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8 Interview<br />
<strong>La</strong> <strong>Gazette</strong> - jeudi 29 novembre 2012<br />
Roland Heguy<br />
« <strong>La</strong> hausse <strong>de</strong> la TVA<br />
va tuer <strong>de</strong>s emplois »<br />
Retrouvez chaque semaine <strong>le</strong>s meil<strong>le</strong>urs<br />
moments du ren<strong>de</strong>z-vous du lundi France B<strong>le</strong>u<br />
Bourgogne – <strong>La</strong> <strong>Gazette</strong>. Lundi, Denis Guey recevait<br />
Roland Heguy, prési<strong>de</strong>nt national <strong>de</strong> l’UMIH, l’Union<br />
<strong>de</strong>s métiers et <strong>de</strong>s industries <strong>de</strong> l’hôtel<strong>le</strong>rie, qui<br />
tient son congrès national à Dijon.<br />
ENIS GUEY : Les professionnels<br />
<strong>de</strong> l’UMIH sont en colère contre<br />
l’augmentation <strong>de</strong> la TVA qui va<br />
passer <strong>de</strong> 7 à 10 % au 1er janvier 2014.<br />
Trois semaines après l’annonce faite par<br />
Jean-Marc Ayrault, vous n’avez toujours<br />
pas digéré ?<br />
ROLAND HEGUY : Nous voulons bien<br />
participer à l’effort national, mais en <strong>de</strong>ux ans<br />
on a doublé <strong>le</strong> taux <strong>de</strong> TVA <strong>de</strong> l’hôtel<strong>le</strong>rie, et<br />
dans la restauration on est passé <strong>de</strong> 7 à 10 %<br />
très rapi<strong>de</strong>ment. Or 90 % <strong>de</strong> nos entreprises<br />
ont moins <strong>de</strong> dix salariés. Et comme <strong>le</strong> crédit<br />
d’impôt repose sur la masse <strong>de</strong>s salaires, on va<br />
rencontrer <strong>de</strong> grosses difficultés.<br />
Maintenant, 7 à 10 % sur une addition<br />
<strong>de</strong> 30 euros, cela représente 90 centimes<br />
d’augmentation seu<strong>le</strong>ment. Ce n’est pas<br />
cela qui va empêcher <strong>le</strong>s gens d’al<strong>le</strong>r au<br />
restaurant.<br />
Documentation à caractère publicitaire - Crédit photo : Masterfi<strong>le</strong> - 211AMP1112<br />
D’accord, sauf qu’on est dans une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
crise, et qu’on grignote encore un peu plus <strong>de</strong><br />
pouvoir d’achat <strong>de</strong>s gens. Mais il faut raisonner<br />
autrement et penser aux petites entreprises<br />
qui n’ont pas <strong>de</strong> salariés. El<strong>le</strong>s sont toujours<br />
à hauteur <strong>de</strong> la ligne <strong>de</strong> flottaison. C’est pour<br />
el<strong>le</strong>s que c’est grave. 3 % c’est beaucoup,<br />
surtout compte tenu <strong>de</strong> l’augmentation du prix<br />
<strong>de</strong>s matières premières.<br />
Mais après la baisse <strong>de</strong> la TVA en 2009,<br />
est-ce que vous avez respecté <strong>le</strong> contrat<br />
d’avenir qui vous engageait à créer <strong>de</strong>s<br />
emplois, augmenter <strong>le</strong>s salaires, et diminuer<br />
<strong>le</strong>s prix ?<br />
À 80 %, <strong>le</strong>s engagements du contrat d’avenir<br />
ont été tenus par la profession. Bercy l’a dit !<br />
53 000 emplois ont été créés et on a renoué<br />
<strong>le</strong> dialogue social dans nos métiers. Mais<br />
pourquoi ne par<strong>le</strong>-t-on que <strong>de</strong> la restauration<br />
et pas du bâtiment par exemp<strong>le</strong> qui a aussi<br />
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On a respecté <strong>le</strong> contrat<br />
d’avenir à 80 %<br />
bénéficié d’une baisse <strong>de</strong> la TVA ? L’effort<br />
col<strong>le</strong>ctif, on est <strong>de</strong>rrière, mais mon inquiétu<strong>de</strong><br />
vient <strong>de</strong> toutes ces petites entreprises qui<br />
ont <strong>de</strong>s salariés à payer. Est-ce qu’el<strong>le</strong>s vont<br />
pouvoir <strong>le</strong> faire à la fin du mois ?<br />
Vous al<strong>le</strong>z négocier avec Sylvia Pinel, la<br />
ministre <strong>de</strong> l’Artisanat, du Commerce et du<br />
Tourisme ; quel message vous lui réservez ?<br />
On perd un café par jour en France. Pour<br />
la survie du territoire, il faut que ces petites<br />
entreprises <strong>de</strong> la ruralité que sont <strong>le</strong>s cafésrestaurants<br />
existent ! Car si el<strong>le</strong>s disparaissent<br />
c’est tout un village qui meurt. Il faut donc<br />
tout faire pour que ces entreprises continuent à<br />
créer <strong>de</strong> l’emploi.<br />
Est-ce que ça passe par un retour à une<br />
TVA moins importante que <strong>le</strong>s 10 % ?<br />
On peut imaginer toutes formes <strong>de</strong> réponse,<br />
je crois qu’il faut repenser notre approche du<br />
tourisme qui fait vivre <strong>le</strong>s entreprises. On sait<br />
que ce tourisme va s’accroître <strong>de</strong> 5 à 7 % en<br />
Europe. Il ne faut pas rester sur <strong>le</strong> côté. <strong>La</strong><br />
France est un grand pays touristique mais c’est<br />
aussi <strong>le</strong> pays où l’on dépense <strong>le</strong> moins. Nous<br />
<strong>de</strong>vons donc faire l’effort nécessaire pour que<br />
<strong>le</strong>s touristes soient confortab<strong>le</strong>ment accueillis<br />
chez nous.<br />
Mais c’est à vous <strong>le</strong>s professionnels <strong>de</strong><br />
l’UMIH <strong>de</strong> faire cet effort, pas à l’État !<br />
C’est un ensemb<strong>le</strong>. Tout <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> doit s’y<br />
mettre. Le mon<strong>de</strong> agrico<strong>le</strong>, <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
restauration-hôtel<strong>le</strong>rie, <strong>le</strong> mon<strong>de</strong> du bâtiment,<br />
<strong>le</strong>s élus locaux...<br />
Qu’est-ce que vous pensez <strong>de</strong> ces<br />
établissements en milieu rural qui<br />
renaissent <strong>de</strong> <strong>le</strong>urs cendres après avoir<br />
été rachetés par un coup<strong>le</strong> <strong>de</strong> gérants<br />
ou <strong>de</strong> propriétaires grâce aux ai<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s<br />
col<strong>le</strong>ctivités territoria<strong>le</strong>s ?<br />
C’est une catastrophe ! Parce que si <strong>le</strong>s<br />
col<strong>le</strong>ctivités mettent <strong>de</strong> l’argent public, cela<br />
veut dire qu’el<strong>le</strong>s se sont aperçues trop tard<br />
qu’il était essentiel que ces entreprises existent.<br />
Et la seu<strong>le</strong> réponse est <strong>de</strong> <strong>le</strong>s tenir en sursis<br />
avec <strong>de</strong> l’argent public. C’est impensab<strong>le</strong>. Il<br />
vaut mieux trouver <strong>de</strong>s réponses structurel<strong>le</strong>s<br />
pour conserver l’emploi.<br />
Les jeunes semb<strong>le</strong>nt <strong>de</strong> moins en moins<br />
motivés par l’hôtel<strong>le</strong>rie-restauration. Il y a<br />
une crise du recrutement ?<br />
Pas <strong>de</strong> crise en tout cas chez <strong>le</strong>s cuisiniers. On<br />
a en revanche un gros problème dans l’accueil<br />
et <strong>le</strong> service : on considère que c’est un job et<br />
pas un métier, et donc que c’est dégradant. À<br />
l’UMIH on est en train <strong>de</strong> réfléchir au moyen<br />
<strong>de</strong> tendre la main à tous ces jeunes qui se font<br />
<strong>de</strong>s idées sur <strong>le</strong> métier <strong>de</strong> serveur par exemp<strong>le</strong>.<br />
Être serveur c’est aussi <strong>de</strong> la cuisine, la cuisine<br />
du service ! Il faut être un expert du goût,<br />
aimer <strong>le</strong> client, aimer faire plaisir. En outre, on<br />
peut bien gagner sa vie en étant maître d’hôtel<br />
ou serveur ! Et on peut faire <strong>de</strong> très bel<strong>le</strong>s<br />
carrières dans la sal<strong>le</strong>.<br />
Propos recueillis par Denis Guey<br />
PHOTO ÉRIC CAPELLI