Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie
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www.nervure-psy.com<br />
■ EDITORIAL G. Massé<br />
Les réseaux <strong>de</strong><br />
santé en santé<br />
mentale<br />
La première Journée Nationale <strong>de</strong>s<br />
Réseaux <strong>de</strong> Santé en Santé Mentale<br />
s’est tenue à Sainte-Anne le 10<br />
octobre <strong>de</strong>rnier. Son organisation<br />
doit beaucoup à Saïd Acef (PREPSY)<br />
et Mireille Arnaud (REHPI) qui ont<br />
comptabilisé une trentaine <strong>de</strong> réseaux en<br />
santé mentale, financés dans le cadre <strong>de</strong>s Dotations<br />
Régionales <strong>de</strong> Développement <strong>de</strong>s<br />
Réseaux, à partir d’un recensement réalisé auprès<br />
<strong>de</strong> l’assurance maladie et <strong>de</strong>s observatoires<br />
régionaux <strong>de</strong> santé.<br />
Les réseaux peuvent être définis comme <strong>de</strong>s<br />
organisations <strong>de</strong> soins, au sein <strong>de</strong>squelles plusieurs<br />
équipes ou professionnels <strong>de</strong> santé coopèrent<br />
à une meilleure prise en charge <strong>de</strong><br />
patients présentant un même problème d’ordre<br />
médical ou médico-social.<br />
Alors que dès le début <strong>de</strong>s années 80, l’épidémie<br />
<strong>de</strong> sida a joué un rôle inducteur, <strong>de</strong><br />
1985 à 1995, plusieurs facteurs ont pesé avec :<br />
- <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s qui s’assument en tant que tels<br />
revendiquant une prise en charge globale et<br />
concertée ;<br />
- la nécessité que les mé<strong>de</strong>cins communiquent<br />
mieux entre eux, se forment continuellement<br />
et coordonnent leurs efforts avec d’autres professions<br />
;<br />
- la recherche <strong>de</strong> financements nouveaux.<br />
Peu à peu on a assisté à <strong>de</strong>s ouvertures successives<br />
:<br />
- la loi <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité sociale<br />
pour 1999 a inscrit <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> rémunération<br />
autres que le paiement à l’acte et a<br />
concerné la prévention, l’éducation à la santé,<br />
la formation, l’évaluation, les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> santé<br />
publique et <strong>de</strong> veille sanitaire ;<br />
- début 2000, les URCAM et les ARH ont<br />
commencé à gérer les Fonds d’amélioration<br />
<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> ville en attribuant<br />
les subventions aux réseaux dont le projet est<br />
agréé ;<br />
(suite page 5 )<br />
Michel Sanchez-Car<strong>de</strong>nas : On raconte que la cathédrale<br />
San Pauli, <strong>de</strong> Hambourg put être reconstruite<br />
après l’incendie qui la ravagea grâce à ses plans, qui<br />
avaient été murés dans une <strong>de</strong> ses pierres. On a l’impression<br />
que, dans votre ouvrage sur la psychothérapie<br />
institutionnelle, vous faites un état <strong>de</strong>s lieux, qui est un<br />
inventaire, d’une psychiatrie qui risque <strong>de</strong> disparaître. Il<br />
y a du cri d’alarme dans votre livre.<br />
Pierre Delion : C’est vrai que l’actualité <strong>de</strong> la psychiatrie<br />
me laisse un goût amer dans la mesure où<br />
nous étions assez près d’arriver à une politique digne<br />
La connaissance clinique et psychopathologique<br />
<strong>de</strong>s séquelles psychiques observées chez les victimes<br />
<strong>de</strong> prises d’otages est d’une importance majeure<br />
pour l’adaptation <strong>de</strong> stratégies thérapeutiques efficaces<br />
qui doivent être précoces. Parmi les nombreuses<br />
techniques préconisées, citons les techniques <strong>de</strong><br />
débriefing, les techniques abréactives <strong>de</strong> groupe, les<br />
techniques cognitivo-comportementales. Les stratégies<br />
thérapeutiques visent la verbalisation, l’expression<br />
<strong>de</strong>s émotions, le réinvestissement <strong>de</strong> la position<br />
<strong>de</strong> sujet (après la chosification, la déshumanisation) par<br />
la mise en mots <strong>de</strong> l’indicible douleur. En d’autres<br />
termes les thérapeutiques tentent le passage <strong>de</strong> la<br />
position d’objet-otage à la position <strong>de</strong> sujet ex-otage.<br />
Cet article ne traite pas <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> prise en<br />
charge thérapeutique <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong> séquestration ;<br />
il focalise l’attention sur la sémiologie <strong>de</strong>s séquelles <strong>de</strong><br />
situations <strong>de</strong> séquestration. En effet, la prise en charge<br />
<strong>de</strong>s otages nécessite une reconnaissance <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s<br />
d’expression <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> séquestration. Ces<br />
manifestations peuvent prendre divers masques : le<br />
masque <strong>de</strong> l’empathie paradoxale du syndrome <strong>de</strong><br />
L<br />
’existence littéraire, l’agencement <strong>de</strong>s mots et <strong>de</strong>s<br />
lettres, le rythme et la sonorité à l’intérieur d’un<br />
poème pour un écrivain tel que Pasolini vaut comme<br />
désir d’existence du sujet, voilà le pari que nous<br />
entendons soutenir. Une <strong>de</strong>s conséquences en est<br />
que la forme du poème transmet une position <strong>de</strong><br />
l’être qui crée le poème.<br />
Une <strong>de</strong>s possibilités pour définir le fonctionnement<br />
subjectif d’un être humain concerne la mise en fonction<br />
d’un nouage, le nouage d’un signifiant et d’un<br />
corps via le scopique, en tant que ces trois éléments<br />
sont orientés par le réel d’une jouissance <strong>de</strong> l’être (1).<br />
Une autre façon d’énoncer cette thèse serait : comment<br />
faire tenir un corps pour un sujet dans son<br />
accroche à un signifiant ? Le scopique, en tant qu’il est<br />
pulsion, source <strong>de</strong> plus-<strong>de</strong>-jouir, fait lien dans cette<br />
accroche. Dès lors, un signifiant, issu d’un dire, fait<br />
écho ou non dans le corps et ce signifiant se raccroche<br />
à ce corps par l’intermédiaire <strong>de</strong> la forme scopique<br />
du corps et du nouage <strong>de</strong> cette forme au corps<br />
Entretien avec Pierre Delion<br />
■ FMC<br />
Les conséquences <strong>de</strong>s<br />
situations <strong>de</strong> séquestration :<br />
sémiologie et typologie<br />
Danses pasoliniennes<br />
Pierre Delion est professeur <strong>de</strong> pédopsychiatrie et chef <strong>de</strong> service à Lille, après avoir exercé la psychiatrie<br />
sectorielle pendant <strong>de</strong> nombreuses années en Anjou et au Mans. Il a livré <strong>de</strong> nombreux textes à ce sujet sur<br />
les trois décennies qui viennent <strong>de</strong> passer. Psychanalyste passionné par l'énigme <strong>de</strong> l'autisme et <strong>de</strong> la schizophrénie,<br />
mais aussi par tous les problèmes « socio-psycho-politico-éducativo...» et donc révolté par les simplifications<br />
abusives <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong> tous ordres il reprend l’ensemble <strong>de</strong> sa pensée sur l’institution psychiatrique<br />
dans un volume récent paru chez Dunod, Soigner la personne psychotique. Concepts, pratiques et<br />
perspectives <strong>de</strong> la psychothérapie institutionnelle. Il faut aussi signaler son récent : Rencontre avec Salomon Resnik,<br />
paru il y a peu chez Erès.<br />
<strong>de</strong> ce nom en matière <strong>de</strong> prise en charge <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s<br />
mentaux, et ce en gran<strong>de</strong> partie grâce à la doctrine <strong>de</strong><br />
la psychiatrie <strong>de</strong> secteur à laquelle je suis très attaché,<br />
quand tout à coup (un coup qui a duré une dizaine<br />
d’années !), un certain nombre <strong>de</strong> détracteurs ont<br />
« inventé » le concept <strong>de</strong>s intersectorialités, me donnant<br />
l’impression d’une série <strong>de</strong> faux nez <strong>de</strong> la sectorisation,<br />
et laissant accroire aux déci<strong>de</strong>urs payeurs<br />
que la psychiatrie pouvait être coupée en tranches<br />
<strong>de</strong> spécialités à l’instar <strong>de</strong>s MCO (Mé<strong>de</strong>cine, Chirurgie,<br />
Obstétrique) pour y accomplir aussi l’« œuvre<br />
(suite page 10 )<br />
S. Tribolet<br />
Stockholm, les masques psychosomatiques, les nombreux<br />
masques psychiques <strong>de</strong> la névrose traumatique<br />
etc.<br />
Nouvelle définition et nouveau<br />
statut <strong>de</strong> l’otage<br />
Les victimes <strong>de</strong> prise d’otage peuvent présenter <strong>de</strong>s<br />
manifestations psychiques ou physiques (avec le<br />
déclenchement <strong>de</strong> pathologies psychosomatiques),<br />
pouvant bouleverser durablement voire définitivement<br />
leur mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie dans ses aspects affectifs, comportementaux<br />
et spirituels. Le mot « otage » a connu<br />
plusieurs définitions <strong>de</strong>puis le XI ème siècle jusqu’au<br />
sens actuel complètement différent. L’ancien français<br />
hostage, dérivé du latin hostis a donné le mot<br />
« hôte » mais aussi le mot « hostile » (le mot prend la<br />
valeur d’« étranger » et d’« ennemi ») et les mots « hôpital<br />
» et « hôtel » (à partir du latin hospes « celui qui<br />
reçoit l’autre » formé sur hostis). Le mot hostage ou<br />
ostage désignait « l’hôte que l’on gar<strong>de</strong> » ; l’expression<br />
(suite page 5 )<br />
■ PSYCHANALYSE<br />
H. Hubert, C. Happiette<br />
réel. Le nouage du corps à cette forme se réalise par<br />
l’habit, intermédiaire entre la forme et la peau du<br />
sujet. Il s’agit d’un nouage <strong>de</strong> jouissance entre ces<br />
trois registres, signifiant-scopique-corps.<br />
Nous proposons donc <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce les<br />
nouages et dénouages entre le signifiant, le scopique<br />
et le corps, à l’œuvre dans la poésie <strong>de</strong> Pasolini à<br />
<strong>de</strong>ux moments clés <strong>de</strong> sa vie.<br />
En 1974, Pasolini entame la réécriture rageuse <strong>de</strong><br />
La meilleure jeunesse qui témoignait <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />
1941-1953, et nomme cette réécriture Secon<strong>de</strong> forme<br />
<strong>de</strong> La meilleure jeunesse. L’écriture et la réécriture se<br />
font en frioulan. Le frioulan était la langue <strong>de</strong> la province<br />
natale <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> Pasolini, Susanna Colussi.<br />
« Le Frioul (au nord-est <strong>de</strong> l’Italie, à la frontière <strong>de</strong> l’ex-<br />
Yougoslavie, au nord <strong>de</strong> Venise), dont elle était originaire,<br />
<strong>de</strong>vint alors pour Pasolini la terre première, le paysage<br />
primitif, le décor essentiel d’une nature perdue. Et la<br />
langue, la langue perdue <strong>de</strong> la réalité » (2). La pério<strong>de</strong><br />
(suite page 7 )<br />
Dans le prochain<br />
OCTOBRE 2006 1<br />
ISSN 0988-4068<br />
n°7 - Tome XIX - 10/2006<br />
Tirage : 10 000 exemplaires<br />
Directeur <strong>de</strong> la Publication et <strong>de</strong> la<br />
Rédaction : G. Massé<br />
Rédacteur en chef : F. Caroli<br />
Rédaction : Hôpital Sainte-Anne,<br />
1 rue Cabanis - 75014 Paris<br />
Tél. 01 45 65 83 09 - Fax 01 45 65 87 40<br />
Abonnements :<br />
54 bd La Tour Maubourg - 75007 Paris<br />
Tél. 01 45 50 23 08 - Fax 01 45 55 60 80<br />
Prix au numéro : 9,15 €<br />
E-mail : info@nervure-psy.com<br />
AU SOMMAIRE<br />
EDITORIAL<br />
Les réseaux <strong>de</strong> santé<br />
en santé mentale p.1<br />
FMC<br />
Les conséquences <strong>de</strong>s<br />
situations <strong>de</strong> séquestration :<br />
sémiologie et typologie p.5<br />
PSYCHANALYSE<br />
Danses pasoliniennes p.7<br />
ENTRETIEN AVEC<br />
Pierre Delion p.10<br />
HUMEUR<br />
La double-peine en<br />
psychiatrie p.11<br />
CLINIQUE<br />
La question <strong>de</strong> la<br />
reconnaissance <strong>de</strong> son propre<br />
visage en schizophrénie p.12<br />
Le vol et la kleptomanie p.13<br />
ORGANISATION DES SOINS<br />
Le traitement <strong>de</strong>s données<br />
d’activité médicale p.14<br />
Enquête auprès <strong>de</strong>s<br />
aidants familiaux p.14<br />
TOXICOMANIE<br />
Les risques méconnus<br />
liés à la consommation<br />
<strong>de</strong> cannabis p.16<br />
THÉRAPEUTIQUE<br />
Du traitement <strong>de</strong> la crise<br />
au long terme p.18<br />
ANNONCES<br />
PROFESSIONNELLES p.19<br />
ANNONCES EN BREF p.22<br />
Julien Daniel Guelfi, Agnès Metton,<br />
Antoine Pélissolo, Gérard Massé,<br />
Christian Spadone et François Caroli<br />
échangent au cours d’une table ron<strong>de</strong><br />
sur le concept <strong>de</strong><br />
SCHIZOPHRÉNIE DÉSORGANISÉE
2<br />
LIVRES<br />
La psychologie et la<br />
phrénologie comparées<br />
Adolphe Garnier<br />
Avec une introduction <strong>de</strong> Serge<br />
Nicolas<br />
L’Harmattan, 35 €<br />
Parmi les philosophes universitaires<br />
français <strong>de</strong> la première moitié du XIX e<br />
siècle, Adolphe Garnier a été un <strong>de</strong>s<br />
premiers à réagir contre l’influence <strong>de</strong><br />
la phrénologie. Frappé du dédain <strong>de</strong>s<br />
phrénologues envers les psychologues,<br />
il pensait que seule la psychologie peut<br />
déterminer les qualités primitives et fondamentales<br />
<strong>de</strong> l’âme. Avant d’assigner<br />
le siège d’une faculté, il faut avoir constaté<br />
son existence par l’observation psychologique.<br />
La psychologie et la phrénologie<br />
comparées (1839) est dédié à<br />
son maître Théodore Jouffroy. Au début<br />
<strong>de</strong> l’ouvrage Garnier rappelle que<br />
la phrénologie se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux parties<br />
bien distinctes : elle recherche, au<br />
moyen <strong>de</strong> l’observation, les facultés<br />
constitutives <strong>de</strong> l’espèce humaine ; elle<br />
essaie, par l’observation physique, <strong>de</strong><br />
rapporter chaque faculté à une partie<br />
du cerveau qui en <strong>de</strong>vient le siège et<br />
l’organe. Gall, qui voulait réunir ces<br />
<strong>de</strong>ux sciences, avait donné à cet ensemble<br />
le nom <strong>de</strong> physiologie du cerveau.<br />
Pour Garnier, Gall a échoué dans<br />
sa tentative car il n’a pas développé sa<br />
psychologie sur <strong>de</strong> bonnes bases. C’est<br />
dans ce contexte qu’il donne une nouvelle<br />
division <strong>de</strong>s facultés <strong>de</strong> l’âme subdivisées<br />
en facultés intellectuelles ; facultés<br />
affectives ; faculté motrice ; faculté<br />
<strong>de</strong> vouloir. Cette classification sera ultérieurement<br />
développée dans l’ouvrage<br />
au titre évocateur : Traité <strong>de</strong>s facultés<br />
<strong>de</strong> l’âme (1852) qui <strong>de</strong>viendra le livre<br />
<strong>de</strong> référence <strong>de</strong> la psychologie spiritualiste<br />
française du XIX e siècle.<br />
Gui<strong>de</strong> Clinique <strong>de</strong> thérapie<br />
comportementale et cognitive<br />
Sous la direction <strong>de</strong> Ovi<strong>de</strong> Fontaine<br />
et <strong>de</strong> Philippe Fontaine<br />
Editions Retz<br />
Cet ouvrage propose un bilan actualisé.<br />
Dans sa première partie, il effectue un<br />
tour d’horizon historique et prospectif<br />
<strong>de</strong>s savoirs et <strong>de</strong>s savoir-faire développés<br />
avec une mise en perspective<br />
sous <strong>de</strong>s angles inédits. La secon<strong>de</strong> partie<br />
présente, pour chacun <strong>de</strong>s troubles<br />
les plus fréquemment rencontrés, une<br />
revue <strong>de</strong>s connaissances puis une psychothérapie<br />
« en action » effectuée par<br />
<strong>de</strong>s spécialistes francophones (Belgique,<br />
France, Québec, Suisse). Chaque auteur,<br />
dans son chapitre, après une brève revue<br />
<strong>de</strong>s connaissances théoriques actuelles<br />
sur la pathologie envisagée, décrit<br />
son parcours avec un patient tout<br />
au long d’une thérapie. Le chapitre se<br />
clôt sur une discussion concrète sur le<br />
cas présenté. Alors que la bibliographie<br />
a été volontairement réduite au minimum<br />
nécessaire à l’objectivation <strong>de</strong>s<br />
éléments théoriques avancés, <strong>de</strong>s lectures<br />
sont recommandées.<br />
Vagabondages psy... il<br />
importe d’avoir <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s<br />
Albert Le Dorze<br />
L’Harmattan<br />
Non seulement Albert Le Dorze choisit<br />
pour titre <strong>de</strong> son livre « vagabondages<br />
psy » mais, <strong>de</strong> plus, dans la quatrième<br />
<strong>de</strong> couverture, il emploie les verbes<br />
« vagabon<strong>de</strong>r » et « musar<strong>de</strong>r », cherchant<br />
peut-être par ces mots légers à minorer<br />
la portée <strong>de</strong> son ouvrage qui ne serait<br />
que le reflet <strong>de</strong> l’itinéraire, sans<br />
gran<strong>de</strong> embûche, d’un psychiatre clinicien,<br />
parfois enseignant et écrivain à<br />
ses heures. Il indique peut-être, par ces<br />
choix sémantiques, qu’il ne veut aucune<br />
inféodation à un quelconque dogme<br />
théorique et qu’il préfère rendre compte<br />
<strong>de</strong> son seul itinéraire réflexif, marqué<br />
par l’érudition et un savoir pluridisciplinaire.<br />
Il affirme peut-être ainsi qu’il<br />
estime son expérience clinique primordiale<br />
et que la praxis prévaut sur la<br />
théorie. Mais il faut, avec le Docteur Le<br />
Dorze, se méfier <strong>de</strong>s évi<strong>de</strong>nces et l’on<br />
trouve une historiette, préambule au<br />
chapitre intitulé « la clinique, <strong>de</strong> la sensation<br />
au concept », dans laquelle il raconte<br />
une dispute entre <strong>de</strong>s professionnels<br />
enfin réconciliés quand « le<br />
notable estimé <strong>de</strong> la psychiatrie et <strong>de</strong> la<br />
psychanalyse » (p.61) laisse tomber cette<br />
remarque mainte fois répétée : « c’est<br />
la clinique qui compte... il faut se laisser<br />
gui<strong>de</strong>r par la clinique » (p61). Il confie sa<br />
perplexité face à l’usage quasi oraculaire<br />
du mot « clinique » dont l’effet est<br />
immédiat : « (...) clôture du hourvari... clinique<br />
sacrée, sacrée clinique » (p61).<br />
Et la perplexité <strong>de</strong> ses lecteurs est au<br />
moins aussi gran<strong>de</strong> que la sienne quand<br />
il fait immédiatement suivre, dans le,<br />
titre <strong>de</strong> son livre, le terme « vagabondages<br />
» d’une phrase qui semble, sinon<br />
le contredire, au moins s’y opposer : « il<br />
importe d’avoir <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s ». Cette apparente<br />
inconciliabilité récèle-t-elle sa<br />
véritable intention ? les vagabondages<br />
n’empêcheraient pas les certitu<strong>de</strong>s et,<br />
pour le Docteur Le Dorze, ils sembleraient<br />
même les fon<strong>de</strong>r, les certitu<strong>de</strong>s<br />
n’étant possibles qu’à ceux qui consentent<br />
à musar<strong>de</strong>r. Albert Le Dorze ne se<br />
contente pas <strong>de</strong> la clinique psychiatrique<br />
ou psychanalytique et, au-<strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> ses patients, ceux qu’il rencontre<br />
dans la confi<strong>de</strong>ntialité <strong>de</strong> son cabinet<br />
ou à travers leurs productions littéraires<br />
(comme Catherine M. à laquelle<br />
il consacre un chapitre), il s’intéresse au<br />
contexte social, politique voire artistique<br />
dans lesquels ces mêmes patients ten-<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
tent <strong>de</strong> vivre (<strong>de</strong> survivre). On <strong>de</strong>vine<br />
que si ses choix politiques influencent<br />
sa clinique, ils sont aussi gran<strong>de</strong>ment<br />
influencés pu son métier et par son savoir.<br />
En acceptant <strong>de</strong> se laisser surprendre<br />
par ses rencontres avec ses patients,<br />
mais également avec un texte<br />
théorique ou avec une œuvre d’art, il<br />
érige les vagabondages en nécessité<br />
éthique. Les imprévus <strong>de</strong> la clinique et<br />
<strong>de</strong> la vie ne l’effrayent pas ; bien plus,<br />
ils constituent les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> sa pratique.<br />
Pour les affronter, il sait qu’il lui<br />
faut un savoir soli<strong>de</strong> (les certitu<strong>de</strong>s) mais<br />
non fermé, structurellement inachevé.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Ils ne peuvent enrichir sa réflexion et<br />
sa pratique qu’à la condition <strong>de</strong> pas<br />
s’éclipser <strong>de</strong>rrière le déjà vu ou le déjà<br />
su (et on en revient au vagabondage).<br />
Le livre d’Albert Le Dorze est l’itinéraire<br />
d’un honnête homme, mé<strong>de</strong>cin psychiatre,<br />
qui ne cè<strong>de</strong> ni aux sirènes <strong>de</strong><br />
la mo<strong>de</strong> (qu’il s’agisse <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> la<br />
prévention ou <strong>de</strong> la dépendance) ni à<br />
celles <strong>de</strong>s idées préconçues (le chapitre<br />
consacré au Père Noël en est une amusante<br />
et pertinente illustration). En voulant<br />
que son itinéraire soit fait <strong>de</strong> vagabondages,<br />
le Docteur Le Dorze a<br />
composé son livre <strong>de</strong> textes écrits à dif-<br />
férents moments et publiés ou présentés<br />
dans différents revues et lieux. Son<br />
ouvrage est d’ailleurs impossible à résumer,<br />
sa synthèse ne pouvant rendre<br />
compte <strong>de</strong> ses flâneries cliniques et théoriques<br />
dont déroulent ses certitu<strong>de</strong>s qui,<br />
dans le même temps, les permettent. Il<br />
faut le lire ou le parcourir (les lecteurs<br />
ont aussi le droit ou le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> vagabon<strong>de</strong>r),<br />
à sa façon, en commençant<br />
au hasard, par le chapitre que l’on imagine<br />
le plus attirant ou le plus intéressant.<br />
Et l’on se surprend alors à répondre<br />
à haute voix à une argumentation que<br />
l’on réprouve ou dont on admet la per-<br />
tinence, c’est-à-dire à s’engager en opposant<br />
ou en conjoignant ses propres<br />
certitu<strong>de</strong>s à celles <strong>de</strong> l’auteur. Albert Le<br />
Dorze a eu raison <strong>de</strong> nommer son livre<br />
« vagabondages psy... il importe d’avoir<br />
<strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s ». Il a eu aussi raison <strong>de</strong><br />
l’écrire afin <strong>de</strong> témoigner que sa pratique<br />
<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin et d’enseignant s’arcqueboute<br />
sur son désir (qui musar<strong>de</strong> et<br />
vagabon<strong>de</strong>) et sur son engagement<br />
éthique, conséquence <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s<br />
qu’il s’est forgées au cours <strong>de</strong> ses vagabondages<br />
et dont il sait qu’elles ne<br />
sont pas tout à fait inébranlables.<br />
A. Henry<br />
Eloge <strong>de</strong> la perte<br />
Perte d’objets, formation du sujet<br />
Jean-Richard Freymann<br />
Préface <strong>de</strong> Roland Gori<br />
Erès, 21 €<br />
Après avoir développé la « frérocité » (Arcanes/érès,<br />
2003), la « naissance du désir<br />
» (Arcanes/érès 2005), J.-R. Freymann<br />
propose plusieurs genèses <strong>de</strong> l’objet<br />
que « le temps pour comprendre » révèle :<br />
objet phobique, objet fétiche, objet transgénérationnel,<br />
à partir d’un nouveau<br />
modèle <strong>de</strong> la constitution subjective qui<br />
passe par Kafka, Villon, Saint Augustin,<br />
Ray Charles.<br />
3<br />
En prenant à rebrousse-poil les langages<br />
dominants, il propose un éloge <strong>de</strong> la<br />
perte, contrastant avec les idéologies<br />
thérapeutiques qui cultivent l’avoir,<br />
l’adaptation et une guérison pensée en<br />
termes <strong>de</strong> protocoles et d’évaluations,<br />
soutenant que la psychanalyse est une<br />
école <strong>de</strong> création.<br />
La question <strong>de</strong> l’objet est ici envisagée<br />
dans l’actualité et dans les perspectives<br />
<strong>de</strong> la cure analytique avec cette hypothèse<br />
qui traverse l’ouvrage : si on est<br />
prêt à perdre <strong>de</strong> la consistance <strong>de</strong> l’objet,<br />
le désir inconscient se développe et<br />
le sujet se déplie. Mais quelles en sont<br />
les conditions incontournables ? L’auteur<br />
rappelle par là que l’objet en psychanalyse<br />
est mosaïque : objet narcissique,<br />
objet Moi, objet spéculaire, objet<br />
partiel, objet a, et que son <strong>de</strong>stin est<br />
singulier dans le temps psychique.<br />
L’amnésie psychologique<br />
Le cas Emma Dutemple<br />
Œuvres choisies II<br />
Pierre Janet<br />
L’Harmattan, 25 €<br />
Contrairement aux amnésies organiques,<br />
les amnésies psychogènes se caractérisent<br />
par l’absence <strong>de</strong> lésions cérébrales<br />
repérables. La perturbation principale<br />
est constituée par un ou plusieurs épiso<strong>de</strong>s<br />
durant lesquels le sujet présente<br />
une incapacité à évoquer <strong>de</strong>s souvenirs<br />
personnels importants, habituellement<br />
traumatiques ou stressants.<br />
Pierre Janet a initié l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’amnésie<br />
psychogène au début <strong>de</strong>s années<br />
1890.<br />
C’est à la Salpêtrière, sous la direction<br />
<strong>de</strong> Charcot, qu’il a été amené à s’intéresser<br />
à cette affection mentale. Il a décrit<br />
minutieusement le cas <strong>de</strong> Mme D.<br />
(Emma Dutemple), classée comme hystérique,<br />
et <strong>de</strong>venue amnésique le 28<br />
août 1891 suite à l’annonce <strong>de</strong> la fausse<br />
mort <strong>de</strong> son mari. Après cet épiso<strong>de</strong><br />
traumatique, Mme D. va présenter une<br />
amnésie antérogra<strong>de</strong> (oubli au fur et à<br />
mesure) que Janet appelle amnésie continue,<br />
et une amnésie rétrogra<strong>de</strong> (oubli<br />
<strong>de</strong>s événements passés).<br />
Le livre rassemble les nombreuses contributions<br />
<strong>de</strong> Janet sur la question <strong>de</strong><br />
l’amnésie et se centre, plus particulièrement,<br />
sur le cas <strong>de</strong> Mme D. mais aussi<br />
d’Irène.<br />
Anthropologie du foetus<br />
Jean Bergeret, Michel Soulé<br />
Bernard Golse et al.<br />
Dunod, 24 €<br />
Ce livre fait le point sur l’état d’avancement<br />
actuel <strong>de</strong>s différentes disciplines<br />
qui se préoccupent <strong>de</strong>s aléas normaux<br />
ou pathologiques <strong>de</strong> la vie foetale et<br />
<strong>de</strong> leurs conséquences immédiates ou<br />
plus lointaines sur le sujet qui va naître.<br />
Il s’agit <strong>de</strong> mieux connaître comment<br />
se déroule le début d’une trajectoire à<br />
la fois organique, affective et relationnelle<br />
qui concerne tout autant le foetus<br />
que ses environnements successifs ;<br />
l’environnement corporel et affectif maternel<br />
au premier chef, mais aussi l’environnement<br />
familial. Une approche anthropologique<br />
<strong>de</strong> l’étape foetale ne peut<br />
être considérée comme une recherche<br />
indépendante portant seulement sur tel<br />
moment ou tel aspect particulier d’une<br />
existence.<br />
Toute vie humaine ne peut se voir considérée<br />
que dans la globalité <strong>de</strong> son<br />
déroulement, <strong>de</strong>puis les conditions (génétiques<br />
et affectives) transgénérationnelles<br />
dans lesquelles s’est opérée<br />
la conception embryonnaire jusqu’à la<br />
disparition du sujet. Cet ouvrage présente<br />
une base <strong>de</strong> référence et <strong>de</strong> reflexion.<br />
Avec la collaboration <strong>de</strong> Arnold Munnich, Chantal<br />
Vavasseur, Fernand Daffos, Jean-Marie Delassus,<br />
Sylvain Missonnier, Marie-José Soubieux, Marcel<br />
Houser, William Slama.
4<br />
LIVRES ET REVUES<br />
La théorie <strong>de</strong> l’émotion<br />
William James<br />
Avant-propos <strong>de</strong> Jacques Chazaud<br />
Introduction <strong>de</strong> Georges Dumas<br />
L’Harmattan, 16,50 €<br />
William James a soutenu sa thèse <strong>de</strong><br />
mé<strong>de</strong>cine à Harvard et y a enseigné la<br />
Physiologie <strong>de</strong> 1872 à 1880. Sa théorie<br />
selon laquelle l’émotion ne serait<br />
« rien d’autre que la sensation <strong>de</strong>s effets<br />
corporels réflexes <strong>de</strong> ce que nous appelons<br />
son objet » (ce dont il déduira qu’en<br />
voyant son enfant mort on était triste<br />
« parce qu’on pleurait », et non qu’on<br />
pleurait parce qu’on était envahi par<br />
une immense affliction) est celle d’un<br />
mé<strong>de</strong>cin cherchant à « donner corps »<br />
aux vécus psychiques, et d’un physiologiste<br />
qui avait déjà réduit le « sentiment<br />
<strong>de</strong> l’effort » aux seules sensations<br />
<strong>de</strong> la contraction musculaire effectuée.<br />
Un vaste mouvement <strong>de</strong> recherches<br />
neuropsychologiques, inauguré par<br />
Charles Sherrington, a opposé aux<br />
conceptions jamesiennes le rôle <strong>de</strong> nombreuses<br />
formations encéphaliques interconnectées<br />
à l’origine <strong>de</strong>s vécus et<br />
<strong>de</strong>s expressions émotionnels. Cependant,<br />
James gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s partisans chez<br />
les psychophysiologistes actuels, et certains<br />
faits semblent toujours plai<strong>de</strong>r en<br />
sa faveur.<br />
C’est ce qui justifie que l’on réédite ce<br />
que James a écrit, tant sur un plan doctrinal<br />
que dans ses réponses aux objections<br />
<strong>de</strong> W. Wundt, W.-L. Worcester,<br />
et d’autres contemporains.<br />
Troubles fonctionnels et<br />
somatisation<br />
Comment abor<strong>de</strong>r les symptômes<br />
médicalement inexpliqués<br />
Pascal Cathébras<br />
Masson, 29 €<br />
Cet ouvrage montre que les symptômes<br />
somatiques inexpliqués (syndrome <strong>de</strong><br />
fatigue chronique, fibromyalgie, intestin<br />
irritable par exemple) ne sont pas<br />
« tout dans la tête », ni ne relèvent <strong>de</strong><br />
pathologies organiques méconnues,<br />
mais que <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> somatisation<br />
chroniques et invalidantes peuvent<br />
« se construire » à partir <strong>de</strong> pathologies<br />
mineures, lorsque le stress, l’anxiété ou<br />
la dépression, les explications médicales<br />
discordantes, les jugements <strong>de</strong>s proches<br />
et <strong>de</strong>s organismes sociaux s’en mêlent.<br />
L’auteur expose les principales conceptions<br />
<strong>de</strong> la somatisation (troubles dits<br />
« somatoformes » et syndromes somatiques<br />
fonctionnels), les facteurs en cause<br />
dans ces situations (biologiques, cognitifs,<br />
psychodynamiques, culturels et<br />
sociaux principalement), ainsi que les<br />
approches thérapeutiques adaptées (traitements<br />
médicamenteux, psychothérapies,<br />
modalités constructives <strong>de</strong> collaboration<br />
entre somaticiens et psychistes,<br />
éducation et réadaptation entre autres).<br />
Thérapie familiale<br />
2006 n°2<br />
Editions Mé<strong>de</strong>cine & Hygiène<br />
Poursuivant sa réflexion sur les interventions<br />
dans les cas <strong>de</strong> maltraitances<br />
à partir du travail <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> SOS<br />
enfants à Bruxelles, Emmanuel <strong>de</strong> Becker<br />
propose une modélisation <strong>de</strong> la<br />
prise en charge <strong>de</strong>s familles où un enfant<br />
a été maltraité. Il réaffirme la nécessité<br />
<strong>de</strong> préserver le secret entre les<br />
différents professionnels intervenants,<br />
et précise les différentes étapes <strong>de</strong> l’évaluation.<br />
L’intervention, toujours faite à<br />
<strong>de</strong> multiples niveaux, doit permettre un<br />
échange entre les co-intervenants, pour<br />
une meilleure régulation <strong>de</strong>s affects<br />
confrontés parfois à l’insoutenable. Exerçant<br />
dans une maternité <strong>de</strong> Genève,<br />
Thomas Will et Francesco Bianchi-<br />
Demicheli constatent que cette image<br />
idyllique est loin d’être la réalité et que<br />
l’arrivée d’un entant n’est pas qu’une<br />
source <strong>de</strong> plaisir et <strong>de</strong> joie. Utilisant la<br />
technique <strong>de</strong> diffraction du langage, ils<br />
ai<strong>de</strong>nt les mères à reformuler leur narration<br />
<strong>de</strong> la maternité, leur permettant<br />
<strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong> nouvelles narrations<br />
plus fonctionnelles, ainsi que le montrent<br />
leurs <strong>de</strong>ux vignettes cliniques.<br />
Fondateur d’un service d’ai<strong>de</strong> aux victimes<br />
<strong>de</strong> sectes en Belgique, Jean-Clau<strong>de</strong><br />
Maes abor<strong>de</strong> <strong>de</strong>s notions fondamentales<br />
telles que la définition du terme<br />
secte, <strong>de</strong>s concepts <strong>de</strong> pré-a<strong>de</strong>ptes, ou<br />
encore le jeu <strong>de</strong>s appartenances... Il<br />
abor<strong>de</strong> enfin ses hypothèses systémiques<br />
concernant le phénomène sectaire, hypothèses<br />
susceptibles d’expliquer l’important<br />
développement du phénomène<br />
sectaire <strong>de</strong>puis une trentaine d’années.<br />
Depuis les débuts, où le thérapeute peine<br />
à se reconnaître lui-même comme thérapeute,<br />
jusqu’à l’expérience <strong>de</strong> la nécessité<br />
<strong>de</strong> trouver sa place dans une<br />
équipe, Anne Latteur choisit comme fil<br />
rouge la question <strong>de</strong> la co-intervention :<br />
Comment travailler avec mes collègues ?<br />
Elle interroge les institutions où elle travaille,<br />
le rôle et la place d’un soignant<br />
en formation. Elle interroge aussi les<br />
parents <strong>de</strong>s enfants suivis, à l’ai<strong>de</strong> d’un<br />
questionnaire.<br />
Dans la lignée du constructivisme et <strong>de</strong><br />
l’attention qu’il porte au processus, Fabienne<br />
Kuenzli-Monnard s’est intéressée<br />
à la façon dont le psychothérapeute<br />
met sa pensée en mots, ce qu’elle nomme<br />
réflexion-en-action. Soulignant combien<br />
la recherche (même qualitative) est difficile<br />
dans le domaine <strong>de</strong> la psychothérapie,<br />
elle propose une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />
pensée pratique et <strong>de</strong> ses différences<br />
entre celle d’un novice et celle d’un expert.<br />
Et la différence qu’elle trouve entre<br />
les <strong>de</strong>ux est, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la plus gran<strong>de</strong><br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
distance d’avec les théories qui sousten<strong>de</strong>nt<br />
sa pratique, la capacité plus<br />
gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> la réflexivité chez le psychothérapeute<br />
expert.<br />
Nicole Lernout propose <strong>de</strong>s illustrations<br />
<strong>de</strong> l’utilisation du cycle <strong>de</strong> l’ambiance<br />
(en tant que manière d’être au mon<strong>de</strong><br />
qui nous environne et avec qui nous<br />
rentrons en contact). Le schéma <strong>de</strong> l’alternance<br />
entre fusion/proximité et rupture/autonomie<br />
permet à ses patients,<br />
en individuel ou en couple, <strong>de</strong> réfléchir<br />
sur la cause du blocage qu’ils ressentent<br />
dans une situation ou dans une<br />
autre.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
prendre en otage signifiait « abriter,<br />
loger ». L’ostage était la personne retenue<br />
comme garantie <strong>de</strong> l’exécution<br />
d’une promesse, d’un traité, d’un contrat<br />
préalablement établi entre <strong>de</strong>ux belligérants.<br />
L’ostage était alors retenu captif<br />
dans la <strong>de</strong>meure du souverain. Le<br />
sens plus proche <strong>de</strong> l’actuel mot otage<br />
apparaît en pério<strong>de</strong> révolutionnaire<br />
(1753) désignant une personne que<br />
l’on retient et que l’on utilise comme<br />
moyen <strong>de</strong> pression, <strong>de</strong> chantage.<br />
Au XX ème siècle, avec la mondialisation<br />
<strong>de</strong> l’information, sa diffusion en<br />
direct donnant ainsi la priorité à l’émotion,<br />
l’impact <strong>de</strong>s paroles et <strong>de</strong>s images<br />
véhiculées par les médias audiovisuels,<br />
la presse écrite et l’internet, un nouveau<br />
regard a été porté sur le phénomène<br />
<strong>de</strong>s prises d’otages. Le statut<br />
d’otage a évolué avec le phénomène<br />
<strong>de</strong> société que représente la place prise<br />
par la médiatisation <strong>de</strong> l’actualité dans<br />
le quotidien <strong>de</strong>s citoyens. L’otage a<br />
désormais un nouveau statut, il est au<br />
centre d’un nouveau système <strong>de</strong> communication.<br />
Il n’est plus le simple<br />
« objet » <strong>de</strong> marchandage mais il est<br />
utilisé comme moyen <strong>de</strong> pression sur<br />
l’opinion publique et sur les gouvernements,<br />
par l’intermédiaire <strong>de</strong>s médias,<br />
pour faire entendre une position politique,<br />
une cause idéologique, une exigence<br />
militaire etc. Pour les terroristes<br />
la prise d’otage équivaut à un droit<br />
d’entrée dans chaque foyer pour y faire<br />
entendre sa cause (pendant toute la<br />
durée <strong>de</strong> la prise d’otage) par le canal<br />
<strong>de</strong> la télévision ou <strong>de</strong> la radio. Il <strong>de</strong>vient<br />
difficile <strong>de</strong> faire la part entre la revendication<br />
immédiate et le but <strong>de</strong> l’impact<br />
médiatique recherché.<br />
Dans les situations <strong>de</strong> prise d’otage, le<br />
mot média correspond à son véritable<br />
sens étymologique du latin médium<br />
« milieu ». Les médias, surtout radio et<br />
télévision mais aussi la presse, prennent<br />
la place d’un tiers situé entre le<br />
milieu extérieur (négociateurs, police) et<br />
le milieu intérieur (otages, ravisseurs), ils<br />
influencent les comportements d’un<br />
côté comme <strong>de</strong> l’autre. Ainsi, quatre<br />
protagonistes jouent un rôle dans ces<br />
nouvelles formes <strong>de</strong> prise d’otages : 1la<br />
victime primaire ou victime active<br />
est représentée par la personne ou les<br />
instances politiques, administratives ou<br />
financières visées par le chantage, 2-<br />
Les réseaux <strong>de</strong> santé<br />
en santé mentale<br />
- la loi <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité<br />
sociale pour 2002 a introduit une<br />
dotation nationale <strong>de</strong> développement<br />
<strong>de</strong>s réseaux (DRDR) inscrite dans<br />
l’objectif national <strong>de</strong> dépenses d’assurance<br />
maladie (ONDAM) qui impute<br />
les dépenses hospitalières, celle<br />
d’actions sociales mais aussi <strong>de</strong> soins<br />
<strong>de</strong> ville favorisant une fongibilité <strong>de</strong>s<br />
enveloppes.<br />
Les réseaux se sont surtout développés<br />
pour <strong>de</strong>s pathologies <strong>de</strong>mandant<br />
un suivi dans la durée, <strong>de</strong><br />
nature médicale, médico-sociale et<br />
médico-psychologique. Peu à peu <strong>de</strong><br />
nouveaux domaines cliniques ont<br />
été concernés : au début <strong>de</strong>s années<br />
80 le VIH, au début <strong>de</strong>s années 90<br />
l’exclusion et les addictions, à la fin<br />
<strong>de</strong>s années 90 le diabète puis les cancers,<br />
les personnes âgées, la périnatalité.<br />
Si bien qu’on recense, actuellement,<br />
plus <strong>de</strong> 500 réseaux concernant<br />
les soins palliatifs, le cancer, le diabète,<br />
les personnes âgées, le handicap,<br />
la périnatalité, les addictions.<br />
Viennent en bien moindre nombre<br />
l’obésité, les pathologies <strong>de</strong>ntaires et...<br />
la santé mentale. Ceux qui se sont<br />
engagés dans la mise en place <strong>de</strong> réseaux<br />
dont la fonction est <strong>de</strong> dépasser<br />
les logiques <strong>de</strong>s institutions, <strong>de</strong> pallier<br />
aux rigidités et aux cloisonnements<br />
veulent « fonctionner ou cela<br />
ne fonctionne pas », travailler autrement,<br />
créer une dynamique. Attirés<br />
par « le poly-exercice et le poly-situationnel<br />
», ils acceptent « le parcours<br />
Les conséquences <strong>de</strong>s situations<br />
<strong>de</strong> séquestration : sémiologie et<br />
typologie<br />
la victime secondaire ou victime passive<br />
est représentée par l’otage, 3- le<br />
ravisseur ou preneur d’otage, 4- l’opinion<br />
publique informée par les médias.<br />
Aux quatre coins du<br />
mon<strong>de</strong><br />
L’actualité <strong>de</strong>s prises d’otages n’est plus<br />
limitée aux actes <strong>de</strong> cambriolages ou <strong>de</strong><br />
pillages <strong>de</strong> banque, elle concerne aussi<br />
les revendications politiques, militaires,<br />
religieuses. De Colombie en Irak, en<br />
passant par l’Autriche avec le cas atypique<br />
<strong>de</strong> la séquestration <strong>de</strong> Natascha<br />
Kampusch âgée <strong>de</strong> 18 ans enlevée à<br />
l’âge <strong>de</strong> 10 ans et séquestrée par son<br />
ravisseur jusqu’à son évasion récente<br />
(septembre 2006). Ce cas est exceptionnel<br />
et les réactions <strong>de</strong> la jeune fille<br />
ne correspon<strong>de</strong>nt pas aux schémas<br />
connus, mais les informations qu’elle<br />
donnera et l’évolution du soutien psychothérapeutique<br />
apporteront, probablement,<br />
<strong>de</strong>s éléments pour la connaissance<br />
<strong>de</strong> l’adaptation psychologique<br />
aux situations <strong>de</strong> séquestration.<br />
En ce début du XXI ème siècle, l’importance<br />
prise par le fléau du terrorisme est<br />
à l’origine d’un regain d’intérêt pour<br />
les questions cliniques et psychopathologiques<br />
concernant les manifestations<br />
psychologiques et les séquelles<br />
psychotraumatiques décrites chez les<br />
otages. Dans la perspective <strong>de</strong> cette<br />
actualité il paraît important <strong>de</strong> préciser<br />
le cadre sémiologique et diagnostique<br />
dans lequel s’intègrent les observations<br />
comportementales et psychologiques<br />
<strong>de</strong>s otages. Une revue <strong>de</strong> la<br />
littérature permet <strong>de</strong> recenser bon<br />
nombres d’observations et <strong>de</strong> repérer<br />
<strong>de</strong>s constantes cliniques telles que les<br />
manifestations du stress post-traumatique,<br />
le syndrome <strong>de</strong> répétition pathognomonique<br />
<strong>de</strong> la névrose traumatique,<br />
<strong>de</strong>s comportements paradoxaux<br />
manifestant <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’adaptation à<br />
la situation traumatisante.<br />
du combattant » <strong>de</strong>s financements et<br />
une fragilité sur une base militante.<br />
C’est à ce prix qu’ils ont pu développer<br />
une véritable ingénierie <strong>de</strong><br />
conception <strong>de</strong> réseaux. Si les réseaux<br />
<strong>de</strong>meurent fragiles, il n’existe pas un<br />
plan sans réseaux (cancer, périnatalité)<br />
à commencer par le plan <strong>Psychiatrie</strong><br />
et Santé mentale 2005-2008<br />
car, on le voit bien, les réseaux peuvent<br />
ai<strong>de</strong>r à dépasser les problématiques<br />
d’établissement, combiner médical,<br />
social, médico-social et, au <strong>de</strong>là,<br />
politique <strong>de</strong> la ville, coordonner les<br />
réponses dans le temps et dans l’espace.<br />
Ils peuvent, également, constituer<br />
<strong>de</strong>s laboratoires d’expérience<br />
pour ce qui intéresse :<br />
- les compétences professionnelles<br />
dont on sait qu’elles sont sur le plan<br />
organisationnel souvent paramédicales<br />
et non soignantes,<br />
- la division et l’organisation du travail,<br />
- les possibilités d’échanges entre professionnels<br />
mais aussi et surtout entre<br />
ces <strong>de</strong>rniers et les non professionnels,<br />
- l’évaluation et la formation,<br />
- l’ancrage territorial.<br />
On peut attendre <strong>de</strong>s réseaux qu’ils<br />
explorent et favorisent <strong>de</strong>s réponses<br />
pour le basculement <strong>de</strong> l’intra vers<br />
l’extrahospitalier, le maillage et remaillage<br />
<strong>de</strong> solutions couvrant les<br />
zones blanches sur le plan du soin,<br />
l’articulation sanitaire, médico-social<br />
et social, les complémentarités entre<br />
public et privé, certains thèmes aussi<br />
importants que les urgences, la réhabilitation<br />
et la gérontopsychiatrie<br />
et tout cela, dans l’esprit et la continuité<br />
du secteur. ■<br />
Le classique syndrome<br />
<strong>de</strong> Stockholm<br />
Certaines <strong>de</strong> ces manifestations sont<br />
connues sous le nom <strong>de</strong> « syndrome<br />
<strong>de</strong> Stockholm » dont les critères cliniques<br />
ont été décrit en 1978 par le<br />
psychiatre américain F. Ochberg (1, 2). Il<br />
propose ce diagnostic à partir <strong>de</strong> l’observation<br />
d’un phénomène d’empathie<br />
paradoxale chez les victimes <strong>de</strong> la prise<br />
d’otage du 23 août 1973 lors d’un holdup<br />
au Crédit Suédois <strong>de</strong> Stockholm<br />
pendant lequel, pour échapper à l’intervention<br />
<strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre, le malfaiteur<br />
(un évadé <strong>de</strong> prison) prenait<br />
quatre employés en otage et obtenait la<br />
libération <strong>de</strong> son compagnon <strong>de</strong> cellule<br />
qui est venu immédiatement le<br />
rejoindre. Leur libération se produisit<br />
après six jours <strong>de</strong> négociation. Cette<br />
prise d’otages fut rendue célèbre en raison<br />
d’une part du rôle joué par les<br />
médias, lui donnant un retentissement<br />
important, d’autre part en raison <strong>de</strong> la<br />
place donnée à l’électronique permettant<br />
<strong>de</strong> filmer les comportements <strong>de</strong>s<br />
différents protagonistes, en particulier<br />
celui <strong>de</strong>s victimes. Ces <strong>de</strong>rnières prenaient<br />
la défense <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ravisseurs,<br />
elles craignaient l’intervention <strong>de</strong> la police<br />
contre leurs ravisseurs. Ce comportement<br />
relève <strong>de</strong> sentiments paradoxaux,<br />
associant une affection et une<br />
compréhension à l’égard <strong>de</strong>s ravisseurs<br />
et une hostilité et une crainte à l’égard<br />
<strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre. Après la prise<br />
d’otages le même type <strong>de</strong> sentiment et<br />
<strong>de</strong> comportement <strong>de</strong>s otages à l’égard<br />
<strong>de</strong> leurs ravisseurs persistait : ainsi par<br />
exemple, ils refusaient <strong>de</strong> témoigner<br />
contre eux au procès, ils continuaient <strong>de</strong><br />
leur rendre visite en prison, et l’une <strong>de</strong>s<br />
otages divorça et épousa un <strong>de</strong>s ravisseurs.<br />
La définition du syndrome <strong>de</strong><br />
Stockholm proposée par Ochberg repose<br />
sur le développement <strong>de</strong> trois types<br />
<strong>de</strong> sentiments : 1- sentiments positifs<br />
<strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> sympathie <strong>de</strong>s otages<br />
à l’égard <strong>de</strong> leurs ravisseurs ; 2- sentiments<br />
positifs <strong>de</strong>s ravisseurs à l’égard<br />
<strong>de</strong> leurs otages ; 3- sentiments négatifs,<br />
d’hostilité, <strong>de</strong>s otages à l’égard <strong>de</strong>s forces<br />
<strong>de</strong> l’ordre. A ces trois éléments <strong>de</strong> définition<br />
plusieurs auteurs ont ajouté <strong>de</strong>s<br />
critères ou conditions concernant le<br />
mo<strong>de</strong> opératoire <strong>de</strong>s ravisseurs, la personnalité<br />
<strong>de</strong>s victimes, les phases du<br />
déroulement <strong>de</strong> la prise d’otages. Ces<br />
ajouts visent à mieux cerner l’évolution<br />
<strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> l’otage (notions <strong>de</strong><br />
séquelles post-traumatiques, investissements<br />
dans <strong>de</strong>s activités à caractère<br />
social après la prise d’otage) et les différentes<br />
approches psychopathologiques<br />
proposées pour expliquer les phénomènes<br />
comportementaux et affectifs<br />
observés ainsi que les mécanismes<br />
d’adaptation physio-psychologiques.<br />
Schémas<br />
psychologiques <strong>de</strong>s<br />
situations <strong>de</strong><br />
séquestration<br />
L. Crocq (3) a systématisé le déroulement<br />
d’une prise d’otage selon une<br />
procédure en quatre phases afin d’ai<strong>de</strong>r<br />
la compréhension <strong>de</strong> la psychopathogénie<br />
du syndrome <strong>de</strong> Stockholm.<br />
La phase <strong>de</strong> capture est à l’origine d’un<br />
stress aigu ou « réaction d’effroi » au<br />
cours <strong>de</strong> laquelle la victime est confrontée<br />
brutalement au sentiment d’une<br />
mort proche avec effondrement <strong>de</strong>s<br />
mécanismes <strong>de</strong> défense contre l’angoisse<br />
<strong>de</strong> mort. Cet effondrement du<br />
fantasme d’immortalité représente une<br />
perte <strong>de</strong> protection et un véritable<br />
« basculement <strong>de</strong> la réalité » exprimé<br />
par <strong>de</strong> nombreuses victimes. Cette<br />
réaction douloureuse peut se traduire<br />
par <strong>de</strong>s symptômes neurovégétatifs<br />
(évanouissements, diarrhées) ou <strong>de</strong>s<br />
troubles psychosomatiques (infarctus,<br />
crise d’asthme), <strong>de</strong>s symptômes d’angoisse<br />
(attaque <strong>de</strong> panique, cris, pleurs),<br />
une inhibition motrice majeure à type<br />
<strong>de</strong> sidération voire une torpeur, parfois<br />
une agitation anxieuse ou plus rarement<br />
un état confusionnel. Pendant<br />
cette situation <strong>de</strong> stress aigu, l’otage<br />
peut tenter <strong>de</strong> résister à ses ravisseurs<br />
ou <strong>de</strong> s’enfuir mais, passer ce premier<br />
temps, sa résistance s’épuise et il s’oriente<br />
vers l’idée d’une collaboration.<br />
La phase <strong>de</strong> séquestration est une<br />
phase <strong>de</strong> stabilisation qui suit le temps<br />
<strong>de</strong> frustration et <strong>de</strong> tension. En même<br />
temps qu’il prend conscience <strong>de</strong> la<br />
situation le sujet accepte progressivement<br />
son statut d’otage. Si pour certains<br />
sujets le maintien d’un déni se<br />
traduit par une hypersomnie à valeur<br />
<strong>de</strong> refuge, pour la plupart <strong>de</strong>s victimes<br />
l’acceptation se déroule en trois temps :<br />
premièrement le déni <strong>de</strong> la situation,<br />
<strong>de</strong>uxièmement l’espoir pendant lequel<br />
le sujet pense que tout ceci est temporaire,<br />
et troisièmement la perte d’espoir<br />
qui correspond à l’acceptation <strong>de</strong><br />
la situation d’otage dans tous ses<br />
aspects. Cette reconnaissance du statut<br />
d’otage peut s’accompagner <strong>de</strong><br />
manifestations <strong>de</strong> lutte contre l’angoisse<br />
sous la forme <strong>de</strong> symptômes obsessionnels<br />
comme une arithmomanie<br />
(compter les lames du parquet, compter<br />
les fissures dans le mur, compter<br />
ses doigts « en boucle », etc.), <strong>de</strong>s rituels<br />
(balayer du regard <strong>de</strong> façon stéréotypée<br />
le même coin <strong>de</strong> la pièce), <strong>de</strong>s ruminations<br />
(sur son passé, sur sa façon<br />
d’être). Une thymie dépressive associant<br />
un sentiment <strong>de</strong> culpabilité d’avoir<br />
été pris en otage peut apparaître. La<br />
séquestration est la phase pendant<br />
laquelle se constitue le syndrome <strong>de</strong><br />
Stockholm, phase pendant laquelle sont<br />
présentes <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> dépendance<br />
à l’égard <strong>de</strong>s ravisseurs : dépendance<br />
pour les besoins vitaux (se mobiliser,<br />
boire, manger, uriner, déféquer, menstruations).<br />
Un sentiment <strong>de</strong> déshumanisation<br />
accompagne ces conditions<br />
souvent dégradantes. Mais, en même<br />
temps, un sentiment <strong>de</strong> sympathie<br />
émerge <strong>de</strong> cette proximité et promiscuité<br />
entre les otages et leurs ravisseurs.<br />
Progressivement s’installe chez l’otage<br />
une tendance à la légitimation <strong>de</strong> cette<br />
situation. La victime peut même entreprendre<br />
<strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> séduction<br />
envers ses ravisseurs, une affinité s’installe<br />
à l’occasion <strong>de</strong> petits gestes, <strong>de</strong><br />
paroles, lors du passage <strong>de</strong> la nourriture,<br />
d’une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> couverture ou d’eau<br />
ou d’autres échanges. Cette nouvelle<br />
homéostasie dans le milieu intérieur<br />
que représente le groupe constitué <strong>de</strong>s<br />
otages et <strong>de</strong> leurs ravisseurs génère un<br />
nouveau rapport avec le milieu extérieur<br />
constitué <strong>de</strong>s négociateurs et <strong>de</strong>s<br />
médias. Ce milieu extérieur est alors<br />
perçu comme plus dangereux que le<br />
milieu intérieur. Petit à petit les ravisseurs<br />
prennent aussi le statut d’otage,<br />
étant empêchés d’agir et <strong>de</strong> sortir.<br />
La phase <strong>de</strong> dénouement correspondant<br />
à la libération est caractérisée par<br />
la recru<strong>de</strong>scence d’une angoisse liée<br />
au risque d’une issue dramatique et<br />
une nouvelle proximité avec la mort. A<br />
cette phase, les comportements paradoxaux<br />
<strong>de</strong>s otages peuvent les amener<br />
à protéger leurs ravisseurs contre<br />
l’assaut <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre.<br />
La phase séquellaire dans les jours qui<br />
suivent la libération peut se manifester<br />
dans les jours ou les semaines par<br />
<strong>de</strong>s troubles thymiques, euphoriques<br />
ou dépressifs, associés à <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong><br />
culpabilité. Les victimes adhèrent dura-<br />
<br />
LIVRES<br />
FMC ■ 5<br />
100 mots pour comprendre<br />
la psychiatrie<br />
Jean Garrabé<br />
Les Empêcheurs <strong>de</strong> penser en rond,<br />
18 €<br />
La psychiatrie est concernée par <strong>de</strong>s<br />
troubles psychiatriques graves (psychoses,<br />
schizophrénie) mais aussi par<br />
<strong>de</strong>s troubles rencontrés en mé<strong>de</strong>cine<br />
<strong>de</strong> ville (différentes formes <strong>de</strong> dépression,<br />
troubles obsessionnels,<br />
anxiété, troubles <strong>de</strong>s conduites <strong>de</strong>s<br />
enfants et <strong>de</strong>s adolescents, troubles<br />
du comportement alimentaire). Elle<br />
procè<strong>de</strong> avant tout d’une démarche<br />
clinique et empirique et s’élabore à<br />
la croisée <strong>de</strong> différents courants théoriques<br />
(psychanalyse, psychologie,<br />
neurosciences, pharmacologie biologique...).<br />
Jean Garrabé dresse un tableau <strong>de</strong><br />
la discipline et montre comment l’ensemble<br />
<strong>de</strong> ces notions confluentes<br />
qui structurent son champ sont en<br />
cohérence mais font aussi l’objet <strong>de</strong><br />
débats et <strong>de</strong> controverses. Le langage<br />
psychiatrique s’enrichit <strong>de</strong> mots<br />
provenant d’autres branches <strong>de</strong> la<br />
mé<strong>de</strong>cine, <strong>de</strong> la psychanalyse, <strong>de</strong>s<br />
sciences <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong>s sciences<br />
humaines, <strong>de</strong> la philosophie, voire<br />
<strong>de</strong> la religion.<br />
Devant choisir dans cet ensemble<br />
une centaine <strong>de</strong> mots, Jean Garrabé<br />
a retenu ceux que l’on peut, quelle<br />
que soit leur provenance, relier entre<br />
eux pour tisser un réseau, un filet permettant<br />
d’en pêcher d’autres dans<br />
différents courants <strong>de</strong> pensée.<br />
Les phobies<br />
Paul Denis<br />
Coll. « Que sais-je »<br />
PUF<br />
Paul Denis est psychanalyste, membre<br />
titulaire <strong>de</strong> la Société Psychanalytique<br />
<strong>de</strong> Paris. On retrouve dans son ouvrage,<br />
très complet, les qualités <strong>de</strong><br />
synthèse et <strong>de</strong> documentation qui<br />
constituent l’attrait <strong>de</strong> la collection<br />
« Que sais-je ». Il traite ainsi <strong>de</strong>s différentes<br />
manifestations phobiques chez<br />
l’adulte, symptômes ou maladie, et<br />
<strong>de</strong>s phobies infantiles. Des cas cliniques<br />
illustrent cet exposé.<br />
Après s’être interrogé sur le statut du<br />
trouble dans la psychopathologie, il<br />
développe le lien entre phobie et dépression.<br />
L’originalité <strong>de</strong> l’éreutophobie<br />
est mise en valeur. Si on<br />
relève une gran<strong>de</strong> diversité <strong>de</strong>s approches<br />
théoriques, on peut remarquer<br />
que l’auteur privilégie l’abord<br />
psychanalytique et ne cite que brièvement<br />
les thérapies cognitives et<br />
comportementales. A travers sa rédaction<br />
et sa réflexion sur le thème<br />
<strong>de</strong>s phobies, l’auteur réussit un livre<br />
qui s’adresse aux professionnels et à<br />
ceux qui s’intéressent à « leur propre<br />
vie psychique ».<br />
A. Cossin<br />
Sein <strong>de</strong> femme, sein <strong>de</strong><br />
mère<br />
Hélène Parat<br />
Presses Universitaires <strong>de</strong> France,<br />
11 €<br />
Par cette approche anthropologique,<br />
Hélène Parat montre le chemin qui<br />
parcourt les sinuosités <strong>de</strong> la fantasmatique<br />
du lait et rencontre les multiplicités<br />
du sein se confronte au passage<br />
à la nécessité du partage, un<br />
impossible et nécessaire partage, qui<br />
d’emblée a inscrit les dualités préœdipiennes<br />
dans les négociations œdipiennes.<br />
Une femme peut être apparemment<br />
mère sans s’être sentie<br />
femme, et pourtant, comme les enjeux<br />
<strong>de</strong> sa féminité passent par les<br />
multiples facettes <strong>de</strong> son désir d’enfant,<br />
les enjeux <strong>de</strong> la maternité passent<br />
par cette difficile voie qui la détermine<br />
femme pour un autre.
6<br />
LIVRES<br />
■ FMC<br />
Introduction à la<br />
psychopathologie<br />
Alain Braconnier<br />
Avec la collaboration d’Eric<br />
Corbobesse, François<br />
Deschamps, Nathalie Duriez,<br />
Nelly Gaillard-Janin, Catherine<br />
Joubert-Chain, Françoise Laugier,<br />
Catherine Saint-Georges<br />
Masson<br />
Dans les <strong>de</strong>ux premiers chapitres <strong>de</strong><br />
cet ouvrage, sont abordées les questions<br />
soulevées par l’entretien clinique<br />
et les théories qui peuvent le soustendre.<br />
Dans les trois chapitres suivants,<br />
sont présentées les gran<strong>de</strong>s<br />
entités psychopathologiques, en établissant<br />
<strong>de</strong>s ponts avec les classifications<br />
multi-axiales contemporaines<br />
et en résumant pour chaque trouble<br />
les points <strong>de</strong> vue explicatifs théoriques<br />
différents.<br />
Au niveau clinique, la distinction entre<br />
Névroses et Psychoses a constitué,<br />
pendant <strong>de</strong> nombreuses années, la<br />
base <strong>de</strong> la psychopathologie aussi<br />
bien pour l’enfant que pour l’adulte.<br />
Les Etats Limites, les Troubles Narcissiques<br />
<strong>de</strong> la Personnalité, les Perversions,<br />
les Organisations Psychosomatiques,<br />
tous les états psychopathologiques<br />
qui ne peuvent être<br />
classés dans l’une ou l’autre structure,<br />
névrotique ou psychotique, n’ont<br />
vu la découverte <strong>de</strong> leurs caractéristiques<br />
que dans la <strong>de</strong>uxième moitié<br />
du XX e siècle. Plus récemment, les<br />
classifications internationales multiaxiales<br />
ont démembré ces entités<br />
pour en extraire <strong>de</strong> multiples syndromes<br />
relevant <strong>de</strong> l’une ou <strong>de</strong> l’autre<br />
<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s entités précé<strong>de</strong>ntes mais<br />
voulant apparemment se détacher<br />
<strong>de</strong> tout point <strong>de</strong> vue explicatif.<br />
Esquisses <strong>de</strong> philosophie<br />
morale<br />
Dugald Stewart<br />
Introduction <strong>de</strong> Serge Nicolas<br />
L’Harmattan, 24,50 €<br />
Face au scepticisme <strong>de</strong> David Hume,<br />
les philosophes écossais, avec Thomas<br />
Reid et Dugald Stewart, ont tenté<br />
<strong>de</strong> s’appuyer sur le sens commun,<br />
qui est dans la raison et qui doit fon<strong>de</strong>r<br />
la validité <strong>de</strong>s convictions <strong>de</strong><br />
l’homme <strong>de</strong> la rue et donc aboutir au<br />
bon sens raisonnable.<br />
La philosophie du sens commun suppose<br />
au départ une science <strong>de</strong> l’esprit.<br />
Qu’il s’agisse du mon<strong>de</strong> extérieur,<br />
du moi, d’autrui, <strong>de</strong> la causalité<br />
ou <strong>de</strong> la morale, il est nécessaire <strong>de</strong><br />
déterminer comment nous arrivons<br />
à nos jugements et dans quelle mesure<br />
ils sont fiables. C’est l’esprit qui<br />
se retourne ici sur lui-même, se prend<br />
comme objet pour étudier sa manière<br />
<strong>de</strong> connaître. Il est donc important<br />
d’adopter une métho<strong>de</strong> qui a fait ses<br />
preuves : ce sera la métho<strong>de</strong> inductive.<br />
Reid et Stewart l’utiliseront pour<br />
développer la science ou philosophie<br />
<strong>de</strong> l’esprit.<br />
Cette psychologie eut un grand succès<br />
en France au cours <strong>de</strong> la première<br />
moitié du XIX e siècle après les leçons<br />
<strong>de</strong> Pierre Pont Royer-Collard, puis <strong>de</strong><br />
Victor Cousin, qui ont vu dans cette<br />
philosophie un moyen <strong>de</strong> combattre<br />
le sensualisme condillacien représenté,<br />
alors, à la Sorbonne par Pierre<br />
Laromiguière. Les psychologues éclectiques<br />
français se sont efforcés alors<br />
<strong>de</strong> rendre accessibles au public les<br />
écrits <strong>de</strong> cette école écossaise représentée<br />
alors par la philosophie <strong>de</strong><br />
Dugald Stewart.<br />
Théodore Jouffroy s’est engagé dans<br />
cette voie en traduisant en 1826 les<br />
Esquisses <strong>de</strong> philosophie morale <strong>de</strong><br />
Dugald Stewart, dont la première édition<br />
date <strong>de</strong> 1793, et qui représentent<br />
le résumé <strong>de</strong> son cours <strong>de</strong> philosophie<br />
<strong>de</strong> l’esprit donné à l’Université<br />
d’Edimbourg.<br />
<br />
blement à la cause <strong>de</strong> leurs agresseurs.<br />
Il peut apparaître à cette phase un syndrome<br />
<strong>de</strong> stress aigu post-traumatique<br />
qui constitue une complication fréquente<br />
<strong>de</strong>s prises d’otages. Le caractère<br />
généralement réversible du syndrome<br />
<strong>de</strong> Stockholm ne doit pas faire sous<br />
estimer le risque <strong>de</strong> bouleversement<br />
profond <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong>s familles et <strong>de</strong><br />
leur victime. Parmi ces bouleversements<br />
on a pu noter un changement d’attitu<strong>de</strong><br />
et même du sens moral <strong>de</strong> certains<br />
otages dont le jugement <strong>de</strong>venait<br />
permissif à l’égard <strong>de</strong> la délinquance<br />
et critique à l’égard <strong>de</strong> la société. De<br />
nombreuses hypothèses psychologiques<br />
proposent <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> compréhension<br />
<strong>de</strong> ce phénomène paradoxal que<br />
constitue le syndrome <strong>de</strong> Stockholm,<br />
paradoxal au regard <strong>de</strong> la douloureuse<br />
expérience <strong>de</strong> séquestration, d’humiliation<br />
et <strong>de</strong> « chosification » infligée<br />
par la situation d’otage. Ces mo<strong>de</strong>s<br />
explicatifs reposent principalement sur<br />
les apports <strong>de</strong> la psychanalyse, <strong>de</strong> la<br />
psychologie <strong>de</strong>s groupes et <strong>de</strong>s théories<br />
<strong>de</strong> la communication. Les manifestations<br />
affectives et comportementales<br />
observées chez les otages<br />
procè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> mécanismes <strong>de</strong> défense<br />
complexes en particulier un mécanisme<br />
décrit par Anna Freud isolé sous le<br />
terme d’« i<strong>de</strong>ntification à l’agresseur » (4).<br />
Par ce mécanisme inconscient, le sujet<br />
confronté à un danger s’i<strong>de</strong>ntifie à son<br />
agresseur en reprenant à son compte<br />
l’agression ou en imitant physiquement<br />
ou moralement la personne <strong>de</strong> l’agresseur<br />
ou en adoptant certains symboles<br />
<strong>de</strong> puissance qui le désignent. Cette<br />
i<strong>de</strong>ntification constitue un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
réponse contre l’angoisse <strong>de</strong> mort. L’expérience<br />
<strong>de</strong> totale dépendance <strong>de</strong> l’otage<br />
vis-à-vis du ravisseur a été rapprochée<br />
d’un autre type <strong>de</strong> dépendance,<br />
celle concernant la dépendance <strong>de</strong> l’enfant<br />
à l’égard <strong>de</strong> sa mère, sta<strong>de</strong> précoce<br />
<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> infantile. L’expérience<br />
d’otage produirait, en quelque sorte,<br />
une régression (c’est-à-dire un retour à<br />
<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> pensée et <strong>de</strong> conduite<br />
ne correspondant ni à l’âge ni à la maturité<br />
psychique du sujet) à un sta<strong>de</strong><br />
préœdipien <strong>de</strong> la vie infantile.<br />
Typologie prédictive<br />
Des facteurs dits prédictifs augmentent<br />
ou diminuent le risque <strong>de</strong> survenue<br />
d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm, ils peuvent<br />
concerner la victime, le mo<strong>de</strong> opératoire<br />
<strong>de</strong>s ravisseurs ou les conditions<br />
<strong>de</strong> détention <strong>de</strong>s otages ainsi que le<br />
rôle <strong>de</strong>s médias. Une typologie <strong>de</strong>s<br />
prises d’otages a permis <strong>de</strong> repérer<br />
quatre situations prenant en compte<br />
les motivations et la personnalité <strong>de</strong>s<br />
ravisseurs (5) : il s’agit parfois <strong>de</strong> malfaiteurs<br />
pris au piège en flagrant délit,<br />
d’autres fois il s’agit <strong>de</strong> terroristes à<br />
motivation politique, ou <strong>de</strong> prisonniers<br />
en révolte ou encore <strong>de</strong> personnes présentant<br />
une maladie mentale (dépression,<br />
personnalité pathologique, état<br />
délirant). Parmi ces quatre formes <strong>de</strong><br />
prises d’otages, celles étant réalisées sans<br />
violence physique, <strong>de</strong> façon non préméditée<br />
et dont les comportements <strong>de</strong>s<br />
ravisseurs peuvent être rationalisés,<br />
constituent <strong>de</strong>s situations favorisant la<br />
survenue d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm.<br />
Dans <strong>de</strong> rares cas, l’existence <strong>de</strong> sévices<br />
corporels peut favoriser le syndrome<br />
d’empathie <strong>de</strong>s victimes à l’égard <strong>de</strong><br />
leurs auteurs en particulier lorsque les<br />
victimes rationalisent ce type <strong>de</strong> comportement<br />
(« il fait cela parce qu’il est obligé<br />
») et se culpabilisent (« c’est à cause<br />
<strong>de</strong> moi qu’il a fait ça »).<br />
Concernant la victime (6) les facteurs<br />
prédictifs sont : le jeune âge et l’immaturité<br />
psycho-affective. Ils favorisent<br />
l’apparition <strong>de</strong> relations <strong>de</strong> confiance.<br />
Les femmes sembleraient plus vulnérables<br />
que les hommes. La durée <strong>de</strong><br />
la prise d’otages favorise aussi l’apparition<br />
<strong>de</strong> relations interpersonnelles<br />
nécessaires à l’émergence d’une cohésion<br />
du groupe otage/ravisseur. La personnalité<br />
<strong>de</strong>s victimes tient une place<br />
importante dans la genèse du syndrome<br />
: il paraît important qu’un système<br />
<strong>de</strong> croyance bien établi (en particulier<br />
sur le plan religieux) ainsi que l’existence<br />
<strong>de</strong> valeurs morales stables et<br />
d’une richesse imaginative (qui tient<br />
un rôle <strong>de</strong> survie psychique <strong>de</strong> l’otage)<br />
sont <strong>de</strong>s conditions importantes<br />
dans la survenue du syndrome <strong>de</strong><br />
Stockholm. De la même façon il<br />
semble que la prédisposition individuelle<br />
d’un otage à transgresser la loi<br />
pour une cause facilite la reconnaissance<br />
inconsciente <strong>de</strong> la victime envers<br />
le « transgresseur ». La capacité <strong>de</strong> la<br />
victime à gérer son angoisse grâce à<br />
<strong>de</strong>s mécanismes psychologiques <strong>de</strong><br />
défense (mécanismes inconscients) est<br />
prise en compte. Côté ravisseurs, les<br />
facteurs prédictifs sont liés aux traits<br />
<strong>de</strong> personnalité. Par exemple, une personnalité<br />
paranoïaque chez l’agresseur<br />
aura plus d’emprise sur les otages avec<br />
un important pouvoir <strong>de</strong> persuasion<br />
permettant d’induire leur adhésion à<br />
sa cause. L’existence <strong>de</strong> traits psychopathiques<br />
(personnalité antisociale)<br />
associant un égocentrisme, une capacité<br />
<strong>de</strong> séduction et <strong>de</strong> manipulation, une<br />
capacité à se mettre en valeur et la tendance<br />
à projeter sur les autorités la<br />
cause <strong>de</strong> ses problèmes sont <strong>de</strong>s facteurs<br />
favorisant l’émergence <strong>de</strong> sentiments<br />
positifs <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s otages.<br />
D’autres facteurs prédictifs <strong>de</strong> la survenue<br />
d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm<br />
consistent dans le mo<strong>de</strong> opératoire <strong>de</strong>s<br />
ravisseurs et les conditions <strong>de</strong> détention<br />
<strong>de</strong>s otages. L’existence d’une agressivité<br />
physique <strong>de</strong>s ravisseurs à l’égard<br />
<strong>de</strong>s otages compromet l’apparition <strong>de</strong>s<br />
sentiments positifs constitutifs du syndrome,<br />
<strong>de</strong> la même façon l’existence<br />
d’un antagonisme ethnique <strong>de</strong> type<br />
raciste avec sentiment <strong>de</strong> haine <strong>de</strong>s<br />
ravisseurs vis-à-vis <strong>de</strong> leurs victimes<br />
empêche la survenue du syndrome <strong>de</strong><br />
Stockholm. En revanche, le risque <strong>de</strong><br />
survenue du syndrome est augmenté<br />
par une motivation reliée à une idéologie<br />
« humanitaire » <strong>de</strong> la prise d’otage<br />
(libération <strong>de</strong> détenus ou appel en<br />
faveur <strong>de</strong> leurs conditions <strong>de</strong> détention,<br />
lutte contre une oppression politique<br />
etc). Dans ce cas, la légitimation<br />
<strong>de</strong> leur propre séquestration est plus<br />
rapi<strong>de</strong> ainsi que leur adhésion à la<br />
cause <strong>de</strong>s ravisseurs. Certains terroristes<br />
politiques redoutant l’apparition<br />
chez eux <strong>de</strong> sentiments et <strong>de</strong> com-<br />
La France a l’un <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> les plus élevés dans<br />
l’Union Européenne pour les femmes <strong>de</strong> 20 à 44 ans<br />
La France a l’un <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> les plus élevés parmi les 25 pays <strong>de</strong><br />
l’Union européenne pour les femmes âgées <strong>de</strong> 20 à 44 ans, selon une enquête<br />
<strong>de</strong> l’Office statistique <strong>de</strong>s communautés européennes Eurostat*.<br />
Il s’agit d’une enquête sur les causes <strong>de</strong> mortalité dans l’Union européenne,<br />
avec <strong>de</strong>s chiffres donnés en moyenne pour les trois années <strong>de</strong> 2001 à 2003.<br />
Elle montre que la France arrive en quatrième position en ce qui concerne<br />
les taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> pour les femmes <strong>de</strong> 20 à 44 ans, <strong>de</strong>rrière la Lituanie, la<br />
Finlan<strong>de</strong> et la région flaman<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Belgique, avec un taux <strong>de</strong> 8,6 pour<br />
100 000 femmes <strong>de</strong> cette classe d’âge, la moyenne <strong>de</strong>s 25 pays <strong>de</strong> l’Union<br />
européenne se situant à 4,9. En revanche, l’Hexagone présente le taux le plus<br />
faible <strong>de</strong> mortalité <strong>de</strong>s suites <strong>de</strong> cardiopathies ischémiques chez les personnes<br />
âgées <strong>de</strong> 65 à 84 ans, avec 402 hommes <strong>de</strong> cet âge décédant <strong>de</strong> cette cause<br />
sur 100 000 et 169 femmes, contre une moyenne respective <strong>de</strong> 788 et 450<br />
pour les 25 pays <strong>de</strong> l’Union européenne.<br />
B.L.<br />
*Les causes <strong>de</strong> mortalité dans l’Union européenne, statistiques Eurostat.<br />
portements d’empathie paradoxale à<br />
l’égard <strong>de</strong>s otages (sentiments décrits<br />
par Ochberg) qui rendraient difficile<br />
l’exécution d’un otage, maintiennent<br />
les victimes dans un isolement visuel<br />
(pièce sombre, ban<strong>de</strong>au sur les yeux) et<br />
auditif (changements régulier <strong>de</strong>s<br />
« gar<strong>de</strong>s » sans contact verbal). Cet isolement<br />
retar<strong>de</strong> ou compromet l’apparition<br />
<strong>de</strong> sentiments positifs. Les facteurs<br />
<strong>de</strong> groupe jouent un rôle<br />
important dans la genèse du syndrome<br />
Stockholm : l’homogénéité et la cohésion<br />
du groupe diminuent le risque <strong>de</strong><br />
sa survenue ; à l’inverse l’existence <strong>de</strong><br />
tensions au sein du groupe favorise le<br />
risque. Les conditions <strong>de</strong> vie du groupe,<br />
l’exiguïté <strong>de</strong>s lieux et la promiscuité<br />
font naître l’idée d’une incapacité du<br />
milieu extérieur à protéger ses membres<br />
et confortent le sentiment d’être abandonné.<br />
Parallèlement l’établissement <strong>de</strong><br />
relations avec les ravisseurs participe<br />
d’une ré-humanisation <strong>de</strong>s otages ; le<br />
milieu extérieur <strong>de</strong>vient menaçant et<br />
le nouveau groupe otages-ravisseurs est<br />
investi comme un milieu protecteur.<br />
Etat <strong>de</strong> stress posttraumatique<br />
Le syndrome <strong>de</strong> Stockholm n’est pas la<br />
seule modalité évolutive <strong>de</strong> l’expérience<br />
douloureuse <strong>de</strong> la prise d’otage, parmi<br />
les autres modalités une place particulière<br />
peut être faite au diagnostic<br />
d’ « état <strong>de</strong> stress post-traumatique » (7),<br />
dénomination mo<strong>de</strong>rne correspondant<br />
à la classique « névrose traumatique »<br />
décrite par H. Openheim dans les<br />
années 1880-1890 et étudiée attentivement<br />
en France par L. Crocq (8). La<br />
riche symptomatologie <strong>de</strong> ce syndrome<br />
est caractérisée par un ordre d’apparition<br />
<strong>de</strong>s symptômes (un temps <strong>de</strong><br />
latence -<strong>de</strong> quelques heures ou jours ou<br />
semaines- sépare l’événement traumatisant<br />
<strong>de</strong> l’apparition <strong>de</strong>s premiers<br />
symptômes) : le syndrome <strong>de</strong> répétition<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Les jeunes mé<strong>de</strong>cins généralistes aimeraient<br />
recevoir plus d’informations sur la dépression au<br />
cours <strong>de</strong> leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />
Selon les résultats d’une enquête internationale, neuf jeunes mé<strong>de</strong>cins généralistes<br />
(MG) sur dix estiment que la formation donnée en faculté <strong>de</strong><br />
mé<strong>de</strong>cine sur la dépression - et en particulier sur les douleurs corporelles associées<br />
- <strong>de</strong>vrait être plus approfondie. Sur les 500 MG interrogés dans cinq<br />
pays - le Brésil, la France, l’Allemagne, le Mexique et le Royaume-Uni - moins<br />
d’un tiers estiment que leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine les a préparés à diagnostiquer<br />
une dépression lors <strong>de</strong> la première visite d’un patient (30%) ou à traiter<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s symptômes <strong>de</strong> la dépression, aussi bien psychiques que<br />
physiques, pour atteindre la rémission (32%). Les MG interrogés avaient tous<br />
une pratique clinique <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong>puis trois à cinq ans et les résultats<br />
étaient relativement similaires d’un pays à l’autre. « Il est important que les mé<strong>de</strong>cins<br />
reconnaissent rapi<strong>de</strong>ment et envisagent certains symptômes physiques -<br />
tels que la fatigue, les douleurs diffuses et <strong>de</strong>s troubles du sommeil comme <strong>de</strong>s<br />
signes possibles <strong>de</strong> dépression » pour Preston Garrison, Secrétaire Général et<br />
Directeur Général <strong>de</strong> la Fédération mondiale pour la santé mentale (WFMH),<br />
l’un <strong>de</strong>s initiateurs <strong>de</strong> l’enquête. Les trois quarts (74%) <strong>de</strong>s MG ont déclaré<br />
que leur formation leur avait appris l’importance <strong>de</strong> prendre en compte à la<br />
fois les symptômes psychiques et les douleurs corporelles <strong>de</strong> la dépression<br />
et plus <strong>de</strong> la moitié (58%) qu’on leur avait enseigné que les patients dépressifs<br />
consultaient souvent d’abord pour <strong>de</strong>s douleurs corporelles. Toutefois, une<br />
fois mis à l’épreuve, les MG ont montré un certain nombre <strong>de</strong> lacunes dans<br />
leurs connaissances et <strong>de</strong> perceptions erronées sur le rôle <strong>de</strong>s douleurs corporelles<br />
dans le diagnostic et le traitement <strong>de</strong> la dépression. Lorsqu’ils ont<br />
été invités à citer cinq symptômes <strong>de</strong> la dépression leur venant à l’esprit, par<br />
exemple, seuls un tiers <strong>de</strong>s MG, ou moins, ont pensé aux douleurs corporelles,<br />
et moins d’un tiers (27%) ont reconnu que les douleurs corporelles<br />
faisaient, la plupart du temps, partie <strong>de</strong>s symptômes <strong>de</strong> la dépression. De<br />
plus, si les MG pensent que les patients dépressifs peuvent parvenir à la rémission<br />
(résolution complète <strong>de</strong>s symptômes), une gran<strong>de</strong> majorité pensent<br />
à tort que le traitement <strong>de</strong>s symptômes psychiques entraînera aussi la résolution<br />
<strong>de</strong>s douleurs corporelles. les recherches cliniques montrent que ceuxci<br />
restent souvent non résolus, même après que les symptômes psychiques<br />
se sont atténués*. Les jeunes MG sont d’accord (48%) ou tout à fait d’accord<br />
(39%) pour dire que la formation reçue pendant leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />
sur la dépression doit être améliorée et une majorité est d’accord (52%) ou<br />
tout à fait d’accord (34%) pour dire que ces améliorations doivent spécifiquement<br />
porter sur les douleurs corporelles <strong>de</strong> la dépression.<br />
L’enquête Testing the Medics s’inscrit dans le cadre <strong>de</strong> la campagne <strong>de</strong> sensibilisation<br />
sur la dépression <strong>de</strong> la WFMH, Breaking through Barriers, une initiative<br />
<strong>de</strong> sensibilisation publique visant à diminuer la stigmatisation <strong>de</strong> la dépression<br />
et à améliorer la qualité <strong>de</strong> la prise en charge <strong>de</strong> la maladie à l’échelle<br />
mondiale. Cette campagne est soutenue conjointement par la WFMH, Eli<br />
Lilly and Company et Boehringer Ingelheim. ■<br />
G.M.<br />
*Greco T. et al., J Gen Intern. M 2004; 19, 813-818<br />
(considéré comme étant pathognomonique)<br />
apparaît comme la répétition<br />
d’un cauchemar dans lequel la<br />
personne revit <strong>de</strong> façon quasi hallucinatoire<br />
la scène traumatisante. Dans<br />
ce syndrome l’angoisse est massive avec<br />
gran<strong>de</strong> douleur psychique, sueurs, palpitations<br />
etc. Une tendance à la somatisation<br />
avec apparition <strong>de</strong> troubles psychosomatiques<br />
(douleurs abdominales<br />
ou autres localisations algiques ou douleurs<br />
diffuses) apparaît dans le décours<br />
du syndrome <strong>de</strong> répétition. Peuvent<br />
aussi apparaîtrent <strong>de</strong>s troubles psychiques<br />
multiples à type <strong>de</strong> phobies,<br />
<strong>de</strong> réactions <strong>de</strong> sursaut exagéré, <strong>de</strong><br />
symptômes comparables aux symptômes<br />
<strong>de</strong> conversion (troubles somatoformes)<br />
<strong>de</strong>s troubles du sommeil etc..<br />
L’installation d’un syndrome dépressif<br />
conditionne le pronostic en raison <strong>de</strong> sa<br />
chronicité, sa résistance aux thérapeutiques<br />
et le risque suicidaire. ■<br />
Serge Tribolet<br />
Psychiatre <strong>de</strong>s hôpitaux, 6ème secteur <strong>de</strong> Paris.<br />
Bibliographie<br />
(1) OCHBERG F., The victim of terrorism, Practioner,<br />
1978, 220.<br />
(2) OCHBERG F., Victim of Terrorism: Psychiatric<br />
Consi<strong>de</strong>rations, Terrorism, 1978, 1,2,<br />
147-168.<br />
(3) CROCQ L., SAILHAN M., BARROIS C.,<br />
Névroses traumatiques (névrose d’effroi, névrose<br />
<strong>de</strong> guerre), Encyclopédie Médico Chirurgicale,<br />
2.1983, 37329, AIO, 12p.<br />
(4) LAPLANCHE J., PONTALIS J.-B., Vocabulaire<br />
<strong>de</strong> la psychanalyse, Ed. PUF, Paris, 1988,<br />
pp 190-192.<br />
(5) BIGOT T., BORNSTEIN S.J., Schème paradoxal<br />
<strong>de</strong> comportement lors <strong>de</strong> prises d’otages<br />
(syndrome <strong>de</strong> Stockholm), Ann Psychiatr, 1988,<br />
3, 3, 196-206.<br />
(6) BIGOT T., Approche victimologique <strong>de</strong> la<br />
prise d’otages : schèmes paradoxaux <strong>de</strong> comportement<br />
<strong>de</strong> comportement, Synapse, 1989,<br />
55, 47.<br />
(7) American Psychiatric Association, DSM-<br />
IV, Manuel diagnostique et statistique <strong>de</strong>s<br />
troubles mentaux, 4ème édition, Ed. Masson,<br />
Paris, 1996, pp. 498-504.<br />
(8) CROCQ L., SAILHAN M., BARROIS C.,<br />
Névroses traumatiques, op. cit.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
évoquée par René <strong>de</strong> Ceccatty concerne<br />
la naissance <strong>de</strong> Pasolini comme<br />
poète, soit le moment <strong>de</strong> son adolescence.<br />
Sa poésie prendra reconnaissance<br />
rapi<strong>de</strong>ment dans le mon<strong>de</strong> littéraire.<br />
La langue poétique <strong>de</strong> Pasolini<br />
sera dès lors frioulane et non pas italienne.<br />
Les premiers poèmes seront<br />
paradoxalement dédiés à son père,<br />
Carlo Alberto Pasolini, d’origine aristocratique<br />
déchue, alors en captivité<br />
au Kenya. L’adresse <strong>de</strong> la création poétique<br />
<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> guerre<br />
mondiale concerne donc le lien avec<br />
le père et la mère. Le rapport <strong>de</strong> Pier<br />
Paolo avec son père est décrit classiquement<br />
comme haineux.<br />
La biographie écrite par René <strong>de</strong> Ceccatty<br />
apporte <strong>de</strong>s précisions. Evoquant<br />
son père dans un entretien Pasolini<br />
disait : « Dans les premières années <strong>de</strong><br />
ma vie, il a été plus important que ma<br />
mère. C’était une présence rassurante,<br />
forte. Un vrai père affectueux et protecteur.<br />
Puis soudain, quand j’avais environ<br />
trois ans, le conflit a éclaté. Dès lors,<br />
il y a toujours eu entre nous une tension<br />
d’antagonisme, <strong>de</strong> drame, <strong>de</strong> tragédie<br />
entre lui et moi (…)» (3). René <strong>de</strong><br />
Ceccatty insiste pour souligner l’absence<br />
<strong>de</strong> haine <strong>de</strong> Pier Paolo envers<br />
son père, mais que l’enfant perçoit la<br />
mésentente <strong>de</strong> ses parents, les scènes<br />
d’ivresse et <strong>de</strong> violence. Le rapport au<br />
père change donc pour Pier Paolo lorsqu’il<br />
a trois ans. Il est marqué par une<br />
brisure.<br />
En 1974, le père <strong>de</strong> Pasolini est mort<br />
<strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 15 ans. Le sujet vit avec<br />
sa mère, est célèbre internationalement<br />
pour ses réalisations cinématographiques,<br />
ses romans, ses théories sur<br />
l’art, ses prises <strong>de</strong> position politique,<br />
mais l’amour <strong>de</strong> sa vie, le jeune Ninetto<br />
Davoli prend distance sans jamais<br />
rompre totalement, pense se marier.<br />
Pasolini est confronté à la perspective<br />
du vieillissement. Il a 52 ans.<br />
Dans la réécriture en frioulan en 1974,<br />
le vœu <strong>de</strong> répétition et <strong>de</strong> retour s’affirme<br />
particulièrement au niveau <strong>de</strong> la<br />
forme du poème, cherchant une symétrie<br />
parfaite.<br />
L’ensemble, première forme <strong>de</strong> 1941-<br />
1953 et <strong>de</strong>uxième forme <strong>de</strong> 1974,<br />
sera publié sous le titre La nouvelle jeunesse,<br />
livre qui est « Un et Double »<br />
comme Narcisse, pour reprendre une<br />
expression <strong>de</strong> Philippe Di Méo (4). Cette<br />
tentative <strong>de</strong> restaurer le passé se fait<br />
Danses pasoliniennes<br />
clairement par l’intermédiaire <strong>de</strong> la<br />
forme <strong>de</strong> la poésie : tout se passe<br />
comme si l’écriture revêtait ses anciens<br />
vêtements pour refaire son entrée en<br />
scène en faisant semblant <strong>de</strong> n’en être<br />
jamais sortie. Mais le vêtement avec le<br />
temps s’est usé, a vieilli, n’est plus le<br />
même. Le miroir est troublé, fissuré,<br />
incapable <strong>de</strong> renvoyer autre chose<br />
qu’une ombre informe qui <strong>de</strong> plus,<br />
tend à s’échapper du miroir.<br />
En effet, le paysage frioulan n’est plus<br />
le même, l’histoire, le peuple frioulan<br />
ont changé.<br />
Face à l’impossibilité dans laquelle se<br />
trouve Narcisse <strong>de</strong> retrouver ce miroir<br />
d’antan qui lui permettait d’appréhen<strong>de</strong>r<br />
et <strong>de</strong> faire tenir le réel <strong>de</strong> son corps,<br />
la poésie et son écriture, dans leur fonction<br />
<strong>de</strong> miroir sont amenées à suppléer<br />
à cette défaillance <strong>de</strong> manière plus<br />
intense qu’auparavant.<br />
Ainsi, il s’agirait <strong>de</strong> reconstruire par la<br />
poésie, donc par le signifiant, une forme<br />
capable <strong>de</strong> faire tenir le corps, soit, en<br />
reprenant les formulations <strong>de</strong>s psychanalystes<br />
anglo-saxons, saisir l’écriture<br />
comme contenant, comme enveloppe<br />
corporelle qui viendrait pallier à<br />
la chose sans forme, à l’inconsistance du<br />
corps.<br />
Mais, cette tentative échoue : les <strong>de</strong>ux<br />
versions ne sont pas du point <strong>de</strong> vue<br />
formel tout à fait symétriques et surtout,<br />
le sens change radicalement <strong>de</strong> l’une à<br />
l’autre. Ce qui semblait se lier pour<br />
Pasolini dans le sens <strong>de</strong> la vie dans la<br />
première version se dénoue dans la<br />
secon<strong>de</strong> et va plutôt dans le sens d’un<br />
laisser-tomber voir même d’un pousseà-la-mort,<br />
et il est saisissant <strong>de</strong> rapprocher<br />
cet élément du constat <strong>de</strong> Philippe<br />
Di Méo : « La nouvelle jeunesse est<br />
le <strong>de</strong>rnier recueil <strong>de</strong> vers publié par Pier<br />
Paolo Pasolini <strong>de</strong> son vivant, quelques<br />
mois avant sa mort. C’est en ce sens un<br />
testament poétique ».<br />
Nous proposons <strong>de</strong> travailler <strong>de</strong>ux<br />
poèmes, un <strong>de</strong> l’époque <strong>de</strong> 1944-<br />
1949, inscrit dans la suite frioulane, intitulé<br />
Danses –suite frioulane (I-IV)- (6),<br />
l’autre <strong>de</strong> l’époque <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> forme<br />
<strong>de</strong> La meilleure jeunesse, 1974, ayant<br />
donc le même titre et la même inscription<br />
dans la formalisation poétique<br />
(7).<br />
Nous prendrons l’ordre chronologique.<br />
Première forme<br />
(1944-1949)<br />
I<br />
« Un enfant se regar<strong>de</strong> dans un miroir,<br />
son œil rit noir.<br />
Mécontent, il regar<strong>de</strong> le revers pour voir<br />
si cette Forme est un corps »<br />
Apparaît d’emblée pour le sujet Pasolini<br />
une tentative <strong>de</strong> nouer le scopique,<br />
via le miroir, à un corps pour lui donner<br />
forme « Un enfant se regar<strong>de</strong> dans<br />
un miroir ». Toutefois, cette tentative<br />
<strong>de</strong> nouage échoue : le scopique ne<br />
renvoie pas au vivant <strong>de</strong> la lumière<br />
mais au noir, au trou, au néant. « Son<br />
œil rit noir ». Aucun reflet ne permet au<br />
corps <strong>de</strong> prendre forme dans ce miroir,<br />
laissant le sujet dans un état d’informité.<br />
La tentative d’accrocher à cette<br />
ébauche <strong>de</strong> nouage entre le scopique et<br />
le corps, le signifiant incarné par le rire,<br />
échoue. Cette formulation « son œil rit<br />
noir » est précieuse pour éclairer le<br />
fonctionnement subjectif. Ce rire<br />
indique certes une jouissance <strong>de</strong> l’œil,<br />
un plus-<strong>de</strong>-jouir, mais aussi que le sujet<br />
produit un son, un signifiant, pur réel,<br />
pure jouissance sans symbolisation, qui<br />
fait ainsi heurt dans la tentative <strong>de</strong><br />
nouage signifiant-scopique-corps. Ce<br />
rire, cet air sonore, pur signifiant sans<br />
signification, n’a pas d’écho dans le<br />
corps. Ce rire ne permet pas l’accroche.<br />
Cela a pour effet le décrochage du<br />
nœud et le laisser tomber du corps<br />
réduit par le miroir au noir, à un vi<strong>de</strong>,<br />
donc à une opacité. Le fait qu’il soit<br />
« mécontent » souligne son désir <strong>de</strong> sortir<br />
<strong>de</strong> cet état <strong>de</strong> désêtre, <strong>de</strong> laisser<br />
tomber. Ce désir <strong>de</strong> trouver une solution<br />
se fait par le scopique puisqu’il se<br />
dirige alors vers le « revers » du miroir<br />
pour tenter d’aller vers un au-<strong>de</strong>là du<br />
rejet, témoignant par là même d’une<br />
confusion entre son corps et son image,<br />
entre le réel et l’imaginaire.<br />
« Mais il ne voit qu’un mur lisse<br />
ou la toile d’une araignée méchante.<br />
Sombre, il regar<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveau sa Forme<br />
Dans le miroir, une lueur sur le verre. »<br />
Sa tentative <strong>de</strong> se saisir d’une forme<br />
par le biais du scopique échoue. Il ne<br />
trouve en guise d’accroche qu’un mur<br />
lisse, une surface en <strong>de</strong>ux dimensions,<br />
sans reliefs et <strong>de</strong> laquelle aucun réfléchissement<br />
ne peut émaner. A ce vi<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> l’accroche répond le trop persécuteur<br />
: la toile d’une araignée méchante,<br />
réseau persécuteur dans lequel il pourrait<br />
bien être pris.<br />
Face à l’échec du scopique à donner<br />
forme au corps, il tente dans une répétition<br />
<strong>de</strong> nouer le scopique et la forme<br />
dans l’espoir d’y trouver une issue plus<br />
favorable. Il cherche <strong>de</strong> nouveau du<br />
regard sa forme. Une lueur apparaît. Il<br />
sort donc du néant pour n’être toutefois<br />
qu’une lueur, ce qui vient affliger le<br />
corps d’un certain rabaissement (Erniedrigung).<br />
De même, l’absence <strong>de</strong><br />
réflexion se répète puisque le verre<br />
n’est pas une surface réfléchissante.<br />
Cependant, il est à noter la production<br />
<strong>de</strong> nouveau dans cette répétition : le<br />
syntagme « une lueur sur le verre » vient<br />
tenter d’abolir l’opacité, le noir antérieur.<br />
Ces <strong>de</strong>ux premières strophes montrent<br />
donc le primat du scopique dans la<br />
tentative <strong>de</strong> parer au laisser-tomber et<br />
<strong>de</strong> faire tenir un corps. A cela viennent<br />
se raccor<strong>de</strong>r <strong>de</strong>ux questions : Où est sa<br />
Forme ? Où est son corps ? L’errance<br />
du signifiant qui fait heurt et qui ne se<br />
fixe pas empêche un nouage signifiantscopique-corps.<br />
II<br />
« Enfant, je regar<strong>de</strong> dans le Miroir<br />
et ce souvenir rit léger,<br />
le souvenir <strong>de</strong> ma vie vive<br />
comme l’herbe d’une rive noire. »<br />
Il apparaît alors un moment <strong>de</strong> vie, un<br />
allègement pour Pasolini. De quoi s’agitil<br />
? Il y a un nouage entre le scopique<br />
« je regar<strong>de</strong> dans le Miroir » et le signifiant<br />
« ce souvenir rit léger » qui évoque<br />
une pério<strong>de</strong> antérieure. L’effet <strong>de</strong> cette<br />
accroche est le passage d’un «on»informe<br />
à un « je»qui vit ; cela est plus<br />
parlant en frioulan avec le passage <strong>de</strong><br />
« un frut » à « jo frut », soit le passage <strong>de</strong><br />
« un enfant » à « je enfant ». Cela fait<br />
référence à un avant qui précè<strong>de</strong> le<br />
laisser tomber. Cette jouissance du « je»<br />
est réaffirmée par « ma vie vive » ou<br />
le redoublement du «v», en français<br />
comme en italien et en frioulan vient<br />
faire vibrer le sujet. Cependant cette<br />
élévation, Aufhebung, est altérée par<br />
la survenue d’un « comme », donc d’un<br />
ersatz, qui ôte l’idée d’une abolition<br />
radicale <strong>de</strong> ce qui a produit le laisser<br />
tomber. Ce <strong>de</strong>rnier, témoigne <strong>de</strong> fait <strong>de</strong><br />
sa trace dans le vers « comme l’herbe<br />
d’une rive noire » : l’herbe est une érection<br />
qui n’ a comme pendant que le<br />
vi<strong>de</strong> indiqué par la rive noire : ce qui<br />
bor<strong>de</strong> est noir. Depuis le temps <strong>de</strong> ce<br />
souvenir, <strong>de</strong> cette construction antérieure,<br />
il y a eu effondrement, laisser<br />
tomber et le bord noir est passé à un<br />
noir sans accroche.<br />
« Mais mécontent je regar<strong>de</strong> le revers<br />
pour voir si c’est quelque chose que je<br />
regrette.<br />
Une lueur c’est une lueur,<br />
Rien que le blanc d’une lueur…»<br />
Qu’en est il <strong>de</strong> ce souvenir d’une vibration<br />
du sujet qui avait eu un effet <strong>de</strong><br />
plus-<strong>de</strong>-jouir ? Est ce quelque chose<br />
qu’il doit regretter ? Pasolini doit faire<br />
<strong>de</strong> nouveau appel à l’épreuve et à la<br />
preuve du scopique pour le savoir et<br />
tenter <strong>de</strong> cerner le <strong>de</strong>stin <strong>de</strong> ce<br />
moment pulsionnel antérieur qui l’a<br />
poussé vers la vie. Il constate un<br />
échouement et le vivant lumineux est<br />
rabaissé au blanc d’une lueur. Ce blanc<br />
retranche du signe et <strong>de</strong> la marque liée<br />
à la couleur, la couleur qui l’a poussé<br />
vers la vie.<br />
III<br />
Là, <strong>de</strong>rrière le verre, dans un pays <strong>de</strong><br />
lumière<br />
une cloche, douce à mon cœur,<br />
et éloignée dans le temps s’enflamme<br />
au beau milieu d’une morte campagne.<br />
Face à cet échouement du miroir à<br />
donner forme au corps, il cherche <strong>de</strong><br />
nouveau à aller au-<strong>de</strong>là, à passer à travers<br />
le verre, surface transparente, pour<br />
se diriger vers la terre maternelle, le<br />
Frioul, ce pays <strong>de</strong> lumière qui lui donne<br />
vie et qui vient tenter <strong>de</strong> métaphoriser<br />
le corps. Dans ce champ maternel, il y<br />
a une rencontre avec le signifiant via le<br />
son <strong>de</strong> la cloche dont il tente d’emblée<br />
d’en éloigner l’immédiateté en<br />
signalant son éloignement dans le<br />
temps. Avec ce fond maternel, ce signifiant<br />
résonne sur l’organe <strong>de</strong> l’amour,<br />
<strong>de</strong> l’Eros et provoque un plus-<strong>de</strong>-jouir<br />
avec la chaleur et la lumière <strong>de</strong> la flamme.<br />
Ce plus-<strong>de</strong>-jouir survient dans un<br />
désert <strong>de</strong> jouissance scopique incarné<br />
par la morte campagne, morte campagne<br />
qui est une représentation du<br />
vi<strong>de</strong> signant l’ab-sens <strong>de</strong> symbolisation<br />
<strong>de</strong> l’absence maternelle. De même, le<br />
son <strong>de</strong> la cloche peut représenter un<br />
appel vers Dieu face à cette ab-sens,<br />
un appel qui fonctionne en lien avec<br />
un plus-<strong>de</strong>-jouir qui l’oriente du côté <strong>de</strong><br />
la vie (la lumière et la chaleur <strong>de</strong> la<br />
flamme).<br />
« Lumière est ma vie, et elles sonnent<br />
joyeusement pour moi sous un ciel nu,<br />
lumière est ma mère petite fille et elles<br />
sonnent joyeusement sur son clair<br />
berceau ».<br />
Il souligne dans ce qui le fait vivre le primat<br />
du scopique qui se raccor<strong>de</strong> par<br />
l’instrument <strong>de</strong> la cloche au signifiant<br />
mais aussi en lien avec la strophe précé<strong>de</strong>nte,<br />
au corps et à sa jouissance<br />
dans la mesure où la chaleur est une<br />
sensation <strong>de</strong> peau. Ces cloches sonnent<br />
joyeusement comme <strong>de</strong>s testicules<br />
en fête, l’organe jouit dans un<br />
déchaînement pulsionnel sous un ciel<br />
nu. Le ciel nu met en question le vi<strong>de</strong><br />
<br />
PSYCHANALYSE ■ 7<br />
LIVRES<br />
Lire Michaël Balint<br />
Un clinicien pragmatique<br />
Hélène Oppenheim Gluckman<br />
Campagne Première, 16 €<br />
Michaël Balint, mé<strong>de</strong>cin et psychanalyste<br />
hongrois émigré en Angleterre,<br />
est surtout connu à travers « les<br />
Groupes Balint » qui désignent une<br />
modalité <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cins<br />
et <strong>de</strong> thérapeutes à la relation soignants-soignés.<br />
Son apport a également<br />
enrichi la théorie et la pratique<br />
psychanalytiques en élargissant les<br />
indications <strong>de</strong>s cures et en proposant<br />
<strong>de</strong>s psychothérapies brèves.<br />
Hélène Oppenheim Gluckman montre<br />
comment ce clinicien pragmatique<br />
est un précurseur <strong>de</strong>s débats actuels<br />
sur l’éthique médicale, la formation<br />
<strong>de</strong>s psychanalystes et <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins,<br />
la psychothérapie. Une notice biographique<br />
et une bibliographie<br />
exhaustive complètent cette étu<strong>de</strong>.<br />
Sigmund Freud - Karl<br />
Abraham<br />
Correspondance complète<br />
1907-1925<br />
Gallimard, 45 €<br />
Cette édition fait suite à une précé<strong>de</strong>nte,<br />
parue en 1969, qui n’était que<br />
partielle, l’édition alleman<strong>de</strong> d’origine<br />
ayant été « caviardée » du fait<br />
<strong>de</strong>s <strong>de</strong>scendants directs <strong>de</strong> Freud<br />
(Ernst Freud) et d’Abraham (Hilda Abraham),<br />
qui pensaient <strong>de</strong>voir protéger<br />
certaines personnes impliquées dans<br />
cette correspondance.<br />
L’édition actuelle est donc une traduction<br />
<strong>de</strong> l’intégralité <strong>de</strong> cette correspondance.<br />
Elle débute en 1907,<br />
lorsqu’Abraham fait la connaissance<br />
<strong>de</strong> Freud et vient s’installer à Berlin<br />
et se termine en 1925, année où<br />
meurt Abraham à l’âge <strong>de</strong> 48 ans.<br />
C’est une discussion riche, fécon<strong>de</strong><br />
et enthousiaste entre les <strong>de</strong>ux hommes,<br />
échangeant observations cliniques<br />
et hypothèses théoriques,<br />
Freud ayant rapi<strong>de</strong>ment reconnu en<br />
Abraham un élève brillant qui <strong>de</strong>viendra<br />
bientôt un maître à son tour.<br />
M. Goutal<br />
Peut-on vivre sans illusion ?<br />
Imaginaire & Inconscient<br />
Etu<strong>de</strong>s psychothérapiques<br />
2006 n°17<br />
L’Esprit du Temps, 21 €<br />
Ce numéro <strong>de</strong> la Revue du Groupe<br />
International du Rêve-Eveillé en Psychanalyse<br />
(GIREP) se consacre à un<br />
thème qui relève non seulement <strong>de</strong><br />
la psychanalyse mais aussi <strong>de</strong> la sociologie<br />
et <strong>de</strong> la philosophie, à première<br />
vue. Le langage courant, « se<br />
bercer d’illusions » décrit à la fois le<br />
piège que ces <strong>de</strong>rnières peuvent nouer<br />
pour nous et la douce rêverie, la rêverie<br />
créatrice ou réparatrice qu’elles<br />
peuvent amener.<br />
La Revue cherche à présenter un éventail<br />
large <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue et <strong>de</strong> facettes<br />
du sujet traité, à travers <strong>de</strong>s articles<br />
<strong>de</strong> professionnels d’horizons<br />
divers, parmi lesquels ceux que l’imaginaire<br />
fréquente, mais aussi <strong>de</strong> référents<br />
théoriques différents.<br />
Sur « l’illusion », sont réunis <strong>de</strong>s textes<br />
variés, au cœur <strong>de</strong>s problèmes d’aujourd’hui<br />
comme dans l’intemporalité<br />
d’un dire poétique ou littéraire, qui<br />
éclairent la possibilité <strong>de</strong> se construire<br />
grâce aux illusions, l’opportunité <strong>de</strong><br />
les conserver jusqu’au moment où<br />
s’en défaire est une libération et enfin<br />
l’éventualité <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue différents<br />
où l’illusion concerne la réalité<br />
même, si elle n’est pas l’objet<br />
d’une défiance absolue.
8<br />
LIVRES<br />
■ PSYCHANALYSE<br />
Freud<br />
René Major et Chantal Talagrand<br />
Folio biographies n°15<br />
Gallimard, 6,40 €<br />
René Major et Chantal Talagrand ont<br />
la plus gran<strong>de</strong> conscience que d’éminents<br />
biographes <strong>de</strong> Freud avant eux<br />
ont pris le parti <strong>de</strong> traiter l’archive<br />
freudienne comme l’œuvre écrite <strong>de</strong><br />
son vivant, les écrits posthumes ou<br />
la correspondance. Leur parti aura<br />
donc été d’introduire, avec l’homme<br />
Freud, à ce qu’on pourrait appeler<br />
une biographie analytique. Non pas<br />
au sens où elle appliquerait l’analyse<br />
au sujet répondant au nom <strong>de</strong> Sigmund<br />
Freud. Mais au sens où la métho<strong>de</strong><br />
freudienne change l’écriture<br />
<strong>de</strong> l’histoire, y compris l’écriture <strong>de</strong><br />
l’histoire <strong>de</strong> Freud. Au risque <strong>de</strong> dérouter,<br />
cette biographie ne suit nullement<br />
la chronologie linéaire habituelle.<br />
Elle tient compte <strong>de</strong> la notion<br />
essentielle d’après-coup chez Freud<br />
selon laquelle le sens d’une expérience<br />
ou d’une impression est différé<br />
dans le temps, où ce qui apparaît<br />
à retar<strong>de</strong>ment donne un autre<br />
sens à <strong>de</strong>s empreintes laissées auparavant.<br />
La nuit <strong>de</strong> l’insomnie<br />
Philosophie du nocturne<br />
Illustrations par Marissa-Gayle<br />
Level<br />
Xavier Pietrobon<br />
L’Harmattan, 27 €<br />
La nuit <strong>de</strong> l’insomnie n’est pas la nuit<br />
où l’homme s’endort, c’est-à-dire où<br />
il s’ignore. L’insomnie rompt avec le<br />
sommeil comme évi<strong>de</strong>nce, et le pose<br />
plutôt comme problématique. Aussi<br />
interroge-t-elle ce sur quoi l’homme<br />
s’endort par coutume. Pour l’auteur,<br />
le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’insomnie se donne à<br />
l’homme comme une énigme à résoudre,<br />
énigme dont on est à la fois<br />
sujet et objet. Il ne faut pas dormir, il<br />
faut philosopher et ainsi toucher la<br />
vérité dissimulée dans les ténèbres ;<br />
cet infini divin se découvre paradoxalement<br />
sur le mo<strong>de</strong> d’une souffrance<br />
proprement humaine, marque<br />
<strong>de</strong> finitu<strong>de</strong>...<br />
L’Egypte du rêve<br />
Rêves, rêveurs et Interprètes au<br />
temps <strong>de</strong>s pharaons<br />
Edda Bresciani<br />
Payot, 20 €<br />
Dans la civilisation égyptienne la plus<br />
ancienne, le rêve, qui s’empare <strong>de</strong>s<br />
hommes au moment où ils sont le<br />
plus vulnérables, était considéré<br />
comme le lieu <strong>de</strong> rencontres effrayantes<br />
avec les esprits, les fantômes<br />
et les morts mécontents qu’il<br />
s’agissait d’apaiser au moyen <strong>de</strong><br />
prières et d’offran<strong>de</strong>s, et <strong>de</strong> repousser<br />
grâce à <strong>de</strong>s formules magiques<br />
et <strong>de</strong>s talismans. Il a ensuite endossé<br />
la fonction <strong>de</strong> porte ouverte sur le futur,<br />
<strong>de</strong> présage <strong>de</strong> ce qui arrivera.<br />
C’est au cours du Nouvel Empire que<br />
l’on trouve les premières listes et les<br />
premiers récits <strong>de</strong> rêves. L’intérêt pour<br />
ces récits et pour leur signification se<br />
poursuit et s’enrichit dans l’Egypte<br />
hellénistique et romaine, plus tardive.<br />
Edda Bresciani lit et commente les<br />
textes magiques <strong>de</strong>stinés à protéger<br />
le sommeil et les Livres <strong>de</strong>s songes<br />
égyptiens, véritables manuels et répertoires,<br />
où les rêves sont énumérés<br />
selon leurs significations propices<br />
ou néfastes pour toutes les occasions<br />
<strong>de</strong> la vie. Elle montre que les peurs,<br />
les espoirs, les visions et les obsessions<br />
<strong>de</strong>s anciens habitants <strong>de</strong> la terre<br />
du Nil n’étaient guère différents <strong>de</strong><br />
ceux <strong>de</strong> l’homme d’aujourd’hui, et<br />
que les schémas d’interprétation anciens<br />
ressemblaient fort à ceux <strong>de</strong><br />
nos horoscopes.<br />
<br />
<strong>de</strong> la symbolisation paternelle : le père<br />
nu a-t-il un attribut qui est lié à une<br />
fonction <strong>de</strong> manque. La mère quant<br />
à elle est raccordée à la lumière qui<br />
donne la vie. Le rapport incestuel dans<br />
lequel la mère est ramenée à l’état <strong>de</strong><br />
petite fille, est évoqué par la présence<br />
<strong>de</strong>s cloches. Se dégage ainsi l’objet scopique<br />
comme objet à la fois <strong>de</strong> plus-<strong>de</strong>jouir<br />
et faisant lien, copule. L’adjectif<br />
« clair » qui renvoie au scopique est le<br />
signe <strong>de</strong> la copule entre le signifiant<br />
(« elles sonnent ») et le corps <strong>de</strong> la mère<br />
petite fille incarnée par le berceau.<br />
IV<br />
« Derrière le Miroir, ma mère petite fille<br />
joue dans une ruelle sèche.<br />
Elle respire les yeux <strong>de</strong> la Madone<br />
Entre les figuiers et les chênes frais <strong>de</strong><br />
résine ».<br />
Au-<strong>de</strong>là du miroir il y a donc la mère<br />
et sa jouissance. Dans l’au-<strong>de</strong>là du<br />
miroir qui n’exerce plus sa fonction<br />
réflexive, la jouissance <strong>de</strong> la mère raccordée<br />
à la lumière a pour référence le<br />
tarissement, le vi<strong>de</strong> du flux, <strong>de</strong> l’écoulement.<br />
Ce qui lui reste <strong>de</strong> vie face à ce<br />
vi<strong>de</strong> phallique, ce qui s’insuffle en elle,<br />
émane <strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> la Vierge soit d’un<br />
scopique, qui apparaît entre les arbres<br />
en tumescence. Cette quatrième<br />
strophe indique clairement l’au-<strong>de</strong>là<br />
du narcissisme, le rapport à la jouissance<br />
maternelle.<br />
Son collier <strong>de</strong> corail au cou,<br />
Elle s’en va heureuse, le long <strong>de</strong>s rives<br />
Dans cette lueur <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> mille<br />
Neuf cent <strong>de</strong>ux, dans un soupir…<br />
L’enflammement produit précé<strong>de</strong>mment<br />
par le lien signifiant-scopiquecorps<br />
s’amenuise jusqu’à disparaître.<br />
C’est la mère qui part en même temps<br />
que le scopique et le signifiant se réduisent<br />
à une lueur et à un soupir voué à<br />
s’éteindre. L’évocation <strong>de</strong> la mère,<br />
« petite fille », vient retrancher le temps<br />
et le ramène là encore au temps <strong>de</strong><br />
l’enfance, celui qui précè<strong>de</strong> le dénouage<br />
et le laisser-tomber. Pasolini évoque<br />
en effet ici, une époque où la mère est<br />
heureuse, une pério<strong>de</strong> d’avant le désespoir<br />
où le nouage signifiant scopiquecorps<br />
est soutenu par la suppléance au<br />
phallus comme en témoigne l’avoir<br />
maternel, le collier <strong>de</strong> corail. Notons<br />
en outre, que ce syntagme « son collier<br />
<strong>de</strong> corail au cou, elle s’en va heureuse<br />
» n’est pas sans évoquer la représentation<br />
<strong>de</strong> la mère qui a le phallus, la<br />
mère non castrée. Le temps <strong>de</strong> l’enfance<br />
est pour lui une promesse <strong>de</strong><br />
bonheur. Il s’agit <strong>de</strong> l’enfance d’avant la<br />
puberté comme en témoigne la date <strong>de</strong><br />
1902, date qui peut paraître énigmatique<br />
à une première lecture. En 1902<br />
la mère <strong>de</strong> Pasolini est âgée <strong>de</strong> 11 ans<br />
soit le passage vers l’âge <strong>de</strong> la puberté<br />
et <strong>de</strong> l’adolescence.<br />
Deuxième forme : 1974<br />
I<br />
Je vais me regar<strong>de</strong>r dans le miroir<br />
Pour voir ce que j’ai été,<br />
Mais, comme l’eau, le miroir est changeant<br />
Et ce que je suis <strong>de</strong>venu est changeant.<br />
Ce nouveau recueil <strong>de</strong> poèmes en<br />
1974 se veut symétrique mais introduit<br />
une rupture. Un avant et un après<br />
se dégage alors clairement <strong>de</strong> l’œuvre<br />
pasolinienne. Si le primat du scopique<br />
dans son désir <strong>de</strong> donner forme au<br />
corps est également présent, celui-ci<br />
est marqué par cette rupture temporelle.<br />
Il tente <strong>de</strong> saisir le reflet <strong>de</strong> ce<br />
qu’il a été. Or, se présente à lui, l’image<br />
<strong>de</strong> ce qu’il est <strong>de</strong>venu, une forme<br />
mobile qui ne tient pas et qui émane<br />
d’un miroir changeant tel le miroir <strong>de</strong>s<br />
eaux qui n’est pas sans évoquer le<br />
mythe <strong>de</strong> Narcisse. Le scopique qui<br />
pour lui précè<strong>de</strong> l’être ( c’est le miroir<br />
qui le fait changer et non l’inverse) ne<br />
parvient donc plus à fixer un corps.<br />
Je reviens regar<strong>de</strong>r dans le miroir<br />
Immobile comme un bloc <strong>de</strong> glace :<br />
Dans le miroir, immobile est la Forme<br />
Qui sait qui naît d’elle.<br />
De retour face au miroir, Pasolini per-<br />
çoit ce que cache ce flou scopique :<br />
sa mort, le tranchant mortel du bloc<br />
<strong>de</strong> glace; en effet il ne peut plus bouger,<br />
il est congelé, tout mouvement pulsionnel<br />
se voit suspendu. Un point <strong>de</strong><br />
fixation est donc trouvé, le corps se<br />
noue au scopique <strong>de</strong> façon mortelle.<br />
Face à ce tranchant mortel, la restauration<br />
vient <strong>de</strong> la Forme à laquelle la<br />
toute-puissance du savoir maternel est<br />
attribuée via la fonction <strong>de</strong> la naissance.<br />
Soulignons la majuscule qui vient<br />
systématiquement élever le signifiant<br />
« Forme », et qui n’est pas sans rappeler<br />
La Femme dont parle Lacan, une Forme<br />
Toute donc, qui est dans la toute-puissance,<br />
à savoir qu’elle ne se noue pas<br />
au regard dans une perte. La Forme<br />
est en contiguïté avec la Mère.<br />
« vieux je regar<strong>de</strong> dans le miroir<br />
qui telle une lumière court à travers le<br />
ciel,<br />
une ombre immobile pour toujours<br />
même si elle pouvait claquer comme un<br />
voile ».<br />
En symétrie avec l’introduction du « je»<br />
dans « jo frut » en 1949, apparaît ici<br />
un « jo veciu », un « je vieux » qui renvoie<br />
à une pério<strong>de</strong> d’après le laisser<br />
tomber. Le miroir dans sa fonction est<br />
<strong>de</strong>venu fugitif, il ne renvoie uniquement<br />
et définitivement qu’à une ombre<br />
immobile, l’ombre <strong>de</strong> son enfance perdue.<br />
La promesse <strong>de</strong> bonheur est <strong>de</strong>venue<br />
une ombre éternelle. Même si le<br />
signifiant essaye <strong>de</strong> donner une forme,<br />
cela rate : le « clac ! » <strong>de</strong> l’ombre ne fait<br />
pas voile, mais ersatz <strong>de</strong> voile, laissant<br />
apparaître l’irréversibilité d’une mort<br />
imminente. Le « comme un voile »<br />
montre l’échec <strong>de</strong> ce qui aurait pu alléger<br />
Pasolini par un raccord au manque<br />
symbolique.<br />
« Dans le miroir, immobile comme un<br />
anneau<br />
je vois une lumière s’enfuir, elle disparaît<br />
du mon<strong>de</strong>, si gran<strong>de</strong> est sa vitesse<br />
qu’on ne voit que le vi<strong>de</strong> qu’elle laisse »<br />
De fugitif, le miroir <strong>de</strong>vient à son tour<br />
sans mouvement. La comparaison <strong>de</strong><br />
l’immobile du miroir avec l’anneau qui<br />
unit renvoie à une alliance mortifère<br />
sans retour.<br />
La fonction scopique ne renvoie plus<br />
qu’au vi<strong>de</strong>. Le primat du scopique dans<br />
sa fonction <strong>de</strong> nouage avec la vie<br />
n’aboutit plus qu’au vi<strong>de</strong>. La lumière<br />
signe <strong>de</strong> vie s’enfuit pour laisser place<br />
au vi<strong>de</strong>, au néant, au gouffre.<br />
« Je cours comme un voleur<br />
qui n’a rien volé à son père,<br />
et se tient immobile auprès du foyer<br />
à regar<strong>de</strong>r la pauvre chaire <strong>de</strong> sa mère ».<br />
En contiguïté avec le laisser tomber du<br />
corps réduit au néant, apparaît pour la<br />
première fois un père, un père a qui il<br />
n’a rien volé. Ce père n’est pas perçu<br />
comme le détenteur d’un phallus dont<br />
il aurait à s’emparer. Ce père n’a pas sa<br />
place dans le désir maternel, laissant<br />
le fils dans une dualité mortifère avec la<br />
mère que les flammes du foyer ne parviennent<br />
pas à ranimer puisque celle-ci<br />
n’est déjà plus qu’un amas <strong>de</strong> chair,<br />
soit un corps dépouillé <strong>de</strong> ses signifiants,<br />
que le désir n’habite plus.<br />
« je suis immobile comme un voleur<br />
tout juste arrivé à Rome<br />
et qui sait que le Tribunal<br />
a mis la mer entre son Frioul et lui »<br />
De par la réitération <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntification<br />
au voleur, un ersatz <strong>de</strong> voleur, le<br />
poète donne à entendre sa volonté <strong>de</strong><br />
mettre quelqu’un en position paternelle,<br />
une position <strong>de</strong> celui qui unit le<br />
désir et la loi. En lieu et place du père,<br />
c’est le Tribunal qu’il trouve, celui-ci<br />
venant introduire la mer entre lui et le<br />
corps maternel métaphorisé par le<br />
Frioul, comme pour le lui interdire. Ce<br />
qui aurait pu médiatiser cette union<br />
mortifère s’effectue par un tribunal soit<br />
l’ombre <strong>de</strong> la faute et la condamnation.<br />
De ce fait, cet appel vers la fonction<br />
paternelle ne parvient pas à sortir<br />
Pasolini <strong>de</strong> son état d’immobilisme<br />
morbi<strong>de</strong> pour le pousser vers la vie.<br />
Le Tribunal fait référence à la condamnation<br />
judiciaire et morale qui a touché<br />
Pasolini en 1949-1950 après une plainte<br />
déposée contre lui pour atteinte aux<br />
bonnes mœurs. Cela aura pour effet<br />
le départ du Frioul pour Rome.<br />
« Un jeune homme au fond du miroir<br />
écrit les jours <strong>de</strong> sa vie.<br />
Il efface plus qu’il n’écrit,<br />
Car il n’a pas d’histoire ».<br />
On note <strong>de</strong> nouveau une référence à la<br />
jeunesse. Il utilise pour cela un style<br />
très impersonnel renvoyant à l’absence<br />
d’i<strong>de</strong>ntité qui résonne avec l’absence<br />
<strong>de</strong> corps dans le miroir qui était évoqué<br />
précé<strong>de</strong>mment. Ce jeune homme est<br />
au fond <strong>de</strong> ce miroir et il écrit, tel un<br />
condamné à mort, les jours <strong>de</strong> sa vie.<br />
« Mais il efface plus qu’il n’écrit » comme<br />
si face à cet effondrement et à l’échec<br />
du scopique à restaurer une image <strong>de</strong><br />
soi qui le fasse exister, une rupture, un<br />
gouffre même s’était creusé et avait<br />
emporté avec lui toute l’histoire, tous les<br />
souvenirs <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> Pasolini, ceux<br />
d’avant le laisser tomber, ne lui laissant<br />
plus cette fois aucune prise à laquelle se<br />
raccrocher.<br />
« Sur une photographie, les têtes <strong>de</strong><br />
son père et <strong>de</strong> sa mère se touchaient<br />
encore en mille neuf cent<br />
<strong>de</strong>ux lorsqu’il s’est tué »<br />
Il termine ce poème en se référant à un<br />
scopique particulier qui n’est plus celui<br />
<strong>de</strong> l’image errante du miroir fugitif mais,<br />
une photographie. Cette photographie<br />
qui présente une image fixe, non mobile,<br />
précè<strong>de</strong> sa naissance <strong>de</strong> vingt années<br />
exactement. Qu’est ce qui a pu suici<strong>de</strong>r<br />
Pasolini vingt avant sa naissance ? Le<br />
suici<strong>de</strong> est toujours une question adressée<br />
à l’Autre et à son désir, soit la<br />
construction d’un Autre. In fine, il s’agit<br />
toujours dans le suici<strong>de</strong> du rapport du<br />
sujet à la question énigmatique <strong>de</strong> son<br />
désir. Quel Autre désirant Pasolini a-til<br />
construit ? Qu’ont voulu ses parents<br />
pour lui ? Quel désir les animait avant<br />
la naissance <strong>de</strong> cet enfant particulièrement.<br />
Telle est la construction à<br />
l’œuvre.<br />
Cette <strong>de</strong>rnière strophe nous oriente<br />
ainsi vers ce que fut le drame pasolinien.<br />
Cette photographie représente<br />
ses <strong>de</strong>ux parents tête contre tête. La<br />
11 octobre 2006<br />
Interprétation<br />
et dynamique<br />
<strong>de</strong> la cure<br />
Bernard Penot<br />
8 novembre 2006<br />
L’interprétation<br />
dans le groupe<br />
Pierre Privat<br />
13 décembre 2006<br />
Interpréter<br />
pour un enfant<br />
sans langage<br />
Laurent Danon-Boileau<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
question <strong>de</strong> ce qui a pu unir ou désunir<br />
les parents à son sujet est la question<br />
portée par l’enfant. L’enfant fait copule<br />
désirante pour les parents. L’enfant<br />
met en tension la place du phallus. Le<br />
drame <strong>de</strong> la désunion au sens où, nous<br />
l’avons vu, le père n’a pas <strong>de</strong> place<br />
désirante pour la mère, le père ne crée<br />
pas du moins pour et par la mère, a<br />
touché Pasolini. Et que vient à la place<br />
<strong>de</strong> cette fonction phallique pour lui ?<br />
Le désir pour les jeunes garçons qui<br />
viennent <strong>de</strong> franchir la puberté. L’union<br />
portée par l’Eros concerne ses parents<br />
en 1902 lorsque ces <strong>de</strong>rniers sont<br />
encore pubères. La place du suici<strong>de</strong><br />
concerne directement ce qu’il a considéré<br />
comme sa faute mais aussi son<br />
débor<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> jouissance, l’attrait<br />
homosexuel pour <strong>de</strong>s jeunes adolescents.<br />
Le recours à <strong>de</strong>s souvenirs évoquant<br />
la vie reste désormais sans effets,<br />
le scopique n’est plus en mesure <strong>de</strong><br />
parer à la marche vers la mort engagée<br />
par Pasolini, une mort qui est à<br />
présent palpable.<br />
Conclusion<br />
“L’interprétation”<br />
Le travail poétique est une tentative<br />
<strong>de</strong> placer le travail <strong>de</strong> la langue pour un<br />
sujet hors du sens commun. Ce travail<br />
se produit par le nouage pour un sujet<br />
d’un signifiant avec un corps via le scopique.<br />
Un poème naît <strong>de</strong> la voix, un<br />
poème doit être chanté dans sa déclamation,<br />
dans son énonciation. Pour<br />
qu’il soit poème il convient donc qu’il<br />
soit du corps d’abord, jouissance phonatoire<br />
alliant les sons à une contiguïté,<br />
une copule, une rupture, hors sens.<br />
Pour qu’il fasse nouage au signifiant et<br />
à la lettre il convient qu’il y ait création<br />
d’un saut, le saut métaphorique.<br />
Le passage à la lettre, l’écrit se fait via le<br />
scopique. Le résultat, via cette métaphore<br />
qui est toujours réelle et non<br />
symbolique ou imaginaire ainsi que<br />
Lacan l’indique à son insu en utilisant<br />
le terme inapproprié dans son enseignement<br />
<strong>de</strong> 1958 <strong>de</strong> métaphore déli-<br />
10 janvier 2007<br />
Ecoute<br />
et interprétation<br />
Sesto-Marcello Passone<br />
14 mars 2007<br />
Interpréter<br />
le traumatisme<br />
à l’adolescence<br />
Christine Jean-Strochlic<br />
9 mpai 2007<br />
Interprétation<br />
et transferts<br />
en cure d’enfants<br />
Albert Louppe<br />
10 janvier 2007 13 juin 2007<br />
L’interprétation dans le<br />
cadre <strong>de</strong> la consultation<br />
Elisabeth Castex<br />
LIEU DES CONFÉRENCES : UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES<br />
Un mercredi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />
Renseignements : Société Psychanalytique <strong>de</strong> Paris, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tél.<br />
01 43 29 66 70 lundi-mercredi <strong>de</strong> 9h à 13h et mardi-jeudi <strong>de</strong> 13h à 17h. E-mail :<br />
spp@spp.asso.fr. Site internet : www.spp.asso.fr. Inscriptions : secrétariat <strong>de</strong> la Société<br />
Psychanalytique <strong>de</strong> Paris uniquement pour le cycle complet ou sur place, le soir <strong>de</strong> la conférence<br />
pour les conférences à l’unité ou le cycle complet. Cycle complet <strong>de</strong>s conférences du<br />
mercredi : 90 € (60 € pour les étudiants - joindre copie carte), à l’unité : 15 € (10 € pour les<br />
étudiants sur présentation <strong>de</strong> la carte). AUCUNE INSCRIPTION N’EST PRISE PAR<br />
L’UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
rante, est hors sens commun.<br />
Lire un poème <strong>de</strong> Pasolini à la lettre et<br />
en contiguïté permet d’écrire et <strong>de</strong> lire<br />
l’au-<strong>de</strong>là du sens <strong>de</strong> sa création, ce qu’il<br />
y a d’insu pour le sujet dans sa création.<br />
L’intitulé du poème choisi enseigne :<br />
« Danses ». Danser c’est accor<strong>de</strong>r son<br />
corps à un rythme <strong>de</strong> sons, <strong>de</strong> signifiants.<br />
Ce corps doit tenir <strong>de</strong>bout, en<br />
position érigée et mobile au regard <strong>de</strong><br />
l’autre. Qu’y a-t-il au-<strong>de</strong>là du sens commun<br />
sinon ce rapport pulsionnel pour<br />
faire vivre un sujet.<br />
En 1944-49 le drame pasolinien est<br />
que la pureté infantile ne suffit plus à<br />
tenir son mon<strong>de</strong>. L’enfance est pour<br />
lui une promesse <strong>de</strong> bonheur qui est en<br />
contiguïté au désir maternel. Le drame<br />
<strong>de</strong> la puberté le déchire, il a honte <strong>de</strong><br />
son homosexualité envers les jeunes<br />
adolescents. Le primat du scopique<br />
permet pour autant <strong>de</strong> faire tenir le<br />
sujet Pasolini face au gouffre du vi<strong>de</strong><br />
subjectif dans son mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> jouissance<br />
selon le mo<strong>de</strong> d’articulation dynamique<br />
que nous avons décrit entre le<br />
signifiant, le scopique et le corps. Ce<br />
qui prédomine est le rapport à son idée<br />
<strong>de</strong> la jouissance <strong>de</strong> la mère petite fille,<br />
promesse <strong>de</strong> bonheur dans l’enfance<br />
qui fait également son rapport à la<br />
faute.<br />
En 1974 le drame pasolinien est autre.<br />
Rien ne vient parer au vi<strong>de</strong>. La promesse<br />
<strong>de</strong> bonheur dans l’enfance disparaît.<br />
Le scopique dans sa fonction<br />
est <strong>de</strong>venu fugitif, il ne renvoie uniquement<br />
et définitivement qu’à une<br />
ombre immobile, l’ombre <strong>de</strong> son enfance<br />
perdue. La promesse <strong>de</strong> bonheur<br />
est <strong>de</strong>venue une ombre, une forme<br />
qui renvoie à la figure figée <strong>de</strong> la mort.<br />
Le scopique <strong>de</strong>vient bloc <strong>de</strong> glace, obstacle<br />
mortifère. Il a perdu l’élan du<br />
moteur subjectif d’autrefois. Face au<br />
vi<strong>de</strong> un appel vain est fait envers le<br />
père et sa fonction. Ce vi<strong>de</strong> paternel<br />
pouvait déjà être lu en 1949, non par<br />
l’illusoire lecture d’une défaillance <strong>de</strong> la<br />
métaphore paternelle, concept <strong>de</strong>venu<br />
obsolète, mais par l’absence <strong>de</strong> fonc-<br />
“L’interprétation”<br />
19 octobre 2006<br />
Interprétation<br />
et répétition agie<br />
Robert Mancini<br />
16 novembre 2006<br />
Interpréter,<br />
pourquoi ?<br />
Michel <strong>de</strong> M’Uzan<br />
21 décembre 2006<br />
Preocessus<br />
et interprétation<br />
Monique Cournut-Janin<br />
tion <strong>de</strong> création du moins que nous<br />
avons mis en évi<strong>de</strong>nce. La nomination<br />
Danses a-t-elle à voir avec le fait que<br />
Carlo Alberto a dilapidé sa fortune à la<br />
mort <strong>de</strong> son père alors qu’il était très<br />
jeune pour une danseuse ? Ce qui<br />
importe pour Pier Paolo est que la faillite<br />
<strong>de</strong> ce qui unit, la blessure mortelle <strong>de</strong><br />
l’enfance se ravive par la cassure du<br />
lien avec Ninetto Davoli. Ce qui faisait<br />
tenir en 1949 Pasolini, le nouage<br />
envers « la mère petite fille », ne supplée<br />
plus. L’Amour s’est effondré<br />
comme à l’âge <strong>de</strong> trois ans. La photographie,<br />
fictive, puisque ses parents se<br />
sont rencontrés alors que Carlo Alberto<br />
était déjà militaire, représente l’avant<br />
<strong>de</strong> la déflagration qui le pousse au suici<strong>de</strong>.<br />
A la place du scopique qui se<br />
meut sans pouvoir accrocher un nouage<br />
i<strong>de</strong>ntitaire ne se profilent que le réel<br />
<strong>de</strong> l’arête du bloc <strong>de</strong> glace et la photographie<br />
qui met la rupture pubertaire<br />
en place <strong>de</strong> faute subjective.<br />
Ce poème dans ses <strong>de</strong>ux formes d’écriture<br />
peut être lu comme paradigmatique<br />
d’une lecture <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> Pasolini.<br />
Le primat du scopique qu’il recèle<br />
et son <strong>de</strong>stin peuvent également interroger<br />
la bascule subjective provoquée<br />
par le passage vers l’art cinématographique<br />
à partir <strong>de</strong> 1961. ■<br />
Hervé Hubert*,<br />
Caroline Happiette**<br />
*Psychiatre, Psychanalyste, Elan Retrouvé,<br />
Paris,<br />
**Master <strong>de</strong> Psychologie, Paris XIII<br />
Bibliographie<br />
(1) voir HUBERT H., Transsexualisme, du<br />
syndrome au sinthome, Thèse <strong>de</strong> Psychologie,<br />
Université Rennes 2, février 2006<br />
(2) DE CECCATTY R., Pasolini, Folio Biographies<br />
Gallimard, Paris, 2005, p. 22<br />
(3) id, p. 31<br />
(4) in PASOLINI P. P. P. , La nouvelle jeunesse,<br />
NRF, Gallimard, Paris, 2003, p. 311<br />
(5) opus cité, p. 305.<br />
(6) i<strong>de</strong>m, p. 67-70.<br />
(7) i<strong>de</strong>m, p 241-244.<br />
18 janvier 2007<br />
La naissance<br />
<strong>de</strong> l’interprétation<br />
Gilbert Diatkine<br />
22 mars 2007<br />
Interpréter l’Œdipe ?<br />
Michèle Perron-Borelli<br />
24 mai 2007<br />
L’interprétation<br />
selon D. Winnicott<br />
Jean-François Rabain<br />
21 juin 2007<br />
Relance associative<br />
et interprétation<br />
Sylvie Dreyfus-Asséo<br />
LIEU DES CONFÉRENCES : UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES<br />
Un jeudi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />
Renseignements : Société Psychanalytique <strong>de</strong> Paris, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tél.<br />
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pour les conférences à l’unité ou le cycle complet. Cycle complet <strong>de</strong>s conférences du jeudi :<br />
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sur présentation <strong>de</strong> la carte). AUCUNE INSCRIPTION N’EST PRISE PAR L’UNIVERSITÉ RENÉ<br />
DESCARTES.<br />
LIVRES ET REVUES<br />
La subjectivation<br />
François Richard, Steven Wainrib<br />
et al.<br />
Dunod, 24 €<br />
L’usage du concept <strong>de</strong> subjectivation<br />
est apparu en psychanalyse pour rendre<br />
compte <strong>de</strong> formes <strong>de</strong> souffrances psychiques<br />
liées à la construction d’un espace<br />
psychique différencié. Son développement<br />
pose la question d’un<br />
concept limite entre l’intra-psychique<br />
et l’inter-subjectit, susceptible <strong>de</strong> relier<br />
la diversité <strong>de</strong> nos pratiques.<br />
Pour R. Cahn le terme même <strong>de</strong> subjectivation<br />
implique qu’il s’agit d’un sujet<br />
processuel, construit à partir <strong>de</strong> ses<br />
liens aux autres. Son actualisation et<br />
sa reconnaissance constituent l’objet<br />
ultime <strong>de</strong> la démarche analytique. S.<br />
Wainrib développe une architecture<br />
<strong>de</strong> la subjectivation, un réseau <strong>de</strong> liens<br />
ouverts, <strong>de</strong> l’association psychosomatique<br />
aux multiples stratégies du désir<br />
qui ont à rencontrer les cadres <strong>de</strong> la<br />
vie avec les autres. R. Roussillon relance<br />
la question vers l’appropriation<br />
subjective, abordant notamment les<br />
problématiques narcissiques en donnant<br />
une extension nouvelle à l’idée<br />
freudienne d’une « ombre <strong>de</strong> l’objet tombée<br />
sur le moi ». Parti <strong>de</strong> la dynamique<br />
<strong>de</strong> la symbolisation et <strong>de</strong> l’appropriation<br />
subjective dans le transfert, le travail<br />
<strong>de</strong> F. Richard mène aux logiques<br />
à l’oeuvre entre désubjectivation psychotique<br />
et création. C. Chabert appuie<br />
sa recherche sur la double lecture d’une<br />
cure analytique, reprise 15 ans après,<br />
en fonction <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong> la notion<br />
<strong>de</strong> subjectivation. Pour R. Kaës le<br />
sujet est un intersujet, et le groupe est<br />
vu comme un espace psychique commun<br />
et partagé dans lequel se nouent<br />
<strong>de</strong>s alliances inconscientes entre les<br />
sujets qui le constituent. A. Carel traite<br />
d’une intersubjectalisation, mettant<br />
l’accent sur un processus qui change<br />
le bébé et son environnement. S’appuyant<br />
sur son expérience institutionnelle<br />
<strong>de</strong>s adolescents, B. Penot pose<br />
la nécessité d’un détour par l’espace<br />
psychique <strong>de</strong>s soignants pour restituer<br />
au patient les repères signifiants qui<br />
lui ont fait défaut.<br />
Avec la collaboration <strong>de</strong> Raymond Cahn, André<br />
Carel, Bernard Penot, René Roussillon, René Kaes.<br />
Les copains<br />
Liens d’amitié entre enfants et<br />
entre adolescents<br />
Sous la direction <strong>de</strong> Jean-Philippe<br />
Raynaud, Danièle Guilbert, Jean-<br />
Clau<strong>de</strong> Cébula<br />
Enfances & Psy 2006 n°31<br />
Erès, 15 €<br />
Dans la première partie <strong>de</strong> ce numéro<br />
sur l’amitié, on perçoit qu’ainsi aller<br />
vers l’autre, c’est aussi aller vers soi.<br />
Très tôt, soutenus en cela par les adultes,<br />
les enfants élisent parmi leurs pairs<br />
ceux qui seront leurs copains, pour<br />
quelques jours ou pour la vie (H. Gane,<br />
C. Graindorge, B. Assezat). Les affinités,<br />
les sympathies, le plaisir <strong>de</strong> la réciprocité<br />
<strong>de</strong>s liens et <strong>de</strong> l’attachement<br />
(R. Dugravier, N. Gue<strong>de</strong>ney, A.-S. Mintz)<br />
se mettent en place très tôt et constituent<br />
un véritable théâtre du lien extrafamilial.<br />
Avec plus ou moins <strong>de</strong> satisfaction,<br />
plus ou moins <strong>de</strong> violence,<br />
les enfants découvrent, expérimentent,<br />
mettent à l’épreuve et échafau<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s<br />
amitiés, dans lesquelles ils engagent<br />
leurs assises narcissiques en <strong>de</strong>venir<br />
et qui, en retour, participent à leur<br />
construction (D. Brun, B. Assezat).<br />
Quand vient le temps <strong>de</strong>s copains, tous<br />
les professionnels <strong>de</strong> l’enfance savent<br />
à quel point, même si les émotions, les<br />
sentiments, les joies et les blessures<br />
sont vécus « pour <strong>de</strong> vrai », les amitiés<br />
constituent une sorte d’extraordinaire<br />
terrain <strong>de</strong> construction gran<strong>de</strong>ur nature<br />
du sujet en <strong>de</strong>venir, <strong>de</strong> la qualité<br />
<strong>de</strong> ses relations aux autres, <strong>de</strong> sa différenciation.<br />
Que ce soit à l’école<br />
(E. Go<strong>de</strong>au, F. Navarro, C. Vignes), à<br />
l’occasion <strong>de</strong> confi<strong>de</strong>nces à un journal<br />
« ami » (S. Clochard, B. Carrère, Ch. Metzger)<br />
ou <strong>de</strong> questionnements sur le corps,<br />
la sexualité, l’accès à la parentalité (M.<br />
Prudhomme).<br />
L’influence <strong>de</strong>s pairs, en particulier à<br />
l’adolescence, est <strong>de</strong> mieux en mieux<br />
connue. Dans les actions <strong>de</strong> prévention<br />
visant les adolescents, on sait que<br />
faire passer <strong>de</strong>s messages par les pairs<br />
est bien plus efficace que tous les arguments<br />
<strong>de</strong>s doctes spécialistes. On<br />
sait aussi qu’en matière d’expérimentations<br />
<strong>de</strong> toxiques, le rôle, dissuasif<br />
ou incitatif, joué par les pairs est bien<br />
supérieur à celui <strong>de</strong> l’entourage familial<br />
ou <strong>de</strong>s professionnels. Ainsi, les<br />
mouvements d’i<strong>de</strong>ntification se jouent<br />
largement hors du théâtre familial, par<br />
exemple au sein <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> la<br />
tribu (J.-P. Le Run). A l’occasion <strong>de</strong>s rencontres,<br />
la quête du semblable et <strong>de</strong><br />
l’altérité est une aventure à la fois riche<br />
et risquée (J.Ph. Raynaud).<br />
Les relations interpersonnelles nous<br />
nourrissent et nous exposent, nous<br />
ren<strong>de</strong>nt à la fois plus forts et plus vulnérables.<br />
Pierre Bourdieu, théorie et<br />
pratique<br />
Perspectives franco-alleman<strong>de</strong>s<br />
Sous la direction <strong>de</strong> Yves Sintomer<br />
et Hans Peter Muller<br />
La Découverte, 25 €<br />
Ce n’est pas un livre d’hommage, même<br />
si cette dimension n’est pas absente<br />
dans les contributions réunies. Il s’agit<br />
<strong>de</strong> prendre au sérieux l’œuvre du plus<br />
grand sociologue français <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong><br />
moitié du XX e siècle en s’interrogeant<br />
sur ses apports et sur les tensions<br />
qui parcourent son œuvre, en<br />
jetant sur celle-ci <strong>de</strong>s lumières contrastées,<br />
en la comparant avec d’autres<br />
problématiques. La secon<strong>de</strong> ambition<br />
est d’interroger Pierre Bourdieu dans<br />
une perspective franco-alleman<strong>de</strong>. Par<br />
décentrement, un tel regard permet<br />
<strong>de</strong> jeter <strong>de</strong> nouvelles lumières sur les<br />
sciences sociales françaises et sur les<br />
sciences sociales en général, sur Pierre<br />
Bourdieu et sur les questions qu’il a<br />
travaillées. Les rapprochements et les<br />
comparaisons que l’on trouve en constituent<br />
un exemple, Pierre Bourdieu y<br />
est notamment mis en regard avec<br />
Martin Hei<strong>de</strong>gger, Ludwig Wittgenstein,<br />
Niklas Luhmann ou Jürgen Habermas.<br />
Le double éclairage franco-allemand<br />
propose un mélange entre <strong>de</strong>s approches<br />
plus fidèles à la lettre <strong>de</strong> l’œuvre<br />
<strong>de</strong> Pierre Bourdieu et d’autres plus distanciées.<br />
Il s’agit d’approfondir notre<br />
connaissance <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> Pierre<br />
Bourdieu et <strong>de</strong> tester leur valeur heuristique<br />
pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos sociétés.<br />
Les cinq premiers chapitres portent sur<br />
le cadre théorique général en détachant<br />
certaines notions, en effectuant<br />
<strong>de</strong>s comparaisons ou en étudiant telle<br />
ou telle problématique. Une préoccupation<br />
théorique parcourt les autres<br />
contributions, avec le souci <strong>de</strong> travailler<br />
systématiquement les rapports qu’entretient<br />
la théorie avec les recherches<br />
empiriques. Les six chapitres suivants<br />
permettent <strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s pans <strong>de</strong><br />
la réception <strong>de</strong> Bourdieu en France et<br />
en Allemagne, en sociologie et en histoire.<br />
Ils donnent <strong>de</strong>s points d’appui<br />
pour un regard décentré.<br />
Enfin, les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers chapitres portent<br />
sur les rapports entre le savant et<br />
le politique.<br />
Terrain privilégié <strong>de</strong>s paradoxes et <strong>de</strong>s<br />
mises en tension, alchimie complexe<br />
et fragile entre investissement narcissique<br />
et investissement objectal <strong>de</strong>s<br />
liens, l’amitié, comme toute aventure<br />
humaine, comporte ses risques, ses<br />
mises à l’épreuve, ses impasses. Elle<br />
traverse la vie et est traversée par elle,<br />
avec ses crises et ses violences (S.<br />
Bour<strong>de</strong>t-Loubère, A. Piernikarch), mais<br />
aussi avec ses moments magiques et<br />
le plaisir à « être avec » (F. Hocini, C.<br />
Potel-Baranes).<br />
PSYCHANALYSE ■ 9<br />
L’ennui et l’enfant<br />
La lettre <strong>de</strong> l’enfance et <strong>de</strong><br />
l’adolescence juin 2005 n°60<br />
Erès, 13 €<br />
Ce numéro propose, autour <strong>de</strong> l’ennui<br />
et l’enfant, une réflexion illustrée par<br />
la clinique et par les pratiques professionnelles.<br />
Tâche qui révèle que l’ennui<br />
peut être une passion comme une<br />
autre. Ce qui est la thèse <strong>de</strong> Martine<br />
Menès, à propos du désir du rien.<br />
Mais l’ennui est aussi fatigue et lassitu<strong>de</strong>,<br />
préoccupation et inquiétu<strong>de</strong>, agacement,<br />
attente impatiente, déconvenue.<br />
Le refuser, n’est-ce pas refuser le<br />
manque, l’incomplétu<strong>de</strong> ? C’est ce<br />
qu’évoque un article collectif (I. Chevalier,<br />
M. Matrand, N. Murcier) autour<br />
<strong>de</strong> l’hypothèse du « refus <strong>de</strong> l’ennui<br />
comme défense contre l’impossibilité <strong>de</strong><br />
combler l’autre ». L’enfant du passé s’ennuyait<br />
probablement aussi. Ne seraitce<br />
pas plutôt le regard sur l’ennui, ses<br />
manifestations, ses causes, qui ont<br />
changé ? C’est ce qu’abor<strong>de</strong> Clau<strong>de</strong><br />
Schau<strong>de</strong>r dans sa contribution sur<br />
l’évolution <strong>de</strong> la société et l’ennui <strong>de</strong>s<br />
jeunes. Pourtant les poètes, les écrivains,<br />
en ont souligné la dimension<br />
créative et <strong>de</strong>ssiné les contours incertains,<br />
ce que montrent les poèmes <strong>de</strong><br />
ces jeunes filles d’un atelier d’écriture<br />
d’IMP tels que les a recueillis Françoise<br />
Brossier Mével.<br />
Comment la littérature enfantine, adolescente,<br />
ou les programmes télévisuels<br />
tiennent-ils compte aujourd’hui<br />
<strong>de</strong> l’ennui ? Marina D’Amato s’interroge<br />
sur la télé comme remè<strong>de</strong> à l’ennui<br />
d’enfants captifs <strong>de</strong>s programmes.<br />
L’ennui, « état <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> involontaire<br />
engendré par la rencontre fortuite d’une<br />
certaine situation et d’un certain individu<br />
», état toujours singulier donc, rappelle<br />
Mathieu Ledoux, fait peur, d’abord<br />
et peut-être surtout aux adultes.<br />
Robert Toboul, avec son « plaidoyer<br />
pour l’ennui » en définit les frontières<br />
avec la dépression pour en souligner<br />
l’aspect constructif dans « le processus<br />
<strong>de</strong> maturation qui fait <strong>de</strong> l’enfant un<br />
adulte ». Véronique Dufour propose un<br />
travail sur l’ennui <strong>de</strong> l’enfant dit surdoué.<br />
Dominique Ottavi interroge cet ennui<br />
contemporain, « absence du sens, au<br />
sens propre, du temps et <strong>de</strong> l’espace qui<br />
débouche sur l’absence du sens <strong>de</strong> l’effort<br />
». Il commence dès la crèche (Irina<br />
Roufidou : les bébés et l’ennui), continue<br />
à l’école (Isabelle Lechevallier :<br />
l’ennui au collège), et s’épanouit le dimanche,<br />
c’est ce qu’Olivier Cadot et<br />
Francine Ferreira illustrent avec une situation<br />
particulière certes : <strong>de</strong>s enfants<br />
en foyer d’accueil.<br />
Dans « l’obscure clarté <strong>de</strong> l’ennui »Tristan<br />
Garcia-Fons invite à voyager jusqu’à<br />
la lumière.<br />
La rubrique Histoire donne la parole à<br />
Berthe Burko à propos d’une enfance<br />
pas comme les autres, prises dans les<br />
impératifs d’une histoire meurtrière qui<br />
a obligé <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> tous les âges<br />
à être cachés pour survivre. L’on en retrouve<br />
<strong>de</strong>s témoignages dans le livre<br />
Traqués, cachés, vivants, <strong>de</strong>s enfants<br />
juifs en France..., commenté par Françoise<br />
Petitot dans la rubrique Lectures.<br />
De la relation d’ai<strong>de</strong> à la<br />
relation d’êtres<br />
La réciprocité transformatrice<br />
Christophe Gaignon<br />
Préface <strong>de</strong> Guy Ausloos<br />
Postface <strong>de</strong> Jeanne-Marie Rugira<br />
L’Harmattan, 18 €<br />
Ce livre traite <strong>de</strong> la démarche d’un éducateur<br />
au Québec engagé auprès <strong>de</strong><br />
jeunes et <strong>de</strong> familles en situation <strong>de</strong><br />
rupture, <strong>de</strong> crise et <strong>de</strong> transition. Soucieux<br />
d’être présent à lui-même et « lieu<br />
d’accueil pour l’autre », l’auteur cherche<br />
à intégrer sa propre histoire <strong>de</strong> vie et<br />
sa pratique. Il entre par la porte <strong>de</strong>s<br />
compétences et <strong>de</strong>s aspirations pour<br />
mieux vivre la relation comme lieu et<br />
levier <strong>de</strong> transformation.
10<br />
■ ENTRETIEN<br />
LIVRES ET REVUES<br />
Les représentations sociales<br />
<strong>de</strong> la schizophrénie<br />
Congrès <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> et <strong>de</strong><br />
Neurologie <strong>de</strong> langue Française<br />
Frantz-Samy Kohl<br />
Masson<br />
Cet ouvrage présente une synthèse<br />
sur les représentations sociales (origines,<br />
facteurs, impacts, etc.) <strong>de</strong> la<br />
schizophrénie. Sont ainsi abordés le<br />
concept <strong>de</strong> représentation sociale en<br />
insistant sur le double ancrage individuel<br />
et collectif, puis la représentation<br />
sociale <strong>de</strong> la maladie en général,<br />
les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recherches utilisées<br />
pour saisir leur contenu et leur<br />
organisation, ainsi que leur évolution.<br />
L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s représentations sociales<br />
<strong>de</strong> la maladie mentale et <strong>de</strong> la schizophrénie<br />
met en évi<strong>de</strong>nce les conséquences<br />
psychologiques et sociales<br />
qu’elles ont sur le patient et leur famille,<br />
la manière dont elles interviennent<br />
dans l’évolution <strong>de</strong> la maladie,<br />
dans le recours au soin, dans<br />
la compliance thérapeutique et l’insertion<br />
sociale <strong>de</strong>s patients.<br />
Enfant surdoué, adulte<br />
créateur ?<br />
Pélagie Papoutsaki<br />
L’Harmattan, 25,50 €<br />
Cet ouvrage met en relation l’autonomie<br />
tout à fait particulière du créateur<br />
avec celle <strong>de</strong> l’enfant surdoué,<br />
traite le processus créatif, et cherche<br />
une enfance <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier chez l’enfant<br />
surdoué. Les expectatives et exigences<br />
du conformisme socialement<br />
valorisé obligent cependant l’enfant<br />
surdoué <strong>de</strong> renoncer à ce qui est au<br />
coeur <strong>de</strong> son surdouement (l’autonomie<br />
processus créatif) pour appartenir<br />
au social dont il est dépendant,<br />
ou s’impliquer dans une lutte<br />
sans issue pour maintenir autonomie<br />
et appartenance. Une pédagogie/<br />
éducation pour surdoués exige <strong>de</strong>s<br />
sociétés ouvertes au différent et la<br />
délibération <strong>de</strong>s conceptions déterministes<br />
ou <strong>de</strong>scriptives du surdouement.<br />
Problématiques<br />
psychiatriques<br />
Sud/Nord n°21<br />
Erès, 19 €<br />
Devant l’intérêt suscité par les <strong>de</strong>ux<br />
<strong>de</strong>rniers numéros traitant plus particulièrement<br />
<strong>de</strong> certains aspects <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie (« Politique et psychiatrie »<br />
et « Pouvoirs »), ce numéro rassemble<br />
plusieurs textes réunis après les journées<br />
<strong>de</strong> psychiatrie <strong>de</strong> Dax <strong>de</strong> 1999,<br />
2001 et 2003, journées auxquelles<br />
pratiquement tous les membres du<br />
comité <strong>de</strong> rédaction ont participé <strong>de</strong><br />
manière régulière ou occasionnelle.<br />
La psychiatrie, dans ses théories, dans<br />
ses pratiques, dans ses objectifs et<br />
dans ses mo<strong>de</strong>s d’organisation, n’est<br />
pas étrangère aux idéologies et à<br />
leurs retombées concrètes dans la vie<br />
<strong>de</strong>s gens, même si ces acteurs s’en<br />
défen<strong>de</strong>nt souvent, soit en se retranchant<br />
<strong>de</strong>rrière la prétendue rigoureuse<br />
scientificité <strong>de</strong> leur discipline,<br />
soit en se réclamant d’une<br />
ineffable spécificité ou d’un savoir<br />
sans égal. De ce fait, la psychiatrie,<br />
comme toute activité humaine est<br />
problématique.<br />
C’est donc <strong>de</strong> certaines <strong>de</strong> ces problématiques<br />
psychiatriques qu’est fait<br />
ce vingt et unième numéro <strong>de</strong> Sud/<br />
Nord : les rapports plus ou moins distants,<br />
plus ou moins conflictuels, <strong>de</strong><br />
la mé<strong>de</strong>cine et <strong>de</strong> la psychiatrie, l’organisation<br />
actuelle <strong>de</strong> la psychiatrie<br />
(particulièrement en France et au Portugal)<br />
et la question <strong>de</strong> la violence<br />
qui agite, aujourd’hui comme hier, le<br />
mon<strong>de</strong> dans lequel nous vivons.<br />
<br />
civilisatrice » du PMSI. Certes, il peut<br />
être utile dans certaines circonstances<br />
<strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s intersectorialités<br />
lorsque les moyens nécessaires sont<br />
bien supérieurs aux disponibilités <strong>de</strong><br />
chaque secteur <strong>de</strong> psychiatrie, par<br />
exemple les unités mères-bébés, ou<br />
les hospitalisations à temps complet<br />
en pédopsychiatrie, mais quand il s’agit<br />
<strong>de</strong> choisir, en antagonisme parfait avec<br />
la sectorisation, les seuls patients dont<br />
on souhaite s’occuper et s’en décréter<br />
le spécialiste local, départemental ou<br />
régional, les conséquences en sont aussitôt<br />
incalculables : rigidification <strong>de</strong>s<br />
symptômes d’entrée dans la nouvelle<br />
structure, rejet <strong>de</strong>s patients qui n’appartiennent<br />
pas à sa sur-spécialité<br />
(« Casse toi, t’es pas <strong>de</strong> ma ban<strong>de</strong> ! »),<br />
tendance à la standardisation <strong>de</strong>s diagnostics<br />
et <strong>de</strong>s thérapeutiques sous<br />
couvert <strong>de</strong>s consensus autorisés par<br />
les statistiques... On n’est plus dès lors<br />
dans une logique d’accueil <strong>de</strong> tous les<br />
patients du secteur dont j’ai la charge,<br />
présentant une souffrance psychique<br />
et dont on va <strong>de</strong>voir s’occuper<br />
pour qu’il aille mieux, ce qui<br />
<strong>de</strong>man<strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> moyens<br />
humains, on est dans une autre<br />
logique, celle <strong>de</strong> choisir les patients<br />
permis pour sa structure <strong>de</strong> référence,<br />
ce qui peut aisément être « contingenté<br />
» sur le plan budgétaire. Or la<br />
psychiatrie, si elle est évi<strong>de</strong>mment une<br />
branche <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine comme les<br />
autres, possè<strong>de</strong> cependant quelques<br />
spécificités incontournables sous peine<br />
<strong>de</strong> retour massif aux pratiques<br />
anciennes. La psychiatrie <strong>de</strong> secteur,<br />
on l’oublie souvent est un dispositif<br />
<strong>de</strong> navigation sur l’océan <strong>de</strong> la folie<br />
qui a été créé par ceux qui en avaient<br />
inventé la boussole méthodique, les<br />
fondateurs <strong>de</strong> la psychothérapie institutionnelle<br />
(Tosquelles, Daumézon,<br />
Bonnafé,...). Ces pionniers avaient ru<strong>de</strong>ment<br />
critiqué les phénomènes asilaires<br />
et abouti à la notion <strong>de</strong> sectorisation<br />
pour proposer une alternative à une<br />
psychiatrie qui ne prenait pas en compte<br />
le sujet, et la relation transférentielle<br />
qu’il instaure avec ceux qui s’occupent<br />
<strong>de</strong> lui. La nécessité <strong>de</strong> la prise en<br />
compte <strong>de</strong> la continuité <strong>de</strong>s soins est la<br />
traduction en langage administratif <strong>de</strong><br />
ce qui est utile pour tenir compte <strong>de</strong> la<br />
relation <strong>de</strong> transfert dans le traitement<br />
<strong>de</strong> la maladie mentale dans la durée.<br />
Aujourd’hui, nous en revenons à une<br />
psychiatrie <strong>de</strong>s comportements, une<br />
psychiatrie sans transfert, et je vous<br />
l’annonce, nous retournons inévitablement<br />
vers (dans le) les murs <strong>de</strong> l’asile<br />
! Ils ne se présenteront peut-être pas<br />
comme auparavant, encore que le projet<br />
<strong>de</strong> prévention <strong>de</strong> la délinquance<br />
peut nous le faire craindre tant la<br />
dimension répressive y est omniprésente,<br />
mais probablement plus sous la<br />
forme <strong>de</strong> multiples asiles périphériques<br />
dans les maisons <strong>de</strong> retraite, les MAS,<br />
les services <strong>de</strong> « sûreté » psychiatriques<br />
départementaux, bref, tous les établissements<br />
qui acceptent d’accueillir la<br />
misère humaine la plus difficile à<br />
prendre en charge parce qu’elle nécessite<br />
<strong>de</strong>s interventions multiples, et l’asile<br />
commence quand un seul intervenant<br />
prétend apporter l’ensemble <strong>de</strong>s<br />
solutions à une personne. Problème<br />
supplémentaire, celui <strong>de</strong> la raréfaction<br />
progressive <strong>de</strong>s psychiatres en formation,<br />
alors que nous le dénonçons<br />
après l’avoir prévu <strong>de</strong>puis au moins<br />
vingt ans. Il nous faudra attendre encore<br />
dix à quinze ans pour que les postes<br />
créés soient pourvus par <strong>de</strong>s personnes<br />
qualifiées. D’ici là, beaucoup <strong>de</strong> nos<br />
jeunes collègues ne passeront même<br />
plus dans <strong>de</strong>s services sectorisés et ne<br />
seront pas formés dans ce sens, en raison<br />
du fait que la sectorisation apparaît<br />
trop souvent comme dépassée. Mon<br />
parcours <strong>de</strong> psychiatre <strong>de</strong> secteur avant<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir psychiatre universitaire m’a<br />
prémuni contre cet oubli fâcheux et<br />
je crois indispensable aujourd’hui <strong>de</strong><br />
parler et d’enseigner la sectorisation<br />
et la psychothérapie institutionnelle<br />
pour toutes ces raisons fondamentales.<br />
C’est pourquoi, non seulement j’ai écrit<br />
cet ouvrage sur le soin à la personne<br />
psychotique, mais aussi créé <strong>de</strong>puis, à<br />
la Faculté <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong> Lille, un<br />
Diplôme Universitaire <strong>de</strong> Psychothérapie<br />
Institutionnelle sur <strong>de</strong>ux ans<br />
(auquel sont déjà inscrites soixantedix<br />
personnes venues <strong>de</strong> toute la France<br />
(1)).<br />
M. S.-C. : Un <strong>de</strong>s aspects très attachant<br />
<strong>de</strong> votre ouvrage est qu’il s’ancre au plus<br />
près <strong>de</strong>s pratiques locales. Vous semblez<br />
connaître un nombre impressionnant <strong>de</strong><br />
praticiens et vouloir les citer tous. Comment<br />
y êtes vous arrivé ?<br />
P.D. : Je crois profondément à l’expérience<br />
<strong>de</strong> la rencontre entre les êtres<br />
humains. Lorsque ces rencontres peu-<br />
vent êtres relatées d’une façon vivante,<br />
elles permettent à ceux qui les lisent<br />
et les enten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> les harmoniser à<br />
leur tempérament, au sens <strong>de</strong> la<br />
musique, et d’en faire quelque chose<br />
dans leur propre trajectoire vitale. C’est<br />
un peu comme les Cinq psychanalyses<br />
écrites par Freud (à qui je propose<br />
d’ailleurs dans mon ouvrage <strong>de</strong> figurer<br />
parmi les pères fondateurs <strong>de</strong> la<br />
psychothérapie institutionnelle ; rappelez<br />
vous son discours <strong>de</strong> Budapest<br />
en 1918) qui ne peuvent résumer à<br />
elles seules toute la psychanalyse. Il<br />
n’est pas possible <strong>de</strong> les réduire à un<br />
seul cas exemplaire : chaque sujet est<br />
unique et chaque manière <strong>de</strong> le<br />
prendre en compte est également<br />
unique. C’est ce que nous enseigne<br />
Saint-Exupéry quand il écrit : « Tu seras<br />
pour moi unique au mon<strong>de</strong> » (dit le<br />
renard au petit prince à qui il est en<br />
train d’expliquer l’apprivoisement<br />
comme modèle <strong>de</strong> la relation transférentielle).<br />
Comment peut-on penser,<br />
lorsqu’on fait ce métier, qu’un traitement<br />
pourrait être standard ? Bien sûr<br />
les doses <strong>de</strong> neuroleptiques peuvent<br />
être standardisées en fonction du poids,<br />
mais le travail psychothérapique le<br />
peut-il ? Non, bien entendu. C’est<br />
d’ailleurs une <strong>de</strong> nos gran<strong>de</strong>s difficultés<br />
avec l’évaluation. Mais j’espère que<br />
nous y trouverons <strong>de</strong>s réponses pertinentes.<br />
Toujours est-il que dans ma<br />
formation j’ai eu la chance <strong>de</strong> rencontrer<br />
un grand nombre <strong>de</strong> gens qui<br />
m’ont accueilli et qui ont accepté <strong>de</strong><br />
partager leurs expériences subjectives<br />
avec moi, au moins pour une part, et à<br />
partir <strong>de</strong> là, j’ai eu l’idée que je <strong>de</strong>vais<br />
à mes collègues et à ceux que je dois<br />
former, <strong>de</strong> transmettre l’expérience <strong>de</strong><br />
ces maîtres. C’est pourquoi, à chaque<br />
fois que c’est possible j’essaye <strong>de</strong> rendre<br />
à César ce qui est à César et aux praticiens<br />
<strong>de</strong> la Psychothérapie Institutionnelle<br />
ce qui leur est arrivé dans les<br />
rencontres qu’ils ont faites, et ce qu’ils<br />
m’ont transmis dans les rencontres que<br />
j’ai faites avec eux. Ces notions <strong>de</strong> fraternité<br />
et <strong>de</strong> transmission sont pour<br />
moi nécessaires dans l’exercice <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie, sans quoi le risque est grand<br />
d’aller vers une psychiatrie vétérinaire,<br />
dans laquelle tout ce qui fait la part<br />
subjective d’un être humain, est considéré<br />
comme un artéfact. Il faut se rappeler<br />
que c’est déjà arrivé à certaines<br />
époques, notamment lors <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />
nazie, et le programme T4 (2) est là<br />
pour en témoigner. Il ne faut pas l’oublier<br />
et donc en transmettre le souvenir<br />
actif aux plus jeunes.<br />
M. S.-C. : « La psychothérapie institutionnelle,<br />
c’est la psychiatrie ! » : c’est le<br />
titre d’un <strong>de</strong> vos chapitres. Vous êtes<br />
connu pour lancer <strong>de</strong>s pavés dans la<br />
mare lorsque cela vous semble justifié.<br />
On peut dire aussi que la psychiatrie<br />
psychanalytique tient le morceau du roi<br />
dans vos pratiques. Comment aimeriezvous<br />
en rappeler vous les grands axes ?<br />
PD : C’est là une phrase <strong>de</strong> Jean<br />
Oury, dont j’aime bien les colères<br />
cathartiques. Quand il a prononcé<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Entretien avec Pierre Delion<br />
celle-là, <strong>de</strong>s gens le cherchaient un<br />
peu sur la psychothérapie institutionnelle,<br />
alors qu’ils n’étaient même pas<br />
foutus <strong>de</strong> faire une psychiatrie digne<br />
<strong>de</strong> ce nom ! Il leur a rappelé l’histoire<br />
<strong>de</strong> la psychiatrie d’après la <strong>de</strong>uxième<br />
guerre mondiale et a essayé <strong>de</strong> leur<br />
démontrer l’impasse <strong>de</strong> l’antipsychiatrie.<br />
Alain Buzaré a d’ailleurs repris<br />
cette phrase pour en faire le titre <strong>de</strong><br />
son livre paru en 2004 aux éditions<br />
du champ social. Je crois en effet que<br />
la psychothérapie institutionnelle est<br />
un courant qui a beaucoup réfléchi à<br />
la question <strong>de</strong>s articulations nécessaires<br />
sur les plans théoriques et pratiques<br />
pour l’organisation <strong>de</strong>s soins<br />
pour les patients, notamment les plus<br />
en déshérence, et plus précisément<br />
encore pour les personnes psychotiques.<br />
Je rappelle souvent que le proverbe<br />
« qui peut le plus peut le moins »<br />
s’applique bien à ce mouvement. Car<br />
si cette manière <strong>de</strong> pratiquer et <strong>de</strong><br />
théoriser a été au départ mise au point<br />
pour pouvoir soigner aussi les personnes<br />
psychotiques, il est évi<strong>de</strong>nt<br />
que les autres pathologies peuvent en<br />
bénéficier « par surcroît ». Tosquelles<br />
disait souvent que cette praxis s’appuie<br />
sur <strong>de</strong>ux jambes : la psychanalytique<br />
et la politique. On le voit bien<br />
tous les jours : si on pratique la psychanalyse<br />
avec les schizophrènes et<br />
les autistes comme avec les « névrosés<br />
occi<strong>de</strong>ntaux poids moyens », avec le<br />
dispositif divan-fauteuil, le ridicule est<br />
au bout <strong>de</strong> la rue ! Il est nécessaire<br />
d’adapter le cadre à ces nouvelles<br />
situations psychopathologiques, au<br />
prix <strong>de</strong> retravailler une nouvelle métapsychologie<br />
pour elles, comme le suggère<br />
par exemple Joyce Mac Dougall.<br />
Freud le premier, nous a montré comment<br />
il pouvait remettre en cause <strong>de</strong>s<br />
pans entiers <strong>de</strong> sa métapsychologie<br />
pour y faire entrer, en authentique<br />
scientifique, ses découvertes récentes.<br />
Mais dès l’instant où l’on s’intéresse<br />
à ces pathologies psychotiques, le<br />
concept d’institution est inévitablement<br />
au ren<strong>de</strong>z vous. Non pas celui<br />
d’établissement où l’on doit les interner,<br />
mais celui d’une équipe soignante<br />
qui doit les accueillir au long <strong>de</strong><br />
leur trajectoire souvent délicate.<br />
Jacques Hochmann par exemple théorise<br />
le concept d’« institution mentale »<br />
à cet usage : une possibilité <strong>de</strong> mobiliser<br />
plusieurs soignants en liens avec<br />
d’autres partenaires <strong>de</strong> la cité et avec<br />
les parents pour les « instituer » en<br />
porteurs <strong>de</strong> ce patient. C’est dans cette<br />
perspective que j’ai décrit la « fonction<br />
phorique », comme ce qui permet à la<br />
personne psychotique d’être portée,<br />
psychiquement, et quelquefois physiquement,<br />
tout le temps qu’elle ne<br />
peut le faire elle-même. A partir <strong>de</strong><br />
cette position <strong>de</strong> base, une sorte <strong>de</strong><br />
proposition d’ouverture et d’accueil<br />
<strong>de</strong> l’autre, c’est l’appareil psychique<br />
<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s soignants qui <strong>de</strong>vient le<br />
porteur <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> souffrance psychique<br />
<strong>de</strong> ce sujet aliéné, c’est la fonction<br />
« sémaphorique ». Et c’est la<br />
réunion <strong>de</strong> nos contre-transferts singuliers<br />
qui peut aboutir à une fonction<br />
<strong>de</strong> transformation, au sens <strong>de</strong><br />
Bion, que je qualifie <strong>de</strong> « métaphorique<br />
». La notion <strong>de</strong> constellation<br />
transférentielle prend alors tout son<br />
sens en croisant les dimensions subjectales,<br />
groupales et institutionnelles<br />
qui sont à travailler pour le soin <strong>de</strong><br />
ces patients. Mais si Tosquelles insistait<br />
sur le « politique » au sens marxiste du<br />
terme, c’était bien plus pour en travailler<br />
les implications sociales<br />
concrètes que pour en déduire une<br />
quelconque idéologie politicienne. Il<br />
avait assez souffert, pendant la guerre<br />
d’Espagne, <strong>de</strong> l’habituelle « entropie<br />
stalinienne ». C’est ainsi que les opérateurs<br />
du « club thérapeutique », <strong>de</strong> la<br />
sectorisation, <strong>de</strong>s relations complémentaires<br />
(Dupréel), <strong>de</strong> la « hiérarchie
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
subjectale », sont autant <strong>de</strong> concepts<br />
élaborés pour faire <strong>de</strong> la réintégration<br />
dans le socius autre chose<br />
qu’une éviction à rebours. Dans ce<br />
sens, Oury a choisi <strong>de</strong> faire son séminaire<br />
mensuel sur ce thème du « Politique<br />
» <strong>de</strong>puis plusieurs années à Sainte<br />
Anne à Paris. Mais je pense à un<br />
tout autre sujet, celui <strong>de</strong> la périnatalité.<br />
Lorsque j’ai donné mon livre à<br />
Françoise Molénat, qui a été l’inspiratrice<br />
<strong>de</strong>s textes « révolutionnaires »<br />
récents à ce sujet, elle m’a dit combien<br />
elle avait été influencée dans sa<br />
formation par les idées <strong>de</strong> la psychothérapie<br />
institutionnelle. Et quand on<br />
lit ses textes, et qu’on voit les objectifs<br />
qu’elle y expose, il est clair qu’elle en<br />
a intériorisé parfaitement les « invariants<br />
structuraux ». Qui aurait pu penser<br />
une chose pareille ? J’y vois le signe<br />
d’une gran<strong>de</strong> actualité et y retrouve la<br />
pertinence d’une « épistémé » <strong>de</strong> la<br />
relation humaine vulnérable. A ce<br />
titre, la psychothérapie institutionnelle<br />
a <strong>de</strong> beaux jours <strong>de</strong>vant elle !<br />
M. S.-C. : Une autre notion tend à se<br />
perdre, celle qui veut que la psychanalyse<br />
trouve aussi un terrain d’application<br />
dans la psychose. Salomon Resnik est<br />
un personnage qui vous est très cher…<br />
P.D. : Mon maître et ami Salomon<br />
Resnik est une figure impressionnante<br />
<strong>de</strong> la psychiatrie contemporaine,<br />
et je me suis souvent <strong>de</strong>mandé ce qui<br />
aurait pu se passer lorsque Tosquelles<br />
lui a <strong>de</strong>mandé, à l’époque où il hésitait<br />
entre la France et l’Angleterre, s’il<br />
accepterait <strong>de</strong> venir travailler avec lui<br />
à Saint Alban pour la formation psychanalytique<br />
<strong>de</strong> ses collègues. Outre<br />
son premier cursus <strong>de</strong> psychanalyse<br />
en Argentine sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong> Pichon<br />
Rivière et <strong>de</strong> ses élèves kleiniens, il a<br />
complété sa formation à Londres avec<br />
Mélanie Klein elle-même, mais aussi,<br />
excusez du peu ! avec Rosenfeld,<br />
Bion, Bick, Winnicott et quelques<br />
autres. Devenu leur ami, il a su explorer<br />
<strong>de</strong>s contrées inhabituelles et<br />
notamment celles <strong>de</strong> la psychose. Il<br />
fait sans doute partie <strong>de</strong>s quelques<br />
personnes qui peuvent comprendre<br />
les personnes psychotiques avec une<br />
intuition et une capacité d’interprétation<br />
proprement époustouflantes. Jean<br />
Ayme le présente comme un génie<br />
<strong>de</strong>s langues, sachant parler aussi bien<br />
l’espagnol, l’anglais, le français, le russe<br />
et l’italien que... « le psychotique » ! Et<br />
non seulement ses talents lui ont permis<br />
<strong>de</strong> soigner <strong>de</strong> très nombreuses<br />
personnes psychotiques, mais <strong>de</strong> plus<br />
il s’est intéressé <strong>de</strong>puis son très jeune<br />
âge à l’art sous toutes ces formes. Et<br />
on voit bien que le domaine <strong>de</strong>s sensations,<br />
que l’étymologie grecque éclaire<br />
puisque ce mot, qui vient <strong>de</strong> « aiesthesis<br />
» qui signifie « sensation », nous<br />
met directement en lien avec celui <strong>de</strong><br />
Revue Santé mentale<br />
au Québec<br />
Revivez la magie du colloque Rencontre<br />
avec quelques Lyonnais qui<br />
a eu lieu le 15 septembre au centre<br />
hospitalier du Vinatier. A travers<br />
le regard <strong>de</strong> cinq Lyonnais (Marcel<br />
Sassolas, Jacques Hochmann,<br />
Francis Maqueda, René Roussillon<br />
et René Kaës), le colloque a réinterrogé<br />
le parcours théorique et<br />
clinique suivi par ceux-ci afin <strong>de</strong><br />
répondre à quatre questions : comment<br />
ont-ils créé leur savoir clinique.<br />
D’où leur sont venues leurs<br />
hypothèses <strong>de</strong> travail ? Comment<br />
les ont-ils modifiées ? Quelle est<br />
l’influence <strong>de</strong>s facteurs personnels<br />
sur ce parcours ?<br />
Prenez connaissance <strong>de</strong> leurs réponses<br />
en visionnant leur conférence<br />
sur le site internet suivant<br />
http://rsmq.cam.org/smq/document/SiteBOA.htm).<br />
L’accès est<br />
gratuit.<br />
l’esthétique. Il y a donc une proximité<br />
logique entre ces mon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la psychose<br />
et <strong>de</strong> l’art et je crois que Salomon<br />
Resnik en a approché les confins<br />
et nous les a rendus accessibles plus<br />
que beaucoup d’autres. Je me souviens<br />
d’un colloque avec lui, Maldiney,<br />
Schotte et Oury au cours duquel<br />
ces notions avaient été exposées d’une<br />
façon très convaincante. Je crois que<br />
cela est paru sous le titre « comprendre<br />
la psychose » dans une <strong>de</strong>s<br />
revues <strong>de</strong> « Psychothérapie psychanalytique<br />
<strong>de</strong> groupe » autour <strong>de</strong> Jean<br />
Clau<strong>de</strong> Rouchy. L’ouvrage <strong>de</strong> Maldiney<br />
Regard, parole, espace est un<br />
<strong>de</strong>s livres les plus passionnants sur ce<br />
sujet, notamment lorsqu’il explicite le<br />
concept <strong>de</strong> « moment pathique ». Nul<br />
doute que les territoires psychiques<br />
en question sont <strong>de</strong> nature à nous<br />
éclairer sur les processus en jeu dans<br />
l’être au mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s personnes psychotiques,<br />
jusques et y compris en<br />
matière d’autisme infantile. D’ailleurs,<br />
ce n’est pas par hasard que Tustin et<br />
Meltzer ont creusé la question <strong>de</strong>s<br />
difficultés <strong>de</strong> « consensuality » (à traduire<br />
plutôt par con-sensation que<br />
par consensualité) chez les sujets<br />
autistes.<br />
M. S.-C. : Quelles sont les perspectives<br />
pour <strong>de</strong>main ?<br />
P.D. : Il me semble très important<br />
aujourd’hui <strong>de</strong> reparler <strong>de</strong> toutes ces<br />
« vieilles choses » <strong>de</strong> la psychothérapie<br />
institutionnelle, parce qu’il s’agit d’une<br />
manière <strong>de</strong> pratiquer la psychiatrie<br />
qui a une cohérence profon<strong>de</strong>. Les<br />
impasses dans lesquelles certains bons<br />
esprits s’égarent sous couvert <strong>de</strong> science<br />
me préoccupent énormément et<br />
je rappelle souvent que la relation<br />
médicale est une <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> la<br />
relation humaine, et que si elle peut et<br />
doit bénéficier <strong>de</strong>s apports <strong>de</strong>s<br />
sciences dites dures, elle ne doit pas<br />
oublier qu’elle ne peut en aucun cas<br />
se réduire à la seule science sous peine<br />
<strong>de</strong> surprises éthico-déontologiques<br />
rapi<strong>de</strong>s. Nous avons tout intérêt à<br />
continuer <strong>de</strong> penser la psychiatrie<br />
comme une discipline installée en<br />
pont entre la mé<strong>de</strong>cine et l’anthropologie,<br />
entre les neurosciences et la<br />
psychopathologie, et à défendre cette<br />
position sur les plans éthiques et épistémologiques.<br />
A ce sujet, j’aime bien<br />
l’expression d’« anthropopsychiatrie »<br />
forgée par mon ami Jacques Schotte<br />
<strong>de</strong> l’université <strong>de</strong> Louvain la neuve,<br />
pour décrire ce projet <strong>de</strong> rencontre.<br />
Dans ce combat qui s’amorce, et qui<br />
peut prendre <strong>de</strong>s tours d’une violence<br />
extrême, le champ <strong>de</strong> la psychopathologie<br />
psychanalytique a une<br />
importance cruciale pour étayer la<br />
question humaine, et il serait incompréhensible<br />
d’avancer sans elle, sous le<br />
prétexte fallacieux qu’elle n’est pas<br />
démontrable. Le sens d’une vie est-il<br />
démontrable ? J’espère participer à<br />
mon niveau à cette aventure aussi<br />
passionnante que vitale pour la psychiatrie<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>main. Et dans cette<br />
aventure, la psychiatrie du bébé , et<br />
tout ce qu’elle porte en elle <strong>de</strong> pistes<br />
novatrices, peuvent nous ai<strong>de</strong>r considérablement<br />
à avancer. ■<br />
Notes<br />
(1) Inscriptions auprès <strong>de</strong> madame Caroline<br />
Debaecker, Service <strong>de</strong> formation<br />
médicale continue, Faculté <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />
<strong>de</strong> Lille2, Pôle recherche, 59045, Lille<br />
ce<strong>de</strong>x. c<strong>de</strong>baecker@univ-lille2.fr<br />
(2) Le programme T4 est le texte réglementaire<br />
écrit par les responsables nazis<br />
pour planifier l’extermination du peuple<br />
Juif. Le film <strong>de</strong> Costa-Gavras, Amen, est à<br />
ce titre très intéressant puisqu’il met en<br />
scène cette horreur dans sa première partie<br />
; les critiques n’ont parlé que <strong>de</strong> la<br />
lâcheté du pape <strong>de</strong> l’époque, en omettant<br />
totalement la mise en place <strong>de</strong> ce<br />
programme monstrueux.<br />
(3) Je recomman<strong>de</strong> la lecture <strong>de</strong> L’êtrebébé<br />
<strong>de</strong> Bernard Golse, paru cette année<br />
aux PUF, dans la collection Le fil rouge.<br />
Une personne hospitalisée parce<br />
qu’elle souffre <strong>de</strong> troubles mentaux,<br />
une fois sur trois, a subi <strong>de</strong>s abus<br />
sexuels ou <strong>de</strong>s violences dans l’enfance.<br />
Devenue adulte et mala<strong>de</strong>, elle a<br />
trois fois plus <strong>de</strong> risque d’être victime<br />
<strong>de</strong> violence qu’un simple citoyen.<br />
Cependant, c’est elle qu’on va montrer<br />
du doigt si un crime est commis ;<br />
et la ficher ? Monsieur le Ministre se<br />
trompe <strong>de</strong> tiroir, c’est dans le fichier<br />
<strong>de</strong>s victimes qu’il doit ranger les<br />
mala<strong>de</strong>s mentaux, pas dans celui <strong>de</strong>s<br />
prédateurs.<br />
La croyance que les mala<strong>de</strong>s mentaux<br />
sont <strong>de</strong>s criminels en puissance est un<br />
travers <strong>de</strong> la pensée qui affecte les<br />
esprits les plus éminents. Un citoyen<br />
sur <strong>de</strong>ux est convaincu que les mala<strong>de</strong>s<br />
mentaux sont dangereux pour les<br />
autres, d’après un sondage réalisé par<br />
l’IPSOS en 2001. Malheureusement,<br />
un Ministre en est convaincu. Il eut<br />
mieux valu qu’il soit en charge d’un<br />
office plus futile mais il est à l’Intérieur.<br />
Cependant, il s’agit d’une croyance<br />
incroyablement banale et, à force d’être<br />
répandue, elle pousse les législateurs<br />
<strong>de</strong>s pays occi<strong>de</strong>ntaux à modifier leurs<br />
législation. C’est le cas du Royaume-<br />
Uni. Sept cents meurtres par an, dont...<br />
71 commis par <strong>de</strong>s personnes souffrant<br />
d’un trouble mental. Cela suffit,<br />
semble-t-il, pour proposer <strong>de</strong> modifier<br />
la législation en vigueur « afin que la<br />
population soit bien protégée <strong>de</strong>s individus<br />
qui peuvent être atteints <strong>de</strong> maladies<br />
mentales et représenter un sérieux<br />
danger pour le public, même s’ils n’ont<br />
pas été accusés d’un crime » (discours<br />
<strong>de</strong> Tony Blair le 20 novembre 2002).<br />
Les étu<strong>de</strong>s menées par les psychiatres<br />
anglais ont pourtant montré que le<br />
nombre <strong>de</strong> crimes perpétrés par <strong>de</strong>s<br />
personnes souffrant <strong>de</strong> maladies mentales<br />
est resté stable <strong>de</strong>puis 38 ans. Et,<br />
le nombre <strong>de</strong> crimes augmentant, la<br />
proportion <strong>de</strong> leurs crimes a continuellement<br />
baissé, au rythme <strong>de</strong> 3%<br />
par an. Une étu<strong>de</strong> britannique récente<br />
sur les violences domestiques montre<br />
que la maladie mentale y joue un rôle<br />
minime. Le principal facteur associé à<br />
cette violence est la prise d’alcool pour<br />
plus <strong>de</strong> 50% <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violence physique.<br />
Ces préjugés contre la maladie<br />
mentale ont poussé les autorités <strong>de</strong><br />
santé <strong>de</strong> Nouvelle-Zélan<strong>de</strong> à comman<strong>de</strong>r<br />
un rapport sur la question. La<br />
réponse est la même : en dépit <strong>de</strong>s<br />
craintes du public, le nombre <strong>de</strong><br />
meurtres commis par <strong>de</strong>s personnes<br />
atteintes <strong>de</strong> maladies mentales a considérablement<br />
diminué <strong>de</strong>puis 1970 au<br />
rythme <strong>de</strong> 4% par an. En 2000, il<br />
représente 5% <strong>de</strong> tous les meurtres :<br />
95% <strong>de</strong>s meurtres sont accomplis par<br />
<strong>de</strong>s personnes ne souffrant pas <strong>de</strong><br />
troubles mentaux. Une étu<strong>de</strong> danoise<br />
menée sur 340 000 personnes, soit<br />
l’ensemble <strong>de</strong>s sujets nés après-guerre<br />
et suivis jusqu’à l’âge <strong>de</strong> 44 ans, montre<br />
que 5000 hommes ont été arrêtés<br />
pour <strong>de</strong>s actes violents commis au<br />
cours <strong>de</strong> leur vie ; seuls 453 présentaient<br />
un trouble mental sévère.<br />
En restant pru<strong>de</strong>nt, il est possible d’estimer<br />
que 90 à 95% <strong>de</strong>s meurtres sont<br />
le fait <strong>de</strong> personnes normales. 5 à 10%<br />
sont le fait <strong>de</strong> personnes souffrant <strong>de</strong><br />
maladies mentales sévères et, dans ce<br />
cas, la victime est le plus souvent un<br />
membre <strong>de</strong> l’entourage. Les crimes sur<br />
<strong>de</strong>s étrangers sont rarement le fait <strong>de</strong><br />
personnes mala<strong>de</strong>s.<br />
Vous ne risquez pas, en vous promenant<br />
dans la rue ou en allant faire vos<br />
courses <strong>de</strong> vous faire assassiner par un<br />
« mala<strong>de</strong> mental ».<br />
Les facteurs associés aux comportements<br />
violents sont les mêmes chez<br />
les personnes atteintes <strong>de</strong> maladies<br />
mentales que chez les personnes<br />
in<strong>de</strong>mnes : il s’agit <strong>de</strong> la consommation<br />
d’alcool ou <strong>de</strong> drogues et <strong>de</strong> la<br />
précarité. Les comportements violents<br />
sont également plus fréquents chez les<br />
hommes, les sujets jeunes et chez les<br />
personnes qui ont déjà commis <strong>de</strong>s<br />
actes violents. Ces facteurs sont connus<br />
<strong>de</strong>puis longtemps. La population seraitelle<br />
plus rassurée si l’on affichait <strong>de</strong>vant<br />
chaque mairie la liste <strong>de</strong> toutes les personnes<br />
qui ont pris une cuite ?<br />
La stigmatisation <strong>de</strong>s<br />
médias<br />
Malheureusement, il ne sert à rien <strong>de</strong><br />
lutter contre les préjugés sociaux. Plusieurs<br />
expériences montrent que la lecture<br />
<strong>de</strong> faits divers où il est indiqué<br />
que le criminel est atteint d’une pathologie<br />
mentale rend les lecteurs plus<br />
craintifs <strong>de</strong> la maladie mentale, plus<br />
favorables à <strong>de</strong>s traitements sous<br />
contrainte et plus enclins à isoler <strong>de</strong><br />
tels patients du reste <strong>de</strong> la société. Ces<br />
lecteurs évitent également <strong>de</strong> fréquenter<br />
<strong>de</strong>s personnes qu’ils savent<br />
atteintes <strong>de</strong> troubles mentaux et, cela<br />
va sans dire, <strong>de</strong> les ai<strong>de</strong>r.<br />
La télévision offre aussi son pesant <strong>de</strong><br />
stéréotypes qui forgent les attitu<strong>de</strong>s<br />
sociales <strong>de</strong>s citoyens. George Gerbner,<br />
un <strong>de</strong>s chercheurs les plus écoutés sur<br />
la violence dans les medias, a observé,<br />
aux USA, que 45% <strong>de</strong>s personnages<br />
télévisés sont violents et que cette proportion<br />
monte à 72% pour les personnages<br />
décrits comme <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s<br />
mentaux. Gerbner note également que<br />
la maladie mentale est, dans l’univers<br />
télévisuel, la seule caractéristique qui<br />
suffit à rendre les personnages féminins<br />
aussi violents que les hommes.<br />
Aucune campagne d’information n’aura<br />
assez d’impact pour contrebalancer<br />
une telle propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> stéréotypes<br />
sociaux. Faut-il, pour autant, créer <strong>de</strong>s<br />
lois pour rassurer le consommateur <strong>de</strong><br />
séries policières ainsi apeuré et prévenu<br />
contre la maladie mentale ? Est-il<br />
plus simple <strong>de</strong> ficher <strong>de</strong>s personnes<br />
mala<strong>de</strong>s que <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s recommandations<br />
aux groupes <strong>de</strong> communication<br />
? Est-il si compliqué <strong>de</strong> fournir<br />
en masse une distraction alternative à<br />
la présentation spectaculaire <strong>de</strong> criminels<br />
délirants ?<br />
Une loi trompeuse pour<br />
rassurer les effrayés<br />
Il faut prévenir les citoyens amateurs<br />
<strong>de</strong> télévision que les conséquences <strong>de</strong><br />
ce projet <strong>de</strong> loi vont aggraver leur situation.<br />
En effet, le principal facteur susceptible<br />
d’augmenter la violence d’un<br />
sujet délirant ou halluciné est le fait<br />
qu’il ne soit pas traité. Croyez-vous<br />
que, sachant qu’il sera fiché, cet individu<br />
acceptera d’aller chercher un traitement<br />
? Bien entendu, non. Le résultat<br />
prévisible <strong>de</strong> cette loi est : le patient<br />
refusera les soins, n’ira pas chercher <strong>de</strong><br />
l’ai<strong>de</strong>. Sans traitement, son risque <strong>de</strong><br />
commettre un acte violent augmente,<br />
une fois celui-ci commis, il sera alors<br />
soumis à l’emprisonnement. La conséquence<br />
sera une augmentation <strong>de</strong> la<br />
criminalité. Avec l’augmentation du<br />
nombre <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s mentaux dans les<br />
prisons, ces patients ne pourront pas<br />
être correctement soignés parce que<br />
tout simplement nos collègues <strong>de</strong>s<br />
SMPR ne sont largement pas assez<br />
nombreux pour soigner tout ce mon<strong>de</strong>.<br />
HUMEUR ■ 11<br />
La double-peine en psychiatrie ou<br />
comment le projet <strong>de</strong> loi <strong>de</strong> prévention<br />
<strong>de</strong> la délinquance va augmenter le<br />
nombre <strong>de</strong> « délinquants »<br />
Ces patients, s’ils ne se sont pas suicidés<br />
et s’ils n’ont pas été victimes <strong>de</strong> violence,<br />
sortiront alors en ayant reçu <strong>de</strong>s<br />
soins élémentaires. Pensez-vous sérieusement,<br />
après un tel parcours, que ces<br />
patients maltraités iront avec confiance<br />
poursuivre leurs soins auprès d’un service<br />
médical ? Ce succès prévisible<br />
<strong>de</strong>vrait inciter nos parlementaires et<br />
Monsieur Houillon, rapporteur du projet<br />
auprès <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s Lois,<br />
à examiner l’impact <strong>de</strong>s mesures envisagées<br />
sur l’évolution <strong>de</strong> la violence.<br />
Après s’être désolé <strong>de</strong>s dysfonctionnements<br />
<strong>de</strong> certaine institution, il s’agirait<br />
<strong>de</strong> franchir une étape dans le<br />
progrès et <strong>de</strong> prévenir <strong>de</strong> tels dysfonctionnements.<br />
Ainsi, le législateur contribuera<br />
indirectement à alléger la stigmatisation<br />
<strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s mentaux,<br />
victimes dans leur corps et dans leur<br />
esprit, victimes du regard que leur porte<br />
la société, ses représentants et ses communicants,<br />
victimes <strong>de</strong>s cruautés ordinaires<br />
et <strong>de</strong> la négligence <strong>de</strong>s bien-portants.<br />
Dresser la liste <strong>de</strong> toutes ces<br />
personnes - ces Martin, Durand,<br />
Dupont – c’est dresser la liste <strong>de</strong> nos<br />
carences, établir le fichier <strong>de</strong> nos petitesses,<br />
aménager un tiroir pour notre<br />
bonne conscience. ■<br />
Roland Dar<strong>de</strong>nnes<br />
PU-PH, Université Paris Descartes & Centre<br />
Hospitalier Sainte-Anne.<br />
Bibliographie<br />
BRENNAN PA, MEDNICK SA, HOD-<br />
GINS S, Major mental disor<strong>de</strong>rs and criminal<br />
violence in a Danish birth cohort, Arch Gen<br />
Psychiatry 2000, 57, 494-500.<br />
COID J. YANG M, ROBERTS A, ULLRI-<br />
CH S, MORAN P, BEBBINGTON P, BRU-<br />
GHA T, JENKINS R, FARRELL M, LEWIS<br />
G, SINGLETON N, Violence and psychiatric<br />
morbidity in the national household population<br />
of Britain: public health implications, Br<br />
J Psychiatry 2006, 189, 12-19.<br />
CORRIGAN PW, WATSON AC, WAR-<br />
PINSKI AC, GRACIA G, Implications of<br />
educating the public on mental illness, violence,<br />
and stigma, Psychiatric Services 2004,<br />
55, 577-580.<br />
LEVIN A, Violence and mental illness: Media<br />
keep myths alive, Psychiatric News 2001,<br />
36, 10.<br />
SIMPSON A, MCKENNA B, MOSKO-<br />
WITZ A, SKIPWORTH J, BARRY-WALSH<br />
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mental illness and homici<strong>de</strong> in New Zealand,<br />
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of New Zealand 2003, 74 pages.<br />
TAYLOR PJ & J GUNN J, Homici<strong>de</strong>s by<br />
people with mental illness: myth and reality,<br />
Br J Psychiatry 1999, 174, 9-14.<br />
La mé<strong>de</strong>cine et les sciences<br />
XIX e -XX e siècles<br />
Jean-Paul Gaudillière<br />
La Découverte<br />
L’auteur part <strong>de</strong> l’idée selon laquelle<br />
la mé<strong>de</strong>cine est, <strong>de</strong>puis le milieu du<br />
XIX e siècle, organisée autour <strong>de</strong> trois<br />
pôles. mé<strong>de</strong>cine clinique, mé<strong>de</strong>cine<br />
sociale et mé<strong>de</strong>cine expérimentale.<br />
Leur particularité est affaire <strong>de</strong> lieux,<br />
d’acteurs, <strong>de</strong> rapports à l’économie<br />
ou à la politique mais aussi <strong>de</strong> manières<br />
<strong>de</strong> savoir. L’ouvrage les présente<br />
en insistant sur les multiples<br />
liens qui unissent expérimentation,<br />
soin, production matérielle et gestion<br />
politique <strong>de</strong> la santé. La <strong>de</strong>rnière partie<br />
confronte cette histoire aux enjeux<br />
<strong>de</strong> la biomé<strong>de</strong>cine contemporaine.
12<br />
LIVRES<br />
■ CLINIQUE<br />
Schizophrénie : l’annonce<br />
du diagnostic<br />
Arnaud Cherrier et Jérôme<br />
Palazzolo<br />
Editions in Press, 12 €<br />
La délivrance d’un diagnostic, notamment<br />
<strong>de</strong> schizophrénie, ne peut<br />
s’effectuer <strong>de</strong> manière irréfléchie. Une<br />
communication pleinement mesurée<br />
s’avère profitable au patient comme<br />
à son entourage et permet d’améliorer,<br />
à la fois, la conscience <strong>de</strong> la<br />
maladie, l’observance du traitement<br />
et la qualité <strong>de</strong> la relation thérapeutique.<br />
Cet ouvrage fait le point sur la question<br />
sous les angles juridique, clinique<br />
et relationnel.<br />
Les phénomènes<br />
d’autoscopie<br />
L’hallucination <strong>de</strong> soi-même<br />
Paul Sollier<br />
Avant-propos <strong>de</strong> Jacques<br />
Chazaud<br />
L’Harmattan, 16 €<br />
Paul Sollier, psychiatre à la jonction<br />
<strong>de</strong>s XIX e et XX e siècles, a été mé<strong>de</strong>cin<br />
au Sanatorium <strong>de</strong> Boulogne-sur-<br />
Mer, Professeur à l’Université nouvelle<br />
<strong>de</strong> Bruxelles et Professeur à<br />
l’Institut <strong>de</strong>s Hautes étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Belgique.<br />
Auteur <strong>de</strong> nombreux ouvrages<br />
<strong>de</strong> psychopathologie sur l’idiotie, l’alcoolisme,<br />
la morphinomanie, la mémoire,<br />
il a été célèbre par son Gui<strong>de</strong><br />
pratique <strong>de</strong>s maladies mentales (Masson,<br />
1893, repris plus tard avec Courbon<br />
sous le titre <strong>de</strong> Pratique sémiologique<br />
<strong>de</strong>s maladies mentales) et<br />
surtout par ses recherches sur la Genèse<br />
et nature <strong>de</strong> l’hystérie (Alcan,<br />
1897) et par son étu<strong>de</strong> sur L’Hystérie<br />
et son traitement partie, chez le même<br />
éditeur, <strong>de</strong>ux ans avant le présent<br />
ouvrage. Quand le sujet d’une confrontation<br />
avec son double <strong>de</strong>vient ainsi<br />
sujet d’une hallucination <strong>de</strong> soi-même,<br />
c’est sous une forme positive : l’autoscopie.<br />
Il existe pourtant une forme<br />
négative <strong>de</strong> l’hallucination : celle <strong>de</strong><br />
l’imperception <strong>de</strong> Soi au miroir. Ces<br />
<strong>de</strong>ux variétés, outre leur existence<br />
consacrée en psychiatrie, ont connu<br />
un <strong>de</strong>stin littéraire.<br />
Paul Sollier, à côté <strong>de</strong> ces formes canoniques,<br />
en rapport avec la pathologie<br />
<strong>de</strong> l’« extériorisation » <strong>de</strong> l’image<br />
<strong>de</strong> notre corps, a isolé une autoscopie<br />
interne lors <strong>de</strong>s états hypno-hystériques.<br />
Cette possibilité, chez les<br />
« vigilambules », d’une représentation<br />
<strong>de</strong>s organes internes objectivant au<br />
<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> Soi les impressions qu’ils<br />
envoient à l’écorce cérébrale est, le<br />
plus souvent, restée l’objet d’un scepticisme<br />
critique. Selon leur inventeur,<br />
elle ouvre pourtant « <strong>de</strong>s horizons nouveaux<br />
sur l’inconscient d’abord, et ensuite<br />
sur les mécanismes <strong>de</strong>s fonctions<br />
psychiques. Ils éclairent tout particulièrement<br />
les conditions <strong>de</strong> la conscience<br />
normale et <strong>de</strong> la suggestion ».<br />
Les données neuro-psychologiques<br />
paraissent en mesure <strong>de</strong> justifier, au<br />
moins dans certaines limites, ces<br />
observations.<br />
Le diagnostic en<br />
psychiatrie : questions<br />
éthiques<br />
Congrès <strong>de</strong> psychiatrie et <strong>de</strong><br />
neurologie <strong>de</strong> langue française<br />
Anne Danion-Grilliat<br />
Masson<br />
Les auteurs interrogent plus particulièrement<br />
le spécificité du diagnostic<br />
<strong>de</strong> psychiatrie (poser, transmettre et<br />
recevoir un diagnostic) : sont, entre<br />
autres, abordés le rôle <strong>de</strong>s références<br />
théoriques du psychiatre, l’annonce<br />
du diagnostic <strong>de</strong> pathologies graves<br />
(telles que la schizophrénie ou<br />
l’autisme), le <strong>de</strong>voir d’information, la<br />
prise en charge en réseau et le secret<br />
partagé.<br />
La question <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité<br />
est une question qui ne se pose<br />
pas normalement ; c’est-à-dire que le<br />
sentiment d’i<strong>de</strong>ntité apparaît comme<br />
une certitu<strong>de</strong> intime imprégnant tout<br />
vécu, <strong>de</strong> la sorte que sa mise en doute<br />
n’est ni naturelle, ni spontanée. Le mot<br />
d’i<strong>de</strong>ntité sera prononcé pour la première<br />
fois par Locke. Il fon<strong>de</strong> cette<br />
notion sur la permanence <strong>de</strong> l’organisme<br />
dans le changement matériel : la<br />
continuité du vécu est à l’origine <strong>de</strong> la<br />
conscience <strong>de</strong> soi, avec pour substrat la<br />
mémoire qui permet <strong>de</strong> récupérer ce<br />
vécu comme étant le nôtre. « Aussi loin<br />
que cette conscience peut s’étendre sur les<br />
actions et les pensées déjà passées, aussi<br />
loin s’étend l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> cette personne.<br />
C’est par là que chacun est à lui-même<br />
ce qu’il appelle soi-même » (7).<br />
Le corps apparaît comme le lieu privilégié<br />
où s’inscrit l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> l’individu<br />
dans sa singularité. Merleau-Ponty<br />
considérait le corps comme la structure<br />
stabilisée <strong>de</strong> l’existence, « lieu d’appropriation<br />
du mon<strong>de</strong> » (8). Lui-même<br />
objet particulier en se confondant avec<br />
le sujet, il est ce par quoi il y a <strong>de</strong>s<br />
objets. Il confère l’expérience à l’être<br />
en le faisant naître au mon<strong>de</strong>. Il est<br />
doublement support <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, en<br />
le liant d’une part au sujet qui le ressent<br />
comme sien, et d’autre part à autrui<br />
qui le reconnaît comme celui du sujet.<br />
La maladie psychique vient mettre en<br />
question ce sentiment d’i<strong>de</strong>ntité en particulier<br />
dans la psychose dont le nœud<br />
s’articule autour <strong>de</strong> cette question fondamentale<br />
<strong>de</strong> l’origine, la problématique<br />
psychotique étant avant tout celle<br />
« d’être quelqu’un ». Le signe du miroir<br />
initialement décrit par Abély et Delmas<br />
dans la fin <strong>de</strong>s années 1920 en<br />
tant que symptôme précoce <strong>de</strong> la schizophrénie<br />
en est l’illustration (1, 3). Ce<br />
trouble <strong>de</strong> l’image <strong>de</strong> soi se caractérise<br />
par une observation répétée et scrupuleuse<br />
<strong>de</strong> son propre visage dans la<br />
glace, comme si le sujet ne se reconnaissait<br />
pas, s’accompagnant <strong>de</strong> réactions<br />
affectives diverses <strong>de</strong>vant le miroir,<br />
et volontiers niée par le patient.<br />
Après un retour sur le cadre théorique<br />
du signe du miroir, nous nous sommes<br />
intéressés à une approche expérimen-<br />
COLLEGE DE PSYCHIATRIE<br />
tale <strong>de</strong> ce « curieux symptôme » tel que<br />
le qualifiait Abély (1), avec l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
la reconnaissance <strong>de</strong> son propre visage<br />
chez <strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets<br />
schizophrènes en tentant d’objectiver ce<br />
symptôme clinique ou du moins d’en<br />
préciser les soubassements cognitifs.<br />
En effet peu d’étu<strong>de</strong>s ont abordé ce<br />
trouble : l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong><br />
son propre visage a essentiellement été<br />
réalisée chez <strong>de</strong>s sujets sains (6), alors<br />
que plusieurs étu<strong>de</strong>s se sont intéressées<br />
à l’exploration du traitement <strong>de</strong>s<br />
visages et à la mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s<br />
déficits <strong>de</strong> ce traitement chez le patient<br />
schizophrène, mais aucune précisément<br />
à celle <strong>de</strong> son propre visage ; c’est ainsi<br />
qu’ont été mis en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s déficits<br />
dans les stratégies <strong>de</strong> recherche qui<br />
sous-ten<strong>de</strong>nt la perception <strong>de</strong>s<br />
visages (10), dans la perception globale<br />
<strong>de</strong>s émotions faciales (9), alors que le<br />
signe du miroir a déjà été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />
dans une étu<strong>de</strong> précé<strong>de</strong>nte (4),<br />
bien qu’elle se soit intéressée à une<br />
approche purement clinique.<br />
Description clinique du<br />
signe du miroir<br />
Abély définira le signe du miroir<br />
comme un « besoin qu’ont certains sujets<br />
<strong>de</strong> s’examiner longuement et fréquemment<br />
<strong>de</strong>vant une surface réfléchissante<br />
» (1), ce symptôme se manifestant<br />
avec une gran<strong>de</strong> fréquence à la phase<br />
<strong>de</strong> début <strong>de</strong> la démence précoce. Cette<br />
auto-inspection concerne essentiellement<br />
leur visage mais peut aussi intéresser<br />
l’ensemble <strong>de</strong> leur corps. Il serait<br />
LES MERCREDIS DE HENRI EY 2006/2007<br />
15 avenue <strong>de</strong> la Porte <strong>de</strong> Choisy - 75013 PARIS<br />
Les premiers mercredis <strong>de</strong> chaque mois à partir du 4 octobre 2006<br />
Salle <strong>de</strong>s conférences : 21 h - 22 h 30<br />
(Entrée libre, inscription sur place)<br />
Déclenchement, xénopathie, suppléance<br />
Questions cliniques<br />
Modalités du lien à l’Autre dans les psychoses<br />
Lors du déclenchement <strong>de</strong> la psychose, la xénopathie dévoile la vérité du lien que<br />
le sujet entretient avec l’Autre. Les aliénistes et les psychiatres classiques s’en<br />
étaient préoccupés avec les questions <strong>de</strong> lieu et <strong>de</strong> nosographie posées par la<br />
clinique. Dans ce lien à l’Autre, <strong>de</strong>s suppléances parfois reconnues socialement<br />
ou <strong>de</strong>s inventions plus singulières sont à l’œuvre dans un travail <strong>de</strong> restauration<br />
nécessaire à la survie du sujet. La clinique peut en être alors revisitée. Leurs<br />
lectures, à partir d’observations cliniques, orienteront un travail qui concerne<br />
nos pratiques professionnelles.<br />
Mercredi 4 octobre : Le concept <strong>de</strong> xénopathie dans la psychiatrie<br />
Introduction du séminaire par : Dr Michel DAUDIN, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux,<br />
Dr Clau<strong>de</strong> JEANGIRARD, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux, Fondateur du Collège <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>.<br />
Mercredi 6 décembre : Modalités du lien à l’Autre dans les Psychoses<br />
Dr Michel DAUDIN, Psychiatre, Hôpital Henri Ey<br />
Mercredi 7 février : Le dualisme schrébérien, Dr Michel JEANVOINE, Psychiatre,<br />
Psychanalyste<br />
Mercredi 7 mars : Xénopathie et transfert <strong>de</strong>s lieux dans les Mémoires du<br />
Prési<strong>de</strong>nt SCHREBER, M. Jorge CACHO, Psychologue<br />
Mercredi 4 avril : Xénopathie et érotomanie, Dr Nicole ANQUETIL, Psychiatre,<br />
Psychanalyste<br />
Mercredi 2 mai : Sur le cas Aimée, Dr Gilles DELAPORTE, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />
Hôpitaux<br />
Mercredi 6 juin : Vignettes cliniques, Dr Françoise BLANADET, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />
Hôpitaux<br />
LE CALENDRIER DES REUNIONS SERA ETABLI TRIMESTRIELLEMENT<br />
Dr ANQUETIL, (01 45 49 95 32/nicole.anquetil@free.fr) - Dr DAUDIN Hôpital Henri Ey<br />
(01 69 25 43. 90/ secretariat-75gO5@gpspv.fr) -Dr JEANVOINE (01 40 26 47 12/ mjeanv@noos.fr)<br />
Une approche<br />
expérimentale du signe<br />
du miroir : la question <strong>de</strong> la<br />
reconnaissance <strong>de</strong> son propre<br />
visage dans la schizophrénie<br />
contemporain <strong>de</strong>s premiers troubles,<br />
d’apparition insidieuse, associé à<br />
d’autres symptômes peu bruyants bien<br />
que caractéristiques : bizarrerie, indifférence,<br />
automatismes.<br />
Cette tendance commune <strong>de</strong> certains<br />
sujets à contempler leur visage <strong>de</strong>vant<br />
un miroir s’accompagne toutefois <strong>de</strong><br />
manifestations variables face à leur<br />
propre reflet. Un premier comportement<br />
est celui d’un examen attentif <strong>de</strong><br />
son image : ce n’est pas un simple<br />
regard furtif dans une glace mais une<br />
véritable inspection à laquelle le patient<br />
se livre ; il s’approche au plus près <strong>de</strong> la<br />
glace, quasiment à son contact, « recherchant<br />
un point minuscule sur la peau<br />
<strong>de</strong> son visage » (3). L’examen se fait en<br />
général selon différents points <strong>de</strong> vue,<br />
<strong>de</strong> face, <strong>de</strong> profil. Le sujet s’adonne à<br />
<strong>de</strong>s mimiques variées, « fronçant et<br />
défronçant les sourcils, plissant et déplissant<br />
le front, gonflant et dégonflant les<br />
joues, faisant la moue avec les lèvres » (3).<br />
L’inspection visuelle sera complétée<br />
par celle du toucher, en modifiant les<br />
traits <strong>de</strong> son visage à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa main<br />
en les tirant, les aplatissant et les frottant.<br />
Cette auto-observation sera répétée<br />
à plusieurs reprises, le sujet passant<br />
<strong>de</strong> longs moments <strong>de</strong>vant sa glace, à la<br />
recherche méticuleuse <strong>de</strong> détails physiques,<br />
parfois avec un certain étonnement,<br />
comme si ce n’était pas lui. « On<br />
dirait, quand il se regar<strong>de</strong>, qu’il est étonné,<br />
qu’il ne se reconnaît pas » (1).<br />
La contemplation <strong>de</strong> son propre visage<br />
ne s’accompagne parfois d’aucun affect,<br />
le sujet manifestant une indifférence<br />
froi<strong>de</strong> face à son image. Au contraire,<br />
certains patients présenteront <strong>de</strong>s réactions<br />
affectives intenses, s’amusant <strong>de</strong><br />
leur reflet, riant voire parlant à leur<br />
miroir. Une véritable mise en scène<br />
<strong>de</strong>vant la glace sera jouée, le sujet parlant<br />
à sa propre image, faisant les questions<br />
et les réponses, entretenant même<br />
<strong>de</strong>s propos amoureux à son reflet, jusqu’à<br />
avoir <strong>de</strong>s comportements d’onanisme<br />
face à leur miroir (1).<br />
Diverses tentatives<br />
d’interprétation<br />
Historiquement, Delmas appréhendait<br />
ce symptôme comme la manifestation<br />
d’un acte impulsif, arbitraire, n’ayant<br />
d’autre sens que lui-même (soit celle<br />
<strong>de</strong> sa réalisation motrice), posé par un<br />
sujet chez qui la notion <strong>de</strong> signifiant<br />
n’a pas <strong>de</strong> place. L’agir est sans finalité,<br />
l’acte sans <strong>de</strong>stinataire, la dialectique<br />
n’est plus possible, l’autre n’existe pas.<br />
Abély voyait dans cet acte la réponse à<br />
un vécu d’étrangeté, voire <strong>de</strong> dépersonnalisation<br />
par <strong>de</strong>s sujets envahis par<br />
la maladie psychique. Les assises <strong>de</strong><br />
leur i<strong>de</strong>ntité vacillent <strong>de</strong> par la transformation<br />
<strong>de</strong> leur personnalité, avec<br />
l’irruption du processus morbi<strong>de</strong> dans<br />
leur fonctionnement psychique, générant<br />
un sentiment d’inquiétu<strong>de</strong>, qui luimême<br />
dicte au sujet un contrôle <strong>de</strong><br />
son i<strong>de</strong>ntité par une vérification <strong>de</strong> son<br />
propre visage, tentative <strong>de</strong> réassurance<br />
du sujet <strong>de</strong> son intégrité. Mais cette<br />
auto inspection viserait aussi la<br />
recherche <strong>de</strong> détails physiques qui<br />
témoigneraient du changement intime<br />
survenant en eux, et rendraient compte<br />
alors <strong>de</strong> leur vécu d’étrangeté. Il<br />
considérait également que le terrain<br />
<strong>de</strong> ce « curieux symptôme » était celui<br />
<strong>de</strong> l’hébéphrénie, et comprenait cette<br />
manifestation comme celle <strong>de</strong> la<br />
dimension autistique <strong>de</strong> la démence<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
PRIX PREMIERE COMMUNICATION<br />
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précoce. Le sujet « trouve dans sa propre<br />
image un interlocuteur docile et muet<br />
qui favorise son évasion imaginative » (1).<br />
La faillite <strong>de</strong> la relation interpersonnelle<br />
trouve sa solution dans la reconstruction<br />
délirante d’un dialogue entre<br />
un sujet et son image, matérialisation<br />
du discours intérieur du patient. L’incapacité<br />
à la relation sociale du schizophrène<br />
est singée dans le signe du<br />
miroir où le sujet recrée un espace relationnel<br />
replié sur lui-même.<br />
Actuellement, il est appréhendé comme<br />
une méconnaissance délirante d’i<strong>de</strong>ntité<br />
appartenant au registre <strong>de</strong>s délires<br />
d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes (5), tels<br />
que le syndrome <strong>de</strong> Capgras ou l’illusion<br />
<strong>de</strong> Frégoli, relevant d’une hypo<br />
i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> son visage. Il partage<br />
en effet <strong>de</strong>s traits communs aux délires<br />
d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes, <strong>de</strong> par sa<br />
sélectivité (il concerne essentiellement<br />
le visage du sujet), d’une composante<br />
<strong>de</strong> dissociation (persistance d’informations<br />
concernant son i<strong>de</strong>ntité), son vécu<br />
d’étrangeté, l’existence <strong>de</strong> détails physiques<br />
différenciateurs, bien que le<br />
patient n’aboutisse pas à la conviction<br />
d’un double usurpant son i<strong>de</strong>ntité.<br />
Quoiqu’il en soit le signe du miroir<br />
apparaît comme la manifestation <strong>de</strong> la<br />
difficulté du sujet psychotique à rester<br />
i<strong>de</strong>ntique à lui-même bien qu’il soit<br />
<strong>de</strong>venu radicalement un autre par le<br />
processus morbi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la maladie psychique.<br />
Approche<br />
expérimentale<br />
Elle a consisté en l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />
<strong>de</strong> son propre visage chez<br />
<strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets schizophrènes<br />
en s’appuyant sur <strong>de</strong>s données<br />
comportementales (temps <strong>de</strong><br />
réponse, seuil <strong>de</strong> discrimination). Deux<br />
groupes <strong>de</strong> sujets appariés pour les<br />
variables d’âge et <strong>de</strong> genre ont été évalués,<br />
un groupe témoin (dix sujets) et<br />
un groupe schizophrène (neuf sujets).<br />
Le protocole s’articulait autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />
conditions expérimentales : l’une implicite,<br />
avec une tâche <strong>de</strong> discrimination<br />
<strong>de</strong> la forme du visage (à choix forcé :<br />
rond ou ovale), et l’autre explicite, avec<br />
une tâche <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> son<br />
i<strong>de</strong>ntité. Il reposait sur un procédé informatique<br />
<strong>de</strong> morphing, avec la présentation<br />
<strong>de</strong> mélanges, <strong>de</strong> combinaisons<br />
<strong>de</strong> visages entre trois catégories (visage<br />
propre du sujet, visages familiers et<br />
inconnus) avec <strong>de</strong>s proportions respectives<br />
différentes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux catégories<br />
<strong>de</strong> visages impliquées : 20/80,<br />
40/60, 60/40, 80/20 ; ces combinaisons<br />
étaient présentées dans trois ordres<br />
différents, croissant (où les morphings<br />
étaient présentés dans le sens d’une<br />
augmentation du pourcentage du visage<br />
propre du sujet au sein <strong>de</strong> la combinaison),<br />
décroissant (dans le sens<br />
d’une diminution <strong>de</strong> ce même pourcentage)<br />
et aléatoire.<br />
Il a, tout d’abord, été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />
au sein <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux populations un traitement<br />
plus rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />
<strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité (traitement synthétique)<br />
par rapport à celui <strong>de</strong> la<br />
discrimination <strong>de</strong> la forme du visage<br />
(traitement analytique), corroborant le<br />
modèle <strong>de</strong> Bruce & Young (2), où le<br />
traitement <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité d’un visage<br />
apparaît plus direct que celui faisant<br />
appel à un traitement analytique. Des<br />
déficits quantitatifs dans le traitement<br />
<strong>de</strong>s visages ont été objectivés chez le
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
groupe schizophrène, avec en premier<br />
lieu la mise en évi<strong>de</strong>nce d’un<br />
effet d’interférence <strong>de</strong> son propre<br />
visage, qui s’est traduit par un ralentissement<br />
du traitement <strong>de</strong>s combinaisons<br />
incluant le visage propre du<br />
sujet, alors que l’on s’attendait au<br />
contraire à une facilitation <strong>de</strong> ce traitement.<br />
Cet effet paradoxal a été<br />
retrouvé dans les <strong>de</strong>ux groupes, mais<br />
<strong>de</strong> manière encore plus manifeste<br />
chez les patients schizophrènes, et<br />
d’autant plus dans <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong><br />
traitement explicite ; on retrouve ainsi<br />
la notion classique <strong>de</strong> la littérature<br />
<strong>de</strong> dissociation avec un traitement<br />
explicite déficitaire et un traitement<br />
implicite conservé dans la population<br />
schizophrène. De plus, alors que l’on<br />
faisait l’hypothèse d’un seuil <strong>de</strong> détection<br />
<strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité plus élevé chez<br />
les patients schizophrènes, un profil<br />
similaire au groupe témoin a été<br />
retrouvé. Toutefois, cette équivalence<br />
<strong>de</strong>s performances a été corrélée à<br />
un coût cognitif plus élevé dans le<br />
groupe schizophrène, les temps <strong>de</strong><br />
réaction s’allongeant avec l’augmentation<br />
du pourcentage du visage<br />
propre du sujet au sein <strong>de</strong> la combinaison.<br />
D’autre part, <strong>de</strong>s secteurs <strong>de</strong><br />
vulnérabilité ont été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />
chez les patients schizophrènes, avec<br />
un traitement <strong>de</strong>s visages fragilisé par<br />
rapport aux témoins. En effet, ce traitement<br />
s’est révélé sensible à <strong>de</strong>s<br />
effets d’ordre (diminution <strong>de</strong>s performances<br />
en condition <strong>de</strong> présentation<br />
aléatoire), ou au contraire il<br />
s’est trouvé facilité pour <strong>de</strong>s visages<br />
intermédiaires, à l’i<strong>de</strong>ntité floue, et<br />
ce d’autant plus pour les combinaisons<br />
familier/inconnu.<br />
En conclusion, si le signe du miroir<br />
apparaît comme un symptôme historique,<br />
particulièrement rare, nous<br />
avons pu mettre en évi<strong>de</strong>nce au travers<br />
<strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> un soubassement<br />
cognitif avec <strong>de</strong>s singularités du traitement<br />
<strong>de</strong> son propre visage dans<br />
le groupe schizophrène, qui pourraient<br />
participer à un déficit <strong>de</strong> la<br />
reconnaissance <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité dans<br />
cette population. ■<br />
Docteur Charles Gheorghiev<br />
Assistant <strong>de</strong> psychiatrie, Hôpital d’Instruction<br />
<strong>de</strong>s Armées Percy, 101 avenue Henri<br />
Barbusse, 92140 Clamart.<br />
Texte <strong>de</strong> la communication présentée à la<br />
104ème session du Congrès <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> et<br />
<strong>de</strong> Neurologie <strong>de</strong> Langue Française à Brest,<br />
du 6 au 7 juin 2006 dans le cadre du Prix<br />
Première Communication <strong>de</strong> Bristol-Myers<br />
Squibb - Otsuka Pharmaceutical France.<br />
Bibliographie<br />
(1) ABELY P, Le signe du miroir dans les<br />
psychoses et plus spécialement dans la démence<br />
précoce, Annales Medico Psychologiques<br />
1930, 88, I, 28-36.<br />
(2) BRUCE V, & YOUNG A, Un<strong>de</strong>rstanding<br />
face recognition, British <strong>Journal</strong> of Psychology<br />
1986, 77, 305-327.<br />
(3) DELMAS FA, Le signe du miroir dans la<br />
démence précoce, Annales Médico-Psychologiques<br />
1929, 87, I, 227-233.<br />
(4) HARRINGTON A, OEPEN G, SPIT-<br />
ZER M, Disor<strong>de</strong>red recognition and perception<br />
of human faces in acute schizophrenia<br />
and experimental psychosis, Comprehensive<br />
Psychiatry 1989, 30, 376-384.<br />
(5) JOSEPH AB, Focal central nervous system<br />
abnormalities in patients with misi<strong>de</strong>ntification<br />
syndromes, 68-79, in : CHRISTODOULOU<br />
GN, The Delusional Misi<strong>de</strong>nti- fication Syndromes,<br />
Karger : Bibliotheca Psychiatrica,<br />
n°164, 1986.<br />
(6) KIRCHER TT, SENIOR C, PHILLIPS<br />
ML et al, Recognizing one’s own face, Cognition<br />
2001, 78, B1-B15.<br />
(7) LOCKE J, Essai philosophique concernant<br />
l’enten<strong>de</strong>ment humain, Paris, Vrin,<br />
1972.<br />
(8) MERLEAU-PONTY M, Phénoménologie<br />
<strong>de</strong> la perception, Paris, Gallimard, 1976.<br />
(9) POREH AM, WHITMAN RD, WEBER<br />
M et al, Facial recognition in hypothetically<br />
schizotypic college stu<strong>de</strong>nts. The role of generalized<br />
poor performance, <strong>Journal</strong> of Nervous<br />
and Mental Disease 1994, 182, 503-<br />
507.<br />
(10) SCHWARTZ BL, ROSSE RB, JOHRI S<br />
et al, Visual scanning of facial expressions<br />
in schizophrenia, <strong>Journal</strong> of Neuropsychiatry<br />
and Clinical Neurosciences 1999, 11,<br />
103-106.<br />
Le vol : « Acte <strong>de</strong> prendre ou <strong>de</strong> s’approprier<br />
sans autorisation le bien<br />
d’autrui » est largement répandu. Il fait<br />
partie <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> l’humanité (Eve<br />
n’at-elle pas volé la pomme ?) Il est<br />
présent dans toutes les cultures, accompli<br />
à tous les âges, indépendant <strong>de</strong> toute<br />
origine, classe ou croyance et implique<br />
une désapprobation morale et sociale.<br />
Conduite fréquente chez l’enfant et<br />
l’adolescent (4), le vol quand il persiste<br />
chez l’adulte est une réaction anti-sociale,<br />
souvent pathologique.<br />
La tolérance dont font preuve certaines<br />
cultures vis-à-vis <strong>de</strong> ces passages à l’acte<br />
à l’adolescence, nous fait penser que<br />
c’est peut-être un phénomène s’inscrivant<br />
dans une phase du développement<br />
humain et que seule sa persistance<br />
a valeur <strong>de</strong> symptôme : le vol<br />
comme solution à un conflit sous-jacent<br />
inconscient qu’il soit utilitaire (occasionnel,<br />
professionnel) ou franchement<br />
pathologique.<br />
C’est un fait juridique puni par la loi (à<br />
<strong>de</strong> rares exceptions près relevant <strong>de</strong><br />
l’article 122-1 et 2 du nouveau Co<strong>de</strong><br />
Pénal) même si on lui reconnaît parfois<br />
<strong>de</strong>s motivations sociologiques.<br />
Nous centrerons cette étu<strong>de</strong> sur la kleptomanie<br />
ou « désir irrationnel <strong>de</strong> voler<br />
pour <strong>de</strong>s motivations distinctes <strong>de</strong> l’utilité<br />
et reliées à l’inconscient chez un individu<br />
dont les autres aspects <strong>de</strong> la personnalité<br />
sont par ailleurs intacts ».<br />
Cette entité nosologique est apparue en<br />
France dans la première moitié du<br />
XIXème siècle. Pinel la distinguait déjà<br />
<strong>de</strong>s autres formes <strong>de</strong> vols pathologiques<br />
: « combien <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s, dit-il, au<br />
retour <strong>de</strong> leur accès ne peuvent s’empêcher<br />
<strong>de</strong> voler et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s tours <strong>de</strong><br />
filouterie, tandis que dans leurs moments<br />
luci<strong>de</strong>s on les cite comme <strong>de</strong>s modèles<br />
d’une probité austère. Mais dans le cas<br />
dont je veux parler ici, le penchant au vol<br />
est permanent et n’est point accompagné<br />
d’aliénation mentale. La raison<br />
conserve tout son empire, elle résiste<br />
contre cette impulsion secrète ; mais le<br />
penchant l’emporte, il subjugue la volonté<br />
». (6)<br />
« L’impulsion à voler, ou vol sans nécessité<br />
» a été décrite (sous le terme <strong>de</strong><br />
klopémanie) pour la première fois en<br />
1816 par Matthey puis par Marc en<br />
1840 qui lui donna son nom <strong>de</strong> kleptomanie<br />
(du grec « je vole et folie »).<br />
Elle fut d’abord considérée comme une<br />
maladie (monomanie) puis comme un<br />
syndrome, et enfin comme un symptôme.<br />
Elle a parfois été niée, certains en<br />
faisant « une affection mentale fictive au<br />
profit <strong>de</strong>s classes aisées » comme<br />
Anteaume en 1925.<br />
Sa définition première rejoint celle du<br />
DSM IV : impossibilité répétée <strong>de</strong> résister<br />
aux impulsions <strong>de</strong> vol d’objets<br />
n’ayant ni utilité immédiate ni valeur<br />
monétaire avec tension croissante avant<br />
<strong>de</strong> commettre l’acte et gran<strong>de</strong> satisfaction<br />
après sa réalisation.<br />
C’est un acte solitaire qui n’est pas dû<br />
à un trouble <strong>de</strong>s conduites (ex : toxicomanie),<br />
ou le fait d’une personnalité<br />
antisociale. Il n’est pas commis sous<br />
l’influence d’une hallucination ou<br />
d’idées délirantes, ni pour exprimer la<br />
colère ou la vengeance.<br />
Ce vol pathologique doit être distingué<br />
d’un vol utilitaire « conscient et organisé<br />
» et d’un trouble mental organique<br />
(débilité, épilepsie, démence, troubles<br />
post-encéphalitiques etc ... )<br />
On peut y associer les troubles bipolaires<br />
avec le vol du mélancolique (1)<br />
ou du maniaque.<br />
Les discussions actuelles à propos <strong>de</strong> la<br />
kleptomanie s’efforcent d’expliquer le<br />
conduite kleptomaniaque et sa signification<br />
inconsciente plutôt que <strong>de</strong> lui<br />
assigner une place nosographique qu’elle<br />
a eu du mal à reconquérir en 1980<br />
dans le DSM III. C’est une pathologie<br />
très répandue mais difficile à évaluer<br />
car les patients ne viennent pas consulter<br />
spontanément (il s’agit souvent<br />
d’obligations <strong>de</strong> soins suite à <strong>de</strong>s problèmes<br />
judiciaires).<br />
D’autres l’évoquent avec plus ou moins<br />
<strong>de</strong> culpabilité au cours <strong>de</strong> thérapies<br />
Le vol et la<br />
kleptomanie*<br />
comme un phénomène transitoire lié à<br />
<strong>de</strong>s moments difficiles <strong>de</strong> leur vie.<br />
Véritable court circuit <strong>de</strong>s processus<br />
<strong>de</strong> mentalisation et <strong>de</strong>s affects, la kleptomanie<br />
est souvent associée à d’autres<br />
troubles comme l’anxiété, la dépression,<br />
la boulimie ou <strong>de</strong>s troubles<br />
sexuels (2). Les conditions <strong>de</strong> réalisation<br />
transgressives dans le suspens et<br />
la peur permettent <strong>de</strong> dénier l’angoisse<br />
mais aussi d’avoir une réelle fonction<br />
anti-dépressive tant au niveau <strong>de</strong>s<br />
mécanismes <strong>de</strong> défense et <strong>de</strong> la symbolique<br />
du vol qu’au niveau biochimique.<br />
Cette fonction thérapeutique du vol a<br />
été décrite dans le cadre <strong>de</strong> pathologies<br />
dépressives : psychasthénie, psychopathie<br />
: « pour revigorer un élan mental<br />
déficient » ou « comme compensation à<br />
l’auto-dépréciation par la satisfaction du<br />
vol réussi » (5), mais aussi, bien que rarement,<br />
dans le cadre <strong>de</strong> la mélancolie<br />
comme une conduite symbolique compensatoire<br />
<strong>de</strong> la perte d’objet (7).<br />
Pierre Janet rapporte ainsi en 1911<br />
l’observation d’une patiente mélancolique<br />
qui au décours d’un troisième<br />
accès dépressif grave guérit brutalement<br />
en découvrant par hasard le vol<br />
dans les grands magasins.<br />
L’explication <strong>de</strong> celle-ci fut que, en pratiquant<br />
son premier vol, elle avait ressenti<br />
un « bouleversement délicieux » à<br />
l’idée qu’elle était une vraie voleuse,<br />
et qu’elle s’était «sentie guérie en rentrant<br />
chez elle ». Elle recommence par<br />
la suite ces vols dès qu’elle a un nouvel<br />
affaissement <strong>de</strong> l’humeur et cela pendant<br />
plusieurs mois jusqu’à l’arrestation,<br />
qui provoque la rechute mélancolique.<br />
« On peut facilement vérifier, dit P. Janet,<br />
les rapports entre impulsion et dépression,<br />
et constater comment l’impulsion<br />
tire sa force du besoin d’excitation qui<br />
se développe au cours <strong>de</strong> la dépression<br />
par les sentiments d’incomplétu<strong>de</strong> qu’elle<br />
engendre (3) ».<br />
Cette patiente <strong>de</strong>vient en quelque sorte<br />
dépendante <strong>de</strong> sa « thérapie par le vol »<br />
avec une faça<strong>de</strong> <strong>de</strong> kleptomane qui<br />
fait écran quelques temps à la maladie<br />
cyclothymique.<br />
Cela démontre la limite du concept <strong>de</strong><br />
kleptomanie qui n’est en fait qu’une<br />
« impulsion symptôme », la plupart du<br />
temps sans obsession préalable (l’impulsion<br />
kleptomane étant le plus souvent<br />
sollicité par la vue <strong>de</strong> l’objet ce<br />
qui la distingue <strong>de</strong> l’obsession-impulsion<br />
<strong>de</strong> la névrose obsessionnelle.) Il<br />
s’agit plutôt d’une contrainte interne à<br />
laquelle le patient ne peut résister sous<br />
menace <strong>de</strong> rechute dépressive (réelle<br />
ou fantasmée).<br />
Mais il peut aussi prendre un autre<br />
« raccourci » associant recherche <strong>de</strong><br />
sensation et impulsivité.<br />
Ainsi, la boulimie, ou d’autres conduites<br />
addictives dont on connaît la comorbidité<br />
et qui ont pour caractère commun<br />
leur répétition, l’envahissement<br />
<strong>de</strong> la vie psychique et la <strong>de</strong>struction<br />
du champ <strong>de</strong> conscience au moment<br />
<strong>de</strong> l’acte : achats pathologiques, jeux<br />
pathologiques, dépendance à une substance<br />
psychoactive, etc... En effet :<br />
« L’imagination du kleptomane transforme<br />
la réalité en un mon<strong>de</strong> autre où il<br />
peut agir a sa guise. Il atténue les vives<br />
informations <strong>de</strong> la conscience et se transpose<br />
par l’imaginaire en un état hypnoï<strong>de</strong><br />
qui permet la réalisation du désir ».<br />
Stekel (8).<br />
Cette compulsion à se remplir <strong>de</strong> nourriture<br />
ou d’objets nous renvoie à <strong>de</strong>s<br />
carences précoces <strong>de</strong> la petite enfance.<br />
Car, comme nous le rappelle Winnicott,<br />
« L’enfant qui vole ne cherche pas<br />
l’objet volé mais cherche la mère sur<br />
laquelle il a <strong>de</strong>s droits (...). Il réclame à sa<br />
mère et à son père <strong>de</strong>s dommages et<br />
intérêts parce qu’il se sent privé <strong>de</strong> leur<br />
amour ». Il rapproche également cette<br />
boulimie d’objet <strong>de</strong> la gloutonnerie<br />
« précurseur du vol » : « En d’autres<br />
termes si un enfant est glouton il y a<br />
une certaine carence affective et une certaine<br />
recherche compulsive d’une thérapie<br />
par l’environnement en rapport avec<br />
cette carence ». (9)<br />
Le kleptomane ferait donc payer<br />
inconsciemment à la société la faillite <strong>de</strong><br />
l’environnement <strong>de</strong> sa petite enfance,<br />
mais l’impulsivité se limiterait à un territoire<br />
restreint (chez un individu par<br />
ailleurs normal ayant bien repéré la<br />
loi), et ne <strong>de</strong>viendrait pas comme chez<br />
le psychopathe un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> relation<br />
aux autres.<br />
Certains auteurs distinguent ainsi selon<br />
le type <strong>de</strong> kleptomanie, la symbolique<br />
<strong>de</strong>s objets volés, une fixation orale,<br />
anale (collectionneurs) ou phallique (2).<br />
Winnicott associe également vol et<br />
vagabondage à l’adolescence : le vol<br />
étant un geste centripète « ce geste <strong>de</strong> la<br />
main qui se tend vers le fruit mûr »<br />
(Lacan), véritable déplacement <strong>de</strong> l’interdit<br />
sexuel, et le vagabondage une<br />
tendance centrifuge, fuite du mon<strong>de</strong><br />
sexué <strong>de</strong>s adultes et l’acceptation <strong>de</strong><br />
sa propre finitu<strong>de</strong>. Dans les <strong>de</strong>ux cas il<br />
s’agit <strong>de</strong> refuser <strong>de</strong> grandir et <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r<br />
l’illusion infantile du sentiment d’éternité<br />
et <strong>de</strong> la toute puissance. Etre obligé<br />
<strong>de</strong> grandir c’est en quelque sorte<br />
être volé <strong>de</strong> son enfance ; en volant, le<br />
kleptomane se fait ainsi justice et se<br />
réapproprie avec jouissance l’objet <strong>de</strong><br />
ses désirs : sa mère. Cet acte s’accomplit<br />
le plus souvent en public dans les<br />
grands magasins avec le risque d’être<br />
pris, ce qui augmente l’excitation.<br />
On peut ainsi avancer l’hypothèse que<br />
la kleptomanie est un acte quasi incestueux<br />
avec en toile <strong>de</strong> fond la<br />
recherche inconsciente <strong>de</strong> la punition,<br />
<strong>de</strong> la loi du père.<br />
Ce serait donc un aménagement pervers,<br />
une solution permettant au sujet<br />
<strong>de</strong> conserver la mégalomanie primaire,<br />
sans pour cela verser dans la psychose,<br />
l’objet volé étant le fétiche à moins que<br />
ce ne soit l’acte en lui-même.<br />
Mais la signification sexuelle du vol<br />
échappe en règle au kleptomane alors<br />
qu’elle est nettement perçue par le fétichiste.<br />
Il s’agit ici plutôt d’un substitut <strong>de</strong><br />
la satisfaction sexuelle que d’une réelle<br />
jouissance. « L’objet d’amour du kleptomane<br />
est bien plus qu’un simple fait<br />
isolé, c’est le lieu d’invasion et <strong>de</strong> fixation<br />
<strong>de</strong> la réalité amoureuse, sensuelle et érotique<br />
dans un acte qui dépasse ne fusse<br />
qu’un instant très court les limites <strong>de</strong><br />
temps et d’espace » (8).<br />
La kleptomanie permettrait ainsi, <strong>de</strong><br />
manière transitoire à l’adolescence ou<br />
à certains moments <strong>de</strong> la vie, le retour<br />
à l’unité première où le sujet et objet<br />
étaient confondus, où le narcissisme<br />
ne connaissait aucune fissure.<br />
Beaucoup d’auteurs font remarquer sa<br />
plus gran<strong>de</strong> fréquence chez la femme<br />
et le lien avec la vie génitale, véritable<br />
« remè<strong>de</strong> » contre la perte d’objet : stérilité,<br />
décès ou départ d’enfant, ménopause<br />
etc..., d’autres mettent l’accent<br />
sur la crainte <strong>de</strong> la castration, l’envie<br />
du pénis et justifie ainsi sa fréquence en<br />
pério<strong>de</strong> menstruelle.<br />
La kleptomanie se caractérise donc par<br />
<strong>de</strong>ux pôles : d’un côté la révolte contre<br />
l’interdit du vol et <strong>de</strong> l’inceste, <strong>de</strong> l’autre<br />
le désir <strong>de</strong> punition.<br />
C’est dans le sens <strong>de</strong> cette recherche <strong>de</strong><br />
limites que le kleptomane doit être<br />
puni mais avec une « peine atténuée »<br />
car même s’il agit sous la « contrainte »<br />
pulsionnelle, il reste responsable <strong>de</strong> ses<br />
actes et ne peut être totalement exonéré<br />
<strong>de</strong> sa responsabilité pénale.<br />
Nous avons remarqué, au cours <strong>de</strong><br />
notre pratique, que beaucoup <strong>de</strong> « kleptomanes<br />
débutants » arrêtaient dès le<br />
premier procès et d’autres dès qu’ils<br />
CLINIQUE ■ 13<br />
avaient une vie affective satisfaisante. En<br />
effet « les conditions favorables peuvent<br />
avec le temps permettre à l’individu <strong>de</strong><br />
trouver une personne à aimer, au lieu<br />
<strong>de</strong> poursuivre sa quête en jetant son<br />
dévolu sur <strong>de</strong>s substituts <strong>de</strong> l’objet dont la<br />
valeur symbolique est perdue » (9).<br />
Cette étu<strong>de</strong> nous a permis <strong>de</strong> situer la<br />
kleptomanie comme solution dans la<br />
reconquête <strong>de</strong> la complétu<strong>de</strong> narcissique<br />
et <strong>de</strong> démontrer qu’il se joue là<br />
quelque chose <strong>de</strong> la perte <strong>de</strong> l’objet et<br />
<strong>de</strong> la jouissance.<br />
Le péché originel n’est-il pas plutôt<br />
d’avoir (acte sexuel) que d’avoir volé<br />
(sans nécessité)le fruit défendu du jardin<br />
d’E<strong>de</strong>n.<br />
Ce mythe fondateur <strong>de</strong> notre société<br />
ne renvoie-t-il pas simplement à l’insatisfaction<br />
fondamentale <strong>de</strong> l’homme et<br />
à sa crainte d’être dépouillé ou privé<br />
d’affection ? ■<br />
Le lavage <strong>de</strong> cerveau :<br />
mythe ou réalité<br />
Dick Athony<br />
Massimo Introvigne<br />
L’Harmattan, 17,50 €<br />
Régis Airault<br />
CH Mayotte, BP04, 97600 Mamoudzou<br />
* « Nom que l’on donne au vol quand il est commis<br />
par une personne appartenant aux classes dirigeantes<br />
» (Selon un humoriste du début du<br />
XX ème siècle).<br />
Bibliographie<br />
(1) DUBOIS J.Cl., RANCUREL G., Vol et<br />
mélancolie : à propos <strong>de</strong> 5 observations,<br />
Société Médico-psychologique, séance du<br />
20 mars 1967, 572-579.<br />
(2) GOLDMAN M.J., Kleptomania : making<br />
sense of the nonsensical, J. Psychiatry, 148,<br />
1991<br />
(3) JANET P. La kleptomanie et la dépression<br />
mentale, J. <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>, 1911, 97-103.<br />
(4) LAUZEL J.P., Les vols chez l’enfant,<br />
Cahiers <strong>de</strong> l’hôpital Henri Rousselle, 4<br />
octobre 1960.<br />
(5) MARTIMOR E., Contribution à l’étu<strong>de</strong><br />
médico-psychologique du vol. Les états dépressifs,<br />
Annales médico-psychologiques,<br />
124ème année, 5, 635-643.<br />
(6) PINEL Ph, Traité Médico-philosophique<br />
sur l’aliénation mentale ou la manie, Paris,<br />
Richard, Caille et Ravier, an. IX, 318.<br />
(7) RAMELLI E., MAPELLI G., Du vol<br />
mélancolique, Acta. Psychiat. 1979, 79, 56-<br />
74.<br />
(8) SEGUIER H., Revue historique <strong>de</strong> la,<br />
notion <strong>de</strong> Kleptomanie, 1ère et 2ème partie.<br />
(9) WINNICOTT, De la pédiatrie à la psychanalyse,<br />
Petite bibliothèque Payot 1969.<br />
Cet ouvrage résume l’histoire scientifique<br />
et juridique <strong>de</strong> la question <strong>de</strong><br />
savoir si la notion <strong>de</strong> « lavage <strong>de</strong> cerveau<br />
», appliquée à <strong>de</strong>s « sectes » religieuses,<br />
politiques et thérapeutiques,<br />
est une notion utile dotée d’un statut<br />
scientifique, ou bien s’il s’agit d’un<br />
mythe <strong>de</strong> stigmatisation employé à<br />
<strong>de</strong>s fins <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>. Cette question<br />
a fait l’objet d’analyses nombreuses<br />
et exhaustives <strong>de</strong>puis les années<br />
1950.<br />
Ce livre, qui résume l’essentiel <strong>de</strong> la<br />
recherche, retrace l’histoire <strong>de</strong>s conflits<br />
entre les différentes approches du lavage<br />
<strong>de</strong> cerveau, aux Etats-Unis et<br />
plus récemment en France. Comme<br />
il le démontre, l’une <strong>de</strong>s carences <strong>de</strong><br />
l’approche du lavage <strong>de</strong> cerveau dans<br />
la perspective anti-sectes, tient au fait<br />
que, en raison <strong>de</strong> sa nature ambiguë<br />
et peu scientifique, on peut l’appliquer<br />
à n’importe quel mouvement<br />
post-mo<strong>de</strong>rne. De surcroît, elle ne sert<br />
à rien pour déterminer quels groupes<br />
sont véritablement nocifs et quels<br />
groupes ne le sont pas. Un grand besoin<br />
<strong>de</strong> recherche se fait sentir, et une<br />
bonne part <strong>de</strong> celle résumée et mentionnée<br />
ici peut être d’un certain secours.
14<br />
LIVRES<br />
■ ORGANISATION DES SOINS<br />
Le gouvernement <strong>de</strong> la<br />
recherche<br />
Histoire d’un engagement<br />
politique, <strong>de</strong> Pierre Mendès<br />
France à Charles <strong>de</strong> Gaulle<br />
(1953-1969)<br />
Sous la direction <strong>de</strong> Vincent<br />
Duclerc et Alain Chatriot<br />
La Découverte, 34 €<br />
Ce livre est né d’un programme <strong>de</strong><br />
recherche <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong>s hautes étu<strong>de</strong>s<br />
en sciences sociales sur les politiques<br />
scientifiques françaises du second<br />
XX e siècle. Il s’est intéressé à l’époque<br />
considérée comme l’« âge d’or » <strong>de</strong><br />
l’engagement <strong>de</strong> l’Etat, au tournant<br />
<strong>de</strong>s années 1950 et 1960, lorsque<br />
Pierre Mendès France, puis le général<br />
<strong>de</strong> Gaulle, s’investirent dans la<br />
construction d’une puissante recherche<br />
publique et <strong>de</strong> ses structures <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment.<br />
Au cœur <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong><br />
collective, rési<strong>de</strong> l’enquête inédite<br />
menée sur la Délégation générale à<br />
la recherche scientifique et technique<br />
(DGRST), une administration dite <strong>de</strong><br />
mission créée entre novembre 1958<br />
et avril 1961 pour <strong>de</strong>venir une institution<br />
importante, placée au sommet<br />
<strong>de</strong> l’Etat pour porter l’effort <strong>de</strong> recherche<br />
et organiser son action. Enquête<br />
inédite car, contrairement au<br />
Centre national <strong>de</strong> la recherche scientifique<br />
(CNRS) qui a célébré son cinquantenaire<br />
en 1989, la DGRST aujourd’hui<br />
disparue n’a suscité aucune<br />
recherche spécifique. La première partie<br />
du livre se présente comme un<br />
recueil d’analyses, pour la plupart<br />
inédites, sur les questions <strong>de</strong> politique<br />
scientifique dans la France du XX e<br />
siècle. Réunissant <strong>de</strong>s historiens du<br />
politique, <strong>de</strong>s sciences ou <strong>de</strong> l’économie<br />
et une archiviste, ces contributions<br />
précisent <strong>de</strong>s hypothèses <strong>de</strong><br />
recherche sur un éventuel modèle <strong>de</strong><br />
politique scientifique Mendès France<strong>de</strong><br />
Gaulle. Centrés sur <strong>de</strong>s moments,<br />
<strong>de</strong>s acteurs ou <strong>de</strong>s institutions, ces<br />
textes restitueront une part <strong>de</strong> la complexité<br />
<strong>de</strong>s décisions politiques et <strong>de</strong>s<br />
réalisations institutionnelles, loin<br />
<strong>de</strong> visions faussement linéaires. La<br />
<strong>de</strong>uxième partie regroupe <strong>de</strong> nombreux<br />
textes dont la force rési<strong>de</strong> dans<br />
l’accès privilégié sur les pratiques<br />
concrètes <strong>de</strong>s acteurs, sur leurs projets,<br />
sur leurs réussites et sur leurs déceptions.<br />
Economie politique <strong>de</strong><br />
l’action sociale<br />
Pierre Naves, Hervé Defalvard<br />
avec la collaboration <strong>de</strong> Katia<br />
Julienne et Patrick Petour<br />
Préfaces <strong>de</strong> Marie-Thérèse Join-<br />
Lambert et François Roussely<br />
Dunod, 27 €<br />
Les auteurs <strong>de</strong> cet ouvrage ont mis<br />
en commun leurs expériences et leurs<br />
réflexions, pour considérer conjointement<br />
le social et l’économique. Ils<br />
décrivent la production <strong>de</strong>s règles qui<br />
fon<strong>de</strong>nt l’intervention publique dans<br />
le domaine social et montrent que<br />
cette production répond à une logique<br />
politique qui n’exclut pas le jeu<br />
<strong>de</strong>s acteurs économiques. Ils présentent<br />
l’importance <strong>de</strong>s questions<br />
sociales et <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> leur prise<br />
en charge dans l’économie française<br />
actuelle et insistent sur l’utilité que<br />
soient faits <strong>de</strong>s choix politiques d’investir<br />
dans l’action sociale.<br />
D’autres disciplines ne sont pas écartées.<br />
En témoignent les nombreuses<br />
références à la sociologie, tant classique<br />
(Weber, Arendt...) que mo<strong>de</strong>rne<br />
(Bourdieu, Castel, Paugam...), à l’histoire<br />
(Hatzfeld), à la philosophie, aux<br />
politiques publiques. Et surtout, l’économie<br />
politique <strong>de</strong> l’action sociale ne<br />
signifie pas pour les auteurs la mise<br />
à l’écart <strong>de</strong> l’humain - je dirais même<br />
bien au contraire -, mais le recours à<br />
la mesure, à la réflexion, à l’analyse<br />
raisonnée <strong>de</strong>s coûts, à la prévision,<br />
à l’évaluation.<br />
Cet arrêté vient concrétiser plus <strong>de</strong><br />
quinze années <strong>de</strong> longs travaux<br />
d’élaboration d’une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription<br />
médicalisée <strong>de</strong> l’activité en psychiatrie<br />
et santé mentale. Il vise à asseoir<br />
un recueil minimum, ayant une validité<br />
nationale, et permettant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r<br />
à l’analyse médico-économique <strong>de</strong> l’activité<br />
<strong>de</strong> soins réalisée dans les établissements<br />
<strong>de</strong> santé publics ou privés<br />
ayant une activité en psychiatrie.<br />
Les informations recueillies seront transmises<br />
aux ARH, après anonymisation,<br />
chaque fin <strong>de</strong> trimestre. A leur tour, les<br />
ARH transmettront ces données anonymes<br />
aux caisses d’assurance maladie<br />
et à l’ATIH. Deux volets <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription<br />
sont <strong>de</strong>mandés par cet arrêté :<br />
- une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> séjours<br />
<strong>de</strong>s établissements privés et publics,<br />
sectorisés ou non, les RPS (Résumés<br />
Par Séquence), transformés en RPSA<br />
(Résumés Par Séquence Anonymisés)<br />
avant transmission aux ARH ;<br />
- une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s activités ambulatoires<br />
par actes <strong>de</strong> chaque catégorie<br />
<strong>de</strong>s personnels <strong>de</strong> santé <strong>de</strong>s établissements<br />
psychiatriques publics sectorisés<br />
ou non, les RAA (Résumés d’Activité<br />
Ambulatoire), transformés en R3A<br />
(Résumés Anonymisés d’Activité<br />
Ambulatoire) avant transmission aux<br />
ARH. Quels en sont les effets pour les<br />
établissements <strong>de</strong> santé, pour les personnels<br />
<strong>de</strong> santé (1) et pour le mé<strong>de</strong>cin<br />
responsable du DIM, et que peuton<br />
attendre <strong>de</strong> l’exploitation <strong>de</strong>s<br />
données ainsi recueillies ?<br />
Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />
relatif au recueil et au traitement<br />
<strong>de</strong>s données d’activité médicale sur<br />
les établissements <strong>de</strong> santé<br />
Cet arrêté <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un traitement<br />
automatisé <strong>de</strong>s données médicales<br />
(article 1 premièrement) pour lesquels<br />
les établissements ne sont pas tous préparés.<br />
Il est précisé dans le premièrement<br />
<strong>de</strong> l’article 2 que « Ces informations<br />
doivent être conformes au contenu<br />
du dossier médical ». Là aussi, nombre<br />
d’établissements n’ont pas mis en place<br />
<strong>de</strong> dispositif permettant la liaison entre<br />
informations sur l’activité et observations<br />
médicales. La situation actuelle<br />
montre, le plus souvent, <strong>de</strong>s applications<br />
indépendantes : les données administratives<br />
sur les séjours, les relevés<br />
d’activités ambulatoires, les dossiers<br />
informatisés <strong>de</strong>s patients quand ils existent<br />
et concernent également l’ambulatoire.<br />
Les établissements auront donc<br />
souvent un lourd travail à réaliser dans<br />
<strong>de</strong>s délais assez brefs pour permettre ce<br />
qui est prescrit dans le troisièmement<br />
<strong>de</strong> l’article 4 <strong>de</strong> l’arrêté, c’est-à-dire,<br />
« veiller à la qualité <strong>de</strong>s données et les<br />
confronter en tant que <strong>de</strong> besoin aux<br />
dossiers médicaux et fichiers administratifs<br />
». L’arrêté est d’application immédiate<br />
à sa date <strong>de</strong> parution. Toutefois,<br />
connaissant les difficultés <strong>de</strong> mise en<br />
œuvre, notamment pour la <strong>de</strong>scription<br />
<strong>de</strong> l’activité ambulatoire, l’arrêté prévoit<br />
une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> transition jusque fin<br />
2007 au cours <strong>de</strong> laquelle les établissements<br />
pourront transmettre <strong>de</strong>s<br />
fichiers d’activité ambulatoire agrégés,<br />
simplifiant les collectes d’information<br />
sur le terrain. L’inci<strong>de</strong>nce médico-économique<br />
sur l’EPRD et le budget <strong>de</strong><br />
l’établissement n’apparaît pas dans ce<br />
texte législatif. Il est bien cité au premièrement<br />
<strong>de</strong> l’article 1 « Afin <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r<br />
à l’analyse médico-économique <strong>de</strong><br />
l’activité...», mais pas plus d’information<br />
n’est donné dans cet arrêté. C’est<br />
dans le préambule du gui<strong>de</strong> méthodologique<br />
que se trouvent les éléments<br />
<strong>de</strong> réponse. Sous la signature <strong>de</strong> Xavier<br />
Bertrand, Ministre <strong>de</strong> la santé et <strong>de</strong>s<br />
solidarités, on peut lire : « les professionnels<br />
et le ministère sont dans l’attente<br />
d’un financement rénové <strong>de</strong> la psychiatrie,<br />
la VAP, un modèle pluraliste à<br />
plusieurs compartiments, qui assurera la<br />
Valorisation <strong>de</strong> l’Activité en <strong>Psychiatrie</strong><br />
(activité <strong>de</strong> soin, mise en œuvre <strong>de</strong>s MIG<br />
communes ou spécifiques à la psychiatrie,<br />
tarification à l’activité, prise en compte <strong>de</strong><br />
critères géographiques et populationnels).<br />
Les éléments objectifs fournis par le<br />
RIM _ P vont permettre d’asseoir le financement<br />
du compartiment relatif à l’activité<br />
en hospitalisation et en ambulatoire ».<br />
Par ailleurs, la mise en place <strong>de</strong> ces<br />
recueils <strong>de</strong> données ne remplace pas la<br />
fiche par patient mais vient en plus.<br />
L’article 1 commence par : « Outre le<br />
recueil <strong>de</strong> données relatives au patient<br />
instauré par l’arrêté du 24 novembre<br />
1998 ... ».<br />
Que peut attendre l’établissement <strong>de</strong><br />
l’exploitation <strong>de</strong>s données ainsi<br />
recueillies ?<br />
L’arrêté précise au Il <strong>de</strong> l’article 4 : « il<br />
(le mé<strong>de</strong>cin responsable du DIM) assure<br />
la diffusion <strong>de</strong>s informations issues <strong>de</strong><br />
ces traitements auprès <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong><br />
l’établissement <strong>de</strong> santé et du prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />
la commission médicale <strong>de</strong> l’établissement<br />
ainsi qu’aux praticiens ayant dispensé<br />
les soins, dans <strong>de</strong>s conditions<br />
garantissant l’anonymat <strong>de</strong>s patients ».<br />
Au II <strong>de</strong> l’article 5 cet arrêté ajoute :<br />
« Le directeur et le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la commission<br />
médicale ou <strong>de</strong> la conférence<br />
médicale <strong>de</strong> l’établissement sont <strong>de</strong>stinataires<br />
<strong>de</strong> statistiques, agrégées par unité<br />
médicale ou tout autre découpage structurel<br />
repérable par les éléments disponibles<br />
dans le système d’information <strong>de</strong><br />
l’établissement et pour l’ensemble <strong>de</strong> l’établissement<br />
». Mais c’est <strong>de</strong> nouveau<br />
dans le préambule du gui<strong>de</strong> méthodologique<br />
que se trouvent <strong>de</strong>s réponses<br />
plus avancées : « Les données recueillies<br />
sont riches, et les possibilités d’exploitations<br />
multiples. Elles peuvent être mobilisées<br />
aussi bien au niveau local, pour la<br />
gestion interne, pour l’amélioration <strong>de</strong><br />
l’efficience et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s soins, qu’au<br />
niveau régional, par exemple, pour l’élaboration<br />
<strong>de</strong>s SROS ». Il existe, toutefois,<br />
une certaine note <strong>de</strong> modération<br />
à ajouter à cet enthousiasme. En effet,<br />
si les RPS et RAA peuvent apporter à<br />
la psychiatrie « conventionnelle » une<br />
assez bonne <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s réalités du<br />
terrain, ils ne permettent pas d’être au<br />
niveau <strong>de</strong> ce que <strong>de</strong>vient aujourd’hui le<br />
travail en santé mentale.<br />
L’arrêté ne vise que la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s<br />
journées d’hospitalisation temps complet<br />
ou partiel et les actes directs ou<br />
indirects relatifs à un patient et réalisés<br />
en « soins externes » (article 2 - 1 -<br />
2°). Il n’y a pas <strong>de</strong> place pour la <strong>de</strong>scription<br />
<strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> plus en plus<br />
nombreuses se situant dans la prévention,<br />
les réseaux ou l’ai<strong>de</strong> aux aidants et<br />
qui ne sont donc pas relatives à un<br />
patient. Ces actions peuvent cependant,<br />
en fonction <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong><br />
chaque secteur, mobiliser une gran<strong>de</strong><br />
part <strong>de</strong>s moyens affectés hors <strong>de</strong> l’hospitalisation<br />
classique ou du CMP.<br />
Le gui<strong>de</strong> méthodologique apporte plus<br />
<strong>de</strong> renseignements : « Les actions pour<br />
la communauté ne relèvent pas du présent<br />
recueil mais seront enregistrées sous<br />
forme d’une mission d’intérêt général<br />
(au sens <strong>de</strong> l’article D 162-6 du co<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> la sécurité sociale) ». Si le gui<strong>de</strong> ne<br />
conseille pas plus sur les métho<strong>de</strong>s à<br />
mettre en œuvre pour expliciter mieux<br />
cette part parfois importante du travail<br />
<strong>de</strong>s secteurs, il est possible <strong>de</strong> penser<br />
qu’un repli sur les activités bien décrites,<br />
se fasse au détriment <strong>de</strong> l’ouverture<br />
vers la santé mentale. (Cette difficulté<br />
est redoublée pour la psychiatrie infanto-juvénile).<br />
Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />
relatif au recueil et au traitement<br />
<strong>de</strong>s données d’activité médicale pour<br />
les personnels <strong>de</strong> santé<br />
Il n’est pas mentionné dans cet arrêté la<br />
notion <strong>de</strong> collecte initiale <strong>de</strong> l’infor-<br />
mation autrement que sous les termes<br />
du premièrement <strong>de</strong> l’article 2 : « Dans<br />
chaque unité médicale <strong>de</strong> soins <strong>de</strong> psychiatrie,<br />
les catégories d’information enregistrées<br />
sur le RPS sont les suivantes :...».<br />
Le gui<strong>de</strong> méthodologique approfondit<br />
un peu cette notion :<br />
« 1.2.1 L’unité médicale<br />
Les informations sont recueillies au<br />
niveau <strong>de</strong> l’unité médicale, définie comme<br />
un ensemble individualisé <strong>de</strong> moyens<br />
matériels et humains, repéré par un co<strong>de</strong><br />
spécifique dans une nomenclature déterminée<br />
par l’établissement. Afin <strong>de</strong> pouvoir<br />
développer une comptabilité analytique<br />
permettant <strong>de</strong> mesurer le coût<br />
d’unités d’oeuvre homogènes, il est souhaitable<br />
que les unités médicales soient<br />
définies <strong>de</strong> telle sorte qu’à chacune ne<br />
correspon<strong>de</strong> qu’une seule forme d’activité<br />
selon la définition donnée au 1. 1.2 ».<br />
L<br />
’interruption du traitement d’un<br />
membre <strong>de</strong> la famille souffrant <strong>de</strong><br />
maladie mentale et l’aggravation<br />
consécutive <strong>de</strong>s symptômes psychiatriques<br />
peuvent avoir <strong>de</strong>s conséquences<br />
sérieuses pour les familles.<br />
Keeping Care Complete (Assurer la<br />
continuité <strong>de</strong>s soins), qui est une<br />
enquête internationale menée auprès<br />
<strong>de</strong> 982 aidants familiaux <strong>de</strong> personnes<br />
souffrant <strong>de</strong> schizophrénie, <strong>de</strong> trouble<br />
bipolaire ou <strong>de</strong> trouble schizo-affectif,<br />
précise les conséquences d’une rechute,<br />
définie comme l’aggravation <strong>de</strong>s<br />
symptômes après un apparent rétablissement,<br />
et le désir <strong>de</strong>s aidants que<br />
les mé<strong>de</strong>cins concentrent leur attention<br />
sur les soins à long terme plutôt<br />
que sur la gestion <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong><br />
crise. L’enquête Keeping Care Complete<br />
a été élaborée par la Fédération<br />
mondiale pour la santé mentale<br />
(WFMH) et Eli Lilly and Company.<br />
La société d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> marché indépendante<br />
Ipsos a mené l’enquête<br />
auprès d’aidants en Australie, au Canada,<br />
en Allemagne, en France, en Italie,<br />
en Espagne, au Royaume-Uni et aux<br />
Etats-Unis.<br />
Conséquences et facteurs<br />
déclenchants d’une rechute<br />
Les aidants dont un membre <strong>de</strong> la<br />
famille a connu une rechute ont rapporté<br />
que leur proche s’était retrouvé<br />
dans l’incapacité <strong>de</strong> travailler, avait<br />
été hospitalisé, avait tenté <strong>de</strong> se suici<strong>de</strong>r<br />
et/ou avait été incarcéré. Un grand<br />
nombre <strong>de</strong> ces aidants ont également<br />
déclaré que leur propre santé mentale<br />
et physique, ainsi que leur situation<br />
financière, s’étaient détériorées à<br />
la suite <strong>de</strong> cette rechute. Parmi les<br />
502 aidants dont le proche avait arrêté<br />
<strong>de</strong> prendre ses médicaments, 91<br />
ont rapporté que leur proche avait<br />
fait une rechute suite à cet arrêt <strong>de</strong><br />
traitement. En outre, 56% <strong>de</strong>s 455<br />
aidants qui ont déclaré que le traitement<br />
<strong>de</strong> leur proche avait été modifié<br />
suite à une décision prise en coopération<br />
avec leur mé<strong>de</strong>cin ont affirmé<br />
que la rechute était survenue après<br />
ce changement.<br />
L’efficacité est l’objectif <strong>de</strong><br />
traitement prioritaire pour les<br />
aidants<br />
Neuf aidants sur dix s’accor<strong>de</strong>nt à dire<br />
que l’efficacité est leur principale préoccupation<br />
lorsqu’ils évaluent les<br />
options <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> leurs proches<br />
et qu’un médicament efficace est<br />
nécessaire pour contrôler les symptômes<br />
<strong>de</strong> la maladie avant <strong>de</strong> pou-<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Commentaires sur l’arrêté du 29 juin<br />
2006 et sur le gui<strong>de</strong> méthodologique<br />
paru le 18 août 2006*<br />
Ce qui n’est pas défini est la responsabilité<br />
<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s données<br />
recueillies. Il faut faire un détour par<br />
les textes réglementant la tenue du dossier<br />
médical (dossier du patient pour<br />
la HAS) pour approcher cette notion<br />
par laquelle, c’est le praticien responsable<br />
<strong>de</strong> la prise en charge du patient<br />
qui est responsable <strong>de</strong> la collecte initiale<br />
<strong>de</strong>s informations.<br />
Pour les RAA, il faut connaître la nature<br />
<strong>de</strong> l’acte son lieu d’effection et la<br />
nature du ou <strong>de</strong>s intervenants effecteurs.<br />
Une prise en charge, même en<br />
l’absence d’un mé<strong>de</strong>cin reste sous sa<br />
responsabilité. Le praticien chargé <strong>de</strong>s<br />
soins d’un patient <strong>de</strong>vra pouvoir s’assurer<br />
que les activités réalisées par les<br />
membres <strong>de</strong> son équipe ont bien été<br />
relevées et que les informations clinique<br />
nécessaires sont bien présentes.<br />
Enquête auprès <strong>de</strong>s<br />
aidants familiaux<br />
voir agir adéquatement sur le bienêtre<br />
et la santé en général. Les résultats<br />
<strong>de</strong> l’enquête montrentque les<br />
aidants qui déclarent que leur proche<br />
est satisfait <strong>de</strong> son traitement actuel<br />
pensent qu’un traitement efficace lui<br />
a permis d’être plus indépendant dans<br />
sa vie quotidienne, <strong>de</strong> ne pas être hospitalisé<br />
et <strong>de</strong> conserver un emploi<br />
stable ou une activité bénévole.<br />
Outre le traitement médicamenteux,<br />
les aidants ont désigné le soutien<br />
familial et l’accompagnement social,<br />
la psychanalyse, l’exercice, le fait<br />
d’avoir <strong>de</strong>s responsabilités et <strong>de</strong>s<br />
horaires stables parmi les facteurs<br />
essentiels qui ai<strong>de</strong>nt à préserver le<br />
bien-être <strong>de</strong> leur proche.<br />
Désir <strong>de</strong> fixer <strong>de</strong>s objectifs plus<br />
ambitieux et <strong>de</strong> se concentrer sur le<br />
bien-être à long terme<br />
La plupart <strong>de</strong>s aidants ont déclaré<br />
qu’ils souhaitent que les mé<strong>de</strong>cins mettent<br />
en place une prise en charge à<br />
long terme <strong>de</strong> la maladie plutôt que <strong>de</strong><br />
gérer uniquement les situations <strong>de</strong><br />
crise : 66% <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s aidants<br />
ont dit être frustrés par les mé<strong>de</strong>cins<br />
qui fixent <strong>de</strong>s objectifs très limités<br />
d’amélioration à long terme <strong>de</strong> la maladie<br />
<strong>de</strong> leurs proches.<br />
L’ensemble <strong>de</strong>s données <strong>de</strong> l’enquête,<br />
<strong>de</strong>s fiches d’information sur la schizophrénie<br />
et les troubles schizo-affectifs<br />
et bipolaires et le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s<br />
aidants peuvent être consultés sur<br />
www.wfmh.com. ■<br />
F.C.<br />
Bibliographie<br />
(1) Schizophrenia: What You Need to Know,<br />
National Mental Health Association, disponible<br />
sur : http://ww w.nmha.org/infoctr/factsheets/51.cfm<br />
consulté le 7 juin 2006.<br />
(2) Bipolar Disor<strong>de</strong>r, National Institute of<br />
Mental Health, Reprinted September 2002,<br />
disponible sur: http://www. nimh.nih.gov/<br />
publicat/bipolar.cfm, consulté le 7 juin 2006.<br />
(3) WEIDEN P, SCHEIFLER P, DIAMOND<br />
R et al, Breakthroughs in Antipsychotic Medications,<br />
New York, W.W. Norton & Company,<br />
1999.<br />
(4) The World Health Report 2001: Mental<br />
Health - New Un<strong>de</strong>rstanding, New Hope,<br />
World Health Organization, disponible sur:<br />
http://www.who.int /whr/2001/chapter3/<br />
/en/in<strong>de</strong>x1.html, consulté le 6 janvier 2006.<br />
(5) The Global Bur<strong>de</strong>n of Disease, World Health<br />
Organization in 2003, disponible sur :<br />
http://www.who.int/mip/2003/other_ documents/en/globalbur<strong>de</strong>nofdisease.pdf,consulté<br />
le 6 janvier 2006.<br />
(6) Schizoaffective Disor<strong>de</strong>r, National Alliance<br />
on Mental Illness, disponible sur :<br />
http://www.nami.org/Template.cfm?Section=By_Illness&template=/ContentManagement/ContentDisplay.cfm&ContetID=<br />
11837, consulté le 7 juin 2006.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Pour les praticiens, en particulier en<br />
psychiatrie infanto-juvénile, l’apprentissage<br />
d’une bonne utilisation <strong>de</strong> la<br />
CIM 10 sera nécessaire. Le <strong>de</strong>uxièmement<br />
<strong>de</strong> l’article 3 mentionne : « Les<br />
diagnostics les facteurs associés sont<br />
codés selon la classification internationale<br />
<strong>de</strong>s maladies (CIM) <strong>de</strong> l’Organisation<br />
mondiale <strong>de</strong> la santé (OMS), complétée,<br />
le cas échéant, d’extensions<br />
publiées par l’Agence technique <strong>de</strong> l’information<br />
sur l’hospitalisation ».<br />
La CIM 10 n’est pas le DSM, elle ne se<br />
réduit pas aux maladies psychiatriques.<br />
Elle comporte <strong>de</strong>s chapitres décrivant<br />
les recours au système <strong>de</strong> santé pour<br />
d’autres causes que <strong>de</strong>s maladies et il<br />
sera nécessaire <strong>de</strong> savoir utiliser ces<br />
items pour décrire les situations cliniques<br />
rencontrées en particulier en<br />
psychiatrie infanto-juvénile.<br />
La nécessité <strong>de</strong> pouvoir confronter<br />
informations du dossier du patient et<br />
informations sur l’activité <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à ce<br />
que soient mis à disposition <strong>de</strong>s praticiens<br />
et <strong>de</strong> leurs équipes les outils épargnant<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>voir tenir en parallèle, le<br />
dossier du patient et les relevés d’activités.<br />
Il serait ennuyeux que persiste<br />
longtemps la tâche ingrate <strong>de</strong>s secrétaires<br />
médicales qui recherchent<br />
patiemment la concordance entre l’activité<br />
et les observations se fiant à la<br />
bonne connaissance qu’elles ont <strong>de</strong>s<br />
pratiques <strong>de</strong> chacun.<br />
Par ailleurs, il est fait obligation au<br />
mé<strong>de</strong>cin responsable du DIM <strong>de</strong> faire<br />
un retour d’information sur l’activité<br />
vers les praticiens (<strong>de</strong>uxièmement <strong>de</strong><br />
l’article 4) : « il assure la diffusion <strong>de</strong>s<br />
informations issues <strong>de</strong> ces traitements<br />
auprès <strong>de</strong> la direction... ainsi qu’aux praticiens<br />
ayant dispensé les soins, dans <strong>de</strong>s<br />
conditions garantissant la confi<strong>de</strong>ntialité<br />
<strong>de</strong>s données et l’anonymat <strong>de</strong>s patients ».<br />
Il faut donc que ce responsable <strong>de</strong> l’information<br />
médicale dispose <strong>de</strong>s outils<br />
pour le faire et que les praticiens disposent<br />
<strong>de</strong>s moyens pour exploiter ces<br />
informations.<br />
Que peuvent attendre les praticiens<br />
et leurs équipes <strong>de</strong> l’exploitation <strong>de</strong>s<br />
données ainsi recueillies ?<br />
Si au niveau <strong>de</strong> l’unité médicale, du<br />
service ou secteur et <strong>de</strong> l’établissement,<br />
ce sont <strong>de</strong>s données agrégées et synthétiques<br />
sur l’activité qui sont attendues,<br />
au niveau du praticien et <strong>de</strong>s<br />
équipes, c’est le suivi du patient qui est<br />
le plus recherché. La transformation<br />
<strong>de</strong>s RPS et <strong>de</strong>s RAA en « trajectoire <strong>de</strong><br />
soins » est possible, mais <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à<br />
ce que ce processus soit correctement<br />
intégré dans la lecture du dossier du<br />
patient.<br />
L’Institut Lilly encourage <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche<br />
clinique<br />
L’Institut Lilly soutient 6 jeunes chercheurs mé<strong>de</strong>cins cliniciens et finance à<br />
hauteur <strong>de</strong> 15 000 euros une année <strong>de</strong> recherche dans le cadre d’une thèse<br />
<strong>de</strong> science ou d’une année <strong>de</strong> post-doctorat.<br />
En 2006, les membres du jury ont retenu 6 projets portant sur :<br />
• L’autisme chez l’enfant ;<br />
• L’impulsivité dans le trouble hyperactif avec déficit <strong>de</strong> l’attention (THADA)<br />
et dans le trouble <strong>de</strong> la personnalité bor<strong>de</strong>rline (TPB) ;<br />
• La schizophrénie ;<br />
• La maladie <strong>de</strong> Parkinson ;<br />
• La sclérose en plaques ;<br />
• Et le syndrome <strong>de</strong> Gilles <strong>de</strong> La Tourette.<br />
Tous s’engagent à mener leurs travaux au cours <strong>de</strong> l’année 2007 et rendront<br />
compte aux membres du jury en 2007 & 2008 <strong>de</strong> leurs résultats.<br />
Le détail <strong>de</strong>s communications <strong>de</strong>s Lauréats est disponible sur www.institutlilly.com<br />
Appel à candidature 2007 ouvert au 1 er février 2007.<br />
Connectez-vous sur www.institutlilly.coml<br />
Ce retour d’information est un facteur<br />
contribuant fortement à l’adhésion <strong>de</strong>s<br />
praticiens et <strong>de</strong> leurs équipes à la vigilance<br />
nécessaire pour obtenir une qualité<br />
suffisante <strong>de</strong>s données. Les praticiens<br />
doivent percevoir <strong>de</strong>s avantages<br />
immédiats en contrepartie <strong>de</strong>s efforts<br />
qu’ils <strong>de</strong>vront fournir pour obtenir l’exhaustivité<br />
et la fiabilité <strong>de</strong>s données<br />
<strong>de</strong>mandées.<br />
Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />
relatif au recueil et au traitement<br />
<strong>de</strong>s données d’activité médicale pour<br />
le mé<strong>de</strong>cin chargé <strong>de</strong> l’information<br />
médicale<br />
Le premier texte législatif présente clairement<br />
le rôle du DIM en psychiatrie.<br />
Ses fonctions sont évoquées aux articles<br />
1, 3, 4, 5 et 6 sur les huit articles que<br />
comprend cet arrêté. L’article 4 est<br />
entièrement consacré à ses obligations.<br />
Son rôle <strong>de</strong> conseil auprès <strong>de</strong>s praticiens<br />
<strong>de</strong> l’établissement est souligné.<br />
Son rôle d’intermédiaire entre les mé<strong>de</strong>cins<br />
inspecteurs <strong>de</strong> santé, les praticiensconseils<br />
<strong>de</strong>s caisses d’assurance maladie<br />
et les données d’activité <strong>de</strong> l’établissement<br />
est précisé.<br />
Outre son rôle <strong>de</strong> conseil, il doit offrir<br />
à l’établissement et à la communauté<br />
soignante sa participation à l’interprétation<br />
<strong>de</strong>s résultats d’exploitation <strong>de</strong>s<br />
données recueillies.<br />
Que peut attendre le mé<strong>de</strong>cin<br />
chargé <strong>de</strong> l’information médicale<br />
Son principal souci sera celui <strong>de</strong> la<br />
transparence <strong>de</strong>s données et <strong>de</strong> la possibilité<br />
<strong>de</strong> suivi du parcours <strong>de</strong> l’information.<br />
Il lui servira peu <strong>de</strong> savoir<br />
conseiller ses collègues ou sa direction,<br />
si l’établissement ne dispose que <strong>de</strong><br />
« boîtes noires » pour amalgamer <strong>de</strong>s<br />
informations cliniques invérifiables et<br />
<strong>de</strong>s données administratives incontrôlables.<br />
Mais plus encore, le mé<strong>de</strong>cin chargé<br />
<strong>de</strong> l’information médicale <strong>de</strong>vra s’inscrire<br />
dans la perspective fixée dans le<br />
préambule au gui<strong>de</strong> méthodologique :<br />
« Le partage <strong>de</strong>s compétences et <strong>de</strong>s expériences<br />
qui s’instaure rapi<strong>de</strong>ment permettra<br />
une analyse pertinente <strong>de</strong>s résultats<br />
et un affinage du recueil... La<br />
démarche est avant tout évolutive : la<br />
parution <strong>de</strong> ce gui<strong>de</strong> n’est que la toute<br />
première étape d’un processus itératif et<br />
c’est l’expérience du terrain qui nous permettra<br />
ensemble <strong>de</strong> l’adapter progressivement<br />
aux divers besoins <strong>de</strong>s professionnels<br />
».<br />
Plus qu’attentiste, le mé<strong>de</strong>cin DIM<br />
<strong>de</strong>vra être moteur dans les progrès à<br />
réaliser pour que ce premier recueil<br />
puisse s’élargir à l’ensemble <strong>de</strong>s actions<br />
menées en santé mentale. ■<br />
Dr. Gaëtan Wagenaar<br />
Psychiatre, Responsable du DIM EPS Barthélémy<br />
Durand - Etampes.<br />
(1) Mé<strong>de</strong>cins, infirmiers, psychologues, assistants<br />
sociaux, rééducateurs, éducateurs, et autres<br />
personnels concourant aux soins.<br />
*Arrêté du 29 juin 2006 relatif au recueil et<br />
au traitement <strong>de</strong>s données d’activité médicale<br />
<strong>de</strong>s établissements <strong>de</strong> santé publics ou privés<br />
ayant une activité en psychiatrie et à la transmission<br />
d’informations issues <strong>de</strong> ce traitement<br />
dans les conditions définies aux articles L.6113-<br />
7 et L.6113-8 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique.<br />
Gui<strong>de</strong> méthodologique disponible sur le site<br />
Internet <strong>de</strong> l’ATH et constituant l’annexe II <strong>de</strong><br />
l’arrêté du 29 juin 2006.<br />
LIVRES<br />
Psychothérapie <strong>de</strong>s victimes<br />
Traitements, évaluations,<br />
accompagnement<br />
2e édition<br />
Gérard Lopez, Aurore Sabouraud-<br />
Séguin, Louis Jehel<br />
Préface <strong>de</strong> Philippe Werson<br />
Dunod, 26 €<br />
Dirigé par l’équipe <strong>de</strong>s enseignants<br />
<strong>de</strong>s diplômes universitaires <strong>de</strong> psychotraumatologie<br />
et <strong>de</strong> victimologie<br />
<strong>de</strong> l’université René-Descartes, Paris<br />
5, cet ouvrage complète Psychotraumatologie<br />
paru dans la même collection.<br />
Il fait le point sur les recherches et les<br />
modalités pratiques du traitement <strong>de</strong>s<br />
conséquences <strong>de</strong>s psychotraumatismes<br />
(état <strong>de</strong> stress post-traumatique, comorbidités,<br />
troubles graves <strong>de</strong> la personnalité)<br />
affectant les adultes et les<br />
enfants.<br />
Les traitements pharmacologiques, les<br />
thérapies cognitivo-comportementales,<br />
la thérapie psychodynamique, l’EMDR,<br />
l’hypnose ericksonienne, les interventions<br />
précoces sont évalués comme<br />
étant efficaces. En association au traitement,<br />
d’autres types d’interventions<br />
sont détaillées : l’intervention auprès<br />
<strong>de</strong>s familles, l’hospitalisation en psychotraumatologie,<br />
la réhabilitation<br />
psychosociale, les groupes <strong>de</strong> parole.<br />
Dictionnaire pratique du<br />
Droit Humanitaire<br />
Françoise Bouchet-Saulnier<br />
Nouvelle édition<br />
La Découverte, 30 €<br />
De « Accords spéciaux » à « Zones <strong>de</strong> sécurité<br />
», ce dictionnaire, qui a été conçu<br />
par Mé<strong>de</strong>cins sans frontières et traduit<br />
en sept langues, balise le champ <strong>de</strong><br />
l’action humanitaire et la responsabiolité<br />
<strong>de</strong>s différents acteurs <strong>de</strong> la gestion<br />
<strong>de</strong>s crises et <strong>de</strong>s conflits. Il propose<br />
la définition juridique et l’analyse<br />
<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 300 notions essentielles :<br />
crimes <strong>de</strong> guerre, génoci<strong>de</strong>, maintien<br />
<strong>de</strong> la paix, population civile, secours,<br />
embargo, enfant, prisonnier <strong>de</strong> guerre,<br />
femme, détention, mission médicale,<br />
réfugiés, ONU, Comité <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong><br />
l’homme, Agence centrale <strong>de</strong> recherche<br />
<strong>de</strong>s disparus, terrorisme, tribunaux pénaux<br />
internationaux, armes bactériologiques,<br />
etc.<br />
Cette nouvelle édition actualisée et<br />
ORGANISATION DES SOINS ■ 15<br />
augmentée prend en compte les évolutions<br />
juridiques et politiques récentes<br />
liées, notamment, à la guerre contre<br />
le terrorisme et au fonctionnement<br />
<strong>de</strong>s tribunaux internationaux.<br />
Des synthèses <strong>de</strong> jurispru<strong>de</strong>nce internationale<br />
récente sont ajoutées à la<br />
fin <strong>de</strong>s principales rubriques concernées.<br />
Un système <strong>de</strong> renvois, une bibliographie,<br />
les coordonnées <strong>de</strong>s différentes<br />
organisations ainsi que <strong>de</strong>s<br />
in<strong>de</strong>x et une liste, pour chaque pays,<br />
<strong>de</strong>s textes applicables complètent cet<br />
ouvrage.<br />
Liberté d’aller et venir<br />
dans les établissements<br />
sanitaires et médico-sociaux<br />
et obligation <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong><br />
sécurité<br />
Actes <strong>de</strong> la conférence <strong>de</strong><br />
consensus <strong>de</strong>s 24 et 25 novembre<br />
2004<br />
Ouvrage coordonné par :<br />
David Causse, Geneviève Arfeux-<br />
Vaucher, Michel Breton, Daniel<br />
Deparcy, Anne Gmblin-Srecki,<br />
Yves Hémery, Roland Lubeigt,<br />
Isabelle Robineau<br />
Editions <strong>de</strong> l’Ecole Nationale <strong>de</strong> la<br />
Santé Publique, 25 €<br />
La conférence <strong>de</strong> consensus <strong>de</strong>s 24<br />
et 25 novembre 2004, organisée par<br />
la Fédération hospitalière <strong>de</strong> France<br />
avec la participation <strong>de</strong> l’Agence nationale<br />
d’accréditation et d’évaluation<br />
en santé, avait pour objectifs <strong>de</strong> permettre<br />
un débat sur ce sujet difficile<br />
et <strong>de</strong> formuler <strong>de</strong>s recommandations<br />
pratiques. Cet ouvrage rassemble la<br />
trentaine <strong>de</strong> contributions <strong>de</strong>s experts<br />
mobilisés pendant la conférence, les<br />
travaux bibliographiques préparatoires<br />
et le texte intégral <strong>de</strong>s recommandations.<br />
Son intérêt est <strong>de</strong> proposer, selon plusieurs<br />
angles <strong>de</strong> vue, une « immersion »<br />
dans la vie quotidienne <strong>de</strong>s personnes<br />
accueillies dans les établissements sanitaires<br />
et médico-sociaux, et notamment<br />
<strong>de</strong>s plus vulnérables d’entre elles :<br />
personnes âgées, personnes handicapées<br />
et personnes souffrant <strong>de</strong><br />
troubles psychiques.<br />
Il s’agit évi<strong>de</strong>mment d’une « plongée »<br />
simultanée dans les questions que<br />
les soins et l’accompagnement <strong>de</strong> ces<br />
personnes posent, tous les jours, aux<br />
équipes soignantes et socio-éducatives.
16<br />
LIVRES<br />
■ TOXICOMANIE<br />
Le psychologue scolaire et la<br />
famille<br />
Dominique Guichard<br />
Retz<br />
Pendant longtemps, la pratique <strong>de</strong><br />
l’entretien dans le cadre scolaire a<br />
été calquée sur le modèle clinique<br />
<strong>de</strong>s entretiens psychologiques en vigueur<br />
dans le champ médical. Dans<br />
le cadre scolaire, l’entretien possè<strong>de</strong><br />
une méthodologie spécifique inspirée<br />
du modèle clinique, ou du modèle<br />
systémique, ou en constituant<br />
une synthèse. Cette méthodologie<br />
permet d’éviter le piège qui consiste,<br />
pour le psychologue, à réagir avec<br />
ses mécanismes <strong>de</strong> défense, issus <strong>de</strong><br />
sa propre histoire, sans le filtre <strong>de</strong> la<br />
distanciation professionnelle qui permet,<br />
<strong>de</strong> faire face aux émotions. Elle<br />
permet <strong>de</strong> fixer un cadre précis sur<br />
lequel le psychologue et l’équipe enseignante<br />
peuvent s’appuyer pour tenir<br />
leur mission éducative.<br />
Illustré d’une vingtaine <strong>de</strong> situations<br />
tirées <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> l’auteur en<br />
tant que psychologue scolaire, cet<br />
ouvrage décrit comment élaborer ce<br />
cadre et le respecter. Il propose différentes<br />
techniques (<strong>de</strong>ssin, métaphore,<br />
génogramme...) par lesquelles<br />
l’enfant et sa famille peuvent faire<br />
<strong>de</strong>s liens entre leur histoire et le comportement<br />
qui pose problème à l’école.<br />
Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’éducation<br />
spécialisée<br />
3e édition<br />
Guy Dréano<br />
Dunod, 38 €<br />
Cet ouvrage permet <strong>de</strong> mieux situer<br />
la fonction éducation spécialisée dans<br />
le contexte <strong>de</strong> l’action sociale. Il en<br />
décrit les contours, les savoir-faire,<br />
les principaux questionnements. Conçu<br />
comme une gui<strong>de</strong> professionnel à<br />
l’usage <strong>de</strong>s intervenants du secteur<br />
social, médico-social et paramédical,<br />
il s’articule autour <strong>de</strong> quatre axes :<br />
une analyse <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments et <strong>de</strong><br />
l’évolution <strong>de</strong> la fonction d’éducation<br />
spécialisée ; une synthèse <strong>de</strong>s thèmes<br />
d’intervention et <strong>de</strong>s indications (déficiences,<br />
affections à dominante organique<br />
et psychique, etc.) ; une présentation<br />
du cadre réglementaire et<br />
administratif qui structure ce secteur ;<br />
une <strong>de</strong>scription synthétique <strong>de</strong>s contenus<br />
professionnels qui régissent ce<br />
métier (relation éducative, médiation,<br />
évaluation, formation).<br />
Cette nouvelle édition qui a été entièrement<br />
revue et corrigée prend notamment<br />
en compte la loi du 2 janvier<br />
2002 rénovant l’action sociale<br />
et médico-sociale.<br />
Des travaux personnels<br />
encadrés<br />
Témoignages et analyses<br />
Christiane Montandon, Claudine<br />
Peyrotte<br />
L’Harmattan, 25 €<br />
Les TPE, Travaux Personnels Encadrés,<br />
sont un nouveau dispositif pédagogique<br />
mobilisant une équipe <strong>de</strong><br />
plusieurs enseignants et <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />
actives ‘<strong>de</strong> questionnement. Cet ouvrage,<br />
à travers les témoignages <strong>de</strong>s<br />
élèves et les analyses <strong>de</strong>s interactions<br />
et <strong>de</strong>s écrits <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail,<br />
vise à montrer comment <strong>de</strong>s élèves<br />
<strong>de</strong> première S peuvent s’engager <strong>de</strong><br />
manière satisfaisante pour eux et<br />
leurs enseignants, dans les différentes<br />
étapes <strong>de</strong> la démarche expérimentale.<br />
Les différents aspects <strong>de</strong> la<br />
construction <strong>de</strong>s connaissances par<br />
les élèves et les modalités d’organisation<br />
mises en place par les enseignants<br />
sont abordés dans ce livre <strong>de</strong><br />
telle sorte qu’ils peuvent intéresser<br />
autant enseignants et formateurs que<br />
chercheurs et étudiants en sciences<br />
<strong>de</strong> l’éducation.<br />
Les risques <strong>de</strong> la vie quotidienne liés<br />
à l’usage <strong>de</strong> cannabis sont fréquemment<br />
étudiés sous trois angles : les<br />
troubles <strong>de</strong> l’apprentissage scolaire, les<br />
perturbations <strong>de</strong> la conduite automobile<br />
et les modifications du comportement<br />
en situation professionnelle.<br />
Notre réflexion a pour but <strong>de</strong> mettre<br />
l’accent – au moyen <strong>de</strong> vignettes cliniques<br />
détaillées tirées <strong>de</strong> notre pratique<br />
<strong>de</strong> psychologue dans un point-<br />
écoute pour adolescents et parents<br />
(1, 2)<br />
– sur d’autres types <strong>de</strong> risques <strong>de</strong> la<br />
vie quotidienne dont la survenue<br />
potentielle pèse sur les fumeurs <strong>de</strong><br />
« joints », d’autant plus que ces aléas, à<br />
la différence <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>nts, ten<strong>de</strong>nt<br />
à survenir <strong>de</strong> manière brutale et, corrélativement,<br />
imprévisible : être victime<br />
d’une agression, faire l’objet d’une<br />
dénonciation auprès <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong><br />
l’ordre et être surpris par celles-ci.<br />
Le risque d’être agressé<br />
Dans la plupart <strong>de</strong>s cas, se procurer<br />
du cannabis n’a rien d’une mission<br />
impossible. L’offre du produit est abondante<br />
et les ven<strong>de</strong>urs sont à proximité<br />
géographique, « amicale », scolaire et<br />
professionnelle <strong>de</strong>s acheteurs. Pourtant,<br />
cette démarche n’est pas toujours<br />
sans dangers.<br />
Les fumeurs <strong>de</strong> « joints » ne vivent pas<br />
plus en ermites que le restant <strong>de</strong> la<br />
population. Ils partent en week-end,<br />
prennent <strong>de</strong>s vacances et voyagent.<br />
Mais à la différence du citoyen lambda,<br />
quitter leur cadre <strong>de</strong> vie les expose<br />
au risque d’être « accostés » puis<br />
« dépouillés » par <strong>de</strong> soi disant ven<strong>de</strong>urs<br />
<strong>de</strong> cannabis. Certains jeunes<br />
vacanciers n’hésitent pas, notamment<br />
lorsqu’ils séjournent en bord <strong>de</strong> mer, à<br />
suivre d’autres jeunes qui habitent la<br />
localité, les ont repérés et démarchés<br />
sur une plage, une terrasse <strong>de</strong> café ou<br />
un jardin public. Ces individus attirent<br />
en fait leurs « clients » dans <strong>de</strong>s « plans<br />
crapuleux » où ils les délestent <strong>de</strong> leur<br />
argent.<br />
C’est ce qui est arrivé à Moussa.<br />
Moussa s’est fait « dépouiller » en<br />
vacances<br />
Cet étudiant en droit, âgé <strong>de</strong> vingt ans,<br />
nous raconte avec dégoût : « Un job<br />
d’été dans un restaurant venait <strong>de</strong> me<br />
passer sous le nez. Le patron m’a prévenu<br />
<strong>de</strong>ux jours avant <strong>de</strong> commencer<br />
pour me dire que finalement il n’aurait<br />
pas besoin <strong>de</strong> moi. Comme je<br />
n’avais pas encore signé <strong>de</strong> contrat, je<br />
n’ai pas pu contester ce coup tordu.<br />
Mes copains étaient soit en train <strong>de</strong><br />
travailler, soit partis. Je n’avais pas envie<br />
<strong>de</strong> passer le mois d’août à tourner<br />
comme un rat dans la maison. Je suis<br />
donc <strong>de</strong>scendu dans le Languedoc avec<br />
mes parents, comme quand j’étais<br />
môme. A Palavas, l’eau est bonne et<br />
le soleil presque garanti, mais je me<br />
suis très vite ennuyé. Je nage mal et<br />
j’ai passé l’âge <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s pâtés <strong>de</strong><br />
sable. Et puis supporter à longueur <strong>de</strong><br />
journée les « beaufs » et les « pétasses »,<br />
merci bien ! Sans compter les raseurs<br />
qui patrouillent pour vendre <strong>de</strong>s beignets,<br />
<strong>de</strong>s ballons et autres niaiseries<br />
pour gogos. En plus, je n’ai eu le temps<br />
d’emporter qu’une barrette <strong>de</strong> shit. J’ai<br />
été obligé <strong>de</strong> la rationner à mort et<br />
comme je fumais moins, l’endroit me<br />
mettait encore plus les nerfs. Alors<br />
quand trois types <strong>de</strong> mon âge, propres<br />
sur eux, m’ont <strong>de</strong>mandé si « j’en voulais<br />
», je n’ai pas hésité. Ils m’ont expliqué<br />
qu’ils rentraient sur Montpellier et<br />
qu’ils pourraient m’en trouver « <strong>de</strong> la<br />
bonne » si je les accompagnais. J’ai dit<br />
rapi<strong>de</strong>ment à mes parents que j’avais<br />
sympathisé avec eux et que je reviendrais<br />
le soir par le bus. Dans la voiture,<br />
les gars ont mis la musique à fond,<br />
comme s’ils ne voulaient pas tellement<br />
discuter, et ils ont fait tourner un<br />
« pétard », histoire <strong>de</strong> me donner un<br />
aperçu <strong>de</strong> la qualité. Le centre ville<br />
était chouette, mais on a foncé vers le<br />
Nord, beaucoup moins « cool ». Planant<br />
un peu, je n’ai pas prêté attention<br />
au quartier pourri où on s’est arrêté.<br />
J’ai suivi les mecs dans une cave<br />
HLM et là, les boules ! Ils m’ont entouré<br />
et ont sorti <strong>de</strong>s crans d’arrêt et <strong>de</strong>s<br />
bombes lacrymo. J’ai dû leur donner<br />
tout mon fric (<strong>de</strong>ux cents euros), ma<br />
montre et ma gourmette, puis ils se<br />
sont « taillés » en m’insultant et en se<br />
foutant du « parigot » qu’ils venaient <strong>de</strong><br />
« carotter ». J’en ai chialé <strong>de</strong> rage, puis<br />
je suis sorti <strong>de</strong> l’immeuble. Une dame<br />
qui habitait là a vu que je n’allais pas<br />
Confort mo<strong>de</strong>rne, « psy » à tous les étages...<br />
Journée <strong>de</strong> Formation du Secteur <strong>de</strong> psychiatrie générale<br />
du Centre Hospitalier <strong>de</strong> LILLEBONNE<br />
JEUDI 9 NOVEMBRE 2006<br />
CENTRE JULIOBONA - LILLEBONNE<br />
Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ce titre un peu provocateur, un constat s’appuyant sur quelques<br />
chiffres :<br />
- battue d’une courte tête par la Suisse, la France a le ratio <strong>de</strong> psychiatres le<br />
plus élevé (23 pour 100 000 habitants contre 9 dans la Communauté Européenne)<br />
- <strong>de</strong> 1980 à 2001, la prescription <strong>de</strong>s antidépresseurs a été multipliée par 15<br />
en France.<br />
Le discours dominant consiste à dénoncer la pénurie <strong>de</strong> psychiatres et l’absence<br />
<strong>de</strong> prise en charge et <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> nombreux patients en souffrance.<br />
Ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s d’ai<strong>de</strong> ne seraient-elles pas souvent dévoyées, perverties par une<br />
quête illusoire du bonheur, un refus <strong>de</strong> la conflictualité, une esquive <strong>de</strong>s interlocuteurs<br />
naturels au sein <strong>de</strong> la famille, du quartier, du lieu <strong>de</strong> travail, etc... ?<br />
Comment les acteurs <strong>de</strong> première ligne que sont le généraliste, les équipes <strong>de</strong><br />
secteur psychiatrique peuvent-ils ai<strong>de</strong>r le patient à accepter son humaine condition<br />
?<br />
Est-ce dans la chimie ou le marché <strong>de</strong>s techniques relationnelles que rési<strong>de</strong> la<br />
fin <strong>de</strong> la plainte ?<br />
Quelle place la « talking cure », le soin par la parole prôné par Freud, né il y a tout<br />
juste 150 ans, peut-elle encore avoir dans les structures publiques <strong>de</strong> soins ?<br />
Nous conclurons ces multiples questionnements par un débat avec Elisabeth<br />
Roudinesco sur l’avenir <strong>de</strong> la Psychanalyse.<br />
Rémi Picard<br />
Renseignements : Association « Méandres » (Association <strong>de</strong> formation agréée), Hôpital<br />
Pierre Janet - UCID, 47 rue <strong>de</strong> Tourneville, BP 24, 76083 Le Havre Cé<strong>de</strong>x, Tél : 02 32 73 39 47<br />
bien. Elle m’a montré la loge du gardien,<br />
qui m’a permis d’appeler mes<br />
parents sur leur portable. Le gardien<br />
m’a conseillé d’aller au commissariat<br />
pour porter plainte contre ces<br />
« raclures », mais comment aurais-je<br />
pu expliquer aux policiers ce que je<br />
faisais dans un endroit sans intérêt pour<br />
un vacancier, où je ne connais personne<br />
et situé à quinze kilomètres du<br />
terrain <strong>de</strong> camping ? En plus, impossible<br />
d’i<strong>de</strong>ntifier mes agresseurs. Ils portaient<br />
<strong>de</strong>s lunettes teintées et comme le<br />
« plan » semblait « nickel », je n’avais<br />
pas regardé la plaque d’immatriculation.<br />
Mon père m’a engueulé grave<br />
quand il m’a récupéré. Il sait que je<br />
fume <strong>de</strong>s « joints » et a compris ce qui<br />
s’était passé. J’ai alors presque regretté<br />
que les mecs ne m’aient pas démonté<br />
la tête, histoire <strong>de</strong> l’apitoyer et qu’il se<br />
calme. J’avais déjà assez la honte<br />
comme ça. Sans « thune », j’ai dû me<br />
passer <strong>de</strong> cannabis pendant le restant<br />
<strong>de</strong>s vacances et lire les mêmes romans<br />
à l’eau <strong>de</strong> rose que ma mère (<strong>de</strong>puis,<br />
quand je vois un bouquin <strong>de</strong> Barbara<br />
Cartland, j’ai envie <strong>de</strong> me « mettre une<br />
balle ») pour essayer d’avoir la tête<br />
ailleurs. Une fois rentré, j’ai parlé <strong>de</strong><br />
l’agression à mon meilleur copain. Il<br />
m’a dit que ça n’était pas rare et que<br />
<strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses cousins avaient subi ce<br />
type d’arnaque. La prochaine fois, j’emporterai<br />
<strong>de</strong> quoi fumer pendant toutes<br />
les vacances. Je sais que j’aurai <strong>de</strong> sacrés<br />
ennuis en cas <strong>de</strong> contrôle policier, mais<br />
ça sera moins humiliant et je ne risquerai<br />
pas <strong>de</strong> prendre un coup <strong>de</strong> couteau<br />
».<br />
« Cassé » par le cannabis, Stéphane<br />
n’a pas pu se défendre<br />
Lorsqu’ils sont sous l’effet du produit,<br />
les consommateurs <strong>de</strong> cannabis ont<br />
une vigilance amoindrie et <strong>de</strong>s gestes<br />
ralentis. Même lorsqu’ils se trouvent<br />
dans un endroit familier, ils <strong>de</strong>viennent<br />
alors <strong>de</strong>s proies faciles pour les agresseurs.<br />
Stéphane en a fait l’inquiétante<br />
expérience.<br />
Ce lycéen <strong>de</strong> dix-sept ans se souvient :<br />
« C’était en fin d’après-midi. Je revenais<br />
du foot. J’avais fumé un « joint » en<br />
sortant du vestiaire. L’entraîneur m’avait<br />
dit « Tu joues <strong>de</strong> mieux en mieux.<br />
Vivement les compétitions, pour que tu<br />
puisses concrétiser ». Je me la jouais<br />
en marchant. J’imaginais que je faisais<br />
gagner l’équipe, qu’on remportait plein<br />
<strong>de</strong> championnats. Le soleil s’est couché<br />
plus tôt que je le pensais. Comme<br />
je n’étais pas pressé, j’avais refusé qu’un<br />
autre joueur me ramène en scooter.<br />
Mais j’avais mal estimé la distance et,<br />
surtout, les effets du « pétard ». Je l’avais<br />
trop chargé. Jusqu’ici, je ne pensais pas<br />
que ça pouvait mettre dans le cirage. Je<br />
me suis rendu compte qu’à partir d’une<br />
certaine quantité, ça n’est pas différent<br />
<strong>de</strong> l’alcool ! En passant dans un endroit<br />
peu éclairé, j’ai entendu <strong>de</strong>s mobylettes<br />
arriver et freiner à ma hauteur. C’était<br />
<strong>de</strong>ux « grands », <strong>de</strong>s mecs <strong>de</strong> la ville d’à<br />
côté. Ils n’aiment pas les gars d’ici. Je<br />
leur ai dit « Si vous me cherchez, je<br />
vous envoie à l’hôpital ». J’étais prêt à<br />
sortir mes chaussures <strong>de</strong> foot et à les<br />
« boxer » avec les crampons. Mais ça les<br />
a fait rire : « Tu t’es vu, morveux ? T’as<br />
<strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> martien et tu tiens à peine<br />
<strong>de</strong>bout. On n’aurait qu’à te souffler<br />
<strong>de</strong>ssus pour que tu dégringoles. File<br />
nous ton sac et tu pourras aller pleurer<br />
chez ta mère ! ». Un <strong>de</strong>s types a touché<br />
mon sac et je lui ai donné un coup <strong>de</strong><br />
poing. J’ai tapé <strong>de</strong> toutes mes forces<br />
pour le laisser sur le carreau et que<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
Agressions, dénonciations,<br />
interpellations : <strong>de</strong>s risques<br />
méconnus liés à la<br />
consommation <strong>de</strong> cannabis<br />
l’autre n’insiste pas, mais j’étais si<br />
engourdi qu’il a esquivé facilement et<br />
que je me suis retrouvé par terre. J’ai eu<br />
du bol, car un automobiliste s’est arrêté.<br />
Il pensait que j’étais tombé <strong>de</strong> mobylette.<br />
En le voyant, les « grands » sont<br />
partis, un peu « péteux ». J’ai dit au<br />
conducteur que j’avais glissé mais que<br />
je n’avais rien. J’ai couru en zigzaguant<br />
vers un autobus qui venait d’arriver à<br />
une station proche. Je l’ai pris et je suis<br />
rentré chez moi, pas très « fiérot ». Le<br />
« bédo », c’est « cool » pour se détendre<br />
et faire la fête, mais je n’en fumerai<br />
plus jamais avant d’aller dans la rue.<br />
Les types avaient clairement vu que<br />
j’étais « cassé ». J’ai rarement la trouille<br />
et je sais me battre, mais là ils auraient<br />
pu me « dépouiller » sans problème ».<br />
Le risque d’être dénoncé<br />
La facilité avec laquelle on peut se procurer<br />
du cannabis a pour revers l’absence<br />
d’anonymat qui entoure les acheteurs.<br />
Les ven<strong>de</strong>urs d’héroïne ten<strong>de</strong>nt,<br />
eux, à obéir à une certaine loi du silence.<br />
Lorsqu’un <strong>de</strong>aler <strong>de</strong> cette drogue est<br />
arrêté par les forces <strong>de</strong> l’ordre, il refuse<br />
souvent <strong>de</strong> communiquer l’i<strong>de</strong>ntité<br />
tant <strong>de</strong> ses fournisseurs – ou grossistes<br />
– que <strong>de</strong> ses clients. C’est qu’il risque<br />
gros auprès <strong>de</strong> ces personnes, <strong>de</strong>s règlements<br />
<strong>de</strong> compte musclés <strong>de</strong> la part<br />
<strong>de</strong>s premiers et un boycott <strong>de</strong> la part<br />
<strong>de</strong>s seconds. La plupart <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs<br />
d’héroïne vivent <strong>de</strong> cette activité, qui les<br />
occupe à « temps plein » et où <strong>de</strong>s<br />
sommes d’argent considérables sont<br />
en jeu. Un <strong>de</strong>aler d’héroïne qui « parle<br />
trop » lors d’un interrogatoire policier<br />
perd sur le champ sa source <strong>de</strong> revenus<br />
et doit envisager, dès sa sortie <strong>de</strong> prison,<br />
<strong>de</strong> changer <strong>de</strong> région ou <strong>de</strong> « métier »<br />
pour échapper aux représailles <strong>de</strong>s individus<br />
qu’il a dénoncés ou <strong>de</strong>s « gros<br />
bras » missionnés par ces <strong>de</strong>rniers pour<br />
le rosser ou / et recouvrir d’illégales<br />
créances (ce type <strong>de</strong> ven<strong>de</strong>tta peut<br />
même avoir lieu lors d’une incarcération,<br />
par détenus interposés). Les ven<strong>de</strong>urs<br />
d’héroïne évitent <strong>de</strong> vendre du<br />
cannabis et se tiennent également à<br />
distance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>alers <strong>de</strong> ce produit.<br />
Ceux-ci pratiquent leur activité « à la<br />
petite semaine ». La vente <strong>de</strong> cannabis<br />
ne constitue pas, loin <strong>de</strong> là, leur principale<br />
source <strong>de</strong> revenus. Surtout, alors<br />
que les ven<strong>de</strong>urs d’héroïne approvisionnent<br />
souvent un groupe circonscrit<br />
d’héroïnomanes « fidélisés » par<br />
leur addiction, les ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> cannabis<br />
ont <strong>de</strong>s acheteurs plus inconstants,<br />
volatiles, dont ils ne connaissent pas<br />
toujours le nom. Les sommes d’argent<br />
en jeu ne sont jamais astronomiques.<br />
Les <strong>de</strong>alers d’héroïne arrêtés savent<br />
que <strong>de</strong> toute façon – qu’ils se « mettent<br />
à table » ou non –, ils vont être<br />
condamnés à une sévère peine d’emprisonnement<br />
et à une lour<strong>de</strong> amen<strong>de</strong><br />
calculée à partir <strong>de</strong> la quantité <strong>de</strong><br />
drogue qu’ils possédaient ou / et qu’ils<br />
ont vendue. Par contre, les ven<strong>de</strong>urs<br />
<strong>de</strong> cannabis arrêtés sont fréquemment<br />
sensibilisés au fait qu’un allégement<br />
<strong>de</strong>s sanctions judiciaires pourrait être<br />
envisagé s’ils font preuve <strong>de</strong> « bonne<br />
volonté », c’est-à-dire s’ils communiquent<br />
l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> leurs fournisseurs<br />
et <strong>de</strong> leurs clients. La plupart d’entre<br />
eux sont sensibles à cet argument…<br />
De plus, policiers et gendarmes sont<br />
désormais aidés dans cette investigation<br />
par l’accès aux numéros attachés<br />
aux appels émis et reçus sur le téléphone<br />
portable du <strong>de</strong>aler. Ces informations<br />
permettent aux forces <strong>de</strong>
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
l’ordre d’intervenir au domicile <strong>de</strong>s personnes<br />
soupçonnées d’avoir acheté du<br />
cannabis à tel ven<strong>de</strong>ur interpellé.<br />
« Balancée » par un <strong>de</strong>aler, Linda<br />
subit les foudres <strong>de</strong> son père<br />
Cette lycéenne <strong>de</strong> seize ans, qui<br />
consomme <strong>de</strong>s « joints » <strong>de</strong> manière<br />
pourtant très occasionnelle, a reçu ce<br />
type <strong>de</strong> visite. Arrêté en possession<br />
d’une « savonnette » - c’est-à-dire environ<br />
250 gr <strong>de</strong> résine <strong>de</strong> cannabis -, son<br />
<strong>de</strong>aler venait <strong>de</strong> donner soixante noms<br />
d’acheteurs aux gendarmes <strong>de</strong> son village<br />
! La maréchaussée s’est présentée<br />
à six heures du matin au pavillon <strong>de</strong> ses<br />
parents, en milieu <strong>de</strong> semaine, alors<br />
que toute la maisonnée dormait encore.<br />
Interrogée sur place, la jeune fille a<br />
reconnu fumer <strong>de</strong> temps en temps <strong>de</strong>s<br />
« joints » et avoir été fournie par le<br />
ven<strong>de</strong>ur qui l’a dénoncée. Ignorant jusqu’ici<br />
l’existence <strong>de</strong> cette consommation,<br />
les parents <strong>de</strong> l’adolescente, vues<br />
les circonstances, ont réagi <strong>de</strong> façon<br />
« éruptive ». En vertu d’une convention<br />
passée entre l’institution où nous<br />
travaillons et le Parquet local, les<br />
simples consommateurs <strong>de</strong> cannabis<br />
interpellés sont adressés vers notre<br />
point-écoute, dans le cadre d’une mesure<br />
« d’orientation éducative » dont l’observance<br />
– sous la forme d’un ou <strong>de</strong><br />
plusieurs entretiens – suffit à éteindre<br />
l’action judiciaire. Ce partenariat intelligent<br />
ouvre une porte judicieuse vers<br />
le sanitaire. Il permet d’évaluer le rapport<br />
au cannabis <strong>de</strong> l’intéressé(e) et sa<br />
connaissance <strong>de</strong>s risques idoines, ainsi<br />
que <strong>de</strong> situer l’usage du produit à la<br />
lueur <strong>de</strong> la dynamique familiale, les<br />
parents étant systématiquement associés<br />
à cette démarche quand l’usager<br />
est mineur. Nous avons accueilli Linda<br />
sous la forme d’un projectile évité <strong>de</strong><br />
justesse ! Aussitôt entrée, son père l’a<br />
propulsée violemment et elle a terminé<br />
sa trajectoire dans un présentoir<br />
métallique, heureusement sans se blesser.<br />
Ambiance ! L’entretien a été à l’avenant.<br />
Nous avons dû nous interposer<br />
physiquement pour que ce père,<br />
furieux d’avoir été réveillé à l’aube par<br />
les gendarmes et persuadé que sa fille<br />
était « une camée », ne batte pas cette<br />
<strong>de</strong>rnière comme plâtre. Terrorisée,<br />
Linda n’a pas pu ouvrir la bouche lors<br />
<strong>de</strong> cette rencontre mouvementée,<br />
dominée par l’impulsivité et les vociférations<br />
paternelles. Un second entretien,<br />
où la jeune fille et ses parents ont<br />
été reçus séparément, a permis au père<br />
<strong>de</strong> l’adolescente <strong>de</strong> métaboliser son<br />
ressentiment et d’entendre que la<br />
fumette <strong>de</strong> « joints » <strong>de</strong> l’intéressée<br />
SEMINAIRE DU JEUDI<br />
Rencontres cliniques<br />
ASSOCIATION E.C.A.R.T.<br />
Enseignement. Création.Analyse.Recherche.Transmission<br />
2006-2007<br />
Thème : « Impossible - mais quand même !»<br />
« Il y a trois métiers impossibles - Eduquer, Soigner, Gouverner » Sigmund Freud<br />
12 <strong>Octobre</strong> 2006 : Jean-Pierre WINTER, Psychanalyste, auteur <strong>de</strong> plusieurs<br />
ouvrages dont Les errants <strong>de</strong> la chair éditions Payot, Choisir la psychanalyse<br />
éditions la Martinière, Les images, les mots, le corps entretiens avec<br />
Françoise Dolto éditions Gallimard, interviendra sur le thème : Ou l’éthique ou<br />
la morale.<br />
19 <strong>Octobre</strong> 2006 : Gilda SABSAY Y FOKS, exceptionnellement <strong>de</strong> passage à<br />
Paris, Psychiatre - Psychanalyste, Prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> l’Association d’histoire <strong>de</strong> la<br />
psychiatrie et <strong>de</strong> la psychanalyse en Argentine interviendra sur le thème : Le<br />
mythe dans la clinique psychanalytique.<br />
9 Novembre 2006 : Christine HENNIQUEAU-MARY, Enseignante, Psycho-pédagogue,<br />
auteur <strong>de</strong> L’enfant qui voulait penser aux éditions Fabert, interviendra<br />
sur le thème : Montreurs <strong>de</strong> signes.<br />
21 Décembre 2006 : Clau<strong>de</strong> SAHEL, Philosophe - Psychanalyste, Membre du<br />
Cercle Freudien, interviendra sur le thème : Le désir pédagogique.<br />
Hôpital Esquirol - porte 19 - 1OH30<br />
Florence REZNIK : Fondatrice <strong>de</strong> l’Association ECART y et Responsable du séminaire.<br />
Le programme <strong>de</strong>s séminaires est disponible sur le site www.ecart-psy.org<br />
était en l’état moins catastrophique qu’il<br />
ne le croyait. Il faut dire que la dénonciation<br />
<strong>de</strong> cette lycéenne par son <strong>de</strong>aler<br />
était intervenue à un moment où sa<br />
parentèle était incapable <strong>de</strong> prendre<br />
du recul vis-à-vis d’une telle révélation.<br />
Sa mère avait <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> santé<br />
et son père connaissait <strong>de</strong>s difficultés<br />
professionnelles telles qu’il craignait<br />
d’être licencié. Cet homme déjà stressé<br />
a donc vu rouge lors <strong>de</strong> la visite <strong>de</strong>s<br />
gendarmes, sans compter la crainte du<br />
qu’en-dira-t-on. Sans l’orientation <strong>de</strong><br />
cette famille vers notre structure, les<br />
relations père-fille se seraient certainement<br />
envenimées, vouant peut-être<br />
l’adolescente à augmenter sa consommation<br />
<strong>de</strong> cannabis sous l’effet <strong>de</strong> la<br />
peur, <strong>de</strong> la tristesse et d’un sentiment<br />
d’incompréhension… un peu compréhensible.<br />
Le risque d’être<br />
interpellé par les forces<br />
<strong>de</strong> l’ordre<br />
La législation française sur les stupéfiants<br />
prévoit que l’interpellation par<br />
les forces <strong>de</strong> l’ordre d’un individu en<br />
possession <strong>de</strong> produit soit suivie d’une<br />
gar<strong>de</strong> à vue. Or, dans les faits, <strong>de</strong> nombreuses<br />
interpellations policières ne<br />
donnent lieu qu’à la saisie du « joint »<br />
ou <strong>de</strong> la barrette <strong>de</strong> cannabis, éventuellement<br />
assortie d’une injonction<br />
railleuse à ne pas récidiver : « Que je ne<br />
t’y reprenne pas, petit imbécile ». Nous<br />
ne souhaitons pas faire le procès <strong>de</strong> ce<br />
type <strong>de</strong> dérogation à la loi écrite. Dans<br />
certaines villes, les fumeurs <strong>de</strong> cannabis<br />
interpellés sont si nombreux que les<br />
commissariats <strong>de</strong>vraient doubler ou tripler<br />
leur surface et leurs ressources<br />
humaines pour les interroger et les<br />
mettre tous « au frais ». Nous voulons<br />
simplement attirer l’attention du lecteur<br />
sur le fait que <strong>de</strong> telles réponses en<br />
première ligne n’ai<strong>de</strong>nt pas du tout le<br />
citoyen lambda à intérioriser la réalité<br />
<strong>de</strong> la loi concernant l’usage <strong>de</strong> cannabis<br />
et n’incitent nullement le citoyen<br />
« jointeur » (3) à bien regar<strong>de</strong>r autour <strong>de</strong><br />
lui avant <strong>de</strong> sortir ou <strong>de</strong> rouler un<br />
« pétard ». Se répand ainsi l’idée, surtout<br />
chez les adolescents, selon laquelle on<br />
ne craint pas <strong>de</strong> se retrouver <strong>de</strong>vant<br />
le juge si l’on n’est pas un gros trafiquant.<br />
Carlos, du commissariat au<br />
chômage<br />
Cultivant cette représentation, Carlos,<br />
âgé <strong>de</strong> vingt-cinq ans, a déchanté brutalement.<br />
Deman<strong>de</strong>ur d’emploi <strong>de</strong>puis<br />
près d’un an, ce jeune adulte a voulu<br />
fêter la signature <strong>de</strong> son nouveau<br />
contrat <strong>de</strong> travail. La veille du jour où<br />
il <strong>de</strong>vait entamer sa pério<strong>de</strong> d’essai, il a<br />
contacté ses trois meilleurs amis pour<br />
fumer du cannabis avec eux. Munis <strong>de</strong><br />
plusieurs barrettes, les jeunes gens sont<br />
montés en voiture et ont élu un parking<br />
désert pour rouler et fumer leurs<br />
« joints ». Une voiture banalisée s’est<br />
placée <strong>de</strong>vant la leur, quatre policiers<br />
en civil en sont <strong>de</strong>scendus et leur ont<br />
<strong>de</strong>mandé leurs papiers. L’habitacle<br />
empestant la fumée <strong>de</strong> cannabis, ils<br />
ont ri jaune. Les policiers les ont invités<br />
à leur remettre leurs cigarettes et à<br />
vi<strong>de</strong>r leurs poches. C’est alors que Carlos,<br />
ne sentant pas que la situation était<br />
franchement désavantageuse, a pris <strong>de</strong><br />
haut cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et a clamé à ses<br />
interlocuteurs : « Ok, prenez notre shit<br />
et partez. Ayez une petite pensée pour<br />
nous quand vous le fumerez ». L’officier<br />
<strong>de</strong> police judiciaire lui a rétorqué<br />
« Puisque monsieur a décidé <strong>de</strong> faire le<br />
malin, nous allons poursuivre cette<br />
conversation dans nos locaux ». Dans la<br />
fourgonnette qui est venue les embarquer,<br />
les copains <strong>de</strong> Carlos l’ont regardé<br />
méchamment et lui ont murmuré :<br />
« Maintenant, tu la boucles ». Mais une<br />
fois arrivés à <strong>de</strong>stination, l’intéressé a<br />
réitéré ses rodomonta<strong>de</strong>s : « Vous<br />
n’avez pas le droit <strong>de</strong> nous enfermer<br />
pour du shit. C’est une bavure. J’irai me<br />
plaindre au tribunal et j’informerai la<br />
presse ». Comme cela était prévisible,<br />
cette diatribe n’a pas eu l’heur <strong>de</strong> plaire<br />
aux policiers <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>. Pour cette<br />
raison, si ses amis sont ressortis rapi<strong>de</strong>ment<br />
après avoir signé une déposition<br />
où ils reconnaissaient avoir été<br />
interpellés en possession <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />
cannabis, Carlos, jugé « agité », a été<br />
placé en gar<strong>de</strong> à vue. Cette mesure<br />
aurait dû le conduire à réaliser la gravité<br />
<strong>de</strong> sa situation. Il a pourtant continué à<br />
jouer les grands citoyens offusqués.<br />
Résultat, il n’est sorti du commissariat<br />
qu’au milieu <strong>de</strong> la journée suivante,<br />
c’est-à-dire bien après le moment où<br />
il <strong>de</strong>vait prendre son poste <strong>de</strong> travail !<br />
Il a fébrilement téléphoné à l’employeur<br />
et prétexté une indigestion, mais ce<br />
<strong>de</strong>rnier n’a pas été dupe et lui a signifié<br />
que cette absence injustifiée augurait<br />
très mal d’une embauche ferme au<br />
terme <strong>de</strong> sa pério<strong>de</strong> d’essai… Me relatant<br />
ces faits, Carlos, à nouveau <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur<br />
d’emploi, conclut : « J’étais tellement<br />
heureux <strong>de</strong> retravailler que je n’ai<br />
pas mesuré les risques. J’aurais dû en<br />
rabattre du caquet quand les « flics »<br />
nous sont tombés <strong>de</strong>ssus. Mais je vous le<br />
jure, j’étais sûr à 200% qu’ils saisiraient<br />
les « bédos » et, éventuellement, qu’ils<br />
nous colleraient une petite amen<strong>de</strong> après<br />
nous avoir laissés repartir. Je me suis fié<br />
à ce que j’avais vécu jusqu’alors. J’ignorais<br />
que la loi était aussi sévère. Avonsnous<br />
eu affaire à <strong>de</strong>s policiers intègres<br />
ou intégristes ? ».<br />
Julien a été menotté au lycée<br />
Cela faisait plusieurs mois qu’une<br />
rumeur courait au lycée selon laquelle<br />
une « <strong>de</strong>scente » <strong>de</strong> police se préparait.<br />
Le proviseur l’avait laissé entendre<br />
en termes à peine déguisés lors d’une<br />
réunion <strong>de</strong> délégués <strong>de</strong> classe. Julien,<br />
âgé <strong>de</strong> seize ans, aurait pu à <strong>de</strong>ux titres<br />
s’inquiéter <strong>de</strong> cette imminence d’une<br />
intervention <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre, Non<br />
seulement cet adolescent consommait<br />
régulièrement du cannabis dans l’immense<br />
parc au sein duquel son établissement<br />
scolaire – un ancien château<br />
– était implanté, mais il se livrait <strong>de</strong><br />
plus à la vente plutôt lucrative <strong>de</strong> ce<br />
produit auprès d’une quinzaine <strong>de</strong> ses<br />
condisciples.<br />
Apprenant que le vent menaçait <strong>de</strong><br />
tourner défavorablement pour lui et<br />
quelques autres, il s’était pourtant<br />
contenté <strong>de</strong> hausser les épaules, sur le<br />
mo<strong>de</strong> : « Causez toujours. On est trop<br />
bien organisés pour se faire attraper ».<br />
Julien poursuivait tant bien que mal sa<br />
scolarité. Il s’étonnait presque d’avoir<br />
<strong>de</strong>s notes proches <strong>de</strong> la moyenne, étant<br />
donné le peu <strong>de</strong> soin – effets <strong>de</strong>s<br />
« joints » et temps passé à s’approvisionner<br />
puis <strong>de</strong> « <strong>de</strong>aler » obligent –<br />
qu’il apportait à ses leçons et <strong>de</strong>voirs. Il<br />
est probable qu’il disposait <strong>de</strong> bonnes<br />
capacités intellectuelles ou / et que les<br />
« pétards » gênaient moins sa concentration<br />
et sa mémoire que chez d’autres<br />
fumeurs. Bref, il n’avait selon lui aucune<br />
raison <strong>de</strong> s’inquiéter. Les dix hectares<br />
<strong>de</strong> forêt et <strong>de</strong> buissons ceignant<br />
les bâtiments scolaires constituaient un<br />
« territoire » idéal pour vendre et » jointer<br />
».<br />
Les clients et les compagnons <strong>de</strong><br />
« fumette » <strong>de</strong> Julien étaient si nombreux<br />
que pour satisfaire la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />
<strong>de</strong> cannabis <strong>de</strong> tous les élèves du lycée<br />
– au moins un quart <strong>de</strong> l’effectif avaitil<br />
estimé –, une douzaine d’autres adolescents<br />
« officiaient » eux aussi à tour<br />
<strong>de</strong> bras. La végétation et la terre<br />
meuble servaient <strong>de</strong> caches aussi<br />
variées qu’indécelables.<br />
Cet E<strong>de</strong>n pour shitmen était cependant<br />
menacé, même si Julien, les autres<br />
<strong>de</strong>alers et leurs « clients » n’en croyaient<br />
rien. La direction <strong>de</strong> l’établissement<br />
avait décidé <strong>de</strong> « décapiter » ce trafic,<br />
dont elle avait déduit l’existence au gré<br />
<strong>de</strong> plusieurs faits. D’abord, les enseignants<br />
et les surveillants remarquaient<br />
que <strong>de</strong> plus en plus d’élèves somnolaient<br />
anormalement, en cours comme<br />
dans les couloirs, au réfectoire et à l’extérieur.<br />
Les « explications » <strong>de</strong>mandées aux<br />
intéressés ne suscitaient que <strong>de</strong>s<br />
réponses aussi laconiques que fuyantes.<br />
Ensuite, lors <strong>de</strong>s récréations et <strong>de</strong>s<br />
heures creuses, <strong>de</strong> nombreux élèves,<br />
même lorsqu’il faisait froid ou / et pleuvait<br />
à torrents, se rendaient promptement<br />
dans les parties les plus touffues<br />
et les plus reculées du parc. Les surveillants<br />
avaient surtout remarqué que<br />
ces jeunes se scindaient rapi<strong>de</strong>ment en<br />
groupes <strong>de</strong> dix environ et que chacune<br />
<strong>de</strong> ces agrégations se hâtait systématiquement<br />
vers le même endroit.<br />
Immuablement, chaque « bataillon »<br />
comportait un élève qui, <strong>de</strong>vançant les<br />
autres d’une vingtaine <strong>de</strong> mètres, inspectait<br />
les alentours à la manière d’un<br />
éclaireur.<br />
De la même façon, un autre élève, situé<br />
lui en « arrière-gar<strong>de</strong> », se retournait<br />
fréquemment pour vérifier qu’ils étaient<br />
seuls. Les surveillants qui s’étaient risqués<br />
à les suivre avaient systématiquement<br />
été « grillés ». A chaque fois,<br />
le groupe « pisté » s’était éparpillé<br />
comme une voilée <strong>de</strong> moineaux avant,<br />
en toute vraisemblance, <strong>de</strong> se recomposer<br />
un peu plus loin. Ce petit mon<strong>de</strong><br />
se livrait <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce à une activité<br />
prohibée, mais laquelle ? L’absence<br />
<strong>de</strong> filles dans ces groupes avait heureusement<br />
permis d’écarter l’hypothèse<br />
d’une victimisation où <strong>de</strong>s adolescentes<br />
seraient entraînées à l’écart pour être<br />
sexuellement importunées, voire abusées.<br />
Le sourire à peine dissimulé <strong>de</strong><br />
l’ensemble <strong>de</strong>s élèves qui composaient<br />
ces groupes furtifs et, surtout, leur<br />
absence <strong>de</strong> blessures et le bon état <strong>de</strong><br />
leur mise vestimentaire lorsqu’ils revenaient<br />
incitaient également à penser<br />
que leurs pérégrinations sylvestres<br />
n’étaient le théâtre ni <strong>de</strong> rackets ou<br />
d’autres sévices à l’encontre <strong>de</strong> « souffre<br />
douleurs » ni <strong>de</strong> bagarres « rituelles »<br />
entre ban<strong>de</strong>s. Il ne s’agissait donc pas<br />
d’un remake <strong>de</strong> La guerre <strong>de</strong>s boutons<br />
! Enfin, quelques parents d’élèves<br />
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<br />
LIVRES<br />
TOXICOMANIE ■ 17<br />
Handicapés : tous vos droits<br />
Alain Cabrit<br />
6 ème édition<br />
Editions du Puits Fleuri*, 22 €<br />
Les personnes handicapées ont <strong>de</strong>s<br />
droits. En fonction <strong>de</strong> leur handicap<br />
et selon leur situation familiale, ces<br />
droits ne sont pas les mêmes pour<br />
tous. De plus, aux diverses étapes <strong>de</strong><br />
la vie <strong>de</strong> la personne handicapée, ils<br />
évoluent. Cet ouvrage fait le point<br />
détaillé sur chacun d’eux. A jour <strong>de</strong><br />
la loi du 11 février 2005, il permet<br />
<strong>de</strong> se retrouver dans les méandres<br />
administratifs et <strong>de</strong> mieux appréhen<strong>de</strong>r<br />
les démarches nécessaires.<br />
Des modèles <strong>de</strong> lettres et une importante<br />
liste d’adresses permettent,<br />
entre autre, <strong>de</strong> solliciter une ai<strong>de</strong> ou<br />
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Tél. : 01 64 23 6146. www.puitsfleuri.com<br />
La place <strong>de</strong>s jeunes dans la<br />
cité<br />
Tome I<br />
De l’école à l’emploi ?<br />
Cécile Baron, Elisabeth Dugué,<br />
Patrick Nivolle (eds)<br />
Tome 2<br />
Espaces <strong>de</strong> rue, espaces <strong>de</strong>parole<br />
Elisabeth Callu, Jean-Pierre<br />
Jurmand, Alain Vulbeau (eds)<br />
L’Harmattan, 27 € et 28,50 €<br />
Ce recueil fait suite à un colloque qui<br />
s’est tenu à Paris les 27 et 28 février<br />
2004 dont il reprend quelques-unes<br />
<strong>de</strong>s contributions. S’y mêlent <strong>de</strong>s<br />
étu<strong>de</strong>s empiriques et <strong>de</strong>s recherches<br />
plus théoriques issues <strong>de</strong> différentes<br />
disciplines. Les textes portent sur les<br />
mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s jeunes comme sur<br />
leurs aspirations, sur les politiques<br />
qui leur sont <strong>de</strong>stinées mais aussi sur<br />
les présupposés qui orientent ces politiques,<br />
notamment la catégorie « jeunesse<br />
en difficulté ». Les diverses approches<br />
présentes dans les <strong>de</strong>ux<br />
ouvrages montrent <strong>de</strong>s zones d’ombre<br />
et <strong>de</strong> nouvelles interrogations qui interrogent<br />
les politiques sociales en<br />
direction <strong>de</strong> la jeunesse. La recherche<br />
De l’école à l’emploi ? s’intéresse aux<br />
trajectoires <strong>de</strong>s jeunes issus <strong>de</strong>s milieux<br />
populaires et étudie comment<br />
celles-ci sont influencées par les mesures<br />
<strong>de</strong> rattrapage scolaire et par les<br />
dispositifs <strong>de</strong> lutte contre l’exclusion<br />
professionnelle. Les auteurs abor<strong>de</strong>nt<br />
les représentations portées sur la jeunesse,<br />
la nature <strong>de</strong> ses « difficultés »<br />
et leurs traitements. Ils examinent les<br />
enjeux <strong>de</strong>s jugements et <strong>de</strong>s catégorisations<br />
qui sous-ten<strong>de</strong>nt les réponses<br />
politiques aux problèmes <strong>de</strong><br />
l’insertion et <strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong>s jeunes.<br />
L’ ouvrage questionne ainsi la capacité<br />
<strong>de</strong>s politiques publiques à réparer<br />
certaines « injustices », ou encore,<br />
à atténuer certains effets <strong>de</strong>s inégalités<br />
sociales pesant sur les jeunes dans<br />
leur relation à l’école et au travail.<br />
Espaces <strong>de</strong> rue, espaces <strong>de</strong> parole s’intéresse<br />
au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s jeunes<br />
issus <strong>de</strong>s milieux populaires et aux<br />
stratégies qu’ils développent pour<br />
faire face à leurs « difficultés ». Les auteurs<br />
tentent <strong>de</strong> restituer l’expérience<br />
<strong>de</strong>s situations sociales auxquelles<br />
sont confrontés ces jeunes : stéréotypes<br />
et stigmatisations, conditions<br />
<strong>de</strong> vie précaires, interventions publiques<br />
« ciblées »... Ils explorent la vie<br />
dans les cités d’habitat social, le quotidien<br />
dès dispositifs socio-éducatifs,<br />
les espaces culturels investis... Les<br />
jeunes <strong>de</strong>s cités savent utiliser les espaces<br />
<strong>de</strong> rue comme « arène <strong>de</strong> socialisation<br />
». Ils se montrent capables<br />
<strong>de</strong> participer à la construction d’espaces<br />
collectifs où leur parole pourra<br />
être prise en compte. En complément<br />
<strong>de</strong> cette analyse <strong>de</strong>s interactions<br />
entre les jeunes et leur environnement,<br />
sont examinés les déterminants<br />
sociaux <strong>de</strong>s « cultures <strong>de</strong> rue » et <strong>de</strong><br />
leur évolution <strong>de</strong>puis une trentaine<br />
d’années.
18<br />
■ THÉRAPEUTIQUE<br />
Ghettos américains,<br />
banlieues françaises<br />
Hérodote 2006 n°122<br />
La Découverte, 19,50 €<br />
Au travers d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas précises -<br />
New York, villes californiennes, banlieue<br />
nord <strong>de</strong> Paris, région lyonnaise<br />
et nord <strong>de</strong> la France -, les auteurs <strong>de</strong><br />
ce numéro d’Hérodote (qui reprend<br />
les communications d’un colloque<br />
franco-américain à l’université <strong>de</strong><br />
Cergy Pontoise en décembre 2005)<br />
analysent les similarités et les différences<br />
<strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> ségrégation<br />
aux Etats-Unis et en France.<br />
L’article <strong>de</strong> Renaud Le Goix, qui retrace<br />
l’histoire <strong>de</strong>s quartiers fermés,<br />
y compris en France, corrige le discours<br />
selon lequel ces quartiers pour<br />
classes aisées seraient une importa-<br />
avaient contacté le proviseur après<br />
avoir trouvé <strong>de</strong>s bouts <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />
cannabis dans le cartable <strong>de</strong> leur progéniture…<br />
Les intéressés ne « traînaient<br />
» guère sur le trajet - effectué<br />
en car – qui séparait le lycée <strong>de</strong> leur<br />
domicile, ne fumaient jamais à la maison<br />
et n’avaient pas la permission <strong>de</strong><br />
sortir après le dîner. Pères et mères en<br />
avaient déduit que le cannabis était<br />
consommé au sein même du lycée et<br />
insisté pour que le chef d’établissement<br />
prenne <strong>de</strong>s mesures adéquates.<br />
Julien et ses « comparses » n’ont rien vu<br />
venir. L’absence totale <strong>de</strong> surveillants<br />
pendant plusieurs jours d’affilée aurait<br />
dû leur mettre la puce à l’oreille. Au<br />
contraire, ils ont en ri et se sont dit : « Ils<br />
se sont rendus compte qu’ils ne pouvaient<br />
pas nous empêcher <strong>de</strong> faire du<br />
business. On les a eu à l’usure. Ils doivent<br />
être tous en arrêt maladie pour<br />
dépression nerveuse ! ». Mauvaise explication<br />
: aucun surveillant ne s’était fait<br />
porter pâle. Se sachant repérés lorsqu’ils<br />
suivaient les groupes <strong>de</strong> fumeurs<br />
<strong>de</strong> cannabis et leurs ven<strong>de</strong>urs et ayant<br />
constaté que le jeu du chat et <strong>de</strong> la<br />
souris qui s’en ensuivait ne tournait<br />
jamais à leur avantage, les surveillants<br />
ont changé leur fusil d’épaule. Ils sont<br />
arrivés au lycée bien avant l’ouverture<br />
<strong>de</strong> l’établissement, puis se sont embusqués<br />
dans les lieux <strong>de</strong> rencontre présumés<br />
– en combinant les directions<br />
précises par chacun <strong>de</strong>s groupes et les<br />
limites du parc – <strong>de</strong>s « jointeurs pèlerins<br />
»… Cette stratégie a été payante.<br />
Les surveillants cachés ont distinctement<br />
vu qui, au sein <strong>de</strong> chaque groupe,<br />
vendait et qui consommait. Ils ont<br />
aussi i<strong>de</strong>ntifié plusieurs endroits où <strong>de</strong>s<br />
quantités assez importantes <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />
cannabis étaient enterrées, enveloppées<br />
dans <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> plastique.<br />
Une fois ces renseignements transmis à<br />
qui <strong>de</strong> droit, le chef d’établissement a<br />
fait illico presto « sonner la charge <strong>de</strong> la<br />
cavalerie ». En substance, une dizaine<br />
<strong>de</strong> voitures <strong>de</strong> police se sont garées<br />
bruyamment <strong>de</strong>vant le lycée, avec<br />
sirènes et gyrophares. Leurs passagers se<br />
sont ensuite rendus directement dans<br />
différentes classes pour, en plein cours,<br />
saisir, menotter et emmener les <strong>de</strong>alers,<br />
parmi lesquels Julien. L’opération<br />
a médusé par son caractère spectaculaire.<br />
Le proviseur, exaspéré par l’intensité<br />
du trafic <strong>de</strong> cannabis qui s’opérait<br />
dans son établissement et par la<br />
difficulté d’y mettre un terme, avait<br />
donné carte blanche aux forces <strong>de</strong><br />
l’ordre au niveau du « style » <strong>de</strong> leur<br />
intervention. Il souhaitait que cette<br />
« visite » soit ostensible et intrusive, <strong>de</strong><br />
façon à ce qu’un message s’imprime<br />
<strong>de</strong> manière durable et dissuasive dans<br />
les jeunes esprits : la loi existe ici<br />
comme sur le restant du territoire national<br />
et nous avons les moyens <strong>de</strong> la<br />
faire appliquer (en l’occurrence, d’en<br />
sanctionner sévèrement la transgression).<br />
Ce but a été pleinement atteint,<br />
mais trop excessivement pour être<br />
« assimilable » sur le plan psychologique.<br />
Peu après, <strong>de</strong>s parents d’élèves et<br />
<strong>de</strong>s personnels du lycée ont contesté<br />
tion récente <strong>de</strong>s Etats-Unis.<br />
Les étu<strong>de</strong>s précises sur les processus<br />
conduisant à la ségrégation urbaine<br />
par le départ <strong>de</strong>s classes moyennes<br />
et par la dynamique du marché immobilier,<br />
commencent seulement en<br />
France. On sait, bien sûr, comment<br />
ça marche, mais il est utile <strong>de</strong> connaître<br />
précisément les quartiers ou les zones<br />
touchés par la ségrégation, choisie<br />
ou subie selon la classe sociale à laquelle<br />
on appartient, si l’on veut<br />
contrôler sinon bloquer ce processus<br />
(voir les articles <strong>de</strong> Didier Desponds<br />
et <strong>de</strong> Martine Berger). Frédérick Douzet<br />
montre, à travers l’exemple <strong>de</strong> la<br />
Californie, comment l’aggravation <strong>de</strong><br />
la ségrégation conduit à une « balkanisation<br />
» politique <strong>de</strong> l’Etat.<br />
C’est là tout l’enjeu <strong>de</strong>s établissements<br />
scolaires et <strong>de</strong> leur réputation.<br />
l’aspect cowboy ou « Starsky et Hutch<br />
» <strong>de</strong> l’intervention policière, même si les<br />
faits, sur le fond, la justifiaient. Ils ont<br />
estimé que les jeunes fautifs ont été<br />
« cueillis » comme <strong>de</strong>s terroristes détenant<br />
<strong>de</strong>s otages ou s’apprêtant à faire<br />
sauter une bombe et ont critiqué fortement<br />
cette « pédagogie » <strong>de</strong> l’humiliation<br />
(vis-à-vis <strong>de</strong>s élèves interpellés) et<br />
<strong>de</strong> la terreur (vis-à-vis <strong>de</strong>s leurs condisciples).<br />
Ils auraient préféré que chaque<br />
élève arrêté ne le soit pas en public,<br />
mais après avoir été préalablement et<br />
discrètement convoqué dans le bureau<br />
du proviseur.<br />
Julien et ses camara<strong>de</strong>s interpellés ont<br />
reconnu les faits. Vus les témoignages<br />
<strong>de</strong>s surveillants et le cannabis ensuite<br />
saisi dans diverses caches, il aurait été<br />
vain et même dangereux <strong>de</strong> nier. Ces<br />
jeunes ont tous fait l’objet d’une comparution<br />
immédiate <strong>de</strong>vant le juge et,<br />
dans le même temps, ont été exclus<br />
définitivement du lycée. Le fait qu’ils<br />
soient tous mineurs, leur franchise et<br />
leur absence d’antécé<strong>de</strong>nts judiciaires<br />
ont joué en leur faveur au tribunal.<br />
Aucune peine <strong>de</strong> prison ferme n’a été<br />
prononcée contre eux. Les sanctions<br />
ont consisté en <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> Travail<br />
d’Intérêt Général (TIG) (4), assorties <strong>de</strong><br />
mesures d’obligation <strong>de</strong> soins (sous la<br />
forme d’un suivi psychologique ou /<br />
et éducatif). C’est dans le cadre <strong>de</strong><br />
celles-ci que j’ai rencontré Julien, <strong>de</strong>ux<br />
mois environ après son arrestation.<br />
L’adolescent oscillait entre le chagrin<br />
et la colère. Il se tenait la tête à <strong>de</strong>ux<br />
mains et ressassait plaintivement : « Les<br />
« flics » n’auraient pas dû nous choper<br />
et nous attacher <strong>de</strong>vant les autres »,<br />
tout en admettant qu’être interpellé<br />
faisait partie <strong>de</strong>s « risques du métier »<br />
<strong>de</strong> ven<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> drogue. Julien ne savait<br />
pas que la police avait le droit d’intervenir<br />
à l’intérieur d’un lycée.<br />
Plusieurs entretiens ont été nécessaires<br />
pour que ce jeune puisse s’exprimer<br />
et prendre un peu <strong>de</strong> distance avec<br />
l’impact émotionnel <strong>de</strong>s circonstances<br />
<strong>de</strong> son arrestation. Au début <strong>de</strong> cette<br />
prise en charge, nous avons bien sûr<br />
dit clairement à l’adolescent que le<br />
contenu <strong>de</strong> nos entretiens serait<br />
étanche en termes <strong>de</strong> secret professionnel,<br />
que nos rencontres étaient la<br />
conséquence d’un partenariat bien<br />
compris et non d’une collusion ou d’un<br />
mandat – sur le mo<strong>de</strong> d’une sous-traitance<br />
- avec les services <strong>de</strong> justice. Parallèlement<br />
à cela, l’association <strong>de</strong>s parents<br />
d’élèves du lycée et une partie <strong>de</strong>s<br />
enseignants ont obtenu du chef d’établissement<br />
la tenue d’une réunion <strong>de</strong>stinée,<br />
à la lueur <strong>de</strong> ce qui venait <strong>de</strong> se<br />
passer, à convenir <strong>de</strong> modalités plus<br />
subtiles en cas <strong>de</strong> nécessité <strong>de</strong> recourir<br />
aux forces <strong>de</strong> l’ordre. Judicieusement,<br />
l’assistante sociale et l’infirmière scolaires<br />
ont profité <strong>de</strong> cette rencontre<br />
pour lancer l’idée - dans une optique<br />
d’action sanitaire et non d’ « innocentation<br />
» <strong>de</strong>s élèves interpellés et <strong>de</strong><br />
leurs acheteurs (5) - d’une réflexion avec<br />
les élèves (intéressés) sur les effets du<br />
cannabis et les « motivations » <strong>de</strong>s<br />
jeunes qui en consomment. Ces per-<br />
sonnes ont sollicité notre équipe et la<br />
pâte a pris. Une dizaine <strong>de</strong> jeunes sont<br />
venus dans nos locaux, à plusieurs<br />
reprises. Nous leur avons fourni <strong>de</strong>s<br />
informations et <strong>de</strong> la documentation. A<br />
la fin <strong>de</strong> l’année scolaire, ces élèves ont<br />
installé une exposition dans le hall du<br />
lycée, assortie d’un débat où nous<br />
avons répondu à <strong>de</strong>s questions d’élèves,<br />
<strong>de</strong> parents et <strong>de</strong> professionnels au sujet<br />
<strong>de</strong>s usages et <strong>de</strong>s usagers <strong>de</strong> « joints ».<br />
L’existence <strong>de</strong> cette action <strong>de</strong> prévention<br />
et le fait que l’association où nous<br />
travaillons y soit partie prenante ont<br />
eu <strong>de</strong>s inci<strong>de</strong>nces positives sur le <strong>de</strong>venir<br />
psychologique <strong>de</strong> Julien. L’adolescent<br />
a peu à peu « digéré » la honte<br />
intense qui, selon ses mots, l’avait<br />
« détruit » lorsque les policiers l’ont<br />
menotté en classe. En effet, « on » pouvait<br />
désormais associer le nom <strong>de</strong> son<br />
lycée et le mot « cannabis » sans penser<br />
automatiquement à l’intervention policière<br />
dont il avait, avec quelques autres,<br />
fait les frais. Julien a pu dès lors avancer<br />
dans la compréhension <strong>de</strong> sa consommation<br />
régulière <strong>de</strong> « joints ». S’il en<br />
fumait tous les jours – et <strong>de</strong>puis plus<br />
d’un an -, c’est précisément parce qu’il<br />
souffrait d’une hypersensibilité au<br />
regard (au sens large : oculaire, mais<br />
surtout verbal) que les autres portaient<br />
sur lui. Il redoutait par-<strong>de</strong>ssus tout qu’on<br />
se moque <strong>de</strong> lui, en particulier <strong>de</strong> sa silhouette<br />
chétive, <strong>de</strong> son maniement<br />
médiocre du langage et <strong>de</strong> la situation<br />
sociale mo<strong>de</strong>ste et problématique dans<br />
laquelle se trouvaient ses parents,<br />
ouvriers au chômage. L’idée qu’on puisse<br />
l’humilier – camouflée sous une réelle<br />
facilité à entrer en contact - l’angoissait<br />
en permanence. Il recherchait<br />
les effets calmants du cannabis pour<br />
« gérer » cette crainte, que les conditions<br />
<strong>de</strong> son interpellation par la police<br />
avaient décuplée ! Nous avons suivi<br />
Julien pendant près d’un an, à raison<br />
d’un entretien toutes les <strong>de</strong>ux semaines.<br />
A la fin <strong>de</strong> nos rencontres, il s’était<br />
réinscrit en Secon<strong>de</strong> dans un autre<br />
lycée, où il travaillait correctement. Il<br />
était surtout parvenu à faire face à ses<br />
difficultés psychologiques sans se ruer<br />
sur le shit, dont il faisait à présent un<br />
usage très ponctuel. Conjuguée aux<br />
sanctions judiciaires, cette forte dimi-<br />
Du traitement <strong>de</strong> la crise<br />
au long terme<br />
Les présentations lors du 19e Collège<br />
Européen <strong>de</strong> Neuropsychopharmacologie<br />
qui a été organisé du<br />
16 au 20 septembre 2006 à Paris,<br />
ont été centrées sur la qualité <strong>de</strong> vie<br />
<strong>de</strong>s patients, leur santé physique et<br />
l’observance du traitement.<br />
Plus <strong>de</strong> 70% <strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong><br />
schizophrénie sont au chômage. Ils<br />
sont significativement moins satisfaits<br />
<strong>de</strong> leur qualité <strong>de</strong> vie dans le domaine<br />
<strong>de</strong> la santé, <strong>de</strong> la situation financière,<br />
<strong>de</strong> l’emploi, <strong>de</strong>s activités quotidiennes<br />
et <strong>de</strong>s relations sociales. Dans<br />
<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s récentes, les patients sous<br />
antipsychotiques atypiques ont <strong>de</strong><br />
meilleurs revenus. Selon une autre<br />
étu<strong>de</strong>, les patients sous olanzapine<br />
ont plus souvent un emploi que ceux<br />
qui prennent <strong>de</strong> l’halopéridol.<br />
Pour Fernando Cañas, chef d’un<br />
Département <strong>de</strong> psychiatrie à Madrid,<br />
les éléments principaux <strong>de</strong> la gestion<br />
<strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> psychotique aigu comprennent<br />
: l’alliance thérapeutique<br />
(attitu<strong>de</strong> empathique, non critique,<br />
prévisible, parole rassurante, etc), l’évaluation<br />
du risque et la sécurité <strong>de</strong>s<br />
patients et du personnel. La sédation<br />
a été longtemps utilisée comme une<br />
camisole chimique pour maîtriser le<br />
patient agité. Cette approche est<br />
déconseillée dans les recommandations<br />
actuelles. Les effets secondaires,<br />
lors du traitement <strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu,<br />
peuvent altérer le fonctionnement<br />
cognitif, s’accompagner d’un vécu<br />
subjectif assez négatif et, <strong>de</strong> ce fait,<br />
nuire à l’observance du traitement.<br />
C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire<br />
<strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong>s préférences<br />
du patient et <strong>de</strong> son état somatique.<br />
Le traitement utlisé en urgence doit<br />
être rapi<strong>de</strong>ment efficace, avoir une<br />
bonne diffusion et peu d’effets secondaires.<br />
Il doit permettre un switch<br />
facile au traitement à long cours.<br />
Actuellement, il est admis qu’il vaudrait<br />
mieux calmer le patient que <strong>de</strong><br />
le sédater. Dans le cas <strong>de</strong> patients<br />
présentant <strong>de</strong>s troubles majeurs du<br />
comportement ou sujets à <strong>de</strong>s crises<br />
d’angoisses importantes, on peut associer<br />
ponctuellement une benzodiazépine.<br />
F. Cañas rappelle que l’association<br />
<strong>de</strong> l’olanzapine IM et <strong>de</strong><br />
benzodiazépine est déconseillée. Il<br />
précise que le passage <strong>de</strong> l’halopéridol<br />
vers l’olanzapine ou l’aripiprazole est<br />
simple et peut se faire 24 heures<br />
après l’administration <strong>de</strong> l’halopéridol.<br />
Andrezina et al. (Psychopharmacology,<br />
in press) ont démontré que dans le<br />
traitement <strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu l’aripiprazole<br />
9,75 mg en IM (cette forme<br />
n’a pas encore obtenu l’AMM en<br />
Europe) est aussi efficace que l’haldol<br />
6,50 mg en IM. Comme les<br />
autres antipsychotiques, l’aripiprazole<br />
est un antagoniste <strong>de</strong>s récepteurs<br />
dopaminergiques D2, mais son originalité<br />
consiste en son activité d’agoniste<br />
partiel <strong>de</strong>s récepteurs dopaminergiques.<br />
L’aripiprazole serait aussi<br />
efficace que l’olanzapine mais moins<br />
sédatif. Il a moins d’effets secondaires<br />
que l’halopéridol, à l’exception <strong>de</strong><br />
nausées et d’insomnies plus fréquentes.<br />
Le Pr. Fagiolini <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Pittsburg<br />
a rappelé que les antipsychotiques<br />
provoquent une up-regulation<br />
(une augmentation du nombre <strong>de</strong>s<br />
récepteurs dopaminergiques suite à<br />
leur blocage par les antipsychotiques).<br />
L’aripiprazole pourrait stimuler ces<br />
récepteurs, mais l’effet d’agoniste partiel<br />
paraît significativement moins puissant<br />
que le blocage <strong>de</strong>s récepteurs<br />
dopaminergiques. Lors du switch rapi<strong>de</strong><br />
d’un antipsychotique vers l’aripiprazole,<br />
il faudrait tenir compte du<br />
risque d’effet <strong>de</strong> rebond <strong>de</strong> certains<br />
antipsychotiques à effets anticholinergiques<br />
ou antihistaminergiques.<br />
Cet effet <strong>de</strong> rebond peut être interprété<br />
par le thérapeute comme une<br />
rechute et pousser ce <strong>de</strong>rnier à arrêter<br />
l’aripiprazole. Dans ce cas, un chevauchement<br />
<strong>de</strong> l’ancien traitement et<br />
<strong>de</strong> l’aripiprazole serait préférable.<br />
Le ziprazidone 10 mg per os (cette<br />
molécule n’a pas encore l’AMM en<br />
France) a montré dans le traitement<br />
<strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu, une efficacité équivalente<br />
à celle <strong>de</strong> l’halopéridol 2,5-<br />
10 mg et moins d’effets extrapyramidaux.<br />
Le ziprazidone a une gran<strong>de</strong><br />
affinité pour les récepteurs D2,<br />
5HT1A et 5HT2A.<br />
La schizophrénie est souvent associée<br />
à une comorbidité et une mortalité<br />
plus fréquentes. Les maladies<br />
cardiovasculaires sont la cause principale<br />
<strong>de</strong> la mortalité élevée chez les<br />
patients chroniques. Le Pr. Cañas met<br />
en avant comme facteurs <strong>de</strong> risque<br />
pour les troubles cardiovasculaires le<br />
tabagisme, l’alcool, la sé<strong>de</strong>ntarité, ainsi<br />
que la surcharge pondérale, les<br />
troubles métaboliques, l’allongement<br />
du QT provoqués par certains antipsychotiques.<br />
Le Pr. Thomas (Université <strong>de</strong> Lille)<br />
explique que l’efficacité du traitement<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
nution <strong>de</strong> sa consommation (et donc<br />
du coût correspondant) avait supprimé<br />
en lui toute envie <strong>de</strong> vendre du<br />
cannabis. ■<br />
Pascal Hachet<br />
Psychologue , Point Ecoute « Le Tamarin » 1bis,<br />
rue Léon Blum, 60100 Creil. Tél. 03 44 64 12 53<br />
Références<br />
(1) HACHET P., Ces ados qui fument <strong>de</strong>s<br />
joints, Paris 2000, Fleurus, 188 p.<br />
(2) HACHET P., Histoires <strong>de</strong> fumeurs <strong>de</strong><br />
joints, Paris 2005, In Press, 164 p.<br />
(3) Il s’agit d’un néologisme.<br />
(4) Ainsi, Julien a dû effectuer huit semaines<br />
<strong>de</strong> travaux d’entretien (peinture, jardinage,<br />
etc.) dans plusieurs associations locales.<br />
(5) Ces <strong>de</strong>rniers, « simples » consommateurs<br />
<strong>de</strong> cannabis, n’ont pas fait l’objet <strong>de</strong><br />
poursuites pénales mais d’orientations éducatives<br />
en alternative à une condamnation<br />
(et non en plus <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière comme<br />
dans le cas <strong>de</strong> Julien). Notre équipe a reçu<br />
plusieurs dizaines <strong>de</strong> ces jeunes, souvent<br />
accompagnés par leurs parents. Sur le plan<br />
scolaire, ils furent temporairement exclus,<br />
pendant trois jours, du lycée.<br />
se traduit par la diminution du<br />
nombre <strong>de</strong>s hospitalisations. Il résume<br />
les résultats d’étu<strong>de</strong>s récentes selon<br />
lesquelles les rechutes sous olanzapine<br />
et risperdal sont significativement<br />
moins fréquentes que celles sous halopéridol.<br />
Dans l’étu<strong>de</strong> naturalistique<br />
STAR (Schizophrenia Trial of Aripiprazole,<br />
Kerwin et al. Schizophrenia<br />
Res., submitted) les patients sous aripiprazole<br />
gar<strong>de</strong>nt leur traitement significativement<br />
plus longtemps que ceux<br />
sous olanzapine, risperdal ou quétiapine.<br />
L’aripiprazole améliore significativement<br />
leur qualité <strong>de</strong> vie (Corey-<br />
Lisle et al., 14 e Congrès <strong>de</strong> l’Association<br />
Européenne <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>, Nice, 4-8<br />
mars, 2006).<br />
Plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s patients abandonnent<br />
leur traitement. Les raisons<br />
en sont différents : effets secondaires<br />
du traitement (50%), absence <strong>de</strong> critique<br />
(30%) et absence d’efficacité<br />
(15%).<br />
L’étu<strong>de</strong> CATIE (Clinical Antipsychotic<br />
Trials of Intervention Effectiveness)<br />
est indépendante, sponsorisée par la<br />
NIMH (National Institut of Mental<br />
Health). Elle compare, dans <strong>de</strong>s conditions<br />
réelles et sur une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />
dix-huit mois, l’efficience et la tolérance<br />
<strong>de</strong> certains antipsychotiques<br />
(olanzapine, quétiapine, risperidone,<br />
ziprazidone) et <strong>de</strong> la perphénazine<br />
(neuroleptique classique <strong>de</strong> référence<br />
aux Etats-Unis) dans la schizophrénie.<br />
A 18 mois, 36% <strong>de</strong>s patients<br />
<strong>de</strong>meuraient sous olanzapine. Ce<br />
pourcentage est respectivement <strong>de</strong><br />
26 pour la rispéridone, <strong>de</strong> 25 pour<br />
le perphénazine, <strong>de</strong> 21 pour le ziprazidone<br />
et <strong>de</strong> 18 pour la quétiapine.<br />
En même temps, l’olanzapine a été<br />
associé à significativement plus <strong>de</strong><br />
prise <strong>de</strong> poids et à <strong>de</strong>s problèmes<br />
métaboliques (hyperglycémie, hypertriglycéridémie<br />
et hypercholestérolémie).<br />
L’aripiprazole n’a pas été inclus à ce<br />
sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong>, mais l’étu<strong>de</strong> STAR a<br />
observé non seulement son efficacité<br />
mais aussi une réduction rapi<strong>de</strong> et<br />
significative <strong>de</strong>s triglycéri<strong>de</strong>s et du<br />
LDL-C, une augmentation du HDL-<br />
C (facteur protecteur contre les acci<strong>de</strong>nts<br />
cardiovasculaires) et une perte<br />
<strong>de</strong> poids (<strong>de</strong> 1,3kg,). 47% <strong>de</strong>s patients<br />
l’ont préféré à leur traitement antérieur.<br />
■<br />
Vesselin Petkov<br />
Symposium Bristol-Myers Squibb/Otsuka -<br />
ECNP du 18/09/2006.
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
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J.-A. Malarewicz relie trois époques qui<br />
se répon<strong>de</strong>nt l’une à l’autre. Trois<br />
époques qui égrènent cette même logique<br />
<strong>de</strong> la possession... donc <strong>de</strong> la dépossession.<br />
C’est, selon le point <strong>de</strong> vue<br />
adopté au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’opposition entre<br />
les <strong>de</strong>ux sexes, plutôt une opposition<br />
dans l’exercice <strong>de</strong> l’emprise sur l’autre,<br />
quelle qu’elle soit. On passe ainsi, dans<br />
la sphère <strong>de</strong> l’Europe occi<strong>de</strong>ntale, <strong>de</strong><br />
la fin du XVI e siècle au XIX e siècle, avant<br />
<strong>de</strong> s’arrêter dans une actualité encore<br />
frémissante. A chacune <strong>de</strong> ces époques<br />
donc, sur la scène <strong>de</strong> la possession, la<br />
femme et un autre. Cet autre, ou plutôt<br />
ces autres, ont d’abord été Dieu et<br />
le diable. En même temps que s’installe<br />
la Renaissance, les sorcières et les<br />
mystiques, surtout <strong>de</strong>s femmes, s’imposent<br />
dans l’espace culturel européen.<br />
L’un et l’autre, le divin comme le diabolique,<br />
se rejoignent dans une même<br />
logique et dans une même ambiguïté.<br />
Quelque <strong>de</strong>ux cent cinquante ans plus<br />
tard, avec l’apparition <strong>de</strong> la psychologie,<br />
l’émergence <strong>de</strong> nouvelles ambitions<br />
classificatoires et l’usage intensif<br />
<strong>de</strong> l’hypnose, les psychiatres du XIX e<br />
siècle inventent l’hystérie et surtout...<br />
l’hystérique ; nouvelle mise en scène<br />
<strong>de</strong> cette emprise.<br />
Au XX e siècle, à partir <strong>de</strong>s années<br />
soixante-dix, une autre épidémie est<br />
apparue en Amérique du Nord, pendant<br />
près <strong>de</strong> vingt ans, celle <strong>de</strong>s personnalités<br />
multiples. Ayant observé le<br />
<strong>de</strong>venir <strong>de</strong> ce diagnostic en France,<br />
l’auteur n’a pas manqué d’être étonné<br />
<strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s résonances entre le<br />
discours <strong>de</strong>s exorcistes et celui <strong>de</strong>s psychiatres<br />
nord-américains.<br />
Trois époques donc, trois figures <strong>de</strong><br />
possession, trois images <strong>de</strong> possédées.<br />
Des résonances les parcourent tout en<br />
les différenciant. Dans leur analyse,<br />
J.-A. Malarewicz est partagé entre l’évi<strong>de</strong>nce<br />
<strong>de</strong>s rapprochement et la nécessité<br />
d’établir <strong>de</strong>s différences au-<strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> l’illusion <strong>de</strong> la répétition. C’est entre<br />
ces <strong>de</strong>ux extrêmes qu’il a tenté <strong>de</strong> mener<br />
son écriture. Il s’agit donc d’un périple<br />
centré sur une triple interrogation.<br />
La première concerne la position <strong>de</strong> la<br />
femme, qui semble constamment piégée,<br />
avec sa participation plus ou moins<br />
active, dans l’illusion <strong>de</strong> la possession<br />
<strong>de</strong> l’autre. A la fois perdante et gagnante,<br />
elle donne le sentiment <strong>de</strong> ne<br />
pouvoir échapper à un jeu où la souffrance<br />
pourrait être heuristique. Les hypothèses<br />
s’enchaînent pour tenter <strong>de</strong><br />
discerner ce qu’il en est <strong>de</strong> la victime<br />
ou <strong>de</strong> la coupable. Il n’en reste pas<br />
moins que la femme montre toute la<br />
plasticité dont elle est capable. L’appétit<br />
<strong>de</strong> croyances que partagent entre<br />
eux les hommes, avec plus ou moins<br />
<strong>de</strong> violence, pose problème. Ils en arrivent<br />
à construire le meilleur comme<br />
le pire, tout en se rendant esclaves <strong>de</strong>s<br />
théories dont ils sont les initiateurs. Enfin,<br />
la question <strong>de</strong> ce qui fon<strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité<br />
interroge n’importe quel psychothérapeute,<br />
car il y trouve les paradigmes<br />
qui structurent sa pratique. Cependant,<br />
la complexité <strong>de</strong> ces notions, parce<br />
qu’elle le confronte à sa propre réalité<br />
et aux fon<strong>de</strong>ments épistémologiques<br />
<strong>de</strong> son discours, le frappe facilement<br />
d’aveuglement lorsqu’il côtoie <strong>de</strong>s frontières<br />
au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>squelles il ne <strong>de</strong>vrait<br />
pas s’aventurer.<br />
Etre psychothérapeute<br />
Problématiques, pratiques,<br />
enjeux<br />
Coordonné par Serge Ginger,<br />
Edmond Marc, Armen Tarpinian<br />
Préface <strong>de</strong> Pierre Angel<br />
Introduction <strong>de</strong> Michel Meignant<br />
Dunod, 27 €<br />
Comme le montre Pascal-Henri Keller,<br />
le mé<strong>de</strong>cin généraliste accueille le<br />
simple tracas, tout comme « la déprime »,<br />
voire la souffrance massive. A notre<br />
« société mala<strong>de</strong> » en proie à une crise<br />
<strong>de</strong> l’autorité et du sens, donc à l’effondrement<br />
<strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s, Charles Rojzman<br />
propose une « thérapie sociale »<br />
et <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> prévention. Wïlly<br />
Szafran et Léon From, souhaitent que<br />
les personnes formées puissent répondre<br />
aux critères d’expérience, <strong>de</strong><br />
professionnalité et <strong>de</strong> travail sur euxmêmes.<br />
La formation dans le cadre universitaire<br />
ne saurait se résumer à une<br />
accumulation <strong>de</strong> cours fondés sur un<br />
savoir figé. Défendant une approche<br />
complexe, Max Pagès rappelle que le<br />
risque dogmatique, réductionniste<br />
et d’inadéquation par rapport aux attentes<br />
<strong>de</strong>s stagiaires n’épargne d’ailleurs<br />
aucun cursus, qu’il s’inscrive dans le<br />
cadre <strong>de</strong>s instituts <strong>de</strong> formation ou <strong>de</strong><br />
l’université.<br />
De nombreuses associations <strong>de</strong> psychothérapie<br />
ont développé, <strong>de</strong>puis<br />
longtemps, <strong>de</strong>s formations <strong>de</strong> qualité,<br />
auxquelles s’adressent <strong>de</strong>s personnes<br />
riches d’expériences personnelles et<br />
professionnelles qui les prédisposent<br />
à l’exercice <strong>de</strong> ce métier. Il est souhaitable,<br />
comme y invite Serge Ginger, <strong>de</strong><br />
mettre en œuvre <strong>de</strong>s partenariats entre<br />
<strong>de</strong>s formations universitaires et ces<br />
centres <strong>de</strong> formation en psychothérapie.<br />
La cause <strong>de</strong>s psychothérapeutes<br />
est défendue avec talent par les animateurs<br />
<strong>de</strong> la Fédération Française <strong>de</strong><br />
Psychothérapie et Psychanalyse, en<br />
particulier Serge Ginger et Michel Meignant.<br />
La place <strong>de</strong> la psychopatholo-<br />
Lancement <strong>de</strong> la souscription pour une réédition limitée en <strong>de</strong>ux forts<br />
volumes <strong>de</strong>s 3 tomes <strong>de</strong>s « Etu<strong>de</strong>s psychiatriques » <strong>de</strong> Henri Ey<br />
Une équipe <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> vingt spécialistes sous la ccordination <strong>de</strong> P. Belzeaux,<br />
avec la collaboration exceptionnelle <strong>de</strong> P. Noel, J. Garrabé, RM Palem, M.<br />
<strong>de</strong> Boucaud, ont réalisé la nouvelle présentation avec citations <strong>de</strong> marge et<br />
in<strong>de</strong>x inédits pour cet ouvrage majeur clinique et <strong>de</strong> psychopathologie,<br />
creuset <strong>de</strong> la psychiatrie française et au confluent <strong>de</strong> la psychiatrie mondiale.<br />
Au prix <strong>de</strong> lancement exceptionnel <strong>de</strong> 112 euros pour près <strong>de</strong> 1800p.!<br />
Exemples <strong>de</strong> quelques sous chapitres :<br />
Rêve et psychopathologie • Psychanalyse et thérapeutique • Classification<br />
naturelle ou nomenclatures statistiques • Pour une approche non catégorielle<br />
<strong>de</strong> la catatonie, <strong>de</strong>s impulsions, <strong>de</strong> l’angoisse... • Pour une validation<br />
<strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> passages entre les psychoses... • La subversion du Surréalisme<br />
et <strong>de</strong> Dada n’est pas une perversion • Kierkegaard et l’angoisse du possible<br />
• Hei<strong>de</strong>gger et le rien <strong>de</strong> l’angoisse • Exhibitionnisme, Suici<strong>de</strong>, Délire <strong>de</strong> Négation,<br />
Jalousie morbi<strong>de</strong>, Mégalomanie, etc. • Binswanger et la fuite <strong>de</strong>s<br />
idées dans la Manie. Minkowski et le temps vécu dans la Mélancolie. • Neurophysiopathologie<br />
<strong>de</strong>s émotions, J. Delay et la psychose maniaco-dépressive<br />
• Mayer-Gross et la <strong>de</strong>structuration <strong>de</strong> l’espace du corps dans les Bouffées<br />
délirantes • Dostoïevski et la psychose épileptique du cas Jean-Pierre •<br />
J.P. Sartre et la confusion <strong>de</strong>s espaces vécus • Rencontre d’une patiente <strong>de</strong><br />
Bonneval avec J. Lacan • Husserl et Hei<strong>de</strong>gger.<br />
Renseignements et inscription par internet au http://www.ey.asso.fr<br />
Par écrit au CERCLE DE RECHERCHE ET D’EDITION HENRI EY<br />
2 Rue Léon Dieudé, 66000 Perpignan - Tél.-fax. 04 68 34 34 12 soir<br />
patrice.belzeaux@wanadoo.fr<br />
gie dans l’exercice <strong>de</strong>s psychothérapies<br />
et dans la formation fait l’objet <strong>de</strong> différentes<br />
contributions, comme celle<br />
d’Edmond Marc se référant à Freud et<br />
Jaspers, ou celle <strong>de</strong> Pierre Canouï qui<br />
s’appuie sur l’œuvre <strong>de</strong> Paul Diel.<br />
Les questions du diagnostic, <strong>de</strong>s limites<br />
du DSM-IV ou <strong>de</strong> la Classification internationale<br />
<strong>de</strong>s maladies, <strong>de</strong> l’évaluation<br />
et <strong>de</strong>s stratégies thérapeutiques<br />
sont traitées (Eric Champ, Serge Ginger,<br />
Isabelle Crespelle, Lucien Tenenbaum,<br />
Nicole Attali). En analysant un cas, Alain<br />
Delourme propose plusieurs <strong>de</strong>scriptions<br />
psychopathologiques en se référant<br />
à différents points <strong>de</strong> vue théoriques.<br />
La polémique suscitée par la<br />
publication, en 2004, du rapport Inserm<br />
sur « L’évaluation <strong>de</strong>s psychothérapies<br />
» a montré la nécessité <strong>de</strong> développer<br />
<strong>de</strong>s recherches cliniques et<br />
épidémiologiques faisant appel à <strong>de</strong>s<br />
métho<strong>de</strong>s privilégiant la dimension<br />
qualitative (Edmond Marc).<br />
Les barrières entre les écoles <strong>de</strong> pensées<br />
ont eu tendance à s’abaisser, du<br />
moins sur le plan international. Il en<br />
est <strong>de</strong> même sur le plan <strong>de</strong>s pratiques.<br />
Théoriciens, universitaires, chercheurs<br />
et cliniciens ont écouté et appris les uns<br />
<strong>de</strong>s autres. La prise en compte <strong>de</strong>s données<br />
<strong>de</strong>s neurosciences est <strong>de</strong> plus en<br />
plus fréquente ainsi que la reconnaissance<br />
du bien fondé <strong>de</strong> la chimiothérapie<br />
dans certaines indications, comme<br />
le confirment Willy Szafran et Léon<br />
From. Les recherches menées sur l’efficacité<br />
<strong>de</strong>s psychothérapies mettent<br />
en évi<strong>de</strong>nce l’importance <strong>de</strong> facteurs<br />
communs indépendants d’un système<br />
théorique particulier. Ces facteurs communs,<br />
comme le montre Nicolas Duruz,<br />
incluent la qualité <strong>de</strong> l’alliance <strong>de</strong><br />
travail thérapeutique, les compétences<br />
relationnelles du thérapeute et son expérience,<br />
ou la volonté <strong>de</strong> changement<br />
du patient. Maridjo Graner montre que<br />
les différences <strong>de</strong> terminologie couvrent<br />
une communauté <strong>de</strong> contenu et<br />
<strong>de</strong> sens. Charles Gellman, témoignant<br />
<strong>de</strong> l’évolutivité <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s, Conrad<br />
Lecomte et Annette Richard, espérant<br />
l’émergence d’une psychothérapie pleinement<br />
relationnelle, proposent <strong>de</strong><br />
dépasser les mythes idéalisateurs du<br />
thérapeute expert, neutre et objectif<br />
ou, à l’inverse, celui du thérapeute empathique,<br />
comme celui décrit par Carl<br />
Rogers, pour promouvoir un thérapeute<br />
retrouvant sa subjectivité en puisant<br />
ses ressources dans l’expérience réfléchie<br />
<strong>de</strong> sa propre vulnérabilité. L’accent<br />
est également mis par Armen Tarpinian<br />
sur les retombées culturelles et<br />
sociales, voire anthropologiques, <strong>de</strong> la<br />
psychothérapie, à partir <strong>de</strong> ses concepts<br />
et <strong>de</strong>s pratiques qu’elle inspire.<br />
Freud... en liberté<br />
Yvon Brès<br />
Ellipses<br />
Ce livre n’est ni une présentation <strong>de</strong><br />
Freud, ni une interprétation, ni même<br />
un libre parcours dans son œuvre, mais<br />
une série <strong>de</strong> rencontres. Il n’y est pas<br />
question du freudisme en général, mais<br />
<strong>de</strong> Freud à propos <strong>de</strong> la jalousie, <strong>de</strong>s<br />
amours infantiles, <strong>de</strong> la solitu<strong>de</strong>, ou encore<br />
<strong>de</strong> points précis <strong>de</strong> son œuvre :<br />
son rapport à Robertson Smith, les coupures<br />
tendancieuses <strong>de</strong> l’édition <strong>de</strong><br />
1950 <strong>de</strong>s lettres à Fliess, la lecture lacanienne<br />
<strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> « Chose ».<br />
L’école, comment ça marche ?<br />
Maternelle-Elémentaire<br />
Petit gui<strong>de</strong> à l’usage <strong>de</strong>s parents<br />
Fabienne Messica<br />
Nouvelle édition actualisée<br />
La Découverte, 10 €<br />
Ce gui<strong>de</strong> donne une information sur<br />
l’école maternelle et élémentaire : inscription,<br />
règlement intérieur, frais, assurances,<br />
cycles d’apprentissage,<br />
<strong>de</strong>voirs, notes, santé, cantine, étu<strong>de</strong>,<br />
activités extrascolaires... Il se veut également<br />
une ai<strong>de</strong> quand les choses ne<br />
se passent pas aussi bien que qu’on<br />
peut le souhaiter : conflit avec un enseignant,<br />
difficultés <strong>de</strong> l’enfant, violences,<br />
racisme, grèves, etc.<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006
22<br />
LIVRES<br />
De Freud au trauma africain<br />
Les cahiers du GRAPPAF*<br />
L’Harmattan, 20 €<br />
Les sociétés humaines endurent <strong>de</strong><br />
plus en plus <strong>de</strong> chocs psychiques :<br />
horreurs ou traumas. Ces irruptions<br />
du réel dans le cours <strong>de</strong> leurs existences<br />
laissent une marque indélébile<br />
chez ceux qui les subissent. Au<br />
terrorisme aveugle, s’ajoutent <strong>de</strong>s catastrophes<br />
naturelles, industrielles, et<br />
les pandémies, dont les effets co-latéraux<br />
génèrent <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s traces<br />
psycho-sociales, souvent aggravées<br />
d’un trauma chez l’impliqué, pour <strong>de</strong><br />
longues années s’il n’est pas pris en<br />
charge <strong>de</strong> manière adaptée. En Afrique<br />
souvent, comme la langue kinyarwanda<br />
l’indique, le mot « trauma »<br />
n’existe pas. Ici il fallut l’inventer, on<br />
forgea le mot « itsembabatutsi » à partir<br />
<strong>de</strong> celui <strong>de</strong> « itembatsenba » qui<br />
voulait dire « massacre » pour signifier<br />
le génoci<strong>de</strong> <strong>de</strong>s tutsi au Rwanda.<br />
*Groupe <strong>de</strong> Recherche et d’Application <strong>de</strong>s<br />
Concepts Psychanalytiques en Afrique Francophone.<br />
Le sujet<br />
Instance grammaticale selon<br />
Freud<br />
Michèle Bompard-Porte<br />
L’Esprit du Temps, 21 €<br />
Parmi les dix-sept volumes <strong>de</strong>s œuvres<br />
complètes <strong>de</strong> Freud, plus <strong>de</strong> six mille<br />
pages publiées <strong>de</strong> 1892 à 1938, le<br />
mot « sujet », Subjekt, n’apparaît curieusement<br />
que vingt-huit fois. Etant<br />
donné l’extrême fréquence <strong>de</strong> l’utilisation<br />
<strong>de</strong> ce terme en psychologie et<br />
en philosophie, l’évitement est spectaculaire.<br />
Michèle Bompard-Porte<br />
montre que Freud délaisse la notion<br />
<strong>de</strong> « sujet », car il restreint son usage<br />
à la fonction grammaticale et opte<br />
pour le « Je», das Ich, pronom personnel<br />
substantivé, lorsqu’il veut désigner<br />
cette instance psychique pour<br />
l’essentiel inconsciente. Il s’inscrit ainsi<br />
dans le courant <strong>de</strong> pensée fondé par<br />
Aristote, repris par Nietsche, pour qui<br />
l’hétéronomie du psychisme est fondamentale,<br />
en contradiction avec l’option<br />
lacanienne <strong>de</strong>s psychanalystes<br />
actuels <strong>de</strong> langue française qui déci<strong>de</strong>nt<br />
en faveur d’un sujet divisé, inspiré<br />
<strong>de</strong> Saint Augustin et conforme à<br />
la tradition <strong>de</strong> la pensée chrétienne.<br />
La critique du sujet augustinien avait<br />
déjà été formulée par Jean-Jacques<br />
Rousseau qui objectait à l’évêque<br />
d’Hippone qu’un amour <strong>de</strong> soi modéré<br />
rendait le sujet autonome et susceptible<br />
<strong>de</strong> contrat, tout en lui évitant<br />
les <strong>de</strong>stins <strong>de</strong> la division et <strong>de</strong> la soumission.<br />
Freud se serait-il accordé<br />
avec le philosophe genevois, en substituant<br />
le « Je»au « sujet » ?<br />
La machine à exclure<br />
Les faux-semblants du retour à<br />
l’emploi<br />
Noëlle Burgi<br />
La Découverte, 20 €<br />
Noëlle Burgi, dans ce livre, à partir<br />
<strong>de</strong> témoignages recueillis lors d’une<br />
enquête dans un département d’Ile<strong>de</strong>-France,<br />
propose une analyse critique<br />
<strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> jugement mobilisés<br />
pour évaluer la situation <strong>de</strong>s<br />
allocataires du RMI. Entre ceux-ci et<br />
les intervenants <strong>de</strong>s dispositifs d’insertion,<br />
un véritable jeu <strong>de</strong> dupes s’est<br />
installé : pour le Rmiste mieux vaut<br />
prétendre croire à l’énième stage proposé<br />
; et pour l’intervenant, il est souvent<br />
plus facile <strong>de</strong> déplacer son impuissance<br />
sur le terrain <strong>de</strong>s difficultés<br />
psychologiques <strong>de</strong> l’allocataire. Un<br />
jeu pas toujours conscient, mais porteur<br />
<strong>de</strong> conséquences graves, individuellement<br />
et socialement.<br />
ANNONCES EN BREF<br />
21 et 22 octobre 2006. Paris. XXXV èmes<br />
Journées <strong>de</strong> la Cause Freudienne sur le<br />
thème : L’envers <strong>de</strong>s familles. Le lien psychanalytique<br />
dans l’expérience psychanalytique.<br />
Renseignements et inscriptions :<br />
Site : www.causefreudienne.org.<br />
<br />
6 et 7 novembre 2006. La Rochelle.<br />
18 èmes Journées Nationales <strong>de</strong>s Secteurs<br />
<strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> en Milieu Pénitentiaire<br />
et Unités pour Mala<strong>de</strong>s Difficiles,<br />
organisées par le SPMP, Centre Hospitalier<br />
Henri Laborit, Poitiers, et l’Association<br />
<strong>de</strong>s Secteurs <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> en<br />
Milieu Pénitentiaire. Inscriptions : EVE-<br />
NYS, 51 bd <strong>de</strong> Courcelles, 75008 Paris.<br />
Tél. : 01 55 200 504. Fax : 01 55 200 509.<br />
E-mail : evenys@evenys.com. Site :<br />
http://congres.evenys.com<br />
9 novembre 2006. Lillebonne. Journée<br />
<strong>de</strong> Formation du Secteur <strong>de</strong> psychiatrie<br />
générale du Centre Hospitalier <strong>de</strong> Lillebonne,<br />
organisée par l’Association<br />
« Méandres » sur le thème : Confort mo<strong>de</strong>rne,<br />
« psy » à tous les étages... Inscriptions<br />
: Association « Méandres », Hôpi-<br />
tal Pierre Janet, UCID, 47 rue <strong>de</strong> Tourneville,<br />
BP 24, 76083 Le Havre Cé<strong>de</strong>x.<br />
Tél. : 02 32 73 39 47.<br />
10 et 11 novembre 2006. Paris. Colloque<br />
International Francophone organisé<br />
par le Groupement pour l’Etu<strong>de</strong><br />
et les Applications Médicales <strong>de</strong> l’Hypnose<br />
(GEAMH) sur le thème : Hypnose<br />
et pensée magique. Jeux d’imagination,<br />
jeux <strong>de</strong> rôles et croyances. Renseignements<br />
et inscriptions : GEAMH, 23 rue<br />
<strong>de</strong> la Rochefoucauld, 75009 Paris. Tél. :<br />
01 49 70 88 52. Fax : 01 42 81 11 17.<br />
E-mail : geamh@hymnosemedicale.com.<br />
Site : www.hypnosemedicale.com<br />
17 et 18 novembre 2006. Colloque<br />
GYPSY VI sur le thème : A quoi servent<br />
les hommes ? Inscriptions : JS Congrès,<br />
39-41 rue Louis Blanc, 92038 Paris La<br />
Défense. Tél. : 01 43 34 76 71. Fax :<br />
01 47 17 68 60. E-mail : jscongres@wanadoo.fr.<br />
Site : www.jpecho.com<br />
25 novembre 2006. Paris. Prochain colloque<br />
du Réseau pour la Psychanalyse<br />
à l’Hôpital sur le thème : Les urgences en<br />
mé<strong>de</strong>cine, psychiatrie et psychanalyse. Informations:<br />
01 47 70 56 02.<br />
25 novembre 2006. Paris. Journée scien-<br />
Centre Hospitalier Saint-Anne<br />
1 rue Cabanis, 75674 Paris Cé<strong>de</strong>x 14<br />
CPOA Tél. : 01 45 65 83 70 - Fax : 01 45 65 82 48<br />
45 €*<br />
pour un an<br />
75 €*<br />
pour 2 ans<br />
Tarif<br />
étudiant et internes<br />
30 €*<br />
*supplément étranger<br />
et DOM/TOM =30 €/an<br />
Le CPOA présente<br />
Entretien et examen en urgence<br />
Annonce du diagnostic<br />
9h - 10h30 - Salle <strong>de</strong> réunions du CPOA<br />
Service du Docteur Marie-Jeanne Guedj<br />
Mardi 14 novembre 2006 : Gilles Vidon, Chef <strong>de</strong> service, Hôpital Esquirol, Schizophrénie<br />
déficitaire. Discutant : Alain Mercuel, Chef <strong>de</strong> service, Equipe santé<br />
mentale et exclusion sociale, CHSA<br />
Mardi 12 décembre 2006 : Christian Spadone, Praticien hospitalier, Hôpital<br />
Saint-Louis, Dépression et affection médicale. Discutant : Alexis Braitman,<br />
Praticien hospitalier, CPOA<br />
Mardi 9 janvier 2007 : Yves Contejean, Chef <strong>de</strong> service, Intersecteur 8, CHSA,<br />
Autisme. Discutant : Bruno Harle, Praticien hospitalier pédopsychiatre<br />
Mardi 13 février 2007 : Alexandra Dürr, Neurologue, Hôpital <strong>de</strong> la Salpêtrière,<br />
Maladie <strong>de</strong> Huntington. Discutant : Gérard Massé, Chef <strong>de</strong> service, S 15,<br />
CHSA<br />
Mardi 20 mars 2007 : Christophe André, Psychiatre SHU, CHSA, Trouble<br />
anxieux. Discutant : Marie-Jeanne Guedj, Chef <strong>de</strong> service, CPOA<br />
Mardi 3 avril 2007 : Christine Foulon, CMME, FHA, Trouble du comportement<br />
alimentaire. Discutant : Pierre Lana, Praticien hospitalier, CPOA<br />
Mardi 15 mai 2007 : Christine Mirabel-Sarron, Praticien hospitalier, CMME,<br />
CHSA, Trouble obsessionnel compulsif. Discutant : Annie Viala, Praticien hospitalier,<br />
S 13, CHSA<br />
Mardi 12 juin 2007 : François Petitjean, Chef <strong>de</strong> service, S 7, CHSA, Dépression<br />
récurrente. Discutant : Eric Gallois, Praticien hospitalier, CPOA<br />
Nom :<br />
Prénom :<br />
Adresse :<br />
tifique organisée par l’AREFFS sur le<br />
thème : Corps et psychanalyse. Quand le<br />
psychanalyste sort <strong>de</strong> son fauteuil... Renseignements<br />
et inscriptions : AREFFS,<br />
11 square <strong>de</strong> Clignacourt, 75018 Paris.<br />
Tél. : 01 42 64 90 17.<br />
25 et 26 novembre 2006. Paris. Prochaines<br />
journées Gisela Pankow sur le<br />
thème : Espace, temps, psychoses. Renseignements<br />
: SPF, 23 rue Campagne-<br />
Première, 75014 Paris.Tél. : 01 43 22 12 13.<br />
AIAGP, secrétariat c/o Dr. Ch. Chaput,<br />
24 bis avenue du Prési<strong>de</strong>nt Wilson,<br />
75116 Paris. Tél. : 01 47 55 61 62.<br />
30 novembre au 2 décembre 2006.<br />
Nantes. Colloque du GRAPE sur le thème :<br />
Mélodrame et melo-dit <strong>de</strong> la séparation.<br />
De l’enfant objet <strong>de</strong>s dysfonctionnements<br />
<strong>de</strong> sa famille à l’enfant objet <strong>de</strong>s idéologies<br />
institutionnelles. Inscriptions : Tél. :<br />
01 48 78 30 88. Fax : 01 40 16 95 92.<br />
E-mail : enfance@grape@wanadoo.fr<br />
1er décembre 2006. Paris. Colloque<br />
Enfances & Psy sur le thème : Les marques<br />
du corps. Renseignements et inscriptions<br />
: E-mail : colloques@enfancesetpsy.net.<br />
08 71 57 99 94 (boîte vocale).<br />
1er décembre 2006. Paris. Colloque organisé<br />
par la Fondation Hôpitaux <strong>de</strong>-<br />
Paris - Hôpitaux <strong>de</strong> France sur le thème :<br />
Les besoins <strong>de</strong> soins <strong>de</strong>s adolescents en<br />
souffrance, quelles réponses à l’hôpital ?<br />
Pour s’inscrire en ligne au colloque ou<br />
en savoir plus sur la Fondation : www.fondationhopitaux.fr<br />
1er décembre 2006. Bor<strong>de</strong>aux. 12 ème<br />
Colloque <strong>de</strong> l’Association ASAIS sur le<br />
thème : Social et <strong>Psychiatrie</strong> face à l’exclusion<br />
: les chemins <strong>de</strong> l’innovation sontils<br />
encore praticables ? Inscriptions : Association<br />
ASAIS, 6 rue Ausone, 33000<br />
Bor<strong>de</strong>aux. Tél. : 05 56 52 60 59. E-mail :<br />
asais.icare@free.fr. Site : www.asaisicare.org<br />
7 décembre 2006. 1 ère Journée Nationale<br />
sur le thème : Douleur et Santé Mentale.<br />
Etat <strong>de</strong>s lieux. Vulnérabilité et handicap<br />
psychique. Renseignements et<br />
inscriptions : Evelyne Rubio, Tél. :<br />
05 57 97 19 19. Fax : 05 57 97 19 15.<br />
E-mail : evelyne.rubio@comm-sante.com<br />
7 et 8 décembre 2006. Arcachon. XXIII ème<br />
Congrès <strong>de</strong> la Société Française <strong>de</strong> Psycho-Oncologie<br />
sur le thème : Le proche,<br />
nouvel acteur du soin : rôles assignés, rôles<br />
assumés. Inscriptions : Société française<br />
<strong>de</strong> psycho-oncologie, Association psychologie<br />
et cancers SFPO-APC, 14 rue<br />
Corvisart, 75013 Paris. Tél. : 01 45 87 86 31.<br />
E-mail : psycho-onco@wanadoo.fr<br />
9 décembre 2006. Boulogne-Billancourt.<br />
Colloque organisé par le Collège<br />
International <strong>de</strong> l’Adolescence et le Laboratoire<br />
<strong>de</strong> Psychologie Clinique et <strong>de</strong><br />
Psychopathologie (paris 5) sur le thème :<br />
Adolescence et éducation. Renseignements<br />
et inscriptions : Tél. : 01 55 20 58 22<br />
(mardi, mercredi, jeudi après-midi). Email<br />
: colloquecila@gmail.com<br />
14 et 15 décembre 2006. Paris. Colloque<br />
organisé par la Ligue Française<br />
pour la Santé Mentale sur le thème : La<br />
Je m’abonne pour : 1 an 2 ans<br />
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
famille dans tous ses ... états. L’amour au<br />
risque du conflit. Inscriptions : Tél. :<br />
01 42 66 20 70. Fax : 01 42 66 44 89.<br />
E-mail : ifsm@worldonline.fr<br />
27 janvier 2007. Paris. Journée scientifique<br />
organisée par Catherine Chabert,<br />
Dominique Cupa, René Kaës, René Roussillon<br />
sur le thème : Didier Anzieu. Le Moipeau<br />
et la psychanalyse <strong>de</strong>s limites. Renseignements<br />
: Estelle Georges-Chassot,<br />
Carnet Psy, 8 avenue JB Clément, 92100<br />
Boulogne. Tél. : 01 46 04 74 35. Fax :<br />
01 46 04 74 00. E-mail : estelle@carnetpsy.com.<br />
Site : www.carnetpsy.com<br />
9 mars 2007. Paris. Colloque organisé<br />
par le Collège International <strong>de</strong> l’Adolescence<br />
et le Laboratoire <strong>de</strong> psychologie<br />
clinique et <strong>de</strong> psychopathologie<br />
(Paris 5) sur le thème : Alcool et adolescence.<br />
Renseignements et inscriptions :<br />
Valérie Discour, Boîte A 5, 8 rue <strong>de</strong>s<br />
Portes Blanches, 75018 Paris. Tél. :<br />
01 42 23 44 12. E-mail : v.discour@wanadoo.fr<br />
19 et 20 mars 2007. Marseille. Colloque<br />
organisé par l’Association ANTHEA sur<br />
le thème : Quand la sexualité <strong>de</strong>vient délit.<br />
Inscriptions : Association ANTHEA,<br />
7 place <strong>de</strong>s Herbes, BP 219, 83006 Draguignan<br />
Ce<strong>de</strong>x. Tél. : 04 94 68 98 48.<br />
Fax : 04 94 68 28 74. E-mail : anthea@club-internet.fr<br />
31 mars 2007. Boulogne-Billancourt.<br />
Colloque organisé par l’Association « Clinique<br />
<strong>de</strong>s Apprentissages » sur le thème :<br />
Regard clinique sur les troubles dits « instrumentaux<br />
». Renseignemets : Tél. :<br />
01 55 20 58 22 (l’après-midi). Fax :<br />
01 55 20 59 84. E-mail : clinap@univparis5.fr<br />
Bulletin d’abonnement<br />
Le <strong>Journal</strong> <strong>de</strong> <strong>Nervure</strong> + La Revue<br />
CHÈQUE À L’ORDRE DE MAXMED à envoyer avec ce bulletin,<br />
54, boulevard <strong>de</strong> la Tour Maubourg, 75007 Paris<br />
Téléphone : 01 45 50 23 08<br />
Je souhaite recevoir une facture acquittée justifiant <strong>de</strong> mon abonnement.<br />
Le thérapeute en tant<br />
qu’artiste<br />
Joseph C. Zinker<br />
L’Harmattan, 21 €<br />
Dans ce recueil d’articles, Joseph<br />
Zinker s’adresse tout particulièrement<br />
aux Gestalt-thérapeutes qui<br />
y trouveront exposée, dans le<br />
contenu comme dans la forme,<br />
l’une <strong>de</strong>s racines essentielles <strong>de</strong><br />
leur métho<strong>de</strong> et leur philosophie.<br />
La première partie, qui est autobiographique,<br />
révèle les liens entre<br />
l’histoire <strong>de</strong> vie d’un homme et son<br />
travail en tant que thérapeute. Un<br />
dialogue imaginaire avec F. Perls<br />
conduit à la <strong>de</strong>uxième partie qui a<br />
pour sujet la créativité et la posture<br />
du thérapeute. Y sont abordés<br />
<strong>de</strong>s thèmes tels que l’intégrité<br />
et le changement, le saut créatif,<br />
le contexte et la métaphore, la pensée<br />
synthétique, l’intervention processuelle<br />
et sa complexité, la présence<br />
en tant que force évocatrice,<br />
la transformation <strong>de</strong>s systèmes<br />
énergétiques, etc. La troisième partie<br />
traite essentiellement du travail<br />
avec les couples considérés comme<br />
systèmes.<br />
✂
N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />
LIVRES ET REVUES<br />
Bébé, où crèches-tu ?<br />
Dossier coordonné par Julianna<br />
Vamos et Miriam Rasse<br />
Spirale juin 2006 n°38<br />
Erès, 12 €<br />
Ce numéro <strong>de</strong> Spirale propose un carrefour<br />
<strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue, d’approches et<br />
<strong>de</strong> témoignages.<br />
Si les crèches ont été créées pour répondre<br />
à un besoin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> pour les<br />
parents pendant leur temps d’exercice<br />
professionnel, elles ont été aussi un soutien<br />
pour les femmes dans leur démarche<br />
d’émancipation.<br />
Outre cette offre d’un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>,<br />
encore loin d’être accessible à tous, une<br />
crèche « suffisamment bonne » peut être<br />
un lieu exceptionnel d’écoute, <strong>de</strong> partage<br />
et <strong>de</strong> soutien dans la fonction parentale<br />
: dans quel autre lieu un parent<br />
peut-il parler <strong>de</strong> son enfant, et le regar<strong>de</strong>r<br />
avec <strong>de</strong>s professionnelles <strong>de</strong> la<br />
petite enfance qui le connaissent bien<br />
et qui éprouvent le besoin, l’envie et le<br />
plaisir <strong>de</strong> partager avec eux ? Partage<br />
et soutien <strong>de</strong>viennent possibles si <strong>de</strong>s<br />
temps quotidiens d’échange peuvent<br />
se vivre, si « le lien parent-enfant est respecté<br />
» (Maryvonne Le Gall), si les choix<br />
<strong>de</strong>s parents peuvent être pris en compte<br />
et soutenus (témoignage <strong>de</strong> cette mère<br />
qui continuera à allaiter son bébé accueilli<br />
à la crèche), et si peuvent être<br />
écoutées les inquiétu<strong>de</strong>s et les appréhensions<br />
que tout parent éprouve. Dans<br />
certains lieux, <strong>de</strong>s initiatives comme «le<br />
massage bébés » (Evelyne Vergnangeal)<br />
peuvent ai<strong>de</strong>r à la consolidation <strong>de</strong>s<br />
liens avant <strong>de</strong> se séparer, et à la différenciation<br />
<strong>de</strong>s places entre parents et<br />
professionnels. Ce numéro permet d’abor<strong>de</strong>r<br />
l’univers <strong>de</strong> la crèche (Hélène Dutertre,<br />
Denis Mellier) pour s’interroger<br />
sur « ce que le bébé peut attendre <strong>de</strong> sa<br />
journée à la crèche » (Julianna Vamos)<br />
et ce qu’une équipe <strong>de</strong> professionnels<br />
doit penser, réfléchir, mettre en place<br />
pour y répondre. Cet accueil doit être<br />
particulièrement réfléchi et concerté<br />
pour s’ajuster au rythme et aux besoins<br />
encore plus particuliers d’un enfant atteint<br />
<strong>de</strong> handicap comme en témoigne<br />
l’équipe <strong>de</strong>s Cèdres (Jocelyne Roux-<br />
Levrat).<br />
Accueillir ces tout jeunes enfants et leurs<br />
parents suscite <strong>de</strong>s questionnements et<br />
met en jeu <strong>de</strong>s processus plus ou moins<br />
conscients, projectifs, d’i<strong>de</strong>ntification,<br />
qu’il est sûrement nécessaire <strong>de</strong> mieux<br />
connaître et reconnaître pour cheminer<br />
vers la construction d’une relation à<br />
23<br />
trois, parent-enfant-professionnel (Maryvonne<br />
Le Gall). Pour certains enfants,<br />
pour certains parents, la crèche peut<br />
alors <strong>de</strong>venir un véritable point d’appui,<br />
une ai<strong>de</strong>, un lieu possible <strong>de</strong> prévention<br />
précoce (Nicole Simon et<br />
Miriam Rasse). Avec un certain nombre<br />
<strong>de</strong> conditions à garantir et affiner sans<br />
cesse, la crèche peut alors <strong>de</strong>venir un<br />
lieu <strong>de</strong> socialisation, faite d’empathie,<br />
<strong>de</strong> développement <strong>de</strong> soi, <strong>de</strong> sensibilité<br />
(Chantal Grosléziat).<br />
La famille<br />
Sous la direction <strong>de</strong> Jacques<br />
Bouineau<br />
L’Harmattan, 26 €<br />
Ce volume inaugure une nouvelle collection<br />
<strong>de</strong>stinée à remplacer la revue<br />
Méditerranée publiée <strong>de</strong> 1994 à 2004.<br />
La publication <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> cette nouvelle<br />
collection est assurée par le Centre<br />
d’Etu<strong>de</strong>s Internationales sur le Romanité<br />
(CEIR - Université <strong>de</strong> La Rochelle).<br />
Ce premier numéro est consacré à la<br />
famille à partir <strong>de</strong> cinq exemples tirés<br />
<strong>de</strong> cinq civilisations différentes : L’Egypte<br />
ancienne (à travers l’institution du sendjet),<br />
la Mésopotamie (présentation générale),<br />
l’Empire byzantin (réflexion sur<br />
la parenté), la famille en droit musulman<br />
(présentation générale) et une mise<br />
en parallèle <strong>de</strong> la famille romaine avec<br />
la famille chrétienne.<br />
A ces étu<strong>de</strong>s qui forment un ensemble<br />
sur la famille envisagée sous l’angle <strong>de</strong><br />
la romanité méditerranéenne telle que<br />
l’étudie le CEIR, s’ajoute une contribution<br />
sur l’influence <strong>de</strong>s modèles antiques<br />
sur la définition du co<strong>de</strong>, <strong>de</strong> 1680 à<br />
1789.<br />
Directeur <strong>de</strong> la rédaction :<br />
Gérard Massé<br />
Rédacteur en chef : François Caroli<br />
Comité <strong>de</strong> rédaction : Centre Hospitalier<br />
Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75014 Paris.<br />
Tél. 01 45 65 83 09.<br />
Botbol M., Carrière Ph., Dalle B., Goutal M.,<br />
Guedj M.-J., Jonas C., Lascar Ph., Martin A.,<br />
Paradas Ch., Sarfati Y., Spadone C.,<br />
Tribolet S., Weill M.<br />
Comité scientifique : Bailly-Salin P.<br />
(Paris), Besançon G. (Nantes), Bourgeois<br />
M. (Bor<strong>de</strong>aux), Buisson G. (Paris), Caillard<br />
V. (Caen), Chabannes J.-P. (Grenoble),<br />
Chaigneau H. (Paris), Christoforov B.<br />
(Paris), Colonna L. (Rouen), Cornillot P.<br />
(Paris), Dufour H. (Genève), Dugas M.<br />
(Paris), Féline A. (Paris), Ginestet D.<br />
(Paris), Guelfi J.-D. (Paris), Guyotat J.<br />
(Lyon), Hochmann J. (Lyon), Koupernik<br />
C. (Paris), Lambert P. (Chambéry), Loo H.<br />
(Paris), Marcelli D. (Poitiers), Marie-<br />
Cardine M. (Lyon), Mises R. (Paris),<br />
Pequignot H. (Paris), Planta<strong>de</strong> A. (Paris),<br />
Ropert R. (Paris), Samuel-Lajeunesse B.<br />
(Paris), Scotto J.-C. (Marseille), Sechter D.<br />
(Lille), Singer L. (Strasbourg), Viallard A.<br />
(Paris), Zarifian E. (Caen).<br />
Comité francophone : Anseau M.<br />
(Belgique), Aubut J. (Canada), Bakiri M.-A.<br />
(Algérie), Cassan Ph. (Canada), Douki S.<br />
(Tunis), Held T. (Allemagne), Lalon<strong>de</strong> P.<br />
(Canada), Moussaoui D. (Maroc), Romila A.<br />
(Roumanie), Simon Y.-F. (Belgique), Stip E.<br />
(Canada), Touari M. (Algérie).<br />
Publicité<br />
médical<br />
SUPPORTER<br />
promotion<br />
Renata Laska - Susie Caron,<br />
54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris.<br />
Tél. 01 45 50 23 08.<br />
Télécopie : 01 45 55 60 80<br />
E-mail : info@nervure-psy.com<br />
Edité par Maxmed<br />
S.A. au capital <strong>de</strong> 40 000 €<br />
54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris<br />
Maquette : Maëval. Imprimerie Fabrègue<br />
Directeur <strong>de</strong> la Publication :<br />
G. Massé<br />
www.nervure-psy.com