Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie
Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie
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12<br />
LIVRES<br />
■ CLINIQUE<br />
Schizophrénie : l’annonce<br />
du diagnostic<br />
Arnaud Cherrier et Jérôme<br />
Palazzolo<br />
Editions in Press, 12 €<br />
La délivrance d’un diagnostic, notamment<br />
<strong>de</strong> schizophrénie, ne peut<br />
s’effectuer <strong>de</strong> manière irréfléchie. Une<br />
communication pleinement mesurée<br />
s’avère profitable au patient comme<br />
à son entourage et permet d’améliorer,<br />
à la fois, la conscience <strong>de</strong> la<br />
maladie, l’observance du traitement<br />
et la qualité <strong>de</strong> la relation thérapeutique.<br />
Cet ouvrage fait le point sur la question<br />
sous les angles juridique, clinique<br />
et relationnel.<br />
Les phénomènes<br />
d’autoscopie<br />
L’hallucination <strong>de</strong> soi-même<br />
Paul Sollier<br />
Avant-propos <strong>de</strong> Jacques<br />
Chazaud<br />
L’Harmattan, 16 €<br />
Paul Sollier, psychiatre à la jonction<br />
<strong>de</strong>s XIX e et XX e siècles, a été mé<strong>de</strong>cin<br />
au Sanatorium <strong>de</strong> Boulogne-sur-<br />
Mer, Professeur à l’Université nouvelle<br />
<strong>de</strong> Bruxelles et Professeur à<br />
l’Institut <strong>de</strong>s Hautes étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Belgique.<br />
Auteur <strong>de</strong> nombreux ouvrages<br />
<strong>de</strong> psychopathologie sur l’idiotie, l’alcoolisme,<br />
la morphinomanie, la mémoire,<br />
il a été célèbre par son Gui<strong>de</strong><br />
pratique <strong>de</strong>s maladies mentales (Masson,<br />
1893, repris plus tard avec Courbon<br />
sous le titre <strong>de</strong> Pratique sémiologique<br />
<strong>de</strong>s maladies mentales) et<br />
surtout par ses recherches sur la Genèse<br />
et nature <strong>de</strong> l’hystérie (Alcan,<br />
1897) et par son étu<strong>de</strong> sur L’Hystérie<br />
et son traitement partie, chez le même<br />
éditeur, <strong>de</strong>ux ans avant le présent<br />
ouvrage. Quand le sujet d’une confrontation<br />
avec son double <strong>de</strong>vient ainsi<br />
sujet d’une hallucination <strong>de</strong> soi-même,<br />
c’est sous une forme positive : l’autoscopie.<br />
Il existe pourtant une forme<br />
négative <strong>de</strong> l’hallucination : celle <strong>de</strong><br />
l’imperception <strong>de</strong> Soi au miroir. Ces<br />
<strong>de</strong>ux variétés, outre leur existence<br />
consacrée en psychiatrie, ont connu<br />
un <strong>de</strong>stin littéraire.<br />
Paul Sollier, à côté <strong>de</strong> ces formes canoniques,<br />
en rapport avec la pathologie<br />
<strong>de</strong> l’« extériorisation » <strong>de</strong> l’image<br />
<strong>de</strong> notre corps, a isolé une autoscopie<br />
interne lors <strong>de</strong>s états hypno-hystériques.<br />
Cette possibilité, chez les<br />
« vigilambules », d’une représentation<br />
<strong>de</strong>s organes internes objectivant au<br />
<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> Soi les impressions qu’ils<br />
envoient à l’écorce cérébrale est, le<br />
plus souvent, restée l’objet d’un scepticisme<br />
critique. Selon leur inventeur,<br />
elle ouvre pourtant « <strong>de</strong>s horizons nouveaux<br />
sur l’inconscient d’abord, et ensuite<br />
sur les mécanismes <strong>de</strong>s fonctions<br />
psychiques. Ils éclairent tout particulièrement<br />
les conditions <strong>de</strong> la conscience<br />
normale et <strong>de</strong> la suggestion ».<br />
Les données neuro-psychologiques<br />
paraissent en mesure <strong>de</strong> justifier, au<br />
moins dans certaines limites, ces<br />
observations.<br />
Le diagnostic en<br />
psychiatrie : questions<br />
éthiques<br />
Congrès <strong>de</strong> psychiatrie et <strong>de</strong><br />
neurologie <strong>de</strong> langue française<br />
Anne Danion-Grilliat<br />
Masson<br />
Les auteurs interrogent plus particulièrement<br />
le spécificité du diagnostic<br />
<strong>de</strong> psychiatrie (poser, transmettre et<br />
recevoir un diagnostic) : sont, entre<br />
autres, abordés le rôle <strong>de</strong>s références<br />
théoriques du psychiatre, l’annonce<br />
du diagnostic <strong>de</strong> pathologies graves<br />
(telles que la schizophrénie ou<br />
l’autisme), le <strong>de</strong>voir d’information, la<br />
prise en charge en réseau et le secret<br />
partagé.<br />
La question <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité<br />
est une question qui ne se pose<br />
pas normalement ; c’est-à-dire que le<br />
sentiment d’i<strong>de</strong>ntité apparaît comme<br />
une certitu<strong>de</strong> intime imprégnant tout<br />
vécu, <strong>de</strong> la sorte que sa mise en doute<br />
n’est ni naturelle, ni spontanée. Le mot<br />
d’i<strong>de</strong>ntité sera prononcé pour la première<br />
fois par Locke. Il fon<strong>de</strong> cette<br />
notion sur la permanence <strong>de</strong> l’organisme<br />
dans le changement matériel : la<br />
continuité du vécu est à l’origine <strong>de</strong> la<br />
conscience <strong>de</strong> soi, avec pour substrat la<br />
mémoire qui permet <strong>de</strong> récupérer ce<br />
vécu comme étant le nôtre. « Aussi loin<br />
que cette conscience peut s’étendre sur les<br />
actions et les pensées déjà passées, aussi<br />
loin s’étend l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> cette personne.<br />
C’est par là que chacun est à lui-même<br />
ce qu’il appelle soi-même » (7).<br />
Le corps apparaît comme le lieu privilégié<br />
où s’inscrit l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> l’individu<br />
dans sa singularité. Merleau-Ponty<br />
considérait le corps comme la structure<br />
stabilisée <strong>de</strong> l’existence, « lieu d’appropriation<br />
du mon<strong>de</strong> » (8). Lui-même<br />
objet particulier en se confondant avec<br />
le sujet, il est ce par quoi il y a <strong>de</strong>s<br />
objets. Il confère l’expérience à l’être<br />
en le faisant naître au mon<strong>de</strong>. Il est<br />
doublement support <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, en<br />
le liant d’une part au sujet qui le ressent<br />
comme sien, et d’autre part à autrui<br />
qui le reconnaît comme celui du sujet.<br />
La maladie psychique vient mettre en<br />
question ce sentiment d’i<strong>de</strong>ntité en particulier<br />
dans la psychose dont le nœud<br />
s’articule autour <strong>de</strong> cette question fondamentale<br />
<strong>de</strong> l’origine, la problématique<br />
psychotique étant avant tout celle<br />
« d’être quelqu’un ». Le signe du miroir<br />
initialement décrit par Abély et Delmas<br />
dans la fin <strong>de</strong>s années 1920 en<br />
tant que symptôme précoce <strong>de</strong> la schizophrénie<br />
en est l’illustration (1, 3). Ce<br />
trouble <strong>de</strong> l’image <strong>de</strong> soi se caractérise<br />
par une observation répétée et scrupuleuse<br />
<strong>de</strong> son propre visage dans la<br />
glace, comme si le sujet ne se reconnaissait<br />
pas, s’accompagnant <strong>de</strong> réactions<br />
affectives diverses <strong>de</strong>vant le miroir,<br />
et volontiers niée par le patient.<br />
Après un retour sur le cadre théorique<br />
du signe du miroir, nous nous sommes<br />
intéressés à une approche expérimen-<br />
COLLEGE DE PSYCHIATRIE<br />
tale <strong>de</strong> ce « curieux symptôme » tel que<br />
le qualifiait Abély (1), avec l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
la reconnaissance <strong>de</strong> son propre visage<br />
chez <strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets<br />
schizophrènes en tentant d’objectiver ce<br />
symptôme clinique ou du moins d’en<br />
préciser les soubassements cognitifs.<br />
En effet peu d’étu<strong>de</strong>s ont abordé ce<br />
trouble : l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong><br />
son propre visage a essentiellement été<br />
réalisée chez <strong>de</strong>s sujets sains (6), alors<br />
que plusieurs étu<strong>de</strong>s se sont intéressées<br />
à l’exploration du traitement <strong>de</strong>s<br />
visages et à la mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s<br />
déficits <strong>de</strong> ce traitement chez le patient<br />
schizophrène, mais aucune précisément<br />
à celle <strong>de</strong> son propre visage ; c’est ainsi<br />
qu’ont été mis en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s déficits<br />
dans les stratégies <strong>de</strong> recherche qui<br />
sous-ten<strong>de</strong>nt la perception <strong>de</strong>s<br />
visages (10), dans la perception globale<br />
<strong>de</strong>s émotions faciales (9), alors que le<br />
signe du miroir a déjà été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />
dans une étu<strong>de</strong> précé<strong>de</strong>nte (4),<br />
bien qu’elle se soit intéressée à une<br />
approche purement clinique.<br />
Description clinique du<br />
signe du miroir<br />
Abély définira le signe du miroir<br />
comme un « besoin qu’ont certains sujets<br />
<strong>de</strong> s’examiner longuement et fréquemment<br />
<strong>de</strong>vant une surface réfléchissante<br />
» (1), ce symptôme se manifestant<br />
avec une gran<strong>de</strong> fréquence à la phase<br />
<strong>de</strong> début <strong>de</strong> la démence précoce. Cette<br />
auto-inspection concerne essentiellement<br />
leur visage mais peut aussi intéresser<br />
l’ensemble <strong>de</strong> leur corps. Il serait<br />
LES MERCREDIS DE HENRI EY 2006/2007<br />
15 avenue <strong>de</strong> la Porte <strong>de</strong> Choisy - 75013 PARIS<br />
Les premiers mercredis <strong>de</strong> chaque mois à partir du 4 octobre 2006<br />
Salle <strong>de</strong>s conférences : 21 h - 22 h 30<br />
(Entrée libre, inscription sur place)<br />
Déclenchement, xénopathie, suppléance<br />
Questions cliniques<br />
Modalités du lien à l’Autre dans les psychoses<br />
Lors du déclenchement <strong>de</strong> la psychose, la xénopathie dévoile la vérité du lien que<br />
le sujet entretient avec l’Autre. Les aliénistes et les psychiatres classiques s’en<br />
étaient préoccupés avec les questions <strong>de</strong> lieu et <strong>de</strong> nosographie posées par la<br />
clinique. Dans ce lien à l’Autre, <strong>de</strong>s suppléances parfois reconnues socialement<br />
ou <strong>de</strong>s inventions plus singulières sont à l’œuvre dans un travail <strong>de</strong> restauration<br />
nécessaire à la survie du sujet. La clinique peut en être alors revisitée. Leurs<br />
lectures, à partir d’observations cliniques, orienteront un travail qui concerne<br />
nos pratiques professionnelles.<br />
Mercredi 4 octobre : Le concept <strong>de</strong> xénopathie dans la psychiatrie<br />
Introduction du séminaire par : Dr Michel DAUDIN, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux,<br />
Dr Clau<strong>de</strong> JEANGIRARD, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux, Fondateur du Collège <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>.<br />
Mercredi 6 décembre : Modalités du lien à l’Autre dans les Psychoses<br />
Dr Michel DAUDIN, Psychiatre, Hôpital Henri Ey<br />
Mercredi 7 février : Le dualisme schrébérien, Dr Michel JEANVOINE, Psychiatre,<br />
Psychanalyste<br />
Mercredi 7 mars : Xénopathie et transfert <strong>de</strong>s lieux dans les Mémoires du<br />
Prési<strong>de</strong>nt SCHREBER, M. Jorge CACHO, Psychologue<br />
Mercredi 4 avril : Xénopathie et érotomanie, Dr Nicole ANQUETIL, Psychiatre,<br />
Psychanalyste<br />
Mercredi 2 mai : Sur le cas Aimée, Dr Gilles DELAPORTE, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />
Hôpitaux<br />
Mercredi 6 juin : Vignettes cliniques, Dr Françoise BLANADET, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />
Hôpitaux<br />
LE CALENDRIER DES REUNIONS SERA ETABLI TRIMESTRIELLEMENT<br />
Dr ANQUETIL, (01 45 49 95 32/nicole.anquetil@free.fr) - Dr DAUDIN Hôpital Henri Ey<br />
(01 69 25 43. 90/ secretariat-75gO5@gpspv.fr) -Dr JEANVOINE (01 40 26 47 12/ mjeanv@noos.fr)<br />
Une approche<br />
expérimentale du signe<br />
du miroir : la question <strong>de</strong> la<br />
reconnaissance <strong>de</strong> son propre<br />
visage dans la schizophrénie<br />
contemporain <strong>de</strong>s premiers troubles,<br />
d’apparition insidieuse, associé à<br />
d’autres symptômes peu bruyants bien<br />
que caractéristiques : bizarrerie, indifférence,<br />
automatismes.<br />
Cette tendance commune <strong>de</strong> certains<br />
sujets à contempler leur visage <strong>de</strong>vant<br />
un miroir s’accompagne toutefois <strong>de</strong><br />
manifestations variables face à leur<br />
propre reflet. Un premier comportement<br />
est celui d’un examen attentif <strong>de</strong><br />
son image : ce n’est pas un simple<br />
regard furtif dans une glace mais une<br />
véritable inspection à laquelle le patient<br />
se livre ; il s’approche au plus près <strong>de</strong> la<br />
glace, quasiment à son contact, « recherchant<br />
un point minuscule sur la peau<br />
<strong>de</strong> son visage » (3). L’examen se fait en<br />
général selon différents points <strong>de</strong> vue,<br />
<strong>de</strong> face, <strong>de</strong> profil. Le sujet s’adonne à<br />
<strong>de</strong>s mimiques variées, « fronçant et<br />
défronçant les sourcils, plissant et déplissant<br />
le front, gonflant et dégonflant les<br />
joues, faisant la moue avec les lèvres » (3).<br />
L’inspection visuelle sera complétée<br />
par celle du toucher, en modifiant les<br />
traits <strong>de</strong> son visage à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa main<br />
en les tirant, les aplatissant et les frottant.<br />
Cette auto-observation sera répétée<br />
à plusieurs reprises, le sujet passant<br />
<strong>de</strong> longs moments <strong>de</strong>vant sa glace, à la<br />
recherche méticuleuse <strong>de</strong> détails physiques,<br />
parfois avec un certain étonnement,<br />
comme si ce n’était pas lui. « On<br />
dirait, quand il se regar<strong>de</strong>, qu’il est étonné,<br />
qu’il ne se reconnaît pas » (1).<br />
La contemplation <strong>de</strong> son propre visage<br />
ne s’accompagne parfois d’aucun affect,<br />
le sujet manifestant une indifférence<br />
froi<strong>de</strong> face à son image. Au contraire,<br />
certains patients présenteront <strong>de</strong>s réactions<br />
affectives intenses, s’amusant <strong>de</strong><br />
leur reflet, riant voire parlant à leur<br />
miroir. Une véritable mise en scène<br />
<strong>de</strong>vant la glace sera jouée, le sujet parlant<br />
à sa propre image, faisant les questions<br />
et les réponses, entretenant même<br />
<strong>de</strong>s propos amoureux à son reflet, jusqu’à<br />
avoir <strong>de</strong>s comportements d’onanisme<br />
face à leur miroir (1).<br />
Diverses tentatives<br />
d’interprétation<br />
Historiquement, Delmas appréhendait<br />
ce symptôme comme la manifestation<br />
d’un acte impulsif, arbitraire, n’ayant<br />
d’autre sens que lui-même (soit celle<br />
<strong>de</strong> sa réalisation motrice), posé par un<br />
sujet chez qui la notion <strong>de</strong> signifiant<br />
n’a pas <strong>de</strong> place. L’agir est sans finalité,<br />
l’acte sans <strong>de</strong>stinataire, la dialectique<br />
n’est plus possible, l’autre n’existe pas.<br />
Abély voyait dans cet acte la réponse à<br />
un vécu d’étrangeté, voire <strong>de</strong> dépersonnalisation<br />
par <strong>de</strong>s sujets envahis par<br />
la maladie psychique. Les assises <strong>de</strong><br />
leur i<strong>de</strong>ntité vacillent <strong>de</strong> par la transformation<br />
<strong>de</strong> leur personnalité, avec<br />
l’irruption du processus morbi<strong>de</strong> dans<br />
leur fonctionnement psychique, générant<br />
un sentiment d’inquiétu<strong>de</strong>, qui luimême<br />
dicte au sujet un contrôle <strong>de</strong><br />
son i<strong>de</strong>ntité par une vérification <strong>de</strong> son<br />
propre visage, tentative <strong>de</strong> réassurance<br />
du sujet <strong>de</strong> son intégrité. Mais cette<br />
auto inspection viserait aussi la<br />
recherche <strong>de</strong> détails physiques qui<br />
témoigneraient du changement intime<br />
survenant en eux, et rendraient compte<br />
alors <strong>de</strong> leur vécu d’étrangeté. Il<br />
considérait également que le terrain<br />
<strong>de</strong> ce « curieux symptôme » était celui<br />
<strong>de</strong> l’hébéphrénie, et comprenait cette<br />
manifestation comme celle <strong>de</strong> la<br />
dimension autistique <strong>de</strong> la démence<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
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précoce. Le sujet « trouve dans sa propre<br />
image un interlocuteur docile et muet<br />
qui favorise son évasion imaginative » (1).<br />
La faillite <strong>de</strong> la relation interpersonnelle<br />
trouve sa solution dans la reconstruction<br />
délirante d’un dialogue entre<br />
un sujet et son image, matérialisation<br />
du discours intérieur du patient. L’incapacité<br />
à la relation sociale du schizophrène<br />
est singée dans le signe du<br />
miroir où le sujet recrée un espace relationnel<br />
replié sur lui-même.<br />
Actuellement, il est appréhendé comme<br />
une méconnaissance délirante d’i<strong>de</strong>ntité<br />
appartenant au registre <strong>de</strong>s délires<br />
d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes (5), tels<br />
que le syndrome <strong>de</strong> Capgras ou l’illusion<br />
<strong>de</strong> Frégoli, relevant d’une hypo<br />
i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> son visage. Il partage<br />
en effet <strong>de</strong>s traits communs aux délires<br />
d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes, <strong>de</strong> par sa<br />
sélectivité (il concerne essentiellement<br />
le visage du sujet), d’une composante<br />
<strong>de</strong> dissociation (persistance d’informations<br />
concernant son i<strong>de</strong>ntité), son vécu<br />
d’étrangeté, l’existence <strong>de</strong> détails physiques<br />
différenciateurs, bien que le<br />
patient n’aboutisse pas à la conviction<br />
d’un double usurpant son i<strong>de</strong>ntité.<br />
Quoiqu’il en soit le signe du miroir<br />
apparaît comme la manifestation <strong>de</strong> la<br />
difficulté du sujet psychotique à rester<br />
i<strong>de</strong>ntique à lui-même bien qu’il soit<br />
<strong>de</strong>venu radicalement un autre par le<br />
processus morbi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la maladie psychique.<br />
Approche<br />
expérimentale<br />
Elle a consisté en l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />
<strong>de</strong> son propre visage chez<br />
<strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets schizophrènes<br />
en s’appuyant sur <strong>de</strong>s données<br />
comportementales (temps <strong>de</strong><br />
réponse, seuil <strong>de</strong> discrimination). Deux<br />
groupes <strong>de</strong> sujets appariés pour les<br />
variables d’âge et <strong>de</strong> genre ont été évalués,<br />
un groupe témoin (dix sujets) et<br />
un groupe schizophrène (neuf sujets).<br />
Le protocole s’articulait autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
conditions expérimentales : l’une implicite,<br />
avec une tâche <strong>de</strong> discrimination<br />
<strong>de</strong> la forme du visage (à choix forcé :<br />
rond ou ovale), et l’autre explicite, avec<br />
une tâche <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> son<br />
i<strong>de</strong>ntité. Il reposait sur un procédé informatique<br />
<strong>de</strong> morphing, avec la présentation<br />
<strong>de</strong> mélanges, <strong>de</strong> combinaisons<br />
<strong>de</strong> visages entre trois catégories (visage<br />
propre du sujet, visages familiers et<br />
inconnus) avec <strong>de</strong>s proportions respectives<br />
différentes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux catégories<br />
<strong>de</strong> visages impliquées : 20/80,<br />
40/60, 60/40, 80/20 ; ces combinaisons<br />
étaient présentées dans trois ordres<br />
différents, croissant (où les morphings<br />
étaient présentés dans le sens d’une<br />
augmentation du pourcentage du visage<br />
propre du sujet au sein <strong>de</strong> la combinaison),<br />
décroissant (dans le sens<br />
d’une diminution <strong>de</strong> ce même pourcentage)<br />
et aléatoire.<br />
Il a, tout d’abord, été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />
au sein <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux populations un traitement<br />
plus rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />
<strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité (traitement synthétique)<br />
par rapport à celui <strong>de</strong> la<br />
discrimination <strong>de</strong> la forme du visage<br />
(traitement analytique), corroborant le<br />
modèle <strong>de</strong> Bruce & Young (2), où le<br />
traitement <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité d’un visage<br />
apparaît plus direct que celui faisant<br />
appel à un traitement analytique. Des<br />
déficits quantitatifs dans le traitement<br />
<strong>de</strong>s visages ont été objectivés chez le