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Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie

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www.nervure-psy.com<br />

EDITORIAL C. Fabre<br />

L’information<br />

du patient en<br />

psychiatrie : un<br />

droit et après ?<br />

Le législateur, en accordant à l’usager<br />

le droit d’être informé par son<br />

prestataire <strong>de</strong> soins, a posé un acte<br />

fondateur. En effet, la Loi du 4 mars<br />

2002 place, solennellement, le patient<br />

au cœur du dispositif <strong>de</strong> soins, dans<br />

le cadre d’un contrat <strong>de</strong> confiance basé sur<br />

la qualité <strong>de</strong>s relations établies entre lui-même<br />

et les différents acteurs <strong>de</strong>s soins.<br />

Les attentes <strong>de</strong>s personnes en matière d’information<br />

sont très fortes, les différentes enquêtes<br />

menées auprès <strong>de</strong>s usagers en témoignent.<br />

Il ressort <strong>de</strong>s résultats <strong>de</strong> l’enquête <strong>de</strong><br />

satisfaction du CHS Esquirol (1) que 30 à 40%<br />

<strong>de</strong>s patients souhaitent obtenir <strong>de</strong>s informations<br />

sur leur pathologie, les traitements, les<br />

soins, les médicaments.<br />

Nous-mêmes avons conduits ce type d’enquête<br />

auprès <strong>de</strong> 400 familles <strong>de</strong> l’UNAFAM (2)<br />

et nos résultats sont similaires à ceux d’autres<br />

enquêtes <strong>de</strong> satisfaction échangées ou conduites<br />

auprès <strong>de</strong> patients hospitalisés en soins généraux<br />

(Enquête ANAES-IFOP, Mars 98).<br />

Ce constat étant fait, il faut en prendre acte<br />

et s’interroger.<br />

Qui doit informer ? Qui informer ? Avec quels<br />

objectifs ? Comment ? Dans quel cadre ?<br />

Le patient, au cœur du dispositif <strong>de</strong> soins, va<br />

être amené à rencontrer différents professionnels<br />

: en premier le mé<strong>de</strong>cin, qui initie la<br />

stratégie du soin et prescrit un traitement médicamenteux<br />

qui sera analysé et délivré par<br />

le pharmacien, puis administré par l’infirmier.<br />

Sans oublier les autres partenaires que sont<br />

les proches et la famille et qui donneront leur<br />

opinion, celle-ci pouvant être favorable ou<br />

pas. Le patient atteint d’une maladie chronique<br />

va, très rapi<strong>de</strong>ment, être confronté à<br />

l’usure du temps et il va lui être difficile <strong>de</strong><br />

maintenir une observance régulière <strong>de</strong> son<br />

traitement.<br />

(suite page 3 )<br />

Ce thème a été celui du symposium satellite du<br />

6ème Congrès <strong>de</strong> l’European Association for the<br />

History of Psychiatry qui s’est déroulé le 23 septembre<br />

2005 au Centre Hospitalier Sainte-Anne.<br />

Modérées par le Professeur Julien-Daniel Guelfi, les<br />

interventions ont été précédées d’une présentation <strong>de</strong><br />

Daniel Gérard, Directeur médical <strong>de</strong> la division Santé<br />

classique <strong>de</strong> Sanofi-Aventis qui a resitué l’intérêt <strong>de</strong><br />

l’histoire <strong>de</strong>s neuroleptiques, à commencer par celle<br />

du Largactil lié aux laboratoires Rhône-Poulenc qui est<br />

à l’origine <strong>de</strong> Sanofi-Aventis.<br />

Une diffusion incroyablement<br />

rapi<strong>de</strong><br />

Le Professeur Pierre Pichot qui présidait le symposium,<br />

a relevé que, sans aucun doute, la découverte<br />

par Jean Delay et Pierre Deniker <strong>de</strong> l’efficacité du<br />

Ces parents décrivent leur incapacité à s’occuper <strong>de</strong><br />

leur progéniture <strong>de</strong>venue opposante et maltraitante.<br />

Cette violence exercée par les enfants sur leurs<br />

parents reste taboue. La famille est généralement<br />

considérée comme un symbole d’amour, <strong>de</strong> chaleur<br />

et comme centre <strong>de</strong> l’affection et <strong>de</strong> la sécurité. Mais<br />

rappelons qu’il est aussi le premier foyer <strong>de</strong> violence :<br />

un tiers à un quart <strong>de</strong> tous les homici<strong>de</strong>s sont <strong>de</strong>s<br />

meurtres domestiques où un membre <strong>de</strong> la famille en<br />

tue un autre. Après une approche historique <strong>de</strong>s<br />

rares étu<strong>de</strong>s concernant ce phénomène, nous tenterons<br />

dans un premier temps <strong>de</strong> définir la tyrannie<br />

familiale. Afin d’appréhen<strong>de</strong>r, plus directement, la<br />

réalité clinique <strong>de</strong> ces situations, nous illustrerons<br />

ces quelques données théoriques par l’observation<br />

clinique d’une patiente consultant au CMP du 14ème arrondissement <strong>de</strong> Paris. Enfin, nous tenterons d’éclaircir<br />

la psychopathologie sous jacente <strong>de</strong> ces parents<br />

maltraités dits « martyrs ».<br />

La question du transfert est au cœur <strong>de</strong> la pratique<br />

<strong>de</strong>s psychanalystes avec les sujets psychotiques, ces<br />

<strong>de</strong>rniers étant <strong>de</strong> plus en plus nombreux à faire une<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’ai<strong>de</strong>, d’entretiens voire <strong>de</strong> cure. Cette<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> correspond aux modifications qui se sont<br />

produites jusqu’à une pério<strong>de</strong> récente dans le champ<br />

<strong>de</strong> la santé mentale, avec une orientation qui a cherché<br />

à favoriser la restauration d’un lien social <strong>de</strong> ces<br />

sujets. Le travail <strong>de</strong> psychanalystes en centres médico-psychologiques,<br />

hôpitaux <strong>de</strong> jour, a été rendu possible<br />

par le développement d’une politique <strong>de</strong> réseau,<br />

auquel il convient d’associer les progrès médicamenteux.<br />

Pour autant la rencontre <strong>de</strong> la psychanalyse et <strong>de</strong> la<br />

psychose n’a pas toujours été <strong>de</strong> soi.<br />

50 ans <strong>de</strong> découverte <strong>de</strong>s<br />

neuroleptiques<br />

Psychopathologie <strong>de</strong>s<br />

« parents martyrs »<br />

Les professionnels <strong>de</strong> santé mentale<br />

peuvent être confrontés à <strong>de</strong>s<br />

patients, aussi parents, souffrant<br />

d’une forme <strong>de</strong> violence mal connue :<br />

la tyrannie familiale.<br />

Largactil dans les symptômes psychotiques est une <strong>de</strong>s<br />

données majeures <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> la psychiatrie et, au<br />

<strong>de</strong>là, <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine. Elle <strong>de</strong>meure le symbole <strong>de</strong><br />

la naissance <strong>de</strong> la psychopharmacologie et a changé<br />

profondément les modalités du soin. Par la compréhension<br />

ultérieure <strong>de</strong> mécanismes d’action, elle a<br />

pesé sur la pensée psychiatrique. La soudaineté <strong>de</strong><br />

cette découverte s’impose comme frappante.<br />

Auparavant, les manuels <strong>de</strong> thérapeutique psychiatrique<br />

(Cossa en 1945 ou Sergent et Slater 1946)<br />

n’abordaient, essentiellement, que les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

choc, seuls quelques médicaments étant mentionnés<br />

comme certains hypnotiques ou sédatifs.<br />

Lors du 1 er Congrès Mondial <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> <strong>de</strong> Paris<br />

en 1950, une synthèse <strong>de</strong>s connaissances a été permise<br />

par les rapports <strong>de</strong> Sackel, Von Meduna et Cerletti,<br />

mais rien ne concernait les thérapeutiques médicamenteuses.<br />

Historique et approches<br />

théoriques<br />

Alors que l’intérêt pour les enfants battus et maltraités<br />

est ancien, remontant à la fin du XIX ème siècle<br />

avec l’apparition <strong>de</strong>s premiers mouvements <strong>de</strong> protection<br />

<strong>de</strong> l’enfance, la <strong>de</strong>scription du phénomène<br />

<strong>de</strong>s parents maltraités est récente, tant en France<br />

qu‘aux Etats-Unis. En France, les premières observations<br />

cliniques <strong>de</strong> cette forme <strong>de</strong> violence familiale<br />

sont dues à Léon Michaux qui consacre un traité sur<br />

« l’enfant pervers ». Le premier cas publié <strong>de</strong> parents<br />

battus fût décrit par Girone en 1974, ce <strong>de</strong>rnier parla<br />

<strong>de</strong> Syndrome <strong>de</strong>s Parents Battus à propos d’une mère<br />

<strong>de</strong> 26 ans amenée dans un service d’urgences pour<br />

toux et fièvre. L’examen révéla <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> coups et<br />

une fracture <strong>de</strong> côte. L’entretien permit <strong>de</strong> retrouver<br />

le coupable, son fils âgé <strong>de</strong> 4 ans. A la même<br />

époque, Barcai (1974) développa, à propos <strong>de</strong>s<br />

familles tyrannisées, l’idée d’une soumission parentale<br />

faisant écho à la dépendance anxieuse <strong>de</strong> l’enfant<br />

ou <strong>de</strong> l’adolescent. Un travail, plus systématique, a<br />

été réalisé par Harbin en 1977 qui proposa <strong>de</strong>s caractéristiques<br />

communes à ces enfants et ces familles, en<br />

développant <strong>de</strong>s hypothèses psychopathologiques.<br />

Le transfert dans la psychose<br />

Une question freudienne<br />

HISTOIRE G. Massé<br />

(suite page 9 )<br />

FMC E. Delaunay<br />

(suite page 3 )<br />

PSYCHANALYSE H. Hubert<br />

La transmission d’un pessimisme<br />

voire d’un veto<br />

Freud était souvent pessimiste à ce sujet, du moins estce<br />

ce qui s’est transmis dans le champ psychanalytique.<br />

Une remarque <strong>de</strong> sa part à ce sujet témoigne <strong>de</strong> ce<br />

pessimisme qui est justement en lien avec la question<br />

<strong>de</strong> l’offre <strong>de</strong> soins en psychiatrie. Il s’agit, dans le<br />

texte qu’il consacre aux Mémoires du Prési<strong>de</strong>nt Schreber,<br />

d’un passage préliminaire où il précise d’emblée<br />

les difficultés <strong>de</strong> l’affaire : « L’investigation psychanalytique<br />

<strong>de</strong> la paranoïa présente, pour nous mé<strong>de</strong>cins<br />

ne travaillant pas dans les asiles, <strong>de</strong>s difficultés particulières.<br />

Nous ne pouvons prendre en traitement ces<br />

(suite page 6 )<br />

OCTOBRE 2005 1<br />

ISSN 0988-4068<br />

n° 7 - Tome XVIII - <strong>Octobre</strong> 2005<br />

Tirage : 10 000 exemplaires<br />

Directeur <strong>de</strong> la Publication et <strong>de</strong> la<br />

Rédaction : G. Massé<br />

Rédacteur en chef : F. Caroli<br />

Rédaction : Hôpital Sainte-Anne,<br />

1 rue Cabanis - 75014 Paris<br />

Tél. 01 45 65 83 09 - Fax 01 45 65 87 40<br />

Abonnements :<br />

54 bd La Tour Maubourg - 75007 Paris<br />

Tél. 01 45 50 23 08 - Fax 01 45 55 60 80<br />

Prix au numéro : 9,15 €<br />

E-mail : info@nervure-psy.com<br />

AU SOMMAIRE<br />

EDITORIAL<br />

L’information du patient<br />

en psychiatrie :<br />

un droit et après ? p.1<br />

FMC<br />

Psychopathologie <strong>de</strong>s<br />

« parents martyrs ” p.1<br />

PSYCHANALYSE<br />

Le transfert dans<br />

la psychose p.6<br />

HISTOIRE<br />

50 ans <strong>de</strong> découverte<br />

<strong>de</strong>s neuroleptiques p.9<br />

HUMEUR<br />

L’autre, ce sujet qui fâche p.11<br />

ENTRETIEN AVEC<br />

Anne Henry<br />

Le <strong>de</strong>rnier rempart pour<br />

entendre p.14<br />

DOSSIER : L’INFORMATION DU<br />

PATIENT EN PSYCHIATRIE<br />

Développement du<br />

projet P.A.C.T. p.14<br />

Information du patient<br />

bipolaire p.15<br />

La place du pharmacien<br />

dans l’information et<br />

l’éducation thérapeutique<br />

du patient p.16<br />

Groupe <strong>de</strong> parole <strong>de</strong>stiné<br />

aux parents <strong>de</strong> personnes<br />

atteintes <strong>de</strong> troubles<br />

psychotiques p.17<br />

THÉRAPEUTIQUE<br />

Critères <strong>de</strong> rechute et<br />

décision thérapeutique dans<br />

les schizophrénies : résultats<br />

<strong>de</strong> l’enquête SACRES p.18<br />

ANNONCES<br />

PROFESSIONNELLES p.20<br />

ANNONCES EN BREF p.22<br />

Vous pouvez consulter l’intégralité<br />

<strong>de</strong> nos éditions, vous abonner<br />

ou consulter nos archives sur notre site<br />

www.nervure-psy.com


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

La première étu<strong>de</strong> en France fût<br />

menée un an après la publication <strong>de</strong><br />

Girone en 1975 par Vauris à l’hôpital<br />

Saint-Louis à Paris sur 25 enfants ayant<br />

un comportement agressif à l’encontre<br />

<strong>de</strong> leurs parents. Ce travail fût repris<br />

et complété par Dugas, Mouren-Siméoni<br />

et Halfon (1985) qui, analysant 36<br />

observations d’enfants battant leurs<br />

parents, les ont classées en trois groupes<br />

nosographiques : celui <strong>de</strong>s enfants<br />

autistes (5) et psychotiques (11), un<br />

second comprenant <strong>de</strong>s enfants « Bor<strong>de</strong>r<br />

line » (6) et au comportement psychopathique<br />

(2) et un troisième groupe,<br />

ceux souffrant <strong>de</strong> troubles<br />

névrotiques <strong>de</strong> la personnalité (11). Les<br />

caractéristiques relationnelles liées à la<br />

personnalité <strong>de</strong>s sujets psychotiques,<br />

psychopathes ou état limite les incitèrent,<br />

comme Harbin et Mad<strong>de</strong>n<br />

(1977), à étudier plus particulièrement<br />

le groupe <strong>de</strong>s sujets « névrotiques ».<br />

C’est aux familles <strong>de</strong> ce troisième groupe<br />

que les auteurs ont réservé le terme<br />

<strong>de</strong> parents battus.<br />

Au regard <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s, nous pouvons<br />

définir cette forme <strong>de</strong> violence familiale<br />

<strong>de</strong> la manière suivante : il s’agit<br />

<strong>de</strong> maltraitance psychologique et/ou<br />

physique s’exerçant <strong>de</strong> façon quasiconstante<br />

vis-à-vis d’au moins un<br />

parent. Cette tyrannie familiale ne s’accompagne<br />

pas, obligatoirement, <strong>de</strong><br />

sévices physiques sur les parents. Elle<br />

peut s’exprimer essentiellement sous<br />

la forme d’une maltraitance psychologique.<br />

Le point commun essentiel <strong>de</strong><br />

toutes ces situations <strong>de</strong> violence familiale<br />

est l’inversion <strong>de</strong> la hiérarchie familiale.<br />

Tout s’organise autour <strong>de</strong>s désirs<br />

et caprices <strong>de</strong> l’enfant. Il existe une<br />

forme <strong>de</strong> soumission du ou <strong>de</strong>s parents<br />

à l’égard <strong>de</strong> l’enfant tout puissant.<br />

La tyrannie familiale peut exister chez<br />

<strong>de</strong>s familles d’enfants présentant <strong>de</strong>s<br />

troubles mentaux auxquels l’agressivité<br />

est fortement associée comme la<br />

psychose, le retard mental ou le trouble<br />

envahissant du développement. Cette<br />

violence dépasse la sphère familiale.<br />

Aussi, parlerons-nous <strong>de</strong> comportements<br />

tyranniques plus que <strong>de</strong> tyrannie<br />

familiale.<br />

La maltraitance physique qu’exercent<br />

certains enfants tyrans sur leurs parents<br />

L’information du patient<br />

en psychiatrie : un droit et<br />

après ?<br />

Il doit donc pouvoir trouver un soutien<br />

auprès <strong>de</strong>s différents partenaires<br />

qui vont l’accompagner tout au long<br />

<strong>de</strong> son parcours.<br />

Chaque professionnel, dans son champ<br />

<strong>de</strong> compétences, va œuvrer pour que<br />

la personne mala<strong>de</strong> et son entourage<br />

s’engagent <strong>de</strong> manière responsable<br />

dans la prise en charge du traitement,<br />

et, pour cela, il faut leur en donner<br />

les moyens, car une personne responsable<br />

est une personne informée,<br />

voire éduquée. En psychiatrie, la plupart<br />

<strong>de</strong>s patients conservent la capacité<br />

<strong>de</strong> comprendre l’information donnée.<br />

Néanmoins, en raison d’altérations<br />

cognitives spécifiques, il faudra prendre<br />

en compte leur capacité d’assimilation<br />

particulière et s’assurer que l’information<br />

donnée a bien été comprise.<br />

En effet, il existe un écart important<br />

entre l’information donnée et ce que<br />

les patients peuvent en comprendre.<br />

Lors d’une communication au Salon<br />

du SNC <strong>de</strong> novembre 2001, le Dr<br />

Marie-Clau<strong>de</strong> Muret, sur la base d’un<br />

questionnaire d’évaluation <strong>de</strong> la qualité<br />

<strong>de</strong> l’information reçue par le patient<br />

sur sa pathologie et son traitement,<br />

dans un service <strong>de</strong> psychiatrie,<br />

montre que 74% <strong>de</strong>s personnes jugent<br />

l’information satisfaisante. Si<br />

78,5% <strong>de</strong>s cas affirment connaître le<br />

nom <strong>de</strong> leurs médicaments, 56,7%<br />

le nomment et 39,7% nomment correctement<br />

le nom <strong>de</strong> leur maladie.<br />

Psychopathologie <strong>de</strong>s<br />

« parents martyrs »<br />

peut entraîner <strong>de</strong> véritables lésions<br />

secondaires aux coups portés (fracture,<br />

hématome…). Nous excluons <strong>de</strong> notre<br />

définition <strong>de</strong> la tyrannie familiale l’aboutissement<br />

extrême <strong>de</strong> cette violence<br />

que serait le parrici<strong>de</strong>. En effet, ce <strong>de</strong>rnier<br />

s’inscrit dans un tout autre contexte<br />

répondant à <strong>de</strong>s caractéristiques particulières<br />

: l’acte est généralement<br />

unique et extrêmement violent et létal,<br />

le parent victime est souvent une figure<br />

sadique haïe par toute la famille,<br />

enfin il existe fréquemment <strong>de</strong>s antécé<strong>de</strong>nts<br />

d’abus sexuel ou physique sur<br />

l’enfant meurtrier, la fratrie ou la mère.<br />

Cas clinique<br />

Mme V., 45 ans, se plaint d’insomnie,<br />

d’anxiété à type d’oppression thoracique<br />

et <strong>de</strong> difficultés à assumer les<br />

tâches <strong>de</strong> la vie quotidienne. Ce qui<br />

est frappant lors <strong>de</strong> l’entretien, c’est<br />

que tout son discours est focalisé autour<br />

<strong>de</strong> sa relation avec son fils : Nicolas,<br />

12 ans, qu’elle n’arrive plus à « gérer ».<br />

La mère rapporte une intolérance à la<br />

moindre frustration. Lors <strong>de</strong>s crises clastiques,<br />

Nicolas s’en prend aux objets<br />

et à tout ce qui l’entoure. Si un <strong>de</strong>s<br />

parents lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> ranger ses<br />

affaires ou le contraint même <strong>de</strong><br />

manière minime, Nicolas casse, donne<br />

<strong>de</strong>s coups <strong>de</strong> pied, lance <strong>de</strong>s crachats.<br />

Les violences sont principalement dirigées<br />

contre la mère. Mme V. se sent<br />

démunie et ne peut contrôler ces accès<br />

d’agressivité.<br />

Tous les moyens sont utilisés pour satisfaire<br />

ses désirs et faire pression sur ses<br />

parents. Madame raconte que Nicolas<br />

a abîmé volontairement la voiture <strong>de</strong><br />

son père qu’il affectionne particulièrement.<br />

Elle rajoute qu’« il prend un malin<br />

plaisir » à casser les jouets du petit frère.<br />

Avec le temps, la situation s’aggrave.<br />

Il donne <strong>de</strong>s ordres « donne moi ça …je<br />

veux aller là…Je veux regar<strong>de</strong>r la télévision<br />

quand je veux… ».<br />

Il s’oppose activement à toutes les<br />

Notre expérience d’une dizaine d’années<br />

<strong>de</strong> conduites d’Ateliers du médicament<br />

nous montre que l’information<br />

n’est assimilée que si elle est<br />

offerte plusieurs fois et <strong>de</strong> différentes<br />

manières. Il paraît donc nécessaire <strong>de</strong><br />

répéter ces informations tout au long<br />

<strong>de</strong> la prise en charge du patient pour<br />

favoriser l’alliance thérapeutique prédictive<br />

d’une adhésion aux soins <strong>de</strong><br />

meilleure qualité.<br />

Dans ces conditions, le patient se sentira<br />

respecté et reconnu dans sa dignité<br />

<strong>de</strong> mala<strong>de</strong> souffrant.<br />

C’est pourquoi, nous avons réuni dans<br />

ce numéro certains textes (3), dont celui<br />

<strong>de</strong> Catherine Faruch, Chef <strong>de</strong> service<br />

au CH Gérard Marchant à Toulouse,<br />

qui a, <strong>de</strong>puis <strong>de</strong> nombreuses<br />

années, fait <strong>de</strong> l’information <strong>de</strong>s patients<br />

une <strong>de</strong> ses priorités. Elle-même<br />

et différents membres <strong>de</strong> son équipe<br />

relatent ci-<strong>de</strong>ssous les différentes expériences<br />

menées auprès <strong>de</strong>s patients<br />

et <strong>de</strong> leurs familles. Marie-Lise Biscay,<br />

Pharmacien Chef <strong>de</strong> service au CH<br />

<strong>de</strong> Pau, présente le concept <strong>de</strong> l’Atelier<br />

du médicament et le rôle du pharmacien<br />

dans l’informatin et l’éducation<br />

au traitement psychotrope. <br />

Claudine Fabre*<br />

*Pharmacien, CH Gérard Marchant, Toulouse.<br />

(1) A. CARIA et coll, Les usagers <strong>de</strong> psychiatrie<br />

sont-ils satisfaits ? Démarche qualité<br />

en santé mentale, 165-177, Editions<br />

In Press.<br />

(2) M.L. BISCAY et C. FABRE, <strong>Journal</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>Nervure</strong>, 2001, 4, 10-11.<br />

(3) Dossier : L’information du patient en<br />

psychiatrie, pages 14 à 17.<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s parents.<br />

Progressivement, « la terreur s’installe »<br />

dira la mère. La famille évite toute situation<br />

susceptible <strong>de</strong> précipiter une crise.<br />

Au moindre accroc, l’enfant hurle, trépigne<br />

et insulte ses parents. Il existe<br />

<strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s plus calmes mais qui sont<br />

très anxiogènes pour la famille qui<br />

appréhen<strong>de</strong> une nouvelle crise.<br />

A l’extérieur <strong>de</strong> la maison, notamment<br />

à l’école, Nicolas est décrit comme un<br />

enfant tranquille ayant <strong>de</strong> bons résultats<br />

scolaires et parvenant à se lier d’amitié<br />

avec <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> son âge.<br />

Madame V. reconnaît spontanément<br />

que la relation entre elle et son fils est<br />

très proche. Elle décrit une violence<br />

que ni elle ni son époux ne peuvent<br />

contenir ni canaliser. Cependant, tantôt<br />

elle rapporte son désarroi, son impuissance<br />

<strong>de</strong>vant les troubles du comportement<br />

<strong>de</strong> l’enfant, tantôt elle semble<br />

l’excuser ou minimiser les violences :<br />

« vous savez, il n’est pas toujours comme<br />

ça, parfois il est très gentil ».<br />

Quant au père, elle le décrit sans autorité.<br />

Au début, il tentait d’intervenir<br />

pour faire cesser la crise mais « sans<br />

conviction » dit-elle. Ces <strong>de</strong>rniers temps,<br />

Monsieur V. abandonne <strong>de</strong> plus en<br />

plus rapi<strong>de</strong>ment, évitant même le<br />

conflit mère-fils. L’histoire <strong>de</strong> la famille<br />

commence par <strong>de</strong>s difficultés à avoir<br />

<strong>de</strong>s enfants. Les fausses couches furent<br />

nombreuses et le couple désespérait<br />

d’avoir un enfant et la question <strong>de</strong> la<br />

procréation médicalement assistée a<br />

même été soulevée. Finalement, <strong>de</strong>vant<br />

ces tentatives <strong>de</strong> grossesses infructueuses<br />

répétées, le gynécologue lui<br />

conseille un alitement précoce. A 32<br />

ans, Madame V. est enceinte et est alitée<br />

dès le <strong>de</strong>uxième mois. La grossesse<br />

se poursuit jusqu’au septième mois<br />

et l’enfant, tant attendu, naît prématuré.<br />

Depuis sa naissance jusqu’à la scolarisation<br />

en petite section maternelle,<br />

Nicolas est gardé par sa mère qui déci<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> ne pas reprendre son travail pour<br />

« se consacrer entièrement » à l’enfant.<br />

Nicolas a eu un développement psychomoteur<br />

normal et aucun retard<br />

d’acquisition n’est noté. Cependant, les<br />

parents mentionnent, très tôt, <strong>de</strong>s<br />

troubles du sommeil à type d’insomnie<br />

d’endormissement jusqu’à l’âge <strong>de</strong><br />

2 ans et <strong>de</strong>mi. L’enfant ne pouvait s’endormir<br />

sans que la mère soit présente<br />

près <strong>de</strong> lui. Elle <strong>de</strong>vait attendre que<br />

Nicolas s’endorme avant d’aller, discrètement,<br />

rejoindre la chambre du<br />

couple. Les troubles diminuent lorsque<br />

les parents installent une veilleuse dans<br />

sa chambre et disparaissent seulement<br />

quand ils laissent ouverte la porte <strong>de</strong><br />

leur chambre donnant sur celle <strong>de</strong> l’enfant.<br />

L’entrée en maternelle est difficile<br />

et s’accompagne <strong>de</strong> pleurs, <strong>de</strong> cris et<br />

d’accès <strong>de</strong> colère « déjà impressionnant<br />

pour son âge » dira la mère. Les mêmes<br />

accès se répèteront à chaque séparation<br />

avec la mère et dureront plusieurs<br />

semaines. La gar<strong>de</strong> par une nourrice<br />

est tentée mais rapi<strong>de</strong>ment abandonnée,<br />

d’ailleurs le couple pendant cette<br />

pério<strong>de</strong> ne s’autorisera aucune sortie.<br />

La famille fait remonter les premiers<br />

accès <strong>de</strong> colère lors <strong>de</strong> la <strong>de</strong>uxième<br />

grossesse, Nicolas a alors 5 ans. A nouveau,<br />

la mère dut être alitée et, vers le<br />

cinquième mois, est hospitalisée plusieurs<br />

semaines pour menace d’accouchement<br />

prématuré. Nicolas est séparé<br />

<strong>de</strong> sa mère, c’est à cette pério<strong>de</strong><br />

précisément qu’apparaissent les premières<br />

manifestations d’agressivité. A<br />

son retour d’hôpital, Madame V. qui<br />

impérativement <strong>de</strong>vait rester alitée ira<br />

habiter chez un oncle avec Nicolas car<br />

le père très pris par son travail d’ingénieur,<br />

n’a pas le temps <strong>de</strong> s’occuper<br />

« <strong>de</strong> la maman alitée et <strong>de</strong> Nicolas », en<br />

plus <strong>de</strong>s activités ménagères quotidiennes.<br />

Madame V. ne mentionne<br />

aucun antécé<strong>de</strong>nt psychiatrique. Elle<br />

se décrit seulement comme anxieuse,<br />

très soucieuse <strong>de</strong> la santé <strong>de</strong> son enfant<br />

ne le quittant pas, <strong>de</strong> peur qu’il lui arrive<br />

un quelconque danger domestique.<br />

Psychopathologie <strong>de</strong>s<br />

parents martyrs<br />

La prévalence <strong>de</strong> la violence d’enfants<br />

ou adolescents sur leurs parents est difficile<br />

à chiffrer (la maltraitance psychologique<br />

reste difficile à évaluer). Les<br />

rares étu<strong>de</strong>s montrent <strong>de</strong>s taux oscillant<br />

entre 10 % (Strauss, 1979) et 14 %<br />

(Paulson, 1990) en population générale<br />

et <strong>de</strong>s taux variant <strong>de</strong> 0,6 %<br />

(Dugas, 1985) à 13 % (Charles, 1986)<br />

en population clinique.<br />

Les données socio-démographiques<br />

montrent que ces parents martyrs<br />

appartiennent plutôt à <strong>de</strong>s catégories<br />

socioprofessionnelles aisées, ont un âge<br />

élevé et présentent plus <strong>de</strong> pathologies<br />

somatiques et/ou psychiatriques<br />

(Dugas, 1985 ; Paulson, 1990 ; Laurent,<br />

1999). Contrairement à ce que<br />

l’on peut penser, les parents explicitement<br />

permissifs <strong>de</strong>viennent rarement<br />

<strong>de</strong> vrais tyrans. Il est frappant <strong>de</strong> constater<br />

que nombre d’enfants ayant bénéficié<br />

d’une éducation radicalement antiautoritaire,<br />

ont un profil hypermature.<br />

En règle générale, ces parents sont<br />

motivés par le désir <strong>de</strong> bien faire et<br />

d’être <strong>de</strong> bons parents. Souvent, ils ont<br />

consulté <strong>de</strong> nombreux ouvrages traitant<br />

<strong>de</strong> l’éducation. Ils ont, cependant,<br />

souvent tendance à confondre autorité<br />

et autoritarisme, colère et détresse<br />

émotionnelle. Du coup, tout vécu <strong>de</strong><br />

frustration chez l’enfant est insupportable.<br />

Par réaction à cette violence, ils<br />

remettent en cause leur attitu<strong>de</strong> éducative<br />

mais pas souvent dans la bonne<br />

direction. Ils ont tendance à développer<br />

une « hyper-compréhension » <strong>de</strong> leur<br />

enfant qui aboutit à trouver encore<br />

plus d’excuses à son attitu<strong>de</strong>, alors<br />

même que celle-ci apparaît simplement<br />

inacceptable pour tout spectateur extérieur.<br />

Ils cherchent, constamment, à<br />

développer la communication et<br />

l’échange avec leur enfant, l’exhortant<br />

à leur confier sa « souffrance » au cours<br />

<strong>de</strong> discussions sans fin. La crainte sousjacente<br />

<strong>de</strong> ces parents martyrs est souvent<br />

<strong>de</strong> perdre l’amour <strong>de</strong> leur enfant.<br />

Certains sont convaincus que s’opposer<br />

au désir d’un jeune enfant revient à le<br />

traumatiser. Ils tentent <strong>de</strong> s’appliquer un<br />

modèle <strong>de</strong> parent idéal.<br />

Un enfant surinvesti<br />

Le surinvestissement apparaît fréquemment<br />

dans les situations <strong>de</strong> tyrannie<br />

familiale. Il s’accompagne, généralement,<br />

d’une anxiété parentale<br />

excessive et d’une tendance à la surprotection.<br />

Au début <strong>de</strong> sa vie, le bébé<br />

est dans la satisfaction totale avec sa<br />

mère « dans la pure jouissance ». Cette<br />

position d’omnipotence <strong>de</strong> l’enfant au<br />

lieu <strong>de</strong> régresser va être, en quelque<br />

sorte, favorisée aboutissant à un renversement<br />

<strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> force parentenfant.<br />

Toute l’organisation familiale<br />

va être régie autour <strong>de</strong>s désirs <strong>de</strong> l’enfant.<br />

Ces enfants sont choyés, valorisés,<br />

surinvestis bénéficiant d’une surprotection<br />

parentale. « Gavés d’amour<br />

jusqu’à la nausée, ils ont recours à la<br />

haine pour se séparer » écrit Cyrulnik<br />

(2001). Le paradoxe <strong>de</strong> cette position<br />

d’omnipotence c’est qu’elle nécessite<br />

la présence continue <strong>de</strong>s parents. Ces<br />

<strong>de</strong>rniers qui évitent pour leur enfant<br />

toute frustration les réduisent en position<br />

<strong>de</strong> dépendance continuelle pour<br />

les actes <strong>de</strong> la vie quotidienne.<br />

Finalement, on arrive à une situation<br />

telle que l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux parents, mais le<br />

plus souvent les <strong>de</strong>ux, traitent leur<br />

enfant comme s’il était leur propre<br />

parent. On observe une forme <strong>de</strong> soumission<br />

anxieuse à l’égard <strong>de</strong> l’enfant<br />

« est-ce que je peux regar<strong>de</strong>r la télévision<br />

? …puis je rentrer dans le salon ? »<br />

s’excuse Mme V. auprès <strong>de</strong> son enfant.<br />

Dans d’autres situations familiales, le<br />

surinvestissement <strong>de</strong>s parents est plus<br />

<br />

LIVRES<br />

FMC 3<br />

Le syndrome <strong>de</strong> Rett, une<br />

maladie génétique<br />

Ouvrage collectif <strong>de</strong> l’Association<br />

Française du syndrome <strong>de</strong> Rett<br />

L’Association Française du Syndrome<br />

<strong>de</strong> Rett (AFSR) a édité, en 2004, un<br />

ouvrage collectif décrivant cette maladie<br />

dans toutes ses dimensions :<br />

clinique, génétique, thérapeutique,<br />

sociale. Rappelons que le syndrome<br />

<strong>de</strong> Rett ne touche que les filles, et<br />

qu’il y aurait entre 25 et 40 nouveaux<br />

cas par an. Chez un nourrisson hypotonique<br />

et stagnant dans son développement<br />

neuromoteur, apparaissent<br />

peu à peu <strong>de</strong>s troubles du<br />

comportement d’un syndrome autistique,<br />

puis <strong>de</strong>s manifestations neurologiques<br />

: comitialité, retard <strong>de</strong> développement,<br />

apraxie <strong>de</strong>s membres<br />

avec, <strong>de</strong> façon évocatrice, une perte<br />

<strong>de</strong> la capacité à utiliser ses mains. Ce<br />

syndrome nécessite une prise en<br />

charge spécialisée. Cet ouvrage peut<br />

être considéré comme un document<br />

<strong>de</strong> référence qui aura sa place dans<br />

toute bibliothèque d’hôpital <strong>de</strong> jour,<br />

mais aussi <strong>de</strong> centre <strong>de</strong> consultation<br />

psychologique.<br />

Alain Frottin<br />

L’histoire <strong>de</strong>s maisons<br />

maternelles<br />

Entre secours et<br />

redressement<br />

L’exemple du département <strong>de</strong><br />

l’Au<strong>de</strong><br />

Yves Boulbès<br />

Préface <strong>de</strong> Jean-Louis Escudier<br />

L’Harmattan 16 €<br />

Yves Boulbès est l’auteur d’une thèse<br />

d’histoire contemporaine intitulée :<br />

« L’Assistance Publique, <strong>de</strong> la loi Roussel<br />

à la Libération. Fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> l’ai<strong>de</strong><br />

Sociale à l’Enfance. L’exemple du département<br />

<strong>de</strong> l’Au<strong>de</strong> ». Educateur spécialisé,<br />

il a travaillé dix ans en Centre<br />

maternel et Centre d’hébergement et<br />

<strong>de</strong> réadaptation sociale. Exerçant, actuellement,<br />

à la Structure d’accueil<br />

enfance du Conseil Général <strong>de</strong> l’Au<strong>de</strong>,<br />

il oriente ses recherches sur la conceptualisation<br />

<strong>de</strong> la notion d’enfant et le<br />

rôle incitatif créé par la prise en charge<br />

<strong>de</strong> l’enfant assisté. Les centres maternels<br />

accueillent <strong>de</strong>s femmes enceintes,<br />

majeures ou mineures et leurs<br />

enfants. Séparées, divorcées, ce sont<br />

le plus souvent <strong>de</strong>s familles monoparentales.<br />

Jusqu’aux années cinquante<br />

les femmes sans hommes ne<br />

sont que <strong>de</strong>s filles-mères, reléguées<br />

aux marges <strong>de</strong> la société. L’histoire<br />

<strong>de</strong> la Maison Maternelle Départementale<br />

<strong>de</strong> l’Au<strong>de</strong> offre une approche<br />

originale <strong>de</strong> ces maternités. Elle permet<br />

d’apprécier la condition <strong>de</strong> la<br />

fille-mère <strong>de</strong> la fin du XIX e siècle à<br />

nos jours et surtout <strong>de</strong> comprendre<br />

le dilemme auquel est confrontée la<br />

fille-mère, d’abord objet du regard<br />

réprobateur <strong>de</strong> la communauté villageoise.<br />

Dodo, l’enfant do<br />

Le sommeil du tout-petit<br />

Dossier coordonné par Jacky<br />

Israël<br />

Spirale juin 2005, n°34<br />

Erès, 12 €<br />

Le sommeil du tout-petit est l’une <strong>de</strong>s<br />

principales préoccupations <strong>de</strong>s<br />

parents au même titre que l’alimentation<br />

et, bien évi<strong>de</strong>mment, sous couvert<br />

d’« éveil », ses capacités intellectuelles...<br />

Dès la naissance, l’absence <strong>de</strong><br />

sommeil et les pleurs qui en résultent<br />

sont tout autant sources d’angoisse<br />

qu’une mauvaise prise du sein ou du<br />

biberon. Seulement voilà, le nouveauné<br />

a sa propre horloge (cycles cumulés<br />

<strong>de</strong> trois à quatre heures), et<br />

son sommeil n’est pas aussi paisible<br />

que les parents le souhaitent, et encore<br />

moins <strong>de</strong> tout repos ! Ce numéro<br />

<strong>de</strong> Spirale tente <strong>de</strong> comprendre et<br />

saisir les objectifs <strong>de</strong> cette activité qui<br />

prend autant <strong>de</strong> place.


4<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Numéro varia<br />

Enfance 2005 n°2<br />

Presses Universitaires <strong>de</strong> Farnce, 22 €<br />

Ce numéro varia d’Enfance réunit une<br />

somme d’informations sur les questions<br />

que chacun se pose à propos du développement<br />

<strong>de</strong> l’enfant.<br />

Comment se fait-il que nous cherchions<br />

une explication autre que le hasard<br />

lorsque se produit la rencontre inopinée<br />

entre <strong>de</strong>ux événements sans lien ?<br />

Fabien Mathy et Joël Bradmetz, montrent<br />

que la formation d’une fausse<br />

croyance fondée sur une coïnci<strong>de</strong>nce<br />

se réalise à l’âge <strong>de</strong> 4-5 ans, au moment<br />

même où s’exprime la capacité à<br />

attribuer une fausse croyance sur la<br />

base d’une information erronée. Les<br />

jeunes enfants aussi inventent <strong>de</strong>s relations<br />

causales entre événements qui<br />

n’en n’ont pas.<br />

La reconnaissance <strong>de</strong>s visages est l’un<br />

<strong>de</strong>s domaines les plus fascinants <strong>de</strong><br />

l’étu<strong>de</strong> du développement : comment<br />

un jeune bébé reconnaît-il un même visage<br />

malgré les changements incessants<br />

<strong>de</strong> ses expressions faciales ? Comment<br />

évolue au cours <strong>de</strong> l’enfance<br />

l’analyse qui nous permet <strong>de</strong> réaliser<br />

cette reconnaissance dans les situations<br />

les plus diverses ? Olivier Pascalis, Marianne<br />

Rotsaert et Stephen Want indiquent<br />

que l’enfant se base sur <strong>de</strong>s éléments<br />

comme le nez ou la bouche, alors<br />

que l’adulte combine ces divers éléments.<br />

L’article débouche sur une réflexion<br />

comparant le traitement <strong>de</strong>s visages<br />

par rapport au traitement <strong>de</strong> toute<br />

autre configuration perceptive.<br />

Les matériels <strong>de</strong> jeu ont une importance<br />

déterminante sur l’orientation <strong>de</strong>s activités<br />

: plus sociale dans le cas <strong>de</strong> jeux<br />

moteurs, plus solitaire dans le cas <strong>de</strong><br />

jeux <strong>de</strong> manipulation. Ces aspects d’écologie<br />

développementale offerts par<br />

Anne-Marie Fontaine sont une source<br />

d’enseignement pour les crèches et jardins<br />

d’enfants.<br />

Toujours en milieu scolaire, Janvier et<br />

Testu montrent que les fluctuations d’attention<br />

concernent <strong>de</strong>s séquences d’une<br />

heure chez l’enfant <strong>de</strong> 4-5 ans, tandis<br />

qu’elles s’expriment en termes <strong>de</strong> <strong>de</strong>mijournées<br />

et sont comparables à celles<br />

<strong>de</strong> l’adulte au travail pour les enfants<br />

<strong>de</strong> 10-11 ans.<br />

Enfin, Dominique Bassano et ses collaborateurs<br />

présentent un outil pour l’évaluation<br />

du développement du langage<br />

qui n’est pas la simple transposition <strong>de</strong>s<br />

évaluations en langue anglaise.<br />

Le bonheur en famille<br />

Psychologie <strong>de</strong> la vie familiale<br />

Pierre Angel avec la collaboration<br />

<strong>de</strong> Christine Schilte<br />

Odile Jacob, 21,90 €<br />

Pierre Angel est le fondateur du Centre<br />

<strong>de</strong> thérapie familiale Monceau à Paris.<br />

Il rapporte, dans ce livre, ce que les familles<br />

lui ont appris. On a tendance aujourd’hui<br />

à surestimer le pourcentage<br />

<strong>de</strong> familles dysfonctionnelles, instables,<br />

brisées, incestueuses ou en échec<br />

moral et social. En vérité, la majorité<br />

<strong>de</strong>s familles sont capables, fort heureusement,<br />

<strong>de</strong> mobiliser <strong>de</strong>s ressources<br />

propres, <strong>de</strong> trouver <strong>de</strong>s solutions efficaces<br />

et <strong>de</strong> prévenir les rechutes. Ces<br />

potentiels ont été longtemps sous-estimés,<br />

mais ils existent indéniablement.<br />

Encore faut-il y croire et, parfois, apprendre<br />

comment les mobiliser.<br />

Traiter les cas difficiles<br />

Les réussites <strong>de</strong> la thérapie brève<br />

Richard Fisch, Karin Schlanger<br />

Seuil<br />

Voilà un livre véritablement novateur,<br />

qui donc va déplaire à beaucoup. En effet<br />

Richard Fisch, succulent petit bonhomme<br />

<strong>de</strong> psychiatre, créateur avec<br />

Paul Watzlawick <strong>de</strong> la célèbre école <strong>de</strong><br />

Palo Alto, et son élève Karin Schlanger,<br />

nous décrivent une psychothérapie stratégique<br />

brève, en récusant toute normativité<br />

et toute référence à la sacrosainte<br />

psychopathologie.<br />

Pire, ils se piquent <strong>de</strong> respecter, selon<br />

l’exigence <strong>de</strong>s (autres) sciences actuelles,<br />

les principes <strong>de</strong> l’épistémologie mo<strong>de</strong>rne.<br />

A savoir :<br />

- rechercher l’« utile » que l’on sait à peu<br />

près estimer, et non l’hypothétique « vérité<br />

», ou la trompeuse « sincérité » ;<br />

- traquer les faits objectivant le « comment<br />

», en délaissant le « pourquoi » ob-<br />

solète et insaisissable (Wittgenstein) ;<br />

- récuser la causalité linéaire qui n’a plus<br />

<strong>de</strong> sens que pour la physique la plus<br />

élémentaire et, étrangement pour toutes<br />

les théories psy ;<br />

- se référer à la causalité circulaire, seule<br />

apte à rendre compte <strong>de</strong>s domaines<br />

complexes comme le psychisme ;<br />

- respecter le principe essentiel <strong>de</strong> « falsifiabilité<br />

» en évaluant, non pas seulement<br />

certains consultants artificiellement<br />

triés en vertu d’un quelconque<br />

DSM, mais tous ceux qui consultent au<br />

moins une fois. Ce qui est autrement<br />

exigeant. Etc... Mais pour cela Fisch, qui<br />

montre <strong>de</strong>s trésors d’habileté dans l’abord<br />

<strong>de</strong> patients que l’on sait rétifs à suivre<br />

les voies <strong>de</strong> la guérison, nous livre simplement<br />

et clairement ses métho<strong>de</strong>s<br />

comme si nous, ses confrères, ne <strong>de</strong>mandions<br />

qu’à les entendre. Pour cette<br />

naïveté, l’Histoire oubliera son nom,<br />

comme elle a oublié celui <strong>de</strong> ce Grec<br />

qui, <strong>de</strong>ux millénaires avant Galilée, découvrait<br />

que la terre était ron<strong>de</strong>. Chers<br />

confrères, si malgré cela vous lisez tout<br />

<strong>de</strong> même ce bouquin étonnant, si votre<br />

organicisme, votre psychanalysme, votre<br />

comportementalisme ou votre systémisme<br />

familial ne vous l’interdisent pas,<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

vous apprendrez comment on peut<br />

« traiter les cas difficiles » par les outils<br />

<strong>de</strong> la parole et <strong>de</strong> la relation. Vous découvrirez<br />

comment non pas « guérir alcooliques,<br />

anorexiques, dépressifs ou psychotiques...<br />

», mais amener un sujet<br />

souffrant à contrôler, selon sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

et son désir, sa prise d’alcool ou d’aliments,<br />

sa thymie ou ses idées délirantes,<br />

et comment cela se construit sur cette<br />

idée essentielle, véritable théorème basal<br />

d’une conception enfin originale et<br />

cohérente <strong>de</strong>s ratés du psychisme : « le<br />

problème vient <strong>de</strong>s solutions ».<br />

M. Pradère


W<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

narcissique qu’anxieux. Certains parents<br />

sont fascinés par les capacités intellectuelles<br />

<strong>de</strong> leur enfant, qui sont bien<br />

réelles mais il s’agit rarement d’authentiques<br />

enfants dits précoces (ou<br />

surdoués). Le plus souvent, ces enfants<br />

sont doués mais aussi charmeurs et<br />

surestimés par leurs parents. Ainsi, la<br />

moindre remise en cause <strong>de</strong> son omnipotence<br />

est susceptible <strong>de</strong> déclencher<br />

une crise. Une situation d’échec <strong>de</strong>vant<br />

un exercice peut provoquer <strong>de</strong>s colères.<br />

Un cas extrême <strong>de</strong> surinvestissement<br />

narcissique est illustré par le syndrome<br />

<strong>de</strong> réussite par procuration. Il s’agit <strong>de</strong><br />

parents sur-stimulant les talents et la<br />

réussite <strong>de</strong> leurs enfants dans différents<br />

domaines (sport, musique…) en vue<br />

d’un bénéfice narcissique personnel.<br />

L’amour parental est entièrement<br />

conditionné par les succès <strong>de</strong> l’enfant<br />

au détriment <strong>de</strong> son épanouissement<br />

affectif. L’inversion du rapport <strong>de</strong> force<br />

parent-enfant avec survenue <strong>de</strong> comportements<br />

tyranniques peut se développer<br />

après une phase plus ou moins<br />

longue <strong>de</strong> tolérance et <strong>de</strong> soumission<br />

aux désirs parentaux.<br />

Des parents en position<br />

<strong>de</strong> faiblesse<br />

La faiblesse réelle ou symbolique <strong>de</strong>s<br />

parents représente un facteur clé <strong>de</strong><br />

l’inversion <strong>de</strong> la hiérarchie familiale.<br />

Ses effets se conjuguent, bien sûr, à ceux<br />

du contexte familial, environnemental<br />

et aux caractéristiques propres <strong>de</strong> l’enfant.<br />

Plus le parent est démuni, plus<br />

l’enfant fera preuve <strong>de</strong> violence envers<br />

sa victime. Le parent peut être fragilisé<br />

par une pathologie somatique ou un<br />

trouble mental. L’image <strong>de</strong>s parents<br />

est, ainsi, amoindrie auprès <strong>de</strong> l’enfant<br />

ou l’adolescent. Dugas (1985) observe<br />

la présence d’une maladie somatique et<br />

d’un trouble mental respectivement<br />

dans 23% et 60% <strong>de</strong>s cas chez le père.<br />

La vieillesse peut contribuer à renforcer<br />

cette position <strong>de</strong> victime <strong>de</strong>s parents<br />

et <strong>de</strong> toute puissance <strong>de</strong> l’enfant.<br />

Contrairement à <strong>de</strong>s parents plus<br />

jeunes qui restent mobilisés par <strong>de</strong>s<br />

projets d’avenir qui leur sont propres,<br />

ceux-là vont avoir tendance à se mettre<br />

en retrait au profit <strong>de</strong> leur progéniture,<br />

qui sera chargée <strong>de</strong> répondre à leur<br />

besoin d’amour et <strong>de</strong> bénéfices narcissiques.<br />

Ces parents âgés vont être<br />

confrontés a la comparaison avec <strong>de</strong>s<br />

familles d’amis <strong>de</strong>s enfants. Pour parer<br />

à cette défaillance, ils auront tendance<br />

à compenser par une surabondance<br />

<strong>de</strong> ca<strong>de</strong>aux et l’anticipation <strong>de</strong> ses<br />

moindres souhaits. L’enfant trop<br />

conscient <strong>de</strong> son importance risque <strong>de</strong><br />

multiplier les exigences.<br />

Parfois, il n’apparaît pas d’éléments évi<strong>de</strong>nts<br />

concrets favorisant cette évolution.<br />

Pas <strong>de</strong> facteurs comme une maladie<br />

somatique ou un conflit parental<br />

manifeste, il faut reprendre l’histoire<br />

familiale pas à pas. Il n’est pas rare <strong>de</strong><br />

Françoise Dolto<br />

constater que <strong>de</strong>s parents expriment<br />

leur refus <strong>de</strong> reproduire ce qu’ils ont<br />

vécu eux-mêmes durant leur enfance.<br />

Ils évoquent <strong>de</strong>s relations rigi<strong>de</strong>s et peu<br />

chaleureuses avec leurs propres parents.<br />

Les thèmes <strong>de</strong> carences d’amour et<br />

du manque <strong>de</strong> disponibilité sont récurrents.<br />

Ainsi, ils manifestent le désir<br />

d’être un parent chaleureux et compréhensible,<br />

quelle que soit la situation,<br />

les amenant à négliger le besoin<br />

d’autorité et <strong>de</strong> limites dont les enfants<br />

ont besoin pour se structurer. Toute<br />

discussion éducative fait l’objet <strong>de</strong><br />

longues explications, voire <strong>de</strong> négociations<br />

soutenues.<br />

Il existe, <strong>de</strong> façon constante, une perturbation<br />

<strong>de</strong> l’autorité parentale même<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s disputes ou <strong>de</strong>s crises<br />

<strong>de</strong> colère. Les parents n’arrivent pas à<br />

fixer <strong>de</strong>s limites. Pour certains parents,<br />

imposer <strong>de</strong>s limites relève du <strong>de</strong>spotisme<br />

ou <strong>de</strong> l’abus <strong>de</strong> pouvoir. Dire<br />

non à l’enfant, c’est le contrarier, ce<br />

qui culpabilise les parents.<br />

Une forte dépendance<br />

affective<br />

On la retrouve, <strong>de</strong> façon quasi permanente,<br />

dans toutes les situations <strong>de</strong><br />

parents martyrs. Dans les cas d’enfants<br />

tyrans garçons, très souvent la relation<br />

mère-fils baigne dans une « a m b i a n c e »<br />

incestueuse. La mère développe un<br />

grand investissement <strong>de</strong> l’enfant (souvent<br />

plus important qu’avec son<br />

conjoint) lui laissant peu d’autonomie,<br />

agissant et parlant à sa place, exigeant<br />

sa présence continuelle auprès d’elle,<br />

exauçant immédiatement ses désirs,<br />

prévenant les frustrations, effectuant à<br />

sa place les efforts nécessaires. Ces relations<br />

incestueuses prennent <strong>de</strong>s formes<br />

diverses, allant du climat érotique à <strong>de</strong>s<br />

relations sexuelles complètes entre<br />

l’adulte et l’enfant. L’érotisation <strong>de</strong>s<br />

relations peut se traduire par la<br />

recherche constante d’une certaine<br />

proximité physique. Mère et fils peuvent<br />

partager le même lit. Souvent, la<br />

famille met en avant le fait que le fils<br />

n’a jamais pu s’endormir dans son lit<br />

seul. L’agressivité envers le parent<br />

<strong>de</strong>vient effective lorsqu’une certaine<br />

ambivalence vient compliquer le lien<br />

incestueux. Soit elle est le fait <strong>de</strong> l’enfant<br />

qui « é t o u f f e », souffre <strong>de</strong> cette<br />

emprise parentale exclusive. Dans cette<br />

relation <strong>de</strong> dépendance affective, l’enfant<br />

ne parvient à ménager son autonomie<br />

voire son i<strong>de</strong>ntité qu’en ayant<br />

recours au passage à l’acte agressif. « L a<br />

violence dans les relations diurnes rétablit<br />

ainsi comme une distance <strong>de</strong> sécurité et<br />

un déni explicite au besoin vital mais<br />

apparemment inavouable qu’éprouve<br />

chacun <strong>de</strong>s membres <strong>de</strong> ces familles à<br />

vivre dans une étroite interdépendance »<br />

(Sibertin-Blanc, 1984). Soit elle vient<br />

<strong>de</strong>s parents qui prenant conscience <strong>de</strong><br />

cette relation <strong>de</strong> dépendance tentent<br />

d’y mettre fin. Ce lien incestueux peut<br />

Film 1 - Tu as choisi <strong>de</strong> naître - 53 mn<br />

Film 2 - Parler vrai - 55 mn<br />

Film 3 - N’ayez pas peur - 53 mn<br />

Complément - Maud Mannoni, évocations - 22 mn<br />

Trois films <strong>de</strong> Elisabeth Coronel et Arnaud <strong>de</strong> Mezamat<br />

Gallimard, 39,90 E<br />

Cette édition rassemble, dans une version renumérisée, trois films <strong>de</strong> référence<br />

consacrés à la vie et à l’œuvre <strong>de</strong> Françoise Dolto. Diffusés pour la première fois<br />

en 1995, ces films ont connu un succès en France et à l’étranger, à la télévision<br />

et dans les festivals. Ils furent récompensés en 1997 par le Grand Prix <strong>de</strong> l’Académie<br />

Charles Cros. Cette édition propose, en outre, les compléments suivants :<br />

un entretien inédit <strong>de</strong> 20 minutes avec Maud Mannoni, un châpitrage détaillé <strong>de</strong>s<br />

trois films, un sous-titrage en français pour les sourds ou les malentendants, un<br />

livret exclusif <strong>de</strong> quarante pages comprenant en particulier une bibliographie commentée<br />

<strong>de</strong> l’œuvre éditée <strong>de</strong> Françoise Dolto (mise à jour 2005). Ces films sont<br />

construits à partir <strong>de</strong> plusieurs éléments :<br />

- <strong>de</strong>s archives inédites dans lesquelles Françoise Dolto apporte <strong>de</strong>s témoignages<br />

d i r e c t s ,<br />

- <strong>de</strong>s interviews <strong>de</strong> psychanalystes et d’historiens qui ont connu et travaillé avec<br />

Françoise Dolto,<br />

- <strong>de</strong>s situations concrètes tournées en France et en Belgique (La Maison Verte,<br />

La pouponnière d’Antony),<br />

- une importante source <strong>de</strong> documents iconographiques.<br />

Dormir dans le lit <strong>de</strong>s parents augmente le risque<br />

<strong>de</strong> mort subite du nourrisson avant 3 mois<br />

Les bébés qui dorment dans le lit <strong>de</strong> leurs parents, même si ceux-ci sont nonfumeurs,<br />

ont un risque accru <strong>de</strong> mort subite avant 11 semaines <strong>de</strong> vie, selon<br />

une étu<strong>de</strong> cas-contrôles écossaise*.<br />

Des étu<strong>de</strong>s antérieures n'ont pas montré d'association entre la mort subite<br />

du nourrisson et le partage du lit si les parents étaient non-fumeurs et n'avaient<br />

consommé ni alcool ni médicament. Le partage du lit est actuellement promu<br />

afin <strong>de</strong> favoriser l'allaitement maternel. Mais l'augmentation <strong>de</strong> cette pratique<br />

aux Etats-Unis a vu, en parallèle, une augmentation <strong>de</strong> la prévalence du partage<br />

<strong>de</strong> lit parmi les morts subites du nourrisson.<br />

David Tappin <strong>de</strong> l'Université <strong>de</strong> Glasgow et ses collègues ont comparé 123<br />

nourrissons décédés <strong>de</strong> mort subite entre janvier 1996 et mai 2000 et 263<br />

contrôles, soit environ 2 pour chaque cas, les contrôles étant constitués par<br />

les enfants nés immédiatement avant et immédiatement après un cas dans<br />

la même maternité. Le partage d'une couche avec les parents était associé à<br />

un risque accru <strong>de</strong> mort subite du nourrisson, multiplié par 2,89. Le risque<br />

le plus élevé était associé au fait <strong>de</strong> dormir sur un canapé avec les parents,<br />

quel que soit l'âge <strong>de</strong> l'enfant, le risque <strong>de</strong> mort subite étant alors multiplié<br />

par 66,9. Sur 46 nourrissons décédés qui partageaient leur couche lors <strong>de</strong><br />

leur <strong>de</strong>rnier sommeil, 87% étaient dans le lit <strong>de</strong>s parents. Avant 11 semaines<br />

<strong>de</strong> vie, cette situation était associée à un risque <strong>de</strong> mort subite multiplié par<br />

10,20, tandis qu'après 11 semaines le risque n'était augmenté que <strong>de</strong> 7%.<br />

Chez les enfants <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 11 semaines, l'association forte avec le risque<br />

<strong>de</strong> mort subite était observée quelle que soit la durée du partage du lit, la<br />

proximité <strong>de</strong>s parents, et la localisation dans le lit. Le fait <strong>de</strong> dormir entre les<br />

<strong>de</strong>ux parents était associé au plus grand risque (OR = 28,6). Toujours chez<br />

les plus jeunes, le risque <strong>de</strong> mort subite associé au partage du lit était présent<br />

même si la mère était non fumeuse, le risque étant alors multiplié par 8,01.<br />

Par ailleurs, le fait <strong>de</strong> dormir dans une chambre séparée <strong>de</strong> celle <strong>de</strong>s parents<br />

n'était pas associé à un risque accru <strong>de</strong> mort subite, sauf en cas <strong>de</strong> parents<br />

fumeurs, le risque étant alors multiplié par 12,2. En conclusion, les auteurs<br />

écrivent que « nous soutenons l'avis du ministère <strong>de</strong> la Santé britannique selon<br />

lequel la place la plus sûre pour dormir pour un bébé est dans un lit <strong>de</strong> bébé<br />

dans la chambre <strong>de</strong> ses parents pendant les 6 premiers mois ». W<br />

P.C.<br />

*The <strong>Journal</strong> of Pediatrics, Vol 147 No 1, pp. 32-37<br />

se rompre également indirectement du<br />

fait d’une séparation physique parentenfant<br />

(lors d’une séparation parentale<br />

par exemple). L’enfant est tenté alors<br />

<strong>de</strong> réagir agressivement pour essayer<br />

<strong>de</strong> maintenir sa place privilégiée.<br />

Un couple désinvesti<br />

Très souvent, ces parents présentent en<br />

général une apparence <strong>de</strong> couple uni,<br />

maintenant une alliance <strong>de</strong> faça<strong>de</strong>. Au<br />

fil <strong>de</strong>s consultations, on s’aperçoit que<br />

leur relation est creuse. On se rend<br />

compte qu’un fils essaye d’occuper la<br />

place symbolique du conjoint, surtout<br />

lorsque ce <strong>de</strong>rnier est disqualifié par<br />

l’épouse. Il existe, très souvent, une<br />

alliance forte avec un <strong>de</strong>s parents au<br />

détriment <strong>de</strong> la relation conjugale. Le<br />

couple est désinvesti au profit <strong>de</strong> l’enfant.<br />

Les pères sont symboliquement<br />

ou physiquement absents. Ils sont parfois<br />

dévalorisés par l’entourage, physiquement<br />

affaiblis, décédés ou ont abandonné<br />

l’enfant rapi<strong>de</strong>ment après la<br />

naissance. « Le parent du même sexe que<br />

l’enfant battant (le père en général) n’assure<br />

pas son rôle d’objet désirant pour la mère.<br />

Même s’il est présent physiquement, il est en<br />

réalité absent car dévalorisé, disqualifié par<br />

la mère » (Dugas, 1985). La complicité<br />

passive avec l’enfant est également possible,<br />

le père se positionnant en spectateur<br />

<strong>de</strong>s troubles du comportement<br />

sans parvenir à mettre en place <strong>de</strong>s<br />

limites éducatives cohérentes (Maqueda,1988).<br />

Dans les situations <strong>de</strong> mésentente<br />

ou séparation parentale, il peut<br />

parfois exister un conflit <strong>de</strong> loyauté.<br />

L’enfant, tiraillé entre l’un et l’autre <strong>de</strong><br />

ses parents, peut se rallier à celui qu’il<br />

juge injustement agressé. Le risque est,<br />

dans ce cas, l’installation d’une relation<br />

d’exclusivité entre l’enfant et le parent<br />

avec lequel il a choisi <strong>de</strong> s’allier. On<br />

peut observer <strong>de</strong>s situations similaires<br />

dans certaines familles monoparentales,<br />

lorsque le lien parent-enfant n’est pas<br />

contre-balancé par les investissements<br />

affectifs, intellectuels ou professionnels<br />

du père ou <strong>de</strong> la mère. Une telle relation<br />

fusionnelle peut favoriser la survenue<br />

<strong>de</strong> comportements tyranniques.<br />

Dans d’autres cas, « l’enfant par i<strong>de</strong>ntification<br />

au parent insatisfait <strong>de</strong>vient agressif<br />

et opposant comme s’il reprenait à son<br />

compte les reproches que le parent victime<br />

formulent clairement ou non » ( P u rper-Ouakil,<br />

2004).<br />

Conclusion<br />

Même si elles présentent <strong>de</strong>s caractéristiques<br />

communes sur le plan psychopathologique,<br />

les situations <strong>de</strong><br />

maltraitance parentale sont très hétérogènes<br />

et il n’est pas toujours facile<br />

<strong>de</strong> les repérer car peu <strong>de</strong> familles osent<br />

consulter. Quand elles le font, il n’est<br />

pas rare que les parents minimisent la<br />

violence à leur égard. Il paraît important<br />

que les professionnels <strong>de</strong> santé mentale<br />

(mais pas seulement) soient sensibilisés<br />

à ce phénomène afin d’orienter au<br />

mieux la prise en charge. Outre l’abord<br />

psychothérapique individuel du parent<br />

victime, les psychothérapies familiales<br />

qu’elles soient analytiques ou systémiques<br />

constituent l’indication <strong>de</strong> choix.<br />

En pratique, le traitement <strong>de</strong> ces situations<br />

est difficile car la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

changement <strong>de</strong>s familles est ambivalente<br />

et la résistance aux soins importante.<br />

Les interruptions thérapeutiques<br />

ne sont pas rares ainsi que le nomadisme<br />

médical. Toute remise en question<br />

<strong>de</strong> la dynamique familiale, <strong>de</strong>s pratiques<br />

éducatives et du climat affectif<br />

est évitée. Des entretiens individuels<br />

avec les parents et les enfants peuvent<br />

être d’abord proposés dans l’idée <strong>de</strong><br />

préparer à <strong>de</strong>s entretiens familiaux ou<br />

un projet thérapeutique et éducatif<br />

a d a p t é . W<br />

E. Delaunay*<br />

* Département médico-psychologique du 14ème<br />

arrondissement, CH Sainte-Anne , 1rue Cabanis,<br />

75014 Paris.<br />

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BARCAI A., ROSENTHAL MK., Fears and<br />

tyranny observations on the tyrannical child,<br />

Arch Gen Psy. 1974, 30, 392-395.<br />

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<strong>de</strong> parents par leur enfant, Mém. Ces <strong>Psychiatrie</strong>,<br />

Paris 7, Lariboisière – Saint-Louis, 1978.<br />

LIVRES<br />

Portrait <strong>de</strong> groupe avec<br />

a n a l y s t e<br />

Des enfants polyhandicapés en<br />

institution<br />

Michèle Faivre-Jussiaux<br />

Erès, 15 E<br />

L’ouverture d’un service pour enfants<br />

polyhandicapés au sein d’un IME,<br />

dans une population où psychose,<br />

autisme et débilité, considérés comme<br />

handicaps majeurs, affectent le psychisme<br />

tout en épargnant le corps,<br />

pose <strong>de</strong> multiples questions.<br />

Auparavant, les enfants polyhandicapés<br />

étaient regroupés dans quelques<br />

centres peu nombreux et souvent<br />

éloignés du domicile parental.<br />

L’admission <strong>de</strong> cette population, qui<br />

semble en voie <strong>de</strong> développement,<br />

dans divers services médico-éducatifs<br />

a eu comme principal avantage<br />

<strong>de</strong> rapprocher géographiquement<br />

certains enfants <strong>de</strong> leur famille. Quant<br />

à la discrimination qu’elle aurait pu<br />

contribuer à enrayer, elle n’est que<br />

reconduite dans les nouvelles structures<br />

d’accueil où les unités pour enfants<br />

polyhandicapés se retrouvent<br />

vite marginalisées. Les mêmes causes<br />

engendrent les mêmes effets, et cette<br />

invariante reproduction <strong>de</strong>s conditions<br />

<strong>de</strong> la ségrégation exigerait une<br />

vigilance <strong>de</strong> chaque instant pour être,<br />

sinon évitée, du moins réinterrogée.<br />

C’est à partir <strong>de</strong> telles interrogations<br />

que s’est construit cet essai.<br />

Danse avec l’inconscient<br />

Les coulisses <strong>de</strong> la<br />

psychothérapie<br />

Francesca Champignoux<br />

Calman-Lévy, 17 E<br />

Psychologue et psychothérapeute à<br />

Milan, Montpellier et Paris, Francesca<br />

Champignoux propose une prise en<br />

charge <strong>de</strong>s difficultés psychologiques<br />

dans un cadre qui, selon sa propre<br />

expression, « pourra apparaître comme<br />

excessivement souple, mobile et fluctuant<br />

».<br />

Et <strong>de</strong> fait, à côté <strong>de</strong> prises en charge<br />

plus ou moins « classiques », elle n’hésite<br />

pas à « sauter le pas ». Nous parlant<br />

d’une patiente dont elle a fait la<br />

connaissance chez <strong>de</strong>s amis communs,<br />

elle ne cache pas son émotion<br />

et son projet : « Qu’elle était belle ! (...).<br />

Comment l’intéresser ? (...) Comment<br />

la séduire ? (...). J’ai réussi à lui glisser<br />

ma carte <strong>de</strong> visite tout en l’invitant à<br />

venir découvrir mon atelier ». F. Champignoux<br />

nous apprend, en effet, qu’elle<br />

est aussi décoratrice et que le mélange<br />

<strong>de</strong>s genres ne la gêne nullement.<br />

Ainsi, à cette femme déprimée,<br />

perdue, en instance <strong>de</strong> divorce, elle<br />

ose dire : « Laisse-toi aimer par moi et<br />

tu verras ensuite ». S’ensuit une véritable<br />

lune <strong>de</strong> miel avec elle en Toscane,<br />

à l’issue <strong>de</strong> laquelle la patiente<br />

divorce. F. Champignoux lui fait rencontrer<br />

<strong>de</strong>s amis et amies à elle, dont<br />

<strong>de</strong>ux call-girls. La patiente <strong>de</strong>viendra<br />

finalement call-girl à son tour... Curieuse<br />

psycho(?) thérapie (?), tout <strong>de</strong><br />

même...<br />

M . G o u t a l<br />

5


6<br />

LIVRES<br />

PSYCHANALYSE<br />

Mais où est donc... ma<br />

mémoire ?<br />

Découvrir et maîtriser les<br />

procédures mnémotiques<br />

Alain Lieury<br />

Dunod, 18,50 €<br />

Ce livre offre un bilan <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />

en fonction d’évaluations expérimentales.<br />

Après une première partie<br />

historique, qui retrace les lointaines<br />

racines <strong>de</strong> certaines métho<strong>de</strong>s, une<br />

<strong>de</strong>uxième partie rappelle quelques<br />

mécanismes <strong>de</strong> base <strong>de</strong> la mémoire<br />

dont la connaissance est nécessaire<br />

pour comprendre l’efficacité ou, à l’inverse,<br />

les raisons <strong>de</strong> l’inefficacité <strong>de</strong><br />

certaines métho<strong>de</strong>s. La troisième partie<br />

présente une classification <strong>de</strong>s procédés<br />

mnémothechniques en « co<strong>de</strong>s,<br />

indices, plans » et leur évaluation par<br />

<strong>de</strong>s expériences. Proposée dans une<br />

première édition, cette classification<br />

a été adoptée dans un classement<br />

pour les bibliothèques. La plupart <strong>de</strong>s<br />

métho<strong>de</strong>s classiques peuvent être<br />

vues, en effet, comme <strong>de</strong>s cas particuliers,<br />

astucieux, <strong>de</strong> mécanismes <strong>de</strong><br />

codage et <strong>de</strong> récupération. Enfin, une<br />

quatrième partie est consacrée aux<br />

apports et limites <strong>de</strong> ces métho<strong>de</strong>s,<br />

ainsi qu’aux nouvelles perspectives.<br />

La dissociation d’une<br />

personnalité<br />

Etu<strong>de</strong> biographique <strong>de</strong><br />

psychologie pathologique<br />

Le cas Miss Beauchamp<br />

1906<br />

Morton Prince<br />

Avec une introduction <strong>de</strong> Serge<br />

Nicolas<br />

L’Harmattan, 44 €<br />

Le mé<strong>de</strong>cin américain Morton Prince<br />

(1854-1929) doit sa réputation à ses<br />

étu<strong>de</strong>s sur les personnalités multiples.<br />

Miss Beauchamp (<strong>de</strong> son vrai nom<br />

Clara Ellen Fowler) reste la figure emblématique<br />

<strong>de</strong> son œuvre. Il réunira<br />

l’ensemble <strong>de</strong> ses observations sur<br />

cette patiente dans son ouvrage intitulé<br />

: « The Dissociation of a Personality.<br />

A biographical study in abnormal<br />

psychology » (1906). Il s’agit,<br />

certainement, <strong>de</strong> l’histoire la plus complète<br />

qui ait été donnée d’un cas présentant<br />

<strong>de</strong>s personnalités multiples.<br />

Cette histoire est passionnante comme<br />

un roman et William James ne s’y est<br />

pas trompé lorsqu’il écrit à l’auteur<br />

le 28 septembre 1906 : « J’en suis ravi.<br />

Non seulement le cas est probablement<br />

<strong>de</strong>stiné à <strong>de</strong>venir historique, mais encore<br />

votre exposé est un parfait exemple<br />

<strong>de</strong> lucidité et <strong>de</strong> maîtrise narrative. Je<br />

le considère comme un classique ». C’est<br />

au printemps 1898 que Miss Beauchamp<br />

consulte le Dr Prince pour ses<br />

troubles neurasthéniques (maux <strong>de</strong><br />

tête, insomnie, douleurs, fatigue, etc.).<br />

Mais, alors qu’elle est sous hypnose,<br />

une nouvelle personnalité apparaît,<br />

elle est enjouée, effrontée et impertinente.<br />

Elle se nomme Sally. Prince<br />

pense maintenant qu’il y a trois personnalités<br />

distinctes BI (la sainte) est<br />

la véritable Miss Beauchamp ; BII est<br />

la personnalité sous hypnose ; BIII (la<br />

diablesse puérile) est Sally. Une quatrième<br />

personnalité fera son apparition<br />

par la suite. C’est dans la perspective<br />

théorique <strong>de</strong> Pierre Janet que<br />

Prince va interpréter le cas Miss Beauchamp.<br />

Le texte est précédé d’une introduction<br />

où l’on trouve une biographie<br />

<strong>de</strong> l’auteur et une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

son œuvre, <strong>de</strong> nouveaux éléments<br />

biographiques concernant Miss Beauchamp,<br />

puis enfin une reproduction<br />

du rapport préliminaire <strong>de</strong> Prince sur<br />

Miss Beauchamp publié à l’occasion<br />

du IV e Congrès international <strong>de</strong> psychologie<br />

qui eut lieu à Paris en 1900.<br />

<br />

mala<strong>de</strong>s, ou bien nous ne pouvons les<br />

soigner longtemps, parce que la possibilité<br />

d’un succès thérapeutique est la condition<br />

<strong>de</strong> notre traitement. C’est pourquoi<br />

je n’arrive qu’exceptionnellement à entrevoir<br />

plus profondément la structure <strong>de</strong><br />

la paranoïa, soit que l’incertitu<strong>de</strong> d’un<br />

diagnostic, d’ailleurs pas toujours facile à<br />

poser, justifie une tentative d’intervention,<br />

soit que je cè<strong>de</strong> aux instances <strong>de</strong> la<br />

famille et que je prenne alors en traitement<br />

pour quelques temps un mala<strong>de</strong><br />

dont le diagnostic ne fait cependant pas<br />

<strong>de</strong> doute » (1). Le traitement psychanalytique<br />

<strong>de</strong>s psychoses est donc raccordé,<br />

pour une part, à la difficulté particulière<br />

<strong>de</strong> la prise en charge en cabinet,<br />

la prise en charge à l’asile étant alors la<br />

référence unique dans ce domaine. Le<br />

cadre asilaire permettrait, selon Freud,<br />

<strong>de</strong>s investigations psychanalytiques, qui<br />

seront développés d’ailleurs par Jung<br />

et Bleuler. Freud n’exclue, cependant<br />

pas, dans ce texte <strong>de</strong> 1911 un traitement<br />

en cabinet, notamment lorsque la<br />

famille insiste ou lorsque la pathologie<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> un éclaircissement entre<br />

névrose et psychose. Le moteur du<br />

traitement psychanalytique étant le<br />

transfert, implicitement l’existence d’un<br />

transfert possible dans la psychose est<br />

donc reconnue par Freud.<br />

Il peut être avancé que ce texte <strong>de</strong><br />

1911 concerne l’étu<strong>de</strong> d’un écrit psychotique,<br />

les Mémoires du Prési<strong>de</strong>nt<br />

Schreber, différente, par conséquent,<br />

d’une étu<strong>de</strong> à partir d’une rencontre<br />

avec un sujet. La question du transfert<br />

n’a certes pas la même portée. Néanmoins,<br />

Freud dégagera <strong>de</strong> son étu<strong>de</strong><br />

un élément essentiel qui concerne le<br />

transfert. Il raccor<strong>de</strong>, en effet, l’éclosion<br />

du délire <strong>de</strong> Schreber aux conditions <strong>de</strong><br />

transfert envers son thérapeute. Cela<br />

est un fait d’importance qui orientera la<br />

conduite <strong>de</strong>s cures en général. Lacan le<br />

reprend dans le séminaire III dans la<br />

séance du 31 mai 1956 : « Il arrive<br />

que nous prenions <strong>de</strong>s pré-psychotiques<br />

en analyse, et nous savons ce que cela<br />

donne –cela donne <strong>de</strong>s psychotiques. On<br />

ne se poserait pas la question <strong>de</strong>s contreindications<br />

<strong>de</strong> l’analyse si nous n’avions<br />

pas tous en mémoire tel cas <strong>de</strong> notre<br />

pratique, ou <strong>de</strong> la pratique <strong>de</strong> nos collègues,<br />

où une belle et bonne psychose –<br />

psychose hallucinatoire, je ne parle pas<br />

d’une schizophrénie précipitée – est déclenchée<br />

lors <strong>de</strong>s premières séances d’analyse<br />

un peu chau<strong>de</strong>s, à partir <strong>de</strong> quoi le<br />

bel analyste <strong>de</strong>vient rapi<strong>de</strong>ment un émetteur<br />

qui fait entendre toute la journée à<br />

l’analysé ce qu’il doit faire et ne pas faire.<br />

Ne touchons-nous pas là dans notre<br />

expérience même, et sans avoir à le chercher<br />

plus loin, à ce qui est au cœur <strong>de</strong>s<br />

motifs d’entrée dans la psychose ? » (2).<br />

L’effet du transfert dans la situation<br />

inaugurale <strong>de</strong> l’analyse peut faire<br />

déclencher une psychose, et parait un<br />

argument supplémentaire contre l’analyse<br />

<strong>de</strong>s psychoses. Pourtant, dans ce<br />

texte <strong>de</strong> Freud sur les mémoires <strong>de</strong><br />

Schreber, texte qui vaut l’éloge <strong>de</strong><br />

Lacan « ce que Freud a écrit <strong>de</strong> mieux »,<br />

apparaît un énoncé fondamental pour<br />

le traitement psychanalytique <strong>de</strong>s psychoses<br />

: « Ce que nous prenons pour<br />

une production morbi<strong>de</strong>, la formation<br />

du délire, est en réalité une tentative <strong>de</strong><br />

guérison, une reconstruction » (3).<br />

Une question reste en suspens : comment<br />

le génie freudien qui déchiffre<br />

un écrit psychotique <strong>de</strong> manière aussi<br />

limpi<strong>de</strong>, en faisant référence au transfert<br />

du sujet envers son thérapeute puis<br />

envers Dieu, dans la logique <strong>de</strong> la production<br />

<strong>de</strong>s manifestations morbi<strong>de</strong>s,<br />

aboutit dans ce qui s’est transmis à un<br />

impératif : « Il n’y a pas <strong>de</strong> transfert<br />

dans la psychose ou s’il y en a, il ne se<br />

prête pas au traitement analytique ».<br />

Il convient <strong>de</strong> reprendre la question<br />

au départ <strong>de</strong> la découverte freudienne.<br />

La découverte<br />

freudienne<br />

Le premier intérêt <strong>de</strong> Freud était l’hystérie,<br />

et Lacan résume cette découverte<br />

en 1975 : « Ce fut pendant qu’il écou-<br />

tait les hystériques qu’il lut qu’il y avait<br />

un inconscient » (4). Il y a passage <strong>de</strong><br />

l’écoute d’un discours à une lecture.<br />

Cette découverte <strong>de</strong> l’inconscient s’accompagne<br />

<strong>de</strong> celle du transfert. Lacan<br />

insiste, dans cette conférence, sur l’importance<br />

du contact avec la psychose<br />

dès le début <strong>de</strong> ses étu<strong>de</strong>s en psychiatrie<br />

: « Ça a été une sorte <strong>de</strong> glissa<strong>de</strong>,<br />

du fait qu’à la fin <strong>de</strong> mes étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />

je fus amené à voir <strong>de</strong>s fous et à en<br />

parler, et fus ainsi conduit à Freud qui en<br />

parla dans un style, qui à moi aussi, s’est<br />

imposé <strong>de</strong> fait <strong>de</strong> mon contact avec la<br />

maladie mentale ». Lacan fait également<br />

dans cette conférence un distinguo<br />

avec Freud qui, contrairement à lui, a<br />

pour principal intérêt l’hystérie et non<br />

la psychose. Il conviendrait dans l’ensemble.<br />

Un <strong>de</strong>s premiers textes <strong>de</strong><br />

Freud : Nouvelles remarques sur les psychonévroses<br />

<strong>de</strong> défense publié en 1896<br />

est consacré dans ce cadre, certes à<br />

l’hystérie et l’obsession mais aussi à<br />

l’analyse d’un cas <strong>de</strong> paranoïa chronique.<br />

Freud fait part du traitement<br />

psychanalytique d’une patiente, Madame<br />

P. Ce qui est intéressant <strong>de</strong> noter<br />

est la conception continuiste <strong>de</strong> Freud<br />

entre névrose et psychose à l’époque,<br />

une théorie issue <strong>de</strong> sa pratique et donc<br />

d’une pratique <strong>de</strong> transfert : « (…) grâce<br />

à la bonté du Dr J.Breuer, il me fut possible<br />

<strong>de</strong> soumettre à une psychanalyse<br />

dans un but thérapeutique le cas d’une<br />

femme intelligente, âgée <strong>de</strong> trente-<strong>de</strong>ux<br />

ans, qu’on ne pourra refuser <strong>de</strong> caractériser<br />

comme paranoïa chronique » (5). Il<br />

écrit encore : « Depuis assez longtemps<br />

je nourris le soupçon que la paranoïa –<br />

ou les groupes <strong>de</strong> cas qui appartiennent<br />

à la paranoïa – est une psychose <strong>de</strong><br />

défense, c’est-à-dire que, comme l’hystérie<br />

et les obsessions, elle provient du<br />

refoulement <strong>de</strong> souvenirs pénibles, et que<br />

ses symptômes sont déterminés dans leur<br />

forme par le contenu du refoulé » (6).<br />

Qu’indique Freud dans cette observation<br />

<strong>de</strong> Mme P ? La circonstance <strong>de</strong><br />

déclenchement est la maternité, le<br />

trouble est d’abord <strong>de</strong> l’ordre d’un<br />

changement relationnel, avec les frères<br />

et sœurs <strong>de</strong> son mari, les voisins qui<br />

se comportent avec elle autrement<br />

qu’avant. Ce changement a un caractère<br />

<strong>de</strong> rabaissement et aboutit au sentiment<br />

qu’on avait quelque chose<br />

contre elle. Ce sentiment ne laisse<br />

aucun doute mais reste énigmatique :<br />

« (…) on avait quelque chose contre elle,<br />

bien qu’elle ne pût avoir l’idée <strong>de</strong> ce que<br />

ça pouvait être. Mais il n’y avait aucun<br />

doute, tout le mon<strong>de</strong> – parents et amis–<br />

lui refusait toute considération et faisait<br />

tout pour la blesser. Elle se cassait la tête<br />

pour savoir d’où cela provenait ; mais<br />

elle ne le savait pas » (7). Le point <strong>de</strong><br />

départ <strong>de</strong> la psychose <strong>de</strong> cette patiente,<br />

tel qu’il est décrit par Freud, correspond,<br />

à ce que Lacan signale, <strong>de</strong><br />

façon lumineuse, dans le séminaire III<br />

« (…) le délire commence à partir du<br />

moment où l’initiative vient d’un Autre,<br />

avec un A majuscule, où l’initiative est<br />

fondée sur une activité subjective. L’Autre<br />

veut cela, et il veut surtout qu’on le sache,<br />

il veut le signifier » (8).<br />

Pour revenir sur la question du transfert,<br />

ce qui est mis en évi<strong>de</strong>nce par<br />

Freud dès 1896 est qu’il y a, dans ce<br />

cas <strong>de</strong> psychose, un transfert <strong>de</strong> signification,<br />

un transfert d’attribution du<br />

désir à l’autre et que cet autre veut le<br />

signifier à un tiers.<br />

Ce qui est tout à fait mis en évi<strong>de</strong>nce<br />

dans le processus par Freud, dans sa<br />

dynamique subjective est qu’après cette<br />

initiative malveillante et énigmatique<br />

<strong>de</strong>s autres à son égard, vient comme<br />

manifestation symptomatique, le scopique,<br />

l’événement <strong>de</strong> corps et la voix.<br />

La patiente se plaint d’être observée,<br />

notamment le soir lorsqu’elle se déshabille,<br />

ce qui l’entraîne à se déshabiller en<br />

se glissant au lit dans l’obscurité en se<br />

dévêtant seulement sous les couvertures.<br />

Le refus <strong>de</strong> relation avec les<br />

autres, le refus <strong>de</strong> nourriture ont nécessité,<br />

pendant l’été 1895, <strong>de</strong>s soins dans<br />

un établissement d’hydrothérapie. Il est<br />

intéressant <strong>de</strong> noter que Freud indique<br />

que <strong>de</strong> nouveaux symptômes apparurent<br />

tandis que les anciens se renforçaient.<br />

Le traitement qui a pour objet<br />

l’ensemble <strong>de</strong> la peau, l’ensemble <strong>de</strong><br />

l’enveloppe corporelle, a pour effet <strong>de</strong><br />

développer <strong>de</strong> nouveaux symptômes<br />

qui concernent le corps.<br />

Nous avons souligné dans notre thèse<br />

<strong>de</strong> Doctorat <strong>de</strong> Psychanalyse (9), la fonction<br />

particulière qu’a la peau dans la<br />

logique psychotique, à savoir une fonction<br />

<strong>de</strong> suppléance par rapport à celle<br />

du phallus. La peau est donc sollicitée<br />

soit vers un plus <strong>de</strong> jouir soit vers un<br />

moins <strong>de</strong> jouir et cela a <strong>de</strong>s effets, <strong>de</strong>s<br />

symptômes. Ces symptômes concernent<br />

la sexualité : « Elle ressentait ses<br />

organes génitaux « comme on ressent<br />

une main lour<strong>de</strong> ». Alors elle commença<br />

à voir <strong>de</strong>s images qui la remplissaient<br />

d’horreur, <strong>de</strong>s hallucinations <strong>de</strong> nudités<br />

féminines, en particulier un bas-ventre<br />

féminin nu avec sa pilosité » (10). Ces<br />

symptômes survenaient, généralement,<br />

lorsqu’elle était en compagnie d’une<br />

femme « et il s’y ajoutait l’interprétation<br />

qu’elle voyait alors cette femme dans<br />

une nudité inconvenante, mais qu’au<br />

même moment la femme avait d’elle la<br />

même image » (11). Puis vinrent <strong>de</strong>s voix<br />

lorsqu’elle était dans la rue : « Voilà<br />

Mme P. elle s’en va. Où va-t-elle ? ». La<br />

question <strong>de</strong> son désir se pose, est attribuée<br />

à l’autre et lui revient sans lien<br />

avec le symbolique, c’est-à-dire sans<br />

lien avec la fonction habituelle du<br />

manque.<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Le transfert dans la psychose ?<br />

Une question freudienne<br />

12 octobre 2005<br />

9 novembre 2005<br />

7 décembre 2005<br />

C’est après ces événements que Freud<br />

la soigna pendant l’hiver 1895. Il appliqua<br />

la métho<strong>de</strong> psychanalytique : « Je<br />

trouvai l’étiologie lorsque je mis en application,<br />

tout comme dans une hystérie,<br />

la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Breuer, tout d’abord pour<br />

étudier et supprimer les hallucinations.<br />

Je partais là <strong>de</strong> la présupposition qu’il<br />

<strong>de</strong>vait y avoir dans cette paranoïa,<br />

comme dans les <strong>de</strong>ux autres névroses<br />

<strong>de</strong> défense que je connais, <strong>de</strong>s pensées<br />

inconscientes et <strong>de</strong>s souvenirs refoulés<br />

qui, <strong>de</strong> la même façon, peuvent être amenés<br />

à la conscience lorsqu’ est surmontée<br />

une certaine résistance ; la patiente confirma<br />

aussitôt cette attente en se comportant<br />

dans l’analyse tout à fait à l’exemple<br />

d’une hystérique et, son attention étant<br />

dirigée par la pression <strong>de</strong> ma main (cf. les<br />

Etu<strong>de</strong>s sur l’hystérie), en amenant <strong>de</strong>s<br />

pensées qu’elle ne se souvenait pas avoir<br />

eues, qu’elle ne comprenait pas tout<br />

d’abord et qui contredisaient son attente.<br />

La présence <strong>de</strong> représentations inconscientes<br />

importantes était ainsi démontrée<br />

pour un cas <strong>de</strong> paranoïa aussi, et je pouvais<br />

espérer ramener également la compulsion<br />

<strong>de</strong> la paranoïa au refoulement<br />

» (12). Freud utilise la métho<strong>de</strong><br />

associative et <strong>de</strong> remémoration <strong>de</strong>s<br />

souvenirs. Le point <strong>de</strong> départ du processus<br />

associatif sera l’image du basventre<br />

féminin et surtout la sensation<br />

organique dans le bas-ventre, beaucoup<br />

plus constante. C’est donc à partir<br />

du corps et dans sa jointure au scopique<br />

que le travail <strong>de</strong> parole, le travail<br />

signifiant va se mettre en place. Ce travail<br />

aboutit au sentiment <strong>de</strong> honte, qui<br />

fait aller Freud vers le constat suivant :<br />

« Etant obligé <strong>de</strong> considérer cette honte<br />

comme quelque chose <strong>de</strong> compulsionnel,<br />

j’en conclue, d’après le mécanisme <strong>de</strong><br />

la défense, qu’en ce point un événement<br />

11 janvier 2006<br />

Florence Guignard Bianca Lechevalier<br />

Jean-José Baranès<br />

Béatrice Ithier<br />

8 mars 2006<br />

Françoise Fe<strong>de</strong>r<br />

10 mai 2006<br />

Marthe Cartier-Bresson<br />

14 juin 2006<br />

Gérard Lucas<br />

LIEU DES CONFÉRENCES : UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES<br />

Un mercredi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />

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mercredi : 90 € (60 € pour les étudiants - joindre copie carte), à l’unité : 15 € (10 € pour les<br />

étudiants sur présentation <strong>de</strong> la carte). AUCUNE INSCRIPTION N’EST PRISE PAR<br />

L’UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES.


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

avait dû être refoulé, lors duquel elle<br />

n’avait pas eu honte. Je l’invitai alors à<br />

laisser émerger les souvenirs qui appartenaient<br />

au thème <strong>de</strong> la honte » (13).<br />

La chaîne associative aboutit sur une<br />

scène à l’âge <strong>de</strong> six ans, dans la<br />

chambre <strong>de</strong>s enfants, où la patiente se<br />

dévêtait pour aller se coucher, sans<br />

avoir honte <strong>de</strong>vant son frère. Freud<br />

interprète le symptôme psychotique<br />

<strong>de</strong> surveillance : « Je compris alors ce<br />

qu’avait signifié l’idée brusquement survenue<br />

qu’on l’observait lorsqu’elle allait<br />

se coucher. C’était un fragment intact<br />

du vieux souvenir passible <strong>de</strong> reproche,<br />

et elle rattrapait maintenant en honte ce<br />

qu’elle avait omis dans son enfance ».<br />

Ce souvenir viendra en écho avec le<br />

fait que le début <strong>de</strong> sa maladie coïncidait<br />

avec une querelle entre son mari et<br />

son frère, à la suite <strong>de</strong> laquelle ce <strong>de</strong>rnier<br />

ne lui rendit plus visite, ainsi<br />

qu’avec un souvenir concernant sa<br />

belle-sœur, l’épouse <strong>de</strong> son frère, qui lui<br />

dit un jour : « Lorsque quelque chose<br />

<strong>de</strong> semblable m’arrive, je le traite par<br />

<strong>de</strong>ssus l’épaule ! », et que cela sera le<br />

point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> la conviction qu’elle<br />

est universellement méprisée et<br />

intentionnellement blessée. Ce souvenir<br />

d’une phrase banale conduit à l’interprétation<br />

du ton <strong>de</strong> la voix <strong>de</strong> la<br />

belle-sœur, considéré comme faisant<br />

signe du mépris et <strong>de</strong> l’intention <strong>de</strong><br />

blesser. Cette interprétation se produit<br />

après-coup et est pour Freud un détail<br />

caractéristique <strong>de</strong> la paranoïa. Ainsi, la<br />

phrase <strong>de</strong> Lacan : « (…) le délire commence<br />

à partir du moment où l’initiative<br />

vient d’un Autre, avec un A majuscule,<br />

où l’initiative est fondée sur une activité<br />

subjective. L’Autre veut cela, et il veut<br />

surtout qu’on le sache, il veut le signifier<br />

» (14) s’éclaire du réel freudien : il ne<br />

s’agit pas uniquement <strong>de</strong> l’Autre du<br />

symbolique comme le martèle Lacan à<br />

l’époque, mais du réel du corps, du<br />

réel <strong>de</strong> la voix, le ton <strong>de</strong> la voix <strong>de</strong> la<br />

belle-sœur, l’autre femme qui a l’objet<br />

privilégié, problématique qui s’inscrit<br />

dans une dimension du registre du<br />

20 octobre 2005<br />

Thierry Bokanowski<br />

17 novembre 2005<br />

Marc Babonneau<br />

15 décembre 2005<br />

Litza Guttieres-Green<br />

complexe <strong>de</strong> castration. Là, s’ancre le<br />

point <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>, le seul qui permette<br />

<strong>de</strong> signer la forclusion et la psychose,<br />

l’initiative vient <strong>de</strong> l’autre.<br />

La pratique <strong>de</strong> Freud amènera la<br />

patiente à <strong>de</strong>ux souvenirs par association<br />

qui concerne le frère. Freud poursuit<br />

: « C’est <strong>de</strong> façon surprenante que se<br />

résolut aussi sa manière bizarre <strong>de</strong> fixer<br />

à son frère <strong>de</strong>s ren<strong>de</strong>z-vous au cours <strong>de</strong>squels<br />

elle n’avait ensuite rien à dire. Son<br />

explication était la suivante : elle pensait<br />

qu’il <strong>de</strong>vait comprendre sa peine simplement<br />

à recevoir son regard, car il<br />

connaissait la cause <strong>de</strong> cette peine.<br />

Comme effectivement ce frère était<br />

l’unique personne qui pouvait savoir<br />

quelque chose <strong>de</strong> l’étiologie <strong>de</strong> sa maladie,<br />

il s’ensuit qu’elle avait agi pour un<br />

motif qu’elle ne comprenait certes pas<br />

elle-même consciemment, mais qui se<br />

montrait parfaitement justifié dès qu’on<br />

lui mettait par en-<strong>de</strong>ssous un sens venant<br />

<strong>de</strong> l’inconscient » (15). Le traitement proposé<br />

par Freud permet donc dans ce<br />

cas particulier <strong>de</strong> psychose <strong>de</strong> produire<br />

un sens qui vient <strong>de</strong> la patiente et lui<br />

permet <strong>de</strong> se séparer, en partie, <strong>de</strong> ce<br />

qui jouit d’elle à son insu et qui est<br />

attribué à l’Autre. Cela est possible par<br />

la pratique <strong>de</strong> transfert et la supposition<br />

<strong>de</strong> savoir attribuée à Freud. Cependant<br />

ce transfert n’est pas uniquement un<br />

transfert adressé au savoir médical, il<br />

<strong>de</strong>vient analytique à partir du moment<br />

où Freud y glisse son désir. Cela vient<br />

avec la phrase : « Pendant ce travail <strong>de</strong><br />

reproduction, la sensation organique dans<br />

le ventre entra dans le dialogue, ce qu’on<br />

observe régulièrement dans l’analyse <strong>de</strong>s<br />

restes mnésiques hystériques » (16). Freud<br />

insiste, tout au long <strong>de</strong> la narration du<br />

cas, sur la question du reproche. Un<br />

reproche qui fait retour dans le symptôme<br />

qui concerne le scopique, la<br />

honte, et le corps. Dans le commentaire,<br />

Freud signale que c’est après avoir<br />

parcouru la série <strong>de</strong>s scènes, les sensations<br />

et les images hallucinatoires<br />

étaient disparues pour ne plus revenir.<br />

Ce reproche concerne aussi l’analyse<br />

19 janvier 2006<br />

Jacqueline Schaeffer<br />

16 mars 2006<br />

Chantal Lechartier-Atlan<br />

18 mai 2006<br />

Diane L’Heureux-Le Beuf<br />

22 juin 2006<br />

Liliane Abensour<br />

et Nadine Amar<br />

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Un jeudi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />

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DESCARTES.<br />

du phénomène élémentaire, la voix,<br />

« les reproches refoulés font retour sous<br />

forme <strong>de</strong> pensées mises à voix<br />

haute » (17). Freud aboutira à propos <strong>de</strong><br />

Mme P. à la question du traumatisme<br />

sexuel avec le frère.<br />

Il conviendrait <strong>de</strong> développer plus<br />

avant ce cas <strong>de</strong> traitement psychanalytique<br />

d’une psychose, notamment<br />

dans la référence que fait Freud au<br />

récit <strong>de</strong> Otto Ludwig, Die Heiterethei.<br />

Dans ce temps <strong>de</strong> découverte freudienne,<br />

la théorie continuiste <strong>de</strong> traitement<br />

entre névrose et psychose nous<br />

paraît porteuse <strong>de</strong> savoir nouveau si<br />

l’on fait référence aux <strong>de</strong>rniers enseignements<br />

<strong>de</strong> Freud et <strong>de</strong> Lacan. Nous<br />

reviendrons sur ce point en conclusion.<br />

Paradoxes freudiens<br />

Après ce temps où un traitement possible<br />

<strong>de</strong> la psychose par la psychanalyse<br />

est promu vient celui, repérable en<br />

1907 où les psychoses sont <strong>de</strong>s états<br />

narcissiques, dans lesquels la libido d'objet<br />

se retire dans le moi. Cela entraîne<br />

une conséquence majeure : l'abandon<br />

<strong>de</strong>s représentations d'objet pour le sujet.<br />

Ainsi, l'analyste ne pourrait être investi<br />

libidinalement par le sujet psychotique.<br />

Ce problème du transfert dans la psychose,<br />

Freud y revient en 1916 dans<br />

son Introduction à la psychanalyse. Là,<br />

il est catégorique, et c’est cela qui s’est<br />

transmis finalement : « L’observation<br />

montre que les mala<strong>de</strong>s atteints <strong>de</strong> névrose<br />

narcissique (la psychose <strong>de</strong> l’époque),<br />

ne possè<strong>de</strong>nt pas la faculté du transfert,<br />

ou n’en présentent que <strong>de</strong>s restes insignifiants.<br />

Ils repoussent le mé<strong>de</strong>cin, non<br />

avec hostilité mais avec indifférence, c’est<br />

pourquoi ils ne sont pas accessibles à son<br />

influence, tout ce qu’il dit les laissent<br />

froids, ne les impressionnent en aucune<br />

façon. Aussi ce mécanisme <strong>de</strong> la guérison,<br />

si efficace chez les autres,(donc les<br />

névrosés) et qui consiste à ranimer le<br />

conflit pathogène et à surmonter la résistance<br />

opposée par le refoulement ne se<br />

laissera pas établie chez eux » (18).<br />

Il y aurait donc impossibilité <strong>de</strong> ranimer<br />

le conflit pathogène, cette division<br />

du sujet qui découvre qu’il ne sait pas<br />

ce qu’il dit, par la question <strong>de</strong> la remémoration<br />

du traumatisme dans la théorie<br />

Freudienne <strong>de</strong> l’époque. Surmonter<br />

la résistance opposée au refoulement,<br />

cela ne peut s’établir chez les psychotiques.<br />

« Ils restent ce qu’ils sont, ils ont<br />

déjà fait <strong>de</strong> leur propre initiative <strong>de</strong>s tentatives<br />

<strong>de</strong> redressement <strong>de</strong> la situation<br />

mais ces tentatives n’ont abouti qu’à <strong>de</strong>s<br />

effets pathologiques, nous ne pouvons<br />

rien y changer » (19). L’approche thérapeutique<br />

semble se confronter à <strong>de</strong>s<br />

obstacles majeurs.<br />

Mais ce qui est intéressant, c’est que<br />

dans le même texte, Freud écrit :<br />

« Dans les névroses narcissiques (les psychoses)<br />

la résistance est insurmontable,<br />

nous pouvons tout au plus jeter un coup<br />

d’œil <strong>de</strong> curiosité par <strong>de</strong>ssus le mur, pour<br />

épier ce qui se passe <strong>de</strong> l’autre côté » (20).<br />

Ça a un effet justement <strong>de</strong> transfert<br />

<strong>de</strong> savoir, transfert quasiment sémiologique<br />

aussi, la curiosité <strong>de</strong> passer par<br />

<strong>de</strong>ssus le mur pour épier ce qui se<br />

passe, ce qui peut se transmettre <strong>de</strong> la<br />

psychose ou <strong>de</strong> la paranoïa, il poursuit<br />

: « Nos métho<strong>de</strong>s usuelles doivent<br />

donc être remplacées par d’autres, et<br />

nous ignorons encore si nous réussirons<br />

à opérer cette substitution » (21).<br />

Possibilité peut être… Se profile toutefois<br />

un espoir pour une autre métho<strong>de</strong>.<br />

« Certes, même en ce qui concerne<br />

ces mala<strong>de</strong>s, les matériaux ne nous font<br />

pas défaut, ils manifestent leur état <strong>de</strong><br />

nombreuses manières. Bien que ce ne<br />

soit pas toujours sous la forme <strong>de</strong> réponse<br />

à nos questions, et nous en sommes<br />

momentanément réduits à interpréter<br />

leur manifestation en nous aidant <strong>de</strong>s<br />

notions que nous avons acquises grâce à<br />

l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s symptômes <strong>de</strong>s névroses <strong>de</strong><br />

transfert. L’analogie est assez gran<strong>de</strong><br />

pour nous garantir au début un résultat<br />

positif sans que nous puissions dire<br />

toute fois si cette technique est susceptible<br />

<strong>de</strong> nous conduire très loin » (22).<br />

Il y a quelque chose <strong>de</strong> contradictoire<br />

dans ce texte <strong>de</strong> 1916 où d’un côté<br />

cela se ferme complètement, « nous ne<br />

pourrons rien y changer » et <strong>de</strong> l’autre<br />

« on a appris <strong>de</strong>s choses à travers <strong>de</strong>s<br />

cures <strong>de</strong> névrosés et même si cela ne<br />

garantit pas au début un résultat positif,<br />

peut être que cela peut conduire, peut<br />

être pas très loin, mais il a y un esprit <strong>de</strong><br />

conduction possible vers un traitement ».<br />

Pour continuer, dans cette découverte<br />

Freudienne : qu’est-ce que l’opinion <strong>de</strong><br />

Freud par rapport au transfert dans la<br />

psychose ?, en 1923 donc cinq ans<br />

après, dans sa présentation par lui-même,<br />

Selbsdarstellung, il évoque cette fois-ci<br />

les succès possibles <strong>de</strong> la psychanalyse<br />

dans le champ <strong>de</strong> la psychose. « Ces<br />

mala<strong>de</strong>s psychiques, écrit-il en parlant<br />

<strong>de</strong>s psychotiques sont en général privés<br />

<strong>de</strong> l’aptitu<strong>de</strong> d’effectuer un transfert<br />

positif <strong>de</strong> sorte que l’instrument principal<br />

<strong>de</strong> la technique analytique leur est inapplicable.<br />

On voit toutefois se <strong>de</strong>ssiner<br />

maintes voies d’accès » (23). Plusieurs<br />

possibilités existent donc. Il poursuit :<br />

« Le transfert n’est souvent pas totalement<br />

absent, qu’on ne puisse faire un<br />

bout <strong>de</strong> chemin avec lui. Dans le cas <strong>de</strong><br />

troubles cycliques <strong>de</strong> l’humeur, d’altérations<br />

paranoïaques légères, <strong>de</strong> schizophrénies<br />

partielles, on est arrivé par l’analyse<br />

à quelques succès non douteux » (24).<br />

Nous ne sommes plus dans l’absence<br />

<strong>de</strong> transfert ou dans l’indifférence ou<br />

dans le transfert hostile, le transfert<br />

négatif, mais il y a une possibilité <strong>de</strong><br />

transfert positif avec l’idée <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s<br />

bout <strong>de</strong> chemin avec un sujet psychotique,<br />

certes avec un <strong>de</strong>gré, un bémol :<br />

c’est la légèreté, le partiel <strong>de</strong> la forme<br />

psychotique ou les troubles <strong>de</strong> l’humeur,<br />

mais les succès sont non douteux.<br />

Enfin, il évoque également un<br />

transfert <strong>de</strong> savoir, à partir <strong>de</strong> la psychose,<br />

qui n’est, sans doute, pas sans<br />

anticiper Lacan : « En outre ce fut au<br />

moins pour la science, un avantage que<br />

dans beaucoup <strong>de</strong> cas, le diagnostic puisse<br />

osciller un certain temps entre l’hypothèse<br />

d’une psychonévrose et celle<br />

d’une démence précoce ». Ce temps d’oscillation<br />

du mé<strong>de</strong>cin entre une hypothèse<br />

diagnostique d’une névrose et<br />

d’une schizophrénie est fructueux pour<br />

la science.<br />

« La tentative thérapeutique entreprise<br />

put ainsi apporter <strong>de</strong>s renseignements<br />

importants avant <strong>de</strong> <strong>de</strong>voir être interrompue.<br />

Mais le point le plus important<br />

est que dans les psychoses, beaucoup <strong>de</strong><br />

choses sont amenées à la surface, ainsi<br />

visibles par tout un chacun, qui dans les<br />

névroses doivent être hissées <strong>de</strong>s profon<strong>de</strong>urs<br />

au prix d’un pénible travail.<br />

C’est pourquoi pour beaucoup d’assertion<br />

<strong>de</strong> l’analyse, c’est la clinique psychiatrique<br />

qui offre les meilleurs objets<br />

<strong>de</strong> démonstration » (25). Freud fait l’éloge<br />

<strong>de</strong> la psychose pour approfondir le<br />

savoir psychanalytique, à travers la rencontre<br />

avec <strong>de</strong>s sujets psychotiques, ce<br />

que Lacan développera avec la pratique<br />

<strong>de</strong>s présentations <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s. Il<br />

cite à nouveau, en exemple, le cas <strong>de</strong><br />

Mme P. dans une théorie continuiste<br />

psychose/névrose : « Très tôt (en 1896),<br />

j’ai pu constater dans un cas <strong>de</strong> démence<br />

paranoï<strong>de</strong> les mêmes facteurs étiologiques<br />

et la présence <strong>de</strong>s mêmes complexes<br />

affectifs que dans les névroses » (26).<br />

Un refoulement <strong>de</strong>s<br />

impulsions<br />

Dans une interview retrouvée <strong>de</strong> Sigmund<br />

Freud dans la Neue Freie Press<br />

en date du 14 août 1933 et publiée<br />

dans la Revue Internationale <strong>de</strong> Psychanalyse,<br />

Freud parle <strong>de</strong>s succès <strong>de</strong><br />

la psychanalyse. A la première question<br />

<strong>de</strong> l’interview : « En quoi consistent<br />

les conquêtes et les possibilités immédiates<br />

<strong>de</strong> la psychanalyse ? », Freud<br />

répond : « Dans la thérapie <strong>de</strong>s névroses<br />

et <strong>de</strong> certaines psychoses, dans certains<br />

cas <strong>de</strong> modification fondamentale du<br />

caractère, et même dans certaines formes<br />

<strong>de</strong> clivages <strong>de</strong> conscience (schizophrénie),<br />

<br />

PSYCHANALYSE 7<br />

LIVRES ET REVUES<br />

L’informe et l’archaïque<br />

Recherches en Psychanalyse<br />

Les Cahiers <strong>de</strong> l’Ecole Doctorale <strong>de</strong><br />

Recherches en Psychanalyse <strong>de</strong><br />

l’Université Paris 7 - Denis Di<strong>de</strong>rot<br />

2005 n°3<br />

L’Esprit du Temps 21 €<br />

Les <strong>de</strong>ux notions <strong>de</strong> l’Informe et <strong>de</strong><br />

l’Archaïque sont travaillées en fonction<br />

<strong>de</strong> leur proximité et <strong>de</strong> leurs différences<br />

par rapport à la question <strong>de</strong><br />

l’origine à laquelle elles renvoient.<br />

Dans les mythes hésiodiques, l’informe<br />

apparaît comme ce vers quoi<br />

tout aspire comme à sa finalité ultime,<br />

mais le Chaos originel n’a pas<br />

pu <strong>de</strong>meurer tel, il lui a fallu engendrer<br />

et donc entrer dans le cycle<br />

<strong>de</strong> la transformation. Les premières<br />

formes archaïques dans leur rai<strong>de</strong>ur<br />

caractéristique en sont issues.<br />

Mais l’informe n’est pas nécessairement<br />

porteur <strong>de</strong> la forme, il peut tout<br />

autant la refouler, l’avaler et l’empêcher<br />

<strong>de</strong> venir au jour et, surtout, il<br />

constitue pour la régression une possibilité<br />

entropique que révèlent les<br />

pathologies dépressives sous leurs<br />

divers aspects, notamment les toxicomanies.<br />

L’archaïque, qui n’est pas le précoce,<br />

apparaît à l’inverse comme une forme<br />

résistante et susceptible <strong>de</strong> faire retour,<br />

analysable aussi bien dans les<br />

rêves, les processus créateurs et les<br />

traces <strong>de</strong> ces premiers mythes magico-sexuels<br />

par lesquels une saisie<br />

<strong>de</strong> l’énigme s’opère pour l’enfant bien<br />

avant les « théories sexuelles ».<br />

La majorité <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> ce volume<br />

correspon<strong>de</strong>nt aux recherches <strong>de</strong>s<br />

auteurs inscrits dans <strong>de</strong>ux équipes<br />

<strong>de</strong> l’Ecole Doctorale, animées, respectivement,<br />

par S. <strong>de</strong> Mijolla-Mellor<br />

et S. Le Poulichet. On trouve, également,<br />

dans ce numéro un hommage<br />

à Pierre Fédida avec <strong>de</strong> nombreuses<br />

participations.<br />

Korsakov<br />

Eric Fottorino<br />

Gallimard, 19,50 €<br />

Que le lecteur n’ouvre pas ce livre en<br />

pensant y trouver une analyse scientifique<br />

du syndrome que <strong>Nervure</strong> avait<br />

au <strong>de</strong>meurant, abondamment traité,<br />

dans le numéro <strong>de</strong> Juin.<br />

Car, en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> quelques brèves<br />

allusions du type « Korsakov manie<br />

l’oubli comme une anesthésie », le registre<br />

<strong>de</strong> l’ouvrage reste purement<br />

romanesque.<br />

Il s’agit du récit <strong>de</strong> la vie d’un petit<br />

garçon <strong>de</strong>venu à l’âge adulte mé<strong>de</strong>cin,<br />

précisément neurologue, à Palerme<br />

: mais ne pensez pas découvrir<br />

un récit linéaire car le narrateur<br />

rassemble ses souvenirs au moment<br />

où l’exercice <strong>de</strong> mémoire <strong>de</strong>vient <strong>de</strong><br />

plus en plus défaillant. Cela conduit<br />

à un récit où les premiers moments<br />

<strong>de</strong> sa vie à Bor<strong>de</strong>aux- il est « un enfant<strong>de</strong>sbrouillards<br />

» - viennent s’entremêler<br />

avec la vie adulte en Italie<br />

ou avec la vie du grand père bienaimé<br />

en Tunisie. Le lecteur perd parfois<br />

ses repères entre le « réel » et<br />

« l’imaginaire » et se laisse emporter,<br />

mais à ce moment quelques affirmations<br />

fortes, par exemple sur le<br />

temps, qui est le thème principal du<br />

roman, plus que la mémoire, viennent<br />

ponctuer l’évocation et forcer le<br />

retour à la réflexion « on dit que le<br />

temps est comme le pain : on doit le<br />

gar<strong>de</strong>r pour le len<strong>de</strong>main ».<br />

En <strong>de</strong>hors d’un problème <strong>de</strong> construction<br />

: pourquoi la troisième partie est<br />

elle si courte ? Il s’agit d’un très beau<br />

roman portant un regard tendre sur<br />

la vie, à l’opposé du syndrome <strong>de</strong><br />

Korsakov constitué par « une amnésie<br />

<strong>de</strong> fixation <strong>de</strong>s souvenirs, compensée<br />

par un mélange <strong>de</strong> fabulations et <strong>de</strong><br />

faux souvenirs ». A lire pour ceux qui<br />

cherchent leur i<strong>de</strong>ntité.<br />

P. Juhan


8<br />

LIVRES<br />

PSYCHANALYSE<br />

De la suggestion et <strong>de</strong> ses<br />

applications à la<br />

thérapeutique (1886)<br />

Hippolyte Bernheim<br />

Avec une préface <strong>de</strong> Serge<br />

Nicolas et une critique <strong>de</strong><br />

Sigmund Freud et d’Alfred Binet<br />

L’Harmattan, 38 €<br />

Hippolyte Bernheim est connu pour<br />

être le principal représentant <strong>de</strong> l’école<br />

<strong>de</strong> Nancy qui a osé s’opposer, sur la<br />

question <strong>de</strong> l’hypnose, à école <strong>de</strong> la<br />

Salpêtrière. Son ouvrage intitulé De<br />

la suggestion et <strong>de</strong> ses applications à<br />

la thérapeutique (1886) est le plus généralement<br />

cité dans la littérature<br />

psychologique comme le manifeste<br />

<strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> Nancy. C’est cette édition<br />

du livre <strong>de</strong> Bernheim qui a été<br />

traduite en allemand en 1888 par<br />

Freud à une époque où il utilise l’hypnose<br />

comme technique thérapeutique<br />

après avoir effectué un stage<br />

en 1885 dans le service <strong>de</strong> Charcot<br />

à la Salpêtrière.<br />

La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Bernheim consistait<br />

à suggérer, sous hypnose, la disparition<br />

du symptôme ou <strong>de</strong> sa cause<br />

prochaine. Le principe en était le suivant<br />

: l’hypnotisme, comme le sommeil<br />

naturel, exalte l’imagination et<br />

rend le cerveau plus accessible à la<br />

suggestion. Provoquer par l’hypnotisme<br />

cet état psychique spécial et<br />

exploiter dans un but <strong>de</strong> guérison ou<br />

<strong>de</strong> soulagement la suggestion ainsi<br />

artificiellement exaltée, tel est le rôle<br />

<strong>de</strong> la psycho thérapeutique hypnotique.<br />

Cette attitu<strong>de</strong> s’opposait à l’attitu<strong>de</strong><br />

purement nosographique <strong>de</strong><br />

la Salpêtrière, qui étudiait l’hypnose<br />

à titre d’état morbi<strong>de</strong>.<br />

L’agression sexuelle chez les<br />

adolescents placés<br />

Josiane Marie Régi<br />

L’Harmattan, 24 €<br />

Dans une population d’enfants placés<br />

dans les services <strong>de</strong> l’Ai<strong>de</strong> sociale<br />

à l’enfance, l’auteur a isolé <strong>de</strong>s situations<br />

d’adolescents <strong>de</strong>venus déviants<br />

sexuels bien qu’ils aient été<br />

pris en charge entre trois et vingt années.<br />

Elle présente un accompagnement<br />

et a démontre l’utilité <strong>de</strong> la cohérence<br />

interinstitutionnelle. On peut<br />

ainsi tenter d’effectuer les réparations<br />

nécessaires, afin d’éviter les récidives,<br />

grâce à l’approche systémique, à sa<br />

métho<strong>de</strong> rétroprospective et à la thérapie<br />

contextuelle qui en découle.<br />

Il ne peut y avoir <strong>de</strong> réparations que<br />

si le contexte permet la reconstruction<br />

<strong>de</strong>s liens sociaux. Ceci n’est acquis<br />

que si l’emboîtement <strong>de</strong>s différents<br />

cadres, judiciaire, administratif,<br />

soignant, éducatif et social est cohérent.<br />

La rééducation contre<br />

l’école, tout contre<br />

L’i<strong>de</strong>ntité professionnelle <strong>de</strong>s<br />

rééducateurs en question<br />

Félix Gentili<br />

Erès, 16 €<br />

Cet ouvrage s’intéresse à l’i<strong>de</strong>ntité<br />

<strong>de</strong>s rééducateurs. S’il s’adresse à eux,<br />

puisqu’ils en constituent la matière<br />

initiale, l’auteur a la conviction que<br />

son livre est susceptible d’intéresser<br />

tous les acteurs sociaux qui œuvrent<br />

dans l’ai<strong>de</strong>, comme c’est le cas <strong>de</strong>s<br />

rééducateurs et <strong>de</strong> tous ceux qui ont<br />

le sentiment d’être dans « l’entre-<strong>de</strong>ux ».<br />

Dans ces pages, l’i<strong>de</strong>ntité professionnelle<br />

<strong>de</strong>s rééducateurs est décrite<br />

à partir <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong>s parcours professionnels<br />

<strong>de</strong>s rééducateurs du département<br />

du Rhône, <strong>de</strong>s critiques <strong>de</strong>s<br />

rapports <strong>de</strong> l’Inspection générale, <strong>de</strong><br />

l’analyse <strong>de</strong>s publications <strong>de</strong> la Fédération<br />

nationale <strong>de</strong>s associations<br />

<strong>de</strong>s rééducateurs <strong>de</strong> l’Education nationale,<br />

et, enfin, <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> contenu<br />

<strong>de</strong>s mémoires professionnels.<br />

<br />

les succès <strong>de</strong> la psychanalyse sont indiscutables<br />

» (27).<br />

Il y a donc un succès possible, indiscutable<br />

du traitement psychanalytique<br />

dans la psychose, y compris schizophrénique.<br />

Il est tout à fait étonnant donc, que ce<br />

qui n’a été retenu <strong>de</strong> l’enseignement<br />

Freudien ne soit que : il n’y a pas <strong>de</strong><br />

transfert et il ne vaut mieux pas toucher<br />

du côté <strong>de</strong> la psychanalyse à la psychose,<br />

soit une tendance à la contre<br />

indication d’un traitement psychanalytique<br />

alors que l’on peut voir qu’en<br />

1916, 1923 et 1933 l’inverse est clairement<br />

écrit ou dit. Il serait intéressant<br />

<strong>de</strong> voir pourquoi cela ne s’est transmis<br />

que <strong>de</strong> ce côté là ? Freud avait en<br />

contrôle <strong>de</strong>s analystes qui recevaient<br />

<strong>de</strong>s psychotiques, la plus éminente<br />

étant Ruth Mack Brunswick qui a décrit<br />

en 1929 une cure réussie <strong>de</strong> courte<br />

durée avec une femme paranoïaque<br />

et qui prendra en analyse l’Homme<br />

aux Loups à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> Freud.<br />

Pourquoi cela ne s’est-il pas transmis ?<br />

La réponse est peut-être à chercher,<br />

en partie, dans la relation <strong>de</strong> Freud<br />

avec Ruth Mack Brunswick.<br />

Ce qui paraît riche d’enseignement<br />

pour la pratique transférentielle avec<br />

les psychotiques se situe encore chez<br />

Freud, toujours dans cette interview<br />

<strong>de</strong> 1933. Freud insiste tout au long <strong>de</strong><br />

l’interview sur l’importance du symptôme<br />

: « On peut guérir même <strong>de</strong>s<br />

troubles psychiques et <strong>de</strong>s dysfonctionnements<br />

organiques en partant <strong>de</strong>s symptômes.<br />

Car toutes les manifestations <strong>de</strong><br />

l’individu, pour infimes et incohérentes<br />

qu’elles paraissent, sont <strong>de</strong>s symptômes<br />

déterminés par les ressorts <strong>de</strong> son état<br />

et sa maladie psychique » (28). Plus encore,<br />

à une question sur le rêve, il<br />

répond : « Il s’agit moins en psychanalyse<br />

d’expliquer le rêve en soi, que <strong>de</strong> le<br />

démasquer comme symptôme et <strong>de</strong> former<br />

un diagnostic grâce au rêve » (29).<br />

La question du symptôme prime par<br />

rapport à la question <strong>de</strong> la structure<br />

dans la pratique. A la question : « Comment<br />

évite-t-on l’arbitraire dans l’interprétation<br />

<strong>de</strong> souvenirs, associations<br />

d’idées, rêves et, <strong>de</strong> manière générale,<br />

dans tout traitement psychanalytique ? »<br />

Freud insiste sur <strong>de</strong>ux points : l’impulsion<br />

refoulée (Vor verdrängten Impulsen)<br />

et le symptôme : « Les variantes <strong>de</strong>s<br />

formes <strong>de</strong> manifestation que peut prendre<br />

une impulsion refoulée dans <strong>de</strong>s figures<br />

libidinales sont infinies et les sublimations<br />

<strong>de</strong> cette impulsion englobent pour<br />

ainsi dire la totalité <strong>de</strong>s aspirations<br />

humaines. Il s’agit pour nous, comme<br />

dans le rêve, moins d’une explication,<br />

d’une dogmatique casuistique, que <strong>de</strong><br />

traiter <strong>de</strong>s symptômes. La métho<strong>de</strong> psychanalytique<br />

est essentiellement dynamique<br />

; nous tenons compte <strong>de</strong> l’immense<br />

finesse, <strong>de</strong>s métamorphoses<br />

ininterrompues <strong>de</strong> la libido. De là résulte<br />

le problème brûlant que j’appelle<br />

« transfert ». Un refoulement <strong>de</strong>s impulsions<br />

dont l’analyse n’a pas su encore<br />

éclairer l’origine. Il s’agit d’effets toujours<br />

prêts à s’adapter, à se transformer suivant<br />

les circonstances et, dans le cas du traitement<br />

psychanalytique, à se transférer<br />

sur le mé<strong>de</strong>cin. La complexité et la variabilité<br />

<strong>de</strong> ces facteurs imposent au mé<strong>de</strong>cin<br />

la nécessité d’un contrôle extrêmement<br />

strict <strong>de</strong> ses recherches , dans<br />

lesquelles l’arbitraire est pris en compte et<br />

éclate au grand jour » (30).<br />

Freud a une définition tout à fait inédite<br />

du transfert. Il appelle cela le problème<br />

brûlant, « le problème brûlant<br />

que j’appelle transfert » mais il le définit<br />

comme un refoulement <strong>de</strong>s impulsions,<br />

dont l’analyse n’a pas encore pu éclairer<br />

l’origine.<br />

Qu’est-ce que le refoulement d’une<br />

impulsion ? Est-ce que paradoxalement,<br />

la psychose, la question du transfert<br />

dans la psychose ne pourrait pas nous<br />

éclairer sur qu’est-ce que ces formes <strong>de</strong><br />

manifestation que peut prendre une<br />

impulsion refoulée dans <strong>de</strong>s figures libidinales,<br />

pour reprendre le terme <strong>de</strong><br />

Freud. Les formes <strong>de</strong> manifestations<br />

sont le symptôme, les figures libidinales<br />

la jouissance, à reprendre les termes<br />

<strong>de</strong> Lacan. Le transfert est une impulsion<br />

refoulée. Le corps, la pulsion sont dans<br />

le transfert qui n’est pas uniquement<br />

du transfert <strong>de</strong> mots, <strong>de</strong> signifiants.<br />

Il paraît intéressant <strong>de</strong> mettre en rapport<br />

ce <strong>de</strong>rnier enseignement <strong>de</strong> Freud<br />

avec le premier, le cas <strong>de</strong> Mme P. <strong>de</strong><br />

1896. L’important est le symptôme et<br />

la façon <strong>de</strong> le traiter dans le transfert. Il<br />

convient <strong>de</strong> s’éloigner <strong>de</strong> la dogmatique<br />

casuistique pour privilégier ce<br />

traitement du symptôme qui a une<br />

face signifiante mais aussi une face pulsionnelle,<br />

du corps.<br />

Françoise Dolto<br />

Une vie <strong>de</strong> correspondances<br />

1938-1988<br />

Gallimard, 39 €<br />

Ce volume <strong>de</strong> correspondance <strong>de</strong><br />

Françoise Dolto a été constitué à partir<br />

<strong>de</strong> ses archives personnelles où<br />

elle conservait les lettres qu’elle recevait.<br />

Ces documents ont permis <strong>de</strong><br />

mener <strong>de</strong>s recherches afin <strong>de</strong> retrouver<br />

les lettres qu’elles avait écrites.<br />

Ce volume réunit donc les lettres <strong>de</strong><br />

Françoise Dolto - environ trois cents -<br />

que ses correspondants ont bien voulu<br />

communiquer, et quelques-unes <strong>de</strong>s<br />

Il convient <strong>de</strong> mettre en tension cette<br />

problématique freudienne avec le <strong>de</strong>rnier<br />

enseignement <strong>de</strong> Lacan, notamment<br />

le séminaire, Le Sinthome. Lacan<br />

prend en compte le corps, parle <strong>de</strong><br />

suppléance au phallus, <strong>de</strong> forclusion<br />

du sens. Nous ne sommes plus dans<br />

l’explication exclusive par le Nom-du-<br />

Père et le signifiant <strong>de</strong> 1958. L’enseignement<br />

<strong>de</strong> la prévalence du signifiant<br />

a pu entraîner chez certains <strong>de</strong> ses<br />

élèves une dogmatique casuistique <strong>de</strong>s<br />

plus arbitraires, préjudiciable parfois.<br />

L’explication par la forclusion du Nomdu-Père<br />

<strong>de</strong>venant l’équivalent du « voilà<br />

pourquoi votre fille est muette ! », le<br />

risque était grand d’expliquer, <strong>de</strong> faire<br />

coller la clinique à la théorie et d’ignorer<br />

la prévalence du transfert dans le<br />

traitement pour privilégier une conception<br />

déficitaire <strong>de</strong> la psychose.<br />

La logique qui prévalait alors était en<br />

effet <strong>de</strong> mettre en avant le « il n’y a<br />

pas » : il n’y a pas <strong>de</strong> métaphore paternelle,<br />

il n’y a pas <strong>de</strong> signification phallique,<br />

qui avait pour <strong>de</strong>stin un certain<br />

fatalisme, le sujet « n’arrivant pas » à<br />

construire une métaphore délirante stabilisatrice.<br />

Outre cette conception déficitaire,<br />

l’autre avatar était <strong>de</strong> prendre<br />

pour exemple une psychiatrie à la De<br />

Clérambault avec repérage du phénomène<br />

élémentaire langagier pour produire<br />

un diagnostic, une catégorisation.<br />

Le Sinthome qui vient d’être publié<br />

récemment (31) est subversif et salutaire<br />

par rapport à cet ordre ancien, qui<br />

entraînait, parfois, <strong>de</strong>s positions très<br />

conservatrices. En plaçant le symptôme<br />

comme primat à prendre en compte<br />

dans le traitement, Lacan rejoint le<br />

Freud <strong>de</strong> 1933, sans le savoir et<br />

déconstruit la nosographie classique<br />

ainsi que le structuralisme. Il traite du<br />

corps et préconise une orientation vers<br />

le réel, ce que Freud n’avait, quant à<br />

lui, jamais quitté dans la narration <strong>de</strong> sa<br />

pratique. Il réintroduit la question freudienne<br />

<strong>de</strong> la pulsion et du corps dans<br />

la suppléance à la psychose non déclenchée<br />

<strong>de</strong> Joyce et permet une autre lecture,<br />

celle <strong>de</strong>s nouages.<br />

Ce que nous dégageons, cependant,<br />

<strong>de</strong> l’articulation avec l’enseignement<br />

freudien que nous avons exposé est<br />

que le primat du symptôme dans la<br />

psychose se saisit à partir du fait que le<br />

symptôme est nouage, nouage du réel<br />

entre le signifiant, le scopique, le corps<br />

(la pulsion). Ce nouage est nouage du<br />

réel, à savoir qu’il noue <strong>de</strong>s plus-<strong>de</strong>jouir<br />

dans ces trois registres. Notre<br />

expérience clinique et thérapeutique<br />

insiste sur les nouages et dénouages<br />

qui peuvent se faire entre le signifiant et<br />

le corps via le scopique qui a un rôle<br />

moteur. C’est ce qu’indique Lacan dans<br />

la première séance du séminaire Le<br />

Sinthome le 18 novembre 1975. Après<br />

avoir souligné le nouage du corps avec<br />

le dire, il insiste sur le regard : « More<br />

geometrico, à cause <strong>de</strong> la forme chère à<br />

Platon, l’individu se présente comme il<br />

est foutu, comme un corps. Et ce corps a<br />

une puissance <strong>de</strong> captivation qui est telle<br />

que, jusqu’à un certain point, c’est les<br />

aveugles qu’il faudrait envier » (32). C’est<br />

à partir <strong>de</strong> la forme que le symptôme<br />

psychotique va s’exprimer souvent<br />

d’abord sous forme <strong>de</strong> laisser tomber<br />

puis <strong>de</strong> ré-accrochage d’un signifiant<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

lettres qu’elle a reçues, au nombre<br />

d’environ quatre cents. A côté <strong>de</strong>s intimes,<br />

<strong>de</strong>s intellectuels, <strong>de</strong>s artistes,<br />

apparaissent les gran<strong>de</strong>s figures <strong>de</strong><br />

la psychanalyse : Rudolph Loewenstein,<br />

Marie Bonaparte, René Spitz,<br />

et plus tard Daniel Lagache, Serge Leclaire,<br />

Wladimir Granoff, Maud Mannoni,<br />

et surtout Jacques Lacan, le compagnon<br />

<strong>de</strong> route. Puis viendront les<br />

« suivants », jeunes analystes à qui<br />

elle se fait un <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> transmettre,<br />

et enfin tous ceux qui lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong>nt<br />

conseil et auxquels elle répond toujours<br />

<strong>de</strong> longues lettres attentives.<br />

et d’une pulsion à une forme. Antonin<br />

Artaud, dans son œuvre, ne cesse<br />

<strong>de</strong> déployer cette logique, le primat <strong>de</strong><br />

la forme en tant qu’il est plus-<strong>de</strong>-jouir,<br />

en témoigne cette phrase extraite <strong>de</strong>s<br />

Cahiers <strong>de</strong> Ro<strong>de</strong>z : « L’être ne commence<br />

pas par l’âme, il se fait par la forme<br />

d’un corps principe que j’anime peu à<br />

peu et pousse jusqu’à la femme » (33).<br />

Nous déploierons dans un autre article<br />

ce qu’enseigne, <strong>de</strong> façon plus spécifique,<br />

le séminaire Le Sinthome dans<br />

la logique <strong>de</strong>s psychoses et <strong>de</strong> son traitement<br />

psychanalytique. <br />

Hervé Hubert<br />

Psychiatre, psychanalyste, Institut Paul Sivadon,<br />

22 rue <strong>de</strong> la Rochefoucault, 75009 Paris.<br />

Bibliographie<br />

(1) FREUD, Le Prési<strong>de</strong>nt Schreber in Cinq<br />

psychanalyses, PUF, Paris, 1954, p.263.<br />

(2) LACAN J, Le Séminaire III, Les psychoses,<br />

Le Seuil, Paris, 1981, p.285.<br />

(3) i<strong>de</strong>m, p.315.<br />

(4) LACAN J, Conférence <strong>de</strong> Yale University,<br />

24 novembre 75, in Scilicet 6/7, Le Seuil,<br />

Paris, 1976, p.10.<br />

(5) FREUD S, Nouvelles remarques sur les psychonévroses<br />

<strong>de</strong> défense in Névrose, Psychose et<br />

perversion, Paris, PUF, 1973, p.72-73.<br />

(6) FREUD S, i<strong>de</strong>m, p.72.<br />

(7) i<strong>de</strong>m, p.73.<br />

(8) LACAN J, Le Séminaire III, Les psychoses,<br />

opus cité, p.218.<br />

(9) HUBERT H, Clinique du transsexualisme,<br />

une logique <strong>de</strong> retranchement, thèse <strong>de</strong> Doctorat<br />

<strong>de</strong> Psychanalyse, Université Paris VIII,<br />

2003.<br />

(10) FREUD S, opus cité, p.73-74.<br />

(11) i<strong>de</strong>m, p.74.<br />

(12) i<strong>de</strong>m, p.74-75.<br />

(13) FREUD S, i<strong>de</strong>m, p.75.<br />

(14) LACAN J, Le Séminaire III, Les psychoses,<br />

opus cité, p. 218.<br />

(15) FREUD, i<strong>de</strong>m, p.75-76.<br />

(16) i<strong>de</strong>m, p.77.<br />

(17) i<strong>de</strong>m, p.81.<br />

(18) FREUD S, Introduction à la psychanalyse,<br />

Petite Bibliothèque Payot n°6, Paris,<br />

p.425.<br />

(19) i<strong>de</strong>m.<br />

(20) i<strong>de</strong>m, p. 400.<br />

(21) i<strong>de</strong>m.<br />

(22) i<strong>de</strong>m.<br />

(23) FREUD S, Freud présenté par lui-même,<br />

Gallimard, Paris, p.101.<br />

(24) i<strong>de</strong>m.<br />

(25) i<strong>de</strong>m, p.101-102.<br />

(26) i<strong>de</strong>m, p.102.<br />

(27) FREUD S, une interview retrouvée <strong>de</strong><br />

Sigmund Freud, présentée par J. LE RIDER,<br />

Revue Internationale <strong>de</strong> Psychanalyse,<br />

Paris,1992, 5, p.614.<br />

(28) FREUD S, i<strong>de</strong>m, p.615.<br />

(29) i<strong>de</strong>m.<br />

(30) i<strong>de</strong>m, p.616.<br />

(31) J. LACAN, Le séminaire Livre XXIII<br />

Le sinthome, Texte établi par Jacques-Alain<br />

Miller, Le Seuil, Paris, mars 2005.<br />

(32) i<strong>de</strong>m, p.18.<br />

(33) ARTAUD A, Œuvres Complètes, tome<br />

XXI.


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Les prototypes <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s catégories<br />

<strong>de</strong> psychotropes ont été découverts<br />

en une décennie. Certes, l’action favorable<br />

<strong>de</strong>s sels <strong>de</strong> lithium sur les états<br />

maniaques avait été remarquée en<br />

1949 mais son emploi n’avait pas pu<br />

être poursuivi du fait <strong>de</strong> la méconnaissance<br />

<strong>de</strong> la nécessité d’un contrôle<br />

strict <strong>de</strong> la lithiémie. La valeur prophylactique<br />

du lithium ne fut mise en<br />

évi<strong>de</strong>nce qu’en 1963 et le lithium n’a<br />

pu être propagé qu’ultérieurement, la<br />

FDA n’autorisant sa prescription qu’en<br />

1970. Les découvertes <strong>de</strong> l’Iproniazi<strong>de</strong><br />

et <strong>de</strong> l’Imipramine furent indépendantes.<br />

Puis, ce fut celle <strong>de</strong>s anxiolytiques<br />

avec le Diazepam.<br />

En 1952 <strong>de</strong>ux tonnes et <strong>de</strong>mi <strong>de</strong> chlorpromazine<br />

avaient été prescrites dans<br />

96 hôpitaux psychiatriques français. En<br />

1969, 50 millions <strong>de</strong> patients avaient<br />

reçu du Largactil. Si ses gran<strong>de</strong>s lignes<br />

historiques apparaissent claires <strong>de</strong> prime<br />

abord, la diffusion <strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong>s neuroleptiques<br />

apparaît plus complexe.<br />

Elle s’inscrit au sein <strong>de</strong>s diverses tendances<br />

et sensibilités <strong>de</strong> l’époque qui<br />

avaient pu s’affirmer dès la fin <strong>de</strong> la<br />

guerre : déclin <strong>de</strong> l’asile, traitements<br />

ambulatoires, nouvelles structures <strong>de</strong><br />

soins, émergence <strong>de</strong> la réhabilitation<br />

et <strong>de</strong> la resocialisation alors que la sécurité<br />

sociale avait pu être mise en place.<br />

L’affirmation <strong>de</strong> la psychiatrie sociale<br />

s’est combinée avec les succès <strong>de</strong> la<br />

psychopharmacologie.<br />

Entre le 7 juillet 1953 et le 16 juin<br />

1954, les services <strong>de</strong> Spécia ont diffusé<br />

<strong>de</strong>s documents <strong>de</strong> synthèse basés<br />

sur la bibliographie disponible consacrée<br />

à la Chlorpromazine. Dix lettres<br />

ont été rassemblées en un volume. En<br />

octobre 1955, au moment du colloque<br />

international sur la Chlorpromazine<br />

qui s’est tenu à Sainte-Anne, on relevait<br />

3500 références. La lettre consacrée à<br />

la psychiatrie indique, comme applications<br />

cliniques, les psychoses, les états<br />

névropathiques avec un appendice<br />

consacré à la cure <strong>de</strong> sommeil. Pour<br />

les psychoses l’accent était mis sur l’agitation<br />

et les états confusionnels, à commencer<br />

par le <strong>de</strong>lirium tremens. Etaient<br />

ajoutés, pêle-mêle : <strong>de</strong>s effets encourageants<br />

pour la mélancolie, les délires<br />

chroniques et, finalement, les états schizophréniques<br />

avec <strong>de</strong>s rémissions plus<br />

ou moins marquées. Les psychoses<br />

schizophréniques n’étaient pas, alors, la<br />

cible principale.<br />

H.E. Lehmann, psychiatre canadien<br />

anglophone à Montréal, eut accès aux<br />

publications françaises par sa femme<br />

québécoise qui les lui avaient traduites.<br />

Il est à l’origine <strong>de</strong> la première publication<br />

anglo-saxonne, en 1954, dans<br />

les Archives of neurology and psychiatry<br />

dont le titre était : « Chlorpromazine<br />

New inhibiting agent for psychomoteur<br />

excitement and maniac states ».<br />

Rapi<strong>de</strong>ment, la bibliographie a pris un<br />

caractère mondial puisque venant <strong>de</strong><br />

40 pays dont un tiers pour la France, à<br />

égalité avec les Etats-Unis.<br />

On ne peut donc qu’être surpris par<br />

la rapidité avec laquelle la Chlorpromazine<br />

a été introduite sur le plan thérapeutique.<br />

L’essor <strong>de</strong> la<br />

psychopharmacologie<br />

Abordant l’essor <strong>de</strong> la psychopharmacologie<br />

le Professeur Alain Puech a<br />

souligné que ce <strong>de</strong>rnier a correspondu<br />

à la conjonction d’un besoin médical<br />

et du développement <strong>de</strong>s neurosciences.<br />

La première génération <strong>de</strong>s<br />

psychotiques a bénéficié <strong>de</strong>s moyens<br />

limités <strong>de</strong> la psychopharmacologie <strong>de</strong><br />

l’époque qu’il s’agisse du modèle <strong>de</strong> la<br />

réserpine dépressogène chez l’homme<br />

appliqué à la souris ou <strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong>s<br />

amphétamines chez le rat comme<br />

modèle <strong>de</strong> psychose.<br />

En parallèle, se sont développées les<br />

connaissances concernant les neurotransmetteurs<br />

et les récepteurs. Les<br />

étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> binding, ont concerné, in<br />

vivo et in vitro, <strong>de</strong>s cibles précises alors<br />

50 ans <strong>de</strong> découverte<br />

<strong>de</strong>s neuroleptiques<br />

que la recherche <strong>de</strong> récepteurs spécifiques<br />

a longtemps côtoyé celle, naïve,<br />

<strong>de</strong> récepteurs <strong>de</strong> maladies.<br />

Au fils du temps on a donc pu mieux<br />

comprendre certains mécanismes, obtenir<br />

moins d’effets secondaires mais l’efficacité<br />

n’a guère évolué. Il est probable<br />

que le mythe <strong>de</strong> la pureté <strong>de</strong>s médicaments,<br />

en recherchant une forte spécificité,<br />

a induit une perte d’efficacité.<br />

Les progrès ont concerné les posologies<br />

optimales capables <strong>de</strong> permettre le<br />

meilleur rapport bénéfice thérapeutique/<br />

risque. La pharmacologie <strong>de</strong>s<br />

comportements n’a guère abouti à la<br />

découverte <strong>de</strong> nouveaux médicaments.<br />

Alain Puech a relevé, en conclusion,<br />

qu’on était, aujoud’hui, au bout <strong>de</strong> ce<br />

qu’on peut faire avec la Dopamine, la<br />

Noradrénaline, le gaba. Il considère<br />

que le courage consiste, probablement,<br />

à essayer <strong>de</strong>s nouveaux produits dont<br />

on espère un potentiel thérapeutique<br />

chez <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> patients dans le<br />

cadre du DSM-IV ou hors DSM-IV.<br />

Neuroleptiques et<br />

parkinsonisme<br />

Vassilis Kapsambelis a abordé l’historique<br />

et les implications psychopathologiques<br />

<strong>de</strong> ce qu’il appelle « une faus-<br />

se conviction scientifique » et qui<br />

concerne les relations entre neuroleptiques<br />

et parkinsonisme.<br />

La fausse conviction scientifique dont il<br />

est question peut être formulée ainsi :<br />

les effets secondaires, notamment neurologiques,<br />

<strong>de</strong>s neuroleptiques sont<br />

nécessaires à leur efficacité thérapeutique.<br />

La découverte empirique <strong>de</strong> l’action<br />

thérapeutique <strong>de</strong>s neuroleptiques a été<br />

initialement celle d’un désintéressement<br />

du mala<strong>de</strong> pour ce qui se passe<br />

autour <strong>de</strong> lui. L’accent était mis sur<br />

l’importance <strong>de</strong>s effets sur la motricité<br />

lors d’accès maniaque, sur l’indifférence<br />

psychomotrice, ce qui a précédé,<br />

par exemple, la perception <strong>de</strong> l’action<br />

antihallucinatoire. Un tel constat<br />

renvoie aux divers termes antérieurs à<br />

celui <strong>de</strong> neuroleptique comme ataraxique,<br />

ganglioplégique, neuroplégique<br />

ou neurolytique.<br />

Alors que Jean Delay et Pierre Deniker<br />

étaient amenés à parler <strong>de</strong> parkinsonisme<br />

thérapeutique induit par les neuroleptiques,<br />

l’inhibition et le contrôle<br />

<strong>de</strong> l’agitation psychomotrice étaient<br />

reliés à un mo<strong>de</strong> d’action sous-corticale.<br />

Le parkinsonisme était compris<br />

comme une condition préalable, siné<br />

qua non, un effet non toxique car<br />

constituant l’élément central à partir<br />

duquel les effets thérapeutiques sont<br />

produits.<br />

Le dogme psychopharmacologique <strong>de</strong>s<br />

effets secondaires était tel que l’absence<br />

<strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers a fait invali<strong>de</strong>r, à lui<br />

seul, l’action antipsychotique possible<br />

<strong>de</strong> certaines molécules. Une telle<br />

conception n’a pas rencontré <strong>de</strong> contradiction<br />

pendant longtemps.<br />

Les cliniciens observaient une liaison<br />

entre effets thérapeutiques et secondaires,<br />

notamment lors <strong>de</strong> délire aigu<br />

au cours <strong>de</strong>squels l’agitation par sa force<br />

motrice imposait un mouvement continuel<br />

ou important. Ils constataient un<br />

apaisement particulier avec un retour<br />

du sommeil, <strong>de</strong> la faim, un accès au<br />

calme marqué par une indifférence au<br />

mon<strong>de</strong> et à l’environnement alors qu’il<br />

était également pensé que le psychis-<br />

me, avant toute action favorable, ne<br />

faisait pas <strong>de</strong> différence entre les perceptions<br />

normales et les hallucinations.<br />

Mais il était, aussi, pensé que l’indifférence<br />

pour le mon<strong>de</strong> extérieur ne<br />

<strong>de</strong>meurait pas complète et qu’au fur<br />

et à mesure que le délire et les hallucinations<br />

régressent, l’intérêt se tourne<br />

vers le corps. Cette place, au premier<br />

plan, du corps est retrouvée dans les<br />

notions <strong>de</strong> pathomimies délirantes<br />

(Kammerer), <strong>de</strong> névrose psychomotrice<br />

<strong>de</strong> substitution, <strong>de</strong> dyskinésies aiguës<br />

non compréhensibles hystériformes car<br />

cédant par la suggestion (Deniker).<br />

Les effets secondaires neuroleptiques<br />

ont été amenés à être perçus comme<br />

prenant, en lieu et place, le relais du<br />

délire. Le parkinsonisme iatrogène<br />

apparaissait important pour ce qu’il<br />

représentait pour le patient. A partir<br />

d’une conception neurophysiologique,<br />

l’intérêt se déplaçait du pôle extéroceptif<br />

au pôle proprioceptif. La psychose<br />

pouvait être comprise comme<br />

une pathologie hypocondriaque qui<br />

capte l’intérêt du sujet.<br />

Une adhésion aussi tenace à « une fausse<br />

idée scientifique » s’inscrit dans la<br />

conception beaucoup plus large, en<br />

mé<strong>de</strong>cine, que la maladie thérapeutique<br />

remplace la maladie initiale. En<br />

outre, le concept <strong>de</strong> maladie thérapeutique<br />

renvoyait aux traitements <strong>de</strong><br />

choc employés <strong>de</strong>puis longtemps et<br />

que les psychotropes feront disparaître.<br />

Il n’en <strong>de</strong>meure pas moins qu’une telle<br />

approche présente un réel intérêt, ne<br />

serait-ce que par l’opportunité <strong>de</strong><br />

repenser les cadres nosographiques à<br />

travers les transformations induites par<br />

la thérapeutique. Ce renouveau <strong>de</strong> la<br />

recherche clinique gar<strong>de</strong>, probablement,<br />

un potentiel qui n’est pas épuisé.<br />

La question <strong>de</strong>meure, posée <strong>de</strong>puis<br />

Moreau <strong>de</strong> Tours et les premières psychoses<br />

expérimentales, <strong>de</strong> savoir pourquoi<br />

les maladies thérapeutiques ont<br />

gardé un intérêt particulièrement attractif.<br />

Le colloque<br />

international sur la<br />

Chlorpromazine <strong>de</strong><br />

Sainte-Anne en 1955<br />

Le Colloque International sur la Chlorpromazine<br />

et les médicaments neuroleptiques<br />

en thérapeutique psychiatrique<br />

qui s’est tenu à Sainte-Anne du<br />

20 au 22 octobre 1955, a marqué une<br />

étape importante puisqu’il a permis un<br />

bilan attendu et un échange d’expériences<br />

entre les nombreuses équipes<br />

qui, <strong>de</strong>puis quelques années, employaient<br />

le Largactil. Jean Delay en<br />

était le Prési<strong>de</strong>nt et Pierre Deniker, le<br />

secrétaire.<br />

Au cours d’une table ron<strong>de</strong> du symposium,<br />

Roger Ropert a situé ce colloque<br />

dans le temps : 3 ans après la<br />

première publication consacrée à une<br />

phénothiazine d’action centrale élective<br />

(4560 RP), un an et <strong>de</strong>mi après son<br />

emploi lors <strong>de</strong> psychose chronique par<br />

les suisses, un an après que l’intérêt se<br />

soit porté sur les effets secondaires<br />

notamment, neurologiques. Ce colloque<br />

a été suivi, en 1956, d’un colloque<br />

national italien à Milan sur le<br />

même thème et, en 1957, du rapport<br />

<strong>de</strong> Pierre Deniker présenté au cours<br />

du <strong>de</strong>uxième Congrès Mondial <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong><br />

à Zurich.<br />

Le Professeur Thérèse Lempérière a<br />

rappelé que le colloque <strong>de</strong> Sainte-Anne,<br />

à l’origine <strong>de</strong> 147 communications, a<br />

regroupé pendant <strong>de</strong>ux jours et <strong>de</strong>mi<br />

150 participants représentant 20 pays<br />

avec une forte participation française<br />

dont <strong>de</strong> nombreux mé<strong>de</strong>cins <strong>de</strong>s hôpitaux<br />

psychiatriques parmi lesquels H.<br />

Ey, M. Hyvert, P.C. Racamier, P.A. Lambert.<br />

La Suisse était représenté, notamment,<br />

par F. Labhardt (700 observations<br />

<strong>de</strong> février 1953 à février 1955)<br />

qui avait employé le Largactil lors <strong>de</strong><br />

schizophrénies d’évolution ancienne et<br />

H. Steck qui a rendu compte <strong>de</strong> son<br />

expérience concernant la réserpine pour<br />

insister, plus particulièrement, sur les<br />

effets secondaires neurologiques.<br />

Le fait que ces <strong>de</strong>rniers étaient observés<br />

chez <strong>de</strong>s patients non psychotiques est<br />

apparu comme important alors q’un<br />

rapprochement sur le plan clinique était<br />

fait avec l’encéphalite épidémique.<br />

Manfred Bleuler a pu rendre compte<br />

<strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong> la réserpine rendue disponible<br />

et isolée par Ciba, sous le nom<br />

<strong>de</strong> Serpasil, emploi induit par <strong>de</strong>s publications<br />

montrant que la prescription<br />

<strong>de</strong> l’alcaloï<strong>de</strong> <strong>de</strong> Rauwolfia « avait calmé<br />

quelques artério-sclérotiques agités sans<br />

les faire dormir ». Les anglais étaient<br />

peu nombreux avec notamment, D.L.<br />

Davies, L. Rees, D.B. Watt (était-ce un<br />

effet <strong>de</strong> leur scepticisme vis à vis <strong>de</strong>s<br />

français ?) alors que leur apport a été<br />

surtout marqué par un apport métho-<br />

<br />

LIVRES<br />

HISTOIRE 9<br />

Observations sur la<br />

phrénologie<br />

1818<br />

G. Spurzheim<br />

Préface <strong>de</strong> Serge Nicolas<br />

L’Harmattan, 36 €<br />

C’est en 1800 que J. G. Spurzheim<br />

(1776-1832) est <strong>de</strong>venu l’élève <strong>de</strong><br />

Franz Joseph Gall. L’ayant suivi à Paris<br />

pour répandre la doctrine phrénologique,<br />

son nom a été associé à<br />

l’œuvre <strong>de</strong> son maître avec qui il se<br />

brouillera. Mais c’est Spurzheim qui<br />

répand le système <strong>de</strong> Gall dans les<br />

pays anglo-saxons. En 1815, il a fait<br />

éditer un gros ouvrage en langue anglaise<br />

qui lui sert <strong>de</strong> référence pour<br />

son enseignement. Propagateur du<br />

mot phrénologie, il l’utilise la première<br />

fois, trois ans plus tard, dans<br />

le titre <strong>de</strong> l’ouvrage réédité ici. Ce livre<br />

propose un autre système phrénologique<br />

différent <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> Gall qui<br />

va obtenir un succès considérable en<br />

France et à l’étranger.<br />

Toutes les fonctions avec connaissance<br />

qui ont lieu chez l’homme peuvent<br />

être divisées en <strong>de</strong>ux ordres :<br />

les unes sont simplement affectives,<br />

les autres intellectuelles. Mais ces<br />

<strong>de</strong>ux ordres peuvent être subdivisés<br />

en plusieurs genres. Certaines facultés<br />

affectives ne donnent qu’un désir,<br />

une inclination ou un penchant,<br />

ou bien ce qu’on appelle instinct chez<br />

les animaux. Ces facultés sont presque<br />

soustraites à la volonté et sont appelées<br />

penchants. D’autres facultés<br />

affectives ne sont pas bornées à un<br />

simple penchant, mais elles éprouvent<br />

quelque chose <strong>de</strong> plus ; c’est ce<br />

qu’on nomme sentiment. L’amourpropre<br />

ou la circonspection peuvent<br />

servir d’exemples. Le second ordre<br />

<strong>de</strong>s facultés renferme celles <strong>de</strong> l’enten<strong>de</strong>ment,<br />

ce sont les facultés intellectuelles.<br />

On peut les subdiviser en<br />

trois genres. Quelques-unes appartiennent<br />

aux sens extérieurs ; d’autres<br />

sont <strong>de</strong>stinées à faire connaître aux<br />

animaux et à l’homme les objets extérieurs,<br />

leurs qualités et leurs relations<br />

; elles sont nommées perceptives.<br />

D’autres, encore, agissent sur<br />

toutes les sortes <strong>de</strong> sensations et <strong>de</strong><br />

connaissances, sous le nom <strong>de</strong> facultés<br />

réflectives.<br />

Troubles bipolaires :<br />

pratiques, recherches et<br />

perspectives<br />

Coordonné par M. Leboyer<br />

John Libbey Eurotext<br />

Dans sa préface, D. Widlöcher relève<br />

que : « La maladie bipolaire apparaît<br />

aujourd’hui dans sa parfaite autonomie<br />

nosologique aussi distincte <strong>de</strong>s<br />

états dissociatifs que <strong>de</strong>s troubles névrotiques.<br />

Son intérêt est même qu’elle<br />

se situe à la croisée <strong>de</strong>s chemins. Trouble<br />

primaire <strong>de</strong>s régulations émotionnelles<br />

et motivationnelles, elle peut montrer<br />

dans les cas graves <strong>de</strong>s formes cliniques<br />

qui, d’un point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>scriptif, peuvent<br />

présenter <strong>de</strong>s altérations <strong>de</strong> type<br />

délirant, donc psychotique. A l’inverse,<br />

les turbulences émotionnelles qu’il crée<br />

viennent, dans les formes subaiguës,<br />

se mêler et donner une coloration clinique<br />

particulière aux difficultés existentielles,<br />

cause ou effet selon les cas<br />

et le poids <strong>de</strong>s déterminismes biologiques<br />

ou psychologiques ».<br />

C’est ce qu’illustre ce livre dont la première<br />

partie décrit la clinique <strong>de</strong>s<br />

troubles bipolaires, aussi bien dans<br />

leur ensemble que dans les formes<br />

cliniques récemment individualisées.<br />

La secon<strong>de</strong> partie décline les différentes<br />

stratégies thérapeutiques et<br />

leurs indications.<br />

La troisième partie fait le point sur<br />

les différents résultats <strong>de</strong> recherches<br />

dans les domaines <strong>de</strong> la neurobiologie,<br />

<strong>de</strong> la génétique, <strong>de</strong>s facteurs<br />

environnementaux, <strong>de</strong>s aspects cognitifs<br />

et <strong>de</strong> l’Imagerie cérébrale.


10<br />

LIVRES<br />

HISTOIRE<br />

Le Lion <strong>de</strong> Florence<br />

Sur l’imaginaire <strong>de</strong>s fondateurs <strong>de</strong><br />

la psychiatrie, Pinel (1745-1826)<br />

et Itard (1774-1838)<br />

Thierry Gineste<br />

Albin Michel, 22 €<br />

Chose attendue, promise, due… Essai<br />

transformé : Le Lion <strong>de</strong> Florence. Une<br />

monographie. Une page d’histoire. Mais<br />

aussi un livre d’auteur. Psychiatre, cofondateur<br />

<strong>de</strong> la Société internationale<br />

d’histoire <strong>de</strong> la psychiatrie et <strong>de</strong> la psychanalyse,<br />

Thierry Gineste est l’auteur<br />

<strong>de</strong> Victor <strong>de</strong> l’Aveyron, <strong>de</strong>rnier enfant<br />

sauvage, premier enfant fou (Hachette,<br />

2004). Fidèle aux travaux qu’il mène et<br />

aux réflexions qui l’animent, Gineste<br />

commence par une question sans fin :<br />

pourquoi le bon Itard disposa-t-il dans<br />

sa salle à manger ce tableau : le fameux<br />

Lion <strong>de</strong> Florence ? Pourquoi un fauve qui<br />

dévore un nourrisson, au vue et sous<br />

les cris <strong>de</strong> sa mère ? Quant à Pinel, l’autre<br />

grand fondateur mythique <strong>de</strong>s arts psychiatriques,<br />

par quelle étrange coïnci<strong>de</strong>nce<br />

choisit-il en guise <strong>de</strong> décor pour<br />

son salon, une gravure représentant un<br />

jeune homme anorexique « d’amour » :<br />

La Maladie d’Antiochus ? Au commencement,<br />

le fil donc d’une double énigme.<br />

Toute recherche tourne autour d’un<br />

point aveugle. Alors, vous me direz, à<br />

chacun ses raisons, ses goûts, ses couleurs,<br />

ses zones d’ombres. Pinel, Itard,<br />

Gineste… Il y a l’histoire, les petites histoires<br />

et les gran<strong>de</strong>s. Sans parler du<br />

reste, plus ou moins inaccessible. Une<br />

question d’imagination, d’initiation, <strong>de</strong><br />

méditation, <strong>de</strong> composition… Car l’intérieur,<br />

le lieu « <strong>de</strong> vie », est aussi ce livre<br />

entrouvert, où chaque détail voile et<br />

dévoile, en même temps, ses parcelles<br />

<strong>de</strong> vérité, offrant aux regards silencieux<br />

ses lumières et ses ombres par bribes.<br />

Thierry Gineste analyse ainsi pru<strong>de</strong>mment,<br />

à distance raisonnable, comment<br />

les fantasmes <strong>de</strong> Pinel et d’Itard se conjuguent<br />

sur la scène <strong>de</strong> leur théâtre intime.<br />

Composition, décomposition, recomposition…<br />

Sans oublier les convictions<br />

messianiques qui animent nombres <strong>de</strong><br />

« grands hommes ». Rêves <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>ur<br />

dont naturellement le meurtre, le suici<strong>de</strong>,<br />

la séduction et la transgression ne<br />

sont pas absents… « Confi<strong>de</strong>nces partielles<br />

et simplement balbutiées, presque<br />

inaudibles, aux limites <strong>de</strong> l’enten<strong>de</strong>ment,<br />

souffle <strong>de</strong> l’invisible, chuchotements <strong>de</strong>s<br />

cœurs éclairant pourtant l’opaque ». L’auteur<br />

cherche à débusquer les fils du <strong>de</strong>stin<br />

immortalisés par ces héros visionnaires,<br />

à leur insu, à travers l’excès et<br />

le malheur, la solitu<strong>de</strong>, le mystère. Quant<br />

à la vérité biographique, nous savons<br />

bien ce qu’il en est… Il se pourrait, en<br />

outre, que les folies sanguinaires <strong>de</strong> la<br />

terreur, dont Pinel (révolutionnaire <strong>de</strong><br />

la mé<strong>de</strong>cine) et Itard (révolutionnaire<br />

<strong>de</strong> la psychothérapie) furent les témoins<br />

impuissants, les aient convaincus <strong>de</strong><br />

l’intrication profon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la raison et <strong>de</strong><br />

la folie dans la vie psychique, au cœur<br />

<strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s civilisations. Une interrogation<br />

tenace et un cauchemar obsédant.<br />

De l’archéologie <strong>de</strong> la raison<br />

aux logiques délirantes. Et réciproquement.<br />

Bien sûr, nul ne saurait ignorer à<br />

quel point l’imaginaire <strong>de</strong>s « aliénés »,<br />

comme celui <strong>de</strong>s génies invite à se défaire<br />

<strong>de</strong>s folies <strong>de</strong> la raison pure, du trop<br />

sérieux, du bien pensant… Se laisser<br />

prendre à condition <strong>de</strong> s’en déprendre.<br />

Cette nécessité interminable d’un travail<br />

<strong>de</strong> l’imaginaire à laquelle renvoie<br />

la citation <strong>de</strong> Daniel Arasse (On n’y voit<br />

rien, Denoël), choisie par l’auteur en<br />

guise d’exergue. Le travail salvateur <strong>de</strong>s<br />

rêves, partout, tout le temps, enfin quand<br />

ça n’est pas impossible, trop tard : « Vous<br />

ne voyez rien dans ce que vous regar<strong>de</strong>z.<br />

Ou, plutôt, dans ce que vous voyez, vous<br />

ne voyez pas ce que vous regar<strong>de</strong>z, ce<br />

pour quoi, dans l’attente <strong>de</strong> quoi vous regar<strong>de</strong>z<br />

: l’invisIble venu dans la vision ».<br />

Avec Le Lion <strong>de</strong> Florence, justement, on<br />

aurait tendance à apprendre à y voir<br />

un peu plus clair, petit à petit… Au fur<br />

et à mesure <strong>de</strong>s pages qui se tournent<br />

d’elle-même, comme notre regard qui<br />

s’en échappe pour se laisser aller à imaginer.<br />

L’iconographie <strong>de</strong> l’ouvrage en-<br />

richit notre regard, en le projetant ailleurs,<br />

entre les mots et les images, à mi-chemin,<br />

comme dans les rêves. Les souvenirs<br />

se nouent et se dénouent au gré<br />

<strong>de</strong>s images intempestives qui nous sont<br />

proposées : Hippocrate refusant les ca<strong>de</strong>aux<br />

d’Artaxercès, Le songe <strong>de</strong> Saint<br />

Bruno, La résurrection <strong>de</strong> Raymond Diocrès,<br />

Paysage orageux avec Pyrame et<br />

Thisbé, Repos pendant la fuite en Egypte,<br />

Phèdre et Hippolyte, Et in Arcadia ego,<br />

Bélisaire <strong>de</strong>mandant l’aumône, Le sommeil<br />

d’Endymion… Des noms, une narration,<br />

<strong>de</strong>s images multiples. Croisements<br />

<strong>de</strong> représentations et d’affects,<br />

même entre les lignes, longtemps après.<br />

L’idée, souvent reprise par Malraux, d’un<br />

musée absolument imaginaire, unique<br />

à chacun. Comme la translation lente<br />

d’un paravent qui ouvrirait sur un espace<br />

transitionnel sans limite. À la mesure<br />

<strong>de</strong> l’opacité qui habite chacun <strong>de</strong>s<br />

protagonistes <strong>de</strong> l’affaire… Ainsi « apparaîtront<br />

peut-être, <strong>de</strong>rrière les images<br />

i<strong>de</strong>ntificatoires idéales mais conformistes<br />

dont la facticité, aveugle et asservit, d’autres<br />

images, celles surgies d’un horizon inconnu<br />

et toujours plus vaste, qu’explore le traitement<br />

<strong>de</strong>s fous compris comme questionnement<br />

sans fin sur la naissance et la<br />

construction <strong>de</strong> la vie psychique » (p.186).<br />

Un archipel d’image. Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s légen<strong>de</strong>s<br />

; <strong>de</strong>s êtres <strong>de</strong> chair et d’os. Une<br />

trace, plusieurs, au loin. Comme l’impression<br />

d’exister. Peut-être. C’est déjà<br />

ça. Au cœur <strong>de</strong>s histoires officielles, un<br />

peu <strong>de</strong> vérité, oblique ? Avec Le Lion <strong>de</strong><br />

Florence, prenons la tangente, avec joie.<br />

Ch. Paradas<br />

Graphologie et recrutement<br />

Marcelle Desurvire<br />

Préface <strong>de</strong> Ma<strong>de</strong>leine Béchu<br />

L’Harmattan, 24 €<br />

Cet ouvrage explique comment la graphologie<br />

est insérée dans le processus<br />

<strong>de</strong> recrutement, quels sont ses repères<br />

techniques, ses apports et ses limites,<br />

ses points <strong>de</strong> jonction avec d’autres approches<br />

<strong>de</strong> la personnalité, et les problèmes<br />

qui se posent au recruteur. Ce<br />

manuel insiste sur la rigueur nécessaire<br />

au métier <strong>de</strong> graphologue, qui <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

une expérience technique et humaine<br />

pour s’exercer avec sérieux, et sur le fait<br />

qu’une étu<strong>de</strong> graphologique professionnelle<br />

est centrée sur la personnalité<br />

engagée dans son métier : elle en<br />

évalue le comportement le plus probable<br />

en situation <strong>de</strong> travail, et apporte<br />

un éclairage parmi d’autres.<br />

Henri Sellier, urbaniste et<br />

réformateur social<br />

Roger-Henri Guerrand et Christine<br />

Moissinac<br />

La Découverte, 20 €<br />

Cette biogtaphie d’envergure souligne<br />

la gran<strong>de</strong> originalité <strong>de</strong> Sellier : mû par<br />

un objectif <strong>de</strong> solidarité sociale, il a été<br />

un homme du quotidien, proche <strong>de</strong> ses<br />

administrés, ancré dans son territoire,<br />

minutieux dans ses directives, qui a toujours<br />

tenté, dans sa recherche <strong>de</strong> solutions<br />

pragmatiques d’élargir sa vision<br />

<strong>de</strong>s problèmes en s’entourant <strong>de</strong> spécialistes<br />

variés. Il fut le premier à associer,<br />

étroitement, les questions dé santé<br />

et d’habitat : la « défense sanitaire », et<br />

il fera <strong>de</strong> la ville <strong>de</strong> Suresnes, dont il <strong>de</strong>vient<br />

le maire en 1919, une vitrine. Ce<br />

souci l’a conduit à embrasser <strong>de</strong>s préoccupations<br />

touchant à l’ensemble <strong>de</strong><br />

la vie <strong>de</strong> ses administrés : soins attentifs<br />

à la petite enfance, allongement et<br />

diversification <strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>s jeunes,<br />

éducation populaire sous toutes ses<br />

formes, accompagnement <strong>de</strong>s plus âgés.<br />

Pour justifier les nombreuses mesures<br />

qu’il a initiées, il s’est appuyé sur une<br />

conception « scientiste » <strong>de</strong> ce que certains<br />

<strong>de</strong> ses conseillers dénommaient<br />

à l’époque le « milieu », en fait le terrain<br />

social. C’est ainsi que, au sein <strong>de</strong> l’Office<br />

départemental d’HBM créé à son<br />

initiative et dont il <strong>de</strong>vient l’administrateur<br />

délégué en 1914, comme dans<br />

ses interventions au Conseil général et<br />

surtout dans ses expériences d’élu municipal<br />

à Puteaux, puis à Suresnes, il a<br />

été conduit à imposer, parallèlement à<br />

la réalisation d’ensembles <strong>de</strong> logements,<br />

<br />

dologique (étu<strong>de</strong>s en double<br />

aveugle) relayé par W. Mayer-Gross.<br />

La participation nord-américaine a surtout<br />

été marquée par le canadien H.<br />

E. Lehmann amené à se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si le<br />

largactif était un sédatif au <strong>de</strong>là <strong>de</strong> son<br />

action réductrice sur la tension émotionnelle.Roger<br />

Ropert a rappelé que<br />

Jean Delay dans son exposé introductif<br />

a rendu hommage à Leriche, Reilly<br />

et Laborit qui « a découvert une métho<strong>de</strong>,<br />

l’hibernation artificielle dont les applications<br />

théoriques et pratiques sont d’un<br />

intérêt considérable » mais aussi « aux<br />

chimistes » ce qui était adressé aux travaux<br />

concernant les phénothiazines du<br />

centre <strong>de</strong> recherche Rhône-Poulenc. Il<br />

n’était pas fait mention <strong>de</strong>s tentatives<br />

antérieures <strong>de</strong> traitement par le phénergan<br />

(P.Guiraud) ou l’antergan (G. Daumezon<br />

et L. Cassan, Essai thérapeuthique<br />

abortive d’accès maniaco-dépressifs<br />

AMP, 1943, T2, p 432).<br />

Pour Jean Delay, les neuroleptiques<br />

s’opposent au concept <strong>de</strong> choc puisque<br />

les thérapeutiques <strong>de</strong> choc provoquent<br />

une réaction d’alarme, <strong>de</strong> défense, <strong>de</strong><br />

démobilisation mettant en jeu l’axe<br />

diencéphalo-hypophysaire alors que la<br />

« neurolepsie » induit « une sorte <strong>de</strong><br />

démobilisation, une réaction <strong>de</strong> détente ».<br />

La cure neuroleptique ne se confond ni<br />

avec la cure <strong>de</strong> sommeil (le sujet ne<br />

dort pas), ni avec l’hibernation artificielle<br />

(même si l’objectif est i<strong>de</strong>ntique<br />

car il n’y a pas une diminution <strong>de</strong> la<br />

température centrale).<br />

Les termes <strong>de</strong> narcolepsie et <strong>de</strong> neuroleptique<br />

ont été proposés en référence<br />

à Pierre Janet « qui avait créé la<br />

notion <strong>de</strong> psycholepsie pour désigner la<br />

chute <strong>de</strong> la tension psychologique ». La<br />

clarté d’analyse et d’expression <strong>de</strong> Jean<br />

Delay est apparue, une fois <strong>de</strong> plus<br />

évi<strong>de</strong>nte et a rallié l’ensemble <strong>de</strong>s participants<br />

: « ces médicaments sont neuroleptiques<br />

grâce à une prégnance particulière<br />

sur les centres nerveux<br />

régulateurs du tonus mental ; ils ne sont<br />

pas à proprement parler neuroplégiques,<br />

car cette <strong>de</strong>rnière expression convient à<br />

une action frappante et paralysante dont<br />

d’autres drogues sont beaucoup plus<br />

représentatives ».Pour ce qui avait pu<br />

être considéré comme une trouvaille<br />

et qui ne relevait certainement pas du<br />

hasard, le colloque s’était donné les<br />

objectifs suivants : indications et contreindications,<br />

comparaison avec les autres<br />

métho<strong>de</strong>s, comparaison <strong>de</strong>s neuroleptiques<br />

entre eux, effets neuro-physiologiques<br />

et psycho-physiologiques et,<br />

enfin, hypothèses sur les mo<strong>de</strong>s d’action.<br />

Un accord s’est fait sur <strong>de</strong> nombreux<br />

points :<br />

- une activité reconnue sur les psychoses<br />

aiguës et chroniques,<br />

- une posologie <strong>de</strong> 300 à 500 mg,<br />

- une modalité d’emploi marquée par<br />

la voie intramusculaire dans un premier<br />

temps relayée, au bout <strong>de</strong> 15 à 20<br />

jours, par la voie orale,<br />

- le traitement doit être prolongé et<br />

peut être interrompu.<br />

Si l’accent était mis sur les psychoses<br />

aiguës et les états d’acuité, certains<br />

aspects ont été abordés comme l’intérêt<br />

<strong>de</strong> l’ergothérapie par P. Sivadon à<br />

<strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> vie dont il espérait qu’elles<br />

assureraient l’épanouissement physique,<br />

intellectuel et moral <strong>de</strong> chacun.<br />

Pour Sellier, l’accompagnement <strong>de</strong>s familles<br />

et la construction <strong>de</strong> logements<br />

allaient dans le même sens, et c’est pourquoi,<br />

pleinement compris par ses auxiliaires<br />

médico-sociales, Sellier le sera<br />

aussi par une équipe <strong>de</strong> jeunes architectes<br />

adhérant à son idéal. Inspirés par<br />

le modèle britannique <strong>de</strong>s cités-jardins,<br />

ils feront surgir ensemble, en banlieue<br />

parisienne, <strong>de</strong>s ensembles mariant<br />

formes rurales et urbaines.<br />

Grâce à Sellier, l’Office départemental<br />

<strong>de</strong>s habitations à bon marché <strong>de</strong>viendra<br />

le lea<strong>de</strong>r en France en matière <strong>de</strong><br />

constructions sociales. Il n’oubliera pas<br />

- et il sera le premier homme politique<br />

à y penser - <strong>de</strong> le flanquer d’un Office<br />

d’hygiène, départemental lui aussi, mais<br />

relayé dans nombre <strong>de</strong> municipalités,<br />

partir <strong>de</strong> l’expérience du CTRS <strong>de</strong> Ville-<br />

Evrard (« chaque fois que nous avons<br />

donné du largactil à un mala<strong>de</strong> sans<br />

réussir à l’occuper d’une façon suffisamment<br />

stable dans un atelier ou une<br />

équipe, les résultats ont été très décevants<br />

»), la transformation <strong>de</strong>s conditions<br />

d’hospitalisation par L. Leguillant<br />

(« leur emploi sur une large échelle permet<br />

<strong>de</strong> transformer certains services ou<br />

certains quartiers, d’y faire régner une<br />

autre atmosphère »), la cure <strong>de</strong> sommeil<br />

collective potentialisée par le Largactil<br />

par H. Ey et H. Faure.<br />

Ces <strong>de</strong>rniers étaient amenés à relever<br />

que « la Chlorpromazine a fait naître et<br />

a déjà justifié <strong>de</strong> grands espoirs. Elle n’est<br />

pas encore <strong>de</strong>venue la « panacée » « l’aspirine<br />

psychiatrique », et on ne saurait à<br />

cet égard être assez méfiant contre son<br />

emploi <strong>de</strong> routine dispensant <strong>de</strong> recourir<br />

à la clinique ». La réponse <strong>de</strong> Jean Delay<br />

ne se fit pas attendre : « Mon ami Henri<br />

Ey a justement critiqué cette notion <strong>de</strong>s<br />

« aspirines psychiatriques », mais je ne me<br />

permettrai <strong>de</strong> faire remarquer que l’aspirine<br />

est un grand médicament et que<br />

nous voudrions bien pouvoir disposer en<br />

psychiatrie <strong>de</strong> quelques « aspirines ».<br />

Le renoncement à certaines techniques<br />

associées n’était pas acquis alors que,<br />

rapi<strong>de</strong>ment, les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> réhabilitation<br />

ont pu être mises en avant du fait<br />

<strong>de</strong> conséquences considérables sur les<br />

hôpitaux psychiatriques, les personnels,<br />

où le personnel <strong>de</strong>s « visiteuses », nouveaux<br />

acteurs sociaux que <strong>de</strong>s femmes<br />

ont inventés à la fin du XIX e siècle, enseigne<br />

à la population ouvrière les règles<br />

d’une vie saine qui lui permettront d’accé<strong>de</strong>r<br />

à la « bonne santé » réservée jusquelà<br />

à la bourgeoisie.<br />

Pendant une longue pério<strong>de</strong>, <strong>de</strong> ses années<br />

<strong>de</strong> maturité jusqu’après son accession<br />

au poste <strong>de</strong> ministre <strong>de</strong> la Santé<br />

du premier gouvernement Blum, il a défendu<br />

une approche transversale <strong>de</strong><br />

l’homme et son souci sera, continuellement,<br />

d’ériger <strong>de</strong>s passerelles entre<br />

<strong>de</strong>s disciplines scientifiques en lesquelles<br />

il a confiance et l’action municipale touchant<br />

à la santé, l’éducation, l’habitat,<br />

les loisirs et les déplacements. Il saura,<br />

dans son action ministérielle, faire appel<br />

à toutes les forces même privées<br />

afin <strong>de</strong> mettre en place une coordina-<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

d’une coopération <strong>de</strong>venue possible<br />

avec les généralistes et d’une transformation<br />

possible <strong>de</strong> la vision <strong>de</strong> l’opinion<br />

publique vis-à-vis <strong>de</strong> la maladie<br />

mentale. Les apports <strong>de</strong>s psychiatres<br />

<strong>de</strong>s hôpitaux psychiatriques ont représenté<br />

une donnée importante, ne seraitce<br />

qu’en relation avec le nombre considérable<br />

<strong>de</strong>s patients traités (1400, par<br />

exemple, pour Le Vinatier et Bassens).<br />

La revue <strong>de</strong> la littérature menée par<br />

P.A. Lambert, A. Die<strong>de</strong>richs et M. Toulet<br />

indique « un nombre réduit <strong>de</strong>s acci<strong>de</strong>nts<br />

signalés en face <strong>de</strong> l’extension d’une<br />

thérapeutique sortie <strong>de</strong>s laboratoires français<br />

il y a à peine trois ans » (environ 5<br />

millions <strong>de</strong> patients). Si le syndrome<br />

pseudo-parkinsonien « qui n’est contesté<br />

que par Baruk », était connu <strong>de</strong>puis<br />

le symposium suisse <strong>de</strong> 1953 sur la<br />

chlorpromazine, il a fallu attendre<br />

1959/60 pour que soient rapportés le<br />

syndrome malin et les dyskinésies tardives<br />

(J. Sigwald).<br />

Ce symposium, animé en partie par<br />

<strong>de</strong>s témoins et acteurs directs, a fait<br />

revivre <strong>de</strong> façon particulièrement vivante<br />

les interrogations qui ont accompagné<br />

la diffusion si rapi<strong>de</strong> du premier<br />

neuroleptique. Ces interrogations permettent,<br />

encore aujourd’hui, <strong>de</strong> percevoir<br />

ce que l’intuition clinique associée<br />

à une volonté thérapeutique est<br />

capable d’induire. <br />

Gérard Massé<br />

tion indispensable en matière <strong>de</strong> santé.<br />

L’expérience ministérielle sera, pour lui,<br />

brève et en partie décevante faute <strong>de</strong><br />

moyens financiers et <strong>de</strong> véritable soutien<br />

gouvernemental. En conséquence,<br />

dans les <strong>de</strong>rnières années <strong>de</strong> sa vie, Sellier,<br />

se repliant sur Suresnes, sa « villelaboratoire<br />

», va chercher <strong>de</strong>s appuis différents,<br />

parfois étonnants, mettant ainsi<br />

en cause certaines <strong>de</strong> ses exigences. Il<br />

restera néanmoins, dans les heures<br />

graves <strong>de</strong> la guerre et <strong>de</strong> l’Occupation,<br />

un élu présent, courageux et prenant<br />

<strong>de</strong>s risques dont certains lui coûteront<br />

cher, puisqu’il sera incarcéré à <strong>de</strong>ux reprises.<br />

Cet homme au parcours si singulier,<br />

provincial venu à Paris pour <strong>de</strong>s<br />

étu<strong>de</strong>s commerciales, puis banlieusard<br />

profondément attaché aux communes<br />

« suburbaines », <strong>de</strong>meure d’une actualité<br />

évi<strong>de</strong>nte.


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Racisme, xénophobie, guerres <strong>de</strong><br />

religions (celle du pétro-dollar ou<br />

d’autres)… autant <strong>de</strong> terrorismes<br />

régnant sur un ailleurs <strong>de</strong> moins en<br />

moins lointain.<br />

Mais, si le terrorisme peut ainsi sembler<br />

<strong>de</strong>venir nôtre, n’est-ce pas qu’intolérance<br />

et rejet n’ont jamais cessé <strong>de</strong><br />

nous habiter ?<br />

Le terroriste est-il l’Autre ?<br />

La reconnaissance <strong>de</strong> l’altérité, premier<br />

motif <strong>de</strong> l’altruisme, en est aussi sa plus<br />

amère limite. A ce point <strong>de</strong> non-retour,<br />

à tout moment, d’un geste bref, sans<br />

même y penser en vérité, nous savons<br />

faire basculer l’Autre du côté <strong>de</strong> l’ennemi,<br />

du No man’s land.<br />

Ainsi, ici, au quotidien <strong>de</strong> l’êtreensemble<br />

dans un pays non sans misère<br />

mais sans terreur, dans les institutions<br />

dévolues à la santé <strong>de</strong> tous, au<br />

cœur <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong>s soins, parmi<br />

les êtres pensants acteurs responsables<br />

du système d’entrai<strong>de</strong>, existe aussi la<br />

violence interpersonnelle.<br />

Nous n’évoquerons pas ici les vécus<br />

qu’associations <strong>de</strong> familles et/ou <strong>de</strong><br />

patients, et avec eux un certain nombre<br />

<strong>de</strong> professionnels, questionnent régulièrement<br />

qu’il s’agisse <strong>de</strong> la violence<br />

<strong>de</strong>s contextes d’urgence, <strong>de</strong> privation<br />

<strong>de</strong> liberté ou, encore, <strong>de</strong> celle inhérente<br />

au dilemme « surveiller ou punir ».<br />

Nous ne développerons pas plus le<br />

problème <strong>de</strong> la rivalité pourvant parfois<br />

confiner à la violence <strong>de</strong>s trois corps<br />

oeuvrant avec <strong>de</strong>s logiques non superposables<br />

au sein <strong>de</strong>s institutions <strong>de</strong> soin<br />

(les administratifs, les mé<strong>de</strong>cins, les soignants)<br />

(1).<br />

Nous nous tournerons vers une dimension<br />

pouvant, pourtant, participer <strong>de</strong>s<br />

précé<strong>de</strong>ntes, une dimension moins<br />

débattue encore si possible, une dimension<br />

<strong>de</strong> polémique interne (du grec<br />

polèmos : la guerre) au mon<strong>de</strong> médical<br />

et à laquelle l’actualité confère une<br />

double forme, partiellement intriquée :<br />

le statut <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins étrangers et la<br />

formation <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins français.<br />

Formations initiales et formation continue.<br />

I<strong>de</strong>ntité et différence.<br />

Un sujet qui fâche.<br />

Le statut <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins étrangers : pour<br />

ne citer qu’un seul axe <strong>de</strong> cette vaste<br />

question, notons avec soulagement que<br />

les mé<strong>de</strong>cins diplômés hors <strong>de</strong> l’Union<br />

européenne, 3000 en situation illégale<br />

dans les hôpitaux recensés fin 2003,<br />

ont aperçu « le bout du tunnel » avec la<br />

publication en 2004 d’un décret attendu<br />

<strong>de</strong>puis 1999, fixant une nouvelle<br />

procédure <strong>de</strong> recrutement.<br />

Réactions françaises exprimées ? Les<br />

unes accueillent « positivement » la « normalisation<br />

» <strong>de</strong> leurs confrères et espèrent<br />

même que la France puisse attirer<br />

<strong>de</strong>s praticiens « extra-communautaires<br />

<strong>de</strong> qualité, ayant un projet professionnel<br />

particulier » ; les autres s’inquiètent et ne<br />

voudraient pas « que ces praticiens se<br />

retrouvent perdus dans la nature pendant<br />

trois ans [durée <strong>de</strong>s stages obligatoires<br />

après épreuves théoriques], dans<br />

<strong>de</strong>s services où ils sont mal encadrés et où<br />

ils servent <strong>de</strong> bouche-trous » (2).<br />

Tout n’est peut-être pas dit.<br />

Un second point, potentiellement éclairant<br />

: les diplômes <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins européens.<br />

L’Arrêté du 30 juin 2004 (3 a)<br />

fait suite au Décret 19 mars 2004<br />

(3 b)<br />

et actualise les conditions dans lesquelles<br />

les mé<strong>de</strong>cins diplômés « <strong>de</strong><br />

l’Union européenne et <strong>de</strong> la confédération<br />

suisse ou <strong>de</strong> l’espace économique européen<br />

» peuvent instruire un dossier<br />

visant à la « reconnaissance mutuelle <strong>de</strong>s<br />

diplômes certificats et autres titres <strong>de</strong><br />

mé<strong>de</strong>cins ». Sans pouvoir envisager ici le<br />

<strong>de</strong>venir <strong>de</strong>s français entamant <strong>de</strong> telles<br />

démarches hors <strong>de</strong> l’hexagone, précisons<br />

un peu le champ ainsi ouvert.<br />

Le même texte met, en effet, à jour<br />

les « commissions <strong>de</strong> qualification » non<br />

seulement pour les « européens » non<br />

français en France, mais aussi, s’agissant<br />

<strong>de</strong>s français, pour les généralistes<br />

souhaitant une « reconnaissance »<br />

comme spécialistes ainsi que pour les<br />

L’Autre, ce Sujet qui fâche<br />

spécialistes souhaitant aussi être « reconnus<br />

» dans l’exercice d’une autre spécialité<br />

que leur spécialité d’origine.<br />

Le Bulletin <strong>de</strong> l’Ordre <strong>de</strong>s Mé<strong>de</strong>cins<br />

faisait état dès le mois <strong>de</strong> mai 2004<br />

(avant même l’Arrêté) <strong>de</strong> l’évolution<br />

<strong>de</strong> ce qu’il dénommait alors une « bouffée<br />

d’oxygène » en avançant le chiffre<br />

d’environ 900 <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> changement<br />

<strong>de</strong> spécialité déposées par les<br />

mé<strong>de</strong>cins « nouveau régime » concernés<br />

auprès <strong>de</strong>s conseils départementaux<br />

(4 a). Il a très vite été question <strong>de</strong><br />

plusieurs milliers <strong>de</strong> dossiers.<br />

Dans les faits, sur le terrain, quelle place<br />

pour les transfuges, les mutants, les<br />

Autres ?<br />

Là où l’on s’autorise à noter, selon un<br />

éclairage tangentiel à cette difficile question<br />

issue cependant <strong>de</strong> la pratique<br />

quotidienne, qu’entre psychiatres et<br />

urgentistes, les différences <strong>de</strong> « culture »<br />

ren<strong>de</strong>nt les partenariats « laborieux » (5),<br />

et ceci pour <strong>de</strong>s exercices a priori non<br />

divergents, en règle différents, au mieux<br />

complémentaires, est-on prêt à questionner<br />

les écarts <strong>de</strong> « culture » ou <strong>de</strong><br />

« représentations » ou encore <strong>de</strong> « pratiques<br />

» entre <strong>de</strong>s professionnels diversement<br />

formés pour le même exercice<br />

?<br />

Sans doute, les réflexes i<strong>de</strong>ntitaires <strong>de</strong>s<br />

professionnels français se trouvent-ils<br />

enracinés dans la valorisation sociale<br />

<strong>de</strong>s diplômes en général, <strong>de</strong> la quantité<br />

d’années requise pour y accé<strong>de</strong>r en<br />

particulier (l’on rappellera pour simple<br />

illustration la désaffection française pour<br />

les filières scolaires courtes avec, pour<br />

corrélat, le taux d’échec majeur chez les<br />

trop nombreux étudiants en première<br />

année d’université<br />

(6 a, 6 b)).<br />

Vient s’y adjoindre une culture <strong>de</strong> l’autosatisfaction<br />

reprise à nouveau frais<br />

par la société post-mo<strong>de</strong>rne, qui après<br />

le désenchantement du mon<strong>de</strong> et la<br />

perte <strong>de</strong>s figures classiques d’autorité, se<br />

précise <strong>de</strong>puis quelques décennies sous<br />

la forme <strong>de</strong> nouveaux pouvoirs (7).<br />

A nouveau frais aujourd’hui en ce que<br />

ces polémiques internes au mon<strong>de</strong><br />

médical voient se confronter <strong>de</strong>s professionnels<br />

ayant <strong>de</strong>s formations initiales<br />

différentes et <strong>de</strong>s formations continues<br />

diverses dont le décret et l’arrêté<br />

cités plus haut envisagent cependant<br />

que la somme puisse autoriser la même<br />

qualité d’exercice.<br />

Le passage d’une valorisation première<br />

<strong>de</strong> la quantité (nombre d’années<br />

d’étu<strong>de</strong>s), mais aussi <strong>de</strong> l’homogénéité<br />

[la bonne formation est-elle celle <strong>de</strong> la<br />

majorité ? celle <strong>de</strong>s usages et <strong>de</strong>s traditions<br />

(pour ne rien dire du conservatisme)<br />

? …celle <strong>de</strong> la pensée<br />

unique ?] à une reconnaissance principielle<br />

<strong>de</strong> la qualité [celle qui reste à<br />

évaluer] suppose d’intégrer l’altérité<br />

non plus comme limite mais comme<br />

ouverture.<br />

Ce qui suscite d’autant plus <strong>de</strong> résistance<br />

que l’autosatisfaction post-mo<strong>de</strong>rne<br />

du petit mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé française<br />

s’enorgueillit en l’état d’exercer « la<br />

meilleure mé<strong>de</strong>cine » et donc <strong>de</strong> détenir<br />

les « meilleurs mé<strong>de</strong>cins du mon<strong>de</strong> ».<br />

Or, c’est peut-être vrai, mais tout bonnement<br />

« présentement impossible à<br />

prouver » (8).<br />

Pouvons-nous alors au moins envisager<br />

avoir « le meilleur programme <strong>de</strong><br />

formation <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins » ? Las, il semble<br />

bien que ce dont atteste la formation<br />

initiale, c’est au plus d’une « durée exacte<br />

» d’étu<strong>de</strong>s, et d’une certaine « qualité<br />

<strong>de</strong> la mémoire » pour répéter « par<br />

écrit ou oralement » ce que les « maîtres »<br />

ont dit (Ibid.).<br />

Savoir et pouvoir.<br />

Envisager que d’autres mo<strong>de</strong>s d’accès<br />

au savoir puissent permettre le même<br />

exercice, c’est donc bien participer <strong>de</strong><br />

la remise en question <strong>de</strong> l’hégémonie<br />

<strong>de</strong>s maîtres, <strong>de</strong> la puissance <strong>de</strong>s institutions,<br />

<strong>de</strong>s valeurs socio-politiques.<br />

En cela, il n’est pas étonnant qu’il ait<br />

fallu « plus <strong>de</strong> dix années <strong>de</strong> tergiversa-<br />

tions » (4 b) à la fois pour que la mission,<br />

rapportée par le Pr. Y. Matillon<br />

en août 2003 sur les « Modalités et<br />

conditions d’évaluation <strong>de</strong>s compétences<br />

professionnelles <strong>de</strong>s métiers <strong>de</strong> la<br />

santé » (9) soit possible et pour que le<br />

Décret du 14.11.2003 (10) pose le cadre<br />

général du dispositif <strong>de</strong> Formation<br />

Médicale Continue récemment précisé<br />

par Décret (11).<br />

Mais c’est peut-être ainsi que, là où les<br />

rencontres internationales formalisées<br />

lors <strong>de</strong>s colloques et <strong>de</strong>s congrès (12)<br />

constituaient une première arme essentielle<br />

au recul <strong>de</strong>s ostracismes « politiquement<br />

corrects » et à l’avancée au<br />

moins théorique d’une mondialisation<br />

sanitaire, la mise en place effective <strong>de</strong><br />

cette évaluation salutaire viendra un<br />

jour fournir la clé <strong>de</strong>s frontières intérieures.<br />

Car, envisager l’Autre sur le même lieu<br />

<strong>de</strong> travail, c’est-à-dire, littéralement,<br />

regar<strong>de</strong>r son visage, le regar<strong>de</strong>r en face,<br />

ça ne se décrète pas, ça ne s’organise<br />

pas.<br />

Envisager l’Autre dans son existence,<br />

ici professionnelle, c’est admettre par lui<br />

une relativisation <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong> son<br />

propre savoir, donc <strong>de</strong> son pouvoir,<br />

surtout si le dit pouvoir a une fonction<br />

structurante pour soi.<br />

Refus <strong>de</strong> la confusion <strong>de</strong> la fonction<br />

et <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité.<br />

Face à face avec le Sujet qui fâche.<br />

Et si vous choisissez <strong>de</strong> sortir <strong>de</strong> la<br />

confusion comme <strong>de</strong> la bêtise (13),<br />

quand vous pensez et agissez en personne,<br />

c’est-à-dire en sujet responsable,<br />

« quand vous n’avez plus <strong>de</strong> souci d’image<br />

ou <strong>de</strong> carrière, vous acquérez une<br />

insolite autonomie <strong>de</strong> pensée » (14).<br />

Et dès lors que vous êtes <strong>de</strong>venus autonomes<br />

(du grec auto-nomos : à soimême<br />

sa propre loi), envisager l’Autre<br />

comme co-laborateur, revient à l’instaurer<br />

comme son égal, et permet, en<br />

se connaissant à travers lui, <strong>de</strong> le « reconnaître<br />

» comme ce Sujet qui nous<br />

fait Sujet.<br />

Le Même.<br />

C’est bien là l’enjeu <strong>de</strong> ce que les psychiatres,<br />

s’ils savent critiquer leurs<br />

propres failles humaines et sociales, s’ils<br />

parviennent à mettre <strong>de</strong> côté leurs<br />

angoisses i<strong>de</strong>ntitaires par rapport aux<br />

autres spécialités, s’ils saisissent le renforcement<br />

possible <strong>de</strong> leur discipline<br />

singulière, « richesse et fragilité » face à<br />

ses nouvelles missions (15 a, 15 b), et ceci<br />

aussi grâce au partage avec <strong>de</strong>s collègues<br />

formés ailleurs ou autrement (16),<br />

peuvent sans doute assumer et peutêtre<br />

même promouvoir en mé<strong>de</strong>cine.<br />

Rendre un Salut qui instaure l’Autre en<br />

Sujet, donner un Salut qui prévient le<br />

terrorisme grâce à la déconstruction d’une<br />

<strong>de</strong> nos terreurs les plus souterraines, un<br />

« salut sans salvation, un imprésentable<br />

salut » (17). <br />

Armelle Grenouilloux*<br />

*<strong>Psychiatrie</strong> V Hôpital Saint-Jacques, 44093<br />

Nantes Ce<strong>de</strong>x 1.<br />

Bibliographie<br />

(1) MUCCHIELLI A, Soigner l’hôpital,<br />

Sciences Humaines, 1994, 44, 32-35.<br />

(2) CHARDON D, Intégration <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins<br />

à diplôme étranger. La nouvelle procédure<br />

<strong>de</strong> recrutement plutôt bien accueillie,<br />

Quotidien du Mé<strong>de</strong>cin, 16.06.2004,<br />

n°7561.<br />

(3) (a)Arrêté du 30 juin 2004 in J.O. du<br />

31.07.2004. portant règlement <strong>de</strong> qualification<br />

<strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins. (b) Décret n° 2004-<br />

252 du 19.03.2004 relatif aux conditions<br />

dans lesquelles les docteurs en mé<strong>de</strong>cine<br />

peuvent obtenir la qualification <strong>de</strong> spécialiste.<br />

(4) Le bulletin <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins ;<br />

mai 2004, n°5. (a) Des passerelles en cours<br />

<strong>de</strong> carrière, p.4 ; (b) F.M.C. le grand chantier<br />

est engagé, p.8-9.<br />

(5) CAROLI F, Laborieuse collaboration<br />

entre psychiatres et urgentistes, Le <strong>Journal</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>Nervure</strong>, septembre 2004, 6, 10.<br />

(6) (a) Rapport 2003 du Haut Conseil pour<br />

l’Evaluation <strong>de</strong> l’Ecole www.education.<br />

gouv.fr ; (b) Après le bac, étudiants et parents<br />

plébiscitent les filières sélectives, Le Mon<strong>de</strong>,<br />

19 juin 2004, p.10.<br />

(7) PONROY A., Des leçons d’il y a tout<br />

juste 30 ans…Vers une « alter-psychiatrie !<br />

A propos <strong>de</strong>… Le Pouvoir Psychiatrique <strong>de</strong><br />

Michel Foucault, Evol. psychiatr. 2004, 69,<br />

501-509.<br />

(8) GUILBERT J-J, « Nous avons les meilleurs<br />

mé<strong>de</strong>cins du mon<strong>de</strong> » C’est peut-être vrai<br />

mais pourriez-vous le prouver ?, Pédagogie<br />

Médicale 2002, 3, 4, 210-212.<br />

(9) MATILLON Y, Modalités et conditions<br />

d’évaluation <strong>de</strong>s compétences professionnelles<br />

<strong>de</strong>s métiers <strong>de</strong> la santé, Rapport <strong>de</strong> Mission<br />

au Ministre <strong>de</strong> la jeunesse, <strong>de</strong> l’Education<br />

nationale et <strong>de</strong> la recherche et au Ministre<br />

<strong>de</strong> la Santé, <strong>de</strong> la famille et <strong>de</strong>s Personnes<br />

handicapées, Août 2003.<br />

(10) Décret n°2003-1077 du 14.011.2003<br />

relatif aux conseils nationaux et au comité<br />

<strong>de</strong> coordination <strong>de</strong> la formation médicale<br />

continue prévus aux articles L.4133-3 et<br />

L.6155-2 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique.<br />

(11) Décret n°2005-346 du 14 avril 2005<br />

relatif à l’évaluation <strong>de</strong> pratiques professionnelles,<br />

J.O. du 15.04.05.<br />

(12) La psychiatrie française dans l’Europe et<br />

dans le mon<strong>de</strong>, Coord. J. GARRABÉ, H.<br />

SONTAG, httpp://psydoc-fr.broca.inserm.fr,<br />

mise à jour 18.03.2002.<br />

(13) GRENOUILLOUX A, De la bêtise,<br />

Act. Méd. Int.-<strong>Psychiatrie</strong> 2004, 6, 21.<br />

(14) CORDELIER J, Régis Debray contre<br />

la dictature du jeunisme, Le Point,<br />

14.10.2004, n°1674, 55-56.<br />

(15) (a) AUSSILLOUX Ch, Richesse et fragilité,<br />

Le Quotidien du Mé<strong>de</strong>cin, n° 7611spécial<br />

psychiatrie, 14.10.2004. (b) GRE-<br />

NOUILLOUX A, Psychosomatique et<br />

corporéité. Pour un abord phénoménologique<br />

<strong>de</strong> la question psychosomatique, Thèse <strong>de</strong><br />

Philosophie, 2005, Paris I-Panthéon-Sorbonne.<br />

(16) FERREY G, Psychiatres au rabais ? Mé<strong>de</strong>cins<br />

à diplômes étrangers boucs émissaires !,<br />

Le <strong>Journal</strong> <strong>de</strong> <strong>Nervure</strong> Mars 2005, XVII, 2,<br />

1-3.<br />

(17) Derrida. L’homme déconstruit, Libération<br />

11.10.2004, p.2-7.<br />

LIVRES<br />

HUMEUR 11<br />

Pluriel intérieur<br />

Variations sur le roman familial<br />

Jacqueline Rousseau-Dujardin<br />

L’Harmattan, 20 €<br />

Quelqu’un tenterait-il d’écrire son histoire<br />

en <strong>de</strong>s moments différents <strong>de</strong><br />

sa vie - c’est le cas du narrateur dans<br />

ce livre -, il constaterait que sa vision<br />

du passé, <strong>de</strong> son passé, n’est pas fixée<br />

une fois pour toutes : les événements<br />

vécus ne lui apparaissent pas sous le<br />

même jour, le rôle qu’il y a joué se<br />

transforme, les personnages qui l’ont<br />

entouré ne répon<strong>de</strong>nt plus exactement<br />

aux portraits d’abord tracés. La<br />

mémoire est vivante, sensible aux effets<br />

que le présent exerce sur elle.<br />

Avec le temps, elle travaille et fournit<br />

<strong>de</strong>s récits diversement composés,<br />

<strong>de</strong>s variations du roman familial,<br />

comme si l’on était plusieurs, successivement,<br />

à l’intérieur <strong>de</strong> soi.<br />

Jacqueline Rousseau-Dujardin est psychanalyste.<br />

Elle a publié plusieurs<br />

livres d’essais sur la psychanalyse :<br />

Couché par écrit, Tu as changé, Ce qui<br />

vient à l’esprit, L’imparfait du subjectif<br />

; en collaboration avec Françoise<br />

Escal, Musique et différence <strong>de</strong> sexes.<br />

Et un roman, L’Excursion.<br />

La polyphonie du paysage<br />

Publié sour la direction <strong>de</strong><br />

Yvan Droz<br />

Valérie Miéville-Ott<br />

Presses polytechniques et<br />

universitaires roman<strong>de</strong>s<br />

L’ambition <strong>de</strong> cet ouvrage est double :<br />

éclairer et préciser le champ <strong>de</strong>s significations<br />

du paysage et en explorer<br />

la dimension opératoire et politique.<br />

La multiplicité <strong>de</strong>s regards<br />

proposés - géographes, sociologues,<br />

agronomes, ethnologues - pose les<br />

jalons d’une anthropologie politique<br />

du paysage. Des étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas enrichissent<br />

le débat et proposent <strong>de</strong>s<br />

pistes <strong>de</strong> réflexion autour du paysage<br />

en tant qu’objet <strong>de</strong> négociation collective<br />

et territoriale.<br />

Avec les contributions <strong>de</strong> Joël Chatélat, Pierre<br />

Donadieu, Yvan Droz, Philippe Fleury, Jéramie<br />

Forney, Emmanuel Guisepelli, Yves Michelin, Valérie<br />

Miéville-Ott, Serge Ormaux, Jacques Rémy,<br />

Emmanuel Reynard, Rachel Spichiger.<br />

Les résultats <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> CATIE<br />

Selon les conclusions <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> CATIE (Clinical Antipsychotic Trial of Intervention<br />

Effectiveness), Zyprexa ® (olanzapine) a été plus efficace en terme<br />

<strong>de</strong> taux d’arrêt <strong>de</strong> traitement pour les patients souffrant <strong>de</strong> schizophrénie<br />

comparativement aux autres médicaments utilisés dans cette étu<strong>de</strong>. Cette<br />

étu<strong>de</strong> conduite <strong>de</strong> façon indépendante par le NIMH (National Institute of<br />

Mental Health) aux Etats-Unis est publiée dans le New England <strong>Journal</strong> of<br />

Medicine du 22 septembre. L’étu<strong>de</strong> CATIE a été mise en place afin d’évaluer<br />

l’efficience clinique générale <strong>de</strong>s antipsychotiques (classiques et atypiques)<br />

dans le traitement <strong>de</strong> la schizophrénie en utilisant comme critère d’évaluation<br />

l’arrêt du traitement quelle qu’en soit la cause, un critère qui intègre le<br />

jugement à la fois <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins et <strong>de</strong>s patients sur l’efficacité du traitement,<br />

sa sécurité d’emploi et sa tolérance.<br />

Au cours <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> les patients traités par Zyprexa ® présentaient une<br />

prise <strong>de</strong> poids et <strong>de</strong>s élévations <strong>de</strong>s paramètres métaboliques glucidiques et<br />

lipidiques plus importantes comparativement aux patients traités par les autres<br />

antipsychotiques étudiés. L’information relative aux effets indésirables liés à<br />

l’élévation du taux <strong>de</strong> glucose dans le sang, aux anomalies du métabolisme<br />

lipidique et à la prise <strong>de</strong> poids est incluse dans le Résumé <strong>de</strong>s Caractéristiques<br />

Produit <strong>de</strong> Zyprexa ®. Dans le groupe <strong>de</strong> patients qui ont arrêté leur<br />

traitement en raison d’effets indésirables, un plus grand nombre <strong>de</strong> patients<br />

traités par Zyprexa ont arrêté leur traitement du fait d’une prise <strong>de</strong> poids et<br />

<strong>de</strong> désordres métaboliques.<br />

Les résultats <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> CATIE montrent que pour Zyprexa ® la durée médiane<br />

avant arrêt du traitement était <strong>de</strong> 9,2 mois, alors qu’elle était <strong>de</strong> 4,6<br />

mois pour la quétiapine, <strong>de</strong> 4,8 mois pour la rispéridone, <strong>de</strong> 3,5 mois pour<br />

la ziprasidone, 5,6 mois pour la perphénazine. La différence était statistiquement<br />

significative pour Zyprexa ® comparé à la rispéridone et la quétiapine,<br />

mais non statistiquement significative comparativement à la perphénazine<br />

ou la ziprasidone.<br />

Les patients traités par Zyprexa ® ont été moins souvent hospitalisés pour<br />

une exacerbation <strong>de</strong> leur symptomatologie schizophrénique que les patients<br />

traités par les autres antipsychotiques utilisés dans l’étu<strong>de</strong>. Dans tous les<br />

groupes <strong>de</strong> traitement, les patients ont présenté une amélioration <strong>de</strong> leur<br />

symptomatologie psychotique évaluée à partir du score total <strong>de</strong> l’échelle<br />

PANSS (Positive and Negative Syndrome Scale). Les patients traités par Zyprexa<br />

® ont présenté une amélioration plus importante en début <strong>de</strong> traitement<br />

comparativement aux autres traitements antipsychotiques. <br />

Communiqué <strong>de</strong> presse <strong>de</strong>s Laboratoires Lilly


12<br />

LIVRES<br />

ENTRETIEN<br />

L’intraduisible<br />

Deuil, Mémoire, Transmission<br />

Janine Altounian<br />

Dunod 22 €<br />

Janine Altounian, qui est traductrice<br />

et essayiste, collabore aux traductions<br />

<strong>de</strong>s œuvres complètes <strong>de</strong> Freud<br />

aux Presses universitaires <strong>de</strong> France.<br />

Elle a publié, notamment, Ouvrez-moi<br />

seulement les chemins d’Arménie, un<br />

génoci<strong>de</strong> aux déserts <strong>de</strong> l’inconscient<br />

(Belles Lettres, 1990) et La Survivance,<br />

traduire le trauma collectif (Dunod,<br />

2000), <strong>de</strong>ux ouvrages qui, avec celui-ci,<br />

constituent une trilogie.<br />

L’ouvrage porte sur la douleur <strong>de</strong><br />

l’empêchement à s’engager dans la<br />

tendresse que rencontre l’héritier<br />

d’une transmission traumatique chez<br />

son parent survivant. L’écriture constitue<br />

le truchement pour ressentir, en<br />

place <strong>de</strong> l’autre détruit, <strong>de</strong>s affects<br />

excédant ses capacités psychiques.<br />

Elle vise à subjectiver une souffrance<br />

parentale encryptée dans le mutisme<br />

et tente <strong>de</strong> nommer les conséquences<br />

traumatiques <strong>de</strong>s meurtres <strong>de</strong> masse<br />

sur les <strong>de</strong>scendants <strong>de</strong> survivants.<br />

Dans un cheminement apparemment<br />

inversé, une tentative <strong>de</strong> réflexions<br />

contemporaines au sein <strong>de</strong>s récits<br />

ancestraux <strong>de</strong>ssine les différentes<br />

étapes d’une psychisation <strong>de</strong> longue<br />

haleine. La survie relève alors d’une<br />

capacité d’invention proprement artisanale,<br />

c’est-à-dire d’un savoir faire<br />

« avec <strong>de</strong>s restes », la vie ultérieure ne<br />

pouvant se construire qu’avec la réintroduction<br />

du tiers anéanti lors <strong>de</strong><br />

la terreur. Le parcours analytique rapporté<br />

dans ce livre soutient l’hypothèse<br />

que, chez un héritier <strong>de</strong> survivants,<br />

le travail <strong>de</strong> la cure peut amener<br />

la scène du meurtre à s’ouvrir au tiers<br />

pour le dialogue ou le conflit, attribuant<br />

par là à ses <strong>de</strong>ux enjeux définis<br />

par Freud - capacité <strong>de</strong> travailler,<br />

capacité d’aimer - une pertinence radicale.<br />

La possession <strong>de</strong> Loudun<br />

Michel <strong>de</strong> Certeau<br />

Edition revue vue par Luce Giard<br />

Folio histoire n°139, 7,5 €<br />

Il convient d’attirer l’attention sur cette<br />

réédition en folio d’un ouvrage paru<br />

en 1970 dans la collection « archives »<br />

puis réimprimé en 1980 et 1990 dans<br />

la même collection pour les éditions<br />

Gallimard.<br />

En 1632, Loudun est éprouvée par<br />

la peste : 3700 décès en quelques<br />

mois sur une population d’environ<br />

14 000 habitants. La peste appelle<br />

à lutter contre la saleté et la sous-alimentation<br />

en créant <strong>de</strong>s institutions<br />

sanitaires municipales. Les croyants<br />

se retirent, dans leurs communauté<br />

assiégées par la malédiction. Parmi<br />

eux, la communauté <strong>de</strong>s ursulines.<br />

La possession prend alors le relais <strong>de</strong><br />

la peste : les premières apparitions<br />

<strong>de</strong>viennent diurnes, se précisent, et<br />

prennent la forme obsédante d’un<br />

curé, Urbain Grandier.<br />

L’affaire <strong>de</strong> Loudun, qui conduira, le<br />

18 août 1634, Grandier, <strong>de</strong>vant six<br />

mille spectateurs, au bûcher, commence..<br />

Comment le diable est-il possible?<br />

Avec l’affaire Urbain Grandier, Loudun,<br />

ville ouverte, <strong>de</strong>vient le centre<br />

et le théâtre d’un mon<strong>de</strong>. Les pouvoirs<br />

s’y affrontent, les savoirs s’y inquiètent<br />

; l’âme catholique s’émeut.<br />

Le corps social se déchire ; partout le<br />

diable est là, mais il est partout ailleurs :<br />

dans le silence <strong>de</strong>s textes, les lacunes<br />

du langage. Dans cette lecture Michel<br />

<strong>de</strong> Certeau montre la guérison d’une<br />

société mala<strong>de</strong> d’elle-même.<br />

G. Massé : Dans votre préambule, vous<br />

évoquez votre rencontre dans une maison<br />

<strong>de</strong> retraite <strong>de</strong> rési<strong>de</strong>nts qui ont traversé<br />

avec douleur, la <strong>de</strong>rnière guerre<br />

mondiale….<br />

A. Henry : Il y a quelques années, j’ai<br />

passé près d’une semaine dans une<br />

maison <strong>de</strong> retraite dont la majeure partie<br />

<strong>de</strong>s rési<strong>de</strong>nts était juive et avait<br />

connu les tourments <strong>de</strong> la guerre. Je<br />

suis, malheureusement, venue dix ans<br />

trop tard et, hormis le témoignage <strong>de</strong>s<br />

époux Stern que je rapporte dans mon<br />

livre, je n’ai pu recueillir aucun récit<br />

ayant trait à la Shoah.<br />

G. M. : Est-il exact que Primo Levi avait<br />

peu <strong>de</strong> considération pour la psychanalyse<br />

?<br />

A. H. : Il me semble que Levi se<br />

méfiait plus <strong>de</strong>s psychanalystes que <strong>de</strong><br />

la psychanalyse. Il était surtout hostile<br />

à l’égard <strong>de</strong> Bruno Bettelheim qui usait,<br />

selon lui, <strong>de</strong>s théories psychanalytiques<br />

comme d’une « armure », d’« un évangile<br />

par lequel tout s’éclaire sans laisser<br />

place au doute ». Mais il affirmait aussi<br />

qu’écrire avait été pour lui l’équivalent<br />

d’une cure analytique et, à la fin <strong>de</strong> sa<br />

vie, il a fait siennes les hypothèses avancées<br />

par le psychanalyste autrichien<br />

ayant trait à la régression, sans jamais le<br />

reconnaître et peut-être sans s’en rendre<br />

compte.<br />

Il n’a pas que dénigré les psychanalystes<br />

et lorsqu’il a été interrogé sur le<br />

film « Portier <strong>de</strong> nuit », il a loué leur<br />

« pru<strong>de</strong>nce éclairée », se souvenant<br />

qu’aucun d’entre eux n’a jamais corroboré<br />

les thèses mises en scène dans<br />

ce film. Enfin, il a recouru à un concept<br />

psychanalytique lorsqu’il s’est interrogé<br />

sur la façon dont ses poèmes se sont<br />

imposés à lui et il a invoqué comme<br />

cause ou comme origine à sa production<br />

poétique, un « lambeau <strong>de</strong> Es(ça) ».<br />

G. M. : Peut-on définir la « survivance<br />

» après Auschwitz ?<br />

A. H. : Levi n’a jamais succombé à la<br />

tentation <strong>de</strong> donner un sens à la survivance,<br />

allant même jusqu’à penser<br />

que ce sont les meilleurs qui sont<br />

morts. Il n’a pas voulu qu’on attribue à<br />

sa propre survie, la nécessité <strong>de</strong> son<br />

témoignage. Au début <strong>de</strong> ses écrits, il<br />

considérait qu’elle était due au hasard,<br />

à la fin <strong>de</strong> son œuvre il exprimait sa<br />

culpabilité, ayant la conviction qu’en<br />

n’ayant pas suffisamment aidé les<br />

autres, il a vécu à leur place.<br />

G. M. : En quoi la régression pose la<br />

question du lien entre les SS et leurs victimes<br />

?<br />

A. H. : Bettelheim a évoqué la régression<br />

pour qualifier la relation <strong>de</strong>s victimes<br />

à leurs bourreaux. Il a observé, à<br />

Dachau, <strong>de</strong>s phénomènes d’i<strong>de</strong>ntification<br />

à l’agresseur et il considèrait que les<br />

violences qui y étaient infligées, provoquaient<br />

« une régression mortelle vers<br />

un état d’enfance sans consolation ». Il a<br />

désigné les nazis comme <strong>de</strong>s pères<br />

jouissant sans limite. Levi a estimé,<br />

quant à lui qu’il n’y avait plus, à Ausch-<br />

Shoah et témoignage<br />

Levi face à Améry et Bettelheim<br />

Anne Henry<br />

L’Harmattan, 17,50 €<br />

Le <strong>de</strong>rnier rempart<br />

pour entendre<br />

witz, ni père ni maître ; il pensait,<br />

contrairement à Bettelheim, au père<br />

<strong>de</strong> la loi c’est-à-dire au père symbolique.<br />

L’ambiguïté du lien entre le bourreau<br />

et la victime et la façon dont Bettelheim<br />

et Levi l’ont abordée, tient à<br />

la pluralité <strong>de</strong>s pères : Moloch contre le<br />

Dieu <strong>de</strong> Moïse.<br />

G. M. : La survie dans les camps aboutit<br />

à ce que le temps ne soit plus qu’une<br />

nébuleuse avec une impossibilité à anticiper.<br />

A. H. : Dans les camps, le temps ne<br />

se conjuguait qu’au présent. Les prisonniers<br />

n’avaient plus <strong>de</strong> passé ; leurs<br />

vies d’autrefois n’existaient plus et elles<br />

étaient même annihilées. Ils étaient, <strong>de</strong><br />

plus, radicalement privés <strong>de</strong> futur ; leur<br />

mort n’était pas dite et, bien que certaine,<br />

ils ne pouvaient s’y préparer. Ils<br />

étaient condamnés à disparaître comme<br />

s’ils n’avaient jamais existé. Seule l’immédiateté<br />

pouvait conditionner les relations<br />

qu’ils avaient entre eux. Elle s’imposait<br />

d’autant plus qu’on s’est efforcé<br />

<strong>de</strong> les priver <strong>de</strong>s repères signifiants<br />

qu’ils possédaient avant leur emprisonnement.<br />

G. M. : Vous montrez comment,<br />

confrontée à la question <strong>de</strong> la vérité, la<br />

douleur du témoignage peut conduire au<br />

suici<strong>de</strong>.<br />

A. H. : Si l’on pose <strong>de</strong> façon récurrente<br />

à Levi ou à tout autre témoin la<br />

question <strong>de</strong> la vérité, le témoignage<br />

<strong>de</strong>vient impossible. En effet, selon Derrida,<br />

celui-ci implique « l’élément <strong>de</strong> crédit,<br />

<strong>de</strong> foi ou <strong>de</strong> croyance » qui est radicalement<br />

étranger à la preuve, à<br />

« l’archive technique », même si la preuve<br />

peut corroborer le témoignage. Levi,<br />

comme tout autre témoin, ne peut<br />

témoigner, que si « il est cru sur parole ».<br />

De plus, la vérité ne peut être qu’entraperçue<br />

et la vouloir éclatante et<br />

entière est un leurre dont les négationnistes<br />

se sont emparés. Contre les<br />

témoignages, ils choisissent « le <strong>de</strong>voir<br />

d’être vrai ». Levi, choisit, quant à lui,<br />

d’affronter l’évanescence <strong>de</strong> la vérité.<br />

Parce qu’elle n’est jamais acquise, elle<br />

peut entraîner la mort <strong>de</strong> ceux qui déci<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> ne pas détourner le regard <strong>de</strong><br />

Primo Levi a souvent confié que s’il n’avait pas été déporté à Auschwitz, jamais<br />

il ne serait <strong>de</strong>venu un écrivain. Parce qu’il a éprouvé le besoin irépressible<br />

<strong>de</strong> témoigner <strong>de</strong> l’horreur du lager, il a été contraint d’écrire.<br />

Il a longtemps pensé qu’écrire avait été, pour lui, l’équivalent d’une cure analytique<br />

et qu’après Auschwitz, il avait pu mener, grâce à son écriture, une vie<br />

d’homme libre. Mais il a découvert les limites obligées <strong>de</strong> son témoignage,<br />

que ce soit le sien ou celui d’autres survivants, et il en a été accablé. Parmi<br />

ces autres, il s’est intéressé au philosophe Jean Améry et au psychanalyste<br />

Bruno Betelheim.<br />

Loin <strong>de</strong> les encenser, il leur a manifesté une hostilité, presque radicale pour<br />

Bettelheim, plus insidieuse pour Améry. Dans le même temps, il a reconnu,<br />

consciemment pour Améry, à son insu pour Bettelheim, la pertinence <strong>de</strong><br />

leur témoignage. Sa férocité à leur égard a peut-être été l’un <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers remparts<br />

qu’il a tenté d’ériger pour ne pas voir et ne pas entendre la vérité qui<br />

était pourtant la sienne et qu’aucun témoin n’a pu complètement saisir, cette<br />

vérité pouvant être tout en plus entraperçue car disparaissant au moment<br />

même où les mots la révèlent.<br />

Entretien avec Anne Henry par Gérard Massé<br />

Anne Henry, qui est mé<strong>de</strong>cin-chef du SMPR <strong>de</strong> Rennes, vient <strong>de</strong> publier chez l’Harmattan<br />

un livre passionnant, mais aussi important : Shoah et témoignage. Levi<br />

face à Amery et Bettelheim. Il est évi<strong>de</strong>nt que Primo Levi est <strong>de</strong>venu écrivain<br />

parce que il a été déporté à Auschwitz. Son écriture répondait à un besoin irrépressible<br />

<strong>de</strong> témoigner et il a, longtemps, espéré qu’elle lui permettrait <strong>de</strong> retrouver<br />

sa liberté. En fait, il sest trouvé confronté aux limites du témoignage : le sien<br />

mais aussi ceux <strong>de</strong>s autres survivants, à commencer par ceux <strong>de</strong> Jean Améry et<br />

Bruno Bettelheim, auxquels il s’est montré hostile. Cette hostilité presque radicale<br />

pour Bettelheim, plus feutrée pour Améry a-t-elle été le <strong>de</strong>rnier rempart pour ne<br />

pas entendre sa vérité ?<br />

leur passé, <strong>de</strong> ce qu’il nomme « l’eau<br />

périlleuse ».<br />

G. M. : Pourquoi Primo Levi ne s’est<br />

pas vécu comme « un témoin intégral »<br />

et a considéré que son œuvre testimoniale<br />

était un échec ?<br />

A. H. : En 1946, Levi était persuadé <strong>de</strong><br />

témoigner <strong>de</strong> l’intérieur, convaincu qu’il<br />

est <strong>de</strong> ceux qui ont « touché le fond ».<br />

Quarante ans plus tard, il a considéré<br />

que son témoignage ne valait pas car il<br />

ne s’agissait que du « récit <strong>de</strong>s choses<br />

vues <strong>de</strong> prêt, non vécues à [son] propre<br />

compte. La <strong>de</strong>struction menée à son<br />

terme, l’œuvre accomplie, personne ne<br />

l’a racontée comme personne n’est jamais<br />

revenu pour raconter sa propre mort ».<br />

Son œuvre testimoniale n’était plus,<br />

selon lui, qu’un discours fait pour le<br />

compte d’un tiers. Le témoin intégral<br />

n’existe pas ou il est mort ou sa capacité<br />

d’observation a été « paralysée »<br />

par la souffrance et l’incompréhension.<br />

Les Musulmans que Levi a désigné en<br />

usant d’expressions comme « les<br />

hommes coquilles », « les damnés », « la<br />

masse anonyme <strong>de</strong>s non hommes » ou<br />

« les engloutis » sont la conséquence<br />

inéluctable <strong>de</strong>s camps. Ils ne se posent<br />

ni se révoltent. Ils s’offrent passivement<br />

aux violences qui leur sont faites. Ils<br />

sont à la limite <strong>de</strong> l’extrême, ils sont<br />

les hommes les plus proches du noyau<br />

d’incan<strong>de</strong>scence <strong>de</strong> la Shoah. Ils incarnent<br />

l’impossibilité <strong>de</strong> témoigner<br />

comme l’impossibilité d’être un témoin<br />

par cette place muette qu’ils occupent<br />

entre la vie et la mort. Il en va <strong>de</strong><br />

même pour les membres <strong>de</strong>s Son<strong>de</strong>rkommandos<br />

dont la <strong>de</strong>stitution extrême<br />

<strong>de</strong> la dignité a fait d’eux <strong>de</strong>s<br />

témoins intégraux mais également <strong>de</strong>s<br />

témoins muets.<br />

G. M. : Une phrase apparaît saisissante<br />

: « si la vérité est absente, la mémoire<br />

ne vaut pas ».<br />

A. H. : Les nazis se sont efforcés, après<br />

leur défaite mais également pendant<br />

la guerre, d’effacer les traces <strong>de</strong> la<br />

Shoah. Ils ont inventé un jargon linguistique<br />

pour subvertir « le pouvoir<br />

référentiel et littéral <strong>de</strong>s mots » afin d’égarer<br />

leurs victimes mais aussi pour tenir<br />

dans l’ignorance l’opinion publique et<br />

les unités <strong>de</strong> l’armée alleman<strong>de</strong> non<br />

directement impliquées. Le système<br />

<strong>de</strong>s camps <strong>de</strong> concentration a été d’emblée<br />

conçu pour que le témoignage fut<br />

impossible. La communication <strong>de</strong>s prisonniers<br />

avec l’extérieur était interdite<br />

et punie <strong>de</strong> mort et ,entre eux, elle ne<br />

se faisait plus. « L’usage <strong>de</strong> la parole<br />

pour communiquer la pensée, ce mécanisme<br />

nécessaire et suffisant pour que<br />

l’homme soit homme était tombé en<br />

désuétu<strong>de</strong>. C’est un signal : [….] nous<br />

n’étions plus <strong>de</strong>s hommes ». En 1945, les<br />

nazis ont détruit leur installations <strong>de</strong><br />

mort et ils se sont efforcés <strong>de</strong> supprimer<br />

les éventuels témoins qu’auraient pu<br />

être les rares survivants. Ceux qui ont<br />

assisté au massacre ont souvent préféré<br />

ne rien en savoir et surtout ne rien<br />

en dire. Levi cite Simon Wiesenthal<br />

qui exprime la volonté <strong>de</strong>s Allemands<br />

<strong>de</strong> livrer une guerre contre la mémoire<br />

et leur volonté <strong>de</strong> la gagner : « <strong>de</strong><br />

quelque façon que cette guerre finisse,<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

nous l’avons déjà gagnée contre vous :<br />

aucun d’entre vous ne restera pour porter<br />

témoignage, mais même si quelquesuns<br />

en réchappaient, le mon<strong>de</strong> ne le croira<br />

pas. Peut-être y aura-t-il <strong>de</strong>s soupçons,<br />

<strong>de</strong>s discussions, <strong>de</strong>s recherches faites par<br />

les historiens, mais il n’y aura pas <strong>de</strong><br />

certitu<strong>de</strong> parce que nous détruirons les<br />

preuves en vous détruisant. Et même s’il<br />

<strong>de</strong>vait subsister quelques preuves, et si<br />

quelques-uns d’entre vous <strong>de</strong>vaient survivre,<br />

les gens diront que les faits que<br />

vous racontez seront trop monstrueux<br />

pour être crus : ils diront que se sont <strong>de</strong>s<br />

exagérations <strong>de</strong> la propagan<strong>de</strong> alliée, et<br />

ils nous croiront, nous qui nierons tout, et<br />

pas vous. L’histoire <strong>de</strong> la guerre, c’est<br />

nous qui la dicterons ». Si la vérité est<br />

absente, la mémoire ne vaut pas.<br />

G. M. : En quoi l’impossibilité d’une<br />

totale réminiscence fait appel au concept<br />

d’entropie ?<br />

A. H. : Levi, à la fin <strong>de</strong> sa vie, ne se fiait<br />

plus à ses souvenirs et, pour expliquer<br />

l’impossibilité d’une totale réminiscence,<br />

il faisait appel au concept d’entropie<br />

: au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la pathologie, c’est la<br />

conséquence « d’une <strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s forces<br />

<strong>de</strong> la nature, celle qui dégra<strong>de</strong> l’ordre en<br />

désordre, la jeunesse en vieillesse et éteint<br />

la vie dans la mort », celle que les analystes<br />

nommeraient pulsion <strong>de</strong> mort<br />

dont la manifestation rési<strong>de</strong> ici dans le<br />

silence que contiennent tous les souvenirs.<br />

L’entropie ou pulsion <strong>de</strong> mort<br />

est, également, présente dans la remémoration<br />

active et consciente qui, lorsqu’elle<br />

est trop fréquente, fige le souvenir<br />

en stéréotype.<br />

G. M. : Vous situez la pulsion <strong>de</strong> mort<br />

dans le silence que contiennent les souvenirs.<br />

A. H. : Bettelheim considérait que la<br />

pulsion <strong>de</strong> mort est au centre du dispositif<br />

d’Auschwitz. Elle est incarnée<br />

par la chambre à gaz qui est un lieu<br />

<strong>de</strong> mutité absolue dont on peut, <strong>de</strong><br />

façon paradoxale, « dire tout ce qu’on<br />

veut ». « Elle ne vous répond pas, ne discute<br />

pas avec vous ». Elle est le « noyau<br />

<strong>de</strong> silence absolu » <strong>de</strong> la Shoah. Elle est<br />

du côté <strong>de</strong>s bourreaux en faisant <strong>de</strong>s<br />

camps <strong>de</strong> concentration « ce résumé <strong>de</strong><br />

la cruauté organisée <strong>de</strong> l’homme contre<br />

l’homme » mais elle est aussi du côté<br />

<strong>de</strong>s victimes quand les prisonniers<br />

<strong>de</strong>viennent <strong>de</strong>s Musulmans. Bettelheim<br />

évoquait la compulsion <strong>de</strong> témoignage,<br />

c’est-à-dire la contrainte irrépressible<br />

qu’éprouvent certains survivants <strong>de</strong><br />

témoigner. Il se trompait lorsqu’il écrivait<br />

qu’il ne s’agissait que « d’amener<br />

les gens à comprendre ». Levi savait,<br />

quant à lui, que l’objet du témoignage<br />

est structurellement mortel et que la<br />

cause <strong>de</strong> celui-ci est immédiatement<br />

du côté <strong>de</strong> la mort.<br />

G. M. : « Si c’est un homme » et <strong>de</strong>s<br />

passages <strong>de</strong> « la Trêve » et <strong>de</strong> « Lillith »<br />

sont écrits autour d’un trou <strong>de</strong> mémoire<br />

obligé, conception <strong>de</strong> la mémoire proche<br />

<strong>de</strong> celle <strong>de</strong>s analystes.<br />

A. H. : Comme Freud, Levi s’est intéressé,<br />

au début <strong>de</strong> son œuvre, à la<br />

mémoire en tant qu’inscription d’un<br />

événement direct positif, pour être<br />

ensuite confronté à l’oubli et à la déformation.<br />

Comme Freud, il savait que la<br />

déformation voire la falsification sont à<br />

l’œuvre dans toute réminiscence ; il<br />

savait que l’oubli est indéfectiblement<br />

noué à la mémoire. Comme Freud, il<br />

distinguait plusieurs types d’oubli<br />

comme les réminiscences faussées ou<br />

les souvenirs absents. Comme Freud, il<br />

croyait à une mémoire et aux oublis<br />

qui laissent <strong>de</strong>s traces et il s’est évertué<br />

à traquer celles <strong>de</strong> la Shoah, à les recenser<br />

et à les créer, en témoignant et écrivant<br />

ainsi qu’en reconnaissant les limites<br />

<strong>de</strong> ces traces et <strong>de</strong> son témoignage.<br />

Son livre « Si c’est un homme », à la<br />

fois monument et ruine, est le paradigne<br />

<strong>de</strong> ces traces, il est à la fois la<br />

mémoire et ce qui l’occulte. Il repose<br />

sur le mécanisme <strong>de</strong> refoulement qui,<br />

en soustrayant à la conscience un souvenir,<br />

le scelle plus soli<strong>de</strong>ment sur cette


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

SEMINAIRE BABYLONE 2005-2006<br />

PSYCHANALYSE, LITTERATURE ET ARTS<br />

Pourquoi l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s textes littéraires est-elle absente <strong>de</strong> la formation <strong>de</strong>s psychologues<br />

et <strong>de</strong>s psychiatres ? Elle permet pourtant <strong>de</strong> revisiter les aspects majeurs<br />

<strong>de</strong> la psychopathologie et <strong>de</strong> la clinique, <strong>de</strong> faire émerger les liens <strong>de</strong> filiation<br />

si manifestes entre psychanalyse et littérature.<br />

De nombreux psychanalystes disent volontiers la <strong>de</strong>tte contractée vis-à-vis <strong>de</strong>s<br />

écrivains, qui leur ont permis <strong>de</strong> penser, <strong>de</strong> conceptualiser, voire à leur tour <strong>de</strong><br />

créer. Le séminaire Babel-Babylone a sollicité, <strong>de</strong>puis dix ans maintenant, <strong>de</strong>s<br />

psychanalystes <strong>de</strong> renom et d’autres en <strong>de</strong>venir, leur <strong>de</strong>mandant <strong>de</strong> faire part<br />

<strong>de</strong> leur curiosité et <strong>de</strong> leur enchantement <strong>de</strong>vant certaines œuvres, ce qui a<br />

éclairé <strong>de</strong> manière originale et vivante, pour leur auditoire, <strong>de</strong> nombreuses dimensions<br />

psychopathologiques et cliniques.<br />

Nouveau Cycle <strong>de</strong> Conférences 2005-2006<br />

Lundi 3 octobre 2005 à 20 h 30 - CINEMA<br />

Sophie <strong>de</strong> MIJOLLA-MELLOR, L’angoisse <strong>de</strong> fiction chez Hitchcock<br />

Discutants : Elisabeth BIROT - Serge KAGANSKI (sous réserve)<br />

Lundi 7 novembre 2005 à 20 h 30 - SCULPTURE<br />

Silke SCHAUDER, « Il ne naît en moi aucune pensée où la mort ne soit pour<br />

ainsi dire sculptée ». Notes sur la mélancolie <strong>de</strong> Michel-Ange<br />

Discutant : Anne-Marie SMITH<br />

MARDI 6 décembre 2005 à 20 h 30 - PEINTURE<br />

Daniel WIDLÖCHER, Ségantini et la mélancolie<br />

Discutant : Vassilis KAPSAMBELIS<br />

MARDI 10 janvier 2006 à 20 h 30 - TEMOIGNAGE<br />

Régine WAINTRATER, A propos <strong>de</strong> Jean Améry<br />

Discutant : Colette SEQUEL<br />

Lundi 20 février 2006 à 20 h 30 - LITTERATURE<br />

Paul AUDI et Laurie LAUFER, Littérature et phantasme : à propos <strong>de</strong> Henry<br />

James et <strong>de</strong> Marcel Proust<br />

Discutant : Maurice CORCOS<br />

Lundi 6 mars 2006 à 20 h 30 - LITTERATURE<br />

Yves THORET, Les paliers <strong>de</strong> la dépression <strong>de</strong> la Princesse Constance dans<br />

la pièce <strong>de</strong> Shakespeare « Le roi Jean »<br />

Discutant : Emmanuelle SABOURET<br />

Lundi 3 avril 2006 à 20 h 30 - LITTERATURE<br />

Isabelle BLONDIAUX, Céline. Aspects du dialogue dans Entretiens avec le<br />

professeur Y.<br />

Discutant : Maurice CORCOS<br />

Lundi 15 mai 2006 à 20 h 30 - LITTERATURE<br />

Catherine CHABERT, Une vieille maîtresse <strong>de</strong> Barbey D’Aurevilly<br />

Discutants : Marthe COPPEL-BATSCH - Isabelle NICOLAS<br />

Mardi 6 juin 2006 à 20 h 30 - CINEMA<br />

Patrick MILLER, Auto-portraits au masculin : sexualité et mélancolie dans<br />

« Blow-up » et « Profession Reporter » d’Antonioni<br />

Discutant : Daniel HURVY<br />

Direction et coordination : Dr M. CORCOS ; C. DUGRÉ-LE BIGRE<br />

Département <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> <strong>de</strong> l’Adolescent et du Jeune Adulte<br />

Institut Mutualiste Montsouris, 42 Boulevard Jourdan, 75014 Paris<br />

Amphithéâtre <strong>de</strong> l’IMM, Hall d’accueil, Métro Porte d’Orléans, RER Cité Universitaire<br />

Tél. : 01 56 61 69 19 - Fax : 01 56 61 69 18. E-mail : corinne.dugre-lebigre@imm.fr<br />

Inscription le soir même à 20h15 : Entrée : 10 € - Tarif réduit étudiant sur justificatif : 5 €<br />

autre scène qu’est l’inconscient. La<br />

mémoire est toujours une mémoire<br />

par éclipse, défaillante, marquée par<br />

une bascule permanente « entre un<br />

mouvement <strong>de</strong> soustraction à la conscience<br />

» et « un mouvement <strong>de</strong> restitution ».<br />

Elle est le contraire <strong>de</strong> la mémoire que<br />

veulent les négationnistes, celle que le<br />

psychanalyste Gérard Wacjman<br />

nomme « mémoire intégrale. Sans perte<br />

ou défaut […..]. Une mémoire qui n’oublie<br />

pas. Où rien n’est jamais advenu »,<br />

où la forclusion est obligée.<br />

G. M. : Levi n’a pas été immédiatement<br />

entendu, comment l’a-t-il vécu ?<br />

A. H. : Lorsque Levi est revenu <strong>de</strong><br />

déportation, il racontait sans cesse. S’il<br />

a aimé sa femme, c’est peut-être qu’elle<br />

savait l’écouter. Et si son livre « Si<br />

c’est un homme » ne s’est pas vendu<br />

malgré <strong>de</strong>s critiques élogieuses, il ne<br />

s’en est pas plaint comme il ne s’est<br />

pas plaint <strong>de</strong> pas avoir été suffisamment<br />

entendu. Cependant, dans le seul<br />

roman qu’il ait écrit « Maintenant ou<br />

jamais », il a relaté l’impression <strong>de</strong> ses<br />

héros (<strong>de</strong>s résistants Juifs d’Europe Centrale)<br />

qui, lorsqu’ils ont rencontré <strong>de</strong>s<br />

juifs italiens épargnés par la guerre,<br />

étaient persuadés que même s’ils parlaient,<br />

ils ne seraient pas compris. Sa<br />

crainte ne pas être entendu ou même<br />

écouté a toujours été présente, y compris<br />

à Auschwitz où ses rêves la mettaient<br />

souvent en scène. Elle s’est prolongée<br />

toute sa vie, <strong>de</strong>venant plus forte<br />

lors <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong>s thèses négationnistes.<br />

Levi s’est senti alors accablé,<br />

ayant le sentiment <strong>de</strong> ne plus être<br />

entendu (ou peut-être <strong>de</strong> l’être moins<br />

encore).<br />

G. M. : Primo Levi a dit à plusieurs<br />

reprises qu’Auschwitz a été « une sorte<br />

d’université ».<br />

A. H. : Levi a emprunté cette expression<br />

à une autre déportée, Lydia Rolfi,<br />

et il l’a répétée à plusieurs reprises. Il a<br />

fait, sans doute, allusion à la vérité qu’il<br />

a entrevue à Auschwitz et qu’il a tenté<br />

<strong>de</strong> cerner par son travail d’écriture et <strong>de</strong><br />

témoignage. Il savait, lorsqu’il employait<br />

cette expression, que cette vérité qu’est<br />

l’horreur innommable du nazisme fait<br />

partie <strong>de</strong> l’humain : « tant qu’on ne<br />

reconnaîtra pas que l’inhumanité est<br />

chose humaine, on restera dans le mensonge<br />

pieux ». Par son écriture et son<br />

témoignage d’Auschwitz, il ne s’est<br />

jamais dérobé. Par eux et à travers eux,<br />

il a choisi <strong>de</strong> ne pas mentir et d’affronter<br />

l’inhumanité <strong>de</strong>s humains mais surtout<br />

<strong>de</strong> la décrire et <strong>de</strong> la transmettre.<br />

G. M. : Comment comprendre que<br />

Primo Levi qui n’a pas cessé <strong>de</strong> fustiger<br />

la psychanalyse n’a pas hésité à raconter<br />

ses rêves ?<br />

A. H. : Levi a toujours refusé que ses<br />

témoignages contiennent le moindre<br />

message. Par ses rêves, il a exprimé<br />

que la vérité d’Auschwitz ne peut être<br />

entièrement dite ou transmise, et qu’elle<br />

ne peut être entendue entièrement.<br />

Elle est coulée dans le bronze d’un mot<br />

sans signification, d’un signifiant privé<br />

<strong>de</strong> signifié. Seule compte son existence<br />

dont les effets délétères accablent les<br />

rêveurs. Levi n’a pas voulu que l’on<br />

s’intéresse à sa psychologie ou à ses<br />

particularités ou à celles <strong>de</strong> ses camara<strong>de</strong>s<br />

qui ont fait les mêmes rêves que<br />

lui. S’y intéresser serait même un obstacle<br />

à l’écoute <strong>de</strong> son témoignage. Ses<br />

rêves ont provoqué « le surgissement<br />

<strong>de</strong> l’image terrifiante, angoissante, <strong>de</strong> cette<br />

vraie tête <strong>de</strong> Méduse, […] la révélation <strong>de</strong><br />

quelque chose d’à proprement parler<br />

innommable […], qui résume […] la<br />

révélation du réel dans ce qui est le moins<br />

pénétrable, du réel sans aucune médiation<br />

possible, du réel <strong>de</strong>rnier […], ce quelque<br />

chose <strong>de</strong>vant quoi tous les mots s’arrêtent<br />

et toutes les catégories échouent, l’objet<br />

d’angoisse par excellence ».<br />

G. M. : Vous parlez <strong>de</strong> la honte <strong>de</strong>s<br />

innocents du fait <strong>de</strong> l’offense commise,<br />

avec laquelle il faut bien continuer à<br />

vivre, du mal qui contamine.<br />

A. H. : Pour Levi, la honte ne concernait<br />

pas les coupables mais les victimes<br />

ou les autres (les innocents) comme<br />

ces quatre jeunes soldats soviétiques<br />

découvrant Auschwitz au début <strong>de</strong> son<br />

livre « La Trêve ». Il a du témoigner <strong>de</strong><br />

cette honte qui est celle que « les allemands<br />

ignorèrent ». Celle-ci implique<br />

qu’il y ait, pour celui qui l’éprouve, un<br />

bien ou un mal. Pour les nazis, la loi est<br />

morte mais pour ceux qui se sentent<br />

honteux ou coupables, elle existe. Bettelheim<br />

a considéré que la culpabilité<br />

(ou la honte) était du côté <strong>de</strong> l’homme<br />

et <strong>de</strong> la vie.<br />

Quand Levi estimait que sa cause était<br />

l’offense commise par les nazis, il semblait<br />

partager son opinion. Mais dès la<br />

Trêve, il affirmait « le caractère indélébile<br />

<strong>de</strong> l’offense qui s’étend comme une épidémie<br />

». Il savait que cette offense est<br />

« une source <strong>de</strong> mal inépuisable » : elle<br />

brise l’âme et le corps <strong>de</strong> ses victimes,<br />

les anéantit et les rend abjectes ; elle<br />

prolifère <strong>de</strong> mille façons, contre la<br />

volonté <strong>de</strong> chacun, sous forme <strong>de</strong><br />

lâcheté morale, <strong>de</strong> négation, <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong>,<br />

<strong>de</strong> renoncement. Il indiquait que<br />

la honte est aussi du côté <strong>de</strong> la mort et<br />

qu’elle provoque ce qu’il a nommé :<br />

« un accès <strong>de</strong> fatigue mortelle ». La lai<strong>de</strong>ur<br />

<strong>de</strong>s bourreaux a contaminé leurs<br />

victimes qui, comme Bettelheim, Levi<br />

et bien d’autres, en sont morts.<br />

G. M. : Que veut dire Primo Levi quand<br />

il affirme que la Shoah ne peut ni ne<br />

doit être comprise ?<br />

A. H. : Levi a considéré que « comprendre<br />

c’est presque justifier » et que<br />

« comprendre la décision ou la conduite<br />

<strong>de</strong> quelqu’un, cela veut dire […] les<br />

mettre en soi, mettre en soi celui qui en<br />

est responsable, se mettre à sa place,<br />

s’i<strong>de</strong>ntifier à lui ». La haine nazie n’a<br />

pas été rationnelle et la Shoah a été<br />

loin d’obéir à « <strong>de</strong> rigoureux schémas<br />

logiques ». Levi a fait sienne la terrible<br />

règle d’Auschwitz « Hier ist kein<br />

Warum », « ici il n’y a pas <strong>de</strong> pourquoi »,<br />

en s’interrogeant sur les raisons inconnaissables<br />

voire inexistantes à ce système<br />

<strong>de</strong> mort. Il a voulu transmettre<br />

cette absence <strong>de</strong> pourquoi et les raisons<br />

inconnaissables et inexistantes à<br />

cette absence.<br />

G. M. : Un style clair, dépouillé et transparent<br />

<strong>de</strong>vient une obligation quasi<br />

éthique et le bien écrire <strong>de</strong>vient le reflet<br />

du style réel inaccessible.<br />

A. H. : Levi a voulu, pour écrire, le<br />

« langage sombre et posé du témoin »,<br />

estimant que ses paroles seraient d’autant<br />

plus crédibles qu’elles seraient<br />

« plus objectives et dépassionnées ». Il a<br />

choisi, pour expliquer aux autres et à<br />

lui-même ce qu’il a vécu, un style comparable<br />

à celui <strong>de</strong>s « rapports hebdomadaires<br />

<strong>de</strong>s entreprises » qui doivent<br />

être « précis, concis et écrits dans un langage<br />

compréhensible par tout le mon<strong>de</strong> ».<br />

Il n’a voulu ni « affectation » ni « oripeaux<br />

» car il considérait que la clarté et<br />

la pertinence <strong>de</strong> son style <strong>de</strong>vaient être<br />

le reflet <strong>de</strong> cette vérité inaccessible dont<br />

il s’est efforcé, tout au long <strong>de</strong> sa vie,<br />

<strong>de</strong> témoigner.<br />

G. M. : En quoi le signifiant qui correspondrait<br />

à l’objet du témoignage n’existe<br />

pas ?<br />

A. H. : Comme il s’est refusé à délivrer<br />

un message, Levi n’a pas voulu <strong>de</strong><br />

mot indiquant une quelconque signification.<br />

Il a préféré <strong>de</strong>s termes qui<br />

étaient surtout « <strong>de</strong>s appellations symboliques<br />

» qui ne faisaient que recouvrir<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Traumatisme et filiation<br />

Dossier composé par Philippe Robert<br />

Dialogue 2005 n°168, Erès, 16 €<br />

ENTRETIEN 13<br />

La question du traumatisme intéresse particulièrement le clinicien du couple et<br />

<strong>de</strong> la famille. Les problèmes que pose le trauma dans la clinique se déclinent<br />

selon <strong>de</strong>ux axes : celui <strong>de</strong>s liens et <strong>de</strong>s capacités transformatrices du groupe et<br />

celui <strong>de</strong> l’interaction constante entre réalité objective et réalité psychique.<br />

La métapsychologie situe le traumatisme dans sa dimension économique : un<br />

trop-plein d’excitation débor<strong>de</strong> les capacités <strong>de</strong> résorption <strong>de</strong> l’appareil psychique.<br />

La trace va non seulement continuer à subsister, mais l’effraction pourra<br />

endommager à long terme le fonctionnement psychique dans son travail <strong>de</strong><br />

liaison. La famille, <strong>de</strong> par sa fonction contenant/conteneur, tente <strong>de</strong> métaboliser<br />

les éléments bruts qui ne peuvent plus se psychiser. Le groupe couple - qu’il<br />

est possible <strong>de</strong> nommer ainsi lorsque l’on parle <strong>de</strong> sa fonction - opère un travail<br />

similaire dans son processus d’affiliation.<br />

Le modèle <strong>de</strong>s thérapies psychanalytiques <strong>de</strong> couple et <strong>de</strong> famille repose, en<br />

partie, sur la remise en route <strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> liaison. C’est avec le travail sur<br />

les liens que les cliniciens du couple et <strong>de</strong> la famille sont davantage tiraillés<br />

entre la réalité objective et la réalité psychique. Ainsi, certains traumas peuvent<br />

résulter <strong>de</strong> la maladie ou <strong>de</strong> la mort d’un enfant, <strong>de</strong> violences conjugales... Il<br />

en va <strong>de</strong> même pour <strong>de</strong>s expériences quasi irreprésentables non élaborées<br />

dans les générations précé<strong>de</strong>ntes. Ces événements peuvent largement débor<strong>de</strong>r<br />

l’histoire <strong>de</strong> la famille et toucher un peuple ou une civilisation comme les<br />

génoci<strong>de</strong>s. Ce dossier regroupe <strong>de</strong>s contributions <strong>de</strong> Philippe Robert, Didier<br />

Drieu, François Marly, Jean Guyotat, Anne Aubert-Godard, Patrick Genvresse,<br />

Janine Altounian, Bianca Lechevalier, Annie <strong>de</strong> Butler et Monique Dupré la Tour.<br />

Le mal - Tome 1<br />

Topique n°91, L'Esprit du Temps, 21 €<br />

Définir le Mal a fait l’objet <strong>de</strong> siècles <strong>de</strong> philosophie et <strong>de</strong> théologie. L’approche<br />

psychanalytique ne saurait se situer à ce même niveau et, pourtant, elle se doit<br />

<strong>de</strong> répondre au même vécu d’injustice que sous-tend ce terme. Le fait que les<br />

théodicées se soient employées à innocenter Dieu <strong>de</strong> l’existence du Mal implique<br />

que la représentation <strong>de</strong> celui-ci implique toujours, selon la logique propre au<br />

fantasme, le désir d’un Autre qui en est l’origine. La sécularisation du concept<br />

en fera à l’inverse, avec Hobbes et Spinoza, quelque chose qui part du sujet luimême.<br />

Le Mal en soi n’existe pas, il est ce qui nous apparaît tel parce qu’il s’oppose<br />

à nos désirs, à nos attentes <strong>de</strong> plaisir, et plus radicalement à notre vie individuelle,<br />

voire à nos valeurs. Nietzsche en dénoncera la notion comme l’expression<br />

du ressentiment et donc <strong>de</strong> l’envie <strong>de</strong>s faibles contre les forts. La rupture instaurée<br />

par les crimes génoci<strong>de</strong>s imprescriptibles a reposé la question du Mal<br />

dans une direction plus kantienne d’un Mal radical. Le Mal est défini par ce dont<br />

la raison ne peut rendre compte, ce qui altère en chacun l’humanité. Les textes<br />

<strong>de</strong> ce numéro et du suivant proposent <strong>de</strong> revenir sur ces questions en y employant<br />

les apports <strong>de</strong> la métapsychologie, la pulsion <strong>de</strong> mort en particulier.<br />

Ecrire contre l’Oubli<br />

Collectif (Association France Alzheimer)<br />

Editions du Rocher, 19,90 €<br />

Une cinquantaine d’artistes et d’écrivains ont accepté, à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Association<br />

France Alzheimer, <strong>de</strong> contribuer symboliquement à la prise <strong>de</strong> conscience<br />

collective d’une maladie qui touche près d’un million <strong>de</strong> personnes en France.<br />

Sensible à une souffrance qu’ils ont parfois connue eux-mêmes, leur plume a su<br />

retranscrire, avec force et humanité, la détresse et l’espoir <strong>de</strong> ceux qui atten<strong>de</strong>nt,<br />

chaque jour, aux côtés <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s, un traitement efficace. Leurs manuscrits sur<br />

le thème <strong>de</strong> la mémoire ont fait l’objet <strong>de</strong> ce recueil. L’intégralité <strong>de</strong>s bénéfices<br />

<strong>de</strong>s ventes <strong>de</strong> cet ouvrage sera reversé à l’Association France Alzheimer.<br />

La boîte <strong>de</strong> Houdini<br />

L’art <strong>de</strong> s’échapper<br />

Adam Phillips, Traduit <strong>de</strong> l’anglais par Jean-Luc Fi<strong>de</strong>l<br />

Editions Payot 16 €<br />

l’innommable. En effet, par son témoignage,<br />

il avait la volonté <strong>de</strong> transmettre<br />

la mutité structurelle <strong>de</strong> la pulsion<br />

<strong>de</strong> mort. Et si certains mots qu’il a<br />

employés ont dit la vérité, celle-ci est<br />

toujours restée « épurée », imparfaite<br />

et fragmentaire. Seuls les négationnistes<br />

peuvent croire au signifiant ultime et<br />

constant qui correspondrait à l’objet<br />

du témoignage.<br />

G. M. : Comment expliquer le sentiment<br />

d’échec qui étreint Levi à la fin <strong>de</strong><br />

sa vie ?<br />

A. H. : Je suis contente que vous me<br />

posiez cette question car elle annonce<br />

le second livre que je consacre à Levi et<br />

qui doit bientôt sortir. Il s’attache à<br />

développer ce qui est annoncé dans le<br />

livre « Shoah et témoignage » quand<br />

Levi, oubliant l’impossibilité structurelle<br />

du témoignage, la confond avec son<br />

impuissance. <br />

Rien ne pouvait retenir prisonnier le célèbre illusionniste Harry Houdini, cet<br />

« éternel évadé », auteur d’un traité sur les menottes, qui a passé sa vie à inventer<br />

<strong>de</strong>s pièges spectaculaires et à s’en libérer pour le plus grand bonheur<br />

du public américain au début du XX e siècle. Adam Pillips parle d’une <strong>de</strong> ses patientes,<br />

une petite fille qui se met toujours à l’écart. Les maîtres <strong>de</strong> la fuite, <strong>de</strong><br />

l’évasion ou <strong>de</strong> l’évitement, artistes comme Houdini, phobiques comme la petite<br />

fille, psychanalystes comme Adam Phillips lui-même, et certains grands névrosés<br />

qu’il évoque révèlent une dimension fondamentale <strong>de</strong> l’existence : on<br />

ne jouit pas <strong>de</strong> la liberté, mais <strong>de</strong> se libérer.


14<br />

LIVRES<br />

DOSSIER : L’INFORMATION DU PATIENT EN PSYCHIATRIE<br />

Vidal <strong>de</strong> la famille<br />

10 ème édition<br />

Larousse diffusion, 29 €<br />

Comme son titre l’indique, il s’agit du<br />

dictionnaire VIDAL, mais à l’usage du<br />

public, c’est à dire simplifié, clair, compréhensible<br />

par tous, tout en restant<br />

d’un très bon niveau informatif. Un<br />

peu plus <strong>de</strong> 1400 pages détaillent<br />

tous les médicaments actuellement<br />

disponibles avec leurs posologies, les<br />

précautions d’emploi, les effets indésirables,<br />

les modalités <strong>de</strong> prise, les<br />

taux <strong>de</strong> remboursement. Complété<br />

par la liste complète <strong>de</strong>s génériques,<br />

<strong>de</strong>s noms <strong>de</strong>s spécialités, d’un lexique<br />

<strong>de</strong> certains termes techniques, médicaux,<br />

biologiques, d’un calendrier<br />

<strong>de</strong> vaccinations, d’adresses utiles<br />

(centres anti-poison, associations antialcooliques<br />

ou concernant le SIDA<br />

ou certaines maladies invalidantes)<br />

il <strong>de</strong>vrait constituer un outil pratique<br />

et utile pour les familles.<br />

M. Goutal<br />

Prévenir le risque<br />

nosocomial<br />

La bala<strong>de</strong> infectieuse<br />

Dominique Lhuilier, Théodore<br />

Niyongabo, Dominique Rolland<br />

L’Harmattan 19,50 €<br />

Venir à l’hôpital pour y être soigné<br />

et y mourir d’une maladie qu’on n’avait<br />

pas en y entrant apparaît tragiquement<br />

absur<strong>de</strong>. Pourtant les infections<br />

hospitalières sont courantes et difficiles<br />

à prévenir. Chaque année, en<br />

France, 5 à 800 000 patients sont infectés<br />

ainsi et 4000 décès sont recensés.<br />

La situation est similaire dans<br />

le reste <strong>de</strong> l’Europe.<br />

Quant aux pays en voie <strong>de</strong> développement,<br />

l’état <strong>de</strong>s lieux est quasi<br />

inexistant. Pourtant, dans <strong>de</strong>s pays<br />

où le sida fait <strong>de</strong>s ravages, l’immunodépression<br />

majore le risque <strong>de</strong><br />

transmission d’infections tant du côté<br />

<strong>de</strong>s soignants que <strong>de</strong>s patients. La<br />

« bala<strong>de</strong> infectieuse » ne distingue pas<br />

ceux qui portent la blouse et les autres.<br />

Ce livre présente une recherche-action<br />

réalisée au CHU <strong>de</strong> Burundi pour<br />

mieux connaître ces risques et améliorer<br />

la protection <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s, <strong>de</strong><br />

leurs familles et du personnel. La collaboration<br />

engagée avec I’ensemble<br />

<strong>de</strong>s acteurs <strong>de</strong> l’hôpital illustre une<br />

certaine approche <strong>de</strong> la prévention :<br />

une approche coopérative, créative<br />

et positive afin d’optimiser les ressources<br />

<strong>de</strong> chacun en termes <strong>de</strong><br />

connaissances, savoir-faire et moyens<br />

disponibles ou à créer.<br />

Villes et toxicomanies<br />

De la connaissance à la<br />

prévention<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Michel<br />

Joubert,<br />

Pilar Giraux-Arcella et Chantal<br />

Mougin<br />

Erès 30 €<br />

Les auteurs s’attachent à analyser les<br />

logiques <strong>de</strong> consommation <strong>de</strong> drogues<br />

illicites dans les gran<strong>de</strong>s villes, en tenant<br />

compte <strong>de</strong>s contextes urbains,<br />

sociaux et culturels (gran<strong>de</strong>s villes <strong>de</strong><br />

la France métropolitaine, Gua<strong>de</strong>loupe,<br />

New York, Londres, Charleroi... ).<br />

A contre-pied <strong>de</strong>s idéologies <strong>de</strong> la<br />

prévention lour<strong>de</strong>ment connotées<br />

(hygiénisme, contrôle social, prohibitionnisme),<br />

les références, les connaissances<br />

et les expériences sont ici actualisées<br />

dans la confrontation <strong>de</strong>s<br />

réflexions <strong>de</strong> sociologues, d’ethnologues<br />

et d’intervenants <strong>de</strong> terrain,<br />

qu’ils travaillent à la « réduction <strong>de</strong>s<br />

risques », ou mènent <strong>de</strong>s actions locales<br />

<strong>de</strong> prévention ou <strong>de</strong>s projets<br />

plus ciblés.<br />

Avec la participation <strong>de</strong> Patricia Bouhnik, Philippe<br />

Bourgois, Laïla Cassubie, Patrick Dessez,<br />

Didier Febvrel, Hervé Hu<strong>de</strong>bine, Pascale Jamoulle,<br />

Marie Jauffret-Rousti<strong>de</strong>, Elise Longe, Anne M.<br />

Lovell, Hervé Richard, Pierre Roche, Thomas Sauva<strong>de</strong>t,<br />

Christian Sueur, Céline Verchère, Pierre<br />

Vidal-Naquet, Marine Zecca.<br />

Développement du projet P.A.C.T.<br />

(Psychose Ai<strong>de</strong>r Comprendre Traiter) avec <strong>de</strong>s patients schizophrènes,<br />

dans un service intra hospitalier d’admission sectoriel (hospitalisations<br />

libres et sous contrainte)<br />

L<br />

’information est, <strong>de</strong> longue date, un <strong>de</strong>s principaux<br />

axes <strong>de</strong> travail <strong>de</strong> nos équipes soignantes.<br />

Ce programme avait déjà été développé à l’hôpital Marchant<br />

et nous avions la volonté <strong>de</strong> poursuivre ce qui avait<br />

été entrepris.<br />

Pourquoi un intérêt pour l’outil P.A.C.T. ?<br />

La tendance actuelle à diffuser, vulgariser, légiférer l’information<br />

au patient (1) doit s’accompagner d’une plus gran<strong>de</strong><br />

disponibilité <strong>de</strong>s soignants : cet atelier est un temps privilégié<br />

d’échange autour <strong>de</strong> la pathologie mentale.<br />

Le travail en groupe apporte une dynamique à la réflexion,<br />

permet un partage <strong>de</strong>s expériences avec un impact du<br />

témoignage <strong>de</strong> l’autre indéniablement différent et parfois<br />

plus important que l’avis du soignant, notamment pour<br />

<strong>de</strong>s patients pas encore engagés dans l’alliance thérapeutique<br />

et plus i<strong>de</strong>ntifiés à l’autre mala<strong>de</strong>. Par exemple, un patient<br />

banalisant les symptômes <strong>de</strong> la maladie a pu entendre un<br />

autre patient s’étonner et relever le caractère pathologique<br />

<strong>de</strong> son inactivité et <strong>de</strong> ses alcoolisations régulières.<br />

Le support vidéo nous a particulièrement intéressé pour ces<br />

patients dont le défaut <strong>de</strong>s représentations peut être un<br />

<strong>de</strong>s symptômes (2). L’image nous semblait être un intermédiaire<br />

pertinent. Certains patients dans le déni <strong>de</strong> leurs<br />

difficultés ont pu s’i<strong>de</strong>ntifier par quelques aspects à l’image<br />

(seul ou avec l’interaction du groupe), d’autres, utilisant<br />

encore leurs mécanismes <strong>de</strong> défense ont pu au moins<br />

nommer la maladie; un <strong>de</strong>s patient commentant la cassette<br />

nous déclarait avec détachement « les schizophrènes<br />

enten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s voix, ont <strong>de</strong>s difficultés <strong>de</strong> motivation et souvent<br />

<strong>de</strong>s relations compliquées avec leur famille ». Cette mise à distance<br />

constitue, tout <strong>de</strong> même, une première avancée à<br />

exploiter.<br />

Quels objectifs ?<br />

Notre objectif principal est <strong>de</strong> permettre au patient <strong>de</strong><br />

mieux comprendre et s’approprier la maladie sur un plan<br />

psycho-éducatif, avec à terme, l’augmentation <strong>de</strong> l’observance<br />

au traitement, la diminution <strong>de</strong>s rechutes, l’amélioration<br />

<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong> vie.<br />

Comment avons-nous mis en place ce<br />

programme ?<br />

Le groupe <strong>de</strong> travail a été constitué par les infirmier(e)s<br />

volontaires du service, le cadre <strong>de</strong> santé, le praticien hospitalier<br />

responsable <strong>de</strong> l’unité et l’interne.<br />

Nous nous sommes réunis <strong>de</strong> façon hebdomadaire pendant<br />

<strong>de</strong>ux mois, l’été 2003, pour « décortiquer » le contenu<br />

<strong>de</strong>s cassettes et fixer le cadre <strong>de</strong> notre travail.<br />

Une parfaite connaissance du support a été posée comme<br />

un pré-requis pour les soignants animateurs <strong>de</strong> l’atelier.<br />

Les cassettes ont donc été visionnées plusieurs fois, discutées,<br />

découpées, en précisant pour chaque séquence l’utilisation<br />

que nous souhaitions en faire. Ce travail a permis<br />

à l’équipe <strong>de</strong> s’approprier et d’optimiser l’outil P.A.C.T.<br />

D’autre part, notre souhait a été que tout le personnel<br />

infirmier visionne les cassettes, <strong>de</strong> façon à pouvoir répondre<br />

aux réactions <strong>de</strong>s patients, même à distance <strong>de</strong>s séances,<br />

dans le service. Le nombre d’animateurs a été fixé à <strong>de</strong>ux<br />

minimum (<strong>de</strong>ux infirmiers ou un infirmier et un interne).<br />

L’indication <strong>de</strong> l’atelier P.A.C.T. est posée par le mé<strong>de</strong>cin<br />

référent, sont concernés <strong>de</strong>s patients schizophrènes (diagnostic<br />

confirmé), cliniquement stables, clairement informés<br />

du diagnostic.<br />

L’atelier a lieu une fois par semaine, avec un ou plusieurs<br />

patients (trois maximum).<br />

Les séquences visionnées sont présélectionnées chaque<br />

semaine selon la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et l’évolution <strong>de</strong>s patients.<br />

Durant les séances, les extraits vidéo alternent avec une<br />

discussion en fonction <strong>de</strong> la dynamique du groupe. La<br />

durée <strong>de</strong>s séances est <strong>de</strong> 30 à 45 minutes.<br />

Quelles ont été nos difficultés ?<br />

Nous avons été freiné par les spécificités même du service.<br />

Il s’agit <strong>de</strong> patients hospitalisés, ce qui peut sembler en<br />

contradiction avec la nécessité <strong>de</strong> stabilité précitée.<br />

Le risque est <strong>de</strong> poser l’indication trop précocement, à la fois<br />

par rapport à la décompensation actuelle et par rapport à<br />

l’histoire naturelle <strong>de</strong> la maladie.<br />

En revanche, pour <strong>de</strong>s patients présentant une pathologie<br />

lour<strong>de</strong>, hospitalisés pour une longue pério<strong>de</strong>, pour lesquels<br />

le projet <strong>de</strong> sortie <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong>s délais (cas notamment<br />

d’un patient hospitalisé d’office pour un acte médico-légal),<br />

cet atelier permet d’avancer sur le plan <strong>de</strong> la reconnaissance<br />

<strong>de</strong>s troubles, parallèlement au long travail <strong>de</strong> réhabilitation<br />

psychosociale traitant les conséquences <strong>de</strong> la<br />

maladie.<br />

De plus, une mobilisation régulière <strong>de</strong>s équipes a été difficile<br />

au départ, d’une part parce qu’il s’agit d’un service d’admission<br />

ayant son lot d’activité urgente, d’autre part parce<br />

que nous nous sommes heurtés à la réserve <strong>de</strong> certains<br />

membres <strong>de</strong> l’équipe soignante.<br />

En effet, cela suppose pour le soignant <strong>de</strong> s’exposer dans<br />

une confrontation en face à face avec <strong>de</strong>s patients psychotiques,<br />

ayant <strong>de</strong>s troubles <strong>de</strong> la communication, parfois<br />

jusqu’au mutisme, d’autant que ces difficultés sont potentialisées<br />

par l’effet du groupe (3).<br />

Rappelons que la plupart <strong>de</strong> nos patients sont hospitalisés<br />

sous contrainte et que leur réticence est souvent gran<strong>de</strong> par<br />

rapport à la pathologie. L’animateur du P.A.C.T. ai<strong>de</strong> le<br />

patient à cheminer entre rejet et i<strong>de</strong>ntification.<br />

Ce déni, souvent présent au début <strong>de</strong> la maladie, peut<br />

décourager les soignants, il permet pourtant au patient <strong>de</strong><br />

se protéger et doit être travaillé avec précaution (4) ; dans certains<br />

cas, nous avons utilisé la rediffusion d’extraits vidéo car<br />

nous avons constaté que lors d’un premier passage, l’information<br />

avait été filtrée <strong>de</strong> façon à n’en intégrer qu’une<br />

petite partie (difficile <strong>de</strong> faire la part entre défense, hermétisme<br />

et troubles cognitifs). Une autre étape délicate<br />

peut être celle où le patient commence à s’i<strong>de</strong>ntifier à<br />

l’image qu’on lui propose ; ceci peut être très angoissant, le<br />

soignant doit être sensible aux réactions <strong>de</strong> chacun et y<br />

répondre <strong>de</strong> façon suffisamment contenante. Nous avons<br />

l’expérience <strong>de</strong> séances très difficiles où régnait un climat<br />

<strong>de</strong> tension extrême, avec un patient quasi mutique, refusant<br />

la discussion mais très avi<strong>de</strong> <strong>de</strong> poursuivre le visionnage <strong>de</strong>s<br />

cassettes. Car, expliquer le trouble, c’est déjà le reconnaître<br />

; où en était-il <strong>de</strong> cette acceptation ? Quel aveu ne pouvaitil<br />

pas encore nous faire ?<br />

L’investissement dans ce projet est effectivement parfois<br />

coûteux sur le plan personnel mais il nous permet d’enrichir<br />

notre pratique et correspond, à notre avis, à la mission<br />

du soignant en psychiatrie.<br />

En ce qui concerne les patients, ils montrent beaucoup<br />

d’intérêt et d’assiduité pour cet atelier et, paradoxalement,<br />

même ceux qui rejettent le plus la maladie : citons le cas<br />

d’un patient très mal à l’aise pendant les séances, <strong>de</strong>mandant<br />

sans cesse l’horaire <strong>de</strong> fin, qui se renseignait toujours<br />

avant <strong>de</strong> quitter la salle sur la prochaine date et s’y rendait<br />

immanquablement.<br />

Toutes ces contradictions ne sont-elles pas ce que l’on<br />

dénomme, « l’ambivalence du patient schizophrène », ici<br />

vécue et agie ?<br />

Quel avenir pour P.A.C.T. ?<br />

Ce projet ne pourra avoir d’impact que s’il s’inscrit dans la<br />

durée. Nous n’en sommes qu’à la mise en route.<br />

Pour l’instant, aucune évaluation n’a été faite et notre postulat<br />

<strong>de</strong> base n’a pas encore été démontré : « informer estce<br />

éduquer ? » (5).<br />

Si, actuellement, il nous parait naturel et satisfaisant en<br />

terme d’éthique d’apporter aux patients les connaissances<br />

que nous avons à disposition, nous pouvons nous questionner<br />

sur les conséquences que cette information aura<br />

pour eux, entre souffrance et apprentissage. Un questionnaire<br />

va être distribué aux patients ayant participé au<br />

P.A.C.T. dans le service pour qu’eux même mesurent l’impact<br />

du programme.<br />

En conclusion, P.A.C.T. est un outil qui nous a paru intéressant<br />

parce qu’il a été l’occasion <strong>de</strong> réflexions sur la question<br />

très actuelle <strong>de</strong> l’information au patient, il nous a permis<br />

d’enrichir nos pratiques et il est un espace privilégié<br />

d’échange pour les patients.<br />

On peut tout <strong>de</strong> même réfléchir sur le sens <strong>de</strong> l’information<br />

donnée à un patient hospitalisé sous contrainte, car même<br />

si la participation au P.A.C.T. est libre, le contexte pèse<br />

forcément. Il faut gar<strong>de</strong>r cette notion à l’esprit pour pouvoir<br />

travailler l’appropriation <strong>de</strong> la pathologie dans le respect du<br />

patient. <br />

S. ASENSIO, C. CAMILLERI, C. FARUCH<br />

Service <strong>de</strong> psychiatrie adulte, secteur 8, hôpital Larrey, 31000 Toulouse.<br />

Bibliographie<br />

(1) J.F. BAYLE, Enquête sur l’annonce du diagnostic <strong>de</strong> schizophrénie<br />

en France, L’Encéphale, 1999, XXV, 603-11.<br />

(2) I. ALMARIC, Le programme P.A.C.T., Neuro-psy. 1999, vol 14-<br />

1.<br />

(3) A. FOURNIER, Groupe P.A.C.T. comme outil psychothérapeutique,<br />

Synapse 2003, 197, 41-43.<br />

(4) P.A.C.T., <strong>de</strong> nouveaux chemins pour communiquer, Santé mentale<br />

99, n°37.<br />

(5) L’éducation du patient, Santé mentale 2000, n° 46.<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Comme dans toutes les maladies<br />

d’évolution chronique, l’information<br />

concernant les troubles bipolaires<br />

représente une ai<strong>de</strong> fondamentale dans<br />

la prise en charge <strong>de</strong> cette maladie.<br />

Le trouble bipolaire représente un<br />

enjeu important en terme <strong>de</strong> santé<br />

publique car il s’agit d’un trouble grave<br />

fait d’alternance, comme on le sait,<br />

d’accès dépressifs et d’épiso<strong>de</strong>s<br />

maniaques qui entraînent une gran<strong>de</strong><br />

souffrance du patient, <strong>de</strong> son conjoint,<br />

<strong>de</strong> ses enfants et <strong>de</strong> son entourage.<br />

Cette maladie est à l’origine d’un taux<br />

<strong>de</strong> mortalité important puisque 15%<br />

<strong>de</strong>s patients présentant <strong>de</strong>s troubles<br />

bipolaires se suici<strong>de</strong>nt, correspondant à<br />

un niveau <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> trois fois supérieur<br />

à celui <strong>de</strong> la population générale.<br />

La mortalité est également importante<br />

du fait <strong>de</strong> l’association à <strong>de</strong>s pathologies<br />

somatiques comme, par exemple, les<br />

pathologies cardio-vasculaires et à <strong>de</strong>s<br />

comorbidités associées (alcool, drogue).<br />

Il existe, par ailleurs, en particulier dans<br />

les états hypomaniaques et maniaques,<br />

<strong>de</strong>s conduites à risques importantes<br />

(acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> voiture, prise <strong>de</strong> risque).<br />

Enfin, au décours <strong>de</strong> cette maladie,<br />

peuvent apparaître <strong>de</strong> nombreuses<br />

complications médico-légales en relation<br />

avec l’exaltation et la mégalomanie<br />

<strong>de</strong>s patients (violence hétéro-agressive<br />

à l’encontre du voisinage, en société,<br />

souvent potentialisée par <strong>de</strong>s consommations<br />

d’alcool).<br />

L’information représente aussi un enjeu<br />

majeur car le diagnostic <strong>de</strong> trouble<br />

bipolaire est souvent un diagnostic<br />

errant pendant <strong>de</strong> très nombreuses<br />

années : il faut, en moyenne, huit ans<br />

avant que le diagnostic soit parfaitement<br />

posé par un mé<strong>de</strong>cin et donc les<br />

traitements mis en route. La recherche<br />

anamnestique reposant sur les antécé<strong>de</strong>nts<br />

familiaux <strong>de</strong> dépression, <strong>de</strong> suici<strong>de</strong><br />

n’est pas toujours simple à réaliser.<br />

Les épiso<strong>de</strong>s hypomaniaques, certains<br />

épiso<strong>de</strong>s dépressifs peuvent passer<br />

inaperçus pendant <strong>de</strong> très nombreuses<br />

années. Des conduites alcooliques ou<br />

toxicomaniaques peuvent cacher <strong>de</strong>s<br />

pathologies dépressives ou <strong>de</strong>s équivalents<br />

maniaques, <strong>de</strong>s équivalents<br />

anxieux ou <strong>de</strong>s troubles <strong>de</strong> la personnalité<br />

peuvent donner le change.<br />

En tout état <strong>de</strong> cause, plus la maladie<br />

est prise en charge précocement,<br />

meilleurs seront les résultats et mineures<br />

seront les complications secondaires à<br />

cette maladie.<br />

L’INFORMATION auprès <strong>de</strong>s patients<br />

aboutit, également, à optimiser les traitements,<br />

traitements <strong>de</strong>s épiso<strong>de</strong>s aigus<br />

et traitements à long terme <strong>de</strong> la prévention<br />

<strong>de</strong>s rechutes. Dans ce domaine,<br />

les étu<strong>de</strong>s concernant le Lithium<br />

confirment, aujourd’hui, 30% d’amélioration<br />

<strong>de</strong> qualité et 30% d’amélioration<br />

partielle. Le Lithium, dans ces<br />

pathologies, peut faire l’objet, également,<br />

d’échec dans la prévention <strong>de</strong>s<br />

rechutes. Cependant, on continue à<br />

penser qu’il a un rôle sur la prévention<br />

du suici<strong>de</strong>.<br />

Depuis la reconnaissance <strong>de</strong> l’efficacité<br />

du traitement par Lithium dans cette<br />

maladie, d’autres molécules sont apparues<br />

comme étant efficaces : les molécules<br />

antiépileptiques Valproate, Carbamazépine<br />

mais également les<br />

antipsychotiques.<br />

En <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s traitements pharmacologiques,<br />

il s’avère indispensable <strong>de</strong><br />

mettre en place une prise en charge<br />

psychologique.<br />

Il s’agit, en effet, d’une maladie pluridéterminée<br />

qui présente <strong>de</strong>s éléments<br />

<strong>de</strong> vulnérabilité génétique mais aussi<br />

<strong>de</strong>s décompensations accompagnant<br />

<strong>de</strong>s évènements <strong>de</strong> vie et <strong>de</strong>s facteurs<br />

<strong>de</strong> stress.<br />

Les co-morbidités dans cette pathologie<br />

sont souvent très élevées et il est nécessaire<br />

<strong>de</strong> pouvoir rechercher tous les<br />

autres facteurs associés.<br />

L’enjeu <strong>de</strong> l’information est <strong>de</strong> maintenir<br />

un centrage sur le patient. Il<br />

<strong>de</strong>vient partie prenante du dispositif<br />

éducatif. Cette éducation thérapeutique<br />

est réalisée par <strong>de</strong>s éducateurs


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Information du patient bipolaire<br />

du soin au sens large, mé<strong>de</strong>cin psychiatre,<br />

mé<strong>de</strong>cin généraliste, infirmier<br />

dans <strong>de</strong>s lieux <strong>de</strong> soins qui <strong>de</strong>viennent<br />

<strong>de</strong>s lieux d’éducation : il s’agit <strong>de</strong> mettre<br />

en œuvre une véritable EDUCATION<br />

THERAPEUTIQUE portant sur plusieurs<br />

points.<br />

• Le patient par rapport à sa maladie<br />

dans le repérage du mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> début<br />

<strong>de</strong> la maladie, <strong>de</strong> la phase d’état, <strong>de</strong> la<br />

phase <strong>de</strong>s complications, <strong>de</strong> la phase <strong>de</strong><br />

maintien, <strong>de</strong> suivi.<br />

• La connaissance <strong>de</strong> la maladie : il s’agit<br />

d’une maladie d’évolution chronique<br />

qui présente <strong>de</strong>s accès aigus. Il est toujours<br />

difficile pour les patients, comme<br />

dans toutes les maladies chroniques y<br />

compris les maladies somatiques, d’obtenir<br />

une adhésion sur le long terme<br />

à bonne observance thérapeutique,<br />

seule chance <strong>de</strong> succès et <strong>de</strong> stabilisation.<br />

Il est impératif d’accompagner le<br />

patient tout au long <strong>de</strong> cette évolution<br />

marquée <strong>de</strong> moments optimistes, <strong>de</strong><br />

phases <strong>de</strong> désespoir, <strong>de</strong> renoncements<br />

et parfois d’acceptation.<br />

• Le statut du patient : le patient <strong>de</strong>vient<br />

un élève auprès duquel on essaie <strong>de</strong><br />

développer les motivations et l’alliance<br />

pour entrer dans le processus <strong>de</strong> soin,<br />

sans oublier qu’il a <strong>de</strong>s difficultés d’apprentissage<br />

dans ce domaine : penser<br />

que l’autre se trompe, que l’épiso<strong>de</strong><br />

peut être unique, qu’il est plus fort que<br />

le génie évolutif propre <strong>de</strong> la maladie…<br />

• L’apprentissage <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> cette<br />

prise en charge repose sur <strong>de</strong>s mesures<br />

psycho-éducatives <strong>de</strong>stinées aux<br />

patients, éventuellement à leur famille,<br />

mesures explicitées par <strong>de</strong>s professionnels<br />

<strong>de</strong> la santé formés, qualifiés.<br />

Les informations dispensées au cours<br />

<strong>de</strong> ces réunions se réalisent sur un<br />

mo<strong>de</strong> interactif ; y seront énoncées <strong>de</strong>s<br />

informations spécifiques sur la maladie,<br />

sur les traitements ainsi que <strong>de</strong>s<br />

mesures psychologiques en relation<br />

avec cette maladie. Elles représentent<br />

donc un acte thérapeutique qui renforce<br />

l’alliance thérapeutique. Les informations<br />

doivent être claires, accessibles<br />

à tous, consensuelles sur la maladie,<br />

abordant différents thèmes en respectant<br />

l’interactivité entre le patient et les<br />

professionnels. Elles reposent, également,<br />

sur la diffusion <strong>de</strong> documents<br />

écrits, <strong>de</strong> documents sonores, <strong>de</strong> films,<br />

<strong>de</strong> sites Internet ; elles vont permettre<br />

l’élaboration et la reconnaissance du<br />

trouble ; elles visent à faire accepter la<br />

maladie et ainsi à améliorer la qualité<br />

<strong>de</strong> l’observance du traitement grâce à<br />

une alliance thérapeutique. Les patients,<br />

souvent d’évolution et d’âges différents<br />

dans la maladie, vont s’auto-renforcer<br />

dans la reconnaissance <strong>de</strong> leur souffrance,<br />

dans la reconnaissance du<br />

trouble voire dans l’amélioration <strong>de</strong>s<br />

symptômes. Ainsi, peu à peu le patient<br />

doit <strong>de</strong>venir acteur <strong>de</strong> sa maladie et<br />

changer certaines habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie,<br />

assumer les contraintes d’une surveillance<br />

régulière, utiliser <strong>de</strong> façon<br />

optimale les services <strong>de</strong> soins. Il s’agit<br />

Trouble obsessionnel compulsif : la HAS définit les<br />

critères d’indication <strong>de</strong> la neurochirurgie<br />

fonctionnelle<br />

La Haute autorité <strong>de</strong> santé (HAS) propose, dans un rapport, <strong>de</strong>s critères d’indication<br />

<strong>de</strong> la neurochirurgie fonctionnelle, ou stimulation cérébrale profon<strong>de</strong>,<br />

dans le trouble obsessionnel-compulsif (TOC), mais rappelle que cette<br />

technique est encore en cours d’évaluation*.<br />

A la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Direction générale <strong>de</strong> la santé (DGS), la HAS a conduit<br />

une étu<strong>de</strong> d’évaluation technologique afin <strong>de</strong> préciser les patients candidats<br />

à la stimulation cérébrale profon<strong>de</strong>, technique neurochirurgicale. Les traitements<br />

conventionnels -antidépresseurs sérotoninergiques, thérapies comportementales<br />

et cognitives ainsi que l’association <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>ux traitementspeuvent<br />

améliorer les <strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong>s patients et en guérir environ 20%. La<br />

stimulation cérébrale profon<strong>de</strong> s’adresse donc aux patients résistants, c’est-àdire<br />

qui présentent une réduction <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 25% <strong>de</strong>s scores sur l’échelle<br />

Y-BOCS (Yale Brown Obsessive-Compulsive Scale) alors qu’ils suivent un<br />

traitement médicamenteux et une psychothérapie « <strong>de</strong>puis au moins 5 ans »,<br />

ou aux patients intolérants. En outre, le pronostic doit être « considéré comme<br />

mauvais en l’absence d’intervention ».<br />

Les patients candidats doivent être âgés <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 20 ans et <strong>de</strong> moins <strong>de</strong><br />

65 ans, avec une maladie qui évolue <strong>de</strong>puis au moins 5 ans. Il faut qu’ils présentent<br />

une « souffrance significative et sévère ainsi qu’une altération majeure<br />

du fonctionnement psychosocial, attestées par l’évaluation clinique et la psychométrie<br />

». En cas <strong>de</strong> comorbidité (troubles <strong>de</strong> l’humeur, troubles anxieux,<br />

syndrome <strong>de</strong> Gilles <strong>de</strong> la Tourette...), celle-ci doit être traitée <strong>de</strong> manière appropriée.<br />

Enfin, le patient doit donner son consentement éclairé pour participer<br />

à un programme d’évaluation préopératoire et au programme <strong>de</strong> réhabilitation<br />

postopératoire à long terme, ce <strong>de</strong>rnier <strong>de</strong>vant également être<br />

accepté par le psychiatre référent. Par ailleurs, les conditions d’organisation<br />

nécessaires (équipements, caractéristiques <strong>de</strong>s services hospitaliers, ressources<br />

humaines) aux procédures <strong>de</strong> stimulation cérébrale profon<strong>de</strong>s, établies en<br />

2002 pour la maladie <strong>de</strong> Parkinson, s’appliquent au TOC.<br />

Des résultats prometteurs qui restent à confirmer<br />

Ces critères pourraient évoluer puisque la neurochirurgie fonctionnelle dans<br />

les TOC est encore balbutiante. La HAS juge les résultats « prometteurs mais<br />

préliminaires », soulignant qu’il reste <strong>de</strong>s questions essentielles à résoudre<br />

telles que la cible cérébrale optimale à stimuler chez ces patients ou l’efficacité<br />

à long terme. L’agence rappelle qu’une étu<strong>de</strong> française nationale multicentrique<br />

a été mise en place dans le cadre du Programme hospitalier pour<br />

la recherche clinique (PHRC) 2004 pour répondre aux questions restées en<br />

suspens. Dans la littérature, la HAS n’a trouvé qu’une dizaine <strong>de</strong> patients<br />

dans le mon<strong>de</strong> traités par stimulation cérébrale profon<strong>de</strong>, avec un suivi <strong>de</strong><br />

18 mois en moyenne. Certains résultats « peuvent être considérés comme positifs<br />

» mais sont « partiels pour la plupart d’entre eux ».<br />

Les données disponibles sur la stimulation cérébrale profon<strong>de</strong> proviennent<br />

<strong>de</strong>s expériences dans d’autres pathologies, la maladie <strong>de</strong> Parkinson, le tremblement<br />

essentiel, la dystonie, l’épilepsie ou le syndrome <strong>de</strong> Gilles <strong>de</strong> la Tourette.<br />

Le rapport <strong>de</strong> la HAS fait, également, une synthèse <strong>de</strong>s connaissances<br />

sur les TOC, rappelant qu’environ 2% <strong>de</strong> la population française adulte serait<br />

atteinte, ce qui ferait <strong>de</strong>s TOC la quatrième pathologie psychiatrique la<br />

plus fréquente après les troubles phobiques, les troubles liés aux toxiques (alcool<br />

et drogue) et les troubles dépressifs. <br />

F.C.<br />

*TOC résistants : prise en charge et place <strong>de</strong> la neurochirurgie fonctionnelle, rapport <strong>de</strong> 80<br />

pages et synthèse <strong>de</strong> 6 pages, téléchargeables sur www.has-sante.fr)<br />

donc, peu à peu, <strong>de</strong> faire reconnaître la<br />

chronicité <strong>de</strong> cette maladie qui nécessite<br />

un suivi et un traitement au long<br />

terme.<br />

Par ailleurs, les objectifs peuvent être,<br />

également, <strong>de</strong> reconnaître précocement<br />

les symptômes d’une récidive, symptômes<br />

classiques marqués par la reconnaissance<br />

<strong>de</strong> l’insomnie, un début d’hyperactivité<br />

mais aussi les premiers<br />

symptômes spécifiques connus ou<br />

reconnus soit par le patient, soit par<br />

son environnement. La connaissance<br />

plus précise <strong>de</strong> ces épiso<strong>de</strong>s amène à<br />

agir sur certains déterminants, également<br />

à agir sur la gestion <strong>de</strong> la vie. A<br />

terme, c’est par l’établissement et par le<br />

maintien d’une alliance thérapeutique<br />

que va s’établir une relation <strong>de</strong> qualité<br />

renforçant les motivations et l’implication<br />

du traitement grâce à un bon<br />

niveau d’information, à une bonne<br />

connaissance <strong>de</strong>s risques <strong>de</strong> la maladie<br />

et <strong>de</strong>s objectifs du traitement.<br />

Au cours <strong>de</strong> ces réunions seront abordés<br />

un certain nombre <strong>de</strong> thèmes<br />

concernant la démystification d’idées<br />

fausses, d’informations générales sur<br />

les traitements et sur les conséquences<br />

d’un arrêt inopportun du traitement.<br />

Il faut ainsi dénoncer certaines stratégies<br />

conscientes ou inconscientes <strong>de</strong>s<br />

patients bipolaires qui, voulant à certaines<br />

phases hypomaniaques éviter le<br />

renouvellement <strong>de</strong> la prescription <strong>de</strong>s<br />

traitements, arrivent à escamoter pour<br />

<strong>de</strong>s fausses raisons <strong>de</strong>s ren<strong>de</strong>z-vous et<br />

à s’extraire du système <strong>de</strong> soin. L’exaltation<br />

hypomaniaque plus confortable<br />

est recherchée au dépend d’une observance<br />

régulière. Le groupe peut, également,<br />

proposer <strong>de</strong>s systèmes d’autoévaluation<br />

portant sur la courbe <strong>de</strong><br />

l’humeur, la courbe du sommeil, le<br />

tableau récapitulatif <strong>de</strong>s évènements<br />

<strong>de</strong> vie et plus récemment, comme l’a<br />

proposé un patient, un diagramme fait<br />

à posteriori et mettant en corrélation<br />

l’état d’exaltation et le niveau <strong>de</strong>s<br />

dépenses financières réalisées au cours<br />

<strong>de</strong>s mois précé<strong>de</strong>nts.<br />

Certains déterminants sont aujourd’hui<br />

bien connus pour être essentiels,<br />

comme <strong>de</strong>s règles d’hygiène <strong>de</strong> vie, le<br />

respect <strong>de</strong>s rythmes <strong>de</strong> sommeil, la<br />

diminution <strong>de</strong>s excitants, la diminution<br />

<strong>de</strong> la charge <strong>de</strong> travail et du surmenage,<br />

le respect <strong>de</strong>s rythmes sociaux ;<br />

préférer une qualification professionnelle<br />

un peu inférieure à ses compétences<br />

propres pour diminuer le stress<br />

au travail, favoriser l’expression émotionnelle<br />

au sein <strong>de</strong>s familles pour favoriser<br />

<strong>de</strong> meilleurs échanges intra-familiaux<br />

tout particulièrement conjugaux<br />

permettant <strong>de</strong> désamorcer certains épiso<strong>de</strong>s.<br />

Il paraît plus difficile <strong>de</strong> pouvoir<br />

réguler ces phénomènes au cours <strong>de</strong> la<br />

phase hypomaniaque du fait du sentiment<br />

d’exaltation mégalomaniaque, <strong>de</strong><br />

l’apparition d’un certain nombre <strong>de</strong><br />

préoccupations par exemple d’ordre<br />

religieux, philosophique qu’au décours<br />

<strong>de</strong> la dépression où les actions sur la<br />

mobilisation, l’activation, l’encouragement,<br />

la resocialisation permettent parfois<br />

<strong>de</strong> dépasser ce cap difficile.<br />

En fait, la révélation du diagnostic n’est<br />

pas suffisante ; elle passe par la connaissance,<br />

l’acceptation et la reconnaissance<br />

du trouble <strong>de</strong> la maladie, <strong>de</strong> son<br />

handicap, <strong>de</strong>s traitements, ceci par <strong>de</strong>s<br />

échanges réciproques entre les patients,<br />

mais également grâce à la lecture <strong>de</strong><br />

livres et <strong>de</strong> documents divers comme<br />

par exemple le livre <strong>de</strong> K. Jamison, psychiatre<br />

décrivant elle-même ces différentes<br />

phases puisque porteuses <strong>de</strong> la<br />

maladie. Il faut souligner que le déficit<br />

relationnel est un <strong>de</strong>s composants du<br />

trouble bipolaire le plus lent à se normaliser<br />

et que cette capacité réduite<br />

<strong>de</strong> réintégration sociale concerne surtout<br />

le rapport avec l’autre, contrairement<br />

aux idées reçues.<br />

Ces groupes peuvent, également, orienter<br />

vers <strong>de</strong>s groupes d’entrai<strong>de</strong> favori-<br />

DOSSIER : L’INFORMATION DU PATIENT EN PSYCHIATRIE 15<br />

sant l’augmentation <strong>de</strong> l’estime <strong>de</strong> soi,<br />

l’amélioration du fonctionnement social<br />

<strong>de</strong> l’individu et à terme permettre une<br />

réintégration plus rapi<strong>de</strong> ainsi qu’une<br />

meilleure qualité <strong>de</strong> vie. Meilleur sera<br />

le fonctionnement social, meilleure sera<br />

l’adaptation sociale, meilleure sera sans<br />

doute la qualité <strong>de</strong> vie et la diminution<br />

du risque d’une rechute.<br />

La parole circule très librement dans<br />

ces groupes. Les préoccupations et la<br />

nature du discours sont différentes<br />

spontanément du contenu <strong>de</strong>s entretiens<br />

médicaux.<br />

Les groupes agissent donc sur plusieurs<br />

variables : d’abord la capacité du patient<br />

à communiquer, à exprimer ses idées,<br />

à comprendre que d’autres sont passés<br />

par la même souffrance, ont évolué<br />

favorablement ; ensuite il transforme<br />

le mala<strong>de</strong> exécuteur passif d’instructions<br />

souvent mal comprises en une<br />

personne qui s’assume dans un rôle<br />

actif se sentant moins seul et moins<br />

isolé dans sa souffrance. La parole est<br />

souvent facile dans le groupe, exprimant<br />

avec sincérité sa vie intime et son<br />

cheminement affectif.<br />

Au total, les résultats <strong>de</strong> ces groupes<br />

renforcent l’alliance thérapeutique mise<br />

en place dans la relation individuelle<br />

mé<strong>de</strong>cin/mala<strong>de</strong>, soignant/mala<strong>de</strong> permettant<br />

une meilleure connaissance<br />

<strong>de</strong> la maladie, donc une meilleure<br />

observance <strong>de</strong>s traitements, une<br />

meilleure connaissance <strong>de</strong>s facteurs<br />

déclenchants, à plus long terme une<br />

réduction du nombre <strong>de</strong> rechute<br />

maniaque et <strong>de</strong> la durée d’hospitalisation,<br />

une amélioration du fonctionnement<br />

social. On peut donc dire que<br />

l’intérêt <strong>de</strong> ces groupes est très fort<br />

pour ai<strong>de</strong>r nos patients bipolaires à<br />

s’inscrire dans la durée dans la gestion<br />

<strong>de</strong> leur maladie et permettre, comme<br />

dans toutes les maladies chroniques,<br />

<strong>de</strong> mieux vivre ce qui peut représenter<br />

une amputation partielle <strong>de</strong> sa vie. Ils<br />

vont ai<strong>de</strong>r le patient à faire un long<br />

travail <strong>de</strong> reconnaissance grâce à la<br />

consolidation <strong>de</strong> l’alliance thérapeutique<br />

et tirer, par là-même, <strong>de</strong>s bénéfices<br />

directs concernant la qualité <strong>de</strong>s<br />

hospitalisations lors <strong>de</strong>s décompensations,<br />

mais, également, la qualité <strong>de</strong> la<br />

vie dans les phases intercurrentes <strong>de</strong>s<br />

épiso<strong>de</strong>s aigus. Le soutien par la présence<br />

dans les groupes <strong>de</strong>s proches du<br />

mala<strong>de</strong> va permettre un meilleur dialogue<br />

au sein <strong>de</strong>s familles et, peut-être,<br />

le désamorçage précoce d’épiso<strong>de</strong>s qui<br />

auraient décompensé sur un mo<strong>de</strong> plus<br />

aigu s’il y avait eu une moins bonne<br />

compréhension réciproque et le maintien<br />

d’un dysfonctionnement relationnel.<br />

L’évaluation <strong>de</strong> ces groupes a montré,<br />

aujourd’hui, une réduction du nombre<br />

<strong>de</strong>s rechutes maniaques et <strong>de</strong> la durée<br />

d’hospitalisation. Cependant, l’efficacité<br />

<strong>de</strong> ce travail s’avère moins marquée<br />

sur la prévention <strong>de</strong>s rechutes dépressives.<br />

Il ai<strong>de</strong> les patients à surmonter<br />

le handicap socio-professionnel généré<br />

par la maladie et tente <strong>de</strong> lutter contre<br />

un problème morbi<strong>de</strong> qui engendre<br />

une chronicité. Le patient acteur <strong>de</strong> sa<br />

maladie, acteur <strong>de</strong> ses soins subit moins<br />

les aléas d’un trouble dont les conséquences<br />

sont extrêmement <strong>de</strong>structives<br />

tant pour lui dans sa vie mais,<br />

également, pour ses proches, sa famille<br />

et son milieu professionnel. <br />

Catherine AMOYAL-FARUCH*,<br />

Pascal MARIE*,<br />

Adam NEUWALD**<br />

*Praticiens Hospitaliers Secteur 8<br />

**Assistant Généraliste Secteur 8<br />

CH G. Marchant.<br />

Bibliographie<br />

GAY C., Les enjeux <strong>de</strong> l’information, Santé<br />

Mentale 2001, 56.<br />

JAMISON KR, De l’exaltation à la dépression,<br />

Ed Robert Laffon 1997, 236 p.<br />

KOCHMAN F., MEYNARD J.A., Les<br />

troubles bipolaires : gui<strong>de</strong> à l’usage <strong>de</strong>s<br />

patients et <strong>de</strong> leur famille, Sanofi système<br />

nerveux central.<br />

LIVRES<br />

Travail et Génétique<br />

De la sélection préventive à la<br />

prévention sélective<br />

Sophie Douay<br />

Préface du Pr. Pierre-Yves<br />

Verkindt<br />

L’Harmattan<br />

Les progrès <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine moléculaire<br />

appliqués en milieu <strong>de</strong> travail<br />

nourrissent d’énormes espoirs en<br />

terme d’évitement <strong>de</strong> la maladie en<br />

amont pour certains, et pour d’autres,<br />

d’affreuses craintes d’émergences<br />

d’une sorte <strong>de</strong> « bio-cratie » ou « génocratie<br />

», au sein <strong>de</strong> laquelle les règles<br />

et les valeurs seraient réexaminées<br />

à la lumière <strong>de</strong> critères biologiques<br />

et génétiques, auxquels le caractère<br />

scientifique confèrerait une sorte <strong>de</strong><br />

valeur absolue. Au <strong>de</strong>là <strong>de</strong>s fantasmes<br />

<strong>de</strong>s uns et <strong>de</strong>s autres, le développement<br />

<strong>de</strong>s tests génétiques en milieu<br />

<strong>de</strong> travail, constituerait un marché<br />

important pour les promoteurs et distributeurs<br />

concernés.<br />

Si la loi interdit les discriminations en<br />

raison <strong>de</strong> l’état <strong>de</strong> santé <strong>de</strong>s salariés,<br />

la question <strong>de</strong> la qualification du recours<br />

aux tests génétiques, en milieu<br />

<strong>de</strong> travail, <strong>de</strong> pratique discriminatoire<br />

peut être discutée.<br />

En outre, si les textes européens et<br />

nationaux donnent priorité à la prévention<br />

primaire, environnementale,<br />

il semble que l’approche actuelle <strong>de</strong><br />

la prévention, en se voulant <strong>de</strong> plus<br />

en plus pluridisciplinaire, ne puisse<br />

exclure une intégration croissante du<br />

paramètre génétique à la notion <strong>de</strong><br />

« risque professionnel », sinon pour luimême,<br />

du moins en combinaison<br />

avec le paramètre environnemental.<br />

Trisomie et handicap<br />

La parole <strong>de</strong>s jeunes :<br />

configurations et itinéraires<br />

Jean-Sébastien Morvan, Nathalie<br />

Auguin, Valérie Torossain<br />

Editions du CTNERHI, 14,60 €<br />

Cet ouvrage est le résultat d’une démarche<br />

<strong>de</strong> recherche menée au début<br />

<strong>de</strong>s années 2000 qui se penche<br />

sur l’évolution <strong>de</strong>s jeunes adolescents<br />

et adultes trisomiques 21. Leur <strong>de</strong>venir<br />

personnel, social, scolaire, professionnel<br />

est pris en considération<br />

sur fond <strong>de</strong> toile d’ajustements psychologiques<br />

tant dans le rapport à<br />

eux-mêmes qu’à celui <strong>de</strong> leur environnement<br />

et <strong>de</strong> leur entourage.<br />

L’approche est psychodynamique afin,<br />

au travers <strong>de</strong>s faits et <strong>de</strong>s conduites<br />

relatés par les jeunes <strong>de</strong> repérer les<br />

mouvements psychiques qui ont accompagné<br />

leur désir <strong>de</strong> grandir, <strong>de</strong><br />

mettre en relief les allers et retours<br />

avec les proches familiaux, professionnels,<br />

pairs et <strong>de</strong> voir comment<br />

se réalisent ou pas, ou peu, les phénomènes<br />

d’insertion, les souhaits<br />

d’autonomie, les recherches affectives<br />

dans le rapport à soi comme<br />

dans le rapport à l’autre. Ces situations<br />

sont analysées dans leur globalité<br />

entre les composantes psychologiques<br />

et les dimensions<br />

environnementales là où s’élaborent<br />

et se construisent la représentation<br />

<strong>de</strong> soi et l’estime <strong>de</strong> soi.<br />

Paradoxalement, le <strong>de</strong>venir <strong>de</strong> l’adolescent<br />

et du jeune trisomique a été<br />

peu étudié. Cette pério<strong>de</strong> est particulièrement<br />

cruciale car elle comporte<br />

un certain nombre <strong>de</strong> choix. Il s’agit,<br />

dans cette perspective, <strong>de</strong> retracer<br />

leurs itinéraires scolaire et professionnel<br />

au travers <strong>de</strong> continuités et<br />

<strong>de</strong> ruptures, <strong>de</strong> les situer dans leur<br />

fonctionnement individuel et social<br />

(capacités d’autonomie et d’insertion),<br />

<strong>de</strong> dégager ce qu’il en est <strong>de</strong> leurs représentations<br />

et <strong>de</strong> leur vécu (image<br />

et estime <strong>de</strong> soi), <strong>de</strong> qualifier leur position<br />

et leur dynamisme <strong>de</strong> sujet en<br />

<strong>de</strong>venir (capacité à être seul et projets).


16<br />

DOSSIER : L’INFORMATION DU PATIENT EN PSYCHIATRIE<br />

LIVRES ET REVUES<br />

La folie protège-t-elle <strong>de</strong> la<br />

maladie ?<br />

Revue Française <strong>de</strong><br />

Psychosomatique 2005, n°7<br />

Presses Universitaires <strong>de</strong> France<br />

26 €<br />

Le titre <strong>de</strong> ce numéro peut surprendre<br />

par le rapprochement qu’il propose<br />

entre <strong>de</strong>ux univers <strong>de</strong> référence aussi<br />

différents que la folie et la maladie<br />

somatique, d’autant plus qu’il suggère<br />

aussi l’idée que le premier pourrait<br />

protéger du second.<br />

Le dossier présenté cherche à approfondir<br />

ce qu’il en est, du point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> l’économie psychosomatique<br />

<strong>de</strong>s relations entre la folie en tant<br />

que solution psychique et la somatisation<br />

en tant que solution somatique.<br />

L’une <strong>de</strong>s contributions fait le point<br />

sur les connaissances actuelles au sujet<br />

<strong>de</strong>s rapports entre psychose et somatose,<br />

du point <strong>de</strong> vue psychiatrique.<br />

Selon les résultats <strong>de</strong> cette<br />

étu<strong>de</strong>, qui doivent être évalués avec<br />

pru<strong>de</strong>nce, les patients psychotiques,<br />

contrairement aux idées reçues, auraient<br />

une authentique vulnérabilité<br />

somatique. La décompensation somatique<br />

intervient, le plus fréquemment,<br />

chez eux dans <strong>de</strong>s moments<br />

<strong>de</strong> rupture <strong>de</strong> l’équilibre précé<strong>de</strong>mment<br />

établi entre leur fonctionnement<br />

mental psychotique et leur environnement<br />

objectal. Ces observations<br />

<strong>de</strong> nature psychiatrique vont dans le<br />

même sens que les conceptions développées,<br />

<strong>de</strong>puis longtemps, par les<br />

psychosomaticiens <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Paris,<br />

qui soulignent la valeur protectrice<br />

<strong>de</strong> la mentalisation vis-à-vis du<br />

fonctionnement somatique.<br />

Les autres articles <strong>de</strong> ce numéro illustrent<br />

aussi ce point <strong>de</strong> vue en élargissant<br />

la notion <strong>de</strong> folie au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s<br />

limites psychopathologiques <strong>de</strong>s psychoses<br />

classiques.<br />

G. Szwec a repris, d’une manière synthétique,<br />

les rapports entre folie et<br />

maladie somatique, en s’appuyant<br />

sur le modèle classique <strong>de</strong> Pierre<br />

Marty, pour en déduire les conséquences<br />

possibles tant au point <strong>de</strong><br />

vue clinique que théorique. Les observations<br />

psychosomatiques montrent,<br />

assez régulièrement, chez certains<br />

patients, <strong>de</strong>s mouvements <strong>de</strong><br />

bascule d’un registre psychopathologique<br />

à un registre physiopathologique.<br />

Le modèle économique permet une<br />

intelligibilité nouvelle <strong>de</strong> ces observations<br />

psychosomatiques, dans la<br />

mesure où les expressions psychiques<br />

et somatiques peuvent être conçues<br />

en termes <strong>de</strong> solutions défensives individuelles.<br />

Dans cette optique, le<br />

« choix » ou, plutôt, la nécessité <strong>de</strong> recourir<br />

à l’une d’entre elles dépend<br />

<strong>de</strong>s conditions économiques locales<br />

et temporelles autant que <strong>de</strong>s aptitu<strong>de</strong>s<br />

individuelles.<br />

Socio-anthropologie <strong>de</strong>s<br />

joueurs d’échecs<br />

Jacques Bernard<br />

L’Harmattan, 24 €<br />

Mené à partir d’une enquête réalisée<br />

selon le principe <strong>de</strong> l’observation participante,<br />

cet ouvrage apporte un<br />

éclairage sur un groupe social méconnu,<br />

celui <strong>de</strong>s joueurs d’échecs français.<br />

L’étu<strong>de</strong> porte sur différents aspects<br />

: les joueurs amateurs, les clubs<br />

d’échecs, les relations sociales qui se<br />

nouent lors <strong>de</strong>s compétitions et, plus<br />

spécifiquement, les joueurs d’échecs<br />

professionnels dont le métier, la vie<br />

privée, les comportements <strong>de</strong> loisir<br />

témoignent <strong>de</strong> ce que la pratique du<br />

jeu rejaillit sur toutes les facettes <strong>de</strong><br />

leur existence. Cet examen <strong>de</strong> la place<br />

<strong>de</strong>s joueurs d’échecs dans la société<br />

est enrichi par une recherche sur la<br />

représentation du jeu dans la littérature,<br />

le cinéma, les médias.<br />

Dans la plupart <strong>de</strong>s maladies chroniques,<br />

le traitement médicamenteux<br />

est la « pierre d’angle » <strong>de</strong> la stratégie<br />

thérapeutique. Il nécessite donc, à<br />

cet égard, la plus gran<strong>de</strong> attention si<br />

l’on veut assurer une bonne stratégie <strong>de</strong><br />

soins qui se construira au fil du temps<br />

entre l’équipe soignante pluridisciplinaire<br />

et le patient.<br />

La prise en charge <strong>de</strong>s troubles psychotiques<br />

représente, en terme <strong>de</strong> santé<br />

publique et sur le plan humain et social,<br />

un enjeu considérable mais ce problème<br />

<strong>de</strong>vient encore plus préoccupant<br />

quand on sait que la non-observance<br />

du traitement médicamenteux, principale<br />

cause <strong>de</strong> rechute ou <strong>de</strong> désocialisation,<br />

atteint plus <strong>de</strong> 50% <strong>de</strong>s patients<br />

en ambulatoire.<br />

L’équipe pluridisciplinaire qui accompagne<br />

le patient psychotique doit alors<br />

considérer les causes <strong>de</strong> ce phénomène<br />

actuellement bien décrites (1, 4) et<br />

s’efforcer d’œuvrer pour transformer<br />

dans ce pronostic ce qui peut être évitable.<br />

Depuis une dizaine d’années, notre<br />

mission <strong>de</strong> pharmacien (2), qui définit<br />

notre rôle <strong>de</strong> « professionnel du médicament<br />

», nous a poussés à formaliser<br />

concrètement ce rôle dans la chaîne<br />

du soin en milieu hospitalier.<br />

Notre démarche s’est déroulée en plusieurs<br />

étapes.<br />

La première étape a consisté à permettre<br />

d’i<strong>de</strong>ntifier le pharmacien hospitalier<br />

comme personne-ressource<br />

dans l’information sur les médicaments<br />

vis-à-vis <strong>de</strong>s partenaires soignants<br />

(mé<strong>de</strong>cins, infirmiers) et <strong>de</strong>s patients.<br />

Un bulletin d’information trisannuel<br />

<strong>de</strong>stiné aux soignants, <strong>de</strong>s fiches d’information<br />

sur les psychotropes ont été<br />

rédigés par un groupe <strong>de</strong> pharmaciens<br />

hospitaliers appartenant au Réseau<br />

P.I.C. (6) puis validés localement par<br />

<strong>de</strong>s psychiatres. Ces fiches ont été élaborées<br />

suivant les recommandations<br />

<strong>de</strong> l’ANAES(5), décrivant le bénéfice<br />

thérapeutique attendu tout en évoquant<br />

les effets iatrogènes potentiels<br />

et la conduite à suivre. Elles signalent<br />

également les précautions à prendre<br />

et les éléments principaux <strong>de</strong> la surveillance<br />

du traitement.<br />

La fiche d’information est un support<br />

concret <strong>de</strong>stiné au patient à qui elle<br />

est remise personnellement par son<br />

mé<strong>de</strong>cin, son pharmacien ou un infirmier.<br />

Toutefois, cette fiche d’information<br />

ne peut se substituer à l’information<br />

orale qui doit être initiée par le<br />

psychiatre au cours <strong>de</strong> la consultation<br />

car elle est le fon<strong>de</strong>ment même <strong>de</strong> l’alliance<br />

thérapeutique sur laquelle s’établira<br />

la démarche <strong>de</strong> soins. La fiche<br />

d’information est aussi la « trace » matérielle<br />

d’une démarche d’information<br />

dirigée vers le patient.<br />

La <strong>de</strong>uxième étape <strong>de</strong> notre démarche<br />

a consisté à mettre au point une<br />

métho<strong>de</strong> d’éducation pharmaco- thérapeutique<br />

intégrée dans la démarche<br />

<strong>de</strong> soins.<br />

Cette métho<strong>de</strong> s’appelle « L’Atelier du<br />

Médicament » (3). Elle a débuté dans les<br />

années 1994-1995 au Centre Hospitalier<br />

G. Marchant à Toulouse avec C.<br />

Fabre pharmacien, et au Centre Hospitalier<br />

<strong>de</strong>s Pyrénées à Pau avec M.L.<br />

Biscay pharmacien.<br />

Après plusieurs années qui ont permis<br />

<strong>de</strong> mettre au point cette métho<strong>de</strong> qui<br />

s’est montrée efficace et relativement<br />

facile à mettre en place, elle est en train<br />

<strong>de</strong> s’étendre dans plusieurs établissements<br />

<strong>de</strong> santé mentale grâce à une<br />

formation professionnelle qu’a suivi<br />

une centaine <strong>de</strong> pharmaciens <strong>de</strong> 2002<br />

à 2004.<br />

« L’Atelier du Médicament » est une<br />

activité thérapeutique sous la forme<br />

d’un groupe <strong>de</strong> paroles, animé par un<br />

pharmacien en collaboration avec une<br />

infirmière. Ce groupe réunit 8 à 10<br />

patients choisis par l’équipe <strong>de</strong> soins<br />

(psychiatres et infirmiers) suivant leur<br />

aptitu<strong>de</strong> à pouvoir participer au groupe<br />

et recevoir <strong>de</strong>s informations ou<br />

suivre plusieurs séances.<br />

En effet, <strong>de</strong>ux types d’ateliers sont pro-<br />

La place du Pharmacien dans<br />

l’information et l’éducation<br />

thérapeutique du patient<br />

posés : ils correspon<strong>de</strong>nt à 2 niveaux<br />

d’approfondissement <strong>de</strong>s connaissances<br />

par les patients.<br />

L’atelier <strong>de</strong> type informatif qui a lieu 1<br />

fois/mois dans un service d’hospitalisation<br />

complète où participent <strong>de</strong>s<br />

patients qui souhaitent compléter les<br />

informations qu’ils ont reçues <strong>de</strong>s<br />

mé<strong>de</strong>cins ou infirmiers. Cet atelier est<br />

également proposé aux patients avant<br />

leur sortie <strong>de</strong> l’hôpital.<br />

L’atelier <strong>de</strong> type éducatif qui est proposé<br />

au même groupe <strong>de</strong> patients, réunis<br />

suivant leur profil pathologique et leurs<br />

besoins. L’atelier se compose <strong>de</strong> 6 à 8<br />

séances hebdomadaires <strong>de</strong> 1 heure.<br />

Un programme est adapté suivant les<br />

besoins <strong>de</strong>s patients : connaissance <strong>de</strong>s<br />

neuroleptiques, <strong>de</strong>s antidépresseurs,<br />

régulateurs <strong>de</strong> l’humeur, anxiolytiques,<br />

hypnotiques, reconnaître les effets thérapeutiques,<br />

les signes <strong>de</strong> la maladie,<br />

les effets indésirables et les solutions<br />

préconisées, la durée du traitement, la<br />

prévention <strong>de</strong>s rechutes, etc….<br />

Les objectifs <strong>de</strong> cette métho<strong>de</strong> éducative<br />

sont bien ciblés sur le patient. Il<br />

s’agit, en effet, <strong>de</strong> :<br />

- permettre au patient <strong>de</strong> vérifier ses<br />

connaissances sur le traitement et <strong>de</strong> les<br />

enrichir,<br />

- l’ai<strong>de</strong>r à s’approprier son traitement en<br />

tant qu’objet utile à sa santé,<br />

- l’ai<strong>de</strong>r à <strong>de</strong>venir acteur (connaître son<br />

rôle, créer <strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s, développer sa<br />

confiance),<br />

- renforcer l’alliance thérapeutique donc<br />

l’observance médicamenteuse.<br />

Le rôle spécifique du<br />

Pharmacien dans cette<br />

approche thérapeutique<br />

Le pharmacien dans sa formation <strong>de</strong><br />

« professionnel du médicament » peut<br />

mettre au service du soin <strong>de</strong>stiné aux<br />

patients, ses qualités <strong>de</strong> pharmacien<br />

clinicien et <strong>de</strong> technicien du médicament.<br />

Nous citerons certains exemples :<br />

- il ai<strong>de</strong> le patient à rechercher les bénéfices<br />

thérapeutiques tout en lui expliquant<br />

les actions du médicament,<br />

- il abor<strong>de</strong> les effets indésirables en<br />

aidant le patient à les i<strong>de</strong>ntifier, les<br />

exprimer, pour trouver les solutions<br />

avec le prescripteur,<br />

- il ai<strong>de</strong> à faire repérer les signes <strong>de</strong> la<br />

maladie tout en permettant <strong>de</strong> différencier<br />

les effets iatrogènes <strong>de</strong>s symptômes<br />

liés à la pathologie,<br />

- il explique l’intérêt du traitement, sa<br />

durée, les risques liés à l’arrêt et permet<br />

ainsi <strong>de</strong> renforcer l’observance.<br />

- il éduque au bon usage <strong>de</strong>s médicaments,<br />

et met en gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s risques liés<br />

à l’usage <strong>de</strong>s drogues, <strong>de</strong> l’alcool, et <strong>de</strong><br />

l’abus <strong>de</strong> certains psychotropes.<br />

- il dédramatise et permet <strong>de</strong> resituer la<br />

place du médicament dans le soin<br />

d’une maladie chronique : accepter la<br />

maladie, apprendre à vivre avec le traitement.<br />

En amont <strong>de</strong> l’éducation, et au cours<br />

du suivi thérapeutique pendant l’atelier,<br />

son rôle se situe avec les prescripteurs<br />

et les infirmières dans l’évaluation<br />

thérapeutique interdisciplinaire,<br />

pour favoriser le bon usage <strong>de</strong>s médicaments.<br />

Il est, en effet, nécessaire,<br />

comme l’indique le rapport <strong>de</strong> la DGS,<br />

<strong>de</strong> « s’assurer <strong>de</strong> l’efficacité <strong>de</strong>s traitements<br />

recommandés et <strong>de</strong> leur validation,<br />

avant <strong>de</strong> les inclure dans une<br />

démarche d’éducation thérapeutique ».<br />

Par sa formation professionnelle et sa<br />

mission <strong>de</strong> dispensateur <strong>de</strong>s médicaments,<br />

le pharmacien analyse d’abord<br />

la prescription médicale mais c’est en<br />

approchant et écoutant le patient qu’il<br />

sera le plus pertinent sur cette analyse<br />

dont il pourra discuter les points d’évaluation<br />

et <strong>de</strong> suivi avec le prescripteur<br />

et l’équipe soignante.<br />

L’observance du traitement sera d’autant<br />

facilitée, si le schéma thérapeutique<br />

est simple : formes galéniques<br />

adaptées, nombre <strong>de</strong> prises limité au<br />

minimum, rythme d’administration<br />

adapté au rythme <strong>de</strong> vie du patient.<br />

Il sera particulièrement important d’éviter<br />

les redondances pharmacologiques<br />

qui peuvent être source <strong>de</strong> iatrogénie,<br />

la prolongation <strong>de</strong> correcteurs non<br />

indispensables au bout <strong>de</strong> quelques<br />

mois, et la durée <strong>de</strong>s hypnotiques trop<br />

souvent mal utilisés.<br />

Nombre<br />

<strong>de</strong> réponses<br />

justes<br />

Nombre<br />

<strong>de</strong> réponses<br />

justes<br />

Nombre<br />

<strong>de</strong> réponses<br />

justes<br />

30<br />

25<br />

20<br />

15<br />

10<br />

5<br />

0<br />

crampes<br />

Evaluation <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong><br />

« Atelier du médicament »<br />

« Les bénéfices doivent être attendus en<br />

terme <strong>de</strong> résultats directs : modification<br />

<strong>de</strong>s savoirs et <strong>de</strong>s comportements,<br />

amélioration <strong>de</strong> la santé et qualité <strong>de</strong><br />

vie du patient en terme <strong>de</strong> conséquences<br />

économiques : diminution <strong>de</strong>s<br />

coûts, augmentation du coût/efficacité<br />

<strong>de</strong>s dépenses <strong>de</strong> santé ».<br />

Notre évaluation s’est portée, dans un<br />

premier temps, sur les modifications <strong>de</strong><br />

comportements <strong>de</strong>s patients ayant suivi<br />

un cycle complet d’Atelier (7 séances en<br />

moyenne), à l’ai<strong>de</strong> d’un questionnaire<br />

qui leur est remis à la première séance,<br />

puis à la <strong>de</strong>rnière séance.<br />

Ce questionnaire comporte une quinzaine<br />

<strong>de</strong> questions regroupées pour<br />

EVALUATION<br />

Connaissance <strong>de</strong>s effets indésirables<br />

+7%<br />

tremblements<br />

+39%<br />

impatiences<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

l’analyse sur 3 items :<br />

1. comportement vis-à-vis du traitement<br />

2. représentations du médicament par<br />

le patient<br />

3. connaissance <strong>de</strong>s effets indésirables<br />

31 paires <strong>de</strong> questionnaires ont été<br />

analysées.<br />

Le score est donné par l’augmentation<br />

du pourcentage <strong>de</strong> réponses justes,<br />

entre les 2 questionnaires pour chaque<br />

patient. L’évaluation statistique <strong>de</strong>s ateliers<br />

éducatifs <strong>de</strong> patients psychotiques<br />

+29%<br />

+20%<br />

changer NL<br />

stabilisés montre une amélioration <strong>de</strong>s<br />

scores significative :<br />

- item 1 : amélioration 10 à 20%,<br />

- item 2 : amélioration <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 10%,<br />

- item 3 : l’amélioration est d’environ<br />

30%.<br />

Un questionnaire <strong>de</strong> satisfaction <strong>de</strong>s<br />

patients vis-à-vis <strong>de</strong> « l’atelier du médicament<br />

», indique un taux <strong>de</strong> réponse<br />

positive <strong>de</strong> 80 % <strong>de</strong>s patients.<br />

Conclusion<br />

+7% ns<br />

dose NL<br />

EVALUATION<br />

Raisons <strong>de</strong> prendre ou ne pas prendre un médicament<br />

35<br />

30<br />

25<br />

20<br />

15<br />

10<br />

5<br />

0<br />

EVALUATION<br />

Comportement vis-à-vis du traitement médicamenteux<br />

40<br />

35<br />

30<br />

25<br />

20<br />

15<br />

10<br />

5<br />

0<br />

mala<strong>de</strong><br />

signes <strong>de</strong> la maladie<br />

éviter les rechutes<br />

obligation <strong>de</strong> ttt continu<br />

acceptation du ttt continu<br />

drogue<br />

idée fausse<br />

+13%<br />

+10%<br />

+13%<br />

+19% +16%<br />

-6%<br />

faire état ttt psy<br />

oubli prise<br />

refus ttt non prescrit<br />

décision arrêt/guérison<br />

décision arrêt/mé<strong>de</strong>cin<br />

décision arrêt/pharmacien<br />

Avant<br />

Après<br />

N=31<br />

Avant<br />

Après<br />

N=31<br />

Avant<br />

Après<br />

N=31<br />

Selon le rapport <strong>de</strong> l’O. M. S., l’éducation<br />

thérapeutique doit être un « processus<br />

continu et intégré aux soins ».<br />

Cette approche, légitime et incontournable,<br />

renforce la nécessité <strong>de</strong> la coordination<br />

<strong>de</strong>s professionnels <strong>de</strong> santé<br />

autour <strong>de</strong> la prise en charge <strong>de</strong>s


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

patients (5). Le pharmacien, par sa position<br />

professionnelle neutre dans la relation<br />

thérapeutique, peut ainsi permettre<br />

une synergie <strong>de</strong>s complémentarités professionnelles<br />

du mé<strong>de</strong>cin référent et<br />

<strong>de</strong> l’équipe infirmière. En jouant son<br />

rôle spécifique vis-à-vis du traitement<br />

sur la scène du soin, il incite et renforce<br />

également les partenaires à jouer<br />

leur rôle singulier dans la chaîne <strong>de</strong><br />

l’information et <strong>de</strong> l’éducation thérapeutique<br />

n<br />

Marie-Lise BISCAY<br />

Pharmacien, Centre Hospitalier <strong>de</strong>s Pyrénées,<br />

64000 Pau<br />

Bibliographie<br />

(1) D’IVERNOIS J.F., L’éducation du patient<br />

chronique, Santé mentale 2000, 46, 27-35.<br />

(2) Loi n°92-1279 du 8 décembre 1992<br />

modifiant le livre V du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé<br />

publique et relative à la pharmacie et au<br />

médicament.<br />

(3) FABRE C., BISCAY M.L., Le rôle du<br />

Pharmacien, partenaire <strong>de</strong> santé, dans l’information<br />

du patient, Démarche qualité en<br />

santé mentale, une politique au service <strong>de</strong>s<br />

patients, 207-214, Editions in press.<br />

(4) NOSÉ M., BARBUI C., GRAY R., TAN-<br />

SELLA M., Clinical interventions for treatment<br />

non-adherence in psychosis: meta-analysis,<br />

Britisch <strong>Journal</strong> Psy 2003,183,<br />

197-206.<br />

(5) THOUVENIN D., Rapport <strong>de</strong> l’ANAES<br />

soumis au groupe <strong>de</strong> travail chargé d’élaborer<br />

<strong>de</strong>s recommandations <strong>de</strong>stinées aux mé<strong>de</strong>cins,<br />

relatives à l’information <strong>de</strong>s patients,<br />

Paris 2000.<br />

(6) www.reseau-pic.com<br />

Les maladies cérébrales ont coûté<br />

386 milliards d’euros en Europe en 2004<br />

Les maladies du cerveau ont coûté 386 milliards d’euros en 2004 dans l’Union<br />

européenne ainsi qu’en Islan<strong>de</strong>, Norvège et Suisse, selon une étu<strong>de</strong> publiée<br />

dans l’European <strong>Journal</strong> of Neurology.*<br />

Le poids économique réel <strong>de</strong>s maladies cérébrales (neurologiques, psychiatriques,<br />

addictions, tumeurs cérébrales) en Europe est probablement sous estimé<br />

puisque les données publiées manquent à la fois pour les anciens et les<br />

nouveaux Etats membres. Patrik Andlin-Sobocki <strong>de</strong> l’Institut Karolinska à<br />

Stockholm et ses collègues ont tenté <strong>de</strong> faire un bilan, tout en prévenant que<br />

certains résultats sont probablement discutables puisque les métho<strong>de</strong>s d’évaluation<br />

utilisées dans les différentes sources exploitées sont hétérogènes.<br />

Pour les 25 pays <strong>de</strong> l’UE, l’Islan<strong>de</strong>, la Norvège et la Suisse, ils ont estimé que<br />

127 millions <strong>de</strong> personnes sur un total <strong>de</strong> 466 millions d’adultes (27,25%)<br />

étaient atteintes d’une ou <strong>de</strong> plusieurs maladies du SNC en 2004. Selon les<br />

pays, la prévalence varie <strong>de</strong> 19% (Espagne) à 36% (Pays-Bas).<br />

Les auteurs notent que la prévalence est la plus élevée dans certains pays du<br />

Nord <strong>de</strong> l’Europe (Pays-Bas, Norvège, Suè<strong>de</strong> et Allemagne) tandis qu’elle est<br />

plus basse dans certains pays du Sud (France, Italie, Espagne). Les maladies<br />

les plus fréquentes sont d’ordre psychiatrique, les troubles anxieux (trouble<br />

panique, phobies, trouble obsessionnel-compulsif, anxiété généralisée) touchant<br />

41 millions <strong>de</strong> personnes et les troubles <strong>de</strong> l’humeur (dépression, trouble<br />

bipolaire) 21 millions.<br />

L’addiction touche au total 9 millions d’Européens, en comptant la dépendance<br />

aux substances illicites et l’alcoolodépendance. Ce chiffre atteindrait<br />

37 millions en y ajoutant la dépendance tabagique. La maladie neurologique<br />

la plus fréquente est la migraine, avec une estimation <strong>de</strong> 41 millions <strong>de</strong> cas.<br />

Parmi les pathologies les moins prévalentes figurent la sclérose en plaques<br />

(380 000 cas) et les tumeurs cérébrales (135 000 cas).<br />

Le coût <strong>de</strong> la dépendance nicotinique, qui n’a pas été incluse dans cette évaluation,<br />

est <strong>de</strong> 15 milliards d’euros supplémentaires. Les céphalées n’ont pas<br />

été prises en compte car il n’existe pas <strong>de</strong> données disponibles en Europe.<br />

Selon une extrapolation <strong>de</strong>s chiffres américains, elles pourraient représenter<br />

46 milliards d’euros supplémentaires.<br />

Les maladies mentales (maladies psychiatriques et addictions) représentent<br />

62% du coût total (239,5 milliards d’euros), les maladies neurologiques 21,7%<br />

(84 milliards), les démences (considérées à la fois comme un trouble neurologique<br />

et mental) 14,3% (55 milliards) et les maladies neurochirurgicales<br />

(tumeurs, trauma cranio-cérébraux) 2% (7,5 milliards). Sur le coût total, les<br />

dépenses médicales directes totalisent 136 milliards d’euros (35%), dont 78<br />

milliards pour les hospitalisations (20% du total), 45 milliards pour les consultations<br />

(12%) et 13 milliards pour les médicaments (3%). Les coûts médicaux<br />

indirects (transport, soins paramédicaux, soins informels...) représentent<br />

72 milliards d’euros (18,6%). Les coûts indirects, représentant notamment<br />

les jours non travaillés et la perte <strong>de</strong> productivité causés par un handicap permanent<br />

et la mortalité, s’élèvent à 179 milliards d’euros (46,41%). Parmi ces<br />

coûts, l’assistance sociale aux patients représente à elle seule 52 milliards d’euros<br />

(13% du coût total). L’évaluation du poids économique a été réalisée à<br />

partir <strong>de</strong> données allant, au plus tard, jusqu’au tout début <strong>de</strong>s années 2000<br />

et en prenant en compte les maladies les plus prévalentes et une partie seulement<br />

<strong>de</strong>s coûts indirects. Pour les démences leur coût augmente <strong>de</strong> 25%<br />

avec les soins informels (dispensés notamment par les familles).<br />

Un coût <strong>de</strong> 41,3 milliards d’euros en France<br />

Les auteurs détaillent les coûts par pays, principalement en raison du niveau<br />

du revenu national. Le coût total <strong>de</strong>s maladies du cerveau pour la France en<br />

particulier est évalué à 41,3 milliards d’euros, dont 40,7% <strong>de</strong> coûts médicaux<br />

directs, 14,4% <strong>de</strong> coûts médicaux indirects et 44,9% <strong>de</strong> coûts indirects.<br />

Le coût moyen par habitant est estimé à 829 euros. Les maladies cérébrales<br />

reçoivent « seulement » 15% <strong>de</strong>s dépenses médicales directes et représentent<br />

8% <strong>de</strong>s ventes totales <strong>de</strong> médicaments. Les résultats montrent que les maladies<br />

neurologiques sont, probablement, parmi les pathologies les plus coûteuses<br />

en Europe alors qu’elles n’ont reçu que 8% du budget du 5 ème programme-cadre<br />

européen <strong>de</strong> recherche.<br />

Les données actuelles sont disparates et insuffisantes, justifiant d’autres étu<strong>de</strong>s<br />

épidémiologiques et médico-économiques, d’autant plus que les mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

prise en charge et les traitements évoluent. Financé par Lundbeck, ce rapport<br />

est publié dans un supplément <strong>de</strong> l’European <strong>Journal</strong> of Neurology qui<br />

présente également <strong>de</strong>s évaluations détaillées pour douze maladies du cerveau<br />

(addictions, troubles <strong>de</strong> l’humeur, troubles anxieux, démence, épilepsie,<br />

migraines et céphalées, SEP, maladie <strong>de</strong> Parkinson, psychoses, AVC et<br />

trauma). Il a été initié par l’European Brain Council (ECB) qui regroupe <strong>de</strong>s<br />

neurologues, psychiatres, neurochirurgiens, chercheurs en neurosciences, psychologues,<br />

associations <strong>de</strong> patients et laboratoires pharmaceutiques. Cet organisme<br />

a pour objectif <strong>de</strong> promouvoir la recherche sur le cerveau. <br />

F.C.<br />

*EJN, vol.12, S1, pp.1-27<br />

Notre expérience clinique au quotidien,<br />

les étu<strong>de</strong>s statistiques le<br />

confirmant, révèle l’importance <strong>de</strong> la<br />

collaboration avec le milieu familial<br />

dans le pronostic évolutif <strong>de</strong>s psychoses<br />

chroniques. En effet, la qualité <strong>de</strong> l’environnement<br />

familial, son implication<br />

éclairée et son adhésion au projet <strong>de</strong><br />

soin participent favorablement à la prise<br />

en charge globale du patient psychotique.<br />

De même, <strong>de</strong> nombreuses situations<br />

cliniques nous confrontent à la souffrance<br />

psychique propre aux parents<br />

parfois dans l’incapacité à initier une<br />

démarche individuelle auprès d’un soignant.<br />

Fort <strong>de</strong> cette double expérience et en<br />

réponse à une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pressentie,<br />

nous avons créé un espace <strong>de</strong> parole<br />

s’adressant à ces parents en difficulté<br />

avec leur proche mala<strong>de</strong>. Il s’agit d’une<br />

séance mensuelle d’une durée <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

heures co-animée par un mé<strong>de</strong>cin et<br />

un infirmier. Ces rencontres s’inspirent<br />

librement d’un programme canadien<br />

<strong>de</strong> réhabilitation psychiatrique « profamille<br />

».<br />

Le niveau informatif voire psycho-éducatif<br />

du schéma canadien nous semble<br />

être redoublé d’un niveau psycho-dynamique<br />

au sens d’une mobilisation <strong>de</strong>s<br />

systèmes défensifs. Nous nous efforcerons<br />

d’illustrer cette double polarité<br />

<strong>de</strong> notre approche.<br />

La <strong>de</strong>man<strong>de</strong> parentale émerge parfois<br />

dans un contexte d’urgence impérieuse<br />

en situation « bruyante » <strong>de</strong> décompensation<br />

inaugurale ou récidivante du<br />

proche mala<strong>de</strong>. En effet, notre proposition<br />

« retardée » ne colmate pas l’immédiateté<br />

<strong>de</strong> cette brèche dans la<br />

constellation familiale. Une certaine<br />

maturation <strong>de</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> nous paraît<br />

aussi être un garant d’une implication<br />

soutenue, c’est-à-dire s’inscrivant dans<br />

une autre temporalité que celle <strong>de</strong> l’immédiateté<br />

primaire. Dans d’autres situations,<br />

la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> doit être sollicitée<br />

face à un épuisement familial voire <strong>de</strong>s<br />

contre-attitu<strong>de</strong>s et/ou un rejet progressif<br />

du proche mala<strong>de</strong> sujet à la chronicisation<br />

d’une symptomatologie négative<br />

plus insidieuse. La désimplication familiale<br />

contribue à la désinsertion psychosociale<br />

du mala<strong>de</strong>. C’est souvent<br />

dans ces cas que nous essayons <strong>de</strong><br />

« résusciter » une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> aidé par le<br />

bénéfice d’une protection groupale.<br />

L’accès au groupe présuppose donc<br />

un travail préliminaire réalisé par le<br />

psychiatre traitant du proche mala<strong>de</strong>.<br />

Notre stratégie s’intègre dans un dispositif<br />

<strong>de</strong> liaison entre les différents<br />

intervenants.<br />

L’entourage familial est, sans cesse, mis<br />

à l’épreuve par les manifestations psychopathologiques<br />

du sujet psychotique<br />

dont on connaît le caractère usant car<br />

résistant (aux traitements). La famille<br />

peu avertie est souvent dépassée dans<br />

ses capacités <strong>de</strong> réponse adéquate<br />

quand elles ne sont pas défaillantes<br />

voire franchement contributives à la<br />

pathogénie. Elle ne parvient pas toujours<br />

à resituer les symptômes dans le<br />

contexte <strong>de</strong> la pathologie psychotique,<br />

les reléguant plus facilement au rang<br />

<strong>de</strong> troubles caractériels. De même que<br />

les signes précurseurs d’une rechute<br />

ne sont pas toujours repérés et i<strong>de</strong>ntifiés<br />

en tant que tels. Le climat relationnel<br />

se dégra<strong>de</strong> <strong>de</strong> façon insidieuse,<br />

chacun <strong>de</strong>s protagonistes ayant recours<br />

à un système défensif plus régressif,<br />

plus rigi<strong>de</strong> aboutissant à <strong>de</strong>s positions<br />

d’impasse. La pathologie psychotique<br />

attaque le tissu familial exposant ses<br />

membres à un sentiment <strong>de</strong> désarroi.<br />

Le diagnostic et son annonce provoquent<br />

un effet traumatisant et engendrent<br />

un sentiment <strong>de</strong> culpabilité dans<br />

une recherche inévitable <strong>de</strong> causalité.<br />

DOSSIER : L’INFORMATION DU PATIENT EN PSYCHIATRIE 17<br />

Groupe <strong>de</strong> parole <strong>de</strong>stiné aux parents<br />

<strong>de</strong> personnes atteintes <strong>de</strong> troubles<br />

psychotiques<br />

Les parents doivent parvenir à faire un<br />

travail <strong>de</strong> <strong>de</strong>uil autour <strong>de</strong> l’enfant idéal.<br />

Des processus <strong>de</strong> réparation sont mis<br />

en route. Il nous paraît profitable, pour<br />

le proche mala<strong>de</strong> et pour les parents,<br />

d’effectuer un accompagnement dans<br />

l’élaboration psychique afin que la fonction<br />

contenante et socialisante <strong>de</strong> la<br />

famille puisse être préservée. L’action<br />

<strong>de</strong> soutien auprès <strong>de</strong>s familles peut éviter<br />

un effondrement voire <strong>de</strong>s réactions<br />

<strong>de</strong> rejet ou d’autogestion toute<br />

puissante. Dans cette perspective, le<br />

parent a besoin d’une ai<strong>de</strong> dans le<br />

décodage <strong>de</strong>s comportements et <strong>de</strong>s<br />

attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> son proche dont les significations<br />

peuvent être déroutantes voire<br />

incompréhensibles. Le processus <strong>de</strong><br />

reconstruction <strong>de</strong> sens implique une<br />

double visée : réconciliation affective et<br />

rétablissement <strong>de</strong>s liens <strong>de</strong> communication.<br />

Ce nouveau rapport tend à<br />

dédramatiser les situations critiques. Il<br />

abaisse le niveau d’anxiété et la tension<br />

émotionnelle dont on connaît l’impact<br />

néfaste sur la vulnérabilité psychotique.<br />

La mise en mots du vécu<br />

affectif et émotionnel au sein du groupe<br />

à travers l’évocation d’expériences<br />

traversées facilite aux participants<br />

d’i<strong>de</strong>ntifier leurs propres investissements<br />

et les répercussions sur la dynamique<br />

familiale. Ce travail <strong>de</strong> verbalisation et<br />

les réactions suscitées au sein du groupe<br />

entraînent <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong> conscience<br />

nécessaires à toute modification comportementale.<br />

Chaque membre du<br />

groupe renvoie à l’autre <strong>de</strong>s représentations<br />

personnelles lui permettant <strong>de</strong><br />

se reconnaître ou <strong>de</strong> les différencier.<br />

A partir <strong>de</strong> l’échange <strong>de</strong> parcelles d’histoire<br />

singulière, le groupe élabore et<br />

fait évoluer (dans le meilleur <strong>de</strong>s cas) la<br />

représentation <strong>de</strong> la maladie psychotique<br />

vers un concept plus ancré dans<br />

une réalité psychopathologique.<br />

Ainsi, se créée une dynamique groupale<br />

<strong>de</strong> plus en plus authentique et<br />

génératrice <strong>de</strong> remises en cause. Le<br />

réajustement <strong>de</strong> contre-attitu<strong>de</strong>s vis à<br />

vis du proche mala<strong>de</strong> <strong>de</strong>vient concevable<br />

à la faveur d’un jeu d’i<strong>de</strong>ntifications<br />

croisées. La confusion du vécu<br />

affectif marquée par l’ambivalence se<br />

décortique et cè<strong>de</strong> la place à une<br />

reconstruction dans le meilleur <strong>de</strong>s cas.<br />

Pour d’autres, il s’agit <strong>de</strong> repérer une<br />

distance relationnelle acceptable, compromis<br />

entre une toute puissance<br />

fusionnelle et un retrait abandonnique.<br />

Les propositions d’un autre parent, support<br />

i<strong>de</strong>ntificatoire, sont parfois mieux<br />

intégrées que celles vécues sur le mo<strong>de</strong><br />

intrusif venant du pôle soignant. S’instaure<br />

une espèce <strong>de</strong> solidarité projective<br />

créatrice <strong>de</strong> sécurité. Les mécanismes<br />

défensifs s’assoupissent et s’assouplissent<br />

permettant un lâchage associatif<br />

qui réalimente le processus d’élaboration<br />

secondaire. Un nouvel espace <strong>de</strong> changement<br />

possible s’entrouvre là où la<br />

maladie institue une fixité voire une<br />

immobilité pour certains.<br />

Chacun peut énoncer à l’autre sa stratégie<br />

envisagée pour endiguer les<br />

débor<strong>de</strong>ments envahissants et sclérosants<br />

<strong>de</strong> la psychose. Les solutions <strong>de</strong>s<br />

uns <strong>de</strong>viennent, plus ou moins, récupérables<br />

ou adaptables par les autres.<br />

L’espace groupal favorise la circulation<br />

d’un savoir informatif et d’un savoirfaire<br />

informel entre les participants. La<br />

remise en confiance soutenue par la<br />

restauration d’une image parentale valorisée<br />

renforce les capacités <strong>de</strong> résistance<br />

et remotive le parent dans sa<br />

fonction étayante auprès du proche<br />

mala<strong>de</strong>.<br />

Le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong>s différentes<br />

séances itératives est fourni par une<br />

succession <strong>de</strong> thématiques puisées dans<br />

le programme canadien. Les premières<br />

rencontres apportent un contenu infor-<br />

matif concernant la maladie, ses différentes<br />

formes, ses traitements et ses<br />

pronostics, toujours sur un mo<strong>de</strong> interactif<br />

en réponse aux diverses interrogations<br />

qui surgissent au fur et à mesure.<br />

Ce premier temps est aussi celui<br />

d’une présentation globale, d’une<br />

connaissance mutuelle et d’une mise<br />

en confiance. Le groupe se structure<br />

par <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong> parole, <strong>de</strong>s prises <strong>de</strong><br />

position. Des membres dynamiques se<br />

profilent, d’autres se détachent dans<br />

une attitu<strong>de</strong> d’écoute. La <strong>de</strong>uxième<br />

série <strong>de</strong> séance s’organise autour <strong>de</strong>s<br />

habilités à communiquer, à établir <strong>de</strong>s<br />

limites, à développer <strong>de</strong>s attentes réalistes,<br />

un réseau <strong>de</strong> soutien social…<br />

C’est ici que sont déposées <strong>de</strong>s expériences<br />

individuelles souvent douloureuses<br />

à partir <strong>de</strong>squelles le groupe élabore.<br />

Sont abordés l’agressivité, la<br />

violence mais aussi l’isolement social<br />

et affectif, les sentiments <strong>de</strong> déception<br />

et <strong>de</strong> désespoir. Face à ces épreuves<br />

relatées et parfois encore éprouvées,<br />

le groupe fait preuve d’une étonnante<br />

capacité d’auto-réparation. La vitalité<br />

groupale répond à une espèce <strong>de</strong><br />

morosité individuelle. Des hypothèses<br />

relatives au dysfonctionnement sont<br />

émises que certains peuvent s’approprier<br />

leur permettant <strong>de</strong> corriger leur<br />

réponse. Le groupe réanime certains<br />

membres qui se sont enfermés dans<br />

une hyper-rigidité génératrice <strong>de</strong> situations<br />

d’échec, il interroge les attitu<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> démission pourvoyeuses d’attitu<strong>de</strong>s<br />

tyranniques intrafamiliales. Au fil <strong>de</strong>s<br />

rencontres, la qualité <strong>de</strong>s échanges s’approfondit<br />

permettant parfois <strong>de</strong> faire<br />

émerger <strong>de</strong>s questions centrales<br />

comme celle <strong>de</strong> la blessure narcissique<br />

que constitue la maladie pour le parent.<br />

Un vécu dépressif ancien mais aussi<br />

actuel est exprimé voir métabolisé en<br />

écho à la « neutralité bienveillante » du<br />

groupe. Ces prises <strong>de</strong> conscience peuvent<br />

aboutir à la formalisation d’une<br />

prise en charge individuelle. Bien que la<br />

famille reste au centre <strong>de</strong>s préoccupations<br />

du groupe, on abor<strong>de</strong> également<br />

les réseaux et dispositifs d’ai<strong>de</strong> médicosociaux,<br />

leur fonctionnement mais aussi<br />

leur dysfonctionnement. Leur connaissance<br />

est un préalable à leur accès.<br />

L’échange d’expérience permet une<br />

meilleure anticipation <strong>de</strong> situations <strong>de</strong><br />

crise. C’est ici que la confrontation à<br />

<strong>de</strong>s sta<strong>de</strong>s différents <strong>de</strong> la maladie trouve<br />

une <strong>de</strong> ses justifications. Ainsi, l’inclusion<br />

<strong>de</strong>s parents dans une prise en<br />

charge globale contribue à pacifier les<br />

rapports parfois conflictuels entre famille<br />

et institution. <br />

Adam NEUWALD<br />

Assistant Généraliste Secteur 8 , CH G. Marchant.<br />

L’Europe du travail social<br />

reste à écrire<br />

ASH magazine n°10<br />

Supplément aux Actualités Sociales<br />

Hebdomadaire n°2417 du<br />

22 juillet 2005<br />

Modèle scandinave contre penchants<br />

anglo-saxons, libéralisme contre Etat<br />

provi<strong>de</strong>nce... Alors que les lignes <strong>de</strong><br />

fracture s’amplifient en Europe, la diversité<br />

<strong>de</strong>s systèmes politiques et économiques<br />

engendre-t-elle fatalement<br />

autant <strong>de</strong> manières <strong>de</strong> penser le travail<br />

social ? Un tour d’horizon <strong>de</strong>s pratiques<br />

est proposé à l’échelle <strong>de</strong> l’Union,<br />

au travers <strong>de</strong>s portraits <strong>de</strong> cinq professionnels<br />

en Allemagne, Pologne,<br />

Finlan<strong>de</strong>, Italie et Gran<strong>de</strong>-Bretagne.<br />

Des regards subjectifs et parfois contradictoires<br />

<strong>de</strong>rrière lesquels Emmanuel<br />

Jovelin, sociologue, décrypte les enjeux<br />

d’un nécessaire rapprochement.


18<br />

LIVRES<br />

THÉRAPEUTIQUE<br />

Les dépressions à<br />

l’adolescence<br />

Modèles, clinique, traitements<br />

Maurice Corcos, Philippe<br />

Jeammet et al.<br />

Avec la collaboration <strong>de</strong> Mario<br />

Speranza<br />

Préface <strong>de</strong> Philippe Jeammet<br />

Dunod, 29 €<br />

La dépression à l’adolescence est<br />

sous-estimée. La symptomatologie<br />

est à cet âge polymorphe et s’il convient<br />

d’être vigilant <strong>de</strong>vant <strong>de</strong>s manifestations<br />

comportementales et psychosomatiques<br />

peu spécifiques, il faut<br />

se gar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> se précipiter vers une<br />

réponse médicale opératoire face à<br />

une tristesse, voire un désarroi sans<br />

symptômes manifestes. Souvent durables,<br />

les troubles dépressifs à l’adolescence<br />

récidivent fréquemment et<br />

représentent un facteur <strong>de</strong> risque<br />

quant à l’épanouissement personnel<br />

à l’âge adulte. De la simple « menace<br />

dépressive » à la dépression clinique<br />

avérée, une réflexion globale doit<br />

être menée, intégrant une analyse<br />

<strong>de</strong> l’organisation psychique sous-jacente<br />

et <strong>de</strong> ses rapports avec l’environnement.<br />

C’est pourquoi les auteurs<br />

présentent les modèles<br />

compréhensifs <strong>de</strong> la dépression à<br />

l’adolescence, en l’étudiant en regard<br />

<strong>de</strong> différents troubles cliniques<br />

(troubles bipolaires, hyperactivité, addiction,<br />

états-limites) et <strong>de</strong> différents<br />

aspects psychopathologiques (problématique<br />

<strong>de</strong> l’attachement, aspects<br />

transculturels). L’ouvrage propose,<br />

également, un inventaire <strong>de</strong>s diverses<br />

approches thérapeutiques : thérapie<br />

bifocale, psychothérapie psychanalytique,<br />

chimiothérapie, sismothérapie.<br />

Les toxicomanes en temps<br />

<strong>de</strong> sida ou les mutations<br />

d’une prise en charge<br />

Nathalie Gourmelon<br />

L’Harmattan, 25,50 €<br />

L’arrivée du sida en France a transformé<br />

le traitement réservé aux<br />

consommateurs <strong>de</strong> drogues injectables.<br />

Du fait <strong>de</strong> la réduction <strong>de</strong>s risques légitimée<br />

par le politique, se sont mises<br />

en place <strong>de</strong> nouvelles pratiques centrées<br />

sur l’offre d’outils (seringues stériles,<br />

produits <strong>de</strong> substitution, etc...)<br />

et d’approches (dispositifs dits bas<br />

seuil, approches communautaires,<br />

etc...) plus <strong>de</strong>stinées à éviter <strong>de</strong> nouvelles<br />

contaminations qu’à prendre<br />

en charge les personnes.<br />

La jonction sida-toxicomanie est analysée<br />

ici sous ses divers enjeux et aspects<br />

à partir d’enquêtes <strong>de</strong> terrain<br />

et d’entretiens menés auprès <strong>de</strong> différentes<br />

personnes impliquées : <strong>de</strong>s<br />

professionnels spécialistes en toxicomanie,<br />

mé<strong>de</strong>cins hospitaliers, humanitaires,<br />

<strong>de</strong>s institutionnels, <strong>de</strong>s<br />

politiques, <strong>de</strong>s associatifs, mais aussi<br />

<strong>de</strong>s consommateurs <strong>de</strong> drogues intraveineuses.<br />

L’analyse proposée ne se limite pas<br />

au seul domaine sida-toxicomanie.<br />

Partant d’une perspective socio-historique<br />

et d’autres exemples (comme<br />

le champ <strong>de</strong> la délinquance <strong>de</strong>s mineurs),<br />

l’auteur montre que les changements<br />

survenus s’insèrent dans<br />

une évolution plus vaste, une mutation<br />

générale <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> prise en<br />

charge <strong>de</strong>s populations marginalisées<br />

<strong>de</strong>puis une trentaine d’années.<br />

En toile <strong>de</strong> fond, le questionnement<br />

porte sur les logiques sociales à travers<br />

l’application d’un modèle <strong>de</strong> gestion<br />

<strong>de</strong>s risques sociaux largement<br />

dominé par <strong>de</strong>s principes d’ordre sécuritaire.<br />

Les <strong>de</strong>scriptions classiques <strong>de</strong> la schizophrénie,<br />

héritées en particulier<br />

<strong>de</strong> Kraepelin, distinguaient les formes<br />

d’évolution continue et les formes<br />

d’évolution intermittente (9). Les premières<br />

correspondaient surtout à une<br />

symptomatologie déficitaire, tandis que<br />

les secon<strong>de</strong>s étaient plus volontiers<br />

paranoï<strong>de</strong>s.<br />

Avec les avancées <strong>de</strong> la psychopharmacologie<br />

(utilisation <strong>de</strong>s neuroleptiques<br />

conventionnels, puis apparition<br />

<strong>de</strong>s antipsychotiques atypiques), une<br />

nouvelle cyclicité est apparue, moins<br />

liée au génie évolutif propre <strong>de</strong> la maladie<br />

qu’à la succession <strong>de</strong> phases d’amélioration<br />

grâce au traitement et <strong>de</strong><br />

rechutes engendrées par son interruption.<br />

Ces ruptures thérapeutiques,<br />

essentiellement liées à une observance<br />

insuffisante <strong>de</strong> la part du patient (6, 11),<br />

représentent l’un <strong>de</strong>s défis majeurs que<br />

doivent relever les psychiatres cliniciens<br />

qui soignent <strong>de</strong>s patients schizophrènes.<br />

Ce facteur thérapeutique, <strong>de</strong>venu sans<br />

doute le principal, s’ajoute ainsi à <strong>de</strong>s<br />

facteurs plus anciennement connus <strong>de</strong><br />

décompensation, tels les événements<br />

<strong>de</strong> vie (perte d’un proche ou d’un<br />

emploi, déménagement,…), les facteurs<br />

<strong>de</strong> stress (maladie somatique intercurrente,<br />

utilisation concomitante <strong>de</strong><br />

toxiques, …) etc. (9, 11).<br />

Il était donc intéressant <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong><br />

mieux décrire les différentes rechutes<br />

observées chez les patients schizophrènes,<br />

et, plus d’un siècle après les<br />

premiers travaux <strong>de</strong>scriptifs, d’analyser<br />

les facteurs entrant aujourd’hui en ligne<br />

<strong>de</strong> compte dans ces rechutes.<br />

Cette tâche est d’autant plus complexe<br />

que la notion <strong>de</strong> rechute reste ellemême<br />

relativement floue dans le<br />

domaine <strong>de</strong>s troubles schizophréniques,<br />

pathologie chronique, généralement<br />

considérée comme ne guérissant pas, et<br />

dont les phases d’amélioration laissent<br />

persister le plus souvent <strong>de</strong>s symptômes<br />

résiduels (3).<br />

On pourrait définir la rechute, chez les<br />

patients atteints <strong>de</strong> schizophrénie,<br />

comme une aggravation <strong>de</strong> l’état clinique<br />

(qu’il s’agisse d’une aggravation<br />

globale ou <strong>de</strong> l’apparition <strong>de</strong> quelques<br />

signes cliniques particulièrement significatifs),<br />

suffisante pour nécessiter une<br />

modification <strong>de</strong> la prise en charge (par<br />

exemple : réhospitalisation à temps<br />

partiel ou à temps plein) ou un renforcement<br />

<strong>de</strong>s modalités psychothérapiques<br />

ou pharmacologiques. La recru<strong>de</strong>scence<br />

symptomatique peut être<br />

objectivée par une élévation d’un score<br />

aux échelles d’évaluation (PANSS, CGI)<br />

ou par l’apparition <strong>de</strong> certains symptômes<br />

particulièrement significatifs,<br />

comme par exemple une idéation suicidaire<br />

(4, 5).<br />

Les informations utiles au praticien<br />

pour prévenir les rechutes concernent<br />

à la fois les facteurs pronostiques <strong>de</strong> la<br />

rechute (tels que l’âge <strong>de</strong> début précoce<br />

<strong>de</strong> la maladie, un intervalle plus<br />

important entre les premiers signes psychotiques<br />

et le traitement, <strong>de</strong>s symptômes<br />

déficitaires plus marqués, un<br />

retrait social, <strong>de</strong>s troubles <strong>de</strong> l’humeur<br />

ou encore, selon les auteurs, le niveau<br />

d’émotion exprimé) (1, 8, 12, 13, 15), les<br />

éventuels facteurs déclenchants ou précipitants,<br />

et les premiers signes cliniques<br />

annonciateurs. Ces <strong>de</strong>rniers, appelés<br />

par certains « prodromes », par d’autres<br />

« signes <strong>de</strong> préalerte <strong>de</strong> rechute imminente<br />

» (2, 10), sont parfois peu spécifiques<br />

: anxiété, tension, insomnie, agitation,<br />

irritabilité, affects dépressifs,<br />

modification du comportement. Ils peuvent<br />

aussi prendre la forme <strong>de</strong> symptômes<br />

pré-délirants : sentiment <strong>de</strong><br />

déréalisation ou <strong>de</strong> dépersonnalisation,<br />

vécu persécutif diffus, bizarreries <strong>de</strong> la<br />

pensée. Il faut noter que la majorité<br />

<strong>de</strong>s schizophrènes sont conscients <strong>de</strong><br />

ces signes, en tous cas au début <strong>de</strong> la<br />

décompensation.<br />

Une enquête épidémiologique transversale<br />

a donc été menée, entre<br />

octobre 2002 et avril 2003, à l’échelon<br />

national et dans différentes structures<br />

<strong>de</strong> soins prenant en charge <strong>de</strong>s patients<br />

souffrant <strong>de</strong> schizophrénie ou <strong>de</strong><br />

troubles schizo-affectifs lors <strong>de</strong> phases<br />

<strong>de</strong> déstabilisation clinique. Elle avait<br />

pour objectif d’i<strong>de</strong>ntifier les critères <strong>de</strong><br />

rechute et/ou i<strong>de</strong>ntifiés comme signes<br />

<strong>de</strong> pré-alerte <strong>de</strong> rechute imminente,<br />

tels que les définissent les cliniciens<br />

dans leur pratique habituelle, à décrire<br />

les possibles facteurs déclenchant <strong>de</strong><br />

la rechute, et à préciser le raisonnement<br />

clinique à l’origine <strong>de</strong> la décision<br />

<strong>de</strong> modification thérapeutique, ainsi<br />

que les attentes du praticien à la suite<br />

<strong>de</strong> ce changement.<br />

Une meilleure connaissance <strong>de</strong>s conditions<br />

<strong>de</strong> la rechute pourrait en effet<br />

permettre la détection la plus précoce<br />

possible <strong>de</strong> celle-ci, et donc l’ajustement<br />

très rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la thérapeutique,<br />

afin soit d’éviter l’apparition même<br />

d’une rechute caractérisée, soit d’en<br />

limiter autant que possible l’intensité<br />

et les conséquences.<br />

Méthodologie <strong>de</strong><br />

l’enquête<br />

Les patients inclus, âgés <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 18<br />

ans, <strong>de</strong>vaient satisfaire aux critères <strong>de</strong> la<br />

CIM-10 pour la schizophrénie ou les<br />

troubles schizo-affectifs, ne pas avoir<br />

été hospitalisés à temps plein <strong>de</strong>puis<br />

au moins trois mois, et être suivis par la<br />

même équipe psychiatrique <strong>de</strong>puis au<br />

moins 6 mois. La posologie du traitement<br />

antipsychotique <strong>de</strong>vait être stable<br />

<strong>de</strong>puis au moins trois mois. L’inclusion<br />

était faite si une déstabilisation récente<br />

<strong>de</strong> l’état clinique nécessitait une modification<br />

du traitement psychotrope.<br />

Pour chaque patient inclus, le choix<br />

<strong>de</strong> la modification thérapeutique proposée<br />

par le clinicien à la suite <strong>de</strong> la<br />

mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> critères <strong>de</strong><br />

rechutes ou <strong>de</strong> signes d’alerte était laissé<br />

à son entière appréciation.<br />

L’enquête a concerné 434 psychiatres<br />

répartis sur le territoire français travaillant<br />

dans toutes structures <strong>de</strong> soins<br />

prenant en charge <strong>de</strong>s patients souffrant<br />

<strong>de</strong> schizophrénie ou <strong>de</strong> troubles<br />

schizoaffectifs.<br />

L’analyse statistique <strong>de</strong> ce travail est<br />

purement <strong>de</strong>scriptive ; les variables<br />

recueillies décrites dans cette analyse<br />

concernent :<br />

- le patient : sexe, âge, conditions <strong>de</strong> vie,<br />

statut familial, activité professionnelle ;<br />

- la pathologie : ancienneté, antécé<strong>de</strong>nts<br />

d’hospitalisation, antécé<strong>de</strong>nts <strong>de</strong><br />

rechutes, diagnostic selon la classification<br />

CIM-10, traitement antipsychotique<br />

antérieur ;<br />

- l’état <strong>de</strong> déstabilisation clinique : circonstances<br />

<strong>de</strong> la consultation, facteurs<br />

susceptibles <strong>de</strong> déclencher une déstabilisation<br />

clinique, prise en charge et<br />

effets attendus.<br />

Population analysée<br />

La population <strong>de</strong>s patients inclus dans<br />

l’enquête soit en rechute, soit présentant<br />

<strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> pré-alerte <strong>de</strong> rechute<br />

et ayant eu une modification <strong>de</strong> leur<br />

traitement psychotrope était <strong>de</strong> 598<br />

sujets. Ils se répartissent en 374<br />

hommes (62,5%) et 224 femmes<br />

(37,5%). L’âge moyen <strong>de</strong>s patients<br />

inclus est <strong>de</strong> 36, 5 ans ± 11,9 ans et la<br />

majorité est âgée <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 50 ans<br />

(86%).<br />

Une moitié <strong>de</strong>s patients vit en famille,<br />

69,7% sont célibataires. Seuls 16,4%<br />

<strong>de</strong>s patients ont une activité professionnelle<br />

en milieu ordinaire.<br />

La durée moyenne d’évolution <strong>de</strong> la<br />

maladie au moment <strong>de</strong> l’inclusion est<br />

<strong>de</strong> 11,7 ans. Le premier traitement<br />

antipsychotique a été instauré en<br />

moyenne un an après la découverte<br />

<strong>de</strong> la maladie.<br />

Divers indices reflètent la lour<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s<br />

patients suivis et inclus : le nombre<br />

total d’hospitalisation par patient est<br />

en moyenne <strong>de</strong> 5,2 ; par ailleurs, 90%<br />

<strong>de</strong>s patients ont présenté au moins une<br />

rechute dans les 5 ans précédant l’inclusion<br />

et 48,9% en ont présenté au<br />

moins trois.<br />

Sur le plan clinique, 74,9% <strong>de</strong>s patients<br />

sont schizophrènes et parmi eux plus<br />

<strong>de</strong> la moitié présentent une forme paranoï<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> schizophrénie (53%). Un<br />

quart <strong>de</strong>s patients présente un trouble<br />

schizo-affectif (25,1%).<br />

Sur un plan thérapeutique, la majorité<br />

<strong>de</strong>s patients (98%) ont reçu un traitement<br />

neuroleptique et/ou antipsychotique<br />

au cours <strong>de</strong>s 3 <strong>de</strong>rniers mois précédant<br />

l’inclusion dans l’enquête. Parmi<br />

eux, près <strong>de</strong> 30% <strong>de</strong>s patients recevaient<br />

<strong>de</strong>ux à trois traitements antipsychotiques<br />

; seulement 2% <strong>de</strong>s<br />

patients n’ont reçu aucun traitement<br />

antipsychotique dans les trois mois précé<strong>de</strong>nts.<br />

Quatre produits représentent 70% <strong>de</strong>s<br />

traitements administrés au moment <strong>de</strong><br />

l’inclusion <strong>de</strong>s patients dans l’enquête :<br />

halopéridol, cyamémazine, rispéridone,<br />

olanzapine. La posologie moyenne<br />

<strong>de</strong> ces produits était <strong>de</strong> 30 mg par<br />

jour pour l’halopéridol, <strong>de</strong> 112 mg par<br />

jour pour la cyamémazine, <strong>de</strong> 5,7 mg<br />

par jour pour la rispéridone et <strong>de</strong> 14,3<br />

mg par jour pour l’olanzapine.<br />

Dans plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s cas (52,1%),<br />

le traitement antipsychotique est associé<br />

à un ou plusieurs psychotropes :<br />

dans 32% <strong>de</strong>s cas la co-prescription<br />

est une benzodiazépine, dans 18,6%<br />

<strong>de</strong>s cas il s’agit d’un inhibiteur spécifique<br />

<strong>de</strong> la recapture <strong>de</strong> la sérotonine,<br />

dans 10,5% <strong>de</strong>s cas un antiparkinsonien.<br />

Description <strong>de</strong>s critères<br />

<strong>de</strong> déstabilisation<br />

Il est intéressant <strong>de</strong> noter que la consultation<br />

d’inclusion est la consultation<br />

habituelle du patient dans seulement<br />

un tiers <strong>de</strong>s cas ; dans les autres cas,<br />

elle a été avancée à la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> du<br />

patient, <strong>de</strong> sa famille ou <strong>de</strong>s soignants<br />

(Tableau I).<br />

Tableau I :<br />

Circonstances <strong>de</strong> consultation<br />

Le changement <strong>de</strong> traitement répond<br />

à l’attente (plusieurs réponses possibles) :<br />

N %<br />

du patient 332 57,4<br />

<strong>de</strong> la famille 208 36,0<br />

<strong>de</strong>s soignants 182 31,5<br />

du mé<strong>de</strong>cin 355 61,4<br />

N global = 578<br />

Afin <strong>de</strong> décrire les signes d’aggravation<br />

<strong>de</strong> l’état clinique <strong>de</strong>s patients, les symptômes<br />

ont été classés en cinq dimensions<br />

symptomatiques : la dimension<br />

positive (hallucinations, idées délirantes),<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

Critères <strong>de</strong> rechute et décision<br />

thérapeutique dans les schizophrénies :<br />

résultats <strong>de</strong> l’enquête SACRES<br />

les troubles du comportement (comportement<br />

impulsif et/ou agressivité<br />

envers l’entourage, excitation psychomotrice,<br />

conduites antisociales, tentatives<br />

<strong>de</strong> suici<strong>de</strong> et/ou automutilation),<br />

les signes déficitaires (tels que retrait<br />

affectif, pauvreté <strong>de</strong> l’expression émotionnelle,<br />

alogie, avolition, apathie,<br />

anhédonie, retrait social), la dimension<br />

cognitive (troubles <strong>de</strong> la pensée formelle,<br />

discordance idéo-affective,<br />

troubles <strong>de</strong> l’attention, <strong>de</strong> la mémoire,<br />

difficultés d’apprentissage, bizarrerie du<br />

comportement) et les signes non spécifiques<br />

(anxiété, signes dépressifs,<br />

troubles du sommeil, troubles <strong>de</strong> l’appétit).<br />

L’évolution <strong>de</strong> chaque signe était<br />

décrite selon 4 <strong>de</strong>grés : signe absent,<br />

récemment apparu, récemment aggravé,<br />

présent mais non modifié par rapport<br />

à l’état antérieur ; les <strong>de</strong>grés<br />

« récemment apparu » et « récemment<br />

aggravé » étaient considérés comme<br />

critères <strong>de</strong> déstabilisation.<br />

On constate que la plupart <strong>de</strong>s patients<br />

entrés dans l’enquête, et ayant nécessité<br />

une modification du traitement, présentent<br />

<strong>de</strong>s modifications symptomatiques<br />

notables dans plusieurs <strong>de</strong>s<br />

champs syndromiques explorés (Figure<br />

1).<br />

Figure 1 : Modifications symptomatiques lors du diagnostic <strong>de</strong><br />

rechute : troubles récemment apparus ou aggravés (N global = 598)<br />

Hallucinations, idées<br />

délirantes<br />

Troubles du<br />

comportement<br />

Signes déficitaires<br />

Désorganisation <strong>de</strong> la<br />

pensée, troubles cognitifs<br />

Signes non spécifiques<br />

475<br />

438<br />

411<br />

497<br />

551<br />

79,4%<br />

73,2%<br />

68,7%<br />

83,1%<br />

92,1%<br />

0 20 40 60 80 100<br />

En effet, seuls 2,1% <strong>de</strong>s patients présentent<br />

une modification dans un seul<br />

<strong>de</strong> ces domaines, tandis que 37% en<br />

présentaient simultanément dans les 5<br />

domaines étudiés. Le plus fréquent <strong>de</strong>s<br />

critères <strong>de</strong> déstabilisation est représenté<br />

par <strong>de</strong>s signes non spécifiques, au<br />

premier rang <strong>de</strong>squels l’anxiété, décrite<br />

comme récemment apparue ou<br />

aggravée chez 79,3% <strong>de</strong>s patients. La<br />

survenue ou l’aggravation d’hallucinations<br />

ou d’une activité délirante est<br />

constatée chez 44% <strong>de</strong>s patients, d’un<br />

comportement impulsif (et/ou agressif)<br />

chez 52,7% <strong>de</strong>s patients, d’une excitation<br />

psychomotrice chez 50,4% <strong>de</strong>s<br />

patients, d’un trouble <strong>de</strong> l’attention<br />

chez 56,6% <strong>de</strong>s patients. L’apparition<br />

ou l’aggravation <strong>de</strong>s signes déficitaires<br />

est l’observation la moins fréquente et<br />

concerne 2/3 <strong>de</strong>s patients ; l’anhédonie<br />

et le retrait social sont, dans cette<br />

dimension, les manifestations les plus<br />

souvent présentes (respectivement chez<br />

44,9% et 47,8% <strong>de</strong>s patients).<br />

Dans la plupart <strong>de</strong>s pathologies psychiatriques<br />

d’évolution intermittente,<br />

les praticiens repèrent chez leurs<br />

patients <strong>de</strong>s signes particuliers qui<br />

reviennent à chaque décompensation<br />

processuelle. Les plus intéressants <strong>de</strong><br />

ces signes, en clinique, sont ceux qui<br />

surviennent au début <strong>de</strong> chaque épiso<strong>de</strong>,<br />

dans la phase prodromique ; ces<br />

« signes <strong>de</strong> pré-alerte <strong>de</strong> rechute »<br />

représentent <strong>de</strong> véritables « signal-symptômes<br />

» : ils permettent en effet <strong>de</strong><br />

pressentir la rechute avant qu’elle ne<br />

soit totalement installée, et donc <strong>de</strong><br />

mettre en œuvre <strong>de</strong> façon très précoce<br />

les modifications thérapeutiques<br />

nécessaires. Le patient sera d’ailleurs<br />

d’autant plus disposé à renforcer <strong>de</strong>


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

manière quasi « préventive » son traitement<br />

qu’il aura été préalablement<br />

sensibilisé par son mé<strong>de</strong>cin à la valeur<br />

pronostique parfois considérable <strong>de</strong><br />

ces tout premiers signes.<br />

Nous avons donc également cherché<br />

dans cette enquête à préciser la place<br />

<strong>de</strong> ces symptômes idiosyncrasiques,<br />

propres à un patient donné, dans l’évaluation<br />

<strong>de</strong> la déstabilisation clinique<br />

<strong>de</strong>s troubles psychotiques par le praticien.<br />

Ceux-ci ont été retrouvés dans<br />

plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s cas (52,6%),<br />

contribuant ainsi largement au diagnostic<br />

<strong>de</strong> la rechute et à la décision<br />

thérapeutique.<br />

Facteurs déclenchants<br />

potentiels<br />

Sans qu’il soit possible d’affirmer leur<br />

rôle causal éventuel sur la survenue <strong>de</strong><br />

la rechute, <strong>de</strong>s facteurs potentiellement<br />

déstabilisants sont souvent i<strong>de</strong>ntifiés<br />

par le mé<strong>de</strong>cin, le patient ou l’entourage,<br />

durant les semaines ou les mois<br />

précédant une rechute. Dans l’échantillon<br />

étudié, pour seulement 13,9%<br />

<strong>de</strong>s patients il n’est retrouvé aucun facteur<br />

déstabilisant. Pour les 86,1%<br />

patients restants, un facteur déstabilisant<br />

est clairement i<strong>de</strong>ntifié en rapport<br />

soit avec un facteur lié à l’environnement<br />

(68,9% <strong>de</strong>s patients) (Figure 2),<br />

soit avec une mauvaise observance du<br />

traitement (53% <strong>de</strong>s patients <strong>de</strong> la<br />

cohorte).<br />

Les différentes raisons décrites par les<br />

cliniciens pour expliquer la mauvaise<br />

observance sont invoquées avec une<br />

fréquence à peu près similaire : souhait<br />

<strong>de</strong> changer <strong>de</strong> molécule, efficacité<br />

ou tolérance insuffisante du traitement<br />

ou sentiment du patient <strong>de</strong> ne plus en<br />

avoir besoin (Figure 3). Cette mauvaise<br />

observance du traitement est reconnue<br />

spontanément par 62,6% <strong>de</strong>s<br />

patients classés non observants.<br />

Ainsi, à l’issue <strong>de</strong> l’évaluation, près <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux tiers <strong>de</strong> la population incluse<br />

étaient considérés en état <strong>de</strong> rechute à<br />

l’issue <strong>de</strong> l’évaluation (62,3%), le tiers<br />

restant présentant <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> préalerte<br />

d’une rechute imminente.<br />

Les cliniciens considèrent dans 60,5%<br />

<strong>de</strong>s cas que le patient est fragilisé par la<br />

présence d’un facteur lié à l’environnement,<br />

mais ce critère est relativement<br />

peu pris en compte dans la décision<br />

thérapeutique. La stratégie<br />

thérapeutique reste au final, pour<br />

82,5% d’entre eux, principalement<br />

basée sur la clinique, c’est-à-dire sur la<br />

symptomatologie <strong>de</strong> déstabilisation<br />

constatée.<br />

Modifications<br />

thérapeutiques mises en<br />

œuvre<br />

La constatation d’une déstabilisation<br />

<strong>de</strong> l’état clinique conduit les praticiens<br />

à proposer une modification du traitement<br />

antipsychotique <strong>de</strong> type arrêt,<br />

substitution ou association thérapeutique<br />

chez plus <strong>de</strong> 9 patients sur 10.<br />

La conduite thérapeutique est très différente<br />

selon que le patient présente<br />

une déstabilisation clinique avec le traitement<br />

antipsychotique prescrit ou qu’il<br />

l’ait interrompu :<br />

• Chez les patients non observants<br />

ayant déclaré avoir interrompu leur<br />

traitement (68,6% <strong>de</strong>s patients ;<br />

n=409), les praticiens optent souvent<br />

pour une non reconduction du traitement<br />

antérieur. Dans ce cas <strong>de</strong> figure,<br />

les neuroleptiques conventionnels sont<br />

en premier lieu arrêtés par les praticiens<br />

(57% <strong>de</strong>s cas), surtout l’halopéridol<br />

(27,7%). Le traitement antipsychotique<br />

est alors essentiellement<br />

substitué par un médicament <strong>de</strong> même<br />

classe prescrit en monothérapie (65,8%<br />

<strong>de</strong>s cas) ; le choix <strong>de</strong>s cliniciens se porte<br />

volontiers vers un antipsychotique atypique<br />

(95,1% <strong>de</strong>s cas), le plus souvent<br />

la rispéridone orale (81,4%) à la posologie<br />

moyenne <strong>de</strong> 6 mg/jour (± 3<br />

mg/j).<br />

Chez 13,4% <strong>de</strong>s patients non observants,<br />

le traitement antérieur est recon-<br />

Figure 2 : Facteurs déstabilisants liés à l’environnement<br />

(N global = 594)<br />

Aucun<br />

Stress psychosocial ou<br />

professionnel<br />

Stress familial ou<br />

professionnel<br />

Stress somatique<br />

(maladie intercurrente)<br />

185<br />

244<br />

288<br />

37<br />

6,2%<br />

31,1%<br />

41,1%<br />

48,5%<br />

0 20 40 60 80 100<br />

duit et associé à un autre antipsychotique,<br />

le plus fréquemment <strong>de</strong> secon<strong>de</strong><br />

génération (66% <strong>de</strong>s cas), en particulier<br />

la rispéridone orale (46,4%).<br />

Une continuité du traitement antipsychotique<br />

antérieur avec une augmentation<br />

<strong>de</strong> la posologie est préconisée<br />

chez un tiers <strong>de</strong>s patients non observants.<br />

Cette adaptation posologique,<br />

lorsqu’elle concerne les traitements antipsychotiques<br />

atypiques, consiste en<br />

Figure 3 : Principaux motifs <strong>de</strong> mauvaise observance thérapeutique<br />

(N global = 316)<br />

Volonté du patient <strong>de</strong><br />

changer <strong>de</strong> traitement<br />

Stabilisation clinique<br />

prolongée<br />

Efficacité insuffisante<br />

Intolérance au<br />

traitement<br />

122<br />

85<br />

87<br />

102<br />

26,8%<br />

27,5%<br />

38,6%<br />

32,3%<br />

0 20 40 60 80 100<br />

une augmentation en moyenne <strong>de</strong><br />

50% <strong>de</strong>s doses.<br />

• Lorsque les patients présentent une<br />

déstabilisation <strong>de</strong> leur état clinique alors<br />

qu’ils observent correctement le traitement<br />

antipsychotique prescrit par le<br />

praticien (n=156), celui-ci propose :<br />

- dans la majorité <strong>de</strong>s cas (65,4%) <strong>de</strong><br />

substituer le traitement antipsychotique<br />

antérieur par un autre (un atypique<br />

dans 79% <strong>de</strong>s cas),<br />

- la poursuite du traitement antipsychotique<br />

antérieur avec une adaptation<br />

posologique à 26,3% <strong>de</strong> ces<br />

patients,<br />

- enfin la conservation <strong>de</strong> leur traitement<br />

antipsychotique en cours en asso-<br />

ciation à un second dans 8,3% <strong>de</strong>s cas.<br />

La modification (arrêt ou adaptation<br />

posologique) <strong>de</strong> médicaments psychotropes<br />

concomitants au traitement<br />

antipsychotique a été observée pour<br />

seulement un tiers <strong>de</strong>s patients ; cela<br />

concerne les antidépresseurs (30%),<br />

les benzodiazépines (23%), et les thymorégulateurs<br />

14%).<br />

La modification <strong>de</strong> la prise en charge<br />

intervient en moyenne durant la secon<strong>de</strong><br />

semaine (moyenne : 1,4 semaines ±<br />

2,5) ayant suivi la perception <strong>de</strong>s premiers<br />

indices <strong>de</strong> déstabilisation clinique.<br />

Dans la majorité <strong>de</strong>s cas, elle répond<br />

plus aux attentes du patient (57%)<br />

et/ou du mé<strong>de</strong>cin (61%) qu’à celles<br />

<strong>de</strong> la famille ou <strong>de</strong>s soignants. Il faut<br />

souligner que, dans la moitié <strong>de</strong>s cas,<br />

une décision d’hospitalisation est alors<br />

prise.<br />

Sur l’ensemble <strong>de</strong> la population étudiée,<br />

les objectifs prioritaires que le<br />

mé<strong>de</strong>cin assigne à sa nouvelle prescription<br />

concernent au premier chef<br />

l’amen<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> la symptomatologie<br />

positive. L’observance, les signes négatifs<br />

et la tolérance sont cités, chacun,<br />

dans plus <strong>de</strong> 40% <strong>de</strong>s cas ; l’amélioration<br />

<strong>de</strong>s signes cognitifs et <strong>de</strong>s signes<br />

non spécifiques étaient <strong>de</strong>s objectifs<br />

moins fréquemment cités (Tableau II).<br />

Concernant la tolérance, les préoccupations<br />

essentielles <strong>de</strong>s praticiens sont<br />

d’obtenir une diminution <strong>de</strong>s effets<br />

neurologiques pour 68% d’entre eux,<br />

<strong>de</strong>s effets sédatifs (46%) et <strong>de</strong> la prise<br />

<strong>de</strong> poids (37%).<br />

Tableau II : Objectifs prioritaires<br />

<strong>de</strong> la prescription<br />

Objectifs<br />

thérapeutiques N %<br />

Améliorer les<br />

signes positifs 470 79,3<br />

Améliorer<br />

l’observance 281 47,4<br />

Améliorer les<br />

signes négatifs 261 44,0<br />

Améliorer la<br />

tolérance 257 43,3<br />

Améliorer les<br />

troubles cognitifs 228 38,4<br />

Améliorer les signes<br />

non spécifiques 172 29,0<br />

Autres objectifs 21 3,5<br />

Conclusion<br />

N global = 593<br />

Les résultats <strong>de</strong> cette enquête, et l’intérêt<br />

qu’y ont porté les praticiens interrogés,<br />

soulignent l’importance <strong>de</strong> la<br />

question <strong>de</strong>s rechutes dans la prise en<br />

charge au long cours <strong>de</strong>s troubles schizophréniques<br />

et schizo-affectifs.<br />

Sur les plans sémiologique et diagnostique,<br />

la place <strong>de</strong>s symptômes non spécifiques<br />

au début d’une rechute est<br />

essentielle. La littérature relève la fréquence<br />

<strong>de</strong> ces signes (tension anxieuse,<br />

insomnie, signes dépressifs) dans les<br />

jours précédant la rechute (7, 14) ; les<br />

résultats <strong>de</strong> l’enquête le confirment,<br />

puisque l’existence <strong>de</strong> signes non spécifiques<br />

constitue le plus fréquent <strong>de</strong>s<br />

critères <strong>de</strong> rechutes.<br />

Qu’ils soient spécifiques ou non, la<br />

connaissance par le praticien et par le<br />

patient <strong>de</strong> « signal-symptômes » (ou<br />

signes <strong>de</strong> pré-alerte), permet <strong>de</strong> percevoir<br />

<strong>de</strong> la façon la plus précoce possible<br />

la survenue d’une rechute, et donc<br />

<strong>de</strong> mettre en place plus rapi<strong>de</strong>ment<br />

les mesures thérapeutiques appropriées.<br />

Leur intérêt est largement souligné par<br />

l’enquête, qui montre dans plus <strong>de</strong> la<br />

moitié <strong>de</strong>s cas que leur prise en compte<br />

a contribué à gui<strong>de</strong>r la décision thérapeutique.<br />

Un point essentiel dans l’apparition <strong>de</strong>s<br />

rechutes chez les patients schizophrènes<br />

ou schizo-affectifs est l’interruption<br />

intempestive <strong>de</strong> leur traitement : celleci<br />

est invoquée pour plus <strong>de</strong> la moitié<br />

<strong>de</strong> l’échantillon étudié. Il faut noter que<br />

cette mauvaise observance est évoquée<br />

spontanément par les 2/3 <strong>de</strong>s patients<br />

inobservants : les patients schizophrènes<br />

ne cherchent donc généralement pas à<br />

« masquer » le fait qu’ils ont interrompu<br />

le traitement. Il s’agit là d’une<br />

marque <strong>de</strong> confiance envers leur mé<strong>de</strong>cin,<br />

confiance renforcée sans doute par<br />

la longueur du suivi nécessité par <strong>de</strong>s<br />

pathologies aussi chroniques et invalidantes<br />

que les troubles psychotiques.<br />

L’apparition <strong>de</strong> signes précurseurs d’une<br />

rechute est un signal important pour<br />

le praticien : dans la majorité <strong>de</strong>s cas,<br />

une décision <strong>de</strong> modification thérapeutique<br />

est prise avant la fin <strong>de</strong> la<br />

<strong>de</strong>uxième semaine qui suit. Il n’existe<br />

donc en général pas « d’attentisme » :<br />

les praticiens croient peu à la possibilité<br />

d’une résolution spontanée <strong>de</strong> la<br />

rechute.<br />

La rechute est d’ailleurs perçue comme<br />

un événement sérieux, puisqu’elle<br />

conduit le praticien dans plus <strong>de</strong> la<br />

moitié <strong>de</strong>s cas à proposer une hospitalisation.<br />

<br />

MOREAU-MALLET V.*,<br />

SPADONE C.**<br />

*Janssen-Cilag France, Issy-Les-Moulineaux<br />

**Hôpital Saint-Louis, Paris<br />

Bibliographie<br />

(1) ALTAMURA AC, BASSETTI R, SAS-<br />

SELLA F, SALVADORI D, MUNDO E,<br />

Duration of untreated psychosis as a predictor<br />

of outcome in first-episo<strong>de</strong> schizophrenia:<br />

a retrospective study, Schizophr Res 2001,<br />

52 (1-2) : 29-36.<br />

(2) BIRCHWOOD M, SPENCER E,<br />

MCGOVERN D, Schizophrenia: early warning<br />

signs, Psychiatr treatment, 2001, 6 :<br />

93-101.<br />

(3) BOURGEOIS ML, Les schizophrénies,<br />

Que sais-je, Ed PUF 2001.<br />

(4) CSERNANSKY JG, MAHMOUD R,<br />

BREHNER MPH et al, Risperidone-USA-<br />

79 Study Group. A comparison of risperidone<br />

and haloperidol for the prevention of<br />

relapse in patients with schizophrenia, N<br />

England J Med 2002, 346 : 16-22 (a).<br />

(5) CSERNANSKY JG, SCHUCHART EK,<br />

Relapse and rehospitalisation rates in patients<br />

with schizophrenia: effects of second generation<br />

antipsychotics, CNS Drugs 2002, 16<br />

(7) : 473-484 (b).<br />

6) DOLDER CR, LACRO JP, DUNN LB,<br />

JESTE DV, Antipsychotic medication adherence:<br />

is there a difference between typical<br />

and atypical agents? Am J Psychiatry 2002,<br />

159 :103–8.<br />

(7) FITZGERALD PB, The role of early warning<br />

symptoms in the <strong>de</strong>tection and prevention<br />

of relapse in schizophrenia, Aust NZJ<br />

Psychiatry 2001, 35 (6) : 758-764.<br />

(8) GEDDES J, MERCER G, FRITH CD,<br />

MACMILLAN F, OWENS DG, JOHNS-<br />

TONE EC, Prediction of outcome following a<br />

first episo<strong>de</strong> of schizophrenia. A follow-up<br />

study of Northwick Park first episo<strong>de</strong> study<br />

subjects, Br J Psychiatry 1994, 165 (5) :<br />

664-668.<br />

(9) GOURION D, GUT-FAYAND A, Les<br />

troubles schizophréniques. Vivre et comprendre,<br />

Ed Ellipses 2004.<br />

(10) JORGENSEN P, Early signs of psychotic<br />

relapse in schizophrenia, Bristish <strong>Journal</strong><br />

of Psychiatry 1998, 172 : 327-338.<br />

(11) MARDER SR, Overview of partial compliance,<br />

J Clin Psychiatry 2003, 64, 5-11.<br />

(12) NORMAN RM, MALLA AK, Prodromal<br />

symptoms of relapse in schizophrenia: a<br />

review, Schizophr Bull 1995, 21(4) : 527-<br />

539.<br />

(13) ROBINSON D, WOERNER MG,<br />

ALVIR JM, BILDER R, GOLDMAN R,<br />

GEISLER S, KOREEN A, SHEITMAN B,<br />

CHAKOS M, MAYERHOFF D, LIEBER-<br />

MAN JA, Predictors of relapse following response<br />

from a first episo<strong>de</strong> of schizophrenia or<br />

schizoaffective disor<strong>de</strong>r, Arch Gen Psychiatry<br />

1999, 56(3) : 241-277.<br />

(14) Practice Gui<strong>de</strong>line for the Treatment of<br />

patients with Schizophrenia, Am J Psy 1997,<br />

154 (4) : 1-63.<br />

(15) WIEDEMANN G, RAYKI O, FEIN-<br />

STEIN E, HAHLWEG K, The Family Questionnaire:<br />

Development and validation of a<br />

new self-report scale for assessing expressed<br />

emotion, Psychiatry Res 2002, 15, 109 (3) :<br />

265-279.<br />

THÉRAPEUTIQUE 19<br />

LIVRES<br />

L’anxiété généralisée<br />

Coordonné par Patrice Boyer<br />

Éditions John Libbey Eurotext<br />

Ce recueil se situe dans une optique<br />

physiopathologique en essayant d’expliquer<br />

la genèse <strong>de</strong>s comportements<br />

anxieux par <strong>de</strong>s modifications, entre<br />

autres, <strong>de</strong>s mécanismes d’intégration<br />

sensorielle, en essayant dans cette<br />

même logique <strong>de</strong> vali<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s modèles<br />

animaux qui ne soient pas seulement<br />

<strong>de</strong>s « équivalents » d’anxiété<br />

chez l’homme mais qui correspon<strong>de</strong>nt<br />

à <strong>de</strong>s perturbations <strong>de</strong> tels mécanismes<br />

intégratifs. Un modèle plus<br />

général <strong>de</strong> continuité - à partir d’une<br />

dimension <strong>de</strong> « vulnérabilité » - peut<br />

alors être proposé, l’interaction entre<br />

prédisposition génétique et facteurs<br />

environnementaux pouvant aboutir<br />

à <strong>de</strong>s tableaux psychopathologiques<br />

plus complexes comme ceux <strong>de</strong>s états<br />

dépressifs.<br />

Outre l’idée <strong>de</strong> continuum anxiétédépression<br />

(validé en clinique pour<br />

certaines catégories <strong>de</strong> dépression),<br />

la notion <strong>de</strong> modèle plurifactoriel intégrant<br />

<strong>de</strong>s composantes psychologiques<br />

(traits et dimensions), physiologiques,<br />

neurobiologiques (dont<br />

génétiques) et sociales a été le fil<br />

conducteur <strong>de</strong> cet ouvrage. Chacune<br />

<strong>de</strong> ces composantes fait l’objet d’un<br />

chapitre, certains chapitres étant plus<br />

« synthétiques » (comme ceux concernant<br />

les aperçus historiques ou épidémiologiques).<br />

Enfin, dans l’idée <strong>de</strong><br />

ce même continuum, <strong>de</strong>s propositions<br />

thérapeutiques novatrices peuvent<br />

être présentées qui doivent être<br />

mises à l’épreuve <strong>de</strong> la pratique.<br />

Ont participé à la rédaction <strong>de</strong> cet ouvrage : S.<br />

Arbabza<strong>de</strong>h-Bouchez, P. Boyer, Ch. Cohen-Salmon,<br />

S. Dubal, F. Rouillon, R. Jouvent, Y. Lecrubier,<br />

J.-P. Lépine.<br />

Les chronopathies, maladies<br />

du temps<br />

Jean- Paul Valabrega<br />

Dunod, 23 €<br />

Les chronopathies (néologisme <strong>de</strong><br />

formation simple, au point qu’on peut<br />

s’étonner qu’il n’ait pas été forgé plus<br />

tôt) méritent d’entrer dans la nosographie<br />

et la nosologie, au même titre<br />

que la chronobiologie est maintenant<br />

incluse dans la science du vivant. Elles<br />

désignent toutes les formes - bénignes,<br />

aiguës et chroniques - <strong>de</strong> pathologies<br />

en rapport <strong>de</strong> causalité directe ou<br />

sous-jacente avec le facteur temporel.<br />

On peut donc affirmer qu’aucune<br />

pathologie, ni aucune normalité non<br />

plus, n’y échappent complètement.<br />

Au cours <strong>de</strong> cet ouvrage Jean-Paul<br />

Valabrega discute plusieurs points.<br />

Notamment, le domaine psychosomatique<br />

et somatopsychique qui<br />

conduit à une théorie <strong>de</strong> la conversion<br />

généralisée, c’est-à-dire à situer<br />

en <strong>de</strong>çà <strong>de</strong> l’hystérie proprement dite,<br />

mais non sans rapport avec elle. La<br />

question d’une nouvelle théorie <strong>de</strong>s<br />

pulsions, regroupe les <strong>de</strong>ux conceptions<br />

successives <strong>de</strong> Freud, par l’introduction<br />

<strong>de</strong> la pulsion <strong>de</strong> régression.<br />

Le Temps-Chronos est partout<br />

et toujours éludé ou nié, même par<br />

Freud dans la théorie <strong>de</strong> l’Inconscient.<br />

En revanche, il ne l’élimine pas avec<br />

la notion <strong>de</strong> régression temporelle.<br />

La réintégration métapsychologique<br />

<strong>de</strong> la temporalité aboutit ainsi à d’importantes<br />

conséquences dans l’analyse<br />

<strong>de</strong> la phobie (hystérie d’angoisse),<br />

<strong>de</strong> l’obsession, <strong>de</strong>s troubles psychonévrotiques<br />

périodiques, cycliques<br />

(maintenant appelés « bipolaires »),<br />

dont le prototype est la manie-mélancolie,<br />

ou psychose maniaco-dépressive,<br />

<strong>de</strong> la paranoïa, bref dans le<br />

champ quasi entier <strong>de</strong> la psychopathologie,<br />

y compris celle <strong>de</strong> la « vie<br />

quotidienne ».


20<br />

LIVRES<br />

ANNONCES PROFESSIONNELLES<br />

Enfants en soins palliatifs<br />

Des leçons <strong>de</strong> vie<br />

Alain <strong>de</strong> Broca<br />

L’Harmattan, 13 €<br />

Qu’y a-t-il <strong>de</strong> plus douloureux que <strong>de</strong><br />

voir son enfant atteint d’une maladie<br />

inexorablement fatale ?<br />

Les désordres induits dans la dynamique<br />

familiale sont majeurs. Les difficultés<br />

à vivre, au jour le jour et dans<br />

la durée, les souffrances <strong>de</strong> l’enfant<br />

et les questions éthiques que chaque<br />

aggravation <strong>de</strong> la maladie suscitent<br />

sont <strong>de</strong>s préoccupations majeures<br />

<strong>de</strong>s soignants qui sont appelés à vivre<br />

avec et pour ces familles.<br />

Toutes les situations rencontrées imposent<br />

d’être dans une disposition<br />

d’écoute permanente pour envisager<br />

la singularité <strong>de</strong> chaque instant et<br />

accompagner chaque désordre produit<br />

par ces mêmes instants.<br />

Le soignant est convoqué à dépasser<br />

ses propres appréhensions et<br />

questions existentielles et à beaucoup<br />

d’humilité. En parlant <strong>de</strong> « soins<br />

palliatifs » face à un enfant atteint<br />

d’une maladie inexorablement fatale,<br />

on doit accepter sa « non toute puissance<br />

» et accepter <strong>de</strong> prendre du<br />

temps pour réaliser un geste, accompagner<br />

l’ambivalence parentale.<br />

On doit désirer également que l’enfant<br />

mala<strong>de</strong> et son parent <strong>de</strong>viennent<br />

<strong>de</strong>s partenaires à part entière<br />

<strong>de</strong> la démarche thérapeutique. La<br />

première partie du livre ouvre, à partir<br />

<strong>de</strong> situations singulières d’enfant<br />

et <strong>de</strong> leur famille, sur quelques gran<strong>de</strong>s<br />

notions générales voire universelles.<br />

La secon<strong>de</strong> partie reprend un certain<br />

nombre <strong>de</strong> notions plus particulières<br />

à la pédiatrie afin d’essayer <strong>de</strong> souligner<br />

les spécificités <strong>de</strong>s soins palliatifs<br />

s’il en existe.<br />

Parents, professionnels<br />

comment éduquer<br />

ensemble un petit enfant ?<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Marie-Paule<br />

Tholion-Behar<br />

Erès, 10 €<br />

Cet ouvrage interroge, à partir d’une<br />

perspective historique et sociologique,<br />

les différents rnodèles éducatifs et situe<br />

la place <strong>de</strong> chacun, parents et<br />

professionnels, dans le processus éducatif.<br />

La première partie, « Réflexions<br />

plurielles » montre la place <strong>de</strong> chacun<br />

dans l’éducation du tout-petit, rassemble<br />

les présentations <strong>de</strong> chercheurs<br />

qui, à partir <strong>de</strong> différentes positions<br />

(psychologique, sociale, venant<br />

<strong>de</strong>s sciences <strong>de</strong> l’éducation), conceptualisent<br />

la question <strong>de</strong> la rencontre<br />

entre parents et professionnels autour<br />

<strong>de</strong> l’accueil <strong>de</strong> l’enfant et <strong>de</strong> son<br />

éducation.<br />

A la suite <strong>de</strong> Denis Mellier, présentant<br />

les enjeux psychiques <strong>de</strong> la relation<br />

parents-professionnels, Catherine<br />

Bouve, à travers une recherche<br />

auprès <strong>de</strong>s parents, leur donne la parole<br />

sur la question <strong>de</strong>s attentes par<br />

rapport aux mo<strong>de</strong>s d’accueil. Luce<br />

Dupraz insiste davantage sur les difficultés<br />

<strong>de</strong> l’éducation, à l’heure actuelIe,<br />

en reprenant une histoire documentée<br />

<strong>de</strong>s différents modèles<br />

éducatifs qui influencent les pratiques<br />

actuelles. Marie-Paule Thollon-Behar<br />

abor<strong>de</strong> les questions éducatives en<br />

se situant du point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’enfant<br />

et <strong>de</strong> son développement, <strong>de</strong> ses besoins,<br />

afin <strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> délimiter la<br />

place <strong>de</strong> chacun dans cette coéducation.<br />

La <strong>de</strong>uxième partie, « Dans les pratiques<br />

», offre la possibilité <strong>de</strong> découvrir<br />

le cheminement <strong>de</strong> groupes <strong>de</strong><br />

travail, d’équipes autour <strong>de</strong> projets<br />

concrets, impliquant parents et professionnels,<br />

en structure d’accueil du<br />

jeune enfant ou à l’école maternelle.<br />

Pour vos annonces professionnelles<br />

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01 45 50 23 08<br />

ou par e-mail<br />

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LE CENTRE HOSPITALIER DE THUIR<br />

Pyrénées-Orientales (66) - Région Languedoc-Roussillon<br />

(situé à 10 mn <strong>de</strong> Perpignan, 1h30 <strong>de</strong> Montpellier et<br />

Toulouse, 2h <strong>de</strong> Barcelone)<br />

Etablissement spécialisé en psychiatrie<br />

(7 secteurs <strong>de</strong> psychiatrie générale, 2 secteurs <strong>de</strong> psychiatrie<br />

infanto-juvénile, 1 intersecteur <strong>de</strong> toxicomanie,<br />

1 secteur psychiatrique en milieu pénitentiaire)<br />

Recherche<br />

pour ses secteurs <strong>de</strong> PSYCHIATRIE GÉNÉRALE<br />

DES MÉDECINS PSYCHIATRES<br />

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Missions :<br />

- Travail clinique, d’organisation et d’animation d’équipe sur structure<br />

d’hospitalisation temps plein, d’hôpital <strong>de</strong> jour et <strong>de</strong> CMP<br />

- Participation à la mise en place du nouveau projet <strong>de</strong> service et <strong>de</strong> l’hôpital<br />

Postes à pourvoir très rapi<strong>de</strong>ment<br />

Candidature à adresser à :<br />

Monsieur le Directeur, Centre Hospitalier Léon-Jean GREGORY<br />

Avenue du Roussillon, BP 22 - 66301 THUIR Ce<strong>de</strong>x<br />

Tél. : 04 68 84 67 00<br />

LE CENTRE HOSPITALIER<br />

DES PAYS DE MORLAIX (Finistère)<br />

3 secteurs <strong>de</strong> psychiatrie générale, un secteur <strong>de</strong><br />

pédopsychiatrie et un secteur d’alcoologie<br />

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située à 60 Kms <strong>de</strong> Brest (Ville Universitaire)<br />

à proximité <strong>de</strong> la mer (Roscoff, Carantec, baie <strong>de</strong> Morlaix),<br />

<strong>de</strong>sserte TGV et voie expresse<br />

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<strong>de</strong>s praticiens en psychiatrie générale et<br />

infanto-juvénile (tous statuts)<br />

Adresser candidature et CV à :<br />

Centre Hospitalier, Direction <strong>de</strong>s Affaires Médicales<br />

BP 97237 - 29672 Morlaix Cé<strong>de</strong>x<br />

Renseignements auprès <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong> affaires médicales :<br />

02 98 62 69 11, ou <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> services <strong>de</strong> psychiatrie par<br />

l’intermédiaire du standard : 02 98 62 61 60.<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

SECTEUR PSYCHIATRIE ADULTE<br />

92G14 (Boulogne Nord et Ouest)<br />

Chef <strong>de</strong> Service Dr M. Goutal<br />

CH Paul Guiraud (Villejuif)<br />

Recherche<br />

PH temps plein provisoire<br />

A dater du 01/09/2005<br />

Tél. : 01 42 11 71 10<br />

Le Centre Hospitalier<br />

Edouard TOULOUSE<br />

(MARSEILLE 13)<br />

recherche un MEDECIN<br />

FAISANT FONCTION D’INTERNE<br />

ou UN PRATICIEN CONTRACTUEL<br />

pour compléter l’équipe médicale<br />

d’un secteur <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> Générale Adultes<br />

Poste à pourvoir dès maintenant<br />

***<br />

Le secteur comporte : Unité d’hospitalisation –<br />

Appartements thérapeutiques – CMP – Hôpital <strong>de</strong> Jour –<br />

CATTP – Atelier thérapeutique<br />

Renseignements :<br />

Docteur Alain ABRIEU, Chef <strong>de</strong> Service<br />

Tél. 04 91 96 99 93 (<strong>de</strong> 8h30 à 16h30)<br />

@mail : alain.abrieu@ch-edouard-toulouse.fr<br />

Candidatures et CV :<br />

Monsieur le Directeur - Centre Hospitalier Edouard TOULOUSE<br />

118 chemin <strong>de</strong> Mimet - 13917 MARSEILLE Ce<strong>de</strong>x 15


22<br />

LIVRES<br />

Fonction <strong>de</strong> direction et<br />

gouvernance dans les<br />

associations d’action sociale<br />

Francis Batifoulier François Noble<br />

Dunod<br />

La Loi du 2 janvier 2002, en confirmant<br />

les droits <strong>de</strong>s usagers et en introduisant<br />

dans le secteur social une logique <strong>de</strong><br />

projet et d’évaluation <strong>de</strong> la qualité, participe<br />

à une nouvelle donne qui va<br />

conduire nécessairement à repenser le<br />

management associatif.<br />

La première partie ce cet ouvrage prend<br />

acte <strong>de</strong>s bouleversements intervenus<br />

dans l’environnement <strong>de</strong>s associations,<br />

repère les effets que ces mutations ont<br />

sur les fonctionnements associatifs et<br />

<strong>de</strong>ssine les contours <strong>de</strong>s enjeux que les<br />

associations ont à relever.<br />

La <strong>de</strong>uxième partie resitue le projet politique<br />

<strong>de</strong>s associés au cœur <strong>de</strong> l’organisation<br />

associative et propose <strong>de</strong> problématiser<br />

les pratiques dirigeantes<br />

associatives en fonction du concept <strong>de</strong><br />

gouvernance.<br />

La troisième partie s’intéresse à la manière<br />

dont le management peut risquer<br />

<strong>de</strong>s pratiques originales <strong>de</strong> direction ;<br />

<strong>de</strong>s pratiques fondées sur un diagnostic<br />

<strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> l’entreprise associative,<br />

sur la prise en compte <strong>de</strong> conceptions<br />

et métho<strong>de</strong>s renouvelées dans le<br />

domaine du management, <strong>de</strong> l’organisation,<br />

<strong>de</strong> la stratégie, sans renoncer<br />

aux fondamentaux éthiques du secteur<br />

associatif.<br />

Cette présentation, en trois parties, peut<br />

être complétée par une lecture plus<br />

transversale <strong>de</strong>s thématiques présentées.<br />

Cinq thèmes, repris selon <strong>de</strong>s angles<br />

différents, constituent la trame <strong>de</strong> la réflexion<br />

proposée.<br />

Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’assistante sociale<br />

Chantal Le Bouffant et Faiza<br />

Guélamine<br />

Dunod, 32 €<br />

Depuis 24 ans, la formation initiale <strong>de</strong>s<br />

assistantes sociales n’avait pas changé.<br />

Depuis une centaine d’année la profession<br />

s’est construite et adaptée aux<br />

politiques sociales et aux grands problèmes<br />

<strong>de</strong> société. De cette double<br />

contrainte résulte la richesse d’un métier<br />

dont l’accès est maintenant réglementé<br />

par le décret <strong>de</strong> juin 2004 relatif<br />

au diplôme d’Etat et à l’exercice <strong>de</strong><br />

la profession d’assistant <strong>de</strong> service social.<br />

Cet ouvrage décrit et explicite les missions<br />

et le mo<strong>de</strong>s d’intervention <strong>de</strong>s services<br />

sociaux ; les cadres institutionnels<br />

dans lesquels exercent les assistantes<br />

sociales ; les enjeux <strong>de</strong> la profession.<br />

La première partie <strong>de</strong> l’ouvrage appréhen<strong>de</strong><br />

les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> la profession<br />

et les principales étapes <strong>de</strong> son évolution.<br />

La <strong>de</strong>uxième partie explore l’exercice<br />

concret du métier, en détaillant les<br />

missions menées auprès <strong>de</strong>s populations<br />

en difficultés, <strong>de</strong>s mineurs en danger,<br />

<strong>de</strong>s personnes fragilisées par la maladie,<br />

le handicap, l’âge ou le statut<br />

d’étranger... La troisième partie traite<br />

<strong>de</strong>s modalités d’intervention utilisées<br />

en référence aux principes éthiques et<br />

déontologiques : entretien, visite à domicile,<br />

enquête sociale, signalement,<br />

contrat, travail avec les groupes et développement<br />

social. La <strong>de</strong>rnière est<br />

consacrée à la formation, aux modalités<br />

<strong>de</strong> préparation à cette profession<br />

<strong>de</strong>puis la rentrée 2004 et aux perspectives<br />

<strong>de</strong> carrières.<br />

Comment penser la<br />

complémentarité <strong>de</strong>s<br />

pratiques et <strong>de</strong>s métiers en<br />

santé mentale<br />

Actes du Réseau <strong>de</strong> Promotion pour la<br />

Santé Mentale dans les Yvelines Sud<br />

Deauville, 6 et 7 juin<br />

Doin éd. 21 €<br />

Situé à l’ouest <strong>de</strong> Paris, le département<br />

<strong>de</strong>s Yvelines comprend une moitié nord<br />

et sud délimitées par la vallée <strong>de</strong> la<br />

Seine. La population du sud représente<br />

environ 600 000 habitants. Ce<br />

territoire est traversé d’est en ouest<br />

par la N 12 et l’A12. Il comprend, au<br />

nord-est, une zone urbanisée <strong>de</strong>nse<br />

et ancienne, Versailles et ses environs,<br />

au centre une zone d’urbanisation<br />

récente représentée par la ville<br />

nouvelle <strong>de</strong> Saint-Quentin en Yvelines<br />

et une vaste partie sud ouest rurale<br />

scandée par <strong>de</strong> petites agglomérations,<br />

dont le centre est la ville<br />

<strong>de</strong> Rambouillet. Le Sud Yvelines correspond<br />

au secteur sanitaire MCO<br />

n°9.<br />

Le réseau <strong>de</strong> santé mentale, né d’une<br />

histoire et d’une géographie spécifiques,<br />

s’est constitué en juin 1999<br />

autour <strong>de</strong> l’EPS Charcot, l’IM <strong>de</strong> la verrière<br />

(MGEN), le centre hospitalier <strong>de</strong><br />

Versailles, <strong>de</strong> la clinique privée d’Yveline<br />

et <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux associations <strong>de</strong> psychiatres<br />

(PSYLib) et <strong>de</strong> généralistes<br />

(GYPsy), soit près <strong>de</strong> 200 praticiens.<br />

Un groupement <strong>de</strong> psychologues libéraux<br />

participe également à ce réseau<br />

qui a été financé, à l’origine, par<br />

l’ARHIF et la DDASS <strong>de</strong>s Yvelines pour<br />

moitié, le complément étant apporté<br />

par la contribution financière <strong>de</strong>s établissements<br />

y participant.<br />

Le point <strong>de</strong> départ <strong>de</strong> l’initiative, émanant<br />

du Pr. Marie-Christine Hardy-<br />

Baylé, au CHV, reposait sur le constat<br />

du cloisonnement entre les acteurs<br />

locaux du champ <strong>de</strong> la psychiatrie et<br />

l’espoir qu’une meilleure lisibilité <strong>de</strong><br />

l’offre, apportée par une coordination<br />

accrue permettant <strong>de</strong> meilleures<br />

complémentarités, serait davantage<br />

<strong>de</strong> nature à convaincre les pouvoirs<br />

publics <strong>de</strong>s besoins dans le domaine.<br />

Dés son origine, le réseau se proposait<br />

plusieurs objectifs : missions <strong>de</strong><br />

concertation et <strong>de</strong> proposition,<br />

d’information et d’observatoire <strong>de</strong>s<br />

connaissances, <strong>de</strong> formation <strong>de</strong>s acteurs,<br />

d’évaluation, d’interface avec<br />

les tutelles, <strong>de</strong> partenariat dans le<br />

champ social.<br />

Le présent ouvrage relate, après cinq<br />

années <strong>de</strong> fonctionnement expérimental,<br />

les <strong>de</strong>ux journées <strong>de</strong> travail<br />

<strong>de</strong>s acteurs du réseau autour <strong>de</strong> l’intervention<br />

introductive <strong>de</strong> M-C Hardy-<br />

Baylé (complémentarité <strong>de</strong>s pratiques,<br />

complexité, clinique pathogénique et<br />

évaluation comparative) à laquelle<br />

répondaient C. Margerit (mé<strong>de</strong>cine<br />

générale et réseau), E. Brunella (pratique<br />

infirmière et réseau), P. Krzakowski<br />

(le point <strong>de</strong> vue psychanalytique<br />

sur la rupture <strong>de</strong>s pratiques<br />

partenariales) et R. Rechtman (pourquoi<br />

une refonte <strong>de</strong> la psychiatrie).<br />

Un compte rendu <strong>de</strong> discussion générale,<br />

une riche bibliographie et la<br />

restitution <strong>de</strong> cinq ateliers complètent<br />

l’ouvrage.<br />

Ces journées, qui sont un point d’arrêt<br />

provisoire, reflètent assez fidèlement<br />

les questionnement épistémologiques,<br />

cliniques, éthiques et<br />

organisationnels que pose l’exercice<br />

45 €*<br />

pour un an<br />

75 €*<br />

pour 2 ans<br />

Tarif<br />

étudiant et internes<br />

30 €*<br />

*supplément étranger<br />

et DOM/TOM =30 €/an<br />

ANNONCES EN BREF<br />

18 octobre 2005. Paris. 14 ème Confrontation<br />

Mé<strong>de</strong>cine-<strong>Psychiatrie</strong> sur le thème :<br />

Le Délire, la Mythomanie et l’Onirisme. Renseignements<br />

et inscriptions : Secrétariat<br />

du 37 ème secteur <strong>de</strong> Paris, 11 ème<br />

section, Secteur <strong>de</strong> Ménilmontant, CH<br />

<strong>de</strong> Maison Blanche, 3 avenue Jean Jaurès,<br />

93300 Neuilly-sur-Marne.<br />

25 et 26 octobre 2005. Paris. 3 ème Conférence<br />

internationale sur l’homoparentalité.<br />

Inscriptions : Association <strong>de</strong>s Parents<br />

et futurs parents Gays et Lesbiens,<br />

BP 255, 3 rue Keller, 75524 Paris Cé<strong>de</strong>x<br />

11. Tél. : 01 47 97 69 15. E-mail :<br />

contacts@conference-apgl.org. Site internet<br />

: http://www.conference-apgl.org.<br />

4 novembre 2005. Bor<strong>de</strong>aux. Colloque<br />

organisé par Asais Recherche sur le<br />

thème : <strong>Psychiatrie</strong> et exclusion sociale :<br />

comment intervenir sans (trop) souffrir ?<br />

Inscriptions : Association Asais, Monique<br />

Ferrand, Correspondante Formation,<br />

121 rue <strong>de</strong> la Bécha<strong>de</strong>, 33076 Bor<strong>de</strong>aux.<br />

Pré-inscriptions par téléphone, contacter<br />

: Mme Hélène Bielle, 05 56 52 60 59.<br />

5 et 6 novembre 2005. Journées d’Etu<strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong> Paris organisées par Euro-Psy sur le<br />

thème : Le transfert : <strong>de</strong> la cure à l’institution.<br />

Renseignements : Euro-Psy,<br />

45 bis rue Pernety, 75014 Paris.<br />

Tél. : 01 45 42 00 10. Fax : 01 45 45 45 45.<br />

E-mail : secretariat@euro-psy.org. Site :<br />

www.euro-psy.org.<br />

18 novembre 2005. Paris. Colloque <strong>de</strong><br />

l’Association Française <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong><br />

sur le thème : L’inquiétu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la société<br />

face aux mala<strong>de</strong>s mentaux « difficiles ». Inscriptions<br />

: Association Française <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>,<br />

147 rue Saint Martin, 75003<br />

Paris.<br />

23 novembre 2005. Rennes. Journée<br />

nationale sur le thème : Enfants surdoués<br />

en difficulté : <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntification à une prise<br />

en charge adaptée, oganisée par le Service<br />

Hospitalo-Universitaire <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong><br />

<strong>de</strong> l’Enfant et <strong>de</strong> l’Adolescent<br />

<strong>de</strong> Rennes. Renseignements : Secrétariat<br />

du Pr Sylvie Tordjman. Tél. :<br />

02 99 51 06 04. Fax : 02 99 32 46 98.<br />

E-mail : pedopsy@ch-guillaumeregnier.fr.<br />

Site : www.sante-enfant-societe.com.<br />

<strong>de</strong> la psychiatrie contemporaine, à partir<br />

<strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue différents. Avec l’espoir<br />

que la pratique du réseau créerait<br />

un espace local où pourraient s’atténuer,<br />

sinon se réduire, les contradictions<br />

ou conflictualisations <strong>de</strong>s épistémologies<br />

partielles, où apparaîtrait une<br />

authentique complémentarité, sans disqualification<br />

subreptice ni œcuménisme<br />

<strong>de</strong> faça<strong>de</strong>, tandis que le service rendu<br />

et l’efficience s’amélioreraient. Sans surprise,<br />

les débats ne tranchent pas mais<br />

permettent à <strong>de</strong>s acteurs qui échangent<br />

peu sur ces questions <strong>de</strong> le faire. En<br />

même temps l’impression prévaut, au<br />

<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s débats théoriques, qu’émerge<br />

Nom :<br />

Prénom :<br />

Adresse :<br />

24 et 25 novembre 2005. Paris. Journée<br />

d’Etu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’Association Nationale<br />

<strong>de</strong>s équipes contribuant à l’action médico-sociale<br />

précoce (ANECAMSP) sur le<br />

thème : Annonces du diagnostic et accompagnement<br />

du handicap. Renseignements<br />

: Association Nationale Et<br />

Centres d’Action Médico-Sociale Précoce<br />

(ANECAMSP), 10 rue Erard, 75012 Paris.<br />

Tél. : 01 43 42 09 10. Fax : 01 43 44 73 11.<br />

E-mail : anecamsp@wanadoo.fr.<br />

24 et 25 novembre 2005. Strasbourg.<br />

3 ème Congrès Européen <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine<br />

en Milieu Pénitentiaire sur le thème : Pathologies.<br />

Risques. Droit et usages <strong>de</strong>s soins.<br />

Points <strong>de</strong> vue Européens. 1 ères Rencontres<br />

Européennes <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> Pénitentiaire<br />

sur le thème : Prise en charge <strong>de</strong>s victimes.<br />

Le déni du crime. Quel avenir pour les criminels<br />

psychopathes en fin <strong>de</strong> peine. Inscriptions<br />

: Evenys, 17 rue <strong>de</strong> Seine, 92100<br />

Boulogne. Tél. : 01 55 200 504. Fax :<br />

01 55 200 509. E-mail : evenys@evenys.com.<br />

24 et 26 novembre 2005. Lyon. 20 e<br />

Congrès <strong>de</strong> la Société Française <strong>de</strong> Recherche<br />

sur le Sommeil (SFRS). Renseignements<br />

: Package Organisation, 140<br />

cours Charlemagne, 69002 Lyon. Tél. :<br />

04 72 77 45 50. Fax : 04 72 77 45 77.<br />

E-mail : z.adam@package.fr.<br />

3 décembre 2005. Aix-en-Provence.<br />

Journée scientifique organisée par le<br />

Centre <strong>de</strong> Pratiques Familiales d’Aix-en-<br />

Provence sur le thème : Adolescents et<br />

parents. Centre <strong>de</strong> Pratiques Familiales<br />

d’Aix-en-Provence, 6 rue Charloun<br />

Rieu, 13090 Aix-en-Provence. Tél. :<br />

04 42 59 64 53. Fax : 04 42 59 64 57.<br />

8 et 9 décembre 2005. Dax. 9 èmes Journées<br />

<strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> <strong>de</strong> Dax sur le thème :<br />

Autour <strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnité en psychiatrie.<br />

Renseignements et inscriptions<br />

: Centre <strong>de</strong> Santé Mentale, 1 rue<br />

Labadie, BP 323, 40107 Dax. Tél. :<br />

05 58 91 48 38/05 58 91 46 26. Fax :<br />

05 58 91 46 843. E-mail : csm@ch-dax.fr.<br />

8 et 9 décembre 2005. Lille. XXII e Congrès<br />

<strong>de</strong> la Société Française <strong>de</strong> Psycho-Oncologie<br />

(SFPO). Renseignements : Jenny<br />

Trupin, Comm Santé, 51 rue du Port <strong>de</strong><br />

l’Homme, BP 33, 33360 Latresne. Tél. :<br />

05 57 97 19 19. Fax : 05 57 91 19 15.Email<br />

: info@comm-sante.com.<br />

un projet médical <strong>de</strong> territoire qui s’impose<br />

(dans les <strong>de</strong>ux sens du terme) aux<br />

pouvoirs publics, avec le confort et les<br />

limites d’une construction médicale <strong>de</strong><br />

projet au sein d’une psychiatrie <strong>de</strong> moins<br />

en moins séparée <strong>de</strong> son contexte social.<br />

Il s’agit donc d’un ouvrage très<br />

recommandable pour alimenter et poursuivre<br />

la réflexion, à partir d’une expérience<br />

originale, voire unique.<br />

S. Kannas<br />

Le lecteur intéressé à poursuivre pourra lire utilement,<br />

entre autres, le n° spécial <strong>de</strong> Carnet Psy consacré<br />

au RPSMYS (4 articles) ainsi que l’ouvrage <strong>de</strong><br />

Hardy Baylé, MC & Bronnec, C. (2003) : Jusqu’où<br />

la psychiatrie peut-elle soigner, Odile Jacob éd.,<br />

Paris.<br />

Je m’abonne pour : 1 an 2 ans<br />

N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

9 décembre 2005. Paris. Réunion d’hiver<br />

<strong>de</strong> la Société <strong>de</strong> Neuropsychologie<br />

<strong>de</strong> Langue Française (SNPLF). Renseignements<br />

: Dr Alain Agniel, Hôpital Purpan,<br />

CHU <strong>de</strong> Toulouse, Service <strong>de</strong> neurologie,<br />

Société <strong>de</strong> Neuropsychologie<br />

<strong>de</strong> Langue Française, Pavillon Riser,<br />

Place du Dr Baylac, TSA 40031, 31059<br />

Toulouse Cé<strong>de</strong>x. Tél. : 05 61 77 76 86.<br />

Fax : 05 61 49 95 24. E-mail : alain.agniel@<br />

toulouse.inserm.fr.<br />

9 et 10 décembre 2005. Paris. 4 ème<br />

Congrès International d’Haptonomie.<br />

Renseignements et inscriptions : Euro<br />

RSCG Life, 2 allée <strong>de</strong> Longchamp, 92281<br />

Suresnes Cé<strong>de</strong>x. Tél. : 01 58 47 87 49.<br />

Fax : 01 58 47 87 18. contact@congreshaptonomie.com.<br />

Site : www.congreshaptonomie.com.<br />

9 et 10 décembre 2005. Dijon. 16 ème<br />

Congrès <strong>de</strong> l’Association Ancre-Psy sur<br />

le thème : La Psychose en question : premières<br />

alertes, quels recours, quelles réponses ?<br />

Renseignements : Centre Médico-Psychologique<br />

Marco Cavallo, 2 bis route <strong>de</strong><br />

Dijon, 21600 Longvic. Tél. : 03 80 66 73 65.<br />

Ou Résacor, 1 bd Chanoine Kir, 21000<br />

Dijon. Tél. : 03 80 42 48 07. E-mail : gerard.milleret@caramail.com<br />

ou secretariat.resacor@chs-chartreuse.fr.<br />

26 janvier 2006. Paris. Séminaire sur<br />

le thème : Stratégies pour l’emploi <strong>de</strong>s personnes<br />

handicapées physiques dans<br />

les fonctions publiques. Inscriptions :<br />

CTNERHI, 236 bis rue <strong>de</strong> Tolbiac,<br />

75013 Paris. Tél. : 01 45 65 59 40. Fax :<br />

01 45 65 44 94. E-mail : r.martinez@ctnerhi.com.fr.<br />

Site : www.ctnerhi.com.fr.<br />

20 et 22 janvier 2006. Bor<strong>de</strong>aux. Congrès<br />

International <strong>de</strong> Gestalt Thérapie <strong>de</strong><br />

Langue Française sur le thème : La psychothérapie<br />

comme esthétique. Renseignements<br />

: Annie Faure, Comm Santé,<br />

51 rue du Port <strong>de</strong> l’Homme, BP 33,<br />

33360 Latresne. Tél. : 05 57 97 19 19.<br />

Fax : 05 57 97 19 15. E-mail : congresGT<br />

@wanadoo.fr.<br />

27 et 28 janvier 2006. Paris. Journées<br />

nationales <strong>de</strong> l’Association Française<br />

<strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> (AFP) sur le thème :<br />

Clinique <strong>de</strong>s limites, limites <strong>de</strong> la clinique.<br />

Renseignements : Association Française<br />

<strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> (AFP), 147 rue St Martin,<br />

75003 Paris. Tél. : 01 42 71 41 11.<br />

Fax : 01 42 71 36 60. E-mail : psy-<br />

spfafp@wanadoo.fr.<br />

Chère Mamie<br />

Collectif (Alzheimer Europe)<br />

CHÈQUE À L’ORDRE DE MAXMED à envoyer avec ce bulletin,<br />

54, boulevard <strong>de</strong> la Tour Maubourg, 75007 Paris<br />

Téléphone : 01 45 50 23 08<br />

Je souhaite recevoir une facture acquittée justifiant <strong>de</strong> mon abonnement.<br />

Ce livre sur la maladie d’Alzheimer est<br />

<strong>de</strong>stiné aux enfants <strong>de</strong> 8 à 12 ans. Renaud<br />

et sa soeur Zoé racontent les histoires<br />

vécues avec leur Mamie, qui a la<br />

maladie d’Alzheimer. Renaud et Zoé expriment<br />

la frustration, la tristesse, voire<br />

la rage qu’ils ressentent face aux comportements<br />

étranges <strong>de</strong> leur grand-mère,<br />

à ses trous <strong>de</strong> mémoire, à ses réactions<br />

inattendues. Tout en vivant <strong>de</strong>s épiso<strong>de</strong>s<br />

difficiles et parfois drôles, les <strong>de</strong>ux enfants<br />

apprennent comment, avec patience<br />

et tendresse, l’ensemble <strong>de</strong> la famille peut<br />

entourer leur grand-mère mala<strong>de</strong>.<br />

Bulletin d’abonnement<br />

Le <strong>Journal</strong> <strong>de</strong> <strong>Nervure</strong> + La Revue


N°7 - TOME XVIII - OCTOBRE 2005<br />

LIVRES<br />

La dépendance <strong>de</strong>s personnes<br />

âgées<br />

Quelles politiques en Europe ?<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Clau<strong>de</strong> Martin<br />

Presses Universitaires <strong>de</strong> Rennes<br />

Editions ENSP, 24 €<br />

Cet ouvrage commence par une analyse<br />

du cas français, en abordant la genèse<br />

<strong>de</strong> la politique dépendance (Robert<br />

Lafore), le processus et les acteurs<br />

qui ont contribué à sa définition, que<br />

ce soit au plan local (François-Xavier<br />

Schweyer) ou national (Thomas Frinault) ;<br />

puis la construction <strong>de</strong>s catégories, celle<br />

<strong>de</strong> dépendance (Bernard Ennuyer), mais<br />

aussi celle <strong>de</strong> handicap et d’incapacité,<br />

avec le rôle <strong>de</strong>s enquêtes statistiques<br />

(Alain Jourdain et Pierre Mormiche). Enfin,<br />

sont évoquées l’évolution <strong>de</strong>s interventions<br />

sociales et <strong>de</strong>s métiers (François<br />

Bigot et Thierry Rivard), mais aussi<br />

l’histoire du métier d’ai<strong>de</strong>-ménagère et<br />

son évolution sous l’effet <strong>de</strong> la politique<br />

adoptée avec la prestation dépendance<br />

(Henri Nogues).<br />

Dans une <strong>de</strong>uxième partie, sont présentées<br />

plusieurs configurations nationales<br />

qui appartiennent à différents régimes<br />

<strong>de</strong> protection sociale : le régime<br />

assurantiel obligatoire, avec le cas <strong>de</strong><br />

l’Allemagne (Gerhard Igl) ; le régime libéral,<br />

avec le Royaume-Uni (Jane Lewis<br />

et Clare Ungerson) ; le régime socialdémocrate,<br />

avec la Finlan<strong>de</strong> (Annelli<br />

Antonnen et Jorma Sipilä) et l’Europe<br />

du sud, avec l’Italie (Cristiano Gori). Dans<br />

chacune <strong>de</strong> ces configurations, certaines<br />

questions sont abordées : celles <strong>de</strong>s<br />

conditions et conséquences du choix<br />

assurantiel (Igl) ; celle <strong>de</strong>s inégalités sociales<br />

et <strong>de</strong> genre (Ungerson) ; celle <strong>de</strong><br />

la place du marché et <strong>de</strong> la régulation<br />

<strong>de</strong> près par les care manager (Lewis) ;<br />

celle <strong>de</strong>s disparités ou inégalités territoriales<br />

(Gori).<br />

Dans une troisième partie sont regroupés<br />

plusieurs textes comparatifs portant<br />

presque exclusivement sur l’Europe,<br />

qui abor<strong>de</strong>nt les différentes modalités<br />

<strong>de</strong> rémunération <strong>de</strong>s soins dans les pays<br />

développés (Jane Jenson) ; la place occupée<br />

par la prise en charge <strong>de</strong> la dépendance<br />

en fonction <strong>de</strong>s différents régimes<br />

<strong>de</strong> protection sociale (Denis<br />

Bouget) ; les enjeux économiques soulevés<br />

par la dépendance en Europe (Marie-Eve<br />

Joël) ; le rôle <strong>de</strong>s institutions européennes<br />

et les différentes législations<br />

nationales au sein <strong>de</strong> l’Union pour <strong>de</strong>ssiner<br />

les contours <strong>de</strong> cette politique<br />

(Francis Kessler) et enfin les différents<br />

23<br />

paniers <strong>de</strong> service offerts dans quelques<br />

pays européens, en partant <strong>de</strong> l’analyse<br />

<strong>de</strong> cas-type uniformisés (Blanche<br />

Le Bihan et Clau<strong>de</strong> Martin).<br />

Cet ensemble <strong>de</strong> contributions retrace<br />

l’évolution dans chaque pays, mais propose<br />

aussi un bilan comparatif <strong>de</strong>s choix<br />

déjà opérés à l’échelle européenne.<br />

Des formations pour quels<br />

emplois ?<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Jean-François<br />

Giret, Alberto Lopez et José Rose<br />

La Découverte, 29 €<br />

Cet ouvrage propose une analyse <strong>de</strong>s<br />

liens entre formations et emplois. Il s’appuie,<br />

essentieIIement, sur les résultats<br />

<strong>de</strong> l’enquête Génération 98 du Céreq<br />

(Centre d’étu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong> recherches sur<br />

les qualifications), qui permettent <strong>de</strong> repérer<br />

les caractéristiques <strong>de</strong>s emplois<br />

occupés au cours <strong>de</strong>s premières années<br />

<strong>de</strong> vie active. La première partie montre<br />

comment les acteurs - système éducatif,<br />

responsables d’entreprises, déci<strong>de</strong>urs<br />

nationaux et régionaux - se positionnent<br />

par rapport à cette question. La<br />

<strong>de</strong>uxième montre qu’une « bonne correspondance<br />

» entre formation initiale<br />

et emplois occupés, tant en termes <strong>de</strong><br />

niveaux que <strong>de</strong> spécialités, n’est pas aujourd’hui<br />

la règle en France, même pour<br />

les formations professionnelles. La<br />

troisième analyse montre comment la<br />

volonté d’ajuster les formations aux<br />

emplois se heurte aux stratégies <strong>de</strong>s<br />

différents acteurs. Enfin, la <strong>de</strong>rnière partie<br />

met l’accent sur les phénomènes <strong>de</strong><br />

« déclassement ».<br />

Directeur <strong>de</strong> la rédaction :<br />

Gérard Massé<br />

Rédacteur en chef : François Caroli<br />

Comité <strong>de</strong> rédaction : Centre Hospitalier<br />

Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75014 Paris.<br />

Tél. 01 45 65 83 09.<br />

Botbol M., Carrière Ph., Dalle B., Goutal M.,<br />

Guedj M.-J., Jonas C., Lascar Ph., Martin A.,<br />

Paradas Ch., Sarfati Y., Spadone C.,<br />

Tribolet S., Weill M.<br />

Comité scientifique : Bailly-Salin P.<br />

(Paris), Besançon G. (Nantes), Bourgeois<br />

M. (Bor<strong>de</strong>aux), Buisson G. (Paris), Caillard<br />

V. (Caen), Chabannes J.-P. (Grenoble),<br />

Chaigneau H. (Paris), Christoforov B.<br />

(Paris), Colonna L. (Rouen), Cornillot P.<br />

(Paris), Dufour H. (Genève), Dugas M.<br />

(Paris), Féline A. (Paris), Ginestet D.<br />

(Paris), Guelfi J.-D. (Paris), Guyotat J.<br />

(Lyon), Hochmann J. (Lyon), Koupernik<br />

C. (Paris), Lambert P. (Chambéry), Loo H.<br />

(Paris), Marcelli D. (Poitiers), Marie-<br />

Cardine M. (Lyon), Mises R. (Paris),<br />

Pequignot H. (Paris), Planta<strong>de</strong> A. (Paris),<br />

Ropert R. (Paris), Samuel-Lajeunesse B.<br />

(Paris), Scotto J.-C. (Marseille), Sechter D.<br />

(Lille), Singer L. (Strasbourg), Viallard A.<br />

(Paris), Zarifian E. (Caen).<br />

Comité francophone : Anseau M.<br />

(Belgique), Aubut J. (Canada), Bakiri M.-A.<br />

(Algérie), Cassan Ph. (Canada), Douki S.<br />

(Tunis), Held T. (Allemagne), Lalon<strong>de</strong> P.<br />

(Canada), Moussaoui D. (Maroc), Romila A.<br />

(Roumanie), Simon Y.-F. (Belgique), Stip E.<br />

(Canada), Touari M. (Algérie).<br />

Publicité<br />

médical<br />

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