CAHIERS DE BERNARD DE CAUX - Jean Duvernoy
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Cahiers de Brnard de Caux – <strong>Jean</strong> <strong>Duvernoy</strong> 5<br />
L'APPORT<br />
Bernard de Caux est à l'irigine d'une "style" de processus qui prévaudra chez les inquisiteurs<br />
dominicains jusqu'au début du siècle suivant: une énumération de visiones (avoir vu un ou des<br />
parfaits cathares) avec pour chacune les mêmes précisions: avoir "adoré", entendu la prédication,<br />
mangé, donné ou envoyé quelque chose, avoir reçu ou hébergé, ou conduit, les parfaits, assisté à<br />
une "hérétication", avoir été "hérétiqué". Au moment où le déposant va dire quelque chose qui pour<br />
nous serait intéressant, il est platement interrompu: on veut savoir s'il a adoré ou vu adorer.<br />
Néanmoins, le document reste très précieux. Comme d'habitude, le catharisme a atteint<br />
l'élite de la population : le sénéchal de Raimond VII en Quercy, Pons Grimoard; son bayle de<br />
Castelsarrasin et Moissac, Odon ou Othon de Barèges, de grands seigneurs comme Isarn de<br />
Tauriac, qui a des veneurs, ou les Villemur, Rabastens, Rabat, Unaud de Lanta, et jusqu'à la<br />
demoiselle d'honneur de la comtesse Eléonor, femme de Raipond VI.<br />
La guerre a d'ailleurs, au moins autant que la foi, réuni tous ces lignages. Presque tous les<br />
nobles déposants se sont retrouvés dans Toulouse assiégée; au siège de Castelsarrasin figuraient des<br />
chevaliers de Saverdun. Parmi ces seigneurs, la plupart ont eu une mère ou une soeur dans les<br />
ordres cathares. Certains y sont même entrés dans leur jeunesse, comme Maffré de Paulhac.<br />
Comme à Mirepoix, Saverdun, Fanjeaux, Laurac, la noblesse locale est concentrée: à<br />
Castelsarrasin, à Villemur, à Verfeil. Là aussi, les maisons de parfaits et de parfaits se sont<br />
multipliées. Les Vaudois ne Sont présents qu'aux<br />
abords de Montauban.<br />
Conséquence de la guerre ou persistance de l'état antérieur à la Croisade, l'insécurité règne<br />
en dehors des villes et des châteaux. Un habitant de Castelsarrasin est gendre d'un routier; on<br />
continue à capturer sur les routes les passants qui n'ont pas le "guidage" d'un seigneur.<br />
Au moment où les interrogatoires ont lieu, on connaît déjà des arrestations de parfaits, des<br />
bûchers, même pour des croyants, la torture, de lourdes coppensations pécuniaires. A la jubilation<br />
causée par la nouvelle de l'assassinat des inquisiteurs en 1242 ont succédé les représailles à<br />
l'époque du siège de Montségur.<br />
Les procédures de Toulouse, concernant le Tarn et le Lauragais, sont également<br />
importantes: il ne s'agit que de nobles. Mais c'est de loin le dernier processus qui l'emporte en<br />
intérêt. Le bourgeois de Toulouse Pierre Garcias, du Bourguet-Nau (un quartier neuf construit en<br />
aval de la Daurade) est amené à exposer ses convictions cathares dans la salle d'école des<br />
Franciscains, en tête à tête avec un Frère homonyme dont il ne se méfie pas, alors que d'autres<br />
franciscains se relaient, sur le plafond, pour noter ce qui se dit. Charles Schmidt avait déjà attiré<br />
l'attention sur ce morceau 13 . Depuis lors, et surtout depuis sa publication par Célestin Douais 14 , il a<br />
été très généralement cité. C'est d'ailleurs, des origines à 1273, l'unique processus conservé<br />
concernant un habitant de Toulouse 15 .<br />
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13. Histoire et doctrine de la secte des cathares ou albigeois, Paris-Genève 1848, t. II, pp. 19 à 51, passim.<br />
14. Documents... op. cit., II, pp. 90-114.