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30 Focus<br />

<strong>La</strong> <strong>Gazette</strong> - jeudi 29 novembre 2012<br />

Thomas Dutronc<br />

« Un peu anarchiste et misanthrope »<br />

Après Comme un manouche sans guitare, Thomas<br />

Dutronc revient <strong>le</strong> 5 décembre au Zénith avec<br />

<strong>de</strong> nouvel<strong>le</strong>s chansons. Histoire <strong>de</strong> casser la<br />

monotonie, il a gardé sa guitare mais a délaissé<br />

un peu <strong>le</strong> manouche.<br />

E RENDEZ-VOUS avait été calé<br />

avec <strong>le</strong> producteur <strong>de</strong> Thomas<br />

Dutronc. Lundi matin, au téléphone,<br />

la seu<strong>le</strong> consigne se résumait à envoyer un<br />

SMS quelques minutes avant, histoire <strong>de</strong><br />

ne pas <strong>le</strong> prendre par surprise. Première<br />

tentative, <strong>le</strong> téléphone sonne une fois, puis<br />

<strong>le</strong> répon<strong>de</strong>ur se résumant à un air <strong>de</strong> jazz<br />

manouche arrive. Dans la foulée, un SMS :<br />

« Ok ! Appe<strong>le</strong>z-moi à nouveau, pardon ! »<br />

signé Thomas Dutronc. « Bonjour, nous<br />

avons ren<strong>de</strong>z-vous ce matin pour une petite<br />

interview. » Réponse : « Ah bon ? Mais je<br />

ne suis pas au courant. À moins que cela<br />

me soit sorti <strong>de</strong> la tête… Mais il n’y a pas<br />

<strong>de</strong> problème. De toute façon il fallait que je<br />

me bouge. »<br />

Était-il vautré sur son canapé à gratter sa<br />

guitare histoire <strong>de</strong> se réveil<strong>le</strong>r sans avoir à<br />

ouvrir <strong>le</strong>s yeux ? Peut-être. Un grésil<strong>le</strong>ment<br />

très fort perturbe <strong>le</strong> début <strong>de</strong> la conversation :<br />

« Je branche mon kit main libre, t’inquiète<br />

pas. » Sa voix se réveil<strong>le</strong> doucement, mais<br />

<strong>le</strong>s idées sont loin d’être embrumées. Les<br />

premières questions sont très généra<strong>le</strong>s, et<br />

Thomas Dutronc enc<strong>le</strong>nche <strong>le</strong> refrain <strong>de</strong><br />

la promotion. Il fait <strong>le</strong> job, et <strong>de</strong>rrière on<br />

entend cou<strong>le</strong>r un premier café. Il semb<strong>le</strong><br />

<strong>le</strong> boire en <strong>de</strong>ux gorgées, puis reprend son<br />

discours. « L’ancien spectac<strong>le</strong> avait été<br />

fait <strong>de</strong> trois bouts <strong>de</strong> ficel<strong>le</strong>, nous avons<br />

été obligés <strong>de</strong> faire différemment… Ça ne<br />

veut pas dire que ce n’était pas bien, mais<br />

c’est vrai que pour ce <strong>de</strong>uxième album j’ai<br />

beaucoup pensé à la scène. » Cependant,<br />

ce qui a guidé sa réf<strong>le</strong>xion reste la musique<br />

et non forcément <strong>le</strong> jeu <strong>de</strong> scène, <strong>le</strong> décor,<br />

ou <strong>le</strong>s lumières. Sur la première tournée,<br />

ils étaient cinq musiciens, pour cel<strong>le</strong>-ci,<br />

ils sont sept. « Parfois ça peut faire un peu<br />

léger (cinq musiciens) mais on peut avoir<br />

besoin d’une guitare é<strong>le</strong>ctrique, ou d’une<br />

folk, d’une guitare cubaine… »<br />

<strong>La</strong> conversation continue. Sont abordés<br />

pê<strong>le</strong>-mê<strong>le</strong>, l’apport <strong>de</strong> la guitare é<strong>le</strong>ctrique<br />

et <strong>de</strong> la batterie, la composition <strong>de</strong>s textes et<br />

<strong>le</strong>ur rô<strong>le</strong> pour la scène. Il se refait cou<strong>le</strong>r un<br />

café. Puis revient naturel<strong>le</strong>ment au public :<br />

« Je ne voulais pas recommencer la même<br />

chose. On aurait trouvé cela redondant. Je<br />

fais un album en pensant davantage aux<br />

gens qui rentrent vraiment dans <strong>le</strong>s paro<strong>le</strong>s,<br />

qu’à ceux qui écoutent distraitement.<br />

J’oublie souvent que beaucoup mettent un<br />

J’aime la liberté<br />

<strong>de</strong>s manouches<br />

morceau dans <strong>le</strong>ur bagno<strong>le</strong>, et n’y prêtent<br />

pas attention. »<br />

Niveau paro<strong>le</strong>s, on retrouve une certaine<br />

marque <strong>de</strong> fabrique, très Dutronc. C’est-àdire<br />

détaché, f<strong>le</strong>gmatique, élégant, sans autre<br />

prétention que <strong>de</strong> se faire plaisir : « C’est<br />

marrant parce que <strong>le</strong>s côtés <strong>le</strong>s plus Dutronc<br />

du disque m’ont été apportés par mes<br />

copains. Enfin, c’est l’image qu’ils s’en<br />

font. Quand j’écris un texte, je ne suis pas<br />

dans une image <strong>de</strong> moi-même ! » C’est<br />

rassurant, Thomas n’est pas schizophrène !<br />

Un troisième café… et il poursuit : « Je<br />

ne voulais par rester dans cette étiquette<br />

<strong>de</strong> jazz manouche, mais c’est ma passion,<br />

et j’écoute du Django tous <strong>le</strong>s jours ! »<br />

D’ail<strong>le</strong>urs, il suffit <strong>de</strong> par<strong>le</strong>r avec<br />

quelques gitans pour comprendre qu’ils<br />

cachent diffici<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>ur fierté <strong>de</strong> voir<br />

un gadjo (non gitan) s’amouracher <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur<br />

musique. Il fait presque partie <strong>de</strong> <strong>le</strong>ur<br />

famil<strong>le</strong>. Un manouche, mais sans caravane.<br />

Thomas Dutronc est <strong>de</strong>venu quasiment un<br />

ambassa<strong>de</strong>ur du mon<strong>de</strong> gitan, « je me sens<br />

un peu comme eux »… Puis il commence<br />

à par<strong>le</strong>r un peu politique. Pas la logique<br />

<strong>de</strong>s partis, mais plus un positionnement par<br />

rapport au mon<strong>de</strong> qui l’entoure : « L’autre<br />

jour, j’ai croisé <strong>de</strong>s gens du gouvernement.<br />

C’était sympa. Je <strong>le</strong>ur ai dit que je me sens<br />

<strong>de</strong> gauche, mais en même temps, je suis un<br />

peu anarchiste et misanthrope. Ce n’est pas<br />

évi<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> tout concilier… C’est pour ça<br />

que j’aime la liberté <strong>de</strong>s manouches, <strong>le</strong> fait<br />

<strong>de</strong> ne pas vouloir être un <strong>numéro</strong>, d’être<br />

sage, <strong>de</strong> rentrer dans <strong>le</strong> rang… J’aime la<br />

liberté. Je ne suis pas sociologue du mon<strong>de</strong><br />

manouche, mais j’ai beaucoup d’amis chez<br />

eux. Ce que je sais c’est qu’ils n’ont pas un<br />

esprit étroit. Chez eux c’est la fête, l’amitié,<br />

la générosité. En plus, la musique a un côté<br />

sacré, et quand ils jouent ils ne pensent pas<br />

à eux. »<br />

Thomas Dutronc s’arrête. Son téléphone lui<br />

signa<strong>le</strong> un doub<strong>le</strong> appel. Il ne répond pas<br />

tout <strong>de</strong> suite. L’interview est terminée, mais<br />

il continue à par<strong>le</strong>r musique, manouches, et<br />

guitare pendant quelques minutes .<br />

Jérémie Demay<br />

jeremie@gazette-cotedor.fr<br />

PHOTO DR

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