hémodialyse.<br />

✓ L’IRA mécanique répond à un phénomène purement obstructif<br />

survenant sur les voies urinaires. Dans ce cas, l’IRA s’installe très<br />

brutalement, comporte volontiers une anurie totale, s’accompagne<br />

de douleurs et de signes urinaires (hématurie). Les manifestations<br />

cliniques dépendent du degré d’obstruction et de la vitesse<br />

de constitution de l’obstacle. Au plan biologique, l’IRA obstructive<br />

aiguë n’a pas de caractéristiques bien particulières. La rétention<br />

de créatinine et d’urée est brutale et rapide. Elle est marquée<br />

par une augmentation très rapide des taux de créatinine<br />

qui peuvent atteindre dans ces cas 200 à 400 μmol/L par jour.<br />

Les indices urinaires n’ont rien de spécifique et s’apparentent à<br />

ceux d’une IRA organique. Seule l’apparition d’une acidose hyperchlorémique<br />

à trou anionique normal est caractéristique de l’atteinte<br />

obstructive. Dans ce cas, c’est l’imagerie de l’appareil urinaire<br />

(échographie ou tomodensitométrie rénale) qui permet de confirmer<br />

le diagnostic en montrant une dilatation des cavités pyélocalicielles,<br />

d’apporter l’étiologie (tumeur, lithiase, fibrose rétropéritonéale…)<br />

et de permettre le traitement (drainage rénal par<br />

néphrostomie ou sondes endoprothétiques de type JJ).<br />

1844<br />

III-Q310<br />

Néphropathie<br />

glomérulaire<br />

ARGUMENTS<br />

Protéinurie<br />

Hématurie HTA<br />

Diabète sucré<br />

Maladie systémique<br />

IRC lentement<br />

évolutive<br />

Reins symétriques<br />

réguliers<br />

Élévation de la créatininémie — Orientation diagnostique<br />

Néphropathie<br />

hypertensive<br />

et microvasculaire<br />

ARGUMENTS<br />

Long passé hypertensif<br />

Facteurs de risque<br />

cardiovasculaire<br />

Tabagisme<br />

Faible protéinurie<br />

Reins symétriques<br />

réguliers<br />

Index de résistance<br />

vasculaire rénaux<br />

élevés<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

Néphropathie<br />

tubulointerstitielle<br />

ARGUMENTS<br />

Passé urologique<br />

IRC lentement<br />

évolutive<br />

Acidose<br />

hyperchlorémique<br />

Fuite sodée<br />

Faible protéinurie<br />

Reins irréguliers<br />

bosselés<br />

Algorithme diagnostique face à une insuffisance rénale chronique.<br />

Néphropathie<br />

vasculaire<br />

et ischémique<br />

ARGUMENTS<br />

Facteurs de risque<br />

vasculaire<br />

HTA<br />

Diabète<br />

Artériopathie diffuse<br />

Souffles vasculaires<br />

Cardiopathie<br />

IRC lentement<br />

évolutive<br />

Reins asymétriques<br />

Sténose artères rénales<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Néphropathie<br />

héréditaire<br />

et congénitale<br />

ARGUMENTS<br />

Contexte familial<br />

ou congénital<br />

Polykystose<br />

Surdité<br />

Angiotubérosités<br />

Acrosyndrome…<br />

HTA<br />

IRC évolution variable<br />

Morphologie rénale<br />

variable en fonction<br />

de la néphropathie<br />

2. S’agit-il d’une insuffisance rénale chronique ?<br />

L’insuffisance rénale chronique (IRC) est un état morbide complexe<br />

qui résulte d’une baisse prolongée et ancienne du débit de filtration<br />

glomérulaire couplée à une altération des fonctions tubulaires.<br />

L’insuffisance rénale chronique se traduit par un syndrome clinicobiologique<br />

complexe, caractérisé par un ensemble d’anomalies<br />

biologiques (rétention azotée, rétention sodique et hydrique,<br />

rétention phosphatée, acidose métabolique, hypocalcémie…), et<br />

comporte des manifestations cliniques variées. L’IRC associe des<br />

anomalies qui concernent l’érythropoïèse, le métabolisme minéraloosseux,<br />

l’hypertension artérielle, la fonction cardiaque et d’autres<br />

fonctions métaboliques. Le caractère chronique de l’insuffisance<br />

rénale peut être affirmé sur un faisceau d’arguments : l’ancienneté<br />

des symptômes (nycturie) ; l’identification d’une néphropathie<br />

ou de facteurs de risques rénaux ; l’ancienneté de l’augmentation<br />

de la créatininémie ; l’anémie d’origine rénale ; l’intensité des désordres<br />

du métabolisme minéralo-osseux ; l’atrophie rénale et la<br />

dédifférenciation corticomédullaire à l’échographie rénale.<br />

L’enquête étiologique nécessaire devant toute insuffisance<br />

rénale chronique doit permettre d’identifier l’origine de la néphropathie<br />

(fig. 4). Les néphropathies les plus fréquentes sont : les<br />

néphropathies hypertensives et vasculaires (néphroangiosclérose,<br />

néphropathie ischémique) ; le diabète sucré ; les glomérulonéphrites<br />

chroniques primitives ; les néphropathies interstitielles et<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008


tubulaires chroniques ; les néphropathies familiales et héréditaires ;<br />

les néphropathies toxiques ; d’autres néphropathies acquises.<br />

Soulignons cependant que dans un nombre relativement important<br />

de cas (20 à 30 %) la néphropathie causale ne pourra pas être typée<br />

du fait d’une découverte tardive ou à stade très avancé de l’insuffisance<br />

rénale chronique et en présence de reins très atrophiques.<br />

Les explorations rénales sont orientées en fonction du contexte<br />

clinique. Les explorations morphologiques par imagerie (échographie<br />

et doppler, tomodensitométrie ou imagerie par résonance<br />

magnétique nucléaire…) permettent d’évaluer au mieux la structure<br />

parenchymateuse rénale (atrophie, dédifférenciation, kystes…).<br />

La biopsie rénale peut être discutée en l’absence de contreindications.<br />

Les examens biologiques ou immunologiques<br />

peuvent êtres utiles à la recherche d’une maladie de système.<br />

Ces éléments font partie de l’enquête étiologique discutée au<br />

chapitre de l’insuffisance rénale chronique et ne seront pas<br />

approfondis ici.<br />

3. S’agit-il d’une insuffisance rénale chronique<br />

décompensée par un facteur aigu ?<br />

La situation clinique correspond à celle d’un patient insuffisant<br />

rénal chronique, qui développe une dégradation rapide de<br />

la fonction rénale à l’occasion d’un épisode intercurrent aigu. En<br />

pratique, cela se traduit par une augmentation rapide de la créatininémie<br />

marquant une chute brutale de la filtration glomérulaire.<br />

Dans ce cas, l’enquête étiologique consiste à rechercher un<br />

facteur fonctionnel (hypovolémie, modification hémodynamique<br />

rénale), un facteur vasculaire (sténose ou thrombose d’une artère<br />

rénale), un obstacle sur les voies urinaires (lithiase, tumeur, adénome<br />

prostatique…) ou un facteur lésionnel rénal (ischémie, toxicité<br />

rénale). Les indices biologiques sanguins et urinaires sont<br />

d’interprétation plus délicate dans ce cas, mais ils gardent néanmoins<br />

une valeur d’orientation. L’imagerie rénale (échographie<br />

et doppler rénaux, tomodensitométrie rénale, IRM rénale) est<br />

utile pour éliminer un facteur obstructif sur les voies urinaires<br />

ou un facteur vasculaire. L’utilisation de produits de contraste<br />

iodés ou à base de gadolinium présente un risque dans ce<br />

contexte, si bien qu’elle demeurera assujettie aux règles de précaution<br />

habituelles. La récupération de la fonction rénale après<br />

correction du facteur causal permet bien souvent et a posteriori<br />

de confirmer l’origine de cette décompensation rénale.<br />

S’agit-il d’un patient ayant des valeurs<br />

antérieurement élevées de créatininémie,<br />

autrement dit, est-ce une insuffisance<br />

rénale chronique ancienne ?<br />

La situation est dans ce cas plus simple. Le problème posé<br />

est en effet davantage d’ordre pronostique que diagnostique.<br />

Une valeur anormale antérieurement ou des signes évocateurs<br />

de maladie rénale doivent être recherchés chez tout patient qui<br />

consulte pour une créatininémie élevée. L’enquête est parfois<br />

facile, si le patient a conservé ses examens biologiques anciens<br />

ou s’il est porteur de facteurs de risque rénaux (diabète sucré,<br />

polykystose rénale, rein unique, transplanté rénal…). Il suffit dans<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

ce cas de passer en revue l’ensemble des explorations biologiques<br />

et des examens morphologiques (échographie rénale…) pour tenter<br />

de dater l’origine de l’insuffisance rénale. L’enquête est parfois<br />

plus difficile si le patient n’a pas de documents, n’a pas d’antécédents<br />

particuliers ou n’est pas capable de retracer son passé<br />

pathologique. La recherche de signes précoces d’altération fonctionnelle<br />

rénale, de type nycturie, fatigue, inappétence, prurit…<br />

permet d’établir approximativement la date d’apparition de la<br />

maladie rénale. Dans ce cas, une enquête étiologique minutieuse,<br />

comportant une exploration biologique et une imagerie rénale<br />

(morphologique et fonctionnelle), s’impose pour identifier la<br />

néphropathie chronique. L’indication d’une biopsie rénale peut<br />

être discutée s’il n’y a pas de contre-indication et dans la mesure<br />

où un traitement spécifique peut être proposé. Nous renvoyons<br />

le lecteur intéressé au chapitre concernant la conduite étiologique<br />

d’une insuffisance rénale chronique.<br />

L’élévation des valeurs de créatininémie observée dans ces<br />

circonstances se fait habituellement de façon lente et progressive<br />

au cours du temps. L’augmentation de la créatininémie est<br />

en fait le « miroir en positif » de la perte de filtration glomérulaire.<br />

Il est en effet facile de montrer que le doublement de la<br />

créatinémie correspond approximativement à une perte de la<br />

moitié de la fonction rénale. C’est la raison pour laquelle ce critère,<br />

ainsi que le temps de doublement de la créatininémie, sont<br />

souvent utilisés dans des travaux scientifiques comme témoin<br />

de progression spontané de l’insuffisance rénale ou comme<br />

preuve d’efficacité d’un traitement néphroprotecteur.<br />

Le rôle du médecin dans ce cas est quintuple : identifier la<br />

néphropathie causale ; évaluer le degré d’insuffisance rénale ;<br />

rechercher et corriger un éventuel facteur aggravant ; mettre en<br />

place un traitement conservateur et néphroprotecteur ; rechercher<br />

d’éventuelles comorbidités, notamment cardiovasculaires.<br />

Le suivi spécifique qui s’impose chez tout patient porteur d’une<br />

insuffisance rénale chronique comporte la surveillance périodique<br />

de paramètres cliniques et biologiques permettant de juger la gravité<br />

de l’urémie. Nous renvoyons le lecteur intéressé au chapitre<br />

de référence concernant la prise en charge de l’insuffisance rénale.<br />

Au premier rang de ces marqueurs se trouve la créatininémie. Le<br />

suivi périodique du quotient 1/[créatininémie] ou, mieux, de la filtration<br />

glomérulaire, permet d’évaluer la vitesse de progression<br />

de la maladie rénale chronique et de juger de l’efficacité du traitement<br />

mis en place. Il est utile également de souligner que la progression<br />

de l’insuffisance rénale est linéaire jusqu’à un stade<br />

avancé. Cela se traduit par une perte de filtration glomérulaire<br />

comprise entre 2 et 4 mL/min par an pour certaines néphropathies<br />

(hypertensive, glomérulaire, polykystose…). En revanche, pour<br />

d’autres néphropathies plus sévères, la perte de filtration glomérulaire<br />

peut atteindre 5 à 10 mL/min par an (diabétique, ischémique,<br />

maladies systémiques avec atteinte glomérulaire…). La<br />

surveillance périodique de la filtration glomérulaire permet également<br />

d’identifier la survenue de facteurs aggravants (facteur<br />

fonctionnel hémodynamique systémique ou rénal, survenue d’un<br />

obstacle, toxicité médicamenteuse…) compliquant le cours évolutif<br />

d’une insuffisance rénale d’évolution lente.<br />

R Q 310<br />

1845


En pratique, toute élévation de créatininémie chez un individu<br />

doit faire rechercher a priori une altération fonctionnelle rénale.<br />

L’estimation du débit de filtration glomérulaire par des formules<br />

simplifiées du type MDRD, basées sur la créatininémie, est largement<br />

conseillée par les guides de bonne pratique pour pallier les<br />

biais liés à l’âge, la masse musculaire, l’ethnie ou le surpoids. La<br />

créatininémie prise isolément peut être extrêmement trompeuse,<br />

en particulier chez les sujets âgés et les obèses. La découverte<br />

d’une créatininémie anormalement élevée doit conduire, en fonction<br />

des circonstances, à rechercher une insuffisance rénale aiguë,<br />

une insuffisance rénale chronique ou même une acutisation<br />

brutale chez un insuffisant rénal chronique stable. ■<br />

1846<br />

III-Q310<br />

Élévation de la créatininémie — Orientation diagnostique<br />

◗ Serum creatinine as an index of renal function : new insights<br />

into old concepts<br />

Perrone RD, Madias NE, Levey AS<br />

(Clin Chem 1992;38:1933-92)<br />

◗ Prediction of creatinine clearance from serum creatinine<br />

Cockroft DW, Gault MH<br />

(Nephron 1976;16:31-41)<br />

◗ A more accurate method to estimate glomerular filtration rate<br />

from serum creatinine: a new prediction equation. Modification of<br />

Diet in Renal Disease study group.<br />

Levey AS, Bosch JP, Lewis JB, Greene T, Rogers N, Roth D<br />

(Ann Intern Med 1999;130:461-70)<br />

◗ Diagnostic de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte<br />

Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé<br />

(ANAES, HAS). Service des recommandations et références,<br />

septembre 2002 : pages 1-4<br />

◗ Comment estimer la fonction rénale des sujets âgés ?<br />

Insuffisance rénale chronique chez le sujet âgé.<br />

Froissart M, Rossert JV<br />

(Rev Prat 2005;55:2223-9)<br />

1<br />

2<br />

3<br />

L’auteur déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

Pour en savoir plus<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

La douleur nociceptive apparaît spontanément<br />

en l’absence de toute agression.<br />

La claudication intermittente est spécifique<br />

de l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs.<br />

Une artériopathie n’est pas toujours d’origine<br />

athéromateuse.<br />

1 Tout épanchement articulaire doit être ponctionné.<br />

2 Le diabète et l’alcool peuvent causer une neuropathie<br />

périphérique.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

1 La créatinine est issue du métabolisme musculaire strié.<br />

2 La créatininémie est un reflet exclusif de la fonction<br />

rénale.<br />

3 La créatinine est éliminée exclusivement<br />

par filtration glomérulaire.<br />

4 La créatinine est dégradée dans le tube digestif<br />

chez l’insuffisant rénal.<br />

3<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

La clairance de la créatininémie des 24 heures<br />

est un reflet exact du débit de filtration glomérulaire<br />

quel que soit le niveau de filtration glomérulaire.<br />

Le débit de filtration glomérulaire estimé par<br />

une formule simplifiée (Cockroft ou Levey)<br />

est préférable dans tous les cas pour évaluer<br />

la fonction rénale d’un individu.<br />

L’estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

par une formule simplifiée est validée<br />

dans l’insuffisance rénale aiguë.<br />

L’utilisation du débit de filtration glomérulaire<br />

estimé ou mesuré est conseillée pour évaluer<br />

la gravité de l’insuffisance rénale chronique.<br />

C / QCM<br />

Une élévation même modérée de créatininémie<br />

traduit dans tous les cas une insuffisance rénale.<br />

Une élévation rapide, récente et significative de la<br />

créatininémie suggère une insuffisance rénale aiguë.<br />

L’élévation rapide de la créatininémie chez un patient<br />

diabétique et hypertendu traduit l’évolution naturelle<br />

de la néphropathie diabétique.<br />

L’évaluation périodique du débit de filtration<br />

glomérulaire chez un patient insuffisant rénal<br />

chronique n’a pas d’intérêt pronostique.<br />

Réponses : A : V, F, V, F / B : F, V, F, V / C : F, V, F, V.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 306, p. 1821<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

Le syndrome du canal carpien est aggravé<br />

par le froid.<br />

C / QCM<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

Parmi les symptômes suivants, lesquels évoquent<br />

une insuffisance veineuse ?<br />

1 Douleur des mollets à la marche obligeant à l’arrêt.<br />

2 Douleur des jambes à type de pesanteur.<br />

3 Abolition d’un pouls.<br />

4 Douleur soulagée par la position jambes surélevées.<br />

5 Déficit moteur distal.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 58, 31 OCTOBRE 2008<br />

Réponses : A : F, F, V / B : V, V, F / C : 2, 4.


DIAGNOSTIC, DÉPISTAGE<br />

L’hématurie est définie par la présence de sang<br />

dans les urines. Elle peut être d’origine urologique,<br />

due à une effraction vasculaire par lésion des voies urinaires,<br />

ou d’origine néphrologique, liée à un passage des hématies<br />

à travers la membrane basale glomérulaire ou à une lésion<br />

du parenchyme rénal.<br />

L’hématurie doit être distinguée de la simple présence de<br />

pigments dans les urines, sans hématies : myoglobinurie (rhabdomyolyse),<br />

hémoglobinurie (hémolyse), ingestion de betterave<br />

ou traitement par rifampicine. L’autre diagnostic différentiel<br />

est la contamination des urines par du sang d’origine génitale,<br />

lors des menstruations. Il est à noter que l’émission de sang par<br />

l’urètre en dehors des mictions est une urétrorragie, non une<br />

hématurie.<br />

Le diagnostic d’hématurie macroscopique est aisé puisqu’elle<br />

est visible à l’œil nu : les urines sont rosées, rouges ou brunes.<br />

L’examen du sédiment urinaire confirme la présence d’hématies.<br />

L’hématurie microscopique est invisible à l’œil nu ; elle est détectée<br />

par la bandelette urinaire ou l’étude du sédiment urinaire.<br />

La bandelette urinaire est le meilleur examen de dépistage de<br />

l’hématurie microscopique. Elle donne un résultat semi-quantitatif<br />

(exprimé en « croix » de sang ou, en cas de lecture automatisée,<br />

en nombre approximatif d’hématies par mm 3 ). Il existe de faux<br />

positifs à la bandelette urinaire. En effet, son seuil de détection<br />

(5 à 10 hématies/mm 3 ) est plus sensible que le seuil pathologique<br />

qui est de 10 hématies/mm3. De plus, le réactif de la bandelette<br />

détecte l’hème présent dans la myoglobine et l’hémoglobine. En<br />

cas de doute, il convient donc de confirmer la présence d’hématies<br />

par un examen microscopique du sédiment urinaire. La bandelette<br />

urinaire permet également le suivi de l’hématurie.<br />

L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) permet de<br />

détecter la présence d’hématies, à condition d’être acheminé et<br />

interprété rapidement au laboratoire. En effet, un délai trop long<br />

entre l’obtention de l’échantillon urinaire et sa lecture s’accompagne<br />

d’une lyse des hématies (l’urine étant hypotonique par rapport au<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56<br />

Hématurie<br />

Orientation diagnostique<br />

Dr Noémie Jourde-Chiche, Dr Fadi Fakhouri<br />

Service de néphrologie, hôpital Necker-Enfants malades, 75743 Paris Cedex 15<br />

fadi.fakhouri@nck.ap-hop-paris.fr<br />

Objectifs<br />

plasma) et peut conduire à un faux négatif. Le seuil pathologique<br />

est de 10 000 hématies/mL. Cet examen permet aussi de détecter<br />

la présence de leucocytes ou de germes dans les urines.<br />

Le compte d’Addis ou HLM (hématies et leucocytes/min), cher<br />

et contraignant, ne doit plus être demandé.<br />

EXPLORATIONS (fig. 1)<br />

I-00-Q000 III-Q315<br />

• Devant une hématurie, argumenter les principales hypothèses<br />

diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.<br />

Interrogatoire et examen clinique<br />

✓ L’interrogatoire recherche :<br />

— des antécédents personnels ou familiaux urologiques ou<br />

néphrologiques (lithiases, polykystose, etc.) ou de surdité ;<br />

— une exposition à des facteurs de risque de survenue de tumeurs<br />

urothéliales ou une prise régulière de médicaments analgésiques ;<br />

— des signes fonctionnels associés à l’hématurie (colique néphrétique,<br />

douleurs lombaires, dysurie et fièvre sont en faveur d’une<br />

cause urologique) ;<br />

— la présence de caillots dans les urines (en faveur d’une cause<br />

urologique, les hématuries néphrologiques étant habituellement<br />

émises sans caillots en raison des facteurs fibrinolytiques produits<br />

dans les glomérules et les tubules rénaux) ;<br />

— une infection de la sphère ORL (oto-rhino-laryngée) récente<br />

(en faveur d’une maladie de Berger ou d’une glomérulonéphrite<br />

postinfectieuse) ;<br />

— un caractère cyclique de l’hématurie macroscopique pouvant<br />

orienter vers une endométriose des voies urinaires ;<br />

— un traumatisme abdominal.<br />

✓ La chronologie de l’hématurie macroscopique par rapport à la<br />

miction peut avoir une valeur localisatrice : une hématurie initiale<br />

oriente vers une cause prostatique, une hématurie terminale<br />

vers une cause vésicale. L’hématurie totale n’a aucune valeur<br />

localisatrice.<br />

901


✓ À l’examen clinique, on recherche :<br />

— une hypertension artérielle ou des œdèmes des membres inférieurs,<br />

évocateurs d’une origine glomérulaire ;<br />

— un contact lombaire à la palpation, témoignant de l’augmentation<br />

de la taille des reins (polykystose, tumeur rénale, thrombose<br />

d’une veine rénale) ;<br />

— des signes extrarénaux dans le cadre d’une maladie systémique<br />

ou d’un cancer évolutif ;<br />

— une anomalie prostatique au toucher rectal.<br />

Hématurie macroscopique<br />

1. Évoquer une cause néphrologique<br />

L’existence d’une protéinurie abondante, d’une hypertension<br />

artérielle (HTA) ou d’une dégradation de la fonction rénale<br />

oriente plutôt vers une cause néphrologique. Cependant, quelle<br />

que soit son origine, une hématurie macroscopique abondante<br />

peut entraîner une protéinurie. La protéinurie doit donc être<br />

quantifiée en dehors d’un épisode d’hématurie macroscopique.<br />

2. Imagerie<br />

L’ASP peut révéler une lithiase radio-opaque. Le premier examen<br />

à réaliser ensuite est une échographie rénale et vésicale, qui peut<br />

mettre en évidence une lithiase, une tumeur rénale ou vésicale,<br />

Figure 1<br />

902<br />

III-Q315<br />

Saignement vésical<br />

ou prostatique<br />

Hématurie : orientation diagnostique<br />

Macroscopique<br />

NON<br />

➠ ASP<br />

➠ Échographies de l’appareil<br />

urinaire doppler<br />

➠ Uroscanner<br />

Normaux<br />

➠ Cystoscopie en période<br />

hématurique<br />

Unilatéral urologique<br />

ou vasculaire<br />

Conduite à tenir devant une hématurie.<br />

HÉMATURIE<br />

ECBU<br />

Protéinurie > 0,5 g/L<br />

ou insuffisance rénale<br />

Saignement haut<br />

des kystes rénaux, ainsi qu’une dilatation des cavités pyélocalicielles<br />

en cas d’obstacle sur les voies urinaires (caillot, calcul). Le doppler<br />

rénal peut révéler la thrombose d’une veine ou d’une artère rénales.<br />

Le scanner (injection de produit de contraste) ou l’imagerie par<br />

résonance magnétique (IRM) des voies urinaires sont encore plus<br />

sensibles pour détecter des tumeurs de petite taille. Le scanner<br />

reste le meilleur examen pour diagnostiquer une lithiase. L’uroscanner<br />

est un scanner rénal avec injection de produit de<br />

contraste iodé, suivi de clichés de radiographie abdominale successifs<br />

permettant de visualiser l’excrétion et la sécrétion de produits<br />

de contraste, l’aspect des uretères et des parois vésicales.<br />

Il peut remplacer l’urographie intraveineuse (UIV).<br />

3. Cystoscopie<br />

En l’absence d’anomalie des examens précédents, l’examen clé<br />

est la cystoscopie réalisée en période hématurique. Elle permet<br />

de déterminer si le saignement est d’origine vésicale ou haute<br />

et, pour un saignement haut, s’il est latéralisé. Un saignement<br />

provenant d’un seul uretère est d’origine urologique (tumeur,<br />

lithiase, malformation vasculaire) et doit faire pratiquer un scanner<br />

ou une IRM rénale (s’ils n’ont pas encore été réalisés), parfois<br />

une artériographie ou une urétéro-pyélographie rétrograde. Un<br />

saignement bilatéral est en faveur d’une néphropathie et doit<br />

faire envisager une ponction-biopsie rénale.<br />

NON<br />

Bilatéral néphrologique<br />

OUI<br />

INFECTION URINAIRE<br />

CAUSE NÉPHROLOGIQUE<br />

Discuter ponction-biopsie rénale<br />

Microscopique<br />

➠ ASP<br />

➠ Échographie de l’appareil<br />

urinaire<br />

➠ Uroscanner<br />

Normaux<br />

➠ Cytologie urinaire<br />

➠ Cystoscopie selon terrain<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56


La cystoscopie réalisée en dehors d’une période hématurique<br />

permet aussi de visualiser les tumeurs vésicales.<br />

4. Autres causes<br />

Un surdosage en anticoagulants, ou une anomalie de l’hémostase<br />

(hémophilie…) peuvent entraîner une hématurie macroscopique<br />

« spontanée », mais il ne faut pas méconnaître une lésion<br />

sous-jacente, et les mêmes explorations sont donc indiquées.<br />

En revanche, en cas d’hématurie macroscopique liée à un<br />

sondage urinaire traumatique, on se contente de surveiller la<br />

disparition de l’hématurie après ablation de la sonde vésicale.<br />

Hématurie microscopique<br />

La prévalence de l’hématurie microscopique dans la population<br />

générale est d’environ 6 % (de 0,18 % à 16 % selon les études).<br />

Une hématurie microscopique transitoire peut être liée à un exercice<br />

physique vigoureux, un rapport sexuel ou un léger traumatisme,<br />

et n’a alors aucune valeur pathologique. C’est pourquoi une hématurie<br />

microscopique isolée doit être contrôlée avant d’envisager<br />

des explorations étiologiques.<br />

L’examen microscopique des urines en contraste de phase<br />

devrait être systématiquement réalisé devant une hématurie, la<br />

présence de rouleaux d’hématies ou d’hématies déformées étant<br />

pathognomonique d’une origine glomérulaire. En pratique, très<br />

peu de laboratoires et de services cliniques en France pratiquent<br />

cet examen pourtant simple.<br />

Devant une hématurie microscopique, et en l’absence d’infection<br />

urinaire, une protéinurie (> 0,5 g/L) et une insuffisance<br />

rénale sont en faveur d’une cause néphrologique et doivent faire<br />

envisager une ponction-biopsie rénale.<br />

En l’absence de ces éléments, une cause urologique est recherchée.<br />

Le dosage du PSA permet d’orienter vers une cause prostatique.<br />

La radiographie de l’abdomen sans préparation (ASP)<br />

peut révéler une lithiase radio-opaque. L’échographie rénale et<br />

vésicale peut mettre en évidence une lithiase, une tumeur, des<br />

kystes rénaux. Les données de l’échographie peuvent être précisées<br />

par un uroscanner, une IRM ou une UIV.<br />

Lorsque aucun des examens précédents n’a permis de déterminer<br />

la cause de l’hématurie microscopique, on peut réaliser<br />

une cytologie urinaire à la recherche de cellules tumorales (examen<br />

peu sensible) et une cystoscopie, d’autant plus que le patient<br />

présente des facteurs de risque pour développer des tumeurs<br />

urothéliales.<br />

Chez le sujet jeune, on mesure la calciurie et l’uraturie des<br />

24 heures, car une cristallurie importante peut être responsable<br />

de microlithiases non détectées par l’imagerie.<br />

Selon le terrain du patient, on peut rechercher des BAAR<br />

(bacilles acido-alcoolo-résistants) dans les urines (même si la<br />

tuberculose urinaire est plutôt responsable d’une leucocyturie<br />

aseptique), des parasites de Schistosoma hæmatobium (bilharziose)<br />

si le patient a séjourné en zone d’endémie, ou réaliser<br />

une électrophorèse de l’hémoglobine à la recherche d’une<br />

drépanocytose.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56<br />

à retenir<br />

L’interrogatoire et l’examen microscopique des urines<br />

permettent souvent de s’orienter dans le diagnostic<br />

étiologique d’une hématurie.<br />

Les causes les plus fréquentes d’hématurie sont urologiques :<br />

lithiasiques, infectieuses ou tumorales ; la première cause<br />

d’hématurie glomérulaire est la maladie de Berger.<br />

Certaines causes néphrologiques doivent être diagnostiquées<br />

sans retard pour pouvoir bénéficier d’un traitement adapté<br />

(vascularites rénales en particulier, avec tableau de<br />

glomérulonéphrite aiguë, voire rapidement progressive).<br />

Les indications des explorations à visée diagnostique<br />

dépendent de l’âge du patient, en particulier la cystoscopie<br />

à la recherche d’une tumeur vésicale.<br />

Quand réaliser une ponction-biopsie<br />

rénale ?<br />

Une hématurie microscopique associée à une protéinurie<br />

(> 0,5 g/L) ou à une insuffisance rénale doivent faire discuter une<br />

biopsie rénale. La biopsie doit être réalisée en urgence en cas<br />

de tableau de glomérulonéphrite rapidement progressive (en<br />

l’absence de contre-indications).<br />

Une hématurie microscopique isolée chez un sujet jeune n’est<br />

habituellement pas une indication de biopsie rénale ; elle ne justifie<br />

qu’une simple surveillance annuelle (bandelette urinaire, pression<br />

artérielle, fonction rénale).<br />

Devant une hématurie macroscopique, ce n’est qu’après avoir<br />

éliminé les causes urologiques et vasculaires que l’on envisage<br />

une biopsie rénale, à la recherche essentiellement d’une maladie<br />

de Berger.<br />

Principales causes d’hématurie<br />

Elles sont rappelées dans le tableau.<br />

POINTS FORTS<br />

CAUSES UROLOGIQUES ET VASCULAIRES<br />

D’HÉMATURIE<br />

Infections urinaires<br />

Les infections urinaires basses (cystite) ou hautes (pyélonéphrite<br />

ou prostatite) sont une cause fréquente d’hématurie microou<br />

macroscopique, et sont systématiquement recherchées<br />

devant toute hématurie. L’hématurie ne constitue pas un signe<br />

de gravité de l’infection. Il s’agit le plus souvent d’infections à<br />

germes banals. La bandelette urinaire retrouve des leucocytes,<br />

des nitrites et des protéines en plus des hématies. L’examen cytobactériologique<br />

permet l’identification du germe, et quantifie la<br />

leucocyturie. Plus rarement, il peut s’agir d’une tuberculose ou<br />

d’une schistosomiase urinaire.<br />

R Q 315<br />

903


Lithiases urinaires<br />

La maladie lithiasique urinaire est fréquente, avec une prévalence<br />

de 5 à 6 % de la population générale en France.<br />

La majorité des calculs (80 %) est de nature calcique (oxalate<br />

ou phosphate de calcium). Viennent ensuite les calculs d’acide urique<br />

(10 à 15 %), les calculs phospho-ammoniaco-magnésiens (lithiase<br />

coralliforme infectieuse : 10 %), et les calculs de cystine (1 %). Tous<br />

peuvent léser les voies urinaires et entraîner une hématurie microou<br />

macroscopique, ainsi que des coliques néphrétiques s’ils<br />

deviennent obstructifs.<br />

L’ASP permet le diagnostic en cas de calcul radio-opaque<br />

(lithiase oxalo- ou phosphocalcique), ou faiblement radio-opaque<br />

(calcul phospho-ammoniaco-magnésien secondairement calcifié<br />

ou lithiase de cystine). L’échographie des voies urinaires, le scanner<br />

ou l’uroscanner permettent de visualiser des calculs de plus petite<br />

taille, ou radiotransparents (acide urique).<br />

Tumeur rénale<br />

Il peut s’agir d’une tumeur bénigne (angiomyolipome) ou maligne<br />

(adénocarcinome, fig. 2). Le cancer du rein peut être longtemps<br />

asymptomatique, et le diagnostic porté tardivement, alors qu’existent<br />

déjà des métastases ou un envahissement local. La découverte<br />

fortuite d’une masse rénale lors d’un examen d’imagerie abdominale<br />

est un mode de révélation de plus en plus fréquent. Les signes<br />

d’appel cliniques peuvent être une hématurie macroscopique<br />

(avec formation de caillots), une douleur abdominale ou lombaire,<br />

une masse à la palpation, une altération de l’état général, ou une<br />

thrombose veineuse profonde.<br />

Cancer vésical<br />

Il est souvent révélé par une hématurie, micro- ou macroscopique.<br />

La cytologie urinaire (réalisée sur la 1 re miction matinale 3 j consécutifs)<br />

peut révéler des cellules tumorales, mais c’est un examen<br />

peu sensible. Le diagnostic est apporté par la cystoscopie avec<br />

biopsies et/ou exérèse et examen anatomo-pathologique montrant<br />

904<br />

III-Q315<br />

Hématurie : orientation diagnostique<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

L’hématurie (item 315) est une question à la croisée de la néphrologie,<br />

de l’urologie, de la cancérologie, et des maladies cardiovasculaires.<br />

Voici quelques exemples de dossiers pouvant conduire à traiter cet item.<br />

Un dossier de lithiase rénale (item 259)<br />

avec colique néphrétique et hématurie<br />

macroscopique. Quelques mois plus tard,<br />

une récidive lithiasique avec pyélonéphrite<br />

aiguë sur obstacle. Prise en charge initiale<br />

de la colique néphrétique ? Conseils hygiénodiététiques<br />

? Bilan étiologique lors de la<br />

récidive ? Prise en charge en urgence de<br />

la pyélonéphrite sur obstacle ? Germes<br />

pouvant être en cause (item 93) ?<br />

Un dossier de maladie de Berger :<br />

patient de 30 ans ayant des hématuries<br />

macroscopiques récidivantes. Apparition<br />

progressive d’une insuffisance rénale chronique.<br />

Arguments pour le diagnostic ? Éléments<br />

de surveillance ? Prise en charge de<br />

l’insuffisance rénale chronique (item 253) ?<br />

Un dossier de cancer vésical dépisté en<br />

médecine du travail chez un patient tabagique<br />

ou exposé à des colorants (item 109).<br />

A<br />

C<br />

Figure 2 Scanner rénal. Adénocarcinome rénal gauche.<br />

A — Avant injection de produit de contraste. B — Temps artériel.<br />

C — Temps tubulaire. D — Temps tardif.<br />

un carcinome urothélial. Les tumeurs urothéliales peuvent se<br />

développer tout le long des voies excrétrices urinaires.<br />

Devant une hématurie microscopique isolée, on réalise d’autant<br />

plus facilement une cystoscopie qu’il existe des facteurs de risque de<br />

tumeur urothéliale : tabagisme (présent dans plus de la moitié des<br />

cas), âge supérieur à 50 ans, sexe masculin, traitement par Endoxan<br />

(cyclophosphamide), exposition professionnelle à certains colorants,<br />

consommation d’herbes chinoises ou de phénacétine, inflammation<br />

chronique de la muqueuse vésicale (bilharziose p. ex.).<br />

L’UIV, l’uroscanner ou l’IRM peuvent renseigner sur l’extension<br />

de la tumeur vers les uretères, les reins ou le périnée.<br />

Cancer prostatique<br />

L’adénocarcinome prostatique est rarement révélé par une hématurie.<br />

L’adénome prostatique bénin, en revanche, n’est pas classiquement<br />

responsable d’hématurie. Le toucher rectal, l’échographie<br />

prostatique et le dosage de PSA (prostatic specific antigen)<br />

orientent le diagnostic, dont la confirmation est histologique.<br />

Un dossier de syndrome néphrotique<br />

(item 328) compliqué d’une thrombose<br />

de veine rénale dans le cadre d’une<br />

glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

(item 264).<br />

Un dossier de fibrillation auriculaire<br />

(item 236) compliquée d’un infarctus<br />

rénal.<br />

Un dossier de polykystose rénale<br />

(item 277) avec hémorragie kystique.<br />

Diagnostic de la polykystose autosomique<br />

dominante.<br />

Un dossier de cancer du rein (item 158)<br />

avec embolie pulmonaire (item 135).<br />

B<br />

D<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56


Polykystose rénale autosomique<br />

dominante<br />

L’hématurie macroscopique est une manifestation fréquente<br />

de la polykystose rénale autosomique dominante (fig. 3), et<br />

conduit parfois au diagnostic. L’hématurie est liée à une lésion<br />

d’un vaisseau de la paroi d’un kyste qui peut à son tour se rompre<br />

dans les voies excrétrices urinaires. Elle peut s’accompagner<br />

d’une douleur abdominale ou lombaire, voire d’une colique<br />

néphrétique en cas de caillot obstructif. Les hémorragies intrakystiques,<br />

ne communiquant pas avec les voies urinaires, ne<br />

s’accompagnent pas d’hématurie.<br />

Infarctus rénal<br />

L’infarctus rénal (fig. 4) peut se révéler par une hématurie<br />

micro- ou macroscopique, accompagnée d’une douleur lombaire.<br />

Le terrain (cardiopathie emboligène ou facteurs de risque vasculaire<br />

pour la thrombose artérielle, thrombophilie, cancer du<br />

rein ou syndrome néphrotique pour la thrombose veineuse)<br />

oriente le diagnostic.<br />

Dans certains cas, l’infarctus complique une dissection de l’artère<br />

rénale (idiopathique ou sur fibrodysplasie) et se manifeste<br />

par une poussée hypertensive. L’imagerie confirme le diagnostic<br />

: échodoppler rénal, scanner injecté ou angio-IRM rénale<br />

montrent l’absence du flux, le thrombus, et la néphromégalie<br />

en cas de thrombose veineuse, ainsi que des zones parenchymateuses<br />

hypodenses ischémiques. La biologie retrouve<br />

une élévation du taux de LDH et une insuffisance rénale aiguë<br />

en cas de thrombose artérielle, ou de thrombose veineuse bilatérale<br />

ou sur rein unique.<br />

Tableau<br />

Causes d’hématuries<br />

Causes urologiques Causes glomérulaires<br />

❚ Infections urinaires ❚ Maladie de Berger<br />

basses/hautes ❚ Syndrome d’Alport<br />

❚ Lithiases urinaires ❚ Hématurie familiale bénigne<br />

❚ Cancer vésical ❚ Glomérulonéphrite aiguë<br />

(carcinome urothélial) post-infectieuse<br />

❚ Adénocarcinome prostatique ❚ Glomérulonéphrite<br />

❚ Tumeur rénale membrano- proliférative<br />

(carcinome, angiomyolipome) ❚ Glomérulonéphrite<br />

❚ Polykystose rénale extracapillaire<br />

❚ Traumatisme rénal<br />

❚ Tuberculose urinaire Causes parenchymateuses<br />

❚ Bilharziose ❚ Néphrite interstitielle aiguë<br />

(immuno-allergique)<br />

Causes vasculaires ❚ Nécrose papillaire<br />

❚ Infarctus rénal<br />

❚ Malformation artérioveineuse<br />

rénale<br />

❚ Syndrome<br />

du « casse-noisettes »*<br />

* Compression de la veine rénale gauche dans la pince aorto-mésentérique.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56<br />

A B<br />

Figure 3 IRM rénale. Polykystose rénale avec kystes hémorragiques<br />

(*). A — Séquence T2. B — Séquence T1.<br />

A<br />

Figure 4<br />

B<br />

Infarctus rénal gauche. A — Scanner. B — Écho-doppler.<br />

CAUSES GLOMÉRULAIRES<br />

ET PARENCHYMATEUSES<br />

Maladie de Berger (glomérulonéphrite<br />

primitive à dépôts mésangiaux d’IgA)<br />

La maladie de Berger est la première cause d’hématurie glomérulaire.<br />

Elle touche le plus souvent les adultes jeunes, essentiellement<br />

les hommes, autour de 30 ans.<br />

Le tableau clinique typique est celui d’hématuries macroscopiques<br />

récidivantes, survenant dans les 48 heures suivant<br />

un épisode infectieux de la sphère ORL. La bandelette urinaire<br />

retrouve fréquemment une hématurie microscopique entre les<br />

épisodes d’hématurie macroscopique. Peuvent s’y associer une<br />

protéinurie, une hypertension artérielle et une insuffisance rénale<br />

chronique progressive. Le diagnostic de maladie de Berger doit<br />

être évoqué devant une hématurie microscopique de découverte<br />

fortuite.<br />

La biopsie rénale confirme le diagnostic en révélant en immunofluorescence<br />

la présence de dépôts mésangiaux granuleux<br />

d’IgA (fig. 5). La microscopie optique permet d’évaluer le degré<br />

d’atteinte tubulo-interstitielle associée, la quantité de glomérules<br />

fibreux et l’existence d’une prolifération extracellulaire (croissants),<br />

qui sont de mauvais pronostic.<br />

Le purpura rhumatoïde est une vascularite pouvant entraîner<br />

des lésions rénales identiques à celles de la maladie de Berger.<br />

Il touche les enfants et les adolescents et s’accompagne de signes<br />

extrarénaux (purpura vasculaire, atteinte articulaire, douleurs<br />

abdominales, syndrome inflammatoire).<br />

R Q 315<br />

905


Syndrome d’Alport<br />

C’est une affection génétique de transmission récessive liée à l’X<br />

dans la grande majorité des cas (il existe des formes autosomiques<br />

dominantes et autosomiques récessives). Le syndrome d’Alport<br />

associe une glomérulopathie, une surdité de perception et des<br />

anomalies oculaires (lenticône antérieur, cataracte, lésions maculaires).<br />

Il est lié à une anomalie de la chaîne α5 du collagène IV<br />

(ou des chaînes α3 et α4 dans les formes autosomiques), qui est<br />

impliqué dans la structure de la membrane basale glomérulaire,<br />

de la cochlée, et qui est présent dans la peau. Il se manifeste au<br />

niveau rénal par une hématurie micro- ou macroscopique, puis<br />

par une protéinurie glomérulaire, une dégradation progressive<br />

de la fonction rénale et l’apparition d’une hypertension artérielle.<br />

Le diagnostic est évoqué devant l’association d’une hématurie<br />

et d’une surdité, et l’existence d’une histoire familiale compatible.<br />

Il est confirmé par la biopsie cutanée ou rénale (membrane basale<br />

glomérulaire fine ou feuilletée, absence de la chaîne α5 ou α3 du<br />

collagène IV en immunofluorescence), et par l’étude génétique.<br />

Hématurie familiale bénigne (maladie<br />

des membranes basales fines)<br />

C’est une affection transmise sur un mode autosomique dominant.<br />

Il existe une hématurie microscopique isolée ou, rarement,<br />

une hématurie macroscopique. Le pronostic rénal est excellent<br />

(absence de dégradation de la fonction rénale). L’histologie rénale,<br />

lorsqu’elle est réalisée, montre en microscopie électronique un<br />

amincissement diffus des membranes basales glomérulaires.<br />

Glomérulonéphrites aiguës<br />

Les glomérulonéphrites post-infectieuses se manifestent par<br />

un syndrome néphritique aigu, associant hématurie, protéinurie,<br />

HTA œdèmes et insuffisance rénale aiguë parfois oligo-anurique.<br />

Elles surviennent après un délai de 10 à 15 jours suivant une infection.<br />

La baisse de la fraction C3 du complément est très évocatrice.<br />

Les glomérulonéphrites extracapillaires peuvent réaliser un<br />

tableau de glomérulonéphrite rapidement progressive, associant<br />

une hématurie micro- ou macroscopique et une insuffisance<br />

906<br />

III-Q315<br />

Hématurie : orientation diagnostique<br />

Figure 5 Figure 6 Biopsie rénale. Microscopie optique. Glomérulonéphrite<br />

Biopsie rénale. Dépôts mésangiaux d’IgA en immunofluorescence<br />

(maladie de Berger).<br />

nécrosante avec présence d’un croissant cellulaire (*) et de<br />

cylindres hématiques (**).<br />

rénale aiguë d’évolution rapidement sévère et oligo-anurique.<br />

La recherche d’anticorps sériques anti-membrane basale glomérulaire<br />

(MBG) et anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles<br />

(ANCA) doit être réalisée en urgence. L’examen en microscopie<br />

optique de la biopsie rénale montre des croissants<br />

cellulaires comblant la chambre urinaire, des zones de nécrose<br />

glomérulaire, et un infiltrat inflammatoire interstitiel (fig. 6). L’examen<br />

en immunofluorescence retrouve des dépôts linéaires dans<br />

le syndrome de Goodpasture (anticorps anti-MBG ; fig. 7), des<br />

dépôts non linéaires en cas de vascularite secondaire (lupus,<br />

cryoglobulinémie, purpura rhumatoïde ou endocardite), ou l’absence<br />

de dépôts en cas de vascularite « pauci-immune » à ANCA<br />

(polyangéite microscopique ou maladie de Wegener). Une atteinte<br />

pulmonaire (hémorragie intra-alvéolaire) peut être associée à<br />

l’atteinte rénale, réalisant le syndrome pneumo-rénal de la maladie<br />

de Goodpasture. D’autres signes d’atteinte systémique<br />

peuvent être retrouvés en cas de lupus, de polyangéite microscopique,<br />

de maladies de Wegener ou de Churg et Strauss. La<br />

précocité de la mise en route du traitement conditionne le pronostic<br />

rénal et parfois vital.<br />

Figure 7 Biopsie rénale. Étude en immunofluoresence. Dépôts<br />

linéaires d’anticorps anti-membrane basale glomérulaire (syndrome<br />

de Goodpasture).<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56


Néphrite tubulo-interstitielle aiguë<br />

(immuno-allergique)<br />

L’hématurie est associée à une insuffisance rénale aiguë, et<br />

survient au décours d’une prise médicamenteuse (antibiotiques<br />

en particulier, pénicillines, sulfamides, rifampicine). D’autres<br />

signes allergiques peuvent être observés (rash, fièvre, cytolyse<br />

hépatique, hyperéosinophilie…).<br />

Nécrose papillaire<br />

Les papilles sont les zones de la médullaire rénale situées au<br />

bord des calices. Elles peuvent se nécroser suite à une consommation<br />

excessive d’analgésiques (AINS, aspirine, phénacétine),<br />

à une crise drépanocytaire, à une hyperpression dans les voies<br />

urinaires (uropathie obstructive) ou en cas de diabète.<br />

Cette nécrose peut être asymptomatique, de découverte fortuite<br />

à l’imagerie rénale. Elle peut au contraire entraîner une hématurie<br />

macroscopique ou une colique néphrétique (obstruction urétérale<br />

par un débris tissulaire). L’examen diagnostique de choix est l’UIV,<br />

qui montre un élargissement du fond caliciel ou une image en cocarde.<br />

QUELLES URGENCES ÉVOQUER ?<br />

L’hématurie est rarement dangereuse par son abondance (syndrome<br />

hémorragique), sauf en cas d’hématurie macroscopique liée à<br />

une tumeur rénale ou vésicale, en particulier sous traitement anticoagulant<br />

ou antiagrégant plaquettaire. En revanche, les caillots<br />

sanguins peuvent entraîner une obstruction aiguë des voies urinaires,<br />

responsable d’un globe vésical ou de douleurs lombaires à type de<br />

coliques néphrétiques, et d’une insuffisance rénale aiguë en cas<br />

d’obstruction bilatérale ou sur rein unique fonctionnel. Une hyperhydratation<br />

ou une sonde vésicale à double courant avec rinçage<br />

vésical peuvent être utilisées pour prévenir cette complication.<br />

Les tableaux de glomérulonéphrite aiguë ou de glomérulonéphrite<br />

rapidement progressive nécessitent une prise en charge<br />

urgente en milieu néphrologique. Ils sont suspectés devant une<br />

dégradation rapide de la fonction rénale, une protéinurie et/ou<br />

une poussée hypertensive. ■<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

VRAI OU FAUX ?<br />

Une hématurie microscopique isolée est le plus<br />

souvent d’origine glomérulaire.<br />

La cystoscopie réalisée en période hématurique<br />

apporte des arguments pour une origine urologique<br />

en cas de saignement unilatéral.<br />

La bilharziose est une cause rare d’hématurie.<br />

Une hématurie microscopique associée à une protéinurie<br />

doit inciter à la réalisation d’une biopsie rénale.<br />

Une hématurie macroscopique survenant lors d’un<br />

surdosage en AVK ne justifie pas d’exploration particulière.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56<br />

Réponses : F, V, V, V, F.<br />

907


908<br />

1<br />

2<br />

3<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 31, p. 883<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

L’infection broncho-pulmonaire dans la mucoviscidose<br />

est exclusivement liée à P. æruginosa.<br />

Dans la mucoviscidose, les exacerbations<br />

de la bronchite ne nécessitent pas de traitement<br />

antibiotique si elles ne sont pas fébriles<br />

et ne s’accompagnent pas de signes biologiques<br />

d’inflammation.<br />

Le pronostic de la mucoviscidose est exclusivement<br />

lié à l’atteinte broncho-pulmonaire.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 L’insuffisance pancréatique exocrine est constante<br />

dans la mucoviscidose.<br />

2 La constipation est inhabituelle au cours de<br />

la mucoviscidose.<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

3 Le poumon est cliniquement sain à la naissance.<br />

4 Moins de 30 mutations du gène CFTR sont en cause<br />

dans la mucoviscidose.<br />

C / QCM<br />

Parmi les signes suivants, lesquels permettent<br />

d’exclure le diagnostic de mucoviscidose ?<br />

1 Une croissance staturo-pondérale normale.<br />

2 L’absence de signe broncho-pulmonaire à l’âge de 6 ans.<br />

3 Un test de dépistage néonatal négatif.<br />

4 Une maternité chez une femme de 28 ans.<br />

5 La présence de 4 frères et sœurs en bonne santé<br />

dans la fratrie.<br />

6 Aucun.<br />

Réponses : A : F, F, F / B : F, F, V, F / C : 6<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 17, p. 891<br />

Le dépistage systématique du diabète gestationnel<br />

repose en France sur :<br />

La mesure mensuelle de la glycosurie.<br />

Le dosage de l’HbA1c au 6e mois de la grossesse.<br />

Le test de O’Sullivan au 6e A / QCM<br />

1<br />

2<br />

3<br />

mois de la grossesse.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

Quels sont parmi les traitements suivants ceux qui<br />

peuvent être utilisés dans le diabète gestationnel ?<br />

1 Mesures diététiques.<br />

2 Insulines.<br />

3 Tous les antidiabétiques oraux.<br />

MINI TEST DE LECTURE de la question 182, p. 895<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Un INR supérieur à 4 est corrélé à un risque élevé<br />

de saignement.<br />

Une nécrose cutanée à l’introduction des AVK est<br />

évocatrice d’un déficit en protéine S.<br />

Un surdosage asymptomatique en AVK à 8<br />

d’INR est au mieux traité par l’administration orale<br />

de vitamine K.<br />

La vitamine K sous-cutanée est au moins aussi efficace<br />

que la vitamine K orale ou parentérale.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

1 Une thrombopénie induite par l’héparine ne peut<br />

survenir qu’en cas d’exposition préalable à l’héparine.<br />

2 La survenue d’une thrombopénie de type I impose<br />

l’interruption de l’héparine.<br />

Parmi les facteurs de risque suivants, lesquels<br />

doivent faire rechercher un diabète méconnu en début<br />

de grossesse ?<br />

Antécédents familiaux de diabète de type 2 au 1er degré.<br />

Surpoids (Indice de masse corporelle > 25 kg/m2 C / QCM<br />

1<br />

2<br />

).<br />

3 Âge > 40 ans.<br />

4 Antécédents d’hyperglycémie sous pilule<br />

ou de diabète gestationnel.<br />

5 Antécédents obstétricaux : mort fœtale in utero,<br />

macrosomie, malformation.<br />

3<br />

4<br />

Réponses : A : 3 / B : 1, 2 / C : 1, 2, 3, 4, 5.<br />

Le sulfate de protamine doit être réservé<br />

aux hémorragies majeures survenant sous traitement<br />

anticoagulant par héparine.<br />

L’antagonisation d’un AVK par la vitamine K expose<br />

à une augmentation du risque thrombotique.<br />

La thrombopénie induite par l’héparine :<br />

Survient souvent entre le 5e et le 8e C / QCM<br />

1<br />

jour de traitement.<br />

2 Ne nécessite pas l’interruption immédiate de l’héparine.<br />

3 Est secondaire à une immunisation contre<br />

le complexe F4P-héparine.<br />

4 Ne survient jamais sous traitement anticoagulant par<br />

HBPM.<br />

Réponses : A : V, F, F, F / B : F, F, V, V / C : 1, 3.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN / 2006 : 56


OBJECTIFS<br />

est une éventualité clinique fréquente<br />

qui constitue parfois une urgence vitale. Il est donc fon-<br />

L’hypercalcémie<br />

damental de connaître les signes cliniques évocateurs<br />

de ce syndrome, les maladies qui s’y rapportent, les examens<br />

complémentaires à demander et les thérapeutiques à mettre en<br />

œuvre.<br />

Définition de l’hypercalcémie<br />

Outre son rôle central dans le métabolisme osseux, l’ion calcium<br />

est indispensable à de très nombreuses réactions biologiques de<br />

l’organisme. De ce fait, la régulation de son taux sérique est<br />

stricte et ses variations étroites. La calcémie sérique totale normale<br />

est comprise entre 2,2 et 2,6 mmol/L chez un sujet à jeun<br />

(avec quelques variations selon les techniques du laboratoire). Il<br />

existe néanmoins des causes d’erreur liées à la fixation du calcium<br />

à l’albumine (40 %) qui justifient que l’on calcule la calcémie<br />

totale corrigée, notamment dans les situations de déshydratation,<br />

hyperhydratation, dénutrition :<br />

calcium total corrigé (mmol/L)<br />

= calcium total mesuré (mmol/L) – 0,02 [albumine (g/L) – 40].<br />

On peut dans certaines circonstances doser le calcium ionisé<br />

(1,15 – 1,3 mmol/L), dont l’analyse doit être rapide après le prélèvement.<br />

Il s’agit de la fraction réellement active du calcium ; le<br />

dosage de la calcémie totale n’est que le reflet de la calcémie<br />

ionisée mais elle est beaucoup plus aisée à analyser et plus<br />

reproductible. Son taux peut être influencé par la diminution du<br />

pH qui l’augmente et l’hypophosphatémie qui le diminue.<br />

L’hypercalcémie est définie par un taux de calcium total supérieur<br />

à 2,6 mmol/L. Le diagnostic impose un deuxième prélèvement,<br />

très rapide s’il existe des signes cliniques de gravité, pour<br />

confirmer le diagnostic.<br />

Mécanismes physiopathologiques (figure)<br />

Trois mécanismes principaux sont susceptibles d’expliquer la<br />

survenue d’une hypercalcémie ; ils sont souvent associés entre eux.<br />

Augmentation de la libération osseuse de calcium<br />

Il s’agit le plus souvent d’une augmentation inappropriée de<br />

parathormone [c’est le cas dans l’hyperparathyroïdie primitive]<br />

ou de PTHrP qui activent le remodelage osseux et singulièrement<br />

la résorption osseuse via l’activation ostéoclastique.<br />

Plus rarement, il s’agit d’une hyperthyroïdie, d’une intoxication<br />

à la vitamine A, d’un processus métastatique osseux ou paranéoplasique,<br />

d’hémopathie (IL6).<br />

En dehors de l’hyperparathyroïdie primitive, l’hypercalcémie<br />

s’accompagne d’une PTH basse ou effondrée et d’une phosphatémie<br />

normale, voire augmentée.<br />

Diminution d’excrétion urinaire du calcium<br />

III Q 319<br />

Pr Pascal Guggenbuhl, Pr Gérard Chalès<br />

Service de rhumatologie, CHU, 35033 Rennes ; université Rennes-1, IFR 140, 35000 Rennes, INSERM UMR U 991, 35000 Rennes, France<br />

pascal.guggenbuhl@univ-rennes1.fr<br />

Devant une hypercalcémie,<br />

ARGUMENTER les principales hypothèses<br />

diagnostiques et JUSTIFIER les examens<br />

complémentaires pertinents.<br />

IDENTIFIER les situations d’urgence<br />

et PLANIFIER leur prise en charge.<br />

HYPERCALCÉMIE<br />

(avec le traitement)<br />

Orientation diagnostique<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

RR<br />

Il peut s’agir d’une diminution de la capacité de filtration glomérulaire ;<br />

au cours de l’insuffisance rénale, des apports excessifs en calcium<br />

ou en calcitriol ou la constitution d’une hyperparathyroïdie<br />

tertiaire peuvent entraîner rapidement une hypercalcémie aiguë<br />

alors même que chez l’insuffisant rénal chronique, la diminution<br />

de l’hydroxylation en 1α de la vitamine D entraîne une diminution<br />

du calcitriol et donc une tendance à l’hypocalcémie.<br />

Il peut aussi s’agir d’une augmentation de la réabsorption du calcium,<br />

qui s’observe le plus souvent en cas d’hyperparathyroïdie primitive,<br />

de prise de diurétique thiazidiques.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong> 405


RR Q 319 III<br />

HYPERCALCÉMIE (AVEC LE TRAITEMENT)<br />

Ou, plus rarement, il s’agit d’une mutation inactivatrice du<br />

récepteur au calcium qui donne un syndrome caractéristique<br />

« hypercalcémie-hypocalciurie », souvent familiale. Le taux de<br />

PTH est variable (elle est généralement normale de façon inadaptée<br />

à la calcémie). Ce syndrome se complique rarement. Il est<br />

important de le reconnaître, car il n’y a pas de sanction chirurgicale<br />

au niveau des parathyroïdes.<br />

Augmentation de la quantité de calcium<br />

intestinal absorbé<br />

L’augmentation de l’absorption digestive est souvent liée à<br />

l’augmentation des taux sériques de calcitriol (granulomatoses,<br />

supplémentation médicamenteuse…) avec initialement une<br />

hypercalciurie et une hypercalcémie lorsque les capacités d’élimination<br />

rénale sont dépassées.<br />

Il existe souvent de façon associée une augmentation des<br />

apports en calcium.<br />

Signes cliniques de l’hypercalcémie<br />

Hypercalcémie asymptomatique<br />

On constate qu’il n’existe aucun symptôme de l’hypercal -<br />

cémie dans 40 % des cas. La découverte de l’anomalie biologique<br />

est alors fortuite à l’occasion d’un bilan biologique<br />

demandé pour une autre raison. Il faut s’assurer de la réalité de<br />

l’hypercalcémie, surtout si elle est modérée, en faisant au<br />

besoin un nouveau prélèvement à jeun et en corrigeant la calcémie<br />

par l’albuminémie.<br />

TABLEAU 1<br />

406<br />

Profil biologique des hypercalcémies en fonction de leur cause<br />

Hypercalcémies Malignes<br />

ou myélome<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong><br />

Hypercalcémie<br />

paranéoplasique<br />

Hypercalcémie symptomatique<br />

Les signes cliniques de l’hypercalcémie sont liés à la rapidité<br />

d’installation de celle-ci et à son taux.<br />

Les taux les plus élevés engendrent généralement un cortège<br />

de signes cliniques évocateurs.<br />

1. Syndrome polyuro-polydypsique et syndrome général<br />

Ce syndrome est caractérisé par :<br />

– une augmentation de la diurèse liée à la stimulation du récepteur<br />

au calcium du tubule rénal liée à l’augmentation excessive du<br />

calcium ionisé ;<br />

– une soif importante pour compenser les pertes hydriques ; des<br />

signes cliniques de déshydratation extracellulaire, un amaigrissement,<br />

une fièvre.<br />

2. Signes digestifs<br />

Ils comprennent anorexie, épigastralgies, nausées, vomissements<br />

et constipation.<br />

3. Manifestations cardiovasculaires<br />

Elles s’expriment cliniquement : tachycardie, arythmie, hypertension<br />

artérielle, ou par des signes électrocardiographiques :<br />

raccourcissement du segment ST et de l’intervalle QT, troubles<br />

de la conduction (bloc atrio-ventriculaire), troubles du rythme<br />

(tachycardie, extrasystoles ventriculaires, fibrillation ventriculaire).<br />

Elles sont aggravées par l’hypokaliémie et les digitaliques.<br />

4. Manifestations rénales<br />

Elles rassemblent les lithiases (phosphate ou oxalate de calcium),<br />

l’insuffisance rénale : aiguë dans les hypercalcémies aiguës, obstructive<br />

en cas de lithiase, chronique en cas d’hypercalcémie<br />

chronique et de néphrocalcinose.<br />

Hyperparathyroïdie<br />

primitive<br />

Granulomatoses<br />

Intoxication vitamine D<br />

Calcémie ↑ ↑ ↑ ↑<br />

Phosphatémie N ou ↑ N ou ↑ ↓ ↑<br />

Calciurie ↑ ↑ ↑ ↑<br />

PTH (parathormone) ↓ ↓ ↑ ↓<br />

PTHrP (parathyroid N ou ↑ ↑ N N<br />

hormone related peptide)<br />

1-25-(OH) 2D* ↓ ↓ ↑ ↑ granulomatoses**<br />

(*) Le dosage du calcitriol n’est pas utilisé en pratique courante en dehors des granulomatoses car c’est le taux de 25 OH vitamine D qui est le reflet du stock de l’organisme.<br />

(**) En cas d’intoxication à la vitamine D autre que par les dérivés hydroxylés, c’est la 25-(OH) vitamine D qui est augmentée.<br />

D’après Orcel P. In : Traité de thérapeutique rhumatologique. Eds Bardin T et Orcel P. Flammarion Médecine Sciences, Paris, 2007.<br />

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FIGURE<br />

Diminution de l’excrétion<br />

urinaire du calcium<br />

● Augmentation de la réabsorption<br />

du calcium urinaire<br />

5. Manifestations neurologiques et psychiatriques<br />

Elles sont protéiformes : céphalées, asthénie, syndrome<br />

mimant soit une polynévrite (hyporéflexie, parfois aréflexie et<br />

paralysie distale), soit une myopathie avec hypotonie, syndrome<br />

confusionnel, somnolence, coma, présentation psychiatrique<br />

(agitation, syndrome dépressif).<br />

Hypercalcémie majeure<br />

Hyperparathyroïdie primitive<br />

Diurétiques thiazidiques<br />

Syndrome<br />

hypercalcémie-hypocalciurie<br />

● Insuffisance rénale<br />

Apports excessifs de calcium<br />

Apports excessifs de calcitriol<br />

Hyperparathyroïdie tertiaire<br />

Mécanismes physiopathologiques de l’hypercalcémie.<br />

L’hypercalcémie majeure se caractérise par des signes de<br />

gravité engageant le pronostic vital. C’est une urgence médicale<br />

qui impose l’hospitalisation en milieu spécialisé, voire d’emblée<br />

en réanimation.<br />

La déshydratation est souvent au premier plan avec une insuffisance<br />

rénale. Le tableau peut s’accompagner de fièvre, de douleurs<br />

abdominales pseudo-chirurgicales qui ne doivent pas égarer<br />

le diagnostic. Enfin, les troubles du rythme et de la conduction<br />

cardiaque participent à la gravité du tableau clinique.<br />

La calcémie est supérieure à 3 mmol/L. L’hyperprotidémie,<br />

l’élévation de l’hématocrite sont le reflet de la déshydratation<br />

extracellulaire. Il peut exister une hypokaliémie et une hypochlorémie.<br />

HYPERCALCÉMIE<br />

Augmentation du calcium<br />

intestinal absorbé<br />

● Augmentation du calcitriol<br />

Granulomatose<br />

Iatrogénie<br />

Examens complémentaires<br />

Les examens complémentaires ont deux buts : 1) affirmer le<br />

diagnostic d’hypercalcémie vraie et évaluer son retentissement ;<br />

2 ) identifier une cause (si possible curable) [tableau 1].<br />

Diagnostic et retentissement de l’hypercalcémie<br />

Doivent être réalisés :<br />

– calcémie, phosphatémie, créatininémie (estimation de la clairance),<br />

ionogramme sanguin ;<br />

– calciurie, phosphaturie, créatininurie sur les 24 heures ;<br />

– hémogramme, CRP, électrophorèse des protides (permet<br />

d’obtenir l’albuminémie pour calculer la calcémie corrigée et de<br />

dépister rapidement une cause majeure, le myélome, en cas<br />

de pic monoclonal dans les gammaglobulines) ;<br />

– électrocardiogramme.<br />

Étiologie et examens utiles au dépistage<br />

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Q RR319<br />

Augmentation de la libération<br />

osseuse du calcium<br />

● Métastases osseuses,<br />

lyse osseuse tumorale<br />

● Hyperparathyroïdie primitive<br />

● Intoxication vitamine A<br />

● Hyperthyroïdie<br />

● Sécrétion du PTH related peptide<br />

1. Hypercalcémies malignes (60 % des cas)<br />

Myélome multiple : il faut demander une électrophorèse des protides<br />

sériques, une immunofixation sérique, une protéinurie des<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong> 407


RR Q 319 III<br />

HYPERCALCÉMIE (AVEC LE TRAITEMENT)<br />

24 heures et rechercher des chaînes légères urinaires par immunofixation.<br />

Il est maintenant possible de doser les chaînes légères<br />

libres dans le sérum.<br />

Métastases osseuses : il faut rechercher un cancer primitif ostéophile<br />

s’il n’est pas connu (sein, rein, poumon, thyroïde, prostate)<br />

ou son évolutivité s’il est connu ; faire une scintigraphie osseuse.<br />

Hémopathies : le plus souvent, il s’agit de lymphomes en phase<br />

d’acutisation.<br />

Hypercalcémie humorale maligne : la tumeur maligne secrète de la<br />

PTHrP (PTH-related peptide) qui est une hormone apparentée à<br />

la PTH avec la même activité sur son récepteur. Cette hormone<br />

intervient physiologiquement dans la grossesse, la lactation et le<br />

développement fœtal. Elle peut être sécrétée par des cellules<br />

tumorales au cours de néoplasies : sein, poumon, œsophage, utérus,<br />

peau, rein, vessie, ovaire… L’hypercalcémie est souvent plus<br />

difficile à traiter sur le plan symptomatique si on n’a pas traité la<br />

cause. La PTHrP peut être actuellement dosée assez facilement.<br />

2. Hypercalcémies non malignes<br />

Hyperparathyroïdie primitive (30 % des cas) : le dosage de la PTH<br />

permet le diagnostic.<br />

C’est la cause bénigne la plus fréquente. La sécrétion de PTH<br />

est inappropriée en regard de la calcémie qui est élevée. Il existe en<br />

effet à l’état physiologique un rétrocontrôle négatif : quand la calcémie<br />

est haute, la PTH diminue ; inversement, lorsqu’il existe une<br />

TABLEAU 2<br />

408<br />

Principes thérapeutiques de l’hypercalcémie<br />

aiguë*<br />

Hypercalcémies aiguës graves - Réanimation<br />

❚ Réhydratation<br />

❚ Anti-ostéoclastiques IV<br />

➙ bisphosphonates<br />

➙ calcitonine<br />

❚ ± furosémide (diurèse avec compensation des pertes)<br />

❚ ± épuration extrarénale<br />

Hypercalcémie > 2,75 mmol/L sans signes de gravité<br />

❚ Réhydratation<br />

❚ Anti-ostéoclastiques IV<br />

➙ Bisphosphonates<br />

❚ Puis en fonction du contexte clinique<br />

➙ ± relais bisphosphonate per os<br />

➙ ± corticoïdes<br />

Hypercalcémie < 2,75 mmol/L sans signes de gravité<br />

❚ Hydratation<br />

❚ Modération des apports calciques<br />

❚ Éviction des médicaments hypercalcémiants si possible<br />

❚ Surveillance<br />

* D’après Orcel P. In : Traité de thérapeutique rhumatologique,<br />

Eds Bardin T et Orcel P. Flammarion Médecine Sciences, Paris, 2007.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong><br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

carence calcique (ou en vitamine D), la PTH augmente (hyperparathyroïdie<br />

secondaire destinée à augmenter le remodelage osseux,<br />

donc la résorption osseuse via les ostéoclastes, afin de fournir du<br />

calcium à l’organisme). Dans l’hyperparathyroïdie primitive, la PTH<br />

est élevée de façon concomitante à l’hypercalcémie, ce qui signe<br />

le diagnostic. Le plus souvent, c’est une tumeur bénigne parathyroïdienne,<br />

un adénome, qui est responsable de la maladie. Moins<br />

souvent il s’agit d’une hyperplasie des glandes parathyroïdiennes,<br />

ou plus exceptionnellement d’un cancer parathyroïdien.<br />

On cherche à mettre en évidence l’adénome par une échographie<br />

cervicale souvent complétée par une scintigraphie au MIBI qui a<br />

l’avantage de pouvoir déceler des localisations ectopiques de<br />

l’adénome, par exemple dans le médiastin. Dans quelques cas, on<br />

peut faire appel au scanner ou à l’IRM. Néanmoins, la recherche est<br />

infructueuse dans un certain nombre de cas. Le diagnostic est biologique<br />

; quand il a été bien porté, il conduit parfois à une intervention<br />

chirurgicale pour enlever l’adénome même s’il n’a pas été localisé<br />

préalablement. C’est le chirurgien (qui doit être expérimenté<br />

dans ce type de chirurgie) qui va rechercher l’adénome au cours de<br />

l’intervention au prix parfois d’une exploration médiastinale.<br />

Dans l’hyperparathyroïdie secondaire, il n’y a généralement<br />

pas d’hypercalcémie.<br />

Il existe une forme d’hyperparathyroïdie, dite tertiaire, qui survient<br />

chez l’insuffisant rénal. Il développe une hyperplasie compensatrice<br />

des parathyroïdes liée à la carence en vitamine D. Celle-ci<br />

peut s’autonomiser, perdant le rétrocontrôle lié à la calcémie et<br />

constituer un véritable adénome et dans certains cas une hypercalcémie.<br />

Autres causes :<br />

– médicamenteuses : elles sont fréquentes, et il faut les rechercher<br />

à l’interrogatoire : diurétiques thiazidiques (augmentent la<br />

réabsorption tubulaire du calcium) ; intoxication à la vitamine D<br />

(doses suprathérapeutiques) ; lithium (stimulation des cellules<br />

parathyroïdiennes) ; rétinoïdes (hypervitaminose A) ;<br />

– sarcoïdose et autres granulomatoses : l’hypercalcémie survient<br />

du fait de la production extrarénale de 1-25-(OH) 2 vitamine D<br />

(ou calcitriol) par le granulome, production non régulée par l’organisme.<br />

Pour la sarcoïdose, il faut demander un cliché thoracique<br />

de face et un dosage de l’angiotensine convertase qui<br />

est augmentée. Plus rarement, il s’agit d’une tuberculose, de la<br />

lèpre, d’une histoplasmose, d’une bérylliose… ;<br />

– endocrinopathies autres que l’hyperparathyroïdie primitive : les<br />

néoplasies endocriniennes multiples (NEM) incluant une hyperparathyroïdie<br />

sont à rechercher pour toute hyperparathyroïdie<br />

primitive survenant avant 40 ans : soit les NEM de type I (chercher<br />

: syndrome de Zollinger-Ellison, prolactinome, néoplasies<br />

pancréatiques neuroendocriniennes) ou II a (chercher : cancer<br />

médullaire de la thyroïde et un phéochromocytome). Il existe le<br />

plus souvent un contexte familial. Plus rarement, il s’agit d’une<br />

hyperthyroïdie ou d’une insuffisance surrénalienne aiguë ;<br />

– insuffisance rénale chronique : il faut alors évoquer une hyperparathyroïdie<br />

tertiaire ;


Hypercalcémie (avec le traitement)<br />

POINTS FORTS À RETENIR<br />

L’hypercalcémie totale est le reflet de l’augmentation<br />

de la calcémie ionisée. En cas de doute, il faut calculer<br />

la calcémie corrigée et doser la calcémie ionisée.<br />

Le dosage concomitant de la PTH oriente fortement<br />

le diagnostic.<br />

Toute hypercalcémie doit faire rechercher des signes<br />

de gravité susceptibles d’engager le pronostic vital.<br />

Le traitement d’urgence de l’hypercalcémie<br />

repose sur une hydratation importante, éventuellement<br />

sur l’usage de diurétiques de l’anse, de bisphosphonates<br />

par voie intraveineuse.<br />

– immobilisation : c’est une cause rare, lors de comas prolongés<br />

ou chez des patients paraplégiques. Il existe plus souvent une<br />

hypercalciurie pouvant entraîner des lithiases urinaires récidivantes.<br />

Plus rarement, il s’agit d’une maladie de Paget en cas<br />

d’immobilisation ;<br />

– syndrome des buveurs de lait : il est rare en France et représente<br />

plutôt une cause historique a priori disparue, liée à l’utilisation<br />

de lait ou de sels alcalins de calcium en grande quantité<br />

pour traiter les ulcères gastroduodénaux.<br />

Traitement symptomatique des hypercalcémies<br />

Traitement d’urgence de l’hypercalcémie aiguë :<br />

urgence vitale (v. tableau 2)<br />

L’hospitalisation est nécessaire<br />

1. Hydratation<br />

Elle est à base de sérum salé isotonique : 2 à 4 litres par 24 h [à<br />

adapter au contexte clinique et à la fonction cardiaque].<br />

L’utilisation de furosémide (diurétique de l’anse) IV est possible<br />

uniquement en milieu de réanimation, en compensant les pertes<br />

heure par heure. Elle est contre-indiquée en cas de protéines<br />

monoclonales urinaires (risque de tubulopathie).<br />

2. Arrêt de certains médicaments<br />

Cela concerne ceux susceptibles d’aggraver l’hypercalcémie<br />

(calcium et vitamine D, diurétiques thiazidiques, alcalins) et ceux<br />

contre-indiqués en cas d’hypercalcémie (digitaliques).<br />

3. Inhibiteurs de la résorption osseuse (action anti-ostéoclastique)<br />

La calcitonine IV est moins utilisée depuis la mise à disposition<br />

des bisphosphonates IV, elle peut garder un intérêt dans les<br />

situations d’urgence en raison de son action plus rapide ou en<br />

cas d’insuffisance rénale. En revanche, son effet tend à s’épuiser.<br />

Q RR319<br />

Les bisphosphonates par voie intraveineuse : théoriquement réservés<br />

dans leurs mentions d’AMM aux hypercalcémies d’origine<br />

néoplasique, il existe un consensus pour les utiliser également<br />

dans les autres situations d’hypercalcémie aiguë menaçante. La<br />

dose est adaptée au niveau de calcémie et à la fonction rénale.<br />

Leur action est non seulement plus lente, mais aussi plus durable<br />

que celle de la calcitonine.<br />

Il s’agit du pamidronate, du clodronate, de l’acide zolédronique,<br />

de l’ibandronate.<br />

4. Réanimation<br />

En cas d’hypercalcémie difficilement contrôlable, d’insuffisance<br />

rénale, de troubles neurologiques, de trouble de conduction ou<br />

du rythme ou d’insuffisance cardiaque… ou de toute situation<br />

engageant le pronostic vital, un transfert médicalisé (Samu) en<br />

réanimation s’impose. Outre le monitorage cardiaque, l’utilisation<br />

des diurétiques et des moyens de réanimation appropriés, une<br />

épuration extrarénale pourra être pratiquée dans certains cas.<br />

Traitement de l’hypercalcémie en dehors de l’urgence<br />

Il se confond avec le traitement de la cause quand celui-ci est<br />

possible. Dans les autres cas, il est souvent fait appel aux bisphosphonates,<br />

particulièrement lorsqu’il existe un risque d’ostéoporose<br />

associé comme dans l’hyperparathyroïdie primitive<br />

non opérable. Néanmoins, il ne s’agit pas d’indications validées<br />

en dehors des contextes de néoplasies.<br />

Les corticoïdes sont surtout utilisés dans le cadre des granulomatoses<br />

; ils permettent de diminuer l’activité des granulomes et<br />

donc la synthèse de calcitriol.<br />

Le cinacalcet est un agoniste du récepteur au calcium qui<br />

freine rapidement la sécrétion de PTH par les cellules parathyroïdiennes<br />

et qui augmente la calciurie par son action sur les cellules<br />

tubulaires rénales, qui sont pourvues elles aussi de ce<br />

récepteur. La diminution de la calcémie est obtenue en quelques<br />

heures. Il est indiqué dans l’hyperparathyroïdie secondaire liée à<br />

l’insuffisance rénale et plus récemment dans l’hyperparathyroïdie<br />

primitive avec hypercalcémie non opérable.<br />

Le traitement de l’hyperparathyroïdie primitive repose sur<br />

l’ablation chirurgicale de l’adénome toutes les fois que cela est<br />

possible. Des recommandations internationales le proposent<br />

systématiquement même en l’absence de signe clinique si la calcémie<br />

est supérieure à 0,25 mmol/L par rapport à la valeur supérieure<br />

du laboratoire, si l’âge est inférieur à 50 ans, s’il existe une<br />

ostéoporose (T score < – 2,5) ou une insuffisance rénale (clairance<br />

de la créatinine estimée < 60 mL/min).<br />

Le traitement des métastases osseuses (radiothérapie, chimiothérapie…)<br />

fait partie de la prise en charge du cancer.<br />

L’arrêt de médicaments hypercalcémiants comme le calcium<br />

ou la vitamine D entraîne un retour rapide à la normale lorsqu’un<br />

surdosage est en cause.•<br />

P. Guggenbuhl et G. Chalès déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

❯❯❯<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong> 409


RR Q 319 III<br />

HYPERCALCÉMIE (AVEC LE TRAITEMENT)<br />

410<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?<br />

Une femme de 50 ans est hospitalisée en raison de la découverte d’une hypercalcémie<br />

à 3 mmol/L lors d’un examen systématique.<br />

QUESTION N° 1<br />

Quels seraient les éléments cliniques<br />

en faveur d’une hyperparathyroïdie<br />

primitive ?<br />

Quelles en sont les conséquences<br />

sur l'os et les articulations ?<br />

QUESTION N° 2<br />

Quels seraient les éléments<br />

biologiques en faveur d’une<br />

hyperparathyroïdie primitive ?<br />

QUESTION N° 3<br />

Citez 3 autres causes<br />

d’hypercalcémie.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN VOL. 61<br />

Mars <strong>2011</strong><br />

QUESTION N° 4<br />

Quelle est la cause la plus fréquente<br />

de l’hyperparathyroïdie primitive<br />

et quel est son traitement ?<br />

QUESTION N° 5<br />

Faut-il effectuer des examens<br />

autres que biologiques avant<br />

la mise en route de ce traitement,<br />

et si oui le(s)quel(s) ?<br />

QUESTION N° 6<br />

L’hypercalcémie aiguë<br />

est une urgence mettant en jeu<br />

le pronostic vital du patient :<br />

➙ à quel taux ?<br />

➙ décrivez-en les principaux<br />

symptômes.<br />

➙ quel traitement symptomatique<br />

mettez-vous en œuvre ?<br />

Retrouvez toutes les réponses<br />

et les commentaires sur<br />

www.larevuedupraticien.fr<br />

onglet ECN<br />

OK<br />

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ? Q 67, p. 399<br />

Il est peu probable que l'item<br />

« Anesthésie locale, loco-régionale<br />

et générale » fasse l'objet d’un cas<br />

clinique complet à l'ECN.<br />

Les questions relatives à l'anesthésie<br />

apparaîtraient de façon préférentielle<br />

dans un cas clinique présentant un cas<br />

chirurgical pour lequel il faudrait<br />

organiser une procédure anesthésique,<br />

dans un contexte urgent ou programmé.<br />

Concernant les principes médicaux<br />

et pharmacologiques de l'anesthésie,<br />

il semble inutile de pousser le niveau<br />

de connaissance trop loin,<br />

car les examinateurs ne pourront<br />

pas exiger un niveau de précision<br />

important concernant la procédure<br />

en elle-même, du fait de sa grande<br />

complexité. L’apprentissage<br />

de ces principes n’est d'ailleurs<br />

pas cité dans les objectifs concernant<br />

cet item. Nous avons volontairement<br />

évité d’entrer dans des considérations<br />

trop détaillées dans notre exposé<br />

afin de ne pas « noyer » les principes<br />

fondamentaux.<br />

Concernant l’organisation d’une<br />

procédure anesthésique, le niveau<br />

d’exigence peut en revanche être<br />

beaucoup plus élevé. En effet,<br />

il existe une réglementation précise,<br />

et il est nécessaire pour les praticiens<br />

de toutes les spécialités de connaître<br />

les étapes à suivre pour programmer<br />

une anesthésie dans le cadre<br />

d’un geste invasif ou d'une chirurgie.<br />

Ainsi, les obligations légales quant à la<br />

TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

programmation d’une consultation,<br />

la prescription d’examens<br />

complémentaires, l’information du<br />

patient, le passage en salle de réveil<br />

sont à connaître parfaitement.<br />

De la même façon, il faudra maîtriser<br />

les indications et contre-indications<br />

d’une anesthésie, dont la liste est<br />

relativement courte et dont la<br />

connaissance est exigée pour l’ENC.<br />

La considération du ratio bénéficesrisques<br />

est une notion importante<br />

et qui permettra d'éviter des erreurs<br />

grossières si vous doutez de<br />

l'opportunité de réalisation d’une<br />

anesthésie dans un cas clinique.<br />

Les risques reliés à l’anesthésie sont<br />

également à connaître car également<br />

exigés dans l’intitulé de l’item.


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DÉFINITION<br />

Le terme d’œdème désigne toute accumulation<br />

anormale de liquide dans un compartiment de<br />

l’organisme. Ce phénomène peut survenir dans<br />

n’importe quel tissu. Le terme d’œdème interstitiel désigne l’inflation<br />

du liquide extracellulaire (hyperhydratation extracellulaire)<br />

dans une région ou dans l’ensemble de l’organisme. L’œdème souscutané<br />

peut être associé à un épanchement des séreuses et à<br />

un œdème viscéral (pulmonaire ou cérébroméningé). Le terme<br />

d’anasarque désigne l’association d’œdème sous-cutané et d’épanchement<br />

séreux. En pratique clinique, le terme d’œdème utilisé<br />

sans qualificatif désigne l’expression sous-cutanée d’un œdème<br />

interstitiel de cause générale ou locorégionale. L’œdème des<br />

membres inférieurs (OMI) est donc l’expression clinique d’un<br />

œdème interstitiel de cause locorégionale ou générale s’exprimant<br />

préférentiellement aux membres inférieurs.<br />

DIAGNOSTIC POSITIF<br />

En pratique clinique, le diagnostic positif de l’OMI ne pose pratiquement<br />

pas de problème. Il repose sur la constatation de la<br />

modification de volume du membre, particulièrement visible dans<br />

la région rétromalléolaire. La dépressibilité ou le caractère mou<br />

(signe du godet) est un bon signe d’inflation hydrique du tissu<br />

sous-cutané et d’OMI pathologiques.<br />

Avant d’envisager une démarche diagnostique étiologique, il<br />

faut considérer qu’il existe des œdèmes physiologiques. En effet,<br />

la grossesse normale (en dehors d’une néphropathie gravidique)<br />

s’accompagne dans 1 cas sur 3 d’œdèmes de rétention hydrosodée<br />

multifactorielle (augmentation des taux d’estrogènes et de<br />

minéralocorticoïdes, hypoprotidémie physiologique, gêne mécanique<br />

au retour veineux). On citera également le syndrome prémenstruel,<br />

caractérisé par un syndrome œdémateux fugace<br />

secondaire à l’hyperestrogénie relative. Les œdèmes généralisés<br />

discrets, survenant par temps chaud, après station debout<br />

ou position assise prolongée, doivent être considérés comme<br />

physiologiques. Ces œdèmes sus-cités ne nécessitent pas de prise<br />

en charge thérapeutique particulière.<br />

DIAGNOSTIC ÉTIOLOGIQUE<br />

Cette partie de la démarche reste l’étape la plus délicate.<br />

Physiopathologie<br />

I-00-Q000 III-Q323<br />

Œdème des membres inférieurs<br />

Orientation diagnostique<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007<br />

Dr Barbara Colombe, Pr Christian Massot<br />

Clinique universitaire de médecine interne, CHU, 38043 Grenoble Cedex 09<br />

cmassot@chu-grenoble.fr bcolombe@chu-grenoble.fr<br />

Objectifs<br />

• Devant l’apparition d’œdèmes des membres inférieurs, argumenter<br />

les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens<br />

complémentaires pertinents.<br />

La connaissance du mécanisme physiopathologique des œdèmes<br />

est un préalable indispensable à la prise en charge correcte<br />

d’un OMI. Les mouvements de l’eau sont la résultante de la pression<br />

hydrostatique transcapillaire (qui tente de faire sortir l’eau des vaisseaux)<br />

et la pression oncotique des protéines (qui tente de retenir<br />

l’eau dans les vaisseaux). La constitution des œdèmes implique<br />

donc un déséquilibre de l’échange hydro-électrolytique entre le<br />

compartiment vasculaire et le compartiment interstitiel (fig. 1).<br />

Cinq grands mécanismes, qu’ils soient isolés ou associés,<br />

concourent à la formation des œdèmes (tableau 1) :<br />

— l’augmentation de la pression hydrostatique intravasculaire :<br />

l’ascension de la pression hydraulique capillaire peut être due soit<br />

à une augmentation du volume intravasculaire, secondaire à une<br />

rétention sodée rénale primitive ou secondaire, soit à une hyperpression<br />

veineuse ;<br />

— une diminution de la pression oncotique des protéines : la pression<br />

oncotique est considérée comme abaissée quand l’albumine plasmatique<br />

est 25 g/L. Cette hypoalbuminémie peut être secondaire<br />

à une déperdition protéique ou à un déficit de synthèse pro téique ;<br />

— une augmentation de la pression oncotique interstitielle ;<br />

— une augmentation de la perméabilité membranaire vasculaire ;<br />

— une diminution anormale du drainage lymphatique.<br />

2285


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Œdèmes des membres inférieurs témoins<br />

d’œdèmes généralisés<br />

Dans un nombre important de cas, le contexte clinique permet<br />

facilement de rattacher l’œdème à une étiologie précise, mais<br />

dans d’autres cas la démarche est plus complexe. L’œdème généralisé<br />

réalise une infiltration non inflammatoire et quasiment<br />

symétrique mise en évidence par le signe du godet. Ces œdèmes<br />

sont mobiles et apparaissent dans les parties déclives. En<br />

orthostatisme, ils se traduisent par un œdème bilatéral des membres<br />

inférieurs, prédominant aux chevilles. En position de décubitus,<br />

l’œdème est constaté au niveau des lombes. En cas de<br />

rétention hydrosodée majeure, il s’accompagne d’épanchement<br />

des séreuses (cavité péritonéale, plèvre, péricarde). Une oligoanurie<br />

avec réduction de la natriurèse (< 20 mmol/j) est habituelle.<br />

Les œdèmes généralisés les plus souvent observés sont en<br />

rapport avec les cardiopathies, les néphropathies et les hépatopathies,<br />

mais ils peuvent être également observés au cours d’hypoprotéinémie<br />

non rénale et non hépatique. Ils peuvent enfin<br />

être provoqués ou aggravés par de nombreux médicaments et<br />

rester parfois sans explication évidente.<br />

1. Œdèmes d’origine cardiaque<br />

Dans la majorité des cas, le diagnostic est aisé. L’interrogatoire<br />

permet de préciser les données évolutives d’une cardiopathie antérieurement<br />

diagnostiquée. L’examen clinique met en évidence un<br />

reflux hépatojugulaire, une hépatalgie avec hépatomégalie à bord<br />

mou, une tachycardie, une turgescence jugulaire, une insuffisance<br />

tricuspidienne. La sévérité de l’œdème n’est pas toujours proportionnelle<br />

au degré de l’élévation de la pression veineuse centrale, en<br />

raison d’autres facteurs associés, tels que l’immobilité, la posture,<br />

l’insuffisance veineuse. Ce sont des œdèmes mous, indolores, prenant<br />

le godet, bilatéraux et symétriques, pouvant être associés à un<br />

anasarque et à un œdème viscéral.<br />

2286<br />

III-Q323<br />

QU’EST-CE QUI PEUT<br />

TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Dans le cadre de dossiers multidisciplinaires,<br />

l’œdème des membres inférieurs sera un des<br />

éléments sémiologiques d’un cas clinique.<br />

Œdème des membres inférieurs — Orientation diagnostique<br />

Le développement de l’observation fera référence aux différentes<br />

questions proposées à l’examen classant national :<br />

l’insuffisance cardiaque, le syndrome néphrotique, les cirrhoses,<br />

la pathologie veineuse, l’érysipèle. Les premières<br />

questions pourront exiger une analyse sémiologique et les<br />

éléments anamnestiques à recueillir. Afin de proposer un<br />

diagnostic étiologique, vous devrez ensuite demander les<br />

examens complémentaires. La capacité à réussir le dossier<br />

dépendra de la compréhension de cette question d’orientation<br />

diagnostique. Devant tout œdème d’allure généralisée,<br />

les trois principales causes, cardiaque, hépatique et rénale,<br />

doivent être soulevées. ●<br />

✓ L’insuffisance cardiaque congestive (à bas débit cardiaque) : les<br />

OMI sont essentiellement constatés lors de ce type de cardiopathie<br />

où il existe une augmentation de la pression de remplissage ventriculaire<br />

et une augmentation de la pression de tout le secteur<br />

plasmatique d’amont.<br />

Selon le type d’insuffisance cardiaque, le diagnostic est plus<br />

ou moins facile. Il est assez évident dans l’insuffisance cardiaque<br />

à fraction d’éjection altérée. Il est plus difficile dans l’insuffisance<br />

cardiaque d’origine diastolique.<br />

✓ L’insuffisance cardiaque non congestive (à débit conservé) : des<br />

OMI sont possibles au cours des insuffisances cardiaques à débit<br />

conservé, notamment lors des grosses fistules artérioveineuses,<br />

du béribéri, d’un état de thyrotoxicose ou de la maladie de Paget.<br />

✓ L’insuffisance cardiaque par insuffisance ventriculaire droite<br />

prédominante : elle s’observe essentiellement lors des situations<br />

de cœur pulmonaire postembolique, cœur pulmonaire chronique<br />

secondaire aux bronchopathies chroniques obstructives.<br />

✓ La péricardite chronique : les signes fonctionnels sont classiquement<br />

une dyspnée, une asthénie, une hépatalgie d’effort et une<br />

ascite. Parfois, les OMI sont révélateurs de cette adiastolie progressive<br />

secondaire à l’épaississement du péricarde qui devient<br />

un sac inextensible.<br />

Ainsi, les examens indispensables pour le diagnostic des OMI<br />

sont la radiographie pulmonaire (recherche d’une cardiomégalie,<br />

surcharge vasculaire bilatérale, épanchements pleuraux, calcifications<br />

péricardiques), l’électrocardiogramme (recherche de<br />

trouble de conduction ou du rythme), voire le dosage du pro-BNP<br />

(peptide natriurétique dont la valeur prédictive négative est<br />

bonne) dans les situations cliniques douteuses. L’échographie<br />

cardiaque donne une estimation des pressions artérielles pulmo -<br />

naires et du débit cardiaque et doit avoir des indications larges.<br />

Le cathétérisme droit peut avoir une indication pour mesurer<br />

une HTAP pré- ou postcapillaire ou évaluer un dip plateau lors<br />

des péricardites chroniques.<br />

2. Œdèmes d’origine hépatique<br />

Ces œdèmes sont souvent associés à une ascite. Ils s’observent<br />

au cours des cirrhoses, quelle qu’en soit la cause. Cette cirrhose<br />

peut être d’origine éthylique (qui, dans notre pays, devance en<br />

fréquence) mais également postvirale (hépatite B ou C), métabolique<br />

(hémochromatose ou maladie de Wilson), dysimmunitaire<br />

ou toxique.<br />

Les OMI sont liés à une baisse des pressions oncotiques et à<br />

un hyperaldostéronisme secondaire. L’insuffisance hépatocellulaire<br />

est à l’origine d’une hypoalbuminémie, et donc d’une baisse<br />

de la pression oncotique. Le diagnostic est facilité par la connaissance<br />

de la pathologie hépatique chronique et par la présence<br />

de signes d’insuffisance hépatique et d’hypertension portale<br />

(ictère, angiome stellaire, hépatomégalie indolore ferme à bord<br />

tranchant, troubles de la coagulation, ascite, circulation collatérale).<br />

Enfin, beaucoup plus rarement, peuvent s’observer des OMI<br />

lors d’hypertension portale globale sans cirrhose du foie, comme<br />

lors des thromboses des veines hépatiques, du syndrome de<br />

Budd-Chiari, des maladies veino-occlusives.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

3. Œdèmes d’origine rénale<br />

Les œdèmes d’origine rénale affectent l’ensemble de l’organisme,<br />

et plus particulièrement la face, donnant un aspect bouffi<br />

évocateur.<br />

L’existence d’une protéinurie est un bon élément d’orientation,<br />

mais il n’est pas spécifique, puisqu’une protéinurie peut s’observer<br />

en cas d’insuffisance cardiaque ou hépatique. Il peut s’agir d’une<br />

atteinte aiguë sous forme de syndrome néphrétique (glomérulo -<br />

néphrite postinfectieuse) ou d’une atteinte plus chronique dans<br />

le cadre d’une insuffisance rénale chronique ou d’un syndrome<br />

néphrotique.<br />

Des OMI associés à une protéinurie doivent inciter à faire un bilan<br />

rénal. La vérification de la créatine plasmatique, la natriurèse, la<br />

recherche d’une hématurie et l’échographie rénale font partie<br />

du bilan systématique. Si nécessaire, la biopsie rénale pourra préciser<br />

le type histologique de l’atteinte rénale.<br />

4. Œdèmes d’origine digestive<br />

Il s’agit d’œdèmes secondaires à une hypoalbuminémie, d’ori -<br />

gine non rénale ou non hépatique. Il existe donc une baisse de<br />

la pression oncotique à laquelle s’ajoute une contraction du<br />

volume vasculaire engendrant une retention rénale de sodium.<br />

✓ Les gastro-entéropathies exsudatives : elles sont responsables<br />

d’une hyperpression veinolymphatique au sein de la paroi du<br />

tube digestif. Au cours des pathologies intestinales (maladie de<br />

Whipple, maladie de Crohn, lymphome principalement), on<br />

retrouve fréquemment des diarrhées et une élévation de la<br />

clairance de l’alpha-1 antitrypsine, qui signe le diagnostic. L’absence<br />

de ces deux éléments peut rendre plus difficile le diagnostic<br />

de pathologies gastriques (maladie de Ménétrier, lymphome, cancer,<br />

gastrite lymphocytaire exsudative avec ou sans infection à<br />

Helicobacter pylori). Dans ce cas, le diagnostic sera fait par la<br />

gastroscopie et l’analyse histologique.<br />

Tableau 1<br />

Mécanismes des œdèmes des membres inférieurs<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007<br />

MÉCANISMES CAUSES<br />

✓ Les malabsorptions : les causes sont multiples : maladie inflammatoire<br />

(maladie cœliaque), infection intestinale (parasitose, pullulation),<br />

résections chirurgicales, insuffisance pancréatique exocrine.<br />

La présence d’autres anomalies biologiques comme la<br />

carence martiale, l’hypocalcémie, l’hypovitaminose D permet de<br />

les évoquer. La confirmation est apportée par l’endoscopie avec<br />

biopsies duodénales et/ou jéjunales.<br />

✓ Les malnutritions : il s’agit là de carence d’apport en protéines.<br />

Dans les malnutritions prolongées protéino-énergétiques des<br />

enfants en pays sous-développés, les œdèmes sont constants et<br />

constituent le kwashiorkor. Dans les pays développés, une carence<br />

d’apport peut être observée au cours de l’anorexie mentale, chez<br />

des patients gastrectomisés ou chez des sujets âgés, isolés.<br />

Augmentation de la pression hydrostatique vasculaire ❚ augmentation du volume intravasculaire par rétention sodée rénale primitive (syndrome<br />

néphrotique, stade initial des cirrhoses, stade initial de l’insuffisance cardiaque, médicaments)<br />

❚ augmentation du volume intravasculaire par rétention rénale secondaire (insuffisance<br />

cardiaque, cirrhose, syndrome néphrotique)<br />

❚ hyperpression veineuse (insuffisance cardiaque globale ou droite, compression,<br />

envahissement, thrombose)<br />

Diminution de la pression oncotique ❚ déperdition protéique par syndrome néphrotique ou entéropathie exsudative<br />

❚ déficit de synthèse par cirrhose ou par dénutrition<br />

Augmentation de la pression oncotique interstitielle ❚ myœdème<br />

Augmentation de la perméabilité capillaire ❚ toxémie gravidique, angiœdème<br />

Diminution anormale du drainage lymphatique ❚ lymphœdème<br />

A<br />

R<br />

T<br />

É<br />

R<br />

I<br />

O<br />

L<br />

E<br />

Figure 1<br />

Diminution<br />

de la pression<br />

oncotique<br />

● syndrome<br />

néphrotique<br />

● malabsorption<br />

● hépatopathie<br />

● malnutrition<br />

· ·<br />

Augmentation<br />

de la pression<br />

oncotique<br />

Augmentation<br />

de la pression<br />

capillaire<br />

·<br />

LIT CAPILLAIRE<br />

·<br />

Physiopathologie des OMI.<br />

Diminution<br />

de la pression<br />

hydrostatique<br />

·<br />

Augmentation<br />

de la pression<br />

hydrostatique<br />

● obstruction<br />

veineuse<br />

● cirrhose<br />

● insuffisance rénale<br />

● grossesse<br />

V<br />

E<br />

I<br />

N<br />

U<br />

L<br />

E<br />

L<br />

Y<br />

M<br />

P<br />

H<br />

A<br />

T<br />

I<br />

Q<br />

U<br />

E<br />

Lymphœdème<br />

primitif<br />

ou secondaire<br />

R Q 323<br />

2287


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

5. Œdèmes par augmentation de la perméabilité<br />

capillaire<br />

Ils peuvent se présenter sous 3 formes : crises généralisées<br />

paroxystiques, crises localisées paroxystiques, œdèmes diffus<br />

chroniques.<br />

✓ Le syndrome d’hyperperméabilité capillaire idiopathique ou syndrome<br />

de Clarkson : l’OMI est dans ce cas un phénomène accessoire.<br />

Le tableau clinique est dominé par un état de choc sévère<br />

avec œdèmes diffus, sans facteur déclenchant, nécessitant des<br />

perfusions massives de macromolécules. La mise en évidence<br />

d’une gammapathie monoclonale est un élément important.<br />

✓ Les angiœdèmes : la localisation à la face de l’œdème est en<br />

général la plus fréquente, alors que les localisations aux membres<br />

inférieurs sont plutôt exceptionnelles. L’angiœdème est lié à l’augmentation<br />

rapide et très localisée de la perméabilité des capillaires<br />

et des veinules sous-muqueux et/ou sous-cutanés, avec pour conséquence<br />

l’extravasation du plasma et le gonflement des tissus.<br />

Les médiateurs possibles de ce phénomène sont nombreux et<br />

permettent de les distinguer.<br />

Les angiœdèmes histaminiques allergiques ou non allergiques :<br />

ils s’associent souvent à des manifestations urticariennes. Un<br />

allergène peut être mis en évidence (piqûre d’insecte, médicament,<br />

produit de contraste, aliment), mais celui-ci n’est pas toujours<br />

authentifié, et certains œdèmes histaminiques peuvent être<br />

non allergiques (œdèmes physiques vibratoires ou thermiques).<br />

Les angiœdèmes bradykiniques : ils sont volontiers résistants<br />

aux antihistaminiques et corticoïdes et sont parfois déclenchés<br />

par un traumatisme même minime. Ils peuvent être associés à<br />

un déficit héréditaire ou acquis en C1 inhibiteur, soit non liés à un<br />

déficit du C1 inhibiteur, avec notamment les angiœdèmes médicamenteux<br />

(inhibiteur de l’enzyme de conversion) et les angiœdèmes<br />

de type 3 estrogénosensibles.<br />

Les angiœdèmes éosinophiliques ou syndrome de Gleich : l’évolution<br />

de cette maladie se caractérise par des œdèmes récidivants<br />

associés à une hyperéosinophilie, une fièvre et une urticaire. Son<br />

évolution est le plus souvent bénigne, spontanément ou sous<br />

corticothérapie.<br />

✓ Les œdèmes diffus par troubles de la perméabilité capillaire : ils<br />

peuvent s’observer dans les pathologies systémiques, dans l’hyper -<br />

éosinophilie, ou être idiopathiques.<br />

6. Œdèmes médicamenteux<br />

L’étiologie médicamenteuse doit toujours être<br />

évoquée. Tous les médicaments susceptibles de<br />

les avoir provoqués doivent être interrompus. Il<br />

peut s’agir d’œdèmes diffus prédominant au<br />

niveau des membres inférieurs ou d’œdèmes localisés<br />

(surtout au niveau de la face) dans le cadre<br />

des angiœdèmes. Différents mécanismes physiopathologiques<br />

peuvent être en cause, notamment<br />

la rétention hydrosodée, les troubles de la perméabilité<br />

capillaire et les troubles fonctionnels<br />

lymphatiques. Le nombre important de médicaments<br />

pouvant être en cause justifie une interro-<br />

2288<br />

III-Q323<br />

Œdème des membres inférieurs — Orientation diagnostique<br />

Tableau 2<br />

Pour en savoir plus<br />

◗ Pathologies<br />

vasculaires intriquées<br />

et situations cliniques<br />

Levesque H<br />

Abrégés Masson Médecine<br />

vasculaire B Devulder<br />

1998;320-9<br />

◗ Œdèmes des membres<br />

inférieurs<br />

Cledes J, Hanrotel-Saliou C,<br />

Jobic Y<br />

(Rev Prat 2004;54:675-80)<br />

Médicaments susceptibles<br />

de provoquer des OMI<br />

❚ Anti-inflammatoires<br />

non stéroïdiens<br />

❚ Glucocorticoïdes<br />

et minéralocorticoïdes<br />

❚ Calciums bloquants :<br />

dihydropyridine<br />

❚ Insuline<br />

❚ Glivec<br />

❚ Glycyrrhizine de la réglisse<br />

❚ Glitazone<br />

❚ Gabapentine<br />

❚ Inhibiteur de l’enzyme<br />

de conversion<br />

❚ Méthadone<br />

❚ Bromocriptine<br />

❚ Interféron<br />

❚ Minoxidil<br />

❚ Estrogènes<br />

❚ Traitement par transfert<br />

de gène VGHF<br />

dans les ischémies aiguës<br />

gation des données de pharmacovigilance. L’interruption du traitement<br />

soupçonné et l’analyse des critiques d’imputabilité permettent<br />

d’approcher le diagnostic. En raison de leur fréquence,<br />

de leur gravité ou de leur caractère de modèle physiopathologique,<br />

la responsabilité de certains médicaments mérite d’être<br />

particulièrement connue (tableau 2).<br />

7. Œdèmes par anémie<br />

Dans les situations d’anémie sévère et prolongée, un désé -<br />

quilibre des échanges hydro-électrolytiques peut s’installer et<br />

être à l’origine d’OMI.<br />

8. Œdèmes cycliques idiopathiques (syndrome de Mach)<br />

Il s’agit d’une affection touchant la femme jeune en période<br />

d’activité génitale. Il s’agit d’œdèmes non inflammatoires prenant<br />

peu le godet et s’aggravant en fin de journée. On retrouve<br />

fréquemment des troubles psychiques, voire des prises cachées<br />

de diurétiques ou de laxatifs. La pathogénie reste incertaine, et<br />

aucune investigation complémentaire n’est réellement susceptible<br />

de confirmer le diagnostic.<br />

Étiologie des œdèmes locorégionaux<br />

Il s’agit le plus souvent d’un œdème unilatéral pouvant ou non<br />

s’accompagner de signes inflammatoires. Il est l’expression d’un<br />

déséquilibre des échanges entre le compartiment<br />

vasculaire et le compartiment interstitiel.<br />

1. Œdèmes locorégionaux sans signe<br />

inflammatoire<br />

✓ Les œdèmes d’origine veineuse. Ce sont :<br />

— les thromboses veineuses profondes : un œdème<br />

récent unilatéral non inflammatoire doit faire<br />

suspecter une thrombose veineuse profonde. Le<br />

diagnostic doit être confirmé en urgence par un<br />

écho-doppler veineux. On pourra auparavant doser<br />

les D-dimères, qui ont une bonne valeur prédictive<br />

négative. Un œdème bilatéral asymétrique peut<br />

être le fait d’une thrombose cave inférieure ;<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

— les compressions veineuses : le même tableau clinique peut<br />

être le fait d’une compression veineuse par un kyste poplité ou<br />

d’une compression de la veine iliaque primitive gauche par l’artère<br />

iliaque primitive réalisant le syndrome de Cockett. Un œdème<br />

bilatéral asymétrique peut être le fait d’une compression des veines<br />

du petit bassin ou de la veine cave par des adénopathies, une<br />

tumeur, un anévrisme artériel ou une fibrose rétropéritonéale.<br />

Les troubles sont alors volontiers asymétriques, et l’œdème<br />

concerne souvent l’ensemble du membre ;<br />

— l’insuffisance veineuse post-thrombotique : la maladie postthrombotique<br />

correspond aux séquelles anatomique et hémodynamique<br />

des thromboses veineuses profondes. Elle survient dans<br />

environ 50 % des cas dans les 5 à 10 années qui suivent une thrombose.<br />

L’œdème local fait partie des signes d’insuffisance veineuse.<br />

Cliniquement, il diminue avec le repos et la contention veineuse,<br />

mais il peut être fixé par des lésions de fibrose sous-cutanée ;<br />

— l’insuffisance veineuse chronique fonctionnelle : elle réalise un<br />

œdème bilatéral chronique prédominant au niveau des chevilles,<br />

respectant l’avant-pied. L’œdème disparaît lors du repos allongé.<br />

L’œdème s’accompagne d’un inconfort, avec une sensation de<br />

jambe lourde ou de chaussures trop serrées. Il est aggravé par<br />

la station debout prolongée et la chaleur ambiante. L’examen<br />

peut noter des varices ou des troubles trophiques (dermite ocre).<br />

L’écho-doppler veineux permet de décrire avec précision la topographie<br />

des reflux veineux superficiels. De telles anomalies peuvent<br />

être détectables et accessibles à une thérapeutique.<br />

✓ Les lymphœdèmes : devant un œdème unilatéral, volumineux,<br />

indolore, élastique, dur et ferme prenant peu le godet, un lymphœdème<br />

doit être évoqué (fig. 2). Son extension est centripète.<br />

Il débute à la périphérie des membres, intéressant les orteils et<br />

la face dorsale du pied. Il progresse vers le haut. Il est peu<br />

influencé par la posture et partiellement réversible la nuit, ce qui<br />

l’oppose à l’œdème d’origine veineuse. L’aspect clinique du lymphœdème<br />

est généralement suffisant pour porter le diagnostic.<br />

Un œdème touchant le dos du pied, mais respectant au début<br />

les orteils (aspect de cou de buffle) est particulièrement évocateur.<br />

Cet œdème deviendra souvent dur, scléreux, cartonné, avec un<br />

phénomène de peau d’orange. Il peut être lié à des anomalies<br />

structurelles ou fonctionnelles, congénitales ou acquises de voies<br />

lymphatiques.<br />

Figure 2<br />

Lymphœdème.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

L’œdème interstitiel désigne l’inflation du liquide<br />

extracellulaire (hyperhydratation extracellulaire) dans<br />

une région ou dans l’ensemble de l’organisme.<br />

Sa constitution implique un déséquilibre de l’échange<br />

hydroélectrolytique entre compartiment vasculaire<br />

et interstitiel.<br />

L’œdème des membres inférieurs est l’expression clinique<br />

d’un œdème interstitiel de cause locorégionale ou générale<br />

s’exprimant préférentiellement aux membres inférieurs.<br />

Un interrogatoire et un examen clinique soigneux aidés<br />

de quelques investigations complémentaires orientent<br />

le plus souvent vers les 4 causes principales :<br />

les cardiopathies, les néphropathies, les hépatopathies<br />

et la pathologie veineuse. La responsabilité en incombe<br />

plus rarement à une cause endocrine, hypoalbuminémique,<br />

médicamenteuse ou à un phénomène idiopathique.<br />

Le traitement des œdèmes des membres inférieurs<br />

ne peut reposer que sur le diagnostic étiologique.<br />

Les œdèmes de cause locorégionale ou générale peuvent<br />

constituer une urgence thérapeutique relative, notamment<br />

dans le cadre des thromboses veineuses profondes ou les<br />

dermohypodermites. En dehors de circonstances cliniques<br />

urgentes (insuffisance cardiaque aiguë ou anasarque),<br />

il n’y a pas d’urgence à faire disparaître les œdèmes.<br />

Le traitement est d’abord symptomatique par le repos<br />

au lit et une restriction sodée, voire des diurétiques.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 2311)<br />

Les lymphœdèmes primitifs congénitaux : ils correspondent<br />

à une aplasie ou une hypoplasie des lymphatiques distaux ou<br />

proximaux ou à des mégalymphatiques. La dysplasie peut être<br />

isolée dans le cadre du syndrome de Milroy (lymphœdème congénital<br />

isolé) ou du syndrome de Meige (lymphœdème primitif précoce<br />

détecté à la puberté chez la femme). Parfois, elle s’intègre<br />

dans des dysplasies plus complexes en relation ou non avec des<br />

anomalies chromosomiques (syndrome de Klippel-Trenaunay,<br />

syndrome de Turner ou Klinefelter).<br />

Les lymphœdèmes secondaires : ils sont liés à des destructions<br />

ou des occlusions des voies lymphatiques par un processus<br />

pathologique. Les causes iatrogènes sont les plus fréquentes<br />

dans les pays occidentaux (curages ganglionnaires inguinaux et<br />

pelviens, chirurgie pour cancer, pontage fémoro-poplité et radiothérapie<br />

locale). Les étiologies infectieuses sont dominées par<br />

les filarioses (principale cause de lymphœdème en zone intertropicale)<br />

et les infections cutanées bactériennes. Les causes<br />

néoplasiques regroupent les localisations ganglionnaires d’un<br />

lymphome, d’une métastase, d’un sarcome de Kaposi. De façon<br />

exceptionnelle, le lymphœdème peut être paranéoplasique.<br />

R Q 323<br />

2289


TOUS DROITS RESERVES - LA REVUE DU PRATICIEN<br />

✓ Le myxœdème prétibial : il s’agit d’un œdème particulier, caractérisé<br />

par une infiltration du tissu sous-cutané retrouvée dans les<br />

hypothyroïdies. L’aspect est œdémateux, avec une peau indurée,<br />

un phénomène de peau d’orange.<br />

2. Œdèmes locorégionaux avec signes<br />

inflammatoires<br />

✓ Les dermohypodermites : un œdème aigu du membre inférieur,<br />

avec signes cutanés inflammatoires correspond au tableau clinique<br />

d’une grosse jambe rouge fébrile. Le terme d’érysipèle est<br />

évoqué si l’on suspecte une infection à streptocoque, mais les<br />

dermohypodermites (fig. 3) peuvent être liées à d’autres agents<br />

bactériens comme le staphylocoque ou les anaérobies.<br />

✓ Les arthrites : un œdème périarticulaire peut accompagner<br />

les arthrites, qu’elles soient d’origine infectieuse, microcristalline<br />

ou dysimmunitaire.<br />

✓ Le syndrome R3SPE :au cours de ce syndrome, encore appelé poly -<br />

arthrite séronégative non érosive du sujet âgé, on peut constater<br />

un œdème plus ou moins inflammatoire volumineux des extrémités.<br />

✓ L’algodystrophie : la face chaude de l’algodystrophie se caractérise<br />

par un œdème d’aspect pseudo-inflammatoire avec une<br />

augmentation de la chaleur locale, une peau luisante et rouge et<br />

une hyperhydrose.<br />

✓ Les atteintes inflammatoires musculofasciales des maladies systémiques<br />

: un œdème inflammatoire peut être présent lors des<br />

manifestations systémiques d’une connectivite ou d’une vascularite.<br />

Le diagnostic repose bien sûr sur les signes associés, mais<br />

on citera de manière plus fréquente la dermatopolymyosite, le<br />

syndrome de Shulman, les rhumatismes inflammatoires, le lupus.<br />

✓ Les myonécroses : il s’agit d’une augmentation de la pression<br />

à l’intérieur d’un compartiment fermé perturbant la fonction et<br />

la viabilité des tissus contenus dans ce compartiment. Un œdème<br />

inflammatoire très douloureux est principalement retrouvé au<br />

cours du syndrome des loges.<br />

Tableau 3<br />

2290<br />

III-Q323<br />

Œdème des membres inférieurs — Orientation diagnostique<br />

Examens complémentaires du bilan<br />

des œdèmes des membres inférieurs<br />

ŒDÈMES GÉNÉRALISÉS ŒDÈMES LOCORÉGIONAUX<br />

❚ ECG<br />

❚ Radiographie pulmonaire<br />

❚ Pro-BNP<br />

❚ Échographie cardiaque<br />

❚ Bandelette urinaire<br />

❚ Protéinurie des 24 heures<br />

❚ Créatinine plasmatique<br />

et albuminémie<br />

❚ Bilan hépatique<br />

avec transaminases<br />

❚ Bilan de coagulation avec TP<br />

et facteur V<br />

❚ Ponction d’épanchements<br />

❚ D-dimères<br />

❚ Doppler veineux et/ou abdominal<br />

❚ Hémocultures<br />

❚ Bilan thyroïdien<br />

❚ Bilan immunitaire<br />

❚ Bilan infectieux<br />

❚ Bilan néoplasique<br />

Figure 3<br />

Dermohypodermite.<br />

BILAN ET ATTITUDE THÉRAPEUTIQUE<br />

L’orientation étiologique est souvent obtenue par les données<br />

de l’interrogatoire et de l’examen clinique. Le type d’examens<br />

complémentaires (tableau 3) dépend de cette orientation en gardant<br />

à l’esprit que les causes les plus fréquentes des OMI restent<br />

les cardiopathies, les néphropathies et les hépatopathies. Compte<br />

tenu de la multiplicité des situations cliniques, il est difficile de<br />

détailler le traitement étiologique de tous les œdèmes des membres<br />

inférieurs. Le traitement des OMI dépend bien entendu de la cause<br />

sous-jacente et du caractère systémique ou localisé. Il y a rarement<br />

urgence à faire disparaître les OMI. La décompensation cardiaque<br />

aiguë ou l’anasarque imposent parfois un traitement incisif rapide<br />

(diurétique, perfusion d’albumine). La composante commune des<br />

OMI est la rétention rénale sodée excessive. Il faut donc essayer<br />

de la limiter par le repos au lit, une restriction sodée, voire des<br />

diurétiques. La présence d’épanchements peut nécessiter leur<br />

évacuation. Bien évidemment, le traitement des OMI de causes<br />

locorégionales repose aussi sur leurs étiologies (anticoagulant<br />

si thrombose, hormones thyroïdiennes, drainage lymphatique,<br />

antibiotiques...).<br />

CONCLUSION<br />

Le diagnostic positif des OMI est un diagnostic clinique facile. Le<br />

diagnostic étiologique est plus délicat et fait appel aux données<br />

de l’interrogatoire, de l’examen clinique et des examens complé -<br />

mentaires. Si les causes sont nombreuses et multiples, elles sont<br />

dominées de très loin par l’insuffisance cardiaque, la cirrhose<br />

hépatique décompensée, les syndromes néphrotiques et les TVP.<br />

En général, ces OMI ne mettent habituellement pas en jeu le<br />

pronostic vital, sauf si, bien entendu, ils sont associés à d’autres<br />

épanchements ou œdèmes viscéraux ou associés à une pathologie<br />

thromboembolique. Dans les autres cas, ils s’intègrent dans<br />

les éléments pronostiques de leur affection causale ■<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 31 DÉCEMBRE 2007


PROTÉINURIE<br />

La découverte d’une protéinurie (excrétion urinaire<br />

journalière de protéines > 0,15 g/j) est<br />

toujours le témoin d’une anomalie fonctionnelle<br />

ou d’une lésion organique rénale. Toutes les<br />

néphropathies peuvent, au cours de leur évolution,<br />

s’accompagner d’une protéinurie. Les critères<br />

qui vont permettre de classer une protéinurie sont son<br />

caractère transitoire ou permanent, son abondance, sa composition<br />

et sa sélectivité, la fonction rénale et l’association éventuelle<br />

à des anomalies du sédiment urinaire (hématurie, leucocyturie).<br />

Une protéinurie permanente justifie toujours la recherche<br />

d’une cause pour permettre de définir les modalités de traitement,<br />

de surveillance, et de préciser au patient le pronostic de<br />

l’atteinte.<br />

La protéinurie est un des 2 facteurs majeurs, avec l’hypertension<br />

artérielle, de progression de l’insuffisance rénale. La réduction<br />

de la protéinurie est donc un objectif thérapeutique à part entière.<br />

Le traitement antiprotéinurique fait appel au contrôle strict de<br />

la pression artérielle, avec une cible fixée à 130/80 mmHg si la<br />

protéinurie dépasse 0,5 g/j. Les médicaments bloqueurs du système<br />

rénine-angiotensine (IEC-ARA2) sont recommandés en première<br />

intention pour obtenir un effet antiprotéinurique optimisé.<br />

Physiopathologie et classification<br />

1. Protéinurie physiologique<br />

Le filtre glomérulaire composé de la paroi des cellules endothéliales<br />

puis de la membrane basale glomérulaire et des pédicelles<br />

des podocytes joints par leur diaphragme de fente représente une<br />

barrière physico-chimique à la filtration des molécules de poids<br />

I-00-Q000 III-Q328<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique<br />

chez l’enfant et chez l’adulte<br />

Orientation diagnostique<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007<br />

D r Olivier Imhoff, P r Bruno Moulin<br />

Service de néphrologie, Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 67091 Strasbourg Cedex<br />

olivier.imhoff@chru-strasbg.fr bruno.moulin@nephro.u-strasbg.fr<br />

Objectifs<br />

• Devant la découverte d’une protéinurie, argumenter les principales<br />

hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires<br />

pertinents.<br />

• Devant un syndrome néphrotique chez l’enfant ou chez l’adulte,<br />

argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier<br />

les examens complémentaires pertinents.<br />

moléculaire (PM) supérieur à 70 kD (albumine, 68k D). Sa richesse<br />

en protéoglycans chargés négativement s’oppose encore plus<br />

au passage des protéines chargées négativement.<br />

Les protéines de faible poids moléculaire filtrées librement<br />

sont réabsorbées à hauteur de 99 % au niveau du tubule proximal<br />

par un mécanisme d’endocytose saturable.<br />

La protéinurie physiologique se compose donc essentiellement<br />

pour 60 % de protéines plasmatiques de faible poids moléculaire<br />

(1/3 d’albumine, 2/3 de globulines) et pour 40 % de protéines<br />

urinaires (sécrétion tubulaire de mucoprotéine de<br />

Tamm-Horsfall et déchets protéolysés de l’urothélium des voies<br />

urinaires) [tableau 1].<br />

Tableau 1<br />

Protéinurie physiologique<br />

Composition :<br />

❚ 60 % de protéines plasmatiques : 1/3 d’albumine et 2/3 de globulines<br />

❚ 40 % de protéines urinaires : protéines de Tamm-Horsfall, déchets<br />

protéiques de l’urothélium<br />

Débit :<br />

❚ protéinurie totale < 150 mg/j (40 à 80 mg/j en moyenne)<br />

dont albuminurie < 30 mg/j<br />

Non détectée par les bandelettes réactives : négative ou traces<br />

781


2. Protéinuries pathologiques<br />

La découverte d’une protéinurie pathologique, c’est-à-dire<br />

supérieure à 150 mg/j, peut correspondre à 4 mécanismes physiopathologiques,<br />

chacun caractérisé par un profil clinico-biologique<br />

distinct (tableau 2).<br />

Une protéinurie constituée principalement de protéines passant<br />

très peu le filtre glomérulaire (albumine et protéines de PM > 60 kD)<br />

témoigne d’une néphropathie glomérulaire.<br />

Une protéinurie constituée principalement de protéines de<br />

faible poids moléculaire, qui ont normalement passé le filtre glomérulaire,<br />

correspond :<br />

— soit à un excès de production de ces petites protéines (chaînes<br />

légères du myélome…),<br />

— soit à un défaut de réabsorption tubulaire (syndrome de<br />

Fanconi, néphropathie tubulo-interstitielle chronique).<br />

Des modifications transitoires de l’hémodynamique rénale<br />

(fièvre, exercice physique…) peuvent expliquer la survenue de<br />

protéinuries intermittentes.<br />

✓ Protéinurie glomérulaire : l’excrétion urinaire quotidienne d’albumine<br />

(albuminurie) est un témoin de l’intégrité du filtre glomérulaire. En<br />

effet, il s’agit d’une protéine chargée négativement et d’un poids<br />

moléculaire d’environ 68 kD. Physiologiquement, elle ne passe donc<br />

que peu le filtre glomérulaire. Toute altération de ce dernier se traduit<br />

donc par une augmentation de l’albuminurie, puis des protéines<br />

de PM supérieur (transferrine, immunoglobulines…). Il peut s’agir<br />

d’une protéinurie liée à la perte du revêtement polyanionique.<br />

782<br />

III-Q328<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte : Orientation diagnostique<br />

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?<br />

Voici une série de questions qui, à partir d’un exemple<br />

de cas clinique, pourrait concerner l’item « Protéinurie et syndrome<br />

néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte ».<br />

Certaines de ces questions peuvent être<br />

intégrées dans d’autres sujets de l’ECN :<br />

syndrome néphrotique à lésions glomérulaires<br />

minimes, néphropathie diabétique,<br />

lupus, amylose…<br />

Cas clinique<br />

Monsieur S., un homme de 65 ans<br />

fumeur actif depuis 30 ans (35 paquetsannées),<br />

est admis pour un syndrome<br />

œdémateux d’apparition récente. L’entourage<br />

signale des crachats sanglants<br />

depuis quelques semaines.<br />

À l’examen clinique, on note un poids à<br />

70 kg (= +10 kg), la pression artérielle<br />

est à 150/90 mmHg. Il existe des<br />

œdèmes des membres inférieurs, bilatéraux<br />

et symétriques. Des examens biologiques<br />

sont prescrits, ils sont détaillés<br />

dans le tableau ci-contre.<br />

Quel est le syndrome rénal du patient ?<br />

Quel examen devra être pratiqué<br />

pour caractériser les lésions, quelles en<br />

sont les contre-indications ?<br />

Quel est le type de néphropathie<br />

suspecté ?<br />

SANG :<br />

URINES :<br />

◗ NFS : Hb = 14 g/dL<br />

◗ Créatininémie : 70 µmol/L<br />

◗ Urée = 5 mmol/L<br />

◗ Diurèse =1 L/j<br />

◗ Ionogramme sanguin : ◗ Hématies : 40/mm<br />

➙ natrémie = 138 mEq/L<br />

➙ kaliémie = 4 mEq/L<br />

◗ Albuminémie = 19 g/L<br />

◗ Protides totaux = 54 g/L<br />

3<br />

◗ Leucocytes : 5/mm 3<br />

◗ Protéinurie : 6 g/j<br />

RADIOGRAPHIE DE THORAX :<br />

opacité segmentaire du poumon droit<br />

Dans ce cas, la protéinurie est constituée presque exclusivement<br />

d’albumine qui passe la barrière glomérulaire en raison de la disparition<br />

des répulsions électrostatiques. Ce type d’atteinte glomérulaire<br />

particulier traduit des anomalies fonctionnelles des podocytes<br />

non décelables en microscopie optique rencontrées dans la néphropathie<br />

à lésions glomérulaires minimes. Le plus souvent, cependant,<br />

cette protéinurie est liée à la destruction physique de la barrière<br />

glomérulaire. Elle est plus ou moins abondante et plus ou moins<br />

sélective selon l’importance des lésions glomérulaires. L’examen<br />

anatomopathologique de la biopsie rénale permet d’établir le diagnostic<br />

étiologique précis de la néphropathie glomérulaire.<br />

✓ Protéinurie de surcharge : il s’agit de protéines dont la taille est<br />

inférieure à celle de l’albumine qui sont retrouvées dans les urines<br />

en l’absence de toute maladie rénale. Ces protéines libérées en<br />

quantité massive dans la circulation sanguine sont filtrées librement<br />

par le glomérule puis insuffisamment réabsorbées au niveau du<br />

tube proximal dont les capacités de réabsorption sont dépassées.<br />

Il s’agit essentiellement des chaînes légères d’immunoglobulines<br />

(kappa et lambda) au cours des myélomes à chaînes légères mais<br />

également de l’hémoglobinurie au cours des hémolyses, de la myoglobinurie<br />

dans les situations de rhabdomyolyse (ischémie, écrasement<br />

musculaire, maladie héréditaire) ou encore de lysozymurie<br />

rencontrée dans les rares leucémies myélomonocytaires. À l’exception<br />

de la lysozymurie, toutes ces protéines sont néphrotoxiques<br />

et entraînent des lésions tubulaires à l’origine d’une<br />

éventuelle atteinte rénale secondaire.<br />

Indiquez les complications potentielles<br />

du syndrome rénal évoqué ci-dessus.<br />

Quelles sont vos propositions pour le<br />

traitement des œdèmes ?<br />

Dans les 10 jours suivant son hospitalisation,<br />

le patient a une hématurie macroscopique,<br />

une douleur de la fosse lombaire<br />

gauche et une altération de la<br />

fonction rénale (créatininémie : 150 µmol/L).<br />

Indiquez quelles sont vos hypothèses<br />

diagnostiques et les mesures que vous<br />

préconisez.<br />

Un traitement chirurgical de la pathologie<br />

pulmonaire associée a été réalisé. Trois<br />

mois après l’intervention, la protéinurie<br />

est à 2 g/j, l’albuminémie à 36 g/L et la<br />

créatininémie à 110 µmol/L.<br />

Quels sont les moyens et les cibles<br />

thérapeutiques que vous proposez pour<br />

la prévention de la progression de la<br />

néphropathie ?<br />

Éléments de réponse dans un prochain numéro ◗<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007


✓ Protéinurie tubulaire : lorsqu’il existe une pathologie du tube<br />

proximal, la charge filtrée des protéines n’est pas augmentée,<br />

mais les capacités de réabsorption tubulaire sont diminuées. La<br />

protéinurie est donc constituée alors de protéines de faible PM<br />

(β-2-microglobuline, lysozyme…), habituellement en faible abondance,<br />

dépassant rarement 1 g/24 heures. Ce type de protéinurie<br />

est observé au cours des néphropathies tubulaires (syndrome de<br />

Fanconi, cystinose, hypokaliémie, hypercalcémie, toxicité tubulaire<br />

des aminosides ou des métaux lourds…) et plus généralement<br />

dans toutes les néphropathies tubulo-interstitielles.<br />

✓ Protéinurie transitoire : des modifications de l’hémodynamique<br />

intrarénale sont capables d’influencer le passage des protéines<br />

à travers le glomérule. Cette protéinurie s’observe au cours de<br />

certaines circonstances s’accompagnant d’une hypersécrétion<br />

d’angiotensine II et/ou d’une augmentation de la pression veineuse<br />

rénale, telles que dans l’insuffisance cardiaque, la fièvre ou l’exercice<br />

physique intense. Dans cette situation, la protéinurie est d’abondance<br />

variable, elle est souvent transitoire ou intermittente et<br />

peut disparaître complètement. On en rapproche le cas particulier<br />

de la protéinurie orthostatique. Cette dernière est observée<br />

chez certains adolescents longilignes et correspond à une protéinurie<br />

intermittente ne survenant que lors de l’orthostatisme<br />

et disparaissant après le repos en clinostatisme. Elle n’est associée<br />

à aucune autre anomalie néphrologique (hématurie, insuffisance<br />

rénale) et disparaît après l’âge de 20 ans.<br />

Diagnostic<br />

Les principales circonstances de découverte sont :<br />

— lors d’un dépistage systématique : médecine du travail ou scolaire,<br />

grossesse ;<br />

— lors de symptômes néphrologiques (œdèmes, HTA, hématurie)<br />

ou urologiques ;<br />

— lors du bilan d’une maladie du rein (diabète, lupus, myélome…).<br />

À la suite du dépistage d’une protéinurie par la bandelette urinaire,<br />

il convient de quantifier son abondance par un dosage de la protéinurie<br />

des 24 heures et de préciser sa nature par une électrophorèse<br />

et une immunoélectrophorèse des protéines urinaires.<br />

1. Bandelette urinaire<br />

Le dépistage d’une protéinurie repose sur la bandelette réactive.<br />

Le principe en est la liaison des protéines chargées négativement<br />

avec le colorant bleu de bromophénol dont la coloration varie en<br />

fonction du pH. L’indicateur coloré varie de 0 à 4 croix, permettant<br />

une appréciation semi-quantitative de la protéinurie (tableau 3).<br />

Un certain nombre de limites doivent cependant être connues :<br />

— à n’utiliser qu’avec des urines fraîchement émises ;<br />

— seule la présence d’albumine est détectée (seuil de détection<br />

de 100 mg/L) ;<br />

— les immunoglobulines et les chaînes légères d’immunoglobulines<br />

ne sont pas détectées (faux négatif) ;<br />

— il existe des faux positifs : bandelette périmée ou mal conservée,<br />

urines alcalines (pH > 7), contamination des urines (menstruation,<br />

infection urinaire), présence d’antiseptique (ammonium quaternaire)<br />

dans le bocal de recueil.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007<br />

à retenir<br />

POINTS FORTS<br />

Une protéinurie anormale (> 150 mg/j) permanente<br />

traduit toujours l’existence d’une néphropathie sousjacente<br />

et nécessite un bilan néphrologique.<br />

L’orientation diagnostique repose sur la caractérisation<br />

du profil de la protéinurie (dosage pondéral, électrophorèse<br />

et immunoélectrophorèse des protéines sériques) et sur la<br />

présence éventuelle d’autres anomalies néphrologiques<br />

(sédiment urinaire, créatininémie, échographie rénale).<br />

Le dosage annuel de la microalbuminurie (excrétion urinaire<br />

quotidienne d’albumine > 30 mg/j) permet le dépistage<br />

précoce de la néphropathie diabétique. Elle représente<br />

également un marqueur de risque cardiovasculaire.<br />

Le syndrome néphrotique (SN) répond à une définition<br />

strictement biologique : protéinurie supérieure à 3 g/j<br />

(50 mg/kg/j chez l’enfant) associée à une hypoalbuminémie<br />

inférieure à 30 g/j. Il traduit toujours l’existence d’une<br />

néphropathie glomérulaire sous-jacente.<br />

Les complications sont fréquentes et doivent être<br />

prévenues ou traitées. Elles sont soit aiguës : œdèmes,<br />

insuffisance rénale aiguë (fonctionnelle ou organique),<br />

thrombose vasculaire, susceptibilité aux infections ;<br />

soit chroniques : progression vers l’IRC, dyslipidémie<br />

sévère, retard de croissance.<br />

Chez l’enfant de 1 à 10 ans, une néphropathie à lésions<br />

glomérulaires minimes (LGM) idiopathique est responsable<br />

du syndrome dans 90 % des cas.<br />

Chez l’adulte, la néphropathie diabétique devient<br />

actuellement la cause la plus fréquente de protéinurie<br />

néphrotique secondaire alors que la glomérulopathie<br />

extramembraneuse (GEM) représente la forme la plus<br />

fréquente de glomérulopathie primitive. Néanmoins,<br />

indépendamment du type histologique, il convient de<br />

toujours rechercher une cause secondaire (cancers,<br />

infections, médicaments...) chez l’adulte.<br />

(v. MINI TEST DE LECTURE, p. 790)<br />

2. Dosage pondéral des protéines urinaires<br />

La technique de dosage est habituellement une technique de<br />

fixation d’un colorant (rouge de pyrogallol) par les protéines (seuil<br />

de sensibilité de 100 mg/L),<br />

Seul le recueil des urines de 24 heures permet la quantification<br />

exacte de la protéinurie. En effet, les dosages sont effectués<br />

en mg/L et dépendent de la dilution des urines (et donc de la diurèse<br />

des 24 heures). En outre, l’excrétion urinaire de protéine<br />

connaît des variations nycthémérales. Cependant, le recueil des<br />

urines des 24 heures n’est pas toujours correctement réalisé.<br />

Des alternatives plus pragmatiques (mais également plus<br />

imprécises) permettent d’apprécier l’abondance de la protéinurie.<br />

Il est possible soit de minuter la durée de recueil urinaire entre<br />

deux mictions (résultats exprimés alors en µg/min), soit d’effectuer<br />

783


le recueil le matin au lever ou en consultation (résultats exprimés<br />

en mg/L). Une meilleure précision et reproductibilité sont obtenues<br />

en rapportant l’expression des résultats à la concentration<br />

urinaire de créatinine (résultats exprimés en mg/mmol de créatinine)<br />

[tableau 4].<br />

L’existence d’une hématurie ou d’une pyurie abondante peut<br />

gêner l’interprétation de la protéinurie. Une hématurie macroscopique<br />

(et non une hématurie microscopique) peut être à l’origine<br />

d’une protéinurie abondante.<br />

3. Microalbuminurie<br />

La quantification de la microalbuminurie fait appel à des<br />

méthodes de dosage immunologiques, mesurant spécifiquement<br />

l’albumine, dont la sensibilité est voisine de 1 mg/L.<br />

L’excrétion urinaire d’albumine physiologique est inférieure à<br />

30 mg/j. Par définition consensuelle, une excrétion urinaire<br />

d’albumine supérieure à 30 mg/24 heures mais non détectable<br />

par les techniques conventionnelles de dosage de la protéinurie<br />

(c’est-à-dire < 300 mg/24 h) est appelée microalbuminurie.<br />

Ce dosage doit être effectué une fois par an chez les patients<br />

diabétiques. En effet, au cours d’un diabète de type 1 ou 2, une microalbuminurie<br />

traduit une atteinte glomérulaire précoce, permettant<br />

de dépister la maladie rénale diabétique à son stade initial.<br />

Des considérations similaires peuvent être faites chez les<br />

patients hypertendus.<br />

De manière plus générale, la microalbuminurie est également<br />

désormais considérée comme un marqueur de dysfonction endothéliale<br />

et donc de risque cardiovasculaire.<br />

Tableau 2<br />

784<br />

III-Q328<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte : Orientation diagnostique<br />

Classification physiopathologique des protéinuries<br />

4. Électrophorèse et immunoélectrophorèse<br />

des protéines urinaires<br />

Réalisée habituellement sur acétate de cellulose, l’électrophorèse<br />

des protéines urinaires permet une étude qualitative de la protéinurie<br />

et est très utile pour caractériser l’origine de la protéinurie.<br />

✓ Les protéinuries dites sélectives sont constituées pour plus de<br />

80 % par de l’albumine et sont, en règle générale, dues à une<br />

néphropathie glomérulaire sans lésion décelable au microscope<br />

optique (syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes).<br />

✓ Les protéinuries non sélectives (proportion d’albumine < 80 %)<br />

contiennent habituellement toutes les classes de globulines du<br />

sérum. Toutes les néphropathies peuvent donner de telles protéinuries.<br />

✓ Les protéinuries constituées en grande partie par les protéines<br />

anormales, migrant sous forme d’un pic étroit dans les β- ou les<br />

γ-globulines, correspondent à une excrétion anormale de chaînes<br />

légères d’immunoglobuline monoclonale. C’est la protéinurie de<br />

TYPE MÉCANISME CARACTÉRISTIQUES CAUSES<br />

Protéinurie glomérulaire ❚ lésion du filtre glomérulaire ❚ débit variable parfois ❚ néphropathies glomérulaires<br />

important (> 3 g/j) (LGM si protéinurie sélective)<br />

❚ albumine et protéines<br />

de PM > 70 kD<br />

Protéinurie de surcharge ❚ libération massive ❚ débit variable selon cause ❚ myélome à chaînes légères<br />

ou hyperproduction ❚ chaînes légères ❚ hémolyse<br />

d’une protéine plasmatique d’immunoglobuline, hémoglobine, ❚ rhabdomyolyse<br />

myoglobine…<br />

Protéinurie tubulaire ❚ défaut de réabsorption tubulaire ❚ débit faible (< 1 g/j) ❚ tubulopathie proximale<br />

❚ β-2-microglobuline, (syndrome de Fanconi…)<br />

protéines de faible PM ❚ néphropathie tubulo-interstitielle<br />

chronique<br />

❚ néphropathie vasculaire<br />

Tableau 3<br />

Interprétation semi-quantitative<br />

de la bandelette urinaire<br />

RÉSULTAT BANDELETTE ÉQUIVALENCE PROTÉINURIE<br />

Négative ou traces < 100 mg/L<br />

1 + < 300 mg/L<br />

2 + < 1 g/L<br />

3 + < 3 g/L<br />

4 + > 3 g/L<br />

Protéinurie transitoire ❚ perturbation hémodynamique ❚ débit souvent faible ❚ fièvre, exercice physique<br />

intrarénale ❚ isolée ❚ insuffisance cardiaque<br />

❚ transitoire ❚ orthostatisme<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007


Bence-Jones, caractérisée initialement par sa propriété de précipitation<br />

autour de 50 °C et de redissolution à plus haute température.<br />

En fait, 50 % des chaînes légères au plus présentent ces<br />

propriétés physicochimiques. L’immunoélectrophorèse ou l’immunofixation<br />

des protéines urinaires caractérise la protéine<br />

monoclonale (chaîne légère kappa ou lambda).<br />

✓ Les protéinuries tubulaires, constituées essentiellement de<br />

globulines de faible poids moléculaire, sont mieux analysées par<br />

l’électrophorèse en gel de polyacrylamide qui sépare les protéines<br />

Figure 1<br />

CIRCONSTANCES<br />

PARTICULIÈRES<br />

➠Fièvre<br />

➠Exercice physique<br />

➠Infection urinaire<br />

➠Insuffisance<br />

cardiaque droite<br />

Disparition<br />

avec la cause<br />

PROTÉINURIE<br />

DE SURCHARGE<br />

Chaînes légères<br />

d’immunoglobulines :<br />

➠myélome à chaînes<br />

légères<br />

Hémoglobinurie :<br />

➠hémolyse<br />

Myoglobulinémie :<br />

➠rhabdomyolyse<br />

Amylasurie :<br />

➠pancréatite aiguë<br />

Orientation diagnostique devant une protéinurie.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007<br />

Disparition<br />

après l’âge de 20 ans<br />

BANDELETTE URINAIRE POSITIVE<br />

DOSAGE PONDÉRAL<br />

SUR URINES DES 24 HEURES<br />

CONFIRMATION<br />

PROTÉINURIE > 150 mg/j<br />

PROTÉINURIE<br />

TUBULAIRE<br />

β2-microalbuminurie ++<br />

Débit faible (< 1 à 2 g/j)<br />

➠Tubulopathie proximale<br />

(syndrome de Fanconi)<br />

➠Néphropathie tubulointerstitielle<br />

chronique<br />

en fonction de leur poids moléculaire. Elles résultent d’un trouble<br />

de réabsorption tubulaire (la lysozymurie et la β-2-microglobulinurie<br />

sont augmentées).<br />

Orientation diagnostique<br />

L’orientation diagnostique se fait en 3 étapes (fig. 1) :<br />

— confirmation de la protéinurie et de son caractère permanent<br />

par le dosage pondéral de la protéinurie des 24 heures qui élimine<br />

une protéinurie transitoire ;<br />

TRANSITOIRE PERMANENTE<br />

PROTÉINURIE<br />

ORTHOSTATIQUE<br />

Adolescent longiligne<br />

Protéinurie isolée<br />

Disparition<br />

en clinostatisme<br />

Débit > 2 g/j<br />

Albuminurie ++<br />

Hématurie<br />

➠Néphropathies<br />

glomérulaires<br />

ÉLECTROPHORÈSE<br />

DES PROTÉINES URINAIRES<br />

SÉDIMENT URINAIRE<br />

CRÉATININÉMIE<br />

ÉCHOGRAPHIE RÉNALE<br />

PROTÉINURIE<br />

GLOMÉRULAIRE<br />

Négative si chaînes légères<br />

d’immunoglobuline<br />

Débit < 2 g/j<br />

➠Toutes néphropathies<br />

785


Tableau 4<br />

— caractérisation du profil de la protéinurie (glomérulaire, tubulaire<br />

ou de surcharge) par l’électrophorèse des protéines urinaires,<br />

qui permet le diagnostic de myélome à chaînes légères ;<br />

— en dehors des protéinuries transitoires ou de surcharge, une<br />

protéinurie permanente témoigne de la présence d’une néphropathie.<br />

La composition de la protéinurie, les anomalies du sédiment<br />

urinaire (hématurie, leucocyturie), de la créatininémie (altération<br />

de la fonction rénale) et de l’échographie rénale (anomalie<br />

urologique) orientent alors vers le type de la néphropathie glomérulaire,<br />

tubulo-interstitielle ou vasculaire :<br />

• le syndrome néphrotique (protéinurie > 3 g/j et albuminémie<br />

< 30 g/L) est pathognomonique d’une néphropathie glomérulaire.<br />

La réalisation d’une ponction-biopsie rénale est indispensable<br />

à l’établissement du diagnostic, à l’exception du syndrome<br />

néphrotique pur évocateur d’une néphropathie à lésions glomérulaires<br />

minimes, du diabète et de l’amylose ;<br />

• l’association d’une protéinurie à une hématurie microscopique<br />

est aussi très évocatrice d’une néphropathie glomérulaire.<br />

Le mode d’installation syndromique, les anomalies clinico-biologiques<br />

associées et la réalisation éventuelle d’une ponction-biopsie<br />

rénale permettent de préciser le diagnostic ;<br />

• l’association d’une protéinurie faible (< 1 g/j) et d’une leucocyturie<br />

significative oriente vers une néphropathie tubulo-interstitielle.<br />

L’imagerie rénale peut alors apporter des éléments diagnostiques<br />

essentiels (uropathie malformative, pyélonéphrite<br />

chronique…) ;<br />

• la protéinurie permanente, modérée (< 2 g/j) et isolée est<br />

d’interprétation plus difficile. L’absence d’autres anomalies rénales<br />

biologiques ou radiologiques ne permet pas dans ce cas d’orienter<br />

le diagnostic. Cependant, cette protéinurie peut révéler ou<br />

accompagner toutes les néphropathies (glomérulaire, tubulointerstitielle<br />

ou vasculaire). La ponction-biopsie rénale s’avère<br />

souvent incontournable pour déterminer la nature des lésions<br />

rénales impliquées.<br />

Il faut remarquer qu’une maladie glomérulaire peut se surajouter<br />

à une néphropathie interstitielle ou vasculaire (lésions<br />

de hyalinose après réduction néphronique par exemple) et que<br />

le débit de la protéinurie diminue souvent quand le débit de filtration<br />

glomérulaire devient inférieur à 50 mL/min (diminution<br />

de la charge filtrée).<br />

Enfin, chez le sujet âgé, il faut toujours penser au myélome.<br />

786<br />

III-Q328<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte : Orientation diagnostique<br />

Modalités de quantification de la protéinurie et de la microalbuminurie<br />

TYPE PROTÉINURIE URINES 24 HEURES PRÉLÈVEMENT MINUTÉ ÉCHANTILLON<br />

Normoalbuminurie < 30 mg/24 heures < 20 µg/min < 2 mg/mmol<br />

créatininurie<br />

Microalbuminurie 30-300 mg/24 heures 20-200 µg/min 2-30 mg/mmol<br />

créatininurie<br />

Protéinurie > 300 mg/24 heures > 200 µg/min > 30 mg/mmol<br />

créatininurie<br />

SYNDROME NÉPHROTIQUE<br />

Le syndrome néphrotique (SN) est défini classiquement par l’association<br />

d’une protéinurie supérieure à 3 g/j (50 mg/kg/j chez<br />

l’enfant) associée à une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/j.<br />

Il traduit toujours une néphropathie glomérulaire sous-jacente.<br />

Chez l’enfant de 1 à 10 ans, une néphropathie à lésions glomérulaires<br />

minimes (LGM) idiopathique est responsable du syndrome<br />

dans 90 % des cas. Chez l’adulte, la néphropathie diabétique<br />

devient actuellement la cause la plus fréquente de protéinurie<br />

néphrotique secondaire alors que la glomérulopathie extramembraneuse<br />

(GEM) représente la forme la plus fréquente de glomérulopathie<br />

primitive. Néanmoins, indépendamment du type histologique,<br />

il convient de toujours rechercher une cause secondaire<br />

(cancers, infections, médicaments...) chez l’adulte.<br />

Définition et physiopathologie<br />

Le syndrome néphrotique est caractérisé par une protéinurie<br />

importante liée à un trouble de la perméabilité capillaire glomérulaire.<br />

Cette protéinurie contient essentiellement de l'albumine<br />

ou des protéines de poids moléculaire supérieur à l’albumine. Elle<br />

est responsable d'une perte d'albumine supérieure aux capacités<br />

de synthèse hépatique, provoquant ainsi une hypoalbuminémie<br />

(fig. 2).<br />

Le syndrome néphrotique répond à une définition strictement<br />

biologique et associe :<br />

— une protéinurie supérieure à 3 g/24 h (50 mg/kg/j chez l’enfant) ;<br />

— une hypoprotidémie inférieure à 60 g/L ;<br />

— une hypoalbuminémie inférieure à 30 g/L.<br />

Le syndrome néphrotique est qualifié de pur s'il n'est accompagné<br />

ni d'hématurie microscopique, ni d'hypertension artérielle,<br />

ni d'insuffisance rénale organique et, en théorie, si la protéinurie<br />

est sélective (albumine constituant plus de 80 % de la protéinurie).<br />

Il traduit un syndrome d'hyperperméabilité capillaire<br />

glomérulaire fonctionnel sans anomalie visible en microscopie<br />

optique. Il répond en général au tableau de syndrome néphrotique<br />

à lésions glomérulaires minimes (LGM) [anciennement<br />

appelé néphrose lipoïdique].<br />

Le syndrome néphrotique est qualifié d'impur s'il est associé<br />

à un ou plusieurs des signes précédents. Il traduit une lésion<br />

morphologique analysable en microscopie optique, qu’il s’agisse<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007


de dépôts (néphropathie diabétique, amylose, GEM…) ou d’anomalies<br />

des cellules glomérulaires (hyalinose segmentaire et focale [HSF],<br />

glomérulonéphrite membrano-proliférative [GNMP]…). La symptomatologie<br />

clinique est dominée par le syndrome œdémateux.<br />

Complications<br />

1. Complications aiguës<br />

✓ Les œdèmes représentent le principal symptôme révélateur d’un<br />

syndrome néphrotique. Ils sont responsables d’une prise de poids<br />

à quantifier.<br />

Ils sont blancs, mous, indolores et « prennent le godet ». Ils<br />

prédominent dans les territoires déclives (chevilles, jambes en<br />

position debout, lombes chez un sujet en décubitus dorsal) ou<br />

aux régions où la pression extravasculaire est faible (orbite de<br />

l'œil). Un épanchement des séreuses (plèvre, péricarde, péritoine)<br />

peut être observé réalisant un tableau d’anasarque. L’œdème<br />

pulmonaire est exceptionnel en l’absence d’insuffisance cardiaque.<br />

Les œdèmes sont liés à une diminution de la pression oncotique<br />

des protéines intravasculaires, qui permet la fuite de sel et<br />

d'eau vers le liquide interstitiel. Cette fuite d'eau et de sel plasmatiques<br />

est responsable d'une hypovolémie efficace qui stimule les<br />

systèmes participant à la rétention hydrosodée comme le système<br />

rénine-angiotensine-aldostérone et le système sympathique.<br />

En fait, cette vue classique attribuant la rétention sodée du<br />

syndrome néphrotique à la seule hypovolémie secondaire à l’hypoalbuminémie<br />

a été remise en question par le résultat d’études montrant<br />

un état d’euvolémie, voire d’hypervolémie chez des patients<br />

atteints de syndrome néphrotique. Toutefois, le facteur « primitif »<br />

responsable de l’avidité rénale pour le sodium reste inconnu.<br />

Le traitement du syndrome œdémateux est basé sur la restriction<br />

sodée (< 3 g de NaCl/j, soit 50 mmmol de sodium), un<br />

repos relatif au lit (pour éviter la stimulation du système rénineangiotensine-aldostérone<br />

et faciliter la mobilisation des œdèmes),<br />

et la prescription éventuelle de diurétiques de l’anse comme le<br />

furosémide (Lasilix) ou le bumétamide (Burinex). Dans tous les cas,<br />

l’obtention d’une réponse natriurétique devra être progressive<br />

pour éviter l’aggravation de l’hypovolémie et les risques de thromboses<br />

veineuses (dues à l’hémoconcentration).<br />

✓ L’insuffisance rénale aiguë (IRA) peut être :<br />

— fonctionnelle, liée à l’hypovolémie relative, le plus souvent iatrogène<br />

(déplétion trop rapide par les diurétiques, usage d’AINS) ;<br />

— organique par nécrose tubulaire aiguë en cas d’hypovolémie<br />

sévère et prolongée (syndrome néphrotique idiopathique de<br />

l’enfant et du sujet âgé) ;<br />

— vasculaire par thrombose uni- ou bilatérale des veines rénales<br />

(notamment au cours des GEM) : elle est le plus souvent asymptomatique,<br />

mais parfois révélée par des lombalgies, une hématurie<br />

macroscopique ou une détérioration de la fonction rénale.<br />

✓ Les thromboses vasculaires sont secondaires à un état d’hypercoagulabilité<br />

d’origine multifactorielle : fuite urinaire d’inhibiteurs<br />

de la coagulation (antithrombine III), déficit fonctionnel en protéine<br />

C et S, hyperfibrinogénémie, thrombocytose et activation<br />

plaquettaire.<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007<br />

Chez l’enfant, les thromboses vasculaires concernent tous les<br />

territoires, veineux et artériels. Chez l’adulte, ils sont majoritairement<br />

veineux. La survenue de thrombose des veines rénales ou<br />

d’un sinus cérébral est plus fréquente au cours des syndromes<br />

néphrotiques, et particulièrement grave.<br />

Le risque thrombotique est particulièrement élevé en cas<br />

d’hypoalbuminémie sévère (< 20 g/L) et de GEM. Dans ces situations,<br />

une anticoagulation préventive par HBPM (en l’absence<br />

d’insuffisance rénale) ou héparine peut être proposée avec relais<br />

par AVK en cas de persistance du syndrome néphrotique.<br />

La prévention des thromboses nécessite également d’éviter<br />

le clinostatisme prolongé et la déplétion hydrosodée brutale<br />

(< 1 kg/j chez l’adulte) par un traitement diurétique trop intensif.<br />

Le traitement curatif se fait selon les modalités habituelles en<br />

prenant garde aux difficultés d’équilibration des AVK (augmentation<br />

de la fraction libre liée à l’hypoalbuminémie).<br />

✓ Les surdosages médicamenteux sont liés au fait que de nombreux<br />

médicaments sont fortement liés à l’albumine. Aussi, la baisse de<br />

l'albumine sérique est directement responsable de l'augmentation<br />

de la fraction libre de ces médicaments (notamment des AVK,<br />

des AINS...).<br />

ÉLECTROPHORÈSE DES PROTÉINES SÉRIQUES NORMALE<br />

Albumine<br />

α1 α2 β γ<br />

L’électrophorèse sépare<br />

les protéines sériques<br />

en 5 fractions (de l’anode<br />

vers la cathode) :<br />

• albumine<br />

(pic le plus important)<br />

• α1-globulines<br />

• α2-globulines<br />

• β-globulines<br />

• γ-globulines.<br />

ÉLECTROPHORÈSE DES PROTÉINES SÉRIQUES<br />

DANS LE SYNDROME NÉPHROTIQUE<br />

Hypoalbuminémie<br />

Hyperα2globulinémie<br />

Albumine α1 α2 β1 β2 γ<br />

Hypoγglobulinémie<br />

Fractions % g/L Valeur réf. g/L<br />

Albumine<br />

Alpha1<br />

Alpha2<br />

Bêta1<br />

Bêta2<br />

Gamma<br />

42,8<br />

11,0<br />

30,5<br />

3,7<br />

6,6<br />

5,4<br />

15,8<<br />

4,1><br />

11,3><br />

1,4<<br />

2,4<<br />

2,0<<br />

41,0<br />

2,0<br />

5,0<br />

4,0<br />

2,5<br />

7,0<br />

52,0<br />

4,0<br />

9,0<br />

6,0<br />

5,5<br />

15,0<br />

• Hypoalbuminémie avec resserement du pic liée à la fuite urinaire<br />

d’albumine.<br />

• Hyperα2globulinémie importante liée à l’augmentation<br />

de l’α2-macroglobuline.<br />

• Hypogammaglobulinémie liée à la fuite urinaire d’immunoglobulines.<br />

Figure 2 Profils de l’électrophorèse des protéines sériques<br />

dans le syndrome néphrotique.<br />

787


Le risque de surdosage et d'effet toxique est augmenté et<br />

impose des adaptations posologiques (diminution).<br />

2. Complications chroniques<br />

✓ Une dyslipidémie est fréquemment associée au syndrome<br />

néphrotique prolongé.<br />

La dyslipidémie est liée à une augmentation de la production<br />

des lipoprotéines au niveau du foie (VLDL et LDL) et à une diminution<br />

de leur catabolisme. Elle est directement corrélée à l’importance<br />

de la protéinurie. Elle est de type mixte le plus souvent.<br />

L’hypercholestérolémie peut être très importante (> 10 mmol/L).<br />

Elle est athérogène avec élévation du LDL-C et HDL-C normal ou bas.<br />

L’hyperlipidémie sévère augmente le risque cardiovasculaire<br />

et pourrait participer à la progression des lésions rénales.<br />

Le traitement de l’hyperlipidémie n’est indiqué qu’en cas de<br />

syndrome néphrotique durable résistant au traitement spécifique<br />

(hyalinose segmentaire et focale, glomérulopathie extramembraneuse).<br />

Il fait appel à l’utilisation des statines sous<br />

contrôle strict des CPK (risque accru de rhabdomyolyse) et à<br />

posologie progressivement croissante.<br />

✓ L’hypertension artérielle et la progression vers l’insuffisance<br />

rénale chronique concernent plus de 50 % des syndromes<br />

néphrotiques intenses (protéinurie > 5 g/j) et prolongés (plusieurs<br />

années) qui vont évoluer en moins de 10 ans vers l’insuffisance<br />

rénale chronique terminale.<br />

Le risque est lié au type de glomérulopathie, à un effet néphrotoxique<br />

direct de la protéinurie et à l’existence éventuelle d’une<br />

hypertension artérielle (HTA) associée non contrôlée, très fréquente<br />

au cours des glomérulonéphrites chroniques.<br />

La prévention de la progression de l’insuffisance rénale chronique<br />

suit les recommandations habituelles en cherchant une<br />

réduction pharmacologique de la protéinurie et une normalisation<br />

de la pression artérielle : objectifs < 130/80 mmHg et protéinurie<br />

< 0,5 g/j, régime hyposodé à 6 g/j, utilisation des bloqueurs du<br />

système rénine-angiotensine (IEC et ARA2) en première intention,<br />

en association avec les diurétiques si nécessaire.<br />

✓ La malnutrition protéique est fréquente au cours des syndromes<br />

néphrotiques (balance azotée négative par fuite urinaire des<br />

protéines, anorexie, corticothérapie prolongée…). Les régimes<br />

hyperprotidiques sont pourtant proscrits, à l’inverse, les régimes<br />

hypoprotidiques (< 0,8 g/kg/j) réduisent la protéinurie mais augmentent<br />

le risque de dénutrition protéique.<br />

Des apports protidiques « normaux », de 1 à 1,5 g/kg/j, sont<br />

donc recommandés.<br />

Chez l’enfant, un retard de croissance peut être observé. Il est<br />

principalement imputable à la corticothérapie.<br />

✓ La susceptibilité accrue aux infections est liée à une diminution<br />

de la réponse immunitaire qui est diminuée au cours du syndrome<br />

néphrotique. La fuite urinaire des immunoglobulines G et A ainsi<br />

que de composants du complément favorisent le risque d’infection<br />

par les bactéries, notamment encapsulées (pneumocoque,<br />

Hæmophilus, Klebsiella).<br />

L’antibioprophylaxie n’est pas indiquée. L’efficacité du vaccin<br />

antipneumococcique n’est pas établie. L’éradication des foyers<br />

788<br />

III-Q328<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte : Orientation diagnostique<br />

infectieux chroniques (ORL et stomatologiques) est recommandée.<br />

En cas d’infections récidivantes, la perfusion d’immunoglobulines<br />

polyvalentes est à discuter.<br />

La corticothérapie et les immunosuppresseurs favorisent les<br />

infections opportunistes (virales, pneumocystose…). Ils contreindiquent<br />

les vaccins vivants.<br />

Causes<br />

De façon schématique, on distingue les syndromes néphrotiques<br />

primitifs et secondaires :<br />

— un syndrome néphrotique est dit primitif ou idiopathique si l’enquête<br />

étiologique s’avère négative : en pratique en l’absence de<br />

signes extrarénaux. Les néphropathies glomérulaires primitives<br />

sont alors définies selon leur type histologique ;<br />

— un syndrome néphrotique est secondaire si la néphropathie<br />

glomérulaire s’intègre dans le cadre d’une maladie générale ou<br />

si une étiologie précise (infectieuse, toxique, tumorale) est mise<br />

en évidence.<br />

Les différentes étiologies avec leurs fréquences relatives données<br />

à titre indicatif sont résumées dans le tableau 5.<br />

Tableau 5<br />

Étiologie du syndrome néphrotique<br />

chez l’enfant et chez l’adulte<br />

SN ÉTIOLOGIE<br />

➥ CHEZ L’ENFANT<br />

SN primitif ❚ syndrome néphrotique à lésions glomérulaires<br />

(90 %) minimes (LGM) (= néphrose lipoïdique) [75-80 %]<br />

❚ hyalinose segmentaire et focale (HSF) [10 %]<br />

❚ autres (GEM, GNMP…) [< 5 %]<br />

SN secondaire ❚ congénital<br />

(10 %) ❚ basalopathies (syndrome d’Alport,…)<br />

❚ autres (GNMP, GEM…)<br />

➥ CHEZ L’ADULTE<br />

SN primitif ❚ glomérulopathie extramembraneuse (GEM) [40 %]<br />

(60 %) ❚ LGM ou HSF (15-20 %)<br />

❚ glomérulonéphrite membrano-proliférative (GNMP),<br />

glomérulopathie à dépôts mésangiaux d’IgA [< 5 %]<br />

SN secondaire ❚ néphropathie diabétique (20 %)<br />

(40 %) ❚ néphropathies lupiques (5 %)<br />

❚ néphropathies amyloïdes (AA et AL) (5 %)<br />

❚ néphropathies glomérulaires héréditaires (< 1 %)<br />

❚ formes secondaires d’autres néphropathies (10 %)<br />

➙ GEM : cancer, hépatite B, sarcoïdose,<br />

médicaments…<br />

➙ LGM : Hodgkin, médicaments (AINS, lithium)…<br />

➙ HSF : réduction néphronique, VIH, médicaments…<br />

➙ GNMP : suppurations profondes, hépatite C,<br />

lymphomes…<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007


Orientation diagnostique<br />

L’orientation diagnostique devant la découverte d’un syndrome<br />

néphrotique se fait en 2 étapes :<br />

— enquête clinico-biologique à la recherche d’arguments en faveur<br />

du caractère primitif ou secondaire du syndrome néphrotique et<br />

du type de néphropathie sous-jacente,<br />

— discussion de la nécessité de réaliser une ponction-biopsie<br />

rénale (PBR).<br />

1. Enquête clinico-biologique<br />

✓ Sur le plan clinique, on cherche à préciser les éléments suivants :<br />

— antécédents familiaux de néphropathie glomérulaire (syndrome<br />

d’Alport, syndrome néphrotique familial) ;<br />

— antécédents personnels extrarénaux suggestifs de maladies<br />

générales (infectieuses, métaboliques ou immunitaires), anciens<br />

(diabète, hépatite virale B ou C, contage VIH, fièvre méditerranéenne<br />

familiale, drépanocytose…) ou récents (éruption du<br />

visage, purpura, arthralgies ou arthrites, fièvre, myalgies, aphtes<br />

ou érosions buccales, syndrome de Raynaud) ;<br />

— âge de survenue (< 1 an ; 1-10 ans ; > 10 ans ; sujet âgé > 60 ans),<br />

— modalités d’installation des œdèmes (quelques jours ou plusieurs<br />

semaines). Un début brutal ou explosif suggère un syndrome<br />

néphrotique à lésions glomérulaires minimes ou la coexistence<br />

d’une prolifération des cellules intraglomérulaires (avec<br />

insuffisance rénale rapidement progressive et hématurie associées).<br />

Un début progressif, sur plusieurs semaines, évoque<br />

davantage des dépôts intraglomérulaires sans prolifération cellulaire<br />

(diabète, glomérulonéphrite extramembraneuse, amylose),<br />

— recherche d’un facteur déclenchant : prise de certains médicaments<br />

(AINS, lithium…), vaccination récente, piqûres d’insecte,<br />

syndrome infectieux récent ;<br />

— caractère pur ou impur du syndrome néphrotique.<br />

✓ Sur le plan paraclinique, le bilan initial comporte :<br />

— immunoélectrophorèse des protéines sériques et urinaires (syndrome<br />

néphrotique pur ou impur, myélome) ;<br />

— glycémie à jeun (diabète) :<br />

— anticorps antinucléaires et anti-DNA (lupus) ;<br />

— dosage du complément (lupus, GNMP) ;<br />

— cryoglobulinémies (GNMP) ;<br />

— sérologies VHB (GEM), VHC (GNMP) et VIH (HSF) ;<br />

— échographie rénale (uropathie malformative associée à une HSF).<br />

2. Indications de la PBR devant un syndrome<br />

néphrotique de l’enfant<br />

Le SN pur idiopathique représente de loin la cause la plus fréquente<br />

entre l’âge de 1 et 10 ans. Il correspond essentiellement<br />

à une néphropathie à lésions glomérulaires minimes.<br />

Dans certains cas, plus rares, des mutations de protéines localisées<br />

au niveau du diaphragme de fente des podocytes sont<br />

responsables de syndromes néphrotiques héréditaires.<br />

Les formes secondaires sont rares avant l’âge de 10 ans.<br />

Dans la pratique, la réalisation d’une PBR n’est donc pas indiquée<br />

si les critères présomptifs du diagnostic d’une forme idiopathique<br />

sont rassemblés :<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007<br />

Tableau 6<br />

Contre-indications à la réalisation<br />

d’une ponction-biopsie rénale<br />

❚ Hypertension artérielle sévère non contrôlée<br />

❚ Anomalies de la coagulation (TP, TCA) ou de l’hémostase primaire<br />

(plaquettes, temps d’occlusion)<br />

❚ Présence d'un rein unique fonctionnel<br />

❚ Petits reins d’insuffisance rénale chronique sévère<br />

❚ Pyélonéphrite<br />

❚ Conditions anatomiques particulières (splénomégalie,<br />

hépatomégalie, rein en fer à cheval, kystes, tumeur)<br />

— âge compris entre 1 et 10 ans ;<br />

— absence d’antécédents personnels ou familiaux urologiques ou<br />

néphrologiques ;<br />

— absence de signes cliniques extrarénaux ;<br />

— syndrome néphrotique pur ;<br />

— complément sérique et anticorps antinucléaires normaux.<br />

3. Indications de la PBR devant un syndrome<br />

néphrotique de l’adulte<br />

En pratique, la biopsie rénale est toujours indispensable en<br />

cas de syndrome néphrotique chez l’adulte, sauf :<br />

— chez le diabétique ayant une rétinopathie diabétique et un syndrome<br />

néphrotique d’apparition progressive sans hématurie,<br />

— chez l’adulte suspect d’amylose si la biopsie des glandes salivaires<br />

accessoires confirme ce diagnostic ;<br />

— en cas de glomérulopathie héréditaire déjà identifiée dans la<br />

famille, si aucun traitement spécifique n’est à proposer ;<br />

— la biopsie rénale permet d’identifier la glomérulopathie sousjacente<br />

mais est également utile pour déterminer le pronostic<br />

et guider le traitement.<br />

La biopsie rénale avec guidage échographique est un geste<br />

relativement sûr entre des mains entraînées et si ses contreindications<br />

sont respectées (tableau 6). ■<br />

La Revue du Praticien • MALADIES GLOMÉRULAIRES CHRONIQUES • 30 novembre 2003 • Tome 53 • N° 18 (1973-2088)<br />

Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts<br />

concernant les données publiées dans cet article.<br />

LA REVUE DU<br />

PRATICIEN<br />

3 0 N O V E M B R E 2 0 0 3 / T O M E 5 3 N º 1 8<br />

IMONOGRAPHIEI<br />

OUVERTURES<br />

Maladies glomérulaires<br />

COMPRENDRE, DÉPISTER ET TRAITER<br />

Infections cutanées du SDF<br />

B Pneumonies des immnodéprimés<br />

B Inhibiteurs du<br />

TNFα B Presse : Résistance<br />

d’H. pylori • Intérêt du THS B<br />

RÉFÉRENCES UNIVERSITAIRES<br />

publication bimensuelle de formation médicale continue<br />

Pour en savoir plus<br />

Une étude d’opinion aux États-Unis B Toux chez l’enfant et chez l’adulte<br />

B Diarrhée aiguë chez l’enfant B Le dossier médical. Le secret médical.<br />

L’information du malade<br />

DE MÉMOIRE DE MÉDECIN Simenon (I). Le «sens clinique» du romancier<br />

◗ Maladies glomérulaires<br />

chroniques<br />

Monographie<br />

(Rev Prat 2003;53[18]:1991-2050)<br />

789


790<br />

III-Q328<br />

1<br />

2<br />

3<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

A / VRAI OU FAUX ?<br />

Protéinurie et syndrome néphrotique chez l’enfant et chez l’adulte : Orientation diagnostique<br />

Les chaînes légères d’immunoglobulines<br />

ne sont pas détectées par la bandelette urinaire.<br />

Une protéinurie composée majoritairement<br />

d’albumine traduit l’existence d’une néphropathie<br />

glomérulaire.<br />

La protéinurie orthostatique est associée<br />

à une hématurie.<br />

B / VRAI OU FAUX ?<br />

Un syndrome néphrotique pur évoque<br />

une néphropathie à lésions glomérulaires<br />

minimes.<br />

L’anticoagulation préventive est proposée<br />

en cas d’hypoalbuminémie < 20 g/L.<br />

La dyslipidémie du syndrome néphrotique<br />

persistant doit être traitée par statines.<br />

La glomérulopathie extramembraneuse<br />

est la cause la plus fréquente de syndrome<br />

néphrotique chez l’enfant.<br />

MINI TEST DE LECTURE<br />

C / QCM<br />

Devant une protéinurie de découverte fortuite<br />

à la bandelette, parmi les examens suivants,<br />

quel(s) est (sont) celui (ceux) que vous prescrivez<br />

en première intention ?<br />

1 Biopsie rénale.<br />

2 Examen du sédiment urinaire.<br />

3 Scanner rénal.<br />

4 Dosage de la protéinurie des 24 heures.<br />

5 Créatininémie.<br />

Réponses : A : V, V, F / B : V, V, V, F / C : 2, 4, 5.<br />

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www.huveaux.fr<br />

LA REVUE DU PRATICIEN, VOL. 57, 15 AVRIL 2007


Plan<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

T. Petitclerc<br />

Le contrôle par le rein de l’équilibre hydrosodé a pour objectif d’assurer la stabilité de l’hydratation<br />

cellulaire et extracellulaire, essentielle pour l’organisme. L’organisme ajuste le bilan hydrique dans le but<br />

de normaliser l’hydratation cellulaire mesurée par les osmorécepteurs ; il ajuste le bilan sodé dans le but<br />

d’éviter les variations du volume extracellulaire détectées par les variations de la volémie efficace. Les<br />

troubles du bilan hydrique affectent l’hydratation cellulaire. On distingue les troubles primitifs du bilan<br />

hydrique responsables d’une altération de l’osmolalité efficace et les troubles du bilan hydrique<br />

secondaires à une altération de l’osmolalité efficace ou de la volémie efficace. Les troubles du bilan sodé<br />

affectent l’hydratation extracellulaire. On distingue les troubles primitifs du bilan sodé responsables d’une<br />

altération de la volémie efficace et les troubles du bilan sodé secondaires à une altération de la volémie<br />

efficace. En pratique médicale courante, le médecin dispose d’une part d’arguments cliniques pour<br />

apprécier l’état d’hydratation extracellulaire et donc la sévérité du trouble du bilan sodé, d’autre part de<br />

la natrémie, reflet dans la plupart des cas de l’osmolalité efficace et de l’état d’hydratation cellulaire, qui<br />

permet d’apprécier la sévérité du trouble du bilan hydrique.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Déshydratation ; Hyperhydratation ; Hypernatrémie ; Hyponatrémie ; Osmolalité efficace ;<br />

Volémie efficace<br />

Introduction 1<br />

Contrôle du bilan hydrosodé 1<br />

Anomalies du bilan hydrique 2<br />

Troubles primitifs du bilan hydrique 3<br />

Troubles secondaires du bilan hydrique 5<br />

Anomalies du bilan sodé 5<br />

Surcharge sodée 6<br />

Déficit sodé 7<br />

Troubles de la natrémie 7<br />

Conduite à tenir devant une hyponatrémie 8<br />

Conduite à tenir devant une hypernatrémie 11<br />

■ Introduction<br />

L’objectif du contrôle de l’équilibre hydrosodé est d’assurer la<br />

stabilité de l’hydratation cellulaire et extracellulaire, essentielle<br />

pour l’organisme. Et s’il est habituel de parler d’équilibre<br />

hydrosodé, ce n’est pas tant parce que le bilan de l’eau et celui<br />

du sodium sont liés – ils sont au contraire largement indépendants<br />

– mais parce qu’une anomalie du bilan de l’eau et/ou du<br />

sodium correspond à un trouble de l’hydratation.<br />

Après un rappel sur la physiologie du contrôle du bilan<br />

hydrosodé, la physiopathologie des anomalies du bilan hydrique<br />

et de celles du bilan sodé est abordée afin de permettre<br />

d’énoncer clairement la conduite à tenir devant un trouble de<br />

la natrémie.<br />

Néphrologie<br />

■ Contrôle du bilan hydrosodé<br />

18-034-A-10<br />

En contrôlant la sensation de soif et l’excrétion urinaire d’eau<br />

libre [1] , l’organisme ajuste le stock hydrique de manière à<br />

assurer la stabilité de l’hydratation cellulaire (Fig. 1) dont les<br />

variations sont détectées par les osmorécepteurs hypothalamiques.<br />

Un trouble de l’hydratation cellulaire signifie donc un<br />

défaut d’ajustement du bilan hydrique : autrement dit un<br />

trouble de l’hydratation cellulaire est un trouble du bilan<br />

hydrique et inversement.<br />

De manière similaire, en contrôlant l’excrétion urinaire de<br />

sodium, l’organisme cherche à ajuster le stock sodé de manière<br />

à assurer la stabilité du volume extracellulaire (Fig. 2). Cependant,<br />

le volume extracellulaire ne peut être régulé, car l’organisme<br />

ne sait pas en détecter les variations : seules sont<br />

détectées les variations de la « volémie efficace » encore appelée<br />

« volume sanguin circulant » et censée varier dans le même sens<br />

que le volume extracellulaire [2] . Un trouble de l’hydratation<br />

extracellulaire signifie donc un défaut d’ajustement du bilan<br />

sodé : autrement dit un trouble de l’hydratation extracellulaire<br />

est un trouble du bilan sodé et inversement.<br />

Le contrôle du bilan hydrique et celui du bilan sodé sont<br />

largement indépendants. Cependant, une diminution importante<br />

de la volémie efficace, telle celle provoquée par une chute<br />

de la volémie supérieure à 15 %, stimule la sécrétion d’angiotensine<br />

et d’antidiuretic hormone (ADH) (Fig. 3). Elle interfère<br />

alors avec les mécanismes de contrôle du bilan hydrique en<br />

augmentant les apports liquidiens du fait de la soif provoquée<br />

par l’angiotensine (puissamment dipsogène) et en diminuant<br />

l’élimination rénale d’eau libre du fait de l’augmentation de<br />

l’ADH. Il en résulte une surcharge hydrique. Ainsi le maintien<br />

1


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

Volume extracellulaire Stock sodé<br />

Centres<br />

de la soif<br />

Apports<br />

hydriques<br />

“ Point fort<br />

Hydratation cellulaire<br />

(osmolalité efficace)<br />

Stock hydrique<br />

ADH<br />

Excrétion<br />

urinaire d’eau<br />

Figure 1. Contrôle du bilan hydrique. La variable régulée est l’hydratation<br />

cellulaire. La variable ajustée est le stock hydrique qui permet le<br />

contrôle de l’hydratation cellulaire. Celui-ci influence aussi l’hydratation<br />

extracellulaire, mais cette dernière est contrôlée par une autre boucle de<br />

régulation détaillée sur la Figure 2. Le taux plasmatique d’antidiuretic<br />

hormone (ADH) observé chez l’individu sain varie en sens inverse de ses<br />

apports liquidiens.<br />

Pourquoi le stock hydrique et le stock sodé ne<br />

sont-ils pas régulés ?<br />

En l’absence de trouble de l’équilibre hydrosodé, les stocks<br />

d’eau et de sodium échangeable de l’organisme, tels qu’ils<br />

peuvent être mesurés par des méthodes de dilution<br />

isotopique, sont stables. L’homéostasie est rendue<br />

possible grâce à l’adaptation par les reins de l’excrétion<br />

urinaire d’eau et de sodium aux apports, ce qui pourrait<br />

suggérer que l’objectif du contrôle de l’équilibre<br />

hydrosodé soit d’assurer la stabilité des stocks hydrique et<br />

sodé de l’organisme. Cette conception erronée conduirait<br />

alors à définir un trouble du bilan hydrique comme une<br />

variation du stock hydrique et un trouble du bilan sodé<br />

comme une variation du stock sodé. Les stocks hydriques<br />

et sodés de l’organisme ne peuvent être régulés, parce<br />

que la régulation d’une variable par une boucle<br />

d’asservissement (telles celles présentées en Figures 1 et 2)<br />

requiert la possibilité de détecter le sens de variation de<br />

cette variable. Or l’organisme ne sait détecter ni une<br />

variation du stock hydrique ni une variation du stock sodé.<br />

En réalité, l’objectif du contrôle de l’équilibre hydrosodé<br />

est d’assurer la stabilité de l’hydratation cellulaire et<br />

extracellulaire : ce sont l’hydratation cellulaire (dont la<br />

variation est détectée par les osmorécepteurs) et la<br />

volémie efficace (dont l’organisme estime, parfois à tort,<br />

que les variations se font dans le même sens que celles de<br />

l’hydratation extracellulaire) qui sont régulées.<br />

de la volémie efficace prévaut-il sur le maintien de la volémie<br />

et de l’hydratation cellulaire, tant l’organisme craint le choc !<br />

De manière analogue, une hypervolémie efficace, telle celle<br />

provoquée par une surcharge sodée primitive, est susceptible de<br />

provoquer une freination de la sécrétion d’ADH et une inhibition<br />

de la sensation de soif et donc, en cas d’apports liquidiens<br />

insuffisants, un déficit hydrique.<br />

Hydratation cellulaire<br />

Volume extracellulaire Volémie efficace<br />

Stock sodé<br />

Natriurèse<br />

Stock hydrique<br />

Facteurs agissant<br />

sur la natriurèse<br />

Figure 2. Contrôle du bilan sodé. La variable régulée est la volémie<br />

efficace. La variable ajustée est le stock sodé qui permet le contrôle de<br />

l’hydratation extracellulaire. Celui-ci influence aussi l’hydratation cellulaire,<br />

mais cette dernière est régulée par une autre boucle de régulation<br />

détaillée sur la Figure 1. Les facteurs agissant sur la natriurèse sont<br />

multiples : le système rénine-angiotensine-aldostérone (SRAA), principalement<br />

mis en action par les barorécepteurs de l’appareil juxtaglomérulaire,<br />

a un rôle primordial. Les facteurs natriurétiques d’origine cardiaque,<br />

atriale (atrial natriuretic factor [ANF]) ou ventriculaire (brain natriuretic<br />

peptide [BNP] ainsi dénommé parce qu’il a été mis d’abord en évidence<br />

dans le cerveau), principalement mis en action par les volorécepteurs du<br />

système à basse pression, et le système nerveux, principalement mis en<br />

action par les barorécepteurs carotidiens, jouent un rôle important.<br />

D’autres facteurs hormonaux (prostaglandines et kallicréines-kinines, dopamine,<br />

endothéline, purines telles que l’adénosine triphosphate [ATP],<br />

facteurs natriurétiques d’origine intestinale tels que la guanyline et surtout<br />

l’uroguanyline) ont une action sur la natriurèse, mais leur rôle physiologique<br />

reste hypothétique [1] . Le taux plasmatique de rénine et d’aldostérone<br />

observé chez l’individu sain varie en sens inverse de ses apports<br />

sodés.<br />

Toujours<br />

Hypovolémie efficace<br />

Rétention sodée Soif + ADH<br />

Rétention hydrique<br />

Seulement si importante<br />

(diminution > 15 %)<br />

Figure 3. Conséquences de l’hypovolémie efficace. L’hypovolémie efficace<br />

stimule d’abord et toujours la rétention sodée puis, seulement<br />

au-dessus d’un seuil plus élevé (variation au moins égale à celle provoquée<br />

par une chute de la volémie vraie d’environ 15 %), la rétention hydrique.<br />

■ Anomalies du bilan hydrique<br />

Un défaut d’ajustement du bilan hydrique affecte l’hydratation<br />

cellulaire. Cependant, l’état d’hydratation cellulaire ne peut<br />

pas être apprécié directement, les signes cliniques n’étant pas<br />

assez spécifiques. L’état d’hydratation cellulaire est en réalité<br />

apprécié indirectement par la mesure ou l’estimation de<br />

« l’osmolalité efficace », encore appelée « tonicité ». En effet,<br />

hormis la situation de déplétion potassique, l’osmolalité efficace<br />

varie en sens inverse de l’hydratation cellulaire : une augmentation<br />

de l’osmolalité efficace (hypertonie) est associée à une<br />

déshydratation cellulaire, une diminution (hypotonie) est, en<br />

l’absence de déplétion potassique, associée à une hyperhydratation<br />

cellulaire.<br />

L’urée ne doit pas être prise en compte dans le calcul de<br />

l’osmolalité efficace car elle n’intervient pas sur la répartition de<br />

l’eau dans l’organisme. L’osmolalité efficace du plasma peut être<br />

calculée à partir de la mesure de l’osmolalité totale et de la<br />

concentration molaire de l’urée, mais il existe plusieurs formules<br />

permettant d’en détecter une variation pathologique : la<br />

formule la plus simple consiste à considérer que la natrémie en<br />

est le reflet (Tableau 1).<br />

2 Néphrologie


“ Point fort<br />

Pourquoi une cellule sensible à la variation<br />

du volume cellulaire est-elle dénommée<br />

« osmorécepteur » ?<br />

Une variation de l’hydratation cellulaire est provoquée<br />

par un flux d’eau à travers la membrane cellulaire à<br />

l’origine d’une variation du volume cellulaire.<br />

L’osmorécepteur détecte la variation du volume cellulaire<br />

par la modification résultante de la tension exercée sur la<br />

membrane cellulaire.<br />

La membrane cellulaire étant librement perméable à<br />

l’eau, l’eau se répartit entre les divers compartiments<br />

liquidiens de l’organisme de manière à assurer l’égalité de<br />

l’osmolalité dans chacun des compartiments. Un soluté<br />

qui, telle l’urée, traverse, comme l’eau, librement<br />

et facilement la membrane cellulaire se répartit<br />

uniformément à la même concentration dans tous les<br />

compartiments liquidiens. Par conséquent une variation<br />

de sa concentration modifie de manière égale l’osmolalité<br />

de chacun des compartiments et ne provoque aucun<br />

transfert osmotique d’eau à travers la membrane cellulaire<br />

(c’est pourquoi ces solutés sont dits « osmotiquement<br />

inefficaces ») et donc aucune variation de l’hydratation<br />

cellulaire. Ce n’est pas le cas des solutés dits<br />

« osmotiquement efficaces » (glucose, ions, etc.) qui<br />

se répartissent de manière différente entre les<br />

compartiments cellulaire et extracellulaire.<br />

L’osmolalité efficace, encore appelée tonicité, désigne la<br />

concentration globale de tous les solutés osmotiquement<br />

efficaces. Elle peut être déterminée dans le plasma où elle<br />

est calculée comme la différence entre l’osmolalité<br />

plasmatique totale (mesurée par cryoscopie) et la<br />

concentration de l’urée (qui représente en pratique le seul<br />

soluté non osmotiquement efficace). L’osmolalité efficace<br />

peut aussi être estimée (Tableau 1).<br />

Hormis le cas de la déplétion potassique, le contenu<br />

cellulaire en osmoles efficaces peut être considéré comme<br />

relativement fixe. Dans ces conditions, une variation de<br />

l’osmolalité efficace ne peut traduire qu’une variation en<br />

sens inverse du stock hydrique dans les cellules et donc<br />

une variation de l’hydratation cellulaire. Bien que<br />

l’osmorécepteur thalamique soit en réalité sensible aux<br />

variations de l’hydratation cellulaire (qui ne sont pas<br />

directement observables), il détient son nom de ce qu’il<br />

paraît, pour l’observateur, sensible aux variations de<br />

l’osmolalité efficace (qui sont mesurables) à l’origine des<br />

variations de l’hydratation cellulaire.<br />

Les troubles du bilan hydrique peuvent être primitifs ou plus<br />

rarement secondaires à une variation de l’osmolalité efficace ou<br />

de la volémie efficace (Tableau 2).<br />

Troubles primitifs du bilan hydrique<br />

Un trouble primitif du bilan hydrique provoque, par concentration<br />

ou dilution, une variation de l’osmolalité efficace et de<br />

la natrémie. Le diagnostic positif d’un trouble primitif du bilan<br />

hydrique repose donc en pratique sur la mesure de la natrémie.<br />

Les troubles primitifs du bilan hydrique n’empêchent aucunement<br />

le contrôle du bilan sodé d’atteindre son objectif : en<br />

conséquence l’hydratation extracellulaire reste cliniquement<br />

normale.<br />

Le diagnostic étiologique d’un trouble primitif du bilan<br />

hydrique nécessite l’estimation de l’osmolalité urinaire. Observer<br />

si l’osmolalité urinaire est adaptée ou non à l’osmolalité<br />

Néphrologie<br />

Tableau 1.<br />

Estimation de l’osmolalité.<br />

Osmolalité (totale)<br />

du plasma<br />

Valeurs normales<br />

Mesure directe (cryoscopie) P 285 ± 10 mOsm/kg<br />

Estimation (calcul) 2 (Na + K) + glucose<br />

+ urée (a)<br />

Osmolalité efficace<br />

du plasma (d)<br />

300 ± 10 mOsm/l<br />

Mesure P – urée 280 ± 10 mOsm/kg<br />

Estimation la plus utile 2 Na + glucose (a) 285 ± 10 mOsm/l<br />

Estimation la plus simple 2 Na (b) 280 ± 10 mOsm/l<br />

Osmolalité (totale)<br />

des urines (e)<br />

Mesure directe (cryoscopie) U Sans objet (f)<br />

Estimation 2 (Na + K) + urée (c)<br />

Sans objet (f)<br />

P : osmolalité plasmatique ; U : osmolalité urinaire.<br />

(a) Estimation inexacte en cas de surcharge par un soluté exogène (mannitol, etc.).<br />

(b) Estimation inexacte en cas d’hyperglycémie importante ou de surcharge par un<br />

soluté exogène. (c) Ne tient pas compte d’une éventuelle glycosurie. (d) Le<br />

potassium n’est pas pris en compte dans l’estimation par le calcul de l’osmolalité<br />

efficace du plasma, car les variations de la kaliémie ne sont jamais suffisantes pour<br />

provoquer une variation significative (> 10 mOsm/l) de l’osmolalité. (e) La<br />

détermination de l’osmolalité efficace des urines ne présente aucun intérêt. (f) Il<br />

n’y a pas de valeurs « normales » pour l’osmolalité urinaire (seulement des valeurs<br />

habituelles) : seule compte la notion d’osmolalité urinaire adaptée ou non à un<br />

trouble de l’osmolalité plasmatique.<br />

“ Point fort<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé 18-034-A-10<br />

Barorécepteurs, volorécepteurs et volémie<br />

efficace<br />

La volémie efficace désigne en réalité une pression, et non<br />

pas un volume, dont la variation est détectée par plusieurs<br />

types de récepteurs situés dans les parois du système<br />

vasculaire et sensibles à la pression exercée sur ses parois.<br />

Les récepteurs situés dans les vaisseaux peu compliants<br />

(en particulier ceux situés au niveau des artères du sinus<br />

carotidien et de l’appareil juxtaglomérulaire), dans<br />

lesquels une forte variation de pression n’entraîne qu’une<br />

faible variation de leur volume, sont appelés<br />

barorécepteurs, ce qui signifie récepteurs sensibles aux<br />

variations de pression. Les récepteurs situés dans le<br />

système vasculaire très compliant (en particulier ceux<br />

situés au niveau des oreillettes), dans lesquels une faible<br />

variation de pression entraîne une forte variation de leur<br />

volume, sont eux aussi sensibles aux variations de la<br />

pression. Ils sont cependant appelés volorécepteurs, car ils<br />

semblent, pour l’observateur, sensibles aux variations de<br />

volume (importantes et donc facilement mesurables)<br />

plutôt qu’aux variations de pression (faibles et plus<br />

difficilement observables).<br />

plasmatique (ou à la natrémie puisqu’elle en est, dans ce cas,<br />

toujours le reflet) permet en effet de déterminer si la réponse du<br />

rein (concentration ou dilution des urines) est adaptée ou non<br />

au défaut d’ajustement du stock hydrique. L’urée doit bien sûr<br />

être prise en compte dans le calcul de l’osmolalité urinaire dont<br />

elle représente une part non négligeable, voire même prépondérante.<br />

L’osmolalité urinaire U peut être soit mesurée directement,<br />

soit estimée par la formule :U=2(Na+K)+urée, mais<br />

celle-ci ne prend en compte ni les cations autres que le sodium<br />

et le potassium (en particulier elle ne prend pas en compte l’ion<br />

3


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

Tableau 2.<br />

Troubles du bilan hydrique.<br />

Troubles primitifs du bilan hydrique (responsables d’une variation de<br />

l’osmolalité efficace)<br />

Surcharge hydrique primitive : intoxication à l’eau, SIADH, insuffisance<br />

rénale<br />

Déficit hydrique primitif : carence en eau, diabète insipide<br />

Troubles du bilan hydrique secondaires<br />

À une variation de la volémie efficace<br />

- surcharge hydrique secondaire à une hypovolémie efficace : déficit<br />

sodé, surcharge sodée secondaire<br />

- déficit hydrique secondaire à une hypervolémie efficace :<br />

hyperaldostéronisme primaire<br />

À une variation de l’osmolalité efficace<br />

- déficit hydrique secondaire à une augmentation de l’osmolalité<br />

efficace : surcharge sodée, hyperglycémie<br />

SIADH : sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique.<br />

“ Point fort<br />

Pourquoi le sodium est-il le seul soluté utile pour<br />

le diagnostic d’un trouble primitif du bilan<br />

hydrique ?<br />

Un trouble primitif du bilan hydrique provoque, par<br />

concentration ou dilution, une variation de l’osmolalité<br />

efficace. Celle-ci affecte seulement la natrémie, et<br />

parallèlement la chlorémie, car, à l’exception de la<br />

natrémie et de la chlorémie, la concentration des autres<br />

solutés osmotiquement efficaces est régulée par<br />

l’organisme, le plus souvent par des systèmes hormonaux.<br />

En pratique, le diagnostic positif d’un trouble primitif du<br />

bilan hydrique repose sur la mise en évidence d’une<br />

variation de la natrémie, parce que la variation de la<br />

chlorémie est moins spécifique : se faisant toujours de<br />

manière à préserver l’électroneutralité plasmatique, elle<br />

peut être la conséquence d’une variation dans le même<br />

sens de la concentration plasmatique d’un cation, en<br />

particulier du sodium, mais aussi la conséquence d’une<br />

variation en sens opposé de la concentration plasmatique<br />

d’un anion, tel le bicarbonate.<br />

ammoniaque NH 4 + ) ni la présence éventuelle de glucose ou<br />

d’un soluté exogène. La comparaison de la natriurèse à<br />

la natrémie n’est d’aucun intérêt.<br />

Surcharge hydrique primitive<br />

La surcharge hydrique tend à augmenter le volume extracellulaire<br />

qui est maintenu normal par un ajustement à la baisse<br />

du stock sodé dont témoigne l’augmentation de la natriurèse<br />

durant la phase d’installation de l’hyponatrémie. La surcharge<br />

hydrique primitive est donc à l’origine d’un tableau d’hyperhydratation<br />

cellulaire cliniquement pure à l’origine d’une hyponatrémie.<br />

La prise de poids est constante et traduit la surcharge<br />

hydrique, mais elle est parfois difficile à mettre en évidence si<br />

le poids antérieur n’est pas bien connu.<br />

Une surcharge hydrique primitive s’observe dans les situations<br />

où le rein est incapable de diluer suffisamment les urines.<br />

On en distingue différentes étiologies :<br />

les causes extrarénales : les urines sont correctement diluées,<br />

mais la capacité de dilution est dépassée. Dans la classique<br />

« intoxication par l’eau » en rapport avec l’absorption de<br />

grandes quantités de bière ou avec une potomanie responsable<br />

d’un syndrome polyurodipsique [3] , le dépassement de la<br />

capacité de dilution est dû à des apports liquidiens trop<br />

élevés ; dans le « tea and toast syndrome », ce dépassement<br />

est dû à des apports osmolaires trop faibles ;<br />

“ Point fort<br />

Que signifie une natriurèse adaptée ou non ?<br />

En présence d’un trouble de la kaliémie, il est important de<br />

déterminer si la kaliurèse est adaptée (< 30 mmol/j) ou<br />

non à la valeur de la kaliémie. Un raisonnement analogue<br />

ne doit cependant pas être conduit devant un trouble de<br />

la natrémie : la notion de natriurèse adaptée ou non à la<br />

natrémie est dénuée de sens, et il n’existe d’ailleurs pas de<br />

corrélation entre la natriurèse et la natrémie.<br />

En effet, le rein n’a pas pour rôle d’ajuster la natriurèse<br />

pour obtenir une natrémie normale : il ajuste pour cela le<br />

stock hydrique en contrôlant la diurèse. Son rôle est en<br />

réalité d’ajuster la natriurèse pour obtenir une hydratation<br />

extracellulaire normale. En l’absence de trouble de<br />

l’hydratation extracellulaire, la natriurèse, quelle que soit<br />

sa valeur (et quelle que soit la valeur de la natrémie), est<br />

forcément normale et sa mesure n’a pas nécessairement<br />

d’intérêt : elle reflète seulement les apports et elle est ou<br />

non dans l’intervalle des valeurs habituelles indiquées par<br />

le laboratoire suivant que l’alimentation sodée du patient<br />

est ou non dans les normes habituelles de la population.<br />

En présence d’un trouble de l’hydratation extracellulaire,<br />

la mesure de la natriurèse est nécessaire et la seule<br />

question pertinente est de savoir si la natriurèse est<br />

adaptée ou non à l’état d’hydratation extracellulaire, reflet<br />

du stock sodé.<br />

les causes rénales : la capacité de dilution des urines est<br />

altérée. On distingue les causes rénales intrinsèques (insuffisance<br />

rénale chronique) et extrinsèques (syndrome de sécrétion<br />

inappropriée d’ADH [SIADH]). Le Tableau 3 indique les<br />

circonstances les plus fréquentes dans lesquelles survient un<br />

tableau de SIADH, mais on ne retrouve parfois aucune cause<br />

(SIADH idiopathique). C’est en particulier le cas de certaines<br />

personnes âgées qui présentent un seuil de déclenchement de<br />

la sécrétion d’ADH anormalement bas (situation dite de<br />

reset-osmostat).<br />

Le diagnostic étiologique repose sur la mesure ou le calcul de<br />

l’osmolalité urinaire. Une osmolalité urinaire basse (U<br />

< 80 mOsm/kg ou calculée à moins de 80 mOsm/l) est adaptée<br />

à la surcharge hydrique et donc à l’hyponatrémie : elle traduit<br />

une origine extrarénale (apports liquidiens trop importants). Le<br />

dosage de l’ADH (qui serait effondrée) n’est pas utile.<br />

À l’opposé, une osmolalité urinaire inadaptée<br />

(U > 80 mOsm/kg ou calculée à plus de 80 mOsm/l) témoigne<br />

d’une origine rénale (défaut d’élimination du fait de la diminution<br />

de la capacité de dilution des urines). Si le contexte ne le<br />

permet pas à lui seul, le dosage de l’ADH permet de trancher<br />

entre une cause intrinsèque (ADH effondrée) et une cause<br />

extrinsèque (ADH normale ou élevée, inadaptée à l’hyponatrémie,<br />

signant le SIADH).<br />

Déficit hydrique primitif<br />

Le déficit hydrique tend à diminuer le volume extracellulaire<br />

qui est maintenu normal par une diminution de la natriurèse<br />

liée à la stimulation du système rénine-angiotensine et permettant<br />

un ajustement à la hausse du stock sodé. Le déficit<br />

hydrique primitif est à l’origine d’un tableau de déshydratation<br />

cellulaire cliniquement pure à l’origine d’une hypernatrémie. La<br />

perte de poids traduit le déficit hydrique.<br />

Un déficit hydrique primitif peut être en rapport :<br />

avec une insuffisance d’apports en eau : soif non ressentie en<br />

raison d’anomalies hypothalamiques (adipsie idiopathique ou<br />

plus souvent secondaire à un accident vasculaire cérébral) ou<br />

soif non satisfaite par absence d’accès libre à l’eau (carence en<br />

eau, très jeune âge, handicap, grand âge) ;<br />

4 Néphrologie


Tableau 3.<br />

Circonstances de survenue d’une sécrétion inappropriée d’hormone<br />

antidiurétique (SIADH).<br />

Sécrétion élevée d’ADH en rapport avec un stimulus physiologique<br />

Hypovolémie efficace<br />

- Hypovolémie vraie : déficit sodé, hémorragie, hypoalbuminémie<br />

- Insuffisance cardiaque, cirrhose décompensée<br />

Stress<br />

- Somatique : douleur<br />

- Psychologique : anxiété (sujets âgés hospitalisés)<br />

Sécrétion élevée d’ADH sans rapport avec un stimulus<br />

physiologique<br />

Tumeurs malignes<br />

- Tumorales : cancer bronchopulmonaire<br />

- Cancer du duodénum ou du pancréas<br />

- Cancer de la prostate ou des voies urinaires<br />

- Lymphomes<br />

Affections pulmonaires<br />

- Tumorales : cancer bronchopulmonaire<br />

- Infectieuses : pneumopathies infectieuses, tuberculose, aspergillose,<br />

abcès du poumon<br />

- Autres : fibrose pulmonaire, asthme, ventilation à pression positive,<br />

pneumothorax<br />

Affections du système nerveux central<br />

- Infectieuses : encéphalite, méningite, abcès cérébral<br />

- Vasculaires : thrombose du sinus caverneux, AVC<br />

- Autres : traumatisme crânien, hydrocéphalie, atrophie cérébrale,<br />

tumeurs cérébrales, syndrome de Guillain-Barré, delirium tremens<br />

Affections endocriniennes<br />

- Myxœdème<br />

- Hypocortisolisme<br />

- Panhypopituitarisme<br />

Médicaments qui augmentent la sécrétion ou renforcent l’action de l’ADH<br />

- Analogues de l’ADH : desmopressine (Minirin ® ), ocytocine<br />

(Syntocinon ® )<br />

- IEC (énalapril, ramipril, etc.)<br />

- IPP (oméprazole, ésoméprazole, etc.)<br />

- Vincristine (Oncovin ® ), vinblastine (Velbé ® )<br />

- Carbamazépine (Tégrétol ® ), phénothiazines<br />

- Nicotine<br />

Situations diverses<br />

- Suites postopératoires<br />

- Psychose aiguë<br />

ADH : antidiuretic hormone ; AVC : accident vasculaire cérébral ; IEC : inhibiteurs<br />

de l’enzyme de conversion ; IPP : inhibiteurs de la pompe à protons.<br />

avec un excès d’élimination rénale (diabète insipide) ou plus<br />

rarement extrarénale (pertes respiratoires, cutanées, digestives),<br />

mais la déshydratation n’apparaît que si cet excès n’est<br />

pas suffisamment compensé par la polydipsie [3] .<br />

En cas de déficit hydrique lié à une carence d’apports ou à un<br />

excès d’élimination extrarénale, le rein concentre correctement<br />

les urines : l’osmolalité urinaire est élevée (U mesurée à plus de<br />

600 mOsm/kg ou calculée à plus de 600 mOsm/l) et adaptée à<br />

l’hypernatrémie. Elle est au contraire inadaptée à l’hypernatrémie<br />

en cas de diabète insipide (U mesurée à moins de<br />

600 mOsm/kg ou calculée à moins de 600 mOsm/l).<br />

Troubles secondaires du bilan hydrique<br />

Les troubles secondaires du bilan hydrique peuvent être en<br />

rapport avec une variation de la volémie efficace ou de l’osmolalité<br />

efficace. Parce qu’une volémie efficace anormale témoigne<br />

d’un trouble du bilan sodé, les troubles du bilan hydrique<br />

secondaires à une variation de la volémie efficace sont traités<br />

dans ce cadre (cf. infra).<br />

Les troubles du bilan hydrique secondaires à une variation de<br />

l’osmolalité efficace (hypertonie ou hypotonie) en rapport avec<br />

Néphrologie<br />

une surcharge ou un déficit en osmoles efficaces apparaissent<br />

seulement lorsque les capacités de régulation de l’hydratation<br />

cellulaire sont dépassées et ne permettent plus un ajustement<br />

correct du stock hydrique. Le retentissement sur la natrémie<br />

diffère selon que la surcharge ou le déficit concerne ou non le<br />

sodium.<br />

Il est important de noter que le soluté à l’origine de la<br />

variation de l’osmolalité efficace ne peut être qu’un soluté<br />

neutre (par exemple le glucose) ou un ion chargé positivement<br />

(cation). En effet, la concentration de l’ion chlorure Cl – n’est<br />

pas soumise à une boucle de régulation, mais elle s’ajuste<br />

uniquement de manière à maintenir la nécessaire électroneutralité<br />

des solutions. Par conséquent, toute variation primitive de<br />

la concentration d’un ion chargé négativement est nécessairement<br />

compensée par une variation opposée de la chlorémie et<br />

n’a pas d’influence sur l’osmolalité. Ce n’est bien sûr pas le cas<br />

lors de la variation de la concentration d’un cation qui<br />

s’accompagne nécessairement, pour maintenir l’électroneutralité,<br />

d’une variation dans le même sens de la chlorémie.<br />

Les seuls solutés endogènes susceptibles de provoquer une<br />

variation de l’osmolalité efficace suffisante (au moins 10 mOsmol/l)<br />

pour entraîner un trouble significatif de l’équilibre<br />

hydrosodé sont le glucose et le sodium. C’est pourquoi l’osmolalité<br />

efficace est le plus souvent estimée à partir de la relation :<br />

osmolalité efficace = 2 [Na] + glycémie (Tableau 1). Cependant<br />

cette relation est mise en défaut en cas de surcharge osmolaire<br />

liée à un soluté exogène osmotiquement efficace.<br />

Surcharge en osmoles efficaces<br />

La surcharge en osmoles efficaces est responsable d’une<br />

hypertonie et donc d’une déshydratation cellulaire seulement si<br />

elle n’est pas compensée par une augmentation suffisante du<br />

stock hydrique. La surcharge sodée est étudiée plus bas. En cas<br />

de surcharge d’un soluté neutre osmotiquement efficace endogène<br />

(glucose) ou exogène (mannitol) ou un cation exogène<br />

(tris-hydroxyméthyl-amino-méthane ou THAM qui n’est pratiquement<br />

plus employé), il existe au contraire une hyponatrémie<br />

(dite hyponatrémie hypertonique) en raison d’un ajustement à<br />

la hausse du stock hydrique du fait de la déshydratation<br />

cellulaire.<br />

Déficit en osmoles efficaces<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé 18-034-A-10<br />

Le cas du déficit sodé est étudié plus loin. Le déficit potassique<br />

ne peut pas entraîner une variation de la kaliémie suffisante<br />

pour induire une diminution significative (> 10 mOsm/l) de<br />

l’osmolalité efficace, mais il est à l’origine d’une hyponatrémie,<br />

ainsi que le montre la relation d’Edelman [4] généralement<br />

simplifiée sous la forme suivante [5, 6] :<br />

natrémie = stock K + stock Na/V<br />

où stock K et stock Na désignent respectivement les stocks de<br />

sodium et de potassium échangeables et où V désigne le stock<br />

hydrique. Cette hyponatrémie est due au flux osmotique d’eau<br />

sortant des cellules provoqué par la déplétion potassique et qui<br />

dilue le secteur extracellulaire. Elle est associée à une diminution<br />

du stock sodé rendue nécessaire pour combattre l’hyperhydratation<br />

extracellulaire. La correction d’une hyponatrémie<br />

secondaire à un déficit potassique nécessite donc d’ajouter du<br />

chlorure de sodium à l’apport de chlorure de potassium.<br />

■ Anomalies du bilan sodé<br />

Un défaut d’ajustement du bilan sodé affecte l’hydratation<br />

extracellulaire (plasmatique et/ou interstitielle). Les troubles du<br />

bilan sodé peuvent être soit primitifs et alors responsables d’une<br />

variation de la volémie efficace, soit secondaires à une variation<br />

de la volémie efficace (Tableau 4).<br />

Le diagnostic positif d’un trouble du bilan sodé repose<br />

principalement sur l’appréciation clinique de l’hydratation<br />

extracellulaire : hypertension et/ou œdèmes généralisés en cas<br />

d’hyperhydratation extracellulaire signant une surcharge sodée,<br />

pli cutané, tachycardie, hypotension orthostatique en cas de<br />

déshydratation extracellulaire signant un déficit sodé. La mesure<br />

5


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

Tableau 4.<br />

Troubles du bilan sodé.<br />

Troubles primitifs du bilan sodé (responsables d’une variation<br />

de la volémie efficace)<br />

Surcharge sodée primitive : sans œdèmes (hyperaldostéronisme<br />

primaire et syndromes apparentés) ou avec œdèmes (insuffisance rénale,<br />

glomérulonéphrite aiguë)<br />

Déficit sodé : pertes rénales ou extrarénales<br />

Troubles du bilan sodé secondaires (à une variation de la volémie<br />

efficace)<br />

Surcharge sodée secondaire à une hypovolémie efficace : insuffisance<br />

cardiaque, cirrhose décompensée, hypoalbuminémie sévère<br />

Déficit sodé secondaire à une hypervolémie efficace : HTA maligne,<br />

éclampsie<br />

HTA : hypertension artérielle.<br />

“ Point fort<br />

Pourquoi la natrémie n’apporte-t-elle aucun<br />

renseignement sur un trouble du bilan sodé ?<br />

La natrémie désigne une concentration (mmol/l) du<br />

sodium et donc le rapport d’un stock sodé (mmol) sur un<br />

stock hydrique (l). Il pourrait donc être intuitif de penser<br />

qu’une variation de la natrémie peut être en rapport soit<br />

avec une variation du stock sodé liée à un trouble du bilan<br />

sodé, soit avec une variation en sens inverse du stock<br />

hydrique.<br />

Cette conception est erronée. En effet un trouble du bilan<br />

sodé n’a aucune raison de provoquer un trouble de la<br />

natrémie, car le stock sodé n’intervient pas directement<br />

dans la boucle de contrôle du bilan hydrique qui est ajusté<br />

pour maintenir une hydratation cellulaire normale et donc<br />

une natrémie normale (Fig. 1). Un trouble de la natrémie<br />

est donc seulement le témoin d’un trouble du bilan<br />

hydrique.<br />

Il est pourtant exact qu’un déficit sodé important<br />

provoque une hyponatrémie (hyponatrémie dite de<br />

déficit sodé). Cependant l’hyponatrémie n’est en aucun<br />

cas le reflet de la déplétion sodée, mais seulement le reflet<br />

de la surcharge hydrique secondaire au déficit sodé.<br />

de la natrémie ne renseigne en aucun cas sur le trouble du bilan<br />

sodé, mais est utile pour déterminer s’il existe un trouble associé<br />

du bilan hydrique.<br />

Le diagnostic étiologique d’un trouble du bilan sodé nécessite<br />

la mesure de la natriurèse. Observer si la natriurèse est adaptée<br />

ou non à l’état d’hydratation extracellulaire permet en effet de<br />

déterminer si la réponse du rein (taux de réabsorption tubulaire<br />

du sodium) est adaptée ou non au défaut d’ajustement du stock<br />

sodé.<br />

Surcharge sodée<br />

Parce que les reins normaux sont capables d’éliminer tout<br />

apport sodé, même très important, les causes de surcharge sodée<br />

sont toutes d’origine rénale, liées à une natriurèse insuffisante<br />

par rapport aux apports.<br />

Surcharge sodée primitive<br />

Les surcharges sodées primitives sont responsables d’une<br />

hypervolémie efficace et sont pour cette raison appelées aussi<br />

« surcharges sodées hypervolémiques ». Elles sont dues à une<br />

natriurèse insuffisante par rapport aux apports en raison :<br />

d’une cause rénale intrinsèque : insuffisance rénale aiguë,<br />

insuffisance rénale chronique terminale, glomérulonéphrite<br />

aiguë ;<br />

ou d’une cause rénale extrinsèque : hyperaldostéronisme<br />

primaire, hypercorticisme ou syndromes apparentés (intoxication<br />

à la réglisse, pseudohyperaldostéronismes, etc.).<br />

La boucle de contrôle du bilan hydrique ajuste le stock<br />

hydrique et parvient le plus souvent à son objectif si bien que<br />

l’hydratation cellulaire, l’osmolalité efficace et la natrémie sont<br />

normales : le trouble du bilan sodé se traduit alors par un<br />

tableau d’hyperhydratation extracellulaire pure. Il est cependant<br />

possible d’observer une discrète hypernatrémie (responsable<br />

d’une déshydratation cellulaire) liée à la freination par l’hypervolémie<br />

de la sécrétion d’ADH qui serait nécessaire pour<br />

maintenir l’hydratation cellulaire à sa valeur normale.<br />

Le diagnostic de surcharge sodée primitive repose sur la mise<br />

en évidence d’une hypervolémie efficace. L’hypertension est<br />

constante mais très peu spécifique ; la présence d’œdèmes<br />

généralisés est un signe spécifique, mais peu sensible : le<br />

diagnostic étiologique (mécanisme rénal intrinsèque ou extrinsèque)<br />

repose d’ailleurs sur leur présence ou non.<br />

L’absence d’œdèmes provient de ce que l’hyperhydratation<br />

extracellulaire n’est pas cliniquement décelable parce que la<br />

surcharge sodée reste très modérée en raison d’un phénomène<br />

d’échappement permettant à la natriurèse de revenir rapidement<br />

égale aux apports (limitant ainsi la surcharge sodée),<br />

même si elle reste inadaptée à l’état d’hypervolémie efficace.<br />

L’absence d’œdèmes fait évoquer une cause rénale extrinsèque :<br />

hyperaldostéronisme primaire (à rénine basse) ou syndromes<br />

apparentés. L’augmentation de la volémie efficace liée à la<br />

surcharge sodée primitive est à l’origine d’une augmentation du<br />

débit de filtration glomérulaire, d’une stimulation de la sécrétion<br />

du facteur atrial natriurétique et d’une inhibition du<br />

système nerveux sympathique ayant tous les trois pour effet de<br />

stimuler la natriurèse et de limiter l’inflation sodée.<br />

En revanche, l’existence d’œdèmes généralisés prédominant<br />

aux points déclives traduit une surcharge sodée plus importante<br />

liée à l’absence d’effets de l’hypervolémie efficace sur l’augmentation<br />

de la natriurèse : sans être complètement bloquée, la<br />

natriurèse reste insuffisante (inadaptée à la surcharge sodée)<br />

malgré l’inhibition de la rénine et de l’aldostérone du fait de<br />

l’hypervolémie. Les œdèmes observés dans le cadre d’une<br />

surcharge sodée hypervolémique sont dits primitifs et font<br />

évoquer un mécanisme rénal intrinsèque [7] : glomérulonéphrite<br />

aiguë ou insuffisance rénale sévère. Le contexte biologique<br />

(créatininémie, protéinurie, hématurie microscopique) permet<br />

facilement de trancher.<br />

Surcharge sodée secondaire<br />

Les surcharges sodées secondaires sont dues à une hypovolémie<br />

efficace et sont pour cette raison appelées aussi « surcharges<br />

sodées hypovolémiques » bien que l’hypovolémie efficace soit le<br />

plus souvent associée à une augmentation du volume sanguin.<br />

Elles sont toujours d’origine rénale extrinsèque et liées à la<br />

cause de l’hypovolémie efficace qui en est à l’origine : hypoprotidémie<br />

majeure (syndrome néphrotique, dénutrition ou sepsis<br />

sévères, entéropathie exsudative, insuffisance hépatocellulaire),<br />

insuffisance cardiaque ou cirrhose décompensées. Le contexte<br />

clinique permet facilement de trancher.<br />

Les œdèmes observés dans le cadre d’une surcharge sodée<br />

hypovolémique sont dits « secondaires ». Ils sont constants et<br />

habituellement sévères. L’hypovolémie efficace est souvent<br />

majeure et alors responsable d’une rétention hydrique aggravant<br />

la prise de poids et à l’origine d’une hyponatrémie. La pression<br />

artérielle est variable, souvent diminuée en cas d’insuffisance<br />

cardiaque ou de cirrhose décompensées, variable et fonction de<br />

la néphropathie en cas de syndrome néphrotique. Avant<br />

l’institution du traitement diurétique, la natriurèse est bloquée<br />

(< 20 mmol/l) dans un contexte d’insuffisance rénale fonctionnelle<br />

avec un rapport Na/K urinaire inférieur à1enraison de<br />

l’activation du système rénine-angiotensine liée à l’hypovolémie<br />

efficace et responsable d’un hyperaldostéronisme secondaire :<br />

l’effet sur la natriurèse de l’activation du système rénineangiotensine-aldostérone<br />

prédomine sur l’effet de l’activation du<br />

facteur atrial natriurétique et de l’inhibition du système nerveux<br />

sympathique liées à l’augmentation des pressions de remplissage<br />

cardiaques.<br />

6 Néphrologie


“ Point fort<br />

Volémie efficace et hydratation extracellulaire<br />

Bien que l’objectif de la boucle de contrôle du bilan sodé<br />

(Fig. 2) soit d’assurer la stabilité du volume extracellulaire,<br />

elle n’est pas capable d’en assurer la régulation parce que<br />

l’organisme n’a pas la possibilité d’en détecter les<br />

variations : seule est détectable une variation de la volémie<br />

efficace, censée varier dans le même sens que le volume<br />

extracellulaire.<br />

Certes, toute variation primitive du volume extracellulaire<br />

entraîne une variation dans le même sens du volume<br />

sanguin (volémie vraie) à l’origine d’une variation dans le<br />

même sens de la pression sanguine et donc de la volémie<br />

efficace. Cette variation de la volémie efficace conduit à un<br />

ajustement du stock sodé réalisé de manière à la minimiser<br />

en même temps que la variation du volume extracellulaire<br />

qui lui a donné naissance.<br />

Cependant, l’hydratation extracellulaire n’est pas le seul<br />

déterminant de la volémie efficace, en ce sens que celle-ci<br />

n’est pas uniquement sensible aux variations du volume<br />

extracellulaire : une diminution de la pression oncotique<br />

du plasma (syndrome néphrotique), une diminution des<br />

résistances vasculaires périphériques (cirrhose hépatique)<br />

ou une diminution du débit cardiaque (insuffisance<br />

cardiaque) sont responsables d’une diminution de la<br />

volémie efficace indépendante de l’état d’hydratation<br />

extracellulaire et de la volémie vraie. Puisque la variable<br />

régulée par la boucle de contrôle du bilan sodé est la<br />

volémie efficace, on observe dans ces conditions une<br />

rétention sodée importante, secondaire à l’hypovolémie<br />

efficace et responsable d’une hyperhydratation<br />

extracellulaire.<br />

Déficit sodé<br />

Déficit sodé primitif<br />

Les déficits sodés primitifs sont responsables d’une déshydratation<br />

extracellulaire qui se traduit dans le secteur vasculaire par<br />

une diminution du volume sanguin (hypovolémie) responsable<br />

d’une hypovolémie efficace.<br />

Parce que les reins normaux peuvent annuler la natriurèse en<br />

cas de nécessité, il n’y a pas de déficit sodé par carence<br />

d’apports : ceux-ci ne peuvent devenir insuffisants qu’en cas de<br />

pertes excessives. Les pertes sodées peuvent être :<br />

d’origine rénale, de cause intrinsèque au rein (insuffisance<br />

rénale aiguë en phase de reprise de diurèse, néphropathie<br />

tubulo-interstitielle avec perte obligatoire de sel) ou extrinsèque<br />

(insuffisance surrénalienne, intoxication aux diurétiques)<br />

;<br />

d’origine extrarénale : les pertes sodées sont le plus souvent<br />

digestives (diarrhée, vomissements, fistule digestive), mais<br />

elles peuvent être aussi en rapport avec la constitution<br />

d’un troisième secteur (occlusion intestinale) ou avec une<br />

hypersudation profuse (fièvre intense et prolongée, température<br />

extérieure très élevée), des brûlures étendues, une<br />

mucoviscidose.<br />

Les pertes sodées d’origine extrarénale, quelles qu’elles soient,<br />

sont hypotoniques et devraient donc être à l’origine d’une<br />

hypernatrémie et donc d’une déshydratation cellulaire. Cependant,<br />

en l’absence de trouble associé du bilan hydrique, le stock<br />

hydrique est ajusté si bien que l’on n’observe jamais d’hypernatrémie.<br />

Bien au contraire, si le déficit sodé est suffisamment<br />

important pour être responsable d’une hypovolémie sévère à<br />

Néphrologie<br />

l’origine d’une stimulation de la soif et de la sécrétion d’ADH,<br />

la surcharge hydrique résultante provoque une hyponatrémie<br />

(hyponatrémie dite « de déficit sodé »).<br />

La mesure de la natriurèse est indispensable pour préciser<br />

l’origine rénale ou extrarénale du déficit sodé. Une natriurèse<br />

basse (inférieure à 20 mmol/l) avec un rapport Na/K inférieur à<br />

1 du fait d’un hyperaldostéronisme secondaire à l’hypovolémie<br />

efficace, des urines rares et concentrées (urée U/P > 10) du fait<br />

de la stimulation de la sécrétion d’ADH par l’hypovolémie<br />

efficace traduisent un comportement rénal adapté et signent<br />

l’origine extrarénale du déficit sodé.<br />

À l’opposé, une natriurèse supérieure à 20 mmol/l est inadaptée<br />

au déficit sodé et traduit habituellement un déficit d’origine<br />

rénale. Une exception en est l’existence de vomissements<br />

importants responsables à la fois d’un déficit sodé et d’une<br />

alcalose métabolique. La nécessité d’éliminer du bicarbonate<br />

pour contrôler l’alcalose peut expliquer l’excrétion rénale de<br />

bicarbonate de sodium en dépit du déficit sodé. Dans ce cas, le<br />

rein bloque l’excrétion rénale de chlorure de sodium afin<br />

d’épargner le sodium : la chlorurie est alors effondrée. Cette<br />

chlorurie basse permet de faire la différence avec un déficit sodé<br />

d’origine rénale, et en particulier avec une intoxication non<br />

avouée aux diurétiques, difficile autrement à différencier de<br />

vomissements cachés, car survenant souvent sur le même<br />

terrain (jeune femme voulant maigrir) et conduisant tous deux<br />

à une déshydratation extracellulaire avec natriurèse inadaptée,<br />

hypokaliémie et alcalose métabolique.<br />

Déficit sodé secondaire<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé 18-034-A-10<br />

Les déficits sodés secondaires sont dus à une augmentation de<br />

la volémie efficace. Ainsi l’hypervolémie efficace de l’hypertension<br />

artérielle maligne ou de l’éclampsie provoquée par<br />

l’atteinte endothéliale entraîne-t-elle une stimulation de la<br />

natriurèse parce que la stimulation par l’hypervolémie des<br />

facteurs natriurétiques autres que l’aldostérone l’emporte sur la<br />

stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone.<br />

L’augmentation de la natriurèse est à l’origine d’un déficit sodé<br />

qui contre-indique l’utilisation des diurétiques dans ces<br />

situations.<br />

La surcharge hydrique primitive tend elle aussi à provoquer<br />

une hyperhydratation extracellulaire et une hypervolémie<br />

efficace à l’origine d’un ajustement à la baisse du stock sodé<br />

pour maintenir une hydratation extracellulaire cliniquement<br />

normale et éviter ainsi un véritable trouble du bilan sodé.<br />

Cependant il importe, lors de la correction de la surcharge<br />

hydrique et de l’hyponatrémie qui la caractérise, d’apporter<br />

suffisamment de sel pour rétablir le stock sodé initial.<br />

■ Troubles de la natrémie<br />

La natrémie désigne la quantité de sodium présente dans 1 l<br />

de plasma. Elle est normalement aux environs de 140 mmol/l.<br />

Les troubles de la natrémie, définis par une natrémie en dehors<br />

de l’intervalle 135-145 mmol/l, sont les plus fréquents des<br />

troubles électrolytiques en pratique quotidienne, mais ils n’en<br />

restent pas moins le plus souvent mal compris. Pourtant les<br />

dysnatrémies sévères sont associées à une morbidité et à une<br />

mortalité importantes [8] .<br />

Un trouble de la natrémie reflète dans l’immense majorité des<br />

cas un trouble de l’hydratation cellulaire et donc un trouble du<br />

bilan hydrique. Il n’est en aucun cas le reflet d’un trouble du<br />

bilan sodé, même si ce dernier peut éventuellement être à<br />

l’origine du trouble du bilan hydrique.<br />

Les manifestations cliniques des dysnatrémies sont principalement<br />

neurologiques, liées à un dysfonctionnement du système<br />

nerveux central. Elles n’apparaissent généralement que pour des<br />

dysnatrémies sévères (hyponatrémies inférieures à 120 mmol/l<br />

ou hypernatrémies supérieures à 160 mmol/l) et en font toute<br />

la gravité. Les dysnatrémies sévères doivent être corrigées de<br />

manière lente. En effet, les cellules cérébrales ajustent leur stock<br />

intracellulaire d’osmoles efficaces (ajustement rapide du stock<br />

cellulaire de chlorure de sodium et surtout de potassium,<br />

7


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

Diminuée :<br />

hyponatrémie<br />

hypotonique<br />

Hypokaliémie importante ?<br />

Oui Non<br />

Hyponatrémie<br />

de déficit<br />

potassique<br />

Hyperhydratation<br />

cellulaire<br />

cf. Fig. 5<br />

ajustement plus lent du stock cellulaire d’osmoles organiques)<br />

afin de limiter la variation de leur volume cellulaire : une<br />

correction trop rapide ne permet pas aux cellules cérébrales de<br />

rétablir aussi vite leur stock physiologique d’osmoles intracellulaires<br />

efficaces [9, 10] .<br />

Habituellement découvert sur la pratique d’un ionogramme<br />

sanguin effectué à l’occasion d’un bilan systématique ou d’un<br />

symptôme généralement non spécifique, un trouble de la<br />

natrémie nécessite d’apprécier à la fois l’état d’hydratation<br />

cellulaire et l’état d’hydratation extracellulaire afin d’en préciser<br />

le mécanisme et de déduire la conduite thérapeutique la mieux<br />

adaptée.<br />

Conduite à tenir devant une hyponatrémie<br />

Une hyponatrémie est définie par une valeur de la concentration<br />

plasmatique du sodium inférieure à 135 mmol/l de<br />

plasma. Le traitement d’une hyponatrémie dépend de son<br />

étiologie et nécessite avant tout de répondre successivement aux<br />

deux questions suivantes :<br />

l’osmolalité efficace du patient est-elle réellement diminuée<br />

(hyponatrémie hypotonique) comme c’est le plus souvent le<br />

cas, ou bien se trouve-t-on dans une situation plus rare où<br />

l’osmolalité efficace est à peu près normale (hyponatrémie<br />

isotonique), voire nettement augmentée (hyponatrémie<br />

hypertonique) ?<br />

le volume extracellulaire du patient est-il à peu près normal,<br />

nettement diminué ou franchement augmenté ?<br />

De l’estimation de l’osmolalité efficace dépendent l’état<br />

d’hydratation cellulaire du patient et la conduite à tenir quant<br />

aux apports hydriques. De l’estimation de l’hydratation extracellulaire<br />

dépendent la valeur du stock sodé et la conduite à<br />

tenir quant aux apports sodés et l’institution d’un traitement<br />

diurétique.<br />

Appréciation de l’osmolalité efficace<br />

Hyperprotidémie<br />

et /ou hyperlipémie<br />

importantes :<br />

fausse hyponatrémie<br />

L’osmolalité efficace étant le plus souvent considérée égale au<br />

double de la natrémie, une hyponatrémie correspond en<br />

principe à une hypotonie (Tableau 1). Cependant, il faut<br />

systématiquement éliminer les rares cas d’hyponatrémies<br />

isotoniques et hypertoniques qui représentent moins de 5%des<br />

hyponatrémies en milieu hospitalier, et probablement encore<br />

beaucoup moins en médecine de ville. Le contexte clinique et<br />

Natrémie < 135 mmol/l<br />

Hyponatrémie<br />

Osmolalité plasmatique<br />

efficace ?<br />

Normale : hydratation<br />

cellulaire normale<br />

Hyponatrémie isotonique<br />

Hyperglycémie modérée<br />

Perfusion de soluté<br />

isotonique (autre que<br />

le sodium)<br />

Figure 4. Arbre décisionnel. Étapes du diagnostic du type d’une hyponatrémie.<br />

Augmentée : déshydratation<br />

cellulaire<br />

Hyponatrémie hypertonique<br />

Hyperglycémie importante<br />

Perfusion de soluté<br />

hypertonique<br />

(autre que le sodium)<br />

biologique permet souvent de suspecter facilement une hyponatrémie<br />

isotonique ou hypertonique, mais en cas de doute<br />

persistant, la mesure de l’osmolalité totale et de la concentration<br />

molaire de l’urée permet de calculer la vraie valeur de<br />

l’osmolalité efficace et d’établir le diagnostic définitif du type de<br />

l’hyponatrémie (Fig. 4).<br />

L’hyponatrémie isotonique correspond à une osmolalité<br />

efficace à peu près normale. Elle n’est donc pas associée à un<br />

trouble de l’hydratation cellulaire et s’observe dans deux<br />

situations très différentes :<br />

soit elle annule l’augmentation de l’osmolalité liée à une<br />

surcharge en osmoles efficaces autres que le sodium : l’hyperglycémie<br />

en est la cause la plus fréquente. Une augmentation<br />

de la glycémie de 3 mmol/l diminue la natrémie d’environ<br />

1 mmol/l, ce qui permet de réduire l’augmentation de<br />

l’osmolalité à environ 1 mOsm/kg et de maintenir une<br />

osmolalité efficace à peu près normale pour des hyperglycémies<br />

pas trop importantes. Parmi les autres causes, citons la<br />

perfusion de mannitol isotonique ou l’instillation vésicale de<br />

solutés isotoniques contenant peu ou pas de sodium, par<br />

exemple dans les suites d’une résection transurétrale de<br />

prostate. Dans ce type d’hyponatrémie isotonique, la surcharge<br />

en osmoles efficaces a été compensée par une diminution<br />

du stock sodé : lors de l’élimination de cette surcharge,<br />

il est nécessaire, pour corriger l’hyponatrémie, d’apporter une<br />

quantité de sodium suffisante pour reconstituer le stock sodé,<br />

au risque sinon de provoquer une déshydratation extracellulaire<br />

;<br />

soit elle est le reflet d’une diminution vraie de l’osmolarité<br />

(sans modification de l’osmolalité) en rapport avec une<br />

hyperprotidémie ou une hyperlipémie importantes et est alors<br />

appelée habituellement « fausse hyponatrémie ». Une augmentation<br />

de la concentration des protides ou des lipides de<br />

6 g/l entraîne une diminution de la natrémie d’environ<br />

1 mmol/l. La fausse hyponatrémie est suspectée sur la<br />

biologie ou sur le contexte clinique (myélome non maîtrisé,<br />

contexte connu d’hyperlipémie majeure...). En raison de son<br />

caractère physiologique, la fausse hyponatrémie doit être<br />

respectée : elle ne justifie aucun apport ni restriction d’eau ou<br />

de sodium et se corrigera spontanément lors de la disparition<br />

de sa cause.<br />

L’hyponatrémie hypertonique est due à l’ajustement à la<br />

baisse du stock sodé et l’ajustement à la hausse du stock<br />

8 Néphrologie


“ Point fort<br />

Qu’est-ce qu’une fausse hyponatrémie ?<br />

La natrémie et l’osmolarité désignent respectivement le<br />

nombre de mmol de sodium et de solutés contenus dans<br />

1 l de plasma et s’expriment respectivement en mmol/l<br />

et mOsm/l. La concentration molale du sodium<br />

(parfois appelée natrhydrie) et l’osmolalité désignent<br />

respectivement le nombre de mmol de sodium et de<br />

solutés contenus dans un échantillon de plasma qui<br />

contient 1 kg d’eau [11] : elles s’expriment en mmol/kg<br />

d’eau (ou mmol/l d’eau) et mOsm/kg d’eau. Comme un<br />

échantillon de plasma contenant 1 kg d’eau a un volume<br />

nécessairement supérieur à1lenraisonduvolume<br />

occupé par les solutés (principalement par les protéines<br />

et les lipides), la natrhydrie et l’osmolalité ont<br />

respectivement une valeur supérieure à celles de la<br />

natrémie et de l’osmolarité.<br />

Les concentrations molales des solutés osmotiquement<br />

efficaces (en particulier la natrhydrie) interviennent dans<br />

l’osmolalité efficace, reflet de l’hydratation cellulaire. Une<br />

variation de la natrhydrie est habituellement mise en<br />

évidence par la variation proportionnelle de la natrémie<br />

qu’elle provoque. Cependant la natrémie peut varier en<br />

l’absence de variation de l’osmolalité efficace et donc de la<br />

natrhydrie. Il en est ainsi lors des hyperprotidémies ou<br />

hyperlipémies importantes qui diminuent la quantité<br />

d’eau (et donc à natrhydrie constante la quantité<br />

de sodium) contenue dans 1 l de plasma. Ce type<br />

d’hyponatrémie isotonique est appelé « fausse<br />

hyponatrémie » bien qu’il s’agisse réellement d’une<br />

hyponatrémie mesurée par le laboratoire.<br />

hydrique pour tenter de compenser l’hypertonie en rapport avec<br />

un soluté osmotiquement efficace autre que le sodium. Il peut<br />

s’agir d’une hyperglycémie très importante (en règle supérieure<br />

à 30 mmol/l) ou d’une perfusion de soluté hypertonique autre<br />

que le sodium (mannitol, par exemple). L’hypertonicité est<br />

favorisée par une insuffisance rénale préexistante qui limite<br />

l’ajustement à la baisse du stock sodé. L’hyponatrémie hypertonique<br />

étant associée à une déshydratation cellulaire, elle contreindique<br />

la restriction hydrique et nécessite au contraire une<br />

réhydratation.<br />

L’hyponatrémie hypotonique est le type d’hyponatrémie de<br />

loin le plus fréquent. Hormis le cas de la déplétion potassique,<br />

l’hyponatrémie hypotonique est le témoin d’une hyperhydratation<br />

cellulaire. Les signes cliniques permettant d’évoquer une<br />

hyperhydratation cellulaire sont peu spécifiques : dégoût de<br />

l’eau, voire nausées et/ou vomissements, crampes. Les signes<br />

neurologiques, qui en font toute la gravité, sont également peu<br />

spécifiques (céphalées, troubles de la conscience ou du comportement,<br />

convulsions, coma) et n’apparaissent qu’en cas d’hyperhydratation<br />

sévère ou d’installation rapide entraînant un<br />

œdème cérébral.<br />

L’hyponatrémie hypotonique nécessite la prescription d’une<br />

restriction hydrique d’autant plus stricte que l’hyponatrémie est<br />

profonde, car tout apport d’eau tend à aggraver l’hyperhydratation<br />

cellulaire et ses conséquences neurologiques éventuelles.<br />

Ainsi, à de rares exceptions près (hyponatrémies isotoniques ou<br />

hypertoniques), en règle facilement évoquées devant le contexte<br />

clinique à condition de savoir y penser, une hyponatrémie doit<br />

entraîner la prescription réflexe d’une restriction des apports<br />

liquidiens. Par ailleurs, l’hyponatrémie hypotonique requiert<br />

l’appréciation du volume extracellulaire afin d’en préciser le<br />

mécanisme (Fig. 5) et d’adapter la thérapeutique.<br />

Néphrologie<br />

Hyponatrémie avec œdèmes généralisés<br />

L’association d’une hyponatrémie et d’œdèmes généralisés<br />

qui traduisent une surcharge sodée importante fait poser le<br />

diagnostic d’hyponatrémie de surcharge. La prise de poids est<br />

constante et souvent évidente. La mesure de la natriurèse<br />

permet de distinguer la surcharge sodée secondaire (natriurèse<br />

< 30 mmol/l) à l’hypovolémie efficace qui est aussi à l’origine<br />

de l’hyponatrémie et la surcharge sodée primitive (natriurèse ><br />

30 mmol/l) qui ne s’accompagne d’une hyponatrémie que si<br />

elle est associée à une surcharge hydrique primitive (insuffisance<br />

rénale chronique sévère).<br />

Le traitement symptomatique consiste à diminuer les apports<br />

de sel et à augmenter l’excrétion rénale de sodium. La présence<br />

de l’hyponatrémie nécessite de plus une restriction hydrique. Le<br />

régime désodé doit être d’autant plus strict que les œdèmes<br />

et/ou l’ascite sont importants. Un régime sans sel correctement<br />

suivi correspond à un apport de chlorure de sodium inférieur à<br />

2 g/j.<br />

Le traitement diurétique est le traitement symptomatique de<br />

l’expansion du volume extracellulaire, mais il convient de<br />

respecter certaines règles :<br />

les diurétiques thiazidiques et ceux de l’anse provoquent une<br />

augmentation de la kaliurèse et nécessitent donc une surveillance<br />

de la kaliémie et la prescription éventuelle d’une<br />

supplémentation potassique ou l’association d’un diurétique<br />

épargneur de potassium ;<br />

la prescription de diurétiques épargneurs de potassium<br />

(spironolactone, etc.) est logique dans toute situation d’hyperaldostéronisme<br />

(primaire ou secondaire) ou en association<br />

avec un diurétique hypokaliémiant, mais elle est formellement<br />

contre-indiquée dans l’insuffisance rénale sévère en<br />

raison du risque d’hyperkaliémie ;<br />

les diurétiques de l’anse sont préférés aux diurétiques thiazidiques,<br />

car ils provoquent une diurèse moins sodée et<br />

aggravent donc moins l’hyponatrémie. Par ailleurs les diurétiques<br />

thiazidiques ne sont pas indiqués en cas d’insuffisance<br />

rénale sévère, car ils ne sont généralement pas efficaces. Il<br />

faut là aussi préférer les diurétiques de l’anse (dont l’efficacité<br />

diminue cependant au fur et à mesure que l’insuffisance<br />

rénale progresse, ce qui nécessite une augmentation des<br />

doses). L’adjonction d’un diurétique thiazidique, sous surveillance<br />

de la natrémie, peut cependant être utile pour aider<br />

à débloquer la natriurèse et réduire les œdèmes ;<br />

le traitement diurétique, parce qu’il diminue le stock sodé,<br />

tend à diminuer la volémie efficace et favorise l’aggravation<br />

de l’hyponatrémie. Si l’hyponatrémie devient menaçante, il<br />

importe d’hospitaliser le patient afin de programmer une<br />

perfusion de chlorure de sodium isotonique tout en augmentant<br />

suffisamment la dose de diurétiques pour maintenir une<br />

diurèse largement supérieure aux apports, avec une surveillance<br />

clinique et biologique rapprochée (natrémie toutes<br />

les4à6h);<br />

en présence d’une hypovolémie efficace, on associe dans la<br />

mesure du possible un traitement étiologique de manière à la<br />

corriger au mieux, car elle est à l’origine de l’expansion du<br />

volume extracellulaire : amélioration de la fonction ventriculaire<br />

(par exemple par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion)<br />

en cas d’insuffisance cardiaque ; arrêt de l’alcool et des<br />

médicaments hépatotoxiques en cas de cirrhose ; une perfusion<br />

d’albumine n’est prescrite qu’en dernier recours en cas<br />

de syndrome néphrotique avec hypovolémie menaçante.<br />

L’utilisation des antagonistes du récepteur V 2 ou des récepteurs<br />

V 1/V 2 de l’ADH est en cours d’évaluation dans l’hyponatrémie<br />

de surcharge sodée liée à l’insuffisance cardiaque ou<br />

à une cirrhose [12] .<br />

Dans le cas d’une insuffisance rénale oligoanurique ou<br />

préterminale, la surcharge sodée peut être réfractaire au traitement<br />

diurétique, même à dose importante (furosémide jusqu’à<br />

1 500 mg/j per os). Elle impose alors une épuration extrarénale<br />

(dialyse).<br />

Hyponatrémie sans œdèmes<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé 18-034-A-10<br />

Le diagnostic d’hyponatrémie associée à un déficit sodé est<br />

facile lorsque l’absence d’œdèmes est associée à une natriurèse<br />

9


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

Plutôt élevées<br />

Déshydratation extracellulaire<br />

Déficit sodé<br />

Na < 30 mmol/l<br />

Na/K < 1<br />

Pertes sodées<br />

extrarénales<br />

Na > 30 mmol/l<br />

Pertes sodées<br />

rénales<br />

bloquée alors que les apports sodés ne sont pas nuls (ce qui<br />

traduit un déficit sodé d’origine extrarénale) ou lorsque le<br />

déficit est suffisamment important pour que les signes cliniques<br />

de déshydratation extracellulaire soient évidents : le signe<br />

capital est le « pli cutané » (perte de l’élasticité normale de la<br />

peau, plus facilement constatée au niveau des régions sousclaviculaires<br />

et du dos de la main). Il témoigne de la déshydratation<br />

du secteur interstitiel. La tachycardie, la sensation de<br />

fatigue avec malaises en position debout témoignant d’une<br />

hypotension orthostatique sont en rapport avec l’hypovolémie.<br />

Les yeux sont cernés, enfoncés dans les orbites. L’hypotension<br />

permanente, voire le collapsus, ne surviennent qu’en cas de<br />

déficit sodé majeur.<br />

Si les signes cliniques de déshydratation extracellulaire ne<br />

sont pas francs, ce qui est fréquent, et si la natriurèse n’est pas<br />

bloquée, la distinction entre hyponatrémie associée à un déficit<br />

sodé d’origine rénale et hyponatrémie de dilution liée à une<br />

surcharge hydrique primitive peut être difficile en l’absence de<br />

contexte clinique évocateur (prise avouée de diurétiques<br />

évoquant un déficit sodé, syndrome polyurodipsique évoquant<br />

une potomanie...). La mesure de la créatininémie, de l’urée<br />

plasmatique et urinaire et de l’uricémie, voire de la rénine et de<br />

l’aldostérone plasmatiques, est alors utile [13, 14] : la créatininémie,<br />

le taux plasmatique de l’urée, l’uricémie, la rénine et<br />

l’aldostérone sont plutôt abaissés dans l’hyponatrémie de<br />

dilution en raison d’une augmentation de la filtration glomérulaire<br />

liée à l’augmentation infraclinique de la volémie du fait de<br />

la surcharge hydrique ; ils devraient être au contraire augmentés<br />

avec un rapport urée urinaire/urée plasmatique élevé (> 10)<br />

dans l’hyponatrémie de déficit en raison de la diminution de la<br />

volémie liée à la déshydratation extracellulaire. Mais le tableau<br />

biologique est loin d’être toujours aussi clair, en particulier si le<br />

déficit sodé est lié à une insuffisance surrénalienne.<br />

Quoi qu’il en soit, le traitement d’une hyponatrémie isolée<br />

(sans œdèmes généralisés) nécessite à la fois la restriction<br />

hydrique pour combattre l’hyperhydratation cellulaire et un<br />

apport de sel : celui-ci est en effet toujours nécessaire, soit pour<br />

Non Oui<br />

Créatininémie ? Uricémie ?<br />

Urée plasmatique ?<br />

Urée plasma/urée urinaire ?<br />

Rénine ? Aldostérone ?<br />

U < 80 mOsm/kg<br />

Excès d’apports<br />

liquidiens<br />

Hyponatrémie hypotonique<br />

(en dehors du déficit potassique important)<br />

Hyperhydratation cellulaire<br />

Œdèmes généralisés ?<br />

Plutôt basses<br />

Volume extracellulaire<br />

cliniquement normal<br />

Surcharge hydrique primitive<br />

U > 80 mOsm/kg<br />

Défaut rénal<br />

d’élimination de l’eau<br />

libre<br />

Hyperhydratation extracellulaire<br />

Surcharge hydrosodée<br />

Natriurèse ? Osmolalité urinaire ? Natriurèse ?<br />

Na < 30 mmol/l<br />

Surcharge sodée<br />

secondaire<br />

Na > 30 mmol/l<br />

Surcharge sodée<br />

primitive<br />

+ surcharge hydrique<br />

primitive<br />

Figure 5. Arbre décisionnel. Étapes du diagnostic étiologique d’une hyponatrémie hypotonique. Na : natriurèse ; K : kaliurèse ; U : osmolalité urinaire.<br />

corriger le déficit sodé (hyponatrémie de déficit), soit pour<br />

rétablir à sa valeur antérieure le stock sodé qui avait été ajusté<br />

à la baisse (hyponatrémie de dilution par surcharge hydrique<br />

primitive). Sauf en cas d’insuffisance rénale chronique sévère, il<br />

ne faut pas craindre d’apporter trop de sodium, puisque l’excès<br />

éventuel est facilement éliminé par les reins.<br />

En cas d’hyponatrémie modérée et asymptomatique, la<br />

restriction hydrique (moins de 750 ml/j) associée à un régime<br />

supplémenté en sodium suffit le plus souvent. Une perfusion de<br />

chlorure de sodium isotonique est utile en cas de déshydratation<br />

extracellulaire avérée pour rétablir une volémie efficace<br />

normale et faire disparaître la stimulation de l’ADH.<br />

En cas d’hyponatrémie sévère, une perfusion de chlorure de<br />

sodium hypertonique (à 3 %) sera nécessaire. Le débit de la<br />

perfusion doit être déterminé de manière à corriger efficacement<br />

l’hyponatrémie, sans que l’augmentation ne dépasse 1 à<br />

2 mmol/l durant les premières heures et 8 mmol/l/j afin d’éviter<br />

des lésions cérébrales potentiellement irréversibles (myélinolyse<br />

centropontine).<br />

De nombreuses formules mathématiques, toutes plus ou<br />

moins dérivées de la relation d’Edelman [4] , ont été proposées,<br />

dans les situations d’hyponatrémie ou d’hypernatrémie, pour<br />

prédire la variation de la natrémie en fonction de la quantité de<br />

sodium et du volume de solution perfusés [15-17] et aider ainsi à<br />

optimiser le débit de perfusion. Le résultat est cependant très<br />

approximatif, car certaines formules négligent les pertes d’eau et<br />

de sodium (en particulier rénales) pendant la durée de la<br />

perfusion [15] ; d’autres formules en tiennent compte, mais elles<br />

deviennent beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre, et de<br />

plus les pertes extrarénales d’eau et de sodium pendant la durée<br />

de la perfusion sont difficiles à estimer précisément [16, 17] .La<br />

formule d’Adrogué-Madias [15] présente l’avantage d’avoir été<br />

testée dans une étude clinique [18] . Cependant toutes les<br />

formules, y compris celle d’Adrogué-Madias, sont susceptibles de<br />

donner des prédictions parfois très erronées [19] , peut-être parce<br />

que la relation d’Edelman dont découlent toutes ces formules<br />

est basée sur un modèle à deux compartiments qui ne prend<br />

10 Néphrologie


Déshydratation extracellulaire<br />

Déficit hydrique primitif<br />

+ déficit sodé primitif<br />

Na < 30 mmol/l<br />

Na/K < 1<br />

Pertes sodées<br />

extrarénales<br />

Na > 30 mmol/l<br />

Pertes sodées<br />

rénales<br />

Non<br />

U > 600 mOsm/kg<br />

Défaut d’apports<br />

liquidiens ou<br />

pertes extrarénales<br />

d’eau libre<br />

pas en compte le sodium osmotiquement inactif qui pourait<br />

être stocké dans l’organisme, particulièrement au niveau de la<br />

peau [20] . Ces formules peuvent finalement être dangereuses, car<br />

elles risquent de rassurer faussement le médecin et de conduire<br />

à des corrections trop rapides ou trop lentes de l’hyponatrémie.<br />

Mieux vaut donc rester très pragmatique et prescrire un débit à<br />

500 ml/24 h de chlorure de sodium hypertonique sous surveillance<br />

rapprochée de la natrémie (toutes les 2haudébut),<br />

ce qui permet de l’adapter.<br />

Dans le cas d’un SIADH, il a été proposé d’utiliser les sels de<br />

lithium (10 à 20 mEq/j de lithium, soit un à deux comprimés/j<br />

de Téralithe LP ® ) qui empêchent l’action de l’ADH sur le tube<br />

collecteur, mais l’efficacité en est inconstante. Un traitement<br />

plus spécifique du SIADH comporte l’utilisation des antagonistes<br />

du récepteur V 2 ou des récepteurs V 1/V 2 de l’ADH en cours<br />

d’évaluation chez l’homme [12] . Dans la mesure du possible, le<br />

traitement est étiologique, fonction de la cause du SIADH.<br />

En cas d’hyponatrémie liée à un déficit sodé sévère avec choc<br />

hypovolémique, les solutés macromoléculaires peuvent être<br />

utiles pour rétablir rapidement un état hémodynamique stable.<br />

Si la déplétion est d’origine extrarénale, la réapparition d’une<br />

natriurèse témoigne de la correction du stock sodé.<br />

Conduite à tenir devant une hypernatrémie<br />

L’hypernatrémie est définie comme une natrémie supérieure<br />

à 145 mmol/l. Elle est toujours associée à un état hypertonique<br />

et donc à une déshydratation cellulaire. Elle nécessite une<br />

réhydratation. Normalement, l’hyperosmolalité efficace entraîne<br />

une soif, signe clinique majeur présent dès l’installation de la<br />

déshydratation et qui devrait permettre de l’éviter. En conséquence,<br />

la persistance d’une hypernatrémie est toujours en<br />

rapport avec le fait que la soif n’est pas ressentie (troubles de la<br />

soif correspondant à un seuil osmotique anormalement élevé,<br />

fréquent chez le sujet âgé), ou ne peut être exprimée (troubles<br />

de la conscience, très jeune enfant) ou satisfaite (handicap,<br />

carence en eau, âges extrêmes de la vie).<br />

La sécheresse des muqueuses (en particulier de la face interne<br />

des joues) est un signe classique et important. En cas de<br />

déshydratation sévère ou d’installation rapide apparaissent les<br />

Natrémie > 145 mmol/l<br />

Hypernatrémie<br />

Déshydratation cellulaire<br />

Volume extracellulaire<br />

cliniquement normal<br />

Déficit hydrique primitif<br />

Natriurèse ? Osmolalité urinaire ?<br />

Hypervolémie ?<br />

(HTA et/ou œdèmes)<br />

U < 600 mOsm/kg<br />

Excès d’élimination<br />

rénale de l’eau libre<br />

Non Oui<br />

Hyperaldostéronisme<br />

primaire<br />

autres signes cliniques, en particulier neurologiques, qui en font<br />

toute la gravité : troubles de la conscience, fièvre, convulsions...<br />

Des hématomes intracérébraux, en raison d’une rupture vasculaire<br />

liée à la diminution du volume cérébral, peuvent compliquer<br />

les formes les plus graves, notamment chez le nourrisson.<br />

L’hypernatrémie témoigne d’un ajustement insuffisant du<br />

stock hydrique : le déficit hydrique peut être isolé (déshydratation<br />

cellulaire pure), mais il est parfois associé à un trouble du<br />

bilan sodé, et dans ce cas beaucoup plus souvent à un déficit<br />

qu’à une surcharge sodés. Le traitement d’une hypernatrémie<br />

dépend de son étiologie qu’il convient donc de préciser en<br />

appréciant, sur des critères cliniques (pression artérielle,<br />

œdèmes, etc.), la volémie et l’état d’hydratation extracellulaire<br />

(Fig. 6).<br />

Hypernatrémie avec hypervolémie<br />

L’association d’une hypernatrémie et de signes cliniques<br />

d’hyperhydratation extracellulaire (hypertension artérielle et/ou<br />

œdèmes généralisés) est en faveur d’une surcharge sodée<br />

hypervolémique, bien qu’une surcharge sodée primitive soit<br />

rarement responsable d’une hypernatrémie. Une hypernatrémie<br />

modérée (entre 145 et 150 mmol/l) peut être expliquée par<br />

l’élévation du seuil osmotique de la soif et de l’excrétion d’eau<br />

libre en rapport avec l’inhibition de l’angiotensine et de l’ADH<br />

par l’hypervolémie. Une hypernatrémie parfois sévère peut être<br />

observée en réanimation chez le patient insuffisant rénal (avec<br />

une capacité limitée d’excrétion sodée) en alimentation parentérale<br />

trop riche en sodium et incapable de satisfaire sa soif. Le<br />

traitement symptomatique repose sur les diurétiques, mais la<br />

présence d’une hypernatrémie nécessite d’y adjoindre un apport<br />

hydrique, si possible per os, sinon à l’aide de solutés glucosés,<br />

de manière à réduire l’hypernatrémie et à corriger la déshydratation<br />

cellulaire.<br />

Hypernatrémie sans hypervolémie<br />

Anomalies de l’équilibre hydrosodé 18-034-A-10<br />

GNA<br />

IRC<br />

L’absence de trouble cliniquement décelable de la volémie<br />

efficace et de l’hydratation extracellulaire témoigne d’un stock<br />

sodé adapté. L’hypernatrémie est alors en rapport avec un<br />

déficit hydrique primitif. La perte de poids est constante, mais<br />

Oui<br />

Hyperhydratation<br />

extracellulaire<br />

Surcharge sodée primitive<br />

Œdèmes ?<br />

Figure 6. Arbre décisionnel. Étapes du diagnostic étiologique d’une hypernatrémie. Na : natriurèse ; K : kaliurèse ; U : osmolalité urinaire ; GNA : glomérulonéphritie<br />

aiguë ; IRC : insuffisance rénale chronique.<br />

Néphrologie<br />

11


18-034-A-10 Anomalies de l’équilibre hydrosodé<br />

difficile à quantifier si le poids antérieur n’est pas connu avec<br />

précision.<br />

Une osmolalité urinaire élevée (U > 600 mOsm/l) est adaptée.<br />

Elle témoigne d’une capacité correcte de concentration des<br />

urines et signe un apport liquidien trop faible. Une osmolalité<br />

urinaire inadaptée témoigne d’un excès d’élimination rénale<br />

d’eau par défaut de concentration des urines (diabète insipide).<br />

Le dosage de l’ADH permet de trancher entre un diabète<br />

insipide d’origine centrale (ADH basse ou normale, en tout cas<br />

inadaptée à l’hypertonicité) et un diabète insipide néphrogénique<br />

(ADH élevée). L’épreuve de restriction hydrique est inutile<br />

et dangereuse en présence d’une déshydratation cellulaire<br />

(hypernatrémie).<br />

Le traitement repose sur la réhydratation, réalisée autant que<br />

possible par voie orale. La déshydratation cellulaire ne survient<br />

cependant que chez le sujet incapable de ressentir ou de<br />

satisfaire sa soif et est souvent responsable de troubles de la<br />

conscience, ce qui nécessite alors une réhydratation par voie<br />

parentérale, remplacée dès que possible par des apports hydriques<br />

per os. La perfusion est à base de soluté glucosé iso- ou<br />

hypotonique (1 l en 6hpuis1à2l/j) avec adjonction d’un peu<br />

de chlorure de sodium (1 g/l) afin de corriger une éventuelle<br />

déshydratation extracellulaire difficile à mettre en évidence.<br />

En cas d’hypernatrémie sévère ou symptomatique, la surveillance<br />

rapprochée de la natrémie, toutes les 4à6heures,<br />

permet d’adapter le traitement et de prévenir une diminution<br />

trop rapide : la natrémie ne doit pas diminuer de plus de<br />

2 mmol/l en 1 heure et de 10 mmol/l en 24 heures afin d’éviter<br />

la survenue d’un œdème cérébral. L’adjonction d’insuline<br />

(environ 4 unités d’insuline ordinaire pour 10 g de glucose)<br />

peut être utile pour éviter l’apparition d’une diurèse osmotique<br />

gênant la réhydratation. Les déshydratations cellulaires en<br />

rapport avec un diabète insipide à l’origine d’un syndrome<br />

polyurodipsique peuvent justifier un traitement spécifique [3] .<br />

S’il existe des signes cliniques de déshydratation extracellulaire,<br />

voire un état de choc hypovolémique, le déficit hydrique<br />

est associé à un déficit sodé : il s’agit alors d’un tableau grave<br />

de déshydratation globale survenant plus fréquemment chez un<br />

sujet âgé. Le traitement doit en priorité corriger la déshydratation<br />

extracellulaire : perfusion de chlorure de sodium isotonique<br />

jusqu’au rétablissement d’un état hémodynamique stable, puis<br />

de glucosé isotonique avec 2g/l de chlorure de sodium de<br />

manière à corriger l’hypernatrémie et la déshydratation cellulaire.<br />

En cas d’acidose associée (diarrhée aiguë), on remplace<br />

tout ou partie du chlorure de sodium par du bicarbonate de<br />

sodium. L’hypokaliémie éventuelle doit être corrigée.<br />

T. Petitclerc, Professeur des Universités, praticien hospitalier (thierry.petitclerc@auraparis.org).<br />

Centre hospitalier Pasteur Vallery-Radot (AURA), 68, rue des Plantes, 75014 Paris, France.<br />

■ Références<br />

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(Elsevier Masson SAS, Paris), Endocrinologie-Nutrition, 10-308-E-<br />

10, 1999.<br />

[2] Houillier P, Vallet M. Bilan de sodium et volume sanguin circulant.<br />

EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Endocrinologie-Nutrition,<br />

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SAS, Paris), Néphrologie, 18-028-A-10, 2004.<br />

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between serum sodium concentration, serum osmolality and total<br />

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Biophysique. Paris: Flammarion; 2006. p. 17-31.<br />

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Am J Med 1986;81:1033-40.<br />

[7] Deschênes G, Doucet A. Œdèmes généralisés d’origine rénale. EMC<br />

(Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-026-C-20, 2010.<br />

[8] Asadollahi K, Beeching N, Gill G. Hyponatremia as a risk factor for<br />

hospital mortality. Q J Med 2006;99:877-80.<br />

[9] Adrogué HJ, Madias NE. Hypernatremia. N Engl J Med 2000;342:<br />

1493-9.<br />

[10] Adrogué HJ, Madias NE. Hyponatremia. N Engl J Med 2000;342:<br />

1581-9.<br />

[11] Petitclerc T. Compartiments liquidiens de l’organisme. In: Aurengo A,<br />

Petitclerc T, editors. Biophysique. Paris: Flammarion; 2006. p. 3-16.<br />

[12] Decaux G. V2-antagonists for the treatment of hyponatremia. Nephrol<br />

Dial Transplant 2007;22:1853-5.<br />

[13] Sterns RH, Silver SM. Cerebral salt wasting versus SIADH: what<br />

difference? J Am Soc Nephrol 2008;19:194-6.<br />

[14] Maesaka JK, Imbriano LJ,Ali NM, Ilamahti E. Is it cerebral or renal salt<br />

wasting? Kidney Int 2009;76:934-8.<br />

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the dysnatremias. Intensive Care Med 1997;23:309-16.<br />

[16] Barsoum NR, Levine BS. Current prescriptions for the correction of<br />

hyponatraemia and hypernatraemia: are they too simple? Nephrol<br />

Dial Transplant 2002;17:1176-80.<br />

[17] Kurtz I, Nguyen MK. Evolving concepts in the quantitative analysis of<br />

the determinants of the plasma water sodium concentration and the<br />

pathophysiology and treatment of the dysnatremias. Nephrol Dial<br />

Transplant 2005;68:1982-93.<br />

[18] Liamis G, Kalogirou M, Saugos V, Elisaf M. Therapeutic approach in<br />

patients with dysnatraemias. Nephrol Dial Transplant 2006;21:1564-9.<br />

[19] Lindner G, Schwarz C, Kneidinger N, Kramer L, Oberbauer R,<br />

Druml W. Can we really predict the change in serum sodium levels?An<br />

analysis of currently proposed formulae in hypernatraemic patients?<br />

Nephrol Dial Transplant 2008;23:3501-8.<br />

[20] Titze J. Water-free sodium accumulation. Semin Dial 2009;22:253-5.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Petitclerc T. Anomalies de l’équilibre hydrosodé. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie,<br />

18-034-A-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

.<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Anurie par obstacle de la voie excrétrice<br />

F. Sallusto, C. Deruelle, V. Joulin, G. Fournier, A. Valeri<br />

L’anurie par obstacle de la voie excrétrice se définit comme l’arrêt total ou presque de la diurèse, la vessie<br />

étant vide, dû à une obstruction située à un niveau quelconque de la voie excrétrice supérieure, incluant<br />

les méats urétéraux. Pour entraîner une anurie, l’obstacle doit être bilatéral ou survenir sur un rein<br />

anatomiquement ou fonctionnellement unique. Il s’agit d’une urgence urologique : l’anurie obstructive<br />

entraîne une insuffisance rénale aiguë, mettant en jeu le pronostic vital du patient. Devant toute anurie, il<br />

faut éliminer en premier lieu une origine obstructive. Dans la majorité des cas, l’échographie de l’appareil<br />

urinaire permet de diagnostiquer l’obstruction. Les causes les plus fréquentes comprennent les<br />

obstructions lithiasiques, néoplasiques et la fibrose rétropéritonéale. Le traitement des anuries<br />

obstructives comporte trois étapes selon le degré d’urgence : le traitement des troubles métaboliques<br />

provoqués par l’insuffisance rénale aiguë, le drainage de la voie excrétrice obstruée, le traitement de la<br />

cause de l’obstacle.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Anurie obstructive ; Obstruction haut appareil urinaire ; Anurie postrénale<br />

Introduction 1<br />

Physiopathologie 1<br />

Diagnostic 2<br />

Circonstances de découverte 2<br />

Examens clinique et biologique 2<br />

Diagnostic radiologique 3<br />

Étiologie 4<br />

Anurie d’origine néoplasique (50 %) 4<br />

Anurie par obstruction lithiasique (40 %) 4<br />

Fibrose rétropéritonéale bénigne idiopathique ou iatrogène 4<br />

Autres causes plus rares 4<br />

Formes cliniques particulières 4<br />

Traitement 5<br />

Principes du traitement d’urgence 5<br />

Traitement étiologique 6<br />

Conclusion 7<br />

■ Introduction<br />

L’anurie est définie par un arrêt total de la diurèse ou encore<br />

par un volume inférieur à 200, voire 400 ml/24 heures selon les<br />

auteurs. Elle est rapidement à l’origine d’une insuffisance rénale<br />

aiguë (IRA), mettant en jeu le pronostic vital à court terme,<br />

nécessitant, quelle que soit son origine, une prise en charge en<br />

urgence en milieu spécialisé.<br />

■ Physiopathologie<br />

L’anurie obstructive ou postrénale, (10 % des anuries), est en<br />

rapport avec un obstacle sur le haut appareil urinaire. L’obsta-<br />

Urologie<br />

18-069-E-20<br />

cle, intrinsèque ou extrinsèque, peut être double et siéger sur la<br />

voie excrétrice des deux reins ou unique et siéger sur celle d’un<br />

rein unique anatomique ou fonctionnel.<br />

Les autres causes d’anurie, donc non obstructives, comprennent<br />

[1, 2] :<br />

l’anurie fonctionnelle ou prérénale, (25 % des cas), d’origine<br />

vasculaire, en rapport avec un désordre circulatoire aigu à<br />

l’origine d’une hypoperfusion rénale, soit par déshydratation<br />

extracellulaire, soit par état de choc (hémorragique, cardiogénique,<br />

infectieux) ;<br />

l’anurie organique ou parenchymateuse, (65 % des cas), provoquée<br />

par une néphropathie aiguë : nécrose tubulaire aiguë<br />

ischémique ou toxique (80 %), néphropathies interstitielles,<br />

néphropathies glomérulaires ou vasculaires aiguës (5-10 %).<br />

Plusieurs mécanismes peuvent être associés, par exemple<br />

anurie obstructive compliquée de choc septique avec nécrose<br />

tubulaire aiguë.<br />

Un obstacle sur la voie excrétrice supérieure, aigu ou chronique,<br />

entraîne un arrêt de la diurèse puis une augmentation de<br />

la pression d’amont dans les tubules rénaux et un blocage de la<br />

filtration glomérulaire. Dans les obstructions aiguës complètes,<br />

la diurèse s’effondre en quelques heures si l’obstacle est<br />

unilatéral, plus lentement s’il est bilatéral.<br />

L’atteinte sur le parenchyme rénal est consécutive à une<br />

hyperpression dans le tube contourné proximal, à une infiltration<br />

cellulaire interstitielle, à une modification des mécanismes<br />

de concentration-dilution. La réduction du débit sanguin rénal<br />

détermine une diminution de la diurèse, ce qui limite l’hyperpression,<br />

mais entraîne une redistribution du débit sanguin<br />

rénal et une ischémie médullaire [3] . La conséquence immédiate<br />

est l’apparition d’une rétention hydrosodée, azotée et potassique<br />

ainsi que phosphorée et urique, qui peut engager le pronostic<br />

vital à court terme.<br />

Une dilatation du haut appareil urinaire peut être absente en<br />

cas de déshydratation extracellulaire importante [2] .<br />

En cas d’obstruction urétérale unilatérale, chez un patient<br />

ayant deux reins fonctionnels, la fonction rénale est souvent<br />

1


18-069-E-20 Anurie par obstacle de la voie excrétrice<br />

normale ou légèrement perturbée. Exceptionnellement ont été<br />

rapportés des cas d’anurie obstructive secondaire à une obstruction<br />

urétérale unilatérale [4, 5] . Ce phénomène, appelé « anurie<br />

réflexe », pourrait être le résultat de spasmes urétéraux et<br />

vasculaires en rapport avec une hyperexcitabilité anormale du<br />

système nerveux autonome [4, 5] .<br />

La rupture de la voie excrétrice, suite à l’hyperpression<br />

intrapyélique (valeur maximale 50-100 cm d’eau), peut compliquer<br />

ultérieurement le tableau clinique en raison de l’extravasation<br />

d’urine avec formation d’un urinome périrénal potentiellement<br />

infecté.<br />

En l’absence de levée rapide de l’obstacle, des lésions irréversibles<br />

du parenchyme rénal peuvent apparaître. La possibilité de<br />

récupération de la fonction rénale est généralement inversement<br />

liée à la durée de l’obstruction. En cas de pyélonéphrite aiguë<br />

sur obstacle, l’absence de traitement en urgence peut évoluer<br />

vers la pyonéphrose ou même vers la mort par choc septique.<br />

■ Diagnostic<br />

Circonstances de découverte<br />

Le diagnostic est parfois facile chez un patient n’ayant pas eu<br />

de miction depuis plusieurs heures, avec une vessie vide au<br />

sondage et en échographie vésicale, associée à une dilatation des<br />

cavités pyélocalicielles au niveau rénal.<br />

Ailleurs, c’est la symptomatologie d’insuffisance rénale aiguë<br />

qui amène le patient à consulter : nausées-vomissements,<br />

céphalées, diarrhées, et le bilan morphologique établit l’origine<br />

obstructive.<br />

Enfin dans certains cas, ce sont les symptômes liés à la cause<br />

de l’obstruction : lombalgies, colique néphrétique uni- ou<br />

bilatérale, qui amènent à découvrir l’insuffisance rénale et son<br />

caractère obstructif sur les bilans biologique et échographique.<br />

Interrogatoire<br />

- Rein unique<br />

- Lithiase<br />

- Néoplasie<br />

- Douleur lombaire<br />

- Hématurie<br />

Dilatation<br />

HAU<br />

Drainage<br />

Affirmer l'anurie<br />

Éliminer un globe vésical<br />

(clinique ± échographie)<br />

Bilan biologique<br />

Rechercher des signes<br />

de gravité (cliniques<br />

et biologiques)<br />

Si +<br />

Prise en charge<br />

néphrologique<br />

en urgence<br />

Rechercher un obstacle<br />

AUSP + échographie<br />

de l’appareil urinaire<br />

systématiques<br />

Doute<br />

sur l’obstacle<br />

TDM abdominopelvienne<br />

non injectée<br />

voire UPR<br />

Examens clinique et biologique<br />

Interrogatoire<br />

L’interrogatoire permet d’apprécier l’absence de mictions<br />

depuis plusieurs heures, le mode d’installation de l’anurie. Il<br />

recherche également des antécédents lithiasiques, de tumeurs de<br />

l’appareil génito-urinaire ou digestif, de chirurgie abdominopelvienne,<br />

ou de rein unique chirurgical ou congénital [6] (Fig. 1).<br />

Il recherche également des douleurs lombaires ou abdominales,<br />

précédant l’anurie, qui évoquent une cause obstructive.<br />

Examen clinique<br />

L’examen clinique ne retrouve aucun globe vésical, la vessie<br />

est vide ou ne contient que quelques millilitres d’urines au<br />

sondage ou à l’échographie vésicale.<br />

Il faut rechercher la présence de cicatrices lombaires ou<br />

abdominopelviennes, et l’existence de douleurs à la palpation<br />

des fosses lombaires. Les touchers pelviens peuvent orienter le<br />

diagnostic étiologique en présence d’une tumeur palpable, voire<br />

d’un « blindage » pelvien en rapport avec un cancer prostatique,<br />

vésical, rectal, utérin ou ovarien [7] .<br />

Enfin, l’examen clinique apprécie également l’existence de<br />

signes de gravité de l’insuffisance rénale : hyperhydratation,<br />

signes d’œdème pulmonaire, œdème des membres inférieurs,<br />

troubles du rythme cardiaque (hyperkaliémie : ECG).<br />

Bilan biologique<br />

Le bilan biologique comporte en particulier un ionogramme<br />

sanguin permettant d’apprécier le degré d’insuffisance rénale et<br />

de poser, lorsque c’est nécessaire, l’indication d’épuration<br />

extrarénale en urgence. Il met en évidence une augmentation<br />

de la créatininémie, de l’urée et, selon les cas, une hyperkaliémie<br />

et une acidose métabolique.<br />

Le bilan biologique est complété sur le plan bactériologique,<br />

par l’examen cytobactériologique des urines (ECBU) lorsqu’on<br />

Examen clinique<br />

Touchers pelviens<br />

Pas d'argument<br />

pour un obstacle<br />

Recherche d’une cause<br />

médicale<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Recherche d’une cause obstructive à une anurie. AUSP : arbre urinaire sans préparation ; TDM : tomodensitométrie ; HAU : haut<br />

appareil urinaire ; UPR : urétéropyélographie rétrograde.<br />

2 Urologie


.<br />

Figure 2. Reconstruction à la tomodensitométrie (TDM) non injectée<br />

chez un patient en anurie obstructive par cancer de la prostate.<br />

peut obtenir un peu d’urines et, si nécessaire, par des hémocultures.<br />

Un bilan préopératoire est prélevé également.<br />

Diagnostic radiologique<br />

Le bilan radiologique, en urgence, a pour but de rechercher<br />

une cause obstructive à l’anurie (Fig. 1). L’étiologie de l’obstacle<br />

n’est parfois déterminée que secondairement. Les examens de<br />

base toujours réalisables en urgence sont l’arbre urinaire sans<br />

préparation et l’échographie rénale, cette dernière étant de plus<br />

en plus souvent remplacée actuellement par le scanner abdominopelvien<br />

non injecté.<br />

Radiographie sans préparation<br />

La radiographie d’arbre urinaire sans préparation de face et<br />

parfois de profil, voire de trois quarts permet d’analyser le<br />

squelette, la taille et la forme du ou des reins et la présence de<br />

calcul(s) radio-opaque(s).<br />

Échographie rénale<br />

L’échographie rénale analysant également l’uretère sous-pyélique,<br />

l’échographie de la vessie et du contenu abdominal est capitale<br />

et réalisée en urgence. La dilatation bilatérale ou unilatérale sur<br />

rein unique des cavités pyélocalicielles, associée à une vessie vide,<br />

ou peu remplie, est quasi pathognomonique d’obstruction du<br />

haut appareil urinaire. Il existe cependant 5-10 % de faux négatifs<br />

lorsque les cavités pyélocalicielles ne sont pas dilatées [8, 9] .La<br />

seule présence de cavités pyélocalicielles visibles à l’échographie<br />

est synonyme de dilatation en cas d’anurie, témoignant d’une<br />

excrétion d’urine en amont d’un obstacle.<br />

Il existe également 5%à20%defaux positifs correspondant<br />

à une image liquidienne intrasinusale en rapport soit avec un<br />

kyste parapyélique, soit avec une polykystose [7] .<br />

L’échographie rénale permet également d’analyser la taille du<br />

rein, l’épaisseur du parenchyme, recherche des signes évocateurs<br />

de calcul(s) (image hyperéchogène, cônes d’ombre). Elle est<br />

complétée par une échographie pelvienne, recherchant une<br />

tumeur vésicale (mais vessie peu remplie ou vide), génitale chez<br />

la femme et prostatique chez l’homme.<br />

Le plus souvent (90-95 %), l’échographie permet d’affirmer<br />

l’obstruction et fait la part entre insuffisants rénaux à cavités<br />

dilatées sur obstacle et insuffisants rénaux à cavités fines en<br />

rapport avec une néphropathie. Dans certains cas, malgré<br />

l’absence de dilatation des cavités, il existe un vrai doute sur une<br />

cause obstructive de l’anurie du fait des antécédents (lithiase,<br />

néoplasie). Dans ces conditions, le scanner spiralé abdominopelvien<br />

sans injection trouve toute sa justification en urgence.<br />

Scanner spiralé abdominopelvien sans injection<br />

(Fig. 2)<br />

Il est effectué en urgence quand l’association arbre urinaire<br />

sans préparation (AUSP)-échographie n’est pas suffisante. Il<br />

permet de mettre en évidence une dilatation des voies excrétrices,<br />

mais précise également la nature de l’obstacle (calcul,<br />

Urologie<br />

Figure 3. Pyélographie antégrade par sonde de néphrostomie.<br />

caillot, aspect tissulaire) ainsi que le siège de l’obstruction. En<br />

cas de calcul, l’hyperdensité lithiasique est observée que le<br />

calcul soit de type radio-opaque ou de type radiotrasparent. En<br />

revanche, le scanner est mis en défaut pour une nouvelle variété<br />

de calculs, développés chez les patients traités par indinavir<br />

dans le cadre du syndrome d’immunodéficience humaine (sida).<br />

Ces calculs, quand ils sont composés d’indinavir sulfate pure, ne<br />

sont visibles ni à l’abdomen sans préparation (ASP) ni au<br />

scanner [10] ; ils nécessitent une opacification de la voie excrétrice<br />

pour être mis en évidence.<br />

Imagerie par résonance magnétique<br />

L’IRM et l’uro-IRM sont réalisables quelle que soit la fonction<br />

rénale. Elle donne le même type de renseignements que le<br />

scanner. Elle peut être pratiquée sans injection : hydro-IRM avec<br />

acquisition en écho de spin rapide (fast spin echo – FSE) et<br />

pondération T2 très élevée faisant apparaître en hypersignal<br />

(blanc) les liquides stationnaires dont l’urine [11, 12] . Cela permet<br />

une excellente analyse morphologique « ultrarapide » avec<br />

exploration de l’ensemble des voies excrétrices sur une coupe.<br />

Elle a, en revanche, des limites : des kystes sinusaux peuvent<br />

être difficilement différenciés de dilatation des cavités pyélocalicielles.<br />

La visualisation serait dégradée si les urines étaient<br />

infectées ou hématuriques [11] . Enfin, elle peut également être<br />

réalisée avec injection de gadolinium : uro-IRM injectée<br />

(séquence T1), reproduisant une urographie intraveineuse (UIV)<br />

avec l’avantage d’être utilisable chez l’insuffisant rénal [11] .<br />

Autres explorations radiologiques obtenues<br />

habituellement au bloc opératoire lors<br />

du drainage chirurgical<br />

Urétéro-pyélographie rétrograde (UPR)<br />

C’est l’opacification de la voie excrétrice par voie rétrograde<br />

obtenue après mise en place par endoscopie vésicale d’une<br />

sonde dans l’orifice urétéral. L’UPR est réalisée, le plus souvent,<br />

sous anesthésie et elle est suivie par le drainage du haut appareil<br />

urinaire par montée d’une sonde urétérale.<br />

Pyélographie antégrade<br />

Anurie par obstacle de la voie excrétrice 18-069-E-20<br />

C’est l’opacification de la voie excrétrice par voie descendante<br />

(Fig. 3), après ponction percutanée d’un calice ou du bassinet,<br />

ce qui permet également de réaliser un drainage par la mise en<br />

place d’une sonde de néphrostomie percutanée. Elle présente<br />

3


18-069-E-20 Anurie par obstacle de la voie excrétrice<br />

l’avantage de pouvoir être réalisée sous anesthésie locale. Cette<br />

technique est utilisée lorsque l’UPR n’est pas possible techniquement<br />

ou lorsque l’obstacle est complet, rendant impossible<br />

une montée de sonde urétérale, ou enfin de principe dans<br />

certains centres en raison de ses avantages (anesthésie locale<br />

possible, pas de nécessité de franchir l’obstacle limitant le risque<br />

de fausse route).<br />

■ Étiologie<br />

L’étiologie est parfois suspectée dès l’examen clinique ou lors<br />

des explorations radiologiques effectuées au cours du drainage<br />

chirurgical. Le diagnostic étiologique n’est parfois définitif<br />

qu’après avoir complété la pyélographie peropératoire par un<br />

scanner ou une IRM, une fois la fonction rénale normalisée ou<br />

stabilisée.<br />

Trois étiologies sont les plus fréquentes et sont à rechercher<br />

en premier lieu.<br />

Anurie d’origine néoplasique (50 %)<br />

Deux mécanismes peuvent être impliqués :<br />

soit la tumeur primitive (uretère, vessie, prostate, utérus,<br />

côlon, rectum ou maladie systémique comme un lymphome)<br />

réalise un envahissement direct par contiguïté de l’uretère ou<br />

des méats urétéraux soit il s’agit d’une compression extrinsèque<br />

;<br />

soit une métastase (ganglionnaire ou par envahissement<br />

rétropéritonéal) d’une tumeur primitive située à distance<br />

(sein, estomac, poumon) comprime ou envahit les uretères.<br />

Indépendamment du mécanisme de l’obstruction et de la<br />

nature de la tumeur primitive, un envahissement urétéral<br />

tumoral est un facteur de mauvais pronostic. Le diagnostic<br />

étiologique est le plus souvent aisé au vu des antécédents du<br />

patient. Le scanner abdominopelvien est l’examen clé permettant<br />

de confirmer le diagnostic.<br />

Anurie par obstruction lithiasique (40 %)<br />

L’anurie par obstruction lithiasique résulte le plus souvent de<br />

la migration d’un calcul sur un rein fonctionnellement unique<br />

(antécédent de néphrectomie controlatérale pour calcul ou non,<br />

ou rein controlatéral détruit). Les obstacles lithiasiques bilatéraux<br />

sont plus rares et sont surtout d’origine métabolique,<br />

secondaires à une hyperuricémie (calculs uriques radiotransparents)<br />

ou à une hyperparathyroïdie (calculs calciques<br />

bilatéraux et multiples). Après l’échographie et la radiographie<br />

de l’abdomen sans préparation réalisées de première intention,<br />

le scanner spiralé sans injection est l’examen de choix du fait<br />

de sa sensibilité et de sa spécificité proches de 100 %. Les<br />

obstructions bilatérales peuvent également résulter de précipitations<br />

médicamenteuses (indinavir, métabolites du méthotrexate<br />

après chimiothérapie sans traitement alcalinisant préventif).<br />

Fibrose rétropéritonéale bénigne<br />

idiopathique ou iatrogène<br />

C’est une cause beaucoup plus rare. Elle résulte d’une sclérofibrose<br />

du tissu adipeux rétropéritonéal siégeant surtout au<br />

niveau du promontoire, à l’origine d’une compression extrinsèque<br />

sans envahissement direct [7] .<br />

Certaines fibroses peuvent être iatrogènes d’origine médicamenteuse<br />

(méthysergide, réserpine, halopéridol, méthyldopa,<br />

bêtabloquant, dérivés de l’ergotamine, phénacétine, amphétamines).<br />

D’autres ont été associées à certaines maladies<br />

inflammatoires systémiques ou encore à l’existence d’un<br />

anévrisme de l’aorte abdominale.<br />

L’échographie montre la dilatation qui signe l’obstacle,<br />

l’urétéropyélographie rétrograde révèle l’aspect classique de<br />

l’attraction des deux uretères vers la ligne médiane. Le diagnostic<br />

est porté par le scanner ou l’IRM abdominopelvienne qui<br />

mettent en évidence la plaque de fibrose qui engaine les<br />

uretères, la veine cave inférieure et l’aorte prédominant au<br />

niveau du promontoire [7, 13] .<br />

La distinction entre fibrose bénigne ou maligne est souvent<br />

difficile, justifiant le plus souvent l’intérêt d’une biopsie soit<br />

percutanée sous scanner, soit chirurgicale le plus souvent alors<br />

par laparoscopie.<br />

Autres causes plus rares<br />

Sclérose urétérale ou périurétérale postradiques<br />

Il s’agit d’une cause plus rare.<br />

Lésions urétérales iatrogènes peropératoires<br />

Ces lésions constituent des étiologies à ne pas négliger. Plaie,<br />

ligature d’uretère sur rein unique ou ligature bilatérale après<br />

chirurgie du rectum, côlon, utérus, aorte ou traitement de<br />

l’incontinence urinaire [14] .<br />

Causes exceptionnelles [15]<br />

Il s’agit de : la tuberculose sur rein unique, les tumeurs<br />

rétropéritonéales, les tumeurs primitives ou secondaires de<br />

l’uretère, les urétérites et les périurétérites de la malakoplakie, de<br />

la bilharziose, de l’aspergillose, de l’endométriose, de la périartérite<br />

noueuse et de la tuberculeuse.<br />

Un prolapsus utérin complètement extériorisé peut déterminer<br />

une anurie obstructive par compression bilatérale des<br />

uretères. Dans ce cas, la simple mise en place d’un pessaire peut<br />

être suffisant pour résoudre l’obstruction en attendant de<br />

réaliser une cure chirurgicale de prolapsus [16] .<br />

Citons, chez la femme enceinte, dans le polyhydramnios<br />

aigu, la compression directe des uretères pelviens par l’utérus<br />

gravide [17] .<br />

Causes exceptionnelles d’anurie obstructive<br />

au décours de la chirurgie urologique<br />

Une anurie obstructive au décours de la chirurgie urologique<br />

peut être due :<br />

aux points d’hémostase après adénomectomie prostatique [6, 18] ;<br />

à l’électrocoagulation d’un méat urétéral, au cours d’une<br />

résection transurétrale de tumeur de vessie intéressant le<br />

trigone, en cas de rein anatomiquement ou fonctionnellement<br />

unique. L’obstruction peut être prévenue par la visualisation<br />

du méat urétéral lors de l’électrocoagulation (issue de<br />

bleu après injection intraveineuse d’indigo carmin) ou, si<br />

besoin, la mise en place préventive d’une sonde double J<br />

après la résection ;<br />

à l’œdème bilatéral des méats urétéraux après adénomectomie<br />

ou prostatectomie radicale. Dans ces cas particuliers, l’œdème<br />

des méats et l’anurie peuvent se résoudre spontanément dans<br />

les 48 heures [18] ou après corticothérapie intraveineuse<br />

courte.<br />

Anurie obstructive après transplantation rénale<br />

Les risques d’anurie obstructive rapportés après transplantation<br />

rénale sont en moyenne de 2 % [19] . Les étiologies les plus<br />

communes sont un calcul, soit préexistant soit acquis, l’hématurie<br />

avec caillots, la sténose de l’anastomose urétérovésicale [20] .<br />

Anurie obstructive chez l’enfant<br />

Chez l’enfant, l’anurie peut être révélatrice d’une anomalie<br />

congénitale, d’une tumeur déterminant une compression<br />

extrinsèque bilatérale ou sur rein unique ainsi que en cas de<br />

lithiase urétérale bilatérale ou sur rein unique.<br />

Formes cliniques particulières<br />

Insuffisance rénale aiguë obstructive à diurèse<br />

conservée<br />

Lorsque l’obstacle est incomplet, la diurèse peut être en<br />

volume normal, voire augmenté. En revanche, l’urine est de<br />

qualité anormale ayant une excrétion faible des métabolites,<br />

secondaire à l’insuffisance de concentration des urines par les<br />

4 Urologie


glomérules et tubules rénaux. L’existence d’une diurèse conservée<br />

ne modifie ni la conduite diagnostique et ni la conduite<br />

thérapeutique [7] .<br />

Association d’une insuffisance rénale aiguë<br />

obstructive à une pyélonéphrite aiguë<br />

Cette situation est fréquente et deux mécanismes peuvent<br />

être impliqués :<br />

une tubulopathie aiguë avec néphropathie interstitielle<br />

infectieuse secondaire à une infection des urines en amont<br />

d’un obstacle unilatéral (rein controlatéral non obstrué) ;<br />

une authentique anurie obstructive compliquée secondairement<br />

d’une pyélonéphrite en amont, avec ou sans tubulopathie<br />

aiguë associée.<br />

Sur le plan thérapeutique, une antibiothérapie doit être<br />

débutée au plus vite après les prélèvements bactériologiques<br />

usuels. Le drainage des urines, toujours nécessaire, n’est pas<br />

toujours suffisant en cas de tubulopathie associée, et le recours<br />

à une épuration extrarénale peut être nécessaire le temps que<br />

régresse la tubulopathie.<br />

■ Traitement<br />

Principes du traitement d’urgence<br />

Les principes du traitement d’urgence sont similaires pour<br />

toutes les anuries obstructives. Ils comportent trois phases<br />

successives.<br />

Correction des troubles métaboliques<br />

Il faut tout d’abord corriger les troubles métaboliques, en<br />

urgence, avant tout geste chirurgical, s’ils engagent le pronostic<br />

vital. Ils comprennent essentiellement l’hyperkaliémie supérieure<br />

ou égale à 6,5 mEq/ml (risque de troubles du rythme<br />

cardiaque mortels), mais parfois également l’hyperhydratation<br />

avec surcharge hydrosodée à l’origine d’un œdème pulmonaire,<br />

ou une acidose majeure (réserve alcaline inférieure à<br />

10 mmol/l). L’épuration extrarénale peut être effectuée soit par<br />

hémodialyse, soit, plus rarement, par dialyse péritonéale.<br />

Drainage en urgence du haut appareil urinaire<br />

Cette phase thérapeutique est réalisée d’emblée ou après<br />

épuration extrarénale en cas de troubles métaboliques mettant<br />

en jeu le pronostic vital. Le drainage est effectué soit par voie<br />

rétrograde (sonde urétérale simple ou une sonde double J), soit<br />

par néphrostomie percutanée. Les avantages et les inconvénients<br />

de ces différents types de drainage, guidant le choix,<br />

figurent dans le Tableau 1. En résumé, la néphrostomie percutanée<br />

peut être réalisée soit en cas d’échec de drainage rétro-<br />

Tableau 1.<br />

Caractéristiques des différents types de drainage.<br />

Type de<br />

drainage<br />

grade soit, de principe, dans certains centres en raison de ses<br />

avantages (anesthésie locale possible, pas de nécessité de<br />

franchir l’obstacle limitant le risque de fausse route).<br />

Mise en place, par voie rétrograde endoscopique, d’une sonde<br />

urétérale simple ou d’une sonde autostatique interne en<br />

double J<br />

Elle peut être réalisée dans les anuries des compressions<br />

rétropéritonéales par fibrose, idiopathique ou périanévrismale,<br />

ou par masse ganglionnaire. Ce sera une bonne solution<br />

d’attente dans certains types de calculs : le cathéter urétéral<br />

permet de dériver les urines avant une intervention, ce qui<br />

laisse quelquefois le temps aux réanimateurs de corriger les<br />

troubles métaboliques et de traiter une éventuelle infection. Le<br />

choix entre sonde double J et sonde urétérale simple dépend de<br />

l’aspect des urines (troubles) ou d’une pyélonéphrite associée.<br />

En effet, dans ce cas, il est plus prudent de mettre en place une<br />

sonde urétérale qui, du fait de son drainage externe, permet une<br />

meilleure surveillance et ainsi d’éviter une obstruction prolongée<br />

de la sonde passant inaperçue en cas de sonde double J. Le<br />

drainage rétrograde n’est pas toujours possible et, parfois, la<br />

sonde urétérale ne peut franchir l’obstacle. Dans ces cas, le<br />

drainage peut être réalisé directement au niveau des voies<br />

excrétrices intrarénales par néphrostomie percutanée.<br />

Néphrostomie percutanée<br />

Le repérage idéal se fait par échographie, la ponction du rein,<br />

puis la dilatation du trajet, permettant de mettre en place une<br />

dérivation transcutanée par sonde type mono J (« pigtail »). Il<br />

est préférable d’obtenir un trajet transparenchymateux plutôt<br />

que transpyélique, car il y a moins de risque de déplacement<br />

secondaire. La ponction peut être effectuée plus rarement sous<br />

scanner lorsque les mauvaises conditions de repérage du rein<br />

rendent impossible la ponction sous échographie.<br />

Drainage par chirurgie conventionnelle<br />

Le drainage par chirurgie conventionnelle est une autre<br />

possibilité, mais d’indication exceptionnelle : néphrostomie<br />

chirurgicale, voire urétérostomie cutanée uni- ou bilatérale en<br />

cas de cancer pelvien et d’impossibilité de drainage endoscopique<br />

ou percutané.<br />

Surveillance de la diurèse<br />

Elle est capitale après le drainage afin de dépister un syndrome<br />

de « levée d’obstacle » provoqué par une hyperdiurèse<br />

secondaire à la perte de concentrations des urines du (des)<br />

rein(s) en amont de l’obstacle. Cette hyperdiurèse, impose une<br />

compensation adaptée des pertes hydroélectrolytiques, faute de<br />

quoi peut apparaître une déshydratation majeure.<br />

Le traitement étiologique de l’obstacle est envisagé secondairement,<br />

une fois la fonction rénale corrigée.<br />

Sonde double J Sonde urétérale Sonde de néphrostomie<br />

Avantages Pas de drainage externe, meilleure<br />

tolérance<br />

Drainage prolongé possible<br />

Inconvénients Surveillance de l’efficacité du drainage<br />

à la phase aiguë plus difficile<br />

Principales<br />

complications<br />

Obstruction<br />

Incrustations<br />

Rares hématuries peu sévères<br />

Indications Première intention dans certains<br />

centres si pas d’infection associée<br />

Urologie<br />

Surveillance externe, diminue le risque<br />

d’obstruction prolongée (intérêt en<br />

particulier en cas d’infection associée)<br />

Drainage temporaire<br />

Poche de drainage externe<br />

Inconfortable<br />

Pose le plus souvent sous anesthésie locale<br />

Surveillance externe, diminue le risque d’obstruction<br />

prolongée (intérêt en particulier en cas d’infection<br />

associée)<br />

Taux de succès : 90 %<br />

Drainage le plus souvent temporaire<br />

Poche de drainage externe<br />

Déplacement secondaire Risque hémorragique<br />

Première intention dans certains<br />

centres en particulier si infection<br />

associée<br />

Anurie par obstacle de la voie excrétrice 18-069-E-20<br />

Contre-indiquée si troubles de la coagulation<br />

Déplacement secondaire<br />

Échec de drainage rétrograde ou première intention dans<br />

certains centres<br />

5


18-069-E-20 Anurie par obstacle de la voie excrétrice<br />

Traitement étiologique<br />

L’urgence étant passée, certains problèmes vont se poser en<br />

fonction des étiologies.<br />

Anurie obstructive et cancers pelviens<br />

Les cancers pelviens représentent une des principales causes<br />

d’anurie obstructive. Peu d’études sont disponibles concernant<br />

la répartition des organes impliqués. Au début des années 1990,<br />

Colombeau et al. [21] relevaient les étiologies suivantes : cancers<br />

génitaux (35 %), cancers de la prostate (25 %), cancers de la<br />

vessie (23 %), cancers digestifs (15 %).<br />

Anurie et cancer génital<br />

Tous les cancers gynécologiques pelviens peuvent être à<br />

l’origine d’une anurie obstructive dans leurs stades avancés :<br />

le cancer du col utérin à partir du stade IIIB (cancer du col et<br />

rein muet) jusqu’au stade IV (extension au-delà du petit<br />

bassin ou envahissement de la vessie et/ou du rectum) (selon<br />

la classification de la Fédération internationale de gynécologie<br />

obstétrique [FIGO]) ;<br />

le cancer de l’endomètre stade III (cancer étendu au-delà de<br />

l’utérus) ou stade IV (envahissement vésical ou digestif) (FIGO<br />

1989). Tout comme les sarcomes utérins à partir du stade III ;<br />

les cancers ovariens dès le stade II (tumeur limitée au pelvis)<br />

et au-delà les stades III et IV (tumeur limitée à l’abdomen ou<br />

métastatique).<br />

Le bilan de tous ces cancers ainsi que leur prise en charge<br />

gynécologique répondent aux recommandations de la Société<br />

française d’oncologie gynécologique (SFOG) [22] et comprennent<br />

un examen clinique sous anesthésie générale, le dosage de<br />

marqueurs (SCC, CA125, CA19-9, antigène carcinoembryonnaire<br />

[ACE]), un bilan d’imagerie (IRM abdominopelvienne,<br />

radiopulmonaire, positon emission tomography-scan [PET-scan]).<br />

La prise en charge gynécologique de ces cancers avancés<br />

consiste le plus souvent en une association thérapeutique<br />

comprenant de la radiothérapie externe, de la curiethérapie<br />

utérovaginale, de la chimiothérapie et de la chirurgie généralement<br />

secondaire sauf pour les cancers ovariens.<br />

La dérivation urinaire par sonde double J ou néphrostomie,<br />

en dehors de tout contexte d’urgence, peut être effectuée lors de<br />

l’examen sous anesthésie générale (AG) et comprend une<br />

cystoscopie avec éventuelles biopsies vésicales. Un capital<br />

néphronique maximal est conseillé en cas de chimiothérapie<br />

par sels de platine. Le mode de dérivation urinaire est à revoir<br />

secondairement en fonction des résultats carcinologiques et de<br />

l’attitude chirurgicale gynécologique allant parfois jusqu’à la<br />

réalisation d’une dérivation supravésicale type Bricker lors d’une<br />

éventuelle exentération pelvienne.<br />

Anurie et cancer de la prostate<br />

L’anurie constitue un accident évolutif souvent terminal du<br />

cancer de la prostate. L’anurie révélatrice des formes localement<br />

avancées et révélatrice du cancer trois fois sur dix il yaune<br />

quinzaine d’années [6] est devenue exceptionnelle dans les pays<br />

pratiquant le dépistage. La surveillance échographique des<br />

patients en échappement hormonal permet maintenant bien<br />

souvent de dériver le haut appareil par sonde double J dès le<br />

début de retentissement sur la voie excrétrice supérieure, avant<br />

l’apparition de l’anurie. Dans les formes révélatrices, l’urgence<br />

uronéphrologique est le plus souvent traitée par la mise en<br />

place d’une néphrostomie percutanée. La poursuite du traitement<br />

passe par une corticothérapie associée à un blocage<br />

androgénique et un drainage par sonde double J après résection<br />

endoscopique du trigone, le plus souvent envahi. L’obstacle<br />

urétéral peut également être en rapport avec une extension<br />

extraprostatique au niveau de l’aileron séminal ou encore avec<br />

une masse ganglionnaire. Lorsque le drainage par sonde double<br />

J est impossible, une néphrostomie est laissée en place le temps<br />

que l’hormonothérapie lève l’obstacle en général en 6 à<br />

8 semaines, ce qui est attesté par une pyélographie descendante<br />

et par l’absence d’altération de la fonction rénale lors du<br />

clampage de la néphrostomie.<br />

Anurie et cancer de la vessie<br />

Il s’agit d’un envahissement du trigone en général soit<br />

bilatéral, soit unilatéral sur rein unique. Lorsqu’une tumeur<br />

vésicale est suspectée être la cause d’une anurie obstructive à<br />

l’échographie (ou par le tableau clinique : hématurie récidivantes<br />

sans contexte lithiasique radiologique), le drainage du haut<br />

appareil urinaire est le plus souvent effectué en urgence par<br />

sonde de néphrostomie [23] . En effet, la reperméabilisation des<br />

méats urétéraux lors de la résection endoscopique peut être<br />

difficile. Elle est plus aisée secondairement avec une néphrostomie<br />

en place, sous contrôle radiologique avec pyélographie<br />

descendante et instillation de bleu par la néphrostomie. Une<br />

fois le bilan d’extension réalisé, si une cystectomie est indiquée,<br />

le remplacement vésical nécessite une récupération totale de la<br />

fonction rénale, sinon, une dérivation supravésicale type Bricker<br />

reste l’option de choix. Chez les patients pour lesquels une<br />

cystectomie n’est pas envisageable pour une tumeur massivement<br />

localement avancée, une dérivation supravésicale palliative<br />

peut également être envisagée.<br />

Anurie et cancer du rectum<br />

L’anurie n’est pas une complication fréquente de l’évolution<br />

des cancers rectosigmoïdiens : 5 % seulement des cancers se<br />

compliquent d’anurie [6] . L’attitude vis-à-vis des dérivations<br />

urinaires est la même qui est adoptée pour les cancers génitaux.<br />

Anurie obstructive et calculs<br />

Anurie obstructive et calculs uriques<br />

La lithiase urique évolue souvent sur un terrain fragile, chez<br />

un patient âgé, obèse, porteur de comorbidités. Il s’agit de<br />

calculs volontiers multiples, et donc parfois bilatéraux qu’on<br />

peut espérer dissoudre. Les urines ayant été dérivées, on<br />

entreprend une alcalinisation, soit in situ par une néphrostomie,<br />

soit par voie générale chez un patient porteur de sonde<br />

double J. La dissolution des calculs est, en règle, obtenue dans<br />

un délai de 5 jours en fonction du volume des calculs, lors<br />

d’une alcalinisation in situ contre 3 semaines en cas d’alcalinisation<br />

par voie générale. En cas d’échec, l’urétéroscopie avec<br />

lithotripsie in situ reste l’option de choix.<br />

Anurie obstructive et calculs calciques<br />

Le traitement des calculs urétéraux sur rein anatomiquement<br />

ou fonctionnellement unique ou des calculs bilatéraux obstructifs<br />

est le plus souvent différé et envisagé lorsque le haut<br />

appareil a été drainé par sonde de néphrostomie ou sonde<br />

urétérale. La lithotripsie extracorporelle ou l’urétéroscopie, avec<br />

lithotripsie in situ, permettent de traiter successivement les<br />

calculs « à froid » dans des conditions idéales (ECBU stérile,<br />

intervention programmée).<br />

Anurie obstructive et calcul compliqué de pyélonéphrite<br />

Les complications infectieuses de l’obstacle lithiasique du<br />

haut appareil urinaire donnent une gravité particulière à ce<br />

tableau clinique, qui représente l’une des principales causes de<br />

décès par choc septique [24] .<br />

La lithiase urique est le plus souvent en cause, la prise en<br />

charge de ces malades fragiles nécessite de drainer en urgence<br />

une pyonéphrose sur obstacle par néphrostomie percutanée ou<br />

par sonde urétérale [6] .<br />

La néphrostomie percutanée est préférable, car elle permet un<br />

drainage de meilleure qualité (calibre de la sonde) et prolongé,<br />

le temps nécessaire au traitement de la pyélonéphrite avant de<br />

pouvoir envisager le traitement du(des) calcul(s) [6] .<br />

Anurie obstructive et fibrose rétropéritonéale<br />

L’anurie est un mode de découverte relativement fréquent de<br />

la fibrose rétropéritonéale. Une caractéristique particulière<br />

toutefois de cette étiologie reste la possibilité pratiquement<br />

constante de pouvoir monter des sondes par voie endoscopique.<br />

Lorsque les sondes en double J ont pu être mises en place, la<br />

plupart des auteurs conseillent la mise en route d’un traitement<br />

médical par corticothérapie à doses filées sur plusieurs mois. En<br />

6 Urologie


.<br />

cas de récidive, l’intrapéritonisation des uretères reste une<br />

excellente option thérapeutique, éventuellement par<br />

cœlioscopie.<br />

■ Conclusion<br />

L’anurie par obstacle est une urgence néphro-urologique dont<br />

les causes les plus fréquentes sont le calcul, ou la compression<br />

urétérale extrinsèque le plus souvent d’origine néoplasique.<br />

Il faut dépister des troubles métaboliques nécessitant une<br />

correction immédiate ou une épuration extrarénale en urgence.<br />

L’échographie rénale permet de confirmer le diagnostic dans<br />

la plupart des cas.<br />

Le traitement des anuries obstructives comporte trois étapes<br />

selon le degré d’urgence : le traitement des troubles métaboliques<br />

provoqués par l’insuffisance rénale aiguë, le drainage de la<br />

voie excrétrice obstruée, le traitement de la cause de l’obstacle.<br />

“ Point important<br />

Critères de corrections des troubles métaboliques<br />

en urgence avant drainage<br />

Hyperkaliémie ≥ 6.5 mmol/l ou retentissement ECG<br />

Surcharge hydrosodée<br />

Acidose sévère (pH


Plan<br />

Atteintes rénales des rhumatismes<br />

inflammatoires<br />

L. Tricot<br />

Les atteintes rénales au cours des rhumatismes inflammatoires ne sont pas rares. Les rhumatologues sont<br />

amenés à voir des manifestations ou des complications rénales chez leurs patients, et des atteintes<br />

articulaires peuvent survenir chez des patients suivis en néphrologie. Ces atteintes rénales doivent être<br />

connues car elles grèvent le pronostic vital de maladies plus connues pour leur morbidité fonctionnelle.<br />

Leur dépistage actif est donc capital pour mettre en place les mesures thérapeutiques adaptées, et limiter<br />

leurs conséquences et une évolution défavorable vers l’insuffisance rénale. Plusieurs circonstances de<br />

découverte sont possibles. Il peut s’agir de l’exploration d’une atteinte rénale apparaissant au cours<br />

d’une maladie systémique ; l’histologie rénale peut permettre de classer la maladie et guider sa prise en<br />

charge thérapeutique. Il peut également s’agir d’une complication rénale émaillant le cours d’un<br />

rhumatisme connu. Plusieurs maladies systémiques responsables d’atteintes articulaires et rénales<br />

associées ont déjà été traitées dans différents articles de l’EMC, telles que le lupus érythémateux<br />

systémique, la sclérodermie ou les vascularites. Nous n’y reviendrons pas. Nous verrons les atteintes<br />

rénales des rhumatismes inflammatoires (polyarthrite rhumatoïde, spondylarthrite ankylosante,<br />

syndrome de Sjögren) et d’affections systémiques diverses telles que sarcoïdose, goutte, connectivites<br />

mixtes. Les complications des traitements de ces maladies chroniques sont aussi abordées, avec le souci<br />

de prendre en compte des données récentes concernant les nouvelles thérapeutiques utilisées. Plusieurs<br />

spécialistes peuvent être impliqués dans la prise en charge de ces patients, rhumatologue, interniste et<br />

néphrologue, et une bonne collaboration est capitale pour une prise en charge optimale de patients aux<br />

frontières de chaque spécialité.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Néphropathie ; Rhumatismes ; Amylose<br />

Introduction 1<br />

Atteintes rénales associées aux rhumatismes inflammatoires 2<br />

Polyarthrite rhumatoïde 2<br />

Spondylarthrite ankylosante 4<br />

Syndrome de Gougerot-Sjögren 4<br />

Atteinte rénale au cours d’affections systémiques diverses 6<br />

Sarcoïdose 6<br />

Néphropathie goutteuse 6<br />

Connectivites mixtes 8<br />

Polymyosites/dermatopolymyosites 8<br />

Toxicité rénale des traitements utilisés en rhumatologie<br />

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) et inhibiteurs<br />

8<br />

de la cyclo-oxygénase 2 8<br />

Agents modificateurs des rhumatismes 9<br />

Conclusion 10<br />

■ Introduction<br />

Les atteintes rénales au cours des rhumatismes inflammatoires<br />

ne sont pas rares. Les rhumatologues sont amenés à voir des<br />

manifestations ou des complications rénales chez leurs patients,<br />

et des atteintes articulaires peuvent survenir chez des patients<br />

Néphrologie<br />

18-055-E-10<br />

suivis en néphrologie. Différentes néphropathies sont décrites et<br />

ont été reconnues comme complications potentielles de maladies<br />

articulaires. Certaines ont d’abord été considérées comme<br />

fortuites, puis, avec la répétition des cas rapportant ces associations,<br />

la possibilité d’un lien entre les deux maladies, rénale et<br />

articulaire, s’est fait jour. Ces complications rénales doivent être<br />

connues car elles grèvent le pronostic vital de maladies connues<br />

pour leur morbidité fonctionnelle. Leur dépistage actif est donc<br />

capital pour mettre en place les mesures thérapeutiques adaptées<br />

et limiter leurs conséquences, notamment une évolution<br />

défavorable vers l’insuffisance rénale. Plusieurs circonstances de<br />

découverte sont possibles. Il peut s’agir de l’exploration d’une<br />

atteinte rénale apparaissant au cours d’une maladie systémique ;<br />

la décision d’une exploration rénale approfondie par une<br />

biopsie laisse peu de doute, et le diagnostic histologique rénal<br />

permet de classer la maladie et de guider sa prise en charge<br />

thérapeutique. Il peut également s’agir d’une complication<br />

rénale émaillant le cours d’un rhumatisme connu, et la biopsie<br />

rénale doit être discutée en tenant compte du bénéfice attendu<br />

pour le patient et des modifications thérapeutiques attendues<br />

selon le résultat histologique.<br />

Plusieurs maladies systémiques responsables d’atteintes<br />

articulaires et rénales associées ont déjà été traitées dans cet<br />

ouvrage, telles que le lupus érythémateux systémique, la<br />

sclérodermie ou les vascularites. Nous n’y reviendrons pas. Nous<br />

insisterons davantage sur les atteintes rénales des rhumatismes<br />

inflammatoires et d’affections systémiques diverses telles que<br />

1


18-055-E-10 Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires<br />

sarcoïdose, syndrome de Sjögren. Les complications des traitements<br />

de ces maladies chroniques sont aussi abordées, avec le<br />

souci de prendre en compte des données récentes concernant<br />

les nouvelles thérapeutiques utilisées.<br />

Plusieurs spécialistes peuvent être impliqués dans la prise en<br />

charge de ces patients, rhumatologue, interniste et néphrologue,<br />

et une bonne collaboration est capitale pour une prise en<br />

charge optimale des patients aux frontières de chaque spécialité.<br />

■ Atteintes rénales associées<br />

aux rhumatismes inflammatoires<br />

Polyarthrite rhumatoïde<br />

Plusieurs types d’atteintes rénales peuvent émailler le cours<br />

évolutif de la polyarthrite rhumatoïde. La néphrotoxicité<br />

induite par les traitements de la polyarthrite est la cause la plus<br />

fréquente d’atteinte rénale. Une cause importante de néphropathie<br />

est l’amylose secondaire, bien qu’en diminution depuis<br />

quelques années [1] (cf. infra). Enfin, différents types de glomérulonéphrite<br />

peuvent survenir, glomérulonéphrite mésangiale et<br />

glomérulonéphrite extramembraneuse le plus souvent, puis,<br />

beaucoup plus rarement, glomérulonéphrite segmentaire<br />

nécrosante à croissants similaire à celle rencontrée au cours des<br />

vascularites.<br />

La présence d’une atteinte rénale est une cause reconnue de<br />

morbidité et de mortalité chez les patients atteints de polyarthrite<br />

rhumatoïde, en troisième position des causes de décès après<br />

les causes cardiovasculaires et infectieuses [2] .<br />

Prévalence de l’atteinte rénale<br />

au cours de la polyarthrite rhumatoïde<br />

La prévalence de l’atteinte rénale au cours de la polyarthrite<br />

rhumatoïde a d’abord été établie à partir de registres mentionnant<br />

la ou les causes de décès chez les patients polyarthritiques.<br />

L’insuffisance rénale figurait comme cause de décès chez 3%à<br />

12 % des patients, une atteinte amyloïde étant responsable dans<br />

1,9%à9%descas. Les études autopsiques rapportaient une<br />

insuffisance rénale dans 9%à27%descas, une amylose dans<br />

8%à17% [3] . Dans les séries les plus anciennes, une glomérulonéphrite<br />

membranoproliférative était rapportée dans 13 % à<br />

63 % des cas, à une époque où les infections étaient très<br />

fréquentes et probablement en cause. Les études cliniques ont<br />

d’abord recherché la présence d’une « glomérulonéphrite<br />

rhumatoïde » spécifique, sans en trouver sur des séries de<br />

biopsies systématiques. Par la suite, des études ciblées chez des<br />

patients qui présentaient des anomalies urinaires significatives<br />

ont montré la présence de lésions rénales.<br />

Types d’atteintes histologiques rénales<br />

au cours de la polyarthrite rhumatoïde<br />

Dans une série rétrospective de 110 patients biopsiés entre<br />

1976 et 1982, les atteintes rénales le plus fréquemment associées<br />

à la polyarthrite rhumatoïde étaient une glomérulonéphrite<br />

mésangiale chez 40 patients (36 %) avec dépôts d’immunoglobulines<br />

(Ig) M le plus souvent, une amylose chez 33 patients (30 %),<br />

une glomérulonéphrite extramembraneuse chez 19 patients<br />

(17 %). Les autres lésions étaient beaucoup moins fréquentes.<br />

Dans quatre cas, une glomérulonéphrite segmentaire et focale<br />

avec ou sans croissants était trouvée, liée à une vascularite dans<br />

un cas ou à une polyarthrite rhumatoïde systémique dans un cas.<br />

Trois patients avaient des lésions glomérulaires minimes, dans<br />

deux cas associées aux sels d’or. Enfin, une néphrite interstitielle<br />

aiguë au kétoprofène est apparue sous forme d’insuffisance rénale<br />

aiguë [4] .<br />

La glomérulonéphrite mésangiale était révélée par une<br />

hématurie microscopique isolée le plus souvent, une protéinurie<br />

ou la combinaison des deux, habituellement dépourvue de<br />

syndrome néphrotique ou d’insuffisance rénale.<br />

L’amylose, présente chez 33 patients, se manifestait par un<br />

syndrome néphrotique chez 16 patients et une protéinurie<br />

abondante chez 12 patients. Tous les patients porteurs d’un<br />

syndrome néphrotique et d’une insuffisance rénale avaient une<br />

amylose histologique (Fig. 1A, B). L’amylose AA est également<br />

rencontrée au cours d’autres rhumatismes inflammatoires (cf.<br />

infra).<br />

Figure 1. Biopsie rénale. Amylose glomérulaire.<br />

A. Microscopie optique, trichrome de Masson (grossissement × 100).<br />

Dépôts mésangiaux et vasculaires.<br />

B. Coloration au rouge Congo. Biréfringence en lumière polarisée.<br />

La glomérulonéphrite extramembraneuse était révélée par une<br />

protéinurie abondante, survenant précocement dans l’évolution<br />

de la polyarthrite rhumatoïde en comparaison avec la protéinurie<br />

liée à l’amylose (3,8 ± 7,3 ans versus 17 ± 7 ans).<br />

Dans 18 cas sur 19, elle était associée aux traitements par<br />

D-pénicillamine et/ou aux sels d’or [4] .<br />

L’absence de corrélation anatomoclinique stricte justifie la<br />

biopsie rénale devant une protéinurie isolée ou une hématurie<br />

qui peut être le témoin d’une glomérulonéphrite mésangiale<br />

dans deux tiers des cas, mais aussi d’une glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse (20 %) ou d’une amylose (20 %). Le risque<br />

hémorragique inhérent à la biopsie rénale et plus élevé en cas<br />

d’amylose fait préférer en première intention la biopsie d’un<br />

autre site, en particulier les glandes salivaires accessoires qui<br />

donnent un résultat positif dans 60 % des cas.<br />

Une vascularite rénale a été rapportée en association avec la<br />

polyarthrite rhumatoïde, touchant les vaisseaux de petit et de<br />

moyen calibres. Des anomalies rénales sont présentes chez 25 %<br />

des patients porteurs d’une vasculite rhumatoïde, mais peu de<br />

données histologiques sont disponibles. Dans les vascularites<br />

sévères, il peut exister une glomérulonéphrite nécrosante mais<br />

de façon rare : c’est la particularité de la vascularite rhumatoïde<br />

d’épargner généralement le rein, même dans ses formes nécrosantes.<br />

Des glomérulonéphrites nécrosantes à dépôts, des<br />

glomérulonéphrites prolifératives et des glomérulonéphrites<br />

extracapillaires à croissants avec dépôts ont été rapportées sous<br />

forme de cas cliniques.<br />

2 Néphrologie


Évolution clinique des néphropathies<br />

au cours de la polyarthrite rhumatoïde<br />

Dans une étude observationnelle prospective portant sur<br />

1 000 patients suivis pour une polyarthrite rhumatoïde âgés de<br />

plus de 40 ans appariés sur l’âge et le sexe à 1 000 patients non<br />

porteurs de polyarthrite rhumatoïde, suivis pendant 10 ans, un<br />

excès de mortalité d’origine infectieuse, cardiovasculaire et par<br />

néphropathie était observé chez les patients « polyarthrite<br />

rhumatoïde ». Au cours du suivi, 31 décès par amylose ont été<br />

observés versus un décès dans le groupe contrôle, et 42 décès<br />

par néphropathie versus un dans le groupe contrôle. Les<br />

principales causes rénales de décès, à une époque où les agents<br />

anti-TNF n’étaient pas utilisés, étaient une insuffisance rénale<br />

chronique et des infections rénales [5] .<br />

Une étude plus récente a comparé la mortalité dans une<br />

population de 604 patients polyarthritiques appariés sur l’âge et<br />

le sexe à 457 contrôles sans polyarthrite rhumatoïde. Les<br />

auteurs se sont intéressés au type des manifestations rénales<br />

particulièrement associées à un pronostic défavorable. La<br />

mortalité globale était augmentée d’un facteur 1,78 chez les<br />

604 patients « polyarthrite rhumatoïde » par rapport aux<br />

457 contrôles. Dans le groupe « polyarthrite rhumatoïde », un<br />

excès de mortalité apparaissait en cas de protéinurie (× 3,54),<br />

d’hématurie/protéinurie combinées (× 4,45), d’insuffisance<br />

rénale chronique (× 3,74) ou de microalbuminurie (× 2,77) par<br />

comparaison aux patients sans anomalie rénale. En revanche,<br />

une hématurie isolée, une insuffisance rénale sans anomalie<br />

urinaire ou une bactériurie n’étaient pas prédictives de mortalité.<br />

L’amylose était associée à un surrisque de décès (odds ratio<br />

× 2,31), responsable de 7,5 % des décès, alors que la glomérulonéphrite<br />

mésangiale n’était pas prédictive de mortalité [2] .<br />

Cette cohorte a de nouveau été étudiée en comparant les<br />

103 patients du groupe « polyarthrite rhumatoïde » qui avaient<br />

une néphropathie avec 102 patients porteurs de polyarthrite<br />

rhumatoïde sans anomalie rénale, appariés sur l’âge, le sexe et<br />

la durée d’évolution de la polyarthrite rhumatoïde. L’âge moyen<br />

des patients était de 59 ± 13 ans et la durée d’évolution de la<br />

polyarthrite rhumatoïde de 15 ± 10 ans au début du suivi. Le<br />

suivi moyen a été de 13 ans, entre 1988 et 2003. À la fin du<br />

suivi, une insuffisance rénale définie par une créatininémie<br />

supérieure à 200 µmol/l était présente chez 8 % des patients qui<br />

avaient une hématurie isolée initialement, 30 % des patients<br />

ayant une protéinurie isolée et 57 % des patients présentant une<br />

combinaison des deux au début du suivi. Une amylose était<br />

présente chez 19 % des patients dans le groupe « néphropathie<br />

» alors qu’elle est apparue chez 4 % des patients du groupe<br />

contrôle. Une insuffisance rénale terminale est apparue chez dix<br />

patients sur les 103 du groupe « néphropathie » (dont huit<br />

étaient dues à l’amylose) versus 2 % des contrôles. Cette étude<br />

confirme que la protéinurie est grevée d’un pronostic défavorable,<br />

associée à une évolution vers l’insuffisance rénale chronique<br />

dans 60 % des cas, probablement liée à de l’amylose. Il n’en est<br />

pas de même pour l’hématurie, qui n’évolue vers l’insuffisance<br />

rénale que chez 20 % des patients. Par ailleurs, dans cette<br />

cohorte, une néphropathie apparaissait dans les 10 à 15 premières<br />

années d’évolution de la polyarthrite. Passé ce délai, les<br />

patients développaient rarement une atteinte rénale [6] .<br />

Amylose AA<br />

Épidémiologie<br />

L’amylose est la complication rénale la plus fréquente au<br />

cours des rhumatismes inflammatoires. Il s’agit d’une amylose<br />

secondaire à une inflammation chronique, caractérisée par des<br />

dépôts extracellulaires de fibrilles de protéine AA (amyloïd<br />

associated). Cette protéine dérive de la protéine plasmatique SAA<br />

(serum amyloid A) circulante, sécrétée à des taux très élevés lors<br />

de la phase aiguë de l’inflammation. La concentration sérique<br />

de SAA est élevée de façon permanente dans les infections<br />

chroniques, les maladies inflammatoires, et certains cancers<br />

pulmonaires et coliques. Sa synthèse est sous la dépendance des<br />

cytokines pro-inflammatoires interleukines 1 et 6, et tumor<br />

necrosis factor (TNF). Bien qu’elle soit indispensable au développement<br />

de l’amylose, cette protéine n’est pas suffisante et<br />

certains facteurs génétiques sont impliqués. L’atteinte rénale est<br />

prédominante et constitue une cause importante de mortalité<br />

Néphrologie<br />

Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires 18-055-E-10<br />

au cours des rhumatismes inflammatoires. Elle paraît en net<br />

recul récemment, en rapport avec les nouveaux traitements de<br />

fond utilisés.<br />

Le diagnostic de l’amylose est histologique, sur des biopsies<br />

rectales ou par aspiration de la graisse mésentérique. La réalisation<br />

d’une biopsie des glandes salivaires accessoires semble plus<br />

simple qu’une biopsie de la graisse abdominale. En cas d’anomalies<br />

urinaires, la biopsie rénale montre des dépôts amyloïdes<br />

glomérulaires, vasculaires ou tubulaires, anhistes, caractérisés par<br />

leur biréfringence en lumière polarisée après coloration au rouge<br />

Congo. Les anticorps anti-SAA permettent d’affirmer le caractère<br />

AA de l’amylose [7] .<br />

Clinique<br />

Les manifestations rénales de l’amylose sont une protéinurie<br />

progressive allant jusqu’au syndrome néphrotique et une<br />

insuffisance rénale progressive. L’hématurie microscopique est<br />

rare (de 5 % à 10 % des cas). L’hypertension artérielle est<br />

possible dans 20 % à 60 % des cas.<br />

Le rein est la localisation clinique la plus fréquente de la<br />

maladie (90 % des amyloses AA). L’atteinte amyloïde apparaît<br />

après plusieurs années d’évolution de la maladie inflammatoire<br />

causale, 200 mois en moyenne. D’autres organes sont atteints :<br />

le foie, la rate, le tube digestif, le cœur et les glandes exocrines.<br />

Les facteurs pronostiques sont le degré d’insuffisance rénale, le<br />

contrôle de la maladie sous-jacente, la présence d’une cardiopathie<br />

si l’évolution est ancienne. La médiane de survie est<br />

comprise entre 2 et 4 ans à partir de l’installation des signes<br />

cliniques [7] .<br />

Maladies associées<br />

Polyarthrite rhumatoïde. C’est la plus fréquente des causes<br />

d’amylose AA dans les pays occidentalisés. Sa fréquence anatomique<br />

est estimée entre 5 % et 10 % des patients vivants. La<br />

moyenne d’âge des patients est de 56 à 60 ans. Son délai moyen<br />

d’apparition est de 16 ans (extrême entre 1à41ans) après le<br />

diagnostic de polyarthrite. L’expression clinique est rare<br />

(1 %) [8] . L’amylose AA est une cause de mortalité importante<br />

dans la polyarthrite rhumatoïde : 31 malades sont décédés<br />

d’amylose sur les 1 000 suivis pendant une période de 10 ans<br />

dans l’étude de Laakso et al. [5] .<br />

Arthrite chronique juvénile. C’est la première cause d’amylose<br />

AA chez l’enfant. Elle est présente dans 5%à20%descas.<br />

Le délai d’apparition est de 9 ans en moyenne (extrême entre<br />

1 et 23 ans). Le signe le plus précoce est une protéinurie. La<br />

mortalité était de 30 % à 7 ans et de 50 % à 10 ans avant<br />

l’utilisation des traitements cytotoxiques [9] .<br />

Spondylarthrite ankylosante. L’amylose est rare au cours de<br />

la spondylarthrite ankylosante. Elle survient dans les formes<br />

sévères à début précoce et périphérique, généralement de 7 à<br />

15 ans après le début de la maladie (extrêmes entre 2 et<br />

45 ans) [10, 11] . C’est une des causes de décès au cours de la<br />

spondylarthrite ankylosante. Devant une protéinurie, la biopsie<br />

rénale est utile pour distinguer une amylose d’une maladie de<br />

Berger qui peut aussi s’associer à la spondylarthrite (cf. infra).<br />

Autres maladies inflammatoires. Elles représentent une<br />

faible part des causes d’amylose AA qui en compliquent les<br />

formes sévères. Il s’agit de la maladie de Still de l’adulte [12] ,du<br />

rhumatisme psoriasique [13] et de la maladie de Behçet [14] .<br />

Traitement<br />

Aucun traitement n’agit directement sur la formation de<br />

l’amylose AA. La production de SAA peut parfois être réduite<br />

par le traitement de la maladie inflammatoire sous-jacente [15] .<br />

Les agents alkylants, le méthotrexate ou la colchicine ont été<br />

utilisés avec succès dans des cas anecdotiques ou de petites<br />

séries, mais il n’existe pas d’étude contrôlée démontrant<br />

clairement leur efficacité. Les traitements anti-TNF ont montré<br />

une efficacité spectaculaire sur la maladie rhumatologique, mais<br />

l’évolution de l’atteinte rénale sous ces traitements a été<br />

rarement étudiée. Une étude française rétrospective a rapporté,<br />

chez 15 patients traités par anti-TNF et porteurs d’une amylose<br />

rénale prouvée, une stabilisation de l’atteinte rénale chez cinq<br />

patients, et une amélioration franche et persistante de l’atteinte<br />

rénale chez trois patients. La bonne tolérance du traitement<br />

chez les autres patients en faisait un traitement prometteur de<br />

l’amylose secondaire aux rhumatismes inflammatoires [16] .<br />

3


18-055-E-10 Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires<br />

Un traitement d’une nouvelle classe, l’éprodisate, apparenté<br />

aux glycosaminoglycanes, semble prometteur. Les interactions<br />

entre les protéines amyloïdes et les glycosaminoglycanes<br />

promeuvent l’assemblage des fibrilles et stabilisent l’amylose. En<br />

modifiant ces interactions, ce traitement proche du sulfate<br />

d’héparine inhibe le développement de l’amylose dans les tissus<br />

dans des modèles d’amylose de souris. Chez l’homme, l’éprodisate<br />

a montré son efficacité pour ralentir la progression de<br />

l’insuffisance rénale sans éviter l’évolution vers l’insuffisance<br />

rénale terminale ni diminuer la mortalité [17] . Ces données<br />

ouvrent la voie vers de nouveaux modes d’action thérapeutiques<br />

et devront être confirmées.<br />

“ Points essentiels<br />

Indications à la biopsie rénale au cours des<br />

rhumatismes inflammatoires<br />

Aide au diagnostic de la maladie systémique sousjacente<br />

Évolution atypique de la maladie rénale, contrastant<br />

avec l’évolution des néphropathies habituellement<br />

associées :<br />

C hématurie microscopique isolée : glomérulonéphrite<br />

mésangiale ou à IgA, ou glomérulonéphrite<br />

nécrosante ?<br />

C protéinurie isolée : glomérulonéphrite mésangiale<br />

ou amylose ?<br />

C insuffisance rénale isolée ou rapidement<br />

progressive : glomérulonéphrite nécrosante ?<br />

En cas de maladie inflammatoire agressive avec atteinte<br />

rénale précoce, pour poser l’indication d’un traitement<br />

dirigé contre l’amylose (éprodisate)<br />

Lorsqu’il existe un élément associé ou un facteur<br />

confondant (pic monoclonal, hépatite, cryoglobulinémie)<br />

Spondylarthrite ankylosante<br />

Épidémiologie<br />

L’atteinte rénale est considérée comme rare au cours de la<br />

spondylarthrite ankylosante, mais aucune série importante ne<br />

permet de préciser sa fréquence exacte. L’étude de Radford et<br />

Smith et celle de Braun ont montré que la mortalité par atteinte<br />

rénale est plus importante chez les spondylarthritiques que dans<br />

la population témoin [18-20] . Si elle est recherchée systématiquement,<br />

l’atteinte rénale est plus fréquente qu’elle n’était estimée<br />

antérieurement. Dans une étude transversale de 40 patients,<br />

Vilar et al. ont trouvé des anomalies du sédiment urinaire chez<br />

14 patients (hématurie microscopique, microalbuminurie) et<br />

une élévation de la créatininémie [21] . Les causes les plus<br />

fréquentes sont l’amylose rénale AA et la glomérulonéphrite à<br />

dépôts mésangiaux d’IgA ou maladie de Berger, en dehors des<br />

néphropathies interstitielles chroniques avec ou sans nécrose<br />

papillaire liées aux traitements antalgiques et antiinflammatoires<br />

prolongés [11] .<br />

Néphropathies associées à la spondylarthrite<br />

ankylosante<br />

Dans une étude rétrospective tunisienne de 210 cas de<br />

spondylarthrite ankylosante suivis pendant une période de<br />

27 ans, 28 patients ont présenté une atteinte rénale (13,3 %)<br />

dépistée par une bandelette urinaire, une créatininémie et une<br />

protéinurie des 24 heures systématiques. Une hématurie<br />

macroscopique était présente dans quatre cas, une hématurie<br />

microscopique dans huit cas, une protéinurie chez 15 patients,<br />

un syndrome néphrotique chez six patients et une insuffisance<br />

rénale, définie par une créatininémie supérieure à 150 µmol/l,<br />

chez 13 patients. Onze patients ont eu une biopsie rénale : les<br />

lésions histologiques étaient une amylose AA dans six cas, une<br />

néphropathie à IgA dans trois cas, une glomérulonéphrite<br />

endocapillaire dans un cas, des lésions de hyalinose segmentaire<br />

et focale dans un cas, et une néphropathie interstitielle dans un<br />

cas. Une lithiase oxalocalcique a été trouvée chez huit patients.<br />

Dans cette cohorte de patients âgés de 35 ans en moyenne<br />

(extrêmes de 15 et 56 ans), l’âge moyen des patients avec<br />

atteinte rénale était de 43 ans. Deux patients ont évolué vers<br />

l’insuffisance rénale terminale nécessitant le recours à l’épuration<br />

extrarénale [22] . Aucun traitement n’a fait la preuve de son<br />

efficacité.<br />

Néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA<br />

ou maladie de Berger<br />

La néphropathie à IgA est la plus fréquente des glomérulopathies<br />

de l’adulte. Idiopathique dans la majorité des cas, elle peut<br />

aussi s’observer au cours d’affections comportant une anomalie<br />

du métabolisme des IgA (cirrhose éthylique, maladie cœliaque,<br />

dermatite herpétiforme, maladie de Crohn). Son association à la<br />

spondylarthrite ankylosante a été rapportée pour la première<br />

fois en 1975 par Sissons. Depuis, une cinquantaine de cas ont<br />

été rapportés dans la littérature, semblant confirmer une<br />

association non fortuite des deux maladies. Dans 97 % des cas,<br />

il s’agit d’hommes jeunes, d’un âge moyen de 32 ans (de 15 à<br />

55 ans), HLA B27 positifs. La néphropathie survient le plus<br />

souvent plusieurs années après l’atteinte articulaire (de 6 à<br />

9 ans). Elle peut être simultanée ou survenir avant le rhumatisme<br />

chez un quart des patients. Aucun traitement spécifique<br />

de la maladie de Berger associée à la spondylarthrite ankylosante<br />

n’a fait la preuve de son efficacité. La spondylarthrite<br />

ankylosante et la néphropathie à IgA, lorsqu’elles sont associées,<br />

ne présentent aucun caractère distinctif particulier par rapport<br />

à leur forme habituelle lorsqu’elles évoluent isolément. L’évolution<br />

vers une insuffisance rénale terminale est observée dans<br />

25 % des cas. La physiopathologie de ces deux pathologies<br />

impliquerait un défaut de clairance des IgA ou un excès de leur<br />

production par la muqueuse digestive. Les dépôts mésangiaux<br />

sont considérés comme des complexes immuns à IgA. La<br />

présence d’une vascularite cutanée à dépôts d’IgA rapportée<br />

dans quelques observations renforce cette hypothèse.<br />

Autres néphropathies associées<br />

En dehors de l’amylose décrite dans 62 % des cas et de la<br />

néphropathie à IgA dans 30 % des cas, d’autres glomérulopathies<br />

ont été rapportées de façon anecdotique : glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse ; glomérulonéphrite mésangiale à<br />

dépôts de C3 et d’IgM. Des lésions vasculaires particulières ont<br />

été rapportées, de même qu’une association à une fibrose<br />

rétropéritonéale. Une surincidence de lithiases est décrite chez<br />

les patients porteurs de spondylarthrite ankylosante (de 8%à<br />

9 % des cas) [11] .<br />

Syndrome de Gougerot-Sjögren<br />

Une néphropathie peut survenir au cours du syndrome de<br />

Sjögren, primaire ou secondaire à une autre maladie autoimmune.<br />

Les anomalies rénales observées au cours des syndromes<br />

de Sjögren secondaires sont habituellement liées à la<br />

maladie systémique associée, polyarthrite rhumatoïde, lupus<br />

érythémateux disséminé, sclérodermie systémique, polymyosites<br />

ou cirrhose biliaire primitive. Les deux atteintes rénales observées<br />

au cours du syndrome de Sjögren primitif sont l’expression<br />

des anomalies immunologiques de l’affection systémique :<br />

infiltrat inflammatoire des glandes exocrines et maladie à<br />

complexes immuns circulants, donnant lieu respectivement à<br />

une néphropathie interstitielle chronique ou à une glomérulonéphrite<br />

à complexes immuns.<br />

Épidémiologie<br />

La fréquence de l’atteinte rénale diffère dans le syndrome de<br />

Sjögren selon que l’on considère les anomalies clinicobiologiques<br />

spontanées (environ 5 %), l’infiltration rénale histologique<br />

(environ 25 %) ou les anomalies biologiques après test de<br />

sensibilisation (de 30 %à40%) [23, 24] . L’atteinte clinique est<br />

donc rare et les cas rapportés anecdotiques.<br />

Néphropathie interstitielle<br />

Elle est responsable d’anomalies des fonctions tubulaires.<br />

4 Néphrologie


Acidose tubulaire distale<br />

L’acidose tubulaire distale avec hypokaliémie est l’anomalie la<br />

plus fréquente et la plus suggestive. L’acidose est due à un<br />

défaut d’excrétion distale de l’ion hydrogène (H + ). Elle est<br />

caractérisée par une acidose (pH < 7,35) hyperchlorémique<br />

(Cl - > 105 mmol/l) et des urines dont le pH est inapproprié<br />

(pH > 5,5) en regard de l’acidémie. Les cellules intercalaires du<br />

tube collecteur sont considérées comme responsables des<br />

anomalies par l’intermédiaire d’une absence d’expression de la<br />

H + -ATPase à leur membrane apicale [25] .<br />

Les conséquences du défaut d’acidification sont l’hypokaliémie,<br />

l’hypercalciurie et l’hypocitraturie, le diabète insipide<br />

néphrogénique<br />

Hypokaliémie. Une déplétion en sodium et en potassium<br />

accompagne l’acidose tubulaire distale. Les mécanismes en sont<br />

complexes et multiples. Dans le néphron distal, le défaut<br />

d’excrétion des protons favorise l’excrétion préférentielle des<br />

2– 2– –<br />

anions filtrés (PO4 ,SO4 ,Cl ) sous forme de sels de sodium<br />

ou de potassium plutôt que d’acides, faute d’ions H + . L’acidose<br />

diminue la réabsorption proximale du sodium, stimule le<br />

système rénine-angiotensine, et augmente la réabsorption<br />

distale du Na + et la sécrétion de K + : l’effet global est une<br />

hypokaliémie avec kaliurèse abondante et inappropriée.<br />

Hypercalciurie et hypocitraturie. L’hypercalciurie observée<br />

est la conséquence de la mobilisation des tampons osseux dans<br />

la lutte contre l’acidose systémique. L’acidose métabolique<br />

stimule également la réabsorption rénale de citrate dans le<br />

tubule proximal et réduit la réabsorption de calcium dans le<br />

tube distal. Le citrate solubilise le calcium urinaire alors que<br />

l’hypocitraturie, le pH urinaire élevé et l’hypercalciurie contribuent<br />

à la lithogenèse et à la néphrocalcinose. Visible sur un<br />

scanner sans injection, la néphrocalcinose correspond au dépôt<br />

de calcium dans la médullaire rénale.<br />

Diabète insipide néphrogénique. Son mécanisme n’est pas<br />

connu. La polyuropolydipsie peut atteindre de 6à8litres par<br />

jour. Elle doit être distinguée des conséquences du syndrome sec<br />

en démontrant un défaut de concentration des urines.<br />

L’épreuve de restriction hydrique montre qu’en présence d’une<br />

hyperosmolarité plasmatique (> 305 mOsm/l) l’osmolarité<br />

urinaire est inappropriée (trop basse, souvent bien inférieure à<br />

750 mOsm/l) et insensible à l’administration d’arginine vasopressine,<br />

un analogue de l’hormone antidiurétique.<br />

Atteinte tubulaire proximale<br />

Les observations d’atteinte du tubule proximal sont anecdotiques.<br />

Une protéinurie tubulaire, inférieure à 0,5 g/j et<br />

constituée de bêta-2 microglobuline, reflète un défaut<br />

d’absorption proximale de cette protéine de faible poids<br />

moléculaire. Elle est constatée chez 12 % à 46 % des<br />

patients [26] .<br />

Conséquences cliniques de l’acidose<br />

Le profil de la néphropathie interstitielle chronique du<br />

syndrome de Sjögren est peu symptomatique ; il n’y a pas<br />

d’hypertension artérielle, pas d’albuminurie ou d’hématurie à la<br />

bandelette urinaire. Les reins sont de taille et de morphologie<br />

normales. Parfois, il existe une fatigabilité musculaire, et dans<br />

quelques observations une hypokaliémie inférieure à 1,8 mmol/l<br />

a provoqué une tétraparésie et une paralysie respiratoire<br />

réversibles après correction de l’hypokaliémie [27] . Les lithiases et<br />

la néphrocalcinose peuvent se révéler par la migration d’un<br />

calcul. Les calculs sont radio-opaques, de petite taille, multiples<br />

et bilatéraux, et récidivants. Une insuffisance rénale légère à<br />

modérée peut être constatée ; l’insuffisance rénale sévère est<br />

exceptionnelle, même après plusieurs années d’évolution [23] .<br />

Diagnostic<br />

Le syndrome de Sjögren est une des causes principales<br />

d’acidose tubulaire distale. Une maladie auto-immune y est<br />

associée le plus souvent. L’existence d’un syndrome sec ou<br />

d’autres signes systémiques (syndrome de Raynaud, polyarthrite,<br />

purpura vasculaire) oriente vers le diagnostic. Les tests immunologiques<br />

utiles sont la recherche de facteurs antinucléaires,<br />

d’anticorps anti-SSA ou SSB présents chez 50 %à60%des<br />

malades avec acidose tubulaire distale et syndrome de Sjögren.<br />

La biopsie des glandes salivaires accessoires est l’examen<br />

Néphrologie<br />

.<br />

Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires 18-055-E-10<br />

histologique le plus utile pour confirmer l’atteinte et relier les<br />

anomalies rénales au syndrome de Sjögren.<br />

La biopsie rénale n’est pas utile quand la maladie systémique<br />

est identifiée. Lorsqu’elle est pratiquée, elle révèle un infiltrat<br />

inflammatoire, lymphoplasmocytaire, entourant les tubules. Il<br />

s’agit de lymphocytes CD4 + similaires aux infiltrats des glandes<br />

salivaires [28] . Dans les formes sévères, une atrophie tubulaire est<br />

observée. La fibrose interstitielle est fréquente.<br />

Traitement de la néphropathie interstitielle chronique<br />

L’alcalinisation est possible par apports de bicarbonate de<br />

sodium ou de potassium en quantité suffisante et répartie entre<br />

les différents repas, en préparation officinale. L’acidose tubulaire<br />

n’est pas une indication au traitement du syndrome de Sjögren<br />

sous-jacent. L’indication des corticoïdes est réservée aux cas<br />

exceptionnels d’insuffisance rénale rapidement progressive.<br />

Pseudolymphome rénal<br />

Deux observations de pseudolymphome rénal ont été rapportées<br />

au cours du syndrome de Sjögren [29] . Une insuffisance<br />

rénale progressive sur quelques mois, une augmentation de la<br />

taille des reins, et une infiltration rénale diffuse et majeure par<br />

des lymphocytes CD4, étaient observées. Le lymphome doit être<br />

exclu par l’étude du réarrangement des gènes codant le récepteur<br />

des lymphocytes T et des chaînes lourdes d’Ig à la recherche<br />

d’une clonalité. Une corticothérapie à forte dose est<br />

indiquée en cas de pseudolymphome.<br />

Néphropathies glomérulaires<br />

Elles sont rares au cours du syndrome de Sjögren primaire.<br />

Une protéinurie supérieure à 1 g/j, une hématurie et une<br />

insuffisance rénale doivent retenir l’attention. La biopsie rénale<br />

est indiquée pour préciser le type d’atteinte en cause.<br />

Glomérulonéphrites à dépôts<br />

Il s’agit de glomérulonéphrites extramembraneuses ou de<br />

glomérulonéphrites membranoprolifératives où une cryoglobulinémie<br />

est souvent présente. La possibilité d’un syndrome de<br />

Sjögren secondaire à un lupus systémique doit être évoquée.<br />

L’atteinte rénale est alors secondaire à un lupus systémique. Le<br />

traitement propre de la glomérulonéphrite lupique par corticoïdes<br />

ou cyclophosphamide peut être indiqué, mais il n’empêche<br />

pas toujours l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale [23] .<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires pauci-immunes<br />

Sept observations sont rapportées de glomérulonéphrites<br />

nécrosantes avec croissants sans dépôts d’Ig, parfois associées à<br />

des anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles<br />

(ANCA) antimyéloperoxydase (MPO). Le traitement de ces<br />

glomérulonéphrites pauci-immunes associées au syndrome de<br />

Sjögren repose sur l’association d’une corticothérapie et du<br />

cyclophosphamide, à l’instar de ce qui est fait au cours des<br />

vascularites touchant les artères de petit calibre pauci-immunes<br />

à ANCA avec atteinte rénale [30, 31] .<br />

“ Points essentiels<br />

Indications à la biopsie rénale au cours du<br />

syndrome de Sjögren<br />

Lorsque le diagnostic de l’atteinte systémique n’a pas<br />

été fait par la biopsie des glandes salivaires accessoires<br />

Devant toute situation où l’évolution rénale n’est pas<br />

typique, contrastant avec l’évolution de la néphropathie<br />

interstitielle habituellement associée<br />

Syndrome glomérulaire :<br />

C hématurie microscopique isolée ;<br />

C protéinurie supérieure à 1 g/24 heures ;<br />

C hypertension artérielle.<br />

Devant une insuffisance rénale rapidement progressive<br />

Devant une augmentation de la taille des reins<br />

(suspicion de lymphome)<br />

5


18-055-E-10 Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires<br />

■ Atteinte rénale au cours<br />

d’affections systémiques diverses<br />

Sarcoïdose<br />

La sarcoïdose est une granulomatose systémique caractérisée<br />

par la formation de granulomes tuberculoïdes non caséeux. Les<br />

manifestations cliniques de la sarcoïdose peuvent être limitées<br />

à un organe ou diffuses, affectant principalement le poumon, la<br />

peau, l’œil et d’autres organes. L’atteinte rénale clinique est<br />

rarement au premier plan au cours de la sarcoïdose. Le plus<br />

souvent, il s’agit de conséquences rénales du métabolisme<br />

anormal du calcium. Une néphrite tubulo-interstitielle granulomateuse<br />

est l’atteinte histologique la plus fréquente, le plus<br />

souvent associée à des manifestations systémiques [32] . Plus<br />

rarement, elle est isolée [33] . Différents types de glomérulopathies<br />

ont été rapportés.<br />

Conséquences rénales des anomalies<br />

du métabolisme du calcium<br />

Les granulomes tuberculoïdes non caséeux qui caractérisent la<br />

maladie sont constitués de cellules macrophagiques activées<br />

sécrétrices de calcitriol : les macrophages activés acquièrent la<br />

capacité de convertir la vitamine 25-OH D3 en 1,25-OH2D3 ou<br />

calcitriol, métabolite le plus actif de la vitamine D. Cette<br />

1a-hydroxylation n’est pas contrôlée par la concentration<br />

sérique de calcitriol. Elle est sensible aux corticoïdes, peut être<br />

stimulée par l’interféron et n’est pas spécifique de la sarcoïdose.<br />

L’augmentation de calcitriol circulant induit une augmentation<br />

de l’absorption intestinale du calcium et de sa résorption<br />

osseuse, aboutissant à une augmentation de la charge filtrée et<br />

de l’excrétion urinaire de calcium. La prévalence de l’hypercalcémie<br />

est de moins de 50 % des cas. Une hypercalcémie peut<br />

apparaître si les apports calciques sont augmentés, en cas<br />

d’exposition solaire ou de diminution de la filtration glomérulaire<br />

dans 10 %à20%descas. L’hypercalcémie chronique peut<br />

induire une néphrocalcinose (dans moins de 5 % des cas), une<br />

néphrite interstitielle chronique ou la formation de calculs dans<br />

10 % des cas. Le traitement de cette production excessive de<br />

calcitriol repose sur une hydratation abondante, une diminution<br />

des apports calciques, une éviction de l’exposition solaire.<br />

Les corticoïdes sont efficaces en diminuant l’activité de la<br />

1a-hydroxylase des macrophages et en limitant l’effet du<br />

calcitriol sur l’absorption digestive et la résorption osseuse du<br />

calcium. D’autres produits peuvent être utilisés, chloroquine,<br />

hydroxychloroquine, qui agissent sur l’activité 1a-hydroxylase.<br />

Le kétoconazole inhibe certains cytochromes P450 responsables<br />

de la 1a-hydroxylation [34] .<br />

Néphrite interstitielle granulomateuse<br />

Une néphrite interstitielle granulomateuse est fréquente au<br />

cours de la sarcoïdose. Sa prévalence sur des séries autopsiques<br />

a été estimée entre 7 % et 13 %. Des études histologiques<br />

récentes ont rapporté une fréquence d’environ 20 % [35] ,<br />

variable en fonction de l’indication de la biopsie rénale et de<br />

l’extension des granulomes. L’insuffisance rénale est en général<br />

la circonstance de découverte de la néphropathie granulomateuse.<br />

L’étude histologique montre des granulomes focaux ou<br />

diffus, de localisation corticomédullaire. Les glomérules sont<br />

normaux. Un infiltrat inflammatoire est associé, constitué de<br />

lymphocytes B, de plasmocytes, de lymphocytes T CD4 + .Iln’y<br />

a pas de dépôts immuns associés.<br />

Dans une série de 59 patients, 56 patients développaient une<br />

insuffisance rénale, sévère chez 12 patients (créatininémie<br />

supérieure à 800 µmol/l). Une hypercalcémie était fréquente et<br />

contribuait à l’insuffisance rénale. L’insuffisance rénale était<br />

progressive, sur quelques semaines à quelques mois, mais parfois<br />

aiguë. Les anomalies urinaires étaient une protéinurie nulle ou<br />

modérée, d’origine tubulaire, une leucocyturie, une cylindrurie.<br />

Il existait parfois une glycosurie ou un syndrome de Fanconi<br />

complet, une hyposthénurie ou un diabète insipide néphrogénique.<br />

Les reins sont de grande taille, infiltrés, pouvant mimer<br />

une polykystose ou une néoplasie [36, 37] . Le traitement repose<br />

sur la corticothérapie à la dose de 1 mg/kg/j pendant 1à2mois<br />

suivie d’une décroissance prolongée sur 1 an. Les biopsies<br />

rénales itératives ont montré une évolution vers la fibrose et des<br />

lésions vasculaires. Le risque, outre l’insuffisance rénale séquellaire,<br />

est l’apparition d’une hypertension artérielle tardive [38] .<br />

L’évolution à long terme de la néphropathie tubulointerstitielle<br />

sarcoïdosique a été étudiée chez 17 patients. Tous<br />

avaient une insuffisance rénale chronique de stade 3 ou 4. Sous<br />

traitement corticoïde prolongé à la dose initiale de 0,5 mg/kg/j<br />

suivie d’une décroissance lente, une amélioration du débit de<br />

filtration glomérulaire estimé par la formule modification of the<br />

diet in renal failure (MDRD) était observée, de 50 % à 60 % à<br />

1 an, suivie d’une stabilisation persistant au dernier suivi. Seuls<br />

les patients n’ayant pas poursuivi la corticothérapie ont vu leur<br />

insuffisance rénale s’aggraver. Les corticostéroïdes semblent<br />

donc efficaces pour préserver la fonction rénale et retarder<br />

l’échéance de l’insuffisance rénale terminale [39] .<br />

La récidive sur le greffon rénal après transplantation semble<br />

très rare.<br />

Glomérulopathies<br />

Plusieurs types de glomérulopathies à dépôts ont été décrits<br />

de manière anecdotique : glomérulonéphrites extramembraneuses<br />

[40, 41] , membranoprolifératives ou nécrosantes à<br />

croissants [42-44] ; hyalinose segmentaire et focale [45] ; néphropathies<br />

à dépôts d’IgA [46] . Le lien de causalité avec la sarcoïdose<br />

n’a pas été établi. Il semble que la corticothérapie utilisée ait été<br />

efficace dans la plupart des cas.<br />

Un cas d’amylose associée [47] , un cas d’adénopathies rétropéritonéales<br />

responsables d’une compression urétérale avec<br />

hydronéphrose [48] et un cas d’hypertension artérielle rénovasculaire<br />

par compression d’une artère rénale liée à une fibrose<br />

rétropéritonéale [49] ont été rapportés.<br />

“ Points essentiels<br />

Indications à la biopsie rénale au cours de la<br />

sarcoïdose<br />

Lorsque le diagnostic de l’atteinte systémique n’a pas<br />

été fait par la biopsie d’autres organes<br />

Devant toute situation où l’évolution rénale n’est pas<br />

typique, contrastant avec l’évolution de la néphropathie<br />

interstitielle habituellement associée<br />

Syndrome glomérulaire :<br />

C hématurie microscopique isolée ;<br />

C protéinurie supérieure à 1 g/24 heures ;<br />

C hypertension artérielle.<br />

Devant une insuffisance rénale rapidement progressive<br />

Devant une augmentation de la taille des reins<br />

Néphropathie goutteuse<br />

La goutte est une maladie du métabolisme des purines.<br />

Connue depuis l’Antiquité, son origine reste partiellement<br />

comprise. Sa recrudescence récente et la découverte de formes<br />

familiales de survenue précoce liées à des mutations de la<br />

protéine de Tamm-Horsfall ont renouvelé l’intérêt pour cette<br />

maladie ancienne.<br />

Épidémiologie<br />

L’arthropathie goutteuse dans sa forme classique est caractérisée<br />

par la survenue d’accès aigus d’arthrite touchant la<br />

métatarsophalangienne du gros orteil ou d’autres articulations<br />

des membres inférieurs chez l’homme de 40 à 60 ans. Cette<br />

arthrite est liée à la précipitation d’acide urique sous forme de<br />

cristaux d’urate de sodium monohydraté dans les articulations<br />

et les tissus mous. La concentration plasmatique d’acide urique<br />

est augmentée, en rapport avec des apports alimentaires<br />

excessifs en purines. La fonction rénale est en général normale<br />

pour l’âge. La prévalence et l’incidence de la goutte sont en<br />

augmentation actuellement, en rapport avec le mode de vie des<br />

sociétés occidentales : obésité, alimentation riche en purines,<br />

consommation d’alcool et traitements diurétiques ou par<br />

ciclosporine chez les transplantés d’organe.<br />

6 Néphrologie


APRT<br />

Métabolisme des purines<br />

R-5-P + ATP<br />

PRPS<br />

HPRT<br />

L’acide urique est le produit de dégradation des purines<br />

(Fig. 2). Les purines jouent un rôle majeur dans l’organisme,<br />

dans le stockage et la transmission de l’information génétique<br />

(acide désoxyribonucléique [ADN], acide ribonucléique), dans la<br />

traduction des signaux intracellulaires (guanine triphosphate,<br />

adénosine monophosphate cyclique, guanine triphosphate<br />

cyclique) et comme source d’énergie indispensable au métabolisme<br />

et aux réactions cellulaires (adénosine triphosphate). Le<br />

produit de dégradation final des purines est l’acide urique,<br />

formé à partir des précurseurs xanthine et hypoxanthine sous<br />

l’action de la xanthine oxydase.<br />

L’élimination de l’acide urique se fait pour deux tiers dans les<br />

urines et pour un tiers par voie digestive. La solubilité de l’acide<br />

urique varie avec le pH urinaire – de 1 mmol/l lorsque le pH est<br />

à 5, à 12 mmol/l lorsque le pH est à8–etlaforceionique des<br />

urines. C’est donc un facteur important de formation de<br />

cristaux et de calculs urinaires. Son précurseur, la xanthine, est<br />

encore moins soluble, quel que soit le pH urinaire (1 mmol/l).<br />

La fraction d’excrétion de l’acide urique varie avec l’âge et le<br />

sexe : de 8 % chez l’homme à 12 % chez la femme et 15 % à<br />

30 % chez l’enfant. Ceci explique la surincidence de la goutte<br />

chez l’homme. L’acide urique, de petit poids moléculaire, est<br />

entièrement filtré par le glomérule puis réabsorbé par le tubule<br />

contourné proximal, puis sécrété et à nouveau réabsorbé. Ce<br />

métabolisme bidirectionnel n’est pas entièrement compris et<br />

pourrait expliquer les différences de susceptibilité interindividuelles<br />

de la maladie. Le pyrazinamide, en diminuant la<br />

fraction d’excrétion de l’acide urique à 0,5 %, entraîne une<br />

hyperuricémie qui peut limiter son utilisation.<br />

Formes cliniques<br />

Goutte primaire<br />

La forme classique de la goutte touche l’homme entre 40 et<br />

60 ans. La fonction rénale est normale, de même que la<br />

production endogène d’acide urique. L’hyperuricémie est liée à<br />

un excès d’apports et à une baisse de la fraction d’excrétion de<br />

l’urate. Le risque de goutte est proportionnel au degré de<br />

l’hyperuricémie et à sa durée. La baisse de l’excrétion d’acide<br />

urique peut être en rapport soit avec une baisse de la sécrétion<br />

tubulaire, soit avec un excès de sa réabsorption. Les déterminants<br />

de ces anomalies ne sont pas complètement élucidés.<br />

Néphrologie<br />

PP-ribose-P<br />

AMP IMP<br />

GMP<br />

Adénine<br />

8-hydroxyadénine<br />

2,8-dihydroxyadénine<br />

XDH<br />

XDH<br />

Hypoxanthine<br />

Xanthine<br />

Acide urique<br />

Guanine<br />

Synthèse<br />

Sauvetage<br />

Dégradation<br />

Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires 18-055-E-10<br />

Figure 2. Métabolisme des purines simplifié :<br />

les enzymes hypoxanthine guanine phosphoribosyltransférase<br />

(HPRT), phosphoribosyl<br />

pyrophosphate synthétase (PRPS), adénine<br />

phosphoribosyltransférase (APRT) et xanthine<br />

déshydrogénase (XDH). Leur déficit congénital<br />

est symbolisé par un double trait. AMP : adénosine<br />

monophosphate ; ATP : adénosine triphosphate<br />

; IMP : inosine monophosphate ; GMP :<br />

guanine monophosphate.<br />

Goutte juvénile ou néphropathie hyperuricémiante juvénile<br />

familiale<br />

La goutte juvénile se caractérise par la survenue précoce, dès<br />

la deuxième ou la troisième décade, de cas familiaux de goutte<br />

touchant diverses articulations avec hyperuricémie et d’une<br />

insuffisance rénale progressive. Le signe le plus précoce est une<br />

diminution de la fraction d’excrétion de l’acide urique autour<br />

de 5 %. La biopsie rénale révèle une néphropathie interstitielle<br />

avec atrophie tubulaire, fibrose interstitielle et glomérulosclérose.<br />

Il n’y a pas de dépôts de cristaux d’urates. Le mode de<br />

transmission est autosomique dominant. L’étude par clonage<br />

positionnel des familles présentant cette néphropathie a révélé<br />

la coségrégation de la maladie avec des anomalies de l’ADN au<br />

sein du gène de l’uromoduline, sur le chromosome 16p11-<br />

13 [50, 51] . Cette protéine, aussi appelée protéine de Tamm-<br />

Horsfall, est la protéine physiologique prédominante dans les<br />

urines. Elle a plusieurs rôles connus : inhibition de la lithogenèse,<br />

modulation des réponses immunes et cytoprotection<br />

urothéliale. Cette forme de goutte atypique a révélé un nouveau<br />

rôle de l’uromoduline, dans le métabolisme de l’acide urique. La<br />

physiopathologie de la néphropathie interstitielle chronique<br />

n’est pas établie. En particulier, il n’y a pas de lien de causalité<br />

entre le degré de l’hyperuricémie et son apparition.<br />

Goutte et insuffisance rénale chronique<br />

L’arthropathie goutteuse est rare au cours de l’insuffisance<br />

rénale chronique, même au stade terminal. En effet, l’uricémie<br />

s’élève jusqu’à deux fois la normale puis se stabilise ensuite,<br />

limitée par l’augmentation parallèle de la fraction d’excrétion<br />

urinaire de l’acide urique de 10 % à 85 %. L’élimination<br />

digestive de l’acide urique augmente également et devient<br />

prédominante (deux tiers de l’élimination totale).<br />

En cas de goutte associée à l’insuffisance rénale, une recherche<br />

d’intoxication par le plomb doit être faite : l’insuffisance<br />

rénale chronique est au premier plan et l’arthropathie habituellement<br />

modérée.<br />

Goutte associée à des anomalies génétiques<br />

Il s’agit d’anomalies enzymatiques de la voie de sauvetage des<br />

purines aboutissant à un excès de purines insolubles (xanthine,<br />

2,8-dihydroxyadénine, acide urique).<br />

Le déficit en hypoxanthine guanine phosphoribosyl transférase<br />

(HGPRT), lié à l’X, est très rare et est responsable du<br />

syndrome de Lesch-Nyan dans sa forme complète, un excès de<br />

production d’acide urique et des troubles neurologiques sévères.<br />

7


18-055-E-10 Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires<br />

Un déficit incomplet en HGPRT peut être responsable de<br />

troubles neurologiques de degrés variables, de goutte tophacée<br />

et d’insuffisance rénale précoce par calcifications du parenchyme<br />

rénal ou lithiases uriques. Plusieurs types de mutation<br />

ont été décrits et sont responsables de l’hétérogénéité phénotypique<br />

de la maladie, en fonction de l’activité enzymatique<br />

résiduelle. Un article spécifique de l’EMC lui est consacré.<br />

Traitement<br />

La goutte est une cause rare d’insuffisance rénale chronique<br />

(de 0,5 % à 1 % des insuffisances rénales terminales). Une<br />

meilleure prise en charge de l’hypertension artérielle et de<br />

l’hyperuricémie est probablement en cause. L’allopurinol permet<br />

de réduire la concentration plasmatique d’acide urique. En<br />

revanche, son efficacité sur la progression de l’insuffisance<br />

rénale est incertaine. Les agents uricosuriques perdent leur<br />

efficacité lorsqu’une insuffisance rénale apparaît.<br />

Connectivites mixtes<br />

Les connectivites mixtes recouvrent un ensemble d’affections<br />

inflammatoires systémiques comportant une atteinte artérielle<br />

avec nécrose fibrinoïde et des anomalies des réponses immunitaires.<br />

La maladie prend des formes variées, en fonction du<br />

chevauchement entre plusieurs affections systémiques diversement<br />

intriquées. En 1972, Sharp et al. ont rapporté 25 patients<br />

qui présentaient des signes cliniques de lupus érythémateux<br />

disséminé, de sclérodermie systémique, de polymyosite ou de<br />

polyarthrite rhumatoïde associés à la présence d’anticorps<br />

antiribonucléoprotéine [52] . Des études ultérieures ont bien<br />

montré l’évolution asynchrone des signes cliniques de ces<br />

diverses pathologies. Une atteinte rénale était notée chez un<br />

seul des patients. Les études ultérieures ont trouvé une prévalence<br />

plus élevée de néphropathie, de 10 % à 40 % chez<br />

l’adulte, et jusqu’à 47 % chez l’enfant.<br />

La présentation clinique est généralement discrète, protéinurie<br />

ou hématurie asymptomatique. Certains patients peuvent<br />

développer un syndrome néphrotique. L’évolution vers l’insuffisance<br />

rénale est rare.<br />

Les anomalies histologiques ont été rapportées par Kitridou et<br />

al. en 1986. Onze parmi 30 patients suivis en moyenne 10 ans<br />

ont développé une néphropathie. Neuf d’entre eux avaient un<br />

syndrome néphrotique. Dans cinq cas, il s’agissait d’une<br />

glomérulonéphrite extramembraneuse, dans deux cas d’une<br />

glomérulonéphrite mésangiale, un cas d’atteinte mixte et un cas<br />

de glomérulonéphrite sclérosante. L’immunofluorescence<br />

montrait la présence d’Ig et de complément, témoignant de<br />

l’atteinte médiée par des complexes immuns [53] .<br />

Le traitement de l’atteinte rénale associée aux connectivites<br />

mixtes repose sur une corticothérapie à forte dose suivie d’une<br />

décroissance sur plusieurs semaines. Dans l’étude de Kitridou,<br />

les stéroïdes étaient efficaces sur la protéinurie dans 60 % des<br />

cas. L’ajout de différents traitements ciblant la symptomatologie<br />

clinique prédominante (méthotrexate, antimalariques, cyclophosphamide)<br />

a montré des résultats d’efficacité variable. Il n’y<br />

a pas d’étude disponible comparant les différents traitements.<br />

Dans la série de Kitridou et al., seuls deux patients ont évolué<br />

vers l’insuffisance rénale chronique et la dialyse [53] . L’autre type<br />

d’atteinte rénale possible est une néphropathie vasculaire de<br />

type rein sclérodermique qui, non traitée, peut évoluer vers<br />

l’hypertension artérielle maligne. Trois cas d’amylose et un cas<br />

de syndrome hémolytique et urémique ont été rapportés.<br />

Polymyosites/dermatopolymyosites<br />

Les polymyosites/dermatomyosites sont caractérisées par une<br />

atteinte inflammatoire du muscle squelettique et de la peau,<br />

respectivement. Elles peuvent être primitives ou secondaires à<br />

de multiples affections. La polymyosite primitive de l’adulte se<br />

manifeste habituellement de façon insidieuse, par une faiblesse<br />

musculaire proximale et symétrique, et des douleurs musculaires.<br />

Rarement, elle se présente sous forme d’une faiblesse<br />

musculaire brutale, parfois associée à une rhabdomyolyse et à<br />

une myoglobinurie. Une insuffisance rénale aiguë a rarement<br />

été rapportée, en rapport avec la toxicité de la myoglobinurie<br />

dans un contexte d’acidose ou d’hypovolémie. L’évolution de<br />

l’insuffisance rénale est semblable à celle des autres rhabdomyolyses,<br />

favorable si le traitement est débuté rapidement. Le<br />

traitement par corticoïdes à forte dose et par le méthotrexate<br />

semble efficace. Des cas anecdotiques de glomérulonéphrite<br />

mésangioproliférative à dépôts d’Ig et de complément ont été<br />

rapportés [54] , ainsi qu’un cas de glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

(sans néoplasie sous-jacente identifiée), un cas de<br />

maladie de Berger [55] et un cas de glomérulonéphrite<br />

extracapillaire [56] .<br />

■ Toxicité rénale des traitements<br />

utilisés en rhumatologie (Tableau 1)<br />

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)<br />

et inhibiteurs de la cyclo-oxygénase 2<br />

Les AINS sont largement prescrits dans le monde entier. Les<br />

atteintes rénales qu’ils peuvent entraîner sont diverses et de<br />

fréquence variable. L’incidence de la néphrotoxicité des AINS<br />

est mal connue. Dans une étude prospective déjà ancienne<br />

portant sur 398 cas d’insuffisance rénale aiguë d’origine<br />

médicamenteuse, la responsabilité des AINS a été retenue dans<br />

15 % des cas, soit 2,8 % des malades hospitalisés pour insuffisance<br />

rénale aiguë dans la même période [57] .<br />

Toxicité aiguë<br />

Nécrose tubulaire aiguë<br />

C’est l’atteinte rénale la plus fréquente, liée à un trouble de<br />

l’hémodynamique intrarénale. Les AINS diminuent la production<br />

intrarénale des prostaglandines vasodilatatrices. En cas<br />

d’hypovolémie, les AINS peuvent provoquer une chute du débit<br />

de filtration glomérulaire et une oligurie. Les malades les plus à<br />

risque sont les insuffisants cardiaques, les cirrhotiques, les<br />

patients présentant un syndrome néphrotique, une déshydratation<br />

extracellulaire, un état de choc ou une glomérulopathie<br />

chronique préalable. Une insuffisance rénale fonctionnelle<br />

survient quelques jours après le début du traitement par AINS.<br />

Il n’y a ni protéinurie ni anomalie du sédiment urinaire et pas<br />

de signes d’hypersensibilité. L’insuffisance rénale est totalement<br />

réversible avec l’arrêt du traitement. L’examen histologique<br />

rénal est normal. Si le traitement est poursuivi, une nécrose<br />

tubulaire peut apparaître, comme en témoigne la présence de<br />

cellules épithéliales tubulaires desquamées dans les urines. Les<br />

lésions tubulaires aiguës induites par les AINS n’ont pas de<br />

Tableau 1.<br />

Néphrotoxicité des médicaments utilisés dans les rhumatismes<br />

inflammatoires.<br />

Aiguë Anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens et inhibiteurs<br />

de la cyclo-oxygénase 2<br />

Insuffisance rénale<br />

fonctionnelle<br />

Nécrose tubulaire<br />

Néphrite interstitielle<br />

immunoallergique : souvent<br />

associée à un syndrome<br />

néphrotique<br />

Lésions glomérulaires<br />

minimes<br />

Glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse<br />

Ciclosporine Vasoconstriction artériolaire<br />

Microangiopathie<br />

thrombotique<br />

Anti-tumor necrosis factor Glomérulonéphrite lupiques<br />

Glomérulonéphrites<br />

pauci-immunes à croissants<br />

Sels d’or et<br />

Glomérulonéphrite<br />

D-pénicillamine<br />

extramembraneuse<br />

Chronique Analgésiques Nécrose papillaire<br />

Néphropathie interstitielle<br />

chronique<br />

Ciclosporine Vasculaires et interstitielle<br />

8 Néphrologie


caractéristique propre. L’insuffisance rénale est habituellement<br />

réversible en quelques semaines après l’arrêt définitif du<br />

traitement.<br />

Néphrite interstitielle aiguë<br />

La néphrite interstitielle aiguë est beaucoup plus rare que la<br />

nécrose tubulaire. Elle était présente chez 2 % des 398 malades<br />

qui avaient une insuffisance rénale aiguë due à des médicaments<br />

[57] . Plus d’une centaine de cas de néphrite interstitielle<br />

aiguë attribués aux AINS ont été publiés. Les différentes classes<br />

d’AINS ont été impliquées : fénoprofène, ibuprofène, naproxène,<br />

indométacine, acide méfénamique. L’association d’une néphrite<br />

interstitielle aiguë et d’un syndrome néphrotique est assez<br />

caractéristique. Les patients sont souvent âgés, hypertendus et<br />

atteints d’une insuffisance rénale préalable ou d’un diabète. Le<br />

délai d’apparition de l’insuffisance rénale après l’introduction<br />

du médicament varie de 1à36mois. La protéinurie est abondante.<br />

Le recours à l’hémodialyse peut être nécessaire. La<br />

fonction rénale s’améliore avec l’arrêt du médicament, laissant<br />

parfois une insuffisance rénale et/ou une protéinurie<br />

séquellaires.<br />

L’analyse histologique montre une infiltration diffuse ou<br />

focale de lymphocytes dans l’interstitium rénal, rarement des<br />

plasmocytes ou des éosinophiles. Des granulomes épithélioïdes<br />

avec des cellules géantes sont parfois visibles. Une atrophie<br />

tubulaire focale ou une nécrose tubulaire étendue peuvent être<br />

associées. Les glomérules sont normaux, sauf chez les patients<br />

présentant déjà une néphropathie chronique. Dans tous les cas<br />

avec syndrome néphrotique, il existe un effacement des pédicelles<br />

des podocytes en microscopie électronique. L’examen en<br />

immunofluorescence est normal. L’infiltrat lymphocytaire est<br />

constitué majoritairement de lymphocytes T cytotoxiques.<br />

L’hypothèse physiopathologique de cette néphropathie fait<br />

intervenir un trouble de l’immunité cellulaire ; l’interaction<br />

entre l’antigène médicamenteux et les lymphocytes activés<br />

provoque la libération de lymphokines, inhibée habituellement<br />

par une sécrétion accrue de prostaglandines. En l’absence de<br />

prostaglandines, inhibées par les AINS, la synthèse des<br />

lymphokines est facilitée, de même que la prolifération des<br />

lymphocytes T dans l’interstitium, témoin d’une réaction<br />

d’hypersensibilité retardée. D’autre part, l’inhibition de la cyclooxygénase<br />

par les AINS favoriserait la déviation du métabolisme<br />

de l’acide arachidonique vers la voie des lipo-oxygénases et de<br />

la synthèse des leucotriènes, substances pro-inflammatoires<br />

augmentant la perméabilité vasculaire, expliquant la protéinurie<br />

et l’activation des macrophages.<br />

Neuf cas de néphrite interstitielle aiguë ont été rapportés en<br />

association avec les inhibiteurs de la cyclo-oxygénase de type 2<br />

(rofécoxib : cinq cas ; célécoxib : quatre cas), initialement<br />

réputés moins toxiques que les AINS du fait de leur sélectivité.<br />

Le délai moyen d’apparition de l’insuffisance rénale après<br />

l’introduction du traitement était d’environ 8 mois, compris<br />

entre 3 jours et 3 ans. L’insuffisance rénale aiguë parfois sévère,<br />

nécessitant le recours à l’hémodialyse, a été réversible à l’arrêt<br />

du traitement parfois associé à une corticothérapie. Comme<br />

pour les AINS, la particularité de cette néphrite immunoallergique<br />

était l’absence de signes d’hypersensibilité associés [58, 59] .<br />

Glomérulopathies<br />

Un plus faible nombre de malades présente un syndrome<br />

néphrotique lié à la prise d’AINS sans néphrite interstitielle<br />

aiguë. En microscopie optique, les glomérules sont normaux. La<br />

seule lésion visible en microscopie électronique est un effacement<br />

des pédicelles des podocytes. L’immunofluorescence est<br />

négative. Il s’agit de lésions glomérulaires minimes sans<br />

caractère distinctif par rapport à la néphropathie primitive. Le<br />

syndrome néphrotique disparaît quelques semaines après l’arrêt<br />

du médicament dans la grande majorité des cas.<br />

Une glomérulonéphrite extramembraneuse a été rapportée en<br />

association avec différents types d’AINS (diclofénac, kétoprofène,<br />

fénoprofène) et plus récemment avec le célécoxib [60-62] .La<br />

protéinurie disparaît à l’arrêt du traitement dans tous les cas.<br />

Ces cas montrent qu’une pathologie médiée par des complexes<br />

immuns peut être impliquée dans les néphropathies secondaires<br />

aux AINS.<br />

Néphrologie<br />

Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires 18-055-E-10<br />

Toxicité chronique des AINS [63] : néphropathie interstitielle<br />

chronique, nécrose papillaire et analgésiques<br />

La prise prolongée d’AINS peut entraîner une nécrose papillaire<br />

dans un faible nombre de cas. Elle survient plusieurs mois<br />

ou années après le début du traitement. Elle peut être associée<br />

à une néphropathie interstitielle chronique. L’inhibition des<br />

cyclo-oxygénases réduit le débit sanguin médullaire qui favorise<br />

la nécrose papillaire [63, 64] .<br />

Cette néphropathie est davantage rapportée en association<br />

avec l’utilisation des analgésiques et se raréfie actuellement avec<br />

la restriction de la vente de ces produits. La néphropathie aux<br />

analgésiques est définie comme une maladie résultant de la<br />

consommation habituelle pendant plusieurs années de plusieurs<br />

antalgiques contenant au moins deux antipyrétiques et de la<br />

caféine ou de la codéine. Elle se caractérise par la nécrose<br />

papillaire et une néphropathie interstitielle chronique qui<br />

évolue insidieusement vers l’insuffisance rénale progressive. Son<br />

diagnostic est très important à établir de façon précoce pour<br />

pouvoir corriger les comportements modifiables qui y conduisent.<br />

Un interrogatoire précis est capital. L’imagerie par scanner<br />

sans injection de produit de contraste montre typiquement une<br />

diminution de la taille des reins dont les contours sont bosselés<br />

et/ou des calcifications papillaires dans un contexte d’insuffisance<br />

rénale modérée [64] .<br />

L’acétaminophène est le métabolite principal de la phénacétine.<br />

La physiopathologie précise de l’insuffisance rénale<br />

secondaire à la prise prolongée d’antalgiques n’est pas claire,<br />

mais plusieurs études épidémiologiques montrent bien la<br />

relation dose cumulée-insuffisance rénale chronique avec un<br />

odd ratio de 2 pour une consommation prolongée et dépassant<br />

3 000 g d’acétaminophène [65] .<br />

Le risque à long terme de carcinome urothélial reste<br />

préoccupant [66] .<br />

Agents modificateurs des rhumatismes<br />

Il s’agit des sels d’or, de la D-pénicillamine et de leurs dérivés.<br />

Leur efficacité a été prouvée dans le traitement de la polyarthrite<br />

rhumatoïde et leurs effets secondaires ont été rapportés dès<br />

le début de leur utilisation dans les années 1960. Ils sont<br />

nettement moins rapportés actuellement, du fait de leur<br />

moindre utilisation depuis l’apparition des traitements anti-<br />

TNF qui les ont supplantés. Leur profil d’effet néphrotoxique est<br />

très similaire.<br />

Sels d’or<br />

Les sels d’or étaient les traitements de deuxième intention au<br />

cours de la polyarthrite rhumatoïde. Leur efficacité est cependant<br />

limitée par la survenue d’effets secondaires, en particulier<br />

rénaux, chez 2%à10%despatients. Une protéinurie d’abondance<br />

variable (de 0,4 à 39 g/24 heures) peut survenir à tout âge<br />

(de 2 à 73 ans) quelle que soit la forme utilisée, orale ou<br />

parentérale, ou la dose. Elle peut survenir dès la deuxième<br />

semaine (10 mg) et jusqu’à 6 ans (6 g) après le début du<br />

traitement. La protéinurie disparaît généralement après l’arrêt<br />

du traitement et ne laisse pas d’insuffisance rénale. Seules de<br />

petites séries ont été publiées. Chez 21 patients traités par<br />

aurothiomalate de sodium par voie intramusculaire et suivis<br />

pendant 60 mois, une protéinurie est apparue chez dix patients<br />

après 6 mois de traitement, chez 15 patients après 12 mois et<br />

chez 18 patients après 24 mois. La protéinurie atteignait un pic<br />

à 2 g (de 0,5 à 30 g) 2 mois après l’arrêt du traitement pour<br />

disparaître spontanément chez tous les patients à 24 mois.<br />

Aucune insuffisance rénale n’était observée sous traitement. La<br />

clairance de la créatinine était à 77 et 59 ml/min, avant et après<br />

le traitement, respectivement. La biopsie rénale a montré une<br />

glomérulonéphrite extramembraneuse chez 15 patients, des<br />

lésions glomérulaires minimes chez deux patients, des dépôts<br />

mésangiaux chez deux patients et l’absence d’anomalie chez<br />

deux autres patients. Chez les patients ayant une polyarthrite<br />

rhumatoïde non traitée par sels d’or, la glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse est exceptionnelle. Les sels d’or semblent<br />

9


18-055-E-10 Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires<br />

favoriser le dépôt de complexes rhumatoïdes circulants dans le<br />

rein et augmenter l’incidence des glomérulonéphrites [67, 68] .<br />

D-pénicillamine et dérivés<br />

La néphropathie induite par la D-pénicillamine est très<br />

proche de celle induite par les sels d’or. Il s’agit d’une protéinurie<br />

chez 7 % à 20 % des malades, révélant une glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse dans 85 % des cas. Des<br />

glomérulonéphrites membranoprolifératives, des lésions glomérulaires<br />

minimes, ont été rapportées dans un petit nombre de<br />

cas. Comme pour les sels d’or, le délai d’apparition de la<br />

protéinurie et du syndrome néphrotique varie entre 7 et<br />

18 mois, le plus souvent après 3 mois de traitement. La protéinurie<br />

disparaît progressivement à l’arrêt du traitement en 6 à<br />

8 mois.<br />

Une dizaine de cas de glomérulonéphrite à croissants révélés<br />

par un syndrome pneumorénal ont été rapportés sous<br />

D-pénicillamine. La recherche d’anticorps anti-membrane basale<br />

glomérulaire (GBM) était rarement positive lorsqu’elle était faite.<br />

La présence d’ANCA (de type MPO) était rapportée dans trois<br />

cas. Un traitement agressif par corticoïdes, cyclophosphamide et<br />

échanges plasmatiques en présence d’anti-GBM doit être débuté<br />

rapidement pour obtenir une évolution favorable [69, 70] .<br />

D’autres dérivés thiols plus récemment utilisés (bucillamine)<br />

peuvent aussi entraîner l’apparition d’une protéinurie ou d’un<br />

syndrome néphrotique. Les lésions en cause sont le plus<br />

souvent une glomérulonéphrite extramembraneuse ou des<br />

lésions glomérulaires minimes [71, 72] .<br />

Ciclosporine<br />

Immunosuppresseur puissant largement utilisé en transplantation<br />

d’organes, la ciclosporine a vu ses indications s’élargir à<br />

certaines maladies auto-immunes, dont la polyarthrite rhumatoïde.<br />

Sa néphrotoxicité, connue en transplantation, a été<br />

étudiée sur des biopsies rénales de patients traités pendant 1 an<br />

pour des pathologies auto-immunes.<br />

Deux types de lésions peuvent apparaître. Les lésions de<br />

toxicité aiguë sont d’origine vasculaire. Il s’agit d’une vasoconstriction<br />

artériolaire à l’origine d’une insuffisance rénale fonctionnelle<br />

ou de lésions de microangiopathie thrombotique<br />

parfois responsables de séquelles (hypertension artérielle,<br />

insuffisance rénale chronique). Les lésions de toxicité chronique<br />

sont vasculaires et interstitielles. Les lumières artériolaires se<br />

rétrécissent progressivement, expliquant l’hypertension artérielle<br />

fréquente et les lésions interstitielles : des bandes fibreuses avec<br />

atrophie tubulaire apparaissent, avec une distribution en travées<br />

découpant le parenchyme de zones normales [73] . La néphrotoxicité<br />

chronique est proportionnelle à la durée d’exposition à<br />

la ciclosporine. Elle constitue un obstacle important à l’utilisation<br />

de ce produit comme immunosuppresseur au long cours.<br />

La prévention de cette toxicité chronique repose sur la mesure<br />

régulière de taux plasmatiques résiduels pour éviter les surdosages<br />

et limiter la néphrotoxicité.<br />

Traitements anti-TNF<br />

L’efficacité des traitements anti-TNF a révolutionné le<br />

traitement des patients atteints de polyarthrite rhumatoïde ou<br />

d’autres rhumatismes (spondylarthrite ankylosante, Sjögren). Ils<br />

permettent notamment de modifier le cours de la maladie en<br />

diminuant l’inflammation et en prévenant l’installation de<br />

l’incapacité fonctionnelle chez des patients qui échappent aux<br />

autres traitements, y compris dits « modificateurs de la<br />

maladie ».<br />

Trois nouveaux traitements sont actuellement disponibles<br />

pour le traitement des polyarthrites évolutives, après échec des<br />

autres traitements. L’infliximab (Rémicade ® ), un anticorps<br />

IgG1 trimérique anti-TNF partiellement humanisé, a montré<br />

une efficacité spectaculaire, précoce (dès la deuxième semaine<br />

de traitement) clinique, biologique et radiologique à 1 an, avec<br />

une stabilisation complète de la maladie. L’adalimumab<br />

(Humira ® ), deuxième anticorps anti-TNF disponible, est totalement<br />

humanisé et a montré la même efficacité chez les<br />

patients. Une troisième molécule, l’étanercept (Enbrel ® ) est une<br />

.<br />

protéine de fusion entre le fragment Fc d’une IgG humaine et<br />

deux molécules solubles du récepteur soluble p75 du TNFalpha.<br />

Les effets secondaires de ces traitements sont essentiellement<br />

à court terme des réactions cutanées au point d’injection,<br />

des signes généraux (fièvre, frissons, nausées, prurit, urticaire)<br />

lors des premières injections. À plus long terme, l’incidence des<br />

réactivations tuberculeuses a augmenté, ainsi que celle des<br />

complications néoplasiques, lymphomes en particulier. Des<br />

manifestations d’auto-immunité sont décrites chez 24 %à37%<br />

des patients sous infliximab, diminuant avec l’association de<br />

méthotrexate. Des autoanticorps anti-ADN natif ont été retrouvés,<br />

rarement associés à des manifestations lupiques.<br />

Cinq cas de glomérulonéphrites apparus lors d’un traitement<br />

par anti-TNF alpha chez des patients atteints de polyarthrite<br />

rhumatoïde ont été rapportés. Chez deux patients, un syndrome<br />

néphritique a révélé une glomérulonéphrite proliférative<br />

lupique. Les facteurs antinucléaires étaient positifs, ainsi qu’une<br />

consommation du complément. Chez deux autres patients, une<br />

glomérulonéphrite nécrosante pauci-immune à croissants a été<br />

découverte, dont l’une était associée à des ANCA anti-MPO et à<br />

une hémorragie alvéolaire. Le dernier patient, qui présentait un<br />

syndrome néphrotique, avait une glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

à la biopsie et une vascularite à complexes<br />

immuns. Le délai rapide d’apparition des glomérulonéphrites<br />

après l’utilisation du traitement évoquait un lien de causalité.<br />

Dans tous les cas, les patients ont évolué favorablement à l’arrêt<br />

du traitement anti-TNF associé aux immunosuppresseurs.<br />

L’utilisation large des traitements anti-TNF doit inciter à la<br />

prudence et les médecins doivent rester vigilants sur la possibilité<br />

d’apparition de glomérulonéphrites liées à la polyarthrite<br />

rhumatoïde ou auto-immunes de novo induites par le traitement<br />

[74] . Plusieurs revues de ces traitements, de leur mode<br />

d’action et de leurs effets indésirables sont disponibles pour plus<br />

de précisions [75, 76] .<br />

■ Conclusion<br />

Les atteintes rénales possibles au cours des rhumatismes<br />

inflammatoires sont multiples et de pronostic très variable,<br />

selon qu’il s’agit d’une néphropathie à dépôts mésangiaux<br />

d’IgM au pronostic relativement bénin dans la polyarthrite<br />

rhumatoïde ou de l’amylose AA qui entraîne une mortalité<br />

accrue à court terme chez les patients atteints. Les médecins<br />

doivent donc rester vigilants au dépistage des complications<br />

rénales chez leurs patients. L’exploration de ces complications<br />

doit être discutée avec le néphrologue de façon à ne pas<br />

méconnaître une atteinte possiblement sévère compliquant soit<br />

une maladie connue, soit un nouveau traitement pour lequel<br />

nous n’avons pas encore un recul suffisant.<br />

Trop peu d’études sont actuellement disponibles pour<br />

connaître l’action des traitements sur la fonction rénale. L’étude<br />

rigoureuse des nouveaux traitements qui ont montré une<br />

efficacité spectaculaire sur les maladies articulaires, comme les<br />

agents anti-TNF ou l’éprodisate dans l’amylose, permettra de<br />

préciser leur action sur l’évolution des néphropathies, et de<br />

répondre à la question de leur efficacité sur la fonction rénale<br />

et la survie des patients à long terme.<br />

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risk of serious infections and malignancies: systematic review and<br />

meta-analysis of rare harmful effects in randomized controlled trials.<br />

JAMA 2006;295:2275-85 (Erratum in: JAMA 2006 ;295:2482).<br />

Pour en savoir plus<br />

L. Tricot (l.tricot@hopital-foch.org).<br />

Service de néphrologie et de transplantation rénale, Hôpital Foch, 40, rue Worth, 92150 Suresnes, France.<br />

Vérine J, Mourad N, Desseaux K, Vanhille P, Noël LH, Beaufils H, et al.<br />

Clinical and histological characteristics of renal AA amyloidosis: a<br />

retrospective study of 68 cases with a special interest to amyloidassociated<br />

inflammatory response. Hum Pathol 2007;38:1798-809.<br />

Mihatsch MJ. The pathology of analgesic nephropathy. In: Stewart JH, editor.<br />

Analgesic and NSAID-induced kidney disease. New York: Oxford<br />

University Press; 1993.<br />

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Grünfeld JP, Kerr DN, Ritz E, Winearls CG, editors. Oxford textbook of<br />

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Anderson PJ. Tumor necrosis factor inhibitors: clinical implications of their<br />

different immunogenicity profiles. Semin Arthritis Rheum 2005;<br />

34(5suppl1):19-22.<br />

Bongartz T, Sutton AJ, Sweeting MJ, Buchan I, Matteson EL, Montori V.<br />

Anti-TNF antibody therapy in rheumatoid arthritis and the risk of<br />

serious infections and malignancies: systematic review and metaanalysis<br />

of rare harmful effects in randomized controlled trials. JAMA<br />

2006;295:2275-85 (Erratum in. JAMA 2006;295:2482).<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Tricot L. Atteintes rénales des rhumatismes inflammatoires. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-055-E-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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au patient<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Néphrologie


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0600<br />

Bases pharmacocinétiques<br />

de la prescription médicale<br />

chez le patient insuffisant rénal<br />

D u<br />

V Launay-Vacher<br />

fait de la fréquence de l’insuffisance rénale, détaillée par ailleurs dans cet ouvrage, dont il est important de<br />

prendre conscience, le praticien est souvent confronté au problème de la prescription de médicaments chez<br />

des patients dont la fonction rénale est altérée. Le seul ouvrage de référence est le Vidalt dans lequel ce thème est<br />

dans la majorité des cas peu ou pas traité dans la rubrique « Posologie et Mode d’administration ». Reste alors à se<br />

reporter au paragraphe « Pharmacocinétique » de la monographie, dont l’interprétation est parfois délicate.<br />

Dans cet article sont résumées les bases de la pharmacocinétique des médicaments qu’il est nécessaire de connaître<br />

pour mieux appréhender les principes de l’adaptation de la posologie des médicaments chez le patient insuffisant<br />

rénal.<br />

© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : adaptation de la posologie, insuffisance rénale, pharmacocinétique.<br />

■ Introduction<br />

Le Dictionnaire Vidalt, outil de référence pour la<br />

prescription des médicaments, présente les résumés<br />

des caractéristiques du produit des médicaments<br />

disponibles sur le marché français. Pour la plupart,<br />

ces monographies comportent un alinéa intitulé<br />

« Pharmacocinétique » et un autre intitulé<br />

« Pharmacodynamie ». La pharmacocinétique est<br />

définie par « l’étude du devenir d’un médicament<br />

dans l’organisme » et la pharmacodynamie par<br />

« l’étude des mécanismes d’action des médicaments<br />

dans l’organisme ». Plus simplement, ces deux<br />

termes peuvent également être qualifiés comme<br />

« l’influence de l’organisme sur le médicament »<br />

(pharmacocinétique) et « l’influence du médicament<br />

sur l’organisme » (pharmacodynamie). Les<br />

représentations graphiques typiques représentent la<br />

courbe des concentrations plasmatiques du<br />

médicament en fonction du temps après<br />

l’administration pour la pharmacocinétique et la<br />

courbe de l’effet pharmacologique induit par le<br />

médicament en fonction du temps après<br />

l’administration pour la pharmacodynamie.<br />

S’il est vrai que le profil pharmacodynamique de<br />

certains médicaments peut être modifié chez le<br />

patient insuffisant rénal du fait de modifications de la<br />

sensibilité de certains récepteurs pharmacologiques<br />

par exemple, les modifications de la pharmacocinétique<br />

sont sans conteste les plus flagrantes et les plus<br />

importantes en termes de maniement du<br />

médicament, car ce sont elles qui nécessitent<br />

d’adapter la posologie chez ces patients. C’est la<br />

raison pour laquelle il a été décidé de réaliser un<br />

article sur ce thème dans le cadre de cet ouvrage.<br />

Après avoir défini dans leurs grandes lignes les<br />

différents paramètres de la pharmacocinétique des<br />

médicaments sont détaillées les modifications de la<br />

pharmacocinétique liées à l’insuffisance rénale et les<br />

modalités de l’adaptation de la posologie des<br />

médicaments chez le patient insuffisant rénal.<br />

Pharmacocinétique<br />

■ des médicaments<br />

Une fois les expérimentations précliniques<br />

réalisées (in vitro, ex-vivo et chez l’animal), le<br />

développement clinique d’un médicament débute<br />

par l’étude de son comportement chez l’homme. Ces<br />

premières études portent essentiellement sur la<br />

pharmacocinétique et ont pour objectif la<br />

détermination des paramètres pharmacocinétiques<br />

à l’aide de la courbe temps-concentrations et d’outils<br />

mathématiques spécifiques.<br />

‚ Courbe temps-concentrations et phases<br />

de la pharmacocinétique<br />

L’établissement de la courbe des concentrations<br />

du médicament en fonction du temps après<br />

l’administration permet la visualisation du profil<br />

pharmacocinétique du médicament et des quatre<br />

phases dont il est constitué : l’absorption, la<br />

distribution, le métabolisme et l’élimination (phases<br />

ADME) (fig 1, 2). D’une manière générale, l’étude du<br />

profil pharmacocinétique d’un médicament<br />

s’effectue sur l’évolution des concentrations<br />

plasmatiques en fonction du temps car ce<br />

compartiment dit central constitue un point de<br />

passage obligatoire pour tout médicament à visée<br />

systémique, d’une part, mais aussi parce qu’il<br />

constitue un compartiment aisément accessible pour<br />

réaliser les prélèvements. Ainsi, un médicament, une<br />

fois administré dans un organisme humain ou<br />

animal, va subir ces quatre phases : l’absorption du<br />

médicament dans le compartiment central (le<br />

plasma), également appelée résorption pour les<br />

autres voies d’administration que les voies orale et<br />

intraveineuse, ou phase d’entrée ; la distribution vers<br />

1<br />

les compartiments périphériques (tissus) ; le<br />

métabolisme (spontané, cellulaire ou hépatique) ;<br />

l’élimination (ou l’excrétion) du médicament sous<br />

forme inchangée ou de métabolites vers l’extérieur<br />

de l’organisme (urines, bile, fèces). Dans le cas d’une<br />

administration intraveineuse, il n’existe pas de phase<br />

d’absorption proprement dite car le médicament est<br />

directement introduit dans le compartiment central.<br />

En revanche, dans le cas d’une administration par<br />

perfusion intraveineuse, il existe bien une phase<br />

d’entrée du médicament dans le compartiment<br />

sanguin dans la mesure où l’administration est<br />

étalée dans le temps et non instantanée comme<br />

c’est le cas lors d’une administration en bolus.<br />

‚ Paramètres pharmacocinétiques<br />

5-0600<br />

Le profil pharmacocinétique d’un médicament est<br />

décrit par ses paramètres pharmacocinétiques :<br />

concentration plasmatique maximale (Cmax), temps<br />

du pic de concentration maximale (Tmax), aire sous<br />

la courbe des concentrations plasmatiques (area<br />

under concentration-time curve [AUC]), demi-vie<br />

d’élimination (T1/2), volume de distribution (Vd) et<br />

clairance (CL). Pour les voies d’administration autres<br />

que la voie intraveineuse bolus est défini un autre<br />

paramètre appelé biodisponibilité (F), dont la<br />

signification est importante à connaître pour<br />

l’interpréter correctement.<br />

Concentration plasmatique maximale<br />

et temps du pic de concentration maximale<br />

Le (ou la) Cmax et le Tmax sont déterminés<br />

graphiquement à partir de la courbe tempsconcentration<br />

(fig 2). Ces deux paramètres traduisent<br />

l’importance et la vitesse d’absorption du<br />

médicament à partir de son site d’administration. Le<br />

Cmax est exprimé en unités de concentration (mg/L,<br />

mg/L, mmol/L etc) et le Tmax en unités de temps<br />

(h, min, s).


5-0600 - Bases pharmacocinétiques de la prescription médicale chez le patient insuffisant rénal<br />

TGI<br />

IM<br />

IV<br />

Absorption<br />

Biodisponibilité F<br />

Réabsorption<br />

tubulaire<br />

Sécrétion<br />

tubulaire<br />

« Area under concentration-time curve »<br />

L’AUC (fig 2) est déterminée par calcul<br />

mathématique. Elle constitue une image de<br />

l’exposition de l’organisme au médicament. Plus<br />

l’AUC est élevée et plus l’exposition a été importante.<br />

L’AUC est exprimée en unités de concentration ×<br />

unités de temps (mg/L.h, par exemple).<br />

Demi-vie d’élimination<br />

Le T1/2 définit le temps nécessaire pour que la<br />

concentration du médicament diminue de moitié<br />

(demi-vie d’élimination) ou soit doublée (demi-vie<br />

d’absorption). Elle est déterminée par le calcul. La<br />

demi-vie d’élimination présente un intérêt non<br />

négligeable en pratique courante car elle permet<br />

d’évaluer en combien de temps l’organisme aura<br />

Volume de distribution<br />

Récepteurs tissulaires<br />

Tissus adipeux<br />

Liquide<br />

extracellulaire<br />

Plasma<br />

Protéines<br />

DFG<br />

Élimination<br />

urinaire<br />

Métabolisme hépatique<br />

Enzymes<br />

Bile<br />

Élimination<br />

dans les fèces<br />

Élimination rénale<br />

1 Schéma de la pharmacocinétique des médicaments [6] .<br />

TGI : tractus gastro-intestinal (administration per os) ; IM : administration intramusculaire ; IV : administration<br />

intraveineuse ; DFG : débit de filtration glomérulaire.<br />

Concentrations<br />

plasmatiques<br />

1 000<br />

Absorption<br />

Cmax<br />

100<br />

10<br />

AUC<br />

Distribution<br />

Métabolisme<br />

TGI<br />

1<br />

0 Tmax 5 10 15 20<br />

temps<br />

Élimination<br />

2 Profil pharmacocinétique d’un médicament.<br />

Cmax : concentration plasmatique maximale (pic plasmatique) ; Tmax : temps du pic plasmatique ; AUC : aire<br />

sous la courbe des concentrations plasmatiques.<br />

complètement éliminé le médicament : après une<br />

demi-vie, 50 % du médicament sont toujours<br />

présents dans l’organisme ; après deux demi-vies,<br />

50 % × 50 % = 25 % ; après trois demi-vies, 25 % ×<br />

50 % = 12,5 % etc. En règle, il est considéré que<br />

l’organisme a complètement éliminé le médicament<br />

après cinq à sept demi-vies d’élimination. Cette<br />

période est appelée wash-out. La demi-vie est<br />

exprimée en unités de temps (h, min, s).<br />

Volume de distribution<br />

La distribution d’un médicament dans<br />

l’organisme est estimée par son Vd. Cet indicateur<br />

est en fait une image mathématique ; on le définit<br />

comme un volume virtuel (et c’est la raison pour<br />

laquelle il peut être très important) qui reflète la<br />

pénétration du produit dans des compartiments plus<br />

2<br />

ou moins profonds de l’organisme. Le Vd est très<br />

variable selon les médicaments. Ainsi, certaines<br />

molécules peuvent présenter des Vd supérieurs à<br />

50 L/kg comme la chloroquine, l’amiodarone ou la<br />

doxorubicine et d’autres de faibles Vd, inférieurs à<br />

0,2 L/kg comme c’est le cas pour certaines<br />

céphalosporines (céfotaxime, céfotétan, ceftriaxone,<br />

céfuroxime), certains anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens (aspirine, ibuprofène, flurbiprofène,<br />

kétoprofène) ou l’acide valproïque [8] . Le Vd est,<br />

comme son nom l’indique, exprimé en unité de<br />

volume (le plus souvent L ou L/kg de poids corporel).<br />

Clairance<br />

La CL est définie par « le volume virtuel de plasma<br />

(pour la clairance plasmatique, par exemple) qui est<br />

totalement épuré d’une substance par unité de<br />

temps ». Elle est déterminée par le calcul et peut être<br />

« totale » si toutes les voies d’épuration de la<br />

substance considérée sont prises en compte ou bien<br />

« rénale » ou « hépatique » si l’on s’intéresse à<br />

l’épuration de ladite substance par un organe en<br />

particulier. La CL est exprimée en unités de débit<br />

(unités de volume/unités de temps : mL/min ou L/h,<br />

le plus souvent).<br />

Biodisponibilité<br />

La biodisponibilité est un paramètre pharmacocinétique<br />

permettant de comparer deux voies ou<br />

formes d’administration différentes d’un même<br />

médicament. Elle est déterminée par un calcul<br />

mathématique rapportant certains paramètres<br />

pharmacocinétiques de la voie étudiée à ceux d’une<br />

voie de référence. Lorsque la voie d’administration<br />

de référence est la voie intraveineuse bolus, la<br />

biodisponibilité est dite « absolue » et lorsque la<br />

comparaison porte sur deux voies autres que<br />

l’intraveineuse bolus, elle est dite « relative ». Par<br />

exemple, la biodisponibilité absolue d’un<br />

médicament X administré sous forme d’un<br />

comprimé par voie orale consiste en la comparaison<br />

des différents paramètres pharmacocinétiques du<br />

médicament X déterminés après administration per<br />

os du comprimé à ceux déterminés après<br />

administration du même médicament X en<br />

intraveineuse bolus. Par conséquent, la<br />

biodisponibilité orale du médicament X n’est pas la<br />

fraction absorbée de médicament, même s’il est vrai<br />

que dans certains cas ces deux éléments peuvent<br />

être du même ordre.<br />

Modifications<br />

■<br />

de la pharmacocinétique<br />

des médicaments chez le patient<br />

insuffisant rénal<br />

L’insuffisance rénale, aiguë ou chronique, peut<br />

avoir des répercussions sur l’une ou plusieurs des<br />

quatre phases de la pharmacocinétique des<br />

médicaments [6] .<br />

‚ Absorption<br />

Il existe chez le patient insuffisant rénal de<br />

nombreuses variations physiopathologiques qui<br />

peuvent avoir des répercussions sur l’absorption des<br />

médicaments, principalement ceux administrés per<br />

os. Ainsi, les modifications du pH gastrique<br />

secondaires à l’hypersécrétion d’urée dans la salive<br />

ensuite déglutie peuvent modifier l’absorption de<br />

certains médicaments administrés par voie orale en


modifiant leur état d’ionisation. Le ralentissement de<br />

l’élimination par voie urinaire peut également<br />

provoquer une modification de la biodisponibilité du<br />

fait de l’accumulation du médicament dans le<br />

compartiment central. Parallèlement, alors que<br />

certains auteurs ont démontré une augmentation de<br />

la perméabilité intestinale en cas d’inflammation de<br />

la muqueuse [4] , une étude clinique mettait en<br />

évidence la présence d’un côlon inflammatoire chez<br />

plus de 50 % des sujets sur une cohorte de 138<br />

patients insuffisants rénaux [9] . Il a également été<br />

observé une diminution du premier passage<br />

hépatique chez certains patients insuffisants rénaux<br />

pour des médicaments comme le propranolol, le<br />

bufuralol ou l’oxprénolol pouvant conduire à une<br />

augmentation importante des concentrations<br />

sériques par rapport à un sujet ayant une fonction<br />

rénale et un captage hépatique normaux. De plus, il<br />

a été récemment mis en évidence une diminution du<br />

métabolisme intestinal liée à une diminution de<br />

l’activité des isoenzymes intestinales du cytochrome<br />

P450 [7] . Ainsi, la quantité de médicament qui atteint<br />

le compartiment central (la phase d’absorption) peut<br />

être altérée chez le patient insuffisant rénal.<br />

‚ Distribution<br />

Œdèmes et ascites peuvent provoquer une<br />

augmentation du Vd par diffusion des médicaments<br />

hydrophiles dans ces liquides, les rendant ainsi<br />

moins disponibles au site d’action. À l’inverse, la<br />

déshydratation peut engendrer une diminution de<br />

ce paramètre. Ainsi, et même en l’absence des signes<br />

cliniques évoqués précédemment, le volume de<br />

distribution de certains médicaments peut varier<br />

chez le patient insuffisant rénal. De plus, la fixation<br />

des médicaments aux protéines plasmatiques peut<br />

également être modifiée chez le patient insuffisant<br />

rénal. En effet, l’albuminémie de ces patients est<br />

souvent inférieure à celle de sujets sains. Ainsi, les<br />

médicaments acides faibles sont moins fixés. La<br />

fraction libre de médicament dans le compartiment<br />

sanguin se trouve ainsi augmentée et une quantité<br />

plus importante de produit est donc disponible pour<br />

atteindre le site d’action et/ou pour diffuser dans des<br />

compartiments plus profonds de l’organisme. Ces<br />

variations du taux de liaison aux protéines<br />

plasmatiques vont avoir les répercussions les plus<br />

importantes sur la pharmacodynamie des<br />

médicaments dont la fraction liée est d’ordinaire<br />

importante (lithium, gentamicine, digoxine,<br />

phénytoïne). De plus, certaines substances qui<br />

s’accumulent chez les patients urémiques vont entrer<br />

en compétition avec les médicaments sur les sites de<br />

fixation aux protéines [2] .<br />

‚ Métabolisme<br />

Il a été longtemps considéré que la pharmacocinétique<br />

des médicaments dont la clairance<br />

métabolique était très supérieure à la clairance<br />

rénale n’était pas modifiée chez le patient insuffisant<br />

rénal. Toutefois, chez certains patients insuffisants<br />

rénaux, des modifications majeures du métabolisme<br />

peuvent se produire du fait du ralentissement de<br />

certaines réactions enzymatiques hépatiques<br />

comme les réductions (cortisol), les acétylations<br />

(isoniazide, acides aminosalicyliques) et les<br />

oxydations (vitamine D) [3] . De plus, il a été démontré<br />

que le métabolisme rénal local (cytochrome P450)<br />

était fortement perturbé chez le patient insuffisant<br />

rénal. Les médicaments à métabolisme strictement<br />

hépatique peuvent donc avoir une pharmacocinétique<br />

modifiée chez le patient insuffisant rénal.<br />

Glomérule<br />

Tubule<br />

proximal<br />

Anse de<br />

Henle<br />

Tubule<br />

distal<br />

Canal<br />

‚ Élimination<br />

Bases pharmacocinétiques de la prescription médicale chez le patient insuffisant rénal - 5-0600<br />

Filtration<br />

Sécrétion<br />

Réabsorption<br />

passive<br />

collecteur<br />

3 Mécanismes d’excrétion des médicaments par le<br />

néphron.<br />

Il est important de définir deux termes de base de<br />

la pharmacocinétique : l’élimination et l’excrétion.<br />

L’élimination consiste en la disparition d’une<br />

substance du compartiment central. L’excrétion<br />

désigne quant à elle la « sortie » de la substance à<br />

l’extérieur de l’organisme. Ainsi, un médicament<br />

peut être éliminé par un métabolisme hépatique et<br />

ses métabolites excrétés par le rein. De ce fait, le rein<br />

joue un rôle, essentiel dans la plupart des cas, dans<br />

l’élimination des médicaments.<br />

L’excrétion rénale est soumise à trois mécanismes<br />

principaux distincts : la filtration glomérulaire, la<br />

sécrétion tubulaire et la réabsorption tubulaire<br />

passive (fig 3). Sont éliminés par filtration<br />

glomérulaire les médicaments non liés aux protéines<br />

et dont la taille est suffisamment faible pour traverser<br />

la membrane glomérulaire par diffusion passive. La<br />

sécrétion tubulaire est un mécanisme de transport<br />

actif impliquant des transporteurs différents selon la<br />

nature des médicaments. On distingue les<br />

transporteurs des anions organiques (organic anion<br />

transporters), les transporteurs des cations<br />

organiques (organic cation transporters) etles<br />

transporteurs des composés non chargés, non<br />

encore clairement identifiés, qui s’apparentent aux<br />

glycoprotéines P [1] . La réabsorption tubulaire est un<br />

phénomène de diffusion passive qui concerne<br />

essentiellement les molécules non chargées. En cas<br />

d’insuffisance rénale, ces trois mécanismes<br />

d’excrétion peuvent être plus ou moins altérés, en<br />

fonction de la nature de l’atteinte rénale.<br />

Les médicaments dont la voie d’élimination<br />

principale est rénale ont, bien entendu, les<br />

pharmacocinétiques les plus modifiées. La demi-vie<br />

d’élimination est augmentée, corrélativement ou<br />

non avec le degré de l’insuffisance rénale. À l’inverse,<br />

les médicaments excrétés par voie biliaire ne<br />

subissennt que peu de modifications de leur<br />

pharmacocinétique. En ce qui concerne les<br />

médicaments métabolisés par le foie se posent les<br />

3<br />

problèmes de l’élimination secondaire de leur(s)<br />

métabolite(s), et de l’activité pharmacologique et/ou<br />

de la toxicité éventuelle de ces derniers. En effet,<br />

l’élimination des métabolites peut être ralentie et, de<br />

ce fait, conduire à une accumulation de ces produits<br />

de dégradation induisant un prolongement de<br />

l’activité pharmacologique et/ou l’apparition de<br />

phénomènes toxiques. Pour certains médicaments<br />

ayant un mode d’élimination mixte, l’une des voies<br />

peut compenser l’autre pour retrouver une vitesse<br />

d’élimination proche de la normale.<br />

L’accumulation du médicament et/ou de ses<br />

métabolites doit conduire, le plus souvent, à une<br />

adaptation de la posologie chez le patient insuffisant<br />

rénal.<br />

■<br />

Adaptation de la posologie<br />

des médicaments chez le patient<br />

insuffisant rénal<br />

Chez le patient insuffisant rénal, l’adaptation de la<br />

posologie est nécessaire quand les modifications de<br />

la pharmacocinétique du médicament génèrent des<br />

concentrations plasmatiques en médicament et/ou<br />

en métabolites supérieures à celles observées<br />

habituellement chez un patient à fonction rénale<br />

normale pour une dose administrée identique. Ainsi,<br />

l’adaptation de la posologie des médicaments chez<br />

le patient insuffisant rénal peut être réalisée selon<br />

trois méthodes :<br />

– diminuer la dose unitaire et conserver<br />

l’intervalle d’administration : méthode de la dose ;<br />

– augmenter l’intervalle d’administration en<br />

conservant la même dose unitaire : méthode de<br />

l’intervalle ;<br />

– modifier à la fois l’intervalle d’administration et<br />

la dose unitaire : méthode mixte.<br />

La méthode dite « de la dose » doit être appliquée<br />

lorsque l’efficacité du traitement nécessite de<br />

maintenir la concentration plasmatique en<br />

médicament au-dessus d’un certain seuil tout au<br />

long du traitement. La méthode dite « de l’intervalle »<br />

doit être utilisée lorsque l’efficacité du traitement est<br />

directement liée au pic plasmatique (Cmax) en<br />

médicament et que la diminution de la dose unitaire<br />

ne permet pas d’atteindre un Cmax suffisamment<br />

élevé (par exemple pour certains antibiotiques pour<br />

lesquels il est indispensable de conserver un Cmax<br />

élevé afin d’atteindre des concentrations<br />

bactéricides). Le choix de la troisième méthode<br />

(intervalle et dose) s’impose lorsque la première<br />

méthode (dose) ne permet pas d’atteindre des<br />

concentrations efficaces ou lorsque la seconde<br />

(intervalle) ne permet pas une couverture<br />

thérapeutique suffisante entre deux prises<br />

médicamenteuses. Les deux premières méthodes<br />

comportent toutefois des limites incontournables en<br />

pratique clinique. En effet, le praticien ne dispose pas<br />

dans tous les cas d’une forme pharmaceutique<br />

permettant une diminution adéquate de la dose<br />

unitaire (méthode de la dose). De même, il est parfois<br />

difficile d’appliquer strictement la méthode de<br />

l’intervalle pour des raisons d’observance. Dans ces<br />

cas, il est nécessaire d’utiliser la méthode mixte et de<br />

diminuer légèrement la dose unitaire afin d’obtenir<br />

un intervalle d’administration applicable ou à<br />

l’inverse d’augmenter légèrement l’intervalle<br />

d’administration afin de pouvoir utiliser une dose<br />

unitaire correspondant à une forme pharmaceutique


5-0600 - Bases pharmacocinétiques de la prescription médicale chez le patient insuffisant rénal<br />

commercialisée. L’adaptation de la posologie quelle<br />

que soit la méthode retenue doit être réalisée en<br />

fonction du patient et du degré de son insuffisance<br />

rénale, et en fonction du médicament et de sa<br />

pharmacocinétique chez le sujet à fonction rénale<br />

normale et chez le patient insuffisant rénal.<br />

Ces méthodes d’adaptation de la posologie<br />

portent sur les doses d’entretien d’un traitement<br />

médicamenteux. Pour certains médicaments<br />

nécessitant chez le sujet ayant une fonction rénale<br />

normale une dose de charge initiale, celle-ci est ou<br />

non modifiée, en fonction de la pharmacocinétique<br />

et de la marge thérapeutique du médicament<br />

concerné. En effet, l’utilisation d’une dose de charge<br />

a pour but d’atteindre rapidement la zone de<br />

concentration plasmatique efficace. L’administration<br />

de doses d’entretien permet de maintenir les taux<br />

circulants dans la fourchette thérapeutique. Si<br />

l’insuffisance rénale induit une forte augmentation<br />

du pic plasmatique et que le médicament présente<br />

une marge thérapeutique étroite, il est malgré tout<br />

nécessaire de diminuer également la dose de<br />

charge. Par ailleurs, il est possible pour certains<br />

médicaments que la mise en place d’une dose de<br />

charge permette une adaptation de la posologie<br />

efficace chez le patient insuffisant rénal. C’est le cas<br />

pour la gabapentine pour laquelle il a été montré<br />

chez le patient insuffisant rénal terminal<br />

hémodialysé que la mise en place d’un tel schéma<br />

thérapeutique permettait d’obtenir une couverture<br />

satisfaisante des patients alors que chez le sujet<br />

ayant une fonction rénale normale il n’est pas<br />

nécessaire de procéder de la sorte [10] . En fait, de<br />

même que la posologie d’un médicament en<br />

développement est établie en fonction du profil<br />

pharmacocinétique chez le volontaire sain, la même<br />

démarche doit être établie chez le sujet insuffisant<br />

rénal, volontaire « sain » par ailleurs ou patient<br />

malade.<br />

■ Conclusion<br />

Les modifications du profil pharmacocinétique<br />

des médicaments chez le patient insuffisant rénal<br />

résultent de modifications multiples du devenir du<br />

médicament dans l’organisme. Ces altérations<br />

portent essentiellement sur l’élimination rénale du<br />

médicament inchangé ou de ses métabolites.<br />

Cependant, des modifications peuvent également<br />

affecter la distribution et le métabolisme hépatique,<br />

voire l’absorption des produits non administrés par<br />

voie intraveineuse. Ainsi, du fait de la complexité et<br />

de la multiplicité des mécanismes concernés, il est<br />

indispensable d’étudier spécifiquement la<br />

pharmacocinétique des médicaments existants ou<br />

en cours de développement chez des volontaires ou<br />

des patients insuffisants rénaux [5] . En l’état actuel des<br />

connaissances, il n’existe pas de règle générale fiable<br />

d’adaptation de la posologie. Celle-ci doit être<br />

élaborée pour chaque médicament en fonction de<br />

son profil pharmacocinétique chez le patient<br />

insuffisant rénal. Malheureusement, le dictionnaire<br />

Vidalt ne propose que rarement une information<br />

pratique et claire sur ce thème. Aussi est-il<br />

souhaitable de prendre un avis auprès de<br />

spécialistes en néphropharmacologie pour toute<br />

prescription chez le patient insuffisant rénal.<br />

Vincent Launay-Vacher : Pharmacien clinicien,<br />

Service de néphrologie du Pr Deray, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : V Launay-Vacher. Bases pharmacocinétiques de la prescription médicale chez le patient insuffısant rénal.<br />

Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), 5-0600, 2003, 4 p<br />

[1] Berkhin EB, Humphreys MH. Regulation of renal tubular secretion of organic<br />

compounds. Kidney Int 2001 ; 59 : 17-30<br />

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sulphate and other endogenous substances on the binding of drugs and dyes<br />

to human albumin. Biochem Pharmacol (3) : 1982 ; 31 319-323<br />

[3] Gibson TP. Renal disease and drug metabolism: an overview. Am J Kidney Dis<br />

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Gastroenterol Rep (5) : 1999 ; 1 410-416<br />

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[6] Launay-Vacher V, Storme T, Izzedine H, Deray G. Modifications pharmacocinétiques<br />

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kidney failure. Ter Arkh 1996 ; 68 : 33-37<br />

[10] Wong MO, Eldon MA, Keane WF, Turck D, Bockbrader HN, Underwood<br />

BA et al. Disposition of gabapentin in anuric subjects on hemodialysis. J Clin<br />

Pharmacol (6) : 1995 ; 35 622


Plan<br />

Calcifications testiculaires<br />

X. Durand, M. Lahutte<br />

Le nombre d’études et de publications montre le problème soulevé par les calcifications testiculaires, dont<br />

la présence fait redouter la survenue d’une tumeur. Il faut bien différencier les calcifications intrascrotales<br />

extratesticulaires, hors de notre propos, et les calcifications intratesticulaires communes des<br />

microcalcifications. Ces dernières ne sont pas spécifiques, peuvent coexister à des degrés différents avec<br />

un infarcissement, une lésion kystique, une lésion tumorale séminomateuse ou non, sans préjuger du<br />

caractère malin ni de son histologie. À l’inverse, les calcifications communes n’ont aucun caractère<br />

pathologique lorsqu’elles sont isolées. La modalité de découverte et de suivi de ces calcifications est<br />

essentiellement l’échographie scrotale. La revue de la littérature met en évidence quelques points<br />

remarquables : il semble clairement exister un lien entre la présence de microcalcifications testiculaires et<br />

une cryptorchidie, et l’éventualité d’une néoplasie germinale intratubulaire. Elles représentent un facteur<br />

de risque familial de cancer du testicule. Leur bilatéralité constitue un facteur de risque supplémentaire.<br />

En revanche, une étude très récente met en évidence que le grade n’est pas un facteur de risque<br />

supplémentaire, donnée nouvelle qui va à l’encontre des connaissances classiques. Pourtant, l’ensemble<br />

de ces résultats ne permet pas de déduire une conduite à tenir univoque devant la découverte (souvent<br />

fortuite) de microcalcifications. Une attitude adaptée et graduelle semble la plus conforme aux données<br />

actuelles. Elle consiste en l’association d’une autopalpation, une échographie scrotale et une consultation<br />

spécialisée annuelle pour les patients présentant un facteur de risque authentifié de tumeur germinale<br />

testiculaire (TGT).<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Tumeur germinale testiculaire ; Échographie scrotale ; Microcalcifications ; Cryptorchidie ;<br />

Néoplasie germinale intratubulaire<br />

Introduction 1<br />

Calcifications intratesticulaires communes 1<br />

Microcalcifications testiculaires (MCT) 2<br />

Prévalence des microcalcifications testiculaires 2<br />

Microcalcifications et tumeurs germinales testiculaires 3<br />

Microcalcifications et facteurs de risque de tumeurs germinales<br />

testiculaires 3<br />

Impact du grade et de la bilatéralité des microcalcifications 4<br />

Recommandations relatives aux microcalcifications testiculaires 4<br />

Conclusion 4<br />

■ Introduction<br />

La question des calcifications testiculaires doit être appréhendée<br />

au travers du prisme de l’échographie, examen à<br />

l’origine de leur description. La multiplication des échographies<br />

scrotales, l’évolution des matériels confrontent de plus en plus<br />

souvent les praticiens à un problème diagnostique. Le spectre de<br />

l’association à une tumeur maligne plane sur ces questions, car<br />

les calcifications n’ont pas, en soi, de caractère de spécificité.<br />

Urologie<br />

.<br />

Il convient d’emblée de différencier les calcifications testiculaires<br />

communes des microcalcifications (MC), entité spécifique<br />

dont la signification est sujette à controverse.<br />

Le propos de cet article est d’apporter un éclairage sur les<br />

différents aspects que revêtent les calcifications siégeant au sein<br />

de la pulpe testiculaire et d’exposer leur signification pathologique<br />

au regard des données récentes disponibles de la<br />

littérature.<br />

■ Calcifications intratesticulaires<br />

communes<br />

18-649<br />

Cet ensemble nosologique regroupe les modifications d’échos<br />

intrapulpaires, focales, hyperéchogènes et contiguës à une<br />

échostructure normale homogène, à l’exclusion des microcalcifications.<br />

Une hyperéchogénicité unique, punctiforme, supramillimétrique,<br />

avec ou sans cône d’ombre postérieur correspond le plus<br />

souvent à un phlébolithe ou à un granulome spermatique [1] .<br />

Celui-ci n’a aucune valeur pathologique. Les calcifications<br />

vasculaires intratesticulaires peuvent également se manifester<br />

sous la forme de grappe de foyers punctiformes.<br />

Les grappes de foyers hyperéchogènes punctiformes peuvent<br />

également correspondre, lorsqu’elles sont associées au sein<br />

1


.<br />

18-649 Calcifications testiculaires<br />

d’une plage hypoéchogène, à une tumeur testiculaire ou à un<br />

foyer d’infarcissement testiculaire. Leur distinction peut être<br />

difficile et fait appel à l’anamnèse. L’infarcissement est généralement<br />

secondaire à un traumatisme, à une épididymite sévère<br />

où l’épididyme augmenté de volume comprime les vaisseaux<br />

testiculaires, ou à une torsion du cordon. L’infarcissement est<br />

plutôt périphérique, triangulaire, aux bords linéaires contenant<br />

des calcifications et correspondant aux zones de nécrose [2] .<br />

La plupart des tumeurs germinales sont bien définies comme<br />

des lésions hypoéchogènes, plus ou moins hétérogènes [2] .Des<br />

calcifications y sont fréquemment rencontrées, mais leur<br />

présence et leur distribution ne présument pas du type histologique<br />

[3] . Les séminomes sont des tumeurs homogènes et<br />

présentent des calcifications dans moins de 30 % des cas. À<br />

l’inverse, les tumeurs, germinales embryonnaires, les tératomes<br />

sont habituellement plus hétérogènes, comportent des plages<br />

d’échogénicité augmentée dues à la nécrose et aux calcifications.<br />

Les tératomes malins sont particulièrement hétérogènes compte<br />

tenu de la nature complexe de leur origine (os, cartilage, tissus<br />

glandulaire, musculaire et nerveux).<br />

La combinaison du tératome et d’un contingent tumoral<br />

embryonnaire représente la situation la plus fréquente en cas de<br />

calcifications au sein d’une masse hétérogène tumorale [4] .<br />

L’aspect d’une large rétraction calcifiée barrant le testicule est<br />

évocateur du burned out syndrome, involution d’une tumeur<br />

germinale testiculaire qui s’exprime ensuite le plus souvent dans<br />

le rétropéritoine ou le médiastin.<br />

L’association de calcifications à une tumeur bénigne est<br />

également bien documentée. Les tumeurs bénignes dérivées des<br />

cellules de Sertoli ou de Leydig sont parfois le siège de calcifications<br />

qui ajoutent à la difficulté de les distinguer des tumeurs<br />

germinales. Les tumeurs épidermoïdes ont des aspects échographiques<br />

variables. Si son aspect en « pelure d’oignon » ou en<br />

cible, avec des cercles concentriques est le plus classique, la<br />

tumeur épidermoïde a également été décrite comme hypoéchogène<br />

hétérogène, avec une démarcation particulièrement nette<br />

du reste de la pulpe par une paroi parfois calcifiée apparaissant<br />

hyperéchogène [5] . Le simple kyste testiculaire, anéchogène,<br />

parfaitement délimité, peut contenir une calcification murale.<br />

Enfin, l’orchite granulomateuse peut se présenter sous la forme<br />

d’une lésion hypoéchogène, volontiers étendue, contenant des<br />

plages ou des zones calcifiées.<br />

Ces calcifications doivent être distinguées des calcifications<br />

scrotales extratesticulaires, plus fréquentes et souvent bénignes<br />

[6] . La « perle scrotale » est une masse calcifiée isolée,<br />

siégeant au sein des tuniques scrotales enveloppant le testicule,<br />

d’étiologie indéterminée. Elle est généralement unique, mesure<br />

plus de 10 mm de grand axe et produit un discret cône d’ombre<br />

acoustique. La vaginale peut être le siège d’une calcification<br />

sous la forme d’une plaque linéaire. Les calcifications épididymaires<br />

sont volontiers associées à une épididymite chronique, le<br />

diagnostic de maladie granulomateuse est alors à évoquer. Le<br />

Tableau 1.<br />

Prévalence des microcalcifications testiculaires, séries rétrospectives.<br />

calcul vaginal peut être secondaire à une hydrocèle [7] . Les<br />

granulomes hématiques ou spermatiques produisent un écho<br />

adjacent à l’épididyme. Les hydatides testiculaires, les appendices<br />

épididymaires calcifiés sont reconnus par leur siège<br />

caractéristique.<br />

■ Microcalcifications testiculaires<br />

(MCT)<br />

Les MCT ont une existence histologique. Elles ont été décrites<br />

en 1961 par Bunge [8] comme des amas ou dépôts calciques au<br />

sein de la lumière des tubules séminifères.<br />

L’analyse morphoconstitutionnelle en spectrophotométrie y a<br />

révélé la présence d’hydroxyapatite. On parle aussi de microcalcosphérites.<br />

Deux types ont été décrits : calcifications nues ou<br />

entourées de lamelles concentriques de collagène. Cette distinction<br />

n’a pas d’implication clinique. Le nombre d’hypothèses<br />

étiopathogéniques avancées témoigne de l’absence d’explication<br />

univoque à la formation des MC testiculaires. Bierger [9] évoque<br />

la persistance d’éléments gonadiques bisexuels secrétants,<br />

aboutissant à un phénomène de nucléation. La piste d’une<br />

affection systémique a été suggérée, Nistal [10] retrouvant des<br />

lésions identiques ubiquitaires (poumon, système nerveux<br />

central) dans une courte série pédiatrique. La dysfonction<br />

sertolienne, dépassée dans son rôle de phagocytose, est également<br />

une hypothèse souvent évoquée [11] , ainsi que la nucléation<br />

de spermatogonies dégénérées [12] .<br />

Mais pour le clinicien, les MC testiculaires sont avant tout<br />

une image échographique, paradoxalement décrite initialement<br />

sur une radiographie conventionnelle du bassin d’un jeune<br />

garçon de 4 ans [13] . Aujourd’hui, l’échographie a permis<br />

l’émergence d’une sémiologie radiologique des microcalcifications<br />

testiculaires. Ces microcalcifications ont été initialement<br />

décrites par Doherty [14] comme des échos microscopiques diffus<br />

au sein du testicule. Hobart [15] , en 1992, a proposé une<br />

définition en quatre points des microcalcifications testiculaires :<br />

échos de moins de 2 mm de grand axe, sans cône d’ombre<br />

postérieur, répartis de manière diffuse (> 5) et sans modification<br />

de l’organisation interne ou de la surface du testis.<br />

En 1994, Backus [16] définit trois stades de MC, en fonction<br />

de leur nombre dans le parenchyme gonadique :<br />

stade 1 : 5 à 10 par champ d’exploration ;<br />

stade 2 : 10 à 20 ;<br />

stade 3 : plus de 20 échos, figurant un aspect de « tempête de<br />

neige ».<br />

Prévalence des microcalcifications<br />

testiculaires<br />

De nombreuses publications depuis 1992 ont tenté d’approcher<br />

la prévalence des MCT (Tableau 1). Les auteurs ont puisé<br />

n MHz Recueil Indication de l’échographie Prévalences<br />

Hobart [15] 1992 1 710 7,5-10 NR Varico-, hypogonadisme (11) 0,6 %<br />

Ganem [17] 1999 1 100 5-10 CR Infertilité, masse scrotale (22) 0,7 %<br />

Cast [18] 2000 4 819 7,5-10 CR Toutes indications (33) 0,7 %<br />

Skyrme [19] 2000 2 215 7,5 CR Toutes indications (34) 1,5 %<br />

Thomas [20] 2000 159 7 CR Azoospermie (10) 6,2 %<br />

von Eckardt [21] 2001 1 816 NR CR Infertilité (40) 2,2 %<br />

Bach [22] 2001 528 7 CR NR (48) 9,1 %<br />

Otite [23] 2001 3 026 7 CR NR (54) 1,7 %<br />

Derogee [24] 2001 1 535 4-10 CR-images Toutes indications (63) 4,1 %<br />

DeGouveia [25] 2004 263 > 7,5 Images Infertilité (53) 20 %<br />

Sakamoto [26] 2006 969 > 10 Images Infertilité, antécédents de tumeur, autre (46) 4,7 %<br />

Miller [27] 2007 3 279 > 10 Images Toutes indications (65) 2 %<br />

NR : non réalisé ; CR : compte rendu.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

2 Urologie


Tableau 2.<br />

Prévalence des microcalcifications testiculaires, séries prospectives.<br />

dans les registres de radiologie (159 à 4 819 échographies) les<br />

comptes rendus relatant les MCT. Les prévalences varient entre<br />

0,6 % et 20 %. Ces chiffres sont cependant sujets à caution. Il<br />

s’agit d’études rétrospectives, les patients étaient souvent<br />

symptomatiques, l’indication des échographies englobait dans<br />

bien des cas des situations connues pour être un facteur de<br />

risque de tumeur germinale testiculaire (TGT) (infertilité,<br />

azoospermie, masse scrotale, cryptorchidie, etc.). De plus,<br />

l’augmentation de la prévalence dans les séries les plus récentes<br />

est contemporaine de l’évolution des matériels (sondes échographiques<br />

à haute fréquence), ainsi que des compétences, de<br />

l’attention grandissante portée par les praticiens aux MCT.<br />

L’analyse concerne la plupart du temps uniquement les comptes<br />

rendus et non l’iconographie elle-même. Enfin, les tranches<br />

d’âge analysées sont hétérogènes d’une série à une autre,<br />

incluant des enfants, des vieillards, patients peu concernés par<br />

le risque de TGT.<br />

Il convient donc de se tourner vers des études prospectives<br />

pour approcher une prévalence plus exacte. Deux études<br />

récentes, américaine et turque [28-30] , menées dans les armées<br />

chez des volontaires sains asymptomatiques (n = 1 504 et<br />

2 079), ont conclu à une prévalence de 5,8 % et 2,4 %. Une<br />

troisième étude prospective anglaise [29] , chez des patients<br />

symptomatiques cette fois, a noté une prévalence de 3,7 %. Ces<br />

chiffres sont probablement un reflet assez fidèle de la prévalence<br />

des MCT dans la population générale. Ils appellent une première<br />

réflexion quant au lien avec les tumeurs germinales.<br />

L’incidence des tumeurs germinales testiculaires aux États-Unis<br />

est en 2005 est de 5,3 nouveaux cas par pour 100 000 habitants.<br />

Une projection considérant les 151 millions d’Américains<br />

exposés durant 40 ans au risque de TGT donnerait une prévalence<br />

des tumeurs mille fois moindre que celle des MCT<br />

(Tableau 2).<br />

Enfin, Peterson, dans son étude prospective, a séparé les<br />

prévalences des groupes ethniques en présence. Il retrouve une<br />

prévalence à 14,4 % chez les Afro-Caribéens contre 4 % chez les<br />

Caucasiens et 8,5 % chez les Hispaniques. Or, Bridges [31] a<br />

montré que l’incidence des TGT chez les Afro-Américains est<br />

deux fois moins importante que chez les Caucasiens. Là encore,<br />

le lien entre MC et TG du testicule est démenti par des arguments<br />

épidémiologiques.<br />

Microcalcifications et tumeurs germinales<br />

testiculaires<br />

n MHz Recueil Indications échographiques Prévalences<br />

Peterson [28] 2001 1 504 7,5-10 Prospectif Asymptomatiques (84) 5,6 %<br />

Middelton [29] 2002 1 079 > 7,5 Prospectif Symptomatiques (40) 3,7 %<br />

Serter [30] 2007 2 179 > 10 Prospectif Asymptomatiques (53) 2,4 %<br />

Certaines des études rétrospectives suscitées ont également<br />

rapporté les chiffres d’association de ces MC à d’authentiques<br />

tumeurs germinales au sein des registres (Tableau 3). Ainsi, entre<br />

18 % et 80 % des patients porteurs de MC souffrent d’une TGT<br />

concomitante [32, 33] . À l’inverse, les auteurs ont puisé dans les<br />

registres de pathologie de leur institution pour conclure que,<br />

parmi les TGT, 12 %à74%sont associées à des MC. Les biais<br />

décrits dans ces études et en particulier la sélection de patients<br />

à risque pour les TG doit faire interpréter ces chiffres élevés avec<br />

prudence. Pour autant, le caractère fortuit de cette association<br />

ne peut être défendu.<br />

Qu’en est-il des trois séries prospectives de volontaires sains ?<br />

Peterson [28] dénombre un cas de TGT sur 84 MC (1,2 %).<br />

Serter [29] ne déplore aucun cas de cancer sur 53 MC. Middelton<br />

[22] rapporte enfin 15 TGT (8 % des MC), mais dans ce cas,<br />

les patients testés étaient symptomatiques, biais de sélection<br />

puissant. Ces chiffres font relativiser la forte association<br />

suggérée par les séries « historiques ».<br />

Urologie<br />

Tableau 3.<br />

Microcalcifications et tumeurs germinales testiculaires, séries<br />

rétrospectives.<br />

Les diagnostics de cancer du testicule chez des patients<br />

porteurs de MC sont rapportés dans la littérature sous forme de<br />

cas cliniques [34-38] . Dans deux cas sur cinq [34, 38] , d’authentiques<br />

facteurs de risque (atrophie, cryptorchidie) remettent en<br />

cause la place des MC. Cinq études [17, 19, 33, 38, 39] de suivi<br />

(27moisà5ans)depatients porteurs de MC (110 patients) ont<br />

été publiées. Une seule d’entre elles [40] , qui propose une<br />

réactualisation à 5 ans de la série de Peterson, retrouve l’apparition<br />

de tumeur germinale non séminomateuse (TGNS) à<br />

64 mois, ce qui n’est pas statistiquement plus que dans la<br />

population générale.<br />

Microcalcifications et facteurs de risque<br />

de tumeurs germinales testiculaires<br />

La question de la filiation entre MC et TGT interroge sur<br />

l’association entre les MC et les facteurs de risque reconnus des<br />

TGT.<br />

Néoplasie germinale intratubulaire<br />

La néoplasie germinale intratubulaire (NGIT) est un état<br />

tumoral préinvasif précurseur des tumeurs germinales à l’exception<br />

du seminome spermatocytaire. Autrefois dénommées<br />

carcinome in situ, les lésions de NGIT sont, dans 70 % des cas,<br />

des cancers à7ans [41] . À l’inverse, on retrouve sur les pièces<br />

d’orchidectomie pour tumeur, de la NGIT, au sein du parenchyme<br />

adjacent dans 90 % des cas. Dans le contexte très<br />

particulier de patients infertiles, à propos de 53 cas de MC<br />

systématiquement soumis à des biopsies, DeGouveia [25] rapporte<br />

sept cas de NGIT (13,2 %), observés d’ailleurs dans des cas<br />

de MC bilatérales pour six d’entre eux. Bach [22] retrouve 22 %<br />

de NGIT sur 36 MC.<br />

Cryptorchidie<br />

MC % MC<br />

Calcifications testiculaires 18-649<br />

Cancer<br />

Le lien entre TGT et cryptorchidie comme facteur de risque<br />

est aujourd’hui parfaitement documenté. Le risque relatif du<br />

testis cryptorchide est de 35 % et 6%del’ensemble des TGT<br />

surviennent sur un testis cryptorchide [42] .<br />

Renshaw [43] , dans une série de 131 testis, a montré une<br />

prévalence de 4%desMC,alorsquelesMCsontprésentes<br />

dans 40 % des testis tumoraux et 50 % des testis cryptorchides.<br />

Dans une série de 263 échographies scrotales, DeGouveia [25] a<br />

n<br />

Cancer<br />

% Cancer<br />

MC<br />

Ikinger [32] 1982 32 80 % 43 74 %<br />

Backus [16] 1994 42 40 % – –<br />

Ganem [17] 1999 22 36 % – –<br />

Cast [18] 2000 33 21 % 54 12,5 %<br />

Bach [22] 2001 48 27 % 43 12 %<br />

Benett [33] 2001 39 18 % – –<br />

Derogee [24] 2001 63 46 % 60 48 %<br />

Degouveia [25] 2004 53 – 6 (NGIT) –<br />

MC : microcalcification ; NGIT : néoplasie germinale intratubulaire.<br />

3


18-649 Calcifications testiculaires<br />

Absence de facteur de<br />

risque<br />

noté sept cryptorchidies (3,3 %) dans le groupe des testis<br />

normaux. Ce chiffre s’élève à 4,2 % dans le groupe de MC<br />

unilatérales et à 13,3 % en cas de MC bilatérales. La nature du<br />

lien qui unit cryptorchidie et MC est difficile à identifier<br />

précisément, mais il semble bien exister une relation entre ce<br />

facteur de risque et les MC.<br />

Risque familial de tumeur germinale testiculaire<br />

Coffey [44] a publié une série de 328 échographies scrotales<br />

chez 169 patients atteints de TGT, 58 parents sains et<br />

101 patients contrôles (indemnes et sans lien de parenté). Les<br />

MC sont significativement plus fréquentes, comme attendu,<br />

dans le groupe TGT par rapport au contrôle (p < 0,0001). C’est<br />

également le cas dans le groupe parents en comparaison au<br />

contrôle (p < 0,02). De plus, la concordance entre TGT et<br />

parents associés pour la présence de MC est supérieure à celle<br />

attendue d’une répartition aléatoire (p = 0,05). Les auteurs<br />

concluent que les MC représentent un facteur de risque familial<br />

du cancer du testicule.<br />

Impact du grade et de la bilatéralité<br />

des microcalcifications<br />

Dans la série de DeGouveia [25] (263 échos), les biopsies<br />

systématiques révèlent la présence de NGIT dans 20 % des cas<br />

de MC bilatérales, dans aucun cas de MC unilatérale et dans<br />

0,47 % des cas d’échographie normale. Malgré le biais de<br />

sélection important de cette série de patients infertiles, la<br />

bilatéralité semble accentuer le risque au moins de NGIT à<br />

défaut de TGT (aucune tumeur n’est retrouvée dans chacun des<br />

trois groupes).<br />

Le grade de MC ne semble pas impacter le risque de développer<br />

un cancer du testicule. À propos de 4 310 échographies<br />

scrotales, Sanli [45] a mis en évidence 77 MC réparties en :<br />

39 grades 1, 24 grades 2 et 15 grades 3. Une TGT est mise en<br />

évidence dans respectivement 17,9 %, 25 % et 26,6 % de ces<br />

groupes (différence non significative).<br />

Recommandations relatives<br />

aux microcalcifications testiculaires<br />

Le lien entre MC et TGT est suggéré par les séries susdécrites,<br />

mais sa nature est difficile à déterminer précisément.<br />

Coffey [44] considère que les MC sont une manifestation<br />

alternative plus fréquente d’une susceptibilité génétique du<br />

développement de TGT.<br />

Patients porteurs de microcalcifications testiculaires<br />

Facteur(s) de risque<br />

Cryptorchidie, risque familial, infertilité,<br />

néoplasie germinale intratubulaire,<br />

tumeur controlatérale<br />

Stades 1 et 2 Stade 3 Stade 1 Stades 2 et 3<br />

Apprentissage de<br />

l’autopalpation<br />

Consultation d’urologie<br />

Échographie scrotale<br />

annuelle<br />

Aucune société savante (Association française d’urologie<br />

[AFU], European Association of Urology [EAU], American<br />

Urological Association [AUA]) ne s’est prononcée sur des<br />

recommandations diagnostiques ou thérapeutiques vis-à-vis des<br />

MC. Les avis des auteurs varient depuis la simple surveillance<br />

clinique jusqu’à la biopsie systématique, le scanner thoracoabdomino-pelvien<br />

et le dosage des marqueurs. Ajoutons que la<br />

prévalence des MC est telle que d’éventuelles recommandations<br />

auraient une implication médicoéconomique lourde. Réaliser<br />

deux échographies, un dosage de marqueurs et une consultation<br />

spécialisée à 5 % de la population masculine américaine<br />

coûterait 7,9 milliards de dollars. Le coût d’un diagnostic de<br />

cancer avoisinerait 1,7 millions de dollars [46] .<br />

Il semble possible de proposer une attitude graduelle et<br />

adaptée pour les patients porteurs de MCT (Fig. 1) :<br />

chez un patient présentant un facteur de risque authentifié de<br />

TGT : autopalpation, échographie scrotale et consultation<br />

spécialisée annuelle ;<br />

chez un patient sans facteur de risque associé : l’information<br />

et l’autopalpation.<br />

Ce schéma est à adapter à la situation clinique. À titre<br />

d’exemple, un patient aux antécédents de tumeur testiculaire<br />

porteur de MC controlatérales grade 3 doit certainement être<br />

exploré par biopsies, à la recherche de NGIT dans la mesure où<br />

une radiothérapie scrotale éventuellement différée peut lui être<br />

proposée.<br />

■ Conclusion<br />

Biopsies testiculaires<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Proposition d’attitude pratique. NR : non réalisé ; CR : compte rendu.<br />

Le nombre d’études et de publications montre le problème<br />

soulevé par les calcifications testiculaires, dont la présence fait<br />

redouter la survenue d’une tumeur.<br />

Il faut bien différencier les calcifications intrascrotales<br />

extratesticulaires, hors de notre propos, les calcifications<br />

intratesticulaires communes des microcalcifications. Ces dernières<br />

ne sont pas spécifiques, peuvent coexister à des degrés<br />

différents avec un infarcissement, une lésion kystique, une<br />

lésion tumorale séminomateuse ou non, sans préjuger du<br />

caractère malin ni de son histologie. À l’inverse, les calcifications<br />

communes n’ont aucun caractère pathologique<br />

lorsqu’elles sont isolées. La modalité de découverte et de suivi<br />

de ces calcifications est essentiellement l’échographie scrotale.<br />

La revue de la littérature met en évidence quelques points<br />

remarquables : il semble clairement exister un lien entre la<br />

présence de microcalcifications testiculaires et une cryptorchidie,<br />

et l’éventualité d’une néoplasie germinale intratubulaire.<br />

Elles représentent un facteur risque familial de cancer du<br />

4 Urologie


.<br />

testicule. Leur bilatéralité constitue un facteur de risque<br />

supplémentaire. En revanche, une étude très récente montre<br />

que le grade n’est pas un facteur de risque supplémentaire,<br />

donnée nouvelle qui va à l’encontre des connaissances<br />

classiques.<br />

Pourtant, l’ensemble de ces résultats ne permet pas de déduire<br />

une conduite à tenir univoque devant la découverte (souvent<br />

fortuite) de microcalcifications. Une attitude adaptée et graduelle<br />

semble la plus conforme aux données actuelles. Elle<br />

consiste en l’association d’une autopalpation, d’une échographie<br />

scrotale et d’une consultation spécialisée annuelle pour les<br />

patients présentant un facteur de risque authentifié de TGT.<br />

“ Points essentiels<br />

Les données de séries rétrospectives historiques ont<br />

renforcé la thèse d’un lien de filiation entre<br />

microcalcifications et tumeur germinale du testicule.<br />

Des arguments épidémiologiques récents infirment<br />

clairement un lien direct entre microcalcifications et<br />

tumeur germinale du testicule.<br />

La présence de microcalcifications dans des situations<br />

cliniques de facteur de risque de tumeur germinale<br />

(antécédent familial, cryptorchidie, NGIT) est néanmoins<br />

avérée.<br />

Une attitude pragmatique, graduelle, adaptée à chaque<br />

patient peut être proposée.<br />

■ Références<br />

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Urologie<br />

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18-649 Calcifications testiculaires<br />

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[43] Renshaw AA. Testicular calcifications: incidence, histology and<br />

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160:1625-8.<br />

X. Durand (xavier.durand.urovdg@orange.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital d’instruction des Armées du Val-de-Grâce, 74, boulevard du Port-Royal, Paris, France.<br />

[44] Coffey J, Huddart RA, Elliott F, Sohaib SA, Parker E, Dudakia D, et al.<br />

Testicular microlithiasis as a familial risk factor for testicular germ cell<br />

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Urol 2007;17:419-23.<br />

M. Lahutte.<br />

Service d’imagerie médicale, Hôpital d’instruction des Armées du Val-de-Grâce, 74, boulevard du Port-Royal, Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Durand X., Lahutte M. Calcifications testiculaires. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-649,<br />

<strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

6 Urologie<br />

Cas<br />

clinique


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0692<br />

© Elsevier, Paris<br />

F aut-il<br />

© Elsevier, Paris.<br />

Cancer de la prostate :<br />

stratégies diagnostique<br />

et thérapeutique<br />

dépister le cancer de la prostate ?<br />

■ Introduction<br />

Compte tenu du vieillissement de la population,<br />

de l’extension du dosage systématique de l’antigène<br />

prostatique spécifique (PSA) et de l’utilisation de plus<br />

en plus répandue de l’échographie endorectale avec<br />

biopsies prostatiques systématisées, le praticien est<br />

confronté avec une fréquence croissante aux<br />

problèmes du diagnostic et du traitement du cancer<br />

de la prostate.<br />

Ces dernières années ont été marquées par une<br />

progression spectaculaire du nombre de cancers de<br />

la prostate diagnostiqués précocement et accessibles<br />

au traitement curatif. Néanmoins, il est important de<br />

garder à l’esprit les faits suivants :<br />

– l’impact réel du traitement curatif sur la<br />

mortalité par cancer de la prostate n’est pas encore<br />

démontré ;<br />

– le traitement du cancer prostatique localement<br />

avancé et/ou métastatique n’a pas fait de progrès<br />

réellement significatifs depuis la découverte par<br />

Huggins, en 1943, de l’andronégodépendance de la<br />

tumeur et de l’efficacité du traitement hormonal.<br />

■ Épidémiologie<br />

‚ Incidence et prévalence<br />

Le cancer prostatique représente la cinquième<br />

cause de tumeur masculine tous âges confondus<br />

dans le monde, et la deuxième dans les pays<br />

industrialisés. Il est en passe de devenir la première<br />

cause de décès par cancer aux États-Unis [7] .<br />

L’incidence en France augmente progressivement,<br />

passant de huit pour 100 000 autour de la<br />

cinquantaine, à 480 pour 100 000 à partir de la<br />

neuvième décennie (fig 1).<br />

Il importe cependant de garder présent à l’esprit<br />

que la prévalence du cancer clinique, si elle<br />

augmente avec l’âge, est toujours très largement<br />

inférieure à l’incidence du cancer autopsique<br />

(tableau I).<br />

Taux pour 100 000<br />

1 000<br />

100<br />

10<br />

1<br />

L Boccon-Gibod<br />

0,1 x x x<br />

< 1 15 35 55 75 > 85 ans<br />

100 %<br />

90 %<br />

80 %<br />

70 %<br />

60 %<br />

50 %<br />

40 %<br />

30 %<br />

20 %<br />

10 %<br />

0 %<br />

25-44 ans 45-64 ans 65-84 ans 85 et +<br />

Répartition de la cause des décès par tranche d'âge en France (1982, Inserm).<br />

■ Le cancer de la prostate était responsable de<br />

8 234 décès en France en 1986, contre 7 112 en<br />

1982. Il représente 10 % des décès par cancer chez<br />

l’homme (fig 1). Néanmoins, si le diagnostic de<br />

cancer de la prostate est porté chez 10 % des<br />

hommes au cours de leur existence, il importe de<br />

noter qu’il ne sera responsable du décès que de 3 %<br />

d’entre eux.<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

x x<br />

x<br />

x<br />

x<br />

Voies aérodigestives<br />

Prostate<br />

Bronches<br />

Estomac<br />

Intestin<br />

Taux de mortalité par tumeur et par tranche d'âge en France (1982, Inserm).<br />

1 Causes de mortalité et mortalité par tumeur et tranche d’âge en France.<br />

1<br />

5-0692<br />

Tumeurs<br />

Cardiovasculaires<br />

Traumatismes<br />

Digestifs<br />

Respiratoires<br />

Autres<br />

Facteurs favorisants<br />

Bien que l’étiologie du cancer de la prostate<br />

demeure inconnue, un certain nombre de facteurs<br />

favorisants ont été impliqués : raciaux, alimentaires,<br />

génétiques.<br />

■ Si la prévalence du cancer histologique est la<br />

même sur toute la surface du globe, la prévalence du<br />

cancer clinique est extrêmement variable, passant


5-0692 - Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique<br />

Tableau I. – Incidence du cancer autopsique vs prévalence du cancer clinique de la prostate.<br />

40-49 ans 50-59 ans 60-69 ans 70-79 ans > 80 ans<br />

Incidence (autopsie) 4,7 % 10,7 % 17,6 % 29,8 % 42,3 %<br />

Incidence (prostatocystectomie)<br />

6,3 % 10,4 % 18,5 % 28,7 % 37,1 %<br />

Incidence (adénomectomie)<br />

6,4 % 18 % 28,7 %<br />

Prévalence du cancer<br />

clinique<br />

0,006 % 0,05 % 0,25 % 0,7 % 0,92 %<br />

Espérance de vie d’un<br />

homme (années)<br />

33,7-25,9 25,1-18,3 17,6-11,8 11,2-6,5 6,2-0<br />

de 6,2 pour 100 000 en Inde, 3,1 pour 100 000 au<br />

Japon ou 0,8 pour 100 000 à Shanghai à 75 pour<br />

100 000 dans la population nord-américaine et près<br />

de 80 à 90 pour 100 000 chez les Afro-Américains.<br />

Cela suggère l’existence de facteurs éventuellement<br />

raciaux favorisant le passage du cancer « latent » au<br />

cancer cliniquement actif. La prévalence marquée du<br />

cancer prostatique chez les Afro-Américains doit<br />

conduire à les considérer comme un groupe à risque<br />

et comme une cible préférentielle du diagnostic<br />

précoce.<br />

■ Les facteurs alimentaires suscitent un intérêt<br />

croissant. Il a été très fortement suggéré, sinon<br />

démontré, que l’abus des graisses animales,<br />

caractéristique de l’alimentation de l’Europe et de<br />

l’Amérique du Nord, pouvait représenter un facteur<br />

favorisant le développement du cancer prostatique.<br />

Cela pourrait également expliquer que l’incidence du<br />

cancer prostatique chez les Japonais migrant aux<br />

États-Unis rejoigne celle des Nord-Américains de<br />

souche après une ou deux générations. Ces<br />

Tableau II. – Classification TNM des cancers de la prostate.<br />

recherches, qui en sont à leurs débuts, ouvrent la<br />

perspective du traitement préventif du cancer de la<br />

prostate.<br />

■ Les facteurs génétiques : les antécédents<br />

familiaux de cancer au premier degré exposent à un<br />

risque deux à trois fois supérieur de survenue d’un<br />

cancer de la prostate. Il existe indiscutablement des<br />

formes familiales de la maladie, et la présence d’un<br />

cancer de la prostate chez un ou plusieurs<br />

ascendants constitue un facteur de risque qui peut<br />

inciter à une surveillance particulièrement étroite. Les<br />

études sont actuellement en cours pour découvrir le<br />

ou les gènes de susceptibilité.<br />

‚ Anatomie pathologique et classification<br />

Le cancer de la prostate est un adénocarcinome<br />

qui se développe préférentiellement dans la zone<br />

périphérique de la prostate (par opposition à la zone<br />

de transition où se développe l’adénome). Le fait que<br />

le cancer de la prostate se développe à distance de<br />

l’urètre explique qu’il soit dans la très grande<br />

majorité des cas, sauf au stade avancé de son<br />

évolution, silencieux sur le plan clinique. Souvent<br />

multifocal, l’adénocarcinome prostatique va se<br />

développer dans un premier temps à l’intérieur de la<br />

glande prostatique, puis sortir de cette dernière en<br />

cheminant le long des gaines nerveuses et des voies<br />

génitales profondes pour envahir les espaces<br />

périprostatiques et les vésicules séminales, et enfin<br />

donner des métastases à distance, d’une part<br />

ganglionnaires au niveau des ganglions obturateurs,<br />

et d’autre part osseuses en suivant les plexus<br />

veineux prévertébraux, tandis que les autres<br />

métastases viscérales sont beaucoup plus rares [5] .<br />

Sur le plan histologique, l’adénocarcinome se<br />

développe à partir de zones de dysplasie<br />

intra-épithéliale de haut grade qui sont considérées<br />

comme un état précancéreux mais dont la seule<br />

découverte sur les biopsies prostatiques ne saurait<br />

provoquer de thérapeutique particulière. Au fur et à<br />

mesure que le cancer augmente de volume, la<br />

dédifférenciation s’accentue et l’architecture<br />

tumorale perd progressivement toute ressemblance<br />

avec le tissu prostatique normal. Ce degré de<br />

dédifférenciation est mesuré par les pathologistes<br />

sous forme de grades dits de Gleason allant du<br />

grade 1 (tissu pratiquement identique au tissu<br />

prostatique bénin) au grade 5 (tissu totalement<br />

différencié). Le cancer prostatique étant souvent<br />

hétérogène, deux grades prédominants sont<br />

indiqués par le pathologiste, ce qui correspond à<br />

l’expression d’un score (score de Gleason :4+3,le<br />

grade 4 et le grade 3 étant les deux éléments<br />

prédominants observés sur la préparation<br />

histologique). Moins la tumeur est différenciée, pire<br />

est le pronostic.<br />

L’extension de la lésion permet d’établir une<br />

classification à valeur pronostique ; cette<br />

classification est détaillée dans le tableau II, oùT<br />

Tumeur Ganglion Métastase<br />

Tx Tumeur non évaluable Nx Envahissement non évaluable Mx Métastases non évaluables<br />

T0 Pas de tumeur détectable N0 Pas de ganglions envahis M0 Pas de métastase<br />

T1 Tumeur non palpable N1 Envahissement d’un ganglion régional < 2 cm M1 Une(des) métastase(s) à distance<br />

T1a Découverte histologique < 5 % de tissu<br />

réséqué<br />

M1a Ganglions non régionaux<br />

T1b Découverte histologique > 5 % de tissu N2 Envahissement d’un ganglion régional > 2cm M1b Métastases osseuses<br />

réséqué<br />

mais < 5cm<br />

T1c Découverte par élévation du PSA ou par<br />

échographie<br />

N3 Enrichissement d’un ganglion régional > 5 cm M1c Autres sites métastatiques<br />

T2 Tumeur palpable limitée à la glande<br />

T2a Tumeur limitée à la moitié d’un lobe<br />

T2b Tumeur envahissant plus de la moitié d’un<br />

lobe<br />

T2c Tumeur envahissant les deux lobes<br />

T3 Tumeur dépassant la capsule prostatique<br />

T3a Envahissement capsulaire unilatéral<br />

T3b Envahissement capsulaire bilatéral<br />

T3c Tumeur envahissant les vésicules séminales<br />

T4 Tumeur fixée ou envahissant les structures<br />

adjacentes<br />

T4a Tumeur envahissant le sphincter externe, le<br />

col vésical ou le rectum<br />

T4b Tumeur envahissant les muscles releveurs ou<br />

fixée à la paroi pelvienne<br />

PSA : antigène prostatique spécifique.<br />

2


indique le stade clinique de la tumeur primitive, N<br />

exprime la présence ou l’absence de métastases<br />

ganglionnaires et M la présence ou l’absence de<br />

métastases à distance.<br />

■<br />

Stratégie diagnostique<br />

Pour établir une stratégie diagnostique du cancer<br />

de la prostate, il faut pouvoir répondre aux trois<br />

questions suivantes :<br />

– faut-il dépister le cancer de la prostate ?<br />

– quand et comment faire le diagnostic précoce ?<br />

– une fois le diagnostic porté, comment apprécier<br />

l’extension de la tumeur et porter un pronostic pour<br />

conseiller le patient ?<br />

‚ Faut-il dépister le cancer de la prostate ?<br />

Bien que le cancer de la prostate réponde à tous<br />

les critères qui pourraient justifier la mise en œuvre<br />

d’opérations de dépistage (le cancer de la prostate<br />

est effectivement un problème de santé publique,<br />

son histoire naturelle est globalement connue, il<br />

existe aujourd’hui des tests diagnostiques qui<br />

permettent de reconnaître la maladie à un stade<br />

précoce et envisager un traitement curatif...), la<br />

preuve qu’un tel dépistage aboutirait à une<br />

réduction de la mortalité par cancer de la prostate,<br />

comme c’est le cas en matière de cancer du sein<br />

chez la femme, n’a pas encore été apportée. Il est<br />

donc raisonnable d’attendre le résultat des essais<br />

contrôlés randomisés mis en œuvre et poursuivis en<br />

Europe et en Amérique du Nord. Il n’est pas pour<br />

l’instant licite de s’engager dans d’autres opérations<br />

de dépistage.<br />

‚ Quand faire le diagnostic précoce<br />

de cancer de la prostate ?<br />

Le diagnostic de cancer de la prostate à un stade<br />

précoce ne doit être recherché qu’à partir du<br />

moment où ce diagnostic aboutira à la mise en<br />

œuvre d’un traitement destiné à augmenter<br />

l’espérance de vie du patient.<br />

Dans les autres cas, les opérations de diagnostic<br />

précoce peuvent et doivent être déclenchées dans<br />

trois types de situation : [6]<br />

– en présence d’une anomalie du toucher rectal,<br />

quel que soit l’âge ;<br />

– chez les patients qui consultent pour des<br />

troubles mictionnels ;<br />

– chez les patients qui souhaitent être rassurés<br />

sur l’état de leur glande prostatique. Dans ce cas,<br />

avant de commencer les opérations (examen<br />

physique et examens complémentaires), il est<br />

indispensable de bien exposer clairement au patient<br />

le déroulement des opérations et les conséquences<br />

d’un diagnostic positif.<br />

Ce n’est qu’après avoir très clairement informé<br />

le patient sur ces éléments que les opérations<br />

pourront alors être raisonnablement déclenchées,<br />

avec son accord.<br />

‚ Comment faire le diagnostic précoce<br />

de cancer de la prostate ?<br />

Le diagnostic précoce du cancer de la prostate<br />

repose sur le toucher rectal, le dosage sérique du PSA<br />

et la biopsie prostatique.<br />

Dans la mesure où les études<br />

scandinaves ont montré que le taux de<br />

mortalité spécifique par cancer chez<br />

les patients de 70 ans et plus atteints<br />

d’un cancer prostatique moyennement<br />

différencié et cliniquement localisé<br />

était de l’ordre de 10 % à 10 ans, il ne<br />

semble pas raisonnable de s’engager<br />

dans des opérations de diagnostic<br />

précoce chez les patients de plus de 70<br />

ans consultant pour des troubles<br />

urinaires (et a fortiori pour tout autre<br />

symptôme) alors que leur prostate a<br />

tous les caractères de la bénignité au<br />

toucher rectal.<br />

Toucher rectal<br />

Il doit être considéré comme suspect non<br />

seulement lorsqu’il met en évidence une induration<br />

nodulaire intéressant tout ou partie d’un ou des deux<br />

lobes de la prostate, mais aussi dès lors qu’il existe<br />

une asymétrie de consistance, voire de volume, de la<br />

glande prostatique.<br />

Le toucher rectal est cependant un test de<br />

diagnostic précoce du cancer de la prostate très<br />

médiocre, puisqu’il méconnaît environ un cancer<br />

prostatique sur deux au début du fait de la<br />

localisation très périphérique de la tumeur.<br />

Dosage sérique du PSA<br />

Le PSA représente en fait l’élément moteur du<br />

diagnostic précoce du cancer de la prostate<br />

aujourd’hui [1] .<br />

C’est un produit de la sécrétion exocrine de<br />

l’épithélium prostatique normal, qui se retrouve<br />

exprimé en mg/mL dans l’éjaculat. Une très faible<br />

fraction du PSA passe dans le sang circulant, où il est<br />

dosé, à l’état normal, en ng/mL. Deux fractions de<br />

PSA peuvent être dosées dans le sang circulant : le<br />

PSA libre, sécrété en plus grande quantité par les<br />

tissus bénins, et le PSA lié aux protéines porteuses<br />

(alpha-2, antichymotrypsine), sécrété en plus grande<br />

quantité par le tissu néoplasique. Toutes les<br />

affections de la prostate (adénome, cancer,<br />

prostatites aiguës) peuvent élever le taux du PSA<br />

circulant.<br />

Le taux normal du PSA sérique est de 3 à<br />

4 ng/mL.<br />

Lorsque le PSA est anormalement élevé, au-delà<br />

de 10 ng/mL, le risque que cette élévation traduise<br />

la présence d’un cancer de la prostate est de l’ordre<br />

de 50 %.<br />

Lorsque le PSA est élevé entre 4 et 10 ng/mL, le<br />

risque que cette anomalie traduise la présence d’un<br />

cancer de la prostate est de 45 à 50 % en cas<br />

d’anomalie concomitante du toucher rectal, et de 20<br />

à 25 % sans anomalie du toucher rectal, alors que la<br />

prostate paraît parfaitement souple, lisse et régulière.<br />

Le toucher rectal, l’exercice physique et l’activité<br />

sexuelle intense n’augmentent que modestement, et<br />

très transitoirement, le taux du PSA sérique. À<br />

l’opposé, les manipulations de la prostate<br />

3<br />

Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique - 5-0692<br />

(endoscopies, biopsies...) peuvent provoquer une<br />

élévation spectaculaire du taux sérique du marqueur<br />

tissulaire.<br />

Constatation d’une anomalie du toucher rectal<br />

et/ou du taux sérique du PSA<br />

Ces constatations peuvent conduire à la<br />

réalisation d’une échographie endorectale avec<br />

biopsies prostatiques systématisées. Il serait<br />

théoriquement possible de mieux cerner les<br />

indications des biopsies prostatiques chez un patient<br />

atteint d’une élévation intermédiaire du PSA entre 4<br />

et 10 ng/mL, sans anomalie du toucher rectal, en<br />

utilisant le rapport du PSA libre au PSA total (prenant<br />

en compte le fait que le tissu bénin sécrète plus de<br />

PSA libre que le tissu malin). S’il est un fait que les<br />

patients dont le rapport du PSA libre au total est<br />

inférieur à 10 % ont de très fortes chances d’être<br />

porteurs d’un cancer de la prostate, et que ceux dont<br />

le rapport est supérieur à 30 % ont de très fortes<br />

chances d’avoir une glande prostatique strictement<br />

bénigne, la grande majorité des patients se trouve<br />

en fait dans la zone grise comprise entre ces deux<br />

valeurs, de sorte qu’en pratique, si l’on décide de<br />

s’engager dans des opérations de diagnostic<br />

précoce de cancer de la prostate, il est raisonnable<br />

d’envisager la réalisation de biopsies prostatiques<br />

dès lors que le PSA dépasse sa valeur normale (3 à<br />

4 ng/mL selon le laboratoire).<br />

Biopsie prostatique<br />

Elle est réalisée sous échographie endorectale. Cet<br />

examen peut être réalisé en ambulatoire, après une<br />

préparation antibiotique (fluoroquinolone de<br />

troisième génération, monodose type ciprofloxacine<br />

500 mg), ainsi qu’une préparation intestinale. Les<br />

complications infectieuses ou hémorragiques sont<br />

exceptionnelles. Toutefois, il faut prévenir le patient<br />

de la possibilité de survenue, dans les jours qui<br />

suivent, d’une hématurie initiale, d’une<br />

hémospermie, voire quelques fois d’une hémorragie<br />

rectale.<br />

Un large échantillonnage biopsique sera réalisé,<br />

portant non seulement sur les zones anormales<br />

évocatrices de cancer par leur caractère<br />

hypoéchogène, mais aussi sur le parenchyme<br />

prostatique strictement normal. Il est important de<br />

souligner que l’imagerie isolée n’a pas sa place dans<br />

le diagnostic précoce du cancer de la prostate.<br />

L’analyse des biopsies prostatiques permettra au<br />

pathologiste d’infirmer ou d’affirmer la présence du<br />

cancer, de préciser son degré de différenciation, le<br />

nombre de biopsies positives, l’étendue du cancer<br />

sur chacun des prélèvements, et enfin la présence ou<br />

l’absence de cancer dans les espaces<br />

périprostatiques.<br />

En cas de biopsies négatives alors qu’il existe une<br />

anomalie du toucher rectal et/ou une élévation du<br />

PSA, il est raisonnable d’envisager quelques<br />

semaines plus tard un nouveau contrôle biopsique, a<br />

fortiori si la première biopsie a montré des lésions de<br />

néoplasie intraépithéliale dont on sait qu’elles sont<br />

associées dans plus de deux tiers des cas à un cancer<br />

de la prostate. D’une manière générale, le taux de<br />

détection des biopsies prostatiques itératives<br />

avoisine 20 à 25 % selon les séries publiées.


5-0692 - Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique<br />

‚ Diagnostic de cancer de la prostate<br />

acquis : comment préciser son extension<br />

et porter un pronostic ?<br />

L’appréciation de l’extension réelle du cancer de<br />

la prostate est rendue particulièrement difficile par le<br />

fait qu’il n’existe aujourd’hui aucun examen<br />

d’imagerie permettant de mettre en évidence la<br />

tumeur et d’apprécier son volume. Force est donc<br />

d’avoir recours à des éléments d’évaluation indirecte<br />

comme le toucher rectal, le taux du PSA sérique et les<br />

examens d’imagerie locaux et systémiques.<br />

Toucher rectal<br />

Il est évocateur d’une lésion cliniquement<br />

localisée à la glande prostatique dès lors que la<br />

prostate est normale au toucher rectal (stade T1c), ou<br />

s’il existe une induration limitée à un lobe<br />

prostatique. Dès lors que l’induration intéresse les<br />

deux lobes, a fortiori si elle semble déborder les<br />

limites de la prostate latéralement ou vers la base de<br />

la glande, il ne s’agit sûrement plus d’un cancer<br />

localisé à la glande prostatique, mais très<br />

vraisemblablement d’un cancer localement avancé<br />

de stade T3. Répétons cependant encore que le<br />

toucher rectal est un très médiocre examen pour<br />

apprécier à la fois la présence et l’extension de la<br />

tumeur.<br />

Taux sérique du PSA<br />

C’est un élément d’appréciation fondamental :<br />

au-delà de 10 ng/mL, les risques que la tumeur ait<br />

franchi la capsule sont de l’ordre de 35 à 40 %.<br />

Lorsque le PSA est supérieur à 50 ng/mL, la<br />

quasi-totalité des cancers est extracapsulaire et peut<br />

s’accompagner de métastases ganglionnaires.<br />

Lorsque le PSA est supérieur à 100 ng/mL, le patient<br />

est à l’évidence atteint d’une maladie à<br />

dissémination générale systémique.<br />

Analyse méticuleuse de la biopsie<br />

Les renseignements fournis par l’analyse<br />

méticuleuse de la biopsie prostatique ont une valeur<br />

considérable :<br />

– la présence d’un score de Gleason égal ou<br />

supérieur à 8, surtout si le PSA est supérieur à<br />

10 ng/mL, est pratiquement synonyme de cancer<br />

avancé ayant franchi la capsule ;<br />

– le nombre de biopsies positives a une valeur<br />

pronostique considérable : lorsque plus des deux<br />

tiers des biopsies contiennent du cancer et si une ou<br />

plusieurs des biopsies sont totalement envahies par<br />

la tumeur, le risque que la tumeur soit localement<br />

avancée extracapsulaire est supérieur ou égal à<br />

85-90 %, et ce risque augmente bien entendu avec<br />

le taux sérique du PSA.<br />

Examens d’imagerie<br />

Compte tenu de la qualité des renseignements<br />

fournis par les investigations précédentes, il n’est pas<br />

surprenant que les examens d’imagerie ciblant la<br />

tumeur ne donnent que peu de renseignements<br />

réellement intéressants, qu’il s’agisse de<br />

l’échographie ou de l’imagerie par résonance<br />

magnétique endorectale, dont la place dans la<br />

stratégie diagnostique demeure encore à préciser.<br />

Scintigraphie osseuse<br />

Celle-ci visant à rechercher les métastases<br />

osseuses à distance est indispensable dès lors que le<br />

PSA est supérieur à 10 ng/mL. Les foyers<br />

d’hyperfixation, s’ils sont détectés, doivent faire<br />

envisager une confirmation par des clichés<br />

radiographiques standards.<br />

Examen tomodensitométrique<br />

abdominopelvien<br />

Il doit lui aussi être envisagé afin de détecter des<br />

métastases ganglionnaires dès lors que le PSA est<br />

supérieur à 10 ou 15 ng/mL.<br />

Au total, au terme de cette batterie d’investigations,<br />

il est possible de considérer que le cancer de la<br />

prostate dont le patient est atteint se situe dans l’une<br />

des trois catégories suivantes :<br />

– cancer cliniquement localisé à la glande :<br />

prostate normale au toucher rectal ou présence d’un<br />

nodule limité au maximum à un lobe prostatique,<br />

PSA inférieur à 15, moins des deux tiers des biopsies<br />

positives, scanner et scintigraphie osseuse normaux.<br />

Il faut savoir que malgré tout, 25 à 30 % des patients<br />

de ce groupe seront atteints d’une extension<br />

extraprostatique exposant à un échappement<br />

biologique ultérieur ;<br />

– cancer localement avancé : tumeur intéressant<br />

les deux lobes prostatiques et/ou ayant dépassé les<br />

limites de la glande, PSA supérieur à 15 avec un<br />

score de Gleason supérieur à 8, plus des deux tiers<br />

des biopsies positives sur toute leur étendue, scanner<br />

et scintigraphie osseuse normaux ;<br />

– cancer métastatique : présence, quelles que<br />

soient les conditions locales, d’adénopathies visibles<br />

au scanner et/ou d’anomalies de fixation à la<br />

scintigraphie osseuse confirmée par les clichés<br />

radiographiques standards.<br />

Quelle stratégie<br />

■<br />

thérapeutique<br />

adopter ?<br />

La réponse à cette question dépend du degré<br />

d’extension de la lésion, et la stratégie variera selon<br />

que l’on est confronté à un patient atteint d’un<br />

cancer prostatique cliniquement localisé, localement<br />

avancé ou métastatique.<br />

En présence d’un cancer de la prostate<br />

cliniquement localisé, deux options doivent être<br />

envisagées :<br />

– surveillance avec traitement symptomatique à<br />

la demande [3] ;<br />

– traitement à visée curative.<br />

‚ Surveillance<br />

Sans traitement actif d’emblée suivi d’un<br />

traitement symptomatique à l’apparition des<br />

symptômes, la surveillance est une option tout à fait<br />

raisonnable dès lors que l’espérance de vie du<br />

patient est inférieure à 10 ans du fait de son âge ou<br />

de facteurs de comorbidité associés.<br />

En effet, les études scandinaves ont montré que,<br />

dans ce type de situation, les patients atteints d’un<br />

cancer prostatique moyennement différencié,<br />

localisé à la glande, sont exposés à un risque de<br />

4<br />

létalité par cancer inférieur à 10 %, à une échéance<br />

de 10 ou 12 ans. Parallèlement, le risque de<br />

progression locale et/ou métastatique, accessible<br />

cependant à un traitement palliatif hormonal, peut<br />

être évalué à 30 ou 40 %. Il n’est donc pas<br />

déraisonnable, dès lors que l’âge du patient dépasse<br />

70-72 ans et/ou qu’existent des facteurs de<br />

comorbidité importants, de discuter avec lui de la<br />

possibilité de ce type de stratégie thérapeutique,<br />

étant entendu que s’il peut être éthiquement justifié,<br />

il n’est pas pour autant aisément accepté par les<br />

patients, tout au moins dans les pays de culture<br />

latine. Il est alors raisonnable de proposer à ces<br />

patients un traitement hormonal palliatif d’emblée.<br />

‚ Traitement curatif<br />

Il dispose de deux possibilités thérapeutiques :<br />

– la radiothérapie externe ;<br />

– la prostatectomie totale.<br />

Aucun des autres traitements souvent<br />

mentionnés dans la littérature comme une<br />

alternative aux thérapeutiques précédentes<br />

(curiethérapie prostatique, cryothérapie, énergies<br />

diverses...) n’est actuellement validé et ne peut être<br />

proposé en dehors d’un très strict protocole<br />

d’investigations.<br />

Radiothérapie externe<br />

Elle utilise des radiations de haute énergie<br />

(accélérateur de particules) à la dose de 65 Gy dirigés<br />

sur la prostate, avec ou sans irradiation des aires<br />

ganglionnaires. Ce traitement, qui a l’avantage de ne<br />

pas comporter d’intervention chirurgicale, peut<br />

laisser à titre de séquelles des troubles urinaires et<br />

surtout digestifs (rectite, ténesme, crampes<br />

abdominales), et s’accompagne d’un risque de<br />

troubles notables de l’érection dans 40 à 50 % des<br />

cas. Le critère d’efficacité de la radiothérapie est<br />

représenté par la décroissance progressive du PSA<br />

qui, 18 mois à 2 ans après la fin du traitement, doit<br />

être au moins en dessous de 1 ng, voire de<br />

0,5 ng/mL.<br />

Prostatectomie totale avec curage<br />

ganglionnaire dès lors que le PSA est<br />

supérieur à 10<br />

C’est en fait une prostatovésiculectomie suivie<br />

d’anastomose vésico-urétrale. La mortalité<br />

opératoire est faible (0,5 à 1 %). Ses effets<br />

secondaires sont essentiellement urinaires et<br />

génitaux : incontinence d’urine transitoire pendant 6<br />

à 12 semaines (exceptionnellement définitive dans<br />

moins de 5 % des cas), et surtout modification<br />

importante de la vie sexuelle (disparition des<br />

éjaculations, troubles de l’érection extrêmement<br />

fréquents en dépit d’une dissection minutieuse des<br />

pédicules vasculonerveux de l’érection). Ces<br />

complications peuvent cependant faire l’objet d’un<br />

traitement palliatif (implantation de sphincter<br />

artificiel en cas d’incontinence définitive, traitement<br />

peu invasif des troubles de l’érection par injection<br />

intracaverneuse, instillations endo-urétrales,<br />

comprimés par voie orale). Le critère d’efficacité de la<br />

prostatectomie totale est l’obtention, de manière<br />

durable, d’un taux de PSA indétectable dans le sang<br />

circulant.


Comment choisir entre traitement chirurgical<br />

et radiothérapie externe ?<br />

L’étude de la littérature montre que les deux<br />

modalités thérapeutiques font jeu égal en terme<br />

d’efficacité et guérissent les mêmes malades,<br />

c’est-à-dire les patients atteints d’un cancer<br />

prostatique cliniquement localisé avec un PSA<br />

inférieur à 15. Il semble cependant admis que, chez<br />

les patients de moins de 65 ans, il yaunavantage<br />

indiscutable de la chirurgie par rapport à la<br />

radiothérapie. Il faut par ailleurs prendre en compte<br />

le fait qu’il est possible, en cas de récidive locale<br />

après prostatectomie totale, d’utiliser un traitement<br />

de radiothérapie à visée curative de seconde ligne,<br />

alors qu’en cas d’échec de la radiothérapie, la<br />

prostatectomie totale de seconde intention, dite de<br />

sauvetage, est très rarement efficace en terme de<br />

contrôle de la maladie et grevée d’une morbidité<br />

postopératoire considérable.<br />

‚ Diagnostic de cancer prostatique<br />

localement avancé<br />

Il est porté dès lors que les données de l’examen<br />

physique et/ou des examens complémentaires<br />

montrent que la tumeur a franchi les limites de la<br />

glande prostatique, sans cependant s’accompagner<br />

de métastases à distance. Le cancer est alors<br />

inaccessible à un traitement curatif fondé sur la<br />

monothérapie, qu’il s’agisse de chirurgie ou de<br />

radiothérapie. Le traitement le moins inefficace dans<br />

ce type de situation est représenté par l’association<br />

hormonothérapie néoadjuvante (dont c’est là la<br />

seule et unique indication reconnue à l’heure<br />

actuelle) et radiothérapie à visée radicale.<br />

Les modalités et la durée de l’hormonothérapie<br />

font encore actuellement l’objet de discussions.<br />

‚ Cancer de la prostate avec métastases<br />

Il relève essentiellement du traitement hormonal.<br />

Traitement hormonal<br />

La prostate est une glande sexuelle secondaire<br />

androgénodépendante, et il revient à Huggins<br />

d’avoir démontré, au début des années 1940, que la<br />

castration entraînait à la fois l’atrophie de la prostate<br />

normale et la régression, pour un temps en tout cas,<br />

du cancer prostatique évolué.<br />

La base du traitement hormonal du cancer de la<br />

prostate est représentée par l’inhibition de l’action<br />

des androgènes au niveau des cellules cibles. Cette<br />

inhibition peut être assurée de trois manières :<br />

– par la suppression des androgènes testiculaires,<br />

c’est-à-dire par castration ;<br />

– par l’inhibition de l’action des androgènes au<br />

niveau de la cellule cible, en utilisant des<br />

médicaments compétiteurs des androgènes au<br />

niveau du récepteur, c’est-à-dire en utilisant des<br />

antiandrogènes ;<br />

– par les deux modalités thérapeutiques<br />

combinées sous le terme de blocage androgénique<br />

complet.<br />

Traitement standard du cancer prostatique<br />

métastatique<br />

Il est représenté essentiellement par la<br />

suppression des androgènes testiculaires, c’est-à-dire<br />

par la castration qui peut être :<br />

– chirurgicale sous forme d’orchidectomie<br />

sous-albuginée, qui assure une suppression<br />

définitive des androgènes testiculaires pour un coût<br />

extrêmement modeste, dont il ne faut néanmoins<br />

pas sous-estimer l’impact psychologique ;<br />

– médicale à l’aide de substances agonistes de la<br />

LH-RH (gonadotropin-releasing hormone), qui,<br />

administrées en continu, suppriment la sécrétion de<br />

LH hypophysaire et par voie de conséquence de<br />

testostérone testiculaire. Ces produits sont<br />

administrés en injection sous-cutanée ou<br />

intramusculaire sous forme de : [2]<br />

– goséréline (Zoladext) : 1 injection mensuelle<br />

sous-cutanée de 3 mg ou trimestrielle de<br />

10 mg ;<br />

– leuproréline (Enantonet) : 1 injection<br />

sous-cutanée mensuelle de 3,75 mg ou<br />

trimestrielle de 11,25 mg ;<br />

– triptoréline (Décapeptylt) : 1 injection<br />

mensuelle sous-cutanée de 3 mg ou<br />

trimestrielle de 10 mg ;<br />

– buséréline (Bigonistt) : 1 injection<br />

bimensuelle sous-cutanée de 6,3 mg.<br />

Tous ces médicaments ont une efficacité<br />

identique, et le coût moyen mensuel du traitement<br />

est environ de 1 000 francs.<br />

Ils entraînent deux effets secondaires notables :<br />

une atrophie testiculaire progressive en quelques<br />

mois, et surtout, du fait même de leur mécanisme<br />

d’action, une poussée initiale plus ou moins<br />

importante de la sécrétion de LH, entraînant<br />

elle-même une élévation plus ou moins importante<br />

et durable de la testostérone sérique. Ce<br />

phénomène, connu sous le nom de flare-up, peut<br />

être particulièrement dangereux dès lors qu’existent<br />

des métastases vertébrales susceptibles d’entraîner<br />

des complications neurologiques.<br />

Pour cette raison, l’induction d’un traitement par<br />

agoniste de la LH-RH doit toujours être<br />

accompagnée pendant au moins 1 mois de la<br />

prescription contemporaine d’un antiandrogène<br />

stéroïdien ou non stéroïdien. Dans ce cas, l’un des<br />

médicaments suivants peut être utilisé :<br />

– acétate de cyprotérone (Androcurt) : 1<br />

comprimé à 50 mg matin midi et soir ;<br />

– nilutamide (Anandront) : 1 comprimé à<br />

150 mg/j ;<br />

– flutamide (Eulexinet) : 1 comprimé à 750 mg/j<br />

en 3 prises de 250 mg.<br />

L’adjonction permanente à la castration médicale<br />

ou chirurgicale d’un traitement par antiandrogènes<br />

(stéroïdiens ou non stéroïdiens) est connue sous le<br />

nom de blocage androgénique complet. Après de<br />

très nombreuses controverses, les faits suivants<br />

semblent aujourd’hui acquis :<br />

– l’adjonction d’un antiandrogène stéroïdien<br />

(acétate de cyprotérone) à la castration n’apporte<br />

pas de bénéfice ;<br />

– l’adjonction d’un antiandrogène non stéroïdien<br />

(nilutamide ou flutamide) à la castration médicale ou<br />

chirurgicale peut apporter un bénéfice au patient<br />

atteint de métastases extrêmement douloureuses,<br />

5<br />

Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique - 5-0692<br />

mais n’augmente de manière significative ni la<br />

survie sans progression, ni la survie globale des<br />

malades atteints de cancer prostatique métastatique.<br />

Ces éléments sont à mettre en parallèle avec les<br />

effets secondaires des antiandrogènes non<br />

stéroïdiens (troubles visuels et respiratoires du<br />

nilutamide, troubles digestifs du flutamide) et le prix<br />

du traitement combiné (de l’ordre de 2 000 francs<br />

par mois).<br />

Il semble raisonnable d’introduire le traitement<br />

hormonal dès lors que le diagnostic de cancer<br />

prostatique métastatique est porté. En effet, une<br />

étude récente menée en Grande-Bretagne montre<br />

que les patients pour lesquels l’introduction du<br />

traitement a été retardée à l’apparition des<br />

symptômes sont exposés aux complications liées à<br />

la progression tumorale, plus fréquente et plus grave<br />

que chez les patients traités d’emblée.<br />

Effets secondaires<br />

Le traitement hormonal a d’indiscutables effets<br />

secondaires (tableau III) [4] .<br />

Les uns sont liés à la suppression des<br />

androgènes : troubles du caractère, disparition de la<br />

libido, anérection, perte de la masse musculaire,<br />

risque d’ostéoporose.<br />

Les autres sont liés au déséquilibre de la balance<br />

androgène-œstrogène : gynécomastie plus ou<br />

moins douloureuse, bouffées de chaleur. La<br />

gynécomastie peut théoriquement être traitée, soit<br />

par la radiothérapie mammaire, rarement mise en<br />

œuvre, soit, dans le futur, par les inhibiteurs des<br />

aromatases. Les bouffées de chaleur répondent<br />

quant à elles en général très bien soit à des<br />

œstrogènes à petites doses type diéthylstilbestrol<br />

(Distilbènet : 0,5 mg), soit à des antiandrogènes<br />

stéroïdiens type acétate de cyprotérone (Androcurt :<br />

1 comprimé à 50 mg 1 jour sur 2). Les interactions<br />

médicamenteuses sont par ailleurs possibles<br />

(tableau IV).<br />

Traitements alternatifs<br />

C’est pour tenter de combattre les effets<br />

secondaires de la suppression androgénique que<br />

des traitements alternatifs à la suppression des<br />

androgènes ont pu être proposés. Toutefois, aucun<br />

de ces traitements n’est actuellement validé, et ils ne<br />

peuvent être utilisés que dans le cadre de protocoles<br />

d’investigations strictement menés.<br />

Il s’agit :<br />

– d’un traitement hormonal intermittent qui<br />

permet au patient de jouir de phases plus ou moins<br />

prolongées et répétées d’imprégnation androgénique<br />

normale ;<br />

– de l’utilisation des antiandrogènes non<br />

stéroïdiens en monothérapie qui ont l’avantage,<br />

tout en combattant le cancer de la prostate, de<br />

maintenir un taux normal ou légèrement<br />

supranormal de testostérone circulante et d’éviter


5-0692 - Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique<br />

Tableau III. – Effets secondaires du traitement hormonal.<br />

Effets secondaires Médicament(s) impliqué(s) Diagnostic Physiopathologie Conduite pratique<br />

Diarrhée Flutamide - Augmentation du nombre et<br />

de la quantité de selles (> 6/j)<br />

et modification de leur consistance<br />

- Fréquence < 14 %<br />

Hépatite Tous les antiandrogènes - Parfois gravissime (quelques<br />

décès rapportés)<br />

- Survient dans les 6 premiers<br />

mois et régresse généralement<br />

Cardiovasculaires : infarctus,<br />

thrombose, embolie pulmonaire,<br />

HTA<br />

Pneumopathies interstitielles,<br />

fibrose pulmonaire<br />

Acétate de cyprotérone, œstrogène,<br />

antiandrogène non<br />

stéroïdien<br />

- Survient dans les 6 premiers<br />

mois<br />

- Fréquence < 2,5 %<br />

Nilutamide - Fréquence < 2%<br />

- Réversible à l’arrêt du<br />

traitement<br />

Méthémoglobinémie Flutamide - À rechercher chez un patient<br />

présentant une cyanose<br />

Effet antabuse Nilutamide - Flush lors d’ingestion<br />

d’alcool<br />

- Fréquence < 2 %<br />

Effets oculaires Nilutamide - Trouble de l’accommodation<br />

dans l’obscurité et de la vision<br />

des couleurs<br />

- Fréquence : 20 %<br />

Rash et réactions<br />

anaphylactiques<br />

Photosensibilisation Flutamide<br />

Analogue de la LH-RH<br />

Aplasie médullaire Nilutamide<br />

Céphalées Acétate de cyprotérone<br />

LH-RG : gonadotropin-releasing hormone ; ASAT : aspartate aminotransférase ; ALAT : alanine aminotransférase ; HTA : hypertension artérielle.<br />

Tableau IV. – Interactions médicamenteuses.<br />

Type de traitement<br />

hormonal<br />

Antiandrogènes<br />

non stéroïdiens<br />

Médicaments<br />

impliqués<br />

- Mal connue<br />

- Effet irritatif de la molécule<br />

directemnt sur la muqueuse<br />

digestive ?<br />

- Mal connue<br />

- Mécanisme immunoallergique<br />

?<br />

- Régime antidiarrhéique<br />

(diminution des troubles en<br />

quelques semaines)<br />

- Diminuer le traitement<br />

- Arrêt du traitement si intolérance<br />

clinique<br />

- Vérifier les ASAT et les ALAT<br />

avant le traitement, puis surveillance<br />

- Si les taux sont supérieurs à<br />

3 fois la normale : arrêt du<br />

traitement<br />

- Surveillance les 6 premiers<br />

mois, surtout chez les patients<br />

âgés, obèses avec ou sans<br />

antécédent cardiovasculaire<br />

- Radiographie pulmonaire<br />

une fois par an (= radiographie<br />

de contrôle des métastases<br />

pulmonaires)<br />

- Scanner si doute<br />

- Arrêt du traitement<br />

- Arrêt du traitement dans<br />

moins de 1 %<br />

Médicaments interagissant Mécanisme Examens à pratiquer Conduite à tenir<br />

Nilutamide Antivitamine K Métabolisme hépatique des TP INR Adapter les AVK<br />

Flutamide<br />

AVK retardé<br />

Nilutamide Phénytoïne Modification du métabo-<br />

Adapter les posologies des<br />

Propranolol<br />

Chlordiazépoxide<br />

Diazépam<br />

Théophylline<br />

lisme hépatique<br />

médicaments interagissant<br />

Œstrogènes Tous Ciclosporine Modification du métabo- Ciclosporinémie Adapter les posologies de<br />

lisme hépatique<br />

ciclosporine<br />

Inducteurs enzymatiques : Accélération de la dégrada-<br />

Adapter les posologies<br />

- anticonvulsivants<br />

- griséofulvine<br />

- rifampicine<br />

tion des œstrogènes<br />

d’œstrogènes<br />

Antiandrogènes Acétate de Antidiabétiques oraux Effet diabétogène Glycémie Adapter le traitement<br />

stéroïdiens cyprotérone<br />

antidiabétique<br />

AVK : antivitamine K ; TP INR : taux de prothrombine (international normalised ratio).<br />

6


ainsi les désagréments de la suppression<br />

androgénique complète, les effets adverses<br />

potentiels du maintien de la testostéronémie<br />

pouvant être combattus éventuellement par<br />

l’adjonction aux antiandrogènes non stéroïdiens<br />

d’un inhibiteur de la 5 alpha-réductase (finastéride,<br />

Chibro-Proscart : 5 mg/j). Insistons encore sur le fait<br />

qu’il s’agit là de traitements purement investigatifs.<br />

Quoi qu’il en soit, la durée de l’efficacité du<br />

traitement hormonal du cancer de la prostate<br />

métastatique est malheureusement limitée dans le<br />

temps, et tôt ou tard l’échappement hormonal se<br />

manifestera, dans un premier temps de manière<br />

biologique, par la réascension du PSA, suivie à plus<br />

ou moins brève échéance par l’apparition de<br />

manifestations cliniques où dominent essentiellement<br />

les douleurs et plus rarement les<br />

manifestations locorégionales. La médiane de survie<br />

sans progression biologique est environ de 2 ans.<br />

Elle est d’autant plus importante et prolongée que la<br />

réponse biologique initiale à la suppression des<br />

androgènes testiculaires est marquée par un retour<br />

rapide du PSA largement en dessous de la normale<br />

du laboratoire.<br />

La surveillance du traitement est fondée<br />

essentiellement sur le dosage du PSA à 3 mois, qui a<br />

une valeur pronostique considérable, puis sur un<br />

suivi clinique régulier. En l’absence de symptômes<br />

intercurrents, il n’y pas lieu de réaliser d’examens<br />

complémentaires puisque, malheureusement, il n’y a<br />

pas de traitement curatif de l’échappement<br />

hormonal.<br />

‚ Cancer prostatique en échappement<br />

hormonal<br />

Ce dernier pose un problème thérapeutique<br />

extrêmement difficile. La durée médiane de survie<br />

des patients atteints de cancer en échappement<br />

hormonal est de 12 à 18 mois. Elle peut être<br />

prolongée par une surveillance attentive et la<br />

correction aussi minutieuse que possible de<br />

l’ensemble des paramètres biologiques. Bien qu’il n’y<br />

ait aucun traitement curatif disponible à ce stade de<br />

la maladie, une réponse graduée doit être envisagée<br />

qui comportera :<br />

– si le patient a été traité par une simple<br />

suppression des androgènes testiculaires, le rajout<br />

au traitement initial d’un antiandrogène stéroïdien<br />

ou non stéroïdien qui peut entraîner une<br />

amélioration objective dans environ 25 % des cas ;<br />

– si le patient a été traité par blocage<br />

androgénique complet, la suppression de<br />

l’antiandrogène. En effet, dans 30 à 40 % des cas,<br />

elle entraînera une amélioration biologique (baisse<br />

du PSA) et souvent clinique. Ce phénomène, connu<br />

sous le nom de syndrome du retrait des<br />

antiandrogènes, traduit le fait qu’au bout d’un<br />

certain temps d’administration, l’antiandrogène peut<br />

avoir un effet plus agoniste qu’antagoniste ;<br />

– en cas d’échec des deux manœuvres<br />

précédentes, le recours à d’autres traitements<br />

hormonaux tels que les œstrogènes, soit sous forme<br />

de diéthylstilbestrol (Distilbènet) à la dose de 3 mg/j,<br />

soit sous forme de fosfestrol (ST-52t) en perfusion à<br />

la dose de 1à2g/j. Ces médicaments peuvent<br />

amener un certain degré d’amélioration des<br />

Laurent Boccon-Gibod : Chirurgien des Hôpitaux, professeur d’urologie à la Faculté, chef du service d’urologie,<br />

centre hospitalier universitaire Bichat-Claude Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France.<br />

douleurs probablement par le biais de la<br />

modification du circuit des endorphines ou<br />

éventuellement par action locale au niveau de la<br />

tumeur ;<br />

– si tous les traitements précédents ont<br />

échoué, le recours à la corticothérapie, voire<br />

éventuellement à la chimiothérapie cytotoxique,<br />

en utilisant des produits adaptés à l’âge et à l’état<br />

général du patient. Par ailleurs, les traitements<br />

antalgiques doivent être activement poursuivis,<br />

utilisant soit les anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens, soit les morphinomimétiques. Le<br />

recours à la radiothérapie à visée antalgique peut<br />

rendre de grands services. Enfin, on n’omettra pas<br />

de traiter les obstacles à l’évacuation des urines :<br />

résection transurétrale prostatique si nécessaire,<br />

dérivation urinaire haute par néphrostomie<br />

percutanée, et chaque fois que possible,<br />

reperméation d’une obstruction urétérovésicale<br />

avec mise en place de sonde double J.<br />

■ Conclusion<br />

En dépit des progrès spectaculaires du<br />

diagnostic précoce et du traitement des cancers<br />

prostatiques localisés, le cancer de la prostate<br />

demeure l’objet de très nombreuses<br />

incertitudes, tandis que le traitement du cancer<br />

prostatique métastatique n’a pas fait réellement<br />

de progrès significatifs depuis les cinq dernières<br />

décennies.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : L Boccon-Gibod. Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0692, 1998, 7 p<br />

[1] Boccon-Gibod L. Antigène prostatique spécifique ou PSA. Ce qui est sûr et ce<br />

qui l’est moins. Presse Med 1995 ; 24 : 1471-1472<br />

[2] Boccon-Gibod L. Maximum androgen blockade in 1996. Eur Urol 1996;30:<br />

19-21<br />

[3] Boccon-Gibod L. The management of localised cancer of the prostate. Eur<br />

Urol 1996 ; 29 (suppl 2) : S62-S68<br />

[4] Lanfrey P, Mottet N, Dagues F, Bennamoun K, Costa P, Louis JF et al. Bouffées<br />

de chaleur et traitement hormonal des cancers de prostate. Prog Urol 1996 ;<br />

6 : 17-22<br />

Références<br />

7<br />

Cancer de la prostate : stratégies diagnostique et thérapeutique - 5-0692<br />

[5] McNeal JE, Villers AA, Redwine EA, Freiha FS, Stamey TA. Histologic<br />

differentiation, cancer volume, and pelvic lymph node metastasis in adenocarcinoma<br />

of the prostate. Cancer 1990 ; 66 : 1225-1233<br />

[6] Perrin P, Mouriquand P, Monsallier M, Oukeira H, Maquet JF, Devonec M.<br />

Diagnostic précoce du cancer de prostate. Presse Med 1989 ; 18 : 1289-1292<br />

[7] Richard F. Enquête épidémiologique prospective sur le cancer de la prostate<br />

en France. Prog Urol 1992;2:2-37


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0510<br />

Classification des néphropathies<br />

L a<br />

H Izzedine<br />

classification de la plupart des néphropathies reste aujourd’hui encore basée sur la nature de la lésion initiale<br />

touchant le parenchyme rénal : les glomérules, les tubes et l’interstitium ou les vaisseaux. Le diagnostic se<br />

fonde sur l’imagerie en ce qui concerne les vaisseaux et les voies excrétrices, sur le syndrome clinique et surtout sur la<br />

ponction biopsie rénale en ce qui concerne les lésions parenchymateuses. Le diagnostic nosologique d’une<br />

néphropathie est d’autant plus précis que cette enquête est faite plus précocement dans le cours de la maladie rénale.<br />

Ainsi, la ponction biopsie rénale a les meilleures chances d’aider à classer une néphropathie lorsqu’elle est faite<br />

précocement sur des reins de volume encore peu diminué. Selon leur rythme évolutif, les néphropathies sont<br />

qualifiées d’aiguës ou chroniques. Consécutives à une maladie identifiée, elles sont dites « secondaires ». Lorsque leur<br />

cause reste inconnue, elles sont dites « primitives idiopathiques ».<br />

© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : néphropathies, ponction biopsie rénale, classification des néphropathies.<br />

■ Introduction<br />

Environ 20 000 sujets vivent aujourd’hui en<br />

France grâce à l’hémodialyse et à la dialyse<br />

péritonéale, et environ 10 000 sujets sont porteurs<br />

d’un greffon rénal fonctionnel. Le tableau I donne<br />

une estimation de la fréquence des causes<br />

d’insuffisance rénale terminale. Ces données sont<br />

toutefois de portée limitée, car elles sous-estiment la<br />

fréquence des maladies rénales qui n’évoluent que<br />

rarement vers l’insuffisance rénale terminale<br />

(comme par exemple la néphrose lipoïdique ou la<br />

néphroangiosclérose bénigne).<br />

La classification de la plupart des néphropathies,<br />

en l’absence de cause définie dans la majorité des<br />

cas, reste aujourd’hui encore fondée sur la nature de<br />

la lésion initiale touchant le parenchyme rénal : les<br />

glomérules, les tubes et l’interstitium ou les<br />

vaisseaux. Les principaux types sont présentés de<br />

manière schématique dans le tableau II.<br />

Le diagnostic se fonde sur l’imagerie en ce qui<br />

concerne les vaisseaux et les voies excrétrices, sur le<br />

syndrome clinique et surtout sur la ponction biopsie<br />

rénale en ce qui concerne les lésions parenchymateuses.<br />

Le diagnostic nosologique d’une<br />

néphropathie est d’autant plus précis que cette<br />

enquête est faite plus précocement dans le cours de<br />

la maladie rénale. Aux stades avancés des<br />

néphropathies chroniques, il peut en effet être<br />

impossible de classer la maladie rénale, car tous les<br />

éléments du rein sont atteints par une fibrose<br />

mutilante.<br />

Voilà pourquoi la ponction biopsie rénale a les<br />

meilleures chances d’aider à classer une<br />

Tableau I. – Fréquence estimée des insuffisances rénales terminales traitées par hémodialyse chez<br />

l’adulte (1/1 000 habitants) en France.<br />

Néphropathies en dialyse Étiologie Fréquence<br />

Glomérulonéphrites primitives GN à dépôts d’IgA (maladie de Berger)<br />

Néphrose<br />

GN nécrosante à croissants<br />

GN extramembraneuse<br />

22 %<br />

Néphrites interstitielles chroniques Néphropathie du reflux<br />

Uropathie obstructive<br />

Lithiase<br />

Médicamenteuse<br />

Autres<br />

9 %<br />

Néphropathies héréditaires Polykystose<br />

Autres<br />

9 %<br />

Néphropathie diabétique Diabète insulinodépendant<br />

Diabète non insulinodépendant<br />

25 %<br />

Néphropathies vasculaires secondaires à l’HTA 20 %<br />

Néphropathies secondaires en dehors du diabète Amylose<br />

Myélome<br />

Lupus érythémateux<br />

Autres maladies systémiques<br />

25 %<br />

Autres causes Nécrose corticale<br />

Sida<br />

Néphrocalcinose<br />

Traumatisme<br />

Tumeur rénale<br />

?<br />

HTA : hypertension artérielle ; GN : glomérulopathie ; IgA : immunoglobuline A ; sida : syndrome de l’immunodéficience acquise.<br />

néphropathie lorsqu’elle est faite précocement sur<br />

des reins de volume encore peu diminué.<br />

Par ailleurs, certains processus intéressent<br />

plusieurs éléments du rein, telle l’amylose qui infiltre<br />

à la fois glomérules, vaisseaux et tubes. En pareil cas,<br />

1<br />

5-0510<br />

la classification de la néphropathie est moins basée<br />

sur l’élément histologique atteint que sur le<br />

processus en cause.<br />

Selon leur rythme évolutif, les néphropathies sont<br />

qualifiées d’aiguës ou chroniques. Consécutives à


5-0510 - Classification des néphropathies<br />

Tableau II. – Classification schématique des<br />

néphropathies parenchymateuses.<br />

Néphropathies glomérulaires<br />

- GN aiguë<br />

- GN rapidement progressive<br />

- GN chronique<br />

Néphropathies tubulaires<br />

- Nécrose tubulaire aiguë<br />

- Tubulopathie chronique<br />

Néphropathies interstitielles<br />

- Néphrite interstitielle aiguë<br />

- Néphrite interstitielle chronique<br />

Néphropathies vasculaires<br />

- Néphroangiosclérose<br />

- Vascularites<br />

- Emboles<br />

GN : glomérulopathie.<br />

une maladie identifiée, elles sont dites « secondaires<br />

». Lorsque leur cause reste inconnue, elles sont<br />

dites « primitives idiopathiques ». Ce dernier terme<br />

cache souvent simplement notre ignorance des<br />

mécanismes physiopathologiques responsables de<br />

la maladie rénale.<br />

■ Classification<br />

‚ Obstacles de la voie excrétrice<br />

Aigu, un obstacle entraîne une anurie lorsqu’il<br />

s’agit d’une migration calculeuse dans une voie<br />

urinaire unique ou une fibrose rétropéritonéale<br />

enserrant les deux uretères. Chronique s’il persiste<br />

ou s’il se complique d’infection, il entraîne des<br />

lésions interstitielles et tubulaires.<br />

‚ Sténoses ou thromboses vasculaires<br />

Sténoses ou thromboses des artères rénales<br />

Elles sont responsables d’une hypertension, d’une<br />

insuffisance rénale ou des deux. C’est une cause<br />

fréquente d’insuffisance rénale chez le sujet<br />

athéromateux après 50 ans. Une sténose chronique<br />

de ce type est toujours suivie d’une atrophie<br />

progressive du rein, dont tous les éléments finissent<br />

par être atteints, avec des lésions de néphroangiosclérose,<br />

de nombreux glomérules en « pains à<br />

cacheter », une atrophie tubulaire et une fibrose<br />

interstitielle. Plus la sténose est serrée et ancienne,<br />

plus cette atrophie rénale est marquée.<br />

Thromboses des veines rénales<br />

C’est une affection rare, compliquant à tout âge<br />

un syndrome néphrotique sévère préexistant<br />

(essentiellement une glomérulopathie extramembraneuse),<br />

et chez le nourrisson une déshydratation<br />

aiguë fébrile.<br />

‚ Atteintes parenchymateuses<br />

Glomérulopathies (GN)<br />

Trois types sont distingués par la biopsie rénale :<br />

■ absence de lésions en optique et en<br />

immunofluorescence (néphrose lipoïdique,<br />

représentant 90 % des syndromes néphrotiques de<br />

l’enfant) ;<br />

■ glomérulonéphrite de dépôts, de composition<br />

et d’étiologie variables, que l’on peut identifier en<br />

optique, en immunofluorescence et en électronique.<br />

La forme devenue la plus fréquente actuellement est<br />

la GN à dépôts d’immunoglobuline (Ig)A.<br />

La glomérulopathie diabétique, les glomérulonéphrites<br />

extramembraneuses et l’amylose<br />

rassemblent le plus grand nombre de ces GN,<br />

souvent compliquées de syndrome néphrotique ;<br />

■ prolifération inflammatoire, avec alors risque<br />

de fibrose séquellaire.<br />

Une même glomérulopathie peut entraîner des<br />

syndromes cliniques différents, et des étiologies<br />

diverses peuvent donner un même type de lésions<br />

glomérulaires. Par exemple, une glomérulopathie à<br />

dépôts mésangiaux d’IgA (maladie de Berger) peut<br />

se révéler par des hématuries macroscopiques<br />

récidivantes, par l’association d’une protéinurie et<br />

d’une hématurie macroscopique, par un syndrome<br />

néphritique aigu, par un syndrome néphrotique, et<br />

même parfois rester latente. Pourtant, la biopsie<br />

rénale peut dans chacune de ces éventualités<br />

trouver des lésions glomérulaires de même nature,<br />

mais plus ou moins sévères. Un autre exemple est<br />

celui des glomérulopathies extramembraneuses :<br />

certaines accompagnent un cancer, la prise d’un<br />

médicament ou une hépatite B. D’autres restent<br />

« idiopathiques », même après plusieurs dizaines<br />

d’années d’observation.<br />

Tubulopathies<br />

Elles peuvent être aiguës (nécrose tubulaire) ou<br />

chroniques. Certaines ne s’expriment que sous<br />

forme de désordres fonctionnels.<br />

Les tubulopathies aiguës accompagnées de<br />

nécrose de l’épithélium tubulaire entraînent une<br />

insuffisance rénale aiguë qui peut être oligoanurique<br />

mais également à diurèse conservée, bien que, si<br />

l’on fait à ce stade une ponction biopsie rénale, les<br />

lésions soient peu différentes. Les lésions tubulaires<br />

subaiguës ou chroniques s’inscrivent en général<br />

dans un tableau de néphrite interstitielle chronique.<br />

Les tubulopathies purement fonctionnelles sont<br />

souvent d’origine congénitale. Elles se traduisent par<br />

une anomalie d’une ou plusieurs fonctions<br />

tubulaires, sans nécessairement s’accompagner de<br />

lésions histologiques. C’est le cas par exemple de la<br />

glycosurie normoglycémique, du diabète insipide<br />

néphrogénique, du syndrome de Fanconi, de<br />

l’acidose tubulaire distale. Au cours de l’existence,<br />

ces troubles purement fonctionnels peuvent petit à<br />

petit entraîner des lésions histologiques des tubes<br />

(exemple : la néphrocalcinose, compliquant plusieurs<br />

années d’acidose tubulaire distale).<br />

Néphrites interstitielles<br />

Elles sont caractérisées par la présence dans<br />

l’interstitium de cellules, de dépôts ou de<br />

microcristaux. Aiguës, subaiguës ou chroniques,<br />

souvent immunoallergiques ou infectieuses, elles<br />

s’accompagnent de lésions tubulaires. Les lésions<br />

glomérulaires sont soit absentes, soit très retardées<br />

par rapport au début de la néphropathie. Enfin, il<br />

faut noter que le pronostic d’une maladie rénale,<br />

qu’elle soit primitivement glomérulaire, tubulaire<br />

ou vasculaire, est directement corrélé à l’intensité<br />

de la fibrose interstitielle.<br />

2<br />

Néphropathies vasculaires<br />

Selon la pathogénie, on distingue trois types de<br />

néphropathies vasculaires : néphroangiosclérose,<br />

angéites, microembolies, essentiellement par des<br />

cristaux de cholestérol.<br />

Néphroangiosclérose bénigne<br />

La néphroangiosclérose bénigne complique en<br />

général une hypertension artérielle ayant évolué<br />

pendant des dizaines d’années. Les lésions affectent<br />

surtout les artères interlobaires et les artérioles. Elles<br />

sont faites d’un épaississement intimal et de<br />

reduplications des limitantes élastiques, d’une<br />

hypertrophie des fibres musculaires lisses et d’un<br />

épaississement hyalin des parois.<br />

Néphroangiosclérose maligne<br />

La néphroangiosclérose maligne est de<br />

constitution très rapide. Elle s’accompagne d’une<br />

hypertension artérielle très sévère, et peut entraîner<br />

une insuffisance rénale terminale en quelques mois,<br />

semaines voire même quelques jours. Les lésions<br />

sont faites d’une nécrose fibrinoïde des parois<br />

artériolaires, d’une rupture des limitantes élastiques<br />

et de thromboses.<br />

Angéites<br />

Les angéites sont des affections inflammatoires<br />

des parois vasculaires (artérielles, artériolaires,<br />

parfois même veinulaires intrarénales) dues à un<br />

processus auto-immun. Les lésions vasculaires<br />

intéressent souvent aussi les capillaires<br />

glomérulaires. Ce sont des maladies de système qui<br />

en général ne se limitent pas qu’au rein.<br />

Embolies de cholestérol<br />

Les embolies de cholestérol sont une<br />

manifestation de la maladie athéromateuse. À<br />

l’obstruction mécanique des artères de petit calibre<br />

peut faire suite une réaction inflammatoire à corps<br />

étranger, prenant plus ou moins l’aspect d’une<br />

angéite.<br />

■ Conclusion<br />

Cette classification imparfaite est aujourd’hui<br />

encore utilisée. Elle ne rend cependant pas compte<br />

de la nature souvent intriquée des lésions au cours<br />

de la plupart des néphropathies. Par exemple, les<br />

glomérulonéphrites s’accompagnent très souvent de<br />

lésions tubulo-interstitielles ou vasculaires qui<br />

conditionnent le pronostic ; les néphropathies<br />

vasculaires compliquant l’hypertension artérielle<br />

sont souvent accompagnées de lésions de sclérose<br />

glomérulaire, et enfin les néphropathies interstitielles<br />

ont souvent partie liée avec des lésions tubulaires.<br />

Ces faits montrent que la classification d’une<br />

néphropathie glomérulaire, tubulaire ou vasculaire<br />

est plus facile au début de l’évolution. À un stade<br />

tardif, la néphropathie devient souvent inclassable,<br />

car elle associe des lésions diffuses des différents<br />

éléments du parenchyme rénal, classique mal de<br />

Bright.


Hassan Izzedine : Chef de clinique-assistant,<br />

Service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Izzedine. Classification des néphropathies.<br />

Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0510, 2003,3p<br />

[1] Lesavre P. Néphropathies. Classification et définition. In : Godeau P, Herson<br />

S, Piette JC ed. Traité de Médecine Interne. 3 e édition. Paris : Flammarion Médecine<br />

Sciences, 1996 : 1066-1067<br />

Références<br />

3<br />

Classification des néphropathies - 5-0510<br />

[2] Meyrier A et al. Maladies rénales de l’adulte. Paris : EllipsesMarketing, 1993


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0675<br />

© Elsevier, Paris<br />

E ntre<br />

© Elsevier, Paris.<br />

Cystite interstitielle<br />

B Mauroy<br />

1950 et 1970, devant un tel tableau clinique, on parlait de « hysterical female condition »!<br />

■ Introduction<br />

La cystite interstitielle (CI) est une maladie<br />

énigmatique pour laquelle il n’existe actuellement pas<br />

de critère diagnostique absolu, mais dont la fréquence<br />

va croissant. La conférence de consensus de l’Institut<br />

national de santé américain (National Institute of<br />

Health [NIH]) publiée en 1989 [9] a permis de définir des<br />

critères diagnostiques.<br />

■ Historique<br />

Décrite en 1878 par Skène comme une<br />

inflammation intramurale interstitielle de la paroi<br />

vésicale et en 1907 par Nitze comme la « cystitis<br />

parenchymatosa », la CI est définie en 1918 par<br />

Hunner. Il décrit la forme ulcéreuse et l’ulcère érosif<br />

chez la femme présentant des douleurs vésicales<br />

associées à des urgences mictionnelles.<br />

Entre 1950 et 1970, devant un tel tableau clinique,<br />

on parlait d’« hysterical female condition ».<br />

Il faut attendre 1978 pour que Messing et Stamey<br />

affirment l’existence de formes non ulcéreuses et de<br />

« glomérulations » vésicales indispensables au<br />

diagnostic, et 1980 pour que se crée l’Interstitial Cystitis<br />

Association.<br />

C’est enfin en 1989 que les critères diagnostiques<br />

définis par la conférence de consensus de l’Institut<br />

national de santé américain ont permis une<br />

homogénéisation des populations étudiées.<br />

Ce sont ces critères qui servent actuellement de<br />

référence, sachant qu’il n’existe pas d’éléments<br />

pathognomoniques de la CI.<br />

■ Épidémiologie<br />

Il s’agit d’une pathologie peu fréquente, mais qui est<br />

certainement sous-estimée en France. Aux États-Unis,<br />

la prévalence de la maladie a été évaluée à<br />

10,6/100 000 habitants et à 18/100 000 femmes.<br />

L’incidence annuelle est de 10/100 000. La fréquence<br />

du diagnostic semble augmenter progressivement.<br />

Plus de 90 % des diagnostics ont été faits chez la<br />

femme, avec un sex-ratio de 1/10. Le poids<br />

socioéconomique de la maladie est important puisque<br />

le coût annuel de la CI aux États-Unis était de 4 000<br />

dollars en 1987. À l’époque, 400 000 cas étaient<br />

recensés.<br />

Définition ■et<br />

critères<br />

diagnostiques<br />

Les critères diagnostiques reposent sur l’examen<br />

clinique (tableau I), l’évaluation urodynamique et la<br />

cystoscopie sous anesthésie générale.<br />

‚ Signes cliniques<br />

Deux signes fonctionnels sont indispensables au<br />

diagnostic :<br />

– un syndrome irritatif : pollakiurie diurne et<br />

nocturne, impériosité mictionnelle ;<br />

– une douleur sus-pubienne (douleurs à la<br />

distension) qui entrave l’activité quotidienne et le<br />

sommeil. Une douleur sus-pubienne persistant après la<br />

miction n’est pas évocatrice de CI.<br />

Se surajoute un terrain psychologique dépressif,<br />

mais celui-ci doit être considéré comme secondaire à<br />

la symptomatologie douloureuse, aggravé par<br />

l’absence de diagnostic (retard au diagnostic supérieur<br />

à 13 mois).<br />

L’examen clinique reste pauvre. Les examens<br />

radiologiques éliminent une lésion organique.<br />

L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) est<br />

négatif, ce qui est un élément négatif important.<br />

Les critères cliniques d’exclusion sont importants<br />

(tableau II).<br />

‚ Explorations utiles<br />

Cystomanométrie<br />

Elle peut montrer une douleur vésicale au<br />

remplissage, une réduction de la capacité vésicale<br />

(souvent normale sous anesthésie), mais la<br />

compliance vésicale reste normale.<br />

La cystoscopie doit être faite sous anesthésie<br />

générale ou analgésie péridurale, ce qui permet une<br />

hydrodistension.<br />

Cystoscopie<br />

Elle peut être décisive en présence d’une forme<br />

ulcéreuse : l’ulcère de Hunner siège au niveau de<br />

l’arrière-fond ou sur les faces latérales et se présente<br />

comme une cicatrice blanchâtre dont les bords<br />

saignent après la distension.<br />

Elle permet de retrouver des glomérulations (50 %<br />

des cas), des hémorragies pétéchiales sous-muqueuses<br />

caractéristiques si elles sont diffuses, intéressant au<br />

moins trois quadrants de la paroi vésicale, ou des<br />

fissures (10 % des cas).<br />

Une hématurie terminale évocatrice peut être<br />

observée dans les suites immédiates de<br />

l’hydrodistension [3] .<br />

En l’absence d’ulcère de Hunner, la réalisation de<br />

biopsies vésicales à la pince froide est indispensable<br />

pour éliminer un carcinome (23 % des hommes et<br />

1,3 % des femmes étiquetés CI sont en fait porteurs<br />

d’un carcinome), une cystite à éosinophiles, une<br />

tuberculose [6] . L’examen histopathologique retrouve<br />

une infiltration non spécifique du chorion, avec<br />

présence de nombreux lymphocytes et parfois une<br />

augmentation de la densité des mastocytes.<br />

Toute pathologie infectieuse ou tumorale vésicale,<br />

prostatique ou urétrale, peut simuler une CI.<br />

Tableau I. – Place des examens complémentaires nécessaires chez des patients suspects de cystite<br />

interstitielle.<br />

Examens indispensables<br />

Cystoscopie sous anesthésie générale permettant :<br />

- une mesure de la capacité vésicale<br />

- une hydrodistension si un élément typique est retrouvé (ulcère ou pétéchies diffuses)<br />

- une biopsie dans le cas contraire<br />

ECBU, cytologie<br />

Bilan radiographique (UIV et/ou échographie rénale et vésicale)<br />

Examens possibles<br />

Test de Parsons<br />

Bilan urodynamique (mesure de la capacité vésicale sous vigilance, instabilité)<br />

ECBU : examen cytobactériologique des urines ; UIV : urographie intraveineuse.<br />

1<br />

5-0675


5-0675 - Cystite interstitielle<br />

Tableau II. – Critères d’inclusion et d’exclusion.<br />

Critères d’inclusion (ulcère de Hunner)<br />

Facteurs positifs<br />

Douleurs au remplissage vésical soulagées par la vidange vésicale<br />

Douleurs pelviennes, vaginales, périnéales, abdominales<br />

Présence de glomérulations lors de l’hydrodistension vésicale sous anesthésie générale<br />

Perte de la compliance vésicale<br />

Critères d’exclusion<br />

Clinique<br />

Âge < 18 ans, ancienneté des symptômes < 1 an, pollakiurie diurne < 8, pollakiurie nocturne < 2<br />

Diminution des symptômes sous antibiotique, antiseptique, anticholinergique, antispasmodique<br />

Pathologie urologique : cystite/prostatite dans les 3 mois, calcul vésical ou urétral, diverticule urétral, tuberculose,<br />

vessie radique ou chimique, tumeur de vessie<br />

Lésion gynécologique : herpès, cancer, vaginite. Antécédent de traitement par cyclophosphamide (Endoxan<br />

Astat)<br />

Urodynamique<br />

Capacité > 350 mL, absence d’impériosité avant 150 mL, instabilité vésicale motrice<br />

‚ Formes cliniques<br />

Deux tableaux cliniques ont été décrits :<br />

– stade 1 : CI dite « mineure » dans laquelle l’ulcère<br />

de Hunner n’est pas retrouvé. Il s’agit habituellement<br />

d’une forme de la femme jeune, pétéchiale,<br />

d’évolution bénigne, qui répond au traitement ;<br />

– stade 2 : forme majeure, ulcéreuse et d’évolution<br />

grave, caractérisée par une capacité vésicale souvent<br />

réduite (350 mL à 150 mL) et qui répond peu au<br />

traitement.<br />

Diagnostic différentiel<br />

✔ Carcinome in situ : la réalisation<br />

de biopsies vésicales à la pince<br />

froide est indispensable pour<br />

éliminer un carcinome (23 % des<br />

hommes et 1,3 % des femmes<br />

étiquetés CI sont en fait porteurs<br />

d’un carcinome).<br />

✔ Cystite à éosinophiles.<br />

✔ Tuberculose.<br />

✔ « Hysterical female condition ».<br />

■ Physiopathologie<br />

Les hypothèses physiopathologiques sont<br />

nombreuses : de multiples théories ont été proposées.<br />

Aucune n’a été retenue, et l’origine multifactorielle de<br />

la CI paraît de plus en plus probable. C’est la raison<br />

pour laquelle, plutôt que de théories, il est préférable<br />

de parler de composantes physiopathologiques visant<br />

à expliquer l’apparition des altérations de la paroi<br />

vésicale (Colombeau P, Lepinard V, Cortesse A. Cystite<br />

interstitielle. In : Mauroy B, Rischmann P eds. Expertises<br />

pratiques en urologie. Comité d’urologie de la femme.<br />

Numéro spécial congrès AFU 1997. 1998 ;<br />

1 : 9).<br />

‚ Composante épithéliale<br />

Il s’agit de la composante fondamentale. Elle a pour<br />

base la présence sur l’épithélium d’une couche de<br />

glycosaminoglycanes (GAG). Dans la CI, cette couche<br />

est altérée, ce qui modifie la perméabilité vésicale,<br />

notamment aux anions. La différence de répartition<br />

des anions potassiques peut expliquer l’impériosité<br />

mictionnelle et les douleurs. Cette notion est à la base<br />

du test de Parsons qui consiste à instiller dans la vessie<br />

successivement 50 mL d’eau distillée puis d’une<br />

solution de potassium. S’il existe une CI, l’instillation de<br />

potassium reproduit la symptomatologie douloureuse.<br />

Ce test est positif dans 70 % des CI et peut aider au<br />

diagnostic [2] .<br />

‚ Composante auto-immune<br />

Différentes études ont rapporté l’existence<br />

d’autoanticorps chez les patientes atteintes de CI. La<br />

composante auto-immune s’est trouvée renforcée<br />

quand Bullock a pu reproduire sur des modèles<br />

expérimentaux des cystites auto-immunes dont les<br />

caractéristiques étaient tout à fait comparables à la CI.<br />

Des travaux plus récents ont permis de conclure que<br />

les autoanticorps détectés dans la CI seraient plutôt le<br />

reflet d’une réponse immunitaire secondaire à une<br />

inflammation chronique de la vessie par un agent qui,<br />

lui, reste indéterminé.<br />

‚ Composante infectieuse<br />

C’est l’hypothèse la plus ancienne, avancée par<br />

Hunner lui-même selon l’idée que l’infection vésicale<br />

chronique altérant la paroi épithéliale entraînerait une<br />

sensibilité particulière à des micro-organismes<br />

habituellement non pathogènes.<br />

Cette composante infectieuse bactérienne a été<br />

récemment remise sur le devant de la scène par la<br />

découverte par PCR (polymerase chain reaction)<br />

d’acide désoxyribonucléique (ADN) bactérien chez des<br />

femmes porteuses d’une CI, alors que les cultures<br />

d’urine étaient négatives. Les agents responsables<br />

n’ont cependant pas été isolés. Il pourrait s’agir de<br />

germes en partie détruits par le traitement<br />

antibiotique, qui se seraient localisés dans la paroi<br />

vésicale et auraient entretenu (ou déclenché) un<br />

processus auto-immun.<br />

‚ Composante inflammatoire<br />

Elle est constante dans la CI, mais on ne sait pas<br />

aujourd’hui si elle est une cause ou une conséquence<br />

de la pathologie. Un rôle essentiel est tenu par les<br />

mastocytes, cellules impliquées dans les processus<br />

inflammatoires et allergiques. Ils sont présents dans<br />

tous les tissus, notamment dans la paroi vésicale, et<br />

contiennent des granulations riches en histamine.<br />

Sous l’influence de différents facteurs, ils libèrent leur<br />

contenu et déclenchent un processus inflammatoire.<br />

Leur nombre est augmenté dans la paroi vésicale de<br />

patientes atteintes de CI. D’autres arguments militent<br />

en faveur de cette hypothèse :<br />

– l’existence d’allergies multiples chez près de 50 %<br />

des femmes porteuses de CI ;<br />

2<br />

– l’augmentation de l’histaminurie dans la CI,<br />

notamment après hydrodistension ;<br />

– un taux de mastocytes activés dans près de 80 %<br />

des cas dans la paroi vésicale de CI (contre moins de<br />

20 % dans la vessie saine ou tumorale).<br />

Le dosage de la méthylhistaminurie pourrait dans<br />

l’avenir devenir un test diagnostique utile.<br />

‚ Composante neurovasculaire<br />

Des études récentes ont montré une modification<br />

de la répartition des terminaisons nerveuses dans la<br />

paroi vésicale des CI, susceptible d’expliquer, au moins<br />

en partie, la survenue des douleurs et l’augmentation<br />

du nombre de mastocytes.<br />

Au total, on peut actuellement retenir l’idée d’une<br />

altération initiale de l’épithélium vésical, expliquant<br />

l’afflux de mastocytes, qui expliquerait à son tour les<br />

phénomènes d’irritation locale et les modifications<br />

neurologiques. Cela permet d’expliquer les différents<br />

« stades » de la maladie, des formes mineures, dont le<br />

diagnostic est essentiellement clinique, aux formes<br />

majeures ulcérées.<br />

Physiopathologie de la cystite<br />

interstitielle<br />

On évoque :<br />

✔ une composante épithéliale ;<br />

✔ une composante auto-immune ;<br />

✔ une composante infectieuse ;<br />

✔ une composante inflammatoire ;<br />

✔ une composante neurovasculaire.<br />

■<br />

Approche thérapeutique<br />

‚ Traitements médicaux<br />

L’évaluation de l’efficacité des traitements<br />

médicaux est rendue difficile par le nombre limité de<br />

patients par étude, le peu d’études versus placebo, le<br />

manque de standardisation des protocoles<br />

thérapeutiques, l’évolution chronique par poussées de<br />

la CI, et surtout par l’absence d’explication<br />

physiopathologique clairement démontrée. C’est la<br />

raison pour laquelle il faut parler non pas du, mais des<br />

traitements médicaux de la CI. Les traitements<br />

chirurgicaux ne vivent que de l’échec des traitements<br />

précédents.<br />

Traitements systémiques<br />

Ils sont destinés à diminuer les douleurs et ont un<br />

tropisme soit vésical, soit neurologique.<br />

Médicaments à effet antihistaminique,<br />

anticholinergique et inhibiteur de la sécrétion<br />

des mastocytes<br />

Les antidépresseurs tricycliques sont un traitement<br />

classique, et l’amitriptyline (Élavilt, Laroxylt) est leur<br />

chef de file. Pour une posologie de 75 mg/j, une<br />

amélioration concernant surtout les douleurs et les<br />

impériosités diurnes a été observée pour 75 % des<br />

patients avec un suivi moyen de 16 mois.<br />

Les antihistaminiques H1, comme l’hydroxyzine,<br />

ou H2, comme la cimétidine, n’ont pas fait la preuve<br />

d’un effet durable, bien que 66 % des patients aient été<br />

initialement améliorés.<br />

Médicaments administrés per os susceptibles<br />

de réparer l’urothélium vésical<br />

Le pentosane polysulfate de sodium (Delmiron<br />

aux États-Unis), GAG de synthèse, est le seul qui ait


éellement prouvé son efficacité contre placebo [4, 7] à<br />

la dose de 300 mg/j. Ce produit est pratiquement<br />

dépourvu d’effets secondaires [7] .<br />

L’héparine est également un GAG qui aurait un<br />

effet cicatrisant sur l’urothélium vésical. Une<br />

amélioration après injections sous-cutanées<br />

d’héparine a été rapportée, mais il existe un risque non<br />

négligeable d’ostéoporose en cas d’administration<br />

prolongée. L’héparine sous-cutanée a également été<br />

proposée en cas de récidive après instillations<br />

vésicales d’héparine ou de formes hyperalgiques.<br />

Autres classes thérapeutiques proposées<br />

Le nalméfène est un antagoniste des opiacés,<br />

comparable à la naloxone, inhibant la dégranulation<br />

des mastocytes. Quelques succès ont été décrits.<br />

Les immunosuppresseurs n’ont pas fait la preuve<br />

d’une réelle efficacité.<br />

Afin d’obtenir une action sur la vessie, les<br />

corticoïdes doivent être prescrits à doses élevées, ce<br />

qui expose le patient à des effets secondaires<br />

potentiellement graves, et la voie endovésicale paraît<br />

donc plus appropriée.<br />

Les inhibiteurs calciques comme la nifédipine<br />

agiraient en induisant une relaxation du détrusor et de<br />

la musculature lisse vasculaire ainsi que grâce à leurs<br />

propriétés immunosuppressives. Une amélioration<br />

chez 50 % des patients a été observée.<br />

L’intérêt des anticholinergiques réside surtout dans<br />

le traitement des signes d’instabilité vésicale majorés<br />

par certains traitements endovésicaux (diméthylsulfoxyde<br />

[DMSO], oxychlorosène de sodium).<br />

Enfin, l’utilisation des anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens ne paraît pas conseillée, car ils augmentent<br />

la libération d’histamine par les leucocytes.<br />

Traitements endovésicaux<br />

Traitement « mécanique » : hydrodistension<br />

vésicale<br />

Le traitement « mécanique » de la CI peut se résumer<br />

à l’hydrodistension vésicale. Cette technique est très<br />

ancienne, introduite de façon empirique par Bumpus<br />

en 1930. La distension, outre son rôle diagnostique,<br />

apporte au plan thérapeutique une amélioration non<br />

négligeable pouvant parfois éviter l’escalade<br />

thérapeutique [5] . La réalisation de cette distension<br />

présente plusieurs principes et nécessite une<br />

surveillance attentive afin de reconnaître, voire de<br />

prévenir, la complication principale qui est la rupture<br />

vésicale, survenant dans 10 à 15 % des cas, surtout en<br />

cas de petite vessie.<br />

La distension est faite par remplissage d’un doigtier<br />

amarré de façon hermétique au-dessus du ballonnet<br />

d’une sonde de Foley. L’ensemble est restérilisé après<br />

le montage. La vidange de la vessie doit être effectuée<br />

avant l’introduction de la sonde de Foley. Le ballonnet<br />

doit être gonflé avant le début du remplissage pour<br />

s’assurer de sa position intravésicale. Le remplissage<br />

du doigtier avec du chlorure de sodium se fait par<br />

simple gravité à une pression de 80 cm d’H2O jusqu’à<br />

capacité maximale. La pression intravésicale est<br />

enregistrée à l’aide d’un capteur de pression sur un<br />

robinet trois voies à la sortie de la sonde de Foley. La<br />

pression intravésicale doit être un peu au-dessus de la<br />

pression artérielle diastolique. Cette distension peut<br />

être :<br />

– de durée brève (deux fois 2 minutes) ;<br />

– prolongée (3 heures) et nécessite alors une<br />

hospitalisation de 48 heures. Elle est réalisée sous<br />

analgésie péridurale au bloc opératoire, en salle de<br />

réveil, sous surveillance constante par une infirmière.<br />

Les deux principaux écueils de cette technique sont<br />

l’analgésie parfois insuffisante (par hyperpression<br />

intrarénale) et la surveillance de la pression<br />

intravésicale pour démasquer une rupture vésicale.<br />

Pour pallier ce problème, deux solutions peuvent être<br />

proposées : soit une péridurale haute, soit compléter<br />

l’analgésie péridurale par une analgésie systémique<br />

morphinique. La rupture de vessie est suspectée<br />

devant une chute brutale de la pression intravésicale,<br />

surtout si celle-ci est précédée d’une élévation rapide<br />

de la pression correspondant à une faible compliance.<br />

Il est possible que cela soit le fait de la rupture du<br />

doigtier mais cela doit être vérifié par cystoscopie.<br />

Les meilleurs résultats sont semble-t-il obtenus par<br />

l’hydrodistension prolongée dont l’efficacitéà1anest<br />

variable, de 30 % [1] à 80 %. Cela suggère que l’on<br />

devrait proposer rapidement une hydrodistension<br />

devant le diagnostic de CI afin d’en avoir le meilleur<br />

bénéfice.<br />

En fin de distension, la quantité de liquide<br />

intravésical est mesurée afin de vérifier la capacité<br />

vésicale qui est habituellement réduite.<br />

Agents cytotoxiques non mécaniques<br />

Les traitements endovésicaux ont l’avantage<br />

théorique d’une action directe sur la vessie mais<br />

nécessitent un cathétérisme urétral répété, plus ou<br />

moins associé parfois à une anesthésie régionale ou<br />

générale du fait de l’importance des douleurs lors des<br />

instillations. Afin d’éviter des accidents graves, il est<br />

prudent de débuter ces traitements endovésicaux 3 à<br />

4 semaines après la réalisation des biopsies vésicales,<br />

après avoir vérifié préalablement l’absence de reflux<br />

vésico-urétéral et d’infection urinaire.<br />

Parmi les traitements endovésicaux susceptibles<br />

d’agir sur les mastocytes et sur la libération<br />

d’histamine, le DMSO reste le plus prescrit : 50 mL<br />

d’une solution aqueuse à 50 % de DMSO sont instillés<br />

pendant au moins 15 minutes après cathétérisme<br />

urétral. Quatre à huit instillations sont réalisées à<br />

raison d’une instillation toutes les1à2semaines. Avec<br />

ces posologies, il n’est habituellement pas nécessaire<br />

de recourir à une anesthésie régionale, et ces<br />

instillations peuvent être effectuées en consultation. Le<br />

DMSO fait l’objet d’une excrétion pulmonaire avec<br />

haleine caractéristique pendant 24 à 48 heures. Les<br />

effets secondaires sont rares (15 %) [7] et dominés par<br />

des manifestations infectieuses vésicales et surtout<br />

d’instabilité vésicale, justifiant un traitement<br />

anticholinergique. Après une phase initiale de<br />

recrudescence des douleurs, 50 à 93 % des patients<br />

sont améliorés [7] , avec une meilleure réponse pour les<br />

formes sans ulcère que pour celles avec ulcère de<br />

Hunner, et diminution de la capacité vésicale.<br />

L’échappement observé après 4à8semaines de<br />

traitement est de l’ordre de 40 % au moins, mais 60 à<br />

80 % des patients qui « échappent » répondront à<br />

d’autres instillations de DMSO. En cas de récidive, un<br />

traitement de fond (une instillation tous les 2 mois) ou<br />

l’association à l’héparine ou à des corticoïdes<br />

intravésicaux a été proposée.<br />

Agissant également sur les mastocytes, la lidocaïne<br />

et le cromoglycate de sodium n’ont pas véritablement<br />

fait la preuve de leur efficacité.<br />

L’efficacité de l’administration intravésicale de<br />

pentosane polysulfate de sodium serait supérieure à<br />

l’administration orale, mais cela reste à démontrer [9] .<br />

Compte tenu de la fréquence des instillations<br />

nécessaires, l’apprentissage des autosondages est<br />

conseillé, de même qu’avec l’héparine qui aurait<br />

également un effet cicatrisant sur l’urothélium vésical.<br />

Dans une étude sur 48 patients, 56 % ont été<br />

améliorés au bout de 3 mois de traitement, avec un<br />

bénéfice durable pour la plupart d’entre eux lorsque le<br />

traitement a été prolongé à 6, voire 12 mois. Une<br />

3<br />

surveillance hebdomadaire de la coagulation et des<br />

plaquettes est souhaitable, bien qu’un passage<br />

systémique soit peu probable.<br />

Parmi les autres molécules, les corticoïdes semblent<br />

surtout intéressants en association avec le DMSO [3] .<br />

Quant au bacille bilié Calmette-Guérin (BCG), il n’a pas<br />

fait la preuve de son efficacité dans cette indication.<br />

L’oxychlorosène de sodium, à base d’acides<br />

hypochlorique et sulfonique, agit comme détergent sur<br />

la muqueuse vésicale et possède une activité<br />

antimicrobienne. Ce traitement est surtout indiqué en<br />

cas de récidive sous DMSO. Parmi les quelques études<br />

publiées sur ce produit, 50 à 79 % des patients ont eu<br />

une amélioration pendant au moins 6 mois.<br />

Le nitrate d’argent a des propriétés caustiques<br />

potentiellement dangereuses, ce qui justifie d’avoir<br />

vérifié préalablement l’absence de reflux vésicourétéral<br />

et d’effectuer les instillations à distance des<br />

biopsies vésicales. Les concentrations élevées<br />

nécessitent une anesthésie locorégionale ou générale.<br />

Bien qu’un taux de succès de 50 % après 1 an ait été<br />

rapporté, ce procédé n’a pas été évalué correctement<br />

(concentrations variables, durée d’instillation,<br />

association à d’autres traitements), et il ne doit pas<br />

faire partie des traitements de première intention.<br />

La doxorubicine n’a pas démontré son efficacité sur<br />

un grand nombre de patients.<br />

Autres traitements médicaux<br />

La psychothérapie ne doit pas être négligée.<br />

Prescrite seule ou associée à d’autres traitements, elle<br />

peut améliorer certains patients, car il est classique<br />

d’observer une majoration de la symptomatologie lors<br />

d’un traumatisme psychoaffectif.<br />

Avec des mesures diététiques comportant un<br />

régime évitant les aliments acides, une alcalinisation<br />

des urines et une vitaminothérapie, Good et Whitmore<br />

ont rapporté un taux de 33 % de patients améliorés.<br />

Avec la rééducation vésicale, dont le but est<br />

d’augmenter la capacité vésicale en allongeant<br />

l’intervalle intermictionnel, un taux de 80 à 88 % de<br />

patients améliorés a été rapporté, cette méthode étant<br />

limitée surtout aux formes pollakiuriques non algiques.<br />

Avant de parler de thérapeutiques plus<br />

chirurgicales, il faut citer un traitement symptomatique<br />

qui aurait quelques résultats intéressants, même dans<br />

des formes avancées : la stimulation électrique<br />

transcutanée. Il s’agit, par l’intermédiaire d’électrodes<br />

cutanées sus-pubiennes distribuant un courant de<br />

fréquence variable, de stimuler des mécanismes<br />

inhibiteurs de la douleur. La durée d’utilisation est de 2<br />

heures par jour sur une période définie par le patient<br />

lui-même, en fonction de l’amélioration des troubles.<br />

La douleur et la pollakiurie semblent être améliorées<br />

dans une proportion satisfaisante (sur des<br />

microséries !), avec deux cas décrits de disparition des<br />

lésions macroscopiques.<br />

‚ Traitements chirurgicaux<br />

Cystite interstitielle - 5-0675<br />

Le traitement chirurgical est réservé aux formes très<br />

invalidantes.<br />

L’endoscopie s’attaque physiquement au problème<br />

par injection intramuqueuse, électrocoagulation, ou<br />

plus récemment laser.<br />

Les injections périulcéreuses ou trigonales (alcool,<br />

corticoïdes, héparine) sont peu efficaces.<br />

L’électrocoagulation ainsi que la résection<br />

endoscopique, utilisée par Hunner dès 1915,<br />

s’adressent aux formes ulcérées et en particulier aux<br />

formes à ulcère isolé. Le risque est la nécrose locale<br />

responsable d’une fibrose et d’une rétraction locale,<br />

d’où réduction de la capacité vésicale et aggravation


5-0675 - Cystite interstitielle<br />

des symptômes. Greensberg, en 1974, décrit tout de<br />

même 60 % de patients asymptomatiquesà1an.<br />

Le laser néodyme YAG est en cours d’évaluation<br />

mais semble donner de bons résultats à moyen terme.<br />

Il ne donne pas de fibrose, de plus grandes zones<br />

peuvent être traitées, et des séances itératives sont<br />

possibles. Les résultats, meilleurs en cas d’ulcères de<br />

Hunner, donnent 80 % d’amélioration immédiate,<br />

45 % de récidive à 18 mois, mais avec toujours la<br />

possibilité d’une nouvelle séance.<br />

L’endoscopie reste une solution palliative avec de<br />

nombreuses récidives. Il paraît néanmoins raisonnable<br />

d’opter pour l’endoscopie avant d’envisager une<br />

chirurgie ouverte qui, elle non plus, ne peut prétendre<br />

guérir le patient dans tous les cas.<br />

La chirurgie ouverte ne concerne globalement que<br />

1 à 5 % des CI, et l’urologue est bien sûr d’autant<br />

moins à l’aise pour la proposer qu’il s’agit d’une<br />

pathologie fonctionnelle. Elle ne se conçoit qu’en cas<br />

de gêne fonctionnelle majeure, d’échec des<br />

thérapeutiques précédentes et en accord absolu avec<br />

le patient.<br />

Les dénervations de la vessie ont été les premières<br />

tentatives chirurgicales pour prendre en charge cette<br />

pathologie. Leur but est essentiellement d’agir sur la<br />

composante douloureuse de la maladie plus que sur<br />

l’hyperactivité vésicale. Les résultats sont variés, avec<br />

une efficacité qui de toute façon s’émousse avec le<br />

temps du fait d’une réinnervation de la vessie.<br />

La sympathectomie sacrée, réalisée pour la<br />

première fois en 1899 par Jaboulay par voie<br />

rétrorectale, la neurotomie des nerfs érecteurs par voie<br />

postérieure, ou plus récemment la résection du plexus<br />

hypogastrique, ne sont que peu ou pas utilisées.<br />

La cystoplastie ou transsection vésicale décrite par<br />

Turner-Warwick en 1967 consiste en un découpage<br />

de la vessie au-dessus du trigone et resuture<br />

immédiate. Son but est l’interruption des fibres<br />

sensitives. Les contractions sont conservées.<br />

La cystolyse décrite par Turner-Warwick en 1973<br />

déconnecte la vessie du plexus hypogastrique<br />

inférieur. Elle conserve simplement l’adhérence du<br />

péritoine, l’implantation des uretères et le trigone. Le<br />

gain sur la symptomatologie est satisfaisant au prix<br />

d’une acontractilité vésicale. À long terme, la récidive<br />

est presque constante.<br />

La cystectomie partielle décrite par Hunner en 1918<br />

ne peut s’envisager que pour enlever une portion<br />

ulcérée et unique d’une vessie ayant une capacité<br />

fonctionnelle appréciable. Toute réduction importante<br />

de la capacité vésicale risquerait de se solder par une<br />

aggravation de la symptomatologie.<br />

L’agrandissement vésical sans cystectomie doit être<br />

abandonné, car la maladie vésicale continuant à<br />

évoluer, le patch d’agrandissement va être exclu et se<br />

comporter inutilement comme un diverticule.<br />

La cystectomie sus-trigonale avec cystoplastie [1] est<br />

à réserver aux formes évoluées avec capacité vésicale<br />

très réduite et compliance altérée, et après échec de<br />

tout autre traitement conservateur. Elle laisse le trigone<br />

et l’urètre en place, et il est donc nécessaire de réaliser<br />

avant décision d’intervention des biopsies du trigone<br />

et un test de sensibilité urétrale. La technique de<br />

cystoplastie est affaire d’habitude. Les résultats sont<br />

satisfaisants sur la douleur et la pollakiurie, avec une<br />

sensation de réplétion vésicale conservée.<br />

En dehors des complications liées à la chirurgie et à<br />

la cystoplastie, les échecs existent : persistance des<br />

douleurs et inflammation de la plastie intestinale, qui<br />

n’est vraisemblablement pas due, comme on a pu<br />

l’écrire, à une reprise de la maladie sur le greffon.<br />

La dérivation urinaire avec cystectomie et<br />

urétrectomie semblerait théoriquement être la solution<br />

la plus radicale. Malheureusement, un certain nombre<br />

de cas de persistance du même syndrome douloureux<br />

sont décrits (syndrome de vessie fantôme).<br />

Quelle option<br />

■<br />

thérapeutique<br />

choisir ?<br />

Malgré la multiplicité des traitements médicaux<br />

proposés, aucun n’apparaît réellement supérieur aux<br />

Brigitte Mauroy : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef du service universitaire d’urologie,<br />

hôpital Victor-Provo, boulevard Lacordaire, 59056 Roubaix cedex 1, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : B Mauroy. Cystite interstitielle.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0675, 1998, 4 p<br />

[1] Guilloneau B, Toussaint B, Bouchot O, Buzelin JM. Traitement de la cystite<br />

interstitielle par cystectomie sus-trigonale et entérocystoplastie. Prog Urol 1993 ;<br />

3 : 27-31<br />

[2] Haab F, Zimmern P. Cystite interstitielle : Nouveaux concepts étiologiques et<br />

diagnostiques. Prog Urol 1995;5:653-659<br />

[3] Hanno PM. Diagnosis of interstitial cystitis. Urol Clin North Am 1994;21:<br />

63-66<br />

[4] Lechevallier E. La cystite interstitielle. Prog Urol 1995;5:21-30<br />

[5] Lepinard V. Cystite interstitielle et autres cystopathies chroniques. Encycl<br />

Med Chir (Elsevier, Paris), Néphrologie-Urologie, 18-220-A-10, 1992 ; 1-8<br />

Références<br />

4<br />

autres par le pourcentage de patients améliorés ou par<br />

la durée de l’amélioration symptomatique obtenue.<br />

Il est donc logique de privilégier les traitements<br />

dépourvus d’effets indésirables et dont la fréquence, la<br />

durée et les modalités d’administration sont<br />

acceptables.<br />

Dans ces conditions, l’hydrodistension est proposée<br />

en première intention, d’autant qu’elle est nécessaire<br />

au diagnostic lors de la première cystoscopie.<br />

Si elle est inefficace dans les formes algiques pures,<br />

le traitement par un antidépresseur (amitriptyline) et<br />

l’électrostimulation peuvent être proposés. En cas<br />

d’échec dans les formes irritatives et algiques, le DMSO<br />

en instillations intravésicales, malgré ses effets<br />

secondaires, reste le plus souvent prescrit, seul ou<br />

associé à l’héparine.<br />

Une mention particulière mérite d’être faite à<br />

propos du pentosane polysulfate de sodium per os,<br />

dénué d’effets secondaires, traitement auquel on a pu<br />

reproché des rechutes fréquentes à l’arrêt du<br />

traitement, mais dont la prescription aux États-Unis<br />

tend à augmenter.<br />

■ Conclusion<br />

De très nombreuses études visent actuellement<br />

à mieux cerner la physiopathologie de la CI qui<br />

est beaucoup moins rare qu’il n’est classique de le<br />

dire. Bon nombre de « cystalgies idiopathiques »,<br />

concept qui doit disparaître, ont été ou sont<br />

d’authentiques CI. Bien qu’il n’existe pas de signes<br />

pathognomoniques de la maladie, le diagnostic<br />

doit être évoqué devant une cystalgie à urines<br />

claires soulagée par la miction et survenant chez<br />

la femme. Ce tableau clinique doit mener à la<br />

réalisation d’une distension vésicale percystoscopique,<br />

sous anesthésie qui peut permettre à la fois<br />

le diagnostic et le début du traitement.<br />

[6] Lepinard V. Cystite interstitielle. Prog Urol 1995;5:18-19<br />

[7] Parsons CL, Benson C, Childs SJ, Hanno P, Sant GR, Webster G. A quantitatively<br />

controlled method to study prospectively interstitial cystitis and demonstrate<br />

the efficacy of pentosanpolysulfate. JUrol1993 ; 150 : 845-848<br />

[8] Walsh A. Interstitial cystitis. In : Harrison JH eds. Campbell’s Urology. Philadelphia<br />

: WB Saunders, 1976 : 693-707<br />

[9] Wein AJ, Hanno PM, Gillewater JY. Interstitial cystitis: an introduction to the<br />

problem. In : Hanno PM, Staskin DR, Krane RJ, Wein AJ eds. Interstitial cystitis.<br />

Berlin : Springer-Verlag, 1990 : 3-15


Plan<br />

Cystopathies chroniques<br />

S.-J. Drouin, A. Vieillefond, E. Chartier-Kastler, M. Rouprêt<br />

On regroupe sous le terme de cystopathies chroniques différentes affections vésicales d’étiologies diverses<br />

(infectieuses, traumatiques, irritatives, etc.) dont la présentation clinique est variée, alliant, le plus<br />

souvent, douleurs pelviennes, hématurie et symptômes irritatifs. L’imagerie est, le plus souvent, peu<br />

contributive pour le diagnostic et utilisée surtout pour éliminer des complications. Le diagnostic repose en<br />

général sur la cystoscopie et l’examen histologique des biopsies vésicales associés à un interrogatoire à la<br />

recherche de facteurs déclenchants. La prise en charge est médicale (traitement de l’agent causal,<br />

antibiothérapie, instillations endovésicales) et/ou chirurgicale (résection endoscopique, cystectomie<br />

partielle ou totale). Les récidives étant fréquentes et certaines formes précancéreuses, un suivi à long<br />

terme est préconisé.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Cystopathies ; Cystite ; Vessie ; Éosinophile ; Incrustante ; Amylose ; Endométriose ; Cystoscopie<br />

Introduction 1<br />

Cystite à éosinophiles 1<br />

Épidémiologie 1<br />

Étiologie 2<br />

Clinique 2<br />

Examens complémentaires 2<br />

Endoscopie et histologie 2<br />

Traitement 2<br />

Cystite incrustante 2<br />

Étiopathogénie 2<br />

Corynebacterium urealyticum 2<br />

Clinique 2<br />

Examens complémentaires 3<br />

Endoscopie et histologie 3<br />

Traitement 3<br />

Cystites kystiques et glandulaires 3<br />

Étiopathogénie 3<br />

Cystite kystique 3<br />

Cystite glandulaire ou métaplasie glandulaire 4<br />

Cystite polypoïde 5<br />

Étiopathogénie 5<br />

Clinique 5<br />

Imagerie 5<br />

Endoscopie et histologie 5<br />

Traitement 5<br />

Endométriose vésicale 5<br />

Épidémiologie 5<br />

Étiologie 6<br />

Clinique 6<br />

Imagerie 6<br />

Endoscopie et histologie 6<br />

Traitement 6<br />

Urologie<br />

Malakoplakie 6<br />

Étiopathogénie 6<br />

Clinique 6<br />

Examens complémentaires 6<br />

Endoscopie et histologie 6<br />

Traitement 7<br />

Amylose vésicale 7<br />

Étiopathogénie 7<br />

Amylose vésicale primitive 7<br />

Amylose vésicale secondaire 8<br />

Cystite chronique à l’Endoxan ®<br />

Conclusion 10<br />

■ Introduction<br />

Le terme de « cystopathies chroniques » regroupe différentes<br />

affections vésicales qui n’ont en commun que la durée d’évolution<br />

de leurs symptômes et l’existence de lésions anatomopathologiques<br />

individualisables à l’endoscopie et/ou à l’histologie.<br />

Ce sont des maladies qui peuvent être asymptomatiques, car<br />

localisées et diagnostiquées sur des lésions pseudotumorales en<br />

endoscopie, ou se révéler par des symptômes invalidants au<br />

premier rang desquels les troubles irritatifs et les douleurs.<br />

Souvent méconnues, elles posent des problèmes diagnostiques<br />

préjudiciables aux patients qui en sont atteints puisque leur<br />

traitement passe la plupart du temps par la suppression de<br />

l’agent causal. Le but de cet article est de répertorier les<br />

différentes formes de ces cystopathies (à l’exclusion des cystites<br />

radiques et interstitielles) et d’en décrire les principaux éléments<br />

du diagnostic et de la prise en charge thérapeutique.<br />

■ Cystite à éosinophiles<br />

Épidémiologie<br />

18-220-A-40<br />

Elle est rare et touche les adultes comme les enfants. Dans la<br />

majorité des cas, un terrain immunoallergique est retrouvé [1] .<br />

8<br />

1


18-220-A-40 Cystopathies chroniques<br />

Figure 1. Cystite à ésosinophiles. Aspect de pancystite avec infiltrat<br />

inflammatoire très riche en polynucléaires éosinophiles que l’on voit ici<br />

dissociant les faisceaux musculaires du détrusor.<br />

Étiologie<br />

L’hypothèse étiopathogénique principale est celle d’une<br />

réaction immunologique antigène-anticorps responsable de<br />

l’attraction d’éosinophiles dans la paroi vésicale qui libèrent des<br />

cytokines responsables du processus inflammatoire. La cystite à<br />

éosinophiles peut survenir plus rarement dans le cadre d’une<br />

uropathie préexistante [2, 3] .<br />

Clinique<br />

La symptomatologie est polymorphe et aspécifique. La cystite<br />

à éosinophiles se manifeste sous forme de cystite aiguë hématurique,<br />

de douleurs sus-pubiennes, de dysurie et d’hématurie<br />

chronique, rarement de nycturie ou de rétention aiguë d’urines.<br />

Certaines manifestations allergiques, comme un rash cutané,<br />

sont parfois associées aux signes urinaires.<br />

À un stade tardif, elle peut être révélée d’emblée par certaines<br />

complications et notamment : une urétérohydronéphrose<br />

secondaire à l’épaississement de la paroi vésicale, un reflux<br />

vésico-urétéral, des infections itératives ou encore une fistule<br />

entérovésicale [1] .<br />

Examens complémentaires<br />

Les examens biologiques mettent en évidence une absence de<br />

bactériurie, une hyperéosinophilie sanguine dans 60 % des cas<br />

et parfois une éosinophilurie, même si celle-ci reste rare et<br />

aspécifique. Radiologiquement, les examens sont le plus souvent<br />

normaux. L’urographie intraveineuse montre parfois un aspect<br />

irrégulier de la vessie avec quelques defects, mais elle est de<br />

moins en moins réalisée car peu contributive. Ils permettent<br />

surtout de rechercher des complications (urétérohydronéphrose).<br />

Endoscopie et histologie<br />

La cystoscopie et les biopsies permettent de faire le diagnostic.<br />

On retrouve typiquement un œdème et des lésions polypoïdes<br />

érythémateuses de la muqueuse, associés à des ulcérations.<br />

Histologiquement, il s’agit d’un infiltrat inflammatoire dense<br />

riche en polynucléaires éosinophiles, qui diffuse dans un<br />

chorion fibro-œdémateux et s’infiltre entre les faisceaux du<br />

muscle détrusor réalisant un tableau de pancystite de la<br />

muqueuse et de la sous-muqueuse [3, 4] (Fig. 1).<br />

.<br />

“ Point fort<br />

Cystite à éosinophiles<br />

Survenant sur un terrain immunoallergique, elle est due à<br />

une réaction antigène-anticorps. L’élévation des<br />

éosinophiles est parfois retrouvée dans le sang ou les<br />

urines mais le diagnostic est fait par l’histologie qui<br />

retrouve un infiltrat inflammatoire éosinophile du chorion<br />

et du muscle. Le traitement passe par la suppression de<br />

l’agent causal et l’administration d’anti-inflammatoires.<br />

Traitement<br />

Il consiste, en premier lieu, en la suppression de l’agent<br />

allergène s’il est retrouvé (médicament) associée à des antiinflammatoires<br />

non stéroïdiens [4, 5] . Les corticoïdes sont utilisés<br />

en seconde ligne thérapeutique, éventuellement associés à des<br />

antihistaminiques. En cas d’échec, de nombreux protocoles ont<br />

été proposés, mais sans succès probant : instillations de nitrate<br />

d’argent, d’azathioprine, de mitomycine C [3, 5] .<br />

En dernier lieu, ou en présence d’un retentissement sur le<br />

haut appareil urinaire, un recours à la chirurgie devient nécessaire.<br />

Dès lors, une résection endoscopique des lésions, une<br />

cystectomie partielle, voire une entérocystoplastie peuvent être<br />

discutées. Un suivi au long cours est indispensable car les<br />

récidives sont fréquentes [4, 5] .<br />

■ Cystite incrustante<br />

Étiopathogénie<br />

La cystite incrustée, responsable de dépôts en « coquilles<br />

d’œuf » sur la muqueuse vésicale, mais également dans l’urothélium<br />

du haut appareil urinaire, était une affection bien<br />

connue chez les patient(e)s ayant des infections urinaires à<br />

répétition ; elle a pratiquement disparu avec l’apparition des<br />

antibiotiques.<br />

Elle peut être observée, en l’absence de traitements antibiotiques<br />

efficaces, chez des patients, souvent immunodéficients,<br />

infectés par des germes uréasiques et en particulier par Corynebacterium<br />

urealyticum [6] .<br />

Corynebacterium urealyticum<br />

Il appartient à la flore cutanée normale, et est retrouvé dans<br />

2-5 % des infections urinaires, essentiellement en milieu<br />

urologique hospitalier (patients fragilisés par des instrumentations<br />

répétées, diabétiques, immunodéprimés, etc.). Cette<br />

bactérie n’est retrouvée par les urocultures que si on la recherche<br />

sur des milieux particuliers.<br />

L’activité uréasique de Corynebacterium urealyticum transforme<br />

l’urée en ammoniaque, rendant l’urine alcaline et favorisant la<br />

formation de calculs mous de struvite (cristaux de phosphate<br />

ammoniacomagnésien) et d’apatite qui s’incrustent sur les zones<br />

de muqueuse nécrosée et ulcérée [7-9] .<br />

Clinique<br />

Les manifestations sont variées : douleurs sus-pubiennes,<br />

dysurie, hématurie, urines malodorantes avec élimination de<br />

mucus et de débris calcaires. Par contiguïté, une urétérite<br />

incrustée ou une pyélite incrustée peuvent se développer et être<br />

responsables d’une urétérohydronéphrose avec retentissement<br />

sur la fonction rénale, notamment chez les patients transplantés<br />

[10, 11] (Fig. 2).<br />

2 Urologie


.<br />

Figure 2. Urétérite incrustante à Corynebacterium urealyticum chez une patiente sondée à demeure. A. Plaque de nécrose, inflammation sous-jacente et<br />

muscle urétéral sain en profondeur. B. Détail.<br />

“ Point fort<br />

Cystite incrustante<br />

Maladie inflammatoire liée à un germe, Corynebacterium<br />

urealyticum, et favorisée par une immunodéficience et un<br />

geste urologique préalable. Le diagnostic repose sur<br />

l’ECBU sur milieu spécifique et la cystoscopie. Le<br />

traitement associe éradication du germe par antibiotiques<br />

(glycopeptides), acidification des urines et exérèse des<br />

plaques calcifiées.<br />

Examens complémentaires<br />

L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) met volontiers<br />

en évidence des urines alcalines et une hématurie. Les<br />

cultures effectuées sur milieu sélectif, enrichi de dioxyde de<br />

carbone, pendant 48-72 heures permettent d’identifier le germe<br />

pathogène [6, 9] . L’imagerie, particulièrement le scanner abdominopelvien<br />

qui est quasi pathognomonique, met en évidence<br />

une vessie de petite taille, avec des plaques calcifiées irrégulières<br />

de la paroi qui est œdématiée et épaissie.<br />

Endoscopie et histologie<br />

La cystoscopie reste toutefois l’examen clé du diagnostic. Elle<br />

retrouve une muqueuse inflammatoire, ulcérée et des plaques<br />

calcifiées siégeant principalement sur le trigone et les zones de<br />

résection antérieures, avec parfois une vessie dont la capacité<br />

vésicale fonctionnelle est diminuée. En histologie, on constate,<br />

au niveau des zones ulcérées, une nécrose incrustée de petits<br />

débris calcifiés qui s’étend en profondeur dans le chorion et qui,<br />

théoriquement, est soulignée par un liseré riche en colonies<br />

bactériennes et en polynucléaires. Plus en profondeur on<br />

observe un aspect de granulome inflammatoire [12] .<br />

Traitement<br />

La prise en charge de la cystite incrustante s’articule autour<br />

de trois étapes complémentaires les unes des autres. En premier<br />

Urologie<br />

lieu, une éradication du germe à l’aide d’un traitement antibiotique<br />

d’au moins 15 jours est impérative. Corynebacterium<br />

urealyticum étant le plus souvent résistant aux fluoroquinolones,<br />

aux pénicillines et aux céphalosporines, on utilise en première<br />

intention les glycopeptides (vancomycine et teicoplanine). Il<br />

faut associer une acidification des urines à l’antibiothérapie, soit<br />

par des inhibiteurs de l’uréase per os (acide acétohydroxamique<br />

à la dose de 15 mg/kg), soit par des instillations intravésicales<br />

de solutions acides (solution de Thomas, solution d’acide<br />

acétique, phosphorique ou citrique).<br />

Enfin, les plaques calcifiées contenant souvent de très<br />

nombreux germes peu accessibles aux traitements antibiotiques<br />

ou locaux, il est licite de proposer d’emblée leur destruction par<br />

des résections endoscopiques itératives [4, 7, 8, 11] .<br />

En cas d’atteinte synchrone du haut appareil urinaire, des<br />

irrigations dirigées par néphrostomies à demeure et l’extraction<br />

des plaques par chirurgie percutanée semblent être les traitements<br />

les plus adaptés et les plus rentables [6, 8, 12] .<br />

■ Cystites kystiques et glandulaires<br />

Étiopathogénie<br />

Ce sont des lésions d’ordre dystrophique et métaplasique<br />

développées aux dépens des îlots de von Brunn (amas épithéliaux<br />

inclus dans le chorion muqueux) et favorisées par une<br />

irritation chronique de la muqueuse vésicale (cathétérisme<br />

prolongé, lithiase, infection chronique). Localisée et asymptomatique<br />

la plupart du temps, on en fait le diagnostic lors de<br />

l’endoscopie ou de façon fortuite sur du matériel de résection<br />

vésicale. Elles forment théoriquement deux entités anatomocliniques<br />

distinctes mais sont en fait souvent associées.<br />

Cystite kystique<br />

Cystopathies chroniques 18-220-A-40<br />

Localisée et asymptomatique la plupart du temps, on en fait<br />

le diagnostic lors de l’endoscopie ou de façon fortuite sur du<br />

matériel de résection vésicale. Elle se traduit cystoscopiquement<br />

par la présence de perles translucides visibles sous l’épithélium<br />

ou, dans sa forme proliférative, par des élevures pseudotumorales<br />

et kystiques sur des secteurs en général limités, parfois plus<br />

étendus [13, 14] . Histologiquement, c’est une lésion banale dont<br />

3


18-220-A-40 Cystopathies chroniques<br />

“ À retenir<br />

Schémas thérapeutiques<br />

Cystite incrustante<br />

Instillations de solution de Thomas<br />

C 120 mM de gluconate de sodium + 92 mM d’acide<br />

citrique + 200 mM d’acide malique<br />

C 25 % de solution à diluer dans de l’eau distillée<br />

C mise en place d’une sonde de Foley 22 Ch, deux<br />

voies, à demeure<br />

C instillations en continu à 20 ml/h à 20 cmH 2O<br />

C pendant plusieurs semaines, jusqu’à disparition<br />

radiologique ou endoscopique des plaques<br />

Instillations d’acide citrique<br />

C solution contenant de l’acide citrique monohydraté,<br />

de l’oxyde de magnésium et du carbonate de<br />

sodium<br />

C à diluer dans 1 l d’eau distillée<br />

C irrigation par une sonde de Foley, sur 1 h, à répéter<br />

pendant plusieurs jours<br />

Cystite glandulaire : instillations d’héparine de bas<br />

poids moléculaire<br />

C 10 000 UI d’héparine de bas poids moléculaire dans<br />

50 ml d’héparine<br />

C à instiller en 20 min<br />

C instillation par une sonde de Foley 22 Ch, retirée<br />

après<br />

C tous les jours pendant 8à15j<br />

Amylose vésicale : instillations de DMSO<br />

C instillation de 25 ml de diméthylsulfoxyde + 25 ml<br />

d’eau stérile<br />

C par une sonde vésicale 22 Ch<br />

C à vessie vide<br />

C en1h<br />

C 1 fois par semaine pendant 8à10semaines<br />

il faut souligner l’atteinte intramuqueuse exclusive. On observe<br />

dans le chorion superficiel, et en cas de forme floride, dans le<br />

chorion profond, une prolifération d’îlots de von Brunn kystisés<br />

en leur centre (Fig. 3A). Le diagnostic différentiel peut se poser<br />

avec la variante en « nids » et la variante microkystique du<br />

carcinome urothélial. La cystite kystique n’est pas une lésion<br />

précancéreuse et peut s’accompagner de cystite glandulaire. Le<br />

traitement consiste tout simplement à supprimer le facteur<br />

causal irritatif.<br />

Cystite glandulaire ou métaplasie<br />

glandulaire<br />

Il s’agit de la réponse métaplasique de l’épithélium transitionnel<br />

en réaction à une irritation chronique qui touche<br />

surtout l’homme d’une cinquantaine d’années [13, 15, 16] . Elle est<br />

retrouvée dans 75-80 % des cas de lipomatose pelvienne [17] .<br />

Deux formes histologiques ont été rapportées : la forme<br />

« glandulaire » typique, simple flexion mucineuse de l’épithélium,<br />

et la forme « intestinale », caractérisée par la présence de<br />

glandes de type colique souvent mucipares, formées de structures<br />

tubulaires bordées de cellules unistratifiées [13, 15, 16] . Les<br />

tubules s’ouvrent dans la lumière et sont en continuité avec<br />

l’urothélium qui peut rester normal. Ils peuvent proliférer en<br />

volumineux amas dans la forme pseudotumorale (ou floride) [18,<br />

19] (Fig. 3B, C).<br />

La plupart du temps, les cystites glandulaires sont strictement<br />

asymptomatiques [13, 15, 16] . Deux modes de présentation ont été<br />

rapportés dans les rares cas de formes symptomatiques : irritatif<br />

Figure 3. Cystite kystique et glandulaire.<br />

A. Nombreux îlots de von Brunn kystisés siégeant dans le chorion sous un<br />

urothélium normal.<br />

B. Cystite glandulaire : prolifération de tubes siégeant dans le chorion<br />

superficiel et bordés de cellules en métaplasie colique.<br />

C. Grappes d’îlots de von Brunn et métaplasie intestinale avec sécrétion de<br />

mucus dans la lumière vésicale.<br />

(dysurie, douleur sus-pubienne, pollakiurie) ou hématurique.<br />

L’imagerie est peu contributive en dehors de la forme floride et<br />

elle doit surtout rechercher une lipomatose pelvienne associée<br />

[17, 18] . En endoscopie, les lésions, grosses bulles œdématiées<br />

d’aspect pseudotumoral, prédominent au niveau du trigone.<br />

4 Urologie


Toutefois, seule l’analyse histologique réalisée à partir des<br />

biopsies de ces lésions permet d’apporter une certitude<br />

diagnostique.<br />

La suppression de l’agent causal est, là encore, fondamentale.<br />

Des instillations endovésicales de diméthylsulfoxyde (DMSO),<br />

d’hydrocortisone ou d’héparine de bas poids moléculaire ont été<br />

essayées. Dans les formes symptomatiques, une résection<br />

endoscopique des lésions ou même un geste chirurgical plus<br />

invasif (réimplantation, cystectomie) semble nécessaire en cas<br />

d’envahissement des méats urétéraux ou de symptômes irritatifs<br />

handicapants [20] .<br />

L’évolution de la cystite glandulaire est controversée. Longtemps<br />

considérée comme une lésion précancéreuse, une<br />

surveillance endoscopique annuelle a souvent été recommandée<br />

[15] . En réalité, des études plus récentes n’ont pas démontré<br />

une augmentation du risque d’adénocarcinome vésical chez les<br />

patients présentant des lésions de cystite glandulaire, ce qui a<br />

remis en cause l’intérêt d’une surveillance endoscopique<br />

rapprochée et prolongée [14] .<br />

“ Point fort<br />

Cystite kystique et glandulaire<br />

Il s’agit de métaplasies des îlots de von Brunn liées à une<br />

irritation chronique de la muqueuse vésicale. Souvent<br />

asymptomatiques, elles sont retrouvées en endoscopie<br />

sous forme de perles ou de bulles parfois pseudotumorales<br />

localisées principalement au trigone. Le traitement<br />

consiste soit en des instillations endovésicales d’héparine<br />

ou de DMSO, soit en une résection chirurgicale en cas de<br />

complications.<br />

■ Cystite polypoïde<br />

Étiopathogénie<br />

Ce n’est pas une cystite à proprement parler mais une<br />

réaction inflammatoire pseudotumorale de la muqueuse vésicale,<br />

avec deux facteurs étiologiques principaux : les cathétérismes<br />

vésicaux à demeure et les inflammations et fistules<br />

digestives [21-23] .<br />

Clinique<br />

Elle se manifeste principalement par des signes irritatifs,<br />

parfois accompagnés d’hématurie. Des épisodes de pneumaturie<br />

et/ou de fécalurie sont possibles en cas de fistule.<br />

Imagerie<br />

Les principaux examens d’imagerie sont contributifs quand ils<br />

permettent de diagnostiquer la cause digestive responsable des<br />

lésions de cystite. Ils sont parfois trompeurs en faisant suspecter<br />

à tort le diagnostic de carcinome urothélial quand ils ne<br />

montrent qu’un épaississement de la paroi vésicale, des images<br />

lacunaires et un retentissement sur le haut appareil.<br />

Endoscopie et histologie<br />

La cystoscopie est aussi parfois trompeuse, retrouvant des<br />

lésions lisses, polypoïdes, à base large, translucides pouvant<br />

évoquer une néoplasie [21-23] . Le diagnostic est histologique et il<br />

élimine l’existence d’un carcinome. Il met en évidence, la<br />

plupart du temps, de gros plis de la muqueuse vésicale associés<br />

à une inflammation et un œdème du chorion parfois associé à<br />

une hyperplasie épithéliale (Fig. 4).<br />

Urologie<br />

Figure 4. Cystite polypoïde. Plis de la muqueuse vésicale.<br />

A. Vue d’ensemble.<br />

B. Détail d’un pli.<br />

Traitement<br />

En raison du risque de complications sous forme de métaplasie<br />

précancéreuse, un traitement est nécessaire. Là encore, il est<br />

licite d’éradiquer l’agent causal, en supprimant notamment le<br />

cathétérisme ou en traitant la cause digestive [21-23] .<br />

■ Endométriose vésicale<br />

Épidémiologie<br />

Cystopathies chroniques 18-220-A-40<br />

L’endométriose est une affection de la femme en période<br />

d’activité génitale et se définit par la présence de tissu endométrial<br />

actif, en situation extra-utérine et ectopique. L’atteinte de<br />

l’appareil urinaire est rare ; elle est rapportée dans 1%à5%<br />

des cas d’endométriose. L’endométriose urinaire concerne la<br />

vessie (85 % des cas) mais peut aussi concerner la voie excrétrice<br />

haute. L’endométriose urinaire peut survenir de novo sans<br />

contexte d’endométriose connu [24-26] .<br />

5


.<br />

.<br />

18-220-A-40 Cystopathies chroniques<br />

“ Point fort<br />

Cystite polypoïde<br />

Réaction inflammatoire à un cathétérisme vésical<br />

prolongé ou à une fistule digestive, ces lésions sont<br />

souvent confondues avec celles d’un carcinome urothélial.<br />

Le diagnostic est confirmé par l’examen anatomopathologique<br />

des lésions polypoïdes. Le traitement est<br />

celui de l’agent causal.<br />

Étiologie<br />

L’étiopathogénie de la maladie est relativement floue à ce<br />

jour mais plusieurs théories ont été proposées. D’aucuns<br />

plaident pour l’existence de reliquats mullériens péritonéaux,<br />

d’autres pour une reflux utérotubaire de cellules endométriales,<br />

d’autres encore pour une diffusion de ces cellules jusqu’au<br />

péritoine, via les voies lymphatiques.<br />

Clinique<br />

L’atteinte de la vessie peut être asymptomatique ou se<br />

manifester, surtout en période cataméniale, par une douleur suspubienne,<br />

une dysurie, une urgenturie ou une hématurie<br />

macroscopique [24] .<br />

Imagerie<br />

Les examens radiologiques sont très utiles au diagnostic,<br />

surtout l’imagerie par résonance magnétique (IRM) qui permet<br />

de mettre en évidence des lésions hétérogènes (isoT2 avec des<br />

spots hyperintenses en T1) et de faire le bilan de la maladie [25] .<br />

L’IRM peut préciser le degré d’infiltration de la musculeuse<br />

vésicale à l’aide de l’injection de gadolinium. Les complications<br />

sur le haut appareil, par compression extrinsèque ou atteinte<br />

intrinsèque de la lumière urétérale sont rares et le plus souvent<br />

unilatérales. L’IRM permet de surcroît de préciser les autres<br />

localisations endométriosiques : ovaires, ligaments utérosacrés,<br />

étage postérieur, etc. (Fig. 5).<br />

“ Point fort<br />

Endométriose vésicale<br />

Maladie rare révélée par des symptômes douloureux et<br />

irritatifs qui se manifestent surtout pendant les règles.<br />

L’IRM oriente le diagnostic qui est confirmé par la<br />

visualisation de lésions œdématiées bleutées en<br />

cystoscopie et la présence d’épithélium mullérien en<br />

histologie. Le traitement est soit médical (agoniste de la<br />

LHRH), soit au mieux chirurgical avec exérèse complète<br />

des lésions.<br />

Endoscopie et histologie<br />

La cystoscopie, à réaliser de préférence en période menstruelle<br />

pour augmenter la sensibilité, reste indispensable au diagnostic<br />

en montrant des lésions prédominant au dôme et au trigone,<br />

bleu-violet, entourées d’œdème. Les biopsies de ces lésions<br />

confirment le diagnostic en montrant la présence de plusieurs<br />

nodules disséminés dans toute la paroi vésicale (chorion et<br />

muscle détrusor). Le plus souvent ces nodules sont composés de<br />

tubes endométriaux cernés de chorion cytogène.<br />

On rapproche de ces lésions d’endométriose typiques l’endocervicose<br />

et l’endosalpingiose où le chorion cytogène est absent<br />

et pour lesquelles il n’y a pas de contexte d’endométriose. Ces<br />

lésions sont regroupées sous le terme de mullérianose [27] .<br />

Traitement<br />

Deux possibilités thérapeutiques sont envisageables. D’une<br />

part, le traitement médical (agoniste de la luteinizing hormonereleasing<br />

hormone [LH-RH]), qui est proposé aux femmes peu<br />

symptomatiques, proches de la ménopause (qui permet parfois<br />

une régression spontanée des lésions) ou avec un désir de<br />

grossesse, mais qui est peu satisfaisant, en raison de ses complications<br />

et du risque de récidive estimé à plus de 50 % [26, 28] .<br />

Ainsi, l’exérèse chirurgicale la plus complète possible des lésions<br />

(cystectomie partielle ou totale avec néovessie), pouvant être<br />

réalisée par cœlioscopie [29] , semble être le traitement le plus à<br />

même de guérir les symptômes et d’éviter les récidives [28] .<br />

La résection endoscopique n’est pas recommandée parce<br />

qu’elle ne permet pas d’exérèse complète et est à risque de<br />

perforation [28, 30, 31] .<br />

■ Malakoplakie<br />

Étiopathogénie<br />

La malakoplakie est une maladie inflammatoire granulomateuse<br />

ubiquitaire qui touche dans 50 %à70%descasl’appareil<br />

urinaire et peut atteindre l’appareil digestif, le rétropéritoine et<br />

plus rarement la peau, les poumons et les os [32, 33] . Il s’agit<br />

d’une maladie touchant principalement les patients immunodéprimés<br />

(transplantés, atteints d’un cancer, d’une hémopathie<br />

ou du syndrome de l’immunodéficience acquise [sida]). Elle<br />

touche l’adulte, avec un ratio de quatre femmes pour un<br />

homme. La malakoplakie correspond à une accumulation de<br />

macrophages (cellules de von Hansemann). Ceux-ci présentent<br />

un déficit acquis de la phagocytose lysosomiale qui diminue<br />

leur capacité à digérer les bactéries, qui sont alors stockées dans<br />

les lysosomes sous forme de débris formant des petits corps se<br />

surchargeant en fer et en calcium (corps de Michaelis-Gutman).<br />

Le germe mis en cause est Escherichia coli, plus souvent que<br />

Proteus mirabilis et Klebsiella oxytoca [34] .<br />

Clinique<br />

Elle se manifeste par une hématurie, des symptômes irritatifs<br />

(urgenturie, impériosités, dysurie), des brûlures mictionnelles, et<br />

plus rarement en cas d’atteinte du haut appareil par des<br />

douleurs lombaires ou des symptômes d’insuffisance rénale liée<br />

à une obstruction urétérale.<br />

Examens complémentaires<br />

L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) retrouve une<br />

hématurie associée à une protéinurie. L’imagerie (échographie)<br />

permet parfois de mettre en évidence une masse vésicale<br />

pseudotumorale et de dépister les atteintes rénales.<br />

Endoscopie et histologie<br />

La cystoscopie retrouve des plaques jaune-marron, multiples<br />

et ombiliquées et des nodules coalescents pseudotumoraux.<br />

L’histologie fait le diagnostic en retrouvant un granulome<br />

inflammatoire richement macrophagique dans le chorion,<br />

pouvant se propager dans le muscle détrusor et dans toute la<br />

paroi. On identifie ces macrophages comme des cellules de von<br />

Hansemann contenant les corps sidérocalcaires de Michaelis-<br />

Gutman (colorations acide périodique Schiff, de Perls et de von<br />

Kossa positives) [33] (Fig. 6).<br />

6 Urologie


Figure 5. Endométriose vésicale et urétérale bilatérale chez une jeune femme.<br />

A. Coupe axiale en séquence T2 montrant une lésion d’endométriose de l’uretère pelvien et de son trajet intravésical (flèche blanche) associée à une lésion du<br />

cul-de-sac de Douglas (flèche noire). Il existe également un endométriome de l’ovaire gauche (tête de flèche).<br />

B. Une coupe axiale T2 met en évidence une dilatation bilatérale des uretères (flèches) liée à une atteinte par l’endométriose des uretères pelviens et de la vessie.<br />

Il existe aussi de l’endométriose au niveau des deux ovaires (tête de flèche).<br />

C. Uro-imagerie par résonance magnétique : hydronéphrose bilatérale avec rétrécissement distal des uretères au niveau vésical (flèches).<br />

Traitement<br />

Le traitement consiste en la prise en charge de l’immunodépression<br />

associée à une désinfection des urines, avec une grande<br />

efficacité des fluoroquinolones et du Bactrim ® . L’adjonction de<br />

cholinergiques (bétanéchol 30 à 100 mg/j en trois prises, etc.),<br />

qui augmenteraient le taux de guanosine monophosphate<br />

“ Point fort<br />

Malakoplakie<br />

Maladie inflammatoire granulomateuse touchant l’adulte<br />

immunodéprimé, elle se manifeste sous forme de<br />

symptômes irritatifs. La cystoscopie retrouve des plaques<br />

jaune-marron et l’histologie met en évidence les deux<br />

entités spécifiques de la maladie : les cellules de von<br />

Hansemann qui contiennent les corps de Michaelis-<br />

Gutman. La guérison passe par la prise en charge de<br />

l’immunodépression et des antibiotiques actifs sur<br />

Escherichia coli, principal germe impliqué.<br />

Urologie<br />

cyclique (GMPc) impliqué dans la phagocytose lysosomiale,<br />

peut aider au contrôle de la maladie [33] . Les atteintes rénales ou<br />

testiculaires sont traitées par chirurgie d’exérèse tout comme les<br />

atteintes vésicales sévères ou résistantes au traitement médical<br />

[33, 35] .<br />

■ Amylose vésicale<br />

Étiopathogénie<br />

L’amylose est une maladie de surcharge, définie par l’accumulation<br />

dans les tissus d’une glycoprotéine amyloïde. On<br />

distingue deux types d’amylose vésicale : l’amylose primitive<br />

localisée et l’amylose vésicale associée à une maladie amyloïde<br />

généralisée réactionnelle ou héréditaire [36-40] .<br />

Amylose vésicale primitive<br />

Cystopathies chroniques 18-220-A-40<br />

Il s’agit d’une maladie rare dont l’étiologie demeure mal<br />

élucidée. Certains auteurs évoquent des antécédents d’infections<br />

urinaires récidivantes ou persistantes. En effet, la présence d’une<br />

inflammation chronique pourrait favoriser l’émergence d’un<br />

clone de plasmocytes caractérisé par la sécrétion d’une protéine<br />

7


18-220-A-40 Cystopathies chroniques<br />

Figure 6. Malakoplakie.<br />

A. Granulome macrophagique dense du chorion.<br />

B. Détail des cellules macrophagiques de von Hansemann contenant des corps de Michaelis-Gutman.<br />

amyloïde [41, 42] . Elle se caractérise par des dépôts extracellulaires<br />

glycoprotéiques composés d’une glycoprotéine P et d’une<br />

fraction protéique AL dérivée des chaînes légères lambda ou<br />

kappa [36-40] . Elle touche autant l’homme que la femme,<br />

d’environ 50 ans, et se manifeste le plus souvent par une<br />

hématurie macroscopique, parfois par une hématurie microscopique<br />

ou des symptômes irritatifs [41, 42] .<br />

Les examens radiologiques peuvent montrer une lacune<br />

vésicale ou une simple irrégularité de la paroi, parfois une<br />

urétérohydronéphrose unilatérale. La topographie des lésions<br />

vésicales révélées par l’endoscopie est variable, fréquemment<br />

multiple mais rarement plurifocale. Il s’agit de lésions polypoïdes<br />

jaunâtres, à larges bases serties d’œdème, souvent difficiles<br />

à différencier de lésions carcinomateuses. Elles se situent au<br />

dôme, sur le trigone ou les parois latéropostérieures.<br />

Le diagnostic de certitude repose sur l’analyse histologique<br />

qui montre des dépôts extracellulaires éosinophiles dans la sousmuqueuse,<br />

la musculeuse et les parois vasculaires, spécifiquement<br />

colorés par le rouge Congo (Fig. 7). L’immunohistochimie<br />

permet de définir le type de protéine impliqué (AL ou AA). Pour<br />

parler d’amylose primitive localisée pseudotumorale, il convient<br />

d’éliminer toute atteinte systémique associée.<br />

Plusieurs attitudes thérapeutiques ont été proposées. Pour des<br />

petites lésions, l’électrocoagulation ou la destruction laser<br />

semble appropriée. En cas de lésions plus importantes, on peut<br />

être amené à effectuer une résection transurétrale, une cystectomie<br />

partielle, voire totale. Les instillations endovésicales de<br />

DMSO ou la colchicine per os n’ont pas fait la preuve de leur<br />

efficacité.<br />

Son évolution est marquée par un risque élevé de récidive<br />

locale, sans évidence de transformation maligne [40] . Par<br />

conséquent, elle nécessite une surveillance cystoscopique<br />

régulière [43] .<br />

Amylose vésicale secondaire<br />

Elle se caractérise par la présence d’une protéine amyloïde de<br />

type AA et rentre dans le cadre soit d’amylose héréditaire, soit<br />

d’amylose systémique réactionnelle à une maladie inflammatoire<br />

chronique (spondylarthrite ankylosante, polyarthrite<br />

rhumatoïde, maladies inflammatoires cryptogénétiques de<br />

Figure 7. Amylose. Dépôts de substance amyloïde dans le chorion<br />

vésical (amylose AL pseudotumorale).<br />

l’intestin type maladie de Crohn, Gougerot-Sjögren). Elle se<br />

différencie de la forme primitive par des hématuries plus<br />

abondantes, parfois cataclysmiques, et par un plus grand<br />

nombre d’atteintes des orifices urétéraux et de complications sur<br />

le haut appareil [44] .<br />

■ Cystite chronique à l’Endoxan ®<br />

Surtout décrite dans sa forme aiguë, dans le cadre des<br />

hématuries macroscopiques abondantes qu’elle peut déclencher,<br />

la cystite à l’Endoxan ® (cyclophosphamide) existe aussi sous<br />

une forme chronique. Elle est la conséquence directe d’un<br />

traitement prolongé par cyclophosphamide per os [45-49] . La<br />

plupart des cas surviennent au bout d’au moins 1 an de<br />

traitement [50] , mais certaines formes ont été décrites plus<br />

précocement (16 semaines) [51] .<br />

Le cyclophosphamide est hydroxylé dans le foie et transformé<br />

en métabolites actifs et en acroléine, métabolite cytotoxique.<br />

Les lésions de cystite sont dues à l’accumulation de ce métabolite<br />

dans la vessie [52] .<br />

8 Urologie


Tableau 1.<br />

Étiologie et agent causal des cystopathies chroniques.<br />

Histologie Traitement et évolution<br />

Urologie<br />

Étiologie Clinique Examens complémentaires<br />

et endoscopie<br />

Épidémiologie<br />

et terrain<br />

Suppression allergène++<br />

Anti-inflammatoires<br />

Chirurgie en dernier recours<br />

Infiltration éosinophile<br />

et œdème<br />

Hyperéosinophilie<br />

Lésions érythémateuses<br />

et ulcérées<br />

Cystite à éosinophiles Rare Immunoallergie Cystite hématurique,<br />

dysurie, douleur<br />

Récidive++<br />

Antibiothérapie :<br />

glycopeptides++<br />

Trois zones :<br />

- superficielle : nécrose<br />

- transitionnelle : colonies<br />

bactériennes et thrombose<br />

ECBU sur milieu sélectif<br />

TDM : calcifications<br />

Cystoscopie : ulcérations et<br />

calcifications<br />

Corynebacterium urealyticum Douleur, dysurie, mucus<br />

et débris calcaires<br />

Cystite incrustante Déficit immunitaire<br />

Geste urologique préalable<br />

+<br />

Acidification des urines<br />

+<br />

Résection des plaques<br />

- profonde : normale<br />

Suppression facteur irritatif<br />

Cavitation centrale des îlots<br />

de von Brunn<br />

Asymptomatique Cystoscopie : perles<br />

translucides ou kystes<br />

Si floride : hématurie ou Cystoscopie : bulles<br />

symptômes irritatifs œdématiées<br />

pseudotumorales sur trigone<br />

Irritation chronique de la<br />

muqueuse vésicale<br />

Associée à la lipomatose<br />

pelvienne<br />

Cystite kystique et<br />

glandulaire<br />

± RTUV ou traitement<br />

chirurgical<br />

Métaplasie glandulaire<br />

± intestinale<br />

Précancéreuse ?<br />

Traitement de l’agent causal<br />

Expansions papillaires<br />

muqueuses et inflammation<br />

du chorion<br />

TDM<br />

Cystoscopie : lésions<br />

polypoïdes translucides<br />

Symptômes irritatifs<br />

Pneumaturie<br />

Cystite polypoïde - Cathétérisme à demeure<br />

Inflammations digestives<br />

Fécalurie<br />

Hormonothérapie ou<br />

chirurgie d’exérèse<br />

Kystes bordés d’épithélium<br />

mullérien<br />

IRM : isoT2, hyperT1<br />

Cystoscopie : nodules<br />

bleutés, œdème<br />

Douleur, dysurie, hématurie<br />

cycliques<br />

Métaplasie ?<br />

Reflux utérotubaire ?<br />

Endométriose vésicale Femme en période d’activité<br />

génitale<br />

Récidives+++<br />

Traitement<br />

immunodépression<br />

Désinfection urines :<br />

fluoroquinolones++<br />

Cellules de von Hansemann<br />

et corps de Michaelis-<br />

Gutman<br />

Échographie/TDM : masse<br />

pseudotumorale<br />

Cystoscopie : plaques marron<br />

et nodules<br />

Hématurie<br />

Symptômes irritatifs<br />

Malakoplakie Immunodépression Déficit acquis de la<br />

phagocytose lysosomiale<br />

Escherichia coli<br />

Électrocoagulation<br />

Laser<br />

Dépôts extracellulaires rouge<br />

Congo+<br />

Hématurie TDM : éliminer amylose<br />

systémique<br />

Cystoscopie : lésions<br />

multiples polypoïdes<br />

jaunâtres<br />

Accumulation glycoprotéine<br />

amyloïde<br />

Infections urinaires<br />

chroniques<br />

Amylose vésicale primitive<br />

secondaire<br />

Chirurgie<br />

Récidives++<br />

Maladies de système<br />

Héréditaire<br />

Nécrose Instillation AgNO3 Vasopressine<br />

Embolisation<br />

Chirurgie<br />

Toxicité Hématurie Cystoscopie :<br />

ulcérations/nécroses diffuses<br />

Cyclophosphamide per os<br />

au long cours<br />

Cystite chronique<br />

à l’Endoxan ®<br />

Cystopathies chroniques 18-220-A-40<br />

ECBU : examen cytobactériologique des urines ; TDM : tomodensitométrie ; RTUV : résection trans-urétrale de la vessie ; IRM : imagerie par résonance magnétique.<br />

9


.<br />

18-220-A-40 Cystopathies chroniques<br />

Les symptômes douloureux sont en général masqués par une<br />

hématurie macroscopique parfois cataclysmique.<br />

“ Point fort<br />

Amylose<br />

Maladie de surcharge primitive ou secondaire, elle se<br />

caractérise par des dépôts de protéines AA ou Al qui sont<br />

responsables d’hématurie ou de signes irritatifs. Le<br />

diagnostic est histologique avec mise en évidence des<br />

dépôts glycoprotéinés par la coloration au rouge Congo.<br />

Le traitement est celui de la cause s’il y en a une, associé le<br />

plus souvent à un geste de résection chirurgicale. La<br />

surveillance doit être prolongée car les récidives sont<br />

fréquentes.<br />

La cystoscopie, lorsqu’elle est pratiquée, montre des ulcérations<br />

hémorragiques et des nécroses diffuses de la muqueuse<br />

vésicale, confirmées par l’histologie.<br />

Différents traitements ont été proposés : instillations endovésicales<br />

de nitrate d’argent, de formol, oxygénothérapie hyperbare,<br />

vasopressine intraveineuse ou embolisation artérielle, mais<br />

le recours à une chirurgie d’hémostase est souvent nécessaire [45-<br />

49] . Un soin tout particulier doit être apporté à la prévention de<br />

ces complications urinaires en assurant une hydratation quotidienne<br />

efficace (3-4 l) ainsi qu’une perfusion d’Uromitexan ®<br />

(mesna), qui encadre la perfusion d’Endoxan ® et dont la dose<br />

est à adapter à celle du cyclophosphamide.<br />

■ Conclusion<br />

Les cystopathies chroniques sont pour la plupart des maladies<br />

chroniques sous-diagnostiquées, d’origine inflammatoire ou<br />

infectieuse. Leur diagnostic passe en premier lieu par un<br />

interrogatoire minutieux à la recherche de facteurs déclenchants<br />

: sondage vésical, terrain immunoallergique, infections<br />

itératives. La multiplication des examens d’imagerie n’est pas<br />

utile en raison de leur faible sensibilité et la cystoscopie doit<br />

être rapidement réalisée pour avancer dans la prise en charge<br />

diagnostique et thérapeutique qui doit être adaptée à chaque<br />

étiologie et agent causal (Tableau 1). Il est important par ailleurs<br />

de garder à l’esprit et d’éliminer les diagnostics différentiels de<br />

ces cystites chroniques que sont les néoplasies, les cystites<br />

radique et interstitielle qui font l’objet de chapitres à part.<br />

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Pour en savoir plus<br />

S.-J. Drouin.<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, 4, place Jussieu, 75005 Paris, France.<br />

A. Vieillefond.<br />

Service d’anatomopathologie, Hôpital Cochin, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France.<br />

Faculté de médecine René Descartes, Université Paris V, 12, rue de l’École-de-Médecine Paris, France.<br />

E. Chartier-Kastler.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, 4, place Jussieu, 75005 Paris, France.<br />

Wein AJ, Kavoussi LR, Novick AC, Partin AW, Peters CA. Infections of the<br />

urinary tract. In: Campbell-Walsh Urology. Paris: Elsevier; 2006.<br />

Traité EMC. Radiodiagnostic-Urologie-Gynécologie. Olivier Hélénon et al.<br />

www.em-consulte.com/.<br />

Godeau P, Herson S, Piette JC. Traité de médecine. Paris: Flammarion; 2004.<br />

Site de l’Association française d’urologie: www.urofrance.org/.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Drouin S.-J., Vieillefond A., Chartier-Kastler E., Rouprêt M. Cystopathies chroniques. EMC (Elsevier Masson<br />

SAS, Paris), Urologie, 18-220-A-40, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Cystopathies chroniques 18-220-A-40<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

11


Plan<br />

Diagnostic, facteurs de risque<br />

et traitement de l’insuffisance rénale<br />

chronique de l’adulte<br />

T. Krummel, D. Bazin, A.-L. Faller, T. Hannedouche<br />

Le diagnostic d’insuffisance rénale chronique (IRC) repose, en accord avec les recommandations<br />

internationales, sur la réduction permanente du débit de filtration glomérulaire (DFG) estimé en dessous<br />

de 60 ml/min. Quelle que soit la maladie causale initiale, l’IRC progresse sous l’influence de deux facteurs<br />

principaux : hypertension artérielle et protéinurie. La stratégie thérapeutique pour ralentir la progression<br />

de l’IRC repose sur la réduction de la pression artérielle et de la protéinurie à l’aide de bloqueurs<br />

pharmacologiques du système rénine-angiotensine (inhibiteurs de l’enzyme de conversion [IEC] ou<br />

antagonistes des récepteurs d’angiotensine II [ARAII]). Les cibles tensionnelles proposées sont modifiées à<br />

135/85 mmHg pour tenir compte du risque de surmortalité chez les patients vasculaires (diabétiques)<br />

lorsque la pression artérielle systolique s’abaisse en dessous de 120 mmHg. Les bloqueurs du système<br />

rénine-angiotensine doivent être utilisés à tous les stades de l’IRC, y compris au stade 5 et après le début<br />

de l’épuration extrarénale pour préserver la diurèse résiduelle. La mesure la plus importante pour<br />

potentialiser l’action des IEC est la réduction du sodium alimentaire. En revanche, le bénéfice lié à la<br />

restriction protidique apparaît plus marginal. L’IRC est associée à un sur-risque de morbimortalité<br />

cardiovasculaire par des mécanismes mal élucidés. Ce haut risque justifie le recours systématique à des<br />

vasculoprotecteurs, statines en particulier, et peut-être aux antiagrégants. Aux stades plus avancés<br />

(stades 4 et 5), des complications liées à l’IRC nécessitent des mesures thérapeutiques complémentaires,<br />

correction de l’anémie et des anomalies phosphocalciques. Récemment, la correction de l’acidose<br />

métabolique a montré des bénéfices spectaculaires sur la progression. Les éléments de la surveillance sont<br />

maintenant bien précisés par les recommandations, ainsi que par le guide des affections de longue durée<br />

(ALD). L’indication de l’épuration extrarénale reste encore mal appréciée. Le démarrage en urgence ou<br />

chez un patient symptomatique est toujours un facteur pronostique défavorable. Chez les patients<br />

strictement asymptomatiques, la décision est individualisée et dépend principalement de la tolérance<br />

cardiaque et nutritionnelle.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Insuffisance rénale chronique ; Diagnostic ; Facteurs de progression ; Traitement ; Nutrition ;<br />

Risque cardiovasculaire ; Épuration extrarénale<br />

Diagnostic de l’insuffisance rénale chronique 1<br />

Définition de l’insuffisance rénale chronique 1<br />

Estimation du débit de filtration glomérulaire 2<br />

Dépistage de l’insuffisance rénale 3<br />

Facteurs de risque de progression des maladies rénales 4<br />

Hypertension artérielle 4<br />

Protéinurie 4<br />

Stratégies pour ralentir la progression (néphroprotection) 4<br />

Traitement antihypertenseur 4<br />

Nutrition 7<br />

Prévention du risque cardiovasculaire 8<br />

Hypolipémiants 8<br />

Antiagrégants plaquettaires 8<br />

Acidose 8<br />

Métabolisme phosphocalcique 9<br />

Anémie 10<br />

Surveillance 11<br />

Indication de l’épuration extrarénale 11<br />

Néphrologie<br />

■ Diagnostic de l’insuffisance<br />

rénale chronique<br />

18-060-A-05<br />

Définition de l’insuffisance rénale chronique<br />

La maladie rénale chronique (MRC) ainsi que l’insuffisance<br />

rénale chronique (IRC) ont été récemment définies dans des<br />

recommandations américaines 2003 (Kidney/Dialysis Outcomes<br />

Quality Initiative – K/DOQI 2002) [1] , reprises plus récemment<br />

par les Kidney Disease : improving Global Outcomes (KDIGO)<br />

en 2005 [2] .<br />

Schématiquement, la maladie rénale chronique est définie par<br />

la présence, pendant plus de 3 mois, d’anomalies rénales<br />

biologiques, morphologiques ou histologiques et/ou d’une<br />

insuffisance rénale.<br />

L’insuffisance rénale chronique est définie par un seul<br />

critère : la réduction du débit de filtration glomérulaire (DFG)<br />

inférieur à 60 ml/min pour 1,73 m 2 , persistant pendant 3 mois<br />

ou plus.<br />

Une classification de la MRC en cinq stades de gravité est<br />

ainsi proposée (Tableau 1).<br />

1


18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

Tableau 1.<br />

Classification de la maladie rénale chronique (MRC).<br />

Stades Caractéristiques cliniques<br />

Stade 1 (a) DFGe au-dessus de 90 ml/min pour 1,73 m 2 ; la fonction<br />

rénale est considérée comme normale<br />

Stade 2 (a) DFGe compris entre 89 et 60 ml/min pour 1,73 m 2 ;ce<br />

stade correspond à une fonction rénale légèrement<br />

diminuée ou normale basse<br />

Stade 3 DFGe compris entre 59 et 30 ml/min pour 1,73 m 2<br />

Stade 4 DFGe compris entre 29 et 15 ml/min pour 1,73 m 2<br />

Stade 5 DFGe inférieur à 15 ml/min pour 1,73 m 2 ; c’est le stade<br />

dit « terminal », impliquant le recours à un traitement<br />

substitutif de l’insuffisance rénale<br />

DFGe : débit de filtration glomérulaire estimé.<br />

(a) Pour les stades 1 et 2, on parle de maladie rénale sans insuffisance rénale lorsque<br />

d’autres marqueurs d’atteinte rénale sont présents (protéinurie, anomalies du<br />

sédiment urinaire, modifications morphologiques ou histologiques des reins).<br />

L’organisme international KDIGO a affiné cette classification<br />

en introduisant un postfixe 5D (ou D) pour les patients dialysés<br />

et T (1T à 4T) pour les patients transplantés rénaux [2] .<br />

En 2002 en France, l’Agence nationale d’accréditation et<br />

d’évaluation en santé (ANAES) avait proposé une classification<br />

simplifiée en quatre stades (regroupant les stades 1 et 2) [3] . Sans<br />

revenir sur les arguments contre ou en faveur de ces quatre<br />

stades, la nécessité d’une harmonisation internationale plaide<br />

pour l’utilisation de la classification KDIGO.<br />

Les recommandations britanniques les plus récentes (National<br />

Institute for health and Clinical Experience [NICE], 2008)<br />

officialisent la division du stade 3 en stades 3a (59-45 ml/min<br />

par 1,73 m 2 ) et 3b (44-30 ml/min par 1,73 m 2 ) sur des bases<br />

épidémiologiques et pronostiques : les patients de stade 3a<br />

représentent plus de 90 % des patients avec une réduction du<br />

DFGe, alors que les anomalies métaboliques et l’excès de risque<br />

cardiovasculaire associés à l’IRC n’augmentent significativement<br />

que pour des valeurs de DFGe en deçà de 45 ml/min par<br />

1,73 m 2 [4, 5] .<br />

Ces mêmes recommandations insistent sur la nécessité<br />

d’identifier les patients progresseurs (suffixe P), définis comme<br />

les patients avec une perte de DFGe supérieure à 5 ml/min par<br />

1,73 m 2 sur 1 année ou plus de 10 ml/min par 1,73 m 2 sur<br />

5 ans et de concentrer le suivi néphrologique dans ce sousgroupe<br />

de patients à risque.<br />

La classification en cinq stades fondée sur le DFGe est<br />

conceptuellement importante, car elle permet d’homogénéiser la<br />

description épidémiologique des maladies rénales et des essais<br />

d’intervention et parce qu’elle donne la primauté à l’estimation<br />

de la filtration glomérulaire par la clairance calculée, plutôt qu’à<br />

la créatinine plasmatique isolément, comme dans le passé [6] .<br />

Cependant, un certain nombre de critiques ont été formulées<br />

vis-à-vis du diagnostic et de la classification de la MRC reposant<br />

sur un seul critère biologique [7, 8] :<br />

le seuil de 60 ml/min est quelque peu arbitraire. L’équation<br />

MDRD (Modification of Diet in Renal Disease) a été développée<br />

dans une population de patients en mauvaise santé, dont<br />

la moitié était soumise à une restriction protidique alimentaire.<br />

Elle n’est pas forcément extrapolable à des sujets sains<br />

à fonction rénale normale ou peu altérée (par exemple, la<br />

masse musculaire n’est pas identique à poids égal) ;<br />

l’équation de MDRD et probablement CKD-EPI (Chronic<br />

Kidney Disease-Epidemiology Collaboration) n’est pas encore<br />

assez discriminante au seuil de 60 ml/min. Par exemple, dans<br />

l’étude de Froissart et al., 12 %à14%desindividus en stade<br />

3 (DFG isotopique inférieur à 60 ml/min par 1,73 m 2 )ne<br />

sont pas classés comme tels par les équations (MRDR ou<br />

Cockcroft) [9] . Plus ennuyeux encore, 20 % environ des sujets<br />

en stade 2 (DFG supérieur à 60 ml/min par 1,73 m 2 ) sont<br />

classés en stade 3, donc considérés, à tort, comme insuffisants<br />

rénaux ;<br />

le dosage de la créatinine plasmatique inclus dans toutes les<br />

formules est encore mal standardisé et source d’importantes<br />

variations interlaboratoires ;<br />

un DFGe abaissé isolément pourrait ne pas toujours être<br />

synonyme de MRC (en particulier dans les populations<br />

d’individus à faible apport protidique, chez les sujets âgés si<br />

l’on admet un vieillissement normal du rein). Certains ont<br />

proposé le recours à des graphiques indiquant le DFGe en<br />

percentiles selon l’âge et le sexe de façon analogue aux<br />

courbes de croissance chez l’enfant.<br />

Estimation du débit de filtration<br />

glomérulaire<br />

L’équation de Cockcroft et Gault a été initialement développée<br />

pour estimer la clairance de la créatinine non indexée<br />

(exprimée en ml/min) à partir de la créatinine plasmatique<br />

(Pcr), de l’âge, du sexe et du poids [10] . En raison de l’inclusion<br />

du poids dans le numérateur comme un index de la masse<br />

musculaire, l’équation a tendance à surestimer la clairance de la<br />

créatinine chez les patients ayant une proportion atypique de<br />

masse musculaire (par exemple syndrome œdémateux, surpoids,<br />

obésité). En revanche, l’inclusion directe de l’âge dans le<br />

numérateur a tendance à sous-estimer la clairance de la créatinine<br />

chez les sujets âgés.<br />

L’équation MDRD a été développée à partir des données de<br />

1 628 patients enrôlés dans l’étude MDRD. Plusieurs équations<br />

ont été produites : la première incluait l’urée sanguine, l’albuminémie,<br />

voire la clairance de la créatinine des 24 heures. Ces<br />

équations initiales étaient trop complexes et faisaient intervenir<br />

un trop grand nombre de paramètres habituellement non<br />

mesurés, si bien qu’une équation dite abrégée a été par la suite<br />

proposée à partir de seulement quatre variables : créatinine<br />

plasmatique, âge, sexe, race [11] . La créatinine plasmatique est<br />

exprimée en mg/dl, l’âge en années et la race comme afroaméricain<br />

ou pas. Comme l’origine ethnique n’est habituellement<br />

pas indiquée sur les données transmises au laboratoire,<br />

celui-ci est tenu de fournir les résultats calculés pour les deux<br />

cas de figure (afro-américains ou non).<br />

L’avantage de cette formule par rapport à celle de Cockcroft<br />

est de ne pas tenir compte du poids (puisque le résultat est<br />

d’emblée indexé pour une surface corporelle de 1,73 m 2 )etde<br />

prendre en considération l’origine ethnique. Le désavantage<br />

majeur est lié à l’expression sous forme de puissance fractionnelle,<br />

ce qui impose le recours à un calculateur (disponible sur<br />

smartphones ou Internet).<br />

Plus récemment encore, l’équation a été recalculée pour<br />

prendre en considération un dosage standardisé de la créatinine<br />

plasmatique (calibration isotope dilution mass sprectometry [IDMS]<br />

par rapport à un dosage de la créatinine en spectrométrie<br />

isotopique). Cette calibration aboutit à des valeurs d’environ<br />

5 % inférieures aux valeurs de créatinine plasmatique initialement<br />

incluses dans l’équation [12] . La dernière équation en date<br />

(2006) à partir des unités SI (créatinine plasmatique exprimée<br />

en µmol/l) est la suivante [12] :<br />

DFGe (ml/min par 1,73 m 2 ) = 175 × (créatinine plasmatique<br />

× 0,0113) – 1,154 × âge – 0,203 (× 0,742 si femme) (× 1,210 si le<br />

sujet est afro-américain).<br />

L’expression du DFG systématiquement indexé pour la<br />

surface corporelle dans MDRD a été largement débattue [13] .<br />

L’indexation a surtout un intérêt épidémiologique pour réduire<br />

la dispersion des valeurs dans une population. Pour l’individu,<br />

le DFG mesure une performance réelle d’épuration, par exemple,<br />

celle des médicaments, et non pas la filtration glomérulaire<br />

théorique de cet individu s’il avait une surface corporelle de<br />

1,73 m 2 . L’adaptation posologique des médicaments est actuellement<br />

majoritairement fondée sur la formule de Cockcroft non<br />

indexée.<br />

Pour palier les insuffisances de la formule MDRD, une<br />

nouvelle équation a été proposée (CKD-EPI) établie à partir d’un<br />

pool de données représentatives de la population nordaméricaine<br />

(8 254 participants dans dix études), y compris un<br />

grand nombre d’individus à fonction rénale normale [14] .<br />

CKD-EPI s’avère être à la fois plus précise et exacte que MDRD,<br />

en particulier pour les valeurs « normales » de DFG (supérieures<br />

à 60 et même à 90 ml/min par 1,73 m 2 ) avec un biais<br />

moindre (2,5 versus 5,5 ml/min par 1,73 m 2 pour le MDRD).<br />

2 Néphrologie


Les limitations reconnues de cette équation sont liées au<br />

nombre limité d’individus âgés ou issus de minorités ethniques.<br />

La formule est en fait un ensemble de formules conditionnelles<br />

selon le sexe, l’ethnie, la valeur de créatinine plasmatique<br />

mesurée. Ces formules ne sont pas détaillées ici, mais peuvent<br />

être consultées dans l’article correspondant [14] .<br />

Ces formules sont toutes dépendantes de la mesure de la<br />

créatinine plasmatique. Au cours des dernières années, il est<br />

apparu que les différences de dosage de la créatinine plasmatique<br />

d’un laboratoire à l’autre pouvaient varier parfois de façon<br />

considérable jusqu’à 14 % selon la technique de dosage. L’erreur<br />

de mesure de la créatinine est liée à la présence de substances<br />

chromogènes dans le sang et cette erreur est « fixe » si bien que<br />

l’imprécision sur la mesure et donc sur le calcul du DFGe est<br />

plus importante pour les valeurs normales ou proches de la<br />

normale.<br />

Parmi les différentes techniques analysées, le dosage enzymatique<br />

Roche a semblé donner un des meilleurs résultats par<br />

rapport aux méthodes de référence [5] . La recalibration régulière<br />

par rapport à des étalons de référence (IDMS) représente une<br />

autre alternative performante et moins coûteuse.<br />

“ Point fort<br />

L’estimation du DFG par la formule simplifiée MDRD doit<br />

être préférée à la formule de Cockcroft, avec les<br />

ajustements correspondant à la méthode de dosage de la<br />

créatinine. Il est probable que la formule CKD-EPI<br />

s’imposera dans les prochaines années, mais elle ne fait<br />

pas pour l’instant l’objet de recommandations<br />

internationales et nécessite un dosage calibré IDMS de la<br />

créatinine, celui-ci n’étant pas encore généralisé.<br />

La cystatine C est une protéine basique non glyquée de<br />

13 kD, librement filtrée, entièrement réabsorbée et dégradée<br />

dans le tube proximal : il n’y a pas de clairance urinaire.<br />

La production et donc la concentration sérique ne sont pas<br />

influencées par la masse musculaire à la différence de la<br />

créatinine plasmatique. Cependant, la concentration de cystatine<br />

C est partiellement affectée par l’âge, l’indice de masse<br />

corporelle (IMC), le tabagisme et l’inflammation (C-reactive<br />

protein [CRP]).<br />

L’avantage principal de ce marqueur est lié à son excellente<br />

précision et reproductibilité analytique, mais à un coût 10 à<br />

30 fois celui de la créatinine. La comparaison directe des<br />

performances de ce marqueur avec celles de l’équation de<br />

Cockcroft et du MDRD a donné des résultats contradictoires<br />

chez l’adulte si bien que, dans l’état, il ne peut être recommandé<br />

de substituer ce marqueur à celui de la créatinine pour<br />

l’évaluation de la fonction rénale chez l’adulte [5] .<br />

La mesure directe de la filtration glomérulaire par une<br />

méthode de référence (inuline, iohexol, acide éthylène tétraacétique<br />

[EDTA]) reste utile dans certaines conditions cliniques<br />

particulières, lorsque les équations sont connues pour être<br />

moins exactes (masses musculaires atypiques, hyperfiltration),<br />

ou lorsque la décision thérapeutique nécessite une connaissance<br />

encore plus précise de la filtration glomérulaire (par exemple<br />

posologie des chimiothérapies) ou encore dans le cadre des<br />

investigations cliniques [5] .<br />

Dépistage de l’insuffisance rénale<br />

Le dépistage de l’insuffisance rénale constitue un enjeu de<br />

santé publique en raison, d’une part, de la haute prévalence de<br />

l’insuffisance rénale dans la population générale, en particulier<br />

lorsque l’âge avance et, d’autre part, de son fort pouvoir<br />

prédictif de la mortalité et des événements cardiovasculaires<br />

Néphrologie<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

Tableau 2.<br />

Patients à risque rénal.<br />

Patients à risque rénal chez lesquels une évaluation de la fonction<br />

rénale est recommandée (ANAES 2002)<br />

Patients ayant une anomalie rénale connue : protéinurie, hématurie,<br />

uropathie, lithiase, IU, post-IRA<br />

Patients à risque : diabète, hypertension artérielle, maladie<br />

athéromateuse, néphropathies héréditaires, maladies systémiques,<br />

insuffisance cardiaque<br />

Traitement néphrotoxique potentiel : AINS et COXIB, antiviraux,<br />

lithium, anticalcineurines, chimiothérapies (cisplatine), produits de<br />

contraste iodés<br />

Sujets âgés (75 ans et plus), polymédicamentés (3 médicaments ou plus<br />

sur l’ordonnance) ou traités par des médicaments à élimination rénale<br />

(surdosage)<br />

Certaines anomalies extrarénales : anémie, hypocalcémie<br />

Patients à risque rénal chez lesquels une évaluation de la fonction<br />

rénale est recommandée (NKF/DOQI 2003) (entre parenthèses sont<br />

indiqués les pourcentages estimés de sujets concernés dans la<br />

population générale)<br />

Diabétiques (5-7 % population > 20 ans)<br />

Hypertendus (24 % > population > 18 ans) (a)<br />

Minorités ethniques ou raciales (25 %)<br />

Histoire familiale de néphropathie<br />

Âge 60-70 ans (7,3 %)<br />

Âge ≥ 70 ans (9,2 %)<br />

Traitement par AINS :<br />

– quotidien (5,2 %)<br />

– intermittent (~ 30 %)<br />

ANAES : Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé ; IU : infection<br />

urinaire ; IRA : infection rénale aiguë ; AINS : anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens ; COXIB : inhibiteurs de la COX-2. (a) L’American Heart Association a<br />

récemment étendu ces recommandations à l’ensemble des patients à risque<br />

cardiovasculaire [17] .<br />

(Kaiser Permanente). Pour autant, les recommandations concernant<br />

le dépistage sont très variables d’un pays à l’autre, quand<br />

elles existent.<br />

Ainsi la Société internationale de néphrologie (ISN) recommande<br />

un dépistage « tous azimuts » chez tous les individus<br />

en contact avec le système de santé, de façon analogue au<br />

dosage du cholestérol par exemple [15] . À l’autre extrême, la<br />

British Society of Nephrology (BSN) ne recommande le<br />

dépistage que chez les patients atteints d’hypertension ou de<br />

diabète [16] . Entre les deux, les recommandations françaises<br />

(ANAES 2002) et américaines (National Kidney Fondation/<br />

Disease Outcomes Quality Initiative [NKF/KDOQI] 2003)<br />

proposent un dépistage ciblé dans les populations considérées<br />

comme à risque rénal (Tableau 2) [1, 3, 17] .<br />

Ces recommandations sont jusqu’à présent surtout fondées<br />

sur des consensus d’experts et n’avaient pas fait l’objet d’une<br />

évaluation formelle. Hallan et al. ont rapporté, en fin d’année<br />

2006, l’analyse d’une cohorte importante de 65 604 sujets<br />

norvégiens suivis pendant 8 ans (étude HUNT 2) [18] . Dans cette<br />

étude européenne, la prévalence moyenne de l’insuffisance<br />

rénale, définie par une réduction du DFGe par le MDRD calibré<br />

inférieur à 60 ml/min par 1,73 m 2 , est de 4,7 % avec un<br />

gradient important parallèle à l’âge. Ces auteurs calculent qu’il<br />

faut évaluer 21 individus pour dépister un sujet atteint (nombre<br />

de sujets à « screener » [NNS] = 21). Si le dépistage est restreint<br />

aux individus diabétiques ou hypertendus, comme le suggèrent<br />

certaines recommandations, seuls 44 % des individus atteints<br />

sont dépistés (avec un NNS à 6). Dans cette étude, le meilleur<br />

modèle combinant spécificité et sensibilité est un dépistage ciblé<br />

sur les trois critères suivants : diabète, hypertension artérielle<br />

(HTA) et âge supérieur à 55 ans.<br />

Ces trois critères combinés permettent de dépister 93 % des<br />

sujets atteints (NN à 9).<br />

3


18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

■ Facteurs de risque de progression<br />

des maladies rénales<br />

Chez des patients avec une maladie rénale connue, de<br />

nombreux facteurs de risque de progression ont été identifiés,<br />

dont quelques-uns sont modifiables.<br />

“ Point important<br />

Principaux facteurs de risque de progression des<br />

maladies rénales<br />

Type de la néphropathie (progression plus rapide des<br />

néphropathies glomérulaires et vasculaires)<br />

Fonction rénale altérée au moment du diagnostic<br />

Sévérité de l’hypertension artérielle<br />

Protéinurie abondante<br />

Intensité de l’atteinte tubulo-interstitielle au cours des<br />

maladies glomérulaires<br />

Exposition au tabac<br />

Exposition à des néphrotoxiques, médicamenteux,<br />

industriels ou environnementaux<br />

Facteurs ethniques (progression plus rapide chez les<br />

sujets noirs que caucasiens)<br />

Facteurs génétiques, par exemple : polymorphisme des<br />

différents composants du système rénine-angiotensinealdostérone<br />

(SRA) (effet marginal et controversé)<br />

Sexe (controversé)<br />

L’analyse de l’ensemble de ces facteurs sort du cadre de cette<br />

revue et ne sont donc abordés que les facteurs de risque<br />

modifiables pouvant faire l’objet d’un impact thérapeutique :<br />

HTA et protéinurie.<br />

Hypertension artérielle<br />

L’hypertension artérielle est présente chez la majorité des<br />

patients avec une insuffisance rénale chronique. Les données de<br />

la cohorte initiale de MDRD ont démontré que l’hypertension<br />

était présente chez 65 %à75%despatients avec une filtration<br />

glomérulaire de 60 à 80 ml/min [19] . L’hypertension est un<br />

facteur de risque réversible de progression des maladies rénales.<br />

Protéinurie<br />

Le degré de protéinurie est l’un des prédicteurs les plus<br />

importants de la progression des maladies rénales de même que<br />

la réponse au traitement antiprotéinurique dans pratiquement<br />

toutes les études concernant les maladies rénales chroniques [20,<br />

21] . La relation entre le risque de progression et le niveau de<br />

protéinurie est globalement « dose-dépendante ». Le degré de<br />

protéinurie est également un prédicteur de la réponse au<br />

traitement. Par exemple, dans l’étude MDRD, les patients les<br />

mieux répondeurs à la baisse intensive de la pression artérielle<br />

à 92 mmHg de pression artérielle moyenne étaient ceux excrétant<br />

plus de 3 g/24 heures de protéinurie [19] .<br />

De plus, le bénéfice sur le ralentissement de la progression<br />

dépend directement de la réduction de la protéinurie sous<br />

intervention et plus particulièrement de la protéinurie résiduelle<br />

sous traitement (REIN [Ramipril Efficacity In Nephropathy),<br />

RENAAL [The Reduction in Enpoint with the Angiotensin<br />

Antagonist Losartan) [22, 23] . Cela illustre également la relation<br />

causale qui existe entre la protéinurie et la progression.<br />

Au niveau de la population générale, les facteurs prédictifs de<br />

survenue d’une insuffisance rénale terminale ont été étudiés<br />

dans la cohorte Kaiser Permanente [24] . Dans cette étude,<br />

177 570 individus ont été examinés et l’apparition d’une<br />

insuffisance rénale terminale (IRT) a été colligée sur une période<br />

de 35 ans (842 cas). Cette étude confirme l’importance des<br />

facteurs de risque établis : sexe masculin, âge avancé, protéinurie,<br />

diabète, HTA, IMC élevé, créatinine plasmatique basale<br />

élevée, ethnie afro-américaine, niveau éducatif bas. Les deux<br />

facteurs les plus importants sont la protéinurie et l’excès<br />

pondéral avec une relation dose-effet. Plusieurs facteurs indépendants<br />

plus originaux sont mis en évidence dans cette étude :<br />

hémoglobinémie basse, hyperuricémie, symptomatologie de<br />

nycturie, antécédents familiaux de maladie rénale.<br />

“ Point important<br />

Facteurs de risque indépendants d’insuffisance<br />

rénale terminale (par ordre d’importance, avec le<br />

risque relatif) (d’après Hsu et al.) [24]<br />

Protéinurie (× 2,7 à 7,9)<br />

Surpoids et obésité (× 1,65 à 4,39)<br />

Créatinine basale (× 1,24 à 4,25)<br />

Ethnie non blanche (× 1,83 à 3,04)<br />

Hypertension (× 1,72 à 2,94)<br />

Diabète (× 2,53)<br />

Âge (× 1,51 à 2,23)<br />

Hyperuricémie (× 1,47 à 2,14)<br />

Niveau éducatif (× 1,45 à 1,56)<br />

Anémie (× 1,27 à 1,33)<br />

■ Stratégies pour ralentir<br />

la progression (néphroprotection)<br />

Globalement, les objectifs de la prise en charge des patients<br />

ayant une insuffisance rénale chronique sont les suivants :<br />

éviter la dialyse ou augmenter la durée de vie sans dialyse en<br />

ralentissant l’évolution de la maladie rénale ;<br />

préserver un bon état général jusqu’au début de l’épuration<br />

extrarénale, en particulier lorsqu’une greffe rénale est envisagée<br />

;<br />

prévenir les complications de l’insuffisance rénale chronique<br />

et en particulier la morbidité/mortalité cardiovasculaire.<br />

Les deux premiers objectifs sont en apparence contradictoires<br />

et soulignent l’importance de démarrer l’épuration extrarénale<br />

au moment optimal, en dehors de l’urgence, chez un patient<br />

informé des techniques disponibles et muni d’un abord de<br />

dialyse.<br />

La plupart des maladies rénales sont progressives, quoique la<br />

vitesse d’évolution soit extrêmement variable d’une néphropathie<br />

à l’autre et, pour une même néphropathie, d’un individu<br />

à l’autre. Freiner la progression peut être obtenu de deux<br />

façons complémentaires et non exclusives :<br />

en assurant le diagnostic étiologique et en optimisant les<br />

traitements spécifiques des néphropathies (par exemple<br />

corticoïdes et immunosuppresseurs d’une néphropathie<br />

lupique) ;<br />

en mettant en place un traitement néphroprotecteur non<br />

spécifique, antihypertenseur et antiprotéinurique.<br />

Traitement antihypertenseur<br />

De nombreuses études et méta-analyses ont montré le bénéfice<br />

de la réduction de la pression artérielle sur la progression<br />

rénale (rendant compte de 50 % de la variance de la baisse de<br />

la filtration glomérulaire). Ces patients hypertendus avec une<br />

insuffisance rénale sont, pour la plupart, à haut risque cardiovasculaire,<br />

et doivent bénéficier de toute façon d’un traitement<br />

antihypertenseur [25] . Les deux questions pertinentes sont :<br />

quelle est la cible tensionnelle optimale pour ralentir la<br />

progression ?<br />

certaines classes de médicaments antihypertenseurs ont-elles<br />

des effets spécifiques sur la progression ?<br />

4 Néphrologie


Objectif tensionnel<br />

L’ensemble des sociétés savantes internationales recommandent<br />

actuellement des cibles tensionnelles inférieures à 140/<br />

90 mmHg chez les individus hypertendus à faible risque et une<br />

cible tensionnelle plus basse inférieure à 130/80 mmHg chez les<br />

patients diabétiques, les patients avec une néphropathie (Joint<br />

National Commitee report version 7 [JNC7] 2003, World Health<br />

Organization [WHO] 2003, KDOQI 2004, British Hypertension<br />

Society [BHS] 2004, Haute Autorité de santé [HAS] 2004 et 2005,<br />

European Society of Hypertension [ESH] 2007, American<br />

Diabetes Association [ADA] 2008) [25-33] , voire chez tous les<br />

patients à risque élevé (antécédent coronarien ou équivalent),<br />

ou ayant un risque calculé selon Framingham supérieur à 10 %<br />

à 10 ans (American Heart Association [AHA] 2007 Guidelines for<br />

the Treatment of Hypertension in the Prevention and Management<br />

of Ischemic Heart Disease) [34] .<br />

Ces recommandations reposent essentiellement sur des<br />

analyses observationnelles, des analyses post-hoc et enfin sur les<br />

conclusions de la méta-analyse BPLTTC (Blood Pressure Lowering<br />

Treatment Trialists Collaboration) 2003 [35] qui avait<br />

comparé un traitement antihypertenseur intensif et un traitement<br />

moins intensif. Cette méta-analyse avait montré une<br />

réduction de l’incidence des accidents vasculaires cérébraux<br />

(AVC), des événements cardiovasculaires majeurs, mais pas de la<br />

mortalité totale ou cardiovasculaire, des événements coronariens<br />

ou de l’insuffisance cardiaque chez les patients traités « intensivement<br />

». Cependant, les résultats positifs de cette métaanalyse<br />

sont largement influencés par ceux de l’UKPDS 38<br />

(United Kingdom Prospective Diabetes Study 38) chez des<br />

diabétiques de type 2 qui comparaît une cible tensionnelle<br />

« traditionnelle » à l’époque de 180/85 mmHg à une cible<br />

« basse » de 150/85 mmHg [36] .<br />

La Cochrane Database of Systematic Review a repris cette<br />

méta-analyse [37] en excluant UKPDS 38 et en incluant les essais<br />

prospectifs de cibles tensionnelles suivants : Modification of the<br />

Diet in Renal Disease (MDRD), Hypertension Optimal Treatment<br />

(HOT), BP Control in Diabetes (ABCD) H et N, African American<br />

Study of Kidney Disease and Hypertension (AASK), et<br />

Renoprotection in Patients with non Diabetic Chronic Renal<br />

Disease (REIN-2) [38-48] .<br />

Dans ces essais, une baisse tensionnelle moyenne supplémentaire<br />

de – 4/3 mmHg obtenue dans le groupe « cible tensionnelle<br />

basse » ne modifie l’incidence d’aucun des critères<br />

suivants : mortalité totale, infarctus du myocarde, AVC, insuffisance<br />

cardiaque, événements cardiovasculaires majeurs, IRT.<br />

Cette étude, si elle ne retrouve pas de bénéfice, ne montre pas<br />

non plus d’aggravation du risque pour des cibles tensionnelles<br />

plus basses.<br />

Concernant spécifiquement les populations diabétiques et les<br />

patients en insuffisance rénale, l’analyse ne retrouve pas de<br />

bénéfice pour des cibles tensionnelles inférieures à<br />

135/85 mmHg, mais, dans ces deux cas, les arguments pour<br />

l’absence de bénéfice sont moins robustes. Des études additionnelles<br />

sont nécessaires pour conclure définitivement sur la<br />

pression artérielle (PA) cible optimale et les résultats de l’étude<br />

ACCORD (Action to Control Cardiovascular Risk in Diabetes)<br />

actuellement menée chez des patients diabétiques sont donc<br />

attendus avec beaucoup d’intérêt [49] .<br />

Dans l’étude IDNT (Irbesartan Diabetic Nephropathy Trial)<br />

chez 1 590 patients avec une néphropathie diabétique avérée,<br />

la cible tensionnelle préconisée sous traitement antihypertenseur<br />

était inférieure ou égale à 135/85 mmHg. Les analyses<br />

post-hoc de IDNT montrent une relation linéaire entre la<br />

pression artérielle systolique (PAS) obtenue sous traitement et<br />

l’incidence de la mortalité cardiovasculaire, et de l’insuffisance<br />

cardiaque (mais pas des événements coronariens) et aussi avec<br />

la vitesse de progression de la néphropathie [50, 51] . Cette<br />

relation persiste jusqu’à une PAS de 120 mmHg. En dessous de<br />

ce seuil, le risque de mortalité globale augmente et le bénéfice<br />

rénal devient marginal. Les conclusions des auteurs de ce travail<br />

sont de viser une cible tensionnelle de 120-130 mmHg en<br />

conjonction avec le blocage du système rénine-angiotensine.<br />

Néphrologie<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

On peut donc conclure que la PA cible « optimale » est de<br />

moins de 135/85 mmHg lorsque la PA est mesurée en consultation.<br />

Un traitement à base de deux antihypertenseurs ou plus<br />

est habituellement nécessaire pour obtenir cette cible tensionnelle.<br />

Il est souhaitable de ne pas abaisser la PA systolique en<br />

dessous de 120 mmHg, en particulier chez les patients à haut<br />

risque coronaire et vasculaire.<br />

La multiplication des mesures de PA permet d’évaluer au<br />

mieux la PA réelle des patients, d’où l’intérêt de la mesure<br />

tensionnelle au domicile soit par mesure ambulatoire de la<br />

pression artérielle (MAPA), soit par automesure. Lorsque la<br />

pression à domicile est prise en compte, les valeurs cibles de PA<br />

doivent être ajustées à la baisse de – 10/5 mmHg par rapport<br />

aux valeurs de consultation.<br />

Médicaments utilisés<br />

Selon les recommandations nationales (HAS 2004 IRC et HAS<br />

2005 HTA) et internationales, les bloqueurs du système rénineangiotensine<br />

(BSRA) sont indiqués en première intention chez<br />

les sujets diabétiques et/ou atteints de néphropathie. La<br />

justification de ces recommandations a été détaillée ailleurs [52]<br />

et n’est pas reprise ici.<br />

Schématiquement, le blocage du système rénine-angiotensine,<br />

comparé aux autres médicaments antihypertenseurs, ralentit la<br />

vitesse de progression en moyenne de 30 %à40% [52] .Les<br />

patients ayant les protéinuries les plus élevées bénéficient<br />

davantage de ces formes de traitement, mais le bénéfice sur la<br />

réduction du risque d’IRT peut être démontré à partir d’un seuil<br />

de protéinurie supérieur à 0,5 g/j. En deçà de cette valeur de<br />

protéinurie, l’effet est probable, mais non démontré [52] .<br />

Choix entre inhibiteur de l’enzyme de conversion<br />

ou antirécepteur de l’angiotensine II. Effet molécule ou effet<br />

classe<br />

Sur la base des essais disponibles, les antirécepteurs de<br />

l’angiotensine II (ARAII) doivent être privilégiés dans la néphropathie<br />

diabétique de type 2 et les inhibiteurs de l’enzyme de<br />

conversion dans tous les autres cas (néphropathie du diabète de<br />

type 1 et néphropathies non diabétiques) (recommandations<br />

ANAES 2004, KDOQI 2004) [28, 30] .<br />

Ces recommandations peuvent être tempérées par l’équivalence<br />

des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et des<br />

ARAII sur la réduction de la protéinurie [53] et la pratique<br />

fréquente de recourir aux IEC pour la prévention cardiovasculaire<br />

chez des patients diabétiques ayant à la fois une atteinte<br />

rénale et une atteinte cardiovasculaire.<br />

En cas d’intolérance spécifique aux IEC (toux invalidante et<br />

surtout œdème angioneurotique), les IEC peuvent être remplacés<br />

par des ARAII.<br />

L’effet de classe n’a jamais été formellement étudié. Il est<br />

probable, compte tenu de la consistance des résultats positifs et<br />

de l’ampleur du bénéfice dans les différentes études ayant utilisé<br />

des médicaments de la même classe. Il est peut être préférable<br />

de privilégier les molécules qui ont fait preuve de leur efficacité<br />

dans des essais contrôlés, à savoir ramipril, énalapril, benazépril,<br />

captopril, trandolapril pour les IEC et losartan, irbesartan pour<br />

les ARAII.<br />

Pour les KDOQI 2006, le bénéfice rénal est un effet de classe<br />

et il est commun aux IEC et aux ARAII qui sont interchangeables<br />

[54] . Les KDOQI 2006 comme les NICE 2008 reconnaissent<br />

cependant des différences possibles entre les molécules et<br />

insistent sur l’intérêt d’un BSRA de longue durée d’action<br />

pouvant être pris (et efficace) en monoprise quotidienne [54, 55] .<br />

Doses utilisées<br />

Dans tous les cas, il est important de rappeler que le bénéfice<br />

dépend de la dose utilisée qui est généralement forte dans tous<br />

ces essais d’intervention (par exemple ramipril 10 mg/j et<br />

losartan 100 mg/j). Utiliser des doses inférieures à celles des<br />

essais réduit au prorata l’amplitude du bénéfice espéré (comme<br />

l’ont montré les études DIABHYCAR (Non-insulin Diabetes,<br />

5


18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

Hypertension, Microalbuminuria or Proteinuria Cardiovascular<br />

Events, and Ramipril) [56] dans la néphropathie diabétique<br />

incipiens et ATLAS (Assessement of Treatment with Lisinopril<br />

and Surival) [57] dans l’insuffisance cardiaque.<br />

Une titration de la posologie doit être réalisée jusqu’à<br />

l’obtention des cibles fixées. Cette titration doit se faire<br />

jusqu’aux doses maximales autorisées pour la molécule choisie<br />

jusqu’à l’obtention de ces cibles, mais peut être limitée par la<br />

tolérance clinique ou biologique.<br />

L’obtention des cibles tensionnelles nécessite, chez la plupart<br />

des patients, une combinaison de deux ou plus antihypertenseurs<br />

[58] .<br />

Peu d’études cependant ont comparé les stratégies d’addition<br />

des antihypertenseurs dans la néphropathie diabétique.<br />

Classiquement, l’addition d’un diurétique thiazidique potentialise<br />

l’effet antihypertenseur et antiprotéinurique des BSRA et<br />

ces produits devraient être largement utilisés lorsque la fonction<br />

rénale est altérée en raison de la rétention sodée précoce qui s’y<br />

associe [59, 60] .<br />

L’étude ACCOMPLISH (Avoiding Cardiovascular Events<br />

through Combination Therapy in Patients Living with Systolic<br />

Hypertension) a comparé deux stratégies d’addition IEC plus<br />

thiazide versus IEC plus dihydropyridine (DHP) chez<br />

11 506 patients hypertendus à risque, dont 60 % de sujets<br />

diabétiques. Cette étude retrouve un bénéfice sur la morbimortalité<br />

cardiovasculaire de la stratégie IEC plus DHP par<br />

rapport à IEC plus thiazide (réduction du risque absolu [RRA] :<br />

2,2 %, réduction du risque relatif [RRR] : 19,6 %) [61, 62] . Cette<br />

étude cependant concerne principalement des patients obèses<br />

avec une hypertension systolique et sans atteinte rénale et ses<br />

résultats ne sont donc peut être pas directement extrapolables<br />

à des patients diabétiques à haut risque de rétention rénale de<br />

sodium (néphropathie et/ou insuffisance rénale, traitement par<br />

insuline ou glitazone, en particulier en association).<br />

Stade de l’insuffisance rénale chronique<br />

nécessitant un traitement par bloqueur<br />

du système rénine-angiotensine<br />

Le bénéfice du traitement par BSRA persiste jusqu’aux stades<br />

les plus avancés de fonction rénale, même si ce bénéfice est en<br />

valeur absolue plus faible, compte tenu de la durée d’évolution<br />

plus courte vers l’IRT. Cela a été démontré dans une analyse<br />

post-hoc de RENAAL chez des diabétiques de type 2 [61, 62] et<br />

dans un essai prospectif randomisé dans des néphropathies<br />

protéinuriques non diabétiques [63] .<br />

Les BSRA sont également recommandés comme traitement<br />

préférentiel de l’HTA chez les patients débutant la dialyse en<br />

raison de leur capacité à maintenir une diurèse résiduelle plus<br />

prolongée (KDOQI 2006) [54] .<br />

Stratégies d’optimisation<br />

Les ARAII (et les IEC) en monothérapie réduisent en<br />

moyenne de 35-40 % la protéinurie et au prorata le risque de<br />

progression de la néphropathie de type 2 (ND2). De nombreux<br />

patients restent protéinuriques et continuent à progresser<br />

malgré un traitement BSRA à la dose maximale recommandée<br />

(et utilisée dans les essais).<br />

Il est donc important d’évaluer les éventuels facteurs de<br />

résistance et de mettre en œuvre des stratégies d’optimisation<br />

du blocage du SRA.<br />

L’apport alimentaire en chlorure de sodium est le principal<br />

facteur modulant l’effet antiprotéinurique des BSRA. Celui-ci<br />

doit donc être réduit à 6-8 g/j pour permettre l’efficacité des<br />

BSRA (recommandations conjointes HAS 2004, HAS 2005,<br />

KDOQI 2006, NICE 2008) [28, 30, 31, 64] .<br />

L’apport alimentaire en sodium (Na) (natriurèse des 24 heures)<br />

devrait être évalué périodiquement pour l’adaptation du<br />

régime désodé. Le recours à une diététicienne et l’éducation<br />

thérapeutique diététique sont deux mesures utiles pour limiter<br />

l’apport sodé de façon significative et durable. Chez les patients<br />

incapables de limiter le Na alimentaire, l’effet des BSRA peut<br />

être « rattrapé » par l’utilisation d’un diurétique thiazidique [59] .<br />

Cependant régime sans sel (RSS) et diurétique sont synergiques<br />

et le RSS permet une réduction supplémentaire de la protéinurie<br />

par rapport au diurétique seul.<br />

Les posologies maximales de BSRA ont été établies à partir des<br />

essais dans l’hypertension artérielle essentielle et il n’y a que<br />

peu d’études de relation effet-dose sur les paramètres rénaux<br />

(hémodynamiques, protéinurie etc.). Plusieurs études de petite<br />

taille et de courte durée suggèrent un bénéfice sur la réduction<br />

de la protéinurie de l’augmentation des doses d’ARAII au-delà<br />

des doses des résumés des caractéristiques du produit (RCP)<br />

(doses double ou quadruple), y compris dans la néphropathie<br />

diabétique [65, 66] .<br />

L’étude ROAD (Renoprotection of Optimal Antiproteinuric<br />

Doses) chez des patients ayant une néphropathie protéinurique<br />

non diabétique démontre le bénéfice des doubles doses d’IEC ou<br />

d’ARAII sur la progression et l’incidence d’IRT, celles-ci étant<br />

réduites d’environ 50 % par comparaison avec une monothérapie<br />

à la dose maximale des RCP [67] .<br />

La combinaison d’IEC et d’ARAII a également été proposée<br />

pour renforcer le blocage du SRA. L’effet additif de ces combinaisons<br />

sur la protéinurie (– 35 % supplémentaires par rapport<br />

à la monothérapie IEC ou ARAII) a été confirmé dans deux<br />

méta-analyses, dont une dans la néphropathie diabétique [68, 69] .<br />

Chez des patients avec une néphropathie protéinurique non<br />

diabétique, l’étude japonaise COOPERATE (Combination Treatment<br />

of Angiotensin Receptor Blocker and Angiotensin Converting<br />

Enzyme Inhibitor in Non-Diabetic Renal Disease) a montré<br />

le bénéfice de la combinaison losartan 100 mg/j plus trandolapril<br />

3 mg/j sur la réduction de protéinurie et la réduction de<br />

l’incidence d’IRT (– 50 %) par rapport à la monothérapie de ces<br />

deux produits à la même dose [70] .<br />

Les résultats de cette étude sont à l’origine des recommandations<br />

HAS 2004 [30] , proposant l’utilisation des combinaisons en<br />

cas de protéinurie persistante (plus de 0,5 g/j) sous monothérapie<br />

maximale, avec un grade B. Depuis cette publication en<br />

2004, des doutes méthodologiques sérieux ont été soulevés à<br />

propos de cette étude monocentrique qui a fait récemment<br />

l’objet d’une rétraction.<br />

L’étude ONTARGET (Ongoing Telmisartan Alone and in<br />

Combination whith Ramipril Global Endpoint Trial) chez des<br />

patients à haut risque vasculaire (37 % de diabétiques, 32 % de<br />

normotendus) a récemment montré l’absence de bénéfice sur la<br />

mortalité et les événements cardiovasculaires d’une combinaison<br />

ramipril 10 mg/j plus telmisartan 80 mg/j par rapport à la<br />

monothérapie de chacun de ces médicaments. La combinaison<br />

est même responsable d’un léger excès d’épisodes d’IRA (fonctionnelles<br />

et réversibles) par rapport aux monothérapies [71] .Ces<br />

résultats ont récemment fait prendre des positions extrêmes [72]<br />

qui ne semblent pas justifiées dans le cadre des néphropathies<br />

progressives protéinuriques. Trois grands essais multicentriques<br />

sont actuellement en cours pour tester l’efficacité des combinaisons<br />

ARAII plus IEC ou des inhibiteurs directs de la rénine (IDR)<br />

sur la progression de la néphropathie diabétique de type 2<br />

(VA NEPHRON D, VALID, ALTITUDE). En attendant les résultats<br />

de ces études, il paraît prématuré de prendre une position<br />

dogmatique interdisant ces combinaisons.<br />

Si ces combinaisons sont utilisées, leur indication, leur<br />

instauration et leur suivi ne devrait être assuré qu’en milieu<br />

spécialisé néphrologique.<br />

Précautions d’emploi<br />

Les contre-indications classiques des IEC et des ARAII doivent<br />

être respectées (allergie, grossesse et sténose de l’artère rénale).<br />

Chez les patients à haut risque de sténose de l’artère rénale,<br />

comme les patients diabétiques de type 2 ou a posteriori chez<br />

les patients ayant une hypertension artérielle sévère résistante à<br />

une trithérapie, celle-ci doit être systématiquement recherchée.<br />

Les patients avec une maladie rénale chronique sont à risque<br />

élevé de complications des traitements pharmacologiques et<br />

doivent être surveillés de façon plus fréquente, plus rigoureuse<br />

que les patients n’ayant pas ces complications rénales. Une<br />

surveillance biologique comportant au minimum la créatinine,<br />

la clairance calculée et la kaliémie doit être faite systématiquement<br />

10 à 15 jours après l’institution du traitement et après<br />

6 Néphrologie


chaque changement de posologie. L’augmentation de la posologie<br />

doit être progressive et ce, d’autant plus que la fonction<br />

rénale est initialement altérée.<br />

L’effet antiprotéinurique des IEC et des ARAII survient<br />

relativement précocement après l’introduction du traitement.<br />

Cet effet devient maximal à 1 à 3 mois après le début du<br />

traitement. Il est dose-dépendant avec une relation doseréponse<br />

différente de la relation pour la baisse tensionnelle.<br />

Une augmentation de la créatinine plasmatique jusqu’à 25 %<br />

à 30 %, maximale à1à2mois après l’introduction du traitement,<br />

peut survenir chez les patients, notamment ceux dont la<br />

filtration glomérulaire est inférieure à 60 ml/min. L’augmentation<br />

initiale de la créatinine plasmatique est associée à une<br />

réduction plus importante de la protéinurie et, à long terme, à<br />

une meilleure préservation de la fonction rénale [73] . Le traitement<br />

par bloqueur du système rénine-angiotensine ne doit<br />

donc pas être réduit ou interrompu sauf si l’élévation de<br />

créatinine plasmatique dépasse 30 % de la valeur de base [73] .<br />

Dans ce cas, il faut rechercher un facteur favorisant (traitement<br />

anti-inflammatoire, déshydratation ou traitement diurétique<br />

trop agressif) et arrêter transitoirement ou réduire la<br />

posologie du traitement par BSRA. Une telle aggravation ne<br />

constitue pas une contre-indication définitive à ce type de<br />

traitement, mais incite à le reprendre plus progressivement<br />

(titration plus progressive et éventuellement posologie maximale<br />

plus basse).<br />

Il est important de rappeler que les BSRA doivent être<br />

diminués ou interrompus transitoirement en cas d’événements<br />

intercurrents favorisant la déshydratation (fièvre, diarrhée,<br />

canicule) comme le montrent les résultats de l’étude<br />

ONTARGET.<br />

L’augmentation de la kaliémie (plus de 5,5 mmol/l) est une<br />

complication fréquente des bloqueurs du système rénineangiotensine,<br />

en particulier chez les patients diabétiques, les<br />

patients dont la filtration glomérulaire est inférieure à 60 ml/<br />

min et ceux qui ont un apport alimentaire important en<br />

potassium (fruits et légumes).<br />

L’hyperkaliémie conduit rarement à l’interruption définitive<br />

des traitements bloqueurs du SRA, mais rend indispensable une<br />

surveillance rapprochée et des mesures énergiques de contrôle<br />

de la kaliémie (mesures diététiques, introduction de diurétique,<br />

voire de polystyrène sulfonate [Kayexalate ® ] et éventuellement<br />

réduction de la dose de BSRA). Une vigilance toute particulière<br />

doit être exercée vis-à-vis des médicaments intercurrents (antiinflammatoires<br />

non stéroïdiens [AINS], inhibiteurs de cyclooxygénase<br />

2 [COXIBS], héparine, héparine de bas poids<br />

moléculaire [HBPM], supplémentation en sels de potassium<br />

[KCl]) ainsi que des sources alimentaires occultes en potassium<br />

(sels de régime à base de KCl).<br />

Nutrition<br />

Limitation de l’apport protidique alimentaire<br />

Outre le régime restreint en sodium modéré entre 6 et 8 g/<br />

24 h nécessaire et systématique pour potentialiser l’effet<br />

antihypertenseur et antiprotéinurique des BSRA, une restriction<br />

de l’apport protidique alimentaire a été proposée pour ralentir<br />

la progression de l’insuffisance rénale.<br />

Chez l’animal, la restriction protidique alimentaire diminue<br />

les lésions rénales et ralentit la progression dans quasiment tous<br />

les modèles expérimentaux. Cependant, chez l’homme, les<br />

résultats de la restriction alimentaire protidique sur la progression<br />

des maladies rénales sont pour le moins controversés. Une<br />

étude récente suggère, par exemple, que le bénéfice de la<br />

limitation protidique pourrait être lié à la limitation de l’apport<br />

alimentaire en sodium qui lui est forcément associé [74, 75] .<br />

La principale étude réalisée dans ce domaine (MDRD) n’a pas<br />

démontré de bénéfice de la restriction protidique alimentaire<br />

[76] . Une analyse post-hoc de MDRD tenant compte du<br />

niveau de restriction protidique réellement atteint pendant<br />

l’étude (analyse dite « per-protocol ») suggère un effet néphroprotecteur<br />

avec une diminution de la vitesse de progression de<br />

1,15 ml/min par an pour chaque diminution de 0,2 g/kg/j<br />

d’apport protidique [77] . Sur la base de cette analyse, le délai<br />

Néphrologie<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

jusqu’à l’insuffisance rénale terminale serait prolongé de 40 %<br />

environ. Dans ces analyses post-hoc, les patients ayant une<br />

polykystose rénale ne tirent pas de bénéfice de la restriction<br />

protidique.<br />

Un point méthodologique important doit être souligné : la<br />

restriction protidique est souvent associée à une diminution de<br />

la masse musculaire et donc indirectement à une réduction de<br />

la production de créatinine et de la créatinine plasmatique.<br />

L’indicateur de mesure de la progression est donc affecté en luimême<br />

par l’intervention diététique et il n’est donc pas possible<br />

d’interpréter les études ayant comme critère de jugement les<br />

variations de créatinine plasmatique ou de DFGe à partir de la<br />

créatinine plasmatique.<br />

Plusieurs méta-analyses ont été publiées, suggérant globalement<br />

un bénéfice de la restriction protidique sur la progression,<br />

en particulier la plus récente [78] , prenant comme critère de<br />

jugement la mort rénale. Dans cette méta-analyse, une restriction<br />

protidique entre 0,3 et 0,6 g/kg par jour (mais pas<br />

au-dessus de 0,6) est associée à une réduction de l’incidence de<br />

mort rénale de – 36 % (p < 0,001). Comme ces régimes abaissent<br />

aussi la concentration plasmatique d’urée, il est difficile de<br />

faire la part d’un effet néphroprotecteur proprement dit et<br />

d’une amélioration du syndrome urémique (cf. infra).<br />

Enfin, il faut souligner que ces méta-analyses ont inclus, en<br />

sus de MDRD, beaucoup d’études comportant de petits effectifs<br />

et réalisées dans les années 1990, c’est-à-dire avant l’utilisation<br />

des IEC.<br />

En outre, il n’a pas été possible, à partir de ces études assez<br />

hétérogènes, d’établir un niveau de restriction protidique<br />

optimal, si bien que les recommandations des K/DOQI [79] et<br />

des CARI (Caring for Australasians with Renal Impairment)<br />

2006 [80] sont de restreindre l’apport protidique alimentaire à<br />

0,75 g/kg par jour. Les recommandations de l’HAS 2004 proposent<br />

un apport de 0,8-1,0 g/kg par jour (ANAES 2004), c’est-àdire<br />

les valeurs recommandées par l’Organisation mondiale de<br />

la santé (OMS) [81] et par l’Agence française de sécurité sanitaire<br />

des aliments (AFSSA) pour l’alimentation des sujets normaux<br />

[82] , mais en tout cas bien en dessous de l’apport protidique<br />

prévalant dans une alimentation occidentale classique<br />

(environ 1,3 g/kg par jour).<br />

En pratique, lorsque de tels régimes restreints en protides<br />

sont appliqués, ils doivent l’être en complément d’un traitement<br />

optimisé du blocage du SRA et certainement pas à sa<br />

place. En effet, l’amplitude attendue de l’effet restriction<br />

protidique sur la progression ne serait que 10 % à 20 % de<br />

l’effet apporté par le traitement IEC [83] .<br />

Les régimes limités en protides doivent être réalisés sous<br />

surveillance diététique stricte, de façon à éviter la dénutrition.<br />

La réduction de l’apport protidique doit être compensée par un<br />

apport énergétique suffisant de 30 à 35 kcal/kg par jour (sauf<br />

obésité associée) (KDOQI) [79] . L’apport protidique alimentaire<br />

peut être monitoré à partir de la mesure de l’excrétion urinaire<br />

d’urée sur un recueil d’urines de 24 heures. L’apport protidique<br />

en g/j est calculé comme l’l’urée urinaire en mmol/j divisée par<br />

5,5 [84] .<br />

Il y a peu de données pour proposer un régime restreint en<br />

protides aux patients ayant un syndrome néphrotique ou une<br />

protéinurie abondante d’autant que l’interprétation de l’albuminémie<br />

devient alors difficile et qu’il n’est généralement pas<br />

possible de maintenir une albuminémie supérieure à 40 g/l,<br />

comme le recommandent les KDOQI [79] .<br />

Au stade de l’insuffisance rénale sévère (filtration glomérulaire<br />

inférieure à 15 ml/min), la restriction protidique alimentaire<br />

atténue le syndrome urémique et, en particulier, limite l’acidose<br />

métabolique (AM), provenant du catabolisme des protéines<br />

soufrées animales, l’hyperhomocystéinémie provenant de la<br />

méthionine et également l’hyperphosphatémie dont les principales<br />

sources alimentaires sont constamment associées aux<br />

protéines et enfin probablement la concentration d’urée<br />

elle-même.<br />

Malgré ces bénéfices symptomatiques, les régimes ne doivent<br />

pas faire reculer l’indication de l’épuration extrarénale (EER)<br />

(ANAES 2002). Le risque de dénutrition sévère est ici important,<br />

7


18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

d’autant qu’un grand nombre de patients limitent spontanément<br />

leurs apports protidiques alimentaires [85] . La dernière<br />

analyse post-hoc de l’étude MDRD, étendant la période d’observation<br />

après le début de la dialyse, montre l’absence d’effet sur<br />

la progression et un excès de mortalité (hazard ratio : 1,92) dans<br />

le groupe soumis à une restriction protéique de 0,28 g/kg par<br />

jour supplémentée en kéto-analogues [86] . Cette étude a été<br />

critiquée en raison du manque d’information sur les paramètres<br />

nutritionnels durant l’étude et sur les facteurs confondants<br />

potentiels de mortalité après le début de l’EER.<br />

Perte de poids<br />

Si l’excès de risque rénal associé au surpoids et à l’obésité<br />

commence à être assez bien établi [24] , en revanche, la réversibilité<br />

du risque de progression sous l’influence de la réduction<br />

pondérale n’est pas formellement démontrée.<br />

Chez les patients obèses ou en surpoids, la perte de poids<br />

peut constituer un adjuvant important au traitement antihypertenseur,<br />

pour restaurer la sensibilité à l’insuline et améliorer le<br />

profil lipidique (CARI 2007) [87] . Ces améliorations tensionnelles<br />

et métaboliques sont susceptibles de ralentir la progression de<br />

la MRC. La réduction pondérale est associée à une baisse<br />

significative de la protéinurie au-delà de ce qui est attendu de<br />

l’amélioration tensionnelle et lipidique.<br />

Selon les CARI [87] , l’objectif initial de la perte pondérale chez<br />

les sujets obèses est une réduction de 10 % du poids de base.<br />

Une réduction supplémentaire peut être tentée selon les<br />

résultats et la tolérance [87] .<br />

■ Prévention du risque<br />

cardiovasculaire<br />

Hypolipémiants<br />

Les bénéfices des agents hypolipémiants chez les sujets avec<br />

une maladie cardiovasculaire préexistante sont bien démontrés.<br />

Bien que les patients avec une IRC sont exposés à un risque<br />

cardiovasculaire accru et devraient raisonnablement bénéficier<br />

des agents hypolipémiants, la plupart des essais randomisés ont<br />

exclu les patients « rénaux ». Les anomalies lipidiques au cours<br />

de l’IRC diffèrent de celles observées dans la population<br />

générale et dépendent du stade de l’IRC et de la présence ou<br />

non d’un diabète et/ou d’un syndrome néphrotique. Les<br />

caractéristiques de la dyslipidémie de l’IRC sont l’hypertriglycéridémie,<br />

l’élévation des lipoprotéines « remnantes », une<br />

réduction du high density lipoprotein (HDL) cholestérol, une<br />

augmentation des fractions athérogènes du low density lipoprotein<br />

(LDL)-cholestérol, de la lipoprotéine (a) et de l’apolipoproteine<br />

A-IV [64] .<br />

Les cibles optimales des concentrations de lipides plasmatiques<br />

chez les sujets en IRC ne sont pas bien connues. Les<br />

données principales reposent sur des analyses post-hoc en sousgroupe<br />

des grands essais de prévention cardiovasculaire.<br />

L’étude Heart Prevention Study (HPS) a confirmé l’intérêt<br />

d’un traitement par simvastatine sur la réduction de la morbimortalité<br />

cardiovasculaire de patients sélectionnés sur un risque<br />

cardiovasculaire élevé et cela, quelles que soient les valeurs<br />

initiales de cholestérol total ou de LDL-cholestérol [88] . L’intérêt<br />

de cette étude était d’inclure un sous-groupe de 1 329 patients<br />

avec une insuffisance rénale modérée (créatinine plasmatique<br />

supérieure à 130 et inférieure à 200 µmol/l) et de confirmer le<br />

bénéfice du traitement par statine dans cette population.<br />

Dans l’étude CARE (Cholesterol and Recurrent Events) chez<br />

plus de 4 000 patients avec infarctus et un cholestérol inférieur<br />

à 2,40 g/l, les 1 700 patients avec un DFGe inférieur à 75 ml/<br />

min et randomisés pour recevoir la pravastatine 40 mg ou son<br />

placebo ont eu une réduction du risque absolu de 4%etune<br />

réduction du risque relatif de 28 % sur le critère principal<br />

(mortalité coronaire et récidive d’infarctus non fatal) [89] .<br />

Dans une méta-analyse de 2008 d’essais randomisés contrôlés<br />

portant sur plus de 6 500 patients présentant une IRC [90] , les<br />

statines réduisent globalement la mortalité cardiovasculaire de<br />

18 % et les complications cardiovasculaires non mortelles de<br />

22 %, sans modifier la mortalité totale et sans majoration des<br />

effets secondaires, en particulier sans anomalie de la fonction<br />

hépatique.<br />

Pour les K/DOQI 2003, l’IRC est considérée comme un<br />

équivalent de maladie coronaire symptomatique, sur la base<br />

d’un risque estimé à 10 ans largement supérieur à 20 % (aux<br />

États-Unis) [91] . Une évaluation annuelle des lipides plasmatiques<br />

est recommandée ainsi qu’une recherche soigneuse des<br />

formes secondaires, en particulier endocriniennes (hypothyroïdie,<br />

diabète) et médicamenteuses (glucocorticoïdes, inhibiteurs<br />

des protéases, bêtabloqueurs, diurétiques, estrogènes). Les<br />

KDOQI 2003 recommandent l’obtention d’un taux de LDLcholestérol<br />

inférieur à 1,00 g/l par des modifications diététiques,<br />

puis, en cas d’échec après 3 mois, un traitement par statine<br />

(National Kidney Foundation 2003). Ces recommandations ne<br />

proposent pas une cible de LDL-cholestérol encore plus basse<br />

chez les patients avec une IRC et une maladie athéroscléreuse<br />

symptomatique.<br />

Pour les NICE 2008, l’indication des statines pour la prévention<br />

primaire chez les patients avec une IRC ne doit pas différer<br />

de la population générale et fait appel aux tables ou calculateurs<br />

de risque [64] . Les NICE insistent sur la prise en compte du<br />

niveau de risque plus que sur les concentrations plasmatiques<br />

de lipides, mais reconnaissent cependant que les équations de<br />

risque actuellement disponibles (Framingham, QRISK) sousestiment<br />

largement le risque chez les individus avec une IRC.<br />

La prise de position des KDOQI 2003 peut paraître un peu<br />

extrémiste en première analyse. Cependant, lorsque l’on prend<br />

en compte la fréquence et la distribution des facteurs de risque<br />

dans une population de patients nord-américains avec une IRC<br />

modérée, 78 % ont deux ou plus facteurs de risque ou présentent<br />

d’emblée une maladie athéromateuse symptomatique [92] .<br />

La reclassification de l’IRC modérée comme un équivalent<br />

coronarien aboutirait donc à traiter 22 % de patients supplémentaires<br />

pour lesquels le risque coronarien est moins bien<br />

défini. Ceci paraît donc un faible prix à payer, compte tenu de<br />

la simplicité des recommandations KDOQI, permettant une<br />

mise en œuvre efficace en pratique quotidienne.<br />

Antiagrégants plaquettaires<br />

Les patients avec une IRC ont paradoxalement à la fois une<br />

tendance à la thrombose et au saignement. Les symptômes<br />

hémorragiques sont habituellement modestes, grossièrement<br />

corrélés au temps de saignement et tendent à s’aggraver avec la<br />

sévérité de l’IRC. Le risque thrombogène est attribué à l’activité<br />

procoagulante exagérée (élévation de la thrombine, du fibrinogène<br />

et des facteurs VII et VIII circulants).<br />

Sur la base des essais disponibles, pour les NICE 2008 [64] ,un<br />

traitement antiagrégant peut être proposé aux patients avec une<br />

IRC en situation de prévention secondaire. L’IRC ne représente<br />

pas en soi une contre-indication aux faibles doses d’aspirine<br />

(75 mg/j), mais les prescripteurs doivent être alertés d’une faible<br />

augmentation du risque de saignement, en particulier chez les<br />

patients IRC recevant des combinaisons d’antiagrégants.<br />

■ Acidose<br />

L’IRC est associée à une acidose métabolique dont la principale<br />

expression biologique est une diminution modérée des<br />

bicarbonates plasmatiques entre 16 et 22 mmol/l. Dans l’insuffisance<br />

rénale chronique modérée, l’acidose métabolique, liée à<br />

la diminution de l’excrétion urinaire d’ammoniac et d’acides<br />

titrables, est une acidose métabolique hyperchlorémique à trou<br />

anionique normal. À un stade plus tardif, la rétention d’acides<br />

(anions organiques et minéraux tels que phosphates et sulfates)<br />

s’accompagne d’une augmentation du trou anionique sanguin.<br />

L’acidose métabolique est plus marquée au cours des néphropathies<br />

interstitielles chroniques et chez les patients ayant une<br />

alimentation riche en protéines soufrées d’origine animale [93] .<br />

L’acidose métabolique chronique est associée à de nombreuses<br />

complications cliniques comme le ralentissement de la<br />

croissance chez l’enfant, la perte de masse osseuse et musculaire,<br />

une balance azotée négative, facteur aggravant de dénutrition.<br />

8 Néphrologie


Des travaux expérimentaux ont montré que l’acidose métabolique<br />

joue un rôle aggravant dans la progression même de l’IRC,<br />

en stimulant l’inflammation et la fibrose interstitielle via la<br />

stimulation de l’ammoniogenèse et la production accrue de<br />

C3 amidés [94] .<br />

Une supplémentation empirique de bicarbonate de sodium<br />

est parfois proposée chez les patients en IRC, mais elle est<br />

souvent limitée, par crainte d’une surcharge sodée avec aggravation<br />

de l’HTA et des œdèmes.<br />

Au stade de prédialyse, le traitement repose sur l’administration<br />

de sels alcalins et sur un régime favorisant les protéines<br />

végétales. Le bicarbonate de sodium est efficace dans la correction<br />

de l’acidose, mais l’apport de sel associé doit être pris en<br />

compte en cas d’œdèmes ou d’HTA sévère. Le citrate est<br />

également proposé (KDOQI-CARI) sous réserve de ne pas utiliser<br />

concomitamment des sels d’aluminium dont il augmente la<br />

toxicité. Les sels de calcium (acétate ou carbonate), utilisés<br />

comme chélateurs de phosphate, permettent la correction de<br />

l’acidose métabolique pour des doses de 3à6g/j, mais leur<br />

utilisation à fortes doses est restreinte en cas d’hypercalcémie<br />

(KDIGO 2009).<br />

Une revue Cochrane de 2009 pointe l’absence d’essai contrôlé<br />

démontrant le bénéfice de la correction de l’AM chez les<br />

patients en IRC [95] . Cette lacune a été comblée par un essai<br />

récent chez 134 patients adultes avec une IRC de stade 4,<br />

randomisés pour une supplémentation en bicarbonate (trois<br />

tablettes orales de 600 mg/j) ou son placebo pendant 2 ans [96] .<br />

La supplémentation en bicarbonate a ralenti la progression de<br />

la MRC et réduit très significativement l’incidence d’IRT (risque<br />

relatif [RR] 0,13 ; p < 0,001). Le traitement par bicarbonate a<br />

également amélioré plusieurs indices nutritionnels (apport<br />

protidique, normalized protein nitrogen appearance [nPNA],<br />

albuminémie) et morphologique (circonférence musculaire du<br />

bras) sans majorer l’hypertension ou l’incidence d’œdème.<br />

Cette étude bien réalisée, bien que la seule de son genre,<br />

milite très fortement pour la généralisation de la correction de<br />

l’acidose métabolique par une supplémentation orale en<br />

bicarbonate chez les patients en IRC.<br />

Par consensus, aux stades 3 et 4 de l’insuffisance rénale, la<br />

plupart des sociétés savantes recommandent la correction de<br />

l’acidose métabolique par l’administration de bicarbonate de<br />

sodium ou citrate pour obtenir une bicarbonatémie supérieure<br />

à 22 mmol/l (CARI, KDIGO, KDOQI).<br />

■ Métabolisme phosphocalcique<br />

Avec le déclin de la fonction rénale, et en particulier à partir<br />

du stade 3 apparaissent des désordres du métabolisme phosphocalcique<br />

incluant des modifications de la calcémie, de la<br />

phosphatémie, des taux circulants de parathormone (PTH), de<br />

25-hydroxyvitamine D (25-OH-D3), de 1,25-dihydroxyvitamine<br />

D (1,25-diOH-D3), et du fibroblast growth factor 23 (FGF23) [97] .<br />

Ces anomalies biologiques ont des conséquences osseuses<br />

importantes avec une formation osseuse ralentie durant la<br />

croissance et un remodelage osseux perturbé à l’âge adulte. La<br />

classification histologique des lésions osseuses comprend<br />

l’ostéite fibreuse à haut remodelage, l’ostéomalacie et l’os<br />

adynamique à bas remodelage et des lésions mixtes [98] . Au<br />

stade de la dialyse, la quasi-totalité des patients ont un os<br />

anormal.<br />

Le métabolisme osseux défectueux, les désordres phosphocalciques<br />

biologiques et les traitements utilisés pour les corriger<br />

sont à l’origine de calcifications extraosseuses, notamment dans<br />

la paroi des artères, sur les valves cardiaques et dans les tissus<br />

périarticulaires.<br />

De nombreuses études de cohortes ont démontré un lien<br />

étroit entre les désordres du métabolisme phosphocalcique et les<br />

fractures, les événements cardiovasculaires et la mortalité [99] .Il<br />

ne s’agit donc pas d’une pathologie strictement osseuse, mais<br />

d’un continuum pathologique plus global que l’on regroupe<br />

sous le terme « désordres minéraux et osseux de la MRC »<br />

(chronic kidney disease-mineral bone disorder [CKD-MBD] des<br />

Néphrologie<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

Tableau 3.<br />

Classification KDIGO (Kidney Disease : Improving Global Outcomes)<br />

2009 des désordres minéraux et osseux de la maladie rénale chronique<br />

(MRC) et de l’ostéodystrophie rénale [100] .<br />

Définition des « désordres minéraux et osseux de l’IRC »<br />

C’est une pathologie systémique affectant le métabolisme minéral et<br />

osseux secondaire à l’insuffisance rénale chronique et se manifestant par<br />

un ou plusieurs des éléments suivants :<br />

– anomalies du calcium, du phosphore, de la PTH ou de la vitamine D<br />

– anomalies osseuses affectant le remodelage, la minéralisation, le<br />

volume, la croissance et la résistance<br />

– calcifications vasculaires ou des tissus mous<br />

Définition de l’ostéodystrophie rénale<br />

C’est une altération de la morphologie osseuse chez les patients<br />

insuffisants rénaux<br />

C’est une mesure de la composante squelettique de la pathologie<br />

systémique « désordres minéraux et osseux de l’IRC » qui est<br />

quantifiable par histomorphométrie d’une biopsie osseuse<br />

PTH : parathormone ; IRC : insuffisance rénale chronique.<br />

“ Point important<br />

Mécanismes des densités minérales osseuses de<br />

l’insuffisance rénale chronique<br />

Diminution de l’élimination rénale du phosphore qui<br />

abaisse la calcémie en se complexant au calcium, stimule<br />

la production de PTH et de FGF23, qui inhibe lui même la<br />

1a-hydroxylase.<br />

Baisse de la synthèse de calcitriol, secondaire à la<br />

réduction néphronique et à l’inhibition de la 1ahydroxylase<br />

par l’hyperphosphatémie et le FGF23. En<br />

conséquence, l’absorption intestinale du calcium est<br />

réduite et l’hypocalcémie stimule la synthèse de PTH.<br />

Sensibilité réduite de la glande parathyroïdienne au<br />

calcium, majorant encore l’hyperparathyroïdie.<br />

Dérégulation du récepteur à la vitamine D et résistance<br />

tissulaire à l’effet de la PTH.<br />

Moindre réponse rénale à la PTH qui, normalement,<br />

stimule l’élimination du phosphore et l’absorption du<br />

calcium, et au FGF23 qui est également une hormone<br />

phosphaturiante.<br />

Anglo-Saxons), le terme d’ostéodystrophie rénale devant être<br />

réservé à l’atteinte osseuse documentée éventuellement par une<br />

biopsie osseuse (Tableau 3).<br />

Les recommandations actuelles [100] sont de rechercher des<br />

anomalies de la calcémie, de la phosphatémie, de la PTH et des<br />

phosphatases alcalines à partir du stade 3 de l’IRC chez l’adulte<br />

et dès le stade 2 chez les enfants. La surveillance de ces<br />

paramètres dépend par la suite de la sévérité des anomalies<br />

constatées et de la vitesse de progression de l’IRC. La fréquence<br />

proposée est de 6-12 mois au stade 3, de 1-3 mois pour la<br />

calcémie et la phosphatémie et de 3-6 mois pour la PTH au<br />

stade 5. Il est proposé de contrôler la phosphatase alcaline tous<br />

les ans ou plus fréquemment en cas d’hyperparathyroïdie.<br />

Lorsque des anomalies sont constatées et que des traitements<br />

ont été initiés, la surveillance doit être rapprochée pour en<br />

vérifier l’efficacité et les effets secondaires.<br />

La carence en vitamine D native (25(OH)D) est fréquente<br />

dans la population générale et plus encore dans la population<br />

des insuffisants rénaux [97] . Elle doit être recherchée et traitée de<br />

la même façon que chez les patients non insuffisants rénaux.<br />

La biopsie osseuse ne doit pas être réalisée de manière<br />

systématique. Le niveau de remodelage osseux peut être apprécié<br />

indirectement par le dosage de la PTH et des phosphatases<br />

alcalines osseuses lorsqu’elles sont dans des valeurs très basses<br />

9


18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

ou très élevées. La biopsie osseuse peut cependant être proposée<br />

chez les patients qui ont des fractures inexpliquées, des douleurs<br />

osseuses, une hypercalcémie ou une hypophosphatémie inexpliquées,<br />

une suspicion d’intoxication aluminique ou encore<br />

avant de débuter un traitement par bisphosphonates [100] .<br />

Les calcifications vasculaires sont recherchées par une<br />

radiographie de l’abdomen de profil ou éventuellement par une<br />

tomodensitométrie et les calcifications valvulaires sont recherchées<br />

par l’échographie cardiaque. La présence de telles calcifications<br />

permet de classer le patient comme à haut risque<br />

cardiovasculaire et influence le choix parmi les thérapeutiques<br />

disponibles.<br />

Les recommandations actuelles de traitement des désordres<br />

phosphocalciques associés à l’IRC de stade 3 à 5 sont de<br />

maintenir les valeurs de calcémie, de phosphatémie et de PTH<br />

dans les normes du laboratoire effectuant l’analyse [100] .Encas<br />

d’hyperphosphatémie, il faut commencer par limiter l’apport<br />

alimentaire en phosphore. Lorsque cela ne suffit pas à normaliser<br />

la phosphatémie, on peut utiliser des chélateurs du<br />

phosphore dont on distingue essentiellement deux types, ceux<br />

à base de calcium (acétate ou carbonate de calcium) et ceux<br />

sans calcium (sevelamer, carbonate de Lanthane, sels d’aluminium).<br />

Les sels d’aluminium ne sont plus recommandés au long<br />

cours en raison du risque d’intoxication aluminique. Les<br />

chélateurs à base de calcium sont à éviter en cas d’hypercalcémie,<br />

de PTH basse, de calcifications artérielles ou d’os<br />

adynamique. Ils sont en revanche à privilégier lorsqu’il existe<br />

une hypocalcémie.<br />

Lorsque la PTH est élevée, il convient de rechercher et de<br />

corriger une hypocalcémie, une hyperphosphatémie et/ou une<br />

carence en vitamine D native. Les suppléments calciques sont<br />

alors à utiliser avec prudence en raison du risque de calcifications<br />

coronaires et ne doivent être employés que pour corriger<br />

une hypocalcémie [101] . Si l’élévation de la PTH persiste, il faut<br />

alors prescrire de la vitamine D 1 alpha-hydroxylée (calcitriol ou<br />

alfacalcidol), en s’assurant que cela n’induise pas d’hypercalcémie<br />

ou d’hyperphosphatémie. Le calcimimétique cinacalcet n’a<br />

pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) actuellement<br />

pour cette indication avant le stade de la dialyse.<br />

L’ostéoporose peut être traitée comme pour la population<br />

générale chez les patients ayant une maladie rénale de stade<br />

1 ou 2 et de stade 3 sans hyperparathyroïdie [100] . Lorsque des<br />

anomalies phosphocalciques apparaissent aux stades 4 et 5, il<br />

faut préalablement essayer de les corriger et une biopsie osseuse<br />

peut être discutée. Les bisphosphonates risquent d’induire de<br />

manière très prolongée un os adynamique et ne peuvent donc<br />

être utilisés que si le remodelage osseux est élevé. L’utilisation<br />

de teriparatide (analogue PTH 1-34) et de raloxifène est possible<br />

à un stade débutant de l’IRC (stades 2 ou 3 avec PTH normale)<br />

et permet de réduire l’incidence des fractures vertébrales, mais<br />

elle n’a pas été évaluée aux stades ultérieurs.<br />

■ Anémie<br />

L’anémie est une complication extrêmement fréquente de<br />

l’IRC, et sa prévalence est étroitement corrélée à la sévérité de<br />

l’insuffisance rénale [102] . Avec la définition actuellement<br />

retenue, à savoir une hémoglobine inférieure à 13,5 g/dl, près<br />

de la moitié des patients qui ont un DFGe inférieur à<br />

50 ml/min par 1,73 m 2 et la quasi-totalité des patients ayant un<br />

DFGe inférieur à 20 ml/min par 1,73 m 2 sont concernés [103] .<br />

L’anémie est principalement la conséquence d’un déficit en<br />

érythropoïétine (EPO), produite essentiellement par les cellules<br />

interstitielles péritubulaires. Ce déficit est relatif, le taux<br />

circulant d’EPO pouvant être normal ou même augmenté, mais<br />

insuffisamment par rapport à celui d’un individu sans insuffisance<br />

rénale avec le même taux d’hémoglobine [104] . D’autres<br />

facteurs peuvent intervenir, comme une résistance à l’EPO liée<br />

à la myélofibrose induite par l’hyperparathyroïdie secondaire,<br />

des saignements occultes liés aux troubles de l’hémostase<br />

secondaires à l’IRC, des carences vitaminiques secondaires à la<br />

dénutrition et l’inflammation, ou encore l’accumulation<br />

d’hepcidine [105] .<br />

Le diagnostic d’anémie liée à l’IRC est porté devant une<br />

anémie normochrome, normocytaire et arégénérative et après<br />

exclusion des autres causes habituelles d’anémie. Dans les cas<br />

difficiles, on peut s’aider du dosage de l’EPO en ayant à l’esprit<br />

qu’un taux normal ou modérément élevé est pathologique.<br />

Les conséquences de l’anémie sont nombreuses. Elle affecte<br />

directement la qualité de vie en réduisant les performances<br />

physiques, les fonctions cognitives, la libido et la qualité du<br />

sommeil [106-108] . L’anémie expose à l’hypertrophie ventriculaire<br />

gauche et à un risque accru d’insuffisance cardiaque et d’infarctus<br />

du myocarde [109] . Elle représente donc un important facteur<br />

de risque de morbimortalité [110] .<br />

Le traitement est relativement bien codifié et consiste en<br />

l’administration d’agents stimulant l’érythropoïèse (ASE) et de<br />

fer, sans omettre de corriger d’éventuelles carences associées et<br />

des facteurs aggravant tels qu’un syndrome inflammatoire ou<br />

une hyperparathyroïdie sévère.<br />

Préalablement à l’administration d’un ASE, il convient de<br />

s’assurer de stocks en fer suffisants. Les patients insuffisants<br />

rénaux sont fréquemment carencés en fer en raison d’une<br />

moins bonne absorption digestive du fer et de troubles de<br />

l’hémostase, à l’origine de pertes occultes avec un bilan négatif<br />

annuel qui a été évalué en moyenne à 100 mg. Lors de l’instauration<br />

d’un traitement par ASE, la synthèse de l’hémoglobine<br />

va consommer une grande quantité de fer et une supplémentation<br />

d’environ 1 000 mg est nécessaire. Le plus souvent, une<br />

administration par voie orale est suffisante, mais, lors de<br />

carences sévères, le recours à la voie intraveineuse peut être<br />

nécessaire.<br />

Le stock de fer est évalué par le dosage de la ferritinémie<br />

(valeur normale 60 à 300 µg/l). Pour une réponse optimale aux<br />

ASE, il est recommandé de maintenir la ferritinémie entre<br />

100 et 500 µg/l (KDOQI 2006). La ferritine est stimulée par<br />

l’inflammation et son interprétation doit en tenir compte. Il<br />

existe une situation appelée « carence fonctionnelle en fer »<br />

avec une ferritinémie normale ou élevée, mais où le fer est<br />

indisponible pour l’érythropoïèse, et sa cause principale en est<br />

l’inflammation. La disponibilité du fer est évaluée par le dosage<br />

du coefficient de saturation de la transferrine ou par le pourcentage<br />

de globules rouges hypochromes. Les recommandations<br />

sont de maintenir un coefficient de saturation de la transferrine<br />

supérieur à 20 % et un pourcentage de globules rouges hypochromes<br />

inférieur à 10 % [111] . Pour y arriver, les cibles doivent<br />

être respectivement entre 30 % et 40 % pour le coefficient de<br />

saturation de la transferrine et inférieures à 2,5 % pour les<br />

globules rouges hypochromes.<br />

Les ASE disponibles comprennent l’époétine a, b ou d, la<br />

darbepoétine a et le continuous erythropoiesis receptor activator<br />

(CERA). Tous sont injectables, les voies intraveineuse et souscutanée<br />

étant comparables pour les deux derniers qui ont des<br />

demi-vies longues. L’époétine a une demi-vie plus courte et<br />

l’administration sous-cutanée permet une épargne de dose de<br />

l’ordre de 30 % [112] . En phase de correction, l’AMM préconise<br />

trois injections hebdomadaires pour l’époétine, une injection<br />

toutes les 1à2semaines pour la darbepoétine et une injection<br />

toutes les 2 semaines pour le CERA. En phase d’entretien, les<br />

injections peuvent être espacées à 1 ou 2 semaines pour<br />

l’époétine et à 1 mois pour la darbepoétine et le CERA. Le taux<br />

d’hémoglobine doit être étroitement surveillé et ne doit pas<br />

augmenter de plus de 2 g/dl par mois afin d’éviter une aggravation<br />

de l’HTA.<br />

Le taux d’hémoglobine cible fait l’objet de nombreux débats<br />

et a beaucoup varié au cours des dernières années. Plusieurs<br />

études récentes ont trouvé un risque accru d’événements<br />

cardiovasculaires en normalisant totalement l’hémoglobinémie<br />

[113, 114] . D’autres études n’ont pas trouvé d’effet cardiovasculaire<br />

délétère associé à une cible d’hémoglobine haute, mais<br />

n’ont pas non plus montré de bénéfice [115, 116] . La position<br />

publiée récemment des European Renal Best Practice est un taux<br />

cible à 11-12 g/dl, sans dépasser intentionnellement 13 g/<br />

dl [117] . Le risque de surcorriger l’anémie concerne surtout les<br />

patients les plus à risque, à savoir les diabétiques et ceux ayant<br />

des antécédents cardiovasculaires. Ce sont souvent ces mêmes<br />

patients qui ont une résistance à l’EPO et ont besoin de fortes<br />

10 Néphrologie


doses d’ASE, celles-ci pouvant avoir des effets directs sur<br />

l’agrégation plaquettaire et l’endothélium à l’origine des<br />

complications cardiovasculaires. Une analyse post-hoc de l’étude<br />

CHOIR (Correction of Hemoglobin and Outcomes In Renal<br />

insufficiency) a ainsi trouvé un risque cardiovasculaire augmenté<br />

chez les patients qui n’ont pas atteint la cible haute<br />

malgré de fortes posologies [118] .<br />

■ Surveillance<br />

La surveillance clinique et paraclinique, la rythmicité et<br />

l’organisation du suivi entre le néphrologue et le médecin<br />

traitant ou d’autres spécialistes dépendent du stade d’évolution<br />

de la maladie rénale, de sa vitesse de progression et des pathologies<br />

associées.<br />

Le guide des affections de longue durée (ALD) de l’HAS<br />

2007 insiste, en accord avec la littérature, sur la prise en charge<br />

multidisciplinaire, justifiée notamment en cas de maladie rénale<br />

secondaire (diabète) et en fonction des comorbidités associées<br />

[119] . Chez l’adulte, le maintien de la qualité de vie et<br />

l’intégration socioprofessionnelle peuvent passer par la prise en<br />

charge du handicap personnel, familial et professionnel que<br />

constitue l’IRC. L’éducation thérapeutique est également<br />

importante, car elle permet de réduire la mortalité, les complications<br />

et probablement aussi indirectement de ralentir la<br />

progression en favorisant l’adhérence thérapeutique, le respect<br />

des régimes, etc.<br />

Schématiquement, on peut proposer comme rythme de<br />

surveillance par le médecin traitant au stade 3 une périodicité<br />

de3à6mois. À titre indicatif, l’HAS en 2004 avait proposé un<br />

intervalle en mois, basé sur le DFG/10. Par exemple pour un<br />

DFGe à 40 ml/min, la fréquence de consultation est tous les<br />

4 mois. Le recours au spécialiste néphrologue est dicté par<br />

l’évolutivité de la maladie, les complications intercurrentes et la<br />

difficulté à atteindre les cibles thérapeutiques recommandées.<br />

La nature et la fréquence de suivi des examens biologiques<br />

sont représentées dans cet article à titre indicatif.<br />

“ Point important<br />

Examens de suivi de la MRC (adapté d’après HAS<br />

2004 et le guide de l’ALD de l’HAS 2007<br />

« néphropathie chronique grave »)<br />

DFG estimé à partir de la créatinine plasmatique<br />

Protéinurie ou albuminurie des 24 heures (ou rapport<br />

protéine/créatinine urinaire sur échantillon)<br />

Urée, sodium, potassium, créatinine sur les urines de<br />

24 heures (cette recherche reste justifiée au stade 5 pour<br />

apprécier l’apport alimentaire en protide, sodium et<br />

potassium respectivement, la créatininurie permet<br />

d’estimer l’exactitude du recueil urinaire des 24 heures)<br />

Hémogramme avec plaquettes<br />

Ferritinémie, coefficient de saturation de la transferrine<br />

(si anémie)<br />

Albuminémie (néphélométrie), CRP<br />

Ionogramme (Na, K, Cl, bicarbonate)<br />

Urée sanguine<br />

Glycémie<br />

Calcium, phosphate<br />

iPTH, 25-OH-D 3, phosphatase alcaline ou phosphatase<br />

alcaline osseuse<br />

Ces examens sont à réaliser tous les 6à12mois au stade 3,<br />

tous les 3à6mois au stade 4, tous les 1à3mois au stade 5. Il<br />

faut y rajouter de façon annuelle, à tous les stades, un bilan<br />

lipidique (exploration d’une anomalie lipidique [EAL]), la<br />

recherche et le titrage des anticorps anti-HBs (après vaccination).<br />

La fréquence des contrôles peut être rapprochée en cas<br />

Néphrologie<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

Tableau 4.<br />

Indications à débuter l’épuration extrarénale.<br />

Indications absolues à débuter la dialyse (risque vital à court terme)<br />

Péricardite<br />

Surcharge hydrosodée ou œdème pulmonaire réfractaires aux<br />

diurétiques<br />

Hypertension artérielle résistante aux traitements<br />

Encéphalopathie ou neuropathie urémique (confusion, astérixis,<br />

myoclonies, convulsions)<br />

Syndrome hémorragique<br />

Nausées et vomissements persistants<br />

Indications relatives à débuter la dialyse<br />

Hypocalcémie ou hyperphosphatémie persistantes<br />

Hyperkaliémie persistante<br />

Acidose métabolique<br />

Résistance à l’érythropoïétine<br />

Anorexie, dénutrition<br />

Prurit<br />

Syndrome des jambes sans repos<br />

d’intervention thérapeutique affectant l’un ou plusieurs des<br />

paramètres ci-dessus (par exemple hémogramme après institution<br />

d’un traitement ASE). Les prélèvements veineux devraient<br />

être réalisés préférentiellement sur le dos de la main afin de<br />

préserver le capital veineux et les ponctions artérielles radiales<br />

(gazométrie) devraient être bannies pour les mêmes raisons.<br />

■ Indication de l’épuration<br />

extrarénale<br />

L’objectif du suivi d’un patient IRC est de retarder au<br />

maximum le moment où l’épuration extrarénale (EER) doit être<br />

débutée et en même temps de permettre au patient de débuter<br />

l’EER avec le moins de complications possibles. En effet, la<br />

survie ultérieure en dialyse est largement influencée par les<br />

comorbidités présentes au début de la dialyse, notamment la<br />

dénutrition, la présence d’une insuffisance cardiaque congestive<br />

ou d’une hypertrophie ventriculaire gauche, elles-mêmes<br />

favorisées par l’hypertension artérielle, la surcharge hydrosodée<br />

et l’anémie [120, 121] .<br />

La littérature concernant le moment optimal du démarrage<br />

de la dialyse est confuse, car elle mélange souvent les effets<br />

négatifs de l’adressage tardif au néphrologue et celui de l’indication<br />

tardive de la dialyse proprement dite. L’ensemble des<br />

études sont concordantes sur le pronostic délétère associé à<br />

l’adressage tardif à l’équipe néphrologique [122] . Jungers et al., en<br />

analysant la cohorte de l’Hôpital Necker chez 1 391 patients<br />

débutant l’EER, rapportent que la mortalité à1anestde18%<br />

chez les patients adressés tardivement (< 6 mois) contre 4 %<br />

chez les patients suivis régulièrement (> 36 mois) avant le début<br />

de l’EER. L’adressage tardif est également associé à un risque<br />

significativement plus important de dialyse sur cathéter veineux<br />

central, de durée initiale d’hospitalisation prolongée et de<br />

diminution des chances de dialyse hors centre et de transplantation<br />

rénale [123] .<br />

L’absence d’abord de dialyse lors de l’initiation en urgence<br />

joue un rôle important, mais non exclusif, car les patients suivis<br />

par une équipe néphrologique qui démarrent dans un contexte<br />

d’urgence ont un pronostic intermédiaire entre ceux adressés<br />

tardivement et ceux bénéficiant d’une initiation « réglée » [124] .<br />

Ces données suggèrent la nécessité de redéfinir des stratégies<br />

de suivi et de prise en charge basées sur une approche multidisciplinaire<br />

et en structure spécialisée (clinique du rein, etc.) [122] .<br />

Un syndrome urémique symptomatique représente une<br />

indication indiscutable à démarrer la dialyse lorsque survient<br />

au moins l’une des complications listées dans le<br />

Tableau 4 [125] .<br />

11


.<br />

18-060-A-05 Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte<br />

Chez les patients strictement asymptomatiques, la valeur<br />

optimale de DFG pour initier le traitement dialytique est<br />

controversée. Les KDOQI proposent de prendre la décision en<br />

fonction du rapport bénéfices/risques chez tout patient au stade<br />

5 (DFG < 15 ml/min) (KDOQI 2006). Les European best practice<br />

guidelines (EBPG) proposent de démarrer entre 8 et 10 ml/min<br />

pour s’assurer de ne pas commencer en dessous de 6 ml/min et<br />

suggèrent que les patients diabétiques peuvent nécessiter un<br />

démarrage plus précoce [126] .<br />

Ces recommandations ne sont cependant pas confortées par<br />

les données de la littérature. Une analyse post-hoc de l’étude<br />

NECOSAD (Nederlands Co-operative Study Adequacy of Dialysis)<br />

chez des patients incidents suggère un bénéfice en termes<br />

de mortalité lorsque la dialyse est démarrée précocement<br />

(timely) [127] . Cependant, cette notion associant des critères de<br />

fonction rénale et de bonne tolérance clinique est surtout<br />

nutritionnelle. Traynor et al. montrent, dans une analyse<br />

rétrospective, que la différence de mortalité est artificielle et<br />

générée par le décalage de mise en dialyse entre les deux<br />

groupes (lead time bias) [128] . Dans une étude du registre<br />

américain sur 302 287 patients incidents, le démarrage de la<br />

dialyse à un DFG plus de 10 ml/min est associé à un excès de<br />

risque de mortalité de 42 % par rapport au démarrage à un DFG<br />

inférieur à 10 ml/min [129] . Ces résultats peuvent faire penser à<br />

un biais d’indication, les patients les plus fragiles étant mis en<br />

dialyse plus précocement. Cependant, la différence de mortalité<br />

persiste après ajustement pour l’ensemble des facteurs<br />

confondants.<br />

La réponse sera peut être apportée par l’étude prospective<br />

IDEAL (Initiating Dialysis Early and Late) menée en Australasie<br />

chez 800 patients incidents et randomisés pour démarrer l’EER,<br />

soit pour un DFG selon Cockcroft compris entre 10-14 ml/min,<br />

soit un pour un DFG de 5-7 ml/min [130] .<br />

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T. Krummel.<br />

D. Bazin.<br />

Service de néphrologie, Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place de l’Hôpital, 67792 Strasbourg cedex, France.<br />

A.-L. Faller.<br />

T. Hannedouche (thannedouche@unistra.fr).<br />

Service de néphrologie, Hôpitaux universitaires de Strasbourg, 1, place de l’Hôpital, 67792 Strasbourg cedex, France.<br />

Faculté de médecine de Strasbourg, 1, rue Kirschleger, 67000 Strasbourg, France.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Krummel T., Bazin D., Faller A.-L., Hannedouche T. Diagnostic, facteurs de risque et traitement de<br />

l’insuffisance rénale chronique de l’adulte. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-060-A-05, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Diagnostic, facteurs de risque et traitement de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte 18-060-A-05<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

15


Plan<br />

Éducation thérapeutique<br />

C. Tourette-Turgis, C. Isnard Bagnis<br />

L’éducation thérapeutique doit être proposée à tout patient présentant une maladie rénale chronique. Les<br />

professionnels de santé vont avoir à se former et à coordonner leurs actions ainsi qu’à mutualiser leurs<br />

moyens pour mettre en place une offre susceptible de répondre aux demandes des patients. Ces actions<br />

doivent être conçues avec les patients. Elles doivent être évaluées dans un esprit d’amélioration de la<br />

qualité de vie des patients. Un changement important des pratiques est associé à cette réflexion sur<br />

l’accompagnement et l’éducation thérapeutique qui devraient servir à l’amélioration de la qualité de vie<br />

des patients et à celle du travail des soignants. L’éducation thérapeutique est une pratique qui nécessite<br />

de la part des soignants l’acquisition de nouvelles compétences et un accès à des dispositifs de formation<br />

adéquats.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Éducation thérapeutique du patient ; Maladie rénale chronique ; Compétences autosoins ;<br />

Compétences psychosociales ; Diagnostic éducatif ; Formation ; Qualité de vie<br />

Introduction 1<br />

Contexte de l’éducation thérapeutique 1<br />

Contexte de l’éducation thérapeutique en néphrologie 2<br />

Impact de la maladie rénale chronique<br />

dans la vie quotidienne du patient 2<br />

Recommandations officielles en éducation thérapeutique<br />

du patient 2<br />

Première étape : diagnostic éducatif ou bilan éducatif partagé 3<br />

Définition avec le patient d’un programme personnalisé 3<br />

Construire les programmes d’éducation thérapeutique<br />

avec les patients 4<br />

Quelle formation pour les acteurs de l’éducation<br />

thérapeutique ? 4<br />

Dispositifs de formation des professionnels de santé<br />

à l’éducation thérapeutique 4<br />

Efficacité des programmes d’éducation thérapeutique<br />

dans les maladies chroniques 4<br />

Éducation thérapeutique en néphrologie 5<br />

Conclusion 5<br />

■ Introduction<br />

L’éducation thérapeutique du patient (ETP) est depuis juillet<br />

2009 inscrite dans la loi Hôpital Patients, Santé Territoire<br />

(HPST) [1] . L’article 84 est entièrement consacré aux dispositions<br />

à mettre en œuvre pour assurer l’éducation thérapeutique.<br />

Celle-ci s’inscrit dans le parcours de soin et a pour objectif « de<br />

rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux<br />

traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie » [2] . Les<br />

programmes d’éducation thérapeutique du patient doivent être<br />

conformes à un cahier des charges national, ils « sont proposés<br />

au malade par le médecin prescripteur et donnent lieu à<br />

Néphrologie<br />

l’élaboration d’un programme personnalisé ». Ces programmes<br />

sont évalués par la Haute Autorité de santé [3] . L’éducation<br />

thérapeutique s’est principalement implantée au cours des deux<br />

dernières décennies dans les services hospitaliers assurant la<br />

prise en charge de patients atteints de maladies chroniques<br />

comme le diabète, l’asthme, les maladies cardiovasculaires et<br />

l’infection au virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Le<br />

financement des réseaux a permis le développement de multiples<br />

programmes ambulatoires en éducation thérapeutique en<br />

facilitant l’intervention et la rémunération d’intervenants<br />

pluridisciplinaires (médecins, diététiciennes, infirmières,<br />

podologues, psychologues) [4] .<br />

■ Contexte de l’éducation<br />

thérapeutique<br />

18-067-B-10<br />

L’allongement de la durée de la vie, le nombre croissant de<br />

la population atteinte au moins d’une maladie chronique<br />

(15 millions en France) et le développement de la médecine<br />

ambulatoire ont amené le législateur à proposer un transfert de<br />

compétences aux patients. En effet, ces derniers ont à gérer dans<br />

leur vie quotidienne des contraintes liées au maintien de leur<br />

santé mais aussi à assurer eux-mêmes la prévention des complications<br />

auxquelles leur pathologie les expose (cécité, amputation,<br />

résistance aux traitements, œdème aigu du poumon).<br />

L’éducation thérapeutique est fondée sur plusieurs arguments<br />

explicites :<br />

une plus grande implication du patient dans les soins et la<br />

gestion de sa maladie rendent sa prise en charge plus efficace<br />

;<br />

de nombreuses complications peuvent être évitées si le<br />

patient possède les savoirs et les compétences appropriés ;<br />

le degré d’observance thérapeutique peut être amélioré si on<br />

forme les patients à un usage optimal de leurs médicaments<br />

en les dotant d’outils de résolution de problèmes (gestion des<br />

effets secondaires, conduite à tenir en cas d’omission de prise<br />

ou de rupture de motivation).<br />

1


18-067-B-10 Éducation thérapeutique<br />

Tableau 1.<br />

Classification de la maladie rénale chronique d’après les KDOQI [12] .<br />

Stades Valeur du DFG Interprétation Action<br />

0 90 ml/min sans marqueur d’atteinte rénale Pas d’atteinte rénale Aucune<br />

1 > 90 ml/min avec marqueurs d’atteinte rénale Maladie rénale sans insuffisance rénale Rechercher un diagnostic étiologique<br />

Par ailleurs, les maladies chroniques, mais aussi les effets des<br />

traitements (dialyse en néphrologie, lipodystrophie dans<br />

l’infection au VIH, dépression dans l’hépatite C, contraintes<br />

diététiques dans l’insuffisance rénale chronique [IRC] ou le<br />

diabète) engendrent des effets négatifs dans la vie des patients<br />

et de leur entourage qui peuvent être réduits par des interventions<br />

spécifiques qui les prennent en compte.<br />

L’éducation thérapeutique doit être proposée à toute personne<br />

ayant une maladie chronique, enfant, adolescent ou<br />

adulte quels que soient le type, le stade et l’évolution de leur<br />

maladie. Cette offre d’éducation concerne aussi l’entourage,<br />

notamment les proches, dans la mesure où souvent ils participent<br />

aux soins, mais aussi vivent plus ou moins bien l’impact<br />

de la maladie et de ses traitements par peur, manque de<br />

connaissance et autres difficultés.<br />

■ Contexte de l’éducation<br />

thérapeutique en néphrologie<br />

Dans leur rapport à l’académie de médecine de 2004, Bourel<br />

et Ardaillou [5] évaluaient le nombre de personnes en France<br />

atteintes de maladies rénales chroniques non dialysées entre<br />

2 et 3 millions. L’incidence et la prévalence de l’insuffisance<br />

rénale modérée ne sont pas connues de façon précise en France<br />

par manque d’enquêtes épidémiologiques. L’épidémiologie de<br />

l’IRC terminale est assez bien définie dans la mesure où cette<br />

pathologie requiert l’utilisation de techniques de soin lourdes,<br />

facilement quantifiables. L’enquête de la Caisse Nationale<br />

d’Assurance Maladie (CNAM) menée en juin 2003, a montré<br />

qu’il existe en France 45 000 patients insuffisants rénaux<br />

chroniques dont environ les deux tiers sont traités par dialyse<br />

et un tiers (15 000) a un greffon fonctionnel [6] . Ainsi, le<br />

dépistage et la prise en charge de l’IRC figurent parmi les<br />

priorités nationales de santé publique [7] . La fréquence de l’IRC<br />

augmente avec l’âge [8] , elle est plus élevée chez les personnes<br />

diabétiques [9] , chez le sujet hypertendu [10] , le sujet atteint de<br />

cancer [11] . C’est une maladie silencieuse dont le signal d’alarme<br />

n’est pas donné par le patient lui-même. Le diagnostic est<br />

biologique et repose sur le dosage de la créatinémie qui doit être<br />

interprété au moyen de formules d’estimation du débit de<br />

filtration glomérulaire, reflet du fonctionnement rénal, à l’aide<br />

d’une formule d’estimation : celle de Cockcroft et Gault ou celle<br />

de MRD (Tableaux 1, 2) [12-14] .<br />

■ Impact de la maladie rénale<br />

chronique dans la vie quotidienne<br />

du patient<br />

Le traitement de la maladie rénale chronique implique un<br />

changement important des habitudes alimentaires et du style de<br />

Traiter les comorbidités<br />

Évaluer la progression de la MRC<br />

Traiter les facteurs de risque cardiovasculaires<br />

2 > 60 ml/min avec marqueurs d’atteinte rénale Malade rénale chronique (MRC) + Ralentir la progression de la MRC<br />

+ Néphroprotection<br />

3 60 à 30 ml/min Insuffisance rénale modérée + Évaluer et traiter les complications<br />

4 30 à 15 ml/min Insuffisance rénale sévère + Préparer le patient au traitement de suppléance<br />

5 < 15 ml/min Insuffisance rénale terminale + Démarrer le traitement de suppléance si nécessaire<br />

DFG : débit de filtration glomérulaire.<br />

Tableau 2.<br />

Formules d’estimation du débit de filtration glomérulaire (d’après [13] ).<br />

Formule de Cockcroft et Gault<br />

Clairance de créatinine (en ml/min)=K×(140 – âge) × poids<br />

en kilo/créatinine en µmol/l<br />

K = 1,23 chez l’homme et 1,04 chez la femme<br />

Formule de MRD simplifiée<br />

Clairance de créatinine (en ml/min/1,73 m 2 )=K×186<br />

créatinine – 1,154 × âge – 0,203<br />

K = 0,742 pour les femmes<br />

vie ainsi qu’un traitement médical lourd et complexe et un<br />

suivi de plus en plus intensif au fur et à mesure de la détérioration<br />

de la fonction rénale. La grande majorité des patients<br />

atteints de maladie rénale chronique présente également une<br />

hypertension, un diabète, une dyslipidémie [15, 16] . La liste des<br />

traitements nécessaires est donc la plupart du temps longue<br />

avec un nombre de médicaments quotidiens allant jusqu’à<br />

15 chez la personne en dialyse, auxquels il faut ajouter une<br />

restriction des apports liquidiens. En néphrologie, le patient se<br />

retrouve avec trois types de recommandations cumulées (la prise<br />

de médicaments, un programme diététique et une activité<br />

physique modérée). La question qui se pose alors en éducation<br />

thérapeutique est la suivante : quelle est la recommandation à<br />

suivre en premier ? La diététique de l’hémodialyse est certainement<br />

une des diététiques les plus difficiles à maîtriser par les<br />

patients. Elle nécessite plusieurs heures d’apprentissage et de<br />

formation portant sur la connaissance des équivalences alimentaires,<br />

la gestion de la sensation de manque et de frustration, la<br />

perte de repères gustatifs, la modification du registre de<br />

satisfaction.<br />

En conséquence, la qualité de vie des patients atteints de<br />

maladie rénale chronique est très fortement altérée. Une étude<br />

récente a confirmé qu’ils ont un niveau de qualité de vie<br />

inférieure à celui de patients traités pour un cancer [17] .<br />

■ Recommandations officielles<br />

en éducation thérapeutique<br />

du patient<br />

La démarche d’éducation thérapeutique telle qu’elle est<br />

décrite dans les recommandations officielles comporte quatre<br />

étapes :<br />

la réalisation d’un diagnostic éducatif ;<br />

la définition avec le patient d’un programme personnalisé ;<br />

la mise en œuvre de séances d’éducation ;<br />

une évaluation.<br />

2 Néphrologie


.<br />

Il existe une méthodologie propre à l’éducation thérapeutique<br />

qui ne peut se réduire à la transmission d’informations. Elle doit<br />

comprendre l’animation d’activités pédagogiques ayant pour<br />

objectif l’acquisition ou le renforcement des compétences<br />

d’autosoins et des compétences psychosociales. La maladie<br />

rénale chronique avec la dialyse nécessite de la part du patient<br />

une réorganisation régulière des choix de vie et de carrière en<br />

fonction de l’âge et du stade de développement de son insuffisance<br />

rénale.<br />

Première étape : diagnostic éducatif<br />

ou bilan éducatif partagé<br />

L’usage de ce terme de diagnostic éducatif recouvre plusieurs<br />

acceptions et il est l’enjeu de discussions dans le milieu des<br />

pédagogues de la santé au sens où la plupart des outils proposés<br />

pour le conduire tendent malheureusement à se réduire à un<br />

interrogatoire du patient sur ses connaissances de la maladie et<br />

de ses traitements.<br />

La définition officielle du diagnostic éducatif est la suivante :<br />

« le diagnostic éducatif est la première étape de la démarche<br />

d’éducation qui permet d’appréhender différents aspects de la<br />

personnalité du patient, d’identifier ses besoins, d’évaluer ses<br />

potentialités, de prendre en compte ses demandes dans le but<br />

de proposer un programme d’éducation personnalisé » [18] .On<br />

voit donc là comment un diagnostic n’est pas un simple<br />

contrôle des connaissances ou des pratiques du patient.<br />

Le diagnostic éducatif est l’occasion d’une rencontre dans<br />

laquelle un soignant essaie d’adopter une posture de pédagogue,<br />

ce qui signifie la mise en place d’un climat de confiance et la<br />

présentation au patient de ce qu’est l’éducation thérapeutique.<br />

Le patient doit avoir envie de revenir dans le service, dans le<br />

réseau ou tout autre endroit pour bénéficier d’une offre d’éducation<br />

qui a priori peut être assez éloignée de l’offre de soin<br />

dans son format habituel (ateliers, réunions de groupes, exposé,<br />

jeux de rôles).<br />

Définition avec le patient d’un programme<br />

personnalisé<br />

Cette étape est particulièrement importante et elle est le<br />

résultat d’une relation de confiance entre le soignant et le<br />

patient qui émettent ensemble des idées, des propositions en<br />

partant des priorités croisées du patient en matière de besoins<br />

fondamentaux et en matière de santé. C’est lors de cette étape<br />

que les conflits de priorité entre la vie du patient et sa santé<br />

peuvent être mis à plat, considérés, étudiés et discutés. En<br />

dialyse par exemple de nombreux patients évoquent leurs<br />

conflits de priorité sous différentes formes. Par exemple Monsieur<br />

R. a tardé à commencer sa dialyse parce qu’il ne voulait<br />

pas gâcher la qualité de vie de son épouse qui vient de prendre<br />

sa retraite. Madame S. voulait vendre son appartement, en<br />

acheter un autre dans une autre région près de sa fille pour y<br />

commencer la dialyse. Madame F. fait des hiérarchies entre les<br />

différentes pathologies qui l’affectent et a décidé de s’occuper de<br />

son diabète après toutes ses autres pathologies. Elle n’effectue<br />

donc plus son suivi en diabétologie, elle veut d’abord dit-elle se<br />

débarrasser des douleurs causées par sa polyarthrite qui endommagent<br />

grandement sa qualité de vie.<br />

L’élaboration d’un programme personnalisé en éducation<br />

peut consister à proposer à un patient de participer à un atelier<br />

estime de soi en groupe parce qu’il est exposé à tellement<br />

d’obstacles dans sa vie quotidienne qui sont des facteurs de<br />

stress, qu’il n’arrive plus à prendre soin de lui et à faire quoi<br />

que ce soit pour lui. Ainsi Madame S. a assisté aux ateliers du<br />

mardi pendant plusieurs semaines où elle a exposé tous les<br />

obstacles qui l’empêchaient de prendre soin de sa santé ; petit<br />

à petit grâce à l’aide du groupe et des animateurs du groupe,<br />

elle a « débobiné » tous ces obstacles et a repris des forces et de<br />

l’énergie pour son suivi de soin.<br />

On retrouve dans les programmes personnalisés, les déterminants<br />

psychosociaux de la santé sachant que l’information<br />

ne compte que pour une part dans l’adoption ou le maintien<br />

d’un comportement de santé. Tout programme personnalisé<br />

Néphrologie<br />

d’éducation comporte une part d’apprentissages déclinés en<br />

savoir-faire (savoirs procéduraux) : le management de ses<br />

médicaments par le patient est un savoir procédural important.<br />

Ce dernier a envie de savoir reconnaître un effet<br />

indésirable, quoi faire en cas d’oubli de prise et aussi repérer<br />

ses pertes de motivation. Les ruptures d’observance thérapeutique<br />

représentent une cause majeure dans la survenue de<br />

complications et de la détérioration de la santé des patients,<br />

aussi des activités doivent-elles être conduites en néphrologie<br />

sur le vécu des traitements sans culpabiliser le patient. Il s’agit<br />

de partir de l’expérience subjective que le patient a de sa<br />

maladie, des questions que la maladie ou ses traitements lui<br />

posent et de voir avec lui ses priorités d’apprentissage. Ces<br />

apprentissages sont surtout des apprentissages expérientiels,<br />

existentiels visant à aider le patient à continuer son développement<br />

et sa croissance personnels.<br />

“ Points importants<br />

Éducation thérapeutique 18-067-B-10<br />

Compétences d’autosoins en néphrologie<br />

Les compétences d’autosoins désignent les activités de<br />

soin et d’autosurveillance à conduire par le patient dans<br />

sa vie quotidienne.<br />

Exemples :<br />

prise de pression artérielle ;<br />

repérage par le patient de la survenue de certains<br />

symptômes (œdèmes des membres inférieurs, perte<br />

d’appétit, fatigue intense) ;<br />

auto-observation de signes d’aggravation ;<br />

savoir repérer une perte de motivation, la survenue de<br />

situations stressantes ;<br />

prendre des décisions pour soi, prendre soin de soi ;<br />

apprentissage des conduites à tenir en cas d’effets<br />

secondaires ;<br />

que faire en cas d’oubli de prise de traitement, en cas<br />

de douleur ? ;<br />

connaissance des équivalences alimentaires.<br />

Compétences psychosociales<br />

Les compétences psychosociales désignent les savoir-être<br />

et savoir-faire que le patient doit maîtriser pour vivre au<br />

mieux avec sa maladie chronique. Elles désignent aussi le<br />

travail à effectuer par le patient pour faire face à l’impact<br />

social de la maladie ou à la lourdeur des soins.<br />

Exemples de compétences psychosociales en<br />

néphrologie :<br />

maintenir ses capacités fonctionnelles le plus<br />

longtemps possible ;<br />

maintenir son degré de socialisation (prévenir<br />

l’isolement et le retrait social liés à l’âge et aux restrictions<br />

alimentaires) ;<br />

savoir expliquer sa maladie aux autres référents<br />

médicaux ;<br />

savoir parler de la maladie et de ses contraintes à son<br />

entourage tout en défendant une bonne image de soi ;<br />

maintenir une bonne estime de soi (en dialyse les<br />

patients se sentent un poids pour leur famille) ;<br />

savoir prendre les décisions adaptées (projet de vie<br />

professionnel, familial ou personnel) selon les stades de la<br />

maladie ou les contraintes de certains soins ;<br />

poursuivre sa croissance et son développement<br />

personnel ;<br />

participer au monde associatif et s’intéresser à l’action<br />

collective en santé (sentiment d’appartenance collective,<br />

réduction du sentiment de solitude particulier à la<br />

maladie).<br />

3


18-067-B-10 Éducation thérapeutique<br />

Construire les programmes d’éducation<br />

thérapeutique avec les patients<br />

Aucune action d’éducation ou de formation des adultes ne<br />

peut, par définition, se conduire sans la participation active de<br />

l’apprenant ou du formé. L’évolution du système d’organisation<br />

des soins et du système de santé a été amenée à laisser une<br />

place centrale aux usagers de santé dans les décisions qui les<br />

concernent. Le partage d’expériences et le soutien mutuel sont<br />

reconnus comme des méthodologies valides en éducation pour<br />

la santé. C’est en s’aidant de l’expérience des autres que les<br />

patients peuvent interroger leurs stratégies personnelles et les<br />

modifier. Il s’agit de proposer aux patients de véritables ateliers<br />

de coapprentissage en groupe.<br />

À ce titre, la loi HPST, en confiant aux associations de<br />

patients des fonctions d’accompagnement, n’a fait qu’entériner<br />

ce qui existait déjà dans de multiples pathologies, notamment<br />

dans l’infection au VIH. En néphrologie, il existe peu d’associations<br />

présentes sur les lieux de soin, peu de bénévoles sont<br />

formés à l’animation des groupes, à l’écoute active, à la<br />

conduite du plaidoyer, aux thérapeutiques. Il est important<br />

d’initier, à l’occasion de la conception de programmes d’éducation<br />

thérapeutique, des contacts avec des associations de<br />

patients afin d’explorer avec eux leurs besoins spécifiques, mais<br />

aussi de les inviter à une participation active à chaque étape de<br />

la construction du programme jusqu’à son implantation. Il ne<br />

s’agit pas de recruter un patient modèle mais de construire avec<br />

des patients des parties du programme et de leur déléguer<br />

l’animation d’ateliers pédagogiques tout en leur proposant<br />

d’intégrer les dispositifs de formation en éducation thérapeutique<br />

et c’est ce que nous avons fait en permettant à des patients<br />

des associations de s’inscrire à notre diplôme universitaire en<br />

éducation thérapeutique à l’Université Pierre-et-Marie-Curie.<br />

Les patients possèdent des savoirs d’expérience et des savoirs<br />

existentiels qui sont une ressource essentielle pour l’éducation<br />

thérapeutique.<br />

Il existe de nombreux outils pédagogiques en éducation<br />

thérapeutique en néphrologie, mais la majorité d’entre eux sont<br />

encore circonscrits à l’apprentissage du maniement des médicaments<br />

alors que les patients demandent l’accès à des savoirfaire<br />

et des savoir-être relevant de la communication sociale.<br />

Une part de l’éducation en néphrologie, au regard de la<br />

spécificité de notre population, devrait être consacrée à l’amélioration<br />

de la communication avec l’entourage (de nombreux<br />

patients en dialyse se vivent comme un poids pour leur entourage)<br />

et à la lutte contre la perte d’estime de soi et de la<br />

confiance en soi.<br />

Une autre part devrait porter sur des débats, à l’intérieur de<br />

la néphrologie, sur des questions encore en suspens comme la<br />

demande d’arrêt de la dialyse, la douleur des soins, la solitude,<br />

le vieillissement, la préparation à la transplantation et la mise<br />

en place de dispositifs d’accompagnement sur le long cours<br />

après la greffe.<br />

■ Quelle formation pour les acteurs<br />

de l’éducation thérapeutique ?<br />

Tout programme d’éducation thérapeutique doit être animé<br />

par une équipe pluridisciplinaire (médecin, infirmière, diététicienne,<br />

pharmacien, psychologue, etc.) ayant au préalable<br />

bénéficié d’au moins une formation courte de 3à6jours dans<br />

la mesure où l’adoption d’une posture pédagogique ne s’improvise<br />

pas. En revanche, l’acquisition de compétences par les<br />

soignants pour la conception, la réalisation et l’évaluation de<br />

programmes d’éducation nécessitent une formation universitaire<br />

de type diplôme d’université (DU).<br />

La transmission des savoirs et de compétences au patient fait<br />

appel chez les soignants à des capacités relationnelles et<br />

pédagogiques qui pour certaines d’entre elles diffèrent de<br />

l’exercice des compétences nécessaires au soin. Les compétences<br />

pédagogiques et relationnelles font appel à l’apprentissage de<br />

postures d’écoute et à la maîtrise de techniques de communication,<br />

notamment en ce qui concerne l’animation des groupes<br />

qui diffère du colloque singulier médecin-patient.<br />

L’introduction de l’éducation dans le soin soulève une<br />

difficulté : la motivation à apprendre. En effet, le savoir ne se<br />

transmet pas dans n’importe quelles conditions. Il suppose que<br />

les équipes médicales sachent créer un climat pédagogique<br />

d’apprentissage qui donne envie aux patients de participer aux<br />

activités qui leur sont proposées.<br />

L’éducation thérapeutique se pratique sous forme de séances<br />

individuelles d’une durée de 30 à 45 minutes ou d’ateliers en<br />

petits groupes de 6 à 10 patients animés par des soignants<br />

possédant des compétences de base dans l’animation de<br />

groupes.<br />

Dispositifs de formation des professionnels<br />

de santé à l’éducation thérapeutique<br />

L’enseignement relatif à la qualité de vie et à l’éducation du<br />

patient est en voie de développement dans la formation initiale<br />

et continue des professionnels de santé.<br />

Il s’agit d’introduire des modules de sensibilisation et de<br />

formation des professionnels à l’éducation thérapeutique.<br />

En dehors de l’intégration de l’éducation du patient dans la<br />

formation médicale et paramédicale initiale, il existe trois<br />

modèles de formation :<br />

une filière courte de sensibilisation de 3à5jours avec remise<br />

d’une attestation par un organisme légitime ;<br />

une filière diplômante de type DU comportant 90 à 120 heures<br />

d’enseignement. Le niveau DU a pour objectif l’acquisition<br />

des compétences requises pour la conception et la<br />

réalisation de programmes d’éducation et chaque région de<br />

France dispose d’un diplôme universitaire en éducation du<br />

patient ;<br />

le niveau Master est requis pour les professionnels en charge<br />

de la coordination de l’éducation thérapeutique, ou de<br />

l’implantation d’unités transversales d’éducation dans les<br />

hôpitaux ainsi que pour la participation à l’élaboration de<br />

projets de recherche.<br />

■ Efficacité des programmes<br />

d’éducation thérapeutique<br />

dans les maladies chroniques<br />

Les résultats des études, l’observation des pratiques sur le<br />

terrain, les avis des experts ont conduit les professionnels et les<br />

promoteurs de programmes d’éducation thérapeutique à identifier<br />

trois domaines majeurs d’évaluation : le domaine bioclinique,<br />

le domaine psychosocial et le domaine pédagogique.<br />

Les évaluations dans le domaine bioclinique mesurent les<br />

changements intervenus au niveau biologique ou clinique à la<br />

suite du programme d’éducation. Ainsi, on retrouve à titre<br />

d’exemple comme critères le taux d’hémoglobine glyquée<br />

(diabète), l’index de masse corporelle (obésité), la pression<br />

artérielle (hypertension), la charge virale (infection au VIH), la<br />

réduction du nombre de crises (asthme), le retard de l’apparition<br />

de complications (maladies cardiovasculaires) et la réduction<br />

du nombre de réhospitalisations.<br />

Les évaluations dans le domaine psychosocial mesurent<br />

l’impact du programme sur les déterminants psychosociaux de<br />

la santé. Les critères utilisés portent sur des indicateurs comme<br />

la mesure de la qualité de vie, la satisfaction du patient, la<br />

réduction du stress et de l’anxiété, le degré de soutien social de<br />

son entourage, l’amélioration de son sentiment d’autoefficacité<br />

et le retour des capacités d’anticipation à la suite d’évènements<br />

cliniques sévères.<br />

Les évaluations dans le domaine pédagogique portent sur les<br />

apprentissages, l’acquisition de compétences, et aussi sur les<br />

pédagogies utilisées, les supports et les outils. Elles concernent<br />

tout ce qui a trait au programme d’éducation proprement dit<br />

4 Néphrologie


comme ses contenus, les compétences des intervenants, les<br />

techniques d’animation, et surtout les liens entre les objectifs<br />

pédagogiques, le choix des séquences d’activité et leurs résultats<br />

en termes d’acquisition par le patient.<br />

Dans l’idéal, un programme d’éducation devrait pouvoir<br />

bénéficier des trois types d’évaluation afin de les corréler. Dans<br />

la pratique de terrain, les équipes doivent au moins s’efforcer de<br />

rédiger par écrit les contenus de leur programme, établir une<br />

courte évaluation à la fin de chaque séance d’éducation en<br />

individuel ou en groupe portant sur les éléments suivants :<br />

quel est l’objectif principal de chaque activité proposée ?<br />

comment chaque patient a réagi en termes de satisfaction et<br />

d’apprentissage ?<br />

quelles ont été les questions posées par les patients au cours<br />

de la séance ?<br />

est-ce que l’activité nécessite des modifications ou des<br />

variantes ?<br />

en quoi est-elle utile à l’amélioration de la santé et de la<br />

qualité de vie du patient ?<br />

■ Éducation thérapeutique<br />

en néphrologie<br />

De nombreux programmes d’éducation existent en néphrologie.<br />

En fait, souvent les équipes se spécialisent sur des évènements<br />

médicaux comme la dialyse ou la transplantation, sur les<br />

soins au long cours, sur la prévention de la détérioration de la<br />

fonction rénale, sur l’observance thérapeutique, sur la diététique,<br />

sur la douleur, sur la reprise de l’activité physique. Il est<br />

rare, par manque de moyens en ressources humaines, qu’une<br />

équipe puisse répondre à la globalité des besoins de tous les<br />

patients d’un service de néphrologie. Il existe un groupe de<br />

travail sur l’éducation thérapeutique à l’intérieur de la Société<br />

francophone de néphrologie et plusieurs équipes de néphrologie<br />

sont engagées dans la formation et l’animation de cursus<br />

universitaires diplômants comme des DU et des Masters en<br />

éducation à la santé ou en éducation thérapeutique.<br />

■ Conclusion<br />

Tout apprentissage pour le patient ne peut lui être bénéfique<br />

que lorsqu’il se sent en accord avec ce qu’il ressent. Cela<br />

commence souvent par pouvoir penser ce que représente la<br />

maladie pour soi et non pas pour son entourage, qui souvent<br />

voit celle-ci comme essentiellement négative ! De même, on ne<br />

peut commencer à s’occuper de soi que si on a fait le point sur<br />

ce qui nous arrive, sur ce qu’on va pouvoir en faire pour vivre<br />

en restant au plus près de ses vraies valeurs, quitte à modifier<br />

son système personnel de valeurs s’il n’est plus opérant !<br />

Enseigner aux patients suppose pour les soignants de pouvoir<br />

enseigner l’importance de la liberté d’être, d’agir, de faire des<br />

choix. « Nous entrons là dans un univers théorique strictement<br />

contraire à l’univers prescriptif qui prédomine en France dans<br />

le soin. Un patient ne peut bénéficier d’un programme d’éducation<br />

et d’accompagnement thérapeutique que s’il est prêt à<br />

entrer dans un univers formatif pour lui. Il faut cesser<br />

d’employer les nouvelles expressions culpabilisantes comme « se<br />

prendre en charge », surtout dans des contextes médicaux où le<br />

sentiment d’impuissance, la fatigue, l’épuisement, la dépendance<br />

ont de tels retentissements émotionnels que le patient vit<br />

sa condition médicale « comme une charge trop lourde pour<br />

lui » [19] .<br />

Tout l’art de l’accompagnement dans l’éducation thérapeutique<br />

consiste à la fois à redonner le pouvoir sur lui-même au<br />

patient et en même temps à le décharger, quand il en a besoin,<br />

de la charge trop lourde que sa pathologie ou ses traitements<br />

peuvent occasionner dans sa vie.<br />

Néphrologie<br />

.<br />

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Pour en savoir plus<br />

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C. Isnard Bagnis, Professeur de néphrologie (corinne.bagnis@psl.aphp.fr).<br />

Groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière et Université Pierre et Marie Curie, 91-105, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Tourette-Turgis C., Isnard Bagnis C. Éducation thérapeutique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-067-B-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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au patient<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

6 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0492<br />

Élévation de la créatininémie :<br />

que faire ?<br />

L a<br />

H Izzedine<br />

créatininémie est un paramètre très utile pour apprécier la fonction rénale. Utiliser et interpréter correctement<br />

le dosage de la créatninémie permet de ne pas sous-estimer l’importance de la dégradation de la fonction<br />

rénale. En effet, une élévation même modérée de la créatininémie impose le calcul de sa clairance et peut révéler une<br />

insuffisance rénale déjà importante.<br />

© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : créatininémie, clairance de la créatinine, insuffisance rénale.<br />

■ Généralités<br />

L’insuffisance rénale est très fréquente. C’est un<br />

indicateur de morbidité et de mortalité (encadré). Il<br />

est donc essentiel de la dépister le plus rapidement<br />

possible.<br />

Plusieurs paramètres peuvent « habituellement »<br />

être utilisés pour apprécier la fonction rénale.<br />

L’urée plasmatique, sujette à de multiples<br />

variations (encadré), est un mauvais marqueur de la<br />

fonction rénale. La créatininémie est le paramètre le<br />

plus utile pour apprécier la fonction rénale [6] . Une<br />

élévation modérée impose le calcul de sa clairance<br />

qui peut révéler une insuffisance rénale déjà<br />

importante. La cystatine C est une protéinase<br />

inhibitrice de la cystéine produite par toutes les<br />

cellules nucléées. Elle est exclusivement éliminée par<br />

le glomérule. IL s’agirait d’un marqueur fiable de la<br />

fonction rénale [1, 9, 10, 11, 12, 13, 14] . Son réel intérêt est<br />

en cours d’évaluation.<br />

Créatininémie<br />

■<br />

:<br />

le dosage le plus utile<br />

‚ Créatinémie<br />

La créatinine est un dérivé du métabolisme de la<br />

créatinine du muscle squelettique. Elle est librement<br />

filtrée par le glomérule, et n’est en théorie ni<br />

réabsorbée, ni synthétisée, ni métabolisée dans le<br />

rein. Cependant, une quantité variable est sécrétée<br />

au niveau du tubule proximal. Pour une fonction<br />

rénale normale, la créatininémie est comprise entre<br />

8 et 13 mg/L (70 à 115 µmol/L) chez l’homme et 6 à<br />

10 mg/L (55 à 90 µmol/L) chez la femme, la limite<br />

supérieure normale correspondant à une clairance<br />

de cette substance supérieure à 80 mL/min. Les<br />

travaux de Couchoud et al [6] ont établi qu’un<br />

dépassement, même modéré, de cette limite<br />

supérieure était lié à une diminution significative de<br />

la clairance rénale. Ainsi, une valeur de la<br />

L’insuffisance rénale : un indicateur<br />

de morbidité et de mortalité<br />

✔ 18 % des patients hypertendus ont<br />

une créatininémie supérieure à<br />

12 mg/L, ce qui signifie une<br />

clairance de la créatinine inférieure<br />

à 50 mL/min [15] ;<br />

✔ 30 % des sujets américains de plus<br />

de 70 ans ont une créatininémie<br />

supérieure à 15 mg/L [15] .<br />

Dans l’étude HOT [15] , une<br />

créatininémie supérieure à 15 mg/L<br />

élève la mortalité d’un facteur de 4,8.<br />

Une insuffisance rénale aiguë est<br />

observée chez 40 % des transplantés de<br />

moelle<br />

[18, 19]<br />

et 50 % des patients en<br />

unité de soins intensifs [2] .<br />

La mortalité des patients transplantés<br />

de moelle est de 53,2 et 29,7 % selon<br />

qu’il existe ou non une insuffisance<br />

rénale aiguë [18] .<br />

L’urée plasmatique, un mauvais<br />

marqueur<br />

Variations de l’urée plasmatique<br />

✔ Augmentation de l’urée<br />

plasmatique :<br />

– alimentation riche en protéines ;<br />

– catabolisme tissulaire ;<br />

– hémorragie digestive ;<br />

– hypovolémie efficace ;<br />

– insuffisance rénale ;<br />

– corticothérapie.<br />

✔ Diminution de l’urée plasmatique :<br />

– régime pauvre en protéines ;<br />

– hépatopathies.<br />

créatininémie à 137 µmol/L pour un homme<br />

(104 µmol/L pour une femme) coïnciderait avec une<br />

clairance de l’inuline de 60 mL/min/1,73 m_ et un<br />

1<br />

taux à 177 µmol/L pour un homme (146 µmol/L<br />

pour une femme) à une clairance de<br />

30 mL/min/1,3 m_.<br />

‚ Clairance de la créatinine : un marqueur<br />

sensible<br />

La mesure du débit de filtration glomérulaire<br />

repose sur le concept de clairance rénale d’une<br />

substance (polysaccharide inuline ou iodothalamate<br />

marqué) possédant les propriétés suivantes :<br />

– capable d’atteindre une concentration stable<br />

dans le plasma ;<br />

– librement filtrée dans le glomérule ;<br />

– non réabsorbée, sécrétée, synthétisée ou<br />

métabolisée dans le rein.<br />

La clairance rénale d’une telle substance en<br />

mL/min représente le volume de plasma totalement<br />

épuré de la substance par les reins en 1 minute. En<br />

pratique, c’est la clairance de la créatinine qui est<br />

calculée.<br />

Facteurs<br />

■<br />

de variation<br />

de la créatinine et de sa clairance<br />

‚ Influence du poids, du sexe, de l’âge<br />

et de la race<br />

Sur la créatininémie<br />

5-0492<br />

La créatininémie est dépendante de la masse<br />

musculaire. À poids égal, la masse musculaire d’un<br />

Noir est légèrement supérieure à celle d’un Blanc<br />

(respectivement 32,5 et 28,7 % [5, 17] ), expliquant un<br />

taux normal de créatinine kinase plus élevé chez le<br />

premier [17] . La concentration plasmatique de la<br />

créatinine est relativement stable mais surestimée<br />

d’environ 10 à 20 % par les dosages les plus<br />

courants du fait de chromogènes non créatinine<br />

(acétone, acide ascorbique) mesurés comme étant<br />

de la créatinine.<br />

En pratique, la créatininémie doit être interprétée<br />

en fonction de l’âge et de la masse musculaire. Ainsi,<br />

un homme de 30 ans et une femme de 80 ans qui


5-0492 - Élévation de la créatininémie : que faire ?<br />

pèsent 80 kg et dont la créatininémie est de<br />

115 µmol/L ont respectivement un débit de filtration<br />

glomérulaire de l’ordre de 95 et 45 mL/min.<br />

Sur la clairance de la créatinine<br />

La réalisation d’une clairance de l’inuline ou d’un<br />

isotope radioactif est compliquée et donc réservée à<br />

des centres spécialisés. La méthode la plus<br />

couramment utilisée pour estimer le débit de<br />

filtration glomérulaire est donc la clairance de la<br />

créatinine endogène. La production de la créatinine<br />

est relativement constante et son excrétion est<br />

approximativement égale à la quantité de créatinine<br />

filtrée. Ainsi, la concentration plasmatique de<br />

créatinine varie inversement avec le débit de<br />

filtration glomérulaire (courbe). Les valeurs normales<br />

de la clairance de la créatinine chez l’adulte sont de<br />

120 ± 20 mL/min chez l’homme et de 95<br />

± 20 mL/min chez la femme.<br />

Par ailleurs, à paramètres égaux (âge, sexe, poids),<br />

le débit de filtration glomérulaire des Noirs est<br />

supérieur d’un facteur 1,18 [17] à celui des Blancs.<br />

‚ Impact de l’insuffisance rénale<br />

Sur la créatininémie (fig 1)<br />

Chez le sujet à fonction rénale anormale, la<br />

créatininémie ne commence à augmenter de façon<br />

sensible que lorsque le débit de filtration<br />

glomérulaire est abaissé d’au moins 40 %.<br />

Sur la clairance de la créatinine<br />

Chez le patient insuffisant rénal, la clairance de la<br />

créatinine mesurée à partir des urines de 24 h<br />

surestime le débit de filtration glomérulaire du fait<br />

d’une sécrétion tubulaire de créatinine. À cet<br />

inconvénient majeur s’associe souvent un second<br />

inconvénient lié à un recueil d’urine incomplet. Aussi,<br />

on propose en pratique courante d’estimer la<br />

clairance de la créatinine (Clcr) à l’aide de la formule<br />

de Cockcroft et Gault [4] :<br />

Clcr =<br />

[(140-âge) x poids (kg) x K<br />

0,814 x Pcréat (µmol/L)<br />

Avec Pcréat = valeur de la créatinine<br />

plasmatique ;K=1chez l’homme et 0,85 chez la<br />

femme ou 0,814 au dénominateur peut être<br />

remplacé par 7,2 lorsque la créatinine plasmatique<br />

est exprimée en mg/L.<br />

Ou par la formule simplifiée :<br />

Clcr =<br />

[1,2 x (140-âge) x poids (kg) x K<br />

Créatininémie (µmol/L)<br />

AvecK=1chez l’homme et 0,85 chez la femme.<br />

Néanmoins, cette méthode sous-estime le débit<br />

de filtration glomérulaire en cas d’insuffisance<br />

rénale.<br />

Particularités<br />

■<br />

chez les personnes âgées<br />

En effet, s’il est vrai qu’il n’y a pas de vieillissement<br />

rénal obligatoire chez les personnes âgées, il n’en<br />

demeure pas moins que l’essentiel de la population<br />

gériatrique, pour des raisons diverses (hypertension<br />

artérielle, diabète, toxiques…), a une fonction rénale<br />

notablement réduite. Sur 2 018 malades, âgés de 85<br />

1<br />

Créatininémie<br />

μmol/L<br />

880<br />

x<br />

352<br />

176<br />

88<br />

ans plus ou moins 7 ans (extrêmes 70–103 ans), la<br />

clairance de la créatinine estimée par la formule de<br />

Cockcroft et Gault était de 35 plus ou moins<br />

15 mL/min avec une créatininémie moyenne de<br />

113 plus ou moins 56 µmol/L [3] . Il est vrai que le<br />

travail de Cockcroft et Gault n’a pas été réalisé dans<br />

une population gériatrique, qu’il mériterait d’être<br />

repris dans ce cas particulier, mais il est couramment<br />

admis que, même imprécise, cette évaluation est<br />

utile en clinique et qu’elle n’est pas plus imprécise<br />

qu’une mesure de la clairance de la créatinine<br />

réalisée avec recueil d’urine dont on connaît les<br />

difficultés en gériatrie [8, 16] . L’évaluation de la<br />

fonction rénale par la mesure de la filtration<br />

glomérulaire par décroissance plasmatique de<br />

produit marqué n’étant pas accessible en routine, il<br />

x<br />

30<br />

x<br />

60 120<br />

90<br />

DFG mL/min<br />

Tableau I. – Comment prévenir l’insuffisance rénale aiguë (IRA) médicamenteuse ? Les règles<br />

d’or.<br />

Patient Traitement<br />

Peser les indications Choix d’un médicament en tenant compte de son<br />

élimination prédominante rénale ou hépatique<br />

Évaluation précise de la fonction rénale Choix de la dose adaptée à la fonction rénale<br />

- créatininémie Choix de la voie d’administration<br />

- clairance de la créatinine Choix du nombre d’administrations par jour<br />

- formule de Cockcroft et Gault Vérification des interactions médicamenteuses<br />

Surveiller la tolérance rénale au traitement : Optimisation des conditions d’administration d’un<br />

médicament ou de réalisation d’un examen :<br />

- signes d’altération de la filtration glomérulaire : - hydratation avant injection de produits de<br />

créatininémie, urée, kaliémie, réserve alcaline, iono- contraste iodés<br />

gramme sanguin<br />

- élimination d’une sténose de l’artère rénale avant<br />

- signes de tubulopathie : hypokaliémie, hypo- prescription d’un IEC ou d’un antagoniste des réuricémie,<br />

hypophosphorémie, glycosurie, acidose cepteurs AT1 de l’angiotensine II<br />

- signes de rétention hydrosodée : poids, œdèmes,<br />

pression artérielle<br />

- signes de réaction immunoallergique : rash cutané,<br />

prurit, fièvre, hyperéosinophilie<br />

- signes de glomérulopathie : protéinurie, albuminémie<br />

En pratique<br />

L’insuffisance rénale aiguë ou chronique est une maladie très fréquente et un<br />

indicateur de morbidité et de mortalité.<br />

L’urée plasmatique est un mauvais marqueur de la fonction rénale.<br />

La créatininémie est l’indicateur le plus utile pour évaluer la fonction rénale.<br />

Toutefois, une élévation même modérée de la créatinine plasmatique peut révéler une<br />

insuffisance rénale déjà importante, d’où la nécessité d’en calculer la clairance.<br />

En pratique courante, la clairance de la créatinine est estimée par la formule de<br />

Cockcroft et Gault.<br />

2<br />

apparaît raisonnable chez les personnes âgées<br />

d’approcher la valeur de la fonction rénale par<br />

l’estimation de la clairance de la créatinine.<br />

Créatininémie<br />

■<br />

élevée<br />

(tableau I) (fig 2)<br />

Conclusion<br />

■<br />

En pratique clinique quotidienne, pour apprécier<br />

la fonction rénale, il faut utiliser le taux sanguin de<br />

créatinine et sa clairance estimée par la formule de<br />

Cockcroft.


Na/K ur > 1**<br />

Urée U/P < 10<br />

± petite Hu<br />

petite Pu<br />

Nécrose tubulaire<br />

aiguë (80 %)<br />

± PBR si évolution<br />

atypique<br />

Ischémique<br />

Pigmentaire<br />

Iatrogènes, toxiques<br />

Obstruction tubulaire<br />

Docteur j'ai une créatininémie élevée<br />

Insuffisance rénale<br />

Une élévation, même modérée, de la<br />

créatininémie correspond, en règle, à une altération<br />

importante de la fonction rénale. Ainsi, une attention<br />

particulière est requise dans le cadre de la<br />

Prise médicamenteuse<br />

(Triméthoprime,tétracycline, fenofibrate)<br />

Effort physique récent<br />

Non<br />

Créatinine antérieure<br />

Taille des reins<br />

Créatinine antérieure normale<br />

Reins de taille normale ou augmentée<br />

Peut évoluer vers<br />

IRA IRC<br />

URGENCE ?<br />

Anurie<br />

Hyperkaliémie<br />

Acidose métabolique sévère<br />

OAP, hyponatrémie aiguë<br />

HTA maligne<br />

MÉCANISME ?<br />

Hypo-TA, pli cutané<br />

Na/K ur < 1**<br />

Urée U/P > 10<br />

IRA fonctionnelle<br />

30%<br />

Pu > 2 g/j<br />

Pu + Hu<br />

HTA<br />

GN<br />

aiguë (5 %)<br />

GNA<br />

GN rapidement<br />

progressive<br />

}<br />

Globe vésical, pelvien<br />

CPC<br />

dilatées (écho)<br />

IRA obstructive<br />

10%<br />

Leucocyturie<br />

± Hu<br />

Pu < 2g/j<br />

Immunoallergique,<br />

infectieuse, toxique,<br />

médicamenteuse,<br />

immunologique<br />

Oui<br />

Refaire le dosage après exclusion<br />

de l'agent causal<br />

Sujet noir, athlétique<br />

(à prendre en considération)<br />

Créatininémie<br />

élevée<br />

Créatinine antérieure élevée<br />

Reins de taille diminuée*<br />

Traitement symptomatique immédiat<br />

Hospitalisation en unité de soins intensifs<br />

Iono-urinaire, biochimie, ECBU, échographie rénale<br />

N. interstitielles<br />

aiguës (10 %)<br />

Créatinine normale<br />

= fausse créatininémie<br />

élevée<br />

Na/K ur > 1**<br />

Urée U/P < 10<br />

CPC non dilatées<br />

IRA organique<br />

60%<br />

HTA +++<br />

Hu ± petite Pu<br />

douleurs lombaires<br />

LDH élevés<br />

Néphropathies vasculaires<br />

aiguës (5 %)<br />

PBR Doppler des vaisseaux rénaux<br />

Emboles de cholestérol<br />

Vascularités<br />

Thrombose vasculaire<br />

MAT<br />

prescription médicamenteuse chez le sujet âgé [7] .<br />

Une adaptation posologique est le plus souvent<br />

nécessaire et la prescription d’un agent<br />

néphrotoxique devrait être arrêtée dès que la<br />

3<br />

Élévation de la créatininémie : que faire ? - 5-0492<br />

2 * Exception : insuffısance rénale chronique (IRC) à<br />

reins de taille normale ou augmentée (polykystose rénale,<br />

amylose, diabète, virus de l’immunodéficience humaine,<br />

infiltration lymphomateuse, thrombose des veines<br />

rénales).<br />

** En l’absence de traitement diurétique.<br />

IRA : insuffısance rénale aiguë ; OAP : œdème aigu du<br />

poumon ; HTA : hypertension artérielle ; TA : tension<br />

artérielle ; GN : glomérulonéphrite ; GNA : glomérulonéphrite<br />

aiguë ; U/P : urinaire/plasmatique ; Pu : protéinurie<br />

; Hu : hématurie ; ur : urinaire ; CPC : cavités<br />

pyélocalicielles ; PBR : ponction-biopsie rénale ; MAT :<br />

microangiopathie thrombotique.<br />

clairance de la créatinine est inférieure à 60 mL/min,<br />

ce qui correspond à une créatininémie de<br />

137 µmol/L chez l’homme et de 104 µmol/L chez la<br />

femme.


5-0492 - Élévation de la créatininémie : que faire ?<br />

Hassan Izzedine : Chef de clinique assistant,<br />

service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Izzedine. Élévation de la créatininémie : que faire ?<br />

Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0492, 2003,4p<br />

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Plan<br />

Énurésie de l’enfant<br />

H. Lottmann, I. Alova<br />

L’énurésie nocturne se définit comme une incontinence intermittente pendant le sommeil chez des<br />

enfants âgés d’au moins 5 ans. L’énurésie nocturne est à la fois un symptôme et un état pathologique.<br />

L’énurésie est dite primaire si l’enfant n’a jamais eu de période de continence d’au moins 6 mois<br />

consécutifs durant le sommeil et qualifiée d’isolée ou monosymptomatique s’il n’existe aucun autre<br />

symptôme associé, en particulier diurne, relevant du bas appareil urinaire. On distingue<br />

schématiquement deux formes principales d’énurésie isolée : une forme polyurique pure avec capacité<br />

fonctionnelle vésicale normale et une forme non polyurique caractérisée par une faible capacité vésicale.<br />

Diverses combinaisons existent entre ces deux formes. Le diagnostic positif d’énurésie nocturne est avant<br />

tout clinique. Il repose sur l’interrogatoire et l’examen physique. L’interrogatoire élimine les troubles<br />

mictionnels diurnes et précise les caractéristiques de l’énurésie. L’examen clinique élimine une pathologie<br />

neurologique ou une malformation urologique. La prise en charge de l’énurésie passe en première<br />

approche par une démarche d’information et d’éducation. Les patients motivés et non guéris par les<br />

seules prescriptions hygiénodiététiques devraient recevoir en complément un traitement spécifique, par<br />

desmopressine et/ou alarme, en fonction du type d’énurésie. Des traitements combinés et d’autres<br />

alternatives thérapeutiques non spécifiques peuvent être proposés dans les énurésies réfractaires. Le suivi<br />

pendant et à l’arrêt du traitement est un élément essentiel du succès, qui reste inconstant.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Énurésie de l’enfant ; Incontinence ; Polyurie nocturne ; Capacité vésicale ; Desmopressine<br />

Introduction 1<br />

Définition 1<br />

Épidémiologie 2<br />

Physiopathologie 3<br />

Polyurie nocturne 3<br />

Capacité vésicale fonctionnelle 4<br />

Sommeil et éveil 4<br />

Facteurs génétiques 4<br />

Autres causes 4<br />

Retentissement psychosocial de l’énurésie 5<br />

Répercussions sur l’enfant 5<br />

Autres corrélations 5<br />

Répercussions sociofamiliales 5<br />

Orientation diagnostique 6<br />

Interrogatoire 6<br />

Examen clinique 6<br />

Examens complémentaires 6<br />

Prise en charge 6<br />

Conseils hygiénodiététiques 6<br />

Traitements 7<br />

Conclusion 9<br />

■ Introduction<br />

Les troubles mictionnels constituent un motif fréquent de<br />

consultation en pédiatrie. Ils sont source d’inquiétude et/ou<br />

Urologie<br />

d’agacement, du fait de leurs répercussions sur la vie familiale<br />

ou sociale. L’énurésie nocturne, désignée familièrement par<br />

l’expression « pipi-au-lit », a longtemps été considérée comme<br />

une affection appartenant aux troubles du comportement ou<br />

aux troubles psychiatriques de l’enfant avant d’être reconnue<br />

comme un trouble mictionnel à part entière. Sa prise en charge<br />

suppose une définition consensuelle, une compréhension des<br />

mécanismes physiopathologiques, une évaluation clinique<br />

simple mais rigoureuse et un éventuel traitement adapté à<br />

chaque cas.<br />

■ Définition<br />

18-207-E-10<br />

Les définitions utilisées dans cet article sont celles établies en<br />

2006 par l’International Children’s Continence Society (ICCS) [1]<br />

et celles de l’Association française d’urologie [2] . L’incontinence<br />

urinaire désigne une perte d’urine incontrôlable, permanente ou<br />

intermittente. L’énurésie nocturne se définit comme une<br />

incontinence intermittente survenant pendant le sommeil chez<br />

des enfants âgés d’au moins 5 ans. Le terme d’énurésie nocturne<br />

désigne à la fois un symptôme et un état pathologique. L’enfant<br />

atteint d’énurésie nocturne urine dans son lit alors qu’il est<br />

endormi et n’est généralement pas réveillé par le fait d’être<br />

mouillé. En fonction de critères nosologiques, des sousclassifications<br />

ont été définies, avec des prises en charge<br />

adaptées à chaque catégorie. L’énurésie nocturne primaire<br />

correspond à des enfants qui n’ont jamais eu de période de<br />

continence nocturne pendant au moins 6 mois consécutifs (sans<br />

traitement) ; elle s’oppose à l’énurésie nocturne secondaire,<br />

définie comme la réapparition d’une incontinence nocturne<br />

après 6 mois ou plus de contrôle mictionnel. L’énurésie, d’autre<br />

1


18-207-E-10 Énurésie de l’enfant<br />

part, est qualifiée d’isolée ou monosymptomatique s’il n’existe<br />

aucun autre symptôme associé, en particulier diurne, relevant<br />

du bas appareil urinaire. Ainsi, la présence de symptômes<br />

cliniques survenant la journée tels qu’une fréquence anormale<br />

des mictions, une incontinence diurne, une impériosité mictionnelle,<br />

des efforts de poussée à la miction, des manœuvres de<br />

retenue (accroupissement, pincement de la verge), des cystalgies<br />

ou encore la présence de douleurs génitales, est évocatrice d’un<br />

dysfonctionnement du bas appareil urinaire et permet d’éliminer<br />

le diagnostic d’énurésie monosymptomatique (Fig. 1). En<br />

outre, on définit l’intensité de l’énurésie selon la fréquence des<br />

nuits mouillées. En se basant sur les seuils le plus souvent<br />

utilisés dans les études épidémiologiques ou thérapeutiques, il<br />

est possible de définir trois sous-groupes, en fonction du degré<br />

de sévérité : l’énurésie mineure (moins d’un épisode par<br />

semaine), l’énurésie moyenne (un ou deux épisodes par<br />

semaine) et l’énurésie sévère (au moins trois épisodes par<br />

semaine). Il n’existe toutefois pas de consensus sur cette<br />

définition.<br />

■ Épidémiologie<br />

Pertes d'urines incontrôlables = incontinence urinaire<br />

Incontinence permanente<br />

(Uropathies malformatives dont abouchements<br />

ectopiques, vessies neurologiques)<br />

Symptômes diurnes =<br />

énurésie non monosymptomatique<br />

Dysfonctions vésicales primitives ou secondaires :<br />

- fréquence anormale des mictions (> 8/j ou < 3/j)<br />

- incontinence diurne, fuites<br />

- impériosités mictionnelles non contrôlées<br />

- incontinence au rire<br />

- faux besoin<br />

- effort de poussée à la miction<br />

- faiblesse du jet, jet saccadé<br />

- manœuvres de retenue<br />

- sensation de vidange vésicale incomplète<br />

- gouttes résiduelles<br />

- dysurie, cystalgies ou douleurs génitales<br />

L’incidence réelle de l’énurésie est actuellement inconnue<br />

puisque la plupart des études épidémiologiques ont été conduites<br />

Incontinence urinaire nocturne intermittente<br />

Incontinence nocturne exclusive =<br />

énurésie monosymptomatique<br />

Modérée<br />

< 1/semaine<br />

Énurésie primaire<br />

Pas d’arrêt > 6 mois<br />

Moyenne<br />

1 à 2/semaine<br />

Sévère<br />

> 2/semaine<br />

Énurésie secondaire<br />

Reprise après arrêt > 6 mois<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Algorithme de définition de l’énurésie nocturne primaire isolée (d’après Aubert et al. [3] ).<br />

Tableau 1.<br />

Épidémiologie de l’énurésie nocturne.<br />

Prévalence de l’énurésie nocturne (%)<br />

Auteur Année Nombre 5 ans 7 ans 9 ans 11-12 ans 16-17 ans<br />

Yeung et al. [6] 2006 16 512 16,1 10,1 3,1 - -<br />

Spee-van der et al. [7] 1998 7 931 15 8 - 4,6 -<br />

Cher et al. [8] 2002 7 225 - 9 ,3 - 1 -7 -<br />

Hellstrom et al. [9, 10] 1990/1995 3 556/1 034 - 9 ,5 - - 0,5<br />

Kanaheswari [11] 2003 2 488 - 10,3 9,7 4,0 -<br />

Swithinbank et al. [12, 13] 1994/1998 1 176 - - - 4,7 1,1<br />

Lottmann [14] 2000 3 803 - 11,2 - - -<br />

Collet et al. [15] 1993 1 677 8,7 7,3 4 0,9 -<br />

Fergusson et al. [16] 1986 Ne précise pas la taille<br />

de l’échantillon<br />

10,3<br />

avant la standardisation des définitions et la distinction des<br />

divers sous-groupes d’énurésie. Une enquête récente, conduite en<br />

France en 2007 par TNS-Healthcare [4] sur 6 455 enfants âgés de<br />

6 à 14 ans, a révélé une prévalence de l’énurésie de 4,6 % (5,8 %<br />

dans le sous-groupe des enfants âgés de 6à10ans), les deux<br />

tiers (67 %) correspondant à une énurésie nocturne primaire.<br />

Dans presque la moitié des cas (46 %), l’énurésie était sévère (de<br />

trois à sept nuits mouillées par semaine). Ces résultats, observés<br />

10 ans après la précédente enquête TNS de 1997 [5] , réalisée sur<br />

3 803 enfants scolarisés âgés de 5 à 10 ans, suggèrent une<br />

évolution positive des pratiques médicales puisque la prévalence<br />

de l’énurésie primaire, dans cette précédente étude, était alors de<br />

9,2 % (11,2 % dans le sous-groupe des enfants âgés de 5 à<br />

7 ans). Ces chiffres sont également similaires à ceux d’autres<br />

études (Tableau 1) [6-16] . Il existe néanmoins possiblement, lors<br />

des interrogatoires des familles ou des enfants, une sousdéclaration,<br />

l’énurésie étant considérée comme dévalorisante<br />

pour l’enfant et sa famille. L’énurésie nocturne est plus fréquente<br />

chez les garçons que chez les filles dans la petite<br />

enfance, mais cette différence tend à s’atténuer à l’adolescence.<br />

Des études longitudinales sur l’histoire naturelle de l’énurésie<br />

ont montré que l’affection a tendance à guérir spontanément et<br />

chaque année environ 15 % des enfants voient disparaître leurs<br />

mictions nocturnes. Cependant, le concept selon lequel tous les<br />

2 Urologie


énurétiques sont guéris à la puberté est faux : l’énurésie existe<br />

aussi chez l’adulte. La prévalence de l’énurésie nocturne chez<br />

l’adulte, estimée à partir d’une population de jeunes adultes de<br />

19 ans en bonne santé, atteint 2,23 % [6] . Le risque, en outre,<br />

de rester énurétique à l’âge adulte pour un enfant de 7 ans<br />

souffrant d’énurésie primaire et non traité est estimé à3% [17] .<br />

■ Physiopathologie<br />

L’acquisition du contrôle mictionnel correspond à une<br />

maturation progressive des commandes neurologiques vésicosphinctériennes.<br />

Chez le nourrisson, le fonctionnement vessiesphincter<br />

est automatique et sous le contrôle prépondérant de<br />

centres médullosacrés. Puis, cette automaticité se trouve<br />

progressivement modulée par des centres bulbaires et encéphaliques<br />

supérieurs qui possèdent essentiellement un rôle inhibiteur<br />

sur la miction réflexe primitive. Chez l’enfant ayant acquis<br />

une maturation complète des voies nerveuses, lorsque la<br />

miction est autorisée, la relaxation sphinctérienne est synchrone<br />

de la contraction vésicale. Le fonctionnement vésicosphinctérien<br />

est coordonné. La continence normale est la résultante<br />

d’une maturation physiologique globale de la fonction mictionnelle<br />

entre l’âge de 1,5 an et 5 ans [18] . Les études épidémiologiques<br />

montrent qu’à l’âge de 5 ans 81 ± 1,8 % des enfants ont<br />

acquis leur continence nocturne [19] . L’énurésie n’est donc<br />

généralement considérée comme pathologique qu’au-delà de<br />

5 ans.<br />

La physiopathologie de l’énurésie primaire monosymptomatique<br />

est complexe, multifactorielle, et fait intervenir trois<br />

composantes essentielles, étroitement intriquées et associées à<br />

des degrés variables : l’excès de volume d’urine produit durant<br />

le sommeil, la réduction de la capacité vésicale fonctionnelle et<br />

l’élévation du seuil d’éveil nocturne. L’énurésie monosymptomatique<br />

correspond ainsi à une inadéquation entre le volume<br />

d’urine produit durant le sommeil et la capacité vésicale<br />

fonctionnelle. L’absence de réveil suite aux signaux de « vessie<br />

pleine » conduit à l’accident énurétique. L’identification de la<br />

forme prédominante – forme polyurique pure avec capacité<br />

fonctionnelle vésicale normale ou production d’urine normale<br />

avec faible capacité vésicale – est essentielle afin d’orienter le<br />

choix thérapeutique.<br />

Polyurie nocturne<br />

Une polyurie nocturne relative est retrouvée chez environ<br />

deux tiers des enfants ayant une énurésie nocturne monosymptomatique.<br />

Le terme de polyurie nocturne signifie que le ratio<br />

d’urine produite le jour par rapport à la quantité produite la<br />

nuit est inférieur à 1. Plusieurs facteurs semblent impliqués dans<br />

la survenue d’une polyurie nocturne chez l’enfant énurétique.<br />

En tout premier, une mauvaise répartition des boissons dans la<br />

journée : beaucoup d’enfants énurétiques boivent peu ou pas<br />

(adolescents) au petit déjeuner ; pratiquement rien durant la<br />

journée : le seul point d’eau offert par la plupart des écoles est<br />

un robinet dans les toilettes dont l’hygiène est souvent tellement<br />

douteuse que les enfants évitent de les fréquenter ; il est<br />

généralement interdit d’amener une bouteille d’eau dans son<br />

cartable et chez beaucoup d’enfants, dont les énurétiques, la<br />

charge hydrique quotidienne est absorbée dans la deuxième<br />

moitié de la journée après le retour de l’école. Malgré de<br />

nombreux rapports, aucune solution rationnelle et efficace n’a<br />

été proposée à ce jour à ce problème d’hygiène publique.<br />

Cependant, bien que tous les enfants soient concernés, tous ne<br />

sont pas énurétiques et d’autres facteurs interviennent chez ces<br />

derniers : l’inversion du rythme nycthéméral de la sécrétion de<br />

l’hormone antidiurétique, les troubles de régulation de l’excrétion<br />

ionique urinaire, une charge osmotique excessive du<br />

régime alimentaire ou un faible pouvoir de concentration du<br />

rein.<br />

L’existence d’un rythme nycthéméral du débit urinaire, avec<br />

réduction de la diurèse nocturne et augmentation correspondante<br />

de l’osmolarité, est connue chez le sujet normal (Fig. 2).<br />

Ce rythme est essentiellement contrôlé, chez l’enfant, par<br />

l’augmentation de sécrétion nocturne d’hormone antidiurétique<br />

Urologie<br />

8-12 h 16-20 h 20-22 h 22-8 h<br />

Diurèse Osmolarité<br />

Énurésie de l’enfant 18-207-E-10<br />

Figure 2. Excrétion urinaire et osmolarité chez un enfant non<br />

énurétique.<br />

ou d’arginine-vasopressine [20] . L’hormone antidiurétique, en<br />

effet, facilite la réabsorption de l’eau dans les tubes collecteurs<br />

rénaux via l’activation des récepteurs V2 à la vasopressine qui<br />

induit la translocation du canal hydrique aquaporine 2 des<br />

vésicules intracellulaires à la membrane plasmique. Chez<br />

beaucoup d’énurétiques, le volume d’urine nocturne est anormalement<br />

élevé. Dans les formes polyuriques avec osmolarité<br />

matinale basse (inférieure à 800 mosm/l), le mécanisme physiopathologique<br />

de la polyurie nocturne passe par une inversion<br />

du rythme nycthéméral de sécrétion de vasopressine. Une<br />

insuffisance fonctionnelle en arginine-vasopressine explique<br />

l’augmentation de la diurèse nocturne et, parallèlement, la<br />

baisse de l’osmolarité urinaire. Ce type d’énurésie est sensible à<br />

la réduction des apports hydriques et à la desmopressine.<br />

L’inversion du rythme nycthéméral de la sécrétion de vasopressine<br />

est le facteur le mieux connu, mais n’est probablement pas<br />

le seul. Dans les formes polyuriques résistantes à la desmopressine,<br />

certains auteurs relient les accidents énurétiques à une<br />

baisse de l’excrétion du potassium et du chlore [21] ou, à<br />

l’inverse, à une excrétion accrue du sodium dans les urines [22] ,<br />

suggérant un rôle prépondérant de l’aldostérone et du système<br />

rénine-angiotensine-aldostérone. Le rôle des prostaglandines<br />

dans l’énurésie a également été étudié dans une série de 46<br />

énurétiques sévères résistants à la desmopressine [22] . L’excrétion<br />

urinaire de prostaglandine E 2 est ainsi plus forte chez les enfants<br />

polyuriques, ce qui évoque clairement un rôle de l’augmentation<br />

de la synthèse des prostaglandines dans la pathogénie de<br />

l’énurésie avec polyurie. La prostaglandine E 2, en inhibant<br />

l’action de l’arginine-vasopressine, possède une action diurétique.<br />

À côté de l’aldostérone et des prostaglandines, il faut<br />

évoquer le rôle du facteur « peptide atrial natriurétique »,<br />

clairement en cause dans l’énurésie après transplantation<br />

cardiaque ou associée aux apnées obstructives du sommeil.<br />

L’obstruction des voies aériennes supérieures, surtout si elle<br />

s’accompagne d’apnées obstructives, est un facteur reconnu<br />

d’énurésie primaire [23] . De nombreuses interventions chirurgicales<br />

ou médicamenteuses supprimant l’obstruction entraînent<br />

des taux de disparition de l’énurésie immédiate deux à trois fois<br />

plus fréquente que l’évolution naturelle de la maladie. Une<br />

étude publiée en 2006 [24] confirme les faits chez 86 enfants<br />

ayant fait l’objet d’une adénotonsillectomie. L’étude montre,<br />

dans cette population, une fréquence de l’énurésie de 42 % et<br />

une guérison complète ou une réduction très nette des épisodes<br />

nocturnes, après chirurgie, chez deux tiers des patients.<br />

L’hypercalciurie nocturne, quant à elle, définie par un rapport<br />

Ca 2+ /créatinine dans les urines supérieur à 0,21, n’est observée<br />

que rarement au cours de l’énurésie et semble davantage liée à<br />

des apports excessifs en calcium (lait, laitages) ou des excès en<br />

vitamine D. L’allaitement maternel prolongé plus de 3 mois,<br />

3


18-207-E-10 Énurésie de l’enfant<br />

Tableau 2.<br />

Exemple de calendrier mictionnel.<br />

Jour<br />

Date :<br />

Lever<br />

Récré<br />

Midi<br />

Récré<br />

Dîner<br />

Coucher<br />

enfin, pourrait jouer un rôle dans la prévention de l’énurésie<br />

[25] . Le type de lait donné dans la première période du<br />

nourrisson jouerait un rôle inducteur sur les mécanismes de<br />

régulation de la diurèse et l’installation de la propreté chez<br />

l’enfant. Ces observations restent toutefois à confirmer.<br />

Capacité vésicale fonctionnelle<br />

Kawauchi et al. ont montré que la capacité vésicale fonctionnelle<br />

est identique entre énurétiques et enfants témoins<br />

pendant la journée, mais significativement moindre chez les<br />

énurétiques la nuit [26] .<br />

La capacité vésicale peut être appréciée par différentes<br />

méthodes. Jusqu’à l’âge de 8 ans, la capacité vésicale (CV)<br />

théorique peut être calculée par la formule proposée par l’ICCS :<br />

CV (ml) = 30 × (âge en années + 1) [27] . La capacité vésicale<br />

fonctionnelle, quant à elle, correspond au plus gros volume<br />

mictionnel émis au cours d’une journée, y compris celui de la<br />

première miction du matin [28] . Chez l’énurétique, le consensus<br />

de l’ICCS de 2006 [1] préconise un calendrier mictionnel sur au<br />

moins 24 heures relevant la fréquence des mictions, la production<br />

d’urine diurne, le volume moyen uriné ainsi que le volume<br />

de la plus grosse miction sur 24 heures et enfin, chaque fois que<br />

possible, la production d’urine nocturne (poids de la couche<br />

mouillée moins poids de la couche sèche, plus le volume uriné<br />

au lever). Les formes d’énurésie à faible capacité vésicale sont<br />

définies par une réduction à moins de 70 % de la capacité<br />

fonctionnelle. Cette dernière, selon les critères de ICCS est<br />

définie comme le plus grand volume uriné en une seule fois sur<br />

une période d’observation de 48 heures, d’après les données<br />

fournies par le calendrier mictionnel (Tableau 2) et rapporté à<br />

la capacité vésicale théorique [28] . Les énurésies à faible capacité<br />

vésicale sont généralement réfractaires à la desmopressine et<br />

s’accompagnent dans un tiers des cas environ d’une hyperactivité<br />

nocturne du detrusor [29] . Cette hyperactivité nocturne<br />

pourrait correspondre à une hyperactivité parasympathique<br />

nocturne globale [30] . Dans la mesure où il n’existe aucune<br />

symptomatologie diurne associée à cette hyperactivité vésicale<br />

nocturne, il s’agit bien, selon la classification ICCS 2006, d’une<br />

énurésie nocturne monosymptomatique. Ces énurésies à capacité<br />

fonctionnelle faible sont traitées en première approche par<br />

les alarmes, associées secondairement dans les formes réfractaires<br />

à l’oxybutinine.<br />

Sommeil et éveil<br />

As-tu fait pipi ? Fuites Boisson<br />

Oui Non Oui Non<br />

La tenue d’un calendrier mictionnel de 48 heures est le moyen recommandé pour<br />

confirmer ou corriger le diagnostic. On demande à l’enfant de consigner sur ce<br />

calendrier : la fréquence des mictions et la quantité d’urine émise (reflet de la<br />

capacité vésicale fonctionnelle), les nuits sèches ou mouillées. On peut aussi<br />

évaluer la production nocturne d’urine (poids de la couche mouillée le matin<br />

moins poids de la couche sèche plus volume d’urine émise au réveil).<br />

La grande énigme de l’énurésie concerne le sommeil et l’éveil<br />

puisque certains enfants, lorsque leur vessie est pleine, se lèvent<br />

pour uriner, ce qui en soi est anormal (nicturie – la nuit, en<br />

particulier chez les enfants, est faite avant tout pour dormir)<br />

alors que d’autres urinent dans leur lit. De nombreux parents<br />

disent que leur enfant énurétique est très difficile à réveiller ou<br />

qu’il dort de façon très profonde. Le sommeil des enfants<br />

comporte des séquences égales de sommeil paradoxal avec<br />

mouvements oculaires rapides et de sommeil calme avec<br />

mouvements oculaires lents. Les épisodes d’énurésie surviennent<br />

surtout durant la phase de sommeil lent, dans la première partie<br />

de la nuit. Chez l’enfant énurétique, aucune anomalie spécifique<br />

et objective du sommeil n’a pu être mise en évidence.<br />

Cependant, l’enfant énurétique a un seuil d’éveil trop élevé et<br />

ne se réveille pas avant une miction nocturne, comme le prouve<br />

sa résistance au réveil par stimuli auditifs (9,3 % de réveil chez<br />

les énurétiques versus 39,7 % chez les témoins) [31] . Différents<br />

travaux ont montré chez les patients énurétiques des signes<br />

infracliniques d’immaturité corticale du système nerveux<br />

central [32] . De discrètes perturbations des capacités motrices de<br />

coordination (dysdiadochocinésies, mouvements choréiformes)<br />

témoignent d’un déficit de maturation des motoneurones<br />

corticaux et de leur coordination [33] . La réduction du réflexe de<br />

sursaut à la stimulation [32] suggère un dysfonctionnement<br />

central portant sur la région du manteau pontique (noyau<br />

tegmental pédonculopontique), à proximité immédiate du<br />

centre mictionnel chargé de l’inhibition physiologique du<br />

detrusor. La région du manteau pontique, chargée de contrôler<br />

l’éveil, est activée par la distension vésicale seulement chez les<br />

patients en sommeil profond et non pas en sommeil léger. Ces<br />

observations suggèrent que chez les enfants énurétiques le<br />

sommeil est normal tandis que le mécanisme d’éveil est<br />

immature.<br />

Facteurs génétiques<br />

L’énurésie nocturne doit faire rechercher des antécédents<br />

familiaux d’énurésie. L’énurésie est, en effet, souvent une<br />

affection héréditaire. Dans une population de 106 enfants ayant<br />

une énurésie nocturne, von Gontard et al. retrouvent une<br />

histoire familiale dans 63,2 % des cas, incluant 22,2 % des<br />

pères, 23,9 % des mères, et 16,5 % des frères et sœurs [34] . Chez<br />

les enfants dont les deux parents ont une histoire d’énurésie<br />

nocturne, l’acquisition de la propreté nocturne est retardée de<br />

1,5 an [16] . Ces études confirment bien le rôle prédominant des<br />

facteurs génétiques, prédominance renforcée par l’étude de<br />

jumeaux mono- et hétérozygotes. Sur 53 couples de jumeaux,<br />

l’atteinte conjointe est de 68 % pour les monozygotes et de<br />

36 % pour les hétérozygotes. La transmission autosomale<br />

dominante avec une pénétrance élevée (90 %) est le mode de<br />

transmission le plus fréquent (44 %), suivie par une transmission<br />

autosomique dominante avec une faible pénétrance<br />

(23,3 %) et par une transmission autosomique récessive (4,4 %).<br />

Les formes réellement sporadiques sont de 28,3 % [35] . Les<br />

études génétiques ont montré qu’il existe une grande hétérogénéité<br />

des chromosomes atteints. Plusieurs microdélétions<br />

géniques ont pu être mises en évidence sur des loci variables<br />

portant sur les chromosomes 12, 13 et 22. Actuellement, aucun<br />

génotype précis n’a été retrouvé dans l’énurésie, et il n’existe<br />

pas de relation entre le génotype et le phénotype [36] , tous ces<br />

loci pouvant être porteurs d’une même expression phénotypique<br />

(locus hétérogène). Du fait des variations du rythme<br />

circadien de l’arginine vasopressine dans l’énurésie, le gène de<br />

l’arginine vasopressine a été exploré mais n’est pas en cause.<br />

L’anamnèse chez un enfant énurétique doit donc faire rechercher<br />

des antécédents familiaux d’énurésie, qui existent dans<br />

30%à60%descas. Cependant, la transmission génétique<br />

hétérogène et inconstante ne permet pas d’avis prédictif<br />

génétique précis et n’explique pas la prédominance masculine.<br />

Autres causes<br />

Obstruction des voies aériennes supérieures<br />

Elle peut favoriser l’énurésie par l’accroissement de la polyurie<br />

nocturne et un sommeil perturbé.<br />

Facteurs psychologiques<br />

L’énurésie a longtemps été considérée, à tort, comme un<br />

symptôme d’origine exclusivement psychologique et a fait<br />

classer l’énurésie dans la rubrique « psychiatrie » de la Classification<br />

internationale des maladies. Un trouble psychique<br />

spécifique n’est pourtant pas plus fréquent chez les enfants<br />

énurétiques que dans la population des enfants non énurétiques<br />

4 Urologie


du même âge ; cette incidence est évaluée à 10 % (par opposition<br />

à l’énurésie secondaire, associée, dans 70 % des cas, à une<br />

origine psychologique primitive). Quand un trouble psychique<br />

primitif est identifié chez un enfant énurétique, il s’agit<br />

essentiellement d’un syndrome d’hyperactivité motrice de type<br />

syndrome trouble déficitaire de l’attention et hyperactivité<br />

(TDAH).<br />

Énurésie et TDAH<br />

Les enfants souffrant de TDAH sont 2,7 fois plus sujets à<br />

l’énurésie que la population générale. Ainsi, en moyenne, 20 %<br />

des enfants souffrant de TDAH souffrent d’énurésie et environ<br />

10 % d’enfants énurétiques souffrent de TDAH [3] . Une étude,<br />

réalisée par Baeyens et al. en 2004 et portant sur 120 patients<br />

énurétiques (dont 39 présentant aussi des troubles diurnes), a<br />

pu mettre en évidence des TDAH chez 40 % des énurétiques,<br />

contre 3%à5%estimés dans la population générale [37] . Cette<br />

comorbidité, observée plus fréquemment chez les garçons,<br />

augmente avec l’âge, et doit donc être recherchée. Toutefois, il<br />

semblerait qu’énurésie et TDAH soient deux entités séparées,<br />

médiées par un facteur étiologique commun.<br />

Constipation<br />

Elle est fréquemment associée à une immaturité vésicale. Elle<br />

peut donc contribuer, par l’intermédiaire de contractions<br />

vésicales désinhibées, à favoriser l’énurésie.<br />

Diabète sucré<br />

Par la polyurie qu’il entraîne, il est une cause d’énurésie<br />

secondaire.<br />

Abus sexuels<br />

Cette éventualité doit rester toujours présente à l’esprit du<br />

clinicien lors de son examen clinique. Certains troubles mictionnels<br />

font partie des symptômes révélateurs possibles d’abus<br />

sexuels. Il s’agit le plus souvent d’énurésies secondaires associées<br />

à d’autres symptômes.<br />

“ Points essentiels<br />

Physiopathologie de l’énurésie monosymptomatique<br />

Elle est multifactorielle mais fait intervenir trois<br />

composantes essentielles :<br />

l’excès du volume d’urine produite durant le sommeil ;<br />

la réduction de la capacité vésicale fonctionnelle,<br />

associée dans un cas sur trois à une hyperactivité vésicale<br />

nocturne ;<br />

l’élévation du seuil d’éveil nocturne par déficit de la<br />

maturation neurologique centrale.<br />

Le rôle de ces trois composantes doit être identifié<br />

cliniquement chez chaque patient afin de proposer la<br />

thérapeutique la mieux adaptée.<br />

■ Retentissement psychosocial<br />

de l’énurésie<br />

L’énurésie est très souvent vécue de façon culpabilisante par<br />

l’enfant et son entourage. De ce fait, elle est très souvent cachée<br />

et doit, en particulier devant des signes d’inhibition chez un<br />

jeune patient, être recherchée plutôt que négligée par le<br />

clinicien qui a trop longtemps considéré que l’énurésie ne faisait<br />

pas partie de sa sphère d’activité.<br />

Répercussions sur l’enfant<br />

La baisse de l’estime de soi est en effet le symptôme le plus<br />

fréquemment retrouvé dans les questionnaires soumis à des<br />

Urologie<br />

populations d’enfants énurétiques comparés à des enfants non<br />

énurétiques. Cette baisse de l’estime de soi est d’ailleurs<br />

fréquemment associée à un sentiment de honte, de culpabilité,<br />

d’humiliation, d’anxiété, et d’isolement [38] . L’étude de Van<br />

Tijen et al. rapporte la perception de l’impact psychologique de<br />

l’énurésie chez 98 enfants et adolescents âgés de 8à18ans:<br />

l’énurésie apparaît comme un événement particulièrement<br />

stressant, qui le situe en troisième position après le divorce et<br />

les querelles entre parents, bien avant les moqueries, les<br />

mauvais résultats scolaires, la petite taille ou le port de lunettes<br />

[39] . Ceci peut être à l’origine de la demande, par l’enfant,<br />

d’une prise en charge qui doit lui être accordée. En effet, même<br />

si aujourd’hui aucun lien de causalité n’a été formellement<br />

prouvé entre l’énurésie et ces symptômes psychiques, certaines<br />

études, en dépit de leurs limites méthodologiques, ont montré<br />

que le ressenti de l’enfant paraît globalement amélioré par la<br />

prise en charge de l’énurésie, quel que soit le résultat du<br />

traitement [40] . Une étude chinoise [41] s’est également penchée<br />

sur la fréquence des troubles dépressifs chez les enfants énurétiques<br />

et a montré, sur une population de 1 920 adolescents<br />

âgés entre 11 et 16 ans, une relation entre deux items d’un<br />

questionnaire : l’envie de se tuer (ou les propos parlant de se<br />

tuer) et l’âge tardif d’acquisition de la propreté nocturne.<br />

Quinze pour-cent des enfants ayant eu un contrôle vésical après<br />

5 ans ont eu une tendance suicidaire contre 2,4 % chez ceux<br />

dont le contrôle mictionnel a été acquis à 3 ans. Il s’agit<br />

toutefois d’une étude rétrospective, ne portant pas sur le risque<br />

suicidaire lui-même.<br />

Autres corrélations<br />

Les études portant sur le développement staturopondéral des<br />

enfants sont très contradictoires et ne semblent pas confirmer<br />

de corrélation entre l’énurésie et une taille, un poids ou un<br />

poids de naissance plus faibles chez l’enfant. D’autres études, en<br />

revanche, suggèrent une corrélation entre énurésie, retard<br />

d’acquisition du langage et de la marche, et difficultés scolaires.<br />

Une étude turque de 2004 [42] a ainsi montré une baisse des<br />

performances scolaires chez des enfants énurétiques âgés de 6 à<br />

11 ans. Il s’agit d’une étude avec groupe contrôle, mais rétrospective,<br />

réalisée sur questionnaires parentaux, sans distinction<br />

entre énurésie primaire et secondaire, énurésie nocturne et<br />

troubles diurnes. Si la relation entre énurésie et troubles du<br />

développement a été évoquée, elle est cependant loin d’avoir<br />

été démontrée. Les troubles cutanés, enfin, sont classiques chez<br />

les énurétiques. Conséquences d’irritations ou de macérations<br />

au contact de l’urine, ils s’observent principalement au périnée,<br />

aux plis inguinaux ou sur la face interne des cuisses.<br />

Répercussions sociofamiliales<br />

Énurésie de l’enfant 18-207-E-10<br />

Les couches, le lavage et les traitements représentent une<br />

charge financière non négligeable. Certaines familles limitent<br />

également leur mobilité et réduisent leurs sorties, ce qui<br />

explique que la diminution des relations sociales soit un des<br />

problèmes les plus importants rapportés par les familles<br />

d’enfants énurétiques. Les parents présentent souvent un<br />

sentiment de culpabilité et d’échec éducatif, comme le montre<br />

l’enquête française de 2007 réalisée par TNS Healthcare [4] . Quel<br />

que soit leur ressenti, les parents en grande majorité (91 %) ne<br />

restent pas indifférents au problème de leur enfant : 86 % des<br />

parents sont gênés que leur enfant soit énurétique et 44 %<br />

d’entre eux développent un sentiment de culpabilité. Dans<br />

47 % des cas, ils réagissent en grondant l’enfant, en lui faisant<br />

changer les draps (32 %), contre 46 % qui adoptent l’attitude<br />

« ce n’est rien, ça passera tout seul ». Dans cette même enquête,<br />

86 % des enfants ont déclaré être gênés par leur énurésie et près<br />

de deux tiers avouent n’avoir jamais parlé de leur problème à<br />

un ami. Concernant la perspective d’un séjour en collectivité,<br />

une proportion significativement plus élevée d’enfants énurétiques<br />

refusent d’y participer (13 % versus 7 % pour les enfants<br />

témoins). Dormir chez des amis et partir en voyage scolaire<br />

figurent, en effet, parmi les activités que s’interdisent les enfants<br />

énurétiques.<br />

5


18-207-E-10 Énurésie de l’enfant<br />

“ Points essentiels<br />

L’étude de la littérature permet de retenir<br />

quelques points importants.<br />

La baisse de l’estime de soi est le symptôme psychique<br />

le mieux reconnu, qui semble amélioré par la seule prise<br />

en charge, quel que soit le résultat du traitement sur<br />

l’énurésie.<br />

L’énurésie est souvent associée au TDAH, évoquant un<br />

facteur étiologique commun.<br />

Les troubles du développement (langage en particulier)<br />

ne sont pas prouvés.<br />

Les perturbations de la vie familiale et sociale de l’enfant<br />

énurétique sont une réalité et justifient la prise en charge<br />

de ces patients.<br />

■ Orientation diagnostique<br />

Le diagnostic positif d’énurésie monosymptomatique est<br />

avant tout clinique. Il repose sur l’interrogatoire et l’examen<br />

physique au cours d’une consultation initiale nécessairement de<br />

longue durée.<br />

Interrogatoire<br />

L’interrogatoire doit s’attacher à rechercher les modalités<br />

d’acquisition de la propreté, tant pour l’enfant que pour les<br />

membres de la famille. Ceci permet de préciser si le trouble est<br />

primitif ou secondaire, et dans ce cas de rechercher les facteurs<br />

ayant pu favoriser la réapparition de l’énurésie (naissance d’un<br />

autre enfant, séparation, décès dans la famille, racket à l’école,<br />

etc.). L’interrogatoire précise l’histoire clinique du patient, ses<br />

antécédents personnels et familiaux, la fréquence des accidents<br />

énurétiques, les habitudes alimentaires (qualité, quantité et<br />

répartition des prises de boissons dans la journée), ses habitudes<br />

mictionnelles, la fréquence de ses selles. Il est essentiel d’exclure<br />

tous les symptômes évocateurs d’un dysfonctionnement du bas<br />

appareil urinaire, afin de confirmer le caractère monosymptomatique<br />

de l’énurésie. L’interrogatoire doit également collecter<br />

des informations sur la qualité du sommeil de l’enfant (profondeur<br />

et durée du sommeil, difficultés d’éveil, ronflement<br />

nocturne), le retentissement de l’énurésie sur sa vie sociale, sur<br />

la vie familiale, et l’existence d’autres affections éventuelles en<br />

cours et de leur traitement pouvant interférer, le cas échéant,<br />

avec l’évolution de l’énurésie. Sont précisés également les modes<br />

de prise en charge antérieurs de l’énurésie et les résultats<br />

obtenus. Le comportement de l’enfant durant la consultation<br />

aide à apprécier sa motivation et à détecter d’éventuels signes<br />

de déficit de l’attention. Dans l’énurésie nocturne primaire<br />

isolée, aucun symptôme de dysfonctionnement du bas appareil<br />

urinaire ne s’observe. Cependant, les habitudes alimentaires et<br />

mictionnelles de l’enfant étant souvent difficiles à préciser par<br />

le seul interrogatoire, la tenue d’un calendrier mictionnel de<br />

48 heures est un moyen recommandé pour confirmer ou<br />

corriger le diagnostic. En effet, il n’est pas rare de rencontrer de<br />

« fausses énurésies » monosymptomatiques : chez un enfant ne<br />

buvant pratiquement rien de la journée, une authentique<br />

immaturité vésicale peut se trouver « masquée » et ne se<br />

présenter que sous la forme d’une énurésie isolée ; c’est par une<br />

période d’observation par les parents du comportement mictionnel<br />

de leur enfant sous une charge hydrique appropriée à<br />

son âge et harmonieusement répartie tout au long de la journée<br />

avec relevé de la fréquence des mictions, de leur volume et de<br />

l’apparition d’une impériosité voire de fuites diurnes que le<br />

diagnostic est rectifié et qu’est prescrit un traitement approprié<br />

à l’hyperactivité du detrusor (anticholinergiques à faible dose<br />

fractionnée).<br />

Examen clinique<br />

L’examen clinique doit idéalement comporter l’observation<br />

d’une miction. La palpation de l’abdomen apprécie la présence<br />

éventuelle d’une rétention stercorale, d’un globe vésical.<br />

L’inspection de la région dorsale, en particulier de la colonne<br />

vertébrale et de la région sacrée, recherche toute anomalie<br />

tégumentaire évocatrice d’une anomalie du contenu du canal<br />

rachidien ou des racines nerveuses du plexus sacré (lipome,<br />

tache pigmentaire, touffe de poils, fossette sacrococcygienne<br />

haute et profonde). L’étude de la marche, de la voûte plantaire,<br />

de la trophicité musculaire et des réflexes complète l’examen<br />

neurologique. Toute anomalie identifiée conduirait à la prescription<br />

d’un cliché du rachis lombosacré de face et de profil,<br />

voire d’une imagerie par résonance magnétique de la moelle<br />

lombosacrée et exclurait le diagnostic d’énurésie nocturne<br />

isolée. Les organes génitaux, enfin, et le méat urétral doivent<br />

être inspectés, chez la fille comme chez le garçon. La normalité<br />

de l’examen clinique et l’absence de troubles mictionnels<br />

diurnes permettent de retenir le diagnostic d’énurésie monosymptomatique.<br />

Dans ce contexte, faut-il réaliser des examens<br />

complémentaires ?<br />

Examens complémentaires<br />

Si le diagnostic d’énurésie monosymptomatique apparaît<br />

certain, aucune imagerie ou examen complémentaire n’est<br />

nécessaire en première intention, hormis éventuellement une<br />

bandelette urinaire pour éliminer une infection (leucocytes,<br />

nitrites), un diabète sucré débutant (glycosurie) ou une hyperconcentration<br />

des urines la journée (densité). Une échographie<br />

de l’arbre urinaire avec mesure de résidu après miction est un<br />

examen non invasif, non irradiant et peu coûteux ; elle peut à<br />

la rigueur être prescrite et doit être normale. Aucun autre<br />

examen complémentaire (type cysto-urétrographie mictionnelle,<br />

exploration urodynamique) n’est justifié en première intention.<br />

Ces examens sont éventuellement prescrits en milieu spécialisé<br />

en cas d’énurésies réfractaires à une prise en charge cohérente.<br />

■ Prise en charge<br />

La prise en charge de l’énurésie passe en première approche<br />

par une démarche d’information et d’éducation. Dès que le<br />

diagnostic d’énurésie est évoqué sur les données de l’interrogatoire<br />

et de l’examen clinique, le patient et ses parents doivent<br />

être informés sur la maladie et ses diverses présentations, dans<br />

le but d’obtenir la coopération du patient pour se conformer<br />

aux conseils d’hygiène de vie. Les patients motivés et non<br />

guéris par les seules prescriptions hygiénodiététiques doivent<br />

recevoir en complément un traitement spécifique.<br />

Conseils hygiénodiététiques<br />

La prise en charge de l’énurésie passe, en premier lieu, par des<br />

mesures visant à réduire le volume de la diurèse nocturne :<br />

contrôle de la répartition des apports liquidiens et renforcement<br />

de l’activité antidiurétique de l’hormone antidiurétique. Les<br />

apports liquidiens recommandés chez l’enfant énurétique<br />

doivent rester normaux (de 45 à 60 ml/kg) mais être absorbés<br />

entre 7h et 18h. Il convient d’inciter l’enfant à boire sa ration<br />

hydrique en première partie de journée avec, au petit-déjeuner,<br />

un apport liquidien représentant un tiers des besoins quotidiens,<br />

suivi d’une diminution, à partir de 18 heures, des apports<br />

en eau et en électrolytes (boissons ou aliments : soupe, laitages).<br />

L’apport liquidien, tout au long de la journée, doit tenir compte<br />

du pouvoir de concentration des urines, peu élevé chez l’enfant<br />

énurétique, et privilégier les eaux de boissons peu minéralisées.<br />

Les boissons sucrées et/ou gazeuses, riches en calcium, ainsi que<br />

les aliments très salés sont à éviter, particulièrement en fin de<br />

journée, car susceptibles d’entraîner une diurèse osmotique. Il<br />

faut également promouvoir des mictions régulières dans la<br />

journée et recommander au patient d’aller aux toilettes cinq ou<br />

six fois par jour, sans oublier au lever et au coucher, ou dès qu’il<br />

en ressent le besoin. Lorsque le patient urine, il doit être<br />

6 Urologie


détendu autant que possible et laisser couler le jet librement.<br />

Ces conseils doivent être suivis au minimum 2 semaines,<br />

pendant lesquelles l’enfant remplit un calendrier des accidents<br />

nocturnes où sont notées les nuits sèches et les nuits mouillées ;<br />

les volumes urinés dans la journée sont mesurés chaque fois que<br />

possible, ainsi que la production d’urine nocturne. Le calendrier<br />

mictionnel se présente comme un outil non invasif essentiel<br />

permettant de faire participer le patient et ses parents à la prise<br />

en charge de l’énurésie, et d’évaluer leur motivation et leur<br />

observance aux conseils d’hygiène de vie. Il permet également<br />

de suivre les progrès au cours de la prise en charge et d’évaluer<br />

l’efficacité des traitements proposés. Avec une bonne observance<br />

des conseils d’hygiène de vie, près de 20 % des patients<br />

souffrant d’énurésie guérissent dans un délai moyen de<br />

8 semaines. Enfin, nous avons déjà souligné le rôle de ces<br />

mesures hygiénodiététiques et de la tenue d’un calendrier<br />

mictionnel pour démasquer une immaturité vésicale et rectifier<br />

le diagnostic.<br />

Traitements<br />

Traitements spécifiques<br />

Les patients motivés et non guéris par les seules prescriptions<br />

hygiénodiététiques doivent recevoir un traitement spécifique<br />

complémentaire.<br />

Desmopressine<br />

La desmopressine est le traitement de choix dans l’énurésie<br />

monosymptomatique associée à une polyurie nocturne chez<br />

l’enfant âgé de plus de 6 ans. La desmopressine est un nanopeptide<br />

de synthèse. C’est un analogue structural synthétique de<br />

l’hormone antidiurétique naturelle, la vasopressine ou hormone<br />

antidiurétique d’origine hypophysaire. Par rapport à l’hormone<br />

antidiurétique, la desmopressine présente deux variations<br />

structurales : la désamination de la cystéine en position 1 et la<br />

substitution de la L-arginine par une D-arginine en position 8.<br />

Ces deux modifications rendent la desmopressine plus efficace,<br />

et d’action plus longue que l’hormone antidiurétique, résistante<br />

à la dégradation enzymatique. En outre, la desmopressine est<br />

spécifique du récepteur V2, d’action vasopressive pratiquement<br />

inexistante. Une étude suédoise multicentrique relativement<br />

ancienne [43] avait évalué l’efficacité à long terme de la desmopressine<br />

nasale chez des enfants énurétiques âgés de 6à12ans<br />

sur une période de 12 mois. À la fin de cette période, 69 % des<br />

enfants étaient soit répondeurs (46 %), soit guéris (23 %). Plus<br />

récemment, un essai canadien [44] a évalué l’efficacité à long<br />

terme de la desmopressine chez des patients énurétiques de 6 à<br />

18 ans pendant une période de 3à12mois. Sur 236 patients<br />

éligibles, 75 % ont montré une réduction du nombre de nuits<br />

mouillées de plus de 50 %à3mois, puis pendant toute la durée<br />

de l’étude. Le nombre moyen de nuits mouillées par semaine a<br />

diminué de 82,6 %, passant de 5,75 nuits mouillées/semaine à<br />

une à la fin de l’étude. La proportion d’enfants ayant maintenu<br />

une réponse complète sans rechute à la fin de la période sans<br />

traitement a augmenté de 5,8 % à 37,5 % tout au long de<br />

l’étude, ce qui correspond à plus de deux fois le taux de<br />

guérison spontané. Les facteurs prédictifs de réponse à la<br />

desmopressine sont un âge supérieur à 8 ans, un nombre de<br />

nuits mouillées limité, un seul épisode énurétique par nuit et<br />

une réponse initiale à la plus petite dose de desmopressine. La<br />

desmopressine est actuellement disponible sous forme de<br />

comprimés dosés à 0,1 mg ou de lyophilisats dosés à 60, 120 et<br />

240 µg de desmopressine. Les formes endonasales, en revanche,<br />

ne sont pas indiquées dans l’énurésie monosymptomatique. La<br />

forme lyophilisat, hautement hydrophile, se dissout instantanément<br />

dans la bouche et permet, en particulier, le respect de la<br />

restriction hydrique vespérale. Les lyophilisats 60 µg, 120 µg et<br />

240 µg sont bioéquivalents aux dosages 0,1 mg, 0,2 mg et<br />

0,4 mg respectivement. Une récente étude de 2006 [45] comparant<br />

six doses différentes de lyophilisat a conclu qu’en utilisant<br />

une dose de desmopressine comprise entre 120 et 240 µg, l’effet<br />

antidiurétique était atteint après une heure et durait de 7 à<br />

11 heures, ce qui correspond à la durée du sommeil des enfants.<br />

Une autre étude [46] a évalué la préférence du lyophilisat par<br />

Urologie<br />

rapport au comprimé chez 221 enfants et adolescents âgés de 5<br />

à 15 ans. Chez les enfants de moins de 12 ans, la préférence<br />

pour le lyophilisat était statistiquement significative. La<br />

tolérance de la desmopressine est bonne. Néanmoins, devant la<br />

survenue de symptômes évocateurs d’une intoxication à l’eau<br />

avec hyponatrémie (céphalées, nausées, vomissements, anorexie,<br />

prise de poids rapide, état confusionnel et, dans les cas sévères,<br />

convulsions), il convient d’arrêter le traitement. Afin de limiter<br />

la survenue de ces complications, le traitement doit être débuté<br />

à la posologie la plus faible recommandée (120 µg pour la forme<br />

lyophilisat ou 0,2 mg pour la forme comprimé) et augmentée<br />

progressivement, par palier (de 60 µg ou 0,1 mg) sans dépasser<br />

la posologie maximale conseillée (de 240 µg ou 0,4 mg, exceptionnellement<br />

360 µg ou 0,6 mg), en respectant la restriction<br />

hydrique vespérale. Le traitement est habituellement prescrit<br />

pour une période de 3 mois, renouvelable une fois. Cependant,<br />

au moins sur le plan théorique, il n’y a pas d’inconvénient à<br />

poursuivre le traitement chez les enfants répondeurs mais non<br />

guéris au bout de deux cures, des études ayant montré que des<br />

traitements de longue durée sont parfaitement tolérés [43, 44] ;<br />

par ailleurs, la desmopressine est prescrite à vie chez les patients<br />

souffrant de diabète insipide. Il paraît logique dans ce cas de<br />

renouveler le traitement à la plus petite dose efficace avec une<br />

fenêtre thérapeutique tous les 3 mois jusqu’à guérison de la<br />

maladie.<br />

Alarmes<br />

Énurésie de l’enfant 18-207-E-10<br />

Les alarmes constituent le traitement de première intention<br />

de l’énurésie monosymptomatique avec capacité vésicale<br />

réduite [40] . Il s’agit d’une méthode dite de conditionnement qui<br />

utilise la conduction électrique de l’urine. Une alarme sonore,<br />

constituée d’un circuit électrique ouvert, est intégrée dans le<br />

pyjama de l’enfant (capteur d’humidité sous forme de miniserviette<br />

en coton ou en feutre). Dans le cas où un accident<br />

énurétique se produit, les premières gouttes d’urine ferment le<br />

circuit électrique et la sonnerie retentit. L’enfant doit alors<br />

couper celle-ci, terminer sa miction aux toilettes et réinstaller<br />

l’appareil pour le restant de la nuit. En pratique, durant une<br />

période pouvant atteindre 1 mois, c’est l’entourage et non le<br />

patient qui est réveillé par l’alarme et doit se charger de réveiller<br />

l’enfant, le conduire aux toilettes et l’aider à réinstaller le<br />

système. Le mécanisme d’action exact est inconnu mais le<br />

traitement par alarme semble avoir un effet sur l’éveil, la<br />

production d’urine nocturne et la capacité vésicale nocturne. Le<br />

système se révèle également efficace par un phénomène d’anticipation<br />

et de prise de conscience du besoin. Il existe plusieurs<br />

systèmes. En France, Pipi-stop ® est le plus connu : il utilise une<br />

couche en coton placée dans les sous-vêtements et un boîtier<br />

avec alarme à côté de l’enfant.<br />

Des dispositifs plus simples sont actuellement disponibles, en<br />

particulier via Internet, avec de petits boîtiers adaptables au<br />

poignet de l’enfant, les fils du dispositif pouvant être glissés<br />

dans la manche du pyjama. La prise en charge par les systèmes<br />

d’alarme suppose une forte motivation de la part de toute la<br />

famille, qui doit être prête à être réveillée plusieurs nuits<br />

consécutives et parfois plusieurs fois par nuit. Après une période<br />

qui peut donc atteindre 1 mois, l’enfant énurétique commence<br />

à se réveiller et finalement l’alarme cesse de sonner pendant les<br />

nuits sèches. La propreté est atteinte soit en se réveillant chez<br />

35 % des enfants, soit sans se réveiller, avec des nuits sèches<br />

complètes, dans 65 % des cas [47] . Mellon et Mac Grath [48] ont<br />

passé en revue 70 études contrôlées et ont rapporté un taux<br />

global de succès de 77,9 % sur l’ensemble des études. La<br />

probabilité d’atteindre 14 nuits sèches consécutives est 13,3 fois<br />

plus élevée que sans traitement. Selon une étude [49] réalisée<br />

chez 505 enfants présentant une énurésie monosymptomatique,<br />

le traitement par alarme, en association avec un support<br />

environnemental, a permis d’obtenir un succès complet (au<br />

moins 14 jours sans nuits mouillées) à 16 semaines dans 79,7 %<br />

des cas pour les formes sévères et dans 75,3 % des cas pour les<br />

formes modérées. Les meilleures chances de réussite sont liées à<br />

une faible capacité vésicale, la motivation de l’enfant et de sa<br />

famille, et une plus grande fréquence de nuits mouillées [48] .En<br />

7


18-207-E-10 Énurésie de l’enfant<br />

outre, les effets du traitement par alarme peuvent être accrus<br />

par une thérapie comportementale associée.<br />

Traitements de recours<br />

Oxybutinine<br />

L’oxybutinine n’est pas indiquée dans le traitement de<br />

l’énurésie monosymptomatique. Elle peut néanmoins présenter,<br />

du fait de son action anticholinergique, un intérêt pour un petit<br />

sous-groupe de patients chez qui on suspecte une vessie<br />

hyperactive uniquement pendant le sommeil. Ainsi, l’oxybutinine<br />

peut être prescrite en deuxième intention, en monothérapie<br />

ou en traitement combiné, chez les patients résistant à un<br />

traitement spécifique et suspectés d’avoir une faible capacité<br />

vésicale nocturne.<br />

Antidépresseurs tricycliques<br />

Les antidépresseurs tricycliques tels que l’imipramine sont<br />

efficaces chez plus de 50 % des patients pendant le traitement,<br />

avec, cependant, un taux élevé de rechute après arrêt puisque<br />

moins de 20 % des enfants restent secs 6 mois après arrêt du<br />

traitement. Compte tenu de leur toxicité potentielle, les<br />

antidépresseurs tricycliques tels que l’imipramine ne doivent pas<br />

être prescrits en première intention. Il faut les réserver à des cas<br />

exceptionnels, chez l’adolescent, après évaluation des risques, en<br />

particulier réalisation d’un électrocardiogramme afin d’éliminer<br />

un trouble de conduction ; il faut également clairement informer<br />

le patient et ses parents sur les dangers d’un surdosage<br />

pouvant éventuellement conduire à un décès par toxicité<br />

cardiaque [17] .<br />

Traitements combinés<br />

Certaines énurésies sont réfractaires à la monothérapie. Chez<br />

ces patients, l’énurésie nocturne résulte probablement de<br />

l’association de différents facteurs physiopathologiques (association<br />

polyurie nocturne et faible capacité vésicale par exemple)<br />

dont certains sont encore inconnus. Chez ces patients, la<br />

combinaison de plusieurs traitements peut se révéler plus<br />

efficace que la monothérapie. Différents traitements combinés<br />

peuvent être proposés, généralement en milieu spécialisé après<br />

réévaluation des causes d’échec des traitements antérieurs.<br />

Association desmopressine/alarme<br />

L’association desmopressine/alarme est indiquée en cas de<br />

polyurie nocturne associée à une capacité vésicale faible pour<br />

l’âge. Leebeek-Groenewegen et al. [50] ont évalué la combinaison<br />

alarme et desmopressine versus alarme seule dans le traitement<br />

de l’énurésie nocturne et ont montré une diminution significative,<br />

bien que transitoire, du nombre de nuits mouillées dans le<br />

groupe sous traitement combiné par rapport au groupe alarme<br />

seule. Les auteurs suggèrent que l’effet positif initial de la<br />

desmopressine pourrait être cliniquement utile pour maintenir<br />

la motivation des enfants pour la thérapie par alarme. Lorsque<br />

lesenfantsnesonttoujourspassecsaprès2à3semainesde<br />

traitement par alarme, le consensus hollandais sur l’énurésie<br />

recommande ainsi d’ajouter la desmopressine pour leur éviter<br />

d’arrêter le traitement. En cas de traitement combiné, les<br />

auteurs recommandent deux comprimés de 0,2 mg (équivalent<br />

à un lyophilisat de 240 µg) de desmopressine au coucher<br />

comme le dosage le plus efficace. Naitoh et al. [51] ont également<br />

comparé l’efficacité d’un traitement par alarme seule,<br />

versus un traitement combiné associant alarme et desmopressine<br />

ou alarme et imipramine, dans l’énurésie nocturne primaire<br />

monosymptomatique. Les auteurs ont conclu que, bien que les<br />

taux d’amélioration n’étaient pas différents entre les groupes à<br />

3 mois, les taux de succès à 6 mois étaient plus élevés dans le<br />

groupe desmopressine (80 %) et imipramine (79 %) que dans le<br />

groupe en monothérapie (59 %). Cherry Fai-Ngo et al. [41] ,<br />

d’autre part, ont publié les résultats d’un essai multicentrique<br />

randomisé contrôlé qui comparait l’efficacité à 12 semaines des<br />

alarmes, de la desmopressine orale et du traitement combiné<br />

chez 105 enfants chinois, âgés de 7à15ans, présentant une<br />

énurésie nocturne primaire monosymptomatique. La fréquence<br />

des épisodes énurétiques a diminué sous traitement respectivement<br />

de 46 % sous alarme seule, 52 % sous desmopressine et<br />

73 % sous traitement combiné.<br />

Association desmopressine/oxybutinine<br />

L’association desmopressine/anticholinergique est indiquée<br />

quand une production élevée d’urine nocturne est associée à des<br />

symptômes d’hyperactivité vésicale. Neveus et al. [52] ont<br />

comparé la capacité de concentration rénale et la capacité<br />

vésicale de 55 enfants contrôles à celles d’enfants énurétiques<br />

monosymptomatiques, répondant soit à la desmopressine seule,<br />

soit à l’oxybutinine seule, soit à l’association desmopressine/<br />

oxybutinine, ou résistant à toutes les alternatives thérapeutiques.<br />

Il a confirmé que les enfants répondant à l’oxybutinine<br />

présentent une petite vessie et un detrusor probablement<br />

hyperactif, alors que ceux répondant à la desmopressine ou<br />

nécessitant un traitement combiné sont polyuriques. Lee et<br />

Suh [53] ont évalué prospectivement l’efficacité d’une combinaison<br />

de desmopressine et d’oxybutinine dans le traitement de<br />

l’énurésie nocturne, par rapport à un traitement en monothérapie<br />

par imipramine ou desmopressine. Les auteurs ont conclu<br />

que le traitement combiné a été bien toléré et a donné des<br />

résultats significativement plus rapides et d’un meilleur rapport<br />

coût-efficacité que la monothérapie avec desmopressine ou<br />

imipramine, que les enfants présentant une énurésie monosymptomatique<br />

ou polysymptomatique. Radvanska et al. [54] ,<br />

d’autre part, ont évalué le traitement combiné avec desmopressine<br />

et oxybutinine chez les patients présentant une énurésie<br />

qui n’a pas répondu à la desmopressine en monothérapie. Chez<br />

les non-répondeurs à la desmopressine, le traitement combiné<br />

avec desmopressine et oxybutinine a encore diminué le nombre<br />

de nuits mouillées. L’étude propose la prescription d’oxybutinine<br />

en association avec la desmopressine chez les enfants qui<br />

ne répondent pas à la desmopressine seule.<br />

Autres traitements<br />

Différentes modalités thérapeutiques alternatives ont été<br />

essayées dans l’énurésie nocturne du fait des résultats imparfaits<br />

des traitements spécifiques actuellement disponibles. Une métaanalyse<br />

[55] , regroupant 15 études randomisées contrôlées et<br />

1 389 patients (dont 703 ayant bénéficié d’un traitement<br />

complémentaire pour une énurésie rebelle), a conclu que les<br />

“ Points forts<br />

En cas d’énurésie nocturne monosymptomatique, les<br />

alternatives thérapeutiques se résument aujourd’hui aux<br />

alarmes et à la desmopressine. Le choix entre ces<br />

traitements impose, au préalable, d’avoir parfaitement<br />

analysé les conditions mictionnelles, et expliqué aux<br />

parents les avantages et inconvénients respectifs de ces<br />

traitements.<br />

La desmopressine est le traitement de choix lorsque l’on<br />

évoque une énurésie associée à une polyurie nocturne.<br />

Les alarmes ne doivent être proposées que dans les<br />

familles motivées et acceptant la contrainte temporaire<br />

d’un à plusieurs réveils nocturnes. Les alarmes devraient<br />

être préférées chez les enfants présentant des fuites<br />

fréquentes (plus de trois par semaine) ou chez lesquels il<br />

existe une forte suspicion de capacité fonctionnelle<br />

réduite.<br />

L’association desmopressine et alarme doit être<br />

proposée devant une polyurie nocturne associée à une<br />

capacité vésicale faible pour l’âge et l’association<br />

desmopressine/oxybutinine indiquée devant une polyurie<br />

nocturne associée à des symptômes nocturnes ou diurnes<br />

d’hyperactivité vésicale.<br />

8 Urologie


.<br />

résultats obtenus par l’hypnose, la psychothérapie, l’acupuncture,<br />

l’homéopathie ou la chiropraxie ne sont actuellement pas<br />

validés car les séries sont insuffisantes et la méthodologie<br />

insuffisamment rigoureuse.<br />

■ Conclusion<br />

L’énurésie nocturne repose sur une multitude de facteurs<br />

intriqués : polyurie nocturne, capacité vésicale fonctionnelle<br />

réduite et élévation du seuil de réveil nocturne. Parce qu’elle est<br />

fréquente et mal tolérée par un nombre important d’enfants<br />

et/ou de familles, elle nécessite une prise en charge précoce et<br />

adaptée. Cette prise en charge passe en première approche par<br />

une démarche d’information et d’éducation. Les patients<br />

motivés et non guéris par les seules prescriptions hygiénodiététiques<br />

doivent recevoir en complément un traitement spécifique<br />

reposant sur l’utilisation d’alarme et/ou de desmopressine.<br />

L’efficacité de ces traitements étant toutefois limitée chez<br />

certains patients, avec des rechutes fréquentes à l’arrêt du<br />

traitement, il est nécessaire de souligner l’importance d’un<br />

accompagnement de ces enfants et de ces familles, bénéfique<br />

même en cas d’échec thérapeutique.<br />

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9


18-207-E-10 Énurésie de l’enfant<br />

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I. Alova.<br />

Service de chirurgie viscérale pédiatrique (Pr Yann Révillon), Hôpital Necker-Enfants malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Lottmann H., Alova I. Énurésie de l’enfant. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-207-E-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Urologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale<br />

terminale traitée par dialyse<br />

V. Masse, J.-B. Richard, P. Landais<br />

En 2005, l’incidence de l’insuffisance rénale terminale (IRT) traitée par dialyse a été estimée à<br />

133 cas/million d’habitants (pmh)/an, sa prévalence à 539 cas pmh. En 2008, plus de 9 000 nouveaux<br />

patients ont débuté un traitement par dialyse en France et plus de 33 000 insuffisants rénaux ont été<br />

traités par dialyse. La population des patients dialysés vieillit. Elle présente plus de comorbidités associées.<br />

Les affections conduisant à l’insuffisance rénale terminale changent. Les néphropathies vasculaires et le<br />

diabète sont devenus les causes les plus incidentes. Les néphropathies vasculaires deviennent la première<br />

cause chez les patients âgés. L’incidence du diabète type 2 augmente et plus singulièrement dans les<br />

départements et territoires d’outre-mer (DOM-TOM). Les néphropathies glomérulaires sont la troisième<br />

cause d’insuffisance rénale terminale, surtout chez les jeunes, et leur prévalence est en diminution par<br />

rapport aux autres causes. La morbimortalité en dialyse est dominée par les causes cardiaques et<br />

vasculaires. Le recours tardif au néphrologue ne s’est pas amélioré. C’est une source de morbimortalité<br />

accrue. C’est aussi une cause de surcoût, estimé à plus de 30 millions d’euros par an. En 2005, en France,<br />

le coût global de la prise en charge par technique d’épuration extrarénale des patients insuffisants rénaux<br />

terminaux traités a été estimé à 2,145 milliards d’euros, soit 1,56 % de l’objectif national des dépenses de<br />

l’Assurance maladie (ONDAM). Ces considérations de coût doivent inciter à mieux prévenir la maladie<br />

rénale chronique. Cela repose sur une meilleure connaissance des facteurs de risque de susceptibilité aux<br />

néphropathies, d’initiation et de progression de l’insuffisance rénale chronique.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Dialyse ; Épidémiologie ; Insuffisance rénale terminale ; Incidence ; Prévalence ; Survie<br />

Insuffisance rénale chronique : enjeu majeur de santé publique<br />

Définir la maladie rénale chronique et l’insuffisance rénale<br />

1<br />

et sa prise en charge 2<br />

Estimer la réduction de la fonction rénale 2<br />

Risque rénal : facteurs de risque et prévention 2<br />

Insuffisance rénale terminale 3<br />

Recours tardif au néphrologue et traitement en urgence de l’IRT 3<br />

Favoriser la prise en charge multidisciplinaire 3<br />

Traitements de suppléance par dialyse 4<br />

Sources de données épidémiologiques 4<br />

Surveillance épidémiologique 4<br />

Une littérature abondante 5<br />

Incidence, prévalence et survie 5<br />

Quelques définitions<br />

En amont de l’IRT, la prévalence insoupçonnée de la maladie<br />

5<br />

rénale chronique 5<br />

Incidence de l’IRTT : âge et disparités régionales 5<br />

Une prévalence qui semble se stabiliser 6<br />

Des disparités internationales 6<br />

Survie des patients en IRTT 7<br />

Offre de soins et coût de l’IRT 8<br />

Coût global de l’IRTT 8<br />

Politique de santé publique et adéquation offre-demande 8<br />

Conclusion 9<br />

Néphrologie<br />

18-025-B-10<br />

■ Insuffisance rénale chronique :<br />

enjeu majeur de santé publique<br />

L’insuffisance rénale chronique (IRC) représente un enjeu<br />

majeur de santé publique [1, 2] . La maladie rénale chronique<br />

concerne plus d’un sujet sur dix dans la population, dont<br />

4/100 000 atteindront le stade de la dialyse. Chez des sujets de<br />

moins de 80 ans, le risque annuel de développer une insuffisance<br />

rénale terminale (IRT) dans les 5 ans est de 42 pour<br />

100 000 [3] . Bien que la fréquence de l’insuffisance rénale<br />

chronique dans la population soit élevée, l’IRT reste une<br />

affection rare, concernant 0,075 % de la population. Toutefois,<br />

le coût de la dialyse est très élevé. Plus de 2 % des dépenses de<br />

santé sont ainsi dédiées au traitement de moins de 0,1 % de la<br />

population [4] .<br />

L’insuffisance rénale terminale concerne une population de<br />

plus en plus âgée, avec plus de comorbidités. Il faut organiser<br />

une prise en charge plus lourde et plus complexe. La dialyse<br />

reste un traitement de référence dont les modalités doivent être<br />

variées pour faire face à une demande accrue, distribuée sur<br />

l’ensemble du territoire. La greffe, chaque fois que possible, ne<br />

permet pas de répondre à toutes les attentes, en dépit d’un<br />

accroissement marqué du prélèvement d’organes depuis<br />

1999 pour pallier le manque de greffons.<br />

La maladie rénale chronique (MRC) et les stades évolutifs de<br />

l’insuffisance rénale chronique (IRC) sont définis avant une<br />

description de l’épidémiologie de la dialyse en 2007 sur la base<br />

des données du Réseau épidémiologie et information en néphrologie<br />

(REIN) et des autres registres de dialyse internationaux.<br />

1


18-025-B-10 Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

■ Définir la maladie rénale<br />

chronique et l’insuffisance rénale<br />

et sa prise en charge<br />

On appelle maladie rénale chronique (MRC) un état défini<br />

par [5] :<br />

la présence depuis au moins 3 mois d’anomalies rénales de<br />

structure ou de fonction, associées ou non à une diminution<br />

du débit de filtration glomérulaire (DFG) et se manifestant<br />

par des anomalies histologiques et des marqueurs d’atteinte<br />

rénale incluant des anomalies sanguines ou urinaires ou des<br />

anomalies à l’imagerie ;<br />

un DFG < 60 ml/min/1,73 m 2 depuis au moins 3 mois,<br />

associé ou non à des marqueurs d’atteinte rénale.<br />

Cette définition prend en compte non seulement l’IRC, mais<br />

également des dommages rénaux avec une fonction rénale<br />

normale.<br />

La National Kidney Foundation a classé la maladie rénale<br />

chronique en cinq stades correspondant à une dégradation<br />

progressive de la fonction rénale par réduction néphronique [5]<br />

(Tableau 1). L’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation<br />

en santé (ANAES) − devenue la Haute Autorité de santé (HAS) −<br />

a classé en 2002 l’IRC en quatre stades, en regroupant les stades<br />

1 et 2 de la National Kidney Foundation (Tableau 2). Elle ne<br />

tient pas compte d’une MRC sans baisse du DFG.<br />

Estimer la réduction de la fonction rénale<br />

Le DFG peut être mesuré par la clairance d’un marqueur<br />

endogène ou exogène. La créatinine est le marqueur le plus<br />

utilisé en pratique courante. Sa clairance est déterminée à partir<br />

de ses concentrations plasmatique et urinaire et du débit<br />

urinaire de 24 heures. En pratique, la clairance de la créatinine<br />

est plus souvent estimée que mesurée. Plusieurs formules<br />

d’estimation sont utilisées qui tiennent compte du sexe, de<br />

l’âge, du poids et de l’origine ethnique, avec pour principal<br />

intérêt d’éviter le recueil urinaire, souvent imprécis. Chez<br />

l’adulte, on utilise soit la formule de Cockroft et Gault [6] , soit<br />

celle du MDRD (modification of diet in renal disease), plus<br />

adaptée, en particulier pour les patients noirs américains [7] .<br />

Cependant, ces formules ne permettent qu’une estimation<br />

imparfaite du DFG. En effet, avec le MDRD, seulement 71 % des<br />

patients sont classés dans le bon stade d’insuffisance rénale, et<br />

Tableau 1.<br />

Stades de la maladie rénale chronique selon la National Kidney<br />

Foundation.<br />

Stades Définition DFG (ml/min/1,73 m 2 )<br />

Stade 1 Maladie rénale chronique DFG ≥ 90<br />

Stade 2 IR débutante 90 > DFG ≥ 60<br />

Stade 3 IR modérée 60 > DFG ≥ 30<br />

Stade 4 IR sévère 30 > DFG ≥ 15<br />

Stade 5 IR terminale DFG < 15<br />

DFG : débit de filtration glomérulaire ; IR : insuffisance rénale.<br />

Tableau 2.<br />

Stades de l’insuffisance rénale selon l’Agence nationale de l’accréditation<br />

et de l’évaluation en santé (ANAES).<br />

Stades Définition DFG (ml/min/1,73 m 2 )<br />

Stade 1 Maladie rénale chronique a<br />

avec DFG ≥ 60<br />

≥ 60<br />

Stade 2 IR modérée 30-59<br />

Stade 3 IR sévère 15-29<br />

Stade 4 IR terminale b


Stades d'IR<br />

Rein normal<br />

État de<br />

susceptibilité<br />

accrue à un<br />

dommage<br />

rénal<br />

Stade 1 =<br />

dommage<br />

rénal<br />

Stade 2 à 4 =<br />

dommage<br />

rénal<br />

Stade 5 =<br />

IRT<br />

Facteurs de<br />

susceptibilité<br />

à un dommage rénal<br />

Facteurs<br />

d'initiation<br />

du dommage rénal<br />

Facteurs de<br />

progression<br />

du dommage rénal<br />

Facteurs de<br />

risque<br />

au stade terminal<br />

facteurs de progression : une fois les lésions installées,<br />

certains facteurs de progression sont susceptibles d’aggraver le<br />

dommage rénal et d’accélérer le déclin de la fonction rénale ;<br />

ils sont modifiables par une prise en charge adaptée ;<br />

autres facteurs : d’autres facteurs, au stade d’IRT, augmentent<br />

la morbidité et la mortalité associée à ce stade.<br />

Ces différents facteurs de risque sont résumés sur la Figure 1.<br />

Insuffisance rénale terminale<br />

L’insuffisance rénale terminale (IRT) correspond à un état<br />

d’altération de la fonction rénale requérant le recours à un<br />

traitement de suppléance, dialyse ou greffe. C’est le stade ultime<br />

d’évolution de la MRC évalué par un DFG < 15 ml/min/1,73 m 2 .<br />

Entre 15 et 10 ml/min/1,73 m 2 de clairance de créatinine, c’est<br />

le stade de préparation au traitement de suppléance.<br />

Un traitement de suppléance est généralement institué dès<br />

lors que le DFG est inférieur à 10 ml/min/1,73 m 2 . Toutefois,<br />

compte tenu de l’imprécision des formules estimant le DFG au<br />

stade de l’IRC terminale, ce seuil de 10 ml/min/1,73 m 2 est peu<br />

fiable. La tolérance clinique est essentielle pour décider du<br />

moment où il faut instituer la dialyse. Ainsi, ce seuil peut être<br />

plus élevé dans certains cas, en particulier chez les patients<br />

diabétiques. Le choix du traitement se porte alors entre deux<br />

options thérapeutiques : la greffe rénale ou l’épuration extrarénale<br />

(EER). C’est le stade de l’insuffisance rénale terminale<br />

traitée (IRTT). Les contre-indications au traitement de suppléance<br />

sont peu nombreuses, par exemple, un âge extrême ou<br />

une démence avancée. Le nombre de patients concerné est<br />

considéré comme très faible, sans toutefois qu’une étude en ait<br />

apprécié la réelle ampleur.<br />

Recours tardif au néphrologue<br />

et traitement en urgence de l’IRT<br />

Un retard au diagnostic d’IRC peut conduire à un recours<br />

tardif au néphrologue ainsi qu’à l’initiation en urgence d’un<br />

traitement de suppléance, dont la conséquence est une augmentation<br />

de la morbimortalité chez ces patients [24-32] . Ce<br />

Facteurs d'évolution Actions de santé publique<br />

Âge plus avancé, diminution de masse rénale,<br />

histoire familiale, facteurs de l'alimentation,<br />

médicaments, produits de contraste iodés,<br />

exposition professionnelle, petit poids de naissance,<br />

statut de minorité raciale ou ethnique,<br />

bas niveau de revenus ou d'éducation, etc.<br />

Diabète, HTA, maladies auto-immunes, infections<br />

systémiques, infections urinaires, calculs,<br />

obstruction, toxicité médicamenteuse, maladies<br />

héréditaires, etc.<br />

Protéinurie de degré plus élevé, pression artérielle<br />

plus haute, contrôle glycémique médiocre,<br />

dyslipidémie, tabagisme, médicaments néphrotoxiques,<br />

produits de contraste iodés, grossesse, certaines<br />

mesures de régime, diabète survenant dans le cadre<br />

de néphropathies non diabétiques, etc.<br />

Référence tardive au néphrologue, accès<br />

vasculaire temporaire, anémie, albuminémie basse,<br />

phosphorémie élevée, etc.<br />

Instituer le traitement de substitution<br />

par dialyse ou greffe<br />

retard est retrouvé dans tous les pays et estimé entre 25 et 45 %<br />

des cas [33-35] . Dans la plupart des situations où le patient est<br />

adressé tardivement au néphrologue, le traitement de suppléance<br />

est institué en urgence, avec comme abord vasculaire<br />

un cathéter veineux central. La durée d’hospitalisation des<br />

patients au recours tardif est généralement plus longue que celle<br />

des patients à la prise en charge précoce : dans une étude<br />

prospective réalisée en 1998 en Île-de-France, la durée moyenne<br />

de séjour est respectivement de 28 jours (intervalle de confiance<br />

[IC] 95 % : 1-90) versus 3 jours (IC 95 % : 1-11) [36] . De plus,<br />

c’est une cause de surcoûts estimés à l’époque à 30 000 euros<br />

par patient, référé à moins de 1 mois de l’institution de la<br />

dialyse [29] . De telles situations de retard perdurent encore dans<br />

près du tiers des cas, malgré la création de guides thérapeutiques<br />

mis à la disposition de tous les professionnels de santé [37, 38] .<br />

Par exemple, dans une étude européenne multicentrique, 26 %<br />

des patients ont été pris en charge moins d’un mois avant leur<br />

dialyse [34] . Il est donc nécessaire de promouvoir le diagnostic<br />

précoce de MRC, en particulier dans les groupes à risque, afin<br />

d’instaurer un suivi adéquat de l’IRC au stade préterminal, dont<br />

l’intérêt ne fait plus de doute.<br />

Le recours tardif constitue une source de surcoûts évitables.<br />

En 1989, un recours tardif était cinq fois plus coûteux qu’une<br />

mise en dialyse en temps utile [39] . Le coût de l’accès vasculaire<br />

fait en cours d’hospitalisation était de 11 300 euros au lieu de<br />

3 000 euros en externe [40] . Si l’accès vasculaire était réalisé en<br />

externe, la réduction des coûts était de 864 000 euros [27] .Sile<br />

recours tardif était mieux géré en France, le gain de productivité<br />

estimé s’élèverait au moins à 30 millions d’euros par an [29] .<br />

Favoriser la prise en charge<br />

multidisciplinaire<br />

Dépister et réduire les facteurs<br />

de susceptibilité de maladie rénale chronique<br />

Dépister et réduire les facteurs d'initiation<br />

de maladie rénale chronique<br />

Diagnostiquer et traiter la MRC :<br />

référer précocement au néphrologue<br />

et traiter les comorbidités<br />

- Estimer et ralentir la progression de l'IRT<br />

- Prévenir et traiter les complications<br />

de l'urémie<br />

- Traiter les comorbidités<br />

- Préparer le traitement de substitution<br />

Figure 1. Actions de santé publique sur les facteurs influençant la maladie rénale chronique. IR : insuffisance rénale ; IRT : insuffisance rénale terminale ; HTA :<br />

hypertension artérielle ; MRC : maladie rénale chronique.<br />

Néphrologie<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse 18-025-B-10<br />

En Île-de-France, plus d’un patient sur trois était adressé<br />

tardivement en néphrologie [35] . Dans ce contexte, la diffusion<br />

des recommandations professionnelles aux médecins généralistes<br />

et aux spécialistes non néphrologues est indispensable. La<br />

3


18-025-B-10 Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

Retour<br />

en dialyse<br />

Amélioration<br />

de la fonction<br />

rénale<br />

Arrêt<br />

de dialyse<br />

reconnaissance précoce de l’évolution d’une IRC est fondamentale<br />

[41] , en particulier pour les groupes à risque pour lesquels un<br />

suivi prédialytique renforcé est indiqué. Les réseaux de professionnels<br />

qui se mettent en place sont destinés à une meilleure<br />

coopération pour mieux gérer un processus décisionnel distribué.<br />

La prise en charge est en effet pluridisciplinaire et associe<br />

au médecin traitant référent [42] le néphrologue, les médecins<br />

spécialistes (diabétologue, cardiologue, etc.), l’équipe soignante,<br />

la diététicienne et l’assistante sociale. Plus en amont, une<br />

meilleure connaissance et un meilleur suivi des maladies rénales<br />

initiales est nécessaire pour prévenir de la manière la plus<br />

appropriée possible l’évolution vers l’IRC.<br />

Traitements de suppléance par dialyse<br />

Au stade d’insuffisance rénale terminale, le choix se porte<br />

entre la dialyse ou la greffe rénale. C’est l’insuffisance rénale<br />

terminale traitée (IRTT). Un patient peut bénéficier successivement<br />

au cours de son traitement d’une méthode ou d’une autre<br />

(Fig. 2). Une meilleure connaissance de ces trajectoires de<br />

traitements est nécessaire pour adapter au mieux l’offre de soins<br />

entre les modes de dialyse et la greffe.<br />

Hémodialyse (HD)<br />

Nouveau patient<br />

en IRT<br />

Hémodialyse<br />

Dialyse péritonéale<br />

Décès<br />

Cette technique permet l’épuration des toxines accumulées<br />

par l’organisme par un circuit extracorporel (générateur d’HD)<br />

via un abord vasculaire, une fistule artérioveineuse (FAV) ou un<br />

cathéter veineux central. Généralement, le traitement d’HD<br />

comprend trois séances par semaine d’une durée de 4 heures en<br />

moyenne. Elle peut se pratiquer en différents lieux : en centre<br />

de dialyse, en unité de dialyse médicalisée, en unité d’autodialyse<br />

simple ou assistée, ou à domicile. L’association d’un lit ou<br />

d’un fauteuil, d’une machine (le générateur d’hémodialyse) et<br />

d’une arrivée d’eau constitue un poste d’HD.<br />

Dialyse péritonéale (DP) à domicile<br />

Transplantation<br />

préemptive<br />

Retour<br />

de<br />

transplantation<br />

Transplantation<br />

Figure 2. Flux des patients insuffisants rénaux terminaux. Un patient<br />

peut, par exemple, avoir une greffe préemptive (sans dialyse préalable)<br />

puis passer en hémodialyse après un rejet de son greffon, puis être<br />

retransplanté. IRT : insuffisance rénale terminale.<br />

Cette technique utilise le péritoine comme membrane de<br />

dialyse. Un cathéter étanche, posé de façon permanente au<br />

niveau de l’abdomen, permet le transfert du liquide de dialyse<br />

vers le péritoine. La DP peut être continue et ambulatoire<br />

(DPCA), il s’agit de la forme manuelle, ou de façon automatisée<br />

(DPA), la nuit, à l’aide d’un cycleur qui se charge du renouvellement<br />

du liquide de dialyse dans le péritoine. Le choix de la<br />

modalité dépend du mode de vie, de la préférence et de l’état<br />

de santé du patient.<br />

■ Sources de données<br />

épidémiologiques<br />

Surveillance épidémiologique<br />

Registres de dialyse<br />

Un registre est défini comme un recueil continu et exhaustif<br />

de données nominatives intéressant un ou plusieurs événements<br />

de santé dans une population géographiquement définie, à des<br />

fins de recherche ou de santé publique, par une équipe ayant<br />

les compétences appropriées.<br />

Un événement de santé est défini comme la survenue repérable<br />

d’un fait important, affectant la santé de l’individu [43] .Il<br />

doit satisfaire à huit critères :<br />

une définition opérationnelle, objective et pas seulement<br />

clinique, non dépendante des variations de l’offre de soins ;<br />

une spécificité du diagnostic ;<br />

une date de l’événement repérable dans l’histoire de l’individu<br />

;<br />

une obtention possible de l’exhaustivité des cas ;<br />

une adéquation entre la fréquence de l’événement et la taille<br />

de la population couverte ;<br />

des finalités scientifiques ;<br />

un intérêt du registre pour la politique nationale de santé<br />

publique ;<br />

un investissement raisonnable en temps et en coût.<br />

Différents registres coexistent, nationaux ou internationaux.<br />

Ils publient leurs rapports annuels de surveillance via leurs<br />

propres sites Internet, consultables en accès libre.<br />

En France, le registre REIN doit couvrir en 2009 l’ensemble<br />

du territoire. Le Registre de dialyse péritonéale de langue<br />

française, (RDPLF) regroupe la majorité des malades français<br />

traités par DP.<br />

En Europe, il faut citer au Royaume-Uni The UK Renal<br />

Registry, en Allemagne le Quasi NIERE (Qualitätssicherung in<br />

der Nierenersatztherapie) ou en Belgique le Registre de néphrologie<br />

de la communauté française de Belgique. L’European Renal<br />

Association European Dialysis and Transplant Association a<br />

développé aussi son registre, qui collige des données internationales.<br />

En zone Pacifique, il faut citer l’ANZDATA (Australia and<br />

New Zealand Dialysis and Transplant Registry) et au Japon le<br />

registre de la société de dialyse JSDT registry. Aux États-Unis c’est<br />

l’USRDS (the United States Renal Data System).<br />

La déclaration des cas est une fonction de l’organisation du<br />

système d’information. Pour l’United States Renal Data System<br />

[44] , les patients sont déclarés via le HCFA (Health Care<br />

Financing Administration), organisme qui gère le remboursement<br />

des soins. Il existe ainsi un lien fort entre le registre de<br />

l’IRT et l’administration qui gère le remboursement des soins.<br />

Pour l’European Dialysis and Transplantation Association<br />

(EDTA), la déclaration des cas recouvre des réalités diverses du<br />

fait des disparités des politiques nationales de prise en charge de<br />

l’IRT [45] .<br />

Il faut souligner que l’estimation de l’incidence de l’IRT dans<br />

tous les pays n’est pas connue précisément, car les registres ne<br />

comptabilisent que les patients traités.<br />

Registre REIN<br />

Le REIN a pour objectif général de décrire l’incidence et la<br />

prévalence des traitements de suppléance de l’insuffisance<br />

rénale chronique, les caractéristiques de la population traitée, les<br />

modalités de prise en charge, la qualité du traitement mis en<br />

œuvre ainsi que la survie des patients. Le REIN a pour mission<br />

de contribuer à l’élaboration et à l’évaluation de stratégies<br />

sanitaires visant à améliorer la prévention et la prise en charge<br />

de l’IRC et de favoriser la recherche clinique et épidémiologique.<br />

Il participe à l’estimation des besoins de la population dans<br />

le cadre des décrets de septembre 2002 relatifs au traitement de<br />

l’IRC par la pratique de l’épuration extrarénale. Il permet, enfin,<br />

d’évaluer la diffusion des recommandations en matière de<br />

prévention et de prise en charge de l’IRC, ainsi que leur impact<br />

dans la population. En particulier, plusieurs des informations<br />

4 Néphrologie


ecueillies constituent des indicateurs de suivi des objectifs 80 et<br />

81 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé<br />

publique, respectivement : stabiliser l’incidence de l’IRT d’ici à<br />

2008 et réduire le retentissement de l’IR sur la qualité de vie des<br />

personnes en dialyse.<br />

Le registre REIN est adossé au registre Cristal des greffés. Cette<br />

architecture des données permet d’envisager une meilleure<br />

connaissance de l’IRTT entre dialyse et greffe et de mieux guider<br />

les évolutions des besoins en soins. Cette organisation va<br />

permettre de suivre les trajectoires des traitements de suppléance<br />

pour un même patient et leurs conséquences.<br />

Le REIN présente plusieurs caractéristiques innovantes. Le<br />

recueil des données a été conçu via Internet, par un système<br />

d’information sécurisé et agréé par la Commission nationale de<br />

l’informatique et des libertés (CNIL) [46-48] . Un contrôle de<br />

qualité systématique est réalisé au niveau de chaque région par<br />

des assistants de recherche cliniques encadrés par une cellule<br />

d’appui épidémiologique. Les données consolidées sont colligées<br />

dans un entrepôt de données [49] qui sert à la présentation des<br />

résultats à partir d’un système d’information géographique, le<br />

SIGNe, disponible sur Internet [50] .<br />

Une littérature abondante<br />

Une recherche bibliographique sur Pubmed ® avec les mots<br />

clés relatifs aux différents types d’études épidémiologiques<br />

réalisées dans le domaine de l’insuffisance rénale terminale et de<br />

la dialyse, transplantation exclue, permet de dénombrer<br />

321 articles concernant des enquêtes prospectives de cohorte,<br />

353 articles concernant des études transversales, et 98 enquêtes<br />

rétrospectives de type cas-témoins. Les articles datant des cinq<br />

dernières années représentent respectivement 59 %, 47 % et<br />

44 %. Parmi toutes ces études, nous citerons par exemple la<br />

cohorte Dialysis Outcomes and Practice Patterns Study (DOPPS),<br />

importante étude observationnelle prospective regroupant de<br />

nombreux pays (États-Unis, Canada, Japon et plusieurs pays<br />

européens, dont la France), ayant débuté en 1996 [51] . Elle<br />

concerne les patients hémodialysés, nouveaux patients et<br />

patients prévalents, et n’inclut pas la dialyse péritonéale. Un<br />

autre exemple, l’étude Choices for Healthy Outcomes in Caring<br />

for End-Stage Renal Disease (CHOICE) Study, aux États-Unis, est<br />

également une étude prospective de cohorte [52] . En France, la<br />

Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés<br />

(CNAMTS) a conduit, en 2003, une étude transversale qui a<br />

permis d’estimer la prévalence de la dialyse [53, 54] . L’étude<br />

GENDIAN est une enquête de type cas-témoin ; elle concerne<br />

les prédicteurs cliniques et génétiques de morbimortalité et<br />

d’IRT par néphropathie chez des diabétiques de type 2 [55] .<br />

■ Incidence, prévalence et survie<br />

Quelques définitions<br />

L’incidence est le nombre de nouveaux cas de malades par<br />

unité de temps divisé par la taille de la population. La prévalence<br />

est la proportion de malades présents dans la population à un<br />

instant donné. Cette prévalence, dite ponctuelle, est calculée à<br />

une date donnée (généralement au 31 décembre). Cet indicateur<br />

intègre la durée de l’IRTT et la cinétique de survenue des<br />

nouveaux cas. C’est un index utile en santé publique, car il<br />

mesure l’ampleur du problème que le système de santé a à gérer.<br />

Il est aussi possible de calculer la prévalence sur une période<br />

donnée. Elle correspond au nombre annuel de sujets pris en<br />

charge en IRTT dans une population donnée (par exemple,<br />

présents au 31 décembre), augmenté du nombre de patients qui<br />

ont été pris en charge mais qui sont décédés au cours de l’année<br />

étudiée. C’est un index utile pour les analyses de coûts. Il<br />

fournit, en effet, une information sur l’ampleur des besoins<br />

mobilisés, permettant ainsi de guider la planification des<br />

ressources.<br />

Afin de pouvoir comparer entre elles des populations, il est<br />

important de vérifier qu’elles sont semblables au regard de<br />

toutes les caractéristiques qui pourraient modifier les taux.<br />

Néphrologie<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse 18-025-B-10<br />

Ainsi, l’âge peut-il affecter la comparaison entre deux populations<br />

s’il n’est pas également distribué. Le cas échéant, on doit<br />

ajuster les taux pour refléter ce qu’ils seraient si les structures<br />

d’âge des deux populations comparées étaient similaires. Dans<br />

ce cas, l’âge est appelé « facteur de confusion ». Si des populations<br />

à comparer diffèrent pour l’âge et le sexe, alors il faut<br />

avoir recours à des taux standardisés sur ces deux variables pour<br />

rendre les comparaisons pertinentes.<br />

Il est à noter, enfin, que pour le registre de l’USRDS, le recueil<br />

des données débute au troisième mois du traitement de suppléance.<br />

Ainsi, tous les sujets décédés précocement ne sont-ils<br />

pas comptabilisés. Dans le registre REIN, les données sont<br />

colligées à la date du début du traitement.<br />

En amont de l’IRT, la prévalence<br />

insoupçonnée de la maladie rénale<br />

chronique<br />

Aux États-Unis, la prévalence estimée de tous les stades de la<br />

maladie rénale chronique est voisine de 13 % et concerne près<br />

de 20 millions d’américains. Le nombre de patients en dialyse<br />

devrait y être de 650 000 en 2010 [56] . La prévalence de la MRC<br />

a crû entre 1988-1994 et 1999-2004. Sur la période 1988-1994,<br />

elle est passée respectivement pour les stades 1à4de10,0 % à<br />

13,1 % en 1999-2004. C’est le stade 3 qui a augmenté le plus,<br />

respectivement de 5,4 % à 7,7 % [57] .<br />

En Europe, l’étude norvégienne Hunt II a montré que la<br />

prévalence de la MRC y était voisine de celle des États-Unis [58] .<br />

En revanche, à 60 ans, le ratio de l’IRT sur l’IRC était deux fois<br />

plus élevé aux États-Unis qu’en Norvège, et trois fois plus après<br />

60 ans. À prévalence analogue de MRC, c’est donc la progression<br />

de l’IRC qui est plus élevée aux États-Unis qu’en Norvège.<br />

Ainsi, la maladie rénale chronique requiert-elle une prise en<br />

charge structurée et renouvelée du fait de l’augmentation de son<br />

incidence, de sa prévalence, de son évolution délétère et de ses<br />

coûts de prise en charge [55] .<br />

Incidence de l’IRTT : âge et disparités<br />

régionales<br />

Une incidence qui croît avec l’âge<br />

L’incidence augmente avec l’âge, de 7 cas pmh chez les<br />

moins de 20 ans à 590 cas pmh chez les plus de 75 ans ; 64 %<br />

des malades ont plus de 65 ans. Le sex ratio, de 1,6, augmente<br />

avec l’âge : il est de 2,6 chez les plus de 75 ans. De plus, les<br />

différences régionales d’incidence sont plus marquées au-delà de<br />

65 ans.<br />

Des disparités régionales<br />

En France, en 2005, dans les 13 régions du REIN, le taux brut<br />

d’incidence de l’IRTT était estimé à 139 cas pmh, soit un taux<br />

standardisé de 133 cas pmh. Cela représente près de<br />

8 400 nouveaux cas ayant débuté un premier traitement de<br />

suppléance en France. L’incidence varie d’une région à l’autre,<br />

la plus faible en Auvergne, à 92 pmh, et la plus forte dans le<br />

Pas-de Calais, à 171 pmh. Cette variabilité pourrait être liée à<br />

des différences de distribution géographique de facteurs de<br />

risque, tel que le diabète, ou de mortalité dans la population<br />

générale.<br />

Une population incidente qui vieillit<br />

La population des insuffisants rénaux terminaux devient plus<br />

agée à l’institution du traitement de suppléance. En 2005, au<br />

niveau national, l’âge moyen à l’institution de la dialyse est de<br />

65 ans mais l’âge médian est de 71 ans. Plus de deux patients<br />

sur trois sont âgés de plus de 65 ans et plus d’un patient sur<br />

trois de plus de 75 ans.<br />

Dans une population donnée, l’importance de l’augmentation<br />

des taux d’incidence peut varier d’un sous-groupe à un autre<br />

selon l’âge, le sexe, la néphropathie initiale, le niveau socioéconomique,<br />

la région de prise en charge. Ainsi, des différences<br />

régionales d’incidence sont identifiables pour chaque tranche<br />

5


18-025-B-10 Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

d’âge. Plus l’âge augmente, plus les différences sont importantes.<br />

L’âge moyen fluctue entre 56 ans en Seine-Saint-Denis et 74 ans<br />

en Ariège ou dans le Tarn-et-Garonne. La région Languedoc-<br />

Roussillon a le plus fort taux d’incidence après 75 ans<br />

(793 cas pmh), double de celui de la Bretagne (377 cas pmh).<br />

En Midi-Pyrénées, 42 % des nouveaux patients patients ont plus<br />

de 75 ans.<br />

Le vieillissement de la population des dialysés varie d’une<br />

région à l’autre. Par exemple, l’âge moyen à l’institution de<br />

l’épuration extrarénale était de 62 ans dans le bassin de<br />

population de Saint-Brieuc, dans la première moitié de la<br />

décennie. En 2005, en Bretagne, 56 % des patients débutant la<br />

dialyse ont plus de 65 ans et un patient sur trois a plus de<br />

75 ans. En Languedoc-Roussillon, en 1994, un quart des cas<br />

incidents avaient plus de 72 ans. En 2005, c’est plus de 40 %<br />

des patients qui ont plus de 75 ans au début de la dialyse. En<br />

1998, en Île-de-France, l’âge moyen à la première dialyse était<br />

de 60 ans et un patient sur cinq avait plus de 75 ans. En 2005,<br />

dans cette région, la situation est en revanche stable. L’âge<br />

moyen à la dialyse est de 60,9 ans et 23 % des patients ont plus<br />

de 75 ans au début de la dialyse.<br />

Plus d’hommes que de femmes<br />

Alors que plus de femmes que d’hommes présentent une<br />

maladie rénale chronique [56] , en revanche plus d’hommes que<br />

de femmes présentent une IRTT. Au-delà de 75 ans, le taux<br />

d’incidence chez les hommes était 2,6 fois plus élevé que chez<br />

les femmes. Les hommes représentent plus de la moitié des cas<br />

incidents d’IRTT pour la plupart des causes. Cependant, à l’île<br />

de la Réunion, l’IRT chez les femmes était 1,4 fois plus incidente<br />

que chez les hommes [59-61] . Une telle inversion du sexe<br />

ratio a été aussi notée dans d’autres populations comme celle<br />

des aborigènes d’Australie [62] .<br />

Une prévalence qui semble se stabiliser<br />

Au 31 décembre 2005, à partir de 13 régions du REIN, la<br />

prévalence des malades adultes dialysés et greffés étaient<br />

respectivement de 539 cas pmh et 387 cas pmh. Ceci représente<br />

plus de 33 000 patients dialysés en France et près de<br />

23 000 greffés.<br />

La prévalence de la dialyse est 1,5 fois plus élevée en<br />

moyenne chez les hommes que chez les femmes ; cette différence<br />

augmente avec l’âge et particulièrement après 45 ans.<br />

L’âge médian des patients dialysés est de 69 ans et diffère de<br />

façon significative selon la région de résidence et la néphropathie<br />

initiale.<br />

Il existe des différences régionales de prévalence. L’exemple le<br />

plus frappant concerne la prévalence dans les DOM, qui est de<br />

l’ordre de deux fois plus élevée que celle de la métropole. Les<br />

disparités régionales persistent après standardisation, les patients<br />

dans les DOM étant plus jeunes avec plus de femmes [59] .<br />

En France, à l’échelon d’une région, la Lorraine, il n’était pas<br />

noté de variation significative de prévalence depuis 2002, mais<br />

une tendance à la hausse chez les sujets de plus de 75 ans.<br />

Les malades prévalents en dialyse au 31 décembre<br />

2005 avaient une durée médiane depuis le premier traitement<br />

de suppléance de 3 ans.<br />

Des disparités internationales<br />

La comparaison des statistiques internationales requiert de<br />

tenir compte des différences de démographie, de structures des<br />

systèmes de santé, de régimes d’assurance sociale, de modalités<br />

de prise en charge, ou d’accès aux soins.<br />

À la fin de l’année 2005, 1,9 million de patients dans le<br />

monde recevaient un traitement de suppléance dont 68 % en<br />

hémodialyse, 8 % en dialyse péritonéale et 23 % greffés [63] .<br />

Le taux d’incidence et la prévalence varient grandement,<br />

attestant d’une disparité géographique importante. Les taux les<br />

plus élevés concernent Taïwan, le Japon et les États-Unis. En<br />

2004, l’incidence était de 376 cas pmh à Taïwan, de<br />

267 cas pmh au Japon et de 342 cas pmh aux États-Unis [64] .La<br />

prévalence en 2005 était respectivement de 1 830 cas pmh,<br />

pmh<br />

450<br />

400<br />

350<br />

300<br />

250<br />

200<br />

150<br />

100<br />

50<br />

0<br />

1998 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005<br />

Taïwan<br />

Allemagne Écosse<br />

États-Unis Belgique Australie<br />

Japon<br />

Canada<br />

Nouvelle-Zélande<br />

Figure 3. Évolution de l’incidence de l’insuffisance rénale terminale<br />

traitée (IRTT) de 1998 à 2005 (par million d’habitants [pmh]). Comparaison<br />

internationale.<br />

2 018 cas pmh, le taux le plus élevé de tous les pays, et<br />

1 585 cas pmh, pour ces trois pays. On comptait plus de<br />

500 000 patients en IRTT aux États-Unis.<br />

Pour le registre de l’ANZDATA en 2004, l’incidence de l’IRTT<br />

était de 95 cas pmh en Australie et de 110 cas pmh en<br />

Nouvelle-Zélande. La prévalence était respectivement de 707 et<br />

de 737 cas pmh.<br />

Enfin, en Europe en 2004, l’incidence de l’IRTT fluctue d’un<br />

pays à l’autre, de 75 cas pmh en Islande à 195 cas pmh en<br />

Grèce. La prévalence fluctue également, de 479 cas pmh en<br />

Islande à 1 022 cas pmh en Italie.<br />

L’incidence et la prévalence de l’IRT continuent à croître dans<br />

le monde. Une tendance générale à la hausse de l’incidence<br />

était notable depuis la fin des années 1980, mais une décélération<br />

semble s’amorcer depuis le début des années 2000 [65-67] .<br />

C’est une conséquence de deux tendances : une stabilisation,<br />

voire une baisse, de l’incidence chez les personnes de moins de<br />

65 ans et une augmentation de l’incidence chez les plus de<br />

75 ans.<br />

Pour l’ensemble des pays, une augmentation de la prévalence<br />

de l’IRTT était notée. Aux États-Unis, à la fin du siècle dernier,<br />

elle était de 5à6%paran,mais avec un ralentissement de 2 à<br />

3 % depuis 2000. À la fin de 2005, on comptait un accroissement<br />

de 12 % de la prévalence par rapport à l’année 2000.<br />

Cette évolution des taux de prévalence est liée, d’une part, à<br />

l’augmentation de l’incidence et, d’autre part, à une meilleure<br />

prise en charge de l’IRT (Fig. 3, 4).<br />

Classer les causes d’IRT<br />

Il n’y a pas de critères acceptés à un niveau international<br />

pour classer les causes d’IRT. La nature de l’affection à l’origine<br />

de l’IRT est souvent mal connue [68] . Pour le registre de l’EDTA,<br />

30 % des causes étaient incertaines ou non recensées, pour<br />

l’USRDS, il s’agissait de 12 %, et 7 % pour l’ANZDATA [69] .Ilest<br />

parfois malaisé d’assigner une cause à une IRT. Ainsi, par<br />

exemple, il n’y a pas de consensus en ce qui concerne le codage<br />

d’une néphrosclérose ou d’une néphropathie ischémique [70] .<br />

Vingt pour cent des patients présentant un diabète de type 2 et<br />

une IRT ont une cause d’IRT qui n’est pas le diabète [71] .En<br />

Australie, près de trois glomérulonéphrites sur quatre sont<br />

prouvées par biopsie, versus une sur deux en Europe et environ<br />

une sur trois aux États-Unis [65] .<br />

Un effort d’harmonisation de la classifications des causes<br />

d’IRT a été entrepris pour trois registres : le registre américain de<br />

6 Néphrologie


Figure 4. Évolution de la prévalence de l’insuffisance rénale terminale<br />

traitée (IRTT) de 1998 à 2005 (par million d’habitants [pmh]). Comparaison<br />

internationale.<br />

l’USRDS, le registre de l’EDTA et le registre australien et néozélandais<br />

[69] . En France, nous avons proposé un thesaurus de<br />

néphrologie commun à l’ensemble de la discipline afin d’harmoniser<br />

le codage au niveau national avec une transcodification<br />

dans la Classification internationale des maladies (CIM)10 [72] .<br />

L’étude UREMIDIAB 2 a confirmé qu’en métropole la prévalence<br />

du diabète chez les patients en IRT était faible par rapport<br />

aux autres pays, voisine de 13 %, même si elle avait doublé<br />

entre 1989 et 1995 [73] . En revanche, cette étude soulignait<br />

l’importance du diabète de type 2 dans les DOM-TOM. L’incidence<br />

de l’IRT liée au diabète était voisine de celle des États-<br />

Unis, où le taux d’incidence ajusté (âge, « race » et sexe) est<br />

passé de 67 pmh en 1990 à 120 pmh en 1997 et à 153 cas pmh<br />

en 2005 [62] . Cette croissance de l’incidence du diabète était<br />

bien plus marquée que pour les autres grandes causes d’IRT.<br />

Le diabète est devenu la cause la plus fréquente d’IRT aux<br />

États-Unis. Il concernait 43,8 % des cas incidents en 2005, soit<br />

36,9 % des cas prévalents au 31 décembre 2005. En Europe,<br />

15 à 35 % des cas incidents en 2005 ont pour cause primaire<br />

un diabète, en Australie et Nouvelle-Zélande respectivement<br />

30 et 40 % [54] .<br />

Le diabète et la néphropathie vasculaire<br />

augmentent<br />

L’augmentation de l’incidence et de la prévalence est associée<br />

à celle des néphropathies diabétique, hypertensive et vasculaire.<br />

Les deux principales causes d’IRTT pour les nouveaux cas en<br />

France sont le diabète, dans 31 % des cas, et l’hypertension<br />

artérielle, pour 29 %. On observe cependant d’importantes<br />

variations régionales d’incidence par type de néphropathie<br />

initiale. Ceci explique une partie des différences interrégionales.<br />

Par exemple, dans le Pas-de-Calais, où l’incidence de l’IRTT est<br />

la plus élevée, on notait un taux standardisé de 53 pmh lié au<br />

diabète à comparer à 9 pmh en Bretagne.<br />

La comparaison des incidences par néphropathie doit être<br />

interprétée avec précaution car il existe une variabilité des<br />

pratiques de codage en l’absence de définition standardisée.<br />

Incidence et prévalence par modalité de prise<br />

en charge<br />

L’hémodialyse est le traitement de suppléance de l’IRT le plus<br />

fréquent, représentant 86 % des nouveaux traitements en 2005,<br />

avec 12 % pour la DP et 2 % pour la greffe préemptive. La part<br />

de la dialyse péritonéale comme premier traitement de suppléance<br />

varie de 4 % dans la région Centre à 25 % en<br />

Bourgogne.<br />

Néphrologie<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse 18-025-B-10<br />

100 %<br />

80 %<br />

60 %<br />

40 %<br />

20 %<br />

0 %<br />

Australie<br />

Autriche<br />

Belgique fr<br />

Canada<br />

France<br />

Allemagne<br />

Pays-Bas<br />

Nouvelle-Zélande<br />

Espagne<br />

Taïwan<br />

États-Unis<br />

Au niveau international, l’HD est aussi la modalité de dialyse<br />

majoritaire, entre 79 et 95 % des patients prévalents en dialyse<br />

en 2005. Seuls quelques pays utilisent largement la DP. À Hong<br />

Kong, 83 % des patients prévalents sont traités par DP, 72 % à<br />

Jalisco au Mexique, 42 % des patients en Nouvelle-Zélande, et<br />

35 % en Islande [56] (Fig. 5).<br />

Survie des patients en IRTT<br />

DP<br />

HD domicile<br />

HD<br />

Figure 5. Prévalence des différents types de dialyse en 2005. Comparaison<br />

internationale. DP : dialyse péritonéale ; HD : hémodialyse.<br />

Morbidité<br />

Des comorbidités accrues<br />

Près d’un malade sur deux a au moins une comorbidité<br />

cardiovasculaire à l’initiation du traitement de suppléance. Le<br />

nombre total de comorbidités (pathologies cardiovasculaires,<br />

diabète, hépatite virale, cirrhose, insuffisance respiratoire,<br />

antécédent de cancer, VIH et/ou sida) augmente avec l’âge.<br />

Au-delà de 75 ans, 83 % des malades avaient au moins une<br />

comorbidité à l’initiation du traitement de suppléance. Le<br />

nombre moyen de comorbidités est plus élevé chez les hommes<br />

que chez les femmes et plus élevé en présence d’un diabète,<br />

quel que soit le sexe. La probabilité d’avoir une pathologie<br />

cardiovasculaire (pathologie coronarienne, insuffisance cardiaque,<br />

troubles du rythme et/ou antécédents d’accident cardiaque<br />

vasculaire [AVC] ou d’accident ischémique transitoire [AIT])<br />

augmente aussi avec l’âge. On compte 77 % des malades avec<br />

antécédents d’hypertension artérielle et 31 % de fumeurs ou<br />

ex-fumeurs.<br />

La comorbidité cardiovasculaire la plus fréquemment déclarée<br />

est l’insuffisance cardiaque, soit 27 % des malades, suivi de<br />

l’insuffisance coronarienne (26 %) et de l’artérite des membres<br />

inférieurs (22 %). La majorité des malades ayant eu une<br />

amputation ou un trouble sévère de la vue était diabétique.<br />

Des hospitalisations plus fréquentes<br />

Les données les plus pertinentes viennent des États-Unis.<br />

L’interpolation à la France reste à démontrer. Chez les patients<br />

en HD, les hospitalisations pour causes cardiovasculaires ont<br />

augmenté de 7,8 % et de 26,8 % pour des causes infectieuses,<br />

dues à la fréquence d’utilisation des cathéters. Les hospitalisations<br />

dues à des évènements liés aux abords vasculaires sont en<br />

revanche à la baisse de 34 %. Chez les patients sous DP, une<br />

baisse générale de 8,9 % est observée toutes causes confondues,<br />

et notamment de 75 % pour les maladies cardiovasculaires. Le<br />

taux d’hospitalisation des cas prévalents d’insuffisants rénaux<br />

est stabilisé depuis plus d’une décennie à un taux ajusté de<br />

1 950 personnes-années en 2005 avec une moyenne de<br />

13,9 jours d’hospitalisation. Les patients hémodialysés sont en<br />

moyenne hospitalisés pour une durée (14,5 jours) près de trois<br />

fois plus élevée que celle des transplantés (5,7 jours) [54] .<br />

Dans l’étude DOPPS, les patients dont les unités de dialyse<br />

avaient les durées d’hospitalisation les moins longues avaient le<br />

7


18-025-B-10 Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

Survie<br />

1,00<br />

0,95<br />

0,90<br />

0,85<br />

0,80<br />

0,75<br />

0,70<br />

Basse-Normandie<br />

Centre<br />

Champagne-Ardenne<br />

Languedoc-Roussillon<br />

Limousin<br />

Midi-Pyrénées<br />

Provence-Alpes-Côte d'Azur<br />

Île-de-France<br />

0 50 100 150 200 250 300 350<br />

Jours<br />

Figure 6. Survie des cas incidents pour huit régions tests en France en<br />

2005.<br />

risque le plus élevé de réadmission, en particulier aux États-<br />

Unis, où la pression pour réduire la durée des hospitalisations<br />

est la plus forte [74] . Le risque d’hospitalisation était significativement<br />

plus élevé en France que dans les autres pays européens<br />

de l’étude DOPPS. Il était significativement associé à une dialyse<br />

péritonéale antérieure, à une maladie vasculaire périphérique, à<br />

un saignement digestif survenu dans l’année précédente, à un<br />

cancer, à une affection cardiaque ou psychiatrique et à l’institution<br />

récente d’une dialyse (moins de 1 mois à l’entrée dans<br />

l’étude) [75] .<br />

Mortalité<br />

Probabilité de survie<br />

En 2005, la probabilité de survie des malades arrivant au<br />

stade du traitement de suppléance est de 82 %à1an,72%à<br />

2anset62%à3ans, toutes modalités de traitement confondues<br />

et ce malgré un nombre important de comorbidités et un<br />

âge médian de 70 ans. La prévention en amont des comorbidités<br />

et la bonne préparation de la prise en charge initiale du<br />

traitement de suppléance pourraient avoir une influence<br />

significative sur la survie en dialyse, qui reste cependant très<br />

fortement liée à l’âge. La Figure 6 représente, pour l’année 2005,<br />

lasurvieà1andedialyse dans huit régions françaises.<br />

Taux de mortalité<br />

La principale cause de décès chez les patients âgés de plus de<br />

65 ans est cardiovasculaire, suivie par les causes infectieuses [76] .<br />

Le taux de mortalité est en excès par rapport à la population<br />

générale [77] .<br />

Au Canada, la mortalité pour cause cardiovasculaire chez les<br />

patients dialysés est, même après ajustement sur l’âge le sexe et<br />

la présence ou non d’un diabète, de 10 à 20 fois plus forte que<br />

pour la population générale. L’IRC doit être considérée comme<br />

un facteur de risque cardiovasculaire à part entière [78] .<br />

Le taux de mortalité est en légère baisse sur l’ensemble de la<br />

population, de 305,3 en 1980 à 225,3 pour 1 000 patientsannée<br />

en 2005, ce qui cache une différence entre les patients<br />

récemment sous traitement de suppléance : chute de 27 % de<br />

1985 à 2005 et ceux étant depuis une plus longue période :<br />

hausse de 7 %.<br />

L’augmentation de l’incidence du diabète s’est dessinée dans<br />

tous les pays développés pendant la dernière décennie. Cette<br />

évolution est liée à l’augmentation d’incidence du diabète [79] de<br />

type 2 et à une diminution de la mortalité précoce liée à<br />

l’hypertension et aux complications cardiovasculaires [80] .En<br />

revanche, le développement de la morbidité cardiovasculaire,<br />

tôt dans l’histoire de l’IRC, participe à une mortalité cardiaque<br />

et vasculaire accrue en IRTT par rapport aux nondiabétiques<br />

[81] . Une augmentation de la mortalité pour causes<br />

infectieuses a également été rapportée pour les diabétiques [82]<br />

de type 2.<br />

■ Offre de soins et coût de l’IRT<br />

Coût global de l’IRTT<br />

En France, en 2003, le coût moyen de la prise en charge d’un<br />

dialysé était estimé à 40 975 euros [83] . En 2005, le coût global<br />

de la prise en charge par technique d’épuration extrarénale des<br />

patients en IRT a été estimé à 2,145 milliards d’euros, soit<br />

1,56 % de l’ONDAM. Une étude effectuée en 2006 a évalué le<br />

coût de la prise en charge de la dialyse en France à partir des<br />

coûts moyens annuels de la dialyse par patient et par modalité<br />

ainsi que le coût annuel global de la dialyse [4] . Les techniques<br />

dispensées au domicile sont les moins coûteuses. Les coûts<br />

moyens annuels des différentes techniques sont les suivants :<br />

49 700 euros pour la DP automatisée ; 49 900 euros pour l’HD<br />

à domicile ; 50 000 euros pour la DP continue ambulatoire ;<br />

59 500 euros pour l’autodialyse ; 62 300 euros pour l’unité de<br />

dialyse médicalisée ; 81 500 euros pour l’HD en centre.<br />

Aux États-Unis, l’USRDS rapporte une hausse des dépenses<br />

d’un patient IRC de 3,2 % entre 2004 et 2005 après ajustement<br />

sur l’inflation. Une projection évalue qu’en 2020 le coût de<br />

Medicare lié à l’IRT aux États-Unis s’élèverait à 53,6 milliards de<br />

dollars, contre 21,3 en 2005. Le coût annuel lié à un patient<br />

Medicare en IRTT en 2005 est de 59 420 dollars et, selon la<br />

modalité de prise en charge : 69 760 dollars pour l’hémodialyse,<br />

50 850 dollars pour la dialyse péritonéale et 25 020 dollars pour<br />

la transplantation.<br />

Politique de santé publique et adéquation<br />

offre-demande<br />

Politique de santé publique et IRT<br />

Le rapport Fragonard, au chevet de l’assurance maladie,<br />

insiste sur l’importance d’améliorer le fonctionnement du<br />

système de soins et la coordination de ses acteurs. L’offre de<br />

soins est plus ample et variée qu’auparavant et la demande de<br />

soins croît. Tout ce qui est proposé n’est pas à placer au même<br />

niveau de nos exigences de soins. Tout n’a pas la même qualité,<br />

la même pertinence pour bien soigner. Notre système de<br />

financement s’épuiserait à vouloir couvrir sans aucun tri<br />

préalable tout ce que les professions de santé et les industries<br />

peuvent offrir. Plus encore, il tarirait les possibilités de redistribution<br />

de la richesse collective. Le rapport Cordier [84] soulignait<br />

que l’existence d’un financement socialisé appelle un discernement<br />

et une optimisation dans l’emploi des fonds qui relèvent,<br />

en dernière analyse, d’une exigence éthique.<br />

Hiérarchiser les priorités est un impératif de notre système<br />

fondé sur la solidarité sociale. Il s’agit de trouver un « développement<br />

durable » pour notre système de solidarité [76] .Ilne<br />

s’agit pas de refuser la croissance des dépenses de santé, liée à<br />

une offre de plus en plus spécifique et de haute technicité, mais<br />

de refuser une croissance injustifiée, non maîtrisée et dépourvue<br />

de sens, qui engloutit les ressources.<br />

Les critères d’efficacité et d’efficience doivent guider les choix.<br />

L’efficacité relève de procédures techniques. En revanche,<br />

l’efficience relève d’un choix collectif, c’est une forme d’appréciation<br />

médicoéconomique de l’utilité d’un type d’offre par<br />

rapport à son coût. Elle consiste à mesurer si l’efficacité ou<br />

l’utilité médicale d’un acte, d’un dispositif, d’un produit, justifie<br />

les dépenses supplémentaires qu’il entraîne. L’articulation de ces<br />

deux approches, présentée de manière explicite, est nécessaire<br />

en indiquant les motifs des décisions partagées. Le ratio utilité/<br />

coût n’est pas ici conçu comme servant à définir ce qui peut<br />

entrer dans un volume de dépenses fixé à l’avance, mais comme<br />

un outil de pilotage médicoéconomique. Pour la santé de notre<br />

système de soins, il faut optimiser les prises en charge, améliorer<br />

la qualité et en maîtriser les coûts, tout en procédant au<br />

réexamen des systèmes de recettes et de prise en charge<br />

publique.<br />

À cet égard, la prise en charge de l’IRT et la redistribution de<br />

l’offre de soins, par l’analyse conjointe des données de dialyse<br />

et de greffe, entrent parfaitement dans ce champ d’une approche<br />

à maîtriser. Elle est illustrée par deux exemples tirés de la<br />

8 Néphrologie


.<br />

modélisation, d’une part, et l’épidémiologie géographique,<br />

d’autre part.<br />

Promotion de la greffe : approche<br />

par modélisation des coûts<br />

Nous avions proposé, en 1997, d’accroître la part de la<br />

transplantation dans le traitement de l’IRT. Le programme<br />

15-20 consistait à passer de 15 à 20 donneurs pmh et par<br />

an [85] . Le retour sur investissement prévisible était élevé,<br />

compte tenu du différentiel de coût entre la dialyse et la greffe.<br />

En effet, le coût moyen annuel de la dialyse pour un patient<br />

était alors estimé à 50 000 euros, celui de la transplantation à<br />

55 000 euros la première année et à 8 000 euros ultérieurement.<br />

Avec de telles hypothèses, le modèle utilisé a considéré le<br />

différentiel de coût entre deux programmes de prise en charge,<br />

l’un, existant, dans lequel le nombre de transplantations rénales<br />

restait de l’ordre de 1 600 par an pour 6 500 nouveaux cas<br />

d’IRTT, l’autre, renforcé, pour lequel le nombre de transplantations<br />

s’accroissait jusqu’à 600 cas supplémentaires par an.<br />

La modélisation montrait que le programme renforcé générerait<br />

annuellement, pour la filière IRTT, un retour sur investissement<br />

dépassant 76 millions d’euros dès la cinquième année et<br />

152 millions d’euros à partir de la dixième année. Ce retour sur<br />

investissement incluait le coût du renforcement des organisations<br />

de prélèvement et permettait de prendre en charge<br />

d’autres coûts induits, comme l’augmentation des autres greffes<br />

d’organe. Ce programme a été développé par l’agence de la<br />

biomédecine avec succès. En effet, le nombre de prélèvements<br />

était en 2006 de 1 442, dont 247 sur donneurs vivants<br />

(23,2 donneurs pmh) et le nombre de greffes de 2 731 (44 greffes<br />

pmh), soit une progression de 1,5 fois par rapport à 1999,<br />

année effective de la mise en place du programme.<br />

Toutefois, en dépit de ces évolutions, il reste du travail car la<br />

demande de greffe était de 6 152, soit 99,2 pmh au 31 décembre<br />

2006, donc encore bien supérieure à l’offre [86, 87] .<br />

Accès aux soins de dialyse et épidémiologie<br />

géographique<br />

Système d’information décisionnel<br />

Un Système d’information décisionnel a été développé pour<br />

le REIN [88] . Il contribue à la connaissance épidémiologique,<br />

demande et offre de soins, et à l’aide à la décision sanitaire. Les<br />

données d’offre et de demande de soins en IRT sont recueillies<br />

en ligne par le Système d’information multisource, et intégrées<br />

dans un entrepôt de données. Celui-ci est dynamiquement<br />

connecté à un outil de présentation ou de reporting interactif :<br />

le Système d’information géographique pour la néphrologie<br />

(SIGNe) [89] . À ce jour, plus de 15 000 patients sont présents<br />

dans la file active (45 % de la file active nationale) des huit<br />

régions pilotes de l’étude (Languedoc-Roussillon, Limousin,<br />

Provence-Alpes-Côte d’Azur, Basse-Normandie, Île-de-France,<br />

Champagne-Ardenne, Centre et Midi-Pyrénées).<br />

SIGNe, outil d’exploration des données<br />

Développé selon des modalités issues d’une technologie<br />

informatique particulière dite des « OLAP spatiaux » (spatial<br />

on-line analytical processing [SOLAP]), SIGNe permet l’analyse et<br />

la description spatiale et temporelle des données stockées dans<br />

la structure multidimensionnelle de l’entrepôt de données [90] .<br />

L’utilisateur a la possibilité de soumettre dynamiquement des<br />

requêtes concernant différents thèmes (incidence, prévalence,<br />

mortalité) et selon différents axes d’analyses (années, âge, sexe,<br />

méthode et structure de traitement, région, comorbidités,<br />

handicaps, etc.).<br />

Adéquation entre offre et demande de soins<br />

SIGNe facilite également l’étude des relations géographiques<br />

entre l’offre et la demande de soins et l’exploration de l’accessibilité<br />

aux centres de soins. L’intégration des temps de trajet a<br />

permis de construire un indicateur d’accessibilité aux unités de<br />

soins, fondé sur la notion d’équité géographique. Celle-ci<br />

suppose que le patient est traité dans l’unité la plus proche de<br />

son domicile et la plus conforme à son état : centre de dialyse,<br />

Néphrologie<br />

.<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse 18-025-B-10<br />

Part de la population<br />

1,0<br />

0,8<br />

0,6<br />

0,4<br />

96,6 % de la population<br />

0 10 20 30 40 50 60<br />

unité de dialyse médicalisée, unité d’autodialyse, dialyse à<br />

domicile. Pour la région Champagne-Ardenne, donnée en<br />

exemple ci-après, 95 % des patients sont traités dans le centre<br />

le plus proche de leur lieu de résidence. En utilisant l’indicateur<br />

d’équité géographique, le temps d’accès au centre lourd le plus<br />

proche a été calculé pour chaque commune de la région<br />

Champagne-Ardenne. Une carte superposant les zones géographiques<br />

à faible accès (éloignées de plus de 45 minutes d’un<br />

centre) avec les lieux de résidence des patients ayant un temps<br />

de trajet supérieur à 45 minutes est établie.<br />

Sur les 40 patients résidant à plus de 45 minutes d’un centre<br />

lourd, cette carte d’accès aux soins indique que près de la moitié<br />

réside dans la zone comprenant Vitry-le-François et Saint-<br />

Dizier. Aussi est-il possible de proposer un scénario de création<br />

d’un centre de dialyse dans cette ville et d’évaluer les conséquences<br />

sur les temps de trajets des patients.<br />

Alors que 11 % de la population régionale, dont 40 dialysés,<br />

résidaient à plus de 45 minutes d’un centre lourd, l’ouverture<br />

d’un centre lourd à Saint-Dizier aurait pour conséquence de<br />

faire baisser ces chiffres à 3,2 % de la population et à 18 dialysés<br />

(Fig. 7).<br />

Ce type d’approche permet de proposer aux décideurs un<br />

outil d’aide à l’adaptation de l’offre de soins à la demande. Dans<br />

ces types de scénarios, d’autres critères seront intégrés au<br />

modèle notamment la disponibilité des professionnels. Le<br />

SIGNe, couplé au registre de dialyse et intégrant le calcul des<br />

temps de trajet, permet le développement d’un outil visant à<br />

améliorer la stratégie sanitaire, en particulier pour les schémas<br />

régionaux d’organisation sanitaire (SROS) dans le cadre des<br />

discussions entre les agences régionales d’hospitalisation et les<br />

professionnels. L’objectif général du SROS est en effet « d’offrir<br />

la meilleure adéquation entre la demande du patient, son état<br />

de santé, et le lieu et la technique de prise en charge ».<br />

■ Conclusion<br />

Temps de trajet (min)<br />

Figure 7. L’accessibilité à un centre de dialyse peut être représentée<br />

selon le temps de trajet et pour l’ensemble de la population. Ainsi, pour<br />

une population de 1 334 000 habitants en Champagne-Ardenne, 44 980<br />

habitent à plus de 45 min d’un centre de dialyse et, parmi eux,<br />

18 dialysés.<br />

L’épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale en France<br />

prend corps avec la mise en place du Réseau épidémiologie et<br />

information en néphrologie. En 2009, l’ensemble du territoire<br />

français doit être couvert pour le recueil exhaustif et continu<br />

des données de dialyse. Couplé aux données de greffe rénale cet<br />

outil représente un atout majeur d’orientation de la politique<br />

9


.<br />

18-025-B-10 Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

“ Points importants<br />

L’insuffisance rénale chronique s’inscrit dans un<br />

continuum évolutif de la maladie rénale chronique (MRC).<br />

Différents facteurs de risque doivent être pris en charge<br />

précocement selon le stade de la MRC : facteurs de<br />

susceptibilité à la MRC, facteurs d’initiation, facteurs de<br />

progression et facteurs favorisant la survenue de<br />

l’insuffisance rénale terminale (IRT).<br />

Une prise en charge pluridisciplinaire de la MRC est<br />

nécessaire, en particulier pour diminuer la persistance<br />

d’un recours tardif au néphrologue, qui a pour<br />

conséquences une augmentation de la morbimortalité et<br />

un surcoût évitable.<br />

L’incidence et la prévalence de l’IRT croissent, mais cette<br />

tendance se ralentit depuis quelques années.<br />

La population des nouveaux dialysés vieillit et présente<br />

plus de comorbidités. L’âge médian à l’institution de la<br />

dialyse augmente ; il est de 71 ans en 2005.<br />

Les néphropathies vasculaires et diabétiques deviennent<br />

les premières causes d’IRT.<br />

Le risque de survenue d’une comorbidité cardiovasculaire<br />

ou d’un décès est dix à 20 fois plus élevé que le risque<br />

d’IRT chez les plus de 65 ans.<br />

L’insuffisance rénale est un facteur de risque<br />

cardiovasculaire en tant que tel.<br />

Le Réseau épidémiologie et information en néphrologie<br />

(REIN) est une source nouvelle et précieuse d’information<br />

épidémiologique pour l’IRT.<br />

sanitaire en matière d’IRT. L’élaboration des prochains SROS<br />

sera un premier test grandeur nature. Il faut en effet faire face<br />

au défi de l’adaptation de l’offre de soins à une demande en<br />

permanente évolution et à des contraintes de plus en plus<br />

importantes d’adaptation des coûts et des recettes.<br />

Remerciements : Aux néphrologues, à leurs équipes, aux ARC et aux cellules<br />

d’appui épidémiologiques ainsi qu’à la coordination nationale du REIN, qui ont<br />

permis la mise en place du registre REIN.<br />

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Pour en savoir plus<br />

Diagnostic de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte. Recommandations<br />

Septembre 2002. www.has-sante.fr.<br />

Arrêté du 25 novembre 1995 relatif au comité national des registres.<br />

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Rapport annuel - bilan des activités de l’agence de biomédecine 2004 et 2006.<br />

www.agence-biomedecine.fr.<br />

V. Masse, Interne des Hôpitaux de Paris.<br />

J.-B. Richard, Ingénieur des Mines.<br />

P. Landais, Professeur des Universités, praticien hospitalier (landais@necker.fr).<br />

Université Paris-Descartes, Faculté de Médecine, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, Hôpital Necker, Service de biostatistique et d’informatique<br />

médicale, UPRES-EA 4067, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Masse V., Richard J.-B., Landais P. Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse. EMC<br />

(Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-025-B-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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légaux<br />

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au patient<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Néphrologie


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0471<br />

Épidémiologie de l’insuffisance<br />

rénale<br />

L ’insuffisance<br />

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

C Isnard Bagnis<br />

rénale est une pathologie extrêmement fréquente. Toute altération de la fonction rénale, qu’elle<br />

soit aiguë ou chronique, élève la morbi-mortalité.<br />

Mots-clés : insuffisance rénale chronique, insuffisance rénale aiguë.<br />

Incidence de l’insuffisance<br />

■<br />

rénale<br />

chronique dans la population<br />

générale (tableau I)<br />

La fréquence de l’insuffisance rénale a été<br />

évaluée dans de nombreuses études<br />

épidémiologiques.<br />

La prévalence de l’insuffisance rénale chronique a<br />

été précisée dans l’étude NHANES [12] qui a été<br />

conduite entre 1988 et 1994 aux États-Unis. Dans ce<br />

travail, des données concernant un échantillon<br />

représentatif de la population américaine (18 723<br />

participants) ont été collectées sur deux périodes.<br />

Dans un premier temps, un interrogatoire a été<br />

conduit au domicile de chaque sujet. Dans un<br />

deuxième temps, l’ensemble des participants a<br />

bénéficié d’une évaluation de plusieurs paramètres<br />

biologiques.<br />

Sur l’ensemble des sujets étudiés, 9,74 % avaient<br />

une créatininémie supérieure à 15 mg/L ce qui<br />

correspond à la réduction de la fonction rénale de<br />

plus de 50 %. Cela correspond par extrapolation à<br />

environ 11 millions de personnes aux États-Unis.<br />

De plus, 21,6 % des patients dont l’âge était<br />

compris entre 60 et 69 ans et 32,26 % des sujets<br />

dont l’âge était supérieur à 70 ans, avaient une<br />

créatininémie supérieure à 15 mg/L.<br />

Tableau I. – Principales causes d’insuffisance rénale terminale en France (d’après Jungers et al,<br />

Néphrologie ; 22 (3) : 91-97, 2001).<br />

Étiologie Fréquence<br />

Glomérulonéphrites chroniques primitives 20,3 %<br />

M À dépôts mésangiaux d’IgA 7,2 %<br />

M Autres variétés 13,1 %<br />

Néphropathies interstitielles chroniques (NIC) 14,4 %<br />

M Néphropathie du reflux 2,6 %<br />

M Autres variétés de NIC 11,8 %<br />

Néphropathies héréditaires 8,8 %<br />

M Polykystose rénale 7,7 %<br />

M Autres néphropathies héréditaires 1,1 %<br />

Néphropathies vasculaires (néphro-angiosclérose avec ou sans sténose artérielle<br />

rénale et/ou embolies de cholestérol)<br />

22,5 %<br />

Néphropathies diabétiques 20,6 %<br />

M Diabète de type 1 6,3 %<br />

M Diabète de type 2 7,1 %<br />

Maladies de système 6,3 %<br />

Autres et indéterminées 7,1 %<br />

A retenir<br />

La prévalence de l’insuffisance rénale chronique est donc très élevée dans la<br />

population américaine.<br />

Environ un sujet sur trois de plus de 70 ans a une créatininémie supérieure à<br />

15 mg/L ce qui correspond à une réduction de la fonction rénale de 60 %.<br />

La prévalence de l’insuffisance rénale a été également précisée dans l’étude<br />

HOT [27] : dans cette étude qui a porté sur environ 19 000 patients, les effets de<br />

différents niveaux de contrôle de la pression artérielle diastolique (PAD < 90, 85 ou<br />

80 mmHg) sur la morbi-mortalité des patients ont été précisés. Les sujets inclus<br />

étaient donc traités pour hypertension artérielle (HTA) essentielle. Parmi ces sujets,<br />

18 % avaient une créatininémie supérieure à 12 mg/L, ce qui, rapporté à l’âge et au<br />

poids, correspondait à une clairance de la créatinine de l’ordre de 45 mL/min.<br />

A retenir<br />

Ces données indiquent très clairement que l’insuffisance rénale chronique est une<br />

pathologie très fréquente qui sera donc rencontrée en pratique clinique quotidienne.<br />

Chez ces patients, la notion d’une créatininémie élevée est un index de<br />

morbi-mortalité. Ainsi, dans l’étude HOT [28] , le risque d’accidents cardiovasculaires<br />

était multiplié par 4,9 chez les sujets dont la créatininémie était supérieure à<br />

15 mg/L. De nombreuses données ont confirmé ces résultats.<br />

1<br />

Insuffisance<br />

■<br />

rénale chronique<br />

et maladie cardiovasculaire<br />

La dégradation de la fonction rénale est très<br />

fréquente en milieu cardiologique du fait de la forte<br />

incidence de l’insuffisance rénale chronique chez le<br />

patient coronarien et des complications rénales<br />

aiguës observées après coronarographie. De plus,<br />

chez le patient insuffisant rénal chronique, les<br />

complications cardiovasculaires sont la première<br />

cause de mortalité.<br />

‚ Incidence de l’insuffisance rénale<br />

chronique chez le patient coronarien<br />

et/ou le patient admis<br />

pour coronarographie<br />

5-0471<br />

L’analyse d’une cohorte de 9 544 patients réalisée<br />

aux États-Unis [21] montre que l’incidence de


5-0471 - Épidémiologie de l’insuffisance rénale<br />

l’insuffisance rénale chez le sujet pris en charge dans<br />

une unité de soins intensifs cardiologiques est très<br />

élevée. En effet, 5,5 % des patients sont dialysés,<br />

21 % ont une clairance de la créatinine inférieure à<br />

46,2 mL/min/1,73 m 2 , 24 % ont une clairance<br />

inférieure à 63,1 mL/min/1,73 m 2 (et supérieure à<br />

46,2 mL/min) et 30 % ont une clairance inférieure à<br />

81,5 mL/min/1,73 m 2 (et supérieure à 63,1 mL/min).<br />

Plus de la moitié des patients ont donc une<br />

insuffisance rénale chronique modérée à sévère ou<br />

terminale. Dans une autre étude, 11 % des patients<br />

admis pour revascularisation coronaire percutanée<br />

ont une créatininémie supérieure à 15 mg/L (ce qui<br />

représente pour cette cohorte de patients âgés de 72<br />

ans en moyenne une clairance de la créatinine<br />

inférieure à 40 mL/min/1,73 m 2 ) [26] .<br />

Les mêmes données sont retrouvées dans l’étude<br />

Hope où 11 % des patients inclus (présentant une<br />

maladie cardiovasculaire) ont une clairance de la<br />

créatinine inférieure à 80 mL/min/1,73 m 2 [19] .<br />

‚ Insuffisance rénale chronique<br />

et coronaropathie<br />

La population de patients atteints d’insuffisance<br />

rénale chronique croît de façon très importante aux<br />

États-Unis et en Europe, principalement en raison de<br />

l’augmentation sensible de l’incidence du diabète<br />

non insulinodépendant [3] .<br />

Une étude prospective réalisée en 1999 dans<br />

quatre centres de néphrologie, a montré que dans<br />

une population de patients dont la clairance de la<br />

créatinine est inférieure ou égale à<br />

75 mL/min/1,73 m 2 (excluant les sujets dialysés), les<br />

facteurs de risques coronaires sont largement<br />

retrouvés : HTA 80 %, dyslipidémie 45 %, diabète<br />

38 %, tabac 28 % [33] .<br />

L’incidence des maladies cardiovasculaires est<br />

bien étudiée dans la population des patients<br />

présentant une insuffisance rénale chronique avec<br />

ou sans diabète. Une étude prospective canadienne<br />

a montré que lorsque la clairance de la créatinine est<br />

en moyenne à 36 mL/min, il existe une<br />

coronaropathie chez environ 30 % des patients [14] .<br />

Au moment de la prise en charge en épuration<br />

extrarénale, une étude plus récente canadienne<br />

confirme ces chiffres [22] .<br />

Chez le sujet hémodialysé, l’incidence de la<br />

coronaropathie a été évaluée à environ 30 % des<br />

patients [11] . La mortalité d’origine cardiovasculaire<br />

est très augmentée par rapport à la population<br />

générale chez les patients insuffisants rénaux<br />

chroniques ou traités par épuration extrarénale [5] .<br />

Les maladies cardiovasculaires représentent 50 %<br />

des causes de décès chez les patients hémodialysés<br />

[16, 25] avec un taux de mortalité annuel d’environ<br />

20 %. L’existence d’un diabète non insulinodépendant<br />

multiplie par 6 le risque de décès d’origine<br />

cardiovasculaire chez le dialysé [3] .<br />

‚ Réalisation d’une coronarographie<br />

chez l’insuffisant rénal chronique :<br />

risque d’insuffisance rénale aiguë<br />

La prise en charge diagnostique et thérapeutique<br />

de la maladie coronaire dans la population des<br />

insuffisants rénaux chroniques dialysés ou non<br />

repose sur la réalisation d’une coronarographie. Cet<br />

examen est le plus performant dans cette population<br />

pour le diagnostic de la maladie coronaire [30] (par<br />

rapport à l’épreuve d’effort par exemple). De plus, il<br />

permet d’associer un geste thérapeutique. La<br />

réalisation d’une angioplastie coronaire chez un<br />

patient insuffisant rénal chronique est une procédure<br />

qui s’associe à un fort taux d’insuffisance rénale<br />

aiguë (IRA), une mortalité périopératoire plus<br />

importante et également une survie à long terme<br />

très inférieure à celle de la population à fonction<br />

rénale normale [9, 34] .<br />

En effet, la moitié des patients diabétiques ayant<br />

une insuffisance rénale chronique sévère et<br />

bénéficiant d’une angioplastie coronaire voient leur<br />

créatininémie augmenter de 25 % au moins après<br />

l’examen et 12 % sont dialysés dans les 7 jours<br />

suivants [20] . Même si le succès initial du geste<br />

endoluminal est obtenu aussi fréquemment que<br />

dans la population générale, la mortalité à1anest<br />

d’environ 15 % en cas d’insuffisance rénale<br />

chronique versus 1,9 à 4,1 % dans la population<br />

témoin [10, 32] .<br />

L’IRA après coronarographie est le plus souvent<br />

secondaire à la toxicité des produits de contraste<br />

iodés. Il est connu que le risque d’atteinte rénale est<br />

majoré s’il existe une insuffisance rénale<br />

préexistante ou un diabète et augmente avec la<br />

[23, 31,<br />

quantité de produit de contraste administrée<br />

35] . Le diabète multiplie par 6 le risque d’IRA après ce<br />

geste.<br />

L’IRA après réalisation d’une procédure invasive<br />

endovasculaire peut aussi être secondaire à un<br />

syndrome des emboles de cholestérol, qui associe<br />

une insuffisance rénale, une hyperéosinophilie, des<br />

orteils bleus, un livedo reticularis. La cinétique de<br />

dégradation de la fonction rénale est plus lente (1 à<br />

plusieurs semaines) et le pronostic rénal et général<br />

beaucoup plus réservé. L’incidence de cette<br />

complication est rare (< 5 %), mais reste sans doute<br />

sous-évaluée.<br />

L’IRA au décours des procédures de revascularisation<br />

coronariennes est associée à une<br />

augmentation significative de la mortalité, aussi bien<br />

[18, 24, 29, 37]<br />

après angioplastie coronaire percutanée<br />

qu’après chirurgie coronarienne [6] .<br />

Dans une étude prospective californienne,<br />

environ 10 % des patients à fonction rénale initiale<br />

normale ou peu altérée (créatinine initiale <<br />

177 µmol/L) présentent une IRA (définie par une<br />

créatininémie supérieure à 177 µmol/L ou une<br />

augmentation de 62 µmol/L au-dessus de la valeur<br />

de base) après chirurgie coronaire.<br />

La mortalité au cours de l’hospitalisation des<br />

patients présentant cette complication est de 27 %<br />

(versus 0,9 % dans la population n’ayant pas<br />

développé d’insuffisance rénale postopératoire). Lip<br />

et al [17] dans une étude récente ont évalué<br />

prospectivement l’incidence des complications<br />

rénales après angioplastie percutanée. Chez 104<br />

patients consécutifs, ayant un taux de créatininémie<br />

plasmatique moyen initial à 98,7 ± 25,6 (SD) µmol/L,<br />

la créatininémie moyenne après angioplastie<br />

prélevée seulement 24 heures après l’examen était<br />

augmentée (105,0 ± 29,4 µmol/L) mais de façon non<br />

significative. Pour 63 % des patients néanmoins, la<br />

créatininémie a augmenté significativement<br />

2<br />

24 heures après l’examen par rapport à sa valeur de<br />

base. Le principal facteur de risque retrouvé dans<br />

cette étude est la durée de l’examen. Cette<br />

augmentation de créatininémie 24 heures après<br />

angioplastie pour deux tiers des patients laisse<br />

craindre une incidence réelle de l’insuffisance rénale<br />

supérieure. En effet, le pic d’augmentation de la<br />

créatininémie après injection de produits de<br />

contraste iodés peut être compris entre 1 et 5 jours<br />

après injection. Par ailleurs, la créatininémie<br />

moyenne est un mauvais reflet de la situation<br />

individuelle de chaque patient. Pour un sujet âgé de<br />

60 ans par exemple, dont la créatininémie de base<br />

est de 80 µmol/L, une augmentation de 40 µmol/L<br />

après angioplastie représente une altération de la<br />

filtration glomérulaire d’environ 30 %. Enfin, aucun<br />

patient dans cette étude n’avait une créatininémie<br />

initiale supérieure à 200 µmol/L. Or, le risque de<br />

survenue d’une IRA après produits de contraste<br />

iodés peut atteindre 50 % chez des patients<br />

présentant des facteurs de risque comme le diabète<br />

et l’insuffisance rénale chronique sévère. Ces facteurs<br />

favorisants sont typiquement ceux que présentent<br />

fréquemment les patients chez qui l’indication de<br />

coronarographie est posée.<br />

A retenir<br />

Lorsqu’il existe une insuffisance<br />

rénale chronique préalable, la<br />

réalisation d’une coronarographie<br />

s’associe à une altération de la<br />

filtration glomérulaire après<br />

coronarographie qui va nécessiter la<br />

dialyse [7] chez un tiers ou plus des<br />

patients.<br />

■<br />

Incidence de l’insuffisance<br />

rénale aiguë dans la population<br />

générale<br />

L’IRA est également une pathologie extrêmement<br />

fréquente.<br />

Dans la population générale, le risque d’IRA varie<br />

de 260 à 800/million d’habitants selon l’étude [2, 15] .<br />

Dans certaines populations, ce risque est<br />

beaucoup plus élevé.<br />

■<br />

Incidence de l’insuffisance rénale<br />

aiguë dans les populations<br />

à risque (tableau II)<br />

Ainsi, dans une unité de soins intensifs, environ<br />

un tiers des patients présenteront une IRA [1, 4] .<br />

Après transplantation médullaire, 40 à 60 % des<br />

patients présenteront une IRA [8, 36] .<br />

De même, dans une unité de soins intensifs, en<br />

cardiologie, 5à10%despatients présenteront une<br />

élévation de leur créatininémie.<br />

Insuffisance<br />

■<br />

rénale<br />

et morbi-mortalité<br />

Dans toutes ces populations, une détérioration de<br />

la fonction rénale est un index prédictif de<br />

morbi-mortalité très clair.


Tableau II. – Incidence de l’insuffisance rénale aiguë (d’après Singri et al, JAMA ; 289 (6) : 747-51, 2003).<br />

Fréquence<br />

Étiologie<br />

Patient hospitalisé Patient non hospitalisé<br />

Insuffısance rénale fonctionnelle<br />

M Hypovolémie (pertes digestives, urinaires, cutanées, hémorragie)<br />

M Hypotension (sepsis, syndrome hépatorénal, iatrogène)<br />

M Pharmacologique (AINS, IEC)<br />

M Atteinte des gros vaisseaux rénaux (thrombose, emboles, dissection)<br />

35à40% 70%<br />

Insuffısance rénale organique<br />

M Atteinte des petits vaisseaux rénaux (microangiopathie thrombotique)<br />

M Glomérulopathies (glomérulonéphrite rapidement progressive, vascularite)<br />

M Tubulopathies (nécrose tubulaire aiguë, précipitation intratubulaire de cristaux)<br />

M Néphropathies interstitielles aiguës (pyélonéphrite, immunoallergique, infiltration cf lymphome ou<br />

sarcoïdose)<br />

55à60% 11%<br />

Insuffısance rénale secondaire à un obstacle sur les voies excrétrices<br />

M Obstacle urétéral (tumeurs, calculs, caillots, fibrose rétropéritonéale)<br />

M Obstacle vésical (hypertrophie ou cancer de la prostate, tumeurs, calculs, vessie neurologique)<br />

M Obstacle urétral (sténoses, tumeurs)<br />

2à5% 17%<br />

AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens ; IEC : inhibiteur de l’enzyme de conversion<br />

Après transplantation de moelle osseuse, la<br />

mortalité des patients transplantés admis en unité de<br />

soins intensifs est respectivement de 88 et 60 % selon<br />

qu’ils présentent ou non une insuffisance rénale [13] .<br />

Dans une autre étude rétrospective, la survie des<br />

patients à 10 ans était de 29,7 % et 53,2 % pour<br />

respectivement les patients qui ont ou pas présenté<br />

une IRA au moment de la transplantation de moelle<br />

osseuse [36] .<br />

De même, en unité de soins intensifs, le patient<br />

dialysé oligoanurique aurait une mortalité de 63,9 %<br />

comparée à 39,8 % chez un patient non dialysé.<br />

■ Conclusion<br />

L’insuffisance rénale est donc une pathologie<br />

très fréquente chez des patients souvent<br />

Corinne Isnard Bagnis : Maître de conférence universitaire, praticien hospitalier, néphrologue,<br />

Service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

porteurs de plusieurs pathologies qui nécessitent<br />

de multiples thérapeutiques. L’adaptation de la<br />

posologie des médicaments est chez ces sujets<br />

essentielle pour éviter les surdosages et donc<br />

diminuer l’iatrogénie fréquemment observée et<br />

à l’inverse éviter l’inefficacité et parfois<br />

l’apparition de résistance impliquées pour<br />

les antibiotiques et les traitements<br />

antirétroviraux.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : C Isnard Bagnis. Épidémiologie de l’insuffısance rénale.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0471, 2003, 4 p<br />

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Plan<br />

Équilibre acidobasique. Acidoses<br />

et alcaloses métaboliques<br />

B. Dussol<br />

L’équilibre acidobasique est assuré par le rein qui maintient en permanence un bilan nul entre la<br />

formation de protons issus du métabolisme cellulaire et leur élimination par excrétion urinaire. Cette<br />

exigence est rendue nécessaire par la capacité des protons à se lier aux protéines ce qui va modifier leur<br />

structure et leurs fonctions. Le rein doit aussi régénérer les bicarbonates. Le rein n’est pas seul dans le<br />

maintien du pH sanguin dans ses limites très étroites, le poumon assure l’élimination d’une très grande<br />

quantité d’acide volatil formé par la respiration cellulaire.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Équilibre acide-base ; Protons ; Tampons ; Bicarbonate ; Acidité titrable ; Ions ammoniums ;<br />

Acidose métabolique ; Alcalose métabolique<br />

Physiologie de l’équilibre acide-base 1<br />

Rappels sur l’équilibre acide-base chez l’homme 1<br />

Quelques principes de physiologie concernant l’équilibre<br />

acide-base 2<br />

Rôle du rein dans l’équilibre acide-base 2<br />

Acidoses métaboliques 5<br />

Définition et diagnostic 5<br />

Exploration d’une acidose métabolique 5<br />

Étiologies des acidoses métaboliques 7<br />

Traitement des acidoses métaboliques 8<br />

Alcaloses métaboliques 8<br />

Définition et diagnostic 8<br />

Approches cliniques 9<br />

Étiologies 9<br />

Traitement 10<br />

■ Physiologie de l’équilibre<br />

acide-base<br />

Rappels sur l’équilibre acide-base<br />

chez l’homme<br />

Le pH sanguin est maintenu à 7,40, ce qui correspond à une<br />

concentration de H + dans le secteur extracellulaire très basse de<br />

40 nmol/l. Le pH est maintenu alcalin bien que l’organisme<br />

produise de grandes quantités d’acide sous deux formes :<br />

un acide volatil, l’acide carbonique (H 2CO 3) venant du CO 2 ;<br />

des acides non volatils.<br />

Deux types d’acides [1]<br />

Acide carbonique (H 2CO 3)<br />

Il est constitué à partir du CO 2 qui est le produit terminal du<br />

métabolisme oxydatif. Il s’agit d’une source majeure d’acide :<br />

13 000 à 20 000 mmol de CO 2 sont formées par jour.<br />

Quand le CO 2 est métabolisé, il fournit un ion H + par des<br />

réactions d’hydratation et d’hydroxylation. Le CO 2 est rapidement<br />

éliminé par le poumon, d’où la notion d’acide volatil.<br />

Néphrologie<br />

“ Point important<br />

Rôle du rein dans l’équilibre acidobasique<br />

-<br />

Réabsorption des HCO3 (tube proximal)<br />

Excrétion urinaire des H + sous trois formes :<br />

acidité titrable : Na2HPO4 +H + → NaH2PO4 (tube<br />

proximal et collecteur)<br />

ammonium : NH3 +H + +<br />

→ NH4 (tube proximal et<br />

collecteur)<br />

protons libres (pH urinaire)<br />

Acides non volatils<br />

Ils sont produits à partir de l’alimentation et du métabolisme<br />

intermédiaire. Les sources d’acides non volatils sont les protéines<br />

alimentaires et le métabolisme des phosphodiesters (cf.<br />

infra).<br />

Tamponnement d’une charge acide<br />

18-033-C-10<br />

On peut schématiquement décrire trois lignes de défense<br />

contre une agression acide [1] :<br />

la ligne de défense physicochimique, d’action instantanée ;<br />

la ligne de défense respiratoire, d’action rapide ;<br />

la ligne de défense rénale, d’action lente.<br />

Ligne de défense physicochimique : les systèmes tampons<br />

Le pH est le logarithme de l’inverse de la concentration en<br />

ions H + (pH=1/[H + ]).<br />

Un tampon est une substance qui capte les ions H + dans une<br />

solution pour limiter les variations de pH. Un tampon est<br />

constitué par l’association d’un acide faible et de sa base<br />

conjuguée :<br />

acide fort + sel basique ↔ sel neutre + acide faible.<br />

Dans le cas de l’acide chlorhydrique :<br />

HCl + NaHCO 3 ↔ NaCl + H 2CO 3.<br />

L’équation d’Henderson-Hasselbach s’écrit :<br />

pH = pK + Log acide/base.<br />

1


18-033-C-10 Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques<br />

–<br />

Pour le tampon HCO3 /H2CO3, la réaction s’écrit :<br />

–<br />

pH = pK + Log [HCO3 ]/[CO2 dissous]<br />

pH = 6,1 + Log 24/0,03.PaCO2 = 6,1 + Log 24/0,03.40<br />

pH = 6,1 + Log 24 mmol/1,2 mmol = 6,1 + Log 20 = 7,4.<br />

Si on ajoute 12 mmol de HCl dans 1 litre de liquide extracellulaire,<br />

on obtient la réaction :<br />

12 HCl + 24 NaHCO3 ↔ 12 NaCl + 12 NaHCO3 +12H2CO3 puis 12 H2CO3 ↔ 12 CO2 +12H2O. On diminue dans l’équation le numérateur de 12 et on<br />

augmente le dénominateur de 12 :<br />

pH = 6,1 + Log 12/1,2 + 12 = 6,1 + Log 12/13,2 = 6,06.<br />

Les tampons n’empêchent donc pas la diminution du pH<br />

mais minimisent la baisse de celui-ci.<br />

Ligne de défense respiratoire<br />

Si dans l’équation précédente on considère que le système<br />

tampon est ouvert et que les 12 CO 2 sont éliminés par le<br />

poumon, l’équation devient :<br />

pH = 6,1 + Log 12/1,2 = 6,1 + Log 10 = 7,1.<br />

En fait le poumon fait plus car l’acidose provoque une<br />

hyperventilation alvéolaire, ce qui entraîne une baisse de la<br />

PaCO 2.<br />

Si la PaCO 2 descend jusqu’à 23 mmHg, l’équation devient :<br />

pH = 6,1 + Log 12/0,03.23 = 7,34.<br />

Ligne de défense rénale<br />

À ce stade, le pH est presque normalisé, toutefois il reste des<br />

ions H + sous forme d’acides faibles et la concentration plasmatique<br />

en HCO 3 – est abaissée de 12 mmol/l. Le rein intervient<br />

alors pour restaurer la concentration des HCO 3 – et éliminer les<br />

H + restants.<br />

Tampons chez l’homme [2]<br />

Les tampons extracellulaires sont représentés essentiellement<br />

par le tampon bicarbonate/acide carbonique :<br />

– –<br />

HCO3 /H2CO3 ↔ H2OetCO2. Le tampon HCO3 /H2CO3 est<br />

un bon tampon car :<br />

il appartient à un système ouvert en relation avec le poumon<br />

qui élimine le CO2 et avec le rein qui réabsorbe et régénère<br />

–<br />

les HCO3 ;<br />

sa concentration dans le secteur extracellulaire est élevée.<br />

Les tampons intracellulaires sont les protéines : hémoglobine<br />

dans les globules rouges, protéines et phosphate dans les autres<br />

cellules. Par ailleurs, le squelette est un immense réservoir de<br />

sels alcalins. L’os se dissout sous l’effet d’une acidose aiguë ou<br />

chronique, ce qui libère des tampons phosphate et carbonate.<br />

Tamponnement du CO 2 et rôle du poumon [1]<br />

Le CO 2 est tamponné pour 80 % par le tampon bicarbonate<br />

dans les hématies tandis qu’une très faible partie du CO 2 est<br />

sous forme dissoute. Les poumons éliminent le CO 2, c’est une<br />

des ouvertures du système tampon des bicarbonates. Des<br />

chémorécepteurs centraux et périphériques analysent la pression<br />

partielle artérielle de CO 2 (PaCO 2). La PaCO 2 stimule (en cas<br />

d’élévation) ou inhibe (en cas de diminution) les centres<br />

respiratoires. Si le pH diminue, les chémorécepteurs vont<br />

générer une hyperventilation (l’inverse est vrai).<br />

Quelques principes de physiologie<br />

concernant l’équilibre acide-base<br />

Concentration en proton dans les secteurs<br />

liquidiens<br />

Le pH sanguin est maintenu dans une fourchette très étroite<br />

de 7,38 à 7,42. Ceci correspond à une toute petite quantité<br />

d’ions H + dans le secteur extracellulaire (40 nmol/l) par rapport<br />

aux autres ions [2] . La concentration en H + dans le cytosol est<br />

de 80 à 100 nmol/l, le pH intracellulaire est plus acide que celui<br />

du plasma variant de 6,8 à 7,2 en fonction des tissus.<br />

Tableau 1.<br />

Sources d’acides et de bases chez l’homme ayant une alimentation<br />

standard.<br />

Nutriments Quantité de H + -<br />

ou de HCO3 formée<br />

Protéines : acides aminés générant des H + 210 mmol d’H +<br />

Phosphates organiques 30 mmol d’H + 2-<br />

(et de HPO4 )<br />

Protéines : acides aminés générant<br />

-<br />

des HCO3 Sources d’acides et de bases<br />

-<br />

110 mmol de HCO3 Anions organiques (citrate, lactate, etc.)<br />

-<br />

60 mmol de HCO3 Excrétion des phosphates organiques -<br />

30 mmol de HCO3 -<br />

(sous forme H2PO4 )<br />

L’excrétion nette de H + sous forme de NH 4 + est donc d’environ 40 mmol/j.<br />

[2, 3]<br />

Les sources d’acides sont les protéines et les phosphodiesters.<br />

Sur 20 acides aminés, 13 sont neutres, leur métabolisme ne<br />

génère pas d’ion H + . Cinq acides aminés (lysine, arginine,<br />

histidine, cystine et méthionine) ont un métabolisme qui<br />

génère des H + sous forme d’acide chlorhydrique (HCl) ou<br />

sulfurique. À l’inverse, le glutamate et l’aspartate sont deux<br />

–<br />

acides aminés qui génèrent des HCO3 .<br />

Les phosphodiesters sont les principaux anions du milieu<br />

intracellulaire (acide ribonucléique [ARN], acide désoxyribonucléique<br />

[ADN], phospholipides, adénosine triphosphate [ATP],<br />

2– +<br />

etc.). Les produits de leur métabolisme sont : HPO4 et H .<br />

2–<br />

L’anion phosphate divalent (HPO4 ) est filtré par le rein.<br />

Comme le pH du fluide tubulaire tend à s’acidifier et à passer<br />

2– 2– +<br />

en dessous du pK de HPO4 , HPO4 et H vont se recombiner<br />

–<br />

pour former H2PO4 . Ceci correspond à l’acidité titrable (AT) (cf.<br />

infra). Ainsi, les phosphates organiques génèrent des H + mais<br />

avec un « partenaire » qui favorise leur élimination.<br />

Le catabolisme des glucides et des lipides produit des lactates<br />

et des corps cétoniques qui sont en physiologie métabolisés, la<br />

production nette d’ions H + est donc très faible. L’excrétion<br />

urinaire des anions organiques reflète cette source d’H + . La<br />

production d’H + à partir des glucides ou des lipides peut<br />

cependant beaucoup augmenter dans certaines situations<br />

physiologiques ou pathologiques :<br />

l’exercice musculaire ou l’hypoxie génèrent de l’acide lactique<br />

;<br />

le diabète déséquilibré génère des corps cétoniques.<br />

Les sources de bases sont les protéines et les anions métabolisables<br />

:<br />

le catabolisme des protéines fournit des acides aminés<br />

anioniques : aspartate et glutamate ;<br />

le catabolisme d’anions organiques métabolisables (citrate,<br />

lactate, gluconate, etc.) fournit des bicarbonates.<br />

Le Tableau 1 résume les sources d’acides et de bases chez<br />

l’homme.<br />

Rôle du rein dans l’équilibre acide-base<br />

Le rôle du rein dans l’équilibre acide-base est double :<br />

réabsorber les HCO 3 – filtrés ;<br />

régénérer des HCO 3 – en excrétant la charge acide sous forme<br />

de NH 4 + et d’AT [4-6] . Une très faible quantité d’H + sera libre<br />

et va déterminer le pH des urines.<br />

Réabsorption des bicarbonates filtrés<br />

–[4 -6]<br />

Mécanismes de réabsorption proximale des HCO3 Les HCO 3 – sont librement filtrés par le glomérule avant d’être<br />

complètement réabsorbés, en particulier dans le tube proximal.<br />

Le seuil de réabsorption est à 28 mmol/l. Au-dessus de cette<br />

valeur, les HCO 3 – ne sont plus réabsorbés, ce qui constitue une<br />

protection contre l’alcalose. La réabsorption proximale des<br />

HCO 3 – a deux composantes, l’une liée au Na + , l’autre au<br />

H + (Fig. 1).<br />

2 Néphrologie


Fluide<br />

tubulaire<br />

Na + Na +<br />

K +<br />

H +<br />

ATP<br />

HCO -<br />

3 + H +<br />

H 2 CO 3<br />

H 2 O + CO 2<br />

Membrane<br />

apicale<br />

Jonction serrée Interstitium<br />

c<br />

H<br />

Na(HCO3 ) 2-<br />

3<br />

CO2 + H2O +<br />

H + H<br />

ATPase<br />

+ + HCO3 -<br />

Anhydrase<br />

carbonique<br />

c<br />

Cellule tubulaire proximale<br />

Membrane<br />

basolatérale<br />

– –<br />

Figure 1. Réabsorption des HCO3 dans le tube proximal. Les HCO3 filtrés<br />

se combinent aux H + qui sortent de la cellule par le contre-transport<br />

Na + /H + et par les H + ATPases. L’acide carbonique ainsi formé (H2CO3)est clivé dans le fluide tubulaire en CO2 et H2O par l’anhydrase carbonique. Le<br />

–<br />

CO2 diffuse dans la cellule et est transformé en HCO3 par l’anhydrase<br />

–<br />

carbonique cytosolique. Le HCO3 franchit la membrane basolatérale par<br />

un canal spécifique avec le Na + –<br />

. Au total, les HCO3 initialement présents<br />

dans le fluide tubulaire sont passés dans l’interstitium. ATP : adénosine<br />

triphosphate.<br />

Composante liée au Na + . La très faible concentration en<br />

Na + dans le cytosol de la cellule tubulaire proximale maintenue<br />

par l’action des Na + /K + ATPases basolatérales permet l’entrée du<br />

Na + dans la cellule le long de son gradient physicochimique. Le<br />

contre-transport Na + /H + dans la membrane luminale fait sortir<br />

le H + en utilisant l’énergie créée par l’entrée du Na + dans le<br />

cytosol.<br />

Composante liée au H + . La sortie des ions H + de la cellule<br />

se fait essentiellement par le contre-transport Na + /H + luminal<br />

mais aussi sous l’action des H + ATPases luminales. Le H + se<br />

–<br />

combine au HCO3 dans la lumière tubulaire, ce qui forme<br />

H2CO3 puis H2OetCO2sous l’action de l’anhydrase carbonique<br />

de la bordure en brosse. Le CO2 diffuse dans la cellule où il se<br />

recombine à OH – –<br />

, ce qui forme HCO3 sous l’action de l’anhydrase<br />

carbonique cytoplasmique. Sur la membrane basolatérale,<br />

– +<br />

un canal permet la sortie du HCO3 avec le Na sous forme<br />

2– –<br />

anionique (Na(HCO3) 3 ).De10%à15%desHCO3filtrés<br />

seront réabsorbés en aval du tube contourné proximal.<br />

Régulation de la réabsorption proximale des bicarbonates<br />

Trois facteurs contrôlent la réabsorption proximale des<br />

–<br />

HCO3 .<br />

–<br />

La charge filtrée en HCO3 : en cas d’acidose métabolique, la<br />

–<br />

quantité filtrée de HCO3 diminue. Ceci réduit d’autant la<br />

sécrétion des ions H + , ce qui entretient l’acidose.<br />

La concentration en H + dans les cellules tubulaires : lorsque<br />

la concentration intracellulaire de H + augmente comme dans<br />

l’acidose, on constate une augmentation d’activité du contretransporteur<br />

Na + /H + . Ce système est cependant peu efficace<br />

pour éliminer la charge acide car la baisse de la quantité filtrée<br />

–<br />

de HCO3 limite l’augmentation potentielle d’activité du contretransport<br />

Na + /H + .<br />

L’avidité des cellules tubulaires proximales à réabsorber le<br />

Na + : la contraction volémique favorise la réabsorption des<br />

–<br />

HCO3 . C’est un facteur très important d’entretien d’une<br />

alcalose métabolique en cas de déshydratation extracellulaire.<br />

L’expansion volémique a l’effet inverse. En effet, de façon<br />

attendue, si les cellules tubulaires réabsorbent moins de Na + ,la<br />

capacité de sécrétion des H + se trouve réduite (acidose de<br />

dilution).<br />

L’acidose tubulaire proximale se caractérise par une diminu-<br />

–<br />

tion du seuil de réabsorption des HCO3 . L’acétazolamide, un<br />

inhibiteur de l’anhydrase carbonique, entraîne une acidose<br />

tubulaire proximale.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques 18-033-C-10<br />

Fluide<br />

tubulaire<br />

Membrane<br />

apicale<br />

–<br />

Régénération des HCO3 –<br />

Les reins reconstituent le pool des HCO3 par excrétion de<br />

+<br />

NH4 et d’AT.<br />

–<br />

Dans les deux cas, le HCO3 formé dans la cellule tubulaire<br />

rénale passe dans le sang péritubulaire avec le Na + qui a été<br />

filtré.<br />

Formation d’acidité titrable<br />

Définition [6] . L’AT représente les protons tamponnés par des<br />

sels d’acides faibles urinaires autres que le bicarbonate. Le<br />

principal tampon est le phosphate inorganique disodique<br />

(Na2HPO4). L’AT apparaît essentiellement dans le tube proximal<br />

et dans le tube collecteur.<br />

Formation de l’AT. Le point de départ est la dissociation<br />

d’une molécule d’eau dans le cytosol. L’OH – va se combiner<br />

avec le CO2 présent dans le cytosol sous l’action de l’anhydrase<br />

–<br />

carbonique pour former un HCO3 qui passe dans le sang<br />

– +<br />

péritubulaire par un cotransport HCO3 /Na . Dans la lumière<br />

–<br />

tubulaire, le proton sécrété se combine avec le HPO4 pour<br />

2– +<br />

former le H2PO4 qui sera excrété dans l’urine. Le Na libéré est<br />

–<br />

réabsorbé par la cellule et se combine avec le HCO3 . Au total,<br />

l’excrétion d’un H + –<br />

favorise l’entrée d’un HCO3 dans la<br />

circulation.<br />

Le seul facteur influençant la formation d’AT est la disponi-<br />

–<br />

bilité du HPO4 qui dépend de l’alimentation et du catabolisme<br />

des anions intracellulaires (cf. supra).<br />

Globalement, l’excrétion de H + sous forme d’AT est très peu<br />

adaptable et insuffisante quantitativement pour éliminer la<br />

charge acide quotidienne.<br />

Formation de NH 4 +<br />

Jonction serrée Interstitium<br />

c<br />

H +<br />

H + ATPase<br />

c<br />

H + + OH -<br />

CO 2<br />

Cellule tubulaire α<br />

H 2 O<br />

Anhydrase<br />

carbonique<br />

Na +<br />

+<br />

Le NH4 est la molécule qui va permettre l’excrétion rénale de<br />

la charge acide.<br />

Sécrétion par le néphron distal des protons [4, 5] . Les<br />

cellules intercalaires de type a, situées dans le canal collecteur<br />

possèdent des pompes H + ATPases sur leur membrane luminale<br />

(Fig. 2). Le NH3 présent dans la lumière tubulaire va fixer le<br />

H + +<br />

pour former NH4 . La sécrétion d’un proton dans la lumière<br />

–<br />

tubulaire s’accompagne de la sortie basolatérale d’un HCO3 par<br />

– –<br />

le contre-transport HCO3 /Cl .<br />

À côté de la sécrétion active des H + par les cellules intercalaires<br />

a, il existe aussi une sécrétion de H + dite voltage dépendante.<br />

Les cellules principales du tube collecteur cortical sont<br />

impliquées dans la réabsorption de Na + et la sécrétion du<br />

Cl -<br />

HCO 3 -<br />

ATP<br />

K +<br />

Cl -<br />

Membrane<br />

basolatérale<br />

Figure 2. Sécrétion active des H + dans la cellule intercalaire a. Cette<br />

cellule a un cytosol riche en anhydrase carbonique qui permet l’hydroxylation<br />

de CO2. Dans sa membrane luminale, elle possède des H + ATPases<br />

impliqués dans la sécrétion active des H + . La dissociation d’une molécule<br />

d’H2O permet sous l’action de l’anhydrase carbonique de former un<br />

–<br />

HCO3 qui franchit la membrane basolatérale par un contre-transport<br />

– –<br />

HCO3 /Cl . ATP : adénosine triphosphate.<br />

3


18-033-C-10 Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques<br />

Fluide tubulaire<br />

(lumière négative)<br />

Na +<br />

Membrane<br />

apicale<br />

Jonction serrée<br />

c<br />

K +<br />

Canal épithélial<br />

sodique<br />

ROMK<br />

H 2 O, H +<br />

Aquaporine<br />

c<br />

Cellule principale du tube<br />

collecteur cortical<br />

Interstitium<br />

Na +<br />

HCO 3 -<br />

ATP<br />

Na +<br />

K + (Fig. 3). La réabsorption électrogénique du Na + par le canal<br />

épithélial sodique sensible à l’amiloride de la membrane<br />

luminale augmente la différence de potentiel transépithéliale<br />

avec lumière tubulaire plus négative. Ceci favorise la sécrétion<br />

de cations (K + et H + ) par des canaux spécifiques situés dans la<br />

membrane luminale. Cette sécrétion de H + voltage dépendante<br />

est sensible à l’aldostérone.<br />

+<br />

Localisation tubulaire de la formation de NH [4]<br />

4 . Le<br />

+<br />

NH4 urinaire provient d’une synthèse rénale. On peut schéma-<br />

+<br />

tiser la formation du NH4 en trois étapes.<br />

+<br />

Première étape : première formation de NH4 dans le tube proximal<br />

+<br />

(Fig. 4). La quasi totalité du NH4 présent dans l’urine finale est<br />

déjà formé dans le tube proximal selon la réaction suivante :<br />

+<br />

Protéines → Glutamine → 2NH4 + a-cétoglutarate<br />

–<br />

a-cétoglutarate → glucose + 2 HCO3 Le métabolisme de l’a-cétoglutarate se fait dans les mitochondries<br />

au sein du cycle de Krebs, ce qui fournit de l’ATP.<br />

+<br />

Toute génération de NH4 s’accompagne donc de celle d’ATP.<br />

+<br />

Au versant luminal, le NH4 est sécrété dans la lumière<br />

tubulaire en prenant la place d’un H + sur le contre-transport<br />

Na + /H + –<br />

. Les deux HCO3 formés vont passer dans le fluide<br />

péritubulaire à travers la membrane basolatérale par un cotransport<br />

Na + –<br />

/HCO3 .<br />

+<br />

Le fait que la formation de NH4 s’accompagne obligatoirement<br />

d’une génération d’ATP a deux conséquences :<br />

dans le rein, la demande en ATP est soutenue principalement<br />

par la réabsorption du Na + . Au cours de l’insuffisance rénale<br />

chronique, la quantité filtrée de Na + diminue de même que<br />

la part réabsorbée. Ceci entraîne une diminution des besoins<br />

+<br />

en ATP, donc de la production de NH4 , ce qui explique la<br />

+<br />

diminution de l’excrétion urinaire de NH4 et l’acidose ;<br />

+<br />

la synthèse de NH4 peut être limitée si d’autres combustibles<br />

sont fournis au cycle de Krebs (corps cétoniques au cours du<br />

jeûne par exemple ou lors de la nutrition parentérale).<br />

On connaît deux stimuli à l’entrée de la glutamine dans les<br />

mitochondries : l’acidose métabolique et l’hypokaliémie. Ces<br />

deux situations cliniques sont caractérisées par une élévation de<br />

+<br />

l’excrétion urinaire de NH4 .<br />

+<br />

Deuxième étape : le gradient interstitiel corticopapillaire du NH4 /<br />

NH3. Le maintien d’un gradient corticopapillaire en NH3 est<br />

nécessaire à l’excrétion des H + +<br />

sous la forme de NH4 . Dans la<br />

branche descendante de l’anse de Henlé, du fait de l’alcalinisa-<br />

+<br />

tion du fluide tubulaire, le NH4 se transforme en NH3 qui va<br />

K +<br />

Membrane<br />

basolatérale<br />

Figure 3. Sécrétion voltage-dépendante des H + dans la cellule principale<br />

du tube collecteur cortical. Le Na + franchit la membrane apicale par<br />

le canal épithélial sodique sensible à l’amiloride. Cette réabsorption<br />

électrogénique génère une différence de potentiel transluminale lumière<br />

négative. Ceci permet la sécrétion voltage-dépendante des H + (et des K + )<br />

par des canaux spécifiques dans la membrane apicale (aquaporine pour<br />

les H + et ROMK pour les K + ). L’aldostérone active la sécrétion des deux<br />

cations. ROMK : renal outer medullary potassium channel ; ATP : adénosine<br />

triphosphate.<br />

Fluide<br />

tubulaire<br />

SO 4 2- , 2Na +<br />

2Na +<br />

SO 4 2- , 2NH4 +<br />

Membrane<br />

apicale<br />

Jonction serrée<br />

c<br />

H + /2NH 4 +<br />

Protéines<br />

Glutamine<br />

2NH 4 + α-cétoglutarate<br />

Cycle de Krebs<br />

Glucose + ATP<br />

CO 2 +H 2 O + ATP<br />

c<br />

Cellule tubulaire proximale<br />

Interstitium<br />

2Na +<br />

2HCO 3 -<br />

ATP<br />

Na +<br />

Membrane<br />

basolatérale<br />

Figure 4. Première étape de la sécrétion de la charge acide : sécrétion<br />

+<br />

des NH4 par la cellule tubulaire proximale. Le catabolisme de la gluta-<br />

+ – –<br />

mine issue des protéines fournit des NH4 et des HCO3 . Les HCO3 franchissent<br />

la membrane basolatérale par un cotransport avec le Na + .Les<br />

+<br />

franchissent la membrane apicale par un contre-transport avec le<br />

NH 4<br />

Na + +<br />

. La sécrétion des NH4 permet dans ce cas l’excrétion de SO4<br />

venant du catabolisme d’un acide aminé soufré. ATP : adénosine<br />

triphosphate.<br />

NH 3<br />

NH 3<br />

NH 3<br />

Anse de Henlé Tube collecteur<br />

NH 4 +<br />

NH 3<br />

H 2 O + CO 2<br />

H 2 CO 3<br />

HCO 3 - + H +<br />

NH 4 +<br />

Cellule de<br />

l’anse de Henlé<br />

H +<br />

NH 3<br />

H +<br />

+<br />

NH 3<br />

NH 4 +<br />

s’accumuler dans la médullaire. Dans la branche ascendante<br />

+<br />

large de Henlé, le NH4 est réabsorbé en prenant la place du<br />

K + sur le cotransport Na + /K + /2Cl – de la membrane apicale. Après<br />

+<br />

sa réabsorption, NH4 se transforme en NH3 et H + dans la<br />

cellule de la branche ascendante. Le NH3 diffuse hors de la<br />

cellule et va s’accumuler dans la médullaire. Le H + est sécrété et<br />

–<br />

se combine avec le HCO3 présent dans la lumière, ce qui va<br />

former H2CO3 puis CO2 et H2O. Le CO2 est alors délivré aux<br />

cellules intercalaires a (Fig. 5).<br />

En cas d’hyperkaliémie, il existe une compétition entre<br />

+ +<br />

NH4 et K pour la réabsorption ce qui diminue la concentra-<br />

+<br />

tion en NH3 dans l’interstitium et donc l’excrétion de NH4 ,ce<br />

qui explique que l’hyperkaliémie favorise l’acidose.<br />

+<br />

Troisième étape : deuxième formation de NH4 dans le tube<br />

collecteur. Le CO2 délivré aux cellules intercalaires a est converti<br />

NH 3<br />

K +<br />

2– pro-<br />

Cellule<br />

intercalaire α<br />

H 2 O + CO 2<br />

Anhydrase<br />

carbonique<br />

H +<br />

- HCO3 ATPase<br />

Figure 5. Deuxième et troisième étapes de la sécrétion de la charge<br />

acide : accumulation de NH3 dans la médullaire et transfert de NH3 dans<br />

+<br />

le tube collecteur. Le NH4 sécrété par la cellule tubulaire proximale se<br />

+<br />

transforme en NH3 qui s’accumule dans la médullaire. Le NH4 est<br />

réabsorbé dans la branche ascendante large de l’anse de Henlé, ce qui<br />

libère le H + –<br />

qui se combine au HCO3 ,cequiformeduH2CO3 puis du<br />

CO2.LeCO2est délivré aux cellules intercalaires a ce qui entraîne la<br />

formation de H + –<br />

et de HCO3 par l’anhydrase carbonique. Les pompes<br />

H + ATPases sécrètent les H + qui se combinent au NH3 dans la lumière<br />

–<br />

tubulaire permettant la réabsorption d’un HCO3 .<br />

4 Néphrologie


en H + et HCO 3 – par l’anhydrase carbonique. Ces cellules<br />

possèdent des H + ATPases qui sécrètent des H + qui transforment<br />

NH 3 en NH 4 + qui est éliminé dans l’urine (Fig. 5).<br />

Facteurs régulant l’excrétion urinaire de NH 4 + [3]<br />

pH sanguin. L’acidose sanguine provoque une acidose<br />

+<br />

cellulaire, ce qui augmente la production de NH4 car l’entrée<br />

de la glutamine dans la mitochondrie est favorisée. De plus,<br />

l’activité des pompes H + ATPases du tube collecteur est stimulée.<br />

En cas d’alcalose, les effets inverses sont constatés.<br />

PaCO2. En cas de baisse de la PaCO2, une alcalose métabolique<br />

puis cellulaire apparaît, ce qui entraîne une diminution de<br />

la sécrétion des H + dans le tube proximal et le tube collecteur.<br />

Il s’agit de la compensation métabolique de l’hypocapnie. En<br />

cas d’augmentation de la PaCO2, le phénomène inverse est<br />

observé (compensation métabolique de l’hypercapnie).<br />

Hormones. L’aldostérone favorise la sécrétion de H + dans le<br />

tube collecteur par l’élévation de la sécrétion voltage dépendante.<br />

Le cortisol stimule le cotransport Na + /H + du tube<br />

+<br />

proximal, ce qui élève la sécrétion de NH4 . L’hormone antidiurétique<br />

(ADH) stimule la sécrétion de H + dans le tube collecteur<br />

cortical d’où une diminution du pH urinaire.<br />

Potassium. L’hyperkaliémie favorise l’acidose par diminution<br />

+<br />

de l’excrétion de NH4 (l’inverse est vrai) par deux mécanismes :<br />

moindre utilisation de la glutamine ;<br />

+<br />

compétition pour la réabsorption du NH4 dans l’anse de<br />

Henlé.<br />

Effet des diurétiques. Les diurétiques de l’anse et les thiazidiques<br />

augmentent la quantité délivrée de Na + au tube collecteur<br />

cortical, ce qui favorise la sécrétion distale voltage<br />

dépendante des H + .<br />

Les diurétiques épargneurs de K + bloquent le canal épithélial<br />

sodique du tube collecteur cortical et génèrent une acidose par<br />

diminution de la sécrétion voltage dépendante des H + .<br />

Au total, l’excrétion nette d’acide est donnée par la formule :<br />

+ – –<br />

Excrétion = NH4 +H2PO4 – HCO3<br />

Chez le sujet à l’état normal, il n’y a pas de bicarbonate dans<br />

les urines pour un pH urinaire inférieur à 6. L’excrétion des<br />

H + se fait un tiers sous forme d’acidité titrable et deux tiers sous<br />

+<br />

forme de NH4 sachant qu’en cas d’acidose seule l’excrétion de<br />

+<br />

NH4 peut s’adapter (jusqu’à être multipliée par 5) [7] .<br />

■ Acidoses métaboliques<br />

“ Point important<br />

Définition et caractérisation d’une acidose<br />

métabolique<br />

-<br />

Définition : pH < 7,37, HCO3 < 24 mmol/l,<br />

PaCO2 0. En effet,<br />

ce sont surtout des anions qui ne sont pas dosés comme les<br />

sulfates, les phosphates et les anions organiques.<br />

+<br />

La formule pour déterminer le NH4 urinaire est :<br />

+ + + –<br />

NH4 = 82 – 0,8 (Na +K –Cl )<br />

En cas d’acidose avec réponse rénale adaptée, l’augmentation<br />

du NH4Cl va inverser le trou anionique urinaire qui devient<br />

négatif.<br />

5


18-033-C-10 Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques<br />

Diminution de la réserve<br />

alcaline (< 22 mmol/l)<br />

Gazométrie : pH < 7,38 et PaCO 2 < 40 mmHg<br />

Trou anionique sanguin (TAs) = Na + – (Cl - + HCO 3 - )<br />

TAs < 16 mmol/l<br />

Trou anionique urinaire (TAu) = (Na + + K + ) – (Cl - )<br />

ou calcul NH 4 + urinaire = 82 – 0,8 (Na + + K + – Cl - )<br />

TAu négatif ou<br />

NH 4 + > 80 mmol/j<br />

(réponse rénale<br />

adaptée)<br />

Étiologies :<br />

- diarrhées, fistules<br />

digestives<br />

- cholestyramine, CaCl 2 ,<br />

MgSO 4<br />

- apports d’acides : NH 4 Cl,<br />

chlorhydrate de lysine ou<br />

d’arginine, sulfate de<br />

méthionine<br />

TAu positif ou<br />

NH 4 + > 80 mmol/j<br />

(réponse rénale<br />

inadaptée)<br />

Étiologies :<br />

- insuffisance rénale<br />

- acidoses tubulaires<br />

Tableau 2.<br />

Acidoses métaboliques avec trou anionique (TrA > 16 mmol/l).<br />

Acidoses lactiques Excès de production d’acide lactique :<br />

Acidocétose Diabète<br />

- états de choc (cardiogénique, périphérique)<br />

TAs > 20 mmol/l<br />

Dosage :<br />

- créatininémie, glycémie<br />

- lactate<br />

- corps cétoniques<br />

- recherche de toxiques, aspirine<br />

Étiologies :<br />

- insuffisance rénale sévère<br />

- acidoses lactiques<br />

- acidocétose<br />

- intoxication aux méthanol,<br />

éthylène glycol,<br />

paraldéhyde, aspirine<br />

- hypoxie sévère (intox CO, méthémoglobinémie)<br />

- infarctus du mésentère<br />

- crises convulsives subintrantes, exercice<br />

musculaire intense<br />

- cancers évolués, leucémies<br />

- déficits enzymatiques (G6-PD)<br />

Défaut de métabolisation d’acide lactique :<br />

- insuffisance hépatocellulaire sévère<br />

- insuffisance rénale sévère<br />

Blocage de la néoglucogenèse :<br />

- traitement par metformine<br />

- intoxication éthylique sévère<br />

- intoxication au méthanol<br />

Éthanol<br />

Jeûne<br />

Intoxications Méthanol<br />

Réduction<br />

néphronique sévère<br />

Salicylés<br />

Éthylène glycol<br />

Paraldéhyde<br />

En cas d’acidose avec réponse rénale inadaptée (le rein est<br />

tout ou partie responsable de l’acidose), le trou anionique<br />

urinaire reste positif avec une excrétion de NH 4Cl inférieure à<br />

80 mmol/j.<br />

pH urinaire<br />

Figure 6. Arbre décisionnel. Démarche diagnostique<br />

devant une acidose métabolique.<br />

Tableau 3.<br />

Acidoses métaboliques hyperchlorémiques (TrA < 16 mmol/l).<br />

Acidose de dilution<br />

Pertes de bases Diarrhée<br />

Acidoses tubulaires<br />

Réduction néphronique<br />

modérée ou moyenne<br />

Nutrition parentérale<br />

Fistules digestives<br />

Cholestyramine<br />

Charge acide exogène NH 4Cl, CaCl 2, MgSO 4, chlorhydrate<br />

d’arginine, chlorhydrate de lysine, sulfate<br />

de méthionine<br />

Il a un intérêt limité en pratique courante dans le bilan<br />

étiologique d’une acidose métabolique.<br />

L’interprétation du pH urinaire dans l’exploration d’une<br />

acidose est rendue difficile pour de multiples raisons.<br />

Il faut d’abord s’assurer de l’absence d’infection urinaire à un<br />

germe uréasique (comme Proteus) car le pH devient alcalin sous<br />

l’effet de l’uréolyse bactérienne.<br />

6 Néphrologie


Tableau 4.<br />

Facteurs pouvant modifier le trou anionique sanguin.<br />

Élévation du trou anionique<br />

sanguin<br />

Augmentation des anions :<br />

- alcalose (élévation du lactate)<br />

- traitement par pénicilline<br />

et carbénicilline<br />

- alcalinisation par des sels de Na +<br />

avec anions indosés (lactate,<br />

citrate, acétate)<br />

Diminution des cations :<br />

- hypoCa 2+<br />

- hypogammaglobulinémie<br />

L’ADH étant nécessaire à l’acidification des urines, le pH<br />

urinaire ne peut être analysé que chez un sujet en position<br />

debout et en relative restriction hydrique.<br />

Le pH urinaire ne peut s’interpréter que si la kaliémie est<br />

normale. En effet, on a vu que les dyskaliémies modifiaient la<br />

disponibilité rénale du NH 3. L’hypokaliémie augmente la<br />

disponibilité du NH 3 ce qui permet aux H + d’être éliminés sous<br />

la forme de NH 4 + d’où un pH urinaire « alcalin ». L’hyperkaliémie<br />

diminue la disponibilité rénale du NH 3 ce qui tend à<br />

favoriser l’excrétion des H + sous forme libre d’où un pH urinaire<br />

« acide ». De même, un traitement par corticoïdes augmente la<br />

disponibilité rénale du NH 3.<br />

Influence de l’acidose sur la kaliémie<br />

Dans le bilan d’une acidose, il faut mesurer la kaliémie car<br />

cette dernière est influencée par l’équilibre acide-base. En cas<br />

d’acidose aiguë minérale (acidoses tubulaires distales), la<br />

kaliémie s’élève par issue de K + de la cellule. Cet effet n’est pas<br />

présent en cas d’acidose aiguë organique (acidose lactique). En<br />

revanche, l’acidose chronique est souvent associée à une<br />

hypokaliémie par fuite rénale de K + [11] .<br />

Étiologies des acidoses métaboliques<br />

Quatre mécanismes sont en cause dans la survenue d’une<br />

acidose métabolique :<br />

surcharge acide ;<br />

défaut d’excrétion de la charge acide ;<br />

perte de bases ;<br />

acidose de dilution.<br />

Surcharge acide<br />

La capacité du rein à éliminer une charge acide est limitée en<br />

dépit de l’augmentation physiologique de l’excrétion rénale des<br />

protons sous forme de NH 4 + .<br />

Surcharge acide exogène<br />

Diminution du trou anionique<br />

sanguin<br />

Diminution des anions :<br />

- hypoalbuminémie (une baisse<br />

de 10 g/l diminue le trou anionique<br />

de 2,5 mmol)<br />

Augmentation des cations :<br />

- intoxications au lithium, brome<br />

- myélome IgG<br />

- hyperCa 2+ , hyperMg 2+<br />

Trou anionique : Na + –(Cl - + HCO 3 - ). La valeur normale est 12 ± 2 mmol/l (8 à<br />

16 mmol/l). Le trou anionique sanguin est constitué par les anions protéinates<br />

(albumine), les PO 4 2- , les SO4 2- et les anions organiques.<br />

Les étiologies sont :<br />

l’apport de NH 4Cl, de chlorhydrate de lysine ou d’arginine,<br />

de sulfate de méthionine. L’acidose est hyperchlorémique.<br />

l’intoxication par le méthanol, l’acide acétylsalicylique,<br />

l’éthylène glycol et le paraldéhyde.<br />

Dans tous les cas, un trou anionique sanguin est présent,<br />

constitué par l’anion toxique ou ses métabolites.<br />

L’intoxication par l’éthylène glycol associe des troubles<br />

neurologiques (pseudoéthylisme) à une insuffisance rénale aiguë<br />

avec présence de très nombreux cristaux d’oxalate de calcium<br />

dans les urines et dans le parenchyme rénal.<br />

L’intoxication par le méthanol associe un pseudoéthylisme,<br />

des douleurs abdominales avec vomissements, des troubles de la<br />

vision à type d’œdème rétinien et de papillite.<br />

L’intoxication par le paraldéhyde est observée chez les<br />

alcooliques et les toxicomanes. Elle associe des douleurs<br />

Néphrologie<br />

abdominales, des signes neurologiques et une hyperleucocytose.<br />

Le diagnostic est fait par exclusion car aucun métabolite ne peut<br />

être dosé.<br />

L’intoxication salicylée est associée à une alcalose respiratoire<br />

qui génère une acidose lactique. Ceci explique plus que la<br />

présence de l’anion salicylate le trou anionique observé.<br />

Surcharge acide endogène<br />

Acidose lactique. Il s’agit de l’accumulation d’acide lactique<br />

du fait d’un déséquilibre entre production et consommation de<br />

cet acide. La production se fait dans les tissus ne possédant pas<br />

d’enzymes mitochondriaux du cycle de Krebs ou en cas de<br />

métabolisme cellulaire en anaérobiose. La consommation se fait<br />

dans le cycle de Krebs en aérobiose et par la néoglucogenèse<br />

hépatique et rénale (cycle de Cori). La lactacidémie normale est<br />

de 1 mmol/l.<br />

On parle d’acidose lactique si la lactacidémie est supérieure à<br />

5 mmol/l. En général le dosage n’est pas utile pour le diagnostic<br />

qui est facilement fait devant une acidose sévère (pH < 7,10 et<br />

HCO 3<br />

Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques 18-033-C-10<br />

– < 10 mmol/l) avec trou anionique dans un contexte<br />

clinique évocateur (Tableau 2).<br />

La metformine (Glucophage ® , Stagid ® ) peut générer une<br />

acidose lactique. Ce médicament doit être arrêté :<br />

en cas d’insuffisance rénale, insuffisance hépatocellulaire,<br />

insuffisance cardiaque ou respiratoire ;<br />

dans les situations à risque d’insuffisance rénale aiguë comme<br />

après injection de produit de contraste iodé ou de molécules<br />

néphrotoxiques, etc. ;<br />

dans toutes les situations de « stress » : anesthésie, chirurgie,<br />

déshydratation, infection, etc.<br />

Acidocétose. Une acidocétose s’observe surtout chez le sujet<br />

diabétique de type I en carence insulinique. Dans le tissu<br />

adipeux, la carence en insuline active la lipase hormonosensible,<br />

ce qui entraîne la libération de grande quantité d’acides<br />

gras. Ces acides gras vont être métabolisés dans les mitochondries<br />

des hépatocytes en cétoacides (acide acétoacétique qui sera<br />

métabolisé en acétone et acide b-hydroxybutyrique) qui vont<br />

s’accumuler dans le plasma.<br />

L’acidocétose diabétique associe des signes neurologiques<br />

(confusion, voire coma) à une déshydratation extracellulaire<br />

(secondaire à l’hyperglycémie avec glycosurie) et à une odeur<br />

acétonique de l’haleine. La biologie révèle une hyperglycémie<br />

associée à des corps cétoniques dans le sang (Acétest ® positif<br />

dans le sérum) et les urines, une acidose sévère avec pH<br />

–<br />

inférieur à 7,3 et HCO3 inférieur à 10 mmol/l avec trou<br />

anionique. L’hyperkaliémie de transfert initiale régresse sous<br />

l’effet du traitement. Parfois, il n’y a pas de trou anionique car<br />

le rein élimine tous les corps cétoniques si la carence en<br />

insuline s’installe lentement.<br />

Autres acidocétoses (Tableau 2)<br />

Acidocétose de jeûne : la diminution de l’insuline secondaire<br />

au jeûne entraîne une acidose modérée.<br />

Acidocétose alcoolique : le jeûne associé à l’ingestion massive<br />

d’alcool souvent associé à des troubles digestifs (vomissements<br />

et/ou diarrhée) entraîne une lipolyse majeure avec formation de<br />

corps cétoniques. La biologie est différente de celle de l’acidocétose<br />

diabétique car :<br />

il n’y a pas d’hyperglycémie ni de glycosurie ;<br />

l’Acétest ® peut être mis en défaut car il ne reconnaît que<br />

l’acide acétoacétique. Or, dans l’acidocétose alcoolique, le<br />

principal indosé anionique est l’acide b-hydroxybutyrique ;<br />

la chlorémie peut être basse du fait des vomissements.<br />

Pertes d’alcalins<br />

–<br />

Certaines sécrétions digestives sont riches en HCO3 , en<br />

–<br />

particulier la bile et le suc pancréatique. Les HCO3 sont<br />

normalement réabsorbés dans le côlon, ce qui rend négligeable<br />

–<br />

la perte fécale des HCO3 .<br />

Une perte digestive d’alcalins peut s’observer en cas :<br />

de diarrhée aiguë ou chronique ;<br />

de fistule pancréatique et biliaire ;<br />

de traitement par cholestyramine (Questran ® ), chlorure de<br />

calcium (CaCl2), magnésium sulfate (MgSO4), ces deux<br />

–<br />

derniers médicaments chélatant directement les HCO3 .<br />

7


18-033-C-10 Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques<br />

L’acidose est sans trou anionique sanguin car il existe une<br />

augmentation de la réabsorption tubulaire de Cl – du fait de la<br />

déshydratation extracellulaire. Le trou anionique urinaire est<br />

constamment négatif. Une hypokaliémie est souvent présente<br />

du fait des pertes digestives de K + mais aussi d’une kaliurèse<br />

inadaptée.<br />

Défaut d’excrétion de la charge acide quotidienne<br />

Insuffisance rénale<br />

L’insuffisance rénale chronique s’accompagne d’une acidose<br />

avec trou anionique du fait de la rétention des phosphates, des<br />

sulfates et d’autres anions organiques. L’acidose est liée à la<br />

diminution de l’excrétion d’H + sous forme de NH 4 + qui est<br />

parallèle à la réduction néphronique.<br />

Acidoses tubulaires<br />

Il s’agit de dysfonctionnements tubulaires de cause et de<br />

physiopathologie variable avec ou sans déficit de la fonction<br />

rénale. La biologie montre une acidose hyperchlorémique et<br />

+<br />

une excrétion urinaire de NH4 trop basse compte tenu de<br />

l’acidose (trou anionique urinaire positif).<br />

Acidose tubulaire proximale (ou de type 2). Elle est<br />

caractérisée par un abaissement du seuil de réabsorption des<br />

–<br />

HCO3 du tube proximal à un niveau variable entre 16 et<br />

–<br />

20 mmol/l. Une fois le seuil atteint, les HCO3 sont complètement<br />

réabsorbés et tout le processus d’acidification des urines se<br />

poursuit normalement.<br />

Les examens sanguins mettent en évidence une hypokaliémie<br />

et des signes d’hémoconcentration. Dans les urines, le pH est en<br />

– +<br />

règle adapté, il n’y a pas de HCO3 .LeNH4 est en quantité<br />

insuffisante. Le diagnostic est confirmé dans des laboratoires<br />

spécialisés par la diminution du rapport de la capacité de<br />

–<br />

réabsorption des HCO3 sur le débit de filtration glomérulaire<br />

–<br />

(TmHCO3 /DFG) qui est inférieur à 20 mmol/l.<br />

Il faut rechercher d’autres signes d’atteinte tubulaire proximale<br />

: glycosurie orthoglycémique, aminoacidurie, élévation du<br />

rapport TmPhosphate/DFG et de la clairance de l’acide urique.<br />

Les étiologies des acidoses tubulaires proximales sont multiples<br />

: maladies de surcharge (cystinose, etc.), maladies rénales<br />

(amylose, maladies auto-immunes, etc.), médicaments (acétazolamide,<br />

cisplatine) et toxiques (métaux lourds).<br />

Acidose tubulaire distale (ATD) (de type 1). Elles sont de<br />

deux types : ATD hypokaliémique et ATD hyperkaliémique [3] .<br />

L’exploration et le bilan étiologique de ces acidoses se fait dans<br />

les services spécialisés.<br />

L’ATD avec hypokaliémie : la biologie révèle une acidose<br />

hyperchlorémique avec hypokaliémie par hyperaldostéronisme<br />

secondaire et une calciurie élevée avec ostéopénie. Le pH<br />

+<br />

urinaire est alcalin avec bicarbonaturie, l’excrétion de NH4 est<br />

basse.<br />

Les étiologies des ATD hypokaliémiques sont nombreuses<br />

(maladies auto-immunes, néphrocalcinose, néphrites interstitielles,<br />

médicaments).<br />

Les ATD avec hyperkaliémie [12] : la biologie révèle une<br />

acidose hyperchlorémique hyperkaliémique et une excrétion<br />

+<br />

basse de NH4 . Le volume extracellulaire, la rénine et l’aldostérone<br />

sont variables en fonction de l’étiologie. Les étiologies des<br />

ATD hyperkaliémiques sont multiples (médicaments, insuffisance<br />

surrénale, diabète, affections vasculaires).<br />

Acidose de dilution<br />

Elle est liée à l’administration rapide de liquides dépourvus de<br />

bicarbonate, ce qui entraîne une diminution de la réabsorption<br />

– +<br />

des HCO3 . En fait le bilan d’ions H est normal.<br />

Traitement des acidoses métaboliques<br />

Le traitement d’une acidose métabolique est d’abord le<br />

traitement de sa cause. Un traitement symptomatique n’est pas<br />

toujours nécessaire.<br />

Moyens du traitement<br />

Il existe trois moyens pour corriger une acidose métabolique :<br />

l’alcalinisation, l’hyperventilation et l’épuration extrarénale.<br />

Alcalinisation<br />

Le NaHCO3 est utilisé per os soit en préparation magistrale (2<br />

à 6 g/j), soit sous forme d’eau de Vichy. L’eau de Vichy Célestins<br />

® – +<br />

apporte par litre 3gdeHCO3 et1,2gdeNa . L’eau de<br />

Vichy Saint-Yorre ® –<br />

apporte par litre 4,3 g de HCO3 et 1,7 g de<br />

Na + .<br />

La forme intraveineuse existe en solution à 1,4 % (solution<br />

molaire apportant 165 mmol/l de Na + –<br />

et de HCO3 )ouà4,2%<br />

(3 fois molaire). La posologie initiale est de 1à2mmol/kg en<br />

perfusion lente, la suite du traitement étant adaptée en fonction<br />

de la correction du pH.<br />

Le lactate de Na + molaire et le trométhamine acétate (THAM)<br />

ne sont plus employés.<br />

Hyperventilation<br />

Ce moyen physiologique de compensation permet une<br />

élimination du CO 2 et donc une diminution de la concentration<br />

en H + . L’hyperventilation physiologique doit donc toujours<br />

être respectée. En cas d’acidose sévère, la ventilation mécanique<br />

peut être utilisée mais son efficacité n’a jamais été évaluée.<br />

Épuration extrarénale (hémodialyse, hémofiltration)<br />

Elle permet de corriger les acidoses sans risque de surcharge<br />

sodée ou de surcompensation. Son utilisation nécessite un état<br />

hémodynamique correct et une élimination du CO 2 efficace par<br />

la ventilation.<br />

Conduite du traitement<br />

Acidoses aiguës<br />

En cas d’acidose aiguë, le risque est celui de la diminution de<br />

la contraction myocardique, des arythmies cardiaques et de la<br />

vasodilatation pouvant entraîner un état de choc. Le pronostic<br />

dépend plus de la cause de l’acidose que du pH sanguin.<br />

Le traitement dépend de la valeur du pH. Si le pH est<br />

inférieur à 7,2, il faut alcaliniser par le NaHCO 3 à 1,4 %. La<br />

ventilation mécanique associée permet l’élimination du CO 2 et<br />

la diminution de la dépense énergétique donc de la production<br />

de H + . L’épuration extrarénale peut être utilisée en cas de<br />

défaillance rénale, d’échec de l’alcalinisation et devant certaines<br />

intoxications.<br />

Si le pH est supérieur à 7,2, l’alcalinisation n’est pas recommandée,<br />

le traitement de la cause est suffisant. Ceci est particulièrement<br />

vrai pour les acidoses lactiques, les acidocétoses et les<br />

intoxications.<br />

Acidoses chroniques<br />

En cas d’acidose chronique, le risque à long terme est celui<br />

de l’ostéoporose et de l’augmentation du catabolisme des<br />

protéines. L’alcalinisation par NaHCO 3 doit tenir compte de<br />

l’apport sodé. La tolérance digestive des solutés alcalins per os<br />

n’est en général pas bonne.<br />

■ Alcaloses métaboliques<br />

Définition et diagnostic<br />

Définition<br />

Une alcalose métabolique est définie par l’association d’un<br />

pH sanguin alcalin (supérieur ou égal à 7,43) à une augmentation<br />

de la réserve alcaline (supérieure ou égale à 28 mmol/l).<br />

L’alcalose métabolique entraîne une augmentation de la<br />

PaCO 2 (hypoventilation alvéolaire de compensation) et une<br />

diminution de la PaO 2 proportionnelle à l’augmentation de la<br />

PaCO 2. La chlorémie est plus basse que ne le voudrait l’augmentation<br />

des HCO 3 – avec un petit trou anionique lié à une<br />

production d’acide lactique [13] .<br />

Diagnostic<br />

Les signes cliniques sont non spécifiques et inconstants. Ils<br />

associent :<br />

des signes neurologiques si le pH est supérieur à 7,5 : agitation,<br />

confusion, coma, épilepsie ;<br />

8 Néphrologie


“ Point important<br />

Génération et facteurs d’entretien d’une alcalose<br />

métabolique<br />

Génération :<br />

pertes de protons depuis le tube digestif ou les urines :<br />

vomissements, diurétiques thiazidiques ou de l’anse, etc. ;<br />

-<br />

entrée de HCO3 dans le secteur extracellulaire :<br />

syndromes de Conn et de Cushing, etc.<br />

Facteurs d’entretien :<br />

déshydratation du secteur extracellulaire →<br />

-<br />

réabsorption des HCO3 au tube proximal ;<br />

hypokaliémie → augmentation de l’excrétion urinaire<br />

des H + par le NH 4<br />

+ ;<br />

hyperminéralocorticisme → sécrétion voltage<br />

dépendante des H + dans le collecteur cortical.<br />

des signes neuromusculaires : crampes, myoclonies (secondaire<br />

à la chute du calcium ionisé) ;<br />

des signes cardiaques : arythmies.<br />

Approches cliniques<br />

Génération et maintenance de l’alcalose<br />

métabolique<br />

Les deux conditions nécessaires pour créer une alcalose<br />

métabolique sont :<br />

–<br />

l’entrée de HCO3 dans le secteur extracellulaire par perte<br />

d’acide ou gain d’alcalin, ce qui va générer l’alcalose ;<br />

une augmentation de la capacité du rein à réabsorber les<br />

– +<br />

HCO3 ou à éliminer les H , ce qui va maintenir l’alcalose [14] .<br />

Génération de l’alcalose<br />

–<br />

L’entrée de HCO3 dans le secteur extracellulaire peut être<br />

rénale ou digestive. Une entrée d’origine rénale des<br />

–<br />

HCO3 s’observe :<br />

dans les situations d’hyperaldostéronisme primitif (syndrome<br />

de Conn par exemple) ;<br />

en cas d’afflux de Na + dans le néphron distal en présence<br />

d’un hyperaldostéronisme (traitement par diurétiques de<br />

l’anse), l’hyperaldostéronisme étant secondaire à la déplétion<br />

volémique.<br />

Ces deux situations vont combiner trois facteurs :<br />

un apport important de Na + dans le tube collecteur cortical ;<br />

un hyperminéralocorticisme, la sécrétion d’aldostérone<br />

devenant indépendante du volume extracellulaire ;<br />

une hypokaliémie, conséquence des deux premiers phénomènes.<br />

L’afflux de Na + dans le tube collecteur cortical alors que<br />

l’aldostérone est élevée augmente la sécrétion des H + . En effet,<br />

l’aldostérone active la Na + /K + ATPase et favorise l’ouverture du<br />

canal épithélial sodique des cellules principales. En présence de<br />

Na + dans la lumière tubulaire, le Na + est échangé contre les<br />

H + et les K + d’où alcalose et hypokaliémie. L’hypokaliémie<br />

aggrave l’alcalose car elle augmente la sécrétion d’acide.<br />

La perte d’acide par le tube digestif à l’occasion de vomisse-<br />

–<br />

ments (riches en HCl) conduit à l’addition de HCO3 dans le<br />

secteur extracellulaire mais il faut, pour maintenir l’alcalose, que<br />

–<br />

la réabsorption rénale des HCO3 soit augmentée [13] .<br />

Maintenance de l’alcalose<br />

Trois mécanismes rendent compte du maintien de l’alcalose :<br />

la déshydratation du secteur extracellulaire. Il s’agit du facteur<br />

principal ;<br />

l’hypokaliémie ;<br />

un hyperminéralocorticisme.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques 18-033-C-10<br />

La déshydratation du secteur extracellulaire diminue le DFG,<br />

–<br />

donc la quantité de HCO3 filtrée, ce qui limite leur excrétion<br />

–<br />

rénale. De plus, la réabsorption des HCO3 est augmentée dans<br />

le tube proximal.<br />

L’hypokaliémie diminue aussi le DFG et stimule la sécrétion<br />

des H + +<br />

sous forme de NH4 .<br />

L’hyperminéralocorticisme est un facteur de maintien car il<br />

stimule la sécrétion des H + si la délivrance du Na + est maintenue<br />

dans le tube collecteur cortical [13] .<br />

Étiologies<br />

Les étiologies des alcaloses métaboliques se divisent en deux<br />

groupes :<br />

les alcaloses associées à une déshydratation extracellulaire ;<br />

les alcaloses associées à une hydratation extracellulaire<br />

normale ou avec hyperhydratation extracellulaire.<br />

Déshydratation extracellulaire<br />

La déshydratation extracellulaire est à l’origine du maintien<br />

de l’alcalose dans ces étiologies. L’analyse du Na + et du Cl – urinaire<br />

permet en général de distinguer les différentes causes<br />

(Fig. 7).<br />

Excrétion urinaire élevée de Na + et de Cl –<br />

L’alcalose est initiée par une perte d’H + par le rein :<br />

traitements en cours par diurétiques de l’anse ou thiazidiques<br />

;<br />

syndromes de Bartter et de Gitelman ;<br />

déficit en magnésium : l’alcalose n’est pas systématique et est<br />

en règle générale modérée. Son déterminisme est inconnu.<br />

–<br />

Rarement, l’alcalose est initiée par une entrée de HCO3 dans<br />

le secteur extracellulaire d’origine digestive ou osseuse comme<br />

dans les hypercalcémies extraparathyroïdiennes :<br />

syndrome de Burnett survenant chez les malades insuffisants<br />

rénaux consommant de grandes quantités de sels de calcium<br />

alcalin (carbonate de calcium) ;<br />

intoxication à la vitamine D, granulomatoses (sarcoïdose) et<br />

lyse osseuse des cancers.<br />

Excrétion urinaire basse de Cl – et élevée de Na +<br />

L’alcalose est initiée par une perte d’H + par le tube digestif :<br />

vomissements actifs ;<br />

sonde nasogastrique en aspiration.<br />

Excrétion urinaire basse de Cl – et de Na +<br />

L’alcalose est initiée soit par une perte d’H + par le tube<br />

digestif en cas de vomissements dans un passé récent, soit par<br />

le rein en cas de traitement par diurétique dans un passé récent<br />

et en cas d’alcalose post-hypercapnie. Cette dernière s’explique<br />

–<br />

par l’accumulation de HCO3 alors que le patient était hypercapnique<br />

(compensation métabolique de l’acidose respiratoire).<br />

– –<br />

L’accumulation des HCO3 entraîne un déficit en Cl par<br />

chlorurie. Lorsque la ventilation alvéolaire est restituée, le rein<br />

–<br />

ne peut excréter tous les HCO3 accumulés du fait du déficit en<br />

chlorure de sodium (NaCl).<br />

Ces alcaloses métaboliques doivent être traitées par du NaCl,<br />

ce qui permet de restaurer l’hydratation du secteur extracellu-<br />

–<br />

laire et ainsi l’excrétion rénale des HCO3 accumulés. La<br />

déplétion en K + contribue aussi au maintien de l’alcalose. Elle<br />

doit aussi être compensée mais c’est l’apport de NaCl qui<br />

constitue le traitement de base.<br />

Hyperhydratation extracellulaire ou hydratation<br />

extracellulaire normale (Fig. 7)<br />

Ce type d’alcalose est toujours en rapport avec une perte<br />

rénale d’acide par hyperactivité minéralocorticoïde. L’alcalose<br />

est entretenue par le maintien de l’activité minéralocorticoïde<br />

en dépit de l’expansion volémique (qui autorise un apport de<br />

Na + dans le tube collecteur) et par l’hypokaliémie qui stimule<br />

l’excrétion des H + . Les dosages de rénine et d’aldostérone<br />

permettent de différencier trois groupes d’étiologies.<br />

9


18-033-C-10 Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques<br />

Na + urinaire bas<br />

Vomissements récents<br />

Diurétiques récents<br />

Posthypercapnie<br />

Tumeurs villeuses<br />

Hyperaldostéronisme primaire (syndrome de Conn)<br />

Dans ces situations, la rénine est basse et non stimulable et<br />

l’aldostérone élevée :<br />

maladie de Conn ;<br />

hyperplasie bilatérale des surrénales ;<br />

cancer de la surrénale.<br />

Hyperaldostéronismes secondaires<br />

Déshydratation du secteur extracellulaire<br />

Hypotension<br />

Cl - urinaire bas<br />

Na + urinaire élevé<br />

Vomissements actifs<br />

Sonde nasogastrique<br />

Dans ces situations, la rénine et l’aldostérone sont élevées :<br />

sténose de l’artère rénale ;<br />

tumeur sécrétant de la rénine ;<br />

hypertension artérielle (HTA) accélérée ou maligne.<br />

Hyperminéralocorticisme sans aldostérone<br />

L’activité minéralocorticoïde n’est pas en rapport avec<br />

l’aldostérone mais avec d’autres hormones surrénaliennes<br />

normalement inactives (cortisol) ou en quantité habituellement<br />

insuffisante pour exercer un effet minéralocorticoïde.<br />

Dans ces situations, la rénine et l’aldostérone sont basses :<br />

syndrome de Cushing et traitement par corticoïdes ;<br />

inhibition de la 11-b stéroïde déshydrogénase par la glycyrrhizine<br />

(réglisse) ;<br />

syndrome de Liddle : il s’agit d’une mutation du canal<br />

épithélial sodique, ce qui augmente son activité de réabsorption<br />

de Na +<br />

aboutissant à une HTA avec alcalose<br />

hypokaliémique [15] .<br />

Toutes ces causes d’alcalose métabolique doivent être traitées<br />

par du chlorure de potassium (KCl), ce qui permet de restaurer<br />

–<br />

l’excrétion rénale des HCO3 accumulés.<br />

Augmentation de la réserve<br />

alcaline (> 28 mmol/l)<br />

Gazométrie : pH > 7,43 et PaCO 2 > 45 mmHg<br />

Cl - urinaire élevé<br />

Diurétiques en cours<br />

Déficit en magnésium<br />

Syndrome de Bartter<br />

Syndrome de Gitelman<br />

Hypercalcémies<br />

extraparathyroïdiennes<br />

Volume extracellulaire ?<br />

Pression artérielle ?<br />

Rénine basse et<br />

aldostérone haute<br />

(hyperaldostéronisme<br />

primaire)<br />

Adénome de Conn<br />

Hyperplasie<br />

surrénalienne<br />

Cancer de la surrénale<br />

Enfin, l’alcalose des déficits en K + s’explique par le transfert<br />

des H + vers le milieu intracellulaire et l’augmentation de<br />

l’excrétion rénale des H + +<br />

sous la forme des NH4 .<br />

L’alcalose de contraction s’observe en cas de traitement par<br />

furosémide (Lasilix ® ) qui soustrait du liquide dans le secteur<br />

–<br />

extracellulaire alors que le stock des HCO3 reste constant.<br />

Traitement<br />

Hydratation normale ou hyperhydratation<br />

du secteur extracellulaire<br />

HTA<br />

Dosage rénine et aldostérone<br />

Rénine et aldostérone<br />

élevées<br />

(hyperaldostéronisme<br />

secondaire)<br />

Le traitement d’une alcalose métabolique est d’abord celui de<br />

son facteur d’entretien, puis celui de sa cause. Un traitement<br />

symptomatique n’est nécessaire que dans de rares circonstances.<br />

Correction du facteur d’entretien<br />

La correction du facteur d’entretien de l’alcalose est primordiale.<br />

Le traitement dépend de l’étiologie :<br />

apport de NaCl dans toutes les situations associées à une<br />

déshydratation extracellulaire. C’est le traitement des alcaloses<br />

des vomissements, des diurétiques, etc. ;<br />

apport de K + dans toutes les situations associées à une<br />

hyperhydratation extracellulaire. C’est le traitement des<br />

alcaloses par hyperaldostéronisme primitif, de la maladie de<br />

Cushing, etc.<br />

Traitement étiologique<br />

HTA maligne<br />

Tumeur à rénine<br />

Sténose de l'artère<br />

rénale<br />

Figure 7. Arbre décisionnel. Démarche diagnostique devant une alcalose métabolique. HTA : hypertension artérielle.<br />

Rénine et aldostérone<br />

basses<br />

Cushing<br />

Corticothérapie<br />

Inhibiteur de la<br />

11β-OH stéroïde<br />

déshydrogénase<br />

Syndrome de Liddle<br />

Déficits enzymatiques<br />

Chaque cause d’alcalose métabolique a son propre traitement.<br />

Il s’agit par exemple :<br />

d’arrêter les diurétiques thiazidiques ou de l’anse ;<br />

de l’ablation d’une sonde gastrique ou de la prescription<br />

d’antisécrétoire si le maintien de la sonde est nécessaire ;<br />

de la cure chirurgicale d’un adénome de Conn, etc.<br />

10 Néphrologie


.<br />

Traitement symptomatique<br />

Compte tenu des conséquences cliniques de l’alcalose, un<br />

traitement symptomatique ne s’impose que chez certains<br />

malades :<br />

malades en détresse respiratoire chez qui la correction de<br />

l’alcalose peut améliorer la ventilation alvéolaire ;<br />

malades en angor instable ou ayant présenté un infarctus<br />

myocardique récent ;<br />

malades présentant des symptômes neurologiques.<br />

Le chlorure d’ammonium (NH 4Cl) peut être utilisé per os ou<br />

par voie veineuse. L’acide chlorhydrique (HCl) 0,15 ou 0,25 N<br />

peut être perfusé sur une voie centrale [16] . Ces acides sont<br />

contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale ou hépatique. Le<br />

chlorhydrate d’arginine a été abandonné du fait d’hyperkaliémie<br />

sévère. Les antialdostérones (spironolactone, Aldactone ® )ou<br />

les diurétiques épargneurs de K + (amiloride, Modamide ® ) sont<br />

de bons traitements de l’alcalose en cas d’hyperaldostéronisme.<br />

L’acétazolamide (Diamox ® ) est peu efficace et peut augmenter<br />

la PaCO 2 en particulier chez l’insuffisant respiratoire.<br />

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effects on acid-base balance and oxygenation. Crit Care Med<br />

1985;13:738-42.<br />

B. Dussol (bdussol@ap-hm.fr).<br />

Centre de néphrologie et de transplantation rénale, Hôpital de la Conception, 147, boulevard Baille, 13385 Marseille cedex 05, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Dussol B. Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-033-C-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

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Équilibre acidobasique. Acidoses et alcaloses métaboliques 18-033-C-10<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

11


Plan<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation<br />

et explorations<br />

M. Courbebaisse, J.-C. Souberbielle<br />

Si le calcium et le phosphate jouent un rôle majeur dans la minéralisation osseuse, ils ont également de<br />

multiples fonctions dans l’organisme. Bien qu’étroitement régulées, les concentrations sériques de<br />

phosphate varient au cours de la vie en fonction des besoins physiologiques. En revanche, la calcémie<br />

ionisée est maintenue dans une fourchette très étroite de valeurs grâce à l’action combinée de deux<br />

hormones, la parathormone (PTH) et le calcitriol, métabolite actif de la vitamine D. Toute variation,<br />

même modeste, de la calcémie ionisée est détectée par une protéine, le récepteur sensible au calcium<br />

(CaSR) qui est présent à la surface des cellules parathyroïdiennes et de nombreux autres tissus. Une baisse<br />

de la calcémie ionisée induit une inactivation du CaSR, ce qui stimule la sécrétion de PTH. Celle-ci stimule<br />

la libération de calcium et de phosphate de l’os vers le plasma, réduit l’excrétion fractionnelle du calcium<br />

et stimule la production rénale de calcitriol qui augmente l’absorption intestinale de calcium et de<br />

phosphate. En outre, la PTH diminue la réabsorption tubulaire rénale du phosphate et contribue ainsi à<br />

l’homéostasie du phosphate. Il est probable qu’une autre hormone, le fibroblast growth factor 23<br />

(FGF23), ait un rôle significatif sur l’homéostasie phosphocalcique par son action inhibitrice sur la<br />

réabsorption rénale du phosphate et sur la synthèse de calcitriol. Récemment, d’autres actions de la<br />

vitamine D, indépendantes du métabolisme phosphocalcique et osseux, ont été découvertes.<br />

L’exploration des troubles du métabolisme phosphocalcique consiste en général à pratiquer une<br />

évaluation de base comportant la calcémie, la phosphatémie, les dosages de la 25-hydroxyvitamine D et<br />

de la PTH, la calciurie des 24 heures et une estimation de la fonction rénale. Enfin, de nombreuses<br />

anomalies génétiques responsables de perturbations du métabolisme phosphocalcique ont été décrites,<br />

ouvrant de nouvelles voies à la compréhension des mécanismes physiopathologiques.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Calcémie ; Calciurie ; Phosphatémie ; Hormone parathyroïdienne ; Vitamine D ; FGF23 ;<br />

Hyperparathyroïdie ; Hypoparathyroïdie<br />

Régulation de la calcémie et de la phosphatémie 1<br />

Parathormone (PTH) 2<br />

Vitamine D 3<br />

Calcium, phosphate, et métabolisme osseux 5<br />

Absorption intestinale du calcium et du phosphate 5<br />

Homéostasie rénale du calcium et du phosphate 6<br />

Aspects analytiques des dosages les plus courants.<br />

Importance pour la pratique clinique 11<br />

Calcémie 11<br />

Calciurie 11<br />

Phosphatémie/phosphaturie 11<br />

Dosages de parathormone 11<br />

Dosages de vitamine D 12<br />

Interprétation des explorations phosphocalciques 12<br />

Hypercalcémie 13<br />

Hyperparathyroïdie primitive (HPP) 14<br />

Hypocalcémies 14<br />

Cas particulier de la découverte d’une parathormone élevée<br />

quand calcémie, phosphatémie et calciurie des 24 heures<br />

sont normales 15<br />

Hypophosphatémies (avec calcémie normale et avec<br />

ou sans hypercalciurie) 15<br />

Néphrologie<br />

Hypercalciuries 15<br />

Place de la biologie moléculaire et des recherches d’anomalies<br />

génétiques 17<br />

Conclusion 17<br />

■ Régulation de la calcémie<br />

et de la phosphatémie<br />

18-010-B-10<br />

Si le calcium (Ca) et le phosphate (P) jouent un rôle majeur<br />

dans la minéralisation osseuse, ils ont également de multiples<br />

fonctions dans l’organisme. Le calcium est impliqué dans la<br />

conduction nerveuse, la contraction musculaire, la coagulation,<br />

la différenciation cellulaire et le signal intracellulaire. Le<br />

phosphate est impliqué dans les échanges énergétiques (adénosine<br />

triphosphate [ATP], etc.), certaines activités enzymatiques<br />

(phosphatases, phosphorylases), l’équilibre acide-base, la<br />

synthèse des acides nucléiques et le signal intracellulaire (acide<br />

adénosine monophosphorique cyclique [AMPc] et guanosine<br />

monophosphorique cyclique [GMPc]). Le corps humain d’un<br />

adulte de 70 kg contient environ 1 kg de calcium et 550 g de<br />

phosphore élément dont l’immense majorité (> 99 % du<br />

calcium et environ 85 % du phosphate) est localisée dans le<br />

cristal<br />

1


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Diminution<br />

de l'excrétion<br />

fractionnelle<br />

du calcium<br />

d’hydroxyapatite du squelette. Dans le plasma, le calcium est<br />

présent sous différentes formes : 40 % à 45 % est lié à des<br />

protéines, principalement l’albumine, 5%à10%estliéàdes<br />

anions, et environ 50 % est sous la forme de calcium ionisé. La<br />

somme du calcium ionisé et du calcium lié aux anions est<br />

appelée calcium « ultrafiltrable ». Dans le plasma, le phosphate<br />

est présent sous forme de phosphate inorganique (on dose la<br />

phosphatémie et non la phosphorémie). Environ 55 % des<br />

phosphates est sous forme ionisée, 10 % lié à des protéines, et<br />

environ 35 % associé à des cations. Le produit phosphocalcique<br />

(calcémie multipliée par la phosphatémie) doit rester constant<br />

pour assurer une minéralisation osseuse optimale. S’il est trop<br />

élevé, des calcifications extrasquelettiques peuvent apparaître.<br />

S’il est trop bas, la minéralisation osseuse peut être altérée.<br />

Seule la calcémie ionisée est régulée et sa concentration<br />

plasmatique est maintenue dans des limites très étroites. En<br />

conditions pathologiques, le maintien de la calcémie ionisée<br />

peut nécessiter une altération de la balance calcique (c’est-àdire<br />

la différence entre la quantité de calcium qui entre dans le<br />

liquide extracellulaire [LEC] et la quantité qui en sort). La<br />

balance calcique est assurée par trois organes : l’intestin, l’os, et<br />

le rein. Après un repas, la calcémie augmente transitoirement<br />

(c’est pourquoi il faut mesurer la calcémie à jeun). En revanche,<br />

à jeun, le maintien de la calcémie dépend seulement de l’équilibre<br />

entre la quantité de calcium relarguée par l’os et la<br />

quantité de calcium excrétée dans l’urine.<br />

Il existe donc :<br />

un système régulé, représenté par la calcémie ionisée, et dont<br />

la stabilité dépend de l’équilibre entre les débits d’entrée et de<br />

sortie du calcium dans le LEC ;<br />

un système de stockage représenté par le squelette, où l’organisme<br />

va puiser du calcium quand la calcémie ionisée<br />

diminue ;<br />

un système régulateur, représenté par : les hormones calciotropes,<br />

PTH et calcitriol (1,25-dihydroxyvitamine D 3), qui corrige<br />

les variations de la calcémie ionisée détectées par une<br />

protéine à sept fragments transmembranaires et le récepteur<br />

sensible au calcium (CaSR), présent à la surface des cellules<br />

parathyroïdiennes et d’autres tissus dont le rein [1] .<br />

La phosphatémie est également très régulée, mais dans des<br />

limites plus larges que celles de la calcémie. C’est le rein qui,<br />

chez l’adulte, est prépondérant pour le maintien de la phosphatémie<br />

et du bilan du phosphate. Il est fort probable que des<br />

protéines appelées phosphatonines, dont la plus connue est le<br />

FGF23, interviennent dans la régulation de la phosphatémie en<br />

Diminution de la calcémie ionisée<br />

Inactivation du récepteur sensible au calcium<br />

Sécrétion de PTH 1-84<br />

Libération<br />

de calcium de l’os<br />

Normalisation<br />

de la calcémie<br />

ionisée<br />

Stimulation<br />

de la sécrétion<br />

de calcitriol<br />

Augmentation de<br />

l'absorption intestinale<br />

de calcium<br />

Figure 1. Représentation schématique de la régulation de la calcémie et de la phosphatémie par les hormones calciotropes. PTH : parathormone.<br />

diminuant la réabsorption tubulaire proximale des phosphates<br />

et en inhibant la synthèse de calcitriol. Les phosphatonines ont<br />

été identifiées comme les agents responsables de certaines<br />

ostéomalacies/rachitismes hypophosphatémiques. Il reste<br />

cependant aujourd’hui à démontrer le niveau exact d’intervention<br />

des phosphatonines en physiologie dans le maintien de la<br />

phosphatémie (par exemple, vitesse de variation de leur sécrétion<br />

ou de leur action quand la phosphatémie s’élève ou<br />

diminue).<br />

La Figure 1 propose une représentation schématique de la<br />

régulation de la calcémie et de la phosphatémie par les hormones<br />

calciotropes.<br />

Parathormone (PTH) (Fig. 2)<br />

Les cellules parathyroïdiennes synthétisent continuellement la<br />

PTH, une protéine de 84 acides aminés, et la stockent dans des<br />

vésicules. Lorsque la calcémie ionisée s’élève, le CaSR est activé,<br />

ce qui induit la dégradation de la PTH dans les vésicules de<br />

stockage et la sécrétion par les parathyroïdes de fragments<br />

inactifs de PTH, ne contenant pas les acides aminés de la partie<br />

N-terminale de la PTH. Au contraire, la baisse de la calcémie<br />

ionisée entraîne une inactivation du CaSR et une stimulation de<br />

la sécrétion de PTH intacte, ce qui va permettre une normalisation<br />

de la calcémie ionisée. Il peut exister des mutations du<br />

gène du CaSR responsables d’hypocalcémie avec hypercalciurie<br />

lorsqu’elles sont activatrices [2] , et du syndrome d’hypercalcémiehypocalciurie<br />

familiale ou d’hyperparathyroïdies néonatales<br />

lorsqu’elles sont inactivatrices [3] . Le CaSR est la cible de<br />

médicaments, les calcimimétiques, utilisés fréquemment chez les<br />

insuffisants rénaux pour contrôler la sécrétion de PTH [1] . Sans<br />

qu’on en connaisse le mécanisme, une hyperphosphatémie<br />

stimule également la sécrétion de PTH [4] . La PTH, qui est la<br />

principale hormone hypercalcémiante, est aussi hypophosphatémiante.<br />

Elle agit par différents mécanismes en se liant, via les<br />

acides aminés de sa portion N-terminale, à un récepteur à sept<br />

fragments transmembranaires (PTHR1) :<br />

elle stimule la libération de calcium de l’os vers le plasma. Ce<br />

processus est très rapide, mais de faible capacité. Il intéresse<br />

le calcium « rapidement échangeable » présent sur les couches<br />

superficielles de l’os, et est probablement médié par les<br />

ostéocytes. Il est différent du remodelage osseux qui est un<br />

processus continu et de grande capacité. Dans l’os, PTHR1 est<br />

localisé sur les ostéoblastes et non sur les ostéoclastes. La PTH<br />

est catabolique pour l’os, en particulier pour l’os cortical,<br />

lorsqu’elle est présente continuellement en excès (hyperparathyroïdies).<br />

En revanche, elle stimule fortement la<br />

2 Néphrologie


↑<br />

Calcémie<br />

(CaSR parathyroïdiens)<br />

Résorption osseuse<br />

↑<br />

↑<br />

↑<br />

Os<br />

Calcémie<br />

Phosphatémie<br />

formation osseuse lorsqu’elle est injectée une fois par jour et<br />

cette propriété est utilisée maintenant en clinique pour le<br />

traitement de certaines ostéoporoses sévères [5] ;<br />

elle augmente la réabsorption rénale du calcium principalement<br />

au niveau du tubule contourné distal. Ce processus, qui<br />

réduit l’excrétion fractionnelle du calcium, concerne 5%à<br />

15 % de la quantité de calcium filtrée par le glomérule ;<br />

elle diminue la réabsorption rénale des phosphates (ce qui<br />

diminue la phosphatémie et augmente la phosphaturie) en<br />

inhibant l’expression, au niveau de la membrane apicale des<br />

cellules du tubule proximal, du cotransporteur sodium/<br />

phosphate NPT2a ;<br />

enfin, toujours au niveau des cellules du tubule proximal, elle<br />

stimule la synthèse et l’activité de la 1-a-hydroxylase, qui<br />

catalyse la transformation de la 25-hydroxyvitamine D<br />

(25OHD) en 1,25-dihydroxyvitamine D 3 ou calcitriol.<br />

La PTH partage son récepteur avec une autre protéine,<br />

appelée PTH related protein (PTHrP) ou substance PTH-like.<br />

Celle-ci n’a en commun avec la PTH que huit acides aminés<br />

situés dans la portion N-terminale. La PTHrP a été identifiée<br />

comme le facteur responsable des hypercalcémies malignes<br />

(différentes des hypercalcémies dues à des métastases osseuses)<br />

[6] . Dans ces situations, la tumeur sécrète de la PTHrP, qui<br />

interagit avec PTHR1 et induit les mêmes effets biochimiques<br />

que la PTH : hypercalcémie et hypophosphatémie. L’hypercalcémie<br />

induite est détectée par le CaSR et inhibe alors la<br />

sécrétion de PTH.<br />

↑<br />

↓<br />

↑ ↑<br />

↑<br />

↑<br />

1-α-hydroxylase<br />

24-hydroxylase Internalisation de NPT2a<br />

↑<br />

–<br />

Calcitriolémie Excrétion urinaire de P<br />

Absorption digestive<br />

de P et Ca<br />

Calcémie<br />

Phosphatémie<br />

Phosphatémie (indépendamment<br />

des variations de Ca extracellulaire ?)<br />

↓<br />

–<br />

PTH<br />

Tubule proximal<br />

↑<br />

Phosphatémie<br />

(évite l’augmentation du produit<br />

phosphocalcique sanguin,<br />

donc les calcifications extraosseuses)<br />

↓<br />

–<br />

Vitamine D (Fig. 3)<br />

Calcitriol et 25OHD<br />

(VDR parathyroïdiens<br />

et 1-α-hydroxylase locale)<br />

↑<br />

↑<br />

Tubule distal<br />

Réabsorption de Ca<br />

↑<br />

Calcémie<br />

Figure 2. Principaux déterminants de la régulation de la parathormone (PTH) et principales actions de la PTH. La sécrétion de PTH est inhibée par une<br />

augmentation de la calcémie ionisée, via la liaison du calcium ionisé extracellulaire au récepteur sensible au calcium (CaSR) des cellules parathyroïdiennes ; par<br />

le calcitriol, par l’intermédiaire de son action sur les VDR parathyroïdiens ; par la 25-hydroxyvitamine D (25OHD) convertie localement en calcitriol grâce à la<br />

présence d’une 1-a-hydroxylase locale et par une diminution de la phosphatémie. Le rôle des variations de la phosphatémie sur la sécrétion de PTH est difficile<br />

à établir, compte tenu des variations concomitantes inéluctables de la concentration de calcium du milieu. La PTH agit principalement sur trois organes cibles :<br />

sur l’os, sur le rein et, indirectement, sur le tube digestif. Elle stimule la résorption osseuse, donc le relargage de calcium et de phosphate à partir de l’os. Elle<br />

stimule la réabsorption tubulaire distale de calcium et inhibe la réabsorption tubulaire proximale de phosphate. Enfin, elle favorise indirectement l’absorption<br />

digestive de calcium et de phosphate par l’intermédiaire de la stimulation de la 1-a-hydroxylase tubulaire proximale, donc de la synthèse de calcitriol par le rein.<br />

Par ces différents mécanismes, la PTH est une hormone essentiellement hypercalcémiante. Une vision physiologique finaliste pourrait consister à penser que<br />

la baisse de la phosphatémie induite par la diminution de la réabsorption tubulaire proximale du phosphate sous l’effet de la PTH a pour but de contrebalancer<br />

l’augmentation de la phosphatémie induite par la résorption osseuse et l’augmentation de l’absorption digestive de phosphate sous l’effet de cette même<br />

hormone. En effet, l’augmentation simultanée de la calcémie et de la phosphatémie s’accompagnerait d’une augmentation du produit phosphocalcique<br />

sanguin, donc d’un risque de calcifications extraosseuses. P : phosphate ; VDR : récepteur de la vitamine D.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

“ Point important<br />

Les variations de la calcémie ionisée sont détectées par le<br />

récepteur sensible au calcium présent à la surface des<br />

cellules parathyroïdiennes. Si la calcémie ionisée diminue,<br />

même très modestement, les parathyroïdes secrètent de la<br />

PTH dont le rôle est de faire monter la calcémie ionisée et<br />

de baisser la phosphatémie.<br />

La vitamine D joue un rôle majeur dans la croissance et la<br />

minéralisation osseuses. Le terme vitamine est inapproprié pour<br />

la vitamine D qui doit être plutôt considérée comme une<br />

prohormone. En effet, la peau peut la synthétiser à partir du<br />

7-déhydrocholestérol sous l’effet de certains rayonnements<br />

ultraviolets B (UVB) (longueur d’onde entre 290 et 315 nm) [7] .<br />

Qu’elle soit synthétisée par la peau (uniquement vitamine D 3)<br />

ou apportée par l’alimentation (principalement vitamine D 3)ou<br />

la supplémentation médicamenteuse (vitamine D 2 ou D 3), la<br />

vitamine D est transportée dans le sang par une protéine<br />

porteuse, la vitamin D binding protein (vitamine D-BP), jusqu’au<br />

foie où elle est hydroxylée en position 25 pour former la<br />

25-hydroxyvitamine D (25OHD). Cette hydroxylation n’est pas<br />

3


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

PTH<br />

25OHD<br />

Sources alimentaires<br />

25 hydroxylase hépatique<br />

1-α-hydroxylase rénale<br />

Phosphatémie<br />

Apports calciques<br />

1-α-hydroxylase<br />

VDR<br />

Calcitriol<br />

7-déhydrocholestérol<br />

Prévitamine D3<br />

Vitamine D3<br />

25(OH) vitamine D3<br />

régulée, c’est-à-dire que plus les quantités de vitamine D<br />

synthétisée ou ingérée sont importantes, plus la quantité de<br />

25OHD formée est grande. La 25OHD est ensuite relarguée dans<br />

le sang où elle circule avec une demi-vie de l’ordre de 3 semaines.<br />

Dans le tubule proximal, une protéine membranaire, la<br />

mégaline [8] , transporte le complexe 25OHD-vitD-BP à l’intérieur<br />

de la cellule où une enzyme, la 1-a-hydroxylase (CYP27B1),<br />

permet l’hydroxylation de la 25OHD en position 1 pour former<br />

la 1,25-dihydroxyvitamine D (1,25[OH] 2D ou calcitriol). Cette<br />

hydroxylation rénale est régulée et est stimulée principalement<br />

par la PTH, par une hypophosphatémie ou par de faibles<br />

apports alimentaires en calcium. Dans certaines pathologies<br />

comme les granulomatoses (sarcoïdose en particulier), cette<br />

hydroxylation n’est pas régulée, et les macrophages produisent<br />

et sécrètent de la 1,25(OH) 2D qui peut être responsable d’une<br />

hypercalcémie et d’une hypercalciurie. La 1,25(OH) 2D est le<br />

métabolite actif de la vitamine D, et sa demi-vie dans le sérum<br />

est de 4 heures environ. Elle agit via un récepteur cytosolique,<br />

le VDR, présent dans de nombreux tissus. Le rôle le plus<br />

important (et le mieux connu) de la 1,25(OH) 2D est le maintien<br />

UVB<br />

Épiderme<br />

24OHase rénale<br />

1,25(OH)2 vitamine D3<br />

= calcitriol<br />

Actions autocrines et paracrines<br />

Synthèse de protéines<br />

VDRE<br />

RXR<br />

Cellules du muscle, côlon, prostate, sein, système<br />

immunitaire, pancréas, etc.<br />

VDR<br />

Absorption digestive<br />

de Ca et P<br />

Réabsorption rénale<br />

de Ca<br />

Résorption osseuse<br />

Sécrétion de PTH<br />

Sécrétion de FGF23<br />

Actions endocrines<br />

Synthèse de protéines<br />

VDRE<br />

RXR<br />

Organes cibles :<br />

tube digestif, rein, os, parathyroïdes<br />

Prolifération<br />

Différenciation<br />

Apoptose<br />

Angiogenèse<br />

Insuline<br />

Rénine<br />

Fonction endothéliale<br />

Immunité innée<br />

Immunité acquise<br />

Figure 3. Différentes étapes de synthèse du calcitriol, facteurs régulant la 1-a-hydroxylase rénale et actions endocrines phosphocalciques et<br />

autocrines/paracrines non phosphocalciques du calcitriol. La vitamine D 3 provient essentiellement (pour 90 %) de la conversion cutanée du<br />

7-déhydrocholestérol sous l’action des ultraviolets B (UVB). Les sources alimentaires de vitamine D 3 (et D 2) sont minoritaires (10 %). La vitamine D 3 subit une<br />

première hydroxylation sur le carbone 25 sous l’effet de la 25-hydroxylase hépatique (étape non régulée). La 25OHD subit ensuite une deuxième hydroxylation<br />

sur le carbone 1 sous l’effet des 1-a-hydroxylases – la 1-a-hydroxylase rénale et celles exprimées localement dans les tissus autres que le rein – et est ainsi<br />

convertie en calcitriol, forme active de la vitamine D. L’activité de la 1-a-hydroxylase rénale est stimulée principalement par la parathormone (PTH), la baisse<br />

de la calcitriolémie, de faibles apports alimentaires en calcium ou l’hypophosphatémie. La 24-hydroxylase (24OHase) rénale transforme la 25OHD et le<br />

calcitriol en métabolites inactifs, hydroxylés en position 24. Le calcitriol se lie à des récepteurs VDR intracellulaires qui s’associent eux-mêmes à des récepteurs<br />

de l’acide rétinoïque RXR. Le complexe calcitriol/VDR/RXR se lie à des VDRE et module ainsi l’expression de nombreux gènes. Il est admis que le calcitriol produit<br />

par le rein a une action endocrine phosphocalcique alors que le calcitriol issu de la conversion locale extrarénale de la 25OHD a des actions autocrines et<br />

paracrines et des effets non phosphocalciques. VDR : récepteur de la vitamine D ; VDRE : éléments de réponse à la vitamine D ; FGF23 : fibroblast growth factor<br />

23 ; Ca : calcium ; P : phosphate.<br />

de l’homéostasie phosphocalcique par augmentation de<br />

l’absorption intestinale du calcium et du phosphate, permettant<br />

ainsi un environnement phosphocalcique favorable à la minéralisation<br />

osseuse. Un déficit profond en vitamine D peut ainsi<br />

avoir pour conséquence des pathologies osseuses caractérisées<br />

par un défaut de minéralisation : rachitisme chez l’enfant et<br />

ostéomalacie chez l’adulte. Il est toutefois bien démontré que de<br />

nombreux tissus expriment à la fois de la 1-a-hydroxylase et du<br />

VDR, et qu’ils sont ainsi capables de convertir la 25OHD en<br />

1,25(OH) 2D qui est alors utilisée localement. Il ne s’agit donc<br />

plus d’une action endocrine, mais d’une action autocrine ou<br />

paracrine du calcitriol. La 1,25(OH) 2D contrôle ainsi plus ou<br />

moins directement plus de 500 gènes. Cette propriété est la base<br />

des actions « non phosphocalciques » que l’on attribue actuellement<br />

à la vitamine D. Il s’agirait d’un rôle protecteur contre<br />

certains cancers [9, 10] , des maladies auto-immunes [11, 12] ,<br />

certaines infections [13] ou des pathologies cardiovasculaires [14] .<br />

Du fait de l’action de la vitamine D sur le muscle squelettique,<br />

le déficit en vitamine D est aussi associé à une augmentation du<br />

risque de chutes [15] .<br />

4 Néphrologie


Calcium, phosphate, et métabolisme osseux<br />

L’os est un tissu en perpétuel renouvellement grâce à un<br />

processus appelé remodelage osseux. Brièvement, des cellules,<br />

les ostéoclastes, détruisent l’os ancien (résorption osseuse), et<br />

d’autres cellules, les ostéoblastes, reconstruisent un os « nouveau<br />

» (formation osseuse). Le remodelage osseux est très<br />

important à intégrer dans la réflexion sur le métabolisme du<br />

calcium et du phosphate puisque lors de la résorption osseuse,<br />

calcium et phosphate sont transférés de l’os vers le plasma alors<br />

que lors de la formation osseuse, ces éléments vont du plasma<br />

vers l’os. La formation et la résorption osseuse sont deux<br />

processus étroitement couplés, c’est-à-dire que lorsque la<br />

résorption osseuse augmente, la formation osseuse augmente<br />

également. Cela n’est toutefois plus exact dans des situations<br />

particulières dites « de découplage », comme par exemple<br />

lorsqu’il existe un excès de glucocorticoïdes qui induit une<br />

diminution de l’activité ostéoblastique et une augmentation<br />

transitoire de l’activité ostéoclastique. La quantité de calcium<br />

allant sur l’os lors de la formation osseuse est donc égale à la<br />

quantité qui sort de l’os lors de la résorption. Cela n’est<br />

cependant vrai que lorsque la résorption est « équivalente » à la<br />

formation, c’est-à-dire grossièrement chez les adultes de 20 à<br />

50 ans. Dans certaines situations physiologiques (ménopause,<br />

vieillissement), ou pathologiques (hyperparathyroïdies, hyperthyroïdies,<br />

etc.), la résorption est plus importante que la<br />

formation et il existe alors un certain déséquilibre entre la<br />

quantité de calcium qui sort et celle qui entre dans l’os. Le<br />

remodelage osseux est en outre la cible des traitements de fond<br />

de l’ostéoporose qui inhibent la résorption osseuse ou stimulent<br />

la formation osseuse. Toutefois, la régulation du remodelage<br />

osseux est complexe et sa description détaillée n’est pas traitée<br />

dans cet article. Comme on l’a vu plus haut, la régulation<br />

rapide par la PTH du flux de calcium allant de l’os vers le<br />

plasma ne concerne pas le remodelage osseux, mais mobilise le<br />

calcium « rapidement échangeable » probablement par le biais<br />

d’autres cellules osseuses, les ostéocytes.<br />

Absorption intestinale du calcium<br />

et du phosphate (Fig. 4)<br />

Le calcium et le phosphate sont absorbés, principalement<br />

dans le duodénum, le jéjunum et l’iléon, selon deux processus<br />

distincts, l’un passif, l’autre actif, dont l’importance respective<br />

dépend de la quantité de calcium et de phosphate apportée par<br />

l’alimentation.<br />

Absorption intestinale du calcium<br />

Dans l’alimentation, le calcium est essentiellement apporté<br />

par les laitages et certaines eaux riches en calcium. Seule une<br />

fraction (20 %à60%)delaquantité de calcium ingérée est<br />

absorbée. L’absorption « nette » du calcium correspond à la<br />

quantité absorbée moins la quantité sécrétée par les entérocytes<br />

vers la lumière intestinale. Si les apports alimentaires sont très<br />

faibles (200 mg ou moins), l’absorption nette de calcium est<br />

négative. Si l’absorption « nette » de calcium est inférieure à la<br />

quantité de calcium éliminée par le rein, la « balance calcique »<br />

est négative. Lorsque la quantité de calcium de la diète augmente,<br />

l’absorption dépend de deux processus :<br />

un processus passif paracellulaire qui dépend du gradient de<br />

concentration et du gradient électrochimique entre la lumière<br />

intestinale et le plasma ;<br />

un processus actif transcellulaire médié par la 1,25(OH) 2D qui<br />

stimule, dans l’entérocyte, différents gènes dont les produits<br />

participent à ce transport actif [16, 17] . Une protéine, TRPV6,<br />

crée un canal calcium à la bordure en brosse luminale de la<br />

cellule intestinale. Le calcium entrant dans la cellule est alors<br />

enfermé dans des vésicules qui contiennent une protéine<br />

liant le calcium, la calbindine 9K. Ces vésicules sont déplacées<br />

vers la membrane basolatérale avec laquelle elles fusionnent.<br />

Le calcium est extrudé vers le plasma via un échangeur<br />

sodium-calcium de faible affinité, mais de forte capacité<br />

(3 ions Na + entrent dans la cellule quand un ion calcium en<br />

sort) ou par l’intermédiaire d’une Ca-ATPase de haute affinité,<br />

mais de faible capacité.<br />

Néphrologie<br />

Pôle apical<br />

ATP<br />

Ca 2+<br />

Ca 2+<br />

TRPV6<br />

Pôle basolatéral<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

Ca 2+ —CaBP 9k<br />

NCX1<br />

Processus actif<br />

transcellulaire<br />

Calcitriol<br />

Ca2+ Ca2+ Na HPO 2-<br />

4 +<br />

Na +<br />

Ce processus actif est prépondérant lorsque les apports<br />

calciques sont faibles ou dans des conditions physiologiques<br />

(croissance, grossesse, lactation) ou pathologiques (granulomatoses,<br />

hyperparathyroïdies, etc.) durant lesquelles la concentration<br />

plasmatique de 1,25(OH) 2D est élevée. Il permet<br />

d’augmenter significativement la fraction de calcium absorbé<br />

par rapport à la quantité ingérée. Au contraire, le processus<br />

passif est prépondérant lorsque les apports calciques sont élevés.<br />

Il est non saturable, c’est-à-dire que, même si les apports<br />

calciques sont élevés (comme dans le syndrome dit « des<br />

buveurs de lait » ou milk alkali syndrom), une fraction (5 % à<br />

10 %) de la quantité de calcium de la diète est absorbée,<br />

pouvant ainsi être responsable d’une hypercalcémie.<br />

Absorption intestinale du phosphate<br />

Le phosphate est présent dans la majorité des aliments et les<br />

apports alimentaires sont généralement compris entre 25 et<br />

“ Point important<br />

NPT2b<br />

HPO 4 2-<br />

Les principales sources alimentaires de calcium sont les<br />

laitages et les eaux riches en calcium. Les apports<br />

nutritionnels conseillés (ANC) sont de l’ordre de 1 000 à<br />

1 200 mg/j, mais sont variables en fonction de l’âge et du<br />

sexe.<br />

• Enfant : 800 mg/j.<br />

• Adolescent : 1 200 mg/j.<br />

• Femme enceinte : 1 200 mg/j.<br />

• Adulte de moins de 50 ans : 1 000 mg/j.<br />

• Femme ménopausée : 1 200 à 1 500 mg/j.<br />

• Homme de plus de 65 ans : 1 200 mg/j.<br />

K +<br />

Processus passif<br />

paracellulaire<br />

Na +<br />

Figure 4. Schéma de l’absorption digestive du calcium et du phosphate.<br />

La cellule représentée est un entérocyte. L’absorption intestinale du<br />

calcium s’effectue par voie passive, paracellulaire (flèche en pointillés<br />

rouges) et par voie active transcellulaire par l’intermédiaire du canal<br />

calcium TRPV6 (cylindre rouge), exprimé au niveau de la bordure en<br />

brosse luminale de la cellule intestinale. Le calcium entrant dans la cellule<br />

se lie à une protéine liant le calcium, la calbindine 9K (CaBP 9k), qui<br />

transporte le calcium vers le pôle basolatéral des entérocytes. Le calcium<br />

est extrudé vers le plasma via un échangeur sodium/calcium NCX1 (rond<br />

orange) ou via une Ca-adénosine triphosphatase (ATPase) (rond jaune).<br />

L’absorption intestinale du phosphate s’effectue par voie passive, paracellulaire<br />

(flèche en pointillés bleus) et par voie active transcellulaire par<br />

l’intermédiaire du cotransporteur sodium/phosphate NPT2b (rond bleu).<br />

Le calcitriol stimule l’expression de TRPV6 et celle de la calbindine 9K,<br />

donc l’absorption digestive transcellulaire du calcium. Le calcitriol stimule<br />

aussi l’expression de NPT2b à la bordure en brosse de l’entérocyte, donc<br />

l’absorption digestive transcellulaire du phosphate.<br />

5


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

60 mmol/j. Dans ces conditions, 60 %à80%duphosphate<br />

alimentaire est absorbé. Si toutefois ces apports sont inférieurs<br />

à 10 mmol/j, une sécrétion nette de phosphate de l’entérocyte<br />

vers la lumière intestinale existe. Comme pour le calcium,<br />

l’absorption intestinale du phosphate se fait par un processus<br />

passif non saturable, prépondérant quand les apports de phosphate<br />

sont normaux, et par un processus actif saturable (lorsque<br />

la concentration de phosphate intraluminale est inférieure à<br />

1 mmol/l environ), impliquant un cotransporteur sodium/<br />

phosphate, NPT2b [18] , dont l’expression à la membrane apicale<br />

des entérocytes est stimulée par la 1,25(OH) 2D et des apports<br />

faibles en phosphate.<br />

Homéostasie rénale du calcium<br />

et du phosphate<br />

Régulation rénale de l’homéostasie du calcium<br />

Chaque jour, environ 250 mmol (10 g) de calcium (il s’agit<br />

de la fraction dite « ultrafiltrable » présente dans le plasma) sont<br />

filtrés et 98 % du calcium filtré est ensuite réabsorbé le long du<br />

tubule rénal afin de maintenir la balance calcique.<br />

Environ 70 % du calcium filtré est réabsorbé de façon passive<br />

et par voie paracellulaire au niveau du tubule proximal,<br />

parallèlement à la réabsorption du sodium.<br />

Approximativement 20 % du calcium filtré est réabsorbé au<br />

niveau de la branche ascendante large de l’anse de Henle,<br />

également par voie paracellulaire du fait d’une électropositivité<br />

luminale. L’énergie requise pour l’ensemble de ce processus est<br />

fournie par l’activité de la Na/K-ATPase basolatérale. La perméabilité<br />

de la voie paracellulaire au calcium (et au magnésium)<br />

dépend de la présence d’une protéine canal de la jonction serrée<br />

intercellulaire, la paracelline 1 (ou claudin-16) [19, 20] . À noter<br />

que l’inhibition par les diurétiques de l’anse (furosémide) du<br />

cotransporteur NKCC2, responsable de la réabsorption du<br />

chlorure de sodium (NaCl), conduit à une diminution de<br />

l’électropositivité luminale, donc à une diminution de la<br />

réabsorption de calcium par la branche ascendante large de<br />

l’anse de Henle, et donc à une hypercalciurie (Fig. 5).<br />

Le tubule distal réabsorbe environ 8 % du calcium filtré et est<br />

le siège d’une régulation physiologique très fine de l’excrétion<br />

urinaire de calcium. La réabsorption du calcium n’y est pas<br />

couplée à celle du sodium et se fait par voie transcellulaire en<br />

trois étapes : le calcium entre dans la cellule par un canal<br />

calcium, TRPV5 (transient receptor potential channel vanilloid<br />

subtype 5), puis est transféré à travers le cytosol jusqu’à la<br />

membrane basolatérale par la calbindin-D28K, pour finalement<br />

être extrudé hors de la cellule vers l’interstitium par l’échangeur<br />

Na + -Ca + (NCX1) et la Ca + -ATPase membranaire (PMCA1b) [21]<br />

(Fig. 6).<br />

La régulation de la réabsorption du calcium par le rein est<br />

cruciale pour maintenir l’homéostasie calcique. De nombreux<br />

facteurs participent à cette régulation, TRPV5 en étant la cible<br />

principale.<br />

La PTH agit sur le néphron à plusieurs niveaux. Elle réduit le<br />

débit de filtration glomérulaire et donc la charge filtrée de<br />

calcium. Elle est également le principal régulateur de la<br />

réabsorption tubulaire du calcium : la PTH stimule la réabsorption<br />

du calcium au niveau de la branche ascendante large<br />

de Henle et du tubule distal où elle augmente l’abondance de<br />

TRPV5 [22, 23] . La PTH-related protein (rP) a les mêmes effets<br />

que la PTH le long du néphron.<br />

Le calcitriol semble stimuler également la réabsorption<br />

tubulaire de calcium. Il a été montré que, lors d’un déficit en<br />

vitamine D, la réabsorption tubulaire de calcium est diminuée,<br />

indépendamment du niveau de PTH. De plus, il a été<br />

mis en évidence des éléments de réponse à la vitamine D<br />

(VDRE) au niveau de la région promotrice du gène de<br />

TRPV5 [24, 25] , ainsi qu’une augmentation de l’abondance de<br />

l’acide ribonucléique messager (ARNm) de TRPV5 et de son<br />

expression protéique sous l’effet du calcitriol [24] .<br />

Les estrogènes participent à l’homéostasie calcique. La carence<br />

en estrogène postménopausique s’associe à une perte de<br />

calcium qui peut être corrigée par le traitement hormonal<br />

Paracelline 1<br />

Ca 2+<br />

Mg 2+<br />

Na +<br />

K +<br />

K +<br />

Ca 2+<br />

ROMK<br />

Ca 2+<br />

substitutif [26, 27] . De plus, il existe des récepteurs aux<br />

estrogènes dans le néphron distal. Des données montrent que<br />

les estrogènes y stimulent l’expression de TRPV5, indépendamment<br />

de la calcitriolémie [28] .<br />

Le calcium extracellulaire module la réabsorption du calcium<br />

par l’intermédiaire du Ca-sensing receptor (SR). Ce dernier est<br />

exprimé dans quasiment tous les segments du néphron, mais<br />

son expression est la plus intense au pôle basolatéral des<br />

cellules de la branche ascendante large de l’anse de Henle. En<br />

cas d’hypercalcémie, le CaSR est stimulé, ce qui diminue la<br />

réaborption de calcium dans ce segment du tubule [29] .<br />

Certains patients présentant des mutations activatrices du<br />

CaSR ont un phénotype de syndrome de Bartter, ce qui<br />

suggère que la stimulation du CaSR peut induire une diminution<br />

combinée de la réabsorption de NaCl et de calcium<br />

dans la branche ascendante large de l’anse de Henle [30] .<br />

L’augmentation du volume extracellulaire (VEC) diminue la<br />

réabsorption tubulaire proximale de calcium, qui suit celle du<br />

NaCl dans cette partie du tubule. La diminution du VEC a<br />

l’effet inverse. Il a été montré récemment que l’effet hypocalciuriant<br />

des diurétiques thiazidiques était dû, au moins en<br />

partie, à une augmentation de la réabsorption tubulaire<br />

proximale de calcium du fait de l’hypovolémie induite par la<br />

perte de sel tubulaire distale sous l’effet du traitement<br />

(inhibition du cotransporteur sodium/chlore apical tubulaire<br />

distal) [31] et non pas à une action indirecte des thiazidiques<br />

sur TRPV5. En effet, les souris TRPV5 -/- traitées par un<br />

diurétique thiazidique présentent, en réponse à la contraction<br />

de leur volume extracellulaire, une augmentation de la<br />

réabsorption tubulaire proximale de sodium et, indirectement,<br />

de la réabsorption passive paracellulaire de calcium, ce<br />

qui réduit leur calciurie [32] .<br />

La protéine klotho est exprimée principalement dans le tube<br />

contourné distal rénal et, dans une moindre mesure, dans les<br />

glandes parathyroïdes et le plexus choroïde cérébral [33, 34] .Le<br />

Cl -<br />

Na-K-2CI<br />

AMPc<br />

PTH<br />

Pôle apical<br />

NKCC2<br />

Pôle basolatéral<br />

Figure 5. Représentation schématique de la réabsorption du calcium au<br />

niveau de la branche ascendante large de Henle. La cellule représentée est<br />

une cellule de la branche ascendante large de Henle (BAL). À ce niveau,<br />

approximativement 20 % du calcium filtré est réabsorbé par voie paracellulaire,<br />

du fait d’une électropositivité luminale. Cette électropositivité<br />

luminale nécessite le fonctionnement du cotransporteur Na-K-2Cl<br />

(NKCC2, en orange) et le recyclage du potassium (K) absorbé par<br />

NKCC2 dans la lumière du tubule grâce à ROMK (cylindre bleu). La<br />

perméabilité de la voie paracellulaire au calcium dépend de la présence<br />

d’une protéine canal de la jonction serrée intercellulaire, la paracelline 1<br />

(ou claudin-16, rond vert). Au niveau de la BAL, la réabsorption tubulaire<br />

du Ca est stimulée par la parathormone (PTH) et la baisse de la calcémie<br />

ionisée, captée par le récepteur sensible au calcium (CaSR) exprimé au<br />

pôle basolatéral (en rouge). À l’inverse, lorsque la calcémie ionisée augmente,<br />

l’activation du CaSR induit une inhibition de ROMK, donc une<br />

diminution de l’électropositivité luminale qui conduit à une diminution de<br />

la réabsorption de calcium et à une augmentation de la calciurie. AMPc :<br />

acide adénosine monophosphorique cyclique.<br />

6 Néphrologie


Na + Cl - Ca 2+<br />

Na +<br />

K +<br />

TRPV5<br />

Ca 2+ -CaBP 28k<br />

ATP<br />

Ca 2+<br />

Ca 2+<br />

NCX1<br />

Calcitriol<br />

Na +<br />

Pôle apical<br />

PTH<br />

Pôle basolatéral<br />

Figure 6. Représentation schématique de la réabsorption du calcium au<br />

niveau du tubule distal. La cellule représentée est une cellule tubulaire<br />

distale. Le tubule distal réabsorbe environ 8%ducalcium filtré. À ce<br />

niveau, la réabsorption du calcium est finement régulée et n’est pas<br />

couplée à celle du sodium. Elle s’effectue par voie transcellulaire en trois<br />

étapes : le calcium entre dans la cellule par un canal calcium, TRPV5<br />

(cylindre rouge), puis il est transféré à travers le cytosol jusqu’à la membrane<br />

basolatérale par la calbindine-D 28K (CaBP28k) pour finalement<br />

être extrudé hors de la cellule vers l’interstitium par l’échangeur<br />

sodium/calcium NCX1 (rond orange) et la Ca + -ATPase PMCA1b (rond<br />

jaune). Au niveau du tubule distal, le calcitriol stimule l’expression de<br />

TRPV5, de la calbindine-D 28K et de NCX1, ce qui favorise la réabsorption<br />

du calcium. La parathormone (PTH) favorise également la réabsorption de<br />

calcium dans le tubule distal en stimulant l’abondance de TRPV5 à la<br />

membrane apicale et celle de NCX1 à la membrane basolatérale. ATP :<br />

adénosine triphosphate ; TRPV5 : transient receptor potential channel vanilloid<br />

subtype 5.<br />

gène klotho, découvert en 1997, code pour une protéine<br />

transmembranaire, dont une partie peut également être<br />

sécrétée. Les souris invalidées pour klotho présentent un<br />

phénotype de vieillissement accéléré [33] , alors qu’une surexpression<br />

de klotho conduit à une augmentation significative<br />

de la durée de vie des souris et à une suppression des symptômes<br />

liés au vieillissement [35] . De nombreux arguments<br />

semblent impliquer klotho dans la régulation de l’homéostasie<br />

phosphocalcique et dans la réabsorption tubulaire du<br />

calcium en particulier. Il a été montré récemment que<br />

l’activité b-glucuronidase de la protéine klotho était responsable<br />

d’une augmentation de l’expression membranaire de<br />

TRPV5. Ainsi, la modification de la glycosylation de<br />

TRPV5 par klotho module l’adressage membranaire apical du<br />

canal calcium, donc la réabsorption distale de calcium [36] .<br />

La kallikréine tissulaire est l’enzyme principale permettant la<br />

formation de kinine et est produite dans le néphron distal où<br />

elle colocalise avec TRPV5. Les souris invalidées pour la<br />

kallikréine développent une hypercalciurie marquée, secondaire<br />

à la diminution de la réabsorption rénale de calcium<br />

[37] . Il a été montré par la suite que la kallikréine<br />

tissulaire stimulait l’activité de TRPV5 par l’intermédiaire de<br />

l’activation du récepteur à la bradykinine de type 2. L’activation<br />

de ce récepteur, soit directement par la kallikréine, soit<br />

indirectement par l’intermédiaire de la libération de bradykinine,<br />

conduit à la phosphorylation dépendante de la PKC<br />

(protéine kinase C) de TRPV5 [38] . La phosphorylation de<br />

TRPV5 permet au final sa stabilisation à la membrane apicale,<br />

donc l’augmentation de la réabsorption tubulaire distale de<br />

calcium.<br />

L’excrétion urinaire de calcium augmente avec l’acidose et<br />

diminue avec l’alcalose. Le pH extracellulaire module l’activité<br />

et le recrutement à la membrane apicale de TRPV5 selon un<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

mécanisme non connu aujourd’hui : l’alcalinisation du milieu<br />

extracellulaire induit un recrutement rapide à la membrane<br />

des vésicules contenant TRPV5, alors que l’acidification<br />

stimule le retrait de TRPV5 de la membrane plasmique [39] .<br />

TRPV5 est lié à de nombreuses protéines cytoplasmiques,<br />

susceptibles de réguler son activité, telles que la protéine<br />

80K-H, ou de moduler son adressage à la membrane apicale,<br />

comme le complexe protéique S100A10-annexine 2 ou<br />

NHERF2, qui est une protéine à domaine PDZ liant les trois<br />

derniers acides aminés C-terminaux de TRPV5 [40] .<br />

Plus récemment, il a été mis en évidence un rôle possible de<br />

la WNK (with no lysine [K]) kinase 4 dans l’adressage membranaire<br />

de TRPV5. En effet, l’hypertension artérielle familiale<br />

avec hyperkaliémie due à des mutations de la WNK kinase<br />

4 s’accompagne d’une hypercalciurie. De plus, il a été montré<br />

in vitro que la WNK kinase 4 stimulait l’expression membranaire<br />

de TRPV5 et le transport de calcium dépendant de ce<br />

dernier [41] .<br />

La magnésémie participe à la régulation de la réabsorption<br />

rénale du calcium de façon directe. En effet, il a été montré<br />

chez le rat parathyroïdectomisé que la réplétion en magnésium<br />

inhibait la réabsorption de calcium au niveau de la<br />

branche ascendante large de Henle [42] . Il se pourrait que cet<br />

effet passe par la liaison du magnésium extracellulaire au<br />

récepteur sensible au calcium. La magnésémie pourrait aussi<br />

réguler la réabsorption rénale du calcium de façon indirecte,<br />

par l’intermédiaire de la modulation de la sécrétion de PTH.<br />

En effet, les hypomagnésémies sévères conduisent à une<br />

inhibition de la sécrétion de PTH [43] , donc possiblement à<br />

une diminution de la réabsorption rénale de calcium.<br />

Régulation rénale de l’homéostasie du phosphate<br />

Le rein joue un rôle déterminant dans la régulation de<br />

l’homéostasie du phosphate en raison de sa capacité à augmenter<br />

ou à diminuer la réabsorption tubulaire du phosphate en<br />

fonction des besoins de l’organisme. L’excrétion urinaire de<br />

phosphate est comprise entre 25 et 33 mmol/j (750 à<br />

1 000 mg). Environ 85 % de la réabsorption du phosphate a lieu<br />

dans le tube contourné proximal et moins de 10 % est réabsorbé<br />

dans les segments tubulaires plus distaux. L’étape limitante<br />

de la réabsorption rénale du phosphate se situe au niveau<br />

du pôle apical des cellules tubulaires proximales qui sont le<br />

siège d’un cotransport sodium/phosphate. Ce cotransport<br />

sodium/phosphate est secondairement actif puisqu’il dépend de<br />

l’activité de la Na + /K + -ATPase membranaire basolatérale qui<br />

maintient en permanence un gradient de sodium (avec une<br />

concentration de sodium extracellulaire supérieure à la concentration<br />

de sodium intracellulaire). Une augmentation progressive<br />

de la charge de phosphate filtré induit une augmentation<br />

de la réabsorption de phosphate jusqu’à ce qu’un seuil maximal<br />

de réabsorption tubulaire du phosphate (TmP) soit atteint.<br />

Au-delà de ce seuil, l’excrétion urinaire du phosphate augmente<br />

de façon proportionnelle à la quantité de phosphate filtré. Il<br />

existe des variations inter- et intra-individuelles du TmP, en<br />

partie dues aux variations du débit de filtration glomérulaire<br />

(DFG). Ainsi, le ratio TmP/DFG représente la capacité maximale<br />

de réabsorption tubulaire du phosphate par unité de débit de<br />

filtration glomérulaire (DFG). Le TmP/DFG est la meilleure<br />

estimation de la capacité globale du rein à réabsorber le<br />

phosphate et détermine la concentration sérique de phosphate<br />

à jeun [44] .<br />

Au niveau de la bordure en brosse des cellules tubulaires<br />

proximales, quatre cotransporteurs sodium/phosphate ont été<br />

identifiés et permettent le transport du phosphate de la lumière<br />

tubulaire vers le compartiment intracellulaire (Fig. 7).<br />

Le cotransporteur sodium/phosphate de type IIa (NPT2a,<br />

SLC34A1) est le principal déterminant du TmP/DFG. Les<br />

souris invalidées pour NPT2a présentent une diminution<br />

d’environ 80 % du transport tubulaire de phosphate dépendant<br />

du sodium [45] , une hypophosphatémie et une hypercalcitriolémie<br />

réactionnelle induisant une hypercalciurie<br />

d’origine absorptive et des calcifications rénales [46] . L’apport<br />

de phosphate dans l’alimentation ou l’invalidation du gène<br />

7


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

P<br />

de la 1-a-hydroxylase permettent de réduire, de façon parallèle<br />

à la diminution de la calcitriolémie, la calciurie et les<br />

calcifications rénales [47] , ce qui atteste du rôle central joué<br />

par l’hypercalcitriolémie dans le phénotype rénal des souris<br />

NPT2a -/-. De la même façon, les patients ayant à l’état<br />

hétérozygote des mutations du gène codant pour NPT2a<br />

présentent une hypophosphatémie secondaire à une fuite<br />

rénale de phosphate et une hypercalciurie pouvant s’accompagner<br />

de lithiases rénales [48] .<br />

Le cotransporteur sodium/phosphate de type IIc (NPT2c, SLC34A3)<br />

est plus abondant dans les reins de jeunes rats que dans les<br />

reins de rats adultes, ce qui suggère un rôle potentiel de ce<br />

cotransporteur pendant la croissance, au cours de laquelle les<br />

besoins en phosphate sont accrus [49] . Des mutations à l’état<br />

homozygote du gène codant pour NPT2c ont été trouvées<br />

chez des patients atteints d’hypophosphatémie héréditaire<br />

avec hypercalciurie (HHRH) [50, 51] . Chez la souris, l’expression<br />

de NPT2c est augmentée en réponse à l’invalidation de<br />

NPT2a, ce qui ne permet cependant pas de restaurer une<br />

réabsorption normale de phosphate [52] .<br />

Le cotransporteur sodium/phosphate de type 1 (NPT1, SLC17A1)<br />

ne transporte pas spécifiquement le phosphate puisqu’il<br />

participe au transport d’autres anions organiques et pourrait<br />

également posséder une activité canal chlore [53] . Son rôle<br />

exact dans la régulation de l’homéostasie du phosphate reste<br />

à préciser.<br />

Récemment, il a été mis en évidence chez le rat et la souris<br />

que Pit2 (SLC20A2), un cotransporteur sodium/phosphate de<br />

type III était également localisé à la bordure en brosse des<br />

cellules tubulaires proximales et que son expression était<br />

régulée par les apports en phosphate [54] .<br />

NPT1 Pit2 3Na + HPO4 2-<br />

NPT2a<br />

PKA<br />

AMPc<br />

NHERF1<br />

NHERF1<br />

PTHR1 FGFR<br />

?<br />

2Na + HPO4 2-<br />

NPT2c<br />

Figure 7. Réabsorption du phosphate par les cellules tubulaires proximales : cotransporteurs sodium/phosphate, régulation hormonale et implication de<br />

NHERF1. La réabsorption rénale du phosphate s’effectue essentiellement au niveau des cellules tubulaires proximales. Au niveau de la bordure en brosse des<br />

cellules tubulaires proximales sont exprimés quatre types de cotransporteurs sodium/phosphate : NPT2a qui est électrogénique puisqu’il transporte trois ions<br />

sodium Na + et un ion phosphate HPO 4 2– ; NPT2b qui est électroneutre, Pit2 et NPT1, dont la stœchiométrie n’est pas connue. NPT2a est responsable d’environ<br />

70 % de la réabsorption tubulaire proximale du phosphate et est la cible principale des deux hormones phosphaturiantes que sont la parathormone (PTH) et<br />

le FGF23. Après fixation à son récepteur PTHR1, la PTH induit, via la production d’acide adénosine monophosphorique cyclique (AMPc), un retrait de la<br />

membrane apicale de NPT2a. NHERF1 interagit directement avec NPT2a et favorise le maintien à la membrane apicale de NPT2a. NHERF1 interagit également<br />

avec PTHR1 et inhibe la production d’AMPc en réponse à la PTH et, par conséquent, l’inhibition du transport de phosphate induite par la PTH. Du fait de son<br />

interaction avec PTHR1 et NPT2a, NHERF1 favorise la réabsorption tubulaire proximale du phosphate. La spécificité pour le FGF23 du récepteur membranaire<br />

fibroblast growth factor receptor (FGFR) dépend de son association à klotho. Après liaison à son récepteur FGFR, le FGF23 induit l’internalisation de NPT2a et de<br />

NPT2c. Le fait que la forme membranaire de klotho soit exprimée uniquement dans le tubule distal, alors que l’inhibition de l’activité des cotransporteurs<br />

sodium/phosphate par le FGF23 a lieu exclusivement dans le tubule proximal, pourrait être expliqué par l’action de la forme sécrétée de klotho. FGF23 :<br />

fibroblast growth factor 23 ; NHERF1 : sodium-hydrogen regulatory factor 1 ; PKA : protéine kinase A ; P : phosphate.<br />

klotho<br />

Les mécanismes impliqués dans l’efflux de phosphate au<br />

niveau de la membrane basolatérale des cellules tubulaires ne<br />

sont pas encore élucidés.<br />

La régulation de la réabsorption rénale du phosphate dépend<br />

essentiellement de l’adressage à la membrane apicale des<br />

cotransporteurs sodium/phosphate, NPT2a principalement et<br />

NPT2c, ou du retrait de ces cotransporteurs de la membrane<br />

apicale. Une fois internalisé, NPT2a n’est pas recyclé, mais subit<br />

une dégradation lysosomale. L’abondance de NPT2a et NPT2c à<br />

la membrane apicale des cellules tubulaires proximale est<br />

régulée par plusieurs facteurs :<br />

une diète pauvre en phosphate entraîne une augmentation de<br />

l’abondance de NPT2a et du cotransport sodium/phosphate<br />

au niveau de la bordure en brosse des cellules tubulaires<br />

proximales, mais pas de modification de l’ARNm de NPT2a<br />

alors qu’un régime riche en phosphate conduit à l’internalisation<br />

de la protéine NPT2a puis à sa dégradation lysosomale<br />

[55] . Ces modifications de la réabsorption rénale du<br />

phosphate en fonction de l’apport en phosphate sont indépendantes<br />

de variations de la PTH, de la calcémie ou du<br />

volume extracellulaire ;<br />

la PTH induit l’internalisation suivie de la dégradation<br />

lysosomale de NPT2a [56] , donc une diminution de la réabsorption<br />

tubulaire de phosphate. L’action de la PTH sur<br />

l’expression membranaire de NPT2c varie en fonction des<br />

modèles animaux [57] : la PTH ne semble pas modifier<br />

l’expression membranaire de NPT2c chez les souris NPT2a -/- ;<br />

en revanche, l’administration de PTH diminue fortement<br />

l’expression à la bordure en brosse de NPT2c chez les rats<br />

parathyroïdectomisés ;<br />

8 Néphrologie


Inhibition de la 1α-hydroxylase rénale<br />

Stimulation de la 24-hydroxylase rénale<br />

Inhibition de l’absorption<br />

divestive de phosphate<br />

le FGF23 est une phosphatonine, c’est-à-dire un facteur<br />

circulant ayant un effet phosphaturiant majeur. Le FGF23 est<br />

produit majoritairement par l’os [58] et son site d’action est<br />

essentiellement rénal : inhibition de l’adressage à la membrane<br />

apicale des cellules tubulaires proximales des cotransporteurs<br />

sodium/phosphate NPT2a et NPT2c et diminution de<br />

la calcitriolémie (par inhibition de la synthèse et stimulation<br />

de la dégradation du calcitriol) (Fig. 8). Plus récemment, il a<br />

été mis en évidence, chez le rat, que le FGF23 agissait<br />

également directement sur les parathyroïdes pour diminuer la<br />

sécrétion de PTH et la transcription de son gène [59] . De plus,<br />

contrairement à son effet inhibiteur sur la 1-a-hydroxylase<br />

rénale, le FGF23 augmente de façon dose-dépendante<br />

l’expression de la 1-a-hydroxylase parathyroïdienne dans des<br />

cellules parathyroïdiennes bovines en culture, ce qui pourrait<br />

contribuer à réduire la transcription du gène de la PTH [60] .<br />

Cependant, le rôle exact du FGF23 dans la régulation de la<br />

fonction parathyroïdienne reste à préciser. La surexpression<br />

de FGF23 chez la souris induit une hypophosphatémie<br />

secondaire à une fuite urinaire de phosphate liée à une<br />

diminution de l’abondance de la protéine NPT2a au niveau<br />

de la bordure en brosse du tubule proximal [61] , alors que les<br />

souris invalidées pour FGF23 présentent une hyperphosphatémie,<br />

une élévation du TmP/DFG et une augmentation de<br />

l’abondance de NPT2a à la membrane apicale des cellules<br />

tubulaires proximales [62] . Chez des sujets volontaires sains, il<br />

a été montré une augmentation de la concentration de<br />

FGF23 sérique, indépendante de la concentration de PTH, en<br />

réponse à un régime riche en phosphate [63] . Les patients<br />

hyperphosphatémiques ont une augmentation, probablement<br />

réactionnelle, du FGF23 circulant, cependant insuffisante<br />

pour normaliser la phosphatémie [64] . L’augmentation de la<br />

concentration du FGF23 circulant peut aussi être primitive et<br />

induire des pathologies avec hypophosphatémie et baisse du<br />

TmP/DFG, à savoir les TIO (ostéomalacies induites par les<br />

tumeurs), l’ADHR (rachitisme hypophosphatémique autosomique<br />

dominant) et le XLH (rachitisme hypophosphatémique<br />

lié à l’X). À l’inverse, une diminution du FGF23 circulant<br />

ou une résistance à l’action du FGF23 est responsable de<br />

calcinose tumorale, avec hyperphosphatémie, augmentation<br />

du TmP/DFG et calcifications extraosseuses. L’ensemble de ces<br />

données cliniques et expérimentales suggère que le FGF23 est,<br />

comme la PTH, une hormone phosphaturiante. Cependant,<br />

contrairement à la PTH, le FGF23 inhibe la 1-a-hydroxylase<br />

tubulaire proximale, et donc la production de calcitriol, et<br />

stimule la 24-hydroxylase et donc la dégradation du calcitriol<br />

[65] . Cela explique l’absence d’hypercalcitriolémie, donc<br />

d’hypercalciurie spontanée observée chez les patients présentant<br />

une augmentation primitive du taux de FGF23 circulant.<br />

↑<br />

↑<br />

Calcitriolémie Apports en phosphate<br />

Phosphatémie<br />

Calcitriolémie<br />

↑<br />

↑<br />

+ +<br />

FGF23<br />

Diminution de l’expression<br />

à la membrane apicale des cellules<br />

tubulaires proximales de NPT2a<br />

et de NPT2c, donc inhibition de la<br />

réabsorption rénale de phosphate<br />

Phosphatémie<br />

Figure 8. Régulation de la production de fibroblast growth factor 23 (FGF23) et ses principales actions. La sécrétion de FGF23 est stimulée par une<br />

augmentation de la calcitriolémie, des apports en phosphate et de la phosphatémie. Le FGF23 inhibe l’expression à la membrane apicale des cellules tubulaires<br />

proximales des cotransporteurs sodium/phosphate NPT2a et NPT2c et diminue ainsi la réabsorption rénale de phosphate. Le FGF23 inhibe la 1-a-hydroxylase<br />

rénale, donc la synthèse de calcitriol, et stimule la 24-hydroxylase rénale, donc le catabolisme du calcitriol. La baisse de la calcitriolémie induite par le FGF23 a<br />

pour conséquence une diminution de l’absorption digestive du phosphate et du calcium. L’action du FGF23 sur le tube digestif est donc indirecte. Au total,<br />

le FGF23 est une hormone essentiellement hypophosphatémiante.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

↓<br />

Des travaux récents ont montré que la protéine klotho se liait<br />

au récepteur FGFR1 rénal, et permettait la conversion de ce<br />

récepteur en un récepteur spécifique au FGF23 [66, 67] . Cela<br />

explique vraisemblablement que le phénotype des souris<br />

invalidées pour klotho [68] soit très proche de celui des souris<br />

invalidées pour FGF23 (entre autres : vieillissement accéléré,<br />

calcifications vasculaires et ectopiques, anomalies de la<br />

minéralisation osseuse, augmentation de la phosphatémie et<br />

de la calcitriolémie) [69] et que, chez l’homme, des mutations<br />

de klotho puissent être responsables de calcinose tumorale<br />

familiale, tout comme les mutations inactivatrices de FGF23.<br />

De façon surprenante, dans le rein, klotho est exprimé dans le<br />

tubule distal, mais pas dans le tubule proximal [70] . Le<br />

mécanisme par lequel klotho diminue l’expression membranaire<br />

des cotransporteurs sodium/phosphate et modifie<br />

l’activité de la 1-a-hydroxylase et de la 24-hydroxylase<br />

tubulaires proximales reste à élucider. Les principales maladies<br />

génétiques responsables d’une hypophosphatémie sont<br />

détaillées dans le Tableau 1 ;<br />

les protéines à domaines PDZ ont pour fonction de lier d’autres<br />

protéines afin de faciliter, entre autres, l’interaction protéine/<br />

protéine et l’adressage membranaire de certaines protéines<br />

liées. Parmi les nombreuses protéines à domaines PDZ<br />

interagissant avec NPT2a in vitro [80] , NHERF1 (sodiumhydrogen<br />

regulatory factor 1) semble avoir une pertinence<br />

physiologique notable puisque les souris invalidées pour<br />

NHERF1 présentent, tout comme les souris NPT2a -/-, une<br />

hypophosphatémie secondaire à une fuite rénale de phosphate.<br />

Cela est dû à un défaut d’expression à la membrane<br />

apicale de NPT2a qui est retenu dans un compartiment sousmembranaire<br />

en l’absence de NHERF1 [81] . NHERF1 peut lier,<br />

grâce à ces deux domaines PDZ, NPT2a et PTHR1.<br />

NHERF1 favorise ainsi directement l’adressage membranaire<br />

de NPT2a et inhibe la production intracellulaire d’AMPc<br />

(principal second messager de la PTH) en réponse à la PTH,<br />

donc l’internalisation de NPT2a sous l’effet de la PTH. Par ces<br />

deux actions, NHERF1 stimule la réabsortion rénale du<br />

phosphate (Fig. 7) ;<br />

d’autres phosphatonines telles que secreted frizzled-related protein 4<br />

(SFRP4), MEPE et le FGF7 ont été isolées de tumeurs induisant<br />

des ostéomalacies, mais leur rôle en physiologie humaine reste<br />

à préciser [82] ;<br />

enfin, d’autres hormones participent, dans une moindre mesure,<br />

à la régulation de la réabsorption tubulaire du phosphate : la<br />

growth hormone (GH), l’insuline-like growth factor 1 (IGF1),<br />

l’insuline, le calcitriol, les hormones thyroïdiennes et la<br />

stanniocalcine stimulent la réabsorption rénale de phosphate<br />

9


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Tableau 1.<br />

Principales anomalies génétiques induisant des perturbations phosphocalciques (avec impact clinique) du métabolisme. Ces différentes situations sont classées<br />

en fonction de l’anomalie phosphocalcique principale retrouvée le plus souvent : hypo- et hyperphosphatémie.<br />

Étiologie T Chr Gène(s) Protéine(s) Mécanisme supposé Caractéristiques<br />

Hypophosphatémie<br />

Rachitisme<br />

hypophosphatémique<br />

autosomique dominant<br />

(ADHR) [71, 72]<br />

Hypophosphatémie liée à l’X<br />

(XLH) [73, 74]<br />

Rachitisme<br />

hypophosphatémique<br />

autosomique récessif<br />

(ARHR) [75]<br />

Rachitisme<br />

hypophosphatémique<br />

héréditaire avec hypercalciurie<br />

(HHRH) [50, 51]<br />

Mutations hétérozygotes<br />

dans le gène de NPT2a [48]<br />

Mutations hétérozygotes<br />

dans le gène de NHERF1 [76]<br />

Hyperphosphatémie<br />

Calcinose tumorale familiale<br />

hyperphosphatémique<br />

AD 12p13.3 FGF23 FGF23 Résistance de FGF23 au<br />

clivage enzymatique<br />

Liée à l’X Xp22.1 PHEX Endopeptidase Modification de la régulation<br />

de FGF23 (mécanisme<br />

incertain)<br />

AR 4q21 DMP1 Dentrix matrix protein 1 Défaut de maturation<br />

ostéocytaire et augmentation<br />

de l’expression de FGF23<br />

dans les ostéocytes<br />

AR 9q34 SLC34A3 NPT2c Perte de fonction du<br />

cotranspoteur NPT2c<br />

AD 5q SLC34A1 NPT2a Perte de fonction du<br />

cotransporteur NPT2a<br />

AR 17q SLC9A3R1 NHERF1 Perte de fonction de<br />

NHERF1 : augmentation<br />

de la production d’AMPc<br />

en réponse à la PTH, donc<br />

de l’effet phosphaturiant<br />

de la PTH<br />

Topaz et al. [77] AR 2q24-31 GALNT3 Glycosyltransférase Défaut de glycosylation de<br />

FGF23 (induisant un possible<br />

défaut de « processing »<br />

du FGF23)<br />

Larsson et al. [78] AR 12 FGF23 FGF23 Diminution de la sécrétion<br />

de FGF23 intact<br />

Ichikawa et al. [79] 13q12 Klotho Klotho Diminution de l’expression<br />

de klotho induisant une<br />

résistance à l’action de<br />

FGF23 sur son récepteur,<br />

fonctionnel en présence<br />

de klotho<br />

Rachitisme/ostéomalacie<br />

Déformation des membres,<br />

petite taille, douleurs<br />

osseuses<br />

Fuite rénale de P,<br />

pas d’hypercalciurie,<br />

augmentation<br />

de FGF23 circulant<br />

Rachitisme/ostéomalacie<br />

Déformation des membres,<br />

petite taille, douleurs<br />

osseuses<br />

Fuite rénale de P, pas<br />

d’hypercalciurie,<br />

augmentation de<br />

FGF23 circulant<br />

Rachitisme/ostéomalacie<br />

Fuite rénale de P,<br />

pas d’hypercalciurie,<br />

augmentation<br />

de FGF23 circulant<br />

Enfants<br />

Rachitisme, possibles<br />

lithiases/néphrocalcinose<br />

Fuite rénale de P,<br />

hypercalcitriolémie,<br />

hypercalciurie<br />

Adultes<br />

Lithiase et/ou<br />

déminéralisation osseuse<br />

Fuite rénale de P,<br />

hypercalcitriolémie, possible<br />

hypercalciurie<br />

Lithiases et/ou<br />

déminéralisation osseuse<br />

Fuite rénale de phosphate,<br />

hypercalcitriolémie,<br />

augmentation de l’AMPc<br />

urinaire<br />

Calcifications vasculaires et<br />

des tissus mous<br />

Hyperphosphatémie<br />

Calcitriolémie normale haute<br />

FGF23 C-Terminal : élevé<br />

FGF23 intact : bas<br />

Un cas<br />

Calcifications vasculaires et<br />

des tissus mous, ostéopénie<br />

Hyperphosphatémie,<br />

hypercalcémie<br />

Augmentation du FGF23<br />

(C-terminal et intact)<br />

et de la PTH sériques,<br />

hypercalcitriolémie<br />

T : mode de transmission ; Chr : localisation chromosomique ; AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; PTH : parathormone ; AMPc : acide adénosine<br />

monophosphorique cyclique ; P : phosphate ; FGF23 : fibroblast growth factor 23.<br />

10 Néphrologie


Tableau 2.<br />

Signes cliniques fréquents d’hyper- et d’hypocalcémie.<br />

Hypercalcémie Hypocalcémie<br />

Fatigue, dépression, confusion, difficulté à se concentrer, besoin accru de<br />

sommeil, faiblesse musculaire<br />

Constipation, anorexie, nausée, vomissements<br />

Polyurie, polydypsie, déshydratation, lithiase rénale, néphrocalcinose<br />

Réduction de l’intervalle QT à l’ECG, bradycardie ou arythmie<br />

ECG : électrocardiogramme.<br />

alors que le PTH-related peptide, la calcitonine, les glucocorticoïdes,<br />

le glucagon, le facteur natriurétique atrial diminuent la<br />

réabsorption rénale du phosphate.<br />

“ Point important<br />

Le FGF23 est une hormone découverte récemment qui<br />

inhibe la réabsorption rénale du phosphate et la synthèse<br />

de calcitriol. Elle agit par l’intermédiaire d’un récepteur<br />

pour lequel la présence d’une protéine nommée klotho est<br />

nécessaire. Le fait que des souris dont le gène klotho a été<br />

invalidé présentent un phénotype de vieillissement<br />

accéléré est en soi un sujet d’interrogation majeur quand à<br />

l’importance physiologique de ces protéines.<br />

Au total, le maintien de l’homéostasie phosphocalcique,<br />

assuré par les hormones calciotropes, est donc vital et peut se<br />

faire aux dépens du squelette. Une altération du métabolisme<br />

phosphocalcique peut ainsi avoir des répercussions importantes<br />

sur la masse osseuse. C’est pourquoi toute exploration d’une<br />

ostéoporose impose d’effectuer un bilan phosphocalcique pour<br />

éliminer une anomalie, en général facilement traitable. L’ostéoporose<br />

n’est toutefois pas la seule situation où un bilan phosphocalcique<br />

est prescrit systématiquement. Il faut en effet le<br />

faire devant une lithiase ou une néphrocalcinose, une malabsorption,<br />

ou une chondrocalcinose. En outre, une exploration<br />

phosphocalcique doit aussi être prescrite dans le cas de la<br />

persistance, sans explication, d’un ou de plusieurs symptômes<br />

d’hyper- ou d’hypocalcémie. On remarque que ces symptômes<br />

sont d’une grande banalité (Tableau 2).<br />

■ Aspects analytiques des dosages<br />

les plus courants. Importance<br />

pour la pratique clinique<br />

Calcémie<br />

La fourchette 2,20-2,60 mmol/l correspond à des valeurs de<br />

référence raisonnables pour la calcémie totale. Toutefois, la<br />

mesure de la calcémie totale n’est qu’une marge intermédiaire<br />

pour approcher la calcémie ionisée. S’il existe une hyper- ou<br />

une hypoalbuminémie, on peut trouver une hyper- ou une<br />

hypocalcémie alors que la calcémie ionisée est parfaitement<br />

normale. Il existe de très nombreuses formules de correction de<br />

la calcémie totale par les protides ou, mieux, par l’albumine.<br />

Elles sont toutes très imparfaites mais peuvent parfois éviter de<br />

conclure à une fausse hyper- ou hypercalcémie. Nous utilisons<br />

en pratique la formule suivante :<br />

calcémie corrigée (mmol/l) = Ca total (mmol/l) + 0,02<br />

× [40 – albuminémie (g/l)].<br />

Les différentes formules de correction ignorent cependant<br />

l’influence majeure du pH sur la liaison Ca-albumine, qui<br />

augmente quand le pH augmente. Autrement dit, chez un sujet<br />

en alcalose, et pour une même calcémie totale et une même<br />

Néphrologie<br />

albuminémie, la calcémie ionisée est plus basse que chez un<br />

sujet en acidose. Le mieux est de doser le calcium ionisé, mais<br />

il existe pour cette mesure des pièges préanalytiques à considérer.<br />

Il vaut donc mieux bien doser la calcémie totale et la<br />

corriger par l’albumine (en connaissant les limites de ces<br />

corrections) que mal doser la calcémie ionisée. Si toutefois la<br />

calcémie ionisée est dosée, il faut utiliser la mesure directe<br />

(c’est-à-dire au pH du patient) et non pas la correction pour un<br />

pH de 7,40.<br />

Calciurie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

Irritabilité musculaire, paresthésie, laryngospasme, bronchospasme,<br />

tétanie, convulsion<br />

Allongement de QT à l’ECG<br />

La calciurie des 24 heures représente l’absorption intestinale<br />

du calcium (à condition que les entrées et les sorties osseuses<br />

soient égales). Un régime trop salé ou trop riche en protéines<br />

augmente la calciurie. Les valeurs normales sont : moins<br />

de 250 mg (soit 6,25 mmoles)/24 heures chez les femmes et<br />

moins de 300 mg (soit 7,5 mmoles)/24 heures chez les hommes,<br />

mais il est préférable de tenir compte du poids du patient :<br />

moins de 4 mg/kg par 24 heures (hommes et femmes), soit<br />

0,1 mmol/kg par 24 heures). Ces valeurs « normales » devraient<br />

en fait prendre en compte les apports calciques (alimentaires et<br />

médicamenteux) [83] . Les valeurs données ci-dessus ne sont<br />

probablement valables que pour des apports calciques normaux,<br />

soit environ 1 g/j. Il faut également signaler que, pour ce qui<br />

concerne le risque lithiasique, c’est davantage la quantité<br />

absolue de calcium éliminée que celle rapportée au poids qui est<br />

pertinente. Par exemple, pour une calciurie de 10 mmol/j, le<br />

risque de lithiase est le même pour un individu de 60 kg que<br />

pour un individu de 100 kg.<br />

Le calcium retrouvé dans les urines du matin à jeun<br />

(deuxième miction) vient théoriquement de la dégradation<br />

osseuse uniquement. Le rapport calcium/créatinine de la<br />

deuxième miction du matin à jeun, parfois appelé « résorption<br />

nette », est à utiliser dans les bilans phosphocalciques extensifs,<br />

en complément de la calciurie des 24 heures.<br />

Phosphatémie/phosphaturie<br />

Les hématies étant très riches en phosphate, il ne faut surtout<br />

pas de prélèvements hémolysés pour doser la phosphatémie. Les<br />

valeurs de référence habituelles pour la phosphatémie sont :<br />

0,80-1,45 mmol/l. Les valeurs de référence pédiatriques sont<br />

plus hautes (contrairement à la calcémie qui n’est pas différente<br />

chez l’enfant et chez l’adulte). Lorsqu’on met en évidence une<br />

hypophosphatémie, il faut savoir si elle est due à une fuite<br />

rénale de phosphate (« diabète phosphaté ») ou à une autre<br />

cause (défaut d’absorption, transfert vers les cellules, etc.). Pour<br />

cela, il faut calculer le taux de réabsorption des phosphates<br />

(TRP) puis le TmP/DFG. Le TRP correspond à la fraction de<br />

phosphate réabsorbée, par rapport à la quantité filtrée par le<br />

rein. On le calcule par la formule :<br />

TRP = [1 – (phosphaturie × créatininémie/phosphatémie<br />

× créatininurie)] × 100 (attention à ce que les quatre mesures<br />

soient exprimées dans la même unité).<br />

Le TmP/DFG s’obtient à partir du TRP et de la phospatémie<br />

que l’on reporte sur un abaque (nomogramme de Bisjvoet) [44] .<br />

Un TmP/DFG bas témoigne d’une fuite rénale de phosphates.<br />

Dosages de parathormone<br />

Depuis 1987, les techniques de dosage disponibles, dites de<br />

seconde génération, sont des immunodosages utilisant deux<br />

11


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

anticorps dirigés contre deux parties distinctes de la PTH [84] .<br />

Elles sont globalement appelées dosages de la PTH « intacte »,<br />

car on pensait initialement qu’elles ne mesuraient que la PTH<br />

1-84. Depuis 1998, on sait que ces dosages de PTH « intacte »<br />

reconnaissent, outre la PTH 1-84, une famille de fragments<br />

proches de la PTH 7-84 [85] qui semblent inhiber l’action de la<br />

PTH [86] . Des nouvelles techniques de dosage dites « de troisième<br />

génération » et ne reconnaissant pas la PTH 7-84 sont maintenant<br />

disponibles [87] . C’est surtout pour le suivi des patients<br />

insuffisants rénaux que ces nouvelles techniques de dosage ont<br />

un intérêt potentiel (bien que controversé) [88] . Pour les dosages<br />

de PTH prescrits dans le cadre de l’exploration des anomalies du<br />

métabolisme phosphocalcique chez des patients ayant une<br />

fonction rénale normale, les « anciens » dosages sont aussi<br />

efficaces que ces nouvelles techniques, en particulier pour le<br />

diagnostic d’hyperparathyroïdie primitive [89] . Quelques travaux<br />

récents ont montré que les dosages de PTH de troisième<br />

génération reconnaissent une molécule, appelée amino-PTH, qui<br />

n’est pas dosée par les techniques de deuxième génération [90] .<br />

Cette molécule semble produite en excès chez certains patients<br />

porteurs d’un carcinome parathyroïdien [91] si bien qu’une<br />

élévation du rapport PTH troisième génération/PTH deuxième<br />

génération pourrait être un marqueur de cette pathologie. À<br />

noter que les dosages de PTH (deuxième ou troisième génération)<br />

ne mesurent absolument pas la PTHrP que l’on peut doser<br />

par immunoanalyse dans des laboratoires spécialisés.<br />

“ Point important<br />

Un dosage de PTH ne doit être interprété qu’en fonction<br />

de la calcémie concomitante, ce qui suppose de prescrire<br />

une calcémie à chaque fois que l’on prescrit un dosage de<br />

PTH.<br />

Dosages de vitamine D<br />

Même si la 1,25(OH) 2D est le métabolite actif de la vitamine D,<br />

plusieurs études suggèrent d’importantes fonctions physiologiques<br />

pour la 25OHD. D’une part, elle est le substrat pour la formation<br />

de 1,25(OH) 2D et, d’autre part, elle semble avoir une activité<br />

directe sur l’absorption intestinale du calcium, 200 à 1 000 fois<br />

plus faible que celle de la 1,25(OH) 2D, mais avec des concentrations<br />

circulantes 500 à 1 000 fois plus élevées [92] . La conséquence<br />

est qu’une diminution de la concentration de 25OHD entraîne<br />

une diminution de l’absorption intestinale du calcium et une<br />

tendance hypocalcémique, elle-même compensée par une élévation,<br />

en général très modérée, de la PTH. Cette hyperparathyroïdie<br />

secondaire va stimuler la 1-a-hydroxylase, augmentant la concentration<br />

sérique de 1,25(OH) 2D. Dans une insuffisance en vitamine<br />

D, la 1,25(OH) 2D sérique peut être normale, élevée ou basse. La<br />

mesure de la 1,25(OH) 2D n’est donc pas appropriée pour évaluer<br />

le statut vitaminique D. C’est la 25OHD qui doit être dosée pour<br />

savoir si un patient a ou non une insuffisance en vitamine D [93] .<br />

Le dosage de 25OHD doit être considéré comme un dosage de<br />

routine puisque c’est lui qui permet d’évaluer le statut vitaminique<br />

D. Il existe plusieurs techniques de dosage de la 25OHD<br />

par immunoanalyse. À condition qu’elles reconnaissent à peu<br />

près également la 25OHD 2 et la 25OHD 3, ces méthodes doivent<br />

être utilisées à la place de la méthode de référence (spectrométrie<br />

de masse), car elles sont plus simples et plus rapides, mais<br />

nécessitent toutefois d’être standardisées [94] . Il faut doser à la<br />

fois la 25OHD 2 et la 25OHD 3 car, si la peau ne synthétise que<br />

de la vitamine D 3 et si les sources alimentaires (rares) de<br />

vitamine D sont surtout de la D 3, certains médicaments sont de<br />

la vitamine D 2. Si on utilise un dosage spécifique de la 25OHD 3<br />

uniquement, on peut sous-évaluer considérablement le statut<br />

vitaminique D d’un patient traité par vitamine D 2 [95] . Cependant,<br />

il semble que l’administration de vitamine D 3 permet de<br />

maintenir plus longtemps un taux satisfaisant de 25OHD que<br />

l’administration de vitamine D 2 [96] , même si cela est controversé<br />

[97] . Il est donc possible que l’on recommande bientôt de<br />

prescrire de la vitamine D 3 plutôt que de la vitamine D 2. Dans<br />

ce cas, toutes les techniques de dosage de 25OHD seraient plus<br />

ou moins équivalentes. Le problème des valeurs de référence de<br />

la 25OHD est tout aussi important que les problèmes techniques<br />

proprement dits et a donné lieu à de nombreuses discussions<br />

ces dernières années. Il n’est pas conseillé d’utiliser des<br />

valeurs de référence établies chez des sujets apparemment en<br />

bonne santé comme on le fait pour la majorité des paramètres<br />

biologiques. En effet, en fonction de la saison, de la latitude, de<br />

l’altitude où les prélèvements sont faits, mais aussi en fonction<br />

de la pigmentation de la peau ou de l’âge des sujets témoins, les<br />

concentrations de 25OHD peuvent grandement changer [98] .Il<br />

est plutôt recommandé aujourd’hui de déterminer, dans une<br />

population en bonne santé apparente, les concentrations de<br />

25OHD au-dessous et/ou au-dessus desquelles il peut exister des<br />

effets néfastes pour la santé comme une élévation de la PTH, ou<br />

les concentrations de 25OHD pour lesquelles des effets bénéfiques<br />

ont été démontrés dans des études d’intervention. Cette<br />

méthode est appelée dans la littérature health-based reference<br />

values [98] . En se fondant sur une analyse des données de la<br />

littérature, les principaux spécialistes proposent maintenant de<br />

définir l’insuffisance en vitamine D par des concentrations de<br />

25OHD inférieures à 30 ng/ml (75 nmol/l) [99] . De même, les<br />

signes biologiques d’intoxication à la vitamine D (hypercalciurie,<br />

hypercalcémie) n’apparaissant pas pour des concentrations<br />

de 25OHD inférieures à 100 ng/ml (250 nmol/l) [100] ; on peut<br />

fixer raisonnablement la limite supérieure des valeurs souhaitables<br />

de la 25OHD à 80 ng/ml (200 nmol/l).<br />

Les dosages de 1,25-dihydroxyvitamine D sont des techniques<br />

difficiles, car elles nécessitent obligatoirement de séparer la<br />

1,25(OH) 2D des autres métabolites de la vitamine D (il y a<br />

environ 1 000 fois moins de 1,25(OH) 2D que de 25OHD dans<br />

le sérum). Contrairement au dosage de 25OHD, le dosage de<br />

1,25(OH) 2D ne devrait être prescrit qu’en deuxième (ou troisième)<br />

intention dans le cadre d’un bilan extensif du métabolisme<br />

phosphocalcique et plus particulièrement dans certaines<br />

indications : hypercalciurie (avec ou sans hypercalcémie) et PTH<br />

basse pour éliminer une élévation de la 1,25(OH) 2D liée à une<br />

granulomatose, diabète phosphaté primitif pour savoir si la<br />

1,25(OH) 2D est élevée (réponse physiologique à une hypophosphatémie)<br />

ou non (ce qui peut orienter vers une tumeur<br />

mésenchymateuse secrétant une phosphatonine comme le<br />

FGF23), diagnostic différentiel des rachitismes vitaminorésistants<br />

pseudocarentiels (dans le RVR de type 1, la concentration<br />

de 1,25(OH) 2D est effondrée, alors qu’elle est élevée dans le type<br />

2). Les valeurs de référence habituelles de la 1,25(OH) 2D varient<br />

avec l’âge (20-110, 20-80, et 20-60 pg/ml chez le nouveau-né,<br />

l’adolescent, et le sujet adulte respectivement).<br />

“ Point important<br />

Pour évaluer le statut en vitamine D (pour savoir si le<br />

patient présente un déficit), il faut doser la 25-hydroxyvitamine<br />

D et non la calcitriolémie. On considère<br />

aujourd’hui que le statut vitaminique D est correct lorsque<br />

la 25OHD est supérieure à 30 ng/ml (soit 75 nmol/l).<br />

■ Interprétation des explorations<br />

phosphocalciques<br />

Il s’agit de dégager ici les grands principes d’une démarche<br />

d’exploration d’une anomalie d’un des paramètres mesurés dans<br />

une exploration phosphocalcique préliminaire (en général,<br />

calcémie, phosphatémie et calciurie des 24 heures).<br />

12 Néphrologie


Hypercalcémie<br />

PTH<br />

haute<br />

Hyperparathyroïdie<br />

primitive<br />

(HPP)<br />

- HPP<br />

- Hypercalcémie,<br />

hypocalciurie familiale<br />

- Prise de médicaments<br />

(thiazidiques)<br />

Il faut tout d’abord vérifier la réalité de cette hypercalcémie<br />

(calcémie corrigée pour l’albumine, ou mieux calcémie ionisée).<br />

Il faut ensuite prescrire un dosage de PTH. Il est très important<br />

de doser à nouveau le calcium sur le même échantillon que<br />

Hypercalcémie<br />

PTH<br />

normale<br />

PTH<br />

basse<br />

Hypercalcémie « non parathyroïdienne »<br />

(hyperthyroïdie métaosseuse, PTHrP,<br />

granulomatose, intoxication à la vitamine D ou A,<br />

apports calciques ++, thiazidiques,<br />

immobilisation, etc.)<br />

Figure 9. Démarche simple d’exploration d’une hypercalcémie. PTH : parathormone. PTHrP : PTH related protein.<br />

Tableau 3.<br />

Principales anomalies génétiques induisant des perturbations phosphocalciques (avec impact clinique) du métabolisme. Ces différentes situations sont classées<br />

en fonction de l’anomalie phosphocalcique principale retrouvée le plus souvent : hypercalcémie.<br />

Étiologie T Chr Gène(s) Protéine(s) Mécanisme supposé Caractéristiques<br />

Chondrodysplasie<br />

métaphysaire de<br />

Jansen [101]<br />

Hypercalcémie<br />

hypocalciurie<br />

familiale [102]<br />

Hyperparathyroïdie<br />

néonatale sévère [103]<br />

Dominante<br />

sporadique<br />

3q22p21.1 PTHR1<br />

AD 3q13.3q21 CaSR<br />

(mutations<br />

activatrices)<br />

Récepteur de la<br />

PTH (type I)<br />

CaSR (récepteur<br />

sensible au<br />

calcium)<br />

Différenciation accélérée<br />

des chondrocytes,<br />

responsable d’anomalies<br />

métaphysaires<br />

Altération de la<br />

régulation de la synthèse<br />

de PTH par perte de<br />

sensibilité des cellules<br />

Petite taille adulte<br />

(120 cm), dysmorphie<br />

faciale<br />

Hypercalcémie,<br />

hypophosphatémie,<br />

hypercalcitriolémie, PTH<br />

effondrée<br />

Asymptomatique<br />

(mutations<br />

Hypercalcémie modérée,<br />

inactivatrices)<br />

hypocalciurie relative, PTH<br />

normale ou peu élevée<br />

parathyroïdiennes aux<br />

AR Hypercalcémie menaçante,<br />

élévations de la calcémie<br />

détresse respiratoire,<br />

fracture de côtes,<br />

hypotonie<br />

Hypophosphatasie [104] AD ou AR 8p21.2 ALPL<br />

Néoplasie endocrinienne<br />

multiple de type 1<br />

[105, 106]<br />

(NEM1)<br />

Néoplasie endocrinienne<br />

multiple de type 2A<br />

(NEM2A) [107, 108]<br />

Syndrome de Williams-<br />

Beuren [109]<br />

(alkaline phosphate<br />

liver form)<br />

PAL non tissuspécifique<br />

Diminution de l’activité<br />

PAL non tissu-spécifique,<br />

donc anomalie de<br />

régulation de la<br />

minéralisation osseuse<br />

AD 11q13 MEN1 Ménine Gène suppresseur de<br />

tumeur<br />

Perte d’hétérozygotie :<br />

inactivation d’un allèle<br />

d’origine familiale et de<br />

l’autre allèle au niveau<br />

tumoral<br />

Hypercalcémie majeure,<br />

hypocalciurie, PTH non<br />

effondrée, voire élevée<br />

Déminéralisation osseuse,<br />

néphrocalcinose,<br />

hypercalcémie, PAL<br />

effondrées<br />

Hyperparathyroïdie (90 %)<br />

Gastrinome (40 %),<br />

insulinome, glucagonome,<br />

VIPome, tumeurs<br />

hypophysaires (45 %) dont<br />

prolactinome (20 %) et<br />

surrénaliennes (20 %)<br />

AD 10q11.2 RET Protéine RET Proto-oncogène Hyperparathyroïdie (5 % à<br />

20 %), cancer médullaire<br />

de la thyroïde (100 %),<br />

phéochromocytome (50 %)<br />

Dominante<br />

sporadique<br />

Microdélétion<br />

en 7q11.23<br />

ELN1, LIMK,<br />

STX1A<br />

Élastine<br />

LIM kinase<br />

Syntaxine<br />

Hypercalcémie néonatale<br />

rare et transitoire (10 %),<br />

dysmorphie faciale,<br />

cardiopathie congénitale,<br />

retard mental, petite taille<br />

T : mode de transmission ; Chr : localisation chromosomique ; AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; PTH : parathormone ; PAL : phosphatases alcalines.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

celui prélevé pour le dosage de PTH puisque la PTH n’est<br />

interprétable qu’en fonction de la calcémie concomitante. La<br />

Figure 9 propose une démarche simple d’interprétation d’une<br />

hypercalcémie en fonction de la concentration de PTH. Le<br />

Tableau 3 détaille les principales causes d’hypercalcémie<br />

d’origine génétique.<br />

13


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Hyperparathyroïdie primitive (HPP)<br />

Il s’agit d’une production excessive et inappropriée de PTH<br />

(c’est-à-dire pas en réponse à une baisse de la calcémie). Maladie<br />

surtout féminine (trois à six femmes pour un homme) et le plus<br />

souvent asymptomatique, c’est, après le diabète et les pathologies<br />

thyroïdiennes, l’endocrinopathie la plus fréquente. Dans<br />

l’immense majorité des cas, l’HPP est due à un adénome bénin<br />

unique d’une parathyroïde. Il peut toutefois exister des HPP à<br />

adénomes multiples, et des HPP dues à une hyperplasie autonomisée<br />

des quatre glandes parathyroïdes (on parle alors souvent<br />

d’hyperparathyroidie « tertiaire »). Les HPP peuvent également<br />

s’inscrire dans des pathologies tumorales, situation rare de<br />

carcinome parathyroïdien isolé ou manifestation d’une néoplasie<br />

endocrinienne multiple (NEM), à rechercher systématiquement<br />

chez les patients HPP de moins de 50 ans, le plus souvent<br />

NEM de type 1 (mutation du gène de la ménine), mais parfois<br />

de type 2. Le traitement actuel de l’HPP est chirurgical, mais<br />

toutes les HPP ne sont pas opérées. Il existe des critères<br />

chirurgicaux définis dans des conférences de consensus (ostéoporose,<br />

lithiase ou néphrocalcinose, calcémie à plus de<br />

0,25 mmol/l au-dessus de la limite supérieure des normes du<br />

laboratoire, calciurie supérieure à 10 mmol/24 heures en régime<br />

« libre », débit de filtration glomérulaire inférieur à 60 ml/min,<br />

âge inférieur à 50 ans) [110] . Le diagnostic d’HPP est biologique<br />

(des examens de localisation, scintigraphie ou échographie,<br />

négatifs n’excluent pas le diagnostic). Théoriquement, le tableau<br />

biologique d’une HPP comporte un certain nombre d’anomalies<br />

: hypercalcémie et élévation de la concentration sérique de<br />

PTH bien sûr, mais aussi, de façon inconstante, hypophosphatémie<br />

avec TmP/DFG bas, élévations de la calcitriolémie, des<br />

marqueurs biologiques du remodelage osseux et de la calciurie.<br />

Bien que la PTH augmente la réabsortion rénale de calcium, il<br />

n’y a pas d’hypocalciurie dans les HPP en raison de l’augmentation<br />

de la charge de calcium filtrée liée à l’hypercalcémie.<br />

Simplement, la calciurie est moins élevée qu’elle ne le serait<br />

pour une même calcémie associée à une PTH basse. Toutefois,<br />

et comme indiqué plus haut, le diagnostic peut être fondé<br />

simplement sur la constatation d’une hypercalcémie et d’une<br />

concentration sérique de PTH élevée, donc inappropriée à<br />

l’hypercalcémie, à condition que ces anomalies soient franches.<br />

Cependant, une hypercalcémie associée à une PTH normale<br />

haute (au-dessus de la médiane des valeurs « normales ») est<br />

également très évocatrice d’une HPP. En outre, si une calcémie<br />

normale associée à une PTH haute évoque en priorité une<br />

hyperparathyroïde secondaire, le fait de ne retrouver aucune<br />

cause d’hyperparathyroïde secondaire doit faire envisager la<br />

possibilité d’une hyperparathyroïdie primitive normocalcémique<br />

[111, 112] . Au total, le diagnostic d’HPP doit être sans<br />

ambiguïté avant d’adresser un(e) patient(e) au chirurgien et, si<br />

le moindre doute persiste sur le diagnostic, il faut pratiquer un<br />

test de charge calcique dans une unité spécialisée. Au cours de<br />

ce test, on fait monter la calcémie largement au-dessus de la<br />

limite supérieure de la normale et on observe l’évolution de la<br />

concentration de PTH. Si celle-ci ne descend pas en dessous de<br />

la médiane des valeurs normales, c’est un argument fort pour le<br />

diagnostic d’HPP [113] . Il semble également important de doser<br />

la 25OHD chez les HPP. En effet, d’une part, il est conseillé dans<br />

la conférence de consensus [110] de maintenir la 25OHD<br />

au-dessus de 20 ng/ml chez les HPP car un déficit en vitamine<br />

D chez ces patients augmente la sécrétion de PTH et la<br />

taille de la tumeur et, d’autre part, afin d’éviter un hungry bone<br />

syndrom, il est important de s’assurer que, en postparathyroïdectomie,<br />

le statut vitaminique D et les apports calciques des<br />

patients HPP sont suffisants. Même s’il ne paraît pas évident de<br />

donner de la vitamine D (qui augmente l’absorption intestinale<br />

du calcium) à des patients HPP déjà hypercalcémiques, il a été<br />

montré récemment que cette pratique n’induisait pas d’augmentation<br />

de la calcémie et réduisait la concentration sérique<br />

de PTH [114] .<br />

Hypercalcémie-hypocalciurie familiale bénigne<br />

C’est en fait le seul réel diagnostic différentiel de l’HPP. Il<br />

s’agit d’une mutation inactivatrice du gène du CaSR. On<br />

“ Point important<br />

Le diagnostic d’hyperparathyroïdie primitive peut être<br />

facile (franche hypercalcémie et PTH élevée), mais, de plus<br />

en plus, des formes modérées sont diagnostiquées. S’il<br />

existe le moindre doute sur le diagnostic, il faut faire<br />

pratiquer un test de charge orale (et/ou IV) en calcium<br />

après avoir, si besoin, corrigé une insuffisance<br />

vitaminocalcique. Ces tests sont pratiqués dans des unités<br />

spécialisées.<br />

constate une hypercalcémie avec PTH normale (elle peut être<br />

parfois élevée) et une « hypocalciurie ». Il s’agit d’une hypocalciurie<br />

« relative », c’est-à-dire d’une calciurie plus basse qu’elle<br />

ne devrait l’être devant une telle hypercalcémie. Pour avancer<br />

dans le diagnostic différentiel, il faut corriger les carences<br />

(vitamine D, calcium), pratiquer un test de charge calcique pour<br />

éliminer une HPP, doser la calcémie dans la proche famille<br />

(ascendants et descendants), calculer l’excrétion fractionnelle du<br />

calcium (si elle est supérieure à1%,c’est un argument contre<br />

le diagnostic). On peut ensuite faire une recherche de mutation<br />

sur le gène du CaSR.<br />

Hypercalcémies « non parathyroïdiennes »<br />

Il s’agit de l’association d’une hypercalcémie et d’une PTH<br />

« freinée ». Les différents diagnostics différentiels nécessitent des<br />

examens complémentaires. Pour bien interpréter ces examens<br />

complémentaires, il faut refaire les dosages « de base » (calcium,<br />

phosphates, PTH, etc.). Les causes les plus fréquentes d’hypercalcémies<br />

avec PTH basse sont listées dans le Tableau 4 avec<br />

leurs principales caractéristiques biologiques. On peut trouver<br />

des causes plus rares d’hypercalcémies non parathyroïdiennes<br />

dans une revue récente [115] .<br />

Hypocalcémies<br />

Là encore, il faut vérifier la réalité de l’hypocalcémie et doser<br />

la PTH en dosant le calcium dans le même temps. La Figure 10<br />

propose une démarche simple d’exploration d’une hypocalcémie.<br />

Le Tableau 5 détaille les principales causes d’hypocalcémie<br />

d’origine génétique.<br />

Hypoparathyroïdies<br />

Il s’agit d’un défaut de synthèse/sécrétion de PTH ayant pour<br />

conséquences une hypocalcémie et une hyperphosphatémie.<br />

Sauf si la calcémie est extrêmement basse, la calciurie est en<br />

général normale et peut même être élevée parfois, comme en<br />

cas de mutation activatrice du CaSR. Il est très important de<br />

bien surveiller la calciurie sous traitement par calcium et dérivé<br />

1-hydroxylé de la vitamine D, car il peut facilement apparaître<br />

une hypercalciurie et une néphrocalcinose. Une hypoparathyroïdie<br />

peut être due à une cause génétique (par exemple<br />

microdélétion du chromosome 22 comme dans le syndrome de<br />

Di-Georges, ou mutation activatrice du gène du CaSR, etc.) ou<br />

à la conséquence d’une chirurgie de la région thyroïdienne<br />

(parathyroïdectomie non voulue après une thyroïdectomie). Si<br />

aucune de ces étiologies n’est retrouvée, il faut éliminer une<br />

hypomagnésémie chronique (le magnésium est nécessaire pour<br />

que les parathyroïdes puissent sécréter de la PTH). Si celle-ci est<br />

retrouvée, sa correction devrait rétablir une sécrétion normale<br />

de PTH (contrairement aux autres étiologies, l’hypoparathyroïdie<br />

due à une hypomagnésémie chronique est une situation<br />

réversible). À noter que cette situation d’hypoparathyroïdie<br />

hypomagnésémique a été récemment rapportée chez des<br />

patients qui prenaient des inhibiteurs de la pompe à protons<br />

comme l’oméprazole [128] .<br />

Hyperparathyroïdies secondaires<br />

Il s’agit de l’association d’une hypocalcémie et d’une PTH<br />

haute. Les différents diagnostics différentiels nécessitent des<br />

14 Néphrologie


Tableau 4.<br />

Principaux indicateurs biologiques des différentes hypercalcémies « non parathyroïdiennes ».<br />

Phosphatémie TmP/<br />

DFG<br />

examens complémentaires. Pour bien interpréter ces examens<br />

complémentaires, il faut refaire les dosages de « base ». Les<br />

causes les plus fréquentes d’hypocalcémies avec PTH haute sont<br />

listées dans le Tableau 6 avec leurs principales caractéristiques<br />

biologiques (là encore, ces éléments sont théoriques et il est<br />

fréquent dans la pratique clinique qu’ils ne soient pas tous<br />

retrouvés).<br />

Cas particulier de la découverte d’une<br />

parathormone élevée quand calcémie,<br />

phosphatémie et calciurie des 24 heures<br />

sont normales<br />

Il s’agit, dans l’immense majorité des cas, d’une hyperparathyroïdie<br />

secondaire et donc d’une réaction normale : la<br />

tendance hypocalcémique est compensée par une élévation de<br />

la PTH qui maintient la calcémie dans les valeurs normales.<br />

C’est une situation très fréquente dont il faut trouver la cause.<br />

Parmi ces causes, les plus fréquentes sont l’insuffisance rénale<br />

modérée et l’insuffisance en calcium/vitamine D. Il faut insister<br />

aussi sur l’importance d’effectuer le bilan phosphocalcique chez<br />

les patient(e)s ostéoporotiques avant de prescrire un traitement<br />

de fond, en particulier un bisphosphonate. En effet, ceux-ci<br />

induisent une élévation de la PTH pour compenser la diminution<br />

du flux de calcium de l’os vers le plasma et donc la<br />

tendance hypocalcémique [129] . D’autres médicaments comme<br />

les anticonvulsivants (pouvant induire un déficit en vitamine D)<br />

ou les diurétiques de l’anse (qui provoquent une fuite rénale de<br />

calcium) [130] peuvent être responsables d’une tendance hypocalcémique<br />

avec hyperparathyroïdie réactionnelle. Si aucune<br />

cause d’hyperparathyroïdie secondaire n’est retrouvée, on peut<br />

suspecter une hyperparathyroïdie primitive normocalcémique<br />

(surtout si la calcémie est normale haute) et faire un test de<br />

charge calcique comme décrit plus haut.<br />

Calciurie 25OHD 1,25(OH) 2D TSH autres<br />

Métastase osseuse N ou H H H Q B N Scintigraphie<br />

Hypophosphatémies (avec calcémie normale<br />

et avec ou sans hypercalciurie) [131] (Tableau 1)<br />

Il faut tout d’abord éliminer une hyperparathyroïdie primitive<br />

ou secondaire normocalcémique puis calculer le TRP et le TmP/<br />

DFG pour savoir si l’hypophosphatémie est due à une fuite<br />

rénale de phosphate. Si, après avoir éliminé une hyperparathyroïdie,<br />

le TmP/DFG est abaissé, on conclut à un diabète phosphaté<br />

« primitif ».<br />

Schématiquement, on peut distinguer deux types de diabètes<br />

phosphatés primitifs.<br />

Diabète phosphaté avec hypercalciurie<br />

et hypercalcitriolémie<br />

Ces formes sont retrouvées lors d’anomalies génétiques (cf.<br />

tableau 8). L’élévation de la calcitriolémie est physiologique (en<br />

réponse à l’hypophosphatémie) et induit l’hypercalciurie (et<br />

parfois même une hypercalcémie modérée). Ces patients font<br />

souvent des lithiases [48] . Si elles sont symptomatiques, ces<br />

formes sont traitées par phosphate seul (pas de dérivé<br />

1-hydroxylé de la vitamine D). Il faut toutefois faire attention<br />

au fait que le traitement par phosphate va augmenter la<br />

phosphaturie et donc ne pas négliger le risque de néphrocalcinose<br />

« iatrogène ». En outre, un traitement par dipyridamole<br />

peut être proposé et induire une élévation du TmP/DFG et donc<br />

une baisse de la phoshaturie chez environ 80 % des<br />

patients [132] .<br />

Diabète phosphaté avec calciurie et 1,25(OH) 2D<br />

normales ou basses<br />

On connaît des formes génétiques (XLH et ADHR), souvent<br />

découvertes dans l’enfance, et des formes acquises dues à des<br />

tumeurs mésenchymateuses bénignes sécrétant une « phosphatonine<br />

» comme le FGF23. Ces formes, si elles sont symptomatiques,<br />

sont traitées par phosphate et 1-OH vitamine D en<br />

surveillant, là encore, la calciurie.<br />

Hypercalciuries (Tableaux 7 et 8)<br />

osseuse + (a,b)<br />

Tumeur PTHrP B (a,b) B (a,b) N ou H Q N ou B N PTHrP H (a,b)<br />

Granulomatose H H H Q H (a,b) N<br />

Hyperthyroïdie N ou H H H Q B B (a,b)<br />

Intoxication à la<br />

vitamine D<br />

H H H H++ (a,b) B,NouH N<br />

T4L H (a,b)<br />

Apports calciques +++ N ou H H H Q B ou N N Chercher prise occulte<br />

(antiacide par exemple) (a,b)<br />

Immobilisation N ou H H H Q B ou N N Immobilisation connue (b)<br />

N : normal ; H : haut ; B : bas ; Q : quelconque ; TmP : seuil maximal de réabsorption tubulaire du phosphate ; PTHrP : parathormone related protein ; TSH : thyroid stimulating<br />

hormone ; T4L : tétra-iodothyronine libre. (a) Pour ces situations le point commun est une hypercalcémie et une parathormone (PTH) basse. (b) Éléments déterminants.<br />

PTH<br />

basse<br />

Hypoparathyroïdie<br />

(différentes étiologies)<br />

Hypocalcémie<br />

PTH<br />

haute<br />

- Pseudohypoparathyroïdie<br />

(= résistance à la PTH)<br />

- Hyperparathyroïdie secondaire<br />

(IRC, déficit en vitamine D, dénutrition,<br />

malabsorption, rachitismes pseudocarentiels<br />

[RVR], fuite tubulaire de Ca,<br />

etc.)<br />

Figure 10. Démarche simple d’exploration d’une hypocalcémie. IRC :<br />

insuffisance rénale chronique ; PTH : parathormone.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

Encore une fois, on élimine une hyperparathyroïde primitive<br />

ou une cause d’hypercalcémie non parathyroïdienne, qui<br />

n’aurait pas encore atteint le stade d’hypercalcémie. On évalue<br />

les apports calciques alimentaires ainsi que les apports sodés. Il<br />

convient de doser le sodium urinaire sur les urines de 24 heures<br />

: si cette valeur est supérieure à 150 mmol/24 heures (soit<br />

9 g/24 heures environ), il faut prescrire un régime limité en sel<br />

(inférieur à 7 g/24 heures) puis doser à nouveau la calciurie sous<br />

ce régime. Il faut aussi évaluer les apports en protéines : un<br />

régime riche en protéines augmente l’absorption intestinale du<br />

15


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Tableau 5.<br />

Principales anomalies génétiques induisant des perturbations phosphocalciques (avec impact clinique) du métabolisme. Ces différentes situations sont classées<br />

en fonction de l’anomalie phosphocalcique principale retrouvée le plus souvent : hypocalcémie.<br />

Étiologie T Chr Gène(s) Protéine(s) Mécanisme supposé Caractéristiques<br />

Rachitisme<br />

vitaminorésistant de type<br />

1 [116]<br />

vitaminorésistant de type<br />

2 [117]<br />

Hypocalcémie autosomique<br />

dominante [2]<br />

Chondrodysplasie de<br />

Blomstrand [118]<br />

Hypoparathyroïdie familiale<br />

isolée [119]<br />

Hypoparathyroïdie<br />

isolée [120]<br />

Syndrome HDR<br />

(hypoparathyroidism,<br />

deafness, renal defect) [121]<br />

Syndrome de Di<br />

George [122]<br />

Syndrome HRD<br />

(hypoparathyroidism,<br />

retardation, dysmorphism),<br />

Syndrome de Kenny-Caffey,<br />

syndrome de Sanjad-<br />

Sakati [123]<br />

Pseudohypoparathyroïdie<br />

[124]<br />

Syndrome APECED (autoimmune<br />

polyendocrinopathy,<br />

candidosis, ectodermal<br />

dystrophy) [125]<br />

Syndrome de Kearns-<br />

Sayre [126]<br />

Hypomagnésémie<br />

avec hypocalcémie<br />

secondaire [127]<br />

AR 11p15.2 1a-hydroxylase 1a-hydroxylase Défaut de synthèse du<br />

calcitriol<br />

AR 12q12-14 VDR Récepteur de la<br />

vitamine D<br />

AD 3q13-q21 CaSR<br />

(mutation<br />

activatrice)<br />

calcium et probablement la résorption osseuse en raison de la<br />

charge acide induite [146] . Même si ce n’est pas constant, une<br />

calcémie normale basse et une PTH normale haute orientent<br />

plutôt vers une fuite rénale de calcium (par exemple un régime<br />

trop « salé » ou une hypercalciurie rénale) alors qu’une calcémie<br />

normale haute et une PTH normale basse orienteraient plutôt<br />

vers des apports calciques excessifs, une hypercalciurie « résorptive<br />

» ou une hypercalciurie « absorptive ». L’examen complémentaire<br />

de choix est le test de charge calcique. Ce test est<br />

pratiqué après 3 jours de régime « pauvre » en calcium<br />

CaSR<br />

(récepteur<br />

sensible au<br />

calcium)<br />

AR 3q22-p21.1 PTH-R1 Récepteur de la<br />

PTH (type I)<br />

AD/<br />

AR<br />

Résistance à la vitamine D<br />

par défaut de liaison du<br />

calcitriol à son récepteur<br />

Gain de fonction du CaSR<br />

qui répond à des<br />

concentrations de calcium<br />

plus basses que la normale<br />

Perte de fonction du<br />

récepteur de la PTH<br />

11q15.3-p15.1 PTH PTH Défaut de synthèse de la<br />

PTH<br />

AR 6p24.2 GCMB Facteur de<br />

transcription<br />

GCMB (glial cell<br />

missing B)<br />

AR 10p14-15<br />

microdélétion<br />

ou mutation<br />

ponctuelle<br />

AD Microdélétion<br />

de la région<br />

22q11<br />

GATA 3 Facteur de<br />

transcription<br />

Mex40/nex2,<br />

TBX1<br />

UDFL1<br />

AR 1q42-43 TCFE Protéine<br />

chaperonne<br />

Défaut d’embryogenèse des<br />

3 e et 4 e arcs branchiaux<br />

Défaut d’embryogenèse des<br />

PT, du rein et de l’oreille<br />

interne<br />

Défaut de développement<br />

de la crête neurale faciale<br />

et des 3 e et 4 es arcs<br />

branchiaux<br />

Anomalies de la formation<br />

des microtubules<br />

intracellulaires impliqués<br />

dans les mouvements<br />

intracellulaires<br />

Empreinte 20q13.3 GNAS Protéine Gsa Atteinte de la transmission<br />

postrécepteur de la PTH<br />

AR 21q22.3 AIRE Protéine AIRE1 :<br />

régule la<br />

transcription<br />

thymique des<br />

autoanticorps<br />

Maternelle/<br />

sporadique<br />

ADN<br />

mitochondrial<br />

AR 9q22 TRPM6 TRPM6, probable<br />

canal ionique<br />

Atteinte de la tolérance<br />

immunitaire<br />

Déficit énergétique<br />

cellulaire entraînant un<br />

défaut de synthèse de PTH<br />

Résistance périphérique<br />

à la PTH, secondaire à<br />

l’hypomagnésémie<br />

Rachitisme/ostéomalacie<br />

Douleurs osseuses, possibles retard<br />

de croissance, hypotonie,<br />

hypoplasie dentaire, alopécie<br />

Hypercalciurie inadaptée à<br />

l’hypocalcémie, PTH sérique<br />

normale, parfois néphrocalcinose<br />

et insuffisance rénale<br />

Létale, avance de la maturation<br />

osseuse<br />

Tableau d’hypoparathyroïdie<br />

isolée<br />

Agénésie des PT<br />

Tableau d’hypoparathyroïdie<br />

isolée<br />

PT absentes ou hypoplasiques,<br />

surdité de perception, dysplasie<br />

rénale<br />

Agénésie des glandes<br />

parathyroïdiennes et du thymus,<br />

cardiopathie, dysmorphie faciale<br />

Hypoparathyroïdie, RCIU, retard<br />

mental et statural microcéphalie,<br />

micropénis, dysmorphie faciale,<br />

anomalies osseuses<br />

Hypocalcémie, hypocalciurie,<br />

hyperphosphatémie, PTH<br />

augmentée<br />

Hypoparathyroïdie, candidose<br />

cutanéomuqueuse chronique,<br />

insuffisance surrénale<br />

Hypoparathyroïdie,<br />

hypogonadisme, diabète, atteintes<br />

neurologique, oculaire, cardiaque,<br />

musculaire, surdité de perception<br />

Néonatale<br />

Hypomagnésémie sévère, signes<br />

neurologiques<br />

T : mode de transmission ; Chr : localisation chromosomique ; AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; PTH : parathormone ; PT : glandes parathyroïdes ;<br />

RCIU : retard de croissance intra-utérin.<br />

(< 300 mg/24 heures, en excluant tous les laitages, les eaux<br />

minérales riches en calcium ; pendant ces 3 jours, boire de l’eau<br />

de Volvic ou une autre eau très peu chargée en calcium et en<br />

ne prenant pas les éventuels traitements par calcium pris<br />

habituellement). Le patient vient à l’hôpital avec ses urines de<br />

24 heures. On lui fait un bilan phosphocalcique complet le<br />

matin à jeun avec miction (on a donc deux urines avant charge<br />

calcique, les urines de 24 heures et les urines du matin à jeun)<br />

puis on lui administre 1gdecalcium per os (dans le cadre d’un<br />

petit-déjeuner calibré avec supplémentation en calcium). On<br />

16 Néphrologie


Tableau 6.<br />

Principaux indicateurs biologiques des principales causes d’hyperparathyroïdie secondaire.<br />

Phosphatémie TmP/<br />

DFG<br />

recueille ensuite les urines, avec nouveau prélèvement sanguin,<br />

4 heures après la charge orale en calcium. Le delta calcium/<br />

créatinine (Ca/créat.) est la différence : Ca/créat. à T4h – Ca/<br />

créat. à T0. Quand le régime pauvre en calcium a été bien<br />

respecté (nécessité d’un interrogatoire « serré » pour le vérifier !),<br />

nous considérons que la calciurie des 24 heures doit être<br />

inférieure à 2,8 mg/kg par 24 heures (et non pas inférieure à<br />

4 mg/kg par jour comme en régime libre).<br />

Place de la biologie moléculaire<br />

et des recherches d’anomalies génétiques<br />

Des anomalies de nombreux gènes sont responsables de<br />

dérèglements du métabolisme phosphocalcique. Ces anomalies<br />

génétiques peuvent être identifiées par des techniques de<br />

biologie moléculaire dans des laboratoires spécialisés. C’est<br />

souvent le seul moyen d’établir un diagnostic définitif. Les<br />

tableaux 1, 3, 5 et 7 proposent une liste non exhaustive de<br />

calciurie 25OHD 1,25(OH) 2D TSH autres<br />

IRC N ou H B Q B ou N N Cl. créat. B (a,b)<br />

Pseudohypoparathyroïdie H (a,b)<br />

H (a,b)<br />

Déficit en vitamine D B ou N B B B (a,b)<br />

B,NouH Q B N<br />

BouN N<br />

RVR 1 B B B H (supplémentation) (a,b) B (a,b) N<br />

RVR 2 B B B Q H+++ (a,b) N<br />

Maladie cœliaque B B B B B ou N N Ac antitransglutaminase ++ (a,b)<br />

Hypercalciurie rénale B B H (24 h et<br />

jeûne) (a,b)<br />

Q N ou H N Test de charge calcique (a,b)<br />

N : normal ; H : haut ; B : bas ; Q : quelconque. IRC : insuffisance rénale chronique ; RVR : rachitisme vitaminorésistant ou pseudocarentiel ; Cl. créat. : clairance de la<br />

créatinine ; Ac : anticorps. (a) Pour ces situations le point commun est une hypocalcémie et une PTH basse. (b) Éléments déterminants.<br />

Tableau 7.<br />

Interprétation de la calciurie dans un test de charge calcique.<br />

CaU 24 heures Ca/créatinine à jeun Delta Ca/créatinine<br />

Hypercalciurie alimentaire (régime trop riche en calcium) N N N<br />

Régime trop salé ou trop riche en protides N ou H N N<br />

Hypercalciurie « absorptive » N N H<br />

Hypercalciurie « rénale » H H N ou H<br />

N : normal ; H : haut ; Ca : calcium ; CaU : concentration du calcium urinaire.<br />

Néphrologie<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations 18-010-B-10<br />

maladies « phosphocalciques » d’origine génétique que nous<br />

avons classées arbitrairement en fonction de l’anomalie principale<br />

retrouvée habituellement (hyphosphatémie, hyperphosphatémie,<br />

hypercalciurie, hypocalciurie, hypocalcémie,<br />

hypercalcémie).<br />

■ Conclusion<br />

L’exploration du métabolisme phosphocalcique consiste en<br />

général à pratiquer un bilan de base comportant la calcémie, la<br />

phosphatémie et la calciurie des 24 heures. De plus en plus, la<br />

mesure de la 25-hydroxyvitamine D (permettant de détecter un<br />

déficit en vitamine D) et celle de la PTH sont prescrites en<br />

première intention. Si une anomalie est détectée sur ces<br />

examens de première intention, il faut en général prescrire des<br />

dosages complémentaires (en represcrivant les dosages « de<br />

base ») pour aboutir à un diagnostic.<br />

17


18-010-B-10 Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Tableau 8.<br />

Principales anomalies génétiques induisant des perturbations phosphocalciques (avec impact clinique) du métabolisme. Ces différentes situations sont classées<br />

en fonction de l’anomalie phosphocalcique principale retrouvée le plus souvent : hypo- et hypercalciurie.<br />

Etiologie T Chr Gène(s) Protéine(s) Mécanisme supposé Caractéristiques<br />

Hypocalciurie<br />

Syndrome de Gitelman [133] AR 16q SLC12A3 NCCT Augmentation de la réabsorption TP<br />

de Ca (liée à celle du NaCl) liée à<br />

l’hypovolémie « thiazide like »<br />

Hypomagnésémie isolée<br />

dominante avec<br />

hypocalciurie [134]<br />

Hypercalciurie<br />

Hypomagnesémie familiale<br />

avec hypercalciurie/<br />

néphrocalcinose [135, 136]<br />

AD 11q23 FXYD2 Na-KATPase<br />

(sous-unité c)<br />

AR 3q27-29 CLDN16 Paracelline 1 Diminution de perméabilité de la<br />

jonction serrée de la BAL au Ca<br />

et au Mg<br />

Perte de sel, hyperaldostéronisme<br />

secondaire modéré (alcalose<br />

métabolique, hypokaliémie),<br />

hypocalciurie, hypomagnésémie,<br />

hypermagnésurie<br />

Mécanisme inconnu Hypomagnésémie, hypocalciurie<br />

Enfants, néphrocalcinose et lithiases<br />

Normocalcémie, hypercalciurie,<br />

hypomagnésémie, hypermagnésurie<br />

Syndrome de Bartter<br />

En général : néphrocalcinose, perte<br />

anténatal<br />

Défaut de transport du NaCl<br />

de sel, hyperaldostéronisme<br />

secondaire (alcalose métabolique,<br />

[137] AR 15q15-21 SLC12A1 NKCC2 par la BAL, donc réduction de<br />

hypokaliémie), hypercalciurie<br />

Anténatal : hydramnios,<br />

[138] AR 11q24 KCNJ1 ROMK l’électropositivité luminale induisant prématurité, déshydratation<br />

Syndrome de Bartter<br />

une diminution de la réabsorption<br />

à la naissance<br />

classique paracallulaire de Ca et de Mg<br />

[139]<br />

AR 1p36 CLCNKB CLC-Kb Enfants, retard de croissance<br />

Syndrome de Bartter<br />

anténatal avec surdité<br />

de perception [140]<br />

AR 1p31 BSND Barttin « furosemide like »<br />

Surdité de perception<br />

Maladie de Dent [141] Liée à l’X Xp11-22 CLCN5 ClC5 Défaut d’acidification lysosomale Lithiase/néphrocalcinose,<br />

et d’endocytose TP, augmentation rachitisme<br />

de l’action de la PTH au pôle apical Dysfonction tubulaire proximale,<br />

des cellules du TP (inhibition du protéinurie de bas poids moléculaire,<br />

transport de P et hypercalcitriolémie) fuite rénale de P, élévation<br />

inappropriée du calcitriol,<br />

hypercalciurie absorptive,<br />

insuffisance rénale terminale<br />

fréquente<br />

Syndrome oculo-cérébrorénal<br />

de Lowe (OCRL) [142]<br />

Acidose tubulaire distale<br />

(type 1)<br />

Liée à l’X Xq26-3 OCRL1 Phosphatidylinositol4,5biphosphate-5phosphatase<br />

[143] AD 17q21-22 SCL4A1 AE1<br />

Échangeur<br />

Cl/HCO3<br />

baso-latéral<br />

[144] AR 2p13 ATP6V1B1 Sous-unité<br />

B1 de la H+<br />

ATPase apicale<br />

Acidose tubulaire mixte<br />

proximale et distale<br />

(type 3) [145]<br />

AR 7q 33-34 ATP6V0A4 Sous-unité a4 de<br />

la H+ ATPase<br />

Mécanisme incertain Cataracte congénitale bilatérale,<br />

retard mental, retard de croissance,<br />

acidose métabolique, syndrome de<br />

Fanconi, hypercalciurie<br />

et néphrocalcinose<br />

En général : acidose métabolique,<br />

Ph urinaire > 6,5<br />

Hypokaliémie (variable)<br />

Hypercalciurie et hyperphosphaturie<br />

Hypercalciurie, hypocitraturie<br />

Après 10 ans, lithiases,<br />

secondaires à la résorption osseuse néphrocalcinose<br />

induite par l’acidose systémique<br />

(rachitisme/ostéomalacie)<br />

Enfant, néphrocalcinose précoce<br />

et probable défaut de réabsorption Retard de croissance, rachitisme,<br />

rénale du calcium et du phosphate<br />

déshydratation<br />

Surdité de perception précoce<br />

AR 8q22 CA2 CAII Ostéopétrose<br />

Cf. ci-dessus, mais surdité de<br />

perception inconstante et de début<br />

plus tardif<br />

Néphrocalcinose précoce, surdité,<br />

cécité, retard statural et mental<br />

Acidose métabolique<br />

Hypokaliémie<br />

T : mode de transmission ; Chr : localisation chromosomique ; AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; P : phosphate ; Ca : calcium ; NaCl : chlorure de<br />

sodium ; Mg : magnésium ; ATP : adénosine triphosphate ; PTH : parathormone ; TP : tube proximal ; BAL : branche ascendante large de Henle.<br />

18 Néphrologie


.<br />

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1408-18.<br />

M. Courbebaisse.<br />

Service de néphrologie et dialyses, Hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75020 Paris, France.<br />

[144] Ruf R, Rensing C, Topaloglu R, Guay-Woodford L, Klein C,<br />

Vollmer M, et al. Confirmation of the ATP6B1 gene as responsible for<br />

distal tubular acidosis. Pediatr Nephrol 2003;18:105-9.<br />

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2003;78(suppl3):584S-592S.<br />

J.-C. Souberbielle.<br />

Service d’explorations fonctionnelles, Hôpital Necker-Enfants malades, 149-161, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Courbebaisse M., Souberbielle J.-C. Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations. EMC (Elsevier<br />

Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-010-B-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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au patient<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

22 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Exploration de la fonction glomérulaire<br />

rénale (I). Méthodes de référence<br />

et créatinine sérique<br />

P. Delanaye, N. Maillard, L. Thibaudin, C. Mariat<br />

L’évaluation du débit de filtration glomérulaire (DFG) est classiquement utilisée pour estimer la fonction<br />

rénale. Le DFG peut être exploré par la clairance d’une substance totalement et exclusivement éliminée de<br />

l’organisme par filtration glomérulaire. Plusieurs substances exogènes, telles que l’inuline, ont des valeurs<br />

de clairance rénale considérées comme équivalentes au DFG. La clairance urinaire d’inuline est le chef de<br />

file des techniques de référence de mesure du DFG. Les méthodes de référence sont de mise en œuvre<br />

complexe mais restent indispensables lorsqu’une évaluation précise de la fonction rénale est nécessaire. À<br />

l’inverse, la créatinine sérique est facilement et rapidement disponible et constitue la substance endogène<br />

la plus utilisée pour évaluer le DFG. L’évaluation de la fonction glomérulaire rénale à partir de ce<br />

marqueur reste toutefois approximative dans de nombreuses situations cliniques.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Débit de filtration glomérulaire ; Inuline ; Créatinine<br />

Introduction 1<br />

Marqueur plasmatique idéal du débit de filtration glomérulaire 1<br />

Notion de clairance 1<br />

Différents types de clairances : urinaire et plasmatique 2<br />

Inuline : marqueur de référence historique 3<br />

Autres marqueurs exogènes de référence 4<br />

Créatinine sérique 5<br />

Mesure de la créatinine dans le sang et les urines : considérations<br />

analytiques 5<br />

Physiologie de la créatinine 5<br />

Clairance de créatinine sur recueil urinaire de 24 heures 6<br />

Variations de la concentration de créatinine indépendamment<br />

d’une modification du débit de filtration glomérulaire 6<br />

Conclusion 7<br />

■ Introduction<br />

La quantification de la fonction de filtration glomérulaire du<br />

rein est classiquement utilisée pour estimer le fonctionnement<br />

global de cet organe. Ceci ne doit, bien entendu, pas occulter<br />

les fonctions tubulaires et endocrines de ce dernier qui restent<br />

importantes. Il n’en reste pas moins que la fonction glomérulaire<br />

est fondamentale à l’équilibre hydroélectrique de l’organisme.<br />

Si, du point de vue historique, on devait déterminer une<br />

année « zéro » dans l’étude de la mesure de la fonction glomérulaire,<br />

cette année serait, sans aucun doute, l’année 1951, date<br />

à laquelle le professeur de physiologie de l’université de New<br />

York, Homer W. Smith, a publié son célèbre ouvrage The<br />

Kidney : structure and function in health and disease [1] . En effet,<br />

cet ouvrage, véritable compilation (2 300 références reprises) de<br />

toutes les données physiologiques concernant le rein, a fait date<br />

et est, encore aujourd’hui, considéré comme une « bible » de la<br />

physiologie rénale. Smith y reprend les notions, déjà connues<br />

depuis les années 1920, de clairance rénale [2, 3] . Il y décrit les<br />

limitations des clairances d’urée et de créatinine qui avaient été<br />

Néphrologie<br />

décrites par de nombreux auteurs avant lui [4, 5] et insiste sur les<br />

critères indispensables pour qu’un marqueur puisse être considéré<br />

comme « idéal » pour la mesure de la fonction glomérulaire<br />

[6] . L’utilisation, à cet effet, de l’inuline doit beaucoup à cet<br />

auteur [1, 6] . Dans les décennies qui ont suivi cet ouvrage,<br />

plusieurs progrès sensibles ont été évidemment réalisés, en<br />

parallèle, dans divers domaines touchant à la mesure du débit<br />

de filtration glomérulaire (DFG) [7] , que cela concerne la mesure<br />

de la créatinine sérique (et la description des limitations à son<br />

utilisation) [8] , l’estimation du DFG par les équations basées sur<br />

la créatinine et la recherche de nouveaux marqueurs plasmatiques<br />

du DFG [9] . Dans cette première partie consacrée à l’exploration<br />

de la fonction glomérulaire rénale, nous décrivons en<br />

détails les moyens à notre disposition pour mesurer précisément<br />

le DFG par les différentes techniques dites « de référence » et<br />

discutons de l’intérêt et des limitations de la créatinine sérique<br />

pour évaluer le DFG.<br />

Notre propos se limite volontairement à l’exploration de la<br />

fonction glomérulaire chez l’adulte et nous renvoyons le lecteur<br />

à l’article de synthèse récemment publié par Georges J. Schwartz<br />

sur les spécificités pédiatriques [10] .<br />

■ Marqueur plasmatique idéal<br />

du débit de filtration glomérulaire<br />

Notion de clairance<br />

18-011-A-10<br />

La clairance (Cl) d’une substance X donnée est définie<br />

comme le volume de plasma qui contenait cette substance,<br />

totalement épuré de cette substance par unité de temps. Pour<br />

une substance X d’élimination rénale, la clairance est définie<br />

par le rapport suivant :<br />

Cl X =U X × V/P X<br />

Cl X est la clairance rénale de la substance X (exprimée en ml/<br />

min), U X et P X les concentrations urinaires et plasmatiques de<br />

la substance X (en mg/l), V le débit urinaire (en ml/min).<br />

L’excrétion rénale d’une substance X correspond à la somme<br />

de la filtration glomérulaire et de la sécrétion tubulaire diminuée<br />

de sa réabsorption tubulaire.<br />

1


18-011-A-10 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique<br />

Concentration du marqueur (mg/l)<br />

10<br />

1<br />

I 1<br />

0,1<br />

0<br />

I 2<br />

B<br />

50<br />

b 2<br />

Pour une substance qui filtre librement à travers les glomérules<br />

et qui ne subit aucun transfert tubulaire (ni sécrétion ni<br />

réabsorption), son excrétion rénale (U X × V) ne dépend que du<br />

débit glomérulaire et de sa concentration plasmatique :<br />

U X ×V=DFG×P X<br />

Pour une telle substance, la clairance rénale est égale au<br />

DFG :<br />

DFG=U X × V/P X =Cl X<br />

Par conséquent, un marqueur idéal de la filtration glomérulaire<br />

doit être une substance libre non liée aux protéines,<br />

éliminée exclusivement par le rein, filtrée librement à travers la<br />

membrane glomérulaire sans subir de sécrétion ni de réabsorption<br />

au niveau du tubule rénal, non métabolisée et ne modifiant<br />

pas le DFG.<br />

Les méthodes de mesure de la fonction rénale se différencient<br />

en fonction du type de clairance (urinaire ou plasmatique), du<br />

type de marqueur exogène utilisé (inuline, marqueurs isotopiques,<br />

produits de contraste iodés), du type d’injection intraveineuse<br />

(bolus unique ou perfusion continue).<br />

Différents types de clairances :<br />

urinaire et plasmatique<br />

b 1<br />

Le DFG peut être déterminé selon deux types de clairances<br />

dépendant des types de prélèvements effectués et utilisés pour<br />

les calculs. On distingue donc les clairances rénales (ou urinaires)<br />

où sont prélevés des échantillons d’urine et de sang et les<br />

clairances plasmatiques où est (sont) prélevé(s) un (ou plusieurs)<br />

échantillon(s) de sang.<br />

Clairances urinaires<br />

La technique des clairances urinaires a été introduite par<br />

Rehberg et al. en 1926 [3] . Le calcul du DFG s’effectue à partir<br />

de la mesure de la concentration du marqueur dans le plasma<br />

et de celle dans les urines selon la formule UV/P. La clairance<br />

urinaire est en fait la moyenne des clairances calculées sur<br />

plusieurs périodes (de 30 minutes environ). Les prélèvements<br />

débutent après un délai qui correspond à la période de distribution<br />

du traceur dans l’organisme.<br />

Clairances plasmatiques<br />

A<br />

100<br />

150<br />

200<br />

250<br />

Temps (min)<br />

Figure 1. Clairance plasmatique : modélisation bicompartimentale.<br />

ASC : aire sous la courbe ; DFG : débit de filtration glomérulaire. ASC = A<br />

+B=I 1/b 1 +I 2/b 2 ; DFG = dose/ASC.<br />

Elles ne nécessitent par définition aucun prélèvement urinaire.<br />

Après l’injection intraveineuse d’un marqueur, sa concentration<br />

plasmatique évolue en deux phases : une décroissance<br />

rapide qui correspond à la distribution du marqueur dans<br />

l’organisme puis une décroissance plus lente qui correspond à<br />

son élimination par filtration glomérulaire (Fig. 1).<br />

La clairance plasmatique d’un marqueur est calculée par le<br />

rapport de la dose du marqueur injectée et l’aire sous la courbe<br />

(ASC) de décroissance du marqueur dans le plasma. Cette<br />

courbe est établie à partir de prélèvements sanguins échelonnés<br />

dans le temps. Le calcul de l’ASC de décroissance fait appel à<br />

divers modèles mathématiques de pharmacocinétique qui<br />

comportent un, deux ou trois compartiments. Le choix du<br />

modèle pharmacocinétique dépend de la biodisponibilité du<br />

marqueur utilisé. À noter qu’en cas de clairance plasmatique, il<br />

est particulièrement critique d’avoir recours à un marqueur<br />

n’ayant pas (ou très peu) de clairance extrarénale.<br />

Modèle à un compartiment<br />

Dans ce modèle, le marqueur est injecté dans un seul compartiment<br />

(le plasma) et est éliminé sans échange avec d’autres<br />

compartiments. La concentration c(t) du marqueur à un temps<br />

t donné dans ce compartiment après la fin de l’injection est<br />

égale à l’exponentielle c(t) = I 1 e – b1t où I 1 est l’intercepte de la<br />

courbe sur l’axe des ordonnées, ce qui correspond à la concentration<br />

théorique du marqueur dans le compartiment à la fin de<br />

l’injection et b1 le débit constant d’élimination. L’intégrale de<br />

cette fonction correspond à l’ASC et est égale à I 1/b1. Dans ce<br />

modèle unicompartimental, le calcul de l’ASC ne tient donc pas<br />

compte de la première composante de distribution (les prélèvements<br />

sanguins sont effectués après un intervalle de temps<br />

suffisant pour s’affranchir de cette première composante de<br />

distribution) et est donc sous-estimé. La clairance plasmatique<br />

et le DFG (dose injectée/ASC) s’en trouvent donc surestimés et<br />

certains auteurs ont appliqué des facteurs de correction pour<br />

gommer cette surestimation (cf. infra) [11, 12] .<br />

Modèle à deux compartiments<br />

Dans ce modèle, le plus communément utilisé (Fig. 1),<br />

immédiatement après l’injection, le marqueur se distribue entre<br />

un compartiment central (le plasma) et un compartiment<br />

périphérique extracellulaire. L’élimination du marqueur se fait à<br />

partir du compartiment plasmatique. La concentration dans ce<br />

modèle est décrite comme la somme de deux fonctions exponentielles<br />

avec deux niveaux constants d’élimination distincts<br />

(b1 et b2) et deux interceptes différents (I1 et I2): c(t) = I 1 e – b1t +I 2 e<br />

– b2t<br />

L’ASC devient : I 1/b1+I 2/b2 et le DFG correspond au rapport<br />

de la dose injectée sur l’ASC.<br />

Modèle à trois compartiments<br />

Dans ce modèle, le marqueur se distribue entre le compartiment<br />

plasmatique et l’espace extracellulaire mais aussi entre<br />

l’espace extracellulaire et des compartiments plus profonds<br />

(septa musculaires, tendons, tissu sous-cutané) [13] . L’élimination<br />

du marqueur se fait seulement à partir du plasma. Dans ce cas,<br />

la concentration du marqueur est décrite mathématiquement<br />

par la somme de trois fonctions exponentielles qui comportent<br />

trois niveaux constants d’élimination distincts (b1, b2 et b3) et<br />

trois interceptes différents (I1,I2 et I3): c(t) = I 1 e – b1t +I 2 e – b2t +I 3 e<br />

– b3t<br />

L’ASC devient I 1/b1 + I 2/b2 + I 3/b3 et le DFG le rapport de la<br />

dose injectée sur l’ASC. Que ce soit dans le modèle à un ou à<br />

plusieurs compartiments, plus le nombre et la durée des<br />

prélèvements sont grands et plus la méthode s’avère précise,<br />

notamment pour la mesure des DFG les plus bas.<br />

Modèles pharmacocinétiques simplifiés<br />

Il s’agit de modèles mathématiques permettant d’estimer<br />

l’ASC à partir d’un nombre limité de prélèvements. Alors que,<br />

dans un modèle bicompartimental classique, la décroissance<br />

plasmatique du marqueur est habituellement décrite par deux<br />

courbes exponentielles obtenues par, au minimum, quatre<br />

prélèvements (par exemple, à 10 et 30 minutes pour la première<br />

composante – décroissance rapide – et 120 et 300 minutes pour<br />

la deuxième composante – décroissance lente –) [14] , cette même<br />

clairance plasmatique peut être calculée seulement à partir de la<br />

courbe de décroissance plasmatique lente (modèle à un compartiment)<br />

corrigée ultérieurement par différentes méthodes<br />

mathématiques (méthode de Bröchner-Mortensen, méthode de<br />

Chantler [11, 12] ). Dans ce cas, deux prélèvements peuvent être<br />

suffisants : le premier prélevé classiquement 120 minutes après<br />

l’injection pour éviter une éventuelle participation de la<br />

2 Néphrologie


composante rapide de décroissance plasmatique, le second<br />

prélevé à 300 minutes ou plus tard en cas d’insuffisance rénale<br />

sévère.<br />

En cas de troisième secteur (ascite ou œdème interstitiel), il<br />

n’est plus possible d’utiliser les clairances plasmatiques (a<br />

fortiori les modèles simplifiés) et le recours aux clairances<br />

urinaires est indispensable.<br />

Inuline : marqueur de référence historique<br />

L’inuline est un polymère de fructose (polyfructosan) avec un<br />

poids moléculaire de 5 200 Da, qui est filtré librement au travers<br />

du glomérule. C’est une substance physiologiquement inerte,<br />

libre et non fixée aux protéines plasmatiques. Elle n’est ni<br />

métabolisée, ni sécrétée, ni réabsorbée par le rein et n’altère pas<br />

sa fonction. Bien que certains auteurs décrivent l’existence<br />

d’une élimination extrarénale [15, 16] , elle est considérée comme<br />

marqueur idéal de filtration glomérulaire et donc comme<br />

marqueur de référence pour l’étude du DFG par d’autres<br />

marqueurs [1] .<br />

Dosage de l’inuline<br />

Le dosage de l’inuline dans les urines et dans le sang repose<br />

classiquement sur une technique combinant une réaction<br />

biochimique (visant à hydrolyser l’inuline en fructose) suivie<br />

d’une mesure colorimétrique. L’étape d’hydrolyse est réalisée à<br />

chaud et en milieu acide. Le réactif de la réaction colorée peut<br />

être l’anthrone [17] , le résorcinol [18] , ou la diphénylamine [19] .<br />

Le principal inconvénient de cette technique est l’existence<br />

d’une interférence avec le glucose ou d’autres glucides, ce qui<br />

réduit la spécificité de la réaction [20] .<br />

Un traitement enzymatique préalable des prélèvements ou la<br />

mesure d’un blanc avant l’administration de l’inuline peut<br />

s’avérer nécessaire pour corriger cette interférence. Mais la<br />

soustraction d’un blanc n’est pas toujours suffisante étant<br />

donné la variation possible de la glycémie au cours d’une<br />

clairance. Ainsi, certains auteurs ont développé des techniques<br />

de dosage enzymatique remplaçant l’hydrolyse biochimique par<br />

une hydrolyse enzymatique (inulinase), l’élimination du glucose<br />

présent par oxydation (glucose oxydase) et la réaction colorée<br />

par une quantification d’une coenzyme par absorbance [21, 22] .<br />

Les caractéristiques analytiques des techniques de dosage sont<br />

importantes puisqu’elles vont retentir sur la précision et la<br />

reproductibilité de la détermination du DFG.<br />

Toutes ces techniques (biochimiques ou enzymatiques) ont<br />

une reproductibilité inférieure à5% [23, 24] .<br />

D’autres auteurs font appel à la high performance liquid<br />

chromatography (HPLC) pour le dosage du fructose après hydrolyse<br />

de l’inuline [25] .<br />

Différents types de clairance de l’inuline<br />

Clairance urinaire de l’inuline<br />

Elle est considérée comme la technique de référence ou gold<br />

standard. La technique classique décrite par Smith [1] comprend<br />

une injection intraveineuse d’inuline de charge suivie d’une<br />

perfusion continue de façon à atteindre une concentration<br />

plasmatique constante en inuline. Après une période d’équilibration<br />

de 1 heure environ, des échantillons sanguins et<br />

urinaires sont prélevés alternativement sur trois périodes de 10<br />

à 20 minutes. Les échantillons urinaires sont prélevés par<br />

sondage vésical. Pour chaque période, la clairance urinaire de<br />

l’inuline est calculée par la formule UV/P et la clairance finale<br />

correspond à la moyenne des clairances de chaque période.<br />

Avec cette technique, le DFG chez les hommes et les femmes<br />

âgés de 20 à 30 ans en bonne santé a été évalué respectivement<br />

à 130 et 120 ml/min rapporté à 1,73 m 2 de surface corporelle.<br />

Le coefficient de variation était de 10 % entre les clairances des<br />

différentes périodes d’une même épreuve [1] .<br />

Cette technique évite le problème de l’équilibration entre les<br />

différents compartiments puisque l’inuline est régulièrement<br />

administrée par la perfusion continue. De plus, pour éviter le<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique 18-011-A-10<br />

sondage vésical, les périodes peuvent être plus longues (30 à<br />

60 minutes) mais dans ce cas, il faut assurer une bonne hydratation<br />

(soit par voie orale soit par perfusion) pour maintenir un<br />

bon niveau de débit urinaire.<br />

Pour éviter la perfusion continue, l’inuline peut être administrée<br />

en une seule injection intraveineuse mais cette méthode<br />

apparaît quelque peu moins précise et est, finalement, peu<br />

utilisée [26, 27] . Comme pour la technique en perfusion continue,<br />

des prélèvements sanguins et urinaires sont réalisés après un<br />

intervalle de temps correspondant à la première composante de<br />

distribution. Dans le calcul, l’influence du temps de passage du<br />

marqueur dans le tractus urinaire, c’est-à-dire des glomérules à<br />

la vessie, est habituellement négligeable.<br />

La principale limitation de la technique de clairance urinaire<br />

est la difficulté d’obtention de recueils urinaires minutés<br />

corrects sans avoir recours au sondage vésical. En effet, des<br />

recueils urinaires incomplets peuvent conduire à des résultats<br />

erronés. Pour remédier à ce problème, il est possible d’évaluer<br />

le volume d’urine résiduel dans la vessie par ultrasons (type<br />

BladderScan ® ) [28] .<br />

Le recours à des techniques de clairances plasmatiques permet<br />

d’éviter le problème des recueils urinaires.<br />

Clairance plasmatique de l’inuline après perfusion continue<br />

Earle et Berliner [29] ont été les premiers à introduire cette<br />

technique basée sur la mesure de la clairance plasmatique de<br />

l’inuline à l’équilibre (concentration plasmatique du marqueur<br />

constante avec volume de distribution saturé) durant une<br />

perfusion continue. Ainsi, à l’équilibre, le débit d’excrétion est<br />

égal au débit de la perfusion. Ainsi DFG (ml/min) =R×I/Poù<br />

R est le débit de la perfusion, I la concentration d’inuline dans<br />

la perfusion et P la concentration plasmatique d’inuline à<br />

l’équilibre.<br />

Finalement, R×Iremplace le facteur U×Vdelaformule<br />

standard de la clairance urinaire.<br />

Le débit d’inuline à perfuser est déterminé par la mesure de<br />

la clairance de la créatinine ou par son estimation par des<br />

formules [30] . Après 2 heures environ, l’équilibre est atteint et les<br />

prélèvements sanguins sont réalisés.<br />

Dans une étude comparative, le coefficient de variation de<br />

cette technique était de 7,8 % alors que la reproductibilité de la<br />

technique standard était de 11,3 % [26] . Par ailleurs, plusieurs<br />

auteurs ont montré que cette technique surestimait le DFG de<br />

5 à 10 ml/min par rapport au DFG déterminé par la technique<br />

classique [15, 24, 26] . D’après ces auteurs, cette surestimation serait<br />

liée à la difficulté d’atteindre des concentrations plasmatiques<br />

constantes durant une perfusion continue intraveineuse. En<br />

effet, l’inuline a un poids moléculaire relativement élevé et<br />

l’équilibre complet de la molécule dans son volume de distribution,<br />

c’est-à-dire dans le volume extracellulaire, prend plus de<br />

12 heures [24] . Ainsi une distribution incomplète de l’inuline<br />

peut conduire à des concentrations plasmatiques plus basses que<br />

celles attendues à l’équilibre. Et par conséquent, le DFG s’en<br />

trouve surestimé.<br />

Ainsi, ces auteurs préconisent même une nuit de perfusion<br />

pour atteindre l’équilibre [24] . Pour atteindre plus rapidement cet<br />

état d’équilibre, une dose de charge peut être administrée avant<br />

la perfusion continue. Vu les contraintes inhérentes à la<br />

perfusion continue, cette technique n’est que très peu utilisée.<br />

Clairance plasmatique de l’inuline après injection<br />

intraveineuse unique<br />

Un bolus d’inuline est administré par voie intraveineuse et les<br />

échantillons sanguins sont prélevés jusqu’à 240 minutes après<br />

l’injection. Cette technique a donc l’avantage de ne pas<br />

nécessiter de perfusion continue et d’être ainsi plus rapidement<br />

réalisée.<br />

Les concentrations d’inuline mesurées permettent la construction<br />

de la courbe de décroissance plasmatique en fonction<br />

du temps.<br />

La clairance correspond alors au ratio dose injectée/ASC.<br />

Les résultats des études comparant cette technique à la<br />

technique standard sont contradictoires : certains trouvent une<br />

surestimation systématique [26] , d’autres montrent une bonne<br />

3


18-011-A-10 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique<br />

corrélation des résultats obtenus par cette méthode comparés à<br />

ceux obtenus par la technique standard de clairance rénale [31,<br />

32] mais le nombre de prélèvements est trop important pour<br />

qu’elle soit utilisée en pratique courante, surtout chez l’enfant.<br />

Ainsi des études menées chez l’enfant et l’adulte ont défini<br />

des stratégies optimales avec un nombre de prélèvements<br />

limité [32-34] . Les schémas de prélèvements sont variables d’une<br />

étude à une autre. Certaines équipes ont même réduit le<br />

nombre de prélèvements à un seul [32, 34] ; cela est cependant<br />

loin d’être validé par tous [32] .<br />

Autres marqueurs exogènes de référence<br />

L’utilisation de l’inuline est réservée à des centres de référence.<br />

Elle n’est pas adaptée à des mesures de routine répétées<br />

et impose de lourdes contraintes aussi bien aux patients<br />

(épreuves longues, perfusion continue) qu’au personnel soignant<br />

(recueils fractionnés et minutés des urines). Son dosage<br />

au laboratoire est long. Pour toutes ces raisons, d’autres<br />

marqueurs du DFG sont utilisés.<br />

On distingue deux classes pharmacologiques : les radiopharmaceutiques<br />

et les produits de contraste iodés.<br />

Radiopharmaceutiques<br />

Ce sont des substances marquées par un corps radioactif. Les<br />

principaux composés utilisés comme marqueur de la filtration<br />

glomérulaire sont : le 51 Cr-acide éthylène diamine tétraacétique<br />

(EDTA), le 99m Tc-diéthylène-triamino-penta-acétate<br />

(DTPA) et le 125 I-iothalamate.<br />

Ces composés sont de faible poids moléculaire par rapport à<br />

l’inuline. Ils répondent aux principaux critères de marqueur de<br />

filtration glomérulaire : ce sont des substances libres non liées<br />

aux protéines plasmatiques ; leur élimination extrarénale semble<br />

négligeable.<br />

Les avantages de ces substances sont leur facilité d’administration,<br />

la simplicité, l’exactitude et la précision de leur mesure.<br />

Leurs propriétés pharmacocinétiques permettent d’étudier<br />

facilement la courbe de décroissance plasmatique en fonction<br />

du temps après injection intraveineuse en bolus. De cette<br />

courbe de décroissance plasmatique en fonction du temps, la<br />

clairance plasmatique du marqueur est calculée en utilisant des<br />

modèles pharmacocinétiques le plus souvent de type<br />

bicompartimental.<br />

L’irradiation entraînée par leur injection, même si elle est<br />

relativement faible (inférieure à une radiographie des poumons),<br />

contre-indique son utilisation chez la femme enceinte [28] .La<br />

seconde limitation d’utilisation est d’ordre réglementaire : en<br />

France, leur injection doit être réalisée dans un service agréé<br />

pour l’utilisation des isotopes in vivo. De plus, les déchets<br />

radioactifs nécessitent des circuits d’élimination très spécifiques<br />

et onéreux.<br />

125 I-iothalamate<br />

L’iothalamate a un poids moléculaire de 636 Da. Il peut être<br />

utilisé marqué par l’ 125 I ou non marqué. Quand il est marqué,<br />

sa période physique est de 60 jours, ce qui permet de différer le<br />

dosage. Sa concentration sérique peut être mesurée par comptage<br />

radioactif, par HPLC ou par électrophorèse capillaire. Dans<br />

une étude comparative, la clairance plasmatique du 125 Iiothalamate<br />

était 13 % plus élevée que celle du 51 Cr-EDTA [35] .<br />

Cette différence était réduite par le prétraitement des patients<br />

par du probénécide, suggérant une sécrétion tubulaire de<br />

l’iothalamate. De même, une surestimation de la clairance<br />

urinaire de l’inuline par la clairance plasmatique de l’iothalamate<br />

a été observée chez des patients avec une fonction rénale<br />

normale [36] . Il existe une clairance extrarénale (à savoir biliaire)<br />

de l’iothalamate qui apparaît limitée par rapport à la clairance<br />

rénale d’un patient sain mais son influence pourrait être plus<br />

importante en cas de mesure de DFG d’un patient insuffisant<br />

rénal [37] . Il faut noter que l’iothalamate est le marqueur<br />

exogène du DFG le plus utilisé aux États-Unis.<br />

99m Tc-DTPA<br />

Le 99m Tc-DTPA correspond à une molécule de DTPA marquée<br />

par le 99m Tc. Le DTPA a un poids moléculaire de 393 Da et est<br />

principalement éliminé par filtration glomérulaire. L’avantage<br />

de la période physique courte du 99m Tc pour la réalisation des<br />

scintigraphies rénales est un inconvénient pour le traitement<br />

des prélèvements qui ne peut être différé. Le principal problème<br />

de ce marqueur est son instabilité après préparation in vitro.<br />

Ainsi le 99m Tc peut se dissocier du DTPA qui peut alors se lier<br />

aux protéines plasmatiques [38] . Cependant, lorsque les critères<br />

de qualité du traceur sont vérifiés, le 99m Tc-DTPA permet une<br />

mesure précise du DFG comparable aux clairances de l’inuline<br />

et du 51 Cr-EDTA [36, 38, 39] . Finalement, la précision du<br />

99m Tc-DTPA va dépendre de la source commerciale du marqueur<br />

et de sa stabilité.<br />

51 Cr-EDTA<br />

L’EDTA est un autre marqueur glomérulaire, de poids moléculaire<br />

de 292 Da, marqué par le 51 Cr. Il s’agit d’un composé<br />

très stable aussi bien in vitro qu’in vivo après injection. La<br />

période physique du 51 Cr de 28 jours permet un stockage et un<br />

traitement différé des échantillons. Ce marqueur est principalement<br />

utilisé en Europe. La clairance plasmatique du<br />

51 Cr-EDTA mesurée après son injection intraveineuse en bolus<br />

excède sa clairance urinaire en moyenne de 6 ml/min [39] .<br />

Cependant, la clairance plasmatique du 51 Cr-EDTA semble en<br />

accord avec la clairance urinaire de l’inuline indiquant qu’il<br />

s’agit d’un bon marqueur du DFG [38-40] . Plusieurs études ont été<br />

menées pour valider des clairances plasmatiques du 51 Cr-EDTA<br />

simplifiées (nécessitant un à plusieurs prélèvements sanguins)<br />

par rapport à la clairance plasmatique totale (nécessitant<br />

12 prélèvements) retenue comme méthode de référence [41-43] .<br />

On peut considérer la clairance plasmatique du 51 Cr-EDTA<br />

comme une alternative possible de la technique de référence.<br />

Produits de contraste iodés<br />

Nous avons déjà évoqué l’iothalamate qui peut être utilisé en<br />

méthode froide. L’iohexol est un autre produit de contraste<br />

iodé, non ionique utilisé comme marqueur de filtration glomérulaire.<br />

Il a un poids moléculaire de 821 Da, sa demi-vie<br />

d’élimination plasmatique est de 90 minutes. Il est distribué<br />

dans l’espace extracellulaire et moins de 2 % se lient aux<br />

protéines plasmatiques. Il est éliminé par filtration glomérulaire<br />

et dans le cas de débit de filtration réduit, l’élimination<br />

extrarénale de l’iohexol est négligeable. Quand il est utilisé à<br />

fortes doses en imagerie médicale, il peut avoir des effets<br />

néphrotoxiques et conduire à une néphropathie, surtout chez<br />

des patients avec une insuffisance rénale préexistante [28] .En<br />

revanche, quand l’iohexol est utilisé comme marqueur du DFG,<br />

les doses administrées sont beaucoup plus faibles. Plusieurs<br />

études menées chez des patients avec des degrés divers d’insuffisance<br />

rénale ont montré l’absence d’effet néphrotoxique<br />

quand il était utilisé à de faibles doses (10 ml d’une solution à<br />

300 mg/ml) [44, 45] . Le dosage de l’iohexol dans le sérum après<br />

déprotéinisation et dans les urines par HPLC est bien validé sur<br />

le plan analytique et constitue la technique de référence [46] .<br />

C’est une technique de dosage très sensible permettant de<br />

réduire les doses injectées à5mld’iohexol (300 mg/ml). Deux<br />

études ont montré qu’à cette dose, l’iohexol pouvait être utilisé<br />

sans risque chez le patient diabétique avec une atteinte rénale<br />

modérée [47, 48] . Si les cas de réactions anaphylactiques semblent<br />

exceptionnels dans le cadre de la mesure du DFG par l’iohexol,<br />

on évite, bien évidemment, d’utiliser ce marqueur chez le<br />

patient connu pour être allergique aux produits de contraste.<br />

Les préparations commerciales contiennent deux isomères qui<br />

se distribuent dans le corps de la même manière [38] . En<br />

pratique, seul le pic principal élué à 5 minutes est utilisé pour<br />

déterminer les concentrations plasmatiques/sériques de<br />

l’iohexol [38] .<br />

La plupart des auteurs valident la mesure du DFG par la<br />

clairance plasmatique ou urinaire de l’iohexol par rapport à la<br />

clairance urinaire de l’inuline [23, 28, 32] . Ainsi, l’étude de<br />

4 Néphrologie


Brändström et al. montre une excellente corrélation entre la<br />

clairance plasmatique de l’iohexol et celle du 51 Cr-EDTA et une<br />

absence de différence entre les deux clairances par l’analyse de<br />

Bland-Altman [41] .<br />

Ainsi, beaucoup d’auteurs considèrent l’iohexol comme un<br />

nouveau marqueur de référence de mesure du DFG.<br />

■ Créatinine sérique<br />

Le terme de créatinine fut probablement employé la première<br />

fois en 1847 par Justus von Liebig, célèbre chimiste allemand,<br />

lorsqu’il décrit la substance obtenue après avoir chauffé de la<br />

créatine en présence de sels minéraux [49] . Aujourd’hui, c’est<br />

toujours l’un des dosages biologiques les plus demandés en<br />

pratique clinique. Si la créatinine sérique est, à ce jour, le seul<br />

marqueur plasmatique utilisé en pratique quotidienne pour<br />

appréhender le concept de fonction rénale, son bon usage et<br />

une interprétation correcte de son résultat restent souvent<br />

problématiques. Les raisons en sont à la fois physiologiques<br />

(liées au fait que la créatinine est loin d’être un marqueur idéal<br />

du DFG) et analytiques (interférences dans les dosages et<br />

multiplication des méthodes de dosage).<br />

Mesure de la créatinine dans le sang<br />

et les urines : considérations analytiques<br />

L’ancienneté, la rapidité et la fréquence de la mesure de<br />

créatinine ne doivent pas faire croire que ce dosage est simple,<br />

bien au contraire. La créatinine peut être mesurée dans le sang<br />

et les urines par deux grands types de techniques, à savoir les<br />

méthodes dérivées de la fameuse réaction de Jaffe et les méthodes<br />

enzymatiques. En 1886, Jaffe décrit la réaction entre le<br />

picrate et la créatinine qui, en milieu alcalin, donne une<br />

solution de couleur rouge-orange [50] . Au début du XX e siècle,<br />

Folin est l’un des premiers à quantifier, par colorimétrie, la<br />

créatinine dans les urines puis dans le sang [51] . Très rapidement,<br />

plusieurs auteurs évoquent des problèmes de spécificité de ce<br />

dosage [52, 53] . Les composants interférant dans la réaction de<br />

Jaffe, appelés pseudochromogènes, ont une concentration plus<br />

ou moins stable mais leur concentration précise reste imprévisible<br />

pour un patient donné [54, 55] . Leur effet est donc d’autant<br />

plus important sur le résultat final de créatinine que celle-ci se<br />

situe dans des valeurs basses [54] .<br />

Les pseudochromogènes (acétoacétate, pyruvate, acides<br />

cétoniques, protéines, glucose et ascorbate) sont nombreux et<br />

peuvent participer jusqu’à 15 %-20 % de la réaction (pour une<br />

créatinine située dans les concentrations normales) [8, 53, 56] . Des<br />

valeurs encore plus faussement élevées de créatinine peuvent se<br />

voir dans certaines situations cliniques particulières, comme<br />

l’acidocétose [57] .<br />

Dès les années 1970 et, notamment, l’apparition des premiers<br />

automates de biologie clinique, la réaction de Jaffe est étudiée<br />

dans ses moindres détails [58, 59] . Ainsi, il est apparu intéressant<br />

de mesurer le produit de la réaction non pas à l’équilibre mais<br />

en cours de formation [58-60] . Ces méthodes sont regroupées<br />

sous le terme de méthode « cinétique ». En général, la lecture de<br />

la coloration se fait entre 20 et 120 secondes. Ceci permet<br />

d’éviter, ou plus exactement de diminuer, deux des interférences<br />

les plus importantes, à savoir celle avec l’acétoacétate qui réagit<br />

fortement et surtout très vite avec le picrate [58, 60, 61] et avec les<br />

protéines et le glucose qui, en revanche, réagissent très lentement<br />

avec le picrate [58, 61] . Ces méthodes cinétiques permettent<br />

de diminuer substantiellement, mais pas totalement, les interférences<br />

[61] . Plusieurs firmes ont aussi utilisé le concept de<br />

« Jaffe compensé ». Il se base sur le fait que, même en l’absence<br />

de créatinine, une mesure de créatinine par une méthode de<br />

Jaffe sur sérum ou plasma donne une valeur d’environ 0,3 mg/<br />

dl, en moyenne [62] . Cette concentration est censée refléter la<br />

concentration moyenne de pseudochromogènes dans le sang.<br />

L’idée est donc de recalibrer les appareils en soustrayant<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique 18-011-A-10<br />

systématiquement 0,3 mg/dl à tous les résultats (la valeur de<br />

0,3 mg/dl est exemplative et varie selon les automates). Cette<br />

compensation, purement mathématique, peut être critiquée,<br />

notamment quand elle est appliquée à des concentrations très<br />

basses de créatinine, comme c’est le cas en pédiatrie [63] .<br />

En parallèle des méthodes de Jaffe se développent les méthodes<br />

basées sur des réactions enzymatiques qui dégradent in fine<br />

la créatinine. Ces méthodes sont connues depuis les années<br />

1930 [55, 64] mais connaissent un net regain d’intérêt ces<br />

dernières années, vu leur plus grande précision analytique. Elles<br />

sont dorénavant les plus recommandées au niveau international<br />

mais restent plus coûteuses (actuellement, elles restent dix fois<br />

plus chères) et ne sont pas, comme nous le verrons, exemptes<br />

de toute interférence [59, 65] . Il existe des différences significatives<br />

entre les résultats donnés par une méthode enzymatique et<br />

une méthode basée sur la réaction de Jaffe, ce qui est évidemment<br />

attendu, mais pose problème dans le cadre de l’établissement<br />

des valeurs de référence et de l’estimation du DFG par les<br />

formules basées sur la créatinine [66] . De même la multiplication<br />

des automates est à l’origine d’une certaine confusion qui<br />

semble pouvoir être améliorée par une standardisation des<br />

dosages, possible avec le recours à la méthode de référence<br />

(chromatographie avec dilution isotopique couplée à la spectrométrie<br />

de masse) [67-69] .<br />

Physiologie de la créatinine<br />

La créatinine, dont le poids moléculaire est de 113 Da, est le<br />

catabolite anhydrique, inerte et terminal de la créatine et de la<br />

phosphocréatine [70] . La synthèse de créatine est essentiellement<br />

hépatique [71] . La majorité de la créatine est destinée aux<br />

muscles où sa phosphorylation donne un composé à haute<br />

valeur énergétique absolument nécessaire au processus de<br />

contraction musculaire. La créatinine est donc synthétisée à<br />

partir de la créatine suite à une réaction irréversible et non<br />

enzymatique. Par jour, 1%à2%delacréatine musculaire est<br />

convertie en créatinine [71] . Il apparaît donc évident que la<br />

concentration de créatinine est avant tout dépendante de la<br />

masse musculaire [8, 59, 71] . Les différences pouvant s’observer<br />

dans les concentrations de créatinine entre hommes et femmes,<br />

entre personnes âgées et jeunes, entre sujets d’ethnies différentes<br />

sont donc principalement expliquées, en l’absence de<br />

maladie rénale, par les différences de masse musculaire entre ces<br />

groupes [8, 72] . Nous abordons la suite de la physiologie de la<br />

créatinine en fonction des conditions nécessaires pour qu’un<br />

marqueur soit considéré comme un marqueur idéal du DFG.<br />

Rappelons tout d’abord que, vu son poids moléculaire, la<br />

créatinine est librement filtrée au niveau glomérulaire et n’est<br />

pas liée aux protéines [8] . En situation d’équilibre, la concentration<br />

de créatinine est stable chez un même individu car sa<br />

production journalière à partir des muscles est constante. En<br />

l’absence d’excrétion extrarénale (celle-ci semble tout à fait<br />

minime [8, 73] ), l’excrétion rénale de créatinine reflète cette<br />

production [8] . Cet équilibre de production peut néanmoins être<br />

rompu dans certaines situations physiopathologiques (atteintes<br />

musculaires au sens large du terme). Dans de telles situations de<br />

déficit musculaire, la concentration sérique de créatinine<br />

diminue (ou n’augmente pas alors qu’une insuffisance rénale se<br />

développe) [8] . Signalons qu’en cas de maladie hépatique,<br />

certains auteurs ont également suggéré que la diminution<br />

observée de la créatinine sérique pouvait être liée, non seulement<br />

à une diminution de la masse musculaire, mais aussi à<br />

une diminution de la synthèse de la créatine par le foie<br />

malade [74] . Il peut également exister des situations où le taux<br />

de conversion créatine-créatinine pourrait être modifié comme<br />

en cas de rhabdomyolyse [8] .<br />

L’effet d’un repas riche en créatine (à savoir un repas riche en<br />

viande cuite) sur la concentration sérique de créatinine reste très<br />

discuté, en tout cas pour ce qui est de l’intensité de l’augmentation<br />

(variation de la créatinine de 10 % à 100 % selon les<br />

auteurs) [75] . L’effet est probablement assez variable d’une<br />

personne à l’autre.<br />

5


18-011-A-10 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique<br />

Créatininémie (mmol/l)<br />

500<br />

450<br />

400<br />

350<br />

300<br />

250<br />

200<br />

150<br />

100<br />

50<br />

0<br />

0 20<br />

40 60 80<br />

DFG (ml/min/1,73 m 2 )<br />

100 120 140<br />

Figure 2. Relation créatinine plasmatique-débit de filtration glomérulaire<br />

(DFG). La relation entre la créatinine (ordonnée) et le DFG (abscisse)<br />

est de type exponentiel (N. Maillard, données personnelles).<br />

La principale limitation physiologique de la créatinine tient au<br />

fait que ce composé est en partie sécrété au niveau tubulaire (10 %<br />

à 40 % de la créatinine sont secrétés au niveau tubulaire). Ce fait a<br />

été illustré par de nombreux auteurs. Il apparaît également<br />

clairement que cette sécrétion, bien qu’imprévisible d’un patient à<br />

l’autre, ait tendance à augmenter avec la diminution du DFG<br />

[1, 4,<br />

5, 56, 76-78] . Pour certains auteurs, une protéinurie importante<br />

(néphrotique par exemple) pourrait aussi s’accompagner d’une<br />

augmentation de la sécrétion de créatinine [79] . Chez le sujet noir,<br />

la sécrétion tubulaire de créatinine pourrait, comparativement au<br />

sujet caucasien, être moins importante [80] .<br />

Une réabsorption tubulaire passive de créatinine est suspectée<br />

depuis longtemps, notamment chez les insuffisants rénaux<br />

sévères [1, 81] , mais si elle existe, elle est beaucoup moins<br />

importante et ne survient que tardivement chez des patients<br />

dont le débit urinaire est déjà fort altéré [8] .<br />

Le problème de la créatinine sérique est donc que sa concentration<br />

dépend du DFG mais aussi de la masse musculaire du<br />

patient et donc du sexe, du poids, de l’ethnie et de l’âge.<br />

L’établissement des valeurs de référence devrait dépendre de<br />

toutes ces variables mais, pour des raisons de facilité, seule la<br />

différence entre les sexes est le plus souvent prise en compte<br />

chez les adultes [54, 63] .<br />

Si la spécificité de la créatinine est bonne (peu de faux<br />

positifs), elle manque cependant clairement de sensibilité et une<br />

augmentation de la créatinine au-delà des valeurs de référence<br />

signifie souvent pour le patient une perte de plus de 50 % de<br />

son DFG [8, 72, 77, 82] . Ce manque de sensibilité est, bien<br />

entendu, d’autant plus impressionnant chez le patient fragilisé<br />

avec une masse musculaire diminuée [74, 83] .<br />

Enfin, il nous paraît essentiel d’insister sur le point suivant :<br />

la relation DFG-créatinine est exponentielle (Fig. 2). Ceci est<br />

fondamental pour une bonne interprétation de la créatinine<br />

(surtout en suivi longitudinal). En effet, cette relation implique<br />

que, dans les valeurs basses de créatinine sérique, une petite<br />

variation de celle-ci a une grande répercussion en termes de<br />

DFG, alors que, dans les valeurs hautes de créatinine, la même<br />

variation n’a que très peu de conséquences en termes de DFG.<br />

Ainsi, une augmentation de créatinine de 0,6 à 1,2 mg/dl<br />

représente une perte de 50 % de fonction, équivalente à un<br />

passage de 5 à 10 mg/dl pour un insuffisant rénal.<br />

Clairance de créatinine sur recueil urinaire<br />

de 24 heures<br />

La clairance de créatinine calculée sur les urines de 24 heures<br />

est connue de tous les praticiens et rencontre, aujourd’hui<br />

encore, un certain succès. Pourtant, comme nous l’avons déjà<br />

souligné, les limites physiologiques de cette clairance existent.<br />

En effet, la sécrétion tubulaire de créatinine entraîne une<br />

surestimation quasi systématique du DFG, surestimation qui<br />

augmente avec l’aggravation de l’insuffisance rénale [8, 56, 76, 77] .<br />

De plus, il semble que la variabilité de l’excrétion urinaire de la<br />

créatinine chez un même individu soit importante (5 %à15%<br />

selon les études) [8, 72, 80, 84] . Si l’on tient compte également de<br />

la variabilité intra-individuelle de la créatinine sérique, la<br />

différence critique (c’est-à-dire la différence entre deux mesures<br />

chez un même individu qui soit bien liée à une modification du<br />

DFG et pas une variation biologique « normale ») de la clairance<br />

de créatinine peut théoriquement aller jusqu’à 35 %-45 %. Un<br />

patient avec une clairance de 100 ml/min a donc peut-être une<br />

clairance qui est, de fait, comprise entre 60 et 140 ml/min [85] .<br />

Le suivi longitudinal de patients avec une donnée possédant<br />

une si grande variabilité est donc une gageure [54, 85] . Enfin, en<br />

pratique clinique, la source d’erreur la plus importante dans la<br />

mesure de la clairance de créatinine est, sans aucun doute, celle<br />

liée aux erreurs de récoltes d’urine [72, 85] . Des variations intraindividuelles<br />

d’un jour à l’autre jusqu’à 70 % ont été décrites<br />

pour ce qui est de la récolte d’urine [72] . Dans le cadre d’une<br />

étude clinique où la récolte d’urine est bien expliquée aux<br />

participants, on estime que 16 % des récoltes d’urine sont<br />

entachés d’erreurs [86] .<br />

Toutes ces limitations expliquent pourquoi, aujourd’hui, la<br />

clairance de créatinine sur récolte d’urine de 24 heures n’est<br />

plus recommandée, en première intention, par aucune société<br />

savante (nous parlons bien entendu de l’estimation du DFG car<br />

la récolte d’urine de 24 heures peut rester utile, notamment<br />

pour l’évaluation du régime en protéines et en sel). Le manque<br />

d’intérêt de la clairance de créatinine est surtout flagrant pour<br />

le suivi longitudinal des patients. À ce jour, la mesure de la<br />

clairance de créatinine n’est plus recommandée que pour les<br />

patients présentant une masse musculaire particulièrement<br />

diminuée (anorexie, paraplégie, amputation) [87] .<br />

Variations de la concentration de créatinine<br />

indépendamment d’une modification<br />

du débit de filtration glomérulaire<br />

Interférences analytiques<br />

La présence d’une concentration élevée de bilirubine est une<br />

source fréquente d’interférences en biologie clinique. C’est aussi<br />

le cas pour le dosage de la créatinine. Les interférences dues à<br />

la bilirubine ont été décrites avec les différentes méthodes de<br />

dosage de la créatinine (de type Jaffe ou enzymatique). Ces<br />

interférences sont complexes, multiples et difficiles à appréhender<br />

[59] . Une des études les plus intéressantes sur cette interférence<br />

à la bilirubine est aussi une des plus récentes [88] . Ces<br />

auteurs ont étudié, sur du sérum pédiatrique, l’effet de l’adjonction<br />

de bilirubine sur 15 méthodes de dosages de la créatinine<br />

(dont quatre enzymatiques). Aucune interférence significative<br />

n’a été retrouvée pour les quatre méthodes enzymatiques alors<br />

qu’une interférence (le plus souvent négative, à savoir les<br />

valeurs de créatinine apparaissent faussement abaissées) plus<br />

significative n’est retrouvée que pour trois méthodes de Jaffe.<br />

De même, les résultats de cette étude montrent que l’hémolyse<br />

ne modifie que relativement peu les valeurs de créatinine quand<br />

elle est mesurée par la méthode de Jaffe et pas du tout quand<br />

la créatinine est mesurée par les méthodes enzymatiques [88] .<br />

Les céphalosporines sont classiquement évoquées comme<br />

sources d’interférences pour la mesure de la créatinine par les<br />

méthodes basées sur la réaction de Jaffe. Certaines céphalosporines<br />

sont, en effet, des pseudochromogènes puissants mais<br />

celles-ci ne sont plus utilisées et les nouvelles générations de<br />

céphalosporines n’interfèrent pas dans le dosage [89] .<br />

Certaines interférences entre la mesure enzymatique de la<br />

créatinine et certains médicaments ne surviennent que lorsque<br />

le médicament en question est présent en concentrations très<br />

élevées (et très supérieures aux concentrations plasmatiques<br />

thérapeutiques). Ces interférences qui sont le plus souvent<br />

négatives ne surviennent donc, en pratique, que lors d’erreurs<br />

de prélèvement (échantillon de sang prélevé sur une voie où le<br />

médicament est perfusé). Ce type d’interférences a été décrit<br />

6 Néphrologie


avec la lidocaïne, le métamizole, l’acide ascorbique, la dopamine,<br />

la dobutamine et l’acétylcystéine [90-93] .<br />

Interférences « physiologiques » : cimétidine,<br />

triméthoprime et fibrates<br />

Depuis 1976, la cimétidine est connue comme pouvant être<br />

à l’origine d’une augmentation significative de la créatinine.<br />

Plusieurs études ont bien démontré que l’effet sur la créatinine<br />

de la cimétidine était lié à une inhibition de la sécrétion<br />

tubulaire de créatinine [94, 95] . Le pouvoir de blocage de la<br />

cimétidine apparaît relativement puissant (même si la dose<br />

minimale nécessaire pour inhiber complètement la sécrétion n’a<br />

pas été étudiée très spécifiquement) et limité dans le temps. Cet<br />

effet inhibiteur de la cimétidine sur la sécrétion tubulaire de<br />

créatinine peut être utilisé pour améliorer la précision et la<br />

reproductibilité de la clairance de créatinine, comme cela a été<br />

suggéré par plusieurs auteurs [78] . Il existe cependant des<br />

différences substantielles entre les différents protocoles d’utilisation<br />

de la cimétidine et aucun protocole ne garantit un<br />

blocage complet.<br />

Le triméthoprime augmente la créatinine sérique via une<br />

inhibition de sa sécrétion tubulaire sans que cela n’affecte le<br />

DFG [96] . L’augmentation de la créatinine est de 10 %à20%<br />

chez le sujet sain mais peut dépasser les 30 % en cas d’insuffisance<br />

rénale. L’effet sur la créatinine est rapide (dans les 2 à<br />

“ Point fort<br />

De l’indexation du DFG à la surface corporelle<br />

L’indexation du DFG par la surface corporelle est très<br />

ancienne et quasi contemporaine des premiers recours à la<br />

notion de clairance pour la mesure du DFG (clairance<br />

d’urée en l’occurrence à cette époque) [2] . Le but de cette<br />

indexation est de permettre la comparaison du DFG entre<br />

individus de gabarit différent. Cependant, une telle<br />

indexation, bien que largement usitée, est très largement<br />

critiquée, et cela depuis très longtemps, dans la littérature<br />

scientifique [102] . En effet, l’utilisation de l’indexation du<br />

DFG par la surface corporelle implique une relation forte et<br />

linéaire entre ces deux variables, cette relation<br />

disparaissant totalement lorsque le DFG est indexé. Or, les<br />

preuves que ces prérequis mathématiques sont bel et bien<br />

rencontrés sont inexistantes. Le choix du 1,73 m 2 comme<br />

base d’indexation est également discutable de nos jours<br />

où la surface corporelle moyenne de la population globale<br />

est plus proche de 1,9 m 2 que de 1,7 m 2 .<br />

Lorsque cette problématique est discutée, il faut aussi bien<br />

avoir à l’esprit que l’indexation n’a une conséquence<br />

chiffrée importante sur les résultats de DFG que chez les<br />

patients dont la surface corporelle est très éloignée de<br />

1,73 m 2 , autrement dit chez les sujets obèses ou très<br />

maigres. Chez les sujets obèses, l’impact chiffré de<br />

l’indexation est très significatif et l’erreur théorique<br />

inhérente est d’autant plus percutante. L’erreur est<br />

d’autant plus réelle que le calcul de la surface corporelle<br />

par les formules habituellement utilisées et basées sur le<br />

poids et la taille (formule de Dubois et de Gehan-Georges<br />

pour citer les plus connues) est probablement entaché<br />

d’erreurs chez l’obèse. De nombreux auteurs ont proposé<br />

d’autres moyens d’indexation (par la taille, le poids idéal,<br />

le volume extracellulaire, le taux métabolique de base)<br />

mais leur utilisation reste marginale, soit parce que les<br />

bases physiologiques restent faibles, soit parce que la<br />

mesure de certains de ces paramètres s’avère compliquée.<br />

Plusieurs études sur le sujet, sur de grandes populations,<br />

s’avèrent encore nécessaires.<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique 18-011-A-10<br />

6 heures qui suivent la prise). La durée de l’augmentation de la<br />

créatinine après arrêt du traitement est plus difficile à juger sur<br />

base des études cliniques.<br />

Les fibrates sont encore fréquemment utilisés de nos jours<br />

comme agents anticholestérolémiques et antitriglycéridémiques.<br />

Plusieurs auteurs ont décrit une augmentation de la créatinine<br />

sous fibrates [97, 98] . Certains auteurs sont convaincus d’une<br />

certaine toxicité rénale des fibrates, notamment chez les transplantés<br />

[98] . D’autres chercheurs ont cependant démontré, en<br />

utilisant et en comparant les variations de créatinine avec les<br />

variations de DFG, que les fibrates ne modifiaient pas le DFG mais<br />

bien la créatininémie, bien que le mécanisme précis par lequel<br />

cette créatininémie varie reste mal connu et discuté [99, 100] .<br />

■ Conclusion<br />

La créatinine sérique reste en pratique incontournable pour<br />

l’exploration de la fonction glomérulaire. Ceci est d’autant plus<br />

justifié que les limitations de ce marqueur endogène historique<br />

du DFG sont parfaitement décrites et peuvent donc être intégrées<br />

dans le processus de décision clinique. Ces dernières<br />

années, l’accent a été mis sur les difficultés analytiques inhérentes<br />

au dosage de la créatinine sérique aboutissant à des recommandations<br />

internationales de standardisation. Ces efforts<br />

constants pour améliorer les performances de la créatinine<br />

sérique comme marqueur du DFG ne doivent cependant pas<br />

occulter le caractère irremplaçable des méthodes de mesure<br />

directe du DFG lorsqu’une évaluation précise de la fonction<br />

rénale est nécessaire. Les arguments convenus, systématiquement<br />

avancés pour limiter leur utilisation (difficulté de mise en<br />

œuvre, prix, contraintes excessives pour le patient), devraient<br />

certainement plus souvent être remis en cause. La difficulté<br />

concernant l’ensemble de ces méthodes dites « de référence »<br />

réside davantage dans le manque de données démontrant de<br />

manière convaincante qu’elles sont réellement équivalentes et<br />

qu’elles peuvent être utilisées indifféremment pour évaluer le<br />

DFG avec le même degré d’exactitude. Il persiste dans ce<br />

domaine encore de nombreuses interrogations qui ont été<br />

jusqu’ici largement négligées. Parallèlement à ces techniques<br />

classiques, l’imagerie fonctionnelle (imagerie par résonance<br />

magnétique et scanner multibarrettes) offre des alternatives<br />

d’évaluation mixte, morphologique et fonctionnelle, particulièrement<br />

innovantes et qui devraient rapidement se développer<br />

dans les prochaines années [101] .<br />

“ Point fort<br />

Un marqueur idéal de la filtration glomérulaire doit être<br />

une substance libre non liée aux protéines, éliminée<br />

exclusivement par le rein, filtrée librement à travers la<br />

membrane glomérulaire sans subir de sécrétion ni de<br />

réabsorption au niveau du tubule rénal, non métabolisée<br />

par le rein et dont l’élimination de l’organisme ne modifie<br />

pas le DFG.<br />

L’inuline est le marqueur exogène de référence pour<br />

explorer la filtration glomérulaire. La clairance de l’inuline<br />

(technique de perfusion intraveineuse continue, mesure<br />

de la clairance urinaire, recueil des urines après sondage<br />

intravésical) est le chef de file des méthodes de référence<br />

de mesure du DFG.<br />

La créatinine plasmatique est le marqueur endogène de<br />

référence pour explorer la filtration glomérulaire bien<br />

qu’elle ne présente pas toutes les caractéristiques d’un<br />

marqueur idéal. Il existe différentes méthodes de dosage<br />

de créatinine. La chromatographie avec dilution isotopique<br />

couplée à la spectrométrie de masse est considérée<br />

comme la méthode de référence vis-à-vis de laquelle<br />

toutes les autres méthodes doivent être standardisées.<br />

7


.<br />

18-011-A-10 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique<br />

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Fibrate-induced increase in blood urea and creatinine: is gemfibrozil<br />

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9


18-011-A-10 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I). Méthodes de référence et créatinine sérique<br />

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[102] Delanaye P, Mariat C, Cavalier E, Krzesinski JM. Indexation du débit<br />

de filtration glomérulaire par la surface corporelle: mythe et réalité.<br />

Nephrol Ther 2009;5:614-22.<br />

Pour en savoir plus<br />

Delanaye P, Mariat C, Cavalier E, Krzesinski JM. Indexing glomerular<br />

filtration rate for body surface area: myth and reality. In: Nephrology -<br />

Dialysis – Transplantation. Krüger E, Hahn K. NOVA publishers.<br />

Ebook. www.novapublishers.com/catalog/product_info.php?products_<br />

id=12723.<br />

P. Delanaye.<br />

Service de néphrologie, dialyse et transplantation, Centre hospitalier universitaire Sart Tilman, Université de Liège, Liège, Belgique.<br />

N. Maillard.<br />

L. Thibaudin.<br />

C. Mariat (christophe.mariat@univ-st-etienne.fr).<br />

Service de néphrologie, Laboratoire d’explorations fonctionnelles rénales, Centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, Université Jean Monnet, 42055<br />

Saint-Étienne cedex 02, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Delanaye P., Maillard N., Thibaudin L., Mariat C. Exploration de la fonction glomérulaire rénale (I).<br />

Méthodes de référence et créatinine sérique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-011-A-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Exploration de la fonction glomérulaire<br />

rénale (II). Estimation du débit<br />

de filtration glomérulaire<br />

N. Maillard, P. Delanaye, C. Mariat<br />

À côté des méthodes de mesure directe du débit de filtration glomérulaire (DFG), il existe de nombreuses<br />

formules ayant pour but d’estimer le DFG à partir de marqueurs endogènes dont le plus utilisé est la<br />

créatinine sérique. Actuellement, il est recommandé d’utiliser en priorité l’équation modification of diet<br />

in renal disease (MDRD) dans sa version abrégée à quatre variables et corrigée pour une utilisation avec<br />

une créatinine sérique standardisée. L’évaluation du DFG à partir de cette équation reste toutefois<br />

approximative dans de nombreuses situations où la concentration plasmatique de créatinine reflète mal<br />

le DFG. Dans ces situations, la cystatine C plasmatique pourrait être un marqueur endogène alternatif,<br />

potentiellement plus fiable que la créatinine plasmatique. L’absence de standard de référence pour le<br />

dosage de la cystatine C est, pour l’instant, une des principales limites à la diffusion de ce marqueur.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Débit de filtration glomérulaire ; Équation MDRD ; Cockcroft-Gault ; Créatinine ; Cystatine C<br />

Introduction 1<br />

Formules d’estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

basées sur la créatinine sérique 1<br />

Principales formules d’estimation 1<br />

Méthodologie d’évaluation de la performance des estimateurs<br />

du débit de filtration glomérulaire 2<br />

Validation des estimateurs basés sur la créatinine<br />

dans la population générale 3<br />

Performances des estimateurs dans différentes populations 5<br />

Cystatine C comme marqueur alternatif du débit de filtration<br />

glomérulaire 6<br />

Bases physiologiques 6<br />

Considérations analytiques 7<br />

Estimation du débit de filtration glomérulaire à partir<br />

de la concentration sérique de CysC : intérêt dans diverses<br />

populations 7<br />

Conclusions et perspectives 8<br />

■ Introduction<br />

Cette deuxième partie du chapitre consacré à l’exploration de<br />

la fonction glomérulaire se focalise sur l’estimation du débit de<br />

filtration glomérulaire (DFG). L’évaluation de la fonction rénale<br />

à partir des équations d’estimation du DFG reste un sujet très<br />

étudié et très débattu dans la littérature scientifique actuelle.<br />

Après avoir évoqué les différentes équations qui ont été successivement<br />

développées à partir de la créatinine sérique, nous<br />

discutons en détails les avantages et limites des deux estimateurs<br />

les plus utilisés : la formule de Cockcroft et Gault (C-G) et<br />

l’équation modification of diet in renal disease (MDRD). Nous<br />

allons voir également en quoi la cystatine C est une alternative<br />

crédible à la créatinine sérique tout en discutant des raisons qui<br />

empêchent actuellement la diffusion de ce marqueur plasmatique<br />

prometteur du DFG.<br />

Néphrologie<br />

■ Formules d’estimation du débit<br />

de filtration glomérulaire basées<br />

sur la créatinine sérique<br />

Principales formules d’estimation<br />

(Tableau 1) [1-16]<br />

La relation entre concentration de créatinine et DFG est une<br />

hyperbole inverse. Le DFG est donc une fonction de l’inverse du<br />

taux de créatinine et toutes les formules d’estimation comprennent<br />

le module 1/créatinine (créatinine –1,154 pour la formule<br />

MDRD abrégée). Les formules d’estimation intègrent par ailleurs,<br />

à différents degrés, des facteurs influençant directement la<br />

production de créatinine ou des facteurs influençant la masse<br />

musculaire (âge, sexe, poids, origine ethnique). Une multitude<br />

d’équations ont été développées au fil du temps [17] avec un<br />

regain d’activité net depuis la publication de l’équation dite<br />

« MDRD » [16] : on parle volontiers actuellement d’« épidémie de<br />

formules d’estimation du DFG ». Cette épidémie est le témoin<br />

indirect du caractère parfois très approximatif d’une estimation<br />

du DFG basée sur les valeurs de concentration sérique de<br />

créatinine.<br />

Les formules d’estimation du DFG les plus courantes et<br />

actuellement recommandées sont les formules C-G [1] et<br />

MDRD [2, 16] . Nous décrivons également la formule chronic<br />

kidney disease epidemiology (CKD-EPI), récemment publiée [4] .<br />

Formule de Cockcroft et Gault<br />

18-011-A-11<br />

La formule a été développée dans l’esprit d’estimer la clairance<br />

de la créatinine en s’affranchissant du recueil urinaire<br />

fastidieux et imprécis. Cette formule donne donc une approximation<br />

de la clairance de la créatinine et non du DFG tel que<br />

mesuré par les méthodes de référence précédemment décrites.<br />

Elle tend donc en théorie à surestimer le DFG réel en raison de<br />

la prise en compte de la sécrétion tubulaire de créatinine.<br />

1


18-011-A-11 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

Tableau 1.<br />

Principales équations d’estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

(DFG) basées sur la créatinine sérique.<br />

Références Formule<br />

Cockcroft-Gault [1] ([140-âge]/[72 × Cr]) × poids × (0,85 si femme)<br />

MDRD abrégée [2, 3]<br />

(a : initiale ;<br />

b : corrigée pour<br />

créatinine<br />

standardisée IDMS)<br />

CKD-EPI [4]<br />

(créatinine<br />

standardisée)<br />

a:186×Cr -1,154 × âge -0,203 × (0,742 si femme) ×<br />

(1,21 si Afro-Américain)<br />

b:175×Cr -1,154 × âge -0,203 × (0,742 si femme) ×<br />

(1,21 si Afro-Américain)<br />

DFG=A×(Cr/B) C × 0,993 âge<br />

Si Noir-Africain, femme et Cr ≤ 62 µmol/l : A<br />

= 166 ; B = 0,7 ; C = -0,329<br />

Si Noir-Africain, femme et Cr > 62 µmol/l : A<br />

= 166 ; B = 0,7 ; C = -1,209<br />

Si Noir-Africain, homme et Cr ≤ 80 µmol/l : A<br />

= 163 ; B = 0,9 ; C = -0,411<br />

Si Noir-Africain, homme et Cr > 80 µmol/l : A<br />

= 163 ; B = 0,9 ; C = -1,209<br />

Si Caucasien, femme et Cr ≤ 62 µmol/l : A = 144 ;<br />

B = 0,7 ; C = -0,329<br />

Si Caucasien, femme et Cr > 62 µmol/l : A = 144 ;<br />

B = 0,7 ; C = -1,209<br />

Si Caucasien, homme et Cr ≤ 80 µmol/l : A = 141 ;<br />

B = 0,9 ; C = -0,411<br />

Si Caucasien, homme et Cr > 80 µmol/l : A = 141 ;<br />

B = 0,9 ; C = -1,209<br />

Bjornsson [5] Hommes : (27 - 0,173 × âge) × poids × 0,7/Cr<br />

Femmes : (25 - 0,175 × âge) × poids × 0,7/Cr<br />

Davis [6] (140 - âge)/Cr × (0,85 si femme)<br />

Edwards [7] Hommes : 94,3/Cr - 1,8<br />

Femmes : 69,9/Cr + 2,2<br />

Gates [8] Hommes : 89,4 × Cr -1,2 + (55 - âge) × 0,447 × Cr -1,1<br />

Femmes : 60 × Cr -1,1 +(56-âge)×0,3×Cr -1,1<br />

Hull [9] (145 - âge - 3)/Cr × (0,85 si femme)<br />

Jelliffe [10] 98 - (0,8 × [âge - 20])/Cr × (0,9 si femme)<br />

Mawer [11] Hommes : poids × (29,3 – [0,203 × âge]) ×<br />

(1 - 0,03 × Cr)/(14,4 × Cr) × (70/poids)<br />

Femmes : poids × (59,3 – [0,175 × âge]) ×<br />

(1 - 0,03 × Cr)/(14,4 × Cr) × (70/poids)<br />

Nankivell [12] 6700/(Cr × 88,4) + poids/4 - urée/2 - (100/taille 2 )<br />

+35<br />

6700/(Cr × 88,4) + poids/4 - urée/2 - (100/taille 2 )<br />

+25<br />

Walser [13] Hommes : 7,57/(Cr × 0,0884) -1 - 0,103 × âge<br />

+ 0,096 × poids - 6,66<br />

Femmes : 6,05/(Cr × 0,0884) -1 - 0,08 × âge + 0,08 ×<br />

poids - 4,81<br />

Mayo [14] Exp(1,911 + 5,249/Cr - 2,114/Cr 2 - 0,00686 × âge -<br />

0,205 si femme)<br />

Salazar [15] Hommes : ([137 - âge] × 0,285 × poids + [12,1 ×<br />

taille 2 ])/(51 × Cr)<br />

Femmes : ([140 - âge] × 0,285 × poids + [12,1 ×<br />

taille 2 ])/(60 × Cr)<br />

MDRD7 [16] 170×Cr -0,999 × âge -0,176 × urée -0,170 ×<br />

albuminémie 0,318 × (0,762 si femme) × (1,18 si<br />

Afro-Américain)<br />

Cr : créatinine sérique, en µmol/l ; MDRD : modification of diet in renal disease ;<br />

CKD-EPI : chronic kidney disease epidemiology ; IDMS : isotope dilution mass<br />

spectrometry.<br />

La publication initiale date de 1976 et était basée sur une<br />

population de 249 patients âgés de 18 à 92 ans ne comprenant<br />

que4%defemmes. Cette formule comprend plusieurs paramètres<br />

à savoir le poids, l’âge, le sexe et bien sûr la créatinine. La<br />

méthode de dosage de la créatinine n’est pas connue, mais<br />

probablement proche des méthodes Jaffé [1] .<br />

Formules MDRD<br />

La méthode de dérivation des formules MDRD était complètement<br />

différente. L’objectif était cette fois-ci de prédire le DFG<br />

mesuré par une méthode de référence.<br />

L’échantillon de population utilisé comprenait 1 070 patients<br />

sur la totalité des 1 628 sujets inclus dans l’étude MDRD au<br />

cours de laquelle une détermination du DFG par clairance<br />

urinaire de l’iothalamate normalisée à la surface corporelle<br />

(rapportée à 1,73 m 2 ) était réalisée. La population était caractérisée<br />

par un âge moyen de 50,6 ans, un indice de masse<br />

corporelle de 28 kg/m 2 , comprenait 60 % d’hommes et 12 % de<br />

Noirs. Le DFG moyen était de 40 ml/min/1,73m 2 . La réalisation<br />

d’une régression multiple intégrant un grand nombre de<br />

variables a permis la dérivation de plusieurs formules de<br />

complexité croissante. La formule initialement recommandée<br />

prend le nom de MDRD7 [16] . En 2000, l’équipe de Levey publie<br />

une nouvelle formule simplifiée dite « abrégée » et comprenant<br />

quatre variables : la créatinine sérique, l’âge, le sexe et l’origine<br />

ethnique [3] . Plus récemment, une dernière modification a été<br />

réalisée permettant d’utiliser cette formule avec une créatininémie<br />

standardisée sur la méthode de référence de dosage de<br />

créatinine (isotope dilution mass spectrometry [IDMS]) [2] . Cette<br />

dernière étape est particulièrement importante dans la mesure<br />

où la variabilité analytique liée aux différentes méthodes de<br />

dosage de créatinine constitue un facteur d’imprécision à la fois<br />

substantiel et maîtrisable dans l’estimation du DFG. La majorité<br />

(et à court terme, la totalité) des kits de dosage de créatinine<br />

étant raccordée à la méthode IDMS, cette version corrigée de la<br />

formule MDRD est actuellement la plus utilisée.<br />

Les limitations de cet estimateur du DFG seront détaillées<br />

plus bas.<br />

Formules CKD-EPI<br />

Très récemment, une nouvelle formule destinée à améliorer<br />

les performances prédictives de la formule MDRD au-dessus de<br />

60 ml/min/1,73m 2 a été décrite. Elle a été dérivée d’un échantillon<br />

beaucoup plus important (5 504 patients) d’âge moyen de<br />

47 ans, d’indice de masse corporelle moyen 28 kg/m 2 , avec<br />

32 % de Noirs et ayant un DFG moyen de 68 ml/min/1,73m 2 .<br />

Cette formule est plus complexe que les précédentes mais<br />

pourrait avoir un intérêt dans la population à DFG élevé [4] .<br />

Méthodologie d’évaluation<br />

de la performance des estimateurs<br />

du débit de filtration glomérulaire<br />

Cette évaluation doit comprendre plusieurs conditions<br />

permettant la plus grande rigueur d’interprétation. Ces conditions<br />

sont en partie précisées par les recommandations Kidney<br />

Disease Outcomes Quality Initiative (K/DOQI) [17] .<br />

La première condition est l’utilisation d’une méthode de<br />

référence de mesure du DFG comme comparateur. La deuxième<br />

condition est liée à la population étudiée. Tout d’abord, la taille<br />

de l’échantillon détermine la performance statistique, et un<br />

nombre de mesures minimal de 100 unités est retenu par les<br />

K/DOQI. D’autre part, la description de la population est un<br />

élément fondamental, puisqu’elle détermine l’interprétation des<br />

résultats et l’applicabilité des performances des estimateurs dans<br />

la pratique clinique. En effet, de nombreux facteurs sont à<br />

même de faire varier les performances des estimateurs du DFG<br />

basés sur la concentration de la créatinine sérique (âge, poids et<br />

indice de masse corporelle, ratio homme/femme, origine<br />

ethnique, situation clinique). La troisième condition est la<br />

pertinence des critères d’évaluation. Plusieurs aspects de la<br />

performance prédictive d’un estimateur doivent en effet être<br />

envisagés.<br />

2 Néphrologie


Tableau 2.<br />

Principales études comparant la performance des équations modification of diet in renal disease (MDRD) et Cockcroft-Gault.<br />

Références Population DFG moyen<br />

(ml/min/1,73 m 2 )<br />

Dosage<br />

créatinine<br />

Lewis, 2001 [22] 1 703 Afro-Américains 56,9 Jaffé modifié<br />

Bostom, 2002 [23] 109 MRC, Cr<br />

< 1,5 mg/dl<br />

L’évaluation de la corrélation est réalisée par la détermination<br />

du coefficient de corrélation r selon Bravais-Pearson. Elle<br />

mesure la force de la relation linéaire existant entre deux<br />

variables, ici le DFG estimé et mesuré. Plus r est proche de 1,<br />

plus il existe une relation linéaire de type y=ax+bentre les<br />

deux variables. Cependant, si a et b sont très différents de<br />

1 et 0 respectivement, la justesse et la précision peuvent être<br />

faibles avec r proche de 1. Ce paramètre n’est donc pas<br />

suffisant pour évaluer un estimateur et, de plus, n’est pas<br />

intuitivement transposable en pratique clinique.<br />

L’évaluation du biais est le premier paramètre à envisager [18] .<br />

Il correspond à l’erreur systématique d’estimation et est<br />

déterminé par la moyenne des différences entre le DFG estimé<br />

et le DFG mesuré. Il donne donc la justesse d’estimation et<br />

permet de conclure à une sur- ou sous-estimation du DFG par<br />

la formule étudiée. L’ampleur du biais absolu est très dépendante<br />

du niveau de DFG et un autre paramètre, le biais relatif,<br />

permet d’exprimer l’erreur systématique en pourcentage du<br />

DFG. Ainsi, un biais absolu de +3 ml/min/1,73m 2 correspond<br />

à une surestimation de 10 % du DFG à 30 ml/min/1,73m 2 ,<br />

alors que celle-ci n’est que de 3%à100ml/min/1,73m 2 .<br />

Le deuxième paramètre est la précision, soit la dispersion de<br />

l’erreur autour du biais. La mesure la plus simple de ce critère<br />

d’évaluation est l’écart-type du biais absolu. Plus celui-ci est<br />

faible, plus la dispersion de l’erreur est faible et plus l’estimateur<br />

est précis.<br />

La représentation conjointe du biais et de la précision peut se<br />

faire par la méthode de Bland et Altman [18] . Celle-ci prend<br />

la forme d’un graphique avec, en abscisse, la moyenne des<br />

DFG mesurés et estimés, en ordonnée, la différence entre<br />

DFG estimé et DFG mesuré. Chaque mesure est représentée et<br />

Méthode de référence Biais<br />

(ml/min/1,73 m 2 )<br />

le nuage de points donne l’impression visuelle de la dispersion<br />

des valeurs autour du biais figuré par une ligne horizontale.<br />

La précision est représentée par deux lignes comprenant<br />

entre elles 95 % des estimations (le biais ± 2 écarts-types).<br />

La proportion d’estimations comprises à ± X % du DFG<br />

mesuré est un paramètre qui intègre, de façon synthétique et<br />

aisément transposable pour le clinicien, à la fois le biais et la<br />

précision. La proportion pour 30 % du DFG, appelée justesse<br />

30 % ou P30, est le paramètre le plus discriminant pour<br />

comparer plusieurs estimateurs entre eux.<br />

Enfin, le dernier type de critère d’évaluation correspond aux<br />

performances diagnostiques, c’est-à-dire la capacité de l’estimateur<br />

à détecter un DFG mesuré inférieur à un seuil (par exemple,<br />

60 ml/min/1,73m 2 ). Il s’agit en fait d’étudier sensibilité,<br />

spécificité, valeurs prédictives et aires sous la courbe (ASC ROC).<br />

Il est utile de noter que la sensibilité et la spécificité varient en<br />

fonction du biais, et une sous-estimation du DFG se traduit par<br />

une sensibilité élevée. L’étude de l’ASC est plus intéressante, car<br />

indépendante du biais.<br />

Validation des estimateurs basés<br />

sur la créatinine dans la population<br />

générale<br />

P30 %<br />

C-G MDRDa C-G MDRDa<br />

125 I-iothalamate +4,8 -6,1 - 88 %<br />

109 Jaffé Iohexol -26,5 -41,7 59 % 28 %<br />

Lin, 2003 [24] 100 DV 113 Jaffé 125 I-iothalamate (n = 55)<br />

99m Tc-DTPA (n = 45)<br />

+16,8 -18,3 58 % 65 %<br />

Hallan, 2004 [25] 215 IRC et DV 49,8 Jaffé modifié 51 Cr-EDTA - - 49 % 62 %<br />

Rule, 2004 [14] 580 pas d’IRC 101 [63-177] Jaffé Iothalamate - -29 - 54 %<br />

320 IRC 48 [5-133] Jaffé Iothalamate - -5,5 - 75 %<br />

Rule, 2004 [26] 365 DV 101 Jaffé Iothalamate -14 -29 82 % 55 %<br />

Poggio, 2005 [27] 828 IRC 32 [10-74] Jaffé modifié 125 I-iothalamate +3,5 -0,5 60 % 71 %<br />

457 DV 106 [85-130] Jaffé modifié<br />

125 I-iothalamate +1,9 -9 85 % 86 %<br />

Poggio, 2005 [28] 107 hospitalisés 17,1 Jaffé modifié 125 I-iothalamate +8,9 +6,8 26 % 31 %<br />

Ibrahim, 2005 [29] 1 286, diabète I, Cr<br />

< 1,2 mg/dl<br />

122 Jaffé modifié 125 I-iothalamate -6 -22 88 % 78 %<br />

Cirillo, 2005 [30] 380 IRC et non-IRC 76 [8-159] Jaffé Inuline -5,2 -6,1 68 % 72 %<br />

Grubb, 2005 [31] 451 tout-venant 63 [11-124] Enzymatique Iohexol - +11,8 - 71 %<br />

Rigalleau, 2005 [32] 160 diabétiques 60,9 Jaffé<br />

Froissart, 2005 [33] 2 095 dont 1 933 IRC 61,1 Jaffé modifié<br />

Verhave, 2005 [34] 850, SCr < 1,5 mg/dl 99,3 Enzymatique<br />

51 Cr-EDTA +4,8 -6,1 - -<br />

51 Cr-EDTA +1,9 -1 79 % 87 %<br />

99m Tc-DTPA -4,9 -12,4 87 % 89 %<br />

MDRDa : formule MDRD abrégée ; C-G : formule de Cockcroft-Gault ; P30 % : justesse 30 % ; Cr : créatinine sérique ; MRC : maladie rénale chronique ; DV : donneurs vivants ;<br />

IRC : insuffisance rénale chronique ; DTPA : acide diéthylène triamine penta-acétique ; EDTA : acide éthylène diamine tétra-acétique.<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire 18-011-A-11<br />

Un grand nombre d’études ont permis l’évaluation des<br />

performances des deux principaux estimateurs, à savoir la<br />

formule de C-G et les formules MDRD. Nous avons retenu les<br />

études les plus récentes, concernant au moins 100 patients et<br />

utilisant une méthode de référence de mesure du DFG. Ces<br />

études sont résumées dans le Tableau 2 [14, 22-34] .<br />

3


18-011-A-11 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

“ Point fort<br />

Formules d’estimation du DFG et épidémiologie de la maladie rénale chronique<br />

• Le développement récent des formules basées sur la créatinine pour l’estimation du DFG a largement favorisé les études<br />

épidémiologiques sur la prévalence de la maladie rénale chronique. En effet, la mesure du DFG par les méthodes de référence dans<br />

une large population est beaucoup plus difficilement envisageable même si elle n’est pas impossible à proprement parler. L’étude<br />

épidémiologique américaine National Health and Nutrition Examination Survey (NHANES) rapporte une prévalence de la maladie<br />

rénale dans la population générale adulte de 10,82 % si on retient, comme définition de la maladie rénale, un DFG estimé par MDRD<br />

inférieur à 60 ml/min/1,73 m 2 [19] . Cependant, nous avons vu que la formule MDRD avait une tendance à sous-estimer le DFG chez le<br />

sujet sain et cette prévalence de 10,82 % est donc sans aucun doute surestimée [20] . Dans la même population, la prévalence de la<br />

maladie rénale passe à 9,88 % si la formule CKD-EPI, sensée être plus précise justement chez les patients à DFG normal, est utilisée à<br />

la place de la formule MDRD. Cette formule, pour différentes raisons analytiques complexes, ne présente cependant pas toutes les<br />

garanties nécessaires à son utilisation en épidémiologie. Il peut aussi apparaître pour le moins étrange que dans ces différentes études<br />

épidémiologiques, la maladie rénale de stades 1 et 2 soit largement moins fréquente que celle de stade 3. Ceci est expliqué par la<br />

classification K/DOQI utilisée dans ces études [17] , classification dans laquelle les stades 1 et 2 nécessitent la présence d’un critère<br />

d’atteinte rénale en plus de l’estimation du DFG (en pratique pour la plupart des cas, il s’agit de la présence d’une protéinurie) alors<br />

que le stade 3 est défini par le seul critère d’un DFG inférieur à 60 ml/min/1,73 m 2 . Signalons, par ailleurs, qu’une nouvelle<br />

classification de la maladie rénale devrait être publiée en <strong>2011</strong>.<br />

• Une autre critique fondamentale, avancée à l’égard de ce genre d’étude de prévalence, est l’utilisation, comme critère de maladie<br />

rénale, d’un niveau fixe de DFG, en l’occurrence 60 ml/min/1,73 m 2 . L’utilisation de ce critère figé apparaît quelque peu arbitraire,<br />

principalement chez le sujet âgé qui voit, « naturellement », son DFG diminué avec le temps. Même si les études visant à déterminer<br />

l’évolution du DFG avec l’âge sont peu nombreuses, il yadenombreux arguments indirects pour affirmer qu’une bonne proportion<br />

de patients âgés, mais néanmoins sains au niveau néphrologique, ont un DFG inférieur à 60 ml/min/1,73 m 2 . Cette affirmation est<br />

aussi à prendre dans un contexte gériatrique où les formules basées sur la créatinine (MDRD et plus encore C-G) sont, sans doute,<br />

imprécises et biaisées (sous-estimation du DFG par la formule de C-G). Des études complémentaires, avec mesures du DFG par une<br />

méthode de référence, apparaissent nécessaires.<br />

• Au total, ces différentes considérations alimentent une polémique qui va bien au-delà de la seule question du dépistage de la<br />

maladie rénale chronique par les formules d’estimation du DFG [21] .<br />

Les critères de jugement les plus couramment utilisés sont le<br />

biais absolu et la P30, et permettent donc la comparaison de ces<br />

études entre elles. Les conditions d’interprétation des performances<br />

de ces estimateurs doivent intégrer le type de population,<br />

le niveau de DFG moyen, la méthode de mesure du DFG,<br />

la technique de dosage de créatinine (colorimétrique ou<br />

enzymatique).<br />

Parmi les études retenues, deux grands types de population<br />

sont à bien différencier : la population de sujets à fonction<br />

rénale normale, particulièrement importante dans le cadre,<br />

d’une part de l’évaluation des donneurs vivants potentiels et,<br />

d’autre part, de la détection de l’insuffisance rénale chronique<br />

débutante (études épidémiologiques de prévalence), et la<br />

population des patients insuffisants rénaux chroniques<br />

(définis, un peu arbitrairement, par un DFG inférieur à<br />

60 ml/min/1,73m 2 ).<br />

Le premier type de population (fonction rénale normale) est<br />

caractérisé par une sous-estimation constante et majeure (-9 à<br />

-42 ml/min/1,73m 2 ) du DFG par les formules MDRD sur les sept<br />

études retenues. Ceci explique les relatives faibles P30 comprises<br />

entre 28 % et 86 %. L’étude de Rigalleau et al. trouve une P30<br />

à 89 %, mais par l’intégration dans la formule MDRD originale<br />

d’une créatinine obtenue par méthode enzymatique proche du<br />

nouveau standard IDMS. Après correction du dosage pour<br />

obtenir un référentiel de type Jaffé, la P30 chute à 51 % [32] .Au<br />

total, seule l’étude de Poggio et al. [27] et la sous-population DFG<br />

supérieur à 60 ml/min/1,73m 2 de l’étude de Froissart et al. [33]<br />

obtiennent une P30 acceptable dans cette population. Toutes les<br />

autres publications ayant étudié MDRD dans une population<br />

avec un DFG supérieur à 60 ml/min/1,73 m 2 ont insisté sur sa<br />

faible performance et sur sa tendance systématique à la sousestimation<br />

du DFG (cf. Tableau 2). Ces résultats sont expliqués,<br />

en partie, par la population de dérivation de la formule MDRD,<br />

ne comportant que des sujets présentant un DFG inférieur à<br />

60 ml/min/1,73m 2 [20] .<br />

La formule de C-G est évaluée dans cette population par six<br />

études et globalement, le biais est moins clairement négatif<br />

(-26,5 à +16,8) ; la P30 est comprise entre 58 % et 88 %, avec<br />

une supériorité sur la formule MDRD dans quatre de ces études,<br />

une équivalence ou une infériorité dans deux études. Le<br />

développement de la formule de la Mayo Clinic était destiné à<br />

améliorer les performances prédictives dans cette population,<br />

intégrant une forte proportion de donneurs vivants potentiels<br />

(580 sur un total de 900 patients) [14] . Cependant, deux études<br />

tendent à montrer une surestimation importante du DFG dans<br />

cette population par cette formule [35, 36] . Très récemment, une<br />

nouvelle formule a été développée pour améliorer les performances<br />

au-dessus de 60 ml/min/1,73m 2 , la formule CKD-EPI. La<br />

publication initiale comprend un groupe de validation externe<br />

avec 1 984 patients présentant un DFG supérieur à<br />

60 ml/min/1,73m 2 , chez qui cette nouvelle équation présente<br />

une P30 à 88,3 % contre 84,7 % avec MDRD. L’amélioration sur<br />

le biais était encore plus marquée (biais médian -3,5 ml/min/<br />

1,73m 2 versus -10,6 ml/min/1,73m 2 ) avec la formule CKD-EPI<br />

au-delà de 60 ml/min/1,73m 2 [4] . Malgré ces améliorations, le<br />

gain en termes de précision reste très limité avec cette nouvelle<br />

formule, y compris chez le patient à fonction rénale normale ou<br />

peu altérée.<br />

En conclusion, dans une population sans insuffisance rénale,<br />

la formule de C-G ne semble pas moins performante que la<br />

formule MDRD. Toutefois, la formule de C-G n’a pas été<br />

spécifiquement adaptée pour pouvoir être utilisée avec des<br />

valeurs de créatininémie standardisées IDMS.<br />

Dans la population des patients insuffisants rénaux chroniques<br />

(DFG < 60 ml/min/1,73m 2 ), la formule MDRD semble<br />

globalement plus performante que la formule de C-G puisque<br />

les quatre études évaluant les deux formules retrouvent une<br />

P30 supérieure [25, 27, 30, 33] . Cette P30 s’étend de 62 %à88%<br />

pour MDRD contre 49 %à79%pour C-G. La formule MDRD<br />

tend à une discrète sous-estimation dans cette population<br />

(-0,5 à -6,1). La formule CKD-EPI n’apporte pas de gain substantiel<br />

dans cette population (P30 79,9 % versus 77,2 % ; biais<br />

médian 2,1 ml/min/1,73m 2 versus 3,4) [4] .<br />

4 Néphrologie


Une évaluation supplémentaire de la formule CKD-EPI par<br />

des équipes indépendantes du groupe de travail CKD-EPI reste<br />

nécessaire afin de complètement valider cette formule dans la<br />

population de patients à fonction rénale normale ou proche de<br />

la normale.<br />

Performances des estimateurs<br />

dans différentes populations<br />

Effet de l’âge<br />

L’âge avancé est caractérisé par une diminution de la masse<br />

musculaire et donc de la production de créatinine. Ainsi, à<br />

concentration de créatinine égale, le patient le plus âgé a le<br />

DFG le plus faible. Le paramètre de l’âge est intégré à tous les<br />

estimateurs du DFG basés sur la créatinine mais avec un<br />

« poids » statistique différent. Le poids de l’âge sur l’estimation<br />

du DFG par la formule de C-G est excessif après 70 ans et rend<br />

la formule inutilisable après 80 ans, comme l’a montré Froissart<br />

[37] . Ces auteurs ont montré une sous-estimation très<br />

importante du DFG par la formule C-G après 65 ans chez les<br />

hommes (-14,5 ml/min/1,73m 2 versus +3,2 avant 65 ans) avec<br />

un effet similaire chez les femmes à DFG élevé. L’amplitude<br />

était moins marquée à bas DFG (< 60 ml/min/1,73m 2 ) [33] . Dans<br />

une étude concernant 46 patients âgés de 69 à 92 ans, Lamb et<br />

al. retrouvent un biais à -11,1 ml/min/1,73m 2 avec la formule<br />

C-G alors qu’il n’était que de -2,0 ml/min/1,73m 2 avec<br />

MDRD [38] . Poggio et al. décrivent également le même effet par<br />

une étude multifactorielle qui retrouve pour chaque augmentation<br />

de 10 % de l’âge, une diminution en moyenne de<br />

1,8 ml/min/1,73m 2 de DFG mesuré (iothalamate), de<br />

1,9 ml/min/1,73m 2 de DFG estimé par MDRD et<br />

3,6 ml/min/1,73m 2 de DFG estimé par C-G [27] . De la<br />

même manière, dans une étude portant sur 48 patients<br />

issus d’un milieu gériatrique (moyenne d’âge 86 ans), la<br />

formule C-G sous-estimait de façon majeure le DFG (biais<br />

moyen -6,7 ml/min/1,73m 2 ) [39] .<br />

En conclusion, la formule de C-G ne doit pas être utilisée<br />

après 70 ans. Il faut lui préférer, ici aussi, la formule MDRD<br />

même s’il est très probable que les performances de cet estimateur<br />

soient également (mais dans une moindre mesure) altérées<br />

dans cette population.<br />

Effet du poids<br />

Le rôle du poids dans les performances des estimateurs est<br />

complexe. La question la plus importante dans ce cadre est le<br />

comportement des estimateurs chez les patients obèses. En effet,<br />

l’obésité est bien sûr liée à une accumulation de masse grasse,<br />

n’entraînant en elle-même aucune surproduction de créatinine,<br />

mais également une augmentation modérée de masse musculaire<br />

qui, elle, peut rendre compte d’un surcroît de concentration<br />

sans différence de DFG. Cependant, il existe une grande<br />

hétérogénéité entre les patients concernant le rapport entre la<br />

masse musculaire du patient et son poids. C’est pourquoi la<br />

formule de C-G qui intègre le poids comme facteur de variation<br />

peut en théorie surestimer le DFG chez les patients obèses [33] .<br />

De plus, la normalisation à la surface corporelle de la formule<br />

de C-G, actuellement recommandée, est critiquable du fait de la<br />

non-linéarité de la relation entre le DFG et la surface corporelle<br />

et donc de l’absence de base physiologique à cette recommandation.<br />

Cette normalisation a peu d’effet à surface corporelle<br />

proche de 1,73m 2 , mais peut entraîner un biais non négligeable<br />

à surface corporelle importante, ce qui est le cas des patients<br />

obèses [40] .<br />

Froissart et al. ont étudié l’effet de l’indice de masse corporelle<br />

sur les formules de C-G et MDRD avec les constatations<br />

suivantes : pour un indice de masse corporelle supérieur à<br />

30 kg/m 2 , il existait une discrète sous-estimation (-2,6 ml/min/<br />

1,73m 2 ) avec la formule MDRD alors que l’équation de C-G<br />

surestimait de façon majeure (+8,5 ml/min/1,73m 2 ) le DFG. Les<br />

deux formules présentaient des performances médiocres chez les<br />

patients dénutris (indice de masse corporelle < 18,5 kg/m 2 ) avec<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire 18-011-A-11<br />

une surestimation importante du DFG (+12,2 pour MDRD et<br />

+6,2 ml/min/1,73m 2 pour C-G) [33] . Poggio et al. ont montré<br />

qu’une augmentation moyenne de 10 % du poids n’entraînait<br />

pas de variation du DFG mesuré par clairance de l’iothalamate<br />

(-0,1 ml/min/1,73m 2 ), pas de variation du DFG estimé par<br />

MDRD (pas d’intégration du poids comme paramètre), mais, en<br />

revanche, une variation en moyenne de +5 % du DFG estimé<br />

par C-G [27] . Il apparaît donc que la prise en compte du poids<br />

par la formule C-G est excessive et ce de façon substantielle<br />

chez les patients obèses (surestimation du DFG) et que la<br />

créatinine n’est pas un bon marqueur du DFG en cas de<br />

dénutrition majeure, quelle que soit la formule utilisée.<br />

De la même manière, les formules d’estimation du DFG<br />

basées sur la créatinine surestiment de façon majeure la fonction<br />

rénale des patients cirrhotiques en raison de leur dénutrition<br />

mais aussi du fait de l’augmentation du volume<br />

extracellulaire.<br />

Effet du sexe<br />

Le genre des sujets influe sur le taux de créatinine par les<br />

différences de masse musculaire entre hommes et femmes. À<br />

DFG égal, un homme présente un taux de créatinine supérieur<br />

à celui d’une femme. Toutes les formules d’estimation intègrent<br />

ce paramètre. Froissart et al. ont évalué l’effet du sexe sur les<br />

performances d’estimation et ne retrouvent pas de différence<br />

avec la formule de C-G et une discrète sous-estimation du DFG<br />

par la formule MDRD chez les femmes de moins de 65 ans<br />

(-3 ml/min/1,73m 2 ) [33] .<br />

Effet de l’ethnie<br />

Le facteur ethnique de variation du taux de créatinine à DFG<br />

constant est lui aussi directement lié à la masse musculaire. La<br />

formule MDRD intègre un facteur correctif pour les patients<br />

noirs dits « afro-américains ». Ce facteur multiplicatif est de<br />

1,18 pour la formule MDRD7 et 1,21 pour la formule MDRD<br />

abrégée et correspond à la masse musculaire plus importante de<br />

ces patients par rapport à la population dite « caucasienne ». Ce<br />

facteur a été ultérieurement validé par les données de l’étude<br />

African American Study of Kidney Disease and Hypertension<br />

(AASK) (1 703 patients afro-américains insuffisants rénaux<br />

chroniques) [22] .<br />

Plusieurs études sur différentes populations asiatiques ont<br />

tenté de définir un facteur correctif. Cependant, ce type de<br />

correction n’est pas encore complètement validé [41-43] .<br />

Population des patients transplantés<br />

En transplantation rénale, l’estimation du DFG permet le<br />

suivi de la fonction du greffon. Il existe des facteurs propres à<br />

cette situation clinique, à même de faire varier les performances<br />

des estimateurs basés sur la créatinine (rein unique, état<br />

nutritionnel, sécrétion tubulaire de créatinine, rôle des traitements<br />

immunosuppresseurs). La formule de Nankivell a été<br />

dérivée à partir d’une population de patients transplantés<br />

rénaux avec pour objectif une amélioration de la prédiction [12] .<br />

Cependant, elle intègre la concentration d’urée comme marqueur,<br />

alors que de nombreux facteurs indépendants du DFG<br />

sont susceptibles de la faire varier (perfusion rénale, état<br />

nutritionnel, apport protidique).<br />

De multiples études ont évalué les performances des estimateurs<br />

du DFG en transplantation rénale (Tableau 3) [44-53] avec<br />

des effectifs compris entre 81 et 798. Elles montrent :<br />

des performances médiocres de la formule de Nankivell, avec<br />

une surestimation importante et des P30 plus faibles que<br />

celles des formules MDRD et C-G ;<br />

une surestimation modérée du DFG par la formule MDRD, ce<br />

qui contraste avec le biais plutôt négatif dans la population<br />

générale à DFG moyen comparable, suggérant un facteur<br />

propre à la transplantation diminuant le taux de créatinine à<br />

fonction rénale égale (sécrétion tubulaire, dénutrition) ;<br />

des performances (P30) des formules MDRD et C-G inférieures<br />

à celles de la population générale à DFG équivalent.<br />

5


18-011-A-11 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

Tableau 3.<br />

Principales études évaluant les estimateurs du débit de filtration glomérulaire (DFG) en transplantation rénale.<br />

Références n Dosage créatinine Calibration créatinine Mesure DFG DFG moyen ± DS (ml/min/1,73 m 2 )<br />

Mariat, 2005 [44] 476 Enzymatique Non Inuline 47 ± 16<br />

Bosma, 2005 [45] 798 Jaffé Non<br />

Ces résultats incitent donc à la prudence lors de l’utilisation<br />

des estimateurs en transplantation rénale et tout particulièrement<br />

au cours des essais cliniques où le DFG est le critère de<br />

jugement principal [54] . L’utilisation des méthodes de référence<br />

de mesure du DFG est donc préférable pour le suivi de la<br />

fonction du greffon, que ce soit en clinique ou dans les études.<br />

En transplantation cardiaque, deux études montrent une<br />

surestimation majeure par toutes les formules d’estimation<br />

basées sur la créatinine [55] . En transplantation hépatique, la<br />

réduction de la masse musculaire explique en grande partie les<br />

performances médiocres des estimateurs basés sur la créatinine.<br />

Gerhardt et al. retrouvent une surestimation massive du DFG<br />

par la formule MDRD (+10 ml/min/1,73m 2 ) alors que le DFG<br />

moyen était inférieur à 60 ml/min/1,73m 2 . La P30 était également<br />

médiocre (64 %) [56] . Gonwa et al. retrouvent en revanche<br />

une sous-estimation globale du DFG par MDRD avant et après<br />

transplantation hépatique, mais lorsque celui-ci était inférieur à<br />

40 ml/min/1,73m 2 , MDRD le surestimait de façon majeure<br />

(+22 ml/min/1,73m 2 ) [57] . Ceci illustre, une fois de plus, les<br />

mauvaises performances des estimateurs chez des patients à état<br />

général très altéré [28] .<br />

■ Cystatine C comme marqueur<br />

alternatif du débit de filtration<br />

glomérulaire<br />

Bases physiologiques<br />

La cystatine C (CysC) fait partie de la famille des cystatines<br />

qui sont des inhibiteurs naturels des cystéines protéinases (telles<br />

que les cathepsines B, H et L et les calpaïnes). Ces cystéines<br />

protéinases exercent un rôle important dans le catabolisme<br />

intracellulaire des peptides et protéines, au niveau du processus<br />

de protéolyse de prohormones et proenzymes, au niveau de la<br />

destruction du collagène, dans l’effraction des membranes<br />

basales par les cellules cancéreuses. L’intérêt potentiel de la<br />

CysC comme marqueur biologique du DFG remonte aux années<br />

1980 [58] .<br />

Les études physiologiques spécifiques au comportement rénal<br />

de la CysC sont relativement peu nombreuses et la principale a<br />

été réalisée chez le rat [59] . Après avoir été filtrée sans limitation<br />

par les glomérules du fait de sa faible masse moléculaire<br />

(13 260 Da [60] ) et l’absence de liaison aux protéines plasmatiques,<br />

la CysC est entièrement réabsorbée par les tubules<br />

proximaux, où elle est presque totalement catabolisée [59, 61] .La<br />

réabsorption tubulaire se ferait par un récepteur, la mégaline,<br />

125 I-iothalamate 55 ± 18 (ml/min)<br />

Gaspari, 2004 [46] 196 Jaffé modifié Non Iohexol plasmatique 56,1 ± 15<br />

Rule, 2006 [47] 103 Jaffé Non Iothalamate 52 ± 18<br />

Raju, 2005 [48] 81 Enzymatique Non<br />

99m Tc-DTPA plasmatique 59 ± 24 (ml/min)<br />

Poge, 2005 [49] 95 Jaffé modifié Non 99m Tc-DTPA plasmatique 37,4<br />

Poge, 2006 [50] 108 Jaffé modifié Non 99m Tc-DTPA plasmatique 39,5<br />

Poggio, 2006 [51] 209 Jaffé modifié Oui 125 I-iothalamate 44 ± 26<br />

White, 2005 [52] 117 Jaffé modifié Oui<br />

99m Tc-DTPA plasmatique 58 ± 23<br />

Maillard, 2008 [53] 120 Enzymatique Oui Inuline 52,6 ± 19<br />

DS : déviation standard ; DTPA : acide diéthylène triamine penta-acétique.<br />

commun à de nombreuses protéines, grâce à un mécanisme<br />

d’endocytose [62] . Il est couramment admis qu’il n’existe pas de<br />

sécrétion tubulaire de la CysC, même si une étude chez<br />

l’homme a publié des données pouvant indiquer le<br />

contraire [63] . Cependant, la méthodologie de cette étude a été<br />

largement critiquée et ses conclusions doivent être interprétées<br />

avec réserve [64] .<br />

La CysC est produite par toutes les cellules nucléées de<br />

l’organisme chez l’homme. La CysC est codée par un gène de<br />

ménage, c’est-à-dire un gène exprimé de façon constitutive et<br />

non régulée, ce qui est l’argument classique étayant la constance<br />

de sa production [61, 65] .<br />

Cette production constante de CysC a longtemps été considérée<br />

comme absolue, notamment au vu d’études de cohorte<br />

qui n’avaient pu relier la production de la protéine à une<br />

situation physiopathologique autre que l’atteinte de la filtration<br />

glomérulaire [65] . De nombreuses observations, in vitro et<br />

cliniques, relativisent aujourd’hui cette notion.<br />

Déterminants physiologiques de la production<br />

de cystatine C<br />

Parmi les facteurs extrarénaux pouvant influencer les valeurs<br />

de CysC chez des sujets sains, les travaux les plus récents ont<br />

montré que chez les adultes de moins de 60 ans, les concentrations<br />

de CysC sont plus faibles chez les femmes que chez les<br />

hommes, cette différence disparaissant au-delà de 60 ans [66, 67] .<br />

L’âge est également un facteur de variabilité de la CysC.<br />

Ainsi, des valeurs plus élevées sont retrouvées chez les nouveaunés<br />

quels que soient le sexe, le poids ou la taille des enfants, y<br />

compris les prématurés [68-70] ; elles déclinent après la naissance<br />

pour rejoindre des valeurs identiques à celles de l’adulte à l’âge<br />

de 4 ans. Il convient cependant d’être prudent, en particulier<br />

pour les très jeunes enfants et les prématurés, chez qui les<br />

valeurs élevées de CysC pourraient refléter un DFG bas dans le<br />

cadre d’un processus de maturation rénale [69] . Chez l’adulte, la<br />

plupart des études montrent une influence significative de l’âge<br />

sur les concentrations de CysC, impliquant des valeurs de<br />

référence différentes pour les sujets de plus de 50-60 ans [66, 71] .<br />

Influence de la masse musculaire<br />

Le défaut principal de la créatinine est bien la dépendance de<br />

sa production à la masse musculaire [72] . Dans un premier<br />

temps, Vinge et al. ont décrit la cystatinémie comme indépendante<br />

de la masse musculaire [73] . Néanmoins, cette étude a été<br />

récemment critiquée, tant pour la méthodologie clinique que<br />

statistique. MacDonald et al. ont, récemment, et de façon plus<br />

convaincante (DFG déterminé par mesure de la clairance de<br />

6 Néphrologie


l’inuline et masse maigre mesurée par densitométrie), démontré<br />

que la cystatinémie était bien, en partie, dépendante de la<br />

masse musculaire. L’influence de la masse musculaire sur la<br />

production de CysC s’explique par le fait que les cellules<br />

musculaires sont les plus nombreuses des cellules nucléées de<br />

l’organisme [74] . Cependant, il n’en reste pas moins que la<br />

variabilité de la CysC expliquée par la masse musculaire est bien<br />

moindre que pour la créatinine. L’avantage de la CysC sur la<br />

créatinine chez le patient avec une masse musculaire diminuée<br />

reste donc important [75, 76] .<br />

Influences hormonales<br />

In vitro, la production de CysC par des cellules HeLa en<br />

culture a été décrite dès 1995 comme transcriptionnellement<br />

stimulée par les corticoïdes [77] . En réponse à ces études in vitro,<br />

les observations cliniques ne sont pas concordantes. Chez des<br />

enfants atteints de syndrome néphrotique traités par des doses<br />

élevées de corticoïdes, aucune augmentation des concentrations<br />

sériques de CysC n’a été retrouvée [78] . En revanche, chez des<br />

patients transplantés rénaux et asthmatiques, une augmentation<br />

des concentrations de CysC dépendante des doses de corticoïdes<br />

a été décrite [79, 80] . Si l’existence d’un « effet corticoïde » est<br />

aujourd’hui admise, son impact clinique sur l’évaluation du<br />

DFG reste incertain.<br />

L’hyperthyroïdie augmente les concentrations sériques de<br />

CysC [81, 82] . Sachant que la production de CysC et le DFG<br />

varient en sens opposés en réponse aux hormones thyroïdiennes,<br />

l’utilisation de la CysC semble inadaptée dans les<br />

dysthyroïdies.<br />

Autres<br />

Si l’on a cru que la production de CysC était indépendante<br />

de l’inflammation [83] , il semble acquis désormais que l’interleukine<br />

6 (IL6) induit une augmentation de l’expression de CysC,<br />

au moins dans les cellules dendritiques [84] . Récemment, cette<br />

relation a été également suggérée en clinique devant l’observation<br />

de concentrations plus élevées de CysC en cas d’augmentation<br />

de la C reactive protein (CRP) [85] . De la même manière, le<br />

diabète semble être associé avec des valeurs plus élevées de<br />

CysC [85] . L’influence du tabagisme [66, 67, 86] et de la consommation<br />

d’alcool [86] a également été retrouvée dans certaines<br />

études et mériterait d’être évaluée comme facteur de variabilité<br />

de la CysC.<br />

Au total, la CysC n’est pas un marqueur parfait du DFG au<br />

sens strict du terme. En effet, si son devenir rénal correspond à<br />

celui d’un marqueur endogène du DFG idéal, sa production<br />

semble dépendante de facteurs physiologiques, hormonaux et<br />

anthropométriques. Toutefois, en comparaison à la créatinine, la<br />

concentration sérique de CysC semble être globalement un<br />

reflet plus fidèle du DFG, notamment pour dépister les formes<br />

débutantes d’insuffisance rénale. La CysC se positionne actuellement<br />

comme un marqueur potentiellement intéressant pour<br />

l’estimation du DFG.<br />

Considérations analytiques<br />

Actuellement, à l’exception de méthodes enzyme-linked<br />

immunosorbent assay (Elisa) encore insuffisamment validées, les<br />

méthodes utilisées pour doser la CysC sont basées sur l’agglutination<br />

en milieu liquide de particules de latex recouvertes<br />

d’anticorps polyclonaux dirigés contre la CysC. En fonction de<br />

la nature du signal mesuré, on distingue la particle-enhanced<br />

turbidimetric immuno-assay (PETIA: mesure de la lumière transmise)<br />

et la particle-enhanced nephelemetric immuno-assay (PENIA :<br />

mesure de la lumière diffusée). La différence technique essentielle<br />

entre les deux méthodes réside dans le fait que la PETIA<br />

peut être effectuée sur un automate multiparamétrique de<br />

biochimie (longueur d’onde de 340 à 650 nm environ en<br />

fonction des applications) alors que la PENIA, nécessitant une<br />

longueur d’onde infrarouge, ne peut être effectuée que sur un<br />

automate dédié à l’immunonéphélémétrie.<br />

Néphrologie<br />

Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire 18-011-A-11<br />

La CysC humaine recombinante est disponible, mais il<br />

n’existe actuellement pas de matériel de référence pouvant faire<br />

office d’étalon primaire. Ceci est d’autant plus dommageable<br />

que les différentes méthodes de dosage de CysC ne sont pas<br />

strictement superposables et perdent notamment leur linéarité<br />

pour des valeurs sériques supérieures à 2 mg/l [87] . Cette<br />

variabilité analytique de la CysC dépend à la fois du type de<br />

détection utilisé, de la nature des anticorps, du type d’automates<br />

de mesure et de l’origine des calibrants. Cette situation<br />

plaide donc en faveur de l’instauration d’un calibrant de<br />

référence et d’une large comparaison intertechnique.<br />

Dans ce contexte, il n’est actuellement pas possible d’ériger<br />

une des méthodes de mesure de la CysC comme méthode de<br />

référence. Toutefois, l’application PENIA a été la plus largement<br />

évaluée et a été préférentiellement utilisée pour développer des<br />

équations d’estimation du DFG basées sur la CysC [88] .<br />

Estimation du débit de filtration<br />

glomérulaire à partir de la concentration<br />

sérique de CysC : intérêt dans diverses<br />

populations<br />

Par analogie aux formules basées sur la créatinine sérique, de<br />

nombreuses équations visant à estimer le DFG à partir des<br />

valeurs de concentration sérique de la CysC ont été dévelop-<br />

pées (les principales sont répertoriées dans le Tableau 4<br />

[31, 47,<br />

89-91, 93-101] ). En cohérence avec l’identification des différents<br />

facteurs extrarénaux influençant la cystatinémie, des formules<br />

d’expression différente en fonction des caractéristiques du<br />

patient existent [47, 97, 98] . Certains auteurs ont récemment<br />

suggéré l’intérêt d’une formule combinant la créatinine et la<br />

CysC [47, 97-100, 102] .<br />

Certaines formules ont cependant parfois été élaborées à<br />

partir d’échantillons trop petits et/ou de populations trop<br />

spécifiques. D’autres sont complexes car mettant en œuvre des<br />

paramètres supplémentaires autres que biologiques, sans que<br />

cela n’apporte d’avantage évident. De manière générale, ces<br />

formules n’ont été que très peu validées dans des populations<br />

différentes de celles à partir desquelles elles ont été élaborées.<br />

L’avantage de ces formules apparaît, aujourd’hui, relativement<br />

faible par rapport à la formule MDRD basée sur la créatininémie,<br />

l’âge, le sexe et la race, en tout cas en ce qui concerne la<br />

population générale [47, 99] . Toutefois, elles pourraient être plus<br />

utiles dans certaines sous-populations où les formules basées sur<br />

la créatinine se sont révélées particulièrement peu exactes,<br />

comme en pédiatrie [31, 97, 98] , en transplantation [47, 52, 103] ,en<br />

gériatrie ou chez le patient dénutri [75, 76] . Ceci reste encore à<br />

confirmer par des études de validation sur de larges populations.<br />

Populations pédiatriques<br />

Le fait que la CysC ne dépende pas, ou en tout cas beaucoup<br />

moins, de la masse musculaire [73, 74] est, en pédiatrie, un<br />

avantage théorique important sur la créatinine. En effet, les<br />

valeurs de référence de la créatinine ne peuvent être considérées<br />

qu’en fonction de l’âge du patient [104, 105] . Or, plusieurs auteurs<br />

ont démontré que les valeurs de référence de la CysC sont<br />

identiques (ou très proches) pour les adultes et les enfants de<br />

plus de 1 an [68] . Plusieurs études ont évalué la capacité de la<br />

CysC à détecter une insuffisance rénale en pédiatrie plus<br />

précocement que la créatininémie ou que les formules d’estimation<br />

du DFG basées sur la créatinine. Les résultats restent<br />

toutefois contradictoires, certains en faveur de la CysC<br />

[89, 106-<br />

110] alors que d’autres ne lui reconnaissent aucune valeur<br />

ajoutée [111-115] . Ceci peut s’expliquer par les limitations<br />

inhérentes à l’étude spécifique des enfants (difficulté à la mise<br />

en œuvre des techniques de mesure directe du DFG, absence de<br />

consensus sur la normalité des valeurs du DFG chez l’enfant) et<br />

aussi par le fait que beaucoup d’auteurs n’ont pas dissocié les<br />

enfants avec ou sans corticothérapie.<br />

Plusieurs auteurs ont mis au point des formules d’évaluation<br />

du DFG basées sur la CysC, parfois couplée à la créatinine. Les<br />

7


18-011-A-11 Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit de filtration glomérulaire<br />

Tableau 4.<br />

Principales formules d’estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) basées sur la cystatine C plasmatique (CysC).<br />

Références n Mesure du DFG CysC Population Formules<br />

Bokenkamp [89] 83 Inuline PETIA Pédiatrie (162/CysC) - 30<br />

Tan [90] 40 Iohexol PENIA Diabétiques et sains (87,1/CysC) - 6,87<br />

Hoek [91] 47 Iothalamate PENIA Divers (80,35/CysC) - 4,32<br />

Larsson [92] 100 Iohexol PENIA Divers 77,24 × CysC -1,2623<br />

formules de Filler [93] et de Grubb [31] ont été construites sur la<br />

base de l’étude d’un grand nombre de patients (n = 536 pour les<br />

deux) mais n’ont été que peu validées dans des populations<br />

pédiatriques autres que celles où elles ont été élaborées [98] .<br />

Intérêt de la cystatine C en transplantation<br />

Globalement, les équations intégrant la CysC semblent<br />

apporter une meilleure performance prédictive, même s’il reste<br />

encore à démontrer que cette amélioration de prédiction soit<br />

cliniquement substantielle [52, 56, 116-118] . En transplantation<br />

cardiaque, l’équation de Rule [47] intégrant la CysC permet<br />

d’augmenter significativement la justesse de prédiction du DFG<br />

par rapport à l’équation MDRD [116] . Une meilleure performance<br />

prédictive des équations basées sur la CysC a également été<br />

rapportée en transplantation hépatique [56] .<br />

Parmi les différentes équations intégrant la CysC et qui ont<br />

été testées en transplantation, celle offrant la meilleure estimation<br />

du DFG n’est pas toujours la même d’une étude à l’autre.<br />

Il est possible que des équations propres aux patients transplantés<br />

soient nécessaires. En effet, confirmant des résultats antérieurs<br />

qui avaient déjà suggéré une possible sous-estimation du<br />

DFG par la CysC en transplantation [119] , Rule et al. observent<br />

que le DFG est supérieur de 19 % chez les patients transplantés<br />

par rapport aux patients insuffisants rénaux à reins natifs [47] .<br />

L’explication la plus communément avancée est celle d’une<br />

production accrue de CysC induite par l’utilisation des traitements<br />

immunosuppresseurs, notamment les stéroïdes. Ceci a<br />

conduit certains auteurs à élaborer des équations spécifiquement<br />

développées pour des patients transplantés, adultes [47, 94] ou<br />

enfants [98] . Les équations de Rule et de Le Bricon sont souvent<br />

PETIA 99,43 × CysC -1.5837<br />

Filler [93] 536 99m Tc-DTPA PENIA Pédiatrie 91,62 × (1/CysC) 1,123<br />

Le Bricon [94] 25 51 Cr-EDTA PENIA Greffés (78 × [1/CysC]) + 4<br />

Sjostrom [95] 381 Iohexol PETIA Divers (124/CysC) - 22,3<br />

Grubb [31] 536 Iohexol PETIA Divers + pédiatrie<br />

(n = 85)<br />

Rule [47] 204 Iothalamate PENIA Divers sauf greffés - 66,8 × CysC -1,3<br />

Rule [47] 206 Greffés 76,6 × CysC -1,16<br />

MacIsaac [96] 125 99m Tc-DTPA PENIA Diabétiques (84,6/CysC) - 3,2<br />

84,69 × CysC -1,68 × 1,384 si moins de 14 ans<br />

- ([66,8 × CysC -1,3 ]×[273×Cr -1,22 × âge -0,299 × 0,738 si femme]) 0,5<br />

Bouvet [97] 67 51 Cr-EDTA PENIA Pédiatrie 63,2 × (Cr/96) -0,35 × (CysC/1,2) -0,56 × (poids/45) 0,3 × (âge/14) 0,4<br />

Zappitelli [98] 103 Iothalamate PENIA Pédiatrie - 75,94/(CysC 1,17 ) × 1,2 si greffé rénal<br />

- (43,82 × e 0,003 × taille)/(CysC 0,635 ×Cr 0,547 )<br />

Ma [99] 376 99m Tc-DTPA PENIA Divers, Chinois 169 × PCr -0,608 × CysC -0,63 × âge -0,157 (× 0,83 pour sexe féminin)<br />

Stevens [100] 3 418 125 I-iothalamate<br />

et 51 Cr-EDTA<br />

PENIA Maladie rénale<br />

chronique<br />

- CKD-EPI-CysC1 = 76,7 × CysC -1,19<br />

- CKD-EPI-CystC2 = 127,7 × CysC -1,17 × âge -0,13 × (0,91 pour sexe<br />

féminin) × (1,06 pour Noir Africain)<br />

- CKD-EPI mixte = 177,6 × Cr -0,65 × CysC -0,57 × âge -0,20 × (0,82 pour sexe<br />

féminin) × (1,11 pour Noir Africain)<br />

Cr : créatinine sérique en mg/dl ; DTPA : acide diéthylène triamine penta-acétique ; EDTA : acide éthylène diamine tétra-acétique ; CKD-EPI : chronic kidney disease epidemiology ;<br />

PETIA : particle-enhanced turbidimetric immuno-assay ; PENIA : particle-enhanced nephelemetric immuno-assay.<br />

retrouvées parmi les équations les plus performantes en transplantation<br />

[47, 94] . Cependant, la démonstration qu’une équation<br />

développée spécifiquement pour la transplantation offre une<br />

estimation du DFG significativement meilleure reste encore à<br />

faire.<br />

Patients âgés<br />

La sarcopénie liée au vieillissement s’accompagne d’une<br />

baisse de la production de la créatinine. Les équations prédictives<br />

incluant l’âge et le sexe prennent partiellement en compte<br />

cette donnée. L’inflammation, la malnutrition et le déconditionnement<br />

musculaire (souvent associés aux pathologies<br />

chroniques comme l’insuffisance cardiaque ou les bronchopneumopathies)<br />

peuvent encore accentuer les anomalies du<br />

métabolisme musculaire et affecter la valeur des équations<br />

prédictives basées sur la créatinine [37] .<br />

Chez le sujet âgé, la CysC paraît moins sensible aux facteurs<br />

métaboliques et extrarénaux que la créatinine [120] . Il n’existe<br />

encore que trop peu d’études comparant les taux de CysC avec<br />

une mesure de référence. La CysC pourrait aussi être un<br />

marqueur plus sensible que la créatinine pour dépister les<br />

altérations modérées du DFG chez le sujet âgé (69-92 ans) [92,<br />

121] , même si des résultats non concluants ont aussi été rappor-<br />

tés [39, 122] .<br />

■ Conclusions et perspectives<br />

La variable biologique « DFG » est plus qu’un simple marqueur<br />

de la fonction rénale : le DFG constitue la pierre angulaire<br />

8 Néphrologie


.<br />

du système de classification internationale de la maladie rénale<br />

chronique [17] ; un DFG altéré est maintenant clairement<br />

identifié comme un facteur majeur et indépendant de risque<br />

cardiovasculaire [123] .<br />

Tout naturellement, la question de l’évaluation du DFG est<br />

revenue ces dernières années au premier plan des préoccupations<br />

de la communauté néphrologique. À cet égard, il faut<br />

saluer la contribution du groupe CKD-EPI [4] . Ce groupe de<br />

recherche, formé à l’initiative d’Andrew S. Levey (Tufts-New<br />

England Medical Center), s’est fixé pour objectif de développer<br />

et valider de nouvelles équations d’estimation du DFG à partir<br />

d’un ensemble de données cliniques et biologiques extraites de<br />

différentes études cliniques qui ont en commun d’une part, de<br />

disposer d’une mesure directe du DFG (dans la majorité des cas,<br />

il s’agit d’une clairance urinaire au 125 I-iothalamate) et d’autre<br />

part, de pouvoir calibrer la mesure de créatinine plasmatique sur<br />

la méthode de référence IDMS. Au-delà de la production de<br />

nouveaux estimateurs du DFG (au premier rang desquels, bien<br />

sûr, l’équation MDRD), les travaux du groupe CKD-EPI ont<br />

permis d’identifier plusieurs obstacles à une évaluation fiable du<br />

DFG. Parmi ceux-ci, nous avons évoqué les difficultés analytiques<br />

liées au dosage de la créatinine (qui sont en partie<br />

corrigées par le raccordement des méthodes de dosage au<br />

standard IDMS), les limitations physiologiques inhérentes à<br />

l’utilisation même de la créatinine comme marqueur du DFG<br />

(qui reste un marqueur loin d’être idéal dans de nombreuses<br />

populations), la difficulté à évaluer précisément une altération<br />

modérée du DFG (qui se répercute sur le dépistage de la maladie<br />

rénale chronique). Il n’en reste pas moins qu’actuellement il<br />

existe un consensus autour de l’équation MDRD qui a véritablement<br />

supplanté la formule de C-G [124] . Les nouvelles équations<br />

CKD-EPI améliorent, certes, l’estimation mais de manière très<br />

limitée en regard de leur sophistication mathématique. Elles<br />

auront probablement des difficultés à s’imposer du fait même<br />

de leur complexité. Ceci est encore plus vrai pour les estimateurs<br />

intégrant la CysC pour lesquels les incertitudes analytiques<br />

(absence de référence pour le dosage de CysC) ne sont pas sans<br />

rappeler les problèmes rencontrés initialement avec la créatinine<br />

et empêchent actuellement leur généralisation. Le problème de<br />

la standardisation de la mesure de CysC doit impérativement<br />

être résolu avant de préciser la place réelle de la CysC en tant<br />

que marqueur endogène du DFG.<br />

“ Point fort<br />

• L’équation MDRD (développée à partir des données de<br />

l’étude Modification of Diet in Renal Disease), dans sa<br />

version simplifiée à quatre variables et corrigée pour être<br />

utilisée avec une créatininémie standardisée IDMS, est<br />

actuellement l’estimateur du DFG, basé sur la créatinine<br />

plasmatique, de référence.<br />

• La cystatine C est un marqueur endogène de filtration<br />

glomérulaire potentiellement plus fiable que la créatinine<br />

mais l’absence actuelle de standard de référence pour son<br />

dosage limite son intérêt clinique.<br />

• Les équations d’estimation du DFG ne peuvent pas<br />

remplacer les méthodes de mesure directe du DFG<br />

lorsqu’une évaluation précise de la fonction rénale est<br />

indispensable.<br />

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Service de néphrologie, Laboratoire d’explorations fonctionnelles rénales, Centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, Université Jean Monnet, 42055<br />

Saint-Étienne cedex 02, France.<br />

P. Delanaye.<br />

Service de néphrologie, dialyse et transplantation, Centre hospitalier universitaire Sart Tilman, Université de Liège, Liège, Belgique.<br />

C. Mariat (christophe.mariat@univ-st-etienne.fr).<br />

Service de néphrologie, Laboratoire d’explorations fonctionnelles rénales, Centre hospitalier universitaire de Saint-Étienne, Université Jean Monnet, 42055<br />

Saint-Étienne cedex 02, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Maillard N., Delanaye P., Mariat C. Exploration de la fonction glomérulaire rénale (II). Estimation du débit<br />

de filtration glomérulaire. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-011-A-11, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Gangrène des organes génitaux externes<br />

P. Berveiller, P. May, F. Dubosq, J.-P. Binder, M. Revol, J.-M. Servant,<br />

F. Desgrandchamps<br />

La gangrène des organes génitaux externes, appelée également gangrène de Fournier, correspond à une<br />

fasciite nécrosante de la région périnéale qui touche majoritairement les hommes de tous âges,<br />

exceptionnellement les femmes. Dans 80 % des cas environ, la survenue d’une gangrène de Fournier est<br />

favorisée par des causes locorégionales telles que les infections urinaires, les sténoses urétrales, les<br />

infections périanales ou les infections dermatologiques périnéales. D’autres facteurs de risque<br />

« généraux » sont également bien connus tels que le diabète (facteur de risque majeur de gangrène des<br />

organes génitaux externes), ou l’immunodépression. Le traitement de la gangrène de Fournier doit être<br />

multidisciplinaire, instauré en extrême urgence et réalisé sous surveillance étroite dans une unité de soins<br />

intensifs. Ce traitement est médical d’une part avec administration d’une large antibiothérapie, et<br />

chirurgical d’autre part avec un débridement complet des tissus nécrosés. Cette prise en charge<br />

thérapeutique multidisciplinaire peut être associée à une reconstruction chirurgicale à distance lorsque les<br />

séquelles physiques et psychologiques sont importantes. D’autres thérapeutiques, telles que<br />

l’oxygénothérapie hyperbare ou les antibiotiques locaux peuvent être associées, mais leur efficacité reste<br />

encore discutée à ce jour et leur place dans la stratégie thérapeutique est encore à déterminer. Malgré les<br />

progrès réalisés dans les domaines de la réanimation, de l’antibiothérapie et de la prise en charge<br />

chirurgicale, le pronostic de la gangrène des organes génitaux externes reste sombre avec un taux de<br />

mortalité variable mais estimé entre 20 % et 50 %.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Gangrène ; Gangrène de Fournier ; Fasciite nécrosante ; Organes génitaux externes ; Périnée<br />

Introduction 1<br />

Étiologies 2<br />

Bactériologie 2<br />

Physiopathologie 3<br />

Facteurs de risque 3<br />

Immunodépression 3<br />

Autres facteurs de risque 3<br />

Tableau clinique 3<br />

Examens complémentaires 4<br />

Examens biologiques 4<br />

Examens radiologiques 4<br />

Risques évolutifs et facteurs pronostiques 4<br />

Prise en charge thérapeutique 5<br />

Prise en charge spécifique 5<br />

Prise en charge non spécifique 7<br />

Thérapies controversées, actuelles et futures 7<br />

« Vacuum-assisted closure » (VAC ® ) 7<br />

Miel 7<br />

Antibiotiques locaux 7<br />

Oxygénothérapie hyperbare (OTH) 7<br />

Perfusions d’immunoglobulines 7<br />

Conclusion 7<br />

Urologie<br />

■ Introduction<br />

18-642-A-10<br />

La première description de gangrène des organes génitaux<br />

externes (OGE) remonte à 1764 : Baurienne décrivit alors une<br />

nécrose scrotale foudroyante secondaire à une plaie périnéale<br />

[1] . Certains historiens affirment que, déjà bien avant<br />

notre ère, Hérode 1 er le Grand, roi de Judée, aurait déjà été<br />

victime d’une gangrène périnéale certainement favorisée par un<br />

diabète [2] .<br />

Sur un plan bibliographique plus établi, c’est Jean-Alfred<br />

Fournier, vénérologue français, qui rapporta la première série de<br />

cinq cas sur le sujet, ce qui lui permit de donner son nom à<br />

cette gangrène périnéoscrotale [3] .<br />

La gangrène des OGE correspond à une fasciite nécrosante de<br />

la région périnéale qui peut toucher majoritairement les<br />

hommes de tous âges, exceptionnellement les femmes. Les<br />

causes et facteurs favorisants sont maintenant bien connus<br />

ainsi que l’étiopathogénie. Le traitement doit être multidisciplinaire,<br />

médical d’une part avec une large antibiothérapie, et<br />

chirurgical d’autre part avec un débridement des tissus nécrosés.<br />

L’ensemble de cette prise en charge médicochirurgicale<br />

(Fig. 1) doit être réalisé sous surveillance étroite dans une unité<br />

de soins intensifs. Malgré les progrès réalisés dans les domaines<br />

de la réanimation, de l’antibiothérapie et de la prise en charge<br />

chirurgicale, le pronostic reste sombre, avec un taux de mortalité<br />

variable mais estimé entre 20 % et 50 % [4-8] .<br />

1


18-642-A-10 Gangrène des organes génitaux externes<br />

■ Étiologies<br />

Clinique compatible :<br />

œdème, érythème,<br />

phlyctène, nécrose<br />

extensive des OGE,<br />

signes généraux<br />

Examens biologiques et<br />

bactériologiques :<br />

NFS, plaquettes, CRP, bilan<br />

hépatique, ionogramme sanguin,<br />

fonction rénale, hémostase,<br />

glycémie, prélèvements<br />

bactériologiques des portes<br />

d’entrée ++<br />

La gangrène des OGE est expliquée dans environ 80 % des<br />

cas par une origine locorégionale, avec en particulier trois<br />

causes principales :<br />

les causes digestives dans environ 20 % des cas : hémorroïdes,<br />

sigmoïdites, appendicites compliquées, abcès de la marge<br />

anale, cancers du rectum perforés [9-12] ;<br />

les causes urinaires et génitales dans 20 % des cas également :<br />

infection urinaire (abcès rénaux), infection génitale de type<br />

épididymite, prostatite, orchite, ou un obstacle urétral de type<br />

sténose, calcul, et corps étranger intra-urétral [13] . Les causes<br />

iatrogènes secondaires à un acte urologique peuvent également<br />

donner lieu à une gangrène des OGE : sondages urétraux,<br />

biopsies transrectales, circoncisions [14-17] ;<br />

les causes dermatologiques dans 20 % à 25 % des cas [11, 18] .<br />

La cause reste indéterminée dans 20 % des cas environ (5 %<br />

à 30 % des cas selon les auteurs) [5, 19, 20] .<br />

Étiologie compatible :<br />

digestive, urogénitale,<br />

dermatologique<br />

Suspicion de gangrène des OGE<br />

(diagnostic clinique +++)<br />

Sans retarder la<br />

prise en charge<br />

thérapeutique<br />

Prise en charge médicochirurgicale urgente +++<br />

- transfert en réanimation médicale<br />

- remplissage vasculaire, thromboprophylaxie, amines vasopressives si<br />

besoin<br />

- antibiothérapie double, voire triple en fonction de la bactériologie<br />

- traitement chirurgical : débridement, drainage ± gestes de<br />

dérivations urinaire ou digestive ± intervention de contrôle<br />

- ± VAC ® ± oxygénothérapie hyperbare, etc.<br />

À distance et en fonction de l’évolution :<br />

discuter une reconstruction chirurgicale<br />

Examens radiologiques :<br />

si besoin TDM ou échographie<br />

en 1 re intention ± IRM<br />

■ Bactériologie<br />

Facteurs favorisants :<br />

diabète, VIH,<br />

alcoolisme<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Stratégie diagnostique et thérapeutique devant une gangrène des organes génitaux externes (OGE). VIH : virus de<br />

l’immunodéficience humaine ; NFS : numération-formule sanguine ; CRP : C reactive protein ; TDM : tomodensitométrie ; IRM : imagerie par résonance<br />

magnétique ; VAC ® : vacuum-assisted closure.<br />

Tableau 1.<br />

Tableau récapitulatif des espèces bactériennes les plus fréquentes responsables de gangrènes des organes génitaux externes.<br />

Germes aérobies Germes anaérobies<br />

Bacilles à Gram négatif Cocci à Gram positif Bacilles à Gram négatif Cocci à Gram positif<br />

Escherichia coli+++ Streptocoques+++ Clostridium perfrigens+ Bacteroides fragilis+++<br />

Pseudomonas++ Staphylocoques++ Peptostreptococcus++<br />

Proteus++ Enterococcus++<br />

Klebsiella+<br />

De nombreuses espèces bactériennes aérobies ou anaérobies<br />

peuvent être à l’origine d’une gangrène des OGE (Tableau 1), le<br />

plus souvent en association, ou plus rarement isolément [21, 22] .<br />

Une moyenne de trois germes est présente dans chaque cas de<br />

gangrène des OGE [23] , mais l’identification de certains, notamment<br />

anaérobies, peut s’avérer difficile.<br />

Les bactéries responsables de ce tableau sont commensales de<br />

la région génitopérinéale et du tractus digestif. Escherichia coli,<br />

Streptococcus sp., Staphylococcus et Enterococcus sont les espèces<br />

les plus fréquentes [22] . Plus rarement, il est possible d’isoler<br />

Proteus, Pseudomonas aeruginosa et certaines klebsielles.<br />

Concernant les germes anaérobies, Bacteroides est le plus<br />

fréquemment rencontré, suivi de Clostridium et de Peptostreptococcus<br />

[24] .<br />

Enfin, de manière plus anecdotique, certains germes ou<br />

parasites peuvent entraîner une gangrène des OGE par les<br />

2 Urologie


lésions cutanées qu’ils provoquent ; il peut s’agir des candidoses,<br />

de la filariose et de l’onchocercose [25-27] .<br />

■ Physiopathologie<br />

Les différentes étapes pathogènes aboutissant au tableau de<br />

gangrène des OGE sont maintenant connues. À partir d’une<br />

porte d’entrée, différentes espèces bactériennes aérobies ou<br />

anaérobies, commensales de la peau ou du tube digestif,<br />

disséminent dans le tissu sous-cutané de façon synergique. Les<br />

germes aérobies utilisent l’oxygène tissulaire nécessaire à leur<br />

multiplication. En diminuant ainsi la quantité d’oxygène<br />

localement, ils favorisent le développement des germes anaérobies<br />

[28] . Cette synergie bactérienne aboutit à la libération<br />

d’exotoxines [29] , de protéines et de différentes enzymes,<br />

spécifiques de chaque espèce bactérienne mise en jeu. Pour les<br />

germes aérobies comme les streptocoques, il s’agit de substances<br />

telles que la streptokinase, la streptodornase et la hyaluronidase,<br />

et de la coagulase pour les staphylocoques. Par exemple, la<br />

streptokinase interagit avec le plasminogène afin de recouvrir le<br />

streptocoque de plasmine, et de lui permettre d’échapper au<br />

système de défense de l’organisme [30] .<br />

L’ensemble de cette « cascade chimique » favorise localement<br />

une hyperagrégation plaquettaire, une hypercoagulation sanguine,<br />

une diminution du potentiel d’oxydoréduction [28, 31] et<br />

une inhibition de la réaction phagocytaire [32] . L’oblitération<br />

artériolaire qui s’ensuit entraîne dans un premier temps une<br />

hypoxie tissulaire, puis une nécrose des tissus sous-cutanés<br />

associée à une libération de gaz (monoxyde d’azote, d’hydrogène<br />

et de sulfate d’hydrogène) [23] , pouvant se déceler sous la<br />

forme de crépitants sous-cutanés [29] . Une fois cette étape<br />

achevée, un cercle vicieux peut débuter : la nécrose favorise la<br />

surinfection par prolifération bactérienne et la gangrène peut<br />

ainsi s’étendre [31] . Cette dissémination fulgurante, 2à3cmpar<br />

heure [33, 34] , s’effectue le long des fascias périnéaux pour<br />

atteindre l’hypogastre, les lombes, la racine des cuisses, voire<br />

même dans certains cas extrêmes la poitrine ou la région<br />

axillaire [20, 35] .<br />

■ Facteurs de risque<br />

Immunodépression<br />

L’immunodépression et l’ensemble des maladies systémiques<br />

favorisant une diminution notable de l’immunité cellulaire<br />

représentent un facteur de risque de gangrène des OGE [36] .<br />

En tout premier lieu, le diabète, a fortiori déséquilibré, est un<br />

des facteurs de risque majeurs [4, 5] . En revanche, il ne serait<br />

pas significativement associé à un pronostic ultérieur péjoratif<br />

[4] .<br />

La séropositivité au virus de l’immunodéficience humaine<br />

(VIH) est également un facteur de risque établi [37, 38] , ainsi<br />

que les affections malignes hématologiques telles que les<br />

leucémies [39, 40] .<br />

Enfin, l’alcoolisme chronique est également un facteur<br />

favorisant reconnu [14] .<br />

Autres facteurs de risque<br />

Ils sont moins évidents ou encore discutés.<br />

Un niveau socioéconomique défavorisé pourrait être un<br />

facteur favorisant de gangrène des OGE. Cependant, les<br />

données disponibles sont controversées et les biais nombreux.<br />

Pour certains, la gangrène des OGE aurait une prévalence plus<br />

élevée dans les pays pauvres par rapport aux pays développés<br />

[41] . Pour d’autres, le contexte défavorisé ne semble pas<br />

jouer de rôle ; en effet, l’hypothèse d’une résistance accrue<br />

des ethnies africaines face aux différents germes responsables<br />

des gangrènes des OGE a été envisagée, et d’autres auteurs<br />

émettent l’hypothèse d’une virulence bactérienne amoindrie<br />

dans le continent africain [42] .<br />

Le sexe masculin semble être un facteur favorisant avec un<br />

sex-ratio qui est de dix hommes pour une femme [5] .<br />

Urologie<br />

L’âge élevé ne semble pas être un facteur de risque ; en effet,<br />

toutes les classes d’âge peuvent être touchées, voire dans<br />

certains cas extrêmes, des enfants [43] .<br />

■ Tableau clinique<br />

Gangrène des organes génitaux externes 18-642-A-10<br />

La symptomatologie typique de la gangrène des OGE est<br />

classiquement composée de quatre phases de durée variable, et<br />

inconstamment décrites dans les observations.<br />

La première phase, qui dure entre 24 et 48 heures, est<br />

totalement aspécifique, le plus souvent insidieuse et passant<br />

volontiers inaperçue. Elle est, de manière inconstante,<br />

constituée de malaises, d’irritabilité ou de prostration,<br />

d’une sensation d’inconfort digestif, de nausées et de vomissements<br />

[6, 41] .<br />

La deuxième phase est une phase d’ « invasion » à proprement<br />

parler, qui est également de courte durée. Elle correspond<br />

aux phénomènes inflammatoires s’étendant localement.<br />

Les signes fonctionnels sont assez constants et composés<br />

majoritairement d’une sensation de gêne périnéale. À cette<br />

gêne peuvent s’associer un prurit, des douleurs périnéales ou<br />

scrotales [7] . Les signes cliniques principaux correspondent à<br />

l’apparition d’érythèmes scrotaux et périnéaux, associés à des<br />

œdèmes. Des signes septiques généraux peuvent précéder ou<br />

suivre cette phase d’invasion. Il s’agit de fièvre, d’hypothermie<br />

ou de frissons, qui sont à rechercher lors de l’interrogatoire.<br />

La troisième phase est constituée par l’apparition du phénomène<br />

nécrotique. En 48 heures, le scrotum devient tuméfié,<br />

dur et exsudatif. S’ajoutent à ce tableau des phlyctènes<br />

hémorragiques et des marbrures cutanées. Puis en quelques<br />

heures apparaissent des plaques noirâtres scrotales, fétides [44] ,<br />

d’abord localisées, mais dont la propension à s’étendre est<br />

remarquable (Fig. 2A, B). C’est à cette étape que les crépitations<br />

« neigeuses » sous-cutanées sont décelables dans 60 %<br />

des cas [29] . Dans plus de la moitié des cas, cette nécrose<br />

locale s’étend vers les lombes, la racine des cuisses et parfois<br />

plus à distance vers la région axillaire par exemple [20, 35] .<br />

La rapidité de la progression de ces lésions est partiellement<br />

expliquée par les rapports anatomiques étroits entre les<br />

différents fascias du périnée : la couche membraneuse du<br />

fascia de Scarpa en avant et en haut, de Colles en arrière, et<br />

de Buck autour des OGE. Contrairement au périnée et aux<br />

tissus pelviens qui sont majoritairement touchés par la<br />

gangrène des OGE, la vessie, le rectum et les testicules sont<br />

particulièrement épargnés. Ceci est expliqué par un réseau<br />

vasculaire à part, propre à ces organes. Si l’on prend l’exemple<br />

du scrotum et du testicule, le premier est vascularisé par<br />

une branche de l’artère pudendale issue de l’artère fémorale,<br />

tandis que le deuxième est vascularisé directement par<br />

l’aorte [5] . Dès lors, si le testicule semble également touché par<br />

la gangrène, il faut rechercher une porte d’entrée infectieuse<br />

d’origine rétropéritonéale ou intra-abdominale [9, 12] .<br />

Concernant les signes généraux, ces derniers sont exacerbés<br />

durant cette phase de nécrose, avec une fièvre élevée ou au<br />

contraire une hypothermie, une tachycardie [45] . Le syndrome<br />

septique s’intensifie [46] , avec une évolution vers un sepsis<br />

sévère ou un choc septique dans 30 % des cas [47] . Quant aux<br />

douleurs, elles s’amendent spontanément du fait d’une<br />

destruction nécrotique des terminaisons nerveuses sensitives<br />

[48] .<br />

La quatrième et dernière phase est une phase de « régénération<br />

» spontanée qui se fait dans les semaines qui suivent les<br />

phases précédentes [6, 44] . Les signes généraux s’amendent<br />

progressivement et la cicatrisation débute par un bourgeonnement<br />

du fond des lésions. Cette phase se termine par un<br />

processus de réépithélialisation centripète [37, 42, 49] . Cette<br />

quatrième et dernière phase est longue, pouvant durer<br />

plusieurs mois, et est accompagnée de rétractions cutanées<br />

inesthétiques entraînant une impotence fonctionnelle.<br />

3


18-642-A-10 Gangrène des organes génitaux externes<br />

Figure 2. Gangrène des organes génitaux externes au stade nécrotique.<br />

■ Examens complémentaires<br />

Examens biologiques<br />

Les examens biologiques, totalement aspécifiques, ne rentrent<br />

pas dans la démarche diagnostique de la gangrène des OGE,<br />

puisque celle-ci est clinique. En revanche, certaines anomalies<br />

biologiques sont fréquentes comme une hyperleucocytose [45] ,<br />

d’autres sont plus rares : une anémie, une thrombopénie ou a<br />

contrario une thrombocytose [23] .<br />

Sur le plan ionique et biochimique, il existe fréquemment<br />

une déshydratation, une hyponatrémie ainsi qu’une augmentation<br />

des phosphatases alcalines [4, 45] . Il peut s’associer une<br />

hyperkaliémie, une hyperglycémie, une hypoalbuminémie et<br />

une acidose métabolique [4] .<br />

Sur le plan bactériologique, il est nécessaire de rechercher<br />

toutes les portes d’entrée potentielles. Les hémocultures sont<br />

systématiques, mais elles ne sont contributives que dans 20 %<br />

à 37 % des cas, a fortiori chez les immunodéprimés [17, 45] .<br />

L’examen cytobactériologique des urines n’est contributif qu’en<br />

cas de cause urologique.<br />

Enfin, les prélèvements locaux à visée bactériologique sont<br />

nécessaires et rentables, puisqu’ils permettent d’identifier le<br />

germedans75%à95%descas [20, 45] . Une mise en culture<br />

rapide en milieux aérobie et anaérobie de pus ou de tissus<br />

nécrosés, en minimisant le contact avec l’air, permet d’identifier<br />

le ou les germes en cause et d’obtenir ainsi un antibiogramme<br />

[29] .<br />

A<br />

B<br />

Examens radiologiques<br />

Bien que le diagnostic de gangrène des OGE soit essentiellement<br />

clinique, l’imagerie peut apporter une aide précieuse au<br />

clinicien dans sa démarche diagnostique.<br />

Les examens d’imagerie disponibles et ayant montré un<br />

intérêt sont historiquement la radiographie standard, mais plus<br />

particulièrement l’échographie, la tomodensitométrie (TDM), et<br />

plus récemment l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le<br />

rôle privilégié de ces examens se joue lorsque le diagnostic de<br />

gangrène des OGE n’est pas évident, lorsque le point de départ<br />

est inconnu, ou lorsque l’extension de la maladie est difficile à<br />

apprécier cliniquement [23] .<br />

La TDM possède la meilleure spécificité pour évaluer l’extension<br />

de la gangrène des OGE et correspond donc à l’examen<br />

d’imagerie de référence [23, 50] . Elle permet d’étudier avec<br />

précision la cause de la gangrène des OGE, les voies de<br />

dissémination, l’existence de collection, ainsi que l’extension<br />

de la maladie [23] . Elle permet de déceler l’emphysème souscutané<br />

dans plus de neuf cas sur dix alors que les crépitants<br />

ne sont qu’inconstamment présents à cette étape de l’infection<br />

[51] . Enfin, la TDM peut être répétée dans le temps et ce<br />

même en postopératoire afin de juger de l’évolution de la<br />

situation et d’une éventuelle nécessité de reprise chirurgicale.<br />

Concernant l’échographie, il s’agit également d’un examen<br />

performant qui permet de mettre en évidence l’air souscutané,<br />

a fortiori en l’absence de crépitants. Elle permet<br />

d’écarter un diagnostic différentiel tel qu’une orchiépididymite<br />

ou une hernie inguinale oblique externe étranglée [50] .<br />

Enfin, l’utilisation de la fonction Doppler permet de surveiller<br />

la vascularisation testiculaire lors d’une éventuelle transposition<br />

testiculaire dans le creux inguinal [52] .<br />

Enfin, la radiographie standard centrée sur la région scrotale<br />

est un examen historiquement utile mais beaucoup moins<br />

performant que la TDM ou l’échographie [23] . Elle permet au<br />

clinicien de mettre en évidence une hyperclarté correspondant<br />

à de l’air sous-cutané avant même qu’il soit décelable<br />

cliniquement [51] . En revanche, la faiblesse de cet examen<br />

réside dans le fait qu’il ne permet pas d’appréhender de<br />

manière précise une cause de gangrène des OGE ni même son<br />

extension. La radiographie standard n’a donc plus à ce jour<br />

qu’un intérêt limité, voire inexistant dans les structures où<br />

d’autres moyens d’imagerie sont disponibles.<br />

Depuis quelques années, certains auteurs relatent l’utilisation<br />

de l’IRM dans la gangrène des OGE. Kickuth et al. ont<br />

montré que l’IRM était supérieure à l’échographie dans<br />

l’identification de la porte d’entrée, ainsi que dans le bilan<br />

d’extension de la maladie [53] .<br />

La référence en matière d’imagerie dans la gangrène des OGE<br />

reste pour le moment la TDM, même si le clinicien peut adapter<br />

sa démarche paraclinique en fonction des disponibilités locales<br />

et des différents plateaux techniques.<br />

■ Risques évolutifs et facteurs<br />

pronostiques<br />

Comme expliqué plus haut, la gangrène des OGE est grevée<br />

d’une lourde morbimortalité et ce malgré les progrès réalisés<br />

dans les domaines de la réanimation et de la chirurgie reconstructrice<br />

[4, 47, 54, 55] . Ceci peut être expliqué par un âge de<br />

survenue plus tardif étant donné un accroissement de la<br />

longévité, et des comorbidités plus nombreuses. Tuncel et al.<br />

ont d’ailleurs montré que les décès survenaient dans plus de<br />

60 % des cas chez des patients ayant au moins deux comorbidités<br />

[4] .<br />

Les causes de décès dans les gangrènes des OGE sont représentées<br />

essentiellement par les chocs septiques, les coagulopathies,<br />

la coagulation intravasculaire disséminée, l’insuffisance<br />

rénale aiguë, la défaillance multiviscérale et l’acidocétose<br />

diabétique [4] .<br />

Il faut ajouter également les conséquences à court et moyen<br />

termes, liées à la réanimation et au décubitus, qui ne sont pas<br />

étudiées clairement dans la littérature. En effet, ces complications,<br />

qu’elles soient infectieuses, thromboemboliques,<br />

4 Urologie


Tableau 2.<br />

Fournier’s Gangrene Severity Index (d’après Laor et al) [22] .<br />

nutritionnelles, peuvent grever la morbidité de manière<br />

notable, et sont à prendre en compte dans le pronostic, a<br />

fortiori si l’hospitalisation a été longue [5] . Pour mémoire, la<br />

durée d’hospitalisation moyenne pour une gangrène des OGE<br />

est de 74 jours (2-300 j) [5, 55] .<br />

Enfin, pour les patients survivants, les risques à long terme<br />

sont fonctionnels, esthétiques (délabrements cutanés importants,<br />

reconstructions esthétiques difficiles) et psychologiques<br />

à la suite des modifications éventuelles du schéma corporel<br />

(dérivations urinaires et digestives, pénectomie, orchidectomie).<br />

Concernant le pronostic des gangrènes des OGE, il est<br />

difficile à appréhender et de nombreux facteurs ont été envisagés.<br />

Ceci a amené plus d’une dizaine d’auteurs à essayer de<br />

définir des paramètres pertinents, permettant d’établir le<br />

pronostic et aboutissant ainsi à la création de scores ou<br />

d’index [4, 7, 22, 47, 56-59] . Un des scores qui semble le plus<br />

pertinent, le Fournier’s Gangrene Severity Index (FGSI), prend<br />

en compte différents critères à l’admission, aussi bien cliniques<br />

que biologiques [22] . Les critères cliniques sont la température<br />

corporelle, les fréquences cardiaque et respiratoire. Les critères<br />

biologiques, quant à eux, comprennent la natrémie, la kaliémie,<br />

la créatininémie, l’hématocrite, le nombre de leucocytes et le<br />

taux sérique de bicarbonates (Tableau 2).<br />

Toutes les valeurs extrêmes apportent un nombre élevé de<br />

points (cotés entre 0 et +4). Une valeur normale correspond à<br />

0 point. Le score final est égal à l’addition des scores de chaque<br />

item, et peut en théorie aller de 0 à 36. Dans un article très<br />

récent, Kabay et al. établissent une valeur seuil de ce score à<br />

10,5 [47] . En effet, 96 % des patients ayant un FGSI supérieur à<br />

10,5 décèdent, et 96 % des patients ayant un score inférieur à<br />

10,5 survivent.<br />

Cependant, il est à noter que le FGSI ne prend pas en compte<br />

d’autres éléments jugés tout aussi importants par d’autres<br />

auteurs. Pour Tuncel et al., le FGSI n’apporte pas de résultat<br />

significatif lors de son utilisation ; en revanche, la surface<br />

cutanée touchée par la gangrène serait, quant à elle, un facteur<br />

pronostique significatif [4] . Malgré la confirmation de cet item<br />

comme facteur pronostique par plusieurs équipes différentes [6,<br />

7, 17] , d’autres auteurs ne semblent pas le confirmer comme un<br />

facteur pertinent [14, 22] .<br />

Le délai écoulé entre le début des symptômes et le diagnostic<br />

semble aussi être un facteur de mauvais pronostic [47] , ce que ne<br />

retrouvent pas Tuncel et al. [4] .<br />

En revanche, la rapidité de la mise en place du traitement<br />

chirurgical est un facteur pronostique majeur [5, 47] .<br />

L’âge, longtemps considéré comme un facteur pronostique [5,<br />

14] , n’a pas été retenu par les études les plus récentes [4, 47] .<br />

L’existence de comorbidités (insuffisance cardiaque, insuffisance<br />

rénale chronique) est un facteur de mauvais pronostic [4] .<br />

En revanche, le diabète et l’immunodépression ne semblent pas<br />

avoir de répercussion significative sur la mortalité [4, 5] .<br />

Valeurs anormales hautes Normale Valeurs anormales basses<br />

Nombre de points +4 +3 +2 +1 0 +1 +2 +3 +4<br />

Température corporelle (°C) > 41 39-40,9 - 38,5-38,9 36-38,4 34-35,9 32-33,9 30-31,9 < 29,9<br />

Fréquence cardiaque (/min) > 180 140-179 110-139 - 70-109 - 55-69 40-54 < 39<br />

Fréquence respiratoire (/min) > 50 35-49 - 23-34 12-24 10-11 6-9 - < 5<br />

Natrémie (mmol/l) > 180 160-179 155-159 150-154 130-149 - 120-129 111-119 < 110<br />

Kaliémie (mmol/l) > 7 6-6,9 - 5,5-5,9 3,5-5,4 3-3,4 2,5-2,9 - < 2,5<br />

Créatininémie (mg/l) > 35 20-34 15-19 - 6-14 - < 6 - -<br />

Hématocrite (%) > 60 - 50-59,9 46-49,9 30-45,9 - 20-29,9 - < 20<br />

Nombre de leucocytes (/mm 3 × 1 000) > 40 - 20-39,9 15-19,9 3-14,9 - 1-2,9 - < 1<br />

Bicarbonate sérique (mmol/l) > 52 41-51,9 - 32-40,9 22-31,9 - 18-21,9 15-17,9 < 15<br />

Urologie<br />

Pour conclure, le pronostic de la gangrène des OGE semble<br />

être déterminé par de nombreux facteurs dont la plupart sont<br />

maintenant bien connus. Cependant, les données de la littérature<br />

sont contradictoires pour certains d’entre eux, et leur<br />

association sous la forme de score pronostique semble encore<br />

imparfaite.<br />

■ Prise en charge thérapeutique<br />

Le traitement des gangrènes des OGE repose sur deux axes<br />

principaux : le premier est une prise en charge médicale dans<br />

une unité de soins intensifs, et le deuxième est une prise en<br />

charge chirurgicale, plus ou moins radicale et répétée dans le<br />

temps. L’ensemble de cette prise en charge doit s’effectuer en<br />

extrême urgence car le pronostic vital est engagé.<br />

Prise en charge spécifique<br />

Antibiothérapie<br />

Il s’agit d’un point essentiel du traitement étant donné<br />

qu’elle permet de contrer le phénomène infectieux systémique.<br />

Elle doit être instaurée en urgence, avant la réalisation des<br />

prélèvements bactériologiques. Elle doit être large, intraveineuse,<br />

empirique ayant pour spectre les bacilles à Gram négatif, les<br />

streptocoques, les staphylocoques, le pyocyanique et les anaérobies.<br />

Elle implique donc l’utilisation d’une céphalosporine de<br />

3 e génération associée à un aminoside afin d’obtenir une<br />

synergie antibactérienne. Il est classique d’utiliser en association<br />

un antibiotique anti-anaérobie. En effet, même si son action<br />

peut sembler redondante avec les deux premières classes<br />

utilisées, sa pénétration tissulaire est excellente. Cependant,<br />

Norton et al. n’ont pas mis en évidence un éventuel intérêt à<br />

utiliser une triple antibiothérapie [59] .<br />

Une fois établie la caractérisation des espèces bactériennes<br />

mises en jeu, il est possible d’adapter l’antibiothérapie, mais<br />

étant donné les difficultés d’identification des anaérobies, il est<br />

fréquent de maintenir une antibiothérapie large jusqu’à disparition<br />

de tout syndrome infectieux clinicobiologique, c’est-àdire<br />

entre 2 et 6 semaines en pratique.<br />

Traitement chirurgical<br />

Gangrène des organes génitaux externes 18-642-A-10<br />

C’est un point majeur de la prise en charge de la gangrène<br />

des OGE [5] . Il a été démontré qu’un traitement médical seul,<br />

sans traitement chirurgical, aggravait de manière significative le<br />

pronostic de la maladie [60] . Le traitement chirurgical sous<br />

anesthésie générale doit être instauré en extrême urgence, car<br />

tout retard à la prise en charge chirurgicale est synonyme<br />

d’aggravation du pronostic [5, 47] .<br />

Débridement chirurgical<br />

Selon les règles des infections des parties molles, nous<br />

pratiquons, dans le service de chirurgie plastique du professeur<br />

5


.<br />

18-642-A-10 Gangrène des organes génitaux externes<br />

Figure 3. Aspect postopératoire immédiat d’une gangrène des organes<br />

génitaux externes. Noter la présence d’une sonde vésicale et d’une lame<br />

de Delbet.<br />

Figure 4. Aspect de face d’une gangrène de Fournier après plusieurs<br />

interventions de débridement chirurgical (phase de bourgeonnement).<br />

Jean-Marie Servant à l’hôpital Saint-Louis [61] , un large débridement<br />

des tissus nécrosés qui entretiennent le phénomène<br />

septique et dans lesquels les antibiotiques diffusent mal [5, 62, 63] .<br />

Cette exérèse doit être réalisée à la lame froide afin d’évaluer,<br />

par le saignement, la viabilité des tissus. Cette viabilité est<br />

également appréciée en testant la résistance tissulaire par une<br />

dissection bidigitale. La limite périphérique du parage s’arrête là<br />

où le doigt ne peut plus séparer la peau de l’aponévrose<br />

profonde [64] . Des prélèvements sont envoyés en bactériologie<br />

pour optimiser l’antibiothérapie. Un drainage des collections<br />

avec des lames de Delbet doit également être réalisé [4] , et<br />

aucune fermeture n’est réalisée afin d’éviter de favoriser la<br />

multiplication bactérienne dans un espace confiné (Fig. 3). Ceci<br />

a pour but d’enrayer le cercle vicieux de l’infection, de contrer<br />

l’extension de la maladie et de diminuer ainsi le phénomène<br />

infectieux systémique. Enfin, cela permet d’apprécier au mieux<br />

l’extension de la maladie, parfois sous-estimée par l’examen<br />

clinique initial.<br />

La surveillance clinique, notamment par le marquage des<br />

contours des lésions, permet de détecter précocement l’extension<br />

de phénomènes infectieux ou nécrotiques. Ainsi, le premier<br />

pansement est réalisé au bloc sous anesthésie générale. Le<br />

débridement chirurgical, au bloc opératoire, peut ainsi être<br />

complété dans le temps, toutes les 24 à 48 heures [47] , jusqu’à<br />

obtention de berges saines et viables (Fig. 4) [65] .<br />

Figure 5. Aspect local postopératoire après greffe de peau mince faiblement<br />

expansée.<br />

Il a d’ailleurs été montré qu’un débridement trop « économique<br />

» était délétère en termes de mortalité, ce qui confirme<br />

l’idée de débridement large, même si celle-ci reste encore<br />

débattue [66] .<br />

Actes chirurgicaux complémentaires<br />

Il est recommandé de réaliser, si le débridement le nécessite,<br />

une dérivation urinaire (cathéter sus-pubien, cystotomie,<br />

sondage urétral) (Fig. 3, 4), ou une dérivation digestive (colostomie<br />

haut située) afin d’éviter des phénomènes de contaminations<br />

ou de macérations des plaies [47] . Cependant, la tendance<br />

actuelle est de ne pas rendre ces gestes agressifs systématiques<br />

[65] . Il en est de même pour l’orchidectomie, systématique<br />

pendant de nombreuses années [5] , dont la fréquence a diminué<br />

nettement puisqu’elle est estimée entre 10 % et 30 % [67] .La<br />

pénectomie est indiquée dans moins de 5 % des cas, lorsque le<br />

pénis est le siège d’une nécrose complète irrécupérable [68] .<br />

Associés à ce traitement chirurgical, des soins locaux répétés<br />

plusieurs fois par jour sont indispensables. Les équipes utilisent<br />

le plus souvent en alternance la polyvidone iodée ou de l’eau<br />

oxygénée et du sérum physiologique en irrigation jusqu’à<br />

obtention d’un liquide clair.<br />

Reconstruction chirurgicale<br />

À distance de ce traitement qui peut être agressif, des techniques<br />

de recouvrement cutané sont souvent nécessaires dans<br />

60%à70%descas [55] . Plusieurs techniques ont été décrites<br />

comme les greffes de peau, les lambeaux musculaires, musculocutanés<br />

et fasciocutanés [69, 70] .<br />

Notre prise en charge chirurgicale reste simple. Après la phase<br />

de bourgeonnement qui succède à la mise à plat et uniquement<br />

lorsque le tissu de granulation est de qualité satisfaisante, nous<br />

réalisons une greffe de peau mince faiblement expansée (1/1,<br />

1/2) en association exceptionnelle avec un lambeau local. Par<br />

commodité ultérieure, il est judicieux, surtout au niveau des<br />

zones d’accès difficiles, de fixer cette greffe avec des points de<br />

fil résorbable.<br />

Lorsque les testicules sont exposés, leur couverture constante<br />

par greffe cutanée (Fig. 5) permet d’éviter la complication la<br />

plus grave : l’altération de la spermatogenèse qui survient après<br />

enfouissement. Avant l’apposition de la greffe de peau, les<br />

cordons testiculaires sont solidarisés à la paroi pelvienne par<br />

quelques points de Vicryl ® 3.0, afin de prévenir tout mouvement<br />

pendulaire testiculaire qui gênerait ultérieurement le<br />

patient. La réalisation de cette greffe testiculaire permet<br />

également de stopper la rétraction tissulaire qui parfois peut<br />

ascensionner exagérément les testicules avec un préjudice<br />

esthétique secondaire majeur. Bien qu’apparaisse de nos jours<br />

un certain intérêt pour les reconstructions par lambeaux<br />

locaux [55] , nous n’avons référencé parmi nos patients aucune<br />

6 Urologie


Figure 6. Aspect local à distance de la reconstruction chirurgicale.<br />

atteinte préjudiciable de la fonction spermatique. Quant au<br />

résultat esthétique final, il affecte peu ces patients (Fig. 6).<br />

Cependant et à distance de l’intervention et du processus<br />

infectieux, lorsque ce résultat esthétique est mal toléré, une<br />

reconstruction par lambeau local peut être alors envisagée. Le<br />

régime sans résidu est maintenu jusqu’au terme du processus de<br />

cicatrisation. Dès la réalisation de la greffe de peau mince, le<br />

décubitus et l’interdiction de toute mobilisation doivent être<br />

stricts durant les 3à4premiers jours en respectant des phases<br />

diurnes durant lesquelles la greffe est laissée à l’air. Ceci<br />

nécessite un nursing adapté à l’âge et à l’état général du patient<br />

et impose parfois une adaptation de la literie. Dès la prise avérée<br />

de la greffe, le patient peut progressivement se mouvoir et<br />

l’arrêt de la prophylaxie antithrombotique par héparine de bas<br />

poids moléculaire peut être envisagé.<br />

Prise en charge non spécifique<br />

Cette prise en charge, dispensée dans un service de réanimation,<br />

encadre l’instauration des traitements antibiotique et<br />

chirurgical. Elle est basée sur une composante réanimatoire<br />

assez classique, consistant en un traitement de l’état de choc.<br />

Cela induit donc un remplissage vasculaire précoce et adapté,<br />

associé ou non à l’utilisation d’amines vasopressives, ainsi qu’un<br />

support transfusionnel éventuel [62] . Une prise en charge<br />

préventive est également nécessaire : prévention des décompensations<br />

de tares (décompensation diabétique, cardiaque) et de<br />

décubitus (anticoagulation préventive), prévention du catabolisme<br />

et du déséquilibre de l’état nutritionnel, si besoin avec<br />

instauration d’une nutrition parentérale [71] ou entérale hyperprotidique<br />

et hypercalorique.<br />

■ Thérapies controversées,<br />

actuelles et futures<br />

En dehors de l’antibiothérapie et de la chirurgie, certaines<br />

équipes ont utilisé des traitements complémentaires qui semblent<br />

intéressants, mais dont l’utilité reste encore à définir.<br />

« Vacuum-assisted closure » (VAC ® )<br />

Le VAC ® ou cicatrisation par la technique de pression<br />

négative est utilisé par certaines équipes. Ce système coûteux<br />

peut être mis en place au niveau du périnée mais plus difficilement<br />

que sur d’autres régions anatomiques. Dès lors, son<br />

utilisation est particulièrement intéressante pour maintenir des<br />

greffes de peau sur des surfaces concaves [72] .LeVAC ® peut être<br />

également intéressant dans cette indication, pour sa composante<br />

de drainage des sérosités. Dans le service de chirurgie<br />

Urologie<br />

plastique de Saint-Louis, son utilisation reste exceptionnelle.<br />

Quant à la stimulation du bourgeonnement, nous lui préférons<br />

les alginates humidifiés.<br />

Miel<br />

Le miel appliqué localement après le débridement chirurgical<br />

aurait des vertus antiseptiques et antifongiques grâce à certains<br />

composés comme le peroxyde d’hydrogène (antiseptique<br />

notamment antianaérobie), l’acide phénolique (modifications de<br />

la perméabilité membranaire) et les flavonoïdes (antioxydants)<br />

[47, 73] . Par ailleurs, il s’agit d’un composé hypertonique<br />

favorisant la diminution des phénomènes inflammatoires et<br />

œdémateux après détersion des éléments nécrotiques [47] .<br />

Antibiotiques locaux<br />

Certains auteurs ont utilisé des antibiotiques topiques<br />

(solutions, crèmes) après le débridement chirurgical [65] . Leur<br />

efficacité reste encore à déterminer.<br />

Oxygénothérapie hyperbare (OTH)<br />

Cette technique était basée sur le fait que l’OTH pouvait<br />

inhiber la prolifération des anaérobies. Son efficacité repose sur<br />

des phénomènes biologiques récemment étudiés : augmentation<br />

des capacités de destruction des aérobies par les leucocytes,<br />

stimulation de la formation des fibres de collagène, résistance<br />

accrue des tissus par augmentation des taux de superoxyde<br />

dismutase (enzyme antioxydante), diminution de l’œdème,<br />

création d’une zone hyperoxygénée jouant le rôle d’une barrière<br />

contre l’extension de l’infection, diminution de la production<br />

des cytokines pro-inflammatoires [74] . Cependant, l’accessibilité<br />

à un caisson hyperbare est limitée (23 centres en France) et la<br />

répétition des séances est aussi un facteur limitant son recours<br />

en pratique quotidienne. De plus, des données plus récentes sur<br />

un impact thérapeutique de l’OTH dans les gangrènes des OGE<br />

sont contradictoires [5, 24, 62, 74-76] . Les études restent globalement<br />

insuffisantes pour établir sa place dans le traitement de la<br />

gangrène des OGE.<br />

Perfusions d’immunoglobulines<br />

L’utilisation des immunoglobulines par voie intraveineuse<br />

repose sur le principe d’empêcher l’activation directe des<br />

lymphocytes T par les toxines bactériennes. Si l’on prend<br />

l’exemple de Streptococcus pyogenes, celui-ci libère des exotoxines<br />

qui se comportent comme des superantigènes. Ces derniers ont<br />

la capacité de court-circuiter les étapes habituelles de la<br />

présentation d’un antigène aux lymphocytes T. Ils ont donc la<br />

faculté de provoquer une libération massive de cytokines proinflammatoires<br />

en activant directement les lymphocytes T. Takei<br />

et al. ont montré que les immunoglobulines intraveineuses<br />

comportaient des anticorps qui inhibaient l’action de ces<br />

superantigènes, et pouvaient dès lors avoir un rôle dans la<br />

gangrène des OGE en empêchant l’activation directe des<br />

lymphocytes T [77] . Malgré des résultats encourageants sur un<br />

faible nombre de patients, il n’existe actuellement pas de<br />

recommandation concernant l’utilisation de ces immunoglobulines,<br />

et certains les réservent aux patients ayant des<br />

critères de mauvais pronostic et une infection à streptocoque<br />

confirmée [78] .<br />

■ Conclusion<br />

Gangrène des organes génitaux externes 18-642-A-10<br />

La gangrène des OGE est une affection grave qui, malgré les<br />

progrès de la réanimation et des techniques chirurgicales, reste<br />

grevée d’un pronostic péjoratif. Les données récentes laissent<br />

émerger l’espoir de nouvelles ressources thérapeutiques, susceptibles<br />

d’améliorer aussi bien le pronostic que les séquelles<br />

esthétiques et psychologiques. Des études complémentaires<br />

méthodologiquement fiables restent cependant nécessaires afin<br />

d’aboutir à une prise en charge standardisée et efficace des<br />

gangrènes des OGE.<br />

7


.<br />

18-642-A-10 Gangrène des organes génitaux externes<br />

“ Points essentiels<br />

Gangrène des OGE (de Fournier)<br />

Maladie grave au pronostic qui reste sombre (20 % à<br />

50 % de mortalité)<br />

Causes locorégionales à rechercher dans 80 % des cas<br />

(urinaire, périnéale, digestive)<br />

Facteurs de risque « généraux » à rechercher : diabète,<br />

immunodépression<br />

Prise en charge thérapeutique réalisée en urgence<br />

Prise en charge thérapeutique médicochirurgicale dans<br />

une unité de soins intensifs<br />

Délai de mise en place du traitement chirurgical :<br />

facteur pronostique majeur<br />

Reconstruction chirurgicale à distance souvent<br />

nécessaire<br />

Place des thérapeutiques associées (comme l’OTH) à<br />

discuter<br />

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P. Berveiller, Interne des hôpitaux de Paris (paul.berveiller@sat.aphp.fr).<br />

Université Paris Diderot, Service d’urologie, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.<br />

P. May, Praticien hospitalier universitaire.<br />

Université Paris Diderot, Service de chirurgie plastique et reconstructrice, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010<br />

Paris, France.<br />

F. Dubosq, Chef de clinique-assistant.<br />

Université Paris Diderot, Service d’urologie, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.<br />

J.-P. Binder, Praticien hospitalier à temps partiel.<br />

Service de chirurgie plastique et reconstructrice, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.<br />

M. Revol, Professeur des Universités, praticien hospitalier.<br />

J.-M. Servant, Professeur des Universités, praticien hospitalier.<br />

Université Paris Diderot, Service de chirurgie plastique et reconstructrice, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010<br />

Paris, France.<br />

F. Desgrandchamps, Professeur des Universités, praticien hospitalier.<br />

Université Paris Diderot, Service d’urologie, Centre hospitalier universitaire Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Berveiller P., May P., Dubosq F., Binder J.-P., Revol M., Servant J.-M., Desgrandchamps F. Gangrène des<br />

organes génitaux externes. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-642-A-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Gangrène des organes génitaux externes 18-642-A-10<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

9


Plan<br />

Glomérulonéphrites aiguës<br />

postinfectieuses<br />

B. Ramdani, M. Zamd, K. Hachim, K. Soulami, M. Ezzahidy, M. Souiri, W. Fadili,<br />

A. Lahboub, L. Hanafi, M. Boujida, S. Squalli, A. Benkirane, M.G. Benghanem,<br />

G. Medkouri<br />

Les glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses sont définies par une agression inflammatoire aiguë non<br />

suppurative à prédominance glomérulaire. Leur incidence actuelle est mal connue du fait de la fréquence<br />

des formes infracliniques. Le germe le plus fréquemment en cause est le streptocoque b-hémolytique du<br />

groupe A. L’immunité humorale joue un rôle clé dans la pathogénie des lésions rénales. L’activation du<br />

complément par la voie alterne représente le mécanisme prépondérant, mais une troisième voie (voie des<br />

lectines) a été récemment identifiée. La présentation clinique classique est l’installation brutale d’un<br />

syndrome néphritique aigu après un intervalle libre d’une infection streptococcique. La ponction-biopsie<br />

rénale n’est pas réalisée en cas de tableau clinique typique et d’évolution rapidement favorable. Le<br />

traitement est essentiellement symptomatique, et la prévention est possible grâce à l’amélioration des<br />

conditions d’hygiène et au traitement précoce des infections.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Glomérulonéphrite aiguë ; Syndrome néphritique aigu ; Complexes immuns ; Complément ;<br />

Biopsie rénale ; Prolifération endocapillaire ; Infections ; Streptocoque<br />

Introduction 1<br />

Épidémiologie 1<br />

Agents pathogènes 1<br />

Incidence 2<br />

Âge et sexe 2<br />

Distribution saisonnière 2<br />

Infection streptococcique initiale 2<br />

Physiopathologie<br />

Mécanisme des lésions glomérulaires : type de description,<br />

2<br />

la GNAPS 2<br />

Mécanisme des manifestations cliniques 4<br />

Mécanisme de la guérison et de la récidive de la GNAPS 4<br />

Clinique 5<br />

Type de description : GNAPS 5<br />

Formes cliniques 7<br />

Traitement 9<br />

Traitement curatif 9<br />

Traitement préventif 9<br />

Évolution et pronostic 9<br />

Conclusion 10<br />

■ Introduction<br />

Les glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses (GNAPI)<br />

traduisent une atteinte inflammatoire aiguë à prédominance<br />

glomérulaire non suppurative, déclenchée par un grand nombre<br />

d’infections : bactériennes, virales, parasitaires ou fongiques [1-3] .<br />

Néphrologie<br />

La GNAPI est la forme la mieux décrite des affections rénales.<br />

Elle se caractérise par l’installation brutale, le plus souvent<br />

après un intervalle libre, suite à une infection, d’un syndrome<br />

néphritique aigu [1] . Sur les plans étiologique et pathogénique,<br />

la GNAPI est une maladie à complexes immuns, où l’immunité<br />

humorale et cellulaire joue un rôle crucial dans la genèse des<br />

lésions rénales [4] . Sur le plan histologique, la forme typique<br />

correspond à une prolifération cellulaire endocapillaire diffuse<br />

avec infiltration par des cellules circulantes et des dépôts de<br />

complexes immuns sous forme de humps [5, 6] . Enfin, l’évolution<br />

de la GNAPI est souvent favorable ; cependant, des formes<br />

sévères de pronostic plus réservé peuvent se voir, particulièrement<br />

chez l’adulte [6] .<br />

Bien que les caractéristiques cliniques de la maladie soient<br />

bien connues, de nouvelles voies de recherche dans l’étiologie<br />

et la pathogénie des lésions rénales, ainsi que dans le processus<br />

évolutif, ont été dernièrement réalisées et ont des implications<br />

thérapeutiques importantes.<br />

■ Épidémiologie<br />

Agents pathogènes<br />

18-035-H-10<br />

Le rôle du streptocoque b-hémolytique du groupe A est bien<br />

établi depuis longtemps [7] . Le streptocoque du groupe C, de<br />

réservoir animal, peut aussi bien être en cause comme dans le<br />

cadre de l’épidémie du Brésil en 1998 [8] . Le streptocoque du<br />

groupe G, moins pathogène que celui du groupe C, peut être<br />

responsable de glomérulonéphrites (GN) et d’insuffisance<br />

rénale [9] . D’autres agents infectieux ont été associés à un ou à<br />

de rares cas de glomérulonéphrite aiguë (GNA) : bactéries<br />

(staphylocoque, méningocoque, pneumocoque, Haemophilus<br />

1


18-035-H-10 Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

influenzae, Salmonella typhi), germes figurés (Mycoplasma pneumoniae,<br />

Coxiella burnetii), champignons (Candida albicans), virus<br />

(varicelle, rougeole, cytomégalovirus, parvovirus B19 et virus<br />

d’Ebstein-Barr) et parasites (Plasmodium falciparum). Ces formes<br />

non streptococciques sont sporadiques et la néphropathie est<br />

parfois contemporaine de l’épisode infectieux [1] .<br />

Incidence<br />

L’incidence actuelle de la GNAPI est mal connue. Elle est liée<br />

à la fréquence des formes cliniques asymptomatiques. Carapetis<br />

et al. estiment qu’il existe plus de 470 000 cas de glomérulonéphrite<br />

aiguë poststreptococcique (GNAPS) dans le monde,<br />

responsables de près de 5 000 décès/an, avec 97 % dans les pays<br />

en voie de développement [10] .<br />

Les GNAPI sont en nette régression dans les pays développés.<br />

La raison de ce déclin d’incidence n’est pas clairement élucidée.<br />

Il serait lié probablement à la reconnaissance plus précoce de la<br />

maladie, à la large utilisation des antibiotiques, à l’amélioration<br />

des conditions d’hygiène ainsi qu’à la modification du potentiel<br />

néphritogénique des souches streptococciques et à la susceptibilité<br />

de l’hôte [11-13] .<br />

Les GNAPI et en particulier la GNAPS surviennent sous forme<br />

sporadique ou épidémique. Les formes sporadiques surviennent<br />

habituellement après une infection pharyngée, liée au streptocoque<br />

A de type 12, alors que les formes épidémiques sont liées<br />

aux différentes souches responsables d’infections soit pharyngées,<br />

soit cutanées [2] .<br />

Les épidémies surviennent essentiellement dans des communautés<br />

où le niveau d’hygiène est souvent bas. La malnutrition,<br />

les parasitoses intestinales et l’anémie sont particulièrement<br />

prépondérantes dans ces milieux [11] . C’est ainsi que des<br />

épidémies ont été rapportées en Afrique, Inde, Pakistan,<br />

Malaisie, Nouvelle-Guinée et Amérique du Sud.<br />

Notre série a recensé 77 cas de GNAPI sur une période allant<br />

de 2000 à 2007. Elle représente donc la troisième glomérulopathie<br />

en termes de fréquence après les lésions glomérulaires<br />

minimes et la GN extramembraneuse.<br />

Âge et sexe<br />

La survenue de GNAPI est influencée par plusieurs facteurs<br />

dont l’âge, le sexe, le niveau socioéconomique et la prédisposition<br />

génétique.<br />

La maladie est plus fréquente à l’âge scolaire entre 2 et<br />

12 ans [11] . Elle est plus rare avant l’âge de 2 ans (moins de<br />

5 % des cas) en raison de la persistance des anticorps maternels<br />

et de l’absence d’exposition au streptocoque b-hémolytique du<br />

groupe A [14] .<br />

Les sujets de sexe masculin sont plus fréquemment atteints,<br />

avec un sex-ratio de 2. La raison de cette prédominance reste<br />

peu claire [11] .<br />

Dans notre série, la moyenne d’âge était de 19 ans (4-58 ans),<br />

la tranche d’âge entre 12 et 20 ans était prédominante avec un<br />

sex-ratio homme/femme de 2/1.<br />

Des études familiales ont suggéré une prédisposition génétique<br />

avec une association probable au système human leukocyte<br />

antigen (HLA) [15, 16] . Les patients ayant un HLA DR1 et<br />

DRW4 semblent plus susceptibles de développer des lésions<br />

rénales par rapport à ceux ayant un HLA DRW48 et BRW8.<br />

Dodge et al. ont rapporté une incidence de 20 % de GNA dans<br />

la fratrie des patients atteints [17] . Cependant, d’autres études<br />

sont nécessaires pour confirmer cette association entre les<br />

antigènes du système HLA et les GNAPI [1, 11] .<br />

Dans notre série, on a noté quatre cas d’atteinte familiale.<br />

Distribution saisonnière<br />

La distribution saisonnière est caractéristique des GNAPS [11] .<br />

Les formes secondaires aux infections rhinopharyngées prédominent<br />

en hiver et au printemps, alors que celles secondaires<br />

aux infections cutanées se voient plus particulièrement en été.<br />

La même distribution est retrouvée dans notre série.<br />

Infection streptococcique initiale<br />

L’infection streptococcique est fréquente chez les enfants [18] .<br />

Elle peut être d’origine hospitalière ou ambulatoire [19] . Certaines<br />

souches seulement sont capables d’induire une atteinte<br />

rénale et sont ainsi appelées « souches néphritogéniques ».<br />

L’incidence de la GN après infection par ces souches est<br />

variable, et dépend essentiellement du sérotype M et du site<br />

d’infection [11] .<br />

Dans une étude réalisée en unité de pédiatrie du centre<br />

hospitalier universitaire Ibn Rochd à Casablanca, l’épisode<br />

infectieux précédant la survenue de GNAPS a été retrouvé chez<br />

presque tous les patients. Il s’agissait d’une angine dans 30,7 %<br />

des cas, d’une pyodermite dans 50 % des cas, d’une infection<br />

rhinopharyngée dans 11 % des cas et d’une otite dans 11,5 %<br />

des cas [14] .<br />

Les sérotypes de la protéine M impliqués dans les infections<br />

cutanées et qui s’associent aux GN sont les sérotypes 2, 42, 49,<br />

56, 57 et 60, alors que les sérotypes 1, 4, 12 et 25 sont plutôt<br />

impliqués dans les infections pharyngées associées aux GN [11] .<br />

Dans notre série, une infection a été retrouvée dans 84 % des<br />

cas. Il s’agissait d’angines (41,5 % des cas), d’une infection<br />

cutanée (11 % des cas), d’une bronchopneumonie (9 % des cas),<br />

d’une rhinopharyngite (3 % des cas), d’un abcès dentaire (2,5 %<br />

des cas), d’une endocardite (2,5 % des cas), d’une otite (1,2 %<br />

des cas) et d’une fièvre typhoïde (1,2 % des cas).<br />

Après la guérison, une protection est acquise contre les<br />

souches néphritogéniques. Cette immunité est protectrice<br />

contre les récidives, et semble plus liée aux spécificités et aux<br />

capacités de neutralisation des anticorps qu’à leur titre [11] .<br />

■ Physiopathologie<br />

Mécanisme des lésions glomérulaires :<br />

type de description, la GNAPS<br />

Plusieurs faits suggèrent que la GNA est une maladie à<br />

complexes immuns comme en témoignent les similitudes<br />

observées avec la maladie sérique expérimentale. La présence de<br />

dépôts immuns glomérulaires en immunofluorescence, la baisse<br />

transitoire du complément, la présence de complexes immuns<br />

circulants chez deux tiers des patients durant la première<br />

semaine de la maladie, sont autant d’arguments en faveur de<br />

cette hypothèse. Cependant, il n’existe pas de corrélation entre<br />

la sévérité de la maladie et les concentrations sériques de<br />

complexes immuns [20] .<br />

Laura et Stickler ont décrit deux phases dans le processus de<br />

constitution des lésions glomérulaires : une première, aiguë,<br />

secondaire à la libération de médiateurs inflammatoires par<br />

mécanisme immun, et une seconde, progressive et chronique,<br />

conséquence des lésions aiguës avec hypertension intraglomérulaire,<br />

sclérose et fibrose [2] .<br />

Néphritogénicité streptococcique<br />

Les mécanismes très probablement mis en jeu comportent<br />

tout d’abord un mimétisme moléculaire entre les fractions des<br />

streptocoques et les composants structuraux du rein, le développement<br />

d’une réaction auto-immune, la liaison plasminogène/<br />

plasmine par les protéines de surface streptococciques et surtout<br />

la formation de complexes immuns comprenant des antigènes<br />

streptococciques dans les glomérules [20] .<br />

Antigènes streptococciques néphritogéniques<br />

En 1911, von Pirquet a suggéré que les complexes immuns<br />

représentent des corps toxiques responsables de symptômes<br />

cliniques ; cependant, la nature de l’antigène néphritogène est<br />

restée controversée [3] .<br />

2 Néphrologie


L’absence de modèle animal approprié de GNAPS, le streptocoque<br />

étant un agent pathogène spécifique à l’homme, a limité<br />

le champ des études expérimentales. Les travaux réalisés dans ce<br />

domaine se sont alors limités à étudier le potentiel de fractions<br />

purifiées du streptocoque à se déposer dans les glomérules et à<br />

provoquer des lésions. Un autre volet d’investigation a été<br />

l’évaluation de la production des anticorps en réponse à ces<br />

antigènes et leurs dépôts dans les biopsies rénales des patients<br />

atteints de GNAPS [20, 21] .<br />

Protéine M<br />

La protéine M est une protéine de surface de structure<br />

fibrillaire, ancrée dans la membrane cellulaire de la bactérie. Elle<br />

est présente dans les streptocoques du groupe A, C et G isolés<br />

chez les êtres humains. Plus de 80 sérotypes ont été identifiés,<br />

avec deux classes. La classe I possède à sa surface un épitope qui<br />

réagit avec les anticorps. Le rôle de la protéine M dans la<br />

pathogénie des lésions rénales est lié à la similitude moléculaire<br />

entre la protéine M et les antigènes de la membrane basale<br />

glomérulaire (MBG). Des anticorps dirigés contre la MBG ont<br />

été isolés et réagissent avec la protéine M 12 [11, 20, 21] .<br />

Certaines perspectives vaccinales portent sur cette protéine M,<br />

mais le nombre important de sérotypes constitue un facteur<br />

limitant [1, 22] .<br />

Antigènes cationiques<br />

Les expériences de Vogt et al. ont mis en évidence des<br />

antigènes cationiques qui pénètrent facilement à travers les<br />

structures polyanioniques de la MBG [23] . Les anticorps produits<br />

en réaction à ces antigènes se fixent ultérieurement sur la MBG<br />

pour former des dépôts immuns sous-épithéliaux caractéristiques<br />

de la GNAPS.<br />

Exotoxine pyrogénique streptococcique (Spe B)<br />

Le streptocoque isolé chez les patients présentant une GNAPS<br />

produit une protéine extracellulaire de 46 kDa qui n’est pas<br />

retrouvée chez les patients sans GN.<br />

Cette protéine, identifiée sous les noms de streptococal<br />

pyrogenic exotoxine B ou de streptococal protéinase zymogen, lie la<br />

plasmine. Son activité protéasique entraîne une activation du<br />

système immunitaire par clivage de différents facteurs qui<br />

favorisent la libération des médiateurs inflammatoires et des<br />

facteurs de perméabilité vasculaire [20, 24, 25] . Il a été démontré<br />

récemment qu’elle induit l’apoptose et la prolifération des<br />

leucocytes humains [26] .<br />

Le titre des anticorps anti-Spe B est élevé chez les patients<br />

atteints de GNAPS, mais pas chez ceux qui développent un<br />

rhumatisme articulaire aigu ou ceux qui ont des infections<br />

streptococciques non compliquées. Les Spe B sont détectés dans<br />

67 % des glomérules de patients ayant une GNAPS et dans 16 %<br />

seulement des glomérules de ceux sans GNAPS [20, 27, 28] (cf.<br />

infra).<br />

Streptokinase<br />

La streptokinase est une protéine extracellulaire de 46 kDa,<br />

dont neuf génotypes ont été identifiés. Seuls les génotypes 1, 2,<br />

6 et 9 ont été associés à la GNAPS [11] .<br />

La streptokinase forme un complexe avec le plasminogène et<br />

a la capacité de convertir le plasminogène en plasmine qui<br />

active localement la cascade du complément, entraîne la<br />

dégradation des protéines de la matrice extracellulaire et induit<br />

la libération de bradykinines vasomotrices [11] .<br />

Dans le modèle expérimental, la délétion du gène de la<br />

streptokinase élimine les propriétés néphritogéniques de la<br />

souche streptococcique [29] .<br />

Neuraminidase<br />

La neuraminidase streptococcique (sialidase) altère les immunoglobulines<br />

(Ig) G autologues. Le complexe antigène-IgG<br />

modifié stimule la production d’autoanticorps.<br />

Cependant, la neuraminidase peut être produite également<br />

par des souches non néphritogéniques [1-11] (Tableau 1).<br />

Néphrologie<br />

Tableau 1.<br />

Antigènes néphritogènes.<br />

Antigènes néphritogènes Mécanisme physiopathologique<br />

Protéine M Similitude moléculaire + AC anti-MBG<br />

Antigènes cationiques AC anti-MBG + CIC<br />

Streptokinase Complexe streptokinase-plasminogène<br />

Plasminogène → plasmine →<br />

activation du complément<br />

Neuraminidase AC anti-MBG + CIC<br />

AC : anticorps ; MBG : membrane basale glomérulaire ; CIC : complexes immuns<br />

circulants.<br />

Spe B NAPLr<br />

CIC<br />

Spe B/Anticorps anti-Spe B<br />

Dépôt MBG Plasmine<br />

Récepteur streptococcique de la plasmine associée<br />

à la néphrite (NAPLr)<br />

L’identification récente de ce récepteur comme agent néphritogène<br />

est le point culminant d’une longue série d’études. C’est<br />

une enzyme glycolytique de 43 kDa à activité glycéraldehyde-<br />

3-phosphate déshydrogénase (GAPDH), qui peut se fixer sur le<br />

glomérule et activer la plasmine. Celle-ci joue un rôle central<br />

dans l’inflammation locale et contribue à l’activation directe de<br />

la voie alterne du complément [30] .<br />

Les anticorps anti-NAPLr sont présents chez 92 % des patients<br />

atteints de GNAPS contre 60 % des sujets ayant une infection<br />

streptococcique sans complication [31] (Fig. 1).<br />

Rôle du complément<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses 18-035-H-10<br />

Prolifération cellulaire endothéliale<br />

(PN, Mo)<br />

Expansion matrice mésangiale<br />

Activation du complément (CAM)<br />

Dégradation de la MBG<br />

Plasminogène<br />

GAPDH<br />

Figure 1. Étiologie et pathogénie des glomérulonéphrites aiguës<br />

poststreptococciques. Spe B : exotoxine pyrogénique streptococcique ;<br />

NAPLr : récepteur streptococcique de la plasmine associée à la néphrite ;<br />

CIC : complexes immuns circulants ; GADPH : glyceraldéhyde-3phosphate<br />

déshydrogénase ; MBG : membrane basoglomérulaire ; PN :<br />

polynucléaires ; Mo : monocytes ; CAM : complexe d’attaque membranaire.<br />

L’immunité humorale joue un rôle clé dans la pathogénie des<br />

lésions rénales. La voie d’activation du complément prédominante<br />

est la voie alterne [1, 22] . Ceci est suggéré par la présence<br />

de properdine dans les glomérules et le dépôt de C3 qui précède<br />

celui des IgG.<br />

De plus, au cours de la phase aiguë de la GNAPS, les taux de<br />

C 3 et de C 5 sont bas, alors que ceux des composants précoces<br />

de la voie classique (C 1q, C 2 et C 4) sont normaux ou faiblement<br />

diminués [32] .<br />

L’activation du complément conduit au composant terminal<br />

C5b-9 désigné sous le nom de « complexe d’attaque membranaire<br />

». Ce complexe est capable d’altérer l’intégrité de la MBG,<br />

3


18-035-H-10 Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Polysaccharides<br />

microbiens<br />

de stimuler la production d’anion superoxyde et l’expression de<br />

cytokines. Il favorise en particulier la production du transforming<br />

growth factor, à l’origine de l’excès de production de la matrice<br />

extracellulaire avec formation des spikes visibles sur les colorations<br />

argentiques [11] .<br />

Au cours de la phase aiguë de la GNAPS, le taux de C 3<br />

nephretic factor (C 3 NF) est augmenté alors que le taux plasmatique<br />

de C 3 est diminué. Le C 3 NF étant un autoanticorps dirigé<br />

contre la C 3 convertase, il conduit ainsi à l’activation continue<br />

de la voie alterne [33] .<br />

Hisano et al. ont publié un premier rapport sur le rôle de<br />

l’activation du complément par la voie des lectines dans la<br />

pathogénie de la GNAPS [34] .<br />

La voie des lectines est la troisième voie d’activation du<br />

complément mise en évidence. Elle est initiée par la liaison des<br />

lectines dépendantes du calcium, telles que la mannan-binding<br />

lectin (MBL), la L-ficoline et la H-ficoline, à la surface d’une<br />

grande variété de micro-organismes. La molécule prototypique<br />

de l’activation est la MBL, qui ressemble structurellement au C 1q<br />

mais qui possède un domaine de reconnaissance des hydrocarbures<br />

permettant sa liaison spécifique aux sucres terminaux de<br />

glycoprotéines de surface des micro-organismes. La MBL circule<br />

en association avec des enzymes de type sérines protéases<br />

nommées MASP 1, -2, -3 et MAp-19. Leur activation suite à la<br />

fixation de MBL à la surface des micro-organismes conduit au<br />

clivage et à l’activation de C 4 et de C 2, rejoignant ainsi la voie<br />

classique [35] (Fig. 2).<br />

Rôle des cellules<br />

Ag + MBL<br />

C4 C4a + C4b<br />

C2<br />

C3<br />

C5<br />

Ag + MBL + MASP<br />

Ag MBL MASP - C4b - C2a<br />

CAM<br />

C2a + C2b<br />

C3a + C3b<br />

C5a + C5b<br />

Figure 2. Activation du complément par la voie des lectines. Ag :<br />

antigène ; MBL : mannose binding lectin ; MASP : protein associated serine<br />

protease ; CAM : complexe d’attaque membranaire.<br />

La GNAPS est caractérisée par une hypercellularité glomérulaire<br />

diffuse résultant de l’accumulation des leucocytes, de la<br />

prolifération des cellules endothéliales et de l’expansion de la<br />

matrice mésangiale [5] .<br />

Les macrophages jouent un rôle prépondérant dans l’initiation<br />

à la prolifération cellulaire.<br />

Hisano et al. ont démontré une infiltration par des macrophages<br />

dans les glomérules des patients atteints de GNAPS plus<br />

importante que celle observée dans les glomérules des patients<br />

atteints de néphropathie à IgA [36] . Il a été noté dans la même<br />

étude que la proportion des macrophages en prolifération<br />

diminue avec l’évolution de la GNAPS alors qu’elle reste<br />

constante pendant toute l’évolution de la néphropathie à IgA.<br />

Des macrophages et des monocytes exprimant l’antigène<br />

CD16 ont été isolés récemment dans les glomérules et dans les<br />

urines de patients atteints de GNAPS. Le nombre de ces cellules<br />

serait corrélé avec la sévérité des lésions glomérulaires [11] .<br />

Une autre découverte récente concerne la lésion sélective des<br />

podocytes qui semble amplifier la prolifération mésangiale et<br />

l’expansion de la matrice. Le facteur bFGF libéré par les<br />

podocytes peut aggraver les lésions podocytaires et induire des<br />

altérations mésangiales [37] .<br />

Rôle des radicaux oxygènes<br />

Des études récentes ont révélé l’implication des mécanismes<br />

de défenses antioxydatives et du stress oxydatif dans la genèse<br />

de la GNAPS chez l’enfant [11] .<br />

Rôle du système de coagulation<br />

Les dépôts de fibrine sont constamment retrouvés dans les<br />

glomérules atteints de GNAPS. La fibrinolyse est augmentée,<br />

comme en témoigne l’élévation du taux du fibrinogène urinaire<br />

et des produits de dégradation de la fibrine. L’excrétion urinaire<br />

de ces produits est le reflet de la dégradation des dépôts de<br />

fibrine et du début de la phase de guérison [11] .<br />

La possibilité d’activation des plaquettes a été proposée du<br />

fait de la diminution de leur temps de survie et de la présence<br />

de facteur activant les plaquettes et de platelet-derived growth<br />

factor dans les glomérules des patients atteints de GNAPS [38] .<br />

Mécanisme des manifestations cliniques<br />

Les manifestations cliniques sont le résultat direct ou indirect<br />

de la réponse inflammatoire glomérulaire, dont le degré détermine<br />

la sévérité des symptômes et des signes cliniques.<br />

L’inflammation glomérulaire (œdème, hypercellularité) réduit<br />

la filtration glomérulaire sans diminuer le débit sanguin rénal.<br />

La réduction du débit de filtration glomérulaire avec préservation<br />

des fonctions tubulaires, entraîne une augmentation de<br />

la réabsorption hydrosodée avec oligurie et œdèmes.<br />

L’étiologie de l’hypertension artérielle (HTA) est moins bien<br />

comprise et probablement multifactorielle. Plusieurs cytokines<br />

ayant un effet sur la pression artérielle sont augmentées au<br />

cours de la GNAPS. Par ailleurs, une rétention hydrosodée a été<br />

incriminée lors de la phase initiale, puis intervient secondairement<br />

la stimulation inappropriée du système rénineangiotensine.<br />

Ce dernier fait a été démontré par l’efficacité des<br />

inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) à partir de la<br />

deuxième semaine d’évolution de la GNAPS [39] .<br />

Mécanisme de la guérison et de la récidive<br />

de la GNAPS<br />

L’apoptose cellulaire est une notion capitale dans la guérison<br />

de la GNAPS. Elle intéresse toutes les cellules infiltrant les<br />

glomérules et conduit à leur élimination, aboutissant ainsi à la<br />

résolution des lésions rénales [40, 41] .<br />

La récidive d’une GNAPS est un phénomène rare. Il est lié<br />

probablement au nombre limité des souches néphritogéniques<br />

et à l’acquisition d’une immunité contre les antigènes streptococciques<br />

après un épisode initial [42] .<br />

4 Néphrologie


Cependant, l’incidence de la récidive a augmenté de 0,7 % à<br />

7 % ces dernières années. Le mécanisme physiopathologique<br />

reste imprécis. Plusieurs théories ont été proposées :<br />

certains auteurs suggèrent que la récidive est secondaire à la<br />

suppression de la réponse immunitaire contre les souches<br />

streptococciques néphritogéniques liée au traitement précoce<br />

par la pénicillinothérapie ; cependant, des récidives sont<br />

observées même en l’absence de prise d’antibiotiques [43] ;<br />

d’autres avancent le rôle du déficit sélectif en IgA [44] ;<br />

enfin, et sachant que les anticorps dirigés contre le NAPLr<br />

sont détectés dans 92 % des cas durant les 3 premiers mois<br />

et persistent longtemps, il a été suggéré que l’absence de ces<br />

anticorps pourrait être à l’origine des récidives [42] .<br />

■ Clinique<br />

La présentation clinique typique de la GNAPI est l’installation<br />

brutale d’un syndrome néphritique aigu 10 à 21 jours après une<br />

infection par un streptocoque b-hémolytique du groupe A [11] .<br />

Les signes glomérulaires de cette néphropathie sont<br />

mineurs [11] , mais la surcharge hydrosodée est souvent majeure<br />

et responsable de symptômes graves qui peuvent mettre en jeu<br />

le pronostic vital [11] .<br />

Type de description : GNAPS<br />

Signes cliniques<br />

Le tableau clinique est caractérisé par l’apparition brutale<br />

d’une hématurie et d’une protéinurie associées à un œdème,<br />

une HTA et une altération légère à modérée de la fonction<br />

rénale [11] .<br />

Le syndrome néphritique aigu apparaît habituellement 1 à<br />

2 semaines après une infection rhinopharyngée et 3à6semaines<br />

après une infection cutanée [45] .<br />

L’hématurie macroscopique est présente chez 18 % à 75,7 %<br />

des enfants présentant une GNAPS [46, 47] , les urines sont alors<br />

foncées, urines « Coca-Cola » ou « bouillon sale » [11] . L’hématurie<br />

microscopique est constante et peut persister des mois<br />

après la résolution des symptômes [11] .<br />

Les œdèmes sont très fréquents, retrouvés dans 51,4 % à<br />

90 % des cas. Ils siègent à la face et aux membres inférieurs<br />

chez les adolescents et sont souvent généralisés chez les jeunes<br />

enfants [45] .<br />

L’HTA est observée dans 60 % à 100 % des cas [45-47] , elle est<br />

systolodiastolique et habituellement légère à modérée. Cependant,<br />

le tableau d’hypervolémie et de congestion circulatoire<br />

peut dominer le tableau clinique, et entraîner un œdème<br />

pulmonaire ou une encéphalopathie hypertensive [48] .<br />

Une oligurie transitoire est observée chez environ 50 % des<br />

enfants, l’anurie est plus rare [11] .<br />

D’autres symptômes non spécifiques peuvent être observés<br />

tels que des nausées, des vomissements, une anorexie, des<br />

douleurs lombaires et abdominales [11] .<br />

Tableau 2.<br />

Manifestations cliniques des glomérulonéphrites aiguës poststreptococciques.<br />

La recherche d’un foyer infectieux est souvent négative à ce<br />

stade.<br />

Les différentes manifestations cliniques observées au cours de<br />

la GNAPS sont résumées dans le Tableau 2 [46, 49, 50] .<br />

Biologie<br />

Signes rénaux<br />

Sédiment urinaire. L’hématurie est systématique. Elle est le<br />

plus souvent macroscopique mais une hématurie microscopique<br />

peut être le seul signe de la maladie. Cette hématurie est<br />

constituée d’acanthocytes et de cylindres hématiques ; ceci est<br />

témoin de son origine glomérulaire [11] .<br />

La protéinurie est fréquente. Elle est habituellement modérée,<br />

inférieure à 500 mg/24 heures mais elle peut devenir néphrotique<br />

dans 5 % à 10 % des cas [11] .<br />

Insuffisance rénale. L’insuffisance rénale est présente dans<br />

25%à83%descas [45-47] . Elle est plus fréquente chez l’adulte<br />

et s’observe dans 83 % des cas environ [51] . L’élévation transitoire<br />

de l’urée et de la créatinine plasmatiques est due à la baisse<br />

du débit de filtration glomérulaire avec un flux sanguin rénal<br />

normal ou bas et une fraction de filtration nettement diminuée<br />

[45] . La durée de l’insuffisance rénale est très brève et<br />

n’excède classiquement pas 3 jours, et les formes oligoanuriques<br />

nécessitant la mise en œuvre d’une épuration extrarénale sont<br />

estimées à 8,3 % selon Christopher et al. [50] . La fonction<br />

tubulaire est habituellement préservée ou légèrement perturbée<br />

[11] . Une acidose tubulaire hyperkaliémique avec hyperchlorémie<br />

(acidose tubulaire type 4) est parfois observée [11] .<br />

Signes immunitaires<br />

Les perturbations du système du complément sont les signes<br />

biologiques les plus évocateurs de la GNA et sont présentes quel<br />

que soit le germe en cause [52] .<br />

On relève une baisse importante de la fraction C 3 avec un<br />

taux normal de C 4 [11] .<br />

Un monitorage régulier des taux sériques du complément est<br />

indispensable au cours des GAPS ; une hypocomplémentémie<br />

persistante représente une indication de la ponction-biopsie<br />

rénale pour éliminer d’autres diagnostics différentiels [53] .<br />

Signes inflammatoires<br />

La vitesse de sédimentation est généralement élevée en<br />

rapport avec un discret syndrome inflammatoire ; la protéine<br />

C-réactive et les facteurs rhumatoïdes sont dans les limites de la<br />

normale [2] .<br />

Signes infectieux<br />

Le prélèvement de gorge est souvent négatif, même au début<br />

de la néphropathie [11] .<br />

La détection d’anticorps contre un antigène streptococcique<br />

apporte des arguments en faveur d’une infection streptococcique<br />

récente [30] . En pratique clinique, des dosages répétés du titre des<br />

anticorps antistreptolysine (ASLO), antidésoxyribonucléase B<br />

Symptômes (%) Rodriguez-Iturbe [49] Christopher [50] Scrace [46] Notre série<br />

Enfants Sujet âgé<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses 18-035-H-10<br />

Hématurie 100 100 100 100 100<br />

Protéinurie 80 92 37,8 100 93,6<br />

Œdèmes 90 75 51,4 64 92,2<br />

Hypertension 60-80 83 67,6 100 58,4<br />

Oligurie 10-50 58 - - 64,9<br />

Dyspnée, insuffisance cardiaque < 5 43 5,6 - -<br />

Syndrome néphrotique 4 20 - - 50,6<br />

Insuffisance rénale 25-40 83 81,1 - 77,9<br />

Néphrologie<br />

5


18-035-H-10 Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Figure 3. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Prolifération<br />

endocapillaire et infiltration de cellules circulantes. Trichrome de Masson,<br />

× 400.<br />

(ADNase B), antihyaluronidase, antistreptokinase et antinicotinamide<br />

adénine dinucléotidase sont réalisés pour confirmer la<br />

présence d’une infection [30] .<br />

Les taux des anticorps antistreptolysine et antinicotinamide<br />

adénine nucléotidase sont élevés dans 80 % des cas d’infections<br />

rhinopharyngées, alors que les titres des anticorps antihyaluronidase<br />

et antidésoxyribonucléase B sont élevés dans 80 % à<br />

90 % des cas d’infections cutanées [30] . Le taux de ces anticorps<br />

augmente durant la première semaine après l’infection streptococcique<br />

et jusqu’à la cinquième, puis revient à la normale<br />

après plusieurs mois [30] . Les anticorps antizymogène présentent<br />

une meilleure valeur prédictive positive que les autres anticorps<br />

pour la détection des infections à streptocoque associées à une<br />

GN [20] .<br />

Autres examens complémentaires<br />

La radiographie thoracique peut montrer une surcharge<br />

pulmonaire, l’électrocardiogramme est le plus souvent normal et<br />

l’échographie rénale objective des reins de taille normale ou<br />

légèrement augmentée [2] .<br />

Signes histologiques<br />

Dans les formes typiques avec évolution rapidement favorable,<br />

la biopsie rénale n’est pas nécessaire. En revanche, la<br />

ponction biopsie rénale est réalisée au cours de la phase aiguë<br />

en cas de complément sérique normal ou de formes symptomatiques<br />

glomérulaires anormalement graves : oligoanurie durant<br />

plus de 3 jours, insuffisance rénale supérieure à 1 semaine,<br />

syndrome néphrotique évoluant pendant plus de 10 à<br />

15 jours [11] . Elle est par ailleurs nécessaire en cas d’évolution<br />

inhabituelle avec une consommation prolongée du complément<br />

pendant plus de 2 mois, une protéinurie importante persistante<br />

pendant plus de 3 mois et une hématurie durant plus de<br />

18 mois [1, 11] .<br />

Microscopie optique<br />

La présentation histologique typique de la GNAPS est une GN<br />

proliférative endocapillaire pure [45] . Elle est caractérisée par une<br />

prolifération cellulaire diffuse avec une augmentation du<br />

nombre de cellules endothéliales, et à moindre degré des<br />

cellules mésangiales et épithéliales [1] .<br />

Tous les glomérules sont le siège d’une infiltration des<br />

lumières capillaires et du mésangium par des cellules initialement<br />

polynucléées, puis à des stades avancés par des monocytes<br />

et des lymphocytes CD4+ [1] (Fig. 3). La paroi des capillaires est<br />

épaissie de façon segmentaire [1] .<br />

Figure 4. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Glomérulonéphrite<br />

proliférative avec croissant épithélial segmentaire (flèche). Trichrome<br />

de Masson, G40.<br />

Figure 5. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Glomérulonéphrite<br />

proliférative avec croissant épithélial segmentaire (flèche). Coloration<br />

argentique, G40.<br />

Dans les cas les plus sévères, des cellules épithéliales et des<br />

macrophages s’accumulent dans l’espace de Bowman, réalisant<br />

une prolifération extracapillaire avec formation de croissants<br />

épithéliaux [45] (Fig. 4, 5).<br />

Les anomalies tubulaires sont habituellement peu marquées,<br />

sauf en cas d’atteinte glomérulaire floride [1] . La vacuolisation<br />

des cellules tubulaires proximales, des érythrocytes intraluminaux,<br />

une tubulite focale, une dilatation et une atrophie<br />

tubulaires peuvent être observées [1] .<br />

La lésion la plus évocatrice de la GNA est la présence de<br />

dépôts anormaux de grande taille, coniques et éosinophiles, qui<br />

sont disposés sur le versant externe de la MBG, appelés humps [1]<br />

(Fig. 6 à 8). Ces dépôts disparaissent le plus souvent avant<br />

8 semaines [1] .<br />

Immunofluorescence<br />

En immunofluorescence, des dépôts granuleux composés<br />

essentiellement de C 3 mais également d’IgG ou d’IgM sont<br />

retrouvés sur les parois capillaires correspondant aux humps et<br />

parfois dans le mésangium en « ciel étoilé » au cours des phases<br />

précoces de la maladie [1] (Fig. 9 à 11).<br />

6 Néphrologie


Figure 6. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Prolifération<br />

endocapillaire, infiltration de cellules circulantes et présence de humps<br />

(flèches). Trichrome de Masson, × 1 000.<br />

Figure 7. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Prolifération<br />

endocapillaire et présence de humps (flèche). Trichrome de Masson, G20.<br />

Ces dépôts peuvent être confluents et disposés de façon<br />

linéaire le long de la MBG, réalisant un aspect en guirlande [1] .<br />

Aux stades tardifs de la maladie, les dépôts de C 3 demeurent<br />

confinés aux aires mésangiales.<br />

Microscopie électronique<br />

L’étude en microscopie électronique n’a pas d’intérêt diagnostique.<br />

Elle montre la présence de dépôts denses sousépithéliaux<br />

nombreux durant les premières semaines et qui<br />

disparaissent graduellement au bout de 6 semaines [1] .<br />

Quelques dépôts intramembraneux (lamina densa), sousendothéliaux,<br />

mésangiaux et parfois le long de la capsule de<br />

Bowman peuvent également être observés [1] .<br />

Diagnostic positif<br />

Le diagnostic de la GNAPS repose sur la présence d’un<br />

antécédent d’infection streptococcique récente, l’apparition<br />

brutale d’un syndrome néphritique aigu, l’élévation du taux des<br />

anticorps anti-antigènes streptococciques, la diminution transitoire<br />

du complément sérique CH50 et de la fraction C 3 et une<br />

évolution rapidement favorable.<br />

Néphrologie<br />

Figure 8. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Prolifération<br />

endocapillaire, infiltration de cellules circulantes et présence de humps.<br />

Trichrome de Masson.<br />

Figure 9. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Glomérulonéphrite<br />

proliférative endocapillaire pure. Examen en immunofluorescence<br />

: présence de dépôts de C3 sur les parois capillaires et dans le<br />

mésangium. G20.<br />

Diagnostic différentiel<br />

Le diagnostic différentiel de la GNAPS comprend diverses<br />

néphropathies glomérulaires primitives ou secondaires se<br />

manifestant cliniquement par un syndrome néphritique aigu.<br />

L’orientation diagnostique se fait alors par le monitorage du<br />

complément sérique et l’existence de signes cliniques, biologiques<br />

et histologiques spécifiques [45] .<br />

Les glomérulopathies primitives sont représentées par la GN<br />

membranoproliférative, la néphropathie à IgA, la néphrite à<br />

anticorps anti-MBG et la GN extracapillaire idiopathique [2] .<br />

Les maladies de système qui posent le plus souvent un<br />

problème de diagnostic différentiel avec la GNAPS sont le lupus<br />

érythémateux systémique et les vascularites, en particulier la<br />

périartérite noueuse, la polyangéite microscopique, la granulomatose<br />

de Wegener et la cryoglobulinémie essentielle [2] .<br />

Le Tableau 3 regroupe les différentes causes de syndromes<br />

néphritiques aigus.<br />

Formes cliniques<br />

Formes asymptomatiques<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses 18-035-H-10<br />

Les formes infracliniques sont caractérisées par une baisse<br />

transitoire du complément sérique, une hématurie microscopi-<br />

7


18-035-H-10 Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Figure 10. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Examen en<br />

immunofluorescence : présence de dépôts de C3 sur les parois capillaires<br />

et dans le mésangium.<br />

Figure 11. Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique. Examen en<br />

immunofluorescence : glomérulonéphrite proliférative avec croissant épithélial<br />

circonférentiel exprimant le fibrinogène (flèche).<br />

que et parfois une HTA [46] . L’hématurie microscopique peut<br />

être le seul signe de la maladie dans les formes épidémiques [11] .<br />

La détection de ces formes est uniquement possible chez des<br />

enfants à risque placés sous surveillance prospective et, en cas<br />

Tableau 3.<br />

Principales causes des syndromes néphritiques aigus.<br />

d’épidémie, la ponction-biopsie rénale n’est pas indiquée dans<br />

ce cas en raison d’un excellent pronostic immédiat et à long<br />

terme [46] .<br />

Glomérulonéphrite aiguë maligne<br />

Certains agents infectieux bactériens peuvent induire une GN<br />

extracapillaire (GNEC) associée à des dépôts de complexes<br />

immuns, provoquant l’activation du complément par la voie<br />

classique [45] . Les micro-organismes le plus souvent en cause<br />

sont le streptocoque A b-hémolytique, Staphylococcus epidermidis<br />

et Staphylococcus aureus, en particulier dans les néphrites de<br />

shunt et les endocardites aiguës [45] .<br />

Le tableau clinique est celui d’une GN rapidement progressive<br />

avec insuffisance rénale progressive en quelques jours ou<br />

semaines, associée à une protéinurie et une hématurie [45] .<br />

Ces formes se caractérisent par un pourcentage élevé de<br />

croissants épithéliaux atteignant plus de 50 % des<br />

glomérules [45] .<br />

Dans notre série, une GNEC représente 24,67 % des GNAPI.<br />

Autres glomérulonéphrites aiguës<br />

postinfectieuses<br />

Toutes les autres classes d’agents infectieux ont été associées<br />

à quelques cas de GNA : bactéries (staphylocoques, méningocoques),<br />

germes figurés (Mycoplasma pneumoniae, agent de la fièvre<br />

Q), champignons microscopiques (Candida albicans), virus<br />

(varicelle, rougeole, cytomégalovirus), parasites (Plasmodium<br />

falciparum) et rickettsiose [11] . Ces formes non streptococciques<br />

sont sporadiques et la néphropathie est parfois contemporaine<br />

de l’épisode infectieux [11] .<br />

La présence d’une relation causale entre l’infection et la<br />

néphropathie a été initialement établie par des études épidémiologiques<br />

d’infections épidémiques ou endémiques associées<br />

à des anomalies glomérulaires spécifiques [45] .<br />

Ces glomérulopathies survenant durant l’épisode infectieux<br />

sans intervalle libre entre l’infection et l’atteinte rénale sont<br />

souvent nommées GN infectieuses plutôt que GN<br />

postinfectieuses [54] .<br />

Cette GN est définie par la présence d’au moins trois des cinq<br />

critères suivants [54] :<br />

une infection (bien documentée cliniquement et/ou bactériologiquement),<br />

précédant l’apparition de la GN ;<br />

une relation temporelle étroite entre l’infection et les premiers<br />

signes rénaux ;<br />

des lésions glomérulaires compatibles avec une origine<br />

infectieuse en microscopie optique et en immunofluorescence<br />

;<br />

l’absence de signes cliniques, biologiques et/ou histologiques<br />

de maladies systémiques ;<br />

la présence non exclusive de dépôts d’IgA en immunofluorescence.<br />

Montseny et al. ont rapporté 76 cas de GN infectieuses avec<br />

plusieurs agents infectieux identifiés [51] : Staphylococcus aureus<br />

Complément bas Complément normal<br />

Maladies rénales Glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique<br />

Néphropathie à immunoglobuline A<br />

Glomérulonéphrite membranoproliférative<br />

Glomérulonéphrite rapidement progressive idiopathique<br />

Maladie à anticorps antimembrane basale glomérulaire<br />

Maladies à complexes immuns<br />

Maladies systémiques Lupus érythémateux systémique<br />

Polyangéite microscopique<br />

Endocardite bactérienne subaiguë<br />

Vascularite d’hypersensibilité<br />

Néphrite de shunt<br />

Granulomatose de Wegener<br />

Cryoglobulinémie<br />

Purpura rhumatoïde<br />

Syndrome de Goodpasture<br />

Abcès viscéraux<br />

8 Néphrologie


Tableau 4.<br />

Glomérulonéphrite et infections.<br />

Infections bactériennes Glomérulonéphrite aiguë<br />

poststreptococcique, endocardite<br />

bactérienne, abcès viscéraux, infection de<br />

shunt, pneumonie, syphilis, brucellose,<br />

leptospirose, salmonelles, lèpre<br />

Infections parasitaires Schistosomiase, paludisme, leishmaniose,<br />

hydatidose.<br />

Infections virales Varicelle, oreillons, rougeole, virus de la<br />

grippe, cytomégalovirus, virus Epstein-<br />

Barr, virus B, virus C, virus de<br />

l’immunodéficience humaine<br />

Infections fongiques Candida albicans<br />

(neuf cas), Staphylococcus epidermidis (quatre cas), le streptocoque<br />

(11 cas), Klebsiella (un cas) et les bacilles à Gram négatif :<br />

Escherichia coli (quatre cas), Haemophilus (deux cas), Pseudomonas<br />

(trois cas), Acinetobacter (un cas). Le site de l’infection était<br />

variable : infection cutanée et pulmonaire, endocardite, septicémie<br />

et abcès profond [51] . Les lésions histologiques rénales<br />

étaient une GN endocapillaire (58 % des cas), une GN endo- et<br />

extracapillaire (34 % des cas), et une GN membranoproliférative<br />

(8 % des cas) (52).<br />

Plusieurs cas sporadiques de néphropathie glomérulaire ont<br />

été rapportés au cours de maladies virales et parasitaires ; ces<br />

glomérulopathies répondent généralement bien au traitement<br />

anti-infectieux [45] .LeTableau 4 regroupe les agents infectieux<br />

impliqués dans le développement d’une GN infectieuse.<br />

Formes chez les transplantés rénaux<br />

La GNAPI est rare chez le greffé rénal. Onze cas seulement<br />

ont été rapportés dans la littérature [55] . Dans la série de Moroni<br />

et al., trois cas de GNAPI après transplantation rénale à partir<br />

d’un donneur cadavérique ont été diagnostiqués [56] . Les<br />

infections en cause étaient une bactériémie à Escherichia coli, un<br />

abcès cutané, une angiocholite. Tous ces patients ont présenté<br />

une détérioration rapide de la fonction rénale avec à la ponction<br />

biopsie rénale un aspect compatible avec une GNAPI [56] .<br />

Un cas sur trois a normalisé sa fonction rénale après traitement,<br />

les deux autres cas sont retournés en hémodialyse [56] .<br />

■ Traitement<br />

Le traitement de la GNAPI est essentiellement symptomatique.<br />

Son but est de réduire la rétention hydrosodée et de<br />

contrôler l’HTA pour éviter ses complications.<br />

L’hospitalisation est indiquée en cas de complications, en<br />

particulier l’insuffisance rénale grave, l’hypertension artérielle<br />

sévère et/ou l’encéphalopathie hypertensive, ou si une<br />

ponction-biopsie rénale est envisagée. La durée moyenne<br />

d’hospitalisation dans notre série est de 12 jours avec des<br />

extrêmes de 2à43jours.<br />

Traitement curatif<br />

Le traitement de l’inflation hydrosodée est basé essentiellement<br />

sur la restriction hydrique et sodée, et sur les diurétiques<br />

de l’anse. Le recours à des antihypertenseurs est parfois voire<br />

souvent nécessaire.<br />

Les inhibiteurs calciques sont les plus utilisés. Ils sont très<br />

efficaces au cours de l’HTA sévère. On est souvent amené à les<br />

utiliser par voie intraveineuse à l’admission avec un relais par<br />

voie orale.<br />

L’utilisation des inhibiteurs de l’enzyme de conversion n’était<br />

pas de mise, mais actuellement ils sont de plus en plus indiqués<br />

en raison d’une stimulation inappropriée du système rénineangiotensine<br />

à la phase aiguë de la maladie et de leurs effets<br />

Néphrologie<br />

bénéfiques sur le cœur (l’atteinte cardiaque n’est pas exceptionnelle<br />

chez les patients atteints de GNAPI). Augustina et al. ont<br />

rapporté des effets bénéfiques de l’énalapril sur la pression<br />

artérielle et les paramètres échocardiographiques chez des<br />

enfants atteints de GNAPI [39] . Un meilleur contrôle tensionnel<br />

a été obtenu à partir du huitième jour de la maladie dans le<br />

groupe énalapril par rapport au groupe contrôle, sans augmentation<br />

de la kaliémie ou de la créatininémie, avec amélioration<br />

des paramètres échocardiographiques.<br />

Les bêtabloquants peuvent être prescrits avec adaptation<br />

posologique en cas d’insuffisance rénale sévère. Cependant, ils<br />

sont contre-indiqués en cas d’insuffisance cardiaque congestive<br />

qu’ils risquent de décompenser.<br />

L’encéphalopathie hypertensive peut nécessiter une prise en<br />

charge en réanimation en plus des mesures antihypertensives<br />

[57] .<br />

L’œdème aigu pulmonaire est traité par le furosémide par<br />

voie intraveineuse associé à l’oxygénothérapie. Le recours à<br />

l’épuration extrarénale est parfois nécessaire.<br />

L’hyperkaliémie peut être contrôlée par la restriction potassique,<br />

l’administration d’une résine qui chélate le potassium mais<br />

peut parfois nécessiter une épuration extrarénale.<br />

Dans notre série, le recours à l’épuration extrarénale a été<br />

nécessaire dans 16,8 % des cas, avec quatre séances d’hémodialyse<br />

en moyenne.<br />

Le traitement antibiotique est indiqué chaque fois qu’il y a<br />

un foyer infectieux détectable, mais il ne réduit ni la gravité ni<br />

la durée de la néphropathie, car la lésion glomérulaire est déjà<br />

constituée et le processus de résolution qui est l’apoptose<br />

cellulaire est déjà initié de façon simultanée avec la<br />

prolifération [58] .<br />

La corticothérapie est utilisée en cas de prolifération extracapillaire<br />

ou de la persistance du syndrome néphrotique 2 à<br />

6 mois après le début de l’épisode initial dans la forme sans<br />

prolifération extracapillaire [59] . Cependant, il y a peu d’études<br />

sur l’effet d’un traitement corticoïde associé ou non aux<br />

immunosuppresseurs dans la GNAPI, et il s’agit dans tous les cas<br />

de rapports de cas ou de séries utilisant des protocoles thérapeutiques<br />

très variés [60-62] . Dans une série par exemple,<br />

El-Husseini et al. ont traité les patients atteints de GNAPI avec<br />

prolifération extracapillaire par cinq bolus de méthylprednisolone<br />

(10 mg/kg/j) relayés par prednisolone par voie orale (1 mg/<br />

kg/j) pendant 4 semaines puis dégression progressive [60] .Le<br />

Tableau 5 regroupe les protocoles utilisés dans certaines séries de<br />

GNAPI extracapillaire et les résultats obtenus.<br />

Une autre indication des bolus de corticoïdes est la GNAPI<br />

chez les transplantés rénaux. Cependant, leur prescription est<br />

controversée [55, 56] .<br />

Traitement préventif<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses 18-035-H-10<br />

La prévention de la GNAPS est possible grâce à l’amélioration<br />

des conditions de vie et d’hygiène, et au traitement précoce des<br />

infections, comme en témoigne la diminution de l’incidence de<br />

la GNAPI dans les pays développés [63] . Plusieurs auteurs<br />

proposent de réaliser des cultures de prélèvements de gorge et<br />

de traiter en cas de positivité pour prévenir l’apparition des<br />

GNAPS [11] . Cependant, l’absence de traitement antibiotique à<br />

visée préventive en cas de culture pharyngée négative n’entraîne<br />

pas d’augmentation d’incidence de la GNAPS [64] . Toutefois,<br />

l’antibioprophylaxie est justifiée chez les populations à risque et<br />

les sujets en contact pendant les épidémies [50] .<br />

■ Évolution et pronostic<br />

Chez l’enfant, la GNAPS est bénigne dans la grande majorité<br />

des cas, avec une mortalité précoce inférieure à1%.L’HTA et<br />

l’hématurie macroscopique disparaissent au bout de quelques<br />

semaines. L’hématurie microscopique peut persister pendant des<br />

années ; quant à la protéinurie, elle disparaît au bout de<br />

quelques mois [11] .<br />

9


18-035-H-10 Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Tableau 5.<br />

Protocoles utilisés dans certaines séries de glomérolunéphrites aiguës postinfectieuses extracapillaires et résultats obtenus.<br />

Auteurs Pays/année Nombre<br />

de cas<br />

par âge<br />

El Housseini<br />

et al. [60]<br />

Dans une série de 138 enfants atteints de GNAPS, âgés de 3<br />

à 14 ans, on a noté la disparition de l’hématurie microscopique<br />

après 6 à 48 mois et de la faible protéinurie après 3 à 24 mois,<br />

avec normalisation du complément après 8 semaines dans 97 %<br />

des cas [14] .<br />

Cependant, la guérison ne doit pas exclure le fait que le<br />

nombre réduit des néphrons intacts subit des changements<br />

hémodynamiques avec le temps, et que l’hyperfiltration résultante<br />

peut causer d’autres lésions rénales avec réapparition des<br />

anomalies urinaires et de l’HTA [65, 66] . Ainsi, un antécédent de<br />

GNAPS dans l’enfance peut être un facteur de risque puissant de<br />

la maladie rénale chronique [50, 67] .<br />

Chez l’adulte, le pronostic à long terme des GNAPI a changé,<br />

avec un taux de rémission complète qui est passé de 80 % dans<br />

les années 1970 [48, 68] à 60 % dans les années 1980 [69] , puis à<br />

43 % en 2002 [70] ; parallèlement on note une augmentation de<br />

l’incidence de l’insuffisance rénale chronique (IRC) compliquant<br />

la GNAPI de 3,3 % dans les années 1970 [48] à 16 à 28 % dans<br />

les années 1980 [69, 71, 72] , puis à 37 % en 2000 [64] . Cela est dû<br />

probablement au changement du type de l’infection en cause<br />

avec des GNAPS devenant plus rares, et également à l’augmentation<br />

du nombre de cas avec des maladies sous-jacentes<br />

sévères [73, 74] .LeTableau 6 regroupe les facteurs pronostiques<br />

de la GNAPI [11, 51, 64, 70, 75] .<br />

■ Conclusion<br />

Suivi<br />

(mois)<br />

% des glomérules<br />

avec croissants<br />

Égypte/2005 23/E+A 41 > 50 % 5 bolus de MP a<br />

+ CS VO (4 sem)<br />

Montseny [51] France/1995 17/E+A NP NP Bolus de MP + CS<br />

VO + bolus de CP b<br />

Sarkissian et<br />

al. [63]<br />

La GNAPI est la troisième GN en termes de fréquence dans<br />

notre expérience. Son incidence reste élevée dans les pays<br />

émergeants malgré la large diffusion de l’antibiothérapie. La<br />

forme type de cette GN est celle secondaire aux infections<br />

streptococciques. Le tableau clinique typique est un syndrome<br />

néphritique aigu. La baisse transitoire du C 3 est l’un des<br />

Traitement Décès IRCT IR stable FR normale<br />

principaux éléments du diagnostic positif. La biopsie rénale<br />

n’est pas systématique et reste indispensable pour étayer les<br />

divers diagnostics différentiels devant un syndrome néphritique<br />

aigu, en particulier chez l’adulte. À l’histologie, il s’agit d’une<br />

GN proliférative endocapillaire pure exsudative, avec fixation<br />

granulaire et pariétale du C3. L’évolution est souvent favorable<br />

dans les formes typiques, mais de plus en plus de cas d’association<br />

avec une GN nécrosante à croissants, de pronostic plus<br />

réservé, sont rencontrés dans notre expérience.<br />

■ Références<br />

3 (13 %) 3 (13 %) 7 (30,5 %) 10 (43,5 %)<br />

2 (11,7 %) 2 (11,7 %) 5 (29,5 %) 5 (29,5 %)<br />

Arménie/1997 4/E NP NP CS VO + CP 0 1 3 0<br />

Notre série Maroc/2007 19/E+A NP 8 > 50 %<br />

11


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Toute référence à cet article doit porter la mention : Ramdani B., Zamd M., Hachim K., Soulami K., Ezzahidy M., Souiri M., Fadili W., Lahboub A., Hanafi L.,<br />

Boujida M., Squalli S., Benkirane A., Benghanem M.G., Medkouri G. Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-035-H-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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Autoévaluations<br />

12 Néphrologie


Plan<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

B. Seitz, V.L.M. Esnault<br />

Les glomérulonéphrites extracapillaires (GNEC) sont caractérisées par la présence d’une prolifération<br />

cellulaire en forme de croissant plus ou moins circonférentiel entourant le floculus glomérulaire, associée à<br />

une réaction inflammatoire parfois majeure, susceptible d’évoluer vers une sclérose transformant les<br />

glomérules en « pain à cacheter ». Le diagnostic de GNEC est classiquement porté lorsque les lésions<br />

glomérulaires intéressent plus de 50 % des glomérules sur une biopsie en comportant au moins une<br />

dizaine. L’étude en immunofluorescence apporte des renseignements précieux d’ordre étiologique. Le<br />

tableau clinique est une glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP) avec insuffisance rénale<br />

progressive en quelques jours ou semaines, associée à une protéinurie et une hématurie. Parfois, des<br />

manifestations extrarénales révèlent la maladie responsable. Ces maladies sont classées en trois groupes<br />

en fonction de l’aspect des lésions observées en immunofluorescence. Le premier groupe est caractérisé<br />

par des dépôts linéaires d’immunoglobulines G le long des membranes basales glomérulaires et<br />

correspond à la maladie de Goodpasture, associée à la présence d’autoanticorps antimembrane basale<br />

glomérulaire. Dans le deuxième groupe hétérogène des GNEC avec dépôts granuleux<br />

d’immunoglobulines, la formation de complexes immuns a été incriminée, mais leur rôle pathogène n’a<br />

pas toujours pu être démontré. Le troisième groupe des GNEC sans dépôt important d’immunoglobulines,<br />

anciennement appelé GNEC pauci-immune, est associé le plus souvent à la présence d’autoanticorps<br />

anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (anti-neutrophil cytoplasmic antibodies [ANCA]),<br />

principalement dans le cadre de la maladie de Wegener et de la polyangéite microscopique. Enfin,<br />

certaines glomérulopathies primitives se compliquent parfois d’une prolifération extracapillaire. Le<br />

pronostic rénal est souvent sombre si un traitement n’est pas débuté en urgence. Un diagnostic précoce<br />

est donc indispensable, orienté par les signes extrarénaux et le bilan immunologique, et confirmé dans les<br />

meilleurs délais par une biopsie rénale qui, de plus, donne des éléments pronostiques. En dehors de<br />

certaines GNEC du groupe II, le traitement d’induction classique associe corticoïdes et cyclophosphamide,<br />

ainsi que des échanges plasmatiques en cas de maladie de Goodpasture. Une fois la rémission obtenue,<br />

un traitement d’entretien prolongé est nécessaire pour les GNEC du groupe III, car les rechutes sont<br />

fréquentes. Les effets secondaires induits par ces traitements immunosuppresseurs (infections<br />

opportunistes et néoplasies) incitent à poursuivre la recherche du traitement minimal efficace ayant le<br />

meilleur rapport bénéfice/risque.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Glomérulonéphrite extracapillaire ; Glomérulonéphrite rapidement progressive ;<br />

Anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles ; Anticorps antimembrane basale glomérulaire ;<br />

Maladie de Goodpasture ; Maladie de Wegener ; Polyangéite microscopique<br />

Introduction 2<br />

Anatomie pathologique 2<br />

Description des lésions 2<br />

Étiologie. Pathogénie 3<br />

Principaux facteurs étiologiques et pathogéniques<br />

Glomérulonéphrites avec anticorps antimembrane basale<br />

5<br />

glomérulaire (anti-MBG)<br />

Glomérulonéphrites avec généralement dépôts granuleux<br />

5<br />

d’immunoglobulines 5<br />

Glomérulonéphrites avec ANCA 6<br />

Description clinique générale 6<br />

Néphrologie<br />

18-037-E-10<br />

Principales maladies responsables 7<br />

Vascularites avec ANCA 7<br />

Maladie de Goodpasture 7<br />

Critères pronostiques 7<br />

Vascularites à ANCA 7<br />

Maladie de Goodpasture 8<br />

Traitement 8<br />

Règles générales 8<br />

Traitement d’une GNEC de type III avec ANCA 8<br />

Traitement de la maladie de Goodpasture 9<br />

Autres GNEC auto-immunes 9<br />

Conclusion 9<br />

1


18-037-E-10 Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

■ Introduction<br />

Les glomérulonéphrites extracapillaires (GNEC) sont caractérisées<br />

par la présence d’une prolifération cellulaire en forme de<br />

croissant plus ou moins circonférentiel entourant le floculus<br />

glomérulaire et les cellules dites endocapillaires (endothéliales et<br />

mésangiales). Une certaine confusion existe avec la notion<br />

clinique de glomérulonéphrite rapidement progressive (GNRP)<br />

qui désigne une insuffisance rénale d’installation rapide en<br />

quelques semaines dans un contexte biologique d’atteinte<br />

glomérulaire. Outre le fait qu’un terme d’anatomie pathologique<br />

ne peut pas être synonyme d’un fait clinique, ces deux entités<br />

ne sont pas strictement superposables en pathologie humaine.<br />

En effet, certaines GNEC peuvent entraîner une dégradation<br />

lente de la fonction rénale [1] , et inversement d’autres atteintes<br />

histologiques (syndrome hémolytique et urémique, sclérodermie)<br />

se révèlent parfois par un tableau de GNRP.<br />

L’ensemble des maladies pouvant induire des GNEC a été<br />

progressivement démembré en trois groupes correspondant à un<br />

début de classification étiologique et pathogénique [2] . La<br />

maladie des anticorps antimembrane basale glomérulaire a été<br />

le premier et reste le seul type clairement identifié. Dans le<br />

deuxième groupe inhomogène des GNEC avec généralement<br />

dépôts granuleux d’immunoglobulines (Ig), la formation de<br />

complexes immuns a été incriminée, mais leur rôle pathogène<br />

n’a pas toujours pu être démontré. Plus récemment, le troisième<br />

groupe des GNEC sans dépôt important d’Ig s’est révélé caractérisé<br />

le plus souvent par la présence d’anticorps circulants anticonstituants<br />

cytoplasmiques des polynucléaires neutrophiles<br />

(anti-neutrophil cytoplasmic antibodies [ANCA]) avec ou sans<br />

lésions de vascularite systémique. Par ailleurs, certaines glomérulopathies<br />

primitives se compliquent parfois d’une prolifération<br />

extracapillaire à un stade plus ou moins tardif de leur<br />

évolution.<br />

■ Anatomie pathologique<br />

Description des lésions<br />

Le diagnostic de GNEC est un diagnostic anatomopathologique<br />

défini par un aspect caractéristique en microscopie optique.<br />

L’examen en immunofluorescence apporte des éléments indispensables<br />

pour le diagnostic étiologique. Cette lésion n’est pas<br />

spécifique, mais le reflet d’une agression particulièrement sévère<br />

de la membrane basale.<br />

Définition<br />

L’aspect très particulier des lésions glomérulaires qui valut à<br />

ces glomérulopathies le terme imagé de glomérulonéphrite à<br />

croissants fut décrit par Volhard en 1914. Le croissant est une<br />

lésion élémentaire définie par l’accumulation d’éléments<br />

inflammatoires (monocytes macrophages, polynucléaires,<br />

lymphocytes et parfois cellules géantes) et surtout de cellules<br />

épithéliales mêlées à de la fibrine, dans l’espace de Bowman.<br />

Aspects morphologiques des croissants<br />

Les croissants se présentent sous des aspects histologiques très<br />

variés suivant l’importance de la prolifération cellulaire épithéliale<br />

et de l’infiltrat inflammatoire, et en fonction du stade<br />

évolutif. À un stade initial, ils sont essentiellement constitués<br />

par un réseau fibrineux enserrant quelques rares cellules<br />

inflammatoires, et surtout des cellules épithéliales. Ces dernières<br />

ont un cytoplasme modérément abondant et pâle, et se groupent<br />

en amas réalisant des lésions segmentaires faiblement<br />

prolifératives (Fig. 1). Puis, la prolifération épithéliale s’accentue<br />

: les cellules se disposent en strates concentriques et<br />

repoussent partiellement (Fig. 2) ou totalement (Fig. 3) le<br />

floculus. Si la capsule de Bowman est intacte, les cellules<br />

épithéliales restent largement majoritaires. En revanche, si la<br />

capsule de Bowman est rompue, les éléments inflammatoires<br />

deviennent prédominants. À un stade plus tardif, les cellules<br />

apparaissent moins nombreuses et engainées dans un réseau<br />

Figure 1. Croissant à un stade précoce.<br />

A. Coloration de Jones (× 250) : rupture des basales capillaires (flèche<br />

simple), irruption de fibrine dans l’espace urinaire (double flèche).<br />

B. Coloration du trichrome (× 250) : multiplication des cellules épithéliales<br />

pariétales mélées à de la fibrine (flèche simple), afflux de leucocytes<br />

(double flèche).<br />

Figure 2. Croissant segmentaire floride (coloration du trichrome ×<br />

160). En périphérie, importante prolifération épithéliale mélée à quelques<br />

leucocytes, en surface abondant réseau fibrineux. Le floculus est refoulé<br />

par ce croissant.<br />

Figure 3. Floculus détruit par un croissant circonférentiel (coloration du<br />

trichrome × 160).<br />

collagène : le croissant est dit « fibrocellulaire ». Peu à peu, les<br />

cellules se raréfient pour disparaître laissant place à une lame<br />

collagène dense : le croissant est dit « fibreux » (Fig. 4).<br />

2 Néphrologie


Figure 4. Croissant semi-circonférentiel fibrocellulaire à droite et fibreux<br />

à gauche (coloration du trichrome × 250).<br />

Aspects morphologiques du floculus sous-jacent<br />

Son aspect, très variable, dépend de l’intensité et de l’étiologie<br />

de la GNEC. Il peut être normal, présenter des ruptures ponctuelles<br />

de la membrane basale capillaire (Fig. 1A) ou de larges<br />

plages de nécrose segmentaire. Il peut être le siège d’une<br />

prolifération endocapillaire et comporter des dépôts immuns<br />

mésangiaux endo- ou extramembraneux. Enfin, il peut être<br />

presque totalement détruit (Fig. 3), ne persistant que sous forme<br />

de quelques lambeaux de membranes basales, ou totalement<br />

scléreux en « pain à cacheter ».<br />

Autres lésions associées<br />

L’interstitium est le plus souvent œdémateux, siège d’un<br />

infiltrat polymorphe à prédominance mononucléée, dont le<br />

renforcement périglomérulaire et périvasculaire évoque une<br />

vascularite. Les lumières tubulaires sont fréquemment encombrées<br />

de cylindres hématiques et l’épithélium tubulaire montre<br />

des signes de souffrance en général mineurs. Les vaisseaux<br />

apparaissent le plus souvent normaux, mais l’examen minutieux<br />

de coupes sériées est indispensable à la recherche de lésion<br />

d’angéite nécrosante et granulomateuse.<br />

Critères diagnostiques d’une GNEC<br />

La définition histologique des GNEC ne fait pas l’unanimité.<br />

Le débat porte principalement sur le pourcentage de glomérules<br />

atteints par la prolifération et sur le volume des croissants.<br />

Selon les auteurs, de 30 %à80%deglomérules atteints sont<br />

exigés pour porter le diagnostic. Mais ce pourcentage doit-il<br />

tenir compte des glomérules scléreux ? Actuellement, les auteurs<br />

français retiennent le nombre de 50 % de glomérules présentant<br />

des croissants formés d’au moins deux strates de cellules et<br />

occupant plus de 50 % de la surface de la chambre de filtration.<br />

Toutefois, Cameron souligne la fragilité d’une telle définition<br />

puisque, selon le plan de coupe d’un même glomérule, celui-ci<br />

peut sembler normal, ou le croissant, s’il apparaît, peut être<br />

segmentaire ou circonférentiel [3] . Pour être représentatif, ce<br />

pourcentage doit donc être évalué sur un nombre minimal de<br />

glomérules, estimé à 20 pour Cameron, dix pour la plupart des<br />

auteurs, et impose qu’une biopsie soit étudiée sur des coupes<br />

sériées.<br />

Immunofluorescence<br />

Les techniques d’immunofluorescence courantes donnent au<br />

clinicien deux types de renseignements :<br />

d’une part, la mise en évidence de dépôts de fibrine au sein<br />

du croissant caractérise des lésions aiguës sans préjuger de<br />

l’étiologie de la maladie (Fig. 5A) ;<br />

d’autre part, l’aspect des dépôts d’immunoglobulines (Ig) et<br />

des fractions du complément permet le classement des GNEC<br />

Néphrologie<br />

en trois groupes distincts qui correspondent à des mécanismes<br />

immunopathologiques différents [2] (Tableau 1) [4-21, 23-51] :<br />

C le groupe I rassemble les GNEC à dépôt linéaire d’Ig le long<br />

de la membrane basale (Fig. 5B) ;<br />

C le groupe II, beaucoup plus hétérogène, regroupe des GNEC<br />

à dépôts granuleux d’Ig ;<br />

C le groupe III est celui des GNEC sans dépôt ou presque<br />

d’immunoglobulines, désignées aussi par le terme de<br />

glomérulonéphrites pauci-immunes, de fait inadéquat.<br />

Étiologie. Pathogénie<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires 18-037-E-10<br />

Figure 5. Étude en immunofluorescence.<br />

A. Croissant segmentaire : fixation du sérum antifibrine extracapillaire.<br />

B. Fixation du sérum anti-immunoglobuline G linéaire sur les membranes<br />

basales (maladie de Goodpasture).<br />

Phénomènes déclenchants et amplificateurs<br />

De véritables perforations de la membrane basale glomérulaire<br />

ont été observées en microscopie électronique. Ces defects<br />

de la membrane basale joueraient un rôle pathogène car ils se<br />

regroupent dans des anses capillaires thrombosées et s’associent<br />

généralement à une nécrose des cellules endothéliales et des<br />

podocytes [52] . La taille de ces brèches est suffisante pour<br />

permettre le passage de protéines sériques et d’éléments cellulaires.<br />

Ces brèches seraient secondaires à l’action d’enzymes<br />

protéolytiques et de radicaux oxygénés libérés par les leucocytes<br />

au contact de l’endothélium glomérulaire activés par divers<br />

facteurs (fractions du complément, fragment Fc des Ig, lymphocytes<br />

T ou autoanticorps).<br />

Des facteurs tissulaires d’origine glomérulaire initient l’activation<br />

de la coagulation qui aboutit à la formation de thrombine<br />

et de fibrine, qui s’accumulent dans la chambre urinaire [53] .<br />

Toutefois, des expériences chez la souris déficiente en fibrinogène<br />

ont montré que la formation de fibrine n’est pas une étape<br />

indispensable à la formation du croissant [54] . Dans des modèles<br />

expérimentaux, plasminogène et activateurs du plasminogène<br />

limitent les conséquences de l’activation de la coagulation [55] .<br />

Par ailleurs, les facteurs tissulaires induisent une augmentation<br />

de l’expression des molécules HLA de classe II par les cellules<br />

résidentes glomérulaires [53] , qui sont indispensables au développement<br />

d’une GNEC expérimentale [56] . En dehors de son<br />

action procoagulante, la thrombine pourrait favoriser l’inflammation<br />

et la formation du croissant en activant le récepteur<br />

pour la thrombine PAR-1 [57] . Les macrophages activés participent<br />

à cette activité procoagulante en produisant de la thromboplastine<br />

tissulaire, et également de façon indirecte grâce à une<br />

production accrue d’interleukine (IL-1) et de tumor necrosis<br />

factor-a (TNF-a) qui dépriment l’expression de molécules à<br />

activité anticoagulante par les cellules endothéliales [58] (heparinlike<br />

proteoglycans, thrombomoduline, prostacycline).<br />

3


18-037-E-10 Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

Tableau 1.<br />

Classification étiologique des glomérulonéphrites extracapillaires.<br />

Type I : glomérulonéphrites avec anticorps Primitive Maladie de Goodpasture<br />

antimembrane basale glomérulaire<br />

Secondaires (rares) Glomérulonéphrite extramembraneuse [4]<br />

Lymphome<br />

Amylose [5]<br />

Médicamenteuse : hydralazine [6]<br />

et D-pénicillamine [7]<br />

Lithotritie [8]<br />

Alport avant ou après transplantation [9]<br />

Forme frontière avec les vascularites<br />

systémiques [10, 11]<br />

Type II : glomérulonéphrites<br />

Postinfectieuses Streptococoque<br />

avec généralement dépôts granuleux<br />

d’immunoglobulines<br />

[12]<br />

Staphylocoque [13]<br />

Shunt atrioventriculaire [14]<br />

Endocardite lente ou aiguë [15]<br />

Infections profondes [13]<br />

Fièvre typhoïde [16]<br />

Maladie des légionnaires [17]<br />

Syphilis [18]<br />

Lèpre [19]<br />

Mycoplasma pneumoniae [20]<br />

Tuberculose [21]<br />

Cytomégalovirus [22]<br />

Virus de l’immunodéficience humaine [23]<br />

Toxicomanes [13]<br />

Lupus érythémateux disséminé [24]<br />

Purpura rhumatoïde de Henoch-Schönlein [25]<br />

Cryoglobuline mixte [26]<br />

Cancer [27] et hémopathie Lymphome non hodgkinien [28]<br />

Gammapathie monoclonale [29]<br />

Amylose [30]<br />

Maladie des dépôts immunotactoïdes [31]<br />

Sarcoïdose [32]<br />

Secondaires à une glomérulonéphrite primitive Glomérulonéphrite extramembraneuse [33]<br />

Néphropathie à dépôts mésangiaux<br />

d’immunoglobulines A [34]<br />

Glomérulonéphrites membranoprolifératives<br />

Glomérulopathie du transplant [35]<br />

Type III : glomérulonéphrites<br />

Vascularites atteignant les vaisseaux<br />

Granulomatose de Wegener<br />

avec peu de dépôts d’immunoglobulines de petit calibre<br />

Polyangéite microscopique [36]<br />

Plus rarement Polychondrite [37]<br />

Takayasu [38]<br />

Horton [39]<br />

Churg-Strauss [40]<br />

Vascularite rhumatoïde<br />

Polyarthrite rhumatoïde [41]<br />

Formes secondaires exceptionnelles Médicaments D-pénicillamine [42]<br />

Bucillamine [43]<br />

Phénylbutazone [44]<br />

Rifampicine [45]<br />

Énalapril [46]<br />

Streptokinase [47]<br />

Immunothérapie [48]<br />

Poussières et toxiques Silicose [49]<br />

Poussières de métal [50]<br />

Solvant organique [51]<br />

Des cytokines pro-inflammatoires, et en particulier l’IL-1 et le<br />

TNF-a [59, 60] , sous la dépendance du facteur de transcription<br />

nucléaire NF-kappa-B [61] , augmentent l’expression de molécules<br />

d’adhésion (sélectine, intégrine) à la surface des cellules<br />

endothéliales, et favorisent l’activation et la diapédèse des<br />

leucocytes [58] . Chez l’animal, l’administration de l’antagoniste<br />

du récepteur à l’IL-1 (IL1-RA), du récepteur soluble du TNF-a<br />

(sTNFrp55), ou d’anticorps anti-LFA1 ou anti-ICAM1 prévient la<br />

formation des croissants dans certains modèles expérimentaux<br />

[62-64] .<br />

La migration des cellules inflammatoires entre les cellules<br />

endothéliales vers la chambre urinaire s’effectue selon un gradient<br />

d’agents chimiotactiques : fraction du complément (C5a),<br />

chimiokines (MCP-1, IL-8, RANTES), lipides (LTB4, PAF), protéines<br />

4 Néphrologie


de la matrice extracellulaire (ostéopontine), etc. Ces molécules<br />

composent un système particulièrement redondant et en conséquence<br />

difficile à contrôler par des agents thérapeutiques [65] .<br />

Toutefois, le recrutement et l’activation des macrophages sont des<br />

étapes clés de la formation du croissant, régulée surtout par<br />

certaines chimiokines (MCP-1, MIP-1a, MIF) [66-68] . Par ailleurs, la<br />

matrice extracellulaire facilite la migration et l’interaction des<br />

cellules infiltrantes avec des facteurs de croissance [69] , mais aussi<br />

favorisent la prolifération des cellules épithéliales glomérulaires<br />

[70] . Des métalloprotéinases (MT1-MMP et MMP-2) participent<br />

aux altérations de la matrice extracellulaire [71] . Par ailleurs, les<br />

podocytes sont impliqués dans la formation précoce de ponts<br />

entre la membrane basale glomérulaire et l’épithélium pariétal<br />

qui prolifère [72] .<br />

L’immunité cellulaire joue un rôle déterminant. Des souris<br />

déficientes en CD4 et CD8 ont permis de démontrer le rôle<br />

prépondérant des CD4+ [73] . Les modèles de GNEC murins sont<br />

surtout dépendants de la composante Th1. En effet, les lésions<br />

sont aggravées par l’IL-12 produite par les cellules mésangiales<br />

qui favorise la réponse Th1 [74] , et par l’interféron gamma<br />

produit par les lymphocytes Th1 et qui participe à l’activation<br />

macrophagique [75] . Les lésions sont en revanche améliorées par<br />

l’administration d’IL-4 ou d’IL-10 qui freinent la réponse<br />

Th1 [76, 77] . Des souris déficientes en IL-4, avec une réponse<br />

Th1 amplifiée, développent des GNEC plus graves [78] . Toutefois,<br />

les lymphocytes CD8+ jouent aussi un rôle dans certains<br />

modèles expérimentaux [79] .<br />

D’autres éléments régulateurs ont été décrits, incluant les<br />

récepteurs pour la fraction Fc des immunoglobulines (FcR), la<br />

monoxyde d’azote synthase inductible (iNOS), les radicaux<br />

oxygénés, les prostaglandines, ainsi que le transforming growth<br />

factor-b (TGF-b) qui arrête le processus inflammatoire au prix<br />

d’une fibrose [80] .<br />

Identification des cellules du croissant<br />

Des techniques immunohistochimiques utilisant des anticorps<br />

monoclonaux ont permis d’identifier les cellules responsables<br />

de la prolifération épithéliale comme étant<br />

essentiellement des cellules épithéliales pariétales [81] . La<br />

thrombine et certains facteurs de croissance sécrétés en autre<br />

par les macrophages ont été incriminés.<br />

Les éléments inflammatoires du croissant des GNEC humaines<br />

rassemblent essentiellement des macrophages et des lymphocytes<br />

T [82-84] . La proportion de macrophages augmente avec<br />

la rupture de la capsule de Bowman et témoigne de lésions<br />

sévères et de plus mauvais pronostic [85] . L’analyse des lymphocytes<br />

T du floculus et du croissant, et de l’infiltrat interstitiel et<br />

périglomérulaire, révèle une prédominance de CD4+ [82, 85] et la<br />

présence de cellules activées (RIL2 positive) [86] . Lymphocytes et<br />

macrophages périglomérulaires pourraient être responsables de<br />

la rupture de la capsule de Bowman [87] .<br />

Évolution fibreuse<br />

L’extinction du processus inflammatoire est marquée par<br />

l’accumulation de matrice extracellulaire et l’évolution vers la<br />

fibrose du croissant. Le TGF-b produit par les cellules glomérulaires<br />

serait le principal élément régulateur de ce processus [88] .<br />

L’administration d’anticorps anti-TGF-ß, ou d’un protéoglycan,<br />

la décorine, qui neutralise toutes les isoformes de cette cytokine,<br />

inhibe la fibrose des croissants dans des modèles expérimentaux<br />

[89] . L’angiotensine II est un puissant stimulant de la<br />

production de TGF-ß et l’inhibition du système rénineangiotensine<br />

pourrait permettre de limiter les processus de<br />

fibrose glomérulaire dans les modèles expérimentaux [90] .La<br />

nature du collagène a pu être identifiée. Il serait plutôt de type<br />

glomérulaire (laminine et collagène IV) tant que la capsule reste<br />

intacte, et plutôt de type interstitiel (type III) lorsque la capsule<br />

est rompue [91] .<br />

Une meilleure connaissance de la physiopathologie de la<br />

prolifération extracapillaire permettra prochainement de<br />

proposer des traitements particulièrement efficaces susceptibles<br />

d’agir à différents stades de la maladie et de l’évolution du<br />

croissant.<br />

Néphrologie<br />

■ Principaux facteurs étiologiques<br />

et pathogéniques<br />

Glomérulonéphrites avec anticorps<br />

antimembrane basale glomérulaire<br />

(anti-MBG)<br />

Le caractère pathogène des anticorps anti-MBG a été démontré<br />

par des expériences de transfert de la maladie chez l’animal<br />

[92] . Ces anticorps sont le plus souvent des IgG et<br />

exceptionnellement des IgA ou des IgM. Le taux des anticorps<br />

est généralement assez bien corrélé à l’activité de la maladie et<br />

permet d’adapter la thérapeutique [93] .<br />

Les anticorps anti-MBG sont dirigés contre une structure du<br />

collagène de type IV. Le collagène est une structure fibrillaire<br />

correspondant à l’assemblage de trois chaînes. Chaque chaîne se<br />

compose d’une portion dite « collagénique » caractérisée par la<br />

présence de glycine tous les trois acides aminés, permettant<br />

l’enroulement de ces chaînes en triple hélice, et d’une portion<br />

globulaire carboxyterminale appelée domaine « non collagénique<br />

». Six variants de domaine non collagénique ont été<br />

identifiés pour le collagène de type IV : alpha 1 et 2 sont codés<br />

par le chromosome 13, alpha 3 et 4 par le chromosome 2, et<br />

alpha 5 et 6 par le chromosome X. L’épitope reconnu par les<br />

anticorps anti-MBG est contenu dans le domaine non collagénique<br />

NC1 de la chaîne alpha 3 du collagène de type IV (codée<br />

par le gène COL4A3) [94, 95] . La chaîne alpha 3 du collagène de<br />

type IV est présente essentiellement dans les membranes basales<br />

glomérulaire et alvéolaire pulmonaire. Le syndrome d’Alport,<br />

dans sa forme classique juvénile liée à l’X, est caractérisé par<br />

une anomalie du gène COL4A5, qui empêche la synthèse<br />

normale des chaînes non seulement alpha 5, mais aussi alpha<br />

3 et 4. Ceci explique que les patients porteurs d’un syndrome<br />

d’Alport juvénile puissent développer après transplantation des<br />

anticorps anti-MBG dirigés contre les chaînes alpha 3, 4 et 5 du<br />

collagène IV [96] . Cependant, l’expression clinique de la maladie<br />

dépend probablement de la capacité à développer une réponse<br />

immune cellulaire [9, 96] . Les anticorps anti-MBG ont une forte<br />

affinité pour leur antigène, entraînant une agression prolongée<br />

de la membrane basale glomérulaire malgré les tentatives<br />

d’extraction par échange plasmatique [97] . Le complexe immun<br />

formé in situ entraîne un processus inflammatoire secondaire à<br />

l’adhésion et l’activation des leucocytes grâce à des molécules<br />

d’adhésion (intégrines plus que sélectines) [98] et aux récepteurs<br />

Fc gamma, plus que par activation complémentaire [99] .<br />

En dehors des facteurs génétiques (HLA DR) [92] , la maladie<br />

semble déterminée par des facteurs environnementaux (toxiques<br />

[100] ou mécaniques par lithotritie [8] ). Des infections<br />

peuvent aggraver la maladie par l’intermédiaire de cytokines<br />

pro-inflammatoires [101] . Le tabagisme favorise l’apparition<br />

d’hémorragies pulmonaires. Il peut exister une dissociation<br />

entre les atteintes pulmonaire et rénale, sans doute parce que le<br />

capillaire pulmonaire n’est pas fenêtré et donc la membrane<br />

basale est protégée par l’endothélium vasculaire.<br />

Glomérulonéphrites avec généralement<br />

dépôts granuleux d’immunoglobulines<br />

Maladies infectieuses<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires 18-037-E-10<br />

Certains agents infectieux bactériens peuvent induire une<br />

GNEC associée à des dépôts de complexes immuns, provoquant<br />

généralement l’activation du complément. La localisation des<br />

dépôts (sous-endothéliaux ou sous-épithéliaux), le germe et<br />

l’origine de l’infection en cause peuvent expliquer les différentes<br />

présentations histologiques [102] , ainsi que des signes cliniques et<br />

un pronostic variables de ces lésions rénales postinfectieuses [13,<br />

103] . Les germes le plus souvent en cause sont le streptocoque A<br />

bêtahémolytique [12] ,etStaphylococcus epidermidis et aureus en<br />

particulier dans les néphrites de shunt et les endocardites<br />

aiguës [14, 15] . La lésion glomérulaire est une glomérulonéphrite<br />

proliférative et exsudative diffuse, associée à une prolifération<br />

5


18-037-E-10 Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

extracapillaire, soit d’emblée, soit secondaire [104] . Certains<br />

germes, en particulier Staphylococcus epidermidis, sont capables<br />

d’induire une lésion directe du capillaire glomérulaire sans<br />

fixation d’Ig, et les taux sériques des fractions C3 et C4 du<br />

complément restent parfois normaux. Des facteurs génétiques et<br />

environnementaux semblent nécessaires à l’induction de la<br />

maladie, car lors d’une épidémie à l’un de ces germes « néphritogènes<br />

», tous les malades ne présentent pas une glomérulonéphrite<br />

et la présentation clinique est différente d’un patient<br />

à l’autre. D’autres infections bactériennes se compliquent<br />

exceptionnellement d’une GNEC (Tableau 1).<br />

Les infections bactériennes sont plus rarement associées à des<br />

glomérulonéphrites sans dépôt de complexes immuns idiopathiques<br />

[105] ou à une vascularite systémique avec ANCA [106] .<br />

Les maladies virales se compliquent rarement de GNEC. Une<br />

hépatite B peut être associée à une glomérulonéphrite extramembraneuse,<br />

mais la prolifération extracellulaire reste exceptionnelle<br />

[107] . L’hépatite C se complique parfois d’une<br />

cryoglobulinémie mixte de type 2 avec glomérulonéphrite<br />

membranoproliférative de type 1, mais la prolifération extracapillaire<br />

reste exceptionelle [26, 108] . Une périartérite noueuse se<br />

développe parfois au cours d’hépatites B ou C, mais ces vascularites<br />

touchant les troncs moyens entraînent une ischémie<br />

glomérulaire sans GNEC [109] . Une GNEC est exceptionnelle au<br />

cours d’une infection à cytomégalovirus [22] ou du sida [23] .<br />

Lupus érythémateux aigu disséminé<br />

Une prolifération extracapillaire survient dans les glomérulonéphrites<br />

prolifératives focales (classe III) et surtout diffuses<br />

(classe IV) [24] , secondairement à des dépôts de complexes<br />

immuns [110] . Le diagnostic est évoqué devant des dépôts<br />

mésangiaux sous-endothéliaux et endomembraneux massifs<br />

d’IgG, A et M, de C3, C4 et Clq, avec présence de corps<br />

hématoxyliques. Plus rarement, il s’agit d’un syndrome hémolytique<br />

et urémique avec ou sans anticorps antiphospholipides<br />

[111] ou d’exceptionnelles vascularites lupiques [112] .<br />

Néphropathies à dépôts mésangiaux<br />

d’immunoglobulines A<br />

Une prolifération extracapillaire diffuse peut atteindre jusqu’à<br />

100 % des glomérules au cours des néphropathies à dépôts<br />

mésangiaux d’IgA, en particulier dans les formes avec atteintes<br />

extrarénales du purpura rhumatoïde [25] . L’atteinte rénale<br />

initiale est souvent plus sévère chez l’adulte, et le pronostic<br />

rénal à distance moins bon [113] . Elle peut apparaître à l’occasion<br />

d’une grossesse [114] , être associée à une cirrhose hépatique [115]<br />

et récidiver en postgreffe [116] . Il existe des formes frontières<br />

avec les vascularites avec ANCA d’isotype IgA ou IgG [117, 118] .<br />

Glomérulonéphrites avec ANCA<br />

Trois vascularites sont habituellement associées à la présence<br />

d’ANCA : la granulomatose de Wegener, la polyangéite microscopique<br />

et la maladie de Churg-Strauss [36] . Parmi celles-ci,<br />

seules les deux premières sont fréquemment associées à des<br />

GNRP. La situation est comparable chez l’enfant [119] .<br />

Les ANCA sont généralement des IgG, mais parfois aussi des<br />

IgM à la phase aiguë de la maladie [120] . Ces anticorps sont<br />

dirigés contre des protéines contenues dans les granules des<br />

polynucléaires neutrophiles. Les deux principales spécificités<br />

antigéniques reconnues par les ANCA dans les vascularites<br />

systémiques sont la protéinase 3 (PR3) et la myéloperoxydase<br />

(MPO) [121] . Les anticorps anti-PR3 produisent une fluorescence<br />

cytoplasmique granuleuse sur neutrophiles fixés à l’alcool<br />

(C-ANCA), et les anti-MPO une fluorescence périnucléaire<br />

(P-ANCA) en raison de la redistribution de leur cible antigénique<br />

autour du noyau après fixation des polynucléaires à l’alcool.<br />

Il n’existe pas de corrélation parfaite entre spécificité antigénique<br />

et expression clinique de la maladie. Toutefois, la plupart<br />

des patients présentant une granulomatose de Wegener ont des<br />

anticorps anti-PR3, alors qu’une proportion plus importante de<br />

patients présentant une polyangéite microscopique ou une<br />

GNEC « idiopathique » ont des anticorps anti-MPO [121] .<br />

Les arguments en faveur du caractère pathogène des ANCA<br />

restent principalement indirects malgré une étude de transfert<br />

des ANCA chez l’animal [122] et de rares cas de transmission<br />

maternofœtale démontrée [123] . La spécificité des ANCA pour les<br />

vascularites systémiques approche 99 % [124] . Une ascension des<br />

taux d’ANCA précède généralement la rechute clinique [125] . Les<br />

patients sans ANCA détectable ne présentent en principe pas de<br />

rechutes [126] , alors que la persistance d’un taux significatif<br />

d’ANCA en rémission augmente le risque de rechute [127] .<br />

D’autre part, des travaux expérimentaux ont démontré que les<br />

ANCA pouvaient induire une stimulation des polynucléaires<br />

neutrophiles avec production de radicaux oxygénés et dégranulation<br />

d’enzymes protéolytiques [128] , ainsi que des lésions de<br />

cellules endothéliales en culture [121] . Les monocytes sont aussi<br />

activés par les ANCA [129] . Ces événements nécessitent un<br />

priming des neutrophiles par des cytokines inflammatoires qui<br />

permettent la translocation des antigènes cibles des ANCA à la<br />

surface de la cellule [130] . Le niveau d’expression des antigènes<br />

cibles à la surface des neutrophiles pourrait constituer un<br />

facteur de risque de la maladie [131] . Les antigènes cibles<br />

pourraient aussi être libérés par des neutrophiles adjacents et<br />

être adsorbés passivement à la surface des cellules [132] . L’antigène<br />

est engagé par les ANCA, et la fraction Fc de l’autoanticorps<br />

se fixe aux récepteurs FccRIIa [133] et RIIIb [134] ,<br />

aboutissant à la transduction d’un message d’activation intracellulaire,<br />

qui nécessite aussi d’autres cofacteurs [135] . L’activation<br />

des neutrophiles par les ANCA nécessite une adhésion des<br />

neutrophiles grâce aux intégrines [136] , qui est facilitée par les<br />

ANCA [137] . L’activation est enfin amplifiée par des boucles<br />

régulatrices [138, 139] . Par ailleurs, les ANCA accélèrent l’apoptose<br />

des neutrophiles et interfèrent avec la clairance des corps<br />

apoptotiques par les macrophages [140] . Des travaux expérimentaux<br />

récents ont également montré le rôle de la voie alterne du<br />

complément dans la genèse des lésions inflammatoires [141] .<br />

La cause de l’apparition des ANCA reste souvent inconnue<br />

[121] . Au cours de l’apoptose des neutrophiles, les antigènes<br />

cibles des ANCA sont exposés à la surface des cellules [142] . Ces<br />

phénomènes d’apoptose pourraient être exacerbés par certaines<br />

conditions pathologiques, comme l’exposition chronique à la<br />

silice, qui constitue un facteur de risque de développer une<br />

vascularite à ANCA [49] . Une exposition massive de corps<br />

apoptotiques aboutit à une rupture de la tolérance et à l’apparition<br />

des ANCA [143] . Une anomalie de la régulation de l’apoptose<br />

des neutrophiles (augmentation de la production, clairance<br />

anormale) pourrait donc jouer un rôle dans la genèse de la<br />

maladie [144] .<br />

Toutefois, des facteurs autres que les ANCA pourraient<br />

contribuer à la genèse de ces maladies. Il existe certainement un<br />

rôle pour l’immunité cellulaire chez ces patients [145, 146] , mais<br />

l’ascension des ANCA semble précéder l’augmentation de l’IL-2R<br />

soluble [147] . Un défaut de la balance protéase/antiprotéase a été<br />

évoqué chez des patients présentant des anticorps anti-PR3 et<br />

un déficit en alpha1-antitrypsine, inhibiteur de l’activité<br />

protéolytique de la PR3 [148-150] , et constitue un facteur de<br />

gravité de la maladie [151] .<br />

■ Description clinique générale<br />

Le tableau clinique est généralement celui d’une GNRP avec<br />

une dégradation en quelques semaines de la fonction rénale,<br />

associée à une hématurie parfois macroscopique et à une<br />

protéinurie rarement néphrotique. Certains patients présentent<br />

toutefois une installation insidieuse de la maladie avec des<br />

poussées successives pouvant passer inaperçues [1] . L’hypertension<br />

artérielle est surtout présente dans les formes les plus<br />

sévères [152] et chez les sujets âgés [153] . Les examens complémentaires,<br />

en particulier biologiques, orientent le diagnostic et<br />

sont choisis en fonction du contexte clinique et des signes<br />

extrarénaux (Tableau 2). Le diagnostic est rapidement confirmé<br />

par une biopsie rénale.<br />

6 Néphrologie


Tableau 2.<br />

Principaux examens complémentaires utiles pour le diagnostic<br />

étiologique des glomérulonéphrites extracapillaires.<br />

Examens biologiques<br />

en l’absence de signes<br />

extrarénaux<br />

Autres examens biologiques<br />

en fonction du contexte<br />

et du résultat des examens<br />

précédents<br />

Examens morphologiques<br />

en fonction du contexte<br />

■ Principales maladies<br />

responsables<br />

Vascularites avec ANCA<br />

ANCA et anti-MBG (éventuellement<br />

dot-blot en urgence)<br />

C3, C4, CH50<br />

Électrophorèse des protides<br />

dans le sang et les urines<br />

Dosage pondéral des Ig G, A et M<br />

Sérologie HBV, HCV<br />

NFS, CRP<br />

Anticorps antinucléaires,<br />

anti-antigènes solubles<br />

Cryoglobuline<br />

ASLO, antistreptodornase,<br />

antistreptokinase<br />

Exploration de la voie alterne<br />

du complément<br />

Hémoculture, BK tubage<br />

Sérologie (± antigénémie) Legionella,<br />

Mycoplasma pneumoniae, CMV, VIH,<br />

lèpre, syphilis, etc.<br />

TDM thoracique, EFR avec DLCO,<br />

lavage bronchoalvéolaire<br />

TDM abdominale<br />

Coloscopie<br />

Myélogramme ± BOM, etc.<br />

Autres biopsies Biopsie cutanée de lésions<br />

purpuriques<br />

Biopsie musculaire<br />

Biopsie des glandes salivaires<br />

accessoires<br />

Biopsie d’une adénopathie<br />

ou d’une tumeur<br />

ANCA : anti-neutrophil cytoplasmic antibodies ; MBG : membrane basale<br />

glomérulaire ; Ig : immunoglobulines ; HBV : virus de l’hépatite B ; HCV : virus<br />

de l’hépatite C ; NFS : numération-formule sanguine ; CRP : protéine C-réactive ;<br />

ASLO : anticorps antistreptolysine O ; BK : bacille de Koch ; TDM :<br />

tomodensitométrie ; EFR : épreuves fonctionnelles respiratoires ; DLCO :<br />

diffusion pulmonaire du monoxyde de carbone ; BOM : biopsie ostéomédullaire ;<br />

CMV : cytomégalovirus ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine.<br />

Les vascularites avec ANCA responsables de GNRP sont<br />

essentiellement la granulomatose de Wegener et la polyangéite<br />

microscopique. Il s’agit de vascularites nécrosantes touchant<br />

principalement les petits vaisseaux [36] . La granulomatose de<br />

Wegener est caractérisée par un granulome inflammatoire à<br />

cellules géantes des voies aériennes ou de l’interstitium<br />

rénal [154] . Cependant, le diagnostic de maladie de Wegener est<br />

souvent posé en l’absence de granulome sur certains signes<br />

cliniques particulièrement évocateurs : nodules pulmonaires,<br />

sinusite ou otite moyenne chronique résistantes au traitement<br />

antibiotique, rhinite croûteuse, ensellure nasale par effondrement<br />

des cartilages, tumeur rétro-orbitaire ou sténose sousglotique<br />

[124] . La polyangéite microscopique est une vascularite<br />

sans granulome, ni asthme, ni éosinophilie, parfois limitée au<br />

rein (glomérulonéphrite « pauci-immune »). La fréquence de ces<br />

pathologies est en augmentation [155] . Ces maladies surviennent<br />

un peu plus souvent chez l’homme, généralement d’âge moyen,<br />

et sont plus rares chez l’enfant. Quelques cas familiaux ont été<br />

décrits. Leur diagnostic est le plus souvent évoqué devant un<br />

syndrome général associant fièvre, myalgies, arthralgies ou une<br />

des nombreuses atteintes extrarénales caractéristiques [156] .<br />

Dans la maladie de Wegener, il existe parfois une histoire déjà<br />

ancienne de rhinite croûteuse, d’épistaxis voire de destruction<br />

partielle des cartilages du nez, de sinusite, d’otite moyenne avec<br />

Néphrologie<br />

hypoacousie, de laryngite ou de trachéite, voire de sténose<br />

inflammatoire sous-glottique. Des signes pulmonaires sont<br />

présents chez 90 % des patients au moment du diagnostic, avec<br />

toux, dyspnée, infiltrats pulmonaires excavés et parfois pleurésie<br />

sur les radiographies thoraciques. Il peut être observé des<br />

hémoptysies et parfois un tableau dramatique d’hémorragie<br />

alvéolaire avec syndrome de détresse respiratoire aiguë. Des<br />

présentations pseudotumorales oto-rhino-laryngologiques (ORL)<br />

ou pulmonaire sont parfois confondues avec des cancers. Les<br />

autres localisations extrarénales sont oculaires (conjonctivite,<br />

uvéite, rétinite, névrite optique ou pseudotumeur rétroorbitaire),<br />

neurologiques (mononévrite plus souvent que<br />

vascularite cérébrale), musculaire (myalgies), articulaires<br />

(arthralgies), cutanées (rash, purpura palpable), digestives (ulcère<br />

de la cavité buccale, douleur abdominale, saignements digestifs),<br />

rarement cardiaques (péricardite, myocardite, endocardite) et<br />

exceptionnellement urologiques (prostate, uretère). Des formes<br />

frontières existent avec les syndromes de Goodpasture, Churg-<br />

Strauss, les polychondrites et les colites inflammatoires.<br />

Les circonstances de découverte de la polyangéite microscopique<br />

sont plutôt une altération de l’état général, des signes<br />

cutanés (rash, purpura vasculaire nécrotique palpable avec<br />

histologiquement une vascularite leucocytoclasique), oculaires<br />

(mais pas de tumeur rétro-orbitaire), parfois neurologiques, ou<br />

des douleurs musculaires et articulaires. L’atteinte rénale peut<br />

être au premier plan, ou même isolée, évoluant parfois par<br />

poussées successives, voire sur un mode chronique. D’autres<br />

patients présentent une GNRP avec une insuffisance rénale<br />

nécessitant rapidement la dialyse et parfois une alvéolite<br />

hémorragique comparable à celle de la granulomatose de<br />

Wegener ou de la maladie de Goodpasture.<br />

Il est généralement mis en évidence des ANCA dans les<br />

formes actives systémiques. La valeur diagnostique des ANCA<br />

augmente si l’on associe à l’immunofluorescence indirecte,<br />

définissant l’aspect cytoplasmique (c-ANCA) ou périnucléaire<br />

(p-ANCA), un test enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa)<br />

spécifique de la PR3 ou de la MPO [124] . La cible antigénique est<br />

plus souvent la PR3 que la MPO dans la maladie de Wegener,<br />

et inversement plus souvent la MPO que la PR3 dans la polyangéite<br />

microscopique et la glomérulonéphrite pauci-immune.<br />

Malgré une valeur prédictive positive d’un test ANCA supérieur<br />

à 99 % dans un contexte de GNRP, le diagnostic doit généralement<br />

être confirmé par une ponction biopsie rénale avant de<br />

débuter un traitement immunosuppresseur lourd.<br />

Maladie de Goodpasture<br />

La maladie de Goodpasture doit être distinguée du syndrome<br />

de Goodpasture associant insuffisance respiratoire aiguë<br />

hémoptoïque et GNRP dont les causes les plus fréquentes sont<br />

en fait les vascularites microscopiques (Wegener et polyangéite<br />

microscopique) [157] . Des formes limitées au rein sont<br />

décrites [158] .<br />

Elle survient un peu plus souvent chez l’homme, avec deux<br />

pics de fréquence entre 20 et 30 ans, et après 50 ans. Cette<br />

maladie rare survient parfois sur un mode épidémique, sans<br />

qu’un agent infectieux responsable ait pu être identifié. Les<br />

patients se présentent avec une dyspnée rapidement croissante<br />

et des hémoptysies, dont l’importance n’est pas corrélée à<br />

l’abondance de l’hémorragie alvéolaire, surtout chez les fumeurs<br />

et en cas d’œdème aigu du poumon associé. Les clichés thoraciques<br />

montrent des opacités hilifuges prédominant aux bases<br />

puis diffuses. L’atteinte rénale est typiquement une GNRP<br />

hématurique révélatrice ou d’apparition secondaire [93] .<br />

Le diagnostic repose sur la mise en évidence d’anticorps anti-<br />

MBG circulants, et le long des membranes basales glomérulaires<br />

et alvéolaires pulmonaires.<br />

■ Critères pronostiques<br />

Vascularites à ANCA<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires 18-037-E-10<br />

La spécificité antigénique reconnue par les ANCA influe sur<br />

le mode évolutif de la maladie. En effet, les patients ayant des<br />

7


18-037-E-10 Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

anticorps anti-PR3 sont significativement plus jeunes, ont une<br />

insuffisance rénale plus rapidement progressive, une maladie<br />

touchant plus d’organes différents, entrent plus facilement en<br />

rémission sous traitement, mais sont plus exposés à des rechutes<br />

de la maladie [159] . Les patients ayant des anticorps anti-MPO<br />

ont plutôt une maladie évoluant sur un mode chronique<br />

insidieux [160] , mais au total la survie rénale n’est pas influencée<br />

par la spécificité antigénique des ANCA à distance du diagnostic<br />

initial [159-161] .<br />

Au moment du diagnostic, les facteurs qui influencent la<br />

survie rénale sont le sexe [162] , la créatininémie [163] , la protéinurie<br />

[161] , le degré de fibrose artériolaire [163] , de fibrose<br />

interstitielle ou un faible pourcentage de glomérules sains, mais<br />

pas le pourcentage de croissants [164, 165] . Cependant, de<br />

nombreux patients ayant une insuffisance rénale nécessitant le<br />

recours à la dialyse récupèrent une fonction rénale indépendante<br />

grâce au traitement [166] . Le taux initial des anticorps<br />

ANCA n’a pas de valeur pronostique, mais un taux d’anticorps<br />

anti-MPO élevé en rémission est associé à un risque d’insuffisance<br />

rénale terminale [160] .<br />

Les facteurs de risque de décès précoce sont des ANCA de<br />

type cytoplasmique, une hémorragie alvéolaire [163] , un score<br />

d’activité plus élevé [156] , un granulome documenté histologiquement<br />

[167] ou un déficit associé en alpha1-antitrypsine [151] .<br />

Maladie de Goodpasture<br />

Les patients porteurs de maladie de Goodpasture ont globalement<br />

un pronostic plus sombre et les récupérations de<br />

fonction rénale au stade de la dialyse sont exceptionnelles. Ils<br />

sont cependant moins exposés aux rechutes de la maladie [93] .<br />

Les formes frontières entre vascularites à ANCA et Goodpasture<br />

ont un pronostic intermédiaire.<br />

■ Traitement<br />

Règles générales<br />

Le traitement symptomatique est celui de toute insuffisance<br />

rénale aiguë et des éventuelles localisations extrarénales d’une<br />

maladie de système. Un traitement spécifique est nécessaire<br />

pour les GNEC infectieuses ou toxiques.<br />

Traitement d’une GNEC de type III avec<br />

ANCA<br />

Traitement d’induction<br />

Le protocole d’induction en cas de GNRP ou de localisation<br />

extrarénale menaçante, en particulier une hémorragie alvéolaire,<br />

est une urgence thérapeutique. En cas de forte suspicion<br />

clinique, éventuellement confortée en urgence par un test<br />

qualitatif spécifique des antigènes PR3 ou MPO, il est parfois<br />

proposé des bolus de méthylprednisolone, bien que ce schéma<br />

n’ait jamais été validé par une étude randomisée. Le traitement<br />

de référence associe cyclophosphamide per os (2 mg/kg/j) ou en<br />

bolus intraveineux (7,5 à 15 mg/kg/bolus tous les 2à3semaines),<br />

associé à la prednisone à la posologie de 1 mg/kg/j. Les<br />

protocoles anciens de cyclophosphamide per os prolongés 1 an<br />

ou plus étaient associés à des doses cumulatives responsables<br />

d’effets indésirables graves : infections opportunistes à Pneumocystis<br />

carinii ou cytomégalovirus, et surtout cancer des voies<br />

urinaires parfois plus de 10 ans après la fin de l’exposition [168] .<br />

Après seulement 1 an de cyclophosphamide per os, le risque de<br />

cancer de la vessie est déjà multiplié par 11 [161] . En cas de<br />

traitement continu per os, les infections à Pneumocystis carinii<br />

doivent être prévenues par une coprescription de cotrimoxazole<br />

ou surtout d’aérosols de pentamidine, moins pourvoyeurs de<br />

leucopénie. Une cystite hématurique est prévenue par l’association<br />

de mesna.<br />

Pour tenter de diminuer la dose cumulative de cyclophosphamide,<br />

plusieurs études ont comparé la voie orale continue aux<br />

bolus intraveineux, mais aucune étude n’a eu la puissance<br />

nécessaire pour conclure [169] . Les études les plus anciennes<br />

préconisaient seulement des bolus mensuels, et les plus récentes<br />

des bolus tous les 15 jours le premier mois puis toutes les<br />

3 semaines. Une étude européenne actuellement en cours<br />

d’analyse (CYCLOPS) semble montrer l’absence de différence<br />

statistiquement significative entre l’administration par voie<br />

orale continue et les bolus tous les 2 puis 3 semaines [170] .<br />

Cependant, dans cette étude, si la maladie résistait à des bolus<br />

de cyclophosphamide toutes les 2 semaines, il était recommandé<br />

de changer pour un traitement continu per os. La dose<br />

de cyclophosphamide doit être diminuée chez les sujets âgés ou<br />

en insuffisance rénale.<br />

En cas d’insuffisance rénale sévère (créatininémie supérieure<br />

à 500 µmol/l ou nécessité de recours à la dialyse), l’étude<br />

MEPEX a montré le bénéfice des échanges plasmatiques par<br />

rapport aux bolus de méthyprednisolone (1 g/j pendant<br />

3 jours) [171] , et le faible risque de décès suite à des complications<br />

liées au traitement, même devant des lésions histologiques<br />

minimes [172] .<br />

De nombreux autres traitements d’induction ont été utilisés,<br />

souvent dans des formes réfractaires : immunoadsorption sur<br />

protéine A [173] , 15-désoxyspergualine, léflunomide, Ig intraveineuse,<br />

sérum antilymphocytaire, anti-TNF, anti-intégrine, anti-<br />

CD20 ou chimiothérapie aplasiante avec greffe de moelle [174-<br />

177] . Pour ces formes réfractaires, une revue systématique<br />

portant sur une soixantaine de cas publiés montre des résultats<br />

intéressant du rituximab en traitement d’induction, avec une<br />

majorité de rémissions complètes, mais quelques récidives entre<br />

1et2ans [178] . Deux études randomisées sont actuellement en<br />

cours pour tester le rituximab en traitement d’induction<br />

(RITUXVAS et RAVE).<br />

Des alternatives moins toxiques que le cyclophosphamide<br />

restent à évaluer. Le mycophénolate mofétil (MMF) a été utilisé<br />

dans des séries non contrôlées de patients ayant une contreindication<br />

au cyclophosphamide avec des taux élevés de<br />

réponses complètes ou partielles [179] , et dans une étude<br />

randomisée versus cyclophosphamide de faible puissance<br />

statistique sans trouver de différence significative en termes<br />

d’efficacité [180] . Un traitement d’induction par le MMF est<br />

actuellement comparé au cyclophosphamide dans l’étude<br />

européenne MYCYC.<br />

Le traitement d’induction de référence reste donc actuellement<br />

une association de bolus de cyclophosphamides toutes les<br />

2 semaines pendant 1 mois, puis toutes les 3 semaines pendant<br />

6 mois ou poursuivi 3 mois après la rémission, avec une<br />

corticothérapie orale débutée à 1 mg/kg puis rapidement<br />

dégressive, avec des échanges plasmatiques si le taux de<br />

créatininémie est supérieur à 500 µmol/l au moment de la prise<br />

en charge.<br />

Traitement d’entretien<br />

Après cette phase d’induction, la rémission est généralement<br />

obtenue et se discute le choix du traitement d’entretien. Les<br />

doses de corticoïdes sont diminuées pour aboutir à une dose<br />

inférieure à5à10mg/jà6mois [181] .Pourdiminuerladose<br />

cumulative de cyclophosphamide, un relais par azathioprine est<br />

possible après le troisième mois, sans augmenter le risque de<br />

rechute [181] . Il ne faut cependant pas perdre de vue que<br />

l’azathioprine augmente le risque de cancer cutané [161] . Le<br />

MMF, le méthotexate, le léflunomide et le rituximab pourraient<br />

constituer des alternatives à l’azathioprine en traitement<br />

d’induction [182] . Le MMF est actuellement comparé à l’azathioprine<br />

dans l’étude européenne IMPROVE, et le rituximab sera<br />

prochainement comparé à l’azathioprine dans le protocole<br />

MAINRITSAN.<br />

Comme le portage nasal de staphylocoque est associé à un<br />

risque de rechute de maladie de Wegener, le cotrimoxazole a été<br />

utilisé avec succès chez ces patients [183] . Cependant, une étude<br />

comparant le méthotrexate au cotrimoxazole a démontré la<br />

supériorité du méthotrexate pour le maintien de la rémission de<br />

formes généralisées de Wegener [184] . Le cotrimoxazole doit donc<br />

être réservé aux formes localisées ORL de la maladie. Le<br />

méthotrexate peut en revanche être utilisé en relais du cyclophosphamide<br />

une fois la rémission obtenue [185] .LeMMF [186]<br />

8 Néphrologie


.<br />

sera peut-être aussi utilisé dans cette indication. Les Ig intraveineuses<br />

permettent d’améliorer certaines situations difficiles,<br />

mais le bénéfice de ce traitement ne semble pas se maintenir<br />

au-delà de 3 mois [187] .<br />

Après l’arrêt du traitement immunosuppresseur, il faut<br />

surveiller étroitement (tous les 2 mois) l’évolution des ANCA,<br />

car une remontée de leur taux prédit efficacement un risque de<br />

rechute [125] . Une remontée du taux conduit à encore rapprocher<br />

les bilans biologiques pour débuter précocement un<br />

traitement adapté, mais l’initiation du traitement avant la<br />

rechute clinique reste très discutée [126] .<br />

Ces patients rechutent plus en dialyse qu’après transplantation<br />

rénale [188, 189] , et un traitement immunosuppresseur<br />

d’entretien doit parfois être prolongé. La transplantation n’est<br />

pas contre-indiquée en cas de positivité persistante des<br />

ANCA [190] .<br />

Traitement de la maladie de Goodpasture<br />

Le traitement standard associe les corticoïdes per os (1 mg/<br />

kg/j), le cyclophosphamide per os (2 à 3 mg/kg/j) et les échanges<br />

plasmatiques tous les jours pendant 2 semaines ou jusqu’à<br />

disparition des anticorps anti-MBG [93] . À un stade nécessitant<br />

la dialyse, la récupération de la fonction rénale est exceptionnelle<br />

[93] . L’immunoabsorption sur protéine A, malgré une<br />

soustraction accrue des IgG, n’est pas supérieure aux échanges<br />

plasmatiques [173] . Le cyclophosphamide est prolongé 2 à<br />

3 mois, et les corticoïdes sont arrêtés en 6à9mois,avecun<br />

risque minime de rechute [93] . La transplantation peut être<br />

envisagée si les autoanticorps ont disparu [93] .<br />

Autres GNEC auto-immunes<br />

Le traitement des GNEC liées à des maladies infectieuses<br />

bactériennes est basé sur l’antibiothérapie, bien que des corticoïdes<br />

voire des immunosuppresseurs soient parfois<br />

proposés [13] .<br />

Dans les glomérulopathies prolifératives lupiques classe III et<br />

IV, l’association du cyclophosphamide [191] ou du MMF<br />

[192, 193]<br />

aux corticoïdes semble améliorer le pronostic rénal. Les échanges<br />

plasmatiques semblent en revanche inutiles.<br />

Dans les formes rapidement progressives de glomérulonéphrites<br />

à dépôts d’IgA avec ou sans purpura rhumatoïde, un<br />

traitement corticoïde et immunosuppresseur semble améliorer<br />

l’évolution [194] , bien que le pronostic rénal reste moins bon que<br />

dans les formes avec ANCA, même quand le traitement comporte<br />

des échanges plasmatiques [34] .<br />

■ Conclusion<br />

Un diagnostic étiologique rapide est nécessaire pour éviter<br />

l’installation de lésions rénales irréversibles et pour permettre<br />

un traitement adapté. Dans ce contexte d’urgence, certaines<br />

erreurs peuvent avoir des conséquences dramatiques (état<br />

septique interprété comme une poussée de maladie autoimmune<br />

et traité par des immunosuppresseurs, etc.). La rapidité<br />

de l’intervention thérapeutique et l’étiologie déterminent le<br />

pronostic rénal, mais aussi extrarénal et parfois vital.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Seitz B., Esnault V.L.M. Glomérulonéphrites extracapillaires. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-037-E-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires 18-037-E-10<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

13


Plan<br />

Glomérulopathie extramembraneuse<br />

L. Mercadal<br />

La glomérulopathie extramembraneuse a pour événement initial fondateur la fixation de dépôts immuns<br />

sur le versant externe de la membrane basale glomérulaire. Une cascade d’activation suit cette fixation et<br />

conduit à la genèse de lésions de la membrane basale. De forme idiopathique le plus fréquemment, les<br />

formes secondaires sont nombreuses.À5et10ans, la survie rénale est respectivement de l’ordre de 90 %<br />

et 65 %. Un modèle pronostique basé sur la protéinurie, son niveau et sa durée, la progression de<br />

l’insuffisance rénale sur quelques mois, permet d’affiner le pronostic. L’excrétion urinaire<br />

d’immunoglobuline G (IgG), de C5b-9 et celle de b2-microglobuline sont également de bons facteurs<br />

prédictifs. Le traitement symptomatique peut comprendre anticoagulant en cas de syndrome<br />

néphrotique, inhibiteur de l’enzyme de conversion, antagoniste de l’angiotensine II, statines, traitement<br />

antioxydant et pentoxifylline. Le traitement immunosuppresseur doit être réservé aux patients à fort<br />

risque évolutif. Le traitement corticoïde seul n’a pas d’indication. Le traitement doit comprendre une<br />

association simultanée ou le plus souvent en alternance de corticoïdes et agent alkylant pour une durée<br />

minimale de 6 mois. L’association corticoïdes-mycophénolate mofétil et le traitement par analogue de<br />

synthèse de l’adrenocorticotrophic hormone (ACTH) pourraient avoir la même efficacité. La<br />

ciclosporine et le tacrolimus ont également fait la preuve d’une réduction de protéinurie avec un haut<br />

risque de rechute à leur arrêt. Le traitement par corticoïdes-agent alkylant est le seul à avoir démontré une<br />

amélioration de la progression de l’insuffisance rénale chez les patients ayant déjà une atteinte de la<br />

fonction rénale au moment du traitement. Le rituximab n’a fait l’objet que d’études ouvertes. Sa place<br />

dans l’arsenal thérapeutique reste à définir.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Glomérulopathie extramembraneuse ; Néphrite de Heymann ; Corticoïdes ;<br />

Cyclophosphamide ; Mycophénolate mofétil ; Ciclosporine ; Tacrolimus ; Rituximab<br />

Physiopathologie 1<br />

Étiologies et associations 2<br />

Évolution et facteurs pronostiques 4<br />

Traitement 4<br />

Traitement symptomatique 4<br />

Traitement spécifique de l’hépatite B 5<br />

Traitements immunosuppresseurs 5<br />

Conclusion et perspectives 8<br />

■ Physiopathologie<br />

La glomérulopathie extramembraneuse (GEM) est caractérisée<br />

par des dépôts sur le versant externe de la membrane basale<br />

glomérulaire. La cible antigénique se situe sur le podocyte. La<br />

protéinurie apparaît après la formation des dépôts qui s’associent<br />

à l’aplatissement des podocytes et à leur effacement. Par<br />

la suite, la membrane basale glomérulaire s’épaissit avec<br />

accumulation de matrice extracellulaire [1] .<br />

La néphrite de Heymann constitue le modèle expérimental<br />

chez le rat de la GEM [2] . Dans ce modèle, les cibles antigéniques<br />

identifiées sont la mégaline et le complexe protéique<br />

Néphrologie<br />

18-036-D-10<br />

associé à la mégaline (receptor associated protein [RAP]). La<br />

mégaline est une protéine transmembranaire de plus de 600 kDa<br />

récepteur d’endocytose, fixant de multiples ligands tels que le<br />

calcium, l’apoprotéine E, J, et B 100, le complexe inhibiteur<br />

activateur du plasminogène urinaire, des antibiotiques, la<br />

lactoferrine, l’albumine, le complexe transcobalamine vitamine<br />

B 12, la vitamine D binding protein et possiblement l’insuline [3, 4] .<br />

Elle s’exprime dans le rein dans les puits recouverts de clathrine<br />

sur la surface des podocytes et dans la bordure en brosse des<br />

cellules tubulaires proximales. Elle est également présente dans<br />

les cellules de type II pulmonaires. Elle appartient à la famille<br />

des récepteurs low density lipoprotein (LDL). Le complexe RAP se<br />

lie à la mégaline lors du processus d’endocytose. RAP est<br />

essentiellement présent dans le réticulum endoplasmique des<br />

podocytes [5, 6] . La formation du complexe inhibe la liaison de<br />

la mégaline à ses ligands. Il existe un seul épitope sur RAP, d’une<br />

longueur de 14 acides aminés. L’injection d’un anticorps dirigé<br />

contre cet épitope a permis de reproduire des dépôts de complexes<br />

immuns. De nombreux autres épitopes pathologiques sur la<br />

mégaline sont cependant nécessaires pour la formation in situ de<br />

complexes immuns. Les épitopes de la mégaline sont situés dans<br />

les quatre domaines extracellulaires riches en cystéine. L’ensemble<br />

mégaline et RAP est désigné comme le complexe antigénique<br />

de la néphrite de Heymann.<br />

La néphrite de Heymann peut être induite par l’injection<br />

intraveineuse de mégaline ou de RAP ou de façon passive par<br />

1


18-036-D-10 Glomérulopathie extramembraneuse<br />

l’injection d’anticorps antimégaline et anti-RAP. Dans le modèle<br />

passif, les dépôts sont détectés quelques minutes après l’injection<br />

et la protéinurie apparaît 5à6jours plus tard. Les dépôts<br />

se forment initialement dans les puits recouverts de clathrine<br />

situés à la base du pied des podocytes puis s’étendent sur le<br />

versant externe de la membrane basale glomérulaire. Les<br />

mécanismes de cette extension vers la membrane basale, ellemême<br />

dépourvue de mégaline, ne sont pas connus.<br />

La formation de complexes immuns sur la surface membranaire<br />

des podocytes est responsable d’une activation du complément<br />

et de l’insertion du complexe d’attaque membranaire<br />

C5b-9 dans la membrane podocytaire via le récepteur à la<br />

vitronectine [7] . Ce complexe d’attaque joue un rôle central dans<br />

les lésions podocytaires et dans l’apparition de la protéinurie [8] .<br />

Son rôle a aussi été mis en évidence chez l’homme. Le traitement<br />

par venin de cobra après induction de la néphrite de<br />

Heymann permet de bloquer l’apparition de la protéinurie par<br />

déplétion en complément alors même que les dépôts de complexes<br />

immuns sont présents sur la surface podocytaire. Le<br />

podocyte répond à l’insertion membranaire de C5b-9 par une<br />

endocytose de ce complexe, constituant probablement un<br />

mécanisme de défense cellulaire. Les vésicules d’endocytose<br />

sont larguées dans l’espace urinaire, expliquant la présence de<br />

C5b-9 dans les urines de patients atteints de GEM. À un stade<br />

avancé de la néphrite de Heymann avec protéinuire, des<br />

complexes d’attaque sont retrouvés dans la membrane podocytaire,<br />

ce qui pourrait être la conséquence d’une limitation du<br />

système d’endocytose.<br />

En réponse à l’insertion de C5b-9 dans la membrane podocytaire,<br />

de nombreuses activités enzymatiques sont modifiées dans<br />

la cellule podocytaire. Une cascade d’activation d’oxydation va<br />

conduire à l’apparition de la protéinurie. L’enzyme oxydoréductase<br />

nicotinamide-adénosine-dinucléotide phosphate (NADPH)<br />

est activée et l’effet antioxydant de la glutathion peroxydase et<br />

de la superoxydismutase est diminué. Le traitement par la<br />

vitronectine qui bloque l’insertion de C5b-9 après induction de<br />

la néphrite de Heymann permet de bloquer l’activation de<br />

l’oxydation dans la cellule podocytaire. L’oxydation génère des<br />

radicaux libres. Des capteurs de radicaux libres administrés dans<br />

la néphrite de Heymann permettent eux de diminuer l’intensité<br />

de la protéinurie sans modifier l’intensité des dépôts. Les<br />

radicaux libres engendrent une oxydation lipidique. Les lipides<br />

membranaires ne sont pas ceux qui sont directement oxydés<br />

avec pour preuve l’absence de phosphatidylcholine oxydée dans<br />

la membrane. De larges quantités d’apolipoprotéine E (apoE) et<br />

d’apoB sont, en revanche, retrouvées liées dans les complexes<br />

immuns à la mégaline, récepteur de ces deux apoliprotéines.<br />

Ces apolipoprotéines sont soumises à l’augmentation du<br />

pouvoir oxydant du podocyte. Les produits de l’oxydation<br />

lipidique de ces apolipoprotéines se lient au collagène IV sur le<br />

domaine NC1 riche en résidus cationiques et pourraient être<br />

responsables de la dégradation protéolytique de la membrane<br />

basale. Le probucol qui bloque l’oxydation lipidique réduit de<br />

80 % la protéinurie dans la néphrite de Heymann.<br />

On ne sait encore comment expliquer les modifications de<br />

perméabilité de la membrane basale glomérulaire à la suite de<br />

ces phénomènes. Les modifications de structure du collagène IV<br />

mais aussi l’oxydation des apolipoprotéines peuvent y contribuer.<br />

On ne sait le rôle précis des modifications des protéinases<br />

dans l’augmentation de la perméabilité membranaire.<br />

L’insertion de C5b-9 induit de plus une augmentation de<br />

l’activité de la gélatinase, de la métalloprotéinase 9, du facteur<br />

de croissance des fibroblastes, du système phospholipase C, A 2<br />

et de la protéine kinase C. L’épaississement de la membrane<br />

basale glomérulaire survient secondairement à l’accumulation<br />

des protéines de la matrice extracellulaire. Le transforming growth<br />

factor b (TGFb) pourrait jouer un rôle de médiateur dans cette<br />

accumulation.<br />

La mégaline n’est pas le substrat de la GEM chez l’homme.<br />

Elle n’est pas exprimée sur les podocytes humains. Un travail de<br />

recherche d’un antigène candidat a été mené aux États-Unis en<br />

utilisant le sérum de patients atteints de GEM idiopathique [9] .<br />

Les glycoprotéines glomérulaires humaines purifiées ont été<br />

mises en contact avec le sérum de 37 patients atteints de GEM<br />

idiopathique, de 30 sujets normaux-sains, de 15 patients atteints<br />

de néphropathie diabétique ou de hyalinose segmentaire et<br />

focale, de sept patients atteints d’autres maladies immunologiques<br />

et de huit patients atteints de GEM secondaire (deux<br />

secondaires à un lupus et six à une hépatite B). Il en ressort que<br />

70 % des patients atteints de GEM idiopathique sont porteurs<br />

d’un anticorps dirigé contre une glycoprotéine de 185 kDa<br />

sensible à la réduction, exprimée sur les podocytes humains<br />

normaux [10] . Des anticorps dirigés contre le récepteur de la<br />

phospholipase A 2 (PLA 2R) réagissent avec la même glycoprotéine.<br />

Tous les sérums des patients atteints de GEM et réagissant<br />

contre la glycoprotéine de 185 kDa reconnaissent également ce<br />

récepteur, suggérant qu’il représente effectivement la cible<br />

antigénique de la GEM idiopathique humaine. PLA 2R est un<br />

récepteur transmembranaire appartenant à la famille des<br />

récepteurs mannose (M-type). Il s’exprime à un niveau élevé<br />

dans le rein et principalement sur la membrane des podocytes.<br />

L’anticorps ne reconnaît PLA 2R que dans une conformation<br />

donnée de celui-ci dépendante de ponts disulfures. Cette<br />

conformation pourrait avoir un rôle dans l’exposition de<br />

l’épitope de PLA 2R. Aucun des sérums des autres patients et des<br />

sujets normaux-sains ne reconnaît cette même protéine, y<br />

compris les sérums des patients atteints de GEM secondaire.<br />

En immunofluorescence, les dépôts d’anti-PLA 2R et d’antiimmunoglobuline<br />

G4 (IgG4) sont localisés aux mêmes endroits<br />

formant un fin dépôt granuleux glomérulaire. Aucun complexe<br />

circulant PLA 2R-anticorps, ni aucun PLA 2R libre ne sont détectables<br />

dans le sang des patients atteints de GEM idiopathique.<br />

Les anticorps semblent corrélés à l’activité de la maladie avec<br />

une disparition lors des rémissions et une réapparition lors des<br />

rechutes. Cette découverte pourrait avoir des implications<br />

cliniques. Un kit diagnostique pour l’immunofluorescence avec<br />

un marquage de PLA 2R est attendu.<br />

■ Étiologies et associations<br />

La GEM est le plus souvent idiopathique. Les formes secondaires<br />

sont retrouvées dans 20 % des cas, plus fréquentes chez<br />

l’enfant que chez l’adulte [11] .LeTableau 1 détaille les étiologies<br />

reconnues. Chez l’enfant, les causes infectieuses et le lupus<br />

érythémateux disséminé sont les étiologies les plus fréquentes,<br />

tandis que les causes néoplasiques et médicamenteuses prédominent<br />

en fréquence chez l’adulte.<br />

Les agents infectieux tels que le paludisme, la bilharziose et<br />

l’hépatite B sont probablement les causes les plus fréquentes<br />

dans le monde [12] . En Asie, l’hépatite B est répertoriée comme<br />

l’agent étiologique le plus fréquent [13] . À Taiwan où 20 % de la<br />

population est positif à l’antigène de l’hépatite B (AgHBs), 96 %<br />

des enfants atteints de GEM sont AgHBs positifs [14] . Au Japon<br />

oùlaprévalencen’estquede2%à3%,57%desenfants<br />

atteints de GEM sont AgHBs positif. Aux États-Unis, la prévalence<br />

de l’AgHBs est de 0,3 % dans la population générale et de<br />

20 % chez les enfants atteints de GEM. Dans une population en<br />

contact avec un porteur de l’AgHBs, la fréquence de la protéinurie<br />

augmente par rapport à une population témoin [15] .<br />

Le rôle pathogénique de l’AgHBs est discuté au vu de son<br />

poids moléculaire élevé ne lui permettant pas de franchir la<br />

membrane basale glomérulaire. Il est le plus souvent absent des<br />

dépôts immuns en immunofluorescence. L’antigène HBe, d’un<br />

poids moléculaire de 30 000 Da, est plus probablement l’agent<br />

pathogène. Il est le plus fréquent dans les dépôts extramembraneux<br />

[13] . Dans cette forme étiologique, les patients peuvent<br />

avoir une hypocomplémentémie (27 %à91%despatients). Le<br />

pronostic est relativement favorable avec 8 % d’insuffisance<br />

rénale terminale dans une série d’adultes [16] . Les facteurs de<br />

non-rémission identifiés sont l’âge supérieur à 6 ans, la durée de<br />

la protéinurie supérieure à 12 mois, l’absence de séroconversion<br />

pour l’AgHBe, les stades histologiques II et III. L’interféron alpha<br />

anciennement recommandé pour le traitement de l’hépatite B<br />

n’avait pas d’effet thérapeutique reconnu sur la GEM liée au<br />

virus de l’hépatite B [16] . Des cas de régression de GEM sous<br />

traitement antiviral par lamivudine ont été publiés [17] .<br />

2 Néphrologie


Tableau 1.<br />

Étiologies et pathologies associées à la glomérulopathie<br />

extramembraneuse.<br />

Infections<br />

Hépatite B, hépatite C, syphilis, VIH, bilharziose, lèpre, kyste hydatique,<br />

filaire, paludisme à Plasmodium malariae (fièvre quarte), tuberculose,<br />

glomérulonéphrite post-streptococcique<br />

Médicaments et toxiques<br />

Sels d’or, D-pénicillamine, captopril, probenecid, AINS, anti-Cox2,<br />

clopidogrel, iode radioactive à dose thérapeutique, anticorps<br />

antiendopeptidase neutre, or, mercure, formaldéhyde, hydrocarbures<br />

volatils<br />

Maladies auto-immunes<br />

Lupus érythémateux disséminé, Sjögren, sclérodermie, dermatomyosite,<br />

syndrome des antiphospholipides, polymicroangéite, polyarthrite<br />

rhumatoïde, thyroïdite de Hashimoto, thymome, Basedow, cirrhose<br />

biliaire primitive, cholangite sclérosante, vascularite urticarienne<br />

hypocomplémentémique, purpura thrombocytopénique<br />

Pathologie néoplasique<br />

Carcinomes, lymphome non hodgkinien, plus rarement hodgkinien,<br />

leucémie lymphoïde chronique, syndrome myélodysplasique<br />

Divers<br />

Drépanocytose néonatale sur déficit en endopeptidase neutre<br />

maternelle, sarcoïdose, psoriasis, maladie de Weber-Christian, dermatite<br />

herpétiforme, pemphigoïde bulleux, spondylarthrite ankylosante,<br />

maladie cœliaque, rectocolite ulcérohémorragique, myasthénie,<br />

Guillain-Barré, fibrose rétropéritonéale, sclérose en plaques,<br />

polyradiculonévrite démyélinisante chronique inflammatoire,<br />

polyglobulie secondaire, Recklinghausen, nail patella syndrome<br />

Transplantation<br />

Transplantation rénale, récidive ou de novo, greffe de moelle : maladie<br />

du greffon contre l’hôte<br />

VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; AINS : anti-inflammatoire non<br />

stéroïdien.<br />

Dans la GEM associée à l’infection par le virus de l’immunodéficience<br />

humaine (VIH), un cas de rémission a été publié<br />

après initiation du traitement antirétroviral [18] . Une réponse à<br />

la corticothérapie a également été suggérée dans une<br />

publication [19] .<br />

Le syndrome néphrotique secondaire aux anti-inflammatoires<br />

non stéroïdiens (AINS) est le plus souvent lié à une glomérulopathie<br />

à lésions glomérulaires minimes, mais la survenue de<br />

GEM n’est pas rare [20] . Radford montre que sur 125 patients<br />

atteints de GEM, 29 patients avaient pris des AINS et 13 remplissaient<br />

des critères d’imputabilité du médicament avec<br />

notamment une régression rapide de la protéinurie à l’arrêt de<br />

celui-ci. Toutes les classes d’AINS sont impliquées : diclofénac,<br />

fénoprofène, ibuprofène, flurbiprofène, oxaprozin, sulindac,<br />

nabumétone, naproxène, l’ampiroxicam et tolmetin.<br />

Le mercure est un métal liquide très volatil, même à température<br />

ambiante. Il peut être absorbé par inhalation, ingestion ou à<br />

travers la peau. Sa toxicité est liée à des inactivations enzymatiques<br />

qui engendrent en toxicité aiguë une pneumopathie interstitielle<br />

ou une gastroentérite érosive selon la voie d’intoxication<br />

et une nécrose tubulaire. En intoxication chronique, le mercure<br />

affecte principalement le système nerveux central et le rein par<br />

une atteinte extramembraneuse. Les expositions anciennes<br />

rapportées sont les diurétiques mercuriels, le dentifrice et les<br />

crèmes contenant du mercure contre le psoriasis. Le mercure est<br />

encore utilisé de nos jours dans l’industrie, notamment dans les<br />

batteries, les tubes fluorescents et dans les appareils de<br />

mesure [21] . Des crèmes utilisées pour blanchir la peau contiennent<br />

du mercure jusqu’à 2 000 fois le taux autorisé et ont été<br />

incriminées dans la survenue de GEM [22] .<br />

L’intoxication au formaldéhyde survient dans des habitations<br />

où le formaldéhyde a été utilisé dans des résines d’assemblage<br />

ou anciennement dans l’isolation [23] . L’air en contient habituellement<br />

moins de 0,01 particule par million (ppm) et peut en<br />

Néphrologie<br />

Glomérulopathie extramembraneuse 18-036-D-10<br />

contenir jusqu’à 2 ppm dans des maisons ou mobile homes où<br />

le formaldéhyde a été utilisé. À partir de 0,05 ppm, une forte<br />

odeur est sentie et des signes d’irritation des yeux et des voies<br />

respiratoires peuvent apparaître. L’exposition au formaldéhyde<br />

est aussi responsable d’urticaire, de dermatose et de cancer des<br />

voies oto-rhino-laryngologiques (ORL).<br />

La classe V de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) des<br />

atteintes rénales lupiques fait référence à la GEM. Elle représente<br />

environ 14 % des néphropathies du lupus érythémateux<br />

disséminé (LEAD) si les classes associant une prolifération<br />

cellulaire sont incluses et moins de 10 % sans les formes<br />

prolifératives [24] . L’ancienne classification regroupait les GEM<br />

sans prolifération cellulaire (pure, Va) et les GEM associées à<br />

une prolifération extracapillaire diffuse (Vd). Dans la nouvelle<br />

classification de l’OMS, les sous-classes Vc et Vd ont été<br />

supprimées et réintégrées dans les classes III et IV dont elles<br />

partagent le pronostic. La GEM peut précéder la survenue du<br />

LEAD clinique et l’apparition des facteurs antinucléaires. Des<br />

signes histopathologiques dont l’extension des dépôts immuns<br />

au versant endocapillaire et tubulaire, la nature des dépôts et<br />

l’existence d’une prolifération cellulaire mésangiale à extracapillaire<br />

peuvent faire suspecter cette étiologie [25] . Les dépôts<br />

associent communément de l’IgG, IgM, IgA et du C1q. L’hypocomplémentémie<br />

existe dans 6%à59%descasavec le plus<br />

souvent un taux d’anticorps anti-acide désoxyribonucléique<br />

(ADN) faible, une faible capacité de précipitation de ces<br />

anticorps et peu de complexes immuns circulants [26, 27] .La<br />

littérature fait état d’une survie rénale de l’ordre de 80 %à90%<br />

à 10 ans, l’évolution péjorative pouvant être liée à une évolution<br />

fibrosante comparable à la forme idiopathique ou à une<br />

transformation en forme de néphropathie lupique proliférative<br />

III ou IV.<br />

La vascularite urticarienne hypocomplémentémique se<br />

compliquerait le plus souvent de glomérulopathie mésangioproliférative<br />

mais des cas de GEM ont également été<br />

rapportés [28] .<br />

La thyroïdite de Hashimoto aussi bien que la maladie de<br />

Basedow ont été décrites en association avec une GEM. Des<br />

lésions rénales ont été reproduites chez le lapin en injectant de<br />

la thyroglobuline, avec prolifération des cellules endothéliales et<br />

épaississement de la membrane basale glomérulaire [29] . La<br />

présence de thyroglobuline a été démontrée le long de la<br />

membrane basale glomérulaire chez l’homme au cours de GEM<br />

secondaire à une hyperthyroïdie [30] . Sur une série de<br />

84 patients atteints de thyroïdite auto-immune, 30 avaient un<br />

rapport urinaire protéine/créatinine anormal [31] . Il n’y avait pas<br />

de relation démontrée entre le niveau d’autoanticorps et<br />

l’existence ou non d’une protéinurie dans cette série. Des cas de<br />

GEM après traitement à l’iode radioactive ont également été<br />

rapportés [32] . Weetman recense l’apparition d’une protéinurie<br />

chez neuf des 14 patients atteints de Basedow traités par iode<br />

radioactive et sans protéinurie avant le traitement. Il est possible<br />

que le relargage de thyroglobuline au cours du traitement par<br />

iode radioactive conduise au développement de la GEM.<br />

Les thymomes malins ou les hyperplasies thymiques peuvent<br />

être associés à des pathologies immunitaires variées au premier<br />

rang desquelles vient la myasthénie. La glomérulopathie à<br />

lésions glomérulaires minimes est la pathologie rénale la plus<br />

fréquemment associée mais des GEM ont également été<br />

décrites [33] .<br />

Les patients atteints de polyarthrite rhumatoïde peuvent<br />

développer des GEM induites par les sels d’or, la D pénicillamine,<br />

mais également spontanément. Nakano recense neuf<br />

patients sans traitement avant l’apparition de ce type d’atteinte<br />

rénale [34] .<br />

Des GEM avec atteintes extracapillaires en dehors du LEAD<br />

ont été décrites en association à des anticorps antimembrane<br />

basale glomérulaire ou anticytoplasme des polynucléaires<br />

neutrophiles [35-39] . Chez l’enfant, il est décrit des GEM en<br />

association avec un anticorps antimembrane basale tubulaire.<br />

Cette forme se caractérise par un syndrome de Fanconi complet<br />

ou incomplet et par la possibilité d’atteintes extrarénales telles<br />

qu’hémorragie alvéolaire et atrophie villositaire intestinale [40] .<br />

3


18-036-D-10 Glomérulopathie extramembraneuse<br />

Chez des nouveau-nés de mères porteuses d’un déficit en<br />

endopeptidase neutre, il a été mis en évidence des formes<br />

néonatales de GEM. Les mères étaient porteuses d’anticorps<br />

anti-endopeptidase neutre acquis lors d’une précédente grossesse.<br />

Après passage transplacentaire, ces anticorps étaient<br />

retrouvés fixés aux podocytes des nouveau-nés [41] .<br />

Sur le plan génétique, il existe des cas familiaux [42] , des cas<br />

chez des jumeaux homozygotes [43] et une association à l’antigène<br />

d’histocompatibilité DR3 [44] . En Europe, il a également été<br />

démontré des associations avec HLA B8, B18 et DQW2 et au<br />

Japon avec DR2 et DQW1. Certains patients atteints de GEM<br />

présentent un haplotype rare du facteur properdin B (BfF1)<br />

associé à HLA B18 et DR3 [45] . L’association GEM et diabète<br />

serait liée à la susceptibilité génétique commune de ces deux<br />

maladies. Le polymorphisme du gène TAP1, gène codant pour<br />

une protéine transporteuse impliquée dans la présentation<br />

antigénique est augmenté chez les patients avec GEM. Ce gène<br />

est présent dans la région du complexe majeur d’histocompatibilité<br />

HLA II.<br />

■ Évolution et facteurs<br />

pronostiques<br />

La survie rénale est de l’ordre de 90 %à5anset65%à<br />

10 ans. L’évaluation précise du potentiel évolutif de la maladie<br />

doit permettre au stade initial et au cours de l’évolution<br />

d’apprécier la nécessité de débuter un traitement (évaluation du<br />

rapport bénéfice/risque).<br />

Schieppati a mené une étude prospective sur la GEM réalisée<br />

sur des patients sans traitement [46] . Sur 100 patients atteints de<br />

GEM, la probabilité de survie rénale à 5 ans était de 88 ±5%<br />

età10ansde73±7%.Cette étude incluait 37 patients non<br />

néphrotiques et la moyenne de protéinurie sur la cohorte était<br />

de 5 ± 3,6 g/24 h. Soixante-deux pour cent des femmes et 59 %<br />

des hommes sont en rémission partielle ou complète à 4 ans.<br />

Les seuls facteurs de mauvais pronostic étaient le sexe masculin<br />

et l’âge supérieur à 50 ans. Au moment du diagnostic, la<br />

présence d’un syndrome néphrotique, d’une hypertension<br />

artérielle, le taux de la protéinurie ne sont pas des facteurs<br />

pronostiques.<br />

A-t-on pu affiner le risque évolutif d’un patient se présentant<br />

avec une GEM ? Pei et al. ont tenté de quantifier le risque<br />

évolutif à l’aide d’un modèle utilisant les facteurs pronostiques<br />

les plus importants, à savoir la protéinurie et sa durée, la<br />

clairance de la créatinine et la pente 1/créatininémie en<br />

fonction du temps [47] . Cette étude incluait 184 patients ayant<br />

au diagnostic une fonction rénale normale. Sur une moyenne<br />

de suivi de 5,8 ans, 26 % des patients vont développer une<br />

insuffisance rénale et 26 % vont entrer en rémission. Cinquante<br />

pour cent des patients recevaient des corticoïdes et 26 patients<br />

un immunosuppresseur additionnel. Dans le modèle étudié<br />

pour le pronostic, le traitement immunosuppresseur n’avait pas<br />

d’influence sur l’incidence de l’insuffisance rénale, ni sur le<br />

pourcentage de rémission. La protéinurie sans notion de sa<br />

durée avait peu de valeur prédictive. Une valeur de protéinurie<br />

supérieure à 8 g/24 h pendant plus de 6 mois représente le<br />

risque le plus élevé de développer une insuffisance rénale<br />

chronique avec une probabilité de 66 %. Inversement, une<br />

protéinurie supérieure à 8 g/24 h pour une durée de moins de<br />

6 mois a une valeur prédictive négative d’insuffisance rénale<br />

chronique de 88 %, traduisant la possibilité de rémission<br />

spontanée quel que soit le niveau de protéinurie. Si le patient<br />

est entre 6 et 8 g/24 h, le risque d’insuffisance rénale est de<br />

55 % si la protéinurie perdure depuis 9 mois ou plus.<br />

Ce modèle va bénéficier d’une large validation sur trois<br />

populations originaires du Canada, d’Italie et de Finlande<br />

(363 patients) [48] . Pour prédire l’évolution vers l’insuffisance<br />

rénale chronique (clairance de la créatinine < 60 ml/min), la<br />

probabilité de progression prend la forme :<br />

P = exponentielle Y/(1 + exponentielle Y)<br />

avec Y = [1,26 + (0,3 × taux moyen de protéinurie sur la<br />

période de suivi en g/24 h) – 0,3 × (pente 1/créatinine pendant<br />

.<br />

le suivi en ml/min et par mois) – 0,05 × clairance de la créatinine<br />

à l’entrée dans la période de suivi].<br />

Ce modèle est applicable pour les patients ayant une clairance<br />

supérieure à 60 ml/min au diagnostic. Le modèle permet<br />

d’améliorer la précision (Se × Sp) par rapport à la protéinurie<br />

seule. Par rapport à un critère protéinurie supérieure à 3,5 g/j,<br />

le modèle améliore la spécificité (89 % versus 28 %) mais<br />

diminue la sensibilité (75 % versus 92 %). Par rapport à un<br />

critère de protéinurie supérieure à 8 g/j pendant plus de 6 mois,<br />

le modèle améliore la sensibilité (83 % versus 58 %) mais<br />

diminue la spécificité (86 % versus 93 %).<br />

D’autres facteurs pronostiques ont également été mis en<br />

valeur et confirmés dans une méta-analyse sur 1 248 patients<br />

ayant inclus les études prospectives et rétrospectives [49] .<br />

À noter tout particulièrement l’excrétion d’IgG, de C5b-9 et<br />

celle de b2-microglobuline qui sont attachées à un risque de<br />

progression vers l’insuffisance rénale avec un pouvoir prédictif<br />

élevé. Les recommandations thérapeutiques pourraient se baser<br />

sur ces paramètres avec une indication de traitement immunosuppresseur<br />

chez les patients néphrotiques si l’excrétion urinaire<br />

de b2-microglobuline est supérieure à 0,5 µg/min et d’IgG<br />

supérieure à 250 mg/24 h [50] .<br />

■ Traitement<br />

Traitement symptomatique<br />

Le traitement symptomatique doit être appliqué quel que soit<br />

le niveau de fonction rénale et de protéinurie. Le traitement<br />

immunosuppresseur est recommandé pour les patients ayant un<br />

syndrome néphrotique persistant ou/et une aggravation de<br />

fonction rénale.<br />

Le traitement symptomatique optimal pourrait comprendre :<br />

inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou inhibiteur de<br />

l’angiotensine II ou leur association et inhibiteur de l’hydroxy-<br />

3-méthyl glutaryl coenzyme A réductase (HMGCoA réductase).<br />

Les IEC diminuent l’excrétion protéique dans des essais<br />

prospectifs de l’ordre de 25 % à 50 % chez des patients<br />

néphrotiques [51-54] . Certains patients ne répondent cependant<br />

pas au traitement de façon significative, ce qui pourrait constituer<br />

un facteur pronostique additionnel. Praga et al. retrouvent<br />

ainsi un effet antiprotéinurique allant de 0%à85%parmi<br />

11 patients [55] . La réponse aux IEC pourrait bien être un facteur<br />

pronostique indépendant, non corrélée au degré de protéinurie<br />

ni à l’excrétion de C5b-9. La réduction de protéinurie est un<br />

bon marqueur d’amélioration du pronostic rénal, même si la<br />

démonstration directe d’une amélioration du pronostic de la<br />

GEM par les IEC n’a pas à ce jour été faite.<br />

L’association IEC-inhibiteur de l’angiotensine II a bénéficié<br />

d’essais contrôlés dans les glomérulopathies primitives. Une<br />

méta-analyse de ces essais retrouve un effet additionnel antiprotéinurique<br />

de l’association comparée à l’IEC ou au sartan seul<br />

d’en moyenne – 0,5 g/j [56] . L’effet de l’association de ces<br />

thérapeutiques à l’aliskiren a été étudié chez neuf patients et<br />

semble plus important que l’effet de l’association IEC-sartan,<br />

sous réserve d’une étude à ce jour unique, non contrôlée et de<br />

faible effectif [57] .<br />

L’étude chez l’animal montre que l’hyperlipidémie accélère la<br />

progression de l’insuffisance rénale en induisant l’équivalent de<br />

lésions athéroscléreuses intraglomérulaires et en accélérant les<br />

lésions fibreuses interstitielles. Dans une étude prospective sur<br />

neuf patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique, la<br />

simvastatine comparée au régime seul permet outre une amélioration<br />

du bilan lipidique, une réduction de la protéinurie et une<br />

augmentation d’albuminémie significative (26 à 46 g/l) [58] .<br />

Malgré cela, la progression de l’insuffisance rénale dans le groupe<br />

simvastatine est comparable à celle du groupe avec régime seul.<br />

L’effet du probucol été démontré chez l’animal avec une<br />

réduction de protéinurie pouvant atteindre 85 %. Cet effet passe<br />

par l’inhibition de la lipoperoxydation (LPO) et pourrait bloquer<br />

l’altération de la membrane basale en dépit de la formation de<br />

complexes immuns à sa surface. Cet effet a également été<br />

retrouvé chez l’homme sur 15 patients néphrotiques résistants<br />

à un traitement immunosuppresseur (n = 7) et sous IEC (n = 12)<br />

4 Néphrologie


à raison de 1 g/j sur 3 mois [59] . Un ensemble de traitements<br />

antioxydants, dans le même but d’inhibition de l’effet de<br />

peroxydation lipidique, est en cours d’évaluation. Ce traitement<br />

peut comprendre vitamine C 1 200 mg/j (à adapter à la fonction<br />

rénale), a-tocophérol 600 UI/j, b-carotène 6 mg/j, sélénium<br />

60 µg/j, N-acétylcystéine 200 mg/j. Ce traitement utilisé chez<br />

une patiente sévèrement néphrotique résistante au traitement<br />

immunosuppresseur a permis une réduction des produits de<br />

peroxydation lipidique avec réduction urinaire du complexe<br />

d’attaque C5b-9 et une diminution parallèle de la<br />

protéinurie [60] .<br />

Les patients atteints de GEM ont un risque thrombotique<br />

élevé. Le taux de thrombose des veines rénales des patients<br />

néphrotiques est évalué en moyenne à 35 % (5 %à60%selon<br />

les études) pour les thromboses des veines rénales et entre 8 %<br />

et 44 % pour les événements thrombotiques d’une autre<br />

localisation [61] . Cela revient à une incidence mensuelle de<br />

thrombose clinique de 0,5 % pour les thromboses des veines<br />

rénales et 1 % pour les thromboses d’un autre site. Ces événements<br />

sont encore plus fréquents en cas de GEM et d’hypoalbuminémie<br />

sévère (< 20 g/l). La probabilité d’une embolie<br />

pulmonaire en cas de thrombose veineuse profonde non traitée<br />

est de l’ordre de 50 %. L’embolie pulmonaire est source d’un<br />

taux élevé de mortalité. D’un autre côté, le traitement anticoagulant<br />

induit un risque hémorragique lié à l’intensité du<br />

traitement et à des facteurs de risque :<br />

âge supérieur à 65 ans ;<br />

antécédent d’hémorragie intestinale ou d’une autre origine ;<br />

facteurs de comorbidité sévères tels qu’infarctus du myocarde<br />

récent, insuffisance rénale, maladie hépatique, cancer ;<br />

fibrillation supraventriculaire.<br />

Le syndrome néphrotique induit une variabilité plus grande<br />

d’efficacité liée à la variabilité de la fixation protéique. Au total,<br />

l’incidence d’événements hémorragiques chez les patients avec<br />

un ou deux facteurs de risque est de l’ordre de 0,25 % par mois<br />

ou 3 % par an. Ce risque s’élève à 17 % par an pour les patients<br />

avec plus de trois facteurs de risque. En analyse de décision, le<br />

traitement anticoagulant prophylactique se justifie chez les<br />

patients néphrotiques d’autant qu’ils sont atteints de GEM et<br />

qu’ils ne présentent pas plus de deux facteurs de risque de<br />

saignement. En effet, le nombre d’embolies pulmonaires fatales<br />

prévenues par un traitement anticoagulant prophylactique<br />

avant tout événement thrombotique est supérieur au nombre<br />

d’hémorragies induites par ce même traitement chez ces<br />

patients.<br />

La pentoxifylline (Torental ® ) réduit la synthèse de tumor<br />

necrosis factor-alpha (TNF-a). Elle a été testée dans une étude<br />

ouverte à raison de 1 200 mg/j sur 10 patients atteints de GEM<br />

néphrotiques, naïfs de tout traitement et avec une durée<br />

d’atteinte rénale allant de 7à46mois [62] . À 6 mois de traitement,<br />

quatre sont en rémission partielle du syndrome néphrotique<br />

et cinq en rémission complète. Le traitement a peu<br />

d’effets secondaires et pourrait être conseillé, même à ce niveau<br />

de preuve (recommandation rang C).<br />

Traitement spécifique de l’hépatite B<br />

L’évolution de patients avec GEM néphrotique secondaire à<br />

l’hépatite B a été comparée entre une cohorte historique sans<br />

traitement spécifique de l’hépatite B et une cohorte sous<br />

lamivudine [63] . La lamivudine est associée à une réduction de<br />

41 % du risque de progression vers la dialyse à 3 ans.<br />

Traitements immunosuppresseurs<br />

Corticoïdes et agents alkylants (chlorambucil,<br />

cyclophosphamide)<br />

Trois méta-analyses permettent d’assurer des recommandations<br />

de bonne qualité (rang A) [64-66] . Dans la méta-analyse de<br />

Hogan, sept études prospectives (dont six randomisées mais<br />

aucune contre placebo) ont été incluses. Cinq comparaient les<br />

corticoïdes à l’absence de traitement immunosuppresseur et<br />

trois comparaient une combinaison de corticoïdes et agent<br />

alkylant à l’absence de traitement immunosuppresseur. Ces<br />

Néphrologie<br />

Glomérulopathie extramembraneuse 18-036-D-10<br />

études n’incluaient que des patients néphrotiques. Une analyse<br />

complémentaire incluait trois études ne comprenant pas de<br />

groupe sans traitement ou comparant un traitement autre qu’un<br />

agent alkylant et une dernière analyse incluait à ces dix études,<br />

22 séries rétrospectives décrivant l’évolution sans traitement,<br />

sous corticoïdes ou sous agent alkylant. Trente trois études ont<br />

été exclues soit parce qu’elles ne distinguaient pas l’évolution<br />

suivant le type de traitement, soit parce qu’elles s’intéressaient<br />

uniquement aux rémissions ou aux rechutes. Sur l’ensemble de<br />

ces études, 78 % des patients étaient néphrotiques. Sur l’ensemble<br />

de la cohorte de 1 189 patients, la survie rénale est de 0,86<br />

à 5 ans, 0,65 à 10 ans et 0,59 à 15 ans. La survie à 5 ans sur les<br />

sept études prospectives était identique. À 5 ans, sur ces mêmes<br />

études, la survie rénale sans traitement ou sous corticoïdes était<br />

de 0,80 et la survie sous agent alkylant de 0,99. Cette différence<br />

n’atteignait cependant pas le seuil de significativité. L’analyse<br />

est similaire sur l’ensemble des 32 études. La chance de rémission<br />

est plus importante avec le traitement alkylant comparé à<br />

l’absence de traitement sur les études prospectives et non<br />

modifiée par le traitement par corticoïdes.<br />

Les conclusions principales de cette étude sont donc : un<br />

pronostic rénal mis en jeu sur une période longue (supérieure<br />

à 10 ans), un défaut d’effet bénéfique rénal des corticoïdes seuls<br />

(survie rénale et rémission du syndrome néphrotique), un effet<br />

bénéfique des agents alkylants sur la rémission du syndrome<br />

néphrotique sur une durée de 24 à 36 mois après le début du<br />

traitement et sans effet significatif sur la survie rénale.<br />

Imperiale et al. [65] ont publié des résultats identiques dans une<br />

méta-analyse sur cinq études prospectives randomisées sur la<br />

combinaison corticoïdes-agent alkylant, soit un total de<br />

228 patients : les agents alkylants augmentent la probabilité<br />

d’une rémission complète d’un facteur 4,6 (RR 2,2-9,3) et d’une<br />

réponse en termes de diminution de protéinurie de 2,3 (RR 1,7-<br />

3,2) sans effet qui puisse être démontré sur la préservation de la<br />

fonction rénale.<br />

L’analyse de Cochrane [66] , la plus récente, effectuée sur<br />

1 025 patients provenant d’études randomisées ou quasi<br />

randomisées conclut que le traitement par agent alkylantcorticoïdes<br />

a 2,37 fois plus de chance de mettre les patients en<br />

rémission complète mais sans effet sur le critère combiné<br />

rémission partielle plus complète et sans effet démontré sur la<br />

survie rénale. Ceci peut être lié au nombre élevé de rechutes.<br />

À noter que les méta-analyses n’ont pas différencié les<br />

traitements comprenant du chlorambucil ou du cyclophosphamide.<br />

Ponticelli et al. montrent une efficacité comparable dans<br />

une étude prospective randomisée sur 97 patients traités en<br />

cures mensuelles alternées sur 6 mois corticoïdes/agent alkylant<br />

(chlorambucil ou cyclophosphamide) [67] . L’analyse de Cochrane<br />

retrouve moins d’effet secondaire avec le cyclophosphamide [66] .<br />

En dessous du niveau de preuve de ces trois méta-analyses,<br />

apparaît un faisceau de présomption en faveur d’une préservation<br />

de la fonction rénale par les protocoles avec agent alkylant.<br />

Le premier argument vient de l’équipe de Ponticelli promotrice<br />

de ces traitements alternés sur un suivi de 10 ans de patients<br />

néphrotiques sans insuffisance rénale au moment du traitement<br />

(critère exact créatininémie < 150 µmol/l) [68] . Sur 81 patients<br />

randomisés traitement immunosuppresseur ou traitement<br />

symptomatique, la probabilité d’être en vie sans dialyse à 10 ans<br />

était de 0,92 pour les patients sous immunosuppresseurs contre<br />

0,60 chez les patients sous traitement symptomatique, différence<br />

significative (p = 0,0038).<br />

Le second argument vient d’études rétrospectives ayant inclus<br />

des patients avec altération de la fonction rénale. Reichert et al.<br />

mentionnent une régression de créatininémie de 260 à<br />

186 µmol/l sur 10 patients, significative après 6 mois de<br />

traitement avec un effet qui semble perdurer jusqu’à 18 mois<br />

pour disparaître à3ans [69] . Branten et al. retrouvent un effet<br />

similaire sous cyclophosphamide per os pendant 1 an avec une<br />

régression d’insuffisance rénale de 38 % en médiane sur<br />

39 patients (créatininémie moyenne initiale 226 ± 108 µmol/l),<br />

amélioration persistante à 36 mois sur 18 patients suivis<br />

pendant cette période [70-72] . Environ 40 % des patients bénéficient<br />

du traitement avec une progression vers l’insuffisance<br />

rénale chronique terminale (IRCT) qui est retardée d’environ 2,5<br />

5


18-036-D-10 Glomérulopathie extramembraneuse<br />

à 3 ans. De même, Torres et al. notent dans une étude rétrospective<br />

sur 39 patients avec atteinte de la fonction rénale,<br />

20 sous traitement symptomatique et 19 sous traitement<br />

immunosuppresseur alterné, une probabilité de survie rénale à<br />

4 ans sans dialyse de 55 % pour les patients sans immunosuppresseur<br />

contre 90 % avec immunosuppresseur [73] . Les facteurs<br />

de gravité au moment de la biopsie et à l’apparition de l’insuffisance<br />

rénale étaient comparables dans les deux groupes.<br />

Enfin sur deux études rétrospectives publiées après les métaanalyses<br />

chez des patients sans insuffisance rénale, les résultats<br />

sont mitigés avec une réduction d’insuffisance rénale terminale<br />

évaluée sur de petits groupes de patients, significative dans<br />

l’étude de Polenakovik et al. [74] et non significative dans celle<br />

de Stirling et al. [75] , ne permettant pas de contredire les<br />

données des méta-analyses.<br />

Azathioprine<br />

Deux études anciennes contrôlées n’ont retrouvé aucun<br />

bénéfice au traitement par azathioprine en combinaison avec les<br />

corticoïdes [76, 77] . Les études plus récentes sont rétrospectives.<br />

Ahuja et al. ne retrouvent aucun effet favorable de l’association<br />

azathioprine-corticoïdes sur 38 patients contre 20 patients<br />

contrôles sans traitement immunosuppresseur [78] . Seule l’étude<br />

de Brown et al. montre un bénéfice à cette association chez des<br />

patients néphrotiques avec insuffisance rénale avec une régression<br />

de l’atteinte rénale et une diminution de protéinurie [79] .<br />

L’ensemble de ces études est cependant en défaveur de l’utilisation<br />

de l’azathioprine.<br />

Mycophénolate mofétil (MMF)<br />

Le MMF inhibe de façon spécifique la voie de synthèse de<br />

novo des bases purines en épargnant la voie de sauvetage. Cette<br />

inhibition spécifique permet dans une certaine mesure une<br />

action plus spécifique sur les lignées lymphocytaires qui<br />

utilisent préférentiellement cette voie de synthèse, les autres<br />

lignées pouvant avoir recours à la voie de sauvetage. Le MMF a<br />

une action antiproliférative sur les lymphocytes avec une<br />

réponse diminuée en présence de mitogène et diminue la<br />

réponse humorale des lymphocytes B.<br />

Dans le modèle murin de la néphrite de Heymann, l’administration<br />

de MMF 4 semaines suivant l’injection d’antigènes<br />

prévient l’apparition de la protéinurie, la formation des dépôts<br />

glomérulaires et l’infiltrat interstitiel [80] . Le MMF donné<br />

4 semaines après l’injection d’antigènes est par contre inefficace.<br />

Les premières études ouvertes ont suggéré un effet bénéfique<br />

[81, 82] . Deux études randomisées suggèrent un effet comparable<br />

de l’association corticoïdes + MMF et du protocole<br />

« Ponticelli » [83, 84] . La dose de MMF employée était de 2 g/j<br />

pendant 6 mois associée à 0,5 mg/kg/j de corticoïdes 8 à<br />

12 semaines. Une étude contrôlée versus traitement symptomatique<br />

n’a en revanche pas retrouvé d’effet bénéfique du MMF<br />

(2 g/j pendant 12 mois) prescrit seul [85] . Le MMF a pour<br />

principal avantage par rapport aux agents alkylants, l’absence<br />

d’effet gonadique.<br />

Fludarabine<br />

La fludarabine est un analogue nucléosidique des bases<br />

purines qui a également une action plus spécifique sur les<br />

lymphocytes. Boumpas et al. rapportent sept patients atteints de<br />

GEM néphrotiques résistant à un traitement par corticoïdes seul<br />

ou avec agent alkylant ou ciclosporine, traités pendant 6 mois<br />

par cures mensuelles de fludarabine [86] . La réduction de<br />

protéinurie est supérieure à 50 % chez cinq patients sur sept et<br />

non significative sur la cohorte. La fonction rénale reste en<br />

moyenne stable sur les 6 mois. Il n’y a pas d’étude de suivi à<br />

plus long terme. Aucune recommandation ne peut découler de<br />

cette étude unique.<br />

Analogue de l’ACTH (Synacthène ® )<br />

Deux études ouvertes ont suggéré un effet bénéfique de<br />

l’analogue de l’ACTH [87, 88] . La première étude ouverte a inclus<br />

14 patients atteints de GEM, néphrotiques antérieurement<br />

traités par protocole de Ponticelli pour quatre patients, corticoïdes<br />

seuls pour sept patients et pas de traitement pour trois<br />

patients. Les patients recevaient à dose croissante trois injections<br />

d’ACTH 1 mg pendant 8 semaines puis cinq patients ont<br />

poursuivi un protocole de 1 an à raison de deux injections de<br />

1 mg/semaine. Le LDL, l’apoB, les triglycérides diminuaient<br />

significativement, effet connu du Synacthène ® de même que la<br />

protéinurie (réduction médiane de 80 %) et la créatininémie<br />

(réduction médiane de 28 %) à 8 semaines. Douze patients sur<br />

14 étaient mis en rémission partielle du syndrome néphrotique.<br />

La réduction de protéinurie et de créatininémie était maintenue<br />

à 30 mois pour les cinq patients ayant poursuivi le traitement<br />

sur 1 an. Une nouvelle augmentation de créatininémie et de<br />

protéinurie était constatée le mois suivant l’arrêt du traitement<br />

pour les patients traités sur 8 semaines.<br />

Une étude randomisée contre protocole Ponticelli est disponible<br />

et démontre une équivalence de résultats en termes de<br />

mise en rémission (partielle ou complète) et de réduction de<br />

protéinurie entre les deux thérapeutiques [89] . La dose de 1 mg<br />

deux fois par semaine d’ACTH a été retenue et maintenue 1 an.<br />

L’avantage de l’ACTH est l’absence d’effet gonadique et l’amélioration<br />

du bilan lipidique. Un suivi à long terme est nécessaire<br />

pour évaluer les rechutes et l’effet sur la préservation de la<br />

fonction rénale.<br />

Une étude de la Mayo Clinic est en cours, randomisée selon<br />

plusieurs dosages d’ACTH 40 ou 80 UI en sous-cutané une à<br />

trois fois par semaine (NTC00805756).<br />

Ciclosporine et tacrolimus<br />

Une étude randomisée contre placebo a porté sur 51 patients<br />

traités par corticoïdes 0,15 mg/kg/j plus ciclosporine 3,5 mg/<br />

kg/j ou corticoïdes même dose plus placebo [90] . Soixantequinze<br />

pour cent des patients (21/28) sous ciclosporine ont eu<br />

une rémission partielle ou complète sans progression de la<br />

fonction rénale contre 22 % dans le groupe placebo. Malgré un<br />

taux élevé de rechute, le pourcentage de rémission à la fin du<br />

suivi de 78 semaines est resté différent entre les groupes (39 %<br />

versus 13 %). Le doublement de la créatinine sur cette même<br />

période était similaire dans les deux groupes (7 % versus 9 %).<br />

La première étude effectuée par la même équipe avait retrouvé<br />

sur 17 patients une amélioration du rythme de progression de<br />

la fonction rénale (–2,05 versus –0,73 ml/min/mois) [91] , fait<br />

non confirmé dans l’étude publiée en 2001.<br />

Une étude randomisée a comparé ciclosporine seule à l’association<br />

ciclosporine plus corticoïdes sur 51 patients néphrotiques<br />

[92] . Les résultats initiaux sont comparables mais le nombre<br />

de rechutes est plus élevé dans le groupe ciclosporine seule.<br />

Quel que soit le groupe, les patients avec rechute avaient un<br />

taux résiduel de ciclosporine plus faible comparés aux patients<br />

sans rechute (72 ± 48 ng/ml versus 194 ± 80 ng/ml).<br />

Une étude tacrolimus seul versus traitement symptomatique<br />

montre une probabilité de rémission de 94 %à18mois versus<br />

35 % dans le groupe contrôle. Le taux de rechute après 18 mois<br />

reste élevé à 50 %, similaire à celui retrouvé sous ciclosporine<br />

[93] . Une étude ouverte a associé tacrolimus et stéroïdes<br />

chez 21 patients pendant 12 mois [94] . Le MMF était ajouté si la<br />

protéinurie était supérieure à 1 g/j à 3 mois. Le taux de rémission<br />

est de 71 % et le taux de rechute est faible avec un taux<br />

de rémission stable (73 %) après une médiane de 23 mois<br />

d’arrêt de traitement.<br />

Il ressort de ces études que la ciclosporine, le tacrolimus et le<br />

MMF doivent être associés aux stéroïdes à la phase initiale du<br />

traitement et que la durée du traitement doit probablement être<br />

longue pour éviter les rechutes.<br />

Rituximab<br />

Le rituximab est un anticorps monoclonal dirigé contre<br />

l’antigène CD20 présent à la surface des lymphocytes B.<br />

Seules des études ouvertes, non contrôlées sont disponibles à<br />

ce jour. Un essai inaugural sur huit patients a testé le rituximab<br />

chez des patients néphrotiques avec clairance de la créatinine<br />

supérieure à 20 ml/min. Ces patients étaient sans rémission<br />

depuis une moyenne de 29 mois, sous IEC pleine dose et statine<br />

sans traitement immunosuppresseur antérieur. Ils ont reçu au<br />

total quatre perfusions hebdomadaires de 375 mg/m 2 de<br />

rituximab. Sur une durée de 20 semaines, deux patients ont<br />

6 Néphrologie


Non néphrotique et fonction rénale<br />

normale : surveillance<br />

Patients atteints de GEM idiopathique<br />

Traitement symptomatique dans<br />

tous les cas comprenant IEC ou/et sartan<br />

ou/et inhibiteur de la rénine et statines<br />

Traitement anticoagulant<br />

suivant l’analyse de risque<br />

Altération de la fonction rénale<br />

quelle que soit la protéinurie<br />

Traitement immunosuppresseur :<br />

cures mensuelles alternées corticoïdes-alkylant<br />

ou corticoïdes-MMF<br />

ou analogue ACTH<br />

atteint une rémission complète et trois une rémission partielle<br />

(protéinurie inférieure à 3,5 g/24 h). À la fin de l’étude, la<br />

protéinurie avait diminué de 62 %. Sur une étude complémentaire<br />

à 1 an, la protéinurie était inférieure à 0,5 g/24 h chez<br />

deux patients et inférieure à 3,5 g/24 h chez trois patients [95] .<br />

Le suivi de ces mêmes patients a montré la persistance d’un<br />

bénéfice à 12 mois avec une réduction persistante de 66 % de<br />

la protéinurie par rapport à l’état basal. La fonction rénale est<br />

restée stable pendant cette même période sans analyse de<br />

progression avant et après traitement.<br />

Le protocole d’administration du rituximab tend à évoluer<br />

avec une réduction des doses administrées [96, 97] . Dans l’étude<br />

de Fervenza et al., les patients ont reçu initialement 375 mg/m 2<br />

à j1 et j15 puis à 6 mois en cas de protéinurie supérieure à3g/j<br />

et des CD19+ supérieurs à 15 cellules/µl. La rémission complète<br />

et partielle est observée respectivement chez deux et huit<br />

patients sur 15 avec une réduction moyenne de protéinurie de<br />

48 %. Dans l’étude de Cravedi et al., les patients reçoivent<br />

375 mg/m 2 avec un suivi des cellules CD19+ circulantes. Une<br />

seconde injection n’est réalisée que si le taux de CD19+ circulant<br />

est supérieur à 5 cellules /mm 3 . Seul un patient sur 12 a<br />

reçu une deuxième dose. L’évolution est comparable à celle de<br />

la cohorte historique de la même équipe ayant reçu quatre<br />

doses avec un pourcentage de rémission complète de 17 % et<br />

partielle de 50 %.<br />

Une étude s’est attachée aux patients dépendants de la<br />

ciclosporine [98] . Le rituximab a permis une décroissance de la<br />

protéinurie de 2,5 g/j à 0,8 g/j avec un arrêt de la ciclosporine<br />

chez tous les patients. Trois patients sur 13 ont eu une récidive<br />

de syndrome néphrotique à 19, 23 et 18 mois de la perfusion<br />

de rituximab. Ces trois patients ont reçu un second traitement<br />

par rituximab. À 30 mois, tous les patients sont en rémission<br />

(partielle ou complète).<br />

Deux études sont actuellement en cours, l’une de la Mayo<br />

Clinic, ouverte, non randomisée de phase II/III (NTC00405340),<br />

l’autre du National Institute of Health américain également<br />

ouverte et non randomisée mais associant rituximab et ciclosporine<br />

(NCT 00977977). Une étude française devrait démarrer.<br />

Immunoglobuline<br />

Néphrotique sans altération<br />

de la fonction rénale<br />

Traitement immunosuppresseur si :<br />

- pas de rémission sur 6 mois<br />

- ou/et b2-microglobuline urinaire > 0,5 mg/min<br />

- ou/et IgG urinaire > 250 mg/24 h<br />

Cures mensuelles alternées corticoïdes-alkylant<br />

ou corticoïdes-MMF<br />

ou analogue ACTH<br />

ou ciclosporine-corticoïdes<br />

Résistance au traitement : discuter rituximab<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Schéma thérapeutique. GEM : glomérulopathie extramembraneuse ; IEC : inhibiteur de l’enzyme de conversion ;<br />

MMF : mycophénolate mofétil ; ACTH : adrenocorticotrophic hormone ; IgG : immunoglobuline G.<br />

Néphrologie<br />

Une équipe japonaise rapporte son expérience sur 86 patients<br />

atteints de GEM suivis au moins 5 ans dont 30 ont été traités<br />

par immunoglobulines de façon ouverte [99] . Le traitement<br />

comprenait une à trois cures d’immunoglobulines à raison de<br />

100 à 150 mg/kg/j pendant 6 jours. Il y avait respectivement<br />

68 % et 70 % de patients néphrotiques dans le groupe Ig versus<br />

sans. La créatininémie était inférieure à 1,5 mg/dl dans la<br />

majorité des cas dans les deux groupes. Dans le groupe n’ayant<br />

pas reçu d’Ig, 39 % des patients ont reçu des corticoïdes plus<br />

agent alkylant et 30 % des corticoïdes seuls. L’analyse de survie<br />

par Kaplan Meir à 15 ans ne donne aucun bénéfice en termes<br />

d’allongement de survie rénale (18 % de décès rénal dans le<br />

groupe Ig versus 10 % dans le groupe contrôle).<br />

Traitement spécifique de la GEM lupique<br />

Les formes de GEM avec prolifération partagent le pronostic<br />

des classes III et IV auxquelles elles se rattachent dans la<br />

nouvelle classification. Le traitement est celui des formes<br />

prolifératives endo- et extracapillaires. Les formes pures ou avec<br />

prolifération mésangiale (Va et Vb) partagent le pronostic des<br />

GEM idiopathiques. Leur traitement reste débattu mais un<br />

consensus émerge vers une prise en charge des formes néphrotiques<br />

par une association de traitements immunosuppresseurs,<br />

de type stéroïdes plus azathioprine, MMF ou ciclosporine ou par<br />

protocole de type Ponticelli [100] .<br />

Recommandations traitement<br />

immunosuppresseur (Fig. 1)<br />

Glomérulopathie extramembraneuse 18-036-D-10<br />

Les corticoïdes ne doivent pas être employés seuls dans le<br />

traitement de la GEM.<br />

Le traitement avec agent alkylant induit des rémissions<br />

prolongées. Ce traitement doit être réservé aux patients à haut<br />

risque de progression vers l’insuffisance rénale. Le traitement<br />

immunosuppresseur est indiqué chez les patients avec insuffisance<br />

rénale, et chez les patients néphrotiques, ce d’autant<br />

que l’excrétion urinaire de b2-microglobuline est supérieure<br />

à 0,5 µg/min et d’IgG au-dessus de 250 mg/j.<br />

7


.<br />

18-036-D-10 Glomérulopathie extramembraneuse<br />

La place des autres thérapeutiques – analogues de l’ACTH ou<br />

MMF, ciclosporine, tacrolimus de préférence en association aux<br />

stéroïdes et rituximab – reste à définir. L’analogue de l’ACTH et<br />

le MMF plus stéroïdes ont bénéficié d’études contrôlées versus<br />

protocole de Ponticelli et offrent une efficacité similaire avec un<br />

profil d’innocuité supérieur. La ciclosporine et le tacrolimus<br />

n’ont pas bénéficié d’études contrôlées et souffrent de l’effet<br />

néphrotoxique de ces molécules à long terme. Le taux de<br />

rechute est élevé à leur arrêt, amélioré par l’association aux<br />

stéroïdes. Le rituximab n’a également pas bénéficié d’études<br />

contrôlées et pourrait avoir un effet additionnel dans les formes<br />

résistantes ou dépendantes. Enfin, seuls les traitements par<br />

agent alkylant et stéroïdes en alternance de type protocole de<br />

Ponticelli ont bénéficié d’un suivi à long terme démontrant leur<br />

effet sur la préservation de la fonction rénale.<br />

■ Conclusion et perspectives<br />

La physiopathologie de la GEM débute par une liaison<br />

antigène/anticorps sur la membrane podocytaire responsable<br />

d’une cascade d’activation qui aboutit à l’augmentation de la<br />

perméabilité membranaire. L’antigène animal, la mégaline, était<br />

connu voilà une décennie et l’antigène humain vient d’être<br />

découvert. Il s’agit du récepteur de la phospholipase A 2 dont le<br />

rôle physiopathologique est encore à définir. Cet antigène<br />

semble spécifique de la GEM idiopathique. Cette découverte<br />

permet d’espérer un diagnostic plus formel de GEM idiopathique<br />

via l’immunofluorescence de l’histologie rénale.<br />

De nouvelles perspectives s’ouvrent également en thérapeutique<br />

avec des essais en cours comparant des associations<br />

d’immunosuppresseurs, ou avec l’analogue de l’ACTH et dernièrement<br />

avec le rituximab.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Mercadal L. Glomérulopathie extramembraneuse. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie,<br />

18-036-D-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Hémospermies<br />

A. Houlgatte, X. Game, X. Durand<br />

La présence de sang dans le sperme caractérisant l’hémospermie constitue, par l’angoisse qu’elle<br />

entraîne, un motif fréquent de consultation. Le plus souvent sans gravité, elle justifie rarement d’un bilan<br />

spécifique. Son caractère récidivant ou son importance peuvent cependant conduire à proposer un bilan<br />

étiologique exhaustif permettant l’analyse des différentes pathologies en cause.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Hémospermie ; Vésicules séminales ; Prostate<br />

Introduction 1<br />

Clinique 1<br />

Bilan paraclinique 1<br />

Examens paracliniques 1<br />

Imagerie 2<br />

Fibroscopie 3<br />

Étiologie 3<br />

Hémospermie et affections tumorales 3<br />

Hémospermie et maladies infectieuses ou inflammatoires 3<br />

Hémospermie et anomalies vasculaires 3<br />

Hémospermie et maladies de système 3<br />

Hémospermie et affection kystique 4<br />

Hémospermie iatrogène 4<br />

Traitement 4<br />

Conclusion 4<br />

■ Introduction<br />

La présence de sang dans le sperme représente en général un<br />

motif d’inquiétude, tant pour le patient que pour sa partenaire,<br />

bien que son origine soit le plus souvent bénigne. Sa persistance<br />

justifie néanmoins la réalisation d’un bilan étiologique où les<br />

données cliniques s’associent à celles d’une imagerie actuellement<br />

plus performante. S’il existe de nombreuses causes<br />

bénignes d’hémospermie, la recherche d’une affection maligne<br />

sous-jacente peut néanmoins constituer une préoccupation. Il<br />

faut également prendre en compte son origine parfois simplement<br />

iatrogène avant d’envisager d’entreprendre un bilan plus<br />

approfondi.<br />

■ Clinique<br />

L’interrogatoire retient les circonstances de survenue de cette<br />

hémospermie ainsi que le caractère accidentel à opposer aux<br />

Urologie<br />

épisodes répétitifs. La notion d’examen urogénital récent, de<br />

biopsies de la prostate, voire de radiothérapie est précisée,<br />

pouvant ainsi orienter vers une cause iatrogène. Les antécédents<br />

infectieux récents sont retenus, de même que la notion de<br />

séjour récent à l’étranger ou de rapports sexuels non protégés.<br />

La prise de traitement anticoagulant ou antiagrégant plaquettaire<br />

de même que l’association à d’autres saignements, en<br />

particulier une hématurie, sont également notées.<br />

L’examen clinique est locorégional mais également général à<br />

la recherche d’un facteur favorisant. L’examen urogénital<br />

intéresse les organes génitaux externes à la recherche essentiellement<br />

d’une atteinte épididymaire, qu’il s’agisse de nodules<br />

kystiques ou d’une pathologie infectieuse. L’examen du méat<br />

urétral recherche une lésion susceptible d’expliquer cette<br />

hémospermie. Le toucher rectal est systématique à la recherche<br />

d’une tumeur prostatique, de même qu’il évalue les vésicules<br />

séminales. Il demeure néanmoins insuffisant pour affirmer<br />

l’origine de ces hémospermies.<br />

■ Bilan paraclinique<br />

Examens paracliniques<br />

18-602-A-10<br />

Ils ont pour but, en particulier chez le sujet jeune, d’éliminer<br />

les maladies infectieuses en s’orientant notamment vers la<br />

recherche de maladies sexuellement transmissibles. Les prélèvements<br />

urétraux sont réalisés dans le but d’isoler les germes<br />

banals. Un examen cytobactériologique des urines ainsi qu’une<br />

spermoculture sont également demandés. Pour la recherche de<br />

Chlamydia trachomatis, lapolymerase chain reaction (PCR) sur le<br />

premier jet d’urine est actuellement l’examen de référence. La<br />

culture s’avère difficile, le sérodiagnostic peu sensible et peu<br />

spécifique. La mise en évidence de Mycoplasma genitalium ne<br />

relève également que de la PCR.<br />

La notion d’exposition spécifique conduit à rechercher la<br />

présence de bacilles de Koch (BK) ou d’œufs de bilharziose dans<br />

les urines ou dans le sperme.<br />

Lorsque le contexte général conduit à évoquer certaines<br />

causes systémiques, un bilan d’hémostase ainsi qu’un bilan<br />

1


18-602-A-10 Hémospermies<br />

Négative : suivi<br />

périodique<br />

hépatique sont réalisés. Dans ce contexte, il est également<br />

souhaitable de réaliser, chez un patient de plus de 50 ans, un<br />

dosage de prostate specific antigen (PSA), tel que le recommande<br />

l’Association française d’urologie.<br />

Imagerie (Fig. 1)<br />

Hémospermie<br />

Échographie endorectale<br />

Positive<br />

ou hémospermie persistante :<br />

IRM endorectale<br />

+/- fibroscopie<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Imagerie dans la prise en charge de l’hémospermie.<br />

IRM : imagerie par résonance magnétique.<br />

Elle constitue une étape essentielle dans la démarche diagnostique,<br />

permettant actuellement une orientation étiologique<br />

plus précise. L’intégration plus récente de l’imagerie par<br />

résonance magnétique (IRM) constitue un complément pour les<br />

hémospermies chroniques, apportant une plus grande précision<br />

d’imagerie (Tableau 1). Sur une série de 121 cas d’hémospermie,<br />

l’imagerie permet pour Papp un diagnostic étiologique dans<br />

85 % des cas [1] . L’échographie endorectale constitue l’examen<br />

le plus simple, non invasif et efficace. L’utilisation de sondes<br />

biplans à haute fréquence 7 MHz rend cette exploration plus<br />

performante. Yagci, dans une étude portant sur 54 patients<br />

d’âge moyen 49,7 ans présentant une hémospermie, considère<br />

que l’échographie permet d’établir un diagnostic dans 94,5 %<br />

des cas [2] . Elle permet notamment de mettre en évidence des<br />

calcifications, des kystes des vésicules séminales, des dilatations<br />

des vésicules séminales ou des canaux éjaculateurs. Les kystes<br />

des vésicules séminales, larges masses hypoéchogènes, se situent<br />

en général à la base des vésicules pouvant refouler le col vésical<br />

(Fig. 2). La mise en évidence de calcifications au sein des canaux<br />

éjaculateurs nécessite une sonde biplan à haute fréquence.<br />

Furuya rapporte, sur une série de 138 cas explorés en échographie,<br />

un kyste médian de la prostate pour 30 cas [3] pouvant<br />

correspondre à une dilatation kystique de l’utricule (Fig. 3).<br />

Au niveau de la prostate est essentiellement retenue la<br />

présence de calcifications ou d’éléments en faveur d’une<br />

Tableau 1.<br />

Étiologies selon l’imagerie.<br />

prostatite. Yagci rapporte également comme cause rare une<br />

masse située au niveau d’une glande périurétrale de Cooper<br />

visible en échographie [2] .<br />

L’IRM est également utilisée pour préciser l’origine de ces<br />

hémospermies (Fig. 4). Une description d’un kyste de l’utricule<br />

prostatique est effectuée par Neustein dans le bilan d’une<br />

hémospermie chronique [4] . La présence de sang au sein des<br />

vésicules séminales ou de lésions kystiques se traduit par un<br />

hypersignal en T1 et un hyposignal en T2. L’étude de Cho,<br />

analysant les données de l’imagerie chez 17 patients, considère<br />

l’IRM plus performante que l’échographie, permettant un<br />

diagnostic dans l’ensemble des cas en utilisant une antenne<br />

endorectale. Cette voie permet une meilleure analyse anatomique<br />

de l’ensemble du tractus séminal avec une étude précise<br />

dans les différents plans spatiaux. Il est ainsi possible de<br />

distinguer les hémospermies en provenance des vésicules<br />

séminales liées essentiellement à l’existence de lésions kystiques<br />

de celles ayant pour origine les canaux éjaculateurs ou la<br />

prostate [5] . Dans une étude plus récente, Prando analyse les<br />

données de l’IRM endorectale chez 86 patients. Elle permet,<br />

contrairement à l’échographie, une analyse précise de la<br />

Worischek et al. (1994) Cho et al. (1997) Yagci et al. (2004) Prando (2008)<br />

26 cas 17 cas 54 cas 86 cas<br />

Étiologies (%) 92 % 100 % 94,5 % 60 %<br />

Hémorragie (IRM) 58,8 % 21 %<br />

Dilatation des vésicules séminales 30 % 22,2 %<br />

Calculs des vésicules séminales 15 % 47 % 20,3 % 7,7 %<br />

Calculs des canaux éjaculateurs 15 % 23,5 % 38,8 % 4 %<br />

Kyste des canaux éjaculateurs 15 % 29,4 % 11,1 %<br />

Dilatation des canaux éjaculateurs 33,3 %<br />

Anomalie des canaux de Müller 7 % 41,1 %<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate 33,3 %<br />

Prostatite 11,1 %<br />

Kyste de l’utricule 19 %<br />

Autres 11,7 % 1,8 %<br />

IRM : imagerie par résonance magnétique.<br />

Figure 2. Kyste d’une vésicule séminale.<br />

Figure 3. Dilatation kystique de l’utricule.<br />

2 Urologie


localisation du sang au sein des voies génitales, se traduisant par<br />

un hypersignal en T1 [6] . Les indications de cette technique<br />

d’imagerie peuvent se limiter actuellement aux hémospermies<br />

persistantes, sans cause évidente en échographie.<br />

Fibroscopie<br />

Lorsque l’imagerie ne permet pas le diagnostic, le bilan peut<br />

être complété par la réalisation de cet examen qui intéresse<br />

l’ensemble de la filière urétrale. Elle permet la visualisation<br />

directe de polypes, de lésions inflammatoires ou d’anomalies<br />

vasculaires urétrales. Elle confirme la saillie endo-urétrale de<br />

certains kystes prostatiques. Une visualisation du col vésical par<br />

rétrovision permet également de rechercher des télangiectasies à<br />

son niveau, susceptibles de constituer une cause de saignement,<br />

en particulier chez les patients sous aspirine ou anticoagulants.<br />

■ Étiologie<br />

L’hémospermie, longtemps considérée comme idiopathique,<br />

voit actuellement son origine de plus en plus souvent précisée,<br />

comme en témoignent les séries les plus récentes et ce, grâce à<br />

l’apport de l’imagerie, qu’il s’agisse de l’échographie endorectale<br />

ou plus récemment de l’IRM.<br />

Hémospermie et affections tumorales<br />

Bien que relativement rare, cette association constitue la<br />

principale crainte du patient. Ahmad, dans une revue de la<br />

littérature britannique portant sur 931 patients, rapporte une<br />

cause tumorale dans 3,5 % [7] . Elle peut concerner les différents<br />

organes de la filière urogénitale avec en premier lieu la prostate.<br />

L’étude de Fletcher portant sur un groupe de 81 patients<br />

présentant une hémospermie retrouve trois cancers de prostate<br />

au sein des étiologies tumorales [8] . Prando et Jones rapportent<br />

un seul cas sur chacune de leurs séries portant respectivement<br />

sur 86 et 70 patients [6, 9] . Papp, sur une série de 121 hémospermies,<br />

retrouve 14 affections tumorales [1] . Rubinowicz rapporte<br />

une association particulière avec un carcinome intraductal de la<br />

prostate [10] .<br />

Le lien entre cancer de prostate et hémospermie reste néanmoins<br />

à préciser, notamment en différenciant les cancers de la<br />

zone de transition vraisemblablement plus concernés par cette<br />

association.<br />

Dans une étude récente, Han analyse, au sein d’une population<br />

ayant participé à une campagne de dépistage, l’association<br />

du cancer de la prostate avec une hémospermie rapportée par<br />

le patient sur les données d’un questionnaire [11] . L’incidence de<br />

l’hémospermie sur cette évaluation portant sur 26 126 volontaires<br />

est relativement faible, estimée à 0,5 % ; 139 d’entre eux ont<br />

signalé sa présence. Elle s’associe avec un cancer de la prostate<br />

Urologie<br />

Figure 4. Dilatation d’une vésicule séminale en T2 (A, B). En B, vue axiale.<br />

Hémospermies 18-602-A-10<br />

dans 19 cas (13,7 %), taux significativement plus élevé que les<br />

6,5 % de cancers diagnostiqués au sein de l’ensemble de ce<br />

groupe. Il est certain que l’augmentation de l’incidence liée en<br />

partie aux campagnes de dépistage explique la plus grande<br />

fréquence actuelle de cette association.<br />

L’association avec une affection tumorale des vésicules<br />

séminales apparaît plus logique. Elle reste néanmoins relativement<br />

rare, l’association n’étant décrite que dans six cas, soit<br />

16 % des 39 carcinomes des vésicules séminales rapportés par<br />

Benson [12] .<br />

L’association est encore plus rare lorsqu’il s’agit de cancers de<br />

la vessie, rapportée dans deux cas par Fletcher [8] , ou de l’urètre<br />

dont le même auteur ne rapporte qu’un seul cas.<br />

Hémospermie et maladies infectieuses<br />

ou inflammatoires<br />

Les phénomènes inflammatoires et/ou infectieux à l’origine<br />

d’œdème ou d’irritation muqueuse peuvent expliquer certaines<br />

hémospermies en provenance des vésicules ou des canaux<br />

éjaculateurs. L’ensemble des maladies infectieuses, qu’elles<br />

soient virales ou bactériennes mais également parasitaires<br />

comme la bilharziose ou la schistosomiase, peuvent induire ces<br />

hémospermies [13, 14] . Ces étiologies sont le plus fréquemment<br />

rencontrées chez les sujets jeunes. Sur les spermocultures, on<br />

retrouve le plus classiquement : le virus herpétique, Chlamydiae<br />

trachomatis, Enterococcus faecalis et Ureaplasma urealyticum.<br />

Hémospermie et anomalies vasculaires<br />

Il s’agit de causes plus rares parmi lesquelles on retient la<br />

présence de varicosités au niveau des vésicules séminales. Cette<br />

hémospermie peut également être liée à des fragilités vasculaires<br />

au niveau de l’urètre prostatique, voire du col vésical. Plus<br />

rarement, il peut s’agir de malformations artérioveineuses ou<br />

d’hémangiomes de la prostate ou des vésicules séminales. Wang<br />

décrit cinq cas d’hémospermies d’origine artérielle associés à<br />

une hématurie en rapport avec un saignement provenant de<br />

l’artère pudendale interne [15] .<br />

Hémospermie et maladies de système<br />

L’ensemble des maladies de système, sources d’hémorragie,<br />

peut expliquer la présence d’une hémospermie. On recherche<br />

notamment une maladie de Willebrand [16] , une hémophilie, la<br />

notion de troubles acquis de la coagulation, en particulier dans<br />

le cadre de pathologies hépatiques. Une amylose des vésicules<br />

séminales est également décrite par Vandwalle [17] . L’hémospermie<br />

peut également avoir pour origine une hypertension<br />

artérielle. Elle peut être présente lors de différentes hémopathies<br />

dont les lymphomes [18] .<br />

3


18-602-A-10 Hémospermies<br />

Hémospermie et affection kystique<br />

Différentes localisations de lésions kystiques peuvent expliquer<br />

une hémospermie. Il peut s’agir de kystes des vésicules<br />

séminales ou des canaux de Wolff mais l’entité la plus fréquente<br />

est représentée par les kystes médians de la prostate ou kyste des<br />

canaux de Müller au sein desquels la dilatation kystique de<br />

l’utricule occupe une place particulière selon Furuya [3] . L’étude<br />

de cet auteur portant sur 138 hémospermies isole 30 kystes<br />

médians de la prostate ; 19 d’entre eux ont fait l’objet d’une<br />

ponction échoguidée à l’aiguille 22 G, permettant une injection<br />

d’indigo carmin et de produit de contraste, objectivant une<br />

communication de ces kystes avec l’urètre prostatique dans<br />

15 cas, correspondant à une dilatation kystique de l’utricule et<br />

les canaux déférents dans 11 cas. L’aspiration du liquide<br />

kystique dans 12 cas ramène du sperme et du vieux sang dans<br />

sept cas (58 %). Cette entité est à différencier du kyste de<br />

l’utricule de l’enfant ou méga-utricule associé avec certaines<br />

anomalies génitales dont l’hypospade et la cryptorchidie.<br />

Hémospermie iatrogène<br />

La réalisation de biopsies prostatiques par voie endorectale<br />

constitue actuellement la cause la plus fréquente d’hémospermie<br />

iatrogène en raison de l’augmentation de ces prélèvements dans<br />

le contexte du diagnostic précoce du cancer de la prostate.<br />

Makinen, dans une évaluation par questionnaire des complications<br />

des biopsies sur une série de 200 patients, retient la notion<br />

d’une hémospermie plus ou moins sévère dans 48,5 % des cas,<br />

soit chez 58 d’entre eux [19] . L’analyse de 5 676 questionnaires<br />

sur 5 802 biopsies réalisées lors de l’enquête européenne de<br />

dépistage réalisée par l’équipe de Schröder révèle la présence<br />

d’une hémospermie dans 50,4 % des cas, soit chez 2 858<br />

patients [20] . Ce taux variable selon les séries s’explique en partie<br />

par un pourcentage différent selon les séries de patients ayant<br />

eu une activité sexuelle avec éjaculation pendant la période de<br />

suivi. Peyromaure précise cette notion en analysant la présence<br />

d’une hémospermie uniquement chez les patients ayant eu une<br />

activité sexuelle durant le mois suivant les biopsies et la<br />

retrouve chez 78,3 % d’entre eux [21] . Pour Naughton, la<br />

survenue d’une hémospermie semble corrélée avec le nombre de<br />

biopsies réalisées, présente dans 71 % des cas avec un protocole<br />

comprenant six biopsies pour 89 % avec 12 prélèvements [22] .<br />

Plus rarement, la présence d’une hémospermie est décrite<br />

après radiothérapie ou curiethérapie prostatique, ainsi qu’après<br />

manœuvres endoscopiques urétrales.<br />

On peut également inclure dans cette catégorie les hémospermies<br />

post-traumatiques, qu’il s’agisse de traumatisme du périnée<br />

ou des organes génitaux externes, ainsi que celles survenant lors<br />

de rapports sexuels après une période d’abstinence prolongée.<br />

■ Traitement<br />

Il est fonction de l’importance, du caractère répétitif et de<br />

l’origine de l’hémospermie. Le plus souvent, l’abstention<br />

thérapeutique apparaît la plus justifiée avec une évolution<br />

spontanément favorable, en particulier en cas d’origine iatrogène,<br />

notamment après biopsies de prostate ou manœuvre<br />

endo-urétrales traumatiques.<br />

Les étiologies infectieuses, microbiennes ou parasitaires<br />

justifient en revanche un traitement spécifique, qu’il s’agisse<br />

d’une antibiothérapie si possible adaptée à l’uro- ou la spermoculture,<br />

ou d’un traitement antiparasitaire en fonction de<br />

l’affection causale.<br />

Une affection kystique peut nécessiter une prise en charge en<br />

l’absence de régression spontanée. La régression, voire la<br />

disparition des hémospermies est courante, justifiant fréquemment,<br />

en particulier pour Furuya, une simple surveillance, en<br />

particulier pour les kystes médians de l’utricule [3] . Néanmoins,<br />

sa persistance au-delà de 1 an peut conduire à une prise en<br />

charge thérapeutique ; en particulier lorsqu’il s’agit de lésions<br />

.<br />

kystiques situées à proximité de l’urètre prostatique où la mise<br />

à plat est envisageable par voie transurétrale. Il semble que la<br />

simple incision à la lame froide de la partie saillante du kyste<br />

soit suffisante plutôt que la véritable résection prostatique.<br />

La ponction-aspiration de certains de ces kystes est également<br />

possible sous contrôle échographique.<br />

Les varicosités de l’urètre prostatique ou les lésions polypoïdes<br />

peuvent justifier un traitement endo-urologique allant de la<br />

simple fulguration à la résection endoscopique de certaines<br />

lésions.<br />

Wang utilise une embolisation sélective de l’artère pudendale<br />

interne sur les données de l’angiographie chez cinq patients,<br />

avec un succès immédiat dans trois cas [15] .<br />

Un traitement cœlioscopique est également possible dans<br />

certaines étiologies, conduisant à proposer une vésiculectomie.<br />

Vandwalle effectue, par cette technique, une vésiculectomie<br />

pour amylose [17] .<br />

■ Conclusion<br />

Si l’hémospermie doit le plus souvent être considérée comme<br />

une affection bénigne ne justifiant pas, la plupart du temps, de<br />

traitement spécifique, l’apport d’une imagerie récente plus<br />

performante amène à proposer, pour certaines étiologies, un<br />

traitement spécifique en cas de persistance suffisamment<br />

prolongée de ce symptôme.<br />

■ Références<br />

[1] Papp GK, Kopa Z, Szoba F, Erdei E. Aetiology of haemospermia.<br />

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L’hémospermie par amylose des vésicules séminales. Traitement par<br />

vésiculectomie cœlioscopique. À propos d’un cas. Prog Urol 2007;17:<br />

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4 Urologie


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controlled study. Urology 2002;60:846-50.<br />

[20] Raaijmakers R, Kirkels WJ, Roobol MJ, Wildhagen MF, Schröder FH.<br />

Complication rates and risk factors of 5802 transrectal ultrasoundguided<br />

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screening program. Urology 2002;60:826-30.<br />

[21] Peyromaure M, Ravery V, Messas A, Toublanc M, Boccon-Gibod L,<br />

Boccon-Gibod L. Pain and morbidity of an extensive prostate<br />

10-biopsy protocol: a prospective study in 289 patients. JUrol2002;<br />

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[22] Naughton CK, Ornstein DK, Smith DS, Catalona WJ. Pain and<br />

morbidity of transrectal guided prostate biopsy: a prospective<br />

randomized trial of 6 versus 12 cores. JUrol2000;163:168-71.<br />

A. Houlgatte, Professeur agrégé (houlgatte.urovdg@free.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital d’instruction des Armées du Val-de-Grâce, 74, boulevard de Port-Royal, 75230 Paris cedex 05, France.<br />

X. Game, Chirurgien urologue.<br />

Service d’urologie, Centre hospitalier universitaire Purpan, place du Docteur-Baylac, TSA 40031, 31059 Toulouse cedex 9, France.<br />

X. Durand, Chirurgien urologue.<br />

Service d’urologie, Hôpital d’instruction des Armées du Val-de-Grâce, 74, boulevard de Port-Royal, 75230 Paris cedex 05, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Houlgatte A., Game X., Durand X. Hémospermies. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie,<br />

18-602-A-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Hémospermies 18-602-A-10<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

5


Plan<br />

Hyperoxalurie primitive<br />

P. Cochat, S. Fargue, J. Bacchetta, F. Beby, J.-F. Sabot, J. Harambat<br />

Les hyperoxaluries primitives sont transmises sur le mode autosomique récessif ; il s’agit d’affections aussi<br />

rares que graves, engageant toujours le pronostic rénal et parfois aussi le pronostic vital, notamment<br />

dans les formes à début précoce. Le type 1, de loin le plus fréquent en Europe, résulte d’un déficit<br />

enzymatique (alanine-glyoxylate aminotransférase) au niveau des peroxysomes du foie, à l’origine d’une<br />

hyperoxalurie qui s’exprime initialement par des lithiases avec ou sans néphrocalcinose. Au fur et à<br />

mesure que la filtration glomérulaire se dégrade, une surcharge systémique apparaît et n’épargne aucun<br />

organe, mais l’essentiel du stockage de l’oxalate se fait au niveau du squelette. Le diagnostic repose sur<br />

l’hyperoxalurie et la confirmation du type d’hyperoxalurie est le plus souvent établie par l’analyse<br />

moléculaire (qui permet aussi un diagnostic prénatal). Le traitement conservateur (hyperhydratation,<br />

inhibiteurs de la cristallisation, pyridoxine) est essentiel et doit être entrepris le plus précocement possible.<br />

Aucune méthode de dialyse n’est suffisamment efficace pour compenser la surproduction d’oxalate, de<br />

sorte que la transplantation hépatique et rénale doit être planifiée relativement tôt, avant le stade<br />

d’insuffisance rénale avancée, pour limiter les dégâts de la thésaurismose. Il se peut que, à l’avenir, de<br />

nouvelles thérapeutiques remplacent ou complètent la transplantation d’organes (transplantation<br />

d’hépatocytes, molécules chaperonnes, etc.).<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Oxalose ; Hyperoxalurie primitive ; Lithiase ; Néphrocalcinose ; Pyridoxine ;<br />

Transplantation combinée hépatique et rénale<br />

Introduction 1<br />

Hyperoxalurie primitive de type 1 1<br />

Introduction 1<br />

Présentation 2<br />

Diagnostic 2<br />

Surcharge en oxalate 3<br />

Approche moléculaire 4<br />

Traitement conservateur 5<br />

Traitements urologiques 5<br />

Dialyse 6<br />

Transplantation d’organes 6<br />

Perspectives thérapeutiques 8<br />

Hyperoxalurie primitive de type 2 8<br />

Diagnostic 8<br />

Approche moléculaire 8<br />

Traitement 8<br />

Autres types d’hyperoxalurie primitive 8<br />

Conclusion 8<br />

■ Introduction<br />

L’hyperoxalurie est un symptôme biochimique qui peut être<br />

la traduction d’une maladie héréditaire du métabolisme (hyperoxalurie<br />

primitive) ou la conséquence d’une pathologie acquise<br />

(hyperoxalurie secondaire).<br />

Deux types d’hyperoxalurie primitive (HP), seule abordée ici,<br />

sont identifiés : le type 1 (HP1) représente environ 80 % des cas<br />

Néphrologie<br />

“ Point fort<br />

Oxalose provient du mot latin oxalis (oseille), lui même<br />

dérivé de oxus (aigu, pointu, acide).<br />

et correspond à un déficit en alanine-glyoxylate aminotransférase<br />

(AGT) ; le type 2 (HP2) est un déficit en glyoxylateréductase/hydroxypyruvate<br />

réductase (GRHPR) ; tous deux sont<br />

la conséquence d’une anomalie sévère du métabolisme du<br />

glyoxylate. D’autres types d’HP (« non 1 – non 2 ») ont été<br />

rapportés dont la physiopathologie reste à préciser.<br />

■ Hyperoxalurie primitive de type 1<br />

Introduction<br />

18-064-M-10<br />

L’HP1 (OMIM#604285) est une affection de transmission<br />

récessive autosomique qui concerne une naissance vivante sur<br />

120 000 en France [1] ; sa description initiale fut rapportée par<br />

Lepoutre en 1927.<br />

Depuis 1986, nous savons qu’elle est la conséquence d’un<br />

déficit en une enzyme normalement produite au niveau des<br />

peroxysomes hépatocytaires, l’AGT, dont le coenzyme est le<br />

phosphate de pyridoxine (vitamine B 6) ; les premières mutations<br />

du gène AGXT ont été mises en évidence en 1990. La maladie<br />

s’exprime soit parce que la production de l’enzyme par le<br />

peroxysome est déficiente ou absente (déficit quantitatif en<br />

1


18-064-M-10 Hyperoxalurie primitive<br />

Hépatocyte<br />

Peroxysome<br />

Pyruvate Alanine<br />

Glycine D-glycérate<br />

AGT<br />

Glycolate<br />

GO<br />

GGT<br />

HPR<br />

Glycine Glyoxylate Glyoxylate Hydroxypyruvate<br />

DAO<br />

AGT), soit parce qu’elle est délocalisée dans la mitochondrie, ce<br />

qui rend l’AGT inefficace (déficit fonctionnel en AGT). Ceci<br />

explique en partie la grande hétérogénéité phénotypique de<br />

l’affection, les déficits quantitatifs étant généralement plus<br />

sévères que les déficits fonctionnels. Ce déficit aboutit dans tous<br />

les cas à une production massive d’oxalate (Fig. 1). L’oxalate de<br />

calcium formé étant insoluble dans l’urine, les premiers symptômes<br />

concernent habituellement l’appareil urinaire.<br />

Présentation<br />

GO<br />

Oxalate<br />

LDH GR<br />

LDH<br />

Oxalate Glycolate<br />

Cytosol<br />

L-glycérate<br />

Augmenté en cas de HP1 et HP2 HP1 HP2<br />

Blocage enzymatique de l'HP1<br />

Blocage enzymatique de l'HP2<br />

Figure 1. Métabolisme du glyoxylate dans le peroxysome hépatocytaire<br />

humain : déficit enzymatique responsable de l’hyperoxalurie primitive<br />

de type 1 (HP1) et de type 2 (HP2). AGT : alanine-glyoxylate aminotransférase<br />

; DAO : D-amino-oxydase ; GGT : glutamate-glyoxylate aminotransférase<br />

; GO : glycolate oxydase ; GR : glyoxylate réductase ; HPR :<br />

hydroxypyruvate réductase ; LDH : lactate déshydrogénase.<br />

“ À retenir<br />

« Chez un enfant de quatre ans et demi, opéré ou soigné<br />

pour calculs multiples de l’urètre, de l’uretère et des deux<br />

reins, une biopsie fait découvrir un parenchyme rénal<br />

bourré de concrétions cristallines d’oxalate de chaux. Ce<br />

cas réalise en clinique l’expérience d’Ebstein et Nicolaier,<br />

qui, faisant ingérer de l’oxamide à des chiens, voyaient se<br />

développer des calculs urinaires et de multiples formations<br />

cristallines dans le parenchyme rénal ».<br />

Article de M. Lepoutre (in extenso). Calculs multiples chez<br />

un enfant ; infiltration du parenchyme rénal par des<br />

dépôts cristallins. J Urol Méd Chir 1927;20:424<br />

L’âge médian des premiers symptômes est de 5à6ans, avec<br />

des extrêmes allant de la naissance à plus de 60 ans [1] . Il s’agit<br />

presque toujours de symptômes urinaires en rapport avec une<br />

pathologie lithiasique : douleur lombaire, colique néphrétique,<br />

hématurie macroscopique, infection urinaire, émission d’un<br />

calcul, découverte fortuite d’une néphrocalcinose ou de lithiases<br />

; il peut aussi s’agir d’anomalies moins spécifiques en<br />

rapport avec l’altération de la fonction rénale : anémie, retard<br />

statural, découverte d’une acidose métabolique ou d’une<br />

augmentation de créatininémie. Outre les conséquences des<br />

épisodes d’obstruction et d’infection liés à la présence des<br />

lithiases, l’insuffisance rénale est le fait d’une atteinte tubulointerstitielle<br />

progressive secondaire à la toxicité mitochondriale<br />

de l’oxalate sur les cellules épithéliales tubulaires d’une part [2] ,<br />

et à l’accumulation de l’oxalate de calcium dans le parenchyme<br />

rénal entraînant inflammation et fibrose d’autre part [3, 4] . Ceci<br />

conduit à une détérioration inéluctable de la filtration glomérulaire<br />

(FG) alors que la production hépatique d’oxalate reste<br />

inchangée. De ce fait, la concentration plasmatique d’oxalate<br />

augmente et les dépôts deviennent systémiques (on parle alors<br />

d’oxalose) : le squelette est le compartiment le plus concerné<br />

par la rétention d’oxalate.<br />

Le stade d’insuffisance rénale chronique terminale (IRCT) est<br />

atteint entre 25 et 40 ans pour la moitié des patients [1] .<br />

Globalement, l’HP1 est à l’origine de 0,5 % des IRCT de l’enfant<br />

en Europe contre environ 10 % au Koweït et 13 % en Tunisie,<br />

probablement en raison du cumul d’une mutation fondatrice et<br />

de la fréquence de la consanguinité dans ces pays.<br />

L’HP1 se présente grossièrement sous cinq formes assez<br />

distinctes [5-7] :<br />

la forme infantile (premiers symptômes avant l’âge de 1 an)<br />

est particulièrement sévère ; la progression vers l’IRCT résulte<br />

de l’importance de la production hépatique et de l’immaturité<br />

physiologique de la FG. La moitié des sujets atteints est<br />

déjà au stade d’IRCT lors du diagnostic et 80 % d’entre eux<br />

atteindront ce stade avant l’âge de 3 ans ;<br />

la survenue de lithiases répétées associée à une altération<br />

progressive de la FG dans l’enfance ou l’adolescence ;<br />

la forme tardive, avec émission de plusieurs lithiases à l’âge<br />

adulte ;<br />

la récidive d’une symptomatologie lithiasique avec insuffisance<br />

rénale après transplantation sans diagnostic précis<br />

avant greffe ;<br />

les sujets présymptomatiques à risque appartenant à une<br />

famille où un cas index a été identifié.<br />

Le phénotype de l’HP1 est donc très polymorphe, depuis les<br />

formes infantiles gravissimes jusqu’à l’élimination itérative de<br />

calculs après l’âge de 50 ans. Ceci s’explique en partie par la<br />

grande variété génotypique, mais il existe en outre d’importantes<br />

variations avec la même mutation au sein d’une même<br />

famille.<br />

Diagnostic<br />

Du fait de la rareté de la maladie et de la méconnaissance<br />

fréquente des maladies rénales héréditaires responsables de<br />

lithiases par les médecins, il se passe en moyenne 5 ans entre<br />

les premiers symptômes et le diagnostic. Ce diagnostic doit être<br />

évoqué sur des arguments principalement cliniques et radiologiques,<br />

et l’association lithiases (très radio-opaques, généralement<br />

multiples et bilatérales) - néphrocalcinose (topographie<br />

médullaire prédominante) - altération progressive de la fonction<br />

rénale est très évocatrice ; l’étude des antécédents collatéraux et<br />

la notion d’une consanguinité parentale renforcent l’hypothèse<br />

d’une maladie autosomique récessive.<br />

L’analyse morphologique du calcul, l’étude de la cristallurie et<br />

l’analyse des lithiases par spectrométrie infrarouge représentent<br />

une étape essentielle de l’approche diagnostique, permettant<br />

l’identification et la quantification des cristaux et des calculs<br />

(Fig.2à4). Il s’agit de cristaux d’oxalate de calcium monohydraté<br />

(ou whewellite de type 1c), et le volume cristallin excède<br />

généralement 200/mm 3 .<br />

Chez les patients ayant une FG normale ou peu altérée,<br />

l’association d’une hyperoxalurie (oxalate urinaire > 0,5 mmol/<br />

1,73 m 2 /24 h) et d’une hyperglycolaturie (glycolate urinaire<br />

> 0,5 mmol/1,73 m 2 /24 h) est très évocatrice d’HP1 (Tableau 1),<br />

mais quelques patients n’ont pas d’hyperglycolaturie [8] . Le<br />

dosage de l’oxalémie est techniquement délicat et ne permet pas<br />

à lui seul d’établir le diagnostic d’HP1 ; la concentration<br />

normale est inférieure à 7 µmol/l et elle augmente en cas<br />

d’insuffisance rénale de toute origine ; toutefois, les concentrations<br />

atteintes en cas d’HP1 sont généralement supérieures à<br />

20 µmol/l. Au stade d’IRCT, et notamment chez les sujets<br />

devenus anuriques, les rapports oxalate/créatinine et glycolate/<br />

créatinine plasmatiques sont utiles (Tableau 1), de même que le<br />

dosage d’oxalate et de glycolate dans le liquide de dialyse<br />

péritonéale le cas échéant.<br />

Lorsque le phénotype est évocateur, il est logique de proposer<br />

un génotypage ciblant les mutations les plus fréquentes en<br />

2 Néphrologie


Figure 2. Calculs d’oxalate de calcium monohydraté (whewellite) :<br />

aspect macroscopique, type Ic.<br />

Absorption<br />

1,0<br />

0,8<br />

0,6<br />

0,4<br />

0,2<br />

Oxalate de calcium monohydraté (whewellite) Référence<br />

1 620<br />

3 429<br />

3 484<br />

3 336<br />

3 254<br />

3 056<br />

0,0<br />

4 000 3 500 3 000 2 500 2 000 1 500 1 000 500<br />

Nombre d’onde<br />

fonction de l’origine géographique et ethnique du patient [8] .<br />

Outre la confirmation du diagnostic, l’analyse de l’acide<br />

désoxyribonucléique (ADN) fournit des informations prédictives<br />

sur le phénotype enzymatique et une éventuelle sensibilité à la<br />

pyridoxine, et parfois sur le pronostic clinique (cf. infra).<br />

Lorsque la présentation est atypique, le diagnostic peut faire<br />

appel à la mesure de l’activité AGT à partir d’une biopsie<br />

hépatique. Mais la corrélation entre le niveau d’activité de<br />

l’AGT et la sévérité de la maladie est très incertaine et la biopsie<br />

hépatique est inutile lorsque le génotype est connu.<br />

1 316<br />

1 375<br />

948<br />

881<br />

777<br />

663<br />

593<br />

514<br />

Figure 3. Spectrométrie infrarouge : spectre d’oxalate de calcium monohydraté<br />

(whewellite).<br />

Figure 4. Cristaux d’oxalate de calcium monohydraté (whewellite,<br />

x 500).<br />

Néphrologie<br />

Tableau 1.<br />

Concentrations urinaires et plasmatiques d’oxalate, glycolate et<br />

L-glycérate : valeurs normales, d’après [8] .<br />

Urine Oxalate/24 h Enfant et adulte < 0,50 mmol/1,73 m2 Oxalate/créatinine Enfant


18-064-M-10 Hyperoxalurie primitive<br />

Figure 5. Histologie osseuse chez une patiente de 13 ans : nombreux cristaux d’oxalate de calcium monohydraté (whewellite) (A à C).<br />

Figure 6.<br />

A. Examen du fond d’œil chez un enfant de 2 ans présentant une forme infantile d’oxalose : piqueté rétinien blanchâtre dû à la présence de cristaux d’oxalate<br />

de calcium.<br />

B. Aspect du fond d’œil chez un enfant de 13 ans.<br />

étude histomorphométrique, mais il s’agit d’une méthode<br />

invasive, de sorte que de nouvelles techniques d’évaluation non<br />

invasives et peu irradiantes (dual-energy X-ray absorptiometry ou<br />

DEXA, high-resolution peripheral quantitative computed tomography<br />

ou hr-pQCT) sont en cours d’évaluation [10] .<br />

Outre la surcharge squelettique, les dépôts d’oxalate sont<br />

véhiculés par le réseau artériel et concernent particulièrement<br />

certains organes, notamment :<br />

le cœur : pathologie coronaire ischémique, troubles de<br />

conduction, risque de mort subite ;<br />

la rétine (Fig. 6) : dépôts sous-épithéliaux d’oxalate de<br />

calcium, risque de cécité ;<br />

la peau : acrocyanose, livedo reticularis [11] ;<br />

les tissus mous : nodules d’oxalate de calcium, gangrène<br />

périphérique ;<br />

les nerfs périphériques : polyradiculoneuropathie par atteinte<br />

des vasa nervorum ;<br />

et d’autres organes : infarctus intestinal, hypothyroïdie, etc.<br />

L’évolution de l’atteinte systémique est responsable d’une<br />

altération progressive de la qualité de vie, en raison du handicap<br />

secondaire à l’atteinte ostéoarticulaire et aux nombreuses<br />

complications possibles. Cette évolution fait ainsi de l’oxalose<br />

une des maladies à expression rénale les plus graves, tant en<br />

termes de morbidité que de mortalité. Ceci est particulièrement<br />

vrai dans les pays en développement du fait de la fréquence<br />

accrue en cas de consanguinité, du retard diagnostique et de<br />

l’absence de possibilités thérapeutiques adaptées.<br />

Approche moléculaire<br />

Analyse des mutations<br />

L’ADN complémentaire et l’ADN génomique codant l’AGT<br />

ont été clonés et séquencés ; le gène AGXT est localisé au<br />

niveau du chromosome 2q37.3 (11 exons sur environ 10 kpb) ;<br />

la protéine codée comporte 392 acides aminés et a une masse<br />

moléculaire de 43 kDa.<br />

Tableau 3.<br />

Analyse de l’acide désoxyribonucléique (ADN) et origine géographique.<br />

Mutation n (%) Origine géographique<br />

Gly170Arg 36 (25) Europe occidentale<br />

Ile244Thr 27 (19) Afrique du Nord<br />

c.33_34insC 16 (11) Différents pays<br />

Arg122X 7 (5) Moyen-Orient<br />

Met195Arg 6 (5) Différents pays<br />

Autres (nombreuses<br />

mutations privées)<br />

49 (35) Différents pays<br />

Expérience personnelle de l’analyse de 141 (282 allèles) patients atteints<br />

d’hyperoxalurie primitive de type 1 (1994-2007) : 80 patients sont homozygotes<br />

(57 %) et 58 sont hétérozygotes composites (41 %).<br />

Une centaine de mutations et polymorphismes ont été<br />

identifiés, avec une fréquence variable (Tableau 3), et plusieurs<br />

relations génotype-phénotype ont été établies, tant sur le plan<br />

clinique que biochimique pour les homozygotes [6, 12-15] :<br />

Gly82Glu : perte de l’activité catalytique de l’AGT en empêchant<br />

sa liaison avec la pyridoxine ;<br />

Ile244Thr (coségrégation avec le polymorphisme Pro11Leu) :<br />

agrégation et dégradation accélérée de l’AGT ;<br />

Gly41Arg : agrégation intraperoxysomale et dégradation de<br />

l’AGT ;<br />

Gly170Arg (coségrégation avec le polymorphisme Pro11Leu) :<br />

C défaut d’adressage de l’AGT du peroxysome vers la mitochondrie,<br />

avec persistance inconstante d’une activité<br />

enzymatique ;<br />

C sensibilité à la pyridoxine ;<br />

C meilleur pronostic clinique global ;<br />

Phe152Ile :<br />

C sensibilité à la pyridoxine, ;<br />

C meilleur pronostic clinique global ;<br />

33insC : précocité de l’IRCT dans l’enfance.<br />

4 Néphrologie


Globalement, il apparaît que les mutations non-sens et le<br />

polymorphisme Pro11Leu sont associés aux phénomènes<br />

d’agrégation, de dégradation accélérée, de perte de l’activité<br />

catalytique et de défaut d’adressage de l’AGT [14] .<br />

Il existe en outre une spécificité géographique et ethnique de<br />

ces mutations. Gly170Arg est la plus fréquente en Europe<br />

occidentale, mais on retrouve plusieurs effets fondateurs, parfois<br />

associés à des corrélations génotype-phénotype particulières, au<br />

Maghreb (Ile244Thr), aux Îles Canaries, au Japon, en Turquie,<br />

au Pakistan, dans la population arabe d’Israël.<br />

Depuis 2003, la structure tridimensionnelle de l’AGT a été<br />

précisée et un modèle de souris transgénique AGTKO a été mis<br />

au point [16] ; ces deux approches permettent d’approfondir la<br />

connaissance des caractéristiques des mutations (Gly170Arg et<br />

Ile244Thr notamment) et laissent entrevoir de nouvelles<br />

thérapeutiques à impact moléculaire.<br />

Diagnostic anténatal<br />

Il n’existe aucun marqueur biologique ou échographique<br />

spécifique de l’hyperoxalurie primitive de type 1. Le recours à<br />

la biologie moléculaire est donc indispensable et repose sur le<br />

séquençage des 11 exons du gène AGXT chez le cas index, avec<br />

recherche de ségrégation chez les deux parents. La recherche de<br />

la mutation ainsi identifiée peut être réalisée soit à partir d’une<br />

ponction de villosités choriales entre 10 et 14 semaines d’aménorrhée,<br />

soit à partir d’une ponction de liquide amniotique vers<br />

16 semaines d’aménorrhée. Cette démarche permet ainsi<br />

d’identifier les fœtus sains, les fœtus atteints homozygotes et les<br />

fœtus porteurs hétérozygotes. Cette stratégie de diagnostic<br />

anténatal est extrêmement fiable mais ne se conçoit que si une<br />

décision d’interruption médicale de grossesse est envisagée en<br />

cas de fœtus atteint homozygote.<br />

Un diagnostic préimplantatoire est théoriquement possible,<br />

mais non encore rapporté dans la littérature.<br />

Traitement conservateur<br />

Généralités<br />

Le traitement conservateur doit être entrepris le plus rapidement<br />

possible, dès que le diagnostic est évoqué et avant même<br />

qu’il ne soit confirmé. Le but est d’augmenter en permanence<br />

la solubilité de l’oxalate de calcium et de réduire la production<br />

d’oxalate, ce qui impose une observance sans faille.<br />

Hydratation<br />

Le risque lithiasique augmente lorsque l’oxalurie excède<br />

0,4 mmol/l, notamment lorsque la calciurie excède 4 mmol/l ;<br />

en effet, le rôle de la saturation en oxalate semble aussi<br />

important que celui de la saturation en calcium [17] . L’essentiel<br />

du traitement repose donc sur l’hydratation, sur la base de 2 à<br />

3 l/m 2 /j, avec pour objectif de diluer les urines aussi bien le jour<br />

que la nuit, ce qui peut parfois nécessiter un apport hydrique<br />

par sonde de nutrition entérale chez les jeunes enfants. La<br />

contrainte de cette hydratation expose à la non-observance,<br />

notamment au moment de l’adolescence, de sorte que l’éducation<br />

et l’information doivent être sans cesse renouvelées sur ce<br />

point.<br />

Les autres éléments du traitement conservateur sont importants,<br />

mais leur impact devient négligeable si l’hydratation n’est<br />

pas appliquée en priorité.<br />

Inhibiteurs de la cristallisation<br />

Les inhibiteurs de la cristallisation, comme le citrate (préférence<br />

au citrate de potassium pour ne pas accroître l’apport sodé<br />

qui augmenterait la calciurie, sur la base de 100 à 150 mg/kg/j<br />

de citrate, en trois ou quatre prises quotidiennes), le phosphate<br />

neutre ou le magnésium sont indispensables pour réduire<br />

l’absorption du calcium et donc la calciurie, mais aussi pour<br />

diminuer la croissance et l’agglomération des cristaux. Il en<br />

résulte une augmentation de la solubilité de l’oxalate de calcium<br />

dans l’urine.<br />

Néphrologie<br />

Tableau 4.<br />

Surveillance sous traitement.<br />

Traitement Conservateur Dialyse Transplantation<br />

Oxalurie Sensibilité Sans objet Diminution constante<br />

pyridoxine : ↓<br />

>25%<br />

Objectif < 0,4 mmol/l<br />

Oxalémie Pas d’intérêt Objectif < 50<br />

µmol/l<br />

Calciurie Maintenir<br />

< 4 mmol/l<br />

Volume<br />

cristallin<br />

Maintenir<br />

< 200/mm 3<br />

Pyridoxine<br />

La pyridoxine est métabolisée dans l’organisme en phosphate<br />

de pyridoxine, principal coenzyme de l’AGT. La sensibilité à la<br />

pyridoxine est retrouvée chez un tiers des patients atteints<br />

d’HP1. Elle doit donc être testée systématiquement et de<br />

manière précoce, à la dose initiale de 5 mg/kg/j et en augmentant<br />

par paliers de 5 mg/kg toutes les 4 semaines jusqu’à<br />

20 mg/kg/j si nécessaire. La réponse à la pyridoxine repose sur<br />

l’évolution de l’oxalurie : sensibilité totale si la réduction est<br />

supérieure à 50 %, sensibilité partielle entre 25 et 50 %,<br />

inefficacité si la réduction de l’oxalurie est inférieure à 25 %.<br />

Cette sensibilité va donc conditionner partiellement le risque et<br />

le moment de l’évolution vers l’IRCT ; les patients qui répondent<br />

le mieux à ce traitement sont généralement porteurs d’une<br />

mutation Gly170Arg ou Phe152Ile, dont le pronostic rénal est<br />

globalement meilleur lorsque le traitement est correctement<br />

réalisé. Il a même été suggéré de ne proposer qu’une greffe<br />

rénale isolée aux patients porteurs de telles mutations, et de<br />

maintenir le traitement par pyridoxine avant et après la<br />

transplantation rénale.<br />

Diurétiques<br />

L’usage des diurétiques doit être prudent. En effet, le furosémide<br />

augmente le débit urinaire, mais excerce un effet calciurétique.<br />

En revanche, l’effet diurétique des thiazidiques<br />

(hydrochlorothiazide, 1à2mg/kg/j) est moins net mais ils<br />

permettent de réduire significativement la calciurie.<br />

Diététique<br />

La réduction des apports alimentaires en oxalate n’influence<br />

guère le cours de l’HP1. En effet, l’oxalate alimentaire ne<br />

représente pas plus de 5à10%del’oxalate éliminé par voie<br />

rénale. Il est néanmoins légitime de limiter les apports en<br />

chocolat, rhubarbe, thé, oseille, épinards, etc., notamment au<br />

stade d’IRCT. En revanche, la réduction des apports calciques<br />

n’est pas recommandée car le calcium alimentaire se lie à<br />

l’oxalate pour former des complexes insolubles d’oxalate de<br />

calcium, éliminés par voie intestinale. Par ailleurs, il convient<br />

d’éviter toute supplémentation en vitamine C, car l’acide<br />

ascorbique est un précurseur de l’oxalate.<br />

Efficacité<br />

La finalité de tous les traitements conservateurs proposés est<br />

de réduire à la fois la concentration plasmatique d’oxalate, le<br />

degré de saturation du plasma en oxalate de calcium et le risque<br />

de cristallisation urinaire. L’impact de ce traitement (Tableau 4)<br />

peut être évalué par le suivi répété de la cristallurie, du volume<br />

cristallin et parfois à l’aide de logiciels permettant d’estimer la<br />

sursaturation en oxalate de calcium.<br />

Traitements urologiques<br />

Hyperoxalurie primitive 18-064-M-10<br />

Objectif < 20 µmol/l<br />

Sans objet Maintenir < 4 mmol/l<br />

Sans objet Maintenir < 200/mm 3<br />

Le traitement des calculs doit éviter chaque fois que possible<br />

la chirurgie ouverte et la chirurgie percutanée en raison du<br />

risque de dégâts parenchymateux associés, susceptibles d’altérer<br />

la FG. Le traitement des calculs par urétéroscopie est une<br />

5


18-064-M-10 Hyperoxalurie primitive<br />

solution particulièrement intéressante lorsqu’elle est possible.<br />

Dans les autres cas, la lithotritie extracorporelle est une option<br />

acceptable mais, lorsque existe une néphrocalcinose, des lésions<br />

parenchymateuses dans le faisceau des ondes de choc peuvent<br />

altérer la FG. Globalement, tous les traitements des calculs chez<br />

des patients atteints d’HP1 sont susceptibles d’entraîner une<br />

modification du profil évolutif de la fonction rénale. Pour cette<br />

raison, chez les malades qui souffrent de coliques néphrétiques<br />

répétées, la mise en place d’une sonde en double J permet de<br />

contrôler la douleur et préserve le parenchyme rénal. Les<br />

indications urologiques sont finalement toutes délicates et<br />

doivent toujours être confiées à des urologues expérimentés<br />

dans le traitement de cette affection.<br />

Par ailleurs, au stade de l’IRCT, la néphrectomie des reins<br />

propres est recommandée dans la perspective d’une transplantation<br />

afin de limiter le risque d’infection urinaire, les épisodes<br />

d’obstruction et l’émission de calculs.<br />

Dialyse<br />

Globalement, la dialyse n’est pas adaptée au traitement de<br />

l’HP1 au stade d’IRCT. En effet, en dépit de la faible masse<br />

moléculaire de l’oxalate (COOH-COOH : 1 mmol = 90 mg), la<br />

dialyse ne permet pas d’équilibrer la surproduction excessive<br />

d’oxalate au niveau hépatique : cette production est de 4 à<br />

7 mmol/1,73m 2 /24 h alors que l’épuration par dialyse conventionnelle<br />

n’est que de 1à2mmol/1,73m 2 /24 h), de sorte que<br />

la surcharge tissulaire est inexorable [18] . Une telle option est<br />

donc inacceptable, tant en termes de qualité de vie que de<br />

morbidité ou de mortalité.<br />

Chez les patients atteints d’HP1 et traités par hémodialyse,<br />

l’oxalémie prédialytique se situe habituellement entre 100 et<br />

200 µmol/l (normale < 7 µmol/l), soit une concentration bien<br />

supérieure à ce que l’on peut observer chez les patients qui<br />

présentent une insuffisance rénale d’autre cause (40 à<br />

50 µmol/l) [19] . On peut aussi calculer le coefficient de saturation<br />

du plasma en oxalate de calcium (bCaOx, valeur normale<br />

≤ 1 unité relative), qui est de l’ordre de 4,5 en cas d’HP1 et de<br />

l’ordre de 1,5 en cas d’IRCT de cause autre que l’HP1 [20] .<br />

L’oxalémie prédialytique est diminuée de l’ordre de 60 % après<br />

chaque séance (mais bCaOx reste supérieur à 1 unité relative),<br />

retourne à environ 80 % de la concentration prédialytique en<br />

24 heures et 95 % en 48 heures. En effet, l’hémodialyse épure<br />

seulement l’oxalate soluble circulant et entraîne un rebond de<br />

concentration provenant du compartiment à renouvellement<br />

lent, à savoir essentiellement le squelette. Par conséquent,<br />

l’hémodialyse quotidienne (5 heures au minimum par séance)<br />

est la mieux adaptée mais ne peut être appliquée à tous les<br />

patients, ce qui conduit inexorablement à la poursuite des<br />

dépôts systémiques d’oxalate [21] . En ce qui concerne les<br />

dialyseurs, la meilleure épuration est obtenue en utilisant des<br />

membranes de grande surface, soit de type polysulfone à haute<br />

perméabilité, soit de type triacétate de cellulose ; en revanche,<br />

le débit de prédilution ne modifie guère l’épuration de l’oxalate<br />

[22] . L’objectif théorique de toute stratégie de dialyse est de<br />

maintenir l’oxalémie prédialytique inférieure à 50 µmol/l afin<br />

de limiter la progression systémique de la maladie (Tableau 4).<br />

La dialyse péritonéale n’offre pas une épuration suffisante de<br />

l’oxalate mais, chez quelques patients, notamment en cas<br />

d’oxalose infantile, la combinaison de l’hémodialyse quotidienne<br />

et de la dialyse péritonéale permet une clairance<br />

relativement efficace, limite l’exposition systémique et évite les<br />

rebonds postdialytiques d’oxalate. Cependant, cette stratégie de<br />

dialyse combinée impose une qualité de vie déplorable du fait<br />

de la lourdeur de la médicalisation.<br />

Sur ces mêmes arguments physiopathologiques, l’hémodialyse<br />

peut être indiquée avant, pendant ou après transplantation<br />

d’organes (cf. infra).<br />

Globalement, les indications de dialyse sont limitées à<br />

certaines situations précises :<br />

malheureusement lorsque le diagnostic d’HP1 n’a pas encore<br />

été fait ;<br />

chez les enfants présentant une forme infantile d’HP1, dans<br />

l’attente d’une transplantation d’organes ;<br />

en préparation à une transplantation rénale, avant ou après<br />

transplantation hépatique associée, afin d’épurer au maximum<br />

l’oxalate et d’éviter qu’il ne se dépose massivement<br />

dans le parenchyme du greffon ;<br />

à la suite d’une greffe isolée du rein ou d’une greffe combinée<br />

hépatique et rénale, seulement lorsque la reprise de diurèse<br />

n’est pas immédiate ou lorsque survient un dysfonctionnement<br />

transitoire du greffon rénal, afin d’épurer l’oxalate<br />

systémique et éviter les dépôts d’oxalate au niveau du rein<br />

greffé ;<br />

exceptionnellement chez des malades relativement âgés et en<br />

l’absence d’alternative thérapeutique ;<br />

dans les pays en développement, l’hémodialyse (ou à défaut<br />

la dialyse péritonéale) est malheureusement la seule alternative<br />

à l’abandon de traitement, ce qui pose des problèmes<br />

éthiques majeurs.<br />

Transplantation d’organes<br />

La stratégie de transplantation est dictée par l’évaluation du<br />

stock systémique d’oxalate, estimé par la mesure répétée de la<br />

FG, de l’oxalémie et de l’atteinte systémique (fond d’œil, DEXA,<br />

histomorphométrie osseuse) [9] . Cette atteinte systémique,<br />

grossièrement corrélée au temps passé en IRCT, conditionne la<br />

morbidité et la mortalité et, idéalement, toute transplantation<br />

doit donc être une démarche précoce, dès que la FG est inférieure<br />

à 40 à 30 ml/min/1,73 m 2 .<br />

Transplantation rénale<br />

La transplantation rénale permet une élimination efficace de<br />

l’oxalate soluble mais le greffon doit alors faire face non<br />

seulement à la production hépatique d’oxalate soluble mais<br />

aussi à la part d’oxalate tissulaire libérée dans le plasma. Il<br />

s’ensuit une récidive des dépôts d’oxalate de calcium dans le<br />

greffon rénal dans 100 % des cas et une pérennisation de la<br />

surcharge tissulaire. La transplantation rénale isolée est donc a<br />

priori contre-indiquée en raison du risque de récidive rénale et<br />

de l’absence d’efficacité sur l’atteinte systémique.<br />

Chez certains patients porteurs de la mutation Gly170Arg ou<br />

Phe152Ile, il existe un degré variable mais certain de sensibilité<br />

à la pyridoxine ; celle-ci doit donc être systématiquement testée<br />

et validée, pouvant alors faire discuter théoriquement une<br />

transplantation rénale isolée associée à un traitement ininterrompu<br />

par pyridoxine [15, 23] .<br />

Dans les pays en développement, la transplantation rénale<br />

isolée est proposée soit en l’absence de diagnostic précis, soit<br />

dans l’attente d’une transplantation combinée hépatique et<br />

rénale dans un autre pays, soit malheureusement comme seule<br />

alternative à la dialyse. Les échecs sont nombreux, d’autant que<br />

les mutations associées à la sensibilité à la pyridoxine sont peu<br />

fréquentes. Cela pose d’importants problèmes éthiques et<br />

parfois de santé publique. Ce constat permet d’insister sur la<br />

nécessité à entreprendre un traitement conservateur précoce et<br />

agressif, mais aussi sur le fait qu’il est légitime de s’abstenir de<br />

tout acharnement thérapeutique en l’absence de ressources<br />

adaptées, notamment dans les formes sévères d’oxalose<br />

infantile.<br />

Argumentaire pour la transplantation hépatique<br />

Dans la mesure où la production d’oxalate est strictement<br />

limitée aux peroxysomes hépatocytaires, unique site de détoxification<br />

du glyoxylate, seule l’hépatectomie permet de contrôler<br />

la situation métabolique. Cette production est si importante que<br />

les tentatives de remplacement enzymatique sont actuellement<br />

toutes vouées à l’échec tant que le foie natif est présent. La<br />

transplantation hépatique orthotopique représente donc une<br />

forme d’enzymothérapie substitutive en apportant l’enzyme<br />

manquante au bon endroit, tant en ce qui concerne l’organe<br />

(foie), que la cellule (hépatocyte) ou la structure intracellulaire<br />

(peroxysome) [24] . L’objectif de la transplantation d’organes dans<br />

l’HP1 est donc de transformer un bilan d’oxalate inexorablement<br />

positif en un bilan progressivement négatif, en interrompant<br />

la production hépatique (transplantation hépatique) et en<br />

restaurant l’épuration rénale (transplantation rénale).<br />

6 Néphrologie


Tableau 5.<br />

Proposition de stratégie de transplantation d’organes selon le niveau de fonction rénale. Actuellement, la plupart des équipes ont opté pour la transplantation<br />

combinée hépatique et rénale dans la quasi-totalité des indications.<br />

Transplantation Foie avec rein Foie puis rein<br />

HD périopératoire HD++ entre-temps<br />

Forme infantile (IRCT avant 2 ans) Oui Oui<br />

Urgence relative<br />

Transplantation combinée hépatique et rénale<br />

Chaque année en Europe, cinq à dix transplantations combinées<br />

hépatiques et rénales sont rapportées chez des enfants<br />

atteints d’HP1, ce qui représente les deux tiers de l’ensemble des<br />

indications pédiatriques de greffes combinées [25] . Les résultats<br />

sont encourageants aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte,<br />

avec une survie des patients de 79 %à5ansetde68%à<br />

10 ans [26] ; une survie similaire, de 76 %à8ans, est rapportée<br />

en Amérique du Nord [27] . Cette stratégie est applicable même<br />

chez de jeunes enfants, avec d’excellents résultats [28] . Toutefois,<br />

la transplantation combinée chez des patients en IRCT et avec<br />

une thésaurismose significative expose au risque de compromettre<br />

la fonction et la survie du greffon rénal exposé à<br />

l’élimination massive et brutale d’oxalate à laquelle il est soumis<br />

dès le déclampage vasculaire (oxalate soluble circulant + oxalate<br />

libéré des tissus). Malgré cela, la survie rénale est de 95 % à<br />

3 ans et la FG est de 40 à 60 ml/min/1,73 m 2 après 5 à<br />

10 ans [29] .<br />

Transplantation préemptive isolée du foie<br />

Théoriquement, il est légitime de proposer une transplantation<br />

hépatique isolée lorsque la FG est encore suffisamment<br />

bonne pour espérer qu’elle se stabilise ou qu’elle s’améliore<br />

après greffe [30, 31] . Cette stratégie a été appliquée ponctuellement<br />

à des receveurs dont la FG se situait entre 60 et<br />

40 ml/min/1,73 m 2 , avec des résultats variables, et en tout cas<br />

suffisamment aléatoires pour en limiter strictement les indications.<br />

En effet, chaque malade a sa propre évolutivité et, une<br />

fois atteinte une FG de 50 ml/min/1,73 m 2 , le temps mis pour<br />

atteindre le stade d’IRCT est très variable d’un sujet à l’autre, de<br />

sorte que la transplantation hépatique peut introduire un risque<br />

vital prématuré. Cette notion de risque vital n’est pas comparable<br />

au risque fonctionnel lié à la progression de la thésaurismose<br />

mais impose d’éviter ou de limiter la surcharge<br />

systémique [32] .<br />

En outre, il est important de rappeler que l’HP1 est la seule<br />

maladie peroxysomale qui ne comporte pas d’atteinte neurologique,<br />

et pour laquelle le traitement conservateur s’est considérablement<br />

amélioré et codifié au cours des dix dernières années ;<br />

la notion d’« urgence métabolique » n’intervient donc pas dans<br />

l’HP1.<br />

Bénéfice de la transplantation sur l’atteinte<br />

systémique<br />

Après transplantation combinée hépatique et rénale, la<br />

glycolatémie se normalise rapidement mais l’oxalémie se<br />

normalise d’autant plus lentement que le stockage tissulaire<br />

était important (Tableau 4) [33] ; cela peut prendre des mois,<br />

voire des années. Le risque de néphrocalcinose et de lithiase est<br />

donc transposé au greffon rénal. Aussi, lorsque l’exposition<br />

présumée du greffon rénal est trop importante (oxalémie<br />

supérieure à 50 µmol/l), des séances quotidiennes d’hémodialyse<br />

sont encore nécessaires, à condition que les variations volémiques<br />

soient contrôlées pour ne pas provoquer d’oligurie posttransplantation,<br />

qui pourrait augmenter brutalement la<br />

saturation urinaire en oxalate de calcium et donc le risque de<br />

Rein seul<br />

HD périopératoire<br />

Foie seul<br />

Non X<br />

FG entre 40 et 60 ml/min/1,73 m 2 X X X Discutable<br />

FG entre 20 et 40 ml/min/1,73 m 2 Oui Non Discutable si sensible B 6 et mutation Gly170Arg X<br />

FG < 20 ml/min (IRCT) Oui Oui Non X<br />

B 6 : pyridoxine ; FG : filtration glomérulaire ; HD : hémodialyse ; IRCT : insuffisance rénale chronique terminale.<br />

Néphrologie<br />

Hyperoxalurie primitive 18-064-M-10<br />

cristallisation [6] . De même, l’hémodialyse post-transplantation<br />

s’impose lorsque existe un retard de fonction du greffon afin de<br />

ne pas cumuler nécrose tubulaire aiguë et précipitation parenchymateuse<br />

d’oxalate de calcium. En revanche, lorsque la<br />

diurèse post-transplantation est immédiate et suffisamment<br />

abondante, l’hémodialyse est inutile et il est alors essentiel de<br />

protéger le greffon rénal par une hydratation abondante, des<br />

inhibiteurs de la cristallisation de l’oxalate de calcium et parfois<br />

un diurétique thiazidique en cas d’hypercalciurie (cf. traitement<br />

conservateur). En revanche, il n’y a pas lieu de poursuivre le<br />

traitement par pyridoxine dans la mesure où le foie a été greffé.<br />

Le suivi repose alors essentiellement sur l’évolution de l’oxalémie<br />

et du volume cristallin (Tableau 4) [34] .<br />

Après transplantation combinée réussie, l’amélioration<br />

systémique peut être spectaculaire : amélioration de l’atteinte<br />

ostéoarticulaire, de la fonction myocardique, des manifestations<br />

artéritiques, et surtout de la qualité de vie globale, etc.<br />

Stratégie de transplantation (Tableau 5)<br />

Plusieurs cas de figure peuvent être envisagés [6, 28, 34-36] .<br />

Chez les patients dont la FG est supérieure à 30 à<br />

40 ml/min/1,73 m 2 et pour lesquels une indication de<br />

transplantation hépatique isolée pourrait être discutée, il<br />

semble préférable d’attendre que la FG diminue davantage<br />

afin de proposer une transplantation combinée hépatique et<br />

rénale en un temps.<br />

En effet, chez les patients régulièrement suivis et dont la FG<br />

diminue progressivement, une transplantation combinée<br />

hépatique et rénale en un temps doit être envisagée lorsque<br />

la FG est de 30 à 15 ml/min/1,73 m 2 afin d’éviter une<br />

transplantation au stade d’oxalose avancée. Il s’agit alors<br />

généralement d’un donneur décédé unique.<br />

Chez les patients ayant atteint le stade d’IRCT et traités par<br />

dialyse, l’épuration doit tout d’abord être temporairement<br />

optimisée (hémodialyse quotidienne ± dialyse péritonéale)<br />

avant d’envisager une transplantation combinée hépatique et<br />

rénale. Toutefois, à ce stade, la transplantation peut être<br />

envisagée en trois temps :<br />

transplantation hépatique ;<br />

période d’épuration optimale afin de stabiliser l’oxalémie en<br />

dessous de 50 µmol/l ;<br />

transplantation rénale.<br />

Ceci concerne notamment les jeunes enfants qui présentent<br />

une forme infantile sévère. Le recours à un donneur vivant n’est<br />

pas exclu dans ce contexte de transplantation en deux temps.<br />

Si la transplantation combinée hépatique et rénale est réalisée<br />

en un seul temps, l’épuration de l’oxalate doit être impérativement<br />

assurée efficacement par le greffon ou, à défaut, par<br />

hémodialyse (cf. supra).<br />

Le choix de la stratégie dépend évidemment des moyens<br />

disponibles et de l’expérience de l’équipe mais tout doit être fait<br />

pour que le temps passé sur liste d’attente soit le plus bref<br />

possible. La lourdeur de la prise en charge impose un accompagnement<br />

du patient dès le moment du diagnostic, afin de lui<br />

permettre de comprendre au mieux sa maladie pour qu’il puisse<br />

en saisir les enjeux thérapeutiques.<br />

7


18-064-M-10 Hyperoxalurie primitive<br />

Perspectives thérapeutiques<br />

De nombreuses recherches sont en cours, fruits des avancées<br />

de la biochimie, de la biologie moléculaire et de la biologie<br />

cellulaire, pour tenter de différer ou de se substituer au traitement<br />

palliatif que représente la transplantation combinée<br />

hépatique et rénale.<br />

« Oxalobacter formigenes »<br />

Oxalobacter formigenes est une bactérie anaérobie saprophyte<br />

de la flore intestinale qui a la propriété de dégrader l’oxalate<br />

d’origine alimentaire. Chez les patients atteints de mucoviscidose,<br />

la prescription d’antibiotiques à large spectre peut<br />

entraîner la disparition d’Oxalobacter formigenes et donc l’apparition<br />

de lithiases d’oxalate de calcium [37] . Sur cette base, il a<br />

été proposé de traiter les patients atteints d’HP par ingestion de<br />

gélules contenant Oxalobacter formigenes [38] : les résultats d’un<br />

premier essai thérapeutique s’avèrent décevants [39] . La réduction<br />

attendue pourrait être le fait d’une dégradation accrue de<br />

l’oxalate intestinal mais aussi de la création d’un gradient<br />

transépithélial permettant l’extraction partielle de l’oxalate<br />

plasmatique via la lumière intestinale [40] .<br />

Pyridoxamine<br />

La pyridoxamine est une molécule capable de chélater les<br />

précurseurs de l’oxalate, en particulier les composés carbonylés.<br />

Son utilisation sur des modèles animaux a montré une efficacité<br />

certaine, notamment sur l’élimination urinaire d’oxalate et de<br />

glycolate ainsi que sur la formation de cristaux d’oxalate de<br />

calcium, mais la tolérance chez l’homme est loin d’être<br />

validée [41] .<br />

Enzyme capable de dégrader l’oxalate<br />

L’administration orale d’une enzyme stable au niveau intestinal<br />

et capable de dégrader spécifiquement l’oxalate<br />

(ALTU-237) est susceptible de réduire l’oxalurie de 30 à 50 %,<br />

de prévenir la néphrocalcinose et de préserver la fonction rénale<br />

sur un modèle murin invalidé pour Agxt [42] . L’utilisation de ce<br />

produit est actuellement envisagée chez l’homme.<br />

Molécules chaperonnes<br />

Différentes configurations spatiales de l’AGT ont été obtenues<br />

et les modifications d’acides aminés identifiées dans ces<br />

structures cristallines peuvent affecter la conformation et la<br />

stabilité de l’enzyme [24, 43] . Certaines petites molécules capables<br />

de diffuser largement dans les cellules agissent comme chaperonnes<br />

et permettent aux protéines mutées nouvellement<br />

synthétisées de conserver une conformation tridimensionnelle<br />

normale [44] . Ces molécules chaperonnes peuvent trouver des<br />

applications dans les anomalies de conformation (mais pas de<br />

fonction) des protéines, comme c’est le cas pour certains<br />

génotypes d’HP1. La mise au point d’un modèle de souris knockout<br />

est une étape essentielle pour le développement de ces<br />

thérapeutiques [16] .<br />

Transplantation d’hépatocytes<br />

La transplantation d’hépatocytes a été initiée à partir d’un<br />

modèle murin Agxt –/–[45] visant à modifier la quasi-totalité des<br />

hépatocytes, en associant irradiation hépatique et expression de<br />

hepatic growth factor (HGF). L’injection d’hépatocytes d’animaux<br />

Agxt +/+ est réalisée par voie intrasplénique, permettant un taux<br />

de colonisation hépatocytaire de plus de 90 % après 24 semaines.<br />

Cette repopulation cellulaire permet une diminution de<br />

l’oxalurie de 1,51 ± 0,53 à 0,19 ± 0,01 mmol et une disparition<br />

de la cristallurie. Ces résultats sont donc encourageants.<br />

Thérapie génique<br />

La thérapie génique est séduisante dans ce contexte et la<br />

transfection de l’AGT dans des hépatocytes a permis quelques<br />

résultats encourageants [46, 47] . Toutefois, dans le cas particulier<br />

de l’HP1, les vecteurs actuels ne permettent pas d’obtenir un<br />

taux de transfection suffisant (souhaitable de l’ordre de 100 %),<br />

ni les moyens d’assurer un adressage peroxysomal exclusif, et<br />

l’application en pathologie humaine est encore lointaine.<br />

■ Hyperoxalurie primitive de type 2<br />

L’HP2 (OMIM#604296) est beaucoup plus rare que l’HP1 et<br />

moins de 50 cas ont été publiés. La transmission est autosomique<br />

récessive et l’affection semble plus fréquente dans la<br />

population asiatique [48] .<br />

Diagnostic<br />

Outre l’hyperoxalurie, le phénotype biochimique de l’HP2 est<br />

caractérisé par une élimination accrue de L-glycérate<br />

(Tableau 1). Le diagnostic est le plus souvent porté entre 18 et<br />

24 mois [47] ; il s’agit généralement d’une symptomatologie<br />

lithiasique. En revanche, la survenue d’infections urinaires et<br />

l’existence d’une néphrocalcinose sont moins souvent mentionnées<br />

que pour l’HP1. La fonction rénale est habituellement<br />

normale au moment du diagnostic et la FG reste préservée plus<br />

longtemps que dans l’HP1. La présentation globale de l’HP2 est<br />

en effet moins sévère que dans l’HP1, probablement du fait<br />

d’une moindre élimination urinaire d’oxalate [49] .<br />

La recherche d’une HP2 mérite d’être réalisée chaque fois<br />

qu’un patient présente une symptomatologie compatible avec<br />

une HP1 mais sans hyperglycolaturie, avec une augmentation<br />

de la L-glycératurie ou lorsque le séquençage du gène AGXT est<br />

négatif. La confirmation du diagnostic d’HP2 peut être obtenue<br />

en mesurant l’activité glyoxylate réductase (GR) et D-glycérate<br />

déshydrogénase (DGDH) à partir d’une biopsie hépatique, mais<br />

aussi au niveau des globules rouges et des cellules mononucléées<br />

du sang périphérique. Lorsqu’elle est possible, l’étude moléculaire<br />

est aujourd’hui préférable.<br />

Approche moléculaire<br />

Le gène muté (GRHPR) code la GR/hydroxypyruvate réductase<br />

; il est localisé sur le chromosome 9p11 et comporte neuf<br />

exons étendus sur environ 9 kpb. Une quinzaine de mutations<br />

ont été décrites ; les plus fréquentes sont Gly165Asp et delG<br />

codon 35. Toutefois, ces mutations ne sont présentes que chez<br />

5 à 20 % des malades.<br />

La GR et la DGDH sont présentes dans les leucocytes, les<br />

reins et le foie où l’activité enzymatique est la plus importante<br />

[50] . La structure cristalline de la GRHPR a été récemment<br />

identifiée [51] .<br />

Traitement<br />

Le traitement conservateur revêt les mêmes recommandations<br />

que pour l’HP1, mais la pyridoxine, coenzyme de l’AGT, n’est<br />

pas justifiée. Certains patients atteints d’HP2 ont pu bénéficier<br />

d’une transplantation rénale isolée au stade d’IRCT [35] .<br />

■ Autres types d’hyperoxalurie<br />

primitive<br />

Dix à 20 % des patients qui présentent un phénotype<br />

d’hyperoxalurie primitive ont des activités AGT et GR-HR<br />

normales. Chez ces patients, le séquençage des gènes AGXT et<br />

GRHPR ne retrouve aucune mutation caractéristique d’une<br />

HP1 ou d’une HP2. Il existe donc probablement un type 3,<br />

voire d’autres types, dont la physiopathologie est encore<br />

inconnue.<br />

■ Conclusion<br />

L’hyperoxalurie primitive de type 1 est une affection gravissime<br />

dont le diagnostic est souvent retardé, même s’il est assez<br />

8 Néphrologie


.<br />

simple à confirmer lorsqu’il a été évoqué. Le traitement est<br />

lourd pour les patients, pour leur entourage et pour la société.<br />

De nombreuses perspectives de recherche sont néanmoins<br />

engagées, pour lesquelles le développement d’une base internationale<br />

de données est en cours d’élaboration.<br />

Les autres types d’hyperoxaluries primitives sont progressivement<br />

démembrés en dépit de leur extrême rareté.<br />

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Pour en savoir plus<br />

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(AIRG). www.airg-france.org.<br />

Oxal Europe. www.oxaleurope.com.<br />

Nephrogones.www.chu-lyon.fr/internet/chu/etablissements/hfme/maladies_<br />

renales_rares/.<br />

The German PH self support group. www.ph-selbsthilfe.org.<br />

The Oxalosis and Hyperoxaluria Foundation (OHF). www.ohf.org.<br />

Nomenclature du génome humain. www.gene.ucl.ac.uk/nomenclature/.<br />

P. Cochat (pierre.cochat@chu-lyon.fr).<br />

S. Fargue.<br />

J. Bacchetta.<br />

F. Beby.<br />

J.-F. Sabot.<br />

J. Harambat.<br />

Centre de référence des maladies rénales rares, Inserm U820, Hospices civils de Lyon, Université de Lyon, service de pédiatrie, Hôpital Femme Mère Enfant,<br />

59, boulevard Pinel, 69677 Bron cedex, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Cochat P., Fargue S., Bacchetta J., Beby F., Sabot J.-F., Harambat J. Hyperoxalurie primitive. EMC (Elsevier<br />

Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-064-M-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

M. Beaufils<br />

L’hypertension touche 26 % de la population mondiale, avec de grandes disparités suivant les contrées.<br />

Sa fréquence augmente avec l’âge. Elle est un des facteurs importants du risque cardiovasculaire global.<br />

Sa définition et sa classification ont évolué avec le temps, et ce processus s’accélère actuellement. En tout<br />

cas son diagnostic ne saurait reposer sur une simple mesure au cabinet médical, mais suppose une<br />

confirmation à l’aide d’une automesure à domicile ou d’une mesure ambulatoire. Même mesurés au<br />

mieux, les chiffres de pression artérielle doivent s’intégrer dans le risque global et c’est de celui-ci que<br />

dépendent les décisions thérapeutiques. Le mécanisme qui conduit à une hypertension n’est assurément<br />

pas univoque, et une multitude de facteurs y concoure, les uns à composante génétique, d’autres relevant<br />

de l’environnement. Dans tous les cas le rein se trouve au centre de la physiopathologie de l’hypertension,<br />

par la régulation du bilan sodé et la relation pression/natriurèse. On dispose actuellement d’une riche<br />

panoplie d’antihypertenseurs. Chacun peut être utilisé en première intention suivant le contexte du<br />

patient, mais la plupart nécessiteront au moins deux médicaments. Des mesures hygiénodiététiques sont<br />

par ailleurs indispensables. Malgré ce riche arsenal et le foisonnement des recommandations, le taux de<br />

contrôle de l’hypertension (< 140/90 mmHg) reste encore médiocre.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Hypertension ; Hypertension essentielle ; Mesure de la pression artérielle ; MAPA ;<br />

Système rénine-angiotensine<br />

Introduction 1<br />

Définition et classification : remaniement progressif 1<br />

Redéfinir peu ou prou l’hypertension 2<br />

Diagnostic d’hypertension 3<br />

Mesure de la pression artérielle 3<br />

Pièges diagnostiques 4<br />

Épidémiologie 4<br />

Prévalence 4<br />

Hypertension artérielle et ethnie 4<br />

Hypertension et migrations de populations 4<br />

Pathogénie 4<br />

Rôle incontournable du rein 4<br />

Anomalie génétique de la réabsorption du sodium ? 5<br />

Génétique 6<br />

Vieillissement artériel et hypertension systolique isolée 7<br />

Autres facteurs endogènes 7<br />

Facteurs d’environnement 8<br />

Hypertension artérielle et risque cardiovasculaire 9<br />

Risque global 9<br />

Syndrome métabolique 9<br />

Atteinte rénale infraclinique 9<br />

Hypertension artérielle et risque rénal 9<br />

Quel bilan ? 10<br />

Traitement 10<br />

Validation : études 10<br />

Qui et quand traiter ? 11<br />

Comment traiter ? 12<br />

Hypertension artérielle résistante 13<br />

Néphrologie<br />

■ Introduction<br />

La situation qualifiée d’hypertension est extraordinairement<br />

fréquente, surtout à l’âge mûr ; elle est considérée comme la<br />

première cause au monde de mortalité (via un accroissement<br />

majeur du risque cardiovasculaire, cardiopathie ischémique et<br />

accident vasculaire cérébral [AVC]) et de morbidité grave [1-4] .Il<br />

s’agit donc d’un problème majeur de santé publique, qui<br />

comporte de plus de lourdes implications financières qui ne<br />

sont pas sans altérer parfois la qualité scientifique des débats.<br />

Sa définition a fluctué avec le temps, mais c’est aujourd’hui<br />

le concept même qui est en pleine évolution, avec pour conséquence<br />

un abord nouveau aussi bien de la classification, que du<br />

diagnostic et du traitement.<br />

On sait de longue date que l’hypertension dite « essentielle »<br />

en est de très loin la forme la plus fréquente. Le temps n’est<br />

plus où l’on pensait que l’hypertension essentielle était une<br />

entité en voie de meilleure compréhension, voire de démembrement.<br />

On connaît mieux aujourd’hui son polymorphisme<br />

remarquable, mais aussi son chevauchement avec d’autres<br />

formes considérées naguère comme des hypertensions secondaires<br />

bien distinctes (hyperaldostéronisme, néphropathies).<br />

L’arsenal thérapeutique face à cette pathologie est désormais<br />

d’une grande richesse, mais paradoxalement le taux de contrôle<br />

de l’hypertension reste médiocre, progresse peu, et le silent killer<br />

poursuit son œuvre sans être trop perturbé.<br />

■ Définition et classification :<br />

remaniement progressif<br />

18-026-B-10<br />

La définition de l’hypertension a longtemps reposé (et c’est<br />

encore le cas dans une certaine mesure) sur des chiffres seuils.<br />

Ces chiffres ont d’abord été de 160/95 mmHg, puis de<br />

1


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

140/90 mmHg. C’est cette dernière définition qui prévaut<br />

encore dans la recommandation française de la Haute Autorité<br />

de santé (HAS).<br />

“ Point fort<br />

L’hypertension est définie par une pression artérielle<br />

supérieure à 140 mmHg pour la pression artérielle<br />

systolique (PAS) ou 90 mmHg pour la pression artérielle<br />

diastolique (PAD). Ce seuil est néanmoins arbitraire, car il<br />

n’y a pas de seuil pour le risque d’événement<br />

cardiovasculaire associé. La recommandation américaine<br />

considère comme « préhypertendus » les sujets ayant une<br />

PAS entre 120 et 140 mmHg. La recommandation<br />

européenne adopte une définition « glissante », fonction<br />

des facteurs de risque associés.<br />

Une telle définition est cependant remise en cause. Elle ne<br />

serait acceptable que s’il existait un seuil de pression artérielle<br />

au-dessus duquel le risque cardiovasculaire s’élèverait de<br />

manière abrupte, ou un seuil au-dessus duquel une thérapeutique<br />

serait bénéfique, tandis qu’elle ne le serait pas si elle était<br />

instaurée pour des valeurs plus basses. Or tel n’est pas le cas. Il<br />

est donc plusieurs excellentes raisons de remettre en cause cette<br />

définition, travail qui n’est que partiellement accompli, tant le<br />

changement d’habitudes est profond et paraît difficile à gérer.<br />

Il existe une relation linéaire, sans aucune forme de seuil,<br />

entre la pression artérielle et le risque cardiovasculaire. Le travail<br />

de la Prospective Studies Collaboration, portant sur près de<br />

1 million de sujets, a confirmé cette linéarité jusqu’à des valeurs<br />

aussi basses que 110-115 mmHg pour la pression artérielle<br />

systolique (PAS) et 70-75 mmHg pour la pression artérielle<br />

diastolique (PAD) [5] . Le nombre insuffisant de sujets ne permet<br />

pas de tester si la relation descend plus bas encore. En tout cas<br />

il y a doublement du risque cardiovasculaire entre 120 et<br />

140 mmHg (Fig. 1).<br />

Les sujets dont la PAS se situe entre 120 et 140 mmHg ont<br />

donc un risque cardiovasculaire plus élevé que ceux dont les<br />

valeurs sont plus basses ; cela a été confirmé dans de nombreuses<br />

séries [6-8] .<br />

Les deux tiers des AVC et plus de la moitié des accidents<br />

coronaires sont considérés imputables à la pression artérielle. Or<br />

plus de la moitié de ces accidents imputables survient pour des<br />

valeurs de PAS au-dessous de 140 mmHg [9] . Qui plus est,<br />

certaines études ont montré, chez des sujets à risque particulier,<br />

un bénéfice notable d’un traitement antihypertenseur, même si<br />

la pression artérielle est inférieure à 140/90 mmHg [10] .<br />

La définition arbitraire de l’hypertension fondée sur les<br />

valeurs de 140/90 mmHg ne reflète donc pas des réalités<br />

cliniques. Face à ce paradoxe, plusieurs attitudes sont possibles,<br />

illustrées par les trois recommandations majeures récentes<br />

(Tableau 1).<br />

Ignorer ce débat et maintenir le seuil de 140/90 mmHg<br />

considéré comme « consensuel », c’est l’attitude, pragmatique,<br />

adoptée dans la recommandation française, même si les problèmes<br />

ci-dessus y sont brièvement évoqués.<br />

Redéfinir peu ou prou l’hypertension<br />

La recommandation américaine Joint National Committee<br />

(JNC) 7 [11] distingue trois zones : en deçà de 120 mmHg, les<br />

sujets sont normotendus ; entre 120 et 140 mmHg, ils sont<br />

« préhypertendus » ; au-delà de 140 mmHg, ils sont hypertendus.<br />

La recommandation de l’European Society of Hypertension/<br />

European Society of Cardiology (ESH/ESC) [12] adopte un<br />

dégradé de qualificatifs pour les niveaux successifs de pression<br />

et exprime sa réticence à fixer un seuil au-delà duquel le terme<br />

« hypertension » devient applicable. Elle le fait néanmoins, pour<br />

Mortalité par cardiopathie ischémique<br />

256<br />

128<br />

64<br />

32<br />

16<br />

8<br />

4<br />

2<br />

1<br />

80-89 ans<br />

70-79 ans<br />

60-69 ans<br />

50-59 ans<br />

40-49 ans<br />

120 140 160 180 PAS (mmHg)<br />

Figure 1. Risque de mortalité par cardiopathie ischémique en fonction<br />

de la pression artérielle systolique, par tranche d’âge. Noter l’absence de<br />

seuil tensionnel à partir duquel le risque se majorerait. D’après Lewington<br />

et al. [5] . PAS : pression artérielle systolique.<br />

Tableau 1.<br />

Classification de la pression artérielle dans les différentes<br />

recommandations.<br />

PAS (mmHg) HAS JNC 7 ESH/ESC<br />

< 120 et < 80 Normale Normale Optimale<br />

120-129 ou 80-84 Normale Préhypertension Normale<br />

130-139 ou 85-89 Normale Préhypertension Normale haute<br />

140-159 ou 90-99 HTA grade 1 HTA grade 1 HTA grade 1<br />

160-179 ou 100-109 HTA grade 2 HTA grade 2 HTA grade 2<br />

≥ 180 ou ≥ 110 HTA grade 3 HTA grade 2 HTA grade 3<br />

≥ 140 et < 90 HTA systolique isolée<br />

HAS : Haute Autorité de santé ; JNC : Joint National Committee ; ESH/ESC :<br />

European Society of Hypertension/European Society of Cardiology ; PAS :<br />

pression artérielle systolique ; HTA : hypertension artérielle.<br />

« ne pas troubler les esprits », mais n’en propose pas moins une<br />

définition plus flexible dans laquelle l’hypertension peut<br />

commencer à 120, 130 ou 140 mmHg en fonction du niveau de<br />

risque cardiovasculaire global (Fig. 2). C’est du reste la position<br />

défendue depuis 10 ans par l’Organisation mondiale de la santé<br />

(OMS) et la Société internationale d’hypertension [13] .<br />

En résumé : le seuil de l’hypertension demeure fixé à<br />

140/90 mmHg, mais tout le monde admet que cette définition<br />

n’est pas satisfaisante. La recommandation américaine propose<br />

une prise en charge par des mesures hygiénodiététiques dès<br />

120 mmHg. La recommandation européenne propose de nuancer<br />

fortement cette définition en fonction du risque cardiovasculaire<br />

global, et conseille une prise en charge thérapeutique (y<br />

compris médicamenteuse) pour des seuils plus bas lorsque le<br />

risque est élevé.<br />

2 Néphrologie


Nombre<br />

d’autres facteurs<br />

de risque<br />

■ Diagnostic d’hypertension<br />

Le diagnostic d’hypertension paraît à première vue si simple<br />

qu’il n’est généralement pas porté avec la rigueur qui s’imposerait.<br />

Ainsi certaines hypertensions ne sont pas diagnostiquées,<br />

d’autres sont diagnostiquées par excès et traitées dans une<br />

inutile précipitation, source de remise en cause ultérieure.<br />

Hormis les cas, assez rares, dans lesquels l’hypertension est<br />

manifestement sévère et associée à un niveau élevé de risque<br />

cardiovasculaire, le bon sens commande de prendre le temps<br />

d’une évaluation sérieuse avant de formuler un diagnostic qui<br />

implique un traitement à vie.<br />

Mesure de la pression artérielle<br />

0<br />

1-2<br />

Trois ou plus,<br />

AOC, diabète<br />

Maladie<br />

cardiovasculaire<br />

établie<br />

Normale<br />

PAS 120-129<br />

PAD 80-84<br />

Normale haute<br />

PAS 130-139<br />

PAD 85-89<br />

Si l’on persiste à se fixer sur des chiffres, encore faut-il que<br />

ceux-ci soient fiables et représentent une réalité plus consistante<br />

qu’un instantané du patient. Les recommandations s’accordent<br />

sur la nécessité de mesures répétées et, sauf cas particulier, du<br />

recours à l’automesure ou à la mesure ambulatoire de la<br />

pression artérielle (MAPA).<br />

La pression artérielle mesurée au cabinet médical reste<br />

généralement le premier terme du diagnostic. Toutes les<br />

recommandations estiment par ailleurs qu’elle reste la<br />

référence. La mesure doit être faite deux fois à quelques<br />

HTA grade 1<br />

PAS 140-159<br />

PAD 90-99<br />

HTA grade 2<br />

PAS 160-179<br />

PAD 100-109<br />

HTA grade 3<br />

PAS 180 +<br />

PAD 110 +<br />

Figure 2. Risque vasculaire suivant les chiffres de pression artérielle et les autres facteurs de risque. Le trait désigne le seuil qui doit être considéré comme<br />

hypertension en cas de risque global élevé. Les couleurs désignent ce risque, du vert (risque standard) jusqu’au rouge (risque très fortement majoré). PAS :<br />

pression artérielle systolique ; PAD : pression artérielle diastolique ; HTA : hypertension artérielle ; AOC : atteinte d’organes cibles. Modifié d’après la<br />

recommandation European Society of Hypertension (ESH) 2007.<br />

“ Point fort<br />

L’hypertension ne peut être diagnostiquée sur la foi de la<br />

seule mesure au cabinet médical. Elle doit être confirmée<br />

par une automesure tensionnelle ou une MAPA.<br />

Néphrologie<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

minutes d’intervalle, une troisième fois si les deux premières<br />

sont sensiblement différentes. Hormis les situations manifestement<br />

graves, le diagnostic d’hypertension ne saurait être<br />

posé après une seule consultation. Les mesures doivent être<br />

répétées et la constance de chiffres élevés vérifiée. Nous<br />

n’insistons pas ici sur les modalités techniques de cette<br />

mesure, simples et bien connues mais trop souvent négligées.<br />

L’automesure à domicile : elle doit suivre la « règle des trois »,<br />

3 jours, 3 mesures le matin, 3 mesures le soir. Cette méthode<br />

est d’un appoint considérable et apporte une évaluation bien<br />

plus précise de la pression artérielle du sujet dans la vie<br />

courante. Elle corrèle mieux avec le risque cardiovasculaire<br />

que la pression de consultation. Enfin, elle a l’avantage<br />

d’impliquer le patient dans son diagnostic, puis son traitement.<br />

Pour la HAS, l’automesure doit être systématique<br />

lorsque la pression de consultation est de 140-180 mmHg ou<br />

90-110 mmHg (sauf là encore les situations de risque manifestement<br />

élevé) avant que le diagnostic soit définitivement<br />

posé.<br />

La mesure ambulatoire (MAPA). Elle a l’inconvénient d’être<br />

plus lourde et plus coûteuse que l’automesure. Elle fournit en<br />

contrepartie des informations précieuses sur la variabilité, sur<br />

la différence jour-nuit, sur la montée tensionnelle du petit<br />

matin. Elle aussi corrèle bien avec le risque cardiovasculaire,<br />

mais pas mieux que l’automesure [14] . La HAS lui assigne un<br />

rôle secondaire par rapport à l’automesure. D’autres recommandations<br />

lui sont plus favorables.<br />

Nous ne nous étendons pas sur la mesure de la pression<br />

artérielle centrale, qui peut différer sensiblement de la pression<br />

brachiale du fait de la superposition de l’onde de réflexion. Sa<br />

mesure non invasive est rendue possible par une analyse<br />

informatique de la forme de l’onde de pouls, permettant de<br />

calculer un « index d’augmentation ». Cet appareillage relève<br />

actuellement de centres de recherche, et son intérêt pratique est<br />

encore mal évalué.<br />

3


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

Tableau 2.<br />

Limites de la normale admises avec différentes méthodes de mesure [12] .<br />

Consultation 140/90 mmHg<br />

MAPA éveil 135/85 mmHg<br />

MAPA sommeil 120/70 mmHg<br />

MAPA 24 h 130/80 mmHg<br />

Automesure 135/85 mmHg<br />

MAPA : mesure ambulatoire de la pression artérielle.<br />

Les différentes méthodes de mesure ont des seuils de normalité<br />

légèrement différents (Tableau 2).<br />

Pièges diagnostiques<br />

L’hypertension « de la blouse blanche » est une situation dans<br />

laquelle la pression artérielle est régulièrement élevée en<br />

consultation, alors qu’elle est toujours normale en MAPA ou en<br />

automesure. Sa signification ne fait pas l’unanimité, certains<br />

estiment qu’il s’agit d’une « fausse hypertension », d’autres<br />

études suggèrent au contraire qu’elle n’est pas innocente au<br />

regard du risque cardiovasculaire [15] .<br />

L’hypertension « masquée » correspond à la situation inverse.<br />

La pression artérielle est régulièrement normale en consultation,<br />

mais élevée en MAPA ou automesure. Cette situation comporte<br />

un risque cardiovasculaire augmenté [16] .<br />

Il est enfin une rare situation, chez le sujet âgé, dans laquelle<br />

une calcification excessive des parois artérielles empêche leur<br />

compression normale par le brassard. Les chiffres mesurés sont<br />

alors très élevés alors même que la pression intra-artérielle est<br />

normale. La palpation des artères permet au moins de soupçonner<br />

cet artefact.<br />

■ Épidémiologie<br />

Prévalence<br />

Globalement, 26 % de la population mondiale (sujets de plus<br />

de 20 ans) est hypertendue [3] . La fréquence est sensiblement<br />

différente suivant les régions : elle est évaluée en moyenne à<br />

37 % dans les pays « à économie de marché », variant tout de<br />

même du simple au double entre les États-Unis/Canada<br />

(22 %-23 %) et l’Europe, où elle atteint jusqu’à 45 % à 55 %<br />

dans certains pays [17] . Elle dépasse 40 % dans les Caraïbes et en<br />

Amérique latine. Elle est plus basse en Inde (20 %), en Chine<br />

(22 %), au Moyen-Orient (22 %) et dans l’Afrique subsaharienne<br />

(26 %) [3] . L’hypertension est généralement plus fréquente dans<br />

les zones urbaines que rurales.<br />

“ Point fort<br />

L’hypertension touche environ 25 % de la population<br />

mondiale. Sa prévalence varie du simple au double suivant<br />

les pays. Dans tous les cas, elle augmente fortement avec<br />

l’âge, dépassant 60 % au-delà de 60 ans. Elle est plus<br />

importante également dans certains groupes ethniques.<br />

En France, les données de l’étude Monitoring Trends and<br />

Determinants in Cardiovascular Disease (MONICA) font état<br />

d’une prévalence de 37,4 % et 28,2 % pour les hommes et les<br />

femmes respectivement, avec d’importantes différences interrégionales<br />

[18] . L’âge des sujets de cette cohorte était de 25 à<br />

64 ans, la définition de l’hypertension de 160/95 mmHg. En<br />

milieu professionnel (ce qui implique des biais de sélection non<br />

négligeables), avec une méthodologie rigoureuse, l’étude<br />

Incidence de l’hypertension dans une population active française<br />

(IHPAF) a trouvé une prévalence de 15 %à27%chez les<br />

hommes et 9 % à 16 % chez les femmes, âgés de 50 à<br />

65 ans [19] . La récente Étude nationale nutrition santé fait état,<br />

chez les adultes de 18 à 74 ans, d’une prévalence globale de<br />

23 % pour une pression artérielle supérieure ou égale à<br />

140/90 mmHg, et 31 % pour une pression artérielle élevée et/ou<br />

un traitement antihypertenseur [20] .<br />

Cette prévalence est largement fonction de l’âge et du sexe.<br />

De moins de 10 % vers 20 ans, elle dépasse 60 % au-delà de<br />

60 ans [21, 22] . Les femmes ont une pression artérielle plus basse<br />

que celle des hommes dans la tranche d’âge 35-44 ans, mais<br />

leur pression augmente plus rapidement avec l’âge que celle des<br />

hommes, si bien que leur niveau de pression artérielle devient<br />

supérieur dès la tranche d’âge 55-64 ans [21, 23] .<br />

Le type d’hypertension varie lui aussi largement avec l’âge.<br />

Dans les tranches les plus basses, l’hypertension est habituellement<br />

systolodiastolique, voire diastolique pure. Plus l’âge<br />

avance, plus la composante systolique devient prédominante,<br />

l’hypertension systolique isolée représentant plus de 90 %<br />

au-delà de 70 ans [24] .<br />

Hypertension artérielle et ethnie<br />

Les prévalences nationales ne prennent généralement pas en<br />

compte la diversité ethnique. Dans un même pays, la fréquence<br />

peut varier de manière importante entre ethnies : aux États-<br />

Unis, l’hypertension est considérablement plus fréquente chez<br />

les sujets noirs (32,4 % dans National Health and Nutrition<br />

Examination Survey [NHANES] III) que chez les blancs (23,3 %)<br />

ou les hispano-américains (22,6 %) [21] .<br />

La différence de prévalence de l’hypertension artérielle entre<br />

sujets blancs et noirs aux États-Unis a conduit à un concept<br />

d’« hypertension du sujet noir », qui est l’objet de diverses<br />

polémiques. Les caractéristiques particulières de ces hypertensions<br />

(fréquence des complications, rénine basse et sensibilité<br />

aux diurétiques) sont parfaitement connues des cliniciens et<br />

semblent conférer un substrat consistant à l’idée d’une catégorie<br />

homogène. Il est hautement probable en fait que cette différence<br />

reflète une interaction entre génétique et environnement.<br />

Hypertension et migrations de populations<br />

Les populations primitives, vivant à l’écart du monde industrialisé,<br />

sont souvent peu ou pas hypertendues, et leur pression<br />

artérielle n’augmente pas avec l’âge. De nombreuses « populations<br />

à pression artérielle basse » ont été ainsi recensées. Ces<br />

populations, lorsqu’elles migrent vers des zones industrialisées,<br />

deviennent pour la plupart hypertendues. L’hypertension qui<br />

apparaît alors chez elles est éventuellement d’une fréquence et<br />

d’une gravité supérieures à celles observées dans le pays hôte.<br />

La population noire-américaine a une pression artérielle plus<br />

élevée que celle des sujets vivant en Afrique subsaharienne,<br />

région dont cette population est majoritairement issue [25, 26] .<br />

Les Noirs-Américains élèvent leur pression artérielle plus que les<br />

Blancs pour une charge sodée identique [27] , et ils ont une<br />

rénine plus basse. D’un point de vue finaliste, ce trait est d’une<br />

évidente utilité en termes de survie pour des populations vivant<br />

en climat chaud et ayant un accès limité au sodium. Il peut<br />

être, au contraire, néfaste en climat tempéré avec un accès libre<br />

au sodium, car dès lors tout apport de sodium est source<br />

d’expansion des liquides extracellulaires et d’hypertension.<br />

De multiples exemples de l’histoire plus récente ont été<br />

rapportés, de populations originaires de zones à faible prévalence<br />

d’hypertension, dans lesquelles la pression artérielle s’est<br />

élevée lors de la migration vers des contrées plus riches.<br />

■ Pathogénie<br />

Rôle incontournable du rein<br />

Guyton a montré, il y a plus de 35 ans, que le rein occupe<br />

une place singulière dans les mécanismes de régulation de la<br />

pression artérielle [28] . En effet la « natriurèse de pression », qui<br />

réajuste en permanence le volume des liquides extracellulaires<br />

pour maintenir constante la pression artérielle, est l’étape finale<br />

4 Néphrologie


du système régulateur, et dispose d’un « gain » pratiquement<br />

infini. Cela souligne l’importance critique de l’élimination<br />

rénale de l’eau et du sodium pour déterminer le niveau auquel<br />

est régulée à long terme la pression artérielle.<br />

Le corollaire en est qu’il ne saurait y avoir d’élévation<br />

permanente de la pression artérielle sans que ce mécanisme soit<br />

défaillant. En d’autres termes, il existe chez les hypertendus une<br />

modification de la relation pression-volume, et l’élimination de<br />

la charge sodée nécessite une pression plus élevée pour éviter<br />

une augmentation du volume extracellulaire.<br />

“ Point fort<br />

Le rein est au centre de la physiopathologie de<br />

l’hypertension. De nombreux arguments donnent à<br />

penser que l’hypertension pourrait être le prix à payer<br />

pour le maintien en équilibre de la balance sodée chez des<br />

sujets dont la courbe pression/natriurèse est altérée. Le<br />

mode et le type de cette altération ne sont probablement<br />

pas univoques. En tout cas, la « sensibilité au sodium » de<br />

la pression artérielle est un élément essentiel.<br />

Les mécanismes de cette altération ne sont pas univoques. Un<br />

déplacement vers la droite de la courbe, généralement corollaire<br />

d’une augmentation de la résistance préglomérulaire, serait à<br />

l’origine d’hypertensions non dépendantes du sodium. Une<br />

altération de la pente de cette relation, liée à une surface de<br />

filtration réduite ou à une réabsorption excessive du sodium,<br />

conduirait au contraire à des hypertensions dépendantes du<br />

sodium. Plusieurs explications sont possibles à ces différents<br />

phénomènes. Johnson et al. [29] en ont proposé trois voies :<br />

un mécanisme « rénoprive » (diminution de la filtration<br />

glomérulaire) ;<br />

une stimulation de la réabsorption de sodium dans le tube<br />

collecteur (via le canal sodium épithélial) ;<br />

une ischémie rénale (vasoconstriction, stress oxydatif et<br />

inflammation), forme plus moderne de l’ancienne théorie de<br />

Goldblatt. Quoi qu’il en soit, plusieurs mécanismes de base<br />

semblent impliqués.<br />

Sensibilité accrue au sodium<br />

Normalement, les variations de l’apport sodé dans une assez<br />

large plage ne s’accompagnent d’aucune modification de la<br />

pression artérielle ou de changements minimes, indiquant une<br />

mise en œuvre normale de la natriurèse de pression. Cette<br />

réponse est néanmoins largement variable dans les populations,<br />

ce qui a conduit au concept d’une « sensibilité au sel », plus ou<br />

moins marquée selon les individus [30] .<br />

Dans l’ensemble, les hypertendus sont plus souvent sensibles<br />

au sel que les normotendus (51 % versus 26 %). Cette sensibilité<br />

varie avec de nombreux facteurs : l’ethnie (les Noirs hypertendus<br />

sont plus souvent sensibles), l’âge, l’obésité, la résistance<br />

à l’insuline. Elle est conditionnée par des facteurs hormonaux<br />

(système rénine-angiotensine, etc.) et par d’autres relevant<br />

directement de l’hémodynamique rénale et/ou de la réabsorption<br />

tubulaire proximale du sodium.<br />

Chiolero et al. ont conduit une élégante étude dans laquelle<br />

ils ont évalué la variation de l’excrétion fractionnelle du lithium<br />

(index de celle du sodium) et de la pression artérielle pour des<br />

niveaux haut ou bas d’apport sodé [31] . Ils ont ainsi individualisé<br />

trois groupes de sujets : en réponse à un apport sodé accru, le<br />

premier groupe augmente son excrétion fractionnelle du<br />

lithium et ne modifie pas, voire baisse légèrement sa pression<br />

artérielle. Le second groupe n’ajuste pas son excrétion fractionnelle<br />

du lithium, et augmente sa pression artérielle. Dans le<br />

troisième groupe, l’excrétion fractionnelle diminue lors de la<br />

Néphrologie<br />

surcharge sodée, et la pression artérielle augmente plus fortement.<br />

Ils ont ainsi démontré que la réponse tensionnelle au<br />

sodium dépend de la capacité d’ajustement de la réabsorption<br />

proximale du sodium.<br />

Anomalie génétique de la réabsorption<br />

du sodium ?<br />

Nombre d’arguments suggèrent que ce trouble de la réabsorption<br />

proximale du sodium est constitutionnel, et donc potentiellement<br />

génétique. Diverses études ont montré que la<br />

sensibilité au sodium avait, par elle même, une composante<br />

génétique. Une anomalie des transferts Na/K a été mise en<br />

évidence dans les parois érythrocytaires de sujets jeunes,<br />

normotendus, mais nés de parents hypertendus [32] . Très tôt,<br />

d’élégantes théories ont suggéré que l’hypertension pourrait être<br />

le prix hémodynamique à payer en présence d’une telle anomalie<br />

pour le maintien d’une balance sodée en équilibre [33] . Parmi<br />

les nombreux gènes-candidats testés, une mutation d’une ou<br />

plusieurs des trois sous-unités de l’alpha-adducine est sans doute<br />

la plus consistante et la plus avancée [34, 35] . Une telle mutation<br />

est d’une fréquence très accrue chez les hypertendus ; elle<br />

corrèle avec la sensibilité au sodium et prédit la réponse<br />

tensionnelle aux diurétiques. L’activation de l’ouabaïne endogène,<br />

suggérée par Garay et par De Wardener, reste néanmoins<br />

d’actualité [36, 37] .<br />

Une hyperfiltration glomérulaire pourrait être le premier<br />

terme de cette compensation. En effet, s’il existe un excès de<br />

réabsorption proximale, limitant l’apport de sodium au néphron<br />

distal, la mise en jeu du rétrocontrôle tubuloglomérulaire<br />

conduit à une augmentation compensatrice de la filtration<br />

glomérulaire. De fait, Bianchi [38] a montré que la filtration<br />

glomérulaire est plus élevée chez des sujets jeunes normotendus<br />

dont les deux parents sont hypertendus (donc a priori prédisposés<br />

à l’hypertension) que chez ceux dont les deux parents<br />

sont normotendus.<br />

De fait, Weir et al. [39] ont montré que la filtration glomérulaire<br />

et la fraction de filtration sont plus élevées chez les sujets<br />

sensibles au sodium. Barba et al. [40] ont étudié la filtration<br />

glomérulaire et la réabsorption proximale du sodium chez<br />

47 volontaires sains normotendus, classés suivant leur sensibilité<br />

au sodium. En régime normosodé, les sujets sensibles au sodium<br />

avaient à la fois une filtration glomérulaire et une réabsorption<br />

proximale du sodium plus élevées que les autres. La différence de<br />

filtration glomérulaire disparaissait sous régime pauvre en sel.<br />

Palatini et al. [41] ont montré chez des sujets jeunes porteurs<br />

d’une hypertension limite que l’hyperfiltration est d’autant plus<br />

marquée si les sujets ont une microalbuminurie. Diverses études,<br />

enfin, ont montré une hyperfiltration chez les sujets noirsaméricains<br />

hypertendus, surtout en régime normosodé [42, 43] .<br />

Ces données suggèrent donc que chez certains individus, le<br />

maintien de la balance sodée se fait effectivement au prix d’une<br />

augmentation de la pression artérielle et de la filtration<br />

glomérulaire.<br />

L’idée est donc largement acquise qu’une hyperfiltration est<br />

commune au stade le plus précoce d’une maladie hypertensive<br />

et qu’elle précède l’augmentation de pression artérielle.<br />

Flux sanguin médullaire<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

Dans les années 1960 a été mise en évidence une substance<br />

produite pas la médullaire rénale, appelée à l’époque medullipine.<br />

Il a ensuite été montré que le flux sanguin médullaire<br />

était un médiateur important de la natriurèse de pression, et<br />

que ce flux est réduit dans nombre d’hypertensions expérimentales.<br />

Diverses études ont étayé cette idée. Chez le spontaneously<br />

hypertensive rat (SHR), la perfusion de captopril dans la médullaire<br />

augmente le flux sanguin médullaire sans altérer le flux<br />

cortical, et diminue la pression artérielle. La relation pressionnatriurèse<br />

est alors déplacée vers la gauche. Chez le rat Dahl<br />

sensible, l’augmentation de l’apport sodé réduit le flux médullaire<br />

en même temps qu’elle augmente la pression artérielle. Si<br />

l’on empêche cette réduction par une perfusion médullaire de<br />

L-arginine, l’hypertension induite par le sodium est aussi évitée.<br />

5


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

Et de fait le NO, et son équilibre avec l’anion superoxyde,<br />

apparaît comme un médiateur essentiel du flux sanguin<br />

médullaire [44] .<br />

Si ces données sont assez convergentes en expérimentation<br />

animale, il n’en existe actuellement aucune contrepartie solide<br />

dans l’hypertension humaine.<br />

Nombre de néphrons réduit à la naissance ?<br />

Brenner a suggéré que l’hypertension essentielle pourrait être<br />

liée à un nombre réduit de néphrons à la naissance, responsable<br />

d’une hyperfiltration compensatrice [45] . Celle-ci expliquerait<br />

alors non seulement l’apparition de l’hypertension, mais aussi<br />

la néphropathie ultérieure.<br />

Des arguments très solides ont été développés en faveur de<br />

cette idée. Parmi diverses études, particulièrement convaincante<br />

est celle, récente, dans laquelle ont été comparés les reins de dix<br />

hommes hypertendus et de dix autres, normotendus, décédés<br />

lors d’accidents de la route [46] . Les hypertendus avaient moitié<br />

moins de néphrons que les normotendus (702 379 contre<br />

1 429 200), et leurs glomérules étaient hypertrophiques.<br />

Au demeurant, le compte et la mesure des glomérules ne sont<br />

pas un travail simple. Hoy et al. [47] ont rapporté une étude<br />

portant sur des reins d’autopsie provenant de sujets d’ethnies<br />

très diverses. Ils ont observé une variation du nombre des<br />

glomérules d’un facteur 9 et une variation de leur volume d’un<br />

facteur 5,6. Il n’y avait pas de différence interethnique franche.<br />

Néanmoins les auteurs ont observé une corrélation forte entre<br />

le nombre et le volume des glomérules. Cette observation leur<br />

a suggéré que l’augmentation du volume des glomérules<br />

pourrait être un facteur compensateur de la réduction de leur<br />

nombre et représenter alors un facteur de susceptibilité à<br />

l’insuffisance rénale.<br />

Un nombre réduit de néphrons suffit-il à expliquer une<br />

hypertension ? Les données obtenues après une néphrectomie<br />

unilatérale chez l’adulte (donneurs de reins par exemple) sont<br />

un peu discordantes, mais dans l’ensemble, l’impression qui<br />

prévaut est que cette néphrectomie n’induit pas une hypertension,<br />

même avec un très long recul. Une néphrectomie chez<br />

le très jeune enfant (en raison d’une tumeur le plus souvent)<br />

semble s’accompagner plus volontiers d’une hypertension à<br />

l’âge adulte. À l’extrême, chez le rat, une néphrectomie pratiquée<br />

dans les heures suivant la naissance entraîne régulièrement<br />

et rapidement une hypertension [48] , alors qu’elle est sans effet<br />

plus tard. Ces données suggèrent que la réduction du nombre<br />

de néphrons n’est pas seule en cause, mais aussi le moment où<br />

elle intervient, et donc les possibilités d’hypertrophie compensatrice<br />

de ces néphrons ; or, c’est celle-ci qui est à la clé de<br />

l’hyperfiltration.<br />

Programmation durant la vie intra-utérine ?<br />

Barker [49] a publié une longue série de travaux indiquant<br />

qu’une souffrance fœtale chronique avec naissance hypotrophe<br />

est associée à une fréquence bien plus élevée d’hypertension et<br />

de diabète à l’âge adulte. Ce concept a été validé par de<br />

nombreuses études, et il est de moins en moins controversé.<br />

Law et Shiell [50] ont passé en revue 21 études qui montraient<br />

presque toutes une PAS plus basse à l’âge adulte pour chaque<br />

tranche de poids de naissance supplémentaire. Cette idée de<br />

perinatal programming a suscité de multiples hypothèses pathogéniques.<br />

Cette relation a été imputée à une « malnutrition »<br />

fœtale, liée soit à une malnutrition maternelle, soit à une<br />

hémodynamique placentaire déficiente. Une hypothèse alternative<br />

incriminerait plutôt la croissance rapide (croissance « de<br />

rattrapage ») qui suit une naissance hypotrophe. Cette croissance<br />

accélérée serait source d’un hyperinsulinisme, et ferait<br />

ainsi le lit du syndrome métabolique et de l’hypertension [51] .<br />

Expérimentalement, une ischémie placentaire en fin de<br />

gestation (clip aortique) donne naissance à des petits de poids<br />

réduit, qui développent rapidement une hypertension [52] .De<br />

même plusieurs études de restriction protéique maternelle chez<br />

l’animal ont montré que les petits nés de ces gestations avaient<br />

un nombre réduit de glomérules, surtout si la restriction<br />

protéique a porté sur la fin de la gestation. Il a été également<br />

montré que ces animaux à glomérules moins nombreux et plus<br />

gros ont une hypertension précoce, une protéinurie, un nombre<br />

de récepteurs AT1 de l’angiotensine augmenté.<br />

Rodriguez et al. [53] ont montré dans l’espèce humaine une<br />

réduction du nombre de néphrons chez les grands prématurés.<br />

De même, Hughson et al. ont constaté une relation linéaire<br />

entre le nombre de glomérules et le poids de naissance des<br />

sujets [54] . Hofman et al. [55] ont montré la présence constante<br />

d’une résistance à l’insuline chez des enfants de 4 à 10 ans nés<br />

prématurés et/ou hypotrophes.<br />

Nous ne détaillons pas ici tout cet argumentaire, dont une<br />

revue générale a été publiée il y a quelques années [56] . L’idée<br />

générale qui en ressort est que certains individus pourraient<br />

naître avec un nombre de néphrons réduit et en hypertrophie<br />

compensatrice. Cette hyperfiltration porterait en elle à la fois le<br />

germe de l’hypertension et celui de la glomérulosclérose. Les<br />

mécanismes de cette programmation apparaissent complexes et<br />

ne sont pas complètement élucidés. Ils pourraient faire intervenir<br />

le système rénine-angiotensine fœtal, le métabolisme des<br />

glucocorticoïdes, et d’autres systèmes encore, au cours de la<br />

période de néphrogenèse, correspondant chez l’homme au<br />

troisième trimestre de la grossesse.<br />

Transplantation<br />

Une raison majeure de considérer le rein comme origine de<br />

l’hypertension réside dans les expériences de transplantation.<br />

De nombreux travaux y ont été consacrés depuis la publication<br />

initiale de Dahl qui avait montré que « l’hypertension suit le<br />

rein ». Dans nombre de modèles d’hypertensions génétiques, si<br />

un rein d’un donneur hypertendu est transplanté à un receveur<br />

normotendu, ce dernier devient hypertendu, et inversement [57] .<br />

En transplantation rénale humaine, des données aussi tranchées<br />

sont impossibles à obtenir, mais il est clair qu’une hypertension<br />

apparaît plus souvent chez les receveurs du rein d’un donneur<br />

hypertendu que si le donneur était normotendu.<br />

Génétique<br />

Une composante héréditaire de l’hypertension est évidente<br />

dans toutes les études épidémiologiques. Des études de familles<br />

ont montré que la corrélation des pressions artérielles est plus<br />

forte chez les jumeaux monozygotes que chez les jumeaux<br />

dizygotes. Elle est plus forte chez les jumeaux dizygotes que<br />

dans la fratrie non gémellaire. Elle est enfin plus forte (aussi<br />

bien mère-enfant que dans la fratrie) pour les enfants naturels<br />

que pour les enfants adoptés [58, 59] . Ces diverses études de<br />

jumeaux et d’adoption ont conduit à estimer entre 20 % et<br />

60 % la part attribuable à la génétique dans la variabilité de la<br />

pression artérielle au sein d’une population.<br />

Pour autant, l’hypertension essentielle n’a pas une transmission<br />

simple de type mendélien. Elle est associée à des polymorphismes<br />

de très nombreux gènes régulateurs (composants du<br />

système rénine-angiotensine, récepteurs adrénergiques, endothéline,<br />

facteur atrial natriurétique, alpha-adducine, etc.), de<br />

manière complexe et variable suivant les ethnies. La situation<br />

apparaît actuellement d’une extrême complexité [60] . Les gènes<br />

de systèmes susceptibles d’influer sur la sensibilité au sodium<br />

ont été les plus étudiés, mais ne sont pas les seuls [61, 62] .<br />

Staessen et al. ont montré par ailleurs que différents polymorphismes<br />

sont capables de potentialiser fortement leurs effets<br />

respectifs sur l’incidence de l’hypertension [63] .<br />

Il existe pourtant quelques formes d’hypertension qui apparaissent<br />

monogéniques et de transmission mendélienne [64] .Ce<br />

sont principalement l’hyperaldostéronisme curable par les<br />

glucocorticoïdes, les excès apparents de minéralocorticoïdes, des<br />

mutations du récepteur minéralocorticoïde et le syndrome de<br />

Liddle. Ces syndromes sont très rares et n’entrent pas dans le<br />

cadre de l’hypertension artérielle essentielle ici envisagée. Au<br />

demeurant, il est des arguments pour penser qu’il en est des<br />

formes mineures, et que celles-ci peuvent être totalement<br />

intriquées avec le tableau pléomorphe de l’hypertension<br />

essentielle. Par exemple, certains polymorphismes du gène<br />

codant le canal sodium épithélial semblent corrélés avec le<br />

niveau de la pression artérielle dans la population générale. De<br />

6 Néphrologie


même, certaines études ont suggéré que d’autres polymorphismes<br />

affectant l’un des éléments impliqués dans la régulation de<br />

la réabsorption distale du sodium peuvent jouer un rôle dans les<br />

hypertensions sensibles au sodium, avec une aldostérone peu ou<br />

pas suppressible.<br />

Vieillissement artériel et hypertension<br />

systolique isolée<br />

Une élévation de la pression artérielle peut résulter d’une<br />

vasoconstriction des artères périphériques, qui augmente la PAS<br />

mais surtout la PAD. C’est ce mécanisme qui prévaut généralement<br />

chez les sujets jeunes. Il résulte de la mise en œuvre de<br />

facteurs hormonaux (système rénine-angiotensine, etc.), nerveux,<br />

endothéliaux, ou autres. L’élévation de la pression<br />

artérielle peut aussi résulter d’une augmentation de la rigidité des<br />

artères élastiques. Celle-ci augmente avec l’âge, conduisant à un<br />

moindre amortissement de l’ondée systolique. Il en résulte une<br />

hypertension artérielle essentiellement ou purement systolique,<br />

caractéristique du vieillissement.<br />

“ Point fort<br />

L’hypertension systolique isolée du sujet âgé relève<br />

surtout d’une rigidité accrue du système artériel, qui est<br />

moins distensible. La PAS est ainsi augmentée, de même<br />

que la pression pulsée (PP), alors que la PAD reste<br />

normale, voire basse.<br />

Avec l’âge, la PAS augmente en effet très régulièrement. Au<br />

contraire, la PAD augmente jusqu’à 50-60 ans, et diminue<br />

ensuite. Par voie de conséquence, la pression différentielle, ou<br />

pulsée (PP) augmente rapidement après cet âge. La pression<br />

artérielle moyenne évolue, elle, relativement peu [24] .<br />

La rigidité artérielle peut être évaluée assez simplement par la<br />

mesure de la vitesse de l’onde de pouls (VOP). Celle-ci est<br />

d’autant plus élevée que les artères sont rigides. Elle croît<br />

régulièrement avec l’âge. Cette rigidité accrue a pour conséquence<br />

un moindre amortissement de la PAS. De plus, la forme<br />

de l’onde de pouls résulte de deux composantes : la première est<br />

l’arrivée de l’onde systolique elle-même. Cette onde systolique<br />

est réfléchie en périphérie, au niveau des artères les plus distales,<br />

donnant lieu à une onde de réflexion qui vient se superposer à<br />

l’onde incidente. Chez les sujets de moins de 50 ans, avec des<br />

artères souples et une VOP basse, l’onde réfléchie vient se<br />

superposer en début de diastole, ce qui contribue à augmenter<br />

la perfusion coronaire sans pour autant augmenter la postcharge.<br />

Très logiquement, l’onde de réflexion intervient d’autant<br />

plus tardivement en diastole que l’artère est plus proximale. Au<br />

contraire, chez les sujets plus âgés avec une VOP élevée, l’onde<br />

de réflexion intervient plus tôt et augmente la PAS sans avoir<br />

d’action sur la PAD. Il en résulte une PAS et une PP plus élevées,<br />

et l’absence de bénéfice sur la circulation coronaire [65] . Cette<br />

augmentation de la PP représente également une contrainte<br />

majorée au niveau des parois artérielles, dont elle accélère le<br />

remodelage.<br />

Les télomères (successions de courtes séquences TTAGGG,<br />

situées à l’extrémité des chromosomes humains) se raccourcissent<br />

au fil des réplications cellulaires et sont donc considérés<br />

comme des « horloges mitotiques », ou indices du « vieillissement<br />

biologique ». Cette attrition progressive limite le nombre<br />

de cycles possibles de réplication cellulaire.<br />

Il existe une corrélation négative entre la longueur des<br />

télomères et la VOP ainsi que la PP. Ce phénomène relie<br />

directement la PP au vieillissement global de l’organisme [66] .La<br />

corrélation est plus marquée chez l’homme que chez la femme,<br />

ce qui reflète quelques différences importantes entre sexes. En<br />

effet à tout âge, les femmes ont des télomères plus longs que<br />

ceux des hommes, ce qui n’est sans doute pas indifférent au fait<br />

Néphrologie<br />

que leur longévité est plus grande. Il a été proposé, et en partie<br />

démontré, que les estrogènes permettraient une épargne de<br />

l’attrition des télomères pendant toute la période où les femmes<br />

y sont largement exposées. Toujours est-il que la relation de la<br />

rigidité artérielle à un indice de vieillissement biologique<br />

conforte avec élégance le vieil adage selon lequel « on a l’âge de<br />

ses artères »...<br />

Autres facteurs endogènes<br />

Système rénine-angiotensine<br />

Le système rénine-angiotensine ne peut être qu’un acteur<br />

majeur dans le déterminisme de l’hypertension. En effet, il est<br />

directement impliqué dans la vasomotricité et le contrôle de la<br />

pression artérielle, ainsi que dans l’équilibre du bilan sodé. De<br />

surcroît certaines hypertensions secondaires sont connues<br />

comme directement liées à l’activation de ce système (hypertension<br />

artérielle rénovasculaire, tumeurs à rénine, hyperaldostéronismes<br />

un peu à part, etc.), et certaines hypertensions<br />

génétiques sont centrées sur une anomalie du récepteur de<br />

l’aldostérone. Enfin, d’élégantes expériences de transgenèse ont<br />

permis de créer des modèles d’hypertension par une modification<br />

du gène de la rénine [67] .<br />

On pourrait s’attendre, chez tout hypertendu essentiel, à une<br />

rénine basse du fait de l’élévation de pression. Chacun sait que<br />

tel n’est pas le cas et que la rénine peut être, chez ces patients,<br />

aussi bien basse, normale, ou élevée. Nous n’entrons pas dans<br />

le détail de ces différentes situations. Une rénine haute indiquerait<br />

une vasoconstriction prédominante, tandis qu’une rénine<br />

basse serait l’indice d’une hypertension plutôt dépendante du<br />

volume circulant. Il en résulte en tout cas diverses hypothèses<br />

pour expliquer l’inadéquation de la rénine à la pression, dont<br />

on pourrait retenir une hétérogénéité néphronique (avec<br />

certains néphrons ischémiques) longtemps défendue par Sealey<br />

et Laragh, une stimulation sympathique anormale, ou un défaut<br />

de modulation de la réponse vasculaire aux variations de<br />

l’apport sodé.<br />

La découverte d’un « second » système rénine-angiotensine<br />

n’a pas simplifié les choses. Il existe en effet une autre enzyme<br />

de conversion (dite ACE 2), qui convertit l’angiotensine II en<br />

angiotensine 1-7, substance vasodilatatrice et antiproliférative.<br />

En d’autres termes, le système comporterait son propre frein [68] .<br />

De nombreux travaux ont été consacrés à ce « second » système,<br />

dont des applications en thérapeutique antihypertensive sont à<br />

l’étude [69] .<br />

Système nerveux<br />

Le système nerveux sympathique est un élément important<br />

de la régulation à court terme du débit cardiaque et de la<br />

pression artérielle. L’activité sympathique artérielle augmente<br />

avec le niveau de la pression artérielle chez les hypertendus<br />

essentiels (et non les hypertendus secondaires) [70] . La courbe du<br />

baroréflexe artériel est déplacée vers les pressions élevées, tandis<br />

que celle du baroréflexe cardiaque voit sa pente diminuée.<br />

L’activation sympathique est aussi un déterminant essentiel de<br />

la variabilité de la pression artérielle. Elle joue enfin un rôle<br />

majeur dans le développement de l’atteinte des organes cibles<br />

et les complications qui en résultent [71] .<br />

Facteurs endothéliaux<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

L’endothélium est une plaque tournante de la régulation de<br />

la vasomotricité, mais aussi de la croissance musculaire lisse, de<br />

l’hémostase, et participe à diverses réponses inflammatoires.<br />

Une implication de l’endothélium est constante dans toute<br />

hypertension, souvent qualifiée de « dysfonction endothéliale<br />

» [72] . Elle est présente non seulement au niveau des grosses<br />

artères, mais également des artères de résistance. L’altération de<br />

la vasodilatation dépendante de l’endothélium est assez facile à<br />

mettre en évidence globalement, au niveau de l’avant-bras par<br />

exemple. Une analyse plus fine de ses mécanismes est difficile :<br />

un déficit des composants vasodilatateurs (monoxyde d’azote,<br />

prostaglandines I 2, etc.) au profit de ceux vasoconstricteurs<br />

(angiotensine, endothéline, radicaux libres, etc.) est souvent<br />

7


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

Tableau 3.<br />

Apports alimentaires comparés entre les hommes du paléolithique (par<br />

analogie à des populations primitives préagricoles) et l’Américain moyen<br />

de nos jours (d’après Eaton [73] ).<br />

Apport énergétique (%) Paléolithique Régime américain actuel<br />

Protéines 33 12<br />

Hydrates de carbone 46 46<br />

Graisses 21 42<br />

Ratio graisses<br />

insaturées/saturées<br />

postulé mais non démontré. Par le biais de la prolifération, la<br />

dysfonction endothéliale intervient sur l’hypertrophie et le<br />

remodelage vasculaires. Elle favorise aussi largement l’athérome<br />

via la prolifération, la réponse aux facteurs inflammatoires,<br />

l’augmentation de perméabilité.<br />

Facteurs d’environnement<br />

Quoi qu’il en soit, la pression artérielle est un compromis<br />

entre des facteurs génétiques et des facteurs d’environnement.<br />

Nous avons vu plus haut que le facteur d’environnement<br />

commence dès la vie in utero. À l’âge adulte, il convient d’en<br />

considérer deux principalement, la nutrition et la pression<br />

sociale.<br />

Facteurs nutritionnels<br />

1,41 0,44<br />

Fibres (g) 100-150 20<br />

Sodium (mg) 690 3 400<br />

Potassium (mg) 11 000 2 400<br />

Ratio potassium/sodium 16/1 0,7/1<br />

Calcium (mg) 1 500-2 000 740<br />

Il est un fait que la nutrition a considérablement évolué<br />

depuis les hommes primitifs jusqu’à l’Américain d’aujourd’hui.<br />

Le Tableau 3 [73] montre ces profonds changements, dominés<br />

par une augmentation majeure de l’apport lipidique, une<br />

réduction de l’apport de fibres, et un accroissement massif de<br />

l’apport de sodium avec diminution parallèle de celui de<br />

potassium.<br />

Les passions se sont principalement concentrées sur le<br />

sodium. Après avoir été paré de toutes les vertus (voir l’excellente<br />

revue de Ritz) [74] , le sodium est aujourd’hui diabolisé. Il<br />

est clair que les populations dans lesquelles l’apport sodé moyen<br />

est le plus élevé sont aussi celles dont le niveau de pression<br />

artérielle est le plus élevé, et augmente le plus rapidement avec<br />

l’âge. À l’inverse, les populations à faible apport sodé ont des<br />

pressions artérielles plus basses, s’élevant moins avec l’âge, et<br />

ont une fréquence d’hypertension réduite [75] . En revanche, au<br />

sein d’une même population, la relation entre apport sodé et<br />

pression artérielle est très lâche, ce qui ramène au concept de<br />

dépendance au sodium, qui est un facteur individuel et pour<br />

l’essentiel génétique. L’apparition de l’hypertension lors de<br />

migrations de populations vers des zones où l’apport sodé est<br />

plus libéral conforte cette idée. Néanmoins et en tout état de<br />

cause, la relation entre apport sodé et pression artérielle n’est<br />

pas consistante [76, 77] . Faute de prouver que l’apport sodé est<br />

responsable de l’hypertension, le discours s’est focalisé sur la<br />

pathologie cardiaque (hypertrophie ventriculaire gauche et<br />

maladie coronaire) ou les AVC, indépendamment de la pression<br />

artérielle. Là encore les données ont été contradictoires. Dans la<br />

plupart des études, une association entre apport sodé et mortalité<br />

cardiovasculaire est observée essentiellement chez les<br />

hommes obèses [78] . Mais une corrélation inverse (mortalité<br />

cardiovasculaire augmentée par un apport sodé faible) a été<br />

également incriminée, et rapportée à une activation du système<br />

rénine-angiotensine par un apport sodé insuffisant [79] . Cette<br />

relation inverse a été confirmée dans la même cohorte quelques<br />

années plus tard [80] .<br />

Nous n’entrerons pas plus avant dans ce débat, où il est très<br />

difficile de garder l’objectivité souhaitable. Il dure depuis une<br />

centaine d’années et demeure malheureusement plus passionnel<br />

que scientifique, comparé par Messerli à de la théologie<br />

médiévale.<br />

L’idée qu’une réduction de l’apport sodé imposée à l’ensemble<br />

de la population serait bénéfique, tant en termes de pression<br />

artérielle que de risque cardiovasculaire global, en a tenté plus<br />

d’un, et connaît des zélateurs particulièrement actifs [81] .<br />

Certains en font de grandes causes nationales. Les études ont<br />

été peu nombreuses, souvent de médiocre qualité, et presque<br />

toujours de courte durée. Celle le plus souvent citée en exemple<br />

(Dietary Approach to Stop Hypertension : DASH) a montré<br />

qu’un régime riche en fruits et légumes et pauvre en graisses,<br />

surtout saturées, permettait de réduire substantiellement la<br />

pression artérielle, surtout chez les hypertendus et les sujets<br />

noirs, quel que soit l’apport sodé [82] . Un deuxième volet de<br />

cette étude a ajouté une restriction sodée, avec un apport accru<br />

de potassium [83] . Globalement, une restriction sodée importante<br />

(apport de 60 mmol/j) a eu un effet additif modeste sur<br />

l’effet du régime DASH. Cet effet était limité aux sujets noirs,<br />

hypertendus et de sexe féminin. Chez les sujets non hypertendus,<br />

l’effet était minime (de l’ordre de 0,5 mmHg) pour les<br />

sujets noirs, et nul pour les sujets blancs. Les études à long<br />

terme évaluant la morbimortalité ont été peu nombreuses (pour<br />

ne pas parler des calculs entièrement théoriques) et ont apporté<br />

des résultats contradictoires, l’effet étant probablement plus<br />

important chez les obèses. Presque plus nombreuses ont été les<br />

méta-analyses, mais pas moins contradictoires. Celle publiée<br />

sous l’égide de la Cochrane Collaboration, portant sur 11 études<br />

avec un suivi de 6 mois à 7 ans, a trouvé une baisse minime de<br />

la pression artérielle (1,1 mmHg pour la PAS et 0,6 mmHg pour<br />

la PAD), avec une natriurèse réduite de 35 mmol. Il n’y avait<br />

pas de corrélation entre la baisse de pression artérielle et la<br />

réduction de la natriurèse. Il n’y a eu aucune différence de<br />

mortalité. Le régime pauvre en sel a cependant plus souvent<br />

permis de maintenir une pression artérielle convenable chez les<br />

sujets hypertendus interrompant leur traitement [84] . À ces<br />

données un peu théoriques, il convient d’ajouter le côté<br />

illusoire de penser réduire durablement l’apport sodé dans toute<br />

une population. Cet objectif ne serait pas facilité par la constatation<br />

que l’apport sodé dans nos pays provient en très large<br />

partie des aliments industriels, et que ce paramètre serait bien<br />

difficile à modifier de manière assez substantielle. L’équilibre et<br />

le bon sens semblent indiquer qu’un apport de l’ordre de 6 g<br />

de NaCl par jour est à la fois sans danger, et acceptable au plan<br />

gustatif. Des apports beaucoup plus élevés sont peut-être<br />

néfastes, des apports plus bas devraient avoir une solide<br />

justification médicale [85] .<br />

L’apport de potassium est un déterminant au moins aussi<br />

important de la pression artérielle. Il est volontiers inversement<br />

corrélé à l’apport sodé. Le rapport potassium/sodium est<br />

généralement supérieur à3aucours d’une alimentation « naturelle<br />

» et inférieur à 0,4 dans les zones industrialisées à forte<br />

consommation de sodium [36] . Mais indépendamment de celuici,<br />

un apport potassique élevé abaisse la pression artérielle, de<br />

manière plus indiscutable que la restriction sodée [86] .<br />

La consommation d’alcool est un autre facteur direct influant<br />

sur la pression artérielle. Dans l’ensemble, l’alcool augmente la<br />

pression artérielle, augmente la fréquence de l’hypertension et<br />

réduit l’effet des traitements antihypertenseurs [87] . Pour ce qui<br />

est du risque cardiovasculaire, il est admis, malgré quelques<br />

débats, qu’il existe une courbe en « J » avec une réduction du<br />

risque pour de faibles consommations, et une augmentation<br />

pour des apports plus importants [87] .<br />

L’obésité est enfin une covariable fortement associée à<br />

l’hypertension, sans préjuger d’un lien de causalité direct. Il<br />

existe une corrélation positive entre le poids corporel et la<br />

pression artérielle [88] . L’obésité est également liée à la sensibilité<br />

au sodium de la pression artérielle, et la perte de poids permet<br />

de réduire cette sensibilité [89] .<br />

Environnement social<br />

Le rôle du « stress » dans l’hypertension est inscrit dans la<br />

tradition populaire, et certains sujets ont même tendance à<br />

mélanger les deux concepts. Un exemple classique est celui de<br />

8 Néphrologie


“ Point fort<br />

L’hypertension relève pour une part de facteurs<br />

génétiques dont la complexité s’avère chaque jour plus<br />

grande, et des facteurs d’environnement, au sein desquels<br />

l’alimentation occupe une place dominante. Le rôle des<br />

apports de sodium reste vivement disputé. Celui des<br />

apports de potassium ne semble pas moindre. L’alcool,<br />

consommé en excès, est également un facteur important<br />

d’hypertension.<br />

nonnes vivant recluses, dont la pression artérielle, mesurée sur<br />

30 ans, n’augmentait pas avec l’âge, en contraste avec les<br />

femmes de même âge vivant au même endroit mais insérées<br />

dans la vie active [90] . De très nombreux travaux, sur lesquels<br />

nous ne pouvons nous appesantir ici, ont montré une hypertension<br />

plus fréquente chez les contrôleurs aériens, chez les<br />

sujets à forte pression professionnelle, chez les sujets à faibles<br />

revenus, chez ceux exposés à un niveau sonore ambiant élevé,<br />

etc. La plus grande fréquence de l’hypertension chez les sujets<br />

noirs aux États-Unis pourrait même, pour certains, être imputable<br />

en partie aux inégalités sociales. Qui plus est, il est clair que<br />

le stress est rarement isolé, il augmente par exemple la consommation<br />

d’alcool et de graisses. Ainsi il y aurait convergence vers<br />

un tronc commun augmentant la pression artérielle, en l’occurrence<br />

le système nerveux sympathique.<br />

■ Hypertension artérielle et risque<br />

cardiovasculaire<br />

Risque global<br />

L’hypertension est un des éléments qui constituent le risque<br />

cardiovasculaire d’un sujet, c’est-à-dire la probabilité pour qu’il<br />

soit victime d’un « événement » cardiovasculaire dans un<br />

intervalle de temps donné. C’est dans ce contexte qu’elle doit<br />

être envisagée (cf. infra). Les principales composantes de ce<br />

risque sont bien connues, résumées dans le Tableau 4.<br />

Il existe diverses méthodes pour évaluer l’intensité du risque<br />

global chez un individu. La plupart sont issues des données de<br />

Framingham, guère extrapolables en Europe. La plus appropriée<br />

dans notre pays est l’usage des diagrammes Systematic Coronary<br />

Risk Evaluation (SCORE) [91] . Au demeurant, nombre de recommandations<br />

se contentent d’un simple compte du nombre de<br />

facteurs de risque.<br />

Syndrome métabolique<br />

Le syndrome métabolique est l’association de plusieurs<br />

anomalies métaboliques et cardiovasculaires dont l’ensemble<br />

Tableau 4.<br />

Composantes principales du risque cardiovasculaire.<br />

Facteurs modifiables Facteurs non modifiables<br />

LDL-cholestérol élevé et/ou<br />

HDL-cholestérol bas<br />

Âge<br />

Hypertension artérielle Sexe masculin<br />

Diabète Antécédents familiaux<br />

Tabagisme<br />

Obésité<br />

Inactivité physique<br />

LDL : low density lipoprotein ; HDL : high density lipoprotein.<br />

Néphrologie<br />

Tableau 5.<br />

Critères du syndrome métabolique suivant la recommandation Adult<br />

Treatment Panel III (ATP III) [92] .<br />

Facteur de risque Niveau<br />

Obésité abdominale Tour de taille<br />

Homme > 102 cm<br />

Femme > 88 cm<br />

Triglycérides ≥ 1,5 g/l<br />

HDL-cholestérol<br />

Homme < 0,4 g/l<br />

Femme < 0,5 g/l<br />

Pression artérielle ≥ 130/85 mmHg<br />

Glycémie à jeun ≥ 1,10 g/l<br />

HDL : high density lipoprotein.<br />

comporte un risque cardiovasculaire particulièrement élevé.<br />

L’idée qu’il s’agisse d’un « syndrome » individualisé est très<br />

contestée. Ses critères le sont quelque peu aussi. Les critères<br />

énoncés dans le Tableau 5, émanant du National Cholesterol<br />

Education Program (dits « Adult Treatment Panel III »<br />

[ATP III]), sont les plus généralement admis [92] .<br />

Toujours est-il que ce groupement symptomatique est fréquent<br />

(jusqu’à 30 %à40%delapopulation d’âge moyen) et<br />

qu’il comporte un niveau très élevé de morbimortalité cardiovasculaire.<br />

Le risque d’apparition d’un diabète est multiplié par<br />

3 à 6. Enfin, ce syndrome est associé à de multiples atteintes<br />

infracliniques des organes-cibles. Le traitement en est fondamentalement<br />

diététique, dominé par la restriction pondérale et<br />

l’exercice physique. En revanche, il n’y a pas de données<br />

permettant de formuler une recommandation particulière sur<br />

un quelconque traitement médicamenteux [12] .<br />

Atteinte rénale infraclinique<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

L’attention a été attirée depuis une dizaine d’années sur<br />

l’association d’une microalbuminurie (de 30 à 300 mg/24 h) à<br />

un risque cardiovasculaire accru. Dans la population générale, la<br />

microalbuminurie est un marqueur de risque cardiovasculaire<br />

[93] , de risque de diabète, d’altération de la fonction rénale<br />

et de mortalité totale. Elle est en outre un marqueur de risque<br />

de développer une hypertension artérielle chez le sujet normotendu<br />

[94] . La microalbuminurie est fréquente chez les hypertendus,<br />

probablement autour de 20 %, mais avec une large<br />

dispersion suivant les études. Là encore elle est associée à un<br />

risque cardiovasculaire largement augmenté [95] . La signification<br />

physiologique de ce phénomène n’est pas parfaitement claire.<br />

Ce peut être la simple manifestation d’une hypertension<br />

glomérulaire avec hyperfiltration, ou bien déjà le témoin d’une<br />

lésion glomérulaire. La réversibilité de la microalbuminurie sous<br />

traitement (particulièrement par inhibition du système rénineangiotensine)<br />

est un argument fort pour la première hypothèse.<br />

Au demeurant, il est clair que les deux situations ont tendance<br />

à se succéder.<br />

■ Hypertension artérielle et risque<br />

rénal<br />

Lorsqu’il existe une néphropathie, l’hypertension en est<br />

toujours un élément d’aggravation et son traitement doit être<br />

rigoureux, nous y reviendrons. À l’inverse, le fait que l’hypertension<br />

soit susceptible, en elle-même, de provoquer des lésions<br />

dites de « néphroangiosclérose » sur un rein sain est plus<br />

discuté. Nous laissons de côté la néphroangiosclérose maligne,<br />

affection grave, de mécanisme complexe, devenue très rare de<br />

nos jours.<br />

De nombreuses statistiques nationales érigent l’hypertension<br />

en cause majeure d’insuffisance rénale chronique (seconde cause<br />

9


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

après le diabète). Aux États-Unis, l’hypertension serait responsable<br />

de 29 % des néphropathies au stade de mise en dialyse<br />

(26 % chez les Blancs, 36 % chez les Noirs), ce pourcentage ne<br />

serait plus que de 12 % en Europe, et de 6%à7%enAsie. De<br />

telles statistiques sont soumises à des biais évidents car toutes<br />

les insuffisances rénales évoluées sont hypertendues, et le<br />

diagnostic de néphroangiosclérose n’est qu’exceptionnellement<br />

validé par une histologie. Les statistiques fondées sur les<br />

biopsies donnent des résultats très différents (2 %à3%des<br />

biopsies permettent d’affirmer ce diagnostic) mais les indications<br />

de biopsie représentent, elles aussi, un biais considérable.<br />

Les études longitudinales de populations ne permettent pas une<br />

précision bien supérieure. Elles montrent généralement une<br />

incidence plus importante d’insuffisance rénale lorsque les<br />

sujets étaient hypertendus au début de l’étude, mais pour<br />

nombre d’entre eux, la protéinurie n’avait pas été recherchée en<br />

début d’étude ; pour d’autres, elle était déjà connue positive à<br />

ce stade.<br />

“ Point fort<br />

L’hypertension essentielle a la réputation d’être un<br />

pourvoyeur très important d’insuffisance rénale, par la<br />

« néphroangiosclérose ». Celle-ci semble en réalité peu<br />

fréquente, limitée à des hypertensions très sévères, surtout<br />

chez des sujets noirs.<br />

Certaines études partant du phénotype hypertension ont<br />

tenté d’apprécier la fréquence de survenue d’une insuffisance<br />

rénale et d’en connaître les déterminants principaux. L’étude de<br />

Perry [96] a montré que plus l’hypertension initiale est sévère,<br />

plus le risque d’insuffisance rénale est élevé, les autres facteurs<br />

majeurs étant la race noire et le diabète. Mais d’autres études<br />

n’ont montré aucune insuffisance rénale terminale lors du suivi<br />

à long terme de cohortes d’hypertendus, quelle qu’en soit la<br />

sévérité. Nous ne nous attardons pas sur ces données, envisagées<br />

plus en détail dans un autre article de ce traité [97] .<br />

Expérimentalement, l’hypertension est effectivement susceptible<br />

d’induire des lésions rénales. Cette démonstration est<br />

évidemment plus difficile à apporter dans l’espèce humaine,<br />

mais des anomalies fonctionnelles rénales sont communes chez<br />

les hypertendus [98] , et l’apparition plus tardive de lésions<br />

organiques est plausible, à la faveur par exemple d’une hyperfiltration.<br />

Il faut bien admettre néanmoins que cette situation<br />

n’est pas fréquente en clinique et que le diagnostic de néphroangiosclérose<br />

est souvent un diagnostic de facilité. Au demeurant,<br />

l’étude histologique des reins retirés lors d’une transplantation<br />

chez des sujets réputés atteints de néphroangiosclérose<br />

apporte parfois des surprises [99] .<br />

■ Quel bilan ?<br />

De quel bilan minimal devrait bénéficier un hypertendu lors<br />

de son diagnostic ? Ce bilan est destiné à offrir un dépistage<br />

minimal des hypertensions secondaires, à évaluer l’existence<br />

d’une atteinte d’organes cibles, et à quantifier le risque<br />

cardiovasculaire.<br />

Certains proposent un bilan très exhaustif – et dispendieux<br />

– quitte à ce qu’il soit inutile chez la plupart des patients ;<br />

d’autres se contentent d’un minimum, quitte à aller plus loin<br />

si le premier bilan fait naître un doute. Le bilan proposé par la<br />

recommandation de la HAS pour une situation standard sans<br />

gravité apparente particulière est le plus minimaliste, peu<br />

coûteux et ne fait finalement que peu d’impasses :<br />

au titre de dépistage d’une hypertension artérielle secondaire :<br />

C créatinine sanguine (et estimation de la filtration glomérulaire)<br />

;<br />

C hémoglobine et hématocrite ;<br />

“ Point fort<br />

Le bilan minimal à réaliser chez tout hypertendu est très<br />

simple et peu onéreux. Il ne saurait être question de s’en<br />

dispenser. À l’inverse, les explorations morphologiques<br />

et/ou hormonales, que l’on voit trop souvent réalisées,<br />

n’ont pas lieu d’être dans le bilan initial.<br />

C kaliémie ;<br />

C dépistage d’une protéinurie et d’une hématurie (bandelette<br />

urinaire) ;<br />

au titre de l’atteinte d’organes cibles :<br />

C électrocardiogramme ;<br />

au titre des facteurs de risque supplémentaires :<br />

C dosage de la glycémie à jeun ;<br />

C bilan lipidique (cholestérol total, high density lipoprotein<br />

[HDL], low density lipoprotein [LDL], triglycérides).<br />

La recommandation ESH/ESC va nettement plus loin. Si elle<br />

admet comme un minimum les explorations ci-dessus, elle<br />

« conseille » d’autres investigations, plus « luxueuses » :<br />

l’échographie cardiaque, dont la HAS précise clairement<br />

qu’elle n’a pas lieu d’être systématique ;<br />

l’échographie-Doppler carotidienne ;<br />

l’index cheville/bras ;<br />

le fond d’œil (lui aussi clairement récusé par la HAS) ;<br />

la vitesse de l’onde de pouls (si l’appareillage est disponible).<br />

Reste des sujets qui demeurent plus litigieux encore, comme<br />

la recherche systématique d’une microalbuminurie, récusée par<br />

la HAS et déconseillée (du moins à titre systématique) par une<br />

récente recommandation française [94] . Le dosage de marqueurs<br />

inflammatoires (en particulier la high sensitivity C-reactive protein<br />

[hs-CRP]) a également été proposé, mais son apport pratique à<br />

l’évaluation du risque reste douteux.<br />

En tout cas, la pratique – bien trop fréquente – à titre<br />

systématique d’examens morphologiques tels qu’une échographie<br />

rénale ou surrénale, avec ou sans Doppler, est clairement<br />

inutile dans le bilan de dépistage initial. De même, la réalisation<br />

de dosages hormonaux, catécholamines et leurs dérivés, cortisol,<br />

voire rénine et aldostérone, est parfaitement inutile à ce stade<br />

et relève de centres spécialisés lorsqu’il existe une suspicion<br />

fondée de pathologie endocrinienne.<br />

■ Traitement<br />

Le but du traitement de l’hypertension n’est pas, en soi,<br />

d’abaisser les chiffres tensionnels jusqu’à une valeur qualifiée de<br />

« normale ». Il est d’éviter autant que faire se peut les accidents<br />

cardiovasculaires et la mortalité afférente. Les seuils du traitement<br />

médicamenteux et les pressions cibles sont donc variables<br />

en fonction du risque cardiovasculaire du sujet. Par ailleurs, le<br />

traitement des autres facteurs de risque fait partie intégrante de<br />

la stratégie thérapeutique. Enfin, l’observance de règles hygiénodiététiques<br />

simples permet souvent de retarder le traitement<br />

pharmacologique, et une fois celui-ci instauré, optimise son<br />

efficacité.<br />

Validation : études<br />

De très nombreux essais contrôlés de grande qualité ont testé<br />

l’efficacité du traitement antihypertenseur. Il ne saurait être<br />

question ici de détailler cette argumentation, remarquablement<br />

résumée dans la recommandation de l’ESH [12] . Les conclusions<br />

qui s’en dégagent sont que :<br />

ce traitement réduit la morbimortalité cardiovasculaire ;<br />

ce bénéfice existe à tous les âges, y compris chez les sujets de<br />

plus de 80 ans porteurs d’une hypertension artérielle systolique<br />

isolée [100] ;<br />

le bénéfice est identique dans les deux sexes, et pour toutes<br />

les ethnies ;<br />

10 Néphrologie


la prévention des événements cérébrovasculaires (30 % à<br />

40 %) est plus importante que celle des événements coronaires<br />

(20 % environ) ;<br />

le traitement entraîne également une réduction importante<br />

de la survenue d’une insuffisance cardiaque.<br />

Face au niveau de preuve très élevé du bénéfice thérapeutique,<br />

il est devenu éthiquement inconcevable de poursuivre des<br />

études de traitement contre placebo. En revanche, quelques<br />

études ont comparé l’adjonction d’un nouveau médicament ou<br />

d’un placebo chez des patients recevant déjà un traitement.<br />

Chez des sujets à haut risque cardiovasculaire, l’abaissement<br />

tensionnel modeste qui en a suivi a été accompagné d’une<br />

réduction très sensible de la fréquence des événements, même<br />

lorsque les sujets avaient des chiffres plus bas que<br />

140/90 mmHg en début d’essai [101, 102] . Nous reviendrons sur<br />

ces patients à haut risque (cf. infra).<br />

La mise en évidence d’un bénéfice en termes d’événements<br />

cliniques en dépit d’une baisse modeste de la pression artérielle<br />

suppose des études de plus en plus lourdes en termes d’effectifs.<br />

Pour pallier cette escalade, certaines études utilisent des critères<br />

de jugement intermédiaires, tels que la régression de l’HVG [103] ,<br />

l’épaisseur intima-média carotidienne [104] , voire la vitesse de<br />

l’onde de pouls. Ces études requièrent évidemment une méthodologie<br />

et une technique d’analyse irréprochables.<br />

Qui et quand traiter ?<br />

Recommandations<br />

La décision de traiter est fonction de deux facteurs principaux<br />

: le niveau des chiffres tensionnels et le niveau du risque<br />

cardiovasculaire global. La limite de 140/90 mmHg n’est donc<br />

pas, en soi, une indication suffisante justifiant une décision<br />

thérapeutique particulière.<br />

“ Point fort<br />

Les patients dont la pression artérielle est au-delà de<br />

180 pour la PAS et/ou 110 pour la PAD doivent être traités<br />

sans délai, de même que ceux dont le risque<br />

cardiovasculaire global est élevé, même si leur pression<br />

artérielle est plus basse. Pour des chiffres inférieurs, il<br />

convient de se limiter à des mesures hygiénodiététiques et<br />

de surveiller. Un traitement médicamenteux n’intervient<br />

que si la pression artérielle demeure élevée après plusieurs<br />

mois de ces mesures.<br />

Les différentes recommandations donnent à cet égard des<br />

indications relativement divergentes.<br />

Les patients dont la PAS est toujours au-delà de 180 mmHg sont<br />

considérés unanimement comme à haut risque et doivent<br />

être traités sans délai. Cette situation de haut risque, impliquant<br />

un traitement immédiat, est partagée par les sujets<br />

porteurs d’une maladie cardiovasculaire avérée ou d’une<br />

néphropathie, qui doivent être traités sans état d’âme même<br />

pour des pressions plus basses que 140/90 mmHg. L’attitude<br />

est à peine plus nuancée pour les diabétiques.<br />

Les patients dont la PAS est comprise entre 140 et 180 mmHg,<br />

hormis ceux porteurs d’une pathologie associée telle que<br />

ci-dessus, font moins l’unanimité. Pour le JNC, ces patients<br />

doivent recevoir une monothérapie par un diurétique, et<br />

même d’emblée une bithérapie (comportant un diurétique)<br />

s’ils sont au-delà de 160 mmHg (hypertension artérielle de<br />

grade 2). L’ESH et la HAS ont des positions beaucoup plus<br />

nuancées. L’attitude varie en fonction du risque associé : plus<br />

ce risque est faible, plus il convient de temporiser (de 3 à<br />

6 mois et plus) en ne recourant qu’aux seules mesures<br />

hygiénodiététiques. Plus il est élevé, plus un traitement<br />

médicamenteux s’impose rapidement.<br />

Néphrologie<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

Les patients dont la PAS est comprise entre 120 et 139 mmHg<br />

posent un problème particulier. Ils ne sont pas hypertendus<br />

au sens des définitions admises à ce jour, pourtant leur risque<br />

de le devenir rapidement est important [105] et leur risque<br />

cardiovasculaire global est plus élevé que celui des patients<br />

dont la PAS est inférieure à 120 mmHg [6] . Nous l’avons vu,<br />

le JNC les qualifie de « préhypertendus » et estime qu’ils<br />

doivent bénéficier de mesures hygiénodiététiques et d’une<br />

surveillance renforcée. Tant la terminologie que ses conséquences<br />

sont critiquées en dehors des États-Unis. Il leur est<br />

reproché de créer implicitement une nouvelle catégorie<br />

(numériquement très importante) de sujets « malades », qui<br />

vont de ce fait s’inquiéter et avoir une demande de soins<br />

majorée et injustifiée. Pour l’ESH, l’attitude chez ces sujets<br />

doit être graduelle : absence de toute forme d’intervention s’il<br />

n’y a aucun autre facteur de risque associé, mesures hygiénodiététiques<br />

si le risque surajouté est modeste, voire traitement<br />

médicamenteux s’il est très élevé. Les seuils d’hypertension<br />

représentés sur la Figure 1 correspondent bien évidemment à<br />

des seuils thérapeutiques. La recommandation française<br />

n’envisage pas explicitement cette situation.<br />

L’apparition de cette nouvelle catégorie de « préhypertendus »<br />

a même donné lieu à quelques tentatives de traitement médicamenteux<br />

destinées à retarder l’apparition d’une hypertension<br />

avérée ou à limiter le risque déjà élevé de ces patients [106] .<br />

Aucune donnée concluante n’en est jusqu’à présent sortie, et la<br />

majorité des auteurs regarde avec scepticisme cette attitude dont<br />

la généralisation serait d’un coût absolument prohibitif.<br />

Au-delà des recommandations : traiter la pression<br />

artérielle ou traiter le risque ? Une nouvelle ligne<br />

qui s’amorce ?<br />

La ligne de démarcation thérapeutique des 140/90 mmHg<br />

semble donc totalement dépassée. Nous avons vu par ailleurs<br />

que les grandes recommandations sont divergentes sur l’attitude<br />

à adopter, hormis les extrêmes. Encore, ces recommandations<br />

étant supposées avoir une portée très large, elles restent donc<br />

prudentes et cherchent à ne s’appuyer que sur des niveaux de<br />

preuve très élevés. L’ESH récuse même explicitement l’idée<br />

d’universalité et insiste sur le fait que le guide général que<br />

constitue une recommandation ne doit pas être appliqué<br />

aveuglément, chaque situation clinique étant particulière. Au<br />

demeurant, des études critiques ont déjà été publiées sur les<br />

dernières recommandations dont les assertions auraient un<br />

niveau de preuve notoirement insuffisant, tant en termes de<br />

niveau justifiant un traitement que de cible à atteindre [107] .De<br />

fait, l’objectif primordial reste de réduire le risque d’événements<br />

cardiovasculaires ; dans ce risque, les chiffres de pression<br />

artérielle ne sont pas prédominants et il n’y a pas de frontière<br />

nette entre la zone où le traitement est utile et celle où il ne<br />

l’est pas [10] . La majorité des infarctus et des AVC survient chez<br />

des sujets non hypertendus au sens des définitions ; pourtant<br />

ces événements sont dépendants de la pression artérielle du fait<br />

de la linéarité de la relation entre les deux. Il est donc un<br />

courant de pensée actuel tendant à se préoccuper nettement<br />

moins des chiffres tensionnels, pour recentrer tout le débat sur<br />

le risque global. Arguant d’une large méta-analyse (147 essais,<br />

près de 500 000 patients, 22 000 événements coronaires et<br />

12 000 AVC), Law et al. ont postulé que le traitement antihypertenseur<br />

réduit le risque d’événement coronaire ou d’AVC<br />

de manière relativement indépendante du niveau tensionnel<br />

initial (jusqu’à 110 mmHg de PAS) et que l’âge joue un rôle<br />

significatif mais non essentiel dans ce bénéfice [108] . La conclusion<br />

quelque peu provocante de ces auteurs est qu’il « est<br />

préférable de donner des antihypertenseurs à tout le monde<br />

au-delà d’un certain âge plutôt que de mesurer la pression<br />

artérielle à tout le monde et de ne traiter que certains sujets<br />

sélectionnés ». Cette idée rejoint celle de la « polypill », dans<br />

laquelle un unique comprimé renfermant plusieurs antihypertenseurs<br />

différents, une statine et de l’aspirine serait absorbé<br />

quotidiennement, sans aucune autre démarche médicale, par<br />

tous les sujets à partir de « l’âge moyen ». Il y a quelques<br />

années, Wald et al. avaient estimé par de savants calculs qu’une<br />

11


18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

telle attitude permettrait de réduire de 80 % le risque cardiovasculaire<br />

[109] ! Une étude préliminaire a été récemment publiée,<br />

montrant qu’à court terme, cette « polypill » réduit effectivement<br />

de manière impressionnante le niveau des facteurs de<br />

risque [110] . Resterait, par des études à long terme, à évaluer<br />

l’effet d’une telle pratique sur la fréquence réelle des événements<br />

(et non sur leur risque calculé), et la iatrogénie potentiellement<br />

induite.<br />

Comment traiter ?<br />

Mesures hygiénodiététiques<br />

Elles sont indiquées dans tous les cas, qu’un traitement<br />

pharmacologique soit ou non instauré. Elles permettent souvent<br />

de retarder son instauration et ensuite, potentialisent son<br />

action. Elles consistent essentiellement en :<br />

la réduction pondérale ;<br />

la limitation de l’apport sodé (entre 80 et 100 mmol/j suivant<br />

les auteurs) ;<br />

la réduction d’une éventuelle consommation excessive<br />

d’alcool ;<br />

la pratique régulière d’un exercice physique.<br />

Une alimentation plus riche en légumes et fruits frais, avec<br />

réduction des graisses totales et saturées (régime DASH) permet<br />

également un bon abaissement de la pression artérielle [82] .<br />

Nous avons déjà discuté plus haut de l’intérêt et des limites de<br />

la restriction sodée. Un apport « modéré », de l’ordre de 5à6g<br />

de NaCl par jour, est probablement un point d’équilibre<br />

raisonnable. Enfin, l’arrêt du tabac, même s’il est sans incidence<br />

sur la pression artérielle, contribue à la réduction du risque<br />

cardiovasculaire.<br />

Il est notoire que ces recommandations sont le plus souvent<br />

peu ou mal suivies. L’insistance et la conviction du médecin<br />

prescripteur ainsi que de fréquents rappels sont sans nul doute<br />

des facteurs essentiels de l’observance.<br />

Quel médicament privilégier en première<br />

intention ?<br />

Cette question suscite un vif débat, alimenté par des intérêts<br />

économiques que chacun imagine. Ce débat porte sur l’efficacité<br />

pour réduire les chiffres de pression artérielle et sur la qualité de<br />

la protection contre les événements cardiovasculaires. À ce jeu,<br />

parmi les cinq grandes classes d’antihypertenseurs, aucune n’est<br />

clairement gagnante ni perdante (diurétiques, bêtabloquants,<br />

inhibiteurs calciques, inhibiteurs de l’enzyme de conversion<br />

[IEC] et antagonistes des récepteurs de l’angiotensine [ARA]).<br />

“ Point fort<br />

Les cinq grandes classes thérapeutiques actuellement<br />

disponibles peuvent être utilisées en première intention ;<br />

aucune n’apporte une performance systématiquement<br />

supérieure aux autres. Le choix est donc fondé sur le<br />

contexte particulier du patient et ses éventuelles<br />

comorbidités. Nombre d’hypertendus ont besoin d’une<br />

bithérapie. Les associations fixes IEC/diurétique ou<br />

ARA/diurétique sont les plus utilisées et leur efficacité est<br />

remarquable. Il a été récemment montré qu’une<br />

association IEC/inhibiteur calcique donnait des résultats<br />

intéressants.<br />

La polémique est pourtant très active. Les États-Unis ont mis<br />

en avant les diurétiques à la suite de l’étude Antihypertensive<br />

and Lipid-Lowering Treatment to Prevent Heart Attack Trial<br />

(ALLHAT) qui était clairement faite pour cela [111, 112] . Les<br />

Britanniques ont condamné les bêtabloquants (particulièrement<br />

l’aténolol), accusés d’offrir une moindre protection cardiovasculaire<br />

[113] . Ce fait n’a pas été retrouvé dans la méta-analyse de<br />

Law [108] . La récente étude Ongoing Telmisartan Alone and in<br />

Combination with Ramipril Global Endpoint Trial (ONTAR-<br />

GET) [114] a mis fin à la guerre entre IEC et ARA en les mettant<br />

à égalité (et en montrant que leur association n’est pas plus<br />

favorable). Enfin, les inhibiteurs calciques ont bénéficié d’études<br />

récentes [115, 116] qui indiquent un excellent potentiel de<br />

prévention cardiovasculaire de ces médicaments.<br />

Face à ces débats un peu chaotiques, la recommandation de<br />

la HAS, comme celle de l’ESH, considère que chacune des cinq<br />

classes peut être utilisée en première intention, aucune n’offrant<br />

une efficacité ou un niveau de protection manifestement<br />

supérieur aux autres. Elles s’alignent ainsi sur les meilleures<br />

méta-analyses ou métarégressions publiées [117, 118] . Cette<br />

attitude est sans nul doute la plus sage et permet de choisir le<br />

médicament le plus favorable suivant le terrain et le contexte<br />

pathologique du patient [12] .<br />

La plupart des hypertendus ont besoin d’au moins deux<br />

médicaments pour être contrôlés. Pourquoi ne pas, dans ces<br />

conditions, faire appel à une bithérapie d’emblée, sous forme<br />

d’une association toute faite, qui permettrait de moins tâtonner<br />

? Cette question de l’usage d’une bithérapie en première<br />

intention ne fait pas l’unanimité. La recommandation française<br />

est certainement la plus réticente, n’autorisant que des associations<br />

dont les deux composants sont sous-dosés, associations<br />

qui s’avèrent, à l’usage, n’être pas plus efficaces qu’une monothérapie<br />

normalement dosée. La recommandation européenne<br />

est plus souple, soulignant le bienfait et le gain de temps<br />

apportés par une bithérapie d’emblée lorsque l’hypertension est<br />

sévère, ou si l’objectif tensionnel est bas (diabète, néphropathie).<br />

Le JNC 7 recommande clairement l’usage d’une bithérapie<br />

d’emblée (comportant un diurétique) dès lors que l’hypertension<br />

est au moins de grade 2 (c’est-à-dire > 160/100 mmHg).<br />

Feldman et al. ont publié l’essai en Ontario d’un algorithme de<br />

traitement simplifié, comportant de manière systématique, en<br />

première intention, une association IEC/diurétique ou<br />

ARA/diurétique, suivie si nécessaire d’une augmentation de<br />

dose, puis de l’association d’un bloqueur calcique. Cette<br />

stratégie a permis un contrôle satisfaisant dans 64,7 % des cas,<br />

contre 52,7 % chez les patients traités suivant les recommandations,<br />

en commençant par une monothérapie [119] .<br />

Dès lors qu’une bithérapie est utilisée, l’association<br />

IEC/diurétique ou ARA/diurétique a tenu jusqu’à présent le<br />

devant de la scène. L’association de l’aliskiren, inhibiteur direct<br />

de la rénine, avec un diurétique, a apporté plus récemment des<br />

résultats comparables [120] . Cette logique de l’inhibition du<br />

système-rénine-angiotensine doublée d’un traitement diurétique<br />

a été un peu mise à mal par la publication de l’étude Avoiding<br />

Cardiovascular Events Through Combination Therapy in<br />

Patients living with Systolic Hypertension (ACCOMPLISH), qui<br />

semble indiquer que l’association IEC/bloqueur calcique pourrait<br />

apporter des résultats équivalents ou supérieurs à ceux de<br />

l’association IEC/diurétique [116] .<br />

Cible tensionnelle<br />

Les chiffres représentant la cible du traitement de l’hypertension<br />

sont de 140/90 mmHg. Les recommandations sont unanimes<br />

à proposer une cible plus basse, 130/80 voire 120/<br />

80 mmHg chez les diabétiques et les sujets porteurs d’une<br />

néphropathie. Ces cibles peuvent être difficiles à atteindre,<br />

faisant appel à l’expertise du prescripteur et à une pleine<br />

coopération du patient. L’attitude dite « d’inertie thérapeutique<br />

», consistant à se satisfaire de valeurs « proches » des cibles,<br />

est régulièrement dénoncée depuis quelques années [121] . La<br />

question peut néanmoins être posée d’une limite inférieure sous<br />

laquelle il est préférable de ne pas descendre (surtout pour la<br />

PAD), sous peine d’augmenter le risque coronaire (courbe en<br />

« J »). La courbe en « J » a connu des fortunes diverses avec le<br />

temps (et les études), tour à tour décriée, niée et reprise en<br />

considération, mais le problème en reste sérieusement posé.<br />

Question de la néphroprotection<br />

Le traitement antihypertenseur est une des mesures essentielles<br />

permettant de diminuer l’évolutivité d’une néphropathie,<br />

qu’elle soit ou non diabétique, et en particulier de retarder<br />

12 Néphrologie


l’apparition d’une insuffisance rénale avancée. Diverses études<br />

ont indiqué que plus la pression artérielle est basse sous<br />

traitement, plus la perte de fonction rénale est limitée [122] .De<br />

telles données sont à l’origine de la recommandation d’une<br />

cible tensionnelle basse chez les patients atteints d’une néphropathie.<br />

Quelques études contradictoires ont néanmoins jeté le<br />

doute sur cette certitude, en montrant qu’un abaissement<br />

tensionnel supplémentaire n’améliorait pas la protection<br />

rénale [123, 124] . L’absolue nécessité d’un strict contrôle tensionnel<br />

chez ces patients n’est néanmoins discutée par personne, le<br />

débat portant uniquement sur la cible à atteindre.<br />

Quoi qu’il en soit, les chiffres tensionnels atteints ne sont pas<br />

les seuls déterminants de la néphroprotection. L’usage de<br />

produits inhibant le système rénine-angiotensine semble au<br />

moins aussi important que le niveau tensionnel atteint. Des<br />

études portant sur la néphropathie du diabète de type 1 [125]<br />

puis plus tard du type 2 [126, 127] ont clairement établi le<br />

bénéfice des IEC et des ARA respectivement dans ces deux types<br />

de néphropathie. D’autres études indiquent que les mêmes<br />

médicaments retardent le passage de la microalbuminurie à la<br />

néphropathie constituée [127] , voire retardent l’apparition d’une<br />

microalbuminurie [128] .<br />

Les médicaments inhibant le système rénine-angiotensine ont<br />

également un effet néphroprotecteur dans les néphropathies<br />

non diabétiques. Ils permettent de réduire très sensiblement la<br />

protéinurie et retardent l’évolution vers le stade terminal de<br />

l’insuffisance rénale. Ce dernier effet n’est patent que lorsqu’il<br />

existe une protéinurie importante [124, 129] . Le mécanisme<br />

invoqué de cet effet néphroprotecteur est la diminution de la<br />

résistance postglomérulaire, avec réduction de la fraction filtrée.<br />

Ce mécanisme rejoint les données expérimentales particulièrement<br />

élégantes publiées depuis longtemps par le groupe de<br />

Brenner [130, 131] . Il est cependant fort probable que cet effet<br />

hémodynamique ne soit pas seul en cause, et que des effets<br />

tubulaires viennent s’y ajouter. Les antialdostérones semblent<br />

avoir un effet bénéfique du même ordre, ou complémentaire<br />

[132] .<br />

L’association d’un IEC et d’un ARA est actuellement très<br />

utilisée dans les néphropathies protéinuriques et semble avoir<br />

un effet supérieur à celui de chaque composant pris isolément<br />

[133] . En réalité, l’étude COOPERATE, la principale sur<br />

laquelle est fondée cette assertion, a été vivement critiquée [134] ,<br />

et l’article finalement retiré. Ceci n’enlève rien à l’importance<br />

du système rénine-angiotensine dans la néphroprotection. Des<br />

données préliminaires indiquent que la combinaison d’un<br />

inhibiteur de la rénine et d’un IEC posséderait également une<br />

action additive [135] .<br />

Ce « double blocage » du système rénine-angiotensine n’est<br />

probablement pas sans risque, et diverses mises en garde ont été<br />

publiées. Dans l’étude ONTARGET, cette association, bien<br />

qu’apportant une meilleure réduction de la protéinurie, a<br />

aggravé l’évolution des insuffisances rénales, majorant la<br />

fréquence d’un doublement de la créatinine et de la nécessité<br />

d’un passage en dialyse [136] . Certes il ne s’agissait pas d’un<br />

critère de jugement primaire de l’étude, dont la population était<br />

particulière, basée sur un risque cardiovasculaire très élevé. Ce<br />

résultat ne peut donc être admis sans précautions. Il n’en a pas<br />

fallu plus, cependant, pour que la méfiance s’installe, et même<br />

que certains condamnent « définitivement » le double<br />

blocage [137] .<br />

Traitements annexes<br />

Nous l’avons déjà dit, le risque cardiovasculaire est un tout,<br />

et chacun de ses facteurs doit être l’objet d’une égale attention.<br />

Il ne saurait donc s’agir de traitements annexes à celui de<br />

l’hypertension elle-même, considérée comme élément principal.<br />

Parmi ces différents éléments, deux sont explicitement abordés<br />

dans les recommandations : les statines et l’aspirine.<br />

L’usage de statines en prévention secondaire est unanimement<br />

admis et son effet bénéfique a été largement démontré<br />

chez les sujets à haut risque, relativement indépendant du<br />

niveau initial de LDL-cholestérol [138] . L’étude Anglo-<br />

Scandinavian Cardiac Outcomes Trial (ASCOT) a montré un<br />

bénéfice spectaculaire d’une statine en prévention primaire chez<br />

Néphrologie<br />

des hypertendus dont le LDL-cholestérol était normal [139] .La<br />

recommandation française propose l’usage d’une statine en<br />

prévention primaire chez les hypertendus porteurs d’autres<br />

facteurs de risque, avec un objectif de LDL-cholestérol variant<br />

de 4,1 mmol (1,6 g/l) à 3,4 mmol (1,3 g/l) suivant le nombre<br />

de facteurs de risque associés. Ces cibles sont abaissées chez les<br />

diabétiques, surtout s’il existe une microalbuminurie ou une<br />

néphropathie déclarée ; dans ce cas, l’objectif est de moins de<br />

2,6 mmol (1 g/l).<br />

L’intérêt de l’utilisation de l’aspirine (75 à 100 mg/j) a été mis<br />

en évidence particulièrement dans l’étude Hypertension Optimal<br />

Treatment (HOT) [140] . Le bénéfice obtenu sur l’incidence<br />

des complications cardiovasculaires est cependant à mettre en<br />

balance avec un risque accru de complications hémorragiques,<br />

principalement extracrâniennes. Dans l’ensemble, les recommandations<br />

s’accordent pour ne proposer ce traitement que si<br />

le risque cardiovasculaire est élevé ou en prévention secondaire,<br />

et à la condition que la pression artérielle soit bien contrôlée<br />

par le traitement.<br />

Enfin, chez les sujets diabétiques, un contrôle strict de la<br />

glycémie est à l’évidence nécessaire à la réduction des complications<br />

micro- ou macrovasculaires, au même titre que le<br />

contrôle de la pression artérielle [141] .<br />

Résultats<br />

En dépit de tous les progrès réalisés, le contrôle tensionnel<br />

reste encore bien médiocre à travers le monde. Le travail<br />

d’Erdine, publié en 2000, montrait en Europe un taux de<br />

contrôle très hétérogène suivant les pays, la France ayant un<br />

score relativement honorable de 33 % [142] . Cette valeur est très<br />

supérieure à celle établie peu avant par l’étude MONICA (9 %<br />

pour les hommes et 25 % chez les femmes) [18] , mais comparable<br />

aux résultats de l’étude plus récente Mona Lisa qui indique<br />

un contrôle de l’hypertension chez 24 % des hommes et 39 %<br />

des femmes [143] . Les États-Unis affichent, eux, un taux de<br />

contrôle plus élevé, à 51 % chez les patients non insuffisants<br />

rénaux [144] . La palme revient au Canada, qui affiche (du moins<br />

en Ontario) un taux de contrôle de 65 % [145] .<br />

■ Hypertension artérielle résistante<br />

L’hypertension résistante est définie par la persistance de<br />

chiffres supérieurs à 140/90 mmHg malgré un traitement par au<br />

moins trois antihypertenseurs, synergiques, dont un diurétique.<br />

Ces médicaments doivent être prescrits à la dose maximale<br />

tolérée [146] . Au vu des résultats thérapeutiques médiocres<br />

évoqués ci-dessus, faut-il considérer que 40 % à 70 % des<br />

hypertensions sont « résistantes » ? Assurément pas, ces hypertensions<br />

sont seulement mal traitées. La fréquence de l’hypertension<br />

résistante est diversement évaluée suivant les<br />

populations. Elle varie entre 5%danslapopulation générale<br />

des hypertendus, et 50 % en milieu néphrologique [146] . Encore<br />

faut-il commencer par éliminer la « pseudorésistance », qui n’est<br />

qu’une variante de l’hypertension blouse blanche, avec des<br />

valeurs normales en automesure ou en MAPA.<br />

“ À retenir<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

Principales causes d’un non-contrôle de l’hypertension<br />

(d’après [146] )<br />

Mauvaise observance du traitement<br />

Mauvais usage des médicaments<br />

Facteurs hygiénodiététiques<br />

Hypertension secondaire<br />

Apnée du sommeil<br />

Surcharge volémique<br />

Un défaut d’observance est effectivement la situation la plus<br />

fréquente, parfois liée à une tolérance médiocre, à un nombre<br />

13


.<br />

18-026-B-10 Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

de comprimés excessif, à des facteurs psychologiques, voire au<br />

coût du traitement. Burnier et al. [147] ont montré que le seul<br />

fait d’informer les patients de l’usage d’un pilulier électronique<br />

permettant de vérifier la fréquence des prises médicamenteuses<br />

permettait la normalisation rapide de nombre d’hypertensions<br />

considérées comme résistantes. Les causes liées aux médicaments<br />

consistent surtout en des doses insuffisantes (en particulier<br />

de diurétiques), des associations non synergiques, ou des<br />

interactions médicamenteuses sur lesquelles nous ne nous<br />

étendons pas ici.<br />

“ À retenir<br />

Facteurs hygiénodiététiques et résistance de<br />

l’hypertension<br />

Majoration de l’obésité<br />

Résistance à l’insuline<br />

Consommation excessive d’alcool<br />

Apport sodé très excessif<br />

Régime alimentaire déséquilibré<br />

Trouble anxiodépressif avec attaques de panique<br />

Il est clair que ces différents facteurs doivent être attentivement<br />

recherchés, et que tout doit être fait pour les amender.<br />

Une situation de résistance vraie suppose la reprise du bilan<br />

étiologique, pour rechercher minutieusement une hypertension<br />

secondaire. Les hypertensions par néphropathies parenchymateuses<br />

devraient avoir été détectées depuis longtemps. Mais c’est<br />

dans ces circonstances qu’une sténose artérielle rénale, un<br />

phéochromocytome, un hyperaldostéronisme peuvent être<br />

découverts par des explorations plus ciblées.<br />

L’hyperaldostéronisme a connu dans ce contexte un regain<br />

d’intérêt depuis quelques années. Calhoun et al. ont trouvé<br />

dans une série d’hypertensions résistantes 20 % d’hyperaldostéronismes<br />

dûment prouvés. Chez ces patients, le traitement par<br />

la spironolactone a eu un effet spectaculaire [148] . Une grande<br />

fréquence a été effectivement confirmée par la suite, et l’on a<br />

considéré que l’hyperaldostéronisme était une cause majeure<br />

d’hypertension résistante. L’efficacité de la spironolactone a<br />

conduit certains auteurs à l’utiliser dans les hypertensions<br />

résistantes sans pour autant accomplir une démarche spécifique<br />

pour prouver l’hyperaldostéronisme. Le résultat de cette attitude<br />

a été tout aussi spectaculaire [149] . Actuellement, l’ajout de<br />

spironolactone est donc une des options thérapeutiques majeures<br />

lorsqu’une hypertension apparaît vraiment résistante.<br />

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Pour en savoir plus<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Beaufils M. Hypertension artérielle essentielle et rein. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie,<br />

18-026-B-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein 18-026-B-10<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

17


Plan<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

S.-J. Drouin, M. Rouprêt<br />

L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) touche près de la moitié des hommes de 50 ans et représente<br />

la première cause de dysurie masculine. Son étiologie est multiple et encore mal connue. Elle est<br />

responsable d’une obstruction à la fois statique et dynamique du bas appareil urinaire. Les symptômes<br />

obstructifs et/ou irritatifs peuvent être invalidants et sont en général le principal motif de consultation,<br />

même si l’HBP est encore diagnostiquée au stade de complications (rétention d’urines, calculs,<br />

insuffisance rénale, etc.). Le volume de la prostate n’est pas toujours prédictif de l’importance des signes<br />

cliniques. Ainsi, un traitement ne doit pas être entrepris en l’absence de signes fonctionnels ou de<br />

complications. La maladie doit être évaluée par un interrogatoire, un examen clinique et au mieux une<br />

débitmétrie ; les examens complémentaires sont surtout préconisés dans les formes compliquées.<br />

L’arsenal thérapeutique de l’HBP est aujourd’hui vaste et, même s’il existe des recommandations<br />

générales, doit être introduit au cas par cas. Les patients les moins symptomatiques peuvent bénéficier<br />

d’une surveillance, pour ceux qui présentent des complications, il faut recourir à une intervention<br />

chirurgicale ou endoscopique. Pour la majorité des patients, un traitement médicamenteux est instauré<br />

en première intention par phytothérapie, alphabloquants ou inhibiteurs de la 5a-réductase.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Hyperplasie bénigne de la prostate ; Adénome de prostate ; Troubles mictionnels ; Dysurie ;<br />

Pollakiurie ; Rétention aiguë d’urines<br />

Introduction 1<br />

Épidémiologie, étiopathogénie et physiopathologie 1<br />

Épidémiologie 1<br />

Étiopathogénie 2<br />

Physiopathologie et évolution 2<br />

Diagnostic 2<br />

Symptômes et interrogatoire 2<br />

Examen clinique 3<br />

Examens complémentaires 3<br />

Traitements 5<br />

Abstention et surveillance 5<br />

Thérapeutiques médicamenteuses 5<br />

Traitements invasifs non chirurgicaux 6<br />

Traitements endoscopiques et chirurgicaux 6<br />

Stratégies thérapeutiques 6<br />

Conclusion 7<br />

■ Introduction<br />

L’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) est la tumeur<br />

bénigne la plus fréquente chez l’homme. Elle représente aussi la<br />

principale cause de troubles urinaires du bas appareil chez<br />

l’homme et constitue un véritable enjeu de santé publique. La<br />

prise en charge thérapeutique de l’HBP s’est considérablement<br />

modifiée ces dernières années. En effet, une meilleure compréhension<br />

de la pathogenèse et de l’évolution naturelle de l’HBP<br />

Traité de Médecine Akos<br />

permet une meilleure prise en charge des symptômes qui en<br />

découlent. Le praticien dispose désormais de multiples options<br />

dans son arsenal thérapeutique autant médicales que<br />

chirurgicales.<br />

■ Épidémiologie, étiopathogénie<br />

et physiopathologie<br />

Épidémiologie<br />

5-0690<br />

L’épidémiologie de l’HBP n’a été étudiée que récemment.<br />

Ceci résulte de la difficulté de trouver des critères diagnostiques<br />

unanimement reconnus et de la différenciation entre HBP<br />

clinique et HBP histologique. Ainsi, des modifications histologiques<br />

de la glande prostatique sont constatées dès 30 ans et<br />

elles augmentent progressivement pour chaque tranche d’âge.<br />

On note une HBP histologique chez 88 % des hommes de plus<br />

de 80 ans en France [1] . L’HBP clinique (présence de signes<br />

cliniques) a une prévalence moins importante surtout chez les<br />

hommes de moins de 40 ans où elle est minime. Certains<br />

évoquent des prévalences de 50 % chez les hommes de 50 ans<br />

et de 70 % chez les octogénaires [2] . D’autres rendent compte de<br />

vraies disparités de prévalence selon les définitions de l’HBP :<br />

83 % après 70 ans sur séries autopsiques, 58 % selon le toucher<br />

rectal et 37 % en associant score de symptômes, toucher rectal<br />

et débitmétrie [3] . Ainsi, à part le fait que la prévalence de l’HBP<br />

est très importante et qu’elle augmente avec l’âge, on ne dispose<br />

pas de données précises. D’une part, parce qu’on a souvent<br />

tendance à confondre histologie et clinique alors qu’il n’existe<br />

1


5-0690 Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

pas de corrélation systématique entre le volume de l’adénome<br />

et les symptômes cliniques. D’autre part parce que de nombreux<br />

patients vivent avec leurs symptômes sans consulter.<br />

Étiopathogénie<br />

Figure 1. Anatomie zonale de la prostate.<br />

L’étiopathogénie de l’HBP est encore mal connue. Macroscopiquement,<br />

l’HBP est un adénomyofibrome. Ce dernier est dû à<br />

une prolifération du stroma fibreux qui compose la zone<br />

antérieure de la prostate et des cellules épithéliales glandulaires<br />

situées dans la zone dite de transition (Fig. 1) Cette prolifération<br />

est responsable d’un adénome, habituellement constitué de<br />

deux lobes latéraux auxquels s’adjoint quelquefois un lobe<br />

médian qui fait protrusion dans la lumière vésicale. Microscopiquement,<br />

l’HBP est un ensemble de nodules dans lesquels on<br />

trouve des tissus glandulaire, fibreux et musculaire. D’un point<br />

de vue microbiologique, l’HBP résulte d’un déséquilibre entre<br />

prolifération et apoptose des cellules prostatiques sous la<br />

dépendance de deux facteurs ; l’âge et les androgènes. Ces<br />

derniers agissent par l’intermédiaire de la dihydrotestostérone,<br />

métabolite actif de la testostérone après transformation par la<br />

5a-réductase. Leur implication a été confirmée par le fait qu’on<br />

n’observe jamais d’HBP chez les eunuques vrais ou en cas de<br />

déficit congénital en 5a-réductase.<br />

D’autres substances ont une action sur le développement de<br />

l’hypertrophie : les estrogènes, les facteurs de croissance<br />

(fibroblast growth factor [FGF], insulin-like growth factor [IGF1],<br />

transforming growth factor [TGF]), le système orthosympathique<br />

et sans doute des facteurs génétiques.<br />

Physiopathologie et évolution<br />

Si l’augmentation du volume prostatique est la condition<br />

nécessaire à l’expression clinique de l’HBP, elle n’est pas<br />

suffisante.<br />

Le mécanisme par lequel l’HBP peut être responsable d’obstruction<br />

vésicale comprend deux composantes : statique et<br />

dynamique. La composante statique, liée directement à l’augmentation<br />

de volume de la prostate, entraîne une réduction de<br />

la lumière urétrale. La composante dynamique est liée à<br />

l’augmentation du tonus du muscle lisse du stroma prostatique<br />

sous l’influence du système adrénergique. Le nombre de<br />

récepteurs alpha adrénergiques semble augmenté dans le tissu<br />

adénomateux. De plus, ces récepteurs semblent jouer un rôle<br />

dans la synthèse de facteurs de croissance (FGFb) impliqués<br />

dans la croissance prostatique [4] . La présence concomitante de<br />

ces deux composantes explique le faible degré de corrélation<br />

entre volume prostatique et sévérité des troubles mictionnels.<br />

Schématiquement, la gêne à l’obstruction des urines provient<br />

donc d’une diminution du calibre de l’urètre et de sa constriction<br />

par les a-récepteurs. L’obstruction va progressivement<br />

entraîner une hypertrophie du détrusor qui va perdre sa<br />

capacité contractile. Cette modification de l’architecture<br />

musculaire peut être responsable d’une modification de l’excitabilité<br />

musculaire responsable d’impériosités. L’obstruction<br />

progressive et la perte de contractilité de la vessie vont au<br />

maximum aboutir à une vidange vésicale incomplète, des<br />

mictions par regorgement et enfin à une atteinte du haut<br />

appareil (dilatation des cavités pyélocalicielles et insuffisance<br />

rénale). Le risque de rétention d’urines complète augmente<br />

proportionnellement aux symptômes, même s’il arrive que la<br />

rétention soit inaugurale [5] . L’HBP est une maladie bénigne sans<br />

risque de transformation maligne, mais ne protège pas de la<br />

survenue concomitante d’un cancer de la prostate pour lequel<br />

il faut donc poursuivre le dépistage individuel. Il faut enfin<br />

avoir en mémoire que la survenue d’une infection ou d’une<br />

intervention chirurgicale peut transitoirement majorer les<br />

symptômes.<br />

■ Diagnostic<br />

Symptômes et interrogatoire<br />

Les troubles urinaires du bas appareil sont le plus souvent les<br />

symptômes qui amènent le patient à consulter et donc au<br />

diagnostic de l’HBP. L’interrogatoire est donc l’élément majeur<br />

de la démarche diagnostique. Il faut tout d’abord préciser ces<br />

symptômes. Ils sont de deux types : obstructifs (dits de vidange)<br />

et irritatifs (dits de stockage). Les premiers sont dominés par<br />

une diminution de la puissance du jet, une miction en deux<br />

temps avec retard de démarrage nécessitant parfois une poussée<br />

abdominale et entraînant une sensation de vidange incomplète<br />

avec gouttes retardataires. À l’extrême, la miction se fait au<br />

goutte-à-goutte. Les symptômes irritatifs sont représentés par<br />

une pollakiurie diurne et nocturne, une nycturie et des impériosités<br />

avec sensation d’urgences mictionnelles. Les troubles de<br />

la continence n’appartiennent pas directement à l’une de ces<br />

deux catégories, mais en sont la conséquence [6] . Ils comportent<br />

d’une part, l’incontinence, présentée par le patient comme des<br />

fuites, qui peut être due soit à des contractions involontaires<br />

dans le cadre d’impériosités, soit à des mictions par regorgement<br />

secondaire à une rétention vésicale chronique. D’autre part, les<br />

troubles de la continence peuvent évoluer vers une rétention<br />

aiguë ou chronique d’urines. Cette dernière n’est souvent pas<br />

ressentie par le patient et un important résidu post-mictionnel<br />

peut passer inaperçu s’il n’est pas recherché.<br />

On dispose désormais d’un score symptomatique et de qualité<br />

de vie (score IPSS) (Tableau 1) qui permet d’évaluer au mieux les<br />

sept principaux symptômes qui caractérisent l’HBP en cotant<br />

leur fréquence mensuelle de 0à5.Ilcomprend par ailleurs un<br />

score de qualité de vie permettant de définir la gêne ressentie<br />

par le patient.<br />

En cas de doute et surtout en cas de pollakiurie, il est possible<br />

de faire réaliser un calendrier mictionnel sur plusieurs jours en<br />

précisant les apports afin d’éliminer une polyurie.<br />

Une fois les symptômes et leur impact précisés, il est important<br />

de déterminer l’ancienneté et le mode d’évolution. Les<br />

différents traitements déjà entrepris doivent être analysés.<br />

Enfin, il convient d’éliminer les diagnostics différentiels et de<br />

rechercher d’autres affections qui pourraient expliquer la dysurie<br />

en réalisant une analyse sémiologique précise en tenant compte<br />

du terrain et des antécédents. Il faut dépister l’existence de<br />

maladies neurologiques (accident vasculaire cérébral, sclérose en<br />

plaques, maladie de Parkinson), d’affections rachidiennes<br />

(traumatisme, hernie discale), d’un diabète, d’atteintes iatrogéniques<br />

(diurétiques, neuroleptique). En cas d’hématurie associée,<br />

il faut dépister les facteurs de risque de cancer de vessie et<br />

s’orienter vers des examens d’imagerie et une urétrocystoscopie.<br />

2 Traité de Médecine Akos


Tableau 1.<br />

Score international des symptômes liés à la prostate (IPSS). Un score de1à7(avec les questions1à7)renseigne un prostatisme léger, de8à19unprostatisme<br />

moyen et de 20 à 35 un prostatisme sévère.<br />

1. Au cours du dernier mois écoulé, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu la sensation que votre<br />

vessie n’était pas complètement vidée après<br />

avoir uriné ?<br />

2. Au cours du dernier mois écoulé, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu besoin à nouveau<br />

d’uriner moins de 2 heures après avoir fini<br />

d’uriner ?<br />

3. Au cours du dernier mois écoulé, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu une interruption du<br />

jet d’urine, c’est-à-dire démarrage du jet, puis<br />

arrêt, puis redémarrage ?<br />

4. Au cours du dernier mois écoulé, après en<br />

avoir ressenti le besoin, avec quelle fréquence<br />

avez-vous eu des difficultés à retenir votre envie<br />

d’uriner ?<br />

5. Au cours du dernier mois écoulé, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu une diminution de la<br />

taille ou de la force du jet d’urine ?<br />

6. Au cours du dernier mois écoulé, avec quelle<br />

fréquence avez-vous dû forcer ou pousser pour<br />

commencer à uriner ?<br />

7. Au cours du dernier mois écoulé, combien<br />

de fois en moyenne vous êtes-vous levé pour<br />

uriner (entre le moment de votre coucher le<br />

soir et celui de votre lever définitif le matin) ?<br />

Examen clinique<br />

Il repose principalement sur le toucher rectal. Celui-ci doit<br />

être réalisé après vidange vésicale, soit en position genupectorale,<br />

soit en position gynécologique, soit patient penché en<br />

avant. La pulpe de l’index entre en contact avec la face antérieure<br />

du rectum et l’on peut s’aider du palper de la main<br />

hypogastrique quand le patient est en position gynécologique.<br />

Le toucher rectal donne deux types de renseignements. Il<br />

renseigne tout d’abord sur le volume de la prostate. Cette<br />

Jamais Environ 1 x/5 Environ 1 x/3 Environ 1 x/2 Environ 2 x/3 Presque toujours<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

Jamais 1 fois 2 fois 3 fois 4 fois 5 fois ou plus<br />

0 1 2 3 4 5<br />

Très satisfait Satisfait Plutôt satisfait Ni satisfait ni ennuyé Plutôt ennuyé Ennuyé Très ennuyé<br />

8. Si vous deviez vivre le restant<br />

de votre vie de cette manière,<br />

diriez-vous que vous en seriez : 0 1 2 3 4 5 6<br />

“ Point important<br />

Évaluation diagnostique de l’HBP<br />

Antécédents du patient : maladie neurologique, pathologie<br />

rachidienne, diabète, traitements médicamenteux<br />

Symptômes :<br />

irritatifs : pollakiurie, nycturie, impériosités<br />

obstructifs : mictions en deux temps, poussée<br />

abdominale, sensation de vidange incomplète<br />

Score IPPS : évaluation de la fréquence des symptômes et<br />

du retentissement sur la qualité de vie<br />

Examen physique :<br />

toucher rectal<br />

recherche de complications : globe vésical, douleur<br />

lombaire<br />

Examens complémentaires :<br />

bandelette urinaire ± ECBU<br />

débitmétrie<br />

Traité de Médecine Akos<br />

estimation est bien sûr dépendante de l’expérience de l’examinateur.<br />

Il permet d’autre part de dépister un cancer de la<br />

prostate. En effet, en cas d’HBP, la prostate palpée doit être<br />

ferme, mais lisse et régulière. Toute induration ou nodule<br />

suspect doit évoquer un cancer et faire poursuivre les<br />

investigations.<br />

L’examen clinique permet par ailleurs de dépister d’éventuelles<br />

complications. On doit en effet s’attacher à rechercher un<br />

globe vésical, un rein hypertrophié ou dilaté. L’examen doit être<br />

complété par celui des orifices inguinaux (hernie), des bourses,<br />

à la recherche d’anomalies testiculaires ou épididymaires, de la<br />

verge et du méat urétéral (sténose, lésions infectieuses). Enfin,<br />

pour éliminer les diagnostics différentiels, on effectue un<br />

examen neurologique du périnée. Pour finir, on réalise une<br />

bandelette urinaire à la recherche de marqueurs d’infection ou<br />

d’une hématurie.<br />

Il n’existe donc pas de signes qui affirment le diagnostic<br />

d’HBP. Celui-ci repose sur un faisceau d’arguments retrouvés par<br />

l’interrogatoire et le toucher rectal. Certains examens complémentaires<br />

peuvent permettre de préciser le diagnostic, surtout si<br />

le toucher rectal est peu contributif.<br />

Examens complémentaires<br />

Différentes commissions se sont réunies afin d’émettre des<br />

recommandations sur les examens à réaliser et celles-ci diffèrent<br />

(Tableau 2) [7] . Nous examinons donc les apports de chacun de<br />

ces différents examens.<br />

Bandelette urinaire<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate 5-0690<br />

Complétée d’un examen cytobactériologique des urines<br />

(ECBU) en cas de positivité, elle est recommandée par tous pour<br />

éliminer une infection.<br />

3


5-0690 Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

Tableau 2.<br />

Examens complémentaires pour le diagnostic de l’HBP (recommandations HAS).<br />

Examens Réalisation systématique Conditions<br />

Bandelette urinaire Oui<br />

Créatininémie Non Si symptômes anciens ou autres facteurs de risque d’insuffisance rénale<br />

Prostate specific antigen (PSA) Non Dans le cadre d’un dépistage individuel de cancer de la prostate<br />

Débitmétrie urinaire Oui (chez l’urologue)<br />

Bilan urodynamique Non Si doute diagnostique<br />

Biologie sanguine<br />

Le dosage de l’antigène prostatique spécifique ne présente pas<br />

d’intérêt pour le diagnostic de l’HBP. Son interprétation peut<br />

même être faussée par la présence de l’HBP. Il n’est recommandé<br />

que dans le cadre d’un dépistage individuel en fonction des<br />

données du toucher rectal.<br />

Le dosage de la créatininémie n’est pas systématique. Il peut<br />

être proposé à des patients présentant des facteurs de risque<br />

d’insuffisance rénale qui conduirait à modifier le traitement ou<br />

chez des patients avec des symptômes anciens et d’autres<br />

complications pouvant faire craindre une atteinte du haut<br />

appareil.<br />

Études urodynamiques<br />

La débitmétrie est le seul examen permettant de quantifier<br />

objectivement la dysurie. Elle est idéalement réalisée dans le<br />

cadre de la consultation avec l’urologue. Elle est exprimée sous<br />

forme d’une courbe et permet de déterminer un débit maximal<br />

en ml/s. Le volume uriné doit être supérieur à 150 ml pour que<br />

l’examen soit interprétable. Un débit supérieur à 15 ml/s est<br />

considéré comme normal. En dessous de 10 ml/s, il existe une<br />

gêne significative à l’évacuation des urines (Fig. 2). Il s’agit d’un<br />

examen performant tant pour le diagnostic que pour le suivi des<br />

malades. Il est par ailleurs non invasif et peu coûteux. Mais il<br />

n’est pour l’instant pratiqué qu’en milieu spécialisé et ne peut<br />

être recommandé en pratique quotidienne chez le médecin<br />

généraliste.<br />

Les autres explorations urodynamiques (cystomanométrie,<br />

urétromanométrie, etc.) ne sont recommandées qu’en cas de<br />

maladie neurologique associée ou de discordance de symptomatologie.<br />

Examens radiologiques<br />

Ils ne sont pas systématiques dans le bilan de première<br />

intention de l’HBP mais peuvent être utilisés pour dépister des<br />

Pour préciser les indications thérapeutiques<br />

Échographie de l’arbre urinaire par voie abdominale Non Si doute sur vessie de lutte, calcul vésical ou dilatation du haut appareil<br />

Échographie par voie transrectale Non Si doute sur le volume prostatique et la technique chirurgicale ou endoscopique<br />

Urétrocystoscopie Non Si doute diagnostique ou hématurie<br />

Débit (ml/s)<br />

Temps jusqu’au<br />

débit maximal<br />

Figure 2. Courbes de débitmétrie.<br />

A. Normale.<br />

B. Pathologique.<br />

Miction<br />

Débit maximal<br />

Volume uriné<br />

Temps (s)<br />

A<br />

Débit (ml/s)<br />

Miction<br />

“ Point important<br />

Temps (s)<br />

La débitmétrie<br />

Réalisée en milieu spécialisé, elle permet de mesurer le<br />

débit maximal et la courbe mictionnelle du patient. Le<br />

volume uriné doit être supérieur à 150 ml pour que<br />

l’examen soit interprétable.<br />

On considère les valeurs-seuils suivantes :<br />

au-delà de 15 ml/s : il n’existe pas d’obstacle significatif<br />

en deça de 10 ml/s : l’obstacle à l’évacuation des urines<br />

est significatif<br />

entre ces deux valeurs le diagnostic n’est pas certain et<br />

d’autres explorations urodynamiques sont nécessaires.<br />

complications. L’examen de choix est l’échographie réno-vésicoprostatique<br />

par voie sus-pubienne. Elle permet de mesurer le<br />

résidu post-mictionnel, de chercher des diverticules vésicaux, un<br />

calcul vésical et de dépister une atteinte du haut appareil.<br />

L’évaluation du volume de l’adénome est meilleure quand elle<br />

est obtenue par une échographie transrectale. Elle est surtout<br />

utile en cas de doute sur la technique chirurgicale à employer.<br />

Les autres examens d’imagerie (urographie intraveineuse,<br />

scanner, etc.) n’ont pas leur place dans le bilan de première<br />

intention de l’HBP. La cystoscopie, en l’absence de doute<br />

diagnostique ou d’hématurie, n’est elle non plus pas recommandée.<br />

Elle permet par ailleurs de dépister un lobe médian qui<br />

n’est pas palpable au toucher rectal.<br />

4 Traité de Médecine Akos<br />

B


Tableau 3.<br />

Traitements médicamenteux de l’hypertrophie bénigne de la prostate.<br />

Phytothérapie Mode d’action mal connu<br />

■ Traitements<br />

Le seul traitement curatif de l’HBP est la chirurgie. Son<br />

recours a été largement modifié ces dernières années avec<br />

l’amélioration des traitements médicaux. Il est encore une fois<br />

important de garder en mémoire que les symptômes ne sont pas<br />

proportionnels au volume de l’adénome et que le choix des<br />

thérapeutiques à entreprendre dépend des signes cliniques et de<br />

la gêne ressentie par le patient. Ainsi, il existe schématiquement<br />

trois groupes de patients : ceux qui présentent des complications<br />

et auxquels on propose un traitement chirurgical, ceux,<br />

paucisymptomatiques, pour qui on peut débuter par une<br />

surveillance, les derniers qui se situent entre ces deux extrêmes<br />

sont accessibles à des traitements médicaux que nous allons<br />

développer avant de définir des stratégies thérapeutiques.<br />

Abstention et surveillance<br />

Elle est indiquée chez les patients peu symptomatiques, sans<br />

complication et dont la qualité de vie n’est pas altérée. Elle se<br />

justifie d’autant plus que les symptômes liés à l’HBP fluctuent<br />

et peuvent s’amender pendant de longues périodes. Le risque<br />

éventuel de complications justifie toutefois de suivre régulièrement<br />

le patient, de l’avertir des complications éventuelles et de<br />

la conduite à tenir en cas de survenue de l’une d’entre elles. Elle<br />

peut être recommandée pour les patients peu symptomatiques<br />

ou avec un faible risque de rétention aiguë d’urines (score IPSS<br />

< 7, un débit maximal > 10 ml/s, pas de résidu post-mictionnel,<br />

une prostate < 30 g et un prostate specific antigen [PSA]<br />

< 1,6 ng/ml) [8] .<br />

Thérapeutiques médicamenteuses<br />

Elles ont deux principaux objectifs : réduire les symptômes et<br />

donc améliorer la qualité de vie d’une part, et diminuer le<br />

risque de complications et le recours à la chirurgie d’autre part<br />

(Tableau 3).<br />

Règles hygiénodiététiques<br />

Traitement de première intention<br />

Pygeum Africanum (Tandenan ® : 1 cp x 2/j) ou<br />

Serenoa Repens (Permixon ® : 1 cp/j)<br />

Alphabloquants Action myorelaxante sur fibres musculaires<br />

lisses<br />

Inhibiteurs<br />

de la 5-réductase<br />

Première intention ou après échec des autres<br />

thérapeutiques<br />

Action rapide (jours à semaines)<br />

Térazosine (Hytrin ® ), Doxazosine (Zoxan ® ),<br />

Alfuzosine (Xatral ® , Urion ® ) ou Tamsulosine<br />

(Omix ® , Omexel ® , Mecir ® , Josir ® )<br />

Inhibition de la transformation de testostérone<br />

en dihydrotestostérone<br />

Première intention ou échec des autres classes<br />

Diminue le PSA de 50 %<br />

Finastéride (Chibro-Proscar ® ) ou dutastéride<br />

(Avodart ® )<br />

Antimuscariniques Action myorelaxante par inhibition des récepteurs<br />

muscariniques<br />

PSA : prostate specific antigen.<br />

Ce ne sont pas des thérapeutiques médicamenteuses à<br />

proprement parler mais il est important de les souligner. Elles<br />

ne sont pas efficaces pour combattre l’évolution de l’adénome<br />

mais peuvent permettre d’éviter des aggravations transitoires ou<br />

Traité de Médecine Akos<br />

En cas d’hyperactivité vésicale associée<br />

Oxybutinine, toltérodine<br />

un épisode de rétention. Il faut ainsi recommander au patient<br />

une hydratation suffisante, une activité physique régulière et<br />

une prévention de la constipation. À l’inverse, il faut déconseiller<br />

la prise d’alcool, les plats épicés et les situations assises<br />

prolongées.<br />

Phytothérapie<br />

Elle n’a été étudiée que dans des essais cliniques à faible<br />

puissance statistique mais n’est pas, comme on l’a longtemps<br />

pensé, un simple placebo et constitue un traitement efficace [9] .<br />

Elle est représentée par deux composés tous deux extraits de<br />

plantes. Le Pygeum Africanum (Tandenan ® : 2 cp/j) est extrait<br />

de l’écorce du prunier africain. Le Serenoa Repens (Permixon ® :<br />

1 cp/j) provient, lui, des baies d’un palmier américain. Le mode<br />

d’action de ces molécules est encore mal connu. Différents<br />

modes d’action ont été évoqués : action antiestrogénique, antiinflammatoire,<br />

inhibition de la 5a-réductase ou inhibition des<br />

facteurs de croissance mais aucun n’a été démontré.<br />

Alphabloquants<br />

Les drogues alphabloquantes agissent sur les a-adrénorécepteurs<br />

qui se trouvent dans la zone péricervicale de la vessie<br />

et du tissu prostatique. Elles ont une action myorelaxante sur<br />

les fibres musculaires lisses et agissent sur la composante<br />

dynamique de l’obstruction sans influer sur le volume prostatique.<br />

Les a-bloqueurs de type 1 semblent être les plus efficaces.<br />

On dispose actuellement de quatre molécules : la térazosine<br />

(Hytrin ® ), la doxazosine (Zoxan ® ), l’alfuzosine (Xatral ® , Urion ® )<br />

et la tamsulosine (Omix ® , Omexel ® , Mecir ® , Josir ® ). Aucune<br />

différence d’efficacité n’a été démontrée entre ces molécules [10] .<br />

Elles permettent une amélioration du débit de 10 %à15%et<br />

une amélioration des scores symptomatiques dans 15 %à20%<br />

des cas [11] . Elles partagent par ailleurs l’avantage d’une rapidité<br />

d’action puisque les premiers bénéfices apparaissent au bout de<br />

quelques jours et l’efficacité maximale en 3 mois. Ceci justifie<br />

leur usage au décours d’une rétention aiguë d’urines car ils<br />

permettent d’accroître la probabilité de sevrage du drainage<br />

vésical. Des données récentes semblent enfin montrer que les<br />

a1-bloquants ralentiraient la progression des symptômes [12] .<br />

Les effets secondaires concernent 4%à10%despatients [7] .<br />

On retient les céphalées, les vertiges, la tachycardie, les troubles<br />

de l’éjaculation et l’hypotension artérielle. À cet égard, tous les<br />

a-bloquants ne sont pas équivalents puisque la tamsulosine a<br />

un impact moins important sur la tension artérielle que<br />

l’afuzosine par exemple.<br />

Inhibiteurs de la 5a-réductase<br />

L’utilisation de cette classe de molécules repose sur le fait que<br />

l’épithélium prostatique se développe sous la stimulation<br />

androgénique de la dihydrotestostérone (DHT), produit de<br />

transformation de la testostérone par la 5a-réductase. La<br />

suppression de cette métabolisation diminue la prolifération<br />

cellulaire prostatique et relance l’apoptose. On dispose actuellement<br />

de deux types d’inhibiteurs : le finastéride (Chibro-<br />

Proscar ® ), inhibiteur sélectif des récepteurs de type II et le<br />

dutastéride (Avodart ® ), inhibiteur des récepteurs de type I et II.<br />

Ils ont tous deux prouvé leur efficacité dans l’amélioration du<br />

débit et des scores symptomatiques mais aussi dans la diminution<br />

du volume prostatique. Ainsi, le PSA est abaissé (50 %) en<br />

cas de traitement par inhibiteur de la 5a-réductase et il faut en<br />

tenir compte en cas de suivi du PSA.<br />

Antimuscariniques<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate 5-0690<br />

Ces molécules, utilisées pour le traitement de l’hyperactivité<br />

vésicale, ont longtemps été contre-indiquées car elles augmentaient<br />

le risque de rétention aiguë d’urines. Elles ont, depuis,<br />

montré leur efficacité en deuxième intention, chez des patients<br />

présentant des symptômes d’hyperactivité vésicale (irritatifs)<br />

associés aux symptômes obstructifs, après échec d’un traitement<br />

a-bloquant seul [13] . Ils sont à proscrire chez les patients ayant<br />

d’importants facteurs de risque de rétention d’urines.<br />

Les autres traitements hormonaux (analogues de la luteinizing<br />

hormone-releasing hormone [LHRH], progestatifs, etc.) n’ont pas<br />

fait la preuve de leur efficacité et ne sont pas recommandés.<br />

5


5-0690 Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

Association<br />

En cas d’échec d’une classe pharmacologique, il est possible<br />

de prescrire une bithérapie. On privilégie l’association inhibiteur<br />

de la 5a-réductase avec les a1-bloquants [8] .<br />

Traitements invasifs non chirurgicaux<br />

Plusieurs traitements dont l’objectif était de proposer une<br />

alternative aux traitements chirurgicaux conventionnels ont vu<br />

le jour ces 20 dernières années. La plupart d’entre eux sont<br />

encore en cours d’évaluation, mais on dispose de données<br />

préliminaires encourageantes.<br />

Endoprothèses urétrales<br />

Utilisées depuis longtemps, elles continuent à l’être chez des<br />

patients aux symptômes sévères avec refus ou contre-indication<br />

à une chirurgie conventionnelle. En effet, elles peuvent être<br />

implantées sous anesthésie locale.<br />

Thermothérapie prostatique par radiofréquence<br />

(TUNA)<br />

Autre forme de traitement par la chaleur, le transurethral<br />

needle ablation (TUNA) utilise des ondes de basse fréquence<br />

délivrées à l’aide d’aiguille par voie transurétrale. La chaleur due<br />

à la radiofréquence entraîne une nécrose des tissus de l’adénome.<br />

L’intervention peut être réalisée sous anesthésie locale et<br />

permet une amélioration des symptômes de l’ordre de 50 %,<br />

surtout si l’adénome est de petite taille [14] . On ne dispose pour<br />

l’instant pas de résultats à long terme mais il semble également<br />

que les effets soient limités dans le temps.<br />

Micro-ondes transurétrales à haute énergie (TUMT)<br />

Il s’agit d’une autre intervention réalisée par voie transurétrale.<br />

Les ondes sont délivrées par un cathéter urétral qui<br />

permet d’atteindre une température de 65 °C à laquelle le tissu<br />

prostatique est détruit, tout en étant équipé d’un système de<br />

refroidissement qui limite les lésions urétrales. Le traitement<br />

nécessite la mise en place d’un drainage vésical pendant<br />

plusieurs jours après l’intervention. Une fois de plus, les<br />

résultats sont proportionnels à l’énergie délivrée. Ce traitement<br />

est en cours d’évaluation mais semble avoir des résultats<br />

encourageants à long terme.<br />

Lasers<br />

L’utilisation du laser dans le traitement de l’HBP date des<br />

années 1990 mais connaît ces dernières années un grand essor<br />

en raison d’innovations technologiques importantes. Il s’agit<br />

d’une technique, réalisée par voie endoscopique, qui utilise des<br />

fibres laser pour énucléer l’adénome de prostate. Elle permet<br />

théoriquement un geste sous sédation légère, une meilleure<br />

coagulation et une meilleure prévention de l’éjaculation<br />

rétrograde que les techniques de résection classique [7] . Il existe<br />

plusieurs types de laser qui diffèrent selon qu’ils vaporisent<br />

(laser Nd:YAG type Greenlight ) ou qu’ils énucléent (laser<br />

Holmium:YAG type VersaPulse ® ) l’adénome, selon le mode<br />

pulsé ou continu d’émission des ondes ou selon l’angulation de<br />

la fibre ou son positionnement directement dans l’adénome [15] .<br />

Le laser a fait la preuve de son efficacité dans diverses études<br />

comparatives mais est en cours d’évaluation en France.<br />

Traitements endoscopiques et chirurgicaux<br />

Les traitements endoscopiques comprennent la résection<br />

transurétrale de prostate et l’incision cervicoprostatique. La<br />

chirurgie ouverte est représentée par l’adénomectomie par voie<br />

haute. Les indications dépendent principalement de la morphologie<br />

et du volume de l’adénome. Les complications sont<br />

communes aux trois techniques à des degrés variables : infection<br />

urinaire (< 10 %), saignement et nécessité de transfusion<br />

(2 à 5 %), éjaculation rétrograde (quasi constante sauf en cas<br />

d’incision cervicoprostatique), incontinence urinaire (0,5 à2%<br />

selon la technique), sténose urétrale, sclérose du col et rarement<br />

troubles de l’érection.<br />

Traitements endoscopiques<br />

Incision cervicoprostatique<br />

Réalisée par voie endoscopique, il s’agit de réaliser au bistouri<br />

électrique une incision qui débute en arrière du col vésical<br />

(après repérage du méat urétéral) et s’étend jusqu’au veru<br />

montanum. Elle ouvre le lobe prostatique en deux. L’adénome<br />

n’est donc pas retiré. Cette technique est à réserver aux patients<br />

jeunes avec de faibles volumes prostatiques ou patients qui ne<br />

pourraient supporter une technique plus longue avec des risques<br />

de complications.<br />

Résection transurétrale de prostate<br />

Il s’agit de la technique de référence et de la voie utilisée le<br />

plus fréquemment. Elle est réalisée sous anesthésie générale ou<br />

locorégionale, par voie endoscopique. L’ablation de l’adénome<br />

se fait grâce à une anse conduisant du courant électrique par<br />

résection progressive de copeaux jusqu’à atteindre la capsule. La<br />

bonne conduction du courant dans la vessie nécessite de la<br />

remplir par du glycocolle, liquide hypo-osmolaire qui peut être<br />

réabsorbé dans le sang et causer une hyponatrémie importante<br />

dans le cadre d’un syndrome de réabsorption (2 à 5 % des<br />

cas). Une hémostase électrique est réalisée en fin d’intervention<br />

et une sonde urétrale positionnée pour 1 à 3 jours. Cette<br />

technique s’applique principalement aux adénomes prostatiques<br />

de moins de 30-40 g. Elle permet une amélioration des symptômes<br />

de l’ordre de 70 % avec des résultats durables dans le<br />

temps [7] . En cas d’HBP symptomatique avec présence d’un lobe<br />

médian chez un homme jeune, il est possible de réséquer<br />

uniquement le lobe médian sans réséquer les lobes latéraux afin<br />

de préserver l’éjaculation.<br />

Adénomectomie prostatique par voie haute<br />

Elle est essentiellement indiquée en cas d’adénome volumineux.<br />

Il existe plusieurs techniques chirurgicales. La plus utilisée<br />

est la voie sus-pubienne transvésicale. Elle consiste en une<br />

énucléation au doigt de l’adénome au contact de la capsule.<br />

L’hémostase est réalisée par des fils chirurgicaux. Une sonde<br />

vésicale est laissée en place pour plusieurs jours. Les résultats à<br />

long terme sont excellents mais il s’agit d’une technique<br />

invasive non dénuée de complications (saignement,<br />

incontinence).<br />

Stratégies thérapeutiques<br />

La grande diversité des traitements rend ardue la prise en<br />

charge thérapeutique de l’HBP. Il faut tout d’abord retenir qu’en<br />

l’absence de symptômes ou de complications, la présence<br />

clinique ou radiologique d’un adénome de prostate ne doit pas<br />

faire débuter de traitement. Celle-ci doit se faire au cas par cas.<br />

Pourtant, il existe des schémas stratégiques qui permettent<br />

d’optimiser les traitements. L’interrogatoire, la clinique et le<br />

bilan complémentaire (présence échographique d’un adénome)<br />

vont permettre de différencier plusieurs situations.<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate compliquée<br />

L’existence d’un de ces éléments doit faire poser d’emblée<br />

l’indication chirurgicale. Il s’agit de la rétention aiguë d’urines<br />

récidivant malgré l’introduction d’un traitement par alphabloquants,<br />

de la rétention vésicale chronique avec résidu postmictionnel<br />

important, de l’atteinte du haut appareil, du calcul<br />

de vessie, de l’hématurie récidivante, des infections urinaires à<br />

répétition et du diverticule vésical rétentionniste.<br />

6 Traité de Médecine Akos


Hypertrophie bénigne de la prostate non<br />

compliquée<br />

Le comité des troubles mictionnels de l’homme de l’Association<br />

française d’urologie a proposé en 2004 un arbre décisionnel<br />

de prise en charge de l’HBP non compliquée [8] (Fig. 3). Il s’agit<br />

d’un traitement médical en première intention : a-bloquants ou<br />

phytothérapie et inhibiteurs de la 5a-réductase si le poids de la<br />

prostate est supérieur à 30-40 g. Le traitement est réévalué à<br />

3 ou 6 mois. En cas de succès, il convient de le poursuivre. En<br />

cas d’intolérance au médicament, il faut changer de classe<br />

pharmaceutique. En cas d’échec, plusieurs solutions s’offrent au<br />

praticien et au patient. D’une part, le choix d’une technique<br />

mini-invasive ou d’un traitement chirurgical. D’autre part, la<br />

poursuite d’un traitement médical. On peut alors changer de<br />

molécule, remplacer une classe médicamenteuse par une autre<br />

ou instaurer une bithérapie. Le nouveau traitement est réévalué<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Prostate < 30/40 g<br />

α-bloquants<br />

ou<br />

phytothérapie<br />

Traitement de 1 re intention<br />

Prostate < 30/40 g Prostate > 30/40 g<br />

3 à 6 mois plus tard et, en cas d’échec, il convient de proposer<br />

un traitement chirurgical.<br />

■ Conclusion<br />

Prostate > 30/40 g<br />

α-bloquants<br />

ou<br />

inhibiteurs de la 5α-réductase<br />

ou<br />

phytothérapie<br />

Réévaluation après 3 mois (α-bloquants ou phytothérapie) ou 6 mois de traitement<br />

Succès<br />

Poursuivre le traitement<br />

Seconde ligne de traitements médicaux<br />

Si phytothérapie<br />

α-bloquants<br />

Si α-bloquants associer<br />

antimuscariniques<br />

Succès<br />

Poursuivre le traitement<br />

Échec<br />

Après discussion avec le patient<br />

Chirurgie ou thérapeutiques<br />

mini-invasives<br />

Échec<br />

Chirurgie ou thérapeutiques<br />

mini-invasives<br />

Intolérance<br />

Changer de médicament<br />

ou de classe pharmaceutique<br />

Si phytothérapie α-bloquants ou inhibiteurs<br />

de la 5α-réductase<br />

Si inhibiteurs de la 5α-réductase α-bloquants<br />

Si α-bloquants autre α-bloquant ou inhibiteur de<br />

la 5α-réductase<br />

Si facteurs de risque : α-bloquants + inhibiteurs<br />

de la 5α-réductase<br />

Si symtômes irritatifs : ajouter des anticholinergiques<br />

Réévaluation après 3 mois (α-bloquants ou phytothérapie) ou 6 mois de traitement<br />

Figure 3. Arbre décisionnel. Hypertrophie bénigne de la prostate non compliquée.<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate 5-0690<br />

L’HBP touche un nombre très important d’hommes de plus de<br />

50 ans et cette population croit d’années en années. Cette<br />

affection est donc un véritable problème de santé publique. La<br />

connaissance de la pathogénie et de l’évolution de l’HBP ont<br />

permis de développer de nouvelles armes thérapeutiques pour le<br />

praticien. Ainsi, en appliquant correctement les recommandations,<br />

il est possible d’améliorer considérablement les symptômes et la<br />

qualité de vie des malades en repoussant le recours à une sanction<br />

chirurgicale. Patients et cliniciens doivent être au mieux informés<br />

pour optimiser ces différents traitements. La recherche est<br />

parallèlement poursuivie afin de développer des nouvelles techniques<br />

instrumentales et d’améliorer les médicaments déjà utilisés.<br />

7


.<br />

5-0690 Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

■ Références<br />

[1] Collège universitaire des enseignants d’urologie. Hypertrophie<br />

bénigne de prostate. In: Urologie. Paris: Ellipses; 2004.<br />

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epidemiology and natural history of BPH. In: Wein AJ, Kavoussi LR,<br />

Novick AC, Partin AW, Peters CA, editors. Campbell-Walsh Urology.<br />

St Louis: WB Saunders; 2007.<br />

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prostatique. Particularités du système alpha-adrénergique. Prog Urol<br />

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(Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-550-A-10, 2000.<br />

[7] de la Rosette J,Alivizatos S, Madersbacher S, Rioja Sanz C, Nordling J,<br />

Emberton M, et al. Guidelines on benign prostatic hyperplasia. In:<br />

Guidelines. Arnhem: European Association of Urology; 2009. p. 5-3.<br />

[8] Desgrandchamps F, de la Taille A, Azzouzi AR, Fourmarier M,<br />

Haillot O, Lukacs B, et al. Management of non-complicated BPH: proposition<br />

of a renewed decision tree. World J Urol 2006;24:367-70.<br />

[9] Carraro JC, Raynaud JP, Koch G, Chisholm GD, Di Silverio F, Teillac P,<br />

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study of 1,098 patients. Prostate 1996;29:231-42.<br />

[10] AUAguideline on management of benign prostatic hyperplasia (2003).<br />

Chapter 1: Diagnosis and treatment recommendations. JUrol2003;<br />

170:530-47.<br />

[11] Cornu JN, Roupret M. Innovations chirurgicales dans le traitement de<br />

l’hyperplasie bénigne de la prostate : vers de nouveaux standards thérapeutiques?<br />

Prog Urol 2007;17:1029-32.<br />

[12] Roehrborn CG. Alfuzosin 10 mg once daily prevents overall clinical<br />

progression of benign prostatic hyperplasia but not acute urinary<br />

retention: results of a 2-year placebo-controlled study. BJU Int 2006;<br />

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[13] Kaplan SA, Roehrborn CG, Rovner ES, Carlsson M, Bavendam T,<br />

Guan Z. Tolterodine and tamsulosin for treatment of men with lower<br />

urinary tract symptoms and overactive bladder: a randomized<br />

controlled trial. JAMA 2006;296:2319-28.<br />

[14] Zlotta AR, Giannakopoulos X, Maehlum O, Ostrem T, Schulman CC.<br />

Long-term evaluation of transurethral needle ablation of the prostate<br />

(TUNA) for treatment of symptomatic benign prostatic hyperplasia:<br />

clinical outcome up to five years from three centers. Eur Urol 2003;44:<br />

89-93.<br />

[15] Azzouzi AR. Laser prostate : principes et présentation du matériel.<br />

Partie II : la pratique. Prog Urol 2009;19:F40-F47.<br />

Pour en savoir plus<br />

Kirby R, Lepor H. Evaluation and non surgical management of benign<br />

prostate hyperplasia. In: WeinAJ, Kavoussi LR, NovickAC, PartinAW,<br />

Peters CA, editors. Campbell-Walsh Urology. Philadelphia: Saunders<br />

Elsevier; 2007 (chap 87).<br />

Fourcade RO, Tahan H. Hypertrophie bénigne de la prostate. EMC (Elsevier<br />

Masson SAS, Paris), Urologie, 18-550-A-10, 2000.<br />

Haute Autorité de Santé. Prise en charge diagnostique et thérapeutique<br />

de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Mars 2003.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/<strong>pdf</strong>/hbp_<br />

2003_recommendations.<strong>pdf</strong>.<br />

Site de l’Association Française d’Urologie : http://www.urofrance.org/.<br />

S.-J. Drouin.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, AP-HP, Faculté de médecine Pierre-et-Marie-Curie, Université Paris VI, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris<br />

cedex 13, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Drouin S.-J., Rouprêt M. Hypertrophie bénigne de la prostate. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de<br />

Médecine Akos, 5-0690, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

8 Traité de Médecine Akos<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Malade porteur d’une sonde vésicale<br />

à domicile<br />

V. Phé, M. Rouprêt<br />

La sonde vésicale à demeure est indiquée en cas d’incontinence urinaire ou de rétention permanente<br />

(paraplégique, malade inopérable) lorsque aucune autre alternative n’est envisageable. Dans tous les<br />

cas, ce geste doit être atraumatique, indolore, stérile. Il existe différents modèles de sondes, mais dans le<br />

cas d’un sondage à demeure, on utilise le plus souvent une sonde à ballonnet, de Charrière 16 ou 18,<br />

100 % silicone, car mieux tolérée. La poche de recueil doit être stérile, vidangeable, munie d’une valve<br />

antiretour, avec un tuyau de bon calibre, semi-rigide, comportant un site de prélèvement à urines. Les<br />

soins d’hygiène sont indispensables. Après une toilette à l’eau et au savon, il ne faut pas oublier de<br />

recalotter les hommes. La diurèse doit être abondante afin d’éviter l’obstruction de la sonde. Certaines<br />

habitudes doivent être respectées : vérifier le bon écoulement des urines, ne déconnecter la sonde du sac<br />

collecteur qu’en cas d’urgence et de manière aseptique, respecter les dates de changement de sonde (tous<br />

les mois), vider régulièrement le sac collecteur à l’aide du robinet de vidange. Tout patient porteur d’une<br />

sonde à demeure voit ses urines contaminées au bout de 3 jours si la règle du système clos n’a pas été<br />

respectée. Seules les infections urinaires symptomatiques (fièvre, douleurs, frissons, épididymite ...)<br />

doivent être traitées par une antibiothérapie adaptée. L’examen cytobactériologique des urines (ECBU)<br />

doit s’effectuer uniquement par le site de prélèvement situé sur le sac collecteur, après désinfection, avec<br />

une seringue et une aiguille. Il ne faut jamais prélever les urines dans la poche de recueil car les urines<br />

présentes dans le sac peuvent avoir stagné plusieurs heures, et l’ECBU peut être ininterprétable. S’il n’y a<br />

pas de site de prélèvement, recueillir les urines directement à la sortie de la sonde, en déconnectant la<br />

sonde du sac, de façon aseptique. Lorsque la sonde est bouchée, le patient se plaint de douleurs<br />

pelviennes, et il y a des fuites autour de la sonde. Dans ce cas, il faut faire des lavages de vessie à la<br />

seringue et augmenter les boissons. Si la sonde ne peut être débouchée, il faut la remplacer. Si les malades<br />

porteurs de sonde à demeure sont de plus en plus nombreux, il faut toujours se demander s’il n’existe pas<br />

une meilleure solution pour assurer la vidange vésicale. L’indication du sondage à demeure peut être<br />

remise en question en fonction de l’évolution de la situation d’un patient.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Sonde vésicale ; Colonisation ; Infection de l’appareil urinaire ; Leucocyturie<br />

Introduction 1<br />

Risques du sondage vésical 2<br />

Terminologie 2<br />

Mécanismes de l’infection 2<br />

Facteurs de risque de l’infection 2<br />

Diagnostic d’une infection urinaire chez le patient sondé 2<br />

Traitement de l’infection 3<br />

Traitement des colonisations asymptomatiques sur sonde 3<br />

Traitement des colonisations symptomatiques 3<br />

Prévention du risque infectieux 3<br />

Méthodes de prévention 3<br />

Modalités de surveillance 3<br />

Conclusion 5<br />

Traité de Médecine Akos<br />

■ Introduction<br />

5-0686<br />

Nombreux sont les patients qui regagnent leur domicile avec<br />

une sonde vésicale après une hospitalisation ou un passage aux<br />

urgences. Il peut s’agir par exemple de patients inopérables,<br />

chez lesquels le traitement chirurgical de l’adénome de prostate<br />

est impossible et chez lesquels une sonde à demeure a été mise<br />

en place, de patients qui ont une sonde pour une période<br />

limitée, en général dans les suites d’une intervention sur les<br />

voies urinaires, ou encore de patients atteints d’un dysfonctionnement<br />

vésical d’origine neurologique qui ne peuvent vider leur<br />

vessie que par des sondages répétés.<br />

Une sonde vésicale peut rester « à demeure », être utilisée en<br />

autosondage (sondage réalisé par le patient lui-même) ou en<br />

hétérosondage (sondage réalisé par une tierce personne).<br />

Quelle que soit l’indication, de nombreux travaux ont<br />

montré l’incidence élevée des bactériuries chez le malade sondé.<br />

La colonisation bactérienne est directement dépendante de la<br />

durée du sondage et des soins apportés au patient.<br />

1


5-0686 Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile<br />

Figure 1. Sonde vésicale. 1. Ballonnet intravésical ; 2. sonde double<br />

courant ; 3. sonde simple courant.<br />

Afin de prévenir le principal risque qui est infectieux, le<br />

médecin doit, à la sortie de l’hôpital, informer le patient sur les<br />

précautions à prendre. À domicile, l’infirmière a un rôle<br />

primordial dans l’information et l’éducation du patient porteur<br />

d’une sonde à demeure.<br />

■ Risques du sondage vésical<br />

Laisser un patient retourner à son domicile avec une sonde<br />

vésicale est possible mais non dénué de risques. Les risques sont<br />

les mêmes que chez le patient sondé à l’hôpital mais la difficulté<br />

chez le patient sondé à domicile provient du fait qu’il<br />

n’est pas soumis à une surveillance permanente de la part du<br />

personnel médical et paramédical.<br />

Le principal risque est infectieux. Il est le plus souvent lié au<br />

non-respect des règles d’hygiène et d’asepsie lors de la pose, au<br />

non-respect du principe du système clos, au non-respect des<br />

précautions d’asepsie lors de manipulations. Il existe effectivement,<br />

chez le patient sondé, une altération des moyens de<br />

défense vésicale par action mécanique sur l’endothélium et la<br />

couche de mucopolysaccharides acides, une perturbation du<br />

transit urinaire avec quasi constamment un résidu minime et la<br />

production d’un biofilm (enduit d’origine bactérienne qui se<br />

produit à la surface de la sonde et qui soustrait les bactéries des<br />

défenses immunitaires de l’organisme et de l’action des<br />

antibiotiques).<br />

Par ailleurs, une sonde vésicale laissée à long terme doit être<br />

changée régulièrement (Fig. 1). Il peut alors survenir, lors du<br />

changement de sonde, des lésions traumatiques de l’urètre ou<br />

de la prostate liées à un cathétérisme forcé, un diamètre de la<br />

sonde trop important, un ballonnet gonflé dans l’urètre, ou<br />

encore à une sonde arrachée.<br />

Les autres risques peuvent être une inflammation de la<br />

muqueuse vésicale liée au temps de présence de la sonde, un<br />

paraphimosis lié à un cathétérisme long ou à une rétraction du<br />

prépuce chez l’homme ou le garçon, des fuites d’urines au<br />

niveau du méat liées à une obstruction de la sonde, un ballon<br />

insuffisamment gonflé et une sonde de diamètre trop petit, une<br />

obstruction de la sonde liée à des dépôts ou à des caillots de<br />

sang.<br />

■ Terminologie<br />

Afin d’utiliser les termes les plus appropriés, le comité<br />

d’infectiologie de l’Association française d’urologie (AFU) a<br />

publié en 2007 une modification de la terminologie [1] . Les<br />

changements à prendre en compte sont les suivants :<br />

le terme « bactériurie asymptomatique » est remplacé par le<br />

terme « colonisation » ;<br />

l’appellation « infection urinaire » disparaît au profit de<br />

« infection de l’appareil urinaire » ;<br />

la dénomination « pyurie » est désormais remplacée par le<br />

terme « leucocyturie ».<br />

■ Mécanismes de l’infection<br />

La présence d’une sonde urétrale est un accès permanent des<br />

germes à l’appareil urinaire.<br />

Trois mécanismes principaux de survenue d’une infection<br />

urinaire peuvent être incriminés :<br />

la contamination de la vessie lors du cathétérisme par des<br />

germes présents dans l’urètre antérieur et non supprimés par<br />

la toilette avant sondage ; environ 20 % des patients sont<br />

déjà colonisés dès le sondage ;<br />

la propagation des germes cutanés à partir du méat urétral le<br />

long de la sonde ;<br />

la propagation des germes dans la lumière même de la sonde,<br />

ce qui souligne l’intérêt de maintenir clos le système de<br />

drainage. On a montré ainsi qu’à l’occasion des changements<br />

de sonde, la numération des germes était plus élevée sur<br />

l’ancienne sonde que sur la nouvelle. Une fois installée,<br />

l’infection est pérennisée par la présence de la sonde qui<br />

induit des lésions inflammatoires au niveau de la muqueuse<br />

cervicale et de la muqueuse urétrale, et qui peuvent être à<br />

l’origine d’incrustations calcaires (elles apparaissent dès la<br />

première semaine après la pose de la sonde) [2] , voire de<br />

calculs qui représentent autant de nids à germes.<br />

La voie lymphatique et hématogène est beaucoup plus rare.<br />

■ Facteurs de risque de l’infection<br />

La durée du cathétérisme représente le facteur de risque<br />

majeur des bactériuries (> 10 4 germes/ml). La durée du sondage<br />

dépend de l’indication du sondage. Ainsi, après un sondage<br />

aller-retour, une colonisation peut se développer dans 1 %-5 %<br />

des cas [3] .<br />

Le sondage de courte durée est défini par une sonde en place<br />

pour moins de sept jours [4] . Ses principales indications sont la<br />

surveillance de la diurèse lors d’une pathologie aiguë, une<br />

rétention aiguë d’urines, et au décours d’une chirurgie. Entre<br />

10 % et 30 % des patients développent une colonisation. Il<br />

n’existe pas de preuve suffisante du bénéfice du sondage pour<br />

une certaine période au décours d’une chirurgie par rapport à<br />

l’ablation de la sonde vésicale immédiatement après<br />

l’intervention [5] .<br />

Le sondage de longue durée est défini par une sonde en place<br />

depuis plus de 28 jours et est associé à un plus haut risque<br />

d’infection.<br />

Les autres facteurs indépendants du sondage vésical mis en<br />

cause sont :<br />

la diurèse : plus la diurèse est faible, plus le risque est grand,<br />

d’où l’importance de bien éduquer à ce sujet le patient qui<br />

rentre à domicile ;<br />

la stase urinaire : l’obstruction du système de drainage à un<br />

niveau quelconque est facteur de stase, et donc de pullulation<br />

microbienne ;<br />

le sexe : le risque d’infection est deux fois plus élevé chez les<br />

femmes que chez les hommes, du fait de la brièveté urétrale.<br />

Il existe en revanche, chez ces derniers, un risque d’épididymite<br />

aiguë et de prostatite aiguë, et les foyers prostatiques<br />

peuvent être à l’origine de récidive ;<br />

l’âge ;<br />

la présence de maladies associées telles que le diabète.<br />

■ Diagnostic d’une infection<br />

urinaire chez le patient sondé<br />

La bactériurie est souvent asymptomatique. Dans ce cas, on<br />

parle de colonisation et c’est la pratique d’un examen cytobactériologique<br />

des urines (ECBU) systématique qui la met en<br />

évidence. Elle peut aussi être à l’origine d’une fièvre à<br />

38-38,5 °C.<br />

L’ECBU est pratiqué dans des conditions particulières chez le<br />

patient porteur d’une sonde à demeure. Il est réalisé après<br />

clampage et désinfection avec une seringue au niveau de la<br />

chambre de prélèvement. Il faut tout faire pour ne pas rompre<br />

le système clos.<br />

2 Traité de Médecine Akos


Chez l’homme, la survenue d’une épididymite ou d’une<br />

prostatite est de diagnostic facile dès lors qu’on a le réflexe<br />

d’examiner les organes génitaux et de réaliser un toucher rectal.<br />

L’interprétation de l’ECBU ne présente que peu de particularités,<br />

si ce n’est qu’une leucocyturie sans infection est possible<br />

du fait de la présence d’un corps étranger. La présence de<br />

bactériurie à une concentration insuffisante pour porter le<br />

diagnostic d’infection urinaire est souvent annonciatrice d’une<br />

véritable infection, survenant alors dans les 24 à 72 heures<br />

suivantes.<br />

Le germe le plus souvent rencontré est Escherichia coli. Il faut<br />

toutefois se méfier lorsque les patients viennent de séjourner à<br />

l’hôpital, ce qui est très souvent le cas. Ils peuvent être porteurs<br />

de germes multirésistants, bien connus de nos services hospitaliers<br />

: Enterobacter cloacae, Serratia marcescens, Pseudomonas<br />

aeruginosa, Enterococcus faecalis.<br />

■ Traitement de l’infection<br />

Traitement des colonisations<br />

[6, 7]<br />

asymptomatiques sur sonde<br />

Il existe un consensus concernant l’abstention thérapeutique<br />

en cas de colonisation. Il n’existe effectivement aucune preuve<br />

de la diminution de la morbidité ou de la mortalité en cas de<br />

traitement d’une bactériurie asymptomatique (pas de diminution<br />

de l’incidence des épisodes fébriles, ni de la sévérité et de<br />

la durée de la bactériurie). Les antibiotiques créent une pression<br />

de sélection qui favorise l’émergence de bactéries résistantes [8,<br />

9] . D’autre part, un traitement n’entraînerait qu’une amélioration<br />

temporaire et favoriserait l’émergence de germes résistants.<br />

Dans quelques cas spécifiques seulement, le traitement de la<br />

bactériurie asymptomatique est recommandé :<br />

patient en situation préopératoire : interventions ou explorations<br />

urologiques ou mise en place d’une prothèse ;<br />

patients porteurs d’une prothèse vasculaire, articulaire ou<br />

cardiaque lors d’une manœuvre invasive ;<br />

épidémie à bactérie multirésistante dans une unité d’hospitalisation<br />

en concertation avec le Comité de lutte contre les<br />

infections nosocomiales ;<br />

patients dont la colonisation urinaire est un facteur de risque<br />

de morbimortalité : immunodéprimés, neutropéniques,<br />

femmes enceintes.<br />

Dans le cas d’une candidurie asymptomatique, l’utilisation<br />

d’un antifongique local ou systémique n’est pas recommandée<br />

mais l’ablation de la sonde vésicale doit être envisagée.<br />

Traitement des colonisations<br />

symptomatiques<br />

Le traitement des colonisations bactériennes symptomatiques<br />

est recommandé et consiste en une antibiothérapie adaptée à<br />

l’antibiogramme. Il est recommandé de changer la sonde après<br />

48 heures d’antibiothérapie sur prescription médicale. La durée<br />

du traitement varie de 5à21jours selon le germe en cause, les<br />

comorbidités et la réponse thérapeutique.<br />

Dans le cas d’une candidurie symptomatique, l’utilisation<br />

d’un antifongique systémique est recommandée [10] .<br />

■ Prévention du risque infectieux<br />

Méthodes de prévention<br />

La prescription de sortie pour un patient qui rentre à domicile<br />

avec une sonde vésicale doit comprendre :<br />

non seulement le matériel nécessaire pour le sondage et le<br />

confort du patient (poches pour la nuit dont la contenance<br />

est de 2 l, poches pour la journée dont la contenance est de<br />

500 ml avec un système d’attache pour la jambe) ;<br />

mais également une information sur les mesures de prévention<br />

et d’éducation.<br />

Le personnel qui prend le relais de la prise en charge thérapeutique<br />

du patient à domicile doit être formé à la prévention<br />

des risques liés à une sonde vésicale.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

La première mesure est bien entendu d’éviter tout sondage<br />

inutile. Il est également nécessaire d’enlever les sondes urinaires<br />

non indispensables (sur prescription médicale), de réévaluer<br />

régulièrement la nécessité d’une sonde à demeure [11-13] .<br />

Les autres mesures de prévention de l’infection sur sonde<br />

sont d’ordre « mécanique ». On peut les énumérer comme suit :<br />

respecter les précautions d’asepsie lors du cathétérisme<br />

urinaire ;<br />

faire un lavage simple des mains avant tout soin et toute<br />

manipulation ; port de gants à usage unique ;<br />

utiliser des sondes en silicone dès que la durée prévisible du<br />

sondage excède 48 heures. Elles sont en effet mieux tolérées<br />

par l’urothélium et l’on connaît le rôle des microtraumatismes<br />

muqueux dans la genèse des infections urinaires ;<br />

choisir des sondes de calibre adapté au diamètre urétral. Des<br />

sondes de trop fort calibre gênent l’écoulement des sécrétions<br />

périurétrales qui stagnent puis s’infectent ;<br />

veiller au maintien d’une diurèse abondante (1,5 l/j). On ne<br />

répète jamais assez ce conseil, notamment aux personnes<br />

âgées dont la sensation de soif est amoindrie et pour lesquelles<br />

l’eau représente véritablement un médicament ; aucune<br />

étude n’a validé l’intérêt thérapeutique d’une hyperdiurèse ;<br />

utiliser un système de drainage clos muni d’une prise latérale<br />

pour prélèvement d’urines, ainsi que d’une poche collectrice<br />

vidangeable et munie d’un système antireflux. Il faut impérativement<br />

limiter le nombre de déconnexions ;<br />

veiller à maintenir un drainage déclive dans toutes les<br />

situations, même lorsque le patient se déplace sans que le sac<br />

ne touche le sol ;<br />

veiller à ce que ne survienne aucune coudure de la tubulure ;<br />

réaliser une toilette génitoanale et des soins de sonde<br />

biquotidiens avec nettoyage soigneux de la région du méat,<br />

zone d’extériorisation des sécrétions urétrales qui s’écoulent le<br />

long de la sonde.<br />

Enfin, il faut changer régulièrement la sonde lorsqu’elle est à<br />

demeure. Il n’existe pas de consensus sur la périodicité du<br />

changement d’une sonde vésicale à demeure. Il est habituel<br />

d’effectuer un changement de sonde vésicale tous les mois. Il est<br />

recommandé de pratiquer un ECBU 24 ou 48 heures auparavant.<br />

En cas de complication infectieuse, la connaissance du<br />

germe et de sa sensibilité permet d’instaurer très précocement<br />

un traitement adapté. Sauf anomalie anatomique de l’urètre, le<br />

changement de sonde est un geste facile qui peut être réalisé<br />

par tout médecin non urologue ou infirmier si les conditions<br />

d’asepsie sont respectées.<br />

Il est indispensable de dire au patient qu’il faut contacter le<br />

médecin en cas de fièvre, douleurs abdominales, brûlures<br />

urinaires, urines troubles ou nauséabondes et en cas d’absence<br />

d’écoulement d’urines dans le sac collecteur.<br />

Il existe par ailleurs des alternatives au sondage à demeure<br />

qui doivent être adoptées autant que faire se peut :<br />

sondage intermittent : à la lumière de ces travaux, le sondage<br />

intermittent apparaît comme la solution la plus séduisante<br />

lorsqu’elle est possible, l’idéal étant bien sûr que le patient<br />

réalise lui-même les sondages (autosondages). Lorsque le<br />

sondage est réalisé par une tierce personne, on parle d’hétérosondage.<br />

Il existe désormais dans le commerce des systèmes<br />

de sondes autolubrifiées raccordées à un sac collecteur qui<br />

permettent de se sonder dans n’importe quel lieu, avec un<br />

minimum de matériel. Il s’agit de sondages propres mais non<br />

stériles. À chaque fois que les conditions anatomiques, le<br />

niveau intellectuel et le degré d’habileté du patient le<br />

permettent, il faut adopter cette solution. Le risque infectieux<br />

est faible et le patient garde son autonomie. Dans le cas<br />

contraire, il faut se résoudre à la sonde à demeure ;<br />

étui pénien lorsqu’il est possible ;<br />

le cathéter sus-pubien n’a pas montré sa supériorité.<br />

Modalités de surveillance<br />

Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile 5-0686<br />

Il s’agit d’une question difficile. On oscille perpétuellement<br />

entre le risque de trop en faire et celui de voir sa vigilance se<br />

relâcher devant une situation chronique (Tableau 1).<br />

Certains incidents peuvent survenir à distance chez le patient<br />

en sonde à demeure.<br />

3


5-0686 Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile<br />

Tableau 1.<br />

Principaux points de surveillance chez un malade porteur d’une sonde<br />

vésicale à domicile.<br />

Risque Surveillance<br />

Infectieux Absence de fièvre et frissons<br />

Absence de douleurs pelviennes, de brûlures<br />

locales<br />

Absence d’hématuries<br />

Urines claires, non nauséabondes<br />

Respect du système clos (ne jamais désadapter<br />

l’ensemble du système sonde-sac collecteur)<br />

Respect des règles d’hygiène<br />

Lésions traumatiques Sondage atraumatique et non douloureux<br />

Diamètre de la sonde adapté<br />

Ballonnet gonflé dans la vessie (s’assurer de la<br />

présence d’urines dans le sac collecteur)<br />

Bonne fixation de la sonde<br />

Positionnement vaginal<br />

Bon repérage anatomique<br />

Présence d’urines dans le sac collecteur<br />

Paraphimosis Bien recalotter le prépuce lors du sondage et des<br />

soins d’hygiène (demander à un urologue)<br />

Fuite d’urines Écoulement régulier des urines dans le sac<br />

Obstruction<br />

de la sonde<br />

collecteur<br />

Utilisation de sonde adaptée<br />

Ballonnet suffisamment gonflé<br />

Écoulement régulier des urines dans le sac<br />

collecteur<br />

Absence de douleur et de globe vésical<br />

Urines claires<br />

Absence d’hématurie<br />

“ Points importants<br />

Patient rentrant à domicile avec une sonde<br />

vésicale<br />

Remise d’une ordonnance pour les poches de recueil<br />

d’urines de jour et de nuit.<br />

Information et éducation sur l’appareillage.<br />

Signes devant l’amener à consulter un médecin en<br />

urgence.<br />

Le rôle du personnel paramédical est primordial dans<br />

l’éducation du patient et la prévention des risques,<br />

notamment infectieux, liés à une sonde vésicale.<br />

Les précautions d’hygiène et d’asepsie sont essentielles<br />

afin de prévenir les infections.<br />

L’indication de la sonde vésicale à domicile doit être<br />

réévaluée régulièrement.<br />

Peu ou pas d’urines dans la poche de recueil. Plusieurs cas de<br />

figures sont possibles. Soit la sonde est bouchée par des<br />

caillots ou des incrustations, soit la sonde est déplacée, soit<br />

le patient n’a pas assez bu.<br />

La sonde est bouchée. Le patient se plaint de douleurs pelviennes<br />

et il y a des fuites autour de la sonde. Dans ce cas, il faut<br />

faire des lavages de vessie à la seringue et augmenter les<br />

boissons. Si la sonde ne peut être débouchée, il faut la<br />

remplacer.<br />

La sonde est déplacée. La longueur visible de la sonde est<br />

anormalement longue, le patient se plaint de douleurs ; il y<br />

a aussi des fuites autour de la sonde. Dans ce cas, la sonde<br />

doit être changée.<br />

La sonde est arrachée. Ceci provoque une urétrorragie importante<br />

; il faut remettre une sonde en place et la mettre en<br />

traction si le saignement persiste : tirer sur la sonde et nouer<br />

une compresse sur la sonde au contact du méat urétral. Cette<br />

traction ne doit pas être maintenue plus de 1 heure, car il y<br />

a risque d’escarre du méat.<br />

Fuites autour de la sonde. La sonde est bouchée ou déplacée. Il<br />

faut vérifier la perméabilité de la sonde et la changer si<br />

nécessaire. Il peut s’agir de contractions involontaires de la<br />

vessie. Après avoir vérifié la perméabilité de la sonde, le<br />

médecin prescrit des antispasmodiques (oxybutynine...).<br />

Hématurie. Elle peut être due à une inflammation chronique<br />

de la vessie (due elle-même à la présence de la sonde) ou à<br />

une pathologie (tumeur de vessie, calcul...). Dans ce cas, il<br />

faut pratiquer des lavages de vessie à la seringue et augmenter<br />

les boissons. Si l’hématurie persiste, il faut prévenir le<br />

médecin. Un patient avec une sonde vésicale en place depuis<br />

plus de 10 ans doit avoir un dépistage de tumeur de vessie à<br />

titre systématique.<br />

La surveillance bactériologique des urines doit être régulière,<br />

même si aucun traitement n’est préconisé. En cas de complication<br />

infectieuse sévère, la connaissance du germe permet de<br />

gagner un temps précieux. Il est donc conseillé de faire un<br />

ECBU avant chaque changement de sonde. Une fréquence plus<br />

élevée n’est pas justifiée, sauf cas particulier. La sonde à<br />

demeure est source d’incrustation, voire de calcul vésical. Il faut<br />

notamment y penser en cas de recrudescence des complications<br />

infectieuses ou de l’apparition de nouveaux germes. Un cliché<br />

d’abdomen sans préparation centré sur la vessie peut permettre<br />

“ Point fort<br />

Recommandations du comité d’infectiologie de<br />

l’AFU, 2007<br />

1. Chez un patient symptomatique sans sonde,<br />

l’association d’une bactériurie 10 3 ufc/ml à une<br />

leucocyturie ≥ 10 4 /ml est fortement évocatrice d’une<br />

infection.<br />

2. Une bactériurie est à prendre en compte si elle est<br />

≥ 10 3 ufc/ml mais en pratique, le seuil de 10 4 ufc/ml est<br />

celui à retenir (seuil de réalisation d’un antibiogramme).<br />

3. Antibiogramme : méthode stricte et consensuelle.<br />

Le spectre ne suffit pas (prendre en compte le terrain et<br />

la diffusion tissulaire).<br />

En présence d’un agent pathogène résistant à l’acide<br />

nalidixique, il est recommandé de ne pas utiliser cette<br />

classe.<br />

En présence d’un entérocoque résistant à bas niveau<br />

aux aminosides, l’association amoxicilline + aminoside<br />

reste la référence car synergique.<br />

L’utilisation de la bandelette chez le sujet âgé non<br />

sondé est une méthode fiable sous réserve du respect des<br />

conditions d’utilisation de la bandelette.<br />

4. Le choix de l’antibiotique doit se faire en choisissant la<br />

molécule du spectre le plus étroit.<br />

La concentration tissulaire de l’antibiotique doit être au<br />

moins égale à la concentration minimale inhibitrice (CMI)<br />

du germe visé.<br />

Le cycling des antibiotiques consiste à substituer<br />

périodiquement un antibiotique à un autre dans le but de<br />

réduire le développement des souches résistantes.<br />

Diminuer la consommation = respecter les indications,<br />

les durées utiles, ne pas traiter les colonisations, en<br />

privilégiant les stratégies courtes.<br />

4 Traité de Médecine Akos


.<br />

d’en faire le diagnostic lorsqu’ils sont suffisamment volumineux.<br />

Il n’est pas déraisonnable d’en faire pratiquer un tous les<br />

6 à 12 mois. S’il est normal et qu’un doute persiste, il ne faut<br />

pas hésiter à réadresser le patient à son urologue pour explorer<br />

(ou réexplorer) l’appareil urinaire. Une antibiothérapie à long<br />

terme n’est pas recommandée.<br />

■ Conclusion<br />

La surveillance d’un patient porteur d’une sonde vésicale à<br />

domicile relève autant du médecin généraliste, du spécialiste<br />

que du personnel paramédical. Ce n’est qu’en respectant des<br />

conditions d’asepsie rigoureuses et en éduquant le patient que<br />

les complications liées au sondage peuvent être limitées au<br />

maximum.<br />

■ Références<br />

[1] Bruyère F, Cariou G, Boiteux JP. Le CIAFU. Recommandations de<br />

bonnes pratiques cliniques du comité d’infectiologie de l’AFU. Prog<br />

Urol 2008;18(suppl1):1-23.<br />

[2] Choong S, Wood S, Fry C, Whitfield H. Catheter associated urinary<br />

tract infection and encrustation. Int J Antimicrob Agents 2001;17:<br />

305-10.<br />

[3] Warren JW. Catheter-associated urinary tract infections. Int<br />

J Antimicrob Agents 2001;17:299-303.<br />

[4] Warren J, Bakke A, Desgranchamps F. Catheter-associated bacteriuria<br />

and the role of biomaterial in prevention. In: Naber KG, Pechere JC,<br />

Kumazawa J, Khoury S, Gerberding IL, Schaeffer AJ, editors.<br />

Nosocomial and health care associated infections in urology.<br />

Plymouth, UK: Health Publications Ltd; 2001. p. 153-76.<br />

[5] Griffiths R, Fernandez R. Policies for the removal of short-term<br />

indwelling urethral catheters. Cochrane Database Syst Rev 2005(1):<br />

CD004011.<br />

[6] Tenke P, Kovacs B, Bjerklund Johansen TE, Matsumoto T,<br />

Tambyah PA, Naber KG. European and Asian guidelines on management<br />

and prevention of catheter-associated urinary tract infections.<br />

Int J Antimicrob Agents 2008;31(suppl1):S68-S78.<br />

[7] Conférence de consensus organisée par la SPILF et l’AFU, infections<br />

urinaires nosocomiales, novembre 2002.<br />

[8] Warren JW, Anthony WC, Hoopes JM, Muncie HL Jr. Cephalexin for<br />

susceptible bacteriuria in afebrile, long-term catheterized patients.<br />

JAMA 1982;248:454-8.<br />

[9] Niel-Weise BS, van den Broek PJ. Antibiotic policies for short-term<br />

catheter bladder drainage in adults. Cochrane Database Syst Rev<br />

2005(3):CD005428.<br />

[10] Sobel JD, Lundstrom T. Management of candiduria. Curr Urol Rep<br />

2001;2:321-5.<br />

[11] Munasinghe RL, Yazdani H, Siddique M, Hafeez W. Appropriateness<br />

of use of indwelling urinary catheters in patients admitted to the medical<br />

service. Infect Control Hosp Epidemiol 2001;22:647-9.<br />

[12] Jain P, Parada JP, DavidA, Smith LG. Overuse of the indwelling urinary<br />

tract catheter in hospitalized medical patients. Arch Intern Med 1995;<br />

155:1425-9.<br />

[13] Bouza E, San Juan R, Munoz P, Voss A, Kluytmans J. A European<br />

perspective on nosocomial urinary tract infections II. Report on incidence,<br />

clinical characteristics and outcome (ESGNI-004 study).<br />

European Study Group on Nosocomial Infection. Clin Microbiol Infect<br />

2001;7:532-42.<br />

Pour en savoir plus<br />

V. Phé.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, Paris, France.<br />

Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Qualité de la pose<br />

et de la surveillance des sondes urinaires, décembre 1999.<br />

www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/nosoco/guide/txt15.html.<br />

100 recommandations pour la surveillance et la prévention des infections<br />

nosocomiales. Prévention des infections urinaires nosocomiales.<br />

Pilly E. CMIT. Maladies infectieuses et tropicales. Paris: Vivactis Plus; 2010.<br />

Le POPI. 2009 CMIT. Maladies infectieuses et tropicales : guide de<br />

traitement; référence pour une bonne pratique médicale. Le Collège<br />

des universitaires de maladies infectieuses et tropicales, CMIT. Paris:<br />

Vivactis plus; 2009.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Phé V., Rouprêt M. Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Traité de Médecine Akos, 5-0686, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Malade porteur d’une sonde vésicale à domicile 5-0686<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

5


Plan<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie<br />

systémique<br />

G. Bussone, L.-H. Noël, L. Mouthon<br />

La crise rénale sclérodermique (CRS) se caractérise par une hypertension artérielle (HTA) maligne et une<br />

insuffisance rénale aiguë oligoanurique. Elle survient chez environ 5 % des patients sclérodermiques,<br />

particulièrement dans les premières années d’évolution dans les formes diffuses de la maladie. La<br />

survenue d’une CRS est favorisée par une corticothérapie supérieure à 15 mg/j de prednisone.<br />

L’insuffisance ventriculaire gauche et l’encéphalopathie hypertensive dominent le tableau clinique.<br />

L’insuffisance rénale peut s’accompagner d’une protéinurie modérée, sans hématurie, et, dans 43 % des<br />

cas, il existe une microangiopathie associée. Les anticorps anti-ARN polymérase III sont présents chez un<br />

tiers des patients développant une CRS. Devant la survenue d’une insuffisance rénale, une origine<br />

iatrogène ou fonctionnelle doit être éliminée, de même qu’une glomérulonéphrite extracapillaire avec<br />

présence d’anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA) ou une microangiopathie<br />

thrombotique (MAT) authentique. La réalisation d’une biopsie rénale n’est pas indispensable dans les<br />

formes typiques de CRS. Cependant, elle peut apporter des éléments pronostiques et est indispensable à<br />

visée diagnostique dans les formes atypiques. Le pronostic de la CRS s’est nettement amélioré depuis<br />

l’utilisation des inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC). Cependant, la survie à 5 ans des patients<br />

sclérodermiques ayant développé une crise rénale n’est que de 65 %. La prise en charge thérapeutique<br />

repose sur un contrôle précoce de la pression artérielle sous IEC, éventuellement en association à d’autres<br />

classes thérapeutiques. En cas d’insuffisance rénale et/ou d’HTA sévères, l’épuration extrarénale permet<br />

de contrôler rapidement la surcharge vasculaire et la pression artérielle. Le sevrage de la dialyse est<br />

possible dans environ la moitié des cas. Chez les patients dialysés au-delà de deux ans, une<br />

transplantation rénale peut être envisagée.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Sclérodermie systémique ; Crise rénale ; Hypertension artérielle ; Insuffisance rénale aiguë ;<br />

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion<br />

Introduction 1<br />

Crise rénale sclérodermique 2<br />

Physiopathologie 2<br />

Facteurs prédictifs de survenue d’une crise rénale sclérodermique 2<br />

Présentation clinique 2<br />

Examens biologiques 3<br />

Examens morphologiques 3<br />

Examen anatomopathologique du rein 3<br />

Pronostic 3<br />

Traitement<br />

Autres atteintes rénales à évoquer au cours de la sclérodermie<br />

5<br />

systémique 6<br />

Atteinte rénale d’origine iatrogène 6<br />

Insuffisance rénale fonctionnelle 6<br />

Sténose des artères rénales 6<br />

Atteintes glomérulaires 6<br />

Fibrose néphrogénique systémique 6<br />

Conclusion 6<br />

Néphrologie<br />

■ Introduction<br />

18-055-C-10<br />

La sclérodermie systémique (ScS) est une affection généralisée<br />

du tissu conjonctif, des artérioles et des microvaisseaux,<br />

caractérisée par la survenue de phénomènes de fibrose tissulaire<br />

et d’oblitération vasculaire et par la présence d’anomalies de<br />

l’immunité humorale et cellulaire [1] . En fonction du degré<br />

d’extension de l’atteinte cutanée, on distingue : les ScS diffuses<br />

caractérisées par des lésions de sclérose remontant au-dessus des<br />

coudes et/ou des genoux et pouvant intéresser le tronc ; les ScS<br />

cutanées limitées, au cours desquelles les lésions de sclérose<br />

intéressent les extrémités mais ne remontent pas au-dessus des<br />

coudes ou des genoux [2] ; et les formes limitées [3] au cours<br />

desquelles la peau est épargnée.<br />

La ScS touche avec prédilection le sexe féminin entre 45 et<br />

64 ans [4] . Sa prévalence exacte reste encore mal connue avec<br />

une disparité importante entre les régions et les pays. La<br />

prévalence est estimée aux États-Unis et en Australie entre<br />

200 et 260 cas/million d’habitants [4, 5] , en Asie entre 20 et<br />

50 cas/million d’habitants [6] et en Europe entre 100 et 200 cas/<br />

million d’habitants [7] La prévalence de 158 cas/million d’habitants<br />

retrouvée dans le département de la Seine Saint-Denis fait<br />

estimer le nombre de patients adultes atteints de ScS en France<br />

entre 6 000 et 9 000 personnes [8] .<br />

1


18-055-C-10 Manifestations rénales de la sclérodermie systémique<br />

La crise rénale sclérodermique (CRS) est la principale manifestation<br />

néphrologique observée au cours de la ScS, survenant<br />

approximativement chez 5 % des patients [9, 10] . Elle est définie<br />

par une hypertension artérielle (HTA) maligne et une insuffisance<br />

rénale rapidement progressive, oligoanurique, sans autre<br />

étiologie que la ScS. Les autres atteintes rénales secondaires à la<br />

ScS sont plus rares.<br />

■ Crise rénale sclérodermique<br />

Physiopathologie<br />

La CRS associe une prolifération de cellules endothéliales, de<br />

cellules musculaires lisses vasculaires et de myofibroblastes et un<br />

épaississement hyperplasique de l’intima des artères de petit et<br />

moyen calibres du parenchyme rénal [11] . Le rétrécissement des<br />

vaisseaux est progressif et peut aboutir à l’obstruction de la<br />

lumière. L’hypoperfusion glomérulaire secondaire à ces lésions<br />

est à l’origine d’une hyperréninémie qui peut entraîner une<br />

HTA sévère et une insuffisance rénale aiguë oligoanurique. Les<br />

plaquettes participent à la survenue de la CRS par des phénomènes<br />

d’agrégation et de relargage de facteurs plaquettaires au<br />

niveau de la paroi des vaisseaux remaniés. Une microangiopathie<br />

thrombotique (MAT) est retrouvée dans 43 % des cas [12] .<br />

Facteurs prédictifs de survenue d’une crise<br />

rénale sclérodermique<br />

Les facteurs prédictifs de la survenue d’une CRS sont détaillés<br />

dans le Tableau 1 [12] . Un traitement par ciclosporine A [13] et<br />

une corticothérapie supérieure à 15 mg/j prescrite dans les trois<br />

mois précédents favorisent la survenue d’une CRS [12] . Nous<br />

avons récemment confirmé ce résultat en mettant en évidence<br />

dans une étude rétrospective portant sur 50 patients des odds<br />

ratio de 24,1 et 17,4 de développer une CRS en cas d’exposition<br />

aux corticoïdes dans les 3 mois ou le mois précédant la survenue<br />

de la CRS, respectivement [14] . La CRS survient essentiellement<br />

chez les patients ayant une ScS diffuse. Steen et al. ont<br />

rapporté en 1994 une CRS chez 19,5 % des patients présentant<br />

une forme diffuse de ScS contre seulement 2 % chez ceux<br />

présentant une ScS limitée. Dans plus de 75 % des cas, la CRS<br />

survient dans les quatre premières années d’évolution de la<br />

maladie [15] . Les patients à risque de CRS doivent donc régulièrement<br />

effectuer une autosurveillance de leur pression artérielle.<br />

Tableau 2.<br />

Principales manifestations cliniques et biologiques de la crise rénale sclérodermique.<br />

Tableau 1.<br />

Facteurs prédictifs de la survenue d’une crise rénale sclérodermique<br />

(d’après [12] ).<br />

Progression rapide de l’atteinte cutanée<br />

Durée d’évolution 15mg/j dans les trois mois précédents<br />

Présentation clinique<br />

La fréquence des principales manifestations cliniques et<br />

biologiques observées au cours des CRS dans les grandes séries<br />

de la littérature est représentée dans le Tableau 2 [12-17] .<br />

La CRS associe le plus souvent une HTA maligne et une<br />

insuffisance rénale aiguë oligoanurique. L’HTA est supérieure à<br />

150/90 mmHg dans 90 % des cas [12] . Cependant, la pression<br />

artérielle est normale dans 10 % des cas de CRS [18] , souvent à<br />

la suite d’un traitement par corticoïdes à forte dose. Les formes<br />

normotensives se caractérisent par une plus grande fréquence de<br />

MAT et un pronostic plus réservé que les formes avec HTA.<br />

Les manifestations cliniques sont avant tout celles de l’HTA<br />

maligne, c’est-à-dire une insuffisance ventriculaire gauche et/ou<br />

une encéphalopathie hypertensive. Le patient peut présenter un<br />

ralentissement psychomoteur, une confusion ou une crise<br />

convulsive. Des signes neurologiques focaux doivent faire<br />

évoquer une complication comme un accident vasculaire<br />

cérébral. Sur le plan cardiopulmonaire, des signes d’insuffisance<br />

ventriculaire gauche peuvent s’observer sous la forme d’un<br />

œdème aigu pulmonaire avec une dyspnée, des expectorations<br />

hémoptoïques et l’apparition ou la majoration de crépitants à<br />

l’auscultation pulmonaire. Un frottement péricardique ou un<br />

trouble du rythme peuvent faire partie du tableau clinique. Les<br />

signes d’insuffisance ventriculaire droite sont plus rares.<br />

Le diagnostic de CRS chez des patients qui n’ont pas<br />

d’atteinte cutanée est difficile. Le plus souvent il s’agit de<br />

formes précoces de la maladie, l’atteinte cutanée s’installant<br />

secondairement à la crise rénale sclérodermique, éventuellement<br />

associée à d’autres atteintes viscérales [19, 20] . Certains signes<br />

cliniques peuvent aider à poser le diagnostic de ScS malgré<br />

Steen et al. [12] Walker et al. [16] DeMarco et al. [17] Penn et al. [9] Teixeira et al. [14]<br />

Nombre de patients 195 16 18 110 50<br />

Âge 50 54 45 51 53<br />

Sexe, hommes (en %) 25 31 17 21 26<br />

Symptômes < 4 ans (en %) 76 69 100 66 (< 1 an) 86<br />

ScS diffuse (en %) 83 100 100 78 86<br />

Ac antitopoisomerase 1(en %) 20 6 NR 17,2 32<br />

Ac anticentromère (en %) 1 NR NR 1,8 0<br />

HTA (en %) 90 94 NR NR 88<br />

PA systolique/diastolique (en mmHg) 184/108 203/113 130/76 193/114 189/111<br />

Péricardite (en %) 53 NR NR NR 6<br />

Insuffisance cardiaque gauche (en %) 25 56 39 31 46<br />

Arythmie (en %) NR NR NR NR 18<br />

Convulsions (en %) 8 12 NR NR 10<br />

Encéphalopathie hypertensive (en %) NR NR NR NR 34<br />

Hémorragie intracérébrale (en %) NR NR NR NR 10<br />

Microangiopathie thrombotique (en %) 30 81 NR 59 46<br />

Plaquettes < 150 000/mm3 (en %) 39 NR NR 50 NR<br />

Hématurie (en %) 38 NR NR NR 42 a<br />

Protéinurie (en %) 63 (> 0,25 g/j) NR NR NR 53 (> 0,5 g/j)<br />

a Hématurie recherchée à la bandelette ou au microscope ; ScS : sclérodermie systémique ; Ac : anticorps ; HTA : hypertension artérielle ; PA : pression artérielle ; NR : non<br />

renseigné.<br />

2 Néphrologie


l’absence de signes cutanés, comme un phénomène de Raynaud<br />

récent avec mégacapillaires visibles à l’œil nu ou en capillaroscopie,<br />

ou des frictions tendineuses.<br />

Examens biologiques<br />

Dans 43 % des cas, la CRS s’accompagne d’une MAT avec une<br />

thrombopénie et une anémie hémolytique mécanique caractérisée<br />

par la présence de signes d’hémolyse (haptoglobine<br />

effondrée, élévations des LDH [lactodéshydrogénase] et de la<br />

bilirubine libre) et de schizocytes [12, 21] . L’insuffisance rénale<br />

peut être sévère et s’accompagner de troubles hydroélectrolytiques.<br />

Une protéinurie est fréquente, mais en général modérée<br />

(< 0,5 g/24 h) et ne s’accompagnant pas d’hématurie. L’hématurie<br />

parfois retrouvée sur la bandelette urinaire est en rapport<br />

avec une hémoglobinurie liée à l’hémolyse intravasculaire.<br />

Trente trois pour-cent des patients développant une CRS ont<br />

des anticorps anti-ARN polymérase III [11] . Ces anticorps n’ont<br />

cependant pas de rôle pathogène démontré.<br />

Examens morphologiques<br />

L’échographie rénale élimine une insuffisance rénale aiguë<br />

obstructive. La taille des reins est en règle normale. Le Doppler<br />

des artères rénales élimine une sténose, une dissection ou une<br />

dysplasie.<br />

Examen anatomopathologique du rein<br />

La biopsie rénale n’est pas nécessaire pour poser le diagnostic<br />

de CRS dans les formes typiques. Cependant, certaines équipes<br />

l’effectuent systématiquement de façon à mieux évaluer le<br />

pronostic des CRS [9] . Dans les formes atypiques, la biopsie<br />

rénale est indispensable pour confirmer le diagnostic de CRS.<br />

Dans tous les cas, elle doit être effectuée chez un patient<br />

contrôlé sur le plan tensionnel. En cas de thrombopénie sévère,<br />

elle peut être effectuée par voie transjugulaire.<br />

Dans la ScS, les lésions classiques sont vasculaires avec<br />

atteinte prédominante des artères interlobulaires et des artères<br />

arquées. Ces lésions sont proches de celles présentes dans l’HTA<br />

maligne. Macroscopiquement, la capsule comporte des zones<br />

hémorragiques, des infarctus, et quelquefois des lésions de<br />

nécrose corticale [22] . L’étude en microscopie optique permet<br />

d’observer un épaississement important de l’intima par un tissu<br />

conjonctif lâche et d’aspect mucoïde. Une prolifération de<br />

cellules myoépithéliales peut être associée donnant alors un<br />

aspect en « bulbe d’oignon ». Cet épaississement intimal, qui<br />

entraîne une réduction importante de la lumière artérielle, est<br />

constitué d’une accumulation de mucopolysaccharides de type<br />

acide hyaluronique (Fig.1à3) [23] . La prolifération cellulaire<br />

myointimale peut conduire à la thrombose (Fig. 4) [24] .<br />

La fibrose adventitielle et périadventitielle permet de distinguer<br />

une CRS d’une autre cause d’HTA maligne. Au cours de la<br />

CRS, des thromboses artériolaires et glomérulaires sont parfois<br />

visibles correspondant à des lésions de MAT (Fig. 5, 6). L’examen<br />

histologique est parfois fait à distance de l’épisode aigu et<br />

sont alors observés au niveau des glomérules des aspects en<br />

double contour des parois capillaires correspondant à des lésions<br />

cicatricielles de MAT ou des flocculus ischémiques, étant la<br />

résultante d’artérioles obstruées (Fig. 7, 8). Il n’y a en général<br />

pas d’infiltration cellulaire. Des dépôts d’IgM (immunoglobuline<br />

M) et de C3 sont retrouvés en immunofluorescence, mais n’ont<br />

pas de caractère spécifique. La présence de fibrine dans les<br />

lumières vasculaires traduit les phénomènes thrombotiques.<br />

Pronostic<br />

Le pronostic des CRS dans les grandes séries de la littérature<br />

est détaillé dans le Tableau 3. À la fin des années 70, le contrôle<br />

de l’HTA par les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) et<br />

le recours à la dialyse ont permis d’améliorer le pronostic des<br />

CRS qui était initialement très mauvais avec une survie < 10 %<br />

à trois mois. Les deux études publiées en 2007 sur ce sujet ont<br />

permis d’estimer la mortalité à 5 ans entre 30 et 40 % [9, 14] .<br />

Dans ces deux études, environ 60 % des patients étaient<br />

Néphrologie<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie systémique 18-055-C-10<br />

Figure 1. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 250. Artère interlobulaire dont la lumière est réduite par une endartérite<br />

œdémateuse contenant des cellules fusiformes et bordée par une prolifération<br />

endothéliale.<br />

Figure 2. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 100. Artère arquée. Obstruction par une prolifération myofibroblastique<br />

sur un fond œdémateux.<br />

Figure 3. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 250. Artère interlobulaire avec endartérite mucoïde. Toute petite fente<br />

vasculaire.<br />

3


18-055-C-10 Manifestations rénales de la sclérodermie systémique<br />

Figure 4. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 400. Artériole avec obstruction mucoïde et aspect en « bulbe<br />

d’oignon ».<br />

Figure 5. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 400. Thrombose d’une artériole signant la microangiopathie<br />

thrombotique.<br />

Figure 6. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 250. Glomérule avec une thrombose intraglomérulaire, lésion de microangiopathie<br />

thrombotique.<br />

Figure 7. Microscopie optique. Coloration par le PAS (acide périodique<br />

Schiff). Grossissement × 400. Les parois capillaires glomérulaires ont des<br />

aspects en double contour. Ces lésions sont celles d’une microangiopathie<br />

thrombotique ancienne.<br />

Figure 8. Microscopie optique. Trichrome de Masson. Grossissement<br />

× 250. Le flocculus glomérulaire est rétracté au pôle vasculaire. Il s’agit<br />

d’un glomérule ischémique.<br />

Tableau 3.<br />

Pronostic des crises rénales sclérodermiques.<br />

Steen et<br />

al. [12]<br />

Walker<br />

et al. [16]<br />

DeMarco<br />

et al. [17]<br />

Penn<br />

et al. [9]<br />

Nombre de<br />

patients<br />

195 16 18 110 50<br />

Patients dialysés<br />

(en %)<br />

43 31 NR 64 56<br />

Temporairement<br />

(en %)<br />

23 6 NR 23 16<br />

De façon<br />

permanente<br />

(en %)<br />

19 25 NR 42 22<br />

Décès en dialyse<br />

(en %)<br />

NR NR NR 18 18<br />

Décèsà5ans<br />

(en %)<br />

19 a 31 50 41 31<br />

a Décès précoces ; NR : non renseigné.<br />

Teixeira<br />

et al. [14]<br />

4 Néphrologie


dialysés, certains de façon transitoire. Au total, 20 à 40 % des<br />

patients suivant les cohortes ont nécessité une épuration<br />

extrarénale définitive.<br />

Des facteurs de mauvais pronostic ont été identifiés, comme<br />

le sexe masculin, un âge supérieur à 50 ans, un mauvais<br />

contrôle de la pression artérielle dans les 3 premiers jours et une<br />

créatininémie supérieure à 270 µmol/l à l’introduction des<br />

IEC [25, 26] . Par ailleurs, une pression artérielle inférieure à 140/<br />

90 mmHg a été identifiée comme un facteur de risque indépendant<br />

de mauvais pronostic [12, 14] .<br />

Traitement<br />

Dépistage et traitement préventif<br />

Les patients présentant une ScS diffuse doivent effectuer une<br />

autosurveillance régulière de leur pression artérielle dans les<br />

premières années d’évolution de leur maladie. Certaines équipes<br />

proposent un traitement préventif de la survenue d’une crise<br />

rénale par IEC à faible dose chez les patients ayant une forme<br />

diffuse évoluant depuis moins de quatre ans, à fortiori si un<br />

traitement corticoïde est prescrit. Il n’existe cependant aucune<br />

donnée en faveur d’une prévention de la survenue d’une CRS<br />

par un traitement prophylactique par IEC ou antagoniste des<br />

récepteurs de l’angiotensine II (ARA II).<br />

Traitement curatif<br />

En cas de CRS, le contrôle de la pression artérielle doit être<br />

rapide avec pour objectif d’obtenir une pression artérielle<br />

systolique ≤ 120 mmHg et une pression artérielle diastolique ≤<br />

80 mmHg.<br />

Traitement antihypertenseur<br />

Seuls les IEC ont démontré une efficacité dans la prise en<br />

charge de la CRS avec une amélioration du pronostic [27, 28] .Le<br />

captopril a été testé chez un grand nombre de patients mais<br />

l’énalapril a également été utilisé avec succès en cas d’intolérance<br />

au captopril [29] . Les IEC sont prescrits à leur posologie<br />

Sclérodermie systémique diffuse précoce<br />

Hypertension artérielle (pression artérielle diastolique > 100 mmHg)<br />

Débuter le captopril entre 6,25 et 12,5 mg × 3/j, puis augmenter juqu'à 50 mg × 3/j<br />

Résultats insuffisants à 72 h : continuer l'IEC et ajouter un inhibiteur calcique<br />

Résultats insuffisants : continuer l'IEC et l'inhibiteur calcique<br />

et ajouter α ou β-bloquants et/ou minoxidil<br />

Insuffisance rénale : dialyse précoce<br />

Continuer l'IEC, maintenir la pression artérielle normale (120-140/70-90 mmHg)<br />

Si amélioration de la fonction rénale : sevrage de la dialyse<br />

Sinon, après 2 ans : envisager une transplantation rénale<br />

Figure 9. Arbre décisionnel. Prise en charge thérapeutique d’une hypertension artérielle au cours d’une sclérodermie systémique (d’après [11] ). IEC :<br />

inhibiteurs de l’enzyme de conversion.<br />

Néphrologie<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie systémique 18-055-C-10<br />

maximale. Cette posologie doit être atteinte en 48-72 h et ne<br />

doit pas être modifiée en cas de dégradation de la fonction<br />

rénale, y compris si la dialyse devient nécessaire.<br />

Les ARA II semblent être associés à un contrôle tensionnel<br />

insuffisant et ne peuvent donc pas être recommandés dans le<br />

traitement de la CRS [12, 30] . L’association IEC et ARA II n’a pas<br />

fait la preuve de son efficacité [31] .<br />

La Figure 9 propose un arbre décisionnel de prise en charge<br />

thérapeutique d’une HTA au cours d’une ScS. Les inhibiteurs<br />

calciques par voie parentérale telle que la nicardipine doivent<br />

être associés précocement si la pression artérielle n’est pas<br />

contrôlée par les IEC seuls. Les dérivés nitrés sont privilégiés en<br />

association aux IEC en cas de survenue d’un œdème pulmonaire<br />

aigu. Le minoxidil est également utilisable en association<br />

si la pression artérielle n’est pas contrôlée par un traitement<br />

antihypertenseur maximal. Cependant, ce médicament n’est<br />

plus disponible depuis peu sur le marché français. Les a- et<br />

b-bloquants ou les diurétiques risquent d’induire une insuffisance<br />

rénale fonctionnelle et ne sont donc pas recommandés au<br />

cours de la CRS [32] .<br />

Les IEC sont également prescrits dans les CRS normotensives<br />

mais à posologie plus faible.<br />

Autres traitements<br />

L’iloprost peut être utilisé dans le traitement de la CRS mais<br />

son efficacité n’est pas démontrée [31] . L’intérêt des inhibiteurs<br />

des récepteurs de l’endothéline 1 est en cours d’évaluation dans<br />

une étude ouverte anglaise. À notre connaissance, les traitements<br />

antirénine, s’ils représentent un intérêt potentiel, n’ont<br />

fait l’objet d’aucune étude dans la CRS. Par ailleurs, les échanges<br />

plasmatiques ne semblent pas efficaces.<br />

Il convient d’éliminer tous les médicaments néphrotoxiques<br />

et de corriger les troubles hydroélectrolytiques secondaires à<br />

l’insuffisance rénale aiguë.<br />

L’épuration extrarénale permet de contrôler rapidement la<br />

surcharge vasculaire et la pression artérielle et doit être entreprise<br />

précocement en cas de pression artérielle non contrôlée<br />

5


18-055-C-10 Manifestations rénales de la sclérodermie systémique<br />

et/ou de dégradation rapide de la fonction rénale sous traitement<br />

médical. Dans deux études récentes, 56 % [14] et 64 % [9]<br />

des patients ont nécessité une épuration extrarénale.<br />

Dans la moitié des cas le sevrage de la dialyse est obtenu dans<br />

un délai de 18 mois à 2 ans, la fonction rénale résiduelle étant<br />

le plus souvent de l’ordre de 30 ml/min [31, 33] .<br />

La survenue d’une CRS, si elle ne justifie pas à elle seule une<br />

intensification thérapeutique avec greffe de cellules souches<br />

hématopoïétiques, ne contre-indique pas sa réalisation sauf en<br />

cas d’insuffisance rénale chronique terminale.<br />

Transplantation rénale<br />

La transplantation rénale ne doit être envisagée qu’après deux<br />

ans d’épuration extrarénale en raison de la possibilité de sevrage<br />

de la dialyse dans les deux premières années suivant la survenue<br />

de la CRS. Aux États-Unis, à partir de la base de données UNOS<br />

(United Network for Organ Sharing), la survie des greffons<br />

observée sur la période 1987-2004 chez 260 patients sclérodermiques<br />

ayant eu une transplantation rénale était de 56,7 % à<br />

5 ans pour une survie globale des patients de 72,7 % à<br />

5 ans [34] . Ainsi, une transplantation rénale peut être proposée<br />

à ces patients. Sur l’ensemble des 260 patients, 5 cas de récidive<br />

de CRS sur le transplant ont été rapportés, soit 1,9 %. Ces<br />

5 patients avaient tous développé une insuffisance rénale<br />

terminale dans l’année suivant le diagnostic de CRS sur le rein<br />

natif. Dans cette étude, dans 1/3 des cas de non survie des<br />

greffons la cause n’était pas connue, ce qui sous-estime probablement<br />

le nombre de récidives. À l’inverse, certaines publications<br />

rapportant un risque de récidive de la CRS de l’ordre de<br />

20 à 50 % surestiment sans doute ce risque. Les facteurs de<br />

risque de récidive sur le greffon sont identiques à ceux décrits<br />

pour un premier épisode sur rein natif [34] . Il n’y a pas de<br />

donnée en faveur d’un effet préventif des IEC. D’autre part, la<br />

ciclosporine n’est pas recommandée dans le traitement du rejet<br />

de greffe en raison du risque de déclenchement d’une CRS [35] .<br />

■ Autres atteintes rénales à<br />

évoquer au cours<br />

de la sclérodermie systémique<br />

Atteinte rénale d’origine iatrogène<br />

Une atteinte rénale d’origine iatrogène doit être évoquée au<br />

cours de la ScS, en particulier en cas de traitement par la<br />

D-pénicillamine. Dans l’étude de Steen et al. [36] , la protéinurie<br />

moyenne imputable à la D-pénicillamine était de 2,7 g/24 h, et<br />

survenait environ 1,2 ans après le début du traitement par<br />

D-pénicillamine. Une biopsie rénale réalisée chez six patients<br />

ayant une protéinurie persistante après l’arrêt de la<br />

D-pénicillamine retrouvait soit des lésions glomérulaires<br />

minimes, soit une glomérulonéphrite extramembraneuse [36] .<br />

Insuffisance rénale fonctionnelle<br />

Une insuffisance cardiaque, une déshydratation, une hypertension<br />

artérielle pulmonaire ou un traitement par diurétiques<br />

peuvent être à l’origine d’une insuffisance rénale fonctionnelle.<br />

Sténose des artères rénales<br />

La présence de lésions athéromateuses doit faire rechercher<br />

une sténose des artères rénales devant une insuffisance rénale<br />

aiguë et/ou une HTA, surtout si le patient suit un traitement par<br />

IEC.<br />

Atteintes glomérulaires<br />

Des cas d’insuffisance rénale conséquence d’une glomérulonéphrite<br />

proliférative avec présence d’anticorps anticytoplasme<br />

des polynucléaires neutrophiles (ANCA), le plus souvent de type<br />

antimyéloperoxydase, ont été rapportés [37, 38] . L’insuffisance<br />

.<br />

rénale est dans ce cas rapidement progressive, accompagnée<br />

d’une hématurie microscopique et/ou d’une protéinurie abondante,<br />

mais sans HTA.<br />

Fibrose néphrogénique systémique<br />

Enfin, la fibrose néphrogénique systémique se caractérise par<br />

l’apparition d’un aspect scléreux de la peau essentiellement au<br />

niveau des extrémités (surtout des membres inférieurs), épargnant<br />

le torse et la face, chez des patients ayant une insuffisance<br />

rénale chronique préalable [39] . Les manifestations<br />

cutanées surviennent secondairement à l’atteinte rénale,<br />

contrairement à ce qui est observé dans la ScS. Le gadolinium<br />

utilisé comme produit de contraste pour l’imagerie par résonance<br />

magnétique nucléaire a été incriminé comme pouvant<br />

être un facteur déclenchant de cette affection.<br />

■ Conclusion<br />

La crise rénale est la manifestation néphrologique la plus<br />

fréquemment observée au cours de la ScS. Son pronostic dépend<br />

du contrôle précoce de l’HTA par les IEC, éventuellement en<br />

association à d’autres antihypertenseurs. Le diagnostic de la CRS<br />

doit être rapide et une autosurveillance de la pression artérielle<br />

doit être effectuée chez les patients à risque de survenue d’une<br />

CRS. Une transplantation rénale peut être envisagée après deux<br />

ans d’épuration extrarénale sans possibilité de sevrage.<br />

Guillaume Bussone a reçu un soutien financier de la Mutuelle AMPLI.<br />

■ Références<br />

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G. Bussone.<br />

Université Paris Descartes, Faculté de médecine Paris Descartes, UPRES EA 4058, 12, rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France.<br />

L.-H. Noël.<br />

Service d’anatomopathologie, Inserm U507, Faculté de médecine Paris Descartes, 12, rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France.<br />

L. Mouthon (luc.mouthon@cch.aphp.fr).<br />

Université Paris Descartes, Faculté de médecine Paris Descartes, UPRES EA 4058, 12, rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France.<br />

Pôle de médecine interne, Hôpital Cochin, Centre de référence pour les vascularites nécrosantes et la sclérodermie systémique, APHP, 27, rue du faubourg<br />

Saint-Jacques, 75679 Paris cedex 14, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Bussone G., Noël L.-H., Mouthon L. Manifestations rénales de la sclérodermie systémique. EMC (Elsevier<br />

Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-055-C-10, 2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie systémique 18-055-C-10<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

7


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0485<br />

Néphrologie pratique : comment<br />

interpréter une protéinurie, une<br />

hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

‚ Introduction<br />

U n<br />

© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

H Izzedine<br />

geste simple et presque constamment effectué durant notre activité professionnelle reste la bandelette<br />

urinaire. Mais exploitons-nous correctement les informations qu’elle nous délivre ?<br />

Mots-clés : protéinurie, hématurie, hypernatrémie, hyponatrémie.<br />

■ Protéinurie<br />

La présence d’une protéinurie est toujours le<br />

témoin d’une anomalie fonctionnelle ou d’une<br />

lésion organique rénale. La protéinurie est<br />

généralement asymptomatique, si bien que sa<br />

recherche doit être systématique. Toutes les<br />

néphropathies peuvent, au cours de leur évolution,<br />

s’accompagner de protéinurie. Si la relation<br />

étiologique est habituellement facile à faire lorsque<br />

la protéinurie est découverte au cours de situations<br />

pathologiques connues (maladies métaboliques ou<br />

immunologiques, uropathies malformatives,<br />

infections urinaires, hypertension artérielle…), il en<br />

va tout autrement en présence d’une protéinurie de<br />

découverte fortuite et cliniquement isolée.<br />

L’évaluation quantitative de la protéinurie fournit<br />

d’emblée des renseignements importants. Quelques<br />

examens simples permettent ensuite d’obtenir le<br />

plus souvent une orientation étiologique<br />

satisfaisante et de programmer alors les<br />

investigations spécialisées éventuellement<br />

nécessaires.<br />

‚ Rappel physiologique<br />

Les protéines retrouvées dans les urines ont<br />

presque toujours une origine plasmatique. Elles sont<br />

habituellement filtrées par le glomérule, puis en<br />

grande partie réabsorbées par endocytose et<br />

détruites dans les cellules tubulaires.<br />

Le glomérule constitue une barrière qui laisse<br />

passer les protéines en fonction de trois critères :<br />

– leur taille : poids moléculaire (PM), valeur-seuil :<br />

60 000 ;<br />

– leur charge électrique (négative) : elles sont<br />

repoussées par la membrane basale glomérulaire ;<br />

– les conditions hémodynamiques locales.<br />

Les cellules tubulaires sont capables de<br />

cataboliser par digestion intracellulaire lysosomale<br />

les protéines réabsorbées ; 1 % de ces protéines, non<br />

réabsorbé est retrouvé dans l’urine définitive et<br />

constitue la protéinurie physiologique.<br />

‚ Protéinurie physiologique<br />

Physiologiquement, il existe une protéinurie de<br />

très faible abondance. Chez les sujets normaux, cette<br />

protéinurie physiologique est d’environ 40-80 mg/j<br />

avec une valeur supérieure haute inférieure à<br />

150 mg/ 24 heures. Cette protéinurie est composée<br />

pour moins de 10 mg/j d’albumine vraie, pour 30 à<br />

À retenir :<br />

✔ La protéinurie est la manifestation la plus fréquente des maladies rénales.<br />

✔ Les bandelettes urinaires permettent de dépister facilement la protéinurie mais<br />

l’examen de référence pour la quantification est la mesure de la protéinurie sur 24<br />

heures.<br />

✔ Lorsque la protéinurie est importante, les patients décrivent souvent les urines<br />

comme troubles et remarquent la présence de mousse, secondaire à la présence de<br />

protéines dénaturées.<br />

✔ L’existence d’une protéinurie à un dosage pondéral contrastant avec une<br />

bandelette urinaire négative doit faire évoquer une protéinurie constituée de<br />

chaînes légères d’immunoglobulines.<br />

✔ L’association protéinurie + hématurie microscopique doit faire évoquer une<br />

pathologie glomérulaire.<br />

✔ La protéinurie est un facteur de risque cardiovasculaire indépendant.<br />

1<br />

Tableau I. – Protéinurie physiologique.<br />

- débit < 150 mg/jour<br />

• en moyenne 80 mg/jour<br />

•dont0à30mg/jour d’albumine (« microalbuminurie<br />

»)<br />

• usuellement non détectée par les bandelettes<br />

réactives<br />

- composition<br />

• 60 % de protéines plasmatiques : 1/3 d’albumine,<br />

2/3 de globuline<br />

• 40 % de protéines d’origine tubulaire et urinaire<br />

:<br />

- mucoprotéine de Tamm-Horsfall<br />

- déchets protéolysés de provenance<br />

urogénitale<br />

50 mg/j de mucoprotéine de Tamm-Horsfall<br />

(protéine synthétisée et sécrétée spécifiquement<br />

dans la branche ascendante large de l’anse de Henle<br />

et ajoutée à l’urine après la filtration glomérulaire ;<br />

cette protéine joue un rôle important puisqu’elle<br />

constitue la matrice de la plupart des cylindres<br />

urinaires), et enfin moins de 20 mg/j d’immunoglobulines<br />

et de fragments d’immunoglobulines et<br />

d’autres protéines de petit poids moléculaire<br />

(tableau I).<br />

‚ Protéinuries pathologiques<br />

5-0485<br />

Dans un certain nombre de situations<br />

pathologiques, la barrière de filtration glomérulaire<br />

est altérée et laisse passer dans l’urine des quantités<br />

importantes de macromolécules, dont notamment<br />

des protéines. Cette quantité anormale de protéines<br />

retrouvée dans l’urine définit la protéinurie (><br />

150 mg/j) qui peut avoir plusieurs mécanismes et<br />

significations :<br />

■ une protéinurie constituée principalement de<br />

protéines de faible PM, qui passent normalement le<br />

filtre glomérulaire, correspond :<br />

– soit à un défaut de réabsorption tubulaire<br />

(syndrome de Fanconi, néphropathie tubulointerstitielle<br />

chronique) ;<br />

– soit à un excès de production de ces petites<br />

protéines (chaînes légères du myélome…) ;


5-0485 - Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

■ une protéinurie constituée principalement de<br />

protéines passant très peu physiologiquement le<br />

filtre glomérulaire (albumine ± globulines de PM<br />

> 60 000) témoigne d’une néphropathie<br />

glomérulaire.<br />

Mesures de la protéinurie<br />

Bandelette urinaire réactive<br />

À n’utiliser que sur un échantillon d’urine<br />

fraîchement émise.<br />

Positivité si virage du jaune au vert.<br />

Une échelle colorimétrique permet une cotation<br />

semi-quantitative (de une à quatre croix).<br />

Seule la présence d’albumine est détectée. Les<br />

globulines et les chaînes légères ne sont pas<br />

reconnues par le test.<br />

Il existe de nombreux faux-positifs :<br />

■ réactif vieux ou mal conservé ;<br />

■ urines très alcalines ;<br />

■ présence d’antiseptique (ammonium<br />

quaternaire) dans le bocal ;<br />

■ contamination du recueil par les sécrétions<br />

vaginales chez la femme ;<br />

■ examen iodé récent (moins de 24 heures).<br />

La bandelette ne détecte que les albuminuries<br />

supérieures à 20 mg/dL.<br />

En pratique, protéinurie positive à une croix<br />

= 300 mg/j, protéinurie à deux croix = 1 g/j,<br />

protéinurie à trois croix ≥ à 3 g/j.<br />

Protéinurie des 24 heures<br />

La protéinurie peut être recherchée par<br />

bandelette urinaire sur un échantillon. Cependant, le<br />

dosage de la protéine sur une période de 24 heures<br />

doit être systématique pour toute recherche de<br />

protéinurie. Cette recherche doit être faite comme<br />

suit : première diurèse du matin éliminée, collecte de<br />

toutes les urines des 24 heures jusqu’au lendemain,<br />

miction avec vidange complète le lendemain à la<br />

même heure conservée.<br />

Microalbuminurie<br />

Normalement, l’albumine dans les urines est<br />

excrétée à un taux de 20 µg/min. Dans certaines<br />

conditions pathologiques telles que la néphropathie<br />

diabétique au stade incipiens, le taux d’albuminurie<br />

varie entre 20 et 200 µg/min.<br />

La recherche de la protéinurie est importante, elle<br />

oriente le diagnostic. De plus, elle constitue un<br />

facteur de risque cardiovasculaire indépendant,<br />

même chez les patients non diabétiques. Pour<br />

estimer le risque d’événements cardiovasculaires<br />

chez des patients à haut risque tels que les<br />

diabétiques et chez d’autres patients (non<br />

diabétiques), une cohorte a été suivie de 1994 à<br />

1999 comportant 5 545 patients, âgés de plus de<br />

55 ans avec au moins un facteur de risque pour<br />

3 498 d’entre eux. La microalbuminurie a été<br />

détectée chez 32,6 % (1 140) des diabétiques et chez<br />

14,8 % (823) de non-diabétiques.<br />

Le risque relatif (rr) était de :<br />

■ pour les principaux événements cardiovasculaires<br />

: 1,83 ;<br />

■ pour toute cause de décès : 2,09 ;<br />

■ pour toute hospitalisation pour insuffisance<br />

cardiaque congestive : 3,23.<br />

En outre, dans les populations générales et<br />

d’hypertendus, la microalbuminurie est commune et<br />

Tableau II. – Protéinurie orthostatique : critères<br />

diagnostiques.<br />

• Terrain : adolescent, longiligne, en période de<br />

croissance<br />

• Caractère strictement isolé de la protéinurie<br />

- pas d’antécédents uronéphrologiques personnels<br />

ou familiaux<br />

- examen somatique normal (notamment pas<br />

d’œdèmes ni HTA)<br />

- fonction rénale normale<br />

- sédiment urinaire : ni hématurie ni leucocyturie<br />

- pas d’uropathie décelable : UIV normale<br />

• Caractère orthostatique de la protéinurie<br />

- Technique<br />

le matin au réveil : miction en clinostatisme et<br />

jeter les urines<br />

décubitus strict de 2 heures et miction en clinostatisme<br />

= échantillon 1<br />

orthostatisme de deux heures et miction =<br />

échantillon 2<br />

- Résultat<br />

échantillon 1 = protéinurie nulle<br />

échantillon2=protéinurie positive (1 à 2 g/L !)<br />

• Survenue peu avant la puberté et disparition<br />

avec l’arrêt de la croissance (après 20 ans)<br />

HTA : hypertension artérielle ; UIV : urographie intraveineuse.<br />

a été associée à un profil athérogène. De plus,<br />

l’albuminurie, même à concentration physiologique<br />

(limite supérieure de la normale) chez des hommes<br />

hypertendus est associée à un profil cardiovasculaire<br />

et métabolique défavorable sur 186 patients<br />

hypertendus essentiels à fonction rénale normale,<br />

jamais traités, glucose-tolérants, normoalbuminuriques<br />

par rapport aux trois quarts inférieurs<br />

(albuminurie 6,3 et 9,4 mg/min), les patients avec<br />

15 mg/min de l’albuminurie (albuminurie normale à<br />

normale haute) ont eu une plus grande hypertrophie<br />

ventriculaire concentrique, un indice de masse<br />

corporelle plus élevé (BMI pour body mass index)<br />

plus élevé, des niveaux d’insuline à jeun accrus, une<br />

sensibilité à l’insuline réduite.<br />

Il est avancé qu’un dysfonctionnement<br />

endothélial est le phénomène fondamental pour<br />

expliquer la microalbuminurie d’une part, et le risque<br />

cardiovasculaire d’autre part. À cet égard, la perte du<br />

glycoaminoglycan de sulfate d’héparine pourrait<br />

être un mécanisme physiopathologique important.<br />

Caractéristiques de la protéinurie<br />

Caractères de la protéinurie.<br />

La protéinurie<br />

est-elle permanente ?<br />

Une protéinurie transitoire ou intermittente ne<br />

nécessite pas d’explorations complémentaires. Ces<br />

protéinuries sont de loin les plus fréquentes :4à7%<br />

des consultations de médecine générale. Elles<br />

justifient de vérifier le dosage des protéines dans les<br />

urines sur un nouvel échantillon. Une fièvre, un<br />

exercice physique important, une infection urinaire,<br />

l’administration de médicament vasopressif, la<br />

perfusion d’albumine peuvent majorer une<br />

protéinurie de 1 g par 24 heures environ.<br />

La protéinurie orthostatique (tableau II) se définit<br />

par l’excrétion de protéines dans les urines lorsque le<br />

2<br />

Tableau III. – Protéinurie permanente : examens<br />

complémentaires.<br />

Biologiques courants<br />

• Électrophorèse des protides sanguins<br />

• hypoalbuminémie (syndrome néphrotique) ?<br />

• gammapathie monoclonale ?<br />

• Ionogramme sanguin<br />

• Glycémie<br />

• Numération sanguine<br />

• Créatininémie<br />

• Étude du sédiment urinaire par bandelette réactive<br />

hématurie ? leucocyturie ?<br />

Imagerie rénale<br />

• Échographie rénale et cliché d’ASP<br />

• vérifient l’absence de dilatation des voies excrétrices<br />

• mesurent la taille des reins et repèrent les<br />

contours (en vue d’une éventuelle biopsie)<br />

• UIV si uropathie suspectée, après vérification de<br />

la fonction rénale, en l’absence de protéinurie de<br />

Bence Jones, et en première partie de cycle chez la<br />

femme<br />

Biologiques de seconde intention<br />

• Électrophorèse des protéines urinaires<br />

- pour dépister une protéinurie monoclonale+++<br />

• pic étroit isolé dans la région des b- ou gammaglobulines<br />

• correspond le plus souvent à des chaînes légères<br />

d’Ig au cours d’un myélome<br />

• la monoclonalité sera prouvée par immunofixation<br />

- pour distinguer (mais test imparfait)<br />

• protéinurie glomérulaire : riche en albumine<br />

(> 40 %)<br />

• protéinurie tubulaire : riche en globulines<br />

(albumine < 60 %)<br />

• b2-microglobulinurie<br />

• petite protéine de 11 900 Da<br />

• sert de marqueur de tubulopathie proximale<br />

• retinol binding protein, lysozymurie et aminoacidurie<br />

sont moins utilisés<br />

ASP : abdomen sans préparation ; UIV ; urographie intraveineuse ; Ig :<br />

immunoglobuline.<br />

sujet est en position debout. Elle disparaît lorsque le<br />

patient est en décubitus prolongé avant le recueil<br />

des urines. Le mécanisme de cette affection est<br />

inconnu mais probablement lié à des anomalies de<br />

la paroi glomérulaire. Elle se caractérise par :<br />

■ l’atteinte des sujets jeunes, souvent des<br />

adolescents (< 20 ans) ;<br />

■ un faible débit (1 à 2 g par 24 heures) ;<br />

■ un sédiment urinaire normal ;<br />

■ son caractère spontanément résolutif ;<br />

■ la normalité de la voie excrétrice.<br />

Une fois ce diagnostic établi chez un adolescent<br />

protéinurique, il convient d’être rassurant, aucune<br />

mesure thérapeutique n’est de mise.<br />

Lorsque la protéinurie est permanente et non liée<br />

à l’orthostatisme, elle témoigne d’une pathologie<br />

rénale ou systémique.<br />

Typer la protéinurie permanente :<br />

quel est le type de protéine excrété ?<br />

L’examen essentiel qui permet de déterminer le<br />

type de protéine excrété dans les urines est<br />

l’électrophorèse des protéines urinaires (tableau III).


Une protéinurie est dite glomérulaire si<br />

l’albumine est la protéine principalement éliminée<br />

dans les urines. Elle est tubulaire s’il existe dans les<br />

urines des protéines de plus faible poids moléculaire.<br />

L’électro- et l’immunoélectrophorèse des urines<br />

permettent également de rechercher la présence<br />

d’une protéinurie monoclonale secondaire à la<br />

synthèse d’une immunoglobuline par un clone<br />

plasmocytaire médullaire dans le cadre d’un<br />

myélome.<br />

Protéinuries permanentes<br />

Les protéinuries permanentes peuvent être liées à<br />

des modifications hémodynamiques intrarénales, à<br />

des protéinuries de surcharge, ou à des protéinuries<br />

par dysfonction tubulaire ou glomérulaire.<br />

Protéinuries liées à des modifications<br />

hémodynamiques intrarénales<br />

Les catécholamines, la rénine plasmatique ou<br />

l’angiotensine II sont susceptibles de favoriser le<br />

passage des protéines à travers le filtre glomérulaire.<br />

Ce mécanisme est impliqué dans la protéinurie<br />

observée dans l’insuffisance cardiaque ou<br />

l’hypertension artérielle (HTA), dans les protéinuries<br />

orthostatiques, au cours de la grossesse.<br />

Protéinuries de surcharge<br />

Ces protéinuries sont constituées de protéines<br />

de faible poids moléculaire (entre 20 et 30 kDa),<br />

libérées en quantité massive dans la circulation<br />

sanguine, librement filtrées par le glomérule mais<br />

insuffisamment réabsorbées car le processus est<br />

saturé au niveau du tube proximal. Dans ces<br />

protéinuries de surcharge, la barrière de filtration<br />

glomérulaire est initialement intacte et la<br />

protéinurie traduit essentiellement l’hyperproduction<br />

d’une protéine spécifique en amont du<br />

rein.<br />

Augmentation de la charge plasmatique en une<br />

protéine :<br />

■ librement filtrée par le glomérule, car petite ;<br />

■ incomplètement réabsorbée par le tubule<br />

proximal, dont les possibilités sont dépassées.<br />

Causes :<br />

■ une production élevée d’origine tumorale ;<br />

– chaînes légères d’immunoglobulines au cours<br />

du myélome multiple +++ ;<br />

– lysozyme au cours de certaines leucémies<br />

aiguës ;<br />

■ un excès de libération dû à un dommage<br />

tissulaire :<br />

– hémoglobine lors des hémolyses aiguës<br />

intravasculaires = hémoglobinurie ;<br />

– myoglobine lors des rhabdomyolyses =<br />

myoglobinurie ;<br />

– amylase lors des pancréatites aiguës =<br />

amylasurie.<br />

En pratique, toute protéinurie récente<br />

chez un sujet de plus de 50 ans doit<br />

faire penser à la possibilité d’un<br />

myélome +++ et doit faire pratiquer<br />

une électrophorèse des protides<br />

urinaires.<br />

Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie - 5-0485<br />

Protéinuries par dysfonction tubulaire<br />

Le tube contourné proximal réabsorbe et<br />

catabolise de très nombreuses protéines<br />

plasmatiques, qui ont franchi librement un<br />

glomérule normal, du fait de leur petite taille et d’un<br />

point isoélectrique favorable.<br />

L’existence d’une tubulopathie limite les<br />

possibilités de réabsorption et se traduit par un débit<br />

urinaire élevé de ces protéines : protéinurie tubulaire.<br />

Causes :<br />

■ néphropathies comportant une dysfonction<br />

tubulaire proximale ;<br />

maladies du tube contourné proximal (syndrome<br />

de Fanconi) ;<br />

■ les néphropathies tubulo-interstitielles<br />

chroniques.<br />

Diagnostic : bêta2-microglobulinurie élevée +++.<br />

Par ailleurs :<br />

■ électrophorèse des protéines urinaires :<br />

majorité de globulines de petit PM (test diagnostique<br />

médiocre) ;<br />

■ protéinurie totale des 24 heures : débit faible<br />

(mais atteint parfois 1,5 à 2 g !).<br />

Protéinuries par dysfonction glomérulaire<br />

■ Anomalies glomérulaires :<br />

– soit fonctionnelles : perte des charges négatives<br />

de la membrane basale glomérulaire (MBG) dans la<br />

néphrose lipoïdique ;<br />

– soit organiques : lésions variables de<br />

l’endothélium, de la MBG, de l’épithélium.<br />

■ Le débit de la protéinurie est variable :<br />

– abondant, le plus souvent supérieur à 1,5 g/j ;<br />

– débit > 4 grammes/j : néphropathie<br />

glomérulaire très probable ;<br />

– parfois faible.<br />

Sélectivité :<br />

■ Une fois la néphropathie glomérulaire<br />

reconnue, il faut préciser sa présentation<br />

syndromique et proposer éventuellement une<br />

biopsie rénale :<br />

– syndrome néphrotique ;<br />

– syndrome néphrotique aigu ;<br />

– syndrome de glomérulonéphrite rapidement<br />

progressive ;<br />

– syndrome des hématuries macroscopiques<br />

récidivantes ;<br />

– syndrome de glomérulonéphrite chronique.<br />

‚ Approche d’évaluation d’une protéinurie<br />

Exclure les protéinuries non pathologiques :<br />

■ des urines très concentrées avec une densité<br />

supérieure à 1,026 ;<br />

■ des urines trop alcalines ;<br />

■ une recherche de protéinurie après un exercice<br />

physique intense ;<br />

■ une recherche de protéinurie au cours d’un<br />

épisode fébrile.<br />

Histoire de la maladie et examen physique du<br />

patient<br />

■ revoir les anciennes investigations, les anciens<br />

examens afin de définir l’ancienneté de la<br />

protéinurie ;<br />

■ faire le test à la recherche d’une protéinurie<br />

orthostatique en cas de doute.<br />

3<br />

Confirmer la protéinurie :<br />

■ par la protéinurie des 24 heures ;<br />

■ à renouveler pour contrôler sa permanence.<br />

Autres examens en cas de protéinurie positive :<br />

■ regarder le sédiment urinaire, et spécialement<br />

la présence d’une hématurie. La présence d’une<br />

hématurie mineure quelle qu’en soit la quantité,<br />

associée à une protéinurie, oriente vers une atteinte<br />

rénale. Cette supposition sera confirmée par l’étude<br />

de la morphologie des globules rouges. La présence<br />

de globules rouges dysmorphiques dans les urines<br />

suggère une pathologie glomérulaire. De même, la<br />

présence de cellules-cibles ou globules rouges dans<br />

les urines indique une pathologie glomérulaire<br />

active ;<br />

■ explorer la fonction rénale avec le dosage de la<br />

créatininémie, de l’urée, d’un ionogramme sanguin<br />

et une albuminémie, cholestérol et triglycérides ;<br />

■ s’assurer de la normalité de la voie excrétrice.<br />

Réaliser une imagerie rénale : une échographie<br />

rénale, un abdomen sans préparation (ASP),<br />

tomographies rénales, etc ;<br />

■ autres investigations : selon le type de<br />

protéinurie et l’allure du sédiment urinaire, l’attitude<br />

pratique devant une protéinurie est résumée sur la<br />

figure 1, les investigations pouvant conduire jusqu’à<br />

la ponction-biopsie rénale.<br />

‚ Mesures thérapeutiques<br />

La protéinurie, lorsqu’elle est le symptôme d’une<br />

maladie rénale, requiert un traitement spécifique<br />

une fois le diagnostic établi, qui peut comporter des<br />

immunosuppresseurs (corticostéroïdes et agents<br />

cytotoxiques).<br />

Le traitement se fait par les inhibiteurs de<br />

l’enzyme de conversion de l’angiotensine (IEC) ou les<br />

sartans : ces classes thérapeutiques représentent un<br />

outil majeur pour diminuer le débit de la protéinurie<br />

et ralentir la dégradation de la fonction rénale. En<br />

plus de leur effet antihypertenseur systémique, les<br />

médicaments diminuent la pression intraglomérulaire<br />

par leur action sur l’artériole efférente.<br />

‚ Introduction<br />

■ Hématurie<br />

La présence d’une quantité anormale d’hématies<br />

dans l’urine définit l’hématurie. L’hématurie<br />

microscopique est par définition invisible à l’œil nu.<br />

Elle est dépistée par les bandelettes réactives<br />

urinaires, et est définie par la présence de plus de<br />

cinq hématies par mm 3 d’urine. L’hématurie<br />

microscopique asymptomatique est fréquente (2,5 à<br />

3 % pour 20 000 habitants), et représente 10 % des<br />

hématuries. L’œil humain perçoit la coloration rosée<br />

ou rouge de l’urine pour un débit d’hématies<br />

supérieur à 300/mm 3 définissant l’hématurie<br />

macroscopique. L’hématurie non expliquée par une<br />

cause évidente, par exemple une cystite, est un<br />

symptôme relativement fréquent. Une hématurie<br />

isolée n’est pas dangereuse en elle-même sauf<br />

lorsqu’un saignement extraglomérulaire est


5-0485 - Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

Pu négative<br />

Pu transitoire, fonctionnelle<br />

(fièvre, exercice...)<br />

Pu < 0,15 g/j<br />

- CICr normale<br />

Pu positive<br />

BU<br />

Répéter test<br />

0,15 < Pu ≤ 1,5 g/j<br />

Fonction rénale normale<br />

Fausse protéinurie Avis néphrologue<br />

abondant et qu’il est responsable de la formation de<br />

caillots obstruant les uretères. Cependant la mise en<br />

évidence d’une hématurie a une grande valeur<br />

diagnostique car celle-ci peut être le symptôme<br />

révélateur d’une maladie rénale ou urologique<br />

grave.<br />

‚ Est-ce une hématurie ?<br />

Docteur, j’ai du sang dans les urines<br />

Les critères de reconnaissance d’une hématurie<br />

macroscopique ou d’une hématurie microscopique<br />

sont donnés dans le tableau IV.<br />

‚ L’hématurie étant confirmée, est-elle<br />

urologique ou néphrologique ?<br />

L’origine glomérulaire de l’hématurie si elle est<br />

confirmée permet d’éviter la réalisation de certaines<br />

explorations urologiques. En revanche, l’affirmation<br />

de l’origine glomérulaire de l’hématurie implique<br />

que le patient doit être adressé au néphrologue pour<br />

discussion de l’indication d’une ponction biopsie<br />

rénale (tableau V).<br />

‚ Quelles sont les causes les plus<br />

fréquentes ?<br />

Les principales causes d’hématurie sont résumées<br />

dans la figure 2 et le tableau VI.<br />

‚ Imagerie<br />

La rentabilité diagnostique de l’imagerie de<br />

l’appareil urinaire chez l’adulte augmente avec l’âge,<br />

et elle est plus importante avec l’hématurie<br />

macroscopique (5 à 23 %) qu’avec l’hématurie<br />

microscopique (jusqu’à 14 %). La démarche optimale<br />

d’imagerie reste mal établie parce que la majorité<br />

des patients ont des signes très minimes. Une<br />

urographie intraveineuse ou une échographie rénale<br />

à la recherche de calculs, d’une tumeur du rein ou<br />

d’une polykystose est généralement effectuée.<br />

L’urographie intraveineuse est préférable chez les<br />

jeunes patients car elle détecte des lésions, comme<br />

l’ectasie canaliculaire précalicielle, qui ne sont pas<br />

détectées par l’échographie. Chez les patients qui ont<br />

une contre-indication à l’urographie intraveineuse<br />

(par exemple allergie au produit de contraste),<br />

l’échographie peut être utilisée à la place. Cet<br />

examen est moins coûteux mais sa rentabillité<br />

diagnostique est plus faible. Les patients jeunes avec<br />

une urographie intraveineuse normale ne<br />

nécessitent pas d’échographie dans la mesure où cet<br />

examen a une très faible valeur diagnostique dans<br />

À retenir :<br />

✔ L’hématurie est fréquente et dans la majorité des cas bénigne lorsqu’elle est isolée.<br />

✔ La possibilité d’un cancer urologique doit être présente à l’esprit du praticien, surtout chez l’adulte présentant des facteurs de<br />

risque (tabac +++).<br />

✔ Le traitement par antivitamine K à dose efficace en l’absence de surdosage ne peut pas expliquer une hématurie. Le patient doit<br />

être exploré de la même façon qu’en l’absence de traitement anticoagulant.<br />

✔ Chez la femme, il faut vérifier que le sang ne provient pas d’un saignement vaginal mêlé aux urines recueillies pour l’examen à<br />

la bandelette. Il faut refaire l’examen en dehors des règles.<br />

Tableau IV. – Hématurie macroscopique et hématurie microscopique.<br />

Hématurie macroscopique si Hématurie microscopique si<br />

• Émission d’urines foncées ou de couleur rouge<br />

• 1 mL de sang dans 1 L d’urine suffıt à induire un changement de couleur<br />

• l’hématurie peut être continue ou intermittente<br />

• la centrifugation permet de vérifier que la couleur n’est pas liée au surnageant<br />

(hémoglobine, myoglobine, colorants alimentaires ou médicamenteux)<br />

Faux-positifs :<br />

• L’uréthrorragie : saignement en dehors des mictions<br />

• Urines colorées par des pigments :<br />

- alimentaires : betteraves, choux rouge, myrtilles<br />

- médicamenteux : rifampicine, métronidazone, phénindine, laxatifs<br />

- humaines : hémoglobine, myoglobine, bilirubine<br />

Pu positive<br />

Pu des 24 heures<br />

Clairance de la créatinine<br />

Étude du sédiment urinaire<br />

Pu > 1,5 g/j ou +<br />

Pu + hématurie<br />

ou CICr abaissée<br />

1 Prise en charge d’une protéinurie découverte à la bandelette urinaire (BU) chez un adulte. Pu : protéinurie ;<br />

ClCr ; clairance de la créatinine.<br />

4<br />

• Présence de plus de 5 globules rouges par mm 3 dans le sédiment urinaire,<br />

> 5 000/mL ou /min au compte d’Addis<br />

• Les bandelettes urinaires sont aussi sensibles que l’examen du sédiment urinaire<br />

mais sont moins spécifiques (plus de faux-positifs)<br />

• un examen des urines à la bandelette négatif exclut l’existence d’une hématurie,<br />

mais la présence d’hématies lysées dans les urines peut positiver faussement la<br />

bandelette<br />

Faux-positifs à la bandelette :<br />

• Hémoglobinurie<br />

• Myoglobinurie<br />

• Antiseptiques


Tableau V. – Hématurie urologique et hématurie néphrologique.<br />

Urologique<br />

• Il s’agit le plus souvent d’une hématurie macroscopique<br />

• Plusieurs éléments cliniques évoquent d’emblée un saignement de cause urologique<br />

- des douleurs<br />

- des troubles mictionnels<br />

- des dépôts/caillots urinaires<br />

- pyurie associée<br />

- une chronologie particulière de l’hématurie au cours de la miction<br />

interrogatoire ± visualisation d’une miction fractionnée<br />

• hématurie terminale = cause vésicale<br />

• hématurie initiale = cause uréthroprostatique<br />

NB : une hématurie totale n’est pas forcément urologique et n’a aucune valeur localisatrice<br />

• Absence d’hématies urinaires déformées<br />

• Présence d’indices cliniques en faveur d’une uropathie<br />

• Les principales hématuries urologiques sont les lithiases et les tumeurs<br />

• Le caillotage des voies urinaires doit être évité en entretenant une hyperdiurèse<br />

• Anomalies d’allure lithiasique ou tumorale sur l’échographie et/ou l’urographie intraveineuse<br />

• Un traitement spécifique adapté sera proposé (traitement d’une lithiase, d’une tumeur bénigne ou maligne,<br />

d’une infection)<br />

Néphrologique<br />

Il s’agit d’une hématurie (microscopique ou macroscopique)<br />

- « isolée » = pas de douleurs, pas de troubles mictionnels, pas de caillots ou dépôts<br />

- «totale » = lorsqu’elle est macroscopique<br />

• Les causes urologiques évoquées ci-contre restent possibles<br />

• Il faut ajouter les néphropaties<br />

• Hématies urinaires déformées ± cylindres hématiques<br />

• ± protéinurie, HTA, insuffısance rénale<br />

• Les principales néphropathies causales sont glomérulaires<br />

• L’intérêt d’une biopsie rénale devra être discuté<br />

HTA : hypertension artérielle.<br />

Transitoire<br />

Permanente<br />

10<br />

ce contexte. Les sujets plus âgés peuvent être<br />

explorés d’abord par l’échographie qui est<br />

supérieure pour la visualisation des petites tumeurs<br />

du rein. La réalisation d’un scanner ou d’une<br />

résonance magnétique nucléaire (RMN) n’est<br />

habituellement pas nécessaire dans le cadre de cette<br />

évaluation initiale.<br />

‚ Indications de la cystoscopie<br />

Transitoire inexpliquée<br />

Infection urinaire<br />

Lithiase<br />

Hématurie d'effort<br />

Traumatique<br />

Endométriose<br />

Polykystose<br />

Cancer<br />

Maladies glomérulaires<br />

20 30 40 50 60 70 80 90<br />

Les indications de la cystoscopie lorsque<br />

l’urographie intraveineuse et l’échographie sont<br />

Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie - 5-0485<br />

Âge<br />

2 Principales causes d’hématurie<br />

en fonction de<br />

l’âge. En jaune, les causes<br />

les plus fréquentes.<br />

négatives restent mal définies. La valeur<br />

diagnostique de cet examen est très faible chez les<br />

hommes en dessous de 40 ans et chez les femmes à<br />

faible risque. D’une façon générale, la cystoscopie<br />

est recommandée chez les patients à risque de<br />

cancer de la vessie : hommes de plus de 50 ans et<br />

ceux qui ont des facteurs de risque spécifiques,<br />

comme l’utilisation prolongée et importante de<br />

phénacétine, les gros fumeurs, l’exposition à certains<br />

colorants ou l’administration prolongée de<br />

cyclophosphamide (tableau VII).<br />

5<br />

Tableau VI. – Causes fréquentes d’hématurie<br />

microscopique isolée.<br />

Pathologies rénales<br />

- Néphropathies à IgA<br />

- GN membranoproliférative<br />

- GN à dépôts de C3 - Néphropathie lupique<br />

- Purpura rhumatoïde<br />

- Syndrome de Goodpasture<br />

- Vascularite rénale<br />

- Hématurie bénigne<br />

- Maladie des membranes basales fines<br />

- Syndrome d’Alport<br />

- Néphropathie interstitielle<br />

- Néphropathie des analgésiques<br />

- Pyélonéphrite<br />

- Néphropathie drépanocytaire<br />

- Polykystose rénale<br />

- Kyste rénal isolé (?)<br />

- Traumatisme/chirurgie rénale<br />

- Biopsie rénale<br />

- Exercice physique<br />

- Dépôts artériolaires de C3 - Embole ou thrombose artérielle<br />

- Thrombose veineuse rénale<br />

- Malformations artérielles ou veineuses<br />

- Fistule artéroveineuse<br />

- Nutcracker syndrome<br />

Pathologies urinaires<br />

- Traumatisme/Chirurgie<br />

- Néoplasie<br />

- Uropathie obstructive<br />

- Kystes<br />

- Varices/Télangiectasie<br />

- Nécroses papillaires<br />

- Périurétérite<br />

- Urétérocèle<br />

- Endométriose<br />

- Infection<br />

- Bilharziose<br />

- Irradiation<br />

- Diverticule<br />

- Cystite iatrogène<br />

- Hématurie a vacuo<br />

- Prostatite<br />

- Adénome prostatique<br />

- Urétérite<br />

- Prolapsus uréthéral<br />

- Ulcère du méat<br />

- Condylome<br />

- Corps étranger<br />

- Cathéter<br />

- Exercice<br />

Anomalies de la coagulation<br />

- Troubles plaquettaires<br />

- Déficit en facteur de la coagulation<br />

- Traitement anticoagulant<br />

IgA : immunoglobulines A ; GN : glomérulonéphrite.<br />

La combinaison d’une échographie négative et<br />

d’une cystoscopie négative est habituellement<br />

suffisante pour exclure un cancer de l’appareil<br />

urinaire. Cependant un cancer peut se révéler<br />

secondairement dans quelques cas. Ce risque de<br />

cancer d’apparition ultérieure est estimé à environ<br />

1%à3ou4anschez les sujets âgés. Chez les sujets<br />

tout particulièrement à risque, une cytologie urinaire<br />

peut être réalisée initialement puis à intervalle<br />

régulier, par exemple tous les 6 mois. Un scanner<br />

permet aussi de trouver des petites tumeurs qui


5-0485 - Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

Tableau VII. – Facteurs de risque de cancers<br />

urothéliaux.<br />

Carcinogènes chimiques<br />

- exposition professionnelle au colorants et au<br />

caoutchouc<br />

- tabac<br />

- cyclophosphamide<br />

- phénacétine<br />

- « herbes chinoises »<br />

Inflammation chronique<br />

- schistosomiase<br />

- leucoplakie<br />

- diverticule vésical<br />

- extrophie vésicale<br />

n’ont pas été détectées par les autres examens. Une<br />

autre attitude est de répéter l’échographie et la<br />

cystoscopie à1anchez les patients à haut risque<br />

chez lesquels l’hématurie persiste. Inversement chez<br />

les patients à faible risque avec une hématurie<br />

microscopique persistante, un simple suivi est<br />

suffisant avec des examens urinaires périodiques.<br />

La cystoscopie est également indiquée dans les<br />

rares situations où une hématurie macroscopique<br />

intermittente ou persistnte est inexpliquée. Il est alors<br />

possible lors de cet examen de déterminer si le<br />

saignement provient de la vessie ou de l’un ou des<br />

deux uretères. Un saignement unilatéral oriente vers<br />

une malformation artérioveineuse, une fistule ou<br />

des varices veineuses.<br />

‚ Attitudes pratiques en cas d’hématurie<br />

Les figures 3, 4, 5 résument différentes attitudes<br />

face à une hématurie macroscopique, ou<br />

microscopique isolée.<br />

■ Dysnatrémies<br />

Questions<br />

Madame X vient vous voir et vous dit :<br />

Docteur, je ne bois presque plus (de l’eau) car j’ai<br />

trop d’eau dans les jambes (œdèmes).<br />

Monsieur X vous consulte :<br />

Docteur, voyez-vous j’ai réduit ma consommation<br />

en sel car dans mon bilan, le sodium est à<br />

150 mmol/L.<br />

Que pensez-vous de ces interprétations ?<br />

Que répondez-vous ?<br />

‚ Rappels physiologiques<br />

Clinique<br />

La natrémie<br />

reflète l’état d’hydratation intracellulaire<br />

et donc le bilan hydrique<br />

d’où :<br />

■ hyponatrémie :<br />

= hyperhydratation intracellulaire ;<br />

Surnageant clair<br />

Culot d'hématies<br />

Hématurie<br />

Hématurie indolore<br />

sans caillots<br />

+ Protéinurie<br />

Cylindres hématiques<br />

Globules rouges déformés<br />

CAT en cas d'urines rouges<br />

Bandelette urinaire<br />

Positive Négative<br />

Rechercher<br />

- globules rouges déformés<br />

- cylindres hématiques<br />

- protéinurie<br />

- faire créatininémie<br />

- échographie rénale, vésicale, prostatique<br />

Syndrome de néphropathie<br />

glomérulaire<br />

PBR<br />

ECBU Porphyrie<br />

Surnageant rouge<br />

pas de culots d'hématies<br />

Hémoglobinurie<br />

Myoglobinurie<br />

Lithiase<br />

Cancer de la voie excrétrice<br />

ou de la prostate<br />

= bilan hydrilique positif ;<br />

la sanction thérapeutique : restriction hydrique ;<br />

Betterave<br />

Médicaments<br />

Hématurie douloureuse<br />

avec caillots<br />

Sans protéinurie<br />

ni cylindres hématiques<br />

Globules rouges normaux<br />

Cause urologique<br />

Toucher rectal<br />

UIV ou échographie<br />

Cystoscopie<br />

■ hypernatrémie :<br />

= déshydratation intracellulaire ;<br />

Cytologie urinaire<br />

surtout si > 50 ans<br />

tabagique<br />

3 Conduite à tenir (CAT) en cas d’urines rouges. ECBU : examen cytobactériologique des urines ; UIV :<br />

urographie intraveineuse ; PBR : ponction-biopsie rénale.<br />

Oui<br />

Saignement urétéral<br />

unilatéral<br />

> 50 ans - Facteurs de risque urothéliaux<br />

Tumeur rénale<br />

ou urothéliale ?<br />

Cytologie urinaire<br />

Scanner rénal<br />

Cystoscopie<br />

Fort débit ou hématurie<br />

macroscopique<br />

Hématurie microscopique isolée, inexpliquée<br />

Âge<br />

Non<br />

Enfant - adulte jeune<br />

Microlithiase<br />

Drépanocytose<br />

Calciurie, uraturie Oui<br />

Cristallurie des 24 heures<br />

Électrophorèse Hb<br />

Urologue Néphrologue<br />

Abondance de l'hématurie<br />

Diététicien<br />

= uropathie<br />

discuter scanner ou<br />

IRM rénale, artériographie,<br />

urétéroscopie ou urétérographie<br />

Cystoscopie en période hémorragique<br />

Sang provenant des deux<br />

uretères<br />

= néphropathie<br />

discuter une biopsie rénale<br />

Hématurie microscopique<br />

Surveillance (annuelle puis espacée)<br />

- bandelette urinaire<br />

- pression artérielle<br />

- créatininémie<br />

- échographie rénale + vésicale<br />

- ± cytologie urinaire tumorale<br />

4 Hématurie microscopique isolée, inexpliquée. IRM : imagerie par résonance magnétique.<br />

6


Infection<br />

Non<br />

Confirmée<br />

par microscopie ?<br />

Oui<br />

Présente sur deux<br />

à trois prélèvements<br />

Oui<br />

Cylindres hématiques<br />

ou protéinurie ou<br />

élévation créatininémie<br />

Oui<br />

Adresser au néphrologue<br />

Probable PBR<br />

Enfant<br />

Calciurie<br />

Uraturie<br />

UIV (?)<br />

Cystographie (?)<br />

Oui<br />

Non<br />

Non<br />

= bilan hydrique négatif ;<br />

la sanction thérapeutique : apport d’eau.<br />

La volémie<br />

reflète l’état d’hydratation extracellulaire<br />

et donc le stock sodé<br />

d’où :<br />

■ les œdèmes :<br />

= hyperhydratation extracellulaire ;<br />

= stock sodé positif ;<br />

la sanction thérapeutique = régime sans sel ;<br />

■ l’hypotension, le pli cutané<br />

= déshydratation extracellulaire ;<br />

= stock sodé négatif ;<br />

la sanction thérapeutique = apport de sel.<br />

Calcul de la fraction excrétée du sodium<br />

FE Na = (Una × PCr × 100) / (Pna × UCr)<br />

HMA à la<br />

bandelette urinaire<br />

Non * Cytologie urinaire<br />

positive<br />

* Anomalies de l'imagerie<br />

urinaire<br />

Non<br />

Calciurie<br />

Uraturie<br />

PBR (?)<br />

Oui<br />

Adresser à l'urologue<br />

où : Una est la natriurèse ; PCr est la<br />

créatininémie ; Pna est la natrémie ; UCr est la<br />

créatininurie.<br />

Exemple :<br />

Natrémie = 140 mmol/L<br />

Natriurèse = 40 mmol/L<br />

Créatininémie = 352 mmol/L<br />

Créatininurie = 12,3 mmol/L<br />

FE Na = (40 × 352 × 100) / (140 × 12,3) = 0,82 %<br />

Toute élévation de la température d’un degré<br />

augmente les pertes insensibles d’environ<br />

500 mL/j.<br />

‚ Troubles du bilan sodé<br />

Déficit sodé<br />

Déficit<br />

sodé<br />

Histoire de la maladie<br />

Examen physique, biologie, ECBU<br />

Traiter l'infection et répéter l'examen<br />

Considérer comme fausse hématurie<br />

(myoglobine, hémoglobine)<br />

Répéter l'examen tous les 3 à 6<br />

mois pendant 1 an<br />

Déshydratation<br />

extracellulaire<br />

Surveillance et vérifier<br />

si nouveaux symptômes<br />

Adulte < 45 ans Adulte > 45 ans<br />

Calciurie/Uraturie<br />

Cytologie urinaire<br />

Cystoscopie<br />

UIV<br />

Échographie<br />

Scanner (?)<br />

Angiographie (?)<br />

PBR (?)<br />

5 Hématurie microscopique asymptomatique (HMA) de l’adulte. ECBU : examen cytobactériologique des<br />

urines ; UIV : urographie intraveineuse ; PBR : ponction-biopsie rénale.<br />

Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie - 5-0485<br />

7<br />

pli cutané<br />

Hypovolémie<br />

efficace<br />

Surcharge sodée hypervolémique<br />

(ou primitive)<br />

Surcharge<br />

sodée<br />

Hyperhydratation<br />

extracellulaire<br />

Surcharge sodée hypovolémique<br />

(ou secondaire)<br />

Hypovolémie<br />

efficace<br />

Surcharge<br />

sodée<br />

Hyperhydratation<br />

extracellulaire<br />

‚ Différents mécanismes<br />

de l’hyponatrémie hypotonique<br />

Hyponatrémie de surcharge hydrique<br />

primitive<br />

Surcharge<br />

hydrique<br />

Hyponatrémie (de dilution)<br />

Hyponatrémie de déficit sodé<br />

Déficit<br />

sodé<br />

Déshydratation<br />

extracellulaire<br />

(pli cutané)<br />

Rétention<br />

hydrique<br />

Œdèmes<br />

Hypervolémie<br />

Œdèmes<br />

Volume extracellulaire<br />

cliniquement normal<br />

Hyponatrémie de surcharge hydrosodée<br />

Hypovolémie<br />

efficace<br />

Rétention<br />

sodée<br />

Rétention<br />

hydrique<br />

‚ Conduite à tenir devant<br />

une dysnatrémie (fig 6, 7, 8)<br />

Hypovolémie<br />

efficace<br />

Hyponatrémie<br />

(de déficit)<br />

Hyperhydratation<br />

extracellulaire<br />

(œdèmes)<br />

Hyponatrémie<br />

(de surcharge)<br />

Réponses<br />

Les interprétations sont bien sûr fausses, les<br />

réponses sont respectivement :<br />

■ vous avez les jambes enflées parce que vous<br />

avez trop de sel (bilan sodé positif = œdèmes), il faut<br />

donc réduire votre apport en sel (fig 6, 7) ;<br />

■ votre natrémie est élevée donc vous manquez<br />

d’eau (bilan hydrique négatif = déshydratation<br />

intracellulaire). Il faut donc boire beaucoup plus<br />

d’eau et manger normalement salé (fig 8).<br />

Références ➤


5-0485 - Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

Hyponatrémie isotonique<br />

Hyperprotidémie<br />

Hyperlipidémie<br />

Hyponatrémie de déplétion<br />

NaU < 20<br />

mm0l/j<br />

Pertes digestives<br />

* diarrhées, VMS<br />

* fistule<br />

* «3e secteur»<br />

* aspiration gastrique<br />

Pertes sudorales<br />

* fièvre<br />

* brûlures<br />

* mucoviscidose<br />

NaU > 20<br />

mm0l/j<br />

Pertes urinaires<br />

* diurétiques<br />

* insuffisance<br />

surrénalienne<br />

* néphropathie<br />

avec perte de sel<br />

* tubulopathie<br />

* levée d'obstacle<br />

* diabète sucré<br />

* hypercalcémie<br />

Natrémie < 135 mmol/L<br />

Osm mesurée<br />

Normale 280-295 mOsm/L Basse < 280 mOsm/L Élevée > 295 mOsm/L<br />

VEC<br />

Hyponatrémie vraie hypotonique<br />

VEC<br />

État cutané<br />

Poids, TA<br />

Hyponatrémie de dilution<br />

HTA<br />

Surcharge sodée<br />

hypervolémique<br />

* insuffisance<br />

rénale aiguë<br />

* insuffisance<br />

rénale chronique<br />

terminale<br />

* syndrome néphritique<br />

* hyperaldostéronisme<br />

* hypercorticisme<br />

Pas de HTA<br />

Sérum salé Restriction hydrique<br />

+ régime sans sel<br />

Surcharge sodée<br />

hypervolémique<br />

* insuffisance<br />

cardiaque<br />

* cirrhose<br />

hépatique<br />

* syndrome<br />

néphrotique<br />

* dénutrition grave<br />

* sepsis grave<br />

* AINS<br />

Hyponatrémie hypertonique<br />

U Osm < 1<br />

P<br />

OsmUr < 100<br />

Excès d'apport<br />

liquidien<br />

Polydipsie<br />

psychogène<br />

(«Potomanie»)<br />

Hyperglycémie<br />

Mannitol, Glycérol<br />

Éthylène glycol<br />

Méthanol, Éthanol<br />

Glycocolle<br />

VEC VEC cliniquement normal<br />

Déficit sodé Surcharge hydrosodée Surcharge hydrique pure<br />

Natriurèse Pression artérielle<br />

Osm Ur<br />

U Osm > 1<br />

P<br />

OsmUr > 100<br />

Défaut d'élimination<br />

rénale de l'eau libre<br />

SIADH<br />

Grand déficit<br />

potassique<br />

Post-nécrose tubulaire<br />

aiguë<br />

Hypothyroïdie<br />

Hypocortisolisme<br />

Restriction hydrique et/ou<br />

recharge potassique<br />

6 Orientation diagnostique devant une hyponatrémie. TA : tension artérielle ; VMS : vomissements ; VEC : volume extracellulaire ; NaU : natriurèse ; AINS :<br />

anti-inflammatoires non stéroïdiens ; SIADH : « syndrome of inappropriate antidiuretic hormone secretion ».<br />

< 48 h<br />

Contexte aigu<br />

* Le plus souvent postopératoire<br />

* Traitement URGENT par sérum<br />

salé hypertonique jusqu'à<br />

natrémie = 130 mmol/L<br />

Traitement progressif<br />

- restriction hydrique<br />

- Natrémie < 8 mmol/jour<br />

- arrêt facteur déclenchant<br />

Natrémie < 120 mmol/L<br />

Depuis quand ? Ou retentissement neurosensoriel<br />

< 48 h<br />

Contexte chronique<br />

Y a-t-il convulsion<br />

ou coma ?<br />

Non Oui<br />

7 Traitement d’une hyponatrémie.<br />

8<br />

Nécessité d'une correction rapide par<br />

sérum salé hypertonique :<br />

- Natrémie < 5 mmol/L en 2 à 3 h<br />

- Natrémie = ~ 8 mmol/L/jour


VEC<br />

Hypotension<br />

Déshydratation globale<br />

Hypernatrémie<br />

hypovolémique<br />

NaU < 10 mmol/L<br />

U/P Osm >1<br />

UOsm > 600 mOsm/L<br />

CAUSE EXTRARÉNALE<br />

DE PERTE SODÉE<br />

Sudation profuse<br />

Diarrhée fébrile, VMS<br />

Pertes respiratoires<br />

Défaut d'apport en eau<br />

Mucoviscidose<br />

Restaurer rapidement le volume extravasculaire<br />

(sérum physiologique ou macromolécule)<br />

Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie - 5-0485<br />

Osmolité urinaire<br />

Natriurèse<br />

NaU > 20 mmol/L<br />

U/P Osm >1<br />

UOsm < 600 mOsm/L<br />

CAUSE RÉNALE<br />

DE PERTE SODÉE<br />

Perte mixte eau >> sel<br />

Natrémie > 145 mmol/L<br />

HYPERNATRÉMIE = Déficit hydrique<br />

DIURÈSE OSMOTIQUE<br />

Diurétique de l'anse<br />

Mannitol<br />

Glucose (coma hyperosmolaire)<br />

Urée<br />

HYPERCALCÉMIE<br />

VEC normal<br />

Tension normale<br />

Déshydratation cellulaire pure<br />

Hypernatrémie<br />

isovolémique<br />

Estimer le déficit en eau libre et à compenser lentement en 72 heures<br />

Réévaluer selon :<br />

• protidémie<br />

• glycémie<br />

à distance de :<br />

• apport de sel hypertonique<br />

• période post-dialyse<br />

U/P Osm >1<br />

UOsm > 600 mOsm/L<br />

CAUSE<br />

EXTRARÉNALE<br />

DE PERTE D'EAU<br />

LIBRE<br />

Hypodipsie<br />

Sudation profuse<br />

Diarrhée fébrile, VMS<br />

Pertes respiratoires<br />

Mucoviscidose<br />

Pertes insensibles<br />

VEC<br />

HTA<br />

Déshydratation cellulaire<br />

avec surcharge sodée<br />

Hypernatrémie<br />

hypervolémique<br />

Apport sodé > eau<br />

- Perfusion excessive :<br />

• de sérum<br />

physiologique (ou<br />

lavement au sérum<br />

physiologique)<br />

• de sérum bicarbonaté<br />

- Absorption de l'eau<br />

de mer<br />

- Hyperaldostéronisme<br />

primaire, syndrome de<br />

Cushing<br />

U/P Osm


5-0485 - Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie<br />

Hassane Izzedine : Chef de clinique-assistant,<br />

Service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : H Izzedine. Néphrologie pratique : comment interpréter une protéinurie, une hématurie, une anomalie de la natrémie.<br />

Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0485, 2003, 10 p<br />

[1] Andrews PA. Casebook: microscopic haematuria. Practitioner 2001; 245<br />

(1618): 18-20, 22-27<br />

[2] Dell’Omo G, Penno G, Giorgi D, Di Bello V, Mariani M, Pedrinelli R. Association<br />

between high-normal albuminuria and risk factors for cardiovascular and<br />

renal disease in essential hypertensive men. Am J Kidney Dis 2002; 40: 1-8<br />

[3] Deray G, Izzedine H. Les troubles hydroélectrolytiques et acidobasiques. L’essentiel<br />

pour la pratique Paris : Éditions Ellipses, 2002: 1-160<br />

[4] Diercks GF, Van Boven AJ, Hillege JL, De Jong PE, Rouleau JL, Van Gilst<br />

WH. The importance of microalbuminuria as a cardiovascular risk indicator: A<br />

review. Can J Cardiol 2002; 18: 35-525<br />

[5] Fernandez-Fresnedo G, Escallada R, Rodrigo E, De Francisco AL, Cotorruelo<br />

JG, Sanz De Castro S et al. The risk of cardiovascular disease associated with<br />

proteinuria in renal transplant patients. Transplantation 2002; 73: 8-1345<br />

[6] Fogazzi GB, Ponticelli C. Microscopic hematuria diagnosis and management.<br />

Nephron 1996; 72: 125-134<br />

Références<br />

10<br />

[7] Gerstein HC, Mann JF, Yi Q, Zinman B, Dinneen SF, Hoogwerf B et al.<br />

Albuminuria and risk of cardiovascular events, death, and heart failure in diabetic<br />

and nondiabetic individuals. JAMA 2001; 286: 6-421<br />

[8] Gossfeld GD, Wolf JS Jr, Litwan MS, Hricak H, Shuler CL, Agerter DC et al.<br />

Asymptomatic microscopic hematuria in adults: summary of the AUA best practice<br />

policy recommendations. Am Fam Physician 2001; 63 (6): 54-1145<br />

[9] Hiatt RA, Ordonez JD. Dipstick urinalysis screening asymptomatic microhematuria<br />

and subsequent urological cancers in a population-based sample. Cancer<br />

Epidemiol Biomarkers Prev 1994; 3: 43-439<br />

[10] House AA, Cattran DC. Nephrology 2: evaluation of asymptomatic hematuria<br />

and proteinuria in adult primary case. CMAJ 2002; 166: 348-353<br />

[11] Ritchie CD, Bevan EA, Collier SJ. Importance of occult haematuria found at<br />

screening. BMJ 1986; 292: 3-681<br />

[12] Weinstock Brown W, Keane WF. Proteinuria and cardiovascular disease. Am<br />

J Kidney Dis 2001; 38: S8-S13


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0590 (2004)<br />

T oute<br />

Néphropathie et grossesse<br />

P. Jungers<br />

grossesse, chez une femme atteinte de néphropathie, doit être considérée comme une grossesse à<br />

risque. Elle doit être planifiée et bénéficier d’un suivi conjoint par néphrologue et obstétricien, en particulier<br />

lorsque la patiente est hypertendue ou lorsque sa fonction rénale est altérée. Au prix de ces conditions et grâce aux<br />

progrès récents de l’obstétrique et de la néonatologie, l’espoir d’une maternité sans aggravation de la néphropathie<br />

est désormais offert à la majorité des patientes souffrant de maladies rénales.<br />

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : Grossesse ; Néphropathie ; Dialyse ; Greffe rénale ; Toxémie gravidique<br />

■ Introduction<br />

La survenue d’une grossesse chez une femme atteinte de néphropathie a<br />

longtemps constitué un sujet de préoccupation et d’inquiétude, en particulier au<br />

cours des glomérulonéphrites chroniques. Les observations rapportées faisaient<br />

état d’une proportion anormalement élevée de mort fœtale in utero, de retard de<br />

croissance fœtale et de prématurité, notamment lorsqu’il existait une<br />

hypertension artérielle (HTA), un syndrome néphrotique ou une insuffisance<br />

rénale. De nombreux auteurs avaient rapporté une aggravation de la maladie<br />

rénale maternelle sous l’influence de la grossesse, alors que d’autres au contraire<br />

rejetaient une quelconque influence défavorable propre à la grossesse sur le<br />

cours de la néphropathie. En effet, néphropathie et grossesse exercent l’une sur<br />

l’autre une interaction : la néphropathie retentit sur le pronostic fœtal, tandis que<br />

la grossesse peut modifier le cours de la néphropathie.<br />

Fort heureusement, au cours des 2 dernières décennies, des études portant sur<br />

de larges effectifs de patientes atteintes de néphropathie primitive ou entrant<br />

dans le cadre d’une maladie systémique ont considérablement clarifié le<br />

problème et ont permis d’identifier les facteurs du pronostic fœtal et maternel.<br />

Elles ont montré qu’une grossesse survenant chez une patiente dont la fonction<br />

rénale est normale ou proche de la normale a en règle générale une évolution<br />

favorable et ne s’accompagne d’aucune aggravation de la maladie rénale<br />

maternelle. En revanche, la présence d’une HTA et, plus encore, d’une altération<br />

significative de la fonction rénale maternelle exerce une influence défavorable<br />

sur le pronostic fœtal et fait courir un risque d’aggravation de la maladie rénale<br />

maternelle. Ces études ont permis de déterminer le niveau de fonction rénale<br />

compatible avec l’espoir d’une grossesse réussie et ont déterminé les règles de<br />

prise en charge des patientes atteintes de néphropathie, avec ou sans<br />

insuffisance rénale préexistante.<br />

Nous envisagerons successivement les facteurs généraux du pronostic fœtal et<br />

maternel chez les patientes atteintes de néphropathie, les problèmes spécifiques<br />

qui se posent dans les néphropathies primitives (glomérulaires ou non), au cours<br />

des maladies systémiques, chez les femmes atteintes d’insuffisance rénale<br />

préexistante et chez les patientes dialysées ou transplantées, pour définir enfin<br />

[7, 8]<br />

les règles de prise en charge optimale des femmes atteintes de néphropathie.<br />

Modifications fonctionnelles<br />

■<br />

et hémodynamiques<br />

rénales induites par la grossesse<br />

Au cours de la grossesse normale, il se produit une augmentation de la<br />

filtration glomérulaire de l’ordre de 40 à 50 %, qui apparaît dès le 1 er trimestre et<br />

se maintient jusqu’à la fin du 3 e trimestre, avec une augmentation<br />

1<br />

Tableau 1. – Modifications physiologiques induites par la grossesse.<br />

Filtration glomérulaire<br />

↑ 40-50 %<br />

Débit sanguin rénal<br />

↑ 40-50 %<br />

Créatininémie<br />

75 µmol/l → 50-60 µmol/l<br />

Pression artérielle<br />

PAD diminuée de 5-10 mmHg<br />

Secteur extracellulaire et volume plasmatique<br />

↑ de 40-50 % (albuminémie » 30-35 g/l ; hémoglobine z12 g/l)<br />

Protéinurie physiologique<br />

↑ jusqu’à 300 mg/24 h<br />

PAD : pression artérielle diastolique.<br />

proportionnelle du débit plasmatique rénal (Tableau 1). Le débit cardiaque<br />

maternel augmente de 30 % dès le 1 er trimestre de manière à compenser<br />

l’augmentation du débit utéroplacentaire et du débit sanguin rénal. Ces<br />

modifications impliquent une vasodilatation généralisée d’origine hormonale, ce<br />

qui explique la baisse physiologique de la pression artérielle observée au cours<br />

des 2 premiers trimestres de la grossesse normale, où s’observe également une<br />

diminution de la réactivité vasculaire aux stimuli presseurs tels que l’angiotensine<br />

II. Parallèlement, se développe une augmentation du volume du secteur<br />

extracellulaire et du secteur plasmatique, atteignant et dépassant 50 % au cours<br />

du 3 e trimestre. L’augmentation de la filtration glomérulaire se traduit par une<br />

diminution de la créatininémie, qui passe d’une valeur moyenne de 75 µmol/l<br />

avant la grossesse à 50 à 60 µmol/l au cours des 2 e et 3 e trimestres, et par une<br />

diminution proportionnelle de l’uricémie. La protéinurie physiologique se majore<br />

et peut atteindre jusqu’à 300 mg/j. Enfin, l’augmentation du secteur plasmatique<br />

entraîne une hémodilution, le taux de l’albuminémie s’abaissant au voisinage de<br />

35 g/l en fin de grossesse.<br />

Influence de<br />

■<br />

la néphropathie<br />

sur l’évolution fœtale<br />

‚ Majoration du risque fœtal<br />

5-0590<br />

Le cumul des observations publiées dans la littérature permet d’analyser plus<br />

de 900 grossesses survenues chez des femmes atteintes de glomérulonéphrite<br />

chronique primitive, plus de 600 grossesses chez des patientes atteintes de


5-0590 -Néphropathie et grossesse<br />

Tableau 2. – Facteurs du pronostic fœtal.<br />

Facteurs de mauvais pronostic<br />

HTA préexistante ou précoce non maîtrisée*<br />

Syndrome néphrotique intense<br />

(albuminémie < 25 g/l)*<br />

Insuffısance rénale notable<br />

(créatininémie > 160-180 µmol/l)*<br />

Maladie systémique en phase d’évolutivité<br />

Facteurs de bon pronostic<br />

Normotension spontanée ou HTA bien contrôlée par monothérapie<br />

(albuminémie > 30 g/l)<br />

Fonction rénale normale ou proche de la normale (créatininémie < 135 µmol/l)<br />

Maladie systémique en rémission stable<br />

* Effet additif de ces facteurs ; HTA : hypertension artérielle.<br />

Dès la conception ou<br />

en début de grossesse<br />

Retard de croissance<br />

Mort fœtale<br />

Prématurité<br />

Faible poids de naissance<br />

Syndrome néphrotique<br />

Hypertension<br />

Insuffisance rénale<br />

néphropathie du reflux, et près de 500 grossesses chez des femmes atteintes de<br />

maladie polykystique rénale, en sachant que dans ces collectifs, moins de 5 %<br />

des patientes avaient une insuffisance rénale significative, c’est-à-dire une<br />

créatininémie supérieure à 135 µmol/l.<br />

La mortalité fœtale globale est de l’ordre de 20 % dans les glomérulonéphrites<br />

primitives et de 10 à 12 % dans les néphropathies du reflux et la maladie<br />

polykystique rénale, si l’on exclut de l’analyse les interruptions thérapeutiques de<br />

grossesse. Cette mortalité est due, pour moitié, à des pertes fœtales au cours des<br />

2 premiers trimestres de grossesse, en sachant que la fréquence des avortements<br />

spontanés au cours d’une première grossesse, dans les pays industrialisés, est de<br />

l’ordre de 10 %. Les morts fœtales survenues aprèsla26 e semaine d’aménorrhée<br />

représentent environ la moitié des cas, tant dans les glomérulopathies que dans<br />

les néphropathies interstitielles chroniques.<br />

‚ Facteurs du pronostic fœtal (Tableau 2)<br />

En fin de grossesse<br />

Peu de conséquences<br />

pour le fœtus<br />

Figure 1 Influence des facteurs de risque fœtaux en fonction de leur date de<br />

survenue.<br />

Plus que le type de la néphropathie elle-même, il apparaît clairement que ce<br />

sont les facteurs de risque associés à la néphropathie, c’est-à-dire l’existence d’un<br />

syndrome néphrotique, d’une HTA ou d’une insuffisance rénale, qui jouent un<br />

rôle déterminant sur l’évolution fœtale ( Fig. 1).<br />

La présence d’un syndrome néphrotique, lorsqu’il existe une hypoalbuminémie<br />

marquée, inférieure à 25 g/l, exerce une influence délétère sur la croissance<br />

fœtale, surtout lorsqu’il est présent dès ledébut de la grossesse. Dans cette<br />

situation, on note une proportion élevée de morts fœtales in utero et<br />

d’hypotrophies fœtales ; une corrélation entre un faible poids de naissance de<br />

l’enfant et le degré d’hypoalbuminémie maternelle a été rapportée. Une biopsie<br />

rénale est alors indiquée pour déterminer la corticosensibilité potentielle du<br />

syndrome néphrotique. Lorsque les corticostéroïdes obtiennent une rémission, au<br />

moins partielle, du syndrome néphrotique, la croissance fœtale est améliorée. En<br />

revanche, un syndrome néphrotique d’apparition tardive au cours de la<br />

grossesse n’a que peu d’influence sur l’évolution fœtale.<br />

L’HTA est le facteur de mauvais pronostic fœtal le plus anciennement reconnu<br />

au cours des néphropathies, mais sa date d’apparition conditionne ici encore le<br />

pronostic fœtal. Une HTA préexistante ou apparue dès ledébut de la grossesse<br />

est associée à une incidence élevée demortfœtale au-delà du 1 er trimestre,<br />

d’hypotrophie fœtale et de prématurité. En revanche, lorsque l’HTA est<br />

parfaitement contrôlée par le traitement dèsledébut de la grossesse, le pronostic<br />

2<br />

Ccr<br />

(ml/min/1,73m 2 )<br />

90<br />

50<br />

40<br />

75 125 160 220 400 Pcr<br />

(µmol/l)<br />

Risque fœtal ± + ++ ++<br />

Risque maternel ± + ++ +++<br />

fœtal s’en trouve très nettement amélioré. Demême, une HTA apparue<br />

uniquement en fin de grossesse n’affecte que très peu le pronostic fœtal.<br />

Il est à noter que la fréquence de la toxémie gravidique est cinq à dix fois plus<br />

élevée chez les femmes atteintes de néphropathie et hypertendues que chez les<br />

femmes normotendues à fonction rénale normale.<br />

Il faut donc surveiller de manière particulièrement vigilante la pression<br />

artérielle de ces patientes, surtout en fin de grossesse.<br />

Au total, si l’indication d’un traitement antihypertenseur au cours d’une HTA<br />

isolée de la grossesse et en dehors de toute néphropathie reste discutée, le<br />

traitement actif de toute HTA chez une patiente atteinte de néphropathie<br />

sous-jacente est impératif pour améliorer le pronostic fœtal.<br />

L’insuffisance rénale préexistante est le facteur limitant le plus sévère du<br />

pronostic fœtal, ce d’autant qu’elle s’accompagne le plus souvent d’une HTA,<br />

même si une amélioration sensible a pu être obtenue au cours des dernières<br />

années grâce aux progrès del’obstétrique et de la néonatologie et grâce à une<br />

meilleure prise en charge néphrologique des patientes atteintes de néphropathie.<br />

L’influence de l’insuffisance rénale est graduelle, et il est possible de déterminer<br />

trois zones de risque fœtal.<br />

– Lorsque la créatininémie n’excède pas 160 µmol/l, ce qui correspond à une<br />

clairance de la créatinine supérieure à 40 ml/min/1,73 m 2 , le pronostic fœtal est<br />

dans l’ensemble bon, dépendant principalement de la présence d’une HTA et de<br />

la qualité de son contrôle.<br />

– Lorsqu’elle est comprise entre 160 et 220 µmol/l, soit une clairance de la<br />

créatinine comprise entre 25 et 40 ml/min/1,73 m 2 , le pronostic fœtal est plus<br />

réservé, avec une augmentation de fréquence des retards de croissance<br />

intra-utérine, des morts fœtales in utero tardives et des grandes prématurités.<br />

Cela dit, la probabilité de la naissance d’un enfant vivant reste de l’ordre de 80 à<br />

90 %.<br />

– Au-delà de 220 µmol/l, ce qui correspond à une clairance de la créatinine<br />

inférieure à 25 ml/min/1,73 m 2 , le risque fœtal s’accroît considérablement et se<br />

double d’un risque d’aggravation irréversible de la fonction rénale maternelle.<br />

Ainsi, il est recommandé aux patientes atteintes d’insuffisance rénale débutante<br />

d’entreprendre une grossesse de préférence tant que la créatininémie n’excède<br />

pas 160 à 180 µmol/l.<br />

Au-delà de ce niveau, le pronostic est beaucoup plus aléatoire, et il peut être<br />

conseillé àune patiente ayant déjà un ou plusieurs enfants de renoncer dans<br />

l’immédiat à une nouvelle grossesse et de ne l’envisager qu’après transplantation<br />

rénale. Le degré du risque fœtal selon le niveau de la fonction rénale maternelle<br />

est schématisé sur la Figure 2.Lafonction rénale est évaluée par la clairance de<br />

la créatinine, calculée selon la formule de Cockroft et Gault appliquée à la<br />

femme :<br />

Ccr =<br />

25<br />

|140 − âge ans | × Poids kg × 1,05<br />

Créatininémie µ mol/l <br />

Influence de la grossesse<br />

■<br />

sur la néphropathie<br />

maternelle [5]<br />

Chez une patiente atteinte de néphropathie sous-jacente, la grossesse entraîne<br />

le plus souvent une majoration de la protéinurie et l’extériorisation ou la<br />

majoration d’une HTA, pouvant aller jusqu’à un tableau de toxémie gravidique<br />

15<br />

Figure 2 Risques fœtal<br />

et maternel en fonction du<br />

niveau de la fonction rénale<br />

maternelle évaluée<br />

par la clairance de la<br />

créatinine. Ccr : clairance<br />

de la créatinine ; Pcr :<br />

créatininémie.


(ou prééclampsie) surajoutée. Toutefois, le problème crucial est de savoir si la<br />

grossesse peut provoquer une altération irréversible de la fonction rénale<br />

maternelle ou une aggravation anormalement rapide d’une insuffisance rénale<br />

préexistante chez les femmes atteintes de néphropathie. Il apparaît clairement<br />

aujourd’hui que l’influence de la grossesse sur le cours de la néphropathie<br />

maternelle est principalement déterminée par le niveau de la fonction rénale au<br />

moment de la conception et par la coexistence éventuelle d’une maladie<br />

systémique.<br />

Il convient de distinguer les effets transitoires et réversibles de la grossesse que<br />

constituent la majoration d’une protéinurie ou d’une HTA préexistante et la<br />

diminution temporaire de la filtration glomérulaire, des altérations irréversibles<br />

telles qu’une HTA permanente et surtout une aggravation irréversible et<br />

anormalement rapide de l’insuffisance rénale maternelle. L’interprétation des<br />

modifications de la fonction rénale et de la pression artérielle provoquées par la<br />

grossesse chez une femme atteinte de néphropathie doit toutefois tenir compte<br />

des modifications fonctionnelles rénales physiologiques induites par la gravidité.<br />

Au total, il apparaît que la grossesse ne provoque pas de reprise évolutive<br />

d’une glomérulonéphrite chronique ou d’une néphrose lipoïdique primitive<br />

lorsque la patiente est en rémission au moment de la conception. La majoration<br />

d’une protéinurie préexistante en cours de grossesse ne doit donc pas être prise<br />

obligatoirement pour un signe d’aggravation de la maladie sous-jacente.<br />

‚ Influence de la grossesse sur la protéinurie, la pression artérielle<br />

et la fonction rénale<br />

Une majoration transitoire du débit de la protéinurie est fréquente en cours de<br />

grossesse chez les femmes atteintes de maladie rénale, notamment dans les<br />

néphropathies glomérulaires. Elle est due en majeure partie aux modifications<br />

hémodynamiques induites par la grossesse, ce qui explique son caractère<br />

réversible. Une augmentation significative de la protéinurie (au-delà de<br />

0,3 g/24 h) est observée dans environ la moitié des cas dans les diverses<br />

catégories de néphropathies glomérulaires. Toutefois, aucune rechute d’un<br />

syndrome néphrotique antérieur et en rémission au moment de la conception<br />

n’est habituellement observée au cours de la grossesse.<br />

Il en est de même en ce qui concerne la pression artérielle. La majoration<br />

d’une HTA préexistante, traitée ou non, est observée dans près de 50 % des cas.<br />

L’apparition d’une HTA en cours de grossesse est plus rare, observée dans 10 à<br />

20 % des cas seulement : l’HTA tend alors soit à persister après l’accouchement,<br />

soit à réapparaître quelques années plus tard, après un retour temporaire à des<br />

chiffres tensionnels normaux. À long terme, l’apparition d’une HTA permanente<br />

est plus fréquente chez les patientes dont une ou plusieurs grossesses ont été<br />

compliquées d’HTA que chez celles qui étaient restées normotendues au cours de<br />

toutes leurs gestations. La grossesse apparaît ainsi comme révélatrice d’une<br />

tendance hypertensive latente ou comme facteur majorant d’une HTA déjà établie,<br />

ce fait paraissant particulièrement fréquent au cours de la glomérulonéphrite à<br />

immunoglobulines (IgA), ou maladie de Berger.<br />

La persistance d’une protéinurie ou d’une HTA au-delà de 3 à 4 mois après<br />

la fin de la grossesse suggère fortement l’existence d’une néphropathie<br />

antérieure à la grossesse ou ayant débuté au cours de celle-ci. De même, la<br />

survenue avant le 3 e trimestre d’une protéinurie associée à une HTA, aussi bien<br />

chez une primipare que chez une multipare, doit faire suspecter l’existence<br />

d’une néphropathie sous-jacente, surtout si l’apparition ou la majoration de la<br />

protéinurie précède celle des chiffres tensionnels, alors que dans la toxémie<br />

gravidique pure, l’apparition de l’HTA précède habituellement celle de la<br />

protéinurie.<br />

‚ Facteurs du pronostic maternel (Tableau 3)<br />

En ce qui concerne l’influence de la grossesse sur la fonction rénale<br />

maternelle, il est désormais établi que la grossesse n’entraîne pas d’altération<br />

de la fonction rénale maternelle chez les femmes atteintes de néphropathie<br />

primitive lorsque la fonction rénale est normale ou proche de la normale au<br />

moment de la conception. Une augmentation physiologique de la filtration<br />

glomérulaire, marquée par la diminution de la créatininémie, s’observe le plus<br />

souvent comme chez la femme normale. Une altération de la fonction rénale<br />

maternelle se produit dans quelques cas, notamment chez les patientes<br />

atteintes de glomérulonéphrite primitive, mais elle est le plus souvent modérée<br />

et réversible à la fin de la grossesse. En revanche, aucune aggravation<br />

irréversible de la fonction rénale maternelle n’est habituellement observée<br />

lorsque la fonction rénale de la patiente est normale ou proche de la normale,<br />

c’est-à-dire lorsque la créatininémie est inférieure à 135 µmol/l au moment de la<br />

3<br />

Tableau 3. – Facteurs du pronostic maternel.<br />

Facteurs de pronostic réservé<br />

Variété de glomérulonéphrite histologiquement sévère<br />

Protéinurie abondante<br />

HTA sévère ou mal contrôlée<br />

Insuffısance rénale notable préexistante (créatininémie ≥ 180 µmol/l)<br />

Maladie systémique en période évolutive<br />

Facteurs de bon pronostic<br />

Néphropathie lentement évolutive<br />

Protéinurie absente ou minime<br />

Normotension spontanée ou hypertension bien contrôlée<br />

Fonction rénale normale ou proche de la normale (créatininémie < 135 µmol/l)<br />

Maladie systémique en rémission thérapeutique ou en période de quiescence<br />

HTA : hypertension artérielle.<br />

1,0<br />

(171) (143)<br />

0,8<br />

(189)<br />

(113)<br />

0,6<br />

0,4<br />

0,2<br />

(105) (69)<br />

(61)<br />

Enceintes<br />

Non enceintes<br />

(31)<br />

Néphropathie et grossesse - 5-0590<br />

conception. Plusieurs études contrôlées ont établi ce fait rassurant, et en<br />

particulier une étude au long cours portant sur 360 femmes atteintes de<br />

différentes variétés histologiques de glomérulonéphrite (suivies à l’hôpital<br />

Necker), dont la fonction rénale était normale au début de la grossesse, qui a<br />

montré que la courbe actuarielle de survie rénale des 171 patientes ayant eu<br />

une grossesse après ledébut clinique de la néphropathie ne différait pas de<br />

celle des 189 patientes n’ayant jamais eu de grossesse aprèsledébut apparent<br />

de leur maladie rénale (Fig. 3). De plus, par analyse cas-témoins, la grossesse<br />

n’est pas apparue comme un facteur de risque de progression vers l’insuffisance<br />

rénale, cette dernière étant déterminée par le type de la néphropathie et la<br />

présence d’une HTA.<br />

Il en va tout autrement lorsqu’il existe une altération significative de la fonction<br />

rénale au moment de la grossesse, qui peut alors induire une accélération<br />

irréversible de l’insuffisance rénale maternelle, par comparaison à l’évolution<br />

habituellement observée dans le même type de néphropathie chez les femmes<br />

ayant une insuffisance rénaledemême degré mais non enceintes. Ce risque reste<br />

faible tant que la créatininémie au moment de la conception ne dépasse pas<br />

160 à 180 µmol/l, mais il augmente nettement au-delà de ce niveau, une<br />

aggravation irréversible de la fonction rénale à l’occasion de la grossesse<br />

survenant alors dans près de 30 % des cas. Chez les patientes dont la<br />

créatininémie dépasse 300 µmol/l, l’aggravation est pratiquement constante,<br />

obligeant souvent à débuter une dialyse de suppléance au cours même de la<br />

grossesse.<br />

Problèmes posés dans<br />

■<br />

les différents types<br />

de néphropathies<br />

Des problèmes spécifiques se posent en fonction du type de néphropathie en<br />

cause. Ils diffèrent sensiblement selon qu’il s’agit d’une néphropathie primitive ou<br />

d’une atteinte rénale dans le cadre d’une affection systémique.<br />

(38)<br />

(9)<br />

(22)<br />

0 5 10 15 20 25 30<br />

Durée depuis le début de la maladie (années)<br />

Figure 3 Absence d’influence de la grossesse sur l’évolution au long cours des<br />

glomérulonéphrites primitives : les courbes actuarielles de survie rénale de<br />

171 femmes ayant eu une ou plusieurs grossesses et de 189 femmes n’ayant pas été<br />

enceintes aprèsledébut de la glomérulonéphrite ne diffèrent pas (d’après Jungers<br />

et al, reproduite avec autorisation).<br />

(5)


5-0590 -Néphropathie et grossesse<br />

‚ Néphropathies primitives<br />

Néphropathies glomérulaires<br />

Lorsqu’il n’existe pas de syndrome néphrotique, d’HTA de contrôle difficile, ni<br />

d’altération significative de la fonction rénale au moment de la conception, le<br />

pronostic fœtal et maternel est bon. Toutefois, il convient d’être prudent au cours<br />

des glomérulonéphrites ayant un potentiel évolutif marqué dont témoigne une<br />

protéinurie abondante ou une HTA sévère, surtout lorsque la créatininémie est à<br />

la limite supérieure de la normale. Cette réserve est particulièrement valable en<br />

cas de glomérulonéphrite à IgA à fort potentiel évolutif attesté par des lésions<br />

glomérulaires segmentaires étendues, des lésions vasculaires et<br />

tubulo-interstitielles marquées à la biopsie rénale et par une tendance<br />

hypertensive franche. Les mêmes réserves s’expriment en cas de hyalinose<br />

segmentaire et focale des glomérules et à un moindre degré en cas de<br />

glomérulonéphrite extramembraneuse en phase néphrotique.<br />

Néphropathies non glomérulaires<br />

Des facteurs particuliers peuvent influencer le pronostic fœtal. Au cours de la<br />

néphropathie du reflux, la persistance d’un reflux vésico-urétéral à l’âge adulte<br />

expose au risque de pyélonéphrite aiguë, facteur de prématurité. Nombre de<br />

néphropathies du reflux sont découvertes au cours d’une grossesse à l’occasion<br />

d’une complication pyélonéphritique. Il est donc de règle, chez toute femme<br />

ayant présenté une pyélonéphrite aiguë en cours de grossesse, de rechercher un<br />

reflux vésico-urétéral par cystographie rétrograde après lafin de la grossesse. En<br />

cas de reflux vésico-urétéral persistant, lorsque des épisodes de pyélonéphrite se<br />

sont produits de manière répétée endépit d’un traitement antibactérien<br />

soigneusement conduit, il peut être utile d’en proposer la correction chirurgicale<br />

avant une future grossesse. [6]<br />

Maladie polykystique rénale<br />

L’insuffisance rénale apparaît rarement avant la 5 e décennie, si bien que la<br />

grossesse pose, la plupart du temps, peu de problèmes, sinon celui d’une HTA<br />

éventuelle. En cas d’insuffisance rénale préexistante, les facteurs du pronostic<br />

sont les mêmes que ceux définis pour les glomérulonéphrites ou la néphropathie<br />

du reflux. Il est rare que le volume des reins kystiques soit tel qu’il constitue une<br />

gêne pour la poursuite de la grossesse. Le problème soulevé par ces patientes est<br />

de l’ordre du conseil génétique, de même que chez les femmes atteintes de<br />

néphropathie héréditaire du type syndrome d’Alport. Dans cette dernière<br />

éventualité, un conseil génétique préconceptionnel est indiqué afin d’aider les<br />

patientes à prendre la décision d’une grossesse et pour définir leur attitude selon<br />

le sexe de l’enfant, qui conditionne la probabilité d’être atteint ou non de la<br />

même néphropathie, sachant que les filles sont simples transmettrices et que<br />

seuls les garçons peuvent être sévèrement atteints.<br />

Lithiase urinaire<br />

Celle-ci étant fréquente, elle peut entraîner des problèmes chez une femme<br />

enceinte. La grossesse n’augmente pas le risque de former des calculs,<br />

l’augmentation physiologique de la charge filtrée de calcium étant compensée<br />

par une excrétion accrue d’inhibiteurs de la cristallisation dans les urines.<br />

Toutefois, des calculs préexistants peuvent compliquer la grossesse lorsqu’il se<br />

produit une migration urétérale, favorisée par la dilatation des voies excrétrices.<br />

En cas de difficulté àobtenir l’expulsion spontanée du calcul et sachant que la<br />

lithotritie extracorporelle par ondes de choc est contre-indiquée au cours de la<br />

grossesse, la technique généralement adoptée est la mise en place d’une sonde<br />

urétérale à demeure pendant la durée de la grossesse, sous couvert d’un<br />

traitement antibactérien prolongé.<br />

‚ Néphropathies secondaires à une maladie systémique<br />

Au cours des maladies systémiques, le pronostic de la grossesse est plus<br />

réservé qu’au cours des maladies rénales primitives. En effet, aux facteurs de<br />

risque généraux que constituent la protéinurie, l’HTA et l’atteinte de la fonction<br />

rénale, s’ajoutent les manifestations extrarénales de la maladie systémique et<br />

surtout le risque de déclenchement d’une poussée évolutive, notamment dans la<br />

maladie lupique.<br />

Diabète sucré (type I ou II) [11]<br />

Les progrès de la diabétologie et de l’obstétrique ont permis d’obtenir un<br />

pronostic fœtal pratiquement analogue à celui des femmes normales, au prix<br />

d’un strict contrôle glycémique dèsledébut de la grossesse, tant qu’il n’existe pas<br />

d’atteinte rénale patente. Une majoration de la microalbuminurie peut être<br />

4<br />

observée en cours de grossesse, ainsi qu’une augmentation de la fréquence de<br />

prématurité et de prééclampsie. Lorsqu’il existe une atteinte rénale patente,<br />

marquée par une macroprotéinurie et, a fortiori, un syndrome néphrotique et une<br />

altération de la fonction rénale, le pronostic fœtal est plus réservé dès lors que la<br />

créatininémie dépasse 130 à 150 µmol/l, c’est-à-dire une valeur inférieure à la<br />

valeur seuil au cours des néphropathies primitives, et il existe un risque élevé<br />

d’aggravation irréversible de l’insuffisance rénale maternelle.<br />

[10, 12]<br />

Lupus érythémateux disséminé<br />

La grossesse pose un problème très différent selon qu’il existe ou non des<br />

signes d’activité de la maladie au moment de la conception. Chez les patientes<br />

antérieurement atteintes d’une néphropathie lupique, même dans sa forme<br />

majeure, proliférative diffuse, à condition que la rémission soit stable depuis au<br />

moins 6 mois à 1 an, le pronostic fœtal et maternel est bon, et le risque de reprise<br />

évolutive du lupus érythémateux disséminé est très faible. En revanche, lorsque la<br />

grossesse survient en période d’évolutivité lupique, notamment lorsque le lupus<br />

érythémateux disséminé se démasque au cours d’une grossesse, le pronostic<br />

fœtal est beaucoup plus réservé, avec un risque élevé de mort fœtale in utero et<br />

de prématurité. Dans cette situation, les corticostéroïdes à fortes doses,<br />

éventuellement associés au cyclophosphamide à partir du 2 e trimestre de<br />

gestation, peuvent permettre d’améliorer le pronostic et d’aboutir à la naissance<br />

d’un enfant vivant. Dans tous les cas, une corticothérapie doit être maintenue<br />

pendant les mois suivant la fin de la grossesse afin d’éviter une poussée lupique<br />

sévère dans le post-partum.<br />

Autres maladies de système<br />

Au cours des vascularites, telles que la maladie de Wegener ou la<br />

micropériartérite noueuse, ou au cours de la sclérodermie, le pronostic de la<br />

grossesse est beaucoup plus réservé. Bien que quelques succès aient pu être<br />

rapportés au prix de traitements associant des corticoïdes à fortes doses et des<br />

immunosuppresseurs, il apparaît préférable de renoncer à la grossesse pendant<br />

la maladie, sachant qu’il existe un risque de réactivation élevé au cours ou au<br />

décours d’une grossesse.<br />

■<br />

Insuffisance rénale, dialyse et transplantation<br />

‚ Grossesse et insuffisance rénale chronique [4]<br />

Un problème particulièrement difficile est celui des patientes atteintes<br />

d’insuffisance rénale préexistante significative, c’est-à-dire dont la créatininémie<br />

atteint ou dépasse 160 µmol/l au moment de la conception. Une évolution fœtale<br />

favorable, sans risque excessif d’aggravation de la fonction rénale maternelle, peut<br />

être espérée tant que la créatininémienedépasse pas 200 à 220 µmol/l, selon le<br />

poids corporel de la patiente. Au-delà de ces valeurs, le pronostic, tant fœtal que<br />

maternel, est beaucoup plus aléatoire, et il apparaît préférable de déconseiller la<br />

grossesse à ce stade. Toutefois, plusieurs études récentes ont montré que chez des<br />

patientes atteintes d’insuffisance rénale de ce degré, à condition d’une prise en<br />

charge coordonnée entre néphrologues, obstétriciens et néonatologistes, dans<br />

des maternités ayant l’expérience du traitement de patientes à haut risque, la<br />

grossesse pouvait être couronnée de succès. Dans une étude récente de l’hôpital<br />

Necker, la survie fœtale observée au cours de la période 1986-1995 s’est élevée<br />

à 91 % (avortements spontanés outhérapeutiques du 1 er trimestre non inclus),<br />

alors qu’elle était seulement de 65 % au cours de la décennie précédente.<br />

Toutefois, si la proportion des morts fœtales in utero et de la mortinatalité a<br />

diminué, la proportion des grands prématurés a augmenté depuis quelques<br />

années, imposant une prise en charge en unité de soins intensifs néonataux dans<br />

plus de la moitié des cas. Un risque particulièrement élevé d’aggravation<br />

irréversible de la fonction rénale maternelle existe lorsque la créatininémie<br />

dépasse 220 µmol/l, soit une clairance de la créatinine inférieure à<br />

25 ml/min/1,73 m 2 , notamment lorsque coexistent une HTA et une protéinurie<br />

abondante. Chez les femmes abordant une grossesse avec une créatininémie<br />

supérieure à 300-400 µmol/l, il n’est pas rare qu’une dialyse de suppléance, par<br />

hémodialyse ou dialyse péritonéale, soit instituée au cours même de la grossesse<br />

et poursuivie indéfiniment au-delà,laréversibilitéétant rare ou transitoire.<br />

[1, 3]<br />

‚ Grossesse chez les femmes dialysées<br />

La grossesse chez une femme traitée par dialyse de suppléance est rare du fait<br />

de la diminution de fertilité associée à l’état urémique, mais elle pose des<br />

problèmes particulièrement difficiles. Toutefois, les progrès de la qualité de


Tableau 4. – Conditions optimales pour une grossesse chez les patientes<br />

transplantées.<br />

Bon état général depuis au moins 2 ans après la transplantation<br />

Absence de signes de rejet du transplant<br />

Bonne fonction rénale avec créatininémie ≤ 135 µmol/l<br />

Protéinurie nulle ou minime<br />

Normotension ou hypertension modéréeetaisément contrôlée<br />

Absence de dilatation pyélocalicielle<br />

Traitement immunosuppresseur à dose de maintenance modérée<br />

(prednisone ≤ 15 mg/j, azathioprine ≤ 2 mg/j, ciclosporine A ≤ 5 mg/kg/j)<br />

l’hémodialyse et de la dialyse péritonéale de suppléance sont tels que de plus en<br />

plus de femmes ainsi traitées ont désormais des cycles ovulatoires, si bien que la<br />

grossesse est actuellement un événement nettement moins rare qu’autrefois. Il<br />

en résulte qu’une contraception appropriée est nécessaire chez les patientes<br />

dialysées, pour éviter une grossesse non planifiée ounondésirée. Le diagnostic<br />

de grossesse est souvent difficile, du fait des irrégularités menstruelles fréquentes,<br />

et est souvent fait à un stade tardif. Dans plusieurs cas, le diagnostic a été porté<br />

sur l’apparition d’une résistance apparente à l’érythropoïétine recombinante.<br />

Jusqu’à un passé récent, l’évolution de la grossesse chez les patientes dialysées<br />

était le plus souvent défavorable, la proportion des naissances d’enfants vivants<br />

étant inférieure à 20 %. Toutefois, plusieurs enquêtes ont fait état d’une<br />

proportion de succès del’ordre de 35 % au cours des dernières années, grâce à<br />

une prise en charge interactive très étroite entre les équipes néphrologiques et<br />

obstétricales, mais une grande prématurité et une sévère hypotrophie fœtale<br />

restent très fréquentes. L’intensification des hémodialyses, jusqu’à cinq ou six<br />

séances par semaine (au lieu des trois séances hebdomadaires habituelles), ou de<br />

la dialyse péritonéale, voire la combinaison temporaire de ces deux méthodes,<br />

est indispensable. En effet, le taux de l’urée sanguine maternelle doit être maintenu<br />

au-dessous de 15 mmol/l pour éviter le développement d’un hydramnios (résultant<br />

de la diurèse osmotique produite par les reins fœtaux, dont la fonction est<br />

normale, sous l’effet d’un taux d’urée sanguine élevé chez la mère). L’institution<br />

ou le renforcement d’un traitement par érythropoïétine recombinante permet<br />

d’améliorer le bien-être de la mère et la vascularisation fœtale en ramenant le<br />

taux d’hémoglobine maternel au voisinage de 10 g/dl, en sachant que le besoin<br />

en érythropoïétine recombinante s’accroît d’environ 50 % au cours de la<br />

grossesse. Bien que des succès soient de plus en plus souvent relatés<br />

actuellement, il n’en reste pas moins que la grossesse chez une femme dialysée<br />

reste trèsaléatoire dans ses résultats et très contraignante dans sa réalisation.<br />

[2, 9]<br />

‚ Grossesse chez les femmes transplantées<br />

Le problème de la grossesse chez les patientes ayant bénéficié d’une<br />

transplantation rénale est tout à fait différent. À l’heure actuelle, plusieurs milliers<br />

de grossesses ont été observées chez des patientes transplantées, plusieurs<br />

centaines d’entre elles ayant eu deux grossesses ou plus.<br />

Au total, sur plus de 3 500 grossesses recensées chez des patientes porteuses<br />

d’un greffon rénal, 93 % poursuivies au-delà de la 20 e semaine se sont terminées<br />

par la naissance d’un enfant vivant, mais au prix d’une incidence élevée de<br />

prématurité (50 %) et de retard de croissance fœtale (40 %), et avec un<br />

pourcentage élevé de nouveau-nés de faible poids.<br />

Comme dans les néphropathies primitives, l’HTA constitue le principal facteur<br />

du pronostic fœtal avec le niveau de la fonction rénale, la proportion des issues<br />

fœtales favorables diminuant nettement lorsque la créatininémie dépasse<br />

160 µmol/l au moment de la conception. Il est à noter qu’aucune incidence<br />

anormalement élevée d’anomalies du développement fœtal n’a été observée<br />

chez les nouveau-nés dont la mère était traitée au cours de toute la grossesse, soit<br />

par l’azathioprine à une dose ne dépassant pas 2 mg/kg/j, soit par la ciclosporine<br />

A à une dose n’excédant pas 5 mg/kg/j. Avec l’expérience, on s’est aperçu que le<br />

meilleur pronostic était obtenu lorsque la grossesse survenait après un intervalle<br />

d’au moins 2 ans après une transplantation réussie (Tableau 4).<br />

Un fait rassurant est la démonstration, par plusieurs études contrôlées, de<br />

l’absence d’effet défavorable de la grossesse sur la fonction du greffon, du moins<br />

lorsque la créatininémieaudébut de la grossesse est normale ou subnormale.<br />

Dans ces conditions, aucune différence dans l’évolution de la fonction du greffon<br />

n’est apparue entre les femmes ayant eu une ou plusieurs grossesses et celles<br />

n’ayant eu aucune grossesse au cours d’une période de temps comparable après<br />

leur transplantation rénale, avec des reculs supérieurs à 10 ans. En revanche, un<br />

risque élevé de détérioration de la fonction du greffon existe lorsque la<br />

créatininémie excède 160 µmol/l.<br />

5<br />

Tableau 5. – Règles du traitement et de la surveillance néphroobstétricale<br />

chez les patientes atteintes de néphropathie.<br />

Conseil préconceptionnel, grossesse planifiée<br />

Prise en charge coordonnée entre néphrologue et obstétricien dèsledébut de<br />

la grossesse<br />

Prise en charge en maternitéàhaut risque avec unité de néonatologie attenante<br />

Contrôle optimal des chiffres tensionnels dèslapériode de la conception : éviction<br />

des inhibiteurs de l’enzyme de conversion et des diurétiques, utilisation de<br />

l’alphaméthyldopa et des bêtabloquants<br />

Pression artérielle diastolique ciblée entre 80 et 90 mmHg<br />

Prévention ou correction de l’anémie : supplémentation martiale et en acide<br />

folique (5 mg/j) ; traitement par érythropoïétine recombinante si<br />

hémoglobine < 9 g/dl<br />

Prévention de l’acidose métabolique et de l’hypocalcémie<br />

Apport protéique et calorique adéquat (apport protéique ≈ 1 g/kg/j en cas d’insuffısance<br />

rénale)<br />

Surveillance régulière de la tension artérielle, de la créatininémie, de l’urée<br />

sanguine et de l’uricémie<br />

Institution de la dialyse de suppléance si la créatininémie excède 400 µmol/l ou<br />

si l’urée sanguine excède 20 mmol/l<br />

Surveillance fœtale renforcée à partir du terme de viabilité fœtale (26 e semaine)<br />

Hospitalisation de la patiente en milieu obstétrical en cas de majoration de<br />

l’HTA ou de contractions prématurées<br />

Surveillance de la tension artérielle et de la fonction rénale maternelle dans le<br />

post-partum<br />

HTA : hypertension artérielle.<br />

Prise en charge de la<br />

■<br />

grossesse chez une femme<br />

atteinte de néphropathie<br />

La principale leçon à tirer des études récentes est que toute grossesse chez une<br />

femme atteinte de néphropathie, tout particulièrement lorsqu’il existe une HTA<br />

ou une insuffisance rénale, est une grossesse à haut risque. L’optimisation du<br />

pronostic fœtal et maternel implique une approche multidisciplinaire, avec prise<br />

en charge de la patiente dans une unité d’obstétrique expérimentée disposant<br />

d’une unité de néonatologie attenante, en coopération étroite avec l’équipe<br />

néphrologique. Les principales recommandations concernant le suivi de ces<br />

patientes sont résumées dans le Tableau 5.<br />

‚ Conseil préconceptionnel<br />

Néphropathie et grossesse - 5-0590<br />

Dans toute la mesure du possible, la grossesse doit être planifiée de telle sorte<br />

que la conception se produise à un moment où les risques prévisibles sont réduits<br />

au minimum. La grossesse peut être autorisée sans arrière-pensée chez une<br />

patiente atteinte de maladie rénale primitive dont la fonction rénale est normale<br />

ou proche de la normale, c’est-à-dire lorsque la créatininémie est inférieure à<br />

135 µmol/l. Les patientes atteintes de maladie de système, telle qu’un lupus<br />

érythémateux disséminé, ne doivent envisager une grossesse qu’après une<br />

période de rémission stable d’au moins 1 an obtenue après cessation totale des<br />

corticostéroïdes ou utilisation d’une dose de maintenance ne dépassant pas<br />

10 mg/j. Dans les maladies rénales héréditaires, telles que la polykystose rénale,<br />

et plus encore au cours du syndrome d’Alport ou de la maladie de von<br />

Hippel-Lindau, un conseil génétique préconceptionnel est souhaitable.<br />

Le problème le plus difficile concerne les patientes ayant une insuffisance<br />

rénale chronique. Une évolution favorable au plan rénal et maternel peut<br />

habituellement être espérée lorsque la créatininémie n’excède pas 160 à<br />

180 µmol/l, mais le pronostic, tant fœtal que maternel, est plus réservé au-delà de<br />

cette limite. La patiente et son conjoint doivent être clairement et complètement<br />

informés des possibilités et des risques de la grossesse dans ces circonstances. En<br />

cas d’insuffisance rénale évoluée et en attendant une transplantation rénale, il<br />

peut être souhaitable d’ajourner le projet de grossesse afin de permettre à la<br />

patiente de bénéficier de la plus longue période d’autonomie rénale possible.<br />

Toutefois, lorsqu’une patiente nullipare désire impérativement tenter une<br />

grossesse en dépit d’une insuffisance rénale déjà avancée, son désir doit être<br />

respecté, et toutes les mesures destinées à optimiser le déroulement de la<br />

grossesse doivent être mises en œuvre si elle maintient sa décision. Elle doit<br />

cependant être informée des risques encourus (mauvaise évolution fœtale et<br />

perte de la fonction rénale avec nécessité d’entreprendre une dialyse de<br />

suppléance avant la date qui aurait été possible en l’absence de grossesse).


5-0590 -Néphropathie et grossesse<br />

‚ Traitement de l’HTA<br />

Le facteur le plus important du pronostic fœtal étant l’HTA, la pression artérielle<br />

des patientes atteintes de néphropathie doit être étroitement surveillée. Une<br />

baisse physiologique de la pression artérielle s’observe dans nombre de cas ; le<br />

traitement antihypertenseur doit alors être temporairement allégé. Lorsque l’HTA<br />

est présente dès la conception, tous les néphrologues sont actuellement d’accord<br />

pour préconiser son traitement immédiat et actif, en cherchant à maintenir la<br />

pression artérielle systolique au-dessous de 160 mmHg et la diastolique entre 80 et<br />

90 mmHg. Une correction plus poussée pourrait entraîner un risque<br />

d’hypoperfusion fœtale et un retard de croissance intra-utérine, tandis que des<br />

chiffres plus élevés exposent au risque d’atteinte de la vascularisation<br />

fœtoplacentaire.<br />

Le choix des agents antihypertenseurs à utiliser au cours de la grossesse est<br />

important. L’alphaméthyldopa mérite toujours d’être utilisée en première<br />

intention (500 à 100 mg/j) du fait de son innocuité, prouvée par un long usage.<br />

Le labétalol, qui combine une action alpha- et bêtabloquante, peut également<br />

être utilisé en première intention, seul ou associé àl’alphaméthyldopa. Les<br />

autres bêtabloqueurs, tels que le pindolol, le métoprolol, l’acébutolol ou<br />

l’oxprénolol, peuvent également être utilisés en première ou en seconde<br />

intention, associés ounonà l’alphaméthyldopa, à dose modérée pour éviter<br />

de favoriser un retard de croissance fœtale. En cas d’HTA particulièrement<br />

résistante, on peut avoir recours à l’hydralazine ou aux inhibiteurs des canaux<br />

calciques, mais les inhibiteurs de l’enzyme de conversion sont formellement<br />

contre-indiqués, en particulier au cours des 2 derniers trimestres de la<br />

grossesse, en raison du risque d’induction d’une anurie néonatale irréversible.<br />

Les diurétiques doivent être proscrits dans toute la mesure du possible de<br />

manière àéviter une contraction du secteur extracellulaire et plasmatique, aux<br />

effets délétères sur la croissance fœtale.<br />

L’utilisation d’aspirine à faible dose, à titre antiagrégant plaquettaire, pour<br />

prévenir la survenue d’une prééclampsie surajoutée, est encore discutée. Sachant<br />

que le risque de prééclampsie est au moins cinq fois plus élevé chez les femmes<br />

ayant une HTA préexistante que chez les femmes normotendues, une faible dose<br />

d’aspirine, de l’ordre de 1 mg/kg/j, apparaît légitime chez les patientes<br />

hypertendues à partir du 4 e mois de grossesse, voire plus tôt chez les patientes<br />

atteintes de lupus érythémateux disséminé avec présence d’anticorps<br />

anticardiolipidiques ou d’un anticoagulant lupique, pour prévenir les<br />

microthromboses et l’ischémie du placenta.<br />

‚ Surveillance fœtale et délivrance<br />

P. Jungers (Professeur émérite à la Faculté de médecine),<br />

107, boulevard Bineau, 92200 Neuilly-sur-Seine<br />

Hôpital Necker-Enfants Malades, 149, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France.<br />

La surveillance régulière de l’état fœtal est fondamentale chez les patientes<br />

atteintes de maladie rénale en raison du risque accru de retard de croissance<br />

intra-utérine. L’enregistrement des ondes artérielles utérines, entre la 2 e et la 24 e<br />

semaine de gestation, est utile pour la prédiction du risque de prééclampsie et de<br />

retard de croissance intra-utérine. La surveillance fœtale par échodoppler doit<br />

être régulière dès le terme de viabilité, c’est-à-dire à partir de la 26 e semaine<br />

gestationnelle. Si un retard de croissance intra-utérine est décelé, des évaluations<br />

répétées de l’état fœtal, comprenant la cardiotocographie, l’index amniotique et<br />

l’enregistrement doppler de l’artère ombilicale et des artères cérébrales du fœtus,<br />

aident à reconnaître une souffrance fœtale et à décider ou non de l’extraction<br />

fœtale.<br />

■ Conclusion<br />

Les progrès del’obstétrique,delanéonatologie et de la prise en charge<br />

néphrologique au cours des dernières années se sont traduits par une<br />

amélioration sensible du pronostic fœtal et maternel de la grossesse chez les<br />

femmes atteintes de néphropathie. Les facteurs du pronostic fœtal sont<br />

aujourd’hui bien définis, et le conseil préconceptionnel permet d’entreprendre<br />

une grossesse dans les meilleures conditions. L’absence d’effet aggravant de la<br />

grossesse sur la fonction rénale maternelle, lorsque celle-ci est normale ou encore<br />

proche de la normale, est actuellement assurée. Même chez les patientes ayant<br />

une insuffisance rénale préexistante, le pronostic fœtal peut être amélioré de<br />

manière significative grâce à une prise en charge multidisciplinaire, avec<br />

coordination étroite entre néphrologues et obstétriciens, condition indispensable<br />

d’un pronostic favorable.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : P. Jungers. Néphropathie et grossesse.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Akos, 5-0590, 2003, 6 p<br />

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systémique. Ann Méd Interne 1999; 150: 408-418


Plan<br />

Néphropathies diabétiques<br />

H. de Préneuf<br />

La néphropathie diabétique est la plus grave des complications microangiopathiques du diabète. Son<br />

incidence augmente parallèlement au nombre de patients diabétiques, particulièrement pour le diabète<br />

de type 2. L’évolution vers l’insuffisance rénale est le plus souvent inéluctable une dizaine d’années après<br />

l’apparition de la protéinurie. Le dépistage de la microalbuminurie est très important, car il permet grâce<br />

à un arsenal thérapeutique de plus en plus important de retarder cette évolution. L’utilisation<br />

d’antagonistes du système rénine-angiotensine (SRA) associés aux autres traitements antihypertenseurs,<br />

les mesures diététiques, les traitements hypoglycémiants et la prévention des autres facteurs de risque<br />

cardiovasculaire (tabac, dyslipidémie et obésité) permettent de retarder l’évolution vers l’insuffisance<br />

rénale, mais aussi de réduire la mortalité cardiovasculaire. La découverte des mécanismes<br />

physiopathologiques expliquant l’apparition de la microangiopathie permet d’envisager d’autres cibles<br />

thérapeutiques. Les produits de glycation avancée (AGE) ont un rôle déterminant dans l’apparition des<br />

lésions micro- et macrovasculaires du diabète. Ces nouvelles cibles peuvent être la prévention de la<br />

formation de ces produits ou l’utilisation de molécules inhibant leur formation. La néphropathie<br />

diabétique constitue un facteur de risque de mortalité cardiovasculaire majeur. Ce qui explique<br />

l’importance de sa prise en charge qui doit être pluridisciplinaire et agressive, avec des objectifs<br />

glycémiques et tensionnels stricts.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Diabète ; Microangiopathie ; Glomérulopathie ; Insuffisance rénale chronique ;<br />

Microalbuminurie ; Prévention cardiovasculaire<br />

Introduction 1<br />

Épidémiologie 2<br />

Prévalence 2<br />

Incidence 2<br />

Aspects économiques 3<br />

Facteurs prédisposants 3<br />

Néphropathie diabétique : un risque majeur de complications<br />

cardiovasculaires 3<br />

Définition de la néphropathie diabétique 3<br />

Physiopathologie de la néphropathie diabétique 3<br />

Histoire naturelle de la néphropathie du diabète de type 1 3<br />

Histoire naturelle de la néphropathie du diabète de type 2 4<br />

Hypothèses physiopathologiques expliquant la néphropathie<br />

diabétique : rôle de l’hyperglycémie, modifications structurelles<br />

et hémodynamiques 4<br />

Évolution 8<br />

Anatomopathologie 8<br />

Expansion acellulaire du mésangium glomérulaire 8<br />

Épaississement des membranes basales 8<br />

Dépister la microalbuminurie 10<br />

Néphrologie<br />

Traitement préventif de la néphropathie diabétique 11<br />

Équilibre du diabète 11<br />

Équilibre de la pression artérielle 11<br />

Réduire la protéinurie 12<br />

Réduire la ration protéique 12<br />

Lutter contre les facteurs de risque cardiovasculaire associés :<br />

dyslipidémie, obésité, sédentarité et tabagisme 12<br />

Néphroprotection 13<br />

Traitement de l’anémie 13<br />

Vaccination contre l’hépatite B 13<br />

Métabolisme phosphocalcique 13<br />

Préserver le capital veineux 13<br />

Traitement substitutif 13<br />

Hémodialyse 13<br />

Dialyse péritonéale 14<br />

Transplantation 14<br />

Cas particulier du diabète post-transplantation 14<br />

Conclusion 14<br />

■ Introduction<br />

18-055-A-10<br />

La néphropathie diabétique (ND) est la plus grave des<br />

complications microangiopathiques du diabète, car elle expose<br />

1


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

au double risque d’insuffisance rénale terminale et de mortalité<br />

cardiovasculaire. La majorité des patients diabétiques présente<br />

des lésions rénales glomérulaires. Le diabète de type 2 est le<br />

principal pourvoyeur de néphropathies diabétiques. La néphropathie<br />

diabétique est responsable de 25 %à50%descauses<br />

d’insuffisance rénale terminale dans les pays occidentaux. La<br />

survie en dialyse de ces patients est deux fois plus faible que<br />

celle des patients ayant une autre maladie rénale.<br />

L’évolution de la néphropathie diabétique au cours du<br />

diabète de type 2 en fait donc un des principaux problèmes de<br />

santé publique, avec des conséquences humaines et économiques<br />

importantes.<br />

■ Épidémiologie<br />

On estime à 246 millions le nombre de personnes diabétiques<br />

dans le monde, avec une augmentation majeure à moyen terme<br />

à 380 millions en 2025 (+ 43 % en Amérique du Nord et + 21 %<br />

en Europe).<br />

Prévalence<br />

La prévalence du diabète traité en France est de 3 %, soit près<br />

de 2 millions de diabétiques [1] . Parmi ces patients, moins de<br />

10 % ont un diabète de type 1. La prévalence du diabète a<br />

fortement augmenté entre 2000 et 2005, avec un taux de<br />

croissance annuel moyen de 5,7 %. En Europe, on estime qu’il<br />

y a 21 millions de diabétiques de type 2 [2] .<br />

La prévalence du diabète de type 2 en France pour 2025 va<br />

doubler et est estimée à5%à8%delapopulation [3] . Cette<br />

« épidémie » de diabète de type 2 est liée aux modifications du<br />

mode de vie et à l’allongement de l’espérance de vie. La<br />

prévalence du diabète de type 2 augmente parallèlement au<br />

vieillissement, à l’urbanisation, à la sédentarisation et au<br />

développement de l’obésité dans les populations des pays<br />

industrialisés. Cette maladie n’épargne pas les pays en voie de<br />

développement où le diabète de type 2 atteint parfois une<br />

prévalence de 20 % à 30 %, en raison de prédispositions<br />

génétiques couplées à la modification rapide du mode de vie.<br />

Le diabète se complique de microangiopathie et de macroangiopathie.<br />

La néphropathie diabétique survient chez 20 % à<br />

40 % des patients diabétiques de type 1 et chez 10 %à30%<br />

des patients diabétiques de type 2. Elle évolue en différents<br />

stades allant de la microalbuminurie à l’insuffisance rénale<br />

terminale. De 20 % à 30 % des patients diabétiques de<br />

type 1 ont une microalbuminurie 15 ans après la découverte du<br />

diabète. L’insuffisance rénale terminale survient chez 4%à<br />

17 % des diabétiques de type 1 après 20 ans d’évolution de la<br />

maladie [4, 5] .<br />

Le diabète de type 2 a une prévalence plus importante que le<br />

diabète de type 1, ce qui explique que 50 %à60%despatients<br />

diabétiques en insuffisance rénale terminale soient des diabétiques<br />

de type 2. L’étude épidémiologique la plus importante des<br />

diabétiques de type 2 avec une néphropathie est la United<br />

Pyélonéphrite<br />

3 %<br />

Inconnu<br />

12 %<br />

Glomérulonéphrite<br />

14 %<br />

Diabète<br />

21 %<br />

Kingdom Prospective Diabetes Study (UKPDS) [6] . Parmi les<br />

5 097 patients suivis pendant 10 ans, la prévalence de la<br />

microalbuminurie était de 24,9 %, celle de la macroalbuminurie<br />

de 5,3 % et celle de l’insuffisance rénale (définie par une<br />

créatininémie supérieure à 175 µmol/l) de 0,8 %. Les patients<br />

présentant une insuffisance rénale avaient un taux de mortalité<br />

annuel de 19,2 %.<br />

La néphropathie diabétique est la première cause de mise en<br />

dialyse. Elle est aussi celle dont l’incidence progresse le plus<br />

vite, d’environ 10 % à 15 % par an [7] .<br />

Incidence<br />

Hommes Femmes<br />

Vasculaire<br />

2 %<br />

Polykystose<br />

6 %<br />

Autre<br />

18 %<br />

Hypertension<br />

24 %<br />

En Europe, au cours des années 1990, le nombre de patients<br />

diabétiques de type 2 arrivant au stade terminal de l’insuffisance<br />

rénale du fait d’une néphropathie diabétique a augmenté<br />

d’environ 12 % par an [7] .<br />

Aux États-Unis, le rapport de l’United States Renal Data<br />

System 2008 montrait que le taux d’incidence des patients<br />

diabétiques en dialyse était de 159 par million, soit 50 % de<br />

plus que 10 ans auparavant. Dans de nombreux pays, le diabète<br />

est la principale cause d’insuffisance rénale terminale, représentant<br />

plus de 40 % des patients incidents (Malaisie, Mexique,<br />

États-Unis, Japon, Corée, Nouvelle-Zélande, Israël) [8, 9] .<br />

En France, les données du réseau Renal Epidemiology and<br />

Information Network (REIN) [10] montraient pour 2005 un taux<br />

brut moyen d’incidence des malades recevant un traitement de<br />

suppléance pour une insuffisance rénale terminale de 139 cas<br />

par million d’habitants par an. L’hypertension artérielle (HTA)<br />

et le diabète étaient les deux principales causes d’insuffisance<br />

rénale terminale, responsables de 63 nouveaux cas par million<br />

d’habitants par an.<br />

En 2005, 22 % des patients incidents en traitement de<br />

suppléance (c’est-à-dire débutant l’hémodialyse, la dialyse<br />

péritonéale ou greffés) présentaient une néphropathie diabétique.<br />

Le pourcentage de néphropathie diabétique est plus<br />

important dans la population féminine (25 %) que masculine<br />

(21 %). Cependant, le nombre d’hommes incidents en dialyse<br />

est plus important (61 % d’hommes). L’âge médian des patients<br />

présentant une néphropathie diabétique et débutant un traitement<br />

de suppléance était de 70 ans (Fig. 1).<br />

En France, en 2005, parmi les 6 021 nouveaux patients<br />

insuffisants rénaux terminaux inclus dans le registre REIN, 36 %<br />

présentaient un diabète (soit 1 868 patients), 11 % avaient un<br />

diabète de type 1, 63 % recevaient de l’insuline. Parmi ces<br />

patients diabétiques débutant un traitement de suppléance,<br />

58 % avaient une néphropathie diabétique, 14 % une néphropathie<br />

vasculaire ou hypertensive et 5 % une glomérulonéphrite<br />

chronique. Dans 90 % des cas, aucune biopsie rénale n’avait été<br />

réalisée.<br />

La survie en dialyse des patients diabétiques de type 2 est<br />

deux fois plus faible que celle des dialysés ayant une autre<br />

maladie rénale [7] . Ils associent en effet deux facteurs majeurs de<br />

risque cardiovasculaire : le diabète et la néphropathie<br />

diabétique.<br />

Pyélonéphrite<br />

4 %<br />

Inconnu<br />

12 %<br />

Glomérulonéphrite<br />

11 %<br />

Diabète<br />

25 %<br />

Vasculaire<br />

1 % Polykystose<br />

7 %<br />

Autre<br />

22 %<br />

Hypertension<br />

18 %<br />

Figure 1. Distribution des cas incidents en France en 2005 selon la maladie rénale et le sexe (d’après Renal Epidemiology and Information Network [10] et<br />

Système d’information multisources pour l’insuffisance rénale terminale [SIMS-REIN]).<br />

2 Néphrologie


“ Point fort<br />

Données épidémiologiques<br />

La néphropathie diabétique est la première cause<br />

d’insuffisance rénale terminale dans le monde.<br />

Son incidence et sa prévalence sont en forte<br />

augmentation.<br />

La prévalence d’une albuminurie supérieure à<br />

30 mg/24 heures est de 20%à30%dans les diabètes de<br />

type1et2.<br />

Le risque cardiovasculaire est multiplié par dix chez les<br />

diabétiques de type 1 et par trois chez les diabétiques de<br />

type 2.<br />

De50%à80%desdiabétiques dialysés sont des<br />

diabétiques de type 2.<br />

Aspects économiques<br />

Le diabète a un coût financier important en raison du taux<br />

élevé de complications dégénératives. En France, le coût de prise<br />

en charge médicale est de 4,9 milliards d’euros, soit 4,7 % des<br />

dépenses générales de l’assurance maladie [11] .<br />

Facteurs prédisposants<br />

Le mauvais contrôle glycémique est un facteur prédictif<br />

majeur de risque de développer une néphropathie quel que soit<br />

le type de diabète.<br />

D’autres facteurs de risque sont définis : les antécédents<br />

familiaux, l’âge, le sexe, l’HTA, l’obésité, l’insulinorésistance, le<br />

tabagisme, l’existence d’un capital glomérulaire réduit. Une<br />

susceptibilité génétique a été soulignée [12, 13] .<br />

Aux États-Unis, l’incidence de l’insuffisance rénale terminale<br />

diabétique est plus élevée dans la population mexicaine ou afroaméricaine<br />

que dans la population caucasienne. Les causes de<br />

ces différences ethniques sont plurifactorielles. Une des causes<br />

principales retrouvées est l’HTA qui est plus fréquente dans les<br />

populations afro-américaines.<br />

Néphropathie diabétique : un risque majeur<br />

de complications cardiovasculaires<br />

L’association entre maladie coronaire et diabète a été illustrée<br />

par une étude majeure : la Framingham Study [14] . Celle-ci a<br />

montré que la présence d’un diabète multiplie par deux le<br />

risque cardiovasculaire ajusté pour l’âge chez l’homme et le<br />

triple chez la femme.<br />

Le diabète entraîne des complications de microangiopathies<br />

(rétinopathie, néphropathie) et de macroangiopathies (coronaropathie,<br />

artériopathie). La néphropathie diabétique est la plus<br />

grave des complications microangiopathiques, car elle associe<br />

l’atteinte rénale qui est un facteur de risque cardiovasculaire<br />

majeur au diabète.<br />

La protéinurie comme l’insuffisance rénale sont devenues des<br />

marqueurs de risque cardiovasculaire au même titre et indépendamment<br />

des facteurs conventionnels comme l’HTA, l’hypercholestérolémie<br />

ou le tabagisme [15] . Le risque annuel d’infarctus<br />

du myocarde d’un patient diabétique protéinurique est dix fois<br />

plus élevé que le risque de prise en charge en dialyse.<br />

La maladie rénale est donc en soi un facteur de risque<br />

cardiovasculaire. Ce risque est d’autant plus important que le<br />

débit de filtration glomérulaire (DFG) est faible [16] . Plusieurs<br />

études ont montré que l’association de l’atteinte rénale et du<br />

diabète augmente significativement le risque de maladie<br />

coronaire [17] .<br />

La mortalité cardiovasculaire est la principale cause de<br />

mortalité chez les insuffisants rénaux diabétiques. Dans la<br />

population des patients dialysés, les accidents cardiovasculaires<br />

sont responsables de la moitié de la mortalité globale [18] . Les<br />

Néphrologie<br />

principales causes de ces accidents sont la cardiopathie ischémique,<br />

l’insuffisance cardiaque et les accidents vasculaires<br />

cérébraux. Athéromatose et artériosclérose évoluent de façon<br />

plus précoce et plus rapide que dans la population générale.<br />

■ Définition de la néphropathie<br />

diabétique<br />

La néphropathie diabétique appartient aux complications<br />

microangiopathiques du diabète. Ses caractéristiques sont les<br />

suivantes :<br />

une albuminurie de débit croissant progressivement, témoin<br />

de l’atteinte glomérulaire ; la microalbuminurie est définie par<br />

l’excrétion dans les urines de 30 à 300 mg d’albumine par<br />

jour ou de 25 à 250 mg/g de créatinine urinaire ; un des<br />

mécanismes physiopathologiques de la microalbuminurie est<br />

la perte d’expression de la néphrine par les podocytes [19] ;<br />

une élévation progressive des chiffres de pression artérielle<br />

(PA) ;<br />

une diminution progressive du DFG ;<br />

typiquement l’absence d’anomalie du sédiment urinaire.<br />

“ Point fort<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

Néphropathie diabétique : définition<br />

Complication microangiopathique du diabète associant :<br />

une albuminurie croissante témoin de l’atteinte<br />

glomérulaire ;<br />

une HTA ;<br />

à terme une diminution du DFG.<br />

■ Physiopathologie<br />

de la néphropathie diabétique<br />

Histoire naturelle de la néphropathie<br />

du diabète de type 1<br />

Mogensen a décrit l’évolution des altérations fonctionnelles<br />

et morphologiques rénales en cinq stades pour la néphropathie<br />

du diabète de type 1 (Fig. 2) [20] .<br />

Le stade 1 est contemporain de la découverte du diabète et<br />

est caractérisé par l’hypertrophie rénale et l’augmentation de la<br />

filtration glomérulaire. Une augmentation de 20 %à40%du<br />

DFG par rapport aux valeurs observées chez les sujets non<br />

diabétiques est possible. Simultanément on constate une<br />

augmentation de la taille et du poids des reins d’environ 20 %.<br />

L’examen histologique en microscopie optique est normal. Ces<br />

anomalies sont réversibles avec l’instauration de l’insulinothérapie<br />

et la normalisation des glycémies.<br />

Le stade 2 est infraclinique. C’est la néphropathie silencieuse.<br />

Elle survient 2 à 5 ans plus tard. Elle peut durer plusieurs<br />

années. L’examen histologique s’il est pratiqué montre un<br />

élargissement de la matrice mésangiale. Certains diabétiques ne<br />

dépassent jamais ce stade. Le DFG est élevé ou normal. L’hypertrophie<br />

rénale est toujours présente. La PA et la protéinurie sont<br />

normales.<br />

Le stade 3 ou néphropathie diabétique incipiens (néphropathie<br />

diabétique débutante) est défini par une microalbuminurie<br />

permanente comprise entre 20 et 200 µg/min ou 30 à<br />

300 mg/24 heures. Elle survient après 6 à 15 ans de diabète. Elle<br />

concerne 40 % des patients. La PA est élevée. Les reins sont<br />

3


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

150<br />

100<br />

augmentés de volume et le DFG reste normal. Sur le plan<br />

histologique apparaît un épaississement de la membrane basale<br />

glomérulaire et une expansion mésangiale.<br />

Le stade 4, néphropathie manifeste, est atteint 5à10ansplus<br />

tard et concerne 35 %à40%despatients. C’est celui de la<br />

glomérulopathie patente cliniquement. Il apparaît une protéinurie<br />

détectable à la bandelette dépassant 500 mg/24 heures,<br />

permanente, qui augmente progressivement tout en perdant sa<br />

sélectivité pour se compliquer chez certains patients d’un<br />

syndrome néphrotique. Une hématurie microscopique s’observe<br />

chez une minorité de patients. L’hypertension artérielle est<br />

quasi constante. Une insuffisance rénale s’installe 5à10ans<br />

après la protéinurie et progresse à un rythme dépendant de la<br />

qualité du traitement antihypertenseur, environ de 5 ml/min<br />

par an [21] . Les lésions histologiques sont des lésions de glomérulosclérose<br />

nodulaire décrites par Kimmestiel et Wilson.<br />

Le stade 5 est celui de l’insuffisance rénale terminale. Il est<br />

atteint en moyenne 5à20ansaprès l’apparition de la protéinurie.<br />

Il est marqué par l’existence d’une protéinurie massive<br />

pouvant être responsable d’un syndrome néphrotique et d’une<br />

HTA sévère. Au plan histologique, les lésions de glomérulosclérose<br />

s’associent à des lésions de hyalinose artériolaire, de<br />

fibrose interstitielle et d’atrophie tubulaire.<br />

Histoire naturelle de la néphropathie<br />

du diabète de type 2<br />

L’évolution de la néphropathie diabétique du diabète de<br />

type 2 est souvent plus complexe. La dégradation de la fonction<br />

rénale peut évoluer sans microalbuminurie significative chez un<br />

tiers des patients. Le délai d’apparition et de progression d’une<br />

microalbuminurie est très variable d’un sujet à l’autre.<br />

Il peut survenir une glomérulosclérose identique à celle du<br />

diabète de type 1. Mais les études ont montré que chez les<br />

patients diabétiques de type 2 l’atteinte glomérulaire n’était en<br />

rapport avec une glomérulopathie diabétique que dans un tiers<br />

des cas. Une glomérulopathie non spécifique est mise en<br />

évidence dans un tiers des cas, et le dernier tiers résulte de<br />

l’association de lésions diabétiques et vasculaires. Il existe donc<br />

une hétérogénéité lésionnelle.<br />

La rétinopathie est absente dans 30 % des cas chez les<br />

diabétiques de type 2 présentant une néphropathie<br />

diabétique [21-23] .<br />

Le niveau d’insulinorésistance périphérique et l’histoire<br />

familiale cardiovasculaire favorisent l’apparition de la néphropathie<br />

diabétique pour les diabètes de type 2.<br />

50<br />

0<br />

1<br />

0 5 10 15<br />

Ans<br />

20 25<br />

Stades ND<br />

silencieuse<br />

Fonctions DFG<br />

augmenté<br />

Anatomie Hypertrophie<br />

rénale<br />

2 3 4 5<br />

ND<br />

incipiens<br />

Microalbuminurie<br />

HTA<br />

Expansion mésangiale<br />

Hyalinose artériolaire<br />

Épaississement de la<br />

membrane basale<br />

glomérulaire<br />

ND<br />

manifeste<br />

5 000<br />

1 000<br />

200<br />

Hypothèses physiopathologiques expliquant<br />

la néphropathie diabétique : rôle de<br />

l’hyperglycémie, modifications structurelles<br />

et hémodynamiques<br />

L’hypertrophie et l’hyperfiltration rénales persistantes associées<br />

à l’hyperglycémie prolongée sont les facteurs les plus<br />

importants de la genèse de la néphropathie diabétique. La<br />

physiopathologie de la néphropathie diabétique repose donc sur<br />

trois facteurs : métabolique, hémodynamique et génétique<br />

(Fig. 3).<br />

De nombreux arguments suggèrent une origine génétique à la<br />

néphropathie diabétique ; cependant, aucun gène n’a été<br />

formellement identifié comme étant responsable de cette<br />

atteinte rénale. Avec l’hyperglycémie, le premier changement est<br />

une augmentation du DFG qui peut être supérieur à<br />

150 ml/min. Cette « hyperfiltration » est observée chez 25 % à<br />

50 % des patients diabétiques de type 1 et dans une moindre<br />

proportion au cours du diabète de type 2. Cette augmentation<br />

du DFG est parallèle à une augmentation de la taille des reins<br />

qui est le résultat d’une hypertrophie rénale correspondant à<br />

une augmentation de la prolifération des cellules tubulointerstitielles<br />

et à l’atteinte glomérulaire.<br />

La seconde modification est l’apparition d’une microalbuminurie<br />

définie par une excrétion urinaire d’albumine de 30 à<br />

300 mg par jour.<br />

Rôle du contrôle du glucose : mécanismes<br />

de la glucotoxicité<br />

20<br />

Protéinurie, syndrome néphrotique<br />

Diminution du DFG<br />

Nodules du mésangium<br />

de Kimmelstiel-Wilson<br />

Fibrose interstitielle<br />

Figure 2. Histoire naturelle de la néphropathie du diabète de type 1. ND : néphropathie diabétique ; DFG : débit de filtration glomérulaire ; HTA :<br />

hypertension artérielle. 1à5:5stades de la néphropathie diabétique.<br />

La durée et le degré d’hyperglycémie sont les facteurs de<br />

risque majeurs du développement de la néphropathie diabétique.<br />

Plusieurs études ont montré qu’un meilleur équilibre<br />

glycémique permettait de diminuer le nombre de patients en<br />

insuffisance rénale terminale (9 % versus 40 % pour le diabète<br />

de type 1) et de ralentir l’évolution de la microalbuminurie [25] .<br />

D’autre part, après transplantation pancréatique et normalisation<br />

totale de la glycémie, on observe une régression des lésions<br />

glomérulaires après 10 ans [26] .<br />

Le développement de la microangiopathie diabétique est<br />

expliqué en partie par une théorie métabolique reposant sur la<br />

toxicité du glucose. Le glucose, source d’énergie indispensable<br />

au métabolisme cellulaire, est le principal hydrate de carbone de<br />

l’organisme. Les cellules utilisent le glucose pour produire de<br />

l’énergie sous forme d’adénosine triphosphate (ATP). Lorsque le<br />

4 Néphrologie


glucose est anormalement élevé, il entraîne des lésions cellulaires<br />

et tissulaires irréversibles. Des études expérimentales ont<br />

permis de comprendre les mécanismes moléculaires qui soustendent<br />

la progression des complications microvasculaires du<br />

diabète. Les mécanismes de la toxicité du glucose dans les tissus<br />

cibles sont multiples et passent par différentes voies : la<br />

glycation protéique, la voie des polyols et la déplétion en myoinositol,<br />

la voie de l’hexamine et la voie de la protéine kinase<br />

C (PKC).<br />

L’ion superoxyde (O 2 - ) est activateur de ces voies. Lors du<br />

métabolisme du glucose, la production massive d’ATP dans la<br />

mitochondrie est liée à la libération d’électrons libres qui<br />

induisent la formation rapide de l’ion superoxyde à partir de<br />

l’oxygène (Fig. 4) [27] .<br />

Le glucose est donc à l’origine de la fabrication de deux<br />

principaux produits : les advanced glycation end-products (AGE) et<br />

les produits de la glycoxydation.<br />

Glycoxydation<br />

Métabolique<br />

Glucose PKC<br />

Angiotensine II<br />

Glycation<br />

AGE<br />

Accumulation de la<br />

matrice extracellulaire<br />

Elle conduit à la formation de composés carbonyles instables<br />

(glyoxal, méthylglyoxal, etc.). Cette réaction est dépendante de<br />

Génétique Hémodynamique<br />

Cytokines<br />

TGF-β<br />

VEGF<br />

la concentration en glucose, du niveau de stress oxydatif et du<br />

temps. Les produits de cette réaction de glycoxydation ont pour<br />

conséquences pour les cellules et les tissus d’augmenter la<br />

production de cytokines et de facteurs de croissance (interleukine<br />

6 [IL6], vascular endothelial growth factor [VEGF]) et<br />

d’induire une apoptose cellulaire (méthylglyoxal) [28] .<br />

En plus de leur toxicité directe, ces produits sont très réactifs<br />

et présentent une source d’AGE lorsqu’ils sont liés aux<br />

protéines [27] .<br />

Produits de glycation avancée<br />

Pression<br />

capillaire<br />

glomérulaire<br />

Augmentation de<br />

la perméabilité<br />

vasculaire<br />

Protéinurie<br />

Figure 3. Physiopathologie de la néphropathie diabétique (d’après [24] ). AGE : advanced glycation end-products ; PKC : protéine kinase C ; TGF : transforming<br />

growth factor ;VEGF:vascular endothelial growth factor.<br />

Glucose<br />

Glucose-6-P<br />

Fructose-6-P<br />

Glycéraldéhyde-3-P<br />

NAD+<br />

GAPDH<br />

NADH<br />

O –<br />

2<br />

1,3-diphosphoglycérate<br />

NADPH<br />

NADH<br />

NADP+<br />

Sorbitol Fructose<br />

Voie des polyols<br />

Voie de l’hexosamine<br />

Voie de la protéine C kinase<br />

Voie des AGE<br />

NAD+ NADH<br />

Glucosamine-6-P UDP-GlcNAc<br />

NAD+<br />

A-glycérol-P<br />

DHAP DAG PKC<br />

Méthylglyoxal AGE<br />

Figure 4. Activation des quatre voies de toxicité de l’hyperglycémie (d’après [ 25] ). NAD : nicotinamide adénine dinucléotide ; GAPDH : glycéraldéhyde-3phosphate<br />

déshydrogénase ; AGE : advanced glycation end-products ; UDP-GlcNAc : uridine diphosphate N-acétylglucosamine ; DAG : diacylglycérol ; PKC :<br />

protéine kinase C.<br />

Néphrologie<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

Définition des AGE. Les produits de glycation avancée,<br />

encore appelés AGE, sont les produits terminaux de la réaction<br />

de glycation. Cette dernière est une réaction non enzymatique<br />

correspondant à une modification post-traductionnelle des<br />

protéines. Les AGE sont le produit de la liaison d’un ose<br />

(glucose, galactose ou fructose) à la fonction amine libre d’une<br />

protéine ou d’une apolipoprotéine.<br />

Les AGE sont des glycotoxines qui sont retrouvées en excès<br />

dans le plasma et les tissus des mammifères au cours du<br />

vieillissement, du diabète et de l’insuffisance rénale. Les AGE<br />

5


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

Stress<br />

oxydatif<br />

O 2<br />

Glucose<br />

Glycoxydation<br />

Base de Schiff<br />

Voies des<br />

polyols<br />

font également partie des toxines urémiques [29] . Les AGE sont<br />

présents dans de nombreux aliments et boissons contenant du<br />

sucre en quantité importante et ayant une étape de chauffage.<br />

Parmi les différents AGE, deux ont été plus étudiés : la<br />

pentosidine et la carboxy-méthyl-lysine (CML).<br />

La pentosidine a une demi-vie longue. Elle se trouve principalement<br />

dans les matrices extracellulaires. La CML a une demivie<br />

courte et est retrouvée dans le sérum. Les protéines peuvent<br />

subir de nombreuses glycations. La protéine glyquée la plus<br />

utilisée est l’hémoglobine glyquée A1c. C’est un produit<br />

intermédiaire de la glycation dont le taux dépend de l’équilibre<br />

glycémique des 4à6semaines précédentes. La glycation des<br />

apolipoprotéines a été impliquée dans l’apparition des lésions<br />

d’athérosclérose.<br />

Rôle des AGE dans la néphropathie diabétique. Les AGE<br />

peuvent agir directement ou par l’intermédiaire de récepteurs.<br />

Récepteurs des AGE. Le premier récepteur décrit est<br />

l’AGE-R1 ou p60. C’est un composant de 50 kD homologue du<br />

complexe OST-48.<br />

L’AGE-R2 ou p90 a un certain degré d’homologie avec une<br />

protéine kinase.<br />

L’AGE-R3 a été précédemment décrit comme la galectine-3.<br />

C’est un polypeptide de 35 kD dont l’affinité pour les AGE est<br />

supérieure à celle des autres hydrates de carbone.<br />

Le RAGE est le récepteur le mieux caractérisé. Il est présent<br />

sur la cellule endothéliale, sur les monocytes-macrophages et les<br />

cellules musculaires lisses, mésangiales et mésothéliales. Il<br />

appartient à la superfamille des immunoglobulines. Trois formes<br />

de RAGE ont été décrites. Seule la forme contenant une région<br />

extracellulaire avec un domaine variable et deux domaines<br />

constants, une région transmembranaire et une région intracellulaire<br />

permet la transduction du signal après liaison avec son<br />

ligand.<br />

Une fois les AGE fixés sur le RAGE, la transduction dans la<br />

cellule endothéliale fait intervenir des mécanismes oxydatifs par<br />

stimulation de la voie de la NADPH-oxydase. La transduction<br />

passe ensuite par l’activation de NFjB.<br />

L’interaction AGE-RAGE au sein de la cellule entraîne des<br />

réactions pro-inflammatoires et profibrosantes (augmentation de<br />

la perméabilité endothéliale, de la synthèse d’IL6 et de VEGF, de<br />

l’expression de la molécule d’adhérence vasculaire VCAM-1).<br />

Tous ces éléments favorisent la sclérose vasculaire accélérée.<br />

L’étude des récepteurs des AGE dans la néphropathie diabétique<br />

montre que le RAGE membranaire est surexprimé à la<br />

base des podocytes [30] . Les souris n’exprimant pas de RAGE<br />

(dont le gène a été invalidé) semblent protégées de la glomérulosclérose<br />

diabétique quand elles sont rendues diabétiques [29] .<br />

Effets non médiés par les récepteurs. Chez les sujets diabétiques<br />

avec une fonction rénale normale, les AGE sont retrouvés en<br />

Glycation<br />

Produits<br />

d’Amadori<br />

O 2<br />

Protéine-NH 2<br />

Figure 5. Synthèse des advanced glycation end-products (AGE) (d’après [27] ).<br />

Produits de<br />

glycation intermédiaire<br />

AGE<br />

excès dans les matrices extracellulaires et dans le plasma.<br />

L’accumulation des AGE dans les parois artérielles participe à la<br />

rigidité artérielle.<br />

Au cours de la néphropathie diabétique, l’accumulation des<br />

AGE a été observée dans différentes structures rénales, et<br />

particulièrement au sein des nodules de la glomérulosclérose<br />

diabétique [31] .<br />

La majeure partie des dépôts amyloïdes dans l’amylose du<br />

dialysé est constituée de bêta 2 microglobuline glyquée<br />

(AGE- bêta 2 microglobuline).<br />

Synthèse des AGE. La formation des AGE est une succession<br />

d’étapes qui dépend du temps et de la concentration en sucre.<br />

Plusieurs voies conduisent à la formation des AGE : la glycation<br />

et la voie des polyols (Fig. 5) [27] .<br />

Glycation protéique. Une des conséquences essentielles de<br />

l’hyperglycémie est la glycation des protéines. Ce processus se<br />

déroule selon trois étapes :<br />

la formation d’une base de Schiff par combinaison de la<br />

fonction aldéhyde du glucose avec les résidus aminés de la<br />

protéine, principalement la lysine et la fonction amine<br />

N-terminale ;<br />

le réarrangement d’Amadori, atteignant un équilibre après<br />

quelques semaines (réaction quasi irréversible) ; ces deux<br />

étapes aboutissent aux produits de glycation dits précoces et<br />

caractérisent les protéines de demi-vie brèves ou intermédiaires<br />

(exemple de l’hémoglobine) ;<br />

une accumulation lente et irréversible de produits terminaux<br />

de glycation ou produits de Maillard, caractérisant les<br />

protéines de durée de vie prolongée, et dont les traits<br />

biochimiques principaux sont leur pigmentation brune et leur<br />

fluorescence.<br />

Voie des polyols. La synthèse des polyols survenant au cours de<br />

l’hyperglycémie est une autre voie pouvant expliquer les<br />

mécanismes de glucotoxicité [32] . En présence d’une hyperglycémie,<br />

un détournement du métabolisme du glucose se<br />

produit : celui-ci au lieu d’être essentiellement oxydé dans la<br />

voie de la glycolyse se trouve l’être dans la voie des polyols<br />

(Fig. 6).<br />

L’excès de glucose qui franchit la membrane cellulaire est<br />

réduit en sorbitol sous l’action de l’aldose réductase en présence<br />

de NADPH + , puis la sorbitol-déshydrogénase catalyse sa transformation<br />

en fructose. L’accumulation du sorbitol s’accompagne<br />

d’une déplétion en myo-inositol. En effet, l’hyperglycémie va<br />

inhiber la captation du myo-inositol par un effet compétitif du<br />

glucose sur les récepteurs membranaires du myo-inositol et<br />

l’accumulation intracellulaire du sorbitol favorise sa sortie<br />

extracellulaire. Le défaut en myo-inositol entrave le métabolisme<br />

des phospho-inositides, la production de diacylglycérol<br />

(DAG) et d’inositol triphosphate. Le DAG et l’inositol triphosphate<br />

régulent l’activité de la PKC, et leur déplétion induit un<br />

6 Néphrologie


défaut d’activation de la PKC avec finalement une diminution<br />

de la Na-K-ATPase. Des agents inhibant l’aldose réductase ont<br />

été essayés pour prévenir la néphropathie diabétique, mais des<br />

réactions d’hypersensibilité et leur toxicité hépatique n’ont pas<br />

permis leur développement.<br />

D’autres voies d’activation cellulaire ont été décrites parallèlement<br />

à la voie des polyols : la voie de l’hexosamine et de<br />

l’activation de la PKC [33] (Fig. 6).<br />

Dégradation des AGE. La réduction des taux sériques des<br />

AGE dépend du catabolisme de la protéine glyquée et de sa<br />

clairance rénale. Les protéases (pepsine, papaïne, collagénase ou<br />

trypsine) dégradent les protéines glyquées. L’accumulation des<br />

AGE active une enzyme inhibitrice, la glyoxalase 1, qui a une<br />

action de détoxication sur le glyoxal, le méthylglyoxal et le<br />

3-déoxyglucose. C’est une voie de défense partielle contre la<br />

formation des AGE.<br />

La clairance des AGE est dépendante de la fonction rénale. La<br />

clairance des AGE par la dialyse péritonéale est supérieure à<br />

celle obtenue par l’hémodialyse, car il existe une fuite protéique<br />

péritonéale favorisant l’élimination des protéines glyquées [34] .<br />

Effet direct du glucose : activation de la protéine kinase C<br />

Un rôle direct du glucose dans la néphropathie diabétique a<br />

été suggéré par des études de cultures cellulaires. Celles-ci ont<br />

montré que le glucose pouvait induire une hypertrophie<br />

cellulaire, la synthèse de matrice extracellulaire et la production<br />

de transforming growth factor b (TGF-b). Ces effets induits par le<br />

glucose ont été attribués à l’activation de la PKC. La PKC est<br />

une sérine-thréonine kinase qui joue un rôle important dans la<br />

transduction du signal. Elle régule des fonctions aussi diverses<br />

que la croissance cellulaire et la synthèse d’acide désoxyribonucléique,<br />

le renouvellement des récepteurs membranaires<br />

et l’activation de facteurs de croissance, la contraction des fibres<br />

musculaires lisses et le contrôle du tonus vasculaire, la production<br />

de collagène et la synthèse de la membrane basale,<br />

l’angiogenèse. Son activité est régulée par les niveaux de DAG<br />

et d’inositol triphosphate. L’hyperglycémie chronique augmenterait<br />

l’activité de la PKC. Cet effet est lié à une augmentation<br />

de la synthèse de novo de DAG à partir de précurseurs dérivés<br />

de la glycolyse. L’activation de la PKC par le glucose a été<br />

retrouvée sur des cellules musculaires lisses aortiques bovines et<br />

dans les glomérules rénaux de rats diabétiques. L’hyperactivité<br />

de la PKC pourrait donc jouer un rôle clé dans la pathogénie de<br />

la microangiopathie diabétique.<br />

Modifications hémodynamiques<br />

L’hyperfiltration glomérulaire est un facteur prédictif de la<br />

néphropathie diabétique chez les patients diabétiques de type 1.<br />

Les patients diabétiques ont en effet une augmentation du DFG<br />

lors de la perfusion d’acides aminés par rapport aux sujets<br />

normoglycémiques et la normalisation de la glycémie corrige<br />

cette hyperfiltration. Le mécanisme expliquant l’augmentation<br />

Néphrologie<br />

Augmentation<br />

de l’osmolalité<br />

intracellulaire<br />

Glucose<br />

extracellulaire<br />

Glucose<br />

intracellulaire<br />

Sorbitol<br />

Aldose réductase<br />

Diminution<br />

du myo-inositol<br />

intracellulaire<br />

Figure 6. Voie des polyols (d’après [24] ).<br />

“ Point fort<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

Physiopathologie<br />

Les mécanismes physiopathologiques fondamentaux<br />

expliquant la néphropathie diabétique sont similaires dans<br />

les deux types de diabète.<br />

Le stress oxydatif est le médiateur commun aux<br />

mécanismes impliqués :<br />

augmentation de la voie des polyols, des hexaminases<br />

et activation du NFjB ;<br />

augmentation de la production des AGE ;<br />

stimulation de la synthèse de l’angiotensine II et<br />

activation du système rénine-angiotensine (SRA), stress<br />

mécanique ;<br />

activation de la PKC.<br />

de la filtration glomérulaire n’est pas parfaitement clair, mais il<br />

pourrait impliquer des effets dépendants du glucose sur la<br />

vasodilatation des artérioles afférentes, médiée par des médiateurs<br />

vasoactifs et des cytokines : insulin-like growth factor 1,<br />

oxyde nitrique, prostaglandines et glucagon.<br />

L’hyperfiltration est la conséquence d’une vasodilatation des<br />

artérioles afférentes qui entraîne une augmentation de la<br />

pression capillaire glomérulaire. Les mesures qui vont diminuer<br />

la pression glomérulaire, comme la baisse de la PA, la diminution<br />

de l’apport protéique (qui inhibe la dilatation des artérioles<br />

afférentes) ou les inhibiteurs du SRA (qui bloquent la vasoconstriction<br />

des artérioles efférentes en inhibant l’angiotensine II),<br />

réduisent le débit de protéinurie et ralentissent la progression de<br />

la glomérulosclérose.<br />

Les mécanismes par lesquels l’angiotensine II contribue au<br />

développement de la néphropathie diabétique sont multiples.<br />

En plus de ses effets hémodynamiques, augmentation de la PA<br />

et de la pression intracapillaire glomérulaire, de la protéinurie et<br />

vasoconstriction rénale, l’angiotensine II joue un rôle sur la<br />

prolifération cellulaire, l’hypertrophie et l’expansion de la<br />

matrice extracellulaire et sur la synthèse de certaines cytokines<br />

comme le TGF-b. Il a été démontré que la production d’angiotensine<br />

II intraglomérulaire colocalise en immunofluorescence<br />

avec l’expression du TGF-b [35] .<br />

Il existe dans ces territoires une production autocrine<br />

d’angiotensine II dont les concentrations locales et les effets<br />

cellulaires in situ expliquent en partie les effets thérapeutiques<br />

indépendants des effets sur la PA. D’autres agents vasoactifs sont<br />

impliqués dans la pathogénie de la ND comme l’endothéline,<br />

l’oxyde nitrique, le système kallikréine-kinine et les peptides<br />

natriurétiques.<br />

Chez les patients diabétiques, il existe une augmentation de<br />

la rigidité artérielle et des résistances vasculaires par remodelage<br />

microvasculaire [36, 37] . Ces altérations micro- et macrovasculaires<br />

entraînent un trouble de la perfusion tissulaire.<br />

Modifications structurelles : hypertrophie rénale<br />

L’hypertrophie rénale est la conséquence d’une hypertrophie<br />

et d’une prolifération glomérulaire et tubulo-interstitielle.<br />

L’atteinte glomérulaire est secondaire à l’expansion mésangiale<br />

qui est caractérisée par une augmentation du nombre des<br />

cellules mésangiales et une accumulation des composants de la<br />

matrice extracellulaire comme le collagène de type IV et V, la<br />

laminine, la fibronectine. Plus tard surviennent la formation de<br />

nodules et la perte de la cellularité mésangiale. L’expansion<br />

mésangiale est clairement médiée par un effet direct du glucose<br />

et des AGE. Les taux élevés de glucose provoquent la stimulation<br />

de facteurs de croissance comme l’insulin-like growth factor<br />

1, l’epidermal growth factor, leplatelet-derived growth factor et le<br />

TGF-b, et par inhibition de certains facteurs antiprolifératifs.<br />

Le TGF-b a été le plus étudié. Il est sécrété sous forme latente.<br />

L’élévation du glucose et des AGE stimule la fabrication de<br />

thrombospondine qui est un activateur du TGF-b. Ce dernier est<br />

7


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

exprimé dans les glomérules et le tissu tubulo-interstitiel au<br />

cours des néphropathies diabétiques. Le TGF-b joue un rôle<br />

essentiel dans l’accumulation de la matrice extracellulaire.<br />

L’angiotensine II est elle aussi impliquée en stimulant la<br />

production du TGF-b par les cellules épithéliales mésangiales et<br />

tubulaires.<br />

Les expérimentations in vitro ont montré que la diminution<br />

de la dégradation de la matrice extracellulaire était la conséquence<br />

de la perte d’activité des métalloprotéases matricielles.<br />

La glycosylation des composants de la matrice extracellulaire les<br />

rend plus résistants à la dégradation [27] .<br />

Il existerait aussi une hypertrophie tubulaire dont les mécanismes<br />

ont été décrits par Rebsomen [38, 39] .<br />

Le degré de fibrose interstitielle est corrélé à la fonction<br />

rénale mais aussi au pronostic rénal. Les mécanismes de<br />

développement de la fibrose sont ceux des autres atteintes<br />

rénales glomérulaires incluant les effets des cytokines et des<br />

facteurs de croissance synthétisés par les glomérules, et des<br />

effets de la protéinurie.<br />

Microalbuminurie et protéinurie<br />

Dès le début de la néphropathie diabétique, la membrane<br />

basale glomérulaire s’épaissit et peut atteindre trois à quatre fois<br />

son épaisseur normale. Cet épaississement est expliqué par la<br />

glycosylation des composants de la membrane basale glomérulaire<br />

qui inhibe sa dégradation et par une augmentation de la<br />

synthèse du collagène de type IV. La glycosylation de la<br />

membrane basale glomérulaire est associée à une perte en<br />

protéoglycanes héparan sulfate. Il constitue le principal constituant<br />

en charges négatives de la membrane basale glomérulaire<br />

qui empêche le passage des protéines dans la chambre urinaire.<br />

Parmi les modifications histomorphologiques retrouvées, des<br />

anomalies des podocytes ont été récemment décrites, avec un<br />

effacement des pieds des podocytes. L’étude de l’expression des<br />

protéines spécifiques des podocytes a montré que l’atteinte<br />

podocytaire est précoce dans le processus de la néphropathie<br />

diabétique [40] .<br />

La podocyturie pourrait être un marqueur de l’activité de la<br />

néphropathie diabétique. Les mécanismes de détachement des<br />

podocytes de la membrane basale glomérulaire sont encore<br />

hypothétiques (phénomènes d’apoptose ou modification<br />

phénotypique, transition épithéliomésenchymateuse) [41] .<br />

■ Évolution<br />

La glomérulopathie diabétique progresse rapidement malgré<br />

un traitement optimal : la vitesse moyenne de décroissance du<br />

DFG est d’environ 5 ml/min/an chez les patients diabétiques de<br />

type 2 [21-23] . Ce chiffre est très variable d’un individu à l’autre.<br />

Cette variation dépend du débit de la protéinurie, de la PA<br />

systolique, de la fonction rénale au moment du diagnostic, du<br />

taux d’hémoglobine, de la qualité de l’équilibre glycémique, de<br />

l’existence d’un tabagisme actif et de l’âge. Toutes ces variables<br />

sont des facteurs pronostiques indépendants [23] . D’autres<br />

paramètres restent à identifier (Tableau 1) [24] .<br />

Pour les patients diabétiques de type 1, les facteurs sont la<br />

présence d’une albuminurie, le sexe masculin, l’augmentation<br />

de la PA et le déséquilibre glycémique.<br />

Le traitement antihypertenseur et l’inhibition du système<br />

rénine-angiotensine permettent de ralentir l’évolution de la<br />

néphropathie en retardant l’apparition de la protéinurie.<br />

Le temps moyen entre l’apparition de la protéinurie et<br />

l’insuffisance rénale terminale est de 14 ans.<br />

Tableau 1.<br />

Déclin du DFG (ml/min/an) en fonction du taux d’albuminurie (d’après<br />

Johnson et Feehally [24] ).<br />

DT1 DT2<br />

Normoalbuminurie 1,2-3,6 0,96<br />

Microalbuminurie 1,2-3,6 2,4<br />

Macroalbuminurie 9,6-1,2 5,4-7,2<br />

DT1 : diabète de type 1 ; DT2 : diabète de type 2.<br />

■ Anatomopathologie<br />

Le diagnostic de la néphropathie diabétique est le plus<br />

souvent posé sans biopsie rénale. En effet, seulement 10 % des<br />

patients dialysés en raison d’une néphropathie diabétique ont<br />

été biopsiés.<br />

Les indications de la biopsie rénale sont posées par le<br />

néphrologue. En règle générale, la présence d’une rétinopathie<br />

et d’une microalbuminurie chez un patient diabétique de<br />

type 1 permet d’admettre le diagnostic de ND sans biopsie.<br />

Cependant, dans certains cas, notamment pour les diabétiques<br />

de type 2, la rétinopathie étant absente dans plus de 30 % des<br />

cas, la question se pose devant l’existence d’une protéinurie<br />

abondante d’une autre atteinte glomérulaire. La biopsie rénale<br />

doit alors être réalisée.<br />

De même, la progression rapide de la protéinurie ou de<br />

l’insuffisance rénale peut inciter à pratiquer une biopsie qui<br />

permet d’éliminer une autre glomérulopathie (glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse, maladie de Berger, etc.) ou une atteinte<br />

interstitielle ou tubulaire aiguë (favorisée par la prise d’antiinflammatoires<br />

non stéroïdiens ou de produit de contraste iodé)<br />

associée.<br />

Lorsque la biopsie est effectuée, le premier examen est<br />

l’analyse en microscopie optique. La glomérulopathie diabétique<br />

est caractérisée histologiquement par une expansion acellulaire<br />

du mésangium oblitérant progressivement la lumière des anses<br />

capillaires, un épaississement des membranes basales glomérulaires<br />

et une artériosclérose diffuse. Ces trois lésions sont<br />

caractéristiques du diabète (Fig. 7).<br />

Expansion acellulaire du mésangium<br />

glomérulaire<br />

Elle peut se présenter sous deux formes morphologiques<br />

différentes.<br />

Glomérulosclérose intercapillaire nodulaire<br />

Elle a été décrite par Kimmelstiel et Wilson [42] en 1936. Elle<br />

est caractérisée par des nodules glomérulaires acellulaires,<br />

positifs à l’acide périodique de Schiff et colorés en vert par le<br />

trichrome de Masson. Elle touche un nombre variable de<br />

glomérules et un nombre variable de lobules au sein du glomérule.<br />

Elle aboutit à l’occlusion progressive de la lumière des<br />

anses capillaires. Ces lésions sont observées chez les diabétiques<br />

des deux types. Elles sont pathognomoniques du diabète, mais<br />

ne sont présentes que dans 12 %à46%desbiopsies [42] .La<br />

lésion nodulaire est considérée comme une microangiopathie<br />

du sous-endothélium développée sur une basale de filtration<br />

particulière (collagène IV, protéoglycanes), et associée à des<br />

modifications phénotypiques podocytaires et mésangiales très<br />

précoces.<br />

Lésions glomérulaires diffuses<br />

Elles sont plus fréquentes que les lésions nodulaires (90 %<br />

dans le diabète de type 1). Elles correspondent à une augmentation<br />

de la matrice mésangiale avec accumulation d’un matériel<br />

membranoïde acellulaire dans l’ensemble des lobules et la<br />

plupart des glomérules. Dans la forme la plus sévère, elles<br />

entraînent une fibrose périglomérulaire. La distribution de ces<br />

lésions est diffuse et irrégulière. Une variété évolutive défavorable<br />

est celle marquée par des lésions de hyalinose segmentaire<br />

et focale.<br />

Épaississement des membranes basales<br />

Il donne un aspect empâté aux parois capillaires et contribue<br />

à rétrécir la lumière.<br />

Artériolosclérose hyaline<br />

L’épaississement hyalin sous-intimal des artérioles touche les<br />

artérioles pré- et postglomérulaires. Chez un sujet jeune, cet<br />

aspect fait à lui seul évoquer le diagnostic de diabète, même en<br />

8 Néphrologie


Figure 7. Néphropathie diabétique.<br />

A. Lésion nodulaire typique de Kimmelstiel-Wilson [42] (flèches). Coloration au trichrome de Masson.<br />

B. Lésion de glomérulosclérose nodulaire et diffuse. Coloration à l’acide périodique de Schiff (PAS).<br />

C. Épaississement des membranes basales. Coloration argentique.<br />

D. Épaississement des membranes basales artériolaires (flèche). Coloration au PAS.<br />

E. Glomérulosclérose diffuse et glomérule ischémique. Trichrome de Masson.<br />

l’absence de lésions glomérulaires évidentes. Les lésions artériolaires<br />

sont prédominantes. Le matériel hyalin remplace progressivement<br />

les parois des vaisseaux afférents et efférents. Alors que<br />

les vaisseaux afférents peuvent être touchés de la même façon<br />

au cours d’autres néphropathies comme l’HTA, l’atteinte des<br />

vaisseaux efférents est spécifique du diabète.<br />

Néphrologie<br />

A B<br />

C D<br />

E<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

D’autres lésions peuvent être observées :<br />

les lésions exsudatives ou fibrin cap, qui sont très éosinophiles,<br />

contenant du matériel lipidique et protéique ; elles sont<br />

une accumulation de matériel hyalin éosinophile entre les<br />

cellules endothéliales des capillaires et la basale glomérulaire,<br />

et sont non spécifiques ;<br />

9


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

les lésions en « goutte » capsulaires (accumulation de matériel<br />

éosinophile entre la membrane basale et les cellules de la<br />

capsule de Bowman), qui sont caractéristiques du diabète ;<br />

des lésions de fibrose non spécifiques siégeant dans les<br />

tubules et le tissu interstitiel.<br />

L’examen en immunofluorescence montre des dépôts linéaires<br />

d’immunoglobulines G et M, d’albumine et de fibrinogène<br />

le long des membranes basales glomérulaires et tubulaires, et sur<br />

la capsule de Bowman.<br />

La microscopie électronique visualise l’épaississement de la<br />

membrane basale glomérulaire. Un épaississement des pieds des<br />

podocytes peut également être visualisé.<br />

■ Dépister la microalbuminurie<br />

“ Point fort<br />

Diagnostic de néphropathie incipiens<br />

Microalbuminurie entre 30 et 300 mg/24 heures à<br />

plusieurs reprises (25 à 250 mg/g de créatinine urinaire).<br />

En l’absence d’un déséquilibre aigu du diabète.<br />

HTA normale (si supérieure à 140/90 : HTA idiopathique).<br />

Le plus souvent rétinopathie sévère (mais son absence<br />

ne permet pas de récuser le diagnostic de néphropathie<br />

diabétique débutante).<br />

La microalbuminurie est définie comme une élimination<br />

urinaire d’albumine comprise entre 30 et 300 mg par 24 heures.<br />

Deux prélèvements doivent être positifs sur une période de 3 à<br />

Négative<br />

Tous les ans pour le DT2<br />

Tous les ans pour le DT1<br />

après 5 ans d’évolution<br />

Bandelette urinaire<br />

Négative<br />

Recherche de<br />

microalbuminurie<br />

Albumine/créatinine<br />

Homme ≥ 2,5<br />

Femme ≥ 3,5<br />

Positive<br />

À répéter deux fois<br />

sur 3 à 6 mois<br />

Si albuminurie persistante<br />

Traiter l’HTA<br />

Optimiser le contrôle glycémique<br />

Traiter les autres facteurs de risques cardiovasculaires<br />

Contrôler la créatinémie<br />

Rechercher une rétinopathie<br />

Éliminer une autre cause de rétinopathie<br />

Évaluation cardiovasculaire<br />

Tableau 2.<br />

Définition de normoalbuminurie, microalbuminurie et macroalbuminurie.<br />

Niveau de l’excrétion<br />

urinaire d’albumine<br />

6 mois pour que l’on puisse affirmer le diagnostic en l’absence<br />

de toute autre anomalie du sédiment urinaire (Tableau 2).<br />

Outre son importance en tant que marqueur précoce de<br />

l’atteinte rénale, la présence d’une microalbuminurie représente<br />

également chez les patients un excès de risque cardiovasculaire<br />

[43] . Dans le diabète de type 2, la microalbuminurie<br />

représente un important facteur prédictif de mortalité cardiovasculaire<br />

(survie de 25 %à10ansencasdemicroalbuminurie<br />

contre 60 % en son absence).<br />

En raison de son importance dans le diagnostic précoce de la<br />

ND et des possibilités thérapeutiques existantes, le dépistage de<br />

la microalbuminurie doit être réalisé systématiquement tous<br />

les ans chez tous les diabétiques de type 1 à partir de la<br />

5 e année de diabète, et chez tous les diabétiques de type 2, tous<br />

les ans dès la découverte du diabète (Recommandations de<br />

l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé<br />

[ANAES]) [44] .<br />

Le dépistage initial puis annuel comporte au minimum la<br />

mesure soigneuse de la PA, le dosage de la créatinine plasmatique,<br />

et la recherche et la quantification d’une microalbuminurie<br />

(Fig. 8).<br />

L’évolution de la néphropathie diabétique vers l’insuffisance<br />

rénale terminale n’est pas inéluctable, les études d’intervention<br />

Positive<br />

mg par 24 heures µg par minute<br />

Normoalbuminurie < 30 < 20<br />

Microalbuminurie 30-300 20-200<br />

Néphropathie manifeste > 300 > 200<br />

Éliminer :<br />

- une glomérulopathie<br />

non diabétique<br />

- une infection urinaire<br />

Quantifier la protéinurie<br />

Traiter l’hypertension et<br />

les autres facteurs de<br />

risques cardiovasculaires<br />

Figure 8. Arbre décisionnel. Dépistage de la protéinurie. DT1 : diabète de type 1 ; DT2 : diabète de type 2 ; HTA : hypertension artérielle.<br />

10 Néphrologie


ont montré que le dépistage systématique, l’équilibre tensionnel<br />

et glycémique strict permettent de ralentir le cours évolutif de<br />

la ND et de retarder l’échéance de l’épuration extrarénale.<br />

“ Point fort<br />

Dosage de la microalbuminurie : Quand ?<br />

Comment ? Pourquoi ?<br />

La microalbuminurie fait partie du bilan annuel<br />

du patient diabétique. Elle n’est dosée plus fréquemment<br />

que si elle est positive, c’est-à-dire supérieure à<br />

30 mg/24 heures.<br />

Elle n’est en rapport avec le diabète que si elle est<br />

retrouvée plusieurs fois et si on a éliminé une pathologie<br />

urinaire, en particulier une infection urinaire ou une<br />

hématurie (examen cytobactériologique des urines) et<br />

une autre pathologie rénale.<br />

Elle a une double signification :<br />

C elle peut être le symptôme d’une néphropathie<br />

diabétique débutante (diabète de type 1, diabète de<br />

type 2) ; il existe le plus souvent une rétinopathie<br />

sévère ; la PA s’élève progressivement ;<br />

C elle peut être le marqueur d’une atteinte<br />

endothéliale rénale non spécifique, en particulier<br />

chez le patient diabétique de type 2, obèse,<br />

hypertendu, hyperlipidémique, et témoigne alors<br />

d’une macroangiopathie diffuse. Elle est associée à<br />

un risque coronarien augmenté.<br />

■ Traitement préventif<br />

de la néphropathie diabétique<br />

De nombreux travaux ont permis de déterminer les facteurs<br />

de progression de l’insuffisance rénale chronique et de définir<br />

des objectifs thérapeutiques précis. Les règles de bonne pratique<br />

clinique ont été établies par un rapport des experts de l’Association<br />

de langue française pour l’étude du diabète et des<br />

affections métaboliques (ALFEDIAM) et de la Société de<br />

néphrologie [45] .<br />

Lorsque le patient diabétique présente les premiers stigmates<br />

d’une atteinte rénale (microalbuminurie) son risque de morbidité<br />

et de mortalité est quatre à six fois plus élevé que celui<br />

d’un diabétique sans atteinte rénale. Sa prise en charge doit être<br />

pluridisciplinaire (diabétologue, néphrologue, diététicien) dans<br />

le cadre d’un réseau de soin spécifique. L’éducation et l’information<br />

de ces patients sont indispensables à la gestion quotidienne<br />

de leur traitement. Elle améliore ainsi leur observance<br />

des règles hygiénodiététiques et du traitement.<br />

L’équilibre rigoureux du diabète et de la PA est le principal<br />

objectif avec le contrôle de la protéinurie. S’ajoutent à cela les<br />

autres traitements préventifs cardiovasculaires : arrêt du tabac ;<br />

traitement de la dyslipidémie ; lutte contre l’obésité et la<br />

sédentarité. L’équilibre nutritionnel, la prévention des amputations,<br />

le suivi ophtalmologique ainsi que l’équilibre phosphocalcique<br />

et la correction de l’anémie sont autant d’éléments à<br />

prendre en compte dans la prise en charge de ces patients. La<br />

préparation à la dialyse ou à la transplantation fait également<br />

partie du suivi.<br />

Équilibre du diabète<br />

L’hyperglycémie est le principal responsable de la néphropathie<br />

diabétique et des autres complications cardiovasculaires.<br />

Suivant le type de diabète, la prise en charge thérapeutique est<br />

différente, mais les études récentes vont dans le sens d’une<br />

intensification du traitement pour les deux types de diabète. Les<br />

Néphrologie<br />

études d’intervention, avec traitement intensif du diabète tant<br />

pour le diabète de type 1 que pour le type 2, ont montré leur<br />

efficacité [46, 47] .<br />

Patient diabétique de type 2 microalbuminurique<br />

La prise en charge a été décrite dans l’étude STENO [48] .<br />

L’objectif de l’équilibre glycémique est de réduire le risque<br />

cardiovasculaire, ainsi que le risque de survenue et de progression<br />

de la microalbuminurie [49] .<br />

Les objectifs d’équilibre glycémique étaient de plus en plus<br />

stricts avec une glycémie à jeun inférieure à 1,26 g/l et une<br />

HbA1c entre 6%et6,5%.Cependant, les objectifs d’HbA1c<br />

sont discutés par une étude de cohorte rétrospective qui montre<br />

que des valeurs basses (6,1 %-6,6 %) et hautes (10,1 %-11,2 %)<br />

d’HbA1c chez des patients de plus de 50 ans sont associées à<br />

une élévation de la mortalité toutes causes confondues [50] .<br />

Le traitement doit être énergique, avec dans un premier<br />

temps une modification du mode de vie : perte de poids<br />

modérée (moins 5%auminimum) et activité physique régulière<br />

pendant 6 mois. En cas de déséquilibre glycémique<br />

persistant, on a recours à d’autres moyens thérapeutiques.<br />

Les autres moyens thérapeutiques sont les antidiabétiques<br />

oraux (ADO) et l’insuline.<br />

Parmi les ADO, la metformine en l’absence de contreindication<br />

constitue la première ligne de traitement du diabète<br />

de type 2 [51] . Dans l’étude UKPDS, elle a permis une réduction<br />

des complications microangiopathiques et cardiovasculaires. Elle<br />

favorise la perte de poids [48] . En cas d’intolérance, une alternative<br />

est possible avec l’acarbose. Le recours précoce aux bithérapies<br />

est souhaitable dès qu’une monothérapie est un échec.<br />

On associe alors la plus forte dose de metformine tolérée<br />

(3 g par jour au maximum) à un autre ADO :<br />

metformine et glitazone si le patient est principalement<br />

insulinorésistant (indice de masse corporelle supérieur à 27 et<br />

syndrome métabolique franc) ;<br />

metformine et insulinosécréteur (glinides) si l’indice de masse<br />

corporelle est inférieur à 27 et le syndrome métabolique<br />

moins marqué.<br />

En cas de contre-indication à la metformine, on utilise<br />

l’association glitazone et insulinosécréteur.<br />

Si l’HbA1c reste insuffisamment contrôlée, on associe les trois<br />

familles d’ADO : metformine, glitazone et insulinosecréteurs. La<br />

metformine est contre-indiquée chez les patients ayant une<br />

clairance de la créatinine inférieure à 60 ml/min. En cas d’échec<br />

ou de contre-indication à la metformine, le recours à l’insuline<br />

est indispensable [52] .<br />

Parmi les nouveaux ADO se trouve la vildagliptine, second<br />

inhibiteur de la dipeptidyl dipeptidase 4 après la sitagliptine. La<br />

Commission de transparence de l’HAS indique que l’association<br />

fixe vildagliptine/metformine est indiquée dans le diabète de<br />

type 2 chez des patients non contrôlés par la metformine seule<br />

à doses maximales. Seule l’association Eucreas ® 50 mg/1 000 mg<br />

est justifiée, mais le rapport efficacité sur effet indésirable est<br />

moyen. Il n’y a pas d’avantage clinique démontré par rapport à<br />

la prise séparée des deux principes actifs [53] .<br />

Patients diabétiques de type 1<br />

L’essai Diabetes Control and Complication Trial a montré<br />

l’intérêt de la prise en charge intensive du diabète de type 1 sur<br />

la microangiopathie [46] . La prise en charge doit être débutée le<br />

plus tôt possible et l’HbA1c cible de moins de 7 % (l’objectif de<br />

l’étude était 6 %, mais en pratique le résultat moyen était à<br />

7,3 % dans le groupe recevant un traitement intensif). Ce<br />

traitement diminuait de 35 %à90%lerisque de survenue des<br />

atteintes microangiopathiques. Un bénéfice à long terme était<br />

également observé, même après la période de traitement<br />

intensif. Le traitement intensif consistait en un minimum de<br />

trois injections d’insuline par jour ou un traitement par pompe<br />

à insuline. Les objectifs glycémiques quotidiens étaient de<br />

0,7 g/l à 1,2 g/l à jeun ou 1,8 g/l en postprandial.<br />

Équilibre de la pression artérielle<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

De nombreuses études ont montré que le contrôle de la PA<br />

avait un effet majeur sur la réduction de la protéinurie et le<br />

11


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

ralentissement de la progression de l’insuffisance rénale tant<br />

pour le diabète de type 1 que pour le diabète de type 2. Les<br />

risques cardiovasculaires et de survenue d’une néphropathie<br />

diminuent parallèlement à la réduction de PA. Cependant, le<br />

contrôle adéquat de la PA chez le patient diabétique est difficile<br />

à obtenir. Seulement 30 % des patients atteignent les objectifs<br />

tensionnels définis. Les combinaisons d’antihypertenseurs sont<br />

nécessaires pour obtenir un contrôle rapide de la PA.<br />

Objectifs de pression artérielle<br />

Afin de limiter l’apparition et la progression de l’insuffisance<br />

rénale au cours de la néphropathie diabétique, les recommandations<br />

internationales (Kidney Disease Outcoms Quality<br />

Initiative) et françaises (ANAES) fixent comme objectif minimal<br />

l’obtention d’une PA inférieure à 130/80 mmHg [54, 55] . La baisse<br />

de la PA réduit le risque de développer une protéinurie indépendamment<br />

de l’agent antihypertenseur utilisé (étude Appropriate<br />

Blood Pressure Control in Diabetes [ABCD]) [56, 57] .La<br />

baisse de PA de 20 mmHg a été associée à une diminution de<br />

47 % du risque de survenue d’un évènement rénal [58] . Certains<br />

traitements antihypertenseurs ont montré un bénéfice supplémentaire<br />

en termes de protection rénale (inhibiteurs du SRA :<br />

inhibiteurs de l’enzyme de conversion [IEC], antagonistes des<br />

récepteurs de l’angiotensine II [ARA2], inhibiteurs directs de la<br />

rénine [IDR]).<br />

L’étude ACCORD [59] réalisée chez des patients diabétiques de<br />

type 2 à haut risque vasculaire n’a pas montré que le contrôle<br />

de la PAS inférieur à 120 mm Hg comparé à un objectif de<br />

140 mmHg diminuait la mortalité cardiovasculaire.<br />

Moyens thérapeutiques<br />

Les difficultés rencontrées pour équilibrer la PA imposent<br />

l’association de plusieurs traitements antihypertenseurs :<br />

antagonistes du SRA ; diurétiques ; bêtabloquants cardioséléctifs<br />

; inhibiteurs calciques.<br />

Le rôle bénéfique des bloqueurs du SRA sur la progression des<br />

néphropathies diabétiques a été mis en évidence pour la<br />

première fois par Lewis et al. en 1993 pour les diabétiques de<br />

type 1, avec un IEC, le captopril [60] . Les autres études concernant<br />

les IEC administrés chez des patients diabétiques de<br />

type 2 microalbuminuriques sont ABCD qui comparait un IEC<br />

versus un antagoniste calcique et Microalbuminuria, Cardiovascular<br />

and Renal Outcomes in the Heart Outcomes Prevention<br />

Evaluation (MICRO-HOPE) (IEC versus placebo) [61] . Dans<br />

l’étude ABCD, l’évolution en termes de protéinurie et d’insuffisance<br />

rénale ne montrait pas de différence significative [56] .<br />

Certaines études se sont intéressées aux ARA2 dans le diabète<br />

de type 2 : Irbesartan Diabetic Nephropathy Trial [58] et Reduction<br />

of Endpoints in NIDDM with the Angiotensin II Antagonist<br />

Losartan (RENAAL) [62] . Trois études dont l’étude RENAAL<br />

sont venues confirmer l’effet bénéfique de la baisse de PA dans<br />

la progression de la néphropathie pour les patients diabétiques<br />

de type 2 [62, 63] . L’analyse a posteriori de RENAAL a également<br />

montré que le bénéfice du losartan était indépendant de la<br />

gravité de l’insuffisance rénale. Le traitement par ARA2 est donc<br />

un traitement néphroprotecteur efficace dans les néphropathies<br />

diabétiques de type 2 avec diminution du DFG.<br />

Le traitement antihypertenseur des patients diabétiques<br />

(diabète de type 1 ou 2) présentant une microalbuminurie et<br />

quel que soit leur degré d’insuffisance rénale doit comporter un<br />

inhibiteur du SRA. Il est recommandé d’inclure un diurétique<br />

thiazidique.<br />

Parmi les nouveaux traitements néphroprotecteurs et antihypertenseurs,<br />

on trouve les IDR. Ils répriment le SRA comme<br />

les IEC ou les ARA2 en baissant le taux d’angiotensine. Ils ne<br />

provoquent pas de toux. Ils ont montré leurs effets antiprotéinuriques<br />

indépendants de la baisse de la pression artérielle<br />

chez le diabétique de type 2 en association avec les autres<br />

traitements antihypertenseurs notamment le losartan [64] .<br />

Réduire la protéinurie<br />

Compte tenu de l’incidence croissante de la néphropathie<br />

diabétique et de la gravité des complications qu’elle engendre,<br />

la prévention de l’évolution de la néphropathie diabétique a fait<br />

l’objet de nombreuses études. La diminution de la protéinurie<br />

par blocage du système rénine-angiotensine-aldostérone est<br />

associée à un ralentissement de la dégradation de la fonction<br />

rénale. Les stratégies visent donc à diminuer au maximum la<br />

protéinurie : la première consiste à associer un IEC à un ARA2 ;<br />

la deuxième est la majoration des doses d’ARA2.<br />

La majoration des doses d’ARA2 au-delà des doses recommandées<br />

a peu d’effet sur la PA mais permet effectivement une<br />

baisse supplémentaire de la protéinurie de 30 % [65] .<br />

L’association d’un IEC à un ARA2 n’apporte un bénéfice que<br />

si le patient est légèrement déshydraté en augmentant la dose<br />

de diurétique pour permettre un blocage efficace du système<br />

rénine-angiotensine. Il apporte alors une baisse supplémentaire<br />

de la protéinurie de plus de 20 % [66] .<br />

De nouvelles études associant les IDR (aliskiren 300 mg) aux<br />

ARA2 (irbesartan 300 mg) ont montré une baisse supplémentaire<br />

de la protéinurie par rapport à la monothérapie [67] .Le<br />

bénéfice en termes de coût/efficacité de l’adjonction des IDR<br />

reste à démontrer [68] .<br />

Réduire la ration protéique<br />

Alors qu’un apport protidique excessif peut être un facteur de<br />

progression de l’insuffisance rénale, la réduction des apports<br />

protidiques n’est acceptée qu’avec réticence. Pourtant, chez les<br />

patients diabétiques stables et bien contrôlés, la restriction<br />

protidique semble avoir un effet bénéfique sur le cours de la<br />

néphropathie. En pratique, l’European Association for the Study<br />

of Diabetes conseille pour les patients présentant une néphropathie<br />

diabétique de réduire l’apport protidique à 0,7-0,9 g/kg/j<br />

et de substituer en partie des protéines végétales aux protéines<br />

animales de façon à réduire en même temps les apports en<br />

lipides et en acides gras saturés. Cette question reste discutée<br />

selon les études avec un risque chez certains patients d’entraîner<br />

une malnutrition. En revanche, lorsque le patient débute<br />

l’épuration extrarénale, les apports protidiques doivent être<br />

rapidement augmentés [55] .<br />

Lutter contre les facteurs de risque<br />

cardiovasculaire associés : dyslipidémie,<br />

obésité, sédentarité et tabagisme<br />

Dyslipidémie des patients ayant une néphropathie<br />

diabétique<br />

Le profil lipidique généralement observé chez les patients<br />

présentant une néphropathie diabétique est celui d’une hyperlipoprotéinémie<br />

de type IV associant une augmentation des<br />

triglycérides et une diminution du cholestérol lié aux lipoprotéines<br />

de haute densité (HDL). L’intensité des perturbations<br />

lipidiques est plus importante chez les patients diabétiques. Ses<br />

perturbations apparaissent avec la microalbuminurie et s’aggravent<br />

avec elle. Les mécanismes de la dyslipidémie sont multiples<br />

: insulinorésistance, syndrome inflammatoire et anomalies<br />

génétiques associés au syndrome métabolique [69] .<br />

Les conseils hygiénodiététiques sont les suivants : réduire les<br />

apports en graisses saturées et augmenter les apports en acides<br />

gras polyinsaturés.<br />

L’utilisation de médicaments diminuant l’insulinorésistance<br />

comme les glitazones permettent de corriger partiellement les<br />

anomalies lipidiques.<br />

Enfin, les patients présentant une néphropathie diabétique<br />

sont des patients à haut risque cardiovasculaire. Les objectifs<br />

thérapeutiques concernant le taux de low density lipoprotein<br />

(LDL)-cholestérol sont donc plus stricts : il doit être inférieur à<br />

1 g/l ou 2,58 mmol/l [70] .<br />

Si le LDL-cholestérol est élevé sans hypertriglycéridémie, le<br />

traitement repose sur une statine. La correction du taux des<br />

triglycérides et du HDL-cholestérol pourrait être obtenue avec le<br />

gemfibrozil qui a montré son efficacité en prévention primaire<br />

et secondaire.<br />

12 Néphrologie


Traitement de la néphropathie incipiens<br />

Équilibre parfait du diabète (HbA1C < 7 %).<br />

Régime hypoprotidique : 0,8 g/kg/j.<br />

Inhibiteurs du SRA.<br />

Objectif tensionnel : PA inférieure à 130/80 mmHg.<br />

Traiter une éventuelle hyperlipidémie et les facteurs de risque<br />

associés.<br />

Néphroprotection<br />

La néphropathie diabétique évolue lentement vers l’insuffisance<br />

rénale terminale, mais certains évènements peuvent<br />

précipiter son évolution, comme la survenue d’une nécrose<br />

tubulaire secondaire à l’injection de produits de contraste iodés<br />

ou à la prise d’anti-inflammatoires non stéroïdiens. Il est donc<br />

important pour ces patients de peser le bénéfice et le risque de<br />

certains examens comme les coronarographies ou artériographies<br />

qui peuvent précipiter le début de l’épuration extrarénale.<br />

Si ces examens sont indispensables, il convient de<br />

préparer le patient par une hydratation suffisante et l’arrêt de<br />

certains médicaments (inhibiteurs du SRA).<br />

Traitement de l’anémie<br />

Le taux d’hémoglobine baisse avec la diminution du DFG.<br />

Une corrélation entre le niveau d’excrétion urinaire d’albumine<br />

et la fréquence de l’anémie a été démontrée [71] .<br />

L’atteinte microvasculaire joue un rôle primordial dans le<br />

développement de l’anémie. Elle apparaît précocement chez les<br />

patients diabétiques. Les agents stimulant l’érythropoïèse<br />

peuvent être utilisés après correction d’une éventuelle carence<br />

martiale. La cible de l’hémoglobine est comprise entre 10 et<br />

12 g/l (soit un hématocrite entre 30 % et 36 %) selon les<br />

recommandations internationales (KDOQI) [72] , et entre 11 et<br />

12 g/dl pour les patients ayant une atteinte cardiaque sévère et<br />

chez les diabétiques selon les recommandations françaises<br />

(Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé<br />

[AFSSAPS]) [73] .<br />

Il faut s’assurer avant le début de traitement par agent<br />

stimulant l’érythropoïèse de l’absence d’autre cause d’anémie :<br />

carence martiale, carence en vitamine B 12, folates ou syndrome<br />

inflammatoire chronique.<br />

Le bénéfice de la correction de l’anémie est discuté à la suite<br />

de la publication de l’étude Trial to Reduce Cardiovascular<br />

Events with Aranesp ® Therapy (TREAT) [74] . Celle-ci étudie le<br />

bénéfice du traitement par darbopoétine alpha chez les patients<br />

diabétiques de type 2 présentant une néphropathie. Elle ne<br />

montre pas de diminution de la mortalité ni des évènements<br />

cardiovasculaires et rénaux. En revanche, cet essai conclut à une<br />

augmentation du nombre d’accidents vasculaires cérébraux chez<br />

les patients randomisés dans le groupe avec une hémoglobine<br />

proche de 13 g/dl.<br />

Vaccination contre l’hépatite B<br />

La vaccination contre l’hépatite B est impérative dès qu’apparaît<br />

l’insuffisance rénale. La vaccination précoce doit être la<br />

règle car il existe une relation directe entre la gravité de<br />

l’insuffisance rénale et le titre des anticorps anti-HBs produits.<br />

Il existe en effet un déficit fonctionnel des cellules T, responsable<br />

notamment d’une diminution de sécrétion d’IL2. Les rappels<br />

doivent être plus fréquents, guidés par le taux des anticorps. Ce<br />

dernier doit être supérieur à 50 mUI/ml.<br />

Le schéma traditionnel recommandé d’une primo-vaccination<br />

est de quatre injections (à 0, 1, 2 et 6 mois). Les doses vaccinales<br />

sont de 40 µg par injection intramusculaire (intradeltoïdienne),<br />

renforcées par rapport à ce qui est habituellement<br />

proposé dans la population générale. La vaccination induit<br />

l’apparition d’anticorps anti-HBs à un titre protecteur dans 50 %<br />

à 80 % des cas chez les patients insuffisants rénaux (contre<br />

90 % à 95 % de la population générale). La répétition des<br />

injections lors de la primovaccination permet d’augmenter de<br />

10%à20%l’efficacité vaccinale chez les patients dialysés [75] .<br />

L’efficacité de la vaccination de rappel à1anapeuétéévaluée.<br />

Néphrologie<br />

L’injection intradermique permettrait de renforcer l’immunogénicité<br />

chez les patients dialysés [76] .<br />

Le niveau d’insuffisance rénale ainsi que l’âge et la présence<br />

du diabète diminuent la réponse vaccinale. En cas de nonréponse<br />

ou de réponse insuffisante, il n’existe pas de consensus<br />

précis. Le pourcentage de non-répondeurs peut atteindre 30 %.<br />

Métabolisme phosphocalcique<br />

Les malades diabétiques et urémiques sont plus fréquemment<br />

atteints d’une ostéopathie adynamique que les urémiques non<br />

diabétiques. Ce type d’atteinte osseuse favorise la survenue de<br />

calcifications des tissus mous. Leurs taux d’hormone parathyroïdienne<br />

intacte sont plus bas que ceux des urémiques non<br />

diabétiques. On recommande la surveillance des dosages<br />

suivants : calcémie, phosphorémie, hormone parathyroïdienne<br />

intacte et 25-OH vitamine D 3.<br />

Préserver le capital veineux<br />

Afin de préserver le capital veineux, il est recommandé<br />

d’éviter les ponctions et perfusions des veines du bras et de<br />

préférer celles du dos de la main, et si possible sur le bras<br />

dominant qui ne sera pas choisi pour faire la fistule artérioveineuse.<br />

Quand l’abord vasculaire est créé, il faut respecter la<br />

veine artérialisée tant qu’elle n’est pas suffisamment dilatée et<br />

éviter toute compression prolongée de la veine et de la fistule.<br />

■ Traitement substitutif<br />

Malgré les progrès de prise en charge des patients présentant<br />

une néphropathie diabétique, un grand nombre d’entre eux et<br />

surtout des diabètes de type 2 arrivent au stade d’insuffisance<br />

rénale terminale. Les possibilités de traitement substitutif sont<br />

alors les mêmes que pour les autres causes d’insuffisance rénale :<br />

la transplantation, l’hémodialyse et la dialyse péritonéale.<br />

Le seuil de filtration glomérulaire de 10 ml/min est habituellement<br />

admis pour débuter l’épuration extrarénale. Mais c’est<br />

dès 30 ml/min que la réflexion sur les modalités de traitement<br />

doit être entreprise. Cette réflexion implique en premier lieu le<br />

patient, son entourage et l’équipe soignante. Il convient en<br />

l’absence de contre-indication de présenter les avantages et les<br />

inconvénients de chacune des méthodes d’épuration extrarénale.<br />

Hémodialyse<br />

Néphropathies diabétiques 18-055-A-10<br />

L’hémodialyse est la modalité d’épuration extrarénale la plus<br />

utilisée. La mortalité de ces patients est extrêmement élevée,<br />

proche de 50 %à2ans [77] . L’optimisation de la prise en charge<br />

de ces patients repose sur les principes suivants : l’instauration<br />

précoce de l’épuration extrarénale, la création d’un accès<br />

vasculaire adapté et l’évaluation régulière de l’état cardiovasculaire<br />

[74] . L’épuration extrarénale doit être débutée, chez les<br />

patients diabétiques, lorsque le DFG baisse en dessous de 6 à<br />

8 ml/min/1,73m 2 , en absence de toute symptomatologie<br />

clinique ou lorsque le DFG est inférieur à 15 ml/min/1,73m 2 en<br />

présence de dénutrition, de surcharge sodée, d’hypertension<br />

non contrôlée ou de signe d’intoxication urémique.<br />

La création de l’abord vasculaire doit être précoce, dès<br />

30 ml/min, en préférant des abords distaux lorsque cela est<br />

possible, après avoir réalisé une cartographie précise artérielle et<br />

veineuse. Les abords proximaux exposent au risque d’ischémie<br />

distale plus fréquente dans cette population de patients<br />

diabétiques [78] .<br />

Des explorations cardiovasculaires à la recherche de lésions<br />

vasculaires périphériques ou d’une cardiopathie ischémique<br />

souvent silencieuse doivent être réalisées avant le début de la<br />

dialyse, puis annuellement.<br />

Le traitement de suppléance doit être adapté : qualité de<br />

dialyse suffisante, membranes haute perméabilité ; le dialysat<br />

doit être enrichi en glucose. L’équilibre tensionnel et glycémique<br />

demeure un des objectifs prioritaires pour éviter les autres<br />

complications micro- et macroangiopathiques. Le recours à<br />

l’insuline est le plus souvent nécessaire.<br />

13


18-055-A-10 Néphropathies diabétiques<br />

La surveillance ophtalmologique et la prévention des lésions<br />

des pieds diabétiques doivent être poursuivies.<br />

Dialyse péritonéale<br />

La dialyse péritonéale continue ambulatoire est actuellement<br />

une méthode de substitution bien acceptée et de nombreux<br />

patients peuvent survivre grâce à cette méthode durant plusieurs<br />

années (5 à 10 ans). De nombreux auteurs ont suggéré<br />

que la dialyse péritonéale continue ambulatoire devait être le<br />

traitement préférentiel des patients diabétiques. Cependant, des<br />

controverses existent et le choix dépend de nombreux facteurs<br />

prenant en compte, le patient, le milieu dans lequel il vit et<br />

l’équipe soignante.<br />

Transplantation<br />

La transplantation est la meilleure alternative de prise en<br />

charge. La survie des patients diabétiques de type 1 et 2 est<br />

meilleure après transplantation rénale que celle des patients<br />

diabétiques dialysés. La transplantation améliore également leur<br />

qualité de vie. Pour les patients diabétiques de type 1, cette<br />

amélioration est observée pour la transplantation rénale isolée<br />

comme pour la transplantation combinée rein et pancréas. La<br />

plupart des études récentes ont montré que le taux de survie du<br />

greffon était similaire pour les patients diabétiques ou non<br />

diabétiques à1et5ans. Les résultats avec donneur vivant sont<br />

meilleurs qu’avec rein cadavérique comme dans la population<br />

générale (80 % versus 64 % de survie du greffon à 5 ans).<br />

La survie des patients diabétiques greffés à 5 ans varie entre<br />

45 % et 84 %. Elle est significativement plus faible que celle des<br />

receveurs non diabétiques, en raison de la mortalité cardiovasculaire<br />

; 36 % des diabétiques greffés meurent de maladies<br />

cardiovasculaires [8] .<br />

Pour cette raison, l’évaluation prétransplantation cardiovasculaire<br />

doit être précoce afin de rechercher une cardiopathie<br />

ischémique souvent silencieuse, par une scintigraphie myocardique<br />

au thalium persantine ou une échographie de stress<br />

avec dobutamine. Une coronarographie est indiquée si un de<br />

ces tests est positif.<br />

Pour les diabètes de type 2, la transplantation est une<br />

transplantation rénale isolée.<br />

En ce qui concerne les diabètes de type 1, si une transplantation<br />

rénale est possible avec un donneur vivant, cette solution<br />

doit être privilégiée. Éventuellement, dans un deuxième temps,<br />

une transplantation pancréatique est proposée ou une greffe<br />

d’îlots. En l’absence de possibilité de transplantation avec<br />

donneur vivant, les patients diabétiques de type 1 de moins de<br />

45 ans sont prioritaires pour bénéficier d’une greffe simultanée<br />

rein et pancréas. Les résultats actuels montrent un taux de<br />

survieà1et4ansrespectivement de 95 % et 90 %. La transplantation<br />

combinée rein-pancréas améliore la morbidité<br />

cardiovasculaire et la qualité de vie [79] .<br />

Une autre alternative pour les patients diabétiques de type<br />

1 est la greffe d’îlots de Langerhans.<br />

La greffe se fait avec les cellules endocrines ou cellules bêta<br />

du pancréas qui sont celles qui produisent l’insuline. Elles ne<br />

représentent que 1%duvolume cellulaire total d’un pancréas<br />

et sont regroupées en îlots dits de Langerhans. La première<br />

étape de la greffe d’îlots est un isolement et une purification de<br />

ces îlots. La quantité d’îlots suffisante à la transplantation<br />

d’une personne nécessite leur isolement à partir de plusieurs<br />

pancréas.<br />

Les îlots sont greffés par voie intraportale et vont s’implanter<br />

dans le foie. Cette intervention nécessite une simple anesthésie<br />

locale et un cathétérisme transhépatique. Un traitement immunosuppresseur<br />

est indispensable.<br />

Les indications sont très limitées et s’adressent à une minorité<br />

de patients : diabétiques déjà greffés ou en attente d’une<br />

transplantation rénale, avec un diabète très instable (épisodes<br />

d’hypoglycémies sévères ou d’acidocétose) [80] .<br />

Cette technique innovante montre cependant des résultats<br />

mitigés avec un taux d’insulino-indépendance de 50 %à1an.<br />

Une équipe canadienne a permis une amélioration des résultats<br />

grâce à l’utilisation d’un nombre d’îlots plus important couplée<br />

.<br />

à une modification des traitements immunosuppresseurs. Ces<br />

résultats sont à confirmer sur une population plus large [81] .<br />

■ Cas particulier du diabète posttransplantation<br />

En Europe, 5%à20%despatients transplantés développent<br />

un diabète en fonction du délai postgreffe (de 6 mois à 10 ans).<br />

Outre l’augmentation du risque cardiovasculaire, le diabète<br />

induit un risque accru de perte du greffon et de décès par<br />

infection.<br />

Les principaux facteurs de risque de survenue d’un diabète<br />

post-transplantation sont : la séropositivité pour l’hépatite C,<br />

l’ethnie (hispanique ou afroaméricaine), l’obésité (index de<br />

masse corporelle supérieure à 30) et le type d’immunosuppression<br />

(les corticoïdes entraînant une résistance à l’insuline et les<br />

inhibiteurs de la calcineurine diminuant l’insulinosécrétion).<br />

L’âge supérieur à 45 ans, l’hérédité et certains groupes human<br />

leukocyte antigen (HLA) sont également des facteurs prédisposant<br />

au développement d’un diabète après transplantation.<br />

■ Conclusion<br />

La néphropathie diabétique est une complication grave du<br />

diabète qui peut être prévenue, dépistée, et dont l’évolution vers<br />

l’insuffisance rénale terminale peut être retardée.<br />

Au cours du diabète de type 2, l’existence d’une néphropathie<br />

diabétique est le marqueur principal de risque cardiovasculaire.<br />

La prise en charge de ces patients doit être globale et multidisciplinaire<br />

afin de ralentir la progression de cette néphropathie<br />

et de réduire le risque de mortalité cardiovasculaire.<br />

Les objectifs thérapeutiques fixés sont alors très stricts en<br />

termes de contrôle de la PA, de la glycémie et de la<br />

dyslipidémie.<br />

Le patient doit être préparé précocement au traitement<br />

substitutif. Les possibilités de transplantation (rein seul, reinpancréas<br />

ou îlots) doivent également être envisagées dès 30 ml/<br />

min en fonction des caractéristiques du patient.<br />

La meilleure compréhension des phénomènes physiopathologiques<br />

devrait permettre de trouver de nouvelles cibles<br />

thérapeutiques.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : de Préneuf H. Néphropathies diabétiques. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-055-A-10,<br />

<strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

16 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0535 (2004)<br />

Néphropathies glomérulaires.<br />

Orientation diagnostique<br />

et évolution<br />

C et<br />

R. Binaut, N. Maisonneuve, P. Vanhille<br />

article envisage les principaux modes de présentation des néphropathies glomérulaires, précise les examens<br />

complémentaires d’orientation diagnostique et la place de la ponction biopsie rénale. Les principales étiologies<br />

des néphropathies glomérulaires aiguës ou chroniques sont rappelées.<br />

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : Glomérulonéphrite ; Insuffisance rénale ; Protéinurie ; Hématurie ; Syndrome néphrotique ; Syndrome<br />

néphritique<br />

■ Introduction<br />

Dans la pratique quotidienne, la découverte d’anomalies urinaires –<br />

protéinurie, hématurie – est une situation fréquente. Le diagnostic repose sur une<br />

démarche fondée sur l’analyse des signes rénaux comportant l’évaluation de la<br />

fonction rénale – créatinine-, des signes extrarénaux, l’anamnèse, et souvent sur<br />

les informations fournies par l’histologie rénale.<br />

‚ Protéinurie<br />

■ Signes rénaux<br />

Malgré un débit de filtration glomérulaire d’environ 120 ml min –1 traduisant<br />

une perméabilité hydro-ionique importante, la barrière capillaire glomérulaire<br />

empêche le passage des protéines de poids moléculaire supérieur à 60 kD et des<br />

éléments figurés du sang. La protéinurie physiologique est en moyenne de 30 à<br />

60 mg j –1 . Une protéinurie est considérée comme significative au-delà de 0,15 g<br />

j –1 .<br />

En routine, la détection de la protéinurie se fait par bandelette réactive. Son<br />

principe (virage d’un indicateur coloré) ne permet qu’une étude semi-quantitative<br />

de la concentration d’albumine sur un échantillon d’urines. Cette méthode très<br />

sensible (elle détecte une concentration de 50 mg l –1 ) ne réagit pas à la présence<br />

de chaînes légères d’immunoglobulines. Par ailleurs de fausses réactions positives<br />

peuvent être observées en cas de bandelette périmée, d’urines alcalines (infection<br />

à germe uréase positif), en présence de détergents ou d’ammonium quaternaire<br />

dans le flacon de recueil.<br />

Sa confirmation passe par un dosage sur échantillon d’urines ou sur la diurèse<br />

des 24 heures. Les techniques de dosage reposent alors le plus souvent sur la<br />

propriété de fixation d’un colorant en présence de protéines. À défaut de disposer<br />

de la protéinurie des 24 heures, on s’aidera du rapport protéine/créatinine<br />

urinaire dont la valeur est à peu près égale à la protéinurie en g j –1 .<br />

La protéinurie au cours des maladies glomérulaires est composée en majorité<br />

d’albumine et en proportions variables de protéines de haut poids moléculaire<br />

telles que les globulines (immunoglobulines notamment). Sa composition peut<br />

être appréciée par la réalisation d’une électrophorèse des protéines urinaires.<br />

Une protéinurie supérieure à 3 g j –1 est d’emblée caractéristique d’une<br />

pathologie glomérulaire. Les protéinuries de volume inférieur sont non<br />

spécifiques et peuvent être liées à d’autres maladies rénales ou à une atteinte des<br />

voies urinaires, ce qui impose la réalisation d’examens simples qui permettent<br />

une orientation étiologique (Tableau 1).<br />

1<br />

Tableau 1. – Conduite à tenir devant une protéinurie<br />

– Éliminer une protéinurie orthostatique chez l’adolescent et l’adulte de moins<br />

de 20 ans<br />

– Numération des hématies et leucocytes/ml<br />

– Sédiment urinaire (cylindres), examen bactériologique<br />

– Créatininémie, électrophorèse des protéines sériques<br />

– Exploration morphologique de l’appareil urinaire (ASP et échographie<br />

rénale ± UIV)<br />

ASP : abdomen sans préparation ; UIV : urographie intraveineuse.<br />

‚ Hématurie<br />

Une hématurie dont la cause n’est pas immédiatement identifiable (cystite,<br />

migration lithiasique) est une manifestation fréquemment révélatrice de maladies<br />

rénales ou urologiques. [1] Elle peut être micro- ou macroscopique. La recherche<br />

d’une anomalie des voies urinaires doit être réalisée de principe, notamment en<br />

cas d’hématurie isolée et après 50 ans où le risque de pathologie néoplasique est<br />

important (par échographie et/ou urographie intraveineuse et/ou uroscanner et<br />

cystoscopie après 50 ans).<br />

La bandelette urinaire a une grande sensibilité car elle détecte 1 à 2 globules<br />

rouges/mm 3 . Les faux négatifs sont exceptionnels. Une bandelette négative<br />

permet donc d’exclure quasi formellement une hématurie. En revanche, il existe<br />

des faux positifs car elle détecte également l’hémoglobine provenant<br />

d’érythrocytes lysés et ne différencie donc pas l’hématurie de l’hémoglobinurie et<br />

réagit également avec la myoglobine. La confirmation de l’hématurie au<br />

laboratoire est donc nécessaire.<br />

Le recueil urinaire doit être réalisé avec les mêmes précautions qu’un examen<br />

cytobactériologique des urines car une numération des leucocytes et une étude<br />

de la bactériologie urinaire sont couplées. Le compte d’Addis-Hamburger reste<br />

l’examen de référence mais sa réalisation, peu pratique, fait souvent préférer un<br />

simple comptage cytologique sur échantillon. Les valeurs considérées comme<br />

pathologiques sont un débit d’hématies supérieur à 10 000/min ou un comptage<br />

supérieur à 10 000 globules rouges/ml.<br />

L’examen microscopique des urines peut apporter des éléments<br />

supplémentaires comme la présence de cylindres hématiques. L’étude au<br />

microscope en contraste de phase par un biologiste expérimenté révèle des<br />

érythrocytes dysmorphiques, fragmentés avec des excroissances et des pertes<br />

segmentaires de la membrane, qui ont perdu presque complètement leur<br />

contenu en hémoglobine. La présence d’acanthocytes (érythrocytes en anneaux)<br />

est encore plus prédictive de l’origine glomérulaire de l’hématurie (Tableau 2).<br />

‚ Évaluation de la fonction rénale<br />

5-0535<br />

C’est un point important dans l’évaluation du patient suspect de néphropathie<br />

glomérulaire comme de toute atteinte rénale, car son altération est un signe de<br />

gravité [2] .


5-0535 - Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution<br />

Tableau 2. – Caractéristiques des hématuries d’origine glomérulaire<br />

– Hématurie macroscopique : totale, sans caillots, de coloration brunâtre,<br />

« Coca-colat »<br />

– Absence de pyurie, de dysurie, de brûlures mictionnelles, de douleurs lombaires<br />

– Présence de cylindres hématiques et/ou d’érythrocytes dysmorphiques et/ou<br />

protéinurie supérieure à 0,5 g jour –1 en l’absence d’hématurie macroscopique<br />

Tableau 3. – Moyens d’évaluation du débit de filtration glomérulaire en<br />

pratique courante<br />

Clairance mesurée (Cl Cr) en ml min –1<br />

ClCr =<br />

U × V<br />

P<br />

où U est la concentration urinaire de créatinine, V est le débit urinaire en<br />

ml min –1 et P la concentration plasmatique de créatinine<br />

Clairance calculée par la formule de Cockcroft et Gault en ml min –1<br />

Cl Cr = 140 – âge (années) × poids (kg) × K [créat] P (µmol l –1 )<br />

K = 1,09 chez la femme<br />

K = 1,26 chez l’homme<br />

L’interprétation du taux de créatinine plasmatique est donc capitale. Ce simple<br />

dosage n’est pas suffisant car la concentration en créatinine plasmatique dépend<br />

de la quantité produite liée aux apports protidiques et à la masse musculaire, et<br />

de l’élimination urinaire. En outre, en raison de la relation exponentielle entre la<br />

créatinine plasmatique et le débit de filtration glomérulaire, une augmentation<br />

minime de la créatinine plasmatique peut correspondre à une diminution<br />

importante du débit de filtration glomérulaire. Ainsi, une créatinine à 90 µmol l –1<br />

peut correspondre à une filtration glomérulaire normale ou à une altération de<br />

50 % de celle-ci. Pour sensibiliser ce dosage, on peut s’aider de la clairance<br />

mesurée à partir d’une période de recueil urinaire ou à défaut de la clairance<br />

calculée par la formule de Cockcroft et Gault (Tableau 3). Des valeurs de clairance<br />

inférieures à 90 ml min –1 chez la femme et 100 ml min –1 chez l’homme<br />

témoignent d’une altération de la fonction rénale.<br />

Il faut savoir répéter ce dosage de créatinine en cas d’altération initiale pour<br />

déterminer le caractère aigu ou chronique ou rapidement progressif de l’atteinte<br />

rénale.<br />

‚ Œdèmes<br />

Contrairement aux œdèmes de l’insuffisance cardiaque ou de la cirrhose, les<br />

œdèmes liés à une pathologie glomérulaire sont souvent périorbitaires au réveil.<br />

Ils sont typiquement blancs, mous, déclives et prennent le godet. La rétention<br />

hydrosodée peut s’aggraver et touche alors les parties génitales, la paroi<br />

abdominale, entraîne des épanchements pleuraux et de l’ascite. La prise de poids<br />

peut être massive et atteindre, voire dépasser les 20 %. [3]<br />

‚ Pression artérielle<br />

La pression artérielle peut être normale, basse ou élevée au cours des<br />

néphropathies glomérulaires.<br />

L’hypertension artérielle fait partie intégrante du syndrome néphritique aigu<br />

(voir infra « Syndrome néphritique aigu ») et accompagne en général les<br />

glomérulonéphrites chroniques (voir infra « Syndrome de glomérulonéphrite<br />

chronique »). Elle est habituellement absente du syndrome de glomérulonéphrite<br />

rapidement progressive (voir infra « Syndrome de glomérulonéphrite rapidement<br />

progressive »).<br />

La présence ou l’absence de ces différents symptômes, leur importance, vont<br />

définir les caractéristiques et le type de syndrome glomérulaire ( Fig. 1). D’autres<br />

éléments sont essentiels à déterminer afin de parvenir au diagnostic étiologique.<br />

‚ Anamnèse<br />

■<br />

Éléments du diagnostic étiologique<br />

Une histoire familiale de néphropathie (en particulier associée à la notion de<br />

surdité) fait suggérer un syndrome d’Alport. La consommation de certains<br />

médicaments ou de substances est impliquée dans certaines néphropathies :<br />

2<br />

Asymptomatique :<br />

Protéinurie 150 mg/j à 3,5 g j -1<br />

Hématurie > 10 000 GR/ml<br />

Glomérulonéphrite rapidement progressive<br />

-Insuffisance rénale<br />

progressive sur quelques jours à<br />

semaines<br />

-Protéinurie<br />

-Hématurie<br />

-Pression artérielle souvent normale<br />

Syndrome néphritique aigu<br />

Début brutal<br />

Insuffisance rénale<br />

Oedèmes et HTA<br />

Hématurie parfois macroscopique<br />

Protéinurie<br />

néphropathie à lésions glomérulaires minimes (anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens [AINS]), glomérulonéphrite extramembraneuse (sels d’or,<br />

D-pénicillamine, AINS), hyalinose segmentaire et focale (héroïne),<br />

glomérulonéphrite extracapillaire (D-pénicillamine).<br />

‚ Présence de signes extrarénaux<br />

L’interrogatoire recherche une altération de l’état général, la notion<br />

d’arthralgies d’allure inflammatoire, de myalgies.<br />

L’examen clinique peut mettre en évidence des signes cutanés (purpura<br />

vasculaire), une atteinte neurologique périphérique de type mono-, multi- ou<br />

polynévrite, des signes oto-rhino-laryngologiques (ORL), des signes pulmonaires<br />

avec dyspnée, hémoptysie et infiltrats parenchymateux sur le cliché de thorax.<br />

On peut retrouver des éléments en faveur d’une pathologie maligne<br />

(adénopathie, etc.). Un foyer infectieux doit être systématiquement recherché.<br />

‚ Place des examens de laboratoire<br />

Après l’analyse urinaire et l’évaluation de la fonction rénale, des examens<br />

biologiques sont demandés en fonction de l’orientation :<br />

– glycémie, cholestérol, triglycérides, low density lipoprotein (LDL) cholestérol ;<br />

– numération-formule sanguine, plaquettes, vitesse de sédimentation (VS),<br />

protéine C réactive (CRP), électrophorèse des protéines sériques ;<br />

– hémocultures en cas de syndrome infectieux évolutif, uriculture,<br />

antistreptolysine (ASLO), streptozyme test, sérologies virales (hépatite C, hépatite<br />

B, virus de l’immunodéficience humaine [VIH]) ;<br />

– complément (CH50, C3, C4), anticorps antinucléaires, anticorps (Ac)<br />

anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA), anticorps antimembrane<br />

basale glomérulaire (Ac anti-MBG), cryoglobulinémie.<br />

‚ Place de l’imagerie<br />

La réalisation d’une échographie rénale permet de vérifier la présence de deux<br />

reins, d’éliminer l’existence d’un obstacle, de préciser la taille des reins. Celle-ci est<br />

souvent normale mais des reins de grande taille (plus de 14 cm) sont observés au<br />

cours des syndromes néphrotiques liés au diabète, à l’amylose ou au VIH. La<br />

présence de petits reins (moins de 9 cm) suggère un processus chronique.<br />

‚ Place de la ponction-biopsie rénale<br />

Hématurie<br />

macroscopique<br />

Syndrome néphrotique<br />

Protéinurie > 3 g j-1 Albumine < 30 g l-1 ± Oedèmes<br />

± Hyperlipémie<br />

Syndrome de néphropathie<br />

glomérulaire chronique<br />

Insuffisance rénale chronique<br />

HTA<br />

Protéinurie > 0,5 g j -1<br />

avec fréquemment hématurie<br />

Figure 1 Présentation clinique des néphropaties glomérulaires.<br />

Elle est généralement nécessaire au diagnostic du type de néphropathie<br />

glomérulaire. Elle permet de guider le traitement et fournit des éléments<br />

pronostiques. Elle est habituellement pratiquée par voie percutanée après<br />

repérage échographique sous anesthésie locale et après vérification de l’absence<br />

de contre-indication chez un patient prémédiqué en décubitus ventral.<br />

Deux prélèvements sont habituellement réalisés pour une étude en<br />

microscopie optique et en immunofluorescence, un troisième fragment pouvant<br />

être examiné en microscopie électronique.<br />

Il y a des situations où la ponction-biopsie rénale (PBR) n’est pas nécessaire. La<br />

survenue d’un syndrome néphrotique pur chez l’enfant sans signes extrarénaux<br />

et sans hypocomplémentémie fait débuter d’emblée une corticothérapie étant


Anamnèse<br />

Fond d’œil<br />

Échographie rénale<br />

+<br />

ASP<br />

Décision<br />

Histoire documentée de diabète<br />

évoluant sur 6 à 8 ans<br />

Rétinopathie diabétique documentée<br />

Volume normal et symétrique<br />

des deux reins<br />

Pas d’investigation complémentaire<br />

donné la grande fréquence de la néphropathie à lésions glomérulaires minimes<br />

dans cette situation. En cas de syndrome néphritique aigu de l’enfant, si le tableau<br />

est typique d’une glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique, en particulier<br />

dans les situations épidémiques, en l’absence d’insuffisance rénale rapidement<br />

progressive, la biopsie n’est effectuée qu’en l’absence d’amélioration rapide du<br />

tableau clinique.<br />

Cet examen n’est généralement pas pratiqué chez les diabétiques, à condition<br />

que le tableau clinique remplisse quelques critères : anamnèse documentée,<br />

succession de normo-, micro- puis macroalbuminurie sur plusieurs années et<br />

diminution progressive de la filtration glomérulaire, hypertension artérielle,<br />

dyslipidémie fréquente, ancienneté du diabète connue et au moins supérieure à<br />

10 ans, présence de complications extrarénales microangiopathiques<br />

(rétinopathie, neuropathie périphérique), absence d’hématurie.<br />

Malheureusement, chez les patients diabétiques de type 2, l’ancienneté du<br />

diabète est souvent difficile à préciser, les complications microangiopathiques<br />

sont parfois absentes alors qu’il existe une authentique néphropathie diabétique,<br />

l’hématurie microscopique n’est pas rare. Cela impose alors d’éliminer d’autres<br />

causes de néphropathie en particulier en cas de détérioration rapide de la<br />

fonction rénale, de développement brutal d’un syndrome néphrotique [4] ( Fig. 2).<br />

■<br />

Syndromes glomérulaires<br />

‚ Protéinurie et/ou hématurie microscopique asymptomatique<br />

Hématurie microscopique isolée<br />

On retient une origine glomérulaire après élimination des causes urologiques.<br />

Le caractère isolé est vérifié par l’absence de protéinurie et d’altération de la<br />

filtration glomérulaire, d’hypertension. Dans cette situation, la principale<br />

néphropathie suspectée correspond à la néphropathie à dépôts mésangiaux<br />

d’immunoglobulines A (IgA) ou maladie de Berger. [1] L’origine glomérulaire<br />

suspectée par l’existence d’anomalies morphologiques des globules rouges (GR)<br />

urinaires ne peut être affirmée en général que par la réalisation d’une biopsie<br />

rénale qui est rarement réalisée dans cette situation car le pronostic est excellent.<br />

Une surveillance annuelle est nécessaire afin de ne pas méconnaître une<br />

évolution défavorable (apparition d’une protéinurie au moins supérieure à 0,5 g<br />

j –1 , d’une dégradation de la fonction rénale, d’une hypertension).<br />

Protéinurie non néphrotique et hématurie asymptomatique<br />

Celle-ci est définie par une protéinurie dont le débit est inférieur à 3 g j –1 ou un<br />

rapport protéinurie/créatininurie inférieur à 3.<br />

Dans cette situation, le risque de pathologie rénale évolutive est tel que la PBR<br />

est généralement indispensable même si la protéinurie est faible (0,5 à 1 g j –1 ).<br />

‚ Hématurie macroscopique<br />

– Début incertain, subit ou récent<br />

– Découverte systématique<br />

Petits reins Asymétrie<br />

symétriques > 2 cm<br />

de grand axe<br />

Absence de rétinopathie diabétique<br />

Exploration des<br />

artères rénales<br />

Les épisodes d’hématurie macroscopique causés par les pathologies<br />

glomérulaires sont surtout observés chez l’enfant et l’adulte de moins de 40 ans. Il<br />

est nécessaire d’éliminer une origine urologique. La plupart des cas sont liés à une<br />

néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA, mais d’autres pathologies<br />

glomérulaires ou interstitielles peuvent être responsables (syndrome d’Alport,<br />

néphrite interstitielle aiguë). Les accès sont typiquement indolores et l’hématurie<br />

est totale, sans caillots (Tableau 2).<br />

Néphropathie à dépôt mésangiaux d’immunoglobulines A<br />

La néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA (GN-IgA) est la néphropathie<br />

glomérulaire la plus fréquente. [2] Le diagnostic est histologique devant l’existence<br />

Volume normal<br />

et<br />

symétrique<br />

Biopsie rénale ?<br />

3<br />

Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution - 5-0535<br />

Dilatation<br />

des voies<br />

urinaires<br />

Explorations<br />

urologiques<br />

de dépôts mésangiaux diffus d’IgA associée à des degrés variés de prolifération<br />

des cellules mésangiales et d’expansion de la matrice mésangiale en microscopie<br />

optique. L’existence de lésions histologiques similaires dans la néphropathie du<br />

purpura rhumatoïde fait discuter des mécanismes physiopathologiques<br />

communs aux deux entités. La GN-IgA peut survenir à tout âge avec un pic<br />

d’incidence dans les 2 e et 3 e décennies de la vie, avec une prépondérance<br />

masculine. L’hématurie macroscopique, survenant dans les 24-48 heures après le<br />

début d’une infection ORL ou gastro-intestinale, est la manifestation la plus<br />

fréquente de la maladie (50 à 60 % des cas). Dans 30 % des cas, elle est<br />

découverte devant l’existence d’une hématurie microscopique associée ou non à<br />

des degrés variables de protéinurie. Dans 10 % des cas, un syndrome néphritique<br />

aigu ou un syndrome néphrotique peuvent révéler la maladie ; il s’agit alors de<br />

formes sévères dont le pronostic est relativement péjoratif. Vingt à 40 % des<br />

patients développent une insuffisance rénale terminale, 5 à 20 ans après le<br />

diagnostic. Les facteurs de risque de progression vers l’insuffisance rénale<br />

terminale sont un âge supérieur à 30 ans, le sexe masculin, la présence d’une<br />

hypertension, l’existence et la persistance d’une protéinurie supérieure à 1 g j –1 ,<br />

l’existence d’une insuffisance rénale au moment du diagnostic, l’absence d’accès<br />

d’hématurie macroscopique, la présence d’une sclérose glomérulaire et/ou d’une<br />

fibrose interstitielle à la PBR. Il n’existe pas à l’heure actuelle de traitement curatif.<br />

Des essais utilisant des glucorticoïdes éventuellement associés à des agents<br />

immunosuppresseurs ont montré des résultats sur la baisse de la protéinurie,<br />

mais l’effet à long terme sur la fonction rénale n’est pas encore clairement établi.<br />

Les inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ont montré une action plus<br />

importante que d’autres antihypertenseurs pour retarder la progression de<br />

l’insuffisance rénale.<br />

Maladie d’Alport<br />

Les accès d’hématurie macroscopique associés à une infection ORL peuvent<br />

également survenir au cours de la maladie d’Alport. Il s’agit d’une maladie<br />

héréditaire liée à une atteinte de la chaîne alpha du collagène IV, constituant de<br />

la membrane basale glomérulaire. La forme de transmission prédominante de ce<br />

syndrome est liée à l’X (80 % des patients) mais d’autres transmissions ont été<br />

retrouvées (par exemple autosomique récessive). La manifestation initiale et<br />

obligatoire de la maladie est l’hématurie. Les hommes atteints ont une hématurie<br />

microscopique persistante souvent présente dès les premières années de vie. Les<br />

femmes, hétérozygotes, peuvent avoir une hématurie microscopique<br />

intermittente. La protéinurie et l’hypertension augmentent en incidence et en<br />

sévérité avec l’âge. L’insuffisance rénale chronique terminale survient chez tous<br />

les hommes atteints entre 15 et 30 ans. Le pronostic est généralement favorable<br />

chez les femmes dans la forme liée à l’X mais l’apparition d’une insuffisance<br />

rénale est possible par l’inactivation aléatoire du chromosome X. Des<br />

manifestations extrarénales sont fréquentes. L’hypoacousie n’apparaît pas avant<br />

la préadolescence et n’est alors détectée que par l’audiométrie. Le déficit va<br />

s’aggraver progressivement pour aboutir à une surdité invalidante. D’autres<br />

manifestations extrarénales en particulier ophtalmologiques sont possibles :<br />

lenticône antérieur, maculopathie. Le diagnostic repose sur les données cliniques,<br />

les examens audiométriques et ophtalmologiques, l’existence d’une transmission<br />

familiale caractéristique, l’étude génétique, et les données fournies par l’histologie<br />

rénale.<br />

‚ Syndrome néphrotique<br />

Figure 2 Conduite à tenir devant une insuffısance rénale<br />

chez un diabétique de type 2. Rapport des experts de<br />

l’Association de langue française contre le diabète et les<br />

maladies métaboliques (Alfediam) et de la Société française<br />

de nutrition (SFN). [4]<br />

Il est défini classiquement par l’association d’une protéinurie supérieure à 3 g<br />

j –1 , d’une hypoalbuminémie inférieure à 30 g l –1 et d’une hypoprotidémie<br />

inférieure à 60 g l –1 . Le syndrome œdémateux et l’hyperlipidémie y sont<br />

fréquemment associés. Selon la cause et le type histologique, sa survenue peut<br />

indiquer une évolution péjorative. Indépendamment de ce risque évolutif, il existe<br />

plusieurs complications potentiellement graves propres au syndrome


5-0535 - Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution<br />

néphrotique (rétention hydrosodée avec anasarque, complications<br />

thromboemboliques, infection, dyslipidémie) qui sont détaillées dans un autre<br />

chapitre. [3]<br />

Tous les patients ayant une protéinurie supérieure à 3 g j –1 ne réunissent pas<br />

toutes les composantes du syndrome néphrotique. Cette distinction est en fait<br />

arbitraire et reflète probablement des différences individuelles de capacité de<br />

synthèse protéique.<br />

Néphropathie diabétique<br />

La néphropathie diabétique représente actuellement la première cause de<br />

protéinurie de volume néphrotique chez l’adulte et justifie un dépistage<br />

systémique par la recherche d’une microalbuminurie chez tous les diabétiques de<br />

type 2 dès le diagnostic et à partir de la 5e année chez les diabétiques de type 1.<br />

Le résultat peut être exprimé en fonction de la diurèse des 24 h ou sur un<br />

échantillon d’urines. Les valeurs pathologiques correspondent à une excrétion<br />

d’albumine supérieure à 30 mg j –1 ou 30 mg g –1 de créatinine et doivent être<br />

confirmées sur un nouvel échantillon. Sa corrélation avec l’existence d’une<br />

néphropathie diabétique débutante est très nette dans le diabète de type 1,<br />

beaucoup moins nette dans le diabète de type 2 où elle est corrélée à la mortalité<br />

cardiovasculaire.<br />

Chez l’enfant, le type histologique le plus répandu est la néphropathie à lésions<br />

glomérulaires minimes ; chez l’adulte en dehors du diabète, les types<br />

histologiques sont beaucoup plus variés.<br />

Néphropathie à lésions glomérulaires minimes<br />

La néphropathie à lésions glomérulaires minimes est la première cause de<br />

syndrome néphrotique chez l’enfant. Son incidence est maximale entre 2 et<br />

7 ans. Elle est le plus souvent primitive mais une association à un contexte<br />

atopique est possible. D’autres associations sont plus rares (maladie de Hodgkin,<br />

consommation d’AINS, cancers). Le tableau clinique habituel est celui d’un<br />

syndrome néphrotique pur sans hypertension artérielle ni hématurie. Le<br />

syndrome œdémateux peut être majeur avec épanchement des séreuses.<br />

L’analyse histologique montre l’absence de lésions visibles en microscopie<br />

optique et l’absence de dépôts en immunofluorescence. Le traitement spécifique<br />

repose sur la corticothérapie à fortes doses qui entraîne une réponse favorable<br />

dans 80 % des cas dans les 4 premières semaines de traitement. Les rechutes<br />

sont fréquentes (50 à 70 % des cas) et souvent multiples. Chez l’adulte, l’évolution<br />

peut être différente avec une réponse plus lente au traitement qui nécessite d’être<br />

prolongé parfois jusqu’au 4e mois. D’autres thérapeutiques sont utilisées dans les<br />

formes corticorésistantes ou corticodépendantes comme la cyclosporine, le<br />

cyclophosphamide.<br />

Hyalinose segmentaire et focale<br />

La hyalinose segmentaire et focale (HSF) primitive associe trois types de lésions<br />

histologiques en général segmentaires (n’affectant que certaines anses) et focales<br />

(ne touchant que certains glomérules). Au niveau des glomérules atteints, il<br />

coexiste des altérations cellulaires, initialement des podocytes, des dépôts hyalins<br />

et de la sclérose. Chez l’enfant, elle réalise typiquement une forme<br />

corticorésistante de syndrome néphrotique ou à rechutes fréquentes mais peut<br />

s’avérer corticosensible dans 30 % des cas. Chez l’adulte, la HSF se présente<br />

souvent avec des degrés variables de protéinurie avec fréquemment une<br />

hématurie microscopique, une hypertension artérielle, une insuffisance rénale.<br />

Les formes liées au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et à la<br />

consommation d’héroïne surviennent quasi exclusivement chez le sujet de race<br />

noire.<br />

Le traitement repose en première ligne sur les corticostéroïdes en association<br />

au traitement symptomatique (inhibiteur de l’enzyme de conversion ou<br />

antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2, statine). [5] Des<br />

immunosuppresseurs peuvent être utilisés. Dans les formes liées au VIH, une<br />

thérapie antirétrovirale est introduite en association au traitement<br />

symptomatique par IEC.<br />

Glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

La glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM) est la plus fréquente des<br />

néphropathies glomérulaires responsables de syndrome néphrotique chez<br />

l’adulte entre 30 et 60 ans. Elle se caractérise histologiquement par un<br />

épaississement de la membrane basale glomérulaire induite par des dépôts<br />

sous-épithéliaux d’immunoglobulines et de complément. La protéinurie est<br />

d’importance variable et s’associe fréquemment à une hématurie microscopique.<br />

L’hypertension artérielle est présente au moment du diagnostic dans 10 à 45 %<br />

4<br />

des cas. La GEM est le plus souvent primitive mais peut s’associer à de grandes<br />

variétés de pathologies. L’évolution est variable. Globalement 25 % des patients<br />

connaissent une rémission spontanée. Chez 50 % des patients, l’évolution est<br />

péjorative avec apparition d’une insuffisance rénale chronique progressive. Parmi<br />

les facteurs pronostiques les plus pertinents, on retient l’existence d’une<br />

insuffisance rénale chronique au moment du diagnostic ou son apparition au<br />

cours du suivi, l’existence d’une protéinurie abondante et sa persistance au cours<br />

du suivi. La prise en charge thérapeutique doit tenir compte des particularités<br />

évolutives, des effets à long terme des traitements immunosuppresseurs et<br />

repose en premier lieu sur un traitement symptomatique. Un traitement plus<br />

lourd sera discuté en cas de critères d’évolution défavorable. Il faut souligner le<br />

risque thromboembolique (en particulier de thrombose des veines rénales) élevé<br />

chez ces patients atteints de GEM avec syndrome néphrotique. Un traitement<br />

anticoagulant efficace doit être mis en œuvre dès que l’albuminémie est<br />

inférieure à 20 g/l.<br />

Amylose rénale<br />

L’amylose rénale se manifeste fréquemment par un syndrome néphrotique.<br />

Les amyloses les plus fréquentes sont l’amylose immunoglobulinique AL et<br />

l’amylose AA des maladies inflammatoires ou infectieuses. La définition est avant<br />

tout histologique à partir de prélèvements pouvant provenir de différents sites<br />

(glandes salivaires accessoires, peau, graisse abdominale) lorsque l’amylose est<br />

suspectée cliniquement, ou d’une PBR en cas de protéinurie isolée. Elle est<br />

caractérisée par des dépôts fibrillaires amorphes extracellulaires se localisant<br />

d’abord dans le mésangium, le long de la membrane basale et dans la paroi des<br />

vaisseaux. Ces dépôts adoptent une biréfringence rouge-vert en lumière polarisée<br />

après coloration par le rouge Congo. La caractérisation de l’amylose repose sur<br />

l’immunofluorescence avec antisérum antiprotéine AA, antisérum antichaînes<br />

légères d’immunoglobulines.<br />

Amylose immunoglobulinique<br />

L’amylose immunoglobulinique est la forme probablement la plus fréquente et<br />

la plus sévère. L’âge moyen au moment du diagnostic est de 64 ans avec une<br />

légère prédominance masculine. Moins de 25 % des patients atteints d’amylose<br />

AL ont une prolifération plasmocytaire en rapport avec un myélome multiple au<br />

moment du diagnostic. Les symptômes les plus fréquents sont l’asthénie et<br />

l’amaigrissement, l’existence d’un syndrome néphrotique, d’une hypotension<br />

artérielle orthostatique, d’une atteinte neurologique de type neuropathie<br />

périphérique. En cas d’insuffisance rénale, l’échographie retrouve des reins de<br />

grande taille. L’hypertension artérielle de même que l’hématurie est absente. La<br />

cardiopathie amyloïde se complique de troubles du rythme et de la conduction<br />

avec un risque de mort subite élevé. L’atteinte digestive entraîne des troubles de<br />

la motilité, un syndrome de malabsorption, des hémorragies. Un syndrome du<br />

canal carpien est parfois présent. L’atteinte cutanée se manifeste par un purpura<br />

ou des ecchymoses périorbitaires, des papules ou des plaques localisées au<br />

niveau de la face et de la partie supérieure du tronc. La détection d’un composant<br />

monoclonal circulant ou urinaire fait appel aux techniques d’immunofixation. Le<br />

pronostic est sévère avec une survie médiane de 12 mois (6 mois en cas<br />

d’atteinte cardiaque) avec moins de 25 % des patients vivants à 3 ans. L’atteinte<br />

cardiaque rend compte à elle seule de 40 % des décès. Le traitement spécifique<br />

repose sur l’association melphalan-prednisone qui permet un taux de réponse de<br />

39 % chez les patients indemnes d’atteinte cardiaque. Fondés sur les résultats<br />

prometteurs du melphalan à fortes doses et de l’autogreffe dans le traitement des<br />

myélomes, des protocoles d’autogreffe sont en cours d’évaluation en<br />

comparaison au traitement conventionnel. [6]<br />

Amylose AA<br />

Contrairement à l’amylose AL, l’insuffisance cardiaque congestive, la<br />

neuropathie périphérique, le syndrome du canal carpien sont rares dans<br />

l’amylose AA. Après le rein, l’atteinte digestive est la plus fréquente. Les<br />

rhumatismes inflammatoires (polyarthrite rhumatoïde) sont devenus la cause la<br />

plus fréquente devant les maladies infectieuses (tuberculose) et les maladies<br />

inflammatoires du tube digestif. L’amylose AA peut compliquer la maladie<br />

périodique (fièvre méditerranéenne familiale) dont la transmission est<br />

autosomique récessive et touche les juifs sépharades et les Arméniens. Elle se<br />

manifeste typiquement par des accès brutaux et périodiques de douleurs<br />

abdominales, de pleurésies ou d’arthralgies inflammatoires survenant dès<br />

l’enfance ou l’adolescence avant l’apparition des manifestations rénales qui<br />

peuvent parfois n’être que la seule expression de la maladie. Le traitement repose<br />

sur la colchicine qui prévient le développement de l’atteinte rénale et peut<br />

permettre une régression du syndrome néphrotique et une stabilisation de la<br />

fonction rénale.


Tableau 4. – Glomérulonéphrite avec hypocomplémentémie<br />

1. Maladies systémiques<br />

LES ↓ C4 ↓ C3<br />

Cryoglobulinémie ↓ C4 C3 normal<br />

Endocardite bactérienne ↓ C4 ↓ C3<br />

2. Maladies rénales<br />

GNA post-streptococcique C4 normal ↓ C3<br />

GN membranoproliférative :<br />

– type 1 ↓ C4 ↓ C3<br />

– type 2 C4 normal ↓ C3 (C3 NEF +)<br />

LES : Lupus érythémateux systémique ; GN : glomérulonéphrite ; GNA : glomérulonéphrite aiguë.<br />

Maladies de dépôts d’immunoglobulines monoclonales<br />

Un syndrome néphrotique peut révéler d’autres maladies de dépôts<br />

d’immunoglobulines monoclonales (maladie de dépôts de chaînes légères ou<br />

syndrome de Randall). Si l’atteinte rénale domine le tableau clinique avec<br />

syndrome néphrotique, hypertension artérielle, hématurie microscopique et<br />

insuffisance rénale progressive, des manifestations extrarénales sont possibles :<br />

hépatomégalie avec cholestase, atteinte cardiaque. Le diagnostic repose sur<br />

l’histologie rénale et la présence inconstante d’une immunoglobuline<br />

monoclonale circulante sanguine ou urinaire. L’aspect histologique le plus<br />

classique est celui d’une glomérulosclérose nodulaire comparable à celle du<br />

diabète mais d’autres formes sont possibles. Le diagnostic impose la mise en<br />

évidence de dépôts monotypiques, le plus souvent kappa, le long des<br />

membranes basales glomérulaires et tubulaires.<br />

Glomérulonéphrite membranoproliférative<br />

La glomérulonéphrite membranoproliférative est rare et se manifeste dans<br />

approximativement 50 % des cas par un syndrome néphrotique mais d’autres<br />

modes de présentation sont possibles. Elle peut être primitive ou s’associer à des<br />

pathologies aussi variées que l’infection par le virus de l’hépatite C associée ou<br />

non à l’existence d’une cryoglobulinémie mixte, à certaines maladies<br />

systémiques (lupus érythémateux systémique), à certaines infections bactériennes<br />

(endocardite), à des proliférations lymphoplasmocytaires (lymphome B, leucémie<br />

lymphoïde chronique). Dans les formes liées au virus de l’hépatite C, les signes<br />

rénaux sont isolés ou s’associent à une vascularite cryoglobulinémique,<br />

entraînant une altération de l’état général, un purpura vasculaire et une<br />

neuropathie périphérique. Selon les associations observées, deux grands types<br />

histologiques sont possibles avec, dans tous les cas, un épaississement des parois<br />

capillaires glomérulaires et une prolifération cellulaire de type endocapillaire. Les<br />

dépôts d’immunoglobulines et de complément sont typiquement de topographie<br />

sous-endothéliale dans le type 1 donnant un aspect en double contour de la<br />

membrane basale. Dans le type 2, il existe des dépôts de composition inconnue<br />

dits « denses » au sein des membranes basales glomérulaires. [2]<br />

L’hypocomplémentémie est fréquente, quelle que soit l’étiologie, et peut avoir<br />

valeur d’orientation. Elle a ceci de particulier qu’elle perdure, contrairement à<br />

l’hypocomplémentémie de la glomérulonéphrite aiguë poststreptococcique qui<br />

est transitoire (Tableau 4).<br />

‚ Syndrome néphritique aigu<br />

Il est caractérisé par un début brutal, une insuffisance rénale aiguë d’intensité<br />

variable, une rétention hydrosodée avec œdème, une hypertension et une<br />

protéinurie parfois de volume néphrotique.<br />

Glomérulonéphrite aiguë<br />

Ce tableau est typiquement réalisé par la glomérulonéphrite aiguë (GNA) de<br />

l’enfant dont le début survient après un intervalle libre de 1 à 3 semaines après<br />

une infection ORL à streptocoque b-hémolytique. La guérison est la règle dans un<br />

délai variable selon les cas avec une fonction rénale se normalisant en<br />

4 semaines. Les anomalies urinaires peuvent persister plus longtemps, parfois des<br />

années. Des mesures répétées du complément sont utiles au diagnostic. La<br />

diminution du C3 est précoce et se normalise en 6 à 8 semaines. La persistance<br />

d’un C3 bas après 8 semaines doit orienter le clinicien vers un autre diagnostic<br />

(Tableau 4). Une augmentation des ASLO, du streptozyme-test peut fournir des<br />

éléments d’orientation en faveur d’une infection à streptocoque. La biopsie, si elle<br />

est réalisée, montre typiquement une prolifération endocapillaire diffuse et des<br />

dépôts en massue (humps) sur le versant externe des capillaires glomérulaires,<br />

composés d’immunoglobulines G et de C3. Dans des formes sévères, une<br />

5<br />

Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution - 5-0535<br />

Tableau 5. – Critères diagnostiques du lupus érythémateux systémique<br />

(selon l’American College of Rheumatology [ACR] 1997)<br />

1. Rash malaire<br />

2. Rash discoïde<br />

3. Photosensibilité<br />

4. Ulcérations buccales<br />

5. Arthrites non érosives (de plus de deux articulations périphériques)<br />

6. Sérite<br />

– a- pleurésie<br />

– b- péricardite<br />

7. Atteinte rénale<br />

– a- protéinurie persistante > 0,5gj –1 ou > +++<br />

– b- cylindres urinaires (GR, GB)<br />

8. Atteinte neurologique<br />

– a- convulsions<br />

– b- psychose<br />

9. Atteinte hématologique :<br />

– a- anémie hémolytique<br />

– b- leucopénie < 4 000/mm 3 à deux reprises<br />

– c- lymphopénie < 1 500/mm 3 à deux reprises<br />

– d- thrombopénie < 100 000/mm 3<br />

10. Anticorps antinucléaires<br />

11. Perturbations immunologiques :<br />

– a- anticorps anti-ADN natifs<br />

– b- anticorps anti-Sm<br />

– c- anticorps antiphospholipides (anticorps anticardiolipine, anticoagulant<br />

circulant, fausse réaction syphilitique)<br />

Quatre critères simultanés ou successifs assurent le diagnostic avec une sensibilité et une spécificité de 96 %.<br />

ADN : acide désoxyribonucléique ; GR : globules rouges ; GB : globules blancs.<br />

prolifération extracapillaire peut être présente avec souvent une évolution<br />

défavorable sur le plan clinique, marquée par une insuffisance rénale rapidement<br />

progressive. Le traitement est essentiellement symptomatique, visant à lutter<br />

contre la rétention hydrosodée. L’antibiothérapie n’est utile qu’en cas d’infection<br />

évolutive. D’autres infections bactériennes comme l’endocardite bactérienne<br />

peuvent se compliquer de syndrome néphritique aigu, donnant alors des aspects<br />

histologiques assez proches avec parfois prolifération extracapillaire. La prise en<br />

charge de ces glomérulonéphrites nécessite une éradication du foyer infectieux<br />

initial qui est parfois latent : mal perforant plantaire chez le diabétique, foyers<br />

infectieux cutanés multiples chez le toxicomane, l’éthylique.<br />

Lupus érythémateux systémique<br />

Le syndrome néphritique aigu peut constituer un des modes de révélation des<br />

glomérulonéphrites du lupus érythémateux systémique en particulier des formes<br />

sévères. [7] Les anomalies urinaires (protéinurie et/ou hématurie) avec ou sans<br />

insuffisance rénale sont présentes dans 25 à 50 % des cas au moment du<br />

diagnostic. L’hypertension artérielle et le syndrome néphrotique sont volontiers<br />

présents dans les formes sévères. Le diagnostic repose sur l’existence fréquente<br />

de signes extrarénaux, des lésions histologiques caractéristiques et la présence<br />

d’anomalies immunologiques (hypocomplémentémie, anticorps antinucléaires,<br />

anticorps anti-acide désoxyribonucléique anticorps anti-ADN natifs). Ces éléments<br />

ont été regroupés en critères diagnostiques (Tableau 5).<br />

Les anticorps antinucléaires présents dans 90 % des cas ont une grande valeur<br />

diagnostique. La technique la plus utilisée est l’immunofluorescence sur cellules<br />

Hep 2. Les anticorps anti-ADN natifs sont présents dans 40 à 90 % des cas ; la<br />

recherche se fait par test Elisa (trop sensible, peu spécifique) ou par technique<br />

radio-immunologique (test de Farr). Les anticorps dirigés contre les antigènes<br />

nucléaires solubles peuvent être révélés par des techniques<br />

d’immunoprécipitation. Les plus spécifiques sont les anticorps anti-Sm (présents<br />

dans 30 % des cas). Une hypocomplémentémie est observée dans trois quarts de<br />

ces cas. Les fractions C4 et C3 sont abaissées, surtout dans les formes sévères. La<br />

plupart des patients ayant une néphropathie lupique ont une glomérulonéphrite<br />

à dépôts de complexes immuns. La classification révisée de l’Organisation<br />

mondiale de la santé (OMS) reconnaît six classes de néphropathies glomérulaires<br />

lupiques. Les formes prolifératives focales (< 50 % des glomérules atteints) et<br />

diffuses (> 50 % des glomérules atteints) sont les plus fréquentes et les plus<br />

sévères.<br />

Un traitement intensif associant une corticothérapie à un immunosuppresseur<br />

(classiquement cyclophosphamide) est recommandé dans les formes sévères. En<br />

phase de rémission, un traitement d’entretien reposant sur l’azathioprine et des<br />

doses plus faibles de corticostéroïdes nécessite souvent d’être prolongé plusieurs


5-0535 - Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution<br />

années. Les rechutes sont un problème fréquent, suspectées par la réapparition<br />

ou la majoration des anomalies urinaires et/ou l’aggravation de la fonction<br />

rénale. Dix à 25 % des patients évoluent vers l’insuffisance rénale chronique<br />

terminale à 10 ans.<br />

‚ Syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressive<br />

Le tableau clinique comporte souvent une hématurie macroscopique<br />

inaugurale, l’absence habituelle d’hypertension artérielle, et une insuffisance<br />

rénale d’aggravation rapide. Ce syndrome constitue une urgence médicale et une<br />

indication impérative à la PBR qui montre la présence d’une prolifération<br />

extracapillaire réalisant des croissants cellulaires et fréquemment des lésions de<br />

nécrose fibrinoïde. L’analyse en immunofluorescence permet l’orientation<br />

étiologique.<br />

Syndrome de Goodpasture<br />

L’immunofluorescence peut révéler des dépôts linéaires d’immunoglobulines<br />

G qui, associés à la présence d’autoanticorps circulants dirigés contre la<br />

membrane basale glomérulaire, confirment alors le diagnostic de syndrome de<br />

Goodpasture. Ce syndrome est complet lorsqu’il s’associe à des hémorragies<br />

alvéolaires entraînant une dyspnée, des hémoptysies avec infiltrats<br />

radiologiques. Le pronostic vital et rénal dépend de la précocité de la prise en<br />

charge. Un taux de créatinine sérique supérieur à 530 µmol l –1 à l’admission est<br />

de pronostic très défavorable. Le traitement conventionnel repose sur des bolus<br />

de méthylprednisolone relayés par une corticothérapie orale à fortes doses, du<br />

cyclophosphamide et des échanges plasmatiques, jusqu’à disparition des Ac<br />

anti-membrane basale glomérulaire.<br />

Glomérulonéphrite pauci-immune<br />

Le terme de glomérulonéphrite pauci-immune s’applique lorsque les dépôts<br />

immuns sont faibles ou absents. Ces glomérulonéphrites sont associées à la<br />

présence d’anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles (ANCA)<br />

dans 80 % des cas et sont l’expression d’une vascularite des petits vaisseaux<br />

limitée ou non aux reins . [8]<br />

Granulomatose de Wegener<br />

La présence d’une glomérulonéphrite pauci-immune associée à des signes de<br />

vascularite systémique et d’inflammation granulomateuse du tractus respiratoire<br />

suggère le diagnostic de granulomatose de Wegener. Plus de 90 % des patients<br />

atteints de cette affection ont une atteinte des voies aériennes supérieures et/ou<br />

inférieures. Il peut s’agir de manifestations évoquant une sinusite, une otite<br />

moyenne, des ulcérations de la muqueuse nasale allant parfois jusqu’à la nécrose<br />

du septum aboutissant à la déformation du nez qui prend un aspect en pied de<br />

marmite. L’atteinte trachéale entraîne un stridor, des sténoses potentiellement<br />

graves. L’atteinte pulmonaire se traduit par des nodules radiologiques parfois<br />

excavés alors que la capillarit alvéolaire entraîne hémoptysies et infiltrats. Les<br />

ANCA sont le plus souvent de fluorescence cytoplasmique et dirigés contre la<br />

protéinase 3. Le traitement des formes sévères repose initialement sur<br />

l’association corticostéroïdes et cyclophosphamide et permet une rémission<br />

complète dans 75 % des cas. Un traitement de maintenance est ensuite institué<br />

en prévention des rechutes et est en général prolongé plusieurs mois.<br />

Polyangéite microscopique<br />

La polyangéite microscopique réalise un tableau de vascularite nécrosante des<br />

petits vaisseaux sans inflammation granulomateuse. Les ANCA (présents dans<br />

plus de 80 % des cas) sont le plus souvent de fluorescence périnucléaire et dirigés<br />

contre la myéloperoxydase. Elle est la cause la plus fréquente de syndrome<br />

pneumorénal (Tableau 6). Le traitement des formes sévères repose sur un<br />

traitement assez proche de celui de la granulomatose de Wegener qui permet<br />

alors d’obtenir une rémission dans environ 80 % des cas. Des rechutes sont<br />

possibles et nécessitent une surveillance prolongée. [8]<br />

6<br />

Tableau 6. – Syndromes pneumorénaux<br />

Polyangéite microscopique<br />

ANCA +<br />

Maladie de Wegener ANCA +<br />

Glomérulonéphrites rapidement<br />

progressives<br />

Syndrome de Goodpasture<br />

Ac anti-MBG +<br />

Lupus érythémateux systémique<br />

Ac antinucléaires +<br />

Cryoglobulinémie Cryo. +<br />

Autres Œdème pulmonaire et<br />

insuffısance rénale aiguë<br />

Décompensation cardiaque<br />

sévère<br />

Infections : hantavirus,<br />

légionellose, leptospirose<br />

Ac : Anticorps ; ANCA : anti-neutrophil cytoplasmic antibodies.<br />

Dépôts granuleux d’immunoglobuline [1]<br />

Troisième possibilité, celle où l’immunofluorescence révèle la présence de<br />

dépôts granuleux d’immunoglobulines. Le syndrome de glomérulonéphrite<br />

rapidement progressive vient alors compliquer l’évolution d’une maladie<br />

systémique (lupus érythémateux systémique, purpura rhumatoïde,<br />

cryoglobulinémie) ou infectieuse (endocardite, infection cutanée), d’une<br />

glomérulonéphrite primitive (glomérulonéphrite membranoproliférative,<br />

GN-IgA). [2]<br />

‚ Syndrome de glomérulonéphrite chronique<br />

L’insuffisance rénale chronique peut être un mode de révélation des<br />

néphropathies glomérulaires, parfois à un stade avancé. À ce stade, la biopsie est<br />

rarement pratiquée d’autant que les reins sont souvent de petite taille. L’aspect<br />

est habituellement une sclérose plus ou moins importante des glomérules (pains<br />

à cacheter) avec fibrose interstitielle et atrophie tubulaire. La biopsie peut<br />

néanmoins être pratiquée en particulier lorsqu’il existe un doute sur une maladie<br />

familiale tels que le syndrome d’Alport ou la maladie de Fabry. Cette maladie, liée<br />

à un déficit enzymatique en alphagalactosidase A dont la transmission est liée à<br />

l’X, se manifeste habituellement dès l’enfance par des manifestations<br />

douloureuses des extrémités, des angiokératomes notamment aux plis<br />

interfessiers, des accidents vasculaires cérébraux hémorragiques ou ischémiques<br />

et une atteinte cardiaque. Dans certains cas, l’atteinte est exclusivement rénale. Le<br />

diagnostic repose sur l’histoire familiale, l’existence d’un déficit en<br />

alphagalactosidase A leucocytaire, un aspect de vacuolisation des cellules<br />

épithéliales glomérulaires et tubulaires due à l’accumulation glycolipidique. Un<br />

traitement apportant l’enzyme défectueuse est maintenant disponible et permet<br />

de prévenir l’atteinte neurologique et l’atteinte cardiaque qui font la gravité du<br />

tableau. Une stabilisation de la fonction rénale peut être espérée.<br />

Au stade d’insuffisance rénale chronique, le traitement repose essentiellement<br />

sur un contrôle rigoureux de l’hypertension artérielle. Celle-ci représente un<br />

facteur pronostique majeur au cours des néphropathies glomérulaires. Sa<br />

persistance est corrélée avec la progression de l’insuffisance rénale. Elle doit être<br />

traitée vigoureusement avec des objectifs tensionnels bas (< 125/75 si<br />

protéinurie > 1g j –1 ). Les autres aspects du traitement comportent le traitement<br />

antiprotéinurique (par les IEC et/ou les ARA 2 et le régime hypoprotidique), la prise<br />

en charge des conséquences de l’insuffisance rénale chronique (traitement de<br />

l’anémie, contrôle de l’hyperphosphorémie, de l’hyperparathyroïdie, de la<br />

dyslipidémie), la préparation à la dialyse et à la transplantation rénale.


R. Binaut (Praticien hospitalier)<br />

N. Maisonneuve (Praticien hospitalier)<br />

P. Vanhille (Praticien hospitalier)<br />

Adresse e-mail: vanhille-p@ch-valenciennes.fr<br />

Services de néphrologie-médecine interne et hémodialyse, centre hospitalier de Valenciennes, avenue Desandrouins, 59300 Valenciennes, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : R. Binaut, N. Maisonneuve, P. Vanhille. Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Akos, 5-0535, 2003, 7 p<br />

[1] Topham PS, Hayer SJ, Furness GN. Glomerular disease as a cause of isolated<br />

microscopie hematuria. Q J Med 1994; 87: 329-336<br />

[2] Hricik DE, Chung-Park M, Sedor JR. Glomerulonephritis. N Engl J Med<br />

1998; 339: 888-899<br />

[3] Orth SR, Ritz E. The nephrotic syndrome. N Engl J Med 1998; 338: 1202-1211<br />

[4] Rapports des experts de l’Alfediam et de la SFN. Prise en charge des diabétiques<br />

urémiques Diabetes Metab 2000; 26: 81-87<br />

Références<br />

7<br />

Néphropathies glomérulaires. Orientation diagnostique et évolution - 5-0535<br />

[5] Korbet SM. Primary focal segmental glomerulosclerosis. J Am Soc Nephrol<br />

1998; 9: 1333-1340<br />

[6] Kyle RA, Gertz MA. Primary systemic amyloïdosis: Clinical and laboratory<br />

features in 474 cases. Semin Hematol 1995; 32: 45-59<br />

[7] Cameron JS. Lupus nephritis. J Am Soc Nephrol 1999; 10: 413-424<br />

[8] Jennette JC, Falk RJ. Small-vessel vasculitis. N Engl J Med 1997; 337:<br />

1512-1523


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0570<br />

L es<br />

Néphropathies vasculaires<br />

A Meyrier<br />

reins reçoivent le quart du débit cardiaque qui se distribue dans les artères rénales, leurs grosses branches de<br />

division, puis les artères arquées, les artères interlobulaires et enfin les artérioles afférente et efférente du<br />

glomérule, lui-même formé d’un peloton capillaire, le flocculus. Les néphropathies vasculaires sont fréquentes et un<br />

grand nombre d’affections rénales non primitivement vasculaires comportent des lésions de cet arbre artériel. La<br />

logique veut que l’on intègre dans les néphropathies vasculaires les lésions allant du tronc aux plus fines ramifications<br />

de cet ensemble. Tout ici est sous-tendu par la notion d’ischémie rénale.<br />

© 2003 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : ischémie rénale, hypertension rénovasculaire, néphroangiosclérose bénigne, néphroangiosclérose<br />

maligne, rein sclérodermique, embolies de cholestérol, angéites.<br />

■ Ischémie rénale<br />

Les expériences de Goldblatt permettent de<br />

comprendre la maladie humaine. Les expériences de<br />

Goldblatt chez le chien (sténose d’une ou des deux<br />

artères rénales) et de Page (enserrement du rein<br />

dans un sac de Cellophanet) ont permis de<br />

découvrir l’hypertension rénovasculaire et le<br />

système rénine-angiotensine-aldostérone [5] .<br />

Modèle de Goldblatt « deux reins-un clip »<br />

La sténose d’une artère rénale est hémodynamiquement<br />

fonctionnelle lorsqu’elle réduit le calibre de<br />

ce vaisseau de plus de 60 %. La riposte<br />

physiologique est destinée à protéger la pression<br />

hydrostatique dans le flocculus glomérulaire, donc le<br />

débit de filtration glomérulaire (DFG).<br />

La diminution de pression détectée par les<br />

barorécepteurs entraîne une sécrétion de rénine,<br />

une élaboration d’angiotensine II (Ang II), qui stimule<br />

la sécrétion d’aldostérone. Il existe une<br />

vasodilatation de l’artériole afférente, mais surtout<br />

une vasoconstriction de l’artériole efférente,<br />

richement dotée de récepteurs de l’Ang II. Le DFG est<br />

conservé. Tout traitement contrecarrant la<br />

vasodilatation de l’artériole afférente (antiinflammatoires<br />

non stéroïdiens [AINS]), la<br />

vasoconstriction de l’artériole efférente (antagonistes<br />

de l’Ang II), de même qu’une surcorrection de<br />

l’hypertension artérielle (HTA) au-dessous d’une<br />

pression de perfusion critique, entraîne une baisse<br />

du DFG [2, 10, 11] .<br />

Le tubule réabsorbe le sodium de façon<br />

inappropriée. L’urine du côté de la sténose est donc<br />

rare, concentrée et pauvre en sodium. Néanmoins, la<br />

volémie n’augmente pas puisque le rein opposé,<br />

normalement perfusé, maintient une excrétion<br />

sodique appropriée.<br />

En résumé, dans ce modèle, il existe :<br />

✔ une HTA avec élévation de<br />

l’activité rénine plasmatique (ARP)<br />

et de l’Ang II ;<br />

✔ un hyperaldostéronisme secondaire<br />

avec tendance à l’hypokaliémie ;<br />

✔ une ARP augmentée dans la veine<br />

rénale du côté de la sténose par<br />

rapport au côté sain ;<br />

✔ l’excrétion retardée d’une urine<br />

moins abondante que du côté<br />

opposé, plus concentrée en urée et<br />

en créatinine et plus pauvre en<br />

sodium ;<br />

✔ une volémie normale, ou un peu<br />

diminuée.<br />

Modèle « deux reins-deux clips »<br />

L’hypertension est volodépendante. L’augmentation<br />

de l’ARP est variable mais inappropriée à<br />

l’augmentation de la volémie. En cas de sténose<br />

serrée bilatérale, le DFG diminue.<br />

Modèle « un rein-un clip »<br />

La situation est comparable à la précédente, à<br />

cela près que l’on se trouve dans le cas d’une<br />

réduction néphronique de 50 %.<br />

■<br />

Ischémie rénale unilatérale<br />

et hypertension artérielle<br />

rénovasculaire<br />

HTA rénovasculaire par sténose artérielle rénale<br />

unilatérale de plus de 60 % de type « Goldblatt »<br />

– Maladie fibromusculaire de l’artère rénale,<br />

propre à la femme jeune.<br />

– Plaques athéroscléreuses, soit ostiales soit<br />

tronculaires.<br />

1<br />

5-0570<br />

– Anévrisme de l’artère rénale.<br />

– Dissection de l’artère rénale, spontanée,<br />

iatrogénique ou traumatique.<br />

– Compression de l’artère rénale, par un<br />

hématome post-traumatique, rarement une tumeur.<br />

– Diverses dysplasies de l’artère rénale.<br />

HTA rénovasculaire de type Page<br />

La circonstance habituelle est un hématome<br />

périrénal, après contusion du rein ou ponctionbiopsie<br />

rénale. L’hématome devient fibreux et<br />

rétractile. Le rein est ischémique.<br />

Infarctus rénal<br />

Il peut être consécutif à une embolie artérielle, ou<br />

à un traumatisme, disséquant ou thrombosant une<br />

branche de l’artère rénale. Les principales causes<br />

sont la migration d’un thrombus parti des cavités<br />

cardiaques (maladie mitrale, fibrillation auriculaire,<br />

thrombus pariétal postinfarctus, exceptionnellement<br />

myxome de l’oreillette gauche), ou à la migration de<br />

matériel destiné à contrôler une hémorragie rénale<br />

par radiologie interventionnelle. Les signes sont la<br />

douleur lombaire brutale, l’hématurie macroscopique,<br />

l’hypertension sévère et une protéinurie<br />

abondante et transitoire. Les inhibiteurs de l’enzyme<br />

de conversion (IEC), permettent de contrôler<br />

l’hypertension artérielle. L’infarctus évolue vers<br />

l’atrophie fibreuse, laissant une cicatrice corticale,<br />

tandis que l’hypertension rétrocède, permettant<br />

l’arrêt progressif du traitement.<br />

HTA de type rénovasculaire accompagnant<br />

une tumeur rénale<br />

Il est fréquent qu’une tumeur maligne du rein<br />

s’accompagne, ou se révèle, par une HTA. Elle peut<br />

comprimer des branches de l’artère rénale, ou<br />

comporter des anastomoses artérioveineuses créant<br />

une ischémie d’aval par « vol vasculaire ». Un<br />

anévrisme cirsoïde (tumeur vasculaire bénigne) a le<br />

même effet.


5-0570 - Néphropathies vasculaires<br />

Hypertensions post-traumatiques<br />

Il en existe deux variétés, toutes deux d’intérêt<br />

médicolégal. L’hypertension précoce après<br />

contusion ou fracture du rein est due à une<br />

dissection de l’artère rénale ou d’une de ses grosses<br />

branches, éventuellement compliquée d’un infarctus,<br />

ou à un hématome périrénal compressif.<br />

L’hypertension à rénine haute peut survenir des<br />

mois ou des années après le traumatisme par<br />

infarctus rénal tardif ou enserrement du rein par une<br />

coque épaisse et fibreuse.<br />

Diagnostic.<br />

✔ C’est une HTA d’apparition ou<br />

d’aggravation récente.<br />

✔ Elle est souvent mal supportée,<br />

avec céphalées, soif, amaigrissement,<br />

éventuellement acouphènes et<br />

mouches volantes.<br />

✔ Elle peut évoluer vers, ou se révéler<br />

par un tableau d’hypertension<br />

maligne.<br />

✔ Sur de simples clichés de l’arbre<br />

urinaire sans préparation, ou des<br />

tomographies rénales, ou une<br />

échographie, il existe une asymétrie<br />

de taille des reins.<br />

✔ L’ARP et l’aldostérone (après arrêt<br />

des médicaments) sont élevées.<br />

✔ Doppler et angiographie (ou<br />

imagerie par résonance magnétique)<br />

confirment les lésions<br />

■<br />

Deux variétés selon le terrain<br />

Femme jeune<br />

Chez une femme jeune sans antécédents<br />

apparaissent les signes d’une HTA mal supportée :<br />

céphalées, soif, amaigrissement, hypertrophie<br />

ventriculaire gauche débutante, anomalies<br />

rétiniennes au fond d’œil. La pression artérielle est<br />

élevée, sans proportionnalité entre les valeurs de la<br />

systolique et de la diastolique et le retentissement<br />

viscéral [2, 5] . On précise la date d’apparition de l’HTA<br />

en se basant sur des chiffres tensionnels relevés au<br />

cours de grossesses antérieures ou en médecine du<br />

travail. On recherche un souffle lomboabdominal,<br />

bien qu’il ne soit ni constant, ni spécifique. La<br />

fonction rénale est normale. L’analyse des urines à la<br />

bandelette, ne montre pas de protéinurie ni<br />

d’hématurie microscopique. L’ionogramme peut<br />

objectiver une hypokaliémie avec tendance à<br />

l’alcalose métabolique. L’ionogramme urinaire<br />

confirme que l’hypokaliémie est accompagnée<br />

d’une kaliurèse non appropriée. L’angiographie<br />

trouve une image caractéristique, en « chapelet ».<br />

Athéroscléreux plus âgé<br />

Le terrain est l’homme d’âge mûr, souvent grand<br />

fumeur et maigre [1, 2, 3, 4, 13] . Il peut avoir été<br />

normotendu jusqu’à une date récente, et l’HTA<br />

apparue depuis peu de temps. Souvent, une HTA<br />

était déjà connue et traitée. L’élévation de la pression<br />

artérielle nécessite une augmentation des doses<br />

d’antihypertenseurs. La tolérance devient mauvaise,<br />

avec céphalées, soif, amaigrissement, hypertrophie<br />

ventriculaire gauche, épisodes d’œdème<br />

pulmonaire.<br />

Les plaques peuvent être tronculaires ou<br />

ostiales [4, 7] . Les premières se prêtent bien à une<br />

angioplastie endoluminale, les secondes sont plus<br />

difficiles à diagnostiquer par angiographie, IRM et<br />

échodoppler et moins faciles à traiter par radiologie<br />

interventionnelle.<br />

La fonction rénale peut être altérée par des<br />

lésions anciennes de néphroangiosclérose [8, 12] .<br />

L’hypokaliémie et l’alcalose métabolique peuvent<br />

être la conséquence du traitement préalable par un<br />

diurétique. La protéinurie (microalbuminurie<br />

dépassant les normes ou macroalbuminurie) peut<br />

aussi bien être due à l’Ang II qu’à des lésions rénales<br />

plus anciennes.<br />

Comment<br />

■<br />

prouver<br />

la nature rénovasculaire<br />

d’une hypertension artérielle ?<br />

Avant de poser l’indication d’une angioplastie, il<br />

convient de rassembler les arguments permettant de<br />

prédire que cette procédure n’aura pas eu pour<br />

résultat que la normalisation d’une image, mais celle<br />

des chiffres tensionnels [14] . Ces arguments sont<br />

basés sur :<br />

– l’importance de la sténose : une sténose de plus<br />

de 70 % avec dilatation poststénotique est très<br />

suspecte d’être responsable d’une ischémie rénale ;<br />

– l’échodoppler : un échographiste exercé<br />

rassemble une série d’arguments très fiables en<br />

faveur du caractère hémodynamiquement<br />

fonctionnel d’une sténose artérielle rénale ;<br />

– l’urographie intraveineuse minutée ne doit plus<br />

être citée car s’il elle est très spécifique, elle est très<br />

peu sensible. Les images sont faites d’un retard<br />

d’apparition du produit de contraste du côté de la<br />

sténose, suivi d’une opacification progressivement<br />

plus contrastée que du côté sain ;<br />

– les dosages d’ARP permettent à la fois<br />

d’apporter le diagnostic d’HTA à ARP élevée et<br />

d’hyperaldostéronisme secondaire ;<br />

– le cathétérisme des veines rénales avec<br />

dosages comparatifs d’activité rénine de chaque<br />

côté est un excellent examen, mais invasif ;<br />

– la scintigraphie rénale avec rénogramme au<br />

99 technétium (Tc)-acide diéthylène triamine<br />

penta-acétique (DTPA) se pratique avant puis après<br />

prise orale de captopril, après arrêt de tout<br />

médicament pouvant interférer avec l’examen. Une<br />

courbe caractéristique de sténose hémodynamiquement<br />

fonctionnelle après captopril est<br />

considérée comme hautement prédictive d’un<br />

succès de la revascularisation.<br />

Maladie rénale<br />

■<br />

ischémique<br />

athéroscléreuse<br />

Il s’agit de la variété Goldblatt « deux reins-deux<br />

clips » ou « un rein-un clip ». On l’observe chez les<br />

patients coronariens, artéritiques, et dans 20 % des<br />

cas porteurs d’un anévrisme de l’aorte abdominale.<br />

Elle s’associe souvent à des embolies de cholestérol.<br />

C’est une cause possible d’insuffisance rénale<br />

chronique, potentiellement curable si l’ischémie est<br />

diagnostiquée avant la destruction du rein par la<br />

fibrose [1, 2, 3, 4, 5, 9, 11] .<br />

2<br />

L’HTA n’est pas au premier plan. Elle n’est pas à<br />

rénine très haute car la réduction du flux<br />

plasmatique rénal entraîne une réabsorption<br />

inappropriée de sodium et une hypervolémie. Ces<br />

malades peuvent présenter de brusques œdèmes<br />

pulmonaires (flash pulmonary edema), non expliqués<br />

par une incompétence myocardique particulière. La<br />

fonction rénale est altérée et la prescription d’un IEC<br />

peut conduire à une ascension rapide de la<br />

créatinine sérique. On se trouve donc ici dans une<br />

situation frontière avec un spectre clinique allant<br />

d’un tableau où domine l’insuffisance rénale<br />

ischémique avec surcharge volémique mais peu<br />

d’HTA, à celui d’une HTA à composante<br />

rénovasculaire mais moins pure que dans les<br />

rubriques précédentes.<br />

Diagnostic.<br />

Il repose sur :<br />

✔ le terrain : malade diffusément<br />

athéroscléreux, ayant souvent des<br />

signes cutanés d’embolies<br />

cholestéroliques ;<br />

✔ l’insuffisance rénale : non<br />

expliquée par une autre cause ;<br />

✔ l’asymétrie des reins à<br />

l’échographie ;<br />

✔ l’hypertension devenant<br />

incontrôlable ;<br />

✔ l’ascension rapide de la créatinine<br />

après mise en œuvre d’un<br />

antagoniste de l’Ang II ;<br />

✔ l’échodoppler.<br />

L’hypertension et l’insuffisance rénale appellent<br />

une revascularisation, à condition que le rein ait une<br />

hauteur d’au moins 8 cm et que les index de<br />

résistance au doppler soient inférieurs à 80. Sinon,<br />

on ne fait que revasculariser un rein scléreux, sans<br />

résultat appréciable.<br />

La revascularisation ne guérit pas toujours<br />

l’hypertension, car plus elle est ancienne, plus il<br />

existe des lésions du parenchyme rénal<br />

(néphroangiosclérose, glomérules hyalinisés ou en<br />

« pain à cacheter », emboles de cholestérol).<br />

Néanmoins, elle rend son contrôle plus facile et avec<br />

moins de médicaments.<br />

■<br />

Néphroangiosclérose maligne<br />

Le tableau est celui d’une hypertension<br />

maligne avec syndrome hémolytique<br />

et urémique<br />

Hypertension sévère<br />

L’hypertension est à chiffres élevés, mal tolérée<br />

(céphalées, troubles visuels, soif, amaigrissement) et<br />

la défaillance ventriculaire gauche avec œdème<br />

pulmonaire arrive rapidement. Le fond d’œil trouve<br />

des hémorragies, des exsudats et des nodules<br />

dysoriques. L’absence d’œdème papillaire n’écarte<br />

pas le diagnostic.<br />

Anémie hémolytique<br />

Il existe une anémie microangiopathique<br />

régénérative (réticulocytes, schizocytes,


lacticodéshydrogénase [LDH] élevée, haptoglobine<br />

basse, thrombopénie, produits de dégradation de la<br />

fibrine).<br />

L’insuffisance rénale progresse rapidement. Elle<br />

s’accompagne d’une protéinurie significative<br />

(> 2 g/L). Les dosages d’ARP sont extrêmement<br />

élevés. Il existe en effet une vasoconstriction intense<br />

avec ischémie corticale du rein. L’ischémie augmente<br />

la production d’Ang II qui aggrave l’hypertension.<br />

Lésions rénales majeures<br />

Les lésions histologiques révélées par une biopsie<br />

rénale faite après contrôle des chiffres tensionnels<br />

sont faites d’une considérable hyperplasie des<br />

cellules musculaires lisses des parois artérielles qui<br />

prennent un aspect dit en « bulbe d’oignon »,<br />

rétrécissant la lumière, associée à une duplication et<br />

des ruptures des limitantes élastiques, un œdème et<br />

de la nécrose de la média. L’évolution peut se faire<br />

vers la thrombose ; les glomérules sont ischémiques<br />

et siège de thromboses (aspect dit de microangiopathie<br />

thrombotique) [10] .<br />

Cause particulière : crise aiguë sclérodermique<br />

L’atteinte rénale de la sclérodermie est plus<br />

fréquente dans les formes diffuses que dans le<br />

syndrome calcinose sous-cutanée-syndrome de<br />

Raynaud-dysfonction de l’œsophage-slérodactylietélangiectasies<br />

(CREST) et rare dans les sclérodermies<br />

localisées. Une protéinurie est présente chez 15 %<br />

des patients, mais la plupart ont une sclérodermie<br />

peu évoluée. Chez 45 % des sclérodermiques existe<br />

au moins un marqueur d’atteinte rénale (protéinurie,<br />

hypertension ou insuffisance rénale). Une<br />

hypertension isolée s’observe chez un quart des<br />

patients. La biopsie rénale montrerait une<br />

néphroangiosclérose sans spécificité particulière,<br />

faite d’une endartérite fibreuse avec duplication des<br />

lames élastiques. L’hypertension est maligne dans<br />

7 % des cas. L’insuffisance rénale aiguë,<br />

conséquence d’une crise aiguë sclérodermique,<br />

survient dans environ 20 % des cas de sclérodermies<br />

diffuses, mais seulement 1 % de ceux atteints du<br />

syndrome CREST.<br />

La fréquence de cette complication grave a<br />

diminué depuis que l’on dispose de traitements<br />

antihypertenseurs efficaces. La crise aiguë<br />

sclérodermique représente une variété d’hypertension<br />

maligne avec syndrome hémolytique et<br />

urémique (SHU), habituellement oligoanurique.<br />

L’artériographie montre un lit vasculaire rénal en<br />

« arbre mort ». La biopsie rénale trouve toutes les<br />

lésions de l’hypertension maligne et du SHU décrites<br />

plus haut.<br />

L’évolution habituelle se fait vers une insuffisance<br />

rénale chronique définitive. Dans un certain nombre<br />

de cas, après une longue période de dialyse, certains<br />

malades reprennent une fonction rénale permettant<br />

le sevrage du rein artificiel, si leur pression artérielle a<br />

parfaitement été contrôlée. Dans les sclérodermies<br />

se compliquant d’une maladie lupique, les lésions<br />

glomérulaires du lupus s’ajoutent aux lésions<br />

vasculaires de la sclérodermie.<br />

Traitement<br />

Le risque est triple : hémorragie cérébrale, œdème<br />

aigu pulmonaire, insuffisance rénale définitive. Le<br />

traitement consiste à lever les résistances<br />

périphériques au plus vite par les vasodilatateurs, en<br />

associant antagonistes de l’Ang II et inhibiteurs des<br />

canaux calciques. Attention cependant : ces malades<br />

sont en général hypovolémiques. La baisse de la<br />

postcharge peut conduire à un collapsus. Il faut donc<br />

être prêt à perfuser du soluté salé physiologique<br />

quand la pression artérielle atteint des valeurs<br />

proches de la normale. Les diurétiques ne font donc<br />

pas partie du traitement de l’hypertension maligne.<br />

■<br />

Néphroangiosclérose bénigne<br />

La néphroangiosclérose bénigne est un<br />

diagnostic histologique et non un diagnostic<br />

clinique. La clinique ne fait que rassembler des<br />

arguments de présomption [8, 9, 11, 12, 13] .<br />

Lien étroit avec la maladie hypertensive<br />

La néphroangiosclérose dite « bénigne » est<br />

connue depuis 100 ans pour être associée à la<br />

maladie hypertensive. De là à conclure qu’elle est<br />

toujours la conséquence d’une HTA primaire est<br />

excessif, car il est des cas (cf infra) où elle peut la<br />

précéder.<br />

Facteur génétique certain<br />

La néphroangiosclérose bénigne n’est pas si<br />

bénigne que cela chez les Noirs d’ascendance<br />

africaine, chez lesquels elle conduit à l’insuffisance<br />

rénale rapidement, vers la cinquantaine. À chaque<br />

tranche d’âge, les lésions artérielles chez les Noirs<br />

sont plus importantes que chez les Blancs d’origine<br />

européenne, et chez des adolescents elles peuvent<br />

exister avant l’ascension des chiffres tensionnels. De<br />

même, on a montré chez des Européens une<br />

association significative avec le phénotype D/D du<br />

gène de l’enzyme de conversion de l’angiotensine.<br />

Tableau associant hypertension très ancienne<br />

et insuffisance rénale progressive<br />

Le début de l’hypertension ne peut souvent être<br />

daté. On trouve déjà des valeurs limites au moment<br />

du service militaire ou en médecine du travail des<br />

dizaines d’années plus tôt. L’insuffisance rénale<br />

apparaît progressivement, avec une faible<br />

protéinurie et sans hématurie microscopique. Les<br />

reins sont harmonieusement atrophiques. Les<br />

artères rénales sont perméables au doppler.<br />

Lésions histologiques de tous les éléments<br />

du rein<br />

Les lésions artérielles sont faites d’une hyperplasie<br />

de l’intima, fibreuse. Le contingent de fibres<br />

musculaires lisses, élastiques, est progressivement<br />

remplacé par du collagène, rigide. La lumière<br />

vasculaire est variablement réduite [10] . Le reste du<br />

rein est lui-même pathologique : atrophie des tubes<br />

qui prennent un aspect microkystique, sclérose<br />

interstitielle parsemée de cellules inflammatoires<br />

(surtout des macrophages), glomérules ischémiques<br />

et qui sont progressivement envahis par la fibrose<br />

pour se transformer en « pain à cacheter ».<br />

L’histologie est utile pour éliminer une néphropathie<br />

d’autre sorte : néphropathie glomérulaire chronique<br />

ou embolies rénales de cristaux de cholestérol.<br />

Risque d’évolution vers la néphroangiosclérose<br />

maligne<br />

Dans les formes négligées, une néphroangiosclérose<br />

bénigne peut passer au stade de la<br />

néphroangiosclérose maligne, ici aussi plus<br />

volontiers chez les Noirs.<br />

3<br />

Néphropathies vasculaires - 5-0570<br />

Traitement basé sur les antihypertenseurs,<br />

essentiellement les antagonistes de l’Ang II<br />

En effet, la fibrose qui caractérise la néphroangiosclérose<br />

(d’où son nom) est en grande partie due à<br />

l’angiotensine. Le contrôle de la pression artérielle<br />

est en soi essentiel, mais la logique veut qu’il<br />

comporte d’abord un IEC ou un antagoniste des<br />

récepteurs de l’angiotensine 2.<br />

Maladie des■embolies rénales<br />

de cholestérol<br />

La migration de cristaux de cholestérol est un<br />

accident grave de la maladie athéroscléreuse. Sa<br />

fréquence a augmenté après les débuts de la<br />

chirurgie vasculaire, puis la radiologie interventionnelle<br />

et enfin l’usage libéral des anticoagulants et<br />

des fibrinolytiques [15] . L’affection est protéiforme. Ses<br />

manifestations vont de la découverte autopsique ou<br />

biopsique de quelques cristaux distillés<br />

chroniquement chez un athéroscléreux, au tableau<br />

très grave des embolies multiviscérales menaçant la<br />

vie et dont l’insuffisance rénale aiguë n’est qu’une<br />

des manifestations. De plus, les cristaux logés dans<br />

les petites artères induisent une réaction<br />

inflammatoire qui comporte des signes proches de<br />

ceux d’une angéite.<br />

La source des emboles est la plaque ulcérée, qui<br />

peut siéger de l’origine de la crosse au reste de<br />

l’aorte ; elle est couverte d’un caillot « pansement »<br />

qui recouvre un nid de cristaux. L’écrasement par un<br />

clamp, le passage d’un cathéter de Seldinger, d’un<br />

ballon d’angioplastie, ou encore la dissolution du<br />

caillot durant un traitement anticoagulant ou<br />

fibrinolytique, en supprimant cette dernière<br />

protection, libèrent les cristaux dans la circulation. Ils<br />

se logent dans les artères viscérales de 150 à<br />

200 µm de diamètre. Dans le rein, on trouve des<br />

cristaux dans les artères arquées, les artères<br />

interlobulaires, l’artériole glomérulaire afférente et<br />

même dans les capillaires du flocculus glomérulaire.<br />

Fréquence<br />

Le diagnostic clinique sous-estime les atteintes<br />

viscérales trouvées à l’autopsie. Tout l’organisme<br />

peut être intéressé par des embolies cholestéroliques.<br />

On a décrit des embolies myocardiques et des<br />

paraplégies par migration dans la grande artère<br />

spinale antérieure d’Adamkiewicz. Les embolies<br />

rétiniennes sont fréquentes, de l’ordre de 20 % des<br />

cas, et souvent associées à des accidents vasculaires<br />

cérébraux.<br />

Les autres tissus de l’organisme sont également<br />

pratiquement tous la cible des embolies<br />

cholestéroliques. C’est le cas avant tout de la peau,<br />

de la rétine, du muscle, de la moelle osseuse.<br />

Circonstances d’apparition<br />

Le terrain habituel est représenté par un homme<br />

de plus de 55 ans, fumeur et hypertendu, de race<br />

blanche, souvent maigre. L’affection est rare chez les<br />

Noirs. Les embolies sont spontanées dans 20 % des<br />

cas et iatrogènes dans 80 %.<br />

Les facteurs provoquant l’essaimage de cristaux<br />

sont réunis par deux éléments, isolés ou associés : le<br />

traumatisme d’une plaque d’athérome et la<br />

disparition du caillot recouvrant la bouillie<br />

athéromateuse d’une plaque ulcérée. La rupture<br />

d’une plaque peut aussi être spontanée. L’existence


5-0570 - Néphropathies vasculaires<br />

d’une aortite ulcérée étendue peut aussi conduire à<br />

un essaimage chronique de cristaux, distillés dans la<br />

circulation au fil du temps.<br />

Les angiographies par cathéter de Seldinger et les<br />

angioplasties sont devenues une cause majeure de<br />

l’affection. Parmi les facteurs médicamenteux les<br />

plus fréquents figurent les traitements anticoagulants<br />

par les antivitamines K, les héparines et les<br />

fibrinolytiques.<br />

Signes extrarénaux (plus de 90 % des cas)<br />

Ils sont faits d’orteils pourpres, de livedo reticularis<br />

qui peut aller jusqu’aux lombes, de nécroses<br />

parcellaires des orteils. Pourtant, les pouls tibiaux<br />

postérieurs et pédieux ne sont pas nécessairement<br />

abolis, ce qui doit orienter vers des lésions<br />

ischémiques de la microcirculation. La biopsie<br />

cutanée trouve des cristaux dans l’hypoderme.<br />

Les douleurs musculaires peuvent simuler une<br />

polymyosite. Des cristaux sont trouvés au fond d’œil<br />

dans environ 20 % des cas. Les douleurs<br />

abdominales traduisent l’atteinte du territoire<br />

mésentérique et pancréatique et s’accompagnent<br />

d’une dénutrition. De la fièvre peut accompagner<br />

l’altération de l’état général.<br />

Signes biologiques<br />

Les embolies de cholestérol entraînent une<br />

réaction inflammatoire à corps étrangers. Ainsi<br />

s’expliquent trois anomalies biologiques, suggestives<br />

quand elles existent : une hypocomplémentémie,<br />

une éosinophilie et une éosinophilurie.<br />

Atteinte rénale (au moins 80 % des cas)<br />

Les embolies massives se révèlent tôt après<br />

chirurgie, angiographie ou angioplastie. Ailleurs, il<br />

s’écoule plusieurs semaines avant que le diagnostic<br />

ne soit évoqué : en moyenne 5,3 semaines après<br />

artériographie. Une troisième variété est caractérisée<br />

par une insuffisance rénale de type subaigu ou<br />

chronique, évoluant par poussées successives qui<br />

coïncident avec des vagues d’embolies, survenant<br />

chacune après un élément déclenchant :<br />

angiographie, reprise chirurgicale, nouveau<br />

traitement anticoagulant.<br />

Les signes rénaux purement cliniques, en dehors<br />

de l’hypertension, sont assez limités. Le tableau<br />

habituel est celui d’une insuffisance rénale de gravité<br />

variable. Elle peut être aiguë, oligoanurique,<br />

nécessitant d’emblée une épuration extrarénale et<br />

survenant immédiatement après un geste invasif, ce<br />

qui est le cas d’environ un tiers des patients. Après<br />

l’événement déclenchant, les signes et symptômes<br />

de la maladie des embolies de cholestérol peuvent<br />

n’apparaître qu’après plusieurs semaines.<br />

L’évolution peut ensuite être progressive et se faire<br />

par poussées entrecoupées de paliers successifs sur<br />

plusieurs semaines ou mois. L’évolution peut enfin<br />

ne se marquer que par une insuffisance rénale<br />

chronique et lentement évolutive. Les manifestations<br />

cliniques de l’affection, chez un sujet âgé, sont<br />

marquées par de la fièvre, un état inflammatoire,<br />

une éosinophilie, une altération de l’état général, un<br />

amaigrissement, des signes cutanés et une<br />

détérioration de la fonction rénale accompagnée<br />

d’une protéinurie. L’hypertension est presque<br />

constante, sévère et parfois maligne. Elle entraîne ou<br />

favorise une insuffisance cardiaque et un<br />

subœdème pulmonaire.<br />

Gros<br />

vaisseaux<br />

Vaisseaux de<br />

taille moyenne<br />

Artérite granulomateuse Artérite nécrosante<br />

> de 50 ans<br />

Horton<br />

Angéite<br />

cryoglobulinémique<br />

< de 50 ans<br />

Takayashu<br />

Avec dépôts immuns<br />

en immunofluorescence (IF)<br />

Puspura<br />

rhumatoïde<br />

La notion récente selon laquelle les statines<br />

exercent un effet stabilisant sur les plaques<br />

d’athérome et sont dotées d’effets antiinflammatoires<br />

incite à les inclure dans tout<br />

protocole thérapeutique de cette affection à titre de<br />

prévention primaire et secondaire.<br />

■ Angéites rénales<br />

Périartérite<br />

noueuse<br />

Lupus<br />

Les angéites (ou « vascularites ») forment un<br />

groupe d’affections vasculaires disparates mais qui<br />

ont en commun un facteur inflammatoire d’origine<br />

immunologique [6] . Il est admis de les classer en<br />

fonction du diamètre du vaisseau intéressé, ce que<br />

montre la figure 1.<br />

En ce qui concerne le rein, et en dehors de<br />

rares affections inflammatoires des gros troncs<br />

artériels (Takayashu), le sujet est dominé par deux<br />

affections : la périartérite noueuse (PAN) et la<br />

maladie de Wegener (MW) toutes deux<br />

accompagnées d’une riche symptomatologie<br />

extrarénale. La première comporte deux variétés :<br />

la PAN « macroscopique », peu fréquente,<br />

Maladie de<br />

Kawasaki<br />

Pas d'asthme<br />

pas de granulomes<br />

PAN<br />

microscopique<br />

Petits<br />

vaisseaux<br />

Sans dépôts en IF<br />

+ ANCA positifs<br />

Granulomes<br />

pas d'asthme<br />

Maladie de<br />

Wegener<br />

Éosinophilie<br />

asthme<br />

granulomes<br />

Maladie de<br />

Chuerg<br />

et Strauss<br />

1 Classification des angéites.<br />

1. Aorte ; 2. artère rénale ; 3. artère lobaire ; 4. artère arquée ; 5. artère interlobulaire ; 6. artériole ; 7. flocculus<br />

glomérulaire. PAN : périartérite noueuse.<br />

4<br />

caractérisée par une atteinte des grosses artères<br />

intrarénales qui peuvent être le siège<br />

d’anévrismes ; la PAN « microscopique » qui<br />

entraîne surtout une glomérulonéphrite<br />

rapidement évolutive à croissants épithéliaux. La<br />

MW se manifeste elle aussi par une atteinte des<br />

vaisseaux intrarénaux de petit calibre, y compris<br />

les veines, par des granulomes et par une<br />

glomérulonéphrite à croissants. Depuis 15 ans,<br />

on a appris à les distinguer par l’existence<br />

d’anticorps anticytoplasme des polynucléaires<br />

(ANCA) qui les accompagnent et qui sans être<br />

absolument spécifiques sont hautement<br />

évocateurs du diagnostic : ceux de la PAN, les<br />

« p-ANCA » sont du type antimyéloperoxydase<br />

(MPO) et ceux de la MW, les « c-ANCA », du type<br />

antiprotéinase 3 (PR3). Ces deux angéites relèvent<br />

d’un diagnostic précoce basé sur un prélèvement<br />

histologique et sur une recherche d’ANCA, et sur<br />

un traitement immunodépresseur comportant le<br />

plus souvent au début du cyclophosphamide et<br />

des emboles de méthylprednisolone. La guérison<br />

définitive n’est pas assurée ; les rechutes sont<br />

fréquentes et ce traitement comporte de<br />

nombreux effets secondaires, mais il est bon de<br />

rappeler qu’auparavant ces affections étaient<br />

constamment mortelles.


■ Conclusion<br />

Les néphropathies vasculaires sont un aspect<br />

essentiel de la néphrologie. Elles ont deux<br />

particularités. Leur élément commun est la fibrose<br />

consécutive à l’ischémie [11, 13] , qui elle-même aggrave<br />

la fibrose, créant un cercle vicieux que l’on doit<br />

rompre par les antihypertenseurs modernes. Les<br />

recommandations internationales (JNC VI) indiquent<br />

d’une part que les valeurs tensionnelles cibles sont<br />

inférieures à 140/90 mmHg, qui pourtant définissent<br />

les limites de l’HTA ; d’autre part, les associations<br />

d’antihypertenseurs microdosés sont préférables en<br />

termes de tolérance et d’efficacité à la stratégie<br />

classique du « stepped care » où l’on ajoutait un<br />

second antihypertenseur au moment où apparaissaient<br />

les signes d’intolérance du premier.<br />

De façon générale, l’élément vasculaire existe dans<br />

toutes les néphropathies (le meilleur exemple est celui<br />

du diabète de type 2) et le traitement de l’HTA reste le<br />

meilleur moyen de ralentir l’évolution de toute<br />

maladie rénale.<br />

Alain Meyrier : Professeur,<br />

Service de néphrologie et Inserm U 430, groupe hospitalier Broussais-hôpital européen Georges Pompidou, 20, rue Leblanc, 75908 Paris cedex 15, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : A Meyrier. Néphropathies vasculaires.<br />

Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0570, 2003,5p<br />

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clinical manifestations of atherosclerotic renovascular disease. Am J Kidney Dis<br />

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[2] Denolle T, Hanon O, Mounier-Vehier C, Marquand A, Fauvel JP, Laurent P et<br />

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résistants aux traitements ? Arch Mal Cœur Vaiss. 2000 ; 93 : 1037-1039<br />

[3] Equine O, Beregi JP, Mounier-Vehier C, Gautier C, Desmoucelles F, Carre A.<br />

Intérêt de l’angioscanner hélicoïdal et de l’écho-doppler des artères rénales dans la<br />

prise en charge des pathologies vasculo-rénales. Résultats à partir d’une étude<br />

rétrospective chez 113 patients. Arch Mal Cœur Vaiss 1999 ; 92 : 1043-1045<br />

[4] Equine O, Mounier-Vehier C, Devos P et al. Résultats cliniques de l’angioplastie<br />

des artères rénales dans l’hypertension artérielle rénovasculaire. Étude rétrospective<br />

chez 113 patients. Arch Mal Cœur Vaiss 1999 ; 92 : 1015-1021<br />

[5] Girerd X. Le Dictionnaire de l’hypertension artérielle. 2 e cycle, phase 5. Paris<br />

: Éditions médicales, 1999<br />

[6] Langford CA, Balow JE. New insights into the immunopathogenesis and<br />

treatment of small vessel vasculitis in the kidney. Curr Opin Nephrol Hypertens<br />

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Néphropathies vasculaires - 5-0570<br />

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36 : 1089-1109


Plan<br />

Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

G. Deschênes, A. Doucet<br />

Les œdèmes généralisés sont l’expression d’une expansion générale des liquides interstitiels, et résultent<br />

de la conjonction d’une augmentation de la réabsorption rénale de sodium conduisant à une balance<br />

positive et d’une augmentation de la filtration capillaire. La physiopathologie des œdèmes n’est pas<br />

toujours bien établie. La rétention rénale de sodium au cours du syndrome néphrotique est originaire des<br />

segments terminaux du néphron mais est indépendante du système rénine-angiotensine-aldostérone.<br />

D’ailleurs, la majorité des patients néphrotiques sont normovolémiques ou légèrement hypervolémiques.<br />

L’augmentation de la filtration capillaire n’est quant à elle pas due à l’hypoalbuminémie mais à une<br />

modification des propriétés intrinsèques de l’endothélium capillaire, en particulier une augmentation de<br />

sa conductivité hydraulique et une diminution de son coefficient de réflexion des protéines. Le traitement<br />

de la rétention de sodium par association de composés natriurétiques agissant sur l’anse de Henle et sur le<br />

néphron distal reste l’approche thérapeutique de référence. Dans les syndromes néphritiques, la rétention<br />

de sodium est aussi originaire du néphron distal et indépendante de l’aldostérone. D’ailleurs, ces patients<br />

présentent une inhibition du système rénine-angiotensine-aldostérone, une hypervolémie et une<br />

hypertension artérielle. Là encore, le traitement de la rétention de sodium permet de normaliser la<br />

pression artérielle et de résoudre les œdèmes.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Rétention de sodium ; Filtration capillaire ; Volume interstitiel ; Hypoalbuminémie ;<br />

Agents natriurétiques<br />

Introduction 1<br />

Physiologie du compartiment interstitiel 2<br />

Compartiments liquidiens de l’organisme 2<br />

Échanges d’eau à travers l’endothélium capillaire<br />

entre les compartiments vasculaire et interstitiel 2<br />

Rôle de la balance du sodium dans la détermination du volume<br />

des compartiments extracellulaires 3<br />

Œdèmes secondaires à un syndrome néphrotique 5<br />

Rétention de sodium au cours du syndrome néphrotique 5<br />

Altération de la filtration capillaire dans le syndrome néphrotique 6<br />

Implications thérapeutiques 7<br />

Œdèmes secondaires au syndrome néphritique 8<br />

Physiopathologie 8<br />

Traitement 8<br />

Conclusion 8<br />

■ Introduction<br />

Les œdèmes sont l’expression d’une expansion générale ou<br />

localisée des liquides interstitiels. Les œdèmes généralisés se<br />

développent lorsque le volume interstitiel augmente de plus de<br />

20 %. Ils affectent d’abord les parties déclives du corps, puis les<br />

séreuses (péritoine, péricarde, plèvre) pour conduire, dans leur<br />

stade ultime, à l’état d’anasarque. La physiopathologie des<br />

œdèmes généralisés est variée, mais dans tous les cas l’augmentation<br />

massive du volume interstitiel résulte d’une dérégulation<br />

Néphrologie<br />

18-026-C-20<br />

de la fonction rénale conduisant à une rétention hydrosodée<br />

dont le traitement bloque l’évolution des signes cliniques.<br />

L’expansion spécifique du compartiment interstitiel par rapport<br />

au compartiment vasculaire est quant à elle l’expression d’une<br />

dysfonction généralisée de la filtration à travers l’endothélium<br />

capillaire. À l’inverse, les œdèmes localisés correspondent à des<br />

expansions quantitativement restreintes du compartiment<br />

interstitiel (ne nécessitant pas de rétention rénale de sodium) et<br />

à des dysfonctionnements localisés de la filtration capillaire.<br />

Indépendamment de leur caractère généralisé ou localisé, on<br />

peut distinguer quatre grandes classes d’œdèmes :<br />

les œdèmes associés aux états d’hypoalbuminémie : syndrome<br />

néphrotique, cirrhose hépatique, entéropathies exsudatives,<br />

certaines glomérulonéphrites aiguës (en particulier le syndrome<br />

néphritique), carence protidique prolongée (en particulier<br />

dans sa forme avancée, kwashiorkor), grands brûlés ;<br />

les œdèmes associés à une hyperpression veineuse : insuffisance<br />

cardiaque droite (œdème généralisé) ou gauche (œdème<br />

pulmonaire), grossesse, thrombus veineux, varices ;<br />

les œdèmes associés à une majoration de la perméabilité<br />

capillaire : allergies, angiœdèmes (œdème de Quincke ou<br />

œdème angioneurotique), sepsis sévère (en particulier infections<br />

à mycoplasmes), syndrome de Clarkson, syndrome de<br />

Gleich ;<br />

les œdèmes associés à une altération du drainage lymphatique<br />

: lymphœdème (qu’il soit primaire ou secondaire par<br />

exemple à un curage axillaire), myxœdème de l’hypothyroïdie,<br />

etc.<br />

Dans cet article ne sont traités que les œdèmes généralisés<br />

secondaires à des pathologies rénales parmi lesquels il convient<br />

de distinguer les œdèmes massifs secondaires au syndrome<br />

1


18-026-C-20 Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

néphrotique, et les œdèmes plus restreints et associés à une<br />

hypertension artérielle secondaires au syndrome néphritique.<br />

■ Physiologie du compartiment<br />

interstitiel<br />

Compartiments liquidiens de l’organisme<br />

Un homme adulte d’adiposité normale est constitué d’environ<br />

60 % d’eau (42 l pour un individu de 70 kg) répartie entre<br />

les compartiments intracellulaire (60 %) et extracellulaire<br />

(40 %). Le compartiment extracellulaire se subdivise en un<br />

compartiment vasculaire et un espace interstitiel au sein duquel<br />

il convient de distinguer l’eau d’imbibition de l’os et du tissu<br />

conjonctif qui, contrairement au liquide interstitiel des autres<br />

organes et tissus, est peu accessible aux échanges avec les autres<br />

compartiments liquidiens (Fig. 1).<br />

Il existe en effet d’importants échanges d’eau et de solutés<br />

entre ces différents compartiments, échanges à travers les<br />

membranes cellulaires (compartiments intra- et extracellulaires)<br />

et à travers la paroi des capillaires (compartiments interstitiel et<br />

plasmatique). Ces échanges permettent d’ajuster le volume et la<br />

composition des différents compartiments à des niveaux qui<br />

peuvent être très différents, et qui sont adaptés aux fonctions<br />

spécifiques de chaque compartiment. Le volume global de ces<br />

compartiments résulte d’un équilibre dynamique entre les<br />

apports d’eau, principalement par voie alimentaire mais aussi<br />

par production endogène liée au métabolisme cellulaire, et les<br />

sorties rénales et les pertes insensibles (perspiration et sudation)<br />

(Fig. 1).<br />

Échanges d’eau à travers l’endothélium<br />

capillaire entre les compartiments vasculaire<br />

et interstitiel<br />

Les secteurs vasculaire et interstitiel sont séparés par la paroi<br />

capillaire qui retient les cellules sanguines et les macromolécules<br />

Métabolisme cellulaire<br />

0,5 l/j<br />

Intracellulaire 25 l<br />

2 l/j<br />

Conjonctif<br />

3 l<br />

11 l/j<br />

11 l/j<br />

9 l/j<br />

7 l/j<br />

Os 2 l<br />

Interstitiel 8 l<br />

Plasma 3 l<br />

180 l/j<br />

178,5 l/j<br />

Sudation,<br />

respiration<br />

0,1 l/j 1,5 l/j<br />

0,5 l/j<br />

Figure 1. Compartiments liquidiens et échanges quotidiens d’eau. Les<br />

volumes représentés correspondent à un sujet de 60 kg et d’adiposité<br />

normale. Les flux représentent des valeurs quotidiennes.<br />

comme les protéines, mais laisse passer l’eau et toutes les autres<br />

substances qui y sont dissoutes. Le transfert d’eau et de solutés<br />

à travers l’endothélium capillaire s’effectue essentiellement par<br />

la voie paracellulaire, c’est-à-dire à travers les jonctions intercellulaires,<br />

jonctions occlusives et jonctions adhésives. Ce sont des<br />

structures multimoléculaires complexes (constituées d’occludine,<br />

de claudines et de protéines ZO pour les jonctions occlusives, et<br />

de cadhérine, de caténines et d’actinine pour les jonctions<br />

adhésives) intimement associées au cytosquelette d’actine [1] .La<br />

moindre concentration des protéines et des charges négatives<br />

qu’elles portent dans le liquide interstitiel par rapport au liquide<br />

plasmatique est compensée par une augmentation de la<br />

concentration d’autres anions (équilibre de Donnan).<br />

Loi de Starling<br />

Le débit de fluide à travers la paroi capillaire est régi par la<br />

loi de Starling :<br />

J v =L p ×S×[(P c−P i)-σ ( c− i)]<br />

où J v est le débit transcapillaire de fluide, L p la conductivité<br />

hydraulique capillaire, S la surface d’échange, P c et P i les<br />

pressions hydrostatiques capillaire et interstitielle, σ le coefficient<br />

de réflexion des protéines à travers la paroi capillaire, et<br />

c et i les pressions oncotiques capillaire et interstitielle.<br />

L’asymétrie de distribution des protéines entre les compartiments<br />

plasmatique et interstitiel explique que la pression<br />

oncotique du compartiment plasmatique ( c) soit supérieure à<br />

la celle du compartiment interstitiel ( i). La différence de<br />

pression oncotique, D = c - i, tend à retenir l’eau dans le<br />

compartiment plasmatique. La pression hydrostatique capillaire<br />

(P c) est supérieure à la pression hydrostatique interstitielle (P i),<br />

cette dernière étant légèrement inférieure à la pression atmosphérique<br />

(-2 mmHg). La différence de pression hydrostatique,<br />

Dp =P c -P i, tend à faire sortir l’eau du capillaire (Fig. 2). Alors<br />

que D reste constante tout le long du capillaire, car les flux<br />

d’eau sont réduits, P c et DP diminuent le long du capillaire du<br />

fait de sa résistance à l’écoulement.<br />

Compte tenu de la diminution de DP, on considérait classiquement<br />

que la pression efficace de filtration, P eff= DP- σD,<br />

s’inversait au milieu du capillaire, permettant ainsi la filtration<br />

d’eau et de solutés du plasma vers l’interstitium au début du<br />

capillaire, et un flux opposé de fluide dans la seconde moitié. Il<br />

en résultait un débit net de filtration faible. Cependant, les<br />

mesures de pression hydrostatique et oncotique plus récemment<br />

effectuées indiquent que dans la plupart des lits capillaires P eff<br />

reste positive sur la quasi-totalité de la longueur des capillaires<br />

[2] . Le débit net de filtration capillaire s’élève donc à plus de<br />

10 l par jour chez un adulte de 60 kg. Ce fluide est drainé hors<br />

de l’interstitium par les capillaires lymphatiques et retourne<br />

dans le système vasculaire par rétrofiltration dans les ganglions<br />

lymphatiques (environ deux tiers) et via le canal thoracique<br />

(environ un tiers). Le drainage lymphatique empêche d’une part<br />

l’expansion du volume interstitiel et la formation d’œdème et,<br />

parce que la paroi des lymphatiques est très perméable aux<br />

protéines, il permet d’autre part de maintenir la concentration<br />

en protéines du liquide interstitiel à une valeur d’environ la<br />

moitié de celle du plasma.<br />

Contrôle des échanges liquidiens transcapillaires<br />

Une augmentation de la pression artérielle systémique ne<br />

modifie pas la pression hydrostatique capillaire car, par autorégulation,<br />

elle induit la contraction des sphincters précapillaires.<br />

La pression hydrostatique capillaire (P c) peut néanmoins<br />

augmenter, par exemple en réponse à une vasodilatation<br />

artériolaire primitive (induite par exemple par des médicaments<br />

vasodilatateurs) ou à une augmentation primitive de la pression<br />

veineuse. Il en résulte une augmentation de la filtration<br />

capillaire et un accroissement du volume interstitiel qui va être<br />

rapidement contrecarré par plusieurs mécanismes. En effet,<br />

l’augmentation du volume interstitiel augmente la pression<br />

hydrostatique interstitielle, ce qui d’une part limite la filtration<br />

et, d’autre part, augmente le débit lymphatique, favorisant le<br />

drainage des protéines du compartiment interstitiel vers les<br />

2 Néphrologie


P eff = 22 mmHg<br />

P eff = 2 mmHg<br />

ΔP = 32 P c = 30<br />

Artériole<br />

vaisseaux lymphatiques et diminuant ainsi la pression oncotique<br />

interstitielle. Ces mécanismes compensateurs protègent<br />

efficacement contre l’apparition d’œdèmes dans les situations<br />

habituelles. Cependant, en cas d’élévation pathologique suffisante<br />

de la pression hydrostatique capillaire, la filtration<br />

importante élève la pression interstitielle qui devient positive, la<br />

compliance du tissu interstitiel devient alors très grande et les<br />

œdèmes apparaissent.<br />

Une fuite rénale d’albumine (syndrome néphrotique) ou un<br />

défaut de sa synthèse hépatique (insuffisance hépatocellulaire)<br />

peut diminuer la pression oncotique capillaire ( c). La réduction<br />

du gradient de pression oncotique à travers l’endothélium<br />

capillaire qui en résulte augmente la filtration mais, là encore,<br />

ce phénomène est transitoire. En effet, la réduction de la<br />

pression oncotique du plasma s’accompagne rapidement d’une<br />

réduction parallèle de la pression oncotique du liquide interstitiel,<br />

de telle sorte que le gradient de pression oncotique à<br />

travers l’endothélium capillaire reste constant. Ainsi, le gradient<br />

transcapillaire de pression oncotique n’est pas significativement<br />

modifié chez les rats analbuminémiques (11,3 ± 0,7 mmHg<br />

versus 12,2 ± 0,3 chez le rat normal) [3, 4] . Chez le chien,<br />

l’abaissement puis le maintien artificiels de la pression oncotique<br />

plasmatique à la moitié de sa valeur normale s’accompagnent<br />

d’une baisse parallèle de la pression oncotique<br />

interstitielle conduisant au maintien d’un gradient oncotique<br />

normal [5] . Le volume extracellulaire augmente transitoirement<br />

pendant la période de changement de la pression oncotique, en<br />

rapport avec un hyperaldostéronisme, mais l’excrétion urinaire<br />

de cet excédent de sodium et la normalisation du volume<br />

extracellulaire interviennent en moins de 3 jours après le début<br />

de la période de stabilité à une valeur basse de pression<br />

oncotique. Le maintien de la constance du gradient de pression<br />

oncotique est opérationnel tant que la pression oncotique<br />

plasmatique reste supérieure à 12 mmHg (environ 15 à 20 g<br />

d’albumine plasmatique). La réduction de la pression oncotique<br />

interstitielle s’explique par le fait que, au fur et à mesure que la<br />

concentration d’albumine plasmatique diminue, le passage des<br />

protéines à travers les capillaires diminue, ce qui, compte tenu<br />

du drainage des protéines par les vaisseaux lymphatiques, est<br />

responsable d’une diminution proportionnelle de la concentration<br />

interstitielle des protéines. Cependant, quand la pression<br />

oncotique plasmatique devient inférieure à 12 mmHg, le<br />

gradient de pression oncotique diminue, induisant une augmentation<br />

du volume interstitiel et l’apparition d’œdèmes.<br />

Le coefficient de réflexion des protéines (σ) peut diminuer (ce<br />

qui correspond à une augmentation de la perméabilité aux<br />

P i = -2<br />

Δπ = 10 π c = 20 π i = 10<br />

Capillaire<br />

sanguin<br />

ΔP = 12<br />

Pi = -2<br />

Pc = 10<br />

Δπ = 10 πc = 20<br />

π i = 10<br />

Sphincter précapillaire<br />

Veinule<br />

Capillaire<br />

lymphatique<br />

Ganglion<br />

lymphatique<br />

Canal<br />

thoracique<br />

Figure 2. Échanges d’eau et de solutés à travers l’endothélium capillaire. Ces échanges sont énergisés par la pression efficace de filtration (P eff), qui est la<br />

résultante du gradient de pression hydrostatique (DP) qui tend à faire sortir l’eau des capillaires, et du gradient de pression oncotique (D) qui tend à l’y retenir.<br />

Le gradient de pression hydrostatique diminue le long du capillaire car la pression intracapillaire (P c) diminue alors que la pression interstitielle (P i) est uniforme.<br />

À l’inverse, le gradient de pression oncotique est constant tout le long du capillaire car les pressions oncotiques capillaire et interstitielle varient peu. Il en résulte<br />

une sortie nette d’eau et de solutés (flèches) qui diminue tout le long du capillaire (sans toutefois s’inverser). Le fluide filtré est drainé par les capillaires<br />

lymphatiques puis retourne vers le compartiment plasmatique par rétrofiltration dans les ganglions lymphatiques, et directement via le canal thoracique et<br />

la grande veine lymphatique.<br />

Néphrologie<br />

Œdèmes généralisés d’origine rénale 18-026-C-20<br />

protéines) en particulier au cours de phénomènes inflammatoires.<br />

Il en résulte une abolition progressive du gradient oncotique<br />

à travers les capillaires, une augmentation de la filtration vers<br />

l’insterstitium et la génération d’œdèmes, en général localisés<br />

aux sites d’inflammation.<br />

Les complexes jonctionnels des cellules endothéliales capillaires<br />

sont la cible de nombreuses régulations qui modulent la<br />

conductivité hydraulique (L p). En particulier, l’activation de la<br />

protéine kinase C augmente L p en induisant la phosphorylation<br />

de l’occludine [6, 7] .<br />

Rôle de la balance du sodium<br />

dans la détermination du volume<br />

des compartiments extracellulaires<br />

Compte tenu des volumes respectifs des compartiments<br />

plasmatique et interstitiel (Fig. 1), les augmentations de ce<br />

dernier nécessaires à l’apparition d’œdèmes (+ 20 %) ne peuvent<br />

se faire sans expansion globale du compartiment extracellulaire.<br />

La compréhension de la régulation du volume extracellulaire<br />

repose sur deux notions essentielles :<br />

le volume extracellulaire dépend directement du bilan du<br />

sodium ;<br />

le bilan du sodium est contrôlé dans les segments distaux du<br />

néphron.<br />

Volume extracellulaire et bilan du sodium<br />

Le sodium et les deux anions principaux qui l’accompagnent<br />

(le chlore et le bicarbonate) sont responsables de la quasitotalité<br />

de l’osmolarité des liquides extracellulaires. Comme la<br />

constance de l’osmolalité du milieu extracellulaire prime sur la<br />

constance du volume des différents compartiments liquidiens,<br />

toute modification primitive de la quantité de sodium dans le<br />

compartiment extracellulaire induit un transfert d’eau entre le<br />

secteur extracellulaire et le secteur intracellulaire ou le milieu<br />

extérieur qui modifie le volume extracellulaire. À l’inverse, toute<br />

anomalie primitive du bilan hydrique modifie l’osmolarité<br />

extracellulaire et induit des transferts d’eau compensateurs qui<br />

limitent les variations du volume extracellulaire. Ainsi, le<br />

développement d’œdèmes généralisés nécessite un excès de la<br />

quantité de sodium échangeable de l’organisme tandis qu’un<br />

excès d’eau sans variation du bilan du sodium ne peut pas être<br />

à l’origine d’œdème.<br />

La quasi-intégralité du sodium ingéré est absorbé au niveau<br />

intestinal et est transféré vers dans le compartiment plasmatique.<br />

Ceci se traduit par une élévation transitoire de l’osmolarité<br />

3


18-026-C-20 Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

Na +<br />

Na +<br />

K +<br />

Pôle apical<br />

(fluide tubulaire)<br />

3 Na +<br />

2 K +<br />

K +<br />

Pôle basolatéral<br />

(compartiment interstitiel)<br />

extracellulaire après chaque repas. Cette élévation de l’osmolarité<br />

extracellulaire est à l’origine de transferts d’eau qui permettent<br />

le retour à la normale de l’osmolarité extracellulaire, mais<br />

au prix d’une augmentation du volume extracellulaire. En<br />

condition normale, cette expansion du volume extracellulaire<br />

génère des signaux neuroendocrines adressés aux reins afin de<br />

réduire la réabsorption tubulaire de sodium et d’ajuster son<br />

excrétion urinaire au niveau de ses apports. Le bilan du sodium<br />

se retrouve donc équilibré, mais de façon retardée et au prix<br />

d’une expansion modérée du volume extracellulaire. Cette<br />

expansion du volume extracellulaire est susceptible d’entraîner<br />

une augmentation du retour veineux vers l’oreillette droite, une<br />

augmentation du débit cardiaque et donc de la pression artérielle<br />

systémique. L’augmentation de la production de peptides<br />

natriurétiques, en réponse à l’augmentation de la pression de<br />

remplissage cardiaque, induit, en plus d’une action natriurétique,<br />

une vasodilatation artériolaire qui compense l’effet de<br />

l’élévation du débit sur la pression artérielle.<br />

À l’inverse, une réduction de l’ingestion de sodium provoque<br />

une diminution adaptée de l’excrétion urinaire de sodium après<br />

une phase intermédiaire de déséquilibre. Durant cette phase, la<br />

contraction des volumes extracellulaires active des systèmes<br />

favorisant la réabsorption du sodium, essentiellement le système<br />

rénine-angiotensine-aldostérone et le système sympathique.<br />

Leur mise en jeu est la conséquence d’une diminution de<br />

l’activité des volorécepteurs auriculaires, des barorécepteurs<br />

artériels et éventuellement de la baisse de la pression de<br />

perfusion rénale. Leur action vasoconstrictrice, synergique de<br />

leur effet sur le tubule rénal, permet le maintien de la pression<br />

artérielle malgré la baisse de la volémie. Notons à ce propos<br />

que, plus que la volémie totale, ces systèmes neuroendocrines<br />

contrôlent la volémie centrale, appelée encore volume sanguin<br />

artériel efficace, une grandeur virtuelle qui est la résultante du<br />

débit cardiaque et des résistances artérielles.<br />

A<br />

Na +<br />

H +<br />

K+<br />

+ Na<br />

Na +<br />

25 moles<br />

Cl<br />

Thiazide<br />

-<br />

NHE3 NCC<br />

Tubule proximal<br />

(15,5 moles)<br />

Anse ascendante<br />

large de Henle<br />

(7,5 moles)<br />

K +<br />

Na +<br />

K + Na + Na +<br />

K +<br />

Furosémide<br />

2 Cl- NKCC2<br />

ENaC<br />

Amiloride<br />

Métabolisme rénal du sodium<br />

Na +<br />

Tubule contourné<br />

distal<br />

(1,5 mole)<br />

Tubule connecteur<br />

et collecteur<br />

(0,3 mole)<br />

K +<br />

Cl- ROMK CLCK<br />

ROMK<br />

Réabsorption de base et contrôle<br />

de la balance hydrique<br />

0,2 mole<br />

Contrôle de la balance du<br />

sodium et de la volémie<br />

Figure 3. Réabsorption rénale de sodium.<br />

A. Principe général de la réabsorption de sodium. La Na-K-ATPase située dans la membrane basolatérale génère un gradient électrochimique de sodium qui<br />

est dissipé à travers des canaux ou des transporteurs exclusivement situés dans la membrane apicale. Le potassium accumulé dans la cellule peut être soit<br />

recyclé à travers la membrane basolatérale, soit sécrété dans le fluide tubulaire. Ces transports transcellulaires sont susceptibles de générer une différence<br />

de potentiel transépithéliale potentiellement capable d’énergiser le passage d’ions entre les cellules.<br />

B. Segmentation du transport de sodium le long du néphron. Environ 1 % seulement des 25 moles de sodium qui sont quotidiennement filtrées par les<br />

glomérules est excrété dans l’urine. La réabsorption de sodium s’effectue principalement dans le tubule proximal (entrée apicale de sodium via l’échangeur<br />

Na + /H + [NHE3]) et l’anse large ascendante de Henle (cotransporteur Na + -K + -2Cl – [NKCC2] et réabsorption paracellulaire). Le tubule contourné distal<br />

(cotransporteur Na + -C – l [NCC]) et les tubules connecteur et collecteur (canal Na) contribuent quantitativement peu à la réabsorption de sodium mais sont les<br />

sites de sa régulation fine qui permet d’équilibrer la balance sodée. ROMK : renal outer medullar k channel ; CLCK : canal chlorure ; ENaC : canal à sodium<br />

épithélial.<br />

Na +<br />

La filtration glomérulaire génère quotidiennement 180 l<br />

d’ultrafiltrat contenant environ 580 g de sodium, dont la<br />

majeure partie est réabsorbée tout au long des néphrons puisque<br />

seulement environ 1,5 l d’urine contenant environ 6 g de<br />

sodium sont excrétés quotidiennement. En condition normale,<br />

la quantité de sodium excrétée est égale à la quantité ingérée,<br />

ce qui permet le maintien d’une balance sodée nulle et la<br />

constance du volume des compartiments extracellulaires.<br />

Le sodium est réabsorbé à travers la paroi épithéliale unistratifiée<br />

des néphrons par un processus primairement transcellulaire<br />

nécessitant le franchissement successif des membranes<br />

apicale et basolatérale. Ce processus est énergisé par la sodium<br />

potassium adénosine triphosphatase (Na-K-ATPase) basolatérale<br />

qui pompe le sodium intracellulaire vers le compartiment<br />

interstitiel au prix de l’hydrolyse d’ATP. Globalement, plus de<br />

3 kg d’ATP sont hydrolysés quotidiennement pour énergiser la<br />

réabsorption rénale de sodium. La sortie active de sodium<br />

génère un gradient électrochimique, favorable à son entrée<br />

passive, qui est préférentiellement dissipé à travers la membrane<br />

apicale qui contient des transporteurs ou des canaux spécifiques<br />

du sodium. Il en résulte une réabsorption nette transépithéliale<br />

de sodium (Fig. 3A). Cette réabsorption transcellulaire de<br />

sodium génère une différence de potentiel transépithéliale<br />

permettant le transport intercellulaire de sodium (dont le sens<br />

et l’intensité dépendent respectivement de la polarisation<br />

électrique de l’épithélium et de la perméabilité ionique des<br />

jonctions intercellulaires).<br />

Ce mécanisme général de réabsorption du sodium se retrouve<br />

tout le long des néphrons, mais chacun de leurs segments<br />

successifs est doté de systèmes spécifiques de perméation apicale<br />

du sodium : principalement l’échangeur Na + /H + (NHE3) dans le<br />

tubule proximal, le cotransporteur Na + -K + -2Cl – (NKCC2)<br />

4 Néphrologie<br />

B<br />

K +<br />

Na +<br />

K +


sensible au furosémide dans l’anse large ascendante de Henle, le<br />

cotransporteur Na + -Cl – (NCC) sensible aux thiazidiques dans le<br />

tubule contourné distal, et le canal épithélial à sodium (ENaC)<br />

sensible à l’amiloride dans le tubule connecteur et le canal<br />

collecteur (Fig. 3B). Les différents segments de néphron diffèrent<br />

aussi par leur capacité de réabsorption du sodium : environ<br />

60 % du sodium filtré sont réabsorbés par le tubule proximal,<br />

un quart par l’anse large ascendante de Henle, et seulement de<br />

6%à8%parlessegments terminaux (tubule contourné distal,<br />

tubule connecteur et canal collecteur). Plus important, il faut<br />

noter que la réabsorption de sodium par les différents segments<br />

du néphron remplit des fonctions physiologiques distinctes.<br />

Dans le tubule proximal, la réabsorption de masse du sodium<br />

est un phénomène obligatoire et peu régulé. Celle dans l’anse<br />

large ascendante de Henle est précisément contrôlée par de<br />

nombreux facteurs endocrines et paracrines en rapport avec le<br />

maintien du bilan de l’eau. La réabsorption de sodium dans la<br />

branche large ascendante de l’anse de Henle engendre en effet<br />

la dilution de l’urine (permettant l’excrétion d’eau en excès du<br />

sel) et le gradient osmotique corticomédullaire, moteur de la<br />

concentration des urines (permettant l’excrétion de sel en excès<br />

par rapport à l’eau).<br />

Enfin, les segments terminaux du néphron, en particulier le<br />

tubule connecteur et le canal collecteur, sont la cible de la<br />

régulation fine du transport de sodium qui permet d’ajuster très<br />

exactement la quantité excrétée au niveau des apports alimentaires,<br />

et de maintenir la constance de la volémie (Fig. 3B).<br />

En réponse à une diminution de l’apport sodé alimentaire et<br />

à la contraction volémique qui en résulte, la réabsorption de<br />

sodium dans le tubule connecteur et le tubule collecteur est<br />

stimulée, en particulier par l’aldostérone dont la sécrétion est<br />

augmentée dans ces conditions. L’aldostérone agit sur ses<br />

cellules cibles via un récepteur cytoplasmique qui, une fois qu’il<br />

a lié l’hormone, migre dans le noyau où il agit comme un<br />

facteur de transcription. Il en résulte une augmentation de<br />

l’activité des voies d’entrée apicale du sodium (NCC et surtout<br />

ENaC) ainsi que de la Na-K-ATPase par des mécanismes d’abord<br />

post-transcriptionnels (adressage de réserves intracellulaires de<br />

ces protéines vers la membrane apicale ou basolatérale) puis<br />

transcriptionnels.<br />

En réponse à un apport sodé élevé et à l’hypervolémie<br />

consécutive, on observe d’une part une inhibition de la réabsorption<br />

de sodium dans le tubule connecteur et le canal<br />

collecteur cortical, en partie due à l’inhibition de la sécrétion<br />

d’aldostérone, et d’autre part une sécrétion de sodium dans la<br />

partie terminale du canal collecteur induite par les peptides<br />

natriurétiques libérés par les oreillettes cardiaques en réponse à<br />

l’augmentation de la pression de remplissage cardiaque.<br />

■ Œdèmes secondaires<br />

à un syndrome néphrotique<br />

Le syndrome néphrotique est défini par une excrétion urinaire<br />

anormalement élevée de protéines plasmatiques (> 50 mg/kg/j<br />

chez l’adulte) et une hypoalbuminémie (< 30 g/l). Ces signes<br />

biologiques sont secondaires à des altérations de la barrière<br />

d’ultrafiltration glomérulaire. Les syndromes néphrotiques sont<br />

soit des maladies primaires sans modifications structurales des<br />

glomérules visibles en microscopie optique (maladies à lésions<br />

glomérulaires minimes), soit des complications de pathologies<br />

inflammatoires avec des dépôts glomérulaires. Les formes<br />

primaires de syndrome néphrotique résultent soit d’altérations<br />

génétiques de protéines impliquées dans la filtration glomérulaire,<br />

soit de la présence d’un facteur plasmatique de perméabilité<br />

glomérulaire d’origine immunitaire (syndrome néphrotique<br />

idiopathique). Quelle qu’en soit l’étiologie, le syndrome néphrotique<br />

est toujours associé à une rétention rénale de sodium<br />

conduisant à la constitution d’œdèmes et/ou d’épanchement des<br />

séreuses (ascite, hydrocèle). Ceux-ci prennent parfois des<br />

proportions considérables, jusqu’à 30 % du poids du corps, et<br />

sont à l’origine d’une gêne fonctionnelle en raison de l’occlusion<br />

forcée des paupières et de difficultés locomotrices.<br />

Néphrologie<br />

Œdèmes généralisés d’origine rénale 18-026-C-20<br />

Rétention de sodium au cours du syndrome<br />

néphrotique<br />

Site et mécanisme cellulaire de la rétention rénale<br />

de sodium<br />

Notre compréhension des mécanismes de la rétention rénale<br />

de sodium au cours du syndrome néphrotique a grandement<br />

bénéficié de l’étude de modèles animaux, en particulier le<br />

syndrome néphrotique induit chez le rat par l’administration<br />

d’aminonucléoside de puromycine (PAN), un agent anticancéreux<br />

qui induit aussi un syndrome néphrotique chez les<br />

primates [8, 9] . Chez le rat, l’excrétion urinaire de sodium<br />

augmente transitoirement au cours des 24 heures suivant<br />

l’injection de PAN, avant de diminuer de façon biphasique : une<br />

première réduction d’environ 20 % s’opère entre le deuxième et<br />

le quatrième jour, suivie par un effondrement de plus de 90 %<br />

qui atteint son maximum après 5 à 6 jours. La protéinurie<br />

apparaît parallèlement à la deuxième phase de la rétention de<br />

sodium, et l’ascite et les œdèmes apparaissent aussi pendant<br />

cette seconde phase associant protéinurie et balance positive de<br />

sodium [10, 11] .<br />

Dans un modèle de syndrome néphrotique induit de façon<br />

unilatérale par le PAN, des expériences de microponction in<br />

vivo ont montré que le site de rétention de sodium se situe en<br />

aval du tubule contourné distal [12] . Des expériences ultérieures<br />

de microperfusion in vitro ont permis d’identifier le canal<br />

collecteur cortical comme le site principal de la rétention de<br />

sodium dans un modèle bilatéral de syndrome néphrotique<br />

induit par le PAN [13] . De plus, les animaux ainsi que les<br />

patients néphrotiques présentent une résistance à l’action des<br />

peptides natriurétiques auriculaires [14, 15] . Cette résistance,<br />

originaire de la portion du tubule collecteur située dans la<br />

médullaire interne (IMCD), empêche toute compensation de la<br />

rétention de sodium originaire des segments situés en amont<br />

par une sécrétion accrue dans les segments terminaux du<br />

néphron.<br />

L’analyse fonctionnelle de tubules collecteurs corticaux<br />

prélevés au pic de la rétention sodée chez des rats présentant un<br />

syndrome néphrotique induit par le PAN a montré une augmentation<br />

de l’activité de l’ENaC et de la Na-K-ATPase, respectivement<br />

aux pôles apical et basolatéral des cellules<br />

principales [16, 17] . L’activation de l’ENaC est principalement due<br />

à l’adressage vers la membrane apicale de canaux préexistant<br />

dans la cellule. Cette activation est associée au clivage partiel<br />

d’une de ses trois sous-unités (sous-unité c) [16, 17] . La stimulation<br />

de la Na-K-ATPase résulte primairement de l’induction<br />

transcriptionnelle des acides ribonucléiques messagers codant<br />

ses deux sous-unités et de leur néosynthèse [17] . Ces effets sur<br />

l’ENaC et la Na, K-ATPase concourent à augmenter considérablement<br />

la réabsorption de sodium.<br />

Rôle de l’aldostérone dans la rétention<br />

de sodium ?<br />

Il est classiquement admis que la rétention de sodium au<br />

cours des protéinuries massives répond à la théorie dite de<br />

l’underfill selon laquelle elle serait secondaire à la stimulation du<br />

système rénine-angiotensine-aldostérone selon la cascade<br />

d’évènements suivante : la diminution de la pression oncotique<br />

plasmatique liée à l’hypoalbuminurie déséquilibrerait les forces<br />

mises en jeu dans la loi de Starling et induirait une fuite de<br />

liquide vers l’interstitium et une hypovolémie. Celle-ci stimulerait<br />

le système rénine-angiotensine-aldostérone, induisant à son<br />

tour une rétention rénale de sodium. Le mécanisme cellulaire de<br />

la rétention de sodium identifié dans le syndrome néphrotique<br />

induit par le PAN est compatible avec cette hypothèse. Cependant,<br />

de nombreux faits cliniques et résultats expérimentaux<br />

l’invalident :<br />

lors des phases de rémission de syndrome néphrotique<br />

idiopathique corticosensible de l’enfant, l’excrétion urinaire<br />

de sodium augmente dès que la protéinurie décroît, bien<br />

avant le rétablissement d’une albuminémie normale [18] ;<br />

l’injection d’albumine est peu efficace pour induire une<br />

natriurèse chez les patients néphrotiques [19-24] ;<br />

5


18-026-C-20 Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

les rats et les malades analbuminémiques ne développent pas<br />

d’œdème malgré une pression oncotique plasmatique<br />

réduite [3, 4] ;<br />

en absence d’aldostérone ou avec une aldostéronémie artificiellement<br />

maintenue normale, les rats développent une<br />

rétention de sodium et une ascite en réponse à l’administration<br />

de PAN [17, 25] ;<br />

des antagonistes du récepteur minéralocorticoïde et des<br />

inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine sont<br />

inefficaces pour induire la natriurèse chez les malades<br />

néphrotiques [26, 27] ;<br />

le volume sanguin et la pression oncotique ne sont pas<br />

corrélés chez les malades néphrotiques [28] ;<br />

la volémie est normale ou élevée chez la plupart des individus<br />

dans plusieurs modèles animaux de syndrome néphrotique<br />

et chez des patients néphrotiques avec une charge<br />

d’œdème [29, 30] .<br />

L’ensemble de ces données indique d’une part que la rétention<br />

de sodium est un phénomène primaire, et d’autre part<br />

qu’elle est indépendante de l’aldostérone.<br />

Autres facteurs responsables de la rétention<br />

de sodium ?<br />

D’autres facteurs endocrines ou paracrines sont susceptibles<br />

de stimuler la réabsorption de sodium dans le canal collecteur,<br />

et leur implication dans le syndrome néphrotique a été proposée.<br />

Parmi ces facteurs, la vasopressine, ou hormone antidiurétique<br />

(ADH), est le plus important. Outre ses effets bien connus<br />

sur la réabsorption d’eau dans le canal collecteur, l’ADH, via<br />

l’activation de ses récepteurs de type V2 couplés à l’adénylyl<br />

cyclase, augmente la réabsorption de sodium de façon synergique<br />

avec l’aldostérone [31] . L’ADH augmente l’activité de la<br />

Na-K-ATPase du canal collecteur d’abord en induisant l’adressage<br />

à la membrane basolatérale d’une réserve fonctionnelle<br />

intracellulaire de pompes [32] puis, lorsque la stimulation est<br />

prolongée, en induisant la transcription et la néosynthèse de ses<br />

deux sous-unités. Le niveau plasmatique d’ADH est élevé chez<br />

les enfants atteints de syndrome néphrotique idiopathique en<br />

poussée de protéinurie [33] . Dans le modèle de syndrome<br />

néphrotique induit par le PAN, le taux des transcrits hypophysaires<br />

de préhormone et le niveau plasmatique d’ADH sont<br />

anormalement élevés alors que la volémie est normale ou<br />

élevée [34] . Cependant, l’administration de PAN à des rats<br />

Brattleboro, une souche qui ne sécrète pas d’ADH, induit une<br />

diminution de l’excrétion urinaire de sodium, une ascite et une<br />

stimulation de la Na-K-ATPase du canal collecteur comparables<br />

à celles observées chez la souche témoin [10] . En fait, les rats<br />

ayant un syndrome néphrotique induit par le PAN présentent<br />

même une résistance à l’effet antinatriurétique de l’ADH<br />

puisque, contrairement aux rats normaux, la réserve fonctionnelle<br />

de Na-K-ATPase de leurs tubules collecteurs n’est pas<br />

mobilisable par l’ADH [35] .<br />

L’implication de tous les autres facteurs actuellement connus<br />

pour activer la réabsorption de sodium dans le tubule collecteur,<br />

à savoir l’angiotensine 2 [36] ,letumor necrosis factor (TNF) a [37,<br />

38] , l’insulin-like growth factor 1 [39, 40] et des agonistes du<br />

peroxisome proliferator-activated receptor (PPAR) c [41, 42] , a aussi été<br />

exclue chez le rat ayant un syndrome néphrotique induit par le<br />

PAN sur la base de l’absence d’effet d’antagonistes de leurs<br />

récepteurs sur la rétention de sodium [43] .<br />

Le fait que dans le modèle de syndrome néphrotique unilatéral<br />

induit par le PAN seul le rein protéinurique retienne le<br />

sodium [12] indique que la rétention de sodium n’est pas induite<br />

par un facteur circulant dans le sang. Elle est probablement<br />

induite par un facteur anormalement présent dans le rein<br />

protéinurique. Une hypothèse actuellement mise en avant<br />

implique la présence dans le compartiment intratubulaire d’une<br />

protéine activatrice de la réabsorption de sodium par suite de sa<br />

filtration anormale dans les reins néphrotiques [44] .<br />

La résistance des patients et des animaux néphrotiques vis-àvis<br />

des peptides natriurétiques ne s’explique ni par une modification<br />

de l’affinité ou de l’expression du récepteur du peptide<br />

atrial natriurétique (ANP) dans l’IMCD, ni par un défaut de<br />

couplage, mais par un catabolisme accru du guanosine monophosphate<br />

cyclique, le deuxième messager de l’ANP, lié à<br />

l’activation de phosphodiestérases intracellulaires [45] . Ce<br />

mécanisme est commun à d’autres modèles non protéinuriques<br />

de rétention rénale de sodium comme la cirrhose hépatique et<br />

l’insuffisance cardiaque à haut débit [46, 47] .<br />

Altération de la filtration capillaire<br />

dans le syndrome néphrotique<br />

Le débit transcapillaire de fluide est doublé chez les malades<br />

néphrotiques [48] , indiquant qu’au moins un des paramètres de<br />

la loi de Starling est altéré au cours de la maladie.<br />

Gradient de pression oncotique<br />

La diminution du gradient de pression oncotique à travers<br />

l’endothélium capillaire est généralement considéré comme<br />

l’agent causal de l’hyperfiltration capillaire chez les sujets<br />

néphrotiques. Cependant, l’absence d’œdème et d’ascite chez les<br />

rats et les patients analbuminémiques a remis en cause l’implication<br />

de ce paramètre dans la genèse des œdèmes au cours du<br />

syndrome néphrotique [3, 4] . Comme attendu (cf. supra), la<br />

pression oncotique interstitielle baisse parallèlement à la<br />

pression oncotique vasculaire au cours du syndrome néphrotique.<br />

Ainsi, le gradient oncotique transcapillaire n’est que<br />

faiblement influencé par la réduction de moitié de la pression<br />

oncotique plasmatique lors des poussées de protéinurie [49] . Par<br />

ailleurs, l’administration d’agents natriurétiques permet la<br />

résolution de quantités importantes d’œdème en présence de<br />

pressions oncotiques inférieures à 10 mmHg et sans modification<br />

du gradient oncotique transcapillaire [49] . De même, par<br />

ultrafiltration extracorporelle, il est possible de réduire de 20 %<br />

le volume interstitiel de patients néphrotiques ayant une faible<br />

pression oncotique plasmatique, sans que soit modifié significativement<br />

leur gradient oncotique transcapillaire pendant<br />

l’ultrafiltration [50] . La soustraction des œdèmes interstitiels<br />

n’oppose donc pas de résistance lorsque la régulation rénale du<br />

sodium est artificiellement modifiée par des agents natriurétiques<br />

ou est court-circuitée par une filtration extracorporelle.<br />

En conclusion, l’abaissement de la pression oncotique<br />

plasmatique dans les modèles animaux comme dans les maladies<br />

humaines ne déséquilibre pas le gradient oncotique<br />

transcapillaire, et n’apparaît ni comme un facteur déterminant<br />

dans la formation et le maintien des œdèmes, ni comme un<br />

facteur de résistance à leur soustraction.<br />

Gradient de pression hydrostatique<br />

La pression hydrostatique intracapillaire n’est pas modifiée<br />

chez les malades néphrotiques [48] . Les tissus mous ayant une<br />

très grande compliance au-delà de 0 mmHg, la pression interstitielle<br />

n’y augmente que de quelques millimètres de mercure<br />

lors de leur expansion [51] . Chez les malades néphrotiques, les<br />

pressions interstitielles des secteurs œdématiés et normaux ne<br />

diffèrent qu’au plus de 4 mmHg [52] . Ces données indiquent que<br />

le gradient de pression hydrostatique n’est pas non plus un<br />

facteur déterminant de la formation des œdèmes néphrotiques.<br />

Conductivité hydraulique<br />

La conductivité hydraulique de l’endothélium est augmentée<br />

au cours du syndrome néphrotique [48] . Les raisons de cette<br />

augmentation ne sont que partiellement connues. Le TNFa,<br />

dont le taux circulant est élevé dans les syndromes néphrotiques<br />

à dépôts et à lésions glomérulaires minimes [53] , augmente<br />

la perméabilité vasculaire par l’intermédiaire d’une activation de<br />

la protéine kinase C (PKC) [54] , et probablement par phosphorylation<br />

de l’occludine. L’hypoalbuminémie per se augmente<br />

aussi la conductivité hydraulique capillaire via l’activation d’une<br />

voie de signalisation calcique [55] , et donc possiblement aussi via<br />

l’activation d’une PKC.<br />

Coeffıcient de réflexion des macromolécules<br />

L’extravasation d’albumine vers le secteur interstitiel est<br />

anormalement élevée dans tous les syndromes néphrotiques,<br />

6 Néphrologie


quelle que soit leur cause [56] . De même, la rétention capillaire<br />

de billes de polyvidone est altérée dans le péritoine des rats<br />

ayant un syndrome néphrotique induit par le PAN [57] . Ces<br />

résultats suggèrent l’existence d’une perturbation du coefficient<br />

de réflexion capillaire des macromolécules systématiquement<br />

associée à l’état néphrotique.<br />

Le syndrome néphrotique idiopathique à lésions glomérulaires<br />

minimes a pour origine un désordre immunitaire : certains<br />

lymphocytes de ces patients sécrètent un facteur non identifié<br />

qui augmenterait la perméabilité aux macromolécules de la<br />

barrière de filtration glomérulaire. En culture, les lymphocytes<br />

T de ces malades sécrètent aussi un facteur qui augmente la<br />

perméabilité capillaire vis-à-vis du bleu Evans chez des hamsters<br />

non néphrotiques [58] . Le facteur circulant du syndrome néphrotique<br />

idiopathique aggrave donc l’altération de perméabilité<br />

de l’endothélium capillaire aux protéines trouvée dans les autres<br />

formes de syndrome néphrotique.<br />

“ Point fort<br />

Contrairement à l’idée couramment admise,<br />

l’augmentation du débit de filtration capillaire au cours du<br />

syndrome néphrotique ne résulte donc pas de la<br />

diminution de la pression oncotique plasmatique mais de<br />

dysrégulations de la conductivité hydraulique de la paroi<br />

capillaire et de son coefficient de réflexion des<br />

macromolécules par des mécanismes pas encore<br />

totalement élucidés.<br />

Implications thérapeutiques<br />

Le développement d’œdèmes au cours du syndrome néphrotique<br />

résulte donc de la conjonction d’une rétention anormale<br />

de sodium et d’une augmentation de la filtration nette à travers<br />

l’endothélium capillaire. Le traitement de l’un ou l’autre de ces<br />

dysfonctionnements est théoriquement suffisant pour empêcher<br />

le développement des œdèmes. Cependant, le traitement de<br />

l’altération capillaire en absence de blocage de la rétention de<br />

sodium conduirait à un état d’hypervolémie et d’hypertension<br />

artérielle. Les traitements actuels ciblent donc tous le défaut de<br />

la balance sodée. Vis-à-vis de ces traitements, il convient de<br />

distinguer les traitements préventifs, utiles en cas de protéinurie<br />

chronique, dans lesquels il suffit d’inhiber le processus de<br />

rétention de sodium, des traitements curatifs où il faut en plus<br />

permettre l’excrétion de l’excès hydrosodé accumulé dans les<br />

œdèmes.<br />

Régime hyposodé<br />

La réduction de la quantité de sodium alimentaire, généralement<br />

fixée à 0,5 mmol/kg/j, permet d’empêcher l’accumulation<br />

de sodium dans l’espace extracellulaire. Cela reste le meilleur<br />

traitement préventif des œdèmes en cas de protéinurie<br />

chronique.<br />

Perfusion d’albumine<br />

Sur la base de la théorie de l’underfill, selon laquelle la<br />

rétention de sodium serait secondaire à une hypovolémie ellemême<br />

secondaire à l’hypoalbuminémie, il a été proposé de<br />

traiter les œdèmes néphrotiques par perfusion d’albumine.<br />

L’analyse des résultats de quatre études [19-21, 24] indique que la<br />

perfusion d’albumine induit une augmentation du débit urinaire<br />

de sodium d’un facteur trois à cinq [59] . Cependant, cette<br />

augmentation est insuffisante pour négativer la balance sodée et<br />

induire une perte significative du poids. L’effet observé sur<br />

l’excrétion de sodium s’explique probablement par le fait que<br />

pendant les périodes transitoires de variation de la pression<br />

oncotique plasmatique le gradient de pression oncotique<br />

transcapillaire est effectivement augmenté, induisant une<br />

Néphrologie<br />

augmentation transitoire de la volémie et inhibant la réabsorption<br />

de sodium. Cependant, cet effet transitoire (cf. supra) est<br />

insuffisant pour résorber les œdèmes. Ajoutons que la perfusion<br />

d’albumine est potentiellement dangereuse chez les patients<br />

dont la volémie est spontanément élevée, et des cas d’œdème<br />

aigu pulmonaire et d’insuffisance cardiaque aiguë aboutissant<br />

parfois au décès ont été rapportés dans la littérature [60] .<br />

Diurétiques<br />

Œdèmes généralisés d’origine rénale 18-026-C-20<br />

Dans le syndrome néphrotique induit par le PAN chez le rat,<br />

l’inhibition de la réabsorption de sodium par l’amiloride dans<br />

le canal collecteur, le site de la rétention de sodium, est<br />

suffisante pour prévenir le développement d’œdèmes [13] .<br />

Cependant, la réabsorption de sodium dans le canal collecteur<br />

est quantitativement trop modeste pour que son inhibition,<br />

même totale, permette l’excrétion rapide de la grande surcharge<br />

sodée accumulée dans des œdèmes généralisés. À cette fin, il<br />

faut utiliser des agents natriurétiques agissant à des sites où la<br />

réabsorption de sodium est plus intense, comme la branche<br />

large ascendante de l’anse de Henle. Cependant, les patients<br />

néphrotiques présentent une résistance à l’effet natriurétique du<br />

furosémide [61] . Cette résistance n’est pas propre à la mobilisation<br />

des œdèmes (cf. supra), mais bien liée à une limitation de<br />

l’effet natriurétique du produit [62] . Elle n’est pas non plus<br />

secondaire à une résistance de la branche large de l’anse de<br />

Henle puisque la sensibilité au furosémide de ce segment de<br />

néphron in vitro est normale chez les rats néphrotiques [13] .<br />

Plusieurs hypothèses pharmacocinétiques ont été avancées,<br />

mais aucune n’a reçu de confirmation :<br />

la vitesse d’élimination du produit n’est pas significativement<br />

modifiée et l’absorption digestive est accrue chez les enfants<br />

néphrotiques [63] ;<br />

la biodisponibilité du produit n’est pas altérée par sa liaison<br />

à l’albumine dans le fluide intratubulaire, puisque l’utilisation<br />

d’inhibiteur de cette liaison a donné des résultats contradictoires<br />

mais ne semble finalement pas améliorer significativement<br />

le débit urinaire de sodium [64, 65] ;<br />

elle n’est pas altérée non plus par l’hypoalbuminémie puisque<br />

la perfusion conjointe d’albumine et de furosémide ne<br />

potentialise pas l’effet natriurétique du furosémide<br />

[19, 20, 22,<br />

23] .<br />

Des hypothèses fonctionnelles ont aussi été proposées, en<br />

particulier l’existence d’une compensation de l’inhibition de la<br />

réabsorption de sodium dans l’anse de Henle par une réabsorption<br />

accrue dans les segments situés en aval sous l’influence de<br />

l’hyperaldostéronémie (toujours la théorie de l’underfill).<br />

Plusieurs essais avec des antagonistes du récepteur minéralocorticoïde<br />

ont été rapportés [27, 66, 67] . Comme attendu, la spironolactone<br />

a un effet natriurétique faible mais significatif chez les<br />

malades néphrotiques hypovolémiques dont le système réninealdostérone<br />

est activé [27] , mais pas chez les malades dont le<br />

taux circulant d’aldostérone est normal ou bas, les plus<br />

nombreux.<br />

Plus judicieusement, des traitements associant le furosémide<br />

et un inhibiteur direct de protéines de transport de sodium dans<br />

les segments en aval de l’anse de Henle ont été proposés. Les<br />

diurétiques thiazidiques, qui inhibent le cotransport Na-Cl dans<br />

le tubule contourné distal, potentialisent l’effet du furosémide<br />

sur le débit urinaire de sodium [68, 69] et réduisent les œdèmes<br />

[69] . Jusqu’à récemment, l’amiloride avait été étudié pour<br />

son effet d’épargne potassique [70] , mais les études portant sur la<br />

natriurèse étaient fragmentaires [71, 72] . Dans une étude récente<br />

portant sur 13 patients néphrotiques, l’association furosémideamiloride<br />

a induit une forte natriurèse, une négativation de la<br />

balance sodée et la résorption progressive et complète des<br />

œdèmes, sans complication, chez 12 malades sur 13 [59] .<br />

Ces résultats avec les thiazidiques et l’amiloride suggèrent que<br />

la résistance rénale au furosémide est liée à la compensation de<br />

son effet dans l’anse de Henle par l’intense réabsorption de<br />

sodium en aval, et démontrent l’efficacité des associations entre<br />

un diurétique de l’anse et un natriurétique du tube distal pour<br />

le traitement des œdèmes néphrotiques.<br />

Dans le canal collecteur, la réabsorption de sodium est<br />

fonctionnellement couplée à une sécrétion de potassium. En<br />

7


18-026-C-20 Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

effet, l’entrée apicale de sodium via l’ENaC dépolarise la<br />

membrane apicale, favorisant ainsi la sortie de potassium via le<br />

canal apical ROMK (Fig. 3B). Ce couplage rend compte du<br />

potentiel effet hyperkaliémiant indésirable de l’amiloride. De<br />

façon encore inexpliquée, la réabsorption massive de sodium<br />

dans le canal collecteur des animaux néphrotiques n’est pas<br />

associée à une augmentation de la sécrétion de potassium, et ces<br />

animaux, tout comme les patients néphrotiques, ne présentent<br />

pas de signes d’hypokaliémie. Cette particularité renforce<br />

l’intérêt du traitement des œdèmes néphrotiques avec l’amiloride<br />

puisqu’elle prévient l’effet secondaire majeur de cet agent.<br />

■ Œdèmes secondaires<br />

au syndrome néphritique<br />

Le syndrome néphritique est caractérisé par une protéinurie<br />

moindre que dans les syndromes néphrotiques, une hématurie<br />

massive, une hypertension artérielle et des œdèmes généralisés<br />

mais de moindre ampleur que les œdèmes néphrotiques.<br />

Physiopathologie<br />

Les œdèmes néphritiques répondent au modèle de l’overflow<br />

dans lequel la rétention rénale de sodium est le phénomène<br />

primaire induisant l’expansion volémique [73] . Contrairement au<br />

syndrome néphrotique où l’œdème interstitiel est prédominant,<br />

cette expansion volémique affecte aussi le secteur vasculaire, ce<br />

qui est cliniquement apparent par l’association des œdèmes<br />

systémiques à une hypertension artérielle, une insuffisance<br />

ventriculaire gauche pouvant conduire à un œdème pulmonaire<br />

aigu.<br />

L’augmentation de l’extravasion capillaire vers l’interstitium,<br />

responsable de la formation des œdèmes, serait due à une<br />

augmentation de la pression hydrostatique secondaire à l’augmentation<br />

de la pression veineuse. Cependant, des altérations<br />

des autres paramètres de la loi de Starling n’ont pas été recherchées<br />

spécifiquement. L’expansion du volume vasculaire aboutit<br />

quant à elle à l’inhibition du système rénine-angiotensinealdostérone<br />

et du tonus sympathique. L’hypoaldostéronisme des<br />

patients peut induire une hyperkaliémie [74] , ce qui distingue<br />

aussi les syndromes néphritique et néphrotique.<br />

Le mécanisme de la rétention rénale de sodium n’est pas<br />

totalement élucidé. La diminution de la filtration glomérulaire<br />

réduit la quantité filtrée de sodium. Des expériences de microponction<br />

dans un modèle de glomérulonéphrite expérimentale<br />

induite chez le chien par injection d’anticorps antimembrane<br />

basale ont montré que la diminution de filtration glomérulaire ne<br />

modifie pas la réabsorption fractionnelle de sodium dans les<br />

segments proximaux du néphron, démontrant l’intégrité du<br />

rétrocontrôle glomérulotubulaire. En revanche, l’augmentation de<br />

la réabsorption fractionnelle de sodium au-delà du tubule<br />

contourné distal rend compte de la diminution des excrétions<br />

fractionnelle et totale de sodium [75] . Dans un modèle de glomérulonéphrite<br />

induite par l’administration d’anticorps anti-<br />

Thy1 chez le rat, la baisse de filtration glomérulaire est associée à<br />

une diminution de l’expression des transporteurs apicaux du<br />

sodium dans le tubule proximal, et à une activation et une<br />

surexpression d’ENaC dans le tubule collecteur [76] , suggérant une<br />

implication majeure du tubule collecteur dans la rétention de<br />

sodium. Comme dans le syndrome néphrotique, l’augmentation<br />

de la réabsorption de sodium dans le tubule collecteur est<br />

indépendante du système rénine-angiotensine-aldostérone qui est<br />

réprimé au cours des glomérulonéphrites aiguës. Certains auteurs<br />

ont là aussi suggéré l’implication de protéases anormalement<br />

présentes dans le fluide tubulaire et capables d’activer l’ENaC [76] .<br />

Dans les formes oligoanuriques d’insuffisance rénale aiguë, la<br />

positivation de la balance sodée est directement liée à l’extrême<br />

réduction du débit de filtration de sodium qui empêche l’excrétion<br />

de la charge quotidienne de sodium (apports alimentaires<br />

et perfusions liées au traitement).<br />

Traitement<br />

Le traitement des œdèmes néphritiques généralisés n’est pas<br />

une finalité thérapeutique en soi, parce qu’ils sont restreints et<br />

.<br />

peu invalidants, et qu’il est plus important de traiter l’hypertension,<br />

voire l’œdème pulmonaire. Néanmoins, puisque la<br />

rétention rénale de sodium est la cause primaire de l’hypertension<br />

chez les patients néphritiques, son traitement permet aussi<br />

la résorption des œdèmes.<br />

Comme dans le syndrome néphrotique, la restriction sodée<br />

aide à la prévention des œdèmes et peut induire une perte de<br />

poids liée à leur résorption. Les fortes doses de furosémide ont<br />

un effet diurétique appréciable dans les formes oligoanuriques,<br />

et induisent une augmentation nette de l’excrétion de sodium<br />

et une réduction de la pression artérielle [77-79] . De façon<br />

intéressante quoiqu’inexpliquée, ces patients ne présentent pas<br />

de stimulation du système rénine-angiotensine-aldostérone en<br />

réponse aux diurétiques de l’anse [77] .<br />

L’efficacité de bithérapies associant un diurétique de l’anse<br />

avec un natriurétique distal (thiazidique ou amiloride) n’a pas<br />

été évaluée, mais ces traitements devraient apporter un avantage<br />

thérapeutique certain compte tenu de l’origine distale de la<br />

rétention de sodium.<br />

■ Conclusion<br />

L’apparition d’œdèmes au cours des syndromes néphrotique<br />

et néphritique résulte de la conjonction d’une rétention rénale<br />

de sodium et d’anomalies des propriétés de filtration de<br />

l’endothélium capillaire responsables d’un déséquilibre de<br />

distribution du liquide extracellulaire en faveur du compartiment<br />

interstitiel par rapport au compartiment plasmatique.<br />

L’intensité de ces anomalies de l’endothélium capillaire va<br />

déterminer la nature des symptômes : œdèmes purs dans le<br />

syndrome néphrotique quand l’anomalie est suffisamment forte<br />

pour que l’intégralité de l’expansion volémique se fasse au<br />

profit du compartiment interstitiel, association œdèmeshypertension<br />

dans le syndrome néphritique lorsqu’une moindre<br />

anomalie permet l’expansion des deux sous-compartiments<br />

extracellulaires. La diminution de la pression oncotique plasmatique<br />

n’a pas de rôle majeur dans l’anomalie de filtration<br />

capillaire, mais ce sont plutôt les paramètres intrinsèques de la<br />

barrière endothéliale qui sont altérés (conductance hydraulique<br />

et coefficient de réflexion des protéines). L’injection d’albumine<br />

aux patients ne peut donc pas durablement rétablir l’équilibre<br />

de distribution de l’eau entre les compartiments interstitiel et<br />

plasmatique. Elle peut même s’avérer dangereuse chez les<br />

patients présentant une hypervolémie.<br />

Dans ces deux pathologies, la rétention rénale de sodium est<br />

originaire des segments distaux du néphron, le canal collecteur<br />

cortical et le tubule connecteur. Bien qu’il s’agisse des cibles<br />

cellulaires de l’action antinatriurétique de l’aldostérone, la<br />

rétention de sodium est indépendante du système rénineangiotensine-aldostérone.<br />

C’est une rétention primaire, répondant<br />

au mécanisme de l’overflow, qui est induite par un facteur<br />

non encore identifié, mais ne circulant probablement pas dans<br />

le plasma. Il pourrait s’agir d’une protéine anormalement<br />

présente dans le fluide intratubulaire de ces patients, secondairement<br />

à l’altération de la barrière de filtration glomérulaire.<br />

Tant que le facteur inducteur de la rétention de sodium ne<br />

sera pas identifié, le canal sodium du tubule collecteur restera<br />

la cible thérapeutique de choix pour prévenir les œdèmes. Leur<br />

résorption nécessite d’associer un diurétique de l’anse capable<br />

d’induire une natriurèse intense et l’amiloride pour inhiber la<br />

réabsorption de la surcharge de sodium arrivant au niveau du<br />

canal collecteur.<br />

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Nephrol 1980;14:55-9.<br />

[78] Pruitt AW, Boles A. Diuretic effect of furosemide in acute<br />

glomerulonephritis. J Pediatr 1976;89:306-9.<br />

[79] Repetto HA, Lewy JE, Braudo JL, Metcoff J. The renal functional<br />

response to furosemide in children with acute glomerulonephritis.<br />

J Pediatr 1972;80:660-6.<br />

G. Deschênes.<br />

Service de néphrologie pédiatrique, Hôpital Robert Debré, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 48, boulevard Sérurier, 75935 Paris cedex 19, France.<br />

Laboratoire de physiologie, physiopathologie et génomique rénales, UMRS 872 & ERL 7226, Centre de recherche des Cordeliers, 15, rue de l’École de<br />

médecine, 75270 Paris cedex 6, France.<br />

A. Doucet (alain.doucet@crc.jussieu.fr).<br />

Laboratoire de physiologie, physiopathologie et génomique rénales, UMRS 872 & ERL 7226, Centre de recherche des Cordeliers, 15, rue de l’École de<br />

médecine, 75270 Paris cedex 6, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Deschênes G., Doucet A. Œdèmes généralisés d’origine rénale. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-026-C-20, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0530<br />

© Elsevier, Paris<br />

Polykystose rénale et autres<br />

néphropathies héréditaires<br />

L a<br />

JP Grünfeld, D Joly<br />

polykystose rénale autosomique dominante s’observe environ chez un individu sur 1 000. C’est une des plus<br />

fréquentes maladies héréditaires humaines : environ 60 000 personnes sont atteintes en France et 60 000<br />

personnes supplémentaires non atteintes appartiennent aux familles touchées.<br />

© Elsevier, Paris.<br />

Quelques points<br />

■<br />

de repère sur<br />

les maladies héréditaires rénales<br />

La prévalence des maladies rénales génétiques est<br />

bien plus élevée chez l’adulte que chez l’enfant (cela<br />

est vrai également pour toutes les maladies génétiques<br />

humaines, comme le diabète non insulinodépendant<br />

qui a un important déterminisme génétique, les<br />

maladies de Huntington et d’Alzheimer, les amyloses<br />

familiales, etc). Les premières manifestations<br />

apparaissent à l’âge adulte dans la grande majorité<br />

des cas [4, 7] .<br />

Les maladies héréditaires rénales les plus graves<br />

(mais aussi les plus rares) s’observent chez l’enfant : la<br />

plus fréquente, la néphronophtise, a une prévalence<br />

d’environ un sur 40 000 sujets. Certes les<br />

néphropathies héréditaires représentent 30 % des<br />

causes d’insuffisance rénale terminale (IRT) chez<br />

l’enfant alors qu’elles ne représentent que 10 % des<br />

causes d’IRT chez l’adulte ; mais l’incidence annuelle<br />

de l’IRT en France (nombre de nouveaux cas par an et<br />

par million d’habitants) est de 100 chez l’adulte contre<br />

cinq chez l’enfant. Beaucoup de maladies rénales<br />

héréditaires ne progressent pas vers l’IRT.<br />

Dans une famille donnée, une maladie héréditaire<br />

peut ne toucher qu’un seul membre : l’enquête<br />

familiale est alors négative. C’est le cas dans trois<br />

circonstances principales (concernant les maladies<br />

rénales) :<br />

Tableau I. – Principales maladies kystiques rénales héréditaires.<br />

Maladie Gène identifié<br />

– dans une maladie liée à l’X : les femmes vectrices<br />

hétérozygotes ont souvent peu ou pas de<br />

symptômes ;<br />

– dans une maladie autosomique récessive : les<br />

deux parents sont hétérozygotes mais souvent<br />

asymptomatiques. Les sujets atteints homozygotes<br />

sont à rechercher dans la même génération mais tout<br />

dépend du nombre de frères, de sœurs ou de<br />

germains exposés au risque ;<br />

– en cas de néomutation qui s’est créée chez le<br />

propositus pour la première fois dans la famille ; bien<br />

entendu, cette mutation sera transmissible à la<br />

descendance.<br />

Maladies kystiques<br />

■<br />

rénales<br />

héréditaires<br />

‚ Polykystose rénale autosomique<br />

[4, 7]<br />

dominante<br />

La polykystose rénale autosomique dominante<br />

(PKRAD) est caractérisée par le développement de<br />

multiples kystes en rapport initialement avec divers<br />

segments tubulaires, puis secondairement exclus de<br />

toute connexion avec les néphrons. Les kystes sont<br />

habituellement non visibles à la naissance (mais dans<br />

quelques cas ils peuvent être détectés chez le fœtus)<br />

ou se limitent à des dilatations tubulaires. Ils<br />

progressent par la suite, et les reins peuvent contenir<br />

Localisation<br />

chromosomique<br />

Prévalence connue<br />

ou estimée<br />

plusieurs milliers de kystes et peser plusieurs<br />

kilogrammes au terme de l’évolution, alors qu’un rein<br />

normal ne pèse que 150 à 200 g (tableau I).<br />

Génétique<br />

Cette variété de polykystose rénale se transmet<br />

selon le mode autosomique dominant. La maladie est<br />

génétiquement hétérogène. En effet, elle est due à des<br />

mutations qui peuvent toucher l’un des trois locus ou<br />

gènes suivants :<br />

– le gène PKD1, localisé au chromosome 16 ;<br />

– le gène PKD2, localisé au chromosome 4 ;<br />

– un troisième locus jusqu’à présent non localisé.<br />

Le gène PKD1 est contigu à l’un des gènes<br />

impliqués dans la sclérose tubéreuse de Bourneville, le<br />

gène TSC2. La protéine codée par PKD1 est<br />

dénommée polycystine. Elle a la structure d’une<br />

molécule d’adhérence mais sa fonction précise reste<br />

inconnue. La structure de la protéine PKD2 ressemble<br />

à celle d’un canal ionique. Les protéines PKD1 et PKD2<br />

interagissent probablement.<br />

Manifestations rénales<br />

La maladie rénale peut rester longtemps<br />

asymptomatique et n’être découverte qu’à l’examen<br />

clinique (gros reins bosselés, parfois asymétriques) ou<br />

lors d’une échographie. Des douleurs plus ou moins<br />

vives sont signalées par la plupart des malades à un<br />

moment ou à un autre de l’évolution. Une colique<br />

néphrétique fait évoquer une lithiase urinaire (urique<br />

Mode de<br />

transmission<br />

Âge de survenue des premières<br />

manifestations rénales<br />

PKRAD 1/1 000 AD Adulte (surtout)<br />

PKD1 (16) 85 % Enfance (très rarement)<br />

PKD2 (4) 10-15 %<br />

PKD3 ( ?)<br />

PKRAR ? (6) 1/40 000 ( ?) AR Enfance<br />

Néphronophtise juvénile NPH (2) 1/40 000 ( ?) AR Enfance - kystes médullaires rénaux<br />

tardifs<br />

Maladie kystique médullaire rénale<br />

Phacomatoses :<br />

? ? ? AD Adulte - kystes rénaux précoces<br />

- sclérose tubéreuse TSC1 (9) 1/15 000 ( ?) AD Enfance/adulte<br />

TSC2 (16)<br />

- von Hippel-Lindau VHL (3) 1/40 000 AD Adulte (surtout)<br />

PKRAD : polykystose rénale autosomique dominante ; PKRAR : polykystose rénale autosomique récessive ; AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif.<br />

1<br />

5-0530


5-0530 - Polykystose rénale et autres néphropathies héréditaires<br />

dans 50 % des cas), qui se développe chez 20 % des<br />

malades, mais la douleur peut également être due à<br />

un saignement intrakystique ou à la migration d’un<br />

caillot. Des hématuries macroscopiques sont<br />

observées chez la moitié des patients.<br />

Les infections du haut appareil urinaire surviennent<br />

chez 20 % des malades, plus souvent chez la<br />

femme. Le traitement est celui d’une pyélonéphrite<br />

aiguë : on utilise en première ligne une céphalosporine<br />

de troisième génération, une fluoroquinolone ou du<br />

triméthoprime-sulfaméthoxazole. L’emploi des<br />

aminosides, pendant une brève période, sera limité au<br />

maximum, à cause de leur toxicité rénale. La durée du<br />

traitement est de 10 à 20 jours. Lorsque le liquide<br />

kystique lui-même est infecté, l’examen cytobactériologique<br />

de l’urine peut se révéler initialement négatif. Par<br />

ailleurs, l’efficacité du traitement est plus médiocre. En<br />

effet, la pénétration intrakystique de la plupart des<br />

antibiotiques est lente. Deux exceptions : les<br />

fluoroquinolones et le triméthoprime.<br />

L’hypertension artérielle est une complication<br />

fréquente et précoce qui touche 50 % à 80 % des<br />

patients, selon que la fonction rénale est normale ou<br />

altérée. L’élévation de la pression artérielle (sans<br />

hypertension franche) peut être observée dès<br />

l’enfance ou l’adolescence. Le contrôle de<br />

l’hypertension artérielle est crucial, non pas tant pour<br />

ralentir la progression de la maladie rénale, que pour<br />

prévenir les complications cardiovasculaires. Les règles<br />

d’utilisation des médicaments antihypertenseurs sont<br />

celles communes à toutes les néphropathies<br />

chroniques, avec ou sans insuffisance rénale. La<br />

plupart des antihypertenseurs peuvent être utilisés,<br />

parfois à doses réduites en cas d’insuffisance rénale<br />

chronique [3] .<br />

L’insuffisance rénale chronique touche 60 à 80 %<br />

des patients. Celle-ci installée, le débit de filtration<br />

glomérulaire s’abaisse en moyenne de 6 mL/min par<br />

an, et le stade terminal de l’insuffisance rénale est<br />

atteint à un âge moyen de 55 ans. Cinq pour cent des<br />

malades progressent vers ce stade avant 40 ans, 20 %<br />

environ après 65 ans. Il est aujourd’hui bien établi que<br />

20 à 40 % des malades atteints de polykystose<br />

n’évolueront pas vers l’insuffisance rénale terminale et<br />

décéderont, parfois à un âge avancé, d’une cause<br />

indépendante. L’anémie est moindre dans la PKRAD<br />

que dans les autres néphropathies, probablement par<br />

suite d’une production d’érythropoïétine par les kystes<br />

ou le tissu adjacent.<br />

La prédiction individuelle du pronostic rénal est<br />

bien difficile chez un adulte d’âge moyen car<br />

l’évolution est hétérogène au sein d’une même famille<br />

et d’une famille à l’autre. Plus le volume rénal est<br />

important et plus le nombre de kystes est élevé, plus le<br />

risque de progression est grand. Deux éléments<br />

principaux déterminent en pratique le pronostic :<br />

– génotype : la forme PKD2 est moins évolutive<br />

que la forme PKD1. La différence au stade terminal est<br />

en moyenne de 15 ans ;<br />

– sexe : les hommes atteignent l’insuffisance rénale<br />

terminale5à6ansplus tôt que les femmes.<br />

D’autres éléments pourraient éventuellement<br />

influencer ou non la progression de la maladie rénale.<br />

Le polymorphisme du gène de l’enzyme de<br />

conversion de l’angiotensine pourrait être impliqué,<br />

comme dans d’autres néphropathies. On connaît<br />

environ 100 cas dans le monde où la maladie rénale a<br />

été très précoce et évolutive, conduisant à<br />

l’insuffisance rénale terminale dans les premières<br />

années de la vie. Ces cas peuvent récidiver dans une<br />

même fratrie. Ils peuvent être associés ou non à une<br />

sclérose tubéreuse de Bourneville (le mécanisme est<br />

alors soit une translocation, soit une délétion touchant<br />

les deux gènes contigus). Enfin, la restriction<br />

alimentaire en protides ou l’emploi d’inhibiteurs de<br />

l’enzyme de conversion n’exercent aucun effet<br />

spécifique sur la progression de la maladie rénale, à<br />

l’opposé de ce qu’on peut observer dans les maladies<br />

glomérulaires chroniques, diabétiques ou non.<br />

Manifestations extrarénales<br />

Kystes hépatiques<br />

Ils représentent la lésion extrarénale la plus<br />

fréquente. Ils se développent progressivement, plus<br />

tard que les kystes rénaux, et touchent environ 70 %<br />

des malades de plus de 60-70 ans. IIs sont plus<br />

fréquents, plus précoces et plus volumineux chez la<br />

femme que chez l’homme [1] .<br />

Les kystes hépatiques sont habituellement<br />

asymptomatiques. L’infection est rare, survenant<br />

habituellement chez des malades dialysés ou<br />

transplantés rénaux. L’atteinte massive du foie par de<br />

très nombreux kystes peut être observée, notamment<br />

chez la femme : la polykystose hépatique peut alors<br />

entraîner une cholestase anictérique, une gêne, des<br />

douleurs, parfois une compression gastrique<br />

entraînant des troubles digestifs et nutritionnels. Le<br />

traitement de la polykystose hépatique massive peut<br />

être difficile : la ponction est souvent insuffisante. La<br />

fenestration des kystes par laparoscopie est difficile. La<br />

résection hépatique partielle est parfois nécessaire.<br />

Dans des cas extrêmes, une transplantation combinée<br />

du foie et d’un rein a pu être réalisée. Enfin, la<br />

polykystose hépatique peut être associée très<br />

rarement à une hypertension portale : celle-ci est le<br />

plus souvent due à des kystes hépatiques postérieurs<br />

comprimant les veines sus-hépatiques et la veine cave<br />

inférieure, entraînant un bloc suprahépatique. Le<br />

traitement chirurgical est indiqué dans ces derniers cas,<br />

mais il est souvent difficile. Dans quelques cas très<br />

rares, une fibrose hépatique congénitale, lésion<br />

associée à la polykystose récessive, a été décrite chez<br />

des malades atteints de polykystose dominante.<br />

[4, 7]<br />

Anévrismes des artères cérébrales<br />

La prévalence de ces anévrismes est plus élevée<br />

dans la PKRAD (environ 8 %) que dans la population<br />

générale (environ 1,2 %). Deux problèmes se posent<br />

en pratique.<br />

■ Reconnaître l’accident de rupture entraînant une<br />

hémorragie méningée ou cérébroméningée : cet<br />

accident survient en moyenne à 40 ans (plus tôt que<br />

dans la population générale, mais au même âge<br />

moyen que dans les anévrismes intracrâniens<br />

familiaux) mais il peut se produire à n’importe quel<br />

âge, y compris avant 20 ans, qu’il existe ou non une<br />

hypertension artérielle ou une insuffisance rénale. La<br />

rupture d’un anévrisme intracrânien impose une<br />

hospitalisation d’urgence, une scanographie cérébrale<br />

et un avis neurochirurgical. Cet accident reste très<br />

grave car environ 40 % des malades meurent avant le<br />

transfert en neurochirurgie, et parmi les survivants, 30<br />

à 40 % gardent des séquelles neurologiques. C’est<br />

pourquoi, chez un malade atteint de PKRAD, il faut<br />

attacher la plus grande importance aux signes<br />

évoquant une fissuration de l’anévrisme, notamment<br />

des céphalées très vives, localisées, persistantes et<br />

inhabituelles, accompagnées de nausées et parfois<br />

d’une discrète raideur de la nuque.<br />

■ Compte tenu de la gravité de l’accident de<br />

rupture, faut-il dépister les anévrismes cérébraux<br />

chez les patients asymptomatiques atteints de<br />

PKRAD ? Il est difficile de répondre à cette<br />

question car nous connaissons mal l’histoire<br />

naturelle de ces anévrismes dans la PKRAD. Ces<br />

2<br />

anévrismes sont assez souvent multiples et<br />

plusieurs anévrismes peuvent se développer<br />

successivement. L’analyse décisionnelle a conclu<br />

que le dépistage systématique n’était pas indiqué<br />

mais les techniques de détection et de traitement<br />

(par neurochirurgie ou radiologie interventionnelle)<br />

évoluent continuellement.<br />

On recommande aujourd’hui de limiter la<br />

recherche aux malades qui ont un antécédent<br />

personnel ou familial d’anévrisme intracrânien,<br />

rompu ou non (le risque est 2,5 à 3 fois plus élevé<br />

dans certaines familles de polykystose où<br />

plusieurs membres ont développé un anévrisme<br />

cérébral). Chez les sujets asymptomatiques, le<br />

dépistage des anévrismes cérébraux dont le<br />

diamètre est supérieur ou égal à 5 mm est<br />

possible grâce à l’IRM-angiographie ou à la<br />

scanographie cérébrale spiralée. La décision<br />

thérapeutique dépend ensuite du siège, de la<br />

taille, du nombre et de la progression des<br />

anévrismes. En cas d’abstention thérapeutique<br />

immédiate, il est recommandé de renouveler<br />

l’examen radiographique 6à12mois plus tard.<br />

En cas de dépistage négatif dans une famille à<br />

risque, il est recommandé de refaire l’examen 5<br />

ans plus tard car la maladie est progressive. Ces<br />

dernières recommandations n’ont pas été testées.<br />

Diagnostic<br />

Il repose sur :<br />

– la nature héréditaire de la maladie, avec<br />

transmission autosomique dominante (les<br />

néomutations sont très rares) ;<br />

– l’échographie.<br />

L’échographie met typiquement en évidence de<br />

multiples kystes rénaux bilatéraux avec une<br />

augmentation plus ou moins marquée du volume des<br />

reins. L’un de ses deux parents étant porteur d’une<br />

polykystose, un sujet de moins de 30 ans sera<br />

considéré comme « atteint » en cas de découverte<br />

échographique d’au moins deux kystes rénaux, même<br />

unilatéraux. La spécificité est, dans cette circonstance,<br />

de 100 %. La sensibilité de l’échographie pour ce<br />

diagnostic croît avec l’âge (88,5 % entre 15 et 30 ans<br />

et 100 % à partir de 30 ans). Une échographie rénale<br />

normale à 30 ans permet donc d’écarter le diagnostic<br />

de polykystose liée au gène PKD1.<br />

En revanche, la spécificité de l’échographie pour<br />

faire le diagnostic décroît avec l’âge. À partir de 50 ans<br />

en particulier, la présence d’un ou plusieurs kystes<br />

rénaux solitaires est assez banale. Il faut alors exiger<br />

des critères plus stricts pour accepter le diagnostic de<br />

polykystose : hérédité démontrée, gros reins<br />

polykystiques avec kystes bilatéraux, éventuellement<br />

kystes hépatiques.<br />

On ne dispose pas encore d’informations<br />

échographiques aussi précises dans la polykystose liée<br />

au gène PKD2.<br />

Traitement de l’insuffisance rénale terminale<br />

Ce traitement comporte la dialyse périodique et la<br />

transplantation rénale, comme dans les autres<br />

néphropathies. Les résultats obtenus sont similaires.<br />

L’hémodialyse périodique est la méthode de dialyse la<br />

plus fréquemment utilisée. La dialyse péritonéale n’est<br />

pas indiquée si les reins et le foie polykystiques sont<br />

très volumineux. La préparation à la transplantation<br />

rénale peut comporter l’ablation préalable d’un rein<br />

polykystique si celui-ci est très volumineux ou a été le<br />

siège d’infections ou d’hémorragies récentes et<br />

récidivantes.


‚ Polykystose rénale autosomique<br />

récessive (PKRAR)<br />

Cette maladie est en tous points différente de la<br />

PKRAD : elle est très rare (tableau I). Les kystes rénaux<br />

se développent seulement à partir des canaux<br />

collecteurs. Une lésion hépatique (dénommée fibrose<br />

hépatique congénitale ou fibroadénomatose biliaire)<br />

est constamment associée. La maladie se révèle<br />

parfois dès la naissance, accompagnée d’une<br />

hypoplasie pulmonaire responsable du décès. Lorsque<br />

la maladie se développe plus lentement, les<br />

manifestations urinaires, l’hypertension artérielle et<br />

l’insuffisance rénale sont plus tardives dans l’enfance.<br />

Grâce au contrôle précoce de l’hypertension artérielle,<br />

souvent sévère mais parfois réversible, 50 % des<br />

enfants parviennent à l’âge adulte sans avoir besoin<br />

d’une méthode de suppléance rénale. Les<br />

manifestations hépatiques peuvent être au premier<br />

plan : hémorragies digestives par hypertension<br />

portale, pouvant nécessiter une dérivation portocave<br />

chirurgicale, ou angiocholites favorisées par la<br />

dilatation des voies biliaires intrahépatiques parfois<br />

associée.<br />

Du fait de la diffusion de l’échographie chez le<br />

fœtus et chez l’enfant, les pédiatres sont<br />

confrontés à d’autres maladies kystiques rénales<br />

que la polykystose récessive. Dans les cas<br />

exceptionnels, la PKRAD, seule ou associée à la<br />

sclérose de Bourneville (cf supra), peut se<br />

compliquer d’insuffisance rénale très précoce, dès<br />

la première année de vie. Plus souvent,<br />

l’échographie découvre quelques kystes rénaux,<br />

alors que la fonction rénale est normale. Il est<br />

essentiel, dans ces cas, de bien différencier<br />

polykystose dominante et polykystose récessive :<br />

c’est l’échographie rénale des parents qui<br />

habituellement permet de trancher (en montrant<br />

des kystes chez l’un des parents en cas de<br />

PKRAD). Pour confirmer le diagnostic de<br />

polykystose récessive, on recherche les signes de<br />

l’atteinte hépatique.<br />

Il est bon de rappeler ici qu’il n’est pas recommandé<br />

de faire systématiquement une échographie rénale<br />

chez les enfants asymptomatiques appartenant à une<br />

famille atteinte de PKRAD. Une surveillance clinique<br />

simple suffit (y compris la mesure de la pression<br />

artérielle). La découverte de kystes rénaux n’a pas de<br />

conséquences cliniques : ces kystes n’entraînent<br />

habituellement aucun trouble. En revanche, les<br />

conséquences psychologiques du dépistage et du suivi<br />

peuvent être délétères pour l’enfant et pour sa famille.<br />

Rappelons enfin que l’absence de kystes dans<br />

l’enfance ne signifie pas que ceux-ci ne deviendront<br />

pas décelables plus tard, à l’âge adulte.<br />

‚ Autres maladies kystiques (tableau I)<br />

La néphronophtise est surtout caractérisée par une<br />

fibrose tubulo-interstitielle progressive. La maladie se<br />

révèle dans l’enfance, souvent par un syndrome<br />

polyuropolydipsique. L’IRT est atteinte en moyenne<br />

vers l’âge de 14 ans. La néphronophtise est la maladie<br />

génétique la plus fréquemment responsable d’IRT<br />

chez l’enfant. Les kystes médullaires rénaux se<br />

développent à un stade avancé [9] .<br />

Les kystes médullaires plus précoces caractérisent la<br />

maladie kystique de la médullaire rénale, affection<br />

autosomique dominante très rare, observée chez<br />

l’adulte et progressant vers l’IRT entre 30 et 40 ans<br />

environ.<br />

Des kystes rénaux peuvent être rencontrés dans la<br />

sclérose tubéreuse, TSC1 comme TSC2 (tableau I). Les<br />

kystes sont parfois très volumineux et multiples,<br />

simulant une PKRAD (cf supra). En fait, la lésion rénale<br />

prédominante de la sclérose tubéreuse est<br />

l’angiomyolipome, souvent multiple et bilatéral. Dans<br />

une autre phacomatose, la maladie de von Hippel-<br />

Lindau, 70 % des malades ont des kystes et/ou des<br />

carcinomes rénaux. Ces carcinomes à cellules claires,<br />

multifocaux et bilatéraux, surviennent en moyenne à<br />

45 ans, soit une à deux décennies avant le carcinome<br />

rénal sporadique. Le traitement de ces cancers repose<br />

sur la tumorectomie simple quand elle est possible ou<br />

la néphrectomie. Le gène VHL est un gène suppresseur<br />

de tumeur dont les mutations et inactivations sont<br />

aussi trouvées dans presque tous les cancers rénaux<br />

sporadiques à cellules claires [8] .<br />

■<br />

Syndrome d’Alport<br />

Ce terme [5, 6] désigne plusieurs maladies qui ont en<br />

commun une néphropathie hématurique progressive<br />

et une hypoacousie de perception. Des anomalies<br />

oculaires sont également présentes dans près de 50 %<br />

des cas, touchant le cristallin (lenticône antérieur<br />

bilatéral) et la rétine (atteinte périmaculaire n’altérant<br />

pas la vision).<br />

La néphropathie se révèle parfois dans<br />

l’enfance, dès les premières semaines de vie ou<br />

plus tard, par des hématuries macroscopiques<br />

intermittentes et récidivantes (cette manifestation<br />

devient très rare après 20 ans) et par une<br />

hématurie microscopique permanente. La<br />

protéinurie apparaît ultérieurement. Son débit<br />

s’accroît progressivement et un syndrome<br />

néphrotique, habituellement modéré, se<br />

développe dans 50 % des cas. Dans d’autres cas,<br />

les anomalies urinaires sont découvertes entre 20<br />

et 30 ans. La progression vers l’insuffisance rénale<br />

terminale se fait rarement (10 %) dans l’enfance,<br />

le plus souvent (90 %) à l’âge adulte, entre l’âge<br />

de 18 et de 75 ans environ. L’hypoacousie de<br />

perception est d’intensité variable, souvent<br />

discrète ou modérée, prédominant sur les<br />

fréquences élevées, hors de la zone conversationnelle<br />

; c’est dire l’intérêt de l’étude audiométrique<br />

pour dépister le défaut auditif.<br />

Le syndrome d’Alport est caractérisé par des<br />

anomalies héréditaires de certaines chaînes α qui<br />

constituent les molécules de collagène de type IV<br />

(l’un des constituants principaux des membranes<br />

basales). Les membranes basales des glomérules<br />

rénaux, de l’oreille interne et du cristallin sont<br />

affectées. L’étude du fragment de biopsie rénale en<br />

microscopie électronique et en immunofluorescence<br />

(avec des anticorps dirigés contre les chaînes α [IV])<br />

met en évidence des altérations caractéristiques de la<br />

membrane basale glomérulaire. Plusieurs types sont<br />

individualisés. Le conseil génétique donné aux familles<br />

dépend de leur identification.<br />

La maladie la plus fréquente (80à85%)se<br />

transmet selon le mode dominant lié à l’X : c’est le<br />

syndrome d’Alport « classique ». Les hommes atteints<br />

(hémizygotes) expriment tous la maladie rénale et<br />

progressent vers l’IRT plus ou moins tôt dans la vie. Le<br />

rythme de progression est homogène chez les<br />

hommes d’une même famille (schématiquement,<br />

avant 30 ans pour les familles de type « juvénile »,<br />

après 30 ans et jusqu’à 76 ans pour les familles de<br />

type « adulte »). Un homme atteint ne transmet pas la<br />

maladie à son ou à ses fils. En revanche, toute sa<br />

descendance féminine sera vectrice (hétérozygote).<br />

3<br />

Polykystose rénale et autres néphropathies héréditaires - 5-0530<br />

Les femmes hétérozygotes ont des anomalies<br />

urinaires souvent permanentes, parfois discrètes et<br />

intermittentes. La grande majorité (85 à 90 %) des<br />

vectrices ont une atteinte rénale non progressive mais<br />

10 à 15 % d’entre elles évoluent vers l’insuffisance<br />

rénale, plus tard que les hommes. Les femmes<br />

vectrices transmettent le gène muté à 50 % de leur<br />

descendance masculine ou féminine. C’est dire l’intérêt<br />

clinique de leur identification dans une famille atteinte.<br />

L’information apportée par la génétique moléculaire<br />

est décisive : la maladie est due à des mutations du<br />

gène codant la chaîne α 5 (IV), localisé sur le<br />

chromosome X. Le même défaut moléculaire a été<br />

trouvé dans des familles sans hypoacousie.<br />

La maladie autosomique récessive a une<br />

présentation clinique et histopathologique presque<br />

similaire à la forme liée à l’X. Cependant, la<br />

néphropathie progresse tôt vers l’IRT, avant 20-30 ans,<br />

et de façon égale dans les deux sexes chez les<br />

homozygotes. Les deux parents vecteurs (hétérozygotes)<br />

ont ou non une hématurie microscopique<br />

permanente. Les mutations touchent les gènes codant<br />

les chaînes α 3ouα 4 (IV), localisés au chromosome 2.<br />

On observe trois formes particulières :<br />

– maladie comportant néphropathie, hypoacousie,<br />

cataracte et leiomyomes multiples (œsophagiens,<br />

respiratoires et génitaux) : elle est liée à l’X et est due à<br />

une large délétion touchant les gènes α 5ouα 6 (IV)<br />

contigus sur le chromosome X ;<br />

– maladie marquée par une néphropathie, une<br />

hypoacousie et une macrothrombopénie (avec<br />

souvent des inclusions intraleucocytaires) : elle est<br />

probablement de transmission autosomique<br />

dominante. Le défaut moléculaire est jusqu’à présent<br />

inconnu ;<br />

– enfin, il existe quelques familles où une<br />

néphropathie progressive est associée à une<br />

hypoacousie, mais où la transmission est autosomique<br />

dominante. Le défaut peut concerner α 3ouα 4 (IV).<br />

Diagnostic<br />

Le diagnostic du syndrome d’Alport et des maladies<br />

correspondantes repose sur :<br />

– le type clinique et histopathologique de la<br />

néphropathie héréditaire ;<br />

– l’association à l’hypoacousie chez le propositus<br />

ou sa famille, mais le déficit auditif peut manquer ;<br />

– l’identification de la mutation responsable,<br />

quand cela est possible.<br />

Le diagnostic différentiel se pose rarement,<br />

seulement quand ces différents éléments ne sont pas<br />

réunis, par exemple :<br />

– hématurie microscopique isolée, sans<br />

progression vers l’insuffisance rénale, caractérisant<br />

l’hématurie familiale bénigne ;<br />

– protéinurie, sans hématurie, se compliquant<br />

d’insuffisance rénale familiale, à transmission<br />

maternelle, avec surdité associée qui doit faire évoquer<br />

une cytopathie mitochondriale, même chez l’adulte.<br />

Les lésions histopathologiques rénales sont différentes<br />

et l’altération de l’acide désoxyribonucléique (ADN)<br />

mitochondrial peut être mise en évidence ;<br />

– autres maladies héréditaires associant atteinte<br />

rénale et auditive, comme la maladie de Fabry ou<br />

certaines acidoses tubulaires distales autosomiques<br />

récessives.<br />

Traitement<br />

Le traitement est celui de toute néphropathie<br />

progressive avec hypertension artérielle et insuffisance


5-0530 - Polykystose rénale et autres néphropathies héréditaires<br />

rénale. La transplantation rénale est utilisée avec<br />

succès. La maladie ne récidive pas sur le transplant.<br />

Dans moins de 5 % des cas, une glomérulonéphrite à<br />

anticorps antimembrane basale glomérulaire se<br />

développe sur le transplant, aboutissant souvent à sa<br />

destruction. Cette complication est le fait d’une alloimmunisation<br />

contre la chaîne α 5, α 3ouα 4, absente<br />

du rein propre mais introduite par le transplant. On<br />

conçoit que ce risque soit plus élevé si la mutation est<br />

une délétion complète du gène ou une mutation<br />

conduisant à la synthèse d’une chaîne α tronquée, très<br />

courte et anormale.<br />

Autres maladies ■ rénales<br />

héréditaires<br />

Il existe un grand nombre de maladies rénales<br />

héréditaires. Les formes principales sont rappelées<br />

dans les tableaux II à IV. Pour trouver des informations<br />

plus détaillées, le lecteur peut se reporter à des revues<br />

générales [2, 4, 5] et aux traités de néphrologie. Nous<br />

nous limiterons, dans le texte, à quelques<br />

commentaires.<br />

Tableau II. – Principales maladies tubulaires rénales héréditaires (à l’exception de celles touchant le tube proximal).<br />

Maladies<br />

Mode habituel<br />

de transmission<br />

Âge de révélation<br />

Manifestations<br />

principales<br />

‚ Tubulopathies héréditaires<br />

Beaucoup se révèlent dès la naissance ou dans la<br />

première enfance. Il est essentiel de les reconnaître<br />

rapidement. La déshydratation (dans le diabète<br />

insipide néphrogénique [DIN]), la perte urinaire de<br />

NaCl (dans le pseudohypoaldostéronisme de type I) ou<br />

l’acidose plasmatique (dans l’acidose tubulaire distale)<br />

mettent en péril le développement de l’enfant si elles<br />

ne sont pas corrigées vite. D’autres tubulopathies<br />

peuvent n’être reconnues qu’à l’âge adulte comme le<br />

syndrome de Gitelman ou le syndrome de Liddle.<br />

Mécanisme Traitement<br />

Anse de Henle<br />

Bartter AR Enfance Hypokaliémie Défaut de réabsorption du NaCl Symptomatique<br />

Nouveau-né (souvent) Alcalose métabolique Indométhacine<br />

Retard de croissance<br />

Calciurie élevée<br />

Néphrocalcinose<br />

(souvent)<br />

Tube distal<br />

Gitelman AR Enfance<br />

Adulte (surtout)<br />

Canal collecteur<br />

DIN XR<br />

AR<br />

Nouveau-né<br />

Nouveau-né<br />

Hypokaliémie<br />

Alcalose métabolique<br />

Hypomagnésémie<br />

Calciurie basse<br />

Chondrocalcinose<br />

(parfois)<br />

DI résistant<br />

DI résistant<br />

Liddle AD Enfance Hypertension artérielle<br />

Adulte Hypokaliémie<br />

Pseudohypoaldostéro-<br />

AR Nouveau-né Déshydratation<br />

nisme (type I)<br />

Hyperkaliémie<br />

Acidose tubulaire distale AR/AD Enfance Lithiase calcique<br />

Néphrocalcinose médullaire<br />

Surdité (parfois)<br />

Défaut de réabsorption du NaCl<br />

(cotransport NaCl)<br />

Défaut du récepteur à l’ADH<br />

Défaut de l’aquaporine 2<br />

Hyperréabsorption de Na (hyperactivité<br />

du canal Na apical épithélial)<br />

Défaut de réabsorption de Na (défaut<br />

du canal Na épithélial)<br />

Symptomatique<br />

Hydratation, indométhacine,<br />

thiazide<br />

Amiloride<br />

Régime pauvre en Na<br />

Apport de NaCl<br />

Bicarbonate ou citrate<br />

de K et/ou de Na<br />

DIN : diabète insipide néphrogénique par résistance de l’action de l’hormone antidiurétique (ADH) ou vasopressine. L’aquaporine 2, un canal à l’eau, est le médiateur terminal de l’ADH. AR : autosomique récessif ; AD : autosomique<br />

dominant ; X : lié à l’X.<br />

Tableau III. – Principales maladies héréditaires avec atteinte rénale, avec ou sans anomalie métabolique.<br />

Maladies<br />

Mode habituel<br />

de transmission<br />

Localisation(s) principale(s)<br />

Âge lors du<br />

diagnostic<br />

Défaut métabolique<br />

Traitement spécifique<br />

Avec défaut métabolique<br />

identifié<br />

- Fabry XR Peau, cornée, cardiovasculaires Enfance<br />

Adulte<br />

α- galactosidase A<br />

- Glycogénose de type I AR Surcharge glyconégique dans le Nouveau-né Glucose-6-<br />

Maïzena crue et/ou administration<br />

Sans défaut métabolique<br />

identifié<br />

foie --> hypoglycémies graves<br />

Atteinte rénale > 20 ans<br />

phosphatase nocturne de glucose<br />

- Ostéo-onychodysplasie AD Rotule, coude, os iliaque, ongles<br />

(« nail-patella »)<br />

Enfance<br />

- Syndrome de Senior-Loken AR Néphronophtise<br />

Dégénérescence tapétorétinienne<br />

Enfance<br />

- Hyperuricémie AD ( ?) Goutte < 30 ans Adulte Allopurinol (pour la goutte)<br />

- Bardet-Biedl AD Hexadactylie, obésité, hypogona- Enfance<br />

disme, rétinite pigmentaire<br />

Adulte<br />

AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; X : lié à l’X.<br />

4


La classification des tubulopathies repose sur le<br />

segment tubulaire concerné (tableau II). Parmi les<br />

tubulopathies proximales, la plus fréquente est<br />

probablement la cystinurie, caractérisée par un défaut<br />

de réabsorption tubulaire de la cystine et d’autres<br />

acides aminés dibasiques ; elle se complique de<br />

lithiase cystinique (tableau IV).<br />

Le syndrome de Fanconi est le prototype de la<br />

tubulopathie proximale complexe associant un<br />

défaut de réabsorption du glucose, des acides<br />

aminés, des phosphates, des bicarbonates et de<br />

certaines protéines (comme la -2 microglobuline).<br />

Plusieurs maladies métaboliques<br />

héréditaires peuvent en être la cause chez<br />

l’enfant : la cystinose est la plus fréquente, à bien<br />

différencier de la cystinurie. La cystinose se définit<br />

par un dépôt de cristaux de cystine dans les<br />

lysosomes des cellules, par suite de la déficience<br />

du système de transport normal de cet acide<br />

Tableau IV. – Principales maladies héréditaires avec lithiase urinaire.<br />

Maladie<br />

Mode de<br />

transmission<br />

aminé hors de ces structures. L’accumulation se<br />

produit dans le rein, l’œil (cornée puis rétine) puis<br />

progressivement dans d’autres organes. Le<br />

dosage de cystine dans les leucocytes permet<br />

d’établir le diagnostic. Bien que le défaut<br />

moléculaire impliqué dans la cystinose soit<br />

encore inconnu, on dispose d’un traitement<br />

efficace, la cystéamine administrée par voie orale<br />

et intraoculaire, à condition qu’il soit mis en route<br />

précocement.<br />

D’autres maladies héréditaires se compliquent d’un<br />

syndrome de Fanconi : le syndrome de Lowe où la<br />

tubulopathie est associée à une cataracte et à un<br />

retard mental, la glycogénose de type I citée dans le<br />

tableau III, la maladie de Dent (tableau IV) ou une<br />

cytopathie mitochondriale. Les autres maladies<br />

tubulaires héréditaires plus distales sont indiquées<br />

dans le tableau II.<br />

Jean-Pierre Grünfeld : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.<br />

Dominique Joly : Chef de clinique-assistant.<br />

Service de néphrologie, hôpital Necker-Enfants Malades, 161, rue de Sèvres, 75743 Paris cedex 15, France.<br />

‚ Maladies héréditaires avec atteinte rénale,<br />

à défaut métabolique identifié au non<br />

Elles sont résumées dans le tableau III. Le diabète<br />

sucré et les amyloses génétiques n’ont pas été cités.<br />

L’atteinte rénale est généralement l’une des plus<br />

graves dans ces maladies, conduisant à l’insuffisance<br />

rénale terminale, le plus souvent à l’âge adulte<br />

(> 20-30 ans, sauf pour le syndrome de Senior-Loken)<br />

(tableau III).<br />

Les maladies rénales héréditaires se compliquant<br />

de lithiase urinaire [2] ont été isolées dans le<br />

tableau IV, car des manifestations liées aux calculs<br />

révèlent ces maladies, habituellement dès l’enfance.<br />

Certaines d’entre elles sont remarquablement<br />

sensibles à un traitement spécifique : par exemple,<br />

vitamine B6 dans certains cas d’hyperoxalurie<br />

primitive de type I, D-pénicillamine dans la cystinurie<br />

ou allopurinol dans le déficit en adénine phosphoribosyl-tranférase<br />

(APRTase) (tableau IV).<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : JP Grünfeld et D Joly. Polykystose rénale et autres néphropathies héréditaires.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0530, 1998, 5 p<br />

[1] Chauveau DC, Chouckroun G, Grünfeld JP. La polykystose hépatorénale autosomique<br />

dominante. Med Therap 1995;1:243-251<br />

[2] Cochat P, Jouvenet M, Pellet H, Feber J, Martin X, Divry P. Les maladies<br />

héréditaires responsables de lithiase rénale. Rev Prat 1997 ; 14 : 1554-1558<br />

[3] Drüeke TE, Grünfeld JP. Antihypertenseurs dans l’insuffisance rénale. Encycl<br />

Med Chir (Elsevier, Paris), Cardiologie, 11-302-B-20, 1998 : 1-4 (in press)<br />

[4] Grünfeld JP, Joly D. Maladies héréditaires à l’âge adulte. Rev Prat 1997;47:<br />

1566-1569<br />

[5] Grünfeld JP, Knebelmann B. Alport’s syndrome (2 nd ed). In : Davison AM,<br />

Stewart Cameron J, Grünfeld JP, Kerr DN, Ritz E, Winearls CG eds. Oxford<br />

Textbook of Clinical Nephrology (2 nd ed). Oxford : Oxford University Press,<br />

1998 ; vol 3 : 2427-2437<br />

Âge de révélation Manifestations principales Diagnostic Traitement spécifique<br />

Cystinurie AR Enfance Lithiase cystinique Cystinurie# Alcalinisation de l’urine<br />

Hyperoxalurie primitive type I AR Enfance (surtout)<br />

Adulte<br />

Adulte jeune Calculs ou cristaux<br />

caractéristiques<br />

Lithiase d’oxalate de calcium<br />

(monohydraté)<br />

Néphrocalcinose<br />

Insuffısance rénale<br />

Acidose tubulaire distale AR/AD Enfance Lithiase calcique<br />

Néphrocalcinose médullaire<br />

Surdité (parfois)<br />

Déficit en APRTase AR Enfance<br />

Adulte<br />

Maladie de Dent<br />

(et maladies apparentées)<br />

XR Enfance<br />

Adulte<br />

AD : autosomique dominant ; AR : autosomique récessif ; APRTase : adénine phosphoribosyl-transférase.<br />

Lithiase de 2,8 dihydro-adénine<br />

Insuffısance rénale (parfois)<br />

Lithiase<br />

Insuffısance rénale<br />

Références<br />

5<br />

Polykystose rénale et autres néphropathies héréditaires - 5-0530<br />

Oxalate#<br />

Glycolate#<br />

Calculs et cristaux<br />

évocateurs<br />

Biopsie hépatique<br />

Acidose métabolique<br />

Hypokaliémie<br />

pH urinaire > 5-5,2<br />

Calculs et cristaux<br />

caractéristiques<br />

Déficit enzymatique<br />

Protéinurie tubulaire<br />

Hypercalciurie<br />

D-pénicillamine (ou autres chélateurs)<br />

Vitamine B 6 (parfois)<br />

Transplantation hépatique<br />

Bicarbonate ou citrate de K<br />

et/ou de Na<br />

Allopurinol<br />

[6] Heidet L, Forestier L, Antignac C, Gubler MC. Syndrome d’Alport, une maladie<br />

héréditaire du collagène de type IV. Med Sci 1997 ; 13 : 28-36<br />

[7] Pirson Y, Chauveau D, Watson ML, Zeier M, Breuning MH. La polykystose<br />

autosomique dominante : progrès cliniques et génétiques. Med Sci 1997;13:<br />

37-44<br />

[8] Richard S, Olschwang S, Chauveau D, Resche F. La maladie de von Hippel-<br />

Lindau. Med Sci 1995 ; 11 : 43-51<br />

[9] Saunier S, Silbermann F, Benessy F, Antignac C. Vers l’identification du gène<br />

de la néphronophtise. Med Sci 1997 ; 13 : 54-56


Plan<br />

Prise en charge des traumatismes<br />

de la vessie<br />

A. Doerfler, C. Iselin<br />

Le traumatisme de la vessie est une pathologie rare, le plus souvent d’origine iatrogène. Les lésions<br />

vésicales par traumatisme fermé ainsi que les plaies pénétrantes sont fréquemment associées à des<br />

lésions d’autres organes et structures, dont le bassin osseux, pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Les<br />

plaies vésicales iatrogènes doivent être si possible prévenues ou tout du moins suspectées et recherchées<br />

lors d’une intervention chirurgicale à risque en raison de leur fréquence ainsi que de la plus grande facilité<br />

à les traiter d’emblée. La prise en charge initiale des traumatismes vésicaux est le plus souvent<br />

réanimatoire avec stabilisation du patient puis traitement des lésions associées de mauvais pronostic<br />

avant le traitement spécifique des lésions vésicales dont le diagnostic est confirmé par l’imagerie. La<br />

cystographie reste l’examen radiologique de référence, hormis dans les institutions largement équipées,<br />

où l’on préfère pratiquer un cystoscanner. Elle permet une classification simple des lésions qui dicte la<br />

prise en charge. Le traitement conservateur par pose de sonde vésicale transurétrale est proposé en cas de<br />

rupture extrapéritonéale sans autre lésion nécessitant un geste chirurgical à proximité. Dans tous les<br />

autres cas, la suture vésicale est la règle, réalisable par laparoscopie en cas de monotraumatisme vésical<br />

intrapéritonéal. Le pronostic des traumatismes vésicaux est directement corrélé aux lésions associées.<br />

Dans cette situation, la mortalité reste importante malgré une prise en charge précoce et les progrès de la<br />

réanimation. En cas de monotraumatisme, en revanche, la mortalité est quasi inexistante. La guérison<br />

sans séquelle est généralement la règle pour les malades qui survivent.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Vessie ; Traumatisme de la vessie ; Traitement conservateur de la vessie ; Cystographie<br />

Introduction 1<br />

Étiologie 1<br />

Traumatisme fermé 1<br />

Plaie pénétrante 2<br />

Plaie iatrogène 2<br />

Rupture spontanée 2<br />

Diagnostic 2<br />

Présentation clinique 2<br />

Examens complémentaires 3<br />

Prise en charge 4<br />

Rupture vésicale par traumatisme fermé 4<br />

Plaies pénétrantes 6<br />

Plaies iatrogènes 6<br />

Évolution 6<br />

Pronostic 6<br />

Séquelles 6<br />

Conclusion 6<br />

■ Introduction<br />

Si la vessie est un organe pelvien extrapéritonéal, protégé par<br />

les structures ostéotendineuses du bassin, il existe néanmoins<br />

des situations où cette protection est prise en défaut, entraînant<br />

une lésion vésicale : traumatisme de haute énergie avec rupture<br />

Urologie<br />

du bassin osseux, traumatisme direct abdominal sur vessie<br />

pleine, plaie pénétrante ou plus fréquemment plaie iatrogène.<br />

Les plaies vésicales n’entraînent que peu de complications<br />

spécifiques si elles sont prises en charge rapidement, le pronostic<br />

étant généralement directement lié aux lésions associées. En<br />

effet, le bassin osseux assure la protection mécanique de la<br />

vessie, des organes reproducteurs, des structures digestives basses<br />

ainsi que de la vascularisation du pelvis et des membres<br />

inférieurs. Si un traumatisme à haute énergie rompt son<br />

intégrité et atteint certaines de ces structures, la morbidité et la<br />

mortalité consécutives sont loin d’être négligeables.<br />

D’autres segments de la voie urinaire basse tels que l’urètre<br />

postérieur peuvent être associés aux traumatismes à haute<br />

énergie du bassin en même temps que la vessie. Un autre article<br />

spécifique de l’EMC-Urologie détaille ce type de lésion et leurs<br />

prises en charge.<br />

■ Étiologie<br />

Traumatisme fermé<br />

18-214-A-10<br />

Les plaies vésicales par traumatisme fermé sont les plus<br />

fréquentes des lésions vésicales non iatrogènes, mais elles<br />

demeurent rares : moins de 2 % des traumatismes abdominaux<br />

fermés incluent une rupture vésicale [1] .<br />

La majeure partie d’entre elles (64 à 80 %) survient lors<br />

d’accidents (Tableau 1), la plupart sur la voie publique. Les<br />

causes moins fréquentes sont les accidents du travail (15 à<br />

20 %), les accidents sportifs (7 à 20 %) et les tentatives de<br />

suicide (2 à4%) [1-4] .<br />

1


18-214-A-10 Prise en charge des traumatismes de la vessie<br />

Tableau 1.<br />

Étiologies des traumatismes fermés de la vessie.<br />

Accident de la voie publique 64-80 %<br />

Accident du travail 15-20 %<br />

Accident sportif 7-20 %<br />

Tentative de suicide 2-4 %<br />

Tableau 2.<br />

Lésions associées à l’atteinte vésicale dans les traumatismes fermés (total<br />

supérieur à 100 % car les lésions peuvent s’additionner).<br />

Fracture du bassin 80-95 %<br />

Lésions digestives 48 %<br />

Traumatismes de l’urètre 10-20 %<br />

Tableau 3.<br />

Lésions associées aux plaies pénétrantes vésicales (total supérieur à 100 %<br />

car les lésions peuvent s’additionner).<br />

Lésions du grêle 50 %<br />

Lésions coliques 50 %<br />

Lésions rectales 20-30 %<br />

Lésions vasculaires 10-15 %<br />

En raison de la situation intrapelvienne de la vessie, remarquablement<br />

protégée par la ceinture ostéotendineuse du bassin,<br />

la rupture vésicale survient sur des traumatismes à haute<br />

énergie. On en distingue deux types :<br />

le traumatisme direct abdominal ou symphysaire sur vessie<br />

pleine, responsable d’une augmentation rapide et importante<br />

de la pression intra-abdominale et intravésicale jusqu’à<br />

rupture de la zone de moindre résistance au niveau du dôme ;<br />

la fracture déplacée du bassin aboutissant à un déchirement<br />

vésical et/ou une lacération par étirement des attaches locales,<br />

notamment pubovésicales, ou à une perforation vésicale par<br />

fragments osseux spiculés [5] .<br />

Les traumatismes fermés de la vessie sont grevés d’une<br />

mortalité importante, de 11 à 44 % [3, 4, 6-8] , liée au pronostic<br />

des lésions associées. En effet, 85 % des patients souffrant de<br />

plaie vésicale par traumatisme fermé ont des lésions concomitantes<br />

[8] avec une moyenne de 4,3 lésions associées [9] : ainsi 80<br />

à 95 % de ces patients souffrent de fracture du bassin [2, 4, 9-13] ,<br />

48 % ont des lésions digestives [13] et 10 à 20 % des traumatismes<br />

urétraux [12] (Tableau 2). On note également que chez les<br />

patients présentant une fracture du bassin associée, 39 % sont<br />

transfusés et presque 20 % reçoivent plus de 2 l de sang [7] .<br />

La probabilité de rupture vésicale est d’ailleurs corrélée avec<br />

le nombre de fractures de branches pubiennes :4%deplaies<br />

vésicales pour la fracture d’une branche, 12 % pour deux ou<br />

trois fractures et 40 % pour quatre fractures [3] .<br />

Plaie pénétrante<br />

Les plaies pénétrantes de la vessie regroupent les plaies par<br />

arme blanche et les plaies par arme à feu. Si les plaies par arme<br />

blanche sont relativement rares, les plaies par arme à feu sont<br />

exceptionnelles dans la population civile et sont le plus souvent<br />

des blessures de guerre [14] .<br />

Les plaies vésicales représentent moins de 1 % des plaies par<br />

arme à feu [14] et seulement 3,6 % des plaies abdominales par<br />

arme à feu [1] . Elles sont, en revanche, grevées d’un taux élevé<br />

de lésions multiples associées, de l’ordre de 80 à 85 % : 50 %<br />

de lésions associées de l’intestin grêle, 50 % du côlon sigmoïde,<br />

20 à 30 % de lésions rectales et 10 à 15 % de lésions vasculaires,<br />

surtout hypogastriques [14] (Tableau 3).<br />

En cas de plaie par arme blanche, la lésion est souvent<br />

punctiforme et de traitement aisé, alors que les plaies par arme<br />

à feu sont fréquemment associées à des lésions délabrantes, sur<br />

polycriblage et/ou en raison du souffle qu’occasionne la vitesse<br />

du projectile.<br />

La plaie vésicale peut se faire par un orifice d’entrée antérieur<br />

(abdominopelvien, inguinal ou crural), postérieur (fessier ou<br />

sacré), le plus fréquent, latéral (obturateur ou trochantérien) ou<br />

encore inférieur (périnéal).<br />

Plaie iatrogène<br />

Les blessures iatrogènes représentent la part la plus fréquente<br />

des traumatismes vésicaux, soit près de 50 % [2, 8] . La plupart<br />

des spécialités chirurgicales peuvent être en cause : chirurgie<br />

urologique, gynécologique, abdominale, orthopédique et<br />

vasculaire.<br />

Les interventions urologiques endoscopiques sont grandes<br />

pourvoyeuses de plaies vésicales : 2,5 % des résections endoscopiques<br />

de la vessie et 0,1 % des résections de prostate se<br />

compliquent de perforation vésicale [15] .<br />

Néanmoins, l’incidence de la perforation vésicale la plus<br />

élevée est due aux bandelettes sous-urétrales placées au moyen<br />

d’alènes (TVT ® , SPARC ® , etc....) avec près de 10 % des interventions<br />

se compliquant d’un passage intravésical de la<br />

bandelette [8] .<br />

La promontofixation laparoscopique comporte un risque de<br />

plaie vésicale de 1 à 7 % [16, 17] .<br />

L’hystérectomie laparoscopique est grevée de 1 à 2 % de<br />

lésions vésicales, passant souvent inaperçues pendant<br />

l’intervention [8] .<br />

La chirurgie rectale peut également se compliquer de plaies<br />

vésicales, allant jusqu’à inclure le trigone, notamment lors de<br />

l’agrafage anastomotique rectocolique.<br />

En chirurgie vasculaire, le passage transvésical de prothèses a<br />

été décrit [2] .<br />

En orthopédie, il est décrit des traumatismes vésicaux lors des<br />

interventions d’ostéosynthèse du bassin ou de mise en place de<br />

prothèse de hanche [2] .<br />

L’obstétrique est également grevée d’un taux de perforation<br />

vésicale loin d’être négligeable : de 0,2 % lors d’une césarienne,<br />

le taux passe à 6 % lors d’une hystérectomie pour raison<br />

obstétricale [15] .<br />

Le risque est majoré si l’exposition n’est pas optimale (utérus<br />

gravide, masse pelvienne majeure, instrumentation non adaptée),<br />

si l’anatomie est considérablement remaniée (prolapsus<br />

important, radiothérapie, chirurgie antérieure) [1] , ou simplement<br />

en cas d’abord laparoscopique puisque alors le risque est<br />

multiplié par un facteur 2 à 10 [15] .<br />

Rupture spontanée<br />

Anecdotique, cette entité semble extrêmement rare, même s’il<br />

existe quelques cas publiés [18] .<br />

Il existe le plus souvent un facteur de risque fragilisant la<br />

vessie, comme un antécédent chirurgical, une tumeur, un<br />

diverticule ou encore un traumatisme passé inaperçu dans un<br />

contexte d’alcoolisation massive [19, 20] .<br />

Il faut néanmoins toujours y penser dans la population<br />

particulière que sont les patients ayant bénéficié d’une entérocystoplastie<br />

de remplacement [21] ou d’agrandissement [22] qui<br />

présentent une douleur abdominale sans notion de traumatisme.<br />

La sensation estompée de réplétion, générée par la<br />

néovessie intestinale, est à incriminer dans cette situation.<br />

■ Diagnostic<br />

Présentation clinique<br />

Traumatisme fermé<br />

Les signes cliniques sont souvent aspécifiques. Il faut suspecter<br />

un traumatisme vésical chez le polytraumatisé de l’abdomen<br />

et/ou du bassin avec hématurie, sang au méat urétral, douleur<br />

sus-pubienne et/ou impossibilité d’uriner.<br />

L’hématurie est macroscopique chez plus de huit patients sur<br />

dix [8, 10, 11, 23] .<br />

L’association du traumatisme vésical fermé avec l’hématurie<br />

et une fracture pelvienne est la pierre angulaire du<br />

2 Urologie


9 %<br />

diagnostic [23-25] . Cette triade comprend l’hématurie macroscopique<br />

dans la grande majorité des cas, alors que l’hématurie<br />

microscopique est exceptionnelle (Fig. 1). Chez 9 % des<br />

patients, la triade est incomplète (absence de fracture du bassin).<br />

Il est clair qu’une douleur sus-pubienne liée à une rupture<br />

traumatique de la vessie peut être occultée par une douleur de<br />

fracture du bassin, mais l’association hématurie macroscopique<br />

et fracture du bassin doit faire évoquer prioritairement le<br />

diagnostic : 75 à 90 % des ruptures vésicales sont associées à<br />

une fracture du bassin [1, 3, 10, 12] . La probabilité de plaie vésicale<br />

augmente de façon significative s’il existe une disjonction<br />

symphysaire [26] . Le risque relatif est de l’ordre d’un facteur 10 si<br />

cette disjonction est de plus de 1 cm [27] . Une disjonction sacroiliaque,<br />

une fracture sacrée, une fracture des ailes iliaques ou des<br />

branches pubiennes comportent également une probabilité plus<br />

élevée de lésion vésicale [27, 28] .<br />

Chez la femme, l’attention doit être portée sur la recherche<br />

de sang intravaginal, pouvant correspondre à une plaie vaginale,<br />

urétrale ou vésicale [29] .<br />

Dans les diagnostics tardifs, le tableau digestif peut être au<br />

premier plan avec silence auscultatoire, iléus reflexe ou péritonite<br />

signant l’uropéritoine, le tableau infectieux survenant<br />

généralement encore plus tardivement, signe d’un urinome<br />

passé inaperçu.<br />

Plaie pénétrante<br />

Là aussi, le diagnostic n’est pas toujours évident. Si l’écoulement<br />

d’urines sanglantes par un orifice sus-pubien, inguinal ou<br />

fessier est pathognomonique, des signes cliniques plus atypiques<br />

peuvent se voir : empâtement sus-pubien, ténesme vésical,<br />

impossibilité mictionnelle sans globe palpable sont des signes<br />

évocateurs [14] . L’irritation péritonéale se voit plus tardivement.<br />

Le diagnostic clinique se complique avec les plaies par arme<br />

à feu, responsables de lésions étendues et s’associant à des plaies<br />

digestives, vasculaires ou à de gros délabrements chez un<br />

patient hémodynamiquement instable pour lequel la réanimation<br />

prime sur le reste.<br />

Plaie iatrogène<br />

2 %<br />

89 %<br />

Hématurie<br />

macroscopique<br />

et fracture pelvienne<br />

Hématurie<br />

macroscopique<br />

sans fracture pelvienne<br />

Hématurie<br />

microscopique<br />

et fracture pelvienne<br />

Figure 1. Répartition des plaies vésicales par traumatisme fermé en<br />

fonction de l’hématurie.<br />

Le diagnostic peropératoire avec plaie de visu ou écoulement<br />

d’urines parfois sanglantes n’est pas forcément évident. Ainsi, il<br />

faut savoir évoquer l’éventualité d’une plaie vésicale iatrogène<br />

lorsque après une intervention du bas abdomen ou du pelvis, il<br />

existe des signes cliniques d’irritation péritonéale ou infectieux.<br />

En laparoscopie, la présence de gaz dans le sac collecteur<br />

d’urine signe une plaie vésicale qu’il faut rechercher, par une<br />

exploration minutieuse ou au besoin en s’aidant d’une perfusion<br />

de sérum physiologique coloré au bleu de méthylène<br />

passée par la sonde vésicale [15] . Ce dernier procédé peut<br />

également être utilisé en chirurgie ouverte. La lésion vésicale est<br />

ainsi aisément mise en évidence par l’écoulement d’un liquide<br />

bleuté.<br />

Urologie<br />

Tableau 4.<br />

Variations biologiques sanguines en cas de réabsorption péritonéale<br />

d’urine.<br />

Urée Élevée<br />

Créatinine Élevée<br />

Sodium Élevé<br />

Potassium Élevé<br />

pH Abaissé<br />

Chlore Élevé<br />

En résection endoscopique, la plaie vésicale doit être suspectée<br />

lorsque le bilan entrée/sortie du lavage continu est négatif<br />

et/ou lorsque apparaissent une distension et/ou des douleurs<br />

abdominales ou sus-pubiennes.<br />

Examens complémentaires<br />

Biologie<br />

Les examens sanguins sont peu contributifs, sauf en cas de<br />

plaie vésicale ancienne où la résorption péritonéale d’urine<br />

occasionne une répercussion hydroélectrolytique (Tableau 4) :<br />

augmentation de l’urémie, de la créatininémie, hypernatrémie,<br />

hyperkaliémie ainsi qu’une acidose métabolique hyperchlorémique<br />

[1, 8, 10, 12] . La présence d’un syndrome inflammatoire est<br />

inconstante.<br />

L’examen d’urine met en évidence quasiment constamment<br />

une hématurie au moins microscopique avec au minimum<br />

30 globules rouges/champ [27] .<br />

Radiologie<br />

Échographie<br />

L’échographie ne signe en aucune façon le diagnostic de<br />

rupture vésicale. Elle permet tout au plus de suspecter une<br />

rupture intrapéritonéale chez un malade intransportable en salle<br />

de « déchocage » lorsqu’elle met en évidence du liquide libre<br />

intrapéritonéal [30] .<br />

Urographie intraveineuse (UIV)<br />

Cet examen présente une proportion élevée de faux négatifs<br />

en raison de la distension vésicale insuffisante liée au protocole<br />

[1, 2] . Sa sensibilité n’est que de 15 % [4] . L’UIV ne doit donc<br />

pas être utilisée comme examen complémentaire à la recherche<br />

d’une plaie vésicale.<br />

Cystographie<br />

En raison de sa simplicité et de sa rapidité de réalisation, la<br />

cystographie reste l’examen de référence en cas de suspicion de<br />

traumatisme vésical.<br />

En pratique, l’indication absolue à réaliser une cystographie<br />

est l’association hématurie macroscopique et fracture pelvienne<br />

qui signe la plus forte suspicion de plaie vésicale [1, 23-25, 31] .Il<br />

existe deux autres indications relatives, l’association fracture<br />

pelvienne et hématurie microscopique ainsi que l’hématurie<br />

macroscopique isolée [1, 24, 25, 31] .<br />

“ Point fort<br />

Prise en charge des traumatismes de la vessie 18-214-A-10<br />

Indications à la cystographie en cas de suspicion<br />

de plaie vésicale<br />

Indication absolue<br />

Hématurie macroscopique + fracture pelvienne<br />

Indications relatives<br />

Hématurie microscopique + fracture pelvienne<br />

Hématurie macroscopique isolée<br />

La sensibilité de l’examen est de 85 à 100 % s’il est réalisé<br />

avec une technique standardisée [2-4, 23] .<br />

3


.<br />

.<br />

18-214-A-10 Prise en charge des traumatismes de la vessie<br />

Figure 2. Aspect cystographique de rupture extrapéritonéale.<br />

La procédure consiste tout d’abord en la mise en place d’une<br />

sonde vésicale type Foley. S’il existe le moindre doute quant à<br />

une lésion urétrale (notamment ascension de la prostate au<br />

toucher rectal), cette mise en place est précédée d’une urétrographie<br />

rétrograde [2] . Une fois une lésion urétrale exclue et la<br />

sonde mise en place, on procède à l’injection intravésicale de<br />

produit de contraste spécifique pour la cystographie (Télébrix<br />

12 ® par exemple). Dans la plupart des cas, le bilan doit être<br />

succinct car le patient est en phase de réanimation. Trois clichés<br />

de face sont déterminants : le premier à vide, le second en<br />

réplétion modérée (250 ml) (Fig. 2) et enfin le troisième après<br />

vidange [3, 23] . Si les circonstances le permettent, des clichés<br />

supplémentaires antéropostérieurs et en réplétion précoce<br />

(100 et 200 ml) évitent une dissémination prématurée de<br />

produit de contraste si la fuite est déjà visualisée. Le cliché après<br />

vidange est indispensable puisqu’il permet de découvrir près de<br />

10 % de fuites vésicales qui seraient sinon passées inaperçues<br />

[11] . Il n’existe pas, en revanche, de relation obligatoire<br />

entre l’importance de la blessure vésicale et l’importance de<br />

l’extravasation [10] .<br />

Scanner<br />

Pratiqué de façon standard avec produit de contraste, le<br />

scanner est grevé d’une proportion très élevée de faux négatifs<br />

en raison de la distension vésicale insuffisante liée au protocole<br />

[1, 23, 32-34] . Selon certains, cependant, l’association absence<br />

de fracture pelvienne et absence de liquide libre intraabdominal<br />

aurait une valeur prédictive négative de 100 % [35] .<br />

La sensibilité du scanner injecté s’élève notablement si la<br />

sonde vésicale est clampée précocement. Cette modification<br />

technique permettrait de se passer de cystographie, mais le délai<br />

d’attente pour obtenir une réplétion vésicale suffisante (20 à<br />

30 min) retarde la prise en charge d’un patient polytraumatisé<br />

[23] et bloque l’accès au scanner.<br />

Le scanner associé à l’injection intravésicale rétrograde de<br />

250 ml de produit de contraste puis au clampage de la sonde<br />

allie les avantages du scanner à la sensibilité de la cystographie<br />

conventionnelle (Fig. 3) [23, 34, 36] : ce « cystoscanner » permet<br />

un bilan lésionnel multiorganes précis et simultané aboutissant<br />

à une prise en charge opératoire précoce et offrant une sensibilité<br />

proche de 100 % [37, 38] .<br />

Une récente revue de notre collectif confirme que le cystoscanner<br />

a progressivement remplacé la cystographie rétrograde<br />

classique dans les centres où le scanner est rapidement disponible<br />

pour les urgences.<br />

Stadification<br />

Contusion vésicale<br />

[2, 15, 39]<br />

Il s’agit d’une lésion sans solution de continuité de la paroi<br />

vésicale, pouvant entraîner une hématurie. Le diagnostic est<br />

posé devant une hématurie dans un contexte de traumatisme<br />

.<br />

.<br />

Figure 3. Cliché cystoscanographique de rupture extrapéritonéale.<br />

pelvien avec absence d’anomalie de la voie urinaire haute et<br />

cystographie ou cystoscanner sans particularité. Il s’agit donc<br />

d’un diagnostic d’exclusion et vraisemblablement de l’entité la<br />

plus fréquente mais dont l’incidence n’est pas connue.<br />

Rupture intrapéritonéale<br />

Son incidence est de 10 à 40 % [1-4, 10-12, 39-41] . Elle est due à<br />

une augmentation rapide de la pression intravésicale sur vessie<br />

pleine entraînant une rupture au dôme qui est la zone de<br />

moindre résistance. L’aspect cystographique et scanographique<br />

est caractéristique : extravasation du produit de contraste vers le<br />

péritoine, pouvant réaliser une véritable « péritonéographie »<br />

avec anses grêles moulées par le produit de contraste, opacification<br />

des gouttières paracoliques, du cul-de-sac de Douglas, de<br />

l’espace de Morrison, voire même des espaces périhépatiques ou<br />

périspléniques.<br />

Rupture interstitielle<br />

Extrêmement rare, elle correspond à une atteinte intramurale<br />

à séreuse intacte. L’aspect cystographique met en évidence une<br />

prise de contraste intrapariétale vésicale sans extravasation.<br />

Rupture extrapéritonéale<br />

Elle représente la rupture la plus fréquente avec une incidence<br />

se situant entre 54 et 90 % [2-4, 10-12, 22, 39-42] . Les images<br />

sont variables en fonction des fascias envahis par le produit de<br />

contraste (Fig. 2, 3) : simple extravasation vers l’espace de<br />

Retzius, l’espace périvésical ou présacré. S’il existe une rupture<br />

des fascias, on peut retrouver une opacification du périnée, du<br />

scrotum, de la paroi abdominale antérieure ou même, dans les<br />

gros délabrements, un trajet fistuleux vésicovaginal ou<br />

vésicocutané.<br />

Rupture mixte<br />

Elle regroupe les caractéristiques des deux autres types de<br />

ruptures vraies. Le piège vient du fait que lorsqu’il existe une<br />

importante fuite extrapéritonéale, une petite plaie intrapéritonéale<br />

associée peut passer inaperçue [39] .<br />

■ Prise en charge<br />

Rupture vésicale par traumatisme fermé<br />

La prise en charge initiale comprend le plus souvent la<br />

réanimation chirurgicale, la stabilisation du patient et le<br />

traitement des lésions associées mettant en jeu le pronostic<br />

vital [1, 2, 8, 11, 12, 40] . Le traitement des lésions vésicales se fait<br />

ensuite en fonction de la classification radiologique.<br />

Contusion vésicale<br />

La contusion vésicale ne nécessite pas de traitement spécifique.<br />

Néanmoins, s’il existe une hématurie macroscopique<br />

4 Urologie


Figure 4. Vue laparoscopique d’une plaie du dôme vésical isolée. Figure 5. Exploration laparoscopique de la plaie après exposition (on<br />

aperçoit le ballonnet de la sonde vésicale).<br />

persistante, on peut instaurer un drainage par cathéter urétral<br />

ou même mettre en route un lavage vésical continu pour<br />

quelques heures [2, 25] .<br />

Rupture intrapéritonéale<br />

La prise en charge des ruptures vésicales intrapéritonéales est<br />

formellement chirurgicale et immédiate, en raison de l’inefficacité<br />

d’un traitement conservateur d’une part et de l’insuffisance<br />

rénale par résorption péritonéale des urines d’autre part. Le but<br />

de l’intervention est bien évidemment de reconstituer l’étanchéité<br />

de la vessie [1, 2, 11, 12, 25, 40, 42] .<br />

L’incision médiane sous-ombilicale est de règle, afin d’élargir<br />

si nécessaire le champ d’exploration péritonéal. L’ouverture<br />

péritonéale permet une inspection des viscères intraabdominaux<br />

après évacuation de l’urine et des caillots sanguins.<br />

La plaie vésicale siège généralement au dôme et se présente<br />

sous la forme d’une rupture longitudinale de 5à10cm(Fig. 4).<br />

Si les tissus sont contus, un parage est souhaitable s’il n’est pas<br />

trop délabrant. Le site de rupture est ensuite refermé en deux<br />

plans par des surjets de fil résorbable 2 ou 3/0. Selon l’épaisseur<br />

et l’état de la paroi, ainsi que le type d’abord (laparoscopie) (cf.<br />

infra), la suture en un seul plan peut s’avérer suffisante. Le<br />

drainage vésical est assuré par une sonde urétrale type Foley de<br />

gros calibre 20 ou 22 Ch avec de gros orifices de drainage. La<br />

cystostomie n’est pas nécessaire [6, 43] si les urines sont claires et<br />

s’il n’y pas de gros risque de caillotage. Si un drainage suspubien<br />

s’avère indispensable, la sonde est sortie avant fermeture<br />

vésicale par une contre-incision. Le drainage prévésical n’est en<br />

général pas utile.<br />

La sonde est retirée entre le 5 e et le 10 e jour, selon l’étendue<br />

de la rupture suturée. Le contrôle cystographique ne se fait que<br />

en cas de difficultés peropératoires [44] .<br />

La place de la laparoscopie reste à définir. Elle est réservée de<br />

principe aux monotraumatismes vésicaux intrapéritonéaux,<br />

stables hémodynamiquement, qui ne sont pas une rareté : dans<br />

notre série, 40 % des plaies vésicales sont l’unique lésion<br />

viscérale. Pour notre part [36, 45] , nous tentons, ainsi que<br />

certaines équipes [18, 46-48] , l’exploration laparoscopique<br />

(Fig. 4, 5) et pratiquons la suture vésicale en un plan de fil<br />

résorbable (Fig. 6). Certaines équipes utilisent les endoloops [48] .<br />

La suture laparoscopique doit être maîtrisée par l’opérateur et le<br />

moindre doute d’observation peropératoire d’une lésion d’un<br />

autre organe impose la conversion.<br />

Rupture interstitielle<br />

Rare en tant qu’entité, elle peut être mimée par une petite<br />

perforation vésicale bouchée, par un caillot sanguin, une<br />

contraction détrusorienne ou de la graisse. Une telle image<br />

radiologique doit inciter à la prudence et un drainage par une<br />

sonde vésicale transurétrale pour une dizaine de jours semble<br />

raisonnable [11] .<br />

Rupture extrapéritonéale<br />

Si, jusque dans les années 1970, le traitement des ruptures<br />

extrapéritonéales de la vessie était exclusivement chirurgical,<br />

Urologie<br />

actuellement le simple drainage par sonde urétrale est la règle en<br />

l’absence de complications. Comme pour les ruptures intrapéritonéales,<br />

une sonde de Foley de gros calibre avec de gros orifices<br />

de drainage peut suffire en l’absence d’hématurie majeure ou de<br />

caillotage important, sinon une sonde urinaire double courant<br />

avec lavage continu peut être proposée. La majorité des brèches<br />

vésicales cicatrise dans ces conditions : 85 % sont fermées dès le<br />

10 e jour postdrainage et virtuellement 100 % sont étanches au<br />

terme de la 3 e semaine [1, 2, 8, 10-12, 25, 40, 42] .<br />

S’il existe des fragments osseux ou tout autre corps étranger<br />

intravésical, l’exploration chirurgicale pour l’extraire est de<br />

rigueur [49] . De même, toute lésion touchant le col vésical, le<br />

trigone, la prostate ou le vagin doit bénéficier d’une exploration<br />

et d’une suture par voie endovésicale [1, 2, 8, 10-12, 25, 40, 42] .<br />

Enfin, une suture vésicale doit être réalisée si une laparotomie<br />

est indiquée pour le traitement d’une lésion associée : plaie<br />

digestive ou, de plus en plus fréquemment, ostéosynthèse du<br />

bassin par plaque [1, 8, 10-12, 36, 40] . La récente revue de notre<br />

collectif confirme cette tendance : 45 % des ruptures vésicales<br />

extrapéritonéales prises en charge aux urgences ont bénéficié<br />

d’une fermeture chirurgicale durant l’ostéosynthèse d’une<br />

fracture du bassin, le plus souvent symphysaire pour une<br />

fracture type « livre ouvert », classiquement par incision de<br />

Pfannenstiel. L’abord est direct, mais peut aussi se faire par une<br />

cystotomie au dôme pour éviter de disséquer l’hématome<br />

prévésical qui souvent tamponne le saignement pelvien. La<br />

suture de toutes les lésions se fait comme cité plus haut par des<br />

points de fil résorbable 2 ou 3/0 après excision des zones<br />

contuses. Le drainage est confié à une sonde transurétrale de<br />

gros calibre.<br />

Rupture mixte<br />

Prise en charge des traumatismes de la vessie 18-214-A-10<br />

Figure 6. Suture vésicale terminée.<br />

Elle est d’indication chirurgicale comme la rupture intrapéritonéale<br />

: cystotomie au dôme, suture endovésicale de la brèche<br />

sous-péritonéale et fermeture en deux plans du dôme au fil<br />

résorbable 2 ou 3/0 sous couverture d’un drainage par sonde<br />

urétrale.<br />

5


18-214-A-10 Prise en charge des traumatismes de la vessie<br />

Plaies pénétrantes<br />

La prise en charge des plaies pénétrantes relève avant tout de<br />

la réanimation en raison du nombre élevé de lésions associées<br />

mettant en jeu le pronostic vital. Outre le maintien de l’équilibre<br />

hémodynamique et l’analgésie, il faut systématiquement<br />

débuter une antibioprophylaxie et prévenir le tétanos [14] .<br />

L’antibiothérapie est double, associant une pénicilline G au<br />

métronidazole ou triple avec aminoside, céphalosporine et<br />

métronidazole s’il existe une contamination fécale.<br />

Si l’exploration doit être systématique, schématiquement, on<br />

peut définir trois situations [1, 14] :<br />

plaie simple du dôme vésical : exploration endovésicale,<br />

repérage des orifices d’entrée après retrait des corps étrangers<br />

et des caillots sanguins, parage puis fermeture en deux plans<br />

de fil résorbable, le plus souvent sur une cystostomie de gros<br />

calibre, 20 à 24 Ch sortant par une contre-incision. Une<br />

sonde vésicale transurétrale est également mise en place, de<br />

plus petit diamètre, 16 à 18 Ch, pour permettre l’écoulement<br />

d’éventuelles sécrétions urétrales ;<br />

plaie latérale ou du fond vésical : on procède à l’exploration<br />

endovésicale par une cystotomie au dôme pour ne pas<br />

mobiliser les hématomes juxtavésicaux qui tamponnent les<br />

saignements, retrait des caillots et des corps étrangers puis<br />

parage et suture des zones lésées après mise en place de<br />

sondes urétérales 5 ou 6 Ch et retrait sur cystostomie et<br />

sonde vésicale. Si la plaie est juxtaméatique ou trigonale, les<br />

sondes urétérales sont laissées en place et sorties par une<br />

contre-incision. Dans la très rare situation où la plaie du<br />

trigone est non suturable, la sonde vésicale est sans ballonnet<br />

et placée de telle façon que son extrémité affleure le col<br />

vésical ;<br />

vessie détruite : dans ces cas exceptionnels, il s’agit le plus<br />

souvent d’un polytraumatisé et le choix de l’urétérostomie<br />

cutanée simple ou transiléale s’impose [50] . Chez un patient<br />

hémodynamiquement instable, une urétérostomie « in situ »<br />

par mise en place de sondes urétérales sorties par une contreincision<br />

cutanée peut permettre un drainage simple, rapide et<br />

efficace des urines. Si le patient survit, une dédérivation ou<br />

une reconstruction vésicale plus complexe peut être envisagée<br />

à distance.<br />

Dans tous les cas, l’espace périvésical est drainé. La sonde<br />

vésicale est retirée après 15 à 20 jours et la cystostomie retirée<br />

après vérification de l’étanchéité vésicale, de la reprise de<br />

mictions satisfaisantes et surtout de l’absence de résidu postmictionnel<br />

significatif.<br />

Plaies iatrogènes<br />

La mesure principale concernant les plaies iatrogènes est la<br />

prévention : bonne exposition, instrumentation adaptée et<br />

recours à la cystoscopie ou à l’injection intraveineuse d’indigo<br />

carmin (5 ml en bolus) additionnée de 10 mg de furosémide au<br />

moindre doute lors d’une intervention potentiellement délétère<br />

pour la vessie [8] . En effet, si la plaie est découverte en peropératoire,<br />

elle est bien sûr réparée sur le champ. En cas de lésion<br />

découverte après l’intervention, la reprise chirurgicale est le plus<br />

souvent la seule solution [2, 8] .<br />

Une petite plaie vésicale lors d’une intervention laparoscopique<br />

peut être suturée directement lorsqu’elle se présente au<br />

dôme. Si, en revanche, elle intéresse le trigone, se trouve être<br />

difficile d’accès, étendue, ou associée à d’autres lésions, il faut<br />

impérativement convertir et réparer par voie ouverte [48] .<br />

Certains drainent simplement la vessie s’il existe une petite<br />

brèche et surveillent étroitement l’apparition d’un péritonisme<br />

qui imposerait une reprise chirurgicale [2] .<br />

La promontofixation laparoscopique mérite une attention<br />

toute particulière : en effet, une fuite vésicale au décours d’une<br />

intervention fixant une bandelette prothétique sur un relief<br />

ostéoarticulaire peut s’avérer délétère si elle passe inaperçue ou<br />

si elle n’est pas correctement réparée. La plaie vésicale doit être<br />

recherchée impérativement au moindre doute et correctement<br />

traitée. En cas de plaie importante, difficilement suturable, ou<br />

mal située, la conversion est parfois nécessaire et l’abandon de<br />

l’intervention peut parfois être la seule solution si la réparation<br />

reste précaire.<br />

Un passage intravésical d’une bandelette sous-urétrale, s’il est<br />

découvert en peropératoire, est traité après repositionnement de<br />

la bandelette par un maintien de la sonde vésicale 48 à<br />

72 heures [8] .<br />

Une plaie vésicale au décours d’une césarienne est traitée par<br />

une suture vésicale en deux plans [8] .<br />

En cas de déchirure vésicale au décours d’un accouchement<br />

par voie basse au forceps, la vessie est suturée par voie vaginale<br />

en deux plans [8] .<br />

Lorsqu’une plaie vésicale intrapéritonéale est faite lors d’une<br />

résection transurétrale de la vessie, l’exploration de la cavité<br />

abdominale s’impose, classiquement par laparotomie, éventuellement<br />

par laparoscopie, à la recherche de lésions associées<br />

après évacuation du liquide d’irrigation et des caillots puis<br />

suture vésicale [8] .<br />

Enfin, lorsque la plaie vésicale est découverte plus tardivement,<br />

l’exploration chirurgicale par laparotomie sous-ombilicale<br />

semble être la meilleure solution [8] .<br />

■ Évolution<br />

Pronostic<br />

Le pronostic des traumatismes vésicaux est directement lié<br />

aux lésions associées. En effet, en raison de la localisation<br />

anatomique de la vessie dans le cadre osseux du bassin, il s’agit<br />

le plus souvent de traumatismes de haute énergie responsables<br />

de polytraumatismes. La mortalité reste importante, malgré la<br />

prise en charge précoce et les progrès de la réanimation chirurgicale,<br />

entre 11 à 34 % [3, 4, 6-8, 12] , non liée à la plaie vésicale<br />

elle-même. La durée moyenne d’hospitalisation reste également<br />

très élevée, de l’ordre de 1 mois [3] .<br />

Séquelles<br />

Bien qu’ils soient associés lors de polytraumatismes à une<br />

mortalité élevée, les traumatismes vésicaux ne sont pas fréquemment<br />

pourvoyeurs de séquelles : les patients qui survivent<br />

ne souffrent qu’exceptionnellement de problèmes vésicaux.<br />

Il existe néanmoins quelques cas particuliers, dominés par les<br />

urgences mictionnelles sur vessie cicatricielle, traitées le plus<br />

souvent avec succès par les anticholinergiques [11] . Les plaies de<br />

la vessie associant une fracture sacrée peuvent s’accompagner<br />

d’aréflexie vésicale (nécessitant des autosondages) et de dysfonction<br />

érectile sur atteinte des nerfs sacrés [1, 11, 14] .<br />

Les lésions intéressant le col vésical chez la femme sont<br />

responsables d’une incontinence urinaire dans 50 à 100 % des<br />

cas [29] . Chez l’homme, le risque est soit la sténose, soit<br />

l’incontinence, mais son incidence n’est pas chiffrée [1] . La<br />

solution est le plus souvent chirurgicale, par plastie secondaire<br />

du col vésical [51] .<br />

Enfin, en cas de lésion vésicale associée à une plaie vaginale<br />

ou rectale, le risque de fistule n’est pas négligeable, mais n’est<br />

pas chiffré [1, 29] .<br />

■ Conclusion<br />

Les traumatismes fermés de la vessie sont le plus souvent<br />

consécutifs à un choc de haute énergie de l’abdomen ou du<br />

bassin entraînant des lésions associées directement responsables<br />

du pronostic vital. La prise en charge initiale est réanimatoire<br />

puis chirurgicale s’il s’agit d’une rupture intrapéritonéale ou<br />

d’une rupture extrapéritonéale associée à des lésions nécessitant<br />

un geste chirurgical (exploration abdominale, ostéosynthèse de<br />

la symphyse pubienne). Le drainage isolé par sonde vésicale est<br />

réservé aux ruptures extrapéritonéales « simples ».<br />

6 Urologie


.<br />

Les plaies pénétrantes nécessitent une révision chirurgicale,<br />

quelle que soit leur importance.<br />

Les plaies iatrogènes sont les plus fréquentes et doivent être<br />

recherchées lors d’une chirurgie à risque par cystoscopie ou<br />

épreuve à l’indigo carmin car leur réparation est toujours plus<br />

aisée si elle est faite immédiatement.<br />

Le pronostic de ces lésions est grevé d’un taux de mortalité<br />

significatif, lié aux lésions associées. La guérison sans séquelle<br />

pour les malades qui s’en sortent est la règle, sauf dans certains<br />

cas de lésions du col ou associées à des plaies rectales, vaginales<br />

ou aux fractures du sacrum avec lésion neurologique.<br />

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7


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associated with pelvic fracture urethral distraction defects. JUrol1999;<br />

162:347-51.<br />

Pour en savoir plus<br />

A. Doerfler, Chef de clinique.<br />

Service d’urologie, Centre hospitalier universitaire Vaudois, rue du Bugnon, 46, 1011 Lausanne, Suisse.<br />

C. Iselin, Professeur, chef de service (Christophe.Iselin@hcuge.ch).<br />

Service d’urologie, Hôpitaux universitaires de Genève, Genève, Suisse.<br />

Iselin CE. Communication personnelle.<br />

Wirth GJ, Peter R, Poletti PA, Iselin CE. Bladder rupture following blunt<br />

trauma: how has its management changed over the last decades? BJU<br />

Int 2010 (In press).<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Doerfler A., Iselin C. Prise en charge des traumatismes de la vessie. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Urologie, 18-214-A-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

8 Urologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Prise en charge des urétrites<br />

B. Chaine, M. Janier<br />

Les urétrites sont des infections sexuellement transmissibles dont la prise en charge doit être rapide,<br />

idéalement en urgence, afin de rompre la chaîne de contamination et d’empêcher les complications, en<br />

particulier l’orchiépididymite aiguë. Les micro-organismes responsables sont le plus souvent Neisseria<br />

gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis. Les urétrites masculines peuvent être prises en charge en<br />

médecine de ville. Le diagnostic biologique s’est considérablement simplifié avec l’application des<br />

techniques d’amplification génomique pour la recherche de Chlamydia trachomatis et de Mycoplasma<br />

genitalium. Les centres de référence spécialisés en infections sexuellement transmissibles tels que les<br />

Centres d’information, de dépistage et de diagnostic des infections sexuellement transmissibles<br />

(CIDDIST) ont l’avantage d’allier la qualité du plateau technique et, pour certains, la gratuité. Depuis<br />

1998, nous assistons à la réémergence d’urétrites à gonocoque, particulièrement chez les homosexuels<br />

masculins, ce qui indique un relâchement de la protection individuelle favorisant également la<br />

transmission du virus de l’immunodéficience humaine. Pour Chlamydia trachomatis, toute la difficulté<br />

réside dans l’existence de nombreux sujets asymptomatiques responsables de la dissémination silencieuse<br />

de l’infection avec des conséquences parfois graves chez les jeunes femmes. Un effort reste à faire pour<br />

dépister et traiter les sujets asymptomatiques. Les traitements antibiotiques des urétrites sont bien<br />

codifiés avec, en particulier, de nouvelles molécules en prise unique et bien tolérées, favorisant<br />

l’observance thérapeutique.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Urétrite ; Écoulement urétral ; Infection sexuellement transmissible<br />

Définition et physiopathologie 1<br />

Épidémiologie 2<br />

Étiologie des urétrites 2<br />

Pathogènes les plus fréquents 2<br />

Pathogènes moins fréquents 3<br />

Complications des urétrites 3<br />

Conduite à tenir 3<br />

Interrogatoire 3<br />

Examen clinique 3<br />

Examens complémentaires 3<br />

Traitement 4<br />

Prévention et dépistage 5<br />

Conclusion 5<br />

■ Définition et physiopathologie<br />

L’urétrite chez l’homme est une inflammation de l’urètre le<br />

plus souvent d’origine infectieuse et sexuellement transmissible<br />

puisqu’il existe des urétrites non infectieuses et des urétrites<br />

traumatiques. La définition de l’urétrite repose sur des critères<br />

cytologiques : présence d’au moins cinq polynucléaires neutrophiles<br />

sur le frottis urétral au grossissement 1 000, ou présence<br />

d’au moins dix polynucléaires neutrophiles dans le premier jet<br />

d’urines centrifugées au grossissement 400. Cette définition<br />

Urologie<br />

18-690-A-12<br />

cytologique est d’une très grande spécificité et permet d’éliminer<br />

les infections urinaires et les autres pathologies urétrales<br />

telles que les causes mécaniques ou psychiatriques. Néanmoins,<br />

le seul diagnostic différentiel à envisager est l’infection urinaire<br />

avec pyurie, mais dans ce cas les polynucléaires sont également<br />

présents dans les urines de fin de miction, contrairement à<br />

l’urétrite où ils ne sont retrouvés que dans le premier jet, ou<br />

sont au moins plus nombreux dans le premier jet que dans le<br />

deuxième jet. Ainsi il est intéressant, en l’absence d’écoulement<br />

urétral, de réaliser une bandelette urinaire sur le deuxième jet<br />

d’urines en plus de l’examen du premier jet urinaire.<br />

En effet, lorsqu’il existe un écoulement urétral, la sensibilité<br />

de la cytologie est excellente, de l’ordre de 60 %à80%,alors<br />

qu’elle n’est plus que de 30 %à40%enl’absence d’écoulement<br />

urétral. En pratique, un écoulement urétral chez un adulte<br />

doit être considéré comme une urétrite jusqu’à preuve du<br />

contraire. Chez un enfant, il faut être plus nuancé car les<br />

pathologies urétrales traumatiques ou allergiques, bien que<br />

prédominantes, ne doivent pas laisser passer une authentique<br />

urétrite infectieuse, témoignant dans ce cas d’un possible abus<br />

sexuel. Dans une série hospitalière, sur sept garçons prépubères<br />

ayant une urétrite gonococcique documentée, seulement trois<br />

sur sept alléguaient une activité sexuelle volontaire [1] .<br />

L’urètre masculin est normalement stérile. En effet, les microorganismes<br />

de la flore cutanée, intestinale ou vaginale sont<br />

régulièrement éliminés par les mictions. Néanmoins, on peut<br />

retrouver, chez l’homme sans activité sexuelle, des colonies<br />

bactériennes saprophytes du premier groupe (comme les<br />

staphylocoques blancs et dorés, les entérocoques, Gardnerella<br />

vaginalis, ou des bactéries saprophytes anaérobies) [2] . Chez<br />

1


18-690-A-12 Prise en charge des urétrites<br />

l’homme ayant une activité sexuelle, d’autres bactéries du<br />

deuxième groupe (comme des streptocoques B et des bacilles à<br />

Gram négatif) ainsi que Mycoplasma hominis et Ureaplasma<br />

urealyticum sont régulièrement retrouvés. Leur pathogénicité<br />

dépend du nombre de colonies, du caractère isolé du microorganisme<br />

retrouvé, de l’absence de bactérie pathogène associée,<br />

de la transmission aux partenaires et de la guérison sous<br />

traitement spécifique. Le troisième groupe comporte uniquement<br />

des micro-organismes fortement pathogènes et responsables<br />

d’urétrites. On les retrouve également fréquemment chez<br />

des patients asymptomatiques. Leur traitement est indispensable.<br />

Il s’agit de Neisseria gonorrhoeae, deChlamydia trachomatis,<br />

de Trichomonas vaginalis et de Mycoplasma genitalium.<br />

■ Épidémiologie<br />

Globalement, l’incidence des gonococcies a diminué de<br />

manière exponentielle dans tous les pays d’Europe occidentale<br />

entre 1985 et 1995. En revanche, à l’échelle planétaire, les cas<br />

de gonococcies sont plutôt en forte augmentation selon l’Organisation<br />

mondiale de la santé (OMS). On assiste actuellement à<br />

un relâchement de la protection et donc à une recrudescence<br />

des urétrites à Neisseria gonorrhoeae depuis 1998 en Europe de<br />

l’Ouest et en particulier en France. La représentation des<br />

homosexuels masculins a fortement augmenté ainsi que la<br />

séroprévalence du virus de l’immunodéficience humaine (VIH)<br />

et le rôle du sexe oral. Ce relâchement semble lié à un phénomène<br />

de lassitude du « sexe sans risque », en particulier chez les<br />

patients séropositifs pour le VIH, et à une moindre crainte du<br />

syndrome de l’immunodéficience acquise (sida), peut-être en<br />

raison des thérapies antirétrovirales efficaces [3] . Les gonocoques<br />

présents en Europe de l’Ouest sont actuellement hautement<br />

résistants aux antibiotiques avec des prévalences élevées de<br />

Neisseria gonorrhoeae productrices de pénicillinase et hautement<br />

résistantes aux tétracyclines. La France se situe parmi les pays<br />

où la proportion de résistance des gonocoques à la ciprofloxacine<br />

est la plus élevée : 43 % en 2006 [4] . En France, l’incidence<br />

des infections à Chlamydia trachomatis était estimée à 37,3 cas<br />

pour 100 000 habitants en 1997. Depuis 2000, on assiste à une<br />

progression annuelle régulière du nombre de diagnostics<br />

d’infection à Chlamydia trachomatis touchant principalement les<br />

sujets jeunes (données du Réseau national des chlamydioses<br />

[Rénachla], réseau de laboratoires volontaires) [5] . Ainsi, entre<br />

2003 et 2006, l’augmentation du nombre d’hommes testés a été<br />

de 33 % et celle du nombre de cas diagnostiqués de 55 %. La<br />

proportion de personnes asymptomatiques est devenue majoritaire<br />

chez l’homme depuis 2004. Néanmoins, ces données ne<br />

sont pas extrapolables au niveau national en raison du recrutement<br />

particulier de ce réseau. Les données épidémiologiques<br />

récentes françaises [6] montrent que la prévalence des infections<br />

urogénitales à Chlamydia trachomatis dans les populations<br />

symptomatiques est comprise entre 10 % et 18 % tandis que<br />

dans des populations d’hommes et de femmes asymptomatiques,<br />

elle serait comprise entre 0,5 % et 9 %. Les prévalences<br />

maximales sont observées pour les 15-25 ans chez les femmes<br />

et pour les 15-34 ans chez les hommes. En France, les infections<br />

à Chlamydia trachomatis sont le diagnostic le plus fréquent dans<br />

les centres d’information, de dépistage et de diagnostic des<br />

infections sexuellement transmissibles (CIDDIST). Il est difficile,<br />

à travers ces données récentes, de savoir s’il s’agit d’une<br />

augmentation de l’incidence ou d’une progression du dépistage<br />

des populations à risque en raison de la généralisation des tests<br />

polymerase chain reaction (PCR) plus sensibles. Il n’y a pas de<br />

chiffres disponibles concernant les autres micro-organismes<br />

responsables d’urétrite.<br />

■ Étiologie des urétrites<br />

Parmi les micro-organismes en cause dans les urétrites, il<br />

convient de distinguer les pathogènes majeurs que sont Neisseria<br />

gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis. Ils sont les plus fréquents<br />

et sont souvent associés. Ils doivent être systématiquement<br />

recherchés et traités. Trichomonas vaginalis et les autres pathogènes<br />

plus rares (mycoplasmes et germes banals) peuvent être<br />

recherchés dans un deuxième temps en cas d’échec du premier<br />

traitement antichlamydien et antigonocoque.<br />

Pathogènes les plus fréquents<br />

Neisseria gonorrhoeae ou gonocoque<br />

Neisseria gonorrhoeae est une bactérie à Gram négatif en forme<br />

de diplocoque surtout intracellulaire dans les polynucléaires. La<br />

transmission est uniquement sexuelle. L’incubation est courte,<br />

de 2 à 5 jours. Neisseria gonorrhoeae est très contagieuse et<br />

provoque, dans 90 % des cas chez l’homme, une urétrite aiguë<br />

très bruyante avec écoulement urétral purulent, le plus souvent<br />

jaune verdâtre (Fig. 1) mais parfois clair, une méatite œdémateuse,<br />

une dysurie marquée connue sous le nom de « chaudepisse<br />

». Il n’y a pas de fièvre, mais il peut y avoir des<br />

adénopathies inguinales. Dans moins de 10 % des cas, il n’y a<br />

pas d’écoulement urétral et uniquement des signes fonctionnels<br />

et dans moins de 1 % des cas, les patients sont totalement<br />

asymptomatiques. Le diagnostic repose sur l’examen direct du<br />

frottis de l’écoulement urétral étalé sur lame et coloré au bleu<br />

de méthylène ou au Gram. Cet examen est très simple à réaliser<br />

et sa sensibilité est proche de 100 %. En effet, la découverte de<br />

diplocoques à Gram négatif extra- et surtout intracellulaires<br />

permet une quasi-certitude d’infection à Neisseria gonorrhoeae.<br />

Les seuls pièges diagnostiques sont, en cas de diplocoques<br />

intracellulaires, le méningocoque qui est exceptionnel, et en cas<br />

de diplocoques uniquement extracellulaires, des Neisseria<br />

saprophytes. La culture sur gélose chocolat à partir de l’écoulement<br />

urétral ou par écouvillonnage endo-urétral en l’absence<br />

d’écoulement reste l’examen de référence qui permet de confirmer<br />

le diagnostic en 24 à 48 heures et de réaliser un antibiogramme<br />

avec recherche de bêtalactamases. La recherche de<br />

Neisseria gonorrhoeae sur le premier jet d’urines par technique de<br />

PCR semble prometteuse et permet également de dépister les<br />

rares sujets asymptomatiques [7] . La recherche de Neisseria<br />

gonorrhoeae par culture dans la gorge et l’anus est recommandée<br />

chez l’homosexuel masculin en raison du risque de pharyngite<br />

et de rectite associée.<br />

Chlamydia trachomatis<br />

Figure 1. Urétrite à gonocoque.<br />

Chlamydia trachomatis est une bactérie intracellulaire obligatoire<br />

dont les sérotypes D à K sont responsables d’urétrite à<br />

transmission uniquement sexuelle. L’incubation dure en<br />

moyenne 10 à 15 jours mais est en fait très variable, voire<br />

impossible à préciser. Environ 50 % des hommes infectés par<br />

Chlamydia trachomatis sont symptomatiques. L’écoulement est le<br />

plus souvent transparent modéré et intermittent mais peut être<br />

franchement purulent. Les symptômes urétraux (brûlures<br />

mictionnelles, prurit canalaire) peuvent être associés à un<br />

écoulement ou être les seuls signes cliniques. Bien que l’examen<br />

2 Urologie


de référence soit la culture de Chlamydia trachomatis, la recherche<br />

de Chlamydia trachomatis par PCR sur le premier jet d’urines<br />

(dernière miction datant de plus de 3 h) est à préférer en raison<br />

de sa simplicité et de sa très bonne sensibilité [8] . La sérologie de<br />

Chlamydia trachomatis n’a aucun intérêt dans le diagnostic de<br />

l’urétrite aiguë non compliquée.<br />

Pathogènes moins fréquents<br />

Trichomonas vaginalis<br />

Trichomonas vaginalis est un protozoaire flagellé à transmission<br />

quasi exclusivement sexuelle. Le tableau est plutôt celui<br />

d’une urétrite subaiguë que celui d’une urétrite aiguë. Trichomonas<br />

vaginalis peut également être responsable de balanoposthite.<br />

Le portage asymptomatique est très fréquent. Le diagnostic<br />

repose sur l’examen à l’état frais de l’écoulement étalé entre<br />

lame et lamelle. Les cultures sur milieux spéciaux à partir de<br />

l’écoulement ou d’un prélèvement endo-urétral ou du premier<br />

jet d’urines permettent de confirmer le diagnostic.<br />

Mycoplasma genitalium et Ureaplasma urealyticum<br />

Les mycoplasmes sont les plus petites bactéries, caractérisées<br />

par leur absence de paroi. Elles sont fréquemment présentes à<br />

l’état commensal chez l’homme dans les voies génitales.<br />

Certaines seulement ont un pouvoir pathogène confirmé chez<br />

le sujet immunocompétent (Mycoplasma genitalium et Ureaplasma<br />

urealyticum). En pratique, devant une urétrite<br />

aiguë, Mycoplasma genitalium n’est recherché qu’en cas d’échec<br />

du traitement de première intention alors qu’en cas d’urétrite<br />

chronique ou récidivante, la recherche de Mycoplasma genitalium<br />

et d’Ureaplasma urealyticum est recommandée. En effet, Mycoplasma<br />

genitalium serait impliqué dans près de 20 % des urétrites<br />

non gonococciques aiguës, mais également dans des urétrites<br />

chroniques avec écoulement ou récidivantes. Mycoplasma<br />

genitalium est identifiable uniquement par des techniques de<br />

PCR sur le premier jet d’urines ou sur le prélèvement urétral.<br />

Les porteurs asymptomatiques sont rares. La présence de Mycoplasma<br />

genitalium est fortement corrélée à la présence de<br />

polynucléaires dans l’urètre ou le premier jet d’urines. Pour<br />

Ureaplasma urealyticum, la seule méthode utilisable en pratique<br />

courante est la culture. Afin de distinguer infection et simple<br />

colonisation, on se base sur des critères quantitatifs et seuls les<br />

mycoplasmes présents en grande quantité (supérieure à<br />

10 3 unités changeant la couleur/ml sur le premier jet d’urines)<br />

sont pris en considération.<br />

Rappelons que Mycoplasma hominis n’est pas responsable<br />

d’urétrite masculine.<br />

Autres micro-organismes<br />

Des bactéries habituellement non pathogènes peuvent exceptionnellement<br />

être responsables d’urétrite : ainsi Haemophilus<br />

influenzae, Haemophilus parainfluenzae, Staphylococcus saprophyticus,<br />

Streptococcus milleri et Bacteroides ureolyticus. De même, les<br />

streptocoques B, les méningocoques et Escherichia coli peuvent<br />

rarement être responsables d’urétrite. Il s’agit toujours d’une<br />

découverte fortuite sur les résultats des cultures bactériennes<br />

réalisées en cas de bilan exhaustif. Le traitement antibiotique<br />

doit être adapté à l’antibiogramme.<br />

Même dans les meilleurs laboratoires, avec des recherches<br />

microbiologiques réalisées dans de bonnes conditions, près de<br />

35 % des urétrites avec écoulement et jusqu’à 50 % des urétrites<br />

sans écoulement [9] sont inexpliqués.<br />

■ Complications des urétrites<br />

En l’absence de diagnostic et de traitement, l’urétrite à<br />

Neisseria gonorrhoeae peut se compliquer de prostatite aiguë,<br />

d’orchiépididymite aiguë, voire de septicémie subaiguë. La<br />

prostatite est surtout une complication de Neisseria gonorrhoeae.<br />

Les complications basses sont la cowpérite, les abcès de part et<br />

d’autre du frein du prépuce pouvant se fistuliser (improprement<br />

connus sous le nom de tysonite) et la balanite. La conjonctivite<br />

Urologie<br />

gonococcique n’est que le reflet du manuportage. La problématique<br />

pour l’urétrite gonococcique est l’évolution constante de<br />

la sensibilité de Neisseria gonorrhoeae aux antibiotiques nécessitant<br />

une actualisation régulière des recommandations thérapeutiques.<br />

La complication la plus fréquente de l’urétrite à<br />

Chlamydia trachomatis est l’orchiépididymite aiguë, probablement<br />

en raison de la forte prévalence des infections à Chlamydia<br />

trachomatis et de leur caractère fréquemment asymptomatique.<br />

De50%à75%desorchiépididymites du sujet jeune sont dus<br />

à Chlamydia trachomatis. Le syndrome de Fiessinger-Leroy-<br />

Reiter est une complication classique. Les conséquences sur la<br />

fertilité masculine sont hypothétiques ; en revanche, les<br />

complications hautes chez la femme sont majeures et vont de<br />

la salpingite et de l’endométrite à la stérilité tubaire. De façon<br />

exceptionnelle, Trichomonas vaginalis peut être responsable de<br />

prostatite.<br />

■ Conduite à tenir<br />

Interrogatoire<br />

L’interrogatoire recherche tous les signes pouvant orienter le<br />

diagnostic et les examens complémentaires : sexualité (nombre<br />

de partenaires, utilisation de préservatifs, rapports orogénitaux,<br />

hétéro- ou homosexualité), présence d’un écoulement urétral et<br />

type de l’écoulement (spontané ou provoqué, clair ou purulent,<br />

douloureux ou indolore, intermittent ou permanent, date<br />

d’apparition), signes fonctionnels associés (brûlures mictionnelles,<br />

pollakiurie, dysurie, prurit canalaire, fièvre, douleur périnéale<br />

ou scrotale, arthralgies). La chronologie permet de<br />

distinguer l’urétrite aiguë datant de moins de 3 semaines de<br />

l’urétrite subaiguë ou chronique. La durée supposée de l’incubation<br />

permet de se faire une idée du micro-organisme en<br />

cause. L’heure de la dernière miction permet d’évaluer la<br />

rentabilité des examens complémentaires. Enfin, l’interrogatoire<br />

général recherche les antécédents généraux et d’infections<br />

sexuellement transmissibles, les traitements pris ou en cours, en<br />

particulier antibiotique, la notion d’allergie médicamenteuse.<br />

Examen clinique<br />

L’examen clinique est systématique : recherche des caractéristiques<br />

de l’écoulement, d’une méatite, d’adénopathies inguinales,<br />

de signe de prostatite (fièvre, toucher rectal), de signe<br />

d’orchiépididymite (fièvre, palpation des bourses), de signes<br />

d’une autre infection sexuellement transmissible.<br />

Examens complémentaires<br />

Prélèvements locaux<br />

Prise en charge des urétrites 18-690-A-12<br />

Dans la mesure du possible, des examens complémentaires<br />

doivent être réalisés si l’on dispose d’un laboratoire performant<br />

et que l’on n’est pas limité par le coût [10, 11] . Un bilan minimal<br />

est toujours souhaitable, mais une simple prise en charge<br />

syndromique sans aucun examen complémentaire est possible<br />

(Fig. 2). Le bilan minimal comprend uniquement le frottis sur<br />

lame de l’écoulement urétral à la recherche de Neisseria gonorrhoeae.<br />

Les prélèvements locaux doivent être réalisés dans de<br />

bonnes conditions, à savoir avant tout traitement antibiotique<br />

et chez un patient n’ayant pas uriné depuis au moins 3 heures,<br />

l’idéal étant avant la première miction matinale.<br />

Le bilan standard à réaliser comporte quatre prélèvements de<br />

l’écoulement et deux prélèvements urinaires :<br />

un premier prélèvement direct de l’écoulement pour frottis<br />

sur lame colorée au bleu de méthylène ou au Gram pour<br />

recherche de diplocoques à Gram négatif extra- et surtout<br />

intracellulaires et pour compte des polynucléaires par grand<br />

champ (résultat immédiat) ; ce prélèvement peut se faire au<br />

choix avec un écouvillon de coton ou une anse en plastique.<br />

En cas de présence de Neisseria gonorrhoeae sur le frottis<br />

urétral, il est souhaitable de réaliser, chez l’homme homosexuel,<br />

un prélèvement anal et de gorge à l’écouvillon de<br />

coton pour culture de Neisseria gonorrhoeae ;<br />

3


18-690-A-12 Prise en charge des urétrites<br />

Avec<br />

écoulement<br />

Recherche de diplocoques<br />

à Gram négatif<br />

Non réalisé Présence Absence<br />

Traitement<br />

antigonocoque<br />

et antichlamydien<br />

Traitement<br />

antichlamydien<br />

trois autres prélèvements de l’écoulement pour mise en<br />

culture sur gélose chocolat avec et sans antibiotiques sélectifs<br />

(isolement de Neisseria gonorrhoeae et de germes banals) et sur<br />

gélose au sang (isolement de streptocoques) qui se font avec<br />

un écouvillon de coton ou d’alginate. Ces prélèvements<br />

permettent de confirmer le diagnostic en isolant l’agent<br />

responsable, de réaliser un antibiogramme indispensable pour<br />

une éventuelle adaptation du traitement probabiliste en cas<br />

d’échec thérapeutique et de surveiller l’épidémiologie des<br />

urétrites.<br />

En l’absence d’écoulement urétral, il n’est pas souhaitable<br />

d’effectuer ces prélèvements. En effet, un prélèvement endourétral<br />

sur un urètre sec est un examen douloureux, voire<br />

traumatique (saignement) qui est peu rentable et peu informatif.<br />

Les examens urinaires sont :<br />

un examen du premier jet d’urines centrifugées, effectué pour<br />

numération des leucocytes et recherche de Chlamydia trachomatis<br />

et Neisseria gonorrhoeae par PCR ;<br />

un examen du deuxième jet urinaire pour tests leucocytaires<br />

estérasiques avec, si la bandelette est positive, un examen<br />

cytobactériologique des urines (ECBU).<br />

Les examens urinaires sont systématiques, qu’il y ait ou pas<br />

d’écoulement urétral.<br />

Dans un deuxième temps et en cas d’échec du premier<br />

traitement, en général au bout de 1 semaine à la visite de<br />

contrôle, sont réalisés :<br />

un prélèvement direct de l’écoulement à l’écouvillon de<br />

coton pour examen à l’état frais entre lame et lamelle dans<br />

une goutte de sérum physiologique pour recherche de Trichomonas<br />

vaginalis mobiles ;<br />

un prélèvement endo-urétral avec un écouvillon en plastique<br />

Bactopick ® pour recherche de Mycoplasma genitalium par PCR.<br />

Il s’agit d’une tige en plastique, terminée par une extrémité<br />

en olive de 5 mm de diamètre et 10 mm de long. Cette olive<br />

Urétrite<br />

Visite de contrôle<br />

à j7<br />

Guérison Non-guérison<br />

Positive<br />

ECBU<br />

Traitement<br />

adapté<br />

Adaptation du traitement à l’antibiogramme<br />

ou prélèvements complémentaires<br />

est gravée, en spirale, sur toute sa longueur d’une gorge<br />

d’environ 1/2 mm de profondeur. Délicatement, on introduit<br />

l’olive de 1 à 2 cm dans l’urètre et on fait tourner, 2 ou<br />

3 fois, la tige sur elle-même. On ressort l’olive qui se détache<br />

très facilement par simple pression sur le point de séparation<br />

tige-olive et on la « décharge » dans le milieu de transport.<br />

Les prélèvements doivent également être systématiques chez<br />

les partenaires sexuels. Alors que chez l’homme la PCR dans le<br />

premier jet d’urines est le seul test utilisable en pratique pour<br />

la recherche de Chlamydia trachomatis, il faut noter l’intérêt chez<br />

la femme de l’autoprélèvement vaginal par écouvillonnage qui<br />

est aussi bien accepté que le recueil du premier jet d’urines et<br />

qui est de plus recommandé dans les enquêtes de dépistage car<br />

il est moins coûteux et plus sensible.<br />

Prélèvements généraux<br />

Les sérologies de la syphilis avec Treponema pallidum haemagglutination<br />

assay (TPHA) et venereal disease research laboratory<br />

(VDRL), du VIH et des hépatites sont réalisées en tenant compte<br />

de leur chronologie respective et de la présence ou de l’absence<br />

de vaccination pour l’hépatite B. La sérologie de Chlamydia est<br />

inutile pour le diagnostic d’une urétrite chez l’homme.<br />

■ Traitement<br />

Sans<br />

écoulement<br />

Bandelette leucocytaire<br />

estérasique sur les urines<br />

de milieu de miction<br />

Négative<br />

Traitement<br />

antichlamydien<br />

Figure 2. Arbre décisionnel. Conduite à tenir devant une urétrite selon la présence ou l’absence d’écoulement. ECBU : examen cytobactériologique des<br />

urines.<br />

Le traitement antibiotique probabiliste doit être débuté<br />

aussitôt après les prélèvements sans attendre le résultat des<br />

différentes cultures (Fig. 2). Les dernières recommandations<br />

thérapeutiques en France sont résumées dans le Tableau 1 [12-<br />

14] . La spectinomycine fait toujours partie des recommandations<br />

de traitement de la gonococcie en deuxième intention ; pourtant,<br />

elle n’est en pratique plus disponible en France. Les<br />

fluoroquinolones ne peuvent plus être recommandées comme<br />

4 Urologie


Tableau 1.<br />

Tableau récapitulatif du traitement probabiliste des urétrites.<br />

traitement probabiliste en raison du taux élevé de résistance du<br />

gonocoque à la ciprofloxacine. Les co-infections Neisseria<br />

gonorrhoeae et Chlamydia trachomatis étant fréquentes, en cas de<br />

suspicion ou de présence de Neisseria gonorrhoeae, un double<br />

traitement anti-Neisseria gonorrhoeae et anti-Chlamydia trachomatis<br />

est systématique. Le patient doit être informé qu’il doit<br />

revenir en consultation si les symptômes persistent au 3 e jour<br />

pour adapter le traitement à l’antibiogramme, et de façon<br />

systématique au 7 e jour pour vérifier la guérison clinique et<br />

donner les résultats des cultures et sérologies.<br />

■ Prévention et dépistage<br />

L’établissement d’un dialogue entre le praticien et son patient<br />

permet de rappeler les messages de prévention contre les<br />

comportements sexuels à risque, d’encourager l’utilisation<br />

systématique du préservatif et d’informer sur les complications<br />

potentielles des urétrites en insistant sur le fait que comme<br />

toutes les infections sexuellement transmissibles (IST), elles<br />

favorisent la transmission du VIH. La notion de symptômes<br />

chez les partenaires et la possibilité de les traiter permet de<br />

rompre la chaîne de contamination. Pour l’urétrite à Chlamydia<br />

trachomatis, l’existence de nombreux sujets asymptomatiques<br />

constituant un réservoir important de transmission est responsable<br />

de la dissémination silencieuse de l’infection avec des<br />

conséquences graves chez les jeunes femmes. Le dépistage et le<br />

traitement des patients asymptomatiques pour Chlamydia<br />

trachomatis sont donc essentiels afin de rompre la chaîne de<br />

contamination et d’éviter la stérilité tubaire des partenaires<br />

féminines.<br />

■ Conclusion<br />

On assiste actuellement à un relâchement de la protection<br />

contre les infections sexuellement transmissibles et donc à une<br />

recrudescence des urétrites, en particulier à gonocoque, chez les<br />

homosexuels masculins séropositifs pour le VIH et pratiquant le<br />

sexe oral sans protection.<br />

Les infections à Chlamydia trachomatis restent une préoccupation<br />

majeure de santé publique du fait des conséquences<br />

humaines (salpingite et stérilité féminine) et financières. Le<br />

problème majeur reste le dépistage et le traitement des hommes<br />

asymptomatiques.<br />

Il faut prendre en charge rapidement les urétrites et les traiter<br />

sans attendre les résultats des examens complémentaires afin de<br />

soulager les patients, d’empêcher les complications et de rompre<br />

la chaîne de contamination. L’éducation des patients en matière<br />

d’infections sexuellement transmissibles doit rester une priorité<br />

absolue.<br />

Traitement de première intention Traitement de deuxième intention<br />

Urétrite à Neisseria gonorrhoeae Ceftriaxone (Rocéphine ® ) 500 mg intramusculaire dose<br />

unique<br />

Traitement antichlamydien systématique<br />

Urétrite à Chlamydia trachomatis Doxycycline 100 mg x 2/j per os pendant 7 j<br />

ou azithromycine (Zithromax ® ) 1 g per os dose unique<br />

Urétrite à Trichomonas vaginalis Métronidazole (Flagyl ® ) 2 g per os en prise unique ou<br />

tinidazole (Fasigyne ® )<br />

Urétrite à Mycoplasma genitalium Zithromax ® per os 500 mg le premier jour puis 250 mg/j les<br />

4 j suivants<br />

Autre micro-organisme Antibiotique selon l’antibiogramme<br />

Urologie<br />

.<br />

En cas de refus ou d’impossibilité d’administrer un<br />

traitement parentéral : céfixime (Oroken ® ) 400 mg per os<br />

dose unique<br />

En cas d’allergie aux bêtalactamines : spectinomycine<br />

(Trobicine ® ) 2 g intramusculaire dose unique<br />

■ Références<br />

Traitement antichlamydien systématique<br />

Érythromycine1gx2/jperospendant 7 j<br />

ou ofloxacine (Oflocet ® ) 300 mg x 2/j per os pendant 7 j<br />

“ Point fort<br />

Prise en charge des urétrites 18-690-A-12<br />

Les micro-organismes les plus fréquemment<br />

responsables d’urétrite sont Neisseria gonorrhoeae et<br />

Chlamydia trachomatis. Ils doivent être systématiquement<br />

recherchés et traités.<br />

Trichomonas vaginalis et mycoplasmes peuvent être<br />

recherchés dans un deuxième temps en cas d’échec du<br />

premier traitement antichlamydien et antigonocoque.<br />

L’examen direct de l’écoulement permet d’orienter très<br />

vite le diagnostic d’urétrite à Neisseria gonorrhoeae et ne<br />

doit jamais être négligé (présence ou absence de<br />

diplocoques à Gram négatif).<br />

Un traitement présomptif doit être systématiquement<br />

administré en urgence sans attendre les résultats des<br />

examens complémentaires.<br />

Le traitement probabiliste antigonococcique repose sur<br />

la ceftriaxone. La spectinomycine est utilisée en cas de<br />

contre-indication aux bêtalactamines et le céfixime en cas<br />

de refus ou d’impossibilité d’administrer un traitement par<br />

voie parentérale. Un traitement anti-Chlamydia doit être<br />

systématiquement associé.<br />

Les complications potentielles des urétrites à Chlamydia<br />

trachomatis sur la fertilité féminine doivent être<br />

expliquées.<br />

[1] Wald ER, Woodward CL, Marston G, Gilbert LM. Gonorrheal disease<br />

among children in a university hospital. Sex Transm Dis 1980;7:41-3.<br />

[2] Chambers CV, Shafer MA, Adger H, Ohm-Smith M, Millstein SG,<br />

Irwin CE, et al. Microflora of the urethra in adolescent boys:<br />

relationships to sexual activity and non-gonococcal urethritis. J Pediatr<br />

1987;110:314-21.<br />

[3] Fox KK, Del Rio C, Holmes KK, Hook EW, Judson FN, Knapp JS, et al.<br />

Gonorrhea in the HIV era: a reversal in trends among men who have sex<br />

with men. Am J Public Health 2001;91:959-64.<br />

[4] Gallay A, Bouyssou-Michel A, Lassau F, Basselier B, Sednaoui P et les<br />

laboratoires du réseau Renago. Les infections à Neisseria gonorrhoeae<br />

en France en 2006. Progression importante chez les femmes et augmentation<br />

importante des résistances à la ciprofloxacine. Bull Épidémiol<br />

Hebd 2008;(n°5-6):33-6.<br />

[5] Goulet V, Laurent E et les biologistes du réseau Rénachla. Augmentation<br />

des diagnostics d’infections à Chlamydia trachomatis en France :<br />

analyse des données Rénachla de 2003 à 2006. Bull Épidémiol Hebd<br />

2008;(n°5-6):42-6.<br />

5


18-690-A-12 Prise en charge des urétrites<br />

[6] ANAES. Évaluation du dépistage des infections uro-génitales basses à<br />

Chlamydia trachomatis en France, février 2003.<br />

[7] Lindan C, Mathur M, Kumta S, Jerajani H, GogateA, Schachter J, et al.<br />

Utility of pooled urine specimens for detection of<br />

Chlamydia trachomatis and Neisseria gonorrhoeae in men attending<br />

public sexually transmitted infection clinics in Mumbai, India, by PCR.<br />

J Clin Microbiol 2005;43:1674-7.<br />

[8] Wiesenfeld HC, Uhrin M, Dixon BW, Sweet RL. Diagnosis of male<br />

Chlamydia trachomatis urethritis by polymerase chain reaction. Sex<br />

Transm Dis 1994;21:268-71.<br />

[9] Janier M, Lassau F, Casin I, Grillot P, Scieux C, Zavaro A, et al. Male<br />

urethritis with and without discharge: a clinical and microbiological<br />

study. Sex Transm Dis 1995;22:244-52.<br />

[10] Janier M. Conduite à tenir devant une urétrite masculine. Ann Dermatol<br />

Venereol 1996;123:349-60.<br />

[11] Section MST de la Société française de dermatologie. Recommandations<br />

générales pour la prise en charge des MST. Ann Dermatol<br />

Vénéréol 2006;133:2S7.<br />

[12] Recommandations de l’AFSSAPS. Traitement antibiotique<br />

probabiliste des urétrites et cervicites non compliquées, octobre 2008.<br />

[13] Dupin N, Janier M, Bouscarat F, Milpied B, Vexiau-Robert D, Dupuis<br />

F et la section MST de la SFD. Infection à Chlamydia trachomatis. Ann<br />

Dermatol Vénéréol 2006;133:2S13-4.<br />

[14] Halioua B, Lassau F, Janier M, Dupin N, Bouscarat F, Chartier CH et la<br />

section MST de la SFD. Gonococcie. Ann Dermatol Vénéréol 2006;<br />

133:2S11-2.<br />

Pour en savoir plus<br />

Saurat JH, Lachapelle JM, Lipsker D, Thomas L. Dermatologie et infections<br />

sexuellement transmissibles. 5e édition. Paris: Masson; 2009.<br />

Bunker CB. Dermatologie génitale masculine. Paris: Masson; 2005.<br />

Bélaïch S. Dermatologie et maladies sexuellement transmissibles. Le livre de<br />

l’interne. Paris: Flammarion; 2003.<br />

B. Chaine, Praticien attaché des hôpitaux (benedictechaine@yahoo.fr).<br />

M. Janier, Praticien hospitalier.<br />

Université Paris VII, Faculté de médecine Lariboisière-Saint-Louis, 10, avenue de Verdun, 75010 Paris, France.<br />

Centre clinique et biologique des maladies sexuellement transmissibles, Hôpital Saint-Louis, 42, rue Bichat, 75475 Paris cedex 10, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Chaine B., Janier M. Prise en charge des urétrites. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie,<br />

18-690-A-12, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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Autoévaluations<br />

6 Urologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Prostatites et épididymites<br />

V. Phé, M. Rouprêt<br />

La prostatite aiguë bactérienne est une maladie fréquente dont le diagnostic est aisé et repose sur une<br />

symptomatologie clinique évocatrice et un examen cytobactériologique des urines positif. Le traitement<br />

consiste en une antibiothérapie adaptée et prolongée. Les prostatites chroniques bactériennes sont de<br />

diagnostic moins facile car il est difficile de prouver l’origine prostatique de la colonisation. Enfin, les<br />

prostatites chroniques non bactériennes sont une entité mal définie qui pose un réel problème<br />

diagnostique et thérapeutique. Les épididymites correspondent par ailleurs à une inflammation de<br />

l’épididyme pouvant correspondre soit à une infection à uropathogènes communs et dont le traitement<br />

est similaire à celui des prostatites aiguës bactériennes, soit à une infection sexuellement transmissible<br />

dont le principal germe est Chlamydia trachomatis.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Prostatite ; Adénomite ; Bactéries ; Épididymite ; Infection sexuellement transmissible<br />

Introduction 1<br />

Terminologie 1<br />

Prostatites 2<br />

Étiopathogénie 2<br />

Prostatites aiguës à uropathogènes communs 3<br />

Prostatites chroniques récidivantes à uropathogènes communs 5<br />

Prostatites à germes non conventionnels 6<br />

Prostatodynie et douleurs pelviennes chroniques 6<br />

Prostatites inflammatoires asymptomatiques type IV 7<br />

Épididymites 7<br />

Mécanismes 8<br />

Germes 8<br />

Épididymites aiguës à uropathogènes communs 8<br />

Épididymites à Chlamydia trachomatis 9<br />

Conclusion 10<br />

■ Introduction<br />

Les prostatites et épididymites sont des pathologies fréquentes<br />

et épidémiologiquement liées. On recouvre sous le terme de<br />

« prostatite » diverses pathologies infectieuses ou inflammatoires<br />

de la glande prostatique. Environ un homme sur dix a au moins<br />

une fois des symptômes évocateurs [1, 2] . La prostate est un<br />

carrefour anatomique entre les voies urinaires et les voies<br />

génitales de l’homme. Toute prostatite peut donc être la<br />

conséquence d’une contamination bactérienne de l’urètre, mais<br />

aussi d’une infection de tout l’appareil urinaire (vessie, uretères,<br />

reins). Le diagnostic de prostatite aiguë bactérienne doit être<br />

évoqué devant un tableau d’infection urinaire fébrile qui doit<br />

être explorée et traitée en conséquence par une antibiothérapie<br />

adaptée.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Les prostatites chroniques bactériennes sont de diagnostic<br />

moins facile.<br />

Les prostatites non infectieuses et les syndromes douloureux<br />

pelviens chroniques regroupent des cadres nosologiques variés<br />

et imprécis dont il n’y a pas de traitement simple et efficace. Ils<br />

peuvent regrouper des pathologies infectieuses prostatiques<br />

chroniques et/ou récidivantes, des pathologies inflammatoires<br />

prostatiques sans cause bactérienne évidente mais aussi des<br />

douleurs chroniques plus ou moins associées à des troubles<br />

fonctionnels pelvipérinéaux dont l’origine prostatique n’est pas<br />

évidente et des formes asymptomatiques purement histologiques<br />

et de découverte fortuite. La classification du National<br />

Institute of Health (NIH) [3] des prostatites est actuellement<br />

admise de manière consensuelle afin de distinguer ces différentes<br />

pathologies (Tableau 1).<br />

Les épididymites correspondent à une inflammation de<br />

l’épididyme. Elles peuvent être la complication directe d’une<br />

prostatite aiguë bactérienne ou alors, surtout de la puberté à<br />

35 ans, correspondre à une authentique infection sexuellement<br />

transmissible.<br />

■ Terminologie<br />

5-0670<br />

Afin d’utiliser les termes les plus appropriés, le Comité<br />

d’infectiologie de l’Association française d’urologie (CIAFU) a<br />

publié en 2007 une modification de la terminologie [1] . Les<br />

changements à prendre en compte sont les suivants :<br />

le terme « bactériurie asymptomatique » est remplacé par le<br />

terme « colonisation » ;<br />

l’appellation « infection urinaire » disparaît au profit de<br />

« infection de l’appareil urinaire » ;<br />

la dénomination « pyurie » est désormais remplacée par le<br />

terme « leucocyturie ».<br />

1


5-0670 Prostatites et épididymites<br />

Tableau 1.<br />

Classification des prostatites selon le National Institute of Diabetes and Digestive and Kidney Diseases (NIDDK)/National Institute of Health (NIH).<br />

Type<br />

I Prostatite aiguë Atteinte bactérienne aiguë de la prostate<br />

II Prostatite chronique bactérienne Atteinte infectieuse chronique ou récidivante dans<br />

la prostate<br />

III Syndrome douloureux pelvien chronique Pas d’atteinte infectieuse<br />

IIIA Syndrome douloureux pelvien chronique<br />

inflammatoire<br />

IIIB Syndrome douloureux pelvien chronique non<br />

inflammatoire<br />

■ Prostatites<br />

Étiopathogénie<br />

Mécanismes<br />

La voie essentielle de contamination prostatique est canalaire.<br />

Les germes colonisent l’urètre puis secondairement les canaux<br />

prostatiques pour atteindre les acini prostatiques. La réaction<br />

inflammatoire générée entraîne la formation de microabcès<br />

prostatiques qui peuvent par confluence aboutir à la formation<br />

d’un abcès prostatique clinique. La pénétration des germes dans<br />

les canaux prostatiques est clairement favorisée par les manœuvres<br />

endoscopiques ou par le sondage urinaire.<br />

Les autres voies de contamination, hématogène secondaire à<br />

une bactériémie ou lymphatique, sont exceptionnelles.<br />

Plusieurs facteurs peuvent aggraver une prostatite aiguë ou en<br />

favoriser la survenue : diabète, état d’immunodéficience, cancer<br />

sous chimiothérapie, insuffisance hépatique.<br />

Agents pathogènes en cause<br />

Les germes responsables des prostatites aiguës à uropathogènes<br />

communs et des prostatites bactériennes chroniques<br />

récidivantes sont ceux que l’on retrouve dans les infections<br />

urinaires (uropathogènes). Il peut s’agir :<br />

de bactéries à Gram négatif avec au premier plan Escherichia<br />

coli (80 %), mais aussi Klebsiella, Enterobacter, Proteus, Serratia,<br />

et Pseudomonas ; les autres entérobactéries (Klebsiella, Proteus,<br />

Enterobacter) représentent environ 10 % des cas alors que le<br />

groupe des Pseudomonas (pyocyanique et Serratia) est impliqué<br />

dans 0 % à 5 % des cas, correspondant aux infections<br />

hospitalières ;<br />

Présence de leucocytes dans les sécrétions<br />

prostatiques témoins d’une atteinte inflammatoire<br />

Pas de leucocytes dans les sécrétions prostatiques<br />

IV Prostatites asymptomatiques Découverte fortuite sur une histologie<br />

VB1<br />

Urines premier jet<br />

Colonisation<br />

urétrale<br />

VB2<br />

Urines milieu<br />

de miction<br />

Urines vésicales<br />

Massage prostatique<br />

EPS<br />

Sécrétions<br />

prostatiques<br />

VB3<br />

Fin de miction<br />

Colonisation<br />

prostatique<br />

Figure 1. Épreuve de Meares et Stamey. VB : voiding bladder ; EPS : expressed prostatic secretions.<br />

de bactéries à Gram positif, essentiellement Enterococcus<br />

faecalis, et possiblement Staphylococcus epidermidis et Corynebacterium<br />

seminale qui, bien qu’étant des saprophytes habituels<br />

de l’urètre antérieur, sont parfois retrouvés dans les<br />

sécrétions prostatiques.<br />

L’épidémiologie bactérienne est plus complexe pour les<br />

formes chroniques. Ce sont les bactéries à Gram positif qui sont<br />

largement majoritaires, E. coli ne représentant que 9 % de<br />

l’ensemble des germes.<br />

Parmi les germes sexuellement transmissibles, on peut citer<br />

Chlamydia trachomatis [4-6] mais il reste difficile à mettre en<br />

évidence. Les autres agents sont représentés par Mycoplasma<br />

hominis et Ureaplasma urealyticum, ainsi que par un protozoaire,<br />

Trichomonas vaginalis. Le gonocoque est surtout responsable<br />

d’urétrites.<br />

La pathogénicité des multiples germes mis en cause ne peut<br />

être reconnue que s’ils sont mis en évidence par la technique<br />

de Meares et Stamey.<br />

Comment faire les recherches bactériologiques ?<br />

Pour les prostatites aiguës à uropathogènes communs, les<br />

germes sont mis en évidence facilement dans l’urine (examen<br />

cytobactériologique des urines [ECBU]) et éventuellement dans<br />

le sang (hémocultures). Pour les autres prostatites, il est difficile<br />

de démontrer que ce sont bien les sécrétions prostatiques qui<br />

sont infectées et non pas l’urine vésicale ni l’urètre. Or, tous les<br />

prélèvements traversent l’urètre à moins de prélever par<br />

ponction transpérinéale, ce qui ne se fait pas en clinique<br />

courante.<br />

Pour cela, il faut recourir à la technique des prélèvements<br />

sélectifs fractionnés selon la techniques de Meares et Stamey [7]<br />

(Fig. 1).<br />

2 Traité de Médecine Akos


Prostatite aiguë simple<br />

Traitement<br />

ambulatoire<br />

Fièvre, dysurie, brûlures mictionnelles, pollakiurie, prostate sensible au toucher rectal<br />

Terrain<br />

compliqué<br />

Signes sévères<br />

de sepsis<br />

Antibiothérapie > 3 semaines<br />

Repos, antalgiques, antipyrétiques<br />

Recherche d’IST, abstinence<br />

Bilan urologique étiologique à distance<br />

Le test est contre-indiqué en cas de poussée aiguë ou subaiguë<br />

en raison du risque de bactériémie. Sa réalisation est bien<br />

codifiée.<br />

Il faut faire venir le patient à vessie pleine, 3 jours après la<br />

dernière éjaculation, le décalotter le cas échéant et désinfecter<br />

le méat, prélever 10 ml du début de la miction (urine urétrale,<br />

voiding bladder [VB1]), puis 10 ml du milieu de la miction (urine<br />

vésicale [VB2]), faire un massage prostatique et prélever les<br />

quelques gouttes de sécrétions prostatiques obtenues (expressed<br />

prostatic secretions [EPS]), puis prélever 10 ml d’urine postmassage<br />

prostatique (VB3) et réfrigérer les quatre tubes. Ensuite,<br />

il faut faire analyser avec un compte des leucocytes et des<br />

colonies ainsi qu’une analyse microbiologique complète recherchant<br />

les uropathogènes communs, les bactéries intracellulaires<br />

et Trichomonas vaginalis ; Chlamydia trachomatis est le germe<br />

pathogène le plus souvent impliqué dans les infections sexuellement<br />

transmissibles. L’utilisation de la polymerase chain<br />

reaction (PCR) sur VB1 et EPS est un progrès mais elle n’élimine<br />

pas la possibilité d’une contamination urétrale. En effet, le taux<br />

de responsabilité de C. trachomatis varie selon les séries de 0 %<br />

à 40 %. Les sérologies sont inutiles en raison des chevauchements<br />

avec les autres formes de Chlamydiae.<br />

La comparaison, dans les différents prélèvements, des comptes<br />

de leucocytes, et des colonies de germes, permet de localiser<br />

l’infection qui doit être significativement plus importante dans<br />

le liquide d’expression prostatique et dans l’urine post-massage<br />

prostatique que dans l’urine de début et de milieu de jet. Il reste<br />

toutefois à préciser le degré de pathogénicité de ces germes et<br />

leur rôle dans la symptomatologie de prostatite chronique. Cela<br />

nécesite des études comparant de très grandes cohortes de<br />

patients et de témoins sains. La spermoculture qui analyse<br />

ECBU +<br />

Recherche de complications<br />

Rétention<br />

aiguë d’urine<br />

Oui<br />

Cathéter sus-pubien<br />

en l’absence<br />

de contre-indication<br />

Hospitalisation<br />

surtout le liquide des vésicules séminales et non pas les sécrétions<br />

prostatiques est utilisée si le massage prostatique est<br />

infructueux, en tenant compte du fait que l’éjaculat traverse<br />

l’urètre.<br />

L’écouvillonnage de l’urètre antérieur est utile pour le<br />

diagnostic des urétrites. Sa positivité, par exemple à Chlamydia,<br />

peut constituer un élément de présomption. Les sérologies de<br />

Chlamydia peuvent être positives dans les infections anciennes<br />

et ne sont pas le reflet de l’état actuel.<br />

Comme on peut le voir, les choses ne sont pas simples et il<br />

est nécessaire de choisir un laboratoire motivé avant d’interpréter<br />

les résultats. Le test de Stamey devant une clinique évocatrice<br />

n’est positif que dans 10 % des cas. C’est-à-dire que 90 %<br />

des patients ayant un tableau clinique évocateur de prostatite<br />

chronique n’ont pas d’infection ou que nous sommes incapables<br />

de mettre en évidence [8] .<br />

Prostatites aiguës à uropathogènes<br />

communs (Fig. 2)<br />

Clinique<br />

NFS, créatininémie,<br />

hémocultures si T > 38,5 °C<br />

Orchiépididymite Abcès<br />

prostatique<br />

Doute avec une torsion<br />

du cordon spermatique ?<br />

Non Oui<br />

Exploration<br />

chirurgicale<br />

en urgence<br />

Pas de torsion<br />

Échographie<br />

prostatique<br />

Drainage<br />

de l’abcès<br />

Figure 2. Arbre décisionnel. Conduite à tenir devant une prostatite aiguë bactérienne. ECBU : examen cytobactériologique des urines ; NFS : numération<br />

formule sanguine ; IST : infection sexuellement transmissible.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Prostatites et épididymites 5-0670<br />

Une prostatite aiguë se traduit par un syndrome fébrile de<br />

début brutal : température à 40 °C, frissons, céphalées, myalgies<br />

; associé à des symptômes mictionnels : pollakiurie, brûlures,<br />

miction difficile ou impossible. Les signes mictionnels<br />

localisent l’infection au bas appareil urinaire. Ils peuvent être<br />

très discrets et passer inaperçus, la maladie étant alors confondue<br />

avec un syndrome grippal. Les myalgies pararachidiennes<br />

3


5-0670 Prostatites et épididymites<br />

sont souvent confondues avec une douleur rénale et le diagnostic<br />

de pyélonéphrite est porté à tort. La pyélonéphrite chez<br />

l’homme est exceptionnelle.<br />

Le toucher rectal est douloureux et retrouve une prostate<br />

chaude, œdématiée, sensible, mais il peut être normal. L’examen<br />

physique s’attache également à rechercher un globe<br />

vésical, des signes d’épididymite ou d’orchiépididymite associée.<br />

Il peut exister des douleurs pelviennes, périnéales, urétrales,<br />

péniennes, parfois rectales. Un tableau d’infection urinaire<br />

fébrile chez l’homme doit faire évoquer en premier lieu le<br />

diagnostic de prostatite aiguë. Le diagnostic peut être moins<br />

évident dans les formes atypiques avec un syndrome infectieux<br />

prédominant, des signes urinaires prédominants ou l’absence de<br />

douleur prostatique au toucher rectal.<br />

L’examen d’urine à la bandelette montre des nitrites, des<br />

leucocytes et du sang, ce qui suffit au diagnostic.<br />

Examens complémentaires<br />

L’ECBU formel, prélevé en même temps, montre une leucocyturie,<br />

identifie et teste le germe. Dans les cas où l’ECBU ne<br />

montre pas de bactériurie, des cultures sur milieux spécifiques<br />

doivent être réalisées, recherchant certains agents pathogènes<br />

parfois responsables (Chlamydia, Ureaplasma urealyticum, mycoses),<br />

permettant d’adapter le traitement, souvent de manière<br />

différée (techniques de culture particulières).<br />

À part l’ECBU, aucun examen paraclinique n’est nécessaire à<br />

ce stade.<br />

Néanmoins, en fonction de la gravité du syndrome infectieux,<br />

la numération formule sanguine, un ionogramme sanguin,<br />

la créatininémie peuvent être demandés.<br />

Les hémocultures réalisées en cas de syndrome infectieux<br />

sévère, peuvent être positives, traduisant la bactériémie.<br />

Le massage prostatique est déconseillé car il est douloureux et<br />

dissémine les germes.<br />

Le dosage du prostate specific antigen (PSA), s’il est réalisé, est<br />

constamment augmenté mais cette élévation ne constitue en<br />

rien un critère diagnostique. Le taux se normalise en quelques<br />

semaines parallèlement à la guérison clinique.<br />

Aucun examen d’imagerie n’est utile en première intention<br />

en l’absence de signe de complication. L’échographie transrectale<br />

de la prostate est douloureuse et n’apporte rien. L’échographie<br />

rénale est normale et élimine une obstruction du haut<br />

appareil urinaire si un diagnostic de pyélonéphrite a été porté.<br />

Une prostatite est dite « non compliquée » ou « simple » s’il<br />

n’y a pas :<br />

de signe de gravité de l’infection ;<br />

d’anomalie fonctionnelle, anatomique ou pathologique de<br />

l’appareil urinaire et notamment sans rétention vésicale ;<br />

d’intervention ou d’acte récent ou récidivant ;<br />

de maladie en cours modifiant le système immunitaire.<br />

Dans tous les autres cas, la prostatite est dite « compliquée ».<br />

Complications<br />

Rétention aiguë d’urine<br />

Il s’agit d’une complication fréquente, parfois inaugurale. Le<br />

traitement repose sur un drainage des urines par un cathéter suspubien,<br />

toute manœuvre endo-urétrale étant contre-indiquée.<br />

Épididymite aiguë<br />

Il s’agit d’une association fréquente à rechercher<br />

systématiquement.<br />

Abcès prostatique<br />

Rare depuis l’utilisation des antibiotiques, il se rencontre<br />

essentiellement sur des terrains à risque tel que le diabète,<br />

l’immunodépression (virus de l’immunodéficience humaine<br />

[VIH], traitements immunosuppresseurs), l’hémodialyse<br />

chronique.<br />

Escherichia coli est le plus souvent en cause (70 %), et plus<br />

rarement les autres bacilles à Gram négatif ou le staphylocoque<br />

doré. Les abcès à germes anaérobies sont particulièrement<br />

graves.<br />

Sur le plan clinique, il s’agit typiquement d’une prostatite<br />

aiguë dont la symptomatologie et/ou le syndrome infectieux<br />

“ Point fort<br />

Recommandations actualisées pour la prise en<br />

charge de la prostatite aiguë<br />

Toute infection fébrile chez l’homme doit être a priori<br />

considérée comme une prostatite aiguë.<br />

Les pyélonéphrites aiguës bactériennes communautaires<br />

de l’homme sont exceptionnelles.<br />

Devant toute suspicion de prostatite bactérienne aiguë<br />

(PBA), la réalisation d’un examen cytobactériologique<br />

urinaire (ECBU) s’impose (A-II).<br />

Un ECBU négatif (sans prise d’antibiotique avant le<br />

prélèvement), ce qui est rare, n’élimine pas le diagnostic,<br />

néanmoins une évaluation complémentaire s’impose à la<br />

recherche d’un diagnostic différentiel de la PBA.<br />

Il est recommandé de faire une échographie pelvienne<br />

post-mictionnelle permettant de détecter une rétention<br />

vésicale nécessitant un geste de drainage (A-II).<br />

Sa réalisation est souhaitable dans les meilleurs délais (au<br />

mieux dans les 24 heures) en l’absence de signes de<br />

gravité.<br />

Ce bilan s’impose en urgence en présence de signes de<br />

gravité ou en cas d’évolution anormale dans les heures qui<br />

suivent le diagnostic clinique de PBA (A-III).<br />

Le dosage du PSA n’est pas recommandé. Une élévation<br />

transitoire de la concentration sanguine du PSA est<br />

habituelle mais inconstante (60 %) (D-III).<br />

Les prostatites bactériennes aiguës simples, avec des<br />

conditions médicosociales favorables, relèvent d’une prise<br />

en charge ambulatoire.<br />

Dans les autres cas, une hospitalisation est recommandée<br />

(A-II).<br />

La durée du traitement reste discutée.<br />

Il existe plutôt actuellement un consensus pour un<br />

traitement long de3à6semaines, pour ne pas laisser dans<br />

la prostate des foyers non désinfectés, source de récidives<br />

ultérieures (C-III).<br />

Le traitement préventif des partenaires sexuels n’est pas<br />

nécessaire en cas d’uropathogènes.<br />

persistent malgré une antibiothérapie bien conduite. La fièvre<br />

manque dans 50 % des cas et les symptômes rectaux dans 20 %<br />

des cas. La perception d’une masse douloureuse et fluctuante au<br />

toucher rectal est inconstante.<br />

Par ailleurs, les urines sont stériles une fois sur deux. C’est<br />

donc un diagnostic auquel il faut penser chaque fois que<br />

l’antibiothérapie a une efficacité incomplète. L’examen clé est<br />

l’échographie endorectale. L’abcès se présente au début comme<br />

une zone hypoéchogène, puis devient franchement transsonique<br />

au stade de collection, avec parfois renforcement postérieur<br />

(aspect de kyste) quand le contenu est parfaitement liquidien.<br />

Ailleurs, il s’agit d’une zone arrondie, hétérogène, à contenu<br />

principalement liquidien et coque épaisse évoquant une nécrose<br />

tissulaire. Il peut être unique ou multiple. Certains ont proposé<br />

la tomodensitométrie (TDM) prostatique qui apporte des<br />

renseignements superposables. Le traitement repose sur une<br />

ponction échographique de l’abcès ou un drainage chirurgical.<br />

Septicémie<br />

Elle est parfois au premier plan. La recherche systématique<br />

d’une prostatite permet alors d’en préciser l’origine. Ailleurs, la<br />

septicémie survient après manœuvre endo-urétrale (sondage ou<br />

endoscopie) chez un malade porteur de prostatite ou après<br />

biopsies prostatiques. Ces manœuvres sont donc à proscrire, et<br />

un drainage sus-pubien doit être préféré en cas de rétention<br />

vésicale.<br />

4 Traité de Médecine Akos


.<br />

Récidive de prostatite aiguë, prostatite chronique<br />

Diagnostic différentiel. Il faut reconnaître l’infection<br />

urinaire devant un syndrome grippal en recherchant, par<br />

l’interrogatoire, des signes mictionnels parfois discrets et en<br />

faisant un examen d’urine à la bandelette.<br />

Il faut éliminer une pyélonéphrite qui est rare chez l’homme<br />

et ne se voit qu’en cas de pathologie urologique obstructive ou<br />

malformative.<br />

S’ilyaundoute, après l’échographie rénale, il convient de<br />

réaliser un uroscanner, c’est-à-dire un scanner rénal avec<br />

injection d’iode suivi de quelques clichés d’urographie.<br />

Traitement<br />

Hospitalisation ou traitement ambulatoire ?<br />

Les prostatites aiguës bactériennes simples avec des conditions<br />

médicosociales favorables relèvent d’un traitement<br />

ambulatoire. Les prostatites aiguës représentent 9 % des urgences<br />

infectieuses de l’hôpital. En cas de prostatite compliquée,<br />

une hospitalisation s’impose. Elle est donc indiquée en cas de<br />

signes infectieux sévères, de complication ou si le patient est<br />

immunodéprimé.<br />

Traitement antibiotique<br />

Choix de l’antibiotique. Les antibiotiques de choix sont les<br />

fluoroquinolones systémiques (ofloxacine, péfloxacine, ciprofloxacine,<br />

lévofloxacine) [9] dont la pénétration dans le parenchyme<br />

prostatique est excellente et donc la concentration dans<br />

le liquide prostatique optimale, qui sont actives à la fois sur la<br />

plupart des uropathogènes rencontrés et sur les bactéries<br />

intracellulaires, et qui peuvent se donner per os avec des effets<br />

secondaires rares.<br />

Le traitement probabiliste doit être débuté après le prélèvement<br />

sans en attendre le résultat.<br />

Par exemple : ofloxacine 200 mg × 2/j, péfloxacine 400 mg × 2/j,<br />

ciprofloxacine 500 mg × 2/j, lévofloxacine 500 mg 1 cp/j. La<br />

norfloxacine est à éviter en raison d’une diffusion tissulaire faible.<br />

En cas de contre-indication aux fluoroquinolones (allergie,<br />

utilisation récente) une céphalosporine de troisième génération<br />

(ceftriaxone, céfotaxime) est recommandée.<br />

En cas de bactériémie grave, un second antibiotique peut être<br />

associé, soit une céphalosporine de troisième génération, soit un<br />

aminoside, pendant 3à5jours. Le triméthoprime contenu dans<br />

l’association triméthoprime/sulfaméthoxazole est un choix<br />

possible, en se souvenant des effets indésirables et de la<br />

résistance actuelle de 40 % des entérobactéries.<br />

Les macrolides et certaines cyclines comme la minocycline<br />

diffusent bien, mais les bactéries à Gram négatif y sont rarement<br />

sensibles, ces antibiotiques trouvant leur intérêt dans les<br />

infections à bactéries intracellulaires.<br />

Durée du traitement antibiotique. L’antibiothérapie doit<br />

être prolongée pendant 3 à 6 semaines pour éviter les récidives.<br />

Elle est secondairement adaptée à l’antibiogramme.<br />

“ Point important<br />

Conduite à tenir devant un ECBU positif sans fièvre<br />

Les bactériuries asymptomatiques ne doivent pas<br />

conduire à un traitement antibiotique sauf dans certaines<br />

situations :<br />

par exemple pour une femme enceinte, ou avant un<br />

geste diagnostique ou thérapeutique concernant<br />

l’appareil urinaire ;<br />

en cas de symptômes, c’est-à-dire de signes<br />

fonctionnels urinaires tels que la dysurie, la pollakiurie, les<br />

brûlures mictionnelles, même en l’absence de fièvre, le<br />

traitement est recommandé.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Mesures associées<br />

Les antalgiques, les antipyrétiques, la réhydratation sont de<br />

mise. L’adjonction d’anti-inflammatoires ne fait pas<br />

l’unanimité.<br />

Le drainage des urines est indiqué en cas de rétention vésicale<br />

complète mais aussi en cas de dysurie extrême, pour des raisons<br />

de confort. En l’absence de contre-indication, un cathéter suspubien<br />

est mis en place et laissé le temps nécessaire à la reprise<br />

des mictions.<br />

En cas d’abcédation malgré un traitement antibiotique bien<br />

conduit, un drainage échoguidé ou chirurgical s’impose.<br />

L’abstinence ou des rapports protégés, le traitement du<br />

partenaire en cas d’infection sexuellement transmissible (cf.<br />

infra) sont nécessaires.<br />

Le traitement spécifique de la cause identifiée sera entrepris<br />

à distance de l’infection afin de prévenir les récidives (section<br />

endoscopique d’une sténose urétrale, résection endoscopique ou<br />

adénomectomie prostatique).<br />

Suivi<br />

La réévaluation du traitement est essentielle à 48-72 heures et<br />

à j7. Elle permet de vérifier l’efficacité de la prescription<br />

antibiotique et la tolérance. Le suivi est clinique (apyrexie et<br />

disparition des douleurs et des signes urinaires). En cas de<br />

persistance de signes cliniques ou d’aggravation, une nouvelle<br />

évaluation clinique, biologique et radiologique est nécessaire à<br />

la recherche d’un abcès prostatique.<br />

La réalisation systématique d’un ECBU pour s’assurer de la<br />

disparition des germes n’est pas abordée dans les recommandations<br />

existantes. Par analogie aux pyélonéphrites, un ECBU<br />

systématique peut être réalisé 1 semaine et 4à6semaines après<br />

l’arrêt du traitement ou simplement 4à6semaines après l’arrêt<br />

du traitement.<br />

À distance de l’épisode aigu, le patient est adressé à un<br />

urologue, pour retrouver une étiologie notamment une origine<br />

prostatique : ECBU, débitmétrie, échographie rénale et vésicale<br />

avec mesure du résidu post-mictionnel, dosage du PSA sérique.<br />

Prévention<br />

Elle consiste à n’effectuer des manœuvres endo-urétrales<br />

(sondage, endoscopie diagnostique ou thérapeutique) que chez<br />

des patients à urines stériles. De même, les biopsies prostatiques<br />

transrectales nécessitent cette précaution ainsi qu’une préparation<br />

du rectum et une antibioprophylaxie. Par ailleurs, le<br />

traitement précoce des urétrites permet d’éviter la propagation<br />

de l’infection à la prostate. Le traitement préventif des partenaires<br />

sexuels n’est pas nécessaire en cas d’uropathogènes.<br />

Cas particuliers<br />

Les prostatites tuberculeuses et mycosiques bénéficient d’un<br />

traitement spécifique.<br />

Prostatites chroniques récidivantes<br />

à uropathogènes communs<br />

Elles sont la conséquence soit d’un traitement initial inadapté<br />

par un antibiotique mal choisi qui a traité la bactériémie et<br />

l’infection de l’urine, mais n’a pas atteint les foyers infectieux<br />

intraprostatiques, soit d’un traitement insuffisamment prolongé,<br />

soit de recontaminations quand il existe une étiologie anatomique<br />

ou une recontamination sexuelle.<br />

Clinique<br />

Prostatites et épididymites 5-0670<br />

Les signes sont peu nets et variables non spécifiques : signes<br />

d’irritation vésicale avec urgence, dysurie, pollakiurie diurne et<br />

nocturne, brûlures, douleurs périnéales ou sur le trajet des<br />

déférents, douleur à l’éjaculation ou hémospermie. Des poussées<br />

aiguës fébriles sont possibles.<br />

Les symptômes sont récurrents, ce qui conduit à des consultations<br />

et à des traitements répétés.<br />

Le toucher rectal est variable et peut montrer une zone<br />

indurée.<br />

La palpation scrotale peut montrer une induration<br />

épididymaire.<br />

5


5-0670 Prostatites et épididymites<br />

Des signes rectaux sont parfois associés (ténesme, épreintes).<br />

Enfin, on peut retrouver, plus rarement, des troubles de<br />

l’érection, un écoulement urétral variable, une hématurie ou<br />

une hémospermie, plus évocatrices.<br />

Examens complémentaires<br />

Un examen microbiologique complet par prélèvements<br />

fractionnés est indispensable, montrant de façon prédominante,<br />

dans le liquide prostatique, la présence de plus de 10 leucocytes<br />

altérés par champ ainsi que le germe. Le PSA peut être élevé.<br />

L’échographie prostatique peut montrer une lithiase intraprostatique,<br />

ou une zone hypoéchogène, mais ne contribue pas au<br />

diagnostic de l’infection. Une exploration radiologique de<br />

l’urètre est conseillée à distance d’un épisode aigu. Elle peut<br />

visualiser le reflux d’urine dans les canaux prostatiques, ou dans<br />

les voies spermatiques, et recherche une sténose du canal.<br />

Diagnostic différentiel<br />

Il s’agit essentiellement du cancer de la prostate, si l’homme<br />

est dans la tranche d’âge, en raison du PSA qui peut être élevé,<br />

du toucher rectal qui peut montrer une induration et de<br />

l’échographie qui peut montrer une zone hypoéchogène.<br />

Si le PSA reste élevé après traitement antibiotique, le patient<br />

est adressé à un urologue pour une biopsie prostatique. Celle-ci<br />

peut, en outre, montrer des signes histologiques d’inflammation.<br />

Traitement<br />

Il est difficile et décevant.<br />

Antibiothérapie<br />

Ici encore, on choisit une fluoroquinolone systémique<br />

pendant au moins 2 semaines. La durée de traitement est de<br />

20 jours si le germe y est sensible, en répétant ce traitement en<br />

cas de poussée aiguë.<br />

Il n’y a pas de consensus pour un traitement discontinu au<br />

long cours et il paraît difficile de donner une quinolone ou du<br />

triméthoprime de manière prolongée à titre prophylactique<br />

même en discontinu. Les récidives sont une indication de<br />

traitement antibiotique prolongé à plus faible dose. Il est admis<br />

que les récidives au même germe ne sont pas tant dues à<br />

l’acquisition d’une résistance à un antibiotique actif qu’à la<br />

persistance de foyers infectieux exclus, inaccessibles à l’antibiotique.<br />

Ces foyers infectieux sont secondaires à la présence de<br />

calculs prostatiques ou d’une matrice glycoprotéique sécrétée<br />

par les bactéries. Certains auteurs ont proposé l’utilisation d’une<br />

antibiothérapie locale administrée par injection directe au sein<br />

de la glande.<br />

Traitement chirurgical<br />

Il y a peu d’indications chirurgicales dans la prostatite<br />

chronique. Certaines équipes ont injecté des antibiotiques in<br />

situ sous contrôle échographique. Une résection endoscopique<br />

est indiquée en cas d’obstruction documentée, persistant à<br />

distance d’un épisode infectieux aigu pour les patients non<br />

préoccupés par leur fécondité (le geste implique l’acceptation de<br />

l’éjaculation rétrograde). Cette intervention vise à libérer la<br />

filière sous-vésicale et à enlever les calculs s’il y en a. Elle ne<br />

guérit pas la totalité des foyers infectieux qui siègent surtout<br />

dans la zone périphérique de la glande et dans les voies<br />

séminales, alors que l’intervention n’enlève que la zone<br />

périurétrale.<br />

Une prostatovésiculectomie totale, comme pour un cancer,<br />

pourrait enlever tous les foyers infectieux, mais n’entre pas dans<br />

les codes de bonne pratique actuellement en raison des risques<br />

de troubles de l’érection, de la continence et des conséquences<br />

sur la sexualité.<br />

Prévention<br />

C’est le traitement suffisamment prolongé des prostatites<br />

aiguës pendant 4 semaines avec une antibiothérapie adaptée.<br />

Autres traitements<br />

Les alphabloquants peuvent aider en cas d’obstruction du bas<br />

appareil urinaire.<br />

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens et diverses mesures<br />

hygiénodiététiques (régimes) ont été proposés comme traitement<br />

d’appoint. Par ailleurs, le soutien psychologique de ces<br />

patients est indispensable étant donné le caractère invalidant de<br />

cette affection volontiers récidivante, avec parfois un passé<br />

symptomatique de plusieurs mois, voire années.<br />

Prostatites à germes non conventionnels<br />

Le diagnostic ne peut être fait que par des prélèvements<br />

fractionnés si on veut localiser l’infection à la prostate et la<br />

différencier d’une urétrite mais la présence de l’agent pathogène<br />

dans l’urètre est un bon argument de présomption. La positivité<br />

des sérologies n’est pas le témoin d’une infection contemporaine,<br />

à moins d’observer une augmentation significative des<br />

taux d’immunoglobulines sur deux dosages distants de 2 semaines,<br />

mais on ne peut pas attendre ce délai pour traiter le<br />

patient. Le micro-organisme le plus souvent en cause est<br />

Chlamydia trachomatis. Cette bactérie primitive intracellulaire,<br />

sexuellement transmissible, est responsable de 40 % des urétrites<br />

non gonococciques et de la plupart des épididymites avant<br />

35 ans et de 30 % des prostatites à germes non conventionnels.<br />

Elle est actuellement recherchée par des méthodes d’amplification<br />

génique. Le germe est généralement sensible aux fluoroquinolones<br />

et, à défaut, également sensible aux macrolides et<br />

aux cyclines (utiliser minocycline). Un traitement de 20 jours<br />

est conseillé. Le traitement synchrone des partenaires sexuels est<br />

une absolue nécessité sans qu’il soit obligatoire de refaire les<br />

prélèvements.<br />

En dehors de Chlamydia trachomatis, on peut retrouver<br />

Mycoplasma hominis, Ureaplasma urealyticum, qui sont également<br />

des bactéries intracellulaires, et impliquent la même conduite<br />

que pour Chlamydia, ainsi que Trichomonas vaginalis qui est un<br />

protozoaire, responsable de vaginites et sexuellement transmissible.<br />

Son traitement fait appel aux imidazolés.<br />

Prostatodynie et douleurs pelviennes<br />

chroniques<br />

Définition<br />

Ces pathologies mal connues concernent des hommes souvent<br />

jeunes se plaignant de dysurie, de brûlures, de pollakiurie,<br />

de douleurs périnéales ou le long des déférents, de troubles<br />

sexuels peu clairs et souvent d’un état dépressif, dont il est<br />

difficile de dire s’il est secondaire aux symptômes ou s’il en est<br />

la cause.<br />

Entrent dans ce cadre différentes entités :<br />

certaines prostatites chroniques infectieuses dont le germe ne<br />

peut pas être identifié mais où les prélèvements montrent au<br />

moins une leucocyturie significative sur le liquide d’expression<br />

prostatique ;<br />

les inflammations prostatiques non infectieuses par l’action<br />

chimique du reflux d’urine dans les canaux prostatiques ;<br />

les prostatites granulomateuses non infectieuses à éosinophiles<br />

d’origine probablement allergique, dont le diagnostic est<br />

fait par les biopsies car elles peuvent simuler un cancer. Elles<br />

répondent à une corticothérapie ;<br />

les algies périnéales par traumatisme du nerf pudendal dans<br />

le canal d’Alcock ;<br />

les dysfonctionnements vésicosphinctériens par défaut de<br />

relaxation des muscles du plancher périnéal ;<br />

enfin, il arrive que l’on ne puisse pas identifier une cause<br />

organique et, si la douleur est le symptôme dominant, on<br />

peut essayer de la traiter par des antidépresseurs pour leur<br />

action sur le seuil de la douleur au niveau central.<br />

Clinique<br />

La symptomatologie, commune aux prostatites chroniques<br />

non bactériennes et aux prostatodynies, associe de manière<br />

variable des signes fonctionnels déjà décrits dans les prostatites<br />

chroniques bactériennes : douleurs de topographie variable,<br />

pelvipérinéales, troubles mictionnels, troubles sexuels. Des<br />

troubles psychiques (dépression, anxiété, somatisation) sont<br />

volontiers retrouvés.<br />

6 Traité de Médecine Akos


Il n’existe pas de signes infectieux généraux.<br />

L’interrogatoire et l’examen clinique sont superposables à<br />

ceux des prostatites chroniques bactériennes.<br />

Le toucher rectal pourrait objectiver une « hypertonie du<br />

sphincter anal et des tissus périprostatiques ».<br />

Examens complémentaires<br />

Le tableau clinique des prostatites chroniques, bactériennes<br />

ou non, et des prostatodynies est similaire. Ainsi, la distinction<br />

entre ces différentes affections est effectuée par les examens<br />

biologiques (ECBU et épreuve de Meares et Stamey). La recherche<br />

d’agents microbiens inhabituels est systématiquement<br />

réalisée.<br />

La prise en charge de ces syndromes chroniques est difficile.<br />

L’exploration se divise en trois catégories [10, 11] .<br />

L’exploration commune comprend un interrogatoire, un<br />

examen physique avec un toucher rectal et un ECBU. Cette<br />

première étape permet de différencier ce qui est probablement<br />

une prostatite chronique de ce qui ne l’est pas.<br />

La deuxième étape comprend une débitmétrie mictionnelle,<br />

le test de Meares et Stamey et éventuellement le calcul de<br />

l’index de prostatite chronique qui permet de comparer les<br />

malades entre eux et, pour un malade donné, le score avant et<br />

après traitement ; cet index mesure par un score compris entre<br />

0 et 43 les trois plaintes les plus importantes des patients (la<br />

douleur, les troubles mictionnels, l’incidence sur la qualité de<br />

vie).<br />

Les autres explorations sont guidées par les résultats de la<br />

deuxième étape (cytologie urinaire, PSA, cystoscopie, bilan<br />

urodynamique, échographie pelvienne, tomodensitométrie,<br />

imagerie par résonance magnétique).<br />

Au terme de ce bilan le patient est classé comme une prostatite<br />

chronique bactérienne ou comme un syndrome douloureux<br />

pelvien chronique.<br />

Traitement [12]<br />

Antibiothérapie<br />

Elle n’est théoriquement pas indiquée car l’origine infectieuse<br />

des prostatites chroniques non bactériennes et des prostatodynies<br />

n’est pas prouvée. En pratique, cependant, une antibiothérapie<br />

par tétracyclines ou érythromycine est volontiers proposée<br />

sur les arguments suivants : l’hypothèse concernant le rôle<br />

possible de certains germes spécifiques (Chlamydia, Ureaplasma<br />

urealyticum) n’est pas définitivement exclue ; les antibiotiques<br />

habituellement utilisés sont généralement bien tolérés ; il<br />

n’existe pas d’autres traitements spécifiques de ces affections. En<br />

cas d’échec, aucun autre traitement antibiotique n’est justifié<br />

dans ces prostatites dont l’origine infectieuse n’est pas prouvée.<br />

Alphabloquants<br />

Ils constituent le principal traitement à l’heure actuelle, ce<br />

qui est justifié du fait des anomalies fréquemment observées<br />

lors du bilan urodynamique [13-15] . Il faut noter cependant que<br />

la plupart de ces études portaient sur un faible nombre de<br />

patients. Meares [16] préconise d’initier le traitement à faible<br />

dose (pour minimiser les risques d’hypotension orthostatique),<br />

puis de porter la dose journalière (prise au coucher) à 10 mg<br />

pour l’alfuzosine, 10 à 15 mg pour la térazosine et 4à8mg<br />

pour la doxazosine. Une durée de 6 mois semble nécessaire<br />

initialement, la poursuite du traitement étant fonction de sa<br />

tolérance et de son efficacité. Pour Roberts [17] , la récidive<br />

symptomatique à l’arrêt du traitement impose de poursuivre les<br />

alphabloquants au long cours.<br />

Autres traitements médicaux<br />

Ils associent, à des degrés divers, différentes molécules :<br />

anticholinergiques, anti-inflammatoires, benzodiazépines,<br />

antihistaminiques et antidépresseurs tricycliques.<br />

Des bains de siège et massages prostatiques sont classiquement<br />

proposés.<br />

Enfin, l’éviction de certains plats épicés, de l’excès d’alcool,<br />

de caféine, pourrait être bénéfique.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Le soutien psychologique est important : les patients doivent<br />

être assurés de la bénignité de leur affection, malgré son<br />

caractère chronique et volontiers invalidant.<br />

Traitements instrumentaux<br />

Ils doivent faire l’objet d’une discussion en milieu ultraspécialisé,<br />

les données sont rares.<br />

Prostatites inflammatoires asymptomatiques<br />

type IV<br />

Elles sont souvent diagnostiquées lors d’explorations pour<br />

d’autres troubles de l’appareil urinaire (infertilité, biopsies<br />

prostatiques pour élévation du PSA).<br />

Les caractéristiques des différents types de prostatite sont<br />

résumées dans le Tableau 2.<br />

“ Points essentiels<br />

Messages importants pour la prise en charge<br />

d’une prostatite<br />

Il faut penser à une prostatite devant toute infection<br />

urinaire fébrile chez l’homme.<br />

Toute prostatite aiguë doit être traitée par une<br />

fluoroquinolone pendant au moins 3 semaines.<br />

La prostatite aiguë contre-indique le sondage vésical en<br />

cas de rétention aiguë d’urine.<br />

En cas de doute avec une torsion testiculaire, tout testicule<br />

douloureux doit être exploré chirurgicalement.<br />

L’évaluation d’une prostatite aiguë se fait en trois temps.<br />

La clinique :<br />

C recherche de symptômes ou de signes d’une<br />

prostatite aiguë bactérienne<br />

C appréciation de la gravité de l’infection<br />

C recherche de facteurs de complications associés<br />

C appréciation de l’évolution sous traitement<br />

La biologie :<br />

C confirmation du diagnostic par un ECBU<br />

C appréciation de la gravité par NFS<br />

C confirmation de l’infection et de l’inflammation :<br />

NFS, CRP, hémocultures<br />

C recherche de facteurs de complications associés<br />

(glycémie à jeun, créatininémie)<br />

La radiologie :<br />

C recherche d’une rétention vésicale<br />

C recherche d’un abcès prostatique ou d’une<br />

pyélonéphrite en cas de doute<br />

Le diagnostic de prostatite chronique non infectieuse ou<br />

syndrome douloureux pelvien chronique est un diagnostic<br />

d’exclusion. Il n’y a ni test ni marqueur spécifique. Les<br />

antibiotiques ne sont indiqués qu’en cas de suspicion<br />

infectieuse même si l’épreuve de Meares et Stamey est<br />

négative et ce sous forme de test thérapeutique de<br />

15 jours ; en cas d’efficacité, ils sont prolongés de 4 à<br />

6 semaines.<br />

■ Épididymites<br />

Prostatites et épididymites 5-0670<br />

Les épididymites correspondent à une inflammation de<br />

l’épididyme. Il faut distinguer l’épididymite du sujet pubère à<br />

35 ans qui peut correspondre à une authentique infection<br />

sexuellement transmissible et celle du sujet de plus 35 ans qui<br />

est souvent la complication directe d’une prostatite aiguë<br />

bactérienne survenant sur une pathologie du bas appareil<br />

urinaire, notamment une origine prostatique. Le traitement<br />

repose sur une antibiothérapie adaptée.<br />

7


5-0670 Prostatites et épididymites<br />

Tableau 2.<br />

Récapitulatif des différents types de prostatite.<br />

Mécanismes<br />

Le plus souvent, l’infection se transmet de manière rétrograde<br />

dans les voies spermatiques, ce qui explique que la queue de<br />

l’épididyme soit touchée en premier, la tête ensuite, l’infection<br />

du testicule lui-même survenant en dernier, l’orchite étant<br />

favorisée par une thrombose infectieuse des vaisseaux<br />

spermatiques.<br />

Il peut s’agir d’une infection ascendante sur urétrite ou<br />

prostatite survenant chez un homme de moins de 35 ans dans<br />

un contexte d’infection sexuellement transmissible.<br />

Il peut également s’agir d’une infection ascendante sur reflux<br />

déférentiel survenant chez un homme de plus de 50 ans<br />

présentant des facteurs favorisants : adénome de prostate,<br />

sténose de l’urètre, manœuvres endo-urétrales.<br />

Par ailleurs, l’infection hématogène est rare. Parfois il s’agit de<br />

pathologies telles que la tuberculose et la filariose.<br />

Germes<br />

Prostatite aiguë Prostatite chronique bactérienne Prostatite chronique non bactérienne<br />

Diagnostic Facile Difficile Très difficile<br />

Définition Infection aiguë bactérienne de la prostate Pathologies infectieuses chroniques et/ou<br />

récidivantes < 10 % des cas<br />

Germes Bacilles à gram négatif : Escherichia coli +++ Bacilles à Gram positif + Aucun<br />

Clinique Fièvre<br />

Examens<br />

complémentaires<br />

Dysurie<br />

Brûlures mictionnelles<br />

Pollakiurie<br />

Rétention aiguë d’urine<br />

Toucher rectal prostate sensible<br />

Non spécifique<br />

Les germes responsables sont les mêmes que dans les prostatites<br />

:<br />

uropathogènes communs dans un tiers des épididymites<br />

avant 35 ans, dans la majorité après 35 ans ;<br />

Signes fonctionnels urinaires<br />

Gêne, douleur pelvienne, périnéale<br />

majorée par l’éjaculation<br />

Absence de signes généraux<br />

Clinique pauvre<br />

Toucher rectal : prostate normale ou un peu<br />

plus ferme<br />

Troubles de l’érection, écoulement urétral,<br />

hémospermie, hématurie<br />

ECBU positif ECBU : leucocyturie fréquente<br />

Bactériurie rare<br />

Meares et Stamey : rarement faite<br />

Spermoculture : abandonnée<br />

Débitmétrie : obstacle sous-prostatique<br />

= facteur d’entretien<br />

Index de prostatite chronique<br />

Autres : en fonction de l’orientation<br />

Imagerie Inutile Inutile Inutile<br />

Complications Rétention aiguë d’urine<br />

Orchiépididymite<br />

Abcès prostatique<br />

Rechute<br />

Traitement Antibiothérapie immédiate après ECBU<br />

Secondairement adapté à l’antibiogramme<br />

Pendant au moins 3 semaines<br />

Quinolones<br />

Triméthoprime-sulfaméthoxazole<br />

Repos<br />

Abstinence sexuelle<br />

Douleurs chroniques<br />

Poussées aiguës<br />

Difficile<br />

Antibiothérapie prolongée si prostatite<br />

chronique bactérienne : 4-6 semaines<br />

Fluoroquinolones<br />

Triméthoprime-sulfaméthoxazole<br />

Alphabloquants, AINS, phytothérapie,<br />

rééducation périnéosphinctérienne avec<br />

biofeed back<br />

Soutien psychologique<br />

AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens ; ECBU : examen cytobactériologique urinaire.<br />

bactéries intracellulaires avec, au premier plan, Chlamydia<br />

trachomatis, prédominant avant 35 ans, sexuellement transmissible,<br />

responsable de salpingites et de stérilité chez les<br />

femmes. Parmi les autres germes sexuellement transmissibles,<br />

on peut citer le gonocoque, mycoplasme, Chlamydia, Trichomonas.<br />

L’écoulement urétral signe l’urétrite et évoque plus<br />

volontiers le gonocoque que Chlamydia trachomatis.<br />

Épididymites aiguës à uropathogènes<br />

communs<br />

Clinique<br />

Pathologies inflammatoires de la prostate<br />

Douleurs chroniques<br />

Formes histologiques<br />

Douleurs de topographie variable, pelvipérinéales,<br />

troubles mictionnels, troubles sexuels<br />

Des troubles psychiques (dépression, anxiété,<br />

somatisation) sont volontiers retrouvés<br />

Absence de signes infectieux généraux<br />

Idem<br />

Éliminer agents microbiens inhabituels<br />

Douleurs chroniques<br />

Très difficile<br />

Alphabloquants, AINS, phytothérapie, rééducation<br />

périnéosphinctérienne avec biofeed<br />

back<br />

Soutien psychologique<br />

La symptomatologie en est bruyante : après un épisode de<br />

prostatite non ou mal traitée se produit une douleur, une<br />

augmentation de volume et des signes inflammatoires au niveau<br />

d’une bourse accompagnés de fièvre. Les douleurs de la bourse<br />

sont souvent sévères. Elles irradient le long du cordon spermatique<br />

vers la région inguinale et le soulèvement du testicule les<br />

soulage (signe de Prehn positif). La palpation, si elle est possible,<br />

retrouve une induration chaude de l’épididyme, localisée au<br />

début à la partie caudale. Le testicule lui-même n’est pas induré,<br />

il n’est pas rétracté, mais le déférent peut être inflammatoire. Il<br />

peut exister une hydrocèle réactionnelle.<br />

8 Traité de Médecine Akos


Dans les formes plus évoluées, l’ensemble du contenu scrotal<br />

est inflammatoire et la palpation ne peut rien distinguer. Le<br />

toucher rectal recherche une douleur prostatique évocatrice de<br />

prostatite aiguë associée.<br />

Examens complémentaires<br />

L’examen de l’urine à la bandelette montre une leucocyturie<br />

et des nitrites et l’ECBU montre une leucocyturie et le germe.<br />

Les hémocultures aérobies et anaérobies sont indiquées quand<br />

la fièvre dépasse 38,5 °C et lors de frissons.<br />

La protéine C réactive est augmentée.<br />

L’échographie apporte peu d’arguments.<br />

La recherche des germes sexuellement transmissibles est<br />

systématique sauf quand une infection urogénitale « classique »<br />

est manifeste (patient âgé, pathologie urologique connue ou<br />

manifeste, intervention chirurgicale ou manipulation sur le bas<br />

appareil urinaire récentes). Actuellement, le prélèvement urétral<br />

s’effectue par simple écouvillonnage à la recherche de Neisseria<br />

gonorrhoeae, car le prélèvement endo-urétral avec grattage est<br />

remplacé par la recherche de Chlamydia trachomatis sur le<br />

premier jet urinaire par technique d’amplification génique<br />

(PCR).<br />

Diagnostic différentiel<br />

Une épididymite aiguë ne doit pas être confondue :<br />

avec une torsion mais, dans ce cas, le début est très brutal, le<br />

testicule est rétracté, et les signes infectieux sont absents,<br />

l’examen d’urine à la bandelette est normal. En cas de doute<br />

diagnostique, une intervention chirurgicale en urgence pour<br />

éliminer une torsion du cordon spermatique s’impose sans<br />

même réaliser d’échographie scrotale ;<br />

avec un cancer du testicule, mais dans ce cas seul le testicule<br />

est induré, l’épididyme est normal à la surface de l’induration<br />

(signe de Chevassu) et les signes infectieux sont absents.<br />

Complications<br />

Le traitement rapide et adapté d’une épididymite aiguë<br />

permet le plus souvent d’obtenir une évolution favorable et<br />

d’éviter les complications.<br />

Des signes cliniques de mauvais pronostic font craindre la<br />

survenue de ces complications. Desai et Vodermark classent les<br />

épididymites en trois formes de gravité croissante :<br />

la forme modérée : les repères anatomiques sont conservés, le<br />

testicule est palpé, séparé de l’épididyme et indolore ;<br />

la forme sévère : les repères anatomiques sont perdus (orchiépididymite<br />

vraie) ;<br />

la forme très sévère : la masse inflammatoire est adhérente à<br />

la paroi scrotale et le cordon est induré et sensible.<br />

Complications aiguës<br />

Elles comprennent les complications infectieuses et ischémiques.<br />

L’absence de réponse au traitement antibiotique les fait<br />

craindre et justifie la réalisation d’examens complémentaires.<br />

Orchite. L’inflammation s’étend au testicule et réalise une<br />

orchiépididymite. La palpation perçoit une masse douloureuse<br />

et ne peut distinguer l’épididyme du testicule.<br />

Abcès. L’abcès épididymaire se manifeste par une douleur<br />

vive et lancinante associée à une fièvre élevée. À l’examen, la<br />

peau scrotale est inflammatoire, adhérente et la palpation<br />

perçoit une zone fluctuante. Cet abcès peut s’étendre au<br />

testicule, se rompre dans le scrotum (pyocèle du scrotum) ou se<br />

fistuliser à la peau.<br />

L’échographie montre une zone hypoéchogène ou anéchogène<br />

avec renforcement postérieur. Au niveau du testicule, cet<br />

abcès peut également se manifester par des radiations striées<br />

hyperéchogènes séparant des espaces hypoéchogènes.<br />

Ischémie testiculaire. Cette ischémie peut répondre à deux<br />

mécanismes : le cordon œdématié peut être comprimé au<br />

niveau de l’orifice inguinal externe ou bien l’œdème épididymaire<br />

comprime les branches terminales de l’artère spermatique<br />

à destinée parenchymateuse, de même la funiculite, en raison<br />

d’un fascia spermatique externe peu compliant, s’accompagne<br />

d’une congestion lymphatique et veineuse puis d’une occlusion<br />

artérielle.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

L’ischémie testiculaire peut conduire à l’infarctus. Celui-ci se<br />

complique volontiers d’une nécrose, d’un abcès ou d’une<br />

atrophie tardive. L’infarctus du testicule peut être lié à une<br />

thrombose veineuse.<br />

L’échographie-Doppler couleur ne retrouve pas de vascularisation<br />

intratesticulaire ou montre une élévation de l’index de<br />

résistivité intratesticulaire avec flux diastolique négatif.<br />

Complications chroniques<br />

Altération de la fertilité. Au décours d’une épididymite<br />

aiguë, le spermogramme montre des perturbations transitoires<br />

portant sur la numération, la mobilité et la morphologie des<br />

spermatozoïdes mais le phénomène le plus préoccupant est le<br />

risque à plus long terme d’obstruction tubulaire secondaire à un<br />

ou plusieurs nodules fibreux séquellaires. En effet, une atteinte<br />

bilatérale de ce type entraîne une azoospermie d’origine<br />

excrétoire. D’autres mécanismes d’altération de la fertilité ont<br />

été évoqués : azoospermie sécrétoire par destruction des cellules<br />

germinales, infertilité d’origine immunologique (par formation<br />

d’autoanticorps antispermatozoïdes).<br />

Épididymite chronique. L’épididymite chronique est secondaire<br />

à une infection mal traitée, négligée ou passée inaperçue.<br />

Elle est parfois le stade irréversible d’une épididymite aiguë<br />

sévère. Elle se manifeste par une pesanteur, une gêne ou des<br />

douleurs scrotales chroniques. La palpation note une induration<br />

de tout ou partie de l’épididyme. L’examen histologique montre<br />

une fibrose diffuse et un infiltrat lymphoplasmocytaire. L’occlusion<br />

tubulaire est fréquente.<br />

Atrophie testiculaire. Sa fréquence est diversement appréciée.<br />

Elle est parfois secondaire à une ischémie testiculaire.<br />

Récidives. Un traitement mal conduit, une étiologie urologique<br />

négligée sont à l’origine de récidives.<br />

Traitement<br />

Antibiothérapie<br />

[12, 18]<br />

Elle est identique à celle d’une prostatite car bien que tous les<br />

antibiotiques actifs sur le germe soient efficaces sur la maladie<br />

épididymaire, il est nécessaire de traiter la source de l’infection<br />

selon ce qui a été dit plus haut. On peut compléter par une<br />

immobilisation du scrotum et des antalgiques.<br />

Traitement chirurgical<br />

Prostatites et épididymites 5-0670<br />

Il est indiqué dans trois circonstances :<br />

s’il persiste un doute avec une torsion, il vaut mieux ouvrir<br />

une bourse pour rien que méconnaître une torsion ;<br />

s’il y a une volumineuse épididymite abcédée, il peut être<br />

préférable d’enlever l’épididyme pour préserver la glande<br />

testiculaire ;<br />

dans les formes récidivantes, une vasectomie peut être<br />

nécessaire pour interrompre les réinoculations.<br />

Épididymites à Chlamydia trachomatis<br />

Elles ont une symptomatologie moins bruyante. L’agent<br />

pathogène doit être recherché par les méthodes d’amplification<br />

génique dans le liquide d’expression prostatique, mais sa<br />

présence dans le prélèvement urétral obtenu par écouvillonnage<br />

ou dans le prélèvement d’urine post-massage est un bon<br />

argument de présomption.<br />

Le traitement fait appel en premier aux fluroroquinolones<br />

systémiques, pendant une durée de 20 jours. À défaut, aux<br />

macrolides ou aux cyclines.<br />

Dans l’hypothèse d’une association d’une infection sexuellement<br />

transmissible, il est indispensable de réaliser un bilan avec<br />

une sérologie syphilitique, de l’hépatite B et du VIH.<br />

Le bilan bactériologique chez la ou les partenaires du patient<br />

est également indispensable avec notamment recherche de<br />

Chlamydia trachomatis (prélèvement cervicovaginal, premier jet<br />

urinaire).<br />

Le traitement synchrone du partenaire sexuel est indispensable<br />

; il permet également d’éviter les récidives.<br />

9


.<br />

5-0670 Prostatites et épididymites<br />

■ Conclusion<br />

Les prostatites et épididymites aiguës bactériennes sont des<br />

pathologies fréquentes et épidémiologiquement liées. Leur<br />

traitement repose sur une antibiothérapie standardisée et<br />

prolongée. Il ne faut pas méconnaître une infection sexuellement<br />

transmissible.<br />

Les prostatites chroniques non bactériennes sont une entité<br />

mal définie, responsables de douleurs pelviennes chroniques<br />

posant un réel problème diagnostique. Leur traitement est<br />

difficile.<br />

■ Références<br />

[1] Bruyère F, Cariou G, Boiteux JP. Le CIAFU. Recommandations de<br />

bonnes pratiques cliniques du comité d’infectiologie de l’AFU. Prog<br />

Urol 2008;18(suppl1):1-23.<br />

[2] Krieger JN, Lee SW, Jeon J, Cheah PY, Liong ML, Riley DE.<br />

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S85-S90.<br />

[3] Krieger JN, Nyberg Jr. L, Nickel JC. NIH consensus definition and<br />

classification of prostatitis. JAMA 1999;282:236-7.<br />

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The role of Chlamydia trachomatis in prostatitis syndrome--our<br />

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[5] Skerk V, Schönwald S, Krhen I, Markovinović L, Beus A,<br />

Kuzmanović NS, et al.Aetiology of chronic prostatitis. Int J Antimicrob<br />

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[6] Badalyan RR, Fanarjyan SV, Aghajanyan IG. Chlamydial and<br />

ureaplasmal infections in patients with nonbacterial chronic prostatitis.<br />

Andrologia 2003;35:263-5.<br />

[7] Meares EM, Stamey TA. Bacteriologic localization patterns in bacterial<br />

prostatitis and urethritis. Invest Urol 1968;5:492-519.<br />

[8] Krieger JN, Riley DE. Prostatitis: what is the role of infection. Int<br />

J Antimicrob Agents 2002;19:475-9.<br />

[9] Naber KG. Antimicrobial treatment of bacterial prostitis. Eur Urol<br />

2003;2:23-6 [suppl].<br />

[10] Schaeffer AJ, Weidner W, Barbalias GA, Botto H, Johansen TE,<br />

Hochreiter WW, et al. Summary consensus statement: diagnosis and<br />

management of chronic prostatitis/ chronic pelvic pain syndrome. Eur<br />

Urol 2003;2:1-4 [suppl].<br />

[11] Weidner W, Anderson RU. Evaluation of acute and chronic bacterial<br />

prostatitis and diagnostic management of chronic prostatitis/chronic<br />

pelvic pain syndrome with special reference to infection/inflammation.<br />

Int J Antimicrob Agents 2008;31(suppl1):S91-S95.<br />

[12] Naber KG, Bergman B, Bishop MC, Bjerklund-Johansen TE, Botto H,<br />

Lobel B. t al. EAU guidelines for the management of urinary and male<br />

genital tract infections. Urinary Tract Infection (UTI) Working Group<br />

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Urology (EAU). Eur Urol 2001;40:576-88.<br />

[13] Nickel JC. Role of alpha1-blockers in chronic prostatitis syndromes.<br />

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[14] Slawson D. Terazosin helpful in patients with chronic prostatitis. Am<br />

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[16] Meares Jr. EM. Prostatitis and related disorders. In: Walsh PC,<br />

Retik AB, Stamey TA, Vaughan Jr. ED, editors. Campbell’s Urology.<br />

Philadelphia: WB Saunders; 1998. p. 615-30.<br />

[17] Roberts RO, Lieber MM, Bostwick DG, Jacobsen SJ. A review of<br />

clinical and pathological prostatitis syndromes. Urology 1997;49:<br />

809-21.<br />

[18] Ludwig M. Diagnosis and therapy of acute prostatitis, epididymitis and<br />

orchitis. Andrologia 2008;40:76-80.<br />

Pour en savoir plus<br />

Diagnostic et antibiothérapies des infections urinaires bactériennes<br />

communautaires chez l’adulte, Recommandations de bonnes pratiques<br />

cliniques. AFSSAPS, juin 2008.<br />

Pilly E. CMIT. Maladies Infectieuses et Tropicales. Paris: Vivactis Plus; 2010.<br />

Le POPI. 2009 CMIT. Maladies infectieuses et tropicales : guide de traitement<br />

: référence pour une bonne pratique médicale. Le Collège des<br />

universitaires de maladies infectieuses et tropicales, CMIT. Paris:<br />

Vivactis plus; 2009.<br />

www.infectiologie.com.<br />

www.has-sante.fr.<br />

www.afssaps.sante.fr.<br />

V. Phé (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

M. Rouprêt.<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Assistance publique – Hôpitaux de Paris, Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, 47-83,<br />

boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Phé V., Rouprêt M. Prostatites et épididymites. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de Médecine Akos,<br />

5-0670, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

10 Traité de Médecine Akos<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

G. Latteux, R. Faguer, P. Bigot, D. Chautard, A.R. Azzouzi<br />

La rétention aiguë d’urine (RAU) est une urgence urologique qui se caractérise par une impossibilité<br />

douloureuse d’uriner et dont l’incidence augmente avec l’âge. Elle peut être provoquée par divers<br />

mécanismes provoquant un dysfonctionnement du système vésicosphinctérien. La RAU est une<br />

pathologie essentiellement masculine qui survient dans deux tiers des cas sur un terrain d’hypertrophie<br />

bénigne de la prostate (HBP). Son diagnostic clinique est caractérisé par la présence d’une envie<br />

douloureuse d’uriner associée à la présence d’un globe vésical. Son traitement repose sur l’évacuation<br />

vésicale qui sera instaurée rapidement, dans l’idéal par cathétérisme sus-pubien. Le traitement<br />

a-bloquant associé au drainage augmente les chances de succès de sevrage et diminue les risques de<br />

récidive. En cas d’indication chirurgicale au décours de l’épisode de RAU, l’intervention doit être réalisée à<br />

distance de l’épisode afin de limiter la morbimortalité périopératoire.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Rétention aiguë d’urine ; Hypertrophie prostatique ; Sondage urinaire ; Cathéter sus-pubien<br />

Épidémiologie 1<br />

Physiopathologie 1<br />

Généralités 1<br />

Capacité vésicale et perception du besoin d’uriner 2<br />

Contrôle vésicosphinctérien 2<br />

Mécanismes de survenue de la rétention aiguë d’urine 2<br />

Étiologies 3<br />

Augmentation des résistances à l’écoulement des urines 3<br />

Troubles vésicosphinctériens 4<br />

Rétentions neurologiques 4<br />

Diagnostic 5<br />

Diagnostic positif 5<br />

Diagnostic étiologique 7<br />

Diagnostic différentiel 7<br />

Traitements 7<br />

Traitement d’urgence : drainage vésical 7<br />

Traitement médical associé 9<br />

Prise en charge secondaire, après le drainage vésical 10<br />

Conclusion 11<br />

■ Épidémiologie<br />

Plusieurs équipes se sont intéressées à l’étude de l’incidence<br />

de la rétention aiguë d’urine (RAU). Pour certains, le taux<br />

d’incidence de survenue de la RAU, cumulé sur 10 ans, varie de<br />

4%à73% [1] . Cette large fourchette montre qu’il est difficile<br />

de définir cette incidence dans la population générale, car la<br />

plupart des études, biaisées, ont été réalisées sur de petits<br />

échantillons non représentatifs de la population générale.<br />

La RAU avant 60 ans est rare, mais elle devient fréquente<br />

dans la septième décennie où il existe huit fois plus de risques<br />

de RAU que chez les patients quadragénaires [2] . Sur 5 ans,<br />

l’incidence cumulative augmente avec l’âge. Elle est de 1,6 %<br />

Urologie<br />

pour les 40-49 ans et augmente jusqu’à 10 % chez les 70-79 ans.<br />

Un homme de 60 ans a 23 % de risque de faire une RAU s’il vit<br />

jusqu’à 80 ans [3] .<br />

Plus récemment, Verhamme et al. ont réalisé une enquête<br />

rétrospective sur un large échantillon de patients allemands<br />

pouvant s’apparenter à la population générale. Cette étude nous<br />

révèle que l’incidence est basse chez les plus de 45 ans (2,2 pour<br />

1 000 patients-années) et augmente avec l’âge. Elle passe de 0,2<br />

à 11 pour 1 000 entre les 45-49 ans et les plus de 80 ans [4] .<br />

Chez les patients présentant des troubles urinaires du bas<br />

appareil en rapport avec une hypertrophie bénigne de la<br />

prostate (HBP) récemment diagnostiquée, l’incidence globale est<br />

de 18,3 pour 1 000 et augmente toujours avec l’âge. Ces<br />

patients présentent un risque beaucoup plus important de RAU<br />

par rapport à la population générale (risque relatif de 11) [4] .<br />

Chez les femmes, la RAU est beaucoup moins fréquente. Le<br />

sex-ratio est de 1/13 [2] .<br />

■ Physiopathologie<br />

Généralités<br />

18-207-D-10<br />

Les reins produisent chaque jour 750 à 2 000 ml d’urines qui<br />

sont acheminées vers la vessie par l’intermédiaire des contractions<br />

péristaltiques urétérales. Dans les conditions physiologiques,<br />

la production d’urine est continue.<br />

En revanche, la diurèse et la vitesse de l’onde péristaltique<br />

sont variables et rendent le stockage des urines indispensable.<br />

Les urines stockées dans la vessie sont ensuite éliminées via<br />

l’urètre lors de la miction.<br />

Le bas appareil urinaire est soumis aux variations de la<br />

diurèse rénale et ce, sans rétrocontrôle. Il doit donc adapter la<br />

fréquence des mictions aux variations des volumes d’urines<br />

sécrétées. Toute anomalie vésicosphinctérienne sensitive ou<br />

motrice entraîne ainsi une anomalie de la miction pouvant<br />

conduire à une rétention aiguë d’urine (RAU). Cette dernière<br />

peut avoir un retentissement sur le haut appareil urinaire qui<br />

est variable selon sa durée et le terrain.<br />

1


18-207-D-10 Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

P° (cm H 2O)<br />

60<br />

40<br />

20<br />

0<br />

Toux<br />

100<br />

B1<br />

200<br />

Capacité vésicale et perception du besoin<br />

d’uriner<br />

La vessie est un muscle creux, acontractile au repos et qui agit<br />

comme un réservoir d’une capacité de 350 à 500 ml chez<br />

l’adulte. Le remplissage vésical s’effectue à une pression constante<br />

basse de 5 à 10 cm d’eau. La compliance vésicale est<br />

assurée par les propriétés viscoélastiques du dôme et des faces<br />

latérales. Lorsque la miction n’est plus possible et que la<br />

compliance vésicale est dépassée, la pression vésicale augmente.<br />

Au-delà de 40 cmH 2O, le flux d’urine rénal est alors stoppé [5] .<br />

Il est admis, qu’au cours du remplissage vésical, la sensation de<br />

besoin s’élabore avec la stimulation de volorécepteurs et de<br />

tensorécepteurs situés respectivement dans le collagène et la<br />

musculeuse vésicale. La participation des cellules urothéliales<br />

dans la sensibilité vésicale est également reconnue, car elles<br />

possèdent des récepteurs sensibles à la douleur et à l’étirement<br />

[6] . Elles pourraient, telles des cellules neuronales, libérer<br />

des substances neurotransmettrices lors de leur stimulation par<br />

certaines substances chimiques [7-10] . D’abord ressentie comme<br />

une simple sensation de plénitude pour un remplissage de<br />

40 %, la sensation de réplétion vésicale devient ensuite une<br />

perception nette avec un besoin d’uriner lorsque la vessie est<br />

remplie à 60 %. En situation physiologique, au-delà de 90 %, le<br />

besoin devient impérieux et finit par être associé à des douleurs<br />

pelviennes [11, 12] . La sensation de besoin redevient nulle après<br />

la miction. Ainsi, au cours d’un bilan urodynamique, plusieurs<br />

degrés du besoin d’uriner sont définis : le premier besoin (B1),<br />

le besoin normal (B2), le besoin impérieux (B3) et le besoin<br />

douloureux (B4) (Fig. 1).<br />

Contrôle vésicosphinctérien (Fig. 2)<br />

300<br />

Temps (s)<br />

Le contrôle vésicosphinctérien est médié par une innervation<br />

végétative et somatique et repose sur un système d’activation et<br />

de désactivation des fibres musculaires lisses et striées.<br />

L’innervation sympathique est assurée par les nerfs hypogastriques<br />

issus des noyaux spinaux sympathiques situés dans les<br />

cornes latérales de la moelle épinière (T10-L2). Les plexus<br />

hypogastriques véhiculent les informations concernant les<br />

variations de la pression vésicale à la moelle sacrée par des fibres<br />

sensitives peu myélinisées de type A Delta (Ad) et des fibres non<br />

myélinisées de type C. L’information se projette sur le cortex<br />

pariétal via la moelle épinière et le tronc cérébral. La stimulation<br />

sympathique entraîne la relaxation du détrusor (effet b-) et<br />

l’activation du sphincter lisse de l’urètre (effet a+), permettant<br />

ainsi le remplissage vésical et la continence.<br />

Les fibres parasympathiques constituent les nerfs pelviens et<br />

se dirigent vers les noyaux spinaux parasympathiques situés<br />

dans la moelle sacrée (S2, S3, S4). Elles déclenchent la contraction<br />

du détrusor et la relaxation du sphincter lisse urétral,<br />

permettant ainsi la miction. Ce sphincter constitue une véritable<br />

entité anatomique et histologique.<br />

L’innervation somatique est assurée par le nerf pudendal qui<br />

contrôle le sphincter strié urétral et dont les fibres sont issues<br />

du noyau d’Onuf situé dans les cornes ventrales de la moelle<br />

sacrée (S2, S3, S4). Son relâchement permet la miction.<br />

B2<br />

Remplissage (50 ml/min)<br />

B3<br />

Miction<br />

Figure 1. Cystomanométrie. P o : pression ; B1 : premier besoin<br />

d’uriner ; B2 : besoin normal ; B3 : besoin impérieux.<br />

1<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

T11<br />

+ -<br />

+<br />

Ces voies périphériques sont sous le contrôle du système<br />

nerveux central. Les afférences végétatives et somatiques sont<br />

acheminées indirectement, via la substance grise périaqueducale<br />

mésencéphalique au centre M, centre de miction médian, situé<br />

dans tegmentum pontis. Sa stimulation entraîne une activation<br />

des fibres parasympathiques responsables de la miction. Le<br />

centre latéral L contrôle la continence par ses projections sur le<br />

noyau d’Onuf. Il active le sphincter strié et permet la continence.<br />

Le contrôle volontaire de la miction permettant la vie<br />

sociale serait assuré par le mésencéphale (substance grise<br />

périaqueducale) et par les gyri cingulaires des lobes frontaux.<br />

Les neurotransmetteurs impliqués sont des neuropeptides tels<br />

que l’acétylcholine ou la noradrénaline, mais aussi le monoxyde<br />

d’azote (NO), l’adénosine triphosphate (ATP), le calcitonine generelated<br />

peptide CGRP et des prostaglandines [6] .Levaso-intestinal<br />

peptide (VIP), les enképhalines et le NO participent également à<br />

la modulation des afférences sensorielles [12] .<br />

Le cycle continence-miction repose ainsi sur la synergie des<br />

systèmes nerveux impliqués, et donc sur l’intégrité de la boucle<br />

réflexe assurée par la moelle sacrée, contrôlée par l’encéphale<br />

qui permet donc d’ordonner la miction ou de la retarder.<br />

Mécanismes de survenue de la rétention<br />

aiguë d’urine<br />

S2<br />

S4<br />

- +<br />

Figure 2. Innervation motrice de l’appareil vésicosphinctérien. 1. Innervation<br />

sympathique ; 2. plexus hypogastrique inférieur ; 3. détrusor ;<br />

4. sphincter interne ; 5. sphincter externe ; 6. innervation parasympathique<br />

; 7. nerf pudendal.<br />

La continence est assurée par les mécanismes actifs de retenue<br />

cités ci-dessus, mais également par des mécanismes passifs. Ces<br />

mécanismes sont principalement représentés par le tonus<br />

cervical (qui ferme l’angle cervico-urétral), les forces de frottements<br />

et de turbulences. Il semble désormais que le sphincter<br />

strié joue un rôle dans la continence passive par son tonus basal<br />

et que sa contraction n’est pas uniquement volontaire [13] . Alors<br />

qu’un déséquilibre de ces forces de retenue peut entraîner, lors<br />

de leur augmentation, une miction incomplète avec l’apparition<br />

d’un résidu postmictionnel, une augmentation brutale des<br />

forces de retenue peut aboutir à la rétention aiguë d’urine<br />

complète. Dans ce cas, la pression intravésicale augmente et<br />

provoque, selon la loi de Laplace, une augmentation de la<br />

tension pariétale (Dp = T/r et donc T = DP × r, avec DP : la<br />

différence de pression entre les deux milieux, T : la tension de<br />

2 Urologie<br />

6<br />

7


surface et r : le rayon de courbure). Ainsi, lorsque la vessie est<br />

remplie au-delà d’un certain volume, la tension de surface est<br />

telle que la contraction détrusorienne n’est plus possible.<br />

La survenue d’une RAU constitue une urgence urologique<br />

définie par l’impossibilité soudaine et douloureuse d’uriner [14]<br />

dont les étiologies sont variées.<br />

■ Étiologies<br />

Les étiologies de la RAU sont nombreuses et varient en<br />

fonction du sexe. Elles peuvent être classées en trois catégories :<br />

l’augmentation des résistances à l’écoulement urinaire<br />

(obstacle mécanique ou augmentation du tonus des sphincters<br />

urétraux) ;<br />

l’absence de contraction détrusorienne (réflexe ou liée à<br />

l’administration de drogues) ;<br />

les causes neurologiques.<br />

Dans certains cas, la RAU est la conséquence d’une association<br />

multifactorielle. Il n’est alors pas possible d’incriminer une<br />

cause plus qu’une autre.<br />

Augmentation des résistances<br />

à l’écoulement des urines<br />

Chez l’homme<br />

Les affections prostatiques sont les principales causes de RAU.<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

Les troubles urinaires du bas appareil (TUBA), dont ceux liés<br />

à l’HBP, touchent plus de 25 % des hommes de plus de 40 ans<br />

et leur fréquence augmente avec l’âge. L’élargissement du<br />

sommet de la pyramide des âges prédit une augmentation de<br />

l’incidence des TUBA liés à l’HBP au cours des prochaines<br />

décennies [15, 16] . La progression de l’HBP peut entraîner, après<br />

quelques années, des troubles graves comme la RAU [17] .Sila<br />

RAU n’est pas la complication la plus fréquente de l’HBP, elle<br />

représente cependant un facteur de risque de mortalité dans<br />

l’année suivante [18] . L’âge représente le premier facteur de<br />

risque avec une probabilité huit fois plus élevée de présenter<br />

une RAU chez les 70-79 ans que chez les 40-49 ans [3] . Un débit<br />

urinaire maximal inférieur à 12 ml/s multiplie par quatre le<br />

risque de RAU. Un score International Prostatic Score Symptoms<br />

(IPSS) supérieur à 7, un volume prostatique supérieur à<br />

« 30 ml », ou un taux de prostate specific antigen (PSA) supérieur<br />

à 1,4 ng/ml multiplient par trois le risque de survenue d’une<br />

RAU [3] . L’apparition d’un résidu postmictionnel est également<br />

un facteur marquant de l’évolution de l’HBP.<br />

Dans la grande majorité des cas, la RAU est liée à l’évolution<br />

naturelle de l’HBP [19, 20] .<br />

Les mécanismes de la rétention sont liés à des facteurs<br />

mécaniques, mais aussi fonctionnels ou intraprostatiques. Lors<br />

des RAU, il existe fréquemment des remaniements inflammatoires<br />

liés à un infarctus prostatique.<br />

Le développement des lobes latéraux prostatiques entraîne<br />

leur saillie dans l’urètre prostatique et peut induire une obstruction<br />

complète de l’uretère par leur accolement.<br />

L’obstruction mécanique de l’HBP est étroitement liée au<br />

volume de la zone de transition. Les patients dont le volume de<br />

la zone de transition (TZ) dépasse 65 % du volume prostatique<br />

total ont un risque plus important de RAU [21] . Le développement<br />

d’une HBP aux dépens du lobe médian est également<br />

possible, cette dernière peut alors limiter l’ouverture de l’angle<br />

cervico-urétral lors de la miction. Les prostatites aiguës sont<br />

également un facteur de risque important de RAU [22] .<br />

Emberton et al., ont déterminé l’étiologie des RAU chez<br />

3 875 hommes atteints d’HBP. Leurs résultats sont retranscrits<br />

dans le Tableau 1 [14] .<br />

Adénocarcinome prostatique<br />

Un cancer de la prostate est retrouvé dans 19,2 % des cas de<br />

RAU [23] . Toutefois, les cancers se développent aux dépens de la<br />

Urologie<br />

Tableau 1.<br />

Étiologies des rétentions aiguës d’urine (RAU) selon Emberton et al. [14] .<br />

Étiologie Incidence<br />

(en %)<br />

HBP 70,30 %<br />

Postopératoire 11,20 %<br />

Alcoolisation massive 3,50 %<br />

Fécalome 3,30 %<br />

Médicaments (parasympaticolytiques,<br />

sympathicomimétiques)<br />

Efforts de retenue de la miction (voyage en voiture,<br />

immobilisation)<br />

zone périphérique et les tumeurs doivent donc être volumineuses<br />

pour provoquer une RAU. Ainsi, la survenue d’une RAU<br />

n’est en général pas consécutive au cancer, mais secondaire à<br />

une autre étiologie qui permet de le dépister.<br />

Obstacles cervico-urétraux<br />

Les affections du col vésical telles que la sténose congénitale,<br />

la sclérose du col ou la maladie de Marion peuvent entraîner<br />

une RAU. Dans cette dernière, une hypertrophie du col avec<br />

une sclérose associée entraîne une diminution de la lumière du<br />

canal urétral. Les obstacles urétraux chez l’homme sont principalement<br />

des sténoses dont l’étiologie peut être infectieuse<br />

(gonococcie, voire tuberculose urinaire ou bilharziose), mais<br />

aussi iatrogène. Même à distance de tout geste endoluminal, les<br />

sténoses urétrales, pourvoyeuses de dysuries importantes,<br />

représentent un problème thérapeutique, compte tenu du haut<br />

degré de récidive. Cependant, il peut également survenir au<br />

décours de tout geste endo-urétral, tel que l’ablation d’un<br />

cathéter urétral, une endoscopie ou une chirurgie cervicoprostatique,<br />

une RAU réflexe, sans obstacle retrouvé. Enfin, des<br />

calculs ayant migré dans la vessie peuvent également s’enclaver<br />

et obstruer l’urètre, conduisant ainsi à la survenue d’une RAU.<br />

Causes péniennes<br />

Un phimosis très serré, un paraphimosis non réduit dont<br />

l’œdème du gland comprime l’urètre, un priapisme, ou la<br />

strangulation par un anneau pénien sont des causes de RAU.<br />

Certaines tumeurs locales peuvent aboutir à une compression<br />

urétrale comme les métastases caverneuses de cancer prostatique<br />

ou autre. La sténose du méat est une cause rare de rétention<br />

aiguë d’urine. Elle peut être associée à un hypospadias congénital<br />

ou être iatrogène après tout geste invasif pour l’urètre.<br />

Causes traumatiques<br />

Lors des traumatismes du bassin, une dilacération, une<br />

rupture partielle ou complète de l’urètre membraneux ou<br />

bulbaire peuvent également être responsables d’une RAU. Ce<br />

diagnostic est fortement suspecté en cas d’urétrorragie posttraumatique.<br />

Dans ce contexte, le drainage urinaire initial doit<br />

impérativement être réalisé par voie sus-pubienne.<br />

Chez la femme<br />

2,80 %<br />

2,40 %<br />

Douleurs anorectales 2,20 %<br />

Infection urinaire (RAU fébrile exclu en France) 2,00 %<br />

État de santé précaire 0,40 %<br />

Lithiases urinaires 0,30 %<br />

Autres 1,60 %<br />

HBP : hypertrophie bénigne de la prostate.<br />

Rétentions aiguës d’urine complètes 18-207-D-10<br />

Les rétentions aiguës d’urines sur obstacle sont rares. L’origine<br />

psychogène est possible, mais ne doit être envisagée qu’en<br />

diagnostic d’élimination. Les mécanismes mis en cause peuvent<br />

être une compression extrinsèque de l’urètre, du col vésical ou<br />

un envahissement urétral tumoral. Les causes compressives en<br />

dehors de la grossesse sont nombreuses : kystes para-urétraux,<br />

fibromes utérins, kystes mullériens, tératomes ovariens [24] .<br />

Durant la grossesse, la rétroversion de l’utérus gravide peut<br />

empêcher l’ouverture du col cervical et aboutir à une RAU [25] .<br />

Une grossesse extra-utérine, un hydrosalpinx peuvent également<br />

3


18-207-D-10 Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

aboutir à une rétention aiguë [26, 27] . L’envahissement de l’urètre<br />

peut être lié à un carcinome urétral. Enfin, une imperforation<br />

de l’hymen, un traumatisme vulvaire, une sténose par<br />

coalescence des petites lèvres, un myxome vaginal ou un<br />

hématocolpos sont d’autres causes gynécologiques de RAU [28] .<br />

Troubles vésicosphinctériens<br />

Causes anorectales<br />

Une constipation importante et un fécalome sont des causes<br />

fréquentes de RAU. La cure chirurgicale hémorroïdaire [29] ,la<br />

cure de fistule anale sont d’autres étiologies de RAU avec une<br />

prévalence variant de 0,9 % à 21,9 % [30, 31] . L’étiologie exacte<br />

de ce type de rétention n’est pas clairement élucidée et semble<br />

être multifactorielle. Pour certains, la douleur pourrait induire<br />

de manière réflexe une hypotonie du détrusor et une contraction<br />

du sphincter urétral [32] . Pour d’autres, c’est la dilatation<br />

anale peropératoire et la surdistension vésicale qui empêcheraient<br />

la contraction du détrusor, entraînant un spasme réflexe<br />

du sphincter urétral [33] . Les tumeurs rectales, les fissures<br />

rectales, les abcès périrectaux ainsi que les rapports anaux<br />

peuvent parfois engendrer une rétention aiguë.<br />

Rétention du post-partum<br />

La rétention urinaire du post-partum (RUP) est une complication<br />

peu fréquente et mal connue de l’accouchement par voie<br />

basse. Elle survient après 0,7 à 0,9 % des accouchements. Elle<br />

varie, selon les auteurs, de l’absence de miction à 12 heures de<br />

l’accouchement à la détection systématique d’un résidu postmictionnel<br />

supérieur à 150 ml. Dans notre pratique obstétricale<br />

actuelle, la définition la plus adaptée semble être celle de<br />

Glavind et al. qui la diagnostiquent devant l’absence de miction<br />

spontanée 6 heures après un accouchement associé à un globe<br />

vésical de volume supérieur à 400 ml. Il s’agit rarement d’un<br />

facteur isolé, mais le plus souvent de facteurs préexistants<br />

associés. Les neuropathies d’étirement du nerf pudendal interrompant<br />

l’arc réflexe qui nuisent à la relaxation du plancher<br />

pelvien et des sphincters urétraux peuvent entraîner une RAU.<br />

La douleur périnéale lors de l’accouchement peut également<br />

provoquer un spasme du sphincter urétral lisse par stimulation<br />

sympathique des récepteurs a-1 du col vésical, voire une<br />

contracture réflexe du sphincter urétral strié. Enfin, une<br />

compression prolongée par la présentation fœtale et un hématome<br />

formé lors d’un accouchement traumatique peuvent<br />

engendrer un œdème du col vésical qui peut constituer un<br />

obstacle mécanique à la miction.<br />

Rétentions postopératoires<br />

Il existe de nombreux facteurs pouvant conduire à une<br />

rétention aiguë d’urine dans les suites d’une chirurgie quelle<br />

qu’en soit la nature. Le type d’anesthésie influence le risque de<br />

RAU postopératoire. L’anesthésie épidurale est plus à risque<br />

d’entraîner une rétention aiguë par rapport à une anesthésie<br />

générale [34, 35] . Le sexe masculin et l’âge avancé restent, pour<br />

certains, des facteurs de risque non négligeables. Les interventions<br />

les plus risquées sont celles touchant la sphère urogénitale,<br />

la chirurgie colorectale, la cure de hernie inguinale et les<br />

arthroplasties de hanche et de genou. Un autre facteur important<br />

de RAU postopératoire est l’hyperdistension vésicale<br />

consécutive à l’hyperdiurèse induite par le remplissage vasculaire.<br />

Au cours d’une intervention longue et en l’absence de<br />

sondage, la vessie peut se distendre et aboutir à « un claquage<br />

du détrusor » (ou hypotonie acquise). L’apport de solutés<br />

intraveineux est donc un facteur de risque indépendant de<br />

RAU [31] . Le mauvais contrôle de la douleur postopératoire<br />

apparaît également comme un facteur de risque de RAU dans la<br />

chirurgie de la hernie inguinale. Enfin, les hommes qui subissent<br />

une résection digestive, et plus particulièrement lors des<br />

résections antérieures du rectum, ont également une forte<br />

probabilité de développer une RAU postopératoire en raison du<br />

risque de lésions de l’innervation végétative de la vessie.<br />

Rétentions psychogènes<br />

Les étiologies psychiatriques ne se conçoivent qu’une fois<br />

toutes les étiologies organiques, notamment neurologiques et<br />

médicamenteuses, éliminées. Les véritables troubles urinaires<br />

psychogènes sont rares et ne représentent que 0,7 % des<br />

troubles urinaires de l’adulte. Les syndromes dépressifs<br />

majeurs [36] et les victimes d’abus sexuels [37] sont des causes de<br />

rétention aiguë d’urine. Des troubles phobiques de l’ordre de la<br />

phobie sociale ou certaines formes de schizophrénie peuvent<br />

également conduire à la rétention des urines [38, 39] .<br />

Rétentions médicamenteuses<br />

Les molécules pouvant entraîner une rétention aiguë d’urines<br />

sont nombreuses et agissent de manière générale en inhibant la<br />

contraction du détrusor. La prise du médicament peut être un<br />

événement déclencheur, mais correspond le plus souvent au<br />

facteur précipitant la RAU sur un terrain prémorbide comme<br />

l’HBP. Certains médicaments inhibent le contrôle volontaire de<br />

la miction alors que d’autres ont une action directe sur l’appareil<br />

vésicosphinctérien via une action sympathicomimétique ou<br />

parasympathicolytique.<br />

Parmi les médicaments les plus incriminés, on retrouve : les<br />

agonistes a-adrénergiques, les b-bloquants, les anticholinergiques,<br />

les antidépresseurs, les neuroleptiques, les antiparkinsoniens,<br />

les myorelaxants, les morphiniques et agonistes, les<br />

antihistaminiques, les anticonvulsivants et plus rarement les<br />

anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) [40] . Les collyres, les<br />

voies sublinguales ou nasales ont un passage dans la circulation<br />

systémique et peuvent également entraîner une RAU (collyres<br />

b-bloquant, spray sublingual de buprénorphine) (Tableau 2).<br />

Rétentions neurologiques<br />

Les origines neurologiques sont nombreuses et touchent les<br />

deux sexes avec la même fréquence, mais avec une prévalence<br />

différente selon les étiologies. Il existe deux grands niveaux<br />

d’atteinte des voies neurologiques urinaires. On distingue les<br />

atteintes situées au-dessus (lésions suprasacrées) et au-dessous<br />

(lésions sacrées, radiculaires et neurogènes) du centre réflexe<br />

mictionnel situé dans la moelle sacrée (Tableau 3).<br />

Lésions suprasacrées<br />

L’appareil vésicosphinctérien fonctionne sous le contrôle du<br />

tronc cérébral et des hémisphères cérébraux. Les lésions neurologiques<br />

interrompant les fibres qui se dirigent vers le centre<br />

sacré de la miction peuvent entraîner des troubles vésicosphinctériens<br />

importants comme la RAU. Les accidents vasculaires<br />

cérébraux (AVC), les lésions du cortex frontal, la sclérose<br />

en plaques, le lupus érythémateux disséminé, la maladie de<br />

Parkinson sont des causes cérébrales de RAU [41, 42] . Certaines<br />

affections infectieuses comme la méningite, la méningoencéphalite<br />

herpétique, la poliomyélite ou le virus de l’immunodéficience<br />

humaine (VIH) peuvent entraîner des RAU. Les<br />

lésions traumatiques médullaires telles que les hématomes<br />

épiduraux ou les compressions médullaires peuvent également<br />

être responsables de rétention aiguë [43] . Les lésions neurologiques<br />

suprasacrées entraînent le plus souvent des troubles<br />

vésicosphinctériens à type de fuites urinaires par défaut du<br />

système central d’inhibition. Toutefois, lors de la phase aiguë<br />

d’un traumatisme médullaire ou choc spinal (équivalent à un<br />

syndrome neurogène périphérique), la vessie devient atone. De<br />

plus, la pression cervicale reste élevée et le sphincter strié reste<br />

fermé, empêchant l’évacuation des urines, ce qui peut conduire<br />

« au claquage du détrusor ».<br />

Les compressions médullaires peuvent être d’origine extradurale<br />

ou intradurale. Les hernies discales, les atteintes rachidiennes<br />

secondaires à des métastases vertébrales de cancers<br />

ostéophiles, aux myélomes ou aux lymphomes, sont des causes<br />

de RAU d’origine extradurale [44] . Il en est de même pour la<br />

4 Urologie


Tableau 2.<br />

Traitements médicamenteux pouvant provoquer une rétention aiguë d’urine (RAU) iatrogène.<br />

Classe Noms (exemples) Action Effet<br />

Alphastimulants Néosynéphrine<br />

spondylodiscite infectieuse ou l’hématome épidural. Les méningiomes<br />

et les neurinomes font partie des causes possibles de<br />

compression intradurale et extramédullaire.<br />

Lésions radiculomédullaires sacrées et lésions<br />

neurogènes<br />

Les lésions radiculomédullaires sacrées et les lésions neurogènes<br />

comprennent toutes les lésions situées sous le centre sacré<br />

de la miction. Les atteintes neurologiques à ce niveau rentrent<br />

souvent dans le cadre de traumatismes importants où l’on<br />

retrouve des lésions des racines du cône médullaire terminal ou<br />

des syndromes de la queue-de-cheval. Dans ces cas, l’arc réflexe<br />

mictionnel est rompu, provoquant une perte de la sensibilité et<br />

de la contraction vésicale. Des atteintes infectieuses d’origine<br />

virale, parasitaire (bilharziose) ou auto-immune (syndrome de<br />

Guillain-Barré), le virus de l’herpès peuvent également, lors<br />

d’atteintes de la filière génitale, entraîner des RAU. Enfin, une<br />

neuropathie diabétique évoluée peut aboutir à un véritable<br />

syndrome neurogène avec absence de sensation du besoin<br />

d’uriner associée à une faible contractilité détrusorienne<br />

pouvant conduire à une RAU.<br />

Pédiatrique<br />

Éphédrine<br />

Noradrénaline<br />

Les cas de rétention aiguë d’urine sont relativement rares<br />

chez l’enfant et leurs étiologies diffèrent de chez l’adulte. La<br />

RAU peut être d’origine neurologique, liée à des troubles<br />

vésicosphinctériens, infectieuse ou secondaire à des médicaments<br />

[45] . Les causes locales d’inflammation vésicale, les<br />

urétérocèles, les lésions bénignes de la vessie telles que des<br />

diverticules vésicaux [46] , la constipation, la hernie inguinale<br />

étranglée, un abcès appendiculaire et les calculs du bas appareil<br />

peuvent également aboutir à des phénomènes rétentionnels.<br />

Des causes plus rares comme des rhabdomyosarcomes de la<br />

vessie [47] , une myéloméningocèle [48] ou l’hypermagnésémie du<br />

nouveau-né dont la mère a été traitée par des sels de magnésium<br />

ont été décrits.<br />

Sympathomimétique Augmentation du tonus urétral<br />

Anticholinergiques Atropine Parasympatholytique Diminution des contractions du<br />

détrusor<br />

Antihistaminique Cétirizine<br />

Antidépresseurs IRS Citalopram<br />

Fluoxétine<br />

Paroxétine<br />

Antidépresseurs IMAO Moclobémide<br />

Antidépresseurs Tricycliques Clomipramine<br />

Amitriptyline<br />

Antiparkinsoniens anticholinergiques Tropatépine<br />

Trihexyphénidyle<br />

Neuroleptiques Clozapine<br />

Amitriptyline<br />

Halopéridol<br />

Morphiniques Morphine Diminution du tonus des fibres lisses<br />

Benzodiazépines Diazépam<br />

Anticonvulsivants Carbamazépine<br />

Androgènes Testostérone Augmentation du volume prostatique Diminution de la lumière urétrale<br />

Analogues LH-RH Goséréline Augmentation transitoire de la testostéronémie<br />

AINS Célécoxib Inhibition de la COX-2 Diminuerait les contractions du<br />

détrusor<br />

AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens ; COX-2 : cyclo-oxygénase 2 ; IMAO : inhibiteurs de la monoamine oxydase ; IRS : inhibiteurs de la recapture de la sérotonine ;<br />

LH-RH : luteinizing hormone-releasing hormone.<br />

Urologie<br />

■ Diagnostic<br />

Diagnostic positif<br />

Examen clinique<br />

La RAU est une urgence thérapeutique au diagnostic clinique,<br />

dont la prise en charge initiale doit être réalisable par tout<br />

praticien. Dans les cas typiques de rétention aiguë, le diagnostic<br />

est aisé. L’examen clinique qui comprend l’interrogatoire ainsi<br />

que l’examen physique et neurologique permet de confirmer la<br />

RAU, d’apprécier son retentissement sur le haut appareil et de<br />

présumer de son étiologie.<br />

Interrogatoire<br />

L’anamnèse évoque d’emblée le diagnostic de RAU. Elle<br />

retrouve la survenue brutale d’un besoin mictionnel douloureux<br />

associé à une impossibilité d’uriner, et dont le patient peut<br />

souvent préciser l’heure de début. Une expression familière<br />

résume parfaitement le tableau : « pisser ou mourir ». L’interrogatoire<br />

permet de présumer du mécanisme impliqué : remplissage<br />

excessif de la vessie, prise de médicaments ou d’alcool,<br />

symptômes évoquant une infection urinaire, etc. Il permet<br />

également une orientation étiologique selon le contexte de<br />

survenue et le terrain sous-jacent : âge du patient, symptomatologie<br />

antérieure (TUBA préexistants), antécédents chirurgicaux<br />

et notamment urologiques, maladies vasculaires pouvant influer<br />

sur la filière urinaire (telles que diabète, artériopathie, neuropathie,<br />

etc.), constipation, traitement habituel, etc.<br />

Examen physique<br />

Rétentions aiguës d’urine complètes 18-207-D-10<br />

L’examen de l’abdomen retrouve la présence d’un globe<br />

vésical défini par la perception d’une matité sus-pubienne<br />

convexe vers le haut et douloureuse à la palpation. La palpation<br />

du globe augmente classiquement le besoin mictionnel. Chez<br />

les sujets maigres, le globe vésical peut se voir dès l’inspection<br />

et la palpation permet de délimiter son bord supérieur. À<br />

l’inverse, chez les patients obèses, le globe vésical est difficilement<br />

perceptible et une échographie pelvienne peut contribuer<br />

5


18-207-D-10 Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

Tableau 3.<br />

Étiologies neurologiques des rétentions aiguës d’urine (RAU).<br />

Lésions du système nerveux central<br />

AVC<br />

SEP<br />

Lupus érythémateux<br />

disséminé<br />

Lésion expansive frontale<br />

Maladie de Parkinson<br />

Infection Méningite<br />

au diagnostic de rétention aiguë d’urine. La RAU peut également<br />

être accompagnée de sueurs, d’une agitation et parfois,<br />

chez le sujet âgé, d’un syndrome confusionnel. L’examen<br />

général permet éventuellement d’apprécier le retentissement sur<br />

le haut appareil par la recherche d’une distension rénale à la<br />

palpation des fosses lombaires et peut mettre en évidence des<br />

signes cliniques liés à une insuffisance rénale aiguë survenant<br />

après à la décompensation d’une insuffisance rénale chronique<br />

par l’épisode de RAU (œdèmes des membres inférieurs, poussée<br />

hypertensive, surcharge pulmonaire, signes neurotoxiques<br />

pouvant aller jusqu’au coma urémique, etc.). La réalisation des<br />

touchers pelviens doit être systématique, notamment le toucher<br />

rectal chez l’homme, qui est réalisé après la vidange vésicale<br />

afin de ne pas minorer le volume prostatique. Le toucher rectal<br />

permet d’estimer le volume prostatique, de dépister un cancer<br />

de la prostate ou du rectum de vérifier la vacuité de l’ampoule<br />

rectale (absence de fécalome) et de réaliser un testing musculaire.<br />

Chez la femme, les touchers pelviens peuvent révéler une masse<br />

pelvienne bénigne d’origine gynécologique (utérus polyfibromyomateux,<br />

fibrome utérin pédiculé, etc.) ou d’origine maligne<br />

diverse. Enfin, l’examen des organes génitaux externes permet<br />

d’écarter une cause facilement identifiable de RAU telle qu’une<br />

sténose méatique, un phimosis serré, une tumeur de verge ou<br />

de l’urètre et une sténose par coalescence des petites lèvres chez<br />

la femme.<br />

Examen neurologique<br />

Méningoencéphalite herpétique<br />

Poliomyélite<br />

VIH<br />

Maladie de Lyme<br />

Compression médullaire Extradurales :<br />

– hernie discale<br />

– traumatique<br />

– origine tumorale (métastase, myélome)<br />

– origine infectieuse (spondylodiscite)<br />

Intradurales :<br />

– méningiome<br />

– neurinome<br />

Lésions du système nerveux périphérique<br />

Polyneuropathie diabétique<br />

Infection Syndrome de Guillain-Barré :<br />

Syndrome de la queue-decheval<br />

– bilharziose urinaire<br />

– herpès génital<br />

– zona dans les dermatomes sacrés<br />

Hernie discale :<br />

– traumatique<br />

– tumoral<br />

AVC : accident vasculaire cérébral ; SEP : sclérose en plaques ; VIH : virus de<br />

l’immunodéficience humaine.<br />

Même si les RAU sont le plus fréquemment obstructives, il ne<br />

faut pas écarter une éventuelle origine neurologique, d’autant<br />

plus s’il s’agit d’un sujet jeune sans obstacle cervico-urétral<br />

évident. C’est pourquoi l’examen neurologique périnéal est<br />

primordial dans le bilan de RAU. En effet, la survenue inopinée<br />

d’une RAU chez le sujet jeune peut être un signe inaugural de<br />

myéloradiculonévrite infectieuse, de syndrome de Guillain-<br />

Barré ou d’une tumeur myélique qui sera confirmée par une<br />

imagerie par résonance magnétique (IRM) médullaire. Pour<br />

certains, une RAU de survenue brutale chez une femme jeune<br />

ne doit pas être étiquetée comme bénigne ou psychogène en<br />

l’absence de ponction lombaire, même en l’absence de signe<br />

neurologique [49] .<br />

L’examen neurologique peut être succinct, mais il sera<br />

approfondi lors de la RAU du sujet jeune sans cause évidente.<br />

Il doit comprendre :<br />

le testing des releveurs et du sphincter volontaire anal, coté de<br />

0 à 5 lors du toucher rectal ;<br />

une étude de la sensibilité périnéale superficielle : faces<br />

postérieures des cuisses (S2), fesses (S3), pourtour de la marge<br />

anale (S4), triangle postérieur anal (S5) ;<br />

la mise en évidence du réflexe bulbocaverneux ou clitoridoanal<br />

afin d’étudier cliniquement l’arc réflexe honteux interne<br />

(S2-S3-S4), impliqué dans le contrôle mictionnel ;<br />

la recherche du réflexe anal à la toux, qui correspond à la<br />

contraction involontaire du sphincter anal lors de la toux<br />

(T12) ;<br />

l’étude des métamères proches de ceux contrôlant la miction<br />

(S2, fléchisseurs des orteils).<br />

Examens complémentaires<br />

Examens biologiques<br />

Les examens à réaliser sont :<br />

une bandelette urinaire (BU) plus ou moins associée à un<br />

examen cytobactériologique des urines (ECBU) en cas de<br />

positivité, à la recherche d’une infection urinaire ;<br />

un ionogramme sanguin avec urémie et créatinémie, pour<br />

dépister une éventuelle insuffisance rénale aiguë et des<br />

troubles hydroélectrolytiques ;<br />

une numération-formule sanguine (NFS) associée à un dosage<br />

de la protéine C réactive (CRP) ou de la vitesse de sédimentation<br />

(VS) pouvant orienter vers une maladie infectieuse ou<br />

inflammatoire ;<br />

un taux de PSA en fonction du terrain à la recherche d’un<br />

cancer de la prostate. Cependant, celui-ci sera surestimé par<br />

l’état de RAU [50] .<br />

Échographie des voies urinaires<br />

L’échographie de l’arbre urinaire permet une exploration<br />

rapide, simple, non invasive et fiable de l’appareil urinaire. Elle<br />

confirme, quantifie et localise le globe vésical. Elle permet<br />

d’apprécier le retentissement sur le haut appareil. Elle est<br />

recommandée en cas de RAU, mais n’est pas indispensable et sa<br />

réalisation ne doit pas retarder le drainage vésical.<br />

Son utilisation est cependant essentielle dans des certaines<br />

situations :<br />

en cas d’obésité morbide ou d’antécédent de chirurgie<br />

abdominale avec cicatrice médiane sous-ombilicale où elle<br />

permet de repérer, de marquer le point de ponction du<br />

drainage sus-pubien ;<br />

dans un contexte d’ascite ou d’obésité morbide où elle<br />

permet de confirmer le diagnostic ;<br />

en cas de traumatisme du bassin où elle permet de confirmer<br />

et de localiser le globe urinaire avant ponction sus-pubienne.<br />

Étude de la vessie. L’échographie sus-pubienne est réalisée à<br />

l’aide d’une sonde superficielle de 3 MHz, en coupes transversales<br />

et longitudinales afin de réaliser la mesure des trois plus<br />

grandes dimensions de la vessie (hauteur × largeur × profondeur).<br />

Plusieurs formules mathématiques permettent de calculer<br />

le volume du globe à partir de ces trois mesures, en assimilant<br />

la vessie à une sphère ou à une ellipse. La formule la plus<br />

employée dans la pratique courante est celle qui assimile le<br />

volume du globe comme la moitié du produit de ces trois<br />

dimensions. L’échographie sus-pubienne a néanmoins ses<br />

limites. En effet, c’est un examen opérateur-dépendant, et la<br />

vessie peut être visualisée sous différentes formes en fonction du<br />

péristaltisme intestinal. La marge d’erreur ainsi engendrée est<br />

6 Urologie


Figure 3. Cliché d’abdomen sans préparation (ASP) couché dans le<br />

cadre d’une rétention aiguë d’urine (RAU).<br />

approximativement de 15 % à 25 % pour des volumes supérieurs<br />

à 150 ml et est supérieure à 25 % pour des volumes<br />

moins importants [51] . Les difficultés sont plus importantes chez<br />

l’enfant, car il existe des faux négatifs de façon quasi constante<br />

[51] . En pratique courante, cette marge d’erreur est<br />

acceptable, notamment chez un adulte en RAU. L’échographie<br />

permet également la recherche de signe de vessie de lutte<br />

(hypertrophie du détrusor visualisé par un épaississement de la<br />

paroi vésicale, visualisation de diverticules) témoignant d’un<br />

obstacle ancien.<br />

État du haut appareil. L’échographie rénale permet d’objectiver<br />

une répercussion de la RAU sur le haut appareil urinaire en<br />

recherchant une dilatation des cavités pyélocalicielles (mesure<br />

du diamètre antéropostérieur du bassinet supérieur à 10 mm).<br />

Elle permet également la mesure du parenchyme rénal qui est<br />

atrophique en cas d’insuffisance rénale chronique.<br />

Radiographie standard d’abdomen sans préparation (ASP)<br />

La radiographie standard a très peu d’intérêt. Elle est réalisée<br />

en l’absence d’échographie. Le cliché d’ASP peut révéler des<br />

signes indirects de RAU tels qu’une opacité sus-pubienne<br />

refoulant vers le haut les clartés digestives, des calculs rénaux,<br />

vésicaux ou des calcifications prostatiques (Fig. 3).<br />

Exploration rétrograde<br />

Les explorations urinaires rétrogrades (fibroscopie urétrovésicale,<br />

cystoscopie, cystographie rétrograde, bilan urodynamique)<br />

sont inutiles en urgence et peuvent engendrer des complications<br />

infectieuses ou traumatiques. Seule la fibroscopie a un<br />

rôle en urgence dans les cas de RAU avec une contre-indication<br />

au drainage sus-pubien et un sondage impossible. Elle est<br />

réalisée par l’urologue afin de passer un fil guide jusque dans la<br />

vessie pour guider le passage de la sonde. Le sondage urétral<br />

« diagnostique » doit être absolument proscrit, compte tenu de<br />

son caractère invasif et des fréquentes complications traumatiques<br />

et infectieuses qui lui font suite.<br />

Diagnostic étiologique<br />

Les étiologies de la RAU ne seront pas redétaillées. Soulignons<br />

encore une fois, d’une part, la valeur de l’examen clinique et,<br />

d’autre part, le fait que la rétention aiguë n’est pas pathognomonique<br />

de la présence d’un obstacle organique ou fonctionnel<br />

et qu’elle peut être multifactorielle.<br />

Urologie<br />

.<br />

Diagnostic différentiel<br />

« Incontinences » de miction par rengorgement<br />

Il s’agit, dans ce cas, d’une rétention chronique d’urine<br />

incomplète se complétant. Il existe des fuites par rengorgement<br />

qui sont prises pour des mictions. Le globe vésical est peu ou<br />

non douloureux, avec une disparition du besoin mictionnel et<br />

des fuites sans miction. Dans la plupart des cas, l’interrogatoire<br />

correctement conduit suffit à rétablir le diagnostic.<br />

Anurie et oligoanurie<br />

Dans ce tableau, il n’y a pas de miction ni de besoins<br />

mictionnels et la vessie est vide cliniquement. L’échographie<br />

confirme la vacuité vésicale et peut mettre en évidence une<br />

éventuelle dilatation du haut appareil, témoignant de la nature<br />

obstructive de l’anurie.<br />

Ascite<br />

L’examen clinique d’un patient ascitique présentant des<br />

douleurs abdominales retrouve une matité déclive au niveau des<br />

flancs et non sus-pubienne à convexité supérieure.<br />

■ Traitements<br />

Traitement d’urgence : drainage vésical<br />

Sondage urétral<br />

Principes généraux<br />

Le sondage urétral est réalisé par cathétérisme rétrograde à<br />

l’aide d’une sonde vésicale. Bien que couramment réalisé, le<br />

sondage n’en reste pas moins un geste invasif. Un sondage<br />

septique peut avoir de lourdes conséquences chez un patient<br />

dont l’état général est précaire. La sténose urétrale est la<br />

complication redoutée en cas de sondage traumatique, car elle<br />

a un retentissement certain sur la qualité de vie ultérieure du<br />

patient. Selon l’article R. 4311-10 du Code de la santé publique,<br />

le premier sondage chez un homme est un acte médical.<br />

Technique<br />

Le sondage doit être réalisé de façon minutieuse, atraumatique,<br />

dans des conditions d’asepsie chirurgicale et être indolore.<br />

Une première toilette soigneuse de la verge ou de la vulve doit<br />

être réalisée avant la désinfection par un antiseptique non<br />

alcoolique. Des gants et un champ troué stériles sont utilisés.<br />

Pour lubrifier la sonde et diminuer la douleur, un gel lubrifiant<br />

stérile, idéalement de lidocaïne à usage urétral (Xylocaïne ® 2%<br />

gel urétral) est déposé sur la sonde. Il est recommandé d’utiliser<br />

une sonde de calibre modéré (ch 16-18), si possible en silicone<br />

(type Silastic ® ), afin de diminuer le risque de sténose urétrale.<br />

Il est également recommandé d’utiliser un collecteur d’urine<br />

stérile préadapté sur la sonde afin de réaliser un sondage en<br />

système clos qui diminue le risque d’infection iatrogène. Ce<br />

système clos ne doit être déconnecté qu’en cas d’absolue<br />

nécessité. Après avoir vérifié l’étanchéité du ballonnet, l’introduction<br />

de la sonde dans l’urètre lubrifié se fait sur une verge<br />

« tendue au zénith ». La progression de la sonde est douce, de<br />

l’urètre antérieur vers l’urètre bulbaire. La mobilisation de la<br />

verge, toujours tendue vers les pieds, permet d’aligner l’urètre et<br />

facilite la progression de la sonde vers l’urètre prostatique.<br />

Lorsque la sonde pénètre dans la vessie, les urines s’écoulent<br />

librement dans le sac collecteur. Une fois la sonde enfoncée<br />

jusqu’à la garde, le ballonnet est rempli par 10 ml d’eau stérile<br />

(et non de sérum physiologique pour éviter sa cristallisation).<br />

Chez l’homme, il est impératif de penser à recalotter le prépuce<br />

pour prévenir le risque de paraphimosis.<br />

Indications<br />

Rétentions aiguës d’urine complètes 18-207-D-10<br />

Le sondage urétral est le moyen de drainage le plus employé,<br />

car il « semble » moins invasif que le drainage sus-pubien et<br />

peut être réalisable au domicile du patient. Il est indispensable<br />

en cas de RAU avec hématurie macroscopique et présence de<br />

7


.<br />

18-207-D-10 Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

Figure 4. Différents types de sondes. 1. Sonde hydrophile pour autosondage<br />

; 2. sonde de Foley ; 3. sonde béquillée d’Aubert ; 4. sonde<br />

double courant de Dufour ; 5. sonde de Marion (pour décaillotage).<br />

caillots dans la vessie où la mise en place d’une sonde double<br />

courant permet la réalisation de lavages vésicaux continus.<br />

Contre-indications<br />

Parmi les contre-indications au sondage urétral, il existe :<br />

la RAU fébrile qui signe une prostatite aiguë et où le passage<br />

de la sonde au niveau de l’urètre prostatique peut déclencher<br />

une décharge bactérienne et une septicémie ;<br />

une fracture du bassin, où la suspicion de rupture urétrale<br />

impose la mise en place d’un cathéter sus-pubien ;<br />

un échec de sondage avec urétrorragie ;<br />

une sténose urétrale connue.<br />

Cas particuliers des « sondages difficiles »<br />

Dans certains cas, le sondage n’est pas réalisable avec les<br />

sondes « classiques » de type Foley. Il existe plusieurs types de<br />

sondes vésicales qui peuvent alors être utilisées : sondes<br />

béquillées (type Foley béquillée ou type sonde d’Aubert), sondes<br />

double-courant béquillées (type Dufour), sondes de Mercier ou<br />

Marion et sondes hydrophiles (type Lofric ® ). En cas de sténose,<br />

une sonde de calibre inférieur peut être utilisée pour franchir<br />

l’obstacle (ch 10-12). Dans le cas d’un sondage impossible lié à<br />

un volumineux adénome prostatique, c’est l’utilisation d’une<br />

sonde de plus gros calibre béquillée qui facilite le sondage (ch<br />

20-22). Certaines équipes utilisent également des sondes<br />

hydrophiles, utilisées habituellement pour les sondages minute<br />

qui ont l’avantage d’être très lubrifiées et permettent d’atteindre<br />

plus facilement la vessie. Un fil guide peut y être introduit dans<br />

l’objectif de monter secondairement une sonde classique. Cette<br />

technique permet la réussite du sondage dans 70 % des cas<br />

après un premier échec [52] . Un mandrin de « Freudenberg »<br />

peut également être utilisé par un praticien entraîné. Le dernier<br />

recours en cas d’échec persistant et en cas de contre-indication<br />

au drainage sus-pubien est la mise en place d’une sonde par<br />

fibroscopie ou cystoscopie (Fig. 4, 5).<br />

Drainage par voie sus-pubienne<br />

Principes généraux<br />

Le cathéter sus-pubien vésical (communément appelé « cystocathéter<br />

») est un système de drainage vésical n’empruntant<br />

pas la filière urétroprostatique. Il peut être posé au lit du patient<br />

sous anesthésie locale et devrait être connu de tout praticien. Il<br />

est difficilement réalisable au domicile du patient, mais dans le<br />

cas où le sondage urinaire est impossible, une ponction évacuatrice<br />

à l’aiguille fine peut soulager le patient en attendant son<br />

transport jusqu’à une structure hospitalière. La pose d’un<br />

cathéter sus-pubien n’est réalisée que sur un globe vésical. S’il<br />

existe un doute clinique, il peut être réalisé une échographie<br />

vésicale.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

Figure 5. Mandrin de Freudenberg.<br />

A. Sans sonde de Foley.<br />

B. Avec sonde de Foley.<br />

Technique<br />

Comme pour le sondage à demeure, la mise en place d’un<br />

cathéter sus-pubien intravésical impose une asepsie chirurgicale<br />

rigoureuse avec antisepsie cutanée et utilisation de matériel<br />

stérile. Le cathéter sus-pubien est posé chez un patient en<br />

décubitus dorsal strict, sur la ligne médiane, à deux travers de<br />

doigts au-dessus de la symphyse pubienne. L’anesthésie locale<br />

réalisée au niveau de ce repère permet d’atteindre la vessie et<br />

confirme le bon positionnement du cathéter.<br />

Deux aiguilles sont utilisées : une aiguille fine pour les tissus<br />

sous-cutanés et une aiguille longue type aiguille à ponction<br />

lombaire pour réaliser l’anesthésie en profondeur plan par plan.<br />

L’aspiration d’urine permet de visualiser le trajet de ponction<br />

à réaliser et d’estimer la profondeur de la vessie. Une moucheture<br />

cutanée est ensuite réalisée au bistouri.<br />

Puis, le cathéter sus-pubien armé du trocart est enfoncé de<br />

façon ferme et retenue (avec un doigt le long du trocart comme<br />

sécurité) perpendiculairement au patient.<br />

Une fois la sensation de la ligne blanche franchie et après<br />

l’obtention d’urine, le cathéter est poussé dans la vessie de<br />

manière à inclure tous les œillets distaux et le trocart est retiré.<br />

Il ne reste plus qu’à fixer le cathéter à la peau de façon efficace<br />

(surtout chez les patients agités) tout en respectant le bon<br />

fonctionnement du système (Fig. 6).<br />

Indications<br />

C’est le mode de drainage idéal du « distendu chronique ».<br />

8 Urologie


Le cathéter sus-pubien est mieux toléré au long cours. Son<br />

indication la plus fréquente est la RAU au cours d’une prostatite<br />

aiguë. Lors d’une RAU sur fracture du bassin, le cathéter suspubien<br />

est également indiqué.<br />

Contre-indications<br />

Les contre-indications du cathéter sus-pubien sont :<br />

l’absence de globe vésical ;<br />

l’existence d’un pontage vasculaire extra-anatomique dans la<br />

région (de type pontage interiliaque passant dans l’espace de<br />

Retzius) ;<br />

les troubles de l’hémostase et une anticoagulation curative ;<br />

une tumeur vésicale liée au risque théorique de dissémination<br />

;<br />

l’existence d’antécédents de chirurgie digestive basse avec<br />

cicatrice de laparotomie sous-ombilicale qui impose sa mise<br />

en place sous repérage échographique.<br />

Complications<br />

La complication la plus fréquente est la mobilisation (ou<br />

l’ablation) du cathéter. D’autres complications ont été rapportées<br />

: perforation intestinale, péritonite aiguë secondaire,<br />

uropéritoine, engagement du cathéter dans l’urètre prostatique<br />

et enfin dissémination le long du trajet d’une tumeur vésicale<br />

[53, 54] .<br />

Choix du drainage<br />

Quelle que soit la technique de drainage, la vidange vésicale<br />

doit être réalisée de façon progressive, en plusieurs fois, afin<br />

d’éviter la survenue d’une hématurie a vacuo et de prévenir le<br />

syndrome de levée d’obstacle. On préconise au minimum une<br />

pause de 20 minutes tous les 500 ml évacués. Quand les deux<br />

moyens de drainage sont raisonnablement possibles, plusieurs<br />

critères entrent en compte dans la décision : l’état général du<br />

patient, l’orientation thérapeutique ultérieure, le matériel<br />

disponible et l’habitude du praticien. Cependant, le cathétérisme<br />

sus-pubien demeure une technique à risque septique<br />

moindre que celle du sondage urétral rétrograde. En effet, ce<br />

dernier est pourvoyeur de bactériurie quasi constante, par<br />

colonisation bactérienne des urines vésicales et par migration<br />

ascendante des germes méatiques. C’est pour ces raisons que la<br />

voie urétrale rétrograde est plus septique avec 40 % d’infection<br />

urinaire postdrainage par voie urétrale contre 18 % par voie suspubienne.<br />

Dans la littérature, il est décrit environ 2 % de<br />

sténoses urétrales postsondage, alors qu’aucun cas n’a été<br />

rapporté avec le cathéter sus-pubien. Ainsi, la mise en place<br />

d’un cathéter sus-pubien devrait être réalisée plus souvent. En<br />

effet, elle épargne la filière urétroprostatique, diminue le risque<br />

d’infection nosocomiale et facilite le sevrage ultérieur en<br />

permettant une mesure aisée du résidu postmictionnel. Enfin, le<br />

cathéter suspubien est mieux toléré par le patient au long cours<br />

Urologie<br />

Figure 6. Dispositif pour cathétérisme sus-pubien.<br />

tant sur le plan pratique que fonctionnel, et permet un retour<br />

à domicile dans de bonnes conditions. Contrairement aux<br />

préjugés, ni le sondage urétral, ni le cathéter sus-pubien<br />

n’augmentent le taux de PSA, et ce critère ne doit donc pas<br />

influencer le choix du drainage. C’est la RAU qui augmente le<br />

taux de PSA de 2 ng/ml en moyenne avec un retour à son taux<br />

initial en 2 semaines [50] . Malgré ces arguments connus en<br />

faveur du drainage d’une RAU par cathéter sus-pubien, la<br />

plupart des urologues emploient préférentiellement le sondage<br />

par voie urétrale [40] .<br />

Complications possibles après drainage vésical<br />

Hématurie a vacuo<br />

L’hématurie a vacuo se caractérise par une hématurie survenant<br />

dans les suites immédiates de la vidange vésicale, lorsque<br />

les vaisseaux de la muqueuse vésicale sont reperfusés de manière<br />

soudaine. Elle est prévenue par une vidange vésicale progressive.<br />

Syndrome de levée d’obstacle<br />

Le syndrome de levée d’obstacle associe une polyurie et une<br />

natriurèse massive au décours d’une obstruction complète des<br />

voies urinaires avec insuffisance rénale obstructive. Il peut<br />

aboutir à une déshydratation importante, voire à un collapsus<br />

et à une insuffisance rénale aiguë. Son mécanisme est multifactoriel<br />

et conduit à une altération des fonctions de filtration et<br />

d’excrétion rénales. Son dépistage repose sur une surveillance<br />

horaire de la diurèse après la levée de l’obstacle et par la<br />

surveillance du ionogramme sanguin. Son traitement est<br />

uniquement symptomatique et consiste en une compensation<br />

hydroélectrolytique adaptée aux pertes urinaires [55] .<br />

Traitement médical associé<br />

Alphabloquants<br />

Le mécanisme d’action des a-bloquants est bien connu. Ils<br />

permettent la relaxation des fibres musculaires lisses a-adrénergiques<br />

présentes au niveau de la filière urétroprostatique et<br />

du col vésical [56] . Les a-bloquants diminuent ainsi les résistances<br />

qui s’opposent à l’évacuation des urines. Ils ont été utilisés<br />

pour le traitement de l’HBP dès 1978 [56] , car leur action est<br />

directement proportionnelle à la composante musculaire de<br />

l’HBP. L’utilisation des a-bloquants sélectifs qui agissent au<br />

niveau des récepteurs a1 (alfuzosine, terazosine, tamsulosine,<br />

etc.), diminuent les effets secondaires, notamment cardiovasculaires.<br />

Plus récemment, leur intérêt dans la prise en charge de<br />

la RAU a été prouvé. Dans certains cas d’HBP, la RAU peut être<br />

due à une augmentation du tonus musculaire prostatique par<br />

surstimulation des récepteurs a-adrénergiques, en relation avec<br />

une hyperactivité sympathique. C’est par l’inhibition de cette<br />

hyperactivité sympathique que les a-bloquants trouvent leur<br />

place dans la prise en charge de la RAU. C’est pourquoi l’alfuzosine<br />

a obtenu l’autorisation de mise sur le marché (AMM)<br />

depuis le 29 juillet 2003 pour le « traitement adjuvant au<br />

sondage vésical dans la RAU liée à l’HBP ». Cependant ils<br />

peuvent également être prescrits pour d’autres causes de<br />

rétention (hypertonie du col vésical, réflexe, etc.). Ils ont une<br />

efficacité prouvée dès 48 heures d’imprégnation avec une<br />

efficacité maximale obtenue en une quinzaine de jours [56] . Leur<br />

demi-vie autorise une seule prise quotidienne.<br />

Inhibiteurs de la 5-a-réductase<br />

Rétentions aiguës d’urine complètes 18-207-D-10<br />

Les inhibiteurs de la 5-a-réductase n’ont pas d’intérêt dans la<br />

prise en charge de la RAU car leur délai d’action est trop long<br />

(de l’ordre de plusieurs semaines). En revanche, ils permettent<br />

de diminuer la survenue de RAU chez les patients atteints<br />

d’HBP. L’incidence diminue de 50 % avec le finastéride versus<br />

placebo [57] .<br />

Ils ont pour effet de diminuer le volume prostatique de 20 %<br />

à 30 %, de diminuer le taux de PSA d’environ 50 % en 12 mois<br />

et d’augmenter modérément le débit maximal (de 1,3 à<br />

1,6 ml/s) [58, 59] .<br />

9


18-207-D-10 Rétentions aiguës d’urine complètes<br />

Analogues de la « luteinizing hormone-releasing<br />

hormone » (LH-RH)<br />

Les analogues de la LH-RH ont un intérêt uniquement dans<br />

un cas spécifique : la RAU liée à un cancer prostatique. En effet,<br />

l’utilisation des analogues de la LH-RH associée à un drainage<br />

vésical permettrait à 80 % de ces patients de retrouver des<br />

mictions satisfaisantes après 4 semaines de traitement, et donc<br />

d’éviter une résection endoscopique.<br />

Prise en charge secondaire,<br />

après le drainage vésical<br />

Sevrage du drainage<br />

Intérêt des -bloquants dans le sevrage<br />

Les caractéristiques pharmacocinétiques et les effets des<br />

a-bloquants leur donnent un rôle primordial dans la prise en<br />

charge des RAU. En effet, ils augmentent le taux de succès de<br />

sevrage [56, 60] . Une administration quotidienne de 10 mg<br />

d’alfuzosine augmente les chances de sevrage à 62 % contre<br />

48 % sous placebo selon l’étude ALFAUR (Alfuzosin in Acute<br />

Urinary Retention) [61] et de 53 % versus 39,6 % selon une étude<br />

française [40] . Il n’y a pas de supériorité démontrée entre les<br />

différentes molécules a-bloquantes [56] . Bien qu’aucune durée ne<br />

soit clairement établie, en absence de geste chirurgical, les<br />

a-bloquants doivent être poursuivis au décours de l’épisode de<br />

RAU. En effet, l’arrêt du traitement après un épisode de RAU<br />

engendre une augmentation significative du risque de récidive<br />

de RAU au cours des deux premiers mois alors que sa poursuite<br />

permet de diminuer le recours à un traitement de l’HBP [56, 61-63] .<br />

La principale indication des a-bloquants dans ce cadre est le<br />

traitement des RAU liées à l’HBP, même si les a-bloquants sont<br />

toutefois prescrits pour d’autres causes de RAU (hypertonie du<br />

col, RAU réflexe, etc.).<br />

Délai avant tentative de sevrage<br />

Les patients âgés (> 70 ans) et ceux ayant une quantité<br />

importante d’urines évacuées (> 1 000 ml) ont un risque<br />

significativement plus important d’échec de sevrage [53] . Pour<br />

certains, lorsque le volume est supérieur à 900 ml, l’ablation<br />

immédiate de la sonde est un échec dans tous les cas. A fortiori,<br />

en cas de globe plus important et possiblement de « vessie<br />

claquée », un repos vésical par drainage est nécessaire d’emblée<br />

pendant plusieurs semaines [54] . Dans ces cas, il est possible de<br />

proposer un retour à domicile avec un drainage adapté associé<br />

à un traitement par a-bloquant [53] . La tentative de sevrage de<br />

sonde peut se faire à distance dans une structure de type hôpital<br />

de jour. Chez les patients présentant une RAU permettant<br />

d’envisager une récupération rapide des mictions spontanées,<br />

une première tentative de sevrage peut être réalisée au bout de<br />

72 heures de drainage associé à un traitement par a-bloquant.<br />

En cas d’échec, un retour à domicile est organisé avec une<br />

seconde tentative à plus de 15 jours d’imprégnation<br />

d’a-bloquant (afin d’avoir les effets optimum). Le plus souvent,<br />

cette seconde tentative de sevrage est effectuée à 3 semaines de<br />

la RAU, également dans une structure type hôpital de jour. En<br />

cas de nouvel échec, d’autres traitements sont à envisager,<br />

notamment le traitement chirurgical (Fig. 7).<br />

Facteurs prédictifs<br />

De nombreux éléments ont été étudiés pour savoir s’ils<br />

pouvaient servir de facteurs prédictifs de récidive de RAU ou<br />

comme outil prédictif de recours ultérieur à la chirurgie. Les<br />

éléments qui ressortent des différentes études sont : le taux de<br />

PSA sérique, le volume prostatique, les mesures du résidu<br />

postmictionnel et du débit maximal (< 12 ml/s) [53, 60, 63] . Ainsi,<br />

le taux de récidives de RAU est de 75 % dans le cas où le débit<br />

maximal est inférieur à 5 ml/s. Cependant, en cas d’HBP, la RAU<br />

récidive dans 60 %à80%descasà12mois et l’intervention<br />

chirurgicale semble inévitable.<br />

Ainsi, l’association du volume prostatique et du taux de PSA<br />

serait un élément puissant dans la prédiction de survenue d’un<br />

épisode de RAU chez les patients présentant une HBP, associée<br />

ou non à des troubles urinaires du bas appareil [57, 64] .<br />

Le taux de PSA, associé aux valeurs du résidu postmictionnel,<br />

pourrait être utilisé pour identifier les patients à haut risque de<br />

récidive de RAU après un succès de sevrage [53, 60] .<br />

Chirurgie<br />

Épisode de RAU<br />

Drainage vésical + traitement a-bloquant<br />

Globe < 900 ml<br />

1 re tentative de sevrage à 72 heures<br />

Succès Échec<br />

Tentative de sevrage à 21 jours<br />

Les sténoses urétrales, les phimosis et toutes autres affections<br />

obstructives responsables d’une RAU doivent être opérées de<br />

façon à éviter les récidives. Dans le cas de RAU par HBP, le<br />

traitement chirurgical ou endoscopique (urétrotomie interne,<br />

résection endoscopique, vaporisation au laser, etc.) est à<br />

envisager après deux échecs de sevrage sous a-bloquants. La<br />

chirurgie prostatique post-RAU, durant la même hospitalisation<br />

est à proscrire. Elle engendre une morbimortalité significativement<br />

supérieure à celle de la chirurgie programmée pour des<br />

troubles urinaires du bas appareil [53] . En effet, dans leur étude<br />

de 1998, Pickard et al. ont démontré que la mortalité après<br />

chirurgie prostatique était de respectivement 12 %, 3,3 % et<br />

0,25 % chez les patients opérés durant la même hospitalisation,<br />

opérés après 8 semaines de sondage à domicile et opérés en<br />

chirurgie réglée [65] . Cela s’explique par la colonisation bactérienne<br />

de la sonde urétrale, qui est significativement supérieure<br />

après 3 jours de cathétérisation, et qui majore le risque de<br />

septicémie postopératoire [40, 53] . Ainsi, il est démontré que<br />

l’incidence des septicémies postopératoires est plus élevée<br />

lorsqu’il existe une bactériurie [66] . Il est donc préférable que la<br />

prise en charge chirurgicale se fasse à distance de l’épisode de<br />

RAU, le plus souvent à 8 semaines et idéalement chez un<br />

patient dépourvu de sonde urétrale.<br />

Place des endoprothèses urétrales<br />

Globe > 900 ml<br />

ou<br />

« vessie claquée »<br />

Figure 7. Arbre décisionnel. Prise en charge d’une rétention aiguë<br />

d’urine (RAU) en cas d’hypertrophie bénigne de la prostate (HBP).<br />

La première endoprothèse a été décrite par Fabian en<br />

1980 [67] . Depuis, de nombreuses prothèses ont été conçues.<br />

Elles peuvent être métalliques ou siliconées, permanentes<br />

(type Titan ® ) ou provisoires (type Urospiral ® , Prostacath ® ) [54] .<br />

Elles permettent essentiellement de traiter un obstacle cervicoprostatique.<br />

Elles sont posées secondairement, en milieu<br />

spécialisé, après avoir traité la RAU. Leur mise en place peut se<br />

faire sous anesthésie locale, sous contrôle échographique,<br />

cystographique ou cystoscopique. Les meilleurs résultats après<br />

pose d’endoprothèse sont obtenus lors des obstructions aiguës.<br />

Ainsi 80 %à90%despatients retrouvent des mictions spontanées<br />

après la pose d’endoprothèse pour RAU. En revanche, la<br />

rétention chronique est une source d’échec en raison de<br />

l’hypocontractilité détrusorienne qui ne permet plus la vidange<br />

10 Urologie


.<br />

vésicale malgré la diminution des résistances urétroprostatiques<br />

liée à l’endoprothèse. Les complications de l’endoprothèse sont<br />

essentiellement à type de douleurs, d’impériosités, de migration,<br />

d’incrustation et d’hématurie. Elles surviennent dans 17 % à<br />

35 % des cas. Toutes les endoprothèses temporaires doivent être<br />

enlevées ou changées tous les 6à36mois [54] . Il existe deux<br />

types d’indication :<br />

lorsque la rétention est liée à un obstacle prostatique (HBP ou<br />

cancer prostatique évolué) avec contre-indication temporaire<br />

ou définitive à une résection transurétrale de prostate ;<br />

à titre de test diagnostique lorsqu’il existe une composante<br />

neurologique. L’endoprothèse, en levant l’obstacle prostatique,<br />

permet de faire la part entre l’HBP et le dysfonctionnement<br />

vésicosphinctérien neurologique dans l’apparition de la<br />

RAU.<br />

Ses indications tendent à disparaître devant l’apparition des<br />

nouvelles techniques endoscopiques de traitement de l’HBP<br />

moins invasives.<br />

Traitements prophylactiques et préventifs<br />

Le traitement de la constipation, la lutte contre les infections<br />

urinaires et l’abus de prises médicamenteuses ainsi que quelques<br />

règles hygiénodiététiques simples ne doivent pas être négligés,<br />

car ils permettent d’éviter un bon nombre de RAU.<br />

■ Conclusion<br />

La rétention aiguë d’urine (RAU) est une urgence urologique<br />

fréquente dont les étiologies sont multiples. Sa prise en charge<br />

initiale nécessite une vidange vésicale en urgence préférentiellement<br />

réalisée par un cathétérisme sus-pubien. Le traitement<br />

a-bloquant, associé au drainage, augmente les chances de succès<br />

de sevrage et diminue les risques de récidive. En cas d’indication<br />

chirurgicale au décours de l’épisode de RAU, l’intervention doit<br />

être réalisée à distance de l’épisode afin de limiter la morbimortalité<br />

périopératoire.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Latteux G., Faguer R., Bigot P., Chautard D., Azzouzi A.R. Rétentions aiguës d’urine complètes. EMC<br />

(Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-207-D-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Urologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Retour à domicile du patient opéré<br />

des voies urinaires<br />

C. Billault, M. Rouprêt<br />

Les suites opératoires en urologie concernent de plus en plus les médecins de ville, du fait de<br />

l’augmentation du nombre d’actes et de la diminution des durées d’hospitalisation. Elles sont marquées<br />

par un certain nombre d’événements gênants pour le patient (telles des impériosités, une hématurie<br />

passagère...) propres au type de chirurgie réalisé, mais généralement bénins et pris en charge aisément<br />

en dehors d’un milieu spécialisé, ce d’autant que le patient aura été prévenu de leur survenue possible. Le<br />

contrôle de la stérilité des urines est souvent une première étape dans le diagnostic en cas de survenue de<br />

complication postopératoire. La perméabilité des sondes est également un facteur important qu’il<br />

convient de contrôler. En cas de complication manifeste, il convient de réadresser le patient à son<br />

chirurgien, dans son service d’origine.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Intervention urologique ; Suites opératoires en urologie ;<br />

Complications urologiques postopératoires<br />

Introduction 1<br />

Généralités sur les suites opératoires en urologie 1<br />

Complications hémorragiques 1<br />

Complications infectieuses 2<br />

Complications pariétales 2<br />

Spécificités de la chirurgie laparoscopique 2<br />

Spécificités de la chirurgie endoscopique basse 2<br />

Spécificités de la chirurgie prostatique et vésicale<br />

non endoscopique 3<br />

Adénomectomie par voie haute 3<br />

Prostatectomie totale 3<br />

Cystectomies 3<br />

Spécificités de la chirurgie du haut appareil urinaire 3<br />

Spécificités de la chirurgie de la pathologie lithiasique 4<br />

Spécificités de la chirurgie des bourses 4<br />

Spécificités de la chirurgie d’incontinence et de prolapsus 4<br />

Conséquences de la mise en place de matériel étranger 4<br />

Sondes vésicales et cathéters sus-pubiens 4<br />

Endoprothèses urétérales 4<br />

Endoprothèses urétrales 5<br />

Neuromodulateurs 5<br />

Sphincters artificiels et prothèses d’érection 6<br />

Conclusion 6<br />

■ Introduction<br />

La prise en charge chirurgicale urologique s’accompagne de<br />

plus en plus souvent de durées d’hospitalisation courtes.<br />

Certains gestes opératoires se réalisent parfois même en ambulatoire.<br />

Le médecin non spécialiste est donc de plus en plus<br />

Traité de Médecine Akos<br />

fréquemment amené à prendre en charge de façon précoce des<br />

patients ayant subi une intervention sur les voies urinaires.<br />

Il convient bien entendu, en cas de complication postopératoire<br />

manifeste, de réadresser le patient à son chirurgien. Les<br />

suites opératoires en urologie peuvent être également marquées<br />

par des phénomènes intercurrents, gênants pour le patient mais<br />

relevant de l’évolution normale après l’intervention, qui<br />

peuvent être pris en charge en médecine de ville. Nous évoquons<br />

successivement les principes généraux de la surveillance<br />

postopératoire en urologie, puis les principaux événements<br />

indésirables susceptibles de survenir en fonction des interventions<br />

pratiquées, et les particularités de la chirurgie par voie<br />

laparoscopique et de la chirurgie avec mise en place de matériel<br />

prothétique.<br />

■ Généralités sur les suites<br />

opératoires en urologie<br />

Comme pour tout autre type de chirurgie, les principales<br />

complications pouvant survenir après une intervention urologique<br />

sont d’ordre hémorragique, infectieux et pariétal. Les durées<br />

d’hospitalisation étant de plus en plus courtes, il est dorénavant<br />

habituel que certains patients soient porteurs d’une sonde<br />

vésicale à domicile (Fig. 1). La gestion de la sonde à proprement<br />

parler est décrite dans l’article 5-0686 de ce traité.<br />

Complications hémorragiques<br />

5-0684<br />

Les complications hémorragiques se présentent le plus<br />

souvent sous la forme d’une hématurie macroscopique. Ce<br />

symptôme est généralement très impressionnant pour les<br />

patients, mais le plus souvent sans gravité. En effet, la dilution<br />

inéluctable du sang dans les urines conduit à teinter toutes les<br />

urines en rouge, sans préjuger pour autant du volume du<br />

saignement. Il convient de souligner qu’il est très rare qu’un<br />

patient se déglobulise de façon massive au décours d’une<br />

1


5-0684 Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires<br />

Figure 1. Sonde vésicale simple courant et sonde vésicale double<br />

courant pour assurer le lavage de la vessie. 1. Ballonnet intravésical ;<br />

2. sonde double courant ; 3. sonde simple courant.<br />

hématurie macroscopique. Il convient, dans la majorité des cas,<br />

de conseiller au patient une hydratation abondante, afin<br />

d’éviter la formation de caillots pouvant entraîner une obstruction<br />

des voies urinaires. Ce risque est particulièrement retrouvé<br />

dans le cadre de la chirurgie endoscopique, 10 à 15 jours après<br />

l’intervention, lors de la « chute d’escarres ».<br />

Une complication hémorragique peut aussi se révéler sous la<br />

forme d’un hématome profond ou pariétal. Celui-ci est dépisté<br />

devant l’apparition de douleurs, d’une gêne, voire d’une masse<br />

palpable ; la présence de fièvre doit faire suspecter une infection<br />

de cet hématome. La numération sanguine retrouve une<br />

anémie. En cas de suspicion d’hématome, ou d’infection, le<br />

patient doit être réadressé à l’opérateur.<br />

Les complications hémorragiques sont favorisées par la prise<br />

par le patient d’un traitement anticoagulant ou antiagrégant<br />

plaquettaire. En cas de traitement par antivitamine K, un relais<br />

est réalisé avant l’intervention par des héparines de bas poids<br />

moléculaire (HBPM) à dose adaptée ; le traitement par antivitamine<br />

K n’est repris qu’à distance de l’intervention, en fonction<br />

du risque hémorragique de l’intervention pratiquée et des<br />

consignes du chirurgien. Dans la mesure du possible, en<br />

fonction du geste et du risque opératoire envisagé, des comorbidités,<br />

et en accord avec l’anesthésiste et le cardiologue, le<br />

traitement antiagrégant plaquettaire est arrêté, pour n’être repris<br />

qu’à distance de l’intervention.<br />

Dans les suites opératoires de la chirurgie urologique, une<br />

prophylaxie antithrombotique par HBPM peut être mise en<br />

place. La chirurgie du petit bassin, ainsi que la chirurgie rénale<br />

par voie ouverte, tout comme les gestes d’exérèse carcinologiques,<br />

sont considérées comme à risque thromboembolique<br />

élevé. En revanche, la chirurgie endoscopique, la chirurgie<br />

pelvienne féminine par voie basse, la chirurgie rénale par abord<br />

percutané, la chirurgie des glandes surrénales sont à faible<br />

risque thromboembolique, ne nécessitant pas de prophylaxie<br />

médicamenteuse [1] . Dans le cas d’une intervention pour cancer,<br />

la prophylaxie est généralement poursuivie pendant 1 mois.<br />

L’utilisation d’une anticoagulation préventive par HBPM impose<br />

la surveillance de la numération plaquettaire deux fois par<br />

semaine afin de dépister une éventuelle thrombopénie induite<br />

par l’héparine.<br />

Complications infectieuses<br />

Les complications infectieuses peuvent toucher le site opératoire,<br />

profondément ou superficiellement au niveau de la<br />

cicatrice, ou les urines. L’infection du site opératoire doit être<br />

suspectée cliniquement sur l’apparition de douleurs, d’un aspect<br />

localement inflammatoire, de fièvre, voire d’un écoulement<br />

suspect en regard de la cicatrice. Toute suspicion d’infection du<br />

site opératoire doit faire réadresser le patient à son chirurgien.<br />

Les infections urinaires se présentent avec les symptômes<br />

habituels, ou peuvent être dépistées sur un examen cytobactériologique<br />

de contrôle qui est réalisé avant la visite de<br />

contrôle postopératoire. Il est à noter qu’en cas de mise en place<br />

pendant l’intervention d’une endoprothèse urétérale, le patient<br />

peut ressentir des douleurs avec pollakiurie pouvant mimer une<br />

infection urinaire mais qui sont en réalité en rapport avec la<br />

présence de la sonde urinaire. En revanche, en cas d’infection<br />

confirmée bactériologiquement en présence d’une endoprothèse,<br />

il faut rechercher une obstruction de celle-ci avec<br />

retentissement sur le haut appareil du fait du risque de pyélonéphrite<br />

aiguë.<br />

Complications pariétales<br />

Les complications pariétales concernent le plus souvent les<br />

interventions réalisées par voie chirurgicale traditionnelle, dite<br />

« incisionnelle » ou à « ciel ouvert ». Il s’agit principalement des<br />

éventrations. Celles-ci sont prévenues en évitant pendant au<br />

moins 1 mois après l’intervention les efforts physiques importants.<br />

Il peut par ailleurs être utile d’instaurer un traitement<br />

contre la constipation afin d’éviter les efforts de poussée<br />

responsables d’hyperpression abdominale.<br />

Il convient de façon générale de surveiller régulièrement la<br />

cicatrice jusqu’à l’ablation des fils de sutures ou agrafes.<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

laparoscopique<br />

Les interventions par chirurgie laparoscopique (atmosphère<br />

gazeuse) donnent généralement lieu à des hospitalisations de<br />

plus courte durée que pour les interventions par voie classique.<br />

La chirurgie par voie laparoscopique comporte moins de risques<br />

pariétaux que la chirurgie par voie ouverte ; cependant, les<br />

conseils de limitation de l’activité physique pendant 1 mois<br />

restent applicables. Les principales particularités après chirurgie<br />

par voie laparoscopique sont la survenue de douleurs au niveau<br />

des épaules, par irritation diaphragmatique secondaire à<br />

l’inflation de l’abdomen pendant l’opération, et la survenue de<br />

crépitations sous-cutanées par diffusion du gaz (emphysème<br />

sous-cutané transitoire). Ces phénomènes sont sans gravité.<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

endoscopique basse<br />

Il s’agit principalement d’intervention sur la prostate (incision<br />

cervicoprostatique, résection transurétrale de prostate) et la<br />

vessie (résection transurétrale de polypes vésicaux). Les principales<br />

complications susceptibles de survenir après le retour à<br />

domicile sont l’hématurie macroscopique, surtout lors de la<br />

période de « chute d’escarres » 10 à 15 jours après l’intervention,<br />

et la rétention aiguë d’urines.<br />

L’hématurie macroscopique simple non caillotante ne nécessite<br />

qu’une simple hyperhydratation du patient jusqu’à disparition<br />

des symptômes, afin d’éviter le caillotage.<br />

La rétention aiguë d’urine peut être secondaire à un caillotage<br />

ou à la persistance d’un copeau de résection qui vient obstruer<br />

la voie urinaire. Dans de plus rares cas, principalement quand<br />

le patient présentait avant l’intervention un tableau de rétention<br />

chronique, la rétention peut s’observer devant une nonreprise<br />

de la fonction contractile normale du détrusor (vessie<br />

« claquée »). La survenue d’une rétention nécessite de réadresser<br />

en urgence le patient pour levée de l’obstacle et drainage.<br />

Dans les suites d’une résection transurétrale d’adénome de<br />

prostate, il est important de prévenir le patient que des signes<br />

irritatifs urinaires peuvent persister pendant 1à3mois, sans<br />

obérer un résultat péjoratif de l’intervention. Le résultat<br />

fonctionnel n’est jamais parfait d’emblée. Il peut aussi exister<br />

des fuites urinaires pendant les premières semaines après<br />

l’intervention, qui s’estompent et disparaissent par la suite. Le<br />

taux d’incontinence après résection transurétrale de prostate est<br />

faible (5,9 % d’incontinence de stress et 11,8 % d’incontinence<br />

2 Traité de Médecine Akos


par impériosité [2] ). Les patients doivent aussi être prévenus du<br />

risque beaucoup plus élevé (de l’ordre de 75 %) d’éjaculation<br />

rétrograde après l’intervention ; on retrouve des taux de<br />

dysfonction érectile allant jusqu’à 13 % après résection<br />

endoscopique d’adénome de prostate [3] .<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

prostatique et vésicale non<br />

endoscopique<br />

Adénomectomie par voie haute<br />

Il s’agit d’une intervention visant à retirer un adénome<br />

prostatique, s’adressant aux adénomes de gros volumes (au-delà<br />

de 60 g) [4] qui ne sont pas accessibles à un geste endoscopique.<br />

En dehors de l’hématurie macroscopique et des troubles<br />

fonctionnels qui sont équivalents à ceux rencontrés dans la<br />

résection transurétrale de prostate, la principale complication à<br />

distance de cette intervention est l’apparition d’une fistule<br />

vésicocutanée secondaire à la mauvaise cicatrisation de l’ouverture<br />

vésicale pratiquée lors de l’intervention.<br />

Prostatectomie totale<br />

Elle consiste à pratiquer l’ablation complète du bloc<br />

« prostate-vésicules séminales » et à réaliser une anastomose<br />

vésico-urétrale. C’est l’intervention de choix pour le traitement<br />

du cancer de la prostate localisé chez le sujet jeune. Elle est<br />

aujourd’hui de plus en plus souvent réalisée par voie laparoscopique<br />

ou robot-assistée. Par ailleurs, les suites peuvent être<br />

marquées par [5] :<br />

l’incontinence urinaire : si elle est très fréquente immédiatement<br />

après l’intervention, il ne faut parler d’incontinence<br />

définitive qu’au-delà de 12 mois. Les pourcentages de continence<br />

retrouvés à distance de l’intervention varient entre<br />

85 % et 95 % en fonction des études. Les résultats de la<br />

rééducation, qui peut être débutée au-delà du 2 e mois<br />

postopératoire, restent modérés. Le traitement de référence<br />

reste la mise en place d’un sphincter artificiel. Dans le cas<br />

d’incontinence modérée existent des alternatives au sphincter<br />

artificiel, telle la mise en place de ballons ;<br />

la dysfonction érectile : c’est une complication fréquente, car<br />

les impératifs carcinologiques conduisent souvent à des<br />

lésions des nerfs érecteurs. Une amélioration spontanée de la<br />

symptomatologie peut survenir jusqu’à 2 ans après l’intervention.<br />

En cas de préservation unilatérale des nerfs érecteurs,<br />

le taux de conservation de la fonction érectile varie entre<br />

13,3 % et 68,8 % selon les études ; si la préservation des nerfs<br />

érecteurs a été bilatérale, on observe des taux variant de<br />

31,9 % à 86 %. Le traitement repose sur les injections<br />

intracaverneuses, ou la prise d’inhibiteurs des phosphodiestérases<br />

de type 5. Il semble aujourd’hui qu’il soit bénéfique de<br />

proposer précocement un traitement par injection intracaverneuse<br />

[6] ;<br />

la sténose de l’anastomose vésico-urétrale : cette complication<br />

est souvent découverte au décours d’un bilan d’incontinence<br />

urinaire après prostatectomie radicale. Elle concerne en<br />

moyenne 6,7 % des patients [7] . Son traitement est chirurgical.<br />

Cystectomies<br />

On distingue les cystectomies totales (cystoprostatectomie<br />

chez l’homme) réalisées dans le cadre de tumeurs vésicales<br />

infiltrantes, et les cystectomies partielles. Le problème principal<br />

après cystectomie totale est celui de la dérivation des urines<br />

(plastie intestinale, dérivation cutanée directe par urétérostomie<br />

ou indirecte avec interposition d’un segment de tube digestif :<br />

intervention de Bricker). Les complications générales retrouvées<br />

peuvent être une fistule urinaire (0,47 %), l’apparition d’une<br />

sténose sur les anastomoses (sténose d’une urétérostomie, de<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires 5-0684<br />

l’anastomose entre uretère et tube digestif dans le cas d’un<br />

Bricker, anastomose urétrale pour une néovessie, 2,92 %) [8] .<br />

D’autres complications sont à mettre en rapport avec le type de<br />

dérivation urinaire réalisé après la cystectomie [9] .<br />

Lorsque les conditions carcinologiques locales le permettent,<br />

la dérivation des urines peut être réalisée par la construction<br />

d’une néovessie à partir d’un segment d’intestin grêle détubulé.<br />

Les sensations de réplétion vésicale sont modifiées, ainsi que les<br />

mécanismes de vidange (on recense 11,5 % de troubles de la<br />

vidange de la néovessie) [10] . Il est important que le patient vide<br />

régulièrement sa vessie toutes les 3 ou 4 heures. Afin d’obtenir<br />

une bonne vidange vésicale, il est nécessaire d’exercer une<br />

poussée abdominale. D’autre part, il est important d’assurer une<br />

diurèse suffisante. En effet, le tube digestif utilisé pour la<br />

néovessie produit du mucus qui, s’il n’est pas éliminé régulièrement,<br />

contribue à obstruer l’anastomose entre l’urètre et la<br />

néovessie et entraîne une rétention d’urine chronique, voire<br />

aiguë. L’accumulation de mucus dans la plastie est aussi à<br />

l’origine de la distension de celle-ci. La continence obtenue avec<br />

la plastie vésicale est rarement parfaite mais peut être améliorée<br />

par la rééducation débutée au-delà du 2 e mois postopératoire, et<br />

ce d’autant plus que le patient s’astreint à une bonne hygiène<br />

mictionnelle. On peut aussi observer des troubles métaboliques,<br />

soit par retentissement sur le haut appareil urinaire d’une<br />

sténose des anastomoses urétérales avec apparition d’une<br />

insuffisance rénale, soit du fait de la réabsorption hydroélectrolytique<br />

par la muqueuse digestive constituant la paroi de la<br />

néovessie, qui peut entraîner l’apparition d’une acidose<br />

métabolique.<br />

Lorsque la réalisation d’une néovessie s’avère impossible, la<br />

dérivation des urines se fait à la peau, soit directement par des<br />

urétérostomies cutanées, soit plus fréquemment par l’intermédiaire<br />

d’un segment d’intestin grêle (urétéro-iléostomie de type<br />

Bricker, dérivation non-continente). La complication le plus<br />

fréquemment rencontrée, en dehors d’éventuelles difficultés<br />

d’appareillage de stomie, est la sténose des anastomoses,<br />

principalement dans le cas des urétérostomies cutanées. Celles-ci<br />

sont généralement appareillées à l’aide de sondes mono-J. Ces<br />

sondes exposent aux risques infectieux, au risque d’obstruction<br />

de celles-ci ainsi qu’au déplacement qui entraîne un mauvais<br />

drainage de la voie excrétrice. L’absence de retentissement sur<br />

le haut appareil urinaire doit aussi être contrôlée (évaluation de<br />

la fonction rénale).<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

du haut appareil urinaire<br />

La chirurgie du haut appareil urinaire est de plus en plus<br />

souvent réalisée par voie cœlioscopique. On distingue trois<br />

grands types d’intervention : la néphrectomie totale (néphrectomie<br />

simple dans le cas d’un rein non fonctionnel ou infecté,<br />

néphrectomie élargie, voire néphro-urétérectomie dans le cadre<br />

d’une tumeur du rein ou de la voie excrétrice supérieure), la<br />

néphrectomie partielle et la cure de syndrome de la jonction<br />

pyélo-urétérale.<br />

Dans le cadre des néphrectomies réalisées par lombotomie, il<br />

est fréquent que les patients conservent des dysesthésies sur le<br />

trajet de la cicatrice pendant plusieurs mois. Une hypotonie de<br />

la paroi en regard, voire une vraie éventration peuvent aussi se<br />

produire.<br />

La chirurgie partielle du rein expose [11] au risque hémorragique<br />

(2,4 %), par exposition d’une tranche de section de parenchyme<br />

rénal, ainsi qu’au risque de fistule urinaire (10,1 %),<br />

secondairement à l’ouverture de la voie urinaire lors de l’intervention.<br />

L’usage d’anticoagulant précocement après une<br />

néphrectomie partielle doit être proscrit.<br />

Le risque de fistule urinaire est aussi présent après une cure<br />

de syndrome de la jonction pyélo-urétérale [12] . Le patient est<br />

porteur, après l’intervention, d’une endoprothèse urétérale qui<br />

sert de tuteur pour assurer la cicatrisation de la voie excrétrice,<br />

et peut ressentir des douleurs ou une gêne en rapport avec la<br />

présence de cette prothèse. Enfin, il existe toujours à distance<br />

un risque de sténose au niveau de la suture avec récidive de la<br />

3


5-0684 Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires<br />

symptomatologie. Ces risques sont cependant faibles, que<br />

l’intervention soit menée par voie ouverte ou par voie<br />

laparoscopique.<br />

Le risque de développer une insuffisance rénale chronique<br />

postopératoire est d’autant plus grand que la chirurgie a été<br />

réalisée en situation de rein unique, ou que la fonction rénale<br />

préexistante était déjà détériorée. Après une telle chirurgie, il<br />

convient de surveiller régulièrement la fonction rénale par un<br />

dosage de la créatininémie.<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

de la pathologie lithiasique<br />

Il existe trois grands types d’intervention dans le cadre de la<br />

prise en charge chirurgicale de la pathologie lithiasique : la<br />

lithotritie extracorporelle, l’urétéroscopie, la néphrolithotomie<br />

percutanée [13] .<br />

La lithotritie extracorporelle est la procédure la moins<br />

invasive. Elle s’adresse à des calculs de petite taille (inférieurs à<br />

20 mm) situés dans les cavités pyélocalicielles ou l’uretère. Sa<br />

principale complication propre est la survenue, en cas de<br />

lithotritie réalisée au niveau du rein, d’un hématome rénal.<br />

L’urétéroscopie rigide ou souple s’adresse aux calculs de petite<br />

taille situés dans la partie proximale ou distale de l’uretère. On<br />

peut observer dans ses suites des hématuries transitoires (2,2 %),<br />

des douleurs résiduelles (3,2 %), l’apparition de sténose urétérale<br />

(0,23 %), surtout si l’urétéroscopie a été traumatique [14] .<br />

La néphrolithotomie percutanée s’adresse à des calculs de<br />

grande taille (supérieurs à 20 mm) situés dans les cavités<br />

pyélocalicielles. Ses complications principales [15] sont de deux<br />

ordres : hématome périrénal et fièvre après l’intervention. Plus<br />

rarement [16] , on peut aussi retrouver des complications par<br />

atteinte d’organes de voisinage.<br />

En dehors des complications spécifiques à chaque type<br />

d’intervention, on retrouve quelques complications communes<br />

à l’ensemble de ces interventions dans la chirurgie de la<br />

pathologie lithiasique :<br />

hématurie macroscopique, généralement transitoire et sans<br />

gravité ;<br />

risque de migration de fragment calculaire restant avec crise<br />

de colique néphrétique, voire au maximum empierrement de<br />

l’uretère ;<br />

risque de pyélonéphrite par translocation bactérienne, surtout<br />

si les calculs sont d’origine infectieuse. Il est primordial,<br />

comme pour toute intervention urologique, de s’assurer de la<br />

stérilité des urines avant l’intervention, ou de mettre en place<br />

un traitement antibiotique adapté quelques jours avant le<br />

geste afin de minimiser le risque infectieux au cours de celuici<br />

;<br />

gêne liée à la mise en place d’une endoprothèse urétérale, très<br />

fréquente quelle que soit l’intervention réalisée, et ce d’autant<br />

plus que les calculs traités sont volumineux et/ou que<br />

plusieurs séances de traitement s’avèrent nécessaires.<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

des bourses<br />

Les deux grandes voies d’abord de la chirurgie testiculaire<br />

sont la voie scrotale et la voie inguinale. Les principales<br />

évolutions indésirables rencontrées après chirurgie des bourses<br />

sont l’hématome, qui est souvent prévenu par la mise en place<br />

d’un pansement compressif, un œdème persistant et les complications<br />

infectieuses en cas de mise en place d’une prothèse<br />

testiculaire.<br />

■ Spécificités de la chirurgie<br />

d’incontinence et de prolapsus<br />

Les cures chirurgicales d’incontinence urinaire et/ou de<br />

prolapsus font de plus en plus souvent appel à la mise en place<br />

de matériel prothétique (bandelettes, plaques de soutien). Le<br />

risque principal est alors bien entendu le risque infectieux. Les<br />

autres complications possibles sont la « surcorrection » pouvant<br />

entraîner des difficultés à la vidange vésicale, le démasquage<br />

d’une incontinence urinaire préalablement méconnue après<br />

cure chirurgicale d’un prolapsus, ou au contraire la récidive de<br />

la symptomatologie. Par ailleurs, certaines techniques de cure de<br />

prolapsus par voie basse exposent à des dyspareunies [17] .<br />

Dans tous les cas, il faut conseiller à la patiente, en plus de<br />

la limitation des efforts physiques pendant 1 mois, l’abstinence<br />

sexuelle pendant une période équivalente. La lutte contre la<br />

constipation, des mictions régulières avec une hydratation<br />

suffisante participent à une bonne hygiène mictionnelle qui<br />

permet de limiter le risque d’infection urinaire basse. L’utilisation<br />

de traitements hormonaux locaux chez les patientes<br />

ménopausées permet aussi de préserver des tissus de bonne<br />

trophicité et de limiter les risques d’infection et les récidives de<br />

troubles de la statique pelvienne.<br />

Il peut apparaître dans les suites de l’intervention, de façon<br />

transitoire, des symptômes urinaires irritatifs à type de pollakiurie,<br />

voire d’impériosités.<br />

■ Conséquences de la mise en place<br />

de matériel étranger<br />

Différents types de matériel étranger sont utilisés en chirurgie<br />

urologique ; le risque principal en cas de mise en place de<br />

matériel étranger est bien évidemment le risque infectieux. En<br />

cas de suspicion d’infection, le patient doit toujours être<br />

réadressé rapidement à son chirurgien.<br />

Sondes vésicales et cathéters sus-pubiens<br />

Il arrive fréquemment qu’un patient retourne à domicile<br />

porteur d’un drainage vésical par sonde (Fig. 1) ou cathéter suspubien.<br />

Deux problèmes principaux peuvent apparaître, un<br />

épisode infectieux ou l’obstruction du drainage. En cas d’obstruction,<br />

qui entraîne une rétention aiguë d’urine, le patient<br />

doit être adressé aux urgences pour changement de la sonde ou<br />

du cathéter.<br />

La positivité d’un examen cytobactériologique des urines chez<br />

un patient porteur d’une sonde vésicale ou d’un cathéter suspubien<br />

est un événement banal (70 % des sondes vésicales sont<br />

contaminées après 3 semaines) et il ne faut mettre en route un<br />

traitement antibiotique qu’en cas de fièvre, d’infection du haut<br />

appareil urinaire, ou afin d’encadrer un geste urologique prévu<br />

dans les jours suivants.<br />

Endoprothèses urétérales<br />

Il s’agit des sondes de type double J ou mono-J, ayant pour<br />

fonction d’améliorer le drainage du haut appareil urinaire vers<br />

la vessie. Il existe différents types de sonde en fonction de<br />

l’indication (événement ponctuel type calcul faisant obstacle,<br />

sonde « tuteur » pour la cicatrisation, obstacle chronique sur les<br />

uretères d’origine tumorale ou fibrose péritonéale, etc.). Quel<br />

que soit son type, aucune sonde n’est destinée à rester perpétuellement<br />

en place. Il est important que le patient en soit<br />

conscient, et sache quels sont les délais dans lesquels la sonde<br />

dont il est porteur doit être retirée ou changée. La présence<br />

prolongée de la sonde entraîne un risque d’obstruction de celleci,<br />

qui peut se traduire par des douleurs, le développement<br />

d’une pyélonéphrite sur obstacle en amont, voire une altération<br />

de la fonction rénale. La présence prolongée d’une sonde expose<br />

aussi celle-ci à un risque de formation de calculs à son contact,<br />

qui peuvent rendre son extraction difficile.<br />

Il arrive que les sondes mises en place se déplacent ; ceci<br />

arrive en particulier avec les sondes mono-J mises en place dans<br />

des cas de drainage cutané des urines. Le déplacement de la<br />

sonde nécessite que celle-ci soit correctement repositionnée sous<br />

contrôle radiologique, repositionnement qui est d’autant plus<br />

aisé que la sonde reste dans le trajet urétéral. Il est donc<br />

important, si on s’aperçoit du déplacement d’une sonde, de<br />

renvoyer le patient à son chirurgien dans les plus brefs délais.<br />

4 Traité de Médecine Akos


Figure 2. Endoprothèse urétérale de type sonde double J.<br />

Figure 3. Patient porteur d’une sonde double J visualisée sur un abdomen<br />

sans préparation de face.<br />

La présence d’une endoprothèse urétérale (sonde double J) est<br />

plus ou moins bien supportée en fonction des patients (Fig. 2).<br />

Celle-ci peut entraîner des impériosités mictionnelles, une gêne,<br />

voire des douleurs vésicales, une pollakiurie et parfois des<br />

douleurs remontant dans le flanc à la miction, en rapport avec<br />

un reflux d’urine le long de la sonde qui obère le mécanisme<br />

antireflux naturel. Dans le doute et lorsqu’on suspecte une<br />

migration de la sonde, un simple cliché d’abdomen sans<br />

préparation permet de repérer facilement l’endoprothèse<br />

(Fig. 3).<br />

Endoprothèses urétrales<br />

La principale complication pouvant être retrouvée en rapport<br />

avec une prothèse endo-urétrale est le déplacement de celle-ci à<br />

Traité de Médecine Akos<br />

la suite de tentatives de sondage vésical. La présence d’une telle<br />

prothèse chez un patient contre-indique formellement toute<br />

tentative de sondage vésical.<br />

Neuromodulateurs<br />

Il s’agit de dispositifs implantables destinés à corriger, par<br />

neurostimulation des nerfs sacrés, certains types d’incontinence<br />

urinaire. La prise en charge de patients porteurs de tels dispositifs<br />

relève de centres spécialisés.<br />

“ À retenir<br />

Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires 5-0684<br />

L’hématurie macroscopique est un événement<br />

fréquent, généralement sans gravité, pouvant survenir<br />

jusqu’à 10 à 15 jours après une intervention. Elle nécessite<br />

une hydratation abondante, afin d’éviter le caillotage<br />

pouvant être responsable de rétention aiguë d’urine.<br />

Les signes irritatifs après intervention sur le bas appareil<br />

persistent pendant plusieurs semaines sans préjuger du<br />

résultat de l’intervention.<br />

Le retour à domicile avec une sonde vésicale à demeure<br />

est possible. La contamination de ces sondes est<br />

systématique après quelques jours. Dans ce contexte, il ne<br />

faut tenir compte d’un examen cytobactériologique des<br />

urines positif et ne traiter le patient qu’en cas de<br />

manifestations cliniques patentes d’infection.<br />

Les sondes double J ne sont pas destinées à rester<br />

indéfiniment en place. Le rythme de leur changement<br />

dépend de leur type et de l’indication pour laquelle elles<br />

ont été placées mais leur durée de vie ne dépasse jamais<br />

1 an.<br />

La survenue d’une complication infectieuse locale sur le<br />

site d’un matériel prothétique type sphincter artificiel<br />

impose la prise en charge en urgence en milieu spécialisé.<br />

En cas de survenue d’une complication postopératoire,<br />

le patient doit être réadressé à son chirurgien.<br />

“ Points forts<br />

Les principales complications retrouvées après chirurgie<br />

urologique sont d’ordre infectieux et hémorragique.<br />

La vérification de la stérilité des urines avant<br />

l’intervention permet de limiter le risque infectieux.<br />

Cependant, la réalisation d’un examen cytobactériologique<br />

de contrôle avant la visite postopératoire est<br />

nécessaire.<br />

La survenue d’une colonisation bactérienne d’une<br />

sonde vésicale à demeure ne nécessite pas de traitement si<br />

elle n’entraîne pas de manifestation clinique. Le<br />

traitement est en revanche nécessaire si un geste est prévu<br />

(intervention ultérieure ou ablation de la sonde vésicale) et<br />

doit être débuté 48 heures avant, au minimum.<br />

La survenue d’une hématurie une dizaine de jours après<br />

un geste de résection endoscopique est fréquente et<br />

correspond à la « chute d’escarre ». Une simple<br />

hyperhydratation du patient pour augmenter la diurèse<br />

est suffisante en l’absence de caillotage.<br />

En cas d’infection fébrile, d’hématurie caillotante ou de<br />

rétention aiguë d’urine, il convient d’adresser le patient<br />

dans le service d’urgences le plus proche de son domicile<br />

et d’avertir son chirurgien.<br />

5


.<br />

5-0684 Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires<br />

Sphincters artificiels et prothèses d’érection<br />

La mise en place de telles prothèses est un geste très spécialisé<br />

où, là encore, la crainte principale est celle de l’infection. La<br />

présence d’un sphincter artificiel ou d’une prothèse d’érection<br />

contre-indique formellement toute tentative de sondage vésical<br />

en dehors d’un centre urologique habitué à la prise en charge<br />

de patients porteurs de ce type de prothèse. En cas de complication<br />

liée à un sphincter artificiel ou à une prothèse d’érection,<br />

il convient de renvoyer le patient vers son opérateur.<br />

■ Conclusion<br />

Le retour à domicile précoce des patients opérés des voies<br />

urinaires est de plus en plus fréquent ; la mise en place, au<br />

cours d’un geste chirurgical urologique, de matériel étranger est<br />

aussi en augmentation. En connaissant les spécificités des<br />

différentes interventions, il est possible de juger au mieux de la<br />

nécessité, lorsqu’un événement indésirable se produit dans la<br />

suite d’une intervention, de renvoyer ou non le patient vers son<br />

opérateur, ou de la possibilité de prendre en charge cet événement<br />

en permettant au patient de rester à son domicile.<br />

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Urol 2008;53:184-90.<br />

[17] Maher C, Baessler K, Glazener CM, Adams EJ, Hagen S. Surgical<br />

management of pelvic organ prolapse in women. Cochrane Database<br />

Syst Rev 2007;(3):CD004014.<br />

Pour en savoir plus<br />

C. Billault.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, 47-83 boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, Paris, France.<br />

Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé. Qualité de la pose<br />

et de la surveillance des sondes urinaires. Décembre 1999.<br />

www.sante.gouv.fr/htm/pointsur/nosoco/guide/txt15.html.<br />

« 100 recommandations pour la surveillance et la prévention des infections<br />

nosocomiales- Prévention des infections urinaires nosocomiales ».<br />

Pilly E. CMIT. Maladies Infectieuses et Tropicales. Paris: Vivactis Plus; 2010.<br />

Le POPI. 2009 CMIT. Maladies infectieuses et tropicales : guide de traitement<br />

: référence pour une bonne pratique médicale/par le Collège des<br />

universitaires de maladies infectieuses et tropicales. Paris: Vivactis<br />

plus; 2009.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Billault C., Rouprêt M. Retour à domicile du patient opéré des voies urinaires. EMC (Elsevier Masson SAS,<br />

Paris), Traité de Médecine Akos, 5-0684, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

6 Traité de Médecine Akos<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Rétrécissements de l’urètre masculin<br />

W. Oosterlinck, N. Lumen<br />

Les rétrécissements de l’urètre masculin représentent une maladie encore souvent mal traitée. Cet article<br />

est une revue sur le sujet incorporant anatomie, étiologies, pathologie, symptômes, diagnostic et<br />

traitements de la maladie. Il est basé sur une expérience personnelle dans un centre de référence pour<br />

chirurgie de l’urètre depuis 30 ans ainsi qu’une revue de la littérature réalisée par PubMed de<br />

1992 jusqu’à novembre 2008.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Urètre masculin ; Urétrotomie ; Urétroplastie<br />

Introduction 1<br />

Anatomie 1<br />

Étiologies 1<br />

Traumatismes externes 2<br />

Traumatismes iatrogènes 2<br />

Symptomatologie et diagnostic 2<br />

Débitmétrie urinaire 2<br />

Examen physique 2<br />

Endoscopie 2<br />

Imagerie 3<br />

Traitement 3<br />

Dilatations 3<br />

Traitement endoscopique 4<br />

Nouvelles endoprothèses 5<br />

Conclusion 5<br />

Traitement chirurgical 5<br />

Diagnostic 5<br />

Délai pour opérer un rétrécissement 5<br />

Préparation préopératoire 5<br />

Techniques 5<br />

Choix de la technique 6<br />

Localisations et conditions spéciales de sténoses urétrales 7<br />

Conclusion 7<br />

■ Introduction<br />

Le rétrécissement de l’urètre masculin est probablement la<br />

plus ancienne des affections urologiques connues. L’étiologie la<br />

plus importante dans les pays en voie de développement reste<br />

l’urétrite infectieuse, surtout par maladie vénérienne. Dans les<br />

pays développés les causes iatrogènes sont devenues les plus<br />

fréquentes. Pendant la deuxième partie du XX e siècle les<br />

urologues ont imaginé plusieurs solutions pour résoudre les<br />

rétrécissements simples ainsi que les cas les plus compliqués. En<br />

dépit de ces progrès, les traitements des rétrécissements demeurent<br />

souvent problématiques. Les urologues peuvent être<br />

responsables de traitements inefficaces par manque d’expérience<br />

de la chirurgie urétrale.<br />

Urologie<br />

1<br />

2<br />

Cet article traite de l’étiologie, des symptômes, du diagnostic<br />

et des principes de thérapeutiques. Pour une description<br />

approfondie des techniques il faut se référer aux articles<br />

précédemment publiés par les mêmes auteurs [1, 2] .<br />

■ Anatomie<br />

Il est important de connaître les termes exacts pour chaque<br />

partie de l’urètre. L’urètre masculin comporte trois portions<br />

successives depuis le col vésical jusqu’au méat : l’urètre prostatique,<br />

l’urètre membraneux et l’urètre antérieur ou spongieux.<br />

Le dernier contient l’urètre bulbaire et, à partir de l’angle<br />

pénoscrotal, l’urètre pénien. La pathologie de l’urètre prostatique<br />

se confond avec la pathologie prostatique et n’est pas<br />

traitée dans cet article (Fig. 1).<br />

■ Étiologies<br />

4<br />

Figure 1. Les différentes parties de l’urètre. 1. Angle pénoscrotal ;<br />

2. urètre pénien ; 3. urètre postérieur (a : prostatique ; b : membraneux) ;<br />

4. urètre bulbaire.<br />

En 1981, une revue de 20 articles publiés entre 1969 et<br />

1980 rassemblant 1 549 cas de rétrécissements de l’urètre<br />

montrait que la cause la plus fréquente de sténose était infectieuse<br />

(40 %) [3] . L’étiologie vénérienne est devenue depuis lors<br />

beaucoup moins fréquente et a laissé la place aux urétrites non<br />

3a 33a<br />

3b 33b<br />

18-370-A-10<br />

1


18-370-A-10 Rétrécissements de l’urètre masculin<br />

1<br />

2<br />

Figure 2. Situation habituelle après rupture de l’urètre postérieur dans<br />

les fractures du bassin. 1. Hématome pelvien ; 2. ligaments puboprostatiques<br />

rompus ; 3. vessie comprimée et déplacée par les hématomes ;<br />

4. prostate ; 5. urètre membraneux.<br />

spécifiques. Quand on compare les périodes 1965-75 et 1976-81,<br />

il en ressort clairement une très nette augmentation de l’étiologie<br />

iatrogène. Une origine traumatique, non iatrogène, est<br />

rapportée dans 20 % des cas, principalement liée à des accidents<br />

de circulation et de travail. Dans la moitié des cas l’origine reste<br />

inconnue. Dans une revue de notre propre série de 268 urétroplasties<br />

entre 2001 et 2008 et d’autres séries récentes [4, 5] ,<br />

l’origine iatrogène est devenue la cause la plus fréquente. Dans<br />

les pays africains, l’urétrite infectieuse reste la cause<br />

prédominante [6-8] . Le lichen sclérosant du gland, avec extension<br />

à l’urètre peut être aussi une cause de sténose urétrale<br />

rétroméatique.<br />

Traumatismes externes<br />

L’urètre membraneux est particulièrement menacé au cours<br />

des fractures du bassin : le déplacement des structures osseuses<br />

peut entraîner un phénomène de cisaillement, provoquant une<br />

rupture partielle ou totale de l’urètre membraneux. L’hémorragie<br />

provoquée par la fracture du bassin a tendance à écarter les<br />

deux segments de l’urètre. La résorption de l’hématome, qui<br />

n’est jamais tout à fait complète et prend plusieurs mois, risque<br />

de figer les deux extrémités de l’urètre dans un double décalage,<br />

frontal et sagittal (Fig. 2).<br />

La chute à califourchon et/ou le traumatisme direct sur le<br />

périnée exposent aux ruptures de l’urètre bulbaire par choc<br />

direct, l’urètre étant écrasé contre la symphyse pubienne. Le<br />

traumatisme provoque une rupture du corps spongieux et un<br />

hématome périnéal important. La cicatrisation de la lésion<br />

urétrale évolue souvent vers la constitution d’une sténose plus<br />

ou moins tardive.<br />

Le faux pas du coït expose à la rupture de l’urètre pénien, en<br />

général associée à une rupture des corps caverneux si le traumatisme<br />

est assez brutal.<br />

Traumatismes iatrogènes<br />

Dans les pays développés ils sont actuellement responsables<br />

d’un grand nombre de rétrécissements de l’urètre masculin [3-5] .<br />

Ils peuvent être la conséquence d’une manipulation transurétrale<br />

inadéquate avec sondes ou instruments, mais aussi de<br />

manipulations bien conduites. Avant n’importe quelle manipulation<br />

transurétrale il faut se demander si elle est utile ou<br />

nécessaire. Chez les jeunes, les interventions pour cure<br />

d’hypospadias sont aussi une cause non négligeable de rétrécissement<br />

secondaire de l’urètre.<br />

En dehors du traumatisme direct de l’urètre par passage de<br />

sonde ou d’instrument, le rétrécissement peut être la suite d’une<br />

inflammation initiée par une sonde à demeure. La toxicité<br />

directe du latex ou le biofilm qui se forme autour de la sonde<br />

après quelques jours peuvent être responsables des phénomènes<br />

inflammatoires, conduisant à court terme à un rétrécissement.<br />

3<br />

4<br />

5<br />

Plus rare, l’ischémie du tissu spongieux au cours d’une<br />

intervention sous hypothermie ou en circulation extracorporelle<br />

(interventions neurochirurgicale ou chirurgie cardiaque) peut<br />

être la source de rétrécissements atteignant la totalité de l’urètre<br />

antérieur. Depuis une dizaine d’années, le traitement du cancer<br />

de la prostate devient une cause de fréquence croissante<br />

(prostatectomie radicale, radiothérapie, brachythérapie).<br />

■ Symptomatologie et diagnostic<br />

Les plaintes d’un patient porteur d’un rétrécissement de<br />

l’urètre attirent l’attention sur un phénomène obstructif du bas<br />

appareil urinaire et ses complications. Le symptôme qui apparaît<br />

le plus souvent est la diminution du débit du jet d’urine.<br />

Néanmoins tous les degrés sont possibles, depuis la miction<br />

normale jusqu’à la rétention totale. En cas de sténose discrète<br />

le débit peut rester normal grâce à une hypertrophie compensatrice<br />

du détrusor. Parfois le patient est inconscient de ses<br />

ennuis, car la dysurie s’est installée très progressivement. Il peut<br />

exister une altération de la forme du jet urinaire, par exemple<br />

en arrosoir, surtout en cas de sténose rétroméatique.<br />

Il faut aussi penser à une sténose de l’urètre en présence<br />

d’infections prostatiques ou épididymaires répétitives.<br />

De même, le développement d’une instabilité vésicale est<br />

assez exceptionnel, contrairement à ce qui existe pour d’autres<br />

causes d’obstruction du bas appareil urinaire.<br />

Les troubles de l’éjaculation sont possibles, quoique peu<br />

fréquents. Enfin, d’autres symptômes peuvent apparaître tels<br />

que la pollakiurie, l’hématurie, mais la plupart du temps ils sont<br />

la conséquence d’une complication de la sténose, tels une<br />

urétrite, un calcul, une prostatite aiguë ou chronique, une<br />

orchiépididymite.<br />

Il faut donc, au cours de l’anamnèse, essayer de dépister le<br />

facteur étiologique de la sténose.<br />

Débitmétrie urinaire<br />

On estime que pour un adulte, un débit inférieur à 10 ml/s<br />

est insuffisant, la normale étant supérieure à 15 ml/s. La valeurlimite<br />

en dessous de laquelle un traitement est nécessaire est<br />

mal établie. La forme de la courbe de débitmétrie est assez<br />

typique (Fig. 3).<br />

La débitmétrie présente également un intérêt pour suivre<br />

l’évolution de la lésion après traitement.<br />

Examen physique<br />

Le diagnostic d’une sténose méatique ou rétroméatique peut<br />

se faire par une bougie de calibre Charrière 16, ou moins, bien<br />

lubrifiée. Mais une exploration par imagerie reste nécessaire<br />

pour explorer le reste du trajet urétral. Plus rarement, il est<br />

possible de palper une induration le long de l’urètre. L’examen<br />

comporte aussi un toucher rectal, ainsi qu’un examen des<br />

organes génitaux externes où l’on peut trouver éventuellement<br />

des nodules épididymaires séquellaires d’épididymites<br />

préalables.<br />

Endoscopie<br />

Une fibroscopie urétrovésicale permet de faire rapidement le<br />

diagnostic de sténose mais les examens d’imagerie sont néces-<br />

25 ml/s<br />

0 ml/s 0 s 10 s 20 s 30 s 40 s 50 s 60 s 70 s<br />

Figure 3. Débitmétrie urinaire obstructive, typique pour rétrécissements<br />

de l’urètre avec un plateau du débit à une certaine valeur.<br />

2 Urologie


Figure 4.<br />

A. Le court rétrécissement de la région bulbaire est masqué par la<br />

superposition du produit de contraste.<br />

B. Un cliché gauche-droite a été nécessaire pour le démontrer.<br />

saires pour compléter le bilan. Certaines sténoses serrées<br />

empêchent le passage du fibroscope et limitent l’exploration de<br />

l’urètre proximal.<br />

Imagerie<br />

Urétrographie permictionnelle<br />

Elle peut être réalisée à la fin d’une urographie intraveineuse<br />

ou par remplissage de la vessie par voie rétrograde durant<br />

l’urétrographie rétrograde. Il est rare que le patient ne puisse pas<br />

relaxer son sphincter externe durant cet examen qui nécessiterait<br />

une ponction sus-pubienne.<br />

Une urétrographie permictionnelle peut renseigner sur<br />

l’existence d’un rétrécissement urétral, mais détermine assez<br />

difficilement sa longueur, de même que la présence d’une<br />

éventuelle deuxième sténose en aval. La dilatation en amont du<br />

rétrécissement urétral est bien mise en évidence, mais la<br />

diminution de débit du produit de contraste au-delà de la<br />

sténose masque la lumière réelle de l’urètre. Il est donc impératif,<br />

surtout en cas de doute, d’associer à cette urétrographie<br />

permictionnelle une urétrographie ascendante ou rétrograde.<br />

Ces deux examens conjugués renseignent parfaitement sur l’état<br />

de l’urètre en vue d’une intervention chirurgicale dont la<br />

technique peut différer selon la localisation, la longueur, la<br />

multiplicité et le degré de sténose [9] .<br />

Une dilatation présténotique, particulièrement dans la région<br />

de l’urètre bulbaire, peut masquer un rétrécissement ou donner<br />

l’impression que celui-ci est beaucoup plus court qu’en réalité.<br />

Dès lors il est souvent utile, voire nécessaire, de réaliser un<br />

cliché permictionnel et rétrograde en profil gauche-droite<br />

(Fig. 4).<br />

L’observation directe du remplissage de l’urètre en scopie<br />

peut être utile dans les cas douteux. Certains rétrécissements ne<br />

s’accompagnent pas de dilatation en amont. Il faut alors<br />

suspecter une rigidité totale de l’urètre et par conséquent un<br />

rétrécissement sur toute la longueur de celui-ci (Fig. 5).<br />

Urologie<br />

Figure 5.<br />

A. Cysto-urétrographie permictionnelle : pas de dilatation typique. On<br />

pourrait diagnostiquer un court rétrécissement.<br />

B. Urétrographie rétrograde : montre la même zone étroite et irrégulière<br />

dans l’urètre pénien. En fait, tout l’urètre doit être considéré comme<br />

malade puisqu’il n’y a pas de dilatation présténotique comme on pourrait<br />

s’y attendre dans les deux directions.<br />

L’urétrographie rétrograde connaît des limites techniques. Le<br />

changement de position du malade et la traction pénienne<br />

peuvent altérer l’image radiologique. La longueur de l’urètre<br />

bulbaire est souvent sous-estimée (jusqu’à 50 %) [7] . Enfin,<br />

l’examen ne donne pas d’information sur l’extension de la<br />

fibrose au tissu spongieux périurétral.<br />

Échographie urétrale<br />

Afin de compléter l’urétrographie, on utilise l’échographie<br />

urétrale [8] . La sonde échographique linéaire à 7,5 MHz est<br />

appliquée au niveau du périnée. L’urètre apparaît sous la forme<br />

d’une bande hypoéchogène de 8à10mmdediamètre après<br />

injection de sérum physiologique par une sonde Foley placée au<br />

niveau du méat urétral.<br />

L’urètre bulbaire est exploré en plaçant la sonde d’échographie<br />

dans le plan sagittal du périnée. Cet accès permet de<br />

mesurer avec précision la longueur de la sténose urétrale.<br />

L’évaluation échographique semble être utile en préopératoire,<br />

particulièrement lors d’une anastomose terminoterminale,<br />

car l’indication de la technique dépend considérablement de la<br />

longueur de la sténose (Fig. 6).<br />

La fibrose du tissu spongieux est un facteur important à<br />

considérer dans le choix thérapeutique, c’est aussi un facteur<br />

pronostique. L’échographie permet d’objectiver la fibrose du<br />

tissu spongieux qui devient épais, irrégulier et hyperéchogène<br />

autour de l’urètre.<br />

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est utile en cas de<br />

sténose d’origine tumorale. Cet examen montre l’extension<br />

éventuelle dans les corps caverneux, ce qui entraîne une<br />

chirurgie beaucoup plus extensive.<br />

■ Traitement<br />

Dilatations<br />

Rétrécissements de l’urètre masculin 18-370-A-10<br />

Elles représentent l’un des plus anciens procédés urologiques.<br />

Pendant des siècles les urologues ont développé des instruments<br />

3


18-370-A-10 Rétrécissements de l’urètre masculin<br />

Figure 6.<br />

A. Urétrographie rétrograde d’une sténose courte de l’urètre bulbaire :<br />

10 mm.<br />

B. Échographie de la sténose : l’urétrographie a sous-estimé la longueur<br />

de la sténose qui est en effet de 14,4 mm à l’image échographique.<br />

pour franchir les rétrécissements et les dilater progressivement.<br />

Les dilatations ne sont pas à considérer comme un traitement<br />

définitif. Bien qu’elles soient réalisées avec prudence, de façon<br />

progressive, elles provoquent une rupture de la muqueuse à<br />

l’endroit le moins cicatrisé. Lors des mictions, de l’urine diffuse<br />

dans la plaie en provoquant une sclérose des tissus périurétraux<br />

et donc une récidive du rétrécissement à court ou long terme.<br />

On ne peut donc espérer un effet durable que dans 20 % des<br />

cas [7] . Chez les autres patients, il est nécessaire de poursuivre de<br />

manière indéfinie les dilatations, avec une fréquence souvent de<br />

plus en plus rapprochée. Finalement, le rétrécissement devient<br />

plus étendu et étroit.<br />

Les complications à craindre sont les hémorragies du corps<br />

spongieux et les septicémies. Il est prudent de ne pas dilater en<br />

cas d’infection urinaire.<br />

Les autodilatations n’échappent pas à ces complications et<br />

sont à considérer comme un traitement palliatif temporaire.<br />

Toutefois, les dilatations peuvent être utiles chez les sujets âgés<br />

et fragiles.<br />

Traitement endoscopique<br />

L’urétrotomie interne est la forme de base du traitement<br />

transurétral des sténoses de l’urètre, dont l’idée est très<br />

ancienne, née en France (Civiale, 1817 ; Maisonneuve, 1848). Le<br />

principe de l’urétrotomie interne diffère essentiellement des<br />

dilatations urétrales, celles-ci entraînent une distension de<br />

l’anneau fibreux, d’où apparition de fissures et de ruptures<br />

involontaires. Par l’urétrotomie interne, on incise la sténose sur<br />

toute sa longueur, jusqu’en tissu sain. L’endroit et la profondeur<br />

de la section sont variables. Après l’urétrotomie apparaissent des<br />

bords de plaie béants, entre lesquels peut se réaliser une<br />

réépithélialisation.<br />

Tableau 1.<br />

Facteurs pronostiques pour le traitement endoscopique des sténoses de<br />

l’urètre.<br />

Favorable Défavorable<br />

Sténose courte (< 2cm)<br />

Bulbaire<br />

Fibrose périurétrale négligeable<br />

Première urétrotomie<br />

Plus large que Char. 15<br />

Récidive tardive<br />

Urétrotomie interne sous contrôle de la vue<br />

Lorsque les premiers résultats de l’urétrotomie interne sous<br />

contrôle de la vue ont été publiés, un sérieux espoir est apparu.<br />

Cependant, ce succès ne paraît pas devoir être attribué uniquement<br />

aux résultats favorables obtenus par cette technique. Un<br />

manque d’expérience en chirurgie plastique de l’urètre est aussi<br />

à la base de cet emploi fréquent de l’urétrotomie. La facilité<br />

d’apprentissage de la technique de l’urétrotomie interne, la<br />

relative simplicité de l’intervention, le fait qu’elle puisse être<br />

souvent appliquée chez des malades ambulatoires sans complications<br />

majeures, expliquent l’attrait de cette technique.<br />

Certains considèrent l’urétrotomie endoscopique comme le<br />

traitement de choix, ou au moins le traitement de première<br />

intention.<br />

Résultats et facteurs pronostiques<br />

Il existe des facteurs pronostiques importants comme la<br />

longueur, la localisation, le nombre de sténoses, l’extension de<br />

la fibrose périurétrale, la période sans récidives et le nombre<br />

d’urétrotomies préalables.<br />

Les rétrécissements de moins de 2 cm s’accompagnent des<br />

meilleurs résultats. On observe près de 80 % de succès pour les<br />

rétrécissements de moins de 1 cm. Au-delà de 1,5 cm, le taux<br />

de bons résultats baisse à près de 20 %. Beaucoup d’autres<br />

études confirment ce facteur pronostique [9-16] . Steenkamp et<br />

al. [7] ont calculé que pour chaque centimètre de longueur en<br />

plus, le risque relatif pour développer une récidive augmente<br />

d’un facteur 1,22 (Tableau 1).<br />

Indications<br />

Les bonnes indications de l’urétrotomie endoscopique sont<br />

donc les sténoses courtes, de moins de 1 cm, uniques, de<br />

l’urètre bulbaire, encore peu serrées, traitées pour la première<br />

fois.<br />

À l’inverse, on ne peut guère espérer un succès durable en cas<br />

de sténose longue de plus de 2 cm, difficilement franchie,<br />

multiple, incisée déjà deux fois préalablement, avec une récidive<br />

précoce, et intéressant l’urètre pénien.<br />

Analyse coût-bénéfice<br />

Sténose longue<br />

Multiple<br />

Pénienne<br />

Prononcée<br />

2 urétrotomies préalables<br />

Fibrose périurétrale prononcée<br />

Récidive précoce<br />

Vu la probabilité de récidive et donc de réintervention, on<br />

peut se demander si le coût de l’urétrotomie interne est plus<br />

satisfaisant comparé au prix d’une intervention chirurgicale<br />

ouverte avec un pourcentage de succès plus élevé. Le prix du<br />

traitement endoscopique semble significativement supérieur. Le<br />

coût total du traitement ne serait finalement en faveur de<br />

l’urétrotomie qu’en cas de pourcentage de succès définitif<br />

dépassant les 60 % [17] .<br />

Endoprothèses urétrales métalliques expansibles<br />

et grillagées<br />

Elles maintiennent la perméabilité de la lumière urétrale après<br />

l’incision. Elles peuvent être intéressantes lorsque la sténose est<br />

courte et qu’il peut y avoir prolifération épithéliale à partir des<br />

deux extrémités. En cas de sténoses plus importantes, le tissu de<br />

granulation peut proliférer entre les mailles aux dépens de<br />

l’épithélium et l’espace sera entièrement comblé par du tissu<br />

fibreux [18, 19] . Elles ne constituent certainement pas une<br />

4 Urologie


solution susceptible de remplacer les techniques d’urétroplastie<br />

dans les cas de sténoses compliquées et multiopérées. Elles sont<br />

donc presque abandonnées.<br />

Endoprothèses spiralées<br />

Les endoprothèses spiralées sont constituées de spires jointives<br />

qui empêchent l’obstruction par du tissu de granulation.<br />

Elles risquent de provoquer une hyperplasie muqueuse à leurs<br />

extrémités. Elles sont plus faciles à retirer en cas d’échec.<br />

La mise en place des prothèses spiralées peut prévenir la<br />

rétraction de la plaie lors de la cicatrisation urétrale, mais<br />

celle-ci peut durer 2 ans. Il faut donc maintenir les prothèses<br />

pendant tout ce temps. L’expérience de Yachia avec les endoprothèses<br />

métalliques confirme qu’il est nécessaire de laisser la<br />

prothèse en place pendant 10 à 12 mois [20] . L’endoprothèse<br />

étant complètement étanche, la lumière urétrale ne peut pas<br />

être envahie, il y a formation d’une sorte de capsule lisse qui<br />

sert de lumière lors du retrait de la prothèse. L’endoprothèse est<br />

laissée suffisamment pour prévenir la rétraction fibreuse qui se<br />

poursuit pendant de longs mois dans ces lésions. Yachia est<br />

pour l’instant le seul à avoir présenté les résultats obtenus avec<br />

la technique qu’il a mise au point. Il faut d’abord que ces<br />

premiers résultats positifs soient confirmés [21] .<br />

Vaporisation du rétrécissement au laser<br />

Bien avant d’appliquer la technique du laser, certains proposaient<br />

de réséquer les rétrécissements de l’urètre par voie<br />

transurétrale qui ne donnait toutefois que de très mauvais<br />

résultats. Le courant électrique brûlait les tissus trop profondément<br />

et la lumière se rétrécissait ensuite plus vite et plus<br />

fortement qu’avant. La technique au laser agit moins en<br />

profondeur et elle détruit donc moins les tissus que l’incision<br />

avec le courant électrique. La technique au laser permet<br />

l’ouverture complète par vaporisation de tous les tissus cicatriciels<br />

de la lumière urétrale. Mais simultanément, elle supprime<br />

l’intégralité de l’épithélium qui assure normalement le rétablissement<br />

de la lumière de l’urètre. Il faut donc que l’intervention<br />

se fasse à partir des bords de la plaie : plus ces derniers sont<br />

écartés, moins le résultat est satisfaisant. L’application de la<br />

technique au laser ne change en rien ce principe. Dans des cas<br />

sélectifs, où le rétrécissement est très court, on peut s’attendre<br />

à ce que le rapprochement des deux extrémités se déroule<br />

mieux qu’avec l’urétrotomie classique. Lorsque les rétrécissements<br />

sont très longs, on peut s’attendre à de moins bons<br />

résultats qu’avec l’urétrotomie ordinaire, surtout si l’épithélium<br />

a disparu sur toute la longueur du rétrécissement traité [22] .<br />

Nouvelles endoprothèses<br />

Un groupe finlandais a développé une endoprothèse spiralée<br />

résorbable en polyglycol, le matériau dans lequel sont fabriqués<br />

les fils chirurgicaux [23] . La prothèse se résorbe en 10-12 mois et<br />

s’expand encore un peu après avoir été mise en place. Elle se<br />

résorbe lentement et n’a pas à être retirée. Elle fait appel aux<br />

mêmes principes que l’endoprothèse spiralée proposée par<br />

Yachia.<br />

Conclusion<br />

Beaucoup considèrent l’urétrotomie endoscopique comme un<br />

moyen qui peut remplacer l’urétroplastie. Même lorsque l’on<br />

considère les pourcentages de succès les plus élevés, il reste<br />

encore au moins 30 % des patients qui doivent subir d’autres<br />

urétrotomies ou des dilatations. Les urétrotomies endoscopiques<br />

ressemblent plus, dès lors, à des dilatations déguisées qu’à un<br />

traitement curatif. L’usage et l’enthousiasme exagérés suscités<br />

par l’urétrotomie endoscopique ont, semble-t-il, mené à une<br />

expérience insuffisante de la chirurgie de l’urètre, et par là, ont<br />

aggravé la désaffection de celle-ci.<br />

L’urétrotomie sous contrôle de la vue constitue un remarquable<br />

apport à l’urologie qui permet de résoudre certaines difficultés<br />

attachées à des formes de sténoses courtes au niveau de<br />

l’urètre membraneux, et ceci d’une manière fort élégante. Il faut<br />

respecter ses limites dans le but d’en voir faire un usage plus<br />

précis, et par conséquent meilleur.<br />

Urologie<br />

■ Traitement chirurgical<br />

Le choix est très vaste et dépendant de facteurs comme la<br />

localisation et la longueur des sténoses, la coexistence de<br />

plusieurs d’entre elles, la qualité du corps spongieux et des<br />

tissus environnants, le type d’intervention antérieure, les<br />

cicatrices présentes et finalement la cause de la sténose (par<br />

exemple après traumatisme du bassin).<br />

Diagnostic<br />

Un diagnostic correct est la première étape intervenant dans<br />

le choix de la technique. Une bonne anamnèse, un rapport<br />

détaillé des interventions antérieures, une inspection minutieuse<br />

des organes génitaux externes sont à la base du choix de la<br />

technique. Les lignes de sutures antérieures, les cicatrices, la<br />

fibrose du tissu spongieux méritent toute notre attention.<br />

Délai pour opérer un rétrécissement<br />

Après toute exploration instrumentale de l’urètre (dilatation,<br />

urétrotomie), il est indispensable de respecter un délai de 3 mois<br />

avant une chirurgie correctrice de l’urètre, sinon le rétrécissement<br />

n’est pas nettement délimité et la correction chirurgicale<br />

peut alors porter sur une longueur insuffisante. En attendant, il<br />

est parfois nécessaire de mettre une dérivation urinaire<br />

suprapubienne.<br />

Une dilatation, même de faible amplitude, quelques jours<br />

avant l’intervention est susceptible de déchirer la lumière<br />

urétrale suffisamment pour qu’un Béniqué large puisse ensuite<br />

passer sans difficulté à travers le rétrécissement. Après cela, il est<br />

impossible de repérer l’extrémité distale de la sténose et le<br />

chirurgien se trouve alors dans une situation embarrassante.<br />

Préparation préopératoire<br />

Il faut toujours veiller à ce que les urines du patient soient<br />

stériles avant de l’opérer car l’infection est une des causes<br />

importantes d’échec. En général, dans le cas d’un rétrécissement<br />

non compliqué et relativement récent, cela ne pose pas de<br />

problème. En revanche, en présence de sténoses anciennes, il<br />

n’est pas rare de trouver une prostatite associée. Il est conseillé<br />

de contrôler le sédiment urinaire 1 semaine avant l’intervention<br />

et d’administrer l’antibiotique approprié 24 heures avant. Cela<br />

est également préférable chez les patients porteurs d’un cathéter<br />

sus-pubien. Chez ces patients, en l’absence de signe infectieux,<br />

il est tout à fait inutile d’administrer une antibioprophylaxie<br />

continue car cela a pour unique résultat la sélection de germes<br />

résistants qui pourront être responsables de l’échec de<br />

l’intervention.<br />

Techniques<br />

Anastomose terminoterminale<br />

Rétrécissements de l’urètre masculin 18-370-A-10<br />

Appelée encore urétroplastie anastomotique, c’est de loin la<br />

meilleure technique pour le traitement des sténoses urétrales<br />

courtes car l’urètre malade est remplacé par son propre tissu<br />

sans interposition de matériel étranger. Les bons résultats<br />

immédiats restent bons à long terme [24-27] . Cette technique est<br />

donc fortement conseillée mais ses indications sont très<br />

restreintes. C’est la technique standard pour le traitement des<br />

ruptures de l’urètre après fracture du bassin. Dans cette indication,<br />

on peut gagner jusqu’à 8 cm par clivage des corps caverneux<br />

à hauteur du pubis, associé à l’ablation de la portion<br />

inférieure de la symphyse. Cette technique peut difficilement<br />

s’appliquer en cas de sténose courte dans la portion plus distale<br />

de l’urètre. Le clivage des corps caverneux entraîne en effet un<br />

risque certain de dysfonction érectile. Les troubles de l’éjaculation<br />

sont provoqués par le fait que l’urètre n’est plus entouré<br />

par les muscles bulbaires. C’est pourquoi, à ce niveau on<br />

compte uniquement sur l’élasticité de l’urètre de part et d’autre<br />

de la sténose, qui ne peut donc dépasser une longueur maximale<br />

de 2 cm. De plus, l’urètre sain doit encore être spatulé sur<br />

environ 1 cm des deux côtés de la sténose et il est parfois<br />

5


18-370-A-10 Rétrécissements de l’urètre masculin<br />

nécessaire de recouper les deux extrémités avasculaires et<br />

fibreuses de l’urètre, ce qui entraîne encore une perte supplémentaire<br />

de tissu. Il arrive ainsi qu’une anastomose terminoterminale<br />

prévue en préopératoire doive être remplacée en cours<br />

d’intervention par une reconstruction par substitution tissulaire.<br />

Urétroplasties par greffes libres<br />

Lorsqu’un morceau de peau ou de muqueuse est totalement<br />

coupé de son apport sanguin dans la zone donneuse et transposé<br />

à un autre endroit, on parle de greffe.<br />

Quand une urétroplastie termino-terminale n’est plus indiquée,<br />

les greffons libres constituent la technique la plus simple<br />

pour traiter la majorité des sténoses urétrales simples de l’urètre<br />

membraneux jusqu’au méat. Ils peuvent être prélevés sur une<br />

longueur illimitée au niveau du prépuce grâce à un prélèvement<br />

spiralé. On peut également utiliser la face dorsale du pénis, la<br />

muqueuse buccale ou, dans des cas exceptionnels, la muqueuse<br />

vésicale.<br />

Un greffon libre fonctionne cependant nettement moins bien<br />

comme tube. Au niveau du méat, un greffon libre donne de<br />

moins bons résultats que dans le cas d’une sténose bulbaire.<br />

Une moins bonne couverture de la partie antérieure du pénis et<br />

l’apparition d’une infection à proximité immédiate du méat<br />

urétral en sont peut-être les causes [28] .<br />

Muqueuse buccale<br />

Depuis quelques années on recommande fortement l’utilisation<br />

de muqueuse buccale au lieu de la peau en provenance du<br />

pénis [29-33] mais il n’existe encore aucune justification scientifique<br />

à cette recommandation. On ne dispose jusqu’à présent<br />

d’aucune étude comparative randomisée. Néanmoins, la<br />

muqueuse buccale est un bon greffon pour remplacer l’urètre.<br />

Il faut cependant rester conscient des inconvénients de<br />

l’utilisation de la muqueuse buccale. Alors que la peau pénienne<br />

est présente en quantité suffisante dans le champ opératoire de<br />

l’urologue, l’utilisation de muqueuse buccale implique la<br />

création d’un second site opératoire, ce qui allonge la durée de<br />

l’intervention et requiert éventuellement le recours à des<br />

spécialistes plus familiarisés avec la cavité buccale. On ne peut<br />

pas non plus nier que la plaie au niveau de la bouche soit<br />

désagréable pour le patient dans les jours suivant l’intervention<br />

et puisse provoquer à long terme une cicatrice gênante [34-37] .<br />

Les plaintes sont directement liées aux dimensions de la plaie.<br />

L’utilisation de muqueuse buccale constitue néanmoins un<br />

élargissement bienvenu des possibilités lorsque la peau génitale<br />

n’est pas disponible.<br />

Dans la technique originale, le greffon libre est positionné<br />

« ventralement » au niveau de l’urètre sténosé qui est ouvert.<br />

Barbagli [38] a eu l’idée de placer la greffe sur le versant dorsal,<br />

contre les corps caverneux. Il y voyait comme avantage une<br />

meilleure fixation, immobile, de la greffe contre son lit d’où<br />

doit provenir la vascularisation en évitant de cette façon des<br />

sacculations. Le choix entre la position ventrale ou dorsale de<br />

la greffe est avant tout une question de bon sens.<br />

Il est connu que l’utilisation de greffes libres au niveau de<br />

l’urètre pénien et au niveau de la région pénoscrotale très<br />

mobile donne plus de complications que dans sa portion plus<br />

proximale. Ici, le recouvrement avec le corps spongieux, qui est<br />

tout fin, est impossible et la vascularisation de la greffe dépend<br />

donc du tissu sous-cutané qui, à cet endroit, est très mobile. On<br />

peut donc supposer qu’ici, le positionnement dorsal de la greffe<br />

est avantageux.<br />

Urétroplastie par lambeau pédiculé<br />

Les greffons pédiculés portent leur propre vascularisation et<br />

ne doivent donc pas avoir recours à la vascularisation des tissus<br />

environnants pour survivre et se défendre contre l’infection. Un<br />

bon lambeau pédiculé emmène sa propre vascularisation dans la<br />

région sténosée et reste dès lors indépendant des tissus environnants.<br />

Même si elle est réalisée avec des tissus fibreux, l’anastomose<br />

peut « survivre ». Prélevés sur le prépuce ou sur le fourreau<br />

pénien, ils peuvent, en fonction de la longueur du pénis, être<br />

amenés jusqu’au bulbe. Ils conviennent aussi bien comme tube<br />

que comme « patch ».<br />

Un lambeau pédiculé peut guérir pratiquement tous les<br />

rétrécissements urétraux depuis le méat jusqu’à l’urètre membraneux.<br />

Cette technique devrait être connue de tous les<br />

chirurgiens concernés par la chirurgie urétrale, dans la mesure<br />

où elle est la seule technique en un temps qui permette de faire<br />

face à certaines destructions urétrales embarrassantes. Cette<br />

technique a néanmoins certains inconvénients qui font que<br />

nous ne la considérons pas comme une méthode de premier<br />

choix dans les cas primaires simples.<br />

Urétroplasties en deux temps<br />

Vu les succès des urétroplasties en un temps, les indications<br />

pour opérer en deux temps sont devenues rares. Il s’agit presque<br />

exclusivement de réinterventions, souvent itératives, chez des<br />

patients qui n’ont plus de peau saine au niveau de la verge, à<br />

la vascularisation fiable.<br />

Presque toutes les techniques d’urétroplastie en deux temps<br />

sont dérivées de la technique originale de Johanson. C’est à lui<br />

que revient le mérite d’avoir appliqué au rétrécissement urétral<br />

le principe du lambeau cutané enfoui. C’est pourquoi il semble<br />

essentiel de décrire brièvement cette opération originale (Fig. 7).<br />

En principe, on anastomose à la sténose ouverte, soit la peau<br />

du pénis, soit la peau du scrotum, selon la localisation de la<br />

sténose comme le schéma l’illustre clairement. On ne passe au<br />

deuxième temps qu’au plus tôt après 3 mois et seulement si les<br />

tissus paraissent bien sains et s’il n’y a pas de récidive de<br />

sténose. Le but ici est de refermer l’urètre « marsupialisé ».<br />

Urétroplastie par greffe libre en grillage<br />

dermoépidermique ou préputial<br />

Appelée aussi urétroplastie « meshgraft », cette technique,<br />

surtout décrite et appliquée par Schreiter [39] est une variable<br />

utile de la technique en deux temps qui évite les désavantages<br />

de la peau scrotale.<br />

Périnéostomie définitive<br />

L’urétroplastie en deux temps est actuellement uniquement<br />

utilisée en cas de situations compliquées, principalement chez<br />

les patients ayant déjà subi plusieurs interventions. Parmi ces<br />

patients, beaucoup sont contents avec le résultat obtenu après<br />

le premier temps opératoire et ne souhaitent plus de reconstruction<br />

pour ne plus encourir le risque d’une nouvelle sténose.<br />

Cette situation est très bien acceptée, principalement chez les<br />

personnes âgées.<br />

Choix de la technique<br />

Les résultats étant comparables, quelle est alors la technique<br />

la plus appropriée ? À nouveau, s’il s’agit d’une première<br />

opération, on choisit la technique la moins délabrante, qui<br />

laisserait encore d’autres possibilités par la suite. Car il faut bien<br />

se rendre compte que des récidives peuvent survenir tôt ou tard<br />

chez un nombre non négligeable de patients. La technique de<br />

l’anastomose termino-terminale est le premier choix pour les<br />

sténoses très courtes, mais non applicable dans beaucoup de cas.<br />

La greffe libre est un premier choix dans la région de l’urètre<br />

bulbaire mais une greffe à partir du prépuce ou du dos du pénis<br />

peut se trouver en abondance dans le champ opératoire, et être<br />

très appropriée. À ce niveau, le corps spongieux peut bien<br />

recouvrir la greffe et offrir un excellent lit vascularisé. À hauteur<br />

de l’urètre pénien, le recouvrement de la greffe est beaucoup<br />

plus problématique et, dans ce cas, le placement du greffon à<br />

la face dorsale de l’urètre ouvert, contre les corps caverneux,<br />

semble plus indiqué. Lorsqu’il n’est plus possible de trouver une<br />

peau de bonne qualité au niveau du pénis, la muqueuse buccale<br />

constitue un excellent matériel de substitution.<br />

En cas de sténose de l’urètre pénien, on peut immédiatement<br />

opter pour un « flap » pédiculé parce que ce dernier apporte sa<br />

propre vascularisation et ne dépend donc plus de son recouvrement.<br />

Il est également plus résistant aux infections.<br />

6 Urologie


Figure 7. Premier temps de l’urétroplastie de Johanson pour un rétrécissement profond.<br />

A. Invagination de la peau scrotale.<br />

B. Résultat final.<br />

C. Situation peropératoire.<br />

Le choix devient plus difficile s’il s’agit de réinterventions :<br />

les cicatrices et la fibrose périurétrale imposent des restrictions.<br />

Il faut alors tenir compte du trajet des cicatrices et des techniques<br />

précédemment utilisées. Par exemple, un pédicule vasculaire<br />

est impossible à disséquer deux fois. Dans ce cadre, les<br />

sténoses de l’urètre pénien posent les problèmes les plus<br />

compliqués. La greffe buccale fixée dorsalement peut être une<br />

bonne alternative dans ces situations. Si la peau du dos du pénis<br />

est intacte, la technique de Perovic peut être utilisée.<br />

Dans ces cas compliqués, plusieurs fois opérés, le « flap »<br />

scrotal reste une solution mais uniquement chez les patients<br />

dont le scrotum convient à ce genre de chirurgie. Lorsque la<br />

totalité de l’urètre doit être remplacée et que la peau du pénis<br />

est intacte, un flap cutané préputial peut convenir en dernier<br />

recours. Les opérations en deux temps ont toujours une place<br />

dans les cas très compliqués.<br />

La connaissance de la plupart des techniques décrites<br />

ci-dessus est vraiment nécessaire pour tout chirurgien qui désire<br />

se lancer dans la chirurgie de l’urètre (Tableau 2). La combinaison<br />

de plusieurs techniques est également parfois nécessaire.<br />

Cette connaissance est impossible pour la plupart des urologues<br />

et il en découle ainsi que cette chirurgie devrait être réservée à<br />

des centres de référence.<br />

Localisations et conditions spéciales<br />

de sténoses urétrales<br />

Reconstruction tardive des rétrécissements<br />

postérieurs<br />

Ces rétrécissements se caractérisent par :<br />

leur localisation dans la région sphinctérienne et/ou au-dessus<br />

du diaphragme urogénital ;<br />

la présence fréquente d’un manque important de substance<br />

entre l’apex de la prostate et l’urètre distal ;<br />

des hématomes, une infection et des échecs de réalignement<br />

antérieurs. Ceci aboutit à une fibrose importante de toute la<br />

région et il n’est pas facile de reconnaître les différents<br />

éléments anatomiques dans la région supradiaphragmatique.<br />

Des déplacements osseux consécutifs aux fractures peuvent<br />

rendre la voie d’accès encore plus difficile ;<br />

Urologie<br />

des lésions associées : traumatismes scrotopérinéaux qui<br />

rendent la peau de cette région peu utilisable et compliquent<br />

encore l’accès par cette voie et qui empêchent même le<br />

recours à certaines techniques.<br />

Rétrécissement du méat<br />

Un rétrécissement du méat peut être une partie d’un rétrécissement<br />

de tout l’urètre antérieur ou être la seule localisation. Il<br />

peut exister seulement au méat dans la fosse naviculaire ou<br />

dans tout le trajet transglandulaire. Il peut être la conséquence<br />

du lichen sclérosant. Chaque situation mérite une solution<br />

individualisée.<br />

Bien qu’un rétrécissement du méat soit généralement considéré<br />

comme une affection plutôt mineure et bénigne, il est<br />

néanmoins difficile d’obtenir un résultat fonctionnel et esthétique<br />

parfait. Cependant, la complication la plus ennuyeuse est<br />

le jet urinaire dispersé qui oblige le patient à uriner en position<br />

assise.<br />

Dans les rétrécissements prononcés, il est difficile de définir<br />

l’étendue du rétrécissement vers l’amont. L’urétrographie<br />

montre la dilatation de tout l’urètre, mais elle estime mal la<br />

longueur exacte du rétrécissement. Celle-ci ne devient évidente<br />

qu’après ouverture du méat. Dès lors, lorsque commence une<br />

méatoplastie, quelle qu’elle soit, il faut être capable d’utiliser<br />

une technique qui permette de corriger des rétrécissements plus<br />

longs que ce que l’on avait initialement prévu.<br />

On doit s’efforcer de reformer un gland d’apparence normale,<br />

sans pont cutané entre les deux moitiés de gland, avec abouchement<br />

de l’urètre au sommet. La plupart des techniques<br />

décrites ne referment pas le gland et donnent de moins beaux<br />

résultats. Il existe actuellement une tendance à diminuer<br />

l’utilisation des flaps cutanés qui créent un méat quelque peu<br />

hypospade.<br />

■ Conclusion<br />

Rétrécissements de l’urètre masculin 18-370-A-10<br />

En chirurgie de l’urètre, succès et échecs se côtoient constamment.<br />

Néanmoins, la chirurgie est la seule solution valable pour<br />

la majorité des sténoses urétrales, vu les résultats décevants du<br />

traitement endoscopique. Le respect méticuleux des principes de<br />

7


.<br />

18-370-A-10 Rétrécissements de l’urètre masculin<br />

Tableau 2.<br />

Récapitulatif des indications des différentes techniques.<br />

Technique Localisation Longueur Première<br />

intervention<br />

transfert tissulaire, de guérison des plaies et des lambeaux<br />

pédiculés est essentiel pour obtenir des résultats optimaux.<br />

Cependant, même dans ces conditions, les échecs restent<br />

fréquents.<br />

Incontestablement l’opération type anastomotique, avec<br />

mobilisation extensive de l’urètre, donne les meilleurs résultats<br />

mais cette technique est réservée aux rétrécissements courts.<br />

Toutes les autres techniques sont suivies de plus de 20 %<br />

d’échecs, fortement dépendants du type de sténose à traiter. Il<br />

est donc très conseillé de prévoir la possibilité d’une réintervention.<br />

Choisir la technique la moins invasive, en épargnant le<br />

plus de peau pénienne est indiqué. Au niveau de l’urètre pénien<br />

et du méat, l’emploi de la technique d’onlay dorsal est préférable<br />

quand une greffe libre est employée. Dans les réinterventions,<br />

les lambeaux pédiculés sont préférés. Le choix et<br />

l’exécution de toutes ces techniques méritent une grande<br />

expérience retrouvée principalement dans des centres de<br />

référence.<br />

■ Références<br />

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par urétrotomie endoscopique. Ann Urol (Paris) 2000;34:184-8.<br />

Réintervention Présence<br />

d’infection<br />

résistante<br />

En tube<br />

(remplacement<br />

total)<br />

Remarque<br />

Terminoterminale TL Max 2 cm ++ + + NA Réinterventions uniquement<br />

quand l’urètre n’a pas été<br />

mobilisé extensivement<br />

précédemment<br />

Greffes libres TL a ++ + - -<br />

- prépuces<br />

- dos du pénis<br />

- muqueuse buccale<br />

Onlay ventral<br />

Onlay dorsal<br />

Lambeaux pédiculés<br />

- prépuce transversal<br />

- pénien longitudinal<br />

- face dorsale de la verge<br />

- scrotaux<br />

Deux temps<br />

Meshgraft<br />

B<br />

P<br />

TL<br />

P<br />

P<br />

TL<br />

TL<br />

TL<br />

Illimité<br />

±10cm<br />

±15cm°<br />

8à10cm<br />

±12cm<br />

±8cm<br />

Illimité<br />

Illimité<br />

Illimité<br />

-<br />

+<br />

-<br />

-<br />

-<br />

-<br />

TL : toute la longueur ; NA : non applicable ; P : pénien ; B : bulbaire ; ++ : conseillé ;+:indicationpossible,maispaslepremierchoix ; - : contre-indiqué.<br />

a Idéal au niveau bulbaire. Moins de succès dans l’urètre pénien.<br />

++<br />

++<br />

++<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

+<br />

++<br />

++<br />

++<br />

-<br />

-<br />

++<br />

++<br />

++<br />

Réintervention quand le lit<br />

receveur est bien vascularisé<br />

Quand le prépuce n’est plus<br />

présent<br />

Nécessité de disposer de 2,5 cm<br />

de longueur pour<br />

confectionner un tube (cf.<br />

circonférence de la verge)<br />

Après épilation ou en cas de<br />

scrotum lisse<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Oosterlinck W., Lumen N. Rétrécissements de l’urètre masculin. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Urologie, 18-370-A-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Rétrécissements de l’urètre masculin 18-370-A-10<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

9


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0580<br />

© Elsevier, Paris<br />

Rôle du généraliste<br />

dans le suivi d’un patient dialysé<br />

E n<br />

L Mercadal, T Petitclerc<br />

parallèle à la prise en charge du dialysé en milieu spécialisé, le généraliste garde une place, par sa situation<br />

de proximité, dans la gestion des événements interdialytiques. Dans ce cadre, il doit avoir connaissance de<br />

l’ensemble des données du suivi réalisé en milieu spécialisé et doit connaître les complications spécifiques du patient<br />

dialysé.<br />

© Elsevier, Paris.<br />

■ Introduction<br />

La dialyse est un traitement lourd et à caractère<br />

vital dont il faut soigneusement poser l’indication,<br />

choisir la technique la mieux adaptée à chaque<br />

patient, assurer un suivi régulier et connaître les<br />

complications. Nous étudierons successivement ces<br />

différents points.<br />

■<br />

Indications et contre-indications<br />

Existe-t-il encore actuellement des contreindications<br />

à l’épuration extrarénale ? On ne peut<br />

plus parler de contre-indication absolue. Les<br />

conditions qui suscitent un débat sont l’existence<br />

d’une démence, d’un cancer métastatique sans<br />

perspective thérapeutique, d’une cirrhose avec<br />

encéphalopathie ou d’un âge physiologique avancé.<br />

Aux États-Unis, le droit à la dialyse est assuré au<br />

patient qui le désire, quelle que soit la sévérité des<br />

problèmes médicaux associés. Si le patient ne peut<br />

s’exprimer, la famille peut être consultée. Par-delà<br />

ces considérations médico-légales et dans le cadre<br />

de ces décisions difficiles, si la qualité de vie du<br />

patient peut être améliorée par la dialyse, celle-ci doit<br />

être mise en œuvre.<br />

Les indications imposant le recours à l’épuration<br />

extrarénale sont récapitulées dans le tableau I.Ilne<br />

faut cependant pas attendre la survenue de ces<br />

complications pour débuter la dialyse. Le calcul de<br />

la clairance de la créatinine fournit l’élément le plus<br />

Tableau I. – Indications de dialyse d’un patient<br />

en insuffisance rénale chronique.<br />

Urgences<br />

Hyperkaliémie menaçante<br />

Œdème aigu du poumon ne répondant pas aux<br />

diurétiques<br />

Troubles de conscience liés à l’urémie<br />

Indications<br />

Péricardite<br />

Polyneuropathie<br />

Hypertension artérielle et surcharge hydrosodée<br />

non contrôlées<br />

Acidose non contrôlée<br />

Dénutrition, anorexie, albumine inférieure à 35 g/L<br />

en dehors d’un syndrome néphrotique<br />

Clairance de la créatinine inférieure à 10 mL/min<br />

objectif pour prendre cette décision. Une étude sur<br />

la survie à 10 ans et la morbidité des patients<br />

dialysés chroniques montre que la survie est de<br />

88 % si la dialyse est débutée pour une clairance de<br />

la créatinine supérieure ou égale à 10 mL/min,<br />

contre 55 % pour une clairance de la créatinine<br />

inférieure ou égale à 4 mL/min. De plus, le nombre<br />

de jours d’hospitalisation est de 5 jours par an et<br />

par patient contre 14 jours par an et par patient, et<br />

la réhabilitation des patients est meilleure dans le<br />

premier groupe. L’argument supplémentaire est la<br />

nécessité de lutter contre la dénutrition, facteur<br />

pronostique grave et indépendant. Or la mise en<br />

dialyse précoce permet d’augmenter l’appétence<br />

des malades et d’augmenter l’apport protidique. Au<br />

total, le chiffre de 8à10mL/min/1,73 m 2 de<br />

clairance de la créatinine doit donc être retenu pour<br />

la prise en charge en dialyse.<br />

1<br />

■<br />

Choix de la technique<br />

Deux types de dialyse peuvent être proposés :<br />

l’hémodialyse ou la dialyse péritonéale. Le choix de<br />

la technique se fera avant le stade de la dialyse selon<br />

des arguments médicaux et en accord avec le<br />

patient pour maintenir une autonomie maximale.<br />

‚ Dialyse péritonéale<br />

5-0580<br />

La dialyse péritonéale consiste à utiliser la paroi<br />

endothéliale des capillaires du mésothélium<br />

péritonéal comme surface d’échange entre le sang<br />

et le dialysat infusé dans la cavité péritonéale. Les<br />

échanges se font à travers la membrane<br />

semi-perméable que représentent la paroi des<br />

capillaires et le mésothélium péritonéal, et ont lieu<br />

par diffusion et par osmose. La diffusion est le<br />

mécanisme principal permettant l’épuration des<br />

déchets azotés. Ces échanges par diffusion se font<br />

suivant le gradient de concentration, ce qui permet<br />

de plus, par une composition adéquate du dialysat,<br />

d’éliminer du potassium et d’apporter du calcium et<br />

des lactates. La métabolisation des lactates en<br />

bicarbonate par le foie permet de corriger l’acidose.<br />

Les dialysats contenant du bicarbonate sont plus<br />

rarement employés en raison d’une préparation et<br />

d’un stockage plus difficiles. Les principaux facteurs<br />

influençant les échanges par diffusion sont le<br />

gradient de concentration entre le sang et le dialysat,<br />

le poids moléculaire du soluté et la perméabilité<br />

diffusive de la membrane d’échange qui peut être<br />

altérée par des péritonites répétées. Le maintien d’un<br />

gradient de concentration est obtenu par le<br />

changement fréquent du dialysat.


5-0580 - Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé<br />

L’osmose correspond à un mouvement d’eau dû au<br />

gradient d’osmolarité créé de part et d’autre de la<br />

membrane semi-perméable en infusant un dialysat<br />

hyperosmolaire par rapport au plasma dans la cavité<br />

péritonéale. On obtient alors un passage d’eau du sang<br />

vers le dialysat jusqu’au rétablissement de l’équilibre<br />

osmotique. Ce mécanisme permet la correction du<br />

bilan hydrique. L’hyperosmolarité du dialysat tient à sa<br />

haute concentration en glucose. Cependant, le glucose<br />

étant absorbé, cet effet est transitoire et peut même<br />

s’inverser secondairement. La prescription du temps<br />

des échanges par rapport à la perméabilité<br />

membranaire de chaque patient permet de limiter ce<br />

phénomène. Le bilan précis des volumes d’entrée et de<br />

sortie du dialysat et le suivi pondéral permettent par<br />

ailleurs de surveiller le bilan hydrique global.<br />

Sa réalisation pratique consiste à placer un<br />

cathéter dans la cavité péritonéale à l’aide d’un<br />

trocart, sous anesthésie locale ou générale légère. Les<br />

échanges peuvent être débutés dans un délai court<br />

d’1 semaine ; 1,5 à 2 litres de dialysat stérile sont<br />

alors instillés pour une durée variable dans la cavité<br />

péritonéale, puis drainés par simple gravité. En<br />

dialyse péritonéale continue ambulatoire, les<br />

changements de poche se font toutes les 4 heures<br />

pendant la journée, au rythme de trois à quatre par<br />

jour. Les échanges peuvent également être réalisés la<br />

nuit à l’aide d’une machine qui contrôle le rythme des<br />

échanges et le bilan entrée-sortie (dialyse péritonéale<br />

continue cyclique ou intermittente). Tous les<br />

changements de poche doivent être réalisés dans des<br />

conditions d’asepsie maximale, qui sont enseignées<br />

au patient ou à une personne de son entourage.<br />

Dans les cas où cette éducation paraît difficile, une<br />

infirmière à domicile effectuera ces changements.<br />

Les inconvénients directement liés à la technique<br />

d’épuration sont une fuite protéique par transport,<br />

qu’il convient de compenser par un régime<br />

hyperprotidique, une faible élimination de sodium et<br />

un apport non négligeable de glucose par le dialysat.<br />

Ses avantages techniques sont une plus longue<br />

préservation de la fonction rénale résiduelle et donc<br />

de la diurèse (le régime concernant les apports<br />

hydriques est moins contraignant), une meilleure<br />

tolérance hémodynamique et la possibilité d’apport<br />

d’insuline par voie intrapéritonéale pour les patients<br />

diabétiques.<br />

Le critère médical principal orientant vers le<br />

choix de la dialyse péritonéale est l’existence d’une<br />

pathologie cardiovasculaire sévère pouvant faire<br />

craindre une mauvaise tolérance hémodynamique<br />

des séances d’hémodialyse. Cette technique est par<br />

ailleurs préférée chez l’enfant. Le deuxième critère<br />

est celui de la qualité de vie et de l’autonomie, la<br />

dialyse étant réalisée à domicile ou même sur le lieu<br />

de travail. Le dernier critère est d’ordre économique,<br />

la dialyse péritonéale ayant un moindre coût.<br />

Les contre-indications sont liées à la nécessité<br />

d’une bonne intégrité de la paroi abdominale et de<br />

la cavité péritonéale qui doit être libre de toute<br />

adhérence pouvant gêner l’infusion et le drainage<br />

du dialysat. Dans le cas d’antécédent de chirurgie<br />

abdominale, le recours à la coelioscopie peut<br />

permettre de libérer des adhérences et de placer au<br />

mieux le cathéter. En cas d’adhérences extensives, la<br />

méthode reste contre-indiquée. En cas de hernie ou<br />

Artère<br />

radiale<br />

d’éventration, une correction chirurgicale sera<br />

réalisée, éventuellement dans le même temps<br />

opératoire que la pose du cathéter de dialyse<br />

péritonéale.<br />

‚ Hémodialyse<br />

Les échanges ont lieu ici de part et d’autre de la<br />

membrane semi-perméable du rein artificiel entre le<br />

sang provenant d’un abord vasculaire adéquat et le<br />

dialysat circulant de l’autre côté de la membrane. Le<br />

circuit extracorporel nécessite une anticoagulation<br />

pendant les séances d’hémodialyse. Les<br />

mécanismes d’échange sont la diffusion et<br />

l’ultrafiltration. La diffusion permet, de même qu’en<br />

dialyse péritonéale, l’épuration des déchets azotés<br />

suivant le gradient de concentration et, par une<br />

composition adéquate du dialysat, une élimination<br />

du potassium et un apport de calcium et de<br />

bicarbonates. Ces échanges dépendront de la taille<br />

des molécules à épurer, des caractéristiques du rein<br />

artificiel, du débit sanguin et du débit du dialysat. Le<br />

débit sanguin est par ailleurs dépendant de la qualité<br />

de l’abord vasculaire. L’ultrafiltration permet la<br />

correction du bilan hydrique. Elle est obtenue sous<br />

l’effet de la pression hydrostatique et dépend des<br />

caractéristiques de perméabilité hydraulique du rein<br />

artificiel et de la pression transmembranaire.<br />

La principale contrainte technique de la méthode<br />

est de disposer d’un abord vasculaire à haut débit.<br />

Dans ce but, une fistule artérioveineuse est créée,<br />

soit par anastomose artérioveineuse, soit par<br />

interposition d’un greffon entre une artère et une<br />

veine. L’anastomose artérioveineuse réalise l’abord<br />

le plus sûr et a une durée de vie plus longue. Elle est<br />

réalisée au niveau de l’avant-bras (fig 1) ou du bras,<br />

au mieux 2à6moisetminimum3semaines avant<br />

le début de l’hémodialyse pour lui permettre de se<br />

développer. Le respect de ce délai est associé à une<br />

meilleure survie à long terme de la fistule. Si l’abord<br />

vasculaire périphérique n’est pas encore utilisable ou<br />

ne peut être réalisé par déficience d’un réseau<br />

veineux correct, l’accès vasculaire se fera par un<br />

cathéter veineux central. Deux conduites<br />

fondamentales résultent de l’extrême nécessité de<br />

cet abord vasculaire pour le patient dialysé<br />

chronique : respecter le capital veineux tout au long<br />

de la vie du patient et anticiper le besoin de cet<br />

abord sur l’évolution des taux de créatinine. La<br />

fistule sera donc au mieux créée entre 10 et 15<br />

mL/min de clairance de la créatinine, soit une<br />

créatinine d’environ 400 µmol/L pour un patient de<br />

50 ans et 60 kg.<br />

2<br />

Veine<br />

céphalique<br />

1 Fistule artérioveineuse<br />

radiale créée par anastomose<br />

artérioveineuse radiale<br />

latéroterminale (les<br />

flèches indiquent le sens<br />

du flux sanguin).<br />

L’hémodialyse peut être réalisée en centre<br />

d’hémodialyse, en centre d’autodialyse ou à<br />

domicile. Ce dernier choix remporte la meilleure<br />

place dans les études sur la qualité de vie en dialyse<br />

mais nécessite une excellente autonomie du patient<br />

et une acceptation de l’entourage.<br />

Il n’existe pas de contre-indication formelle à cette<br />

méthode. Elle reste la thérapeutique de choix pour la<br />

correction rapide des désordres hydroélectrolytiques<br />

aigus du patient dialysé chronique tels que<br />

l’hyperkaliémie et l’œdème aigu du poumon. Elle<br />

sera préférée chez le patient dénutri ou<br />

profondément hypoprotidémique (par syndrome<br />

néphrotique persistant, par exemple) en raison de la<br />

perte protidique induite par la dialyse péritonéale.<br />

Il reste donc un nombre majoritaire de<br />

cas où le choix de la technique peut<br />

être laissé à l’appréciation du patient,<br />

si les conditions locales de réalisation<br />

le permettent. Il doit s’agir d’un choix<br />

éclairé, réalisé en dehors de l’urgence<br />

et tenant compte de l’activité du<br />

patient. Ce choix n’est de plus pas<br />

définitif, et le passage d’une technique<br />

à l’autre est possible, parfois<br />

indispensable. L’inscription sur une<br />

liste de transplantation est par ailleurs<br />

toujours à discuter.<br />

■<br />

Suivi du patient dialysé<br />

Ce suivi est organisé en milieu néphrologique<br />

spécialisé.<br />

En hémodialyse, le suivi clinique doit comprendre<br />

l’estimation du poids sec qui est défini comme le<br />

poids à obtenir en fin de séance. Sa détermination se<br />

base principalement sur des critères cliniques :<br />

disparition des œdèmes, de l’hypertension artérielle,<br />

absence de chute tensionnelle et de crampes en fin<br />

de séance d’hémodialyse. Il doit être réajusté<br />

périodiquement. Un amaigrissement sans<br />

réévaluation du poids sec peut conduire<br />

insidieusement à un état de surcharge hydrosodée.<br />

La prise de poids interdialytique doit être<br />

surveillée et ne doit pas dépasser 2à3kg,cequi<br />

impose une restriction hydrique à 500 mL/j<br />

augmentée de la diurèse journalière et des pertes


hydriques extrarénales notables (diarrhée ou<br />

sudation importante). Le furosémide à forte dose<br />

peut permettre de maintenir une diurèse résiduelle.<br />

En dialyse péritonéale, le suivi clinique doit<br />

comprendre la surveillance des bilans entrée-sortie<br />

réalisée à chaque poche et le suivi pondéral. Un<br />

drainage inférieur à la quantité infusée impose de<br />

vérifier la position du cathéter par une radiographie<br />

de l’abdomen sans préparation (le cathéter<br />

radio-opaque doit être dans le cul-de-sac de<br />

Douglas), de vérifier l’absence de péritonite ou de<br />

constipation gênant le drainage. Il peut aussi être la<br />

conséquence d’un péritoine hyperperméable<br />

absorbant précocement le glucose. La prescription<br />

des échanges doit alors être modifiée.<br />

De façon générale, le suivi clinique devra<br />

comprendre un suivi tensionnel, l’appréciation de<br />

l’état nutritionnel, de l’état vasculaire et cardiaque et<br />

du retentissement psychologique, notamment au<br />

moment de la prise en charge en dialyse.<br />

Le suivi biologique mensuel comprend<br />

généralement une numération formule sanguine<br />

avec numération des plaquettes, un ionogramme<br />

sanguin pré- et postdialytique avec une calcémie,<br />

une phosphorémie, un dosage de l’urée et de la<br />

créatinine. Les taux pré- et postdialytiques d’urée<br />

permettent d’apprécier la dose de dialyse délivrée.<br />

Les dosages de protidémie et d’albuminémie<br />

permettent d’apprécier l’état nutritionnel, facteur<br />

pronostique important puisque la mortalité<br />

augmente en dialyse dès que l’albuminémie est<br />

inférieure à 37 g/L. Les sérologies virales de<br />

l’hépatite B, C et du virus de l’immunodéficience<br />

humaine (VIH) doivent être connues et contrôlées si<br />

négatives (ou après une vaccination pour l’hépatite<br />

B). La parathormone et l’albuminémie sont<br />

contrôlées régulièrement.<br />

Sur le plan morphologique, l’échographie<br />

cardiaque sera effectuée annuellement pour vérifier<br />

l’absence de péricardite et d’hypertrophie ou de<br />

dilatation ventriculaire gauche. L’existence d’un de<br />

ces signes devra faire réévaluer le poids sec et la<br />

dose de dialyse délivrée.<br />

Le suivi, la prescription et la gestion des<br />

complications du traitement par dialyse sont du<br />

domaine du spécialiste. Les complications perdialytiques<br />

ne seront donc pas traitées dans cet article.<br />

À côté de cette prise en charge en milieu spécialisé,<br />

le généraliste doit avoir connaissance de l’ensemble<br />

des données de ce suivi car il garde une place, par sa<br />

situation de proximité, dans la gestion immédiate des<br />

événements interdialytiques. Dans ce cadre, il doit<br />

connaître les complications spécifiques du dialysé.<br />

Complications<br />

■<br />

spécifiques<br />

du patient dialysé chronique<br />

‚ Complications liées à la technique<br />

de dialyse<br />

Hémodialyse<br />

En hémodialyse, les complications spécifiques<br />

sont liées à l’abord vasculaire. Ce sont en premier<br />

lieu les infections et les thromboses.<br />

Le staphylocoque est l’agent infectieux principal,<br />

responsable de septicémie, parfois sans élément<br />

inflammatoire local pouvant directement incriminer<br />

l’abord vasculaire. Quatre localisations secondaires<br />

sont à craindre : l’endocardite, l’ostéomyélite, la<br />

méningite et la staphylococcie pulmonaire. Le<br />

traitement doit être précoce et prolongé pendant 4<br />

semaines, dont 1 semaine en bithérapie, et fait appel<br />

le plus souvent à la vancomycine à dose adaptée<br />

(Vancocinet :1genintraveineux pendant la séance<br />

de dialyse, dose à renouveler en fonction des taux<br />

résiduels, généralement au rythme d’une fois par<br />

semaine). Le portage de staphylocoque doré,<br />

fréquent chez ces patients, doit être recherché par un<br />

prélèvement bactériologique nasal, ombilical et anal,<br />

et traité par l’application locale de pommade<br />

antibiotique telle que la mupirocine (Bactrobant) ou<br />

la rifampicine. Inversement, la fistule artérioveineuse<br />

peut constituer une localisation secondaire<br />

privilégiée, ce qui incite à prescrire une<br />

antibioprophylaxie avant une extraction dentaire<br />

ou une colonoscopie.<br />

La thrombose de la fistule (fig 1) est le plus<br />

souvent secondaire à une sténose non diagnostiquée<br />

ou, dans un nombre plus restreint de cas,<br />

secondaire à une chute tensionnelle ou à une<br />

obstruction mécanique pendant une intervention<br />

chirurgicale. Elle est attestée cliniquement par la<br />

disparition du thrill vasculaire à la palpation et à<br />

l’auscultation. Elle doit être traitée en urgence. La<br />

surveillance étroite des fistules doit permettre<br />

d’intervenir au stade précoce de sténose, cequi<br />

augmente notablement la survie des fistules à long<br />

terme. Le diagnostic de sténose repose sur<br />

l’échographie et le traitement sur l’angioplastie à<br />

ballonnet, associée ou non à la fibrinolyse. La<br />

thrombose est moins accessible au traitement par<br />

angioplastie et le traitement est alors chirurgical<br />

(± fibrinolyse).<br />

Dialyse péritonéale<br />

En dialyse péritonéale, la complication la plus<br />

fréquente est la péritonite. Elle est le plus souvent<br />

secondaire à une faute d’asepsie lors des<br />

changements de poche ou la conséquence d’une<br />

infection cutanée qui se propage dans le tunnel du<br />

cathéter. Le Staphylococcus epidermidis représente<br />

40 % de ces infections. La péritonite se manifeste par<br />

une douleur abdominale, une fièvre, des nausées et<br />

des vomissements. Le liquide de dialyse devient<br />

trouble, signe constant (99 %) et précoce. Le patient<br />

doit systématiquement examiner ses poches à la<br />

recherche de ce signe. Le traitement de cette<br />

péritonite est médical et sera géré en milieu<br />

néphrologique. L’antibiothérapie est administrée par<br />

voie intrapéritonéale en utilisant le cathéter de<br />

dialyse péritonéale, après prélévements<br />

bactériologiques du dialysat. Une cause sous-jacente<br />

de péritonite doit cependant toujours être écartée<br />

(appendicite, rupture de diverticule, ulcère perforé,<br />

etc).<br />

La deuxième complication en dialyse péritonéale<br />

est la survenue d’une dénutrition en raison de la<br />

perte protéique péritonéale. Un régime<br />

hyperprotidique est recommandé pour compenser<br />

cette perte. Elle peut imposer le recours à<br />

l’hémodialyse.<br />

3<br />

Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé - 5-0580<br />

Enfin, quelle que soit la méthode de dialyse<br />

utilisée, une épuration insuffisante peut amener à la<br />

non-disparition ou à la réapparition des symptômes<br />

d’urémie chronique (fatigue, nausée, vomissement,<br />

inappétence, dénutrition, impatience des membres<br />

inférieurs, anémie), à une hypertension artérielle non<br />

contrôlée ou de révélation brutale, à une<br />

hyperkaliémie, un œdème aigu du poumon ou une<br />

péricardite.<br />

‚ Complications de l’insuffisance rénale<br />

chronique terminale<br />

Surcharge hydrosodée et complications<br />

cardiovasculaires<br />

La mise en dialyse permet généralement de<br />

corriger la surcharge hydrosodée et l’hypertension<br />

artérielle qui persiste uniquement dans 30 % des cas.<br />

Les traitements antihypertenseurs ne sont souvent<br />

plus nécessaires après un ajustement correct du<br />

poids sec, confirmant le caractère essentiellement<br />

volodépendant de l’hypertension artérielle chez<br />

l’insuffisant rénal chronique. Si un traitement est<br />

nécessaire, il pourra faire appel à un inhibiteur de<br />

l’enzyme de conversion à dose adaptée sous<br />

surveillance de la kaliémie (Renitect : 2,5 à 5 mg/j ;<br />

Triatect : 1,25 à 2,5 mg/j), à un inhibiteur calcique<br />

sans adaptation de dose, à un bêtabloquant de<br />

préférence à élimination hépatique (métoprolol :<br />

Lopressort et Selokent ; propranolol : Avlocardylt),<br />

sinon en adaptant la posologie, ou à un<br />

antihypertenseur central sans adaptation de dose.<br />

Les bêtabloquants et le vérapamil sont<br />

recommandés en cas d’hypertrophie ventriculaire<br />

gauche associée, les inhibiteurs de l’enzyme de<br />

conversion en cas de dilatation ventriculaire gauche.<br />

L’apport sodé sera de plus limité si l’hypertension<br />

artérielle persiste.<br />

L’hypertrophie ventriculaire gauche régresse<br />

généralement en dialyse grâce à la normalisation du<br />

volume intravasculaire, l’épuration des toxines<br />

urémiques, la correction de l’hypertension artérielle,<br />

la correction des désordres hydroélectrolytiques, le<br />

meilleur contrôle de l’hyperparathyroïdie et de<br />

l’anémie. Une fistule artérioveineuse à gros débit<br />

reste cependant un facteur de risque. L’hypertrophie<br />

ventriculaire gauche constitue un facteur<br />

essentiel de mortalité et doit être prévenue avant la<br />

mise en dialyse, au risque d’évoluer vers<br />

l’insuffisance cardiaque avec dilatation ventriculaire<br />

gauche. Elle favorise les arythmies qui restent<br />

fréquentes en dialyse, principalement en<br />

hémodialyse où les variations de kaliémie et de<br />

calcémie durant la séance peuvent être mal tolérées.<br />

Les risques liés à l’athéromatose accélérée<br />

persistent et constituent une cause majeure de<br />

morbimortalité : ischémie myocardique, artérite des<br />

membres inférieurs, accident vasculaire cérébral et<br />

ischémie mésentérique. Les épisodes hypotensifs<br />

pouvant survenir pendant les séances d’hémodialyse<br />

sont d’autant moins bien tolérés qu’ils<br />

surviennent sur ce terrain. Le traitement de ces<br />

complications n’a pas de particularité. Les dérivés<br />

nitrés étant éliminés par voie hépatique, leur dose<br />

n’est pas à adapter chez le dialysé.<br />

La péricardite est devenue rare grâce à une prise<br />

en charge plus précoce en dialyse. Sa survenue doit


5-0580 - Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé<br />

Tableau II. – Aliments très riches en<br />

potassium.<br />

Légumes secs : lentilles, haricots blancs, pois, fèves,<br />

flageolets<br />

Chocolat<br />

Fruits secs : figues, dattes, abricots, bananes, raisins,<br />

pruneaux<br />

Fruits gras : cacahuètes, amandes, pistaches, noisettes,<br />

noix, noix de coco, avocat<br />

Bananes, agrumes<br />

Châtaignes<br />

Bouillon de légumes, sirop de fruits cuits<br />

Sels de régime<br />

faire rechercher une dialyse insuffisante avec une<br />

surcharge hydrosodée persistante ou tout autre<br />

cause de péricardite, notamment tuberculeuse.<br />

À long terme, le patient dialysé est exposé aux<br />

calcifications valvulaires, le plus souvent sur l’anneau<br />

mitral.<br />

Infections<br />

Fréquentes, elles sont dues pour une part au<br />

caractère invasif des techniques de dialyse (abord<br />

vasculaire en hémodialyse, cathéter intrapéritonéal en<br />

dialyse péritonéale) et de façon générale à la<br />

diminution de l’immunité et aux pathologies associées.<br />

Elles peuvent se présenter de façon insidieuse chez des<br />

patients fréquemment en hypothermie.<br />

Les infections urinaires sont fréquentes chez les<br />

patients diabétiques ayant une vessie neurologique,<br />

chez les patients ayant une polykystose rénale ou<br />

une uropathie malformative. Le tarissement de la<br />

diurèse avec la mise en hémodialyse résout en<br />

partie ce problème.<br />

La diverticulite est fréquente, notamment en cas<br />

de polykystose rénale. La rupture de diverticule<br />

constitue un diagnostic différentiel en cas de<br />

péritonite chez un patient en dialyse péritonéale. Si<br />

une colonoscopie ou une chirurgie colique doivent<br />

être réalisées, les préparations à base de<br />

polyéthyléneglycol (Colopegt, Fortranst,<br />

Klean-Prept) seront prescrites à posologie habituelle<br />

car elle ne sont pas absorbées, de même que les<br />

préparations à base d’anthraquinone (X-Prept), par<br />

ailleurs plus faciles d’utilisation.<br />

Les infections bronchopulmonaires sont<br />

favorisées par un subœdème pulmonaire fréquent<br />

induit par un poids sec inadapté, une perméabilité<br />

alvéolaire augmentée, une hypertension artérielle<br />

non contrôlée ou une hypertrophie ventriculaire<br />

gauche. Les germes sont ceux habituellement<br />

rencontrés dans la population générale. Le<br />

traitement recommandé de la bronchite reste<br />

l’amoxicilline à la dose de 500 mg 2 fois par jour ou<br />

un macrolide à posologie habituelle. En cas de<br />

pneumopathie, le traitement initial doit être<br />

parentéral. Dans le cadre des mesures préventives,<br />

la vaccination antigrippale est conseillée.<br />

La tuberculose est également plus fréquente,<br />

souvent extrapulmonaire, disséminée, avec un taux<br />

de mortalité élevé. L’intradermoréaction à la<br />

tuberculine n’est positive que dans 30 % des cas, en<br />

raison de l’immunodépression induite par<br />

l’insuffisance rénale chronique.<br />

Concernant les infections virales, la prévalence<br />

de l’infection par le virus de l’hépatite B a nettement<br />

diminué depuis la vaccination systématique des<br />

patients en insuffisance rénale, et ne s’élèverait plus<br />

qu’à 5 % des patients en attente de transplantation<br />

rénale. À l’opposé, la prévalence de l’hépatite C reste<br />

élevée, atteignant 10 à 65 % de la population des<br />

hémodialysés et des transplantés rénaux en fonction<br />

des zones géographiques. Elle est hautement<br />

dépendante de la durée d’hémodialyse et du<br />

nombre de transfusions sanguines. L’examen<br />

clinique s’attachera à retrouver des signes<br />

d’hypertension portale et d’insuffisance<br />

hépatocellulaire. Les examens biologiques<br />

comprendront un dosage des transaminases, de la<br />

bilirubinémie, de l’albuminémie et du temps de<br />

prothrombine. L’échographie doppler hépatique<br />

analysera la morphologie hépatique, recherchera<br />

des signes d’hypertension portale et un<br />

hépatocarcinome associé. L’hépatologue posera<br />

l’éventuelle indication d’une ponction-biopsie<br />

hépatique et du traitement.<br />

La prévalence de l’infection par le virus<br />

d’immunodéficience acquise est supérieure à celle<br />

observée dans la population générale, car l’infection<br />

par le VIH est responsable d’insuffisance rénale<br />

terminale. Les traitements par trithérapie<br />

augmentant la survie des patients, il est possible que<br />

l’incidence des patients infectés par le VIH dans les<br />

centres de dialyse augmente.<br />

Hyperkaliémie<br />

Les épisodes d’hyperkaliémie sont le plus souvent<br />

la conséquence d’une consommation trop<br />

importante d’aliments riches en potassium ou d’un<br />

traitement par inhibiteur de l’enzyme de conversion.<br />

Leur prévention repose sur l’éducation du malade<br />

concernant les aliments à éviter car très riches en<br />

potassium (tableau II) et les quantités de fruits et de<br />

légumes à respecter (un fruit et une part de légume<br />

cru par jour). Une cuisson dans un grand volume<br />

d’eau est conseillée car elle permet d’extraire 50 à<br />

80 % du potassium des fruits et des légumes. Si les<br />

mesures diététiques sont insuffisantes, on a recours<br />

à des résines échangeuses de cations telles que le<br />

Kayexalatet ou le Calcium-Sorbistéritt. Prescrites de<br />

façon chronique, ces résines peuvent être<br />

responsables de constipation qui doit être traitée par<br />

du sorbitol.<br />

Les manifestations de l’hyperkaliémie sont frustes<br />

et tardives : faiblesse musculaire, paresthésies<br />

buccales et des extrémités, nausées, goût métallique<br />

dans la bouche. Rarement, on observe une paralysie<br />

flasque pouvant atteindre les muscles respiratoires.<br />

Des troubles de conduction cardiaque surviennent<br />

de façon plus ou moins précoce suivant la rapidité<br />

d’installation de l’hyperkaliémie et l’existence d’une<br />

acidose. Les signes électrocardiographiques sont la<br />

présence d’ondes T amples, symétriques et pointues,<br />

un aplatissement de l’onde P et un allongement du<br />

QRS. Un bloc de conduction peut apparaître au<br />

niveau sinoauriculaire, auriculoventriculaire ou<br />

intraventriculaire. L’arrêt cardiocirculatoire peut<br />

survenir par fibrillation ventriculaire.<br />

Le traitement dépend de la sévérité de<br />

l’hyperkaliémie et de l’imminence de la prochaine<br />

séance de dialyse qui constitue son meilleur<br />

traitement dans le cas d’un patient dialysé<br />

chronique.<br />

Ostéodystrophie rénale<br />

L’ostéodystrophie rénale est la conséquence de<br />

l’hyperphosphorémie et du déficit en forme active<br />

1,25 (OH) 2 D3 de la vitamine D. Ces anomalies,<br />

présentes pour un débit de filtration glomérulaire<br />

inférieur à 30 mL/min, induisent une hyperparathyroïdie<br />

avec ostéoclastose prédominante et<br />

remplacement de l’os par un tissu ostéoïde fibreux.<br />

L’hyperparathyroïdie doit être<br />

prévenue avant la prise en charge en<br />

dialyse par une supplémentation<br />

vitaminique D sous sa forme<br />

hydroxylée en position 25 (Dédrogylt :<br />

5 à 10 gouttes/j) ou en position 1-α<br />

(Un-Alfat : 0,25 µg/j), forme plus<br />

efficace chez l’insuffisant rénal<br />

chronique, et par la prescription d’un<br />

chélateur de phosphate type carbonate<br />

de calcium (3 à 9 g/j). On s’assurera<br />

de l’absence d’hypercalcémie<br />

iatrogène et de la correction de la<br />

phosphorémie et du taux de<br />

parathormone.<br />

La mise en dialyse permet en général de mieux<br />

contrôler le bilan phosphocalcique, en éliminant le<br />

phosphate et en apportant du calcium. La<br />

supplémentation vitaminique D est poursuivie à une<br />

dose de 0,25 µgà1µg/j de 1-α-hydroxyvitamine D 3<br />

par voie orale ou rarement par voie intraveineuse en<br />

fin de dialyse. Les phosphorémies prédialytiques<br />

doivent êtres maintenues à un taux inférieur à 1,6<br />

mmol/L, ce qui peut nécessiter le maintien des<br />

chélateurs de phosphate.<br />

Parfois l’hyperparathyroïdie n’est pas contrôlée.<br />

Des douleurs osseuses et articulaires, un prurit<br />

Pour des kaliémies inférieures ou égales à 6 mmol/L un jour sans dialyse, la<br />

prescription de Kayexalatet à la dose de 1à4mesures (de 15 à 60 g) suffit. Passé ce<br />

chiffre, il paraît raisonnable d’avancer la dialyse. En cas de modifications<br />

électrocardiographiques, l’hémodialyse en urgence s’impose. Des mesures permettent<br />

d’attendre sa mise en route : l’injection d’1 à 2 ampoules de chlorure de calcium à<br />

10 % en intraveineux lent, l’alcalinisation par 100 mL de bicarbonate hypertonique<br />

si l’état d’hydratation le permet, la perfusion de glucosé à 30 % contenant une unité<br />

d’insuline ordinaire pour 2gdeglucose à raison de 100 à 200 mL/h, et la perfusion<br />

continue de salbutamol à la dose de 0,1 à 0,2 µg/kg/min.<br />

4


apparaissent. Le taux de parathormone est supérieur<br />

à trois fois la limite supérieure de la normale. Les<br />

radiographies osseuses attestent de la lyse osseuse :<br />

érosions des houppes phalangiennes, résorption<br />

sous-périostée, déminéralisation osseuse diffuse, le<br />

tout pouvant aboutir à des fractures pathologiques.<br />

L’augmentation du produit phosphocalcique crée<br />

une situation favorable pour la précipitation de<br />

dépôts calciques dans les tissus mous et les<br />

vaisseaux. L’échographie des parathyroïdes<br />

montre une hypertrophie pouvant être associée à<br />

des adénomes. Si elle est normale, la<br />

scintigraphie au métaiodobenzylguanidine<br />

(MIBG) est utile pour rechercher une localisation<br />

parathyroïdienne ectopique. La parathyroïdectomie<br />

subtotale en est le traitement. Elle permet<br />

d’augmenter la minéralisation osseuse mais<br />

impose toujours une supplémentation calcique et<br />

vitaminique D, afin d’éviter la récidive de<br />

l’hyperparathyroïdie.<br />

Anémie<br />

L’incidence de l’anémie a diminué en dialyse<br />

depuis l’introduction de l’érythropoïétine. Celle-ci a<br />

permis l’amélioration de la qualité de vie des<br />

patients, une amélioration de la tolérance à<br />

l’exercice, une diminution de l’hypertrophie<br />

ventriculaire gauche, une diminution des épisodes<br />

hypotensifs dialytiques et une diminution du<br />

nombre de transfusions. Les causes de résistance à<br />

l’érythropoïétine sont récapitulées dans le tableau III.<br />

Le déficit en fer est la plus fréquente. Le fer<br />

administré par voie intraveineuse pendant les<br />

séances d’hémodialyse, mieux toléré sur le plan<br />

digestif et ayant une meilleure biodisponibilité que<br />

par voie orale, doit être systématiquement prescrit<br />

chez les patients sous érythropoïétine, en dehors du<br />

cas d’hémosidérose associée.<br />

La correction de l’anémie et la mise en dialyse<br />

améliorent de plus les fonctions plaquettaires.<br />

Intoxication aluminique<br />

Elle résulte de l’apport d’aluminium par le bain de<br />

dialyse préparé à partir de l’eau de ville et de la<br />

prescription de chélateurs de phosphate ou de<br />

pansement gastrique contenant de l’alumine<br />

principalement éliminée par le rein. Cette<br />

intoxication est responsable d’une ostéopathie avec<br />

diminution de la minéralisation osseuse, d’une<br />

Tableau III. – Causes de résistance à<br />

l’érythropoïétine.<br />

Déficit en fer<br />

Perte sanguine : saignement occulte, rein artificiel<br />

coagulé, prélèvements sanguins fréquents<br />

Hypersplénisme<br />

Hémolyse<br />

Syndrome inflammatoire<br />

Infection<br />

Hyperparathyroïdie secondaire non contrôlée<br />

Envahissement médullaire d’un cancer<br />

anémie microcytaire, hypochrome, et dans les<br />

formes graves, d’une démence (dite « démence du<br />

dialysé »). Le diagnostic repose sur le dosage sanguin<br />

avant et après test à la déféroxamine.<br />

Dégénérescence kystique du rein et cancer<br />

L’incidence de cancer semble augmentée chez le<br />

patient dialysé chronique, essentiellement pour le<br />

cancer du rein, de l’utérus et de la prostate (risque<br />

relatif égal à 5). Le cancer du rein peut se développer<br />

secondairement à une dégénérescence kystique du<br />

rein, présente chez 50 % des dialysés. Ces kystes<br />

peuvent provoquer des douleurs, une hématurie, un<br />

hématome périrénal ou se surinfecter. Ils sont<br />

toutefois le plus souvent asymptomatiques. La<br />

néphrectomie n’est indiquée qu’en cas de<br />

complication ou si l’aspect du kyste est atypique en<br />

échographie, évoquant un caractère malin.<br />

Maladie amyloïde<br />

La maladie amyloïde du dialysé est due à des<br />

dépôts tissulaires de -2-microglobuline,<br />

insuffisamment épurée par la dialyse. Les<br />

membranes à haute perméabilité, par leur meilleure<br />

épuration de la -2-microglobuline, permettraient de<br />

la prévenir. Elle survient après8à10ansdedialyse,<br />

et se manifeste principalement par des douleurs<br />

périarticulaires, des fractures pathologiques, un<br />

syndrome du canal carpien ou des manifestations<br />

digestives non spécifiques. Les radiographies<br />

osseuses montrent des dépôts intraosseux sous<br />

forme de géodes, des arthropathies et des<br />

spondylarthropathies destructrices.<br />

Le syndrome du canal carpien n’a pas de<br />

particularité clinique : paresthésies dans le territoire<br />

du nerf médian, reproduites cliniquement par la<br />

manœuvre de Tinel (percussion sur le ligament<br />

antérieur du carpe) ou par la manœuvre de Phalen<br />

(poignet maintenu en flexion), et amyotrophie de la<br />

loge thénar. À l’électromyogramme, la vitesse de<br />

conduction nerveuse du nerf médian est diminuée<br />

après le ligament antérieur du carpe. Le traitement<br />

du syndrome du canal carpien est chirurgical.<br />

Manifestations cutanées<br />

Le prurit est très fréquent chez les patients en<br />

insuffisance rénale chronique, et souvent peu<br />

soulagé par la dialyse. Sa cause n’est pas univoque.<br />

Le traitement doit être préventif en<br />

évitant les médicaments contenant de<br />

l’alumine chez l’insuffisant rénal<br />

chronique, de même que les<br />

préparations contenant du citrate<br />

(Alka-Seltzert, jus de citron, citrate de<br />

calcium), connu pour augmenter<br />

l’absorption intestinale d’aluminium,<br />

et en traitant l’eau du bain de dialyse<br />

de manière convenable.<br />

5<br />

Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé - 5-0580<br />

L’augmentation du produit phosphocalcique, le<br />

déficit en fer et en zinc sont des facteurs favorisants.<br />

Une allergie à l’héparine, aux plastiques des<br />

tubulures de dialyse ou à l’éthylène glycol utilisé<br />

pour stériliser le matériel peut être en cause.<br />

Le traitement repose en premier lieu sur la<br />

correction des facteurs évoqués. Localement,<br />

l’application de crèmes émollientes permet de<br />

diminuer la sécheresse cutanée souvent associée.<br />

Les antihistaminiques sont peu efficaces. La<br />

photothérapie par ultraviolets peut être essayée. La<br />

transplantation rénale est constamment efficace.<br />

Les autres manifestations cutanées sont<br />

l’hyperkératose, la modification de la pigmentation<br />

et le purpura vasculaire.<br />

Manifestations digestives<br />

Au niveau gastroduodénal, duodénite, gastrite et<br />

angiodysplasie sont plus fréquentes. La prévalence<br />

d’Helicobacter pylori chez les dialysés est identique à<br />

celle de la population générale. Les antihistaminiques<br />

de type 2 doivent être prescrits à demi-dose<br />

(risque de confusion). Les inhibiteurs de la pompe à<br />

protons ne nécessitent pas d’adaptation de<br />

posologie et sont en général préférés.<br />

Au niveau intestinal, les complications les plus<br />

fréquentes sont l’ischémie mésentérique, l’amylose,<br />

la diverticulose chez les patients porteurs d’une<br />

polykystose rénale et l’angiodysplasie qui est<br />

responsable de saignement. La présence d’une<br />

hernie peut être responsable de fuite de dialysat en<br />

dialyse péritonéale.<br />

■ Conclusion<br />

Au total, le médecin généraliste prend souvent<br />

une part active, par sa situation de proximité, dans la<br />

gestion des événements interdialytiques et devrait<br />

retenir dans ce contexte cinq recommandations<br />

d’ordre général :<br />

– le patient dialysé chronique est à considérer<br />

comme un terrain fragile et notamment<br />

immunodéprimé dans la gestion des infections, par<br />

ailleurs fréquentes ;<br />

– quel que soit le traitement prescrit, il faut<br />

vérifier l’adaptation de posologie dans l’insuffisance<br />

rénale terminale et adapter l’horaire des prises si le<br />

médicament est dialysé ;<br />

– il faut connaître les complications spécifiques<br />

du patient dialysé chronique, dont certaines doivent<br />

être traitées en urgence, au mieux en milieu<br />

spécialisé néphrologique ;<br />

– si le patient est hémodialysé, la préservation du<br />

capital veineux impose que les examens non urgents<br />

soient réalisés pendant la séance d’hémodialyse ;<br />

– le patient dialysé fait l’objet d’un suivi spécialisé<br />

important dont le médecin généraliste devrait avoir<br />

connaissance pour une meilleure gestion médicale.<br />

De façon générale, la clé d’une bonne prise en<br />

charge du patient dialysé passe par une bonne<br />

coordination entre généraliste et spécialiste.


5-0580 - Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé<br />

Lucile Mercadal : Interne des hôpitaux de Paris.<br />

Thierry Petitclerc : Professeur des Universités, praticien hospitalier.<br />

Service de néphrologie, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : L Mercadal et T Petitclerc. Rôle du généraliste dans le suivi d’un patient dialysé.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine, 5-0580, 1998, 6 p<br />

[1] Daugirdas JT, Ing TS. Handbook of dialysis. Boston : Little Brown, 1994 :<br />

1-689<br />

[2] Hakim RM. Quand commencer la dialyse : les bases de la décision. Actualités<br />

néphrologiques Jean Hamburger, hôpital Necker. Paris : Médecine-Sciences Flammarion,<br />

1993 : 229-242<br />

[3] Lazarus JM, Denker BM, Owen WF. Hemodialysis. In: Brenner BM ed. The<br />

Kidney. Philadelphia : WB Saunders, 1996 : 2424-2506<br />

[4] Owen WF, Nancy LL, Yan Liu MS, Lowrie EG, Lazarus JM. The urea reduction<br />

ratio and serum albumin concentration as predictors of mortality in patients<br />

undergoing hemodialysis, N Engl J Med 1993 ; 329 : 1001-1006<br />

Références<br />

6<br />

[5] Pol S. Évaluation de l’état hépatique chez les patients en attente de transplantation<br />

rénale. Séminaires d’uro-néphrologie de la Pitié-Salpêtrière, 1997 ; 23 :<br />

163-175<br />

[6] Port FK, Ragheb NE, Schartz AN, Hawthorne VM. Fatal neoplasm in dialysis<br />

patients: A population-based study. Am J Kidney Dis 1989 ; 24 : 119-123


Plan<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie<br />

et anomalies du sédiment urinaire<br />

E. Pillebout<br />

Le dépistage d’une protéinurie par la bandelette urinaire nécessite d’être confirmé puis d’être quantifié.<br />

Sa composition et les signes biologiques et morphologiques associés peuvent orienter le diagnostic<br />

étiologique de la maladie rénale. La présence d’une hématurie et d’une dysfonction rénale associée doit<br />

faire l’objet d’une prise en charge spécialisée urgente. Sa présence chez la personne âgée doit faire<br />

rechercher une gammapathie monoclonale. Une hématurie microscopique doit être confirmée à deux<br />

reprises par l’analyse du sédiment urinaire. Une hématurie microscopique est en rapport dans 7 % des cas<br />

avec une infection urinaire. L’association d’une hématurie à une protéinurie des 24 heures supérieure à<br />

500 mg évoque le diagnostic de néphropathie. Le risque de diagnostiquer une tumeur maligne de<br />

l’appareil urinaire augmente après 40 ans, notamment chez le patient tabagique. Une hématurie<br />

macroscopique impose des explorations urologiques. En dehors du diagnostic de cystite non compliqué, le<br />

dépistage d’une leucocyturie à la bandelette doit être confirmé par l’analyse du sédiment urinaire.<br />

L’association d’une leucocyturie et d’une bactériurie à un taux significatif est en faveur d’une infection<br />

urinaire. L’infection urinaire simple se distingue de l’infection urinaire compliquée en fonction de la<br />

pathologie urologique sous-jacente, des comorbidités associées et du terrain physiologique. Leurs prises<br />

en charge sont différentes. L’absence de bactérie associée et son association à des cylindres leucocytaires<br />

orientent vers une pathologie néphrologique.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Protéinurie ; Hématurie ; Leucocyturie ; Cylindre ; Chylurie<br />

Introduction 1<br />

Recueil des urines 1<br />

Protéinurie 2<br />

Définition 2<br />

Physiopathologie 2<br />

Quantification et méthodes d’étude qualitative de la protéinurie 2<br />

Diagnostic étiologique 3<br />

Ponction-biopsie rénale 4<br />

Étude du sédiment urinaire 4<br />

Hématurie 4<br />

Leucocyturie 7<br />

Cellules épithéliales 8<br />

Cylindres 8<br />

Micro-organismes 8<br />

Podocyturie 9<br />

Chylurie 10<br />

Définition 10<br />

Physiopathologie 10<br />

Étiologies 10<br />

Exploration d’une chylurie 10<br />

■ Introduction<br />

L’examen des urines en microscopie ou par des tests biochimiques<br />

est essentiel au diagnostic des maladies rénales. Il<br />

permet également d’évaluer l’activité de la maladie et/ou<br />

Néphrologie<br />

d’identifier une complication surajoutée. Outre une très faible<br />

quantité de protéines, un individu urine normalement par jour<br />

environ 1 million d’hématies, 3 millions de cellules leucocytaires<br />

ou épithéliales et 10 000 cylindres, exclusivement hyalins [1] .<br />

■ Recueil des urines<br />

18-026-C-40<br />

Les urines de la deuxième miction du matin sont les plus<br />

adaptées pour l’analyse de la composition des urines. En effet,<br />

elles sont encore acides et concentrées, sans la stase vésicale des<br />

urines de la nuit, les éléments sont alors correctement préservés.<br />

Pour pratiquer un examen cytobactériologique des urines<br />

(ECBU), le recueil dans un flacon stérile en milieu de jet<br />

convient chez la plupart des hommes (rétracter le prépuce si<br />

non circoncis). Chez la femme, les organes génitaux externes<br />

doivent au préalable être nettoyés par un antiseptique puis<br />

rincés à l’eau stérile pour éviter la contamination par des<br />

sécrétions locales. Il faut éviter (ou alors le signaler) la période<br />

menstruelle pour pouvoir interpréter la présence de sang dans<br />

les urines.<br />

Trente à 60 minutes après la miction, les urines sont centrifugées<br />

à 3 000 tours/min pendant 3à5minutes. Le surnageant<br />

est séparé et permet l’étude de la couleur, de la concentration,<br />

du pH, et de la présence de protéines et/ou de glucose. Une<br />

petite quantité du sédiment est placée sur une lame pour<br />

quantifier les éléments figurés, les cylindres et les cristaux. Si les<br />

urines ne peuvent être analysées immédiatement, elles peuvent<br />

être conservées à température ambiante au maximum 2 heures<br />

età4°Caumaximum 24 heures. Le recueil dans un flacon<br />

contenant de l’acide borique permet une conservation des<br />

urines jusqu’à 48 heures à température ambiante.<br />

1


18-026-C-40 Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

L’analyse de la bandelette urinaire nécessite un prélèvement<br />

du deuxième jet urinaire comme pour la réalisation d’un ECBU<br />

sur des urines fraîchement émises dans un récipient propre et<br />

sec mais non stérile. Une toilette préalable n’est pas nécessaire.<br />

La lecture doit se faire à température ambiante, après 1 ou<br />

2 minutes selon les tests. L’utilisation de la bandelette suppose<br />

le respect des délais de péremption et des conditions de<br />

conservation.<br />

■ Protéinurie<br />

Le dépistage d’une protéinurie par la bandelette urinaire<br />

nécessite des explorations complémentaires. Il convient en effet,<br />

de la confirmer, de la quantifier et d’affirmer son caractère<br />

permanent. Sa composition et les signes biologiques et morphologiques<br />

associés peuvent orienter le diagnostic étiologique de<br />

la maladie rénale. La présence d’une hématurie et d’une<br />

dysfonction rénale associée doit faire l’objet d’une prise en<br />

charge spécialisée urgente. Sa présence chez la personne âgée<br />

doit faire rechercher une gammapathie monoclonale.<br />

Définition<br />

Élévation du taux de protéines excrétées par le rein supérieur<br />

à 0,15 g/24 h.<br />

Physiopathologie<br />

Physiologiquement, il y a 0,08 ± 0,025 g/24 h de protéines<br />

dans les urines. Pour 60 % les protéines urinaires proviennent<br />

du plasma (40 % d’albumine, 20 % d’immunoglobulines), 40 %<br />

sont d’origine rénale (par exemple, la protéine de Tamm-<br />

Horsfall, mucoprotéine synthétisée par la branche large ascendante<br />

de Henlé) (Tableau 1).<br />

La filtration glomérulaire des protéines dépend de leur taille,<br />

de leur charge (électronégativité de la barrière glomérulaire), de<br />

leur configuration et de diverses substances vasoactives, dont<br />

l’angiotensine II.<br />

Une protéinurie pathologique peut résulter de plusieurs<br />

mécanismes :<br />

de la filtration d’une protéine de petit poids moléculaire<br />

contenue en grande quantité dans le plasma. Ce sont les<br />

protéinuries de surcharge (chaînes légères du myélome,<br />

lysozymes au cours de la leucémie aiguë myélomonocytaire,<br />

myoglobine après rhabdomyolyse...) ;<br />

de l’altération de la filtration glomérulaire par trouble<br />

hémodynamique ou altération de la paroi capillaire. Ce sont<br />

les protéinuries glomérulaires ;<br />

de la diminution de la réabsorption-dégradation tubulaire. Ce<br />

sont les protéinuries tubulaires.<br />

Quantification et méthodes d’étude<br />

qualitative de la protéinurie<br />

Dépistage de la protéinurie : bandelette et lecture<br />

colorimétrique<br />

Elle permet une estimation semi-quantitative de la protéinurie,<br />

mais l’interprétation doit être prudente car elle ne porte pas<br />

Tableau 1.<br />

Protéinurie physiologique.<br />

Débit < 150 mg/j<br />

En moyenne 80 mg/j<br />

dont0à30mg/j d’albuminurie<br />

(microalbuminurie)<br />

Composition 60 % de protéines plasmatiques : 1/3 d’albumine<br />

et 2/3 de globulines<br />

40 % de protéines urinaires<br />

Mucoprotéines de Tamm-Horsfall<br />

Déchets protéolysés de provenance urogénitale<br />

Usuellement non détectée par la bandelette réactive : négative ou traces<br />

Tableau 2.<br />

Définition proposée par les recommandations australiennes « CARI<br />

guidelines » [5] et adoptée par les recommandations K/DOQI des termes<br />

micoalbuminurie, albuminurie et protéinurie en fonction des méthodes<br />

de mesure.<br />

Microalbuminurie Albuminurie Protéinurie<br />

Par 24 h 30-300 mg/j > 300 mg/j > 150-300 mg/j<br />

Bandelette > 3 mg/dl BU<br />

albumine<br />

Échantillon<br />

d’urine<br />

H > 17 mg/g<br />

(1,9 g/mmol)<br />

F > 25 mg/g<br />

(2,8 g/mmol)<br />

H : homme ; F : femme.<br />

sur la totalité des urines émises sur 24 heures. La détection<br />

concerne surtout l’albumine et la sensibilité est faible pour les<br />

autres protéines, en particulier les chaînes légères. Il existe des<br />

faux positifs liés à l’utilisation de bandelettes trop anciennes,<br />

l’utilisation d’ammonium quaternaire au cours du prélèvement<br />

ou à des urines alcalines (présence de germes uréase+). La<br />

présence d’une hématurie macroscopique peut entraîner une<br />

fausse protéinurie (20 ml de sang correspondent grossièrement<br />

à 1,5 g de protéinurie). Les chaînes légères n’étant pas détectées<br />

à la bandelette, la protéinurie est alors faussement négative. Plus<br />

rarement, ce mécanisme est impliqué dans la myoglobinurie<br />

post-rhabdomyolyse et dans l’hémoglobinurie post-hémolyse<br />

intravasculaire. Dans ces deux situations, la bandelette est<br />

faussement positive pour la détection d’hématurie.<br />

Confirmation de la protéinurie : analyse<br />

quantitative de la protéinurie<br />

Si la bandelette urinaire est positive, la protéinurie doit être<br />

confirmée et quantifiée par un dosage sur les urines des<br />

24 heures. La technique la plus fréquemment utilisée est celle<br />

du rouge de pyrogallol. Elle prend en compte la quasi-totalité<br />

des protéines. La présence de sulfamides, de pénicilline ou de<br />

produit de contraste radiologique est source d’erreurs [2] .<br />

Elle peut aussi être estimée sur un échantillon par le rapport<br />

protéine totale/créatinine (les deux valeurs exprimées en<br />

mg/l) [3] . C’est dorénavant la méthode recommandée en première<br />

intention chez l’enfant et l’adulte pour détecter et suivre<br />

la protéinurie [4] .<br />

Des experts australiens (CARI guidelines) ont proposé des<br />

définitions de la microalbuminurie, de l’albuminurie et de la<br />

protéinurie en fonction des méthodes de mesure [5] , reprises par<br />

les recommandations K/DOKI. Elles sont rapportées dans le<br />

Tableau 2.<br />

Le degré de protéinurie est un facteur pronostique essentiel<br />

au diagnostic et au cours du suivi de tout patient ayant une<br />

glomérulopathie. Un débit de protéinurie important ou persistant<br />

est en effet fortement corrélé au risque de progression vers<br />

l’insuffisance rénale.<br />

Il est également possible de doser précisément une faible<br />

quantité d’albuminurie par des techniques immunologiques. La<br />

microalbuminurie est définie par la présence de 30 à 300 mg<br />

d’albumine dans les urines par jour. Ce dosage est recommandé<br />

pour le dépistage et le suivi de la néphropathie diabétique ou<br />

vasculaire. Elle témoigne, même en l’absence de diabète, de<br />

l’existence d’une microangiopathie, reflétant un risque cardiovasculaire<br />

accru [6, 7] .<br />

Caractérisation de la protéinurie<br />

> 20 mg/dl > 30 mg/dl<br />

H > 250 mg/g<br />

(28 g/mmol)<br />

F > 355 mg/g<br />

(40 g/mmol)<br />

H > 250 mg/g<br />

(28 g/mmol)<br />

F > 355 mg/g<br />

(40 g/mmol)<br />

Analyse qualitative de la protéinurie par l’électrophorèse<br />

des protéines urinaires<br />

Elle sépare les protéinuries sélectives (albumine > 85 %)<br />

caractérisant les néphropathies glomérulaires, des protéinuries<br />

non sélectives (albumine < 75 % et toutes les globulines du<br />

sérum) pouvant se rencontrer dans toutes les néphropathies. De<br />

plus, elle oriente parfois vers une étiologie : l’excès de chaînes<br />

légères migrant vers les bêta- ou gammaglobulines en un pic<br />

2 Néphrologie


étroit dont le caractère monoclonal est confirmé par une<br />

immunoélectrophorèse fait porter le diagnostic de myélome.<br />

Signes associés<br />

En présence d’une protéinurie, quelques examens simples<br />

permettent d’orienter le diagnostic étiologique :<br />

ECBU à la recherche d’une hématurie (sédiment urinaire dit<br />

actif) ;<br />

dosage de la créatinine plasmatique pour estimer la fonction<br />

rénale ;<br />

dosage des protides totaux et de l’albumine ;<br />

électrophorèse des protéines sanguines, systématique chez les<br />

patients âgés à la recherche d’une gammapathie monoclonale<br />

;<br />

exploration morphologique de l’appareil urinaire, le plus<br />

souvent par une échographie permettant d’apprécier la taille<br />

et l’aspect des reins et de rechercher des anomalies des voies<br />

excrétrices.<br />

Diagnostic étiologique<br />

Comme le montre l’arbre diagnostique de la Figure 1, il faut<br />

dans un premier temps distinguer les protéinuries intermittentes,<br />

qui ne sont généralement pas en rapport avec des lésions<br />

rénales organiques, des protéinuries permanentes.<br />

Protéinuries intermittentes<br />

Protéinurie orthostatique<br />

Cette protéinurie, qui disparaît spontanément, se rencontre<br />

classiquement chez l’adolescent longiligne à croissance rapide,<br />

juste avant la puberté. La technique de recherche du caractère<br />

orthostatique doit être rigoureuse. Son débit doit être inférieur<br />

à 1 g/24 h, elle doit être non sélective et strictement isolée :<br />

absence d’antécédents, pression artérielle inférieure ou égale<br />

à 140/90 mmHg, protéinurie absente en décubitus, absence<br />

d’hématurie et de leucocyturie, ECBU stérile, clairance de la<br />

créatinine comprise entre 80 et 120 ml/min, et échographie<br />

rénale normale.<br />

Autres protéinuries intermittentes<br />

Elles sont plutôt liées à une modification de l’hémodynamique<br />

rénale : protéinuries d’effort, de l’insuffisance cardiaque, en<br />

Néphrologie<br />

Protéinurie intermittente<br />

Protéinurie orthostatique<br />

Protéinurie associée à :<br />

- fièvre<br />

- effort<br />

- infection urinaire<br />

- insuffisance ventriculaire droite<br />

> 2 g/24 h<br />

Bandelette positive<br />

Dosage quantitatif de la protéinurie des 24 heures<br />

Chaînes légères<br />

Albumine majoritaire<br />

Électrophorèse des protéines urinaires<br />

Sédiment urinaire<br />

lonogramme sanguin, créatinine<br />

Échographie rénale<br />

< 2 g/24 h<br />

Néphropathie glomérulaire Toute néphropathie<br />

Protéinurie permanente<br />

Protéinurie tubulaire<br />

(albumine minoritaire)<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Conduite à tenir devant une protéinurie.<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire 18-026-C-40<br />

particulier droite, des hyperthermies importantes, des polyglobulies<br />

et des hyperprotidémies (hyperviscosité).<br />

Protéinuries permanentes<br />

Protéinurie d’origine glomérulaire<br />

Une protéinurie sélective, c’est-à-dire constituée quasi<br />

exclusivement d’albumine, ou la présence d’un syndrome<br />

néphrotique sont pathognomoniques d’une atteinte<br />

glomérulaire.<br />

Le syndrome néphrotique est un syndrome biologique<br />

associant par définition : une protéinurie abondante au-dessus<br />

de 3 g/24 h, une hypoprotidémie inférieure à 60 g/l et une<br />

hypoalbuminémie en dessous de 30 g/l. Il est dit impur si s’y<br />

associent une insuffisance rénale organique, une hématurie<br />

et/ou une hypertension artérielle.<br />

La présence d’une hématurie microscopique (sédiment<br />

urinaire actif) oriente vers une glomérulopathie proliférative. Le<br />

syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressive,<br />

suspecté s’il existe une dégradation de la fonction rénale, est<br />

une urgence diagnostique et thérapeutique.<br />

Protéinurie d’origine tubulaire<br />

Lorsque la protéinurie est de faible débit, inférieure à<br />

1 g/24 h, et associée à une leucocyturie amicrobienne et/ou des<br />

anomalies morphologiques de l’appareil urinaire, le diagnostic<br />

s’oriente vers une pathologie interstitielle. Lorsque celle-ci<br />

s’associe à une glycosurie, une phosphaturie ou des troubles de<br />

l’équilibre acidobasique, le diagnostic s’oriente alors plutôt vers<br />

une pathologie tubulaire.<br />

Lorsque la protéinurie est modérée et qu’elle ne s’associe à<br />

aucune anomalie biologique ou morphologique, le diagnostic<br />

étiologique est plus difficile. La protéinurie signe alors une<br />

maladie rénale, mais elle n’est pas spécifique et peut être<br />

d’origine glomérulaire, tubulo-interstitielle ou vasculaire. La<br />

ponction-biopsie rénale (PBR) n’est pas systématique dans cette<br />

situation mais une surveillance de la pression artérielle, de la<br />

fonction rénale et de la protéinurie est recommandée au moins<br />

une fois par an.<br />

3


18-026-C-40 Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

Ponction-biopsie rénale<br />

La PBR pour analyse histologique est le seul moyen, en<br />

l’absence de contexte clinique évident, de faire le diagnostic de<br />

la néphropathie sous-jacente. Deux autres chapitres de l’EMC<br />

(18-024-A/B10) sont consacrés aux techniques, indications et<br />

contre-indications de la biopsie rénale.<br />

Pour résumer, elle est indiquée, chez l’adulte, dans les<br />

situations suivantes [8] :<br />

syndrome de glomérulonéphrite rapidement progressive ;<br />

syndrome néphrotique ;<br />

la présence d’une protéinurie chez un patient par ailleur suivi<br />

pour une maladie systémique ;<br />

protéinurie abondante non néphrotique (2 à 3 g/j) ;<br />

protéinurie modérée (< 2 g/j) mais associée à une dysfonction<br />

rénale ou à un déséquilibre de la pression artérielle.<br />

La PBR par voie transpariétale nécessite une courte hospitalisation<br />

de 24 à 48 heures. Elle est contre-indiquée (de manière<br />

relative) chez les patients ayant des anomalies de l’hémostase<br />

primaire ou secondaire, une hypertension non contrôlée ou un<br />

rein unique. Le refus du patient est la seule contre-indication<br />

absolue.<br />

En présence d’anomalie de l’hémostase, la biopsie par voie<br />

transjugulaire est alors une alternative à la biopsie transpariétale.<br />

Le prélèvement se faisant par la veine rénale, le risque<br />

hémorragique est nettement diminué, mais les prélèvements<br />

sont de plus petite taille donc plus difficiles à interpréter.<br />

■ Étude du sédiment urinaire<br />

Bien qu’il soit généralement admis que le sédiment urinaire<br />

ne contient que peu d’hématies ou leucocytes, il n’y a pas de<br />

consensus en ce qui concerne leur nombre précis. La variété des<br />

méthodes de mesure ou de collection des urines est une des<br />

explications. Il existe par ailleurs des variations interindividuelles<br />

d’excrétion des cellules et des cylindres au sein de la<br />

population d’individus normaux et également chez un même<br />

individu au cours du vieillissement [1] .<br />

Le compte d’Addis, peu réalisé en pratique courante, permet<br />

de mesurer le débit urinaire des éléments figurés. Ceux-ci sont<br />

comptabilisés pendant une période de 2à3heures. Normalement<br />

le débit urinaire des hématies est inférieur à 5 000/min et<br />

le débit urinaire des leucocytes inférieur à 5 000/min.<br />

Cet examen étant contraignant, le plus souvent les éléments<br />

du sédiment urinaire sont quantifiés en examinant au microscope<br />

un échantillon d’urine centrifugée. Le seuil considéré<br />

comme pathologique est plus de 10 hématies ou leucocytes<br />

par mm 3 .<br />

Hématurie<br />

L’hématurie est en rapport avec une lésion de l’appareil<br />

urinaire. Il est important d’explorer un épisode d’hématurie afin<br />

de ne pas passer, notamment chez le patient âgé de plus de<br />

50 ans, à côté du diagnostic de tumeur des voies urinaires<br />

(Fig. 2). La démarche diagnostique devant la présence d’une<br />

coloration rouge des urines consiste donc dans un premier<br />

temps à confirmer la présence de sang puis à situer l’origine du<br />

saignement qui peut provenir de tout l’arbre urinaire, du rein à<br />

la vessie (Fig. 3). L’examen bactériologique des urines est<br />

systématique, l’infection urinaire restant la cause la plus<br />

fréquente de survenue d’une hématurie (Fig. 4).<br />

Définition<br />

Présence d’une quantité anormale de sang dans les urines au<br />

cours d’une miction.<br />

Démarche diagnostique<br />

Interrogatoire<br />

C’est une étape essentielle de la démarche diagnostique. Le<br />

contexte, le type d’hématurie et les signes associés permettent<br />

en effet d’orienter la prescription des examens complémentaires.<br />

Intermittente<br />

Permanente<br />

Contexte<br />

Inexpliquée<br />

Infection du tractus urinaire<br />

Lithiase<br />

Exercice physique intense<br />

Traumatisme<br />

Endométriose<br />

Drépanocytose<br />

Polykystose rénale<br />

Glomérulopathies<br />

Il convient de préciser les antécédents personnels et familiaux<br />

du patient. Antécédent de lithiase, de tumeur, de maladie<br />

rénale ? Maladie systémique ? Drépanocytose ? Tabagisme ?<br />

Exposition professionnelle à des toxiques ? Prise de médicaments<br />

(antiagrégants ou anticoagulants, médicaments responsables<br />

d’urines colorées [Tableau 3], cyclophosphamide) ? Séjour<br />

en zone d’endémie bilharzienne ?<br />

La prise d’antiagrégant ou anticoagulant ne peut à elle seule<br />

expliquer un épisode d’hématurie et doit inciter à rechercher la<br />

lésion sous-jacente qui saigne.<br />

Caractéristiques de l’hématurie<br />

Cancer : vessie<br />

rein<br />

prostate<br />

Adénome de prostate<br />

10 20 30 40 50 60 70 80 ans<br />

Figure 2. Principales causes d’hématurie en fonction de l’âge du patient<br />

et de sa persistance.<br />

Figure 3. Hématurie : aspect des urines.<br />

L’hématurie peut être macroscopique, c’est-à-dire visible à<br />

l’œil (Fig. 3), ce qui ne préjuge pas de sa quantité puisqu’une<br />

quantité aussi minime que 1 ml de sang par litre d’urine peut<br />

4 Néphrologie


être responsable d’une couleur rouge. L’hématurie microscopique<br />

est le plus souvent détectée de manière fortuite, par une<br />

bandelette urinaire faite dans le cadre de la médecine du travail<br />

par exemple.<br />

L’hématurie peut être constante (présente à chaque miction)<br />

ou intermittente. Un épisode transitoire d’hématurie chez le<br />

patient jeune n’est pas exceptionnel. Il peut faire suite à un<br />

exercice physique intense mais le plus souvent la cause n’est pas<br />

retrouvée [10, 11] . Chez la femme une hématurie rythmée par le<br />

cycle menstruel évoque en premier lieu une endométriose des<br />

voies urinaires. Elle peut être présente au début, à la fin ou<br />

pendant toute la durée de la miction.<br />

Signes associés<br />

Bandelette urinaire : hématurie<br />

microscopique<br />

Infection urinaire ?<br />

Non<br />

La présence de signes fonctionnels urinaires (pollakiurie,<br />

brûlures, impériosités mictionnelles) et/ou une pyurie associée<br />

Oui<br />

Sédiment urinaire : non hématies > 5 000/ml<br />

Anamnèse<br />

Protéinurie<br />

Cylindres hématiques<br />

Dysfonction rénale<br />

Oui<br />

Biopsie rénale ?<br />

Hématurie macroscopique<br />

Pas de facteur<br />

de risque<br />

1 seule fois<br />

Refaire une analyse<br />

d’urine à 6 mois<br />

Tableau 3.<br />

Substances responsables de la coloration rouge/orange des urines.<br />

Médicaments<br />

Métronidazole, phényl-indane-dione, rifampicine, sulfasalazine,<br />

L-Dopa, ibuprofène, dantrone, laxatifs à base de phénolphtaléine,<br />

polyvidone-iodée, nitrofurantoïne, déféroxamine, doxorubicine,<br />

chloroquine<br />

Aliments<br />

Betteraves (hyperabsorption de la bétanine, pigment responsable leur<br />

coloration) chez 14 % de la population, mûres<br />

Pigments<br />

Myoglobine, hémoglobine, pigments biliaires, porphyrine, mélanine<br />

Néphrologie<br />

Non<br />

Non<br />

Traitement<br />

Bandelette urinaire à 1 mois<br />

Faux positifs ? Hème, etc.<br />

Répéter l’examen à 6 mois<br />

Uroscanner Diagnostic<br />

Normal<br />

Cytologie 3 jours de suite<br />

Négative Positive<br />

Âge > 40 ans<br />

Tabac<br />

Cytologie urinaire positive<br />

Imagerie anormale<br />

Figure 4. Arbre décisionnel. Conduite à tenir devant une hématurie [9] .<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire 18-026-C-40<br />

font évoquer en premier lieu une infection urinaire, parenchymateuse<br />

(pyélonéphrite ou prostatite) si le patient est fébrile.<br />

Des douleurs lombaires unilatérales de type colite néphrétique<br />

font évoquer un obstacle sur les voies urinaires, lithiase ou<br />

tumeur.<br />

Un prostatisme avec dysurie, nycturie ou rétention aiguë<br />

d’urine oriente vers une pathologie prostatique (Tableau 4).<br />

Examen clinique<br />

Il complète l’interrogatoire :<br />

une altération de l’état général avec amaigrissement ou<br />

asthénie en faveur d’une tuberculose ou d’un processus<br />

néoplasique ;<br />

hypertension artérielle, œdèmes des membres inférieurs ou<br />

signes extrarénaux (arthralgies, lésions cutanées) en faveur<br />

d’une néphropathie ;<br />

toucher rectal pour explorer la prostate ;<br />

examen des organes génitaux externes : varicocèle gauche<br />

(cancer du rein avec envahissement de la veine rénale<br />

gauche), épididymite (tuberculose urogénitale) ;<br />

palpation des fosses lombaires et de l’abdomen (polykystose<br />

rénale) ;<br />

examen gynécologique (cancer du col ou de l’utérus avec<br />

envahissement vésical).<br />

Diagnostic positif<br />

Bandelette urinaire<br />

Cystoscopie<br />

La bandelette urinaire détecte la présence d’hème dans les<br />

urines. C’est un examen de dépistage puisque sa sensibilité<br />

approche 100 % et que les faux négatifs sont exceptionnels.<br />

5


18-026-C-40 Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

Tableau 4.<br />

Principales étiologies des hématuries de l’adulte.<br />

Tumeurs malignes et bénignes<br />

Tumeurs du rein (carcinome, lymphome, angiomyolipome,<br />

oncocytome, etc.)<br />

Tumeurs urothéliales<br />

Cancer de vessie<br />

Cancer de prostate<br />

Adénome de prostate<br />

Métastase de l’appareil urinaire<br />

Infections<br />

Pyélonéphrite<br />

Cystite<br />

Prostatite aiguë/chronique<br />

Tuberculose<br />

Bilharziose<br />

Lithiases<br />

Lithiase rénale<br />

Lithiase urétérale<br />

Lithiase vésicale<br />

Maladie de Cacchi-Ricci<br />

Causes vasculaires<br />

Fistules urétéro-iliaque/aortiques<br />

Syndrome casse-noisette<br />

Thrombose veine rénale<br />

Infarctus rénal<br />

Malformations congénitales ou aquises<br />

Reflux vésico-urétéral<br />

Syndrome de la jonction pyélo-urétérale<br />

Urétérocèle<br />

Diverticule vésical<br />

Néphropathies<br />

Polykystose<br />

Néphropathie tubulo-interstitielle<br />

Glomérulopathies prolifératives<br />

Néphropathies vasculaires<br />

Autres<br />

Cystite radique<br />

Cystite chimique : cyclophosphamide, ifosfamide<br />

Cystocèle<br />

Cystite à éosinophile<br />

Vessie neurologique<br />

Corps étranger<br />

Traumatismes<br />

Nécrose papillaire<br />

Endométriose<br />

Amylose des voies urinaires<br />

Hypertrophie des îlots de von Brünn<br />

Néanmoins, l’existence de faux positifs (hémoglobinurie,<br />

myoglobinurie, certaines infections urinaires) nécessite que<br />

l’hématurie soit confirmée par une analyse du sédiment<br />

urinaire [12] .<br />

Examen du sédiment urinaire<br />

L’ECBU permet une analyse quantitative et qualitative des<br />

hématies dans les urines. Les urines, prélevées en dehors de la<br />

période des règles et après asepsie rigoureuse sont centrifugées.<br />

Le sédiment urinaire et le surnageant sont alors analysés.<br />

Le diagnostic d’hématurie est confirmé s’il existe plus de<br />

5 000 hématies/ml (ou 5/mm 3 ) dans le sédiment urinaire et que<br />

le surnageant est clair. Un surnageant de couleur rouge/orange<br />

doit faire rechercher la présence d’hème (hémoglobinurie<br />

ou myoglobinurie) ou plus rarement d’autres substances<br />

(Tableau 3). L’analyse au microscope à contraste de phase<br />

permet par ailleurs de visualiser l’aspect des hématies. Les<br />

Tableau 5.<br />

Examens morphologiques pour explorer une hématurie.<br />

Examen Intérêts Inconvénients<br />

Urographie<br />

intraveineuse (UIV)<br />

hématies déformées et de petite taille évoquent une origine<br />

glomérulaire au saignement, de même que la présence de<br />

cylindres hématiques.<br />

Hématurie d’origine néphrologique<br />

L’interrogatoire et l’examen clinique peuvent comme nous<br />

l’avons vu précédemment orienter vers l’origine néphrologique<br />

de l’hématurie. La présence d’une protéinurie supérieure à<br />

500 mg/j, notamment si elle est constituée majoritairement<br />

d’albumine, signe l’origine glomérulaire.<br />

Lorsque l’hématurie reste la seule manifestation d’une<br />

maladie glomérulaire, trois principaux diagnostics peuvent être<br />

évoqués :<br />

la néphropathie à dépôts mésangiaux d’immunoglobuline A<br />

(maladie de Berger) ;<br />

le syndrome d’Alport : néphropathie héréditaire dont<br />

l’atteinte glomérulaire peut être associée à une surdité et à des<br />

anomalies de la cornée ;<br />

la maladie des membranes basales fines qui est également une<br />

néphropathie héréditaire, mais exceptionnellement compliquée<br />

de dysfonction rénale.<br />

La nécessité d’une biopsie rénale pour affirmer le diagnostic<br />

est discutée au cas par cas [13] . En effet, ce geste n’est pas dénué<br />

de risque, notamment d’accident hémorragique et il n’existe à<br />

ce jour pas de traitement efficace dans ces trois pathologies au<br />

stade d’hématurie microscopique isolée.<br />

Examens complémentaires<br />

Une fois l’origine néphrologique de l’hématurie exclue, les<br />

examens complémentaires s’appliquent à situer l’origine du<br />

saignement : rein, cavités pyélocalicielles, uretères ou vessie [9,<br />

14, 15] . Les intérêts et inconvénients de chacun sont résumés<br />

dans le Tableau 5.<br />

Imagerie<br />

Bonne visualisation des<br />

reins, cavités<br />

pyélocalicielles et uretère<br />

Cystoscopie Meilleur examen pour<br />

examiner la vessie<br />

Échographie Aussi sensible que l’UIV<br />

pour les lésions rénales,<br />

moins d’effets<br />

secondaires et moins cher<br />

Pyélographie<br />

rétrograde<br />

Meilleur examen pour<br />

explorer les uretères, peut<br />

être associé à la<br />

cystoscopie<br />

Cytologie urinaire Sensibilité de 67% et<br />

spécificité de 96% pour le<br />

cancer de la vessie<br />

Scanner spiralé Meilleur examen pour<br />

explorer le parenchyme<br />

rénal<br />

Angiographie En l’absence de<br />

diagnostic avec les autres<br />

examens<br />

Meilleur examen pour les<br />

malformations<br />

vasculaires<br />

Visualise mal les<br />

lésions vésicales<br />

Néphrotoxicité<br />

possible<br />

Réactions<br />

idiosyncratiques<br />

Invasif, désagréable et<br />

cher<br />

Moins sensible que<br />

l’UIV pour les uretères<br />

et la vessie<br />

Invasif, n’explore que<br />

les uretères<br />

Utile uniquement pour<br />

le cancer de la vessie<br />

Cher<br />

Néphrotoxicité si<br />

injection d’iode<br />

Invasif<br />

Cher<br />

Néphrotoxique<br />

Les examens sont prescrits en fonction de l’âge du patient et<br />

de la pathologie suspectée.<br />

6 Néphrologie


Tableau 6.<br />

Facteurs de risque de tumeur de vessie.<br />

Tabagisme<br />

Exposition aux produits chimiques (benzène et amines aromatiques)<br />

Antécédent d’hématurie macroscopique<br />

Âge supérieur à 50 ans<br />

Antécédents de signes urinaires irritatifs<br />

Antécédents d’infection urinaire<br />

Abus d’analgésiques (phénacétine)<br />

Antécédents de radiothérapie pelvienne<br />

Cyclophosphamide<br />

Chez le patient de plus de 50 ans, une échographie ou un<br />

scanner spiralé sont prescrits en première intention car ils<br />

peuvent détecter de petites tumeurs rénales avec une grande<br />

sensibilité.<br />

Chez le patient plus jeune, l’uroscanner est privilégié puisque<br />

cet examen peut faire le diagnostic de Cacchi Ricci, pas toujours<br />

visualisé par l’échographie.<br />

Cytologie urinaire<br />

La sensibilité de la cytologie urinaire est plus importante pour<br />

les carcinomes in situ de la vessie (environ 90 %) que pour les<br />

carcinomes du tractus urinaire supérieur (environ 65 %). La<br />

présence de cellules urothéliales malignes au frottis urinaire<br />

impose la réalisation d’une cystoscopie, d’autant plus s’il existe<br />

des facteurs de risque (Tableau 6).<br />

Cystoscopie<br />

La cystoscopie est recommandée chez les patients à risque<br />

important de cancer de vessie : homme de plus de 50 ans,<br />

consommation importante de tabac, traitement prolongé par la<br />

phénacétine, le cyclophosphamide (Endoxan © ) ou les analgésiques.<br />

Elle permet de bien visualiser la muqueuse vésicale et les<br />

orifices urétéraux. Cet examen se réalise sous anesthésie locale,<br />

après s’être assuré de la stérilité des urines.<br />

Leucocyturie<br />

Définition<br />

Débit de leucocytes supérieur à 10 000 leucocytes/min<br />

d’urines non centrifugées ou plus de 10 leucocytes par champs<br />

(ou mm 3 ) à l’examen du sédiment urinaire d’urines<br />

centrifugées.<br />

Diagnostic positif<br />

Le diagnostic de leucocyturie peut être suspecté si la bandelette<br />

urinaire est positive. Celle-ci mesure l’activité estérasique<br />

des polynucléaires lysés ou intacts avec un seuil de détection de<br />

10 à 15 globules blancs/mm 3 . Il existe des faux positifs :<br />

utilisation de formaldéhyde ou absorption de médicaments<br />

contenant de l’imipénème ou de l’acide clavulanique, et des<br />

faux négatifs : protéinurie ou glycosurie abondante ou densité<br />

urinaire augmentée. La bandelette urinaire peut également<br />

détecter les nitrites en présence de bactéries possédant une<br />

nitrate-réductase (entérobactéries). Le seuil déterminant est<br />

10 5 unités formant colonie (UFC)/ml [1] .<br />

Le diagnostic de leucocyturie est confirmé par un examen du<br />

sédiment urinaire ou par un compte d’Addis.<br />

Pyurie<br />

La présence de pyurie ou leucocytes altérés dans les urines<br />

témoigne d’une infection ou d’une inflammation d’un site<br />

quelconque de l’appareil urinaire. Elle n’a cependant aucune<br />

valeur sur certains terrains, notamment chez les patients<br />

porteurs d’une sonde à demeure, en postopératoire immédiat<br />

d’une résection transurétérale de prostate ou de vessie et chez<br />

les patients ayant une entérocystoplastie.<br />

Néphrologie<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire 18-026-C-40<br />

Infection urinaire<br />

Les circonstances de découverte sont variées :<br />

découverte clinique devant une symptomatologie fonctionnelle<br />

évocatrice (douleurs génito-urinaires, troubles mictionnels),<br />

une hématurie micro- ou macroscopique, un syndrome<br />

infectieux (fièvre, frisson, état de choc septique), un aspect<br />

trouble des urines ;<br />

systématique, notamment si une bandelette urinaire ou un<br />

ECBU est effectué chez un patient à risque.<br />

Les termes d’infections urinaires basses et hautes sont<br />

abandonnés. La distinction des infections urinaires (IU) en IU<br />

simples et IU compliquées a pour but de prendre en compte les<br />

facteurs de risque de complications qui sont :<br />

une pathologie organique ou fonctionnelle de l’arbre urinaire<br />

(résidu vésical, lithiase, tumeur, acte récent, etc.) ;<br />

une situation pathologique particulière (diabète, immunodépression,<br />

insuffisance rénale, etc.) ;<br />

un terrain physiologique particulier (sujet âgé avec comorbidité,<br />

grossesse, homme).<br />

Seule la cystite aiguë simple peut être confirmée par une<br />

simple bandelette urinaire avant d’être traitée. Sa valeur<br />

prédictive négative (VPN), dans cette situation, est supérieure à<br />

95 %. Les autres infections urinaires nécessitent la pratique d’un<br />

ECBU, si la bandelette urinaire est positive, pour identifier la<br />

bactérie en cause et effectuer un antibiogramme. L’étude<br />

bactériologique est quantitative (numération des germes estimée<br />

d’après le nombre de colonies ayant poussé au bout de 18 heures)<br />

et qualitative (examen direct et coloration de Gram puis<br />

culture en milieu gélosé permettant une identification en<br />

48 heures).<br />

Lorsque la leucocyturie est supérieure à 10 4 /ml (ou 10/mm 3 )<br />

et la bactériurie supérieure à un seuil variable qui tient compte<br />

de la forme clinique et de l’espèce bactérienne, l’infection peut<br />

être affirmée (Fig. 5). Ce seuil, non opposable à un tableau<br />

clinique évident, est de :<br />

≥ 10 3 UFC/ml pour les cystites aiguës à Escherichia coli et<br />

autres entérobactéries, notamment Proteus spp. et Klebsiella<br />

spp., et pour S. saprophyticus ;<br />

≥ 10 5 UFC/ml pour les cystites à autres bactéries (notamment<br />

entérocoques) ;<br />

≥ 10 4 UFC/ml pour les pyélonéphrites et prostatites.<br />

La numération bactérienne peut être prise en défaut :<br />

lors des mictions nombreuses et répétées, empêchant la<br />

multiplication massive des bactéries dans la vessie ;<br />

lorsque l’infection est ailleurs que dans la vessie (bassinet,<br />

prostate, tissu para-urétral) ;<br />

si le pH urinaire est basique ;<br />

en présence dans les urines de substance antibactérienne ;<br />

lors des infections par des bactéries à croissance lente ou<br />

nécessitant des milieux spéciaux.<br />

Leucocyturie aseptique<br />

Les principales causes de leucocyturie aseptique sont reportées<br />

dans le Tableau 7. L’interrogatoire (il faut surtout s’assurer de<br />

l’absence de prise récente d’antibiotiques) et l’examen clinique<br />

orientent souvent facilement le diagnostic. Lorsqu’une infection<br />

urinaire à germes atypiques est suspectée, elle doit être spécifiée<br />

sur la demande d’ECBU qui est alors complété de cultures sur<br />

des milieux spécifiques et plus prolongées. Les bacilles acidoalcoolo-résistants<br />

(BAAR) étant éliminés de manière intermittente<br />

dans les urines, il ne faut pas hésiter en cas de suspicion<br />

de tuberculose à répéter l’examen d’urine.<br />

L’association d’une leucocyturie aseptique à une hématurie<br />

et/ou une protéinurie est très en faveur de son origine néphrologique,<br />

d’autant plus s’il existe également des cylindres<br />

leucocytaires (Fig. 6).<br />

Éosinophilurie<br />

Les éosinophiles sont mis en évidence dans les urines grâce à<br />

la coloration de Hansel. Leur présence fait suspecter une<br />

néphrite interstitielle aiguë immunoallergique médicamenteuse<br />

(à l’exception des anti-inflammatoires non stéroïdiens [AINS]).<br />

La présence d’une éosinophilie ne peut cependant pas être<br />

considérée comme un test diagnostique de cette pathologie. En<br />

7


18-026-C-40 Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

effet, sa sensibilité ne serait que de 40 % et sa valeur prédictive<br />

de 38 % [16] . Une éosinophilurie existe également au cours des<br />

pyélonéphrites aiguës, des prostatites aiguës, de certaines<br />

glomérulonéphrites, du syndrome de Churg et Strauss et de la<br />

maladie des emboles de cholestérol [17-19] .<br />

Lymphocyturie<br />

Des lymphocytes peuvent être observés dans les urines au<br />

cours de néphropathies interstitielles chroniques comme la<br />

sarcoïdose ou au cours du rejet aigu d’allogreffe de rein.<br />

Cellules épithéliales<br />

Les cellules épithéliales retrouvées dans les urines peuvent<br />

provenir de tout l’arbre urinaire : cellules tubulaires, de transition<br />

ou pavimenteuses. La présence de cellules tubulaires<br />

isolées, mais surtout, associées à des cylindres tubulaires oriente<br />

le diagnostic vers une pathologie du parenchyme rénal : nécrose<br />

tubulaire aiguë ou pyélonéphrite. Au cours du syndrome<br />

néphrotique, elle témoigne de l’agressivité pour les tubes de la<br />

protéinurie abondante.<br />

La présence de cellules urothéliales anormales doit faire<br />

rechercher une tumeur de vessie de haut grade et doit être<br />

complétée par une cystoscopie. La cytologie urinaire a dans<br />

cette situation également démontré son intérêt pour la surveillance<br />

de patients traités.<br />

Decoy-cell<br />

Négative<br />

Stop<br />

Suspicion d’infection<br />

urinaire<br />

Bandelette urinaire<br />

Lu > 10 4 /ml<br />

Bu > 10 3 à 5* /ml<br />

Infection<br />

urinaire<br />

Les decoy-cells sont des cellules urothéliales avec inclusions<br />

intranucléaires. Elles sont visibles sur des urines fixées, après<br />

coloration de Papanicolaou ou par technique d’immunohistochimie,<br />

ou sur le sédiment urinaire, sans coloration, au microscope<br />

à contraste de phase. Elles peuvent faire évoquer des<br />

Lu > 10 4 /ml<br />

Bu < 10 3 à 5* /ml<br />

Leucocyturie<br />

aseptique<br />

Positive<br />

ECBU<br />

Lu < 10 4 /ml<br />

Bu > 10 3 à 5* /ml<br />

Contamination<br />

IU débutante<br />

cellules de carcinome de haut grade mais leurs contours<br />

nucléaires sont plus réguliers et la texture chromatinienne plus<br />

homogène.<br />

Leur présence dans les urines identifie la réplication du<br />

polyomavirus (JC et BK virus le plus souvent) avec une valeur<br />

prédictive de 18 % et négative de 100 % [20] . Ces virus sont<br />

responsables chez les patients immunodéprimés de néphrites<br />

interstitielles pouvant évoluer vers l’insuffisance rénale terminale.<br />

La néphropathie à BK ne s’observe néanmoins presque<br />

exclusivement que chez le transplanté rénal [21] .<br />

Cylindres<br />

Définition<br />

Agglomérats de protéines et de cellules formés dans la<br />

lumière tubulaire distale et des tubules collecteurs, à la faveur<br />

d’un pH urinaire acide. Ils sont de forme cylindrique à bords<br />

réguliers. Leur présence (> 3/ml) signe l’origine intrarénale de la<br />

pathologie. Ils sont composés d’une matrice organique composée<br />

essentiellement de mucoprotéines de Tamm-Horsfall et l’on<br />

distingue (Tableau 8), en fonction des éléments figurés associés<br />

et de leur aspect en microscopie :<br />

les cylindres hyalins, composés exclusivement de matrice sans<br />

cellule associée ;<br />

les cylindres cellulaires :<br />

C leucocytaires, contenant des leucocytes ;<br />

C hématiques, contenant des globules rouges ;<br />

C tubulaires, contenant des cellules tubulaires ;<br />

les cylindres granuleux, contenant des débris cellulaires<br />

témoins d’une agression tubulaire (protéinurie abondante,<br />

inflammation). Lorsque les débris protéiques dégénèrent<br />

davantage, ils sont appelés cylindres cireux. Leur présence<br />

témoigne d’un flux intratubulaire très ralenti, comme au<br />

cours d’une insuffisance rénale sévère ;<br />

les cylindres lipidiques dont la matrice est composée ici<br />

essentiellement de cholestérol et/ou esther de cholestérol.<br />

Leur présence (aspect de croix de Malte caractéristique en<br />

lumière polarisée) témoigne d’une altération sévère de la<br />

membrane basale glomérulaire.<br />

Micro-organismes<br />

Bactéries<br />

Lu < 10 4 /ml<br />

Bu < 10 3 /ml<br />

Figure 5. Arbre décisionnel. Interprétation d’un examen cytobactériologique des urines (ECBU). Lu : leucocyturie ; Bu : bactériurie ; IU : infection urinaire ;<br />

* En fonction de l’espèce bactérienne.<br />

Tableau 7.<br />

Étiologies à évoquer devant une leucocyturie aseptique.<br />

Infection urinaire décapitée par une antibiothérapie préalable<br />

Présence dans l’urine de solution stérilisante<br />

Contamination de l’urine par des leucocytes vaginaux (leucorrhées ?)<br />

Infection à germes atypiques : Chlamydia, Ureaplasma urealyticum,<br />

Corynebacterium<br />

Tuberculose urinaire<br />

Néphropathie interstitielle chronique<br />

Tumeur urothéliale<br />

Lithiase<br />

Stop<br />

La présence de bactéries dans l’urine est le plus souvent en<br />

rapport avec une contamination. La présence d’une leucocyturie<br />

8 Néphrologie


associée augmente la probabilité que ce soit réellement une<br />

infection. Bien que l’urine normale soit stérile, le diagnostic de<br />

bactériurie non symptomatique est de plus en plus fréquent,<br />

mais elle est généralement non traitée.<br />

Champignons<br />

Le Candida est le champignon le plus fréquemment retrouvé<br />

dans les urines, résultant généralement d’une contamination<br />

génitale. Des infections fongiques peuvent se voir néanmoins<br />

chez les patients à risque : diabétique, immunodéprimé, ayant<br />

reçu une antibiothérapie prolongée, porteur de matériel étranger<br />

(sondes, cathéters).<br />

Protozoaires<br />

La présence de Trichomonas vaginalis peut être observée quel<br />

que soit le sexe, là aussi le plus souvent en rapport avec une<br />

contamination génitale (Fig. 7). Vivant, il est facilement<br />

reconnaissable grâce à la mobilité de son flagelle. Mort, il peut<br />

être confondu avec un polynucléaire neutrophile.<br />

Parasites<br />

Négative<br />

Urines troubles<br />

BU-ECBU<br />

Chylurie ? Leucorrhées<br />

Pyurie Leucocytes<br />

non altérés<br />

Cylindres<br />

leucocytaires ?<br />

Néphrologie<br />

Antibiothérapie<br />

récente ?<br />

IU décapitée<br />

La présence dans les urines d’œufs de Schistosoma haematobium<br />

signe le diagnostic de bilharziose urinaire (Fig. 8). Les<br />

Positive<br />

Symptomatologie<br />

urinaire ?<br />

Germes atypiques<br />

Impériosité<br />

Douleurs ?<br />

Lithiase<br />

Tumeur vésicale<br />

œufs, mesurant 140 × 50 µm sont mis en évidence grâce à des<br />

colorations spéciales (lugol, gomme au chloral ou lactophénol).<br />

Podocyturie<br />

Éosinophiles ?<br />

Lymphocytes ?<br />

Figure 6. Arbre décisionnel. Leucocyturie isolée. BU : bandelette urinaire ; ECBU : examen cytobactériologique des urines ; IU : infection urinaire.<br />

Tableau 8.<br />

Orientation diagnostique en fonction de la caractéristique des cylindres<br />

présents dans les urines.<br />

Caractéristique des cylindres Diagnostics à évoquer<br />

Cylindres hyalins<br />

(nombreux et isolés)<br />

Cylindres cellulaires :<br />

Diurétiques, exercice, fièvre,<br />

déshydratation, insuffisance cardiaque<br />

congestive<br />

- leucocytaires Pyélonéphrite aiguë, néphrite<br />

interstitielle aiguë, néphrite lupique,<br />

glomérulonéphrite postinfectieuse<br />

- hématiques Glomérulopathies prolifératives<br />

- tubulaires Néphrite interstitielle aiguë, nécrose<br />

tubulaire aiguë, protéinurie<br />

Cylindres granuleux Toute néphropathie<br />

Protéinurie abondante<br />

Cylindres lipidiques Glomérulopathies<br />

Néphrologie<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire 18-026-C-40<br />

Figure 7. Trichomonas vaginalis dans les urines.<br />

Figure 8. Œuf de Schistosoma haematobium dans les urines.<br />

La présence de podocytes dans les urines, mis en évidence par<br />

immunohistochimie, a été récemment identifiée comme un<br />

facteur d’activité au cours de certaines maladies glomérulaires :<br />

prééclampsie, diabète de type 2, néphropathie à IgA [22-26] . Cet<br />

9


18-026-C-40 Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

examen reste néanmoins réservé aux études expérimentales et<br />

aux essais cliniques et n’est pas encore validé ni disponible en<br />

pratique quotidienne.<br />

■ Chylurie<br />

Définition<br />

Présence de lymphe dans les urines.<br />

Physiopathologie<br />

La chylurie résulte de la rupture dans le bassinet, l’uretère ou<br />

la vessie, de varices lymphatiques, elles-mêmes liées à la stase<br />

créée par une gêne à la circulation lymphatique au voisinage de<br />

la citerne de Pecquet (Fig. 9). Elle se marque par un aspect<br />

lactescent des urines (Fig. 10). Les urines sont riches en graisses,<br />

les globules gras peuvent flotter à la surface de l’urine. La<br />

lipidurie (en majorité des chylomicrons) peut atteindre 2 à<br />

40 g/l.<br />

Étiologies<br />

Causes parasitaires<br />

La cause la plus fréquente est la filiariose à Wucheria bancrofti,<br />

surtout observée en Chine, dans le nord du Japon et dans le<br />

Pacifique Sud. En zone d’endémie, une chylurie est observée<br />

jusqu’à 2 % des patients infestés. Plus rarement, d’autres<br />

parasites peuvent être incriminés : Echinococcus, Ascaris lumbricoides<br />

ou Schistosomia mansoni.<br />

Causes non parasitaires<br />

En Europe et en France la chylurie est très rare et plutôt de<br />

cause non parasitaire : malformation congénitale ou obstruction<br />

du canal thoracique par un processus néoplasique ou inflammatoire<br />

chronique (fibrose rétropéritonéale) [27] .<br />

2<br />

1<br />

Figure 9. Mécanisme physiopathologique de la chylurie. 1. Blocage du<br />

canal thoracique ou de ses branches d’origine par des filaires adultes<br />

(mortes le plus souvent) ; 2. fistule lymphovésicale (rare) ; 3. stase lymphatique<br />

en amont ; 4. fistule lymphopyélique et/ou calicielle (la plus<br />

fréquente) ; 5. chylurie.<br />

3<br />

4<br />

5<br />

.<br />

Figure 10. Chylurie : aspect lactescent des urines.<br />

D’autres causes, encore plus exceptionnelles ont fait l’objet de<br />

case report : diabète, grossesse, tuberculose, traumatismes<br />

(contusion abdominale, lithotripsie extracorporelle) et chirurgie.<br />

Exploration d’une chylurie<br />

Exploration biologique<br />

Biochimie des urines avec dosage des lipides pour confirmer<br />

le diagnostic.<br />

Évaluation de la fonction rénale et de l’état nutritionnel pour<br />

juger des conséquences d’une perte abondante quotidienne de<br />

lymphe.<br />

Recherche de microfilaires dans les urines et sérologie chez un<br />

patient originaire d’une zone d’endémie.<br />

Explorations morphologiques<br />

Une cystoscopie réalisée au mieux après un repas riche en<br />

graisse peut, en visualisant l’issue d’urines laiteuses par un des<br />

méats, préciser le côté atteint.<br />

L’urétéropyélographie rétrograde peut visualiser des lymphatiques<br />

paracalicielles opacifiées après reflux du produit de<br />

contraste.<br />

L’uro-imagerie par résonance magnétique (IRM) semble un<br />

examen prometteur dans cette indication, notamment lorsque<br />

le site de l’obstruction se situe dans la portion basse des<br />

uretères [28] .<br />

La lymphographie pédieuse n’est plus pratiquée en France.<br />

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Pour en savoir plus<br />

Santé AFdSSdPd. Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires<br />

bactériennes communautaires chez l’adulte : recommandations de<br />

bonne pratique. Juin 2008.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Pillebout E. Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire. EMC (Elsevier Masson<br />

SAS, Paris), Néphrologie, 18-026-C-40, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Néphrologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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Documents<br />

légaux<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire 18-026-C-40<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

11


Plan<br />

Sténoses urétérales intrinsèques<br />

et extrinsèques<br />

R. de Petriconi<br />

Les sténoses de l’uretère sont un problème quotidien de l’urologue. Les méthodes diagnostiques actuelles<br />

permettent dans la majorité des cas d’élucider l’étiologie et de planifier le traitement. Entre solutions<br />

palliatives, solutions d’urgence, et définitives chirurgicales, une vaste palette de possibilités s’offre à nous.<br />

Elle se complète par les techniques endoscopiques ou de radiologie interventionnelle ainsi que par la<br />

cœliochirurgie. Le seul problème qui se pose est celui de l’indication adéquate en fonction des capacités de<br />

récupération du rein de stase.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Sténoses urétérales ; Stase urinaire ; Évaluation de la fonction rénale ; Endo-urologie<br />

Introduction 1<br />

Définition 2<br />

Anatomie des uretères 2<br />

Histologie 2<br />

Physiologie 3<br />

Physiopathologie 3<br />

Physiopathologie de l’obstruction aiguë de l’uretère 3<br />

Physiopathologie de l’obstruction chronique de l’uretère 4<br />

Pathophysiologie et degré d’obstruction de l’uretère 4<br />

Symptomatologie clinique 4<br />

Symptomatologie clinique de la sténose aiguë 5<br />

Symptomatologie clinique de la sténose chronique 5<br />

Examen clinique 5<br />

Anamnèse 5<br />

Examen clinique 5<br />

Examens complémentaires 5<br />

Examens biologiques 5<br />

Examens complémentaires paracliniques 5<br />

Ionogramme urinaire et clairance de la créatinine du rein<br />

obstrué 10<br />

Évaluation du degré de stase urinaire due à la sténose<br />

urétérale 10<br />

Étiologies des sténoses urétérales 10<br />

Principes thérapeutiques des sténoses urétérales 10<br />

Chirurgie endoscopique ou/et percutanée interventionnelle 11<br />

Chirurgie à ciel ouvert 13<br />

Biotechnologie 17<br />

Cœliochirurgie 17<br />

Conclusion 17<br />

■ Introduction<br />

Les sténoses intrinsèques et extrinsèques de l’uretère prennent<br />

de plus en plus d’importance dans notre pratique urologique<br />

quotidienne. Ceci est lié à deux groupes de facteurs :<br />

d’une part :<br />

Urologie<br />

18-161-A-10<br />

C à l’échographie rénale systématique, à la standardisation et<br />

à l’amélioration du suivi postopératoire qui font découvrir<br />

de plus en plus de stases urinaires asymptomatiques (mais<br />

pas forcément plus tôt) ;<br />

C à l’efficience des traitements oncologiques, qui, par le<br />

rallongement du pronostic vital, font entrer certains<br />

patients dans des stades tumoraux qu’ils n’auraient jamais<br />

atteints par le passé ;<br />

C à l’amélioration des traitements oncologiques adjuvants,<br />

qui nous incitent également à aborder et traiter chirurgicalement<br />

des stades carcinologiques de plus en plus avancés<br />

que nous aurions réfutés ou classés comme perdus il y a<br />

quelques années ;<br />

d’autre part :<br />

C à l’augmentation non négligeable des lésions iatrogènes de<br />

l’uretère non seulement après chirurgie classique (pelvienne,<br />

gynécologique) mais aussi et surtout celles liées au<br />

développement des techniques endoscopiques (chirurgie<br />

cœlioscopique, chirurgie endo-urologique) ;<br />

C aux nouvelles techniques interventionnelles endoscopiques<br />

et leur objectif de résoudre le problème obstructif urétéral<br />

sans grande intervention, qui nous poussent de plus en<br />

plus à traiter ces patients alors que par le passé nous<br />

aurions affiché une attitude plus attentiste ;<br />

C enfin, au développement de nouvelles techniques de<br />

dérivation urinaire continente et leurs larges indications,<br />

qui sont également grandes pourvoyeuses de sténoses<br />

d’implantation urétéroentérale au niveau du réservoir.<br />

En 1869, Simon, pionnier du cathétérisme urétéral, pratiqua<br />

la première néphrectomie pour rein muet par altération de<br />

l’uretère. Depuis, une meilleure connaissance de la physiologie<br />

du rein, de l’anatomopathologie et de la physiopathologie du<br />

rein de stase et de ses capacités de récupération fonctionnelle,<br />

des explorations fonctionnelles prédictives préopératoires<br />

(scintigraphie rénale) et le net développement des techniques de<br />

dérivations urinaires temporaires (sonde double J, néphrostomie<br />

percutanée) ou définitives, nous permettent de plus en plus la<br />

conservation de reins en stase et posent plus le problème de<br />

l’indication thérapeutique et de la technique à employer en<br />

fonction de l’étiologie.<br />

1


.<br />

.<br />

18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Les formes classiques des sténoses urétérales comme la fibrose<br />

rétropéritonéale idiopathique, la stase urinaire du haut appareil<br />

durant la grossesse, la stase urinaire dans l’endométriose, etc.,<br />

sont restées constantes dans leur incidence.<br />

Nous limitons le sujet aux sténoses acquises de l’uretère qui<br />

touchent directement ou indirectement la paroi urétérale et<br />

excluons les affections et malformations congénitales (syndrome<br />

de la jonction pyélo-urétérale, méga-uretère, etc.), le calcul<br />

urétéral, les tumeurs bénignes (polype) et malignes urothéliales<br />

de l’uretère. Ces dernières devant néanmoins toujours être<br />

considérées dans les hypothèses de diagnostic différentiel.<br />

■ Définition<br />

Rétrécissements, sténoses, compression de l’uretère, obstructions,<br />

occlusions partielles ou, à l’extrême, totales, sont des<br />

termes qui s’appliquent tous à un état pathologique caractérisé<br />

par une réduction de la lumière endo-urétérale entraînant une<br />

perturbation du transport des urines avec des conséquences<br />

pathologiques pour le haut appareil urinaire sus-jacent, fonction<br />

du degré et de la durée de l’obstruction.<br />

Nous utilisons préférentiellement le terme de sténose sans<br />

préjuger de la localisation du processus pathologique (affection<br />

endomurale = intrinsèque, externe à l’uretère extrinsèque<br />

= compression, infiltration).<br />

La définition du type de sténose peut être variée et classifiée<br />

suivant des critères anatomiques (localisation haute/basse,<br />

unilatérale/bilatérale), des critères anatomopathologiques<br />

(sténoses bénignes/malignes), des critères physiopathologiques<br />

(sténose aiguë/chronique, partielle/subtotale/totale, compensée/<br />

décompensée), etc. Ces classifications, qui peuvent être développées<br />

à l’extrême, permettent de mettre l’accent sur un aspect<br />

particulier de la sténose et d’en faire découler une attitude<br />

thérapeutique générale pour des étiologies très diverses. Par<br />

exemple, une sténose partielle inflammatoire, tumorale ou<br />

iatrogène, peut être, avec le même grade d’obstruction, compensée<br />

ou décompensée. L’indication thérapeutique ne repose<br />

pas sur l’importance (longueur) de la sténose ni sur son<br />

étiologie, mais uniquement sur le fait d’être compensée ou<br />

décompensée.<br />

■ Anatomie des uretères<br />

L’uretère est une structure anatomique rétropéritonéale<br />

tubulaire fibromusculaire lisse à lumière virtuelle, animée d’un<br />

péristaltisme longitudinal, allant du bassinet jusqu’à la vessie.<br />

Son trajet a une légère forme en S étiré à gauche, et inversé à<br />

droite et présente trois « rétrécissements » physiologiques.<br />

Les études radiologiques montrent de haut en bas, une<br />

variabilité physiologique de calibre [1] . Sa longueur est en<br />

général de 24-34 cm pour un adulte de taille normale. L’uretère<br />

droit est de 1 cm le plus long. Ils présentent différents segments<br />

définis par leur situation anatomique, permettant d’une part la<br />

localisation de la sténose et d’autre part de poser les indications<br />

quant aux possibilités techniques opératoires (Fig. 1) (cf. infra).<br />

Le diamètre extérieur est de 5 mm à 1 cm et le diamètre<br />

endoluminal est variable en fonction de la diurèse.<br />

La vascularisation artérielle est classiquement divisée en trois<br />

zones d’influence vasculaire anastomosées entre elles par des<br />

capillaires longitudinaux. Les origines vasculaires de ces trois<br />

zones sont résumées dans la Figure 2 (tiers supérieur : artère<br />

rénale/pyélique ; tiers moyen : aorte, artères iliaques, artère<br />

mésentérique inférieure à gauche, artère spermatique, ou<br />

ovarienne ; tiers inférieur : artères vésicales, artère iliaque<br />

interne). L’observation clinique montre qu’en chirurgie urétérale<br />

les problèmes (nécrose ischémique, hypovascularisation avec<br />

fibrose secondaire) ne surviennent que si l’une de ces zones<br />

manque d’emblée (étiologie congénitale, radique, iatrogène<br />

chirurgicale).<br />

Le système veineux a une distribution analogue se drainant<br />

vers les veines vésicales, vaginales/utérines, gonadiques, iliaques,<br />

lombaires et la veine rénale.<br />

Le système lymphatique accompagne sans grande systématisation<br />

particulière la distribution artérielle.<br />

.<br />

Figure 1. Segments de l’uretère en fonction de son parcours anatomique.<br />

La dénomination des différents segments de l’uretère permet non<br />

seulement de définir la localisation et l’étendue des sténoses, mais également<br />

le choix des différentes techniques chirurgicales à ciel ouvert.<br />

1. Artère iliaque ; 2. uretère présacré ; 3. uretère pelvien ; 4. uretère<br />

endomural ; 5. uretère sous-muqueux ; 6. jonction pyélo-urétérale ;<br />

7. uretère lombaire ; 8. croisement des vaisseaux iliaques ; 9. méat<br />

urétéral.<br />

L’innervation est autonome avec des cellules ganglionnaires<br />

limitées à l’adventice. Les fibres nerveuses préganglionnaires<br />

proviennent du plexus rénal, vésical inférieur, hypogastrique,<br />

aortique, gonadique, mésentérique inférieur, vaginal, cœliaque<br />

et des ganglions présacrés supérieurs. La sensibilité somatique<br />

(coliques néphrétiques lors de stase aiguë) est liée au nerf<br />

iliohypogastrique (L1 ou/et Th12), au nerf ilio-inguinal (Th12 et<br />

L1) et aux branches externes du génitofémoral (L1 et L2).<br />

Les rapports anatomiques de l’uretère expliquent son éventuelle<br />

implication dans des processus pathologiques de voisinage<br />

(abcès de l’appendice, anévrisme de l’artère iliaque<br />

commune, hématome du muscle psoas).<br />

■ Histologie [2]<br />

La structure et l’architecture histologique de l’uretère expliquent<br />

en grande partie les réactions de ce dernier aux différents<br />

types d’agression et de lésion tissulaire (radiation, traumatisme<br />

direct, inflammation, etc.).<br />

La muqueuse est un revêtement épithélial de transition<br />

soutenu par un chorion. L’épithélium est constitué de 4 à<br />

5 couches de cellules de forme cylindrique à uretère affaissé,<br />

vide, ou cubique, lors du passage d’un bolus urinaire. Les<br />

cellules de surface présentent une face convexe endoluminale.<br />

La membrane basale extrêmement fine est portée par un tissu<br />

conjonctif fibreux dense riche en fibres élastiques. Ce chorion<br />

présente un tissu lymphoïde et est plus dense sous l’épithélium<br />

qu’en profondeur. L’élasticité du chorion, la laxité de la couche<br />

externe et la couche musculeuse expliquent les replis longitudinaux<br />

de la muqueuse. Ceci donne en coupe transversale un<br />

aspect étoilé. Il n’existe pas de sous-muqueuse, ni de glandes.<br />

La musculeuse urétérale est épaisse et constituée de fibres<br />

musculaires lisses avec des travées de tissu conjonctif. La couche<br />

musculeuse interne est longitudinale. La couche externe<br />

circulaire manque dans la partie inférieure de l’uretère. Elle<br />

devient oblique dans sa partie inférieure.<br />

2 Urologie


Figure 2. Distribution de la vascularisation artérielle de l’uretère gauche.<br />

Les différentes zones vasculaires se chevauchent et présentent des<br />

anastomoses directes. Le risque et problème du « dernier champ » n’est<br />

présent que lors d’absence ou variation anatomique ou après lésion<br />

iatrogène (post-chirurgie, radiogène). À droite, il n’y a pas de branche<br />

vasculaire provenant de l’artère mésentérique inférieure. 1. tiers supérieur<br />

de l’uretère : artère rénale, artère pyélique ; 2. tiers moyen de l’uretère :<br />

aorte, artère lombaire, artère iliaque gauche, artère mésentérique inférieure,<br />

artère gonadique, artère hypogastrique ; 3. tiers inférieur de l’uretère<br />

: artères vésicales.<br />

L’adventice est constitué de tissu conjonctif fibroélastique<br />

couvert en avant par du péritoine.<br />

Le plexus vasculaire et lymphatique et les fibres nerveuses<br />

avec les ganglions du système autonome sont répartis dans la<br />

musculeuse et le chorion. Les fibres sensitives traversent la<br />

musculeuse et pénètrent la couche épithéliale.<br />

■ Physiologie<br />

L’uretère transporte l’urine sous forme de boli propulsés par<br />

les fibres musculaires lisses circulaires. L’initiation de l’onde<br />

péristaltique se trouve dans des cellules de la région du fornix<br />

caliciel, zone de contact du calice et de la papille rénale<br />

(« pacemaker » rénal) [3] . Il semble exister des « pacemaker »<br />

secondaires au niveau de la jonction pyélo-urétérale ainsi que<br />

des centres secondaires latents répartis le long de l’uretère [4] .La<br />

pression endoluminale du bassinet est de 11 cm H 2O<br />

(6-12 mmHg) [5] et dans le bolus de 15-45 cm H 2O. Entre les<br />

phases d’activité péristaltique, la pression endoluminale correspond<br />

en gros à la pression abdominale. L’activité péristaltique<br />

est en grande partie stimulée par la production des urines. On<br />

peut observer dans les études radiographiques de 1à4boli par<br />

uretère [6] , mais les uretères ne sont jamais contrastés d’un<br />

tenant de haut en bas (diurèse massive, début d’obstruction).<br />

Le bassinet et surtout l’uretère présentent un péristaltisme de<br />

base indépendant de tout système nerveux. Ce phénomène fut<br />

décrit la première fois en 1925 par Hryntschak [7] et se laisse<br />

observer sur le rein dénervé lors de la transplantation rénale.<br />

Les modifications d’amplitude et de fréquence des ondes<br />

péristaltiques (augmentation) sont dues au système nerveux<br />

Urologie<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

végétatif. Des fibres cholinergiques et adrénergiques ont déjà été<br />

démontrées par Schulmann en 1974 [8] avec des fibres alphaadrénergiques<br />

(excitatoires) et bêta-adrénergiques (inhibitrices)<br />

[9] . Ces observations physiologiques sont à la base des<br />

traitements de la colique néphrétique.<br />

De par l’innervation urétérale, l’obstruction est à l’origine<br />

d’une douleur somatique et d’une douleur viscérale. La prédominance<br />

de l’une ou l’autre est très différente et présente des<br />

variations interindividuelles (âge) et de la rapidité d’installation<br />

de l’obstruction ; douleur aiguë, presque toujours accompagnée<br />

de tout le tableau clinique d’une colique néphrétique, ou<br />

douleurs lancinantes, « sourdes » dans les obstructions lentes et<br />

chroniques. La douleur somatique correspond généralement à la<br />

distribution métamérique des dermatomes. La douleur viscérale<br />

est générée par la sensibilité viscérale et liée à la distension ou<br />

dilatation des fibres musculaires lisses. Elle est de localisation<br />

beaucoup plus diffuse, de type ondulant et très difficile à<br />

localiser mais correspondant généralement au même segment<br />

embryonnaire. Par ce caractère ondulant, de spasme, elle signe<br />

son origine végétative entraînant des signes végétatifs associés<br />

comme vomissements, hypotonie, atonie intestinale et<br />

sudation [10] .<br />

■ Physiopathologie<br />

Les effets d’une sténose urétérale sont de deux ordres.<br />

D’abord sur l’uretère sus-jacent à la sténose, où elle entraîne une<br />

dilatation avec modifications du péristaltisme et des modifications<br />

histologiques de la paroi urétérale posant le problème de<br />

la capacité de récupération fonctionnelle de l’uretère, puis sur<br />

la fonction sécrétrice du rein soumis à la stase urinaire. Ici se<br />

pose le problème de la capacité de récupération du parenchyme<br />

rénal.<br />

La réversibilité de ces altérations fonctionnelles dépend de<br />

l’âge du rein (un rein infantile a plus de capacité de compensation<br />

qu’un rein adulte), du degré d’obstruction (minime,<br />

partielle, complète), de la vitesse d’installation de l’obstruction<br />

(aiguë/chronique) et de l’association d’affections secondaires<br />

(infection, hypertension) ou associées (Kimmelstiel Wilson,<br />

insuffisance rénale et lupus érythémateux).<br />

La compréhension de ces phénomènes permet de prévoir la<br />

capacité de récupération de la fonction rénale, mais aussi de la<br />

fonction urétérale. À quoi sert d’avoir sauvé par une néphrostomie<br />

percutanée un rein si son uretère n’est plus fonctionnel ?<br />

Combien de temps faut-il attendre après une néphrostomie<br />

percutanée pour espérer une récupération de ce dernier ? De ce<br />

type de questions découle pour le patient toute la chaîne<br />

d’indications d’examens complémentaires et thérapeutiques.<br />

Il semble licite de différencier du point de vue physiopathologique<br />

comme clinique, entre obstruction aiguë et chronique<br />

ainsi que partielle et complète. Mais, il faut se rendre à l’évidence<br />

que les cas ne sont pas aussi tranchés dans la pratique<br />

courante. En expérimentation animale, il est très difficile de<br />

simuler une sténose partielle, d’autant que son effet sur le<br />

passage des urines dépend de la diurèse (problème des sténoses<br />

dites compensées/décompensées). C’est certainement la raison<br />

pour laquelle ces travaux expérimentaux ne tiennent compte<br />

que des obstructions complètes. En clinique, une obstruction<br />

complète iatrogène d’un uretère est souvent associée à une<br />

fistule urinaire (point de suture sur un uretère lors d’une<br />

hystérectomie). Donc, la réalité se trouve entre ces cas de figure<br />

caractéristiques et extrêmes et doit toujours nous inciter à la<br />

prudence, quitte, par exemple, à proposer une néphrostomie<br />

percutanée afin d’apprécier la capacité de récupération et de<br />

poser l’indication d’une néphrectomie secondairement.<br />

Physiopathologie de l’obstruction aiguë<br />

de l’uretère<br />

Effets de l’obstruction aiguë sur l’uretère<br />

L’obstruction aiguë entraîne [5] :<br />

un hyperpéristaltisme initial, avec augmentation de l’amplitude<br />

de contraction ;<br />

3


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

un péristaltisme rétrograde secondaire ;<br />

la dilatation de l’uretère, surtout dans son diamètre, rend les<br />

vagues péristaltiques propulsives inefficaces. Les fibres<br />

circulaires ne sont plus occlusives, ce qui potentialise la stase ;<br />

puis s’installe une désorganisation complète du péristaltisme ;<br />

avant de sombrer, après 30-60 minutes, dans une hypotonie<br />

musculaire liée à la pression hydrostatique urinaire qui<br />

annule les contractions par augmentation de la tension<br />

murale ;<br />

allant jusqu’à la paralysie complète ;<br />

cette atonie est aggravée par la distension et la dilatation<br />

urétérale passive qui s’accompagne généralement d’une<br />

élongation de la paroi urétérale ;<br />

la douleur par distension (colique) est transmise par l’innervation<br />

segmentaire Th11 Th12 et L1 [11] .<br />

Ces phénomènes sont, au début, complètement et rapidement<br />

réversibles sous dérivation urinaire (néphrostomie percutanée).<br />

Ils s’accompagnent d’un œdème de la paroi urétérale<br />

d’une part lié à la pression hydrostatique de l’urine en stase<br />

(presse l’urine dans le tissu) et d’autre part lié à la libération de<br />

substances actives sur les chémorécepteurs et les récepteurs<br />

d’ischémie de l’urothélium. Ces substances actives humorales<br />

sont peut-être à l’origine de phénomènes comme l’augmentation<br />

de la créatininémie, observée lors d’une obstruction aiguë<br />

unilatérale à rein controlatéral sain.<br />

Une persistance du phénomène obstructif peut mener à un<br />

uretère totalement défonctionnalisé.<br />

Effets de l’obstruction aiguë sur le parenchyme<br />

rénal<br />

L’obstruction urétérale, et surtout l’obstruction subtotale et<br />

totale, entraîne une dilatation progressive des cavités urétéropyélo-calicielles<br />

durant les premières semaines avec un œdème<br />

du parenchyme rénal ainsi qu’une réduction de la sécrétion<br />

urinaire. De nombreuses études expérimentales, surtout sur le<br />

chien avec des sténoses complètes, montrent une diminution de<br />

la fonction tubulaire dès les premières heures [12] . La diminution<br />

secondaire du flux sanguin avec diminution de la filtration<br />

glomérulaire [13, 14] , une acidification urinaire [15] avec plus<br />

tardivement une altération de la concentration urinaire [12]<br />

s’accompagnent petit à petit d’une atrophie parenchymateuse<br />

ischémique.<br />

La perturbation vasculaire est d’une part liée à l’augmentation<br />

de la pression hydrostatique des urines qui comprime le<br />

parenchyme et ses capillaires dans la capsule rénale, mais<br />

d’autre part aussi à l’œdème parenchymateux qui renforce le<br />

phénomène compressif sur le système artériel tout en perturbant<br />

l’écoulement veineux. Ces altérations reproduites très tôt<br />

(1924) expérimentalement sur le chien et le rat [16, 17] montrent<br />

que l’augmentation de la pression hydrostatique entraîne<br />

également un aplatissement progressif des papilles rénales et<br />

une dilatation du néphron distal qui se répercute jusqu’au<br />

niveau du glomérule. Après 4à7jours, on observe une réduction<br />

de la diurèse (réversible) due à la pression hydrostatique sur<br />

le parenchyme rénal et sa réduction de perfusion sanguine<br />

majeure. Au bout de 7 jours, apparaissent des signes d’atrophie<br />

et de nécrose d’origine vasculaire. Après 28 jours, la zone<br />

médullaire du parenchyme rénal perd 50 % de sa masse. La<br />

corticale suit relativement rapidement pour, au bout de<br />

8 semaines, aboutir à une perte complète du parenchyme par<br />

atrophie vasculaire.<br />

Certains de ces facteurs pathologiques semblent également<br />

avoir un « effet protecteur ». Par résorption d’urine et de ses<br />

composants par les vaisseaux lymphatiques et veineux, surtout<br />

au niveau du fornix caliciel et du tube droit [18, 19] , il y a<br />

réduction du volume urinaire et donc de la pression hydrostatique.<br />

D’autre part, l’insuffisance rénale fonctionnelle, la<br />

diminution du flux artériel [20] avec anoxie corticale et formation<br />

des renal schunt de Truete avec diminution de la filtration<br />

glomérulaire, bien que pathologiques, vont dans le même sens.<br />

Dans certains cas d’obstruction rénale (bi- ou unilatérale), une<br />

hypertension artérielle associée peut être observée. L’origine est<br />

très controversée. Plusieurs explications ont été avancées :<br />

.<br />

.<br />

théorie de la macula densa où les modifications hydroélectrolytiques,<br />

par diminution de la concentration en sodium ou de<br />

son flux influent sur la macula densa entraînant une augmentation<br />

de la rénine [21, 22] ;<br />

théorie des barorécepteurs : la stase urinaire avec sa pression<br />

hydrostatique diminue le flux sanguin rénal avec stimulation<br />

de l’appareil juxtaglomérulaire (augmentation de la rénine) ;<br />

théorie sympathique où la libération de rénine est modifiée<br />

par l’intermédiaire du sympathique [23] .<br />

La physiopathologie nous permet de comprendre la perte de<br />

fonction rénale, mais ne nous donne pas d’argument décisif sur<br />

la durée, ni le degré de stase tolérée par un rein. Le problème<br />

devient plus complexe en regard des obstructions partielles<br />

(degrés très variables) et de l’association d’affections secondaires<br />

(infection urinaire) ou associées (insuffisance rénale, diabète,<br />

hypertension).<br />

Il n’existe pas de données certaines et irréfutables pour<br />

l’appréciation de la durée maximale d’obstruction complète<br />

tolérée par un rein. Une semaine à 15 jours est certainement un<br />

laps de temps qui reste sans grande conséquence. On admet<br />

généralement pour une obstruction complète jusqu’à 4 semaines<br />

comme limite critique. Certaines publications font état de<br />

56 jours [24] et 69 jours [25] .<br />

Physiopathologie de l’obstruction chronique<br />

de l’uretère<br />

Effets de l’obstruction chronique sur l’uretère<br />

La dilatation se faisant progressivement sur une durée plus<br />

longue, nous retrouvons toutes les modifications pathologiques<br />

de l’urètre en obstruction aiguë mais plus étalées dans le temps.<br />

On remarque surtout l’allongement considérable de l’uretère et<br />

des phénomènes de dilatation du système tubulaire<br />

intraparenchymateux.<br />

La récupération d’un péristaltisme prograde efficient est<br />

souvent plus difficile à obtenir que dans les dilatations aiguës<br />

car les fibres musculaires présentent une atrophie, une fibrose et<br />

sont distendues, incapables d’un péristaltisme efficace (fibres<br />

musculaires circulaires lisses). Ceci explique certains résultats<br />

décevants en postopératoire pour une chirurgie correctrice<br />

réalisée de façon idéale.<br />

Effets de l’obstruction chronique<br />

sur le parenchyme rénal<br />

Les altérations du parenchyme rénal sont identiques à celles<br />

des formes aiguës, mais d’installation plus lente et progressive,<br />

ce qui explique qu’à l’inverse de ces dernières, elles sont<br />

théoriquement encore réversibles après plusieurs mois. Mais, en<br />

réalité, moins symptomatiques, elles sont généralement découvertes<br />

beaucoup plus tardivement. Ce facteur durée de stase agit<br />

à plein et explique que ces reins récupèrent moins bien que<br />

dans les formes aiguës.<br />

Pathophysiologie et degré d’obstruction<br />

de l’uretère<br />

Le degré d’obstruction et la vitesse d’installation d’une<br />

sténose sont des facteurs le plus souvent indépendants l’un de<br />

l’autre, mais qui dans leur association donnent toute une<br />

palette de lésions fonctionnelles. Le cas clinique d’une obstruction<br />

instantanée est réalisé par la ligature iatrogène d’un uretère.<br />

■ Symptomatologie clinique<br />

La symptomatologie clinique de la sténose urétérale est liée<br />

d’une part aux signes de l’obstruction urétérale (douleur<br />

lombaire, colique néphrétique), aux signes cliniques d’une<br />

éventuelle complication de la sténose (septicémie, rupture<br />

rénale) et d’autre part, éventuellement, aux signes cliniques liés<br />

à l’étiologie de la sténose (maladie de Crohn, cancer utérin). Elle<br />

est fonction de la vitesse d’installation de l’obstruction (aiguë/<br />

chronique), de sa localisation (uni-/bilatérale/rein unique),<br />

4 Urologie


d’une affection associée (infection, septicémie), de la fonction<br />

rénale restante (sans/avec insuffisance rénale, compensée/<br />

décompensée).<br />

Le tableau clinique peut encore varier en fonction :<br />

de l’âge : indolence du sujet âgé, aspécificité pédiatrique ;<br />

du sexe ;<br />

de l’ethnie ;<br />

en postopératoire : symptomatologie masquée par la douleur<br />

de la plaie opératoire.<br />

Il n’est pas possible de décrire tous les aspects de la symptomatologie<br />

clinique qui associent ceux de l’obstruction à ceux de<br />

l’étiologie (voir les chapitres correspondants). Classiquement,<br />

deux extrêmes sont possibles : le tableau clinique de l’obstruction<br />

aiguë et le tableau de l’obstruction chronique d’installation<br />

lente. Entre ces deux extrêmes, tout est possible avec pour<br />

complication majeure la septicémie et l’insuffisance rénale. La<br />

vitesse d’installation de la symptomatologie clinique ne permet<br />

pas de préjuger ni de l’étiologie bénigne ou maligne de la<br />

sténose, ni du degré d’obstruction.<br />

Symptomatologie clinique de la sténose<br />

aiguë<br />

À titre de réflexion, nous décrivons quelques tableaux<br />

cliniques et situations classiques.<br />

Sténose aiguë unilatérale<br />

Elle survient le plus souvent après un acte chirurgical du petit<br />

bassin ou du rétropéritoine. La douleur est ondulante, paroxystique,<br />

parfois foudroyante de type colique néphrétique avec des<br />

irradiations vers l’aine, nausées, iléus intestinal réflexe, chez un<br />

sujet plutôt agité. Le bilan biologique au début est sans<br />

particularité.<br />

Sténose aiguë bilatérale ou sur rein unique<br />

Nous observons la même symptomatologie que dans la forme<br />

précédente mais avec des douleurs bilatérales (uni- et homolatérales<br />

sur rein unique) un bilan biologique d’abord sans<br />

particularité. Puis, s’installe relativement rapidement (2-3 jours)<br />

l’insuffisance rénale aiguë avec ses paramètres biologiques et son<br />

tableau clinique : nausées, agitation, désorientation, altération<br />

de la vigilance, état précomateux, etc.<br />

Symptomatologie clinique de la sténose<br />

chronique<br />

L’évolution lente et progressive de la sténose donne une<br />

caractéristique très insidieuse, silencieuse à la symptomatologie<br />

clinique. Elle est le plus souvent associée à des affections<br />

malignes.<br />

Sténose chronique unilatérale<br />

Dans la majeure partie des cas, elle est de découverte fortuite<br />

lors d’un examen échographique de routine, dans le cadre d’un<br />

examen gynécologique, par exemple. Du fait du manque de<br />

symptômes et de la durée de la stase, nous avons souvent à faire<br />

à des reins ayant perdu une partie de leur fonction, voire<br />

complètement détruits.<br />

Sténose bilatérale ou sur rein unique<br />

Dans ces cas, l’insuffisance rénale progressive est au premier<br />

plan. L’observation va de l’asthénie, l’apathie, la réduction de<br />

performance intellectuelle, en passant par des troubles psychiques<br />

et de somnolence, jusqu’à un état comateux plus ou moins<br />

profond. L’œdème des membres inférieurs et tous les signes<br />

cliniques néphrologiques de l’insuffisance rénale sont d’expression<br />

très variable. Dans certains cas, chez un sujet totalement<br />

asymptomatique, un bilan biologique de routine met en<br />

évidence une créatininémie de 600 µmol/l avec urémie et<br />

hyperkaliémie.<br />

■ Examen clinique<br />

Nous avons trop tendance à négliger ce point, alors qu’il peut<br />

se révéler primordial.<br />

Urologie<br />

Anamnèse<br />

Elle est fondamentale pour l’orientation diagnostique et<br />

l’indication thérapeutique (néoplasie en stade avancé).<br />

Les antécédents chirurgicaux :<br />

uropédiatrique (chirurgie antireflux, syndrome de la jonction)<br />

;<br />

urologique (néphrectomie pour tumeur du rein, remplacement<br />

iléal de vessie) ;<br />

vasculaire (prothétique aortique) ;<br />

traumatique (fracture vertébrale avec fixateur interne) ;<br />

obstétrique (hystérectomie) ;<br />

chirurgicaux (résection du sigmoïde) ;<br />

chirurgie cœlioscopique.<br />

Les antécédents médicaux, comme la colite ulcéreuse, la<br />

maladie de Crohn, la diverticulose du sigmoïde ou gynécologique<br />

comme une endométriose doivent être également inventoriés.<br />

Il est évident que certaines étiologies sont spécifiques au<br />

sexe, d’où la classification par certains auteurs des étiologies en<br />

fonction de ce facteur. Mais, il faut toujours avoir à l’esprit que<br />

certaines de ces étiologies spécifiques peuvent toucher, bien que<br />

très rarement, les deux sexes : endométriose chez l’homme, par<br />

exemple [26] .<br />

La durée des symptômes, leur début brutal ou lent permet de<br />

présager une forme aiguë ou chronique. Les signes associés dus<br />

à une éventuelle maladie causale (diarrhée et Crohn) peuvent<br />

masquer la symptomatologie urologique tout en donnant des<br />

indices étiologiques de la stase urinaire.<br />

Il est primordial de chercher des signes infectieux. Un épisode<br />

fébrile, des frissons avec fatigue, une poussée fébrile peuvent<br />

être un signe avant-coureur d’une infection du rein en stase. De<br />

même pour la symptomatologie de l’insuffisance rénale.<br />

Examen clinique<br />

Il doit être systématique et minutieux, comportant :<br />

mesure de la tension artérielle ;<br />

mesure de la température rectale ;<br />

inspection (œdème, cicatrice opératoire) ;<br />

palpation lombaire, abdominale, bimanuelle : on peut<br />

rarement palper une masse tumorale élastique d’une stase<br />

importante. Le plus souvent un gros anévrisme de l’aorte ;<br />

percussion, surtout des fosses lombaires, pouvant être douloureuse,<br />

signe d’une pyélonéphrite associée ;<br />

le toucher pelvien ne doit pas manquer. Il peut éventuellement<br />

mettre en évidence une grosse masse tumorale du petit<br />

bassin ou un cancer de la prostate avancé.<br />

■ Examens complémentaires<br />

Examens biologiques<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Les examens biologiques sont ceux d’un bilan sanguin<br />

standard de routine ou ceux d’une admission en urgence. La<br />

présence de signes inflammatoires, infectieux doit, même si le<br />

tableau clinique est apparemment anodin, toujours faire<br />

craindre un début de septicémie donc de grande urgence et faire<br />

agir en conséquence. L’examen cytobactériologique urinaire, la<br />

cytologie urinaire de dépistage de cancer urothélial, ainsi que<br />

l’ionogramme urinaire ne doivent pas manquer.<br />

La cystatine-C est un inhibiteur de la cystéine protéase d’un<br />

poids moléculaire de 13 kDa qui ne se lie à aucune autre<br />

protéine et qui par sa petite taille moléculaire est filtrée par le<br />

glomérule et résorbée au niveau tubulaire. De ce fait, le taux<br />

sanguin de la cystatine-C est un bon paramètre d’appréciation de<br />

la fonction tubulaire rénale (stase bilatérale, rein unique) [27, 28] .<br />

Examens complémentaires paracliniques<br />

L’indication des examens complémentaires doit être situative<br />

et adaptée (urographie intraveineuse [UIV]/insuffisance rénale).<br />

La règle d’or doit être : obtenir le maximum d’informations avec<br />

le minimum d’examens réalisés avec la plus haute qualité et le<br />

minimum de risque pour le patient.<br />

5


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Forme aiguë<br />

symptomatique<br />

Urgence immédiate :<br />

- septicémie<br />

- infection de rein en stase<br />

- rein unique + IR<br />

- sténose bilatérale<br />

- IR<br />

Urgence clinique<br />

Complications<br />

Dérivation urinaire d'urgence :<br />

- sonde double J<br />

- sonde mono J<br />

- néphrostomie percutanée<br />

Traitement<br />

endoscopique<br />

Notre attitude décisionnelle, en fonction de la clinique, est<br />

résumée dans la Figure 3, en gardant toujours les examens les<br />

plus invasifs et à risques en dernier recours.<br />

Échographie réno-uretérale, pelvienne,<br />

abdominale<br />

Sténose de l'uretère<br />

Stase du haut appareil urinaire<br />

Par son innocuité et sa performance diagnostique, l’absence<br />

de contre-indication (même dans l’insuffisance rénale) et son<br />

coût réduit, l’échographie est l’examen de base et de routine<br />

dans le diagnostic primaire de la stase du haut appareil urinaire<br />

(85 % de nos patients) ainsi que dans le suivi postopératoire et<br />

post-chimiothérapeutique.<br />

Les différentes voies d’abord (percutanée, transrectale,<br />

transvaginale) et modalités (Doppler, contrastant échographique<br />

: Sonovist ® ) permettent d’une part de constater la stase<br />

urinaire, son degré, sa localisation uni- ou bilatérale, d’apprécier<br />

grossièrement la valeur fonctionnelle du rein par la mesure de<br />

l’épaisseur du parenchyme rénal (épaisseur


3<br />

2<br />

1<br />

Figure 4. Critères échographiques de la stase urinaire et paramètres<br />

d’appréciation de la stase, de son évolutivité et de la fonction rénale.<br />

A. Stase urinaire aiguë : les cavités pyélocalicielles (1-2) sont bien visibles.<br />

La forme du pyélon (1) rappelle celle à l’urographie intraveineuse. Le<br />

parenchyme rénal présente une épaisseur normale de 2,5 cm (flèches) et<br />

laisse présupposer une bonne fonction rénale. La largeur mesurée du col<br />

caliciel (ligne pointillée) permet de suivre l’évolution de la stase en<br />

postopératoire éventuellement après stimulation au furosémide pour<br />

apprécier l’importance fonctionnelle d’une sténose.<br />

B. Stase urinaire chronique : d’apparition lente et progressive dans un<br />

cancer utérin. Les calices (2) prennent un aspect de boule et l’épaisseur du<br />

parenchyme rénal (flèches) est réduite à 0,8 cm. 3. Foie.<br />

Figure 5. Néphrostomie « idéale ». Dans ce cas de stase rénale gauche<br />

après chirurgie pelvienne, la néphrostomie percutanée a été ponctionnée<br />

par le calice inférieur. La pyélographie antérograde montre l’axe de<br />

l’uretère (ligne pointillée) et l’angle aigu avec la sonde de néphrostomie<br />

(1). Lors de manipulation antérograde, surtout lorsqu’il faut forcer la<br />

résistance de la sténose, cet angle aigu peut s’avérer défavorable et le tout<br />

faire une boucle dans le pyélon. L’angle de ponction (a) et (b) est plus<br />

propice à de telles manipulations.<br />

Urologie<br />

2<br />

A<br />

B<br />

.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

.<br />

Tableau 1.<br />

Contre-indications générales aux examens radiologiques.<br />

Contre-indications à l’usage de rayons ionisants<br />

Grossesse<br />

Contre-indications à l’application de produit de contraste iodé<br />

Allergie à l’iode<br />

Insuffisance rénale<br />

Hyperthyroïdie<br />

Plasmocytome<br />

Risques accrus à l’application de produit de contraste iodé<br />

Syndrome de Kimmelstiel Wilson, diabète<br />

Hyperuricémie<br />

Déshydratation prononcée<br />

Patient âgé<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Association à des médicaments néphrotoxiques (furosémide,<br />

antibiotiques)<br />

Figure 6. Image « urographique » de reconstruction par tomodensitométrie.<br />

Ce type d’image est largement équivalent à celle obtenue par<br />

urographie intraveineuse. Pour une dose moindre de produit de<br />

contraste, la tomodensitométrie, mis à part les images standards habituelles<br />

de coupe transversale, permet des reconstructions, même tridimensionnelles<br />

et, dans le cas précis, à l’aide de l’ordinateur, de tourner et de<br />

changer les axes de vue pour mettre en évidence certains processus<br />

pathologiques qui, sur un cliché antéropostérieur classique, ne seraient<br />

pas visibles.<br />

rapports de la sténose avec des structures pathologiques de<br />

voisinage et éventuellement la nature intrinsèque de la sténose.<br />

Les informations fonctionnelles et morphologiques de l’UIV<br />

sont grossières, mais leurs aspects sont classiques.<br />

Des clichés tardifs permettent souvent de visualiser le niveau<br />

supérieur de la sténose. L’UIV ne montre pas forcément la<br />

longueur et la limite inférieure de la sténose urétérale.<br />

La symptomatologie radiographique ne permet pas ou que<br />

rarement un diagnostic étiologique de la sténose, de la compression<br />

extrinsèque, de l’infiltration tumorale directe ou d’une<br />

tumeur endoluminale.<br />

Urétéropyélographie rétrograde<br />

L’application de produit de contraste par injection rétrograde<br />

dans le méat urétéral à l’aide d’une sonde urétérale (de Chevassu,<br />

de Woodruff, de Thiemann) au cours d’une cystoscopie<br />

est un examen invasif qui ne se fait qu’à urine stérile. Chez<br />

l’homme, elle nécessite généralement une sédation ou une<br />

7


.<br />

.<br />

18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Figure 7. Cliché « urographique » obtenu à partir de l’IRM. Ici, les<br />

mêmes remarques que pour la Figure 6, mais avec en plus l’absence<br />

d’application de produit de contraste iodé et de rayonnement ionisant.<br />

Figure 8. Pyélographie rétrograde dans une récidive d’hydronéphrose<br />

par sténose cicatricielle de la jonction pyélo-urétérale (flèche) après pyéloplastie<br />

cœlioscopique il ya5ans.Cetypedesténose est idéal pour des<br />

techniques endoscopiques (Acucise ® ).<br />

anesthésie générale. Chez la femme, vu les conditions anatomiques,<br />

elle peut se faire avec une sédation plus légère. Elle<br />

montre l’aspect urétéral sous-jacent à la sténose, la localisation<br />

de l’extrémité inférieure de la sténose. Lors du passage de la<br />

sténose par le produit de contraste, nous pouvons définir sa<br />

longueur et son aspect régulier ou irrégulier, son extrémité<br />

supérieure et l’état de l’uretère proximal et distal (Fig. 8, 9).<br />

Elle est souvent nécessaire pour le choix de la technique<br />

opératoire et se fait généralement dans le même temps anesthésique<br />

que l’intervention correctrice. Elle est le premier temps<br />

d’un geste endoscopique. Les principaux risques sont : la<br />

.<br />

Figure 9. Urétérite kystique de l’uretère gauche. Cet aspect typique a<br />

été confirmé à l’urétéroscopie (en cartouche). Elle accompagne les infections<br />

chroniques à l’origine de petits « kystes » endothéliaux (flèches).<br />

Figure 10. Rupture du fornix caliciel supérieur et inférieur. L’injection<br />

trop forcée du produit de contraste lors de la pyélographie rétrograde<br />

peut aboutir à des ruptures de fornix (flèches). Une partie de l’extravasation<br />

est drainée par les lymphatiques (flèche pointillée). 1. Extrémité<br />

distale de la sonde urétérale.<br />

perforation de la paroi urétérale avec fausse route, une extravasation<br />

(Fig. 10), une infection ou le déclenchement d’une<br />

pyélonéphrite.<br />

Elle doit toujours être précédée d’un cliché sans préparation<br />

(calcification) et d’un cliché après injection permettant d’évaluer<br />

la capacité péristaltique du segment proximal sussténotique<br />

en fluoroscopie.<br />

Certains aspects radiologiques permettent d’évoquer l’étiologie<br />

de la sténose : irrégularité de contour dans les tumeurs de<br />

l’uretère ou infiltration de voisinage.<br />

Certains aspects typiques comme l’urétérite kystique (Fig. 9),<br />

doivent toujours être confirmés par une urétérorénoscopie<br />

8 Urologie


.<br />

.<br />

.<br />

Figure 11. Façon idéale de réaliser une pyélographie antérograde. Le<br />

patient est mis en décubitus dorsal sur une table de radiologie (RX). La<br />

néphrostomie (3) du rein en stase est connectée à un système de perfusion<br />

de produit de contraste (1). Le niveau de la chambre de débullage (2) se<br />

trouve à 20 cm au maximum au-dessus du niveau du rein.<br />

diagnostique avec éventuellement biopsie. La compression<br />

extrinsèque de grands volumes tumoraux non infiltrants<br />

déplace les uretères en les rallongeant.<br />

La fibrose rétropéritonéale idiopathique, ou maladie<br />

d’Ormond, présente un aspect typique de médialisation bilatérale<br />

des uretères (presque prévertébraux) qui restent extrêmement<br />

graciles, faciles à sonder avec des pyélons très dilatés. La<br />

confirmation diagnostique est du domaine de la tomodensitométrie<br />

(plaque fibreuse rétropéritonéale).<br />

Pyélo-urétérographie antégrade<br />

L’opacification antégrade des cavités du haut appareil urinaire<br />

se fait par injection du produit de contraste via la néphrostomie<br />

percutanée. Cette dernière a généralement été posée en urgence<br />

lors de la phase aiguë (Fig. 5).<br />

Pour éviter une rupture du fornix (cf. supra) avec extravasation<br />

interstitielle, l’injection de produit de contraste ne doit pas<br />

se faire avec une pression trop élevée. Pour éviter cette complication,<br />

l’application est à faire à l’aide d’un système de perfusion<br />

dont la chambre de « débullage » est placée au maximum<br />

20 cm au-dessus du niveau rénal (Fig. 11). L’injection manuelle<br />

à la seringue est bien entendu possible, mais doit se faire avec<br />

beaucoup de précaution et sans chercher à « forcer » le passage<br />

du produit de contraste.<br />

L’urétéropyélographie antégrade est le premier temps de toute<br />

manipulation opératoire ou dilatation antégrade de sténose<br />

urétérale. Elle donne des informations sur le pyélon, l’uretère<br />

sus-jacent à la sténose ; la longueur, le degré de sténose, ainsi<br />

que l’état de l’uretère sous-sténotique qui ne peut être jugé que<br />

lors du passage du produit de contraste. Dans certains cas, pour<br />

l’appréciation de ce dernier, il est nécessaire d’associer une<br />

urétérographie rétrograde.<br />

Angiographie<br />

Autrefois très utile dans la recherche des causes vasculaires<br />

(anévrisme de l’aorte ou iliaque avec sténose urétérale, artère<br />

polaire rénale inférieure), elle est, depuis l’avènement de<br />

l’échographie, de la tomodensitométrie (l’angiotomodensitométrie,<br />

la tomodensitométrie 3D) et de l’IRM (angio-IRM) devenue<br />

complètement obsolète.<br />

Urologie<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Figure 12. IRM d’une compression urétérale par bride.<br />

A. Aspect à la pyélographie IRM.<br />

B. Site intraopératoire avec une bride cicatricielle (flèche). L’uretère est<br />

monté sur des lacs bleus.<br />

Tomodensitométrie abdominopelvienne (scanner)<br />

La tomodensitométrie est devenue l’examen de base du<br />

diagnostic étiologique des sténoses de l’uretère.<br />

Utilisant des rayons ionisants et un produit de contraste iodé,<br />

le scanner est soumis aux mêmes règles et contre-indications<br />

que l’UIV. Il montre non seulement la stase rénale, son degré,<br />

une éventuelle rupture du fornix, le niveau et l’étendue de la<br />

sténose, mais aussi dans la majorité des cas, la cause de la<br />

sténose (processus inflammatoire, tumeur rétropéritonéale,<br />

ganglions lymphatiques comprimants). Un diagnostic histologique<br />

n’est possible que dans de rares cas ou dans le cadre<br />

clinique (lymphome de Hodgkin). Ce cadre clinique est important<br />

pour le radiologue et doit être mis en exergue dans la<br />

demande d’examens complémentaires radiologiques. Ainsi,<br />

après injection du produit de contraste, le radiologue doit, en<br />

fonction de ces données cliniques et de l’hypothèse diagnostique,<br />

exploiter au maximum le temps approprié : temps artériel<br />

dans les anomalies vasculaires, temps parenchymateux pour les<br />

tumeurs ou vasculaire veineux dans les étiologies veineuses<br />

comme le syndrome de la veine ovarienne droite. Au scanner<br />

biphasique, il peut par exemple différencier une endométriose<br />

intramurale et extramurale [32] . Le temps sans injection permet<br />

de repérer des calcifications pathologiques, des calculs qui<br />

seraient masqués par l’opacité du produit de contraste. Des<br />

coupes fines permettent une analyse plus précise de petits<br />

processus pathologiques.<br />

À partir des images de coupes transversales et frontales, il est<br />

possible de faire des reconstructions tridimensionnelles qui<br />

permettent dans certains cas une clarification de la situation et<br />

la mise au point d’une stratégie opératoire.<br />

Dans certains cas, le scanner est interventionnel, s’il est<br />

associé à une ponction de tumeur, ou dans des cas difficiles, à<br />

la mise en place d’une néphrostomie percutanée.<br />

Imagerie par résonance magnétique<br />

L’IRM est, par l’absence de rayonnement ionisant, une<br />

alternative au scanner. Elle présente, par les différentes pondérations<br />

(T1, T2) de nouvelles possibilités diagnostiques (Fig. 12).<br />

Le gadolinium nécessaire à l’IRM est plus avantageux que les<br />

produits de contraste classiques, mais présente selon des<br />

publications récentes une certaine toxicité rénale non négligeable<br />

bien que moindre [33, 34] .<br />

9


.<br />

18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Scintigraphie rénale chiffrée au technécium (Tc)<br />

La scintigraphie rénale au 99m Tc DTPA (acide diéthylène<br />

triamine tétra-acétique) pour l’évaluation de la valeur fonctionnelle<br />

du rein est la base chiffrée pour l’indication thérapeutique<br />

de la conservation ou de l’ablation du rein. Elle n’a pas<br />

d’indication en phase aiguë. Pour une bonne évaluation de la<br />

fonction rénale il faut attendre 2à4semaines après dérivation<br />

urinaire percutanée ou par sonde double J (récupération). Pour<br />

obtenir une évaluation complète de la situation, il faut tenir<br />

compte de la clairance (taux de filtration), de la répartition de<br />

fonction gauche/droite, de la vidange spontanée du haut<br />

appareil urinaire après miction et dans certains cas des résultats<br />

du test de vidange au furosémide qui évalue, bien mieux et plus<br />

simplement que le test de Whitaker [35, 36] , le degré de sténose<br />

et ses répercussions sur l’excrétion urétérale des urines.<br />

■ Ionogramme urinaire et clairance<br />

de la créatinine du rein obstrué<br />

L’évaluation de la fonction rénale peut être directement<br />

déterminée après néphrostomie percutanée sur les urines<br />

drainées. L’ionogramme urinaire, après une phase de récupération,<br />

et le bilan de diurèse du rein drainé donnent une appréciation<br />

de sa capacité de sécrétion et de concentration. De<br />

même pour le calcul de la clairance de ce rein.<br />

■ Évaluation du degré de stase<br />

urinaire due à la sténose urétérale<br />

L’évaluation du degré d’obstruction d’une sténose urétérale a<br />

pour intérêt de distinguer les sténoses sans risque pour le<br />

parenchyme rénal et qui seront simplement suivies (forme<br />

compensée/à ne pas traiter) des sténoses avec risques pour le<br />

parenchyme rénal (forme décompensée/à traiter impérativement).<br />

Cette appréciation de risque n’est que difficilement<br />

possible à partir du degré de la sténose à l’UIV (même avec test<br />

au furosémide, attention toxicité rénale furosémide + produit de<br />

contraste). Examen par ailleurs devenu obsolète. De même pour<br />

l’échographie rénale, qui peut être également associée à un test<br />

au furosémide.<br />

Le test de Whitaker n’est possible qu’après mise en place<br />

d’une néphrostomie percutanée (cf. supra) et sa validité est<br />

souvent contestable (standardisation ?) [36] .<br />

La scintigraphie rénale avec son test standardisé au furosémide<br />

est simple de réalisation, peu coûteuse et sans risque pour<br />

le patient. Cette méthode est la plus exacte et la plus sûre.<br />

■ Étiologies des sténoses urétérales<br />

Il est absolument impossible de dresser une liste exhaustive<br />

des étiologies des sténoses urétérales. Certaines sont également<br />

exceptionnelles : sténose de l’uretère lombaire par une vis<br />

dorsale de fixateur vertébral ! D’autres si banales (stase urinaire<br />

et grossesse, sténose après hystérectomie) que l’on a l’impression<br />

d’énumérer des banalités.<br />

Le fait d’une symptomatologie aiguë ou chronique ne permet<br />

en rien d’exclure l’une ou l’autre des étiologies. Une évolution<br />

chronique, peu symptomatique, peut devenir aiguë (infection).<br />

Une symptomatologie aiguë peut en quelques jours basculer<br />

dans une forme chronique moins symptomatique, que le<br />

patient négligera. Nous avons essayé dans les Tableaux 2 et 3 de<br />

donner un aperçu étiologique des sténoses urétérales sans entrer<br />

dans les descriptions et discussions de ces affections. Le lecteur<br />

les retrouvera dans les chapitres correspondants de l’EMC.<br />

Les raisonnements diagnostiques différentiels doivent bien<br />

entendu inclure toutes les affections exclues par notre définition<br />

initiale (cf. supra).<br />

Tableau 2.<br />

Étiologies bénignes des sténoses urétérales. Cette liste n’est en aucun cas<br />

exhaustive. Elle montre seulement la diversité possible des étiologies et la<br />

nécessité de pouvoir penser tous azimuts dans certains cas.<br />

Étiologies congénitales = diagnostics différentiels<br />

Syndrome de la jonction pyélo-urétérale<br />

Méga-uretère<br />

Uretère rétrocaval (uniquement à droite)<br />

Artère polaire inférieure<br />

Abouchements ectopiques : vagin, utérus, vésicule séminale<br />

Étiologies vasculaires<br />

Artère rénale polaire inférieure<br />

Anévrisme de l’aorte<br />

Anévrisme de l’artère iliaque commune/interne<br />

Uretère rétrocave<br />

Syndrome de la veine ovarienne droite<br />

Étiologies inflammatoires<br />

Maladie de Crohn<br />

Colite ulcéreuse<br />

Diverticulite sigmoïdienne<br />

Appendicite abcédée<br />

Abcès et hématome du psoas, du petit bassin<br />

Pancréatite<br />

Maladie d’Ormond/fibrose rétropéritonéale idiopathique<br />

Annexite et ovarite<br />

Étiologies rares<br />

Bride rétropéritonéale<br />

Grossesse, kyste de l’ovaire, prolaps génital<br />

Endométriose intra- et extramurale<br />

Lipomatose pelvienne<br />

Hypertrophie du détrusor<br />

Projectile<br />

Bilharziose<br />

Étiologies iatrogènes<br />

Laparoscopie/cœlioscopie<br />

Urétérorénoscopie pour lithiase<br />

Chirurgie abdominale, pelvienne, vasculaire, vertébrale, etc.<br />

■ Principes thérapeutiques<br />

des sténoses urétérales<br />

Nous ne présentons ici que les principes thérapeutiques et<br />

ceci de façon aussi succincte et schématique que possible pour<br />

donner un aperçu d’ensemble mais non exhaustif des techniques<br />

« standards » les plus courantes. Le lecteur devra se<br />

reporter au chapitre de technique chirurgicale correspondant<br />

pour plus de développement. Nous ne tenons pas compte des<br />

indications étiologiques, ni du contexte d’urgence ou de<br />

chronicité. Dans certains cas, l’abstention de toute intervention<br />

peut être donnée ou être la meilleure alternative.<br />

L’attitude thérapeutique et la technique employée sont<br />

discutées en fonction de l’unilatéralité ou bilatéralité de la<br />

lésion urétérale ainsi que de l’étendue (longueur), de la localisation<br />

(problème de suppléance vasculaire) et du type de lésion<br />

(bride, fibrose, inflammatoire, compression, etc.) de la sténose<br />

et dans certains cas de l’âge du patient.<br />

Les principes thérapeutiques des sténoses de l’uretère sont de<br />

trois ordres :<br />

la chirurgie endoscopique ou/et percutanée interventionnelle,<br />

minimal invasive des Anglo-Saxons ;<br />

la chirurgie à ciel ouvert ou conventionnelle ;<br />

dans certains cas et plus récente la chirurgie cœlioscopique.<br />

Les indications doivent tenir compte des situations cliniques<br />

(Fig. 13). En cas d’étiologie maligne en situation palliative, les<br />

méthodes peu invasives de type endoscopique ou percutané<br />

sont de mises. Dans les étiologies bénignes ou malignes en<br />

situation curative, les méthodes endoscopiques sont transitoires<br />

en attendant une correction chirurgicale à ciel ouvert, ou à titre<br />

10 Urologie


Tableau 3.<br />

Étiologies malignes des sténoses urétérales. Même remarque que pour le<br />

Tableau 2. L’imagerie par tomodensitométrie et résonance magnétique a<br />

considérablement allégé la tâche du chirurgien.<br />

Cancers digestifs<br />

Colorectal, sigmoïde, cæcum<br />

Pancréas<br />

Cancers gynécologiques<br />

Utérus<br />

Ovaire<br />

Infiltration directe ou par lymphadénopathies comprimantes<br />

Cancers urologiques<br />

Prostate par infiltration directe ou par adénopathie<br />

Vessie par infiltration directe ou par adénopathie<br />

Testicule par adénopathies métastatiques<br />

Cancer de l’uretère = diagnostic différentiel<br />

Dérivation urinaire de tous types<br />

Cancers hématologiques<br />

Compression par paquet de lymphomes<br />

Cancers osseux<br />

Sarcome d’Ewing du bassin<br />

Cancers rares<br />

Neuroblastome, sarcome, léiomyosarcome rétropéritonéal<br />

Post-radiothérapie<br />

d’essai thérapeutique pour tenter de résoudre sans grande<br />

morbidité et de façon simple le problème de la sténose<br />

urétérale.<br />

Par ailleurs, il faut éviter tout risque de sténoses postopératoires<br />

en réalisant des techniques chirurgicales primaires idéales,<br />

Étiologie bénigne<br />

uni- et bilatérale<br />

Essai<br />

thérapeutique<br />

Chirurgie<br />

endo-urologique<br />

Chirurgie à<br />

ciel ouvert<br />

Éventuellement<br />

cœlioscopie<br />

Sténose de l'uretère<br />

.<br />

.<br />

Situation<br />

curative<br />

Dérivation<br />

urinaire<br />

palliative<br />

sûres et éprouvées. Par exemple, dans une dérivation urinaire de<br />

type Bricker, l’implantation urétérale de type terminoterminal<br />

selon Wallace type I [37] est plus sûre et moins à risque de<br />

sténose que l’implantation de type terminolatérale de la<br />

description originale. Dans les néovessies et poches continentes,<br />

l’incidence des sténoses d’anastomose urétéro-iléale est de 2 %<br />

à12% [38, 39] . La modification apportée dans le remplacement<br />

orthotopique iléal de vessie par implantation urétérale sur un<br />

segment non détubularisé (Wallace type I) s’est avérée très<br />

positive [40, 41] .<br />

Chirurgie endoscopique ou/et percutanée<br />

interventionnelle<br />

La chirurgie endoscopique est en apparence un geste simple,<br />

mais nécessite un plateau technique et logistique relativement<br />

important et coûteux, surtout lors de manipulations anté- et<br />

rétrogrades combinées (prix du matériel à usage unique, durée<br />

opératoire) pour des résultats souvent décevants.<br />

Dérivations urinaires temporaires ou définitives<br />

Ces techniques sont réalisées en urgence (insuffisance rénale,<br />

rein de stase infecté), transitoirement jusqu’à la récupération de<br />

la fonction rénale ou l’établissement du diagnostic étiologique<br />

et dans certains cas à titre définitif (cancer avancé).<br />

Elles sont généralement réalisables chez la femme sous<br />

anesthésie ou sous sédation. Chez l’homme une anesthésie<br />

générale est de règle. La mise en place d’une sonde urétérale est<br />

toujours précédée d’une urétéropyélographie rétrograde qui met<br />

en évidence le niveau, l’étendue et la perméabilité de la sténose<br />

(obstruction complète = néphrostomie percutanée).<br />

Cathéter urétéral<br />

Cette simple sonde radio opaque (6-7 Charrière), relativement<br />

rigide, servant à la réalisation d’une urétéropyélographie<br />

Étiologie maligne<br />

Stase<br />

unilatérale<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Situation<br />

palliative<br />

Abstention<br />

Dérivation<br />

bilatérale<br />

Stase<br />

bilatérale<br />

Dérivation<br />

unilatérale du<br />

meilleur rein<br />

Chirurgie endo-urologique<br />

Figure 13. Arbre décisionnel. Attitude thérapeutique en fonction de la bénignité de l’étiologie. Les modalités endoscopiques ne sont, compte tenu des<br />

résultats cliniques, qu’une alternative secondaire.<br />

Urologie<br />

11


.<br />

.<br />

18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Figure 14.<br />

A. Sonde double J.<br />

B. La sonde double J est stabilisée et maintenue en place par les enroulements<br />

de ses extrémités distale et proximale. Elle apporte un grand<br />

confort et une qualité de vie au patient. Dans certains cas, on observe une<br />

intolérance caractérisée par des signes d’une simple gêne, sensation de<br />

corps étranger jusqu’à des douleurs parfois de type colique néphrétique.<br />

rétrograde, ne peut être que transitoire. Elle permet souvent de<br />

« forcer » certaines sténoses par ses différents types de configuration<br />

d’extrémité et de franchir des siphons et angles dus à la<br />

dilatation chronique. Elle sert à la mise en place d’un guide<br />

permettant des manipulations diverses (cf. infra).<br />

Sonde urétérale mono J<br />

Cette sonde urétérale transitoire présente un enroulement<br />

mémorisé proximal qui se place dans le pyélon. L’avantage par<br />

rapport aux sondes double J, est de pouvoir contrôler la diurèse<br />

du rein et le fonctionnement de la sonde (oblitération de sonde<br />

par caillot/détritus cellulaires). En cas d’obstruction, un rinçage<br />

avec 2-4 ml de sérum physiologique permet de la remettre en<br />

fonction. Pour la maintenir en place, elle est fixée à une sonde<br />

vésicale de type Foley.<br />

Sonde double J<br />

Par sa mise en place et son principe, elle est identique à la<br />

précédente mais son extrémité distale s’enroule dans la vessie.<br />

C’est une sorte de pontage interne de la sténose qui n’handicape<br />

pas le patient et le laisse libre de ses mouvements sans<br />

risque de migration (Fig. 14). Le risque est l’obstruction qui peut<br />

rester asymptomatique et inaperçue (contrôle échographique<br />

régulier systématique).<br />

Néphrostomie percutanée<br />

En urgence ou dans les sténoses ou oblitérations complètes,<br />

elle est la seule technique de dérivation urinaire primaire<br />

possible (Fig. 15, 16). La ponction sous contrôle échographique<br />

nécessite de mettre le patient en décubitus ventral (état général)<br />

et une anesthésie locale (dans certains cas assistance anesthésique).<br />

La ponction doit être transparenchymateuse (et non<br />

directement le pyélon) et placée de telle sorte qu’elle permette<br />

des manipulations endo-urologiques antégrades ultérieures<br />

(calice dorsal moyen) (Fig. 5). Après ponction à l’aiguille des<br />

cavités dilatées, trois échantillons urinaires sont prélevés :<br />

bactériologie, cytologie, ionogramme urinaire (test cytologique<br />

de dépistage de cancer urothélial). Après mise en place du<br />

cathéter de néphrostomie et en l’absence de signes cliniques ou<br />

biologiques infectieux, une urétéropyélographie antégrade affine<br />

le diagnostic.<br />

Figure 15. Néphrostomie percutanée.<br />

A. Ligature au point de suture de l’urétère gauche après chirurgie gynécologique.<br />

La néphrostomie percutanée mise en urgence permet une<br />

pyélo-urétérographie antérograde et une évaluation diagnostique de la<br />

situation : niveau du point de suture transfixiant de l’uretère (flèche<br />

épaisse), fistule urétérovaginale (flèche pointillée), extravasation de produit<br />

de contraste dans le champ opératoire (flèches fines).<br />

B. Set de néphrostomie percutanée : canule de ponction du rein en<br />

anesthésie locale (1), sonde de néphrostomie percutanée (2), raccord<br />

pour le système collecteur d’urine (3).<br />

Chirurgie endoscopique ou/et percutanée interventionnelle<br />

La chirurgie endoscopique et percutanée a un taux de succès<br />

inférieur à celui des traitements chirurgicaux à ciel ouvert [42-<br />

44] . Les techniques endoscopiques sont souvent combinées ou<br />

associées à des techniques percutanées [45, 46] . Le contrôle et la<br />

confirmation du résultat thérapeutique peuvent bien entendu<br />

être urographiques [47, 48] , mais ils ne permettent pas une<br />

évaluation fonctionnelle exacte du parenchyme rénal et surtout<br />

de la fonction de l’uretère (transport urinaire). La scintigraphie<br />

rénale, moins toxique, sans exposition à des rayons ionisants et<br />

reproductible sans grand risque, permet avec un test standardisé<br />

de diurèse au furosémide d’apprécier au plus près le résultat<br />

opératoire.<br />

Les différentes techniques (les plus fréquentes) sont résumées<br />

dans le Tableau 4. Dans la majeure partie des cas, nous les<br />

réalisons en anesthésie générale pour le confort du patient<br />

(durée opératoire, douleurs) et du chirurgien (plus de liberté<br />

d’action). Elles sont idéales pour des sténoses courtes 1-4 cm et<br />

aussi adaptées pour les sténoses sur implantation intestinale<br />

(néovessie, Bricker).<br />

Plus les sténoses sont longues plus la réalisation s’avère<br />

difficile et les résultats décevants.<br />

Dilatation par sonde de taille progressive (bougie de<br />

dilatation) ou télescopique (Fig. 17A). L’« éclatement » de la<br />

sténose est la base de nouvelles cicatrices sténosantes. Pratiquée<br />

sur un guide intra-urétéral placé préalablement, le risque de<br />

fausse route est presque nul, mais celui d’une avulsion urétérale<br />

sous la sténose n’est pas à sous-estimer (Fig. 17B).<br />

Dilatation par sonde à ballonnet (Fig. 18). Elle est basée sur<br />

le même principe d’« éclatement », de dilatation de la sténose<br />

que la méthode précédente. Mais par son effet de dilatation<br />

concentrique, elle ne présente pas le risque d’une avulsion<br />

12 Urologie


.<br />

.<br />

Figure 16. Technique de néphrostomie percutanée.<br />

A. Ponction transparenchymateuse du système pyélocaliciel dilaté sous contrôle échographique.<br />

B. Asservissement des échantillons d’urine.<br />

C. Placement du guide de néphrostomie.<br />

D. Retrait de l’aiguille de ponction.<br />

E. Mise en place de la sonde de néphrostomie sur le guide et retrait de ce dernier.<br />

F. Contrôle radiographique final.<br />

urétérale. Cette dilatation est réalisée sous contrôle manométrique<br />

de 10-20 atmosphères pour 10 à 15 minutes et<br />

radioscopique.<br />

La dilatation ne doit pas dépasser 15-18 Charrière pour éviter<br />

la dilacération de l’uretère. À 1 an, les résultats varient entre<br />

16%et66% [48-50] .<br />

Incision électrique avec ballonnet de dilatation : Acucise<br />

® [51, 52] . C’est une variante de la technique précédente. Un<br />

fil thermoélectrique appliqué sur le ballonnet permet simultanément<br />

à la dilatation par application dosée, une incision de la<br />

sténose dans l’espoir d’une incision plus nette et moins génératrice<br />

de cicatrice (Fig. 19).<br />

Incision à la lame froide. Lors d’une urétérorénoscopie, elle<br />

est de réalisation plus sûre après mise en place d’un guide<br />

jusqu’au pyélon (Fig. 20). Elle est à préférer à l’incision aveugle<br />

par montée d’une lame creuse sur le guide. L’incision doit être<br />

menée en aval et amont de la sténose jusqu’en tissu sain. En<br />

profondeur, elle doit sectionner tout tissu cicatriciel ou fibreux<br />

(parfois jusque dans la graisse périurétérale). L’incision est soit<br />

unilocale, soit en « étoile de mercédès » (à 12, 5, et 7 heures) et<br />

pour certains auteurs jusqu’à six (!). En postopératoire, une<br />

sonde double J pour 4-6 semaines, bien qu’il n’y ait pas de<br />

données concernant la durée de séjour idéale, semble assurer le<br />

résultat. Les taux de succès de l’incision à la lame froide sont<br />

entre 40 % et 80 % [53, 54] .<br />

Électro-incision au crochet de Collins (Fig. 20C). Elle ajoute<br />

au traumatisme de l’incision de la paroi urétérale, les dégâts<br />

thermiques.<br />

Incision laser [55, 56] . En urétérorénoscopie ou après invagination<br />

dans les dérivations urinaires cutanées, elle prétend<br />

vaporiser le tissu sténotique et donc infliger moins de dégâts<br />

thermiques à l’origine d’une récidive. Avec la technique<br />

d’invagination dans les dérivations de Bricker, les auteurs<br />

enregistrent 80 % de succès après 51 mois [57] . Entre nos mains,<br />

la thermoablation laser de sténoses urétérales n’a pas été aussi<br />

satisfaisante. Les résultats à long terme sont sécurisés par la mise<br />

en place d’une sonde double J standard pour quelques semaines<br />

Urologie<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

postopératoires. Des sondes double J spéciales dites de dilatation<br />

(Mentor ® ), n’apportent pas d’avantage dans notre expérience.<br />

Implants endo-urétéraux ou stent métallique autoexpansif<br />

en Nitinol ® , ou autres produits biocompatibles (polyflex). Ils<br />

sont mis en place à titre définitif, à cheval sur la sténose après<br />

incision. La littérature présente des taux de succès de 100 % (!)<br />

à 37,8 % [58, 59] . Entre nos mains, cet additif technique n’a pas<br />

fait ses preuves. Nous avons observé entre les mailles des<br />

prothèses grillagées (Wallstent ® ) une hyperréaction du tissu<br />

cicatriciel et une hypertrophie de l’épithélium aboutissant à une<br />

obstruction urétérale. Par ailleurs, l’incorporation dans la paroi<br />

urétérale n’est jamais parfaite et le segment en contact avec les<br />

urines donne de bons points d’appel pour la formation de<br />

calcul.<br />

Dans les indications palliatives, des sondes double J métalliques<br />

(Resonance ® ) [60] , des endoprothèses spiralées en Nitinol ®<br />

ou tubulaires (Memokath 051 ® ) ont été préconisées par certains<br />

auteurs. Ces implants semblent prometteurs mais doivent être<br />

considérés avec beaucoup de prudence [61, 62] .<br />

Pontage néphrovésical extra-anatomique (Detour ® ) [63, 64] .<br />

Nous ne le citons ici qu’à titre indicatif, car nous n’avons eu<br />

qu’une seule fois l’occasion de l’appliquer. Le principe est<br />

résumé dans la Figure 21.<br />

Chirurgie à ciel ouvert<br />

Suivant le niveau et l’étendue de la sténose, le fait qu’elle soit<br />

primaire sur un uretère non préopéré ou secondaire iatrogène,<br />

différents types de gestes chirurgicaux sont possibles ou non.<br />

Ces techniques sont plus efficaces que les techniques endoscopiques,<br />

mais présentent plus de morbidité, entre autres la fistule<br />

urinaire [65, 66] .<br />

L’étiologie bénigne ou maligne influe bien entendu sur<br />

l’attitude thérapeutique (Fig. 13), mais dans la Figure 22, nous<br />

avons cherché à résumer notre attitude thérapeutique chirurgicale<br />

ouverte en tenant uniquement compte de la longueur, de<br />

la localisation de la sténose et des meilleures chances d’obtenir<br />

un résultat positif (Fig. 23).<br />

13


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Tableau 4.<br />

Tableau non exhaustif des techniques chirurgicales dans les sténoses<br />

urétérales. Un certain nombre de ces techniques peuvent être combinées.<br />

L’interposition de grêle ou le remplacement urétéral par du grêle n’est<br />

qu’un terme générique. Il couvre une foule de techniques avec ou sans<br />

modelage.<br />

Techniques endoscopiques<br />

Techniques rétrogrades Sonde urétérale<br />

Techniques antérogrades :<br />

abord percutané<br />

Techniques combinées :<br />

endoscopique et percutanée<br />

Chirurgie cœlioscopique<br />

Nous disposons d’un grand nombre de techniques chirurgicales<br />

à ciel ouvert. Dans la pratique courante pourtant un<br />

nombre restreint est suffisant pour résoudre la majeure partie<br />

des problèmes posés par les sténoses urétérales. Pour une<br />

sténose longue de l’uretère présacré droit, il est bien entendu<br />

possible de faire un remplacement urétéral par l’appendice,<br />

selon la technique de Mitrofanov [67, 68] . Mais bien plus simple<br />

et sûre est une réimplantation urétérale sur vessie psoïque.<br />

L’autotransplantation est à favoriser à l’interposition d’iléon<br />

pour le remplacement urétéral. Il faut savoir sacrifier l’élégance<br />

de certains gestes chirurgicaux à l’efficacité. Nous ne présentons<br />

ici que quelques-unes des techniques courantes de façon<br />

schématique (le lecteur se reportera aux chapitres correspondants<br />

de l’EMC pour les descriptions détaillées) qui doivent en<br />

tous les cas faire partie de la formation de base de l’urologue et<br />

de son arsenal thérapeutique.<br />

Techniques utilisant l’uretère<br />

Sonde urétérale mono J<br />

Sonde urétérale double J<br />

Dilatation à la bougie ou bougie<br />

téléscopique<br />

Dilatation à la sonde à ballonnet ou au<br />

ballonnet thermoélectrique (Acucise ® )<br />

Urétéroscopie avec incision à la lame<br />

froide<br />

Urétéroscopie avec incision<br />

thermoélectrique : crochet de Collins<br />

Urétéroscopie avec incision par<br />

thermovaporisation au laser<br />

Implant métallique permanent :<br />

wallstent<br />

Même technique que pour les<br />

méthodes rétrogrades<br />

Endoscopes flexibles<br />

Néphrostomie percutanée<br />

+ sondage/dilatation anté- ou<br />

rétrograde<br />

Une grande partie des techniques chirurgicales ouvertes sont réalisables<br />

en cœlioscopie<br />

By pass urétéral de Desgrandjean<br />

Chirurgie ouverte conventionnelle<br />

Résection-anastomose<br />

Incision-interponnants biotechnologiques<br />

Interposition de grêle<br />

Vessie psoïque<br />

Technique de Boari-Kuss<br />

Dérivation urinaire cutanée<br />

- urétérocutanéostomie d’intubation<br />

- urétérocutanéostomie, trans- urétéro-cutanéostomie<br />

- dérivation de Bricker<br />

- conduit colique<br />

- poche continente<br />

- autotransplantation<br />

- néphrectomie<br />

Technique de résection/anastomose de la sténose : simple,<br />

rapide de réalisation pour des sténoses jusqu’à 3 cm. Elle est<br />

également réalisable en cœliochirurgie. Une sonde double J<br />

pour 2 semaines évite les fistules (Fig. 24).<br />

Figure 17. Système de dilatation urétéral.<br />

A. Différentes bougies de taille progressive qui sont enfilées sur le guide<br />

préalablement mis en place au début de l’intervention.<br />

B. Mécanisme de l’arrachement urétéral lors de dilatation à la bougie. Les<br />

bougies téléscopiques ne parent pas forcément à cette complication. La<br />

tête de la sonde de dilatation se bloque dans la sténose et entraîne cette<br />

dernière avec l’uretère (flèches). L’élongation de l’uretère sous-jacent peut<br />

mener à la rupture de la continuité urétérale (flèches pointillées). Ce<br />

mécanisme est également possible lors du retrait de la sonde de dilatation<br />

et peut aboutir à un stripping de l’uretère.<br />

L’urétérocalicostomie [69] est d’indication extrêmement rare et<br />

surtout dans les cas d’involution du pyélon ou d’une partie de<br />

ce dernier dans le processus pathologique. Elle est plus facile à<br />

calice très dilaté (Fig. 25).<br />

La technique de Culp (Fig. 26, 27) peut être une alternative à<br />

la technique ci-dessus dans certains cas à pyélon très dilaté.<br />

L’urétérolyse et l’intrapéritonisation : l’urétérolyse simple,<br />

tout en laissant l’uretère dans la zone pathologique, est généralement<br />

vouée à l’échec, sauf en cas de bride (Fig. 12). Elle doit<br />

toujours s’accompagner d’une intrapéritonisation et est l’intervention<br />

typique pour la fibrose rétropéritonéale idiopathique<br />

d’Ormond [70] .<br />

L’urétéro-urétérostomie en Y ou transurétérostomie (Fig. 27A)<br />

est de prime abord une technique tentante mais qui présente<br />

des risques non négligeables pour l’uretère receveur [71] . Elle est<br />

délaissée de nos jours.<br />

Le remplacement urétéral homologue (Fig. 27B) est une<br />

technique intéressante sur rein unique ou en chirurgie de<br />

transplantation rénale. Dans les cas de nécrose ou de sténose<br />

étendue de l’uretère du greffon rénal, nous utilisons l’uretère<br />

homolatéral natif du patient pour, après préparation adéquate<br />

(longueur, vascularisation), l’anastomoser avec le pyélon du<br />

greffon (Fig. 27C).<br />

L’urétérostomie d’intubation (Fig. 27D) : cette technique est<br />

un dernier recours quand plus rien d’autre n’est possible.<br />

Techniques utilisant de l’intestin<br />

L’urétéro-iléoplastie (Fig. 28) : avec ses différentes techniques<br />

de modelage ou non du greffon de grêle, cette technique n’a<br />

pas présenté, entre nos mains, les avantages qu’on lui prête et<br />

nous préférons de loin si possible l’autotransplantation.<br />

14 Urologie


Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Figure 18. Dilatation de sténose urétérale au ballonnet.<br />

A. La pyélographie rétrograde est le premier temps indispensable. Elle permet d’évaluer le site, la longueur, l’aspect de la sténose et de voir si elle sera<br />

franchissable pour un guide (flèche). Dans ce cas, le produit de contraste passe bien. S’il n’y a pas de passage de produit de contraste, une tentative rétrograde<br />

est d’emblée vouée à l’échec, d’où l’indication d’une néphrostomie percutanée.<br />

B. Mise en place d’un guide jusqu’au niveau du pyélon. Il y a différents types de guide en raison des matériaux et configuration. Ils ont en général<br />

0,36 Charrière. Pour ce type d’intervention endoscopique, les guides hydrophiles sont idéals.<br />

C. La sonde à ballonnet de dilatation est mise en place par-dessus le guide. Les extrémités proximale et distale du ballonnet sont marquées par des bagues<br />

radio-opaques (flèche) qui permettent de placer ce dernier.<br />

D. Ballonnet en place et gonflé au sérum physiologique légèrement contrasté (flèches).<br />

E. Le guide est laissé en place et le cathéter de dilatation retiré. Mise en place d’une sonde double J pour sécuriser le postopératoire et assurer les résultats.<br />

Figure 19. Cas clinique de thermo-incision avec le système Acucise ® . Patiente de 45 ans, ayant subi 8 ans auparavant une urétérocalicostomie pour sténose<br />

iatrogène étendue (5 cm) proximale de l’uretère sous-pyélique gauche.<br />

A. Urétéropyélographie antérograde après néphrostomie percutanée en phase aiguë : pyélon (flèche pointillée), sténose de l’urétérocalicostomie (flèche).<br />

B. Après mise en place d’un guide hydrophile jusque dans les cavités pyélocalicielles dilatées, placement de la sonde Acucise ® avec ses deux repères de<br />

ballonnet radio-opaques.<br />

C. Gonflage du ballonnet pour appliquer le fil thermoélectrique contre la sténose. Le ballonnet présente un rétrécissement au niveau de la sténose.<br />

D. En cours de traitement, le rétrécissement disparaît au fur et à mesure que le fil thermoélectrique incise la sténose.<br />

E. Résultat urographique à 3 mois : anastomose élargie.<br />

Urologie<br />

15


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Figure 20. Urétérorénoscopes.<br />

A. Urétérorénoscope standard 7 Charrière (1) pour des manipulations simples ou l’application d’une fibre laser. Urétérorénoscope 9 Charrière avec chariot<br />

pour incision à la lame froide (2) avec plusieurs types d’instruments (3) pour inciser ou réséquer des sténoses.<br />

B. Aspect intraopératoire de montée d’urétéroscope sur guide avec contrôle radioscopique complétant le contrôle visuel.<br />

C. Différents types d’instrument pour l’urétéroscope : 1. Anse thermoélectrique de résection ; 2. crochet de Collins ; 3. lame froide courte ; 4. lame froide à<br />

tranchant ondulé.<br />

Figure 21. Système Détour ® (A, B). Ce type de dérivation interne<br />

présente des avantages dans les situations palliatives. L’extrémité rénale,<br />

multiperforée (1) est mise en place par voie percutanée et dilatation du<br />

canal de ponction. Le corps du cathéter (2) est passé en sous-cutané à<br />

l’aide d’un guide métallique. L’extrémité distale ou vésicale (3) est mise en<br />

place, après adaptation de sa longueur, soit par une contre-incision, soit<br />

par cœliochirurgie ou ponction directe au trocart creux de la vessie.<br />

L’intervention de Mitrofanov : dans cette technique, le<br />

remplacement urétéral est réalisé par l’interposition de l’appendice<br />

isolé avec son pédicule vasculaire [72] . Elle est donc<br />

réalisable à droite, mais aussi dans certains cas rares à gauche.<br />

C’est la longueur de la racine mésentérique qui est déterminante.<br />

Ce segment sans péristaltisme peut avoir un effet<br />

« obstructif ».<br />

Techniques utilisant de la vessie<br />

Leurs indications techniques sont décrites dans la Figure 22.<br />

Ce sont des classiques de la chirurgie urologique et de ce fait<br />

parfaitement standardisés, de réalisation simple et de résultats<br />

très sûrs :<br />

l’intervention de Leadbetter-Politano [73] (Fig. 29) ;<br />

la vessie psoïque [74] (Fig. 30) ;<br />

Figure 22. Diagramme décisionnel du type de chirurgie ouverte en<br />

fonction des facteurs de la sténose.<br />

A. Rappel des différents segments anatomiques de l’uretère (voir anatomie).<br />

1. Uretère lombaire ; 2. uretère présacré ; 3. uretère pelvien ;<br />

4. uretère endomural ; 5. uretère sous-muqueux. ai : artère iliaque.<br />

B. Diagramme décisionnel chirurgical simplifié. 1. Zone d’indication pour<br />

la réimplantation selon Leadbetter-Politano ; 2. zone d’indication pour les<br />

techniques de type Boari-Kuss ; 3. zone d’indication pour les techniques<br />

de Bischoff ou l’autotransplantation ; 4. zone d’indication des pyéloplasties<br />

élargies ou urétérocalicostomies.<br />

la technique de Boari-Kuss (Fig. 31) : il est primordial d’avoir<br />

une base large du lambeau vésical pour assurer une bonne<br />

vascularisation sanguine ;<br />

la technique de Bischoff est en fait identique à la technique<br />

précédente, mais la découpe du lambeau vésical est plus<br />

poussée. Il passe diagonalement sur la face antérieure de la<br />

16 Urologie


.<br />

vessie pour venir jusqu’à la face latérale controlatérale (un<br />

peu comme une orange qu’on épluche).<br />

Technique d’autotransplantation<br />

Elles se basent sur les principes de techniques chirurgicales de<br />

la transplantation rénale. Elles s’effectuent dans la fosse iliaque<br />

controlatérale au prélèvement et sont soumises aux mêmes<br />

contre-indications techniques que la transplantation rénale (état<br />

vasculaire pelvien).<br />

Techniques d’urétérostomie<br />

Elles sont de réalisation simple et rapide et d’indication rare.<br />

Le plus grand risque est la sténose cutanée de la stomie, même<br />

avec des modifications techniques du type Rodeck ou lambeau<br />

cutané.<br />

Pour éviter deux stomies (une droite et une gauche) on peut<br />

recourir à une trans-urétéro-urétérostomie avec bien sûr le<br />

risque de sténose pour l’uretère porteur. Mieux, si possible, est<br />

la double urétérostomie en « canon de fusil ». Dans notre<br />

expérience, elles sont toutes restées intubées par une sonde<br />

mono J pour assurer un bon drainage urinaire.<br />

Néphrectomie<br />

L’indication de la néphrectomie se pose dans deux circonstances<br />

: le rein non fonctionnel et l’indication élective d’un rein<br />

présentant une fonction réduite ou normale. Dans ce dernier<br />

cas, la néphrectomie s’avère être la meilleure solution comparée<br />

aux techniques décrites ci-dessus. Par exemple, dans un cas où<br />

un traitement par sonde double J est le seul praticable chez<br />

l’homme, il nécessite pour chaque changement de sonde une<br />

anesthésie générale. Au vu des contraintes, on est en droit de<br />

discuter, à rein controlatéral normal, la néphrectomie. La<br />

demande peut venir du sujet lorsque ce dernier est très actif et<br />

que la néphrostomie percutanée altère son confort et sa qualité<br />

de vie. Pour le rein non fonctionnel, même asymptomatique, la<br />

néphrectomie évite les complications inhérentes et tardives<br />

(pyonéphrose).<br />

Du point de vue chirurgical, un aspect nous semble essentiel :<br />

la néphrectomie doit toujours comporter une urétérectomie<br />

Urologie<br />

1<br />

Localisation<br />

de la sténose<br />

Résection anastomose<br />

Réimplantation de type<br />

Leadbetter-Politano<br />

< 3 cm<br />

Pyéloplastie de type<br />

Sigel/Culp ou Bischoff<br />

Urétéro-alicostomie<br />

Réimplantation de type<br />

vessie psoïque<br />

Longueur<br />

de la sténose<br />

> 3 cm Étendue<br />

Pyéloplastie<br />

type Sigel/Culp<br />

ou Bischoff<br />

Réimplantation de type<br />

Leadbetter-Politano<br />

Réimplantation de type vessie psoïque<br />

Urétéro-alicostomie<br />

Technique de type Boari-Kuss<br />

Mitrofanov - Remplacement urétéral / iléal<br />

Autotransplantation<br />

Figure 23. Techniques chirurgicales validées en fonction de la localisation et de<br />

la longueur de la sténose. Les colonnes vertes sont à mettre en rapport avec la<br />

localisation de la sténose et de sa longueur et indiquent les niveaux où elles sont<br />

appliquées. Notre indication de la technique chirurgicale est surtout prise en<br />

fonction de la sûreté de la technique, de son efficience et des résultats positifs à<br />

long terme. Nous avons réduit au maximum la variété des techniques que nous<br />

utilisons et simplifié leurs indications. D’autres attitudes sont certainement tout<br />

aussi valables mais la réduction des modalités techniques bien choisies garantit les<br />

résultats. 1. Artère iliaque.<br />

jusqu’au niveau de la sténose pour éviter des empyèmes du<br />

moignon urétéral exclu par la sténose.<br />

Biotechnologie<br />

La biotechnologie ou bio-engineering des Anglo-Saxons ne joue<br />

à l’heure actuelle aucun rôle dans la chirurgie de l’uretère et de<br />

son remplacement.<br />

Cœliochirurgie<br />

La cœliochirurgie n’est citée qu’à titre exhaustif. Presque<br />

toutes les techniques de la chirurgie à ciel ouvert peuvent être<br />

transposées en chirurgie cœlioscopique. Les avantages et risques<br />

sont encore à évaluer. Dans des cas complexes (réintervention<br />

+ plaque cicatricielle + post-radique), la chirurgie ouverte reste<br />

la technique de choix.<br />

■ Conclusion<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Les progrès considérables de ces deux dernières décennies<br />

permettent de préserver de plus en plus de reins en stase, mais<br />

ont été aussi pourvoyeurs de sténoses urétérales. Le problème<br />

essentiel qui se pose au chirurgien est d’une part l’évaluation de<br />

la fonction rénale et urétérale, d’autre part de choisir la<br />

technique la plus sûre et prometteuse d’un résultat à long terme<br />

positif tout en replaçant ce concept dans l’histoire naturelle de<br />

la maladie en cause. Dans certains cas, une solution apparemment<br />

peu élégante de prime abord peut s’avérer à long terme<br />

meilleure pour le patient. À ce jour la biotechnologie et la<br />

recherche n’ont pas apporté d’innovations prometteuses et il ne<br />

nous reste qu’à assumer le difficile problème des sténoses de<br />

l’uretère avec les « moyens du bord ».<br />

À Pia et son indéfectible amitié qui nous a quittés le 8 novembre 2008.<br />

17


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Figure 24. Principe de la résection-anastomose terminoterminale de l’uretère.<br />

A. La zone sténosée (en rouge) est réséquée et l’extrémité urétérérale distale et proximale mobilisée pour une adaptation sans tension (flèches pointillées).<br />

1. Artère iliaque.<br />

B. Les extrémités sont spatulées de façon opposée.<br />

C. Les angles des spatulations sont recoupés pour faciliter l’adaptation.<br />

D. Suture au point séparé de l’anastomose.<br />

E. L’anastomose terminée est sécurisée par une sonde double J pour 12 jours.<br />

18 Urologie


Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Figure 25. Principe de l’urétérocalicostomie.<br />

A. Ligature-section en dessous de la sténose.<br />

B. À l’aide d’un dissecteur introduit par une pyélotomie, le calice dilaté inférieur est repéré et le parenchyme sus-jacent réséqué.<br />

C. Anastomose de l’uretère mobilisé au calice inférieur.<br />

D. L’anastomose est sécurisée par une sonde multiperforée drainant le pyélon et tutorisant l’uretère pour 12 jours.<br />

Figure 26. Principe adapté de la technique de Culp (A à D). Cette technique n’est possible que dans les cas d’un pyélon très dilaté qui permet la découpe<br />

d’un lambeau qui sera tubularisé pour s’anastomoser avec l’uretère sain mobilisé. Dans des cas extrêmes, une découpe en pelure d’orange est possible.<br />

Urologie<br />

19


18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

Figure 27. Quelques exemples de techniques chirurgicales.<br />

A. Transurétérostomie gauche-droite.<br />

B. Remplacement urétéral par le moignon urétéral controlatéral.<br />

C. Remplacement urétéral homologue dans une nécrose de l’uretère du transplant rénal. Le rein natif sus-jacent peut rester en place.<br />

D. L’urétérostomie d’intubation.<br />

.<br />

Figure 28. Principe du remplacement urétéral par un segment iléal. Figure 29. Principe de la technique de Leadbetter-Politano.<br />

A. L’uretère est sectionné et éventuellement ligaturé au niveau de la<br />

sténose, puis mobilisé en respectant sa vascularisation.<br />

B. Par une cystotomie, l’uretère est réimplanté en veillant à lui donner un<br />

tunnel antireflux sous-muqueux de 2-3 cm.<br />

20 Urologie


Figure 30. Principe de la technique de la vessie psoïque.<br />

A. Ligature de l’uretère au niveau de la sténose. Cystotomie transversale.<br />

B. Mobilisation de la vessie et pexie aux points séparés sur le muscle psoas. Spatulation antérieure de l’uretère.<br />

C. Implantation de l’uretère dans la vessie psoïque comme dans la technique de Leadbetter- Politano.<br />

D. Fermeture de la cystotomie par suture longitudinale.<br />

E. Aspect radiologique d’une vessie psoïque avant ablation des sondes urétérales au 12 e jour.<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Figure 31. Technique de Boari-Kuss.<br />

A. Un lambeau vésical à large base et d’au moins un travers de doigts de large à son extrémité est découpé dans la paroi antérieure de la vessie. Sa longueur<br />

est adaptée au défaut urétéral.<br />

B. Le lambeau vésical est relevé vers l’uretère spatulé.<br />

C. L’uretère spatulé est réimplanté dans ce lambeau relevé avec un tunnel antireflux sous-muqueux.<br />

D. Tubularisation du lambeau et fermeture de la paroi vésicale au surjet passé.<br />

Urologie<br />

21


.<br />

18-161-A-10 Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : de Petriconi R. Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Urologie, 18-161-A-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Sténoses urétérales intrinsèques et extrinsèques 18-161-A-10<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

23


Plan<br />

Syndrome de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle : physiopathologie,<br />

diagnostic et traitement<br />

P. Mouracade, C. Saussine<br />

Le syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle (SDV/CI) est un diagnostic clinique associant des<br />

symptômes douloureux de la vessie et/ou du pelvis et d’autres symptômes urinaires tels que l’urgenturie<br />

et la pollakiurie. Sa physiopathologie reste imprécise mais une hypothèse actuellement admise est que le<br />

SDV/CI serait lié à d’autres syndromes douloureux comme le syndrome du côlon irritable, la fibromyalgie<br />

et le syndrome de la fatigue chronique. Ce travail fait le point sur les modifications terminologiques<br />

récentes, sur les symptômes qui doivent faire évoquer cette maladie, sur le bilan à réaliser et sur les<br />

traitements possibles en donnant un exemple d’algorithme thérapeutique.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Cystite interstitielle ; Syndrome de la douleur vésicale ; Diagnostic de la cystite interstitielle ;<br />

Traitement de la cystite interstitielle<br />

Introduction 1<br />

Définition, nomenclature et terminologie 1<br />

Épidémiologie 2<br />

Étiologie 2<br />

Association du syndrome de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle avec d’autres syndromes 2<br />

Critères diagnostiques du syndrome de la douleur<br />

vésicale/cystite interstitielle 3<br />

Interrogatoire 3<br />

Bilan diagnostique 3<br />

Test d’hydrodistension vésicale avec biopsies vésicales 4<br />

Quelle est la place des autres examens complémentaires 4<br />

Traitement du syndrome de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle 4<br />

Traitements per os 4<br />

Traitements par instillations endovésicales 5<br />

Traitement chirurgical ou endoscopique 6<br />

Autres traitements 7<br />

Profil psychologique 7<br />

Facteurs aggravant les symptômes du syndrome de la douleur<br />

vésicale/cystite interstitielle 7<br />

Réponse au traitement 7<br />

Rôle du soutien psychologique/psychiatrique 7<br />

Conclusion 8<br />

■ Introduction<br />

« Même pour ceux d’entre nous qui savent dire beaucoup à<br />

partir d’un rien, il est difficile de décrire une affection pour<br />

laquelle aucun critère diagnostique spécifique n’a été établi et<br />

pour laquelle la physiopathologie, l’évaluation et le traitement<br />

restent aussi peu consensuels. »<br />

Urologie<br />

Bien que datant d’une vingtaine d’années, cette description<br />

faite par Hanno [1] du syndrome de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle (SDV/CI) reste d’actualité alors que cette affection<br />

a été décrite il y a déjà plus d’un siècle. En effet, Hunner, en<br />

1915, était le premier à décrire les ulcérations de la vessie liées<br />

au SDV/CI [2] et Hand, en 1949, avait décrit l’hémorragie sousmuqueuse<br />

[3] . La communauté urologique nord-américaine et<br />

européenne s’est mobilisée ces dernières années pour structurer<br />

l’approche et la prise en charge du SDV/CI. Des progrès ont été<br />

faits notamment dans le domaine de la terminologie. Mais il<br />

n’en demeure pas moins que l’étiologie, la physiopathologie, les<br />

critères diagnostiques de cette affection ne sont toujours pas<br />

clairement établis. Cet article résume l’état des connaissances<br />

actuelles sur ces différents aspects.<br />

■ Définition, nomenclature<br />

et terminologie<br />

18-220-A-10<br />

S’il est un domaine qui a évolué concernant le SDV/CI, c’est<br />

la terminologie. Brièvement, l’historique de celle-ci est le<br />

suivant. En 1987, l’Institut national de santé américain ou<br />

National Institute of Health (NIH) a établi des critères diagnostiques<br />

du SDV/CI à utiliser pour la recherche clinique [4] . Par la<br />

suite, il a été démontré que l’application stricte de ces critères<br />

excluait, en pratique clinique courante, 60 % des patients avec<br />

des symptômes pouvant correspondre à un SDV/CI [5] . Dans ces<br />

conditions, l’International Continence Society (ICS) a remplacé,<br />

en 2002, la terminologie « cystite interstitielle » (CI) par celle de<br />

cystite interstitielle/syndrome de la vessie douloureuse (CI/<br />

SVD) ou en anglais, interstitial cystitis/painful bladder syndrome<br />

(IC/PBS).<br />

En 2005, l’European Society for the Study of IC/PBS (ESSIC)<br />

a établi sa propre définition du syndrome de la vessie douloureuse<br />

(SVD) et de la cyctite interstitielle (CI). Selon l’ESSIC, le<br />

SVD se caractérisait par une douleur sus-pubienne en relation<br />

avec le remplissage vésical et accompagnée de symptômes tels<br />

qu’une pollakiurie et/ou une nycturie, en l’absence d’autres<br />

pathologies telles qu’une infection urinaire. La CI faisait partie<br />

1


18-220-A-10 Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement<br />

Tableau 1.<br />

Sous-groupes du syndrome de la douleur vésicale en fonction du résultat<br />

de la biopsie vésicale et du test d’hydrodistension, selon la proposition de<br />

l’European Society for the Study of Interstitial Cystitis (ESSIC), 2008 [6] .<br />

des SVD avec en plus des caractéristiques typiques cystoscopiques<br />

et/ou histologiques.<br />

En 2008, L’ESSIC a proposé, à nouveau, une modification de<br />

la terminologie. Le terme « cystite interstitielle » a été définitivement<br />

retiré de la nomenclature et le terme « syndrome de la<br />

vessie douloureuse » (SVD) ou en anglais painful bladder syndrome<br />

(PBS) a été remplacé par le terme « syndrome de la<br />

douleur vésicale » (SDV) ou en anglais bladder pain syndrome<br />

(BPS).<br />

Désormais selon l’ESSIC, le SDV désigne précisément une<br />

douleur pelvienne, une pression, ou un inconfort chronique<br />

(évoluant depuis plus de 6 mois) perçus comme étant en<br />

relation avec la vessie et accompagnés par au moins un des<br />

symptômes urinaires tels que la pollakiurie ou une envie<br />

mictionnelle permanente. Tous les symptômes associés doivent<br />

être recherchés et les autres diagnostics différentiels doivent être<br />

exclus. En fonction des résultats du test d’hydrodistension et<br />

des biopsies vésicales, des sous-groupes du SDV ont été définis<br />

[6] (Tableau 1). Ces sous-groupes offrent l’avantage de<br />

n’exclure aucun patient des recherches cliniques à partir du<br />

moment où ils présentent les symptômes requis. En effet,<br />

comme aucun critère cystoscopique ou histologique n’est<br />

considéré comme pathognomonique, cette façon de faire paraît<br />

plus juste en regard des connaissances actuelles.<br />

En résumé, il n’est plus recommandé d’utiliser le terme de<br />

« cystite interstitielle ». Le tableau clinique appelé auparavant<br />

« cystite interstitielle » fait désormais partie du grand chapitre<br />

du SDV ou en anglais BPS.<br />

Les conséquences de ces changements sont une harmonisation<br />

de la description des syndromes douloureux pelviens<br />

« syndrome de la douleur urétrale, syndrome de la douleur<br />

vulvaire... », et la création de sous-groupes du SDV permettant<br />

une meilleure comparaison entre les études cliniques. L’ESSIC,<br />

conscient des répercussions que peut avoir, sur la prise en<br />

charge des patients, l’abandon définitif du terme « cystite<br />

interstitielle », a proposé d’utiliser en parallèle celui de « syndrome<br />

de la douleur vésicale » et de « syndrome de la douleur<br />

vésicale/cystite interstitielle » (SDV/CI). C’est pourquoi, dans ce<br />

travail, nous avons utilisé l’acronyme SDV/CI pour parler de<br />

cette maladie autrefois appelée « cystite interstitielle » ou<br />

cystalgies à urines claires.<br />

■ Épidémiologie<br />

Cystoscopie avec hydrodistension<br />

Non réalisée Normale Glomérulations Lésions<br />

de Hunner<br />

Biopsie Non réalisée XX 1X 2X 3X<br />

Normale XA 1A 2A 3A<br />

Non<br />

contributive<br />

XB 1B 2B 3B<br />

Positive XC 1C 2C 3C<br />

La définition du SDV/CI ayant récemment évolué par rapport<br />

à celles utilisées auparavant dans les différentes études épidémiologiques<br />

disponibles, une estimation de la prévalence du SDV/<br />

CI est impossible. Cependant, il semble raisonnable de retenir<br />

dans l’immédiat le chiffre de trois cas pour 1 000 femmes avec<br />

une prévalence masculine qui représente 10 %à20%decelle<br />

des femmes. Cette estimation est susceptible de changer dans la<br />

mesure où désormais une définition standardisée existe avec la<br />

prise en compte d’une population plus large et répartie en sousgroupes<br />

selon des critères endoscopiques et histologiques.<br />

■ Étiologie<br />

Facteur déclencheur<br />

Activation des fibres C transmettant<br />

la douleur et libération<br />

de la substance P<br />

Dégranulation des mastocytes<br />

et sécrétion de cytokines<br />

Altération de la perméabilité<br />

urothéliale<br />

Passage transépithélial de substance<br />

toxique<br />

Réaction inflammatoire<br />

et auto-immune<br />

Neuropathie chronique<br />

atteinte médullaire<br />

Figure 1. Étiologie du syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle.<br />

Différents mécanismes supposés et interactions possibles.<br />

L’étiologie du SDV/CI reste indéterminée mais les circonstances<br />

variables d’apparition des premiers symptômes suggèrent<br />

une physiopathologie multifactorielle. Les approches thérapeutiques<br />

[7] sont sous-tendues par cette physiopathologie supposée,<br />

qui fait appel principalement à cinq mécanismes (Fig. 1) dont<br />

le degré d’implication reste imprécis : un mécanisme infectieux,<br />

une altération de la perméabilité urothéliale, une réaction<br />

mastocytaire, un mécanisme neurovasculaire (Fig. 2) et un<br />

mécanisme auto-immun. Des recherches fondamentales et<br />

cliniques restent nécessaires pour progresser dans la compréhension<br />

physiopathologique du SDV/CI.<br />

■ Association du syndrome<br />

de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle avec d’autres<br />

syndromes<br />

Jusqu’à récemment, le SDV/CI a été étudié par des urologues<br />

qui ont mis essentiellement l’accent sur la vessie. Une association<br />

entre le SDV/CI et d’autres syndromes douloureux comme<br />

la fibromyalgie/douleur musculaire chronique, le syndrome du<br />

côlon irritable ou le syndrome de Sjögren a été retrouvée. En<br />

1997, Clauw et al. [8] ont montré que la fréquence de certains<br />

symptômes courants était la même dans une cohorte de<br />

patients avec une fibromyalgie que dans une cohorte de<br />

patients avec le SDV/CI. La même année, une enquête réalisée<br />

par Alagiri et al. [9] sur plus de 6 700 personnes retrouvait que<br />

les individus avec un SDV/CI étaient 100 fois plus susceptibles<br />

d’avoir une maladie inflammatoire de l’intestin et que les<br />

allergies, le syndrome du côlon irritable et la fibromyalgie<br />

étaient significativement associés au SDV/CI.<br />

L’hypothèse pour expliquer cette association est que le<br />

SDV/CI rentre dans le cadre d’une maladie systémique plutôt<br />

2 Urologie


Activité<br />

sympathique<br />

qu’une maladie localisée de la vessie [10] . Cette association<br />

soulève la question de savoir si ces différents syndromes ne sont<br />

que le reflet d’une même anomalie biologique. C’est dans ces<br />

conditions que certains auteurs préconisent une approche<br />

multidisciplinaire du SDV/CI.<br />

■ Critères diagnostiques<br />

du syndrome de la douleur<br />

vésicale/cystite interstitielle<br />

Désormais, pour poser le diagnostic de SDV/CI, il suffit selon<br />

l’ESSIC [6] d’appliquer la nouvelle définition et de réaliser un<br />

interrogatoire, un bilan diagnostique et un test d’hydrodistension<br />

vésicale avec biopsies vésicales.<br />

Interrogatoire<br />

Mécanisme neurovasculaire<br />

Douleur<br />

Diminution de la capacité vésicale<br />

Douleur au remplissage vésical<br />

Inflammation chronique aspécifique<br />

Augmentation de la perméabilité urothéliale<br />

Risque infectieux<br />

Ischémie<br />

Figure 2. Hypothèse du mécanisme neurovasculaire dans le syndrome<br />

de la douleur vésicale/cystite interstitielle.<br />

Cet interrogatoire doit être systématisé à la recherche d’une<br />

douleur pelvienne, d’une pression, ou d’un inconfort chronique<br />

(évoluant depuis plus de 6 mois) perçus comme étant en<br />

relation avec la vessie et accompagnés par au moins un des<br />

symptômes urinaires tels que la pollakiurie ou une envie<br />

mictionnelle permanente.<br />

La symptomatologie du SDV/CI est souvent riche. Les symptômes<br />

pour lesquels les patients consultent comprennent la<br />

pollakiurie, importante, avec en moyenne 16 mictions par<br />

jour [11] , la nycturie, la douleur pelvienne, la gêne pelvienne, les<br />

spasmes vésicaux, la dyspareunie. L’urgenturie ou urgency des<br />

Anglo-Saxons ne fait pas partie à notre avis des symptômes du<br />

SDV/CI contrairement aux descriptions nord-américaines. Au<br />

lieu d’urgenturies, les patients atteints de SDV/CI décrivent<br />

plutôt une envie mictionnelle quasi permanente allant de la<br />

simple gêne à une véritable douleur et qui est soulagée par la<br />

miction. Ce soulagement par la miction parfois fugace et<br />

rarement prolongé explique l’empressement de ces patients à<br />

vider leur vessie, ce qui entraîne la confusion avec l’urgenturie<br />

qui est plutôt le signe emblématique de l’hyperactivité vésicale.<br />

Urologie<br />

Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement 18-220-A-10<br />

Si le besoin ne peut être soulagé, la gêne ou la douleur s’accentue<br />

sans qu’il se produise de fuites urinaires ce qui est, en<br />

revanche, souvent le cas dans l’urgenturie. Ceci est vrai pour la<br />

majorité des patients atteints d’un SDV/CI, mais la nature étant<br />

complexe, rien n’interdit a priori qu’un patient présente un<br />

SDV/CI et une hyperactivité vésicale, ce qui complique le bilan<br />

diagnostique.<br />

Le siège de la douleur est le plus souvent la région suspubienne,<br />

ce qui la rattache a priori à la vessie. Mais pour<br />

confirmer son origine vésicale, il faut s’assurer par des questions<br />

précises que cette douleur augmente lors du remplissage vésical<br />

et s’améliore après vidange de la vessie. La douleur peut avoir<br />

d’autres localisations tout en restant liée au cycle remplissage/<br />

vidange de la vessie. Sont ainsi parfois ressentis comme étant<br />

douloureux, le vagin, l’urètre ou le périnée. Beaucoup de<br />

symptômes et en premier lieu la douleur sont aggravés par la<br />

menstruation et les rapports sexuels, ce qui conduit les patientes<br />

à les raréfier, voire les interrompre définitivement.<br />

Les éléments à rechercher par l’interrogatoire pour évoquer<br />

un SDV/CI sont présentés, ainsi que le tableau typique d’un<br />

SDV/CI.<br />

“ À retenir<br />

Éléments du tableau clinique à rechercher par<br />

l’anamnèse pour évoquer un SDV/CI.<br />

Patient de sexe féminin<br />

Besoin mictionnel permanent, gênant, voire<br />

douloureux<br />

Pollakiurie dont une nycturie avec au moins un lever<br />

la nuit<br />

Gêne pelvienne, dyspareunie, douleurs vésicale,<br />

pelvienne, périnéale, vaginale ou urétrale<br />

Soulagement des douleurs et du besoin par les mictions<br />

Absence de brûlures mictionnelles<br />

ECBU stériles<br />

Inefficacité des traitements antibiotique, antiinflammatoire,<br />

anticholinergique<br />

Association à d’autres syndromes comme la<br />

fibromyalgie, le syndrome de Sjögren ou le syndrome<br />

du côlon irritable<br />

“ À retenir<br />

Tableau typique ou image d’Épinal d’un SDV/CI<br />

Patiente qui vient consulter pour des douleurs associées<br />

aux mictions évoluant depuis plusieurs années, qui a eu<br />

recours à plusieurs spécialistes et plusieurs traitements<br />

médicamenteux antalgique, antibiotique ou antiinflammatoire<br />

mais sans amélioration, qui dit souffrir de<br />

façon chronique de sa vessie et être obligée d’uriner<br />

fréquemment, voire tout le temps, même la nuit et dont<br />

l’examen clinique ne retrouve aucune anomalie en dehors<br />

parfois d’un profil psychologique particulier (type<br />

anxiodépressif).<br />

Bilan diagnostique<br />

Ce bilan a pour but d’éliminer toute autre affection pouvant<br />

expliquer les symptômes retrouvés à l’interrogatoire. Ces<br />

symptômes n’étant pas pathognomoniques, la liste des affections<br />

à éliminer est assez longue et les plus fréquentes sont les<br />

3


18-220-A-10 Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement<br />

Tableau 2.<br />

Diagnostic différentiel et moyen d’exclusion, selon l’European Society for<br />

the Study of Interstitial Cystitis (ESSIC), 2008 [6] .<br />

Diagnostic différentiel Bilan à faire<br />

Cancer de vessie, carcinome in situ Cystoscopie avec biopsie vésicale<br />

Infection urinaire banale ECBU<br />

Infection urinaire à germes<br />

atypiques : Chlamydia trachomatis,<br />

Ureaplasma urealyticum,<br />

Mycoplasma hominis, Mycoplasma<br />

genitalium, Corynebacterium<br />

urealyticum, Candida<br />

cystites bactérienne, virale, fungique, radique ou médicamenteuse,<br />

le carcinome excréto-urinaire vésical et notamment le<br />

carcinome in situ (CIS), la lithiase vésicale, le diverticule urétral,<br />

l’endométriose et l’obstruction sous-vésicale (Tableau 2).<br />

Ce bilan comprend les examens suivants. L’examen cytobactériologique<br />

des urines (ECBU) élimine une infection urinaire.<br />

La cytologie urinaire écarte un carcinome excréto-urinaire.<br />

L’échographie vésicale et pelvienne élimine une pathologie<br />

tumorale ou lithiasique vésicale ou une pathologie des voies<br />

génitales. La cystoscopie (avec éventuellement des biopsies)<br />

permet de rejeter formellement le diagnostic de carcinome<br />

vésical ou de CIS. L’échographie endovaginale élimine un<br />

diverticule urétral suspecté à l’examen clinique. L’imagerie par<br />

résonance magnétique (IRM) pelvienne élimine une endométriose<br />

pelvienne suspectée cliniquement ou un diverticule<br />

urétral.<br />

Test d’hydrodistension vésicale<br />

avec biopsies vésicales<br />

Culture spécifique à chaque germe<br />

Mycobacterium tuberculosis À suspecter si pyurie et ECBU stérile<br />

Culture spécifique ou PCR<br />

Herpès génital (HSV) et HPV Examen clinique : recherche<br />

des lésions herpétiques ou<br />

des condylomes au niveau de la<br />

vulve, du vagin, du col utérin<br />

ou de l’urètre<br />

Cystite radique Antécédents de radiothérapie<br />

Cystite médicamenteuse Antécédents de chimiothérapie<br />

ou d’immunothérapie par<br />

cyclophosphamide<br />

Obstruction sous-vésicale Débitmètre et mesure du résidu<br />

postmictionnel, urétrocystoscopie<br />

Lithiase vésicale Échographie ou cystoscopie<br />

Diverticule urétral Examen clinique, échographie<br />

endovaginale<br />

Endométriose pelvienne ou<br />

vésicale<br />

Cancer vaginal, du col utérin<br />

ou de l’utérus<br />

Histoire clinique, IRM pelvienne,<br />

cystoscopie et biopsie de nodule<br />

bleuté<br />

Examen clinique, consultation<br />

gynécologique, biopsie,<br />

échographie pelvienne<br />

Hyperactivité vésicale Clinique, bilan urodynamique<br />

si suspicion<br />

Cancer prostatique Toucher rectal, PSA et biopsie<br />

Hypertrophie vésicale Débitmétrie, étude pression-débit<br />

Prostatite chronique Histoire clinique, ECBU<br />

Névralgie pudendale Clinique, bloc anesthésique<br />

du tronc du nerf pudendal positif<br />

ECBU : examen cytobactériologique des urines ; PCR : polymerase chain reaction ;<br />

HSV : virus herpes simplex ; HPV : papillomavirus humain ; IRM : imagerie par<br />

résonance magnétique ; PSA : prostate specific antigen.<br />

Ce test d’hydrodistension vésicale avec biopsies vésicales est<br />

indispensable désormais pour, selon l’ESSIC [6] , classer les<br />

patients en sous-groupes du SDV/CI selon les résultats obtenus<br />

(Tableau 1).<br />

Le test d’hydrodistension vésicale réalisé obligatoirement sous<br />

anesthésie générale commence par une exploration cystoscopique<br />

puis consiste à remplir la vessie avec du sérum physiologique<br />

ou de l’eau avec une pression de 80 cmH 2O jusqu’à ce que<br />

le débit de remplissage cesse par équilibration des pressions. La<br />

distension vésicale doit être maintenue de 2à5minutes. Lors<br />

du remplissage puis après la vidange vésicale, la vessie est<br />

explorée à la recherche de pétéchies/glomérulations ou d’ulcères<br />

de Hunner. À ce stade et jamais avant la distension, des biopsies<br />

vésicales profondes incluant le muscle détrusor sont réalisées sur<br />

les zones les plus perturbées au moins au nombre de trois.<br />

À l’issue du test, les lésions observées sont classées en quatre<br />

grades :<br />

grade I : muqueuse vésicale normale ;<br />

grade II : pétéchies dans au moins deux quadrants ;<br />

grade III : large saignement sous-muqueux (ecchymose) ;<br />

grade IV : rupture de la muqueuse sans ou avec saignement/<br />

œdème muqueux (lésions de Hunner).<br />

Les prélèvements biopsiques doivent être fixés au formol.<br />

L’examen anatomopathologique sert en priorité à écarter le<br />

carcinome vésical et notamment le CIS mais recherche aussi des<br />

signes évocateurs du SDV/CI comme la présence d’une inflammation<br />

de la lamina propria, la présence d’une mastocytose<br />

détrusorienne avec plus de 28 mastocytes/mm 2 et la présence<br />

d’une fibrose intrafasciculaire.<br />

■ Quelle est la place des autres<br />

examens complémentaires<br />

Les autres examens complémentaires tels que le bilan urodynamique,<br />

le test au KCl et les questionnaires n’interviennent<br />

plus directement dans le diagnostic de SDV/CI. En effet, ces<br />

examens sont peu spécifiques. À titre d’exemple, la réduction de<br />

la capacité vésicale et la présence d’un premier besoin mictionnel<br />

précoce, recherchés par le bilan urodynamique, reflétaient<br />

une maladie avancée mais l’absence de ces signes n’excluait pas<br />

le diagnostic. En revanche, cet examen reste indiqué pour<br />

éliminer d’autres pathologies comme une obstruction sousvésicale<br />

ou une hyperactivité du détrusor. Le test au KCl est<br />

associé à des faux négatifs (25 %) ainsi que des faux positifs<br />

(4 %) [12] et sa réalisation dans le cadre d’un bilan de SDV/CI<br />

reste optionnelle. Les questionnaires restent utiles pour le suivi<br />

des patients après traitement.<br />

■ Traitement du syndrome<br />

de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle (Tableau 3)<br />

Parmi les nombreux traitements proposés pour traiter le SDV/<br />

CI, très peu ont été soumis à des essais contrôlés. En France, en<br />

2010, il n’existe aucun traitement ayant l’autorisation de mise<br />

sur le marché (AMM) dans cette affection et encore moins qui<br />

soit remboursé. Néanmoins, par le biais d’autorisation temporaire<br />

d’utilisation (ATU), les malades peuvent avoir un accès à<br />

certains médicaments. Deux médicaments sont autorisés dans le<br />

cadre d’ATU nominative, le diméthylsulfoxyde (DMSO) et<br />

l’Elmiron ® . Ces deux médicaments sont ainsi pris en charge par<br />

la Sécurité sociale. Parmi les différents traitements, on distingue<br />

ceux administrés par voie orale, ceux administrés par voie<br />

intravésicale et les traitements chirurgicaux. Nous évoquons<br />

pour finir le rôle du contrôle alimentaire dans le traitement du<br />

SDV/CI.<br />

Traitements per os (Tableau 4)<br />

Pentosan polysulfate de sodium (PPS) (Elmiron ® )<br />

C’est un polysaccharide de structure similaire à celle du<br />

sulfate d’héparine et donc des glycosaminoglycanes qui sont des<br />

4 Urologie


Tableau 3.<br />

Différentes modalités thérapeutiques dans le syndrome de la douleur<br />

vésicale/cystite interstitielle.<br />

Traitement oral Traitement intravésical Traitement<br />

chirurgical<br />

ou endoscopique<br />

Pentosan polysulfate<br />

de sodium (Elmiron ® )<br />

protéines constitutives de la paroi vésicale. Son mécanisme<br />

d’action supposé passe par un effet direct de restauration de la<br />

couche de mucine de l’urothélium vésical et un mécanisme<br />

indirect en liant des substances toxiques contenues dans<br />

l’urine [13] . La dose habituelle est de 100 mg trois fois par jour.<br />

Deux à six pour cent de la dose absorbée sont excrétés, inchangés<br />

dans l’urine. La réponse au traitement, souvent partielle<br />

avec une amélioration de la symptomatologie de seulement<br />

40%à50%,concerne environ un tiers des patients [14, 15] .Un<br />

traitement au long cours est préconisé car l’effet optimal n’est<br />

atteint qu’après 6à12mois de traitement. Les effets secondaires<br />

sont rares, de 1%à4%(surtout une dyspepsie). Certaines<br />

études indiquent un meilleur effet de ce traitement s’il est<br />

introduit dans les 6 premiers mois d’évolution du SDV/CI [16] .<br />

Antidépresseurs<br />

Diméthylsulfoxyde<br />

(DMSO)<br />

Hydrodistension<br />

Antidépresseurs Héparine Toxine botulique<br />

Gabapentine<br />

(Neurontin ® )<br />

BCG-thérapie (bacille<br />

de Calmette-Guérin)<br />

Neuromodulation<br />

Antihistaminiques Hyaluronate de sodium Cystectomie<br />

et dérivation urinaire<br />

Cimétidine<br />

(Tagamet ® )<br />

Chondroïtine sulfate<br />

0,2 %<br />

Neurotoxines vanilloïdes<br />

Tableau 4.<br />

Doses utilisées dans les traitements oraux et intravésicaux du syndrome de<br />

la douleur vésicale/cystite interstitielle.<br />

Médicament Dosage<br />

Pentosan polysulfate de sodium<br />

(Elmiron ® )<br />

100 mg 3 ×/j<br />

Amitriptyline (Élavil ® , Laroxyl ® ) 10 à 25 mg/j, 1 h avant le coucher<br />

Fluoxétine (Prozac ® ) 20 à 40 mg/j<br />

Gabapentine (Neurontin ® ) 100 mg 3 ×/j<br />

Ciclosporine A (Néoral ® ) 1,5 mg/kg 2 ×/j<br />

Hydroxyzine (Atarax ® ) 10 à 75 mg au coucher<br />

Cimétidine (Tagamet ® ) 200 mg 2 ×/j<br />

Diméthylsulfoxyde (DMSO)<br />

intravésical<br />

50 ml de DMSO à 50 %<br />

Héparine intravésicale 20 à 40 000 UI d’héparine diluées<br />

dans 10 ml<br />

Hyaluronate de sodium (Cystistat ® ) 40 mg/50 ml<br />

Résinifératoxine (RTX) 50 ml d’une solution de 0,01 µM<br />

Les antidépresseurs sont des neuromodulateurs de la douleur<br />

et peuvent agir de ce fait dans le SDV/CI. Leurs effets secondaires<br />

fréquents conduisent souvent à prescrire de faibles doses.<br />

L’amitriptyline (Élavil ® , Laroxyl ® ) est prescrite à des doses<br />

initiales de 10 ou 25 mg/j, 1 heure avant le coucher et peut<br />

être augmentée jusqu’à 75 mg/j en cas de bonne tolérance.<br />

Les symptômes du SDV/CI sont améliorés chez 64 %à90%<br />

des patients [17] . Ses effets secondaires sont la prise de poids,<br />

la fatigue, la diminution de la libido, les palpitations et<br />

rarement une hépatotoxicité ou une aplasie médullaire.<br />

La fluoxétine (Prozac ® ) est prescrite à la dose initiale de<br />

20 mg/j et peut être augmentée à 40 mg/j.<br />

Urologie<br />

Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement 18-220-A-10<br />

La sertraline (Zoloft ® ), autre inhibiteur sélectif de la recapture<br />

de la sérotonine, est initiée à la dose de 50 mg/j et peut être<br />

augmentée jusqu’à 100 mg/j.<br />

Les effets thérapeutiques des antidépresseurs sont multiples.<br />

Ils améliorent la qualité du sommeil et en conséquence diminuent<br />

la nycturie. Ils ont un effet neuromodulateur sur la<br />

douleur en augmentant son seuil de perception ainsi qu’un effet<br />

anticholinergique sur le détrusor. Cependant, une revue de la<br />

littérature récente n’a relevé que deux études randomisées pour<br />

l’amitriptyline et deux études randomisées pour la sertraline<br />

avec des résultats discordants ne permettant pas d’affirmer avec<br />

certitude l’utilité des antidépresseurs dans le SDV/CI [18] .<br />

Gabapentine (Neurontin ® )<br />

La gabapentine est un antiépileptique qui a une propriété<br />

antalgique par augmentation du seuil de perception de la<br />

douleur. Efficace chez les patients dont la douleur est le<br />

symptôme dominant [19] , la gabapentine est utilisée en seconde<br />

ligne de traitement à la dose quotidienne initiale de 100 mg en<br />

trois prises. L’effet secondaire principal de la gabapentine est<br />

la fatigue.<br />

Antihistaminiques<br />

L’hydroxyzine (Atarax ® ) est un anti-H 1 et agirait par une<br />

inhibition de la dégranulation des mastocytes. L’hydroxyzine<br />

est initiée à une dose de 10 à 75 mg au coucher. Son efficacité<br />

dans le SDV/CI a été remise en cause par une étude randomisée<br />

[20] et une revue de la littérature pointant les insuffisances<br />

méthodologiques des études publiées [21] .<br />

Cimétidine (Tagamet ® )<br />

La première étude ouverte ayant montré une efficacité de la<br />

cimétidine dans le SDV/CI ne concernait que neuf patients [22] .<br />

Cette efficacité s’est avérée durable puisque dans une autre<br />

étude, 74 % des patients traités par cimétidine restaient<br />

améliorés après un suivi de 30 mois [23] . En 2001, une étude<br />

randomisée en double aveugle contre placebo a permis de<br />

confirmer l’intérêt de la cimétidine dans le traitement du SDV<br />

en améliorant surtout la cystalgie et la nycturie [24] .Ladose<br />

utilisée était de 200 mg deux fois par jour.<br />

Ciclosporine A (Néoral ® )<br />

De par son action immunosuppressive, la ciclosporine A est<br />

utilisée pour prévenir les réactions de rejet après greffe d’organe<br />

mais aussi dans le traitement de maladies telles que le psoriasis,<br />

la polyarthrite rhumatoïde ou autres maladies auto-immunes.<br />

Dans une étude comparative, la ciclosporine A à faibles doses<br />

(1,5 mg/kg deux fois par jour) avait une meilleure action sur les<br />

symptômes de patients atteints de SDV/CI que le pentosan<br />

polysulfate de sodium (Elmiron ® ) [25] .<br />

Traitements par instillations endovésicales<br />

(Tableaux 3, 4)<br />

Diméthylsulfoxyde (DMSO)<br />

Utilisé dans le SDV/CI dès les années 1960, le DMSO a<br />

montré dans différentes études son efficacité avec une faible<br />

morbidité chez un grand nombre de patients traités [26] .<br />

Solvant organique possédant une action anti-inflammatoire et<br />

analgésique, le DMSO est éliminé par les alvéoles des poumons<br />

et se caractérise chez les patients traités par une odeur spécifique<br />

de l’haleine. Responsable d’une dissolution du collagène, le<br />

DMSO pourrait à long terme entraîner une fibrose vésicale<br />

source d’une résistance au traitement.<br />

Certains l’administrent seul à raison de 50 ml de DMSO<br />

dilués à 50 % dans du sérum physiologique ou en mélange de<br />

50 ml de DMSO dilués à 50 % avec 10 ml de bicarbonate de<br />

sodium, des corticoïdes (40 ml de triamcinolone), 10 000 U<br />

5


18-220-A-10 Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement<br />

d’héparine et 80 mg de gentamicine [27] . Après instillation dans<br />

la vessie, il est demandé au patient de retenir le produit<br />

pendant 30 à 60 minutes. Une instillation hebdomadaire est<br />

répétée pendant 6 semaines. Une accentuation des symptômes<br />

est possible après la première instillation alors que leur amélioration<br />

apparaît lors des instillations suivantes.<br />

Héparine<br />

Glycosaminoglycane similaire au pentosan polysulfate sodique,<br />

l’héparine a pour action de renforcer la couche de mucine<br />

protectrice de l’urothélium vésical sans avoir d’effet sur la crase<br />

sanguine. Dans la publication princeps, la dose utilisée était de<br />

10 000 UI d’héparine diluée dans 10 ml de sérum physiologique,<br />

instillées 3 fois par semaine pendant 3 mois. L’efficacité<br />

concernait un peu plus de la moitié des patients et pour les<br />

volontaires, son administration pouvait être prolongée avec la<br />

même efficacité pendant 1 an [28] .<br />

Bacille de Calmette-Guérin (BCG)-thérapie<br />

L’action du BCG en instillations endovésicales dans le SDV/CI<br />

a été remise en cause par une étude prospective comparative qui<br />

a montré, après un suivi de 34 semaines, un taux de réponses<br />

de 21 % pour le BCG par rapport à un taux de 12 % pour le<br />

placebo [29] . Le mécanisme d’action supposé serait immunologique<br />

mais reste indéterminé. L’instillation est hebdomadaire<br />

pendant 6 semaines.<br />

Acide hyaluronique<br />

L’acide hyaluronique est une glycosaminoglycane de la<br />

couche mucineuse de la vessie. Son administration intravésicale<br />

renforcerait la protection urothéliale de la vessie contre les<br />

produits toxiques de l’urine. Le protocole consiste en une<br />

instillation hebdomadaire (40 mg/50 ml) pendant 4 semaines<br />

puis, selon les études, poursuivie par une instillation mensuelle<br />

pour une durée variable. Dans une étude prospective non<br />

randomisée, la pollakiurie nocturne et la douleur diminuaient à<br />

3 mois respectivement de 40 % et 30 %, et 65 % des patients<br />

étaient considérés comme répondeurs [30] . Les résultats de<br />

l’étude internationale multicentrique randomisée contre placebo<br />

« CISTIC » n’ont toujours pas été publiés. Un rapport présenté<br />

au congrès de l’ESSIC en 2008 montrait l’absence de différence<br />

statistiquement significative par rapport au placebo.<br />

Récemment, l’acide hyaluronique a été montré comme plus<br />

efficace que l’héparine en termes de prolongation de l’effet de<br />

l’hydrodistension vésicale dans une étude comparative non<br />

randomisée chez des patients ayant subi un test d’hydrodistension<br />

vésicale [31] .<br />

Chondroïtine sulfate 0,2 % (Uracyst-S ® )<br />

Autre glycosaminoglycane, le chondroïtine sulfate a fait<br />

l’objet d’une étude in vivo chez un modèle de souris dont la<br />

barrière urothéliale est endommagée et a prouvé sa capacité à<br />

la réparer et à restaurer son imperméabilité [32] . Une étude<br />

clinique multicentrique a récemment confirmé son efficacité<br />

avec 60 % de répondeurs à la 24 e semaine après une instillation<br />

par semaine de chondroïtine sulfate à2%suivie d’une instillation<br />

par mois pendant 16 semaines [33] .<br />

Neurotoxines vanilloïdes<br />

Les neurotoxines comme la capsaïcine et la résinifératoxine<br />

(RTX) appartiennent au groupe des « vanilloïdes » et ont été<br />

testées dans le SDV/CI pour leur effet dénervant. Elles sont par<br />

ailleurs efficaces dans le traitement de l’hyperactivité du<br />

détrusor neurologique réfractaire. Une étude comparative<br />

réalisée en 2005 n’a pas permis de retrouver un bénéfice dans<br />

le SDV/CI [34] . Néanmoins, une étude sur la RTX a trouvé une<br />

amélioration des scores du questionnaire d’O’Leary-Sant après<br />

instillation de cette substance, mais sans effet démontré sur la<br />

douleur ou sur la pollakiurie [35] . Le protocole est une instillation<br />

hebdomadaire de 50 ml d’une solution de RTX à<br />

0,01 µmol pendant 4 semaines.<br />

Traitement chirurgical ou endoscopique<br />

Hydrodistension vésicale<br />

L’hydrodistension vésicale ne se conçoit que sous anesthésie<br />

générale. Elle n’est pas possible lors d’une simple cystoscopie<br />

réalisée en consultation. Son rôle est diagnostique permettant<br />

désormais de classer les patients souffrant d’un SDV/CI en<br />

différents groupes selon son résultat et celui des biopsies<br />

vésicales (Tableau 1). Son rôle est aussi thérapeutique puisque<br />

30%à50%despatients notent une amélioration des symptômes<br />

après une hydrodistension. Cette amélioration fait souvent<br />

suite à une amplification des symptômes pendant les 2 à<br />

3 premières semaines suivant l’hydrodistension. L’efficacité de<br />

l’hydrodistension vésicale serait meilleure pour les patients avec<br />

une capacité vésicale réduite. L’hydrodistension a une efficacité<br />

limitée dans le temps qui varie de 4à12mois et la répétition<br />

de celle-ci n’apporte pas toujours le même soulagement.<br />

Toxine botulique<br />

La toxine botulique compte parmi les plus puissants des<br />

poisons naturels du fuseau neuromusculaire. C’est une neurotoxine,<br />

produite par une bactérie à Gram négatif, sporulée,<br />

anaérobie stricte, naturellement présente dans l’environnement,<br />

nommée Clostridium botulinum. Il existe sept sérotypes de la<br />

toxine botulique. La toxine A est utilisée en urologie notamment<br />

en recherche clinique dans le traitement de l’hyperactivité<br />

du détrusor neurologique réfractaire aux anticholinergiques, et<br />

une AMM pour le Botox ® dans cette indication est en attente<br />

pour 2010-<strong>2011</strong>. Elle bloque la libération de l’acétylcholine et<br />

empêche le développement des contractions non inhibées du<br />

détrusor. L’efficacité de la toxine botulique dans le SDV/CI reste<br />

cependant controversée [36, 37] . La dose habituelle utilisée varie<br />

entre 100 et 200 unités injectées en sous-muqueux dans 20 à<br />

30 sites. Il a été décrit une amélioration de la douleur lorsque<br />

l’injection de toxine botulique est suivie 2 semaines après d’une<br />

hydrodistension vésicale [38] .<br />

Neuromodulation sacrée<br />

La neuromodulation sacrée a été testée chez les patients<br />

souffrant de SDV/CI avec des résultats encourageants. Une étude<br />

multicentrique a évalué l’intérêt de la neuromodulation sacrée<br />

chez 33 patients avec un SDV/CI. Les résultats montraient une<br />

diminution de la pollakiurie et de la douleur ainsi qu’une<br />

amélioration du score des symptômes chez 60 % des<br />

patients [39] . L’utilisation de la neuromodulation sacrée reste<br />

réservée aux patients qui ne répondent pas au traitement oral<br />

ou intravésical. L’intervention se fait en deux temps par<br />

implantation d’une électrode percutanée dans le trou sacré S3,<br />

le boîtier permanent n’étant implanté qu’en cas d’amélioration<br />

clinique notée avec le boîtier de stimulation externe.<br />

Cystectomie et dérivation urinaire<br />

La cystectomie simple reste un choix thérapeutique quand les<br />

symptômes sont réfractaires à tous les moyens thérapeutiques<br />

conservateurs. La cystectomie supratrigonale avec entérocystoplastie<br />

d’agrandissement offre l’avantage sur la cystectomie avec<br />

dérivation urinaire de préserver le schéma anatomique normal.<br />

Cependant, si une majorité de patients devient asymptomatique<br />

après cystectomie supratrigonale avec entérocystoplastie<br />

d’agrandissement, une minorité de patients continue à présenter<br />

des douleurs pelviennes [40] .<br />

La cystectomie n’est cependant pas un traitement anodin et<br />

il est préférable, avant de la réaliser, de présenter les dossiers des<br />

candidats potentiels en réunion de concertation pluridisciplinaire<br />

pour y recueillir l’assentiment des collègues algologues et<br />

psychiatres notamment.<br />

6 Urologie


Tableau 5.<br />

Liste des divers groupes d’aliments et de boissons à éviter ou bien tolérés.<br />

Catégorie d’aliments (par ordre alphabétique) Aliments à éviter Aliments tolérés<br />

Boissons Alcools, boissons gazeuses, thé, café, jus d’airelles,<br />

jus d’agrumes<br />

Autres traitements<br />

De nombreux autres traitements ont été décrits dans la<br />

littérature et en dresser une liste systématique serait fastidieux,<br />

surtout qu’ils n’ont pas toujours fait l’objet d’études rigoureuses<br />

sur le plan méthodologique. Pour être complet, nous citons les<br />

massages, l’acupuncture, l’hypnose ou l’oxygénothérapie<br />

hyperbare.<br />

■ Profil psychologique<br />

Les patientes atteintes de SDV/CI ont souvent un profil<br />

psychologique de type anxiodépressif. Mais l’origine primitive<br />

ou secondaire de ces désordres psychiques reste indéterminée.<br />

Nous ne développons pas plus ce sujet controversé du rôle du<br />

psychisme et du stress dans la genèse du SDV/CI ou plus<br />

généralement des algies d’origine psychique. Enfin, il a été<br />

évoqué une incidence élevée d’abus sexuels associée au tableau<br />

de SDV/CI et à des perturbations de l’axe hypothalamohypophysaire<br />

[41] .<br />

■ Facteurs aggravant<br />

les symptômes du syndrome<br />

de la douleur vésicale/cystite<br />

interstitielle<br />

Les facteurs précipitant ou aggravant les symptômes du<br />

SDV/CI sont variés et on retrouve fréquemment le stress, les<br />

rapports sexuels, les vêtements serrés, l’exercice et certains<br />

aliments.<br />

Le rôle de l’alimentation comme facteur aggravant les<br />

symptômes du SDV/CI est considéré comme important [42] .De<br />

nombreux patients atteints de SDV/CI ont remarqué que<br />

certains aliments pouvaient exacerber leurs symptômes et que la<br />

modification du régime alimentaire suffisait à soulager significativement<br />

ces symptômes. Cependant, d’un patient à l’autre,<br />

Eau minérale plate, café décaféiné, thé sans<br />

théine, certaines tisanes<br />

Céréales, hydrate de carbone Pains de seigle ou au levain Autres pains, pâtes, pommes de terre, riz<br />

Conservateurs et additifs Acide citrique, glutamate de monosodium, aspartam,<br />

saccharine, aliments avec des conservateurs<br />

ou des additifs, aliments artificiels<br />

Divers Tabac, restauration rapide, produits minceurs,<br />

médicaments contenant de l’éphédrine ou<br />

de la pseudoéphédrine, certaines vitamines (B ou C)<br />

Épices et assaisonnements Mayonnaise, aliments épicés, sauce au soja, sauces<br />

préparées pour les salades, moutarde et vinaigre<br />

Fruits Ananas, pomme, abricot, avocat, banane, fraise,<br />

pamplemousse, nectarine, pêche, prune, airelles,<br />

rhubarbe, agrumes, noix<br />

Laitages/chocolat Fromage affiné, crème fraîche, crème aigre, yahourts,<br />

chocolat<br />

Légumes Haricots verts, fèves, oignons, tofu, soja, tomates Autres légumes<br />

Viandes/poissons Produits traités, fumés ou en conserve, anchois,<br />

caviar, foie de volaille, corned-beef<br />

Urologie<br />

Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement 18-220-A-10<br />

Ail<br />

Poire, melon, amande, noix de cajou<br />

Chocolat blanc, fromage frais, lait<br />

Autres produits<br />

les aliments en cause vont différer. Pour d’autres patients, le<br />

régime alimentaire n’a qu’une influence minime sur leur état<br />

clinique. De façon non exhaustive, il est possible de proposer<br />

une liste des aliments à éviter ou à l’inverse, de ceux qui sont<br />

bien tolérés (Tableau 5).<br />

■ Réponse au traitement<br />

Il n’existe pas de critères de guérison du SDV/CI autre que la<br />

disparition ou plus souvent l’amélioration des symptômes<br />

cliniques. La réponse au traitement varie en fonction du<br />

patient, et il est fréquent d’essayer de nombreux médicaments<br />

avant d’en trouver un qui soulage. Il n’est pas rare d’observer<br />

des effets bénéfiques seulement au bout de quelques mois et<br />

parfois pour une durée limitée. Une réapparition progressive des<br />

symptômes se rencontre souvent. De plus, il est difficile de dire<br />

si une amélioration a été provoquée par un médicament ou<br />

simplement par une rémission spontanée (Fig. 3).<br />

Certains des traitements proposés ci-dessus vont s’avérer<br />

efficaces mais au prix d’effets secondaires parfois importants et<br />

la poursuite du traitement nécessite d’évaluer avec le patient le<br />

rapport bénéfice/risques. C’est pourquoi, plus encore que dans<br />

d’autres maladies, un suivi régulier est indispensable, l’évolution<br />

à long terme au cours de certains traitements n’étant pas du<br />

tout connue.<br />

■ Rôle du soutien<br />

psychologique/psychiatrique<br />

L’errance diagnostique et la non-efficacité de traitements<br />

inadaptés (tous ceux non évoqués dans la liste ci-dessus)<br />

conduisent souvent à une sensation d’abandon et de désespoir<br />

de ces patients. Savoir leur expliquer la maladie et sa prise en<br />

charge conduit très souvent à améliorer en partie la situation<br />

par le soutien psychologique indéniable que cela apporte. La<br />

preuve de la nécessité systématique d’un soutien psychologique<br />

ou psychiatrique n’est pas démontrée ; il se décide au cas<br />

par cas.<br />

7


.<br />

18-220-A-10 Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement<br />

■ Conclusion<br />

Le SDV/CI reste un défi pour tous les médecins et les urologues<br />

en particulier. Les gynécologues voient très souvent dans<br />

leur consultation de telles patientes. Connaître cette maladie,<br />

savoir la prendre en charge ou savoir orienter ces patientes leur<br />

fera gagner beaucoup de temps.<br />

La recherche fondamentale mais aussi clinique par les<br />

différents nouveaux traitements nous fera progresser dans notre<br />

connaissance physiopathologique de cette maladie. Le garant de<br />

ces progrès reste l’utilisation, dans des études comparatives et<br />

randomisées, d’une bonne méthodologie et de critères de<br />

jugement robustes.<br />

■ Références<br />

Elmiron ® 100 mg 1-1-1 pendant 6 à 12 mois<br />

Neuromodulation<br />

sacrée<br />

Cystectomie supratrigonale<br />

ou dérivation urinaire<br />

Héparine en intravésical<br />

hebdomadaire pendant<br />

4 à 12 mois<br />

Instillation de DMSO<br />

hebdomadaire pendant<br />

6 semaines<br />

[1] Hanno P, Levin RM, Monson FC, Teuscher C, Zhou ZZ, Ruggieri M,<br />

et al. Diagnosis of interstitial cystitis. JUrol1990;143:278-81.<br />

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1999;161:553-7.<br />

Traitements envisageables<br />

Ciclosporine A<br />

Hyaluronate de sodium<br />

Chondroïtine sulfate<br />

Toxine botulique<br />

Oxygène hyperbare<br />

Massage<br />

Hypnose<br />

Acupuncture<br />

Restriction alimentaire<br />

Test d'hydrodistension<br />

Tagamet ® 200 mg 1-0-1<br />

pendant 1 mois<br />

+<br />

Consolidation<br />

par DSMO 1 × par mois<br />

pendant 6 mois<br />

+<br />

Poursuivre Tagamet ®<br />

pendant 3 mois<br />

Figure 3. Arbre décisionnel. Proposition d’algorithme thérapeutique du syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle. DMSO : diméthylsulfoxyde ;<br />

+ : amélioration ou guérison ;–:échec.<br />

[6] Van De Merwe JP, Jørgen Nordling J, Bouchelouche P,<br />

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P. Mouracade (pascal.mouracade@chru-strasbourg.fr).<br />

C. Saussine.<br />

Service d’urologie, Université Louis Pasteur, Hôpitaux universitaires de Strasbourg, Hôpital civil, 1, place de l’Hôpital, 67000 Strasbourg, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Mouracade P., Saussine C. Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie,<br />

diagnostic et traitement. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-220-A-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Syndrome de la douleur vésicale/cystite interstitielle : physiopathologie, diagnostic et traitement 18-220-A-10<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

9


Plan<br />

Syndrome douloureux vésical<br />

(ou cystite interstitielle)<br />

S. Drouin, M. Rouprêt<br />

Le syndrome douloureux vésical ou cystite interstitielle (CI) est une pathologie de la vessie qui reste<br />

largement méconnue. La CI touche davantage les femmes que les hommes et son étiologie demeure non<br />

élucidée. Les différentes études suggèrent que sa physiopathologie est multifactorielle. Le diagnostic de la<br />

CI doit être suspecté par le clinicien sur les informations obtenues lors de l’anamnèse. La confirmation de<br />

ce diagnostic, qui reste un diagnostic d’élimination, repose sur une série d’examens dont le but est<br />

d’écarter d’autres pathologies. Aucun test pathognomonique de la CI n’est disponible. La<br />

méconnaissance de la physiopathologie rend les traitements empiriques. La réponse au traitement varie<br />

en fonction du patient et il est fréquent d’essayer de nombreux médicaments avant d’en trouver un qui<br />

soulage. Certaines méthodes ou certains médicaments peuvent avoir des effets bénéfiques assez<br />

importants, mais souvent au bout de quelques mois et malheureusement pendant une période limitée. Il<br />

est fréquent que le traitement devienne de moins en moins efficace au cours du temps et que les<br />

symptômes réapparaissent. De plus, il est difficile de dire si une amélioration a été causée par un<br />

médicament ou simplement par une rémission spontanée. Un algorithme décisionnel est proposé à la fin<br />

de cet article. Certains facteurs aggravants ont été décrits, susceptibles de précipiter la douleur due à la<br />

CI. On note le stress, les rapports sexuels, les vêtements serrés, l’exercice et certaines alimentations telles<br />

que les boissons acides, le café, les épices, l’alcool, les boissons gazeuses, le thé et le chocolat.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Cystopathies ; Cystite ; Vessie ; Éosinophile ; Hydrodistension ; Glycosaminoglycane ;<br />

Cystoscopie ; Histologie<br />

Introduction 1<br />

Historique 1<br />

Définition 2<br />

Épidémiologie 2<br />

Étiologie et physiopathologie 2<br />

Infectieuse 2<br />

Inflammation et mécanismes auto-immuns 2<br />

Mastocytes et médiateurs de l’inflammation 3<br />

Barrière de glycosaminoglycanes et perméabilité épithéliale 3<br />

Neurobiologie 3<br />

Facteur antiprolifératif 3<br />

Orientation diagnostique 3<br />

Interrogatoire et examen clinique 3<br />

Examens complémentaires 4<br />

Prise en charge thérapeutique 4<br />

Éducation et soutien psychologique 4<br />

Traitements oraux 5<br />

Traitements endovésicaux 5<br />

Neuromodulation 5<br />

Chirurgie 6<br />

Quelle option choisir ? 6<br />

Conclusion 7<br />

Traité de Médecine Akos<br />

■ Introduction<br />

Le syndrome douloureux vésical ou cystite interstitielle (CI)<br />

reste une pathologie de la vessie largement méconnue. Elle<br />

appartient au groupe des syndromes dits de la « vessie douloureuse<br />

» mais ne correspond à aucun critère diagnostique<br />

spécifique, ce qui conduit souvent les patients qui en souffrent<br />

à de longues errances diagnostiques.<br />

Sa prévalence ne cesse pourtant d’augmenter dans les pays<br />

développés. Il s’agit d’une maladie « bénigne » mais responsable<br />

d’un handicap fonctionnel qui peut cumuler des altérations<br />

physiques, psychiques voire socioéconomiques pour les patients.<br />

Connaître la CI, savoir l’évoquer, l’envisager, la diagnostiquer et<br />

la traiter s’avère indispensable de nos jours.<br />

■ Historique<br />

5-0675<br />

La CI a été définie comme une entité à part entière dès le<br />

XIX e siècle par Skene, mais n’a été réellement décrite qu’en<br />

1918 par Hunner. Celui-ci décrit une cystite responsable de<br />

douleur et d’urgenturie associée à la présence d’ulcères vésicaux<br />

en cystoscopie.<br />

En 1949, Hand est l’auteur de la première étude qui inclut<br />

223 cas de CI avec présence d’ulcère dits de Hunner. Il faut<br />

attendre 1978 pour que Messing et Stamey rapportent l’existence<br />

de formes non ulcéreuses et la présence de glomérulations<br />

vésicales. La première définition consensuelle de la CI ne voit<br />

le jour que dans les années 1980 avec la création de l’Interstitial<br />

1


5-0675 Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle)<br />

Cystitis Association. En 1989, l’Institut national de santé<br />

américain a défini des critères diagnostiques précis pour les<br />

études cliniques. Ceux-ci ont été révisés en 2002 et 2005, avec<br />

l’introduction des syndromes de vessie douloureuse.<br />

■ Définition<br />

Depuis 1987, l’Institut national de santé avait établi des<br />

critères de diagnostic de CI devant servir à la recherche clinique<br />

[1] . Ceux-ci comprenaient des critères histologiques d’inclusion,<br />

des facteurs positifs et des critères d’exclusion. L’application<br />

de tels critères ne permettait en réalité d’inclure que<br />

60 % des patients ayant une CI. Ainsi, en 2005, la Société<br />

internationale de continence et l’European Society for the Study<br />

of IC/PBS (ESSIC) ont modifié les définitions [2] .<br />

“ Point fort<br />

Définition selon l’ESSIC 2005<br />

La CI est une maladie d’origine inconnue consistant en :<br />

une plainte douloureuse sus-pubienne liée au<br />

remplissage vésical ;<br />

accompagnée d’autres symptômes comme la<br />

pollakiurie diurne (plus de huit fois par jour) et nocturne<br />

(plus d’une fois par nuit) ;<br />

avec les caractéristiques suivantes :<br />

C cystoscopiques : glomérulations et/ou ulcère de<br />

Hunner ;<br />

C et/ou histologiques (infiltration par des cellules<br />

inflammatoires mononucléaires incluant les cellules<br />

mastocytaires et un tissu de granulation) ;<br />

en l’absence d’infection ou d’autre pathologie.<br />

Tout d’abord, le terme de CI a été remplacé par celui de<br />

« cystite interstitielle - syndrome de la vessie douloureuse ». Le<br />

syndrome de vessie douloureuse est caractérisé par une douleur<br />

sus-pubienne chronique en relation avec le remplissage vésical<br />

et accompagnée de symptômes tels qu’une pollakiurie et/ou une<br />

nycturie, en l’absence d’autres pathologies telles qu’une infection<br />

urinaire. La CI fait partie des syndromes de vessie douloureuse<br />

avec, en plus, des caractéristiques cystoscopiques et/ou<br />

histologiques [3] . L’interrogatoire et l’examen clinique permettent<br />

de suspecter le diagnostic, mais il n’existe aucun test<br />

diagnostique spécifique de la cystite interstitielle. Celle-ci reste<br />

un diagnostic d’exclusion qui impose d’éliminer les différents<br />

diagnostics différentiels (Tableau 1). On peut schématiquement<br />

décrire deux formes principales de CI :<br />

la forme non ulcéreuse de type neurogène, qui concerne la<br />

femme jeune à capacité vésicale normale ;<br />

la forme ulcéreuse de type inflammatoire, moins fréquente en<br />

Europe, qui touche la femme plus âgée et entraîne une<br />

diminution de la capacité vésicale.<br />

■ Épidémiologie<br />

La prévalence du syndrome de « vessie douloureuse - cystite<br />

interstitielle » est extrêmement variable selon les études et les<br />

populations, ce d’autant que les critères diagnostiques se sont<br />

modifiés avec le temps et qu’il n’existe pas de marqueur<br />

diagnostique spécifique de la CI. Les chiffres de prévalence<br />

varient de 10 à 300/100 000 avec un ratio de dix femmes pour<br />

un homme. L’âge moyen au diagnostic est de 45 ans. Il semble<br />

toutefois que l’incidence de la CI soit sous-estimée chez<br />

l’homme et chez l’enfant. Elle est plus fréquente dans les pays<br />

anglo-saxons et les pays du Nord de l’Europe. Il semble exister<br />

une composante génétique avec une prédisposition familiale [4] .<br />

Enfin, certaines associations avec des maladies inflammatoires<br />

Tableau 1.<br />

Diagnostics différentiels de la cystite interstitielle [3] .<br />

Diagnostics différentiels Moyens d’exclusion<br />

Carcinome Cystoscopie et biopsie<br />

Carcinome in situ Cystoscopie et biopsie<br />

Infection à :<br />

- Chlamydia trachomatis<br />

- Ureaplasma urealyticum<br />

- Mycoplasme<br />

- Corynebacterium<br />

urealyticum<br />

- Mycobactérie<br />

- Candida<br />

- Herpes virus<br />

- Human papilloma virus<br />

Séquelles :<br />

- d’irradiation<br />

- de chimiothérapie<br />

- de traitement antiinflammatoire<br />

(acide tiaprofénique)<br />

ou auto-immunes, la fibromyalgie et les troubles paniques ont<br />

été rapportées [5] . La physiopathologie commune s’articulerait<br />

autour d’un modèle global de réponse au stress mettant en jeu<br />

une activité accrue du système nerveux sympathique [6] . Il faut<br />

souligner que la CI n’est pas une lésion précancéreuse. Pour<br />

autant, la CI demeure un véritable enjeu de santé publique,<br />

puisqu’on estime que son coût représente chaque année<br />

100 millions de dollars aux États-Unis [7] .<br />

■ Étiologie et physiopathologie<br />

L’origine de la CI est probablement multifactorielle. Plusieurs<br />

hypothèses étiologiques et pathogéniques ont été avancées,<br />

mais aucune n’a fait la preuve de sa réalité. Il existerait plusieurs<br />

composantes pouvant expliquer l’altération de la paroi vésicale<br />

qui se surajouteraient les unes aux autres.<br />

Infectieuse<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU et milieu de culture adapté<br />

ECBU, milieu de culture adapté et clinique<br />

ECBU, milieu de culture adapté et clinique<br />

Interrogatoire<br />

Interrogatoire<br />

Interrogatoire<br />

Adénome prostatique Débitmétrie et échographie<br />

Lithiase vésicale Échographie et cystoscopie<br />

Rétention aiguë d’urine Échographie<br />

Diverticule de l’urètre Interrogatoire et examen clinique<br />

Prolapsus Interrogatoire et examen clinique<br />

Endométriose Interrogatoire et examen clinique<br />

Candidose vaginale Interrogatoire et examen clinique<br />

Cancer du col de l’utérus,<br />

de l’ovaire<br />

Interrogatoire et examen clinique<br />

Vessie hyperactive Examen clinique et bilan urodynamique<br />

Cancer de prostate Examen clinique et PSA<br />

Adénome de prostate Débitmétrie et examen clinique<br />

Prostatite Examen clinique et ECBU<br />

Vessie neurologique Interrogatoire et examen clinique<br />

PSA : prostate specific antigen ; ECBU : examen cytobactériologique des urines.<br />

Il s’agit de l’hypothèse la plus ancienne. On estimait que des<br />

infections répétées étaient responsables d’un état inflammatoire<br />

chronique, rendant la vessie sensible à des germes en général<br />

non pathogènes. Pourtant, et malgré les techniques modernes,<br />

aucun micro-organisme n’a été mis en cause et les antibiotiques<br />

restent inefficaces dans le traitement de la CI [8] .<br />

Inflammation et mécanismes auto-immuns<br />

Il est difficile de savoir s’il s’agit d’une cause ou d’une<br />

conséquence : l’inflammation est constante dans la maladie<br />

avec des lésions de pancystite et d’inflammation périnerveuse<br />

[9] . L’association avec d’autres maladies inflammatoires est<br />

2 Traité de Médecine Akos


.<br />

un argument qui milite en faveur d’une composante autoimmune<br />

de la CI. Comme dans d’autres pathologies, des<br />

autoanticorps ont été retrouvés chez certaines patientes. Il<br />

n’existe pourtant pas un anticorps spécifique qui pourrait<br />

expliquer à lui seul l’apparition de la maladie.<br />

Mastocytes et médiateurs de l’inflammation<br />

Ces cellules géantes contiennent de nombreux médiateurs de<br />

l’inflammation comme l’histamine, les cytokines, la sérotonine<br />

et les leucotriènes. De nombreux signes cliniques, comme la<br />

douleur, l’œdème et la fibrose, pourraient être dus à un relargage<br />

excessif de ces facteurs dans le tissu vésical. On retrouve<br />

d’ailleurs une nette augmentation du taux de mastocytes activés<br />

dans les vessies des patients malades.<br />

Barrière de glycosaminoglycanes<br />

et perméabilité épithéliale<br />

La muqueuse vésicale est protégée par une couche de glycosaminoglycanes<br />

(GAG) présente sur l’épithélium. Dans la CI, on<br />

retrouve des defects dans cette couche responsables d’une<br />

augmentation de la perméabilité épithéliale. Les filaments<br />

nerveux sous-muqueux sont alors exposés aux toxiques urinaires.<br />

Ces lésions de l’épithélium pourraient correspondre aux<br />

glomérulations et cicatrices retrouvées macroscopiquement.<br />

Neurobiologie<br />

Chez certains patients, une augmentation de l’innervation<br />

sympathique a été constatée, notamment dans les cas de CI<br />

apparus au décours d’un traumatisme ou d’une chirurgie. La<br />

théorie évoque une inflammation neurogène répétée, faisant<br />

intervenir les fibres non myélinisées C, qui altèrerait les<br />

mécanismes centraux de réponse à la douleur. Ceci serait à<br />

l’origine des douleurs chroniques décrites par les patients<br />

atteints de CI.<br />

Facteur antiprolifératif<br />

Il s’agit d’un facteur de découverte récente, sécrété par<br />

l’urothélium (épithélium de revêtement de la vessie) des<br />

patients atteints de CI, qui pourrait causer l’inhibition de la<br />

prolifération de l’épithélium vésical. Le mode d’action hypothétique<br />

de ce facteur serait par la diminution de l’heparin-binding<br />

epidermal growth factor-like growth factor (HB-EGF) et l’augmentation<br />

parallèle de l’epidermal growth factor (EGF).<br />

■ Orientation diagnostique<br />

La CI est un diagnostic d’exclusion pour lequel aucun test<br />

clinique ou paraclinique spécifique n’est actuellement disponible.<br />

L’ensemble du bilan réalisé vise surtout à éliminer les<br />

diagnostics différentiels.<br />

Interrogatoire et examen clinique<br />

Les symptômes sont parmi les principaux éléments du<br />

diagnostic de la CI. Par conséquent, il est fondamental de<br />

réaliser un interrogatoire minutieux, rigoureux, voire « policier<br />

». Il doit permettre de définir la douleur avec précision. Elle<br />

est le plus souvent sus-pubienne, à irradiation vaginale, et peut<br />

se prolonger jusqu’au rectum ou au sacrum. La douleur de la CI<br />

est majorée par le remplissage vésical et diminue après la<br />

miction, pour réapparaître rapidement. Elle est associée à au<br />

moins un symptôme urinaire : pollakiurie, nycturie, urgenturie.<br />

L’évolution de la CI se fait par alternance de phases d’aggravation<br />

et de rémission. Afin d’affiner l’interrogatoire, certains<br />

questionnaires standardisés sont disponibles comme l’indice des<br />

symptômes de la cystite interstitielle aussi connu sous le nom<br />

d’indices des symptômes d’O’Leary-Sant, récemment validé au<br />

cours d’une large étude (Tableau 2) [10] .<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Tableau 2.<br />

Scores d’O’Leary-Sant.<br />

Score des symptômes d’O’Leary-Sant<br />

Évaluation des symptômes avant traitement<br />

Pendant le mois écoulé<br />

Combien de fois avez-vous ressenti une importante envie d’uriner sans<br />

pouvoir attendre ?<br />

0 Jamais<br />

1 Moins que 1 fois sur 5<br />

2 Moins que 1 fois sur 2<br />

3 À peu près 1 fois sur 2<br />

4 Plus que 1 fois sur 2<br />

5 Presque continuellement<br />

Avez-vous eu deux mictions séparées de moins de 2 heures ?<br />

0 Jamais<br />

1 Moins que 1 fois sur 5<br />

2 Moins que 1 fois sur 2<br />

3 À peu près 1 fois sur 2<br />

4 Plus que 1 fois sur 2<br />

Habituellement, combien de fois vous levez-vous pour uriner ?<br />

0 Jamais<br />

1 1 fois<br />

2 2 fois<br />

3 3 fois<br />

4 4 fois<br />

5 5 fois ou plus<br />

Avez-vous ressenti des douleurs ou des brûlures dans votre vessie ?<br />

0 Jamais<br />

1 Quelquefois<br />

2 Presque toujours<br />

3 Vraiment souvent<br />

4 Continuellement<br />

Score total :/19<br />

Score de gêne d’O’Leary-Sant<br />

Évaluation de la gêne avant traitement<br />

Pendant le mois écoulé<br />

La fréquence de vos mictions pendant la journée a représenté pour<br />

vous :<br />

0 Aucun problème<br />

1 Un problème minime<br />

2 Un petit problème<br />

3 Un problème moyen<br />

4 Un problème important<br />

Vous lever la nuit pour uriner a représenté pour vous :<br />

0 Aucun problème<br />

1 Un problème minime<br />

2 Un petit problème<br />

3 Un problème moyen<br />

4 Un problème important<br />

Ressentir le besoin d’uriner sans pouvoir attendre a représenté pour<br />

vous :<br />

0 Aucun problème<br />

1 Un problème minime<br />

2 Un petit problème<br />

3 Un problème moyen<br />

4 Un problème important<br />

Les brûlures, les douleurs, l’inconfort ou la pesanteur dans votre vessie<br />

ont représenté pour vous :<br />

0 Aucun problème<br />

1 Un problème minime<br />

2 Un petit problème<br />

3 Un problème moyen<br />

4 Un problème important<br />

Score total :/16<br />

Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle) 5-0675<br />

3


5-0675 Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle)<br />

Figure 1. Cystoscopie et test d’hydrodistension : visualisation de pétéchies<br />

à l’examen macroscopique (A, B).<br />

Examens complémentaires<br />

Analyses urinaires<br />

Il faut systématiquement réaliser un examen cytobactériologique<br />

des urines ainsi qu’une cytologie urinaire afin d’exclure<br />

une cystite d’origine tumorale ou infectieuse. Le dosage urinaire<br />

du facteur antiprolifératif, s’il n’est pas encore utilisé en<br />

pratique courante, est un des marqueurs prometteurs pour le<br />

diagnostic de CI. Son taux sérique semble en effet augmenté<br />

chez les patients atteints.<br />

Cystoscopie<br />

Réalisée sous anesthésie (générale ou locorégionale), afin de<br />

pouvoir être complétée d’une hydrodistension, elle permet<br />

surtout d’exclure les autres diagnostics (carcinome, cystite<br />

infectieuse, etc.). Elle met parfois en évidence une diminution<br />

de la capacité vésicale avec hypersensibilité, des pétéchies (ou<br />

glomérulations) (Fig. 1) et reproduction des symptômes. Elle<br />

permet aussi de réaliser des biopsies vésicales. La biopsie vésicale<br />

a pour but d’éliminer d’autres pathologies telles qu’un carcinome<br />

in situ vésical. La biopsie est logiquement réalisée après<br />

le test d’hydrodistension afin d’éviter une perforation vésicale.<br />

Une fibrose du détrusor peut exister et témoigne de l’ancienneté<br />

des troubles. Certaines anomalies sont évocatrices d’une CI sur<br />

les biopsies vésicales : une réaction inflammatoire dans la<br />

lamina propria, une mastocystose du détrusor, une présence de<br />

tissu de granulation ou une fibrose intrafasciculaire.<br />

On peut par ailleurs distinguer deux types de lésions qui, sans<br />

être suffisantes pour faire le diagnostic de CI, en sont évocatrices<br />

: d’une part une muqueuse qui paraît initialement normale<br />

A<br />

B<br />

et sur laquelle apparaît, après hydrodistension, des hémorragies<br />

sous-muqueuses ; d’autre part, la présence de petites ulcérations<br />

étoilées de la muqueuse, appelées désormais lésions de Hunner,<br />

le terme d’ulcère étant inapproprié. La cicatrice centrale<br />

circonférentielle est entourée de petits vaisseaux et de dépôts de<br />

fibrine. Il n’existe pas de caractéristiques histologiques typiques<br />

de la CI. Les biopsies, indispensables pour exclure d’autres<br />

diagnostics, mettent en évidence un œdème avec épaississement<br />

pariétal ainsi qu’une distension vasculaire sous l’épithélium. Les<br />

ulcérations sont elles situées dans la moitié supérieure du<br />

chorion. À distance, on retrouve un infiltrat inflammatoire<br />

diffus et non spécifique avec colonisation périneurale.<br />

Test de sensibilité au potassium<br />

Son intérêt repose sur la théorie de defects dans l’urothélium<br />

vésical qui permettraient aux ions de potassium de pénétrer<br />

dans la muqueuse vésicale, de dépolariser les fibres nerveuses et<br />

de recréer les symptômes. Il est réalisé en injectant en intravésical<br />

une solution contenant 40 mEq de chlorure de potassium.<br />

Des études récentes réfutent sa sensibilité et il est de moins en<br />

moins utilisé.<br />

Cystomanométrie<br />

Cette phase du bilan urodynamique est aspécifique et ne fait<br />

que supporter la suspicion clinique. Elle peut montrer des<br />

douleurs au remplissage, un B1 précoce, une capacité vésicale<br />

réduite, une diminution de la compliance, ou peut être<br />

normale.<br />

■ Prise en charge thérapeutique<br />

La CI est une maladie chronique sans marqueur ni critères<br />

diagnostiques validés, diagnostiquée souvent tardivement chez<br />

des patients qui se sont largement automédiqués.<br />

Le choix du traitement doit se faire après une évaluation<br />

précise des symptômes et de la plainte du patient, en pesant les<br />

bénéfices et les risques des thérapeutiques. Il doit s’accompagner<br />

d’un suivi attentif et régulier.<br />

Éducation et soutien psychologique<br />

Comme dans de nombreuses maladies chroniques, un soutien<br />

psychologique est indispensable. Il peut s’agir d’une simple<br />

réassurance par le praticien avec explication de la maladie, de<br />

ses symptômes et de l’évolution possible. Cela peut aller jusqu’à<br />

la thérapie comportementale en cas de symptômes psychologiques<br />

plus marqués ou la prise en charge d’une dépression<br />

réactionnelle. Tout dépend en réalité de l’ancienneté des<br />

troubles et de leur retentissement concret sur la vie des patients.<br />

Certains éléments subjectifs semblent en mesure d’améliorer les<br />

symptômes de la CI : la diminution du stress, la pratique<br />

régulière d’exercice physique ou les bains chauds. Certains<br />

patients rapportent qu’une modification du régime alimentaire<br />

en éliminant certains aliments peut soulager significativement<br />

les symptômes (Tableau 3) [11] . La mise en place d’une autorééducation<br />

vésicale basée sur l’allongement de l’intervalle<br />

Tableau 3.<br />

Conseils diététiques pour les patients atteints de cystite interstitielle [11] :<br />

liste des aliments pouvant aggraver les symptômes.<br />

Épices et moutarde<br />

Boissons Alcool, boissons gazeuses, caféine, jus d’airelles<br />

Laitages Fromage affiné, crème fraîche, yaourt<br />

Légumes Haricots verts, fèves, oignon, soja, tomates<br />

Fruits Airelles, rhubarbe, agrumes, ananas, pêche,<br />

prune, noix<br />

Pains Au seigle et au levain<br />

Viande et poissons Fumés ou en conserve, anchois, foie de volaille<br />

4 Traité de Médecine Akos


mictionnel aidée par un calendrier mictionnel peut s’avérer<br />

utile. Enfin, l’instauration d’exercices de relaxation périnéale<br />

permet parfois de diminuer les douleurs.<br />

Traitements oraux<br />

Antalgiques<br />

Souvent utilisés en automédication par les patients pour agir<br />

sur le versant douloureux de la maladie, les antalgiques conventionnels<br />

sont en réalité peu efficaces. Le risque de dépendance<br />

est élevé. Ils doivent être utilisés avec parcimonie, sur de courtes<br />

périodes, et l’administration d’antalgiques morphiniques doit<br />

être réservée aux formes rebelles et très symptomatiques. Ils<br />

doivent au mieux être mis en place dans le cadre d’une consultation<br />

spécialisée antidouleur.<br />

Antidépresseurs<br />

Ils jouent un rôle important comme neuromodulateurs de la<br />

douleur en augmentant son seuil de perception. Ils ont aussi un<br />

effet anticholinergique sur le détrusor. Différentes familles ont<br />

été utilisées. Les tricycliques (amitriptyline, Laroxyl ® 25 à<br />

75 mg/j) permettent une amélioration de la symptomatologie<br />

dans plus de 60 % des cas [12] . Les inhibiteurs de la recapture de<br />

la sérotonine sont aussi employés (Prozac ® , Zoloft ® ) pour leur<br />

action anticholinergique et leur effet de diminution de la<br />

recapture de la sérotonine et de la noradrénaline. Ils ont par<br />

ailleurs une action sédative, efficace sur la nycturie.<br />

Antihistaminiques<br />

Leur action reste controversée. L’hydroxyzine (Atarax ® ),<br />

principal antihistaminique utilisé, pourrait permettre de<br />

diminuer les symptômes en inhibant la dégranulation des<br />

mastocytes. Aucune modification en cystoscopie ou en histologie<br />

n’a été retrouvée chez les patients traités par hydroxyzine.<br />

La cimétidine, antihistaminique de type 2, utilisée initialement<br />

dans le traitement des ulcères gastroduodénaux, semble avoir<br />

fait la preuve de son efficacité [13] . À la dose de 200 mg deux<br />

fois par jour, elle améliore principalement la cystalgie et la<br />

nycturie.<br />

Pentosan polysulfate de sodium<br />

Il s’agit d’un polysaccharide de structure similaire au sulfate<br />

d’héparine, commercialisé sous le nom d’Elmiron ® . Il doit être<br />

administré à la dose de 100 mg trois fois par jour au long cours<br />

car l’effet optimal est obtenu après 6 mois de traitement. Il agit<br />

en corrigeant le defect dans la barrière de GAG. Les résultats des<br />

principales études sont contradictoires et son efficacité controversée<br />

[14, 15] .<br />

Gabapentine (Neurontin ® )<br />

Utilisé initialement comme antiépileptique, il est actuellement<br />

largement préconisé dans le traitement des douleurs<br />

chroniques dont celle de la CI car il augmenterait le seuil de la<br />

douleur.<br />

Autres thérapeutiques systémiques<br />

Les bénéfices controversés des corticoïdes et leurs nombreux<br />

effets secondaires ne permettent pas de préconiser leur usage<br />

dans le traitement de la CI. Les immunosuppresseurs, dont la<br />

ciclosporine A (Neoral ® ) utilisée dans de nombreuses maladies<br />

auto-immunes, a fait la preuve de son efficacité dans la prise en<br />

charge de la CI, mais la fréquence et la gravité de ses effets<br />

secondaires limite son usage. L’utilisation systémique de facteur<br />

de croissance nerveuse est une des thérapeutiques en cours<br />

d’évaluation et les premiers résultats semblent encourageants.<br />

Traitements endovésicaux<br />

Hydrodistension vésicale<br />

Elle possède non seulement un rôle diagnostique, mais aussi<br />

thérapeutique, et peut apporter une amélioration chez 30 % à<br />

Traité de Médecine Akos<br />

50 % des patients, surtout en cas de diminution de la capacité<br />

vésicale. Elle est efficace 4à12mois et peut être renouvelée. On<br />

note toutefois une diminution de l’efficacité au fur et à mesure<br />

des hydrodistensions. Elle s’effectue sous anesthésie générale ou<br />

locorégionale au décours de la cystoscopie et nécessite un<br />

remplissage à 80 cm H 2O pendant 1 heure. Son efficacité<br />

pourrait être due aux dommages qu’elle entraîne sur les nerfs<br />

afférents de la muqueuse vésicale.<br />

Pentosan polysulfate de sodium<br />

En raison d’une plus grande biodisponibilité, son efficacité<br />

par voie intravésicale serait supérieure à celle par voie orale. Une<br />

surveillance de la coagulation semble souhaitable, même si le<br />

risque de passage systémique est faible.<br />

Diméthylsulfoxyde<br />

Il s’agit d’un solvant industriel myorelaxant, antiinflammatoire<br />

et analgésique, capable de lyser le collagène. Il<br />

est depuis longtemps utilisé de manière empirique et semble<br />

calmer les douleurs. Il peut être utilisé en association à l’héparine<br />

ou aux corticoïdes pour augmenter son effet. Une résistance<br />

au traitement peut toutefois apparaître, liée à une fibrose<br />

vésicale secondaire à la dissolution du collagène vésical.<br />

Héparine<br />

En agissant sur la restauration des ponts GAG, elle renforce<br />

le rôle protecteur de la mucine qui protège l’épithélium. Le<br />

schéma consiste en une instillation de 10 à 25 000 UI d’héparine<br />

deux ou trois fois par semaine et peut être utilisé en cures<br />

courtes de 4à6semaines ou de manière chronique sur 1 an.<br />

L’utilisation de l’héparine permet d’améliorer la douleur, la<br />

pollakiurie et la capacité vésicale.<br />

Nitrate d’argent<br />

Premier traitement utilisé dans la CI, il n’est plus recommandé<br />

actuellement. Par son action caustique et antiseptique,<br />

il était préconisé dans les formes hémorragiques mais était<br />

responsable de nombreuses sténoses urétérales.<br />

Neurotoxines vanilloïdes<br />

En agissant sur l’hyperactivité réfractaire du détrusor, elles<br />

pourraient permettre une diminution des symptômes. Toutefois,<br />

les bénéfices du traitement ne sont pas établis et les résultats des<br />

études sont contradictoires.<br />

Hyaluronate de sodium<br />

Ce dérivé de l’acide hyaluronique permettrait de renforcer le<br />

rôle de l’urothélium contre l’agression des toxiques urinaires.<br />

Une étude randomisée versus placebo est en cours et devrait<br />

permettre de préciser les bénéfices de ce traitement dans la CI.<br />

BCG<br />

Il est utilisé dans le traitement du carcinome urothélial pour<br />

ses propriétés immunomodulatrices et a été testé dans celui de<br />

la CI. Le faible taux de réponse versus placebo et l’abondance<br />

des effets secondaires ont conduit à l’abandon de ce traitement<br />

en pratique courante.<br />

Toxine botulique de type A<br />

Il s’agit d’une neurotoxine qui bloque la libération de<br />

l’acétylcholine. On l’utilise en injectant en sous-muqueux, sous<br />

cystoscopie et sur une vingtaine de points différents, 100 UI de<br />

la toxine. Son efficacité dans la CI est encore controversée et<br />

fait l’objet uniquement de protocoles cliniques [16] .<br />

Neuromodulation<br />

Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle) 5-0675<br />

Il s’agit de la stimulation directe des racines sacrées. Son<br />

efficacité est déjà démontrée dans le traitement de l’incontinence<br />

des vessies hyperactives. Son utilisation est pour l’instant<br />

réservée aux patients ne répondant pas aux traitements oraux<br />

5


5-0675 Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle)<br />

ou endovésicaux. Le traitement s’effectue en deux phases : une<br />

période d’essai avec implantation d’une électrode temporaire<br />

reliée à un boîtier externe et, en cas de succès, l’implantation<br />

d’un boîtier définitif [17] .<br />

Chirurgie<br />

Résection transurétrale et laser<br />

Ce traitement est à réserver aux formes ulcéreuses de la<br />

maladie. Il permet une résection des lésions de Hunner, et<br />

entraîne une diminution des douleurs et de la dysurie. Les effets<br />

sont temporaires et il est nécessaire de répéter le traitement. Le<br />

risque est la nécrose locale responsable de fibrose qui majore les<br />

symptômes.<br />

Cystectomie<br />

Elle est à réserver aux patients réfractaires à tous les autres<br />

traitements et souffrant de symptômes très invalidants. Il faut<br />

peser au mieux l’indication et ses bénéfices avec le patient, ce<br />

d’autant qu’il s’agit d’une pathologie bénigne et que, si la<br />

majorité des patients est améliorée, certains restent malgré tout<br />

douloureux après ablation du réservoir vésical [18] .<br />

La cystectomie partielle a été abandonnée car aboutissant le<br />

plus souvent à une majoration des symptômes. On réalise<br />

Résection transurétrale<br />

de la prostate/laser<br />

Bonne réponse au traitement<br />

Poursuivre/répéter selon les<br />

symptômes<br />

Suspicion de syndrome de vessie douloureuse :<br />

douleur pelvienne accompagnée d’au moins un<br />

symptôme urinaire<br />

Interrogatoire<br />

Examen clinique<br />

ECBU et cytologie urinaire<br />

Cystoscopie et hydrodistension<br />

Pas de réponse au<br />

traitement<br />

désormais une cystectomie sus-trigonale ou totale avec urétrectomie,<br />

toutes deux complétées d’une entéroplastie de remplacement,<br />

dont la technique est affaire d’habitude. La chirurgie<br />

semblerait plus efficace chez les patients présentant une forme<br />

ulcéreuse de la maladie avec diminution de la capacité vésicale<br />

[19, 20] . L’importance des complications de la chirurgie et la<br />

réapparition de symptômes malgré les néovessies incitent à<br />

réserver ces traitements aux formes majeures de la maladie.<br />

Les dénervations vésicales et la sympathectomie sont<br />

abandonnées.<br />

■ Quelle option choisir ?<br />

L’Association européenne d’urologie a établi un algorithme<br />

décisionnel pour la prise en charge de la CI en 2008 (Fig. 2) [21] .<br />

En effet, aucun des traitements évoqués n’a fait la preuve<br />

complète de son efficacité et choisir la bonne attitude demeure<br />

difficile. Il faut avant tout privilégier les traitements dénués<br />

d’effets secondaires (régime, soutien psychologique et rééducation),<br />

ainsi que l’hydrodistension et les thérapeutiques orales.<br />

Les instillations endovésicales ne sont instaurées qu’en cas<br />

d’échec des premières mesures. La chirurgie doit elle être<br />

réservée à la minorité des formes très invalidantes et après échec<br />

de toutes les autres thérapeutiques.<br />

Forme ulcéreuse Forme hémorragique<br />

Traitements non invasifs<br />

Régime<br />

Soutien psychologique<br />

Relaxation périnéale<br />

Traitements oraux<br />

Pas de réponse au traitement<br />

Traitements endovésicaux<br />

Pas de réponse au traitement<br />

Traitement symptomatique et<br />

antidouleur<br />

Pas de réponse au traitement<br />

Inclusion dans le protocole :<br />

- injection de toxine botulique<br />

- neuromodulation sacrée<br />

En dernier recours : chirurgie<br />

Figure 2. Arbre décisionnel. Prise en charge de la cystite interstitielle [21] . ECBU : examen cytobactériologique des urines.<br />

6 Traité de Médecine Akos


.<br />

■ Conclusion<br />

La CI ou syndrome douloureux vésical est de plus en plus<br />

souvent diagnostiquée dans les pays développés, eu égard à<br />

l’amélioration des tests et au développement des moyens<br />

diagnostiques. Elle touche surtout la femme de 40 à 50 ans et<br />

son étiologie reste encore indéterminée. La CI est responsable de<br />

douleurs sus-pubiennes liées au remplissage vésical et de<br />

symptômes urinaires parfois très invalidants, responsables chez<br />

les patients atteints d’une altération parfois majeure de leur vie<br />

quotidienne et de leur état psychologique. En l’absence de<br />

traitement curatif connu, l’accent doit être mis sur des thérapeutiques<br />

non invasives, qui sont hélas encore trop souvent<br />

partiellement efficaces.<br />

■ Références<br />

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Diabetes, Digestive and Kidney Diseases Workshop on Interstitial<br />

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Continence Society. Neurourol Urodyn 2002;21:167-78.<br />

[3] Van de Merwe JP, Nordling J, Bouchelouche P, Bouchelouche K,<br />

Cervigni M, Daha LK, et al. Diagnostic criteria, classification, and<br />

nomenclature for painful bladder syndrome/interstitial cystitis: an<br />

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syndromes. Urology 1997;49:52-7.<br />

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unexplained clinical conditions. JUrol2004;172:1242-8.<br />

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cystitis. London: Springer Verlag; 1990.<br />

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and archival specimens from patients with interstitial cystitis, using<br />

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[10] Lubeck DP, Whitmore K, Sant GR, Alvarez-Horine S, Lai C.<br />

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polysulfate sodium for therapy of interstitial cystitis. A double-blind<br />

placebo-controlled clinical study. Urology 1990;35:552-8.<br />

[15] Parsons CL, Benson G, Childs SJ, Hanno P, Sant GR, Webster G. A<br />

quantitatively controlled method to study prospectively interstitial<br />

cystitis and demonstrate the efficacy of pentosanpolysulfate. JUrol<br />

1993;150:845-8.<br />

[16] Smith CP, Radziszewski P, Borkowski A, Somogyi GT, Boone TB,<br />

Chancellor MB. Botulinum toxin a has antinociceptive effects in<br />

treating interstitial cystitis. Urology 2004;64:871-5.<br />

[17] Whitmore KE, Payne CK, Diokno AC, Lukban JC. Sacral<br />

neuromodulation in patients with interstitial cystitis: a multicenter<br />

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305-9.<br />

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orthotopic substitution enterocystoplasty for interstitial<br />

cystitis. JUrol2002;167:603-7.<br />

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intractable interstitial cystitis: is histology and mast cell count a reliable<br />

predictor for the outcome of surgery? JUrol1990;144:255-9.<br />

[20] Peeker R,Aldenborg F, Fall M. The treatment of interstitial cystitis with<br />

supratrigonal cystectomy and ileocystoplasty: difference in outcome<br />

between classic and nonulcer disease. JUrol1998;159:1479-82.<br />

[21] Fall M, Baranowski AP, Elneil S, Engeler D, Hughes J, Messelink EJ,<br />

et al. Bladder pain syndrome/interstital cystitis (BPS/IC). In:<br />

Guidelines of chronic pelvic pain. Arnhem: European Association of<br />

Urology (EAU); 2008. p. 24-57.<br />

S. Drouin.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 13, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Drouin S., Rouprêt M. Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle). EMC (Elsevier Masson SAS,<br />

Paris), Traité de Médecine Akos, 5-0675, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Syndrome douloureux vésical (ou cystite interstitielle) 5-0675<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

7


AKOS Encyclopédie Pratique de Médecine 5-0515 (2004)<br />

C et<br />

Syndrome néphrotique<br />

N. Maisonneuve, R. Binaut, P. Vanhille<br />

article envisage les principales circonstances de découverte du syndrome néphrotique : syndrome<br />

œdémateux et complications, en particulier thromboemboliques ou dyslipémique. La biopsie rénale,<br />

fréquemment indiquée chez l’adulte, permet de caractériser la néphropathie glomérulaire responsable. Le traitement<br />

symptomatique et le traitement des différentes complications sont rappelés.<br />

© 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots-clés : Protéinurie ; Syndrome œdémateux ; Syndrome néphrotique ; Thromboses ; Insuffisance rénale<br />

■ Introduction<br />

Le syndrome néphrotique est défini par un ensemble de signes biologiques et<br />

éventuellement cliniques secondaires à une protéinurie suffisamment abondante<br />

pour entraîner des perturbations plasmatiques. Le syndrome néphrotique est<br />

toujours secondaire à une néphropathie glomérulaire. Il est en rapport avec une<br />

augmentation de la perméabilité de la membrane basale glomérulaire aux<br />

protéines plasmatiques. [1]<br />

■ Définition<br />

Le syndrome néphrotique est défini par l’existence d’une protéinurie<br />

supérieure à 3 g/24 h ou 50 mg/kg/j chez l’enfant, d’une hypoalbuminémie<br />

inférieure à 30 g/l et d’une hypoprotidémie inférieure à 60 g/l (Tableau 1). [2]<br />

Lorsque le syndrome néphrotique s’accompagne d’une hypertension artérielle<br />

et/ou d’une insuffisance rénale, et/ou d’une hématurie microscopique, on parle<br />

de syndrome néphrotique impur. Dans le cas contraire, le syndrome néphrotique<br />

est dit pur, à savoir qu’il n’est associé ni à une hématurie, ni à une hypertension<br />

artérielle, ni à une insuffisance rénale.<br />

Cette définition du syndrome néphrotique est arbitraire. Il est possible<br />

d’observer une protéinurie supérieure à 3 g/j en l’absence d’hypoalbuminémie,<br />

donc de syndrome néphrotique stricto-sensu. En règle générale, la démarche<br />

étiologique et le pronostic rénal d’une protéinurie majeure sont identiques quel<br />

que soit le taux d’albuminémie.<br />

‚ Protéinurie<br />

■<br />

Circonstance de découverte<br />

La recherche d’une protéinurie s’effectue facilement à l’aide d’une bandelette<br />

urinaire. Les urines sont recueillies dans un récipient propre et sec et la lecture se<br />

fait au bout de 1 minute par comparaison à une échelle colorimétrique, ou à<br />

l’aide d’un appareil de lecture automatique.<br />

Tableau 1. – Définition du syndrome néphrotique.<br />

- Protéinurie > 3 g/24 h<br />

- Protidémie < 60 g/l<br />

- Albuminémie < 30 g/l<br />

1<br />

Les résultats par méthode visuelle apparaîtront sous forme de croix [1]<br />

(Tableau 2).<br />

Le dépistage d’une protéinurie à la bandelette ne permet qu’une estimation<br />

semi-quantitative de la concentration d’albumine dans un échantillon. En cas de<br />

positivité, la protéinurie doit être confirmée et quantifiée sur les urines des<br />

24 heures. En cas d’impossibilité de recueil des urines des 24 heures (petit enfant,<br />

incontinence urinaire), ou lors d’examens répétés, en consultation externe ou<br />

dans le cadre de la surveillance du traitement, on peut apprécier l’abondance de<br />

la protéinurie par le calcul du rapport protéinurie/créatininurie (en mg/mg) sur un<br />

échantillon non minuté, recueilli au hasard. Cette valeur est approximativement<br />

égale à la protéinurie des 24 heures. La protéinurie est considérée comme<br />

néphrotique lorsque le rapport est supérieur à 3.<br />

La protéinurie du syndrome néphrotique est principalement composée<br />

d’albumine. Elle est sélective lorsqu’elle ne comporte que peu ou pas de protéines<br />

de haut poids moléculaire (immunoglobulines [Ig] par exemple), associées à<br />

l’albumine. En pratique, cette notion de sélectivité est quantifiée par le rapport<br />

IgG/albumine urinaire. Un rapport IgG/albumine inférieur à 0,2 témoigne d’une<br />

protéinurie sélective.<br />

La barrière de filtration glomérulaire a comme fonction essentielle d’assurer la<br />

haute perméabilité à l’eau et aux solutés de faible poids moléculaire, et en même<br />

temps d’assurer une restriction sélective au passage des molécules de poids<br />

moléculaires plus importants, au-delà de 60 kilodaltons (kDa), ainsi qu’aux<br />

éléments figurés.<br />

Sur le plan fonctionnel et anatomique, la barrière de filtration glomérulaire<br />

entre la lumière capillaire et l’urine primitive de la chambre urinaire de Bowman<br />

est définie par trois couches successives de dedans en dehors ( Fig. 1) :<br />

– l’endothélium capillaire glomérulaire largement fenestré qui n’assure<br />

aucune restriction de taille ;<br />

– la membrane basale glomérulaire, assemblage complexe (maillage) de<br />

glycoprotéines. La membrane basale assure environ 30 % de la restriction de<br />

passage de taille ;<br />

– les cellules épithéliales ou podocytes recouvrent le versant externe de la<br />

membrane basale glomérulaire. Les pieds des podocytes ou pédicelles sont à<br />

l’origine d’interdigitations qui recouvrent complètement l’ensemble de la<br />

membrane basale glomérulaire. Entre chaque interdigitation, il existe un<br />

diaphragme qu’on appelle diaphragme de fente, lui-même perforé par des pores<br />

Tableau 2. – Bandelette urinaire : appréciation semi-quantitative de la<br />

protéinurie.<br />

Traces 0,10-0,20 g/l<br />

+ 0,30 g/l<br />

++ 1g/l<br />

+ ++ 3 g/l<br />

+ ++ + 10 g/l<br />

5-0515


5-0515 - Syndrome néphrotique<br />

Figure 1 Aspect ultrastructural de la paroi capillaire glomérulaire. 1. Endothélium<br />

vasculaire ; 2. membrane basale ; 3. pédicelles.<br />

Tableau 3. – Principaux facteurs contribuant à l’hypercoagulabilité du<br />

syndrome néphrotique (d’après 4 ).<br />

Baisse des facteurs IX et XI<br />

Augmentation de facteurs procoagulants : V et VIII<br />

Augmentation du fibrinogène<br />

Diminution d’inhibiteurs de la coagulation : antithrombine III<br />

Altération du système fibrinolytique : augmentation de l’-2 antiplasmine, diminution<br />

du plasminogène<br />

Augmentation des capacités d’agrégation plaquettaire :<br />

• thrombocytose<br />

• augmentation de la libération de certaines substances in vitro (adénosine diphosphate,<br />

thrombine, collagène…)<br />

Augmentation du facteur IV et de b-thromboglobuline in vivo<br />

Altération des fonctions des cellules endothéliales<br />

rectangulaires d’environ 60 × 40 nm. Cette couche épithéliale assure l’ensemble<br />

de la restriction au passage de taille empêchant notamment le passage de<br />

protéines de poids supérieur à 60 kDa. Les pédicelles sont également recouverts<br />

de glycoprotéines polyanioniques qui assurent une restriction dite « charge<br />

sélective ».<br />

Le passage des protéines à travers la barrière glomérulaire est donc limité par<br />

la barrière :<br />

– « charge sélective » qui concerne les protéines de 70 à 150 kDa ;<br />

– « taille sélective » pour les protéines de taille supérieure à 150 kDa.<br />

Une protéinurie apparaît lorsque l’un des mécanismes est défaillant.<br />

‚ Œdèmes<br />

Les œdèmes sont fréquemment associés au syndrome néphrotique et en sont<br />

le symptôme le plus souvent révélateur. Ils s’accompagnent d’une prise de poids<br />

de 2 à 3 kg qui précède leur apparition. Ces œdèmes sont typiquement blancs,<br />

mous, prenant le godet, indolores. Ils sont de topographie déclive, prédominant<br />

le matin au niveau des paupières, du dos des mains et des lombes, siégeant le<br />

soir au niveau des membres inférieurs.<br />

La physiopathologie des œdèmes du syndrome néphrotique demeure<br />

controversée. La théorie classique, faisant appel à une rétention sodée<br />

secondaire à l’hypovolémie induite par la baisse de la pression oncotique liée à<br />

l’hypoalbuminémie, a longtemps été l’hypothèse retenue.<br />

Cependant, de nombreux arguments vont à l’encontre de cette hypothèse : [3]<br />

– la volémie est généralement normale, ou même augmentée dans le<br />

syndrome néphrotique, et la pression artérielle peut être également haute ;<br />

– au cours du syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes, la<br />

réabsorption tubulaire de sel apparaît avant la réduction de l’albuminémie. Lors<br />

de la rémission, l’excrétion sodée précède la remontée de l’albuminémie.<br />

Il existe aujourd’hui des preuves convaincantes montrant qu’il existe dans le<br />

syndrome néphrotique une incapacité rénale à excréter le sodium, liée en partie à<br />

une diminution de sensibilité du tube collecteur au facteur natriurétique<br />

auriculaire.<br />

‚ À l’occasion d’une complication du syndrome néphrotique<br />

Complications thromboemboliques<br />

Le mécanisme de ces complications reste imparfaitement connu. Il existe dans<br />

le syndrome néphrotique des anomalies de synthèse et d’excrétion de<br />

nombreuses protéines qui jouent un rôle dans l’hémostase. Ces anomalies sont<br />

rappelées [4] dans le Tableau 3.<br />

Les facteurs de risque des thromboses qu’il convient de dépister afin de<br />

débuter le traitement préventif sont représentés par :<br />

2<br />

– l’hypoalbuminémie inférieure à 20 g/l, le taux d’albumine étant corrélé à<br />

celui de l’antithrombine III ;<br />

– l’alitement ;<br />

– le traitement par corticoïdes ou diurétiques ;<br />

– enfin, ce risque thromboembolique est particulièrement noté au cours de<br />

deux néphropathies glomérulaires, la glomérulonéphrite extramembraneuse et<br />

l’amylose.<br />

Ces complications thromboemboliques, dont la fréquence est estimée à 20 %,<br />

sont principalement veineuses :<br />

– thrombose veineuse profonde touchant tous les territoires (membres<br />

supérieurs et inférieurs) ;<br />

– thrombose des veines rénales, rarement symptomatique (10 % des cas) et<br />

révélée par des douleurs lombaires, une hématurie, parfois une insuffisance<br />

rénale lorsque la thrombose est bilatérale ;<br />

– embolie pulmonaire qui fait toute la gravité des complications<br />

thromboemboliques.<br />

Ces complications, et notamment l’embolie pulmonaire, peuvent être<br />

révélatrices du syndrome néphrotique.<br />

Les thromboses artérielles surviennent plus facilement dans un contexte<br />

athéromateux, responsable d’accidents coronariens et cérébraux vasculaires,<br />

mais tous les territoires peuvent également être touchés. [5]<br />

Hyperlipémie<br />

L’hyperlipémie est si fréquente chez les patients ayant une protéinurie<br />

abondante qu’elle est considérée comme un des signes principaux du syndrome<br />

néphrotique. Toute hypercholestérolémie nécessite la réalisation d’une<br />

bandelette urinaire à la recherche d’une protéinurie. Cette hyperlipémie constitue<br />

un facteur de risque de maladie cardiovasculaire, avec une élévation du risque<br />

relatif d’infarctus du myocarde chez les adultes avec syndrome néphrotique de<br />

5,5, et une élévation du risque relatif de décès secondaire à une thrombose<br />

coronarienne de 2,8. La dyslipémie est d’autant plus fréquente que la protéinurie<br />

est abondante. [5]<br />

Les différentes anomalies lipidiques retrouvées dans le syndrome néphrotique<br />

sont résumées sur la Figure 2 .<br />

En pratique, les examens recommandés sont simples et représentés par le<br />

dosage du cholestérol total, du low density lipoprotein (LDL)-cholestérol et des<br />

triglycérides.<br />

Infections<br />

Augmentation<br />

de la synthèse<br />

hépatique<br />

Augmentation de<br />

la sécrétion de HDL<br />

Diminution de<br />

l’activité LCAT<br />

VLDL ↑<br />

IDL ↑<br />

LDL ↑<br />

HDL<br />

HDL 3<br />

HDL 2<br />

LPa ↑<br />

Dépôts de VLDL<br />

dans tissus ↑<br />

↑ catabolisme ;<br />

↑ lipoprotéine lipase<br />

endothéliale<br />

LDL oxydées ↑<br />

↑ Athérogenèse<br />

Clairance urinaire<br />

de HDL3 de petit PM<br />

Épuration des tissus<br />

en cholestérol<br />

vers le foie altéré<br />

↑ Athérogenèse<br />

Figure 2 Anomalies lipidiques rencontrées dans le syndrome néphrotique. PM :<br />

poids moléculaire ; HDL : high density lipoprotein ; LCAT : lécithine cholestérol<br />

acyl transférase ; IDL : intermediate density lipoprotein ; LDL : low density<br />

lipoprotein ; VLDL : very low density lipoprotein.<br />

Les patients néphrotiques sont sujets aux infections. Avant la découverte de<br />

l’efficacité de la corticothérapie dans le syndrome néphrotique de l’enfant, le<br />

sepsis était la première cause de décès.


Tableau 4. – Mécanismes de l’insuffisance rénale aiguë dans le syndrome<br />

néphrotique.<br />

- Hémodynamique (syndrome néphrotique majeur, hypoalbuminémie importante)<br />

- Œdème interstitiel<br />

- Précipitation tubulaire de protéines de haut poids moléculaire<br />

- Allergies<br />

- Médicament aggravant l’hémodynamique rénale : anti-inflammatoires non<br />

stéroïdiens, inhibiteurs de l’enzyme de conversion<br />

- Thrombose bilatérale des veines rénales<br />

La péritonite primitive, essentiellement due au pneumocoque mais aussi au<br />

streptocoque b – hémolytique ou à des organismes à Gram négatif, est<br />

caractéristique de l’enfant néphrotique. La vaccination antipneumococcique peut<br />

être proposée de façon prophylactique.<br />

La cellulite, particulièrement dans les zones d’œdèmes importants, est<br />

également classique, le plus souvent liée au streptocoque b – hémolytique. [6]<br />

Insuffisance rénale aiguë<br />

L’insuffisance rénale aiguë peut apparaître au cours du syndrome néphrotique<br />

de façon inaugurale ou lors d’une rechute. Elle est d’installation brutale, en<br />

rapport avec une hypovolémie efficace ou avec l’agglutination intratubulaire de<br />

protéines de haut poids moléculaire (protéinurie non sélective). [6]<br />

Cette forme d’insuffisance rénale aiguë se voit essentiellement chez l’enfant.<br />

L’administration d’albumine associée aux diurétiques est souvent utile dans cette<br />

forme d’insuffisance aiguë.<br />

Chez l’adulte, l’insuffisance rénale aiguë est souvent associée sur le plan<br />

histologique à une nécrose tubulaire aiguë et/ou un œdème interstitiel sévère.<br />

L’existence d’une artériolosclérose intrarénale est responsable d’une plus grande<br />

fréquence d’insuffisance rénale aiguë et détermine certainement le pronostic de<br />

récupération rénale. La prise en charge de ces formes nécessite parfois le recours<br />

à l’hémodialyse. Un cas particulier d’insuffisance rénale aiguë est lié à la<br />

thrombose bilatérale des veines rénales, décrite dans le chapitre précédent.<br />

Les différents mécanismes de l’insuffisance rénale aiguë sont rappelés dans le<br />

Tableau 4.<br />

L’insuffisance rénale aiguë peut également être liée au retentissement sur<br />

l’hémodynamique glomérulaire de médicaments souvent prescrits, comme<br />

l’association diurétique et inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) de<br />

l’angiotensine ou antagoniste des récepteurs de l’angiotensine 2 (ARA 2). En règle<br />

générale, l’apparition d’une insuffisance rénale aiguë sous diurétiques +/- IEC doit<br />

conduire à un arrêt temporaire de ces médicaments, suivi de leur réintroduction à<br />

doses plus faibles, en évitant notamment toute hypovolémie favorisée par un<br />

traitement diurétique à posologie excessive. En aucun cas, ce type d’accident ne<br />

représente une contre-indication à l’utilisation de ces médicaments, souvent<br />

prescrits afin de réduire la protéinurie et la pression artérielle.<br />

Autres complications<br />

Dénutrition<br />

– Dénutrition protidique<br />

Une fuite protidique massive et prolongée peut conduire à une dénutrition<br />

protidique menaçant le pronostic vital. [2] Cependant, l’albuminémie n’est que peu<br />

influencée par le contenu en protides des apports caloriques et les apports<br />

intraveineux d’albumine n’ont aucune efficacité sur l’état nutritionnel.<br />

– Dénutrition vitaminique<br />

En raison de la fuite urinaire de protéines porteuses, on a décrit des déficits en :<br />

– transferrine et céruléoplasmine ;<br />

– zinc ;<br />

– vitamine D ;<br />

– calcium ;<br />

– thyroxine binding protein avec fuite urinaire de T3 et de T4. Précautions d’emploi pour l’utilisation des médicaments<br />

Les IEC, les ARA 2 et les diurétiques, utilisés dans le cadre du traitement du<br />

syndrome néphrotique (traitement antiprotéinurique et des œdèmes) peuvent<br />

entraîner une insuffisance rénale aiguë, ce d’autant que l’hypovolémie efficace<br />

est marquée.<br />

L’existence d’une hypoalbuminémie est responsable d’une augmentation de<br />

la fraction libre des médicaments avec risque de surdosage en l’absence<br />

3<br />

d’adaptation posologique (antivitamines K [AVK], fibrates avec risque accru de<br />

myopathie). [4]<br />

Enfin, il existe un phénomène de résistance au traitement diurétique du fait de<br />

la liaison des diurétiques aux protéines intratubulaires urinaires, liaison réduisant<br />

la fraction libre active sur le site de liaison, par exemple le cotransporteur<br />

Na-K-2Cl dans le cas de l’utilisation de diurétiques de l’anse (furosémide,<br />

bumétanide).<br />

‚ Insuffisance rénale chronique<br />

En cas de néphropathie avec syndrome néphrotique non accessible à un<br />

traitement spécifique, la persistance d’une protéinurie abondante et d’une<br />

hypertension artérielle représente deux facteurs de risques essentiels de<br />

progression de l’insuffisance rénale chronique. Les objectifs à atteindre sont :<br />

– un rapport protéine/créatinine urinaire inférieur à 1 ;<br />

– une pression artérielle inférieure ou égale à 125/75 mmHg.<br />

En dehors de la néphropathie à lésions glomérulaires minimes, la plupart des<br />

causes de syndrome néphrotique est associée au risque de survenue d’une<br />

insuffisance rénale chronique.<br />

L’un des principaux facteurs de risque de progression de l’insuffisance rénale est<br />

le degré de la protéinurie. En dessous de 1 g/j, le risque est faible, au-delà, le risque<br />

augmente proportionnellement à l’élévation de la protéinurie.<br />

En effet, dans les conditions normales, les protéines traversent la barrière de<br />

filtration glomérulaire et sont ensuite réabsorbées au niveau tubulaire proximal.<br />

Le même mécanisme est observé en cas de protéinurie abondante, les protéines<br />

filtrées réabsorbées étant responsables d’une activation tubulaire proximale. Ceci<br />

résulte en la fabrication en excès de substances vasoactives et<br />

pro-inflammatoires, qui elles-mêmes sont sécrétées vers l’interstitium rénal et<br />

responsables de lésions inflammatoires. [7]<br />

L’effet délétère de la protéinurie a été démontrées dans l’étude REIN où, pour<br />

un contrôle de la pression artérielle identique, le déclin du débit de filtration<br />

glomérulaire, dans une population de non-diabétiques, était significativement<br />

plus élevé dans le groupe où la protéinurie était supérieure à 4,3 g/j. [8] Dans cette<br />

étude, alors que les chiffres de pression artérielle étaient identiques chez<br />

l’ensemble des patients, la diminution de la protéinurie obtenue par un IEC<br />

entraînait une réduction de la vitesse de progression de l’insuffisance rénale. Le<br />

ralentissement de la perte de filtration glomérulaire était corrélé avec<br />

l’importance de la chute de la protéinurie.<br />

Ainsi, la mise en route d’un traitement antiprotéinurique (IEC/ARA 2 et<br />

diurétique) nécessite la surveillance mensuelle de la protéinurie ou encore du<br />

rapport protéine/créatinine sur un échantillon urinaire.<br />

Quels examens envisager<br />

■<br />

en cas de suspicion<br />

de syndrome néphrotique ?<br />

‚ Examen clinique<br />

– Mesure de la pression artérielle.<br />

– Surveillance du poids puisque les œdèmes n’apparaissent qu’après une<br />

prise de poids de 3 kg. On recherchera également des épanchements des<br />

séreuses.<br />

– Recherche de manifestations extrarénales, cutanées, articulaires,<br />

inflammatoires, neurologiques périphériques…<br />

– Notion de prise médicamenteuse.<br />

‚ Examens biologiques de première intention<br />

Syndrome néphrotique - 5-0515<br />

– Protéinurie en g/24 h ou sur échantillon avec détermination du rapport<br />

protéine/créatinine urinaire.<br />

– Numération des globules rouges et des globules blancs par mL dans les<br />

urines à la recherche d’une hématurie microscopique (> 10 000 globules<br />

rouges/ml).<br />

– Créatininémie et calcul de la clairance selon la formule de Cockcroft, urée<br />

sanguine, ionogramme plasmatique.<br />

– Électrophorèse des protéines sériques.<br />

– Cholestérol total, LDL-cholestérol, triglycérides.<br />

– Numération-formule plaquettes.<br />

En deuxième intention, des examens plus approfondis seront envisagés en<br />

milieu spécialisé en fonction de l’orientation étiologique.


5-0515 - Syndrome néphrotique<br />

Tableau 5. – Fréquence (%) des néphropathies glomérulaires primitives<br />

avec syndrome néphrotique (d’après 7 ).<br />

Néphropathie Enfant Adulte < 60 ans Adulte > 60 ans<br />

LGM 76 20 20<br />

HSF 8 15 2<br />

GEM 7 40 39<br />

Autres 25 25 39<br />

LGM : lésions glomérulaires minimes ; HSF : hyalinose segmentaire et focale ; GEM : glomérulonéphrite<br />

extramembraneuse.<br />

‚ Chez l’enfant<br />

Place de la ponction-biopsie<br />

■<br />

rénale<br />

dans le syndrome néphrotique<br />

En présence d’un syndrome néphrotique pur, en l’absence de signes<br />

extrarénaux et biologiques inhabituels (hypocomplémentémie…), la<br />

ponction-biopsie rénale (PBR) n’est pas envisagée. En effet, la probabilité que le<br />

syndrome néphrotique soit lié à des lésions glomérulaires minimes est très<br />

élevée. La corticothérapie est instaurée d’emblée.<br />

En revanche, en présence d’un syndrome néphrotique impur, de signes<br />

extrarénaux, d’une hypocomplémentémie, ou en cas de corticorésistance ou<br />

corticodépendance du syndrome néphrotique, la biopsie rénale sera effectuée.<br />

‚ Chez l’adulte<br />

En raison de la diversité des néphropathies glomérulaires compliquées de<br />

syndrome néphrotique, la PBR est généralement nécessaire pour déterminer le<br />

type de glomérulopathie, pour orienter la démarche thérapeutique et pour<br />

préciser le pronostic. Elle est réalisée dans tous les cas lorsque le syndrome<br />

néphrotique survient de façon isolée, en l’absence de manifestations<br />

extrarénales, l’ensemble du tableau faisant suspecter une néphropathie<br />

glomérulaire primitive.<br />

Lorsque le syndrome néphrotique survient dans le cadre d’une pathologie<br />

systémique déjà identifiée, la réalisation d’une PBR sera discutée au cas par cas<br />

en fonction des renseignements qu’elle est susceptible d’apporter non seulement<br />

à visée diagnostique mais aussi pronostique. Dans certaines situations, la PBR<br />

n’est pas indiquée :<br />

– en cas de diabète de types 1 et 2, en raison des arguments suivants : diabète<br />

ancien, association à une hypertension artérielle, autres signes de<br />

microangiopathie (rétinopathie diabétique), syndrome néphrotique précédé<br />

d’une phase de protéinurie isolée et absence d’anomalies du sédiment urinaire ;<br />

– en cas d’amylose lorsqu’il existe des signes extrarénaux (altération de l’état<br />

général, purpura périorbitaire, macroglossie), si une biopsie d’organe plus<br />

facilement accessible est envisageable pour établir le diagnostic (biopsie des<br />

glandes salivaires accessoires, biopsie de la sous-muqueuse rectale, biopsie de la<br />

graisse périombilicale), associée à l’immunohistochimie pour le typage de<br />

l’amylose (cf. chapitre Glomérulonéphrites).<br />

Tableau 6. – Principales néphropathies glomérulaires révélées par un syndrome néphrotique (d’après 5 ).<br />

■<br />

Formes histologiques principales<br />

La fréquence des différentes glomérulopathies varie avec l’âge (Tableau 5).<br />

Les principales causes du syndrome néphrotique sont résumées dans le<br />

Tableau 6.<br />

■ Traitement<br />

Ne seront abordés ici que les traitements symptomatiques du syndrome<br />

néphrotique, les traitements des différentes glomérulopathies étant abordés dans<br />

le chapitre concerné. Les objectifs thérapeutiques visent à la disparition des<br />

œdèmes, à la réduction de la protéinurie et à la prévention des complications du<br />

syndrome néphrotique. [9]<br />

‚ Œdèmes<br />

Les objectifs du traitement du syndrome œdémateux sont multiples :<br />

– amélioration de l’esthétique, du confort et parfois restauration de la<br />

mobilité ;<br />

– éviter les effractions cutanées, sources d’infection (cellulite) ;<br />

– parfois en cas de surcharge hydrosodée majeure, réduire la pression<br />

artérielle et traiter un œdème aigu pulmonaire.<br />

Les moyens sont les suivants :<br />

– réduire les apports par un régime de 4 à 6 g de sel, correspondant à une<br />

natriurèse de l’ordre de 70 à 100 mEq/j ;<br />

– augmenter l’excrétion de sodium par l’utilisation de diurétiques, en préférant<br />

les diurétiques de l’anse (furosémide et bumétanide), fractionnés en deux à trois<br />

prises quotidiennes. Il faut souvent utiliser de fortes doses de diurétiques pour<br />

obtenir une natriurèse suffisante. L’association de furosémide à un diurétique<br />

d’action plus distale (thiazidique par exemple) peut s’avérer nécessaire.<br />

En pratique :<br />

– utilisation du furosémide en débutant par une dose de 120 mg/j ;<br />

– administration en deux à trois prises quotidiennes ;<br />

– augmentation progressive des doses pour une perte de poids quotidienne<br />

de 1 à 1,5 kg au maximum ;<br />

– si la natriurèse demeure insuffisante, on peut augmenter les doses de<br />

furosémide de 40 à 80 mg/j et y associer un diurétique distal, par exemple un<br />

thiazidique (hydrochlorothiazide) à la posologie de 12,5 à 25 mg/j ;<br />

– en cas d’hypokaliémie, l’utilisation d’amiloride, réduisant l’excrétion du<br />

potassium, est plus maniable que les antialdostérones.<br />

La surveillance s’effectue par la pesée quotidienne et la surveillance de la<br />

fonction rénale, une correction trop rapide pouvant être responsable d’une<br />

insuffisance rénale aiguë hémodynamique, favorisée par la prise simultanée<br />

d’IEC, et de complications thrombotiques.<br />

‚ Protéinurie<br />

En l’absence de possibilité de traitement spécifique de la néphropathie, le but<br />

du traitement doit viser à diminuer la pression intraglomérulaire, permettant ainsi<br />

une réduction de la protéinurie.<br />

Formes histologiques Association possible Biologie<br />

Lésions glomérulaires minimes Atopie, AINS, maladie de Hodgkin<br />

Hyalinose segmentaire et focale - VIH (race noire)<br />

- Héroïne<br />

- Sérodiagnostic VIH<br />

Glomérulonéphrite extramembraneuse - Médicaments : sels d’orD-pénicillamine, AINS<br />

- Infection : hépatite B, hépatite C, paludisme - Marqueurs de l’hépatite B, C<br />

- Lupus<br />

- Néoplasme : sein, poumon, tube digestif<br />

- Anticorps antinucléaires<br />

Glomérulonéphrite membranoproliférative - Hépatite C +/- cryoglobuline - Marqueurs de l’hépatite C, cryoglobuline<br />

- Endocardite - Hypocomplémentémie<br />

- Lupus - Hypocomplémentémie, anticorps anti-nucléaire<br />

Amylose AL - Myélome<br />

- Polyarthrite rhumatoïde, maladies inflammatoires<br />

- Électrophorèse et immunofixation des protéines sériques<br />

et urinaires<br />

Amylose AA<br />

du tube digestif, suppurations chroniques et infection<br />

par le BK, maladie périodique<br />

Néphropathie diabétique Rétinopathie diabétique, neuropathie diabétique<br />

AINS : anti-inflammatoires non stéroïdiens ; VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; BK : bacille de Koch.<br />

4


Une protéinurie abondante et persistante est étroitement corrélée avec la<br />

rapidité de progression de l’insuffisance rénale. [4]<br />

Les médicaments les plus adaptés dans ce but sont les IEC ou les ARA 2 qui<br />

permettent une réduction de la protéinurie de 40 à 50 %. [3] Cet effet est majoré<br />

par la prescription d’un régime sans sel et l’administration prudente d’un<br />

diurétique. La posologie de l’IEC (ou de l’ARA 2) est progressivement augmentée<br />

afin de parvenir à l’objectif thérapeutique, c’est-à-dire un rapport<br />

protéine/créatinine urinaire inférieur à 1.<br />

Le régime restreint en protéines a également été proposé pour diminuer la<br />

protéinurie ainsi que pour retarder l’évolution vers l’insuffisance rénale<br />

chronique ; cependant, ces régimes restreints en protéines (< 0,7 g/kg/j) exposent<br />

au risque de dénutrition et nécessitent une surveillance nutritionnelle rapprochée<br />

pour assurer un apport calorique quotidien suffisant.<br />

‚ Prévention du risque thromboembolique<br />

Dans tous les cas, en présence d’un syndrome néphrotique, il faut :<br />

– favoriser l’activité physique ;<br />

– prescrire des bas de contention ;<br />

– limiter la perte de poids à 1,5 kg/j lors de la déplétion des œdèmes. [9]<br />

Tant que persiste une hypoalbuminémie sévère < 20 g/l, un traitement<br />

anticoagulant à doses efficaces doit être instauré : AVK avec obtention d’un<br />

international normalized ratio (INR) entre 2 et 3.<br />

‚ Hyperlipémie<br />

Le traitement de l’hyperlipémie fait appel aux inhibiteurs de<br />

l’hydroxy-3-méthylglutaryl coenzyme A (HMG-Co-A) réductase (statines) qui ont<br />

montré une réduction significative du cholestérol total et du LDL-cholestérol dans<br />

le syndrome néphrotique. Ils sont généralement bien tolérés. Les statines sont<br />

utilisées à doses progressivement croissantes, jusqu’à la dose maximale, en<br />

association avec les règles hygiénodiététiques habituelles (activité physique,<br />

interruption de l’intoxication tabagique). La posologie est augmentée<br />

progressivement jusqu’à obtention d’un LDL-cholestérol proche de 1. La<br />

surveillance nécessite le contrôle biologique des créatine-phosphokinases (CPK).<br />

N. Maisonneuve (Praticien hospitalier)<br />

R. Binaut (Praticien hospitalier)<br />

P. Vanhille (Praticien hospitalier)<br />

Adresse e-mail: vanhille-p@ch-valenciennes.fr<br />

Service de néphrologie et de médecine interne, Hôpital de Valenciennes, avenue Désandrouin, BP 479, 59322 Valenciennes cedex, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : N. Maisonneuve, R. Binaut, P. Vanhille. Syndrome néphrotique.<br />

Encycl Méd Chir (Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Akos, 5-0515, 2003, 5 p<br />

[1] Niaudet P. Syndrome néphrotique chez l’enfant. Encycl Méd Chir,<br />

Néphrologie-Urologie, 18-039-D-10, Pédiatrie, (Elsevier SAS, Paris) 4-084-C-25<br />

2000 12p<br />

[2] Christian J. Syndromes glomérulaires. Fries D, Druet P, Fournier A, Paillard<br />

M, eds. Maladies rénales Paris: Hermann, 1992; 47-53<br />

[3] Koomans HA. Pathophysiology of edema and acute renal failure in idiopathic<br />

nephrotic syndrome. Adv Nephrol Necker Hosp 2000; 30: 41-55<br />

[4] Orth SR, Ritz E. The nephrotic syndrome. N Engl J Med 1998; 338: 1202-1211<br />

[5] Feehally J, Johnson RJ. Introduction to glomerular disease, clinical presentations.<br />

Johnson RJ, Feehally J, eds. Comprehensive clinical nephrology London:<br />

CV Mosby, 2000; 1-14<br />

Références<br />

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Syndrome néphrotique - 5-0515<br />

[6] Koomans HA. Pathophysiology of acute renal failure in idiopathic nephrotic<br />

syndrome. Nephrol Dial Transplant 2001; 16: 221-224<br />

[7] Remuzzi G, Ruggenenti P, Perico N. Chronic renal diseases: renoprotective<br />

benefits of renin-angiotensin system inhibition. Ann Intern Med 2002; 136:<br />

604-615<br />

[8] The Gisen Group (Gruppo Italiano di Studi Epidemiologici in Nefrologia).<br />

Randomized placebo-controlled trial of effect of ramipril on decline in glomerular<br />

filtration rate and risk of terminal renal failure in proteinuric, non-diabetic nephropathy.<br />

Lancet 1997; 349: 1857-1863<br />

[9] Cledes J, Perrichot R, Hanrotel-Saliou C. Symptomatic treatment of nephrotic<br />

syndrome. Presse Méd 2000; 29: 430-438


Plan<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques.<br />

Physiopathologie et prise en charge<br />

thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

D. Sahali, V. Audard, P. Remy, P. Lang<br />

Le syndrome néphrotique idiopathique (SNI) est une néphropathie glomérulaire définie par une<br />

protéinurie abondante associée à une hypoalbuminémie, sans lésions inflammatoires rénales ni dépôts de<br />

complexes immuns circulants. Le SNI traduit une maladie du podocyte qui se manifeste sur le plan<br />

histologique sous trois formes, les lésions glomérulaires minimes (LGM), la hyalinose segmentaire et<br />

focale (HSF) et la prolifération mésangiale. Le syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes<br />

(SNLGM) et la HSF représentent 70 % et 20 % des SNI de l’enfant, respectivement tandis que leur<br />

fréquence est également répartie chez l’adulte (20 %). L’atteinte podocytaire dans le SNI peut<br />

schématiquement résulter soit d’une anomalie structurale, soit d’une altération des signaux cellulaires,<br />

aboutissant à une perte de l’intégrité fonctionnelle qui est réversible dans les formes sensibles au<br />

traitement et irréversible dans les formes résistantes. Les études génétiques ont permis une avancée<br />

importante dans la compréhension de l’architecture moléculaire de la barrière de filtration glomérulaire<br />

grâce à l’identification de plusieurs gènes dont les mutations sont associées à la survenue d’un syndrome<br />

néphrotique corticorésistant. À l’inverse des formes génétiques de SNI, qui sont rares, la physiopathologie<br />

des formes corticosensibles, nettement plus fréquentes, reste incomprise. Des arguments cliniques et<br />

expérimentaux suggèrent que ces formes seraient liées à des perturbations immunologiques. L’étude des<br />

fonctions lymphocytaires T au cours des phases aiguës du SNI a mis en évidence une inhibition de<br />

l’hypersensibilité de type retardée, une hyporéactivité cellulaire aux mitogènes et une polarisation T<br />

helper « contrariée », caractérisée par un profil cytokinique mixte associant une production accrue<br />

d’interleukines Th1 (interféron gamma [IFNc], interleukines 8 [IL8]) et Th2 (IL13, IL10). Les altérations<br />

lymphocytaires au cours du SNI semblent affecter également le compartiment lymphocytaire B. Il semble<br />

que la différenciation B soit anormale comme l’atteste la baisse fréquente des taux sériques de certaines<br />

fractions des immunoglobulines (IgG1, IgG2), ce qui suggère des anomalies de la coopération T/B au<br />

cours du SNI. Le traitement du SNI repose en première ligne sur la corticothérapie à fortes doses. Le<br />

recours aux immunosuppresseurs (anticalcineurines, inhibiteurs de la synthèse des nucléotides, agents<br />

alkylants) est indiqué en cas de corticodépendance ou de corticorésistance.<br />

© 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Lésion glomérulaire minime ; Hyalinose segmentaire et focale ; Podocyte ; Lymphocyte T ;<br />

Lymphocyte B ; Corticosensibilité ; Corticorésistance<br />

Définition et classification 2<br />

Physiopathologie du syndrome néphrotique idiopathique 2<br />

Altération de la signalisation podocytaire au cours du syndrome<br />

néphrotique idiopathique 3<br />

Perturbations immunologiques dans le syndrome néphrotique<br />

idiopathique corticosensible 5<br />

Récidive du syndrome néphrotique après transplantation<br />

rénale 6<br />

Syndrome néphrotique idiopathique d’origine<br />

génétique 7<br />

Syndrome néphrotique congénital lié à une mutation du gène<br />

NPHS1 ou syndrome néphrotique de type finlandais 7<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène NPHS2 7<br />

Néphrologie<br />

18-039-I-10<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène PLCE1 (phospholipase C epsilon 1) (NPHS3) 7<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène ACTN4 (FSGS1) 7<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène Trpc6 (« transient receptor potential cation channel,<br />

subfamily C, member 6 ») (FSGS2) 7<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène CD2AP (FSGS3) 7<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié à une mutation<br />

du gène Wt1 8<br />

Prise en charge thérapeutique 8<br />

Objectifs 8<br />

Traitements spécifiques 8<br />

Perspectives thérapeutiques 10<br />

Conclusion 10<br />

1


18-039-I-10 Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

■ Définition et classification<br />

Le syndrome néphrotique idiopathique est une entité anatomoclinique<br />

définie par une protéinurie sélective massive (supérieure<br />

à 3 g/24 heures) et une hypoalbuminémie (inférieure à<br />

30 g/l) sans lésions glomérulaires visibles en microscopie optique<br />

et sans dépôts d’immunoglobulines ou de compléments en<br />

immunofluorescence. L’atteinte glomérulaire n’est pas associée à<br />

une infiltration de cellules sanguines ou de prolifération de<br />

cellules résidentes. Le SNI a essentiellement deux formes : le<br />

syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes (SNLGM,<br />

néphrose lipoïdique) et la hyalinose segmentaire et focale<br />

primitive (HSFP). Le SNI représente 85 % des néphropathies<br />

d’origine glomérulaire de l’enfant et 25-30 % de celles de l’adulte.<br />

La réponse au traitement corticoïde permet de distinguer les<br />

formes sensibles et les formes résistantes. Indépendamment de<br />

la classification histologique, les formes corticosensibles<br />

jouissent d’un bon pronostic, tandis que les formes corticorésistantes<br />

ont un pronostic plus réservé, qu’il s’agisse de SNLGM ou<br />

de HSF (Fig. 1). Environ 80 % des SNLGM et 50 % des HSF sont<br />

corticosensibles, mais les rechutes s’observent dans les deux tiers<br />

des cas lorsque les doses de corticoïdes sont réduites ou après<br />

l’arrêt du traitement, nécessitant chez certains patients l’introduction<br />

de substances immunosuppressives telles que la ciclosporine<br />

ou des agents alkylants (cyclophosphamide, chloraminophène).<br />

Parfois, la rémission complète ne peut être obtenue, en<br />

dépit de traitements successifs. Habituellement, ces patients<br />

développent, après un délai variable, des lésions de glomérulosclérose<br />

et évoluent vers l’insuffisance rénale chronique terminale.<br />

Le risque majeur après transplantation rénale est la<br />

récidive de la maladie sur le greffon. Il est estimé à 30 %àla<br />

première transplantation, mais peut atteindre 100 % si le<br />

greffon initial est détruit par la maladie primitive [1] . Il n’existe<br />

pas, pour l’instant, de marqueurs moléculaires qui permettent<br />

de distinguer ces formes cliniques ainsi que les différents profils<br />

évolutifs. On considère que les formes résistantes au traitement,<br />

mais qui ne récidivent pas après transplantation rénale sont<br />

causées par des anomalies intrinsèques de gènes (mutations ou<br />

délétions) qui sont impliqués dans le fonctionnement de la<br />

barrière de filtration glomérulaire. En revanche, les formes<br />

corticosensibles ou qui récidivent après transplantation seraient<br />

liées à des altérations du système immunitaire.<br />

La hyalinose segmentaire et focale est caractérisée par une<br />

hétérogénéité morphologique qui repose probablement sur des<br />

mécanismes pathogéniques différents. La classification de<br />

Columbia individualise cinq types de lésions HSF en fonction<br />

de leur emplacement topographique au sein du floculus glomérulaire<br />

et par la nature des altérations endocapillaires et<br />

extracapillaires associées (Tableau 1) : HSF non spécifiques (NS),<br />

85 %<br />

SNLGM<br />

15 %<br />

50 %<br />

périhilaire, cellulaire, du pôle tubulaire (tip lesion) et avec<br />

collapsus [2] . La signification pronostique de ces différentes<br />

entités a été clairement établie [3, 4] . En effet, les formes avec<br />

collapsus glomérulaire répondent mal au traitement et évoluent<br />

dans un délai relativement court vers l’insuffisance rénale<br />

chronique terminale, tandis que les HSF du pôle tubulaire ont<br />

un pronostic proche de celui des SNLGM (Tableau 1). Les<br />

formes cellulaires associent des lésions de HSF segmentaire à<br />

une hypercellularité endocapillaire et, de façon inconstante, une<br />

hyperplasie des podocytes. Leur pronostic est intermédiaire.<br />

Outre les formes primitives ou idiopathiques de syndrome<br />

néphrotique, il existe des formes secondaires qui sont suspectées<br />

devant des antécédents (maladies générales, infections, prise<br />

médicamenteuse, expositions aux toxiques, tumeurs malignes)<br />

et le contexte clinique (signes extrarénaux) qui vont orienter le<br />

choix de certains examens biologiques (sérologies des hépatites<br />

et du virus de l’immunodéficience humaine [VIH], étude du<br />

complément, anticorps antinucléaires) ou d’imagerie (radiographie<br />

des poumons, scanner). Le caractère idiopathique du<br />

syndrome néphrotique n’est confirmé que lorsque l’enquête<br />

étiologique demeure négative. Les principales causes de syndrome<br />

néphrotique secondaire sont résumées dans le Tableau 2.<br />

■ Physiopathologie du syndrome<br />

néphrotique idiopathique<br />

La fuite massive de protéines dans les urines résulte d’une<br />

hyperperméabilité de la barrière de filtration glomérulaire qui<br />

est composée de trois types d’éléments, l’endothélium fenestré<br />

du capillaire glomérulaire, une membrane basale glomérulaire,<br />

et les cellules épithéliales viscérales très différenciées appelées<br />

podocytes qui sont des cellules polarisées baignant dans le filtrat<br />

de l’espace de Bowman et qui sont ancrées à la membrane<br />

basale par des expansions membranocytoplasmiques appelées<br />

Hyalinose segmentaire et<br />

focale primitive<br />

Corticosensible Corticorésistant Facteurs génétiques<br />

Perturbations immunologiques + Récidive – !<br />

Dysfonction du podocyte<br />

Tableau 1.<br />

Classification morphologique des hyalinoses segmentaires et focales<br />

(HSF) et corrélation pronostique [2] .<br />

Classification des HSF (Columbia) Rémission (%) Évolution<br />

vers l’IRC (%)<br />

HSF avec collapsus glomérulaire 13 66<br />

HSF du pôle tubulaire 76 6<br />

HSF avec prolifération cellulaire 44 28<br />

HSF périhilaire Nd Nd<br />

HSF non spécifique 39 35<br />

IRC : insuffisance rénale chronique ; nd : non déterminé.<br />

50 %<br />

Transplantation<br />

Figure 1. Évolution des principales formes de syndrome néphrotique idiopathique (SNI). Le syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes<br />

(SNLGM) répond majoritairement aux corticoïdes et son pronostic à long terme est excellent. Les formes corticorésistantes sont rares et peuvent évoluer vers<br />

l’insuffisance rénale. La hyalinose segmentaire et focale (HSF) est considérée comme une entité distincte ; elle est sensible aux corticoïdes dans près de la moitié<br />

des cas et le pronostic est alors comparable au SNLGM corticosensible. Les HSF corticorésistantes peuvent évoluer vers l’insuffisance rénale et récidiver après<br />

transplantation. Il est recommandé de rechercher une cause génétique en l’absence de réponse aux corticoïdes. On considère que les SNI corticosensibles et<br />

probablement certaines formes corticorésistantes (en particulier celles qui récidivent après transplantation) sont d’origine immunologique, tandis que les SNI<br />

corticorésistants traduisent possiblement une maladie primitive du podocyte d’origine génétique.<br />

2 Néphrologie


Tableau 2.<br />

Principales causes de syndrome néphrotique idiopathique, lésion<br />

glomérulaire minime (LGM) ou hyalinose segmentaire ou focale (HSF),<br />

secondaire.<br />

LGM secondaires<br />

Médicaments :<br />

- AINS<br />

- interféron<br />

- rifampicine (exceptionnel)<br />

- lithium (exceptionnel)<br />

- interféron a<br />

Hémopathies :<br />

- maladie de Hodgkin<br />

- lymphomes non hodgkiniens (rare)<br />

Hyalinoses segmentaires et focales secondaires<br />

Néphropathies congénitales :<br />

- agénésie rénale<br />

- hypoplasie rénale<br />

Reflux vésico-urétéral<br />

Réduction néphronique acquise<br />

Infection VIH, parvovirus B19<br />

Médicaments : biphosphonates (pamidronate), lithium<br />

Obésité<br />

Diabète<br />

Consommation d’héroïne<br />

Drépanocytose et cardiopathies cyanogènes<br />

VIH : virus de l’immunodéficience humaine ; AINS : anti-inflammatoire non<br />

stéroïdien.<br />

1<br />

2<br />

3 5<br />

Figure 2. Ultrastructure de la barrière de filtration glomérulaire. Les<br />

cellules épithéliales viscérales (également appelées podocytes) baignent<br />

dans l’espace urinaire (1) et sont ancrées à la membrane basale glomérulaire<br />

(MBG, 3) par l’intermédiaire d’expansions cytoplasmiques appelées<br />

pédicelles (2). Le diaphragme de fente (4) est une fine membrane qui<br />

connecte les domaines basolatéraux des pédicelles et représente l’ultime<br />

barrière de filtration. La membrane basale glomérulaire est constituée de<br />

trois couches : externe (lamina rara externa), moyenne (lamina densa) et<br />

interne (lamina rara interna). Les cellules endothéliales (5) recouvrent la<br />

couche interne de la MBG et sont régulièrement espacées d’où le terme<br />

« d’endothélium fenestré ». Les trois structures, podocyte, MBG et endothélium<br />

composent la barrière de filtration glomérulaire.<br />

pédicelles (Fig. 2). L’espace entre deux pédicelles adjacents<br />

forme une fente étroite de 40 nm de largeur appelée fente de<br />

filtration qui est recouverte sur son versant externe par une<br />

structure membranoïde hautement spécialisée appelée<br />

diaphragme de fente, lequel constitue l’ultime barrière de<br />

filtration qui s’oppose aux passages de protéines dans la<br />

chambre urinaire [5, 6] . On peut schématiquement distinguer<br />

trois structures complexes et hautement dynamiques qui<br />

contrôlent l’intégrité de la barrière de filtration (Fig. 3) :<br />

le diaphragme de fente qui est une jonction adhérente<br />

unique, formée par des homodimères de néphrine sur lesquels<br />

s’agencent d’autres molécules telles que FAT et neph 1,<br />

P cadhérine et densine ;<br />

Néphrologie<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte 18-039-I-10<br />

4<br />

le domaine basal qui permet l’ancrage du podocyte dans la<br />

membrane basale glomérulaire (MBG) par l’intermédiaire de<br />

molécules d’adhésion comme les intégrines a3b1, les dystroglycans<br />

;<br />

le cytosquelette des pédicelles qui interagit avec ces structures<br />

par l’intermédiaire de protéines exprimées dans les zones<br />

cellulaires proximales, en particulier la podocine, CD2AP et<br />

l’ILK (integrin-linked kinase).<br />

La MBG est une matrice extracellulaire acellulaire qui recouvre<br />

l’endothélium des capillaires glomérulaires et qui est<br />

composée essentiellement de laminine 11 (a5, b2, c1), de<br />

perlecan, de collagène de type IV, de nidogène et de<br />

protéoglycans [7] .<br />

L’atteinte podocytaire dans le SNI peut résulter soit d’une<br />

anomalie structurale, soit d’une altération des signaux cellulaires,<br />

aboutissant à une perte de l’intégrité fonctionnelle qui est<br />

réversible dans les formes sensibles au traitement et irréversible<br />

dans les formes résistantes. Une avancée importante dans la<br />

compréhension de l’architecture moléculaire du podocyte a été<br />

accomplie au cours de cette décennie grâce à l’identification de<br />

plusieurs gènes dont les mutations sont associées à la survenue<br />

d’un syndrome néphrotique corticorésistant (Tableau 3). Les<br />

travaux qui ont découlé de l’étude des gènes, dont les mutations<br />

sont associées à la survenue d’un syndrome néphrotique<br />

corticorésistant, ont permis de concevoir une approche fonctionnelle<br />

du podocyte ; elle met en évidence le rôle central du<br />

cytosquelette podocytaire qui interagit, d’une part, avec le<br />

diaphragme de fente et, d’autre part, avec le domaine basal qui<br />

permet l’ancrage de la cellule à la membrane basale glomérulaire<br />

(Fig. 3). Tout processus qui interfère avec cette interconnexion<br />

dynamique est susceptible d’altérer le fonctionnement<br />

de la barrière de filtration et d’induire une protéinurie.<br />

Altération de la signalisation podocytaire<br />

au cours du syndrome néphrotique<br />

idiopathique<br />

Les données actuelles indiquent clairement que le<br />

diaphragme de fente n’est pas une structure statique, mais une<br />

plateforme dynamique qui communique en continu avec le<br />

cytosquelette, via un recrutement séquentiel des protéines<br />

présentes dans les couches lipidiques de la membrane plasmique.<br />

Cette signalisation bidirectionnelle est cruciale pour le<br />

maintien de l’intégrité fonctionnelle et la survie du podocyte [8] .<br />

Dans les formes génétiques, l’absence d’une protéine fonctionnelle<br />

interrompt la transduction des signaux vers l’extérieur ou<br />

l’intérieur du podocyte où elle induit une désorganisation du<br />

cytosquelette, ce qui entraîne une rétraction des pédicelles, un<br />

affaissement des podocytes et une disparition des diaphragmes<br />

de fentes.<br />

La néphrine est le premier composant structural du<br />

diaphragme de fente, codée par le gène NPHS1 qui a été<br />

identifié par clonage positionnel à partir de l’étude de familles<br />

atteintes de syndrome néphrotique congénital de type finlandais<br />

[9] . Il s’agit d’une protéine transmembranaire de 1 241<br />

acides aminés avec un court domaine intracellulaire et un<br />

domaine extracellulaire comportant huit domaines<br />

immunoglobuline-like (Ig-like) et un domaine transmembranaire<br />

de type fibronectine de type III. Chaque motif Ig-like est de type<br />

C2 caractéristique des protéines impliquées dans les interactions<br />

intercellulaires ou avec les composants de la matrice.<br />

La néphrine aurait le rôle d’un récepteur transmembranaire<br />

qui, suite à sa liaison avec son ligand, non encore identifié, va<br />

initier une cascade d’activations. Ce processus présente des<br />

similitudes avec celui qui met en jeu le récepteur clonotypique<br />

dans le lymphocyte T sauf que beaucoup d’acteurs moléculaires<br />

qui interviennent dans le lymphocyte ne sont pas exprimés<br />

dans le podocyte ou bien ne sont pas identifiés. La liaison de la<br />

néphrine à son ligand entraîne un regroupement des complexes<br />

dans des microdomaines lipidiques (lipid rafts). Cet événement<br />

va activer la protéine Fyn, un membre de la famille Src kinase,<br />

qui phosphoryle plusieurs résidus tyrosines situés à l’extrémité<br />

N-terminale de la néphrine, au niveau desquels sont recrutées<br />

des protéines kinases et des protéines adaptatrices qui se lient<br />

ensuite à la néphrine via leurs domaines SH2 [10-12] .<br />

3


18-039-I-10 Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

Glepp<br />

TRPC6<br />

Podocalyxine<br />

Collagène IV<br />

Ezrine<br />

Podoplanine<br />

NHERF2<br />

Ca ++<br />

Podocytes<br />

ILK<br />

Paxiline<br />

Vinculine<br />

Utrophine<br />

ILK<br />

β<br />

α<br />

Dystroglycans<br />

Agrine<br />

La phosphorylation de la néphrine par Fyn a deux conséquences<br />

essentielles (Fig. 4) :<br />

elle active la phosphatidyl inositol 3 kinase (PI3K) via l’interaction<br />

du domaine SH2 de la sous-unité régulatrice, p85 avec<br />

s<br />

Taline<br />

Actine<br />

s<br />

s<br />

ACTN4<br />

CD2AP<br />

Laminine 11<br />

Podocine<br />

Taline<br />

Paxiline<br />

Viculine<br />

Diagramme de fente<br />

Néphrine<br />

Neph1, 2, 3<br />

P cadhérine<br />

Densine<br />

Fat1<br />

MBG<br />

Endothélium<br />

Figure 3. Représentation schématique des pédicelles. Les pédicelles permettent l’adhésion des podocytes à la membrane basale glomérulaire (MBG). Elles<br />

représentent une structure dynamique, essentielle au processus de filtration. L’architecture moléculaire des pédicelles permet de distinguer au moins trois<br />

structures complexes avec des fonctions spécifiques : i) le domaine basal, composé notamment du complexe taline, paxilline et vinculine, associé à kinase ILK<br />

(integrin-linked kinase) des distroglycans et du collagène IV ; ii) le domaine basolatéral où sont localisées les protéines qui interagissent avec la néphrine (qui est<br />

le composant essentiel du diaphragme de fente), en particulier la podocine et CD2AP ; iii) le cytosquelette podocytaire qui renferme les réseaux d’actine,<br />

d’alpha-actinine-4 (ACTN4) et de synaptopodine. Ces trois domaines communiquent à travers des interconnections dynamiques (exemple CD2AP et<br />

synaptopodine).<br />

Tableau 3.<br />

Syndromes d’origine génétique.<br />

Nom du gène Syndrome associé Chromosomique<br />

localisation<br />

Néphrine (NPHS1) Syndrome néphrotique<br />

congénital de type<br />

finlandais<br />

Podocine (NPHS2) Syndrome néphrotique<br />

corticorésistant<br />

Alpha-actinine4<br />

(FSGS1)<br />

Canal calcique Trpc6<br />

(transient receptor<br />

potential cation channel<br />

– FSGS2)<br />

Protéine associée<br />

à CD2 (FSGS3)<br />

Phospholipase C<br />

epsilon 1 (PLce1)<br />

(NPHS3)<br />

Type de<br />

transmission<br />

Caractéristiques cliniques Relation<br />

19q13 AR Protéinurie massive débutant<br />

avant la naissance<br />

(hydramnios)<br />

Structure/fonction<br />

Protéine d’adhésion<br />

transmembranaire localisée<br />

dans le diaphragme de fente<br />

1q25–q31 AR Protéinurie survenant entre Protéine structurale<br />

3 mois et 5 ans, parfois impliquée dans la voie de<br />

chez l’adulte avec progression signalisation de la néphrine<br />

vers l’insuffisance rénale<br />

HSF héréditaire 19q13 AD Âge d‘apparition et sévérité<br />

variable<br />

Progression vers<br />

l’insuffisance rénale<br />

HSF héréditaire 11q21–22 AD Protéinurie sévère<br />

apparaissant à l’age adulte<br />

avec progression vers<br />

l’insuffisance rénale<br />

dans 60 % des cas<br />

Référence<br />

le domaine cytoplasmique de la néphrine tandis que la sousunité<br />

catalytique p110 génère des phospho-inositides capables<br />

de recruter et d’activer la sérine-thréonine kinase Akt qui joue<br />

un rôle-clé dans les processus de survie du podocyte ;<br />

9<br />

50<br />

Protéine du cytosquelette 54<br />

Canal calcique qui interagit<br />

avec la plateforme de<br />

signalisation diaphragme<br />

de fente<br />

HSF 6p12 AR HSF Protéine interagissant avec<br />

le domaine cytoplasmique<br />

de la néphrine<br />

HSF 10q23–q24 AR HSF d’apparition précoce<br />

avec rapide progression<br />

vers l’insuffisance rénale<br />

AR : autosomique récessif ; AD : autosomique dominant ; HSF : hyalinose segmentaire et focale.<br />

Phospholipase catalysant<br />

l’hydrolyse des polyphosphoinositides<br />

Rôle important dans<br />

la signalisation proximale<br />

4 Néphrologie<br />

55<br />

60<br />

52


Fyn<br />

Wasp<br />

Arp2/3<br />

Nck<br />

Réorganisation<br />

du cytosquelette<br />

Néphrine<br />

p85<br />

Podocine<br />

CD2AP<br />

PI3K<br />

p110<br />

Synpo<br />

RhoA<br />

Activation de facteurs<br />

antiapoptotiques<br />

elle stabilise le complexe fonctionnel néphrine-podocine [13]<br />

puisque la déphosphorylation de la néphrine provoque le<br />

détachement de la podocine et la liaison de la b-arrestin-2 à<br />

la néphrine qui subit alors une endocytose suivie d’une<br />

dégradation, interrompant ainsi la voie de signalisation [14] .<br />

D’autres protéines du diaphragme de fente semblent jouer un<br />

rôle déterminant dans la transmission du signal vers le cytosquelette<br />

podocytaire. La protéine CD2AP interagit directement<br />

avec p85 qui l’amène au contact du complexe néphrinepodocine,<br />

ce qui contribue à renforcer les signaux émanant de<br />

la plateforme de signalisation incluant les signaux antiapoptotiques.<br />

En effet, Les podocytes de souris déficientes pour CD2AP<br />

sont caractérisés par une susceptibilité accrue à l’apoptose,<br />

possiblement liée à la diminution de l’activité de Akt [15] .<br />

Outre son rôle sur l’activation de la néphrine, Fyn interagit<br />

avec N-Wasp qu’elle phosphoryle, entraînant le recrutement et<br />

l’ancrage de Nck aux microdomaines lipidiques [10, 11] . La<br />

famille des protéines adaptatrices Nck comprend Nck1 (Ncka) et<br />

Nck2 (Nckb ou Grb4) qui possèdent chacune trois domaines<br />

SH3 et un domaine SH2 C-terminal [16] . Nck se lie, via ses<br />

domaines SH3, à différentes protéines impliquées dans la<br />

régulation de l’actine telles que WASp et le complexe Arp2/<br />

3 [11] , tandis que, via ses domaines SH2, Nck se lie aux phosphotyrosines<br />

de la néphrine ce qui permet une connexion<br />

étroite entre la plateforme de signalisation et l’organisation du<br />

cytosquelette d’actine (Fig. 3). Le rôle de la phosphorylation de<br />

la néphrine au cours de la morphogenèse podocytaire reste<br />

controversé comme en témoignent des données récentes qui<br />

montrent que les souris déficientes pour la néphrine ont un<br />

développement podocytaire normal bien que les podocytes<br />

n’expriment pas de diaphragme de fente [17] .<br />

Akt<br />

Wt1 Bcl2 VEGF<br />

Figure 4. Voie de signalisation de la néphrine. La liaison de la néphrine<br />

à son ligand entraîne un regroupement des complexes dans des microdomaines<br />

lipidiques (lipid rafts ou radeaux lipidiques). Cet événement va<br />

activer la protéine Fyn, un membre de la famille Src kinase, qui phosphoryle<br />

plusieurs résidus tyrosines situés à l’extrémité N-terminale de la<br />

néphrine, au niveau desquels sont recrutées des protéines kinases et des<br />

protéines adaptatrices qui se lient ensuite à la néphrine via leurs domaines<br />

SH2. La phosphorylation de la néphrine par Fyn a deux conséquences<br />

essentielles : i) elle active la phosphatidyl inositol 3 kinase (PI3K) via<br />

l’interaction du domaine SH2 de la sous-unité régulatrice p85 avec le<br />

domaine cytoplasmique de la néphrine tandis que la sous-unité catalytique<br />

p110 génère des phospho-inositides capables de recruter et d’activer<br />

la sérine-thréonine kinase Akt, qui joue un rôle clé dans les processus de<br />

survie du podocyte ; ii) elle stabilise le complexe fonctionnel néphrinepodocine.<br />

Fyn interagit également avec N-Wasp qu’elle phosphoryle,<br />

entraînant le recrutement et l’ancrage de Nck aux microdomaines lipidiques.<br />

Nck se lie alors avec N-Wasp et le complexe Arp2/3 ainsi qu’avec la<br />

néphrine, ce qui permet une connexion étroite entre le complexe de<br />

signalisation regroupé dans les radeaux lipidiques et le cytosquelette<br />

d’actine. VEGF : vascular endothelial growth factor.<br />

Néphrologie<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte 18-039-I-10<br />

Les résultats acquis in vitro et surtout in vivo suggèrent que<br />

Fyn joue un rôle primordial dans la régulation des signaux<br />

proximaux et dans le contrôle dynamique du cytosquelette.<br />

Toutefois, la régulation de Fyn dans le podocyte n’est pas<br />

connue, d’autant que les protéines qui contrôlent son activation<br />

dans le lymphocyte T sont peu ou pas exprimées par le podocyte<br />

normal (données personnelles).<br />

L’étude de la signalisation podocytaire est actuellement à<br />

l’état embryonnaire. Les données disponibles font souvent<br />

l’objet de controverses et les résultats obtenus in vitro, voire<br />

dans des modèles animaux peuvent ne pas reproduire ou ne pas<br />

rendre compte du phénotype observé chez l’homme. La situation<br />

est d’autant plus complexe que nos connaissances sur<br />

l’architecture moléculaire du diaphragme de fente ainsi que les<br />

interactions de celui-ci avec les régions proximales du podocytes<br />

ou avec le milieu environnant sont faibles.<br />

Perturbations immunologiques dans<br />

le syndrome néphrotique idiopathique<br />

corticosensible<br />

Outre ces formes génétiques, l’étiologie du SNI d’origine<br />

dysimmunitaire reste une énigme. L’origine extrarénale du SNI<br />

est suspectée sur les arguments cliniques et expérimentaux<br />

suivants :<br />

la transplantation de reins de donneurs atteints de SNI, chez<br />

des receveurs indemnes de cette maladie entraîne, en moins<br />

de 1 semaine, une disparition complète du syndrome néphrotique<br />

lié à une LGM [18] , ou à une HSF [19] ;<br />

les échanges plasmatiques réalisés de façon exceptionnelle<br />

chez les patients en poussée résistant au traitement peuvent<br />

conduire à des rémissions ponctuelles, suggérant que le<br />

facteur pathogénique est présent dans le sang périphérique<br />

[20, 21] ;<br />

les surnageants de lymphocytes T périphériques isolés chez<br />

des patients atteints de SNI et activés in vitro ainsi que le<br />

plasma prélevé au cours des rechutes ou lors des récidives<br />

après transplantation rénale sont capables d’induire une<br />

protéinurie chez le rat [22-25] ;<br />

la transmission maternofœtale transitoire du syndrome<br />

néphrotique [26, 27] .<br />

Les événements moléculaires qui s’enchaînent après l’agression<br />

initiale du podocyte sont inconnus mais, compte tenu de<br />

la nature des protéines impliquées dans les formes familiales du<br />

syndrome néphrotique, il est possible que ces événements<br />

altèrent le fonctionnement normal du cytosquelette podocytaire<br />

et modifient les interactions entre le podocyte et la matrice<br />

extracellulaire.<br />

Les études physiopathologiques des formes corticosensibles<br />

ont été quasi exclusivement centrées sur les perturbations<br />

immunologiques. La Figure 5 résume les hypothèses pathogéniques<br />

actuelles. L’étude des fonctions lymphocytaires T au cours<br />

des phases aiguës du SNI a mis en évidence une inhibition de<br />

l’hypersensibilité de type retardée, une hyporéactivité cellulaire<br />

aux mitogènes et une polarisation T helper « contrariée »,<br />

caractérisée par un profil cytokinique mixte associant une<br />

production accrue d’interleukines Th1 (IFN, IL8) et Th2 (IL13,<br />

IL10). Ces résultats s’expliquent par l’activation concomitante et<br />

inappropriée au sein des mêmes cellules de voies transcriptionnelles<br />

antagonistes comme NF-jB, cmaf, AP1, T bet, ce qui<br />

semble être une caractéristique propre des formes corticosensibles.<br />

La régulation de l’interleukine 4 illustre remarquablement<br />

bien la notion d’interférence transcriptionnelle au cours du SNI.<br />

Chez les patients en phase de poussée et en l’absence de tout<br />

terrain allergique préexistant, l’interleukine 4 n’est pas produite<br />

dans les lymphocytes T CD4 + et ce, malgré l’induction du<br />

facteur transcriptionnel cmaf dont l’IL4 est un gène cible<br />

majeur, en raison d’une activation importante de la voie NF-jB<br />

qui s’oppose à la transcription du gène en bloquant l’accès<br />

de cmaf à son site de liaison sur le promoteur de l’IL4 [28] . Chez<br />

les mêmes patients en phase de rémission, le niveau<br />

d’IL4 s’élève significativement et est corrélé à l’inhibition de la<br />

voie NF-jB par les corticoïdes. Bien que les mécanismes moléculaires<br />

qui sous-tendent l’interférence transcriptionnelle restent<br />

à élucider, ces résultats suggèrent que la polarisation des<br />

lymphocytes T au cours des SNI est possiblement un événement<br />

5


18-039-I-10 Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

Stimuli immunogènes<br />

(infection, allergènes, stress)<br />

Activation<br />

NF-kB<br />

TLRs<br />

Cellules<br />

dendritiques<br />

Activation TLR<br />

Induction B7.1<br />

Désorganisation<br />

du cytosquelette<br />

secondaire. Des études récentes, fondées sur l’étude du polymorphisme<br />

de la région variable du récepteur T n’ont pas<br />

retrouvé un recrutement oligoclonal d’une population lymphocytaire<br />

au cours des poussées [29] .<br />

L’analyse du phénotype des sous-populations lymphocytaires<br />

T périphériques, lors des rechutes, montre une expansion des<br />

lymphocytes T CD4 + qui expriment le marqueur CD25 [30] , ainsi<br />

que des lymphocytes T CD4 + et CD8 + qui expriment le marqueur<br />

CD45RO, caractéristique des lymphocytes T mémoires<br />

[31] . L’expression de l’antigène CD25 (chaîne a du récepteur<br />

de l’IL2), au cours des poussées peut refléter une activation des<br />

cellules T CD4 + ou bien traduire le recrutement d’une souspopulation<br />

mineure (environ 10 %) de lymphocytes T<br />

CD4 + CD25 + , dotée de fonctions suppressives. Cette seconde<br />

éventualité est compatible avec certaines études fonctionnelles<br />

qui ont montré une diminution de l’immunité à médiation<br />

cellulaire appréciée par des tests cutanés d’hypersensibilité<br />

retardée (type IV dans la classification de Gell et Combs) et une<br />

réduction de la capacité des lymphocytes T à proliférer en<br />

présence de mitogènes [32, 33] . Cependant, le rôle spécifique des<br />

lymphocytes T suppresseurs dans le SNI reste à établir. Il est<br />

vraisemblable qu’une proportion majoritaire des cellules T<br />

CD4 + exprimant le marqueur CD25 correspond à des cellules T<br />

activées au cours des néphroses.<br />

Les altérations lymphocytaires au cours du SNI ne sont pas<br />

limitées au seul compartiment T puisque, au cours des poussées,<br />

on observe également une expansion significative de la population<br />

lymphocytaire B, mais celle-ci a été peu étudiée. Il semble<br />

que la différenciation B soit également affectée comme l’atteste<br />

la baisse fréquente des taux sériques des immunoglobulines qui<br />

ne peut être expliquée par la seule fuite urinaire car elle<br />

n’affecte que certaines fractions d’IgG (IgG1, IgG2 ou IgG3), ce<br />

qui suggère des anomalies de la coopération T/B au cours du<br />

SNI. Ces observations peuvent contribuer à la compréhension<br />

de l’effet bénéfique potentiel du traitement par des anticorps<br />

anti-CD20 au cours de certaines formes de SNI [34] .<br />

B7<br />

Podocyte<br />

Facteur circulant<br />

Actine<br />

Altération de la barrière<br />

de filtration glomérulaire<br />

Activation des<br />

Lymphocytes T<br />

Podocine<br />

Altération des<br />

protéines du DF<br />

Néphrine<br />

Activation<br />

NF-kB et cmaf<br />

Figure 5. Mécanismes potentiels impliqués dans la pathogénie du syndrome néphrotique idiopathique corticosensible. L’hypothèse actuellement admise<br />

postule que le syndrome néphrotique idiopathique (SNI) corticosensible résulte d’une anomalie d’une ou de plusieurs populations de cellules immunes<br />

(lymphocytes, cellules dendritiques ou monocytes), entraînant le relargage dans le sang d’un facteur inconnu qui altère le fonctionnement de la barrière de<br />

filtration glomérulaire. Le dysfonctionnement du podocyte pourrait résulter de l’induction de molécules qui sont habituellement non exprimées par ces cellules<br />

comme la molécule B7, sous l’effet du facteur circulant ou d’une activation inappropriée de l’immunité innée via les toll-like récepteurs (TLR).<br />

Dans certaines formes pédiatriques de SNI, les rechutes<br />

surviennent dans un délai très court suivant une infection,<br />

volontiers d’origine virale. La rapidité de survenue suggère un<br />

lien entre l’atteinte podocytaire et l’activation de l’immunité<br />

innée puisque a priori, l’immunité adaptative met deux à trois<br />

semaines pour être élaborée. Des données expérimentales<br />

réalisées chez la souris ont montré que l’injection de LPS, un<br />

antigène de la paroi bactérienne, induit l’expression podocytaire<br />

de novo de la molécule B7.1 et déclenche via sa liaison avec un<br />

toll-like récepteur, TLR4, des cascades de signaux pour l’instant<br />

non identifiées, qui entraînent une désorganisation du cytosquelette<br />

et un syndrome néphrotique [35] . L’intérêt de ce modèle<br />

en pathologie humaine reste à démontrer, mais il ouvre toutefois<br />

de nouvelles pistes de recherches.<br />

Récidive du syndrome néphrotique<br />

après transplantation rénale<br />

L’hypothèse d’un facteur de perméabilité altérant la barrière<br />

de filtration glomérulaire a été postulée dès les premières<br />

observations de récidive du SNI après transplantation<br />

rénale [36] . L’argument essentiel en faveur de cette hypothèse<br />

est le fait que les rechutes immédiates du SNI après transplantation<br />

peuvent être mises en rémission après échanges plasmatiques<br />

ou immunoadsorption du plasma [37, 38] .<br />

L’analyse par immunochimie du matériel élué des colonnes<br />

d’immunoadsorption n’a pas permis d’identifier un facteur<br />

potentiel, mais semble indiquer que l’essentiel de l’activité<br />

protéinurique de l’éluat se trouve dans les fractions sériques de<br />

poids moléculaire apparent inférieur à 150 kDa [38] . L’existence<br />

d’un facteur de perméabilité circulant impliqué dans la physiopathologie<br />

du SNI est admise par de nombreux auteurs, mais ce<br />

facteur reste une énigme quant à son origine, ses propriétés<br />

physicochimiques et son mécanisme d’action. La situation<br />

apparaît plus complexe car la récidive après transplantation<br />

rénale a également été rapportée dans les formes génétiques de<br />

6 Néphrologie


SNI quoiqu’elle soit de survenue habituellement plus tardive [39] .<br />

Dans cette éventualité, qui reste rare, il a été postulé que les<br />

patients développent des autoanticorps contre la protéine<br />

défectueuse dans le rein natif, mais nouvellement exprimée sur<br />

le rein sain du donneur, mais cette hypothèse, bien que<br />

conceptuellement attrayante, est difficilement compatible pour<br />

deux raisons :<br />

la récidive immédiate exclut une immunité adaptative alors<br />

que celle-ci est indispensable puisque l’autoanticorps est<br />

spécifique ;<br />

la recherche d’autoanticorps contre des cibles rénales est<br />

souvent négative. Le mécanisme des récidives dans ces formes<br />

génétiques reste inconnu.<br />

Plusieurs facteurs de perméabilité potentiels ont été incriminés<br />

comme le facteur de croissance de l’endothélium vasculaire<br />

(vascular endothelial growth factor [VEGF]) et l’hémopexine [40-<br />

42] . Le VEGF est produit et secrété par le podocyte et agit par<br />

des voies autocrine et paracrine sur les structures glomérulaires<br />

en se liant à ses récepteurs présents sur le podocyte, les cellules<br />

mésangiales et les cellules endothéliales. Bien qu’un taux plus<br />

élevé de VEGF ait été retrouvé chez les patients à la phase<br />

protéinurique, il n’est pas spécifique du SNI et les souris<br />

surexprimant VEGF ne développent pas un phénotype proche<br />

du SNI [43] . L’héparanase augmenterait la perméabilité glomérulaire<br />

en induisant la dégradation des glucosaminoglycanes<br />

héparane sulfates d’où la perte du revêtement anionique de la<br />

membrane basale glomérulaire qui, normalement, s’oppose par<br />

répulsion électrostatique au passage des protéines comme<br />

l’albumine dans l’espace urinaire. Ce mécanisme ne semble pas<br />

intervenir dans le SNI [41] . Le rôle de l’IL13 comme facteur<br />

d’hyperperméabilité potentiel de la barrière de filtration a été<br />

suggéré dans des travaux récents [44] .<br />

■ Syndrome néphrotique<br />

idiopathique d’origine génétique<br />

L’origine génétique d’un SNI peut être évoquée sur le caractère<br />

familial du syndrome néphrotique, le début précoce (au<br />

cours des premiers mois ou années de vie) et l’absence de<br />

réponse au traitement corticoïde et/ou immunosuppresseur. Ces<br />

formes correspondent à des anomalies structurales (mutations<br />

ou délétions) d’un gène codant pour une protéine constitutive<br />

de la barrière de filtration glomérulaire. L’approche génétique de<br />

ces formes familiales par clonage positionnel a permis d’identifier<br />

pour l’instant six gènes qui semblent impliqués dans les<br />

trois quarts des causes génétiques des SNI (Tableau 3). Des<br />

formes sporadiques de SNI d’origine génétique ont été décrites,<br />

notamment celles impliquant les gènes codant pour la podocine<br />

et la néphrine [45, 46] . Les altérations des gènes codant pour la<br />

néphrine et la podocine sont en cause dans 60 % des cas de<br />

syndromes néphrotiques corticorésistants apparaissant au cours<br />

de la petite enfance [47] .<br />

Syndrome néphrotique congénital lié<br />

à une mutation du gène NPHS1<br />

ou syndrome néphrotique de type<br />

finlandais [9]<br />

La prévalence de ce syndrome est particulièrement élevée en<br />

Finlande et s’explique par un effet fondateur qui définit<br />

l’apparition d’un allèle pathologique se répandant dans une<br />

population restreinte dont la mobilité géographique est faible et<br />

ayant peu de contact avec les autres populations. La protéine<br />

codée par ce gène, appelée néphrine, appartient à la famille des<br />

immunoglobulines et ressemble aux protéines d’adhésion.<br />

L’importance structurale et fonctionnelle de la néphrine dans<br />

les processus de filtration glomérulaire est démontrée par deux<br />

types d’observation :<br />

les souris déficientes en néphrine n’expriment pas de<br />

diaphragme de fente et développent à la naissance une<br />

protéinurie massive rapidement fatale [48] ;<br />

l’administration d’un anticorps monoclonal dirigé contre un<br />

épitope du domaine extracellulaire de la néphrine induit une<br />

protéinurie massive [49] .<br />

Néphrologie<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte 18-039-I-10<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène NPHS2<br />

Le gène NPHS2 code pour une protéine cytosolique, la podocine.<br />

Les mutations de ce gène sont responsables d’un syndrome<br />

néphrotique corticorésistant qui apparaît souvent dans les cinq<br />

premières années de vie et qui évolue rapidement vers l’insuffisance<br />

rénale terminale [50] . Les études immuno-ultra-structurales<br />

ont permis de montrer que la néphrine et la podocine sont<br />

colocalisées avec le cytosquelette d’actine. Le gène NPHS2 code<br />

pour une protéine cytosolique, la podocine [51] .<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène PLCE1<br />

(phospholipase C epsilon 1) (NPHS3)<br />

Les mutations de PLCE1 ont été décrites chez des enfants qui<br />

présentent soit une HSF, soit une sclérose mésangiale diffuse [52] .<br />

Ces mutations causent l’arrêt du développement des glomérules<br />

avec un blocage de la maturation des podocytes au stade de<br />

corps en S. La protéine Plce1 est une enzyme de type phospholipase<br />

qui hydrolyse le phosphatidyl inositol 4,5-biphosphate en<br />

inositol 1,4,5-triphosphate (IP3), qui stimule le relarguage de<br />

calcium à partir des stocks intracellulaires, et en diacylglycérol<br />

(DAG) qui active la protéine kinase C. PLCE1 active des signaux<br />

cellulaires qui sont cruciaux pour la croissance et la différenciation<br />

cellulaires. Fait intéressant, des mutations de PLCE1 ont été<br />

retrouvées chez près d’un tiers de patients (28,6 %) atteints de<br />

sclérose mésangiale diffuse alors que celle-ci était associée à une<br />

mutation de Wt1 que chez 8,5 % des patients [53] .<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène ACTN4 (FSGS1)<br />

Le gène codant pour l’alpha-actinine-4 (ACTN4) est responsable<br />

d’une forme familiale très rare de syndrome néphrotique<br />

corticorésistant à transmission autosomique dominante d’évolution<br />

plus lente [54] .<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène Trpc6 (« transient<br />

receptor potential cation channel, subfamily<br />

C, member 6 ») (FSGS2)<br />

Des mutations du gène Trpc6 ont été découvertes chez des<br />

enfants atteints d’un syndrome néphrotique corticorésistant<br />

(SNCR) à début précoce et évoluant vers l’insuffisance rénale<br />

terminale vers l’âge de 5 ans. Six familles, essentiellement<br />

d’origine turque, ont été rapportées. Le gène Trpc6 code pour un<br />

canal perméable aux ions calciques associé au diaphragme de<br />

fente où il interagit avec la néphrine et le podocine. Le mécanisme<br />

par lequel les mutations de Trpc6 induisent un flux<br />

calcique entraînant la dépolarisation de la cellule et une<br />

hyperperméabilité aux protéines et une HSF n’est pas élucidé. Il<br />

est intéressant de noter que l’expression de la forme normale de<br />

Trpc6 est accrue chez les souris invalidées pour le gène de la<br />

néphrine, mais également au cours des LGM, des HSF et des<br />

glomérulonéphrites extramembraneuses (GEM) et qu’elle est<br />

corrélée à une augmentation du flux calcique [55, 56] . La surexpression<br />

transitoire de Trpc6 dans les podocytes in vitro entraîne<br />

une désorganisation du cytosquelette tandis que la surexpression<br />

transitoire in vivo chez la souris induit une protéinurie [56] .<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène CD2AP (FSGS3)<br />

Le gène CD2AP code pour une protéine adaptatrice initialement<br />

identifiée par double-hybride dans le lymphocyte T où<br />

elle interagit avec la molécule costimulatrice CD2 et elle<br />

intervient dans l’endocytose, la motilité et la survie cellulaires<br />

[57] . L’imputabilité de ce gène dans certaines formes de<br />

syndrome néphrotique est d’abord suspectée à partir de travaux<br />

chez la souris qui ont montré que les souris déficientes en<br />

7


18-039-I-10 Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

CD2AP développaient un syndrome néphrotique congénital<br />

avec des dépôts mésangiaux de matrice extracellulaire [58] .Ce<br />

syndrome néphrotique n’est pas la conséquence d’un conflit<br />

immunitaire puisque les souris sauvages préirradiées et transplantées<br />

avec les cellules souches hématopoïétiques de souris<br />

invalidées pour le gène CD2AP n’ont aucune anomalie rénale.<br />

Chez l’homme, une mutation altérant l’épissage normal d’un<br />

des deux allèles, aboutissant à un déficit partiel en CD2AP, a été<br />

rapportée chez deux patients avec HSF [59] . Une observation<br />

récente de HSF avec insuffisance rénale sévère à début précoce<br />

a récemment été rapportée chez un patient présentant une<br />

mutation de CD2AP à l’état homozygote [60] .<br />

Syndrome néphrotique corticorésistant lié<br />

à une mutation du gène Wt1<br />

Wt1 est un facteur de transcription qui joue un rôle important<br />

dans l’embryogenèse, plus spécifiquement dans le développement<br />

du système génito-urinaire, du cœur et du système<br />

nerveux central. Les mutations homozygotes de Wt1 sont<br />

retrouvées dans près de 10 % des tumeurs de Wilms. Wt1 joue<br />

un rôle clé dans la différenciation podocytaire, mais son rôle ne<br />

se limite pas à la néphrogenèse, car il reste spécifiquement actif<br />

dans le podocyte mature où il contrôle l’expression de certains<br />

gènes dont la néphrine, la podocalyxine et le facteur de<br />

transcription PAX-2 [61-63] . En régulant la transcription de la<br />

néphrine et de la podocalyxine, Wt1 intervient dans le maintien<br />

de la structure et de la barrière de filtration glomérulaire.<br />

Des mutations hétérozygotes de Wt1 situées sur les exons 8 et<br />

9 sont retrouvées chez les patients présentant un syndrome de<br />

Denys-Drash qui associe une sclérose mésangiale diffuse, un<br />

pseudohermaphrodisme masculin et/ou une tumeur de Wilms.<br />

Ces patients développent une glomérulosclérose qui est reproduite<br />

chez des souris ayant la même mutation [64] . Le syndrome<br />

de Frasier est caractérisé par une HSF dans un contexte de<br />

pseudohermaphrodisme féminin (phénotype féminin associé à<br />

un caryotype XY) en rapport avec des mutations au niveau des<br />

séquences non codantes (introniques) du gène Wt1 qui entraîne<br />

la perte de l’isoforme plus KTS qui joue un rôle-clé dans la<br />

maturation des acides ribonucléiques (ARN) messagers.<br />

Bloqueurs du SRA (IEC/ARAII)<br />

Cible HTA < 125/75 mmHg<br />

Statine<br />

Corticorésistance :<br />

Recherche d'anomalie génétique<br />

Prednisone<br />

1 mg/kg/j (maximum : 80mg/j)<br />

12 à 16 semaines<br />

Corticorésistance :<br />

Ciclosporine 4 mg/kg/j en 2 prises (T0 entre 100<br />

et 150 ng/ml) associée à une faible corticothérapie<br />

(0,15 mg/kg/j au maximum 15 mg/j)<br />

Discuter le mycophénolate mofétil<br />

■ Prise en charge thérapeutique<br />

(Fig. 6)<br />

Objectifs<br />

La prise en charge des malades atteints de SNI doit répondre<br />

aux objectifs suivants :<br />

obtenir une rémission complète du syndrome néphrotique ;<br />

prévenir les rechutes ;<br />

identifier et traiter les complications aiguës d’un syndrome<br />

néphrotique persistant ;<br />

prévenir et traiter les complications à long terme liées aux<br />

effets secondaires des médicaments afin d’assurer le meilleur<br />

confort possible pour les patients qui ont des rechutes<br />

fréquentes.<br />

La prise en charge symptomatique, la prévention et le<br />

traitement des complications du syndrome néphrotique faisant<br />

l’objet d’un chapitre spécifique de l’EMC néphrologie, seul la<br />

prise en charge spécifique (actuelle et à venir) du SNI de l’adulte<br />

est développée ici.<br />

Traitements spécifiques<br />

Définitions<br />

Rémission complète<br />

Décroissance complète sur 3 mois<br />

Rémission partielle<br />

Diminution plus progressive sur 6 mois<br />

Échec du traitement<br />

En l'absence de réponse après 16 semaines<br />

Rechutes<br />

Si initialement corticosensible : reprise de<br />

la prednisone<br />

Sinon : ciclosporine 4 mg/kg/j en 2 prises<br />

(T0 entre 100 et 150 ng/ml)<br />

Une rémission complète (RC) est habituellement définie par<br />

l’obtention d’une protéinurie inférieure à 0,3 g/j (ou rapport<br />

protéinurie/créatinémie inférieur à 30 mg/mmol) et une albuminémie<br />

supérieure à 30 g/l.<br />

La rémission partielle (RP) est habituellement définie par une<br />

albuminémie supérieure à 30 g/l et une protéinurie persistante<br />

(supérieure à 0,30 à 3 g/j ou rapport protéinurie/créatinurie<br />

compris entre 30 et 300 mg/mmol).<br />

La rechute est habituellement définie par l’augmentation de<br />

la protéinurie au-delà de 3 g/j chez un patient en RC ou RP.<br />

La corticodépendance est habituellement définie comme la<br />

survenue d’une rechute durant la diminution des doses de<br />

corticoïdes ou dans les deux semaines qui suivent l’arrêt des<br />

corticoïdes [65] .<br />

Une rémission spontanée peut survenir au cours des syndromes<br />

néphrotiques à lésion glomérulaire minime (LGM). Elle est<br />

Figure 6. Arbre décisionnel. Modalités de<br />

prescription de prednisone. SRA : système<br />

rénine-angiotensine ; HTA : hypertension artérielle<br />

; ARAII : antagoniste des récepteurs de<br />

l’angiotensine II ; IEC : inhibiteurs de l’enzyme<br />

de conversion.<br />

8 Néphrologie


exceptionnelle chez les patients présentant une hyalinose<br />

segmentaire et focale primitive (HSF).<br />

Syndrome néphrotique à lésions glomérulaires<br />

minimes<br />

Un traitement curatif doit être envisagé après avoir éliminé<br />

une cause secondaire au syndrome néphrotique à lésions<br />

glomérulaires minimes (SNLGM) (médicaments, allergies,<br />

hémopathies) (voir Tableau 2).<br />

Traitement de première intention<br />

Il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’études contrôlées randomisées<br />

ayant évalué le traitement optimal du SNLGM de<br />

l’adulte. La corticothérapie reste le traitement de première<br />

intention. Les études non contrôlées rétrospectives portant sur<br />

le traitement par corticoïdes du SNLGM de l’adulte ont permis<br />

de montrer que, par rapport à la population pédiatrique, les<br />

réponses étaient plus tardives et plus lentes à obtenir avec un<br />

taux variant, dans les meilleurs cas, de 70 % à 8 semaines,<br />

jusqu’à 93 % après 42 semaines de traitement [66, 67] .<br />

Le traitement initial repose sur une corticothérapie (prednisone)<br />

à 1 mg/kg par jour sans dépasser 80 mg/j [66, 68] . La durée<br />

du traitement initial conditionne le risque de rechute, elle est<br />

définie comme suit :<br />

dans le cas de rémission complète rapide, la posologie de<br />

prednisone est maintenue sans modification pendant<br />

3 semaines supplémentaires. Puis une décroissance est<br />

organisée selon le schéma ci dessous (cf. « Poursuite du<br />

traitement ») ;<br />

dans les autres cas (rémission incomplète ou pas de rémission),<br />

le traitement initial est poursuivi sans modifier la<br />

posologie de prednisone pendant 12 semaines.<br />

Poursuite et décroissance du traitement<br />

En cas de rémission complète, le traitement initial est<br />

poursuivi pour une durée de 6à8semaines, à une posologie de<br />

0,5 mg/kg par jour (ou de 1 mg/kg par jour, un jour sur deux),<br />

puis en diminuant progressivement la corticothérapie sur<br />

8 semaines supplémentaires.<br />

En cas de rémission partielle, le protocole de décroissance de<br />

la corticothérapie est identique. L’introduction d’un traitement<br />

visant à réduire la protéinurie, associé à la surveillance de la<br />

protéinurie et/ou l’introduction d’un deuxième immunosuppresseur,<br />

peut être discutée.<br />

Traitement des rechutes<br />

Comme les enfants, les adultes sont exposés au risque de<br />

rechute (au moins une rechute dans 16 %à70%descasselon<br />

les études) [69, 70] . La rechute répond le plus souvent favorablement<br />

à une seconde cure de corticothérapie selon les mêmes<br />

modalités que le traitement initial.<br />

En cas de contre-indication aux corticoïdes, le traitement<br />

d’attaque repose sur la ciclosporine. Dans cette situation, il y a<br />

trop peu d’études pour émettre des recommandations en termes<br />

de doses et de durée optimale pour le traitement du SNLGM [71] .<br />

Traitement des syndromes néphrotiques à lésions<br />

glomérulaires minimes corticodépendants<br />

En cas de corticodépendance à haut seuil, deux possibilités<br />

thérapeutiques peuvent être envisagées :<br />

la ciclosporine (Neoral ® ), à la dose de 4 mg/kg/j (en deux<br />

prises matin et soir, à 12 heures d’intervalle), en association<br />

avec de faibles doses de corticoïdes (0,15 mg/kg/j pour un<br />

maximum de 15 mg/j), avec adaptation de la posologie aux<br />

taux sanguins [72-74] (taux résiduel de Neoral ® compris entre<br />

100 et 150 ng/ml en phase néphrotique et maintenu entre<br />

50 et 100 ng/ml en phase de rémission). Ce traitement<br />

permet l’obtention d’une rémission dans environ 60 % à<br />

80 % des cas [66] . Un traitement prolongé par ciclosporine<br />

pendant plus de 2 ans expose au risque de néphrotoxicité,<br />

même chez les patients dont les taux résiduels de ciclosporine<br />

sont normaux. Chez ces patients, la toxicité rénale de la<br />

ciclosporine peut être évaluée soit par mesure du débit de<br />

filtration glomérulaire (DFG) par une technique de référence,<br />

soit par biopsie rénale [75] qui évalue les lésions interstitielles<br />

et vasculaires imputables à la ciclosporine ;<br />

Néphrologie<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte 18-039-I-10<br />

le cyclophosphamide par voie orale, à la dose de 2 mg/kg/j,<br />

en association avec de faibles doses de corticoïdes, pour une<br />

durée de 8 à 12 semaines [76] .<br />

Plusieurs études non contrôlées suggèrent que le mycophénolate<br />

mofétil (MMF), en association à de faibles doses de<br />

corticoïdes, pourrait être utile dans la prise en charge des<br />

SNLGM corticodépendants ou cyclodépendants. La dose initiale<br />

est de 2 g/j en deux prises à adapter aux données pharmacocinétiques<br />

(AUC [area under the curve – aire sous la courbe] cible<br />

de 40 mg/l/h) [77, 78] .<br />

Traitement des syndromes néphrotiques à lésions<br />

glomérulaires minimes corticorésistants<br />

La corticorésistance est définie par la persistance du syndrome<br />

néphrotique en dépit d’un traitement corticoïde poursuivi à<br />

doses pleines pendant 8à12semaines.<br />

Sous réserve d’une corticothérapie prolongée, le SNLGM est<br />

rarement corticorésistant (environ 10 % des cas). Dans ces<br />

formes, l’utilisation de ciclosporine en association à de faibles<br />

doses de corticoïdes est recommandée. En cas d’échec après<br />

6 mois, le traitement par ciclosporine doit être interrompu [74] .<br />

Hyalinose segmentaire et focale primitive<br />

Un traitement curatif doit être envisagé après avoir éliminé<br />

une cause secondaire (Tableau 2).<br />

Les facteurs pronostiques influençant la réponse au traitement<br />

tels que l’intensité de la protéinurie, l’altération initiale de<br />

la fonction rénale, et les constatations anatomopathologiques<br />

(fibrose interstitielle, intensité des lésions de HSF et/ou de<br />

sclérose glomérulaire), doivent être évalués, et sont pris en<br />

compte dans le choix thérapeutique.<br />

Traitement de première intention<br />

La corticothérapie est le traitement de première intention du<br />

syndrome néphrotique causé par une HSF primitive de<br />

l’adulte [79, 80] . Selon les études, une rémission est obtenue dans<br />

40%à80%descas [81-84] . Cependant, il n’existe pas, à l’heure<br />

actuelle, d’études contrôlées randomisées ayant évalué le<br />

schéma optimal (dose et durée) de la corticothérapie. Plusieurs<br />

études ont montré que l’obtention d’une rémission était<br />

corrélée à la durée de traitement et survenait le plus souvent<br />

après 3à4moisdecorticothérapie. En conséquence, sur la base<br />

des données disponibles, le schéma thérapeutique recommandé<br />

est le suivant.<br />

Traitement initial. Il repose sur la corticothérapie (prednisone)<br />

à la dose de 1 mg/kg/j sans dépasser 80 mg pendant 12 à<br />

16 semaines.<br />

Poursuite du traitement. Si la rémission complète est<br />

obtenue, une décroissance progressive des doses sur 3 mois doit<br />

être réalisée. En cas de rémission partielle, une diminution<br />

lentement progressive sur 6 mois doit être effectuée. Les<br />

patients dont le syndrome néphrotique persiste après 12 à<br />

16 semaines de corticothérapie doivent être considérés comme<br />

en échec de traitement (corticorésistance) et la corticothérapie<br />

doit être interrompue. Bien qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle,<br />

de consensus sur la recherche d’anomalies génétiques (mutation<br />

de gènes codant pour des protéines podocytaires) chez les<br />

patients adultes présentant une HSF résistante à la corticothérapie,<br />

il est toutefois recommandé de réaliser cette recherche dans<br />

cette situation.<br />

Traitement des rechutes. Chez les patients initialement<br />

corticosensibles présentant une rechute de syndrome néphrotique,<br />

une seconde cure de corticoïdes peut être envisagée en<br />

l’absence d’effets secondaires ou de contre-indication. Dans<br />

cette dernière situation, le traitement de première intention de<br />

la HSF repose sur la ciclosporine à la dose de 4 mg/kg/j, en deux<br />

prises, avec surveillance des taux sanguins de ciclosporine (taux<br />

résiduel compris entre 100 et 150 ng/ml en phase néphrotique<br />

et maintenu entre 50 et 100 ng/ml en phase de rémission) [74] .<br />

Ce traitement doit être évité chez les patients présentant une<br />

altération de la fonction rénale (DFG inférieur à 40 ml/min/<br />

1,73 m 2 ). Le tacrolimus a été utilisé dans une étude, chez six<br />

patients en première intention, et a permis des réductions<br />

significatives de la protéinurie (de l’ordre de 75 %) sans pour<br />

autant obtenir des rémissions complètes [85] .<br />

9


18-039-I-10 Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte<br />

Hyalinose segmentaire et focale corticodépendante<br />

ou corticorésistante<br />

Le traitement de première intention repose sur la ciclosporine<br />

(4 mg/kg en deux prises), associée à de faibles doses de corticoïdes<br />

(0,15 mg/kg/j au maximum 15 mg/j) [74-80] . Dans un essai<br />

contrôlé, le taux de rémissions à 26 semaines chez les patients<br />

traités par cette combinaison est d’environ 70 % [73, 86] .La<br />

rémission est le plus souvent obtenue dans un délai de 2 semaines<br />

à 2 mois. Le traitement doit être poursuivi pour une durée<br />

d’au moins 6 mois après obtention d’une rémission complète<br />

(en diminuant les doses de ciclosporine). Dans tous les cas, il est<br />

recommandé d’éviter l’utilisation de ciclosporine à plus de<br />

5 mg/kg/j, les risques de néphrotoxicité étant alors majorés.<br />

L’utilisation de tacrolimus dans des formes résistantes aux<br />

corticoïdes et à la ciclosporine a permis dans une étude d’obtenir<br />

des rémissions complètes ou partielles [87] . Toutefois, il n’y<br />

a pas eu d’essai contrôlé à large échelle avec ce médicament.<br />

Les études portant sur les agents cytotoxiques (cyclophosphamide,<br />

chlorambucil) ne permettent pas de retenir leur utilisation<br />

dans cette indication [80] .<br />

En dernier recours et compte tenu des données encourageantes<br />

mais non contrôlées, la prescription du mycophénolate<br />

mofétil à la dose de 1g×2/jpour une durée de 6 mois peut<br />

être discutée [77, 88] . La dose doit être adaptée aux données<br />

pharmacocinétiques (AUC cible de 40 mg/l/h).<br />

En parallèle, il faut rechercher une anomalie génétique car si<br />

celle-ci était avérée, il faudrait suspendre progressivement le<br />

traitement corticoïde et/ou immunosuppresseur et envisager<br />

d’autres mesures thérapeutiques (inhibiteurs de l’enzyme de<br />

conversion (IEC), antagonistes des récepteurs de l’angiotensine<br />

II (ARAII), autres mesures symptomatiques), de manière à freiner<br />

l’évolution vers l’insuffisance rénale. La même attitude thérapeutique<br />

est recommandée en l’absence d’anomalie génétique<br />

(ou si celle-ci ne peut pas être recherchée pour des raisons<br />

matérielles).<br />

Récidive du syndrome néphrotique idiopathique<br />

après transplantation rénale<br />

La récidive du syndrome néphrotique idiopathique après<br />

transplantation rénale peut être immédiate dans les heures qui<br />

suivent la greffe rénale ou plus tardive, après quelques jours ou<br />

semaines. La fréquence des récidives est de l’ordre de 30 % à<br />

70 % selon les séries, mais elle avoisine 100 % en cas de<br />

deuxième transplantation et si la perte du premier greffon est<br />

directement liée à la récidive [1] . Le traitement des récidives<br />

comporte des échanges plasmatiques seuls ou associés au<br />

cyclophosphamide, au Cellcept ® ou à la ciclosporine à dose<br />

élevée. La majorité des patients répondent à ce traitement<br />

tandis que certains restent totalement réfractaires. Il n’existe pas<br />

de facteur prédictif permettant de différentier les répondeurs des<br />

non-répondeurs.<br />

Cas particulier de la grossesse<br />

Le cyclophosphamide, le mycophénolate mofétil sont contreindiqués<br />

en cas de grossesse. Les glucocorticoïdes peuvent être<br />

utilisés à doses habituelles, mais une surveillance rapprochée,<br />

multidisciplinaire, impliquant le néphrologue, le gynécologueobstétricien<br />

et le médecin traitant est requise. La possibilité<br />

d’une insuffisance surrénale aiguë chez le nouveau-né requiert<br />

la présence d’un pédiatre lors de l’accouchement. La ciclosporine<br />

n’est en principe pas indiquée au cours de la grossesse, en<br />

raison des cas de prématurité et de faible poids de naissance<br />

rapportés chez des nouveau-nés de patientes transplantées [89,<br />

90] . Toutefois, elle ne constitue pas une contre-indication<br />

absolue car ce risque apparaît relativement faible et la croissance<br />

semble se normaliser dès les premières semaines de vie [91] .<br />

Perspectives thérapeutiques<br />

L’utilisation de l’anticorps anti-CD20 (rituximab) a permis<br />

d’obtenir des rémissions prolongées dans certaines formes de<br />

SNLGM, caractérisées par des rechutes fréquentes et une<br />

corticodépendance à haut seuil et ce, en dépit de l’arrêt total<br />

des corticoïdes. Il semble que les rémissions soient maintenues<br />

dans un certain nombre de cas tant que le chiffre des lymphocytes<br />

B reste inférieur à1%,cequicorrespond en moyenne à<br />

.<br />

une durée de 6à9mois après la dernière injection de l’anti-<br />

CD20. Les rechutes réapparaissent lorsque ce taux dépasse 1 %,<br />

mais elles peuvent régresser après réintroduction du rituximab.<br />

Ces résultats sont intéressants et incitent à réaliser une étude<br />

prospective incluant un groupe contrôle. Il est difficile actuellement<br />

d’avoir une vision précise de l’efficacité du rituximab dans<br />

cette entité, car les échecs sont rarement rapportés [92] . Le<br />

mécanisme d’action de l’anti-CD20 reste incompris, mais le rôle<br />

des lymphocytes B dans la physiopathologie du SNLGM mérite<br />

d’être étudié à la lumière de ces résultats.<br />

■ Conclusion<br />

La compréhension de la physiopathologie du syndrome<br />

néphrotique idiopathique a fait des avancées remarquables au<br />

cours de la dernière décennie à travers l’identification de<br />

quelques gènes dont les mutations sont associées à certaines<br />

formes de HSF corticorésistantes. Les mécanismes de la protéinurie<br />

restent néanmoins non élucidés. De même, le rôle du<br />

système immunitaire dans la pathogénie des formes corticosensibles<br />

et de la récidive après transplantation n’est pas clairement<br />

déterminé. En dépit de ces méconnaissances, la recherche de<br />

nouvelles thérapeutiques tend à se développer et il est probable<br />

que les stratégies du futur cibleront spécifiquement chaque<br />

entité de ce syndrome.<br />

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D. Sahali (sahali@inserm.fr).<br />

V. Audard.<br />

P. Remy.<br />

P. Lang.<br />

Service de néphrologie et Inserm U-581, Centre hospitalier universitaire Henri Mondor, 51, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil,<br />

France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Sahali D., Audard V., Remy P., Lang P. Syndromes néphrotiques idiopathiques. Physiopathologie et prise<br />

en charge thérapeutique spécifique chez l’adulte. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-039-I-10, 2010.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

12 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Toxicité rénale des antiangiogéniques<br />

C. Vigneau, N. Rioux-Leclercq<br />

Depuis quelques années, de nouvelles thérapies antiangiogéniques ont permis une amélioration de la<br />

survie sans progression et la survie globale de patients souffrant de certains cancers (rein, tumeurs<br />

stromales gastro-intestinales, sein, côlon). Leur objectif est de bloquer l’action du vascular endothelial<br />

growth factor (VEGF) sur les cellules endothéliales et les cellules tumorales soit en bloquant le VEGF<br />

circulant par un anticorps monoclonal (bévacizumab), soit en bloquant son récepteur par un inhibiteur<br />

des récepteurs tyrosine-kinases (sunitinib, sorafénib). Ces traitements ont permis une amélioration du<br />

pronostic des patients mais ces thérapeutiques ont de nombreux effets secondaires. Outre les effets<br />

secondaires digestifs ou cutanés, le développement d’une hypertension artérielle ou d’une protéinurie<br />

semble fréquent et nécessite une bonne collaboration entre oncologues, néphrologues et cardiologues.<br />

Dans cet article, nous ne traitons que des complications cardiovasculaires et rénales de ces traitements.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Anti-VEGF ; Microangiopathie thrombotique ; Antiangiogéniques ; Prééclampsie<br />

Introduction 1<br />

Physiologie du « vascular endothelial growth factor »<br />

et de ses récepteurs 2<br />

Physiopathologie des effets secondaires cardiovasculaires 2<br />

Manifestations cliniques des effets secondaires cardiovasculaires 2<br />

Physiopathologie des effets secondaires rénaux 2<br />

Manifestations cliniques rénales 3<br />

Traitement de l’hypertension et/ou de la protéinurie 3<br />

Inhibiteurs de la « mammalian target of rapamycin » 4<br />

Conclusion 4<br />

■ Introduction<br />

Depuis quelques années, de nouvelles thérapies dites<br />

« ciblées » antiangiogéniques ont permis une amélioration de la<br />

survie sans progression et de la survie globale de certains<br />

patients souffrant de cancers du rein, du pancréas, du sein, de<br />

tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST), ou de cancers<br />

colorectaux, en particulier dans des formes métastasées [1-13] .De<br />

nouvelles indications sont également en cours d’étude, notamment<br />

en situation adjuvante. Cependant, de nombreux patients<br />

développent une hypertension artérielle (HTA), une protéinurie<br />

et/ou une insuffisance rénale au cours du traitement, effets<br />

secondaires pour l’instant peu étudiés et mal expliqués [14] .<br />

Différentes molécules sont d’ores et déjà commercialisées ou<br />

en cours de développement :<br />

le bévacizumab, Avastin ® et l’aflibercept, VEGF-Trap ® :<br />

anticorps monoclonaux humanisés recombinants ciblant le<br />

vascular endothelial growth factor (VEGF) circulant, administrés<br />

par voie intraveineuse ;<br />

le sorafénib, Nexavar ® et le sunitinib, Sutent ® , chefs de file de<br />

la classe des inhibiteurs oraux de tyrosine-kinases (ITK) dont<br />

le récepteur au VEGF.<br />

Néphrologie<br />

18-066-G-10<br />

D’autres inhibiteurs des récepteurs tyrosine-kinases : brivanib,<br />

erlotinib, imatinib, dasatinib, etc. sont aussi à l’étude dans un<br />

certain nombre de cancers.<br />

Certains de ces inhibiteurs sont multicibles, inhibant de<br />

façon non spécifique plusieurs récepteurs tyrosine-kinases, et<br />

certains sont plus spécifiques d’un récepteur : VEGF-R ou<br />

epidermal growth factor (EGF)-R par exemple.<br />

L’objectif de tous ces traitements antiangiogéniques est de<br />

bloquer l’action du VEGF sur les cellules endothéliales et les<br />

cellules tumorales. Le VEGF stimule en effet la prolifération des<br />

cellules endothéliales et la synthèse d’enzymes protéolytiques,<br />

indispensables à la formation de néovaisseaux et donc à la<br />

prolifération de la tumeur et à sa dissémination métastatique [1] .<br />

Ces tumeurs très métastatiques sont en effet très vascularisées et<br />

le taux de VEGF circulant, principal acteur de la néoangiogenèse,<br />

est corrélé au mauvais pronostic de ces patients, y compris<br />

sous traitement antiangiogénique [15, 16] .<br />

Ces traitements ont permis une remarquable avancée dans<br />

différents types de cancer, permettant une amélioration de la<br />

survie globale et de la survie sans progression [4-6, 8, 9, 11, 12, 17-20] .<br />

Cependant, ces thérapeutiques ont de nombreux effets<br />

secondaires. Les principaux sont : diarrhées (environ 38 %),<br />

manifestations cutanées avec rash/desquamation (29 %), voire<br />

syndrome pied/mains (19 %) [21] , alopécie (25 %), nausées<br />

(16 %), fatigue (15 %), HTA (12 % à 100 %), vomissements<br />

(10 %), stomatite et/ou œsophagite (7 %), allongements du QT<br />

et insuffisance cardiaque (10 % à 40 %) [22] ainsi qu’une<br />

protéinurie [10, 23] . La fréquence des effets secondaires varie<br />

selon la molécule utilisée (anticorps monoclonal ou ITK) mais<br />

tous ces effets secondaires et en particulier cardiovasculaires et<br />

rénaux peuvent être observés avec les différentes molécules.<br />

Pour les cancérologues, la prise en charge de ces effets secondaires<br />

cardiovasculaires et rénaux diffère de celle des effets<br />

secondaires hématologiques ou digestifs dont ils ont l’habitude<br />

avec les chimiothérapies classiques et nécessite une bonne<br />

collaboration entre oncologues, néphrologues et cardiologues<br />

[14] .<br />

1


18-066-G-10 Toxicité rénale des antiangiogéniques<br />

Dans cet article, nous ne traitons que de l’HTA et des manifestations<br />

rénales de ces traitements.<br />

■ Physiologie du « vascular<br />

endothelial growth factor »<br />

et de ses récepteurs<br />

Le VEGF est indispensable à la croissance des cellules endothéliales<br />

normales ou pathologiques. L’invalidation in utero du<br />

gène du VEGF est létale à un stade précoce du développement.<br />

Le VEGF est donc aussi l’acteur principal de la néoangiogenèse<br />

tumorale et donc de la croissance et de la dissémination<br />

tumorale. Le VEGF-A identifié en 1983, appelé souvent VEGF,<br />

existe sous forme soluble plasmatique et sous forme liée à la<br />

matrice extracellulaire, nécessitant alors l’action des protéases<br />

pour être actif [24] . La sécrétion du VEGF est sous la dépendance<br />

de nombreux facteurs de transcription, mais le principal est<br />

hypoxia-inducible factor-1 (HIF-1) qui est activé en réponse à<br />

l’hypoxie tissulaire.<br />

Les récepteurs au VEGF (VEGF-R) sont des récepteurs transmembranaires<br />

à activité tyrosine-kinases, de plusieurs types :<br />

VEGF-R1 (ou Flt-1), VEGF-R2 (KDR/FLK-1) et VEGF-R3 (Flt-4). Les<br />

récepteurs VEGF-R1 et VEGF-R2 sont exprimés principalement<br />

par les cellules endothéliales des vaisseaux sanguins mais aussi<br />

par les plaquettes, par certaines cellules tumorales ou par les<br />

cellules mésangiales rénales [25] . La fixation du VEGF sur le<br />

récepteur VEGF-R2 entraîne une dimérisation puis des cascades<br />

de phosphorylation et l’activation de différentes voies de<br />

signalisation comme la voie phosphoinositide 3-kinase/proteine<br />

kinase B/mammalian target of rapamycin (PI3K/Akt/mTOR) ou Ras/<br />

Raf/mitogen-activated protein kinase/extracellular signal-regulated<br />

kinase (MEK-ERK). La conséquence de l’activation de VEGF-<br />

R2 est donc un effet prolifératif sur les cellules endothéliales et<br />

une augmentation de la perméabilité capillaire. L’activation du<br />

VEGF-R1 entraîne la sécrétion de facteurs de croissance mais n’a<br />

pas d’effets directs sur la prolifération des cellules endothéliales.<br />

Le VEGF-R3 est exprimé par les cellules endothéliales surtout des<br />

vaisseaux lymphatiques. Leur rôle va donc être différent, avec<br />

une action majeure dans la néoangiogenèse pour le VEGF-R2,<br />

alors que le VEGF-R3 intervient surtout dans la lymphangiogenèse.<br />

Les inhibiteurs des tyrosine-kinases étant des inhibiteurs non<br />

spécifiques ou multicibles, ils inhibent l’effet des trois récepteurs<br />

ainsi que d’autres récepteurs tyrosine-kinases comme le platelet<br />

derived growth factor (PDGF)-R.<br />

■ Physiopathologie des effets<br />

secondaires cardiovasculaires<br />

La physiopathologie de ces effets secondaires cardiovasculaires<br />

est loin d’être claire. Cependant, le mécanisme principal est<br />

probablement que l’antagonisme du VEGF entraîne une inhibition<br />

de la synthèse de monoxyde d’azote (NO) et de la prostacycline<br />

(prostaglandine) PGI 2, induisant une vasoconstriction,<br />

une diminution de l’excrétion sodée et ainsi une élévation de<br />

la pression artérielle [26-29] . D’autre part, l’ischémie tissulaire<br />

induite par les antiangiogéniques et le blocage du VEGF-R<br />

entraînent une augmentation de l’endothéline, puissant vasoconstricteur,<br />

responsable de la dysfonction cardiaque et de<br />

l’hypertension via ses récepteurs ET ARetET BR [27, 30] . Enfin, il<br />

est possible que l’inhibition du VEGF induise une activation du<br />

système rénine-angiotensine (SRA), en partie responsable de<br />

l’HTA, sans que cela ait pu pour le moment être mis en évidence<br />

[27] . Plus d’études sont nécessaires pour mieux comprendre<br />

les mécanismes de l’HTA et l’insuffisance cardiaque sous ces<br />

traitements.<br />

■ Manifestations cliniques<br />

des effets secondaires<br />

cardiovasculaires<br />

La fréquence de l’HTA sous thérapie ciblée est très difficile à<br />

apprécier et à quantifier. En effet, les études ayant permis la mise<br />

sur le marché de ces traitements relatent un taux faible d’HTA,<br />

mais la technique de mesure n’est que rarement précisée, les<br />

HTA n’étant déclarées que quand elles sont considérées comme<br />

« effets secondaires de grade 3 ou 4 », grades qui ne correspondent<br />

en rien à la classification recommandée de l’HTA. En outre,<br />

l’HTA n’est jamais un critère principal de ces études. Cependant,<br />

on retrouve souvent une HTA qui semble dose-dépendante,<br />

fréquente, peut-être plus fréquente sur un terrain d’HTA préexistante<br />

mais avec toutes les thérapies ciblées [14] . Cette HTA<br />

régresse le plus souvent après diminution ou arrêt du traitement<br />

ou sous traitement antihypertenseur mais dans certains cas,<br />

conduit à des complications graves comme la dissection aortique<br />

ou le posterior reversible encephalopathy syndrome (PRES syndrome)<br />

[31, 32] . Le type de cancer et notamment l’antécédent de<br />

néphrectomie n’a pour le moment pas été étudié comme facteur<br />

de risque potentiel de développement de cette HTA. Les recommandations<br />

récentes (fin 2008) de la Société française de<br />

néphrologie (en collaboration avec la Société française d’hypertension<br />

artérielle, l’Association pédagogique nationale des<br />

enseignants de thérapeutique et la Fédération francophone de<br />

cancérologie digestive) soulignent le peu de données actuelles<br />

sur l’incidence réelle de l’HTA et la protéinurie chez les patients<br />

traités, et l’absence d’explication histologique et physiopathologique.<br />

Elles insistent également sur la nécessité de dépister et<br />

surveiller de façon rapprochée ces patients pour la pression<br />

artérielle et la protéinurie. Des études plus ciblées, notamment<br />

avec de l’automesure tensionnelle, sont nécessaires pour, estimer<br />

d’une part la fréquence réelle de ces HTA mais aussi les facteurs<br />

de risque de son développement [33-35] .<br />

Il est aussi décrit une toxicité cardiaque directe avec allongement<br />

du QT mais surtout développement d’une insuffisance<br />

cardiaque sous traitement antiangiogénique sans HTA associée<br />

ou préexistante et dont l’incidence réelle (diminution silencieuse<br />

de la fraction d’éjection) pourrait aller jusqu’à 15 % [14,<br />

22] .<br />

Enfin, certaines études suggèrent que le développement de<br />

cette HTA serait un facteur de bonne réponse au traitement [14,<br />

35, 36] . Là encore, ces résultats portent sur de petits effectifs, et<br />

avec des données indirectes, nécessitant d’être confirmés par des<br />

études spécifiques.<br />

■ Physiopathologie des effets<br />

secondaires rénaux<br />

La physiopathologie du développement d’une protéinurie<br />

et/ou d’une microangiopathie thrombotique (MAT) sous traitement<br />

antiangiogénique est pour le moment encore peu étudiée<br />

mais les études sur le rôle du VEGF dans le rein et sur la<br />

prééclampsie permettent de l’approcher.<br />

Le VEGF, sécrété dans le rein majoritairement par les podocytes,<br />

est indispensable au développement rénal ainsi qu’au<br />

maintien de la perméabilité capillaire dans le rein adulte.<br />

Pendant le développement rénal, les podocytes expriment de<br />

nombreux facteurs de croissance dont le VEGF, alors que les<br />

cellules endothéliales expriment ses récepteurs Flt-1 (VEGF-R1)<br />

et Flk-1 (VEGF-R2) [37] . Dans le rein adulte, le VEGF est exprimé<br />

par les podocytes, les cellules tubulaires distales et du tube<br />

collecteur mais aussi par les cellules mésangiales activées [38-40] .<br />

Les récepteurs du VEGF de types 1 et 2 sont exprimés par les<br />

cellules endothéliales des capillaires préglomérulaires et péritubulaires<br />

mais aussi par les cellules mésangiales [38, 41] . Le VEGF<br />

est donc indispensable à la formation et au maintien du<br />

diaphragme de fente formé par l’interaction des cellules<br />

endothéliales et des podocytes, dont l’intégrité permet l’absence<br />

de protéinurie [42] .<br />

2 Néphrologie


Le développement d’un HTA associée à une protéinurie<br />

parfois majeure ressemble cliniquement à la situation clinique<br />

de la prééclampsie. Cette impression clinique de ressemblance<br />

est confortée par les connaissances physiopathologiques récentes<br />

sur les mécanismes de la prééclampsie, et par les études dans<br />

des modèles murins.<br />

Chez les femmes prééclamptiques, il a récemment été montré<br />

qu’il existe un taux élevé de sFlt-1, récepteur soluble de VEGF<br />

dans le sérum, associé à un taux faible de VEGF libre et de<br />

placental growth factor (PGF) ainsi que de l’angiopoïétine 2 [43-<br />

49] . Le bévacizumab ou l’aflibercept peuvent être considérés<br />

comme des équivalents pharmacologiques de ce récepteur<br />

soluble. Histologiquement, la prééclampsie donne des lésions<br />

d’endothéliose glomérulaire avec, dans les formes sévères, une<br />

MAT [43] . D’un point de vue moléculaire, il existe une diminution<br />

de l’expression de la néphrine et la synaptopodine [43, 50] .<br />

De plus, le milieu conditionné provenant de cultures de<br />

villosités choriales de femmes prééclamptiques diminue l’angiogenèse<br />

des cellules endothéliales et entraîne une désorganisation<br />

de la vascular endothelial (VE)-cadhérine [51, 52] . L’immunoprécipitation<br />

de ce milieu conditionné contre sFlt-1 restaure<br />

l’angiogenèse normale [51] .<br />

Dans différents modèles animaux, il a été montré qu’après<br />

injection d’anti-VEGF ou du récepteur soluble Flt-1, les souris<br />

développent une protéinurie avec histologiquement une hypertrophie<br />

des cellules endothéliales, leur détachement de la<br />

membrane basale avec parfois rupture du diaphragme de fente,<br />

et dans les podocytes une diminution de l’expression de la<br />

néphrine (immunofluorescence et western blot) mais pas<br />

d’autres protéines pouvant être impliquées dans les mécanismes<br />

de protéinurie telles que la CD2-associated protein (CD2AP), la<br />

podocine et l’a-actinine-4 [39, 49, 50] . De même, chez des rats,<br />

l’injection d’un adénovirus produisant sFlt-1 à des rates enceintes<br />

ou non entraîne une HTA et une protéinurie abondante et<br />

ces symptômes peuvent être réversibles après injection de<br />

VEGF [46] . Là encore, l’histologie rénale retrouve une endothéliose<br />

et en immunofluorescence, des dépôts focaux de fibrine<br />

dans les glomérules. Les souris invalidées pour le VEGF dans les<br />

podocytes (hétérozygotes conditionnels) développent une<br />

protéinurie avec histologiquement une endothéliose puis<br />

progressent vers le syndrome néphrotique et l’insuffisance<br />

rénale chronique vers 9à12semaines [42] . Les souris KO non<br />

conditionnelles sont létales à un stade embryonnaire précoce.<br />

Les souris qui, au contraire, surexpriment le VEGF dans les<br />

podocytes, développent une insuffisance rénale chronique avec<br />

une glomérulopathie de type néphropathie collapsante semblable<br />

à ce qui est observé dans la néphropathie due au virus de<br />

l’immunodéficience humaine (VIH) [37] .<br />

Le VEGF est aussi indispensable à la prolifération, la différenciation<br />

et la survie des cellules mésangiales et endothéliales,<br />

notamment en cas de réparation tissulaire après une agression<br />

[40, 53] . Par exemple, après une mésangiolyse induite chez<br />

le rat par le venin de serpent ou les anticorps anti-thy-1.1, le<br />

traitement par VEGF favorise la prolifération des cellules<br />

endothéliales et la restauration ad integrum du glomérule [41] .<br />

Plusieurs données expérimentales laissent penser que les<br />

lésions podocytaires passeraient par l’endothéline et son<br />

récepteur. Dans un modèle animal, l’ischémie placentaire<br />

entraîne l’activation des cellules endothéliales via l’élévation de<br />

cytokines et en particulier de tumor necrosis factor (TNF-a) ;<br />

l’activation des cellules endothéliales entraîne une sécrétion<br />

d’endothéline qui se fixe alors sur les récepteurs de type A ET AR<br />

des podocytes [54, 55] . Les mêmes résultats sont retrouvés avec le<br />

sérum de rates prééclamptiques sur des cellules endothéliales en<br />

culture.<br />

Aucune donnée expérimentale ne permet pour le moment de<br />

conclure sur la physiopathologie de la protéinurie, l’insuffisance<br />

rénale et/ou la MAT des patients traités par anti-VEGF (anticorps<br />

monoclonaux ou inhibiteurs des récepteurs). La similitude<br />

clinique avec la prééclampsie permet de formuler des hypothèses<br />

mais seules les études in vitro et in vivo permettront de<br />

conclure sur les modifications de l’expression des différentes<br />

Néphrologie<br />

Toxicité rénale des antiangiogéniques 18-066-G-10<br />

protéines du diaphragme de fente par les podocytes, les anomalies<br />

endothéliales et les interactions entre cellules endothéliales<br />

et podocytes.<br />

■ Manifestations cliniques rénales<br />

Différentes manifestations rénales peuvent survenir au cours<br />

d’un traitement antiangiogénique.<br />

Un travail récent rétrospectif montre que les patients traités<br />

par antiangiogéniques pour un cancer du rein après néphrectomie,<br />

ont une diminution de leur fonction rénale au cours du<br />

temps (estimée par le modification of the diet in renal disease<br />

[MDRD]) plus marquée que les patients non traités, et ce<br />

d’autant plus qu’ils sont hypertendus avant le traitement [56] .<br />

Aucune autre étude ne s’est intéressée à la fonction rénale de<br />

ces patients.<br />

Le développement d’une protéinurie semble fréquent, et peut<br />

être associée ou non à l’HTA [27, 42] . De la même façon que pour<br />

l’HTA, la fréquence réelle est difficile à déterminer car cette<br />

protéinurie n’est pas systématiquement recherchée dans les<br />

études et n’est jamais un critère principal [57] . Seulement<br />

quelques biopsies rénales ont été réalisées dans les formes les<br />

plus graves. La plupart des cas décrits rapportent une MAT, une<br />

fusion des pieds des podocytes et une endothéliose [2, 42, 58-64] .<br />

Les premiers cas étaient relatés après traitement par bévacizumab<br />

ou l’aflibercept, mais avec le développement des ITK, de<br />

plus en plus de cas sont également observés sous sunitinib ou<br />

sorafénib. Les descriptions cliniques vont de la protéinurie isolée<br />

à la MAT histologique sans nécessairement de MAT biologique,<br />

sans ou avec insuffisance rénale. Les quelques biopsies réalisées<br />

retrouvent une discordance entre l’importance de la MAT<br />

histologique et le peu de signes biologiques avec une insuffisance<br />

rénale le plus souvent modérée. Les signes biologiques<br />

régressent le plus souvent à la diminution ou l’arrêt du traitement<br />

et parfois sous traitement par antagonistes du SRA [58, 64] .<br />

Cependant, dans certains cas, la poursuite du traitement, même<br />

en complément d’inhibiteurs du SRA, se complique d’insuffisance<br />

rénale majeure. La discordance entre l’histologie et la<br />

biologie et le risque de développement d’insuffisance rénale<br />

justifient la réalisation le plus souvent possible d’une biopsie<br />

rénale chez ces patients, de manière à ne pas continuer un<br />

traitement qui a déjà entraîné des lésions rénales importantes<br />

[59] . Si le développement de cette protéinurie, comme le<br />

développement d’une HTA, est un signe de réponse tumorale au<br />

traitement, il paraît important de ne pas stopper systématiquement<br />

le traitement devant le développement de ces effets<br />

secondaires, mais la poursuite du traitement ne peut se faire que<br />

sous contrôle strict de la pression artérielle et de la protéinurie<br />

par les inhibiteurs du SRA, et la surveillance de l’histologie et de<br />

la fonction rénale [65, 66] .<br />

À côté de ces cas de MAT qui semblent les plus fréquents, des<br />

cas isolés de glomérulonéphrite à cryoglobulinémie, de glomérulopathie<br />

collapsante, de glomérulonéphrite à complexes<br />

immuns et de néphropathie tubulo-interstitielle ont aussi été<br />

rapportés [62, 64, 67] . Plusieurs auteurs ont aussi décrit des dépôts<br />

d’immunoglobulines A (IgA) associés à la MAT ou à un syndrome<br />

néphrotique majeur dont la physiopathologie est difficile<br />

à déterminer. Il s’agit parfois de patients porteurs d’une<br />

hépatopathie, peut-être responsable par elle-même des dépôts<br />

d’IgA [61, 63, 64] . Enfin, un cas de glomérulonéphrite aiguë a été<br />

décrit après sunitinib avec endothéliose, dépôts de C3 et dépôts<br />

denses en microscopie électronique [66] .<br />

■ Traitement de l’hypertension<br />

et/ou de la protéinurie<br />

Ces effets secondaires très différents des effets secondaires<br />

hématologiques ou digestifs classiques des chimiothérapies<br />

posent le problème de leur dépistage et de leur prise en charge.<br />

Les recommandations de la Société de néphrologie insistent sur<br />

le dépistage (pression artérielle, bandelette urinaire) régulier de<br />

ces patients, et l’intérêt de l’automesure et du suivi pluridisciplinaire<br />

[34] . Il paraît également important de réaliser une<br />

3


18-066-G-10 Toxicité rénale des antiangiogéniques<br />

biopsie le plus souvent possible pour évaluer au mieux les<br />

lésions, compte tenu de la discordance fréquente entre l’intensité<br />

de la MAT biologique et l’importance des lésions.<br />

Ces effets secondaires, en particulier l’HTA, semblent très<br />

dose-dépendants et régressent avec la diminution ou l’arrêt du<br />

traitement. Cependant, dans la mesure du possible, le traitement<br />

antiangiogénique ne doit pas être stoppé, surtout si l’on<br />

considère que la survenue d’effets secondaires témoigne d’une<br />

bonne réponse tumorale [36] . Il est donc indispensable de<br />

trouver une bonne stratégie thérapeutique permettant de<br />

contrôler l’HTA et/ou la protéinurie sans arrêter la thérapie<br />

ciblée.<br />

Le choix du traitement de l’HTA ou de la protéinurie n’est<br />

pour le moment pas codifié. Cependant, de nombreux arguments<br />

font préférer les inhibiteurs du SRA [30] . Outre leurs effets<br />

classiques pour diminuer la dysfonction cardiaque ou la<br />

protéinurie, l’utilisation d’antagonistes des récepteurs de<br />

l’angiotensine II (ARA-2) ou des inhibiteurs de l’enzyme de<br />

conversion (IEC), voire de l’inhibiteur direct de la rénine,<br />

permettrait peut-être de renforcer l’effet des anti-VEGF sur la<br />

vascularisation tumorale. En effet, l’angiotensine II via son<br />

récepteur de type 1 (AT1-R) a un effet proangiogénique et<br />

pourrait favoriser le développement des néovaisseaux, notamment<br />

en accroissant la sécrétion de VEGF [14, 68-71] . De plus, des<br />

études récentes in vitro et in vivo sur des modèles animaux<br />

suggèrent un effet antitumoral des IEC ou des ARA-2 [72-75] et<br />

une augmentation de l’expression des récepteurs de l’angiotensine<br />

II dans un certain nombre de cancers [72-80] . Enfin, de<br />

grandes études épidémiologiques suggèrent que les IEC ou les<br />

ARA-2 pourraient diminuer l’incidence de certains cancers, mais<br />

ces études de grandes cohortes épidémiologiques rétrospectives<br />

sont contradictoires sur les types de cancers et nécessitent d’être<br />

complétées par des études prospectives plus spécifiques [81, 82] .<br />

Toutefois, ces différents arguments (effet antiprotéinurique,<br />

protection cardiaque, diminution du VEGF et de l’angiogenèse,<br />

diminution de la croissance tumorale) permettent de recommander<br />

les inhibiteurs du SRA en première intention dans le<br />

traitement de l’HTA ou de la protéinurie sous antiangiogénique.<br />

Compte tenu de la variabilité selon la prise ou non de l’anti-<br />

VEGF, le traitement doit dans tous les cas être adapté aux cycles<br />

de traitement, et si possible aux automesures et encadré par un<br />

suivi régulier de la fonction rénale et de la protéinurie.<br />

Les données récentes sur le rôle de l’endothéline 1 (ET-1)<br />

dans les lésions glomérulaires suggèrent aussi une place pour les<br />

antagonistes des récepteurs de l’ET-1 dans le traitement des<br />

effets secondaires cardiovasculaires et rénaux des antiangiogéniques<br />

[30, 55] . De plus, l’ET-1, comme l’angiotensine II, stimule la<br />

carcinogenèse et la néoangiogenèse essentiellement via ET AR, et<br />

ses antagonistes pourraient aussi être un traitement adjuvant de<br />

certains cancers [83] . Cependant, des études cliniques sont<br />

nécessaires avant de les recommander.<br />

■ Inhibiteurs de la « mammalian<br />

target of rapamycin »<br />

Une autre voie moléculaire apparaît importante dans la<br />

biologie du cancer, notamment du carcinome rénal à cellules<br />

claires : la voie PI3K/Akt/mTOR. Cette voie se situe en aval des<br />

récepteurs aux facteurs de croissance, pour la plupart à activité<br />

tyrosine-kinases, en parallèle avec la voie des mitogen activated<br />

proteins (MAP) kinases. mTOR agit en stimulant la traduction<br />

des acides ribonucléiques messagers (ARNm) en protéines et<br />

donc en augmentant la synthèse protéique. mTOR agit donc à<br />

la fois sur la cellule cancéreuse et sur la cellule endothéliale des<br />

néovaisseaux [24] . L’activation de cette voie entraîne également<br />

une sécrétion de VEGF qui augmente la néoangiogenèse.<br />

Plusieurs molécules ciblant mTOR ont été développées. La<br />

première a été la rapamycine, qui a donné son nom à mTOR<br />

(mammalian target of rapamycin). D’autres inhibiteurs, plus<br />

maniables chez l’homme, ont été ensuite testés dont le premier<br />

.<br />

.<br />

à avoir été commercialisé est le temsirolimus [84] . Cette molécule<br />

a prouvé sa supériorité à l’immunothérapie dans les cancers du<br />

rein en première ligne métastatique. Cette efficacité concerne<br />

tous les sous-types histologiques, ce que n’ont pas encore<br />

formellement démontré les inhibiteurs du VEGF-R. De plus, les<br />

patients inclus présentaient des tumeurs de plus mauvais<br />

pronostic que les patients inclus dans les essais avec inhibiteurs<br />

du VEGF-R. Le ciblage de mTOR apparaît donc comme une<br />

approche particulièrement intéressante dans ces tumeurs.<br />

D’autres inhibiteurs de mTOR sont à l’essai ; parmi eux,<br />

l’évérolimus qui devrait prochainement obtenir son autorisation<br />

de mise sur le marché [85] .<br />

Les inhibiteurs de mTOR ont été au préalable utilisés en<br />

transplantation d’organes solides, et leurs effets secondaires bien<br />

décrits chez ce type de patient [86] . Outre les problèmes de<br />

cicatrisation [87] , d’aphtose sévère [88] , d’anémie [89] , de pneumopathies<br />

[90] et d’hyperlipidémie [91] , qui peuvent amener à<br />

diminuer ou interrompre le traitement, les inhibiteurs de mTOR<br />

ont des effets secondaires rénaux non négligeables. Le taux de<br />

retard de reprise de la fonction rénale après transplantation est<br />

plus important [92] et de nombreux patients développent une<br />

protéinurie qui peut être de taux néphrotique. Le mécanisme<br />

n’est pour le moment pas clair mais certains cas de hyalinose<br />

segmentaire et focale ont été rapportés [93] .<br />

Cependant, trop peu de données sont actuellement disponibles<br />

pour donner la fréquence de la survenue de protéinurie<br />

chez les patients traités par inhibiteurs de mTOR pour cancer.<br />

■ Conclusion<br />

Les thérapies ciblées ont, depuis quelques années, considérablement<br />

changé le pronostic des patients avec des cancers<br />

métastasés, en particulier du rein, du sein, des GIST ou du<br />

cancer colorectal. Le développement et la commercialisation de<br />

ces thérapeutiques ont été très rapides et les effets secondaires,<br />

en particulier cardiovasculaires et rénaux, peu recherchés. De<br />

nombreux patients développent une HTA, une insuffisance<br />

cardiaque, une protéinurie, une insuffisance rénale ou une MAT.<br />

Ces effets secondaires, nouveaux pour les cancérologues,<br />

nécessitent une prise en charge multidisciplinaire, où les<br />

inhibiteurs du SRA ont certainement une place privilégiée. La<br />

recherche clinique et fondamentale et la similitude avec la<br />

prééclampsie devraient permettre d’avancer rapidement dans la<br />

compréhension de la physiopathologie de ces effets secondaires<br />

et dans leur prévention.<br />

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C. Vigneau, Professeur (cecile.vigneau@chu-rennes.fr).<br />

Service de néphrologie, centre hospitalier universitaire Pontchaillou, 2, rue Henri-Le-Guilloux, 35033 Rennes cedex 9, France.<br />

Centre national de la recherche scientifique-Unité mixte de recherche (CNRS-UMR) 6061, Université Rennes 1, 2, avenue Léon-Bernard, 35043 Rennes<br />

cedex, France.<br />

N. Rioux-Leclercq, Professeur.<br />

Centre national de la recherche scientifique-Unité mixte de recherche (CNRS-UMR) 6061, Université Rennes 1, 2, avenue Léon-Bernard, 35043 Rennes<br />

cedex, France.<br />

Service d’anatomie et cytologie pathologiques, centre hospitalier universitaire Pontchaillou, 2, rue Henri-Le-Guilloux, 35033 Rennes cedex 9, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Vigneau C., Rioux-Leclercq N. Toxicité rénale des antiangiogéniques. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris),<br />

Néphrologie, 18-066-G-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

6 Néphrologie<br />

Cas<br />

clinique


Plan<br />

Traitement de la dysfonction érectile<br />

V. Phé, M. Rouprêt<br />

La dysfonction érectile (DE) est définie comme l’impossibilité de maintenir une érection suffisante pour<br />

avoir un rapport sexuel. En quelques années, l’arsenal thérapeutique dans la dysfonction érectile s’est<br />

considérablement enrichi. Les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (IPDE5) sont devenus le<br />

traitement de première ligne avec une sécurité et une efficacité d’utilisation prouvée. Les caractéristiques<br />

pharmacologiques permettent pour certains d’éviter une programmation de l’acte avec peu d’effets<br />

secondaires. En seconde ligne, les traitements locaux tels que les injections intracaverneuses de<br />

prostaglandines E1 ou le vacuum gardent une place importante. En dernier recours, les prothèses<br />

péniennes sont une solution envisageable ; chez des patients bien informés, et posées par des urologues<br />

ayant une bonne pratique de cette chirurgie, le taux de satisfaction est important. Cependant, la<br />

dimension psychologique ne doit pas pour autant être négligée dans la prise en charge globale des<br />

troubles sexuels, au détriment du traitement médical.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Impuissance ; Dysfonction érectile ; Inhibiteurs des phosphodiestérases ; Prostaglandine E1 ;<br />

Implant pénien<br />

Introduction 1<br />

Diagnostic positif 2<br />

Interrogatoire 2<br />

Examen clinique 2<br />

Examens complémentaires à réaliser au cours du bilan initial 2<br />

Prise en charge thérapeutique 3<br />

Traitement étiologique 3<br />

Traitement symptomatique : les médicaments d’aide à l’érection 4<br />

Conclusion 6<br />

■ Introduction<br />

La dysfonction érectile (DE) est définie comme l’impossibilité<br />

d’avoir ou de maintenir une érection suffisante pour avoir un<br />

rapport sexuel suffisant [1] . Elle doit donc être différenciée des<br />

troubles de l’éjaculation ou de la libido qui peuvent cependant<br />

coexister. L’allongement de la durée de vie, la demande d’une<br />

meilleure qualité de celle-ci et la mise à disposition de traitements<br />

efficaces ont accru la demande de prise en charge des<br />

dysfonctions érectiles pour lesquelles le médecin généraliste est<br />

le premier interlocuteur. C’est ainsi que l’association<br />

interhospitalo-universitaire de sexologie (AIHUS), parrainée par<br />

des sociétés savantes d’urologie et d’andrologie, a publié en<br />

2005 des recommandations aux médecins généralistes pour la<br />

prise en charge de première intention de la dysfonction<br />

érectile [2] .<br />

Traité de Médecine Akos<br />

5-0695<br />

L’érection est un mécanisme musculovasculaire par modification<br />

de l’état de relaxation des fibres musculaires lisses qui<br />

composent les deux corps caverneux, augmentation de l’apport<br />

artériel et diminution du retour veineux. Cette vasomotricité est<br />

sous la dépendance d’un double contrôle neurologique central<br />

et endothélial local dans une ambiance hormonale liée à la<br />

testostérone. Toute altération d’un de ces facteurs peut causer<br />

ou contribuer à la survenue d’une dysfonction érectile. En<br />

outre, un homme sur deux entre 40 et 70 ans a des troubles<br />

érectiles à des degrés divers et la probabilité de dysfonction<br />

modérée double entre 40 et 70 ans alors qu’elle triple pour les<br />

dysfonctions sévères [3] .<br />

Si le principal facteur de risque est l’âge, il ne doit pas cacher<br />

l’origine souvent multifactorielle en rapport avec les mécanismes<br />

physiologiques de l’érection.<br />

La dysfonction érectile est souvent associée à des comorbidités,<br />

qu’elle peut aussi révéler, en particulier :<br />

le diabète : la prévalence de la dysfonction érectile augmente<br />

chez les diabétiques ;<br />

les pathologies cardiovasculaires : la dysfonction érectile serait<br />

un marqueur de la maladie endothéliale et sa prévalence<br />

augmente chez les patients ayant une maladie cardiovasculaire<br />

de même que chez les patients ayant une dyslipidémie ;<br />

les troubles anxiodépressifs dont l’intensité est corrélée à la<br />

fréquence de la DE ;<br />

les troubles mictionnels du bas appareil urinaire qui sont le<br />

plus souvent liés à l’hypertrophie bénigne prostatique dont la<br />

fréquence augmente avec l’âge : la prévalence de la DE est<br />

augmentée en présence de troubles mictionnels et varie de<br />

43 % à 82,5 % en fonction de leur intensité.<br />

1


5-0695 Traitement de la dysfonction érectile<br />

Ainsi, la dysfonction érectile n’est pas seulement un symptôme<br />

isolé, elle est fréquemment « l’indicateur » d’une<br />

comorbidité.<br />

■ Diagnostic positif (Fig. 1)<br />

Interrogatoire<br />

Le diagnostic se fait à l’interrogatoire. Il est nécessaire de<br />

rechercher l’association à un autre trouble sexuel. Si tel est le<br />

cas, la prise en charge par un spécialiste est nécessaire.<br />

Une fois la DE confirmée, il faut la caractériser :<br />

caractère inaugural ou réactionnel à un autre trouble sexuel ;<br />

existence d’un facteur déclenchant ;<br />

caractère permanent ou situationnel (selon le ou la partenaire...)<br />

;<br />

persistance d’érections nocturnes ou matinales spontanées qui<br />

oriente vers une cause psychologique ;<br />

sévérité de le DE : évolution, persistance ou non d’érections<br />

suffisantes pour une pénétration, possibilité d’érections<br />

provoquées, persistances d’érections nocturnes ou matinales<br />

spontanées ;<br />

évaluation du retentissement de la DE.<br />

La recherche de pathologies favorisant la DE est nécessaire :<br />

chirurgie abdominopelvienne, maladie cardiovasculaire, affection<br />

neurologique, endocrinopathie, traitement médicamenteux,<br />

trouble psychiatrique, renseignements sur la partenaire. La<br />

correction des facteurs favorisants contribue au traitement de<br />

la DE.<br />

Problématique simple :<br />

- secondaire<br />

- isolée (sans autre trouble sexuel)<br />

- dont la durée n'apparaît pas comme un facteur<br />

de complexité<br />

- avec une capacité érectile résiduelle<br />

- au sein d'un couple motivé (sans conjugopathie)<br />

Prise en charge par le médecin généraliste :<br />

- information sexuelle<br />

- conseils d'hygiène de vie<br />

- changement des traitements en cours<br />

- médicaments d'aide à l'érection<br />

Évaluation lors d'une consultation ultérieure<br />

Succès<br />

Succès<br />

Patient rapportant une dysfonction érectile<br />

Échec<br />

Adaptation thérapeutique<br />

Confirmer-caractériser-évaluer<br />

Échec<br />

Examen clinique<br />

Un examen clinique est recommandé chez tous les patients.<br />

Il comprend :<br />

un examen urogénital :<br />

C caractères sexuels secondaires : testicule (taille, consistance),<br />

pénis (maladie de Lapeyronie, autres malformations),<br />

C toucher rectal après 50 ans en l’absence d’antécédents<br />

familiaux de cancer de prostate, sinon après 45 ans,<br />

C examen des seins ;<br />

un examen cardiovasculaire :<br />

C prise de la pression artérielle, palpation des pouls, mesure<br />

de la fréquence cardiaque,<br />

C souffle artériel,<br />

C périmètre abdominal (syndrome métabolique) ;<br />

un examen neurologique orienté :<br />

C réflexes ostéotendineux et cutanés plantaires,<br />

C sensibilité des membres inférieurs,<br />

C anesthésie en selle.<br />

Examens complémentaires à réaliser<br />

au cours du bilan initial<br />

Il est utile de réaliser les examens biologiques suivants à visée<br />

étiologique :<br />

glycémie à jeun si le patient n’en a pas eu dans les douze<br />

mois précédents, hémoglobine glyquée HbA1c s’il s’agit d’un<br />

patient diabétique connu ;<br />

Problématique complexe<br />

Pas de prescription<br />

Avis spécialisé<br />

Évaluation lors d'une consultation ultérieure<br />

Cothérapie médecin généraliste + spécialiste<br />

En cas d’échec :<br />

- réévaluer l’histoire de la DE et le fonctionnement sexuel du couple<br />

- expliquer à nouveau les modalités de prescription, la nécessité de la répétition des essais<br />

- augmenter le dosage jusqu'au maximum<br />

- réévaluer les interactions médicamenteuses<br />

- étudier le contexte psychologique ou la conjugopathie<br />

- rechercher une anomalie organique ou non, méconnue lors de la 1 re consultation<br />

Figure 1. Arbre décisionnel. Prise en charge de la dysfonction érectile (DE) par le médecin généraliste. FDR : facteurs de risque ; IPDE5 : inhibiteurs de la<br />

phosphodiestérase de type 5.<br />

2 Traité de Médecine Akos


ilan lipidique s’il n’y en a pas eu dans les douze mois<br />

précédents : cholestérol total, high density lipoprotein (HDL),<br />

triglycérides ;<br />

numération-formule sanguine (NFS), ionogramme, créatininémie,<br />

bilan hépatique s’il n’y en a pas eu depuis 5 ans :<br />

bilan orienté par la clinique ;<br />

recherche d’un déficit androgénique par dosage de la testostéronémie<br />

biodisponible chez les patients présentant des<br />

facteurs de risque ou des signes évocateurs (diminution du<br />

désir sexuel ou des érections nocturnes en fréquence et en<br />

qualité) :<br />

C diabète,<br />

C insuffisance rénale chronique,<br />

C syndrome d’immunodéficience humaine (sida),<br />

C corticothérapie au long cours,<br />

C antécédents de chirurgie herniaire, de cryptorchidie opérée,<br />

de cure de varicocèle ou d’orchidectomie ;<br />

l’Association française d’urologie (AFU) propose, dans le cadre<br />

d’un dépistage individuel, un dosage du prostate specific<br />

antigen (PSA) total chez les hommes à partir de 50 ans et à<br />

partir de 45 ans en cas d’antécédents familiaux.<br />

Ce bilan est nécessaire et suffisant même s’il ne permet pas<br />

toujours de retrouver une étiologie, d’autant plus que, souvent,<br />

la DE est d’origine multifactorielle. Aucune autre exploration<br />

n’est recommandée en première intention.<br />

■ Prise en charge thérapeutique<br />

Avant de proposer un traitement spécifique, la demande<br />

réelle du patient doit, au préalable, être évaluée ainsi que sa<br />

motivation à un traitement. L’information est incontournable,<br />

elle permet de réassurer et de dédramatiser de façon adaptée à<br />

l’âge et à la demande. Le choix du traitement est un choix<br />

expliqué, une décision partagée avec le patient et éventuellement<br />

sa partenaire.<br />

La fréquence d’une interférence psychologique, qu’elle soit la<br />

cause ou la conséquence du trouble, rend indispensables un<br />

soutien et une attention particulière à ce niveau. La prise en<br />

compte du couple est indispensable dans tous les cas, car le rôle<br />

de la partenaire est essentiel : parfois favorable à l’amélioration<br />

symptomatique, parfois aggravant le trouble, voire véritablement<br />

responsable de ce dernier [4] .<br />

Pour certains patients, une prise en charge psychothérapeutique<br />

est parfois nécessaire, mais à condition que le patient soit<br />

demandeur, et après avis spécialisé. Certains médicaments à<br />

visée psychotrope sont souvent utiles et il faut alors privilégier<br />

les substances les moins iatrogènes sur le plan sexuel.<br />

Des conseils d’hygiène de vie sont prodigués : régime alimentaire,<br />

sevrage du tabac et d’éventuelles autres substances<br />

addictives.<br />

L’écoute doit être attentive, respectant la confidentialité sans<br />

préjugé et met en confiance le patient.<br />

Traitement étiologique<br />

Le traitement étiologique est souvent occulté au profit du<br />

traitement symptomatique alors qu’il peut suffire pour régler<br />

définitivement le problème érectile. Il ne doit donc pas être<br />

négligé.<br />

Causes médicamenteuses<br />

Certains médicaments peuvent avoir un effet négatif sur les<br />

érections (Tableau 1). En cas d’effet iatrogène suspecté, l’arrêt ou<br />

la substitution du médicament doit, si possible, être envisagé<br />

pendant 1 mois. Il faut alors vérifier le rapport chronologique<br />

entre la mise en route du traitement et le début des troubles<br />

sexuels. Si la restauration de la fonction érectile est obtenue<br />

après l’arrêt du traitement incriminé, cela présume de sa<br />

responsabilité. En pratique, la responsabilité des médicaments<br />

est difficile à établir et il existe des précautions à prendre avant<br />

de décider d’arrêter certaines thérapeutiques.<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Tableau 1.<br />

Principaux médicaments susceptibles d’altérer les érections.<br />

Antihypertenseurs Toutes les molécules peuvent être responsables<br />

de dysfonction érectile par leur effet hypotenseur<br />

qui entraîne une réduction potentielle de l’afflux<br />

sanguin<br />

Hypolipémiants Fibrates<br />

Ainsi, un avis cardiologique est indispensable avant d’arrêter<br />

des antihypertenseurs chez des patients coronariens ou diabétiques.<br />

En revanche, chez un patient jeune hypertendu sans<br />

facteur de risque, l’arrêt d’antihypertenseurs tels que les<br />

bêtabloquants, les antagonistes calciques, les inhibiteurs de<br />

l’enzyme de conversion (IEC), les antagonistes des récepteurs de<br />

l’angiotensine 1 et 2, les diurétiques ne nécessite pas d’avis<br />

cardiologique préalable, mais nécessite le respect des précautions<br />

habituelles.<br />

En ce qui concerne les antidépresseurs, distinguer ce qui est<br />

la cause et la conséquence n’est pas facile. En effet, la DE peut<br />

être intriquée avec le syndrome dépressif ou résulter du traitement<br />

antidépresseur.<br />

Si le patient est suivi par un psychiatre, le médecin doit<br />

prendre contact avec celui-ci ci avant tout changement de<br />

traitement.<br />

Si le patient est traité par son médecin généraliste pour une<br />

dépression et que celle-ci est bien stabilisée (la DE semble liée<br />

au traitement et n’est pas le témoin d’une absence d’amélioration<br />

de la dépression), un changement de traitement pour une<br />

molécule antidépressive moins délétère sur la sexualité est<br />

possible.<br />

Aucun traitement antipsychotique ne doit être changé ou<br />

arrêté sans avis du psychiatre. Il est recommandé de doser la<br />

prolactinémie en raison de l’effet hyperprolactinémiant des<br />

neuroleptiques pouvant entraîner une dysfonction érectile.<br />

Causes générales<br />

En cas de pathologie générale évolutive, il faut savoir rassurer<br />

et faire patienter. Le traitement d’une insuffisance hépatique ou<br />

rénale peut ainsi avoir un effet bénéfique sur l’érection. De<br />

même, toute pathologie aiguë (infarctus, infection, etc.) peut<br />

s’accompagner d’une dysfonction érectile transitoire qui<br />

récupérera après l’épisode.<br />

Pathologie hormonale<br />

Un traitement spécifique peut être proposé en fonction des<br />

résultats du bilan (rare hypogonadisme central ou périphérique,<br />

exceptionnelle hyperprolactinémie). Une androgénothérapie ne<br />

se conçoit qu’en cas d’anomalie biologique (hypogonadisme) et<br />

sous surveillance prostatique.<br />

Déséquilibre glycémique<br />

L’augmentation de la fréquence du trouble avec l’hémoglobine<br />

A1c doit inciter à l’amélioration de l’équilibre glycémique<br />

qui peut parfois améliorer la dysfonction érectile.<br />

Causes artérielles<br />

Les bêtabloquants ont un rôle supplémentaire<br />

d’altération du contrôle neurologique<br />

de l’érection<br />

Psychotropes La majorité des molécules peut interférer, notamment<br />

les antidépresseurs et les antipsychotiques<br />

Antiulcéreux Anti-H2 (cimétidine)<br />

Hormones Antiandrogènes<br />

Estrogènes<br />

Traitement de la dysfonction érectile 5-0695<br />

En cas de lésions aorto-iliaques, la chirurgie ne se discute pas.<br />

En revanche, les revascularisations distales sont devenues<br />

3


5-0695 Traitement de la dysfonction érectile<br />

Tableau 2.<br />

Médicaments d’aide à l’érection.<br />

Sildénafil Viagra ®<br />

25, 50 et 100 mg<br />

Vardénafil (Lévitra ® )<br />

5, 10 et 20 mg 60 min<br />

Tadalafil (Cialis ® )<br />

10 et 20 mg<br />

Apomorphine<br />

Uprima ® 2et3mg<br />

d’indication exceptionnelle, limitées à des patients jeunes<br />

(< 60 ans), sans neuropathie ni diabète, motivés et informés sur<br />

les risques d’échecs (de 30 % à 40 %).<br />

Traitement symptomatique :<br />

les médicaments d’aide à l’érection (Tableau 2)<br />

Il est recommandé au médecin généraliste de faire participer<br />

activement le patient et son couple au choix du traitement en<br />

discutant des bénéfices, des risques et des coûts.<br />

Traitements pharmacologiques oraux<br />

En général, la prise en charge initiale fait appel aux traitements<br />

pharmacologiques par voie orale. Ce sont des facilitateurs<br />

qui nécessitent une stimulation sexuelle pour permettre le<br />

développement de l’érection. Il faut souligner que ces médicaments<br />

sont onéreux et qu’aucun d’entre eux n’est pris en charge<br />

par la Sécurité sociale.<br />

Inhibiteurs des phosphodiestérases 5<br />

Mode d’action Effets secondaires Précautions d’emploi Indications Remboursé<br />

Inhibiteur de<br />

la phosphodiestérase 5<br />

Relaxation des fibres<br />

musculaires lisses<br />

par la voie du NO<br />

Agoniste des récepteurs<br />

dopaminergiques<br />

centraux<br />

dans l’hypothalamus<br />

Levée de l’inhibition<br />

centrale<br />

Yohimbine Bloqueur des récepteurs<br />

a2 présynaptiques<br />

au niveau central<br />

et périphérique<br />

Injections intracaverneuses<br />

de prostaglandines<br />

10 et 20 µg alprostadil<br />

Caverject ® , Edex ®<br />

Injections intra-urétrales<br />

de prostaglandines<br />

Muse ® 250, 500, 1 000 µg<br />

Érecteurs à dépression<br />

vacuum<br />

Implants péniens<br />

gonflables ou semirigides<br />

Récepteurs intracaverneux<br />

dont la stimulation provoque<br />

une relaxation du muscle<br />

lisse par augmentation<br />

de l’AMPc<br />

Céphalées, flush, rhinites,<br />

gastralgies<br />

Il s’agit actuellement du traitement de première intention et<br />

de références. Les IPDE5 inhibent la phosphodiestérase 5,<br />

Angor instable<br />

Dérivés nitrés<br />

Cardiopathies évolutives<br />

Cf. consensus<br />

de Princeton<br />

En première intention<br />

Quelle que soit l’étiologie<br />

Nausées Antiparkinsonien DE d’origine psychogène<br />

DE neurologiques centrales<br />

chez des patients<br />

jeunes<br />

Anxiété, troubles gastrointestinaux,<br />

vertiges,<br />

tachycardie, céphalées,<br />

rashs cutanés, insomnie ou<br />

agitation<br />

Priapisme<br />

Hématome<br />

Fibrose des corps<br />

caverneux<br />

Douleur<br />

Analogues de la PGE1 Douleurs urétrales,<br />

urétrorragies, baisse modérée<br />

de la PA systolique<br />

et diastolique, vertiges<br />

Cylindre creux relié à un Acceptation<br />

système de pression néga- psychologique<br />

tive, permettant de provo- Douleur, sensation<br />

quer une érection, celle-ci de froideur du pénis<br />

étant maintenue par la mise (partenaire), blocage<br />

en place d’un élastique de l’éjaculation, pétéchies,<br />

à la base de la verge ecchymoses mineures<br />

Infections<br />

Réinterventions pour<br />

problèmes mécaniques<br />

Insuffisance rénale<br />

ou hépatique sévère<br />

Partenaire enceinte<br />

Sujets prédisposés<br />

au priapisme<br />

(drépanocytose, leucémie,<br />

lymphome)<br />

DE légère d’origine psychologique<br />

dominante<br />

Contre-indication<br />

ou intolérance au traitement<br />

oral<br />

Échec du traitement oral<br />

Chirurgie carcinologique<br />

prostatique ou vésicale<br />

Partenaire enceinte Alternative aux injections<br />

intracaverneuses<br />

Anticoagulants Alternative aux injections<br />

intracaverneuses<br />

et à la prothèse pénienne<br />

Contre-indications<br />

opératoires<br />

Échec du traitement<br />

médical<br />

Courbures de verge<br />

NO : monoxyde d’azote ; DE : dysfonction érectile ; PGE1 : prostaglandine E1 ; PA : pression artérielle ; AMPc : acide monophosphorique cyclique.<br />

Non<br />

Non<br />

Non<br />

Possible<br />

dans certains cas<br />

Non<br />

Non<br />

Non<br />

responsable de la dégradation de la guanosine monophosphorique<br />

cyclique (GMPc). Le traitement oral de la DE est fondé sur<br />

l’amplification de la réponse à la stimulation du monoxyde<br />

d’azote (NO). L’action est locale sur les corps caverneux en<br />

favorisant la relaxation des fibres musculaires lisses par la voie<br />

du NO.<br />

Actuellement, trois molécules sont commercialisées.<br />

Leur chef de file est le sildénafil (Viagra ® ). Il a été le premier<br />

traitement oral utilisé avec une efficacité objective (amélioration<br />

de l’ensemble des items du score International Index of Erectile<br />

Function – IIEF) chez les hommes ayant une DE et ce, quelle<br />

que soit son origine : hypertension artérielle, chirurgie pelvienne,<br />

diabète ou coronaropathie [5, 6] . Chez tous ces patients,<br />

l’efficacité du sildénafil dans la genèse et le maintien de<br />

l’érection a été prouvée de manière significative versus placebo.<br />

Le tadalafil (Cialis ® ) est un nouvel IPDE5 dont la demi-vie est<br />

plus longue que celle du sildénafil. La dose usuelle chez le<br />

patient ayant une fonction rénale normale est de 10 à 20 mg,<br />

30 minutes à 12 heures avant de débuter une activité sexuelle.<br />

Le vardénafil (Levitra ® ) est un nouvel IPDE5 puissant et très<br />

sélectif. Il a prouvé son efficacité dans le traitement de la DE<br />

modérée à sévère de nature variée [7] . La dose usuelle chez le<br />

patient ayant une fonction rénale normale varie de 5à20mg.<br />

4 Traité de Médecine Akos


Maladie coronarienne connue<br />

Avis cardiologique<br />

La prise orale doit débuter 25 à 60 minutes avant toute activité<br />

sexuelle.<br />

Pour le Viagra ® , le délai d’action est d’environ 1 heure et la<br />

durée d’action de 4à5heures. Les nouvelles molécules récemment<br />

commercialisées ont un délai d’action plus court pour une<br />

durée d’action prolongée (jusqu’à 24 heures pour le Cialis ® ),<br />

évitant les contraintes de programmation du rapport sexuel.<br />

Il n’existe pas à ce jour d’étude comparant l’efficacité ou les<br />

effets secondaires des 3 IPDE5 disponibles. Des taux d’efficacité<br />

sont compris entre 65 % et 85 % dans une population standard<br />

de patients ayant une DE. Chaque molécule a montré son<br />

efficacité contre placebo dans des essais randomisés avec des<br />

effets secondaires bien tolérés.<br />

Les effets secondaires (de 15 %à20%)sont essentiellement<br />

d’ordre vasculaire (céphalées, flush, rhinites, gastralgies). De<br />

même, il n’existe pas d’étude comparative sur les effets<br />

secondaires.<br />

Le médecin généraliste doit connaître les propriétés de<br />

chaque traitement afin que le patient puisse choisir le traitement<br />

le mieux adapté à sa demande (délai, durée d’action). Les<br />

modalités de prise seront expliquées au patient. Il s’agit d’un<br />

traitement facilitateur des érections à la demande, nécessitant<br />

une stimulation sexuelle dont l’effet peut être visible dès la<br />

première prise, mais qui, selon les cas, peut encore s’améliorer<br />

au fil du traitement, ce qui nécessite un minimum de 4-6 essais.<br />

Une fois le traitement pris, la plage d’efficacité est de<br />

4-5 heures.<br />

Cet encadrement de prescription est important, car une cause<br />

fréquente d’échec du traitement oral est l’absence d’explication<br />

du traitement.<br />

En dehors des cas particuliers (prise concomitante d’un<br />

médicament agissant sur le cytochrome p450), il est recommandé<br />

de prescrire le dosage le plus faible : Viagra ® 50 mg,<br />

Cialis ® 10 mg, Lévitra ® 10 mg. En cas d’échec avec l’une des<br />

trois molécules, il est classique d’essayer les deux autres,<br />

permettant parfois d’obtenir un meilleur résultat. En cas d’échec<br />

ou de contre-indication d’emblée aux IPDE5, les traitements de<br />

seconde ligne peuvent être envisagés.<br />

Précautions d’emploi. Les inhibiteurs de la phosphodiestérase<br />

de type 5 sont à utiliser avec prudence chez les sujets<br />

coronariens avec un angor instable, chez les insuffisants<br />

cardiaques congestifs ou chez les hommes prenant plusieurs<br />

antihypertenseurs ou plusieurs médicaments métabolisés par le<br />

cytochrome P450 3A4 qui sont assez nombreux dans la population<br />

des hémodialysés. Il est recommandé de suivre le consensus<br />

de Princeton [8] (Fig. 2). En revanche, les cardiopathies<br />

stables pour lesquelles l’activité sexuelle n’est pas déconseillée<br />

ne sont pas une contre-indication. Une consultation de cardiologie<br />

n’est pas nécessaire pour la prescription de ces molécules<br />

en dehors des cardiopathies évolutives.<br />

Seule contre-indication absolue, l’utilisation combinée avec<br />

des dérivés nitrés, car elle pourrait être à l’origine d’une chute<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Pour tous les patients : vérifier l'aptitude de l'exercice physique que représente le rapport sexuel, le patient doit être capable de faire<br />

facilement soit la montée de deux étage, soit 20 minutes de marche chaque jour<br />

Patient actif et asymptomatique lors d'efforts réguliers<br />

Peu ou pas de FDR cardiovasculaire<br />

IPDE5 sans exploration cardiologique préalable<br />

Absence de maladie coronarienne connue<br />

Figure 2. Arbre décisionnel. Consensus de Princeton.<br />

brutale de la pression artérielle. Avant de prescrire un IPDE5,<br />

une épreuve d’effort doit être réalisée chez les patients présentant<br />

une pathologie coronarienne patente ou latente afin<br />

d’évaluer l’ischémie induite par le stress et d’estimer le risque<br />

d’ischémie cardiaque au cours d’un rapport sexuel [9, 10] .<br />

Apomorphine (Uprima ® )<br />

Agoniste des récepteurs dopaminergiques centraux dans<br />

l’hypothalamus, l’apomorphine agit par levée de l’inhibition<br />

centrale. Administrée par voie sublinguale, elle n’a que peu<br />

d’effets secondaires (nausées dans 10 % des cas) et aucune<br />

contre-indication cardiovasculaire. Son efficacité est cependant<br />

moindre que celle des inhibiteurs des phosphodiestérases [11] et<br />

elle doit être réservée aux dysfonctions érectiles d’origine<br />

psychogène ou aux dysfonctions neurologiques centrales chez<br />

des patients jeunes. En revanche, l’efficacité est très limitée dans<br />

les étiologies artérielles, mixtes (en particulier le diabète) ou<br />

après chirurgie pelvienne élargie. Une molécule est disponible :<br />

Uprima ® 2 et 3 mg.<br />

Une précaution d’emploi existe avec les traitements à action<br />

dopaminergique (maladie de Parkinson).<br />

Ce médicament n’est pas recommandé en première intention.<br />

Alphabloquants : yohimbine<br />

Traitement de la dysfonction érectile 5-0695<br />

Patient sédentaire et/ou plus de 3 FDR<br />

cardiovasculaire<br />

Avis cardiologique préalable<br />

C’est un bloqueur des récepteurs a2 présynaptiques au niveau<br />

central et périphérique. Peu d’études ont démontré une efficacité<br />

supérieure au placebo en monothérapie. Il peut être efficace<br />

en cas de DE légère d’origine psychologique dominante [12] .En<br />

revanche, il semble plus efficace en association. Son avantage<br />

principal réside dans son coût modeste, et il ne faut pas oublier<br />

que, compte tenu de la participation psychologique dans<br />

beaucoup de dysfonctions érectiles, le placebo a jusqu’à 40 %<br />

d’efficacité. Il n’est pas recommandé de proposer ce traitement<br />

en dehors d’un choix éclairé de celui-ci. Les effets secondaires<br />

surviennent dans 3%à30%descas:anxiété, troubles gastrointestinaux,<br />

vertiges, tachycardie, céphalées, rashs cutanés,<br />

insomnie ou agitation.<br />

Traitements pharmacologiques locaux<br />

Les traitements pharmacologiques locaux ne font pas partie<br />

du traitement de première intention sauf exception.<br />

Injections intracaverneuses de prostaglandines<br />

La prostaglandine E1 (PGE1) est un agent inducteur de<br />

l’érection par l’intermédiaire de récepteurs intracaverneux dont<br />

la stimulation provoque une relaxation du muscle lisse par<br />

augmentation de l’AMPc.<br />

Les indications actuelles sont :<br />

une contre-indication ou intolérance au traitement oral ;<br />

un échec du traitement oral ;<br />

5


5-0695 Traitement de la dysfonction érectile<br />

une chirurgie carcinologique prostatique ou vésicale (prostatectomie<br />

totale ou cystoprostatectomie) ;<br />

la préférence du patient (problème du non-remboursement<br />

des traitements oraux).<br />

Elle est cependant plus volontiers utilisée en deuxième<br />

intention après échec des traitements oraux ou dans certaines<br />

étiologies organiques. Deux formes injectables d’alprostadil<br />

existent : 10 et 20 µg.<br />

Son remboursement par la Sécurité sociale est possible dans<br />

certaines indications en tant que médicament d’exception<br />

(neurologiques : para- et tétraplégies, neuropathie diabétique<br />

avérée et sclérose en plaques ; séquelles de chirurgie : anévrisme<br />

de l’aorte abdominale, prostatectomie radicale, cystectomie<br />

totale et exérèse colorectale ; séquelles de la radiothérapie<br />

abdominopelvienne ou du priapisme, traumatismes du bassin<br />

compliqués de troubles urinaires). La dose dépend de l’étiologie<br />

de la dysfonction. Elle peut être faible, en particulier chez les<br />

patients neurologiques du fait d’une hypersensibilité de dénervation<br />

(5 µg et moins) [13] . L’efficacité varie de 55 %à93%.Les<br />

effets secondaires sont peu fréquents. Les érections prolongées<br />

dépendent essentiellement des modalités de mise en route du<br />

traitement et des doses utilisées. Les douleurs des corps<br />

caverneux sont présentes chez 10 %à20%despatients. Un<br />

hématome au niveau du point de ponction sans gravité peut<br />

survenir ainsi qu’une fibrose localisée des corps caverneux<br />

(0,8 % à 23,3 % des cas).<br />

Son utilisation comme test diagnostique et/ou thérapeutique<br />

à la consultation est également intéressante. La dose de départ<br />

est en règle générale de 10 µg. Elle permet, selon le contexte et<br />

le résultat clinique, d’orienter l’enquête étiologique vers une<br />

cause psychologique ou organique. Cela est particulièrement<br />

vrai pour les dysfonctions érectiles survenant dans un contexte<br />

neurologique (central ou après chirurgie pelvienne) ou le<br />

diabète. La réponse à ce test est un facteur prédictif de l’évolution<br />

clinique de la dysfonction. Les injections ne sont pas<br />

contre-indiquées en cas de pathologies cardiovasculaires.<br />

“ Conduite à tenir<br />

Recommandations au médecin généraliste<br />

Si le médecin généraliste est parfaitement formé au<br />

traitement local par injections intracaverneuses et en<br />

connaît les modalités de surveillance et les effets<br />

secondaires possibles, il pourra prendre en charge le<br />

traitement.<br />

Une ou plusieurs injections test au cabinet sont<br />

indispensables, elles permettent de confirmer l’efficacité<br />

de l’alprostadil, l’apprentissage des auto-injections et la<br />

détermination de la dose utile permettant un rapport<br />

satisfaisant.<br />

Une information du patient est indispensable : risque<br />

d’érection pharmacologique prolongée (> 4 h), mesures<br />

à prendre pour y remédier, risques d’apparition des<br />

nodules, de fibrose, de déviation de la verge, ne pas<br />

augmenter la posologie de son propre chef.<br />

Une surveillance régulière est nécessaire.<br />

Instillations intra-urétrales de prostaglandines :<br />

système Muse ®<br />

La prostaglandine est également proposée en instillation<br />

intra-urétrale (Muse ® ). Le mécanisme d’action physiologique est<br />

peu clair, mais l’importance des doses de prostaglandine<br />

nécessaires laisse penser que l’action se fait par voie générale. En<br />

dehors de son côté plus pratique que la voie injectable, il existe<br />

des effets secondaires locaux urétraux (douleurs 5 %-33 %, 40 %<br />

d’urétrorragies, baisse modérée de la PA systolique et diastolique<br />

dans0%à3,6%descasetvertiges dans 1%à5,5%)etdes<br />

contre-indications liées à la partenaire du fait de l’action de la<br />

prostaglandine éjaculée sur le col utérin. Son coût est une<br />

limitation supplémentaire. Il n’est pas remboursé quelle que soit<br />

la pathologie à l’origine de la DE. Un test médicalisé est<br />

nécessaire avant prescription (risque d’hypotension dû au<br />

passage systémique de la PGE1, apprentissage de la technique,<br />

détermination de la dose à prescrire).<br />

Il peut être proposé aux patients ne souhaitant pas les<br />

injections intracaverneuses.<br />

Érecteur à dépression (vacuum)<br />

Il s’agit d’un cylindre creux relié à un système de pression<br />

négative, permettant de provoquer une érection, celle-ci étant<br />

maintenue par la mise en place d’un élastique à la base de la<br />

verge. L’efficacité d’un tel système est de 40 %à80%,quelle<br />

que soit la cause [14] . Il s’agit d’une alternative aux injections<br />

intracaverneuses, mais surtout à la prothèse pénienne. Le seul<br />

problème est celui de son acceptation psychologique par le<br />

patient qui peut trouver le système un peu « encombrant » ou<br />

ressentir parfois une gêne provoquée par l’élastique.<br />

Ses effets secondaires sont la douleur dans 10 % à 20 % des<br />

cas, une sensation de froideur du pénis (partenaire), un blocage<br />

de l’éjaculation dans 20 %à40%descasetdespétéchies et des<br />

ecchymoses mineures jusqu’à 30 % des cas. Les anticoagulants<br />

sont, pour certains, une contre-indication relative.<br />

Ce système ne fait pas partie du traitement de première<br />

intention. Un apprentissage de son maniement est nécessaire.<br />

Implants péniens<br />

Gonflables ou semi-rigides, les implants péniens sont un<br />

excellent traitement du symptôme chez les patients pour<br />

lesquels les traitements pharmacologiques ont échoué ou pour<br />

ceux qui ne souhaitent pas la programmation de l’acte qu’induit<br />

nécessairement un traitement pharmacologique. Ils ne doivent<br />

donc pas être proposés en première intention. La condition de<br />

la satisfaction dépend surtout d’une bonne information préopératoire<br />

du couple sur les résultats et d’une bonne technique de<br />

pose par un urologue habitué à ce type de chirurgie. Chez les<br />

patients présentant une prothèse fonctionnelle chez des couples<br />

sélectionnés et parfaitement informés, le taux de satisfaction est<br />

très élevé, allant de 79 % à 98 %. La mise en place d’une<br />

prothèse ne modifie ni la sensibilité pénienne, ni l’éjaculation,<br />

ni l’orgasme s’ils étaient encore présents au moment de<br />

l’implantation. Les complications mécaniques sont exceptionnelles.<br />

Le principal risque, comme pour toute prothèse, est<br />

infectieux, mais demeure rare (1 %-5 %) en dehors des patients<br />

diabétiques (8 %), les problèmes mécaniques avec la prothèse ou<br />

les tubulures augmentent avec le temps (5 % après 1 an, 20 %<br />

à 5 ans, et 50 %à10ans) et nécessitent une réintervention<br />

pour remplacement [15] . Ils sont également indiqués dans le<br />

traitement des dysfonctions érectiles associées aux courbures<br />

acquises de verge (maladie de La Peyronie).<br />

■ Conclusion<br />

Actuellement, les divers traitements de la dysfonction érectile<br />

sont bien connus, leur efficacité et leur sécurité ont été largement<br />

démontrées. Cependant, ils doivent être prescrits chez des<br />

patients bien informés et accompagnés. Le médecin généraliste<br />

peut être le premier interlocuteur du patient souffrant de<br />

dysfonction érectile à condition de bien connaître les modalités<br />

de prescription et de surveillance des différents traitements. À<br />

tout moment, le patient peut être réorienté vers un médecin<br />

spécialiste.<br />

6 Traité de Médecine Akos


.<br />

“ Points essentiels<br />

Le médecin généraliste est souvent le premier<br />

interlocuteur du patient ayant une dysfonction érectile.<br />

L’évaluation de la demande réelle du patient est<br />

nécessaire avant d’instaurer un traitement.<br />

Il faut identifier et proposer autant que possible un<br />

traitement étiologique avant de proposer un traitement<br />

symptomatique spécifique.<br />

L’accompagnement psychologique est essentiel.<br />

Les IPDE5 sont largement prescrits avec une efficacité et<br />

une sécurité prouvées.<br />

Le médecin généraliste peut réorienter à tout moment<br />

le patient vers un spécialiste.<br />

■ Références<br />

[1] NIH Consensus Conference. Impotence. NIH Consensus Development<br />

Panel on Impotence. JAMA 1993;270:83–90.<br />

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Massachusetts Male Aging Study. JUrol1994;151:54-61.<br />

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2002;12:377-83.<br />

V. Phé.<br />

M. Rouprêt (morgan.roupret@psl.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Assistance publique-Hôpitaux de Paris, 47-83, boulevard de l’Hôpital, 75651 Paris cedex 1, France.<br />

Faculté de médecine Pierre et Marie Curie, Université Paris VI, Paris, France.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Phé V., Rouprêt M. Traitement de la dysfonction érectile. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Traité de<br />

Médecine Akos, 5-0695, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Traité de Médecine Akos<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Traitement de la dysfonction érectile 5-0695<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

7


Plan<br />

Traitements immunosuppresseurs :<br />

mécanismes d’action et utilisation<br />

clinique<br />

E. Thervet, J. Zuber, R. Sberro, G. Canaud, D. Anglicheau, R. Snanoudj,<br />

M.-F. Mamzer-Brunel, F. Martinez, C. Legendre<br />

La transplantation rénale est le traitement de choix de l’insuffisance rénale chronique terminale. Elle<br />

permet une amélioration de la qualité de vie et la quantité de vie des patients par rapport à la dialyse de<br />

suppléance. Ces résultats sont en partie liés à l’utilisation de traitements immunosuppresseurs plus<br />

efficaces et dont le maniement s’est amélioré au cours du temps. Les progrès de la connaissance des<br />

mécanismes de l’activation lymphocytaire et des phénomènes de rejet a permis en effet de mieux définir<br />

l’utilisation de ces traitements et de leurs associations. Les traitements peuvent schématiquement être<br />

classés selon leurs caractéristiques (traitement biologique ou chimique). Parmi les traitements chimiques,<br />

les corticoïdes restent très utilisés, même si la question de leur arrêt ou de leur non-utilisation d’emblée est<br />

de plus en plus posée. Par ailleurs, la pierre angulaire des traitements immunosuppresseurs reste les<br />

inhibiteurs de la calcineurine, caractérisés par un index thérapeutique étroit et la nécessité d’un suivi<br />

pharmacologique. Les inhibiteurs de la mammalian target of rapamycin (mTOR) présentent des<br />

caractéristiques antiprolifératives intéressantes pour lutter contre le phénomène de dysfonction<br />

chronique du greffon ou pour diminuer le risque tumoral. Leur profil de tolérance rend parfois leur<br />

maniement difficile. Les inhibiteurs de la synthèse des bases puriques font appel principalement aux<br />

inhibiteurs de l’inosine monophosphate déshydrogénase. Leur efficacité en fait des partenaires privilégiés<br />

des autres classes thérapeutiques. Parmi les traitements biologiques, il est possible de séparer les<br />

anticorps déplétants ou non déplétants. Parmi les premiers, les globulines antithymocytaires sont<br />

principalement actives sur les lymphocytes T, alors que le rituximab, un anticorps monoclonal anti-CD20,<br />

est actif sur les lymphocytes B impliqués dans les phénomènes de rejet à médiation humorale. Les<br />

anticorps non déplétants sont représentés par les anticorps anti-CD25, dirigés contre le récepteur de<br />

l’interleukine-2. Dans un proche avenir, il est probable que le belatacept, bloqueur du second signal, sera<br />

utilisé pour permettre une épargne des inhibiteurs de la calcineurine. D’autres traitements<br />

immunosuppresseurs, agissant à des niveaux différents de la réponse immunitaire, sont en cours<br />

d’évaluation. De plus, les progrès de la pharmacologie laissent espérer une meilleure individualisation des<br />

traitements immunosuppresseurs et la meilleure définition des stratégies thérapeutiques utilisées.<br />

© 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Transplantation rénale ; Immunosuppression ; Inhibiteurs de la calcineurine ;<br />

Inhibiteurs de mTOR ; Mycophenolate mofétil ; Belatacept ®<br />

Introduction 1<br />

Réponse allo-immune 2<br />

Traitements immunosuppresseurs chimiques 3<br />

Corticoïdes 3<br />

Inhibiteurs de la calcineurine : ciclosporine et tacrolimus 3<br />

Inhibiteurs de mTOR : sirolimus et évérolimus 7<br />

Inhibiteurs de la synthèse des bases puriques 8<br />

Inhibiteurs de la synthèse des bases pyrimidiques : léflunomide 9<br />

Traitements biologiques 9<br />

Introduction aux traitements biologiques 9<br />

Agents déplétants 10<br />

Anticorps monoclonaux déplétants 10<br />

Anticorps non déplétants 11<br />

Néphrologie<br />

Nouveaux traitements immunosuppresseurs 11<br />

Inhibiteurs du premier signal 11<br />

Immunosuppresseurs bloquant le second signal 11<br />

Drogues ciblant le troisième signal 11<br />

Agents modifiant le trafic et l’adressage lymphocytaire 11<br />

Stratégies immunosuppressives 11<br />

Bases du choix des stratégies immunosuppressives 12<br />

Proposition de protocoles 12<br />

Conclusion 13<br />

■ Introduction<br />

18-065-F-10<br />

La transplantation rénale adulte est le traitement de choix de<br />

l’insuffisance rénale chronique au stade terminal. Elle améliore<br />

la qualité de vie des patients, mais aussi leur espérance de vie [1] .<br />

1


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

Les progrès considérables réalisés au cours des 20 dernières<br />

années sont dus à l’effet combiné d’une diminution très<br />

significative de l’incidence des rejets aigus, témoin de l’efficacité<br />

de l’immunosuppression, et d’une meilleure prévention des<br />

complications infectieuses qui témoignent, elles, de la puissance<br />

de ces traitements [2, 3] . À l’heure actuelle, dans la plupart des<br />

équipes, la survie des patients à un an excède 95 % et celle des<br />

greffons se situe entre 90 % et 95 %, en fonction de la typologie<br />

des patients (rapport de l’Agence de biomédecine).<br />

Les enjeux actuels du traitement immunosuppresseur, induction<br />

de tolérance mise à part, sont multiples. Le traitement<br />

immunosuppresseur doit être efficace, et donc puissant, à la<br />

période initiale. Cette puissance permet une meilleure prévention<br />

des rejets aigus et la prévention et/ou le traitement des<br />

rejets sévères, en particulier ceux dont les mécanismes sont en<br />

relation avec l’immunité humorale. À plus long terme, il est<br />

important de définir pour chaque patient une immunosuppression<br />

de maintenance, dont le rapport bénéfice/risque est le<br />

meilleur possible. Il convient alors de mieux individualiser le<br />

traitement pour contenir la part immunologique de la néphropathie<br />

d’allogreffe, mais aussi améliorer la tolérance et donc<br />

l’observance de ces traitements [4] .<br />

CD4<br />

CD8<br />

CMH/peptide<br />

TCR<br />

ZAP-70<br />

PLC−γ<br />

Ca 2+<br />

Cellule présentatrice d'antigène<br />

Signal 1 - + Signal 2<br />

CD3<br />

Ras-GTP PKC θ<br />

Rac-GTP<br />

Calcineurine<br />

ERK, JNK<br />

DAG<br />

IDO<br />

AP-1<br />

CD80/86<br />

CTLA-4 CD28<br />

–<br />

+<br />

NF-κB<br />

NFAT<br />

+<br />

M<br />

Lymphocyte T<br />

■ Réponse allo-immune<br />

Les détails de la réponse allo-immune sont présentés dans<br />

un chapitre spécifique de ce traité. Il convient cependant d’en<br />

rappeler quelques notions puisque ces mécanismes vont<br />

expliquer l’action des traitements immunosuppresseurs<br />

utilisés.<br />

Succinctement, l’activation complète d’un lymphocyte T naïf<br />

requiert plusieurs signaux (Fig. 1) [5] . Le premier signal est<br />

secondaire à la reconnaissance d’un déterminant antigénique,<br />

les molécules HLA par exemple, par le récepteur de l’antigène<br />

du lymphocyte T (TCR). Ce premier signal est transmis par la<br />

molécule CD3, couplée aux protéines tyrosine kinase lck et ZAP-<br />

70, qui le relaient par trois voies de signalisation. Il s’agit de<br />

celle des MAP kinases, de celle dépendantes du couple calciumcalcineurine<br />

et enfin de celle impliquant la protéine kinase C<br />

thêta (PKCh), qui activent respectivement les facteurs de<br />

transcription comme l’activator-protein 1 (AP-1), le nuclear<br />

activating factor (NFAT), et le facteur nucléaire jB (NF-jB). Ces<br />

derniers conduisent à l’expression de CD154 (CD40 ligand),<br />

mais aussi de l’interkeukine 2 (IL-2) et de la chaîne alpha<br />

(CD25) de son récepteur. La molécule CD154 engage son ligand<br />

CD40<br />

CD40L<br />

G1 S<br />

mTOR<br />

G2<br />

Akt<br />

PI-3K<br />

IL-2<br />

STAT5<br />

α β γ<br />

JAK3<br />

CCR1<br />

CCR5<br />

CXCR3<br />

Signal 3<br />

Récepteur<br />

S-1-P<br />

Figure 1. Représentation des différentes étapes de l’activation lymphocytaire T. Le premier signal est issu de la reconnaissance de son ligand par le récepteur<br />

des lymphocytes T (TCR), qui active les facteurs de transcription pro-inflammatoires NF-jB, NFAT et AP-1 par différentes voies de signalisation. Le second signal<br />

est délivré par l’engagement des molécules de cosignal (CD28, inducible costimulator-ligand [ICOS-L], CD40L), qui renforcent le premier signal. Enfin, le<br />

troisième signal naît de la fixation de l’IL-2 sur son récepteur de haute affinité. Celui-ci délivre un message permettant la prolifération, la sécrétion de cytokines<br />

et de chémokines, ainsi que des signaux protégeant de la mort par apoptose. La prolifération cellulaire est dépendante de la synthèse de bases puriques et<br />

pyrimidiques. L’expression du récepteur S-1-P permet au lymphocyte de s’extraire du ganglion drainant pour atteindre les tissus cibles sous l’effet des<br />

chémokines pro-inflammatoires, dont il exprime les récepteurs (CCR1, CCR5, CXCR3). CMH : complexe majeur d’histocompatibilité ; IDO : indoléamine<br />

2,3-dioxygénase ; ZAP-70 : protéine tyrosine kinase ; PLC : phospholipase C ; CTLA-4 : cytotoxic T lymphocyte antigen-4 ; DAG : diacylglycérol ; PKC : protéine<br />

kinase C ; PI-3K : phospho-inositol-3 kinase ; Akt : protéine kinase ; STAT : signal transducer and activator of transcription ; mTOR : mammalian target<br />

of rapamycine ; G1-S-G2-M : phases du cycle cellulaire ; JAK3 : Janus kinase 3.<br />

2 Néphrologie


CD40 sur la cellule présentatrice d’antigène qu’elle active,<br />

induisant ainsi une augmentation de l’expression des molécules<br />

CD80 et CD86 [6] .<br />

Celles-ci permettent de délivrer le deuxième signal par l’engagement<br />

de la molécule de cosignal CD28 sur le lymphocyte. Ce<br />

cosignal renforce le signal transmis par le TCR, en activant<br />

AP-1 qui, complexé à NFAT, transactive les gènes IL-2 et IL-2R.<br />

Son absence ne permet pas au lymphocyte de s’activer totalement<br />

et celui-ci devient anergique.<br />

Le troisième signal est induit par la fixation de cytokines sur<br />

leurs récepteurs, et en particulier l’IL-2. Ce troisième signal<br />

conduit à la prolifération cellulaire. En résumé, l’expression<br />

induite de CD25 (IL2Ra), permet la formation du récepteur de<br />

haute affinité de l’IL-2, associant les chaînes a, b et c. Ces<br />

récepteurs transmettent un troisième signal qui conduit à la<br />

prolifération cellulaire, à l’expression de gènes anti-apoptotiques<br />

et à la production de cytokines et de chémokines. Trois voies<br />

principales de signalisation sont décrites en aval du récepteur de<br />

l’IL-2. Une voie MAP-kinase, une voie initiée par la Janus kinase<br />

3 (JAK3) [7] , mettant en jeu les protéines STAT5, et une voie en<br />

aval de la phosphoinositide-3-kinase (PI-3K), impliquant<br />

mTOR [7] .<br />

La prolifération cellulaire, parfois assimilée à un quatrième<br />

signal, requiert la synthèse de nucléotides purines et pyrimidines,<br />

respectivement dépendantes des enzymes inosine monophosphatase<br />

déshydrogénase (IMPDH), et dihydroorotate<br />

déshydrogénase (DHODH).<br />

Enfin, un certain nombre de récepteurs aux chémokines<br />

(CCR1, CXCR3, CCR5) et molécules d’adressage, comme le<br />

récepteur sphingosine-1-phosphate (S-1-P), sont exprimées,<br />

permettant au lymphocyte de quitter l’organe lymphoïde<br />

secondaire où il a été activé pour rejoindre le tissu cible [8] .<br />

■ Traitements<br />

immunosuppresseurs chimiques<br />

Corticoïdes<br />

Mécanismes d’action<br />

Les glucocorticoïdes, dont l’utilisation remonte aux années<br />

1960, agissent comme agonistes des récepteurs des glucocorticoïdes.<br />

Leurs mécanismes sont complexes et ont été résumés<br />

récemment dans un article de synthèse [9] . À un dosage important,<br />

ils possèdent aussi des effets indépendants de la fixation<br />

au récepteur. Les effets médiés par le récepteur sont principalement<br />

des effets transcriptionnels, par l’intermédaire d’interaction<br />

avec les éléments de fixation à l’ADN et des interactions<br />

protéine-protéine du complexe « récepteur des stéroïdes » . Ceci<br />

entraîne un effet sur des facteurs de transcription tels que<br />

AP-1 et NF-jB.<br />

Les corticoïdes se fixent sur un récepteur intracellulaire<br />

spécifique. Le gène de ce récepteur est localisé sur le chromosome<br />

5q31-32. Après fixation des glucocorticoïdes sur son<br />

récepteur, il se produit une dissociation de molécules chaperons,<br />

telles que des protéines du choc thermique (heat-shock protein ou<br />

HSP) de ce récepteur. Dans la cellule, les corticoïdes agissent<br />

donc de trois manières. Tout d’abord, le complexe<br />

glucocorticoïdes-récepteur est transloqué dans le noyau, où il se<br />

fixe sous la forme d’un homodimère sur des séquences de<br />

l’ADN, appelées sur des éléments récepteurs de glucocorticoïdes<br />

(GRE). Le complexe résultant recrute, soit des protéines coactivatrices,<br />

soit corépressives, qui modifient la structure de la<br />

chromatine, facilitant ou inhibant ainsi l’assemblage de la<br />

machinerie cellulaire de base et l’initiation de la transcription<br />

par la RNA polymérase II. Deuxièmement, la régulation d’autres<br />

gènes répondeurs aux glucocorticoïdes implique l’interaction<br />

entre le complexe du récepteur cortisol-glucocorticoïdes et<br />

d’autres facteurs de transcription comme le facteur NF-jB. Les<br />

effets immunosuppresseurs des corticoïdes sont alors liés à la<br />

diminution de l’expression de cytokines (IL-1, IL-6 et IL-2 et<br />

Néphrologie<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

interféron-c [INF-c]). Cette action est en particulier secondaire à<br />

l’induction de la synthèse d’une protéine, appelée I–jB. Cette<br />

protéine inhibe la translocation nucléaire de NF-jB. Le troisième<br />

mécanisme est une signalisation des glucocorticoïdes par<br />

l’intermédiaire de récepteurs associés à la membrane et de<br />

deuxième messager (voies non génomiques).<br />

Utilisation clinique<br />

Les corticoïdes peuvent être utilisés dans le traitement<br />

d’attaque après transplantation selon des modalités posologiques<br />

variables selon les schémas d’immunosuppression. Il n’est<br />

pas possible de proposer un protocole standard d’utilisation de<br />

ceux-ci. De plus, leur non-utilisation d’emblée (avoidance), ou<br />

leur arrêt à distance de la transplantation reste une des grandes<br />

controverses dans le domaine de la transplantation. Un éditorial<br />

fait d’ailleurs état des tribulations de l’arrêt des stéroïdes après<br />

transplantation [10] ! Il semble raisonnable de proposer un arrêt<br />

des stéroïdes et/ou l’absence complet d’utilisation de ceux-ci<br />

dans des populations à faible risque de rejet en encadrant cette<br />

manœuvre par des techniques (biopsie de dépistage et/ou test<br />

immunologiques) susceptibles de dépister précocement une<br />

complication.<br />

Les corticoïdes sont également utilisés pour le traitement<br />

curatif des épisodes de rejet aigu prouvé. Dans ce cas, les<br />

protocoles associent le plus souvent de fortes doses par voie<br />

intraveineuse pendant quelques jours, suivies d’une augmentation<br />

transitoire de la posologie orale des corticoïdes.<br />

Inhibiteurs de la calcineurine : ciclosporine<br />

et tacrolimus<br />

Les inhibiteurs de la calcineurine bloquent la transduction<br />

intranucléaire du premier signal. Ils restent la pierre angulaire<br />

des traitements immunosuppresseurs utilisés actuellement. La<br />

ciclosporine, isolée à partir de Tolypocladium inflatum Gams et<br />

dont Borel mit en évidence les propriétés immunosuppressives<br />

en 1976, est utilisée depuis le début des années 1980 en<br />

transplantation. Le tacrolimus est un antibiotique de la famille<br />

des macrolides. Malgré une structure différente, il a un mode<br />

d’action similaire à celui de la ciclosporine.<br />

Mécanismes d’action<br />

La stimulation des lymphocytes T, consécutive à la présentation<br />

d’un antigène par les molécules du complexe majeur<br />

d’histocompatibilité, entraîne une cascade de réactions intracytoplasmiques<br />

qui aboutissent à l’augmentation intracellulaire de<br />

calcium. Ceci induit l’activation, par la calmoduline, d’une<br />

protéine intracellulaire, la calcineurine. Cette sérine/thréonine<br />

phosphatase a pour substrat le composant cytoplasmique du<br />

facteur de transcription NFAT. La déphosphorylation de celui-ci<br />

facilite sa translocation nucléaire, où il va induire la synthèse de<br />

cytokines, en particulier d’IL-2, responsable du signal de<br />

prolifération lymphocytaire. La ciclosporine et le tacrolimus<br />

sont classés comme inhibiteurs de la calcineurine (Fig. 2) [11] .<br />

Leur action passe par leur fixation sur leurs cibles protéiques<br />

spécifiques de la famille des immunophilines, respectivement la<br />

cyclophiline et la FK binding protein 12. Ces protéines sont des<br />

enzymes, ou rotamases, impliquées dans l’assemblage des<br />

protéines (cette propriété n’est pas impliquée directement dans<br />

le mécanisme d’action). Les complexes ainsi formés se lient à la<br />

calcineurine et bloquent son action par phénomène allostérique.<br />

En bloquant le translocation de NFAT dans le noyau, les<br />

inhibiteurs de la calcineurine inhibent la synthèse d’IL-2 et de<br />

produits d’activation précoce (c-myc, l’IL-3, l’IL-4, le GM-CSF, le<br />

TNF-a et INF-c).<br />

Ciclosporine<br />

Utilisation clinique<br />

L’efficacité de la ciclosporine a été démontrée dans des études<br />

datant du début des années 1980. L’utilisation de celle-ci a<br />

3


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

CD4<br />

CD8<br />

Ciclosporine<br />

Cyclophiline<br />

FK506<br />

FKB12<br />

TCR<br />

ZAP-70<br />

Ca 2+<br />

Calcineurine<br />

OKT3<br />

CD3<br />

PLC-γ<br />

Stéroïdes<br />

DAG<br />

AP-1<br />

NFAT<br />

PKC θ<br />

NF-κB<br />

Figure 2. Les voies de signalisation en aval du récepteur des lymphocytes<br />

T (TCR) constituent des cibles privilégiées pour les drogues immunosuppressives.<br />

Celles-ci visent l’antagonisme des facteurs de transcription<br />

NFAT, AP-1 et NF-jB, de façon tissu spécifique, par le blocage des voies de<br />

signalisation propres au lymphocyte. La ciclosporine et le tacrolimus,<br />

toutes deux des prodrogues complexées à des immunophilines, inhibent<br />

la calcineurine, senseur biologique de l’afflux de calcium dans la cellule<br />

après l’engagement du TCR. Les stéroïdes ont un effet plus ubiquitaire,<br />

agissant directement sur les facteurs de transcription AP-1 et NF-jB. Enfin,<br />

la molécule CD3, complexée au TCR, peut également être la cible d’anticorps,<br />

deplétants ou non. ZAP-70 : protéine tyrosine kinase ; PLC : phospholipase<br />

C ; DAG : diacylglycérol ; PKC : protéine kinase C ; FK506 :<br />

tacrolimus ; NFAT : nuclear activating factor.<br />

permis une amélioration de la survie des greffons en comparaison<br />

avec les traitements de l’époque, c’est-à-dire les corticoïdes<br />

et l’azathioprine, et l’essor moderne de la transplantation<br />

d’organe [12, 13] . La ciclosporine est en revanche associée à de<br />

nombreux effets indésirables. Il existe des complications en<br />

relation avec son effet immunosuppresseur (risque infectieux et<br />

carcinologique). La ciclosporine est aussi associée à des complications<br />

spécifiques. Il s’agit, en premier lieu, d’une néphrotoxicité<br />

aiguë et chronique [12, 14] . La néphrotoxicité aiguë,<br />

fonctionnelle et réversible, est liée à des effets hémodynamiques.<br />

La néphrotoxicité chronique est caractérisée par une<br />

fibrose tubulo-interstitielle en bande (Fig. 3) et une artériolopathie<br />

de l’artériole afférente du glomérule [15] . Par ailleurs, une<br />

hypertension artérielle (HTA) est présente chez 50 %à60%des<br />

patients traités par ciclosporine. La pathogénie de cette HTA est<br />

multifactorielle, même si le rôle du système rénine-angiotensine<br />

(SRA) [16] , de l’endothéline [17] et de l’oxyde nitrique [18] semble<br />

prédominant. Enfin, la ciclosporine induit un profil lipidique<br />

athérogène en augmentant la concentration plasmatique du<br />

cholestérol, de sa fraction LDL et la péroxydation des lipides [19] .<br />

.<br />

Figure 3. Fibrose en bandes en relation avec une néphrotoxicité chronique<br />

des inhibiteurs de la calcineurine (Trichrome de Masson. Cliché<br />

Laure-Hélène Noël, Service d’anatomopathologie, Hôpital Necker, Paris).<br />

D’autres effets indésirables ont également été décrits. Parmi<br />

ceux-ci, les inconvénients cosmétiques, tels que l’hirsutisme et<br />

l’hypertrophie gingivale, ne sont pas à négliger pour améliorer<br />

l’observance des patients.<br />

Pharmacologie<br />

Un grand nombre des effets indésirables décrits au chapitre<br />

précédent sont en relation avec des concentrations excessives de<br />

ciclosporine dans le sang. En effet, la ciclosporine est caractérisée<br />

par un index thérapeutique étroit, une grande variabilité<br />

intra- et interindividuelle, l’absence de marqueur pharmacodynamique<br />

simple et une bonne corrélation entre la concentration<br />

sanguine et l’effet observé. Toutes ces caractéristiques rendent ce<br />

traitement éligible pour un suivi thérapeutique pharmacologique.<br />

Dans le cas de la ciclosporine, pendant longtemps le suivi<br />

thérapeutique pharmacologique a reposé sur la mesure de la<br />

concentration résiduelle (c’est-à-dire immédiatement avant la<br />

prise du matin), appelée également C0. Plus récemment, la<br />

pratique de la concentration mesurée deux heures après la prise<br />

(C2), ou même la pratique de mesure d’aire sous la courbe (area<br />

under curve [AUC]) ont pu être proposées pour améliorer<br />

l’individualisation du traitement.<br />

Le suivi thérapeutique de la ciclosporine par la C0 reste la<br />

méthode la plus utilisée pour l’adaptation de sa dose. Le suivi<br />

par la C0 est facile à expliquer aux patients et au personnel<br />

soignant [20] . De plus, en utilisant la C0, les écarts de temps<br />

entre la prise médicamenteuse et le prélèvement sont moins<br />

stricts que lorsque l’on s’intéresse à la partie initiale de la courbe<br />

concentration/temps (cf. infra). De ce fait, la plus grande partie<br />

des études réalisées jusqu’en 2003 pour évaluer le risque de rejet<br />

aigu après transplantation rénale ont utilisé une adaptation<br />

posologique de la ciclosporine reposant sur une détermination<br />

de la C0, y compris lorsqu’il s’agissait de la forme de microémulsion.<br />

Toutefois, les valeurs cibles de la C0 ont souvent été<br />

définies de façon arbitraire ou approximative et il existe une<br />

grande variation de concentrations cibles selon les centres de<br />

transplantation rénale. Les valeurs cibles de la C0 décrites dans<br />

la littérature dépendent aussi du délai après transplantation<br />

(première année ou à distance de la greffe) et du traitement<br />

immunosuppresseur associé (monothérapie, association avec le<br />

mycophénolate mofétil, l’azathioprine ou le sirolimus, utilisation<br />

d’une induction biologique, etc.). Les recommandations<br />

sont à prendre avec précaution car aucune étude prospective<br />

comparant deux concentrations cibles de la C0 sur l’incidence<br />

du rejet aigu n’est disponible.<br />

4 Néphrologie


6000<br />

5000<br />

4000<br />

3000<br />

2000<br />

1000<br />

r 2 = 0,12<br />

0 300 600<br />

Même si la C0 reste la méthode la plus utilisée, le meilleur<br />

marqueur de l’exposition à un médicament est la mesure de<br />

l’AUC entre 0 heure et 12 heures. Cependant, la détermination<br />

de cette AUC ne peut être effectuée de façon répétitive pour les<br />

patients. Une première approche pour faciliter son utilisation<br />

est de proposer une estimation de l’AUC par des techniques de<br />

prélèvements limités ou une approximation bayésienne. Dans le<br />

cas de la ciclosporine, une étude a montré que l’AUC mesurée<br />

précocement en période post-greffe est significativement<br />

associée au rejet aigu. Cette relation existe pour l’AUC entre<br />

0 heure et 12 heures et celle entre 0 heure et 4 heures (AUC 0-<br />

4) [21] . Même si cette AUC courte rend cette approche plus<br />

facile, elle ne permet pas non plus un suivi en pratique courante<br />

régulière. L’étape ultérieure a donc consisté à déterminer<br />

le point unique le mieux corrélé à cette AUC 0-4. Il est apparu<br />

que le prélèvement unique le mieux corrélé était la concentration<br />

mesurée 2 heures après la prise (Fig. 4) [24] . De plus, la<br />

C2 correspond à la période d’inhibition maximale de la calcineurine<br />

et de sécrétion d’IL-2 [22] . Enfin, une étude a précisé<br />

l’effet bénéfique du suivi thérapeutique par la C2 sur la prévention<br />

des effets toxiques chez des patients transplantés rénaux à<br />

long terme : chez les patients ayant une C2 supérieure de plus<br />

de10%àlaconcentration cible (800 ng/ml), une réduction des<br />

doses de ciclosporine a permis une réduction des signes de<br />

toxicité rattachés à la ciclosporine chez 75 % des patients, sans<br />

survenue d’épisodes de rejet aigu (Cole E., communication<br />

personnelle). Le principal inconvénient du suivi thérapeutique<br />

par la C2 est la précision du temps de prélèvement par rapport<br />

au temps de prélèvement théorique. L’écart de prélèvement ne<br />

doit pas excéder 10 minutes avant ou après la C2. Ceci implique<br />

que le patient et le personnel paramédical respectent<br />

précisément les temps de prise du médicament et celui du<br />

prélèvement.<br />

Des conférences de consensus ont été organisées pour tenter<br />

de préciser les avantages, les cibles et les limites de l’utilisation<br />

de la C2. Le groupe Consensus on neoral C2 : expert review in<br />

transplantation (CONCERT) a publié la première conférence de<br />

consensus portant sur l’utilisation de la C2 [22] . L’analyse des<br />

données cliniques a montré qu’il existe une association entre les<br />

valeurs de la C2 et le risque de survenue d’un épisode de rejet<br />

après transplantation d’organe. Ce lien persiste quels que soient<br />

les traitements initiaux (en particulier induction biologique)<br />

utilisés après la transplantation. De plus, l’obtention de concentrations<br />

adéquates dès cinq jours après transplantation est<br />

importante pour obtenir la plus faible incidence de rejet.<br />

L’utilisation de la C2 est également intéressante car elle permet<br />

C 0<br />

6000<br />

5000<br />

4000<br />

3000<br />

2000<br />

1000<br />

r 2 = 0,85<br />

0 1000 2000<br />

C 2<br />

6000<br />

5000<br />

4000<br />

3000<br />

2000<br />

1000<br />

Concentration de ciclosporine à j3 post-transplantation (ng/ml)<br />

r 2 = 0,70<br />

0 1000<br />

Figure 4. Corrélation entre les points uniques de concentration mesurée à différents délais après la prise et l’aire sous la courbe entre 0het4h.Lepoint<br />

unique présentant la meilleure corrélation est le point 2haprèslatransplantation (C2) (d’après [22, 23] ).<br />

Néphrologie<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

d’individualiser une population particulière présentant des<br />

C2 faibles malgré des posologies quotidiennes élevées. Dans ce<br />

cas, la réalisation d’un dosage plus tardif, par exemple 6 heures<br />

après la prise (C6), ou une AUC complète, permettent de<br />

différencier les véritables mauvais absorbeurs, qui ont une<br />

C6 basse, des patients présentant un retard à l’absorption (C6 ><br />

C2), comme en présence d’une gastroparésie diabétique. En<br />

période plus tardive suivant la transplantation, l’utilisation de la<br />

C2 pourrait améliorer la fonction rénale des patients et d’autres<br />

complications comme l’hypertrophie gingivale ou l’hirsutisme.<br />

Une nouvelle conférence a donné lieu à la définition de valeurs<br />

cibles selon le type d’organe et la période après la transplantation<br />

(Tableau 1) [23] . Cette conférence a aussi mis en avant<br />

quelques limitations de cette stratégie en indiquant que d’autres<br />

outils (comme des AUC courtes) sont parfois utiles.<br />

D’autres critiques ont été avancées plus récemment. Knight et<br />

Morris ont conduit une revue systématique des études portant<br />

sur le bénéfice clinique d’un suivi par la C2 [25] . Les auteurs ont<br />

identifié 29 études, dont dix avaient une méthodologie adéquate<br />

(contrôlée et randomisée). À la période initiale après la<br />

transplantation, l’utilisation de la C2 par rapport à la C0 est<br />

associée à une augmentation de 50 % en moyenne de la dose<br />

de ciclosporine utilisée. Elle n’était pas associée à une diminution<br />

significative de l’incidence de rejet aigu, mais ne s’accompagnait<br />

pas non plus d’une dégradation significative de la<br />

fonction rénale. Les résultats chez les patients en situation<br />

stable sont encore plus rares. Une seule étude portant sur<br />

70 patients a été réalisée pour comparer après trois mois un<br />

suivi par la C2 et un suivi par la C0 [26] . Les incidences de rejet<br />

aigu et de néphrotoxicité étaient identiques dans les deux<br />

groupes. En revanche, l’utilisation de la C2 était associée à une<br />

diminution d’environ 20 % de la posologie quotidienne de<br />

ciclosporine, sans augmentation de l’incidence de rejet aigu, et<br />

à une diminution de la posologie des traitements antihypertenseurs.<br />

En conclusion, il existe des arguments théoriques pour la<br />

supériorité du suivi par la C2, mais il n’existe pas de preuve<br />

probante de sa supériorité en clinique.<br />

Ceci ouvre la porte à un suivi différent, en particulier à<br />

distance de la transplantation. Il peut s’agir d’AUC abrégées,<br />

utilisant des outils bayésiens. Cette approche a été utilisée par<br />

l’équipe de néphrologie de Rouen. Une adaptation fondée sur<br />

des cibles basses d’AUC abrégée dans le long terme permet une<br />

amélioration significative de la fonction rénale sans augmentation<br />

du risque de rejet aigu (Etienne I, communication<br />

personnelle).<br />

C 3<br />

5


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

Tableau 1.<br />

Recommandations pour les concentrations de C2 cibles après<br />

transplantation rénale [23] .<br />

Équipes Régime immunosuppresseur C2 cibles (ng/ml)<br />

Anvers CsA, MPA, STE ± antiCD25 M1 : 1 300-1 500<br />

(Belgique)<br />

M2-M3 : 900-1 300<br />

M4-M6 : 750-950<br />

> M6 : 700<br />

Oslo<br />

CsA, MPA, STE M1 : 1 500-2 000<br />

(Norvège)<br />

M2 : 1 400-1 600<br />

M3 : 1 000-1 200<br />

Berlin<br />

CsA, MPA, STE M1 : 1 400-1 600<br />

(Allemagne)<br />

M2-M6 : 800-1 100<br />

> M6 : 450-700<br />

CsA, MPA, STE, AntiCD25 M1 : 1 000-1 100<br />

M2-M6 : 700-900<br />

> M6 : 450-700<br />

CsA, Inh mTOR, STE M1 : 500-700<br />

M2-M6 : 400-600<br />

M7-M12 : 300-500<br />

> M12 : 200-400<br />

Newcastle CsA, AZA, STE, AntiCD25 M1-M3 : 1 000-1 500<br />

(Angleterre)<br />

M4-M6 : 800-1 200<br />

> M6 : 600-1 000<br />

Paris Necker CsA, MPA, STE, AntiCD25 M1-M3 : 1 000-1 200<br />

(France)<br />

M4-M6 : 800-1 000<br />

> M6 : 600-800<br />

CsA : ciclosporine microémulsion ; MPA : inhibiteur de l’inosine<br />

monophosphatase déshydrogénase (IMPDH) ; STE : stéroïdes ; AntiCD25 :<br />

anticorps monoclonal antirécepteur de l’interleukine 2 ; AZA : azathioprine ; Inh<br />

mTOR : inhibiteurs de la mammalian target of rapamycine ; Mn : délai (n mois) après<br />

transplantation.<br />

Tacrolimus<br />

Utilisation clinique<br />

Si les mécanismes d’action sont communs entre les deux<br />

inhibiteurs de la calcineurine, leur valeur respective en termes<br />

d’efficacité reste un sujet de controverse. Les études initiales ont<br />

montré une supériorité du tacrolimus sur la ciclosporine sous sa<br />

forme « classique » en termes d’incidence de rejet [27] . Cependant,<br />

l’utilisation de la forme non-microémulsion et d’autres<br />

biais laissent planer un doute sur la démonstration rigoureuse<br />

de cette supériorité.<br />

Une étude récente, non exempte de critique méthodologique,<br />

vient d’être publiée. Portant sur plus de 1 500 patients, elle<br />

montre une meilleure efficacité du tacrolimus comparé à la<br />

ciclosporine. Cette étude a montré que des C0 de tacrolimus<br />

cibles comprises entre 3 ng/ml et 7 ng/ml étaient associés aux<br />

meilleurs résultats [28] . Dans cette étude, les patients recevant du<br />

tacrolimus présentaient une meilleure fonction rénale, une<br />

moindre incidence de rejet aigu et une meilleure survie à un an<br />

du greffon rénal en comparaison avec les groupes traités avec de<br />

fortes ou de faibles doses de ciclosporine ou avec du sirolimus<br />

combinés aux autres traitements (mycophénolate mofétil et<br />

stéroïdes). D’autres études ne retrouvent pas une telle<br />

différence [29] .<br />

En ce qui concerne les effets indésirables, la néphrotoxicité et<br />

l’HTA sont des complications communes aux deux inhibiteurs<br />

de la calcineurine. En revanche, si le profil lipidique est meilleur<br />

en cas d’utilisation du tacrolimus, ce dernier est associé à une<br />

augmentation du risque de troubles de la glycorégulation. Une<br />

étude randomisée a récemment rapporté l’incidence de ces<br />

troubles [29] . Cette étude a comparé de façon prospective<br />

l’incidence de troubles de la glycorégulation observés chez des<br />

patients transplantés recevant, soit un traitement par ciclosporine,<br />

soit un traitement par tacrolimus. Après six mois, l’incidence<br />

de diabète survenant après transplantation ou d’anomalie<br />

de la glycémie à jeun a été de 26 % dans le groupe traité par<br />

ciclosporine, contre 33,6 % dans le groupe traité par tacrolimus<br />

(p = 0.046).<br />

De plus, l’utilisation du tacrolimus est associée à la survenue<br />

d’une alopécie réversible, en particulier chez les patients<br />

diabétiques et les femmes [30] .<br />

Le tacrolimus pourrait aussi être associé à une augmentation<br />

du risque de survenue d’une néphropathie à virus BK pouvant<br />

conduire à la perte du greffon [31] .<br />

Pharmacologie<br />

Le tacrolimus est aussi un traitement à index thérapeutique<br />

étroit et ses caractéristiques en font un bon candidat à un suivi<br />

thérapeutique pharmacologique. Les concentrations cibles sont,<br />

comme pour la ciclosporine, mal précisées. Le suivi thérapeutique<br />

du tacrolimus est fondé principalement sur la concentration<br />

résiduelle (C0). Même si certains travaux sont contradictoires, il<br />

semble qu’il existe une corrélation entre la C0 et la survenue<br />

d’effets secondaires pour des concentrations élevées et le risque<br />

de rejet cellulaire pour des concentrations faibles. De plus, la<br />

corrélation entre la C0 et l’AUC semble satisfaisante. Une étude<br />

prospective a montré que le suivi de transplantés rénaux traités<br />

par tacrolimus par la C2 n’augmentait pas de façon significative<br />

l’efficacité du suivi thérapeutique [32] . En revanche, il a été<br />

montré que le suivi thérapeutique fondé sur l’AUC diminue le<br />

risque de surexposition à ce médicament. Les auteurs ont défini<br />

une AUC cible entre 175 et 250 ng.h/ml au cours des six<br />

premières semaines post-transplantation, puis une AUC cible<br />

autour de 125 ng.h/ml [33] . À nouveau, l’inconvénient majeur<br />

de cette approche est la nécessité de nombreux prélèvements<br />

sanguins.<br />

Une conférence de consensus, non encore publiée, a fait un<br />

point sur les connaissances actuelles portant sur le tacrolimus et<br />

a proposé des cibles thérapeutiques (Tableau 2) (Wallemacq P.,<br />

communication personnelle).<br />

Un autre aspect, tout à fait original, de la prise en charge de<br />

patients traités par tacrolimus est l’apport de la pharmacogénétique.<br />

Il a en effet été montré que le polymorphisme du gène<br />

du cytochrome P450 3A5 (CYP3A5) est associé avec la pharmacocinétique<br />

du médicament et pourrait se révéler être un outil<br />

intéressant pour permettre une individualisation prédictive des<br />

posologies initiales à utiliser après transplantation et obtenir<br />

ainsi des concentrations cibles plus précocement et de façon<br />

plus reproductible. La principale enzyme impliquée dans le<br />

Tableau 2.<br />

Recommandations pour les concentrations cibles (C0) de tacrolimus en ng/ml après transplantation (Wallemacq P. communication personnelle).<br />

Délai (mois) Sans induction AntiCDC25<br />

Trithérapie<br />

Ac polyclonaux/HRI MMF/minimisation des stéroïdes InhmTOR<br />

0-3 10-15 3-7 5-10/10-15 10-15 3-7<br />

3-12 5-15 3-7 5-10/10-15 8-12 3-7<br />

> 12 5-10 3-7 5-10/8-12 5-10 3-7<br />

.<br />

AntiCD25 : anticorps monoclonal antirécepteur de l’interleukine-2 ; Ac : anticorps ; HRI : haut risque immunologique ; MMF : mycophénolate mofétil ; InhmTOR :<br />

inhibiteurs de mammalian target of rapamycine.<br />

6 Néphrologie


Unités<br />

0,4<br />

0,35<br />

0,3<br />

0,25<br />

0,2<br />

0,15<br />

0,1<br />

0,05<br />

0<br />

métabolisme du tacrolimus est la sous-famille 3A du cytochrome<br />

P450 [34] . Les activités CYP3A chez l’homme reflètent<br />

l’expression hétérogène d’au moins deux isoformes de cette<br />

sous-famillle, les CYP3A4 et CYP3A5, dont les gènes sont situés<br />

de façon adjacente sur le chromosome 7q21. Il est admis que le<br />

CYP3A5 est le plus important pour le métabolisme du tacrolimus.<br />

Seuls les individus avec au moins un allèle CYP3A5*1 (A<br />

à la position 6 986) produisent des hauts niveaux d’acide<br />

ribonucléique messager (ARNm) et expriment la protéine<br />

CYP3A5, qui représente alors au moins 50 % du contenu total<br />

en CYP3A [35] . Les porteurs de l’allèle CYP3A5*3 (G en position<br />

6 986) ont une variabilité de séquence dans l’intron 3 qui crée<br />

un site d’épissage et codent pour un ARNm tronqué avec un<br />

codon stop prématuré. Il a été montré qu’il existe une association<br />

entre les besoins en tacrolimus et ce polymorphisme<br />

(Fig. 5) [36] . Les patients avec un génotype CYP3A5*1/*1 ont un<br />

haut niveau de métabolisme intestinal et hépatique et la dose<br />

quotidienne nécessaire pour obtenir des C0 de tacrolimus<br />

adéquats est plus élevée. La présence d’un allèle *1 est associée<br />

à la survenue plus précoce des épisodes de rejet après transplantation,<br />

en raison de concentrations inadéquates dans le contexte<br />

d’un traitement initial sans induction biologique [37] . La plus<br />

grande fréquence de cet allèle dans la population noire pourrait<br />

expliquer en partie les moins bons résultats observés après<br />

transplantation rénale dans cette population. En utilisant le<br />

génotypage de patients inscrits sur la liste d’attente pour<br />

lesquels une pharmacocinétique complète de tacrolimus était<br />

réalisée, des posologies initiales adaptées au génotype ont été<br />

déterminées [38] . Elles seraient de 0,30 mg/kg/j pour les patients<br />

exprimant le CYP3A5 (allèle *1) et de 0,15 mg/kg/j pour les<br />

patients ne l’exprimant pas (*3/*3). Il faut à présent démontrer<br />

l’intérêt clinique d’une adaptation pharmacogénétique de ce<br />

traitement.<br />

Inhibiteurs de mTOR :<br />

sirolimus et évérolimus<br />

Mécanismes d’action<br />

p = 0,0268<br />

(n = 4) (n = 9) (n = 68)<br />

Dose quotidienne M1 (mg/kg/j)<br />

Figure 5. Influence du génotype du cytochrome P450 3A5 (CYP3A5)<br />

sur les paramètres pharmacocinétiques de patients transplantés un mois<br />

(M1) après l’introduction du tacrolimus. La dose quotidienne de tacrolimus<br />

nécessaire pour atteindre les concentrations cibles est significativement<br />

plus élevée chez les patients porteurs d’un allèle *1, c’est-à-dire<br />

exprimant l’enzyme CYP3A5 (d’après [36] ).<br />

Les inhibiteurs de la mTOR, le sirolimus et l’évérolimus,<br />

bloquent une voie de signalisation, en aval des récepteurs à<br />

Néphrologie<br />

CYP3A5*1/*1 CYP3A5*1/*3 CYP3A5*3/*3<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

l’IL-2 et l’IL-15 [7] . Pour être actif, ils doivent se lier, comme le<br />

tacrolimus, à la protéine FKBP12 mais n’ont aucun effet sur la<br />

phosphatase calcineurine.<br />

Le sirolimus est un macrolide dont la structure est très proche<br />

de celle du tacrolimus, mais dont le mécanisme d’action est<br />

complètement différent [39] . En se fixant sur le FKBP12, il inhibe<br />

la prolifération cellulaire induite par les cytokines telles que<br />

l’IL-2, l’IL-3, l’IL-4 et l’IL-6 par une voie indépendante du<br />

calcium. Il bloque le cycle cellulaire en phase G1. Le complexe<br />

sirolimus-FKBP se lie à la protéine mTOR. Cette protéine a une<br />

activité d’autophosphorylation sur les résidus sérines. Elle<br />

contrôle l’activité d’une protéine kinase, la p70S6k et la<br />

phosphorylation d’une protéine qui inhibe le début de la<br />

traduction, la 4E-BP1. Le blocage de la p70S6kinase, qui<br />

phosphoryle la protéine ribosomale S6 impliquée dans l’activation<br />

de l’étape d’initiation, est responsable de l’inhibition de la<br />

traduction des ARNm comprenant un domaine riche en polypyrimidine<br />

à leur extrémité 5’(5’-TOP). Ces ARN messagers<br />

constituent une petite famille de transcrits présents en grande<br />

quantité dans la cellule, qui codent pour des protéines ribosomales<br />

et des composants de l’appareil traductionnel. La protéine<br />

4E-BP1 sous sa forme phosphorylée se dissocie de eIF4E, qui<br />

peut alors se lier à la coiffe et mettre en route la traduction des<br />

ARNm. Le sirolimus inhibe l’induction de la phosphorylation de<br />

4E-BP1 par les facteurs de croissance et augmente ainsi la<br />

fraction eIF4E séquestrée, inactive dans la cellule. Le blocage de<br />

ces réponses par le sirolimus va bloquer en aval la progression<br />

du cycle cellulaire de la phase G1 à la phase S.<br />

Utilisation clinique<br />

Même si ce sujet reste matière à controverse, le profil d’efficacité<br />

et de tolérance des deux inhibiteurs de mTOR, le sirolimus<br />

et l’évérolimus, sont globalement comparables.<br />

Les premières études portant sur le sirolimus ont été réalisées<br />

en utilisant cette molécule en association avec les inhibiteurs de<br />

la calcineurine [40, 41] . Si l’efficacité pour la prévention des<br />

épisodes de rejet aigu est bonne et si le sirolimus, seul, ne<br />

semble pas être associé à une néphrotoxicité propre, ces études<br />

ont montré que l’association des deux classes thérapeutiques<br />

était responsable d’une potentialisation de la néphrotoxicité des<br />

inhibiteurs de la calcineurine. L’intérêt s’est alors porté sur<br />

l’utilisation de cette classe thérapeutique selon d’autres modalités,<br />

comportant soit une introduction immédiate sans inhibiteur<br />

de la calcineurine, soit une minimisation des doses d’inhibiteurs<br />

de la calcineurine, soit une introduction secondaire plus ou<br />

moins précoce de l’inhibiteur de mTOR avec arrêt de l’inhibiteur<br />

de la calcineurine [39] . Cette approche est d’ailleurs celle<br />

retenue par l’autorisation de mise sur le marché européenne [42] .<br />

La première approche consiste donc en une introduction<br />

immédiate. Cette manœuvre est discutée car, même si elle a<br />

donné des résultats satisfaisants dans certaines études en<br />

association avec un traitement biologique d’induction par<br />

anticorps monoclonaux anti-IL2R [43] ou anticorps polyclonaux<br />

[44] , d’autres études ont été arrêtées prématurément. Une<br />

autre approche consiste en une introduction secondaire (par<br />

exemple après 3 mois), qui permet une stabilité dans le long<br />

terme de la fonction du greffon et des lésions histologiques [42] .<br />

De plus, une analyse montre que l’incidence des tumeurs est<br />

plus faible chez les patients traités par sirolimus que par<br />

anticalcineurines [45] . Il est d’ailleurs de plus en plus admis que<br />

l’intérêt des inhibiteurs de mTOR pourrait reposer sur leurs<br />

effets antiprolifératifs, bénéfiques à long terme sur la néphropathie<br />

d’allogreffe et les proliférations tumorales. Une étude sur<br />

l’introduction secondaire du sirolimus a montré qu’elle pouvait<br />

ralentir l’évolution de la néphropathie d’allogreffe.<br />

Une des particularités des inhibiteurs de mTOR est leur profil<br />

de tolérance. Introduits à la période initiale après la transplantation,<br />

ils ont été associés à une augmentation de la durée de<br />

la reprise retardée de fonction, possiblement en relation avec<br />

une diminution de la prolifération des cellules tubulaires<br />

rénales [46, 47] . Ils ont aussi été associés à des retards de cicatrisation<br />

et à une augmentation du risque de lymphocèle [48] .<br />

7


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

D’autres complications peuvent être observées. Il s’agit en<br />

particulier de complications hématologiques (thrombopénie,<br />

anémie), hépatiques, métaboliques (lipidiques), cutanéomuqueuses<br />

(acné, aphtes, etc.) ou de pneumopathies interstitielles<br />

sévères [49] . Les mécanismes de toutes ces complications ne sont<br />

pas encore bien élucidés. En revanche, les inhibiteurs de mTOR,<br />

sirolimus et évérolimus, pourraient avoir une action bénéfique<br />

contre le cytomégalovirus [50] .<br />

Inhibiteurs de la synthèse des bases<br />

puriques<br />

Azathioprine<br />

Mécanismes d’action<br />

Le mécanisme d’action de l’azathioprine est complexe, par<br />

inhibition de la synthèse de novo des purines et la perturbation<br />

de l’interconversion de ces bases bloquant la synthèse d’ADN et<br />

le passage en phase S. Ce sont les différents métabolites de<br />

l’azathioprine, surtout l’acide thioinosinique et les nucléotides<br />

dérivés de la 6-thioguanine qui sont actifs. L’acide thioinosinique<br />

inhibe par un pseudofeedback la phosphoribosylpyrophosphate<br />

amidotransférase (PRPP) et d’autres enzymes de<br />

l’interconversion des base puriques. La 6-thioguanine et d’autres<br />

dérivés sont des pseudonucléotides intégrés à l’ADN. Cytotoxiques,<br />

ils entraînent des cassures chromosomiques ainsi que des<br />

anomalies des acides nucléiques.<br />

Utilisation clinique<br />

L’azathioprine est utilisé comme traitement adjuvant pour la<br />

prévention des rejets aigus. À la dose de 2 mg/kg/j à 3 mg/kg/j,<br />

il est administré en une prise quotidienne. Son intérêt clinique<br />

est difficile à préciser. Une méta-analyse n’a pas mis en évidence<br />

d’amélioration des pertes de greffon et de l’incidence de rejet<br />

aigu en cas d’utilisation d’azathioprine [51] . Cependant, le suivi<br />

des données du registre de transplantation rénale laisse supposer<br />

une efficacité à long terme d’un traitement double par azathioprine<br />

et ciclosporine. De plus, une étude laisse planer un doute<br />

sur la supériorité du mycophénolate mofétil, pourtant très<br />

utilisé à présent en transplantation rénale [52] .<br />

La toxicité de l’azathioprine est hépatique et médullaire.<br />

L’azathioprine est responsable d’hépatites cholestatiques<br />

réversibles, de pélioses, de maladies veino-occlusives ou<br />

d’hyperplasie nodulaire régénérative. Le rôle favorisant d’une<br />

co-infection virale B ou C est probable [53] . La myélotoxicité<br />

porte surtout sur la lignée granuleuse, mais est aussi responsable<br />

d’anémies normocytaire ou macrocytaire et de thrombopénies.<br />

Une diminution des globules blancs nécessite la diminution,<br />

voire l’arrêt du traitement. Plus rarement, il existe des aplasies<br />

médullaires favorisées par l’association à l’allopurinol [54, 55] ou<br />

la présence d’une activité basse d’une enzyme du métabolisme,<br />

la thiopurine méthyltransférase (TPMT), chez 0,3 % de la<br />

population [56] . La mesure de l’activité de la TPMT peut servir au<br />

suivi pharmacodynamique de l’azathioprine [57, 58] . Enfin, le<br />

rôle à long terme des cassures chromosomiques sur le potentiel<br />

cancérigène de l’azathioprine reste discuté [59] .<br />

Pharmacologie<br />

L’efficacité thérapeutique et la toxicité de l’azathioprine sont<br />

secondaires aux caractéristiques des différentes étapes de son<br />

métabolisme. L’azathioprine suit probablement un métabolisme<br />

essentiellement hépatique. Sa transformation en<br />

6-mercaptopurine (6-MP) et en un dérivé nitro-imidazolé inclut<br />

une part enzymatique, catalysée probablement par les<br />

glutathion-S-tranférases.<br />

La 6-MP comporte trois voies métaboliques principales.<br />

L’hypoxanthine guanine phosphoribosyl transférase la transforme<br />

en acide thioinosinique. L’acide thioinosique est luimême<br />

actif, mais est aussi transformé en 6-thioguanine<br />

nucléotides (6-TGN). Ces 6-TGN sont responsables de l’effet<br />

immunosuppresseur et de la toxicité, proportionnelle à leurs<br />

concentrations. La TPMT transforme la 6-MP en 6-méthylmercaptopurine<br />

par méthylation de la fonction thiol. La<br />

xanthine oxydase (XO) inactive enfin les différents produits du<br />

métabolisme de la 6-MP. La 6-mercapto-8-hydroxypurine, les<br />

dérivés 6-méthylés et les 6-thioguanines sont métabolisés par la<br />

XO en acide thiourique.<br />

Comme cela a déjà été précisé, la TPMT présente un polymorphisme<br />

d’origine génétique, responsable d’épisodes d’aplasie<br />

médullaire grave.<br />

Inhibiteurs de l’inosine monophosphate<br />

déshydrogénase (IMPDH)<br />

Mécanismes d’action<br />

Le mycophénolate mofétil est une prodrogue de l’acide<br />

mycophénolique (MPA), un inhibiteur de l’IMPDH. Une revue<br />

récente a fait le point sur ses mécanismes d’action [60] . La<br />

recherche s’est développée à partir d’observations réalisées sur<br />

les mécanismes de déficiences génétiques d’enzymes impliquées<br />

dans les voies du métabolisme des bases puriques. Certaines de<br />

ces déficiences ont des effets dramatiques sur les réponses<br />

immunitaires. En 1972, Giblett et al. ont montré que les enfants<br />

ayant un déficit en adénosine désaminase (ADA) présentent une<br />

immunodéficience combinée impliquant les lymphocytes T et<br />

B. Peu de temps après, il a été montré que les enfants présentant<br />

un déficit en hypoxanthine-guanine phosphoribosyl<br />

transferase (HGPRTase) ont un système immunitaire normal,<br />

démontrant que la voie de sauvetage des purines, catalysée par<br />

l’HGPRT est importante pour le développement et les fonctions<br />

cérébrales mais pas pour le système immunitaire, alors que c’est<br />

l’inverse pour l’ADA. En partant de cette observation, la<br />

stratégie de développement d’un traitement immunosuppresseur<br />

a consisté à obtenir une copie phénotypique d’une déficience<br />

en ADA. Il fallait inhiber une enzyme qui limite le niveau de<br />

synthèse des nucléotides guanidiques, c’est à dire l’IMPDH.<br />

L’acide mycophénolique est un produit de fermentation du<br />

Penicillium brevicompactum. Son action principale est l’inhibition<br />

de l’isoforme de type II de l’IMPDH exprimé dans les lymphocytes<br />

T et B activés. Son action est donc liée au fait que les<br />

lymphocytes sont tributaires de la voie de synthèse de novo des<br />

bases guanidiques et que l’expression de l’IMPDH de type II est<br />

majeure dans les cellules du système immunitaire. Les monocytes<br />

sont aussi affectés par le MPA.<br />

Utilisation clinique<br />

La dose utilisée habituellement est de 2 g/j. Trois études<br />

multicentriques, contrôlées, randomisées en double aveugle,<br />

regroupant 1 493 patients receveurs d’allogreffe rénale, ont testé<br />

l’efficacité du mycophénolate mofétil [61] . Celles-ci ont toutes<br />

montré que l’utilisation du mycophénolate mofétil en comparaison<br />

avec un placebo ou l’azathioprine permet de diminuer de<br />

façon significative les épisodes de rejet aigu.<br />

En ce qui concerne les effets indésirables, outre ceux observés<br />

habituellement avec les traitements immunosuppresseurs, le<br />

mycophénolate mofétil se caractérise principalement par des<br />

troubles digestifs à type de douleurs et/ou de troubles du transit,<br />

généralement réversibles à l’arrêt ou à la diminution des<br />

doses [62] . De plus, une toxicité hématologique (leucopénie) est<br />

également fréquente.<br />

Le mycophénolate de sodium est une autre prodrogue de<br />

l’acide mycophénolique. Sa présentation galénique sous forme<br />

de comprimés gastroprotégés à libération lente avait laissé<br />

espérer une amélioration des effets indésirables digestifs. Les<br />

études randomisées n’ont pas confirmé cette amélioration,<br />

même si des cas d’amélioration en cas de conversion ont été<br />

rapportés [63-65] .<br />

Pharmacologie<br />

Le mycophénolate mofétil est le morpholinoéthylester du<br />

MPA, qui est le principe actif. Il est rapidement hydrolysé dans<br />

le tube digestif supérieur, pour produire du MPA [66] . Le mycophénolate<br />

de sodium libère le MPA à un pH neutre dans<br />

8 Néphrologie


l’intestin grêle avec, de ce fait, une absorption plus lente [67] .Le<br />

MPA est métabolisé principalement dans le foie par les enzymes<br />

du système uridine disphosphate glucuronyltransférase (UGT).<br />

La comparaison du mycophénolate mofétil et du mycophénolate<br />

de sodium montre que ce dernier présente une concentration<br />

maximale (Cmax) retardée, en relation avec une absorption<br />

plus tardive [64] , mais une augmentation du Cmax et de l’AUC<br />

normalisée à la dose [68] .<br />

Dans tous les cas, le suivi thérapeutique pharmacologique ne<br />

peut être fait que par le dosage du MPA. Plusieurs approches ont<br />

été tentées pour réaliser le suivi thérapeutique pharmacologique<br />

du médicament. La première approche consiste à doser le C0 de<br />

MPA mais les résultats sont sujets à caution, puisque l’existence<br />

d’un deuxième pic plasmatique entraîne des modifications non<br />

reproductibles selon de nombreux facteurs, en particulier<br />

alimentaires. La seconde approche consiste à étudier l’AUC du<br />

MPA. Il existe différentes méthodes pour la calculer. La plus<br />

fiable consiste à réaliser de multiples prélèvements sanguins<br />

pour calculer ainsi une AUC complète. Cette méthode est<br />

inutilisable en pratique clinique, car elle représente trop de<br />

contraintes pour le patient et le personnel soignant. Une autre<br />

méthode consiste à réaliser une stratégie de prélèvements<br />

limités à deux ou trois temps après la prise [69] . Des formules<br />

mathématiques permettent de calculer l’AUC. L’utilisation<br />

d’algorithmes de régression linéaire a l’inconvénient majeur de<br />

nécessiter un strict respect des heures de prélèvements. L’estimation<br />

bayésienne, méthode mathématique et statistique,<br />

permet, à partir de trois prélèvements sanguins, de calculer les<br />

AUC et présente l’avantage d’une plus grande souplesse pour les<br />

heures de prélèvements [70] . Les estimateurs bayésiens permettent<br />

le calcul de l’AUC et l’adaptation de posologie pour fixer<br />

la nouvelle dose en fonction de la cible thérapeutique.<br />

La question se pose de l’intérêt clinique du suivi thérapeutique<br />

pharmacologique du MPA. Une étude avec des concentrations<br />

contrôlées a conclu que les patients du groupe à faible<br />

exposition présentent une incidence élevée de rejet [71] . Pour les<br />

autres groupes, le taux de rejet était sensiblement identique,<br />

avec plus d’effets secondaires dans le groupe cible avec la valeur<br />

la plus haute. Les conférences de consensus recommandent<br />

l’utilisation du suivi thérapeutique pharmacologique du MPA et<br />

proposent une cible thérapeutique comprise entre 30 mg.h/l et<br />

60 mg.h/l [66, 69] . Plus récemment, deux études prospectives<br />

randomisées, explorant l’intérêt du suivi thérapeutique pharmacologique,<br />

ont apporté des résultats contradictoires. La première<br />

étude internationale, pas encore publiée, n’a pas montré<br />

d’amélioration de l’incidence de rejet aigu ou des effets indésirables<br />

en cas de suivi thérapeutique pharmacologique (Van<br />

Gelder T, communication personnelle). Cette étude est entachée<br />

de nombreux biais méthodologiques, dont le plus important<br />

réside dans la non-réalisation des adaptations posologiques. La<br />

deuxième étude, française, a étudié la valeur du suivi thérapeutique<br />

pharmacologique du MPA dans une population homogène<br />

de patients recevant un traitement par ciclosporine, avec une<br />

adaptation réalisée effectivement selon l’AUC calculée par<br />

méthode bayésienne et des concentrations obtenues par chromatographie<br />

en phase liquide à haute performance (HPLC) [72] .<br />

Dans ce contexte, le suivi thérapeutique pharmacologique<br />

réalisé à J7, J14, M3 et M6 pour obtenir une AUC cible de<br />

40 mg.h/l, est associé à moins d’échec de traitement et de rejet<br />

aigu, sans augmentation des événements indésirables. En raison<br />

du caractère contradictoire des deux études cliniques citées, le<br />

bénéfice d’un suivi thérapeutique pharmacologique systématique<br />

pour le MPA est discutable : il peut être proposé à la période<br />

initiale de la transplantation et en cas d’évolution clinique<br />

inhabituelle.<br />

Toutes ces études ont été réalisées avec le mycophénolate<br />

mofétil. Pour le mycophénolate de sodium, en raison d’une<br />

variabilité plus marquée des caractéristiques pharmacocinétiques<br />

en relation avec une absorption moins prévisible, il n’a pas été<br />

possible pour l’instant de proposer une approche de l’AUC par<br />

des algorithmes de régression linéaire ou des estimateurs<br />

bayésiens.<br />

Néphrologie<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

Inhibiteurs de la synthèse des bases<br />

pyrimidiques : léflunomide<br />

Un autre traitement utilisé pour le traitement de la polyarthrite<br />

rhumatoïde, le léflunomide, a pu être utilisé dans certains<br />

cas pour la prévention des rejets aigus après transplantation<br />

rénale. Compte tenu de l’absence d’indication précise, nous ne<br />

ferons qu’évoquer les connaissances actuelles. Le léflunomide,<br />

un malononitrilamide, inhibe l’activité de l’enzyme dihydroorotate<br />

déshydrogénase (DHOH), enzyme clé de la synthèse des<br />

bases pyrimidiques. En plus de son action de prévention du<br />

rejet aigu, le léflunomide présenterait également une efficacité<br />

antivirale contre le cytomégalovirus ou le virus BK [73] .<br />

■ Traitements biologiques<br />

Introduction aux traitements biologiques<br />

L’utilisation thérapeutique d’anticorps monoclonaux est le<br />

modèle absolu du traitement spécifique : à chaque pathologie sa<br />

cause ; à chaque cause son agent thérapeutique. Ce schéma<br />

idéal, mais bien sûr extrêmement réducteur, a le mérite de relier<br />

chaque avancée dans la compréhension des mécanismes d’une<br />

pathologie à une action thérapeutique. La meilleure compréhension<br />

du rôle des lymphocytes T et des différentes souspopulations<br />

lymphocytaires a transformé le traitement<br />

biologique. Initialement, des sérums antilymphocytaires ou<br />

antithymocytes de spécificité large ont été utilisés efficacement.<br />

La description, en 1975 par Kohler et Milstein, de la technologie<br />

des hybridomes a constitué un tournant marquant dans l’histoire<br />

de l’immunologie et en particulier de l’utilisation thérapeutique<br />

de l’immunosuppression [74] . L’utilisation de ces<br />

anticorps a permis à la fois de définir les cibles à atteindre à la<br />

surface cellulaire et de produire les agents thérapeutiques<br />

efficaces.<br />

Malgré leurs promesses initiales, l’utilisation thérapeutique<br />

des anticorps monoclonaux a été plutôt décevante et pendant<br />

longtemps, seul un anticorps monoclonal dirigé contre la<br />

molécule CD3 du lymphocyte T, l’OKT3, a reçu une autorisation<br />

de mise sur le marché. Ce manque relatif d’efficacité des<br />

anticorps testés était surtout lié à leur origine xénogénique. En<br />

effet, cette origine entraîne des phénomènes d’immunisation et<br />

une activation insuffisante des fonctions effectrices humaines.<br />

C’est en partant de ces constatations et en utilisant les progrès<br />

biotechnologiques que le concept de manipulation des anticorps<br />

pour les rendre chimériques ou humanisés a été<br />

développé.<br />

Justification de l’humanisation des anticorps<br />

monoclonaux<br />

Immunisation<br />

Les caractéristiques de l’immunisation ont été principalement<br />

étudiées dans le cadre d’un traitement par OKT3. La réponse<br />

immunitaire vis-à-vis d’un anticorps monoclonal peut comporter<br />

des immunoglobulines (Ig) d’isotype IgG et IgM, qui<br />

peuvent être détectées par enzyme linked immunosorbent assay<br />

(Elisa). Seules les IgG sont neutralisantes [75] . Plus rarement, des<br />

anticorps d’isotype IgA ou IgE ont été retrouvés [75-77] .<br />

Lorsque l’on analyse leur spécificité fine, les anticorps<br />

détectés chez les patients immunisés ne reconnaissent pas<br />

toutes les Ig de souris. Elles sont très spécifiquement dirigées<br />

contre certains déterminants antigéniques de l’anticorps<br />

monoclonal murin utilisé [78] . La réponse anti-OKT3 est restreinte<br />

à des anticorps dirigés contre l’isotype de l’OKT3 (IgG2a)<br />

et son idiotype [75] . On distingue les anticorps anti-isotypes,<br />

spécifiques des déterminants localisés au niveau de la partie<br />

constante (Fc) de l’anticorps monoclonal, et les anticorps antiidiotypes,<br />

dirigés contre des déterminants situés au niveau des<br />

régions hypervariables de la molécule, localisées au sein des<br />

fragments F(ab’)2, qui lui confèrent sa spécificité antigénique.<br />

9


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

La réponse isotypique anti-souris réagit avec toutes les immunoglobulines<br />

IgG2a de souris, même avec celles qui ne présentent<br />

pas de spécificité anticellules T, mais pas avec les<br />

immunoglobulines non-IgG2a. Ils ne bloquent pas l’effet de<br />

l’OKT3. La réponse anticorps anti-idiotype bloque la liaison de<br />

l’OKT3 avec le complexe CD3 des cellules T et peut, lorsque les<br />

anticorps sont présents à un haut titre, neutraliser les effets de<br />

l’OKT3 [75, 79] .<br />

Conséquences cliniques de l’immunisation<br />

Une maladie sérique n’a été décrite qu’exceptionnellement<br />

après utilisation d’anticorps monoclonal. La quantité et les<br />

caractéristiques physicochimiques des immuns-complexes<br />

formés ne sont vraisemblablement pas compatibles avec un<br />

dépôt massif dans les tissus et avec l’apparition d’une maladie<br />

sérique, contrairement à ce qui peut être observé avec le sérum<br />

antilymphocytaire. Peu d’événements cliniques graves en<br />

rapport avec cette immunisation ont été notés, à l’exception de<br />

quelques cas exceptionnels d’anaphylaxie en relation avec une<br />

immunisation de type IgE [80] . La conséquence la plus gênante<br />

de l’immunisation est de neutraliser l’action thérapeutique ou<br />

de rendre inefficace un traitement ultérieur par le même<br />

anticorps [81] . Certaines techniques (détection des anticorps<br />

bloquants par un test d’inhibition d’immunofluorescence)<br />

prédisent l’efficacité d’un nouveau traitement par OKT3 en cas<br />

de nécessité [82] .<br />

La fréquence de l’immunisation est variable. Des études<br />

initiales avaient montré que la formation d’anticorps antisouris<br />

était présente chez 100 % des patients traités par anticorps<br />

seuls [83] . L’association à divers immunosuppresseurs<br />

comme les corticoïdes, l’azathioprine, la cyclosporine ou le<br />

mycophénolate mofétil permet de diminuer cette immunisation<br />

[78, 84] .<br />

Une autre complication peut être en relation avec la fonction<br />

effectrice lymphocytaire. Après injection d’OKT3, se produit une<br />

activation lymphocytaire conduisant à la libération massive et<br />

séquentielle de cytokines telles que l’IL-2, IL-3, l’IL-4, l’IL-6, l’IL-<br />

10, le TNF-a et l’INF-c [85, 86] . Cette libération est responsable<br />

d’un syndrome clinique aigu grave pouvant mettre en jeu la vie<br />

des patients traités par OKT3. Différents agents tels que les<br />

stéroïdes, la pentoxiphylline et l’IL-10 peuvent diminuer la<br />

sécrétion de cytokines induite par l’injection d’OKT3 [87, 88] .Il<br />

est également important de bien contrôler l’état d’hydratation<br />

des patients pour éviter toute surcharge hydrosodée.<br />

Il a été montré que les propriétés activatrices ou mitogéniques<br />

des anticorps sont, en règle générale, dépendantes de la capacité<br />

des régions Fc constantes qui interagissent avec les récepteurs<br />

pour le fragment Fc présent à la surface des cellules<br />

monocytaires/macrophagiques [89] . Il est possible d’éviter cette<br />

complication en sélectionnant des régions constantes Fc qui<br />

sont dépourvues de capacité de liaison aux récepteurs des<br />

cellules phagocytaires.<br />

D’un autre côté, l’origine xénogénique des anticorps fait que<br />

ces anticorps n’interagissent généralement pas ou mal avec les<br />

mécanismes effecteurs de l’hôte, par exemple pour la cytotoxicité<br />

cellulaire dépendant des anticorps (ADCC). Ceci peut<br />

limiter leur utilité en clinique humaine. L’humanisation de<br />

l’anticorps pourrait permettre de pallier cet inconvénient.<br />

Agents déplétants<br />

Anticorps polyclonaux anti-lymphocytaires<br />

Mécanismes d’action<br />

Il s’agit d’anticorps obtenus chez le lapin ou le cheval après<br />

immunisation contre des lymphocytes humains. Après récupération<br />

des IgG ainsi formées et absorption des anticorps<br />

toxiques (par exemple dirigés contre les plaquettes ou les<br />

érythrocytes), ces anticorps sont utilisés par voie parentérale. Ils<br />

interviennent à différentes étapes de la réponse immunitaire,<br />

principalement sur la reconnaissance et l’activation du lymphocyte<br />

T, mais aussi dans la transduction du message de prolifération<br />

lymphocytaire. Les mécanismes d’action sont multiples [5] .<br />

Ces anticorps entraînent une lymphopénie portant essentiellement<br />

sur les cellules T. Le mécanisme principal d’élimination est<br />

l’opsonisation des lymphocytes T et leur phagocytose par le<br />

système réticuloendothélial. La déplétion durable pourrait<br />

impliquer une apoptose des cellules T par la voie Fas-FasLigand.<br />

Une inactivation cellulaire par recouvrement et/ou modulation<br />

antigénique (disparition des récepteurs de la surface cellulaire)<br />

a également été rapportée. Par ailleurs, une inhibition des<br />

phénomènes d’adhésion et de transduction du signal participe<br />

à l’action immunosuppressive. Enfin, des nouvelles données<br />

évoquent le rôle des sérums antilymphocytaires sur les lymphocytes<br />

B et les cellules dendritiques.<br />

Utilisation clinique<br />

Des études récentes ont insisté sur l’efficacité des anticorps<br />

polyclonaux déplétants, en particulier pour les patients à risque<br />

immunologique. Une étude prospective randomisée a comparé<br />

un traitement par globulines antithymocytaires à un traitement<br />

monoclonal antirécepteur de l’IL-2 (le basiliximab) [90] . Après<br />

12 mois de suivi, l’incidence de rejet aigu, en particulier celle<br />

des rejets aigus corticorésistants, a été plus faible dans le groupe<br />

recevant des anticorps polyclonaux (respectivement 15,6 % vs<br />

25,5 %, p = 0,02 et 1,4 % vs 8,0 %, p = 0,005). Il semble donc<br />

que pour les patients à risque élevé de rejet ou à risque de<br />

reprise retardée de fonction du greffon, un traitement d’induction<br />

biologique par anticorps polyclonaux déplétants pourrait<br />

être intéressant.<br />

Les effets secondaires sont nombreux. Ils sont secondaires à<br />

l’injection d’une molécule xénogénique (de simples réactions<br />

fébriles à la maladie sérique par dépôt des complexes immuns<br />

circulants) ou liés à la puissance immunosuppressive (augmentation<br />

du risque d’infections et de tumeurs).<br />

Anticorps monoclonaux déplétants<br />

Anticorps anti-CD3<br />

Les anticorps monoclonaux anti-CD3 ont été historiquement<br />

les premiers à être utilisés en clinique humaine. Il s’agit d’un<br />

anticorps monoclonal de souris dirigé contre le complexe CD3.<br />

Le mécanisme d’action principal de l’anti-CD3 consiste en une<br />

déplétion du sang circulant en lymphocytes T. Le principal<br />

problème est la tolérance de ce traitement, puisque la première<br />

dose est associée à un relargage de cytokines responsables d’un<br />

syndrome clinique impressionnant, mimant un choc septique.<br />

Des anticorps de nouvelles générations, humanisés, pourraient<br />

redonner un intérêt clinique à ces molécules (cf. infra.). Nous<br />

avons développé les avantages et les inconvénients du recours<br />

à ce type de traitement dans l’introduction de ce chapitre.<br />

Compte tenu de ces complications, l’OKT3 n’est plus utilisé que<br />

de façon exceptionnelle dans le cadre de rejet aigu cellulaire<br />

particulièrement sévère ou récidivant.<br />

Anticorps anti-CD52 : alemtuzumab<br />

L’alemtuzumab est un anticorps monoclonal humanisé<br />

contre la molécule CD52. Cet anticorps entraîne une déplétion<br />

massive et durable des populations lymphocytaires. Il est utilisé<br />

pour traiter des leucémies chroniques lymphocytaires réfractaires.<br />

Des études ont montré que cet anticorps pouvait être<br />

efficace pour la prévention et le traitement des rejets aigus après<br />

transplantation. Il pourrait aussi, en association avec le sirolimus,<br />

permettre l’obtention d’une forme de tolérance immunitaire<br />

[91] . Les effets indésirables incluent en particulier des<br />

réactions de première dose, une neutropénie, et rarement une<br />

pancytopénie et des risques d’auto-immunité [92] . Le risque<br />

majeur est celui de l’induction d’un état d’immunodépression<br />

sévère et prolongée.<br />

10 Néphrologie


Anticorps anti-CD20 : rituximab<br />

Le rituximab est un anticorps monoclonal chimérique anti-<br />

CD20. Il élimine ainsi la plupart des cellules B. Il est indiqué<br />

pour le traitement des lymphomes B non hodgkiniens, en<br />

particulier les lymphomes post-transplantation. Le rituximab est<br />

aussi utilisé dans des indications faisant intervenir l’immunité<br />

humorale [93] . C’est le cas des rejets aigus humoraux après<br />

transplantation d’organe, mais aussi de pathologies telles que le<br />

lupus érythémateux disséminé ou la polyarthrite rhumatoïde. La<br />

molécule CD20 n’est pas présente à la surface des cellules B<br />

mémoires à longue demi-vie et, de ce fait, ne serait pas efficace<br />

pour permettre une déplétion au long terme de ce contingent<br />

cellulaire. Il n’est pas non plus actif sur les plasmocytes. En<br />

revanche, la déplétion observée dans le sang périphérique<br />

persiste de nombreux mois après l’injection de l’anticorps. Les<br />

complications sont principalement liées à une réaction de<br />

première dose.<br />

Anticorps non déplétants<br />

Actuellement, les anticorps utilisés de façon habituelle après<br />

transplantation rénale sont les anticorps anti-CD25, c’est-à-dire<br />

dirigés contre le récepteur de l’IL-2. Ce récepteur est composé de<br />

trois chaînes associées à la surface lymphocytaire pour former<br />

un récepteur de haute affinité. La chaîne a (CD25) n’est<br />

exprimée à la surface cellulaire que lorsque le lymphocyte T est<br />

activé. Les anticorps se fixent et bloquent la chaîne a de l’IL-2.<br />

Le rôle de ces anticorps est de bloquer le récepteur et d’inhiber<br />

ainsi l’activation cellulaire T induite par l’IL-2. Les anticorps<br />

anti-CD25 inhibent ainsi le signal de prolifération. Comme<br />

l’expression de CD25 nécessite une activation lymphocytaire T,<br />

les anticorps anti-CD25 ne sont responsables que d’une déplétion<br />

lymphocytaire limitée. Deux anticorps, l’un chimérique<br />

(basiliximab) et l’autre humanisé (daclizumab), ont récemment<br />

démontré leur efficacité et leur tolérance.<br />

Les études initiales de ces traitement ont montré qu’ils<br />

diminuaient de façon significative l’incidence de rejet aigu par<br />

rapport à un placebo [94-96] . En ce qui concerne leur comparaison<br />

avec les anticorps polyclonaux déplétants, nous avons déjà<br />

évoqué une étude en faveur des anticorps polyclonaux [90] .<br />

D’autres études ont montré que dans une population à moindre<br />

risque de rejet, les deux stratégies donnaient des résultats<br />

comparables avec un profil de tolérance plus acceptable pour les<br />

anticorps anti-CD25 [97, 98] .<br />

■ Nouveaux traitements<br />

immunosuppresseurs<br />

Compte tenu des aléas du développement clinique, nous ne<br />

ferons que citer succinctement les pistes de mécanismes et les<br />

molécules en cours de développement. Seul l’avenir pourra<br />

préciser dans quelle mesure ils seront utilisés dans le domaine<br />

de la transplantation.<br />

Inhibiteurs du premier signal<br />

Des inhibiteurs pharmacologiques du premier signal sont à<br />

l’étude. On compte parmi eux des inhibiteurs des kinases Lck,<br />

ZAP-70, PKC-h, mais aussi de la cascade des MAP kinases<br />

(Fig. 1). Enfin, l’anticorps anti-CD3 humanisé non mitogénique<br />

(hOKT3g1), à l’étude en transplantation rénale, intervient<br />

également dans la modulation du premier signal. Cet anticorps<br />

est non déplétant et semble capable de bloquer l’activation<br />

complète des lymphocytes T. Il induirait l’anergie des cellules<br />

naïves, réduirait le potentiel effecteur des cellules mémoires et<br />

favoriserait l’expansion des cellules régulatrices.<br />

Immunosuppresseurs bloquant le second<br />

signal<br />

Le Belatacept ® est une protéine de fusion, associant la<br />

molécule CTLA-4 avec le fragment Fc d’une IgG [99] . Son mode<br />

Néphrologie<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

d’action est double. D’une part, cette protéine entre en compétition<br />

avec la molécule de cosignal CD28 des lymphocytes,<br />

bloquant ainsi le second signal. D’autre part, elle délivre un<br />

signal immunosuppresseur aux cellules présentatrices d’antigène,<br />

notamment par l’induction de l’enzyme indoléamine 2,3dioxygénase<br />

(IDO). L’utilisation clinique du premier anticorps<br />

anti-CD154 (CD40L) [100] , le hu5C8, s’est compliquée d’évènements<br />

thromboemboliques, probablement par activation<br />

plaquettaire. Depuis, un autre anticorps, l’IDEC-131, a été<br />

développé contre un autre épitope de la même molécule. Il<br />

semble dépourvu d’effet procoagulant. Il y a plusieurs avantages<br />

théoriques à bloquer l’axe de cosignal CD40-CD40L. D’une part,<br />

cet anticorps devrait diminuer l’activation des cellules présentatrices<br />

d’antigènes, et donc la densité d’expression des molécules<br />

de cosignal CD80/86. D’autre part, il est vraisemblable que cet<br />

immunosuppresseur a un effet sur l’immunisation humorale,<br />

tant l’axe CD40-CD40L est important à la collaboration entre<br />

lymphocytes T et B. Une étude de phase II a montré une<br />

supériorité d’un traitement par belatacept par rapport à un<br />

traitement par cyclosporine dans la période initiale après la<br />

transplantation rénale [101] . En particulier, la fonction rénale des<br />

patients traités par bélatacept est meilleure que la fonction des<br />

patients recevant de la ciclosporine, sans augmentation de<br />

l’incidence de rejet aigu. Des études de phase III sont en cours<br />

et devraient permettre l’utilisation clinique de cette nouvelle<br />

approche.<br />

Drogues ciblant le troisième signal<br />

D’autres inhibiteurs du troisième signal sont à l’étude<br />

(Fig. 1, 6). La molécule CP-690,550 bloque la kinase JAK3,<br />

couplée à la chaîne c, commune aux récepteurs des cytokines<br />

IL-2, IL-4, IL-7, IL-9, IL-15, et IL-21. La voie de signalisation<br />

dépendante de STAT5 est tout particulièrement affectée par cette<br />

inhibition. Il en résulte un effet antiprolifératif et une réduction<br />

de l’expression de cytokines et chémokines.<br />

Agents modifiant le trafic et l’adressage<br />

lymphocytaire<br />

Le FTY720 [8] , dont l’évaluation clinique a été interrompue<br />

par la survenue de complications rétiniennes, a un mode<br />

d’action particulièrement innovant. Il cible les mécanismes de<br />

trafic des lymphocytes (Fig. 1). In vivo, le FTY720 est rapidement<br />

phosphorylé, donnant un composé actif, le FTY720-P qui<br />

partage une homologie structurale avec le sphingosine<br />

1-phosphate (S1P). Celui-ci est sécrété par les plaquettes,<br />

mastocytes et cellules endothéliales après activation. Des cinq<br />

récepteurs au S1P, le récepteur S1P 1 est majoritairement exprimé<br />

par les lymphocytes. Des données récentes établissent que le<br />

récepteur S1P 1 est nécessaire à l’efflux des cellules thymiques<br />

simple-positives (récents émigrants thymiques), comme à la<br />

sortie des lymphocytes des ganglions périphériques. En conclusion,<br />

le FTY720-P bloque le récepteur S1P 1, internalisé, provoquant<br />

une séquestration des lymphocytes dans les ganglions.<br />

D’autres agents immunosuppresseurs s’inscrivant dans la<br />

même stratégie sont à l’étude. Les récepteurs aux chémokines,<br />

CCR1, CXCR3 et CCR5, impliqués dans l’adressage des lymphocytes<br />

au site d’inflammation (rejet aigu), constituent des cibles<br />

privilégiées. Deux anticorps antagonistes des récepteurs CCR1 et<br />

CXCR3 sont en cours de développement. Ils constitueront sans<br />

doute des drogues d’appoint très intéressantes dans l’avenir.<br />

■ Stratégies immunosuppressives<br />

Compte tenu de la multiplicité des traitements possibles et de<br />

leur association, il n’est pas possible de définir de règles<br />

absolues. Aussi, dans ce chapitre, nous ne ferons que poser les<br />

bases des choix possibles en donnant un aperçu des traitements<br />

les plus souvent utilisés.<br />

11


18-065-F-10 Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

M<br />

Sirolimus<br />

FKB12<br />

Anti-apoptose<br />

mTOR<br />

Synthèse<br />

des<br />

nucléotides<br />

G1 S<br />

G2<br />

Daclizumab<br />

Basiliximab<br />

Bases du choix des stratégies<br />

immunosuppressives<br />

En transplantation, les immunosuppresseurs ont toujours été<br />

utilisés en association pour diminuer la toxicité spécifique de<br />

chaque molécule et pour permettre de bloquer le système<br />

immunitaire à différents niveaux. Historiquement, les schémas<br />

immunosuppresseurs ont associé des stéroïdes à doses fortes et<br />

prolongées et l’azathioprine à la dose de 3 mg/kg/j. Les complications<br />

des stéroïdes étaient fréquentes [102] . De plus, avec ce<br />

traitement, l’incidence de rejet aigu dépassait largement 50 %<br />

dans la première année et le taux de survie des greffons à un<br />

an avoisinait à peine les 50 %. Vers la fin des années 1970, les<br />

sérums antilymphocytaires furent utilisés en traitement dit<br />

d’induction à la phase toute initiale de la transplantation. Les<br />

sérums antilymphocytaires permirent une diminution de<br />

l’incidence du rejet aigu au prix de complications infectieuses,<br />

en particulier virales et de maladies sériques [103, 104] . Au début<br />

des années 1980, la ciclosporine fut introduite, entraînant une<br />

diminution de l’incidence du rejet aigu, se traduisant ellemême<br />

par une augmentation très significative de la durée de<br />

survie du greffon à un an post-transplantation [12, 13] .<br />

Akt<br />

Mycophénolate<br />

mofétil<br />

Léflunomide<br />

FK778<br />

PI-3K<br />

α β γ<br />

STAT5<br />

JAK3<br />

IL-2<br />

CP-690,550<br />

Cytokines<br />

Chémokines Azathioprine<br />

Figure 6. Le troisième signal peut être bloqué à différents niveaux. Les<br />

anticorps daclizumab et basiliximab reconnaissent la chaîne alpha du<br />

récepteur de l’IL-2 (CD25). Le sirolimus et la molécule CP-690, 550 bloquent<br />

des voies de signalisation différentes du récepteur de l’IL-2, respectivement<br />

celle dépendante de mammalian target of rapamycine (mTOR) et<br />

celle de JAK3. Le mycophénolate mofétil et le FK778 inhibent respectivement<br />

la synthèse des bases puriques et pyrimidiques, nécessaire à la<br />

prolifération cellulaire. Enfin, l’azathioprine interfère avec la synthèse<br />

d’ADN, à l’origine de son effet immunosuppresseur comme procarcinogène.<br />

PI-3K : phospho-inositol-3 kinase ; Akt : protéine kinase ; G1-S-<br />

G2-M : phases du cycle cellulaire ; STAT : signal transducer and activator of<br />

transcription.<br />

Actuellement, les différentes molécules immunosuppressives<br />

disponibles rendent difficiles des propositions consensuelles de<br />

stratégies immunosuppressives. Les choix pourront se faire selon<br />

plusieurs critères :<br />

il peut s’agir du risque immunologique, défini par le degré<br />

d’incompatibilité HLA, le degré d’immunisation antiHLA et le<br />

rang de la transplantation. Les autres marqueurs sont encore<br />

trop à leurs balbutiements pour être inclus dans le choix en<br />

routine du traitement ;<br />

il s’agit aussi, et de plus en plus, de la qualité du greffon. En<br />

cas de greffon non optimal, c’est-à-dire prélevé chez un<br />

donneur pour lequel un doute existe sur l’obtention d’une<br />

fonction rénale satisfaisante, les traitements potentiellement<br />

néphrotoxiques devront être évités ou minimisés ;<br />

il peut également s’agir des caractéristiques du receveur, de<br />

son ethnie, de son sexe, de son âge, de ses antécédents<br />

tumoraux, métaboliques, cardiovasculaires, du risque viral ou<br />

même de sa pathologie néphrologique initiale ;<br />

enfin, à l’avenir, l’utilisation de la pharmacogénétique, que<br />

nous avons déjà évoquée, pourrait aider à ces critères de<br />

choix.<br />

Proposition de protocoles<br />

Il est possible de diviser le traitement en deux grandes<br />

périodes : la période initiale et le traitement de maintenance.<br />

Traitement de la période initiale<br />

Induction biologique<br />

Au cours des premiers jours ou semaines suivant la transplantation,<br />

un traitement court par globulines antilymphocytes ou<br />

anticorps anti-CD25 peut être utilisé. Un tel traitement est<br />

appelé « induction ». Un traitement d’induction est utile lors<br />

des transplantations chez des patients à risque immunologique.<br />

La place relative de l’un ou l’autre des types de traitement est<br />

discutable, mais des travaux récents semblent privilégier les<br />

anticorps déplétants [90] .<br />

En dehors de ces situations, l’intérêt d’un traitement d’induction<br />

est de diminuer l’incidence des rejets aigus à la période<br />

initiale après transplantation. Il ne semble pas, dans ce cas,<br />

exister de différences entre les deux types de traitements. De<br />

plus, l’utilisation d’une induction biologique permet de retarder<br />

et/ou de diminuer la posologie initiale des traitements par<br />

inhibiteurs de la calcineurine et, potentiellement, diminuer<br />

ainsi leur néphrotoxicité initiale.<br />

Corticothérapie<br />

Le traitement par corticoïdes a représenté un des premiers<br />

traitements immunosuppresseurs. Cependant, en raison de leurs<br />

effets indésirables, il a été essayé depuis longtemps une diminution,<br />

voire un arrêt ou une absence complète des stéroïdes. De<br />

nombreuses études, ainsi que des méta-analyses, ont tenté de<br />

montrer l’efficacité relative de ces manœuvres. Une récente<br />

revue de la littérature précise que l’utilisation de faibles doses<br />

pendant une période de temps limité après transplantation est<br />

associée, sauf dans une étude, à une augmentation de l’incidence<br />

des rejets aigus, mais à l’absence de différence en termes<br />

de survie des greffons. Une autre approche est un arrêt secondaire<br />

(après trois mois) des stéroïdes. Il convient cependant de<br />

noter que la majorité des méta-analyses montre dans ce cas des<br />

résultats discutables.<br />

Inhibiteur de la synthèse de bases puriques<br />

Depuis le milieu des années 1990, le mycophénolate mofétil<br />

a supplanté très largement l’azathioprine. Il convient cependant<br />

de noter qu’une étude randomisée n’a pas montré de différence<br />

entre ces traitements [52] et que l’utilisation du mycophénolate<br />

mofétil n’a pas montré d’amélioration de la survie des greffons<br />

ou des patients. L’utilisation du mycophénolate de sodium ne<br />

semble pas apporter d’avantage notable.<br />

12 Néphrologie


Tableau 3.<br />

Exemples de protocole [5] .<br />

Protocole Éléments du protocole Commentaires<br />

Induction protéique Maintenance<br />

avant adaptation<br />

Traitement conventionnel Anti-CD25<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

ATG<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Aucun<br />

Stéroïdes<br />

Traitement conventionnel<br />

sans stéroïdes<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

L’utilisation relative de la cyclosporine et du tracrolimus est<br />

affaire d’école. Une approche scientifique semble être de<br />

proposer la prise en compte des risques métaboliques (diabète<br />

ou troubles lipidiques) et le risque immunologique.<br />

Inhibiteur de mTOR<br />

Malgré les attentes de ce traitement à la phase initiale,<br />

plusieurs études publiées montrent une augmentation des effets<br />

indésirables ou de l’incidence de rejet. D’autres études ont été<br />

arrêtées prématurément pour cette raison. Il ne semble donc pas<br />

opportun de proposer ce traitement à cette phase initiale.<br />

Traitement de maintenance<br />

Le but n’est plus alors de privilégier l’efficacité immunosuppressive,<br />

mais plutôt la balance bénéfice/risque. La tendance est<br />

donc à la minimisation, soit des stéroïdes lorsqu’ils n’ont pas<br />

déjà été interrompus, soit des anticalcineurine.<br />

Il est également possible de remplacer un anticalcineurine par<br />

un inhibiteur de mTOR afin de profiter de l’absence de néphrotoxicité<br />

et des propriétes antitumorales de cette nouvelle<br />

classe [39] .<br />

En l’absence de consensus, nous proposons dans le Tableau 3<br />

quelques exemples de protocole d’immunosuppression [5] .<br />

■ Conclusion<br />

Anti-CD25 Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Introduction secondaire du sirolimus ATG Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Stéroïdes<br />

Traitement à haut risque<br />

immunologique<br />

ATG<br />

Rituximab<br />

IVIg<br />

On l’a vu, au fil des années, l’efficacité des associations de<br />

traitements immunosuppresseurs a entraîné une diminution de<br />

l’incidence du rejet aigu et donc une amélioration des succès à<br />

court terme. En revanche, le bénéfice à plus long terme est<br />

modeste, voire discuté. Ceci a plusieurs explications : tout<br />

d’abord, les mécanismes immunologiques qui aboutissent à la<br />

destruction chronique du greffon sont moins bien compris. En<br />

outre, la néphrotoxicité des anticalcineurine, dont l’importance<br />

est désormais bien évaluée à long terme, entraîne une perte<br />

significative de greffons. Enfin, d’autres effets secondaires des<br />

immunosuppresseurs limitent la survie, soit des patients par le<br />

biais des complications cardiovasculaires, des infections et des<br />

cancers, soit des greffons par le bais de l’HTA, du diabète et des<br />

infections à BK virus. Les progrès pourront venir d’une<br />

meilleure utilisation individuelle des traitements actuellement<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Stéroïdes<br />

disponibles ou de l’utilisation de nouvelles molécules. Enfin, la<br />

tolérance immunologique, c’est-à-dire la possibilité de sevrer<br />

entièrement dans le long terme un patient transplanté reste un<br />

rêve à venir, même si des articles récents ont relancé le débat<br />

de la possibilité de l’obtenir en pratique clinique [105, 106] .<br />

■ Références<br />

Maintenance<br />

après adaptation<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Stéroïdes si besoin<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Arrêt de l’inhibiteur<br />

de la calcineurine<br />

Inhibiteur de mTOR<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Stéroïdes<br />

Inhibiteur de la calcineurine<br />

Inhibiteur de l’IMPDH<br />

Stéroïdes<br />

Possible surimmunosuppression<br />

Possible augmentation<br />

de l’incidence de rejet<br />

Possible augmentation<br />

de l’incidence de rejet<br />

Anti-CD25 : anticorps monoclonal antirécepteur de l’interleukine-2 ; ATG : globulines antithymocytaires ; IVIg : immunoglobulines intraveineuses ; IMPDH : inosine<br />

monophosphatase déshydrogénase ; mTOR : mammalian target of rapamycine.<br />

Néphrologie<br />

Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique 18-065-F-10<br />

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E. Thervet, Professeur des Universités, praticien hospitalier (eric.thervet@nck.aphp.fr).<br />

J. Zuber, Chef de clinique-assistant.<br />

R. Sberro, Chef de clinique-assistant.<br />

G. Canaud, Chef de clinique-assistant.<br />

D. Anglicheau, Chef de clinique-assistant.<br />

R. Snanoudj, Praticien hospitalier.<br />

M.-F. Mamzer-Brunel, Praticien hospitalier.<br />

F. Martinez, Praticien hospitalier.<br />

C. Legendre, Professeur des Universités, praticien hospitalier.<br />

Service de transplantation rénale adulte, Hôpital Necker, 149, rue de Sèvres, 75015 Paris, France.<br />

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Toute référence à cet article doit porter la mention : Thervet E., Zuber J., Sberro R., Canaud G., Anglicheau D., Snanoudj R., Mamzer-Brunel M.-F., Martinez F.,<br />

Legendre C. Traitements immunosuppresseurs : mécanismes d’action et utilisation clinique. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Néphrologie, 18-065-F-10,<br />

2009.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

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décisionnels<br />

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supplémentaires<br />

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légaux<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Autoévaluations<br />

16 Néphrologie


Plan<br />

Uretère rétrocave<br />

J.-N. Cornu, P. Sèbe<br />

L’uretère rétrocave est une malformation congénitale, caractérisée par un trajet spiroïde de l’uretère<br />

autour de la veine cave inférieure. Il s’agit d’une anomalie du développement de la veine cave inférieure,<br />

qui peut amener à une obstruction urétérale et à une hydronéphrose. Le diagnostic est radiologique et le<br />

traitement chirurgical.<br />

© <strong>2011</strong> Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.<br />

Mots clés : Uretère rétrocave ; Embryologie ; Anomalies de l’uretère ; Imagerie de l’uretère ; Laparoscopie<br />

Introduction 1<br />

Épidémiologie 1<br />

Développement embryologique de la veine cave inférieure 1<br />

Embryologie de la veine cave inférieure préurétérale 3<br />

Anomalies associées 3<br />

Classification anatomique 3<br />

Diagnostic 4<br />

Clinique 4<br />

Bilan complémentaire 4<br />

Traitement 4<br />

Abstention thérapeutique et surveillance active 4<br />

Néphrectomie 4<br />

Traitement chirurgical conservateur 4<br />

Conclusion 5<br />

■ Introduction<br />

L’uretère rétrocave (ou circumcave) est une malformation<br />

congénitale, caractérisée par un trajet spiroïde de l’uretère<br />

lombaire droit autour de la veine cave inférieure (VCI) (Fig. 1).<br />

La cause de cette malformation est une anomalie de l’embryogenèse<br />

du système veineux cave inférieur et non du haut<br />

appareil urinaire. D’un point de vue embryologique, cette<br />

anomalie correspond donc à une VCI pré-urétérale. Cette<br />

malformation peut rester quiescente, ou aboutir à une obstruction<br />

urétérale pouvant relever d’un traitement chirurgical.<br />

■ Épidémiologie<br />

L’uretère rétrocave est une malformation rare dont la fréquence<br />

exacte est inconnue ; son incidence serait de l’ordre de<br />

1 pour 1 000 naissances [1] . L’anomalie est environ trois fois<br />

plus fréquente chez l’homme, et l’âge au moment du diagnostic<br />

est habituellement entre 20 et 40 ans. Les incertitudes concernant<br />

sa fréquence proviennent de son caractère le plus souvent<br />

asymptomatique. Actuellement, les examens d’imagerie comme<br />

Urologie<br />

18-158-A-10<br />

Figure 1. Vue de face d’un uretère rétrocave ou circumcave.<br />

la tomodensitométrie (TDM) ou l’imagerie par résonance<br />

magnétique (IRM) abdominale permettent des diagnostics<br />

fortuits de plus en plus fréquents.<br />

■ Développement embryologique<br />

de la veine cave inférieure<br />

L’uretère rétrocave est le résultat d’une anomalie de développement<br />

de la VCI. Pour comprendre la genèse de cette anomalie,<br />

le développement normal de la VCI et ses rapports avec<br />

l’uretère sont décrits dans un premier temps.<br />

La formation du système veineux cave inférieur est issue du<br />

remaniement de trois systèmes veineux temporaires : cardinaux<br />

postérieurs, supracardinaux et subcardinaux. Des phénomènes<br />

de fusion, de régression et de croissance vont faire évoluer ces<br />

trois systèmes veineux, qui vont se résumer en une seule et<br />

volumineuse VCI à la naissance. Les différents segments de la<br />

VCI sont ainsi constitués par les vestiges des trois anciens<br />

systèmes veineux. Cette séquence embryologique est également<br />

une source d’explication pour toutes les autres anomalies de la<br />

VCI (VCI double, VCI gauche, etc.). Cependant, la description<br />

de ces phénomènes ne peut être que schématique ; ils sont<br />

1


18-158-A-10 Uretère rétrocave<br />

Figure 2. Vue latérale de l’embryon et des systèmes veineux : vitellin,<br />

ombilical et cardinal. 1. Veine cardinale commune ; 2. veine cardinale<br />

antérieure ; 3. veine vitelline ; 4. aorte dorsale ; 5. veine cardinale postérieure<br />

; 6. villosité placentaire ; 7. artère et veine ombilicales ; 8. artère<br />

vitelline.<br />

Figure 3. Vue antérieure de l’embryon de 10 mm (5 à 6 semaines de<br />

gestation). Formation des veines subcardinales. 1. Veine cardinale commune<br />

; 2. sinus veineux ; 3. veine ombilicale ; 4. mésonéphros ; 5. conduit<br />

mésonéphrotique ; 6. aorte ventrale ; 7. veine cardinale antérieure ;<br />

8. veine cardinale postérieure ; 9. veine vitelline ; 10. veines subcardinales.<br />

artificiellement divisés en stades pour permettre de comprendre<br />

les anomalies responsables. La réalité est un continuum bien<br />

plus complexe [2] .<br />

La genèse du système veineux de l’embryon se déroule de la<br />

quatrième à la huitième semaine de gestation. À la fin de la<br />

quatrième semaine, plusieurs systèmes veineux sont en place :<br />

vitellin, ombilical et cardinal (Fig. 2). Chacun est pair et l’on<br />

dénombre six troncs veineux chez l’embryon, qui convergent<br />

vers les cornes droite et gauche du sinus veineux. Les veines<br />

vitellines (ou omphalomésentériques), assurent le retour<br />

veineux du sac vitellin (tractus gastro-intestinal) ; les veines<br />

ombilicales apportent un sang oxygéné des villosités placentaires<br />

vers l’embryon, et les veines cardinales (antérieures et<br />

postérieures) recueillent le sang de la tête, du cou et des parois<br />

du corps de l’embryon, ainsi ramené vers le sinus veineux par<br />

les veines cardinales communes.<br />

Le système cardinal postérieur assure le drainage de la partie<br />

postérieure de l’embryon. Il est progressivement remplacé par<br />

deux autres systèmes veineux pairs, subcardinaux et supracardinaux,<br />

qui vont subir de profondes modifications pour former la<br />

partie lombaire de la VCI.<br />

Durant la cinquième et la sixième semaine, les veines subcardinales<br />

se forment (Fig. 3). Elles drainent les structures médiodorsales<br />

dont le mésonéphros et les gonades, en développement<br />

à cette période. Émergeant de la base des veines cardinales<br />

postérieures, elles se localisent en avant et en dedans du<br />

mésonéphros. Ainsi, les veines cardinales postérieures et<br />

Figure 4.<br />

A. Vue antérieure de l’embryon à 7 semaines de gestation. Formation des<br />

anastomoses veineuses et des veines supracardinales. 1. Veine cardinale<br />

postérieure droite ; 2. mésonéphros ; 3. métanéphros ; 4. bourgeon<br />

uretéral ; 5. conduit mésonéphrotique ; 6. veine supracardinale gauche ;<br />

7. anastomose supracardino-supracardinale ; 8. anastomose cardinosubcardinale<br />

; 9. anastomose subcardino-subcardinale ; 10. veines subcardinales<br />

; 11. anastomose cardinocardinale.<br />

B. Coupe transversale. 1. Anastomose subcardino-subcardinale ; 2. veines<br />

subcardinales ; 3. veines cardinales postérieures ; 4. veines supracardinales<br />

; 5. bourgeons urétéraux.<br />

subcardinales sont ventrales par rapport à l’uretère en développement,<br />

les veines cardinales postérieures étant latérales, et les<br />

veines subcardinales en position plus médiane. L’embryon<br />

mesure alors environ 10 mm.<br />

Progressivement, de nombreuses anastomoses se créent<br />

(Fig. 4) :<br />

entre les deux veines subcardinales elles-mêmes (anastomoses<br />

subcardino-subcardinales), prédominant dans la partie<br />

caudale ;<br />

entre les veines cardinales postérieures et subcardinales<br />

(anastomoses cardino-subcardinales), bilatérales et précoces ;<br />

entre les deux veines cardinales postérieures (anastomoses<br />

cardino-cardinales), dans la partie caudale, qui forment la<br />

veine iliaque primitive gauche ;<br />

entre la veine subcardinale droite et une émanation naissant<br />

du foie à la faveur d’un flux préférentiel à partir du tronc<br />

ombilico-vitellin dirigé dorsalement, inondant les sinusoïdes<br />

hépatiques (ce qui constituera la partie rétrohépatique de la<br />

VCI).<br />

Les veines supracardinales apparaissent vers la septième<br />

semaine (Fig. 4A). Ce système veineux dorsal est situé en arrière<br />

et médialement par rapport aux veines cardinales postérieures.<br />

En outre, les veines supracardinales se situent en arrière du<br />

mésonéphros et du conduit mésonéphrotique. Des anastomoses<br />

apparaissent également entre les deux veines supracardinales, et<br />

avec les deux autres systèmes veineux.<br />

Par la suite, les veines cardinales postérieures disparaissent et<br />

sont remplacées par les veines subcardinales et supracardinales,<br />

qui forment la majeure partie de la VCI (Fig. 5). En revanche,<br />

les veines cardinales postérieures sont à l’origine de la formation<br />

des vaisseaux iliaques. À partir de la huitième semaine, il existe<br />

une asymétrie du développement avec une prédominance de la<br />

partie droite. Ce phénomène est attribué au déséquilibre de<br />

pression intravasculaire que génèrent les anastomoses vasculaires<br />

des trois systèmes, en particulier l’anastomose hépatosubcardinale,<br />

large et prédominante. La veine cardinale<br />

postérieure gauche involue, les veines supracardinales et<br />

subcardinales gauches subsistent en donnant respectivement la<br />

2 Urologie


Figure 5. Système veineux cave inférieur d’embryon au stade de<br />

22 mm. 1. Veine azygos ; 2. veine surrénalienne droite ; 3. veine rénale<br />

droite ; 4. veine cave inférieure sous-rénale ; 5. veine iliaque droite ;<br />

6. veine hémiazygos ; 7. veine surrénalienne gauche ; 8. veine rénale<br />

gauche ; 9. veine génitale gauche ; 10. veine génitale droite ; 11. veine<br />

illiaque gauche.<br />

veine hémiazygos et les veines rénale et génitale gauches<br />

(Fig. 5). À droite, la veine cardinale postérieure droite involue<br />

également. Le retour veineux est alors concentré sur la veine<br />

subcardinale droite qui constitue la partie rénale de la veine<br />

cave inférieure et la veine rénale droite ; la veine supracardinale<br />

générant le segment sous-rénal de la veine cave inférieure<br />

(Fig. 5). La VCI est formée lors de la huitième semaine. La veine<br />

rénale gauche a pour origine une anastomose subcardinosubcardinale<br />

(Fig. 5).<br />

Le bourgeon urétéral naît de la partie distale du conduit<br />

mésonéphrotique (Fig. 4) pour rejoindre le blastème métanéphrogène.<br />

Tous deux suivent un trajet ascendant, au sein des<br />

trois systèmes veineux. Ils remontent en avant des deux veines<br />

en situation dorsale (veine cardinale postérieure et veine<br />

supracardinale) et en arrière de la veine subcardinale (Fig. 4B).<br />

Ainsi, l’uretère droit est bien en position antérieure et latérale<br />

par rapport à la VCI sous-rénale (origine supracardinale), puis<br />

passe en avant de la veine iliaque commune droite (origine<br />

cardinale postérieure). Il est croisé en avant par la veine<br />

gonadique droite (origine subcardinale).<br />

■ Embryologie de la veine cave<br />

inférieure préurétérale<br />

L’existence d’anomalies dans la fusion et la régression de<br />

différents systèmes veineux sont à l’origine des malformations<br />

de la VCI et de l’uretère rétrocave [2] .<br />

Lors de la formation d’un uretère rétrocave, la veine subcardinale<br />

droite persiste comme partie principale du segment sousrénal<br />

de la VCI, aux dépens de la veine supracardinale. La<br />

partie distale de la VCI et la veine iliaque commune droite<br />

reste le fait d’une anastomose cardino-cardinale. L’uretère droit<br />

se retrouve alors postérieur à la VCI sous-rénale, car il est<br />

postérieur et médial au système subcardinal. Puis, l’uretère<br />

Urologie<br />

.<br />

Figure 6. Développement normal (a) et anormal (b) de la veine cave<br />

inférieure, entraînant un uretère droit rétrocave.<br />

redevient antérieur par rapport à la terminaison de la VCI, car<br />

il est antérieur au système cardinal postérieur (Fig. 6). Cela<br />

provoque une « circonvolution » urétérale autour de la VCI, que<br />

l’on peut décrire comme un demi-tour de spire.<br />

Il est alors clair que l’uretère rétrocave résulte d’une anomalie<br />

de formation de la VCI, et non pas de l’uretère, ce qui appelle<br />

à faire préférer le terme de « VCI préurétérale », plus correct du<br />

point de vue physiopathologique, plutôt que d’uretère rétrocave,<br />

qui décrit la situation simplement d’un point de vue<br />

anatomique.<br />

Anomalies associées<br />

De nombreuses malformations sont associées aux cas répertoriés<br />

d’uretère rétrocave. Elles sont majoritairement d’ordre<br />

urologique (rein en « fer-à-cheval », malrotations rénales,<br />

syndrome de jonction pyélo-urétérale), génitosexuel (hypospadias)<br />

ou cardiovasculaire (veine cave double).<br />

■ Classification anatomique<br />

Uretère rétrocave 18-158-A-10<br />

L’uretère rétrocave présente différents types anatomiques,<br />

selon la position du croisement de l’uretère autour de la veine<br />

cave.<br />

L’exploration radiologique permet de préciser la morphologie<br />

de la malformation, définie par Bateson et Atkinson [3] . On<br />

décrit deux types d’uretère rétrocave :<br />

le type 1, forme la plus commune, correspond à un trajet<br />

brutal en hameçon au niveau de L3 ; radiologiquement, il<br />

existe alors une image en J inversé sur l’urétérographie ;<br />

le type 2 est décrit comme un enroulement progressif à la<br />

courbe plus douce, et c’est dans ce cas la portion initiale de<br />

l’uretère qui est rétrocave.<br />

Le type 1 est plus volontiers compliqué d’affection obstructive<br />

et quand l’hydronéphrose est présente, elle est souvent plus<br />

sévère.<br />

La physiopathologie de l’obstruction urétérale, principale<br />

complication de l’uretère rétrocave, n’est pas univoque selon les<br />

auteurs. Plusieurs hypothèses sont envisageables (Bateson et<br />

Atkinson) : compression par le segment de veine cave en regard,<br />

3


.<br />

.<br />

18-158-A-10 Uretère rétrocave<br />

anomalie de l’uretère ou de son péristaltisme dans sa portion<br />

rétrocave, ou encore anomalie associée (vaisseau polaire,<br />

compression par les vaisseaux génitaux, fibrose localisée, etc.).<br />

Cependant, comme il est montré ci-après, la majorité des<br />

stratégies thérapeutiques pratiquées comportent un décroisement<br />

de l’uretère par mobilisation puis une anastomose urétérourétérale,<br />

avec ou sans résection de la portion rétrocave, avec<br />

des résultats satisfaisants dans les deux types d’intervention.<br />

Dans la majorité des cas rapportés, la morphologie de l’uretère<br />

et son environnement immédiat ne mettaient pas en évidence<br />

d’anomalie notable, en dehors du trajet urétéral anormal.<br />

■ Diagnostic<br />

Clinique<br />

Quand l’anomalie est symptomatique, elle se révèle classiquement<br />

dans la troisième ou quatrième décennie par une<br />

complication en rapport avec l’obstruction urétérale. Les<br />

symptômes dominants sont une colique néphrétique, une<br />

pyélonéphrite, ou une hématurie. Ces symptômes sont volontiers<br />

récidivants.<br />

En outre, il existe clairement des cas asymptomatiques, avec<br />

ou sans hydronéphrose associée. Lorsque celle-ci est découverte<br />

fortuitement, c’est à l’occasion d’une imagerie abdominale, ou<br />

lors d’une intervention chez l’adulte, ou dans le cadre d’un<br />

bilan malformatif chez l’enfant.<br />

Bilan complémentaire<br />

L’imagerie est un des aspects essentiels du bilan diagnostique<br />

et préthérapeutique d’un uretère rétrocave. Chaque examen<br />

morphologique (opacification urétérale par urographie intraveineuse<br />

[UIV], urétéropyélographie rétrograde, uro-TDM ou IRM<br />

abdominale) permet de situer le niveau de l’anomalie, l’importance<br />

de la dilatation et les conditions anatomiques locales. La<br />

scintigraphie rénale permet d’évaluer la valeur fonctionnelle du<br />

rein en cas de syndrome obstructif associé à une atrophie<br />

rénale.<br />

Urographie intraveineuse<br />

Historiquement, c’est essentiellement l’urographie intraveineuse<br />

qui a contribué à l’exploration des uretères rétrocaves [4]<br />

elle est aujourd’hui avantageusement remplacée par le scanner<br />

avec injection et reconstruction des clichés tardifs (uroscanner).<br />

Dans la description princeps de l’anomalie à l’UIV, le trajet<br />

urétéral pathologique est décrit selon deux types. Dans le type<br />

1, il existe une boucle initiale en J inversé, dont la pointe est<br />

en regard de L3.<br />

La constatation d’une dilatation des cavités pyélocalicielles<br />

associée est classique. Cependant, l’obstruction urétérale peut<br />

aller jusqu’à une morphologie de rein muet et rend cette<br />

description classique de l’uretère proximal inconstante. La<br />

portion d’aval est rarement visualisée. Dans le type 2, l’uretère<br />

est médian avec une courbe plus douce puis reprend un trajet<br />

normal arrivé au détroit supérieur.<br />

L’UIV permet également de rechercher : des calculs radioopaques<br />

associés, une anomalie rénale homo- ou controlatérale,<br />

une anomalie associée de la voie excrétrice supérieure.<br />

Urétéropyélographie rétrograde<br />

Cet examen peropératoire est l’examen permettant une étude<br />

anatomique complète du trajet urétéral. Si le segment situé en<br />

dessous du détroit supérieur est habituellement normal, l’uretère<br />

se porte alors rapidement en position médiane au niveau de<br />

L4 puis latéralement au corps vertébral de L3 et reproduit un<br />

aspect de J inversé.<br />

Sur des clichés de profil, on peut mettre en évidence un signe<br />

pathognomonique, dit de Randall et Campbell : alors qu’un<br />

uretère normal, sur des clichés de profil, est en avant du rachis<br />

et s’en éloigne progressivement, vers le bas et l’avant, l’uretère<br />

rétrocave est au contact du rachis dans son segment rétrocave,<br />

.<br />

alors qu’il est à bonne distance du rachis dans son segment<br />

inférieur précave. Le coude que forme l’uretère reste donc<br />

« accroché » au rachis sur toutes les incidences.<br />

Échographie rénale<br />

Réalisée en rapport avec le motif de consultation (calcul,<br />

hématurie, douleur lombaire), elle permet le plus souvent de<br />

poser le diagnostic de dilatation pyélocalicielle sans pouvoir<br />

suivre le trajet urétéral jusque dans sa portion rétrocave. Elle est<br />

alors complétée par une autre imagerie, en règle, un scanner<br />

abdominopelvien.<br />

Tomodensitométrie abdominopelvienne<br />

L’uro-tomodensitométrie (uro-TDM) est à présent l’examen de<br />

choix pour diagnostiquer un uretère rétrocave [5] . Grâce aux<br />

reconstructions tridimensionnelles, il est possible de visualiser<br />

l’intégralité du trajet urétéral et ses rapports avec la VCI.<br />

L’uro-TDM permet d’apprécier la trophicité du rein et le degré<br />

d’obstruction.<br />

Elle est de grande utilité pour faire le diagnostic différentiel<br />

des obstructions urétérales, en premier lieu les processus<br />

extrinsèques (tumeurs, fibrose rétropéritonéale).<br />

Imagerie par résonance magnétique<br />

L’IRM est également proposée et apporte des éléments<br />

comparables à ceux du scanner [6] , sans injection d’iode.<br />

■ Traitement<br />

Abstention thérapeutique et surveillance<br />

active<br />

La surveillance est proposée dans les cas où le patient est<br />

asymptomatique. Si une dilatation est présente, une scintigraphie<br />

doit être réalisée pour objectiver l’obstruction et la<br />

fonction rénale. Elle peut permettre de proposer un traitement<br />

avant une dégradation de la fonction rénale.<br />

Néphrectomie<br />

La néphrectomie est justifiée chez les patients symptomatiques<br />

dont le rein est détruit, avec une faible valeur fonctionnelle<br />

à la scintigraphie, afin d’éviter les complications<br />

principalement infectieuses.<br />

Traitement chirurgical conservateur<br />

Il est indiqué pour tous les patients symptomatiques dont la<br />

fonction rénale homolatérale est conservée. Le plus souvent, il<br />

s’agit de patients jeunes, sans tares associées (sauf terrain<br />

malformatif complexe). Toutes les techniques chirurgicales sont<br />

donc a priori envisageables.<br />

Le principe de la chirurgie conservatrice de l’uretère rétrocave<br />

est la restauration de la situation anatomique normale, par<br />

décroisement de l’uretère et de la veine cave inférieure. Ce<br />

décroisement peut être fait par section et anastomose de<br />

l’uretère ou section et anastomose de la veine cave inférieure<br />

(technique actuellement abandonnée). On y associe ou non la<br />

résection de la portion urétérale rétrocave. Cette chirurgie peut<br />

être effectuée par voie ouverte, par voie laparoscopique transpéritonéale<br />

[1] , par voie laparoscopique rétropéritonéale [7] , ou<br />

encore à l’aide du robot [8] .<br />

Quelle que soit la voie d’abord utilisée, la problématique du<br />

geste chirurgical est le lieu de section de la voie excrétrice. On<br />

distingue deux stratégies opératoires :<br />

la section haute des cavités excrétrices, au niveau du pyélon,<br />

puis la dissection rétrocave de l’uretère, le décroisement et<br />

l’anastomose pyélopyélique. Dans cette option, la portion<br />

rétrocave de l’uretère n’est pas réséquée, ce qui permet une<br />

anastomose large. C’est la technique dite de Harril [9] .<br />

L’inconvénient est de laisser en place le segment qui était<br />

rétrocave, dont la vitalité est souvent mauvaise, ce qui est<br />

source de sténose urétérale ;<br />

4 Urologie


.<br />

la section de l’uretère à hauteur du passage rétrocave, puis<br />

abandon ou exérèse de l’uretère rétrocave et anastomose<br />

urétéro-urétérale sur sonde JJ.<br />

La seconde stratégie est la plus souvent employée lors des<br />

procédures chirurgicales mini-invasives. Le segment rétrocave<br />

peut être laissé en place, ce qui évite une dissection rétrocave<br />

dangereuse. La technique d’anastomose pyélo-urétérale s’apparente<br />

à celle du syndrome de jonction pyélo-urétérale.<br />

Les résultats semblent être équivalents pour les deux voies<br />

d’abord, la chirurgie laparoscopique présentant des avantages de<br />

durée d’hospitalisation, de convalescence et de douleur postopératoire<br />

par rapport à la voie ouverte.<br />

■ Conclusion<br />

L’exploration paraclinique par imagerie permet le diagnostic<br />

d’uretère rétrocave et l’évaluation de son retentissement sur la<br />

fonction du rein droit. La TDM est l’examen d’imagerie de<br />

choix.<br />

Le traitement est chirurgical et peut être réalisé par voie<br />

laparoscopique ou par voie ouverte.<br />

J.-N. Cornu.<br />

P. Sèbe (philippe.sebe@tnn.aphp.fr).<br />

Service d’urologie, Hôpital Tenon, 4, rue de la Chine, 75970 Paris cedex 20, France.<br />

Université Pierre et Marie Curie, Paris, France.<br />

■ Références<br />

[1] Simforoosh N, Nouri-Mahdavi K, Tabibi A. Laparoscopic<br />

pyelopyelostomy for retrocaval ureter without excision of the<br />

retrocaval segment: first report of 6 cases. JUrol2006;175:2166-9.<br />

[2] Lesma A, Bocciardi A, Rigatti P. Circumcaval ureter: embryology. Eur<br />

Urol 2006;5:444-8 [suppl].<br />

[3] Bateson E, Atkinson D. Circumcaval ureter: a new classification. Clin<br />

Radiol 1969;20:173-7.<br />

[4] Xiaodong Z, Shukun H, Jichuan Z, Xiaofeng W, Guangdong M,<br />

Xingke Q. Diagnosis and treatment of retrocaval ureter. Eur Urol 1990;<br />

18:207-10.<br />

[5] Pienkny A, Hertz I, Streem SB. Contemporary diagnosis of retrocaval<br />

ureter. J Endourol 1999;13:721-2.<br />

[6] Uthappa MC,Anthony D,Allen C. Retrocaval ureter: MR appearances.<br />

Br J Radiol 2002;75:177-9.<br />

[7] Salomon L, Hoznek A, Balian C, Gasman D, Chopin DK, Abbou CC.<br />

Retroperitoneal laparoscopy of a retrocaval ureter. BJU Int 1999;84:<br />

181-2.<br />

[8] Gundeti MS, Duffy PG, Mushtaq I. Robotic-assisted laparoscopic correction<br />

of pediatric retrocaval ureter. J Laparoendosc Adv Surg Tech A<br />

2006;16:422-4.<br />

[9] Harril HC. Retrocaval ureter. Report of a case with operative correction<br />

of the defect. JUrol1940;44:450-7.<br />

Toute référence à cet article doit porter la mention : Cornu J.-N., Sèbe P. Uretère rétrocave. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Urologie, 18-158-A-10, <strong>2011</strong>.<br />

Disponibles sur www.em-consulte.com<br />

Urologie<br />

Arbres<br />

décisionnels<br />

Iconographies<br />

supplémentaires<br />

Vidéos /<br />

Animations<br />

Documents<br />

légaux<br />

.<br />

Information<br />

au patient<br />

Informations<br />

supplémentaires<br />

Uretère rétrocave 18-158-A-10<br />

Autoévaluations<br />

Cas<br />

clinique<br />

5


VIDAL Recos - Cancer de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/9<br />

La maladie<br />

Physiopathologie<br />

Cancer de la prostate<br />

Le cancer de la prostate est hormonodépendant, sous la dépendance des androgènes testiculaires (90 %) et surrénaliens (10 %). Sa<br />

progression est le plus souvent lente, mais inexorable.<br />

Epidémiologie<br />

L'adénocarcinome prostatique représente 99 % des cancers de la prostate. Il est, en France, le 1 er cancer de l'homme de plus de<br />

50 ans. Il représente la 2 e cause de décès par cancer chez l'homme, avec plus de 9 000 décès par an. La survie moyenne d'un homme<br />

de 70 ans atteint d'un cancer de la prostate est de 15 ans en l'absence de comorbidités, et de 8,4 ans en présence de comorbidités ; un<br />

seuil d'espérance de vie de 10 ans a donc été retenu pour proposer un traitement à visée curative Accord Pro .<br />

Complications<br />

Elles sont liées à la maladie (troubles urinaires, distension rénale, métastases osseuses) et aux traitements (incontinence, insuffisance<br />

érectile, rectite radique, etc.).<br />

Diagnostic<br />

La circonstance de découverte la plus fréquente d'un cancer de la prostate est une élévation isolée du PSA ( Prostate Specific Antigen)<br />

chez un patient asymptomatique avec un toucher rectal normal, dans le cadre d'une démarche de dépistage individuel. Un foyer<br />

d'adénocarcinome peut également être découvert fortuitement lors de l'examen histologique d'une pièce de résection pour hypertrophie<br />

prostatique. Moins de 10 % des cancers de la prostate sont révélés par des signes urinaires. Le diagnostic au stade métastatique devant<br />

une altération de l'état général, des douleurs osseuses ou une fracture spontanée, est rare.<br />

Le diagnostic est histologique : biopsies sous repérage échographique par voie endorectale (10 à 12 prélèvements au minimum)<br />

Grade B ou analyse anatomopathologique d'une pièce d'exérèse.<br />

En France, la HAS ne recommande pas le dépistage systématique, dont le bénéfice en terme de réduction de mortalité globale n'est<br />

pas démontré. L'Association française d'urologie (AFU) préconise un dépistage individuel au cas par cas, pour des patients informés.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tous les patients atteints d'un cancer de la prostate doivent être pris en charge. La stratégie thérapeutique varie en fonction de<br />

l'espérance de vie estimée du patient et du stade de la maladie. Elle fait appel, selon les cas, à la chirurgie, à la radiothérapie, à<br />

l'hormonothérapie, voire à la chimiothérapie, ces différents traitements étant le plus souvent combinés. Une surveillance active avec<br />

traitement différé peut être proposée dans certaines situations.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Lorsque l'espérance de vie estimée du patient est supérieure à 10 ans, l'objectif est l'éradication du cancer au stade localisé, la<br />

prévention de l'extension métastatique au stade localement avancé et le ralentissement de la stimulation hormonale de la tumeur au<br />

stade métastatique.<br />

Quelle que soit l'espérance de vie estimée et à tous les stades de la maladie, l'objectif du traitement est également la prévention des<br />

complications, l'amélioration de la qualité de vie et l'allongement de la survie.


VIDAL Recos - Cancer de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 2/9<br />

Prise en charge<br />

Adénocarcinome prostatique


VIDAL Recos - Cancer de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 3/9<br />

1 Évaluation initiale<br />

L'échographie endorectale a peu d'intérêt en dehors du guidage des prélèvements biopsiques.<br />

L'IRM endorectale peut détecter une extension extracapsulaire avec une sensibilité de 70 % et une spécificité de 95 %. Le scanner<br />

tomodensitométrique (TDM) abdominopelvien peut détecter la présence d'adénopathies ilio-obturatrices de 8 mm, mais sans en<br />

affirmer la nature tumorale. La scintigraphie osseuse est l'examen de référence pour détecter les métastases osseuses. Ces<br />

examens ne sont recommandés que chez les patients à risque intermédiaire ou élevé. Grade B<br />

Le PSA total sérique est le seul marqueur inclus dans le bilan initial.<br />

La classification TNM permet de distinguer cancers localisés (stades T1 et T2), localement avancés (stade T3) et métastatiques<br />

(stades M+).<br />

2<br />

3<br />

Tx : tumeur primitive non évaluée N : ganglions régionaux M : métastases à distance<br />

T0 : tumeur primitive non retrouvée Nx : ganglions régionaux non<br />

évalués<br />

T1 : tumeur ni palpable, ni visible en imagerie<br />

T1a : < 5 % du tissu réséqué<br />

T1b : > 5 % du tissu réséqué<br />

T1c : découverte sur biopsie prostatique en<br />

raison d'une élévation des PSA<br />

T2 : tumeur limitée à la prostate<br />

T2a : concerne la moitié d'un lobe ou moins<br />

T2b : plus de la moitié d'un lobe mais sans<br />

atteindre les 2 lobes<br />

T2c : concerne les 2 lobes<br />

T3 : extension au-delà de la capsule<br />

T3a : extension extracapsulaire unie ou<br />

bilatérale<br />

T3b : extension aux vésicules séminales<br />

T4 : extension aux organes adjacents<br />

N0 : absence de métastase<br />

ganglionnaire régionale<br />

N1 : atteinte ganglionnaire<br />

régionale<br />

Mx : métastases à distance non<br />

évaluées<br />

M0 : absence de métastase à<br />

distance<br />

M1 : métastases à distance<br />

M1a : ganglions non régionaux<br />

M1b : os<br />

M1c : autres sites, avec ou<br />

sans atteinte osseuse<br />

L'évaluation des pathologies associées est déterminante dans la prise de décision thérapeutique. Un seuil d'espérance de vie<br />

estimée de 10 ans a été retenu pour proposer un traitement à visée curative.<br />

Atteinte ganglionnaire et/ou métastatique avec espérance de vie > 10 ans<br />

En cas d'atteinte ganglionnaire avérée, sans métastases à distance, le choix thérapeutique est ouvert.<br />

Au stade métastatique, le traitement hormonal est recommandé en 1 re intention Grade B . Il doit être instauré précocement<br />

Grade B , comprendre un blocage androgénique complet le 1 er mois (agoniste de la LHRH + antiandrogène) puis une monothérapie<br />

par agonistes de la LHRH. Les autres modalités du traitement hormonal, dont la castration chirurgicale et le traitement intermittent,<br />

sont optionnelles.<br />

En cas d'hormonorésistance (3 augmentations successives du PSA) : arrêt du traitement anti-androgène Grade B ± chimiothérapie<br />

cytotoxique. Le docétaxel a montré un bénéfice significatif en survie globale Grade A . En cas de métastases osseuses<br />

symptomatiques, le docétaxel et la mitoxantrone sont des options thérapeutiques reconnues. Grade B<br />

Espérance de vie < 10 ans<br />

Le choix peut se porter, selon les situations, sur une simple surveillance, un traitement hormonal ou un traitement palliatif.<br />

Évaluation et options thérapeutiques<br />

Stratégie de dépistage<br />

Il n'existe pas de dépistage organisé du cancer de la prostate en France. Selon la HAS, « il n'a pas été démontré, à ce jour, qu'une<br />

mise en œuvre d'un dépistage systématique du cancer de la prostate par le dosage du PSA sérique total soit associée à un bénéfice<br />

significatif en terme de réduction de la mortalité globale ». L'Association française d'urologie (AFU), comme la HAS, ne préconise pas<br />

un dépistage de masse systématique, mais un dépistage individuel au cas par cas, sur une population ciblée, informée et/ou à risque.<br />

Ce dépistage individuel annuel, par toucher rectal et dosage du PSA total sérique, est recommandé chez les hommes de 50 à 75 ans<br />

ayant une espérance de vie ≥ 10 ans. Il est également recommandé dès l'âge de 45 ans chez les hommes ayant un risque accru de<br />

cancer de la prostate (hommes d'origine africaine ou antillaise et hommes ayant un antécédent familial de cancer de la prostate).<br />

Des biopsies sont recommandées si le PSA total est > 4 ng/ml, quelles que soient les données du toucher rectal. Des biopsies sont<br />

également recommandées en cas d'anomalies au toucher rectal, quelle que soit la valeur du PSA Grade A . Chez les hommes à<br />

risque et les sujets jeunes, la valeur seuil du PSA pour indiquer des biopsies peut être abaissée à 3 ng/ml, surtout si la cinétique du<br />

PSA est suspecte Grade B .<br />

Le PSA circule dans le sérum sous 2 formes : une fraction libre et une fraction liée à des protéines. En cas de cancer, la proportion<br />

de PSA libre par rapport au PSA lié est significativement plus faible que dans l'hypertrophie bénigne de la prostate. Le ratio PSA<br />

libre/PSA total est par conséquent diminué en cas de cancer. Le PSA libre et le ratio PSA libre/PSA total ne sont cependant pas<br />

utilisés en 1 re intention pour le dépistage. Leur dosage peut être utile lorsque le PSA total est compris entre de 4 et 10 ng/ml, pour<br />

affiner l'indication de biopsie ou pour discuter l'indication d'une seconde série de biopsies si la première est négative Accord Pro<br />

.


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Facteurs pronostiques<br />

Le choix de la stratégie thérapeutique s'appuie sur la recherche de facteurs pronostiques dont les plus reconnus sont le stade TNM,<br />

le score de Gleason (somme du grade histologique le plus représenté et du grade histologique le plus indifférencié) et le taux de<br />

PSA. La combinaison de ces facteurs permet de constituer des groupes pronostiques.<br />

La classification TNM (2002) permet de distinguer les cancers localisés (stades T1 et T2), localement avancés (stade T3) et<br />

métastatiques (stades M+).<br />

Tx : tumeur primitive non évaluée N : ganglions régionaux M : métastases à distance<br />

T0 : tumeur primitive non retrouvée Nx : ganglions régionaux non<br />

évalués<br />

T1 : tumeur ni palpable, ni visible en imagerie<br />

T1a : < 5 % du tissu réséqué<br />

T1b : > 5 % du tissu réséqué<br />

T1c : découverte sur biopsie prostatique en<br />

raison d'une élévation des PSA<br />

T2 : tumeur limitée à la prostate<br />

T2a : concerne la moitié d'un lobe ou moins<br />

T2b : plus de la moitié d'un lobe mais sans<br />

atteindre les 2 lobes<br />

T2c : concerne les 2 lobes<br />

T3 : extension au-delà de la capsule<br />

T3a : extension extracapsulaire unie ou<br />

bilatérale<br />

T3b : extension aux vésicules séminales<br />

T4 : extension aux organes adjacents<br />

N0 : absence de métastase<br />

ganglionnaire régionale<br />

N1 : atteinte ganglionnaire<br />

régionale<br />

Mx : métastases à distance non<br />

évaluées<br />

M0 : absence de métastase à<br />

distance<br />

M1 : métastases à distance<br />

M1a : ganglions non régionaux<br />

M1b : os<br />

M1c : autres sites, avec ou<br />

sans atteinte osseuse<br />

La classification de D'Amico permet d'estimer, pour les tumeurs localisées, le risque de progression après traitement (risque de<br />

rechute biologique à 10 ans) et de classer les patients en 3 catégories :<br />

Risque faible : PSA ≤ 10 mg/ml et Gleason ≤ 6 et tumeur non palpable ou limitée à 1 lobe.<br />

Risque intermédiaire : PSA entre 11 et 20 ng/ml, ou Gleason = 7, ou tumeur intéressant plus de la moitié d'un lobe.<br />

Risque élevé : PSA > 20 ng/ml ou Gleason ≥ 8 ou tumeur intéressant les 2 lobes.<br />

Prise en charge thérapeutique<br />

Le rôle du médecin traitant est essentiel dans la prise en charge du cancer de la prostate, en coordination avec les autres<br />

intervenants : chirurgien urologue, oncologue, radiothérapeute, radiologue, médecin du travail, etc. La coordination entre ces acteurs<br />

doit être très précoce, en particulier pour l'annonce du diagnostic et lors de la demande d'exonération du ticket modérateur faite par le<br />

médecin traitant.<br />

Les modalités de la prise en charge doivent être définies sur la base des conclusions d'une réunion de concertation pluridisciplinaire<br />

(RCP) réunissant un urologue, un oncologue et un radiothérapeute.<br />

L'annonce du diagnostic doit s'inscrire dans le cadre du dispositif d'annonce défini par le Plan cancer. Ce dispositif comprend<br />

4 temps :<br />

un temps médical, sous forme d'une ou plusieurs consultations, comprenant l'annonce du diagnostic et de la proposition de<br />

stratégie thérapeutique définie lors de la RCP (voir plus haut). Cette proposition de traitement sera expliquée et proposée au<br />

patient, puis lui sera remise sous forme d'un Programme personnalisé de soins (PPS) ;<br />

un temps d'« accompagnement soignant », visant à repérer les besoins du patient, à l'informer et à le soutenir ;<br />

l'accès à une équipe impliquée dans les soins de support ;<br />

un temps d'articulation avec la médecine de ville.<br />

Le suivi du patient, réalisé conjointement par l'urologue et le médecin traitant, doit être planifié de manière à éviter toute répétition<br />

inutile des examens.<br />

Les soins dits « de support » comprennent la prise en charge psychologique du patient et de ses proches, le suivi des effets<br />

indésirables des traitements, la prise en charge nutritionnelle, le traitement de la douleur, les soins palliatifs. Utiles à tous les stades<br />

de la maladie, ils sont coordonnés par le médecin traitant.<br />

La recherche d'une symptomatologie douloureuse doit être systématique. L'évaluation de la douleur permet de déterminer son<br />

caractère aigu ou chronique, ses mécanismes d'action (douleurs par excès de nociception, douleurs neuropathiques ou douleurs<br />

mixtes), son étiologie (douleurs dues à la tumeur cancéreuse elle-même ou aux traitements). Le traitement doit être adapté en<br />

fonction des mécanismes d'action, du contexte et de son retentissement sur la qualité de vie (anxiété, dépression, troubles du<br />

sommeil, terrain). Lire Douleur de l'adulte.


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Suivi et adaptation du traitement<br />

Surveillance du traitement<br />

Le toucher rectal doit être annuel, à la recherche d'une possible récidive locale.<br />

Le 1 er dosage du PSA total sérique après traitement doit être réalisé avant 3 mois, puis à 6 mois, puis 2 fois par an pendant 3 ans et<br />

1 fois par an pendant 10 à 15 ans, selon l'âge du patient et la tumeur. Après prostatectomie radicale, le PSA doit être indétectable dans<br />

les 4 à 6 semaines. Un seuil de PSA > 0,2 ng/ml est actuellement retenu pour définir l'échec biologique, éventuellement confirmé par 1<br />

ou 2 dosages successifs du PSA à 3 mois Grade B . Après radiothérapie externe, l'obtention du taux de PSA le plus bas possible<br />

(nadir) peut être très tardive, jusqu'à 36 mois. L'élévation du PSA de plus de 2 ng/ml au-dessus du nadir est le signe le plus fiable pour<br />

définir une récidive ou une persistance tumorale. Grade B Pour les patients sous hormonothérapie, la valeur du PSA nadir est corrélée<br />

au temps de survie sans récidive. L'abaissement du PSA est observé pendant une durée moyenne de 18 mois.<br />

Les transaminases doivent être contrôlées en cas de traitement par antiandrogène non stéroïdien à 1, 3 et 6 mois après le début du<br />

traitement. La créatininémie doit être vérifiée en cas de tumeur localement avancée, de signes d'envahissement ou de compression<br />

urétérale.<br />

Différents examens d'imagerie ont leur place dans le suivi : scintigraphie osseuse en cas d'évolution biologique ou clinique,<br />

échographie rénale en cas de tumeur localement avancée symptomatique, TDM en cas de suspicion d'atteinte ganglionnaire, IRM en<br />

cas de suspicion d'atteinte vertébrale.<br />

Prise en charge des effets secondaires des traitements<br />

Une incontinence urinaire par hypotonie sphinctérienne est fréquente dans les suites immédiates de la chirurgie. Elle peut bénéficier<br />

de séances de rééducation périnéale. En cas de non-amélioration, des thérapies mini invasives (implant, fronde sous-urétrale) ou<br />

l'implantation de sphincter artificiel sont envisageables chez des patients bien sélectionnés et dont la maladie prostatique est bien<br />

contrôlée. Des troubles dysuriques précoces peuvent également apparaître au décours de la radiothérapie externe, de la curiethérapie<br />

ou après un traitement par ultrasons focalisés à haute intensité.<br />

Une dysfonction érectile, fréquente après la chirurgie, peut également être observée après radiothérapie externe, curiethérapie ou<br />

ultrasons focalisés à haute intensité. Elle peut être améliorée par les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 per os ou par des<br />

injections intracaverneuses de prostaglandines Grade C . Le traitement hormonal entraîne également une dysfonction érectile<br />

réversible à son arrêt.<br />

Des troubles digestifs à type de diarrhées et de ténesmes sont possibles au décours d'une radiothérapie externe. À long terme, des<br />

troubles rectaux à type de rectorragies et d'ulcérations peuvent survenir.<br />

Les effets indésirables de l'hormonothérapie, en rapport avec la déprivation androgénique (ostéoporose et risque fracturaire, anémie<br />

durable, dépression, modification du profil lipidique, troubles de l'humeur et dépression, bouffées de chaleur, gynécomastie) doivent<br />

être dépistés et pris en charge.<br />

Échec thérapeutique<br />

Il faut distinguer la récidive locale après thérapeutique à visée curative et la récidive à distance, évocatrice d'une évolution<br />

métastatique.<br />

En cas de récidive locale après radiothérapie externe ou curiethérapie, la prostatectomie totale a sa place, bien que difficile et<br />

susceptible d'entraîner des complications. Le traitement par ultrasons postradiothérapie est en phase d'évaluation. Son taux de succès<br />

dépasse 40 %. En cas de récidive locale après prostatectomie totale, une radiothérapie externe à doses curatives peut être envisagée.<br />

Une élévation des PSA, témoin d'une récidive à distance, doit être traitée par une hormonothérapie précoce permettant de diminuer la<br />

fréquence de métastases cliniques. Grade B<br />

Une chimiothérapie peut être envisagée en cas d'échappement hormonal au stade métastatique.<br />

Conseils aux patients<br />

L'association du patient au projet thérapeutique nécessite un apprentissage et une évaluation de ses connaissances et de celles de<br />

son entourage.<br />

L'information doit porter sur les traitements disponibles, sur les modalités de choix entre ces traitements et sur leurs effets<br />

indésirables éventuels. Le patient doit être notamment clairement informé des risques de dysfonction érectile et d'incontinence urinaire.<br />

Une évaluation objective de la fonction sexuelle avant l'intervention, une information sur les modalités de prise en charge postopératoire<br />

d'une éventuelle dysfonction érectile font partie intégrante de la démarche thérapeutique. Accord Pro<br />

Un guide ALD destiné aux patients, « La prise en charge du cancer de la prostate » (juin 2010), disponible sur le site de l' INCa,<br />

répond aux principales questions sur le diagnostic et le choix des traitements, les traitements et le suivi post-thérapeutique. Il comprend<br />

également un glossaire de quelques termes médicaux et des adresses pratiques.<br />

Dépistage et suivi des complications<br />

L'obstruction du haut appareil urinaire peut nécessiter un drainage de la voie excrétrice par la pose d'une sonde urétérale double J ou<br />

une néphrostomie percutanée. Une rétention vésicale peut être traitée par drainage de la vessie puis résection endoscopique.<br />

Les métastases osseuses peuvent être traitées par biphosphonates pour prévenir leurs complications (fractures, hypercalcémie, etc.).<br />

Grade A Les autres traitements comme la radiothérapie externe, la radiothérapie métabolique, les antalgiques doivent être envisagés<br />

précocement devant des métastases osseuses symptomatiques. Grade B L'anémie, fréquente à la phase terminale, peut nécessiter<br />

des transfusions en cas de mauvaise tolérance.<br />

La phase palliative justifie la prescription de soins de support et de traitements symptomatiques (asthénie, anorexie, nausées,<br />

vomissements, constipation) associés aux traitements spécifiques dans le cadre d'une collaboration multidisciplinaire. Lire Soins<br />

palliatifs.<br />

Traitements


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Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Surveillance active<br />

Elle est envisageable dans 2 situations : découverte fortuite d'un cancer de la prostate après une résection prostatique transurétrale<br />

chez un patient ayant une espérance de vie estimée supérieure à 10 ans, et surveillance d'une tumeur révélée par une élévation<br />

isolée des PSA et en l'absence de toute symptomatologie clinique (on parle dans ce cas d'abstention-surveillance). La surveillance<br />

repose sur un dosage semestriel du PSA couplé au toucher rectal, avec un bilan local par biopsies à 1 an puis tous les 2 à 3 ans. Les<br />

critères d'initiation d'un traitement curatif incluent tout événement indicatif d'une progression : stade clinique > T2a, temps de<br />

doublement du PSA < 3 ans, PSA > 10 ng/ml, plus de 2 biopsies positives, score de Gleason ≥ 7, longueur du tissu tumoral de plus<br />

de 3 mm sur une biopsie.<br />

Prostatectomie totale<br />

C'est le traitement de référence des cancers de la prostate localisés chez les patients ayant une espérance de vie estimée > 10 ans.<br />

Elle consiste à réaliser l'exérèse de la prostate associée à l'ablation bilatérale des vésicules séminales. Elle peut être réalisée par<br />

voie chirurgicale ouverte rétropubienne ou par voie cœlioscopique Grade C . Le curage ganglionnaire ilio-obturateur bilatéral est<br />

optionnel pour les cancers à faible risque évolutif. Accord Pro La prostatectomie totale représente le seul traitement ayant montré<br />

une amélioration de la survie comparativement à la surveillance. Grade B Le taux de survie sans récidive biologique est d'environ<br />

74 % à 10 ans et de 66 % à 15 ans. La morbidité péri et postopératoire est faible et est dominée par le risque hémorragique et les<br />

accidents thromboemboliques. Ses effets secondaires sont essentiellement l'incontinence urinaire et la dysfonction érectile. Le taux<br />

d'incontinence durable et relevant d'un traitement spécifique est de 5 à 10 % et celui d'érections spontanées de 20 %. La technique<br />

de préservation des bandelettes neurovasculaires, contre-indiquée en cas d'extension extraprostatique, permet une restauration des<br />

érections chez 75 % des patients de moins de 60 ans. Il n'y a pas de bénéfice à effectuer une hormonothérapie avant une<br />

prostatectomie totale.<br />

Radiothérapie externe<br />

Elle représente la seconde modalité du traitement à visée curatrice du cancer de la prostate localisé. Ses indications sont élargies à<br />

tous les patients non métastatiques. La radiothérapie conformationnelle, qui détermine plus précisément le volume à irradier grâce à<br />

un repérage préalable par TDM, permet d'augmenter les doses d'irradiation jusqu'à 80-81 Gray tout en ménageant au mieux les<br />

organes de voisinage. Un régime alimentaire limitant les aliments riches en cellulose (légumes verts, fruits, pain, pâtisseries) et<br />

pauvre en graisse (fritures et graisses cuites, charcuterie, viandes grasses et fromages gras) est conseillé avant la radiothérapie. Les<br />

complications précoces (cystite, rectite) sont inférieures à 2 %. Les complications à distance sont dominées par la rectite radique, qui<br />

survient dans 15 % des cas. L'incontinence urinaire est très rare. Les taux de dysfonction érectile varient de 40 à 70 %. Le taux de<br />

rémission à 5 ans va décroissant en fonction du taux de PSA initial (de l'ordre de 80 % pour un PSA < 10 ng/ml, de l'ordre de 70 %<br />

pour un PSA de 10 à 20 ng/ml et de l'ordre de 30 % pour un PSA > 30 ng/ml) et le score de Gleason (de l'ordre de 75 % avec un<br />

score de 2 à 4 et de l'ordre de 50 % pour un score de 7 à 10). Le document « Médecin traitant et patient en radiothérapie : conseils<br />

pratiques » (2008) est disponible sur le site de l' INCa.<br />

Il répond aux principales questions pratiques pour le suivi d'un patient avant,<br />

pendant et après la radiothérapie.<br />

Curiethérapie<br />

Elle consiste à mettre en place à l'intérieur de la prostate des implants d'iode radioactif permanents (Iode 125) par voie périnéale et<br />

sous contrôle échographique. La technique est proposée pour les cancers à faible risque. Ses indications sont limitées à un volume<br />

prostatique < 50 cc en l'absence de résection prostatique endo-urétrale. Il est préférable de proposer la curiethérapie pour des<br />

patients de 70 ans ou plus. Accord Pro En effet, les résultats carcinologiques sont identiques à court et moyen termes à ceux de la<br />

prostatectomie totale et la radiothérapie externe mais les résultats à 10 ans sont moins clairs. Pour en savoir plus sur ce traitement,<br />

consulter la fiche « La curiethérapie », disponible sur le site de l' INCa.<br />

Ultrasons focalisés de haute intensité (HIFU)<br />

Cette technique consiste à coaguler le tissu prostatique grâce à des ultrasons délivrés par voie endorectale sous anesthésie générale<br />

et repérage échographique. L'énergie apportée aux tissus provoque une nécrose de coagulation. Ce traitement peut être proposé à<br />

des patients de plus de 70 ans dont l'espérance de vie estimée est au moins de 7 ans, présentant une tumeur à faible risque évolutif<br />

avec un faible volume, un PSA < 15 ng/ml, une masse prostatique inférieure à 50 g Accord Pro . La survie sans récidive biologique<br />

est de 77 % à 5 ans. Les complications sont modérées, 95 % des patients sont continents, 13,6 % ont une obstruction prostatique<br />

postopératoire. Le recul de la technique est cependant insuffisant pour juger du bénéfice à long terme. Les patients doivent en être<br />

informés.<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Hormonothérapie<br />

Analogues de la LH-RH<br />

Les analogues de la LH-RH sont indiqués dans le traitement du cancer de la prostate hormonodépendant localement avancé ou<br />

métastatique. La gosériline est également indiquée dans le traitement adjuvant à la radiothérapie externe dans le cancer de la<br />

prostate localement avancé. Les analogues de la LH-RH entraînent, en cas de traitement prolongé, une inhibition de la sécrétion<br />

des gonadotrophines hypophysaires et une suppression de la synthèse des stéroïdes testiculaires chez l'homme (castration<br />

chimique). Cet effet est réversible à l'arrêt du traitement. Ils sont administrés pour la plupart par voie injectable sous-cutanée ou<br />

intramusculaire, sous des formes à libération prolongée (formes retard 3 ou 6 mois). La buséréline existe également sous forme<br />

d'implant sous-cutané et de solution nasale. Des cas d'aggravation transitoire des symptômes urinaires ont été rapportés lors de la<br />

mise en route du traitement par un analogue de la LH-RH. Ils justifient une surveillance médicale particulièrement attentive durant<br />

les 1 res semaines du traitement, notamment chez les patients ayant une obstruction des voies excrétrices ou des métastases<br />

vertébrales. Les principaux effets indésirables sont liés à l'abaissement des taux plasmatiques de la testostérone (bouffées de<br />

chaleur, diminution de la libido, impuissance). Des cas de perte osseuse ont été décrits en cas d'utilisation prolongée.<br />

buséréline<br />

BIGONIST 6,3 mg implant inj SC


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SUPREFACT 1 mg/ml sol inj SC<br />

SUPREFACT 100 µg sol nasal<br />

goséréline<br />

ZOLADEX 10,8 mg implant inj SC<br />

ZOLADEX 3,6 mg implant inj<br />

leuproréline<br />

ELIGARD 22,5 mg pdre/solv p sol inj<br />

ELIGARD 45 mg pdre/solv p sol inj<br />

ELIGARD 7,5 mg pdre/solv p sol inj<br />

ENANTONE LP 11,25 mg µsphèr/sol LP p us parentér IM/SC<br />

ENANTONE LP 3,75mg pdre/solv p susp inj LP IM/SC<br />

ENANTONE LP 30 mg pdre/solv p susp inj<br />

triptoréline<br />

DECAPEPTYL 0,1 mg pdre/solv p sol inj SC<br />

DECAPEPTYL 11,25 mg pdre/solv p susp inj LP IM<br />

DECAPEPTYL 3 mg pdre/solv p susp inj LP IM<br />

DECAPEPTYL LP 22,5 mg pdre/solv p susp inj LP<br />

GONAPEPTYL 3,75mg pdre/solv p susp inj LP<br />

Antiandrogènes<br />

Les antiandrogènes agissent en bloquant les récepteurs androgéniques prostatiques. Prescrits en association avec une<br />

castration chimique (par un agoniste de la LH-RH) ou chirurgicale, ils permettent un blocage androgénique complet au cours du 1<br />

er mois de l'hormonothérapie. Ils peuvent également être utilisés en monothérapie. Les antiandrogènes sont contre-indiqués en<br />

cas d'insuffisance hépatocellulaire sévère. L'acétate de cyprotérone l'est également en cas de tuberculose, de diabète sévère,<br />

d'antécédent d'accident thromboembolique, de dépression chronique sévère, d'anémie falciforme, et la nilutamide en cas<br />

d'insuffisance respiratoire sévère. Un bilan biologique hépatique doit être effectué avant le démarrage du traitement et<br />

régulièrement par la suite. Les principaux autres effets du traitement sont : inhibition de la spermatogenèse, habituellement<br />

réversible à l'arrêt du traitement (pouvant entraîner une stérilité temporaire), gynécomastie, impuissance, dyspnée, dépression,<br />

aggravation d'une insuffisance veineuse des membres inférieurs, migraines et céphalées, perte osseuse en cas de traitement de<br />

longue durée.<br />

bicalutamide<br />

BICALUTAMIDE 50 mg cp<br />

BICALUTAMIDE ISOMED 50 mg cp pellic<br />

CASODEX 50 mg cp enr<br />

cyprotérone<br />

ANDROCUR 100 mg cp séc<br />

ANDROCUR 50 mg cp séc<br />

CYPROTERONE 100 mg cp séc<br />

CYPROTERONE 50 mg cp<br />

CYPROTERONE WINTHROP 100 mg cp séc<br />

flutamide<br />

EULEXINE 250 mg cp<br />

FLUTAMIDE 250 mg cp<br />

nilutamide<br />

ANANDRON 150 mg cp<br />

ANANDRON 50 mg cp<br />

Diéthylstilbestrol<br />

Le diéthylstilbestrol est un estrogène de synthèse indiqué comme traitement optionnel de 2 e ligne dans le traitement du cancer<br />

de la prostate hormonodépendant. Il est contre-indiqué en cas d'antécédent d'accident thromboembolique artériel (infarctus du<br />

myocarde, accident vasculaire cérébral) ou veineux (phlébite, embolie pulmonaire), d'hypertension artérielle, de pathologie<br />

oculaire d'origine vasculaire, de diabète compliqué de micro ou de macroangiopathie, d'affections hépatiques sévères ou récentes,<br />

de connectivites, de porphyries. Ses principaux autres effets sont : céphalées, ictère, lithiase biliaire, dépression, gynécomastie,<br />

atrophie testiculaire, impuissance. Son utilisation actuelle est marginale.<br />

diéthylstilbestrol<br />

DISTILBENE 1 mg cp enr<br />

Bisphosphonates<br />

Bisphosphonates


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Certains bisphosphonates,<br />

du fait de leur activité antiostéoclastique, sont proposés dans la prévention des ostéolyses d'origine<br />

maligne avec ou sans hypercalcémie. Lorsque le traitement par bisphosphonate est actif, il peut entraîner, en complément du<br />

traitement spécifique, une diminution des complications squelettiques et une réduction des douleurs osseuses. Une surveillance<br />

de la fonction rénale est indispensable. Les principaux effets indésirables sont allergiques, hématologiques (anémie) et rénaux.<br />

Des cas d'ostéonécrose de la mandibule et/ou du maxillaire (ONM) ont été observés chez des patients traités par bisphosphonates<br />

par voie intraveineuse. L'ONM, dont le diagnostic est souvent retardé, est d'intensité douloureuse variable, difficile à traiter et peut<br />

entraîner des séquelles. Les médecins et les spécialistes dentaires ont été informés de ces risques de complications<br />

buccodentaires et osseuses graves qui existent pendant et après un traitement par bisphosphonates (Recommandations sur la<br />

prise en charge buccodentaire des patients traités par bisphosphonates, Afssaps, 19 décembre 2007). Ils doivent en informer les<br />

patients.<br />

acide clodronique<br />

CLASTOBAN 800 mg cp pellic<br />

LYTOS 520 mg cp pellic<br />

acide zolédronique<br />

ZOMETA 4 mg/5 ml sol diluer p perf<br />

Antinéoplasiques cytostatiques<br />

Docétaxel<br />

Le docétaxel est un antinéoplasique cytostatique indiqué dans le traitement du cancer de la prostate métastatique<br />

hormonorésistant, en association à la prednisone ou à la prednisolone. Une prémédication orale avec 8 mg de dexaméthasone<br />

12 heures, 3 heures et 1 heure avant la perfusion de docétaxel est en outre nécessaire. Une numération formule sanguine et un<br />

dosage des plaquettes doivent être réalisés avant et après chaque cure, et en cas de signes d'infection. Les effets indésirables les<br />

plus fréquents sont : neutropénie réversible, anémie, alopécie, nausées, vomissements, stomatite, diarrhée et asthénie.<br />

docétaxel<br />

DOCETAXEL ACTAVIS 20 mg/ml sol diluer p perf<br />

DOCETAXEL EBEWE 10 mg/ml sol diluer p perf<br />

DOCETAXEL HOSPIRA 10 mg/ml sol diluer p perf<br />

DOCETAXEL INTAS PHARMACEUTICALS 20 mg/0,5 ml sol diluer/solvant p perf<br />

DOCETAXEL INTAS PHARMACEUTICALS 80 mg/2 ml sol diluer/solvant p perf<br />

DOCETAXEL TEVA 20 mg sol diluer/solvant p perf<br />

DOCETAXEL TEVA 80 mg sol diluer/solvant p perf<br />

TAXOTERE 160 mg/8 ml sol diluer p perf<br />

TAXOTERE 20 mg/1 ml sol diluer p perf<br />

TAXOTERE 80 mg/4 ml sol diluer p perf<br />

Mitoxantrone<br />

La mitoxantrone est un antinéoplasique cytostatique indiqué dans le traitement palliatif du cancer métastatique de la prostate<br />

hormonorésistant, en association avec de faibles doses de corticoïdes par voie orale. Cette association peut entraîner une<br />

amélioration significative de la douleur et de la qualité de vie, mais n'a pas d'impact sur la survie globale. Un bilan hépatique doit<br />

être réalisé avant le début du traitement, ainsi qu'une numération formule sanguine et un dosage des plaquettes avant et après<br />

chaque cure et en cas de signes d'infection. Le risque de survenue d'une leucopénie et/ou d'une thrombopénie est maximal au 10e<br />

jour suivant l'administration, avec une récupération spontanée vers le 20 e jour. La sévérité de la myélodépression sera d'autant<br />

plus grande que les patients auront déjà reçu une chimiothérapie ou une radiothérapie. La cardiotoxicité, principal risque du<br />

traitement, augmente avec la dose cumulée et les facteurs favorisants (administrations antérieures d'anthracyclines, radiothérapies<br />

médiastinales, cardiopathies sous-jacentes). La mitoxantrone peut entraîner nausées, vomissements, mucites et stomatite,<br />

généralement de faible intensité et transitoires. L'alopécie, si elle se produit, est généralement modérée et réversible à l'arrêt du<br />

traitement.<br />

mitoxantrone<br />

MITOXANTRONE EBEWE 2 mg/ml sol diluer p perf<br />

MITOXANTRONE MYLAN 2 mg/ml sol diluer p perf<br />

MITOXANTRONE TEVA 10 mg/5 ml sol diluer p perf<br />

MITOXANTRONE TEVA 2 mg/ml sol diluer p perf<br />

MITOXANTRONE TEVA 20 mg/10 ml sol diluer p perf<br />

MITOXANTRONE TEVA 25 mg/12,5ml sol diluer p perf<br />

NOVANTRONE 10 mg/5 ml sol diluer p perf<br />

NOVANTRONE 20 mg/10 ml sol inj p perf<br />

NOVANTRONE 25 mg/12,5ml sol diluer p perf<br />

Médicaments en attente d'évaluation à long terme<br />

Dégarélix<br />

Le dégarélix est un antagoniste de l'hormone entraînant la libération de gonadotrophines (GnRh). Il réduit la libération de LH et de<br />

FSH et, donc, la sécrétion de testostérone. Il est indiqué dans le traitement du cancer de la prostate avancé, hormonodépendant.<br />

Selon la HAS, administré en monothérapie, ce médicament constitue un moyen thérapeutique supplémentaire dans<br />

l'hormonothérapie du cancer de la prostate au stade avancé ( synthèse d'avis de la commission de la transparence,<br />

HAS, juin 2009).<br />

dégarélix<br />

FIRMAGON 120 mg pdre/solv p sol inj<br />

FIRMAGON 80 mg pdre/solv p sol inj


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Médicaments non cités dans les références<br />

Estramustine<br />

L' estramustine combine un alkylant et un œstrogène. Il est indiqué dans le traitement du cancer prostatique hormonorésistant.<br />

estramustine phosphate disodique<br />

ESTRACYT 140 mg gél<br />

Références<br />

« Cancer de la prostate », Guide ALD n° 30, INCA/HAS, septembre 2008.<br />

Guide ALD INCa/HAS 2008<br />

Recommandations 2007 en onco-urologie. Comité de Cancérologie de l'Association française d'urologie, Progrès en Urologie,<br />

2007,<br />

vol. 17, n° 6, pp. 1159-1230.<br />

« Guidelines on Prostate Cancer », Aus G. et al. , European Association of Urology, 2007.<br />

http://www.uroweb.org/fileadmin/user_upload/Guidelines/07_Prostate_Cancer_2007.p...<br />

Le cancer de la prostate. Prise en charge de la maladie et de ses séquelles, Cosset J.M. et al. , Editions John Libbey Eurotext,<br />

120 pages, 2008.<br />

« Éléments d'information des hommes envisageant la réalisation d'un dépistage individuel du cancer de la prostate. Document à l'usage<br />

des professionnels de santé », Anaes, septembre 2004.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_459096/cancer-prostate-2004-depistage-ind...<br />

Mise à jour de la Reco : 13/07/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


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La maladie<br />

Colique néphrétique<br />

La colique néphrétique est un syndrome douloureux lomboabdominal aigu.<br />

Physiopathologie<br />

Elle résulte de la mise en tension brutale de la voie excrétrice du haut appareil urinaire en amont d'une obstruction, quelle qu'en soit la<br />

cause. L'augmentation de la pression hydrostatique stimule la sécrétion de prostaglandines vasodilatatrices, provoquant une<br />

augmentation de la pression de filtration glomérulaire et, partant, de la pression intrapyélique. 75 à 80 % des coliques néphrétiques<br />

seraient liées à un calcul. Les causes non lithiasiques sont représentées par tout obstacle aigu ou toute aggravation aiguë d'un obstacle<br />

sur les voies excrétrices : tumeur des voies excrétrices, compression par cancer, sténoses urétérales inflammatoires, tuberculose,<br />

sclérose rétropéritonéale, migration urétérale d'une papille nécrosée.<br />

Epidémiologie<br />

En France, près de 10 % des hommes et 5 % des femmes ont souffert ou souffriront de colique néphrétique au moins une fois dans<br />

leur vie. Sans prévention appropriée, la récidive se produit dans les 5 ans chez près de 50 % des sujets.<br />

Complications<br />

Elles sont représentées par la rupture de la voie urinaire au niveau d'un fornix, par l'association à une infection des urines, par<br />

l'existence d'une anurie (migration sur rein unique), et par les complications de la maladie lithiasique. Une distension chronique<br />

au-dessus d'une lithiase urétérale méconnue ou des migrations lithiasiques répétées causent des lésions de néphropathie interstitielle<br />

chronique. Lire Lithiase urinaire.<br />

Diagnostic<br />

La colique néphrétique se manifeste par une douleur lomboabdominale, le plus souvent unilatérale, à type de broiement, avec des<br />

paroxysmes hyperalgiques. Elle irradie volontiers vers les organes génitaux. Des signes digestifs (nausées, vomissements, constipation),<br />

urinaires (dysurie, pollakiurie, impériosité) et généraux (agitation, anxiété), peuvent être présents. Il n'y a pas de fièvre.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tout patient souffrant d'une colique néphrétique.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Soulagement de la douleur.<br />

Prise en charge de la maladie lithiasique.


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Prise en charge<br />

Colique néphrétique


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1 Diagnostic<br />

La clinique suffit le plus souvent au diagnostic. La bandelette urinaire reste recommandée à la recherche d'une hématurie<br />

microscopique (lithiase) ou de nitrites et de leucocytes (infection urinaire). Grade C Un ECBU et une créatininémie seront<br />

systématiquement réalisés aux urgences. Grade C En cas de colique néphrétique simple, un ASP et une échographie ou un<br />

scanner spiralé abdominopelvien sans injection sont indiqués Grade A entre la 12 e et la 48 e heure. Dans les cas compliqués ou de<br />

doute diagnostique, un scanner spiralé sans injection est indiqué en urgence Grade A . Chez la femme enceinte, une échographie<br />

est pratiquée en 1 re intention Grade B . Les examens ne doivent en aucun cas retarder le traitement.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Prise en charge<br />

Le traitement antalgique est guidé par la mesure répétée de l'intensité douloureuse évaluée par l'échelle visuelle analogique (EVA).<br />

En l'absence de contre-indication, la voie d'administration de l'AINS la plus efficace est la voie veineuse, communément<br />

recommandée : seul le kétoprofène IV 100 mg Grade A est disponible. Il nécessite une perfusion de 20 minutes et est donc réservé<br />

à l'usage hospitalier : 100 à 300 mg par jour pendant 2 jours au maximum. Pour des raisons de commodité, on peut utiliser la voie<br />

intramusculaire : il existe des formes IM de kétoprofène (100 à 300 mg par jour pendant 2 jours au maximum) et de diclofénac<br />

(75 mg 1 fois par jour pendant 2 jours au maximum).<br />

Il n'y a pas lieu d'associer 2 AINS.<br />

En cas de contre-indication aux AINS, un antalgique morphinique peut être prescrit en 1 re intention. Grade B<br />

Si l'intensité de la douleur le justifie, un antalgique morphinique peut être associé à l'AINS. Grade A<br />

L'efficacité du tiémonium (effets indésirables atropiniques) et du phloroglucinol est peu évaluée dans le traitement de la colique<br />

néphrétique.<br />

Restriction hydrique ou hydratation ?<br />

L'hyperhydratation ou la prise de diurétiques afin de faciliter l'expulsion du calcul et de réduire les symptômes douloureux sont<br />

inutiles Grade A . Il est recommandé de boire normalement pour éviter la déshydratation.<br />

Colique néphrétique grave<br />

Une fièvre élevée ou des frissons, une anurie justifient un avis urologique immédiat.<br />

Cas particuliers<br />

Colique néphrétique chez la femme enceinte<br />

Le risque d'accouchement prématuré et de rupture prématurée des membranes justifie l'appel en urgence du gynécologue<br />

obstétricien. La plupart des coliques néphrétiques pendant la grossesse surviennent aux 2 e et 3 e trimestres et sont dues à la<br />

migration de calculs préexistants. Le traitement repose sur les antispamodiques, tels que le phloroglucinol, les analgésiques : la<br />

morphine peut être prescrite en dehors du travail ; le paracétamol n'est pas contre-indiqué, mais son efficacité n'a pas été<br />

particulièrement étudiée dans la colique néphrétique. Les AINS et la lithotritie extracorporelle sont contre-indiqués. En cas de besoin,<br />

une sonde urétérale double J est montée dans l'uretère.<br />

Traitement initial chez l'insuffisant rénal<br />

Il existe un risque de détérioration aiguë de la fonction rénale. Les AINS sont contre-indiqués, justifiant le recours aux antalgiques :<br />

paracétamol et/ou morphine.<br />

En cas d'infection urinaire associée, ne pas prescrire d'antibiotiques néphrotoxiques.<br />

Conseils aux patients<br />

Les urines doivent être tamisées à l'aide d'un grand filtre à café. Tous les calculs expulsés doivent être conservés pour analyse.<br />

La température doit être prise tous les matins.<br />

La disparition de la douleur n'a pas valeur de guérison : les examens doivent avoir lieu comme prévu, ainsi qu'une nouvelle<br />

consultation.<br />

Une consultation en urgence est nécessaire en cas de : fièvre > 38 °C, frissons, vomissements, réapparition ou modification de la<br />

douleur, malaise, hématurie, anurie.<br />

Dépistage et suivi des complications<br />

Au décours de la crise, il est indispensable de se demander, pour chacun des patients :<br />

Un calcul a-t-il été identifié ? Si oui, quelles sont sa taille et sa localisation ?<br />

Si le calcul n'a pas été éliminé, un geste urologique est-il nécessaire ?<br />

En l'absence de calcul décelé, le diagnostic est-il confirmé ?<br />

Le patient est-il à risque de récidives ?<br />

Selon certaines recommandations, la tamsulosine (hors AMM) à la dose de 0,4 mg par jour pendant 1 mois réduit le délai et<br />

augmente le taux d'expulsion des calculs distaux de moins de 10 mm Grade A . Il en est de même pour la nifédipine (hors AMM) à la<br />

dose de 30 mg par jour pendant la même durée (mais avec plus d'effets secondaires).<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS)


VIDAL Recos - Colique néphrétique - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 4/5<br />

Les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) diminuent la filtration glomérulaire par inhibition de la synthèse des<br />

prostaglandines, diminuent le tonus musculaire lisse des voies urinaires et réduisent l'œdème inflammatoire au niveau de<br />

l'obstruction. Seuls quelques AINS ont fait l'objet d'essais cliniques comparatifs dans la colique néphrétique. Il s'agit du diclofénac,<br />

de l'indométacine, du kétoprofène et de l'acétylsalicylate de lysine. En France, 2 AINS bénéficient d'une AMM dans le traitement de<br />

la colique néphrétique : le diclofénac et le kétoprofène. Le respect des contre-indications et la brièveté du traitement concourent à sa<br />

bonne tolérance. L'injection intraveineuse d'AINS est privilégiée car son délai d'action est très bref. Les principales contre-indications<br />

du kétoprofène IV sont : une grossesse au-delà de 24 semaines d'aménorrhée, des antécédents d'asthme déclenché par la prise de<br />

kétoprofène ou de substances d'activité proche (autres AINS, aspirine), une hémorragie en évolution, un ulcère gastrique ou<br />

intestinal en évolution, une insuffisance hépatique ou rénale sévères, une insuffisance cardiaque sévère non contrôlée. La voie IM<br />

ne garantit pas une absorption rapide et totale du principe actif, notamment chez les personnes obèses ou âgées. La voie rectale<br />

(hors AMM) peut à la rigueur être utilisée en cas de non-utilisation de la voie intramusculaire et de difficultés de l'abord veineux.<br />

poso Le kétoprofène 100 mg peut être administré par voie intraveineuse (réservé à l'usage hospitalier) en perfusion lente, dilué<br />

dans un volume de 100 à 150 ml et administré en 20 minutes au moins : 100 mg 3 fois par jour, au maximum pendant 2 jours<br />

Accord Pro . Il peut également être administré par voie IM à raison de 100 mg 3 fois par jour, au maximum pendant 2 jours.<br />

poso Le diclofénac ne peut pas être administré par voie IV. Il peut être administré par voie IM à la dose unique de 75 mg 1 fois par<br />

jour, pendant 2 jours maximum.<br />

Le diclofénac IM contient des sulfites (risque allergique, notamment chez l'asthmatique). Certaines recommandations préconisent<br />

l'utilisation de diclofénac per os pendant 7 jours (50 mg, 3 fois par jour, hors AMM) pour réduire le risque de récidive de colique<br />

néphrétique.<br />

diclofénac<br />

DICLOFENAC 75 mg/3 ml sol inj IM<br />

VOLTARENE 75 mg/3 ml sol inj<br />

kétoprofène<br />

KETOPROFENE 100 mg/2 ml sol inj IM<br />

PROFENID 100 mg pdre p sol inj IV<br />

PROFENID 100 mg/2 ml sol inj IM<br />

Morphiniques<br />

Les morphiniques gardent une place importante dans le traitement de la colique néphrétique car la réponse aux AINS est<br />

imprévisible d'un sujet à l'autre.<br />

poso Le chlorhydrate de morphine s'administre en titration IV à la dose initiale de 0,1 mg/kg toutes les 4 heures (dose diminuée de<br />

moitié chez le sujet âgé).<br />

morphine<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AGUETTANT 0,1 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AGUETTANT 1 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AGUETTANT 10 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AGUETTANT 20 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AGUETTANT 40 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) AP-HP 50 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) COOPER 10 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) LAVOISIER 10 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) LAVOISIER 10 mg/ml sol inj en ampoule<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) LAVOISIER 20 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) LAVOISIER 20 mg/ml sol inj en ampoule<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) RENAUDIN 1 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) RENAUDIN 10 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) RENAUDIN 20 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (CHLORHYDRATE) RENAUDIN 40 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (SULFATE) LAVOISIER 1 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (SULFATE) LAVOISIER 50 mg/ml sol inj<br />

MORPHINE (SULFATE) RENAUDIN 15 mg/ml sol inj<br />

Antispasmodiques<br />

Les antispasmodiques diminuent les nausées et vomissements en cas de recours aux morphiniques. Il n'y a pas d'argument<br />

probant publié pour leur utilisation en association avec les AINS, pourtant très répandue. Le phloroglucinol est souvent utilisé au<br />

cours de la colique néphrétique chez la femme enceinte.<br />

atropine<br />

ATROPINE RENAUDIN 0,25 mg/ml sol inj SC IV<br />

ATROPINE RENAUDIN 0,5 mg/ml sol inj SC IV<br />

ATROPINE RENAUDIN 1 mg/ml sol inj SC IV<br />

ATROPINE SULFATE AGUETTANT 0,25 mg/ml sol inj<br />

ATROPINE SULFATE AGUETTANT 0,5 mg/1 ml sol inj<br />

ATROPINE SULFATE AGUETTANT 1 mg/1 ml sol inj<br />

ATROPINE SULFATE LAVOISIER 0,25 mg/1 ml sol inj<br />

ATROPINE SULFATE LAVOISIER 0,5 mg/1 ml sol inj<br />

ATROPINE SULFATE LAVOISIER 1 mg/1 ml sol inj<br />

phloroglucinol<br />

PHLOROGLUCINOL 80 mg lyoph oral<br />

SPASFON LYOC 80 mg lyoph oral<br />

phloroglucinol + triméthylphloroglucinol


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SPASFON cp enr<br />

SPASFON sol inj<br />

SPASFON suppos<br />

tiémonium<br />

VISCERALGINE 50 mg cp pellic<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Gestes urologiques<br />

Différents gestes urologiques peuvent être proposés : urétéroscopie, montée de sonde urétérale par voie endoscopique rétrograde,<br />

néphrostomie percutanée, lithotritie extracorporelle ou in situ (désintégration des calculs par ondes de choc).<br />

Chirurgie urologique<br />

Selon l'association européenne d'urologie (2008), toutes techniques confondues, les indications de la chirurgie urologique sont : un<br />

calcul de diamètre > 7 mm, une douleur résistante, une obstruction et une infection (risque d'insuffisance rénale et de pyonéphrose),<br />

une obstruction sur rein unique ou une obstruction bilatérale.<br />

Références<br />

« Prise en charge des coliques néphrétiques de l'adulte », actualisation 2008 de la 8 e conférence de consensus de la société<br />

francophone d'urgences médicales, Progrès en urologie,<br />

2009, n° 19, pp. 462-473.<br />

http://www.urgences-serveur.fr/IMG/<strong>pdf</strong>/colique.<strong>pdf</strong><br />

« Nonsteroidal Anti-inflammatory Drugs (NSAIDs) versus Opioids for Acute Renal Colic », Holdgate A., Pollock T., The Cochrane<br />

Library, 2005.<br />

« Managing Acute Renal Colic Across the Primary-secondary Care Interface : a Pathway of Care Based on Evidence and Consensus »,<br />

Wright P.J. et al. , British Medical Journal,<br />

2002, vol. 325, n° 7377, pp. 1408-1412.<br />

http://bmj.bmjjournals.com/cgi/content/full/325/7377/1408<br />

« Renal Colic », Clinical Knowledge Summaries, National Health Service (NHS), mars 2009.<br />

Mise à jour de la Reco : 22/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Cystite aiguë simple - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/7<br />

La maladie<br />

Cystite aiguë simple<br />

La cystite aiguë simple de la femme de 15 à 65 ans est une inflammation de la vessie et de l'urètre d'origine infectieuse.<br />

Physiopathologie<br />

Les germes le plus souvent en cause sont des entérobactéries d'origine fécale ( Escherichia coli 70 à 95 %, autres entérobactéries dont<br />

Proteus mirabilis, Klebsiellae 15 à 25 %, Staphylococcus saprophyticus 1 à 4 %).<br />

Epidémiologie<br />

On estime que 40 à 50 % des femmes ont au moins une infection urinaire au cours de leur existence.<br />

Complications<br />

Les complications possibles sont une hématurie macroscopique, la survenue d'une pyélonéphrite et, plus fréquemment, la récidive.<br />

Diagnostic<br />

La cystite aiguë simple de la femme de 15 à 65 ans associe à des degrés divers une dysurie, une pollakiurie, des brûlures et une<br />

impériosité mictionnelles.<br />

La bandelette urinaire (BU) multiréactive positive (présence de leucocytes et de nitrites) est en faveur du diagnostic d'infection. Une BU<br />

négative (absence de leucocytes et de nitrites) permet d'exclure le diagnostic de cystite avec une probabilité > 95 % Grade A .<br />

Aucun autre examen complémentaire n'est recommandé. Grade A<br />

La notion de cystite aiguë dite simple suppose l'absence de facteur de risque de complication Accord Pro , notamment :<br />

absence de pathologie organique ou fonctionnelle de l'arbre urinaire (résidu vésical, reflux, lithiase, tumeur, acte récent, etc.) ;<br />

absence de situation pathologique particulière (diabète, immunodépression, insuffisance rénale, etc.) ;<br />

absence de terrain physiologique particulier (sujet âgé avec comorbidité, femme enceinte, homme).<br />

Quels patients traiter ?<br />

Toutes les femmes présentant des signes cliniques de cystite aiguë, après confirmation, si possible, du diagnostic par un examen par<br />

bandelette urinaire (BU) avant le traitement.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Soulagement de la douleur.<br />

Guérison de l'infection.<br />

Prévention des complications.


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Prise en charge<br />

Cystite aiguë non compliquée


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1 Bandelette urinaire<br />

C'est la méthode diagnostique de choix. Le virage de la plage des leucocytes est témoin d'une pyurie, celui de la plage des nitrites,<br />

d'une bactériurie. La valeur prédictive du dépistage par BU est élevée (valeur prédictive négative > 95 %) dans la cystite aiguë<br />

simple. Les causes de faux négatifs des nitrites sont : dilution des urines, régime restreint en nitrates, infections à Staphylococcus<br />

saprophyticus.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

Examen cytobactériologique des urines (ECBU)<br />

Indiqué en cas de résultat négatif ou douteux de la bandelette, certains auteurs le préconisent à titre systématique.<br />

Prise en charge thérapeutique<br />

L'antibiothérapie est probabiliste. Le médicament recommandé est la fosfomycine trométamol en dose unique. Grade A D'autres<br />

médicaments peuvent être également utilisés : la nitrofurantoïne (traitement de 5 à 7 jours) Grade A ou une fluoroquinolone<br />

(ciprofloxacine, loméfloxacine, norfloxacine et ofloxacine), en dose unique ou pendant 3 jours selon les médicaments Grade A .<br />

En cas de suspicion d'infection à Staphylococcus saprophyticus (femmes < 30 ans et recherche de nitrites négative à la BU),<br />

privilégier la nitrofurantoïne ou les fluoroquinolones.<br />

Peuvent être utilisés au vu d'un antibiogramme : bêtalactamines, céphalosporines de 1 re et 2 e générations, pivmecillinam et<br />

sulfaméthoxazole-triméthoprime.<br />

Une diurèse > 2 litres par jour a un effet antalgique.<br />

Guérison clinique Accord Pro<br />

Il n'est pas nécessaire de reconvoquer la patiente pour un contrôle par BU ou ECBU.<br />

Persistance des symptômes<br />

En cas de persistance des symptômes après 3 jours de traitement, un ECBU sera réalisé Grade B , complété, au moindre doute,<br />

d'une imagerie rénale.<br />

Bilan complémentaire<br />

Nécessaire en cas de multirécidives, il comprend un bilan clinique (dont examen gynécologique), biologique (glycémie, glycosurie,<br />

protéinurie, créatininémie) et radiologique (abdomen sans préparation, échographie des voies urinaires).<br />

En cas de doute sur l'existence d'un reflux vésico-urétéral, il peut être complété par une cystoscopie ou une cystographie<br />

rétrograde.


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Cas particuliers<br />

Cystite récidivante<br />

(> 4 épisodes infectieux urinaires par an Accord Pro )<br />

Le traitement de chaque épisode de cystite récidivante peut être similaire à celui d'une cystite aiguë simple.<br />

En cas de réapparition des symptômes, il est recommandé que la patiente puisse faire le diagnostic de cystite elle-même à l'aide<br />

d'une bandelette urinaire.<br />

Un traitement autodéclenché par la patiente selon les résultats de la bandelette urinaire peut être proposé au cas par cas après<br />

éducation et sélection des patientes Grade A . Le traitement est indiqué en cas de leucocyturie à la bandelette.<br />

Les différentes mesures destinées à prévenir les récidives sont détaillées dans les Conseils aux patients.<br />

La cranberry ( Vaccinium macrocarpon),<br />

fruit d'une airelle proche de la canneberge, pourrait avoir un effet de prévention des<br />

infections urinaires basses non compliquées. Les modalités d'utilisation ne font pas l'objet de consensus.<br />

L'association sulfaméthoxazole-triméthoprime a fait la preuve de son efficacité en terme de réduction du nombre d'infections<br />

urinaires aussi bien dans le cadre d'une prophylaxie post-coïtale Grade B que pour une prophylaxie continue Grade A , hors<br />

indication d'AMM.<br />

En l'absence d'efficacité démontrée, le nitrate d'argent par instillation ne doit plus être utilisé.<br />

Cystite à Staphylococcus saprophyticus<br />

Elle est suspectée chez une femme de moins de 30 ans en cas de leucocyturie sans nitriturie à la bandelette urinaire.<br />

Le traitement doit privilégier nitrofurantoïne (5 à 7 jours) ou fluoroquinolone (3 jours).<br />

Bactériurie asymptomatique ou colonisation urinaire<br />

Elle correspond à la présence de micro-organismes à un taux significatif dans l'arbre urinaire sans manifestation clinique ni réaction<br />

inflammatoire (leucocyturie notamment) : bactériurie > 10 5 germes/ml sans leucocyturie.<br />

Sa fréquence augmente avec l'activité sexuelle et avec l'âge.<br />

En l'absence de facteur de risque de complication, aucun traitement n'est nécessaire. Grade A<br />

Cystite aiguë compliquée<br />

Il s'agit d'une cystite chez un patient présentant des facteurs de risque de complication : sexe masculin, sujet âgé, pathologie<br />

urologique, diabète, immunodépression, insuffisance rénale.<br />

L'ECBU sera systématiquement réalisé.<br />

En traitement probabiliste, selon les recommandations de l'Afssaps, sont recommandés : de préférence la nitrofurantoïne (hors<br />

AMM), ou le céfixime Grade A ou une fluoroquinolone Grade A .<br />

Le traitement sera, si nécessaire, adapté aux résultats de l'antibiogramme.<br />

Cystite aiguë de la femme enceinte<br />

Il s'agit d'une cystite aiguë compliquée.<br />

Le traitement probabiliste utilise céfixime pendant 5 jours Accord Pro ou nitrofurantoïne pendant 7 jours Grade B .<br />

Le traitement sera éventuellement adapté aux résultats de l'antibiogramme.<br />

Un ECBU de surveillance à réaliser une dizaine de jours après l'arrêt du traitement est nécessaire.<br />

Cystite de la petite fille<br />

En l'absence d'uropathie, l'antibiothérapie est orale et repose sur l'association sulfaméthoxazole-triméthoprime (30 mg/kg par jour<br />

de sulfaméthoxazole et 6 mg/kg par jour de triméthoprime) en 2 prises quotidiennes (contre-indiqué avant l'âge de 1 mois), ou le<br />

céfixime à la dose de 8 mg/kg par jour en 2 prises quotidiennes (indication d'AMM à partir de 3 ans), notamment en cas de<br />

résistance, d'intolérance ou de contre-indication au sulfaméthoxazole-triméthoprime. Grade B<br />

Une durée de traitement de 3 à 5 jours est recommandée chez l'enfant. Accord Pro<br />

Cystite récidivante de la petite fille<br />

Elle est définie par la survenue d'au moins 3 épisodes infectieux par an.<br />

Il n'existe pas de consensus sur l'intérêt et la durée de l'antibioprophylaxie dans ce cadre.<br />

L'antibioprophylaxie a 2 objectifs : réduire la fréquence des épisodes d'infections urinaires et prévenir, ou au moins limiter, les<br />

lésions rénales secondaires aux épisodes répétés d'infection urinaire. Elle intervient en complément du traitement des facteurs de<br />

risque de l'infection : réplétion rectale (constipation, encoprésie), troubles mictionnels (instabilité vésicale, dyssynergie<br />

vésicosphynctérienne), et d'une hygiène périnéale adaptée. En cas d'instauration d'une antibioprophylaxie, les médicaments<br />

proposés étaient, jusqu'en février <strong>2011</strong>, l'association sulfaméthoxazole-triméthoprime, hors AMM, et la nitrofurantoïne Grade C , selon<br />

la recommandation de bonne pratique de l'Afssaps (juin 2008). Mais en février <strong>2011</strong>, du fait de cas graves d'atteintes hépatiques et<br />

pulmonaires rapportés en particulier lors de traitements prolongés par la nitrofurantoïne, l'Afssaps a initié une révision des indications<br />

et des conditions de prescription et d'utilisation de la nitrofurantoïne dans le cadre du traitement prophylactique des infections<br />

urinaires récidivantes ( Afssaps, février <strong>2011</strong>).<br />

Dans l'attente des résultats de cette évaluation, l'Afssaps recommande de ne plus<br />

initier de traitement prophylactique par la nitrofurantoïne et, chez les patients recevant déjà un traitement prophylactique, de mettre<br />

en place les mesures appropriées de surveillance, conformément aux recommandations de l'AMM.<br />

Symptômes de cystite chez l'homme<br />

Dysurie, pollakiurie et brûlures ne traduisent pas une cystite aiguë simple.<br />

Il y a lieu de chercher une autre affection : prostatite, urétrite, maladie sexuellement transmissible, ou bien une cystite aiguë<br />

« compliquée ».


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Conseils aux patients<br />

La cystite aiguë simple est une affection bénigne. La prévention des récidives repose sur la cure de diurèse (volume urinaire > 1,5 litre<br />

par jour). Grade A<br />

La cystite récidivante est une affection invalidante dont la prise en charge est facilitée par la responsabilisation de la patiente. Il faut<br />

rassurer la patiente sur le fait que l'infection urinaire basse multirécidivante n'est pas un facteur de risque d'insuffisance rénale.<br />

Le respect de règles hygiéniques simples semble diminuer également le risque de récidive. Ces conseils reflètent un consensus<br />

professionnel et n'ont fait l'objet d'aucune évaluation contrôlée :<br />

ne pas se retenir longtemps d'uriner ;<br />

uriner après les rapports sexuels ;<br />

ne pas utiliser de produits de toilette intime parfumés ;<br />

éviter les douches vaginales à répétition ;<br />

arrêter l'utilisation éventuelle de spermicides.<br />

Le maniement et l'interprétation des bandelettes urinaires réactives doivent être appris aux patientes.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Fosfomycine trométamol<br />

Par soucis de prévention des résistances, la fosfomycine trométamol est privilégiée en traitement monodose dans le traitement<br />

de la cystite aiguë simple, l'éradication bactérienne étant de l'ordre de 80 %. Cet antibiotique n'est pas efficace sur Staphylococcus<br />

saprophyticus.<br />

poso La fosfomycine trométamol s'administre à raison de 1 sachet de 3 g en dose unique.<br />

Elle bénéficie d'une bonne tolérance.<br />

fosfomycine trométamol<br />

FOSFOMYCINE TROMETAMOL 3 g glé p sol buv en sach<br />

MONURIL 3 g glé p sol buv<br />

URIDOZ 3 g glé p sol buv ad<br />

Nitrofurantoïne<br />

La nitrofurantoïne peut être utilisée dans le traitement de la cystite aiguë simple pendant 5 à 7 jours. Grade A<br />

La nitrofurantoïne a également été utilisée hors AMM chez l'adulte, en traitement prolongé, dans la prévention des cystites<br />

récidivantes. La survenue d'effets indésirables graves (atteintes hépatiques et pulmonaires) a conduit l'Afssaps à recommander (<br />

février <strong>2011</strong>)<br />

l'arrêt de telles prescriptions et la surveillance des patients.<br />

poso La posologie usuelle est de 150 à 350 mg par jour, en 3 prises.<br />

nitrofurantoïne<br />

FURADANTINE 50 mg gél<br />

FURADOINE 50 mg cp<br />

MICRODOINE 50 mg gél<br />

Fluoroquinolones<br />

Les fluoroquinolones peuvent être utilisées en traitement probabiliste soit en traitement de 3 jours (plus régulièrement efficace<br />

selon les méta-analyses), soit en dose unique. On constate néanmoins, régulièrement et de manière inquiétante, une augmentation<br />

du pourcentage de souches, même communautaires, d' Escherichia coli résistantes à ces médicaments.<br />

poso La ciprofloxacine et l'ofloxacine peuvent être utilisées en monoprise : 1 comprimé dosé à 500 mg pour la ciprofloxacine,<br />

2 comprimés dosés à 200 mg pour l'ofloxacine, en dose unique. La ciprofloxacine (250 mg, 2 fois par jour), la loméfloxacine<br />

(400 mg, 1 fois par jour, de préférence le soir) et la norfloxacine (400 mg, 2 fois par jour) s'administrent en traitement de<br />

3 jours. L'énoxacine (400 mg, 1 fois par jour, le soir) est utilisée en traitement de 5 jours.<br />

Parmi les effets indésirables des fluoroquinolones, des arthralgies, des myalgies, des tendinites et des ruptures du tendon d'Achille<br />

ont été rapportées. Les tendinites touchent préférentiellement les sujets de plus de 65 ans, ceux soumis à une corticothérapie, ceux<br />

ayant déjà présenté une tendinite et ceux pratiquant une activité sportive intense. Dans la recommandation de l'Afssaps, la<br />

péfloxacine est exclue du choix en raison d'un risque plus élevé de tendinopathie, même en traitement court. Il faut éviter l'exposition<br />

solaire pendant le traitement du fait d'un risque important de photosensibilisation et d'éruption cutanée. Les fluoroquinolones sont<br />

contre-indiquées en cas de tendinopathie survenue lors d'un traitement antérieur par fluoroquinolone.<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 250 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg/5 ml glé/sol p susp buv<br />

CIFLOX 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 250 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 500 mg cp pellic séc<br />

CIPROFLOXACINE ACTAVIS 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE ARROW 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE PANPHARMA 500 mg cp pellic<br />

UNIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

énoxacine


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ENOXOR 200 mg cp pellic<br />

loméfloxacine<br />

LOGIFLOX 400 mg cp pellic séc<br />

norfloxacine<br />

NORFLOXACINE 400 mg cp pellic<br />

NOROXINE 400 mg cp enr<br />

ofloxacine<br />

MONOFLOCET 200 mg cp pellic<br />

OFLOXACINE 200 mg cp<br />

Autres antibiotiques<br />

D' autres antibiotiques ne sont plus recommandés dans le traitement probabiliste des cystites aiguës simples Grade A en raison du<br />

niveau de résistance bactérienne : amoxicilline, amoxicilline-acide clavulanique, céphalosporines de 1 re génération, céphalosporines<br />

de 2 e génération, pivmecillinam, sulfaméthoxazole-triméthoprime. Cependant, certains peuvent être prescrits en fonction des<br />

données d'un antibiogramme.<br />

amoxicilline<br />

AMOXICILLINE 1 g cp dispers (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 1 g pdre susp buv<br />

AMOXICILLINE 125 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 250 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg gél (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg/5 ml pdre susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE SODIQUE 1 g sol inj IM<br />

BACTOX 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

BACTOX 500 mg pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 1 g cp dispers<br />

CLAMOXYL 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 250 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 500 mg gél<br />

CLAMOXYL 500 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

amoxicilline + acide clavulanique<br />

AMOXICILLINE/AC CLAVULANIQUE 1 g/125 mg pdre p susp buv ad<br />

AMOXICILLINE/AC CLAVULANIQUE 500 mg/62,5 mg cp pellic ad<br />

AMOXICILLINE/ACIDE CLAVULANIQUE EG 1 g/125 mg ADULTES pdre p susp buv sach-dose<br />

AMOXICILLINE/ACIDE CLAVULANIQUE EG ADULTES 500 mg/62,5 mg cp pellic<br />

AUGMENTIN 1 g/125 mg pdre p susp buv Ad<br />

AUGMENTIN 500 mg/62,5 mg cp pellic adulte<br />

céfaclor<br />

ALFATIL 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

ALFATIL 250 mg gél<br />

ALFATIL 250 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

ALFATIL 375 mg cp pellic LP<br />

ALFATIL 500 mg cp pellic LP<br />

CEFACLOR 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CEFACLOR 250 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

HAXIFAL 500 mg cp efferv<br />

céfalexine<br />

CEFALEXINE 1 g cp<br />

CEFALEXINE 500 mg cp<br />

KEFORAL 1 g cp pellic<br />

KEFORAL 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

KEFORAL 250 mg/5 ml pdre p susp buv en flacon<br />

KEFORAL 500 mg cp pellic<br />

céfatrizine<br />

CEFATRIZINE 500 mg gél<br />

céfixime<br />

CEFIXIME 100 mg/5 ml pdre p susp buv en fl<br />

CEFIXIME 200 mg cp pellic<br />

CEFIXIME EVOLUGEN 200 mg cp pellic<br />

OROKEN 100 mg/5 ml pdre p susp buv enf<br />

OROKEN 200 mg cp pellic<br />

céfradine<br />

DEXEF 500 mg gél<br />

pivmecillinam<br />

SELEXID 200 mg cp pellic<br />

sulfaméthoxazole + triméthoprime<br />

BACTRIM cp adulte


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BACTRIM FORTE cp<br />

SULFAMETHOXAZOLE/TRIMETHOPRIME 800 mg/160 mg cp<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Péfloxacine<br />

La péfloxacine,<br />

même en traitement court, n'est pas recommandée en raison d'un risque plus élevé de tendinopathie.<br />

péfloxacine<br />

PEFLACINE MONODOSE 400 mg cp enr<br />

Acide pipémidique<br />

L' acide pipémidique n'a plus de place dans le traitement des cystites. Accord Pro<br />

acide pipémidique<br />

PIPRAM FORT 400 mg cp enr<br />

Test de dépistage des infections urinaires<br />

Bandelettes urinaires multiréactives<br />

Les bandelettes urinaires multiréactives permettent de confirmer le diagnostic d'infection urinaire par la mise en évidence de la<br />

présence de leucocytes et de nitrites dans les urines. La présence des nitrites traduit la réduction des nitrates induite par la plupart<br />

des germes impliqués dans les cystites (comme les Escherichia coli).<br />

Cependant, la réaction peut être mise en défaut lors d'infections<br />

à d'autres germes parmi lesquels certains staphylocoques, ou lors de l'examen d'urines n'ayant pas séjourné assez longtemps dans<br />

la vessie (4 heures).<br />

Ces bandelettes sont très utiles si elles sont correctement employées : la qualité et la validité des résultats obtenus sont<br />

conditionnées par le respect des délais de péremption, des conditions de conservation et d'utilisation indiquées par le fabricant.<br />

Imprégnées d'un ou plusieurs réactifs chimiques, les bandelettes sont souvent sensibles à la chaleur, à l'humidité et à la lumière :<br />

elles doivent être généralement conservées à une température inférieure à 30 °C, dans un endroit sec (hors du réfrigérateur), dans<br />

leur flacon d'origine, avec le desséchant, et ne doivent en être sorties qu'au moment de l'utilisation.<br />

Le récipient de recueil de l'urine doit être sec et propre, rincé à l'eau claire, sans antiseptique.<br />

L'analyse doit se faire sur des urines fraîchement émises, du milieu du jet, après une toilette locale soigneuse au savon, suivie d'un<br />

rinçage à l'eau.<br />

Le mode d'emploi de la bandelette doit être respecté, en veillant à :<br />

ne pas toucher les zones réactives,<br />

plonger et retirer immédiatement la bandelette de l'urine,<br />

tapoter la tranche de la bandelette,<br />

pour la lecture, tenir la bandelette horizontalement en respectant les temps de lecture indiqués (par exemple : 2 minutes pour la<br />

plage leucocytes).<br />

Lorsque ces conditions sont respectées, la valeur du dépistage d'infection urinaire par bandelette urinaire est élevée (valeur<br />

prédictive négative > 95 % dans la cystite aiguë simple).<br />

À titre d'exemple et de façon non exhaustive : COMBUR 2 TEST LN (50 bandelettes), COMBUR 7 TEST (100 bandelettes),<br />

COMBUR 10 TEST (100 bandelettes).<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Cranberry<br />

La cranberry ( Vaccinium macrocarpon),<br />

fruit d'une airelle proche de la canneberge, pourrait avoir un effet de prévention des infections<br />

urinaires basses non compliquées. Les modalités d'utilisation ne font pas l'objet de consensus.<br />

Références<br />

« Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires chez l'adulte », Recommandations de bonne<br />

pratique, Afssaps, juin 2008 (diffusion suspendue en février <strong>2011</strong> pour révision).<br />

« International Clinical Practice Guidelines for the Treatment of Acute Uncomplicated Cystitis and Pyelonephritis in Women : a 2010<br />

Update by the Infectious Diseases Society of America and the European Society for Microbiology and Infectious Diseases », Clinical<br />

Infectious Diseases,<br />

<strong>2011</strong>, n° 52, supp. 5, pp. 103-120.<br />

http://cid.oxfordjournals.org/content/52/5/e103.long<br />

« Diagnostic et traitement des infections bactériennes urinaires de l'adulte », Progrès en Urologie,<br />

2008, vol. 18, supp. 1, pp. 1-23.<br />

Mise à jour de la Reco : 15/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Dysfonction érectile - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/5<br />

La maladie<br />

Dysfonction érectile<br />

La dysfonction érectile est une incapacité persistante ou récurrente à obtenir ou à maintenir une érection permettant un rapport sexuel.<br />

Physiopathologie<br />

La dysfonction érectile peut avoir des causes organiques (principalement vasculaire ou neurologique, parfois médicamenteuse, très<br />

rarement hormonale) et/ou psychologiques. La conservation des érections matinales et nocturnes est en faveur de l'absence de cause<br />

organique. Les principaux facteurs de risque sont l'âge, le diabète, l'hypertension artérielle, la dyslipidémie et plus généralement tous<br />

les facteurs de risque de maladies cardiovasculaires, ainsi que la dépression.<br />

Epidémiologie<br />

La prévalence et la sévérité de la dysfonction érectile augmentent avec l'âge. Parmi les hommes de 18 à 69 ans sexuellement actifs,<br />

47 % rapportent une dysfonction érectile au moins occasionnelle et 7 % une dysfonction érectile persistante.<br />

Complications<br />

La dysfonction érectile peut être responsable d'une altération considérable de la qualité de vie.<br />

Diagnostic<br />

La dysfonction érectile se manifeste par une incapacité persistante ou récurrente à obtenir ou à maintenir une érection permettant un<br />

rapport sexuel.<br />

À l'exception des dysfonctions érectiles post-traumatiques ou consécutives à une intervention chirurgicale pelvienne, une durée<br />

minimale des troubles de 3 mois est nécessaire pour poser le diagnostic.<br />

La dysfonction érectile est un symptôme basé sur la plainte du patient. Une mesure objective de l'érection à l'aide du Rigiscan®<br />

(monitoring) ou le témoignage des partenaires peuvent aider au diagnostic, mais ne peuvent se substituer aux informations fournies par le<br />

patient.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tous les patients exprimant une plainte liée à une dysfonction érectile.<br />

À l'inverse, il convient de ne pas médicaliser un symptôme n'occasionnant pas de plainte.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Permettre au patient d'avoir de nouveau des rapports sexuels satisfaisants.<br />

Dépister et traiter un syndrome métabolique, un diabète, une dyslipidémie, un tabagisme, une dépression, et toute maladie<br />

cardiovasculaire.


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Prise en charge<br />

Dysfonction érectile


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1 Facteurs de risque et comorbidités<br />

Les maladies associées (dépression) ou les facteurs de risque cardiovasculaire (diabète) doivent faire l'objet d'une prise en charge<br />

spécifique.<br />

Obésité, tabagisme, alcoolisme ou usage de stupéfiants doivent être pris en charge. Lire Obésité, Tabagisme : sevrage,<br />

Alcoolodépendance : sevrage et Traitement de substitution aux opiacés.<br />

De possibles causes psychosociales doivent être identifiées : stress professionnel, retraite, conflit au sein du couple ou de la<br />

famille, décès d'un proche, difficultés financières, troubles de l'humeur.<br />

Certains médicaments sont délétères pour la fonction érectile : diurétiques thiazidiques, neuroleptiques, inhibiteurs de la recapture<br />

de la sérotonine et antiandrogènes notamment.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Information du patient<br />

Elle doit porter sur les risques, les bénéfices et le coût des traitements (pour le plupart non remboursés par l'Assurance maladie).<br />

La participation active du patient dans la décision thérapeutique est très souhaitable. Cette décision peut être prise en couple.<br />

Le médecin a également un rôle d'éducation en matière de sexualité : mécanisme physiologique de l'érection, importance de la<br />

stimulation, altération naturelle avec l'âge, importance de la qualité de la relation dans le couple.<br />

Statut cardiovasculaire du patient<br />

L'effort physique fourni lors d'un rapport sexuel est l'équivalent d'une marche de 30 minutes en terrain plat (phase d'excitation), suivie<br />

d'une montée d'escaliers (pénétration). La capacité du patient à fournir un tel effort doit être appréciée avant la prescription d'un<br />

traitement. En cas de doute, un bilan cardiovasculaire est nécessaire.<br />

Traitement médicamenteux<br />

Le traitement oral par inhibiteur de la PDE5 (sildénafil, tadalafil, vardénafil) est le traitement de référence chez la grande majorité<br />

des patients. Il est contre-indiqué en cas de prise de dérivés nitrés.<br />

Les traitements locaux sont des inducteurs de l'érection : à la différence des traitements oraux, la stimulation sexuelle n'est pas<br />

nécessaire à leur effet. Ils nécessitent tous un apprentissage médicalisé.<br />

Cas particuliers<br />

Causes organiques de dysfonction érectile<br />

Il s'agit essentiellement des causes et des comorbidités cardiovasculaires : hypertension artérielle, athérosclérose,<br />

hypercholestérolémie, coronaropathie, insuffisance cardiaque et diabète. La dépression est également une cause avérée de<br />

dysfonction érectile. Il faut également citer les neuropathies centrales (lésions de la moelle épinière, accidents vasculaires cérébraux,<br />

sclérose en plaques) et périphériques (lésions tronculaires consécutives à une chirurgie ou à une radiothérapie pelvienne, atteintes<br />

des terminaisons nerveuses en cas de neuropathie diabétique). Une association fréquente existe enfin entre troubles du bas-appareil<br />

urinaire et dysfonction érectile. Dans tous ces cas, la stratégie thérapeutique est symptomatique.<br />

Dysfonction érectile en cas d'hypogonadisme<br />

Lorsqu'une insuffisance de désir est associée à la dysfonction érectile, un hypogonadisme doit être évoqué. Son diagnostic est<br />

confirmé par le dosage de la testostéronémie. La testostérone peut être utilisée sous diverses formes galéniques pour la substitution.<br />

Les contre-indications sont l'existence d'une pathologie prostatique (cancer de la prostate et hypertrophie bénigne de la prostate<br />

symptomatique), d'une hépatopathie (en fonction de la voie d'administration), d'une hyperlipidémie, d'une polyglobulie ou d'apnées du<br />

sommeil.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (PDE5)<br />

Les inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5 (PDE5) ont pour cible l'enzyme qui dégrade la guanosine monophosphate<br />

cyclique, second messager du monoxyde d'azote, principal neuromédiateur libéré dans le tissu érectile en réponse à une stimulation<br />

sexuelle. L'inhibition de la PDE5 facilite la relaxation des cellules musculaires lisses caverneuses et des artères vascularisant le tissu<br />

érectile, donc l'afflux sanguin, le remplissage des corps caverneux, donc l'érection.<br />

L'efficacité de ces médicaments, globalement importante Grade A , varie en fonction de l'étiologie de la dysfonction érectile. Elle<br />

est moindre chez les patients diabétiques (types 1 et 2) et après chirurgie carcinologique pelvienne, en particulier après<br />

prostatectomie radicale. Ces médicaments sont, pour la plupart, indiqués à la demande dans la dysfonction érectile. Il s'agit de la<br />

classe pharmacologique de référence pour le traitement oral.<br />

poso L'action des inhibiteurs de la PDE5 débute au moins 15 à 30 minutes après la prise. La durée de l'effet est variable : de<br />

quelques heures pour le sildénafil et le vardénafil à 36 heures pour le tadalafil. Chez des patients répondeurs à un traitement<br />

par tadalafil à la demande, et qui prévoient de l'utiliser au moins 2 fois par semaine, ce médicament peut être administré<br />

chaque jour à faible dose (comprimés dosés à 2,5 mg et 5 mg de tadalafil).<br />

Les effets indésirables communs aux inhibiteurs de la PDE5 sont : céphalées, dyspepsie, rougeurs du visage et congestion nasale.<br />

Des troubles de la vision et des lombalgies peuvent survenir. La prise de dérivés nitrés ou de donneurs de monoxyde d'azote<br />

représente une contre-indication absolue à l'utilisation des inhibiteurs de la PDE5. Chez les patients traités par alphabloquants, une<br />

potentialisation éventuelle (variable selon les molécules alphabloquantes) de l'effet hypotenseur est possible.<br />

sildénafil<br />

SILDENAFIL 100 mg cp pellic


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SILDENAFIL 25 mg cp pellic<br />

SILDENAFIL 50 mg cp pellic<br />

VIAGRA 100 mg cp pellic<br />

VIAGRA 25 mg cp pellic<br />

VIAGRA 50 mg cp pellic<br />

tadalafil<br />

CIALIS 10 mg cp pellic<br />

CIALIS 2,5 mg cp pellic<br />

CIALIS 20 mg cp pellic<br />

CIALIS 5 mg cp pellic<br />

vardénafil<br />

LEVITRA 10 mg cp orodispers<br />

LEVITRA 10 mg cp pellic<br />

LEVITRA 20 mg cp pellic<br />

LEVITRA 5 mg cp pellic<br />

Yohimbine<br />

La yohimbine est un alpha-2 bloquant d'action périphérique et centrale indiqué dans le traitement de la dysfonction érectile.<br />

poso La posologie est de 2 à 20 mg en 1 à 3 prises quotidiennes, en traitement continu. Un délai de 2 à 3 semaines peut être<br />

nécessaire pour observer les premiers effets.<br />

Son efficacité est minime. Grade B<br />

yohimbine<br />

YOCORAL 5 mg cp<br />

YOHIMBINE 5 mg cp<br />

YOHIMBINE HOUDE 2 mg cp<br />

Injections intracaverneuses de prostaglandine E1<br />

Les injections intracaverneuses de prostaglandine E1,<br />

analogue synthétique d'un prostanoïde endogène, peuvent être<br />

réalisées par le patient. La prostaglandine E1 provoque la relaxation des cellules musculaires lisses du tissu érectile en stimulant la<br />

synthèse d'adénosine monophosphate cyclique. L'efficacité est élevée, quelle que soit l'étiologie de la dysfonction érectile, mais<br />

l'acceptabilité est moindre que celle des traitements oraux. Il s'agit d'un traitement à la demande de la dysfonction érectile.<br />

poso L'injection doit être effectuée immédiatement avant le rapport sexuel. La posologie aura été déterminée par le médecin au<br />

préalable, après une première injection au cabinet médical, pour que l'effet se maintienne en général de 30 minutes à<br />

1 heure.<br />

Les contre-indications sont les antécédents de priapisme et la drépanocytose qui expose au priapisme. Grade A Les douleurs<br />

péniennes représentent l'essentiel des effets indésirables locaux. Le priapisme est très rare et résulte d'une augmentation<br />

intempestive de la posologie. La répétition des injections est rarement responsable de la survenue d'une fibrose caverneuse. Dans<br />

certaines indications, ces médicaments sont pris en charge à 35 % par l'Assurance maladie selon la procédure des médicaments<br />

d'exception. Ils sont indiqués dans le traitement des troubles de l'érection chez les patients souffrant de paraplégie et tétraplégie,<br />

quelle qu'en soit l'origine, de traumatisme du bassin compliqué de troubles urinaires, de séquelles de la chirurgie (anévrisme de<br />

l'aorte, prostatectomie radicale, cystectomie totale et exérèse colorectale), de séquelles de radiothérapie abdominopelvienne, de<br />

séquelles de priapisme, de neuropathie diabétique avérée ou de sclérose en plaques.<br />

alprostadil<br />

CAVERJECT 10 µg/ml pdre/solv p sol inj<br />

CAVERJECT 20 µg/ml pdre/solv p sol inj<br />

CAVERJECTDUAL 10 µg/0,5 ml pdre/solv p sol inj<br />

CAVERJECTDUAL 20 µg/0,5 ml pdre/solv p sol inj<br />

EDEX 10 µg/1 ml pdre/solv p sol inj<br />

EDEX 20 µg/1 ml pdre/solv p sol inj<br />

Délivrance intra-urétrale de prostaglandine E1<br />

La délivrance intra-urétrale de prostaglandine E1 est une autoadministration, dans la portion distale de l'urètre, de prostaglandine<br />

E1 à l'aide d'un dispositif jetable. Elle a une efficacité moindre que les injections intracaverneuses de prostaglandine E1. Grade B<br />

Elle est responsable de douleurs péniennes et, dans de rares cas, d'hypotension, voire de syncopes.<br />

alprostadil<br />

MUSE 1000 µg bâton p us urétr<br />

MUSE 250 µg bâton p us urétr<br />

MUSE 500 µg bâton p us urétr<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Vacuum Grade B<br />

C'est un dispositif mécanique comprenant un cylindre placé sur la verge, appliqué sur le pubis, et dans lequel le patient fait le vide à<br />

l'aide d'une pompe manuelle ou électrique. L'érection ainsi obtenue par dépression à l'intérieur du cylindre est maintenue, après avoir<br />

ôté le cylindre, par une bande constrictive élastique placée à la racine de la verge. Les effets secondaires sont minimes, comprenant<br />

des douleurs, une sensation de pénis froid et des difficultés à l'éjaculation.<br />

Prothèses péniennes Grade B


VIDAL Recos - Dysfonction érectile - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 5/5<br />

Elles sont de différents types : rigides, semi-rigides ou malléables et gonflables. C'est une option thérapeutique invasive et<br />

irréversible. Il s'agit d'un traitement de dernière intention qui peut s'avérer très efficace en terme de satisfaction des patients. Les<br />

effets secondaires sont représentés par les infections du matériel (1 à 5 %) qui nécessitent souvent l'ablation de la prothèse. Les<br />

prothèses gonflables sont grevées d'un taux de défaillance mécanique estimé à 5 % la 1 re année, 20 % à 5 ans et 50 % à 10 ans.<br />

Chirurgie de revascularisation Accord Pro<br />

Elle consiste à réaliser des pontages artériels microchirurgicaux et des ligatures veineuses qui permettent, chez des patients jeunes,<br />

le plus souvent après un traumatisme pelvipérinéal, une amélioration de la vascularisation pénienne. Les très rares indications de ce<br />

type de chirurgie nécessitent l'intervention d'un opérateur spécialisé.<br />

Références<br />

« Recommandations aux médecins généralistes pour la prise en charge de première intention de la dysfonction érectile », Association<br />

inter-hospitalo-universitaire de sexologie (AIHUS), août 2005.<br />

http://www.aihus.fr/prod/data/Aihus/Vie/recommandationsauxmedecins.<strong>pdf</strong><br />

« Guidelines on the Management of Erectile Dysfunction », British Society for Sexual Medicine, 2007.<br />

« Clinical Guidelines Panel on Erectile Dysfunction : Summary Report on the Treatment of Organic Erectile Dysfunction », Montague<br />

D. K., Barada J. H., Belker A. M. et al. , The American Urological Association, Journal of Urology,<br />

décembre 1996, vol. 156, n° 6,<br />

pp. 2007-<strong>2011</strong>.<br />

« Summary of the Recommendations on Sexual Dysfunctions in Men », Lue T. F., Giuliano F., Montorsi F. et al. , Journal of Sexual<br />

Medicine,<br />

2004, vol. 1, n° 1, pp. 6-23.<br />

http://www.blackwell-synergy.com/doi/full/10.1111/j.1743-6109.2004.10104.x<br />

Mise à jour de la Reco : 15/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Hypertrophie bénigne de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/5<br />

La maladie<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

L'hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) est une augmentation de la taille de la prostate, non due à un cancer, survenant chez<br />

l'homme de plus de 50 ans.<br />

Physiopathologie<br />

L'HBP correspond histologiquement à une hyperplasie de la zone transitionnelle de la prostate. Cette hyperplasie de la glande<br />

prostatique est volontiers dénommée adénome prostatique. L'augmentation du volume prostatique qui en résulte entraîne une<br />

compression de l'urètre, responsable de troubles urinaires du bas-appareil. Il n'existe aucune relation entre la taille de la prostate et<br />

l'importance de ces troubles.<br />

Epidémiologie<br />

L'HBP est fréquente chez l'homme de plus de 50 ans. Elle est histologiquement présente chez la moitié des patients de 45 ans, chez<br />

80 % de ceux de 60 ans et 100 % de ceux de 90 ans.<br />

Complications<br />

L'HBP peut se compliquer d'hématurie, infection urinaire, rétention aiguë d'urine, rétention chronique d'urine avec mictions par<br />

regorgement pouvant conduire à une insuffisance rénale obstructive, calculs vésicaux et diverticules vésicaux.<br />

Diagnostic<br />

L'hypertrophie bénigne de la prostate (HBP) se manifeste par des symptômes urinaires de types irritatifs (pollakiurie, impériosité<br />

mictionnelle) ou obstructifs (dysurie, diminution de la force du jet). Elle peut aussi être asymptomatique.<br />

Le diagnostic est clinique : il repose sur l'anamnèse et le toucher rectal. Accord Pro<br />

L'échographie prostatique suspubienne ou endorectale complète les données fournies par le toucher rectal, permet d'estimer le volume<br />

prostatique et de poser le diagnostic d'un lobe médian.<br />

L'échographie vésicale postmictionnelle mesure le résidu vésical postmictionnel. La débimétrie urinaire apprécie objectivement le<br />

rétrécissement urétral.<br />

Le dosage du PSA (antigène spécifique de la prostate) sérique n'a pas d'intérêt pour le diagnostic, le bilan ou le suivi d'une HBP.<br />

L'existence d'une HBP ne modifie pas les recommandations existantes sur le dépistage du cancer de la prostate. Il n'y a pas à ce jour<br />

de consensus sur la mise en œuvre d'un tel dépistage.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Une HBP asymptomatique relève d'une simple surveillance.<br />

La décision de traiter ou non un patient atteint d'une HBP symptomatique non compliquée dépend de l'importance des troubles urinaires<br />

du bas-appareil et de leur retentissement sur la qualité de vie. Accord Pro<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Amélioration du confort et de la qualité de vie du patient.<br />

Prévention des complications.


VIDAL Recos - Hypertrophie bénigne de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 2/5<br />

Prise en charge<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate


VIDAL Recos - Hypertrophie bénigne de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 3/5<br />

1 Gêne légère Accord Pro<br />

L'abstention thérapeutique est recommandée, avec une surveillance annuelle.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

7<br />

Gêne modérée<br />

La présence de signes irritatifs (pollakiurie, impériosité mictionnelle) ou obstructifs (dysurie, diminution de la force du jet) justifie la<br />

mise en route d'un traitement médicamenteux.<br />

Gêne intense ou complications<br />

En cas d'hématurie, d'infection urinaire ou de diverticules non symptomatiques, le traitement peut être soit médical, soit chirurgical.<br />

Le traitement chirurgical peut être proposé d'emblée ou en cas d'échec du traitement médical. Accord Pro<br />

Le traitement chirurgical est indispensable en cas de rétention aiguë d'urine, de diverticules vésicaux symptomatiques ou<br />

d'insuffisance rénale obstructive.<br />

Traitement médicamenteux<br />

Il fait appel aux alphabloquants, d'effet rapide, ou aux inhibiteurs de la 5-alpha-réductase, d'effet retardé (parfois jusqu'à 6 mois), ou<br />

encore aux traitements phytothérapeutiques. Il n'existe pas d'essais thérapeutiques menés avec une méthodologie satisfaisante<br />

permettant de comparer ces classes de médicaments. Leur efficacité est qualifiée de modérée par l'Afssaps.<br />

Surveillance<br />

Il est souhaitable de suivre régulièrement les patients sous traitement médical. Le suivi repose sur l'interrogatoire du patient et la<br />

pratique régulière du toucher rectal, y compris pour les patients non traités.<br />

Traitement chirurgical<br />

Trois interventions sont possibles : incision cervicoprostatique, résection transurétrale ou adénomectomie, la résection transurétrale<br />

étant de loin l'intervention la plus fréquente.<br />

Les résultats fonctionnels du traitement chirurgical semblent d'autant plus satisfaisants que la symptomatologie initiale est sévère.<br />

Accord Pro Aucune surveillance spécifique n'est recommandée après un traitement chirurgical lorsque l'examen histologique des<br />

copeaux ou de la pièce d'anénomectomie n'a pas retrouvé l'existence d'un adénocarcinome.<br />

Traitement par radiofréquence (TUNA)<br />

Le traitement par TUNA (Transuretral Needle Ablation) pourrait être proposé à des patients en échec de traitement médical et ne<br />

pouvant pas ou ne souhaitant pas recourir à un traitement chirurgical.<br />

Conseils aux patients<br />

Les patients doivent être informés de la bénignité de l'HBP, et de l'inconstance et de la variabilité dans le temps de l'intensité des<br />

troubles urinaires du bas-appareil.<br />

Ils doivent également être informés de l'absence de lien entre HBP et cancer de la prostate.<br />

Après information, le souhait du patient pour un traitement médical ou chirurgical est un élément décisionnel majeur.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Alphabloquants<br />

Les alphabloquants agissent par blocage des récepteurs alpha-1, entraînant une relaxation du col vésical et des fibres musculaires<br />

lisses intraprostatiques. Ils sont significativement plus efficaces que le placebo. Grade B Leur effet est rapide. Grade A Il n'existe<br />

pas d'étude permettant d'affirmer une différence significative entre les différentes molécules de la classe. Leur effet indésirable le<br />

plus fréquent est l'hypotension. Des troubles de l'éjaculation à type d'anéjaculation peuvent survenir chez les patients traités par<br />

tamsulosine ou par silodosine. D'autres effets indésirables rares peuvent être observés avec cette classe thérapeutique, dont des<br />

vertiges, des nausées. L'alfuzosine a également une indication d'AMM en traitement adjuvant du sondage vésical dans la rétention<br />

aiguë d'urine compliquant l'HBP.<br />

alfuzosine<br />

ALFUZOSINE 2,5 mg cp pellic<br />

ALFUZOSINE LP 10 mg cp<br />

URION 2,5 mg cp pellic<br />

XATRAL 10 mg cp LP<br />

XATRAL 2,5 mg cp pellic<br />

doxazosine<br />

DOXAZOSINE 4 mg cp LP<br />

ZOXAN LP 4 mg cp LP<br />

ZOXAN LP 8 mg cp LP<br />

prazosine<br />

MINIPRESS 1 mg cp séc<br />

MINIPRESS 5 mg cp séc<br />

silodosine<br />

SILODYX 4 mg gél


VIDAL Recos - Hypertrophie bénigne de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 4/5<br />

SILODYX 8 mg gél<br />

UROREC 4 mg gél<br />

UROREC 8 mg gél<br />

tamsulosine<br />

JOSIR 0,4 mg gél (µgle LP)<br />

MECIR 0,4 mg cp pellic LP<br />

OMEXEL L.P. 0,4 mg cp pellic LP<br />

OMIX 0,4 mg gél (µgle LP)<br />

TAMSULOSINE LP 0,4 mg µgle en gél<br />

térazosine<br />

DYSALFA 1 mg cp<br />

DYSALFA 5 mg cp<br />

HYTRINE 1 mg cp<br />

HYTRINE 5 mg cp<br />

TERAZOSINE 5 mg cp<br />

Inhibiteurs de la 5-alpha-réductase<br />

Les inhibiteurs de la 5-alpha-réductase agissent en inhibant la conversion par la 5-alpha-réductase de la testostérone en<br />

dihydrotestostérone (DHT), androgène impliqué dans la croissance prostatique. Ils sont significativement plus efficaces que le<br />

placebo lorsque le volume prostatique est supérieur à 40 ml Grade B , le volume normal étant d'environ 20 ml. L'amélioration des<br />

symptômes est plus lente que sous traitement par alphabloquants. L'effet obtenu est du même ordre. Les effets indésirables, peu<br />

fréquents, sont essentiellement l'apparition de troubles de l'érection et de la libido.<br />

dutastéride<br />

AVODART 0,5 mg caps molle<br />

finastéride<br />

CHIBRO-PROSCAR 5 mg cp pellic<br />

FINASTERIDE 5 mg cp<br />

FINASTERIDE ISOMED 5 mg cp pellic<br />

FINASTERIDE PHR LAB 5 mg cp pellic<br />

Traitements phytothérapeutiques<br />

Les traitements phytothérapeutiques ( Pygeum africanum et Serenoa repens)<br />

sont indiqués dans le traitement des troubles<br />

mictionnels modérés liés à l'HBP. L'intérêt thérapeutique sur des critères cliniques n'est pas établi avec un niveau de preuve élevé<br />

versus placebo. Un essai comparant Serenoa repens à la tamsulosine a montré des similitudes entre ces 2 produits concernant les<br />

symptômes liés à l'HBP et la débitmétrie. Serenoa repens Grade B et Pygeum africanum (prunier d'Afrique) Accord Pro peuvent<br />

cependant être recommandés pour traiter les troubles urinaires du bas-appareil responsables d'une gêne modérée en rapport avec<br />

l'HBP.<br />

prunier d'Afrique<br />

PRUNIER D'AFRIQUE MYLAN 50 mg caps molle<br />

PRUNIER D'AFRIQUE QUALIMED 50 mg caps molle<br />

TADENAN 50 mg caps molle<br />

serenoa repens<br />

PERMIXON 160 mg gél<br />

PRODINAN 160 mg gél<br />

Association fixe dutastéride et tamsulosine<br />

L' association fixe dutastéride et tamsulosine est indiquée dans le traitement des symptômes modérés à sévères de l'HBP et dans<br />

la réduction du risque de rétention aiguë d'urine et de chirurgie chez les patients ayant des symptômes modérés à sévères de l'HBP.<br />

dutastéride + tamsulosine<br />

COMBODART 0,5 mg/0,4 mg gél<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Résection transurétrale de prostate<br />

C'est la procédure le plus couramment pratiquée. Elle réduit la sévérité des troubles urinaires du bas-appareil et augmente le débit<br />

urinaire maximal. Grade B L'éjaculation rétrograde postopératoire est très fréquente. Le risque d'incontinence est très faible.<br />

Incision cervicoprostatique<br />

Elle réduit la sévérité des troubles urinaires lorsque le volume prostatique est inférieur à 30-40 ml. Grade B Le risque d'éjaculation<br />

rétrograde est moindre qu'avec la résection transurétrale. Le taux de réintervention est d'environ 25 % à 3 ans.<br />

Adénomectomie chirurgicale<br />

Elle est l'alternative chirurgicale à la résection transurétrale lorsque la prostate est volumineuse. Accord Pro L'éjaculation rétrograde<br />

postopératoire est très fréquente. Le risque d'incontinence est très faible.<br />

TUNA (Transuretral Needle Ablation)


VIDAL Recos - Hypertrophie bénigne de la prostate - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 5/5<br />

Il s'agit d'une procédure de thermothérapie à haute énergie : un courant de radiofréquences entraîne une nécrose de coagulation par<br />

chauffage. Un sondage postopératoire est systématique.<br />

Traitements non médicamenteux non cités dans les références<br />

TMTU (thermothérapie par micro-ondes transurétrales)<br />

L'intérêt thérapeutique de la thermothérapie par micro-ondes transurétrales est remis en cause par les complications de cette<br />

technique (brûlures de l'urètre).<br />

Références<br />

« Prise en charge diagnostique et thérapeutique de l'hypertrophie bénigne de la prostate », Anaes, mars 2003.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/display.jsp?id=c_461523<br />

« Traitement de l'hypertrophie bénigne de la prostate par radiofréquences ou micro-ondes », HAS, février 2006.<br />

Benign Prostatic Hyperplasia, Finnish Medical Society Duodecim, Wiley Interscience, John Wiley & Sons, septembre 2008.<br />

http://www.guideline.gov/summary/summary.aspx?doc_id=13191<br />

« AUA Guideline on Management of Benign Prostatic Hyperplasia : Diagnosis and Treatment Recommendations », Journal of Urology,<br />

2003, vol. 170, n° 2, pp. 530-547.<br />

Mise à jour de la Reco : 15/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Incontinence urinaire de la femme - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/5<br />

La maladie<br />

Incontinence urinaire de la femme<br />

L'incontinence urinaire de la femme est une perte involontaire d'urine par le méat urétral.<br />

Physiopathologie<br />

L'incontinence urinaire d'effort est liée à une augmentation brusque de la pression intra-abdominale. Les deux principaux mécanismes<br />

en cause sont l'hypermobilité urétrale (90 % des cas) due à une perte de tonus des tissus de soutènement vaginaux, et l'insuffisance<br />

sphinctérienne (10 % des cas). L'incontinence par impériosités est liée à une hyperactivité vésicale. L'incontinence par regorgement est<br />

associée à une rétention vésicale chronique. Elle peut être liée à une obstruction sous-cervicale due à un fécalome ou faisant suite à un<br />

traitement chirurgical de l'incontinence d'effort, ou à un prolapsus.<br />

Epidémiologie<br />

La prévalence de l'incontinence urinaire de la femme est de 20 à 30 % en France (20 % avant 30 ans, 46 % entre 51 et 70 ans). On<br />

estime que seulement 30 % des patientes souffrant d'incontinence consultent spécifiquement pour ce symptôme.<br />

Complications<br />

L'incontinence urinaire peut altérer la qualité de vie et se compliquer d'infections urinaires basses ou hautes, de troubles trophiques<br />

muqueux et cutanés, voire d'escarres chez la personne âgée.<br />

Diagnostic<br />

L'incontinence urinaire de la femme est définie comme une perte involontaire d'urine par le méat urétral, démontrée de façon objective<br />

par l'examen clinique. Le terme de « fuite urinaire » recouvre aussi les cas de perte d'urine s'extériorisant par le vagin (malformations,<br />

fistules vésicovaginales). Un test au bleu de méthylène (intravésical ou par voie orale) peut être utile pour localiser la fuite.<br />

Le diagnostic repose sur l'interrogatoire. Il comprend une évaluation de la gêne provoquée et du retentissement sur la qualité de vie.<br />

On distingue principalement l'incontinence d'effort et l'incontinence par impériosité. Les patientes savent le plus souvent préciser si leur<br />

incontinence survient lors d'un effort (toux, rire, éternuement, course, port de charge), ou s'il s'agit d'envies impérieuses qu'elles ne<br />

peuvent contrôler. Parfois les deux symptômes coexistent ou sont difficiles à distinguer (incontinence mixte). Plus rare, l'incontinence par<br />

regorgement est associée à une rétention vésicale chronique.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Un traitement doit être proposé à toutes les patientes se plaignant de pertes d'urine.<br />

Une incontinence doit être recherchée chez les patientes consultant pour une toux chronique, un diabète, une constipation ou des<br />

troubles de la fonction anorectale, une atteinte neurologique, et lors de toute consultation en rapport avec la sphère urogénitale ou la<br />

pratique du sport. Accord Pro<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Restauration d'une continence urinaire permettant d'améliorer la qualité de vie.<br />

Préservation du haut appareil urinaire.


VIDAL Recos - Incontinence urinaire de la femme - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 2/5<br />

Prise en charge<br />

Incontinence urinaire de la femme


VIDAL Recos - Incontinence urinaire de la femme - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 3/5<br />

1 Évaluation initiale<br />

L'interrogatoire précise le type d'incontinence, son ancienneté, la fréquence et les circonstances des pertes d'urine, la gêne<br />

occasionnée. Il recherche aussi les facteurs aggravants (maladie chronique, toux, infections urinaires à répétition, atrophie<br />

vulvovaginale, constipation, diabète, réduction de la mobilité, diurétiques, psychotropes, morphiniques, inhibiteurs calciques,<br />

agonistes alpha et bêta-adrénergiques, phytothérapie) et les erreurs hygiénodiététiques : apports hydriques excessifs ou mauvaise<br />

répartition des prises liquidiennes, consommation importante d'alcool, de café ou de boissons contenant de la caféine.<br />

La recherche d'une infection urinaire par bandelette ou ECBU est recommandée. Accord Pro Aucun autre examen n'est<br />

nécessaire à ce stade.<br />

La recherche d'un résidu postmictionnel par échographie suspubienne est préconisée en cas d'incontinence par impériosités si un<br />

traitement par anticholinergique est envisagé.<br />

Une cystoscopie est indiquée en cas de suspicion de pathologie tumorale vésicale (hématurie, infections urinaires à répétition).<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

Rééducation périnéosphinctérienne<br />

Elle est recommandée dans les incontinences d'effort et mixtes. Elle est parfois utile dans l'incontinence par impériosités. L'utilisation<br />

de plusieurs techniques (manuelle, biofeedback, électrostimulation) semble plus efficace que la pratique d'une seule. Grade B Le<br />

bénéfice ne peut être apprécié qu'après 15 à 20 séances.<br />

Traitements médicamenteux<br />

En cas d'impériosités : anticholinergiques. Grade A<br />

En cas d'incontinence d'effort, les estrogènes ont été proposés.<br />

Thérapie comportementale<br />

Elle est recommandée dans l'incontinence par impériosités : reprogrammation mictionnelle, calendrier mictionnel Grade C .<br />

Bilan de 2 e intention<br />

Une échographie suspubienne est nécessaire avant tout acte chirurgical. Un bilan urodynamique est indiqué avant un traitement<br />

chirurgical pour incontinence d'effort, en cas d'incontinence mixte, de pathologie associée, d'échec du traitement par<br />

anticholinergiques d'une incontinence par impériosités.<br />

Cas particuliers<br />

Incontinence avec mictions par regorgement<br />

Un avis urologique est indispensable pour en connaître le mécanisme et décider du type de traitement. Les incontinences par<br />

regorgement, liées à une obstruction urétrale, rares chez la femme, sont traitées si possible chirurgicalement, sinon par sondage<br />

intermittent ou permanent. Après avoir éliminé les causes locales d'obstruction, une acontractilité vésicale liée au vieillissement<br />

vésical ou par atteinte neurogène est objectivée au mieux par un bilan urodynamique Accord Pro .<br />

Conseils aux patients<br />

Les éventuels facteurs aggravants doivent être identifiés et dans la mesure du possible corrigés : apports liquidiens excessifs ou<br />

inadaptés (tisanes diurétiques, café, alcool), sédentarité, surpoids.<br />

Les difficultés potentielles d'accessibilité des toilettes doivent être prises en compte et corrigées (bassin, chaise percée), tout en<br />

favorisant la prise de conscience des délais et des fréquences des mictions pour lutter contre certains comportements anxieux ou<br />

phobiques aggravant l'état mictionnel (pollakiurie de précaution).<br />

En cas d'incontinence urinaire d'effort, la patiente doit être informée sur les modalités de la rééducation périnéosphinctérienne et<br />

l'importance du travail d'autorééducation entre chaque séance. Elle doit également être informée des possibilités de la chirurgie.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Anticholinergiques<br />

Les anticholinergiques bloquent les récepteurs périphériques du système parasympathique et s'opposent au relâchement du<br />

détrusor induit par l'acétylcholine. Ils représentent le traitement de 1 re intention de l'incontinence urinaire par impériosités, pour<br />

laquelle ils sont les seuls à disposer en France d'une AMM spécifique Grade A . L'efficacité de l'oxybutynine, de la toltérodine, du<br />

chlorure de trospium est significativement supérieure au placebo sur l'incontinence par impériosités. Grade A L'emploi des<br />

anticholinergiques n'est pas recommandé dans l'incontinence d'effort isolée sans symptômes d'impériosités associés. Grade A<br />

Les effets secondaires atropiniques augmentent avec la posologie et avec l'âge et doivent être dépistés : sécheresse buccale,<br />

constipation, ralentissement du transit intestinal, rougeur du visage, risque de rétention d'urine, troubles neuropsychiques. Les<br />

principales contre-indications sont une hypersensibilité connue aux anticholinestérasiques, un glaucome à angle fermé, une<br />

myasthénie, un risque majoré de rétention urinaire ou d'occlusion intestinale. La prescription d'anticholinergiques doit être par<br />

conséquent particulièrement prudente chez les femmes de plus de 85 ans, notamment en cas de polymédication, d'altération des<br />

fonctions cognitives, de dépression, de dénutrition, de troubles neurosensoriels, d'instabilité posturale, de perte d'autonomie ou<br />

d'isolement sociofamilial. Leur prescription doit être précédée d'une échographie à la recherche d'un résidu postmictionnel et d'une<br />

évaluation des fonctions cognitives, qui seront régulièrement surveillées au cours du traitement.<br />

L'efficacité maximale de l'oxybutynine, de la toltérodine, du chlorure de trospium est atteinte après 5 à 8 semaines. Il est donc<br />

recommandé de ne pas interrompre le traitement plus tôt, si la tolérance est acceptable Grade B . En cas de mauvaise tolérance, un<br />

changement d'anticholinergique peut être proposé.


VIDAL Recos - Incontinence urinaire de la femme - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 4/5<br />

Le chlorure de trospium, ne passant pas la barrière hémato-encéphalique, a moins d'effets secondaires neuropsychologiques. En<br />

pratique, son emploi est préférable chez les patientes âgées ou atteintes de maladie de Parkinson.<br />

La solifénacine est un anticholinergique de longue durée d'action supposé avoir une action préférentielle sur la vessie. Elle est<br />

indiquée dans l'incontinence urinaire par impériosités pouvant s'observer chez les patientes souffrant d'hyperactivité vésicale.<br />

chlorure de trospium<br />

CERIS 20 mg cp enr<br />

oxybutynine<br />

DITROPAN 5 mg cp séc<br />

OXYBUTYNINE 5 mg cp<br />

solifénacine<br />

VESICARE 10 mg cp pellic<br />

VESICARE 5 mg cp pellic<br />

toltérodine<br />

DETRUSITOL 1 mg cp pellic<br />

DETRUSITOL 2 mg cp pellic<br />

TOLTERODINE 1 mg cp pellic<br />

TOLTERODINE 2 mg cp pellic<br />

Flavoxate<br />

Le flavoxate est un antispasmodique non anticholinergique musculotrope sans effet cholinergique aux doses thérapeutiques. Il<br />

possède une AMM dans le traitement des mictions impérieuses (avec ou sans fuites), sans incontinence d'effort. Son mode d'action,<br />

mal connu, relève de l'inhibition de la phosphodiestérase. Son efficacité est moins documentée que celle des antispasmodiques<br />

cholinergiques.<br />

flavoxate<br />

URISPAS 200 mg cp pellic<br />

Estrogènes (estriol, estradiol)<br />

Les estrogènes (estriol, estradiol) , administrés par voie locale, jouent un rôle dans l'amélioration de la pression urétrale, la force<br />

des muscles du plancher pelvien et la relaxation du détrusor pendant la phase de remplissage. Par rapport à l'administration par voie<br />

générale, la voie locale présente l'avantage d'être aussi efficace sur le plan génito-urinaire sans entraîner de retentissement<br />

systémique. Le bénéfice des estrogènes a été rapporté sur l'incontinence d'effort et par impériosités, sous-tendu par une action<br />

trophique locale et une potentialisation des alphastimulants, mais peu de travaux corroborent cet intérêt. Son efficacité chez la<br />

femme ménopausée n'est pas clairement établie, bien que ces traitements soient conseillés en cas d'atrophie vaginale. Le traitement<br />

estrogénique local préconisé pendant 2 mois est considéré comme un traitement associé à une prise en charge rééducative.<br />

En l'absence d'indication d'AMM dans la pathologie concernée, les médicaments correspondants ne sont pas listés.<br />

Médicaments en attente d'évaluation à long terme<br />

Toxine botulique<br />

Les injections intradétrusoriennes de toxine botulique,<br />

bien qu'elles ne disposent pas de l'AMM dans l'incontinence urinaire, sont<br />

actuellement proposées en cas d'échec des anticholinergiques pour traiter les hyperactivités vésicales détrusoriennes neurogènes.<br />

Elles représentent dans ce cadre une alternative sûre, conservatrice, réversible et efficace à court terme (6 à 9 mois) Grade A .<br />

L'efficacité observée des injections pour des symptômes d'hyperactivité vésicale idiopathique justifierait l'intérêt actuel suscité par<br />

cette alternative thérapeutique pour les incontinences par impériosités.<br />

En l'absence d'indication d'AMM dans la pathologie concernée, les médicaments correspondants ne sont pas listés.<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Injections endo-urétrales d'implant dextramonomère/acide hyaluronique<br />

Elles représentent un procédé thérapeutique peu invasif pour le traitement de l'incontinence urinaire d'effort. Plusieurs agents ont été<br />

utilisés pour le traitement endoscopique de l'incontinence urinaire d'effort, tels que le polytétrafluoroéthylène, le collagène, le<br />

macroplastique. Le dextramonomère/acide hyaluronique est l'agent le plus récemment employé dans cette indication. Les injections<br />

peuvent être réalisées en ambulatoire, sous anesthésie locale, avec une bonne tolérance et une faible morbidité. Le risque de<br />

rétention transitoire impose une surveillance de quelques heures. Ces injections représentent une alternative thérapeutique<br />

envisageable pour certaines patientes se plaignant d'incontinence d'effort, préalablement informées du manque de recul de cette<br />

technique Grade C .<br />

Bandelettes sous-urétrales<br />

Les bandelettes sous-urétrales sont les interventions chirurgicales les plus proposées pour l'incontinence d'effort en cas d'échec des<br />

traitements conservateurs. Elles visent à corriger le défaut de soutien du col vésical et de l'urètre. Le matériel utilisé comporte des<br />

bandelettes en polypropylène, placées par voie basse rétropubiennne ou transobturatrice. Elles sont à l'origine, dans 5 à 10 % des<br />

cas, de dysurie et d'impériosités de novo.<br />

Sphincter artificiel


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Le sphincter artificiel est indiqué en cas de déficit majeur de l'appareil sphinctérien et/ou en cas d'échec des traitements précédents. Il<br />

rétablit la continence de façon durable dans plus de 90 % des cas. Un risque d'érosion urétrale et d'infection du matériel est présent<br />

dans 5 à 10 % des cas. L'intervention consiste à implanter autour de l'urètre une manchette gonflable reliée à un réservoir placé en<br />

suspubien et dont le remplissage est commandé par une pompe située dans une grande lèvre.<br />

Électromodulation (ou électrostimulation)<br />

L'électromodulation (ou électrostimulation) des racines sacrées est une option thérapeutique validée en cas d'hyperactivité vésicale<br />

réfractaire et invalidante. Grade B Cette technique nécessite un test préalable avec électrode temporaire et stimulateur externe.<br />

L'électrode est implantée à proximité de la branche ventrale du 3 e nerf sacré et agit par inhibition des afférences vésicales. Lorsqu'un<br />

résultat positif à ce test est obtenu, une implantation d'électrodes et du boîtier définitif est proposée. Les taux de guérison sont de 30<br />

à 50 % avec plusieurs années de recul, les taux d'amélioration globale sont de 90 %. Il s'agit d'une technique coûteuse avec un<br />

certain taux d'abandon, mais réversible.<br />

Chirurgie d'agrandissement vésical<br />

Elle est réservée à des cas bien sélectionnés pour lesquels l'hyperactivité vésicale menace le haut appareil. Elle vise à augmenter le<br />

réservoir vésical et sa capacité à se remplir à basse pression en utilisant un segment d'intestin (iléon, généralement).<br />

Références<br />

« Recommandations pour la pratique clinique : Prise en charge de l'incontinence urinaire de la femme », Agence nationale<br />

d'Accréditation et d'Évaluation en Santé, Anaes, mai 2003.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_460897/incontinence-urinaire-2003-recomma...<br />

« Diagnostic et prise en charge de l'incontinence urinaire de la femme adulte », Collège national des gynécologues et obstétriciens<br />

français (CNGOF), 2009.<br />

http://www.cngof.asso.fr/D_TELE/RPC%20INCONTINENCE_2009.<strong>pdf</strong><br />

« Third International Consultation on Incontinence », Abrams P. et al. , Editions 21 and Health publication Ltd, 2005, Paris, France.<br />

« Urinary Incontinence: the Management of Urinary Incontinence in Women », NICE Clinical Guideline n° 40, octobre 2006.<br />

http://www.nice.org.uk/nicemedia/live/10996/30282/30282.<strong>pdf</strong><br />

« Prise en charge urologique des vessies neurogènes », Rapport du 100 e Congrès de l'Association Française d'Urologie,<br />

Chartier-Kastler E., Ruffion A., Progrès en urologie,<br />

2007, n° 17, pp. 291-775.<br />

Mise à jour de la Reco : 07/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Insuffisance rénale chronique - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/9<br />

La maladie<br />

Insuffisance rénale chronique<br />

L'insuffisance rénale chronique (IRC) est une affection, souvent progressive, entraînant une réduction des fonctions d'épuration et des<br />

fonctions endocrines (sécrétion d'érythropoïétine, métabolisme de vitamine D, etc.) du rein. Elle doit être prévenue, dépistée, traitée, et le<br />

patient doit être accompagné au long cours. Cette Reco concerne la prise en charge de l'IRC avant les stades de dialyse et<br />

transplantation.<br />

Physiopathologie<br />

L'altération du parenchyme rénal, à l'origine de l'IRC, est masquée pendant un certain temps par une augmentation du débit capillaire<br />

glomérulaire, du gradient de pression hydraulique à travers la membrane basale, et du débit de filtration glomérulaire dans les néphrons<br />

sains. Les anomalies n'apparaissent que lorsque près de 50 % du parenchyme sont détruits. Les principales causes d'IRC sont le<br />

diabète et l'hypertension artérielle.<br />

Epidémiologie<br />

En France, 150 nouveaux patients par million d'habitants sont pris en charge chaque année pour une IRC terminale, traitée par<br />

épuration extrarénale (dialyse) ou transplantation rénale.<br />

Complications<br />

L'insuffisance rénale multiplie la morbimortalité cardiovasculaire par un facteur variant de 4,9 à 19 selon les publications. Les autres<br />

complications sont l'anémie, l'hyperkaliémie, l'acidose métabolique, les troubles du métabolisme phosphocalcique et les complications<br />

osseuses.<br />

Diagnostic<br />

Le diagnostic est biologique : débit de filtration glomérulaire (DFG) < 90 ml/min/1,73 m 2 durant plus de 3 mois.<br />

Stade (K/DOQI) Définitions DFG (ml/min/1,73 m ) 2<br />

Stade 1 Maladie rénale(1) > 90<br />

Stade 2 IRC légère entre 60 et 89<br />

Stade 3 IRC modérée entre 30 et 59<br />

Stade 4 IRC sévère entre 15 et 29<br />

Stade 5 IRC terminale < 15<br />

(1) Persistance > 3 mois de marqueurs d'atteinte rénale : protéinurie, microalbuminurie (diabétique de type 1), hématurie, leucocyturie,<br />

anomalies morphologiques à l'échographie.<br />

On admet que, à partir de l'âge de 40 ans, on perd en moyenne 10 ml/min de filtration glomérulaire par décade.<br />

Le dosage de l'urée n'a aucune valeur dans l'appréciation du DFG. La créatininémie en est un meilleur reflet mais sa valeur dépend de<br />

l'âge, du sexe et de la masse musculaire. La formule de Cockroft et Gault est une approximation de la clairance de la créatinine<br />

couramment utilisée en France. La formule MDRD est plus précise chez l'adulte non obèse aux stades 2, 3 et 4.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tout patient atteint de maladie rénale chronique doit bénéficier d'une prise en charge adaptée.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Ralentissement de la progression de l'IRC et prise en charge de ses complications.<br />

Prévention du risque cardiovasculaire.<br />

Préparation du patient à un traitement de suppléance (dialyse ou transplantation).


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Prise en charge<br />

Insuffisance rénale chronique


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1 Formule MDRD<br />

En 2009, la Société de néphrologie a recommandé d'abandonner la formule de Cockroft et Gault et d'utiliser l'équation de l'étude<br />

MDRD (Modification of the Diet in Renal Disease) pour estimer le DFG.<br />

Un calculateur est disponible sur le site de la Société de néphrologie.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

Facteurs récents d'aggravation<br />

Il peut s'agir d'un obstacle, d'une déshydratation, d'une glomérulonéphrite rapidement progressive, d'une cause vasculaire, d'une<br />

cause médicamenteuse (voir Cas particuliers).<br />

Orientation diagnostique<br />

Elle est basée sur l'anamnèse (antécédents familiaux de néphropathie, antécédents personnels de diabète, d'HTA, de maladie<br />

athéromateuse, d'infections urinaires hautes récidivantes, d'uropathie, de lithiase, d'une maladie systémique, de goutte), l'examen<br />

clinique, la bandelette urinaire, l'électrophorèse des protéines sériques, la protéinurie des 24 heures, la cytologie urinaire,<br />

l'échographie, l'ASP (radiographie d'abdomen sans préparation).<br />

Les principaux diagnostics étiologiques sont le diabète, l'HTA, les néphropathies glomérulaires primitives, les néphropathies<br />

interstitielles, une atteinte vasculaire parenchymateuse et l'atteinte rénovasculaire.<br />

Adaptation des traitements<br />

Certains sont à éviter ou à surveiller étroitement (voir Cas particuliers).<br />

Régime hypoprotidique<br />

Un apport de 0,8 g à 1 g de protides/kg par jour est conseillé, dont 50 % d'origine animale. Il ne faut pas descendre au-dessous de<br />

0,6 g de protides/kg par jour sans supplémentation d'acides aminés. La surveillance diététique doit être attentive. Lire Diététique :<br />

Insuffisance rénale chronique.<br />

Traitements de suppléance<br />

Ils sont discutés au stade 5. Ils doivent être débutés lorsque le DFG est durablement inférieur à 10 ml/min/1,73 m 2.<br />

Cas particuliers<br />

IRC et médicaments néphrotoxiques<br />

Les médicaments néphrotoxiques ne doivent être administrés en cas d'IRC que lorsqu'aucune alternative n'est possible et sous<br />

surveillance du DFG : anti-inflammatoires non stéroïdiens, aminosides, sels de platine, produits de contraste iodés notamment.<br />

Certains médicaments indiqués dans certaines néphropathies peuvent, dans certaines conditions, diminuer le DFG. Leur utilisation<br />

impose une surveillance étroite de la fonction rénale : diurétiques, inhibiteurs de l'enzyme de conversion et antagonistes des<br />

récepteurs de l'angiotensine II, ciclosporine et tacrolimus.<br />

IRC favorisant la toxicité de certains médicaments<br />

Certains médicaments ou leurs métabolites s'accumulent en cas d'insuffisance rénale : les digitaliques, certains antiarythmiques, tous<br />

les anticoagulants (héparine, HBPM et antivitamines K), les antidiabétiques oraux (metformine et sulfamides hypoglycémiants), les<br />

anticancéreux, de nombreux hypolipidémiants (fibrates, statines). Il faut adapter les doses et surveiller étroitement le traitement.<br />

Substances susceptibles d'entraîner une hyperkaliémie en cas d'IRC<br />

Elles sont nombreuses : potassium (notamment sels diététiques), diurétiques hyperkaliémiants, anti-inflammatoires non stéroïdiens, y<br />

compris les inhibiteurs de la COX-2, héparines fractionnées ou non, inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC), antagonistes des<br />

récepteurs de l'angiotensine II (ARA II), triméthoprime, ciclosporine, tacrolimus, pentamidine.<br />

Conseils aux patients<br />

Le patient peut boire à sa soif.<br />

Le régime doit être modérément hypoprotidique et souvent peu salé du fait de l'hypertension artérielle fréquemment associée. Lire<br />

Diététique : Insuffisance rénale chronique.<br />

Une activité physique régulière est bénéfique.<br />

Toute automédication doit être proscrite (notamment les anti-inflammatoires non stéroïdiens).<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Antihypertenseurs


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Les antihypertenseurs, via la baisse de la pression artérielle, ralentissent la vitesse de détérioration de la fonction rénale au cours<br />

de l'IRC. L'objectif tensionnel est de 130/80 mmHg et de 120/70 mmHg en cas de protéinurie abondante ou de néphropathie<br />

diabétique Grade A . Outre leur effet antihypertenseur, il est possible que les antagonistes du système rénine-angiotensine, à savoir<br />

les IEC et les ARA II, aient un effet bénéfique propre. Il est démontré que l'administration au long cours de certains IEC ralentit la<br />

vitesse de détérioration de la fonction rénale au cours d'une IRC. Le captopril est indiqué dans la néphropathie macroprotéinurique<br />

du diabète de type 1. Le bénazépril est indiqué dans des néphropathies chroniques de causes diverses. Le lisinopril est indiqué dans<br />

la néphropathie débutante chez l'hypertendu diabétique de type 2. Le ramipril est indiqué dans le traitement des néphropathies<br />

glomérulaires diabétiques débutantes (microalbuminurie) ou manifestes (macroprotéinurie avec au moins un facteur de risque<br />

vasculaire), ainsi que dans les néphropathies glomérulaires non diabétiques manifestes (macroprotéinurie ≥ 3 g par jour). L'énalapril<br />

a été également étudié avec succès dans l'IRC, mais n'a pas d'indication d'AMM spécifique. L'administration au long cours de<br />

certains ARA II (irbésartan ou losartan) ralentit la vitesse de détérioration de la fonction rénale de la néphropathie diabétique de<br />

type 2. Tous les antihypertenseurs peuvent être utilisés chez l'insuffisant rénal. Pour certains d'entre eux, une adaptation<br />

posologique est nécessaire. Seuls sont listés ci-dessous les antihypertenseurs ayant une AMM spécifique dans l'IRC.<br />

bénazépril<br />

BENAZEPRIL 10 mg cp séc<br />

CIBACENE 10 mg cp pellic séc<br />

captopril<br />

CAPTOPRIL 25 mg cp<br />

CAPTOPRIL 50 mg cp<br />

LOPRIL 25 mg cp séc<br />

LOPRIL 50 mg cp séc<br />

irbésartan<br />

APROVEL 150 mg cp pellic<br />

APROVEL 300 mg cp pellic<br />

APROVEL 75 mg cp pellic<br />

IRBESARTAN 150 mg cp pellic<br />

IRBESARTAN 300 mg cp pellic<br />

IRBESARTAN 75 mg cp pellic<br />

lisinopril<br />

LISINOPRIL 20 mg cp séc<br />

LISINOPRIL 5 mg cp séc<br />

PRINIVIL 20 mg cp<br />

PRINIVIL 5 mg cp<br />

ZESTRIL 20 mg cp<br />

ZESTRIL 5 mg cp séc<br />

losartan<br />

COZAAR 100 mg cp pellic<br />

COZAAR 2,5 mg/ml pdre/solv susp buv<br />

COZAAR 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ACTAVIS 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN ACTAVIS 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ALTER 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN ALTER 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ARROW 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN BOUCHARA RECORDATI 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN CRISTERS 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN CRISTERS 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN EG 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN EG 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ISOMED 100 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ISOMED 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN MYLAN 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN MYLAN 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN QUALIMED 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN QUALIMED 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN RATIOPHARM 100 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN RATIOPHARM 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN WINTHROP LAB 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN WINTHROP LAB 50 mg cp pellic séc<br />

LOSARTAN ZYDUS 100 mg cp pellic<br />

LOSARTAN ZYDUS 50 mg cp pellic séc<br />

ramipril<br />

RAMIPRIL WINTHROP 1,25 mg cp<br />

RAMIPRIL WINTHROP 10 mg cp séc<br />

RAMIPRIL WINTHROP 2,5 mg cp séc<br />

RAMIPRIL WINTHROP 5 mg cp séc<br />

TRIATEC 1,25 mg cp<br />

TRIATEC 10 mg cp séc<br />

TRIATEC 2,5 mg cp séc<br />

TRIATEC 5 mg cp séc


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Diurétiques<br />

Parmi les diurétiques,<br />

seuls les diurétiques de l'anse ont un effet natriurétique et probablement antihypertenseur utilisable au cours<br />

de l'IRC.<br />

bumétanide<br />

BURINEX 5 mg cp<br />

furosémide<br />

FUROSEMIDE RENAUDIN 250 mg/25 ml sol inj<br />

LASILIX SPECIAL 250 mg/25 ml sol inj en ampoule<br />

LASILIX SPECIAL 500 mg cp séc<br />

Alcalinisants<br />

Les alcalinisants sont destinés à compenser la rétention acide associée à l'IRC, se traduisant par une baisse des bicarbonates<br />

plasmatiques. L'acidose chronique augmente le risque d'hyperkaliémie, favorise l'ostéomalacie et a un effet antianabolique. Il est<br />

donc nécessaire de maintenir un taux de bicarbonates supérieur à 23 mmol/l par l'administration de bicarbonate de soude, par<br />

exemple sous forme d'eau de Vichy. Certains médicaments alcalinisants contiennent du citrate de potassium, et il y a évidemment<br />

lieu de prendre en compte l'apport de potassium. Les diurétiques de l'anse ont également un effet alcalinisant.<br />

acide citrique + citrates de potassium et de sodium<br />

FONCITRIL 4000 glé p susp buv<br />

trométamol + citrates de potassium et de sodium<br />

ALCAPHOR sol buv<br />

Fer par voie orale ou veineuse<br />

L'administration de fer par voie orale ou veineuse est souvent nécessaire. La voie orale est souvent mal tolérée.<br />

fer<br />

ASCOFER 33 mg gél<br />

FER ACTAVIS 100 mg/5 ml sol inj<br />

FER AP-HP 0,5 mg gél<br />

FER MYLAN 100 mg/5 ml sol diluer p perf<br />

FER UCB sol buv<br />

FERINJECT 50 mg/ml sol inj p perf<br />

FERO-GRAD VITAMINE C 500 cp enr<br />

FERROSTRANE 0,68 % sirop<br />

FUMAFER 33 mg/1 g pdre oral<br />

FUMAFER 66 mg cp pellic<br />

INOFER 100 mg cp pellic<br />

TARDYFERON 80 mg cp enr<br />

TIMOFEROL gél<br />

TOT'HEMA sol buv<br />

VENOFER 20 mg/ml sol inj IV<br />

Agents stimulant l'érythropoïèse (ASE)<br />

Les agents stimulant l'érythropoïèse (ASE) visent à maintenir l'hémoglobinémie aux environs de 11 g/dl. Bien que l'anémie soit<br />

fréquente au cours de l'IRC, il faut rechercher et éliminer une cause indépendante ou associée à la maladie rénale chronique.<br />

Plusieurs ASE sont actuellement disponibles. Le choix du médicament dépend surtout de la voie d'administration et d'un éventuel<br />

traitement par dialyse.<br />

darbépoétine alfa<br />

ARANESP 10 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 100 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 100 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 130 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 150 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 150 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 20 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 20 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 30 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 300 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 300 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 40 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 40 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 50 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 500 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 500 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 60 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 60 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

ARANESP 80 µg sol inj en seringue préremplie<br />

ARANESP 80 µg sol inj en stylo prérempli (Sureclick)<br />

époétine alfa<br />

BINOCRIT 10 000 UI/1 ml sol inj en seringue préremplie


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BINOCRIT 1000 UI/0,5 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 20 000 UI/0,5 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 2000 UI/1 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 30 000 UI/0,75 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 3000 UI/0,3 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 40 000 UI/1 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 4000 UI/0,4 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 5000 UI/0,5 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 6000 UI/0,6 ml sol inj en seringue préremplie<br />

BINOCRIT 8000 UI/0,8 ml sol inj en seringue préremplie<br />

EPREX 10 000 UI/ml sol inj en ser<br />

EPREX 2 000UI/ml sol inj ser pré<br />

EPREX 4000 UI/ml sol inj<br />

époétine bêta<br />

NEORECORMON 10 000 UI sol inj<br />

NEORECORMON 20 000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 2000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 30 000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 3000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 4000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 500 UI/0,3 ml sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 5000 UI sol inj en ser préremplie<br />

NEORECORMON 6000 UI sol inj en ser préremplie<br />

époétine thêta<br />

EPORATIO 20 000 UI/1 ml sol inj seringue préremplie<br />

EPORATIO 30 000 UI/1 ml sol inj seringue préremplie<br />

époétine zêta<br />

RETACRIT 10 000 UI/1,0 ml sol inj<br />

RETACRIT 1000 UI/0,3 ml sol inj<br />

RETACRIT 2 000 UI/0,6 ml sol inj<br />

RETACRIT 20 000 UI/0,5 ml sol inj<br />

RETACRIT 3 000 UI/0,9 ml sol inj<br />

RETACRIT 30 000 UI/0,75 ml sol inj<br />

RETACRIT 40 000 UI/1,0 ml sol inj<br />

RETACRIT 4000 UI/0,4 ml sol inj<br />

RETACRIT 5000 UI/0,5 ml sol inj<br />

RETACRIT 6000 UI/0,6 ml sol inj<br />

RETACRIT 8000 UI/0,8 ml sol inj<br />

méthoxy polyéthylène glycol-époétine bêta<br />

MIRCERA 100 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 120 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 150 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 200 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 250 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 30 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 360 µg/0,6 ml sol inj<br />

MIRCERA 50 µg/0,3 ml sol inj<br />

MIRCERA 75 µg/0,3 ml sol inj<br />

Médicaments du métabolisme phosphocalcique<br />

Les médicaments du métabolisme phosphocalcique,<br />

dont la vitamine D, sont utilisés pour prévenir et compenser les troubles<br />

du métabolisme phosphocalcique associés à l'IRC : baisse de la synthèse rénale des formes actives de la vitamine D, diminution de<br />

l'absorption digestive du calcium, balance calcique négative, rétention phosphorée et hyperparathyroïdisme secondaire.<br />

La vitamine D et ses dérivés (alfacalcidol, calcitriol) augmentent la calcémie et freinent l'hyperparathyroïdisme. La vitamine D peut<br />

être utilisée seule ou en association au calcium.<br />

alfacalcidol<br />

ALFACALCIDOL TEVA 0,25 µg caps molle<br />

ALFACALCIDOL TEVA 1 µg caps molle<br />

UN ALFA 0,1 µg/gte sol buv<br />

UN ALFA 0,25 µg caps<br />

UN ALFA 0,5 µg caps molle<br />

UN ALFA 1 µg caps<br />

UN ALFA 1 µg/0,5 ml sol inj<br />

UN ALFA 2 µg/1 ml sol inj<br />

calcitriol<br />

ROCALTROL 0,25 µg caps molle<br />

Sels de calcium


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Les sels de calcium augmentent l'apport oral de calcium. À fortes doses (carbonate de calcium), ils diminuent l'absorption digestive<br />

du phosphore. Certains sels (gluconate) ont un effet alcalinisant. Toutefois, des apports élevés en calcium sont incriminés dans la<br />

genèse des calcifications vasculaires et des accidents ischémiques de l'insuffisant rénal chronique. Les associations<br />

calcium-vitamine D peuvent également être utilisées. Certains sels de calcium ont une indication spécifique (hypocalcémie et<br />

hyperphosphorémie de l'insuffisance rénale chronique).<br />

calcium carbonate<br />

CALCIDIA 1,54 g glé p susp buv<br />

Chélateurs du phosphore<br />

Les chélateurs du phosphore (sels d'aluminium, acétate de calcium, sévélamer, lanthane) complexent le phosphore dans la<br />

lumière intestinale. Ils réduisent donc la phosphorémie et freinent l'hyperparathyroïdisme secondaire. L'usage des sels d'aluminium<br />

est limité par les risques à long terme d'encéphalopathie et de ralentissement de la formation osseuse.<br />

aluminium<br />

LITHIAGEL susp buv<br />

calcium acétate<br />

PHOSPHOSORB 660 mg cp pellic<br />

lanthane<br />

FOSRENOL 1000 mg cp à croquer<br />

FOSRENOL 250 mg cp à croquer<br />

FOSRENOL 500 mg cp à croquer<br />

FOSRENOL 750 mg cp à croquer<br />

sévélamer<br />

RENAGEL 800 mg cp pellic<br />

RENVELA 2,4 g pdre p susp buv<br />

RENVELA 800 mg cp pellic<br />

Hypo-uricémiants<br />

Parmi les hypo-uricémiants, l'allopurinol est le seul hypo-uricémiant utilisable per os en cas d'insuffisance rénale. L'accumulation<br />

de son métabolite actif permet l'usage de doses faibles. Les accidents immunoallergiques seraient plus fréquents chez l'insuffisant<br />

rénal chronique en cas de doses non adaptées.<br />

allopurinol<br />

ALLOPURINOL 100 mg cp<br />

ALLOPURINOL 200 mg cp<br />

ALLOPURINOL 300 mg caps<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 100 mg cp<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 200 mg cp<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 300 mg cp<br />

ZYLORIC 100 mg cp<br />

ZYLORIC 200 mg cp<br />

ZYLORIC 300 mg cp<br />

Statines<br />

Les statines visent à obtenir chez ces patients un LDL-cholestérol < 1 g/l. Lire Risque cardiovasculaire : prévention.<br />

atorvastatine<br />

ATORVASTATINE 10 mg cp pellic<br />

ATORVASTATINE 20 mg cp pellic<br />

ATORVASTATINE 40 mg cp pellic<br />

ATORVASTATINE 80 mg cp pellic<br />

TAHOR 10 mg cp pellic<br />

TAHOR 20 mg cp pellic<br />

TAHOR 40 mg cp pellic<br />

TAHOR 80 mg cp pellic<br />

fluvastatine<br />

FLUVASTATINE 20 mg gél<br />

FLUVASTATINE 40 mg gél<br />

FRACTAL 20 mg gél<br />

FRACTAL 40 mg gél<br />

LESCOL 20 mg gél<br />

LESCOL 40 mg gél<br />

pravastatine<br />

ELISOR 10 mg cp séc<br />

ELISOR 20 mg cp séc<br />

ELISOR 40 mg cp séc<br />

PRAVASTATINE 10 mg cp séc<br />

PRAVASTATINE 20 mg cp séc<br />

PRAVASTATINE 40 mg cp


VIDAL Recos - Insuffisance rénale chronique - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 8/9<br />

PRAVASTATINE PHR LAB 10 mg cp<br />

PRAVASTATINE PHR LAB 20 mg cp<br />

VASTEN 10 mg cp séc<br />

VASTEN 20 mg cp séc<br />

VASTEN 40 mg cp<br />

rosuvastatine<br />

CRESTOR 10 mg cp pellic<br />

CRESTOR 20 mg cp pellic<br />

CRESTOR 5 mg cp pellic<br />

simvastatine<br />

LODALES 20 mg cp enr séc<br />

LODALES 40 mg cp pellic<br />

SIMVASTATINE 10 mg cp enr<br />

SIMVASTATINE 20 mg cp enr séc<br />

SIMVASTATINE 40 mg cp pellic<br />

SIMVASTATINE 5 mg cp enr<br />

SIMVASTATINE ZYDUS FRANCE 20 mg cp pellic séc<br />

ZOCOR 20 mg cp enr séc<br />

ZOCOR 40 mg cp pellic<br />

ZOCOR 5 mg cp enr<br />

Complexants du potassium<br />

Les complexants du potassium attirent dans la lumière intestinale un ion potassium en échange d'un ion sodium ou d'un ion<br />

calcium. Avant le stade de la dialyse, leur usage est rarement nécessaire.<br />

calcium polystyrol sulfonate<br />

RESIKALI pdre p susp buv/rect<br />

sodium polystyrène sulfonate<br />

KAYEXALATE pdre p susp buv/rect<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Calcimimétiques<br />

Les calcimimétiques augmentent la sensibilité du récepteur calcium-sensible de la cellule parathyroïdienne et abaissent le taux de<br />

la parathormone. Ils ne sont indiqués que chez les patients dialysés.<br />

cinacalcet<br />

MIMPARA 30 mg cp pellic<br />

MIMPARA 60 mg cp pellic<br />

MIMPARA 90 mg cp pellic<br />

Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Il existe 3 types de traitements de suppléance : la transplantation rénale, l'hémodialyse et la dialyse péritonéale. Ces traitements sont<br />

complémentaires et peuvent être proposés de manière successive.<br />

Transplantation rénale<br />

C'est la technique de choix. Elle peut être réalisée à partir d'un rein de cadavre ou de donneur apparenté. Elle peut être programmée<br />

avant la prise en charge en dialyse (transplantation préemptive). Sa seule contre-indication est, finalement, un âge avancé ou une<br />

maladie associée à l'insuffisance rénale réduisant considérablement l'espérance de vie du patient.<br />

Hémodialyse chronique<br />

L'hémodialyse chronique est la technique la plus utilisée. Les principaux problèmes techniques sont la création et l'entretien de la<br />

voie d'abord vasculaire. Les complications à long terme sont ostéoarticulaires et cardiovasculaires.<br />

Dialyse péritonéale<br />

Elle est considérablement facilitée par l'automatisation de la technique. Les principaux inconvénients sont représentés par les<br />

altérations de perméabilité de la membrane péritonéale et le risque de péritonite. Ses contre-indications sont la dénutrition sévère,<br />

l'obésité, des antécédents d'interventions chirurgicales abdominales, une polykystose hépatorénale majeure, une atteinte digestive,<br />

une immunodépression sévère, une insuffisance respiratoire chronique.


VIDAL Recos - Insuffisance rénale chronique - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 9/9<br />

Références<br />

« Néphropathie chronique grave », Guide ALD n° 19, HAS, juin 2007.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_565904/ald-n-19-guide-medecin-sur-la-neph...<br />

« Moyens thérapeutiques pour ralentir la progression de l'insuffisance rénale chronique chez l'adulte », Anaes, septembre 2004.<br />

http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/<strong>pdf</strong>/IRC_2006_recos.<strong>pdf</strong><br />

« Bonnes pratiques cliniques pour le diagnostic, l'évaluation, la prévention et le traitement des troubles minéraux et osseux associés<br />

aux maladies rénales chroniques (TMO-MRC) », recommandations KDIGO (Kindney Disease Improving Global Outcomes), CKD-MBD<br />

Work Group, Kidney International,<br />

2009, n° 76 (suppl. 113), pp. 1-130.<br />

http://www.kdigo.org/clinical_practice_guidelines/<strong>pdf</strong>/CKD-MBD_French.<strong>pdf</strong><br />

Mise à jour de la Reco : 06/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


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La maladie<br />

Lithiase urinaire<br />

La lithiase urinaire est liée à la formation de concrétions dans les voies urinaires. Les calculs peuvent séjourner dans les voies excrétrices<br />

du rein ou migrer dans les uretères et la vessie.<br />

Physiopathologie<br />

La formation d'un calcul s'étend sur plusieurs mois ou années. Elle débute par la constitution, dans le rein, d'un noyau autour de débris<br />

cellulaires. Ces cristaux se fixent ensuite sur les parois des cellules tubulaires de la papille rénale et augmentent de taille par<br />

agrégation cristalline. Différents constituants de l'urine sont susceptibles de cristalliser : calcium, oxalates, phosphate, urate, sodium,<br />

ammonium, cystine, xanthine.<br />

Epidémiologie<br />

La maladie lithiasique urinaire touche en moyenne 5 % des femmes et 10 % des hommes. Le risque de récidive d'une lithiase à 5 ans<br />

est estimé à plus de 50 %.<br />

Complications<br />

Elles peuvent constituer le mode de révélation de la maladie lithiasique : hématurie, infection urinaire, rétention aiguë d'urines. Le<br />

retentissement au long cours de la maladie lithiasique sur le parenchyme rénal est fonction de l'hyperpression qu'elle entraîne en amont<br />

et de l'éventuelle infection associée, qui peuvent être exceptionnellement à l'origine d'une insuffisance rénale chronique.<br />

Diagnostic<br />

La maladie lithiasique, caractérisée par la présence de calculs dans les voies urinaires, peut rester longtemps asymptomatique.<br />

Elle peut se révéler par des douleurs de la fosse lombaire, une hématurie micro ou macroscopique, une infection urinaire, une colique<br />

néphrétique, une oligoanurie.<br />

Le diagnostic est confirmé par l'imagerie : scanner hélicoïdal au mieux, abdomen sans préparation, échographie des reins et des voies<br />

urinaires au minimum.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tout patient atteint d'une maladie lithiasique doit bénéficier d'un traitement adapté en cas de symptomatologie aiguë, d'un bilan<br />

étiologique complet et d'un traitement préventif des récidives.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Éradication ou surveillance des calculs existants.<br />

Prévention de la formation de nouveaux calculs.<br />

Prévention de l'insuffisance rénale dans les formes graves récidivantes.


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Prise en charge<br />

Lithiase urinaire


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1 Bilan étiologique<br />

Le bilan sera adapté au type de la lithiase (aspect radiologique notamment). Il doit être effectué au moins 1 mois après un épisode<br />

obstructif et 3 mois après un traitement par lithotritie extracorporelle. Accord Pro<br />

Il comporte : analyse d'un calcul, NFS, VS, créatininémie, ionogramme sanguin, calcémie, albuminémie, phosphorémie, uricémie,<br />

diurèse des 24 heures, mesures du pH urinaire ; sur les urines des 24 heures : urée, ionogramme urinaire, calciurie, phosphaturie,<br />

uraturie ; ECBU, ASP, échographie rénale et des voies urinaires.<br />

Il peut être complété, selon l'orientation clinique, par électrophorèse des protides, dosage de la parathormone, de la 1,25<br />

hydroxy-vitamine D, réaction de Brandt urinaire, aminoacidogramme urinaire, citraturie et oxalurie des 24 heures, magnésurie des<br />

24 heures, épreuve de charge calcique, épreuve d'acidification urinaire, UIV, scanner spiralé.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Lithiase urique (ou uratique)<br />

Elle peut s'intégrer dans le tableau d'une maladie goutteuse mais se présente souvent isolée. Le pH urinaire est en permanence<br />

acide (élément majeur du diagnostic). Une hyperuricémie ou une hyperuraturie ne sont pas toujours associées.<br />

Les calculs peuvent être dissous par alcalinisation urinaire ou détruits par lithotritie.<br />

Traitement préventif des récidives : cure de diurèse > 2 litres par jour et alcalinisation des urines (bicarbonate de sodium 4 à 6 g par<br />

jour ou eau de Vichy). L'allopurinol peut être indiqué en cas d'hyperuraturie.<br />

Lithiase oxalocalcique<br />

C'est la plus fréquente (70 %). Les calculs ne peuvent pas être médicalement dissous. En fonction de leur taille, on peut espérer<br />

une élimination spontanée (calcul < 5 mm), ou recourir à la lithotritie ou à la chirurgie (calcul > 5 mm).<br />

Le traitement préventif des récidives comprend des boissons abondantes permettant une diurèse > 2 litres par jour et repose sur<br />

3 mesures diététiques : restriction modérée en protéines animales (1 g/kg par jour), restriction modérée en chlorure de sodium (4 à<br />

5 g par jour) et régime normal en calcium (800 à 1 000 mg par jour). En cas d'hyperoxalurie, limiter les apports en oxalates (voir<br />

Conseils aux patients).<br />

Lithiase oxalocalcique récidivante<br />

Après vérification de la compliance aux règles hygiénodiététiques, un traitement de fond peut être indiqué : diurétiques thiazidiques<br />

(hydrochlorothiazide, indapamide) hors AMM, allopurinol, citrate de potassium.<br />

Cas particuliers<br />

Autres lithiases radio-opaques<br />

La lithiase phosphocalcique représente 10 à 20 % des lithiases. Elle a pour principale origine une alcalinité chronique des urines et<br />

survient donc préférentiellement sur certains terrains : diarrhée chronique, iléostomie, abus de laxatifs, traitement par l'acétazolamide.<br />

Le traitement curatif est la chirurgie. La prévention repose sur la prise en charge de sa cause et l'éventuelle acidification des urines.<br />

La lithiase cystinique représente 1 à 2 % des calculs observés chez l'adulte, et près de 10 % de ceux observés chez l'enfant.<br />

L'affection est transmise sous forme autosomique récessive. Les calculs cystiniques sont faiblement radio-opaques, en taches de<br />

bougie, et souvent résistants à la lithotritie. Il s'agit d'une lithiase grave, justifiant un avis spécialisé. La diurèse doit être maintenue<br />

au-dessus de 3 litres par jour. L'alcalinisation des urines est obtenue par l'administration de bicarbonate de sodium utilisé à la dose<br />

de 12 à 18 g par jour, selon le poids corporel du patient, l'objectif étant de maintenir le pH des urines au voisinage de 7,5. Si ce<br />

traitement est insuffisant, on a recours à la tiopronine ou à la D-pénicillamine (hors AMM).<br />

La lithiase phospho-ammoniaco-magnésienne, qui représente moins de 2 % des calculs, est plus fréquente chez les femmes. Elle<br />

est favorisée par la présence d'une infection urinaire par un germe doté d'une uréase, tel que Proteus ou Ureaplasma urealyticum.<br />

Le<br />

traitement repose sur l'ablation de la masse lithiasique et sur l'éradication de l'infection par une antibiothérapie prolongée.<br />

Lithiases de cause médicamenteuse<br />

Les 2 principaux médicaments responsables de lithiases sont la sulfadiazine et l'indinavir. L'acétazolamide (calcium), les<br />

uricosuriques (acide urique) et la vitamine C (oxalates) peuvent également jouer un rôle dans la lithogenèse.<br />

Lithiases et anomalies anatomiques<br />

Certaines anomalies morphologiques de l'appareil urinaire entraînent une stase des urines qui favorise la formation de calculs : rein<br />

en fer à cheval, hydronéphrose congénitale par sténose de la jonction pyélo-urétérale, diverticules caliciels et surtout ectasies<br />

tubulaires précalicielles ou maladie de Cacchi-Ricci. Une anomalie métabolique associée, telle qu'une hypercalciurie, doit toujours<br />

être recherchée et traitée.<br />

Conseils aux patients<br />

La cure de diurèse consiste en la prise abondante de boissons, de façon à maintenir la diurèse des 24 heures autour de 2 à 3 litres<br />

par jour.<br />

Le régime adapté à la nature de la maladie lithiasique peut associer : une restriction modérée en protéines animales (Lire Diététique :<br />

Insuffisance rénale chronique.), une restriction modérée en chlorure de sodium (Lire Diététique : Régime désodé.),<br />

un régime normal en<br />

calcium (entre 800 et 1 000 mg par jour), dont la moitié au moins sous forme de produits laitiers. En cas d'hyperoxalurie, il est conseillé<br />

de limiter les apports en oxalates : éviter les fruits secs et les oléagineux, les épinards, la rhubarbe, le cresson, le fenouil, l'oseille, le<br />

cassis, les groseilles, les framboises, le persil et la moutarde en grande quantité, le thé longuement infusé, le café soluble, le chocolat,<br />

les apports médicamenteux de vitamine C.<br />

En cas de lithiase récidivante, un suivi médical est absolument nécessaire afin d'éviter les complications qui peuvent s'installer à bas<br />

bruit.


VIDAL Recos - Lithiase urinaire - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 4/5<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Diurétiques thiazidiques<br />

L'efficacité des diurétiques thiazidiques dans la prévention des lithiases oxalocalciques récidivantes est démontrée dans plusieurs<br />

essais contrôlés et confirmée dans une méta-analyse. Cette efficacité est indépendante du profil métabolique de la lithiase,<br />

notamment de la présence ou non d'une hypercalciurie. Elle a été observée notamment avec l'hydrochlorothiazide et l'indapamide.<br />

En l'absence d'indication d'AMM dans la pathologie concernée, les médicaments correspondants ne sont pas listés.<br />

Citrate de potassium<br />

Le citrate de potassium est largement utilisé en France comme alcalinisant urinaire, notamment dans le traitement de la lithiase<br />

urique. Il est également utilisé dans le cadre de la prévention des récidives de lithiases calciques, car il réalise une supplémentation<br />

en citrate et en potassium.<br />

acide citrique + citrates de potassium et de sodium<br />

FONCITRIL 4000 glé p susp buv<br />

Allopurinol<br />

L'efficacité de l' allopurinol dans la prévention des lithiases oxalocalciques récidivantes est démontrée dans plusieurs essais<br />

contrôlés. Cette efficacité semble réservée aux patients présentant une lithiase oxalocalcique avec hyperuraturie indépendamment<br />

de la présence ou non d'une hypercalciurie. L'allopurinol est également utilisé dans la prévention de la lithiase uratique, notamment<br />

lorsqu'elle s'associe à une hyperuraturie non contrôlée par le régime. Il est généralement bien toléré. Il peut toutefois provoquer des<br />

troubles digestifs (nausées, vomissements, diarrhée) ne contre-indiquant pas habituellement sa poursuite. Une intolérance cutanée à<br />

l'allopurinol, parfois sévère, devrait conduire à l'arrêt définitif du traitement. Des cas de syndrome de Lyell ont été rapportés (liés à<br />

une réaction immunoallergique). Ils seraient plus fréquents chez les insuffisants rénaux. Quelques rares cas de leucopénie, de<br />

thrombopénie et d'agranulocytose ont été rapportés. En cas d'allergie à l'allopurinol, une désensibilisation peut parfois être proposée.<br />

Elle est délicate et peu employée.<br />

allopurinol<br />

ALLOPURINOL 100 mg cp<br />

ALLOPURINOL 200 mg cp<br />

ALLOPURINOL 300 mg caps<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 100 mg cp<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 200 mg cp<br />

ALLOPURINOL PHR LAB 300 mg cp<br />

ZYLORIC 100 mg cp<br />

ZYLORIC 200 mg cp<br />

ZYLORIC 300 mg cp<br />

Tiopronine<br />

La tiopronine est utilisée dans le traitement de la lithiase cystinique. Elle peut entraîner des effets indésirables cutanéomuqueux ou<br />

digestifs.<br />

tiopronine<br />

ACADIONE 250 mg cp enr<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Trométamol<br />

Le trométamol est un autre alcalinisant urinaire proposé dans la prévention de la lithiase urique. Il peut être mal toléré sur le plan<br />

digestif.<br />

trométamol + citrates de potassium et de sodium<br />

ALCAPHOR sol buv<br />

Autres médicaments<br />

D' autres médicaments sont utilisés soit comme complexant du calcium dans la lumière intestinale, soit comme antioxalurique.<br />

Aucun essai clinique ne permet de recommander leur usage.<br />

acide fytique<br />

PHYTAT DB sirop<br />

acide phosphorique + calcium bisdihydrogénophosphate + magnésium glycérophosphate + phosphate disodique<br />

PHOSPHONEUROS sol buv<br />

ammonium dihydrogénophosphate + manganèse glycérophosphate + phosphate monopotassique<br />

PHOSPHORE ALKO 750 mg cp efferv<br />

succinimide<br />

SUCCINIMIDE PHARBIOL 3 g pdre p susp buv


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Traitements non médicamenteux cités dans les références<br />

Eaux de boisson<br />

Elles sont indiquées dans les cures de diurèse et pour l'alcalinisation des urines dans la prévention de la lithiase urique. Les eaux<br />

citées ici le sont à titre d'exemple et de façon non exhaustive. Dans la prévention de la lithiase calcique, il est plus logique d'éviter les<br />

eaux riches en sulfate de calcium (Contrex, Vittel, Hépar) et les eaux alcalines, qui favorisent la pullulation microbienne (Vichy<br />

Saint-Yorre et Vichy Célestins). Pour l'alcalinisation des urines (lithiases urique et cystinique), choisir les eaux alcalines : 1 litre de<br />

Vichy Saint-Yorre apporte 50 mmol de bicarbonates, 1 litre de Vichy Célestins 40 mmol de bicarbonates. Tenir compte toutefois de<br />

leur apport sodé : plus de 1 g de sodium élément par litre.<br />

Traitements urologiques chirurgicaux<br />

Les méthodes sont au nombre de trois :<br />

la lithotritie utilise des ondes de choc qui servent à désintégrer les calculs urinaires, permettant ainsi aux fragments d'être<br />

évacués dans l'urine ;<br />

l'urétéroscopie avec fragmentation et évacuation est utile en cas d'échec de la lithotritie, de lithiases complexes, chez la femme<br />

enceinte, de troubles de la coagulation, d'obésité ;<br />

la néphrolithotomie percutanée, notamment pour les lithiases importantes, complexes ou multiples.<br />

Références<br />

« Les recommandations ou guidelines de la lithiase urinaire », Saussine C., Lechevallier E., Traxer O., Progrès en urologie,<br />

2008, n° 18,<br />

pp. 841-843.<br />

http://www.urofrance.org/fileadmin/documents/data/PU/2008/00180012/08004028/main...<br />

« Management of Kidney Stones », Miller N.L., Lingeman J.E., British Medical Journal,<br />

2007, vol. 334, n° 7591, pp. 468-472.<br />

« Medical Management of Urinary Stone Disease », Pak C.Y. in Nephron, Clinical Practice,<br />

2004, vol. 98, n° 2, pp. 9-53.<br />

« Meta-Analysis of Randomized Trials for Medical Prevention of Calcium Nephrolithiasis », Pearle M.S., Roehrborn C.G., Pak C.Y.,<br />

Journal of Endourology,<br />

1999, vol. 13, n° 9, pp. 679-685.<br />

« Guidelines on Urolithiasis », Tiselius H.G. et coll., European Urology,<br />

2001, vol. 40, n° 4, pp. 362-371.<br />

Mise à jour de la Reco : 16/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Prostatite aiguë - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/7<br />

La maladie<br />

Prostatite aiguë<br />

La prostatite aiguë est une inflammation aiguë de la glande prostatique d'origine bactérienne.<br />

Physiopathologie<br />

Toute infection de l'appareil urinaire a une potentialité d'atteinte prostatique. Les prostatites font partie du groupe nosologique des<br />

infections urinaires compliquées. En effet, la diffusion extravasculaire des antibiotiques est gênée du fait que les capillaires sanguins de<br />

la prostate ne sont pas fenêtrés et qu'il n'a pas été identifié de transporteur actif d'antibiotique dans ces vaisseaux ; de plus, la prostate<br />

inflammatoire a un pH alcalin, auquel de nombreux antibiotiques sont moins actifs.<br />

Epidémiologie<br />

La répartition des germes en cause est similaire aux autres types d'infections urinaires : E. coli (dans plus de 80 % des cas), et autres<br />

entérobactéries ( Proteus mirabilis, Klebsiella spp, Enterobacter) prédominent. Plus rarement, Pseudomonas aeruginosa et<br />

Enterococcus spp peuvent être en cause. Les prostatites aiguës représentent 9 % des urgences infectieuses urinaires à l'hôpital.<br />

Complications<br />

Les prostatites aiguës peuvent se compliquer : à court terme, d'un état septique sévère (sepsis sévère, choc septique), d'une rétention<br />

d'urines purulentes, d'abcès prostatique ou rénal ; à plus long terme, la rechute et l'échec du traitement sont possibles (dans 10 à 30 %<br />

des cas), l'évolution peut se faire vers une prostatite chronique, et/ou vers la persistance des symptômes invalidants (douleurs<br />

pelviennes, douleurs à l'éjaculation, etc.).<br />

Diagnostic<br />

La prostatite aiguë associe typiquement des douleurs pelviennes indépendantes de la miction (sus-pubiennes, périnéales, urétrales,<br />

péniennes et parfois rectales), un ou plusieurs signes fonctionnels urinaires (brûlures mictionnelles, impériosité, pollakiurie, dysurie,<br />

rétention d'urine, urines troubles) et des signes généraux (fièvre ≥ 38 °C et souvent à 40 °C, frissons, malaise). La présentation clinique<br />

des prostatites aiguës est très diverse, allant de formes pauci-symptomatiques au sepsis sévère.<br />

La durée des symptômes est par définition < 3 mois.<br />

Le toucher rectal, systématique, ne doit pas être appuyé. Il peut déclencher une vive douleur à la palpation d'une prostate augmentée<br />

de volume et tendue ; il peut être normal.<br />

Une bandelette urinaire et un ECBU sont systématiquement réalisés avant le début du traitement. Grade A Le diagnostic est confirmé<br />

par une bactériurie ≥ 10 4 UFC/ml. Dans les rares cas de prostatites aiguës à bactériurie négative, il est préconisé de faire un ECBU avant<br />

et après massage prostatique (dit « Test de Nickel »).<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tous les patients présentant une infection urinaire, qu'ils soient fébriles ou non.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Guérison de l'infection.<br />

Soulagement des douleurs.<br />

Éradication des germes.<br />

Prévention des complications.


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Prise en charge<br />

Prostatite aiguë


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1 Évaluation initiale<br />

Les prostatites aiguës peuvent être graves par leur terrain de survenue ou leurs manifestations : sepsis sévère, choc septique,<br />

rétention aiguë d'urine. L'hospitalisation est le plus souvent justifiée, notamment dans les formes graves.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Bilan complémentaire<br />

En complément de l'ECBU initial réalisé avant l'antibiothérapie Grade A , des hémocultures sont recommandées dans les formes<br />

graves et souvent pratiquées dans les autres cas, en raison du risque de bactériémie associé. Une échographie des voies urinaires<br />

par voie sus-pubienne, et non endorectale Accord Pro , est recommandée dans les 24 heures (recherche d'obstacle, dilatation des<br />

voies urinaires ou rétention aiguë d'urine).<br />

Traitement<br />

Il débute en urgence par une monoantibiothérapie probabiliste : fluoroquinolone Grade A (ciprofloxacine, lévofloxacine, ofloxacine)<br />

par voie orale ou céphalosporine de 3 e génération (C3G Grade A , ceftriaxone ou cefotaxime) par voie parentérale. Le choix se<br />

portera préférentiellement sur une C3G parentérale en cas de prise récente (< 6 mois) par le patient d'une fluoroquinolone pour<br />

quelque indication que ce soit.<br />

Dans les formes graves, il est d'usage d'associer un aminoside (gentamicine, nétilmicine ou tobramicine) pendant 1 à 3 jours à la<br />

phase initiale du traitement. Accord Pro<br />

L'association sulfaméthoxazole-triméthoprime (SMX-TMP), même IV, n'est pas recommandée en traitement probabiliste (forte<br />

prévalence des résistances acquises de E. Coli).<br />

Il n'existe pas de consensus quant à la durée totale du traitement, qui varie de 2 semaines pour les formes simples (germe<br />

sensible, sepsis non sévère, etc.) à 4 semaines, voire plus selon le tableau clinique (abcès, traitement probabiliste inefficace, etc.).<br />

Le traitement symptomatique repose sur les antalgiques. La place des anti-inflammatoires non stéroïdiens comme des<br />

alphabloquants est discutée.<br />

En cas de rétention aiguë d'urine, le drainage par voie sus-pubienne en milieu urologique est recommandé.<br />

Réévaluation après 2 à 3 jours<br />

Le relais par voie orale, adapté aux résultats de l'antibiogramme, fait appel préférentiellement aux fluoroquinolones ou, à défaut, au<br />

SMX-TMP.<br />

La persistance de la fièvre et/ou la survenue de signes de gravité nécessitent de contrôler l'ECBU et de compléter l'imagerie<br />

(IRM/échographie par voie sus-pubienne/scanner) à la recherche d'une cause locale.<br />

Cas particuliers<br />

Pathologie urologique sous-jacente<br />

La survenue d'une prostatite doit systématiquement faire rechercher une pathologie urologique sous-jacente, et notamment un cancer<br />

prostatique, une sténose urétrale, une hypertrophie bénigne de la prostate, etc. Un bilan doit donc être réalisé à distance, comprenant<br />

un toucher rectal, un dosage des PSA pour les plus de 50 ans (réalisé plus de 6 mois après la prostatite), voire d'autres examens<br />

(débitmétrie, consultation d'urologie, etc.).<br />

Conseils aux patients<br />

Bien prendre le traitement antibiotique oral pendant toute la durée prescrite.<br />

Guetter la survenue des effets indésirables des antibiotiques (quinolones : risque de photosensibilisation et de tendinite) et, le cas<br />

échéant, arrêter les antibiotiques et consulter en urgence.<br />

Insister sur la nécessité de réaliser un ECBU de contrôle en vue du dépistage d'une éventuelle rechute 4 à 6 semaines après la fin du<br />

traitement antibiotique.<br />

Consulter rapidement en cas de réapparition des symptômes pour dépister et prendre en charge le plus tôt possible une rechute ou<br />

une récidive.<br />

Faire pratiquer un bilan à distance comprenant un ECBU et, notamment pour les patients de plus de 50 ans, un dosage des PSA à<br />

partir du 6 e mois après l'épisode infectieux.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Fluoroquinolones<br />

Les fluoroquinolones sont recommandées dans le traitement probabiliste des prostatites aiguës bactériennes simples Grade A<br />

en monothérapie. La ciprofloxacine, l'ofloxacine et la lévofloxacine sont recommandées dans le traitement par voies orale et<br />

parentérale de la prostatite aiguë.<br />

poso La posologie de la ciprofloxacine est, per os,<br />

de 500 à 750 mg, 2 fois par jour et, en IV, de 400 mg, 2 à 3 fois par jour.<br />

Pour la lévofloxacine, la posologie est, per os ou en IV, de 500 mg, 1 fois par jour.<br />

La posologie de l'ofloxacine est, ou en IV, de 200 mg, 2 à 3 fois par jour.<br />

per os<br />

La durée du traitement est de 14 jours au minimum, pouvant aller jusqu'à 6 semaines.<br />

La prescription d'une molécule de la famille des quinolones dans les 6 mois précédents (quelle qu'en ait été l'indication) expose au<br />

risque de résistance acquise et constitue une limite à l'utilisation probabiliste des fluoroquinolones. Une fois l'infection documentée et<br />

si le germe est sensible aux fluoroquinolones, cette famille d'antibiotiques doit être privilégiée du fait de sa très bonne diffusion dans<br />

la prostate.


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Les effets indésirables sont : arthralgies, myalgies, tendinites pouvant aller jusqu'à la rupture du tendon. Les tendinites touchent<br />

préférentiellement les sujets de plus de 65 ans, ceux soumis à une corticothérapie, ceux ayant déjà souffert d'une tendinite et ceux<br />

pratiquant une activité sportive intense. Les fluoroquinolones sont contre-indiquées, notamment en cas d'antécédent de<br />

tendinopathie survenue lors d'un traitement antérieur par fluoroquinolones. Les fluoroquinolones abaissent le seuil épileptogène et<br />

peuvent entraîner des manifestations psychiatriques chez les sujets âgés (confusion chez la personne âgée). Il faut éviter<br />

l'exposition solaire pendant le traitement du fait d'un risque important de photosensibilisation et d'éruption cutanée.<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf IV<br />

CIFLOX 250 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg/5 ml glé/sol p susp buv<br />

CIFLOX 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 200 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 250 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 400 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 500 mg cp pellic séc<br />

CIPROFLOXACINE ACTAVIS 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE ARROW 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE KABI 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE KABI 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE PANPHARMA 500 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 400 mg/200 ml sol p perf<br />

lévofloxacine<br />

LEVOFLOXACINE 500 mg cp<br />

TAVANIC 5 mg/ml sol p perf<br />

TAVANIC 500 mg cp pellic séc<br />

ofloxacine<br />

OFLOCET 200 mg cp pellic séc<br />

OFLOCET 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE 200 mg cp séc<br />

OFLOXACINE AGUETTANT 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MACO-PHARMA 200 mg/40 ml S inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/40 ml sol p perf<br />

OFLOXACINE WINTHROP 200 mg/40 ml sol p perf<br />

Céphalosporines de 3 e génération par voie parentérale<br />

Les céphalosporines de 3 e génération (C3G) par voie parentérale sont les seules C3G recommandées dans le traitement<br />

probabiliste des prostatites aiguës bactériennes simples Grade A : il s'agit de la ceftriaxone en administration par voies IV, IM ou SC<br />

et du céfotaxime en administration par voies IV ou IM.<br />

poso La posologie de la ceftriaxone par voies IM, IV ou SC, est de 1, voire 2 g, 1 fois par jour.<br />

La posologie du céfotaxime par voies IM ou IV est de 1, voire 2 g, 3 fois par jour.<br />

Les C3G sont contre-indiquées en cas d'allergie aux antibiotiques de la famille des bêtalactamines. Mais l'allergie aux<br />

céphalosporines n'est croisée avec celle des pénicillines que dans 5 à 15 % des cas.<br />

céfotaxime<br />

CEFOTAXIME MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 0,5 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 1 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 0,5 g pdre/solv p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM/IV<br />

ceftriaxone


VIDAL Recos - Prostatite aiguë - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 5/7<br />

CEFTRIAXONE 1 g/3,5 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 1g/10 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/2 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/5 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 1 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV/SC<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 2 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE SANDOZ 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE TEVA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 2 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 500 mg pdre p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/10 ml pdre/solv p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/3,5 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/2 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/5 ml pdre/solv p sol inj<br />

Aminosides<br />

Les aminosides ont une place limitée en raison de leurs inconvénients : marge thérapeutique très étroite, néphrotoxicité et<br />

ototoxicité, nécessité dans certains cas d'un suivi des taux sériques, voie d'administration parentérale. En revanche, leur spectre<br />

antibactérien est très adapté à l'épidémiologie bactérienne de la prostatite aiguë. Dans les formes graves, ils sont recommandés en<br />

traitement probabiliste court (1 à 3 jours) en association à une fluoroquinolone ou à une céphalosporine de 3 e génération<br />

Accord Pro en début de traitement, après estimation du débit de filtration glomérulaire. Les aminosides recommandés sont la<br />

gentamicine, la nétilmicine et la tobramycine.<br />

poso La posologie de la gentamicine IV ou IM est de 3 mg/kg, 1 fois par jour.<br />

La posologie de la nétilmicine IV ou IM est de 6 mg/kg, 1 fois par jour.<br />

La posologie de la tobramycine IV ou IM est de 3 mg/kg, 1 fois par jour.<br />

gentamicine<br />

GENTALLINE 10 mg sol inj<br />

GENTALLINE 160 mg sol inj<br />

GENTALLINE 40 mg sol inj<br />

GENTALLINE 80 mg sol inj<br />

GENTAMICINE B. BRAUN 1 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE B. BRAUN 3 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 10 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 160 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 40 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 80 mg sol inj<br />

nétilmicine<br />

NETROMICINE 100 mg/1 ml sol inj<br />

NETROMICINE 150 mg/1,5 ml sol inj<br />

NETROMICINE 25 mg/1 ml sol inj pédiatrique<br />

NETROMICINE 50 mg/2 ml sol inj pédiatrique<br />

tobramycine<br />

NEBCINE 100 mg sol inj<br />

NEBCINE 25 mg sol inj<br />

NEBCINE 75 mg sol inj<br />

TOBRAMYCINE B. BRAUN 1 mg/ml sol p perf<br />

TOBRAMYCINE B. BRAUN 3 mg/ml sol p perf<br />

TOBRAMYCINE MYLAN 25 mg/2,5 ml sol inj IM/IV en flacon<br />

TOBRAMYCINE MYLAN 75 mg/1,5 ml sol inj IM/IV en flacon<br />

Sulfaméthoxazole-triméthoprime<br />

L'association sulfaméthoxazole-triméthoprime ne doit pas être utilisée dans le traitement probabiliste de la prostatite aiguë en<br />

raison de la forte prévalence des résistances des entérobactéries à cet antibiotique. Son utilisation est en revanche possible en<br />

relais oral après documentation bactériologique.<br />

poso La posologie est de 800 mg de sulfaméthoxazole + 160 mg de triméthoprime, soit 1 comprimé de<br />

sulfaméthoxazole-triméthoprime fort dosage, 2 à 3 fois par jour.<br />

Le sulfaméthoxazole-triméthoprime est contre-indiqué notamment en cas d'antécédents d'hypersensibilité à l'un des composants<br />

(en particulier, hypersensibilité aux sulfamides). Les effets indésirables sont dominés par les éruptions cutanées, parfois graves<br />

(syndrome de Lyell), et les leuconeutropénies.<br />

sulfaméthoxazole + triméthoprime


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BACTRIM cp adulte<br />

BACTRIM FORTE cp<br />

BACTRIM sol p perf IV<br />

SULFAMETHOXAZOLE/TRIMETHOPRIME 800 mg/160 mg cp<br />

Amoxicilline<br />

L' amoxicilline (IV ou orale), bien qu'habituellement non recommandée pour des raisons de mauvaise diffusion tissulaire, peut être<br />

utile dans le traitement de prostatites à entérocoques, et si le germe est résistant au sulfaméthoxazole-triméthoprime.<br />

amoxicilline<br />

AMOXICILLINE 1 g cp dispers (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 1 g pdre susp buv<br />

AMOXICILLINE 125 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 125 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe HICONCIL)<br />

AMOXICILLINE 250 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 250 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe HICONCIL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg gél (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg gél (Gpe HICONCIL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe HICONCIL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg/5 ml pdre susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IV<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g/5 ml pdre/solv p sol inj IM<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 2 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE SODIQUE 1 g sol inj IM<br />

BACTOX 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

BACTOX 500 mg pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 1 g cp dispers<br />

CLAMOXYL 1 g pdr p sol inj IM IV<br />

CLAMOXYL 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 2 g pdre p sol inj IV<br />

CLAMOXYL 250 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 500 mg gél<br />

CLAMOXYL 500 mg pdr p sol inj IM IV<br />

CLAMOXYL 500 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

Pristinamycine<br />

La pristinamycine a une place réduite dans le traitement de la prostatite aiguë mais elle peut être utile dans les infections à<br />

Staphylococcus aureus résistants à la méticilline.<br />

pristinamycine<br />

PYOSTACINE 250 mg cp pellic<br />

PYOSTACINE 500 mg cp pellic séc<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Aztréonam<br />

L' aztréonam,<br />

monobactam, bien que ne faisant l'objet d'aucune recommandation en France, a une indication d'AMM dans le<br />

traitement des infections des voies urinaires hautes et basses, compliquées ou non, prostatites aiguës, urétrites gonococciques, et<br />

des infections sévères à bactéries à Gram- sensibles. De ce fait, il pourrait être prescrit dans le traitement de prostatites à germes<br />

résistants, en particulier aux autres antibiotiques (C3G), après antibiogramme.<br />

aztréonam<br />

AZACTAM 1 g pdre/sol p us parentér<br />

Autres antibiotiques<br />

D'autres antibiotiques ne sont pas recommandés dans le traitement de la prostatite aiguë. C'est le cas, parmi les<br />

fluoroquinolones, de l'énoxacine (d'efficacité insuffisante), la norfloxacine (de biodisponibilité insuffisante) et la loméfloxacine. La<br />

péfloxacine a toujours une indication d'AMM dans le traitement des prostatites aiguës et chroniques, y compris dans leurs formes<br />

sévères. Mais son rapport bénéfice/risque, du fait du risque de tendinopathies, n'est pas en faveur de son utilisation.<br />

Les céphalosporines orales et les quinolones de 1 re génération ne doivent pas être utilisées compte tenu de leur médiocre diffusion<br />

prostatique.<br />

énoxacine<br />

ENOXOR 200 mg cp pellic<br />

loméfloxacine<br />

DECALOGIFLOX 400 mg cp pellic séc<br />

norfloxacine<br />

NORFLOXACINE 400 mg cp pellic<br />

NOROXINE 400 mg cp enr


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péfloxacine<br />

PEFLACINE 400 mg cp pellic séc<br />

Références<br />

« Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires de l'adulte », Recommandations de bonne<br />

pratique, Afssaps (diffusion suspendue en mars <strong>2011</strong> en attente d'actualisation).<br />

http://www.afssaps.fr/content/download/32456/425545/version/1/file/lp-110311-nit...<br />

« Diagnostic et traitement des infections bactériennes urinaires de l'adulte : Prostatites aiguës », Progrès en urologie,<br />

2008, n° 18,<br />

suppl. 1, pp. 19-23.<br />

http://www.urofrance.org/fileadmin/documents/data/PU/2008/001800S1/08705086/main...<br />

« Guidelines on the Management of Urinary and Male Genital Tract Infections », Grabe M., Bishop M.C., Bjerklung-Johansen T.E. et<br />

coll., European Association of Urology,<br />

mise à jour 2008.<br />

http://www.uroweb.org/fileadmin/user_upload/Guidelines/The%20Management%20of%20M...<br />

« National Guideline for the Management of Prostatitis », British Association for Sexual Health and HIV, Care Guideline,<br />

2001.<br />

Mise à jour de la Reco : 16/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


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La maladie<br />

Pyélonéphrite aiguë du nourrisson et de l'enfant<br />

Les pyélonéphrites aiguës du nourrisson et de l'enfant (PNA) sont des infections urinaires (IU) bactériennes, avec atteinte du parenchyme<br />

rénal.<br />

Physiopathologie<br />

Elles sont souvent associées à une anomalie des voies urinaires dont la plus fréquente est le reflux vésico-urétérorénal. E. coli est la<br />

bactérie la plus souvent impliquée, suivie de Proteus mirabilis, des entérocoques et de Klebsiella species.<br />

Epidémiologie<br />

La prévalence des IU (PNA et IU basses) dépend de multiples facteurs, notamment de l'âge et du sexe. Dans les 3 premiers mois de<br />

vie, la prévalence des IU est plus élevée chez les garçons : approximativement de 13 % chez les filles, 2 % chez les garçons circoncis<br />

et 19 % chez ceux qui ne le sont pas. Dans la 1 re année de vie, l'incidence du 1 er épisode d'IU est la plus élevée : chez les nourrissons<br />

fébriles, le risque d'IU est estimé avant un an à 6 % chez les filles et 3 % chez les garçons. Après un an, les IU sont beaucoup plus<br />

fréquentes chez les filles que chez les garçons (8 % des filles et 2 % des garçons avant l'âge de 6 ans).<br />

Complications<br />

Les facteurs de risque de complication sont un âge < 3 mois, une uropathie sous-jacente ou une immunodépression. Les signes de<br />

gravité sont un syndrome septique marqué et une déshydratation. Les risques essentiels des PNA sont :<br />

les cicatrices rénales pouvant se compliquer de protéinurie, d'HTA et de réduction néphronique ;<br />

les bactériémies qui surviennent essentiellement dans les premiers mois de vie (> 30 % avant 1 mois).<br />

Diagnostic<br />

Le diagnostic de pyélonéphrite aiguë (PNA) repose sur le tableau clinique lorsqu'il est évocateur, une bactériurie et une leucocyturie<br />

significatives (voir ci-dessous).<br />

Les signes et les symptômes de PNA sont souvent non spécifiques, en particulier chez le nourrisson. Le diagnostic de PNA doit être<br />

évoqué devant toute fièvre sans foyer infectieux patent, mais aussi en présence de symptômes atypiques : troubles digestifs, altération de<br />

l'état général.<br />

Chez le grand enfant, les PNA s'accompagnent le plus souvent de signes urinaires, d'une fièvre élevée (> 39° C) et de douleurs<br />

lombaires et/ou abdominales.<br />

Avant l'âge de 3 mois, un examen cytobactériologique des urines (ECBU) est réalisé en 1 re intention. Les bandelettes réactives (nitrites<br />

+ leucocytes) ne sont pas utilisées, car l'alimentation lactée exclusive restreint l'apport en nitrites, ce qui majore le risque de faux négatifs.<br />

Après l'âge de 3 mois, une bandelette réactive urinaire est réalisée en 1 re intention à la recherche simultanée de leucocytes et de<br />

nitrites. En cas de résultat positif ou discordant (leucocytes + et nitrites −, ou l'inverse), un ECBU est réalisé. Si la bandelette est négative,<br />

l'ECBU n'est pas pratiqué et le diagnostic de PNA peut être écarté.<br />

Un ECBU positif associe une bactériurie > 10 4 UFC/ml (UFC : unités formant colonies) si le prélèvement a été mictionnel, > 10 3 UFC/ml<br />

si d'autres techniques de prélèvement ont été utilisées, ≥ 10 UFC/ml en cas de prélèvement par ponction suspubienne (voir Suivi et<br />

adaptation du traitement) et une leucocyturie > 10/mm 3 ou 10 4/ml.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Enfants et nourrissons fébriles avec un ECBU positif.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Guérison du processus infectieux, stérilisation des urines, disparition des symptômes.<br />

Prévention des récidives et des cicatrices rénales.<br />

Détection des malformations.


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Prise en charge<br />

Pyélonéphrite aiguë du nourrisson et de l'enfant


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1 Diagnostic<br />

Il est suspecté sur la clinique et affirmé par l'ECBU précédé, après 3 mois, d'une bandelette urinaire (voir Diagnostic).<br />

2<br />

3<br />

4<br />

Critères d'hospitalisation<br />

L'hospitalisation est recommandée pour le nourrisson fébrile avant 3 mois ainsi que pour l'enfant de plus de 3 mois, fébrile et ayant<br />

des signes cliniques d'infection sévère Accord Pro avec signes de gravité (fièvre mal tolérée, altération de l'état général, troubles<br />

hémodynamiques, déshydratation) ou des facteurs de risque de complications (uropathie connue, immunodépression, contexte<br />

socio-économique défavorable).<br />

Traitement<br />

La stratégie thérapeutique est la même en cas d'hospitalisation ou de traitement en ambulatoire.<br />

Le traitement probabiliste de 1 re intention repose sur les C3G injectables pour une durée brève (2 à 4 jours), suivies d'une<br />

antibiothérapie orale. Il est recommandé de prescrire en 1 re intention Grade A la ceftriaxone (IV ou IM à l'hôpital, IM en ambulatoire)<br />

ou le céfotaxime (IV à l'hôpital). La forme IM de la ceftriaxone contenant de la lidocaïne, la douleur au point d'injection s'en trouve<br />

réduite.<br />

La gentamicine IM ou IV peut aussi être utilisée en traitement d'attaque Accord Pro en association aux C3G IM ou IV dans les<br />

PNA sévères, ou en monothérapie en cas d'allergie aux bêtalactamines chez les sujets à fonction rénale normale, ou en association<br />

à l'amoxicilline en cas d'infection à entérocoques.<br />

Selon les résultats de l'antibiogramme, le relais oral fait appel au sulfaméthoxazole-triméthoprime (contre-indiqué avant l'âge d'un<br />

mois) ou au céfixime (contre-indiqué avant 6 mois). Avant 1 mois, l'antibiothérapie reste IV pendant toute la durée du traitement. La<br />

durée totale du traitement de la PNA est de 10 à 14 jours. Grade B<br />

Il convient de prendre en charge une instabilité vésicale, une constipation, des adhérences préputiales, etc.<br />

Examens complémentaires<br />

L'échographie est réalisée dans les 48 heures suivant un premier épisode de PNA à la recherche d'une dilatation pyélocalicielle ou<br />

d'une atteinte du parenchyme rénal.<br />

NFS, dosages de la procalcitonine ou de la CRP, urée et créatininémie.<br />

L'hémoculture est recommandée chez les enfants hospitalisés (syndrome septique ou âge < 3 mois).<br />

La place de la cystographie rétrograde est discutée.<br />

La recherche systématique d'un reflux vésico-urétérorénal après un 1 er épisode de PNA est discutable. L'objectif est le dépistage<br />

des reflux vésico-urétérorénaux de haut grade à risque élevé de cicatrices rénales. L'indication de la cystographie rétrograde pourrait<br />

se limiter aux situations suivantes : rein unique, anomalies rénales échographiques, récidive de PNA, situations dans lesquelles<br />

l'antibioprophylaxie ou la chirurgie présentent un réel bénéfice.<br />

Suivi et adaptation du traitement<br />

Modalités de prélèvement des urines<br />

Prélèvement<br />

Technique Utilisation En pratique<br />

En milieu de jet Enfants ayant des mictions volontaires.<br />

Peut aussi être proposée pour les nourrissons<br />

et les enfants trop jeunes pour uriner sur<br />

commande.<br />

Nourrisson ou jeune enfant maintenu allongé sur le dos,<br />

sans couche ou couche ouverte, sur les genoux d'un adulte<br />

prêt à prélever les urines en milieu de jet au moment de la<br />

miction spontanée.<br />

Les nourrissons urinent toutes les 20 à 30 minutes : le<br />

temps d'attente est finalement le même que lorsque l'on<br />

pose une poche à urine, avec de meilleurs résultats.<br />

Poche à urine Enfants qui ne peuvent uriner à la demande. La poche adhésive doit être enlevée dès l'émission des<br />

urines et ne doit pas rester en place plus de 30 minutes.<br />

Ponction<br />

suspubienne<br />

(sous<br />

échographie)<br />

cathétérisme<br />

urétral<br />

(sonde<br />

souple)<br />

En cas de difficultés diagnostiques et si<br />

l'antibiothérapie est considérée comme urgente,<br />

en fonction des habitudes et des possibilités des<br />

services. Grade B<br />

À l'hôpital uniquement<br />

Recueil : Quelle que soit la méthode de prélèvement utilisée, le recueil des urines doit être précédé d'une toilette soigneuse de la<br />

région périnéale au savon et avec un antiseptique (Dakin dilué, chlorexidine), suivie d'un rinçage à l'eau, la présence d'antiseptique<br />

dans l'échantillon pouvant inhiber la croissance bactérienne.<br />

Conservation : Les urines recueillies dans un récipient stérile doivent être immédiatement envoyées au laboratoire car<br />

l'ensemencement doit idéalement avoir lieu dans les 20 minutes. À défaut, leur conservation ne doit jamais dépasser 2 heures à<br />

température ambiante ou 24 heures à + 4° C.<br />

Conseils aux patients<br />

Les règles d'hygiène périnéale doivent être expliquées aux parents et, lorsque c'est possible, aux enfants : boissons abondantes,<br />

mictions régulières (toutes les 2 à 3 heures) et complètes, essuyage d'avant en arrière.


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Les récidives de PNA étant fréquentes (1/3 des cas), une bandelette urinaire doit être pratiquée à domicile en cas de réapparition<br />

d'une fièvre. Une consultation est nécessaire en cas de résultat positif ou discordant, ou si la réalisation de la bandelette est difficile.<br />

Dépistage et suivi des complications<br />

Bandelettes réactives<br />

Les bandelettes réactives comportant la recherche de leucocytes et de nitrites sont utiles au dépistage des récidives d'infection urinaire.<br />

À condition que le recueil des urines soit effectué dans les mêmes conditions que l'ECBU, les bandelettes ont une valeur prédictive<br />

négative de 97 % si l'on considère à la fois la négativité des leucocytes et des nitrites. Après 3 mois, ce test présente un intérêt évident<br />

en cas de fièvre isolée. Avant 3 mois, la valeur prédictive négative est insuffisante.<br />

Recours à un avis spécialisé<br />

Il n'existe pas de consensus sur l'intérêt des examens d'imagerie au décours d'une PNA. En cas d'évolution inhabituelle ou de récidive,<br />

un avis spécialisé est nécessaire.<br />

Reflux vésico-urétérorénal<br />

La recherche systématique d'un reflux vésico-urétérorénal après un 1 er épisode de PNA est discutable. L'objectif est le dépistage des<br />

reflux vésico-urétérorénaux de haut grade à risque élevé de cicatrices rénales. L'indication de la cystographie rétrograde pourrait se<br />

limiter aux situations suivantes : rein unique, anomalies rénales échographiques, récidive de PNA, situations dans lesquelles<br />

l'antibioprophylaxie ou la chirurgie présentent un réel bénéfice.<br />

Par ailleurs, la procalcitonine est un marqueur biologique qui semble intéressant : une valeur < 0,5 ng/ml lors d'une PNA excluerait à<br />

100 % un reflux vésico-urétérorénal de haut grade, permettant ainsi d'éviter des cystographies rétrogrades inutiles.<br />

Antibioprophylaxie<br />

Il n'existe à ce jour aucune étude clinique de bonne qualité démontrant le bénéfice de l'antibioprophylaxie urinaire systématique. Il est<br />

acceptable de ne pas prescrire d'antibiotiques au long cours aux enfants ayant eu une première PNA et porteurs de reflux<br />

vésico-urétérorénal de bas grades I, II, ou III (grade I : reflux urétéral ; grade II : reflux urétéral atteignant le bassinet et les calices sans<br />

dilatation ; grade III : dilatation légère de l'uretère et du bassinet).<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Céphalosporines de 3 e génération injectables<br />

Parmi les céphalosporines de 3 e génération (C3G) injectables,<br />

la ceftriaxone est recommandée en 1 re intention dans le<br />

traitement des PNA Grade A . En pratique de ville, la ceftriaxone IM est adaptée au traitement des PNA.<br />

poso Elle est prescrite à raison de 50 mg/kg par jour en une seule injection, sans dépasser la dose adulte (1 g par jour).<br />

La ceftriaxone est contre-indiquée en cas d'allergie aux céphalosporines, chez le prématuré jusqu'à l'âge corrigé de 41 SA (terme<br />

de naissance + âge postnatal en semaines) et chez le nouveau-né à terme jusqu'à 28 jours de vie en cas d'hyperbilirubinémie<br />

(risque de déplacement de la bilirubine) et/ou d'apports calciques IV (risque de précipitation).<br />

Les effets secondaires sont essentiellement cutanés (éruptions d'allure allergique, urticaire).<br />

La ceftriaxone ne doit pas être mélangée à des solutions contenant du calcium (risque de précipitation à l'origine d'exceptionnels<br />

accidents graves).<br />

Le céfotaxime est recommandé comme traitement de 1 re intention des pyélonéphrites de l'enfant, uniquement pour les patients<br />

hospitalisés.<br />

poso Il s'administre à raison de 100 mg/kg par jour, en 3 ou 4 injections IV, sans dépasser la dose adulte (4 g par jour).<br />

céfotaxime<br />

CEFOTAXIME MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 0,5 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 1 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 0,5 g pdre/solv p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM/IV<br />

ceftriaxone<br />

CEFTRIAXONE 1 g/3,5 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 1g/10 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/2 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/5 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 1 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV/SC<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 2 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE SANDOZ 2 g pdre p sol p perf


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CEFTRIAXONE TEVA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 2 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 500 mg pdre p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/10 ml pdre/solv p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/3,5 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/2 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/5 ml pdre/solv p sol inj<br />

Gentamicine<br />

La gentamicine est un aminoside indiqué dans les infections à bacilles Gram- définis comme sensibles, notamment dans leurs<br />

manifestations rénales et urologiques. Selon les recommandations de l'Afssaps, la gentamicine peut être utilisée chez l'enfant et le<br />

nourrisson en traitement d'attaque de la PNA Accord Pro en association aux C3G injectables dans les formes sévères, en<br />

association à l'amoxicilline en cas d'infection à entérocoque ou en monothérapie notamment en cas d'allergie aux bêtalactamines<br />

chez le sujet à fonction rénale normale. La voie intramusculaire (IM) est à privilégier, la voie intraveineuse (IV) en perfusion<br />

discontinue peut être utilisée.<br />

Les contre-indications de la gentamicine sont l'allergie aux aminosides et la myasthénie.<br />

Le risque de néphrotoxicité et d'ototoxicité existe, même lors de traitements courts.<br />

poso Chez l'enfant et le nourrisson ayant une fonction rénale normale, la posologie recommandée est de 3 mg/kg par jour en<br />

injection IM ou IV pour une durée brève de 2 à 4 jours, relayée par une antibiothérapie orale adaptée aux résultats de<br />

l'antibiogramme. Le rythme des injections préconisé est, selon l'Afssaps, d'une injection quotidienne unique et, selon l'AMM,<br />

de 3 injections IM à raison de 1 mg/kg toutes les 8 heures, sous contrôle des taux sériques de l'antibiotique chez le<br />

nourrisson ; chez le nouveau-né, l'AMM indique une posologie de 3 à 6 mg/kg par jour en perfusion IV sous contrôle des taux<br />

sériques de l'antibiotique.<br />

gentamicine<br />

GENTALLINE 10 mg sol inj<br />

GENTALLINE 40 mg sol inj<br />

GENTALLINE 80 mg sol inj<br />

GENTAMICINE B. BRAUN 1 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE B. BRAUN 3 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 10 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 160 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 40 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 80 mg sol inj<br />

Association sulfaméthoxazole-triméthoprime<br />

L' association sulfaméthoxazole-triméthoprime dispose d'une AMM dans le traitement des infections urinaires de l'enfant et du<br />

nourrisson.<br />

poso La posologie recommandée est de 30 mg/kg par jour de sulfaméthoxazole et de 6 mg/kg par jour de triméthoprime en<br />

2 prises par jour. Selon l'AMM, la posologie peut être augmentée de moitié en cas d'infection sévère.<br />

Cette association est contre-indiquée avant l'âge de 1 mois et en cas d'hypersensibilité à l'un des composants, aux sulfamides en<br />

particulier.<br />

Les effets indésirables sont dominés par les manifestations cutanées, parfois graves (syndrome de Lyell).<br />

sulfaméthoxazole + triméthoprime<br />

BACTRIM susp buv pédiatrique<br />

Céfixime<br />

Le céfixime est une C3G orale indiquée dans le traitement des pyélonéphrites aiguës en relais d'une antibiothérapie parentérale<br />

d'au moins 4 jours.<br />

poso Prescrit à la posologie de 8 mg/kg par jour en 2 administrations chez l'enfant de plus de 6 mois, le céfixime est une alternative<br />

thérapeutique au sulfaméthoxazole-triméthoprime notamment en cas de résistance, d'intolérance ou de contre-indication<br />

Grade B .<br />

Le céfixime est contre-indiqué en cas d'allergie connue aux céphalosporines.<br />

Les effets indésirables sont essentiellement d'ordre digestif, parfois sévères (colites pseudomembraneuses).<br />

céfixime<br />

CEFIXIME 100 mg/5 ml pdre p susp buv en fl<br />

CEFIXIME 200 mg cp pellic<br />

CEFIXIME EVOLUGEN 200 mg cp pellic<br />

OROKEN 100 mg/5 ml pdre p susp buv enf<br />

OROKEN 200 mg cp pellic<br />

OROKEN 40 mg/5 ml pdre p susp buv nour<br />

Amoxicilline


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L' amoxicilline est une aminopénicilline réputée à large spectre. L'évolution des résistances bactériennes des entérobactéries, en<br />

particulier celle des infections urinaires, fait que cette molécule n'a plus d'indication en traitement de 1 re intention dans ce cadre. La<br />

seule exception est représentée par les infections à entérocoques.<br />

poso Dans ce cas, l'amoxicilline peut être utilisée en traitement d'attaque (100 mg/kg par jour en 3-4 injections IV ou IM sans<br />

dépasser 4 g par jour) en association éventuellement avec la gentamicine.<br />

On pourrait être tenté, en traitement de relais, lorsque la souche isolée est sensible, de prescrire l'amoxicilline et/ou l'association<br />

amoxicilline-acide clavulanique. En fait, les paramètres pharmacologiques de ces deux molécules n'encouragent pas leur utilisation.<br />

amoxicilline<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IV<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g/5 ml pdre/solv p sol inj IM<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 2 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE SODIQUE 1 g sol inj IM<br />

BACTOX 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

BACTOX 500 mg pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 1 g pdr p sol inj IM IV<br />

CLAMOXYL 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 2 g pdre p sol inj IV<br />

CLAMOXYL 500 mg pdr p sol inj IM IV<br />

Ciprofloxacine<br />

La ciprofloxacine est une fluoroquinolone qui peut être envisagée dans le traitement de la PNA, de manière exceptionnelle, chez<br />

l'enfant prépubère après documentation microbiologique, en cas de résistance aux autres familles d'antibiotiques.<br />

poso Ce traitement doit être initié à l'hôpital à raison de 10 à 15 mg/kg 2 fois par jour (1,5 g par jour au maximum).<br />

Les fluoroquinolones ne peuvent en général pas être utilisées chez l'enfant jusqu'à la fin de la période de croissance, en raison<br />

d'une toxicité articulaire (arthropathie sévère touchant électivement les grosses articulations). Chez l'adolescent pubère, les<br />

fluoroquinolones peuvent être utilisées comme chez l'adulte.<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 250 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg/5 ml glé/sol p susp buv<br />

CIFLOX 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 250 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 500 mg cp pellic séc<br />

CIPROFLOXACINE ACTAVIS 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE ARROW 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE PANPHARMA 500 mg cp pellic<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Autres antibiotiques<br />

D' autres antibiotiques disposent d'une AMM dans le traitement des pyélonéphrites aiguës.<br />

amikacine<br />

AMIKACINE MYLAN 1 g pdre p sol inj<br />

AMIKACINE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

AMIKACINE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

AMIKACINE MYLAN ENFANTS ET NOURRISSONS 50 mg/ml sol inj<br />

AMIKACINE WINTHROP 250 mg lyoph p us parentér<br />

amoxicilline + acide clavulanique<br />

AMOXICILLINE/AC CLAVULANIQUE 100 mg/12,5 mg pdre p susp buv enf<br />

AUGMENTIN 100 mg/12,5 mg p ml pdre p susp buv Enf<br />

AUGMENTIN 500 mg/62,5 mg pdre p susp buv Enf<br />

céfépime<br />

AXEPIM 1 g pdre p us parentér<br />

AXEPIM 2 g pdre p us parentér<br />

AXEPIM 500 mg pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 0,5 g pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 1 g pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 2 g pdre p us parentér<br />

cefpirome<br />

CEFROM 2 g/20 ml pdre/solv p sol inj IV<br />

cefpodoxime<br />

CEFPODOXIME PROXETIL 40 mg/5 ml glé p susp buv<br />

ORELOX 8 mg/ml glé p susp buv enfant nourrisson<br />

ceftazidime<br />

CEFTAZIDIME 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTAZIDIME 500 mg pdre p sol inj


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FORTUM 250 mg pdre p sol inj IM/IV enfant nourrisson<br />

FORTUM 500 mg pdre p sol inj IM/IV enfant nourrisson<br />

céfuroxime<br />

CEFUROXIME KABI 1500 mg pdre p sol p perf<br />

CEFUROXIME KABI 750 mg pdre p sol inj<br />

CEFUROXIME MYLAN 1,5 g pdre p sol p perf<br />

CEFUROXIME MYLAN 750 mg pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFUROXIME PANPHARMA 1,5 g pdre p sol p perf<br />

CEFUROXIME PANPHARMA 750 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CEFUROXIME TEVA 1,5 g pdre p sol p perf<br />

ZINNAT 1,5 g pdre p sol p perf<br />

ZINNAT 250 mg pdre p sol inj IM IV<br />

ZINNAT 750 mg pdre p sol inj IM IV<br />

ZINNAT 750 mg pdre/solv p susp inj IM<br />

cilastatine + imipénem<br />

IMIPENEM CILASTATINE KABI 250 mg/250 mg pdre p sol p perf<br />

IMIPENEM CILASTATINE PANPHARMA 250 mg/250 mg pdre p sol p perf<br />

IMIPENEM/CILASTATINE 500 mg/500 mg pdre p perf<br />

IMIPENEM/CILASTATINE 500mg/500mg pdre p perf avec système de transfert p poche<br />

TIENAM 500 mg/500 mg pdre p sol p perf<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf IV<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE 200 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 400 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE KABI 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE KABI 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 400 mg/200 ml sol p perf<br />

méropénem<br />

MERONEM 1 g pdre p sol inj IV<br />

MEROPENEM 1 g pdre p sol inj ou p perf<br />

sulfaméthoxazole + triméthoprime<br />

BACTRIM sol p perf IV<br />

téicoplanine<br />

TARGOCID 100 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TARGOCID 200 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TARGOCID 400 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TEICOPLANINE MYLAN 100 mg pdre p sol inj ou perf<br />

TEICOPLANINE MYLAN 200 mg pdre p sol inj ou perf<br />

TEICOPLANINE MYLAN 400 mg pdre p sol inj ou perf<br />

Tests de dépistage<br />

Bandelettes réactives<br />

Les bandelettes réactives permettent la détermination, dans l'urine, des paramètres suivants : densité urinaire, leucocytes, nitrites,<br />

pH, protéines, glucose, cétones, urobilinogène, bilirubine, sang. Le nombre de ces paramètres est variable selon le type de<br />

bandelettes. Certaines d'entre elles sont à usage grand public.<br />

À titre d'exemple et de façon non exhaustive : COMBUR 2 TEST LN (50 bandelettes), COMBUR 7 TEST (100 bandelettes),<br />

COMBUR 10 TEST (100 bandelettes).


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Références<br />

« Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires du nourrisson et de l'enfant », Recommandations<br />

de bonne pratique, Afssaps (diffusion suspendue en mars <strong>2011</strong> en attente d'actualisation).<br />

http://www.afssaps.fr/content/download/32456/425545/version/1/file/lp-110311-nit...<br />

Rémic, référentiel en microbiologie médicale, groupe Rémic de la Société française de microbiologie (SFM), 2010, 4 e édition.<br />

Mise à jour de la Reco : 16/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


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La maladie<br />

Pyélonéphrite aiguë simple de l'adulte<br />

La pyélonéphrite est l'infection bactérienne des voies excrétrices du rein. Elle peut être propagée au parenchyme rénal et mener à un<br />

sepsis. Cette Reco est centrée sur la pyélonéphrite aiguë dite « simple » c'est-à-dire « en l'absence de facteur de risque de<br />

complication ». Elle ne concerne que la femme. Les autres formes, dites « compliquées », sont traitées dans la rubrique Cas particuliers.<br />

Physiopathologie<br />

La pyélonéphrite aiguë simple de la femme, en dehors de la grossesse, est une infection urinaire haute provoquée généralement par<br />

des germes d'origine vésicale. Leur passage de la vessie à l'uretère peut être lié à des reflux intermittents, secondaires à l'inflammation<br />

vésicale, ou à la progression bactérienne rétrograde par adhérence à la muqueuse.<br />

Epidémiologie<br />

Les espèces bactériennes le plus fréquemment responsables d'infections urinaires communautaires sont les entérobactéries. Parmi<br />

celles-ci, Escherichia coli reste la bactérie la plus souvent isolée, toutes formes cliniques confondues et quels que soient l'âge et le<br />

sexe du patient, devant Proteus mirabilis et Klebsiella pneumoniae.<br />

Complications<br />

Une hypotension et des troubles digestifs peuvent se manifester à la phase initiale. Une résistance au traitement peut entraîner la<br />

constitution d'une suppuration intraparenchymateuse.<br />

Diagnostic<br />

La notion de pyélonéphrite aiguë dite « simple » suppose l'absence de facteur de risque de complication Accord Pro , notamment :<br />

absence de pathologie organique ou fonctionnelle de l'arbre urinaire (résidu vésical, reflux, lithiase, tumeur, acte récent, etc.) ;<br />

absence de pathologie particulière (diabète, immunodépression, insuffisance rénale, etc.) ;<br />

absence de terrain particulier (sujet âgé avec comorbidité, femme enceinte, etc.).<br />

La pyélonéphrite aiguë simple de la femme associe douleur lombaire unilatérale, fièvre > 38 °C et signes de cystite. L'endolorissement<br />

lombaire est parfois bilatéral. Les signes de cystite peuvent manquer.<br />

Le diagnostic sera confirmé par la bandelette urinaire puis par les résultats de l'ECBU : leucocyturie > 10 4/ml et bactériurie > 105<br />

colonies/ml. Une échographie rénale et vésicale dans les 24 heures est recommandée Grade C .<br />

Certaines pyélonéphrites simples peuvent être d'évolution sévère, par exemple se compliquer de sepsis grave.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tous les patients présentant une pyélonéphrite aiguë simple.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Éradication des germes.<br />

Soulagement de la douleur.<br />

Prévention des complications.


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Prise en charge<br />

Pyélonéphrite aiguë simple


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1 Évaluation initiale<br />

La présence de signes de gravité (signes de choc, forme hyperalgique, gros rein, vomissements), des conditions sociales<br />

défavorables, un doute diagnostique ou un doute sur l'observance du traitement imposent une hospitalisation.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

Bilan complémentaire<br />

Il comprend au minimum un examen cytobactériologique de l'urine (ECBU) avant traitement, suivi d'une radio d'abdomen sans<br />

préparation (ASP) et d'une échographie rénale et vésicale dans les 24 heures Grade C . En milieu hospitalier, des hémocultures sont<br />

souvent réalisées, ainsi que NFS et CRP.<br />

Traitement ambulatoire d'une pyélonéphrite<br />

Le traitement probabiliste recommandé est une monothérapie par une céphalosporine de 3 e génération par voie parentérale<br />

Grade A (ceftriaxone IV, IM, SC ou céfotaxime IV, IM) ou par une fluoroquinolone per os Grade A (ciprofloxacine, lévofloxacine ou<br />

ofloxacine). En 2010, il existe environ 15 % de résistance aux fluoroquinolones pour E. coli.<br />

Suite du traitement selon résultat de l'antibiogramme : amoxicilline, amoxicilline-acide clavulanique, céfixime, fluoroquinolone ou<br />

sulfaméthoxazole-triméthoprime.<br />

La durée du traitement est de 10 à 14 jours Accord Pro . Sous réserve que le germe soit sensible, un traitement de 7 jours est<br />

possible par une fluoroquinolone.<br />

Traitement hospitalier d'une pyélonéphrite<br />

En l'absence de signe de gravité, il est identique au traitement ambulatoire.<br />

En cas de signe de gravité, une monothérapie IV par céphalosporine de 3 e génération (ceftriaxone ou céfotaxime) ou par<br />

fluoroquinolone est recommandée.<br />

Un aminoside en 1 injection IM quotidienne pendant 1 à 3 jours peut être associé. Grade B La supériorité de cette association sur<br />

la monothérapie n'est pas démontrée.<br />

La suite du traitement est fonction du résultat de l'antibiogramme : amoxicilline, amoxicilline-acide clavulanique, céfixime,<br />

fluoroquinolone ou sulfaméthoxazole-triméthoprime.<br />

La durée du traitement est de 10 à 14 jours. Accord Pro<br />

Réévaluation après 2 à 4 jours<br />

La persistance de la fièvre et de signes locaux impose un nouvel ECBU et un complément d'imagerie : uro-TDM (scanner avec<br />

injection).<br />

Une évolution défavorable peut être due à des anomalies de la voie excrétrice, à un abcès du rein ou à la résistance du germe.<br />

Cas particuliers<br />

Pyélonéphrites aiguës compliquées<br />

Ce sont des infections urinaires associées à l'un ou plusieurs facteurs de risque de complication (voir Diagnostic).<br />

Les examens recommandés dans le cadre de la prise en charge sont des hémocultures Accord Pro , un uro-TDM, examen le plus<br />

sensible Grade A , ou à défaut une échographie des voies urinaires. Un avis urologique sera demandé en cas de doute sur<br />

l'existence d'un obstacle justifiant en urgence un drainage des urines.<br />

L'hospitalisation est nécessaire en présence de signes de gravité.<br />

Le traitement probabiliste est le même que celui d'une pyélonéphrite aiguë avec signes de gravité.<br />

En cas d'allergie ou d'intolérance, un aminoside en monothérapie (gentamycine ou nétilmycine ou tobramycine) ou l'aztréonam<br />

(prescription hospitalière) peuvent être utilisés.<br />

Une surveillance cytobactériologique des urines devra être réalisée au 3 e jour et 4 à 6 semaines après la fin du traitement<br />

Accord Pro .<br />

Le traitement doit parfois être prolongé jusqu'à 21 jours ou plus en fonction des situations cliniques. Accord Pro<br />

Pyélonéphrites aiguës chez l'homme<br />

Elles sont beaucoup moins fréquentes que chez la femme, survenant surtout à partir de 50 ans.<br />

L'infection prostatique est quasi constante et doit donc être documentée.<br />

L'antibiothérapie doit être adaptée aux germes et la localisation prostatique, et prescrite pour une durée de traitement suffisante (2 à<br />

6 semaines).<br />

Pyélonéphrite aiguë et grossesse<br />

Une pyélonéphrite aiguë gravidique peut mettre en jeu le pronostic maternofœtal.<br />

Il est indispensable d'effectuer rapidement un ECBU et une échographie des voies urinaires.<br />

Dans la majorité des cas, il est préférable d'hospitaliser la patiente en milieu obstétrical.<br />

Le traitement probabiliste est une céphalosporine de 3 e génération par voie injectable (ceftriaxone ou céfotaxime). Grade A En cas<br />

d'allergie, l'aztréonam (utilisable pendant toute la grossesse), un aminoside en monothérapie (gentamycine ou nétilmycine ou<br />

tobramycine) ou une fluoroquinolone sont des options possibles après avis spécialisé. Accord Pro<br />

Il est recommandé de réaliser un ECBU 48 heures après le début du traitement, dans les 8 à 10 jours après son arrêt ainsi que<br />

mensuellement, jusqu'au terme de la grossesse. Accord Pro<br />

Conseils aux patients


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Une pyélonéphrite est une infection des voies urinaires supérieures dans laquelle le rein lui-même est infecté. Mal traitée, l'infection<br />

peut avoir des conséquences graves sur le rein et toucher d'autres organes.<br />

Un traitement antibiotique est indispensable et doit être pris pendant la durée prescrite.<br />

L'identification de la bactérie responsable de l'infection est importante pour être certain de donner un antibiotique actif sur des<br />

microbes de plus en plus résistants.<br />

Des récidives sont possibles et doivent faire rechercher une anomalie du rein ou des voies urinaires. Des boissons abondantes sont<br />

un des moyens de les prévenir.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références<br />

Fluoroquinolones<br />

Les fluoroquinolones sont recommandées en 1 re intention et en monothérapie dans le traitement de la pyélonéphrite simple.<br />

Seules la ciprofloxacine, l'ofloxacine et la lévofloxacine sont indiquées dans le traitement de la pyélonéphrite aiguë par voies orale et<br />

parentérale. L'énoxacine et la loméfloxacine s'administrent uniquement par voie orale. La durée du traitement est de 7 jours au<br />

minimum, pouvant aller jusqu'à 21 jours. La prescription d'une molécule de la famille des quinolones dans les 6 mois précédents<br />

(quel qu'en ait été le motif) expose au risque de sélection de souches moins sensibles et constitue une limite à l'utilisation des<br />

fluoroquinolones. Dans la recommandation de l'Afssaps, la péfloxacine est exclue du choix en raison d'un risque aggravé de<br />

tendinopathie, même en traitement court. Les fluoroquinolones sont contre-indiquées notamment en cas d'antécédent de<br />

tendinopathie survenue lors d'un traitement antérieur par fluoroquinolones. Parmi les effets indésirables : survenue possible<br />

d'arthralgies, de myalgies, de tendinites et de ruptures du tendon d'Achille. Les tendinites touchent préférentiellement les sujets de<br />

plus de 65 ans, ceux soumis à une corticothérapie, ceux ayant déjà présenté une tendinite et ceux pratiquant une activité sportive<br />

intense. Il faut éviter l'exposition solaire pendant le traitement du fait d'un risque important de photosensibilisation et d'éruption<br />

cutanée.<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf IV<br />

CIFLOX 250 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg/5 ml glé/sol p susp buv<br />

CIFLOX 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 200 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 250 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 400 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 500 mg cp pellic séc<br />

CIPROFLOXACINE ACTAVIS 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE ARROW 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE KABI 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE KABI 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE PANPHARMA 500 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 400 mg/200 ml sol p perf<br />

énoxacine<br />

ENOXOR 200 mg cp pellic<br />

loméfloxacine<br />

DECALOGIFLOX 400 mg cp pellic séc<br />

ofloxacine<br />

OFLOCET 200 mg cp pellic séc<br />

OFLOCET 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE 200 mg cp séc<br />

OFLOXACINE AGUETTANT 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MACO-PHARMA 200 mg/40 ml S inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/40 ml sol p perf<br />

OFLOXACINE WINTHROP 200 mg/40 ml sol p perf<br />

Céphalosporines de 3 e<br />

génération (C3G)


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Les céphalosporines de 3 e génération (C3G) ont des indications très différentes selon qu'elles sont administrées par voie orale ou<br />

parentérale : en effet, les concentrations sériques et tissulaires des C3G injectables sont nettement supérieures à celles des C3G<br />

orales.<br />

C3G par voie parentérale<br />

Les C3G par voie parentérale recommandées dans le traitement probabiliste de la pyélonéphrite Grade A sont la ceftriaxone par<br />

voies IV, IM ou SC et le céfotaxime par voies IV ou IM.<br />

céfotaxime<br />

CEFOTAXIME MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME MYLAN 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 0,5 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 1 g pdre p sol inj IM IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 2 g pdre p sol inj IM/IV<br />

CEFOTAXIME WINTHROP 500 mg pdre p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 0,5 g pdre/solv p sol inj IM IV<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAFORAN 1 g pdre/solv p sol inj IM/IV<br />

ceftriaxone<br />

CEFTRIAXONE 1 g/3,5 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 1g/10 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/2 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/5 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 1 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV/SC<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 2 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE SANDOZ 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE TEVA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 2 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 500 mg pdre p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/10 ml pdre/solv p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/3,5 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/2 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/5 ml pdre/solv p sol inj<br />

C3G orales<br />

Parmi les C3G orales disponibles en France, seul le céfixime est indiqué dans le traitement des pyélonéphrites, uniquement en<br />

relais d'une antibiothérapie parentérale. Il est également conseillé chez la femme enceinte pour laquelle les fluoroquinolones sont<br />

contre-indiquées.<br />

céfixime<br />

CEFIXIME 200 mg cp pellic<br />

CEFIXIME EVOLUGEN 200 mg cp pellic<br />

OROKEN 200 mg cp pellic<br />

Aminosides<br />

Les aminosides ont une place limitée en raison de leurs inconvénients : marge thérapeutique très étroite, néphrotoxicité et<br />

ototoxicité, nécessité dans certains cas d'un suivi des taux sériques, voie d'administration parentérale. En revanche, leur spectre<br />

antibactérien est très adapté à l'épidémiologie bactérienne de la pyélonéphrite aiguë. Ils peuvent donc être proposés en traitement<br />

court probabiliste en association à une fluoroquinolone ou à une céphalosporine de 3 e génération en début de traitement, après<br />

estimation du débit de filtration glomérulaire.<br />

amikacine<br />

AMIKACINE MYLAN 1 g pdre p sol inj<br />

AMIKACINE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

AMIKACINE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

AMIKACINE WINTHROP 250 mg lyoph p us parentér<br />

gentamicine<br />

GENTALLINE 10 mg sol inj<br />

GENTALLINE 160 mg sol inj<br />

GENTALLINE 40 mg sol inj<br />

GENTALLINE 80 mg sol inj


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GENTAMICINE B. BRAUN 1 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE B. BRAUN 3 mg/ml sol p perf<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 10 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 160 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 40 mg sol inj<br />

GENTAMICINE PANPHARMA 80 mg sol inj<br />

nétilmicine<br />

NETROMICINE 100 mg/1 ml sol inj<br />

NETROMICINE 150 mg/1,5 ml sol inj<br />

NETROMICINE 25 mg/1 ml sol inj pédiatrique<br />

NETROMICINE 50 mg/2 ml sol inj pédiatrique<br />

tobramycine<br />

NEBCINE 100 mg sol inj<br />

NEBCINE 25 mg sol inj<br />

NEBCINE 75 mg sol inj<br />

TOBRAMYCINE B. BRAUN 1 mg/ml sol p perf<br />

TOBRAMYCINE B. BRAUN 3 mg/ml sol p perf<br />

TOBRAMYCINE MYLAN 25 mg/2,5 ml sol inj IM/IV en flacon<br />

TOBRAMYCINE MYLAN 75 mg/1,5 ml sol inj IM/IV en flacon<br />

Association sulfaméthoxazole-triméthoprime<br />

L' association sulfaméthoxazole-triméthoprime ne doit plus être utilisée dans le traitement probabiliste de la pyélonéphrite en<br />

raison de l'évolution des résistances des entérobactéries. Elle reste un traitement utile après documentation bactériologique. Cette<br />

association est contre-indiquée notamment en cas d'antécédents d'hypersensibilité à l'un des composants (en particulier,<br />

hypersensibilité aux sulfamides). Les effets indésirables sont dominés par les éruptions cutanées, parfois graves (syndrome de<br />

Lyell).<br />

sulfaméthoxazole + triméthoprime<br />

BACTRIM cp adulte<br />

BACTRIM FORTE cp<br />

BACTRIM sol p perf IV<br />

SULFAMETHOXAZOLE/TRIMETHOPRIME 800 mg/160 mg cp<br />

Certains antibiotiques (amoxicilline, association amoxicilline-acide clavulanique)<br />

Certains antibiotiques (amoxicilline, association amoxicilline-acide clavulanique) ne doivent plus être utilisés dans le<br />

traitement probabiliste de la pyélonéphrite en raison de l'évolution des résistances des entérobactéries. Ils ne doivent être prescrits<br />

qu'au vu d'un antibiogramme.<br />

acide clavulanique + amoxicilline<br />

AMOXICILLINE/AC CLAVULANIQUE 1 g/125 mg pdre p susp buv ad<br />

AMOXICILLINE/AC CLAVULANIQUE 500 mg/62,5 mg cp pellic ad<br />

AMOXICILLINE/ACIDE CLAVULANIQUE EG 1 g/125 mg ADULTES pdre p susp buv sach-dose<br />

AMOXICILLINE/ACIDE CLAVULANIQUE EG ADULTES 500 mg/62,5 mg cp pellic<br />

AUGMENTIN 1 g/125 mg pdre p susp buv Ad<br />

AUGMENTIN 500 mg/62,5 mg cp pellic adulte<br />

amoxicilline<br />

AMOXICILLINE 1 g cp dispers (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 1 g pdre susp buv<br />

AMOXICILLINE 125 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 250 mg/5 ml pdre p susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg gél (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE 500 mg/5 ml pdre susp buv (Gpe CLAMOXYL)<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj IV<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 1 g/5 ml pdre/solv p sol inj IM<br />

AMOXICILLINE PANPHARMA 2 g pdre p sol inj<br />

AMOXICILLINE SODIQUE 1 g sol inj IM<br />

BACTOX 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

BACTOX 500 mg pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 1 g cp dispers<br />

CLAMOXYL 1 g pdr p sol inj IM IV<br />

CLAMOXYL 1 g pdre/solv p sol inj IM<br />

CLAMOXYL 125 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 2 g pdre p sol inj IV<br />

CLAMOXYL 250 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

CLAMOXYL 500 mg gél<br />

CLAMOXYL 500 mg pdr p sol inj IM IV<br />

CLAMOXYL 500 mg/5 ml pdre p susp buv<br />

Médicaments non cités dans les références


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Aztréonam<br />

L' aztréonam,<br />

monobactam, ne fait l'objet d'aucune recommandation en France en traitement probabiliste initial de la pyélonéphrite<br />

aiguë simple, mais a une indication d'AMM, notamment dans le traitement des infections des voies urinaires hautes et basses,<br />

compliquées ou non, prostatites aiguës, urétrites gonococciques, et des infections sévères à bactéries à Gram- sensibles. Selon<br />

l'Afssaps (2008), il pourrait être prescrit dans le traitement des pyélonéphrites aiguës compliquées en cas d'allergie ou d'intolérance<br />

aux antibiotiques recommandés en 1 re intention, ou en cas d'allergie aux céphalosporines chez la femme enceinte, après avis<br />

spécialisé. La prescription de cet antibiotique est uniquement hospitalière.<br />

aztréonam<br />

AZACTAM 1 g pdre/sol p us parentér<br />

Autres antibiotiques<br />

D' autres antibiotiques disposent d'une indication dans divers types d'infection urinaire.<br />

acide clavulanique + ticarcilline<br />

CLAVENTIN 3 g/200 mg pdre p sol inj IV<br />

CLAVENTIN 5 g/200 mg pdre p sol inj IV<br />

céfépime<br />

AXEPIM 1 g pdre p us parentér<br />

AXEPIM 2 g pdre p us parentér<br />

AXEPIM 500 mg pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 0,5 g pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 1 g pdre p us parentér<br />

CEFEPIME 2 g pdre p us parentér<br />

cefpirome<br />

CEFROM 2 g/20 ml pdre/solv p sol inj IV<br />

cilastatine + imipénem<br />

IMIPENEM CILASTATINE KABI 250 mg/250 mg pdre p sol p perf<br />

IMIPENEM CILASTATINE PANPHARMA 250 mg/250 mg pdre p sol p perf<br />

IMIPENEM/CILASTATINE 500 mg/500 mg pdre p perf<br />

IMIPENEM/CILASTATINE 500mg/500mg pdre p perf avec système de transfert p poche<br />

TIENAM 500 mg/500 mg pdre p sol p perf<br />

doripénem<br />

DORIBAX 250 mg pdre p sol p perf<br />

DORIBAX 500 mg pdre p sol p perf<br />

méropénem<br />

MERONEM 1 g pdre p sol inj IV<br />

MEROPENEM 1 g pdre p sol inj ou p perf<br />

norfloxacine<br />

NORFLOXACINE 400 mg cp pellic<br />

NOROXINE 400 mg cp enr<br />

péfloxacine<br />

PEFLACINE 400 mg cp pellic séc<br />

PEFLACINE 400 mg sol inj p perf IV<br />

téicoplanine<br />

TARGOCID 100 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TARGOCID 200 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TARGOCID 400 mg lyoph/sol p us parentér<br />

TEICOPLANINE MYLAN 100 mg pdre p sol inj ou perf<br />

TEICOPLANINE MYLAN 200 mg pdre p sol inj ou perf<br />

TEICOPLANINE MYLAN 400 mg pdre p sol inj ou perf<br />

ticarcilline<br />

TICARPEN 5 g pdre p sol inj IV<br />

Références<br />

« Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires de l'adulte », Recommandations de bonne<br />

pratique, Afssaps (diffusion suspendue en mars <strong>2011</strong> en attente d'actualisation).<br />

http://www.afssaps.fr/content/download/32456/425545/version/1/file/lp-110311-nit...<br />

« International Clinical Practice Guidelines for the Treatment of Acute Uncomplicated Cystitis and Pyelonephritis in Women : a 2010<br />

Update by the Infectious Diseases Society of America and the European Society for Microbiology and Infectious Diseases », Clinical<br />

Infectious Diseases,<br />

<strong>2011</strong>, n° 52, supp. 5, pp. 103–120.<br />

http://cid.oxfordjournals.org/content/52/5/e103.long<br />

Mise à jour de la Reco : 16/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


VIDAL Recos - Urétrite masculine - Copyright VIDAL <strong>2011</strong> Page 1/7<br />

La maladie<br />

Urétrite masculine<br />

L'urétrite est une inflammation de l'urètre d'origine le plus souvent infectieuse. C'est une infection sexuellement transmissible (IST).<br />

Physiopathologie<br />

L'infection de l'urètre est fréquente et récidivante. Elle n'entraîne pas d'immunisation, ce qui facilite la survenue de récidives.<br />

Epidémiologie<br />

Neisseria gonorrhoeae, responsable de 49 000 cas d'infections par an en France, est une infection à déclaration obligatoire. Le risque<br />

de co-infection par Chlamydiae trachomatis (20 à 30 % des cas), justifie la coprescription d'un traitement antichlamydien systématique.<br />

La co-infection par le VIH est fréquente. D'autres germes peuvent être en cause : Trichomonas vaginalis, Ureaplasma urealyticum,<br />

Mycoplasma genitallium.<br />

L'augmentation actuelle de la résistance des gonocoques, principalement aux quinolones (de 40 à 50 %) et à<br />

un moindre degré à la pénicilline (11 %) et aux cyclines (18 %), devient un réel problème.<br />

Complications<br />

Neisseria gonorrhoeae peut être à l'origine d'une prostatite aiguë, d'une orchiépididymite aiguë, d'une bactériémie subaiguë fébrile avec<br />

des localisations secondaires. Chlamydiae trachomatis est la 1 re cause d'orchiépididymite de l'homme jeune, de cervicite et de<br />

salpingite (> 50 % des cas) chez la partenaire. Elle peut aussi être responsable de douleurs pelviennes chroniques, d'une grossesse<br />

extra-utérine ou d'une stérilité.<br />

Diagnostic<br />

L'urétrite masculine est caractérisée par un écoulement urétral purulent, mucopurulent ou séreux. Les signes fonctionnels sont peu<br />

spécifiques et inconstants : prurit canalaire, brûlures mictionnelles, dysurie, pollakiurie. Les formes non compliquées sont apyrétiques.<br />

Le diagnostic clinique doit être confirmé par un examen bactériologique, qui nécessite un prélèvement et doit permettre de déceler une<br />

résistance aux antibiotiques.<br />

Quels patients traiter ?<br />

Tous les patients ayant des symptômes d'urétrite doivent être traités après prélèvement.<br />

Les partenaires doivent être systématiquement dépistés et traités.<br />

Objectifs de la prise en charge<br />

Soulagement de la douleur et de la gêne fonctionnelle.<br />

Guérison de l'infection et prévention des complications.<br />

Prévention de la transmission de la maladie.


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Prise en charge<br />

Urétrite masculine


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1 Orientation étiologique<br />

Origine gonococcique : incubation courte (2 à 5 jours), urétrite aiguë symptomatique (98 % des cas), avec un écoulement spontané<br />

purulent jaune verdâtre (60 % des cas), clair (30 % des cas) ou absent (10 % des cas) et des signes fonctionnels associés (la<br />

chaude-pisse).<br />

Origine chlamydienne : incubation plus longue (10 à 15 jours), avec un écoulement clair (20 à 60 % des cas), purulent (15 à 30 %<br />

des cas) ou absent (25 à 50 % des cas) et des signes associés (prurit endo-urétral, dysurie). L'infection isolée à Chlamydiae<br />

trachomatis n'est symptomatique que dans 50 % des cas.<br />

2<br />

3<br />

4<br />

5<br />

6<br />

Bilan de MST et dépistage des partenaires<br />

La recherche d'infections associées est systématique : syphilis, VIH, condylomes, herpès génital et hépatite B.<br />

Tous les partenaires identifiés dans les 2 mois précédant le diagnostic doivent être dépistés et traités si nécessaire.<br />

Diagnostic bactériologique<br />

Neisseria gonorrhoeae : écouvillonnage d'un écoulement urétral extériorisé ou écouvillonnage endo-urétral (douloureux) en<br />

absence d'écoulement.<br />

Chlamydiae trachomatis : 1 er jet urinaire 2 heures après la dernière miction. La recherche est basée sur l'amplification génique.<br />

Traitement de 1 re intention de Chlamydia<br />

Macrolide (azithromycine 1 g en monodose) ou cycline (doxycycline 100 mg 2 fois par jour durant 7 jours).<br />

Traitement de 1 re intention du gonocoque<br />

Pour prendre en compte le risque de gonocoques résistants, le schéma suivant est recommandé :<br />

ceftriaxone : 500 mg en 1 seule injection (IM ou IV) ;<br />

en cas de contre-indication aux bêtalactamines : spectinomycine, 2 g en 1 seule injection IM ;<br />

en cas de refus ou de voie parentérale impossible : céfixime, 400 mg en 1 prise orale unique.<br />

Associé au traitement antichlamydien : voir plus haut.<br />

La ciprofloxacine 500 mg per os en 1 prise ne doit être prescrite qu'après antibiogramme, en raison de l'augmentation des<br />

résistances du gonocoque qui peuvent toucher 50 % des gonocoques en cause.<br />

Échec du traitement<br />

Une réinfection ou une mauvaise observance nécessitent un nouveau traitement après la recherche de résistances.<br />

Cas particuliers<br />

Urétrite du patient homosexuel<br />

La présence d'une gonococcie pharyngée et/ou anale associée, souvent asymptomatique, doit être recherchée par des prélèvements<br />

(le portage pharyngé de Neisseria gonorrhoeae est de 14 à 16 % chez les homosexuels).<br />

Prise en charge des partenaires femmes<br />

Le diagnostic clinique, difficile, nécessite un examen gynécologique et général complet, à la recherche d'une forme compliquée<br />

(fréquente et paucisymptomatique) : bactériémie, salpingite, endométrite, arthrite.<br />

Un double prélèvement, urétral et cervicovaginal, doit systématiquement être réalisé. On doit attendre le résultat des cultures pour<br />

traiter.<br />

Une échographie pelvienne et un avis spécialisé (gynécologue) peuvent être demandés.<br />

Urétrites dues à d'autres agents infectieux<br />

D'autres agents infectieux peuvent être plus rarement en cause : Trichomonas vaginalis et Ureaplasma urealyticum.<br />

Ils doivent être évoqués chez les patients restant symptomatiques malgré un 1 er traitement bien conduit et chez qui une réinfection<br />

est peu probable. Le diagnostic peut être confirmé par des prélèvements locaux adaptés (écoulement, prélèvements endo-urétraux<br />

ou analyse du 1 er jet d'urine) à la recherche de Trichomonas vaginalis et Ureaplasma urealyticum.<br />

Le traitement antibiotique associe un traitement antitrichomonas par métronidazole, ornidazole, secnidazole ou tinidazole (en<br />

monoprise ou non) et un traitement antiureaplasma par cycline, macrolide (érythromycine, josamycine, azithromycine, roxithromycine)<br />

ou fluoroquinolone pendant 7 jours.<br />

Conseils aux patients<br />

Il est indispensable de prévenir et de traiter simultanément le(s) partenaire(s).<br />

Informer le patient qu'il doit revenir en consultation si les symptômes persistent au 3 e jour pour une adaptation éventuelle de son<br />

traitement. Une consultation de suivi en fin de traitement (7 e jour) est souhaitable pour vérifier la guérison clinique.<br />

Les rapports protégés (utilisation de préservatifs) sont préconisés pendant 7 jours après un traitement en dose unique ou jusqu'à la fin<br />

d'un traitement en plusieurs prises et jusqu'à disparition des symptômes.<br />

Les préservatifs ont fait la preuve de leur efficacité pour éviter les urétrites et les IST en général.<br />

Traitements<br />

Médicaments cités dans les références


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Céphalosporines de 3 e génération<br />

Les céphalosporines de 3 e génération sont des antibiotiques antibactériens, bactéricides, de la famille des bêtalactamines. Elles<br />

s'administrent soit par voie parentérale (ceftriaxone), soit par voie orale (céfixime). Leur efficacité est de 98 à 100 %. Aucune souche<br />

résistante à la ceftriaxone n'a été isolée en France. L'administration par voie injectable de ceftriaxone, souvent pratiquée en<br />

consultation, offre une meilleure garantie d'observance, notion qui doit être prise en compte pour la population concernée. Le<br />

céfixime (par voie orale) est moins bactéricide que la ceftriaxone. Sa biodisponibilité est variable. Des échecs thérapeutiques ont été<br />

décrits avec le céfixime pour des souches de Neisseria gonorrhoeae nécessitant des CMI ≥ 0,5 mg/l. La sensibilité des gonocoques<br />

au céfixime doit être systématiquement vérifiée. Les céphalosporines de 3 e génération bénéficient d'une bonne tolérance, en dehors<br />

de troubles digestifs avec le céfixime (10-20 %). La ceftriaxone a une meilleure diffusion pharyngée (angine gonococcique) que le<br />

céfixime.<br />

céfixime<br />

CEFIXIME 200 mg cp pellic<br />

CEFIXIME EVOLUGEN 200 mg cp pellic<br />

OROKEN 200 mg cp pellic<br />

ceftriaxone<br />

CEFTRIAXONE 1 g/3,5 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 1g/10 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/2 ml sol inj IM<br />

CEFTRIAXONE 500 mg/5 ml sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 1 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE KABI 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 1 g pdre p sol inj IM/IV/SC<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 2 g pdre p sol inj IV<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE MYLAN 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE PANPHARMA 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE SANDOZ 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE TEVA 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 2 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE TEVA 500 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 1 g pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 2 g pdre p sol p perf<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 250 mg pdre p sol inj<br />

CEFTRIAXONE WINTHROP 500 mg pdre p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/10 ml pdre/solv p sol inj<br />

ROCEPHINE 1 g/3,5 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/2 ml pdre/solv p sol inj IM SC<br />

ROCEPHINE 500 mg/5 ml pdre/solv p sol inj<br />

Spectinomycine<br />

La spectinomycine est un antibiotique antibactérien, bactéricide, de la famille des aminoglycosides. Son efficacité est de 90 %. La<br />

résistance de Neisseria gonorrhoeae à la spectinomycine n'a pas encore été observée en France et reste encore rare à l'étranger.<br />

Les échecs cliniques décrits sous spectinomycine en cas de localisation pharyngée (échec dans 1 cas sur 2), ne font pas de ce<br />

médicament un traitement de 1 re intention. La spectinomycine pourra être proposée aux sujets ayant une contre-indication aux<br />

bêtalactamines. Sa présentation est adaptée à une prise unique.<br />

spectinomycine<br />

TROBICINE 2 g pdre/solv p sol inj<br />

Fluoroquinolones<br />

Les fluoroquinolones sont des antibiotiques de synthèse, bactéricides. Elles entraînent un risque de tendinopathie et de<br />

photosensibilisation. La ciprofloxacine est la plus active des fluoroquinolones vis-à-vis de Neisseria gonorrhoeae,<br />

notamment en cas<br />

de localisation pharyngée. Cependant, l'augmentation du nombre de résistances du gonocoque à la ciprofloxacine (de 40 à 50 % en<br />

France) nécessite une identification bactériologique et un antibiogramme. Son efficacité est de 95 à 100 %.<br />

ciprofloxacine<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 200 mg/100 ml sol p perf IV<br />

CIFLOX 250 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIFLOX 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

CIFLOX 500 mg/5 ml glé/sol p susp buv<br />

CIFLOX 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 200 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 250 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE 400 mg sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE 500 mg cp pellic séc<br />

CIPROFLOXACINE ACTAVIS 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE ARROW 750 mg cp pellic


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CIPROFLOXACINE KABI 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE KABI 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MACOPHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE MYLAN PHARMA 400 mg/200 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE PANPHARMA 500 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 200 mg/100 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 400 mg/200 ml sol p perf en poche<br />

CIPROFLOXACINE TEVA 750 mg cp pellic<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 200 mg/100 ml sol p perf<br />

CIPROFLOXACINE WINTHROP 400 mg/200 ml sol p perf<br />

UNIFLOX 500 mg cp pellic séc<br />

Cyclines<br />

Les cyclines sont des antibiotiques de la famille des tétracyclines. Elles constituent le traitement de référence des infections à<br />

Chlamydiae trachomatis.<br />

Comparée à la tétracycline base, la doxycycline est une cycline semi-synthétique caractérisée par une<br />

meilleure résorption orale (95 %), une tolérance et une diffusion supérieures, et une demi-vie d'élimination plus longue. Son<br />

utilisation doit être privilégiée. Les effets secondaires sont dominés par le risque de photosensibilisation en cas d'exposition solaire<br />

concomitante à la prise du traitement.<br />

doxycycline<br />

DOXYCYCLINE 100 mg cp séc<br />

DOXYCYCLINE HYCLATE 100 mg gél<br />

DOXYCYLINE PHARMACIE CENTRALE DES ARMEES 100 mg cp<br />

VIBRAMYCINE N 100 mg cp séc<br />

Macrolides<br />

Les macrolides sont des antibiotiques bactériostatiques. Ils possèdent une bonne diffusion tissulaire et une forte pénétration<br />

intracellulaire leur permettant une action sur Chlamydiae trachomatis et les mycoplasmes. L'azithromycine est le seul macrolide à<br />

pouvoir être utilisé en monoprise. Des effets secondaires digestifs sont parfois décrits. La survenue d'une diarrhée doit faire évoquer<br />

la possibilité d'une colite pseudomembraneuse, rare mais gravissime. Des manifestations cutanées allergiques et des hépatites ont<br />

également été rapportées.<br />

azithromycine<br />

AZITHROMYCINE 250 mg cp pellic monodose<br />

ZITHROMAX MONODOSE 250 mg cp pellic<br />

Nitro-5 imidazolés<br />

Les nitro-5 imidazolés sont indiqués dans le traitement des urétrites à Trichomonas vaginalis.<br />

Certains peuvent être administrés en<br />

1 seule prise : ornidazole, secnidazole et tinidazole.<br />

métronidazole<br />

FLAGYL 250 mg cp pellic<br />

FLAGYL 4 % susp buv<br />

FLAGYL 500 mg cp pellic<br />

ornidazole<br />

TIBERAL 500 mg cp<br />

secnidazole<br />

SECNOL 2 g glé sachet-dose<br />

tinidazole<br />

FASIGYNE 500 mg cp enr<br />

Médicaments non cités dans les références<br />

Autres fluoroquinolones<br />

Les autres fluoroquinolones (ofloxacine, norfloxacine et péfloxacine) ne peuvent pas être recommandées du fait d'une résistance<br />

croisée entre toutes les fluoroquinolones. De plus, ces molécules présentent d'emblée une moins bonne activité que la ciprofloxacine<br />

vis-à-vis du gonocoque, la norfloxacine étant la moins performante, et l'ofloxacine présentant une mauvaise diffusion pharyngée. En<br />

revanche, l'ofloxacine est habituellement proposée pour le traitement des infections à Chlamydiae trachomatis.<br />

énoxacine<br />

ENOXOR 200 mg cp pellic<br />

norfloxacine<br />

NORFLOXACINE 400 mg cp pellic<br />

NOROXINE 400 mg cp enr<br />

ofloxacine


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OFLOCET 200 mg cp pellic séc<br />

OFLOCET 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE 200 mg cp séc<br />

OFLOXACINE AGUETTANT 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MACO-PHARMA 200 mg/40 ml S inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN 200 mg/40 ml sol inj p perf<br />

OFLOXACINE MYLAN PHARMA 200 mg/40 ml sol p perf<br />

OFLOXACINE WINTHROP 200 mg/40 ml sol p perf<br />

péfloxacine<br />

PEFLACINE 400 mg cp pellic séc<br />

PEFLACINE 400 mg sol inj p perf IV<br />

PEFLACINE MONODOSE 400 mg cp enr<br />

Autres médicaments<br />

D' autres médicaments ont une indication d'AMM dans le traitement des urétrites, gonococciques ou non, ou dans le traitement des<br />

infections génito-urinaires.<br />

aztréonam<br />

AZACTAM 1 g pdre/sol p us parentér<br />

érythromycine<br />

ABBOTICINE 200 mg/5 ml glé p susp buv<br />

EGERY 250 mg gél (µgle gastrorésis)<br />

ERY 125 mg glé p susp buv nour<br />

ERYTHROCINE 1000 mg glé p sol buv adulte<br />

ERYTHROCINE 250 mg/5 ml glé p sirop<br />

ERYTHROCINE 500 mg cp pellic<br />

ERYTHROCINE 500 mg glé p sol buv<br />

ERYTHROCINE 500 mg/5 ml glé p sirop<br />

ERYTHROMYCINE ETHYLSUCCINATE 250 mg glé<br />

ERYTHROMYCINE ETHYLSUCCINATE 250 mg glé p sirop<br />

ERYTHROMYCINE PROPIONATE 500 mg cp<br />

josamycine<br />

JOSACINE 1000 mg cp dispers adulte<br />

JOSACINE 125 mg/5 ml glé p susp buv<br />

JOSACINE 250 mg/5 ml glé p susp buv<br />

JOSACINE 500 mg cp pellic<br />

JOSACINE 500 mg/5 ml glé p susp buv<br />

lymécycline<br />

TETRALYSAL 150 mg gél<br />

TETRALYSAL 300 mg gél<br />

méthylènecycline<br />

LYSOCLINE 300 mg gél<br />

PHYSIOMYCINE 300 mg gél<br />

midécamycine diacétate<br />

MOSIL 400 mg cp pellic<br />

MOSIL 800 mg pdre p susp buv<br />

minocycline<br />

MESTACINE 100 mg cp pellic séc<br />

MINOCYCLINE 100 mg cp<br />

MINOCYCLINE 100 mg gél<br />

MINOCYCLINE 50 mg gél<br />

MYNOCINE 100 mg gél<br />

MYNOCINE 50 mg gél<br />

roxithromycine<br />

CLARAMID 100 mg cp pellic Enf<br />

CLARAMID 150 mg cp pellic<br />

ROXITHROMYCINE 100 mg cp pellic<br />

ROXITHROMYCINE 150 mg cp pellic<br />

RULID 100 mg cp pellic<br />

RULID 150 mg cp enr<br />

RULID 50 mg cp séc p susp buv<br />

spiramycine<br />

ROVAMYCINE 1,5 M UI cp pellic<br />

ROVAMYCINE 3 MUI cp pellic<br />

SPIRAMYCINE 3 MUI cp<br />

thiamphénicol<br />

THIOPHENICOL 250 mg cp<br />

THIOPHENICOL 750 mg pdre/solv p sol inj


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Références<br />

« Mise au point sur le traitement antibiotique probabiliste des urétrites et cervicites non compliquées », Afssaps, octobre 2008.<br />

http://www.afssaps.fr/var/afssaps_site/storage/original/application/cbe108d870b0...<br />

« Les gonococcies en France en 2000 : données du réseau RENAGO », Goulet V. et al. , in : Infection à VIH, maladies sexuellement<br />

transmissibles et hépatite C,<br />

Institut de veille sanitaire (InVS)/Surveillance nationale des maladies infectieuses, novembre 2002,<br />

pp. 63-68.<br />

http://www.invs.sante.fr/publications/2003/snmi/SNMI-E-p035-078.<strong>pdf</strong><br />

« Les infections à C. trachomatis en France en 2000 : données du réseau RENACHLA », Goulet V. et al. , in : Infection à VIH, maladies<br />

sexuellement transmissibles et hépatite C,<br />

Institut de veille sanitaire (InVS)/Surveillance nationale des maladies infectieuses, novembre<br />

2002, pp. 57-62.<br />

http://www.invs.sante.fr/publications/2003/snmi/SNMI-E-p035-078.<strong>pdf</strong><br />

« Sexually Transmitted Diseases Treatment Guidelines 2002 », Centers for Diseases Control and Prevention, Morbidity and Mortality<br />

Weekly Report (MMWR) , 2002, vol. 51, n° RR-6, p. 84.<br />

http://www.cdc.gov/mmwr/preview/mmwrhtml/rr5106a1.htm<br />

« Pharyngeal Gonorrhoea : the Forgotten Reservoir », Janier M. et al. , Sexually Transmitted Infections,<br />

2003, vol. 79, n° 4, p. 345.<br />

Mise à jour de la Reco : 17/06/<strong>2011</strong><br />

Mise à jour des listes de médicaments : 23/06/<strong>2011</strong>


MALADIES<br />

Néphrologie<br />

SOMMAIRE<br />

MÉDICAMENTS<br />

Acidose métabolique (1) ............................ 1198<br />

Acidose métabolique (2) ............................ 1199<br />

Alcalose métabolique (1) ........................... 1200<br />

Alcalose métabolique (2) ........................... 1201<br />

Dyskaliémies (1) .......................................... 1202<br />

Dyskaliémies (2) .......................................... 1203<br />

Dyskaliémies (3) - hyperkaliémie ........... 1204 Résines hypokaliémiantes ........................ 1205<br />

Dyskaliémies (4) - hypokaliémie ............. 1206 Potassium (1) ................................................ 1207<br />

Potassium (2) ................................................ 1208<br />

Potassium (3) - pharmacologie ................ 1209<br />

Hypokaliémie des diurétiques (1) ........... 1210 Diurétiques de l’anse (1) ........................... 1211<br />

Hypokaliémie des diurétiques (2) ........... 1212 Diurétiques de l’anse (2) - pharmacologie 1213<br />

Diurétiques thiazidiques ............................ 1214<br />

Diurétiques antialdostérone ..................... 1215<br />

Autres diurétiques (1) et associations de<br />

diurétiques ................................................ 1216<br />

Autres diurétiques (2) et associations de<br />

diurétiques - pharmacologie ................ 1217<br />

Déshydratation extracellulaire (1) ........... 1218<br />

Déshydratation extracellulaire (2) ........... 1219<br />

Hyperhydratation intracellulaire (1) ....... 1220<br />

Hyperhydratation intracellulaire (2) ....... 1221<br />

Insuffisance rénale aiguë (1) .................... 1222<br />

Insuffisance rénale aiguë (2) .................... 1223<br />

Insuffisance rénale aiguë (3) .................... 1224<br />

Insuffisance rénale aiguë (4) .................... 1225<br />

Insuffisance rénale chronique (1) ............ 1226<br />

Insuffisance rénale chronique (2) ............ 1227<br />

Insuffisance rénale chronique (3) ............ 1228<br />

Insuffisance rénale chronique (4) ............ 1229<br />

Insuffisance rénale chronique (5) ............ 1230<br />

Insuffisance rénale chronique (6) ............ 1231<br />

Insuffisance rénale chronique (7) -<br />

troubles hydroélectrolytiques .............. 1232


1196 Néphrologie SOMMAIRE<br />

Insuffisance rénale chronique (8) - Chélateurs du phosphore (1) .................... 1234<br />

troubles ostéo-articulaires ................... 1233<br />

Chélateurs du phosphore (2) .................... 1235<br />

Insuffisance rénale chronique (9) - Agents stimulant l’érythropoïèse<br />

anémie ....................................................... 1236 (ASE) (1) ..................................................... 1237<br />

Agents stimulant l’érythropoïèse<br />

(ASE) (2) ..................................................... 1238<br />

Agents stimulant l’érythropoïèse<br />

(ASE) (3) ..................................................... 1239<br />

Insuffisance rénale chronique (10) -<br />

préparation à la dialyse ........................ 1240<br />

Œdèmes réfractaires .................................... 1241<br />

Syndrome néphrotique (1) ........................ 1242<br />

Syndrome néphrotique (2) ........................ 1243<br />

Transplantation rénale (1) ......................... 1244 Immunosupresseurs (transplantation) (1) .. 1245<br />

Transplantation rénale (2) ......................... 1246 Immunosupresseurs (transplantation) (2) .. 1247<br />

Transplantation rénale (3) ......................... 1248 Immunosupresseurs (transplantation) (3) .. 1249<br />

Immunosupresseurs (transplantation) (4) .. 1250<br />

Immunosupresseurs (transplantation) (5) .. 1251<br />

Immunosupresseurs (transplantation) (6) .. 1252<br />

Anticorps monoclonaux<br />

(transplantation) (1) ................................... 1253<br />

Anticorps monoclonaux<br />

(transplantation) (2) ................................... 1254


NOTES Néphrologie 1197<br />

NOTES


1198 Néphrologie ACIDOSE MÉTABOLIQUE<br />

ACIDOSE MÉTABOLIQUE (1)<br />

Diagnostic positif Traitement symptomatique<br />

Il repose sur la gazométrie artérielle. En cas d’acidose sévère (pH < 7,10)<br />

HCO Soit épuration extrarénale (oligo-anurie,<br />

- 3 < 22 mmol/L : diminution des<br />

bases tampon : (soit consommation par<br />

des ions H<br />

insuffisance rénale aiguë, hyperkaliémie<br />

sévère associée, ou cause toxique).<br />

+ en excès ; soit perte digestive<br />

ou urinaire).<br />

PaCO2 < 36 mmHg : tentative de<br />

Soit alcalinisation par bicarbonate de<br />

sodium lV.<br />

compensation respiratoire afin de normaliser<br />

le pH.<br />

pH < 7,38 : acidose « non compensée ».<br />

pH normal : acidose « compensée ».<br />

La quantité de bicarbonate nécessaire est<br />

-<br />

évaluée par la formule : mmoles de HCO3 à perfuser = espace de diffusion x correc-<br />

- tion souhaitée = [poids x 0,6] x [HCO3 sou-<br />

haité - HCO 3 - réel]<br />

Conduite à tenir<br />

En pratique, l’alcalinisation doit être par-<br />

Quatre réflexes immédiats en cas d’acidose tielle +++ (ramener les bicarbonates plassévère<br />

matiques à 16 mmol/L en environ 6 h), les<br />

Existe-t-il :<br />

risques d’une correction trop rapide étant :<br />

– un état de choc ?<br />

– une hyperventilation avec alcalose res-<br />

– une insuffisance rénale sévère ? piratoire (l’acidose du LCR se corrige plus<br />

– une acidocétose ?<br />

lentement) ;<br />

– une hyperkaliémie ?<br />

– une surcharge hydrosodée ;<br />

– une hypoxie tissulaire (augmentation<br />

Calcul du trou anionique (TA) de l’affinité Hb-O2 à pH alcalin) ;<br />

– plus rarement une hypokaliémie.<br />

TA « Classique » = [Na + K] - [Cl + HCO3] =<br />

16 ± 4 mmol/L.<br />

TA « Simplifié » = [Na] - [Cl + HCO3] = 12 ±<br />

4 mmol/L.<br />

Quatre solutés de bicarbonate de sodium IV<br />

- + (HCO3 ,Na ) sont disponibles :<br />

–isotonique= 14 ‰ = voie périphérique ;<br />

– hypertonique = 30 ‰ = voie centrale ;<br />

Le TA est augmenté en cas d’acidose<br />

métabolique par gain d’acide, et normal<br />

en cas d’acidose métabolique par perte de<br />

base.<br />

Le calcul permet donc d’approcher la<br />

cause de l’acidose métabolique.<br />

– semi-molaire = 42 ‰ = voie centrale ;<br />

– molaire = 84 ‰ = voie centrale.<br />

- 1 g apporte 12 mmol de HCO3 et<br />

12 mmoles de Na.<br />

En cas d’acidose modérée/chronique<br />

L’alcalinisation orale est indiquée en cas :<br />

d’insuffisance rénale chronique :<br />

Traitement<br />

– soit du BICARBONATE DE SODIUM OFFICI-<br />

Traitement étiologique<br />

Il sera appliqué chaque fois que possible ;<br />

lorsque l’acidose est modérée, il est parfois<br />

suffisant. Quelques exemples :<br />

– acidocétose diabétique : réhydratation<br />

+ insuline ;<br />

– acidose lactique par biguanides : épura-<br />

NAL (2 à 8 g/j) : EAUX DE VICHY (500/j<br />

apportent 2 g de HCO3Na), poudre en préparation<br />

officinale, gélules à 1 g,<br />

– soit ALCAPHOR (trométamol + citrates de<br />

sodium et de potassium) (2 à 8 g/j per os),<br />

qui n’apporte pas de sel ;<br />

d’acidose tubulaire :<br />

– de type I (distale) = le citrate de potassium<br />

tion extrarénale ; a l’avantage de corriger simultanément<br />

– intoxication par l’éthylène glycol ou le l’acidose et l’hypokaliémie (en l’absence<br />

méthanol : alcool éthylique ; d’insuffisance rénale),<br />

– prise en charge d’un état de choc, de –detypeII(proximale)= bicarbonate de<br />

convulsions, d’une diarrhée, etc.<br />

sodium.


ACIDOSE MÉTABOLIQUE Néphrologie 1199<br />

ACIDOSE MÉTABOLIQUE (2)<br />

Causes des acidoses métaboliques<br />

Acidose métabolique avec trou anionique simplifié augmenté (> 16 mM/L)<br />

Surcharge acide endogène :<br />

– céto-acidose (diabète, jeûne prolongé, stéatose hépatique éthylique) ;<br />

– acidose lactique (états de choc, intoxications, insuffisance hépatocellulaire, cancers, etc.) ;<br />

– rhabdomyolyses.<br />

Surcharge acide exogène (alcool méthylique, éthylène glycol, paraldéhyde, salicylés).<br />

Insuffisance rénale aiguë ou chronique terminale.<br />

Acidose métabolique avec trou anionique simplifié normal (12 ± 4 mM/L)<br />

Perte digestive de bicarbonates :<br />

– diarrhée ;<br />

– fistules biliaires, duodénales et pancréatiques ;<br />

– urétéro-sigmoïdostomie (urines riches en Cl - réabsorption de Cl - par le sigmoïde en<br />

échange de HCO 3 - !) ;<br />

– colestyramine (QUESTRAN) ;<br />

– MgSO 4 ; CaCl 2.<br />

Acidoses tubulaires rénales (proximale, distale).<br />

Rares cas de surcharge acide exogène avec apport chloré concomitant : HCl ; chlorhydrate<br />

d’arginine, de lysine, chlorure d’ammonium, méthionine.


1200 Néphrologie ALCALOSE MÉTABOLIQUE<br />

ALCALOSE MÉTABOLIQUE (1)<br />

Physiopathologie mation d’alcalins, réduction de la posolo-<br />

Pour générer une alcalose métabolique il gie de diurétiques, traitement des vomisfaut<br />

simultanément deux situations. sements, exérèse d’une tumeur villeuse,<br />

etc.<br />

Une élévation des bicarbonates<br />

plasmatiques<br />

Soit par perte d’ions H<br />

Traitement symptomatique<br />

Il est exclusivement réservé aux alcaloses<br />

+ (digestive ou<br />

rénale), ce qui entraîne une génération<br />

- d’ions HCO3 .<br />

Soit par apport excessif de bicarbonates<br />

(ou de ses précurseurs).<br />

Soit par diminution du volume de distribution<br />

des bicarbonates (déshydratation).<br />

Un défaut d’élimination des bicarbonates<br />

sévères (pH > 7,56) ou symptomatiques<br />

(troubles de vigilance, convulsions).<br />

Apports de chlore<br />

L’objectif est de corriger les déficits en<br />

sodium, chlore et potassium en apportant<br />

du NaCl et du KCl par voie orale ou paren-<br />

térale. Lorsque le traitement est efficace, il<br />

y a bicarbonaturie et le pH urinaire s’élève<br />

Soit par diminution du débit de filtration (passant en règle de 5,5 à plus de 8).<br />

glomérulaire. Acidification (rarement indiquée)<br />

Soit du fait d’une réabsorption tubulaire Lorsque l’« apport de chlore » a échoué :<br />

accrue (déficit en chlore ou en potassium, – soit inhibiteur de l’anhydrase carbodéshydratation).<br />

nique (augmente l’excrétion urinaire de<br />

Diagnostic<br />

bicarbonates) : acétazolamide (DIAMOX);<br />

– soit soluté acidifiant (chlorhydrate d’ar-<br />

Le diagnostic positif d’une alcalose méta-<br />

bolique est biologique :<br />

- – HCO3 > 26 mmol/L ;<br />

– PCO2 > 42 mmHg ;<br />

– pH > 7,42 (alcalose non compensée) ou<br />

normal (alcalose compensée).<br />

ginine, chlorhydrate d’ammonium, acide<br />

chlorhydrique dilué) ; la quantité de<br />

mmoles à perfuser en 6 à 12 h est évaluée<br />

par la formule : [0,6 x poids du patient] x<br />

[bicarbonates plasmatiques - 24].<br />

Dialyse<br />

Traitement<br />

Traitement étiologique<br />

Une séance d’épuration extrarénale est<br />

nécessaire lorsqu’une alcalose métabolique<br />

grave symptomatique survient chez<br />

Il est suffisant dans la majorité des cas. un patient porteur d’une insuffisance<br />

Quelques exemples : arrêt d’une consom-<br />

rénale totale ou terminale.


ALCALOSE MÉTABOLIQUE Néphrologie 1201<br />

ALCALOSE MÉTABOLIQUE (2)<br />

Causes d’alcalose métabolique<br />

Excès d’apports alcalins :<br />

– apport exagéré de bicarbonates ou de ses précurseurs ;<br />

– antiacides + résines échangeuses de cations ;<br />

– syndrome des « buveurs de lait et alcalins ».<br />

Alcaloses sensibles au chlore (avec déshydratation extracellulaire et chlorurie basse) :<br />

– vomissements ou aspiration gastrique, tumeur villeuse du côlon ;<br />

– diurétiques (chlorurie variable) ;<br />

– correction rapide d’une hypercapnie chronique.<br />

Alcaloses insensibles au chlore (pas de déshydratation, chlorurie variable, hypokaliémie<br />

profonde, parfois HTA) :<br />

– hyperaldostéronisme primaire ;<br />

– syndrome de Cushing, syndrome de Bartter et syndrome de Gitelman ;<br />

– pénicillines à fortes doses.


1202 Néphrologie DYSKALIÉMIES<br />

DYSKALIÉMIES (1)<br />

Métabolisme du potassium Hyperkaliémie<br />

Le potassium est le principal cation<br />

intracellulaire. Les cellules musculaires<br />

abritent 98 % du potassium total de l’organisme.<br />

Une pompe (Na/K-ATPase) per-<br />

met de maintenir un important gradient<br />

entre milieux intra- et extracellulaires.<br />

Définition<br />

+ K plasmatique > 5 mmol/L.<br />

L’hyperkaliémie suppose la conjonction<br />

de 2 facteurs :<br />

– augmentation de l’apport potassique<br />

Les apports de potassium sont alimen- extracellulaire, alimentaire ou intracellutaires<br />

(environ 4 g/j), et les sorties fécales laire ;<br />

(5 %, obligatoires) et rénales (95 %, régulables).<br />

Le maintien d’une kaliémie normale<br />

– un défaut d’excrétion rénale.<br />

(3,5 à 5 mmol/L) est possible grâce à des Principales causes d’hyperkaliémie<br />

transferts transcellulaires de potassium à<br />

court terme, et à une régulation rénale à long<br />

terme.<br />

Trois facteurs stimulent l’entrée du<br />

Fausses hyperkaliémies<br />

Garrot serré, hémolyse in vitro, thrombo-<br />

cytose ou hyperleucocytose majeures.<br />

potassium dans les cellules :<br />

Transfert extracellulaire du potassium<br />

– la stimulation β2-adrénergique ;<br />

– l’insuline ;<br />

– un pH alcalin.<br />

Concernant la régulation rénale, après fil-<br />

tration glomérulaire, le potassium est totalement<br />

réabsorbé au niveau du tube<br />

contourné proximal et de l’anse de Henle.<br />

Une sécrétion distale permet son élimination<br />

urinaire. Cette sécrétion tubulaire distale est<br />

Acidose métabolique ou respiratoire.<br />

Destruction cellulaire massive (rhabdomyolyse,<br />

lyse tumorale des chimiothérapies).<br />

Hypo-insulinisme.<br />

Paralysie périodique hyperkaliémique.<br />

Traitement β-bloquant.<br />

Intoxication digitalique.<br />

stimulée par l’hyperkaliémie, l’aldostérone,<br />

un pH alcalin, un débit urinaire élevé.<br />

Défaut d’élimination rénale du potassium<br />

Insuffisance rénale sévère (aiguë, chro-<br />

K nique).<br />

+ 1g= 25 mmol de K +<br />

KCI 1 g = 13 mmol de K +<br />

Déficit minéralocorticoïde.<br />

Aliments riches<br />

mmol/100 g).<br />

en potassium (en<br />

Traitement par spironolactone, amiloride,<br />

AINS, IEC.<br />

Fruits et légumes secs : 15 à 40.<br />

Jambon fumé : 15.<br />

Pommes de terre, champignons, épinards : 12.<br />

Chocolat, bananes : 10.<br />

Poissons, crustacés, viandes : 4 à 10.<br />

Légumes et fruits frais : 5 à 7.<br />

Jus de fruits (pour 100 mL) : 4.<br />

Surcharge exogène en potassium<br />

Perfusion intraveineuse, apports<br />

(dont les sels de régime).<br />

oraux


DYSKALIÉMIES Néphrologie 1203<br />

DYSKALIÉMIES (2)<br />

Hypokaliémie – hyperaldostéronisme (primaire ou<br />

Définition<br />

K<br />

secondaire) ;<br />

– autres hyperminéralocorticismes* ;<br />

+ plasmatique ≤ 3,5 mmol/L.<br />

– hypercortisolisme endogène (syndrome<br />

Principales causes d’hypokaliémie<br />

Insuffisance des apports alimentaires (3 g/j<br />

au minimum)<br />

Anorexie, régimes.<br />

de Cushing).<br />

Causes rénales :<br />

– néphropathies interstitielles avec perte<br />

de sel ;<br />

– acidoses tubulaires distales, acidocétose<br />

Transfert intracellulaire accru du K diabétique ;<br />

+<br />

– syndrome de Bartter, syndrome de<br />

Alcalose aiguë (métabolique ou respiratoire).<br />

Insulinothérapie (surtout lors d’une aci-<br />

docétose).<br />

Stimulation β2-adrénergique. Hypothermie.<br />

Intoxication : chloroquine, théophylline,<br />

baryum.<br />

Vitaminothérapie B12 ou GM-CSF.<br />

Maladie de Westphal (autosomique<br />

dominante).<br />

Pertes rénales de K<br />

Gitelman (maladies héréditaires touchant<br />

les cellules tubulaires rénales et mimant la<br />

prise de diurétiques, respectivement de<br />

l’anse et thiazidiques) ;<br />

– polyurie (après levée d’obstacle,<br />

nécrose tubulaire, transplantation).<br />

+ Pertes digestives de K (kaliurèse « appro-<br />

priée » en quelques jours < 20 mmol/24 h)<br />

Hautes : vomissements, aspiration digestive.<br />

La perte d’HCl favorise une alcalose<br />

métabolique et un profond déficit chloré<br />

+ (kaliurèse « inappropriée<br />

» supérieure à 20 mmol/24 h)<br />

(chlorémie et chlorurie basses).<br />

Basses : diarrhée aiguë infectieuse, mala-<br />

Causes médicamenteuses : die des laxatifs, tumeur villeuse, VIPome,<br />

– diurétiques : acétazolamide, de l’anse, Zollinger-Ellison. Il y a souvent acidose<br />

thiazidiques, osmotiques ; métabolique (perte digestive de bicarbo-<br />

– tubulotoxiques : lithium, cisplatine, nates), et pas de déficit chloré.<br />

amphotéricine B, pénicilline à forte dose, Pertes cutanées de K +<br />

etc. Sudation extrême.<br />

– corticothérapie.<br />

Brûlures étendues.<br />

Causes endocriniennes (avec HTA) : Hémodialyse, plasmaphérèse<br />

* Théoriquement contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale.


1204 Néphrologie DYSKALIÉMIES<br />

DYSKALIÉMIES (3) - HYPERKALIÉMIE<br />

Traitement ambulatoire dique (en cas d’anomalies ECG) : en l’absence<br />

de traitement digitalique, gluconate<br />

Conditions nécessaires<br />

– Hyperkaliémie modérée (< 6 mmol/L),<br />

de calcium à 10 % : 1 amp. en IVL.<br />

chronique ou non rapidement évolutive.<br />

– ECG normal.<br />

– Cause identifiée et contrôlable.<br />

Mesures d’effet rapide (30 min)<br />

Le but est de transférer le potassium en<br />

intracellulaire :<br />

Il s’agit souvent en pratique d’une hyper- – alcalinisation : 50 cm3 de bicarbonate de<br />

kaliémie chez un patient porteur d’une<br />

insuffisance rénale chronique, éventuellement<br />

dialysé. Outre l’insuffisance rénale, il<br />

faut rechercher un facteur associé (erreur<br />

de régime, médicament hyperkaliémiant).<br />

Éviction des aliments riches en potassium<br />

sodium à 42 ‰ en 15 min.<br />

– perfusion intraveineuse de 500 mL de<br />

glucose à 30 % avec 30 UI d’insuline ordi-<br />

naire en 30 min ;<br />

– perfusion intraveineuse d’agents 2- mimétiques : salbutamol 0,5 mg dans<br />

Fruits secs, bananes, cerises, légumes, cho- 100 mL en 15 min ;<br />

colat, etc. Alcalinisation et glucosé/insuline sont<br />

Arrêt des médicaments hyperkaliémiants<br />

Antialdostérone*, inhibiteurs de l’enzyme<br />

de conversion**, AINS, sels de régime (sels<br />

de potassium)***.<br />

Traitement hypokaliémiant<br />

souvent associés, mais contre-indiqués en<br />

cas d’œdème pulmonaire car ils aggravent<br />

la surcharge. Les agents β2-mimé tiques ont une efficacité inconstante et<br />

variable.<br />

Correction d’une éventuelle acidose Mesures à efficacité retardée (2 h)<br />

métabolique : EAUX DE VICHY : 500 mL/j.<br />

Résine hypokaliémiante (KAYEXALATE,<br />

CALCIUM SORBISTERIT).<br />

Diurétique hypokaliémiant (furosémide,<br />

bumétanide).<br />

Traitement hospitalier<br />

Résine hypokaliémiante : KAYEXALATE per<br />

os : 2 c-mes. (30 g) ou en lavement : 60 g.<br />

Ces mesures ont une efficacité modérée,<br />

permettant le plus souvent de faire baisser<br />

la kaliémie de 1 à 1,5 mmol en 1 h, en<br />

attendant la mise en œuvre d’une séance<br />

Impératif dans les situations suivantes :<br />

d’épuration extrarénale.<br />

– hyperkaliémie sévère (> 6 mmol/L) ;<br />

– hyperkaliémie rapidement évolutive Épuration extrarénale (EER)<br />

(lyse cellulaire, insuffisance rénale aiguë) ;<br />

– cause et évolutivité incertaines ;<br />

– anomalies ECG.<br />

Le plus souvent par hémodialyse contre<br />

un bain pauvre en potassium, qui permet<br />

de corriger complètement et rapidement<br />

Mise en condition du patient<br />

Hospitalisation en réanimation.<br />

Surveillance cardioscopique continue.<br />

Voie veineuse périphérique.<br />

Mesures d’effet immédiat<br />

la kaliémie. Une EER prolongée plus de<br />

4 h, voire continue, est nécessaire lorsque<br />

l’hyperkaliémie est rapidement évolutive<br />

en raison d’une cause difficilement contrôlable<br />

(lyse cellulaire).<br />

K + 1g= 25 mmol de K +<br />

Le but est d’obtenir une protection transi-<br />

KCI 1 g = 13 mmol de K +<br />

toire contre l’hyperexcitabilité myocar-<br />

* Théoriquement contre-indiqués en cas d’insuffisance rénale.<br />

** La survenue d’une hyperkaliémie avec poussée d’insuffisance rénale sous IEC doit faire évoquer<br />

une maladie rénovasculaire ; les IEC ne sont pas contre-indiqués en situation d’insuffisance<br />

rénale chronique, mais motivent une surveillance biologique stricte.<br />

*** À éviter chez l’insuffisant rénal car très riches en K + .


RÉSINES HYPOKALIÉMIANTES Néphrologie 1205<br />

Polystyrène sulfonate de sodium<br />

KAYEXALATE<br />

RÉSINES HYPOKALIÉMIANTES<br />

Traitement initial : 30 c-mes. à 15 g (boîte 36,14 II 100 % 1,20<br />

– 1 à 4 c-mes./j 450 g)<br />

– ou en lavement (à garder 6 h, renouvelable)<br />

de 60 g dilués dans 100 mL de<br />

soluté glucosé à 10 %<br />

Traitement d’entretien (insuffisant rénal<br />

chronique, dialysé) : posologie variable<br />

(entre 3 c-mes./sem. et 2 c-mes./j)<br />

Polystyrène sulfonate de calcium<br />

CALCIUM-SORBISTERIT<br />

Idem KAYEXALATE 25 c-mes. à 18 g (boîte 20,11 II 100 % 0,80<br />

500 g)<br />

PROPRIÉTÉS PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Résines échangeuses de cations non résorbées, En cas de traitement prolongé (insuffisant rénal<br />

échangeant dans le tube digestif (côlon) potas- chronique, dialysé), surveiller régulièrement la<br />

sium contre sodium (polystyrène de sodium)<br />

ou calcium (polystyrène de calcium). Efficacité<br />

retardée (3 à 4 h), permettant un abaissement<br />

progressif et transitoire de la kaliémie de 0,5 à<br />

1,5 mmol/L.<br />

kaliémie, la magnésémie, la phosphorémie (et<br />

la calcémie pour le polystyrène de calcium).<br />

Un traitement préventif de la constipation est<br />

préconisé (sorbitol per os) afin d’éviter occlu-<br />

sion et hyperabsorption sodée (pour le polystyrène<br />

de sodium).<br />

INDICATIONS<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Traitement des hyperkaliémies non mena-<br />

çantes, au cours de l’insuffisance rénale aiguë<br />

ou chronique.<br />

Troubles digestifs : constipation le plus souvent,<br />

avec risque de fécalome ; parfois nausées<br />

ou gastralgies.<br />

Hypokaliémie (par surdosage).<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Hypercalcémie (pour le polystyrène de<br />

Hypercalcémie (polystyrène de calcium, surtout<br />

en cas de traitement simultané par la vitamine D).<br />

Surcharge sodée (polystyrène de sodium, surcalcium).<br />

tout en cas de ralentissement du transit digestif<br />

Hypokaliémie.<br />

chez l’insuffisant cardiaque).


1206 Néphrologie DYSKALIÉMIES<br />

DYSKALIÉMIES (4) - HYPOKALIÉMIE<br />

Traitement curatif Supplémentation orale en sels de potas-<br />

Le traitement curatif d’une hypokaliémie sium : chlorure de potassium le plus souest<br />

tout d’abord étiologique. Une supplé- vent, corrigeant également le déficit chlo-<br />

mentation potassique est nécessaire lors- ré ; DIFFU-K, 1 à 6 gél./j ou KALEORID LEO<br />

que l’hypokaliémie est sévère LP 600, 1 à 6 cp./j ou KALEORID LEO LP 1000,<br />

(< 2,5 mmol/L) ou lorsqu’elle survient chez 1 à 4 cp./j. Prescrire en 2 à 3 prises à la<br />

un sujet digitalisé ou porteur d’une cardio- fin des repas, avec un verre d’eau.<br />

pathie. La quantité de potassium à apporter<br />

et la voie d’administration dépendent<br />

essentiellement de l’existence ou non de<br />

troubles du rythme, de paralysies, et de<br />

troubles digestifs.<br />

Les sels alcalins de potassium (bicarbo-<br />

nate, citrate, gluconate) pérennisent l’alca-<br />

lose et donc l’hypokaliémie : à éviter, sauf<br />

en cas d’acidose métabolique associée.<br />

Limiter les risques d’accident cardiaque Voie veineuse en cas de troubles du<br />

Arrêt d’un traitement digitalique si kalié- rythme, paralysie, trouble digestif<br />

mie < 3 mmol/L. Sous surveillance cardioscopique conti-<br />

Discuter l’arrêt de médicaments allon- nue : chlorure de potassium à diluer dans un<br />

geant l’espace QT (risque de torsades de<br />

pointes).<br />

soluté salé ou glucosé :<br />

– concentration maximale : 4 g/L sur une<br />

Limiter les pertes potassiques<br />

veine périphérique (irritation, phlébite) ;<br />

Il s’agit du traitement étiologique, lors- – débit à ne jamais dépasser : 1,5 g/h ;<br />

qu’une fuite rénale ou digestive peut être – jamais d’injection intraveineuse directe<br />

stoppée. Il faut notamment interrompre (mort subite).<br />

les médicaments hypokaliémiants. En cas<br />

d’hyperaldostéronisme secondaire, les Traitement préventif<br />

diurétiques épargneurs de potassium (spironolactone,<br />

SOLUDACTONE) peuvent limiter<br />

les pertes urinaires et aider à la correction<br />

d’une hypokaliémie.<br />

Un traitement préventif est souvent utile<br />

chez les patients soumis à un traitement<br />

hypokaliémiant, par exemple corticoïde<br />

ou diurétique.<br />

Corriger le déficit potassique<br />

En revanche, lorsqu’un IEC est associé au<br />

Voie orale en l’absence de troubles du diurétique, la supplémentation potassique<br />

rythme, de paralysie, ou de trouble digestif n’est généralement pas utile.<br />

Alimentation riche en potassium : jus<br />

K + 1 gramme = 25 mmol de K +<br />

d’orange, pamplemousse, banane, fruits<br />

KCI 1 gramme = 13 mmol de K +<br />

secs, légumes, chocolat.


POTASSIUM Néphrologie 1207<br />

Chlorure de potassium<br />

DIFFU-K<br />

POTASSIUM (1)<br />

Hypokaliémie : traitement préventif : 8 à 40 gél. à 8 mmol 2,61 65 % 0,07<br />

24 mmol/j ou curatif : 24 à 96 mmol/j<br />

KALEORID LP<br />

Kaleorid LP 600 mg 30 cp. 8 mmol 1,96 65 % 0,07<br />

Idem DIFFU-K<br />

Kaleorid LP 1 g 30 cp. 13,4 mmol 2,57 65 % 0,09<br />

Idem DIFFU-K<br />

POTASSIUM RICHARD<br />

Idem DIFFU-K 16 càs à 11 mmol (fl. 2,67 65 % 0,17<br />

250 mL)<br />

20 sachets à 11 mmol 3,07 65 % 0,15<br />

100 sachets à 11 mmol HOP<br />

POTASSIUM CHLORURE injectable<br />

Idem DIFFU-K 100 amp. 10 mL à 7,46 % HOP<br />

(10 mmol/10 mL)<br />

100 amp. 10 mL à 15 % HOP<br />

(20 mmol/10 mL)<br />

100 amp. 10 mL à 20 % HOP<br />

(26,8 mmol/10 mL)<br />

NB : La quantité indiquée est celle des laboratoires Aguettant ; les conditionnements des laboratoires<br />

Lavoisier sont les mêmes mais il n’y a que 10 ampoules par boîte.


1208 Néphrologie POTASSIUM<br />

Gluconate de potassium<br />

GLUCONATE DE POTASSIUM H3 SANTÉ<br />

POTASSIUM (2)<br />

Hypokaliémie, traitement préventif : 1 à 17 càs à 10 mmol 2,24 65 % 0,13<br />

4 càs/j (fl. 250 mL)<br />

Tartrate de potassium<br />

NATI-K<br />

Hypokaliémie, traitement préventif : 1 à 40 cp. à 4,26 mmol 2,35 65 % 0,06<br />

6 cp./j


POTASSIUM Néphrologie 1209<br />

POTASSIUM (3) - PHARMACOLOGIE<br />

PROPRIÉTÉS (IVD) sinon risque de mort subite par arrêt car-<br />

Cf. Dyskaliémies diaque ; voie périphérique : dilution dans un<br />

INDICATIONS<br />

Hypokaliémies : traitement curatif ou préventif<br />

(coprescription avec diurétiques hypokalié-<br />

miants ou corticoïdes).<br />

soluté salé ou glucosé isotonique, avec concentration<br />

≤ 4 g/L sur une veine périphérique.<br />

Préférer le chlorure de potassium en cas d’alcalose<br />

associée.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Hyperkaliémie ; coprescription avec IEC ou<br />

diurétiques épargneurs de potassium (sauf<br />

hypokaliémie).<br />

Voie orale : nausées, gastralgies, vomissements,<br />

diarrhée.<br />

Voie veineuse : irritation veineuse (concentra-<br />

tions élevées) ; risque de mort subite (perfusion<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

trop rapide).<br />

Prudence (risque d’hyperkaliémie) : insuffi- INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

sance rénale sévère, insuffisance surréna- L’association aux diurétiques hyperkaliélienne,<br />

diabète sucré. miants ou aux inhibiteurs de l’enzyme de<br />

Comprimés : ingérer debout ou assis, avec de conversion est contre-indiquée, sauf en cas<br />

l’eau. d’hypokaliémie : dans ce cas un contrôle heb-<br />

Voie veineuse : ne jamais dépasser 1,5 g/h ; domadaire de la kaliémie est initialement souhaitable<br />

le 1er jamais d’injection intraveineuse directe<br />

mois.


1210 Néphrologie HYPOKALIÉMIE DES DIURÉTIQUES<br />

HYPOKALIÉMIE DES DIURÉTIQUES (1)<br />

Caractéristiques tiques (par exemple 12,5 à 25 mg d’hy-<br />

Deux types de diurétiques d’usage coudrochlorothiazide (ESIDREX) dans le traiterant<br />

sont pourvoyeurs d’hypokaliémies : ment de l’HTA).<br />

les diurétiques thiazidiques principalement,<br />

et les diurétiques de l’anse à un Hypokaliémie sévère (< 3 mmol/L) ou<br />

degré moindre. Cette complication des persistante<br />

thiazides ou des diurétiques de l’anse est<br />

rare (≤ 5 %), précoce (≤ 3 sem. de traite-<br />

ment) et dose-dépendante. Les hypokalié-<br />

mies « tardives » (au-delà de la 3<br />

Supplémentation orale en chlorure de<br />

potassium (et en chlorure de magnésium en<br />

cas d’hypomagnésémie associée).<br />

e semaine<br />

de traitement) sont liées soit à une aug- Alimentation riche en potassium (jus<br />

mentation de la posologie du, diurétique, d’orange, pamplemousse, bananes, fruits<br />

soit à une réduction des apports potas- secs, chocolat).<br />

siques alimentaires, soit à des pertes<br />

potassiques extrarénales (diarrhée).<br />

Chlorure de potassium : DIFFU-K, KALEORID<br />

LEO LP 600, ouKALEORID LEO LP 1000, 1à<br />

Diagnostic 2 cp./j.<br />

Lorsque la cause d’une hypokaliémie (K + < Diurétique épargneur de potassium :<br />

3,5 mmol/L) est incertaine, un iono- spironolactone (ALDACTONE) 75 à 300 mg/j,<br />

gramme urinaire est indispensable. ou amiloride (MODAMIDE) 5 à 20 mg/j, la<br />

Kaliurèse basse (< 20 mmol/24 h) sans posologie efficace étant parfois élevée<br />

déficit chloré<br />

chez l’insuffisant cardiaque du fait de l’im-<br />

Les pertes de potassium sont digestives portance de l’hyperaldostéronisme seconbasses<br />

(diarrhée, prise de laxatifs). daire.<br />

Déficit chloré intense (avec kaliurèse L’amiloride (mieux toléré, en particulier par<br />

variable)<br />

l’homme) est le produit de choix. Ces diu-<br />

Il s’agit de vomissements.<br />

rétiques épargnent en outre le<br />

Fuite rénale de potassium (kaliurèse ><br />

magnésium.<br />

40 mmol/j) chez un hypertendu<br />

Il faut évoquer de principe, outre le rôle<br />

des diurétiques, certaines HTA secon-<br />

Hypokaliémies sous diurétiques + IEC<br />

La coprescription d’un IEC limite les pertes<br />

urinaires de potassium et rend l’hypokalié-<br />

daires (hyperaldostéronisme primaire, stémie très rare : il n’est pas utile de prescrire<br />

nose artérielle rénale, hypercortisolisme, systématiquement une supplémentation<br />

hyperminéralocorticisme,<br />

Liddle).<br />

syndrome de potassique.<br />

Si une hypokaliémie survient (souvent lors<br />

des 3 premières semaines du traitement), il<br />

Fuite rénale de potassium isolée et<br />

faut diminuer la posologie du diurétique, ou<br />

inexpliquée<br />

Il s’agit d’une prise cachée de diurétiques<br />

ou d’une maladie tubulaire rénale (ex. :<br />

syndrome de Gitelman).<br />

augmenter la posologie de l’IEC. En seconde<br />

intention, une supplémentation en chlorure<br />

de potassium est possible : dans ce cas, la<br />

kaliémie doit être surveillée de façon hebdo-<br />

madaire (du fait du risque d’hyperkaliémie),<br />

Conduite thérapeutique<br />

Hypokaliémie modérée (> 3 mmol/L) liée à<br />

sachant qu’un nouvel état d’équilibre sera<br />

atteint en 3 sem. L’adjonction d’une faible<br />

dose d’un diurétique « épargneur de potas-<br />

l’emploi de diurétiques hypokaliémiants<br />

sium » à l’association IEC-diurétique est trop<br />

Le meilleur traitement est l’utilisation de la<br />

posologie minimale efficace des diurédélicate<br />

à manier pour être conseillée en pratique<br />

extrahospitalière.


DIURÉTIQUES Néphrologie 1211<br />

Furosémide<br />

LASILIX FAIBLE<br />

DIURÉTIQUES DE L’ANSE (1)<br />

1 à 2 cp./j en 1 à 2 prises 30 cp. séc. 20 mg 2,31 II 65 % 0,08<br />

LASILIX<br />

1 à 6 cp./j en 1 à 2 prises 30 cp. séc. 40 mg 3,31 II 65 % 0,11<br />

100 cp. séc. 40 mg HOP II<br />

0,5 à 1 mg/kg/j IM ou IV 1 amp. 20 mg 1,14 II 65 % 1,14<br />

5 amp. 20 mg HOP<br />

25 amp. 20 mg HOP II<br />

LASILIX RETARD<br />

1 à 2 gél./j en 1 à 2 prises 30 gél. LP à 60 mg 4,79 II 65 % 0,16<br />

100 gél. LP à 60 mg HOP II<br />

LASILIX SPÉCIAL<br />

250 mg à 2 000 mg/j 50 cp. quadriséc. à HOP II<br />

500 mg<br />

5 amp. 250 mg HOP II<br />

Bumétanide<br />

BURINEX<br />

1/2 à 6 cp./j 30 cp. séc. 1 mg 4,68 II 65 % 0,16<br />

OAP : 1 amp., renouvelable à la demande 1 amp. 2 mg 8,22 II 65 % 8,22<br />

Pirétanide<br />

EURELIX<br />

HTA : 1 gél./j 30 gél. à 6 mg LP 7,86 II 65 % 0,26


1212 Néphrologie HYPOKALIÉMIE DES DIURÉTIQUES<br />

HYPOKALIÉMIE DES DIURÉTIQUES (2)<br />

Diurétiques (indications préférentielles)<br />

PATHOLOGIE CHOIX DU DIURÉTIQUE<br />

Insuffisance cardiaque Furosémide<br />

Cirrhose Diurétique épargneur de potassium ±<br />

Syndrome néphrotique furosémide (doses progressives)<br />

Diurétique épargneur de potassium ±<br />

furosémide (doses progressives)<br />

Insuffisance rénale aiguë oligoanurique Normalisation de la volémie puis furosémide IV à<br />

fortes doses<br />

Hypertension artérielle :<br />

- essentielle Thiazidique ou diurétique de l’anse<br />

- hyperaldostéronisme primaire Diurétique épargneur de potassium<br />

- syndrome de Liddle Amiloride ou triamtérène<br />

Hypercalcémie Réhydratation puis furosémide IV et<br />

compensation de diurèse<br />

Lithiase calcique + hypercalciurie Thiazidique<br />

Diabète insipide néphrogénique Thiazidique<br />

Hyperhydratation intracellulaire sévère Furosémide + soluté salé hypertonique<br />

Glaucome aigu Acétazolamide per os/IV<br />

Mal des montagnes Acétazolamide per os<br />

Alcalose de reventilation Acétazolamide per os<br />

Mode d’action des différents types de diurétiques<br />

Site I, tube proximal : inhibiteur de l’anhydrase carbonique.<br />

Site II, branche ascendante de l’anse de Henle : « diurétiques de l’anse ».<br />

Site III, segment cortical de dilution et segment initial du tube distal : thiazides et dérivés.<br />

Site IV, tube distal terminal et collecteur cortical : diurétiques antikaliurétiques (spironolactone,<br />

amiloride, triamtérèse).


DIURÉTIQUES Néphrologie 1213<br />

DIURÉTIQUES DE L’ANSE (2) - PHARMACOLOGIE<br />

PROPRIÉTÉS d’encéphalopathie hépatique), de coprescrip-<br />

Sulfamides diurétiques inhibant au niveau de tion de digitaliques, produits hypokaliémiants<br />

la branche ascendante de l’anse de Henle la ou anti-arythmiques (en particulier chez les<br />

réabsorption du NaCl ; accessoirement, ils aug- sujets cirrhotiques, insuffisants cardiaques ou<br />

mentent l’excrétion urinaire de potassium, du dénutris : risque de troubles du rythme sévères<br />

magnésium, et du calcium. Les diurétiques de et de torsades de pointes).<br />

l’anse ont une puissance dose-dépendante, et Diabète : risque de déséquilibre glycémique<br />

sont les seuls diurétiques couramment utili- faible lorsque les posologies habituelles sont<br />

sables en situation d’insuffisance rénale avan- employées.<br />

cée (Cl créatinine < 50 mL/min), moyennant Interrompre 24 h avant un examen iodé.<br />

l’utilisation de fortes doses. Grossesse :lesdiurétiques sont contre-indiqués<br />

Après administration orale, la résorption diges- dans le traitement des œdèmes et de l’HTA gravitive<br />

du bumétanide (95 %) est meilleure que diques (risque de majoration de l’ischémie fœtocelle<br />

du furosémide (60 %) ; l’action débute placentaire) ; le furosémide reste utilisable en cas<br />

rapidement (30 min) et est brève (6 à 8 h) ; les de syndrome œdémateux lié à une affection<br />

formes retard ont une action moins intense et rénale, cardiaque ou hépatique.<br />

plus prolongée : leur galénique est particulièrement<br />

adaptée au traitement de l’HTA, mais ne<br />

convient pas en cas d’insuffisance rénale (le pic<br />

de concentration tubulaire nécessaire à l’action<br />

diurétique est rarement obtenu).<br />

Après injection parentérale, l’action natriurétique<br />

débute en 5 min et dure moins de 2 h ; elle est précédée<br />

d’un effet vasodilatateur veineux, utile en<br />

cas d’œdème pulmonaire. L’élimination des diu-<br />

rétiques de l’anse se fait par voie urinaire essentiellement<br />

et digestive accessoirement.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Déshydratation extracellulaire puis globale (avec<br />

hypernatrémie) en cas de surdosage (interrompre,<br />

réhydrater). L’hyponatrémie est rare : elle ne s’ob-<br />

serve qu’en cas de régime désodé strict avec<br />

apports hydriques libres chez des patients ayant<br />

une forte activation du système rénine-aldosté-<br />

rone (insuffisance cardiaque sévère, cirrhose, certains<br />

syndromes néphrotiques).<br />

Hypokaliémie : rare lorsque les doses<br />

employées sont modérées.<br />

INDICATIONS<br />

Risque d’encéphalopathie hépatique chez le<br />

Voie orale : hypertension artérielle ; syndromes cirrhotique.<br />

œdémateux d’origine rénale ou hépatique ou Élévation (inconstante et modérée) de la glycé-<br />

cardiaque ; insuffisance cardiaque congestive.<br />

Voie parentérale : œdème aigu du poumon ;<br />

rétentions hydrosodées sévères d’origine cardiaque,<br />

rénale ou hépatique ; hypercalcémies<br />

sévères.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Hypersensibilité aux sulfamides.<br />

Encéphalopathie hépatique.<br />

Insuffisance rénale par obstruction urinaire.<br />

Déshydratation extracellulaire, hypovolémie.<br />

Grossesse : pour bumétanide et pirétanide ;<br />

furosémide utilisable dans des circonstances<br />

exceptionnelles.<br />

Allaitement : déconseillé (passage dans le lait<br />

maternel et réduction de la lactation).<br />

mie, des lipides plasmatiques et de l’uricémie<br />

(± crises de goutte) ne devant pas faire interrompre<br />

le traitement.<br />

Rarement : allergie cutanée, photosensibilisa-<br />

tion, leucopénie, thrombopénie, insuffisance<br />

rénale immunoallergique.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Associations déconseillées : lithium (risque de<br />

surdosage) ; médicaments entraînant des torsades<br />

de pointes.<br />

Associations à manier avec prudence : AINS,<br />

IEC, produits de contraste iodés, aminosides<br />

injectables (risque d’insuffisance rénale aiguë) ;<br />

corticostéroïdes, diurétiques, laxatifs stimulants<br />

(risque d’hypokaliémie), metformine<br />

(risque d’acidose lactique), antidépresseurs tri-<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI cycliques et neuroleptiques (risque d’hypoten-<br />

Insuffisance rénale aiguë : écarter la possibilité sion orthostatique).<br />

d’une cause obstructive. Phénytoïne : diminution de l’activité du diuré-<br />

Surveillance biologique régulière (kaliémie, tique (50 %).<br />

natrémie, créatininémie) en début de trai- Antiacides (diminution de l’absorption du furotement.<br />

sémide) : respecter un intervalle de 2 h entre<br />

Prudence particulière en cas de cirrhose (risque<br />

les prises.


1214 Néphrologie DIURÉTIQUES<br />

Hydrochlorothiazide<br />

ESIDREX<br />

DIURÉTIQUES THIAZIDIQUES<br />

HTA : 1/2 à 1 cp./j 30 cp. séc. à 25 mg 2,62 II 65 % 0,09<br />

90 cp. séc. à 25 mg 6,49 II 65 % 0,07<br />

Indapamide<br />

FLUDEX<br />

HTA : 1 cp. le matin 30 cp. LP à 1,5 mg 10,76 II 65 % 0,36<br />

Poso. max. : 2,5 mg/j 90 cp. LP à 1,5 mg 29,68 II 65 % 0,33<br />

100 cp. LP à 1,5 mg HOP II<br />

30 cp. à 2,5 mg 12,57 II 65 % 0,42<br />

PROPRIÉTÉS ou dénutris : risque de troubles du rythme<br />

Sulfamides diurétiques inhibant la réabsorption sévères et de torsades de pointes).<br />

tubulaire de NaCl au niveau du segment corti- Risque de déséquilibre diabétique faible lors-<br />

cal de dilution. Par ailleurs, augmentent l’excré- que les posologies habituelles sont employées.<br />

tion urinaire de potassium et de magnésium ; Interrompre 24 h avant un examen iodé.<br />

réduisent la calciurie ; réduisent la diurèse en EFFETS SECONDAIRES<br />

cas de diabète insipide néphrogénique. Hyponatrémie + déshydratation extracellulaire.<br />

Résorption digestive (50 à 80 %) ; délai d’ac- Hypokaliémie : risque faible (< 5 %) avec les<br />

tion de 2 h, persistant 12 à 72 h selon les prodoses actuellement préconisées dans le traite-<br />

duits. Élimination urinaire sous forme inchan- ment de l’HTA.<br />

gée. Passage transplacentaire et dans le lait Risque d’encéphalopathie hépatique chez le<br />

maternel.<br />

cirrhotique.<br />

Élévation (inconstante et modérée) de la glycé-<br />

INDICATIONS mie, des lipides plasmatiques et de l’uricémie<br />

Hypertension artérielle. (± crises de goutte) ne devant pas faire inter-<br />

Syndromes œdémateux d’origine rénale, hépa- rompre le traitement.<br />

tique, cardiaque.<br />

Hypercalcémie : rare, doit faire rechercher une<br />

Hypercalciuries idiopathiques.<br />

hyperparathyroïdie associée.<br />

Diabète insipide néphrogénique singulier. Nausées, constipation, céphalées, paresthésies,<br />

flou visuel.<br />

CONTRE-INDICATIONS Rarement : allergie cutanée, photosensibilisa-<br />

Hypersensibilité aux sulfamides.<br />

tion, leucopénie, thrombopénie, agranulocy-<br />

Encéphalopathie hépatique.<br />

tose, anémie hémolytique, aplasie médullaire,<br />

Grossesse : contre-indiqué.<br />

insuffisance rénale immunoallergique, pan-<br />

Allaitement : déconseillé.<br />

créatite aiguë.<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Inefficaces en cas d’insuffisance rénale chronique<br />

avancée (Cl créatinine < 50 mL/min).<br />

Surveillance biologique régulière (kaliémie,<br />

natrémie, créatininémie) en début de traitement.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Associations déconseillées : lithium (risque de<br />

surdosage) ; médicaments entraînant des tor-<br />

sades de pointes.<br />

Associations à manier avec prudence : AINS,<br />

IEC, produits de contraste iodés (risque d’in-<br />

suffisance rénale aiguë) ; corticostéroïdes, diu-<br />

Prudence particulière en cas de cirrhose (risque rétiques, laxatifs stimulants (risque d’hypokad’encéphalopathie<br />

hépatique), ou de copres- liémie), metformine (risque d’acidose lactique),<br />

cription de digitaliques, produits hypokalié- antidépresseurs tricycliques et neurolepmiants<br />

ou antiarythmiques (en particulier chez tiques (risque d’hypotension orthostatique),<br />

les sujets cirrhotiques, insuffisants cardiaques<br />

calcium (risque d’hypercalcémie).


DIURÉTIQUES Néphrologie 1215<br />

Spironolactone<br />

ALDACTONE<br />

DIURÉTIQUES ANTIALDOSTÉRONE<br />

Per os : 1 à 3 mg/kg/j en 2 prises 30 cp. séc. à 25 mg 8,87 II 65 % 0,30<br />

90 cp. séc. à 25 mg 24,29 II 65 % 0,27<br />

30 cp. séc. à 50 mg 8,87 II 65 % 0,30<br />

90 cp. séc. à 50 mg 13,68 II 65 % 0,15<br />

30 cp. séc. à 75 mg 12,81 II 65 % 0,43<br />

90 cp. séc. à 75 mg 18,71 II 65 % 0,21<br />

SPIROCTAN<br />

Idem ALDACTONE 30 gél. séc. à 50 mg 5,15 II 65 % 0,17<br />

30 gél. séc. à 75 mg 6,92 II 65 % 0,23<br />

Canrénoate de potassium<br />

SOLUDACTONE<br />

IVL ou perfusion : 200 à 800 mg/j 1 fl. 100 mg/2 mL 2,62 I 65% 2,62<br />

Éplérénone<br />

INSPRA<br />

Réservé au traitement de l’insuffisance cardia- 28 cp. à 25 mg 70,22 I 65 % 2,51<br />

que post-infarctus et de l’hypertension artérielle 50 cp. à 25 mg HOP I<br />

50 mg/j en 1 prise 28 cp. à 50 mg 70,22 I 65% 2,51<br />

Posologie à atteindre progressivement en<br />

4 sem. en fonction de la kaliémie<br />

Débuter p. ex. à 25 mg 1 j/2<br />

PROPRIÉTÉS Grossesse : contre-indiqué.<br />

Diurétiques épargneurs de potassium agissant Allaitement : déconseillé (passage dans le lait<br />

par antagonisme compétitif des récepteurs tubu- maternel, réduction de la lactation).<br />

laires de l’aldostérone. Action antiminéralocorti-<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

coïde maximale après 48 à 72 h de traitement, et<br />

Surveillance régulière de la kaliémie (notamment<br />

effets natriurétique et antihypertenseur modérés<br />

en début de traitement) et des fonctions rénales et<br />

mais prolongés (24 à 48 h). Résorption digestive<br />

hépatiques (notamment chez les diabétiques,<br />

lente, suivie d’une biotransformation en de nomsujets<br />

âgés ou traités par un diurétique puissant).<br />

breux métabolites, puis d’une élimination prolon-<br />

Éviter chez les cirrhotiques avec natré-<br />

gée mixte (urinaire et fécale). Propriétés antiandrogéniques.<br />

Faibles inducteurs enzymatiques.<br />

mie < 130 mmol/L et chez les sujets suscep-<br />

tibles de présenter une acidose.<br />

INDICATIONS<br />

Traitement de l’hyperaldostéronisme primaire<br />

par hyperplasie bilatérale des surrénales.<br />

Hypertension artérielle essentielle.<br />

Hypokaliémies modérées liées à un traitement<br />

diurétique (de l’anse, thiazidique).<br />

Œdèmes avec hyperaldostéronisme secondaire<br />

: syndrome néphrotique, cirrhose décom-<br />

pensée, rétention hydrosodée de l’insuffisance<br />

cardiaque, œdèmes cycliques idiopathiques.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Hyperkaliémie (principalement en cas de surdo-<br />

sage, d’insuffisance rénale ou de diabète déséquilibré).<br />

Risque de déshydratation faible. Effets endocriniens<br />

chez l’homme (gynécomastie dose-<br />

dépendante le plus souvent réversible, impuissance),<br />

et chez la femme (troubles des règles). Nausées,<br />

vomissements, diarrhée. Réactions cutanées<br />

allergiques. Somnolence, céphalées.<br />

Traitement adjuvant au cours de la myasthénie. INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

L’éplérénone est réservée au traitement de l’in- Associations contre-indiquées du fait du risque<br />

suffisance cardiaque post-infarctus et de l’hy- d’hyperkaliémie (sauf en cas d’hypokaliémie chropertension<br />

artérielle. nique, si un contrôle hebdomadaire de la kaliémie<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

dans le premier mois est possible) : potassium, diu-<br />

Insuffisance rénale sévère ou aiguë. Hyperka- rétiques hyperkaliémiants (amiloride, triamtéliémie.<br />

Association au potassium ou à d’autres rène)etIEC.<br />

produits hyperkaliémiants (sauf hypokaliémie). Association déconseillée : lithium.<br />

Insuffisance hépatique terminale. Hypersensibi- Associations à utiliser avec précautions : AINS,<br />

lité connue à la spironolactone.<br />

produits de contraste iodés, biguanides, diu-<br />

Troubles graves de la conduction auriculoven- rétiques hypokaliémiants, antidépresseurs<br />

triculaire (pour la forme). tricycliques, neuroleptiques.


1216 Néphrologie DIURÉTIQUES<br />

AUTRES DIURÉTIQUES (1) ET ASSOCIATIONS DE DIURÉTIQUES<br />

Amiloride<br />

MODAMIDE<br />

Amiloride et triamtérène<br />

1 à 6 cp./j en 1 à 2 prises 30 cp. à 5 mg 2,94 II 65 % 0,10<br />

Triamtérène + diurétique thiazidique<br />

ISOBAR<br />

Triamtérène 150 mg + 30 cp. séc. 6,42 II 65 % 0,21<br />

Méthyclothiazide 5mg<br />

HTA : 1/2 à 1 cp./j<br />

PRESTOLE<br />

Triamtérène 50 mg + 30 gél. 6,17 II 65 % 0,21<br />

hydrochlorothiazide 25 mg<br />

HTA : 1 à 2 gél./j<br />

Furosémide + spironolactone<br />

Associations de diurétiques<br />

ALDALIX<br />

Spironolactone 50 mg + Furosémide 30 gél. 8,56 II 65 % 0,29<br />

20 mg 90 gél. 23,37 II 65 % 0,26<br />

Insuffisance cardiaque : 1 à 2 gél./j 100 gél. HOP II<br />

Furosémide + amiloride<br />

LOGIRÈNE<br />

Amiloride 5mg+Furosémide 40 mg 30 cp. séc. 6,62 I 65% 0,22<br />

HTA, syndromes œdémateux : 1 à 6 cp./j<br />

Hydrochlorothiazide + amiloride<br />

MODURETIC<br />

Amiloride 5mg+Hydrochlorothiazide 30 cp. séc. 3,92 I 65 % 0,13<br />

50 mg<br />

HTA, syndromes œdémateux : 1/2 à<br />

1 cp./j<br />

Altizide + spironolactone<br />

ALDACTAZINE<br />

Altizide 15 mg + Spironolactone 25 mg 30 cp. séc. 5,99 II 65 % 0,20<br />

HTA, syndromes œdémateux : 1 à 2 cp./j 90 cp. séc. 16,06 II 65 % 0,18<br />

100 cp. séc. HOP II<br />

SPIROCTAZINE<br />

Idem ALDACTAZINE 30 cp. séc. à 25 mg 5,64 II 65 % 0,19


DIURÉTIQUES Néphrologie 1217<br />

AUTRES DIURÉTIQUES (2) ET ASSOCIATIONS DE DIURÉTIQUES<br />

PHARMACOLOGIE<br />

PROPRIÉTÉS PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Diurétiques épargneurs de potassium, à effets Éviter chez les cirrhotiques avec natrémie ≤<br />

antihypertenseur et natriurétique modérés.<br />

Leur activité est comparable à celle de la spironolactone<br />

mais leur action se situe au niveau<br />

du tube distal des tubules rénaux (canal<br />

sodium épithélial) et est indépendante de l’aldostérone.<br />

Après administration orale, l’action<br />

apparaît en 3 à 6 h et persiste 12 à 24 h, pas-<br />

125 mmol/L et chez les sujets susceptibles de<br />

présenter une acidose.<br />

Surveillance régulière de la kaliémie, des fonc-<br />

tions rénale et hépatique (notamment chez les<br />

diabétiques, les sujets âgés ou traités par un<br />

diurétique puissant), et de la NFS en cas d’utili-<br />

sation prolongée du triamtérène.<br />

sage transplacentaire et dans le lait maternel. EFFETS SECONDAIRES<br />

Hyperkaliémie (principalement en cas de sur-<br />

INDICATIONS dosage, d’insuffisance rénale ou de diabète<br />

Complément des diurétiques hypokalié- déséquilibré).<br />

miants. Hypertension artérielle secondaire à Risque de déshydratation faible (sauf sur-<br />

un syndrome de Liddle (mutations activatrices dosage).<br />

du canal sodium épithélial).<br />

Hypertension artérielle par hyperaldostéronisme<br />

primaire (en particulier hyperplasie bila-<br />

térale des surrénales chez l’homme).<br />

Ascite et œdèmes des cirrhotiques.<br />

Insuffisance cardiaque congestive.<br />

Encéphalopathie chez les cirrhotiques.<br />

Troubles digestifs (anorexie, nausées, vomissements,<br />

douleurs abdominales, diarrhée ou<br />

constipation), réactions cutanées allergiques.<br />

Triamtérène : possibilité d’anémie mégaloblastique<br />

par carence en folates et de lithiase urinaire<br />

médicamenteuse.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Hyperkaliémie, association au potassium.<br />

Insuffisance rénale, insuffisance hépatocellu-<br />

laire avancée.<br />

Hypersensibilité connue aux différents pro-<br />

duits.<br />

Triamtérène : carence en folates.<br />

Grossesse : contre-indiqué.<br />

Associations contre-indiquées du fait du risque<br />

d’hyperkaliémie (sauf en cas d’hypokaliémie<br />

chronique, si un contrôle hebdomadaire de la<br />

kaliémie dans le premier mois est possible) :<br />

potassium, diurétiques hyperkaliémiants<br />

(antialdostérone) et IEC.<br />

Association déconseillée : lithium.<br />

Associations à utiliser avec précautions : AINS,<br />

Allaitement : éviter (passage dans le lait mater- produits de contraste iodés, biguanides, diunel,<br />

réduction de la lactation). rétiques hypokaliémiants, antidépresseurs<br />

Éviter chez l’enfant.<br />

tricycliques, neuroleptiques.<br />

Associations de diurétiques<br />

Les associations de diurétiques (diurétique de l’anse ou thiazidique + diurétique épargneur<br />

de potassium) offrent deux avantages : (1) une action complémentaire (sur 2 sites tubulaires<br />

différents) qui rend l’action salidiurétique plus efficace ; (2) des effets opposés sur la kaliémie,<br />

qui ne dispensent toutefois pas d’une surveillance prolongée (au long cours, quelques hypokaliémies<br />

ont pu être observées).


1218 Néphrologie DÉSHYDRATATION EXTRACELLULAIRE<br />

DÉSHYDRATATION EXTRACELLULAIRE (1)<br />

Rappel physiopathologique – Sachets ou gélules de NaCl à 1 g en plus<br />

La perte d’eau et de sel, iso-osmotique au de l’alimentation normale.<br />

plasma, aboutit à une déshydratation Veineuse, en cas de vomissements ou<br />

extracellulaire pure. signes de gravité (hypotension)<br />

Diagnostic positif<br />

– perte de poids ;<br />

– soif ;<br />

– tachycardie ;<br />

– hypotension artérielle : orthostatique,<br />

Soluté salé isotonique (NaCl à 9 ‰) ou<br />

bicarbonate de sodium à 14 ‰ en cas d’acidose<br />

métabolique associée.<br />

Sous-cutanée, en cas de réduction du capital<br />

veineux (sans apports potassiques)<br />

puis permanente, voire collapsus ou choc ; Quantité d’eau et de sel à apporter<br />

– veines plates (jugulaires externes) ;<br />

– pli cutané et peau sèche (sauf pertes<br />

sudorales) ;<br />

– hémoconcentration (élévation de l’hématocrite<br />

et des protides) ;<br />

– élévation de l’urée et de la créatinine ;<br />

– élévation de l’uricémie ;<br />

Perte de poids (1 litre d’eau par kg perdu),<br />

avec 9 g de NaCl/L. Lorsque le poids anté-<br />

rieur n’était pas connu, le déficit extracellulaire<br />

peut être estimé à 20 % x poids x<br />

(Hte/Hte normale - 1).<br />

Rapidité de correction<br />

– alcalose métabolique « de contraction ». Elle dépend de l’importance initiale du<br />

Diagnostic étiologique<br />

Pertes hydrosodées extrarénales : la<br />

réponse rénale est « appropriée »<br />

Réabsorption maximale d’eau et de sel<br />

(diurèse < 400 cm<br />

déficit, de la persistance ou non de la<br />

cause, et de la réponse au remplissage<br />

(efficacité clinique et biologique, tolérance<br />

cardiaque).<br />

Surveillance<br />

3 /j et natriurèse <<br />

20 mmol/L).<br />

– Pression artérielle et fréquence car-<br />

Élimination maximale des déchets : diaque.<br />

urines concentrées, riches en urée (urinai- – Poids, diurèse, téguments.<br />

re/plasmatique > 10) et en créatinine (uri- – Pression veineuse centrale parfois.<br />

naire/plasmatique > 40).<br />

– Biologie : régression de l’hémoconcen-<br />

Pertes hydrosodées rénales : la réponse<br />

rénale est « inappropriée »<br />

Urine abondante et natriurèse ><br />

tration et de l’insuffisance rénale fonctionnelle.<br />

– Surveillance de la cause de la DEC.<br />

30 mmol/L.<br />

Traitement étiologique<br />

Urée urinaire/plasmatique < 10 et créa- Pertes digestives : vomissements, diartinine<br />

urinaire/plasmatique < 20. rhée, aspiration digestive, fistule ; 3e sec-<br />

Traitement symptomatique<br />

teur (occlusion, pancréatite, péritonite).<br />

Apports hydrosodés isotoniques équivalents<br />

à la perte de poids.<br />

Pertes rénales : diurétiques, insuffisance<br />

surrénalienne, levée d’obstacle, néphropa-<br />

thie avec « perte de sel » (atteintes intersti-<br />

Voie d’administration tielles aiguës ou chroniques, polykystose,<br />

Orale, en l’absence de vomissements et de néphronophtise), diabète décompensé,<br />

signes de gravité<br />

etc.<br />

– Alimentation riche en sel, bouillons Pertes cutanées : brûlures, coup de chasalés.<br />

leur, mucoviscidose.


DÉSHYDRATATION EXTRACELLULAIRE Néphrologie 1219<br />

DÉSHYDRATATION EXTRACELLULAIRE (2)<br />

Mouvements de l’eau entre les compartiments –<br />

Rôle des forces osmotiques<br />

La chute du Na entraîne une baisse de la pression osmotique<br />

du compartiment extracellulaire et par suite une hyperhydratation cellulaire<br />

Mais la natrémie peut apparaître normale si la réduction volumétrique du compartiment<br />

est parallèle à la diminution du capital sodé du milieu intérieur<br />

PO : pression osmotique


1220 Néphrologie HYPERHYDRATATION INTRACELLULAIRE<br />

HYPERHYDRATATION INTRACELLULAIRE (1)<br />

Diagnostic décompensée, d’un syndrome néphrotique<br />

Une hyponatrémie (< 135 mmol/L) traduit le ou d’une insuffisance rénale avancée.<br />

plus souvent une hyposmolalité plasma- Traitement symptomatique<br />

tique efficace, qui a pour conséquence un Déplétion hydrosodée avec des pertes<br />

transfert d’eau du secteur extracellulaire vers hydriques supérieures aux pertes sodées :<br />

le secteur intracellulaire : hyperhydratation – régime restreint en sel (2 g/j) et en eau<br />

intracellulaire. Les signes cliniques sont (500 mL/j) ;<br />

digestifs (nausées, vomissements, anorexie, – diurétiques de l’anse (furosémide, bumédégoût<br />

de l’eau) et neuro-psychiques (cépha- tanide) ouantialdostérone (spironolactone) ;<br />

lées, asthénie, troubles de la vigilance, confu- – diurétiques intraveineux avec une persion,<br />

délire, crampes musculaires, hypertonie fusion de sérum salé hypertonique dans<br />

extrapyramidale, signe de Babinski, myoclo- les formes sévères ;<br />

nies, fasciculations). Les complications les – en cas d’insuffisance rénale terminale,<br />

plus redoutables sont coma profond et crises<br />

convulsives.<br />

discuter l’ultrafiltration.<br />

Hyponatrémie avec déshydratation<br />

Hyponatrémies sans hyperhydratation extracellulaire<br />

intracellulaire<br />

Les causes sont les suivantes (le traite-<br />

C’est une hyperhydratation intracellulaire<br />

(hyponatrémie) + déshydratation extracelment<br />

est étiologique). lulaire : déplétion hydrosodée avec pertes<br />

Secteur intracellulaire normal ou « fausse<br />

hyponatrémie »<br />

Hyperprotidémie majeure (> 90 g/L) :<br />

myélome, Waldenstöm.<br />

Hyperlipidémie majeure (> 30 g/L) : syndrome<br />

de Zieve, diabète déséquilibré, syndrome<br />

néphrotique, etc.<br />

sodées > pertes hydriques.<br />

Traitement étiologique<br />

Limiter les pertes hydrosodées cutanées,<br />

digestives ou rénales ; un exemple : acci-<br />

dent des diurétiques ( cf. infra ).<br />

Traitement symptomatique<br />

Correction de la déshydratation extrac-<br />

ellulaire.<br />

Déshydratation intracellulaire (cas très rares) Correction du déficit sodé relatif (secteur<br />

Hyperosmolaires (mannitol, glycérol, dex- intracellulaire) :<br />

trans, produits de contraste).<br />

– en cas de troubles neuropsychiques :<br />

Résorption de glycocolle, résections sérum salé hypertonique IVSE ;<br />

endoscopiques de prostate.<br />

– en cas de patient peu symptomatique :<br />

Intoxications : méthanol, éthanol, trich- suppléments sodés alimentaires (NaCl 10 à<br />

loroéthane, bière.<br />

20 g/j).<br />

Élévation très rapide de l’urée ou de la<br />

glycémie.<br />

Accident des diurétiques<br />

Contexte : thiazidiques à forte dose, régime<br />

Hyponatrémies traduisant<br />

désodé strict, apports hydriques libres.<br />

une hyperhydratation intracellulaire Physiopathologie :(1)pertehydriquesodée<br />

sous thiazidiques, avec déshydratation ; (2)<br />

Hyponatrémie avec hyperhydratation<br />

soif importante mais apports hydriques<br />

extracellulaire<br />

exclusifs ; (3) capacité de dilution de l’urine<br />

C’est une hyperhydratation globale car<br />

intracellulaire (hyponatrémie) + extracellulaire<br />

(prise de poids, œdèmes) : rétention<br />

hydrosodée, avec excès relatif d’eau.<br />

limitée (thiazide, insuffisance rénale fonctionnelle,<br />

élévation de l’ADH).<br />

Présentation clinique : hyponatrémie +<br />

déshydratation extracellulaire.<br />

Prévention : thiazides à doses appro-<br />

Traitement étiologique<br />

C’est le traitement d’une insuffisance car-<br />

diaque droite et/ou globale, d’une cirrhose<br />

priées (12,5 à 25 mg d’hydrochlorothiazide<br />

au maximum), pas de régime sans sel<br />

strict, boissons 1 500 mL/j au plus.


HYPERHYDRATATION INTRACELLULAIRE Néphrologie 1221<br />

HYPERHYDRATATION INTRACELLULAIRE (2)<br />

Hyponatrémie avec secteur extracellulaire Hyponatrémie chronique<br />

normal L’adaptation des neurones à l’hyponatré-<br />

C’est une rétention hydrique pure ou « hy- mie les rend en effet très sensibles à la<br />

ponatrémie de dilution ». Malgré une dis- moindre déshydratation, exposant au<br />

crète prise de poids, il n’y a pas d’œdè- risque de myélinolyse centro-pontine. Cet<br />

mes ; la natriurèse est adaptée aux accident neurologique effroyable survient<br />

apports sodés alimentaires. électivement en cas de correction trop<br />

Traitement étiologique<br />

Limiter des apports hydriques excessifs<br />

rapide d’une hyponatrémie chronique.<br />

(potomanie,<br />

massives).<br />

perfusions hypotoniques La règle est donc de ne pas augmenter la<br />

natrémie de plus de 0,5 mmol/L/h.<br />

Opothérapie en cas d’opsiurie endocrinienne<br />

(hypothyroïdie, insuffisance cor-<br />

tico-surrénalienne).<br />

Cause d’une sécrétion inappropriée<br />

d’hormone antidiurétique (SIADH) : infec-<br />

Ceci suppose une surveillance régulière du<br />

ionogramme en milieu hospitalier dans<br />

les cas où un traitement parentéral a été<br />

décidé.<br />

tion, néoplasie, etc. Hyponatrémie aiguë symptomatique<br />

Traitement symptomatique Dans les hyponatrémies aiguës sympto-<br />

Obtenir une déplétion hydrique pure matiques, la vitesse de correction de l’hy-<br />

(apportant moins d’eau alimentaire qu’il ponatrémie peut être plus élevée, en partin’en<br />

est perdu au quotidien par voie cutanée,<br />

respiratoire et rénale).<br />

Restriction hydrique (500 mL/j) et<br />

apports sodés normaux.<br />

Lédermicine ou lithium (action anti-ADH)<br />

culier en cas de coma ou convulsions,<br />

sans toutefois dépasser 2 mmol/L/h le<br />

premier jour, et 1 mmol/L/h les jours sui-<br />

vants.<br />

en dernier recours en cas d’hyponatrémie Seuil de correction<br />

symptomatique persistante malgré la restriction<br />

hydrique.<br />

Chez l’alcoolique ou le patient dénutri, il<br />

ne faut jamais s’acharner à corriger<br />

Vitesse et seuil de correction complètement la natrémie, du fait du<br />

d’une hyponatrémie risque de myélinolyse centro-pontine. On<br />

Vitesse de correction peut se contenter d’un seuil plus bas (par<br />

La natrémie devra être corrigée d’autant exemple 125 à 130 mmol/L) pour lequel<br />

plus lentement qu’elle est chronique. il n’y a en règle pas de trouble clinique.<br />

HYPONATRÉMIE SANS<br />

HYPERHYDRATATION<br />

INTRACELLULAIRE<br />

HYPONATRÉMIE TRADUISANT UNE<br />

HYPERHYDRATATION INTRACELLULAIRE<br />

Secteur Hyperhydratation Hyponatrémie Hyponatrémie Hyponatrémie<br />

intracellulaire intracellulaire avec avec secteur<br />

normal ou fausse hyperhydratation déshydratation extracellulaire<br />

hyponatrémie extracellulaire extracellulaire normal<br />

Hyperprotéiné- Hyperosmolarité Insuffisance Diurétiques Potomanie<br />

mie majeure Glycocolle cardiaque thiazidiques Perfusions<br />

Hyperlipidémie Intoxications droite ou hypotoniques<br />

majeure (éthanol, métha- globale Hypothynol,<br />

bière, trichlo- Cirrhose roïdie<br />

roéthane) décompensée Insuffisance<br />

Élévation rapide Syndrome surrénale<br />

de la glycémie ou néphrotique SIADH<br />

de l’urée Insuffisance<br />

rénale avancée


1222 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË (1)<br />

Diagnostic Alimentation<br />

L’insuffisance rénale aiguë (IRA) est définie Elle sera selon les cas orale, par sonde<br />

par une diminution rapide (quelques nasogastrique ou parentérale, apportant<br />

heures à quelques jours) du débit de filtra- en moyenne tous les jours 35 kcal/kg et<br />

tion glomérulaire (DFG), se traduisant en 0,8 g/kg de protides, avec une supplé-<br />

pratique par une élévation de la créatini- mentation en vitamines B1 et B6.<br />

némie.<br />

La prévention des gastrites aiguës de<br />

stress repose sur l’alimentation et les inhi-<br />

Les deux meilleurs arguments en faveur<br />

du caractère aigu d’une insuffisance rénale<br />

sont :<br />

biteurs de la pompe à protons.<br />

Épuration extrarénale<br />

– créatininémie récente normale ;<br />

– reins de taille normale (ils sont petits en<br />

cas d’insuffisance rénale chronique, sauf<br />

en cas de polykystose, amylose, diabète,<br />

obstruction, thrombose veineuse rénale).<br />

Certains éléments cliniques ou biologiques<br />

plaident pour une épuration extra-<br />

rénale immédiate.<br />

Éléments cliniques<br />

L’hypocalcémie vraie, l’anémie nor- Surcharge hydrosodée (œdème pulmomochrome<br />

normocytaire arégénérative et<br />

l’HTA chronique au fond d’œil plaident<br />

plutôt en faveur de la chronicité.<br />

naire, épanchement<br />

compressif).<br />

Encéphalopathie.<br />

péricardique<br />

Il faut préciser rapidement :<br />

– les caractéristiques de la diurèse : anurie<br />

(< 100 mL/j en l’absence de globe vésical),<br />

oligurie (< 400 mL/j), ou diurèse<br />

conservée ;<br />

– les éléments de gravité justifiant un traitement<br />

symptomatique immédiat : hyper-<br />

kaliémie, acidose métabolique sévère,<br />

Hémorragie digestive.<br />

Toxique dialysable.<br />

Éléments biologiques<br />

Kaliémie > 7 mmol/L ou hyperkaliémie<br />

rapidement progressive.<br />

Urée > 35 mmol/L.<br />

Acidose métabolique sévère (réserve<br />

alcaline < 8 mmol/L, pH < 7,2).<br />

œdème aigu pulmonaire, PA diastolique > Rythme des séances<br />

120 mmHg ;<br />

Le rythme des épurations dépend de l’état<br />

– la cause de l’IRA : par obstacle (urinaire d’hydratation, de l’existence ou non d’une<br />

ou vasculaire), fonctionnelle, parenchyma- diurèse, et des valeurs de l’urée et de la<br />

teuse.<br />

créatinine : il est habituel d’effectuer une<br />

séance de dialyse dès que l’urée est ≥<br />

Traitement symptomatique quelle que<br />

soit la cause<br />

Potassium<br />

35 mmol/L.<br />

Technique<br />

L’hémodialyse est la technique la plus<br />

Hyperkaliémie menaçante et œdème pul- employée, et nécessite la mise en place<br />

monaire doivent être traités en urgence, d’une voie d’abord vasculaire centrale<br />

en attendant qu’une séance d’épuration temporaire, idéalement fémorale ou jugu-<br />

extrarénale puisse être réalisée.<br />

laire.<br />

Apports hydriques<br />

Hémofiltration continue et hémodiafiltration<br />

continue (qui combine ultrafiltration<br />

Ils sont en moyenne « diurèse + et dialyse) sont mieux tolérées au plan<br />

500 mL/j », et les apports en sel sont adap- hémodynamique, d’où leur intérêt dans<br />

tés à la natriurèse des 24 h. Ces valeurs les cas les plus difficiles.<br />

seront revues au jour le jour : à la baisse La dialyse péritonéale est rarement utili-<br />

(si possible) en cas de surcharge, à la sée en situation d’insuffisance rénale<br />

hausse en cas de déshydratation.<br />

aiguë.


INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË Néphrologie 1223<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË (2)<br />

IRA par obstacle urinaire – dépistage : surveillance horaire de la<br />

Un obstacle (complet ou incomplet) à<br />

l’écoulement urinaire doit être recherché,<br />

que la diurèse soit conservée ou non.<br />

Outre le contexte, l’examen clinique, une<br />

échographie rénale est systématiquement<br />

programmée à la recherche d’une dilata-<br />

tion des cavités pyélocalicielles. La sensibilité<br />

de cet examen n’est ici que de 85 %<br />

(parfois négatif si obstruction récente,<br />

fibrose rétropéritonéale, déshydratation<br />

associée).<br />

Les causes les plus fréquentes sont les<br />

tumeurs prostatiques, les néoplasies (pelviennes<br />

ou rétropéritonéales) et les lithiases.<br />

diurèse ;<br />

– compensation totale des pertes uri-<br />

naires au cours des 24 premières heures<br />

avec 50 % de soluté salé intraveineux isotonique<br />

et 50 % de glucosé à 5 %. La<br />

compensation sera progressivement<br />

réduite pour ne pas entretenir la polyurie.<br />

Après levée d’une obstruction complète,<br />

une récupération complète est prévisible<br />

si le traitement est précoce (< 3 j), tandis<br />

qu’une insuffisance rénale chronique<br />

séquellaire de gravité variable est quasi<br />

constante si la prise en charge est tardive<br />

(> 3 sem.).<br />

Le drainage de l’urine retenue en amont<br />

de l’obstacle doit être rapide, et peut faire<br />

appel à plusieurs techniques. Dans la plupart<br />

des cas, le traitement étiologique est<br />

effectué dans un second temps, « à froid ».<br />

IRA par obstruction vasculaire<br />

Obstruction artérielle rénale<br />

Sur rein unique le plus souvent, elle sur-<br />

vient du fait d’une thrombose, d’une dis-<br />

section, ou d’une embolie d’origine car-<br />

Globe vésical<br />

Soit sondage urétral (contre-indiqué en<br />

cas de prostatite ou d’orchiépididymite).<br />

diaque. Ce diagnostic doit être envisagé<br />

chez les patients âgés, athéromateux, et<br />

porteurs d’une cardiopathie emboligène.<br />

Le Doppler artériel ou la scintigraphie<br />

Soit cathéterisme sus-pubien (sous anes- confirment l’absence de flux artériel rénal.<br />

thésie locale, après contrôle de l’hémos- Radiologie interventionnelle ou chirurgie<br />

tase, à éviter en cas de suspicion de can- doivent être discutées.<br />

cer vésical).<br />

Thrombose bilatérale des veines rénales<br />

Obstruction du haut appareil<br />

Soit montée de sonde(s) endo-urétérale(s)<br />

sous anesthésie générale, avec antibioprophylaxie.<br />

Soit néphrostomie percutanée écho-gui-<br />

Origine rare d’IRA, dont la cause quasi<br />

exclusive chez l’adulte est le syndrome<br />

néphrotique par glomérulonéphrite extra-<br />

membraneuse.<br />

Hématurie, lombalgies, fièvre, embolie<br />

pulmonaire sont possibles. Doppler, scandée<br />

(uni- ou bilatérale). ner ou IRM sont les meilleurs examens<br />

Un « syndrome de levée d’obstacle » est diagnostiques actuels.<br />

fréquent après un obstacle complet pro- Le traitement repose sur une anticoagula-<br />

longé impliquant :<br />

tion efficace prolongée.


1224 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË (3)<br />

IRA fonctionnelle normale. En cas de traitement tardif, des<br />

Diagnostic<br />

lésions organiques du parenchyme rénal<br />

L’insuffisance rénale fonctionnelle est due<br />

(nécrose tubulaire) peuvent se constituer.<br />

à une baisse du flux sanguin rénal, ou Traitement<br />

« hypoperfusion » rénale.<br />

En cas de déshydratation, collapsus ou<br />

choc de type hypovolémique<br />

La cause fonctionnelle d’une insuffisance<br />

rénale sera suspectée devant :<br />

– un contexte d’hypoperfusion rénale ;<br />

– des urines, typiquement pauvres en sel et<br />

concentrées en déchets (urée, créatinine).<br />

Cette réponse tubulaire rénale est<br />

« adaptée » à la situation d’hypoperfusion,<br />

Interrompre les antihypertenseurs et les<br />

médicaments perturbant l’hémodynamique<br />

intrarénale (IEC et AINS en particulier).<br />

Rétablir une volémie normale : expansion<br />

volémique rapide par soluté cristalloïde<br />

(soluté salé isotonique), colloïde (macromolécules),<br />

ou dérivés du sang (choc hémorracar<br />

les tubules sont anatomiquement et gique) sous surveillance clinique voire hémofonctionnellement<br />

normaux ; à l’inverse, dynamique (pression veineuse centrale).<br />

en cas de lésions tubulaires organiques, il<br />

existe une fuite sodée inappropriée et un<br />

En cas d’incompétence myocardique<br />

Drogues tonicardiaques ou antiarythdéfaut<br />

d’excrétion des déchets. miques. L’expansion volémique est<br />

Le diagnostic de certitude est en fait rétros- logique en cas d’insuffisance cardiaque<br />

pectif : retour à la fonction rénale antérieure droite, mais contre-indiquée en cas d’in-<br />

après rétablissement d’une perfusion rénale suffisance cardiaque gauche.<br />

Principales causes d’hypoperfusion rénale<br />

Déshydratation extracellulaire (pertes hydrosodées rénales, digestives, cutanées), collapsus<br />

ou choc de type hypovolémique.<br />

Insuffisance cardiaque (droite ou globale), tamponnade.<br />

Hypovolémie efficace (certains syndromes néphrotiques, syndrome hépatorénal).<br />

Certains médicaments (IEC, AINS), en cas de sténose bilatérale des artères rénales, déshydratation,<br />

ou néphroangiosclérose associée(s).<br />

Indices biologiques d’insuffisance rénale fonctionnelle<br />

Na urinaire (mmol/L) < 20<br />

Fe* Na (U/P Na ÷ U/P créat) < 1 %<br />

Na/K (urinaire) < 1<br />

Créatinine (urinaire/plasmatique) > 40<br />

En pratique, ces indices urinaires ne sont interprétables qu’en l’absence de traitement diurétique<br />

(ce qui est rare), et en l’absence d’insuffisance rénale chronique organique sous-jacente.<br />

IRA parenchymateuse rénales demandent en moyenne 3 sem.,<br />

Les causes d’IRA parenchymateuse sont durant lesquelles plusieurs séances d’épuratrès<br />

nombreuses ( cf. encadré).<br />

tion extrarénale seront nécessaires.<br />

En cas d’anurie initiale, il est intéressant de<br />

Nécrose tubulaire tenter de « relancer la diurèse » après norma-<br />

Dans 90 % des cas, l’IRA parenchymalisation de la volémie grâce à l’emploi de diuteuse<br />

est une nécrose tubulaire aiguë :la rétiques de l’anse àfortesdoseset/oudopa-<br />

cause en est facilement identifiée, et la mine àfaiblesdoses(3μg/kg/min) : le débit<br />

biopsie rénale n’est pas utile.<br />

de filtration glomérulaire ne change pas,<br />

La réparation des lésions épithéliales tubu- mais la réanimation est plus facile et la frélaires<br />

et la reprise progressive des fonctions quence des dialyses moindre.<br />

* Fe : Fraction d’excrétion.


INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË Néphrologie 1225<br />

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË (4)<br />

Autres IRA parenchymateuses imagerie) donnent parfois une orientation<br />

Leur diagnostic est souvent difficile à étiologique précise ; le plus souvent, une<br />

établir.<br />

biopsie rénale est utile afin de porter un<br />

L’anamnèse, l’examen clinique, et cer- diagnostic exact et d’apprécier l’étendue<br />

tains examens complémentaires (biologie, des lésions.<br />

Principales causes d’IRA parenchymateuse<br />

Nécrose tubulaire<br />

– État de choc.<br />

– Pigments (myoblobine, hémoglobine).<br />

– Produits tubulotoxiques (iode, aminosides, etc.).<br />

Obstruction tubulaire<br />

– Myélome.<br />

– Médicaments<br />

– Syndrome de lyse tumorale.<br />

Interstitielle<br />

– Immunoallergique.<br />

– Sarcoïdose.<br />

– Infection.<br />

Vasculaire<br />

– Embolies de cholestérol.<br />

– HTA maligne.<br />

Glomérulovasculaire<br />

– Glomérulonéphrite rapidement progressive.<br />

– Glomérulonéphrite aiguë.<br />

– Microangiopathie thrombotique (SHU).


1226 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (1)<br />

Généralités avancée, préterminale et enfin « termina-<br />

L’insuffisance rénale chronique (IRC) est<br />

définie par une réduction permanente du<br />

débit de filtration glomérulaire, estimée en<br />

le », qui nécessitera la mise en œuvre d’un<br />

traitement de suppléance : dialyse et/ou<br />

transplantation rénale.<br />

pratique clinique par la réduction de la<br />

clairance de la créatinine. L’IRC peut résulter<br />

de diverses atteintes du parenchyme<br />

Le premier objectif thérapeutique est de<br />

prolonger la survie rénale, tout en faisant,<br />

le moment venu, les préparatifs au traite-<br />

ment de suppléance.<br />

rénal, affectant initialement les structures Le second objectif est d’amener le patient<br />

glomérulaires, vasculaires, ou tubulo-inter-<br />

stitielles.<br />

Lorsqu’elle est constituée, l’IRC débutante<br />

au stade terminal de la maladie rénale<br />

dans le meilleur état possible : une bonne<br />

qualité de vie, peu de symptômes urémiques,<br />

un état nutritionnel satisfaisant, un<br />

progresse en règle inexorablement et équilibre hydroélectrolytique et un bilan<br />

indépendamment de la maladie causale<br />

vers l’insuffisance rénale modérée, puis<br />

phosphocalcique contrôlés, et un athé-<br />

rome limité.


INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE Néphrologie 1227<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (2)<br />

Mesure de la fonction rénale [1] métriques, la formule MDRD donne une<br />

La fonction rénale ne peut pas être éva- estimation plus précise du DFG que la forluée<br />

à partir de la seule mesure de la créa-<br />

tininémie ; une créatininémie « normale »<br />

d’après les normes du laboratoire ne signi-<br />

mule de Gault et Cockcroft, en particulier<br />

chez le sujet obèse et chez le sujet âgé.<br />

L’estimation du DFG permet de classer les<br />

fie pas toujours que la fonction rénale est maladies rénales chroniques en 5 stades<br />

normale. Le calcul de la clairance de la (à chaque stade correspond un projet thé-<br />

créatinine à partir des urines de 24 h est rapeutique spécifique) et d’adapter les<br />

souvent erroné et doit être abandonné. posologies médicamenteuses.<br />

La fonction rénale est définie par le débit Les sujets jeunes sans néphropathie ont<br />

un DFG > 90 mL/min/1,73 m2 de filtration glomérulaire (DFG), exprimé<br />

. Quel que<br />

par un volume d’ultrafiltrat glomérulaire soit l’âge, le DFG doit être ><br />

formé par unité du temps et rapporté à la 70 mL/min/1,73 m2 en l’absence de<br />

surface corporelle. néphropathie.<br />

La mesure du DFG (clairance de l’inuline,<br />

du iohexol ou de l’EDTA par exemple) est Formules d’estimation du DFG<br />

complexe, coûteuse et d’indication rare. Formule de Gault et Cockcroft<br />

L’estimation du DFG est simple et repose Cette formule, basée sur la créatininémie,<br />

sur la formule de Gault et Cockcroft et la le poids, l’âge et le sexe, doit être idéale-<br />

formule MDRD. À partir d’un simple ment « corrigée » par la surface corporelle<br />

dosage sanguin (la créatininémie), et de (c’est-à-dire rapportée à une surface cor-<br />

quelques variables cliniques et anthropo- porelle de 1,73 m2 ):<br />

Formule de Gault et Cockcroft<br />

DFG (mL/min/1,73 m2 ) =<br />

[poids (kg) taille (cm)/3600] 0,5<br />

K × poids (kg) x[140<br />

– âge (années)]<br />

Créatininémie (µmol/L)<br />

x<br />

1,73<br />

x<br />

avec K = 1,23 (homme) ou 1,04 (femme)<br />

Formule MDRD (Modification of the Diet in l’équation actuellement utilisée, appelée<br />

Renal Disease)<br />

Les formules MDRD ont été établies grâce<br />

aux patients inclus dans l’étude MDRD,<br />

après confrontation avec une mesure du<br />

DFG par clairance du iothalamate. L’équation<br />

originale comprenait 6 variables ;<br />

« MDRD simplifiée », en contient 4 : créatininémie,<br />

âge, sexe et race. La valeur calcu-<br />

lée est directement rapportée à la surface<br />

corporelle, bien que celle-ci ne soit pas<br />

mesurée :<br />

Formule MDRD<br />

DFG (mL/kg/1,73 m 2 ) = K 186,3 [Créatininémie (mg/L)/10] –1,154 [Âge (années)] –0,203<br />

× × ×<br />

avec K = 1 (homme) ou 0,742 (femme)<br />

peau noire : multiplier par 1,212


1228 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (3)<br />

Classification des maladies rénales – d’adapter la posologie des médicachroniques<br />

ments à élimination rénale de façon à en<br />

On parle de éviter la toxicité;<br />

néphropathie chronique en<br />

cas d’existence depuis au moins 3 mois :<br />

– soit d’une anomalie des marqueurs bio-<br />

– de définir<br />

adapté.<br />

un projet thérapeutique<br />

logiques rénaux (protéinurie, anomalie du<br />

sédiment urinaire, troubles hydroélectro-<br />

Stade Description DFG<br />

(mL/min)<br />

lytiques d’origine rénale), ou d’une anomalie<br />

morphologique cliniquement signifi-<br />

cative ;<br />

– soit d’un DFG inférieur à<br />

60 mL/min/1,73 m<br />

1<br />

2<br />

Maladie rénale<br />

chronique à fonction<br />

rénale normale<br />

IRC légère<br />

> 90<br />

60-89<br />

2 , avec ou sans marqueurs<br />

de lésions rénales associés. 3 IRC modérée 30-59<br />

L’estimation du DFG permet :<br />

– de classer la sévérité d’une néphropa-<br />

4 IRC sévère 15-29<br />

thie chronique (insuffisance rénale débu- 5 IRC terminale < 15<br />

tante, modérée, sévère, terminale pour 5D Dialysé<br />

des DFG respectivement inférieurs à 90,<br />

60, 30 et 15 L/min/1,73 m<br />

5T Transplanté<br />

2 );<br />

Mode d’action des différents types de diurétiques<br />

Diagnostic étiologique Stade 1<br />

Prévention et traitement<br />

des complications, comorbidités<br />

Stade 2<br />

et pathologies associées : HTA, anémie,<br />

troubles phosphocalciques, acidose<br />

métabolique, troubles nutritionnels<br />

Préservation du capital veineux<br />

Stade 3<br />

pour éventuel abord vasculaire<br />

Vaccination antivirale B<br />

Stade 4<br />

Information et préparation au traitement<br />

de suppléance (hémodialyse, dialyse<br />

péritonéale) et à la transplantation rénale<br />

Stade 5<br />

Débuter si nécessaire le traitement de suppléance


INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE Néphrologie 1229<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (4)<br />

Ralentir la progression [2] élevé, une néphropathie initiale de type<br />

La diminution annuelle de la filtration glomérulaire<br />

est très lente (–1 à –3 mL/min/an),<br />

modérée, ou rapide (–6 à<br />

–2 mL/min/an) avec comme facteurs de<br />

risque le sexe masculin, la race noire,<br />

glomérulaire.<br />

Traitement étiologique<br />

Le traitement de la cause de l’insuffisance<br />

rénale chronique permet souvent de<br />

ralentir ou stopper la dégradation de la<br />

fonction rénale ; une amélioration est parl’existence<br />

et la sévérité d’une hyperten- fois notée. Les principaux exemples sont<br />

sion artérielle, une protéinurie de débit indiqués dans le tableau ci-dessous.<br />

TYPE<br />

D’INSUFFISANCE<br />

RÉNALE<br />

ÉTIOLOGIE TRAITEMENT<br />

Obstruction urinaire Chirurgie, drainage, sondage<br />

UROPATHIES<br />

Maladie lithiasique Hyperdiurèse, régime et<br />

traitement médicamenteux<br />

Tuberculose rénale Antibiothérapie<br />

NÉPHROPATHIES<br />

VASCULAIRES<br />

Insuffisance rénale ischémique<br />

Néphroangiosclérose<br />

Revascularisation artérielle<br />

rénale<br />

Contrôle tensionnel strict<br />

Abus d’analgésiques Arrêt de l’intoxication<br />

NÉPHROPATHIES<br />

TUBULO-<br />

INTERSTITIELLES<br />

Uratique<br />

Hypokaliémique<br />

Allopurinol<br />

KCl<br />

Hypercalcémique Étiologique<br />

Maladie de Berger Corticoïdes (« Locatelli »)<br />

Glomérulonéphrite Corticoïdes + chlorambucil<br />

extramembraneuse primitive (« Ponticelli »)<br />

NÉPHROPATHIES<br />

GLOMÉRULAIRES<br />

Diabète Équilibre glycémique<br />

Vascularite primitive, lupus Corticoïdes ±<br />

cyclophosphamide<br />

Amylose AL Chimiothérapie<br />

Fabry α-galactosidase A recombinante<br />

MALADIES Néphropathie familiale Allopurinol<br />

HÉRÉDITAIRES hyperuricémique<br />

Cystinose Cystéamine


1230 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (5)<br />

Néphroprotection pharmacologique : téinuriques ont une efficacité progressive,<br />

réduction de la pression artérielle et et leur efficacité maximale n’est observée<br />

de la protéinurie que tardivement (environ 6 mois).<br />

L’HTA touche la grande majorité des insuffisants<br />

rénaux et contribue à l’aggravation<br />

des lésions rénales ; inversement, sa nor-<br />

malisation permet de ralentir la dégrada-<br />

tion de la fonction rénale.<br />

Au cours des maladies rénales chroniques,<br />

l’existence d’une protéinurie est un marqueur<br />

de progression de l’insuffisance<br />

rénale : plus son débit est élevé, plus le déclin<br />

annuel de la filtration glomérulaire est rapide<br />

et plus le risque d’insuffisance terminale est<br />

fort. Au-delà de son rôle de marqueur, de<br />

nombreux arguments expérimentaux indi-<br />

quent que la protéinurie est aussi un acteur<br />

de la progression des néphropathies.<br />

Traitements antiprotéinuriques<br />

Le traitement étiologique d’une néphropathie<br />

peut faire disparaître la protéinurie. À<br />

défaut, réduire de façon globale le débit<br />

de protéinurie.<br />

Le contrôle de la pression artérielle est la<br />

première étape du traitement antiprotéinu-<br />

rique et néphroprotecteur. Dans tous les cas,<br />

la TA doit être < 140/90 mmHg ; un contrôle<br />

plus agressif est recommandé chez le diabé-<br />

tique (TA ≤ 130/80 mmHg), et en cas de<br />

néphropathie non diabétique avec protéinurie<br />

> 1g/j (TA ≤125/75 mmHg).<br />

Les IEC et les sartans ont la meilleure effica-<br />

cité antiprotéinurique et néphroprotectrice ;<br />

Seuil d’intervention et cible thérapeutique<br />

À quel seuil de protéinurie intervenir ?<br />

Lesétudesd’observationsuggèrentqu’ilya<br />

un bénéfice rénal à intervenir dès le stade de<br />

microalbuminurie permanente de débit<br />

élevé au cours des néphropathies diabé-<br />

tiques, et dès que la protéinurie est > 0,5 g/j<br />

dans les néphropathies non diabétiques.<br />

leur association est synergique sur ces deux<br />

paramètres au cours des néphropathies non<br />

diabétiques. Leur effet antiprotéinurique est<br />

potentialisé par les inhibiteurs calciques non<br />

dihydropyridiniques (vérapamil, diltiazem),<br />

par le régime sans sel et/ou par l’adjonction<br />

d’un diurétique (thiazidiques de préférence,<br />

diurétiques de l’anse si la filtration gloméru-<br />

laire est < 30 mL/min) ; les antialdostérones<br />

Jusqu’où aller ? sont en revanche déconseillés du fait du<br />

Là encore, des études d’observation sug- risque d’hyperkaliémie.<br />

gèrent le bénéfice rénal de l’obtention D’autres interventions pourraient réduire<br />

d’une microalbuminurie normale chez le la protéinurie : certaines sont peu discutables<br />

diabétique, et d’une protéinurie réduite de car utiles (perte de poids chez l’obèse, usage<br />

60 % de sa valeur initiale ou < 0,5 g/j en de statines, interruption du tabagisme),<br />

valeur absolue dans les néphropathies d’autres sont à évaluer lors d’essais contrôlés<br />

non diabétiques. Les traitements antipro- (régimetrèslimitéenprotides).<br />

Utilisation des IEC dans l’insuffisance rénale : règles de prudence<br />

Écarter la possibilité d’une sténose bilaté- J30 : kaliémie et créatininémie ;<br />

rale des artères rénales. – vérifier l’efficacité : pression artérielle ±<br />

Prescription initiale : protéinurie à J30, et décider ou non d’une<br />

– à doses faibles en cas de lésions vasculaires majoration progressive de la posologie.<br />

intrarénales (néphroangiosclérose, diabète) ; Prévenir le patient :<br />

– chez un patient cliniquement non déshy- – interrompre le traitement en cas de déshydraté<br />

; dratation aiguë (diarrhée, vomissements) et<br />

– les diurétiques éventuels seront prescrits consulter ;<br />

dans un second temps. – en cas de coprescription de diurétiques :<br />

Le premier mois : contact médical en cas de perte de poids<br />

– vérifier l’absence d’insuffisance rénale aiguë : excessive ou de vertiges orthostatiques ;<br />

J3 : diurèse, kaliémie et créatininémie, – éviction formelle des AINS.


INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE Néphrologie 1231<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (6)<br />

Limitation des apports protidiques causes (voir encadré). Le diagnostic de<br />

Les apports limités en protides pourraient poussée évolutive de la néphropathie est<br />

réduire l’hyperpression intraglomérulaire toujours un diagnostic d’élimination.<br />

et ralentir la dégradation de la fonction L’hospitalisation est souvent nécessaire ;<br />

rénale : 1 g/kg/j lorsque l’insuffisance l’anamnèse, les données cliniques et<br />

rénale est débutante, puis 0,8 g/kg/j lors- quelques examens simples d’imagerie<br />

que l’IRC est modérée, sans jamais descendre<br />

au-dessous de 0,7 g/kg/j lorsque<br />

l’IRC est sévère. La mesure de l’excrétion<br />

urinaire d’urée permet de vérifier la<br />

compliance au régime.<br />

(échographie rénale, cliché d’abdomen<br />

sans préparation) ou de biologie identi-<br />

fient le plus souvent la cause de l’aggrava-<br />

tion. Un traitement précoce permet en<br />

règle un retour rapide à la fonction rénale<br />

Acuitisation antérieure, comme par exemple la réhy-<br />

L’aggravation brutale d’une IRC doit faire dratation après un épisode de diarrhée ou<br />

rechercher systématiquement plusieurs de vomissements sévères.<br />

Principales causes d’acutisation d’une IRC<br />

Obstacle sur les voies excrétrices :<br />

– rétention aiguë ou chronique d’urine vésicale ;<br />

– migration lithiasique.<br />

Hypoperfusion rénale :<br />

– déshydratation extracellulaire ou collapsus de toute cause, anémie sévère ;<br />

– infarctus rénal, thrombose des veines rénales ;<br />

– poussée d’insuffisance cardiaque ;<br />

– épanchement péricardique compressif.<br />

HTA maligne.<br />

Médicaments :<br />

– IEC, en cas de déshydratation aiguë ou sténose bilatérale des artères rénales ;<br />

– AINS, iode, aminosides ;<br />

– tous produits inducteurs d’immunoallergie aiguë, de rhabdomyolyse (hypolipémiants), ou<br />

d’hémolyse.<br />

Toute infection, urinaire ou non.<br />

CONSENSUS<br />

[1] Diagnostic de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte, Anaes, 2002, www.has-sante.fr<br />

[2] Moyens thérapeutiques pour ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique<br />

chez l’adulte, Anaes, 2004, www.has-sante.fr


1232 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (7)<br />

TROUBLES HYDROÉLECTROLYTIQUES<br />

Troubles hydroélectrolytiques Hyperkaliémie<br />

Apports hydrosodés La kaliémie est longtemps normale au<br />

Dans la plupart des cas, l’IRC avancée s’ac- cours de l’IRC car les néphrons sains augcompagne<br />

d’une polyurie, avec polydipsie<br />

et nycturie. Les apports hydriques sont<br />

libres et le patient pourra boire selon sa<br />

soif, de façon à compenser les pertes<br />

hydriques urinaires, soit en moyenne 1,5<br />

à 3 L/j. Au stade ultime cependant, les<br />

reins sont incapables d’excréter une<br />

mentent leur fraction d’excrétion du<br />

potassium. De plus, les diurétiques de<br />

l’anse (furosémide, bumétanide) couram-<br />

ment employés dans l’IRC augmentent<br />

significativement la kaliurèse. L’hyperka-<br />

liémie due à la seule insuffisance rénale<br />

charge d’eau importante, et une hypona- est en règle tardive (clairance de la créatitrémie<br />

peut apparaître : une restriction nine ≤ 15 mL/min), modérée (K + = 5 à<br />

hydrique modérée est alors indiquée.<br />

Le « bilan sodé » est très longtemps normal<br />

au cours de l’IRC : la majorité des patients<br />

consomment sans inconvénient 6 à 10 g<br />

de sel par jour. Un régime désodé abusif<br />

6 mmol/L), et non rapidement évolutive.<br />

Son traitement est ambulatoire ( cf. Hyper-<br />

kaliémie).<br />

peut induire une déshydratation globale<br />

et une aggravation fonctionnelle de l’in-<br />

Acidose métabolique<br />

suffisance rénale : en situation d’IRC avancée,<br />

les reins sont le plus souvent incapables<br />

de réduire l’excrétion urinaire de<br />

sel au-dessous de 2 à 3 g/j. L’insuffisance<br />

des apports sodés est particulièrement<br />

dangereuse chez les patients porteurs<br />

L’acidose métabolique est parfois précoce<br />

(fuite urinaire de bicarbonates par tubulo-<br />

pathie proximale), mais volontiers tardive<br />

(toute IRC avancée, diminution de l’excré-<br />

tion tubulaire distale d’ammoniac et réten-<br />

d’une « néphropathie avec perte urinaire tion d’acides).<br />

de sel » (certaines néphropathies tubulointerstitielles),<br />

pour qui les besoins sodés<br />

alimentaires varient parfois de 12 à 20 g/j.<br />

Tant que le taux plasmatique de bicarbo-<br />

nate est supérieur à 20 mmol/L, aucune<br />

mesure thérapeutique n’est nécessaire ;<br />

Les indications à un régime sans sel (2 g/j) en deçà, une correction au moins partielle<br />

sont rares :<br />

– HTA sévère et résistante au traitement<br />

pharmacologique ;<br />

de l’acidose est souhaitable.<br />

En moyenne, 2 à 4 g de bicarbonate de<br />

– survenue d’un syndrome œdémateux, sodium par jour permettent de maintenir la<br />

qui s’explique d’ailleurs rarement par la<br />

seule insuffisance rénale (insuffisance cardiaque<br />

droite ou globale, cirrhose hépatique,<br />

facteur compressif doivent être<br />

recherchés).<br />

réserve alcaline entre 20 et 25 mmol/L.


INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE Néphrologie 1233<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (8)<br />

TROUBLES OSTÉO-ARTICULAIRES<br />

Ostéodystrophie rénale prime, ou le plus souvent à la fin des repas<br />

Mécanismes<br />

riches en phosphore (midi et soir) si la baisse<br />

La rétention de phosphates est précoce au<br />

cours de l’IRC, mais l’apparition d’une hyperphosphorémie<br />

est tardive (DFG <<br />

30 mL/min) car longtemps contenue par une<br />

élévation réactionnelle de la PTH. Le prix à<br />

payer est un hyperparathyroïdisme secondaire<br />

avec « turnover » osseux élevé et<br />

ostéite fibreuse parfois compliquée de douleurs<br />

osseuses, déminéralisation et fractures.<br />

Le freinage excessif du « turnover » osseux<br />

(PTH excessivement freinée) peut induire<br />

une ostéopathie adynamique. L’existence<br />

d’un déficit en calcitriol (synthétisé par le<br />

de la phosphorémie prime.<br />

Les chélateurs digestifs du phosphore<br />

non calciques (sevelamer et carbonate de<br />

lanthanum) peuvent être utilisés isolément<br />

ou en association au carbonate de calcium.<br />

Les dérivés 1-alpha-hydroxylés de la<br />

vitamine D (alfacalcidol ou calcitriol) rédui-<br />

sent, en se liant à leur récepteur, la syn-<br />

thèse de PTH par les cellules parathyroï-<br />

diennes ; ils sont indiqués lorsque les taux<br />

de PTH mesurés sont excessivement<br />

élevés ou lorsque la calcémie reste basse<br />

malgré l’usage de carbonate de calcium.<br />

La vitamine D augmente l’absorption<br />

rein), et une balance calcique négative peu- intestinale du calcium et des phosphates : la<br />

vent induire un ralentissement de la minéra- phosphorémie doit impérativement être norlisation<br />

osseuse avec lésions d’ostéomalacie. male avant le début du traitement, sous<br />

Ces remaniements de la structure osseuse peine de voir apparaître des dépôts phossont<br />

parfois associés chez l’insuffisant rénal : phocalciques tissulaires. Il faut surveiller<br />

on parle alors d’ostéodystrophie mixte. régulièrement l’absence d’hypercalcémie et<br />

Traitement<br />

Objectifs<br />

Dès que la clairance de la créatinine est inférieure<br />

à 60 mL/min, une surveillance régulièredelacalcémieetdelaphosphorémie<br />

est utile, avec un dosage annuel de la PTH et<br />

veiller à ce qu’un certain degré d’hyperparathyroïdie<br />

persiste, un freinage trop poussé de<br />

la PTH (< 2N) pouvant occasionner une<br />

ostéopathie adynamique.<br />

Le cinacalcet, premier agent calcimimé-<br />

tique disponible, réduit la sécrétion de<br />

PTH, et diminue la calcémie, la phropahodu<br />

stock vitaminique D (25 OH D3). Les rémie et le produit phosphocalcique. Son<br />

objectifs intermédiaires sont une calcémie et usage est réservé au traitement des hyperun<br />

stock vitaminique D normaux, une phos- parathyroïdismes sévères du dialysé.<br />

phorémie < 1,5 mmol/L (stades 3 et 4) ou <<br />

1,8mmol/L(stade5)etunePTHélevéepar<br />

nécessité, mais pas excessivement (nor-<br />

male70 à 110 pg/mL au stade 4, 150 à<br />

300 pg/mL au stade 5).<br />

L’objectif final est de prévenir l’ostéodys-<br />

trophie rénale ; une réduction de la morbimortalité<br />

cardiovasculaire n’est pas exclue<br />

mais reste à prouver.<br />

Moyens thérapeutiques<br />

Le carbonate de calcium normalise la calcémie<br />

en augmentant la ration calcique absorbée<br />

par l’intestin malgré le déficit en calcitriol<br />

et corrige l’hyperphosphorémie en<br />

chélatant les phosphates alimentaires dans<br />

la lumière digestive. Il est prescrit en dehors<br />

des repas si la correction de la calcémie<br />

Crises de goutte<br />

L’hyperuricémie est le plus souvent asymptomatique<br />

au cours de l’IRC. Dans 20 %<br />

des cas, elle entraîne une goutte dite « secondaire<br />

». La COLCHICINE peut être utilisée<br />

à faibles doses (2 mg/j initialement) et<br />

pour une brève période, sachant qu’elle<br />

induit presque toujours une diarrhée chez<br />

le malade urémique.<br />

Après 2 accès goutteux, un hypo-uricémiant,<br />

allopurinol (ZYLORIC) assure générale-<br />

ment la prévention des récidives ; sa posolo-<br />

gie doit être considérablement réduite<br />

lorsque l’IRC est avancée (100 mg/j) ou termi-<br />

nale (50 mg/j). L’allopurinol n’a aucune indi-<br />

cation en prévention primaire des accidents<br />

goutteux chez l’insuffisant rénal.


1234 Néphrologie CHÉLATEURS DU PHOSPHORE<br />

Carbonate de calcium<br />

CALCIDIA<br />

CHÉLATEURS DU PHOSPHORE (1)<br />

Hyperphosphorémie : 20 sach. à diluer (1,5 g 5,71 65 % 0,29<br />

1/2 à 1 sach. x 2/j à la fin des repas riches de calcium-élément)<br />

en phosphore (midi et soir)<br />

Hypocalcémie :<br />

1 à 2 sach./j en dehors des repas<br />

EUCALCIC<br />

Idem CALCIDIA 30 sach. buvables (1,2 g 8,37 65 % 0,28<br />

de calcium-élément)<br />

CALTRATE<br />

1 à 2 cp./j 60 cp. 500 mg 7,67 65 % 0,13<br />

60 cp. 600 mg 7,62 65 % 0,13<br />

CACIT<br />

0,5 à 1 g/j 60 cp. efferv. 500 mg 7,62 65 % 0,13<br />

30 cp. efferv. 1 g 7,62 65 % 0,25<br />

CALCIDOSE<br />

1 à 2 sach./j 60 sach. 500 mg 7,62 65 % 0,13<br />

PROPRIÉTÉS CONTRE-INDICATIONS<br />

Le carbonate de calcium est utilisé dans le traitement<br />

de l’ostéodystrophie rénale :<br />

– il diminue la phosphorémie par<br />

complexation digestive, lorsqu’il est administré<br />

à la fin des repas ;<br />

– il augmente la calcémie, par baisse de la<br />

phosphorémie et par absorption digestive passive,<br />

principalement lorsqu’il est administré en<br />

dehors des repas<br />

Hypercalcémie (> 2,6 mmol/L), hypercalciurie<br />

(> 1 mmol/10 kg/j), lithiase urinaire calcique,<br />

néphrocalcinose<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Surveillance régulière de la calcémie : arrêt de<br />

l’apport calcique en cas d’hypercalcémie ; surveillance<br />

renforcée (initialement hebdoma-<br />

daire) en cas de coprescription de vitamine D<br />

ou d’immobilisation prolongée.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Il est utilisé à titre préventif pour freiner la Troubles digestifs : accélération du transit, plus<br />

sécrétion de parathormone lorsque celle-ci est rarement nausées, constipation.<br />

élevée (PTH > 3 N).<br />

Surdosage : hypercalcémie aiguë.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

INDICATIONS<br />

Association nécessitant des précautions<br />

Traitement de l’ostéodystrophie rénale : hyperd’emploi<br />

:<br />

– digitaliques (risque de toxicité accrue en cas<br />

phosphorémie et hypocalcémie des insuffisants<br />

rénaux chroniques.<br />

Prévention de l’ostéodystrophie rénale (calcé-<br />

mie et phosphorémie normale, mais PTH ><br />

d’hypercalcémie) ;<br />

– tétracyclines orales (risque d’absorption<br />

diminuée : respecter un intervalle de 3 h entre<br />

les deux principes) ;<br />

– polystyrène de calcium (risque d’hypercalcé-<br />

3 N).<br />

mie) : réduire la dose de carbonate de calcium.


CHÉLATEURS DU PHOSPHORE Néphrologie 1235<br />

Sevelamer hydrochloride<br />

RENAGEL<br />

CHÉLATEURS DU PHOSPHORE (2)<br />

Hyperphosphorémie : 800 à 1 600 mg x 180 cp. à 800 mg 210,45 I 65 % 1,17<br />

3/j durant les repas<br />

PROPRIÉTÉS PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Composé polymérique chélateur digestif du<br />

phosphore. Pas d’absorption systémique.<br />

Surveillance régulière de la phosphorémie. Prudence<br />

chez les patients atteints de troubles<br />

digestifs. Ne pas ouvrir les capsules.<br />

INDICATIONS<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Traitement de l’hyperphosphorémie du dialysé.<br />

Troubles digestifs (diarrhée, dyspepsie, vomissements,<br />

flatulences). Céphalées. Hypotension.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Douleurs neuromusculaires. Baisse de l’absorption<br />

des vitamines D, E, K et de l’acide<br />

Hypophosphorémie ; hypersensibilité au seve- folique.<br />

lamer. INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Grossesse et allaitement : innocuité non Les autres médicaments doivent être pris 1 h<br />

établie.<br />

avant ou 3 h après le sevelamer.<br />

Carbonate de lanthanum<br />

FOSRENOL<br />

Hyperphosphorémie : augmentation pro- 90 cp. croq. 250 mg 148,06 I 65 % 1,65<br />

gressive jusqu’à 1 500-3 000 mg (fin de 90 cp. croq. 500 mg 195,12 I 65% 2,17<br />

repas) 90 cp. croq. 750 mg 254,67 I 65 % 2,83<br />

90 cp. 1 000 mg 268,56 I 65% 2,98<br />

PROPRIÉTÉS PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Chélateur digestif du phosphore.<br />

Surveillance régulière de la phosphorémie. Prudence<br />

chez les patients atteints de troubles<br />

INDICATIONS<br />

Traitement de l’hyperphosphorémie lors des<br />

maladies rénales chroniques stade 5 (DFG <<br />

digestifs.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Troubles digestifs (diarrhée, dyspepsie, vomis-<br />

sements).<br />

15 mL/min) chez l’adulte. Céphalées.<br />

Hypotension.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Hypophosphorémie ; hypersensibilité au lantahanum.<br />

Douleurs neuromusculaires.<br />

Baisse de l’absorption des vitamines D, E, K et<br />

de l’acide folique.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Grossesse et allaitement : innocuité non Les autres médicaments doivent être pris 1 h<br />

établie.<br />

avant ou 3 h après.


1236 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (9) - ANÉMIE<br />

Mécanismes Supplémentation martiale<br />

Une anémie normochrome normocytaire<br />

arégénérative apparaît progressivement<br />

dans la plupart des néphropathies chroniques<br />

évoluées. Elle est due à un déficit<br />

de synthèse rénale d’érythropoïétine ; une<br />

hémolyse modérée (due aux toxines uré-<br />

miques) et plusieurs carences (martiale,<br />

folique, en vitamine B12) peuvent y<br />

contribuer.<br />

Les conséquences de l’anémie sont invalidantes<br />

: asthénie physique et psychique,<br />

capacité d’effort limitée, dyspnée, baisse<br />

de la libido, etc. Les mécanismes adapta-<br />

tifs cardiaques (augmentation du débit,<br />

hypertrophie ventriculaire gauche) sont à<br />

long terme délétères, et chez certains<br />

patients, une insuffisance coronarienne en<br />

partie fonctionnelle peut apparaître en<br />

dessous d’un certain seuil d’hémoglobine.<br />

Elle est indiquée si la ferritinémie est inférieure<br />

à 150 μmol/L ou le coefficient de<br />

saturation inférieur à 20 % : en moyenne<br />

100 mg de fer ferreux par jour, per os, en<br />

dehors des repas. Cette mesure permet de<br />

combattre, alors même que le stock martial<br />

est jugé normal la « carence martiale<br />

fonctionnelle » qui nuit chez l’insuffisant<br />

rénal à une érythropoïèse efficace.<br />

Érythropoïétine recombinante<br />

Si une anémie < 11 g/dL persiste après<br />

6 sem. de supplémentation martiale, la<br />

prescription d’érythropoïétine humaine<br />

recombinante (r-HuEPO) ou d’un stimulant<br />

de l’érythropoïèse (darbépoïétine alfa) est<br />

justifiée. Avant le stade de dialyse,<br />

l’érythropoïétine est administrée par<br />

injections sous-cutanées. L’élévation de<br />

l’hémoglobine ne doit pas dépasser 1 à<br />

2 g/dL/mois sous peine de complications<br />

Objectif thérapeutique<br />

sévères (HTA, encéphalopathie, convulsions).<br />

Maintenir l’hémoglobinémie entre 11 et<br />

12 g/dL.<br />

Dès que l’hémoglobinémie-cible est<br />

atteinte, une posologie d’entretien est<br />

prescrite, faisant appel à des doses plus<br />

faibles d’érythropoïétine, voire une seule<br />

Rechercher une cause d’anémie associée<br />

Une cause d’anémie associée peut réclamer<br />

un traitement autonome : carence<br />

martiale par perte sanguine occulte (le<br />

plus souvent digestive), une carence en<br />

injection hebdomadaire.<br />

Durant tout le traitement, la poursuite de<br />

la supplémentation martiale est utile.<br />

Cette stratégie thérapeutique permet de<br />

réserver la transfusion de culots globu-<br />

laires aux cas où une correction rapide de<br />

vitamines B9 ou B12, une maladie inflam- l’anémie est indispensable (angor foncmatoire<br />

chronique, une hypothyroïdie, tionnel, hémoglobine < 8 g/dL chez un<br />

une myélodysplasie.<br />

insuffisant coronarien).


AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE) Néphrologie 1237<br />

Époïétine bêta<br />

NÉORECORMON<br />

AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE) (1)<br />

Utilisation restreinte 1 ser. 5 UI à 0,3 mL 6,24 I NR 6,24<br />

Conservation : + 2 à + 8 °C 6 ser. 1 000 UI à 63,43 I 65 % 10,57<br />

Insuffisance rénale : 0,3 mL<br />

– avant dialyse : 50 UI/kg x 2/sem. par 6 ser. 2 000 UI à 121,63 I 65% 20,27<br />

voie sous-cutanée pendant 4 sem. puis 0,3 mL<br />

adapter 6 ser. 3 000 UI à 179,83 I 65 % 29,97<br />

– en dialyse : 30 à 50 UI/kg/sem. puis 0,3 mL<br />

adapter 6 ser. 4 000 UI à 234,22 I 65% 39,04<br />

Cancérologie : dose initiale recommandée 0,3 mL<br />

à 30 000 UI/sem. 6 ser. 5 000 UI à 288,41 I 65 % 48,07<br />

– 150 UI/kg x 3/sem. SC initialement puis 0,3 mL<br />

adapter 6 ser. 6 000 UI à 342,60 I 65% 57,10<br />

Transfusion autologue programmée 0,3 mL<br />

– 600 UI/kg x 2/sem. IV pendant 3 sem. 6 ser. 10 000 UI à 557,49 I 65 % 92,92<br />

0,6 mL<br />

6 ser. 20 000 UI à 1089,33 I 65% 181,56<br />

0,6 mL<br />

4 ser. 30 000 UI à 1089,33 I 65 % 272,33<br />

0,6 mL<br />

1 fl. pdre. 50 000 UI 468,85 I NR 468,85<br />

1 fl. pdre. 100 000 UI 912,05 I NR 912,05<br />

Époïétine alpha<br />

EPREX<br />

Utilisation restreinte 6 ser. 1 000 UI à 61,67 I 65% 10,28<br />

Conservation : + 2 à + 8 °C à l’abri de la 0,5 mL<br />

lumière 6 ser. 2 000 UI à 118,13 I 65 % 19,69<br />

Insuffisance rénale : la voie SC est 0,5 mL<br />

déconseillée (risque d’apparition 6 ser. 3 000 UI à 0,3 174,59 I 65% 29,10<br />

d’autoanticorps) mL<br />

Cancérologie : idem époïétine bêta 6 ser. 4 000 UI à 118,13 I 65 % 19,69<br />

Alternativement, EPREX peut être 0,5 mL<br />

administré à la dose de 450 UI/kg x 6 ser. 5 000 UI à 280,28 I 65% 46,71<br />

1/sem., soit 40 000 UI/sem. en 1 inj. 0,5 mL<br />

hebdomadaire 6 ser. 6 000 UI à 0,6 332,84 I 65 % 55,47<br />

Puis adapter la posologie jusqu’à 300 UI x mL<br />

3/sem. si l’augmentation de 6 ser. 8 000 UI à 0,8 437,97 I 65% 73,00<br />

l’hémoglobinémie est < 1 g/dL mL<br />

6 ser. 10 000 UI à 1 mL 541,53 I 65 % 90,26<br />

1 ser. 20 000 UI à 192,68 I 65% 192,68<br />

0,5 mL<br />

1 ser. 30 000 UI à 280,28 I 65 % 280,28<br />

0,75 mL<br />

1 ser. 40 000 UI à 1 mL 367,88 I 65% 367,88<br />

6 fl. 1 mL = 4 000 UI 118,13 I 65 % 19,69


1238 Néphrologie AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE)<br />

Darbepoïétine<br />

ARANESP<br />

AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE) (2)<br />

Utilisation restreinte 1 ser. 10 μg (0,4 mL) 23,29 I 65% 23,29<br />

Conservation : + 2 à + 8 °C à l’abri de la 1 ser. 15 μg (0,37 mL) 34,33 I 65 % 34,33<br />

lumière. Ne pas secouer 1 stylo SC 20 μg 44,03 I 65% 44,03<br />

Indications : idem époïétine alpha (0,5 mL)<br />

Insuffisance rénale : 0,45 μg/kg/sem (IV ou 1 ser. 20 μg (0,5 mL) 44,03 I 65 % 44,03<br />

SC) puis titrer la dose pour limiter l’aug- 1 ser. 30 μg (0,3 mL) 63,43 I 65% 63,43<br />

mentation de l’Hb (


AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE) Néphrologie 1239<br />

AGENTS STIMULANT L’ÉRYTHROPOÏÈSE (ASE) (3)<br />

PROPRIÉTÉS systématique en cours de traitement permet<br />

Époïétine alpha et époïétine bêta : hormones d’éviter une « carence fonctionnelle » et de<br />

glycoprotéiques recombinantes d’origine prescrire des doses moindres.<br />

humaine (r-HuEPO) stimulant la croissance des Éviter une correction trop rapide de l’anémie<br />

précurseurs érythroblastiques. (≥ 2 g/dL/mois d’hémoglobine) ; ne pas dépas-<br />

Darbepoïétine : protéine stimulant la crois- ser 12 g/dL d’hémoglobine.<br />

sance des précurseurs érythroblastiques. Demi- Préférer la voie SC à la voie IV (utilisable en<br />

vie 3 fois supérieure à l’érythropoïétine ambulatoire avant le stade de dialyse, plus écohumaine<br />

recombinante. nomique).<br />

INDICATIONS<br />

Néphrologie : anémie des insuffisants rénaux<br />

chroniques, dialysés ou non.<br />

Prudence en cas : d’hypertension artérielle (surveillance<br />

pour renforcer si besoin le traitement<br />

antihypertenseur), d’antécédents convulsifs.<br />

Cancérologie : anémie symptomatique des EFFETS SECONDAIRES<br />

patients atteints de tumeurs malignes non HTA (apparition ou majoration, de façon dose-<br />

myéloïdes et traités par chimiothérapie. dépendante) : rarement sévère ; très rarement<br />

Hématologie : transfusion autologue pro- HTA maligne avec encéphalopathie et convulgrammée.sions.<br />

Hors AMM : anémie hémolytique induite par la Syndrome pseudo-grippal (céphalées, vertiges,<br />

ribavirine lors du traitement de l’hépatite C. arthralgies) disparaissant après les premières<br />

semaines.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

HTA non équilibrée, allergie au produit.<br />

Grossesse : innocuité non établie.<br />

Allaitement : éviter.<br />

Les ASE sont est un des produits dopants<br />

détectables dans le sang.<br />

Réactions allergiques cutanées.<br />

Douleurs locales (après injection SC).<br />

Hyperviscosité (correction excessive de l’anémie)<br />

: moindre efficacité de la dialyse, risque<br />

de thrombose de l’accès vasculaire.<br />

Augmentation (modérée) de la kaliémie et de<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

la phosphorémie.<br />

Efficacité nulle ou réduite en cas de : carence<br />

martiale, syndrome inflammatoire (infection),<br />

hyperparathyroïdisme majeur ou surcharge<br />

aluminique.<br />

Rares cas d’érythroblastopénie par anticorps<br />

anti-EPO principalement décrits avec une for-<br />

mulation ancienne de l’EPREX chez des insuffi-<br />

sants rénaux traités par voie sous-cutanée.<br />

Corriger toute carence martiale avant le début INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

du traitement ; une supplémentation martiale Ne pas mélanger à d’autres produits.


1240 Néphrologie INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE<br />

INSUFFISANCE RÉNALE CHRONIQUE (10)<br />

PRÉPARATION À LA DIALYSE<br />

Vaccination anti-hépatite B rioveineuse), ou de la mise en place d’un<br />

L’hépatite B est une menace endémique cathéter de dialyse péritonéale. Dans les<br />

dans les centres de dialyse et de néphrologie.<br />

La vaccination antivirale B doit être<br />

précoce car son succès décroît avec l’âge<br />

et le degré d’IRC. Un protocole « renforcé »<br />

est recommandé lorsque l’IRC est avan-<br />

cée : 4 injections en primovaccination<br />

deux cas, l’intervention chirurgicale est<br />

effectuée lorsque la clairance de la créati-<br />

nine est comprise entre 10 et 15 mL/min,<br />

de façon à ce que, au moins, quelques<br />

semaines de maturation se soient écoulées<br />

avant que le montage soit utilisé.<br />

(M1, M2, M3, M6) et un rappel à M12. Un Quand débuter la dialyse ?<br />

titrage des anticorps anti-HBs vérifie qu’un Le traitement de suppléance doit débuter<br />

taux protecteur est apparu (> 50 mUI/mL) avant l’apparition d’une dénutrition ou<br />

et déterminera par la suite le moment des d’une profonde altération de l’état générappels.ral.<br />

À ce moment, la clairance de la créati-<br />

Création d’un abord pour dialyse<br />

nine est volontiers située entre 5 et<br />

10 mL/min. Une attitude excessivement<br />

Selon la technique d’épuration extraré- « attentiste » n’est pas justifiée car elle<br />

nale choisie il s’agira d’un abord vascu- compromet la qualité de vie et expose à<br />

laire pour hémodialyse (type fistule arté- des complications sévères.<br />

Indications formelles à débuter la dialyse<br />

Indications de principe<br />

DFG estimé :<br />

– ≤ 5 mL/min chez un patient non diabétique ;<br />

– ≤ 10 mL/min chez un patient diabétique.<br />

Indications de nécessité<br />

Trouble(s) clinique(s) ou biologique(s) sévère(s), imputable(s) à l’IRC, non contrôlé(s) par le<br />

traitement conservateur mais corrigé(s) par la dialyse :<br />

– asthénie marquée ;<br />

– encéphalopathie ;<br />

– dénutrition, vomissements fréquents ;<br />

– surcharge hydrosodée réfractaire ;<br />

– HTA réfractaire ;<br />

– hyperkaliémie ou acidose incontrôlables ;<br />

– neuropathie urémique clinique ;<br />

– péricardite.


ŒDÈMES RÉFRACTAIRES Néphrologie 1241<br />

ŒDÈMES RÉFRACTAIRES<br />

Définition plutôt que multiplier les prises dans la<br />

Les œdèmes généralisés de l’insuffisance journée.<br />

cardiaque congestive, de la cirrhose, du Les insuffisants rénaux ont souvent<br />

syndrome néphrotique et de l’insuffisance besoin de fortes doses de diurétiques de<br />

rénale avancée répondent en règle favo- l’anse, en prenant soin d’éviter les formes<br />

rablement à l’association régime pauvre « retard » qui ne permettent jamais dans ce<br />

en sel et diurétiques.<br />

cas d’obtenir un pic de concentration<br />

Certains patients cependant résistent à ce tubulaire efficace du produit.<br />

traitement (stabilité du poids et persistance<br />

des œdèmes) et ont des œdèmes<br />

réfractaires.<br />

Absorption orale diminuée<br />

La diminution de la perfusion intestinale<br />

(bas débit) et des œdèmes muqueux des<br />

Causes et conduite à tenir<br />

grandes insuffisances cardiaques altèrent<br />

Trois principaux facteurs peuvent expli-<br />

quer une rétention hydrosodée persistante.<br />

Non-respect du régime hyposodé<br />

parfois l’absorption digestive du furosémide.<br />

Deux parades existent :<br />

– débuter le traitement par voie veineuse<br />

;<br />

À poids stable, une natriurèse des 24 h – utiliser le bumétanide (BURINEX), qui offre<br />

supérieure à 100 mmol indique que les une meilleure biodisponibilité.<br />

apports sodés sont excessifs.<br />

En cas de persistance des œdèmes<br />

Posologie ou galénique du diurétique malgré les mesures précédentes<br />

inadaptée L’hospitalisation est indispensable, per-<br />

La courbe dose-réponse des diurétiques mettant :<br />

de l’anse indique clairement qu’en deçà – un meilleur contrôle du régime désodé ;<br />

d’une certaine concentration tubulaire de – l’utilisation de diurétiques par voie veiproduit,<br />

il n’y a pas de natriurèse. neuse ;<br />

Si un patient ne répond pas à 40 mg de – une combinaison de diurétiques ;<br />

furosémide, il faut plutôt augmenter la – une ou plusieurs séances d’hémofil-<br />

dose unitaire (60 à 80 mg en une prise)<br />

tration.


1242 Néphrologie SYNDROME NÉPHROTIQUE<br />

SYNDROME NÉPHROTIQUE (1)<br />

Fuite protéique<br />

Chez l’adulte, un syndrome néphrotique Les apports protidiques alimentaires<br />

est défini par l’association d’une protéinu- quotidiens sont de (0,8 à 1 g/kg + protéirie<br />

> 3 g/24 h et d’une hypoalbuminé-<br />

mie < 30 g/L. Le diagnostic est donc purenurie<br />

des 24 h).<br />

ment biologique. La traduction clinique Les inhibiteurs de l’enzyme de conver-<br />

principale est un syndrome œdémateux<br />

sion et/ou les sartans sont parfois utilisés<br />

(non obligatoire). dans les syndromes néphrotiques persistants<br />

afin de diminuer la protéinurie<br />

Traitement symptomatique<br />

(- 30 % en moyenne) et pourraient jouer<br />

un rôle néphroprotecteur :<br />

Œdèmes<br />

– IEC : énalapril (RENITEC) 2,5 à 20 mg/j ;<br />

ramipril TRIATEC) 1,25 à 10 mg/j ;<br />

Repos au lit sans excès : diminue la<br />

sécrétion de rénine mais favorise les<br />

–et sartans : irbésartan (APROVEL) 75 à<br />

300 mg/j ; losartan (COZAAR) 50 à 100 mg/j<br />

thromboses vasculaires. sont parfois associés en milieu spécialisé<br />

Restriction sodée : 2 g de NaCl/j, qui sera pour une action synergique sur la protéiassociée<br />

à une restriction hydrique modé- nurie.<br />

rée en cas d’hyponatrémie (1 000 mL/j).<br />

Diurétiques. En première intention, si la<br />

fonction rénale est normale, les antialdos-<br />

térone, spironolactone (ALDACTONE, 1 à<br />

3 mg/kg/j) ou les thiazides, hydrochlorothiazide<br />

(ESIDREX, 12,5 à 25 mg/j) sont utilisables<br />

en monothérapie. En cas d’insuffi-<br />

sance rénale, il faut utiliser un diurétique<br />

de l’anse (furosémide, LASILIX, 40 à<br />

500 mg/j per os, selon la fonction rénale).<br />

L’instauration d’une association de plusieurs<br />

diurétiques (afin de bloquer diffé-<br />

Prévention des thromboses vasculaires<br />

Éviter l’hémoconcentration par hypovolémie<br />

iatrogène (diurétiques à trop fortes<br />

doses) ; pas d’immobilisation stricte.<br />

Anticoagulation efficace si l’albuminé-<br />

mie est < 20 g/L : risque thrombogène<br />

fort. Héparine de bas poids moléculaire<br />

(rémission rapide probable) ou antivita-<br />

mines K (syndrome néphrotique prolongé<br />

probable). La posologie d’AVK sera d’autant<br />

plus faible que l’albuminémie est<br />

basse (car la fraction libre active est<br />

rents sites de réabsorption du sodium) élevée).<br />

n’est concevable qu’en milieu hospitalier,<br />

sous surveillance stricte de la kaliémie.<br />

Les perfusions d’albumine ont des indica-<br />

tions très limitées (coût prohibitif, efficacité<br />

modeste, possible induction de lésions<br />

tubulaires) : anasarque avec résistance<br />

Hypercholestérolémie<br />

Réduire les apports en cholestérol et<br />

acides gras saturés alimentaires.<br />

Prescrire une statine si le cholestérol<br />

total est supérieur à 7 mmol/L.<br />

aux diurétiques ; œdèmes avec hypovolé- Prévention des infections<br />

mie efficace (ALBUMINE HUMAINE BAXTER) :<br />

100 mL x 2/j pendant 3 j. En fin de perfusion,<br />

une injection IV de furosémide est<br />

souvent associée.<br />

Éradication des foyers infectieux ORL,<br />

stomatologiques ; hygiène cutanée stricte.<br />

Pas d’antibioprophylaxie, mais traite-<br />

ment précoce de toute infection.<br />

L’ultrafiltration par circuit extracorporel Vaccins : pas de vaccins vivants en cas<br />

est réservée aux syndromes œdémateux de traitement immunosuppresseur ; les<br />

majeurs après échec des mesures précé- autres vaccins sont autorisés mais moins<br />

dentes.<br />

efficaces.


SYNDROME NÉPHROTIQUE Néphrologie 1243<br />

SYNDROME NÉPHROTIQUE (2)<br />

Diagnostic solone : en cas d’échec (corticorésistance),<br />

La biopsie rénale est indispensable chez biopsie rénale ± autre traitement.<br />

l’adulte. Quatre exceptions : forte suspicion<br />

de néphropathie diabétique ; amylose (AA<br />

ou AL) histologiquement prouvée en un<br />

autre site ; syndrome néphrotique héréditaire<br />

ou médicamenteux probable.<br />

Une fois le diagnostic histologique établi, la<br />

Glomérulonéphrite extramembraneuse<br />

primitive<br />

Traitement symptomatique du syndrome<br />

néphrotique en attendant une rémission<br />

spontanée (30 % des cas) ; traitement<br />

immunosuppresseur en cas de syndrome<br />

recherche d’une cause est systématique : néphrotique intense persistant plus de 6 à<br />

seule la négativité de l’enquête permettra de 12 mois, ou d’insuffisance rénale orgaconclure<br />

à une néphropathie glomérulaire nique débutante, selon le protocole de<br />

primitive. Chez l’enfant, l’impasse histolo- Ponticelli : prednisone et chlorambucil ou<br />

gique est licite lorsque la suspicion de syn- cyclophosphamide (cures mensuelles alter-<br />

drome néphrotique idiopathique est forte. nées pendant 6 mois).<br />

Néphropathies glomérulaires primitives<br />

Glomérulonéphrite membranoproliférative<br />

idiopathique<br />

Syndrome néphrotique idiopathique<br />

(néphrose lipoïdique, lésions glomérulaires<br />

minimes, hyalinose segmentaire et focale<br />

Traitement non codifié chez l’adulte ; corticothérapie<br />

utilisée avec succès dans certaines<br />

études chez l’enfant.<br />

primitive) Autres causes<br />

Chez l’adulte Le syndrome néphrotique est un événe-<br />

Corticothérapie orale, prednisone (CORTAN- ment rare au cours de la maladie de Ber-<br />

CYL) : 1 mg/kg/j jusqu’à 15 j après la rémisger ; dans ce cas, le traitement n’est pas<br />

sion (80 % des cas) puis décroissance sur codifié, mais peut faire appel à des sté-<br />

8 mois ; les rechutes sont rares. En l’absence roïdes ± immunosuppresseurs.<br />

de réponse après 12 sem., on parle de corti-<br />

corésistance (20 %) : diminution progressive<br />

de la posologie des stéroïdes,etintroduction<br />

d’un immunosuppresseur : cyclophospha-<br />

Un syndrome néphrotique est possible au<br />

cours des syndromes néphrotiques aigus<br />

(SNA) et des syndromes de glomérulo-<br />

néphrite rapidement progressive (GNRP).<br />

mide pendant 8 sem. et, en cas de nouvel<br />

échec, ciclosporine (5 mg/kg/j) pendant 1 à<br />

2ans.<br />

Néphropathies glomérulaires<br />

secondaires<br />

Le traitement du syndrome néphrotique est<br />

Chez l’enfant<br />

ici celui de sa cause. Quelques exemples :<br />

Corticothérapie orale (60 mg/m – traitement d’une poussée lupique ;<br />

2 /j) pendant<br />

4 sem., puis posologie alternée<br />

(/48 h) pendant 1 mois puis décroissance<br />

des doses pendant 2 à 3 mois.<br />

La rémission est rapide et fréquente<br />

(90 %), mais rechutes et corticodépen-<br />

dance nécessitent parfois l’usage d’un<br />

immunosuppresseur (ciclosporine) à visée<br />

d’épargne cortisonique. Moins de 5 % des<br />

enfants corticosensibles auront encore<br />

des poussées à l’âge adulte. En l’absence<br />

– traitement d’une amylose AL, d’un myé-<br />

lome, d’un lymphome, d’une leucémie<br />

lymphoïde chronique, d’un cancer solide ;<br />

– traitement d’une infection : foyer infectieux<br />

profond, endocardite, infection<br />

virale (VHB, VHC, VIH), d’une syphilis,<br />

d’une infection parasitaire (paludisme, fila-<br />

riose, bilharziose) ;<br />

– interruption d’un traitement médicamen-<br />

teux (sels d’or, D-pénicillamine, AINS,etc.);<br />

– prise en charge d’un diabète, d’une dréde<br />

rémission après 4 sem. (10 % des cas), panocytose, d’une toxémie gravidique,<br />

une 5e semaine de traitement est propo- d’une HTA maligne (parfois compliqués de<br />

sée, comportant 3 bolus de méthylpredni-<br />

syndrome néphrotique).


1244 Néphrologie TRANSPLANTATION RÉNALE<br />

TRANSPLANTATION RÉNALE (1)<br />

La transplantation rénale doit être envisagée Préparation du receveur<br />

chez tout patient insuffisant rénal avancé,<br />

dialysé ou non, pourvu qu’il soit motivé, et<br />

que le bénéfice attendu soit supérieur aux<br />

risques induits par l’intervention et les traitements<br />

immunosuppresseurs. Comparative-<br />

ment à l’hémodialyse et à la dialyse péritonéale,<br />

la transplantation rénale prolonge la<br />

survie des patients, est moins contraignante<br />

Information complète et loyale du<br />

patient : avantages et risques de la trans-<br />

plantation rénale dans son cas.<br />

Détermination du risque de récidive de<br />

la néphropathie initiale sur le greffon.<br />

Étude complète du dossier médical, gui-<br />

dant la prescription d’examens complé-<br />

et plus économique.<br />

mentaires ( cf. tableau).<br />

Contre-indications<br />

Absolues<br />

Cancer métastatique<br />

En fonction des résultats, le transplanteur<br />

peut :<br />

– autoriser la transplantation ;<br />

Pathologie psychiatrique rendant la prise – déconseiller la transplantation ;<br />

des immunosuppresseurs incertaine<br />

Juste avant la greffe : cross match positif<br />

Relatives<br />

Risque > bénéfice (grand âge, comorbidité<br />

lourde)<br />

– préconiser un traitement préalable.<br />

À titre d’exemples : néphrectomie d’un ou<br />

des rein(s) propre(s) (polykystose importante,<br />

infection chronique) ; correction<br />

Temporaires<br />

Infection évolutive<br />

Antécédent de cancer < 5 ans<br />

d’une uropathie ; cure d’un anévrisme<br />

aortique ; revascularistion coronaire ; traitement<br />

d’une hépatite virale chronique.<br />

Examens complémentaires<br />

IMMUNOLOGIE PHÉNOTYPAGE ÉRYTHROCYTAIRE, RAI,<br />

GROUPAGE HLA, ANTICORPSANTI-HLA<br />

Cœur Coronaropathie ? Insuffisance cardiaque ? Valvulopathie ?<br />

ECG,échographie cardiaque ± scintigraphie myocardique ±<br />

coronarographie si > 50 ans.<br />

Aorte et axes Anévrisme aortique ? Athérome ? Axes iliaques<br />

vasculaires (avantanastomoses) ?<br />

Échographie et Doppler vasculaire ± scanner iliaquesans iode.<br />

Appareil urinaire Diurèse résiduelle ? Uropathie malformative<br />

(conditionnel’anastomose urétérale) ?<br />

– Cystographie sus-pubienne (hommes) ourétrograde (femmes).<br />

–Échographie rénale et vésicale, ECBU.<br />

– PSA<br />

Infections Antécédents de tuberculose ? Risque parasitaire ?Hépatite virale<br />

chronique ?<br />

–Éradication des foyers infectieux<br />

chroniquesORL/stomatologiques.<br />

– Sérologies VIH, VHB, VHC, CMV, EBV, HHV8,<br />

HTLV,toxoplasmose, TPHA -VDRL.<br />

Tube digestif Ulcère ? Diverticulose ?<br />

Discuter FOGD etcolonoscopie.<br />

Consultations ORL, stomatologie, gynécologie (systématiques) ; psychiatrie(si<br />

antécédents).


IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) Néphrologie 1245<br />

Azathioprine<br />

IMUREL<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (1)<br />

Transplantation : 5 mg/kg/j puis 1 à 50 cp. pell. à 25 mg 10,54 I 100 % 0,21<br />

4 mg/kg/j (entretien), 1 à 3 prises 100 cp. pell. à 50 mg 30,53 I 100 % 0,31<br />

Autres indications : 1 à 2,5 mg/kg/j 1 fl. à 50 mg I<br />

PROPRIÉTÉS < 100 000/mm3 , en particulier en cas d’insuffi-<br />

Analogues des bases puriques à action cyto- sance hépatique ou rénale (utiliser une faible<br />

toxique et antiproliférative (agit sur les immu- posologie initiale).<br />

nodépressions par action sur les cellules hématopoïétiques<br />

et les Iymphocytes T).<br />

Résorption digestive complète, transformation<br />

en mercaptopurine, dégradation par la xanthine-oxydase,<br />

puis élimination urinaire (méta-<br />

bolite peu mais myélotoxique).<br />

Demi-vie = 5h.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Leucopénie dose-dépendante, réversible en 1<br />

à 2 sem. (thrombopénie et anémie plus rares).<br />

Sensibilité aux infections, fréquence accrue des<br />

cancers cutanés (en cas d’exposition solaire) et<br />

des tumeurs malignes.<br />

Alopécie réversible.<br />

INDICATIONS Hépatite cholestatique.<br />

Prévention du rejet des organes transplantés Rarement : troubles digestifs (nausées, vomis-<br />

(en association avec d’autres immunosuppres- sements, diarrhée), hypersensibilité (fièvre et<br />

seurs).<br />

frissons, vertiges, éruption cutanée, arthralgies,<br />

Maladies auto-immunes et inflammatoires (en pancréatite, pneumopathie, troubles du<br />

particulier les formes corticorésistantes ou cor- rythme).<br />

ticodépendantes afin de réduire la posologie Pas d’altération de la fertilité.<br />

des corticoïdes) : lupus érythémateux disséminé,<br />

polyarthrite rhumatoïde sévère, myasthénie,<br />

hépatite auto-immune, purpura thrombopénique<br />

idiopathique, anémie hémolytique<br />

acquise auto-immune, sclérodermie, pemphigus,<br />

dermatomyosite, polymyosite, périartérite<br />

noueuse.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Inhibiteurs de l’uricosynthèse (allopurinol et<br />

tisopurine) : risque d’aplasie médullaire impo-<br />

sant une réduction de posologie (75 %) et une<br />

surveillance hématologique accrue.<br />

Curarisants : antagonisme (curares non dépola-<br />

risants) ou agonisme (curares dépolarisants).<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Cytostatiques : effets additifs sur l’hémato-<br />

Grossesse.<br />

poïèse.<br />

Hypersensibilité connue au produit.<br />

Vaccins vivants atténués.<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI Surveillance d’un patient sous IMUREL<br />

Éviter le contact prolongé des comprimés avec NFS hebdomadaire pendant 2 mois puis<br />

la peau.<br />

NFS tous les 3 mois minimum.<br />

Éviter l’exposition solaire.<br />

Diminution ou arrêt du traitement si leucopénie<br />

< 2 500/mm3 Surveiller l’hémogramme de façon hebdoma-<br />

ou thrombopénie<br />

< 130 000/mm3 daire les 2 premiers mois, puis tous les 3 mois :<br />

diminuer ou arrêter en cas de leucopénie<br />

< 2 500/mm<br />

.<br />

Diminuer la posologie en cas d’insuffi-<br />

sance hépatique ou rénale.<br />

3 ou de thrombopénie


1246 Néphrologie TRANSPLANTATION RÉNALE<br />

TRANSPLANTATION RÉNALE (2)<br />

Choix du donneur La greffe<br />

Rein de cadavre<br />

Le receveur est inscrit sur la liste d’attente<br />

du centre de transplantation qui le<br />

suit ; l’inscription est confirmée par<br />

l’Agence de biomédecine. Le patient doit<br />

être contactable à tout moment.<br />

En fosse iliaque (droite le plus souvent) :<br />

anastomoses vasculaires sur les vaisseaux<br />

iliaques ; anastomose urétéro-vésicale<br />

avec montage antireflux et sonde JJ de<br />

protection transitoire ; anastomose uré-<br />

téro-urétérale possible (sauf si reflux), avec<br />

Conditions de prélèvement du donneur ablation du rein propre sus-jacent si la diu-<br />

– Certificat de mort encéphalique établi par<br />

deux médecins (dont un réanimateur) n’appartenant<br />

pas à l’équipe de prélèvement.<br />

rèse résiduelle<br />

simple ligature).<br />

est importante (sinon,<br />

– Sérologies VHB, VHC et VIH négatives.<br />

– Donneur non inscrit au registre de refus<br />

du prélèvement d’organes.<br />

Traitement immunosuppresseur<br />

préventif du rejet<br />

Prélèvement (multi-organes en règle) Indispensable, poursuivi à vie, utilisant<br />

par une équipe spécialisée dans un éta- une association d’immunosuppresseurs<br />

blissement agréé.<br />

(fortes doses initialement puis doses d’en-<br />

Conservation du rein dans un soluté tretien). Les associations sont variables et<br />

spécial réfrigéré à 4 °C (ischémie froide, souvent protocolaires. La plus classique<br />

36 h max.)<br />

Détermination des groupes sanguin et<br />

tissulaire, transmis à l’EFG qui identifie les<br />

receveurs les plus compatibles.<br />

Choix du receveur qui est contacté par<br />

son néphrologue :<br />

– en l’absence de contre-indication temporaire<br />

;<br />

–sile cross-match est négatif.<br />

Donneur vivant apparenté<br />

La transplantation peut être planifiée et il<br />

n’y a pas de délai d’attente.<br />

Le donneur est le plus souvent un frère ou<br />

une sœur (HLA identique dans 25 % des cas,<br />

HLA semi-identique dans 50 % des cas) ou le<br />

père ou la mère (HLA semi-identique).<br />

est la triple immunosuppression :<br />

– corticoïdes : méthylprednisolone IV<br />

(SOLUMÉDROL) les premiers jours puis pred-<br />

nisone (CORTANCYL) per os, 1 mg/kg les<br />

10 premiers jours puis dégression progres-<br />

sive jusqu’à 0,15 à 0,25 mg/kg/j ;<br />

– antimétabolite : soit mycophénolate<br />

mofétil (CELLCEPT), soit azathioprine<br />

(IMUREL);<br />

– inhibiteur de la calcineurémie : soit<br />

ciclosporine (SANDIMMUN ou NÉORAL), soit<br />

tacrolimus (PROGRAF). Ce dernier serait efficace<br />

dans la prévention des rejets résis-<br />

tants ou récidivants sousciclosporine, mais<br />

serait plus néphrotoxique à long terme.<br />

En induction de greffe, des anticorps<br />

Conditions de prélèvement du donneur<br />

– Motivation spontanée et sincère du<br />

donneur.<br />

– Présence de deux reins, absence de<br />

néphropathie.<br />

monoclonaux antirécepteurs à l’IL2 sont<br />

régulièrement utilisés : basiliximab (SIMU-<br />

LECT), daclizumab (ZENAPAX) ; les anticorps<br />

polyclonaux antilymphocytaires (THYMO-<br />

– DFG mesuré > 80 mL/min.<br />

– Consentement confirmé devant le juge<br />

du tribunal de grande instance.<br />

GLOBULINE, ATG, LYMPHOGLOBULINE) sont<br />

réservés aux patients à haut risque immu-<br />

nologique de rejet.


IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) Néphrologie 1247<br />

Ciclosporine<br />

SANDIMMUN<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (2)<br />

5 mg/kg (2 à 15) mg/kg/j en 2 prises 50 caps. 25 mg 58,25 I 100 % 1,17<br />

50 caps. 50 mg 111,26 I 100 % 2,23<br />

50 caps. 100 mg 214,95 I 100 % 4,30<br />

1 fl. 50 mL 214,95 I 100 % 214,95<br />

(100 mg/mL)<br />

2 à 5 mg/kg/j en perf. 10 amp. 50 mg HOP I<br />

continue sur 24 h 10 amp. 250 mg HOP I<br />

NÉORAL<br />

5 mg/kg ; 2 à 15 mg/kg/j en 60 caps. 10 mg 30,40 I 100 % 0,51<br />

2 prises 60 caps. 25 mg 68,85 I 100 % 1,15<br />

60 caps. 50 mg 132,48 I 100 % 2,21<br />

60 caps. 100 mg 254,44 I 100 % 4,24<br />

1 fl. 214,95 I 100 % 214,95<br />

50 mL (100 mg/mL)


1248 Néphrologie TRANSPLANTATION RÉNALE<br />

TRANSPLANTATION RÉNALE (3)<br />

Insuffisance rénale aiguë immédiate En cas de corticorésistance et dans les<br />

Tubulopathie transitoire (+++), favorisée formes sévères, les anticorps antilymphopar<br />

une ischémie prolongée du greffon : cytaires sont associés aux stéroïdes.<br />

impose<br />

dialyse.<br />

la poursuite temporaire de la La néphrotoxicité de la ciclosporine ou du<br />

tacrolimus.<br />

Hypovolémie.<br />

Complication chirurgicale, dépistée par Insuffisance rénale progressive tardive<br />

l’échographie + Doppler : urinaire (obstacle,<br />

fuite) ou vasculaire (thrombose artérielle<br />

ou veineuse).<br />

Rejet hyperaigu : dû à la présence d’anticorps<br />

anti-HLA ayant échappé au crossmatch.<br />

Immédiat (rein violet après déclampage),<br />

il nécessite la détransplantation ;<br />

retardé (< J15, anurie fébrile, pas de vascularisation<br />

rénale décelable en écho-<br />

Doppler ou scintigraphie, du fait de<br />

Rejet chronique : la biopsie rénale révèle<br />

une fibrose interstitielle et une endartérite<br />

fibreuse. L’évolution est à terme défavorable,<br />

conduisant à la reprise des dialyses.<br />

Toxicité de la ciclosporine ou du tacro-<br />

limus.<br />

Conséquences rénales de l’HTA du<br />

transplanté.<br />

Récidive de la néphropathie initiale.<br />

lésions vasculaires intenses visibles sur Infections<br />

l’artériographie et/ou l’histologie) : lourde Citons ici les infections opportunistes qui<br />

immunosuppression (Ig IV, anticorps anti- bénéficient volontiers d’un traitement prélymphocytaires,<br />

échanges plasmatiques) ventif durant les 3 premiers mois après la<br />

mais résultats décevants. greffe :<br />

Insuffisance rénale retardée<br />

– pneumocystose (et infections<br />

naires) : BACTRIM FORTE, 1 cp./j ;<br />

uri-<br />

Il faut évoquer les causes précédentes, – herpès et infection à CMV : ZOVIRAX ;<br />

mais aussi les deux cas suivants : – candidose : FUNGIZONE per os.<br />

Le rejet aigu : dû à l’infiltration du greffon<br />

par les lymphocytes du receveur, il<br />

survient dans les premiers mois, révélé<br />

Autres<br />

Toxicité des immunosuppresseurs.<br />

par une élévation de la créatininémie (± HTA : 60 % des transplantés.<br />

gros rein douloureux, fièvre et réduction Athérome accéléré et ses conséquences<br />

de diurèse). Le diagnostic repose sur l’his- cardiovasculaires.<br />

tologie rénale et l’élimination des autres Complications métaboliques : diabète,<br />

causes d’insuffisance rénale aiguë. ostéoporose, goutte, polyglobulie.<br />

Le traitement par méthylprednisolone IV (3 j Tumeurs (40 % après 20 ans de greffe) :<br />

de suite) puis corticothérapie orale renfor- cancers cutanés +++ (éviter l’exposition<br />

cée est généralement efficace. solaire), lymphomes, tumeurs solides.


IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) Néphrologie 1249<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (3)<br />

PROPRIÉTÉS réversible) ou vasculaire (syndrome hémoly-<br />

Immunosuppresseur inhibiteur de la calcineu- tique et urémique) ; insuffisance rénale chrorine.<br />

Peptide interagissant avec la ciclophiline ; nique progressive (après plusieurs années,<br />

le complexe inhibe l’activité de la calcineurine, fibrose interstitielle).<br />

induisant un arrêt réversible et sélectif de la Hépatites cholestatiques, hypertension artéproduction<br />

d’IL2 par les Iymphocytes CD4. Les rielle, infections opportunistes, pseudolymfonctions<br />

phagocytaires et l’hématopoïèse sont phomes, tumeurs cutanées.<br />

préservées. Biodisponibilité après absorption Hypertrichose, acné, alopécie, hypertrophie<br />

digestive d’environ 30 %, forte fixation aux gingivale, œdème facial, troubles digestifs<br />

lipides plasmatiques, métabolisation hépa- (anorexie, nausées, vomissements, diarrhée),<br />

tique, puis élimination biliaire (demi-vie de 8 à neurologiques (convulsions, encéphalopathies,<br />

14 h). Ayant permis d’améliorer considérable- paresthésies ou dysesthésies des extrémités,<br />

ment les résultats des allogreffes d’organes et tremblements), oséo-articulaires (goutte, algode<br />

moelle osseuse (inhibition des réactions dystrophie).<br />

immunitaires allogéniques : rejet de la greffe, Hyperkaliémie, hyperuricémie, dyslipémie.<br />

réaction du greffon contre l’hôte) et également Réactions allergiques (excipient des formes<br />

certaines pathologies auto-immunes. injectables).<br />

INDICATIONS INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Transplantation d’organes (en association aux Risque d’hyperkaliémie : diurétiques éparcorticoïdes<br />

et à l’azathioprine, dans la préven- gneurs de potassium.<br />

tion du rejet). Risque de rhabdomyolyse en association à cer-<br />

Greffe de moelle osseuse (prévention ± traite- taines statines.<br />

ment du rejet, et de la réaction du greffon Risque de sous-dosage : anticonvulsivants,<br />

contre l’hôte). antituberculeux.<br />

Utilisable dans le traitement des psoriasis, der- Risque de surdosage : jus de pamplemousse,<br />

matite atopique, polyarthrite rhumatoïde, amiodarone, antagonistes calciques (sauf<br />

uvéites (formes graves et résistantes) ; aplasie amlodipine), antifongiques, macrolides et<br />

médullaire (si allogreffe impossible) ; syndrome apparentés (sauf spiramycine), cisapride, inhinéphrotique<br />

idiopathique corticodépendant ou biteurs protéasiques.<br />

corticorésistant. Risque accru de néphrotoxicité : tacrolimus,<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

aminosides, amphotéricine B, ganciclovir.<br />

Grossesse : éviter si possible.<br />

Éviter les vaccins à virus vivants atténués.<br />

Allaitement : déconseillé.<br />

Déconseillées : érythromycine, nifédipine,<br />

Hypersensibilité connue à la ciclosporine. melphalan à forte dose.<br />

Affection maligne récente ou évolutive. Précautions : amiodarone, antagonistes cal-<br />

Infection évolutive.<br />

ciques (sauf amlodipine), colchicine, inducteurs<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Surveillance régulière du taux de ciclosporine<br />

(80 à 250 ng/mL dans le sang total) pour adaptation<br />

posologique.<br />

Surveiller la fonction rénale et hépatique.<br />

enzymatiques, inhibiteurs de I’HMG-CoA réductase,<br />

fluconazole, kétoconazole, itraconazole,<br />

macrolides et apparentés (sauf spiramycine),<br />

méthotrexate, octréotide.<br />

À prendre en compte : cimétidine, aminosides,<br />

amphotéricine B IV, œstroprogestatifs et<br />

EFFETS SECONDAIRES œstrogènes, corticoïdes, diurétiques, trimétho-<br />

Insuffisance rénale aiguë tubulaire (après transprime, norfloxacine, vaccins à virus vivants<br />

plantation rénale, précoce, dose-dépendante, atténués.


1250 Néphrologie IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION)<br />

Mycophénolate mofétil<br />

CELLCEPT<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (4)<br />

Transplantés rénaux : 1 g x 2/j dans les 3 j 100 gél. 250 mg 128,75 I 100 % 1,29<br />

suivant la greffe 50 cp. 500 mg 128,75 I 100 % 2,58<br />

Transplantés cardiaques : 1,5 g x 2/j dans 4 fl. 500 mg IV HOP I<br />

les 5 j suivant la greffe<br />

Acide mycophénolique<br />

MYFORTIC<br />

Transplantés rénaux : 720 mg x 2/j 120 cp. 180 mg 169,92 I 100 % 1,42<br />

débuté dans les 3 j suivant la greffe 120 cp. 360 mg 324,14 I 100 % 2,70<br />

PROPRIÉTÉS Surveiller l’apparition d’une neutropénie :<br />

Immunosuppresseur, inhibiteur de l’inosine numération globulaire hebdomadaire le 1er monophosphate déshydrogénase : la synthèse mois 2 fois/mois au cours des 2e et 3e mois,<br />

des purines, effet cytostatique plus marqué sur puis 1 fois/mois la 1re année.<br />

les lymphocytes B et T. Contacter le médecin en cas d’infection, ecchy-<br />

Lié à 97 % à l’albumine plasmatique, trans- mose ou saignement.<br />

formé en MPA (forme active, seule dosable, Éviter les vaccins vivants atténués.<br />

non dialysée), puis en MPAG (inactif, éliminé Prudence en cas d’affection évolutive du tube<br />

dans l’urine à 90 %). digestif et du cycle entérohépatique, car l’effi-<br />

INDICATIONS<br />

cacité de CELLCEPT pourrait être diminuée.<br />

Prévention du rejet aigu d’organe après allo-<br />

greffe rénale ou cardiaque, en association avec<br />

la ciclosporine et les corticoïdes.<br />

Grossesse : tératogénicité chez l’animal, pas de<br />

données humaines disponibles.<br />

Allaitement : passage dans le lait chez l’ani-<br />

mal, pas de données humaines disponibles.<br />

CONTRE-INDICATIONS<br />

Hypersensibilité au mycophénolate mofétil ou<br />

à l’acide mycophénolique.<br />

Déficits héréditaires rares de l’hypoxanthine<br />

guanine-phosphoribosyl transférase (HGPRT)<br />

tels que le syndrome de Lesch-Nyhan et le syndrome<br />

de Kelley-Seegmiller.<br />

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Aciclovir et ganciclovir : augmentation de la<br />

concentration des 2 produits.<br />

Antiacides : diminution de l’absorption du<br />

mycophénolate mofétil.<br />

Colestyramine : diminution de la concentration<br />

de mycophénolate mofétil.<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI EFFETS SECONDAIRES<br />

Réduire la dose de 50 % chez les sujets âgés. Dominés par les troubles digestifs : gastralgies,<br />

Si le débit de filtration glomérulaire nausées.<br />

est < 25 mL/min/1,73 m2 , la dose maximale Leucopénie, infections (en association avec la<br />

sera de 1 g/j. ciclosporine et les corticoïdes).<br />

Envisager l’interruption en cas de neutropénie. Risque accru de lymphome et d’autres tumeurs<br />

Limiter l’exposition au soleil et aux rayons UV.<br />

malignes (cutanées).


IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) Néphrologie 1251<br />

Tacrolimus<br />

PROGRAF<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (5)<br />

Transplantés rénaux : 50 gél. 0,5 mg 76,29 I 100 % 1,53<br />

A. 0,2-0,3 mg/kg/j PO en 2 prises 12 h 50 gél. 1 mg 135,51 I 100 % 2,71<br />

après la greffe 50 gél. 5 mg 593,31 I 100 % 11,87<br />

E. : 0,3 mg/kg/j en 2 prises PO<br />

Traitement du rejet : augmentation de la<br />

posologie du tacrolimus et des corticoïdes<br />

PROGRAF injectable 10 amp. 5 mg/mL HOP I<br />

Si voie orale impossible : 0,01-<br />

0,05 mg/kg/24 h IVSE<br />

ADVAGRAF<br />

Idem PROGRAF 30 gél. 0,5 mg 44,12 I 100 % 1,47<br />

30 gél. 1 mg 83,00 I 100 % 2,77<br />

30 gél. 5 mg 379,55 I 100 % 12,65<br />

PROPRIÉTÉS tacrolimus en cas de diarrhée pour adapter la<br />

Le tacrolimus est un immunosuppresseur très posologie.<br />

puissant qui inhibe la formation des lymphocytes<br />

cytotoxiques lesquels sont principalement<br />

responsables du rejet du greffon. Il sup-<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Anémie, leucopénie, coagulopathie.<br />

Hyperglycémie, diabète, hyper ou hypokaliéprime<br />

l’activation des lymphocytes T et la mie, hypocalcémie, hyponatrémie.<br />

prolifération T-dépendante des lymphocytes B. Anxiété, confusion, dépression, convulsion,<br />

INDICATIONS<br />

Prévention du rejet aigu d’organe après allo-<br />

AVC.<br />

Troubles neurosensoriels.<br />

Insuffisance cardiaque, dyspnée.<br />

greffe rénale, hépatique ou cardiaque. Diarrhée, pancréatite, ascite.<br />

Traitement du rejet de l’allogreffe résistant à un Insuffisance rénale.<br />

traitement par d’autres traitements immuno- Rash, prurit, syndrome de Lyell.<br />

suppresseurs.<br />

Leucopénie, infections (en association avec la<br />

ciclosporine et les corticoïdes).<br />

CONTRE-INDICATIONS Risque accru de lymphome et d’autres tumeurs<br />

Hypersensibilité au tacrolimus.<br />

malignes (cutanées).<br />

Galactosémie congénitale, syndrome de INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

malabsorption du glucose ou du galactose, Inhibiteurs du CYP3A4 : antifongiques (kétodéficit<br />

en lactates. conazole, fluconazole, voriconazole), érythro-<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Limiter l’exposition au soleil et aux rayons UV.<br />

Surveiller PA, ECG, bilan neurologique et visuel,<br />

mycine, clarithromycine, josamycine, inhbiteur<br />

de la protéase du VIH, nifédipine,<br />

nicardipine.<br />

Inducteurs du CYP3A4 : rifampicine, phényglycémie<br />

à jeun, NFS, hémostase, fonction toïne, millepertuis.<br />

rénale et hépatique. Contraceptifs stéroïdiens : diminution de leur<br />

Surveiller la concentration plasmatique du<br />

clairance par le tacrolimus.


1252 Néphrologie IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION)<br />

Sirolimus<br />

RAPAMUNE<br />

IMMUNOSUPRESSEURS (TRANSPLANTATION) (6)<br />

Transplantés rénaux : 30 cp. 1 mg 129,59 I 100 % 4,32<br />

Dose de charge à J1 (3 à 15 mg) puis 1 à 30 cp. 2 mg 249,04 I 100 % 8,30<br />

5 mg/j per os : obtenir une concentration 60 mL sol. 1 mg/mL 249,04 I 100 % 4,15<br />

sérique de 3 à 10 ng/mL<br />

PROPRIÉTÉS EFFETS SECONDAIRES<br />

Le sirolimus est un inhibiteur de mTOR. Il Dyslipémie (50 %).<br />

bloque la transduction du signal lymphocytaire Troubles digestifs (env. 30 %) : diarrhée, consti-<br />

en aval de l’IL2. Sa demi-vie est très prolongée pation, douleurs, nausées, vomissements.<br />

(57 h). Outre son action immunosuppressive, il Anémie (23 à 37 %), thrombocytopénie (13 à<br />

s’agit d’un agent antiprolifératif et antiangiogé- 30 %).<br />

nique. Un éventuel bénéfice antitumoral est en Aphtes, acné, rash cutané.<br />

cours d’étude.<br />

Retard de cicatrisation.<br />

INDICATIONS<br />

Prévention du rejet aigu d’organe après allogreffe<br />

rénale.<br />

Pneumopathie interstitielle.<br />

Insuffisance rénale.<br />

Arthralgies.<br />

Cephalées.<br />

CONTRE-INDICATIONS Tremblements.<br />

Hypersensibilité au sirolimus. Risque accru d’infections (notamment uri-<br />

Grossesse et allaitement : éviter. naires).<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Éviter en cas de reprise retardée de fonction Inhibiteurs du CYP3A4 : antifongiques (kétorénale<br />

et en cas de tubulopathie aiguë (inhibe conazole, fluconazole, voriconazole), érythrola<br />

tubulogenèse réparative), et autrour d’une mycine, clarithromycine, josamycine, inhbi-<br />

intervention chirurgicale (retarde nettement la teur de la protéase du VIH, nifédipine,<br />

cicatrisation). nicardipine.<br />

Réduire les doses de 30 % en cas d’insuffi- Inducteurs du CYP3A4 : rifampicine, phénysance<br />

hépatique. toïne, millepertuis.<br />

Surveiller la concentration plasmatique. Contraceptifs stéroïdiens : diminution de leur<br />

Limiter l’exposition au soleil et aux rayons UV. clairance par le sirolimus.


ANTICORPS MONOCLONAUX (TRANSPLANTATION) Néphrologie 1253<br />

Évérolimus<br />

CERTICAN<br />

ANTICORPS MONOCLONAUX (TRANSPLANTATION) (1)<br />

Transplantés rénaux : 60 cp. 0,1 mg 53,05 I 100 % 0,88<br />

A. : 0,75 mg x 2/j à débuter dès que pos- 60 cp. 0,25 mg 124,79 I 100 % 2,08<br />

sible après la transplantation 60 cp. disp. 0,25 mg 124,79 I 100 % 2,08<br />

À administrer en même temps que la 60 cp. 0,5 mg 240,11 I 100 % 4,00<br />

ciclosporine 60 cp. 0,75 mg 351,43 I 100 % 5,86<br />

À prendre avec un verre d’eau et ne pas<br />

écraser<br />

PROPRIÉTÉS Absence de contraception féminine orale<br />

L’évérolimus est un inhibiteur du signal de pro- efficace.<br />

lifération qui prévient le rejet d’allogreffes. Il Intolérance au galactose.<br />

exerce son effet immunosuppresseur en inhi- Déficit en lactase.<br />

bant la prolifération et par conséquent l’expan- Malabsorption glucose galactose.<br />

sion clonale des cellules T activées par un antigène<br />

médiée par des interleukines spécifiques<br />

de la cellule T telles que l’IL2 et l’IL15. L’évérolimus<br />

inhibe également la fonction mTOR qui<br />

joue un rôle dans le métabolisme, la croissance<br />

et la prolifération cellulaire. L’effet de l’évérolimus<br />

ne se limite pas aux cellules T : il inhibe,<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Surveillance des concentrations résiduelles<br />

dans le sang en cas d’insuffisance hépatique<br />

sévère.<br />

Éviter l’exposition au soleil et UV.<br />

Infections opportunistes plus fréquentes (pneu-<br />

mocystose).<br />

de manière générale, la prolifération stimulée Surveillance de la fonction rénale, de la cholespar<br />

facteur de croissance des cellules tant térolémie et de la triglycéridémie.<br />

hématopoïétiques que non hématopoïétiques,<br />

telles que, par exemple, les cellules musculaires<br />

lisses vasculaires.<br />

L’évérolimus est métabolisé par l’isoenzyme<br />

CYP3A4 dans le foie.<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Infections virales, bactériennes, fongiques. Leu-<br />

copénie, anémie, troubles de la coagulation,<br />

syndrome hémolytique et urémique, purpura<br />

thrombopénique. Épanchement péricardique,<br />

INDICATIONS<br />

Prévention du rejet d’organe chez les patients<br />

adultes présentant un risque immunologique<br />

faible à modéré recevant une allogreffe rénale<br />

ou cardiaque. L’évérolimus doit être utilisé en<br />

pleural, pneumopathie. Douleur abdominale,<br />

diarrhée, nausée, vomissements, élévation des<br />

transaminases. Œdème de Quincke, éruption<br />

cutanée. Tumeur maligne, lymphome, syn-<br />

drome lymphoprolifératif, cancer cutané.<br />

association avec de la ciclosporine sous forme INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

de microémulsion et des corticoïdes.<br />

L’association de CERTICAN et d’inhibiteurs (par<br />

ex. kétoconazole, itraconazole, voriconazole,<br />

CONTRE-INDICATIONS clarithromycine, télithromycine, ritonavir) ou<br />

Hypersensibilité à l’évérolimus et au sirolimus. inducteurs (par ex. rifampicine, rifabutine)<br />

Grossesse et allaitement.<br />

puissants du CYP3A4 n’est pas recommandée.


1254 Néphrologie ANTICORPS MONOCLONAUX (TRANSPLANTATION)<br />

Basiliximab<br />

SIMULECT<br />

ANTICORPS MONOCLONAUX (TRANSPLANTATION) (2)<br />

Transplantés rénaux : 10 mg pdre + solv. I<br />

A. : 1 dose de 20 mg IV 2 h avant la greffe, 20 mg pdre + solv. HOP I<br />

2 e dose 4 j après la greffe<br />

E.< 35 kg : 1 dose de 10 mg 2 h avant, 2 e<br />

dose de 10 mg 4 j après la greffe<br />

PROPRIÉTÉS Absence de contraception féminine orale<br />

Le basiliximab est un anticorps monoclonal efficace.<br />

dirigé contre la chaîne alpha du récepteur de<br />

l’IL2 (récepteur exprimé à la surface des lym-<br />

PRÉCAUTIONS D’EMPLOI<br />

Injection uniquement si certitude de la greffe<br />

phocytes T en réponse à une stimulation anti- rénale.<br />

génique) ; il se lie spécifiquement à l’antigène<br />

CD25 à la surface des lymphocytes T, ce qui<br />

empêche la liaison de l’IL2, signal de prolifération<br />

des lymphocytes T au cours de la réponse<br />

EFFETS SECONDAIRES<br />

Constipation, nausées, diarrhée. Infection uri-<br />

naire, infections respiratoires hautes. Œdèmes<br />

des membres inférieurs.<br />

immunitaire impliquée dans le rejet de l’allo- Hypertension artérielle, anémie, céphalées.<br />

greffe.<br />

Hyperkaliémie, hypercholestérolémie, éléva-<br />

INDICATIONS<br />

tion de la créatinine. Prise de poids. Réactions<br />

d’hypersensibilité : éruption cutanée, urticaire,<br />

Prévention du rejet aigu d’organe après allo- bronchospasme, œdème pulmonaire, insuffigreffe<br />

rénale.<br />

sance respiratoire et cardiaque, syndrome d’ex-<br />

travasation capillaire. Lymphome, syndrome<br />

CONTRE-INDICATIONS lymphoprolifératif.<br />

Hypersensibilité au basiliximab. INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES<br />

Grossesse et allaitement : éviter.<br />

Aucune.


PAS DE TTT STANDARDISE<br />

• Les souhaits du patient doivent orienter le choix et les objectifs d’un TTT<br />

• Si gêne symptomatique légère ou jugée acceptable par le patient : abstention thérapeutique avec surveillance<br />

• Si gêne symptomatique jugée inacceptable par le patient : TTT médical ou chirurgical<br />

TROIS CLASSES THÉRAPEUTIQUES indiquées pour le TTT symptomatique de l’HBP<br />

• L’efficacité des trois classes est qualifiée de modérée par l’AFSSAPS<br />

• Alpha-bloquants : niveau de preuve intermédiaire (Grade B)<br />

3 alfuzosine (Urion ® , Xatral ® , gé), doxazosine (Zoxan ® ), prazosine (Minipress ® ), tamsulosine (Josir ® , Mecir ® , Omexel ® ,<br />

Omix ® , gé), térazosine (Dysalfa, Hytrine ® , gé)<br />

3 efficacité quel que soit le volume prostatique<br />

3 effets secondaires peu fréquents : hypoTA<br />

• Inhibiteurs de la 5-alpha-réductase : niveau de preuve intermédiaire (Grade B)<br />

3 dutastéride (Avodart ® ), finastéride (Chibro-Proscar ® )<br />

3 efficacité démontrée que pour un volume prostatique > 40 mL<br />

3 induisent une baisse iatrogène du PSA<br />

• Phytothérapies<br />

3 serenoa repens (Permixon) : niveau de preuve intermédiaire (Grade B)<br />

3 pygeum africanum (Tadenan) : accord professionnel<br />

COMPLICATIONS<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

ELEMENTS DIAGNOSTIQUES ET BILAN INITIAL<br />

• Évaluation de la gêne (questionnaire standardisé, score I-PSS)<br />

3 retentissement sur la qualité de vie du patient<br />

• TR (essentiel) et examen physique<br />

3 attention : pas de parallélisme anatomo-clinique entre le volume de la prostate et la sévérité des TUBA<br />

• Élimination d’autres causes (examens complémentaires recommandés)<br />

3 BU, ECBU (si suspicion ou ATCD d’infection urinaire)<br />

3 créatininémie (si FR d’IR)<br />

• Pas de dosage PSA systématique : l’HBP n’augmente pas le risque de cancer prostatique<br />

• Ne pas proposer systématiquement une échographie de l’arbre urinaire par voie abdominale<br />

3 utile seulement pour identifier une vessie de lutte, un calcul vésical ou de dilatation du haut appareil<br />

• Ne pas proposer systématiquement une échographie prostatique par voie rectale<br />

3 utile qu’en cas d’indication opératoire<br />

• Informations sur le caractère bénin de l’HBP, sur la variabilité spontanée des TUBA (amélioration ou détérioration),<br />

sur les possibilités thérapeutiques<br />

• Discussion avec le patient d’un dosage éventuel de PSA<br />

3 si hématurie, infections urinaires ou diverticules non symptomatiques : TTT médical et/ou chirurgical<br />

3 si rétention aiguë d’urine récidivante, rétention chronique avec mictions par regorgement, calculs vésicaux, diverticules<br />

vésicaux symptomatiques ou IR liée à l’HBP : TTT chirurgical<br />

• Surveillance uniquement clinique (évolution des symptômes et retentissement sur la qualité de vie)<br />

3 répéter le bilan 1 fois par an ou si aggravation des symptômes<br />

• Si manque d’efficacité, l’association alpha-bloquant + inhibiteur de la 5-alpha-réductase est possible (avis d’expert)<br />

• Si aggravation des symptômes, envisager des examens complémentaires (échographie abdominale, débitmétrie<br />

fonctionnelle, catalogue mictionnel, dosage PSA, urographie IV, échographie endorectale, urétrocystoscopie)<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises et résultats d’études.<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS<br />

UROLOGIE<br />

RÉSULTATS<br />

D'ÉTUDES<br />

RÉSULTATS


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Hypertrophie bénigne de la prostate<br />

Au cours du dernier mois, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu la sensation<br />

que votre vessie n’était pas complètement<br />

vidée après avoir uriné ?<br />

Au cours du dernier mois, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu besoin d’uriner<br />

à nouveau moins de 2 h après avoir fini<br />

d’uriner ?<br />

Au cours du dernier mois, avec<br />

quelle fréquence avez-vous eu une<br />

interruption du jet d’urine, c’est-à-dire<br />

démarrage du jet, puis arrêt, puis<br />

redémarrage ?<br />

Au cours du dernier mois, après en<br />

avoir ressenti le besoin, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu des difficultés<br />

à retenir votre envie d’uriner ?<br />

Au cours du dernier mois, avec quelle<br />

fréquence avez-vous eu une diminution<br />

de la taille ou de la force du jet d’urine ?<br />

Au cours du dernier mois, avec quelle<br />

fréquence avez-vous dû forcer ou<br />

pousser pour commencer à uriner ?<br />

Au cours du dernier mois, combien de<br />

fois par nuit en moyenne, vous êtesvous<br />

levé pour uriner (entre le moment<br />

de votre couché le soir et celui de votre<br />

lever définitif le matin)<br />

Références :<br />

Jamais<br />

Environ 1<br />

fois sur 5<br />

I-PSS<br />

Environ 1<br />

fois sur 3<br />

Environ 1<br />

fois sur 2<br />

Environ 2<br />

fois sur 3<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Presque<br />

toujours<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

0 1 2 3 4 5<br />

Jamais 1 fois 2 fois 3 fois 4 fois 5 fois<br />

0 1 2 3 4 5<br />

I-PSS Score S : 0-7 = léger<br />

8-19 = modéré Score I-PSS Total S =<br />

20-35 = sévère<br />

Vous venez d’expliquer comment vous<br />

urinez. Si vous deviez vivre le restant de<br />

votre vie de cette manière, diriez-vous<br />

que vous en seriez :<br />

Evaluation de la qualité de vie liée aux symptômes urinaires<br />

Très satisfait Satisfait<br />

Plutôt<br />

satisfait<br />

UROLOGIE<br />

u 1. Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES). Recommandations pour la pratique clinique. Prise en charge diagnostique et<br />

thérapeutique de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Recommandations mars 2003. u 2. McConnell, JD. The long-term effect of doxazosin, finasteride, and<br />

combination therapy on the clinical progression of benign prostatic hyperplasia. N Engl J Med 2003; 349:2387-2398.<br />

Partagé<br />

Plutôt<br />

ennuyé<br />

Ennuyé Très ennuyé<br />

0 1 2 3 4 5 6<br />

Evaluation de la qualité de vie L =<br />

Adapté de Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES). Recommandations pour la pratique clinique. Prise en charge<br />

diagnostique et thérapeutique de l’hypertrophie bénigne de la prostate. Recommandations mars 2003.<br />

Score<br />

Mise à jour février 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Infections urinaires (IU) (cystite et pyélonéphrite) – Enfant<br />

Les recommandations sur l’antibiothérapie des IU de l’adulte sont applicables à l’adolescent pubère<br />

• Signes et symptômes souvent non spécifiques (nourrisson+++)<br />

• Evoquer la pyélonéphrite devant toute fièvre sans foyer infectieux patent<br />

OUTILS<br />

• Diagnostic : bandelette (sauf avant 3 mois)<br />

3 enfant (> 3 mois) fébrile sans point d’appel urinaire : BU négative (leucocytes et nitrites) = absence d’IU (valeur prédictive<br />

négative ≈ 97 %) pas d’ECBU<br />

3 si persistance des symptômes : nouvelle BU ou ECBU<br />

• Confirmation : clinique + ECBU<br />

3 ex. direct : négatif (leucocyturie + bactériurie) = absence d’IU (valeur prédictive négative ≈ 100 %)<br />

3 culture : espèce bactérienne, quantification (seuil de signification : prélèvement mictionnel = 105 UFC/mL ; autres types<br />

de prélèvement = 103 UFC/mL), antibiogramme<br />

• Privilégier le prélèvement urinaire per-mictionnel<br />

3 si difficulté ou urgence : cathétérisme, voire ponction sus-pubienne<br />

3 ECBU sur urine prélevée à l’aide d’une poche : peu fiable<br />

≤ 103 UFC/mL : excellente valeur prédictive négative<br />

> 104 UFC/mL : tenir compte de tableau clinique, leucocyturie, nombre et nature des espèces isolées<br />

3 si doute, renouveler le prélèvement dans des conditions rigoureuses avant ATB<br />

STRATEGIE OPERATIONNELLE<br />

• Fièvre + signes urinaires non expliqués par une inflammation périnéale = ECBU d’emblée<br />

• Cystite chez la fille > 3 ans : dysurie, brûlures mictionnelles, pleurs en urinant, pollakiurie, envies impérieuses, douleurs<br />

hypogastriques, fuites urinaires, hématurie macroscopique (20 % des cas), fièvre < 38,5°C, 0 douleurs lombaires 0 syndrome<br />

inflammatoire biologique<br />

• Pyélonéphrite aiguë<br />

3 grand enfant : signes de cystite + fièvre > 39°C + douleurs lombaires et/ou abdominales<br />

3 jeune enfant et nourrisson : fièvre inexpliquée voire des symptômes trompeurs (troubles digestifs ou une altération de l’EG) <br />

BU / ECBU systématiques<br />

• Cystite aiguë (fille > 3 ans) : TTT = 3 à 5 j<br />

3 cotrimoxazole (contre-indiqué avant l’âge d’1 mois) : sulfaméthoxazole 30 mg/kg/j + triméthoprime 6 mg/kg/j en 2 prises /j<br />

3 ou céfixime 8 mg/kg/j (à partir de 3 ans) en 2 prises /j, notamment si résistance, intolérance ou contre-indication au cotrimoxazole<br />

3 ECBU de contrôle inutile<br />

• Pyélonéphrite aiguë<br />

a) TTT d’attaque voie injectable pendant 2 à 4 j<br />

En 1ère intention<br />

3 ceftriaxone (IV ou IM, patient hospitalisé ou ambulatoire) : 50 mg/kg/j en 1 injection sans dépasser 1 g/j<br />

3 ou céfotaxime (IV, uniquement si hospitalisé) : 100 mg/kg/j, en 3 ou 4 injections, sans dépasser 4 g/j<br />

Cas particuliers : aminosides (gentamicine 3 mg/kg/j en 1 injection IV ou IM)<br />

3 en association aux C3G injectables dans les pyélonéphrites sévères (enfant < 3 mois, uropathie malformative connue, syndrome<br />

septicémique, immunodéprimé)<br />

3 en monothérapie en cas d’allergie aux bêta-lactamines, si fonction rénale normale<br />

3 en association à l’amoxicilline (100 mg/kg/j en 3-4 injections sans dépasser 4 g/j) si infection à entérocoques<br />

b) relais oral pour un total de 10 à 14 j<br />

3 cotrimoxazole (enfant >1 mois) ou céfixime (> 6 mois) selon l’antibiogramme<br />

3 si résistance aux autres familles d’ATB : ciprofloxacine chez l’enfant prépubère, FQ chez l’adolescent pubère<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

UROLOGIE /<br />

PEDIATRIE<br />

• Hospitalisation chez l’enfant < 3 mois ou présentant des signes cliniques d’infection sévère<br />

• Examen clinique recommandé 48-72 h après le début du TTT<br />

• Antibioprophylaxie si cystites récidivantes, en complément du TTT des FR de l’infection (réplétion rectale, troubles mictionnels,<br />

prépuce physiologiquement étroit)<br />

3 cotrimoxazole (enfant > 1 mois) : sulfaméthoxazole 5-10 mg/kg/j + triméthoprime 1-2 mg/kg/j<br />

3 ou nitrofurantoïne (> 6 ans) : 1 à 2 mg/kg/j<br />

3 durée : plusieurs mois en continu, avec hygiène périnéale adaptée et vigilance accrue pour diagnostic précoce des pyélonéphrites aiguës<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Infections urinaires (IU) (cystite et pyélonéphrite) – Enfant<br />

Négative<br />

Bandelette<br />

urinaire<br />

Pas d’examen<br />

Pas de TTT<br />

Sans signes<br />

urinaires<br />

Schéma : Diagnostic de l’infection urinaire chez l’enfant 1<br />

Enfant fébrile<br />

Positive<br />

Négatif Positif<br />

u 1. Afssaps - Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires du nourrisson et de l’enfant - recommandations (février2007) :<br />

http://afssaps.sante.fr/<strong>pdf</strong>/5/rbp/antibiotherapie-infections-urinaire-nourisson-reco.<strong>pdf</strong><br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Avec signes<br />

urinaires<br />

ECBU*<br />

Antibiothérapie<br />

UROLOGIE /<br />

PEDIATRIE<br />

Mise à jour décembre 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Insuffisance rénale chronique (IRC)<br />

Suivi des patients au stade d’IRC modérée ou sévère<br />

Stades d’IRC : estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) (cf fiche dépistage et verso)<br />

• IRC modérée (stade 3 d’IRC) : DFG entre 30 et 60 mL/mn<br />

• IRC sévère (stade 4 d’IRC) : DFG entre 15 et 30 mL/mn<br />

• IRC terminale (stade 5 d’IRC) : DFG entre < 15 mL/mn<br />

Affirmer le caractère chronique et éliminer une insuffisance rénale aiguë<br />

• Insuffisance rénale fonctionnelle en particulier du sujet âgé, obstacle, médicament (produits de contrastes iodés, IEC, AA2, AINS,<br />

aminosides), glomérulonéphrite ou cause vasculaire<br />

Bilan initial d’orientation diagnostic<br />

• Anamnèse : ATCD familiaux de néphropathie (polykystose), ATCD personnels de diabète, d’hypertension artérielle,de maladie<br />

athéromateuse, d’infections urinaires hautes récidivantes, d’une uropathie, d’une lithiase, d’une maladie systémique ou autoimmune,<br />

de goutte, d’une protéinurie, d’une hématurie<br />

• Prise chronique ou intermittente de médicaments potentiellement néphrotoxiques<br />

• Exposition à des toxiques professionnels : plomb, cadmium<br />

• Clinique : rechercher : TA, souffle vasculaire sur les axes artériels, disparition de pouls périphériques, œdèmes, reins palpables,<br />

obstacle urologique (globe vésical, touchers pelviens), signes extrarénaux de maladie systémique<br />

• Bandelette urinaire : protéinurie, hématurie, leucocyturie, nitrites en faveur d’une infection des urines à gram négatif<br />

• Paraclinique<br />

3 électrophorèse des protéines sériques, glycémie à jeun<br />

3 protéinurie des 24 h (+ créatininurie pour valider la qualité du recueil des urines de 24 h) ou - rapport protéinurie/créatininurie<br />

sur un échantillon si recueil sur 24 h impossible<br />

3 cytologie urinaire quantitative sur urines fraîches : recherche et quantification d’une hématurie, d’une leucocyturie, de cylindres<br />

3 échographie rénale et vésicale, ASP<br />

Avis néphrologique pour préciser le diagnostic et organiser le suivi selon la gravité de l’IRC<br />

• Expliquer les facteurs aggravants de l’insuffisance rénale et l’évolutivité de l’IRC<br />

• Mettre en garde contre l’automédication, en particulier les AINS<br />

• Hygiène de vie : maintien de l’activité physique, lutte contre l’obésité et arrêt du tabac<br />

• Conseils diététiques (cf verso)<br />

3 boire en fonction de sa soif : préférer une eau riche en bicarbonate<br />

3 régime hypoprotidique : entre 0.8 g et 1 g/Kg/j<br />

3 limiter les aliments riches en potassium : oléagineux, bananes, fruits secs<br />

3 diminuer le sel et régime hyposodé en cas de dialyse<br />

• Préparer le patient à la dialyse dès le stade 4 (DFG < à 30 ml/mn)<br />

• Prise en charge conjointe avec le néphrologue et le diététicien ou dans un réseau de soins<br />

• Surveiller la fonction rénale régulièrement et en cas de prise médicamenteuse +++<br />

3 adapter la dose (digitaliques, certains antiarythmiques, tous les anticoagulants, metformine, sulfamides hypoglycémiants, statines…)<br />

3 n’utiliser qu’en cas de nécessité absolue les médicaments néphrotoxiques (AINS, COX-2, lithium, produits de contrastes iodés)<br />

• Prise en charge FRCV (diabète, HTA, dyslipidémies…), comorbidités et éviction des produits toxiques (cf fiche prévention IRC)<br />

• IEC ou AA2 ralentissent la progression de l’IRC malgré une augmentation initiale de la créatininémie<br />

• Surveillance tous les 3 mois puis tous les mois dès le stade 4 (DFG < à 30 mL/mn)<br />

• Vaccination hépatite B, grippe et pneumocoque<br />

• Surveiller l’anémie en corrigeant avec agents stimulants l’érythropoïèse ou fer. Objectifs hémoglobine 11 à 13 g/dL et<br />

ferritine > 100 ng/mL<br />

• Eviter déséquilibre phosphocalcique (vitamine D, Ca, chélateur du P, calcimimétiques…)<br />

• Surveiller les risques d’hyperkaliémie, d’acidose métabolique et d’hyperuricémie<br />

• Préservation du capital veineux<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

UROLOGIE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Insuffisance rénale chronique (IRC)<br />

Suivi des patients au stade d’IRC modérée ou sévère<br />

Estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) par la formule de Cockcroft et Gault<br />

DFG (mL/min) = [(140-âge) x poids en kg/créatininémie en μmol/L] x k, avec k = 1,23 pour les hommes, 1,04 pour les femmes, âge en années<br />

Si la créatinine est exprimée en mg/L, il faut en multiplier le chiffre par 8,84 pour l’obtenir en μmol/L<br />

Mesure du débit de filtration glomérulaire par la formule MDRD simplifiée : en mL/mn/1,73 m²<br />

= 186.3 x créatininémie [mg/dlL-1.154 x âge (ans)-0.203 x (1.212 si race noire) x (0.742 si femme)]<br />

Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

UROLOGIE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

REGLES DIETETIQUES : apprentissage des règles nutritionnelles pour l’adulte non dialysé, à adapter selon le stade et le contexte<br />

Apport en sel : limité à 6 g/j dans le cas d’hypertension artérielle, entre 2 et 6 g/j en cas d’œdèmes<br />

Apport énergétique suffisant : 30 à 35 kcal/kg/j<br />

Apport protidique, limité à 0,8 g/kg/j en cas d’insuffisance rénale stade 3 et inférieur à 0,8 g/kg/j en cas de stades 4 et 5 non dialysés<br />

Apport liquidien : ni restreint, ni forcé, adapté à la diurèse et à la soif, proche de 1,5 L/j<br />

Apport potassique : limité en cas d’hyperkaliémie (artichauts, champignons, céleri, épinards, fenouil, oseille, purée de tomates, fèves, haricots blancs, fruits secs,<br />

bananes, châtaignes, lait en poudre, café soluble, chocolat, ketchup, poissons en conserve…). Objectif : maintien de la kaliémie =< 5,5 mmol/L<br />

Apport en phosphore (presque exclusivement lié aux protéines et aux céréales) : à surveiller en cas de troubles phosphocalciques. Objectif :<br />

maintien de la phosphorémie =< 1,45 mmol/L<br />

Chez l’enfant, les règles nutritionnelles seront définies en collaboration avec le pédiatre néphrologue<br />

Au stade de dialyse : des règles différentes sont mises en place<br />

SURVEILLANCE BIOLOGIQUE DE L’IRC à adapter en fonction des circonstances cliniques<br />

STADE 3 STADE 4 STADE 5<br />

DFG Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 12 mois Tous les 1 à 3 mois<br />

Protéinurie/24 h Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Sans objet<br />

Urée, sodium, créatinine, urines de 24 h Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Sans objet<br />

NFP K Na bicarbonates urémie Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Tous les 1 à 3 mois<br />

Ferritinémie + Coeff. Sat. Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Tous les 3 mois<br />

Albuminémie Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Tous les 3 mois<br />

Calcium phosphates Tous les 6 à 12 mois Tous les 3 à 6 mois Tous les 3 mois<br />

Parathormone, 250H-vitamine D Tous les 12 mois Tous les 3 à 6 mois Tous les 3 mois<br />

CRP Selon le contexte<br />

Glycémie, lipides, Ac HBs Tous les 12 mois<br />

u 1. ANAES : RCP : moyens thérapeutiques pour ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte, septembre 2004. www.has-sante.fr/portail/<br />

jcms/c_268117/ralentissement-irc-synthese-des-recommandations<strong>pdf</strong> u 2. Afssaps : Traitement de l’anémie au cours de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte -<br />

mai 2005. www.af22ssaps.sante.fr/<strong>pdf</strong>/5/rbp/anereco.<strong>pdf</strong> u 3. BEH 37/38 2005 numéro thématique : l’insuffisance rénale chronique : www.invs.santé.fr u 4. ANAES :<br />

diagnostic de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte septembre 2002. u 5. Prévention et dépistage de l’insuffisance rénale chronique, rapport de Michel BOUREL<br />

et Raymond ARDALLIOU de l’Académie de Médecine du 16/11/2004. u 6. Revue du praticien monographie : insuffisance rénale chronique 2005, 55, n°20. u 7.Afssaps :<br />

Thésaurus des Interaction médicamenteuses – mise à jour juillet 2008. http://www.afssaps.fr/Dossiers-thematiques/Interactions-medicamenteuses/Interactions-medicamenteuses/(offset)/0<br />

u 8. HAS : Indications et non-indications de la dialyse péritonéale chronique chez l’adulte. Consensus formalisé Recommandations Juin 2007.<br />

http://www.socnephrologie.org/PDF/enephro/recommandations/HAS/2008/DP_recommand.<strong>pdf</strong><br />

Mise à jour mars 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Lithiase urinaire - Conduite à tenir<br />

CIRCONSTANCES DE DECOUVERTE<br />

• Douleur aiguë ou chronique<br />

• Infection urinaire<br />

• Hématurie<br />

• Insuffisance rénale<br />

• Découverte fortuite<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations internationales.<br />

UROLOGIE<br />

CONFIRMATION RADIOLOGIQUE<br />

• Si tableau clinique typique : ASP + échographie<br />

• Si doute : UIV ou tomographie numérisée (sensibilité et spécificité ≥ UIV)<br />

(meilleure détection des lithiases uriques et xanthiques radio transparentes et meilleure discussion du diagnostic différentiel mais irradiation plus<br />

importante et difficulté du suivi post thérapeutique des calculs radio-opaques)<br />

MESURES DIÉTÉTIQUES DE PRÉVENTION DE LA RÉCIDIVE<br />

• Augmentation des apports liquidiens : objectif : diurèse ≥ 2L/j. NB : Le jus de pamplemousse est corrélé avec un risque lithiasique accru<br />

• Réduction des apports : oxalates (excrétion oxalate), protéines animales (excrétion Ca, urates, oxalate), sodium (excrétion Ca,<br />

excrétion de citrate et pH), vitamine C (interdire la supplémentation excessive)<br />

• Augmentation des apports : fibres, légumes<br />

EN CAS DE RÉCIDIVE DOULOUREUSE : AUTOGESTION DES ANTALGIQUES<br />

ANTALGIQUE<br />

• Kétoprofène : surveillance diurèse + fonction rénale chez l’insuffisant rénal<br />

• Alternatives : indométhacine ou ibuprofène<br />

EXERESE ACTIVE DE LA LITHIASE<br />

• Indications<br />

3 diamètre ≥ 7 mm, soulagement de la douleur impossible à obtenir<br />

3 obstruction + infection, risque de pyonéphrose ou d’urosepsis<br />

3 rein unique ou obstruction bilatérale<br />

• Méthode de référence : lithotripsie extracorporelle par onde de choc (LECOC) en ambulatoire : prévenir du risque d’hématurie<br />

dans les 24 h. Contrôle radiologique au bout de 2 semaines<br />

• Alternatives<br />

3 néphrolithotomie percutanée : si LECOC expose à des difficultés opératoires<br />

3 exérèse rétrograde sous antibioprophylaxie sous contrôle de la vue<br />

3 lithotomie à champ ouvert / laparotomique : si la taille du calcul ou l’anomalie des voies urinaires le demandent<br />

• Cas particuliers (lithiase urinaire de la femme enceinte, de l’enfant, du patient sous anticoagulants, CAT en cas de fragments résiduels) 2<br />

• Classement des alternatives thérapeutiques en fonction du calcul : cf verso<br />

PRÉVENTION DES LITHIASES CALCIQUES avec HYPERCALCIURIE<br />

• Eau de boisson pauvre en Ca (Volvic, Evian…), éviter les aliments riches en Ca (lait, fromages, épinards)<br />

• Diurétique thiazidique : hydrochlorothiazide<br />

• Proscrire : vitamine D, vitamine A, gels d’alumine (calciurie)<br />

PRÉVENTION DES LITHIASES CALCIQUES avec HYPEROXALURIE<br />

• Diurèse > 2 à 2,5 L/j, éviter les aliments riches en oxalate (thé, oseille, betterave…)<br />

• Allopurinol (excrétion) ou pyridoxine (synthèse d’oxalate)<br />

TRAITEMENT MEDICAL DES LITHIASES URIQUES<br />

• Prévention : diurèse > 3 L/j (au moins 150 mL/h) + alcalinisation (citrate de K : 3 à 7 mmol x 2 à 3/j). Si uricémie ou uraturie élevées :<br />

allopurinol 300 mg/j<br />

• Dissolution : diurèse > 2 à 2,5 L/j + alcalinisation (citrate de K : 6 à 10 mmol x 2 à 3/j) + allopurinol 300 mg/j systématique<br />

TRAITEMENT MEDICAL DES LITHIASES CYSTINIQUES<br />

Diurèse > 2 à 2,5 L/j + alcalinisation selon taux d’excrétion cystinique<br />

3 < 3 mmol/24 h : citrate de K : 3 à 10 mmol x 2 à 3/j pour atteindre pH >7,5<br />

3 > 3 mmol/24 h : tiopronine 250 à 2 000 mg/j ou Captopril 75 à 150 mg/j<br />

• Bilan étiologique > 1 mois après un épisode obstructif (> 3 mois après néphrolithotomie percutanée : analyse d’un calcul, NFS, VS,<br />

créatininémie, ionogramme sanguin, calcémie, albuminémie, phosphorémie, uricémie, diurèse des 24 h, mesures du pH urinaire ; sur les urines<br />

des 24 h : urée, ionogramme urinaire, calciurie, phosphaturie, uraturie ; ECBU, ASP, échographie rénale et des voies urinaires<br />

RECOMMANDATIONS<br />

INTERNATIONALES<br />

RECOMMANDATIONS


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Lithiase urinaire - Conduite à tenir<br />

Tableau 1 : Classement des alternatives thérapeutiques en fonction du calcul<br />

Lithiase radio-opaque (calcium) ≤ 20 mm de diamètre<br />

1 LECOC<br />

2 néphrolithotomie percutanée<br />

3 chirurgie rénale rétrograde<br />

4 chirurgie laparotomique<br />

5 chirurgie à champ ouvert<br />

(+ antibiothérapie si lithiase infecté ou ATCD récent d’infection urinaire)<br />

Lithiase d’acide urique ≤ 20 mm de diamètre<br />

1 dissolution par voie orale<br />

2 LECOC + dissolution par voie orale<br />

Lithiase cystéinique ≤ 20 mm de diamètre<br />

1 LECOC<br />

1 néphrolithotomie percutanée<br />

2 chirurgie rénale rétrograde<br />

3 chirurgie laparotomique<br />

4 chirurgie à champ ouvert<br />

Lithiase radio-opaque (calcium) > 20 mm de diamètre<br />

1 néphrolithotomie percutanée<br />

2 LECOC<br />

3 néphrolithotomie percutanée + LECOC<br />

4 chirurgie laparotomique<br />

4 chirurgie à champ ouvert<br />

(+ antibiothérapie si lithiase infecté ou antécédent récent d’infection urinaire)<br />

Lithiase d’acide urique > 20 mm de diamètre<br />

1 dissolution par voie orale<br />

2 LECOC + dissolution par voie orale<br />

3 néphrolithotomie percutanée<br />

3 néphrolithotomie percutanée + dissolution<br />

Lithiase cystéinique > 20 mm de diamètre<br />

1 néphrolithotomie percutanée<br />

1 néphrolithotomie percutanée + LECOC<br />

1 néphrolithotomie percutanée + dissolution<br />

2 LECOC + dissolution<br />

3 chirurgie laparotomique<br />

3 chirurgie à champ ouvert<br />

Tableau 2 : Facteurs de risque de récidive<br />

Facteurs cliniques<br />

Maladies associées<br />

à une lithogenèse augmentée<br />

Médicaments associés<br />

à une lithogenèse augmentée<br />

Anomalies anatomiques associées<br />

à une lithogenèse augmentée<br />

Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

UROLOGIE<br />

• Survenue précoce (< 25 ans) du 1 er épisode<br />

• Présence de phosphate de calcium hydrogéné dans la lithiase<br />

• ATCD familiaux lourds de lithiase<br />

• Présence d’un seul rein fonctionnel (le rein unique n’augmente pas le risque lithiasique mais les patients concernés<br />

doivent faire l’objet de mesures assidues de prévention des récidives)<br />

• Hyperparathyroïdie<br />

• Acidose tubulaire rénale<br />

• Cystinurie<br />

• Hyperoxalurie primaire<br />

• Dérivation jéjuno-iléale<br />

• Maladie de Crohn<br />

• Résection intestinale<br />

• Malabsorptions digestives<br />

• Sarcoïdose<br />

• Supplémentation calcique<br />

• Supplémentation vitaminique D<br />

• Acétazolamide<br />

• Acide ascorbique (> 4 g/j)<br />

• Sulphonamides<br />

• Triamtérène<br />

• Indinavir<br />

• Ectasie tubulaire<br />

• Obstruction de la jonction pelvo-urétérale<br />

• Diverticulose calicielle<br />

• Rétrécissement urétéral<br />

• Reflux vésico-urétéral<br />

• Rein en fer à cheval<br />

• Urétérocèle<br />

u 1. Enquête nationale multicentrique réalisée par le Comité Lithiase de l'Association Française d'Urologie dans un échantillon de patients > 60 ans : http://www.urofrance.<br />

org/index.php?id=base-resultats-recherche&no_cache=1&tx_axdocdb_pi1[showUid]=3566 u 2. European Association ou Urology (eau) - Guidelines on urolithiasis<br />

(2008). http://www.uroweb.org/fileadmin/user_upload/Guidelines/Urolithiasis.<strong>pdf</strong> u 3. Brochure-patients « règles diététiques et calculs urinaires“ téléchargeable sur<br />

le site de l’Association Française d’Urologie : http://www.urofrance.org/fileadmin/documents/data/FI/2006/FI-2006-00010001-1/TEXF-FI-2006-00010001-1.PDF.<br />

Mise à jour septembre 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prescription médicamenteuse chez l’insuffisant rénal<br />

EVALUER L’INSUFFISANCE RENALE, AIGUË OU CHRONIQUE<br />

• Calcul de la Clairance de la créatinine (CC) à partir du taux de créatinine plasmatique par la formule de Cockcroft ou MDRD<br />

selon l’âge<br />

3 normale (adulte masculin de 70 kg) ≈ 100 mL/min<br />

3 insuffisance rénale chronique<br />

➣ modérée CC ≈ 30-50 mL/min<br />

➣ sévère : CC ≈ 10-30 mL/min<br />

➣ dialyse : à partir de 15 mL/min<br />

• Etre porteur d’une carte indiquant l’existence de l’IR<br />

• Informer sur les principaux FR de progression des maladies rénales (tableau 1 au verso) et les règles à respecter pour les éviter<br />

3 restriction en sodium : 5 à 8 g / 24 h<br />

3 restriction protidique : apport quotidien ≈ 0,75-0,80 g/kg/j (alimentation occidentale classique : ≈ 1,30 g/kg/j)<br />

➣ sous surveillance diététique stricte<br />

➣ en compensant l’apport énergétique de 30 à 35 kcal/kg/j (sauf obésité)<br />

➣ avec contrôle du poids<br />

3 sevrage tabagique<br />

3 observance du TTT hypotenseur<br />

3 respect des dates de vaccinations<br />

3 interdiction de toute automédication, méfiance vis-à-vis des prises médicamenteuses<br />

3 interdiction de toute injection d’iode à visée diagnostique<br />

3 régularité de la surveillance clinique et biologique<br />

PRISE EN CHARGE DE L’IR<br />

• Inhibition du système rénine-angiotensine (SRA)<br />

3 privilégier les ARAII dans la néphropathie diabétique de type 2, les IEC dans la néphropathie diabétique de type 1 et la néphropathie<br />

non diabétique<br />

• TTT plus agressif des anomalies lipidiques (LDL-cholestérol < 1,00 g/L) : diététique, puis statines si échec après 3 mois<br />

• Vaccinations : antitétanique, anti HB, grippe saisonnière et A (H1N1), privilégier le vaccin sans adjuvant ; anti-pneumococcique :<br />

Pneumo 23 ; hépatite B<br />

3 retarder la vaccination en cas de syndrome néphrotique en poussée<br />

PRISE EN CHARGE DES MALADIES INTERCURRENTES<br />

• Médicaments à éviter : biguanides, sulfamides hypoglycémiants ; nitrofurantoïne, tétracyclines ; spironolactone, triamtérène, amiloride ;<br />

coxibs ; sels de lithium<br />

• Réévaluer l’indication des autres médicaments à élimination rénale : aminoglycosides, cotrimoxazone, céphalosporines, quinolones<br />

de 2ème génération, vancomycine ; allopurinol, colchicine ; chlorpromazine, clonidine, aténolol, digoxine, fifrates, sotalol...,<br />

à la lumière de l’IR, adaptation des doses au degré de réduction de la fonction rénale (tableau 2 au verso)<br />

• Auto surveillance du poids<br />

• Surveillance biologique : créatinine, clairance calculée, kaliémie<br />

• TTT inhibiteur du SRA<br />

3 augmentation de posologie d’autant plus lente que la fonction rénale est altérée<br />

3 dosage créatinine, clairance calculée, kaliémie systématique 10 à 15 j après instauration et après chaque<br />

changement de posologie<br />

3 objectif : PA < 130/80 mm Hg voire moins. Souhaitable : PAS = 110-120 mm Hg si cliniquement bien tolérée<br />

3 efficacité jugée sur : PA à 4 – 6 semaines et protéinurie à 2 – 3 mois (effet maximum après 6 mois)<br />

3 attendue (< 30 %) de la créatininémie / 4 premiers mois du TTT (preuve d’efficacité)<br />

➣ si > 30% : réduire ou arrêter transitoirement et rechercher un facteur favorisant (TTT anti-inflammatoire / déshydratation /<br />

TTT diurétiques trop agressifs)<br />

➣ hyperkaliémie = effet secondaire le plus redoutable, surtout si facteurs favorisants : IR marquée, néphropathie diabétique,<br />

médicaments bloqueurs de l’aldostérone : AINS, coxib, amiloride, spironolactone, éplerénone, héparines, anticalcineurines…<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

THERAPEUTIQUE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prescription médicamenteuse chez l’insuffisant rénal<br />

Tableau 1 : Règles d’ajustement posologique chez l’insuffisant rénal<br />

Tableau 2 : Principaux facteurs de risque de progression* des maladies rénales<br />

• Type de néphropathie (progression des néphropathies glomérulaires et vasculaires)<br />

• Fonction rénale altérée au moment du diagnostic<br />

• Sévérité de l’HTA<br />

• Abondance de la protéinurie<br />

• Intensité de l’atteinte tubulo-interstitielle au cours des néphropathies glomérulaires<br />

• Tabagisme<br />

• Exposition à des néphrotoxiques médicamenteux, industriels ou environnementaux<br />

• Facteurs ethniques (sujets noirs > caucasiens)<br />

• Facteurs génétiques (?), sexe (?)<br />

Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

THERAPEUTIQUE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

Si la demi-vie d’un médicament à élimination rénale = 2 h chez l’individu à fonction rénale normale (CC = 100 mL/min), elle sera de 6 h<br />

lorsque la CC = 33 mL/min et de 20 h lorsque la CC = 10 mL/min<br />

Pour un médicament dont la demi-vie > 6 h, on peut adapter la posologie en<br />

3 les doses avec un coefficient de réduction = CC calculée / CC normale<br />

3 l’intervalle des prises dans la même proportion<br />

Dans tous les cas, dose initiale = dose normale pour parvenir à un pic plasmatique immédiatement efficace (ATB+++)<br />

Cas particulier, dans le cadre de la grippe A (H1N1) : adaptation posologique du Tamiflu® dans l’IRC (hors patient dialysé)<br />

DFGe TTT (5 j) Prophylaxie (10 j)<br />

> 30 mL/min 75 mg x 2/j 75 mg x 1/j<br />

15-30 mL/min 75 mg x 1/j 75 mg tous les 2 j<br />

> 15 mL/min (non dialysé) 75 mg en 1 fois 30 mg / semaine (2 doses)<br />

(*) Parmi les facteurs modifiables pouvant faire l’objet d’un impact thérapeutique, les plus importants sont l’hypertension artérielle<br />

et la protéinurie<br />

D’après : NEPHROHUS > Progression de l’insuffisance rénale chronique et son traitement : http://www.nephrohus.org/s/spip.<br />

php?article141<br />

u 1. Nephro 2008 : néphrotoxicité des médicaments. http://www.nephrohus.org/s/spip.php?article154 u 2. Pharmacocinétique des médicaments dans l’IRC.<br />

http://www.nephrohus.org/s/spip.php?article19 u 3. Inhibiteurs du SRA dans l’IRC 2007. http://www.nephrohus.org/s/spip.php?article352<br />

Mise à jour décembre 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prévention de l’insuffisance rénale chronique (IRC)<br />

Dépistage et suivi des patients au stade de maladie rénale chronique et d’IRC légère<br />

Eléments de diagnostic d’une maladie rénale<br />

• DFG (débit de filtration glomérulaire) se calcule par 2 méthodes<br />

3 Cockcroft et Gault rapporté à 1.73 m 2 de surface corporelle (cf verso)<br />

3 MDRD plus performant après 75 ans et chez l’obèse (cf verso)<br />

• Marqueurs de maladie rénale<br />

3 microalbuminurie chez le diabétique > 30 mg/24 h ou > 20 μg/min ou rapport albuminurie/créatininurie > 2 mg/mmol<br />

3 protéinurie > 300 mg/24 h ou : rapport protéinurie/créatininurie > 200 mg/g<br />

3 hématurie ou leucocyturie > 20/mm 3<br />

3 anomalie morphologique à l’échographie rénale<br />

Stades d’IRC<br />

• Maladie rénale chronique (stade 1) : DFG > 90 ml/mn + un marqueur de maladie rénale<br />

• IRC légère (stade 2) : DFG entre 60 et 90 ml/mn + marqueur de maladie rénale<br />

• L’insuffisance rénale est dite chronique lorsqu’elle est présente depuis au moins 3 mois et est irréversible<br />

• Hygiène de vie, lutter contre l’obésité et arrêt du tabac<br />

• Expliquer les facteurs aggravants la maladie rénale et son évolution vers l’IRC<br />

COMMENT DEPISTER ET QUI DEPISTER ?<br />

• Créatininémie avec calcul du débit de filtration glomérulaire (DFG)<br />

3 chez tous les patients ayant une anomalie rénale<br />

3 chez tous les patients ayant un risque de maladie rénale : antécédents familiaux de néphropathie, diabète, hypertension<br />

artérielle, maladie athéromateuse, maladie systémique, insuffisance cardiaque, insuffisance hépatique, goutte, dysglobulinémie<br />

monoclonale, prise prolongée ou régulière de médicaments néphrotoxiques (lithium, AINS, IEC, ARAII, diurétiques, antalgiques…),<br />

exposition professionnelle néphrotoxique<br />

3 chez le sujet âgé (âge > 75 ans), avant la prescription de médicaments à élimination rénale<br />

3 devant des anomalies cliniques ou biologiques extrarénales : découverte d’une anémie normochrome, normocytaire arégénérative,<br />

troubles digestifs (anorexie, nausées, vomissements), anomalies du métabolisme phosphocalcique cliniques (douleurs osseuses, fractures,<br />

tassement) ou biologiques (hypocalcémie, hypercalcémie)<br />

• Protéinurie à la bandelette urinaire (BU)<br />

3 tous les 5 ans chez l’hypertendu<br />

3 tous les ans chez le diabétique (si BU négative, rechercher microalbuminurie)<br />

• Hématurie + protéinurie à pratiquer<br />

3 en présence d’œdèmes<br />

3 lors de la suspicion d’une gammapathie monoclonale<br />

3 dans le suivi des maladies inflammatoires chroniques<br />

3 lors de la découverte d’un DFG inferieur à 90 ml/min/1,73 m 2<br />

RECHERCHER LA CAUSE CLINIQUE ET/OU PARACLINIQUE (tenir compte du stade, de l’âge et de la vitesse de dégradation du DFG)<br />

• Clinique : recherche d’antécédents de néphropathie, uropathie, diabète, HTA, prise de médicaments néphrotoxiques…<br />

• Biologie : BU (hématurie, protéinurie, leucocyturie, nitrites), glycémie, électrophorèse des protéines sériques, protéinurie/24 h,<br />

cytologie urinaire<br />

• Imagerie : échographie rénale, vésicale et ASP<br />

AVIS NEPHROLOGIQUE pour finaliser le diagnostic et l’organisation conjointe du suivi<br />

• Prévenir l’aggravation par<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

UROLOGIE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

3 prise en charge des FRCV et des comorbidités : HTA (objectif : 130/80), dyslipidémie, tabagisme, diabète (contrôle et utilisation des IEC)<br />

3 éviter les produits néphrotoxiques (lithium, AINS…)<br />

• Surveiller l’évolution des marqueurs de la fonction rénale régulièrement<br />

• Adapter la surveillance à l’âge et à la vitesse de dégradation rénale<br />

• Collaborer avec le néphrologue pour optimiser la prise en charge<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prévention de l’insuffisance rénale chronique (IRC)<br />

Dépistage et suivi des patients au stade de maladie rénale chronique et d’IRC légère<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

UROLOGIE /<br />

NEPHROLOGIE<br />

Estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) par la formule de Cockcroft et Gault<br />

DFG (ml/min) = [(140-âge) x poids en kg/créatininémie en μmol/l] x k, avec k = 1,23 pour les hommes, 1,04 pour les femmes,<br />

âge en années<br />

Si la créatinine est exprimée en mg/l, il faut en multiplier le chiffre par 8,84 pour l’obtenir en μmol/l<br />

La performance de la formule de Cockcroft et Gault est inconnue chez l’obèse (IMC > 30 kg/m²) et peu évaluée chez le sujet âgé<br />

(âge > 75 ans). Il est donc nécessaire d’avoir des données complémentaires de mesure du DFG pour définir le seuil d’insuffisance rénale<br />

dans ces deux populations (accord professionnel)<br />

Mesure du débit de filtration glomérulaire par la formule MDRD simplifiée : en ml/mn/1,73 m²<br />

= 186.3 x créatininémie [mg/dlL - 1.154 x âge (ans) - 0.203 x (1.212 si race noire) x (0.742 si femme)]<br />

u 1. HAS : Guide ALD - Néphropathie chronique grave – actualisation juillet 2008. http://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_565906/ald-n19-nephropathie-chroniquegrave.<br />

u 2. ANAES : RCP : moyens thérapeutiques pour ralentir la progression de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte, septembre 2004. www.has-sante.fr/portail/<br />

jcms/c_268117/ralentissement-irc-synthese-des-recommandations<strong>pdf</strong> u 3. Afssaps : Traitement de l’anémie au cours de l’insuffisance rénale chronique de l’adulte - mai<br />

2005. afssaps.sante.fr/<strong>pdf</strong>/5/rbp/anereco.<strong>pdf</strong> u 4. REIN, rapport annuel 2002, réseau épidémiologique et information en néphrologie, registre français des traitements<br />

de suppléance de l’insuffisance rénale chronique - Etablissement Français des Greffes. http://www.soc-nephrologie.org/PDF/enephro/registres/rapport_2002/ u 5. BEH<br />

37/38 2005 numéro thématique : l’insuffisance rénale chronique : www.invs.santé.fr u 6. ANAES : diagnostic de l’insuffisance rénale chronique chez l’adulte septembre<br />

2002 u 7. Prévention et dépistage de l’insuffisance rénale chronique, rapport de Michel BOUREL et Raymond ARDALLIOU de l’Académie de Médecine du 16/11/2004<br />

u 8. Inserm. Avis du Haut Comité de la santé publique. Avis sur la prévention de l’insuffisance rénale chronique et son diagnostic précoce – 2004. http://ist.inserm.<br />

fr/basisrapports/insuffren/Annexe.<strong>pdf</strong> u 9. Revue du praticien monographie : insuffisance rénale chronique 2005, 55, n°20 u 10. Afssaps : Prise des médicaments<br />

chez les personnes âgées 4 juillet 2005. http://afssaps.sante.fr/var/afssaps_site/storage/original/application/b95f8cccbd18d654edfd325defa09907.<strong>pdf</strong> u 11. Afssaps :<br />

Thésaurus des Interaction médicamenteuses – mise à jour juillet 2008. http://www.afssaps.fr/Dossiers-thematiques/Interactions-medicamenteuses/Interactionsmedicamenteuses/(offset)/0<br />

u 12. HAS : Indications et non-indications de la dialyse péritonéale chronique chez l’adulte. Consensus formalisé Recommandations<br />

Juin 2007. http://www.soc-nephrologie.org/PDF/enephro/recommandations/HAS/2008/DP_recommand.<strong>pdf</strong>


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prise en charge d’une colique néphrétique<br />

Douleur paroxystique, spontanée ou provoquée de la fosse lombaire irradiant vers les organes génitaux externes<br />

BIOLOGIE<br />

• Bandelette urinaire (BU) au lit du malade : hématurie + pH (si pH < 5.5 : lithiase urique probable)<br />

• ECBU si fièvre ou BU+<br />

• Bilan pré-opératoire + CRP et hémocultures si fièvre<br />

IMAGERIE<br />

• ASP face + échographie appareil urinaire<br />

• TDM sans injection : si pas de calcul vu sur imagerie initiale ou complication<br />

3 lithiase radiotransparente avec pH acide = lithiase d’acide urique => enquête étiologique : antécédents de goutte,<br />

médicament favorisant (aspirine++), ATCD médicaux (chimio, syndrome myéloprolifératif), apport alimentaire en purines.<br />

Biologie : uricémie, uraturie, pH urinaire, urée et créatinine sériques, NFS, électrophorèse des protides<br />

3 lithiase radio-opaque = oxalate et/ou phosphate de calcium => biologie : oxalurie, calcémie, phosphorémie, calciurie,<br />

phosphaturie, uraturie des 24 h<br />

• TDM avec injection: si TDM sans injection non contributive<br />

3 UIV et ASP isolé ne sont pas indiqués<br />

• Cas particuliers<br />

3 femme enceinte : échographie<br />

3 insuffisant rénal : TDM sans injection > ASP + écho graphie<br />

QUAND HOSPITALISER ?<br />

• Crise hyperalgique résistant au traitement médical<br />

• Syndrome septique<br />

• Anurie ou insuffisance rénale aiguë biologique<br />

• Terrain particulier (ex : grossesse)<br />

A SURVEILLER AVEC ATTENTION<br />

• Obstacle avec dilatation des CPU (attention si > 20 mm)<br />

• Urinome à l’échographie (un petit se résorbe, un gros se draine)<br />

• Pathologie urologique connue (ex : rein unique)<br />

Recommandations au patient<br />

• Poursuivre le traitement comme prescrit. Ne pas modifier les doses sans avis médical<br />

• Tamiser les urines au travers d’un filtre à café, apporter tous les calculs à la prochaine consultation<br />

• Boire normalement en répartissant les prises au cours de la journée. Manger normalement<br />

• Mesurer sa température tous les matins<br />

• Consulter en urgence en cas de<br />

3 fièvre ≥ 38°C<br />

3 frissons<br />

3 vomissements<br />

3 réapparition ou modification de la douleur<br />

3 malaise<br />

3 urines rouges<br />

3 pas d’urine pendant 24 h<br />

• Faire les examens prescrits et apporter les résultats à la consultation<br />

• Attention : la disparition de la douleur ne signifie pas guérison. Il faut faire les examens et consulter comme prévu dans<br />

tous les cas<br />

PRISE EN CHARGE INITIALE<br />

Antalgie précoce et rapidement efficace<br />

• Utiliser préférentiellement la voie veineuse<br />

• Sauf CI : AINS<br />

3 à domicile: diclofénac IM 75 mg x 1/j pendant 2 j au maximum ou kétoprofène<br />

3 à l’hôpital : kétoprofène 100 mg en 20 min x 3/j pendant 2 j au max<br />

• Si douleur faible à modérée : propacétamol IV en association avec l’AINS<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent le consensus professionnel.<br />

UROLOGIE<br />

CONSENSUS<br />

PROFESSIONNEL<br />

CONSENSUS


Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Prise en charge d’une colique néphrétique<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

UROLOGIE<br />

• Si douleur majeure d’emblée : antalgique morphinique en association avec l’AINS : chlorhydrate de morphine en titration IV à la<br />

dose initiale de 0,1 mg/kg toutes les 4 h (demi-dose chez le sujet âgé)<br />

• Si résistance à AINS + morphine, vérifier que les doses prescrites = les doses conseillées<br />

• Si douleur intense et contre-indication à l’AINS : antalgique morphinique d’emblée<br />

• Ne pas interrompre le traitement au cours du nycthémère<br />

• Ne pas associer deux AINS<br />

• Attention : pas de restriction hydrique<br />

Alphabloquants (favorisent la migration calculeuse) : térasozine en prise unique le soir au coucher pendant 10 j (titration commençant par<br />

1cp à 1 mg et finissant à 5 cp à 1 mg)<br />

Antibiotiques si fièvre après prélèvements (C3G ou FQ + aminosides)<br />

Femme enceinte<br />

• AINS non recommandés voire formellement contre-indiqués pendant le 3 ème trimestre<br />

• Paracétamol non contre-indiqué, efficacité mal documentée<br />

• Morphine non contre-indiquée en dehors du travail<br />

Insuffisant rénal<br />

• AINS contre-indiqués, paracétamol et/ou morphine à poso. adaptées à l’insuffisance rénale<br />

COLIQUE NÉPHRÉTIQUE FÉBRILE > 38°C<br />

• Hospitalisation en urgence pour prélèvements bactério (sang + urines) + antibiothérapie probabiliste + dérivation urinaire (au bloc<br />

opératoire) par sonde urétérale par voie endoscopique rétrograde ou néphrostomie percutanée par voie antérograde<br />

• Calcul le plus souvent traité à distance de l’urgence<br />

• Consultation à J8 avec tous les résultats (biologie+ ASP et écho)<br />

• Après élimination du calcul : bilan phosphocalcique sanguin (phosphatémie, calcémie, uricémie, créatinémie) et urinaire (pH,<br />

densité, calciurie, uraturie, phosphaturie, oxalurie des 24 h à deux reprises)<br />

• Traitement urologique spécifique (cf fiche lithiase urinaire)<br />

u 1. 8e Conférence de consensus de la Société Francophone d’Urgences Médicales « Prise en charge des coliques néphrétiques de l’adulte dans les services d’accueil<br />

et d’urgences » 1999. http://www.sfmu.org/documents/consensus/cc_cna_court.<strong>pdf</strong> u 2. Recommandations de prise en charge des urgences urologiques – service<br />

d’urologie du CHU de Rouen – 2006. http://www3.chu-rouen.fr/NR/rdonlyres/3CA40134-87AC-4A6F-B3B1-50E385E6CFA7/0/urgences_urologiques.<strong>pdf</strong><br />

Mise à jour juin 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Pyélonéphrite aiguë – Nourrisson et enfant<br />

TABLEAU TYPIQUE<br />

• Cystite + fièvre élevée (> 39°C) + douleurs lombaires et/ou abdominales = ECBU d’emblée<br />

3 culture bactérienne ≤ 103 UFC/mL = excellente valeur prédictive négative<br />

3 culture bactérienne ≤ 103 > 104 UFC/mL à interpréter avec prudence : tenir compte du tableau clinique, leucocyturie<br />

(absence de pyurie = diagnostic improbable), nombre et nature des espèces isolées<br />

3 nourrisson, enfant trop jeune pour uriner sur commande : renouveler le prélèvement en conditions rigoureuses<br />

ou par cathétérisme ou ponction avant antibiothérapie<br />

TABLEAU NON SPECIFIQUE DU NOUVEAU-NE ET DU NOURRISSON<br />

• BU / ECBU systématiques devant une fièvre inexpliquée<br />

• Une BU négative (leucocytes et nitrites) élimine le diagnostic d’IU sauf chez le nourrisson fébrile < 3 mois<br />

• ECBU seulement si persistance des symptômes<br />

TABLEAU TROMPEUR<br />

• Troubles digestifs, altération de l’état général<br />

A savoir<br />

• FR : âge (< 3 mois : bactériémie), uropathie sous-jacente, immunodépression<br />

• Facteurs de sévérité : syndrome septique marqué, signes de déshydratation<br />

• Rappeler aux parents les principes de l’antalgie auto-contrôlée<br />

3 à dose suffisante<br />

3 à heure fixe, sans attendre la réapparition de la douleur<br />

3 en tenant un agenda de la douleur (échelle d’évaluation adaptée à l’âge de l’enfant)<br />

• Rappeler la nécessité de respecter la durée de prescription des ATB<br />

• Immédiat si : certitude du diagnostic, syndrome septique, uropathie connue, immunodépression ou nourrisson < 3 mois<br />

• Sinon : différer le TTT (quelques heures) afin d’établir le diagnostic<br />

• Durée totale : 10 à 14 j<br />

PREMIERE INTENTION (2 à 4 j, avant résultat de l’antibiogramme)<br />

• Ceftriaxone (IV ou IM, patient hospitalisé ou ambulatoire) : 50 mg/kg 1/j en 1 sans dépasser 1 g/j ou céfotaxime (IV, uniquement<br />

si hospitalisé) : 100 mg/kg/j en 3 ou 4 IV sans dépasser 4 g/j<br />

• Aminosides (gentamicine : 3 mg/kg/j en IV ou IM unique) utilisés en TTT d’attaque : en association aux C3G injectables<br />

si pyélonéphrite sévère (enfant < 3 mois, uropathie malformative connue, syndrome septicémique, immunodéprimé)<br />

ou en monothérapie (allergie aux bêta-lactamines et fonction rénale normale) ou en association à l’amoxicilline (100 mg/kg/j<br />

en 3-4 injections sans dépasser 4 g/j) si infection à entérocoques<br />

PUIS EN FONCTION DE L’ANTIBIOGRAMME<br />

• Cotrimoxazole : 30 mg/kg/j de sulfaméthoxazole + 6 mg/kg/j de triméthoprime en 2 prises (contre-indiqué avant l’âge d’1 mois)<br />

ou céfixime : 8 mg/kg/j en 2 prises (AMM à partir de 6 mois)<br />

EN CAS DE RESISTANCE aux autres familles d’antibiotiques<br />

• Enfant prépubère : ciprofloxacine<br />

• Adolescent pubère : fluoroquinolones<br />

• Hospitalisation : enfant < 3 mois ou apparition de signes cliniques d’infection sévère<br />

• ECBU de contrôle : inutile pendant et à l’arrêt du TTT sauf évolution clinique inhabituelle ou bactérie résistante au TTT<br />

antibiotique initial<br />

• Anomalie fonctionnelle ou anatomique des voies urinaires : recherche systématique (reflux vésico-urétéro-rénal+++)<br />

• Surveillance et réévaluation à 48-72 h après le début du TTT : vérifier l’évolution clinique et la sensibilité de la bactérie<br />

au TTT initial et au TTT de relais<br />

• Antibioprophylaxie dans les infections urinaires récidivantes<br />

3 pas de consensus sur l’intérêt et la durée de l’antibioprophylaxie de l’IU chez l’enfant<br />

3 cotrimoxazole (pas d’AMM, contre-indiqué avant 1 mois) : triméthoprime 1 à 2 mg/kg/j + sulfaméthoxazole 5 à 10 mg/kg/j<br />

ou nitrofurantoïne : 1 à 2 mg/kg/j en 1 prise au moment du pic de concentration osmolaire des urines (matin jusqu’à 2 ans,<br />

soir ensuite), en continu pendant plusieurs mois<br />

3 avec ou sans antibioprophylaxie, la prise en charge des IU récidivantes doit s’accompagner<br />

➣ d’un meilleur dépistage et TTT des FR d’infection<br />

➣ d’une hygiène périnéale adaptée<br />

➣ d’une vigilance accrue pour permettre un diagnostic précoce des pyélonéphrites aiguës<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

PEDIATRIE /<br />

UROLOGIE<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Pyélonéphrite aiguë – Nourrisson et enfant<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

PEDIATRIE /<br />

UROLOGIE<br />

u 1. Recommandations de bonne pratique - Diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires du nourrisson et de l’enfant 2007 :<br />

http://www.afssaps.fr/Infos-de-securite/Recommandations-de-bonne-pratique/Diagnostic-et-antibiotherapie-des-infections-urinaires-bacteriennes-communautairesdu-nourisson-et-de-l-enfant/(language)/fre-FR<br />

Mise à jour novembre 2009


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Pyélonéphrite aiguë de l’adulte (PNA)<br />

CLINIQUE<br />

• Signes urinaires : brûlures mictionnelles, pollakiurie, pyurie, hématurie<br />

3 douleur lombaire unilatérale, spontanée ou à la palpation, irradiant →pubis et organes génitaux externes<br />

3 fièvre<br />

• Troubles digestifs pouvant égarer le diagnostic : douleurs abdominales, vomissements, diarrhées<br />

• Syndrome infectieux isolé : fièvre > 38,5°C + frissons (bactériémie)<br />

EXAMENS RECOMMANDES<br />

• PNA simple : BU, ECBU et dans les 24 h, échographie systématique des voies urinaires<br />

• PNA compliquée : BU, ECBU et uro-TDM ou échographie des voies urinaires si contre-indication à l’uro-TDM, en urgence<br />

• Expliquer les principes de l’antalgie autocontrôlée<br />

3 à dose suffisante<br />

3 à heure fixe, sans attendre la réapparition de la douleur<br />

3 en tenant un agenda de la douleur (échelle EVA)<br />

• Expliquer la nécessité de respecter la durée des ATB<br />

1. PNA SIMPLE<br />

• TTT probabiliste :<br />

3 C3G : ceftriaxone (IV/IM/sous-cutanée) ou céfotaxime (IV/IM) ou FQ : ciprofloxacine, lévofloxacine, ofloxacine (PO ou IV si voie<br />

orale impossible)<br />

3 toute prise de quinolone < 6 mois (quel qu’en ait été le motif) = limite à l’utilisation des FQ<br />

3 sepsis grave : hospitalisation + ajout d’un aminoside (gentamicine, nétilmicine, tobramycine 1 à 3 j)<br />

3 situations conduisant à l’hospitalisation<br />

➣ signes de gravité (mauvaise tolérance du sepsis…)<br />

➣ forme hyperalgique<br />

➣ doute diagnostique<br />

➣ impossibilité de réaliser le bilan (ECBU, échographie) en ambulatoire<br />

➣ vomissements rendant impossible un TTT par voie orale<br />

➣ conditions socio-économiques médiocres<br />

➣ doute concernant l’observance du TTT<br />

• Relais par voie orale selon l’antibiogramme :<br />

3 amoxicilline ou amoxicilline-acide clavulanique ou céfixime<br />

3 ou fluoroquinolone (ciprofloxacine, lévofloxacine, ofloxacine)<br />

3 ou sulfaméthoxazole-triméthoprime<br />

• Durée de TTT si évolution favorable : 10-14 j sauf pour FQ (7 j)<br />

2. PNA COMPLIQUEE (cf tableau 1 au verso)<br />

• TTT probabiliste<br />

3 idem PNA simple<br />

3 forme grave (pyélonéphrite sur obstacle, sepsis grave, choc septique...) : hospitalisation indispensable + ajout d’un aminoside<br />

(gentamicine ou nétilmicine ou tobramycine) pendant 1 à 3 j<br />

• Relais par voie orale après obtention de l’antibiogramme : idem PNA simple<br />

• Durée de TTT : 10-14 à 21 j ou plus selon situation clinique<br />

1. PNA SIMPLE<br />

• Suivi clinique<br />

• ECBU de contrôle systématique inutile pendant et après TTT<br />

• Si évolution défavorable sous TTT (persistance de la fièvre > 72 h) : ECBU de contrôle avec antibiogramme + uro-TDM<br />

(sauf contre-indication)<br />

2. PNA COMPLIQUEE<br />

• Suivi clinique et biologique avec ECBU systématique pendant le TTT (à 48-72 h) et 4-6 semaines après la fin du TTT<br />

(risque d’échec notamment en cas d’obstacle, de lithiase…)<br />

• Prise en charge urologique si PNA sur obstacle ayant justifié drainage ou dérivation en urgence<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

UROLOGIE<br />

INFECTIOLOGIE<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Pyélonéphrite aiguë de l’adulte (PNA)<br />

Tableau 1 : Pyélonéphrite compliquée 2<br />

Une pyélonéphrite est compliquée ou plus précisément à risque de complication selon<br />

Le terrain Récidive chez une femme jeune<br />

Femme âgée : augmentation proportion PNA secondaires<br />

Homme : PNA rarement primitive (uropathie, prostatite)<br />

Les FR favorisant la colonisation Cathéter, geste endoscopique (rétrograde)<br />

Résidu post mictionnel > 100 ml<br />

Uropathie obstructive (+++)<br />

Reflux vésico-rénal, calcul<br />

Pathologie du parenchyme rénal (polykystose, IRC...)<br />

Interposition d'une anse digestive<br />

Les FR majorant la conséquence de la bactériurie Troubles vésico-sphinctériens<br />

Diabète, éthylisme, immunosuppression<br />

Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

UROLOGIE<br />

INFECTIOLOGIE<br />

u 1. Recommandations de bonne pratique - diagnostic et antibiothérapie des infections urinaires bactériennes communautaires chez l’adulte 2008 : http://www.afssaps.fr/content/download/8252/85655/version/1/file/reco-antibiotherapie-infections-urinaire-adulte.<strong>pdf</strong><br />

u 2. «L’uro-logique», Pr F. Guillé UFR de Médecine, Université<br />

de Rennes I, 2000 : http://www.med.univ-rennes1.fr/etud/uro/pyelonephrite_aigue.html#_Toc468939701<br />

Mise à jour septembre 2009


ECOULEMENT URETRAL<br />

• Purulent, muco-purulent ou séreux chez l’homme ; cervicite chez la femme<br />

• Prurit canalaire, brûlures mictionnelles, dysurie, pollakiurie<br />

• Apyrexie<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Urétrite et cervicites aiguës purulentes<br />

• Recherche de complications prostatite / orchi-épididymite<br />

3 salpingite, endométrite (discuter l’échographie)<br />

IMPUTABILITE MICROBIENNE<br />

• N. gonorrhoeae : incubation < 5 j, urétrite aiguë, écoulement important, purulent<br />

• C. trachomatis : incubation 10 à 15 j, urétrite subaiguë (50-80 % asymptomatique), écoulement clair<br />

Association fréquente (20-30 %)<br />

PRELEVEMENT<br />

Examen direct + culture + antibiogramme<br />

• N. gonorrhoeae : écouvillonnage (écouvillon avec milieu de transport) : chez l’homme : endo-urétral ; chez la femme : urétral et<br />

cervico-vaginal ; chez l’homosexuel : prélèvements anal et pharyngé systématiques<br />

• C. trachomatis : biologie moléculaire (PCR) sur premier jet d’urine 2 h après la dernière miction (sensibilité = 90 %, spécificité = 90 %)<br />

Recherche d’infections associées : syphilis / VIH / condylomes / herpès / hépatite B<br />

Probabiliste : anti-gonococcique + anti-chlamydiae immédiatement après le prélèvement<br />

ANTI-GONOCOCCIQUE<br />

• 1ère intention : ceftriaxone 500 mg monodose IV ou IM<br />

La diminution de sensibilité du gonocoque contre-indique la dose de 250 mg<br />

• 2ème intention (si refus ou impossibilité de TTT parentéral) : céfixime 400 mg monodose per os<br />

• Spectinomycine : 2 g monodose IM si contre-indication aux bêta-lactamines<br />

Ciprofloxacine : haut niveau de résistance des fluoroquinolones<br />

ANTI-CHLAMYDIAE<br />

• Azithromycine (1 g en monodose)<br />

• Ou doxycycline (200 mg/j en deux prises per os pendant 7 j)<br />

• Abstinence sexuelle jusqu’à J7 après le début du TTT<br />

• Information/prévention risque VIH, hépatite B, réinfections, stérilité chez la femme, préservatif masculin et féminin<br />

• Concerne : patient + le ou les partenaire(s) récent(s) et/ou habituel(s) (jusqu’à 2 mois précédant le diagnostic)<br />

• Consultations de suivi<br />

3 à J3 si les symptômes persistent (adapter le TTT selon antibiogramme)<br />

3 à J7 systématiquement (guérison clinique, contrôle microbiologique si besoin)<br />

• En cas de récidive<br />

3 le TTT initial était-il adapté à l’antibiogramme ?<br />

3 a-t-il bien été pris ?<br />

3 réinfection par un partenaire non traité ou nouveau ?<br />

3 recherche d’un foyer pharyngé et anal<br />

L’origine majoritaire des recommandations mentionnées dans cette fiche suivent les recommandations françaises.<br />

INFECTIOLOGIE /<br />

UROLOGIE<br />

RECOMMANDATIONS<br />

FRANÇAISES<br />

RECOMMANDATIONS


Références :<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

Urétrite et cervicites aiguës purulentes<br />

FICHES D’AIDE À LA CONSULTATION PREUVES & PRATIQUES<br />

INFECTIOLOGIE /<br />

UROLOGIE<br />

u 1. Observatoire des Médicaments, des Dispositifs Médicaux et des Innovations Thérapeutiques – Région Centre - Omédit – 2007 : http://www.omedit-centre.fr/fichiers/<br />

upload/Uretrite%20aigue%20conduite%20a%20tenir.<strong>pdf</strong> u 2. Afssaps - Mise au point sur le traitement antibiotique probabiliste des urétrites et cervicites non compliquées<br />

(27/03/2009) : http://www.afssaps.fr/Infos-de-securite/Mises-au-point/Traitement-antibiotique-probabiliste-des-uretrites-et-cervicites-non-compliquees/(language)/fre-FR<br />

Mise à jour octobre 2009


Autoévaluation<br />

Anatomie des reins et de la voie excrétrice supérieure<br />

Questions<br />

1/ Concernant la morphologie interne des reins, quelles sont les propositions exactes ?<br />

A - les pyramides de Malpighi sont des éléments du cortex<br />

B - les pyramides rénales contiennent des tubules rénaux droits et des tubes collecteurs<br />

C - le sommet des pyramides forme les papilles rénales<br />

D - le cortex rénal est la zone de la filtration glomérulaire<br />

E - les corpuscules rénaux se trouvent dans la médullaire<br />

2/ Concernant la microanatomie du rein, quelles sont les réponses exactes ?<br />

A - le nombre de néphrons est d’environ un million<br />

B - le corpuscule rénal comprend les tubes<br />

C - l’anse de Henlé poursuit le tube contourné proximal<br />

D - le tube contourné distal fait partie du tube collecteur<br />

E - le corpuscule rénal est constitué de façon exclusive par le glomérule<br />

3/ Quelles sont les caractéristiques de la vascularisation intrarénale ?<br />

A - les artères arquées se situent à la base des pyramides rénales<br />

B - le diamètre de l’artériole efférente est plus grand que celui de l’artériole afférente<br />

C - l’artériole efférente donne naissance à un plexus capillaire cortical<br />

D - les vasa recta prennent naissance des artères glomérulaires afférentes<br />

E - la différence de diamètre entre les artérioles efférentes et afférentes intervient dans le maintien<br />

de la pression intraglomérulaire<br />

4/ Quelles sont les caractéristiques de la morphologie externe des reins ?<br />

A - la hauteur des reins est proportionnelle à la taille de l’individu<br />

B - les deux reins sont de dimensions équivalentes<br />

C - le hile rénal contient les éléments du pédicule<br />

D - la surface des reins est en général polylobulée chez l’adulte<br />

E - en moyenne le poids des reins est inférieur chez la femme<br />

5/ Concernant les voies excrétrices, quelles sont les réponses exactes ?<br />

A - le diamètre de l’uretère varie entre 1 et 3 centimètres<br />

1


B - le fornix est un élément de continuité entre la capsule du sinus rénal et de l’adventice de la voie<br />

excrétrice supérieure<br />

C - le nombre de calices majeurs varie entre cinq et dix<br />

D - les voies excrétrices sont divisées en une partie intrarénale et une partie extrarénale constituée<br />

de l’uretère<br />

E - les méats urétéraux sont situés aux extrémités latérales du trigone vésical<br />

2


Autoévaluation<br />

Anatomie des reins et de la voie excrétrice supérieure<br />

Réponses<br />

1/ Concernant la morphologie interne des reins, quelles sont les propositions exactes ?<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

2/ Concernant la microanatomie du rein, quelles sont les réponses exactes ?<br />

Les réponses sont : A, C<br />

3/ Quelles sont les caractéristiques de la vascularisation intrarénale ?<br />

Les réponses sont : A, C, E<br />

4/ Quelles sont les caractéristiques de la morphologie externe des reins ?<br />

Les réponses sont : A, C, E<br />

5/ Concernant les voies excrétrices, quelles sont les réponses exactes ?<br />

Les réponses sont : B, D, E


Autéovaluation<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Questions<br />

1/ Parmi les affirmations suivantes concernant le CaSR, lesquelles sont exactes ?<br />

A - l’inhibition du CaSR induit une dégradation de la PTH<br />

B - les mutations inactivatrices du gène du CaSR induisent une hypercalcémie et une hypocalciurie<br />

C - l’élévation de la calcémie ionisée inhibe le CaSR<br />

D - dans le rein, le CaSR est exprimé principalement au pôle apical des cellules de la branche<br />

ascendante large de Henle<br />

E - les mutations activatrices du gène du CaSR peuvent s’accompagner d’une perte rénale de sel<br />

2/ Parmi les affirmations concernant la vitamine D, deux sont exactes. Lesquelles ?<br />

A - pour évaluer le statut en vitamine D, il faut doser la calcitriolémie<br />

B - les valeurs de référence pour le statut en vitamine D doivent être établies chez des sujets<br />

apparemment en bonne santé<br />

C - une insuffisance en vitamine D peut avoir pour conséquence une hyperparathyroïdie secondaire<br />

D - sous l’effet des UVB, le 7-déhydrcholestérol est transformé dans la peau en vitamine D2<br />

E - les kits de dosage de la 25OHD ne reconnaissent pas tous la 25OH-vitamineD2<br />

3/ Parmi les affirmations suivantes concernant la PTH, lesquelles sont fausses ?<br />

A - la PTH stimule la réabsorption rénale du calcium<br />

B - dans l’hyperparathyroïdie primaire, il existe souvent une hypocalciurie<br />

C - la PTH stimule la résorption osseuse par l’intermédiaire de son récepteur PTH1R ostéoclastique<br />

D - l’expression membranaire apicale des cotransporteurs sodium/phosphate est stimulée par la<br />

PTH<br />

E - les dosages de PTH « intacte » reconnaissent une famille de fragments proches de la PTH 7-84<br />

4/ Parmi les affirmations suivantes concernant le FGF23, lesquelles sont vraies ?<br />

A - le FGF23 stimule l’activité 1--hydroxylase rénale<br />

B - les études récentes montrent que le FGF23 stimule la sécrétion de PTH<br />

C - le FGF23 est une hormone essentiellement hypophosphatémiante<br />

D - l’activité 24-hydroxylase rénale est stimulée par le FGF23<br />

E - les mutations inactivatrices du FGF23 sont responsables de calcinose tumorale familiale<br />

1


5/ Parmi les affirmations suivantes concernant l’homéostasie calcique, lesquelles sont<br />

exactes ?<br />

A - la calcémie totale est régulée par la PTH<br />

B - l’augmentation du pH sanguin fait baisser la calcémie ionisée<br />

C - un régime pauvre en sodium contribue à diminuer la calciurie<br />

D - la majeure partie du calcium filtrée est réabsorbée dans la branche ascendante large de Henle<br />

par voie transcellulaire du fait d’une électronégativité luminale<br />

E - l’augmentation du volume extracellulaire augmente la réabsorption tubulaire proximale du<br />

calcium<br />

2


Autéovaluation<br />

Équilibre phosphocalcique : régulation et explorations<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les affirmations suivantes concernant le CaSR, lesquelles sont exactes ?<br />

Les réponses sont : B, E<br />

2/ Parmi les affirmations concernant la vitamine D, deux sont exactes. Lesquelles ?<br />

Les réponses sont : C, E<br />

3/ Parmi les affirmations suivantes concernant la PTH, lesquelles sont fausses ?<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

4/ Parmi les affirmations suivantes concernant le FGF23, lesquelles sont vraies ?<br />

Les réponses sont : C, D, E<br />

5/ Parmi les affirmations suivantes concernant l’homéostasie calcique, lesquelles sont<br />

exactes ?<br />

Les réponses sont : B, C


Autoévaluation<br />

Imagerie par résonance magnétique du rein<br />

Questions<br />

1/ Quels sont le (ou les) examen(s) à proposer pour faire le diagnostic d’une masse<br />

kystique atypique en échographie, chez un patient à fonction rénale normale ?<br />

A - UIV<br />

B - TDM<br />

C - IRM sans injection<br />

D - IRM sans et avec injection<br />

E - échographie de contraste<br />

2/ Quels sont le (ou les) examen(s) à proposer pour faire le diagnostic d’une masse<br />

kystique atypique en échographie, chez un patient avec une clairance de créatinine à<br />

25 mg/ml ?<br />

A - UIV<br />

B - TDM<br />

C - IRM sans injection<br />

D - IRM sans et avec injection<br />

E - échographie de contraste<br />

3/ Parmi les propositions concernant l’IRM pour le diagnostic de sténose de l’artère<br />

rénale, laquelle est exacte ?<br />

A - elle est performante sans injection de produit de contraste<br />

B - elle n’est pas sensible pour une sténose serrée<br />

C - elle analyse bien la paroi et les calcifications pariétales<br />

D - elle est fiable concernant l’estimation du degré de sténose<br />

E - elle nécessite une bonne coopération du patient<br />

4/ Parmi ces propositions concernant l’uro-IRM sans injection de produit de contraste,<br />

laquelle est exacte ?<br />

A - elle visualise toujours les collections liquidiennes<br />

B - elle ne permet qu’une approche morphologique<br />

C - elle nécessite une fonction rénale normale<br />

D - elle détecte toujours le niveau d’obstacle en cas de dilatation<br />

E - elle n’est pas applicable chez la femme enceinte


Autoévaluation<br />

Imagerie par résonance magnétique du rein<br />

Réponses<br />

1/ Quels sont le (ou les) examen(s) à proposer pour faire le diagnostic d’une masse<br />

kystique atypique en échographie, chez un patient à fonction rénale normale ?<br />

Les réponses sont : D, E<br />

2/ Quels sont le (ou les) examen(s) à proposer pour faire le diagnostic d’une masse<br />

kystique atypique en échographie, chez un patient avec une clairance de créatinine à<br />

25 mg/ml ?<br />

La réponse est : E<br />

3/ Parmi les propositions concernant l’IRM pour le diagnostic de sténose de l’artère<br />

rénale, laquelle est exacte ?<br />

La réponse est : E<br />

4/ Parmi ces propositions concernant l’uro-IRM sans injection de produit de contraste,<br />

laquelle est exacte ?<br />

La réponse est : B


Autoévaluation<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

Questions<br />

1/ Dans quels cas peut-on parler de maladie rénale chronique (MRC) ?<br />

A - une hématurie et leucocyturie ancienne de plus de 2 ans et un DFG à 95 ml/min/1,73 m 2<br />

B - une protéinurie et un DFG à 95 ml/min/1,73 m 2 depuis 6 mois<br />

C - un DFG à 55 ml/min/1,73 m 2 depuis 3 mois sans autre perturbation<br />

D - des anomalies rénales à l’imagerie avec un DFG à 45 ml/min/1,73 m 2 depuis 1 mois<br />

2/ Concernant les stades d’insuffisance rénale selon la National Kidney Foundation,<br />

quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - un DFG à 50 ml/min/1,73 m 2 correspond à un stade 3<br />

B - un DFG à 30 ml/min/1,73 m 2 correspond à un stade 4<br />

C - un DFG à 10 ml/min/1,73 m 2 correspond à un stade 1<br />

D - un DFG à 60 ml/min/1,73 m 2 correspond à un stade 2<br />

E - un DFG à 80 ml/min/1,73 m 2 correspond à un stade 1<br />

3/ Quelles sont les deux principales causes d’insuffisance rénale terminale (IRTT) chez<br />

les patients débutant une dialyse en 2005 ?<br />

A - les glomérulonéphrites<br />

B - le diabète<br />

C - la polykystose rénale<br />

D - les cancers évolutifs<br />

E - l’hypertension artérielle<br />

4/ Parmi les propositions suivantes, quelles sont celles qui sont exactes ?<br />

A - l’incidence est le nombre de cas d’IRTT présents rapportés à la population à une date donnée<br />

B - l’incidence est plus faible à l’initiation du traitement de suppléance qu’au 3 e mois de traitement<br />

C - la prévalence des cas de dialyse est estimée à 3 300 patients en France au 31 décembre 2005<br />

D - l’incidence de l’IRTT est évaluée à 1 000 patients en 2005 en France<br />

E - aucune<br />

1


5/ Au sujet des traitements de suppléance de l’IRT, quelles sont les propositions<br />

exactes ?<br />

A - un traitement de suppléance est systématiquement proposé quand le DFG est inférieur à<br />

15 ml/min/1,73 m 2<br />

B - la dialyse péritonéale (DP) n’est proposée qu’en cas d’impossibilité des autres méthodes<br />

C - il est nécessaire d’adresser précocement les patients au néphrologue<br />

D - il est impossible de changer de méthode de traitement de suppléance<br />

2


Autoévaluation<br />

Épidémiologie de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse<br />

Réponses<br />

1/ Dans quels cas peut-on parler de maladie rénale chronique (MRC) ?<br />

Les réponses sont : A, B, C<br />

La réponse D est inexacte car un délai de 3 mois est nécessaire.<br />

2/ Concernant les stades d’insuffisance rénale selon la National Kidney Foundation,<br />

quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : A, D<br />

La réponse B correspond à un stade 3 ; la réponse C correspond à un stade 5 ; la réponse E<br />

correspond à un stade 2.<br />

3/ Quelles sont les deux principales causes d’insuffisance rénale terminale (IRTT) chez<br />

les patients débutant une dialyse en 2005 ?<br />

Les réponses sont : B, E<br />

4/ Parmi les propositions suivantes, quelles sont celles qui sont exactes ?<br />

La réponse est : E<br />

A : faux, car il s’agit de la définition de la prévalence.<br />

B : on décompte un nombre inférieur de nouveaux cas à J90 car certains patients ont pu décéder<br />

durant ces 3 premiers mois.<br />

C : on décompte en France, au 31 décembre 2005, 33 000 patients dialysés.<br />

D : l’incidence de l’IRTT est estimée à 8 400 patients en France en 2005.<br />

1


5/ Au sujet des traitements de suppléance de l’IRT, quelles sont les propositions<br />

exactes ?<br />

La réponse est : C<br />

A : quand le DFG est inférieur à 15 ml/min/1,73 m 2 , c’est le stade de prédialyse, de préparation au<br />

traitement de suppléance. Dans tous les cas, quand le DFG est égal ou inférieur à 10 ml/min/1,73 m 2 ,<br />

l’épuration extrarénale ou la transplantation rénale préemptive est initiée.<br />

B : la DP constitue un traitement de l’IRT à part entière et connaît peu de contre-indications.<br />

C : le recours tardif au néphrologue est source de retard à l’initiation du traitement de suppléance et<br />

de complications accrues.<br />

D : les techniques sont complémentaires et il est donc tout à fait possible de passer de l’une des<br />

méthodes à l’autre.<br />

2


Autoévaluation<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

Questions<br />

1/ La prévalence de l’hypertension dans la population mondiale (au-dessus de 20 ans) est<br />

de :<br />

A - 42 %<br />

B - 26 %<br />

C - 61 %<br />

D - 13 %<br />

2/ Quelles sont les propositions justes ? On qualifie de « préhypertendu » :<br />

A - un sujet encore « normotendu » mais dont les parents sont hypertendus<br />

B - un sujet à risque vasculaire élevé, chez lequel on peut s’attendre à l’apparition rapide d’une<br />

hypertension artérielle<br />

C - un sujet dont la pression artérielle se situe entre 120/80 mmHg et 140/90 mmHg<br />

D - un sujet dont la pression artérielle se situe entre 140/90 mmHg et 160/95 mmHg<br />

3/ Quelles sont les propositions justes ? On qualifie d’hypertension masquée :<br />

A - une hypertension observée en consultation, mais inapparente en automesure et MAPA<br />

B - une hypertension qui n’est détectable qu’en automesure et MAPA (normale en consultation)<br />

C - une hypertension qui ne peut être détectée que par des examens invasifs<br />

D - une hypertension qui n’apparaît que lors d’un stress particulier<br />

4/ La filtration glomérulaire chez un sujet jeune, normotendu, dont les parents sont<br />

hypertendus, est :<br />

A - normale<br />

B - abaissée<br />

C - augmentée<br />

5/ À partir de 50-60 ans, la PAS augmente régulièrement. La PAD, elle :<br />

A - diminue<br />

B - augmente de la même manière<br />

C - se stabilise<br />

1


6/ Quelles sont les propositions justes ? La microalbuminurie :<br />

A - est prédictive de l’insuffisance rénale chez tous les hypertendus<br />

B - est prédictive de la mortalité coronaire chez tous les hypertendus<br />

C - n’est prédictive d’une atteinte cardiaque ou rénale que chez les diabétiques<br />

7/ Quel (ou quels) examen(s) ne fait (font) pas partie de ceux nécessaires dans le premier<br />

bilan d’un hypertendu « standard » ?<br />

A - potassium<br />

B - bilan lipidique<br />

C - échographie cardiaque<br />

D - échographie rénale<br />

E - bandelette urinaire<br />

8/ Quelles sont les propositions justes ? L’hypertension artérielle résistante est une<br />

hypertension :<br />

A - non contrôlée par une bithérapie<br />

B - non contrôlée par une trithérapie comportant un diurétique à la dose maximale tolérée<br />

C - résistante aux IEC ou ARA<br />

9/ Dans une HTA résistante, on peut souvent obtenir un meilleur contrôle par l’ajout<br />

de :<br />

A - un bêtabloquant<br />

B - un antihypertenseur central<br />

C - un vasodilatateur (hydralazine…)<br />

D - spironolactone<br />

2


Autoévaluation<br />

Hypertension artérielle essentielle et rein<br />

Réponses<br />

1/ La prévalence de l’hypertension dans la population mondiale (au-dessus de 20 ans) est<br />

de :<br />

La réponse est : B<br />

2/ Quelles sont les propositions justes ? On qualifie de « préhypertendu » :<br />

La réponse est : C<br />

3/ Quelles sont les propositions justes ? On qualifie d’hypertension masquée :<br />

La réponse est : B<br />

4/ La filtration glomérulaire chez un sujet jeune, normotendu, dont les parents sont<br />

hypertendus, est :<br />

La réponse est : C<br />

5/ À partir de 50-60 ans, la PAS augmente régulièrement. La PAD, elle :<br />

La réponse est : A<br />

6/ Quelles sont les propositions justes ? La microalbuminurie :<br />

La réponse est : B<br />

7/ Quel (ou quels) examen(s) ne fait (font) pas partie de ceux nécessaires dans le premier<br />

bilan d’un hypertendu « standard » ?<br />

Les réponses sont : C, D<br />

8/ Quelles sont les propositions justes ? L’hypertension artérielle résistante est une<br />

hypertension :<br />

La réponse est : B<br />

9/ Dans une HTA résistante, on peut souvent obtenir un meilleur contrôle par l’ajout<br />

de :<br />

La réponse est : D


Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

Autoévaluation<br />

Questions<br />

1/ Concernant le syndrome œdématoascitique dans le syndrome néphrotique<br />

chez l’homme, quelle est la proposition exacte ?<br />

A - il est lié à une absorption accrue de sodium dans le tubule proximal<br />

B - il est associé à une hypovolémie<br />

C - il est associé à une déshydratation extracellulaire<br />

D - il est associé à une hyperhydratation intracellulaire<br />

E - il est parfois associé à une activation du système rénine/angiotensine/aldostérone<br />

2/ Concernant la prise en charge symptomatique du syndrome néphrotique,<br />

quelle est la proposition exacte ?<br />

A - elle nécessite un traitement par inhibiteur de l’enzyme de conversion<br />

B - une association d’un diurétique de l’anse et d’amiloride peut être proposée<br />

C - elle ne nécessite pas de limiter l’apport sodé<br />

D - elle nécessite la perfusion d’albumine<br />

3/ Quels sont les différents transporteurs de sodium impliqués dans la<br />

constitution du syndrome œdématoascitique ?<br />

A - le canal sodium épithélial (ENaC) situé dans l’anse de Henle<br />

B - la Na-K-ATPase qui est hyperactivée dans le néphron distal<br />

C - le cotransporteur Na-K-2C1 dans la branche large ascendante de l’anse de Henle<br />

D - le transporteur Na-C1 sensible aux thiazidiques<br />

E - la Na-K-ATPase présente au pôle basolatéral du tubule proximal<br />

4/ Concernant la constitution d’œdème dans le syndrome néphrotique chez<br />

l’homme, quelle est la proposition exacte ?<br />

A - elle est exclusivement due à une rétention rénale de sodium<br />

B - elle est exclusivement due à la perte urinaire de protéines et à l’hypoalbuminémie<br />

C - elle s’explique exclusivement par la diminution du gradient de pression oncotique à<br />

travers la paroi capillaire<br />

D - elle est secondaire à une hypertension artérielle<br />

E - elle est associée à une modification des propriétés de filtration de la paroi des<br />

capillaires<br />

1


5/ Concernant les patients néphritiques, quelle est la proposition exacte ?<br />

A - la rétention rénale de sodium est secondaire à l’activation du système rénineangiotensine-aldostérone<br />

B - on peut observer une hypervolémie<br />

C - l’hypertension artérielle est responsable de l’hyperfiltration capillaire<br />

D - une hypokaliémie secondaire à l’activation du système rénine-angiotensinealdostérone<br />

est souvent observée<br />

E - la restriction sodée ne présente pas d’intérêt thérapeutique<br />

2


Œdèmes généralisés d’origine rénale<br />

Autoévaluation<br />

Réponses<br />

1/ Concernant le syndrome œdématoascitique dans le syndrome néphrotique chez<br />

l’homme, quelle est la proposition exacte ?<br />

La réponse est : E<br />

2/ Concernant la prise en charge symptomatique du syndrome néphrotique, quelle est la<br />

proposition exacte ?<br />

La réponse est : B<br />

3/ Quels sont les différents transporteurs de sodium impliqués dans la constitution du<br />

syndrome œdématoascitique ?<br />

La réponse est : B<br />

4/ Concernant la constitution d’œdème dans le syndrome néphrotique chez l’homme,<br />

quelle est la proposition exacte ?<br />

La réponse est : E<br />

5/ Concernant les patients néphritiques, quelle est la proposition exacte ?<br />

La réponse est : B


Autoévaluation<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

Questions<br />

1/ Quel résultat de l’analyse de l’ECBU est en faveur d’une infection urinaire ?<br />

A - leucocyturie < 10 4 ml et bactériurie < 10 3 ml<br />

B - leucocyturie < 10 4 ml et bactériurie > 10 3 ml<br />

C - leucocyturie > 10 4 ml et bactériurie < 10 3 ml<br />

D - leucocyturie > 10 4 ml et bactériurie > 10 5 ml<br />

E - leucocyturie > 10 4 ml et bactériurie > 10 5 ml plusieurs espèces bactériennes<br />

2/ Quel est l’examen indispensable pour explorer une hématurie chez un homme de 68<br />

ans grand fumeur ?<br />

A - scanner du poumon<br />

B - biopsie rénale<br />

C - cystoscopie<br />

D - recherche de BAAR dans les urines 3 jours de suite<br />

E - échographie transrectale de la prostate<br />

3/ Quels éléments sont très en faveur d’une hématurie d’origine glomérulaire ?<br />

A - hématurie initiale<br />

B - association à des douleurs lombaires<br />

C - présence de cylindres hématiques<br />

D - albuminurie à 3 g par 24 h<br />

E - antécédents familiaux de maladie rénale et de surdité<br />

4/ Quels examens sont nécessaires si la bandelette est négative alors que la protéinurie<br />

est dosée à 1 g/j ?<br />

A - ECBU<br />

B - échographie rénale<br />

C - électrophorèse des protéines sanguines<br />

D - électrophorèse des protéines urinaires<br />

E - glycémie<br />

5/ Quelle est la première cause d’hématurie chez la femme ?<br />

A - cystite radique<br />

1


B - tumeur urothéliale<br />

C - néphropathie à IgA<br />

D - infection urinaire<br />

E - syndrome d’Alport<br />

2


Autoévaluation<br />

Sémiologie urinaire : protéinurie et anomalies du sédiment urinaire<br />

Réponses<br />

1/ Quel résultat de l’analyse de l’ECBU est en faveur d’une infection urinaire ?<br />

La réponse est : D<br />

2/ Quel est l’examen indispensable pour explorer une hématurie chez un homme de 68<br />

ans grand fumeur ?<br />

La réponse est : C<br />

3/ Quels éléments sont très en faveur d’une hématurie d’origine glomérulaire ?<br />

Les réponses sont : C, D, E<br />

4/ Quels examens sont nécessaires si la bandelette est négative alors que la protéinurie<br />

est dosée à 1 g/j ?<br />

Les réponses sont : C, D<br />

5/ Quelle est la première cause d’hématurie chez la femme ?<br />

La réponse est : D


Autoévaluation<br />

Équilibre potassique. Hypokaliémie et hyperkaliémie<br />

Questions<br />

1/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux qui augmentent l’excrétion urinaire de<br />

K + ?<br />

A - l’aldostérone<br />

B - la présence de HCO3 - dans le tube collecteur cortical<br />

C - l’alcalose métabolique<br />

D - l’acidose métabolique chronique<br />

E - l’hyperkaliémie<br />

2/ Quels éléments sont impliqués dans la sécrétion de K + par les cellules principales du<br />

tube collecteur cortical ?<br />

A - la différence de potentiel transépithéliale lumière positive<br />

B - l’ouverture du canal épithélial sodique<br />

C - la fermeture des canaux potassiques apicaux<br />

D - la Na + K + ATPase basolatérale<br />

E - le cotransport K + /Cl - luminal<br />

3/ Le gradient transtubulaire de K +<br />

A - représente la force de sécrétion du K + par le tube collecteur cortical<br />

B - diminue sous l’action de l’aldostérone<br />

C - s’élève avec le débit d’osmoles dans le tube collecteur cortical<br />

D - peut être calculé en cas d’urine hypotonique<br />

E - est élevé en cas de shunt au chlore<br />

4/ Le débit d’osmoles dans le tube collecteur cortical<br />

A - augmente en cas d’anabolisme protidique<br />

B - détermine le flux hydrique dans le tube collecteur cortical<br />

C - diminue en cas de déshydratation du secteur extracellulaire<br />

D - est d’environ 600 à 1 000 mosm/jour chez l’adulte avec une alimentation normale<br />

E - est bas chez le malade en insuffisance rénale chronique<br />

5/ Parmi les signes ECG suivants, lesquels s’observent en cas d’hyperkaliémie ?<br />

A - torsade de pointes<br />

1


B - allongement de PR<br />

C - élargissement de QRS<br />

D - fibrillation auriculaire<br />

E - bloc sino-auriculaire<br />

6/ Parmi les affections suivantes, quelles sont celles s’accompagnant d’une aldostérone<br />

plasmatique élevée ?<br />

A - intoxication à la réglisse (acide glycyrrhizique)<br />

B - adénome de Conn<br />

C - HTA sensible à la dexaméthasone<br />

D - syndrome de Liddle<br />

E - bloc enzymatique en 11-β-hydroxylase<br />

7/ Parmi ces éléments suivants, lesquels s’appliquent au syndrome de Gitelman ?<br />

A - il est souvent diagnostiqué en période néonatale<br />

B - l’hypomagnésémie est constante<br />

C - une chondrocalcinose articulaire est parfois observée<br />

D - une néphrocalcinose est fréquente<br />

E - le tableau ressemble à celui d’un malade sous furosémide<br />

8/ Quels sont les éléments qui s’appliquent aux vomissements ?<br />

A - l’hypokaliémie s’explique par les pertes digestives de K +<br />

B - la chlorurie est basse<br />

C - le TTKG est inférieur à 2<br />

D - l’excrétion urinaire de K + est < 15 mmol/jour<br />

E - la fuite sodée urinaire explique l’hyperaldostéronisme<br />

9/ Parmi les médicaments suivants, quels sont ceux pouvant donner une hyperkaliémie ?<br />

A - cyclosporine<br />

B - éplérénone<br />

C - acétazolamide<br />

D - cisplatine<br />

E - mannitol<br />

10/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux qui favorisent l’entrée de K + dans le<br />

compartiment cellulaire ?<br />

A - insuline<br />

2


B - alcalose métabolique<br />

C - hyperosmolalité du secteur extracellulaire<br />

D - bêtabloquant<br />

E - α-adrénergiques<br />

3


Autoévaluation<br />

Équilibre potassique. Hypokaliémie et hyperkaliémie<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux qui augmentent l’excrétion urinaire de<br />

K + ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, D, E<br />

2/ Quels éléments sont impliqués dans la sécrétion de K + par les cellules principales du<br />

tube collecteur cortical ?<br />

Les réponses sont : B, D, E<br />

3/ Le gradient transtubulaire de K +<br />

La réponse est : A<br />

4/ Le débit d’osmoles dans le tube collecteur cortical<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

5/ Parmi les signes ECG suivants, lesquels s’observent en cas d’hyperkaliémie ?<br />

Les réponses sont : B, C, E<br />

6/ Parmi les affections suivantes, quelles sont celles s’accompagnant d’une aldostérone<br />

plasmatique élevée ?<br />

Les réponses sont : B, C<br />

7/ Parmi ces éléments suivants, lesquels s’appliquent au syndrome de Gitelman ?<br />

Les réponses sont : B, C<br />

8/ Quels sont les éléments qui s’appliquent aux vomissements ?<br />

Les réponses sont : B, E<br />

9/ Parmi les médicaments suivants, quels sont ceux pouvant donner une hyperkaliémie ?<br />

Les réponses sont : A, B, D<br />

1


10/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux qui favorisent l’entrée de K + dans le<br />

compartiment cellulaire ?<br />

Les réponses sont : A, B<br />

2


1/ Quelles sont les réponses vraies ?<br />

Autoévaluations<br />

Désordres de la magnésémie<br />

Questions<br />

A - la magnésémie est un reflet imparfait de la déplétion en magnésium, car le magnésium circulant<br />

est majoritairement lié aux protéines<br />

B - la magnésémie est un reflet imparfait de la déplétion en magnésium, car le magnésium circulant<br />

ne représente que 1 % du pool de magnésium total<br />

C - la déplétion en magnésium est généralement associée à la déplétion proportionnelle en<br />

potassium<br />

D - la magnésurie permet d’évaluer la sévérité d’une déplétion en magnésium<br />

E - la magnésurie permet d’évaluer l’origine rénale ou extrarénale d’une déplétion en magnésium<br />

2/ L’absorption intestinale de magnésium en situation physiologique :<br />

A - résulte d’un flux bidirectionnel<br />

B - comporte un flux passif de sécrétion transcellulaire<br />

C - comporte un flux actif de sécrétion transcellulaire<br />

D - comporte un flux passif d’absorption transcellulaire<br />

E - comporte un flux actif d’absorption transcellulaire<br />

F - comporte un flux passif de sécrétion paracellulaire<br />

G - comporte un flux actif de sécrétion paracellulaire<br />

H - comporte un flux passif d’absorption paracellulaire<br />

I - comporte un flux actif d’absorption paracellulaire<br />

3/ TRPM6 :<br />

A - est un canal sélectif au magnésium exprimé au pôle apical des cellules de l’intestin grêle et<br />

large<br />

B - est un canal sélectif au magnésium exprimé au pôle basolatéral des cellules de l’intestin grêle et<br />

large<br />

C - est déficiente dans l’hypomagnésémie avec hypocalcémie secondaire<br />

D - est une étape limitante de la réabsorption tubulaire rénale distale de magnésium<br />

E - a une expression rénale diminuée par un traitement chronique par les inhibiteurs de la voie de<br />

l’EGF<br />

F - a une expression rénale diminuée par les mutations inactivatrices d’HNF1β<br />

G - a une expression rénale diminuée par un traitement chronique par les diurétiques de l’anse<br />

1


4/ En présence d’une hypomagnésémie :<br />

A - une magnésurie à 2,5 mmol/24 h ou une EF de magnésium supérieure à 2 % signent une origine<br />

rénale de l’hypomagnésémie<br />

B - une magnésurie à 0,5 mmol/24 h signe une origine digestive de l’hypomagnésémie<br />

C - une hypocalcémie peut apparaître liée à l’effet direct de l’hypomagnésémie sur le récepteur au<br />

calcium<br />

D - une hypocalcémie peut apparaître par résistance aux effets de la parathormone et du calcitriol<br />

E - une hypocalcémie peut apparaître par hypoparathyroïdisme<br />

5/ Quelles sont les affirmations vraies ?<br />

A - la magnésémie est étroitement régulée par le récepteur au calcium<br />

B - l’hypervolémie inhibe la réabsorption rénale de magnésium dans la branche large de Henle<br />

C - l’hypercalcémie inhibe la réabsorption rénale de magnésium dans la branche large de Henle<br />

D - la PTH inhibe la réabsorption rénale de magnésium dans la branche large de Henle<br />

E - l’hypermagnésémie inhibe la réabsorption rénale de magnésium dans la branche large de Henle<br />

6/ Parmi ces situations, quelles sont celles pouvant classiquement entraîner une<br />

hypermagnésémie ?<br />

A - un traitement chronique par cisplatine<br />

B - un traitement chronique par inhibiteurs des tyrosines kinases<br />

C - un traitement chronique par certains laxatifs<br />

D - une acidose tubulaire<br />

E - certains traitements tocolytiques<br />

2


1/ Quelles sont les réponses vraies ?<br />

Autoévaluations<br />

Désordres de la magnésémie<br />

Réponses<br />

Les réponses sont : B, C, E<br />

A - faux : dans le plasma, seulement 20 % du magnésium sont liés aux protéines plasmatiques. La<br />

magnésémie est donc beaucoup moins affectée par les variations de protidémie que la calcémie. Elle<br />

peut être utilisée comme un bon reflet des concentrations en magnésium libre et ultrafiltrable, en<br />

dehors des situations de variations aiguës de l’état acidebase<br />

B - vrai : le contenu de l’organisme en magnésium est d’environ 1 000 mmol (25 g) dont plus de<br />

60 % sont stockés dans l’os, 30 % à 40 % dans les muscles, érythrocytes et autres cellules, et<br />

seulement environ 1 % (10 mmol) dans le volume extracellulaire.<br />

C - vrai : dans la dénutrition et les déficits en potassium, un déficit cellulaire en magnésium<br />

apparaît, qui est corrélé au déficit en potassium intracellulaire. Ainsi, au cours d’une déplétion en<br />

potassium chronique, le contenu musculaire intracellulaire en magnésium diminue de 0,5 mmol pour<br />

chaque diminution de 10 mmol de potassium par kg de masse maigre.<br />

D - faux : en particulier si l’origine de la déplétion est rénale.<br />

E - vrai : la mesure de la magnésurie permet de déterminer si l’origine de l’hypomagnésémie est<br />

rénale (magnésurie > 2 mmol/24 h) ou extrarénale (magnésurie ≤ 1 mmol/24 h). Si la magnésurie est<br />

comprise entre 1 et 2 mmol/24 h, il faut supplémenter le patient et répéter les mesures sanguines et<br />

urinaires. Certains proposent également de calculer, sur un échantillon d’urine et un prélèvement<br />

plasmatique contemporain, l’excrétion fractionnelle du magnésium, une valeur > 1 % associée à une<br />

hypomagnésémie témoignant d’une perte rénale de ce cation.<br />

2/ L’absorption intestinale de magnésium en situation physiologique :<br />

Les réponses sont : A, E, G<br />

A, E, G - vrai : l’absorption intestinale du magnésium résulte de deux flux inverses : un flux facilité<br />

d’absorption transcellulaire (40 % des apports) et un flux de sécrétion passif paracellulaire (8 % des<br />

apports). Au cours des déplétions extrarénales sévères comme au cours de la croissance, la<br />

réabsorption intestinale est stimulée et peut atteindre 70 % des apports. La réabsorption intestinale du<br />

magnésium est majoritairement localisée dans l’intestin grêle distal, dans la partie allant du duodénum<br />

distal (D3) à l’iléon. Finalement, le côlon possède une faible capacité de réabsorption du magnésium.<br />

3/ TRPM6 :<br />

Les réponses sont : A, C, D, E<br />

1


A - vrai : la réabsorption intestinale de magnésium implique un transport facilité transcellulaire,<br />

distinct de celui du calcium et peu ou pas sensible à la vitamine D. Récemment, une des étapes<br />

limitantes de ce transport a pu être identifiée. Il s’agit du canal TRPM6, exprimé à la membrane<br />

luminale des intestins grêle et large ; sa perte de fonction conduit à une abolition de la réabsorption<br />

active transcellulaire de magnésium et à une hypomagnésémie profonde par malabsorption sélective<br />

(hypomagnésémie avec hypocalcémie secondaire).<br />

B - faux : c’est la membrane luminale.<br />

C - vrai : voir réponse A.<br />

D - vrai : l’hypomagnésémie avec hypocalcémie secondaire ; il existe également une perte rénale<br />

de magnésium qui se révèle lorsque l’on corrige le déficit et que la magnésémie est normalisée par le<br />

traitement. Ce défaut s’explique par le fait que le canal TRPM6 est également exprimé sur la<br />

membrane apicale du tubule contourné distal, site majeur de régulation fine de l’excrétion urinaire de<br />

magnésium.<br />

E - vrai : l’EGF est un régulateur positif de TRPM6.<br />

F - faux : HNF1β régule la sous-unité γ de la Na-K-ATPase.<br />

G - faux : ce sont les diurétiques thiazidiques qui inhibent son expression.<br />

4/ En présence d’une hypomagnésémie :<br />

Les réponses sont : A, D, E<br />

A - vrai : voir réponse E question 1.<br />

B - faux : elle signe une origine extrarénale, mais qui peut être un mécanisme d’accrétion osseuse.<br />

C - faux : la baisse de magnésémie devrait stimuler la sécrétion de PTH et élever la calcémie.<br />

5/ Quelles sont les affirmations vraies ?<br />

Les réponses sont : C, E<br />

A - faux : on ne connaît pas à ce jour d’hormone ou de récepteur spécifique au magnésium qui<br />

pourrait orchestrer, à l’instar de ce qui est décrit pour le calcium, l’absorption intestinale de<br />

magnésium, sa réabsorption rénale ou son flux net osseux.<br />

B - faux : l’hypervolémie inhibe la réabsorption rénale de magnésium dans le tubule proximal.<br />

D - faux : la PTH stimule la réabsorption rénale de magnésium dans la branche large de Henle.<br />

6/ Parmi ces situations, quelles sont celles pouvant classiquement entraîner une<br />

hypermagnésémie ?<br />

Les réponses sont : C, E<br />

C - vrai : les laxatifs osmotiques à base de sels de magnésium.<br />

E - vrai : la perfusion de sulfate de magnésium.<br />

Les autres causes sont des causes d’hypomagnésémie.<br />

2


A - faux : une hypomagnésémie apparaît selon les séries chez 50 % à 75 % des patients traités par<br />

cisplatine, qui peut persister plusieurs mois après l’arrêt du traitement.<br />

B, D - faux : une hypomagnésémie avec hypocalcémie secondaire apparaît selon les séries chez<br />

15 % à 45 % des patients traités par inhibiteurs de la voie de l’EGF (anticorps anti-EGFR et<br />

inhibiteurs des tyrosines kinases), qui régresse à l’arrêt du traitement, contrairement aux<br />

hypomagnésémies induites par le cisplatine. Cette hypomagnésémie modérée à sévère a été<br />

récemment rapportée à l’inhibition de l’expression du canal TRPM6 dans le tubule contourné distal.<br />

Le canal TRPM6 est également inhibé par la prise chronique de ciclosporine et de FK 506, deux<br />

immunosuppresseurs capables d’induire des hypomagnésémies chroniques, ainsi que par l’acidose<br />

métabolique chronique.<br />

3


Autoévaluation<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Questions<br />

1/ Parmi ces germes, quels sont ceux pouvant être responsables de GNAPI ?<br />

A - staphylocoque<br />

B - streptocoque<br />

C - Klebsiella pneumoniae<br />

D- Plasmodium falciparum<br />

E - Pseudomonas aerugenosa<br />

2/ Parmi les infections suivantes, quelles sont celles pouvant se compliquer de GNAPI ?<br />

A - les pyodermites<br />

B - les ostéomyélites aiguës<br />

C - les bronchopneumonies<br />

D - les angines<br />

E - les diarrhées aiguës<br />

3/ Concernant les GNAPI, quelles sont les propositions exactes ?<br />

A - elles sont en relation avec une infection directe du parenchyme rénal<br />

B - elles traduisent une inflammation glomérulaire aiguë non suppurative<br />

C - elles sont fréquemment dues au streptocoque -hémolytique<br />

D - elles se voient souvent après un intervalle libre<br />

E - elles sont des maladies à complexes immuns circulants<br />

4/ Quelles sont les indications d’une ponction-biopsie rénale au cours de la GNAPI ?<br />

A - une protéinurie abondante supérieure à 3 g/j<br />

B - une insuffisance rénale rapidement progressive<br />

C - un complément sérique normal à la phase aiguë<br />

D - la présence d’une hématurie macroscopique au cours de la phase aiguë de l’affection<br />

E - la présence d’une HTA au cours de la phase aiguë de l’affection<br />

5/ Concernant le traitement de la GNAPI, quelles sont les propositions exactes ?<br />

A - il est essentiellement symptomatique<br />

B - il comporte de façon systématique une corticothérapie<br />

C - il comporte de façon systématique une antibiothérapie<br />

1


D - il peut prévenir une récidive<br />

E - il associe souvent un régime sans sel, un traitement antihypertenseur et des diurétiques<br />

2


Autoévaluation<br />

Glomérulonéphrites aiguës postinfectieuses<br />

Réponses<br />

1/ Parmi ces germes, quels sont ceux pouvant être responsables de GNAPI ?<br />

Les réponses sont : A, B, D<br />

2/ Parmi les infections suivantes, quelles sont celles pouvant se compliquer de GNAPI ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

3/ Concernant les GNAPI, quelles sont les propositions exactes ?<br />

Les réponses sont : B, C, D, E<br />

4/ Quelles sont les indications d’une ponction-biopsie rénale au cours de la GNAPI ?<br />

Les réponses sont : A, B, C<br />

5/ Concernant le traitement de la GNAPI, quelles sont les propositions exactes ?<br />

Les réponses sont : A, E


Autoévaluation<br />

Glomérulopathie extramembraneuse<br />

Questions<br />

1/Le modèle expérimental de la glomérulopathie extramembraneuse chez le rat :<br />

A - est la néphrite de Heymann<br />

B - a permis de retrouver la cible antigénique sur le podocyte<br />

C - la cible antigénique est identique chez l’homme<br />

D - la cible antigénique est un récepteur d’endocytose<br />

E - la fixation d’anticorps à cette cible déclenche une cascade d’activation du complément<br />

2/ Les causes les plus fréquentes de glomérulopathie extramembraneuse chez l’adulte<br />

sont :<br />

A - médicamenteuses<br />

B - infectieuses<br />

C - néoplasiques<br />

D - immunologiques<br />

E - génétiques<br />

3/ Les causes les plus fréquentes de glomérulopathie extramembraneuse chez l’enfant<br />

sont :<br />

A - médicamenteuses<br />

B - infectieuses<br />

C - néoplasiques<br />

D - immunologiques<br />

E - génétiques<br />

4/ Quels facteurs pronostiques de la glomérulopathie extraembraneuse indiquent un fort<br />

risque de progression vers l’IRCT ?<br />

A - une protéinurie supérieure à 1 g/24 h<br />

B - une protéinurie supérieure à 3 g/24 h<br />

C - une excrétion urinaire de β2-microglobuline > 0,5 µg/min<br />

D - une excrétion urinaire d’IgG > 250 mg/24 h<br />

E - une détérioration de la fonction rénale<br />

1


5/ Quels traitements ont démontré une équivalence de mise en rémission de la<br />

glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

A - corticoïdes-cyclophosphamide<br />

B - corticoïdes-chlorambucil<br />

C - corticoïdes-mycophénolate mofétil<br />

D - mycophénolate mofétil seul<br />

E - analogue de l’ACTH<br />

6/ Quel traitement a démontré un ralentissement de la progression de l’insuffisance<br />

rénale dans la glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

A - corticoïdes-cyclophosphamide<br />

B - ciclosporine-corticoïdes<br />

C - corticoïdes-mycophénolate mofétil<br />

D - mycophénolate mofétil seul<br />

E - analogue de l’ACTH<br />

7/ Quelle dose de rituximab semble nécessaire et suffisante pour traiter une<br />

glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

A - 1 perfusion hebdomadaire de 375 mg/m² pendant 4 semaines<br />

B - 1 perfusion de 375 mg/m² j1, j15 et M6<br />

C - 1 perfusion de 375 mg/m² et réinjection suivant le suivi des cellules CD19+<br />

D - 1 perfusion de 375 mg/m² j1, j15 et M6 suivant le taux de cellules CD19+<br />

E - 1 perfusion de 375 mg/m² j1, j15 et suivant le taux de cellules CD19+<br />

8/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant la découverte d’une glomérulopathie<br />

extramembraneuse avec une fonction rénale normale, une protéinurie de 4 g/24 h et une<br />

albuminémie de 26 g/l ?<br />

A - traitement symptomatique et réévaluation à 6 mois<br />

B - traitement immunosuppresseur par corticoïdes-cyclophosphamide après avoir prévenu le patient<br />

du risque gonadique<br />

C - traitement anticoagulant<br />

D - recherche étiologique<br />

E - traitement par corticoïdes et mycophénolate mofétil<br />

2


9/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant une glomérulopathie<br />

extramembraneuse idiopathique avec une fonction rénale normale, une protéinurie de<br />

4 g/24 h et une albuminémie de 26 g/l diagnostiquée il y a 7 mois ?<br />

A - traitement symptomatique et réévaluation à 6 mois<br />

B - traitement immunosuppresseur par corticoïdes-cyclophosphamide après avoir prévenu le patient<br />

du risque gonadique<br />

C - traitement anticoagulant<br />

D - traitement par ciclosporine-corticoïdes<br />

E - traitement par corticoïdes et mycophénolate mofétil<br />

10/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant une glomérulopathie<br />

extramembraneuse idiopathique avec une clairance de la créatinine à 55 ml/min, une<br />

protéinurie de 4 g/24 h et une albuminémie de 26 g/l ?<br />

A - traitement symptomatique et réévaluation à 6 mois<br />

B - traitement immunosuppresseur par corticoïdes-cyclophosphamide après avoir prévenu le patient<br />

du risque gonadique<br />

C - traitement anticoagulant<br />

D - traitement par ciclosporine-corticoïdes<br />

E - traitement par corticoïdes et mycophénolate mofétil<br />

3


Autoévaluation<br />

Glomérulopathie extramembraneuse<br />

Réponses<br />

1/Le modèle expérimental de la glomérulopathie extramembraneuse chez le rat :<br />

Les réponses sont : A, B, D, E<br />

2/ Les causes les plus fréquentes de glomérulopathie extramembraneuse chez l’adulte<br />

sont :<br />

Les réponses sont : A, C<br />

3/ Les causes les plus fréquentes de glomérulopathie extramembraneuse chez l’enfant<br />

sont :<br />

Les réponses sont : B, D<br />

4/ Quels facteurs pronostiques de la glomérulopathie extraembraneuse indiquent un fort<br />

risque de progression vers l’IRCT ?<br />

Les réponses sont : C, D, E<br />

5/ Quels traitements ont démontré une équivalence de mise en rémission de la<br />

glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, E<br />

6/ Quel traitement a démontré un ralentissement de la progression de l’insuffisance<br />

rénale dans la glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

La réponse est : A<br />

7/ Quelle dose de rituximab semble nécessaire et suffisante pour traiter une<br />

glomérulopathie extramembraneuse ?<br />

La réponse est : C<br />

8/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant la découverte d’une glomérulopathie<br />

extramembraneuse avec une fonction rénale normale, une protéinurie de 4 g/24 h et une<br />

albuminémie de 26 g/l ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

1


9/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant une glomérulopathie<br />

extramembraneuse idiopathique avec une fonction rénale normale, une protéinurie de<br />

4 g/24 h et une albuminémie de 26 g/l diagnostiquée il y a 7 mois ?<br />

Les réponses sont : B, C, E<br />

10/ Quelles attitudes peuvent être adoptées devant une glomérulopathie<br />

extramembraneuse idiopathique avec une clairance de la créatinine à 55 ml/min, une<br />

protéinurie de 4 g/24 h et une albuminémie de 26 g/l ?<br />

Les réponses sont : B, C (± E)<br />

2


Autoévaluation<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

Questions<br />

1/ Parmi les propositions suivantes, précisez la (ou les) proposition(s) vraie(s) ?<br />

A - les dépôts de fibrine dans la chambre urinaire affirme le diagnostic de GNEC nécrosante à<br />

ANCA<br />

B - l’épitope reconnu par les anticorps anti-MBG est le domaine non collagénique NC1 des chaînes<br />

alpha 3 du collagène de type IV<br />

C - une GNEC associée à des dépôts mésangiaux d’IgA n’est retrouvée que dans le purpura<br />

rhumatoïde<br />

D - la découverte d’anticorps anti-PR3 permet d’éliminer le diagnostic de polyangéite<br />

microscopique et d’affirmer le diagnostic de Wegener<br />

âgés<br />

E - une hypertension artérielle est trouvée dans les GNEC dans les formes sévères et chez les sujets<br />

2/ Parmi les propositions suivantes, précisez la (ou les) proposition(s) vraie(s) ?<br />

A - la valeur diagnostique des ANCA augmente quand on associe l’immunofluorescence et les tests<br />

antigènes spécifiques<br />

B - les anticorps anti-PR3 sont souvent associés à des vascularites évoluant sur un mode plus<br />

chronique et insidieux<br />

C - si un patient a une vascularite à ANCA et d’emblée besoin de dialyse, les chances de<br />

récupération de la fonction rénale sont minimes, justifiant une épargne en immunosuppresseur<br />

D - l’ascension du taux des ANCA justifie un renforcement du traitement immunosuppresseur pour<br />

prévenir l’apparition des rechutes cliniques<br />

E - la présence d’ANCA contre-indique la transplantation rénale


Autoévaluation<br />

Glomérulonéphrites extracapillaires<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les propositions suivantes, précisez la (ou les) proposition(s) vraie(s) ?<br />

Les réponses sont : B, E<br />

A : faux, dans toutes les GNEC<br />

C : faux, possible dans toutes les néphropathies à IgA<br />

D : faux, certains Wegener ont des MPO-ANCA et certaines polyangéites ont des PR3-ANCA<br />

2/ Parmi les propositions suivantes, précisez la (ou les) proposition(s) vraie(s) ?<br />

La réponse est : A<br />

B : faux, ce sont les MPO-ANCA qui évoluent sur ce mode chronique insidieux<br />

C : faux, au contraire, intensifier le traitement avec des échanges plasmatiques, car les chances de<br />

récupération sont importantes<br />

D : faux, seulement renforcer le suivi pour dépister précocement la rechute clinique, qui seule fait<br />

débuter un traitement


Autoévaluation<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques<br />

Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez<br />

l’adulte<br />

Questions<br />

1/ La recherche d’une anomalie génétique au cours d’un syndrome néphrotique<br />

idiopathique :<br />

A - est recommandée lors de l’évaluation initiale du syndrome néphrotique à lésions glomérulaires<br />

minimes<br />

B - est toujours recommandée lors de l’évaluation initiale d’une hyalinose segmentaire et focale<br />

C - est souvent recommandée dans un syndrome néphrotique corticosensible<br />

D - est rarement recommandée dans un syndrome néphrotique corticorésistant<br />

E - n’est indiquée que s’il existe des antécédents de syndrome néphrotique familial<br />

F - est recommandée dans un syndrome néphrotique résistant aux corticoïdes et autres<br />

immunosuppresseurs<br />

2/ La biopsie rénale :<br />

A - est nécessaire pour le diagnostic du syndrome néphrotique quel que soit l’âge de survenue<br />

B - n’est requise que dans les formes corticorésistantes de l’adulte<br />

C - n’est requise que dans les formes corticorésistantes de l’enfant<br />

D - permet de guider la stratégie thérapeutique<br />

E - permet parfois de dépister un processus tumoral latent<br />

F - peut être pratiquée même en cas de troubles de l’hémostase<br />

3/ Le traitement initial du SNLGM :<br />

A - repose en première intention sur une corticothérapie orale<br />

B - doit être prolongé au moins 8 mois avant de débuter une décroissance<br />

C - doit toujours être débuté d’emblée en association avec un traitement néphroprotecteur type IEC<br />

ou ARAII<br />

D - est associé à des mesures hygiénodiététiques à type de restriction sodée et régime pauvre en<br />

sucre d’absorption rapide<br />

D - est toujours associé à la mise en route d’un traitement anticoagulant à dose curative<br />

F - repose en première intention sur une corticothérapie à faible dose (0,25 mg/kg par jour) associé<br />

à la ciclosporine<br />

1


G - permet dans plus de 95 % des cas la guérison définitive du SNLGM<br />

H - est associé à une prophylaxie de l’anguillose chez les patients à risque<br />

4/ La récidive du syndrome néphrotique idiopathique après transplantation :<br />

A - ne survient que chez le sujet jeune<br />

B - ne s’observe jamais dans les formes génétiques<br />

C - peut s’observer dans les formes génétiques<br />

D - est traitée par corticoïdes et immunosuppresseurs type Cellcept <br />

E - répond favorablement à la ciclosporine à faible dose<br />

F - répond favorablement aux échanges plasmatiques<br />

5/ La néphrine :<br />

A - est une protéine transmembranaire présente dans les podocytes et les lymphocytes T<br />

B - est phosphorylée sur ses résidus tyrosines par la SRC kinase Fyn<br />

C - est à l’origine d’une signalisation intracellulaire induite après son interaction avec son ligand<br />

naturel, l’IL13<br />

D - est active après phosphorylation la PI3 kinase puis Akt permettant l’induction de signaux de<br />

survie podocytaires<br />

E - interagit de façon directe avec la podocine<br />

F - est codée par le gène NPHS2<br />

2


Autoévaluation<br />

Syndromes néphrotiques idiopathiques<br />

Physiopathologie et prise en charge thérapeutique spécifique chez<br />

l’adulte<br />

Réponses<br />

1/ La recherche d’une anomalie génétique au cours d’un syndrome néphrotique<br />

idiopathique :<br />

La réponse est : F<br />

2/ La biopsie rénale :<br />

Les réponses sont : E, F<br />

3/ Le traitement initial du SNLGM :<br />

Les réponses sont : A, D, H<br />

4/ La récidive du syndrome néphrotique idiopathique après transplantation :<br />

Les réponses sont : C, F<br />

5/ La néphrine :<br />

Les réponses sont : B, D, E


Autoévaluation<br />

Syndromes hémolytiques et urémiques de l’adulte<br />

Questions<br />

1/ La physiopathologie du SHU fait intervenir :<br />

A - une coagulation intravasculaire disséminée<br />

B - un déficit en facteur de von Willebrand<br />

C - une lésion endothéliale d’origine infectieuse, toxique ou immunologique<br />

D - rarement une hyperactivation de la voie alterne du complément<br />

E - un déficit en facteur C2 du complément<br />

2/ Dans le SHU typique post-diarrhée :<br />

A - l’agent causal est une entérobactérie sécrétant une shigatoxine<br />

B - la diarrhée est souvent hémorragique<br />

C - l’hypovolémie induite par la diarrhée peut aggraver les lésions rénales<br />

D - l’antibiothérapie spécifique est nécessaire<br />

E - les ralentisseurs du transit doivent être administrés<br />

3/ Le SHU de l’adulte peut être en rapport avec :<br />

A - un déficit hétérozygote en facteur H à révélation tardive<br />

B - un traitement par gemcitabine<br />

C - un traitement par aspirine<br />

D - une néphropathie sous-jacente<br />

E - une HTA chronique<br />

4/ La prise en charge thérapeutique du SHU de l’adulte fait appel à :<br />

A - un très bon contrôle tensionnel<br />

B - un traitement anticoagulant efficace<br />

C - un traitement fibrinolytique<br />

D - la perfusion de plasma frais ou les échanges plasmatiques<br />

E - l’antibiothérapie à large spectre<br />

5/ Le SHU de l’adulte :<br />

A - a un pronostic inchangé depuis 30 ans<br />

B - a une survie des patients de 85 % à 1 an environ<br />

C - est compliqué d’une insuffisance rénale chronique dans plus de 50 % des cas<br />

1


D - peut récidiver en cas de déficit en facteur H<br />

E - peut récidiver après greffe rénale<br />

2


Autoévaluation<br />

Syndromes hémolytiques et urémiques de l’adulte<br />

Réponses<br />

1/ La physiopathologie du SHU fait intervenir :<br />

Les réponses sont : C, D<br />

2/ Dans le SHU typique post-diarrhée :<br />

Les réponses sont ; A, B, C<br />

3/ Le SHU de l’adulte peut être en rapport avec :<br />

Les réponses sont : A, B, D, E<br />

4/ La prise en charge thérapeutique du SHU de l’adulte fait appel à :<br />

Les réponses sont : A, D<br />

5/ Le SHU de l’adulte :<br />

Les réponses sont : B, D, E


1/ La prééclampsie « maternelle » :<br />

Autoévaluation<br />

Hypertensions de la grossesse<br />

Questions<br />

A - est plus précoce que la prééclampsie « placentaire »<br />

B - s’accompagne toujours d’un retard de croissance du fœtus<br />

C - est plus fréquente que la prééclampsie « placentaire »<br />

D - comporte le risque de complications le plus élevé<br />

2/ Une hypertension survient dans un pourcentage des grossesses de :<br />

A - 6 à 8 %<br />

B - 10 à 12 %<br />

C - 15 à 20 %<br />

3/ L’hémodynamique rénale de la grossesse normale comporte :<br />

A - une augmentation du débit sanguin rénal<br />

B - une augmentation de la filtration glomérulaire<br />

C - une activation du système rénine-angiotensine<br />

D - une vasodilatation systémique dépendante de l’endothélium<br />

E - une augmentation de la perméabilité glomérulaire<br />

4/ Les facteurs pathogéniques de la prééclampsie comportent :<br />

A - un rejet de l’allogreffe fœtale du fait de l’incompatibilité HLA<br />

B - l’apparition de substances antiangiogéniques<br />

C - une réaction immune de type Th-2<br />

D - une distension utérine excessive<br />

E - des anticorps anti-PAI-1<br />

5/ Les antihypertenseurs contre-indiqués dans la grossesse sont :<br />

A - la méthyldopa<br />

B - les bêtabloqueurs<br />

C - les IEC et ARA<br />

D - les calcium bloqueurs<br />

E - les vasodilatateurs type hydralazine


1/ La prééclampsie « maternelle » :<br />

La réponse est : C<br />

Autoévaluation<br />

Hypertensions de la grossesse<br />

Réponses<br />

2/ Une hypertension survient dans un pourcentage des grossesses de :<br />

La réponse est : A<br />

3/ L’hémodynamique rénale de la grossesse normale comporte :<br />

Les réponses sont : A, B, C, D<br />

4/ Les facteurs pathogéniques de la prééclampsie comportent :<br />

La réponse est : B<br />

5/ Les antihypertenseurs contre-indiqués dans la grossesse sont :<br />

La réponse est : C


Autoévaluation<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie systémique<br />

1/ La crise rénale sclérodermique :<br />

Questions<br />

A - associe dans sa forme typique une hypertension artérielle maligne et une insuffisance rénale<br />

aiguë oligoanurique<br />

B - s’accompagne d’une microangiopathie thrombotique dans 20 % des cas<br />

C - est à l’origine d’une insuffisance rénale lentement progressive<br />

D - est la manifestation néphrologique la plus fréquente au cours de la sclérodermie systémique<br />

E - s’accompagne d’une hyperréninémie<br />

2/ Concernant la crise rénale sclérodermique (CRS), quelle(s) est (sont) la (les) bonne(s)<br />

réponse(s) ?<br />

A - sa prévalence est d’environ 5 % chez les patients sclérodermiques<br />

B - la CRS est plus fréquente au cours des formes cutanées limitées<br />

C - la CRS survient essentiellement dans les premières années d’évolution des formes diffuses<br />

D - une corticothérapie inférieure à 30 mg/j n’est pas un facteur de risque de survenue d’une CRS<br />

E - une autosurveillance de la pression artérielle est utile chez les patients à risque de survenue<br />

d’une CRS<br />

3/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux prédictifs de la survenue d’une crise<br />

rénale sclérodermique ?<br />

A - présence d’une hypertension artérielle pulmonaire<br />

B - progression rapide de l’atteinte cutanée<br />

C - présence d’anticorps anti-ARN polymérase III<br />

D - corticothérapie supérieure à 15mg/j<br />

E - ulcérations digitales<br />

4/ À propos de la présentation clinique de la crise rénale sclérodermique (CRS) :<br />

A - dix pour cent des CRS sont normotensives<br />

B - le patient peut présenter un ralentissement psychomoteur<br />

C - une crise comitiale peut survenir<br />

D - les signes d’insuffisance ventriculaire droite sont précoces<br />

E - la CRS peut s’accompagner d’un épanchement péricardique<br />

1


5/ Quelle(s) est (sont) la (les) réponse(s) juste(s) parmi les affirmations suivantes :<br />

(CRS)<br />

A - la protéinurie est le plus souvent supérieure à 3 g/j au cours d’une crise rénale sclérodermique<br />

B - les CRS s’accompagnent dans 40 à 50 % des cas d’une microangiopathie thrombotique<br />

C - les anticorps anti-ARN polymérase III sont présents chez 70 % des patients présentant une CRS<br />

D - la biopsie rénale est indispensable pour confirmer le diagnostic quelle que soit la présentation<br />

de la CRS<br />

E - l’immunofluorescence sur la biopsie rénale retrouve le plus souvent des dépôts de C1q<br />

6/ Quels diagnostics différentiels faut-il rechercher devant un tableau clinique évocateur<br />

de crise rénale sclérodermique ?<br />

A - une glomérulonéphrite associée à des anticorps anticytoplasme des polynucléaires neutrophiles<br />

B - une polykystose rénale<br />

C - une atteinte rénale secondaire à un traitement par D-pénicillamine<br />

D - une sténose des artères rénales chez un patient traité par un inhibiteur de l’enzyme de<br />

conversion<br />

E - une fibrose néphrogénique systémique<br />

7/ Quels sont les facteurs de mauvais pronostic identifiés au cours de la crise rénale<br />

sclérodermique :<br />

A - le sexe féminin<br />

B - un âge supérieur à 50 ans<br />

C - un mauvais contrôle de la pression artérielle dans les trois premiers jours<br />

D - les anticorps anti-ARN polymérase III<br />

E - une créatininémie initiale supérieure à 270 µmol/l<br />

8/ Concernant le traitement de la crise rénale sclérodermique (CRS), quelles sont les<br />

affirmations exactes ?<br />

A - le traitement précoce par inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) a considérablement<br />

amélioré le pronostic des CRS<br />

B - une bithérapie antihypertensive est rapidement indiquée en l’absence de contrôle de la pression<br />

artérielle par les IEC seuls<br />

C - une dialyse, si elle est réalisée, est en règle définitive<br />

D - un patient dialysé peut être sevré jusqu’à deux ans après la survenue de la CRS<br />

E - la récidive sur greffon après transplantation rénale est rare<br />

2


Autoévaluation<br />

Manifestations rénales de la sclérodermie systémique<br />

1/ La crise rénale sclérodermique :<br />

Les réponses sont : A, D, E<br />

Réponses<br />

2/ Concernant la crise rénale sclérodermique (CRS), quelle(s) est (sont) la (les) bonne(s)<br />

réponse(s) ?<br />

Les réponses sont : A, C, E<br />

3/ Parmi les éléments suivants, quels sont ceux prédictifs de la survenue d’une crise<br />

rénale sclérodermique ?<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

4/ À propos de la présentation clinique de la crise rénale sclérodermique (CRS) :<br />

Les réponses sont : A, B, C, E<br />

5/ Quelle(s) est (sont) la (les) réponse(s) juste(s) parmi les affirmations suivantes :<br />

La réponses est : B<br />

6/ Quels diagnostics différentiels faut-il rechercher devant un tableau clinique évocateur<br />

de crise rénale sclérodermique ?<br />

Les réponses sont : A, C, D, E<br />

7/ Quels sont les facteurs de mauvais pronostic identifiés au cours de la crise rénale<br />

sclérodermique :<br />

Les réponses sont : B, C, E<br />

8/ Concernant le traitement de la crise rénale sclérodermique (CRS), quelles sont les<br />

affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : A, B, D, E


Autoévaluation<br />

Insuffisance rénale aiguë du sujet âgé<br />

Questions<br />

1/ Quelles sont les modifications rénales physiologiques rencontrées au cours du<br />

vieillissement ?<br />

A - réduction du nombre de tubules<br />

B - apparition d’une fibrose interstitielle<br />

C - augmentation de la taille des reins<br />

D - diminution des résistances vasculaires<br />

E - augmentation du pouvoir de concentration des urines<br />

2/ Quel(s) critère(s) peut-on utiliser pour diagnostiquer une IRA chez le sujet<br />

âgé ?<br />

A - une clairance de la créatinine selon la formule de Cockcroft<br />

B - une clairance de la créatinine selon la formule abrégée du MDRD<br />

C - un taux de créatininémie<br />

D - les critères de RIFLE<br />

E - un taux d’urémie<br />

3/ Quelles sont les affirmations exactes concernant l’IRA fonctionnelle ?<br />

A - l’IRA fonctionnelle peut être traitée par un inhibiteur du système rénine-angiotensine<br />

B - la natriurèse est le plus souvent inférieure à 20 mEq/l<br />

C - la fraction excrétée de sodium et d’urée sont différentes entre IRA fonctionnelle et<br />

nécrose tubulaire aiguë<br />

D - l’insuffisance cardiaque peut être une cause d’IRA fonctionnelle<br />

E - pour toute IRA fonctionnelle oligurique, un traitement par diurétique peut être débuté<br />

4/ Quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - un sujet âgé de 80 ans peut bénéficier d’une corticothérapie pour une glomérulopathie<br />

B - la biopsie rénale est contre-indiquée chez le sujet de plus de 65 ans<br />

C - le toucher rectal est systématique chez un homme âgé qui a une IRA<br />

D - les anticorps spécifiques de vascularites ne sont pas fiables chez le sujet âgé<br />

E - les résultats de la bandelette urinaire ne sont validés que sur les urines des 24 h<br />

1


5/ Quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - les diurétiques peuvent être maintenus lors d’un examen au produit de contraste<br />

B - une antibiothérapie doit être adaptée à la fonction rénale dès son instauration<br />

C - la prise d’inhibiteur du système rénine-angiotensine peut favoriser une IRA en cas de<br />

diarrhée<br />

D - un médicament non néphrotoxique mais à élimination urinaire ne peut pas entraîner<br />

d’effet indésirable en cas d’IRA<br />

E - une hydratation optimale pré-, per- et postopératoire est la meilleure prévention de<br />

l’IRA postopératoire<br />

2


Autoévaluation<br />

Insuffisance rénale aiguë du sujet âgé<br />

Réponses<br />

1/ Quelles sont les modifications rénales physiologiques rencontrées au cours du<br />

vieillissement ?<br />

Les réponses sont : A, B<br />

2/ Quel(s) critère(s) peut-on utiliser pour diagnostiquer une IRA chez le sujet<br />

âgé ?<br />

La réponse est : D<br />

3/ Quelles sont les affirmations exactes concernant l’IRA fonctionnelle ?<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

4/ Quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : A, C<br />

5/ Quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : C, E


1/ Au cours du syndrome néphrotique :<br />

A - les α-2-globulines sont augmentées<br />

Autoévaluation<br />

Syndrome néphrotique de l’enfant<br />

Questions<br />

B - la protéinurie est composée en majeure partie d’albumine<br />

C - la natriurèse est élevée<br />

D - il existe une hypocalcémie<br />

E - le taux de cholestérol est augmenté<br />

2/ Chez un enfant atteint de syndrome néphrotique corticodépendant :<br />

A - les rechutes peuvent survenir lors de la diminution de la corticothérapie<br />

B - le risque d’insuffisance rénale chronique est élevé<br />

C - la cassure de la courbe de croissance staturale est une indication des immunosuppresseurs<br />

D - le traitement pas ciclosporine est efficace dans 80 % des cas<br />

E - la biopsie rénale montre le plus souvent des lésions de hyalinose segmentaire et focale<br />

3/ Le syndrome néphrotique congénital :<br />

A - est présent avant l’âge de 3 mois<br />

B - a une cause génétique dans la majorité des cas<br />

C - répond rarement à la corticothérapie<br />

D - rechute souvent après transplantation rénale<br />

E - peut entraîner une augmentation de l’alphafœtoprotéine dans le sang maternel durant la<br />

grossesse<br />

4/ Parmi les complications suivantes, lesquelles doit-on craindre lors d’une rechute de<br />

syndrome néphrotique corticosensible ?<br />

A - thrombose veineuse<br />

B - œdème aigu du poumon<br />

C - péritonite à pneumocoque<br />

D - insuffisance rénale aiguë<br />

E - collapsus cardiovasculaire<br />

1


5/ Parmi les maladies suivantes, lesquelles peuvent se compliquer de syndrome<br />

néphrotique ?<br />

A - maladie de Berger<br />

B - onycho-ostéodysplasie<br />

C - syndrome de Bartter<br />

D - cystinose<br />

E - syndrome d’Alport<br />

2


1/ Au cours du syndrome néphrotique :<br />

Les réponses sont : A, B, D, E<br />

Autoévaluation<br />

Syndrome néphrotique de l’enfant<br />

Réponses<br />

2/ Chez un enfant atteint de syndrome néphrotique corticodépendant :<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

3/ Le syndrome néphrotique congénital :<br />

Les réponses sont : A, B, C, E<br />

4/ Parmi les complications suivantes, lesquelles doit-on craindre lors d’une rechute de<br />

syndrome néphrotique corticosensible ?<br />

Les réponses sont : A, C, D, E<br />

5/ Parmi les maladies suivantes, lesquelles peuvent se compliquer de syndrome<br />

néphrotique ?<br />

Les réponses sont : A, B, E


Autoévaluation<br />

Reins kystiques de l’enfant<br />

Questions<br />

1/ Devant un diabète de type MODY5 et une maladie kystique, quel gène muté est le plus<br />

vraisemblablement en cause ?<br />

A - PKHD1<br />

B - PKD1<br />

C - TCF2<br />

D - OFD1<br />

2/ Quand faut-il penser à rechercher une mutation du gène TCF2 ?<br />

A - reins hyperéchogènes bilatéraux<br />

B - dysplasie multikystique rénale et hypoplasie rénale controlatérale<br />

C - agénésie rénale unilatérale<br />

D - reins microkystiques corticaux bilatéraux<br />

3/ En cas d’IMG ou de mort fœtale in utero, le diagnostic de polykystose récessive<br />

nécessite :<br />

A - une biopsie à l’aiguille du foie et du rein<br />

B - un prélèvement entier du foie et du rein<br />

C - un prélèvement sanguin pour étude de l’ADN<br />

D - toutes les réponses sont justes<br />

4/ Quelles sont la ou les maladies à transmission autosomique récessive ?<br />

A - les maladies kystiques liées à une mutation du gène TCF2<br />

B - la polykystose infantile<br />

C - la sclérose tubéreuse de Bourneville<br />

D - la néphronophtise infantile<br />

5/ Quels sont les gènes impliqués dans la formation du cil primaire ?<br />

A - VHL<br />

B - NPHP2<br />

C - PKD1<br />

D - PKHD1<br />

E - BBS<br />

1


6/ Qu’est-ce qui caractérise la polykystose autosomique dominante ?<br />

A - une incidence 1/500 à 1/1 000<br />

B - une dilatation kystique des tubes collecteurs rénaux<br />

C - des manifestations extrarénales possibles : kystes hépatiques et anévrismes cérébraux<br />

D - l’existence d’une corrélation entre l’apparition de macrokystes et la sévérité de la maladie<br />

7/ Quels sont les risques évolutifs de la dysgénésie biliaire de la PKAR ?<br />

A - l’hypertension portale<br />

B - la cholangite aiguë<br />

C - le cholangiocarcinome<br />

D - l’insuffisance hépatocellulaire<br />

2


Autoévaluation<br />

Reins kystiques de l’enfant<br />

Réponses<br />

1/ Devant un diabète de type MODY5 et une maladie kystique, quel gène muté est le plus<br />

vraisemblablement en cause ?<br />

La réponse est : C<br />

2/ Quand faut-il penser à rechercher une mutation du gène TCF2 ?<br />

Les réponses sont : A, B, D<br />

3/ En cas d’IMG ou de mort fœtale in utero, le diagnostic de polykystose récessive<br />

nécessite :<br />

Les réponses sont : B, C<br />

4/ Quelles sont la ou les maladies à transmission autosomique récessive ?<br />

Les réponses sont : B, D<br />

5/ Quels sont les gènes impliqués dans la formation du cil primaire ?<br />

Les réponses sont : B, C, D, E<br />

6/ Qu’est-ce qui caractérise la polykystose autosomique dominante ?<br />

Les réponses sont : A, C<br />

7/ Quels sont les risques évolutifs de la dysgénésie biliaire de la PKAR ?<br />

Les réponses sont : A, B, C


Autoévaluation<br />

Atteintes rénales des cytopathies mitochondriales<br />

Questions<br />

1/ Concernant la chaîne respiratoire mitochondriale, quelles sont les propositions<br />

exactes ?<br />

A - elle est située dans la membrane interne des mitochondries<br />

B - la majorité des protéines qui la constitue est codée par le génome mitochondrial<br />

C - elle représente la principale source d’énergie des cellules de l’organisme<br />

D - elle est responsable de la phosphorylation oxydative<br />

E - elle est constituée d’une quinzaine de complexes multi-enzymatiques<br />

2/ Concernant les mitochondries, quelles sont les propositions exactes ?<br />

A - les mitochondries suivent une hérédité mendélienne<br />

B - en cas d’hétéroplasmie, il existe un mélange d’ADNmt normal et d’ADNmt muté<br />

C - les hommes transmettent leur ADNmt aussi bien à leurs filles qu’à leurs garçons<br />

D - chaque mitochondrie contient plusieurs copies d’ADNmt<br />

E - le cycle de Krebs se produit dans les mitochondries<br />

3/ L’atteinte rénale des cytopathies mitochondriales peut se manifester par :<br />

A - un syndrome néphrotique<br />

B - une glumérulonéphrite extramembraneuse<br />

C - une tubulopathie proximale<br />

D - des lésions glomérulaires de hyalinose segmentaire et focale<br />

E - une hypodysplasie rénale<br />

4/ Au cours de l’exploration d’un patient atteint d’une cytopathie<br />

mitochondriale :<br />

A - la lactatémie peut être augmentée<br />

B - la glycémie peut être augmentée<br />

C - les corps cétoniques diminuent après les repas<br />

D - il faut rechercher une acidurie organique en cas de tubulopathie proximale<br />

E - on retrouve le plus souvent une mutation de l’ADNmt<br />

1


5/ Quels sont, parmi les propositions suivantes, les modes possibles de<br />

transmission des cytopathies mitochondriales ?<br />

A - transmission autosomique dominante<br />

B - transmission liée à l’X<br />

C - transmission maternelle<br />

D - transmission autosomique récessive<br />

2


Autoévaluation<br />

Atteintes rénales des cytopathies mitochondriales<br />

Réponses<br />

1/ Concernant la chaîne respiratoire mitochondriale, quelles sont les propositions<br />

exactes ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

2/ Concernant les mitochondries, quelles sont les propositions exactes ?<br />

Les réponses sont : B, D, E<br />

3/ L’atteinte rénale des cytopathies mitochondriales peut se manifester par :<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

4/ Au cours de l’exploration d’un patient atteint d’une cytopathie mitochondriale :<br />

Les réponses sont : A, B, D<br />

5/ Quels sont, parmi les propositions suivantes, les modes possibles de transmission des<br />

cytopathies mitochondriales ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, D


Autoévaluation<br />

Hyperoxalurie primitive<br />

Questions<br />

1/ L’association lithiase – néphrocalcinose – insuffisance rénale chronique chez un<br />

enfant de 4 ans évoque :<br />

A - une cystinurie<br />

B - une hypercalciurie idiopathique<br />

C - une hyperoxalurie primitive<br />

D - un syndrome de Bartter<br />

E - un rachitisme hypophosphatémique lié à l’X<br />

2/ La fréquence de l’hyperoxalurie primitive de type 1 :<br />

A - est d’une naissance vivante sur 20 000 en France<br />

B - est d’une naissance vivante sur 120 000 en France<br />

C - est d’une naissance vivante sur 1 000 000 en France<br />

D - est augmentée lorsque le taux de consanguinité est élevé<br />

E - est plus importante dans le sexe masculin<br />

3/ Le déficit enzymatique responsable de l’hyperoxalurie de type 1 :<br />

A - est limité à l’alanine-glyoxylate aminotransférase<br />

B - est strictement localisé au niveau rénal<br />

C - est strictement localisé au niveau hépatique<br />

D - est systémique<br />

E - est toujours associé à un déficit en phosphate de pyridoxine<br />

4/ Dans l’hyperoxalurie primitive de type 1, la surcharge systémique débute lorsque la<br />

filtration glomérulaire est inférieure, au stade de dialyse, à :<br />

A - 90 ml/min pour 1,73 m²<br />

B - 70 ml/min pour 1,73 m²<br />

C - 40 ml/min pour 1,73 m²<br />

D - 15 ml/min pour 1,73 m²<br />

1


5/ Quelle (s) présentation (s) biologique (s) est (sont) en faveur d’une hyperoxalurie<br />

primitive de type 1 ?<br />

A - cristaux de whewellite + hyperoxalurie + hyperglycolaturie<br />

B - cristaux de weddellite + hyperoxalurie + hypercalciurie<br />

C - cristaux de whewellite + hyperoxalurie + glycolaturie normale<br />

D - cristaux de whewellite + hyperoxalurie + hyperglycératurie<br />

E - cristaux de weddellite + hyperoxalurie + hyperglycolaturie<br />

6/ Chez un patient atteint d’hyperoxalurie primitive de type 1 en insuffisance rénale<br />

terminale, l’hémodialyse :<br />

A - permet d’attendre une transplantation rénale dans de bonnes conditions<br />

B - doit être évitée au profit d’une transplantation combinée hépatorénale préemptive<br />

C - est efficace sur la base de 3 × 6 heures par semaine, avec une membrane de haute perméabilité<br />

D - peut être proposée sur la base de séances quotidiennes de 6 heures<br />

E - peut être quotidienne et couplée à la dialyse péritonéale pour améliorer l’épuration de l’oxalate<br />

7/ L’étude moléculaire du cas index en cas d’hyperoxalurie primitive de type 1 :<br />

A - concerne principalement une délétion majoritaire<br />

B - permet d’établir un pronostic fiable<br />

C - donne accès au diagnostic prénatal<br />

D - peut contribuer à orienter la prise en charge thérapeutique<br />

E - est indispensable avant d’envisager une transplantation combinée hépatique et rénale<br />

8/ L’hyperoxalurie primitive de type 2 :<br />

A - est cliniquement moins sévère que l’hyperoxalurie primitive de type 1<br />

B - correspond à une hyperabsorption d’oxalate au niveau intestinal<br />

C - est secondaire à un déficit en arginine glyoxylate-aminotransférase<br />

D - peut bénéficier d’un traitement par la pyridoxine<br />

E - impose généralement une transplantation combinée hépatique et rénale précoce<br />

2


Autoévaluation<br />

Hyperoxalurie primitive<br />

Réponses<br />

1/ L’association lithiase – néphrocalcinose – insuffisance rénale chronique chez un<br />

enfant de 4 ans évoque :<br />

La réponse est : C<br />

2/ La fréquence de l’hyperoxalurie primitive de type 1 :<br />

Les réponses sont : B, D<br />

3/ Le déficit enzymatique responsable de l’hyperoxalurie de type 1 :<br />

Les réponses sont : A, C<br />

4/ Dans l’hyperoxalurie primitive de type 1, la surcharge systémique débute lorsque la<br />

filtration glomérulaire est inférieure, au stade de dialyse, à :<br />

La réponse est : C<br />

5/ Quelle (s) présentation (s) biologique (s) est (sont) en faveur d’une hyperoxalurie<br />

primitive de type 1 ?<br />

Les réponses sont : A, C<br />

6/ Chez un patient atteint d’hyperoxalurie primitive de type 1 en insuffisance rénale<br />

terminale, l’hémodialyse :<br />

Les réponses sont : B, D, E<br />

7/ L’étude moléculaire du cas index en cas d’hyperoxalurie primitive de type 1 :<br />

Les réponses sont : C, D, E<br />

8/ L’hyperoxalurie primitive de type 2 :<br />

La réponse est : A


Autoévaluation<br />

Rejets aigus humoraux<br />

Questions<br />

1/ Parmi les propositions suivantes concernant les lésions histologiques définissant le<br />

rejet aigu humoral dans la classification de Banff 03, laquelle (lesquelles) est (sont)<br />

exacte(s) ?<br />

A - nécrose tubulaire<br />

B - œdème interstitiel<br />

C - capillarite glomérulaire<br />

D - capillarite péritubulaire<br />

2/ Parmi les propositions suivantes concernant la définition du rejet aigu humoral dans<br />

la classification de Banff 03, laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

A - les anticorps antidonneurs doivent être mis en évidence sur la biopsie rénale<br />

B - les anticorps antidonneurs doivent être mis en évidence dans le sang du receveur<br />

C - le marquage pour le C4d doit être positif sur les glomérules en immunopéroxydase<br />

D - nécrose tubulaire, capillarite et nécrose artérielle fibrinoïde peuvent être décrites<br />

3/ Parmi les propositions suivantes concernant les rejets humoraux, laquelle (lesquelles)<br />

est (sont) exacte(s) ?<br />

A - le rejet hyperaigu est lié à des anticorps antidonneurs présents au moment de la greffe chez le<br />

receveur<br />

B - le rejet aigu humoral implique la présence dans le sang du receveur d’anticorps antidonneurs, le<br />

plus souvent anti-HLA<br />

C - le rejet aigu accéléré est synonyme de rejet aigu humoral<br />

D - le rejet chronique humoral est caractérisé par la présence d’une glomérulopathie d’allogreffe<br />

4/ Parmi les propositions suivantes concernant le traitement du rejet aigu humoral,<br />

laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

A - les anticorps antilymphocytes sont indispensables<br />

B - les échanges plasmatiques doivent être prolongés au moins 2 mois<br />

C - le rituximab est un anticorps monoclonal anti-CD19<br />

D - les immunoglobulines polyvalentes sont utilisées à la dose de 0,1 g/kg/j pendant 8 jours<br />

E - toutes les propositions sont fausses<br />

1


5/ Parmi les propositions suivantes concernant le diagnostic du rejet aigu humoral,<br />

laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

A - la biopsie rénale est indispensable au diagnostic<br />

B - la positivité du C4d est indispensable au diagnostic<br />

C - la présence d’anticorps antidonneurs dans le sang périphérique est indispensable au diagnostic<br />

D - la présence de lésions de capillarite est indispensable au diagnostic<br />

2


Autoévaluation<br />

Rejets aigus humoraux<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les propositions suivantes concernant les lésions histologiques définissant le<br />

rejet aigu humoral dans la classification de Banff 03, laquelle (lesquelles) est (sont)<br />

exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

2/ Parmi les propositions suivantes concernant la définition du rejet aigu humoral dans<br />

la classification de Banff 03, laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : B, D<br />

3/ Parmi les propositions suivantes concernant les rejets humoraux, laquelle (lesquelles)<br />

est (sont) exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, D<br />

4/ Parmi les propositions suivantes concernant le traitement du rejet aigu humoral,<br />

laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

La réponse est : E<br />

5/ Parmi les propositions suivantes concernant le diagnostic du rejet aigu humoral,<br />

laquelle (lesquelles) est (sont) exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : A, C


Autoévaluation<br />

Traitements immunosuppresseurs :<br />

mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

Questions<br />

1/ Parmi les mécanismes d’action des inhibiteurs de la calcineurine, lesquels sont<br />

exacts ?<br />

A - ils doivent se fixer sur des protéines de la famille immunophiline<br />

B - ils bloquent le deuxième signal<br />

C - ils inhibent la synthèse d’interleukine-2<br />

D - ils bloquent la translocation nucléaire de NFAT<br />

E - leur cible est l’inosine monophosphate déshydrogénase<br />

2/ Quels sont les principaux effets de la ciclosporine ?<br />

A - le diabète et les troubles de la glycorégulation<br />

B - la néphrotoxicité<br />

C - l’hirsutisme<br />

D - l’alopécie<br />

E - l’hypertrophie gingivale<br />

3/ Concernant l’utilisation du tacrolimus, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - il entraîne une augmentation du risque de diabète<br />

B - il est associée à une moindre incidence de rejet aigu qu’un traitement par la ciclosporine<br />

C - il peut être responsable d’une alopécie<br />

D - il pourrait être adapté selon le génotype du patient<br />

E - il entraîne des phénomènes de néphrotoxicité chronique<br />

4/ Concernant les inhibiteurs de mTOR, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - ils bloquent le premier signal<br />

B - ils agissent sur la calcineurine<br />

C - ils présentent une néphrotoxicité chronique<br />

D - ils peuvent être responsables de pneumopathie<br />

E - ils ont des propriétés anti-tumorales<br />

5/ Concernant l’acide mycophénolique, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - il inhibe la voie de sauvetage des bases puriques<br />

1


B - il est associé à des troubles digestifs parfois sévères<br />

C - il présente un cycle entérohépatique<br />

D - il n’est pas myélotoxique<br />

E - il est un puissant agent antiviral<br />

6/ Concernant le rituximab, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

A - c’est un anticorps monoclonal chimérique<br />

B - c’est un anticorps monoclonal humanisé<br />

C - sa cible est la molécule CD20<br />

D - il permet une déplétion efficace des plasmocytes<br />

E - il est associé à des phénomènes de première dose<br />

2


Autoévaluation<br />

Traitements immunosuppresseurs :<br />

mécanismes d’action et utilisation clinique<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les mécanismes d’action des inhibiteurs de la calcineurine, lesquels sont<br />

exacts ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

2/ Quels sont les principaux effets de la ciclosporine ?<br />

Les réponses sont : B, C, E<br />

3/ Concernant l’utilisation du tacrolimus, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, D, E<br />

4/ Concernant les inhibiteurs de mTOR, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : D, E<br />

5/ Concernant l’acide mycophénolique, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : B, C<br />

6/ Concernant le rituximab, quelles sont les affirmations exactes ?<br />

Les réponses sont : A, C, E


Autoévaluation<br />

Éthique et transplantation<br />

Questions<br />

1/ Dans quelles conditions le don de rein entre vifs est-il autorisé en France ?<br />

A - anonymat<br />

B - gratuité<br />

C - dans le cadre d’un cercle familial bien défini<br />

D - entre époux<br />

E - entre amis d’enfance<br />

2/ Dans quelles conditions le prélèvement d’organes cadavérique est-il autorisé en<br />

France ?<br />

A - après le constat de décès<br />

B - après consultation du registre national des refus<br />

C - après avoir vérifié auprès des proches que le défunt n’y était pas opposé<br />

D - en l’absence d’obstacle médicolégal<br />

E - lorsque toutes ces conditions sont réunies<br />

3/ Concernant le consentement au don d’organe en France, quelle(s) est (sont) les<br />

affirmation(s) exacte(s) ?<br />

A - il est explicite lorsqu’il s’agit d’un don entre vifs<br />

B - il est présumé dès lors qu’il s’agit d’un prélèvement d’organes cadavériques<br />

C - il est présumé lorsqu’il s’agit d’un prélèvement cadavérique et que le défunt était une personne<br />

adulte capable<br />

D - il est explicite et recueilli auprès des parents lorsqu’il s’agit d’un prélèvement cadavérique et<br />

que le défunt est un enfant<br />

E - il est non requis<br />

4/ En quoi le tourisme de transplantation se distingue-t-il du voyage pour<br />

transplantation ?<br />

A - il implique du trafic d’organes<br />

B - il implique du commerce de transplantation<br />

C - les ressources utilisées pour la transplantation de patients venant de l’extérieur d’un pays<br />

réduisent les capacités de ce pays à répondre aux besoins de transplantation de sa propre population<br />

D - toutes les propositions précédentes sont justes<br />

1


E - aucune de ces propositions n’est juste<br />

5/ Concernant la pénurie opérationnelle d’organes, quelle(s) est (sont) les affirmation(s)<br />

exacte(s) ?<br />

A - c’est une réalité internationale et croissante<br />

B - elle n’a pas d’impact sur les pratiques professionnelles<br />

C - elle est à l’origine de l’élargissement des critères d’acceptation des greffons<br />

D - c’est un bon motif pour ne pas inscrire sur la liste d’attente les candidats les plus âgés<br />

E - elle favorise les dérives vers le commerce et le trafic d’organes<br />

2


Autoévaluation<br />

Éthique et transplantation<br />

Réponses<br />

1/ Dans quelles conditions le don de rein entre vifs est-il autorisé en France ?<br />

Les réponses sont : B, C, D<br />

2/ Dans quelles conditions le prélèvement d’organes cadavérique est-il autorisé en<br />

France ?<br />

La réponse est : E<br />

3/ Concernant le consentement au don d’organe en France, quelle(s) est (sont) les<br />

affirmation(s) exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : A, C, D<br />

4/ En quoi le tourisme de transplantation se distingue-t-il du voyage pour<br />

transplantation ?<br />

La réponse est : D<br />

5/ Concernant la pénurie opérationnelle d’organes, quelle(s) est (sont) les affirmation(s)<br />

exacte(s) ?<br />

Les réponses sont : A, C, E


Autoévaluation<br />

Éducation thérapeutique<br />

Questions<br />

1/ Parmi les lieux suivants, l’éducation thérapeutique peut se faire :<br />

A - dans une pharmacie<br />

B - dans une association de patients<br />

C - dans un réseau<br />

D - à l’hôpital<br />

E - au domicile du patient<br />

2/ L’éducation thérapeutique concerne essentiellement :<br />

A - la maladie aiguë<br />

B - la psychiatrie<br />

C - la maladie chronique<br />

D - le handicap<br />

3/ Quels sont les arguments qui fondent l’éducation thérapeutique ?<br />

A - l’amélioration de l’observance thérapeutique<br />

B - l’amélioration des dépenses de santé<br />

C - la réduction des séjours hospitaliers<br />

D - la responsabilisation du patient dans ses soins<br />

4/ L’éducation thérapeutique doit être proposée :<br />

A - dès l’annonce de la maladie<br />

B - à tout patient qui demande à en bénéficier<br />

C - en cas de survenue de complications<br />

D - en cas d’échec thérapeutique<br />

E - régulièrement tout au long de la maladie chronique<br />

5/ Combien de patients sont atteints d’insuffisance rénale terminale en France ?<br />

A - 20 000<br />

B - 45 000<br />

C - 60 000<br />

D - 100 000<br />

1


6/ Quelle est la première étape de la démarche d’éducation thérapeutique ?<br />

A - la réalisation d’un diagnostic éducatif<br />

B - l’annonce<br />

C - l’information donnée par le soignant<br />

D - les séances d’éducation<br />

E - l’évaluation<br />

7/ Quelles sont parmi les propositions celles qui peuvent être des activités d’autosoin en<br />

néphrologie ?<br />

A - prise de la pression artérielle<br />

B - savoir repérer une perte de motivation<br />

C - savoir parler de la maladie à son entourage<br />

D - maintenir une bonne estime de soi<br />

E - avoir une connaissance des équivalents alimentaires<br />

2


Autoévaluation<br />

Éducation thérapeutique<br />

Réponses<br />

1/ Parmi les lieux suivants, l’éducation thérapeutique peut se faire :<br />

Les réponses sont : A, B, C, D, E<br />

2/ L’éducation thérapeutique concerne essentiellement :<br />

La réponse est : C<br />

3/ Quels sont les arguments qui fondent l’éducation thérapeutique ?<br />

Les réponses sont : A, B, C, D<br />

4/ L’éducation thérapeutique doit être proposée :<br />

Les réponses sont : A, B, C, D, E<br />

5/ Combien de patients sont atteints d’insuffisance rénale terminale en France ?<br />

La réponse est : C<br />

6/ Quelle est la première étape de la démarche d’éducation thérapeutique ?<br />

La réponse est : A<br />

7/ Quelles sont parmi les propositions celles qui peuvent être des activités d’autosoin en<br />

néphrologie ?<br />

Les réponses sont : A, B, E

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