Totem et Tabou - Philosophie pour le Bac
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Sigmund Freud (1912), <strong>Totem</strong> <strong>et</strong> tabou. Interprétation par la psychanalyse 85<br />
de la vie socia<strong>le</strong> des peup<strong>le</strong>s primitifs<br />
l'importance qu'el<strong>le</strong>s présentent par la lumière qu'el<strong>le</strong>s proj<strong>et</strong>tent sur l'histoire<br />
du développement de la civilisation.<br />
Avant de clore ces considérations, nous allons faire une remarque qui<br />
formera une sorte de préparation aux recherches ultérieures. Tout en affirmant<br />
l'identité de nature de la prohibition tabou <strong>et</strong> du commandement moral, nous<br />
ne constatons pas qu'il existe entre l'une <strong>et</strong> l'autre une différence<br />
psychologique. Si <strong>le</strong> commandement moral n'affecte plus la forme du tabou, la<br />
cause doit en être cherchée uniquement dans un changement survenu dans <strong>le</strong>s<br />
conditions <strong>et</strong> <strong>le</strong>s particularités de l'ambiva<strong>le</strong>nce.<br />
Jusqu'à présent, nous nous sommes laissé guider, dans la considération<br />
psychanalytique des phénomènes tabou, par <strong>le</strong>s analogies qui existent entre ces<br />
phénomènes <strong>et</strong> <strong>le</strong>s manifestations des névroses. N'oublions cependant pas que<br />
<strong>le</strong> tabou n'est pas une névrose, mais une formation socia<strong>le</strong>. Nous avons donc à<br />
montrer en quoi consiste la différence de principe qui sépare la névrose du<br />
tabou.<br />
Ici encore je prendrai, <strong>pour</strong> point de départ, un seul <strong>et</strong> unique fait. La<br />
transgression d'un tabou a <strong>pour</strong> sanction un châtiment, <strong>le</strong> plus souvent une<br />
grave maladie ou la mort. N'est menacé de ce châtiment que celui qui s'est<br />
rendu coupab<strong>le</strong> de c<strong>et</strong>te transgression. Il en est tout autrement dans la névrose<br />
obsessionnel<strong>le</strong>. Lorsque <strong>le</strong> malade est sur <strong>le</strong> point d'accomplir quelque chose<br />
qui lui est défendu, il craint <strong>le</strong> châtiment, non <strong>pour</strong> lui-même, mais <strong>pour</strong> une<br />
autre personne sur laquel<strong>le</strong> il ne donne aucune précision, mais que l'analyse<br />
révè<strong>le</strong> comme étant une des personnes qui lui sont <strong>le</strong>s plus proches <strong>et</strong> <strong>le</strong>s plus<br />
chères. Le névrosé se comporte donc dans c<strong>et</strong>te occasion en altruiste, <strong>le</strong><br />
primitif en égoïste. C'est seu<strong>le</strong>ment quand la transgression d'un tabou n'est pas<br />
suivie automatiquement <strong>et</strong> spontanément du châtiment du coupab<strong>le</strong>, que <strong>le</strong>s<br />
sauvages sentent s'éveil<strong>le</strong>r en eux <strong>le</strong> sentiment col<strong>le</strong>ctif qu'ils sont menacés<br />
d'un danger, <strong>et</strong> ils s'empressent d'appliquer eux-mêmes <strong>le</strong> châtiment qui ne<br />
s'est pas produit spontanément, Il nous est faci<strong>le</strong> d'expliquer <strong>le</strong> mécanisme de<br />
c<strong>et</strong>te solidarité. C'est la crainte de l'exemp<strong>le</strong> contagieux, de l'impulsion à<br />
l'imitation, donc de la nature infectieuse du tabou, qui entre en jeu. Lorsqu'un