N° 281 - Mai 2012 (.pdf - 3809 Ko) - Portail de la Recherche et des ...
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C’est bien <strong>la</strong> faute à Colomb<br />
La «découverte» par erreur<br />
du continent américain par<br />
Christophe Colomb a sans<br />
aucune doute enrichi plusieurs pays<br />
du bassin méditerranéen mais a<br />
eu, localement, un eff<strong>et</strong> bien moins<br />
positif: <strong>la</strong> réduction dramatique <strong>de</strong>s<br />
popu<strong>la</strong>tions locales. Les causes sont<br />
connues: guerres, esc<strong>la</strong>vage mais<br />
aussi contamination acci<strong>de</strong>ntelle <strong>de</strong><br />
popu<strong>la</strong>tions qui n’étaient pas aptes à<br />
lutter contre <strong>de</strong>s «germes» inconnus<br />
pour eux, importés du Vieux Mon<strong>de</strong>.<br />
Et c’est ainsi que <strong>la</strong> variole, <strong>la</strong> grippe<br />
<strong>et</strong> <strong>la</strong> rougeole ont eu raison d’une<br />
partie importante <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion,<br />
estimée par certains historiens à<br />
90%. Pourtant, d’autres auteurs affirment<br />
que l’eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> colonisation<br />
par les conquistadores sur <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion<br />
d’Américains du 16 e siècle a<br />
été exagérément amplifié, les popu<strong>la</strong>tions<br />
locales s’étant assez rapi<strong>de</strong>ment<br />
reconstituées ensuite.<br />
Comme souvent, ce sont <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s<br />
circonstanciées effectuées avec les<br />
outils contemporains offerts par <strong>la</strong><br />
biologie molécu<strong>la</strong>ire qui ont permis<br />
<strong>de</strong> trancher. Jusqu’à preuve<br />
du contraire en tout cas. Des chercheurs<br />
ont décidé d’étudier l’ADN<br />
mitochondrial d’indiens américains<br />
d’aujourd’hui <strong>et</strong> celui qui a été<br />
exhumé <strong>de</strong> vestiges anciens. C<strong>et</strong><br />
ADN-là (propre aux mitochondries,<br />
<strong>de</strong>s p<strong>et</strong>its organites présents dans<br />
les cellules) présente <strong>de</strong>ux particu<strong>la</strong>rités:<br />
il résiste plutôt bien à l’eff<strong>et</strong> du<br />
temps <strong>et</strong> il n’est hérité que <strong>de</strong>s mères,<br />
via l’ovule originel. La fréquence <strong>de</strong>s<br />
mutations i<strong>de</strong>ntifiées a été confrontée<br />
au temps chronologique avec<br />
l’appoint d’outils statistiques adaptés.<br />
Et le résultat vient confirmer <strong>la</strong><br />
théorie <strong>la</strong> plus dramatique: une rupture<br />
apparaît en eff<strong>et</strong> il y a 5 siècles<br />
dans ce que les historiens appellent<br />
<strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion effective, celle constituée<br />
<strong>de</strong>s femmes en âge d’avoir <strong>de</strong>s<br />
enfants. La réduction a même été<br />
quantifiée <strong>et</strong> estimée à 50%.<br />
Apparue il y a 15 000 ans, <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion<br />
américaine native aurait connu<br />
une croissance continue qui semble<br />
avoir culminé il y a 5 000 ans avant<br />
<strong>de</strong> se stabiliser. Puis il y a eu c<strong>et</strong>te<br />
«rupture» désormais mise en évi<strong>de</strong>nce<br />
vers le 16 e siècle. Depuis, une<br />
croissance continue est à nouveau<br />
objectivée.<br />
En dépit du caractère scientifique<br />
indéniable <strong>de</strong> l’approche, les résultats<br />
restent controversés. <strong>Mai</strong>s<br />
c’est une affaire <strong>de</strong> spécialistes. Sur<br />
le fond, ce<strong>la</strong> ne change évi<strong>de</strong>mment<br />
pas grand chose aux réalités<br />
historiques. <br />
Science 2011; 334: 1335<br />
Jean-Michel DEBRY · BIOLOGIE<br />
Moins virils<br />
qu’avant ?<br />
une étu<strong>de</strong> américaine<br />
- portant sur une popu<strong>la</strong>tion<br />
C’est<br />
<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 600 Philippins - qui<br />
l’a établi: être un jeune père <strong>de</strong> famille<br />
(âgé <strong>de</strong> 21 à 26 ans) mène à une production<br />
quotidienne <strong>de</strong> testostérone plus<br />
faible que celle d’hommes <strong>de</strong> même âge<br />
mais sans enfant. Interpel<strong>la</strong>nt lorsqu’on<br />
se souvient que l’hormone en question<br />
est celle qui détermine le caractère mâle.<br />
Le jeune papa-gâteau serait-il donc<br />
un peu… gâteux aussi ? Rien n’interdit<br />
<strong>de</strong> le penser pour certains d’entre eux;<br />
pourtant, il y a peu à craindre <strong>de</strong> ce<br />
côté. D’abord, bien qu’effectivement<br />
plus réduites, les valeurs n’en sont pas<br />
moins normales. Ce qui est déjà rassurant.<br />
Ensuite, les dosages ont été réalisés<br />
sur <strong>la</strong> salive, le matin. Or, on sait<br />
que <strong>la</strong> concentration en testostérone<br />
peut varier d’un moment à l’autre <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> journée chez l’homme jeune <strong>et</strong> celui<br />
qui découvre les joies <strong>de</strong> <strong>la</strong> paternité<br />
découvre aussi souvent celles <strong>de</strong>s nuits<br />
courtes <strong>et</strong> perturbées. Il y a donc peutêtre<br />
un rapport <strong>de</strong> cause à eff<strong>et</strong> à rechercher<br />
<strong>de</strong> ce côté. Et puis finalement, n’y<br />
a-t-il pas un eff<strong>et</strong> «feedback» entre c<strong>et</strong>te<br />
production hormonale <strong>et</strong> le réel désir<br />
sexuel d’un couple jeunes parents ?<br />
On en <strong>la</strong>isse l’appréciation à chacun. Que<br />
les pères <strong>de</strong> fraîche date n’en viennent<br />
pas à maudire leurs rej<strong>et</strong>ons pour autant:<br />
ceux-ci ne sont vraisemb<strong>la</strong>blement pour<br />
rien dans ce discr<strong>et</strong> infléchissement hormonal<br />
qui, soit dit entre parenthèses,<br />
n’affecte ni <strong>la</strong> libido ni, bien entendu,<br />
<strong>la</strong> fertilité. Chaque p<strong>la</strong>isir <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie se<br />
savoure sur le moment. La paternité en<br />
fait partie. Si ce<strong>la</strong> justifie une mo<strong>de</strong>ste<br />
économie hormonale, ce n’est finalement<br />
pas bien grave… <br />
Proceedings of the National Aca<strong>de</strong>my of<br />
Science; 2011: 16194-16199<br />
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