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Le tango des crocodiles http://www.tango-crocodiles.com [Document]

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<strong>Le</strong> <strong>tango</strong> <strong>des</strong> <strong>crocodiles</strong><br />

Je me surprends à sortir de mes rêveries sans pensées pour sauter<br />

d’un côté ou de l’autre. Je n’ai qu’un seul sentiment. Celui d’un<br />

trou dans le bide que je suis capable de retrouver même à présent<br />

en quelques instants. Quelques surfs sur l’écume m’ont posé sur le<br />

sable mou et j’ai enfoncé mes bottes en caoutchouc sous l’écume. Je<br />

n’ai pas éprouvé de délivrance <strong>com</strong>me on pourrait le croire. J’ai fait<br />

les gestes qu’on fait lorsqu’une embarcation arrive sur la plage. J’ai<br />

soulevé quelques secon<strong>des</strong> la survie pour ne pas qu’elle frotte sur le<br />

sable avant de me rendre <strong>com</strong>pte que cela n’avait pas d’importance<br />

et j’ai relâché le canot dans les vagues qui déferlaient.<br />

La plage est déserte ce 11 janvier au lever du soleil. La mer déferle<br />

au bord bien plus qu’au large. Elle s’écrase sur le sable en fracas. On<br />

a mis le son on dirait. Je vais à droite vers un ensemble de maisons<br />

que j’atteins au bout d’un quart d’heure environ. J’ai l’impression de<br />

<strong>des</strong>soûler. <strong>Le</strong>s maisons, vastes et bétonneuse sont vi<strong>des</strong>. Je reprends<br />

ma marche dans l’autre sens. Je me rends <strong>com</strong>pte que je pèse lourd.<br />

Lourd de mes habits mouillés, de mes pas, d’être là.<br />

J’ai pas pensé à la fatalité. Il n’y en avait pas. Pas à pas, les<br />

conditions du naufrage avaient été réunies. La cession inique avait<br />

déclenché un mode de vie et les médicaments. Je n’aurais pas dû<br />

rencontrer d’exclu, <strong>com</strong>pagnon d’infortune. Ils n’auraient jamais dû<br />

toucher à ce navire. On n’avait rien à foutre en cette saison en mer,<br />

seuls, récupérant un navire peut-être blessé. On ne pouvait pas non<br />

plus le laisser là-bas. Je ne me suis pas dit que pas à pas, les violations<br />

<strong>des</strong> lois les plus élémentaires me faisaient errer sur la plage. Tout le<br />

monde me dirait que c’est la fatalité. Moi, je savais que je venais de<br />

tuer Sylvestre parce que je m’étais laissé pousser depuis trois ans le<br />

long de la barrière de sécurité.<br />

Je pousse la porte de cette maison perdue dans les ban<strong>des</strong> de<br />

sables. En entrant dans la pièce, une cuisine derrière un bar, je me<br />

rends <strong>com</strong>pte que je suis mouillé. <strong>Le</strong> carrelage brut ruisselle déjà.<br />

Devant moi un bar. Des chats. Un chien et leur maître. Un type<br />

moustachu un peu rude que je surprends dans sa cuisine à l’heure<br />

du café. Il a vu qu’il se passait quelque chose. <strong>Le</strong>s passants en cirés<br />

dégoulinants ne sont pas légion les matins de janvier. Je me suis<br />

effondré. Assis dans le coin droit. <strong>Le</strong>s larmes se sont mises à jaillir<br />

de mon ventre <strong>com</strong>me si elles attendaient au delà de la nuit un<br />

spectateur. J’ai dû lui dire qu’on avait coulé le navire et Sylvestre je<br />

ne me souviens plus bien <strong>com</strong>ment. Je dois téléphoner, ai-je dû dire<br />

au type qui déjà me faisait un café. Il avait la politesse de ne rien<br />

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