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1 Nancy VENEL Chercheur associée au CADIS (EHESS) Muslims ...

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pratiquants. Ils ont transmis leur islam avec conformisme et rigueur à leurs enfants. Au sein<br />

du foyer, l’interdit de toute promiscuité homme/femme est respecté. On peut relever par<br />

ailleurs que les néo-commun<strong>au</strong>taires ont tous été confrontés à des situations d’échec scolaire,<br />

ils ont parfois connu la petite délinquance et entretiennent un sentiment d’indignité sociale.<br />

Le rattachement à l’Umma, leur permet de se constituer un espace protégé, de se retrouver sur<br />

un territoire convivial, une niche identitaire rassurante, extérieure (voire étrangère) à<br />

l’hostilité de l’espace national dont ils se sentent exclus.<br />

Conclusion<br />

Ce panorama des types d’articulation, repérés chez une population de jeunes d’origine<br />

maghrébine, entre les modes de croire et les modes d’expérimentation citoyennes révèle une<br />

réelle hétérogénéité dans les manières de vivre son islamité et les façons d’appréhender son<br />

appartenance à la France.<br />

Les manières « d’être d’ici de ces jeunes » sont le fruit de combinaisons exclusives,<br />

parfois conflictuelles, entre francité, religion, culture d’origine, mémoire collective postcoloniale,<br />

etc.<br />

Leurs rapports à la France résultent de géométries singulières et inédites, chacun<br />

cherchant à se créer ses propres possibilités pour conjuguer de manière non antagoniste<br />

altérité et vie commune, particularité et universalité.<br />

La typologie reflète les tensions propres à la citoyenneté française qui oscille entre<br />

particularisme et universalisme ; citoyenneté identitaire et citoyenneté contractuelle. La nation<br />

française se pose comme universelle, elle s’est constituée politiquement (contre l’Ancien<br />

Régime et le féodalisme) et non par rapport à des mœurs ou des traditions particuliers. Mais<br />

parallèlement pour se renforcer, elle a eu besoin de se constituer un ancrage dans le temps<br />

avec la création de mythes unificateurs. La nation française est ainsi basée sur un vouloir<br />

vivre ensemble, tout <strong>au</strong>tant que sur l’enracinement dans un terroir.<br />

La religion d’origine de ces jeunes issus de l’immigration, qu’elle soit pour l’heure<br />

assumée, recomposée ou rejetée, fonctionne, certes, comme une « empreinte identitaire »,<br />

mais ne constitue pas leur seul et unique pôle de référence. Le repli sur l’identité religieuse et<br />

l’exhibition de marqueurs islamiques, bien qu’ils constituent des comportements<br />

particulièrement bruyants à l’heure actuelle, restent minoritaires, la plupart considérant la<br />

religion comme une affaire privée.<br />

L’un des premiers constats de ma thèse est l’absence de la centralité de l’identité nationale<br />

dans les conceptions ordinaires de la citoyenneté. Le rapport <strong>au</strong> territoire se trouve redéfini, la<br />

« naturalité » de l’identité française repensée, l’appartenance nationale de fait inégalement<br />

subjectivée. La dimension identitaire de la citoyenneté tend à décliner <strong>au</strong> profit de sa<br />

dimension participative. La citoyenneté « ordinaire » se définit plus, pour une partie des<br />

jeunes rencontrés, <strong>au</strong> regard des liens qui unissent les citoyens entre eux.<br />

La citoyenneté fait l’objet d’appropriation et de bricolages inédits en fonction de la<br />

position des agents dans l’espace social. Chacun opère une sélection, une mise en conformité,<br />

ou affirme la complémentarité de ses diverses appartenances. Les représentations que chacun<br />

se fait de son rôle de citoyen sont elles <strong>au</strong>ssi plurielles. Les ressorts de la participation et de<br />

l’engagement dans la sphère publique, ainsi que l’ampleur de l’investissement assumé ne sont<br />

pas identiques pour les accommodateurs, les Français « pratiquants, ainsi que pour les<br />

contractants et les néo-commun<strong>au</strong>taires.<br />

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