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Du Fabliau à la Farce: encore la question performancielle?

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88 Brian J. Levy<br />

contentons de renvoyer ici <strong>à</strong> quelques-unes de ces auctoritates et <strong>à</strong> leurs<br />

prises de position, avant de revenir <strong>à</strong> nos moutons fablialesques qui broutent<br />

<strong>à</strong> l’autre rive du grand fleuve dramatique.<br />

Dans son article sur les rapports entre <strong>la</strong> farce et <strong>la</strong> littérature narrative, 3<br />

Helena Lewicka ne parle pas des fabliaux. Ce qui l’intéresse, ce sont les<br />

motifs particuliers au genre dramatique: elle fait enfin <strong>la</strong> p<strong>la</strong>idoirie pour<br />

<strong>la</strong> constitution d’un Index compréhensif pareil au grand Folklore Index de<br />

Stith-Thompson.<br />

Bernadette Rey-F<strong>la</strong>ud consacre en revanche un chapitre entier aux re<strong>la</strong>tions<br />

entre ‘<strong>Farce</strong>s et <strong>Fabliau</strong>x’, dans son ouvrage La <strong>Farce</strong> ou <strong>la</strong> machine<br />

<strong>à</strong> rire. 4 Elle y avance l’hypothèse d’un lien assez étroit entre les deux genres,<br />

et même d’une évolution du fabliau (distinctif par <strong>la</strong> progression simple<br />

et logique de ses épisodes linéaires) en <strong>la</strong> farce <strong>à</strong> personnages multiples<br />

et plus indépendants d’une action dramatique qui prend <strong>à</strong> son tour son<br />

propre é<strong>la</strong>n. 5 Son jugement des fabliaux manquerait un peu d’ampleur: elle<br />

n’apprécie guère, <strong>à</strong> notre avis, <strong>la</strong> dynamique du récit narratif transformé<br />

par le jongleur en performance comique. Quant aux trois grands exemples<br />

qu’elle cite, deux d’entre eux ne semblent pas <strong>à</strong> eux seuls justifier ses conclusions,<br />

car ils offrent plutôt des similitudes que des remaniements précis ou<br />

directs. 6 Pour une mouvance plus c<strong>la</strong>ire, plus distincte, il faudra peut-être<br />

chercher ailleurs. . .<br />

3H. Lewicka, ‘Les rapports entre <strong>la</strong> farce et <strong>la</strong> littérature narrative (pour un répertoire<br />

des motifs dramatiques)’, Cahiers de l’Association Internationale des Études Françaises<br />

21 (1974), pp. 21–32.<br />

4B. Rey-F<strong>la</strong>ud, La <strong>Farce</strong> ou <strong>la</strong> machine <strong>à</strong> rire (Genève: Droz, 1984), pp. 35–57.<br />

5Notons que Michel Rousse avance une hypothèse contraire: selon lui, le fabliau ne<br />

se serait point métamorphosé en farce dramatique, car une activité théâtrale analogue<br />

<strong>à</strong> celle des farces aurait toujours existé au 13e et au 14e siècle, même si elle ne s’est<br />

manifestée sous forme manuscrite que dans des cas ‘hors-série’ tels Courtois d’Arras, Le<br />

Garçon et l’Aveugle, et le Dit de Dame Jouenne. Voir M. Rousse, ‘Propositions sur le<br />

théâtre profane avant <strong>la</strong> farce’, Tréteaux 1 (1978), pp. 4–18.<br />

6Mme Rey-F<strong>la</strong>ud rapproche d’abord <strong>la</strong> <strong>Farce</strong> du Poulier du fabliau de Constant du<br />

Hamel. C’est aussi l’avis d’O. Jodogne (Le fabliau, Typologie des sources du moyen âge,<br />

13 (Turnhout: Brepols, 1975), p. 29), mais nous trouvons tout de même un écart significatif<br />

entre ces deux textes qui seraient plutôt des analogues partageant un même<br />

thème (‘Vi<strong>la</strong>ins amants punis’) que des frères de sang. D’ailleurs, loin d’être d’une simplicité<br />

linéaire, l’action du fabliau est parfaitement cyclique. Elle est aussi très complexe,<br />

déployant notamment tout un réseau d’intertextualité. Voir, <strong>à</strong> propos de ce fabliau exceptionnel:<br />

G. Bianciotto, ‘De Constant du Hamel’, Reinardus 6 (1993), pp. 15–30; et<br />

A. Cobby, ‘Langage du pouvoir, pouvoir du <strong>la</strong>ngage: Constant du Hamel et Les Trois<br />

Aveugles de Compiègne’, Reinardus 14 (2001), pp. 131–51. Dans le cas de <strong>la</strong> Bourgeoise<br />

d’Orliens et de <strong>la</strong> <strong>Farce</strong> d’ung mari jaloux, ces deux titres remontent également au ressort<br />

comique commun du ‘Mari battu mais content’. Quant au troisième exemple, celui du<br />

fabliau des Braies au cordelier et de <strong>la</strong> farce de Frère Guillebert, il est bien va<strong>la</strong>ble: voir<br />

plus loin, pp. 89–90.

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