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La machine à trahir
À force de parler aux uns et aux autres des histoires que je tire
derrière moi comme une ancre flottante pour ne pas sancir* dans
la mer de l’exclusion, je me retrouve pas mal positionné, c’est à
dire au nord, par rapport à la dépression 1 qui aurait pu me tomber
dessus. L’information m’est délivrée en avant première. Par Christine
Lazerges 2 , mon professeur de droit pénal. Elle tombe à la cafétéria
de la fac de droit : la future commission d’enquête parlementaire sur
les tribunaux de commerce 3 . La quantité d’articles de presse et les
scandaleux scandales imputés aux tribunaux de commerce avaient
été le feu sous la cocotte minute de leurs petites tambouilles aussi
discrètes qu’irrégulières.
Une commission d’enquête parlementaire sur les tribunaux de
commerce, je me dis sans y croire, comme un rêve que je n’aurais
pas osé faire.
Une commission d’enquête parlementaire sur les tribunaux de
commerce 4 est la suite normale de l’article de Libération intitulé
L’ère de soupçons sur les tribunaux de commerce a commencé[24],
que j’avais vu brunir sous la vitre arrière de ma voiture maghrébine.
C’est une occasion ne plus passer pour un paranoïaque, un fou
instable, un hystérique aigri. C’est la validation de ma résistance, la
récompense de ces études de droit sans débouchés lucratifs.
Au delà de la réforme, l’enquête parlementaire allait mettre à jour
bien plus que des dysfonctionnements. Les choses allaient changer, je
le crois et je veux en être un acteur. Après tout, c’est bien de notre
faute ce qui nous arrive : les affaires bien gérées ne se trouvent
jamais devant les tribunaux de commerce. Enfin, pas de ce côté. Le
capitalisme français s’est bâti devant les barres de ces tribunaux. Je
suis au bon endroit, au bon moment, et j’ai forgé depuis des années
les bons outils. Je savais bien que je les aurais. Je remets à Christine
Lazerges, le Tango des Crocodiles.
« Ce n’est qu’un document contenant les pièces de preuves d’un
bal mal famé, lui dis-je. »
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