01.07.2013 Views

La traduction caduque, retraduction et contexte culturel (en ...

La traduction caduque, retraduction et contexte culturel (en ...

La traduction caduque, retraduction et contexte culturel (en ...

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

différ<strong>en</strong>ce <strong>en</strong>tre la « version, plus littérale, plus attachée aux procédés<br />

propres de la langue originale », <strong>et</strong> la « <strong>traduction</strong>, plus occupée du fond<br />

des p<strong>en</strong>sées, plus att<strong>en</strong>tive à les prés<strong>en</strong>ter sous la forme qui peut leur<br />

conv<strong>en</strong>ir dans la langue nouvelle ».<br />

Louis de Fontanes, dont la <strong>traduction</strong> s’inscrit dans la période fin<br />

de siècle, est le seul à faire référ<strong>en</strong>ce au caractère particulier du coupl<strong>et</strong><br />

héroïque, <strong>en</strong> expliquant sa démarche, qui consiste à varier le rythme,<br />

susp<strong>en</strong>dre, réunir <strong>et</strong> détacher les vers tour à tour (p. 63). C<strong>et</strong>te <strong>traduction</strong><br />

reflète une compréh<strong>en</strong>sion différ<strong>en</strong>te du concept de fidélité. Le<br />

traducteur explique sa démarche <strong>en</strong> se rapportant à la métaphore de la<br />

copie, fort usitée dans le discours portant sur la <strong>traduction</strong> : « J’ai donc<br />

copié L’Essai sur l’homme avec l’exactitude la plus scrupuleuse. Je dois<br />

r<strong>en</strong>dre compte des principes que j’ai suivis. J’ai cherché d’abord quels<br />

avoi<strong>en</strong>t été ceux de Pope. (…) Ceux qui <strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t la langue de Pope<br />

verront que, si son tal<strong>en</strong>t disparoît dans mes vers, le caractère de sa<br />

philosophie s’y r<strong>et</strong>race fidèlem<strong>en</strong>t » (pp. 62-63).<br />

Sous l’étiqu<strong>et</strong>te de l’<strong>et</strong>hnoc<strong>en</strong>trisme<br />

Le XVIII e siècle est souv<strong>en</strong>t considéré comme une période de la<br />

<strong>traduction</strong> <strong>et</strong>hnoc<strong>en</strong>trique 1 . Néanmoins, <strong>en</strong> analysant de manière<br />

att<strong>en</strong>tive les détails du discours portant sur l’étranger, on peut observer<br />

que c<strong>et</strong>te vision est réductrice, puisqu’il y a plusieurs directions qui se<br />

contredis<strong>en</strong>t parfois à l’intérieur de la même argum<strong>en</strong>tation. Des normes<br />

opposées fonctionn<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong> parallèle <strong>et</strong> les préjugés qui se<br />

form<strong>en</strong>t à la faveur de c<strong>et</strong> espace des contradictions représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t un<br />

obj<strong>et</strong> d’analyse intéressant. Le besoin de préserver le familier, de se<br />

protéger contre l’agressivité de la nouveauté, sous-t<strong>en</strong>du par la<br />

naissance de tout préjugé, est doublé, de manière paradoxale, par un<br />

besoin perman<strong>en</strong>t de transgression. N’oublions pas que l’on se<br />

confronte, dans le <strong>contexte</strong> du XVIII e siècle, à un espace où le<br />

mouvem<strong>en</strong>t d’affranchissem<strong>en</strong>t des superstitions <strong>et</strong> des préjugés du<br />

passé est fondé sur la création d’une « opposition abstraite <strong>en</strong>tre muthos<br />

<strong>et</strong> raison », d’un schéma de « dépassem<strong>en</strong>t du muthos par le logos » 2 .<br />

Le préjugé fondam<strong>en</strong>tal de c<strong>et</strong>te époque est « le préjugé contre les<br />

préjugés <strong>en</strong> général <strong>et</strong> la récusation de la tradition qui <strong>en</strong> résulte » 3 .<br />

Les observations sur la langue anglaise, telles qu’elles ressort<strong>en</strong>t<br />

des préfaces des <strong>traduction</strong>s qui représ<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t notre obj<strong>et</strong> d’analyse,<br />

1<br />

v. BERMAN, Antoine, Pour une critique des <strong>traduction</strong>s : John Donne, Gallimard,<br />

Paris, 1995, p. 54.<br />

2<br />

GADAMER, Hans-Georg, op. cit., p. 111.<br />

3 Ibid., p. 108.<br />

153

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!