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Totem et Tabou - Philosophie pour le Bac

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Sigmund Freud (1912), <strong>Totem</strong> <strong>et</strong> tabou. Interprétation par la psychanalyse 67<br />

de la vie socia<strong>le</strong> des peup<strong>le</strong>s primitifs<br />

encore est la coutume de certaines tribus nord-américaines, d'après laquel<strong>le</strong> la<br />

veuve doit porter pendant un certain temps, après la mort de son mari, un<br />

vêtement en forme de pantalon, fait avec des herbes sèches, afin de détourner<br />

d'el<strong>le</strong> l'approche de l'esprit. Cela nous autorise à penser que, même au sens<br />

« figuré », <strong>le</strong> contact est toujours conçu comme corporel, car l'esprit du mort<br />

ne se sépare pas des parents survivants <strong>et</strong> continue de « planer » autour d'eux<br />

pendant toute la durée du deuil.<br />

Chez <strong>le</strong>s Agutainos, habitants de Palawan, î<strong>le</strong> des Philippines, » une veuve<br />

ne doit quitter sa cabane, pendant <strong>le</strong>s 7 ou 8 premiers jours qui suivent la mort<br />

du mari, que la nuit, alors qu'el<strong>le</strong> ne s'expose pas à des rencontres. Celui qui<br />

l'aperçoit, est menacé de mort immédiate : aussi avertit-el<strong>le</strong> tout <strong>le</strong> monde de<br />

son approche, en frappant à chaque pas sur un arbre avec un bâton de bois ; <strong>le</strong>s<br />

arbres qu'el<strong>le</strong>s a frappés meurent desséchés. En quoi consiste <strong>le</strong> danger<br />

inhérent à une veuve, c'est ce que nous montre une autre observation. Dans <strong>le</strong><br />

district Mekeo, de la Nouvel<strong>le</strong>-Guinée Britannique, un veuf perd tout ses droits<br />

civiques <strong>et</strong> vit pendant un certain temps en réprouvé. Il ne doit ni cultiver la<br />

terre, ni se montrer en publie, ni être vu dans <strong>le</strong> village <strong>et</strong> dans la rue. Il erre<br />

comme une bête sauvage dans <strong>le</strong>s herbes hautes ou dans <strong>le</strong>s buissons, afin de<br />

pouvoir se cacher faci<strong>le</strong>ment, dès qu'il aperçoit quelqu'un, surtout une femme.<br />

Ce détail nous perm<strong>et</strong> de voir dans la tentation <strong>le</strong> principal danger que<br />

présentent <strong>le</strong> veuf <strong>et</strong> la veuve. L'homme qui a perdu sa femme doit se m<strong>et</strong>tre à<br />

l'abri de toute tentation de la remplacer ; la veuve doit lutter contre la même<br />

velléité, <strong>et</strong> en outre, n'ayant pas de maître, el<strong>le</strong> est susceptib<strong>le</strong> d'éveil<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s<br />

convoitises d'autres hommes, car s'abandonner ainsi aux tentations est un acte<br />

contraire au sens du deuil <strong>et</strong> ne peut qu'allumer la colère de l'esprit 1 .<br />

Une des plus bizarres, mais aussi des plus instructives, coutumes du tabou<br />

se rapportant au deuil chez <strong>le</strong>s primitifs consiste dans l'interdiction de<br />

prononcer <strong>le</strong> nom du mort. C<strong>et</strong>te coutume est extrêmement répandue,<br />

présente de nombreuses variations <strong>et</strong> a eu des conséquences très importantes.<br />

1 La malade dont j'ai plus haut (p. 45) comparé <strong>le</strong>s « impossibilités » à cel<strong>le</strong>s imposées par <strong>le</strong>s tabous, avouait<br />

qu'el<strong>le</strong> était indignée chaque fois qu'el<strong>le</strong> rencontrait dans la rue une personne portant <strong>le</strong> deuil. « à c<strong>et</strong> genslà,<br />

disait-el<strong>le</strong>, il devrait être défendu de sortir ! »

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