Décembre - Nervure Journal de Psychiatrie
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N°9 - TOME XIX - DÉCEMBRE 2006/JANVIER 2007<br />
Fresnes, Histoires <strong>de</strong> fous<br />
Catherine Herszberg<br />
Seuil<br />
Ce livre témoignage a été largement<br />
commenté à juste titre par les médias.<br />
Je le trouve poignant pour <strong>de</strong>ux<br />
raisons essentielles. D’abord, <strong>de</strong> manière<br />
générale, collective, il fait état<br />
sans sensationnalisme <strong>de</strong> la réalité<br />
carcérale réservée aux mala<strong>de</strong>s mentaux<br />
(mais également aux non mala<strong>de</strong>s).<br />
Les lecteurs non avertis du problème<br />
spécialisé <strong>de</strong> la maladie mentale<br />
en prison pourraient croire en lisant<br />
Catherine Herszberg qu’il s’agit d’une<br />
fiction ou d’une exagération. Et non,<br />
ce que la journaliste relate avec talent,<br />
ce sont <strong>de</strong> vraies histoires <strong>de</strong><br />
fous, <strong>de</strong>s drames actuels et véridiques<br />
qui se passent dans les geôles françaises.<br />
Contrairement au livre <strong>de</strong> Véronique<br />
Vasseur qui avait tendance à forcer<br />
le trait sur une présumée mauvaise<br />
administration pénitentiaire, ce document<br />
est tout en nuances. Le problème<br />
<strong>de</strong>s prisons est avant tout dans<br />
les mains <strong>de</strong>s politiques et <strong>de</strong> certains<br />
professionnels ; probablement pas<br />
dans celles <strong>de</strong> la plupart <strong>de</strong>s citoyens,<br />
bien contents <strong>de</strong> voir les méchants<br />
enfermés et heureux <strong>de</strong> ne pas les y<br />
voir en sortir. Parmi les professionnels<br />
concernés et surtout lorsqu’il<br />
s’agit d’un problème sanitaire, le positionnement<br />
<strong>de</strong>s psychiatres est essentiel.<br />
Les psychiatres exerçant en<br />
prison s’enfonceront-ils <strong>de</strong> plus en<br />
plus dans une collaboration à l’enfermement<br />
carcéral <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s mentaux<br />
et au risque <strong>de</strong> voir leur état <strong>de</strong><br />
santé empirer ? Les psychiatres et les<br />
soignants <strong>de</strong>s hôpitaux psychiatriques<br />
continueront-ils dans leur refus d’admettre<br />
<strong>de</strong>s maladies mentales graves,<br />
à fortiori s’ils sont délinquants ? Et<br />
les experts psychiatres continuerontils<br />
à responsabiliser <strong>de</strong> grands ma-<br />
situation <strong>de</strong> handicap).<br />
• Concevoir la psychiatrie comme une<br />
complémentarité. Il s’agit d’une complémentarité<br />
entre le publie et le privé,<br />
mais également entre les différents<br />
types <strong>de</strong> prise en charge.<br />
• Modifier réellement l’image <strong>de</strong> la psychiatrie<br />
dans la population. Actuellement,<br />
le Plan <strong>de</strong> santé mentale prévoit<br />
<strong>de</strong>s budgets importants dans ce domaine,<br />
mais aucune mise en place n’a été<br />
effectuée à ce jour.<br />
La situation <strong>de</strong> la santé mentale<br />
Gérard Massé, coordinateur <strong>de</strong> la Mission<br />
nationale d’appui en santé mentale,<br />
a rappelé que les politiques sont<br />
<strong>de</strong>s interlocuteurs centraux avec lesquels<br />
les techniciens doivent travailler<br />
au quotidien, pour les éclairer. On estime<br />
aujourd’hui que le pourcentage <strong>de</strong>s<br />
personnes atteintes <strong>de</strong> maladies mentales<br />
s’élève à 3 à 4% <strong>de</strong> la population,<br />
alors que la souffrance psychique<br />
réelle touche en fait 40% <strong>de</strong>s Français<br />
à un moment <strong>de</strong> leur existence.<br />
Si le réseau <strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> soins en<br />
France est satisfaisant en comparaison<br />
<strong>de</strong> ses pays voisins, il est en revanche<br />
nécessaire <strong>de</strong> faire évoluer le dispositif<br />
actuel <strong>de</strong> soins car une crise d’organisation<br />
liée à <strong>de</strong>s problèmes institutionnels<br />
se fait jour.<br />
Le principal enjeu porte sur une véritable<br />
politique <strong>de</strong> santé mentale associant<br />
la prévention, le soin et l’insertion,<br />
notamment pour la population souffrant<br />
<strong>de</strong> psychoses. Dans ce cadre, il<br />
s’agit <strong>de</strong> formuler <strong>de</strong>s objectifs à la hauteur<br />
d’une réelle insertion <strong>de</strong>s patients.<br />
Alors que l’on constate le poids croissant<br />
<strong>de</strong>s usagers, qui interpellent les politiques<br />
sur la psychiatrie, on déplore une<br />
absence d’évaluation <strong>de</strong>s techniques <strong>de</strong><br />
soin, laquelle conduit souvent à <strong>de</strong>s<br />
débats idéologiques stériles.<br />
Patients, familles, usagers : tous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />
davantage <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong> meilleu-<br />
la<strong>de</strong>s du moment qu’une once <strong>de</strong> lucidité<br />
leur fait admettre qu’un vol alimentaire,<br />
même s’il est commis pour<br />
subsister, est digne d’une sanction<br />
pénale ?<br />
Je trouve poignant cet ouvrage pour<br />
une <strong>de</strong>uxième raison. La juste <strong>de</strong>scription<br />
<strong>de</strong> Fresnes, son volume froid,<br />
ses clairs obscurs, ses bruits, son organisation<br />
particulière, son ordonnance<br />
quasi-militaire, les contrastes<br />
<strong>de</strong>s ambiances (le CNO vs le reste <strong>de</strong><br />
la détention par exemple) me rappelle<br />
que j’y ai travaillé. J’ai quitté<br />
Fresnes il y a dix ans, mais si je retrouve<br />
bien l’immuabilité <strong>de</strong>s lieux,<br />
par contre les conditions <strong>de</strong> travail<br />
<strong>de</strong>s psychiatres semblent s’être considérablement<br />
dégradées avec une augmentation<br />
quantitative et qualitative<br />
considérable du nombre <strong>de</strong> détenus<br />
présentant <strong>de</strong>s pathologies mentales<br />
gravissimes. N’oublions pas qu’il y a<br />
quelques mois, Christiane <strong>de</strong> Beaurepaire,<br />
le mé<strong>de</strong>cin chef du SMPR lançait<br />
un cri d’alarme très médiatisé sur<br />
la situation sanitaire que son équipe<br />
rencontrait.<br />
Catherine Herszberg pose la question<br />
<strong>de</strong> la maladie mentale en prison avec<br />
<strong>de</strong>s mots justes, dans un style limpi<strong>de</strong><br />
qui ne laisse aucune excuse au<br />
citoyen tout venant pour ne pas lire<br />
ce livre. On notera tout particulièrement<br />
le passage sur les UHSA (unités<br />
spécialement aménagées) décrites<br />
comme « l’affirmation officielle qu’il<br />
est légitime <strong>de</strong> les (les mala<strong>de</strong>s mentaux)<br />
emprisonner, et qu’il est <strong>de</strong> surcroît<br />
légitime <strong>de</strong> les punir le <strong>de</strong> les soigner<br />
au même endroit ». Ce qui fait<br />
dire à un soignant dans l’avant-<strong>de</strong>rnier<br />
chapitre : « au rythme où ça va,<br />
on finira par rouvrir les chambres à<br />
gaz ». Si le propos peut sembler exagéré<br />
quand il est extrait du contexte<br />
du livre, vous verrez en lisant les faits<br />
horrifiques qui y sont relatés que<br />
l’exaspération et le désespoir <strong>de</strong> ce<br />
re qualité. Les moyens nécessaires sont<br />
<strong>de</strong> plus en plus importants et complexes.<br />
Ils doivent s’articuler avec les<br />
autres dispositifs, sociaux et médicosociaux.<br />
Cependant, les budgets <strong>de</strong>s démarches<br />
psychiatriques, sociales et médicosociales<br />
sont différents. Plus globalement,<br />
il ne sera pas possible <strong>de</strong> proposer<br />
une réponse <strong>de</strong> santé globale<br />
sans y intégrer un volet « santé mentale<br />
» conséquent. Les besoins sont importants<br />
et posent la question <strong>de</strong> l’articulation<br />
entre la mé<strong>de</strong>cine-chirurgie obstétrique<br />
et le soin psychiatrique. Faut-il<br />
proposer dix RMN <strong>de</strong> plus ou mettre<br />
en place <strong>de</strong> façon conséquente <strong>de</strong>s<br />
équipes psychiatriques d’intervention<br />
à domicile ?<br />
Le Plan français <strong>de</strong> santé mentale a un<br />
réel rôle structurant dans l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s régions et le Parlement européen<br />
prendra bientôt position sur la santé<br />
mentale et évoquera notamment les<br />
points suivants :<br />
- la santé mentale en tant que priorité<br />
<strong>de</strong> santé (les pays <strong>de</strong> l’est <strong>de</strong> l’Europe<br />
en sont bien plus conscients que nous) ;<br />
- la santé mentale <strong>de</strong>s enfants et <strong>de</strong>s<br />
adolescents ;<br />
- la santé mentale au travail et le chômage<br />
;<br />
- la santé mentale et le vieillissement<br />
<strong>de</strong> la population.<br />
Il importe bien sûr <strong>de</strong> distinguer ce qui<br />
relève <strong>de</strong> l’offre <strong>de</strong> soins <strong>de</strong>s actions<br />
<strong>de</strong> promotion et <strong>de</strong> prévention, tout<br />
en s’attachant à soigner l’image <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie, qui doit être améliorée.<br />
Face à cette situation, un débat politique<br />
et démocratique doit être ouvert.<br />
La psychiatrie française ne franchira les<br />
différents obstacles auxquels elle est<br />
confrontée que grâce à une volonté<br />
politique affirmée.<br />
C’est pourquoi les relations obligatoires<br />
<strong>de</strong>s techniciens du soin avec les politiques<br />
sont si importantes dans notre<br />
discipline.<br />
soignant sont bien compréhensibles.<br />
Une journaliste nous tend la perche<br />
pour témoigner <strong>de</strong> ce que l’on fait.<br />
Qu’attendons-nous, les soignants en<br />
prison pour dire qu’il y a un problème,<br />
un gros problème ? C’est en tout cas<br />
ce que le SMPR <strong>de</strong> Baie-Mahault a<br />
tenté d’exprimer lors <strong>de</strong>s journées<br />
<strong>de</strong>s secteurs <strong>de</strong> psychiatrie en milieu<br />
pénitentiaire à la Rochelle le 6 et 7<br />
novembre <strong>de</strong>rnier, en évoquant la<br />
nécessité d’un nouveau paradigme.<br />
Nos propositions en ont surpris certains.<br />
Elles sont très critiquables mais<br />
elles étaient surtout motivées par le<br />
fait qu’on ne peut pas continuer sur<br />
les modalités actuelles. Elles partent<br />
d’un malaise qui ne peut tenter <strong>de</strong> se<br />
soulager qu’en réfléchissant à <strong>de</strong>s<br />
« portes <strong>de</strong> sortie ».<br />
Mais il n’y a pas que les psy sur terre<br />
pour changer quelque chose. On peut<br />
toujours espérer que ce livre en ces<br />
temps <strong>de</strong> précampagne électorale intéressera<br />
quelques candidats et sensibilisera<br />
un peu plus que quelques<br />
citoyens.<br />
Marcel David<br />
Auto-érotismes, narcissismes<br />
et pulsions du moi<br />
Jean-Michel Porret<br />
L’Harmattan, 17,50 €<br />
L’objectif principal <strong>de</strong> cet ouvrage est<br />
<strong>de</strong> retracer les rapports (conjonctifs<br />
et disjonctifs) qui existent entre les<br />
auto-érotismes et les narcissismes au<br />
cours du développement normal du<br />
psychisme et en tenant compte <strong>de</strong> la<br />
secon<strong>de</strong> théorie freudienne <strong>de</strong>s pulsions<br />
(opposition entre pulsions érotiques<br />
et pulsions <strong>de</strong> <strong>de</strong>struction dans<br />
le ça). En outre, est proposée une vision<br />
générale <strong>de</strong>s pulsions du moi, à<br />
savoir <strong>de</strong>s pulsions qui, sous formes<br />
directes ou transformées, sont à l’œuvre<br />
dans le moi.<br />
Le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s politiques<br />
André Vantomme (Sénateur PS <strong>de</strong><br />
l’Oise) a rappelé que pendant vingt<br />
ans, il a présidé à la <strong>de</strong>stinée d’une ville<br />
<strong>de</strong> 10 000 habitants, qui compte un<br />
centre hospitalier spécialisé employant<br />
2 800 personnes, dont une centaine<br />
<strong>de</strong> psychiatres.<br />
Il a découvert la psychiatrie et ses problèmes<br />
dans le cadre d’un grand établissement<br />
bicentenaire, qui a été un<br />
asile et a su évoluer pour désormais<br />
mettre le patient au cœur du dispositif<br />
<strong>de</strong> soins, et est intimement persuadé<br />
<strong>de</strong> la complémentarité <strong>de</strong>s actions du<br />
public et du privé. Il a évoqué un certain<br />
nombre <strong>de</strong> mesures prises par le passé.<br />
• On ne peut que s’interroger sur la<br />
diminution draconienne du nombre<br />
<strong>de</strong> patriciens sans parier <strong>de</strong> la pratique<br />
du numerus clausus, qui a engendré<br />
<strong>de</strong> graves problèmes.<br />
• La fermeture <strong>de</strong>s écoles d’infirmières<br />
a été interrompue en catastrophe, dans<br />
la mesure où la « solution » <strong>de</strong>s infirmières<br />
espagnoles ne pouvait être satisfaisante<br />
à terme.<br />
• La suppression <strong>de</strong> lits psychiatriques<br />
est dramatique et affecte plus particulièrement<br />
la région parisienne.<br />
• La création du diplôme d’Etat d’infirmier<br />
a entraîné la suppression <strong>de</strong> la<br />
spécificité du diplôme d’infirmier psychiatrique.<br />
Dans certains établissements,<br />
les anciens titulaires du poste d’infirmier<br />
psychiatrique partent à la retraite,<br />
alors que les plus jeunes débutent leur<br />
carrière sans disposer d’une formation<br />
initiale adéquate.<br />
• Les problèmes d’attractivité et les disparités<br />
régionales en matière <strong>de</strong> santé<br />
sont criants. Dans la ville dont André<br />
Vantomme a été maire et qui présente<br />
un taux <strong>de</strong> chômage <strong>de</strong> 9%, 169<br />
postes d’infirmier sont aujourd’hui<br />
vacants.<br />
• Le PLFSS n’est pas suffisamment<br />
conséquent.<br />
• La situation est catastrophique dans<br />
les prisons. Les défis consistent à concilier<br />
le soin et l’incarcération, à humaniser<br />
les conditions <strong>de</strong> vie dans les prisons<br />
et à accueillir dans les hôpitaux<br />
psychiatriques <strong>de</strong>s personnes parfois<br />
dangereuses et violentes.<br />
• Sous couvert <strong>de</strong> lutte contre la délinquance,<br />
le ministre <strong>de</strong> l’Intérieur intervient<br />
dans le domaine <strong>de</strong> la santé, alors<br />
que ce <strong>de</strong>rnier relève <strong>de</strong> la compétence<br />
du ministère <strong>de</strong> la Santé.<br />
Marie-Anne Montchamp (ancien<br />
Ministre et Député UMP du Val-<strong>de</strong>-<br />
Marne) a précisé qu’elle a rencontré<br />
pour la première fois la question <strong>de</strong> la<br />
santé mentale lorsqu’elle a préparé la<br />
loi sur l’égalité <strong>de</strong>s droits et <strong>de</strong>s chances,<br />
la participation et la citoyenneté <strong>de</strong>s<br />
personnes handicapées. A cette occasion,<br />
elle a été confrontée <strong>de</strong> plein<br />
fouet à cette problématique, notamment<br />
lors <strong>de</strong> ses rencontres avec <strong>de</strong>s<br />
associations <strong>de</strong> patients.<br />
Dans ce cadre, elle a dû conduire un<br />
certain nombre d’arbitrages en faveur<br />
<strong>de</strong> l’inclusion du handicap psychique<br />
dans le champ du handicap et du développement<br />
d’une approche politique<br />
spécifique. Il faut dire à l’ensemble <strong>de</strong><br />
nos compatriotes que l’on peut être<br />
privé d’autonomie lorsque l’on est<br />
sourd ou aveugle, mais également<br />
lorsque l’on est affecté <strong>de</strong> troubles psychiques.<br />
Le concept <strong>de</strong> handicap psychique est<br />
un point d’équilibre permettant d’ouvrir<br />
<strong>de</strong>s droits spécifiques. Nos compatriotes<br />
doivent savoir que la maladie mentale<br />
n’est pas simplement une série <strong>de</strong><br />
symptômes, mais peut être un véritable<br />
empêchement à la libre participation<br />
et à la citoyenneté.<br />
En matière <strong>de</strong> santé mentale, le politique<br />
est plus que jamais dans son rôle<br />
d’arbitrage. Il doit répondre à la question<br />
<strong>de</strong> savoir jusqu’où aller le plus loin<br />
pour faire avancer une question sensible<br />
sur un sujet douloureux, tout en<br />
ne basculant pas dans une vulgarisation<br />
excessive. Aujourd’hui, il est temps<br />
que les politiques se saisissent du problème<br />
<strong>de</strong>s troubles psychiques, qui<br />
constitue une véritable priorité <strong>de</strong> santé<br />
publique, collective. Il s’agit <strong>de</strong> faire en<br />
sorte que la question <strong>de</strong> la santé mentale<br />
ne soit plus seulement l’affaire <strong>de</strong>s<br />
spécialistes, mais constitue également<br />
une partie <strong>de</strong> notre conscience collective<br />
plus éveillée.<br />
Pour y parvenir, il est nécessaire <strong>de</strong><br />
recueillir un certain nombre <strong>de</strong> données,<br />
notamment sur les coûts évités<br />
par la prise en charge médicale. Il s’agit<br />
également <strong>de</strong> déspécialiser cette thématique<br />
et sans doute d’abor<strong>de</strong>r la<br />
question du bien-être psychique<br />
comme un projet politique pour les<br />
Français. Il y a là un objet <strong>de</strong> préoccupation<br />
qui ne concerne pas uniquement<br />
le ministre <strong>de</strong> la Santé et qui doit<br />
prendre le risque <strong>de</strong> définir <strong>de</strong>s priorités<br />
pour l’époque actuelle et les dix<br />
ans à venir.<br />
En tant qu’élue, Marie-Anne Montchamp<br />
a la conviction que notre société<br />
est mûre pour ce changement.<br />
Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la contribution du politique,<br />
il faut refon<strong>de</strong>r un investissement collectif,<br />
c’est-à-dire trouver, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s<br />
arbitrages, <strong>de</strong>s points d’entrée convaincants<br />
et durables.<br />
Conclusion<br />
Dans sa conclusion, Jacques Gayral a<br />
précisé qu’il est bien évi<strong>de</strong>nt qu’il n’est<br />
pas possible <strong>de</strong> traiter exhaustivement<br />
lors d’un colloque qui ne dure que<br />
quelques heures une question aussi<br />
vaste,<br />
Cependant, ont été réunis <strong>de</strong>s parlementaires,<br />
<strong>de</strong>s journalistes, <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins,<br />
<strong>de</strong>s représentants <strong>de</strong>s hôpitaux et<br />
<strong>de</strong>s cliniques afin <strong>de</strong> lancer <strong>de</strong>s pistes<br />
<strong>de</strong> réflexion, avec un objectif qui<br />
consiste bien à faire <strong>de</strong> la psychiatrie<br />
et <strong>de</strong> la santé mentale une cause<br />
nationale. ■<br />
COLLOQUE ■ 11<br />
LIVRES ET REVUES<br />
Les recours aux soins<br />
spécialisés en santé<br />
mentale<br />
François Chapireau<br />
Etu<strong>de</strong>s et Résultats nvembre 2006<br />
n°533, DREES<br />
Le recours aux soins spécialisés en<br />
santé mentale est appréhendé par<br />
l’enquête santé <strong>de</strong> INSEE en 2003 à<br />
travers la déclaration que font les personnes<br />
d’avoir consulté un psychiatre,<br />
un psychologue ou un psychanalyste,<br />
ou d’avoir été hospitalisées dans un<br />
service <strong>de</strong> psychiatrie. Trois dimensions<br />
<strong>de</strong> la santé mentale sont ici<br />
prises en compte pour les caractériser<br />
: avoir déclaré un trouble psychique,<br />
avoir recouru à une consultation<br />
non programmée « pour le<br />
moral » et enfin connaître <strong>de</strong>s difficultés<br />
sociales. Neuf consultants sur<br />
dix se sont adressés à un seul <strong>de</strong>s<br />
trois spécialistes en santé mentale<br />
considérés. Ce sont en majorité <strong>de</strong>s<br />
femmes (70%) et dans plus <strong>de</strong> la moitié<br />
<strong>de</strong>s cas <strong>de</strong>s personnes seules. Ce<br />
recours est le plus souvent motivé<br />
par un trouble psychique avec une<br />
propension plus forte à consulter<br />
quand le niveau <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s<br />
enquêtés est élevé. Cependant, les<br />
caractéristiques <strong>de</strong>s patients sont différentes<br />
selon les praticiens. Les psychiatres<br />
reçoivent surtout <strong>de</strong>s adultes<br />
en forte détresse psychique et aux<br />
parcours professionnels perturbés,<br />
mais avec <strong>de</strong>s caractéristiques assez<br />
diversifiées du point <strong>de</strong> vue socioprofessionnel.<br />
La clientèle <strong>de</strong>s psychologues<br />
est pour moitié composée<br />
<strong>de</strong> jeunes <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 20 ans, qui<br />
présentent souvent <strong>de</strong>s troubles psychiques<br />
et physiologiques associés.<br />
Les personnes qui consultent un psychanalyste,<br />
bien qu’elles aient un niveau<br />
<strong>de</strong> formation plus élevé que la<br />
moyenne, sont plus difficiles à cerner<br />
dans la mesure où leur rythme<br />
<strong>de</strong> consultation déclaré ne correspond<br />
pas aux standards <strong>de</strong> la cure<br />
analytique. Enfin, celles qui ont été<br />
hospitalisées en psychiatrie cumulent<br />
<strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s difficultés sociales et un<br />
important recours aux soins non psychiatriques.<br />
Histoire <strong>de</strong> l’hystérie<br />
Etienne Trillat<br />
Préface <strong>de</strong> Jacques Postel<br />
Editions Frison-Roche, 35 E<br />
Dans sa préface, Jacques Postel relève<br />
qu’il était temps <strong>de</strong> republier<br />
cette « Histoire <strong>de</strong> l’hystérie » que son<br />
auteur avait confiée à la collection<br />
que dirigeait alors Clau<strong>de</strong> Quétel, chez<br />
Seghers. C’est en 1986 que paraissait<br />
dans « Mé<strong>de</strong>cine et Histoire », ce<br />
livre qui allait obtenir le prix <strong>de</strong> la<br />
« Société Française <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine » dès<br />
l’année suivante.<br />
La meilleure partie <strong>de</strong> l’ouvrage reste<br />
celle qui recouvre la <strong>de</strong>uxième partie<br />
du XIX e siècle et les débuts <strong>de</strong> la<br />
découverte freudienne : sur Charcot<br />
avec « l’hystérie pénétrant enfin dans<br />
le temple <strong>de</strong> la Science », sur la place<br />
<strong>de</strong> l’hystérie à cette époque dans l’ensemble<br />
<strong>de</strong>s « névroses », sur le conflit<br />
entre l’école <strong>de</strong> Paris et celle <strong>de</strong> Nancy<br />
sur le rôle <strong>de</strong> la suggestion et la nature<br />
<strong>de</strong> l’hypnose, sur P. Janet et sa<br />
« psychasthénie », sur l’importance <strong>de</strong>s<br />
observations du jeune S. Freud sur<br />
l’hystérie dans sa découverte <strong>de</strong> l’inconscient<br />
et l’invention <strong>de</strong> la psychanalyse,<br />
sur le rôle aussi <strong>de</strong> la religion<br />
et <strong>de</strong> la culture dans l’abord <strong>de</strong><br />
l’hystérie. On se souvient, à ce propos,<br />
<strong>de</strong> la phrase <strong>de</strong>s Goncourt dans<br />
leur journal : « La religion est une partie<br />
du sexe <strong>de</strong> la femme ».