Télécharger le PDF "8 artistes" - Karine Maire

Les vitraux éphémères
et l’embrasement
de la croix
(Installation et vidéo, 2005)
Jean-Jacques
PIGEON
Jean-Jacques Pigeon, artiste associé à l’événement Lâchés dans la nature, présente deux œuvres in situ,
conçues avec et pour les lieux. L’une se situe dans la cour de l’espace Condorcet entre la médiathèque
et les services socioculturels de la mairie de Viry-Châtillon, l’autre dans l’espace d’exposition. Pour la
deuxième année, le récolteur de vieilles branches est revenu et occupe cette fois-ci les hauteurs inaccessibles
de l’ancienne chapelle. L’artiste réveille la mémoire des lieux en accrochant des branches sur
la silhouette lumineuse des vitraux masqués à l’occasion des expositions. Par son œuvre, il révèle l’origine
du lieu, la chapelle. En outre, il imagine dès son projet d’inventer d’éventuels nouveaux vitraux.
Deux temps se confondent donc : la trace et le devenir. Les brindilles peintes en noir reprennent la
plombure - le châssis des vitraux - et celles en blanc et gris tracent la barlotière (ses traverses). Le
dessin des brindilles à contre-jour souligne celui du vitrail qui se révèle. La fragilité du bois rappelle
celle du vitrail mais son éphémérité va à l’encontre de la conservation des œuvres cultuelles et culturelles.
Comment l’œuvre s’intègre-t-elle au lieu ? Dans quelle mesure le lieu acquiert-il un autre
regard ? sont des questions que soulève la réalisation in situ. Le rebut des déchets verts révèle le
sacré.
Dans un même souci de révéler le lieu, Jean-Jacques Pigeon projette une vidéo retraçant au ralenti
l’embrasement d’une croix. A travers le dispositif de mise en vue et l’utilisation du ralenti, l’artiste a
voulu donner l’impression d’une succession de peintures et non d’une narration qui se déroulerait et
se saisirait dans la durée. La compréhension du spectateur est alors rendue possible à tout moment
de la projection. Les branches cernent la croix dessinée en réserve pour signifier la désaffectation du
lieu de culte et peut-être l’abandon de la religion par ses sujets. Quelle autre croyance la remplacerait
? L’intention de l’artiste n’est pas de blasphémer. Souhaitons que la réception de cette œuvre -
qui ne peut se faire qu’au travers de réactions vives - adoucisse les passions pour laisser place à
l’échange. La croix et la décomposition du bois par le feu donnent l’occasion de parler de la mort et
de convoquer d’autres interpellations ancrées dans une mémoire collective et personnelle.
action culturelle
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