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Le tango des crocodiles http://www.tango-crocodiles.com [Document]

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25. <strong>Le</strong> trou noir<br />

collages. Jean Louis toujours aussi fidèle dans ses amitiés m’appelait<br />

souvent. Ainsi, je passais <strong>des</strong> heures au téléphone, allongé dans les<br />

aiguilles de pin qui me piquaient les fesses. Je reniflais l’humus. Des<br />

vacances en somme.<br />

Comme les fois précédentes, j’ai quitté la clinique au bout de<br />

quelques jours pour me retrouver libre. Mais sans avoir changé le<br />

presse étoupe de mon besoin de vengeance, sans avoir repeint les<br />

oeuvres mortes de la reconnaissance <strong>des</strong> pillages légaux, bref, un<br />

passage rapide au chantier et une connerie médicale majeure. On<br />

vient de me lâcher d’un sas immergé par trois cents mètres de fond<br />

et mes tympans ont éclaté <strong>com</strong>me lors de cette plongée en apnée<br />

dans un mouillage de Minorque.<br />

L’éclatement <strong>des</strong> tympans est la seule expérience passée physique<br />

à laquelle je <strong>com</strong>pare la douleur de ma maladie. Dans la semaine qui<br />

suivit ma sortie, les douleurs furent aussi violentes et aigues que celles<br />

procurées par l’accident d’apnée. <strong>Le</strong>s premiers mois furent <strong>des</strong> mois<br />

d’oreilles crevées, de cerveau crevé, d’estomac crevé. Tout s’était<br />

explosé.<br />

Claudine ne m’a pas lâché, affectivement, moralement, intellectuellement,<br />

économiquement. Sans elle je serais mort, ou allongé<br />

quelque part, <strong>com</strong>me ces types sans plus rien qu’une bouteille de<br />

rosé pas toujours frais.<br />

Je quittais parfois son canapé vert, trop petit pour que je m’y<br />

étende de tout mon long, abandonnais le chien de fusil, pour tenter<br />

de monter en haut du village. Dès que j’étais à mi-côte, je devais<br />

renoncer. La pente de cent mètres me paraissait infranchissable.<br />

Et surtout, d’en haut, on voyait la mer.<br />

<strong>Le</strong>s gouttes bleues, je les prenais à présent par la bouche. Elles<br />

étaient aussi soli<strong>des</strong> que l’impression que me faisait le temps. <strong>Le</strong> fil<br />

du temps ne signifiait plus rien pour moi. Chaque heure, c’est à coup<br />

de ciseau à bois mal affûté que je l’entamais dans la masse, le temps.<br />

Cela a duré <strong>des</strong> mois, d’après ce que l’on m’en a dit.<br />

C’est la nuit que le <strong>com</strong>bat devenait inégal. L’insomnie, tout le<br />

monde l’a racontée. Que dire de plus que Fitzerald. Seul le moustique<br />

de La Fêlure[11], rendait réellement <strong>com</strong>pte de ce qu’étaient mes<br />

insomnies, ainsi que <strong>des</strong> rapports que j’entretenais avec elles. Cela a<br />

duré <strong>des</strong> mois, m’a-t-on dit.<br />

La tempête et le naufrage, je connaissais trop bien l’une ou<br />

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