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Du Fabliau à la Farce: encore la question performancielle?

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<strong>Du</strong> <strong>Fabliau</strong> <strong>à</strong> <strong>la</strong> <strong>Farce</strong>: <strong>encore</strong> <strong>la</strong> <strong>question</strong> <strong>performancielle</strong>? 97<br />

sûr, de <strong>la</strong> femme de l’imagier). Ayant vu le départ du mari, il se décide <strong>à</strong><br />

profiter de son absence. . .<br />

Scene III [on suppose qu’il frappe <strong>à</strong> <strong>la</strong> porte]: Le prêtre fait <strong>à</strong> <strong>la</strong> belle femme<br />

une déc<strong>la</strong>ration ardante: elle le connaît déj<strong>à</strong>, il est temps qu’elle reconnaisse<br />

son amour pour elle. Il est évident que <strong>la</strong> femme ne le repousse pas: le prêtre<br />

béat lui propose donc un petit verre intime. [Ici se termine le premier fragment<br />

du rollet]<br />

Scene IV [Second fragment]: Le petit verre bat son plein: rendu de plus en<br />

plus chaleureux par le vin, le prêtre propose enfin que l’on fasse l’amour. 40<br />

C’est en ce moment que <strong>la</strong> femme doit voir revenir son mari (son ‘dernier<br />

mot’: voi). Pris de panique, le prêtre supplie sa maîtresse de lui sauver <strong>la</strong> vie.<br />

Scène V : Il est évident qu’il arrive au prêtre quelque malheur: tout brûlé<br />

au visage, il pousse des cris de douleur. Peut-être le mari rentré aurait-il<br />

commandé <strong>à</strong> sa femme de lui passer une chandelle allumée; 41 de toute façon,<br />

c’est lui qui aurait brûlé <strong>la</strong> peau au prêtre (écoutons <strong>la</strong> p<strong>la</strong>inte de <strong>la</strong> victime:<br />

il m’a tout brulé le veil<strong>la</strong>nt! A2/v. 14). Scène VI : Il paraît que le prêtre<br />

s’est sauvé dans l’atelier: de l<strong>à</strong>, il crie <strong>à</strong> <strong>la</strong> femme de bien fermer les portes<br />

[contre le mari?], avant qu’elle ne vienne le rejoindre. Scène VII [entre cette<br />

scène et <strong>la</strong> précédente, on peut supposer une confrontation menaçante entre<br />

mari et femme]: De plus en plus agité, le prêtre demande <strong>à</strong> haute voix <strong>à</strong><br />

sa maîtresse de lui dire qu’est-ce qui se passe, et, dans un dernier espoir<br />

de se cacher dans l’atelier, il monte sur un crucifix (voici, en effet, l’unique<br />

indication scénique conservée dans les fragments: Il va en <strong>la</strong> le crucefis). La<br />

dernière scène du fragment est ponctuée des dernières paroles attribuées au<br />

rôle du prêtre, qui s’écrie par deux fois: He<strong>la</strong>s, he<strong>la</strong>s! (vv. 21, 23). Quant aux<br />

deux dernières répliques conservées sur le rollet, ce serait le mari qui parle,<br />

indiquant une volonté imp<strong>la</strong>cable. Dans <strong>la</strong> première, ne quan (v. 20), nous<br />

entendons l’expression d’un refus absolu: c’est ‘ne tant ne quant’: ‘pas du<br />

tout’, ‘absolument pas’. La seconde, ne bien (v. 22: ‘[ni . . . ,] ni bien’?), est<br />

plus énigmatique, mais <strong>la</strong>isserait entendre que l’imagier a réduit, ou réduira,<br />

sa victime <strong>à</strong> un état pitoyable, démuni de tout bonheur. Enfin, tout porte <strong>à</strong><br />

croire que le prêtre de <strong>la</strong> farce vient de subir <strong>la</strong> même humiliation physique<br />

que son sosie fablialesque.<br />

Ce qui nous frappe d’emblée, c’est que l’action de <strong>la</strong> farce est très proche<br />

de celle de notre fabliau du Prestre crucefié: elle reste d’ailleurs beaucoup<br />

40 Les trois vers du prêtre au début de ce second fragment sont <strong>la</strong>cunés. M. Runnalls<br />

n’ayant pas tenté de les compléter, nous en proposons <strong>la</strong> leçon tentative suivante: le vin<br />

gr[andira] mes ameur / Aporte [m’en, ma belle] seur / et puis [si g]erés avec moy.<br />

41 Une scène pareille se serait, peut-être, inspirée de celle du fabliau, où le mari commande<br />

<strong>à</strong> sa femme d’allumer une chandelle et de l’accompagner dans l’atelier (Le Prestre<br />

crucefié, vv. 53–59).

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