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dimanche 26 juillet

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"« TROISIÈME ANNÉE : N° 1<strong>26</strong> ■ '»"»' iiiiiiiMiiimiiiHuii^niiHiiiiiiiiiiin 30 Centimes "»»"'


1IIIIIMI DIMANCHE»ILLUST^.Ë IMIIIIIIIMIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIlllllllllUlllIlIllIllllllllMIIIIIIinillllllllllllll £ IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIUIIIlllllllllllllllllllllllllllllllllllllIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII uni LE <strong>26</strong> JUILLET 1925Jl'uimiin<br />

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France, Colonies, Régions occupées.<br />

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DISTRACTIONS DU DIMANCHE<br />

LISTE DES LAURÉATS ET DES SOLUTIONS POUR<br />

LES PROBLÈMES POSES DANS LES NUMÉROS DE JUIN<br />

ES concurrents qui nous ont adressé des<br />

solutions exactes pour tous les problèmes<br />

(en tenant compte de la faute d'impression<br />

commise dans la donnée des nombres<br />

enfermés, où 30 devait remplacer 39, e^ que<br />

la plupart des lecteurs ont rectifiée d'euxmêmes),<br />

ont été classés d'après leurs réponses<br />

à la question des Mots continus, qui, aux termes<br />

du règlement, devait servir à les départager.<br />

Dans la réponse la meilleure à cette question,<br />

toutes les lettres données ont été utilisées et le<br />

nombre des mots formés se réduit à quinze.<br />

Voici ces mots, dont certains ne figurent que<br />

dans le gros dictionnaire Larousse :<br />

Vesou — Animal — Trapp — Brisant —<br />

Sole — Bruit — Roc — Travail — Mengel —<br />

Lavage — Lut — Anus — Bougie — Musicomane<br />

-— Lot.<br />

Voici les noms des gagnants :<br />

AVEC QUINZE MOTS<br />

M. BRICARD, 3 _ bis, rue Edmond-Nocard,<br />

Saint-Maurice (Seine) ;<br />

' M. ROBERT FROSSARD, 11, rue de Courcelles,<br />

Paris ;<br />

M. EDMOND OUDET, hospice de Brévannes<br />

(Seine-et-Oise).<br />

AVEC SEIZE MOTS<br />

M me SUZANNE RAGUIDEAU, Bellevue, à<br />

Montoire-de-Bretagne (Loire-Inférieure) ;<br />

M. }. DUBRETON, Émérainville, par Champsur-Marne<br />

(Seine-et-Marne).<br />

AVEC DIX-SEPT MOTS<br />

M. RENÉ PARAY, 9, place du Cloître, Soissons<br />

(Aisne) ;<br />

M 116 PHÉLIZOT, 40, rue Vauban, Colmar<br />

(Haut-Rhin) ;<br />

M. JULIEN PAINÇON, 76, rue de Romainville,<br />

Les Lilas (Seine) ;<br />

M. P. BRIZARD, 3, rue Saint-Benoît, Clermont-Ferrand<br />

(Puy-de-Dôme) ;<br />

M. CHARLES PÉTIAU, Froidestrées, par La<br />

Capelle (Aisne) ;<br />

M. PAUL DE BEAUVAIS, 2, avenue du Cimetière-Monumental,<br />

Rouen (Seine-Inférieure).<br />

AVEC DIX-HUIT MOTS<br />

M. DUBOURDIEU, <strong>26</strong>, rue de La Roche,<br />

Pontoise (Seine-et-Oise) ;<br />

M. DES PONTEILLES, 82, rue Bonaparte,<br />

Paris ;<br />

M. HENRI MOREUX, sanatorium de La<br />

Guiche (Saône-et-Loire) ;<br />

M. MARTIN, 17, rue de Chéroy, Paris ;<br />

M. G. MORIN, 137, avenue Edouard-<br />

Vaillant, Billancourt (Seine) :<br />

M. PAUL BŒHMER, 42, rue de Trévise,<br />

Paris :<br />

M. FRANCIS COURTIEUX, 248, boulevard<br />

Baille, Marseille ;<br />

M. REISS, 92, rue du Mont-Cenis, Paris ;<br />

M. DROUARD, 11, rue Brown-Séquard,<br />

Paris ;<br />

M. BADET, 3, rue Paira, Meudon (Seineet-Oise).<br />

Suivant leur classement, ces lauréats recevront trois bouteilles Grand<br />

Marnier, cordon rouge ; un choix lingerie ; un litre d'eau de Cologne<br />

ou des parfums des premières marques, ces derniers dans des flacons<br />

artistiques de Lalique, un porte-mines Cico Eversharp, etc.<br />

SOLUTION DES PROBLEMES POSÉS DANS LE NUMÉRO DE JUILLET<br />

I. — (7 juin) LES PRÉFECTURES<br />

17 N commençant par le bâton le plus long, les lettres<br />

que figurent tous les bâtons sont : ROUEN<br />

NEVERSAILLES.<br />

On obtient, de la sorte, pour les quatre trajets .<br />

Rouen — Nevers — Versailles — Arras — Rennes.<br />

II. - (7 juin)<br />

LES DEUX LOTS DE RIVIÈRES<br />

Creuse — Adour — Rance — Maine — Seine— Tarn.<br />

Durance — Escaut — Isère — Orne — Marne - - Ain.<br />

III. - (7 juin)<br />

SUR TOUTES LES LIGNES<br />

©<br />

IV. - (7 juin)<br />

LES VILLES ARROSÉES<br />

Valence, Rhône — An-<br />

Vers, Escaut — Moulins,<br />

Allier — Florence, Amo —<br />

Bagdad, Tigre — Belgrade,<br />

Danube — Cracovie, Vistule.<br />

©<br />

l. — (14 juin) LES CARRÉS CONCENTRIQUES<br />

Les quatre prénoms sont :<br />

Alphonse — Rosemonde — Victorien — Angelina.<br />

II. — (14 juin)<br />

LES NOMBRES ENFERMÉS<br />

J.<br />

III. — (14 juin) LES<br />

PIÈCES COMMUNICANTES<br />

I. — (21 juin) LES PHRASES DÉFICURÉES<br />

Ciel trop pur ne laisse pas voir d'où vient le vent.<br />

L'amour-propre est souvent blessé, mais n'en meurt jamais.<br />

Plat réchauffé et plat rejroidi ont perdu tout leur prix.<br />

II. — (21 juin) CHEMIN ALPHABÉTIQUE ET MUSICAL<br />

IlaMSEPISIFXÉlalIaVQLutÉLUIDC<br />

D (SA) fa mi R S T.<br />

// a aimé ce pays et s'y est fixé. Là il a vécu et lutté et,<br />

lui décédé, sa jemme y est restée.<br />

IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIMIIIIIIlllllllllllllMIIIIIIIIIIIIIIIIIIIlllllllllllllllllllllllllllIllllllHllllllllllllllllllllillll'll"<br />

QUAND-- DOIT-OM REMONTER SA MOITRE ?<br />

BEAUCOUP de gens ont l'habitude de remonter<br />

leur montre à un moment quelconque<br />

de la journée, et sans prêter d'attention à l'acte<br />

qu'ils accomplissent.<br />

Cependant, l'exactitude et la durée d'une<br />

montre dépendent beaucoup du moment où<br />

son propriétaire la remonte, et cette importante<br />

question a été discutée et résolue par la<br />

corporation des horlogers, en Angleterre.<br />

Plusieurs membres prétendaient que l'opé-<br />

ration devait être exécutée la nuit. Ils considéraient<br />

qu'au matin le grand ressort était plus<br />

froid et moins souple qu'après avoir été porté<br />

dans la poche pendant toute la journée.<br />

Mais le président a fait valoir qu'il y avai<br />

avantage à remonter une montre le matin, cart<br />

pendant le jour, la montre est soumise à de,<br />

mouvements et à des déplacements irréguliers<br />

et anormaux, qu'elle supporte plus facilement<br />

quand elle est remontée à fond.<br />

: III111111111111111 i 1111111111 II 11111II11II II III ■ 111111111111111111 ■ : 1111111 II 111 Illlllllllllllllllll IIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIII1IIIIIIIIIIIIIIII<br />

©<br />

SOLUTION<br />

DU PROBLÈME<br />

DES<br />

MOTS CROISÉS<br />

PARU LE<br />

19 JUILLET 1925<br />

DIMANCHE-ILLUSTRE<br />

RÉTRIBUE<br />

LES PHOTOGRAPHIES<br />

QUI LUI SONT ENVOYÉES<br />

PAR SES LECTEURS<br />

DES QU'ELLES ONT ÉTÉ PUBLIÉES


niiiiniii L£ <strong>26</strong> JUILLET 1925 nHiiiiiHiiiiiiiHiiiiiHiiiiiiiiiiiiiiiiiîiiiiiiiiiiiiiii IIIMIIIIIIIIIIIIIIIIIIUIIIIIIIIII 3 ■■■■■■■■■■iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiniiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii TROISIÈME ANNÉE : N° 1<strong>26</strong><br />

DlMANCHE-lLLUST<br />

ENTRE NOUS<br />

U allez-vous, cet été ?<br />

O — Je ne sais pas encore. Et vous ?<br />

— Moi non plus.<br />

— Nous nous y retrouverons peut-être.<br />

Seulement, s'ils y vont en auto, peut-être<br />

se retrouveront-ils dans l'autre monde. Que<br />

de gens, partis en limousine, changent brusquement<br />

de moyen de locomotion ! Ils<br />

prennent passage, moyennant une obole, sur<br />

la barque lente et silencieuse que conduit<br />

Caron... Le Styx devrait être indiqué — en<br />

noir — sur les cartes que consultent les<br />

chauffeurs, avant de s'élancer sur !a route<br />

à une vitesse de record. Les apprentis-morts<br />

vont vite, trop vite...<br />

L'automobilisme estival, tel que l'entendent<br />

un nombre croissant de " rois du<br />

volant , c'est quelque chose comme le<br />

choléra... Ce ne sont qu ecrabouillades,<br />

emboutissages et dispersions de débris<br />

humains, au bord des routes blanches.<br />

Chaque arbre se transforme en bec de gaz<br />

et les journaux n'ont plus assez de place pour<br />

publier la liste des victimes : elles sont trop !<br />

J'avais cependant entendu parler d'un<br />

certain code de la route... Mais ce code est<br />

comme l'autre. On l'ignore, on le dédaigne<br />

ou, tout au moins, on se dit :<br />

— Pas vu, pas pris !...<br />

Mais pourquoi n'avoir pas respecté les<br />

prescriptions du code de la route ? Pourquoi<br />

s'être montré indiscipliné, égoïste, vaniteux ?<br />

C est la vanité — surtout — qui est à<br />

l'origine de ces accidents... On veut épater,<br />

et on écrase les piétons, et on s'aplatit soimême<br />

sous une route plus ou moins caoutchoutée.<br />

* * *<br />

E besoin d'être admiré par la galerie est<br />

C la grande explication de toutes nos<br />

bêtises, de toutes nos folies et même de<br />

tous nos exploits.<br />

Le stupide chauffard qui, tous gaz dehors,<br />

joue au bolide sur la route ou dans la rue,<br />

est un cabotin désireux d'étonner les populations.<br />

Le cycliste falot qui pédale avec<br />

frénésie au milieu de la chaussée encombrée<br />

s'imagine qu'on le prend pour un " tour de<br />

France "... Mais un sentiment du même<br />

ordre anime, au fond, maints héros : Hercule<br />

n'accomplit ses fameux travaux que pour<br />

épater, lui aussi, la galerie. Il faut être un<br />

saint pour accomplir des exploits, tout seul,<br />

en plein désert...<br />

Nous plaçons notre vanité en toutes<br />

choses. Le jeune artiste s'enorgueillit de<br />

faire partie du groupe des " moins de trente<br />

ans ", mais s'il vieillit, il ne se montrera<br />

pas moins enchanté d'être du ' club des<br />

doyens" ".Le monsieur décoré est fier d'être<br />

décoré, mais le monsieur qui n'est pas décoré,<br />

se déclare ravi de ne pas porter à la boutonnière<br />

le signe de ce qu'il appelle la " servitude<br />

". Une de nos vedettes fut très flattée<br />

d'être lancée en Amérique comme la<br />

" femme la plus laide du monde ". Tel<br />

écrivain déclare avec morgue :<br />

— Mes tirages sont formidables... Mes<br />

livres se vendent à plus de cent mille ! La<br />

foule m'admire !...<br />

Tel autre de ses confrères répond avec<br />

hauteur :<br />

— Mes tirages sont nuls....Mes livres ne<br />

se vendent pas du tout. Je ne suis accessible<br />

qu'à quelques rares esprits d'élite.<br />

La vanité trouve toujours quelque coin<br />

pour se loger. Elle est le sentiment le plus<br />

naturel, le plus humain... Et la modestie<br />

n'est, le plus souvent, qu'une forme raffinée<br />

de cet amour-propre. Je me méfie, pour- ma<br />

part, des modestes. Et il me suffit de leur<br />

dire que leur effacement est très justifié,<br />

qu'ils ont raison de ne pas chercher à en<br />

faire accroire, pour que le mince vernis<br />

de leur modestie craque aussitôt.<br />

Le vaniteux, lui, se montre tel qu'il est...<br />

C'est un paon qui ne pousse pas la confiance<br />

en son chic naturel, jusqu'à se parer des<br />

plumes du geai !<br />

rSAN STYLO.<br />

REFLEXIONS DU DIMANCHE<br />

souvent, on entend des femmes déclarer<br />

qu'elles voudraient être des hommes, parce<br />

que les hommes ont la meilleure part en ce<br />

bas monde.<br />

Tout dépend de ce qu'on entend par la meilleure<br />

part. Les hommes doivent se dresser, s'élancer<br />

dans la bataille et lutter; les femmes restent à<br />

l'arrière pour organiser et conserver les résultats<br />

du combat. La femme est la gardienne du foyer<br />

tandis que l'homme en est le constructeur.<br />

Une femme est, par sa nature, un satellite. Elle<br />

est née pour être l'épouse et la mère, pour être<br />

l'âme du foyer. Certaines femmes, toutefois,<br />

n appartiennent pas à ce type. Elles veulent être,<br />

elles-mêmes, au cœur du combat.<br />

Elles ne peuvent pas s'exprimer par le moyen<br />

d'un homme, que ce soit la faute de leur nature<br />

ou celle des circonstances, et elles veulent frapper,<br />

elles-mêmes, le monde à leur façon.<br />

L'homme est tout naturellement le créateur et<br />

l'aventurier. C'est lui qui doit marcher en avant,<br />

courir les risques et assurer le progrès. La femme<br />

est l'organisatrice de la maison, elle tire parti des<br />

résultats amenés par l'effort de l'homme.<br />

Les femmes n'ont jamais été très grandes dans<br />

certaines voies. Il y. a eu peu de femmes poètes,<br />

prophètes ou hommes d'Etat, bien que la règle<br />

comporte quelques exceptions.<br />

Il n'y a ni justice ni bon sens à refuser aux<br />

femmes les droits dont jouissent les hommes.<br />

Partout, maintenant, les femmes peuvent faire<br />

du commerce ou diriger des affaires; en nombre<br />

de pays, elles ont le droit de vote.<br />

" Et même celles qui sont d'un esprit trop élevé<br />

pour avoir une pensée de revanche, ne peuvent<br />

qu'éprouver une satisfaction profonde à n'être<br />

plus traitées en inférieures au point de vue politique<br />

", a dit une féministe notoire.<br />

Il n'est pas sans danger, évidemment, d'enlever<br />

les barrières qui ont toujours été dressées autour<br />

des femmes, mais — cette même féministe nous<br />

le rappelle — les premiers fruits de l'instruction<br />

sont toujours empoisonnés, avec le temps seulement<br />

ils deviennent doux et bienfaisants.<br />

La nature humaine ne change pas, et; après<br />

les surprises du premier contact, la femme<br />

s'installera dans sa liberté et retrouvera sa personnalité<br />

éternelle.<br />

Un ennui pour les femmes qui s'occupent<br />

d'affaires, c'est qu'elles se heurtent constamment<br />

à l'élément personnel. Les hommes les considèrent<br />

d'abord comme des femmes — tout court -<br />

ensuite seulement comme des femmes d'affaires.<br />

Les hommes aiment les femmes du* type qui<br />

s'appuie. Le liseron qui s'enroule au saule. Ils<br />

aiment à protéger leurs compagnes. S'il arrive<br />

que la femme l emporte sur l'homme par les biens<br />

intellectuels ou matériels, une complication se<br />

trouve ajoutée au problème sentimental du couple.<br />

La femme la plus heureuse est, peut-être, celle<br />

qui dépend d'un homme dont elle est justement<br />

fière de dépendre. Celle qui a trouvé l'époux de<br />

ses rêves, éprouve de la pie à être simplement<br />

" la compagne ".<br />

io ife A<br />

LA SEMAINE PROCHAINE<br />

LUNDI 27 JUILLET<br />

Lever du soleil : 5 h. 18 - coucher : 20 h. 35.<br />

Lever de la lune : 10 h. 54- coucher: 22 h. 42.<br />

Le jour décroît : 1 m. matin ; 2 m. soir.<br />

Sainte NATHALIE . 208 e jour + 157.<br />

Courses de chevaux au Tremblay (Prix de<br />

La Flèche).<br />

MARDI 28 JUILLET<br />

Lever du soleil : 5 h. 18- coucher : 20 h. 34.<br />

Lune : (p. Q., 20 h. 23), 12 h. 3 - couch.: 23 h. 8.<br />

Le jour décroît : 1 m. matin ; 1 m. soir.<br />

Saint SAMSON : 209 e jour + 156.<br />

Courses de chevaux à Chantilly.<br />

MERCREDI 29 JUILLET<br />

Lever du soleil : 5 h. 21 - coucher : 20 h. 33.<br />

Lever de la lune : 13 h. 14 - coucher : 23 h. 37.<br />

Le jour décroît : 2 m. matin ; 1 m. soir.<br />

Sainte MARTHF r 2f 0» jour + F95.<br />

Courses de chevaux à Vichy (Prix Cérès).<br />

JEUDI 30 JUILLET<br />

Lever du soleil : 5 h. 22 - coucher : 20 h. 31.<br />

Lever de la lune : 14 h. 27 - coucher :<br />

Le jour décroît : 1 m. matin ; 2 m. soir.<br />

Saint ABON : 211 e jour + 154.<br />

Cyclisme : Bruxelles-Paris.<br />

Lever du soleil : 5 h. 24 - coucher : 20 h. 28.<br />

Lever de la lune : 16 h. 53 - coucher : 0 h. 53.<br />

• Le jour décroît : 1 m. matin ; 2 m. soir.<br />

Saint PIERRE-AUX-LIENS : 213 e jour + 152.<br />

Courses de chevaux à Deauville, Compiègne.<br />

DIMANCHE 2 AOUT<br />

Lever du soleil : 5 h. <strong>26</strong> - coucher : 20 h. 27.<br />

Lever de la lune : 17 h. 58 - coucher : 1 h. 46.<br />

Le iour décroît : 2 m. matin ; 1 m. soir.<br />

Saint ALPHONSE DE LrGuoKi : Hlv jour -f<br />

Cyclisme : Paris-Angers.<br />

Natation : Le Marathon nautique Corbeil-<br />

Paris (40 km.) ; championnats de France<br />

militaires de plongeons et de sauvetage au<br />

Stade des Tourelles.<br />

Aviron : Championnats de Paris à Juvisy,<br />

Coursés de chevaux à Caen, Compiègne,<br />

| Vichy (Grand Prix).<br />

AUJOURD'HUI DIMANCHE <strong>26</strong> JUILLET<br />

Automobile : Grand Prix de l'Automobile Club de France, à Montlhéry. — Natation<br />

: Traversée de Paris à la nage. — Courses de chevaux à Maisons-Laffitte<br />

(Omnium de deux ans), Vichy, Pont-l'Évêque, Les Andelys, Vittel.<br />

et<br />

SOYONS AU COURANT...<br />

...de la création d'une péniche-aquarium<br />

à l'Exposition des Arts décoratifs<br />

f\N vient d'inaugurer, aux Arts décoratifs.<br />

une péniche aménagée en un vaste<br />

aquarium, qui contient d'intéressantes et nombreuses<br />

variétés de poissons d'eau de mer et<br />

d eau douce. La péniche, amarrée à la berge du<br />

quai d'Orsay, est organisée à la manière des<br />

sous-sols du musée océanographique de Monaco.<br />

Les poissons des pays tropicaux évoluent<br />

dans l'eau à 25° : les poissons de mer auront,<br />

par procédé chimique, l'eau salée et fraîche<br />

qui leur est nécessaire, et l'on pourra ainsi<br />

effectuer d'intéressantes observations scientifiques<br />

et tenter de conserver, vivants, pour les<br />

besoins de l'alimentation, les homards et les<br />

langoustes. La péniche est donc, en outre, une<br />

sorte de laboratoire d'expériences.<br />

Les poissons les plus étranges ont été rassemblés<br />

là. On y voit les queues de Voiles japonais,<br />

dont les voiles transparents ont l'air de<br />

mousselines précieuses et qui coûtent jusqu'à<br />

3.000 francs. Les poissons du Brésil, dont le<br />

prix oscille entre 600 et 1.000 francs, présentent<br />

les formes les plus étranges. Voici les perches<br />

américaines, dont la nageoire dorsale est dotée<br />

d'un bizarre des in en forme d'oeil. Puis, les<br />

somptueux macropodes hindous.<br />

Il y a, également, des représentants des<br />

espèces communes de nos rivières : anguilles,<br />

gardons, tanches, brochets, et ces curieux<br />

poissons-chats importés de l'étranger, et dont<br />

la voracité est sans égale.<br />

A U point culminant<br />

trouve la douleur.<br />

de toute émotion, on<br />

La douleur est simplement la sonnette d'alarme<br />

dont se sert la Nature, pour nous annoncer que le<br />

délicat organisme de la vie est en danger. Si<br />

j'approche par trop ma main de la flamme d'une<br />

bougie, la sonnette m avertit que ma chair est<br />

exposée à une température trop élevée. La faim<br />

me prévient que mon corps est menacé d'épuisement,<br />

faute de substances étrangères pour l'alimenter.<br />

La fièvre, /es, frissons, les spasmes sont<br />

des signaux donnés par le centre vigilant de la<br />

vie.<br />

Aussi, lorsqu'une émotion outrepasse la limite<br />

de sécurité, la souffrance naît. On peut rire,<br />

manger, se reposer, jouer, s'exalter jusqu'à en<br />

avoir mal.<br />

Nous retirerons le maximum de satisfaction de<br />

la vie, non pas en augmentant, mais en modérant<br />

nos sensations agréables. Seul un insensé, pour<br />

avoir apprécié l'action stimulante d'un peu de vin,<br />

en boit jusqu'à l'ébriété ; ou, ayant pris plaisir à<br />

quelque distraction, ne fait plus que s'amuser,<br />

laisse ses sentiments s exalter jusqu'à la folie,<br />

ou même, ayant goûté la joie des émotions religieuses,<br />

se complaît dans une extase morbide.<br />

Tout ce qui constitue le lot commun des hommes<br />

est bon pour eux, à dose modérée. Il y a même dans<br />

les déceptions, les deuils, la solitude, l'humiliation<br />

et toutes les formes de la tristesse, une certaine<br />

douceur, un gain qui ajoute à la richesse, à la<br />

profondeur de la vie, s'il n'y a pas excès.<br />

La loi essentielle des deux, c'est l'ordre. Le<br />

secret du contentement, dans la vie, c'est la discipline<br />

de coi-même. FRANK CRÂNE.<br />

VENDREDI 31 JUILLET<br />

Lever du soleil : 5 h. 23 - coucher : 20 h. 30.<br />

Lever de la lune : 15 h. 41 - coucher : 0 h. 11.<br />

Le jour décroît : 1 m. matin ; 1 m. soir.<br />

Saint IGNACE DE LOYOLA : 212e jour + 153.<br />

Courses de chevaux à Vichy (Prix des<br />

Jouvenceaux), Pont-rEvêque.<br />

SAMEDI 1 ER ... d'un perfectionnement dans la photographie<br />

en couleurs<br />

jyroNSiEUR J. L. BRETON vient de présenter<br />

à l'Académie des Sciences un nouveau<br />

procédé dû à M. Gabriel-A. Rousseau, et<br />

concernant la photographie instantanée des<br />

couleurs.<br />

Les amateurs qui font de la photographie en<br />

couleurs,par procédé direct, savent que le temps<br />

de pose est relativement long.<br />

La nouvelle méthode est basée sur l'observation<br />

suivante : lorsque des rad<br />

AOUT<br />

: ations colorées<br />

traversent une ou plusieurs couches d'émulsions<br />

sensibles, les rayons bleus et v olets sont<br />

fortement absorbés, les rayons verts beaucoup<br />

moins et les rayons orangés pas du tout Cette<br />

absorpt'on peut s'expliquer par le travail qui<br />

se produit pendant l''mpression du sei d'argent<br />

par la 'umière (on sait que les sels d'argent<br />

entrent dans la composition de la pel icule<br />

sensible).<br />

Pour ''application pratique de cette théorie,<br />

l'inventeur superpose trois pellicules qui<br />

forment plaque unique et qui s'emploient, sans<br />

aucun écran, d^ns les appareils photographiques<br />

ordinaires.<br />

On peut facilement faire de l'irutantané au<br />

l/25 e de seconde, ce qui rend ce procédé tout<br />

à fait pratique pour les ama'eurs.<br />

... des performances d'un authentique<br />

fakir hindou, à Paris<br />

possède depuis quelques jours, dans<br />

PARIS<br />

la personne d'un visiteur, Tahra Bey,<br />

un authentique fakir hindou.<br />

Tahra Bey se propose de faire des démons-<br />

faire. Récemment, au cours d'une séance privée,<br />

qui avait lieu devant de nombreuses personnalités<br />

scientifiques et littéraires, il a déjà donné<br />

un échantillon de ses talents. Le fakir se<br />

transperce le bras ou la jambe avec un stylet<br />

et fait ou non, à volonté, saigner ses plaies.<br />

Pour les personnes sensibles que ce spectacle<br />

émeut par trop, voici un autre exercice. Il se<br />

met, lui-même, en état tle catalepsie complète.<br />

On le hisse, alors, sur deux piliers espacés soutetenant<br />

la tête et les jambes. On place ensuite<br />

sur la poitrine du fakir une énorme pierre, que<br />

des aides brisent à coups de masse sans que le<br />

corps raidi du' fakir fas e le moindre mouvement.<br />

On l'enterre, enfin, pendant un quart<br />

d'heure. Il sort de son cercueil tout à fait frais<br />

et dispos. L'autohypnotisme semble jouer<br />

dans ces performances un rôle important.


nMiuiB DIMANCHE-ILLUSTRÉ ■■■iuiiiiiiiiHiuiuiiiiiiiinmiMHUimnim^HiiiiHiUi


miiuiiu LE 23 JUILLET 1323 iNiiiiiiMimiMniiniMiiimiiiNiiiimiiiinmiiiiiiimiiiniriiiiiiiiiiiiiiimiiiiiiiiiiii 5<br />

LES ROMANS DE LA VIE<br />

■■■■mil ■iiiiiiiiiniiiiiiiii iiiituîiiiiuuiHiiiiiiiuiii 1 itiuiiii DIMANCHE-ILLUSTRÉ MHIHUII<br />

GAMAIN, L'HOMME A L'ARMOIRE DE FER<br />

par JE AM-BERN ARD><br />

ARMI les chapitres les plus romanesques<br />

de l'histoire de la Révolution<br />

française, un des plus pittoresques<br />

est, assurément, celui de<br />

l'armoire de fer. Cette armoire, qui,<br />

en fait, était un gros coffret en fer,<br />

a joué un grand rôle dans le procès de<br />

Louis XVI, et a certainement contribué à sa<br />

condamnation. Nous savons aujourd'hui, sans<br />

aucun doute possible, quand, comment et par<br />

qui fut construit cette faméuse cassette. On<br />

connaît à peu près ce qu'elle contenait.<br />

Le seul côté mystérieux est celui relatif aux<br />

accusations sans preuves, tout à fait invraisemblables,<br />

portées plus tard par Gamain,<br />

qui prétendit avoir été empoisonné à la suite<br />

du travail qu'il avait effectué. Empoisonné<br />

par qui ? et pour quoi?<br />

Par Louis XVI, n'a pas craint d'affirmer<br />

Gamain, qui a ensuite changé de thèse et a<br />

accusé Marie-Antoinette. L'histoire en main,<br />

on peut dire cjue c'est là un double mensonge.<br />

Pourquoi 1 aurait-on empoisonné ? Pour<br />

anéantir le détenteur d'un secret qu'on lui<br />

avait spontanément et volontairement confié.<br />

Nous verrons, tout à l'heure, l'absurdité d'une<br />

pareille et si audacieuse affirmation de la part<br />

d'un homme dont le moins qu'on puisse penser,<br />

c est qu il manqua de reconnaissance, de<br />

probité morale et de dignité.<br />

Mais, tout d'abord, qu'était Gamain ? Un<br />

maître serrurier, ayant sa boutique à Versailles<br />

et dont Louis XVI, qui aimait, comme on sait,<br />

manier la lime et le marteau, avait demandé le<br />

concours pour les divers travaux de sa forge,<br />

très complète, située dans une des salles du<br />

rez-de-chaussée du château. Gamain était<br />

fort habile et il existe encore à Versailles un<br />

beau balcon, en fer forgé, qui est son ouvrage.<br />

Le roi avait fait avec lui de réels progrès dans<br />

le métier de serrurier et il fabriquait avec art<br />

des clefs de poche, des petits ouvrages de<br />

ferronnerie, de même qu'il savait à merveille<br />

réparer les pendules détraquées. Louis XVI,<br />

qui avait fait donner à son professeur manuel<br />

une pension de 200 livres en 1782, lui servait<br />

1.600 livres d'appointements.<br />

Quand, après les journées d'Octobre, les<br />

femmes ramenèrent la famille royale à Paris,<br />

le roi fit installer une forge au rez-de-chaussée<br />

des Tuileries et s'amusa à remettre en état les<br />

nombreuses serrures du château qui, par<br />

suite du long abandon où on l'avait laissé,<br />

étaient en mauvais état. A plusieurs reprises,<br />

il avait demandé à Gamain de venir lui donner<br />

un coup de main et toujours ce dernier avait<br />

été largement payé de sa peine.<br />

Au surplus, comme la plupart des petits<br />

bourgeois et des artisans aisés, Gamain avait<br />

accepté les idées nouvelles ; il fut élu membre<br />

du Conseil général de Versailles et il manifesta<br />

ses opinions en faisant placer sur le mur<br />

de sa maison, 9, rue Neuve, l'inscription<br />

suivante :<br />

Tyrans, tremblez que la foudre<br />

Bientôt ne vous réduise en poudre.<br />

Peut-être bien que Gamain, dont les relations<br />

journalières, et d'une certaine intimité avec le<br />

roi, rendaient les sentiments révolutionnaires<br />

suspects aux vigilants Versaillais, força un<br />

peu la note pour témoigner son civisme. Toujours<br />

est-il que Louis XVI, qui n'avait rien<br />

d'un tyran, et ne se considérait pas comme<br />

tel, ne s'offusqua point de ces sentiments<br />

patriotiques, malgré leur forme un peu dure<br />

et il demanda souvent, pendant les années<br />

1790 et 1791, à son ancien chef de ferronnerie,<br />

Gamain, de venir à Paris. Il arriva même que<br />

le maître serrurier passa plusieurs jours sans<br />

rentrer à Versailles. Devant l'enclume, le roi<br />

oubliait ses amertumes et les tristesses de sa<br />

situation.<br />

LE 21 mai 1792, comme Gamain était dans<br />

sa boutique, un cavalier s'arrêta devant sa<br />

porte -et appela le serrurier par son nom.<br />

Gamain sortit et reconnut Durey, un des<br />

valets de chambre du roi, qui aidait souvent<br />

le souverain dans ses travaux de la forge.<br />

— Monsieur Gamain, dit Durey, Sa Majesté<br />

m'envoie vous demander de venir aux Tuileries.<br />

Vous entrerez par les cuisines pour ne<br />

pas inspirer des soupçons.<br />

Le serrurier, craignant de se compromettre<br />

davantage aux yeux des jacobins de Versailles<br />

qui le surveillaient, ne dit ni oui ni non et ne<br />

bougea pas. Le lendemain, Durey revint et<br />

remit cette fois un billet de la main même du<br />

roi, dans lequel Louis XVI priait Gamain,<br />

en termes familiers, de venir le plus tôt qu'il<br />

pourrait, pour lui donner un coup de main<br />

pour un travail difficile et pressé. Le serrurier<br />

(F<br />

Parmi les chapitres les plus romanesques de l'histoire de la<br />

Révolution française, un des plus pittoresques est, assurément,<br />

celui de l'armoire de fer. Cette armoire qui, en fait, était un<br />

gros coffret en fer, a joué un grand rôle dans le procès de<br />

Louis XVI et a certainement contribué à sa condamnation.<br />

Dans cette page, notre collaborateur, Jean-Bernard, nous<br />

initie à la vie de Louis XVI, serrurier.<br />

J<br />

se décida et partit pour Paris, promettant à sa<br />

femme d'être de retour le soir même. Comme<br />

le lui avait recommandé Durey, il entra par les<br />

cuisines, par la porte des fournisseurs, sans<br />

éveiller l'attention de la sentinelle qui montait<br />

la garde. Il se rendit à la forge, qu'il connaissait<br />

bien, et il vit une porte de fer nouvellement<br />

forgée. Louis XVI entra et avec la familiarité<br />

dont il était coutumier avec son ancien maître de<br />

serrurerie, il lui dit, en lui frappant sur l'épaule :<br />

précieux. Nous avons percé la muraille à nous<br />

deux, Durey et moi. Toutes les nuits, Durey<br />

allait jeter les graviers à la Seine ; il faisait<br />

même plusieurs voyages dans la même nuit.<br />

— En quoi puis-je vous être utile ? demanda<br />

Gamain.<br />

— Il s'agit de placer la porte de fer que j'ai<br />

construite et que je t'ai montrée, à l'entrée de<br />

ce trou. Je ne sais comment m'y prendre. Mais<br />

je compte sur toi pour me rendre ce service.<br />

APPARITION DE L'OMBRE DE MIRABEAU DANS L'ARMOIRE DE FER, AUX TUILERIES, (d'après<br />

une estampe anonyme de l'époque). CETTE COMPOSITION SATIRIQUE REPRÉSENTE ROLAND,<br />

MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, FAISANT OUVRIR PAR GAMAIN, LARMOIRE DE FER, AU FOND DE<br />

LAQUELLE APPARAIT LE SPECTRE DE MlRABEAU.<br />

— Ah ! mon pauvre Gamain, voilà bien<br />

longtemps que nous ne nous sommes vus.<br />

Puis il lui montra une grosse cassette de<br />

fer dont la porte était fermée par une serrure<br />

et une clef qu il fit jouer :<br />

— Tu vois, dit le roi, j'ai exécuté tout cela,<br />

seul, en dix jours.<br />

Au cours de la conversation qui suivit, on<br />

causa des événements, de Versailles; Gamain<br />

parla de la suspicion où on le tenait au club<br />

et il prononça le mot de dévouement.<br />

— J'en étais bien sûr, lui dit Louis XVI ;<br />

j'étais certain de ta fidélité et c'est à elle que je<br />

me confie.<br />

Passant devant, accompagné de Durey, il<br />

conduisit Gamain dans un couloir qui faisait<br />

communiquer la chambre du roi avec celle<br />

du dauphin. Durey éclairait avec une bougie.<br />

Le souverain leva un panneau de la boiserie<br />

qui masquait un trou rond " d'à peu près<br />

deux pieds de diamètre, pratiqué dans le<br />

mur ".<br />

— J'ai aménagé cette cachette pour cacher<br />

I des bijoux, de l'argent et quelques objets<br />

Gamain ayant demandé du plâtre, se mit<br />

à fixer les gonds de la porte ; il fut aidé par le<br />

roi et par Durey. Le travail dura plusieurs<br />

heures et se prolongea assez avant dans la<br />

nuit. Plus tard, Gamain assura qu'il avait vu<br />

Louis XVI compter deux millions en louis<br />

d'or qu'il divisa en quatre sacs et qu'il plaça<br />

dans la cassette où Durey apporta des liasses<br />

de papier.<br />

Jusqu'ici, voici l'histoire telle qu'elle fut<br />

vérifiée, sans incidents et sans rien de bien<br />

extraordinaire. Mais le drame se dessine et le<br />

mystère commence. Sorti des Tuileries,"le<br />

serrurier rentra à Versailles, faisant le chemin<br />

à pied pendant la nuit. Il était malade ; mais il<br />

ne dit à personne la cause de cette maladie<br />

subite. Un médecin de Versailles, M. de Lameiran,<br />

et le chirurgien Voisin, qui soignèrent<br />

Gamain, ont délivré des certificats qui, plus<br />

tard, ont disparu des archives.<br />

A quelle époque et par qui eut lieu cette<br />

suppression ? O.n n'a pu l'établir. Sous la<br />

Restauration, a-t-on écrit. Rien ne le prouve,<br />

ce qui épaissit le mystère et permit des suppo-<br />

sitions qui ne s'appuient sur aucune preuve<br />

Mais suivons les événements.<br />

Le 18 novembre 1792, Gamain, complètement<br />

guéri, vient trouver le ministre de<br />

l'Intérieur Roland et lui apprend l'existence de<br />

la fameuse armoire de fer. Roland se rend aux<br />

Tuileries, mais au lieu de placer sous scellés<br />

les dossiers que contenait la cachette, il les<br />

emporta chez lui dans deux serviettes de<br />

maroquin. Il est certain que Roland expurgea<br />

les papiers, qu'il enleva tout ce qui aurait pu<br />

compromettre la Gironde et, notamment, la<br />

correspondance de Barnave à la reine. Deux<br />

jours après, Roland informa la Convention de<br />

cet évérj^ment, et on nomma une commission<br />

de vingt et un membres.<br />

Les pièces principales des documents recueillis<br />

étaient la correspondance de Louis XVI<br />

avec l'empereur d'Autriche à qui il demandait<br />

aide et protection, et des lettres au roi d'Angleterre<br />

dans le même sens. On retrouva aussi les<br />

lettres de Mirabeau, après que le grand orateur<br />

se fut engagé à soutenir la royauté. Toute la<br />

campagne de propagande royaliste dans les<br />

milieux révolutionnaires fut ainsi connue.<br />

Tout cela fut mis en œuvre dans le procès de<br />

Louis XVI et hâta sa condamnation. Louis XVI,<br />

ne sachant pas que la Convention possédait ces<br />

documents et songeant — a-t-on dit — à ne<br />

pas compromettre ceux qui l'avaient soutenu<br />

et servi, nia et protesta, ce qui, naturellement,<br />

se retourna contre lui.<br />

QUAND au tôle de Gamain, on s'est demandé<br />

pourquoi il avait commis cette dénonciation<br />

qui était une vilaine action, puisqu'il allait<br />

ainsi pousser à l'échafaud Louis XVI qui avait<br />

été toujours très bon pour lui, et avec qui il<br />

avait vécu dans une grande familiarité, durant<br />

les longues heures de travail dans la forge du<br />

château de Versailles. On n'a pu donner aucune<br />

explication. Dans tous les cas, le délateur ne<br />

réclama aucune récompense pour cet acte<br />

sans dignité. Le seul motif plausible, c'est que<br />

les idées révolutionnaires devenant plus vives<br />

à Versailles où le serrurier jouait un petit rôle<br />

comme membre du Conseil général, il devait<br />

être suspect à cause des longues relations qu'on<br />

lui connaissait avec le roi. Pour garder sa réputation<br />

de bon révolutionnaire, il se décida à<br />

livrer son élève au bourreau, autant qu'il le<br />

pouvait, pour faire tomber toutes ces suspicions<br />

et garder sa réputation jacobine.<br />

Notons qu'à ce moment Gamain ne parlait<br />

nullement d'empoisonnement, ce qui aurait<br />

été une explication de son attitude déloyale.<br />

On comprendrait qu'il eût dit : " Le roi a<br />

voulu m'empoisonner, je me vengé en racontant<br />

ce que je sais. " Mais, le 18 novembre 1792,<br />

rien de pareil ; le serrurier garde le silence<br />

sur ce fait. Peut-être n'a-t-il pas encore inventé<br />

la fable invraisemblable dont il se servira plus<br />

tard.<br />

Le 18 novembre 1792, il dénonce, mais se<br />

tait sur les motifs qui le font agir, et ce ne fut<br />

que le 8 floréal, an II (27 avril 1794), qu'il<br />

adressa une pétition à la Convention pour<br />

demander une pension comme victime de<br />

l'ancien roi, qui aurait tenté de l'empoisonner .<br />

" pour supprimer celui qui était dépositaire<br />

du secret de l'armoire de fer ".<br />

Il avait attendu que Louis XVI et Marie-<br />

Antoinette fussent montés sur l'échafaud, pour<br />

invoquer ce grief contre lequel tout proteste.<br />

Gamain, d'ailleurs,, varie dans sa version et<br />

même dans son système insoutenable. Il ment<br />

d'un côté ou de l'autre. Tout d'abord, il<br />

affirma que lorsqu'il eut terminé son travail,<br />

le 12 mai 1792, le roi lui présenta un verre de<br />

vin en lui disant : " Tu es tout en sueur, bois,<br />

tu l'as bien mérité ". Gamain aurait bu et,<br />

sorti des Tuileries, il serait tombé aux Champs-<br />

Elysées en proie à d'affreuses brûlures intérieures.<br />

Un Anglais, qui passait par hasard en<br />

voiture à cette heure tardive, dans ce quartier<br />

désert, l'aurait ramassé, conduit chez un<br />

apothicaire de la rue du Bac qui lui aurait<br />

administré une potion et l'aurait ainsi sauvé.<br />

L'Anglais l'aurait ensuite ramené à Versailles.<br />

C'était sombre et machiné comme un mélodrame.<br />

La Convention adopta cette version, et<br />

sur un rapport de Musset, ancien curé de<br />

Falleron (Vendée), qui avait précisément<br />

épousé la fille d'un serrurier, elle accorda une<br />

pension : Art. I. — François Gamain, empoisonné<br />

par Louis Capet, le 22 mai 1792, jouira<br />

d'une pension annuelle et viagère de 1.200 livres,<br />

à compter du jour de l'empoisonnement.<br />

Quelques mois plus tard, Gamain change<br />

complètement de système ; ce n'est plus le roi,<br />

c'est la reine qui l'a empoisonné.<br />

(Lire la suite page 10, 4' colonne).


fillliui DlMÂNCH&ILLUSTRÉ miiiiiniiiiiiiiMiiiMiiuiHiiiiiiuiiiiiiiiiiniiMiiiiiiiiiiiiiiimiiiiiiiiiiiiiiiiniiiii g iiiiiiiiiiiirtniiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiuiiiiiiiiniiiiiiiiiniiiniinninMiiiiiiiiiiniiiiiiiiii LE <strong>26</strong> JUILLET 1925 njiiiiiii<br />

LES CONTES D'ACTION<br />

LE COIN DANS LE CHÊNE<br />

LA nuit était descendue sur la forêt<br />

des Ardennes.<br />

MandaSeptantin, le sorcier, venait<br />

de retirer l'échelle de corde par<br />

laquelle il accédait à la grotte qui<br />

lui servait de maison ; il avait poussé<br />

la cheville de bois derrière la claie qui constituait<br />

la porte et s'apprêtait à dormir quand il<br />

entendit un appel.<br />

A gauche, dans les profondeurs du bois,<br />

des chouettes ululaient. En face, entre les<br />

rochers.-qui formaient, à dix pieds au-dessous<br />

de la grotte, un entablement large de vingt et<br />

surplombant un précipice, les yeux perçants du<br />

vieillard distinguèrent, dans un rayon de lune,<br />

une forme mouvante. Un homme approchait,<br />

tâtant du bâton les blocs de granit que contournait<br />

l'étroit sentier. Bientôt une voix<br />

s'éleva, implorante, mais contenue, comme si<br />

elle eût craint d'être entendue de trop loin :<br />

— Manda !... Manda Septantin !...<br />

— Qui va là ?<br />

— Déroule ton échelle et descends ! H faut<br />

qu'on te parle tout de suite !<br />

— Qui es-tu ?<br />

— Jacques Girondelle, des Trois-Moulins.<br />

— Le sabotier ?<br />

— Oui. Viens çà, Manda Septantin ! Ce<br />

que j'ai à te dire est sérieux.<br />

— Le bois n'est point sûr, la nuit : les<br />

bêtes rôdent. Il fait meilleur ici qu'en bas.<br />

Pourras-tu grimper ?<br />

— Oui. Dépêche-toi !... - ' .<br />

L'échelle tomba. Le visiteur, un jeune<br />

homme, gravit agilement les barreaux et pénétra<br />

dans la grotte en se courbant.<br />

— Je n'ai pas de chandelle, dit le vieillard.<br />

— N'importe ! Pas besoin d'y voir pour<br />

causer !<br />

— Que veux-tu de moi ?<br />

— Ton conseil et ton secours... On dit que<br />

tu peux des choses... J'ai un ennui, une peine.<br />

Peut-être saurais-tu m'en tirer ? Je te donnerai...<br />

— Nous ferons marché tout à l'heure.On<br />

paie selon le travail. Dis-moi ton-souci !<br />

Jacques s'assit sur l'escabeau unique. Manda<br />

resta debout. Dehors, les chouettes ululaient<br />

toujours.<br />

— Il y a, aux Trois-Moulins, commença<br />

le jeune homme, une fille qui a nom Lucette<br />

Bonnin. De son état, elle est couturière. Des<br />

cheveux noirs et les yeux bleus... Sais-tu cela,<br />

Manda Septantin ?<br />

Le sorcier ne répondit que par un grogne-<br />

ment.<br />

— Je l'aime ! continua Jacques d'une voix<br />

sourde. Mais... à l'aimer, nous sommes deux.<br />

Il y a aussi Bruno Vernaire, le bûcheron.<br />

Le grand Bruno... Nous aimons Lucette<br />

depuis plus d'un an. Elle le sait. Pourquoi fautil<br />

qu'elle ne se décide point à choisir entre<br />

nous, l'un ou l'autre ? Elle fait la coquette.<br />

Chaque fois que je la presse de me dire oui,<br />

à moi, elle me répond " qu'on a bien le<br />

temps d'être en ménage ", qu'il faut d'abord<br />

" voir un peu ", et qu'on verra à la saison<br />

prochaine ! Tantôt, je crois que Lucette m aime<br />

et tantôt qu'elle se moque de moi. Parfois, le<br />

<strong>dimanche</strong>, au sortir de la messe, elle me sourit,<br />

et puis, aux vêpres, elle se détourne ! Enfin, je<br />

suis trop malheureux. Il faut que cela finisse.<br />

Ma patience est usée. Il faut que la belle se<br />

décide. Si c'est Bruno qu'elle préfère, qu'elle<br />

le dise !... Est-ce qu'il n'y aurait pas un moyen<br />

de l'obliger à choisir ? Connaîtrais-tu ce moyen,<br />

Manda ? Voilà ce que je veux de toi. J'ai tout dit.<br />

L<br />

E sorcier hechait la tête, tirait sa barbe<br />

d'argent. Il réfléchit plusieurs minutes.<br />

Jacques attendait impatiemment. Enfin :<br />

— Deux écus tout de suite, fit Manda<br />

Septantin, en serrant fortement, de ses doigts<br />

secs, le bras du jeune homme, et puis un boisseau<br />

de fèves... Après... la chose ! Je sais comment<br />

Lucette Bonnin sera ta femme.<br />

— Ma femme !...<br />

— Je sais comment Lucette Bonnin pourra<br />

être la femme de Jacques Girondelle.<br />

— Ma femme ! Et quand nous marieronsnous<br />

?<br />

— Bientôt... bientôt ! Mais, d'abord, ce<br />

que je te demande, me le donnes-tu ?<br />

— Deux écus ! c'est beaucoup. C'est tout<br />

ce que j'ai dans ma bourse. Je ne comptais<br />

t'en laisser, pour te payer de ton service, que<br />

la moitié !<br />

— Tu ne seras donc jamais qu'une moitié<br />

d'amoureux !<br />

Et le vieillard montrait à Jacques l'échelle,<br />

dont l'extrémité s'accrochait à une forte racine,<br />

comme pour l'inviter à prendre congé, tous<br />

pourparlers étant rompus..<br />

/F<br />

par PIERRE LADOUÉ<br />

Ce récit tragique d'un drame d'amour a été placé par<br />

Pierre Ladoué dans le cadre sublime de la grande forêt,<br />

pleine de clairs-obscurs et où les loups et la mort rôdent<br />

de compagnie, autour de leur victime, l'Homme.<br />

— Allons... Un écu ! fit le jeune homme.<br />

— Tu marchandes ? C'est que tu ne tiens<br />

pas à Lucette !...<br />

Jacques soupira et jeta vivement sa bourse<br />

de cuir sur le billot qui servait de table. Manda<br />

Septantin desserra posément le cordon, s'appro-<br />

dans les étoiles pour me faire devenir le mari<br />

de Lucette Bonnin ?... Tu ne connais donc pas<br />

Bruno Vernaire, plus haut que moi de dix<br />

pouces, Bruno, le plus fort gaillard du pays et<br />

de quatre lieues à la ronde ? C'est ma honte<br />

et ma mort que tu manigances là, sorcier de<br />

// secoua son bras prisonnier, fil craquer ses os dans un effort terrible. Il ne parvint<br />

qu'à accroître sa souffrance, à tel point que, près de défaillir, il tomba sur les genoux...<br />

cha de l'entrée de la grotte et, au clair de lune,<br />

fit luire les deux pièces. Puis il regarda les<br />

astres un long moment.<br />

— Écoute-moi bien, dit-il, revenu à son<br />

visiteur et lui posant sur les épaules ses deux<br />

mains, afin de lui mieux faire pénétrer ses<br />

paroles dans l'esprit. Ecoute-moi bien, Jacques<br />

Girondelle, et ne t'écarte point des prescriptions<br />

de Manda Septantin, qui ht l'avenir dans les<br />

étoiles ! Le crois-tu, que je lis l'avenir dans les<br />

étoiles ?... Le crois-tu ?<br />

— Je l'ai toujours ouï dire et tout un chacun<br />

le répète aux Trois-Moulins, fit Jacques, soudainement<br />

intimidé.<br />

— Bien parlé. Connais-tu le Val-Cranioux ?<br />

C'était un endroit perdu, un des fonds les<br />

plus sauvages de la grande forêt, à une lieue<br />

de la grotte de Manda et à deux de toute autre<br />

habitation.<br />

— Oui, j'y suis allé une fois... On y voit<br />

de beaux hêtres.<br />

— Et de beaux chênes. A cent pas de la<br />

source, dans l'herbe, il y a un grand tronc de<br />

rouvre, abattu depuis plusieurs années, et qui<br />

paraît avoir été oublié par les bûcherons. Un<br />

coin rouillé est resté enfoncé dedans. Jacques<br />

Girondelle, tu vas emmener auprès de cet<br />

arbre Bruno Vernaire, et tu lui diras ceci :<br />

Mon camarade, puisque Lucette Bonnin<br />

ne se résout point à prendre l'un de nous<br />

deux pour mari, décidons qui le sera par le<br />

moyen d'un jugement de Dieu. Eprouvons<br />

nos forces. Celui qui, de ses seules mains, sans<br />

le secours d'aucun outil, arrachera ce coin de<br />

ce tronc, sera vainqueur : il jDOurra épouser la<br />

belle en tranquillité, car l'autre quittera le pays<br />

et plus jamais n'y reviendra !<br />

■— Traître ! interrompit Jacques Girondelle<br />

en se levant de son escabeau. C'est ainsi que<br />

tu te moques de moi et que tu me voles mon<br />

argent ! Voilà le beau moyen que tu as trouvé<br />

malheur ! Tiens, rends-moi plutôt ma bourse<br />

et laisse-moi m'en retourner chez nous !<br />

— Nenni ! fit le vieillard d'une voix lente.<br />

Il te faut calmer, Jacques, et te rappeler ce que<br />

tu as ouï raconter de Manda Septantin dans<br />

les hameaux. Tes paroles sont inconsidérées,<br />

et je te les pardonne à cause de ta jeunesse.<br />

Ecoute-moi jusqu'à la fin... T'ai-je dit que je<br />

possède une plante qui rend le plus chétif<br />

capable de soulever les rochers ? T'ai-je dit<br />

que les paroles que je prononcerai de loin, dans<br />

le temps même qu'aura lieu l'épreuve à quoi<br />

je t'engage, réduiront à rien la force de Bruno<br />

Vernaire ?... T'ai-je dit cela ?<br />

— Non... non !... Bien sûr que, si c est<br />

ainsi... Fais excuse, Manda... Je ne savais<br />

point ! balbutia Jacques, apaisé, en se rasseyant<br />

sur l'escabeau.<br />

— L'herbe que je te donnerai, reprit le<br />

vieillard, tu t'en frotteras les bras, après en<br />

avoir mâché les feuilles, et tu garderas précieusement<br />

les tiges dans ta poche... A présent,dis-moi<br />

quand, Bruno et toi, vous vous rendrez<br />

au Val-Cranioux, à seule fin que je puisse dire<br />

les paroles en temps voulu.<br />

— Dès demain ! Je voudrais y aller demain !<br />

— Demain, donc. A l'heure où la lune se<br />

lèye...<br />

— Oui. Le matin, j'irai trouver Bruno pour<br />

lui proposer la chose. Mais... s'il allait refuser ?<br />

— Il ne refusera pas. Il connaît le poids de<br />

ses bras !<br />

— Tu as raison... Mais... lu m assures bien,<br />

Manda, que cette herbe me rendra plus fort<br />

que lui, plus fort que Bruno Vernaire ?.:.<br />

— Aussi vrai que la lune est en son plein et<br />

que l'oiseau de nuit pleure là-bas !<br />

— Et si Bruno, après, ne voulait pas quitter<br />

le pays ? ..<br />

— S'il avait cette malice-là, je saurais encore<br />

le moyen de l'obliger à se montrer loyal !<br />

—_ Et Lucette ? Tu me promets que Lucette,<br />

ensuite, sera ma femme ?<br />

— Imagine que tu balances toi-même entre<br />

deux filles, et que l'une des deux disparaisse<br />

un matin : est-ce que tu n'épouserais pas<br />

l'autre ?<br />

Convaincu par les arguments du sorcier<br />

et nanti de la plante merveilleuse, le sabotier<br />

voulait sans plus attendre regagner les Trois-<br />

Moulins, mais son hôte lui représenta que de<br />

mauvaises rencontres étaient à redouter, sous<br />

bois, à pareille heure, et le jeune homme<br />

accepta de passer le reste de la nuit sur la<br />

paillasse de Manda, qui ne dormit pas.<br />

Loin d'avoir goûté lui-même un véritable<br />

repos, tant son esprit demeurait surexcité,<br />

Jacques déroula l'échelle de corde et descendit<br />

de la grotte dès que les oiseaux de la forêt<br />

eurent signalé l'aurore entre les branches.<br />

Le sorcier lui adressa, d'en haut, un adieu de<br />

la main. Jacques reviendrait, dans quelques<br />

jours, apporter le boisseau de fèves, après la<br />

réussite de l'affaire : c'était convenu.<br />

Il s'enfonça rapidement, entre les rochers,<br />

dans les fougères que mouillait la rosée du<br />

matin, et bientôt il eut disparu.<br />

D<br />

A * *<br />

ANS la clairière transformée en chantier,<br />

Bruno Vernaire, armé de sa bonne<br />

cognée, entamait un chêne.<br />

Han ! Han !... l'arbre résonnait et frémissait<br />

de toutes ses fibres. Des éclats de - bois<br />

durs comme des silex volaient autour du travailleur.<br />

La cognée docile décrivait un cercle<br />

brillant et venait s'appliquer exactement, à<br />

chaque coup, dans l'entaille agrandie.<br />

A voir ainsi besogner ce grand garçon si<br />

vigoureux et si adroit, -quelle fille n'eût senti<br />

pour lui de l'amour dans son cœur ?... Mais,<br />

à cette heure matinale, Lucette Bonnin ne<br />

songeait pas à courir les futaies pour y contempler<br />

les bûcherons. Devant son miroir, sans<br />

doute lissait-elle à présent ses bandeaux noirs,<br />

ou ajustait-elle sa guimpe avant de prendre son<br />

aiguille...<br />

C'est ainsi du moins que Bruno se la représentait,<br />

ayant interrompu, pour souffler un<br />

moment, le fier jeu de son outil, lorsque Jacques<br />

Girondelle déboucha par le sentier qui venait<br />

du village...<br />

— Holà, Bruno, te voilà aux prises avec<br />

un rude compagnon, fit-il, goguenard, en<br />

mesurant le chêne de la racine aux hautes<br />

branches. Penses-tu le mettre par terre avant<br />

ce soir ?<br />

— Avant midi, lui et puis un autre ! A<br />

moins que le manche de ma cognée ne me<br />

reste dans les mains, ce qui m'étonnerait,<br />

car il est de bon hêtre et bien durci au feu...<br />

Et que fais-tu si matin par ici, mon camarade ?<br />

Cherches-tu des morilles, ou n'as-tu plus de<br />

bois sec pour tes sabots ?<br />

Ainsi les deux jeunes gens s'abordaient-ils,<br />

en toute occasion, sur un ton de plaisanterie<br />

aigre-douce, à cause de Lucette Bonnin.<br />

Apparemment, ils se faisaient bon visage.<br />

Au fond, ils se détestaient.<br />

— Je suis venu, Bruno, parce que j'ai à<br />

te parler... à te parler franc.<br />

— C'est bon. Je t'écouterai de même.<br />

Bruno s'appuya sur sa cognée et attendit<br />

que son rival commençât.<br />

Jacques parlait bien quand il voulait. Il<br />

n'eut pas de peine à convaincre Bruno de<br />

la nécessité qu il y avait d'obtenir de Lucette<br />

qu'elle optât enfin pour l'un ou pour l'autre<br />

de ses poursuivants. En vérité, le manège de<br />

la. coquette durait depuis trop longtemps. On<br />

commençait à rire dans le pays des amoureux<br />

soumis de la sorte au jeu de la balançoire.<br />

Il fallait forcer son choix et décider pour elle,<br />

sans attendre son caprice, lequel des deux la<br />

mènerait devant le curé... Pour ce faire,<br />

Jacques avait un moyen... Et il décliqua tout<br />

d'une haleine, devant Bruno ébahi, le projet<br />

que lui avait soufflé Manda Septantin, dont il<br />

se garda bien, naturellement, de prononcer le<br />

nom.<br />

Quand il eut fini, Bruno s'exclama :<br />

— N'as-tu pas la cervelle brouillée, ami<br />

Jacques, ou veux-tu qu'on se gausse de toi<br />

dans tout le canton ? Pour être départagés de<br />

cette sorte, m'est avis qu'il nous faudrait à<br />

peu près force égale !... Veux-tu regarder<br />

tes bras auprès des miens ?<br />

Et Bruno, relevant la manche de sa chemise<br />

jusqu'à l'épaule, découvrait de formidables<br />

bosses. Jacques n'eut garde d'imiter<br />

ce geste, encore qu'il y fût invité par le regard<br />

moqueur de l'autre. Il mit, au contraire, ses<br />

mains derrière son dos, et reprit sur un ton<br />

tranquille :


»,' LE <strong>26</strong> JUILLET 1925 IIIIIIIIIIIIIIIIIIIItlIllillIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIllMlllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllllt 7 ■IIIIIIIIIIlillllllllllllllllillllIlllIIIIlIlIllilMUIIllllMIIIIIIIIIUIIIIIlMIlIIIIIllllIllIl DIMiiNCHE-ILLUSTRÉ "»"«»'<br />

Tout le monde sait bien que tu es plus<br />

grand et mieux corporé que moi, Bruno. Je<br />

ne suis pas assez aveugle pour ne pas m'en être<br />

aperçu. Mais un jugement de Dieu est un<br />

jugement de Dieu, et la grosseur des bras n'est<br />

pas tout !... Je pense, moi, que nous sommes<br />

de taille à nous mesurer... J'ai bien réfléchi,<br />

et je tiens à mon idée. Tu connais ma proposition<br />

: acceptes-tu, oui ou non ?<br />

Bruno, avec plus d'honnêteté c|ue de méfiance,<br />

se récria encore que la partie n était pas égale,<br />

qu il était, lui, bien sûr de gagner, et que<br />

Jacques n'avait point, ce matin, tout son<br />

bon sens. Jacques secouait la tête et ne démordait<br />

pas. Tant et si bien qu'à la fin Bruno,<br />

perdant patience et jugeant que ce sabotier<br />

avait besoin d'une leçon, lui jeta à la face<br />

cette question :<br />

— Tu le veux ?<br />

— Oui.<br />

— Dans la manière que tu viens de dire ?<br />

— Oui.<br />

— Eh bien, tope-là !<br />

Ils se frappèrent dans la main et s'occupèrent<br />

aussitôt de régler, sans témoins, les<br />

conditions de cé duel d'un nouveau genre.<br />

— Quand irons-nous là-bas ? demanda<br />

Bruno.<br />

— Ce soir, si tu veux, au lever de la lune.<br />

— Au lever de la lune, soit. Et qui commencera<br />

? Il faudra tirer.<br />

— Oui, à la courte paille. Puis on essaiera<br />

d'ôter le coin, à tour de rôle, chacun par trois<br />

fois...<br />

- — Quatre si tu veux. Et pendant combien<br />

de temps, chaque fois ?<br />

— Le temps que l'autre mettra à compter<br />

dix. Ça te va ?<br />

— Oui-da !<br />

— Au revoir donc. Reprends ta cognée,<br />

bûcheron !<br />

— Et toi, retourne à Ion évidoir, sabotier !...<br />

Ce soir, au lever de la iune...<br />

— Je t'attendrai au Vai-Cranioux.<br />

C<br />

A A -A<br />

ETTE journée de juin, remarquent les<br />

anciens du pays qui racontent cette<br />

histoire, fut la plus chaude de toute<br />

l'année. Il semblait qu'on respirât dans le<br />

halo d'un incendie, ou à l'entrée d'une chambre<br />

à four. Mais ce n'était pas seulement la pesanteur<br />

de l'orage " en route " qui travaillait ainsi<br />

les nerfs de Jacques et lui brûlait le sang. La<br />

fièvre. Il avait la fièvre...<br />

A mesure que les heures de l'après-midi<br />

passaient, son excitation augmentait. Enfermé<br />

dans sa boutique, il tournait et retournait entre<br />

ses doigts la plante magique donnée par<br />

Manda Septantin. Elle ressemblait à une<br />

herbe ordinaire, à la sauge ou à la menthe.<br />

Etait-ce vraiment à ces pauvres feuilles toutes<br />

menues, fripées et fanées que Jacques devrait,<br />

ce soir, sa victoire ? Mais le sorcier dirait aussi<br />

des paroles !... Ah oui... les paroles !...<br />

L'ombre du clocher toucha enfin le puits.<br />

Le soleil, voilé par moments, déclinait lentement,<br />

trop lentement...<br />

Lorsqu'il crut l'heure venue, le sabotier,<br />

qui n'avait oublié aucune des prescriptions de<br />

Manda, mâcha avec soin les feuilles amères<br />

de la plante, oignit énergiquement ses deux<br />

bras et mit au fond de sa poche les parcelles<br />

qui restaient, en ayant soin de n'en perdre<br />

aucune. Après quoi, il se munit d'un gros<br />

bâton et sortit dans le jardin tout embaumé de<br />

l'odeur des lis.<br />

Par une porte à claire-voie, toujours ouverte<br />

sous les noisetiers et les pruniers sauvages,<br />

Jacques Girondelle gagna, sans être aperçu<br />

de quiconque, d'abcrd le chemin couvert, puis<br />

les premiers taillis de la forêt, dans laquelle<br />

il s'enfonça par une haie qu'il connaissait.<br />

Les rayons du soleil couchant s'insinuaient<br />

obliquement, par intermittences, sous les<br />

feuillages, rougissant ici le tronc d'un sapin, là<br />

dorant l'écorce d'un bouleau, parfois révélant<br />

dans l'air de claires sarabandes de moucherons.<br />

Soudainement, une demi-obscurité noya la<br />

forêt. Jacques leva la tête et s'aperçut, autant<br />

que le lui permettait l'entre-croisement des<br />

branches, que de noires nuées voguaient làhaut.<br />

Un long souffle passa.<br />

— L'orage vient, se dit le jeune homme.<br />

Tant pis !... Marchons !<br />

Il fallait marcher. Les nuages d'orage<br />

n'empêcheraient pas la lune de se lever, tout<br />

à l'heure... Alors, Manda dirait les paroles.<br />

Et il était nécessaire que l'épreuve eût lieu<br />

dans le même temps, afin que leur vertu, en<br />

laquelle Jacques avait foi, pour tout dire,<br />

plus qu'en la plante aux feuilles amères, fût<br />

agissante. Jacques, marchait donc, tenaillé<br />

seulement par une crainte, celle que Bruno<br />

ne vînt pas...<br />

• Mais Bruno avait promis d'être au Val-<br />

Cranioux au crépuscule, il y serait !...<br />

Par le même chemin que suivait Jacques,<br />

join derrière lui, le bûcheron se hâtait vers<br />

îe lieu du rendez-vous. Il chantonnait. Il<br />

pensait à Lucette et déjà la voyait dans leur<br />

ménage, au foyer ou sur le seuil, brune et<br />

souriant de sa bouche rouge. En vérité, il<br />

l'aurait, Lucette ! C'est comme si ce gringalet<br />

de Jacques Girondelle la lui donnait, aujourd'hui,<br />

de sa main. A n'en pas douter, le sabotier<br />

était fou ! Il courait au-devant de sa confusion !<br />

A moins que, se sentant perdu sans rémission<br />

dans le coeur de la jeune fille, il n'eût voulu<br />

pouvoir accuser le sort de sa défaite... Car<br />

Bruno était, Bruno serait le plus fort !... Il<br />

brandissait son bâton en de terribles moulinets,<br />

cassant les branchettes et faisant voler des<br />

bouquets de feuilles. Il ne sentait nulle fatigue<br />

appesantir son bras, qui pourtant avait manié<br />

la cognée tout le jour. Ah ! la force de Bruno !<br />

A mesure que le bûcheron approchait du<br />

Val-Cranioux, le bois devenait plus épais et<br />

l'aspect des lieux plus sauvage. Le sentier,<br />

par endroits, se perdait. Des blocs de granit<br />

affleuraient, auxquels le pied butait. Une<br />

odeur de pourriture montait des fonds humides<br />

où grouillaient des bêtes sans yeux. Les ronces<br />

cachaient les troncs des arbres et des lianes<br />

unissaient les branches.<br />

U<br />

A A A î<br />

N grondement sourd, prolongé, encore<br />

lointain, retentit. Le tonnerre.<br />

Bruno hâta le pas autant que le per-<br />

mettait la difficulté du terrain. Il trouvait<br />

l'heure de l'épreuve assurément mal choisie.<br />

Cet orage !... Mais fait-il jamais mauvais<br />

tations qu'élevait Bruno à cause de son trop<br />

de précipitation à compter, Jacques commença<br />

une deuxième tentative.<br />

Il s'était mis, cette fois, à cheval sur le tronc,<br />

et il tâchait d'attirer d'abord vers lui le sommet<br />

du coin, pour le repousser ensuite dans le sens<br />

de la fente, et le faire enfin glisser au dehors.<br />

Il n'y parvint pas.<br />

Un coup de tonnerre couvrit la voix de Bruno<br />

qui achevait :<br />

— Neuf... dix 1...<br />

Jacques së redressa. Ses jambes ployèrent<br />

sous 1 effet d'une fatigue soudaine ou de la<br />

fureur. Il lui semblait qu'un serpent lui mordait<br />

le cœur. Il pensa au sorcier. Le misérable<br />

Manda aurait-il menti ? Où donc étaient la<br />

vertu de sa plante et la vertu de ses paroles,<br />

et qu'attendaient-elles pour se manifester ?<br />

Mais déjà le rival détesté, prêt à tenter<br />

l'épreuve pour la seconde fois, enjoignait à<br />

Jacques de commencer à compter... A ce<br />

moment, de larges gouttes de pluie tombèrent<br />

en claquant sur les feuilles.<br />

— Allons I cria Bruno. Finissons !... Il<br />

faut rentrer I<br />

Il s'était presque allongé dans l'herbe, le<br />

corps placé à angle droit avec le tronc d'arbre.<br />

Ses pieds s'arc-boutèrent. II coiffa le coin de<br />

sa paume gauche et saisit solidement de sa<br />

main droite le rebord de la fente béante.<br />

Ayant amené Jacques à l'emplacement qu'il crut propice, il le souleva de terre<br />

et le jeta dans le vide. Mais Jacques s'était agrippé à la longue barbe du sorcier.<br />

temps un jour de victoire ? Au Val-Cranioux<br />

Jacques attendait, assis sur le tronc du chêne.<br />

Au moment où Bruno parut, un éclair illumina<br />

la clairière.<br />

— Dépêchons-nous, dit le sabotier nerveusement.<br />

Le feu du ciel est sur nous !<br />

Un coup de tonnerre accompagna la fin de<br />

sa phrase.<br />

Bruno examina le chêne, dans lequel un<br />

gros coin rouillé s'enfonçait, puis il arracha<br />

un brin de jonc, le coupa en deux tronçons<br />

inégaux qu'il brouilla dans ses mains derrière<br />

son dos :<br />

— Le plus court commence, dit-il. Quelle<br />

main choisis-tu ?<br />

— La gauche.<br />

— C'est à toi !<br />

Jacques se rua sur le tronc, de l'arbre.<br />

Agenouillé dans l'herbe, il saisit à deux mains la<br />

partie saillante du coin de fer et banda ses<br />

muscles.<br />

Le coin ne broncha pas.<br />

Bruno comptait :<br />

— ... Deux, trois, quatre...<br />

Furieusement, Jacques s'efforçait, les genoux<br />

écartés, la tête courbée entre ses épaules<br />

arrondies. En vain.<br />

— Huit, neuf... Debout ! A mon tour !<br />

cria Bruno.<br />

L'orage se rapprochait : tous les échos du<br />

bois s'affolaient aux fracas célestes.<br />

Bruno monta sur le tronc et, le corps<br />

ployé, manifesta l'intention d'arracher le<br />

coin en le tirant verticalement, après l'avoir<br />

ébranlé de gauche à droite par de petites<br />

secousses. Mais le temps qu'il lui fallut pour<br />

placer convenablement ses larges mains autour<br />

de la tête du coin et pour préparer à l'effort<br />

tous ses muscles, suffit à Jacques, dont la voix<br />

haletait, pour atteindre le chiffre dix.<br />

En suite de quoi, sans entendre les protes-<br />

Puis tous ses muscles entrèrent en jeu à la fois.<br />

Jacques, penché sur lui, l'œil fou, articulait<br />

en saccadant : " ... Cinq... six... " lorsque le<br />

grand corps de Bruno se replia tout à coup<br />

comme un ressort qui se tend... Un cri monta,<br />

cri de triomphe, cri de douleur : le coin était<br />

hors, mais les quatre doigts de la main droite<br />

du vainqueur restaient pris dans la fente<br />

refermée, broyés jusqu'à la paume par le<br />

resserrement des fibres du bois.<br />

— Au secours !... Jacques !...<br />

Les gouttes "de pluie crépitaient et le tonnerre<br />

roulait continûment. Bruno se retourna,<br />

la face crispée :<br />

— Jacques !... Le coin !... Remets le coin,<br />

vite !...<br />

La voix du supplicié se perdit dans le bruit<br />

de l'orage. Ses yeux scrutèrent autour de lui<br />

la clairière. Et ses yeux ne virent pas Jacques.<br />

Jacques n'était plus là...<br />

Mû par sa colère et par une joie atcoce,<br />

Jacques avait pris la fuite vers le village, abandonnant<br />

son rival à l'épouvantable torture...<br />

Quand il eut compris qu'il restait seul,<br />

Bruno Vernaire ramassa le coin, le replaça<br />

dans la fente et tenta de l'enfoncer. Mais,<br />

de sa seule main gauche, comment l'eût-il pu<br />

faire? Vainement, il se meurtrit le poing.<br />

Vainement, de son bâton, il essaya de frapper.<br />

La fente ne se rouvrit pas.<br />

Alors, le malheureux- se mit à pousser des<br />

hurlements. Mais qui l'entendait? Le village<br />

était loin et le fracas de l'orage redoublait...<br />

Il secoua son bras prisonnier, fit craquer ses<br />

os dans un effort terrible. Il ne parvint qu'à<br />

accroître sa souffrance, à tel point que, près de<br />

défaillir, il tomba sur les genoux...<br />

Enfin, une idée le hanta :<br />

— Mon couteau... mon couteau' !...<br />

Pour se dégager, Bruno ne voyait plus qu'un<br />

seul moyen : se couper les doigts au ras de la<br />

paume... II courrait ensuite à la fontaine<br />

baigner son moignon dans l'eau fraîche et<br />

reviendrait au village quand il aurait fait une<br />

ligature à son poignet pour arrêter le flux du<br />

sang.<br />

De sa main libre il explora ses poches,<br />

atteignit le couteau, le retira, l'ouvrit et commença<br />

l'affreuse besogne. Mais quand la lame<br />

toucha l'os et ne voulut plus mordre, Bruno<br />

sentit ses muscles se détendre. Toute sa belle<br />

force, soudain, s'anéantit. Il s'évanouit. Son<br />

front heurta le tronc du chêne...<br />

A * A<br />

E lendemain matin, tout le village des<br />

Trois-Moulins apprit la " disparition " de<br />

L Bruno Vernaire. Ses parents, qu'il avait<br />

quittés sur le soir, en leur disant qu'il allait<br />

poser un collet, l'avaient attendu toute la nuit<br />

dans les transes. Maître Le Luquet, pour le<br />

compte de qui Bruno travaillait, et qui était<br />

venu s'enquérir de lui, ne le voyant point<br />

arriver au chantier à l'heure accoutumée, proposa<br />

de battre le bois. Le pauvré garçon avait<br />

sans doute été frappé de la foudre. Car comment<br />

supposer qu'il se tût égaré, surpris par la nuit,<br />

dans la forêt?... Bruno la connaissait, la forêt,<br />

assez bien pour s'y diriger en pleines ténèbres !<br />

— Peut -être, suggéra la mère, qui ne voulait<br />

point croire encore à un accident, peut-être<br />

qu'il est allé à l'affût d'un sanglier?<br />

— Le fusil est au clou ! remarqua le père.<br />

— Quoi qu'il en soit, il faut le chercher !<br />

dit maître Le Luquet. Je vas prévenir les<br />

compagnons !<br />

Bientôt, une petite troupe fut assemblée<br />

i— une douzaine d'hommes et de jeunes gens,<br />

accompagnés de cinq ou six chiens — et l'on<br />

se dirigea vers la sortie du village.<br />

Comme on passait devant la boutique de<br />

Jacques Girondelle, un des garçons heurta à<br />

la vitre :<br />

— Hé, sabotier !... Viens avec nous !<br />

— Qu'est-ce qu'il y a donc? demanda<br />

Jacques, paraissant sur le seuil, de menus<br />

copeaux de hêtre dans ses cheveux ébouriffés.<br />

— Comment? Tu ne sais pas que Bruno<br />

Vernaire, ton ami Bruno, a disparu cette<br />

nuitée ? On va le chercher par le bois. Il faut<br />

que tu viennes aussi !<br />

— Mais... c'est que...<br />

—s II n'y a pas de mais. Nous ne serons<br />

jamais trop ! En route !"<br />

Jacques dut, bon gré, mal gré, suivre le<br />

groupe. On remarqua son teint pâle, ses mains<br />

çjui tremblaient, et l'on pensa que c'était<br />

I annonce brutale de la disparition de Bruno<br />

— le prétendant favori, disaient les uns, de<br />

Lucette Bonnin — qui l'avait jeté dans cet<br />

émoi.<br />

Hommes et chiens entrèrent en forêt. Le<br />

Luquet dirigeait la troupe, qui, dispersée, mais<br />

gardant liaison au moyen de cris convenus, se<br />

rassemblait de temps à autre, aux points fixés,<br />

dans les clairières.<br />

On marcha longtemps. Les soleil était déjà<br />

haut. Les parfums silvestres montaient, développés<br />

par la pluie de la nuit, entêtants. La<br />

chaleur pesait. Onze heures approchaient.<br />

— Il faut revenir, dit Le Luquet, quand les<br />

hommes se furent, pour la cinquième fois,<br />

réunis. Nous sommes loin : nous allons tourner<br />

bride. Par la gauche ou par la droite?<br />

— Prenons par le Val-Cranioux ! lança<br />

Jacques d'une voix qu'il eût voulu raffermir.<br />

— En route, les amis ! Et qu'on se retrouve<br />

tous à la fontaine !<br />

Jacques disparut sous bois, comme les<br />

autres. Mais bientôt ses jambes se raidirent.<br />

II lui semblait que lianes et ronces, enchevêtrées<br />

autour de ses 'pieds, leur donnaient le<br />

poids du plomb. La sueur ruisselait de ses<br />

tempes.<br />

— Allons ! murmura-t-il, allons ! Faut voir,<br />

pourtant ! Faut voir !...<br />

Et il se fit violence pour continuer d'avancer.<br />

Les appels des hommes se répondaient<br />

régulièrement dans le taillis et les échos répétaient<br />

: " Ho... hé !... hé... hé !... " Parfois, la<br />

voix des chiens se mêlait, rauque ou perçante,<br />

à ces clameurs. Une demi-heure encore passa,<br />

et puis parvint soudain un aboiement étrange,<br />

long, déchirant, sinistre... Peu après monta<br />

la voix de maître Le Luquet, amplifiée par les<br />

résonances de 1 endroit :<br />

— Par ici ! Holà ! Camarades !... Holà !...<br />

Ah !...<br />

Et ce dernier ah se prolongeait en une sorte<br />

de plainte effarée.<br />

Jacques Girondelle bondit en avant. Sans<br />

souci des branches qui lui griffaient le visage<br />

et les mains, il allait, maintenant, il allait vers<br />

le Val-Cranioux. Bientôt, il distingua la clairière...<br />

Quelques pas encore... Il écarta les<br />

derniers buissons... Il courut.<br />

Autour du tronc couché dans l'herbe, les<br />

hommes des Trois-Moulins contemplaient,<br />

avec des gestes d'horreur, d'informes débris,<br />

des os roses, sortant, décharnés, de lambeaux<br />

de vêtements, un crâne scalpé, sans visage, et<br />

(Lire la suite page 14, 3 e colonne).


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Copyright par Dimanche-Illustré, Chicago Tribun*


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NE POURRAI VOub RÉCOM<br />

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ME-RiTEZ POUR VOTRE- DE<br />

V0UE-MENT E-T VOTRE ADREV)E<br />

A RETROUVER MON NEVEu<br />

N&SToR-VOICI ENATTEHPAHT<br />

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TÊ-Fou QOi A TOUT<br />

FAIT ' OUELpEuouE-<br />

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NESTOR ! IL ME-RlTE PL-Ui<br />

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«HÉ:<br />

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/CHEM-AR EST FINI.<br />

J'AI RE-4-u T?tV? Houv/ÊiL.-<br />

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IHIIIIIII DIMANCHE-ILLUSTRE ■■•■■■■■îiiiiiiitiiiiiiiiiimiiiiiiiiifiiif•■■•■■■■iiiimiiifmiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii 10 IIIIIIIIIIIIIIMIIIIIEIIIIIH ii]ifi]ii[iiiiiiiiiiiiiiititiiiiiipiTir>';ii


imni LE <strong>26</strong> JUILLET 1925 "lunni ■> IIDUIIIHIH iiiimiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii iiiiiuiiiiiii.il n iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiuiiiiii DIMANCHE-ILLUSTRÉ "MHK<br />

T<br />

PROFITONS DE NOS LOISIRS DU DIMANCHE<br />

POUR NOUS INSTRUIRE UN PEU<br />

MORT DU GÉNÉRAL DESAIX A LA BATAILLE DE MARENGO<br />

ANDIS que Masséna tenait désespérément<br />

dans Gênes assiégé, Bonaparte avait<br />

fait accomplir à son armée le prodigieux<br />

passage des Alpes. Il comptait prendre à<br />

l'improviste l'armée autrichienne de Mêlas, qui<br />

enveloppait Gênes. Mais cette ville, où la<br />

famine était devenue extrême, fut obligée de<br />

capituler le 4 juin 1800, capitulation glorieuse,<br />

avec tous les honneurs de la guerre, mais qui<br />

libérait les Autrichiens. Ceux-ci ne s'en<br />

trouvaient pas moins, cependant, dans la souricière<br />

que leur avait préparée Bonaparte, dont<br />

l'admirable manœuvre s'achevait. Ses troupes,<br />

disséminées, mais prêtes à un rassemblement<br />

rapide, le cas échéant, surveillaient toutes les<br />

routes par lesquelles Mêlas pouvait échapper.<br />

Le 9 juin, les Autrichiens se heurtaient, à<br />

Montebello, aux soldats de Lannes, qui les<br />

refoulèrent. Ils cherchèrent un passage vers<br />

Plaisance et rencontrèrent Bonaparte. Le<br />

Premier Consul accepta la bataille dans la<br />

plaine et le village de Marengo. Il reçut le choc<br />

de toute l'armée ennemie en un point ; il ne<br />

pouvait, en ce matin du 14 juin, que lui opposer<br />

des forces inférieures en nombre, obligé qu'il<br />

avait été, de disperser ses divisions. Jusqu'à<br />

A un<br />

CARACALLA<br />

empereur romain de grande valeur<br />

succéda presque toujours un empereur<br />

— quand ce n'était point une suite<br />

d'empereurs — odieux et néfaste. Après<br />

Septime-Sévère qui réorganisa l'empire, le<br />

brutal, le sournois, le cruel Caracalla.<br />

Né à Lyon, en 188, il avait été associé fort<br />

jeune, ainsi que son frère Geta, au gouvernement<br />

par son père, Septime-Sévère, qui<br />

avait cru ainsi parer au vice le plus grave du<br />

système impérial : l'incertitude des successions,<br />

en raison de quoi s'étaient produites tant de<br />

séditions militaires. Septime-Sévère étant mort<br />

en 211, au cours d'une expédition en Bretagne,<br />

la transmission pacifique du pouvoir se<br />

trouvait donc assurée. On pouvait en conclure<br />

que l'avenir de la dynastie des Sévères était sauvegardé.<br />

Mais Caracalla et Geta > se haïssaient<br />

profondément. Chacun avait l'ambition de<br />

régner seul et d'évincer l'autre, et comme tous<br />

deux avaient une<br />

mentalité de soudard,<br />

ils ne songeaient<br />

qu'à un<br />

moyen : l'assassinat.<br />

Caracalla se décida<br />

le premier et fit tuer<br />

son frère.<br />

Devenu seul empereur,<br />

il maintint<br />

le système, politique<br />

de Septime-Sévère<br />

et s'appuya encore<br />

davantage sur l'armée,<br />

qu'il gorgea de<br />

CARACALLA<br />

M A R E N G O<br />

faveurs nouvelles.<br />

Fratricide, il con-<br />

tinua tout au cours de son règne à accumuler<br />

crimes et folies. On compte qu'il fit<br />

mettre à mort près de 20.000 personnes,<br />

dont le jurisconsulte Papinien, qui appartenait<br />

au conseil impérial. Cependant, ce conseil<br />

impérial n'en continua pas moins à travailler<br />

comme au temps du précédent empereur et<br />

mit au point une nouvelle constitution, qui<br />

devait transformer le monde romain. Elle<br />

étendait, en effet, à. tous les habitants de<br />

l'empire, le droit de cité. Cette décision, prise<br />

dans un dessein fiscal, eut surtout de grandes<br />

conséquences morales et politiques.<br />

Caracalla, devenu odieux à tous, fut assassiné,<br />

en 217, au cours d'un voyage en Orient, près<br />

d'Edesse, par son préfet du prétoire Macrin,<br />

qui recueillit sa succession.<br />

trois heures de l'après-midi, les Français ne<br />

peuvent prendre l'ascendant ; mais ils résistent<br />

avec héroïsme ; notamment la garde consulaire<br />

que Berthier, dans son rapport, compare<br />

à une redoute de granit. Cependant, des<br />

directions vers lesquelles elles ont été détachées,<br />

nos divisions accourent au canon. Et voici<br />

qu'arrive sur le champ de bataille, Desaix, à la<br />

tête de six mille hommes. Ces troupes fraîches<br />

arrêtent les colonnes autrichiennes en passe<br />

de devenir victorieuses. Desaix dirige luimême<br />

la charge d'un de ses régiments. Il<br />

tombe frappé à mort d'une balle dans la poitrine.<br />

" Cachez ma mort ", dit-il en expirant.<br />

Mais la disparition de leur chef ne fait qu'augmenter<br />

l'exaspération des soldats. D'ailleurs,<br />

d'autres troupes françaises peuvent maintenant<br />

attaquer l'ennemi sur ses flancs. Une charge<br />

décisive de Kellermann coupe en deux tronçons<br />

l'armée de Mêlas, dont la moitié reste<br />

prisonnière.<br />

Le général autrichien est obligé, par ce<br />

revers éclatant, de signer la convention<br />

d'Alexandrie, qui nous rend Gênes, le Piémont,<br />

le Milanais. L'ennemi se retire au delà du<br />

Mincio.<br />

P<br />

TAINE ,<br />

HILOSOPHE et historien, d'esprit doctrinaire,<br />

cherchant à tout expliquer d'après<br />

un système, mais, néanmoins, d'une<br />

grande probité intellectuelle, Hippolyte -<br />

Adolphe Taine fut un des plus influents<br />

directeurs de la pensée française à la fin du<br />

XIX E siècle ; et, si son système apparaît aujourd'hui<br />

très imparfait, ses principales œuvres<br />

restent parmi les meilleures de son temps.<br />

Né à Vouziers, en 1828, il entra le premier<br />

à l'École Normale après de très brillantes<br />

études. Refusé à l'agrégation de philosophie<br />

en 1851, il fut nommé professeur à Nevers,<br />

puis à Poitiers, enfin à Besançon. Il ne resta<br />

pas à ce dernier poste et vint à Paris où il entra<br />

dans le journalisme. Il écrivit successivement<br />

au Journal des Débats et à la Revue des Deux<br />

Mondes. Ses premiers articles avaient révélé<br />

un talent de premier ordre. Désormais, Taine<br />

consacre tout son temps aux lettres et, particulièrement,<br />

à la<br />

philosophie, à la<br />

critique et à l'histoire,<br />

s'échappant<br />

de son cabinet de<br />

travail uniquement<br />

pour voyager, et de<br />

chacun de ses voyages,<br />

aux Pyrénées,<br />

en Angleterre, en<br />

Belgique et eh Allemagne,<br />

il rapporte<br />

un ouvrage particulier<br />

ou les éléments<br />

TAINE<br />

d'un ouvrage général.<br />

En critique littéraire,<br />

il donne un<br />

Essai sur les fables de La Fontaine (sa thèse de<br />

doctorat), un Essai sur Tite-Lioe, l'Histoire de la<br />

littérature anglaise. En philosophie pure, voici :<br />

1"Intelligence, Philosophie de l'art en Italie,<br />

Philosophie de l'art dans les Pays-Bas, Études<br />

sur les philosophes français du XIX e siècle.<br />

En histoire, son livre capital, Origines de la<br />

France contemporaine, est précédé ou suivi de<br />

ses Essais de critique d'histoire, Du suffrage<br />

universel et de la manière de voter, des Noies<br />

sur l'Angleterre.<br />

Bien que le style de Taine soit clair, vif et<br />

imagé, il est peu doué pour les œuvres d'imagination.<br />

Il commença un roman qu'il n'acheva<br />

pas, la Vie et opinion de Thomas Graindorge.<br />

Taine, qui appartenait à l'Académie française<br />

depuis 1878, mourut en 1893-<br />

L<br />

LORD CLIVE<br />

'HOMME qui conquit les Indes à l'Angleterre,<br />

en imitant les procédés de Dupleix,<br />

mais en obtenant, contrairement au con-<br />

quistador français, l'aide constante de son pays.<br />

Né à Styche, en 1725, Robert Clive s'annonçait<br />

comme un vaurien indisciplinable, lorsque<br />

ses parents le firent entrer comme simple<br />

commis à la Compagnie des Indes britanniques.<br />

Aux Indes, il montra du goût pour les armes<br />

et, un jour, proposa à la Compagnie, inquiète<br />

des progrès des Français, de frapper un coup<br />

décisif, si l'on voulait bien lui donner le commandement<br />

d'une unité assez importante.<br />

Son idée était de renverser le nabab de la<br />

Carnatique, créature de Dupleix, pour le remplacer<br />

par un nabab,<br />

créature des Britanniques,<br />

qui, au profit<br />

des Anglais, accomplirait<br />

la même<br />

besogne que l'autre,<br />

au profit des Français.<br />

L'expédition<br />

est décidée. Clive<br />

triomphe et s'illustre<br />

par la prise, puis<br />

la défense d'Arcote.<br />

Puissamment soutenu<br />

par la Compa-<br />

gnie, Clive obtient<br />

de nouvelles victoires<br />

et, finalement,<br />

LORD CLIVE<br />

la Carnatique est soumise à l'influence britannique.<br />

Tandis que Dupleix est rappelé en France,<br />

Clive, débarrassé du plus puissant ennemi de<br />

son pays, va poursuivre ses avantages. II va<br />

soumettre le Bengale en détrônant le nabab<br />

Surajah Dowlah, sympathique aux Français.<br />

Il s'empare de Chandernagor, bat le nabab à<br />

Plassey. Finalement, il fait proclamer nabab,<br />

un certain Merr-Safier, qui gouvernera le<br />

Bengale au profit de la Compagnie anglaise.<br />

C'est, on le voit, le procédé même qu'a inventé<br />

Dupleix. Mais Clive est autrement soutenu et<br />

autrement récompensé. Alors que Dupleix est<br />

revenu ruiné à Paris, Clive reçoit des cadeaux<br />

royaux. La Compagnie lui donne sept millions.<br />

Il est fait pair d'Irlande par le roi.<br />

Clive, qui était venu recevoir son titre de lord<br />

en Angleterre, retourne aux Indes, en 1764, pour<br />

y gouverner presque complètement les territoires<br />

britanniques, jusqu'en 1768. Mais, à<br />

Londres, il subit de rudes attaques. On l'accuse<br />

de concussion. Il vient se défendre au procès<br />

que lui intente la Chambre des communes, qui<br />

déclare que Clive a abusé de son pouvoir ;<br />

néanmoins, par un autre vote elle l'acquitte,<br />

affirmant qu'il avait rendu à son pays de grands<br />

et méritoires services.<br />

Ce procès l'avait ébranlé et, en proie à une<br />

sombre neurasthénie, Clive se suicida en 1774.<br />

U<br />

LA PLACE DES VICTOIRES<br />

NE des plus.belles places que compte Paris<br />

et la seule qui ne coûta presque rien<br />

à la ville, étant presque entière l'œuvre<br />

d'un courtisan. Ce courtisan, le duc François<br />

de la Feuillade, maréchal de France et colonel<br />

des gardes-françaises, avait fait exécuter par le<br />

sculpteur Martin van den Bogaert, en témoignage<br />

de reconnaissance, une statue de Louis<br />

XIV. Pour cette statue, qu'il hésita à ériger en<br />

divers points, il se décida finalement à créer<br />

une place. Il acheta donc l'hôtel de la Ferté,<br />

situé entre les rues Neuve-des-Petits-Champs<br />

et des Fossés-Montmartre, et le démolit. La<br />

ville, pour l'aider dans sa tâche, acheta de son<br />

côté divers immeubles, qui furent mis à bas.<br />

Le dessin de la place fut confié à Mansart et<br />

la construction, au sculpteur Predot. Bientôt<br />

s'édifièrent des bâtiments circulaires, coupés<br />

sur un côté par une ligne droite de bâtiments,<br />

CANROBERT<br />

EU de chefs furent aussi populaires parmi<br />

leurs subordonnés et dans tout le pays<br />

P que ce brave et noble maréchal de France,<br />

François-Certain Canrobert, officier intrépide<br />

et énergique, mais peu doué pour les grandes<br />

combinaisons stratégiques.<br />

Né en 1809, Canrobert, après être passé par<br />

Saint-Cyr et avoir goûté pendant quelque<br />

temps à la vie de garnison, partit pour l'Algérie<br />

en 1835. On en était encore à l'époque héroïque<br />

de la conquête, et les conditions de<br />

guerre contre les Arabes, encore mal connues<br />

de nos troupes, exigeaient, de la part de nos<br />

hommes et de leurs chefs, un courage d'une<br />

constance singulière. Canrobert, à la tête de<br />

ses zouaves, fit merveille<br />

pendant les<br />

longues années au<br />

cours desquelles il<br />

resta en Afrique,<br />

participant à la plupart<br />

des expéditions,<br />

escaladant<br />

tous les grades de la<br />

hiérarchie militaire,<br />

se révélant d'une<br />

valeur insigne au<br />

combat et d'une<br />

bonté bourrue, mais<br />

agissante auprès de<br />

ses soldats. Plus CANROBERT<br />

aimées encore que<br />

le képi de Bugeaud étaient sa grande chevelure<br />

bouffante et ses longues moustaches cirées.<br />

De retour en France comme général de brigade,<br />

Canrobert devint aide de camp du prince Bonaparte,<br />

qui, le jour du 2 Décembre, le chargea<br />

de faire évacuer les grands boulevards.<br />

En 1854, il commande une division de l'armée<br />

qui va investir Sébastopol. A l'Aima, où<br />

il agit avec son courage habituel, il est blessé.<br />

Peu après, le maréchal de Saint-Amand, mourant,<br />

lui remet le commandement en chef.<br />

Canrobert se rend compte qu'il n'est point taillé<br />

pour de pareilles responsabilités etaccepte d'être<br />

remplacé par Pélissier. D'ailleurs, il a été de<br />

nouveau grièvement blessé à Inkermann.<br />

Devenu, après la guerre de Crimée, maréchal<br />

de France, il fait preuve de la même<br />

modestie en 1870, en servant sous les ordres<br />

de Bazaine, alors qu'il eût pu revendiquer le<br />

commandement ; ce à quoi la France eût<br />

gagné. Par sa défense héroïque à Saint-Privat,<br />

Canrobert se couvre d'une nouvelle gloire ;<br />

mais, malgré ses protestations, Bazaine capitule.<br />

Il est, lui aussi, interné en Allemagne.<br />

Quand il revient en France, il n'occupe<br />

plus aucun poste actif et est élu, en 1876, sénateur<br />

du Lot. La Chambre le réélit en 1879,<br />

puis en 1885. Canrobert mourut en 1895, étant<br />

alors le dernier des maréchaux de France.<br />

tous du même style ét donnant une apparence<br />

majestueuse à l'ensemble.<br />

Au centre fut placée la statue représentant<br />

Louis XIV couronné par une victoire et foulant<br />

au pied la triple alliance. Sur le socle, aux<br />

quatre angles, des figures de bronze figuraient<br />

des esclaves enchaînés.<br />

Le 18 mars 1686, le duc de la Feuillade<br />

inaugura avec pompe le monument. A la<br />

tête de son régiment, il fit trois fois le tour de<br />

la place, descendant trois fois de son cheval pour<br />

aller s'agenouiller devant l'image du roi.<br />

En 1790, on fit disparaître les esclaves du<br />

monument et, en 1792, la statue tout entière.<br />

La place prit alors le nom de place de<br />

la Victoire-Nationale. En 1816, elle reprit<br />

son appellation primitive et une nouvelle<br />

statue de Louis XIV, celle que l'on voit<br />

aujourd'hui, y fut érigée.<br />

LA PLACE DES VICTOIRES ET LA STATUE DE LOUIS XIV


iBjinrra DIMANCHE-ILLUSTRÉ ■"uinuiiuiiiiiiuiiiiiuiiiiiiiiiiiiuiiiiimiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii ■uiiiuiiiii 12 an iiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiin iiiiiiiiiniiiimiiiiiiiiiiiiiiiiiiii LE <strong>26</strong> JUILLET 1925 «uiiuii<br />

LA SEMAINE COMIQUE<br />

LE PESSIMISTE<br />

— Tout est détraqué, aujourd'hui ! Voilà<br />

le soleil qui se lève avec vingt et une minutes<br />

de retard !<br />

(Dessin inédit de R. LENOIR.)<br />

L IMPASSE<br />

— Je n arriverai jamais l C'est trop difficile<br />

l<br />

— Tu devrais te montrer... te faire voir...<br />

— Mais on me dit partout qu'on m'a assez<br />

vu l<br />

* [ (Dessin inédit de GuÊPINj<br />

MEFIANCE<br />

— Je ne le fréquente pas... C'est un type<br />

dangereux /...<br />

— Ah l c'est une fripouille ?...<br />

— Non... mais... il fume des cigarettes'<br />

fuscees /.«■<br />

1 (Dessin inédit de GASTON MAS.)<br />

T H<br />

WILLY BRUYCE, l'ancien manager du d'une grande mare aux bords de laquelle<br />

nègre boxeur Lipton Heigh, m'a croassaient des milliers de grenouilles. Elles<br />

conté ceci :<br />

avaient dû se réunir là pour demander un roi.<br />

Ma fidèle et autoritaire compagne, lady Eva Théodore se désaltéra et, au moment de<br />

Bruyce, que j'ai épousée après avoir pris ma revenir au pré,- s'attarda à regarder curieu-<br />

retraite de manager, s'était mise dans l'idée sement une des grenouilles. Celle-ci, frêle et<br />

que je devenais paresseux.<br />

légère, sautillait joyeusement. Elle se retourna<br />

A la fin d'un repas, elle m'en fit le reproche vers le mufle énorme de" Théodore. "<br />

sur un ton acide et elle m'accusa presque de J'ignore si les bêles peuvent se parler, mais<br />

vivre à ses dépens.<br />

je crus comprendre que cette pnmesautière<br />

J'acceptai placidement les premières injures grenouille se moquait de mon bœuf et semblait,<br />

mais, à bout de patience, je lui infligeai une par ses bonds à droite et à gauche, le mettre au<br />

sévère correction dont elle porta les traces défi d'en faire autant.<br />

plusieurs jours.<br />

Théodore essaya de sauter.<br />

Je la croyais calmée lorsqu'elle revint à la Il se levait de terre avec peine et retombait<br />

charge. J'allais reprendre le même parti de lourdement. Il eut honte de lui-même.<br />

défense : elle avait tout prévu.<br />

Pourquoi la nature l'avait-elle fait aussi gros<br />

Les objets les plus divers, qui se trouvaient et aussi impropre à sauter ?<br />

à portée de sa main, me volèrent à la figure Évidemment, cette grenouille était parée<br />

et me mirent dans un tel état que je préférai de tous les dons : petite, mince, pouvant<br />

parlementer.<br />

s allonger, franchissant d'un bond les obstacles<br />

— Willy, êtes-vous décidé à travailler ? et se révélant nageuse de premier ordre.<br />

— Oui, chère Eva !<br />

Théodore essaya de nager.<br />

— Prenez-en l'engagement solennel !<br />

Il entra dans la mare, allongea les pattes<br />

— J'en prends l'engagement solennel ! comme il venait de le voir faire : mais sa ten-<br />

— Quelle occupation choisissez-vous ? tative devait ajouter aux regrets précédents.<br />

Je me grattai le crâne, mon pauvre crâne La nature avait négligé de lui donner des<br />

meurtri par le choc d'objets solides et cherchai aptitudes à la natation.<br />

une réponse.<br />

Théodore sortit de la mare, le corps couvert<br />

— Willy, vous dissimulez votre désir de ne de vase et le cœur plein d'amertume. Il rentra à<br />

rien faire.<br />

l'étable, marchant la tête basse et la queue<br />

— Vous vous trompez, chère Eva. Je entre les pattes, ce qui était, chez lui, une<br />

voudrais choisir une profession digne de mon marque personnelle de mécontentement.<br />

ancienne, je veux dire, digne d'un manager... Je n'en parlai pas à Eva, car elle n'entend<br />

Voulez-vous que je fasse de l'élevage ? rien à l'âme des bêtes. Les jours suivants, je<br />

— De l'élevage de quoi ?<br />

conduisis encore T héodore aù pâturage.<br />

;—■ Je n'en sais trop rien ; mais jugez, chère A chaque sortie, mon bœuf commençait par<br />

Eva, combien je suis enclin à vous être agréable. manger, et ceci d'une façon décroissante, puis<br />

Le lendemain, j'arrivai chez moi en tirant un il se dirigeait vers la mare. Il y retrouvait de<br />

boeuf au bout d'une corde. J'avais trouvé ce légères grenouilles, observait patiemment leurs<br />

bœuf sur une route : il était seul. Je pensai moindres gestes et reprenait ses exercices de<br />

qu'il était venu là tout exprès pour me per- natation.<br />

mettre de réaliser mon engagement solennel de Je dois dire, malgré l'amitié que j'avais<br />

la veille.<br />

pour lui, qu'il s'y prenait fort mal et n'avait,<br />

Ma fidèle et autoritaire ménagère m'accueillit décidément, aucune disposition pour ce- sport.<br />

avec les marques du plus grand étonnement. . Ne pouvant me lancer dans des explications<br />

— Où avez-vous pris l'argent pour acheter techniques, j'essayai de distraire ma bête en<br />

une pareille bête ?<br />

la tirant par sa corde, la promenant pour lui<br />

— Il serait plus précis de me demander : où montrer le charme des champs, la beauté des<br />

avez-vous pris une pareille bête ?<br />

arbres, le pittoresque des paysages.<br />

— Elle ne vous est pas tombée du ciel ? Rien n'y fit. De jour en jour, Théodore<br />

— J'en suis encore à le croire... Evitez, dépérissait, mangeant de moins en moins et<br />

chère Eva, de me poser des questions aussi s'acharnant à tenter des brasses.<br />

embarrassantes que celles d'un juge... Laissez Je confiai mon inquiétude à Eva : elle m'in-<br />

aux mystères tout leur charme et daignez me juria. J'aurais dû ne rien lui dire. Etant seul à<br />

permettre de conduire mon bœuf à l'étable. voir la juste situation, je fus seul à en souffrir.<br />

Franchement, je n'ai pas d'étable. Vous Mon bœuf, par jeûnes volontaires et exer-<br />

savez qu'un ancien manager ne s embarrasse cices répétés, devint si faible qu'il ne pût plus<br />

pas pour si peu. J'installai mon bœuf dans une se tenir sur ses pattes et qu'il me fallut l'abattre.<br />

pièce du rez-de-chaussée de mon habitation. J'ai assuré à-Eva que le travail ne me<br />

Eva me fit bien quelques objections. Je la réussissait plus et je vais profiter de cette<br />

menaçai de reporter l'animal où je l'avais malheureuse expérience pour prendre un<br />

trouvé : elle se tut. Chaque jour, je sortais, repos absolu. Nous avons mangé le peu de<br />

de grand matin, avec mon bœuf.<br />

viande qui restait sur les os de Théodore ; je<br />

Je l'emmenais dans les prés se gorger de me ferai faire des chaussures avec sa peau.<br />

verdure, et, pendant ce temps, imitant les Je ne sais, gentleman, si vous éprouvez<br />

pâtres, je m'essayais à jouer de la flûte, à rêver, l'ambition de faire de l'élevage, mais souvenez-<br />

à lire les journaux et, bien souvent aussi, je vous de mon bœuf qui voulut devenir aussi<br />

m'endormais sous les grands arbres. Je donnai mince et aussi agile qu'une grenouille.<br />

à mon bœuf le prénom de Théodore, car une Les animaux nous ressemblent en ce qu ils<br />

bête ne nous appartient réellement qûe finissent,' tôt au tard, par regretter de ne pas<br />

lorsqu'on lui a attribué un prénom.<br />

être autre chose qu'eux-mêmes !...<br />

Il arriva qu'une fois Théodore s'approcha<br />

A. DE WENZEL.<br />

TRAVAUX DE VACANCES<br />

Mais oui, voyez, je me fabrique un intérieur d'été... pour cet hiver I.<br />

(Dessin inédit de M. SAUVAYRE.)<br />

ARITHMETIQUE MODERNE<br />

— Comment ! Le service à café est déjà<br />

dépareillé ?<br />

— Oui... Il a tout juste duré... deux bonnes<br />

et demie !...<br />

(Dessin inédit de A. de Roux.)<br />

SANG-FROID<br />

— Que Monsieur vienne vite, on demande<br />

Monsieur au téléphone !<br />

(Dessin inédit de GREY.)<br />

PRESENCE D ESPRIT<br />

— Vous êtes vraiment maladroite. Maria ;<br />

voilà ce cendrier cassé I Que vais-je dire<br />

à Monsieur, pour vous éviter une réprimande<br />

?<br />

— Madame n'a qu'à lui dire que c'est\lle<br />

qui l'a fait l<br />

(Dessin inédit de S.-M. BERTINJ


JUILLET 192S piNiiunii ■■■■llllilntliliiHlIiniilllI niiiiiiiiiiiiiiii ■■■iiiiiiiiiiiiiiiiin J.3 niiiiiiimiiim ■■■■■■■■■■■■■■■■■■■■■IUIUIIMHIIIIIIIIIIIHUIIIHIIIIUMIIMIUIIIII DIMANCHE-ILLUSTRÉ nuuiiii<br />

UN HOMME COURAGEUX<br />

— Alors, il a payé la traite ?<br />

— Non, et il m'a dit que, si j'osais venir<br />

lui demander encore de l'argent, il me romprait<br />

les os et me jetterait par la fenêtre.<br />

— Bon I Vous y retournerez demain, et<br />

vous lui direz qu'il ne me fait pas peur avec<br />

Ses menaces /... (Dessin inédit de FOUCHERY.)<br />

— Inculpé, quelle est Votre profession I<br />

— Croque-mort, m'sieu le commissaire<br />

pOUr VOUS servir I (Dessin médit de G. FRONVAL.)<br />

LE PUBLIC EST PARFOIS EXCESSIF<br />

LES SPORTS A LA CAMPACNE<br />

— Grand-père, t'as pas bientôt fini de dormir... On a besoin du filet pour jouer au<br />

tennis, .i (Dessin inédit de VAREJ j<br />

ON TOURNE "UN DRAME SOUS LES COCOTIERS" A VINCENNES<br />

— C'est malin l Vous avez failli tuer Adolphe, qui fait le lion dans la descente de lit<br />

du régisseur l ( DKsin inédit de R Lenoiii)<br />

GRACIEUSETE<br />

— Vous me permettez, madame, de cueil-<br />

lir cette jolie fleur ?<br />

— Bien sûr, que je vous le permets... C'est<br />

Vingt SOUS, pièce /... (Dessin inédit de H. SAUVAYRE.) ,<br />

DEPLACEMENTS ET VILLEGIATURES<br />

— 1 Comme ça, les amis du bureau seront<br />

forcés de croire que j'ai été à la mer !<br />

(Dessin inédit de TH. BARN.)<br />

?<br />

PARADOXE<br />

u est-ce qui se passe, là-bas ?<br />

'est une vente à l'amiable I (Djr fn inédit de DIIARUJ


niiiiin DIMANCHE-ILLUSTRÉ iiiiiiiinniiiiiniininimiiiiiiiiiiini iMiiiiiiiiin riiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii 14 iriiiiiiiiiiiiin llllliiiiiiiiiiiiiiiiinn min iiiillllinilllill i min IJj 2C JUILLET 192S "«mil»<br />

B R I C - A B R A C<br />

ÉCHOS ET LUES DE PARTOUT<br />

LA FEMME A L'USINE<br />

jT'N France, le nombre des ouvrières qui se<br />

.—i rendent à l'usine dépasse la moitié de<br />

celui des ouvriers. Elles formaient, de 1835 à<br />

1839, 23 % du personnel de la grande industrie.<br />

En 1847, elles comptaient dans les textiles :<br />

pour le coton 16 %, pour la laine 69 %, pour<br />

la soie 70 %. Quelques années avant la guerre,<br />

rcs chiffres deviennent : pour la laine 80 %,<br />

pour le coton 1<strong>26</strong> %, pour la soie 300 %.<br />

Depuis la guerre, l'industrie a dû recourir<br />

encore davantage aux services des femmes,<br />

j'.lles figurent " en rangs serrés" dans les<br />

textiles (environ 400.000), dans la couture,<br />

dans les fabriques de conserves, dans les<br />

manufactures de tabac, dans les produits<br />

chimiques et la parfumerie, dans les cuirs et<br />

peaux, la fourrure, la ganterie, dans les industries<br />

qui se rattachent à la typographie, dans<br />

celles où l'on opère sur le caoutchouc, la paille,<br />

le crin, la plume, le bois, le celluloïd et même<br />

le métal.<br />

SI existe, en Amérique, des villes qui portent<br />

le nom de Shetowns (villes-femmes). Elles sont<br />

ainsi nommées parce que la main-d'œuvre<br />

féminine y prédomine. Paris peut être rangée<br />

dans cette catégorie. Elle n'est pas, d'ailleurs,<br />

seule en France à présenter ce caractère. Il y a<br />

une quinzaine d'années, on comptait sept<br />

départements où hommes et femmes s'équilibraient<br />

à peu près et cinq où la main-d'œuvre<br />

iéminine l'emportait en quantité sur la maind'œuvre<br />

masculine : Ardèche, Drôme, Gard<br />

(soie), Tarn-et-Garonne (cuirs et peaux),<br />

Vosges (lingerie et broderie).<br />

POISONS DE COMBAT<br />

L'Ecole et la Vie.<br />

OMME d'autres peuples prennent plaisir<br />

C à voir s'affronter des coqs, des chiens,<br />

spécialement dressés à ces jeux sanguinaires,<br />

les Siamois se délectent aux combats de*<br />

poissons. Pour petits qu'ils soient, ces animaux<br />

n'en sont pas moins belliqueux, et leurs<br />

luttes sont souvent mortelles. Ils ont ceci de<br />

remarquable que leur excitation guerrière<br />

modifie leurs couleurs. De jaune pâle, on les<br />

voit devenir dorés, rouges, revêtir d'éclatantes<br />

nuances pourpre. Et le spectacle est féerique,<br />

bien que cruel.<br />

L'aquarium du Jardin Zoologique de<br />

Londres a le bonheur de posséder quelques<br />

spécimens de ces féroces petits êtres. Et l'on<br />

a imaginé un ingénieux moyen défaire admirer<br />

aux visiteurs leur changeante splendeur, sans<br />

mettre en danger leur vie. On place deux de<br />

ces poissons dans !e même bassin aux parois<br />

de verre, comportant une cloison médiane.<br />

Ils s'aperçoivent, tombent en arrêt, se provoquent<br />

et, pleins de fureur, le reflet de leurs<br />

émotions passant en ondes colorées sur leurs<br />

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corps nacrés, se précipitent l'un sur l'autre.<br />

0 stupeur ! un obstacle invisible les sépare,<br />

un mur transparent dont ils ne peuvent imaginer<br />

la nature, les empêche de se déchirer, de<br />

lacérer à coups de dents leurs souples nageoires,<br />

longues et flottantes, leur queue arrondie en<br />

forme d'éventail exotique.<br />

Leur étonnement et leur rage impuissante<br />

se traduisent en couleurs merveilleuses, en<br />

tons d'arc-en-ciel qui se transforment, s'effacent<br />

et renaissent pour le ravissement des<br />

spectateurs. Finalement, les petits énergumènes<br />

se lassent, s'éloignent avec dignité et<br />

s ignorent dédaigneusement, retombés à leur<br />

apparence modeste et toute leur beauté<br />

disparue. -<br />

Daily Mail.<br />

PRÉSENTS SAHARIENS<br />

N intéressant et anonyme journal de<br />

U voyage nous révèle que les présents<br />

n'entraînent pas à grande dépense dans le<br />

Sahara :<br />

" Dans l'après-midi du lendemain, j'envoyai<br />

au gouverneur deux livres de sucre<br />

français, une livre de clous de girofle et une<br />

livre de seunbeul (littéralement les tiges). C'est,<br />

d'après les botanistes français orientaux, le<br />

nard, spina celiica. Il s'en vend d'immenses<br />

quantités dans le désert. On ne doit faire aucun<br />

présent à un homme de quelque importance,<br />

sans lui en offrir. Les dames du Sahara se<br />

servent d'une décoction de ses feuilles en<br />

guise d'eau de Cologne, Les clous de girofle,<br />

greunjel, sont très recherchés, surtout par les<br />

femmes, qui en assaisonnent leurs gâteaux, leurs<br />

couscouss et différents mets.<br />

' Une vingtaine de femmes Touareg sont<br />

venues me voir. Après être restées quelques<br />

instants devant moi avec tous les signes de<br />

Tétonnement, elles commencèrent à s'agiter<br />

dans tous les sens. Ne sachant qu'en faire, je<br />

pris un morceau de sucre et. le cassai en morceaux,<br />

que je leur distribuai. La scène changea<br />

subitement, la joie brilla dans tous les yeux,<br />

chaque langue s'agita avec volubilité. Elles<br />

me demandèrent alors si j'étais marié, si les<br />

femmes chrétiennes étaient jolies, si elles étaient<br />

plus jolies qu'elles, et si, n'étant pas marié,<br />

je verrais quelque objection à épouser l'une<br />

d'elles. Ceci ne doit pas étonner : les femmes<br />

Touareg ont une existence bien différente de<br />

celle des femmes maures et musulmanes ; elles<br />

jouissent de beaucoup plus de liberté, vont<br />

toujours sans voile, et prennent une part active<br />

à toutes les affaires, à toutes les transactions de<br />

leurs maris. La vivacité de ces femmes, les<br />

égards que les hommes ont pour elles, forment<br />

un contraste frappant avec les mœurs des<br />

autres Etats mahométans.<br />

On importe des aiguilles dans le désert,<br />

mais jamais d'épingles. Je remis à chacune de<br />

mes visiteuses, au moment où elles s'en allaient,<br />

quelques épingles ; et, comme elles n'en connaissaient<br />

pas l'usage, je leur donnai une leçon<br />

pratique en en fixant une ou deux sur leurs<br />

vêtements, ce qui excita leur joie d'une manière<br />

extraordinaire.<br />

La Dépêche Commerciale.<br />

POLICE VIGILANTE<br />

UI donc prétendait que la police parisienne<br />

n'apportait pas un soin extrême à protéger<br />

Q notre vie et notre santé ? Voici un fait<br />

qui prouve péremptoirement le contraire, ainsi<br />

que l'apprit un de nos bons amis.<br />

Ce dernier, paisible et modeste enfant de la<br />

région espalionnaise, devenu depuis vingt ans<br />

parisien sans avoir pour cela appris tous les<br />

règlements de police de la capitale, longeait, un<br />

de ces jours, la rue de Richelieu quand il se<br />

sentit happé au collet par un agent.<br />

— Vos papiers ? lui demanda ce dernier<br />

d'un ton qui n'admettait pas de réplique.<br />

— Mais, monsieur l'agent, je n'ai pas de<br />

papiers et, d'ailleurs, je ne vois pas pourquoi<br />

vous m'interpellez.<br />

— Je vous interpelle parce que j'en ai le droit.<br />

Votre nom ? Votre profession ? Votre adresse,<br />

vos lieu et date de naissance ?<br />

— Mais...<br />

— Il n'y a pas de mais. Vous avez jeté des<br />

papiers dans la rue, et vous passerez pour cela<br />

devant le tribunal de police ; répondez avec<br />

preuves, ou sinon au poste Effectivement, notre<br />

ami, qu avait réduit en miettes une enveloppe<br />

qu'il venait d'ouvrir, en avait machinalement jeté<br />

les morceaux au vent. Après cela, allez donc vous<br />

plaindre du manque de vigi ance de la police !<br />

Le Rouergue.<br />

LE COIN DANS LE CHÊNE<br />

(Suite du texte de la page 7.)<br />

les quatre~doigts captifs rongés au ras de l'arbre<br />

ensanglanté.<br />

Les loups, qui, à cette époque, infestaient<br />

la forêt, les grands loups des Ardennes étaient<br />

passés par là L.<br />

L faut ! Il faut !... J'irai demain !<br />

Dix fois par jour, Jacques Girondelle<br />

I s interrompait de creuser ou aplanir son<br />

morceau de hêtre pour songer et pour se<br />

répéter qu'il devait aller trouver Lucette<br />

Bonnin. Et puis il n'osait pas.<br />

Deux semaines avaient passé depuis le<br />

drame du Val-Cranioux. Peu à peu, l'émoi du<br />

village s'était calmé. Un accident est un accident.<br />

Seuls, les parents de Bruno se perdaient<br />

encore en conjectures sur le mobile qui avait<br />

mené leur malheureux fils au Val-Cranioux<br />

en cet horrible soir d'orage.<br />

De Manda Septantin le sabotier se ressouvenait<br />

de temps en temps, Manda Septantin<br />

dont il restait le débiteur...<br />

— J irai lui porter son boisseau de fèves,<br />

à Manda, se disait Jacques. Certainement,<br />

j'irai, puisque c'est dû !... Mais... quand j'aurai<br />

vu Lucette Bonnin !... Je serais bien nigaud<br />

de payer avant l'affaire conclue !... Il faut...<br />

il faut que j'aille trouver Lucette ! Il est temps !<br />

Un jour vint où Jacques ajouta : "J'y vais I "<br />

et où il y alla.<br />

C'était une après-midi de <strong>juillet</strong>. Le village<br />

semblait vide. Bêtes et gens étaient aux champs,<br />

au bois. Nul bruit. Pas même de cris d'enfants.<br />

Rien que des bourdonnements d'insectes.<br />

Pour éviter la mère Guillemette, qui, assise<br />

devant sa porte, dormait d'un œil, le front<br />

posé sur ses deux mains, serrant la crosse de<br />

son bâton, Jacques Girondelle fit un détour<br />

et arriva par une ruelle à la maison de Lucette.<br />

L inflexion de la voix de Lucette glaça<br />

Jacques dès le seuil.<br />

— Bonjour, fit-il gauchement, en venant<br />

s appuyer au dossier d'une chaise.<br />

Lucette se tenait assise près de la fenêtre,<br />

d'où, sans doute, elle avait vu venir le jeune<br />

homme. Sans quitter son ouvrage, elle dit, le<br />

front plissé :<br />

— Maman n'est pas là. Qu'est-ce que tu<br />

veux, Jacques Girondelle?<br />

— Ce que je veux, Lucette?<br />

— Oui, que veux-tu?<br />

Lucette leva son visage et regarda Jacques<br />

avec une fixité qui décontenança le garçon.<br />

— Lucette... Voyons... tu t'en doutes bien,<br />

Lucette... Il m'avait semblé... à présent...<br />

— A présent... quoi?<br />

— Je gagne ma vie et j'ai un peu de bien,<br />

tu le sais. Et puisque le malheur a voulu qu'un<br />

autre... s.en aille... je me suis dit...<br />

— Que je voudrais t épouser, peut-être?<br />

C'est cela que tu viens me demander, Jacques<br />

Girondelle !... Tu peux t'en aller comme tu es<br />

venu ! Jamais ! Jamais !... Entends-tu?... Jamais<br />

je ne serai ta femme !<br />

— Pourtant... à présent...<br />

— Oui, à présent... à présent qu'il est mort<br />

Tu ne t'aperçois donc de rien? Tu es donc<br />

plus borné qu'une bête?... Tu ne vois donc<br />

pas que je ne serai point ta femme, ni la femme<br />

de personne, parce que... justement, c'est<br />

Bruno... c'est Bruno que...<br />

Un sanglot s'étrangla dans la gorge de la<br />

jeune fille. Brusquement, elle rejeta son<br />

ouvrage, se leva, marcha vers Jacques, le bras<br />

tendu, comme une furieuse.<br />

— Va-t'en ! Va-t'en ! cria-t-elle. Que je ne<br />

te voie plus jamais dans notre maison, ni nulle<br />

part ! Va-t'en ! Je te déteste !... Va-t'en !...<br />

C est lui que j aimais !<br />

"Ce disant, elle avait poussé Jacques hors<br />

de la pièce, avec tant de vigueur et de rapidité<br />

que le sabotier se trpuva dans le couloir et<br />

entendit claquer .le verrou de la porte avant<br />

d'avoir pu objecter un seul mot.<br />

Derrière l'huis, il tenta de parlementer<br />

encore. Il appela :<br />

— Lucette !... Oh !... Lucette !...<br />

I! supplia, il pleura,,. La jeune fille ne<br />

répondit non plus qu'une morte.<br />

A-la fin, il s'en fut, désespéré, fou de honte,<br />

et regagna son. logis en longeant les haies des<br />

jardins, comme un voleur.<br />

Un quart d'heure plus tard, il sortait de<br />

nouveau, gagnait le bois et se dirigeait vers<br />

la grotte du sorcier. Il courait.<br />

Des chants d'oiseaux emplissaient les taillis ;<br />

dans l'ombre bleue flottait un parfum de<br />

fraises ; un crépuscule apaisé tombait sur !a<br />

forêt, sur les feuilles immobiles, sur les mousses...<br />

Parmi les rochers, au-dessous de sa grotte<br />

d'où pendait l'échelle de corde. Manda Septantin<br />

faisait cuire un aliment ou bouillir des<br />

herbes sur un feu clair. Il entendit le bruit<br />

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que faisait Jacques en marchant dans les lougères<br />

et, lui voyant les mains vides ;<br />

— C'est ainsi, lui cna-t-il, que tu remplis<br />

tes engagements et que tu m'apportes mes<br />

fèves ?<br />

— C'est ainsi, fit l'autre, en s'approchant,<br />

menaçant, que tu trompes les gens sur le<br />

pouvoir de tes paroles et de tes plantes?<br />

— Eh quoi, Jacques Girondelle, reprit<br />

tranquillement le sorcier, en baissant la voix,<br />

n'es-tu pas débarrassé du rival qui te gênait?<br />

Est-ce que l'âme de Bruno revient?<br />

.-Di eu ait l'âme deBruno! soupira Jacques<br />

en frissonnant. Mais que me fait qu'il ne soit<br />

plus, puisque... puisque Lucette ne veut pas<br />

de moi pour mari?<br />

— Cela, mon fils, c'est affaire à toi... A toi<br />

de cueillir la rose !<br />

— Tu m'avais promis que Lucette serait<br />

ma femme !...<br />

— Promis... promis... Peut-être que, si tu<br />

ne m avais pas toi-même frustré de mon dû...<br />

— Ton dû...? C'est toi le voleur, misérable<br />

sorcier !<br />

Les injures succédaient tout naturellement<br />

aux reproches. Puis ce furent les menaces :<br />

— Je ne te donnerai pas les fèves, criait<br />

Jacques exaspéré, et je te ferai rendre les écus<br />

que tu m'as pris !<br />

— Je dirai dans le pays que Bruno n'était<br />

pas seul au Val-Cranioux le soir qu'il a fait<br />

de l'orage et que les loups rôdaient, clamait le<br />

sorcier.<br />

— Si tu as ce malheur...<br />

Jacques s'avançait, le poing levé, vers<br />

Manda, qui recula en criant :<br />

— Je dirai que tu as assassiné Bruno !<br />

— Menteur ! Tais-toi ! Te tairas-tu?<br />

Alors, le sorcier redressa sa haute taille,<br />

leva sa loneue main et jeta, solennel :<br />

— Maudît !<br />

Jacques, aveuglé, fou, se précipita alors sur<br />

le vieillard et le terrassa. L'autre se dégagea<br />

avec une agilité inattendue. Jacques s'élança<br />

de nouveau, tête baissée, et une âpre lutte<br />

commença.<br />

Il arrivait que tantôt l'un, tantôt l'autre<br />

échappait à l'étreinte. Mais Jls se poursui- -<br />

vaient, se reprenaient aussitôt, sauvagement.<br />

Bientôt, ils furent au bord du précipice.<br />

Chacun nourrissait la même sournoise intention<br />

d y pousser l'adversaire. Aucun des deux<br />

ne disait mot ; ils .s'appliquaient à leur tâche.<br />

Au . loin, les chats-huants commençaient, dans<br />

le soir, leur chanson désespérée...<br />

Dix minutes passèrent et ce fut le vieillard<br />

qui triompha. Ayant amené Jacques à l'emplacement<br />

qu il crut propice, il le souleva de<br />

terre et le jeta dans le vide.<br />

Mais Jacques s'était agrippé aux vêtements,<br />

à la longue barbe du sorcier.<br />

Les deux corps pirouettèrent et tombèrent<br />

en même temps...<br />

Une vieille, qui passait non loin de là,<br />

rapportant un faix de bois mort, entendit le<br />

double cri et donna l'alarme.<br />

Du village on accourut.<br />

Déjà, Manda Septantin était mort. Quant à<br />

Jacques Girondelle — ajoutent ceux qui<br />

racontent cette ancienne histoire — il eut,<br />

avant d expirer, le temps de confesser la<br />

vérité et de se repentir de son crime.<br />

Une pierre rappelle le nom de Bruno<br />

Vernaire, à l'endroit où il périt. Ainsi le<br />

voulut Lucette Bonnin, qui la paya de ses<br />

deniers et puis se retira dans un couvent.<br />

On peut voir cette pierre chaque fois que les<br />

bûcherons font coupe nette au fond du Val-<br />

Cranioux, qui demeure d'ailleurs un endroit<br />

peu fréquenté, encore que les loups, grâce à<br />

Dieu, aient, aujourd'hui, à peu près disparu...<br />

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SELLE, 59, boulevard Iixclmans, Paris (10 E ).<br />

Si vous souhaitez, en outre, des conseils spéciaux<br />

à votre cas, ils vous seront fournis, très complets,<br />

à titre gracieux et sans engagement de votre part.<br />


tini DIMANCHE-ILLUSTRÉ mi i n IIMIIIIMIIHI liiliiiiiMiiiiiiMiiMiiiiiiiiiiiiiii il }g IIIIIIII minium mu i M ïinuiii 1111 iiiini un LE <strong>26</strong> JUILLET 1925 miiif<br />

LA MOTOCYCLETTE ENLISÉE<br />

Un motocycliste parisien, M. Ropars, qui voyageait<br />

dernièrement dans les parages du Mont-<br />

Saint-Michel, à marée basse, a eu sa machine<br />

enlisée dans les sables mouvants. Il a dû abandonner<br />

sa moto qui s'enfonçait ' rapidement.<br />

LE CENTENAIRE DU " CHEMIN... DE BOIS "<br />

On vient de fêter le centenaire du chemin de fer. Mais nos pères auraient<br />

pu, dès 1730, fêter le centenaire de son ancêtre, le " chemin de bois ",<br />

sur lequel roulaient les chariots de charbon, dans certaines mines britanniques,<br />

comme nous le prouve cette ancienne et curieuse estampe anglaise.<br />

UNE RACE DU CENTRE DE L'AUSTRALIE, QUI VIT COMME AU TEMPS DE LA PIERRE TAILLÉE<br />

UN RECORD DE PREMIERS PRIX<br />

Ce superbe bouledogue de dix-neuf mois, Billy<br />

Hercule, appartenant à un propriétaire de Paris,<br />

semble bien battre le record des prix. Rien qu'en<br />

1925, à différentes expositions canines, il a obtenu<br />

sept premiers prix, ce qui est une belle performance.<br />

La race humaine la plus primitive est, vraisemblablement, celle des autochtones de l'inté- dite de Néanderthal. Nos photographies montrent : 1 0 un vieillard jouant de la musique<br />

rieur de l'Australie, qui, non seulement vivent encore comme nos plus lointains ancêtres avec deux lames de bois ; 2°deux chasseurs lançant leurs javelots, fort primitifs, sur des<br />

de l'âge de la pierre taillée, mais présentent certaines caractéristiques anatomiques qui kangourous ; 3° une vieille femme portant les caractéristiques crâniennes de sa race :<br />

les apparentent étroitement à une des races préhistoriques de l'Europe occidentale nez très large et charnu ; yeux enfoncés sous des visières osseuses ; menton en retrait.<br />

" L'ARBRE DROIT " A SOIXANTE-TREIZE ANS<br />

Le D r Richard Hogner, Suédois d'origine, est un vieillard<br />

de soixante-treize ans. Mais nul n'est plus actif que<br />

lui et, malgré son âge avancé, il possède, grâce à un<br />

entraînement sportif continu, une agilité que lui envieraient<br />

bien des jeunes. Le voici faisant " l'arbre droit "*<br />

LE TRICORNE ET LE TRAIN ÉLECTRIQUE<br />

On vient d'installer, récemment, un nouveau service de<br />

trains électriques entre Londres et Guildford, inauguré par<br />

les notabilités. Le crieur de la ville de Guildford, avec son<br />

tricorne et sa cloche, ne fut pas le moins remarqué du cortège.<br />

UNE ÉMIGRATION DE LAMPROIES<br />

Voici le paradis des pêcheurs. Car cette masse informe est<br />

constituée par une énorme bande de lamproies qui, comme<br />

chaque année, émigrent et franchissent presque à sec une<br />

chute d'eau dans un fleuve de l'Oiégon, aux Etats-Unis.<br />

II<br />

LAMAS THIBÉTAINS DEVANT LEUR MAISON<br />

Nul n'a oublié la visite que les lamas thibétains firent,<br />

récemment, à Londres et à Paris. Or, voici un lama<br />

entouré de sa famille devant la demeure qu'il habite.<br />

A noter la très curieuse architecture de ce bâtiment<br />

qui, au Thibet, est dé]à une maison... de luxe.

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