Arabic Linguistics

langue est envisagée dans l‘un des textes fondateurs de la linguistique arabe
appartenant à al-H~alīl:
« Les Arabes bédouins parlaient correctement d‘eux mêmes. Ils se rendaient
compte des structures (mawāqi„) de leur langue et dans leurs esprits s‘est formée
l‘idée de justifier ces structures. Leurs justifications ne nous furent
malheureusement pas transmises. Moi j‘ai présenté les raisons qui m‘ont semblé
être des explications pour ce que je cherchais : si je suis tombé juste c‘est le but
même que je poursuivais. S‘il existe une autre explication c‘est parce que je me
trouve dans la situation de cet homme sage qui est entré dans une maison
parfaitement construite, à la charpente merveilleusement assemblée et ou la
sagesse de l‘architecte lui est révélée soit par des informations dignes de
confiance, soit par des preuves claires, soit par des arguments adéquats. Chaque
fois qu‘il examine une partie de la maison (l‘homme), il se dit : si le constructeur
a fait cela c‘est pour tel ou tel raison ou pour tel ou tel motif, ou parce qu‘il
considère que c‘est mieux ainsi, ou parce que cela lui est simplement passé par la
tête. Il est possible que le sage bâtisseur ait agi comme il a agi pour cette même
raison que suppose le visiteur, mais il se peut aussi qu‘il ait agi pour une raison
différente de celle que l‘on invoque ».
On a remarqué moins cette métaphore du bâtiment pour la théorie de la
langue en tant que modèle hypothétique dans ce texte, cité d‘habitude pour sa
référence aux « causes » de la grammaire (voir, par exemple, Māzin al-Mubārak
1971, qui cite al-Zağğāğī, ‘Īd}āh} „ilal al-nah}wi).
Al-H~alīl lui-même est pour ses successeurs le grand bâtisseur de la
grammaire arabe : pour Ibn Ğinnī, il est « le maître de son groupe (de spécialistes)
(sayyidu qawmihi) et celui qui a dévoilé (les secrets) de l‘analogie (du système,
c‘est nous qui notons) dans cette science » (‟a lā tarā ‟ilā qawli al-H~alīl, wa huwa
sayyidu qawmihi wa kāšif qinā„i al-qiyās fī ‗ilmihi) (al-H~as}ā‟is}, I, p. 361). L‘idée
que la science du langage doit « dévoiler » les « secrets » de la constitution et du
fonctionnement de la langue arabe se trouve chez les premiers grammairiens et
chez al-Ğāh}iz} aussi: elle explique la présence fréquente du mot sirr « secret »
dans le titre des ouvrages linguistiques, y compris chez Ibn Ğinnī : Sirru s}inā„ati
al-‟i„rāb, nonobstant son titre, est un ouvrage de morpho-phonologie.
L‘idée de « la signification » (ma„nā) cachée sous la couverture de « l‘expression »
(lafz}), présente chez certains grammairiens et rhétoriciens, chez Ibn Ğinnī également,
explique elle aussi l‘utilisation de la métaphore du « voile » et, corrélativement, de la
métaphore du « dévoilement » pour l‘œuvre du grammairien. On a remarqué que
cette idée se trouve surtout chez les auteurs influencés par le mu„tazilisme, dont Ibn
Ğinnī fait partie (sur l‘influence mu„tazilite sur la naissance et le développement de la
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