N° 281 - Mai 2012 (.pdf - 3809 Ko) - Portail de la Recherche et des ...
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Il n’y a pas <strong>de</strong> p<strong>et</strong>ites économies<br />
L<br />
es insectes ne figurent assurément pas au nombre <strong>de</strong>s animaux <strong>de</strong> gran<strong>de</strong><br />
taille; si on excepte quelques coléoptères, longicornes <strong>et</strong> phasmes tropicaux,<br />
ils sont même plutôt discr<strong>et</strong>s; ce qui ne les empêche pas <strong>de</strong> se<br />
rappeler <strong>de</strong> temps en temps à notre bon (<strong>et</strong> plus souvent mauvais) souvenir à<br />
l’occasion <strong>de</strong> l’une ou l’autre piqûre. En revanche, nombre d’entre eux savent<br />
se montrer particulièrement discr<strong>et</strong>s par <strong>la</strong> taille, à l’image <strong>de</strong> Megaphragma<br />
mymaripennis, une guêpe parasite dont le corps n’excè<strong>de</strong> guère… 200 microns<br />
<strong>de</strong> long; un cinquième <strong>de</strong> millimètre, par conséquent ! À titre <strong>de</strong> comparaison,<br />
certains organismes unicellu<strong>la</strong>ires comme <strong>la</strong> paramécie - un cilié <strong>de</strong>s eaux<br />
douces - peuvent atteindre 300 microns <strong>de</strong> long.<br />
C<strong>et</strong>te Megaphragma est donc spécialement p<strong>et</strong>ite, on l’aura compris; presqu’un<br />
modèle du genre. Pourtant, elle a tous les attributs <strong>de</strong> son groupe: trois paires<br />
<strong>de</strong> pattes, une paire d’ailes, une tête, un thorax, un abdomen… mais tout p<strong>et</strong>its,<br />
p<strong>et</strong>its. Et l’économie a été poussée particulièrement loin. Si <strong>la</strong> mouche domestique,<br />
qui n’est déjà pas géante, compte 340 000 neurones dans ce qui lui sert<br />
<strong>de</strong> cerveau, notre lilliputienne n’en compte que 4 600. Et ce n’est pas tout. Pour<br />
réduire poids <strong>et</strong> volume, 95% <strong>de</strong> ces cellules neurales ont perdu leur noyau; soit<br />
une économie <strong>de</strong> 50% du poids <strong>de</strong> l’organe concerné !<br />
Pourquoi une telle miniaturisation ? On s’interroge. Sans doute l’animal miniaturisé<br />
est-il plus en accord avec <strong>la</strong> niche qu’il occupe <strong>et</strong> avec <strong>la</strong> taille <strong>de</strong>s proies<br />
qu’il parasite. On conviendra tout <strong>de</strong> même qu’il se situe au niveau du record<br />
mondial ! <br />
Nature 2011; 480: 294<br />
l y a qu quel elques e ann nnée ées, s <strong>de</strong>s botanistes ont<br />
eu l’i ’ dé dée <strong>de</strong> rep<strong>la</strong>nter er d<strong>de</strong>s<br />
ébéniers (Diospyro<br />
ros egr<strong>et</strong>tatum) ) sur r un une e p<strong>et</strong>ite île <strong>de</strong> l’océan n<br />
indi dien d’où, à for orce d’exp xplo loitation sans contr t ôl ô e,<br />
l’es espè p ce a dispa p ru. Ma <strong>Mai</strong>s is cc<strong>et</strong><br />
<strong>et</strong>te t belle intenti tion on n’a ’<br />
pa pas s été su s ivie i <strong>de</strong>s effe ff<strong>et</strong>s ts esc scom omptés <strong>et</strong> t le les s habitants<br />
s <strong>de</strong> l’île aux Aigr<strong>et</strong>tes n’ont nt pas as vu réappa<br />
paraî a tre l’essence noire aussi ab abon ondamment<br />
qu’ils l’auraient souhaité.<br />
L’ébène <strong>et</strong> <strong>la</strong> tortue<br />
Qu Quel elqu ques es ssci<br />
c en e tifiques appelés à <strong>la</strong> rescousse<br />
po pour ur rec eche herc rche h r <strong>la</strong> raison <strong>de</strong> ce re<strong>la</strong>tif échec<br />
en ont nt lev evé le l mystère: l’absence <strong>de</strong> tortues !<br />
Eu Eux auss ssi i di disp sparus du lieu, ces reptiles p<strong>la</strong>ci<strong>de</strong>s<br />
ét étai aien ent <strong>de</strong> <strong>de</strong>s s consommateurs avi<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s fruits<br />
<strong>de</strong> d l’a ’arbre. La ddigestion<br />
faisant son œuvre, les<br />
graines étaient re reje j<strong>et</strong>é t es un peu plus tard nanties<br />
d’une gangue d’un fe fertilisant garanti 100% bio.<br />
On a donc réintroduit l’animal aussi; en<br />
l’occurrence <strong>la</strong> tortue géante Aldabrachelys<br />
gigantea, venue d’une autre île du même océan.<br />
Quelques es années<br />
<strong>de</strong> présence conjointe ont<br />
suffi: auj ujourd rd’h ’hui, i le les ébéniers colportés par les<br />
re rept p iles besogneux <strong>et</strong> gourmands commencent<br />
à pousser un peu partout dans l’île, à <strong>la</strong> satisfaction<br />
<strong>de</strong>s futurs exploitants locaux.<br />
Par parenthèse, le processus <strong>de</strong> dissémination<br />
évoqué n’est pas exceptionnel <strong>et</strong> connaît <strong>de</strong>s<br />
développements fréquents chez nous aussi; il<br />
ne n s’agit pas d’ d ébène mais bien <strong>de</strong> saules ou<br />
d’autr t es essen ence ces s locales; quant aux tortues<br />
gé géantes, ell lles trouvent un équivalent bien <strong>de</strong><br />
ch chez ez nnous,<br />
sous <strong>la</strong> for orme d’oiseaux frugivores ou<br />
granivores e . La présence d’arbustes à l’aplomb <strong>de</strong><br />
perchoirs divers en est une preuve permanente<br />
dans les es campagnes c<br />
! <br />
Natu ture re 201 20<br />
1; 4473:<br />
8<br />
Jean-Michel DEBRY · BIOLOGIE<br />
A: Megaphragma; B: paramécie; C: amibe<br />
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