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Le tango des crocodiles http://www.tango-crocodiles.com [Document]

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3. <strong>Le</strong> second jugement<br />

à la voile, ou à coups de quelques minutes de moteur.<br />

C’est une panne de moteur, un coup de vent annoncé au-dehors,<br />

et <strong>des</strong> batteries du bord totalement blettes, qui m’ont fait tomber<br />

dans la nasse.<br />

Nous ne pouvions à nouveau risquer ce coup de mistral prévu<br />

par la météo aux Canoubiers, car le mouillage n’y tient pas. S’accrocher<br />

à une <strong>des</strong> chaînes du fond en s’en remettant à Dieu n’a jamais<br />

été ma solution. Nous sommes allés nous abriter à Saint Tropez. Je<br />

suis rentré à bord de ma coquille, me suis versé un verre de rosé<br />

frais, malgré les médicaments administrés à haute dose Par précaution<br />

” j’extrais le pistolet à fusées de mon grand short noir acheté en<br />

Guyane et le pose sur ma table à cartes. Il est plus efficace d’avoir ce<br />

genre d’objet non homologué que les fusées en coffret, imposées par<br />

la réglementation maritime française. C’est pas le genre de flingue<br />

qu’on peut utiliser pour soi. Trop gros, avec son canon de deux bons<br />

centimètres. <strong>Le</strong> pistolet est à <strong>des</strong>tination du type qui viendrait saisir<br />

le navire. Je sors une boîte de pâté Henaff de sous le plancher. Ma<br />

détermination est montée en température, de façon stable, régulière.<br />

Je suis très calme, lucide. Je termine ce que je crois être les dernières<br />

corrections de mon livre. Je contemple mon navire, la mer. Je pense,<br />

<strong>com</strong>me mon pote Jonjon que le bonheur est une affaire de bon sens<br />

et de bonne volonté. Je sais que je peux perdre le navire, <strong>com</strong>me j’ai<br />

perdu le reste. Je savoure chaque courbe <strong>des</strong> boiseries <strong>com</strong>me un de<br />

mes derniers instants de vie.<br />

<strong>Le</strong> soir même, lorsque sont parus par le panneau bâbord une<br />

bande de pieds en chaussettes trouées, j’ai immédiatement <strong>com</strong>pris.<br />

J’ai tourné la tête vers le pistolet à fusées. On a jamais les corones<br />

qu’il faudrait. Ils passent la tête par la <strong>des</strong>cente. C’est mal élevé,<br />

je me dis. On frappe sur la coque, depuis le quai, et on attend la<br />

permission, l’invitation. Huissier ou pas. Claudine a <strong>com</strong>pris aussi.<br />

Je la vois en bas de la <strong>des</strong>cente, dé<strong>com</strong>posée. Moi, assis devant la<br />

table à cartes, je ne me lève pas, ni ne tends la main.<br />

Au lieu de la mise en joue, Claudine et moi avons accueilli presque<br />

poliment l’huissier venu saisir mon navire. Encore une fois, une fois<br />

de trop, je décidais de négocier. Maître Viaud était ac<strong>com</strong>pagné de<br />

son associé et du <strong>com</strong>missaire de police de Saint Tropez.<br />

« Cela fait <strong>des</strong> semaines que je vous cours après, m’apostrophe<br />

Viaud.<br />

— C’est le jeu, je réponds à peine agressif, la main tremblante<br />

près du flingue à fusées, sous la table à cartes. »<br />

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