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Totem et Tabou - Philosophie pour le Bac

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Sigmund Freud (1912), <strong>Totem</strong> <strong>et</strong> tabou. Interprétation par la psychanalyse 76<br />

de la vie socia<strong>le</strong> des peup<strong>le</strong>s primitifs<br />

irréductib<strong>le</strong>. Nous avons pu pénétrer au-delà de c<strong>et</strong> élément, en concevant <strong>le</strong>s<br />

dénions comme des projections des sentiments hosti<strong>le</strong>s que <strong>le</strong>s survivants<br />

nourrissent envers <strong>le</strong>s morts.<br />

C<strong>et</strong>te manière de voir étant bien établie, nous prétendons que ces<br />

sentiments à caractère doub<strong>le</strong>, c'est-à-dire à la fois tendres <strong>et</strong> hosti<strong>le</strong>s,<br />

cherchent à se manifester, à s'exprimer simultanément au moment de la mort,<br />

sous la forme de dou<strong>le</strong>ur <strong>et</strong> de satisfaction. Entre ces deux sentiments opposés<br />

un conflit est inévitab<strong>le</strong>, <strong>et</strong> comme l'un de ces sentiments, l'hostilité, est en<br />

grande partie inconscient, <strong>le</strong> conflit ne peut se résoudre par une soustraction<br />

des deux intensités, avec acceptation consciente de la différence, comme, par<br />

exemp<strong>le</strong>, dans <strong>le</strong>s cas où l'on pardonne à une personne aimée une injustice<br />

dont el<strong>le</strong> s'est rendue coupab<strong>le</strong> envers celui qui l'aime. Le procès se termine<br />

plutôt par l'entrée en jeu d'un mécanisme psychique particulier qu'on désigne<br />

habituel<strong>le</strong>ment dans la psychanalyse sous <strong>le</strong> nom de projection. L'hostilité,<br />

dont on ne sait rien <strong>et</strong> ne veut rien savoir, est proj<strong>et</strong>ée de la perception interne<br />

dans <strong>le</strong> monde extérieur, c'est-à-dire détachée de la personne même qui<br />

l'éprouve, <strong>pour</strong> être attribuée à une autre. Ce n'est plus nous, <strong>le</strong>s survivants, qui<br />

sommes contents d'être débarrassés de celui qui n'est plus ; bien au contraire :<br />

nous p<strong>le</strong>urons sa mort, mais c'est lui qui est devenu un mauvais démon que<br />

notre malheur réjouirait <strong>et</strong> qui cherche à nous faire périr. Aussi <strong>le</strong>s survivants<br />

doivent-ils se défendre contre c<strong>et</strong> ennemi ; ils ne se sont libérés d'une<br />

oppression intérieure que <strong>pour</strong> l'échanger contre une angoisse ayant une<br />

source extérieure.<br />

Sans doute, c<strong>et</strong>te projection, grâce à laquel<strong>le</strong> <strong>le</strong> décédé se trouve transformé<br />

en un ennemi malfaisant, peut trouver sa justification dans <strong>le</strong> souvenir de<br />

certaines manifestations hosti<strong>le</strong>s qu'on a réel<strong>le</strong>ment eu à reprocher au défunt :<br />

sévérité, tyrannie, injustices <strong>et</strong> tant d'autres actes de malveillance qui forment<br />

l'arrière-fond des relations humaines même <strong>le</strong>s plus tendres. Mais ce serait<br />

adopter une explication trop simpliste que de voir dans ce facteur une raison<br />

suffisant à justifier la création de démons par <strong>le</strong> processus de la projection. Les<br />

fautes dont se sont rendus coupab<strong>le</strong>s, pendant <strong>le</strong>ur vie, ceux qui ne sont plus

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