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Prendre sa carte 1920-2009 - Fondation Gabriel Péri

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[Le graphique d’évolution générale des effectifs se trouve en annexe<br />

(graphique 1)]<br />

1. Un héritage en peau de chagrin.<br />

En 1913, la SFIO approchait les 75 000 adhérents ; en<br />

1918, ses effectifs sont réduits de moitié. La fin de la guerre<br />

relance la machine, au-delà des attentes : 130 000 adhérents en<br />

1919, près de 180 000 au moment du Congrès de Tours<br />

(tableau 9). Les gros bataillons se trouvent dans le Nord, en Îlede-France,<br />

en Al<strong>sa</strong>ce, en Aquitaine, dans le sillon alpin et, dans<br />

une moindre mesure, dans le centre et sur le littoral méditerranéen<br />

(<strong>carte</strong> 1 en annexe). La vague d’adhésions de l’aprèsguerre<br />

se fait sur la base du gauchissement de la ligne politique<br />

du parti, qui attire une masse de jeunes profondément marqués<br />

par la guerre et par son refus. Jeunes ouvriers, syndicalistes révolutionnaires,<br />

anciens combattants et intellectuels pacifistes se<br />

retrouvent dans le désir d’un socialisme régénéré, retrouvant la<br />

combativité révolutionnaire d’antan. Ce sont eux qui, sur fond<br />

d’échecs du mouvement ouvrier, font basculer la SFIO du côté<br />

de Moscou. Marcel Sembat, hostile à l’adhésion à la Troisième<br />

Internationale, peut bien es<strong>sa</strong>yer de tourner vers Londres les<br />

regards des congressistes de Tours : il <strong>sa</strong>it, à l’ouverture du<br />

Congrès, qu’il a partie perdue.<br />

En octobre 1921, le nouveau Parti communiste annonce<br />

qu’il a récupéré environ 60 % des effectifs de la vieille SFIO<br />

(110 000 adhérents). La <strong>sa</strong>tisfaction est de courte durée : neuf<br />

mois plus tard, un quart du patrimoine adhérent a fondu et près<br />

d’un tiers supplémentaire l’année suivante. Le reflux révolutionnaire<br />

du début des années vingt, les hésitations stratégiques de<br />

l’Internationale communiste (IC) et les aléas de la stalini<strong>sa</strong>tion<br />

du mouvement communiste réduisent l’organi<strong>sa</strong>tion comme<br />

peau de chagrin. Un léger regain, entre 1923 et 1926, laisse<br />

espérer une amélioration, confirmée par les résultats relativement<br />

rassurants des législatives de 1924 et par la sensible progression<br />

des effectifs de la CGTU (de 370 000 en 1921 à<br />

465 000 en 1926). C’est dans cette période, en tout cas, qu’arrive<br />

une nouvelle génération de jeunes ouvriers qui constitueront<br />

le noyau thorézien des années suivantes (Léon Mauvais,<br />

Henri Jourdain, Henri Tanguy dit « Rol », Auguste Lecœur).<br />

Hélas pour eux, le retour de bâton ne se fait guère attendre<br />

: en 1929, le parti est passé au-dessous de la barre des<br />

30 000 ; entre 1927 et 1930, il a perdu la moitié de ses adhérents,<br />

tout comme la CGTU dans la même période (tableau 10).<br />

La « bolchevi<strong>sa</strong>tion » (1924-1926), puis l’orientation de « classe<br />

contre classe » se paient cher. Le tissu d’organi<strong>sa</strong>tion s’est resserré<br />

de façon drastique 51 : un peu plus de 3 300 cellules en 1927, environ<br />

1 350 quatre ans plus tard, les cellules d’entreprises pas<strong>sa</strong>nt de<br />

900 à 300 dans cette période. Dans l’ensemble, les pertes du PCF<br />

sont d’autant plus sévères qu’il est au départ mieux doté : le Nord,<br />

la région lyonnaise et la région marseillaise ont perdu plus de la<br />

moitié de leurs adhérents entre 1927 et 1933. Résistent un peu<br />

mieux le Languedoc et surtout la région parisienne, dont la part<br />

se renforce sensiblement dans l’ensemble militant : 35 % en<br />

1934, contre un peu plus de 18 % en 1927.<br />

51 Serge Wolikow, thèse citée.<br />

Données nouvelles sur les effectifs du PCF<br />

2. L’élan du Front populaire.<br />

1933 est la dernière année maigre pour le PCF ; à la fin<br />

de la suivante, ses effectifs ont plus que doublé. En 1936, c’est<br />

l’envolée et le pic est atteint à l’automne de 1937 avec un<br />

dénombrement officiel de près de 330 000 adhérents, plus de<br />

dix fois au-dessus du niveau de la décennie commençante. Les<br />

deux années suivantes sont moins fastes, à l’image d’un Front<br />

populaire qui se délite : quand la guerre se déclenche, le parti est<br />

repassé sous la barre des 300 000, <strong>sa</strong>ns doute même pour se rapprocher<br />

des 200 000 <strong>carte</strong>s placées auprès des adhérents.<br />

En 1937, seuls 23 départements se trouvent en deçà des<br />

effectifs socialistes de <strong>1920</strong>, et notamment dans le Nord-Pas-de-<br />

Calais, où les outrances sectaires des années trente ont fait le<br />

bonheur de la SFIO « maintenue ». Dans l’ensemble, les années<br />

du Front populaire ont conforté l’implantation militante initiale.<br />

Le Nord prolongé vers l’Ile-de-France, l’Est minier et<br />

métallurgique, le Rhône, la Loire et le sillon alpin, la Gironde<br />

et le littoral méditerranéen constituent les pivots de l’espace<br />

militant (<strong>carte</strong> 2).<br />

La <strong>carte</strong> de la seconde moitié des années trente exprime<br />

l’apogée du communisme prolétarien, jeune, urbain et masculin,<br />

centré sur la périphérie parisienne. Nous sommes alors au<br />

cœur des « années Thorez, années Gabin », ce moment où le<br />

monde ouvrier accède à la reconnais<strong>sa</strong>nce statutaire et symbolique<br />

et sort de la marginalité à laquelle les « classes dangereuses<br />

» étaient vouées jusqu’alors.<br />

3. Un parti nationalisé.<br />

La Seconde Guerre mondiale, plus encore que la première,<br />

fait fondre le corps militant, sous la triple pression de la<br />

mobili<strong>sa</strong>tion, de la répression (celle du gouvernement français,<br />

puis de l’occupant et de Vichy) et de la démorali<strong>sa</strong>tion qui suit<br />

le pacte germano-soviétique. L’organi<strong>sa</strong>tion communiste éclate<br />

et ne se reconstitue, lentement, qu’après l’invasion de la France.<br />

Impossible d’en mesurer exactement les contours : Philippe<br />

Buton suggère avec vraisemblance une fourchette qui va de<br />

quelque 5 000 adhérents à l’automne 1939 à 60 000 à l’été de<br />

1944.<br />

La Libération bouleverse la donne. Les effectifs explosent<br />

de nouveau : 60 000 à l’été de 1944, entre 240 et 370 000 à la<br />

fin de l’année, un effectif encore doublé un an plus tard. Le<br />

point culminant est atteint en 1947 (le tableau 6 en rappelle<br />

les estimations). À l’exception de la Lozère, aucun département<br />

ne se situe au-dessous du seuil des 1 000 adhérents officiellement<br />

dénombrés. La géographie de l’adhésion se nationalise,<br />

comme celle du vote : là encore, l’archipel tend à se faire continent<br />

(<strong>carte</strong> 3). Depuis 1937, le parti fait plus que tripler son<br />

volume en Bretagne, dans le Sud-Ouest et dans les Alpes. Sa<br />

progression est inférieure à la moyenne dans la Région parisienne,<br />

dans le Nord, la région lyonnaise et l’Est. Il a conforté<br />

son implantation sur les contreforts du Massif central et réussi<br />

<strong>sa</strong> percée en Bretagne. En revanche, il recule en Al<strong>sa</strong>ce, où le<br />

communisme local s’est déchiré avant-guerre face à la revendication<br />

al<strong>sa</strong>cienne.<br />

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