Décembre - Nervure Journal de Psychiatrie
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6<br />
LIVRES<br />
■ HOMMAGE<br />
Michel Foucault<br />
Savoir et pouvoir <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine<br />
Bernard Van<strong>de</strong>walle<br />
L’Harmattan, 14,50 €<br />
Foucault a voulu interroger les formes<br />
<strong>de</strong> problématisation qui sont celles<br />
<strong>de</strong> notre époque. L’hypothèse <strong>de</strong><br />
B. Van<strong>de</strong>walle est que la mé<strong>de</strong>cine<br />
constitue à la fois un modèle possible<br />
pour cette interrogation philosophique<br />
(dans la pratique du diagnostic) et le<br />
lieu majeur <strong>de</strong> cette interrogation, à<br />
mesure que la problématisation médicale<br />
est au cœur <strong>de</strong> nos sociétés<br />
hantées par les normes biopolitiques.<br />
On comprend ainsi que Foucault a,<br />
toute sa vie, fait porter sa réflexion<br />
sur la mé<strong>de</strong>cine et ses enjeux, explorant<br />
la dimension archéologique<br />
du savoir médical, la dimension généalogique<br />
du pouvoir que la mé<strong>de</strong>cine<br />
exerce et enfin sa capacité <strong>de</strong><br />
problématiser le sujet sous l’angle <strong>de</strong><br />
l’éthique.<br />
La <strong>de</strong>rnière rupture opérée par Foucault<br />
est méthodologique. Il a sans<br />
doute révolutionné la pratique philosophique<br />
en faisant porter l’analyse<br />
sur ce qu’il appelle archive, sur<br />
la sédimentation d’un discours où le<br />
plan d’un hôpital se révèle aussi important,<br />
et peut-être plus, qu’une référence<br />
philosophique traditionnelle,<br />
où la référence à Bichat ou à Pinel<br />
sera jugée plus opérante que celle<br />
qui ferait appel à Hegel ou à Kant.<br />
Foucault a concentré son attention<br />
sur l’archive grise <strong>de</strong>s hôpitaux et <strong>de</strong>s<br />
asiles, préférant la prose <strong>de</strong>s discours<br />
cliniques ou administratifs à la poésie<br />
philosophique <strong>de</strong> discours plus<br />
séduisants, mais aussi placés plus loin<br />
<strong>de</strong> leurs objets. L’archive <strong>de</strong> Foucault,<br />
ce seront aussi les voix anonymes issues<br />
<strong>de</strong> toutes ces vies minuscules<br />
interpellées par le pouvoir médical<br />
ou psychiatrique et amenées à avouer<br />
une certaine « vérité » sur soi.<br />
Wallon et Piaget<br />
Pour une Critique <strong>de</strong> la<br />
psychologie contemporaine<br />
Emile Jalley<br />
L’Harmattan, 41 €<br />
Wallon et Piaget sont, probablement,<br />
les <strong>de</strong>ux plus grands psychologues<br />
<strong>de</strong> la culture francophone et aussi<br />
européenne.<br />
Le point le plus intéressant <strong>de</strong> leur<br />
dialogue consiste dans l’étroite complémentarité<br />
<strong>de</strong> leurs <strong>de</strong>ux approches<br />
au plan <strong>de</strong>s applications pédagogiques<br />
: Wallon analyserait plutôt la<br />
composante « littéraire », et Piaget davantage<br />
la composante « scientifique »,<br />
d’où se forme le courant unique <strong>de</strong><br />
la pensée <strong>de</strong> l’enfant puis <strong>de</strong> l’adulte.<br />
Cet ouvrage représente pour l’auteur<br />
une étape dans la tentative d’une critique<br />
générale <strong>de</strong>s disciplines psychologiques,<br />
en particulier <strong>de</strong> la psychologie<br />
objective. S’il est facile <strong>de</strong><br />
critiquer la psychanalyse, il l’est moins<br />
<strong>de</strong> critiquer la psychologie scientifique,<br />
dont un examen attentif montre<br />
que la scientificité est à questionner.<br />
L’affaire du Livre noir <strong>de</strong> la psychanalyse,<br />
débutant en 2005, touche, au<strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> la question relativement limitée<br />
<strong>de</strong>s psychothérapies, à la<br />
confrontation entre la psychanalyse<br />
et l’ensemble <strong>de</strong>s sciences cognitivesneurosciences<br />
- dont la psychologie<br />
et la psychiatrie biologique -, et plus<br />
largement entre <strong>de</strong>ux conceptions <strong>de</strong><br />
la culture occi<strong>de</strong>ntale, l’une <strong>de</strong> type<br />
nord-américain, l’autre européenne.<br />
C’est ce que les péripéties laborieuses<br />
<strong>de</strong> la construction européenne risquent<br />
<strong>de</strong> montrer progressivement.<br />
Il est clair que le dialogue encore très<br />
actuel entre Wallon et Piaget est impliqué<br />
dans ce débat.<br />
<br />
Hommage à Jean Talairach<br />
Service <strong>de</strong> Neurologie <strong>de</strong> l’Hôpital<br />
d’instruction militaire du Val-<strong>de</strong>-Grâce.<br />
Jean Talairach accepta le poste, aux<br />
côtés d’autres Psychiatres <strong>de</strong> l’Hôpital<br />
Sainte-Anne qui s’orientaient, eux, vers<br />
la Neurologie : Henri Hecaen et Julian<br />
<strong>de</strong> Ajuriaguerra. Jean Talairach débutait<br />
donc une carrière <strong>de</strong> neurochirurgien<br />
tout en poursuivant son cursus <strong>de</strong> psychiatre<br />
: en 1944, il était Chef <strong>de</strong> Clinique<br />
<strong>de</strong>s Maladies Mentales et <strong>de</strong> l’Encéphale<br />
dans le Service du Professeur<br />
Jean Delay et neurochirurgien conventionné<br />
au Val-<strong>de</strong>-Grâce ; en 1945 il<br />
était Mé<strong>de</strong>cin <strong>de</strong>s Hôpitaux Psychiatriques<br />
et en 1947 Neurochirurgien-<br />
Assistant à l’Hôpital Paul-Brousse <strong>de</strong><br />
Villejuif. C’est à cette pério<strong>de</strong> qu’il pratiqua<br />
sa première intervention stéréotaxique.<br />
A la mort <strong>de</strong> Pierre Puech en<br />
1950, Marcel David prit la succession<br />
<strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier à l’Hôpital Sainte-Anne<br />
avec toute son équipe. Jean Talairach<br />
<strong>de</strong>vint ainsi Neurochirurgien-Adjoint<br />
au Centre Neurochirurgical <strong>de</strong>s Hôpitaux<br />
Psychiatriques <strong>de</strong> la Seine en<br />
1950. Le Radiologue Hermann Fischgold<br />
rejoignit le groupe et développa à<br />
Sainte-Anne la Neuroradiologie à partir<br />
<strong>de</strong> 1951, tout en participant au<br />
développement <strong>de</strong> l’Electroencéphalographie<br />
en France. En 1952 un Neurologue<br />
<strong>de</strong> la Salpêtrière, Jean Bancaud,<br />
rejoignait l’équipe <strong>de</strong> Marcel David et<br />
allait jouer un rôle fondamental dans le<br />
développement <strong>de</strong> la chirurgie <strong>de</strong> l’épilepsie.<br />
Un arrêté préfectoral du 10 juillet 1958<br />
créa, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> Marcel David, la<br />
section <strong>de</strong> Stéréotaxie du Service <strong>de</strong><br />
Neurochirurgie. Cette section, qui comportait<br />
12 lits et une salle d’opération<br />
spécifique, fut confiée à Jean Talairach.<br />
Avec son collègue neurochirurgien<br />
du Val-<strong>de</strong>-Grâce Pierre Tournoux, un<br />
Neurochirurgien arrivé <strong>de</strong> Hongrie<br />
cette même année, Gabor Szikla, Jean<br />
Bancaud et Alain Bonis, Neurologue<br />
clinicien arrivé dans l’équipe en 1956,<br />
Talairach s’entourait d’hommes illustres<br />
qui apportèrent tous leur pierre à l’édifice<br />
<strong>de</strong> la Stéréotaxie <strong>de</strong> Sainte-Anne.<br />
En septembre 1958, la salle d’opération<br />
d’un genre nouveau, « réservée à la<br />
Neurochirurgie stéréotaxique et à l’exploration<br />
neurophysiologique du cerveau<br />
», fut construite dans le pavillon <strong>de</strong><br />
Chirurgie <strong>de</strong> l’Hôpital Sainte-Anne.<br />
Cette salle <strong>de</strong> dimensions importantes<br />
en largeur comme en hauteur pour y<br />
loger un appareillage <strong>de</strong> téléradiologie,<br />
fut surnommée « la chapelle ».<br />
En 1960, Marcel David quitta l’hôpital<br />
Sainte-Anne pour prendre la chaire <strong>de</strong><br />
Neurochirurgie <strong>de</strong> la Pitié. Son Service<br />
fut alors scindé en <strong>de</strong>ux : un service<br />
<strong>de</strong> 60 lits (Neurochirurgie A) qui sera<br />
dirigé par Gabriel Mazars et un second<br />
<strong>de</strong> 25 lits (Neurochirurgie B ou stéréotaxique)<br />
dirigé par Jean Talairach.<br />
La même année furent créés un service<br />
d’Anatomie Pathologique et une<br />
Unité <strong>de</strong> Neuroradiologie. En 1961,<br />
les principales activités du Service <strong>de</strong><br />
Neurochirurgie Stéréotaxique concernaient<br />
la Chirurgie <strong>de</strong> l’épilepsie, la<br />
Chirurgie stéréotaxique <strong>de</strong> la maladie<br />
<strong>de</strong> Parkinson, l’irradiation interstitielle<br />
<strong>de</strong>s tumeurs cérébrales et <strong>de</strong> l’hypophyse.<br />
Cette approche nouvelle en<br />
Neurochirurgie, et ces applications innovantes<br />
vont attirer <strong>de</strong> nombreux élèves<br />
français et étrangers au cours <strong>de</strong> cette<br />
pério<strong>de</strong>. Talairach fut nommé Professeur<br />
<strong>de</strong> Neurochirurgie en 1966.<br />
Sous l’impulsion <strong>de</strong>s Cliniciens et <strong>de</strong>s<br />
Chercheurs du Service <strong>de</strong> Neurochirurgie<br />
B, qui souhaitaient disposer d’un<br />
secteur <strong>de</strong> recherche afin <strong>de</strong> développer<br />
l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s mécanismes fondamentaux<br />
<strong>de</strong> l’épilepsie, en parallèle aux<br />
recherches cliniques effectuées dans<br />
leur service, un nouveau bâtiment sera<br />
construit en 1970 aux côtés du pavillon<br />
<strong>de</strong> chirurgie. Ce bâtiment va abriter<br />
<strong>de</strong>ux unités <strong>de</strong> Recherche dont l’une,<br />
l’Unité INSERM U 97, créée le 1 er Jan-<br />
vier 1971 pour « l’exploration fonctionnelle<br />
stéréotaxique et thérapeutique chirurgicale<br />
<strong>de</strong>s épilepsies », sera sous la<br />
direction <strong>de</strong> Jean Talairach. Les travaux<br />
<strong>de</strong> l’Unité U 97 porteront sur l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
modèles animaux d’épilepsie partielle,<br />
<strong>de</strong> différents neuromédiateurs et <strong>de</strong><br />
leurs récepteurs, <strong>de</strong> potentiels évoqués<br />
cognitifs chez l’homme, ... Les équipes<br />
<strong>de</strong> chercheurs et cliniciens se succé<strong>de</strong>ront<br />
aux côtés <strong>de</strong> Talairach jusqu’à son<br />
départ à la retraite en 1980.<br />
Sa retraite en octobre 1980 fut célébrée<br />
à l’Abbaye <strong>de</strong> Royaumont à l’occasion<br />
du Congrès Européen <strong>de</strong> Stéréotaxie<br />
présidé par Gabor Szikla. Mais il ne<br />
quittait pas tout à fait Sainte-Anne.<br />
Dans le bureau qu’il conservait il continuait<br />
à travailler à ses futurs atlas, qui<br />
parurent en 1988 et 1993. Dans son<br />
ancien Service, l’activité <strong>de</strong> Stéréotaxie<br />
continuait sous la direction <strong>de</strong> Gabor<br />
Szikla, entouré <strong>de</strong> Claudio Munari et<br />
d’Antonino Musolino. A la retraite <strong>de</strong><br />
Gabriel Mazars en 1983, les <strong>de</strong>ux Services<br />
<strong>de</strong> Sainte-Anne, séparés <strong>de</strong>puis<br />
1960, fusionnèrent pour ne former à<br />
nouveau qu’un Service, sous la direction<br />
<strong>de</strong> Jean-Paul Chodkiewicz. Au<br />
décès <strong>de</strong> Gabor Szkila, en octobre<br />
1983, Louis Merienne rejoignait le<br />
groupe <strong>de</strong>s Stéréotacticiens du Service<br />
pour s’occuper plus spécifiquement<br />
<strong>de</strong> la radiochirurgie par accélérateur<br />
linéaire, poursuivant et développant<br />
avec l’équipe <strong>de</strong> Radiothérapie <strong>de</strong> l’Hôpital<br />
Tenon le travail pionnier d’Osvaldo<br />
Betti à Sainte-Anne puis à l’Institut<br />
Antartida <strong>de</strong> Buenos Aires. Une<br />
équipe nouvelle succéda à l’ancienne,<br />
pour permettre à la Stéréotaxie et à la<br />
Chirurgie <strong>de</strong>s épilepsies partielles <strong>de</strong><br />
poursuivre leur route à l’hôpital Sainte-<br />
Anne.<br />
Les débuts <strong>de</strong> la<br />
stéréotaxie ...<br />
En 1942, aux origines <strong>de</strong> la carrière<br />
neurochirurgicale <strong>de</strong> Jean Talairach, il<br />
n’était pas encore question <strong>de</strong> Stéréotaxie.<br />
En 1946, le Physiologiste Genevois<br />
A. Monnier exprimait <strong>de</strong>vant la<br />
Société <strong>de</strong> Neurologie <strong>de</strong> Paris le souhait<br />
que « les laborieuses expériences <strong>de</strong><br />
localisation <strong>de</strong>s fonctions nerveuses <strong>de</strong>s<br />
centres sous-corticaux chez l’animal trouvent<br />
un jour une application pratique et<br />
que l’électro<strong>de</strong> du physiologiste remplace,<br />
dans un avenir prochain, le bistouri<br />
du neurochirurgien ». Voeu prémonitoire.<br />
La Stéréotaxie française naquit à<br />
l’issue d’une conférence du Professeur<br />
Jean Lhermitte à l’Hôpital Paul-Brousse<br />
sur le «Thalamus, filtre sélectif <strong>de</strong> la<br />
douleur », en novembre 1947. De la<br />
discussion qui suivit la conférence, entre<br />
Jean Lhermitte, Henri Hecaen et Julian<br />
<strong>de</strong> Ajuriaguerra, il fut proposé à l’Assistant<br />
du Dr Marcel David, Jean Talairach,<br />
<strong>de</strong> fabriquer un instrument (un<br />
« bidule » selon les propres termes<br />
d’Ajuriaguerra) capable <strong>de</strong> permettre,<br />
chez l’homme, une exploration physiologique<br />
du thalamus. Poussé par le<br />
sentiment <strong>de</strong> fausse précision <strong>de</strong>s interventions<br />
<strong>de</strong> Neurochirurgie fonctionnelle<br />
réalisées alors, Jean Talairach se<br />
mit à l’oeuvre. Pour atteindre <strong>de</strong> façon<br />
certaine et en toute sécurité le thalamus,<br />
il lui fallait mettre au point une<br />
métho<strong>de</strong> qui répondait à trois problèmes<br />
: instrumental, radiologique et<br />
anatomique. La stéréotaxie humaine<br />
était née, du moins en Europe, car Jean<br />
Talairach ignorait qu’à la même époque<br />
- et pour être exact quelques mois<br />
avant lui - Spiegel et Wycis avaient réalisé<br />
à Phila<strong>de</strong>lphie, en octobre 1947,<br />
la première intervention stéréotaxique<br />
chez l’homme, une thalamotomie dorsomédiane<br />
pour une psychose suivie<br />
d’une thalamotomie para-commissurale<br />
pour un petit mal épileptique.<br />
La première intervention chirurgicale<br />
stéréotaxique eut lieu le 7 décembre<br />
1948, à l’hôpital Paul Brousse. Entou-<br />
ré <strong>de</strong> son patron, Marcel David, d’Henri<br />
Hecaen, <strong>de</strong> Julian <strong>de</strong> Ajuriaguerra et<br />
<strong>de</strong> Monnier, Jean Talairach réalisait à<br />
l’ai<strong>de</strong> d’un appareillage stéréotaxique,<br />
une électrocoagulation <strong>de</strong>s noyaux thalamiques<br />
ventropostéro-médian (noyau<br />
semi-lunaire <strong>de</strong> Flechsig) et noyau centromédian<br />
chez un patient <strong>de</strong> 72 ans<br />
atteint d’algies faciales sévères post-zostériennes.<br />
Les suites ne furent marquées<br />
que par une hypoesthésie transitoire<br />
<strong>de</strong> l’hémiface et les douleurs<br />
disparurent ... pendant 6 mois.<br />
Les travaux<br />
anatomiques<br />
Au cours <strong>de</strong>s années 1940, les travaux<br />
<strong>de</strong> Neurophysiologie s’intéressaient<br />
essentiellement aux formations grises<br />
souscorticales. 1949 et 1950 furent<br />
dévolues au repérage <strong>de</strong>s noyaux gris<br />
centraux par l’iodo-ventriculographie. Il<br />
fallait trouver une solution satisfaisante<br />
aux trois problèmes posés par la Stéréotaxie<br />
: instrumental, radiologique et<br />
anatomique. Le problème instrumental<br />
était celui d’une fixation rigi<strong>de</strong>, immobile<br />
et reproductible <strong>de</strong> la tête du mala<strong>de</strong>,<br />
adaptable à toutes les formes et<br />
tailles <strong>de</strong> crâne, et celui d’une instrumentation<br />
capable d’atteindre n’importe<br />
quel point <strong>de</strong> l’encéphale. Avec<br />
Jean Sabaton, technicien <strong>de</strong> génie, Jean<br />
Talairach conçut et fit fabriquer par la<br />
Maison Alexandre son premier cadre<br />
stéréotaxique (1947). Le problème<br />
radiologique était celui d’une définition<br />
d’une structure cérébrale dans les<br />
trois plans <strong>de</strong> l’espace sans déformation<br />
par les moyens radiologiques disponibles<br />
; la téléradiographie orthogonale<br />
<strong>de</strong> face et <strong>de</strong> profil, le centrage<br />
reproductible <strong>de</strong>s tubes à rayons X<br />
réglaient ce problème et permettaient<br />
<strong>de</strong> faire la preuve <strong>de</strong> l’exactitu<strong>de</strong> du<br />
repérage. Le problème anatomique,<br />
enfin, était à la fois le plus difficile à<br />
N°9 - TOME XIX - DÉCEMBRE 2006/JANVIER 2007<br />
résoudre et à la fois le plus intéressant.<br />
L’absence <strong>de</strong> rapport constant entre<br />
les structures osseuses et les noyaux<br />
gris centraux et l’absence <strong>de</strong> proportionnalité<br />
entre les dimensions du cerveau<br />
et celles <strong>de</strong>s noyaux imposait une<br />
i<strong>de</strong>ntification directe <strong>de</strong> structures cérébrales.<br />
Le ventricule était alors la seule<br />
structure visible par les examens radiologiques<br />
à contraste iodé ou aérique. La<br />
netteté <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux commissures - commissure<br />
blanche antérieure Ca et postérieure<br />
Cp - qui bor<strong>de</strong>nt le 3 ème ventricule<br />
sur les ventriculographies iodées,<br />
leur position sur la ligne médiane et<br />
leurs rapports avec les formations grises<br />
diencéphaliques en faisaient <strong>de</strong>ux excellents<br />
repères radiologiques. La ligne<br />
qui les unit - ligne <strong>de</strong> base Ca-Cp <strong>de</strong>venait<br />
ainsi un plan d’orientation général<br />
<strong>de</strong>s structures. La ligne bicommissurale<br />
Ca-Cp a été publiée en 1952<br />
(Presse Médicale, 1952, 28, 605-609).<br />
L’année 1952 marqua aussi le début<br />
<strong>de</strong>s explorations neurophysiologiques<br />
dans l’épilepsie.<br />
Sous l’impulsion <strong>de</strong> la Neurophysiologiste<br />
Mme Dell, chercheur à l’INSERM,<br />
Talairach explora en même temps les<br />
noyaux gris centraux et le cortex et<br />
abandonna la corticographie superficielle,<br />
comme la pratiquait Penfield à<br />
Montréal, pour s’intéresser au cortex<br />
enfoui accessible au moyen d’électro<strong>de</strong>s<br />
profon<strong>de</strong>s. A cette même époque, il<br />
commençait ses travaux anatomiques<br />
sur les cerveaux <strong>de</strong> cadavres (ceux-ci<br />
étaient amenés en salle d’opération la<br />
nuit pour y être radiographiés avant<br />
d’être coupés en tranches au laboratoire<br />
!) et corrélait ses observations avec<br />
celles <strong>de</strong>s repérages radiologiques pratiqués<br />
chez les patients épileptiques.<br />
Ces travaux furent consacrés par la<br />
publication du premier Atlas, l’Atlas<br />
d’Anatomie Stéréotaxique, publié chez<br />
Masson en 1957. Cet Atlas concernait<br />
le repérage <strong>de</strong>s noyaux gris centraux en<br />
fonction <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> base Ca-Cp.<br />
Cette même année Ruggiero, Neuroradiologue,<br />
publiait un livre sur l’Encéphalographie<br />
Fractionnée. Celle-ci fit<br />
Résultats <strong>de</strong> la 1 ère enquête nationale<br />
sur la prise en charge <strong>de</strong> la douleur chez les<br />
patients psychotiques<br />
L’Institut UPSA <strong>de</strong> la Douleur a annoncé le 7 décembre 2006 les résultats<br />
<strong>de</strong> la 1ère enquête nationale sur la prise en charge <strong>de</strong> la douleur chez les patients<br />
psychotiques dans les Centres Hospitaliers <strong>de</strong> psychiatrie. Cette enquête<br />
a été présentée dans le cadre <strong>de</strong> la 1ère Journée Nationale « Douleur et<br />
santé mentale » organisée par Djéa Saravane et Yvan Halimi.<br />
Méthodologie <strong>de</strong> l’enquête<br />
Le questionnaire a été envoyé à 811 chefs <strong>de</strong> service <strong>de</strong> psychiatrie <strong>de</strong>s<br />
Centres Hospitaliers (CH) et <strong>de</strong>s Centres Hospitaliers Spécialisés en psychiatrie<br />
(CHS) ainsi qu’à 203 chefs <strong>de</strong> service <strong>de</strong> pharmacie <strong>de</strong>s CHS.<br />
L’ensemble <strong>de</strong>s 11 questions posées évoquait l’opinion <strong>de</strong>s répon<strong>de</strong>urs sur<br />
la qualité <strong>de</strong> la prise en charge <strong>de</strong> la maladie mentale et <strong>de</strong>s troubles somatiques<br />
associés, sur la formation et sur les pratiques d’évaluation et <strong>de</strong> traitement<br />
<strong>de</strong> la douleur.<br />
Le taux <strong>de</strong> réponse a été <strong>de</strong> 17,8% traduisant l’intérêt <strong>de</strong>s professionnels <strong>de</strong><br />
santé interrogés.<br />
Les résultats<br />
• Seulement 30% <strong>de</strong>s patients psychotiques sont suivis régulièrement par un<br />
mé<strong>de</strong>cin traitant.<br />
• 70% <strong>de</strong>s CHS n’ont pas <strong>de</strong> centre <strong>de</strong> lutte contre la douleur.<br />
• 75% <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> service estiment que leurs équipes ne sont pas formées<br />
à la prise en charge <strong>de</strong> la douleur.<br />
• 68% <strong>de</strong>s psychiatres formés à la douleur n’utilisent pas l’Echelle Visuelle<br />
Analogique.<br />
• 55% <strong>de</strong>s pharmaciens sont tout à fait favorables à l’utilisation <strong>de</strong>s opioï<strong>de</strong>s<br />
forts à visée antalgique contre 23% <strong>de</strong>s psychiatres.<br />
Les alarmes<br />
• 7 patients psychotiques sur 10 ne sont pas suivis par un mé<strong>de</strong>cin traitant.<br />
Leur espérance <strong>de</strong> vie est diminuée <strong>de</strong> 9 à 12 ans par rapport à la population<br />
générale. Cette surmortalité importante est liée à <strong>de</strong>s pathologies organiques<br />
non détectées et non prises en charge, telles que les pathologies cardiovasculaires,<br />
le diabète, les pathologies infectieuses, le cancer.<br />
• Les patients psychotiques sont <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s qui souffrent comme les autres<br />
et cette douleur a une inci<strong>de</strong>nce importante sur le vécu <strong>de</strong> leur maladie. Mais<br />
l’évaluation <strong>de</strong> leur douleur est une problématique récente. Les patients psychotiques<br />
n’ont pas la même expression <strong>de</strong> la douleur que les autres.<br />
• Les psychiatres et les soignants ne sont pas toujours conscients <strong>de</strong> la nécessité<br />
<strong>de</strong> prendre en charge les douleurs somatiques chez ces patients et se<br />
sentent démunis : ils sont peu ou pas formés et manquent d’outils adaptés<br />
à l’évaluation <strong>de</strong> la douleur et au suivi du patient psychotique. ■<br />
F.C.