Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie
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■ ENTRETIEN<br />
LIVRES ET REVUES<br />
Les représentations sociales<br />
<strong>de</strong> la schizophrénie<br />
Congrès <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> et <strong>de</strong><br />
Neurologie <strong>de</strong> langue Française<br />
Frantz-Samy Kohl<br />
Masson<br />
Cet ouvrage présente une synthèse<br />
sur les représentations sociales (origines,<br />
facteurs, impacts, etc.) <strong>de</strong> la<br />
schizophrénie. Sont ainsi abordés le<br />
concept <strong>de</strong> représentation sociale en<br />
insistant sur le double ancrage individuel<br />
et collectif, puis la représentation<br />
sociale <strong>de</strong> la maladie en général,<br />
les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recherches utilisées<br />
pour saisir leur contenu et leur<br />
organisation, ainsi que leur évolution.<br />
L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s représentations sociales<br />
<strong>de</strong> la maladie mentale et <strong>de</strong> la schizophrénie<br />
met en évi<strong>de</strong>nce les conséquences<br />
psychologiques et sociales<br />
qu’elles ont sur le patient et leur famille,<br />
la manière dont elles interviennent<br />
dans l’évolution <strong>de</strong> la maladie,<br />
dans le recours au soin, dans<br />
la compliance thérapeutique et l’insertion<br />
sociale <strong>de</strong>s patients.<br />
Enfant surdoué, adulte<br />
créateur ?<br />
Pélagie Papoutsaki<br />
L’Harmattan, 25,50 €<br />
Cet ouvrage met en relation l’autonomie<br />
tout à fait particulière du créateur<br />
avec celle <strong>de</strong> l’enfant surdoué,<br />
traite le processus créatif, et cherche<br />
une enfance <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier chez l’enfant<br />
surdoué. Les expectatives et exigences<br />
du conformisme socialement<br />
valorisé obligent cependant l’enfant<br />
surdoué <strong>de</strong> renoncer à ce qui est au<br />
coeur <strong>de</strong> son surdouement (l’autonomie<br />
processus créatif) pour appartenir<br />
au social dont il est dépendant,<br />
ou s’impliquer dans une lutte<br />
sans issue pour maintenir autonomie<br />
et appartenance. Une pédagogie/<br />
éducation pour surdoués exige <strong>de</strong>s<br />
sociétés ouvertes au différent et la<br />
délibération <strong>de</strong>s conceptions déterministes<br />
ou <strong>de</strong>scriptives du surdouement.<br />
Problématiques<br />
psychiatriques<br />
Sud/Nord n°21<br />
Erès, 19 €<br />
Devant l’intérêt suscité par les <strong>de</strong>ux<br />
<strong>de</strong>rniers numéros traitant plus particulièrement<br />
<strong>de</strong> certains aspects <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie (« Politique et psychiatrie »<br />
et « Pouvoirs »), ce numéro rassemble<br />
plusieurs textes réunis après les journées<br />
<strong>de</strong> psychiatrie <strong>de</strong> Dax <strong>de</strong> 1999,<br />
2001 et 2003, journées auxquelles<br />
pratiquement tous les membres du<br />
comité <strong>de</strong> rédaction ont participé <strong>de</strong><br />
manière régulière ou occasionnelle.<br />
La psychiatrie, dans ses théories, dans<br />
ses pratiques, dans ses objectifs et<br />
dans ses mo<strong>de</strong>s d’organisation, n’est<br />
pas étrangère aux idéologies et à<br />
leurs retombées concrètes dans la vie<br />
<strong>de</strong>s gens, même si ces acteurs s’en<br />
défen<strong>de</strong>nt souvent, soit en se retranchant<br />
<strong>de</strong>rrière la prétendue rigoureuse<br />
scientificité <strong>de</strong> leur discipline,<br />
soit en se réclamant d’une<br />
ineffable spécificité ou d’un savoir<br />
sans égal. De ce fait, la psychiatrie,<br />
comme toute activité humaine est<br />
problématique.<br />
C’est donc <strong>de</strong> certaines <strong>de</strong> ces problématiques<br />
psychiatriques qu’est fait<br />
ce vingt et unième numéro <strong>de</strong> Sud/<br />
Nord : les rapports plus ou moins distants,<br />
plus ou moins conflictuels, <strong>de</strong><br />
la mé<strong>de</strong>cine et <strong>de</strong> la psychiatrie, l’organisation<br />
actuelle <strong>de</strong> la psychiatrie<br />
(particulièrement en France et au Portugal)<br />
et la question <strong>de</strong> la violence<br />
qui agite, aujourd’hui comme hier, le<br />
mon<strong>de</strong> dans lequel nous vivons.<br />
<br />
civilisatrice » du PMSI. Certes, il peut<br />
être utile dans certaines circonstances<br />
<strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s intersectorialités<br />
lorsque les moyens nécessaires sont<br />
bien supérieurs aux disponibilités <strong>de</strong><br />
chaque secteur <strong>de</strong> psychiatrie, par<br />
exemple les unités mères-bébés, ou<br />
les hospitalisations à temps complet<br />
en pédopsychiatrie, mais quand il s’agit<br />
<strong>de</strong> choisir, en antagonisme parfait avec<br />
la sectorisation, les seuls patients dont<br />
on souhaite s’occuper et s’en décréter<br />
le spécialiste local, départemental ou<br />
régional, les conséquences en sont aussitôt<br />
incalculables : rigidification <strong>de</strong>s<br />
symptômes d’entrée dans la nouvelle<br />
structure, rejet <strong>de</strong>s patients qui n’appartiennent<br />
pas à sa sur-spécialité<br />
(« Casse toi, t’es pas <strong>de</strong> ma ban<strong>de</strong> ! »),<br />
tendance à la standardisation <strong>de</strong>s diagnostics<br />
et <strong>de</strong>s thérapeutiques sous<br />
couvert <strong>de</strong>s consensus autorisés par<br />
les statistiques... On n’est plus dès lors<br />
dans une logique d’accueil <strong>de</strong> tous les<br />
patients du secteur dont j’ai la charge,<br />
présentant une souffrance psychique<br />
et dont on va <strong>de</strong>voir s’occuper<br />
pour qu’il aille mieux, ce qui<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> moyens<br />
humains, on est dans une autre<br />
logique, celle <strong>de</strong> choisir les patients<br />
permis pour sa structure <strong>de</strong> référence,<br />
ce qui peut aisément être « contingenté<br />
» sur le plan budgétaire. Or la<br />
psychiatrie, si elle est évi<strong>de</strong>mment une<br />
branche <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine comme les<br />
autres, possè<strong>de</strong> cependant quelques<br />
spécificités incontournables sous peine<br />
<strong>de</strong> retour massif aux pratiques<br />
anciennes. La psychiatrie <strong>de</strong> secteur,<br />
on l’oublie souvent est un dispositif<br />
<strong>de</strong> navigation sur l’océan <strong>de</strong> la folie<br />
qui a été créé par ceux qui en avaient<br />
inventé la boussole méthodique, les<br />
fondateurs <strong>de</strong> la psychothérapie institutionnelle<br />
(Tosquelles, Daumézon,<br />
Bonnafé,...). Ces pionniers avaient ru<strong>de</strong>ment<br />
critiqué les phénomènes asilaires<br />
et abouti à la notion <strong>de</strong> sectorisation<br />
pour proposer une alternative à une<br />
psychiatrie qui ne prenait pas en compte<br />
le sujet, et la relation transférentielle<br />
qu’il instaure avec ceux qui s’occupent<br />
<strong>de</strong> lui. La nécessité <strong>de</strong> la prise en<br />
compte <strong>de</strong> la continuité <strong>de</strong>s soins est la<br />
traduction en langage administratif <strong>de</strong><br />
ce qui est utile pour tenir compte <strong>de</strong> la<br />
relation <strong>de</strong> transfert dans le traitement<br />
<strong>de</strong> la maladie mentale dans la durée.<br />
Aujourd’hui, nous en revenons à une<br />
psychiatrie <strong>de</strong>s comportements, une<br />
psychiatrie sans transfert, et je vous<br />
l’annonce, nous retournons inévitablement<br />
vers (dans le) les murs <strong>de</strong> l’asile<br />
! Ils ne se présenteront peut-être pas<br />
comme auparavant, encore que le projet<br />
<strong>de</strong> prévention <strong>de</strong> la délinquance<br />
peut nous le faire craindre tant la<br />
dimension répressive y est omniprésente,<br />
mais probablement plus sous la<br />
forme <strong>de</strong> multiples asiles périphériques<br />
dans les maisons <strong>de</strong> retraite, les MAS,<br />
les services <strong>de</strong> « sûreté » psychiatriques<br />
départementaux, bref, tous les établissements<br />
qui acceptent d’accueillir la<br />
misère humaine la plus difficile à<br />
prendre en charge parce qu’elle nécessite<br />
<strong>de</strong>s interventions multiples, et l’asile<br />
commence quand un seul intervenant<br />
prétend apporter l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
solutions à une personne. Problème<br />
supplémentaire, celui <strong>de</strong> la raréfaction<br />
progressive <strong>de</strong>s psychiatres en formation,<br />
alors que nous le dénonçons<br />
après l’avoir prévu <strong>de</strong>puis au moins<br />
vingt ans. Il nous faudra attendre encore<br />
dix à quinze ans pour que les postes<br />
créés soient pourvus par <strong>de</strong>s personnes<br />
qualifiées. D’ici là, beaucoup <strong>de</strong> nos<br />
jeunes collègues ne passeront même<br />
plus dans <strong>de</strong>s services sectorisés et ne<br />
seront pas formés dans ce sens, en raison<br />
du fait que la sectorisation apparaît<br />
trop souvent comme dépassée. Mon<br />
parcours <strong>de</strong> psychiatre <strong>de</strong> secteur avant<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir psychiatre universitaire m’a<br />
prémuni contre cet oubli fâcheux et<br />
je crois indispensable aujourd’hui <strong>de</strong><br />
parler et d’enseigner la sectorisation<br />
et la psychothérapie institutionnelle<br />
pour toutes ces raisons fondamentales.<br />
C’est pourquoi, non seulement j’ai écrit<br />
cet ouvrage sur le soin à la personne<br />
psychotique, mais aussi créé <strong>de</strong>puis, à<br />
la Faculté <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong> Lille, un<br />
Diplôme Universitaire <strong>de</strong> Psychothérapie<br />
Institutionnelle sur <strong>de</strong>ux ans<br />
(auquel sont déjà inscrites soixantedix<br />
personnes venues <strong>de</strong> toute la France<br />
(1)).<br />
M. S.-C. : Un <strong>de</strong>s aspects très attachant<br />
<strong>de</strong> votre ouvrage est qu’il s’ancre au plus<br />
près <strong>de</strong>s pratiques locales. Vous semblez<br />
connaître un nombre impressionnant <strong>de</strong><br />
praticiens et vouloir les citer tous. Comment<br />
y êtes vous arrivé ?<br />
P.D. : Je crois profondément à l’expérience<br />
<strong>de</strong> la rencontre entre les êtres<br />
humains. Lorsque ces rencontres peu-<br />
vent êtres relatées d’une façon vivante,<br />
elles permettent à ceux qui les lisent<br />
et les enten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> les harmoniser à<br />
leur tempérament, au sens <strong>de</strong> la<br />
musique, et d’en faire quelque chose<br />
dans leur propre trajectoire vitale. C’est<br />
un peu comme les Cinq psychanalyses<br />
écrites par Freud (à qui je propose<br />
d’ailleurs dans mon ouvrage <strong>de</strong> figurer<br />
parmi les pères fondateurs <strong>de</strong> la<br />
psychothérapie institutionnelle ; rappelez<br />
vous son discours <strong>de</strong> Budapest<br />
en 1918) qui ne peuvent résumer à<br />
elles seules toute la psychanalyse. Il<br />
n’est pas possible <strong>de</strong> les réduire à un<br />
seul cas exemplaire : chaque sujet est<br />
unique et chaque manière <strong>de</strong> le<br />
prendre en compte est également<br />
unique. C’est ce que nous enseigne<br />
Saint-Exupéry quand il écrit : « Tu seras<br />
pour moi unique au mon<strong>de</strong> » (dit le<br />
renard au petit prince à qui il est en<br />
train d’expliquer l’apprivoisement<br />
comme modèle <strong>de</strong> la relation transférentielle).<br />
Comment peut-on penser,<br />
lorsqu’on fait ce métier, qu’un traitement<br />
pourrait être standard ? Bien sûr<br />
les doses <strong>de</strong> neuroleptiques peuvent<br />
être standardisées en fonction du poids,<br />
mais le travail psychothérapique le<br />
peut-il ? Non, bien entendu. C’est<br />
d’ailleurs une <strong>de</strong> nos gran<strong>de</strong>s difficultés<br />
avec l’évaluation. Mais j’espère que<br />
nous y trouverons <strong>de</strong>s réponses pertinentes.<br />
Toujours est-il que dans ma<br />
formation j’ai eu la chance <strong>de</strong> rencontrer<br />
un grand nombre <strong>de</strong> gens qui<br />
m’ont accueilli et qui ont accepté <strong>de</strong><br />
partager leurs expériences subjectives<br />
avec moi, au moins pour une part, et à<br />
partir <strong>de</strong> là, j’ai eu l’idée que je <strong>de</strong>vais<br />
à mes collègues et à ceux que je dois<br />
former, <strong>de</strong> transmettre l’expérience <strong>de</strong><br />
ces maîtres. C’est pourquoi, à chaque<br />
fois que c’est possible j’essaye <strong>de</strong> rendre<br />
à César ce qui est à César et aux praticiens<br />
<strong>de</strong> la Psychothérapie Institutionnelle<br />
ce qui leur est arrivé dans les<br />
rencontres qu’ils ont faites, et ce qu’ils<br />
m’ont transmis dans les rencontres que<br />
j’ai faites avec eux. Ces notions <strong>de</strong> fraternité<br />
et <strong>de</strong> transmission sont pour<br />
moi nécessaires dans l’exercice <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie, sans quoi le risque est grand<br />
d’aller vers une psychiatrie vétérinaire,<br />
dans laquelle tout ce qui fait la part<br />
subjective d’un être humain, est considéré<br />
comme un artéfact. Il faut se rappeler<br />
que c’est déjà arrivé à certaines<br />
époques, notamment lors <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />
nazie, et le programme T4 (2) est là<br />
pour en témoigner. Il ne faut pas l’oublier<br />
et donc en transmettre le souvenir<br />
actif aux plus jeunes.<br />
M. S.-C. : « La psychothérapie institutionnelle,<br />
c’est la psychiatrie ! » : c’est le<br />
titre d’un <strong>de</strong> vos chapitres. Vous êtes<br />
connu pour lancer <strong>de</strong>s pavés dans la<br />
mare lorsque cela vous semble justifié.<br />
On peut dire aussi que la psychiatrie<br />
psychanalytique tient le morceau du roi<br />
dans vos pratiques. Comment aimeriezvous<br />
en rappeler vous les grands axes ?<br />
PD : C’est là une phrase <strong>de</strong> Jean<br />
Oury, dont j’aime bien les colères<br />
cathartiques. Quand il a prononcé<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Entretien avec Pierre Delion<br />
celle-là, <strong>de</strong>s gens le cherchaient un<br />
peu sur la psychothérapie institutionnelle,<br />
alors qu’ils n’étaient même pas<br />
foutus <strong>de</strong> faire une psychiatrie digne<br />
<strong>de</strong> ce nom ! Il leur a rappelé l’histoire<br />
<strong>de</strong> la psychiatrie d’après la <strong>de</strong>uxième<br />
guerre mondiale et a essayé <strong>de</strong> leur<br />
démontrer l’impasse <strong>de</strong> l’antipsychiatrie.<br />
Alain Buzaré a d’ailleurs repris<br />
cette phrase pour en faire le titre <strong>de</strong><br />
son livre paru en 2004 aux éditions<br />
du champ social. Je crois en effet que<br />
la psychothérapie institutionnelle est<br />
un courant qui a beaucoup réfléchi à<br />
la question <strong>de</strong>s articulations nécessaires<br />
sur les plans théoriques et pratiques<br />
pour l’organisation <strong>de</strong>s soins<br />
pour les patients, notamment les plus<br />
en déshérence, et plus précisément<br />
encore pour les personnes psychotiques.<br />
Je rappelle souvent que le proverbe<br />
« qui peut le plus peut le moins »<br />
s’applique bien à ce mouvement. Car<br />
si cette manière <strong>de</strong> pratiquer et <strong>de</strong><br />
théoriser a été au départ mise au point<br />
pour pouvoir soigner aussi les personnes<br />
psychotiques, il est évi<strong>de</strong>nt<br />
que les autres pathologies peuvent en<br />
bénéficier « par surcroît ». Tosquelles<br />
disait souvent que cette praxis s’appuie<br />
sur <strong>de</strong>ux jambes : la psychanalytique<br />
et la politique. On le voit bien<br />
tous les jours : si on pratique la psychanalyse<br />
avec les schizophrènes et<br />
les autistes comme avec les « névrosés<br />
occi<strong>de</strong>ntaux poids moyens », avec le<br />
dispositif divan-fauteuil, le ridicule est<br />
au bout <strong>de</strong> la rue ! Il est nécessaire<br />
d’adapter le cadre à ces nouvelles<br />
situations psychopathologiques, au<br />
prix <strong>de</strong> retravailler une nouvelle métapsychologie<br />
pour elles, comme le suggère<br />
par exemple Joyce Mac Dougall.<br />
Freud le premier, nous a montré comment<br />
il pouvait remettre en cause <strong>de</strong>s<br />
pans entiers <strong>de</strong> sa métapsychologie<br />
pour y faire entrer, en authentique<br />
scientifique, ses découvertes récentes.<br />
Mais dès l’instant où l’on s’intéresse<br />
à ces pathologies psychotiques, le<br />
concept d’institution est inévitablement<br />
au ren<strong>de</strong>z vous. Non pas celui<br />
d’établissement où l’on doit les interner,<br />
mais celui d’une équipe soignante<br />
qui doit les accueillir au long <strong>de</strong><br />
leur trajectoire souvent délicate.<br />
Jacques Hochmann par exemple théorise<br />
le concept d’« institution mentale »<br />
à cet usage : une possibilité <strong>de</strong> mobiliser<br />
plusieurs soignants en liens avec<br />
d’autres partenaires <strong>de</strong> la cité et avec<br />
les parents pour les « instituer » en<br />
porteurs <strong>de</strong> ce patient. C’est dans cette<br />
perspective que j’ai décrit la « fonction<br />
phorique », comme ce qui permet à la<br />
personne psychotique d’être portée,<br />
psychiquement, et quelquefois physiquement,<br />
tout le temps qu’elle ne<br />
peut le faire elle-même. A partir <strong>de</strong><br />
cette position <strong>de</strong> base, une sorte <strong>de</strong><br />
proposition d’ouverture et d’accueil<br />
<strong>de</strong> l’autre, c’est l’appareil psychique<br />
<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s soignants qui <strong>de</strong>vient le<br />
porteur <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> souffrance psychique<br />
<strong>de</strong> ce sujet aliéné, c’est la fonction<br />
« sémaphorique ». Et c’est la<br />
réunion <strong>de</strong> nos contre-transferts singuliers<br />
qui peut aboutir à une fonction<br />
<strong>de</strong> transformation, au sens <strong>de</strong><br />
Bion, que je qualifie <strong>de</strong> « métaphorique<br />
». La notion <strong>de</strong> constellation<br />
transférentielle prend alors tout son<br />
sens en croisant les dimensions subjectales,<br />
groupales et institutionnelles<br />
qui sont à travailler pour le soin <strong>de</strong><br />
ces patients. Mais si Tosquelles insistait<br />
sur le « politique » au sens marxiste du<br />
terme, c’était bien plus pour en travailler<br />
les implications sociales<br />
concrètes que pour en déduire une<br />
quelconque idéologie politicienne. Il<br />
avait assez souffert, pendant la guerre<br />
d’Espagne, <strong>de</strong> l’habituelle « entropie<br />
stalinienne ». C’est ainsi que les opérateurs<br />
du « club thérapeutique », <strong>de</strong> la<br />
sectorisation, <strong>de</strong>s relations complémentaires<br />
(Dupréel), <strong>de</strong> la « hiérarchie