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Octobre - Nervure Journal de Psychiatrie

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www.nervure-psy.com<br />

■ EDITORIAL G. Massé<br />

Les réseaux <strong>de</strong><br />

santé en santé<br />

mentale<br />

La première Journée Nationale <strong>de</strong>s<br />

Réseaux <strong>de</strong> Santé en Santé Mentale<br />

s’est tenue à Sainte-Anne le 10<br />

octobre <strong>de</strong>rnier. Son organisation<br />

doit beaucoup à Saïd Acef (PREPSY)<br />

et Mireille Arnaud (REHPI) qui ont<br />

comptabilisé une trentaine <strong>de</strong> réseaux en<br />

santé mentale, financés dans le cadre <strong>de</strong>s Dotations<br />

Régionales <strong>de</strong> Développement <strong>de</strong>s<br />

Réseaux, à partir d’un recensement réalisé auprès<br />

<strong>de</strong> l’assurance maladie et <strong>de</strong>s observatoires<br />

régionaux <strong>de</strong> santé.<br />

Les réseaux peuvent être définis comme <strong>de</strong>s<br />

organisations <strong>de</strong> soins, au sein <strong>de</strong>squelles plusieurs<br />

équipes ou professionnels <strong>de</strong> santé coopèrent<br />

à une meilleure prise en charge <strong>de</strong><br />

patients présentant un même problème d’ordre<br />

médical ou médico-social.<br />

Alors que dès le début <strong>de</strong>s années 80, l’épidémie<br />

<strong>de</strong> sida a joué un rôle inducteur, <strong>de</strong><br />

1985 à 1995, plusieurs facteurs ont pesé avec :<br />

- <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s qui s’assument en tant que tels<br />

revendiquant une prise en charge globale et<br />

concertée ;<br />

- la nécessité que les mé<strong>de</strong>cins communiquent<br />

mieux entre eux, se forment continuellement<br />

et coordonnent leurs efforts avec d’autres professions<br />

;<br />

- la recherche <strong>de</strong> financements nouveaux.<br />

Peu à peu on a assisté à <strong>de</strong>s ouvertures successives<br />

:<br />

- la loi <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité sociale<br />

pour 1999 a inscrit <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> rémunération<br />

autres que le paiement à l’acte et a<br />

concerné la prévention, l’éducation à la santé,<br />

la formation, l’évaluation, les étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> santé<br />

publique et <strong>de</strong> veille sanitaire ;<br />

- début 2000, les URCAM et les ARH ont<br />

commencé à gérer les Fonds d’amélioration<br />

<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s soins <strong>de</strong> ville en attribuant<br />

les subventions aux réseaux dont le projet est<br />

agréé ;<br />

(suite page 5 )<br />

Michel Sanchez-Car<strong>de</strong>nas : On raconte que la cathédrale<br />

San Pauli, <strong>de</strong> Hambourg put être reconstruite<br />

après l’incendie qui la ravagea grâce à ses plans, qui<br />

avaient été murés dans une <strong>de</strong> ses pierres. On a l’impression<br />

que, dans votre ouvrage sur la psychothérapie<br />

institutionnelle, vous faites un état <strong>de</strong>s lieux, qui est un<br />

inventaire, d’une psychiatrie qui risque <strong>de</strong> disparaître. Il<br />

y a du cri d’alarme dans votre livre.<br />

Pierre Delion : C’est vrai que l’actualité <strong>de</strong> la psychiatrie<br />

me laisse un goût amer dans la mesure où<br />

nous étions assez près d’arriver à une politique digne<br />

La connaissance clinique et psychopathologique<br />

<strong>de</strong>s séquelles psychiques observées chez les victimes<br />

<strong>de</strong> prises d’otages est d’une importance majeure<br />

pour l’adaptation <strong>de</strong> stratégies thérapeutiques efficaces<br />

qui doivent être précoces. Parmi les nombreuses<br />

techniques préconisées, citons les techniques <strong>de</strong><br />

débriefing, les techniques abréactives <strong>de</strong> groupe, les<br />

techniques cognitivo-comportementales. Les stratégies<br />

thérapeutiques visent la verbalisation, l’expression<br />

<strong>de</strong>s émotions, le réinvestissement <strong>de</strong> la position<br />

<strong>de</strong> sujet (après la chosification, la déshumanisation) par<br />

la mise en mots <strong>de</strong> l’indicible douleur. En d’autres<br />

termes les thérapeutiques tentent le passage <strong>de</strong> la<br />

position d’objet-otage à la position <strong>de</strong> sujet ex-otage.<br />

Cet article ne traite pas <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> prise en<br />

charge thérapeutique <strong>de</strong>s victimes <strong>de</strong> séquestration ;<br />

il focalise l’attention sur la sémiologie <strong>de</strong>s séquelles <strong>de</strong><br />

situations <strong>de</strong> séquestration. En effet, la prise en charge<br />

<strong>de</strong>s otages nécessite une reconnaissance <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s<br />

d’expression <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> séquestration. Ces<br />

manifestations peuvent prendre divers masques : le<br />

masque <strong>de</strong> l’empathie paradoxale du syndrome <strong>de</strong><br />

L<br />

’existence littéraire, l’agencement <strong>de</strong>s mots et <strong>de</strong>s<br />

lettres, le rythme et la sonorité à l’intérieur d’un<br />

poème pour un écrivain tel que Pasolini vaut comme<br />

désir d’existence du sujet, voilà le pari que nous<br />

entendons soutenir. Une <strong>de</strong>s conséquences en est<br />

que la forme du poème transmet une position <strong>de</strong><br />

l’être qui crée le poème.<br />

Une <strong>de</strong>s possibilités pour définir le fonctionnement<br />

subjectif d’un être humain concerne la mise en fonction<br />

d’un nouage, le nouage d’un signifiant et d’un<br />

corps via le scopique, en tant que ces trois éléments<br />

sont orientés par le réel d’une jouissance <strong>de</strong> l’être (1).<br />

Une autre façon d’énoncer cette thèse serait : comment<br />

faire tenir un corps pour un sujet dans son<br />

accroche à un signifiant ? Le scopique, en tant qu’il est<br />

pulsion, source <strong>de</strong> plus-<strong>de</strong>-jouir, fait lien dans cette<br />

accroche. Dès lors, un signifiant, issu d’un dire, fait<br />

écho ou non dans le corps et ce signifiant se raccroche<br />

à ce corps par l’intermédiaire <strong>de</strong> la forme scopique<br />

du corps et du nouage <strong>de</strong> cette forme au corps<br />

Entretien avec Pierre Delion<br />

■ FMC<br />

Les conséquences <strong>de</strong>s<br />

situations <strong>de</strong> séquestration :<br />

sémiologie et typologie<br />

Danses pasoliniennes<br />

Pierre Delion est professeur <strong>de</strong> pédopsychiatrie et chef <strong>de</strong> service à Lille, après avoir exercé la psychiatrie<br />

sectorielle pendant <strong>de</strong> nombreuses années en Anjou et au Mans. Il a livré <strong>de</strong> nombreux textes à ce sujet sur<br />

les trois décennies qui viennent <strong>de</strong> passer. Psychanalyste passionné par l'énigme <strong>de</strong> l'autisme et <strong>de</strong> la schizophrénie,<br />

mais aussi par tous les problèmes « socio-psycho-politico-éducativo...» et donc révolté par les simplifications<br />

abusives <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong> tous ordres il reprend l’ensemble <strong>de</strong> sa pensée sur l’institution psychiatrique<br />

dans un volume récent paru chez Dunod, Soigner la personne psychotique. Concepts, pratiques et<br />

perspectives <strong>de</strong> la psychothérapie institutionnelle. Il faut aussi signaler son récent : Rencontre avec Salomon Resnik,<br />

paru il y a peu chez Erès.<br />

<strong>de</strong> ce nom en matière <strong>de</strong> prise en charge <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s<br />

mentaux, et ce en gran<strong>de</strong> partie grâce à la doctrine <strong>de</strong><br />

la psychiatrie <strong>de</strong> secteur à laquelle je suis très attaché,<br />

quand tout à coup (un coup qui a duré une dizaine<br />

d’années !), un certain nombre <strong>de</strong> détracteurs ont<br />

« inventé » le concept <strong>de</strong>s intersectorialités, me donnant<br />

l’impression d’une série <strong>de</strong> faux nez <strong>de</strong> la sectorisation,<br />

et laissant accroire aux déci<strong>de</strong>urs payeurs<br />

que la psychiatrie pouvait être coupée en tranches<br />

<strong>de</strong> spécialités à l’instar <strong>de</strong>s MCO (Mé<strong>de</strong>cine, Chirurgie,<br />

Obstétrique) pour y accomplir aussi l’« œuvre<br />

(suite page 10 )<br />

S. Tribolet<br />

Stockholm, les masques psychosomatiques, les nombreux<br />

masques psychiques <strong>de</strong> la névrose traumatique<br />

etc.<br />

Nouvelle définition et nouveau<br />

statut <strong>de</strong> l’otage<br />

Les victimes <strong>de</strong> prise d’otage peuvent présenter <strong>de</strong>s<br />

manifestations psychiques ou physiques (avec le<br />

déclenchement <strong>de</strong> pathologies psychosomatiques),<br />

pouvant bouleverser durablement voire définitivement<br />

leur mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie dans ses aspects affectifs, comportementaux<br />

et spirituels. Le mot « otage » a connu<br />

plusieurs définitions <strong>de</strong>puis le XI ème siècle jusqu’au<br />

sens actuel complètement différent. L’ancien français<br />

hostage, dérivé du latin hostis a donné le mot<br />

« hôte » mais aussi le mot « hostile » (le mot prend la<br />

valeur d’« étranger » et d’« ennemi ») et les mots « hôpital<br />

» et « hôtel » (à partir du latin hospes « celui qui<br />

reçoit l’autre » formé sur hostis). Le mot hostage ou<br />

ostage désignait « l’hôte que l’on gar<strong>de</strong> » ; l’expression<br />

(suite page 5 )<br />

■ PSYCHANALYSE<br />

H. Hubert, C. Happiette<br />

réel. Le nouage du corps à cette forme se réalise par<br />

l’habit, intermédiaire entre la forme et la peau du<br />

sujet. Il s’agit d’un nouage <strong>de</strong> jouissance entre ces<br />

trois registres, signifiant-scopique-corps.<br />

Nous proposons donc <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce les<br />

nouages et dénouages entre le signifiant, le scopique<br />

et le corps, à l’œuvre dans la poésie <strong>de</strong> Pasolini à<br />

<strong>de</strong>ux moments clés <strong>de</strong> sa vie.<br />

En 1974, Pasolini entame la réécriture rageuse <strong>de</strong><br />

La meilleure jeunesse qui témoignait <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />

1941-1953, et nomme cette réécriture Secon<strong>de</strong> forme<br />

<strong>de</strong> La meilleure jeunesse. L’écriture et la réécriture se<br />

font en frioulan. Le frioulan était la langue <strong>de</strong> la province<br />

natale <strong>de</strong> la mère <strong>de</strong> Pasolini, Susanna Colussi.<br />

« Le Frioul (au nord-est <strong>de</strong> l’Italie, à la frontière <strong>de</strong> l’ex-<br />

Yougoslavie, au nord <strong>de</strong> Venise), dont elle était originaire,<br />

<strong>de</strong>vint alors pour Pasolini la terre première, le paysage<br />

primitif, le décor essentiel d’une nature perdue. Et la<br />

langue, la langue perdue <strong>de</strong> la réalité » (2). La pério<strong>de</strong><br />

(suite page 7 )<br />

Dans le prochain<br />

OCTOBRE 2006 1<br />

ISSN 0988-4068<br />

n°7 - Tome XIX - 10/2006<br />

Tirage : 10 000 exemplaires<br />

Directeur <strong>de</strong> la Publication et <strong>de</strong> la<br />

Rédaction : G. Massé<br />

Rédacteur en chef : F. Caroli<br />

Rédaction : Hôpital Sainte-Anne,<br />

1 rue Cabanis - 75014 Paris<br />

Tél. 01 45 65 83 09 - Fax 01 45 65 87 40<br />

Abonnements :<br />

54 bd La Tour Maubourg - 75007 Paris<br />

Tél. 01 45 50 23 08 - Fax 01 45 55 60 80<br />

Prix au numéro : 9,15 €<br />

E-mail : info@nervure-psy.com<br />

AU SOMMAIRE<br />

EDITORIAL<br />

Les réseaux <strong>de</strong> santé<br />

en santé mentale p.1<br />

FMC<br />

Les conséquences <strong>de</strong>s<br />

situations <strong>de</strong> séquestration :<br />

sémiologie et typologie p.5<br />

PSYCHANALYSE<br />

Danses pasoliniennes p.7<br />

ENTRETIEN AVEC<br />

Pierre Delion p.10<br />

HUMEUR<br />

La double-peine en<br />

psychiatrie p.11<br />

CLINIQUE<br />

La question <strong>de</strong> la<br />

reconnaissance <strong>de</strong> son propre<br />

visage en schizophrénie p.12<br />

Le vol et la kleptomanie p.13<br />

ORGANISATION DES SOINS<br />

Le traitement <strong>de</strong>s données<br />

d’activité médicale p.14<br />

Enquête auprès <strong>de</strong>s<br />

aidants familiaux p.14<br />

TOXICOMANIE<br />

Les risques méconnus<br />

liés à la consommation<br />

<strong>de</strong> cannabis p.16<br />

THÉRAPEUTIQUE<br />

Du traitement <strong>de</strong> la crise<br />

au long terme p.18<br />

ANNONCES<br />

PROFESSIONNELLES p.19<br />

ANNONCES EN BREF p.22<br />

Julien Daniel Guelfi, Agnès Metton,<br />

Antoine Pélissolo, Gérard Massé,<br />

Christian Spadone et François Caroli<br />

échangent au cours d’une table ron<strong>de</strong><br />

sur le concept <strong>de</strong><br />

SCHIZOPHRÉNIE DÉSORGANISÉE


2<br />

LIVRES<br />

La psychologie et la<br />

phrénologie comparées<br />

Adolphe Garnier<br />

Avec une introduction <strong>de</strong> Serge<br />

Nicolas<br />

L’Harmattan, 35 €<br />

Parmi les philosophes universitaires<br />

français <strong>de</strong> la première moitié du XIX e<br />

siècle, Adolphe Garnier a été un <strong>de</strong>s<br />

premiers à réagir contre l’influence <strong>de</strong><br />

la phrénologie. Frappé du dédain <strong>de</strong>s<br />

phrénologues envers les psychologues,<br />

il pensait que seule la psychologie peut<br />

déterminer les qualités primitives et fondamentales<br />

<strong>de</strong> l’âme. Avant d’assigner<br />

le siège d’une faculté, il faut avoir constaté<br />

son existence par l’observation psychologique.<br />

La psychologie et la phrénologie<br />

comparées (1839) est dédié à<br />

son maître Théodore Jouffroy. Au début<br />

<strong>de</strong> l’ouvrage Garnier rappelle que<br />

la phrénologie se compose <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux parties<br />

bien distinctes : elle recherche, au<br />

moyen <strong>de</strong> l’observation, les facultés<br />

constitutives <strong>de</strong> l’espèce humaine ; elle<br />

essaie, par l’observation physique, <strong>de</strong><br />

rapporter chaque faculté à une partie<br />

du cerveau qui en <strong>de</strong>vient le siège et<br />

l’organe. Gall, qui voulait réunir ces<br />

<strong>de</strong>ux sciences, avait donné à cet ensemble<br />

le nom <strong>de</strong> physiologie du cerveau.<br />

Pour Garnier, Gall a échoué dans<br />

sa tentative car il n’a pas développé sa<br />

psychologie sur <strong>de</strong> bonnes bases. C’est<br />

dans ce contexte qu’il donne une nouvelle<br />

division <strong>de</strong>s facultés <strong>de</strong> l’âme subdivisées<br />

en facultés intellectuelles ; facultés<br />

affectives ; faculté motrice ; faculté<br />

<strong>de</strong> vouloir. Cette classification sera ultérieurement<br />

développée dans l’ouvrage<br />

au titre évocateur : Traité <strong>de</strong>s facultés<br />

<strong>de</strong> l’âme (1852) qui <strong>de</strong>viendra le livre<br />

<strong>de</strong> référence <strong>de</strong> la psychologie spiritualiste<br />

française du XIX e siècle.<br />

Gui<strong>de</strong> Clinique <strong>de</strong> thérapie<br />

comportementale et cognitive<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Ovi<strong>de</strong> Fontaine<br />

et <strong>de</strong> Philippe Fontaine<br />

Editions Retz<br />

Cet ouvrage propose un bilan actualisé.<br />

Dans sa première partie, il effectue un<br />

tour d’horizon historique et prospectif<br />

<strong>de</strong>s savoirs et <strong>de</strong>s savoir-faire développés<br />

avec une mise en perspective<br />

sous <strong>de</strong>s angles inédits. La secon<strong>de</strong> partie<br />

présente, pour chacun <strong>de</strong>s troubles<br />

les plus fréquemment rencontrés, une<br />

revue <strong>de</strong>s connaissances puis une psychothérapie<br />

« en action » effectuée par<br />

<strong>de</strong>s spécialistes francophones (Belgique,<br />

France, Québec, Suisse). Chaque auteur,<br />

dans son chapitre, après une brève revue<br />

<strong>de</strong>s connaissances théoriques actuelles<br />

sur la pathologie envisagée, décrit<br />

son parcours avec un patient tout<br />

au long d’une thérapie. Le chapitre se<br />

clôt sur une discussion concrète sur le<br />

cas présenté. Alors que la bibliographie<br />

a été volontairement réduite au minimum<br />

nécessaire à l’objectivation <strong>de</strong>s<br />

éléments théoriques avancés, <strong>de</strong>s lectures<br />

sont recommandées.<br />

Vagabondages psy... il<br />

importe d’avoir <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s<br />

Albert Le Dorze<br />

L’Harmattan<br />

Non seulement Albert Le Dorze choisit<br />

pour titre <strong>de</strong> son livre « vagabondages<br />

psy » mais, <strong>de</strong> plus, dans la quatrième<br />

<strong>de</strong> couverture, il emploie les verbes<br />

« vagabon<strong>de</strong>r » et « musar<strong>de</strong>r », cherchant<br />

peut-être par ces mots légers à minorer<br />

la portée <strong>de</strong> son ouvrage qui ne serait<br />

que le reflet <strong>de</strong> l’itinéraire, sans<br />

gran<strong>de</strong> embûche, d’un psychiatre clinicien,<br />

parfois enseignant et écrivain à<br />

ses heures. Il indique peut-être, par ces<br />

choix sémantiques, qu’il ne veut aucune<br />

inféodation à un quelconque dogme<br />

théorique et qu’il préfère rendre compte<br />

<strong>de</strong> son seul itinéraire réflexif, marqué<br />

par l’érudition et un savoir pluridisciplinaire.<br />

Il affirme peut-être ainsi qu’il<br />

estime son expérience clinique primordiale<br />

et que la praxis prévaut sur la<br />

théorie. Mais il faut, avec le Docteur Le<br />

Dorze, se méfier <strong>de</strong>s évi<strong>de</strong>nces et l’on<br />

trouve une historiette, préambule au<br />

chapitre intitulé « la clinique, <strong>de</strong> la sensation<br />

au concept », dans laquelle il raconte<br />

une dispute entre <strong>de</strong>s professionnels<br />

enfin réconciliés quand « le<br />

notable estimé <strong>de</strong> la psychiatrie et <strong>de</strong> la<br />

psychanalyse » (p.61) laisse tomber cette<br />

remarque mainte fois répétée : « c’est<br />

la clinique qui compte... il faut se laisser<br />

gui<strong>de</strong>r par la clinique » (p61). Il confie sa<br />

perplexité face à l’usage quasi oraculaire<br />

du mot « clinique » dont l’effet est<br />

immédiat : « (...) clôture du hourvari... clinique<br />

sacrée, sacrée clinique » (p61).<br />

Et la perplexité <strong>de</strong> ses lecteurs est au<br />

moins aussi gran<strong>de</strong> que la sienne quand<br />

il fait immédiatement suivre, dans le,<br />

titre <strong>de</strong> son livre, le terme « vagabondages<br />

» d’une phrase qui semble, sinon<br />

le contredire, au moins s’y opposer : « il<br />

importe d’avoir <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s ». Cette apparente<br />

inconciliabilité récèle-t-elle sa<br />

véritable intention ? les vagabondages<br />

n’empêcheraient pas les certitu<strong>de</strong>s et,<br />

pour le Docteur Le Dorze, ils sembleraient<br />

même les fon<strong>de</strong>r, les certitu<strong>de</strong>s<br />

n’étant possibles qu’à ceux qui consentent<br />

à musar<strong>de</strong>r. Albert Le Dorze ne se<br />

contente pas <strong>de</strong> la clinique psychiatrique<br />

ou psychanalytique et, au-<strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong> ses patients, ceux qu’il rencontre<br />

dans la confi<strong>de</strong>ntialité <strong>de</strong> son cabinet<br />

ou à travers leurs productions littéraires<br />

(comme Catherine M. à laquelle<br />

il consacre un chapitre), il s’intéresse au<br />

contexte social, politique voire artistique<br />

dans lesquels ces mêmes patients ten-<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

tent <strong>de</strong> vivre (<strong>de</strong> survivre). On <strong>de</strong>vine<br />

que si ses choix politiques influencent<br />

sa clinique, ils sont aussi gran<strong>de</strong>ment<br />

influencés pu son métier et par son savoir.<br />

En acceptant <strong>de</strong> se laisser surprendre<br />

par ses rencontres avec ses patients,<br />

mais également avec un texte<br />

théorique ou avec une œuvre d’art, il<br />

érige les vagabondages en nécessité<br />

éthique. Les imprévus <strong>de</strong> la clinique et<br />

<strong>de</strong> la vie ne l’effrayent pas ; bien plus,<br />

ils constituent les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> sa pratique.<br />

Pour les affronter, il sait qu’il lui<br />

faut un savoir soli<strong>de</strong> (les certitu<strong>de</strong>s) mais<br />

non fermé, structurellement inachevé.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Ils ne peuvent enrichir sa réflexion et<br />

sa pratique qu’à la condition <strong>de</strong> pas<br />

s’éclipser <strong>de</strong>rrière le déjà vu ou le déjà<br />

su (et on en revient au vagabondage).<br />

Le livre d’Albert Le Dorze est l’itinéraire<br />

d’un honnête homme, mé<strong>de</strong>cin psychiatre,<br />

qui ne cè<strong>de</strong> ni aux sirènes <strong>de</strong><br />

la mo<strong>de</strong> (qu’il s’agisse <strong>de</strong> celles <strong>de</strong> la<br />

prévention ou <strong>de</strong> la dépendance) ni à<br />

celles <strong>de</strong>s idées préconçues (le chapitre<br />

consacré au Père Noël en est une amusante<br />

et pertinente illustration). En voulant<br />

que son itinéraire soit fait <strong>de</strong> vagabondages,<br />

le Docteur Le Dorze a<br />

composé son livre <strong>de</strong> textes écrits à dif-<br />

férents moments et publiés ou présentés<br />

dans différents revues et lieux. Son<br />

ouvrage est d’ailleurs impossible à résumer,<br />

sa synthèse ne pouvant rendre<br />

compte <strong>de</strong> ses flâneries cliniques et théoriques<br />

dont déroulent ses certitu<strong>de</strong>s qui,<br />

dans le même temps, les permettent. Il<br />

faut le lire ou le parcourir (les lecteurs<br />

ont aussi le droit ou le <strong>de</strong>voir <strong>de</strong> vagabon<strong>de</strong>r),<br />

à sa façon, en commençant<br />

au hasard, par le chapitre que l’on imagine<br />

le plus attirant ou le plus intéressant.<br />

Et l’on se surprend alors à répondre<br />

à haute voix à une argumentation que<br />

l’on réprouve ou dont on admet la per-<br />

tinence, c’est-à-dire à s’engager en opposant<br />

ou en conjoignant ses propres<br />

certitu<strong>de</strong>s à celles <strong>de</strong> l’auteur. Albert Le<br />

Dorze a eu raison <strong>de</strong> nommer son livre<br />

« vagabondages psy... il importe d’avoir<br />

<strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s ». Il a eu aussi raison <strong>de</strong><br />

l’écrire afin <strong>de</strong> témoigner que sa pratique<br />

<strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cin et d’enseignant s’arcqueboute<br />

sur son désir (qui musar<strong>de</strong> et<br />

vagabon<strong>de</strong>) et sur son engagement<br />

éthique, conséquence <strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s<br />

qu’il s’est forgées au cours <strong>de</strong> ses vagabondages<br />

et dont il sait qu’elles ne<br />

sont pas tout à fait inébranlables.<br />

A. Henry<br />

Eloge <strong>de</strong> la perte<br />

Perte d’objets, formation du sujet<br />

Jean-Richard Freymann<br />

Préface <strong>de</strong> Roland Gori<br />

Erès, 21 €<br />

Après avoir développé la « frérocité » (Arcanes/érès,<br />

2003), la « naissance du désir<br />

» (Arcanes/érès 2005), J.-R. Freymann<br />

propose plusieurs genèses <strong>de</strong> l’objet<br />

que « le temps pour comprendre » révèle :<br />

objet phobique, objet fétiche, objet transgénérationnel,<br />

à partir d’un nouveau<br />

modèle <strong>de</strong> la constitution subjective qui<br />

passe par Kafka, Villon, Saint Augustin,<br />

Ray Charles.<br />

3<br />

En prenant à rebrousse-poil les langages<br />

dominants, il propose un éloge <strong>de</strong> la<br />

perte, contrastant avec les idéologies<br />

thérapeutiques qui cultivent l’avoir,<br />

l’adaptation et une guérison pensée en<br />

termes <strong>de</strong> protocoles et d’évaluations,<br />

soutenant que la psychanalyse est une<br />

école <strong>de</strong> création.<br />

La question <strong>de</strong> l’objet est ici envisagée<br />

dans l’actualité et dans les perspectives<br />

<strong>de</strong> la cure analytique avec cette hypothèse<br />

qui traverse l’ouvrage : si on est<br />

prêt à perdre <strong>de</strong> la consistance <strong>de</strong> l’objet,<br />

le désir inconscient se développe et<br />

le sujet se déplie. Mais quelles en sont<br />

les conditions incontournables ? L’auteur<br />

rappelle par là que l’objet en psychanalyse<br />

est mosaïque : objet narcissique,<br />

objet Moi, objet spéculaire, objet<br />

partiel, objet a, et que son <strong>de</strong>stin est<br />

singulier dans le temps psychique.<br />

L’amnésie psychologique<br />

Le cas Emma Dutemple<br />

Œuvres choisies II<br />

Pierre Janet<br />

L’Harmattan, 25 €<br />

Contrairement aux amnésies organiques,<br />

les amnésies psychogènes se caractérisent<br />

par l’absence <strong>de</strong> lésions cérébrales<br />

repérables. La perturbation principale<br />

est constituée par un ou plusieurs épiso<strong>de</strong>s<br />

durant lesquels le sujet présente<br />

une incapacité à évoquer <strong>de</strong>s souvenirs<br />

personnels importants, habituellement<br />

traumatiques ou stressants.<br />

Pierre Janet a initié l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’amnésie<br />

psychogène au début <strong>de</strong>s années<br />

1890.<br />

C’est à la Salpêtrière, sous la direction<br />

<strong>de</strong> Charcot, qu’il a été amené à s’intéresser<br />

à cette affection mentale. Il a décrit<br />

minutieusement le cas <strong>de</strong> Mme D.<br />

(Emma Dutemple), classée comme hystérique,<br />

et <strong>de</strong>venue amnésique le 28<br />

août 1891 suite à l’annonce <strong>de</strong> la fausse<br />

mort <strong>de</strong> son mari. Après cet épiso<strong>de</strong><br />

traumatique, Mme D. va présenter une<br />

amnésie antérogra<strong>de</strong> (oubli au fur et à<br />

mesure) que Janet appelle amnésie continue,<br />

et une amnésie rétrogra<strong>de</strong> (oubli<br />

<strong>de</strong>s événements passés).<br />

Le livre rassemble les nombreuses contributions<br />

<strong>de</strong> Janet sur la question <strong>de</strong><br />

l’amnésie et se centre, plus particulièrement,<br />

sur le cas <strong>de</strong> Mme D. mais aussi<br />

d’Irène.<br />

Anthropologie du foetus<br />

Jean Bergeret, Michel Soulé<br />

Bernard Golse et al.<br />

Dunod, 24 €<br />

Ce livre fait le point sur l’état d’avancement<br />

actuel <strong>de</strong>s différentes disciplines<br />

qui se préoccupent <strong>de</strong>s aléas normaux<br />

ou pathologiques <strong>de</strong> la vie foetale et<br />

<strong>de</strong> leurs conséquences immédiates ou<br />

plus lointaines sur le sujet qui va naître.<br />

Il s’agit <strong>de</strong> mieux connaître comment<br />

se déroule le début d’une trajectoire à<br />

la fois organique, affective et relationnelle<br />

qui concerne tout autant le foetus<br />

que ses environnements successifs ;<br />

l’environnement corporel et affectif maternel<br />

au premier chef, mais aussi l’environnement<br />

familial. Une approche anthropologique<br />

<strong>de</strong> l’étape foetale ne peut<br />

être considérée comme une recherche<br />

indépendante portant seulement sur tel<br />

moment ou tel aspect particulier d’une<br />

existence.<br />

Toute vie humaine ne peut se voir considérée<br />

que dans la globalité <strong>de</strong> son<br />

déroulement, <strong>de</strong>puis les conditions (génétiques<br />

et affectives) transgénérationnelles<br />

dans lesquelles s’est opérée<br />

la conception embryonnaire jusqu’à la<br />

disparition du sujet. Cet ouvrage présente<br />

une base <strong>de</strong> référence et <strong>de</strong> reflexion.<br />

Avec la collaboration <strong>de</strong> Arnold Munnich, Chantal<br />

Vavasseur, Fernand Daffos, Jean-Marie Delassus,<br />

Sylvain Missonnier, Marie-José Soubieux, Marcel<br />

Houser, William Slama.


4<br />

LIVRES ET REVUES<br />

La théorie <strong>de</strong> l’émotion<br />

William James<br />

Avant-propos <strong>de</strong> Jacques Chazaud<br />

Introduction <strong>de</strong> Georges Dumas<br />

L’Harmattan, 16,50 €<br />

William James a soutenu sa thèse <strong>de</strong><br />

mé<strong>de</strong>cine à Harvard et y a enseigné la<br />

Physiologie <strong>de</strong> 1872 à 1880. Sa théorie<br />

selon laquelle l’émotion ne serait<br />

« rien d’autre que la sensation <strong>de</strong>s effets<br />

corporels réflexes <strong>de</strong> ce que nous appelons<br />

son objet » (ce dont il déduira qu’en<br />

voyant son enfant mort on était triste<br />

« parce qu’on pleurait », et non qu’on<br />

pleurait parce qu’on était envahi par<br />

une immense affliction) est celle d’un<br />

mé<strong>de</strong>cin cherchant à « donner corps »<br />

aux vécus psychiques, et d’un physiologiste<br />

qui avait déjà réduit le « sentiment<br />

<strong>de</strong> l’effort » aux seules sensations<br />

<strong>de</strong> la contraction musculaire effectuée.<br />

Un vaste mouvement <strong>de</strong> recherches<br />

neuropsychologiques, inauguré par<br />

Charles Sherrington, a opposé aux<br />

conceptions jamesiennes le rôle <strong>de</strong> nombreuses<br />

formations encéphaliques interconnectées<br />

à l’origine <strong>de</strong>s vécus et<br />

<strong>de</strong>s expressions émotionnels. Cependant,<br />

James gar<strong>de</strong> <strong>de</strong>s partisans chez<br />

les psychophysiologistes actuels, et certains<br />

faits semblent toujours plai<strong>de</strong>r en<br />

sa faveur.<br />

C’est ce qui justifie que l’on réédite ce<br />

que James a écrit, tant sur un plan doctrinal<br />

que dans ses réponses aux objections<br />

<strong>de</strong> W. Wundt, W.-L. Worcester,<br />

et d’autres contemporains.<br />

Troubles fonctionnels et<br />

somatisation<br />

Comment abor<strong>de</strong>r les symptômes<br />

médicalement inexpliqués<br />

Pascal Cathébras<br />

Masson, 29 €<br />

Cet ouvrage montre que les symptômes<br />

somatiques inexpliqués (syndrome <strong>de</strong><br />

fatigue chronique, fibromyalgie, intestin<br />

irritable par exemple) ne sont pas<br />

« tout dans la tête », ni ne relèvent <strong>de</strong><br />

pathologies organiques méconnues,<br />

mais que <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> somatisation<br />

chroniques et invalidantes peuvent<br />

« se construire » à partir <strong>de</strong> pathologies<br />

mineures, lorsque le stress, l’anxiété ou<br />

la dépression, les explications médicales<br />

discordantes, les jugements <strong>de</strong>s proches<br />

et <strong>de</strong>s organismes sociaux s’en mêlent.<br />

L’auteur expose les principales conceptions<br />

<strong>de</strong> la somatisation (troubles dits<br />

« somatoformes » et syndromes somatiques<br />

fonctionnels), les facteurs en cause<br />

dans ces situations (biologiques, cognitifs,<br />

psychodynamiques, culturels et<br />

sociaux principalement), ainsi que les<br />

approches thérapeutiques adaptées (traitements<br />

médicamenteux, psychothérapies,<br />

modalités constructives <strong>de</strong> collaboration<br />

entre somaticiens et psychistes,<br />

éducation et réadaptation entre autres).<br />

Thérapie familiale<br />

2006 n°2<br />

Editions Mé<strong>de</strong>cine & Hygiène<br />

Poursuivant sa réflexion sur les interventions<br />

dans les cas <strong>de</strong> maltraitances<br />

à partir du travail <strong>de</strong> l’équipe <strong>de</strong> SOS<br />

enfants à Bruxelles, Emmanuel <strong>de</strong> Becker<br />

propose une modélisation <strong>de</strong> la<br />

prise en charge <strong>de</strong>s familles où un enfant<br />

a été maltraité. Il réaffirme la nécessité<br />

<strong>de</strong> préserver le secret entre les<br />

différents professionnels intervenants,<br />

et précise les différentes étapes <strong>de</strong> l’évaluation.<br />

L’intervention, toujours faite à<br />

<strong>de</strong> multiples niveaux, doit permettre un<br />

échange entre les co-intervenants, pour<br />

une meilleure régulation <strong>de</strong>s affects<br />

confrontés parfois à l’insoutenable. Exerçant<br />

dans une maternité <strong>de</strong> Genève,<br />

Thomas Will et Francesco Bianchi-<br />

Demicheli constatent que cette image<br />

idyllique est loin d’être la réalité et que<br />

l’arrivée d’un entant n’est pas qu’une<br />

source <strong>de</strong> plaisir et <strong>de</strong> joie. Utilisant la<br />

technique <strong>de</strong> diffraction du langage, ils<br />

ai<strong>de</strong>nt les mères à reformuler leur narration<br />

<strong>de</strong> la maternité, leur permettant<br />

<strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong> nouvelles narrations<br />

plus fonctionnelles, ainsi que le montrent<br />

leurs <strong>de</strong>ux vignettes cliniques.<br />

Fondateur d’un service d’ai<strong>de</strong> aux victimes<br />

<strong>de</strong> sectes en Belgique, Jean-Clau<strong>de</strong><br />

Maes abor<strong>de</strong> <strong>de</strong>s notions fondamentales<br />

telles que la définition du terme<br />

secte, <strong>de</strong>s concepts <strong>de</strong> pré-a<strong>de</strong>ptes, ou<br />

encore le jeu <strong>de</strong>s appartenances... Il<br />

abor<strong>de</strong> enfin ses hypothèses systémiques<br />

concernant le phénomène sectaire, hypothèses<br />

susceptibles d’expliquer l’important<br />

développement du phénomène<br />

sectaire <strong>de</strong>puis une trentaine d’années.<br />

Depuis les débuts, où le thérapeute peine<br />

à se reconnaître lui-même comme thérapeute,<br />

jusqu’à l’expérience <strong>de</strong> la nécessité<br />

<strong>de</strong> trouver sa place dans une<br />

équipe, Anne Latteur choisit comme fil<br />

rouge la question <strong>de</strong> la co-intervention :<br />

Comment travailler avec mes collègues ?<br />

Elle interroge les institutions où elle travaille,<br />

le rôle et la place d’un soignant<br />

en formation. Elle interroge aussi les<br />

parents <strong>de</strong>s enfants suivis, à l’ai<strong>de</strong> d’un<br />

questionnaire.<br />

Dans la lignée du constructivisme et <strong>de</strong><br />

l’attention qu’il porte au processus, Fabienne<br />

Kuenzli-Monnard s’est intéressée<br />

à la façon dont le psychothérapeute<br />

met sa pensée en mots, ce qu’elle nomme<br />

réflexion-en-action. Soulignant combien<br />

la recherche (même qualitative) est difficile<br />

dans le domaine <strong>de</strong> la psychothérapie,<br />

elle propose une étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la<br />

pensée pratique et <strong>de</strong> ses différences<br />

entre celle d’un novice et celle d’un expert.<br />

Et la différence qu’elle trouve entre<br />

les <strong>de</strong>ux est, au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> la plus gran<strong>de</strong><br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

distance d’avec les théories qui sousten<strong>de</strong>nt<br />

sa pratique, la capacité plus<br />

gran<strong>de</strong> <strong>de</strong> la réflexivité chez le psychothérapeute<br />

expert.<br />

Nicole Lernout propose <strong>de</strong>s illustrations<br />

<strong>de</strong> l’utilisation du cycle <strong>de</strong> l’ambiance<br />

(en tant que manière d’être au mon<strong>de</strong><br />

qui nous environne et avec qui nous<br />

rentrons en contact). Le schéma <strong>de</strong> l’alternance<br />

entre fusion/proximité et rupture/autonomie<br />

permet à ses patients,<br />

en individuel ou en couple, <strong>de</strong> réfléchir<br />

sur la cause du blocage qu’ils ressentent<br />

dans une situation ou dans une<br />

autre.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

prendre en otage signifiait « abriter,<br />

loger ». L’ostage était la personne retenue<br />

comme garantie <strong>de</strong> l’exécution<br />

d’une promesse, d’un traité, d’un contrat<br />

préalablement établi entre <strong>de</strong>ux belligérants.<br />

L’ostage était alors retenu captif<br />

dans la <strong>de</strong>meure du souverain. Le<br />

sens plus proche <strong>de</strong> l’actuel mot otage<br />

apparaît en pério<strong>de</strong> révolutionnaire<br />

(1753) désignant une personne que<br />

l’on retient et que l’on utilise comme<br />

moyen <strong>de</strong> pression, <strong>de</strong> chantage.<br />

Au XX ème siècle, avec la mondialisation<br />

<strong>de</strong> l’information, sa diffusion en<br />

direct donnant ainsi la priorité à l’émotion,<br />

l’impact <strong>de</strong>s paroles et <strong>de</strong>s images<br />

véhiculées par les médias audiovisuels,<br />

la presse écrite et l’internet, un nouveau<br />

regard a été porté sur le phénomène<br />

<strong>de</strong>s prises d’otages. Le statut<br />

d’otage a évolué avec le phénomène<br />

<strong>de</strong> société que représente la place prise<br />

par la médiatisation <strong>de</strong> l’actualité dans<br />

le quotidien <strong>de</strong>s citoyens. L’otage a<br />

désormais un nouveau statut, il est au<br />

centre d’un nouveau système <strong>de</strong> communication.<br />

Il n’est plus le simple<br />

« objet » <strong>de</strong> marchandage mais il est<br />

utilisé comme moyen <strong>de</strong> pression sur<br />

l’opinion publique et sur les gouvernements,<br />

par l’intermédiaire <strong>de</strong>s médias,<br />

pour faire entendre une position politique,<br />

une cause idéologique, une exigence<br />

militaire etc. Pour les terroristes<br />

la prise d’otage équivaut à un droit<br />

d’entrée dans chaque foyer pour y faire<br />

entendre sa cause (pendant toute la<br />

durée <strong>de</strong> la prise d’otage) par le canal<br />

<strong>de</strong> la télévision ou <strong>de</strong> la radio. Il <strong>de</strong>vient<br />

difficile <strong>de</strong> faire la part entre la revendication<br />

immédiate et le but <strong>de</strong> l’impact<br />

médiatique recherché.<br />

Dans les situations <strong>de</strong> prise d’otage, le<br />

mot média correspond à son véritable<br />

sens étymologique du latin médium<br />

« milieu ». Les médias, surtout radio et<br />

télévision mais aussi la presse, prennent<br />

la place d’un tiers situé entre le<br />

milieu extérieur (négociateurs, police) et<br />

le milieu intérieur (otages, ravisseurs), ils<br />

influencent les comportements d’un<br />

côté comme <strong>de</strong> l’autre. Ainsi, quatre<br />

protagonistes jouent un rôle dans ces<br />

nouvelles formes <strong>de</strong> prise d’otages : 1la<br />

victime primaire ou victime active<br />

est représentée par la personne ou les<br />

instances politiques, administratives ou<br />

financières visées par le chantage, 2-<br />

Les réseaux <strong>de</strong> santé<br />

en santé mentale<br />

- la loi <strong>de</strong> financement <strong>de</strong> la sécurité<br />

sociale pour 2002 a introduit une<br />

dotation nationale <strong>de</strong> développement<br />

<strong>de</strong>s réseaux (DRDR) inscrite dans<br />

l’objectif national <strong>de</strong> dépenses d’assurance<br />

maladie (ONDAM) qui impute<br />

les dépenses hospitalières, celle<br />

d’actions sociales mais aussi <strong>de</strong> soins<br />

<strong>de</strong> ville favorisant une fongibilité <strong>de</strong>s<br />

enveloppes.<br />

Les réseaux se sont surtout développés<br />

pour <strong>de</strong>s pathologies <strong>de</strong>mandant<br />

un suivi dans la durée, <strong>de</strong><br />

nature médicale, médico-sociale et<br />

médico-psychologique. Peu à peu <strong>de</strong><br />

nouveaux domaines cliniques ont<br />

été concernés : au début <strong>de</strong>s années<br />

80 le VIH, au début <strong>de</strong>s années 90<br />

l’exclusion et les addictions, à la fin<br />

<strong>de</strong>s années 90 le diabète puis les cancers,<br />

les personnes âgées, la périnatalité.<br />

Si bien qu’on recense, actuellement,<br />

plus <strong>de</strong> 500 réseaux concernant<br />

les soins palliatifs, le cancer, le diabète,<br />

les personnes âgées, le handicap,<br />

la périnatalité, les addictions.<br />

Viennent en bien moindre nombre<br />

l’obésité, les pathologies <strong>de</strong>ntaires et...<br />

la santé mentale. Ceux qui se sont<br />

engagés dans la mise en place <strong>de</strong> réseaux<br />

dont la fonction est <strong>de</strong> dépasser<br />

les logiques <strong>de</strong>s institutions, <strong>de</strong> pallier<br />

aux rigidités et aux cloisonnements<br />

veulent « fonctionner ou cela<br />

ne fonctionne pas », travailler autrement,<br />

créer une dynamique. Attirés<br />

par « le poly-exercice et le poly-situationnel<br />

», ils acceptent « le parcours<br />

Les conséquences <strong>de</strong>s situations<br />

<strong>de</strong> séquestration : sémiologie et<br />

typologie<br />

la victime secondaire ou victime passive<br />

est représentée par l’otage, 3- le<br />

ravisseur ou preneur d’otage, 4- l’opinion<br />

publique informée par les médias.<br />

Aux quatre coins du<br />

mon<strong>de</strong><br />

L’actualité <strong>de</strong>s prises d’otages n’est plus<br />

limitée aux actes <strong>de</strong> cambriolages ou <strong>de</strong><br />

pillages <strong>de</strong> banque, elle concerne aussi<br />

les revendications politiques, militaires,<br />

religieuses. De Colombie en Irak, en<br />

passant par l’Autriche avec le cas atypique<br />

<strong>de</strong> la séquestration <strong>de</strong> Natascha<br />

Kampusch âgée <strong>de</strong> 18 ans enlevée à<br />

l’âge <strong>de</strong> 10 ans et séquestrée par son<br />

ravisseur jusqu’à son évasion récente<br />

(septembre 2006). Ce cas est exceptionnel<br />

et les réactions <strong>de</strong> la jeune fille<br />

ne correspon<strong>de</strong>nt pas aux schémas<br />

connus, mais les informations qu’elle<br />

donnera et l’évolution du soutien psychothérapeutique<br />

apporteront, probablement,<br />

<strong>de</strong>s éléments pour la connaissance<br />

<strong>de</strong> l’adaptation psychologique<br />

aux situations <strong>de</strong> séquestration.<br />

En ce début du XXI ème siècle, l’importance<br />

prise par le fléau du terrorisme est<br />

à l’origine d’un regain d’intérêt pour<br />

les questions cliniques et psychopathologiques<br />

concernant les manifestations<br />

psychologiques et les séquelles<br />

psychotraumatiques décrites chez les<br />

otages. Dans la perspective <strong>de</strong> cette<br />

actualité il paraît important <strong>de</strong> préciser<br />

le cadre sémiologique et diagnostique<br />

dans lequel s’intègrent les observations<br />

comportementales et psychologiques<br />

<strong>de</strong>s otages. Une revue <strong>de</strong> la<br />

littérature permet <strong>de</strong> recenser bon<br />

nombres d’observations et <strong>de</strong> repérer<br />

<strong>de</strong>s constantes cliniques telles que les<br />

manifestations du stress post-traumatique,<br />

le syndrome <strong>de</strong> répétition pathognomonique<br />

<strong>de</strong> la névrose traumatique,<br />

<strong>de</strong>s comportements paradoxaux<br />

manifestant <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s d’adaptation à<br />

la situation traumatisante.<br />

du combattant » <strong>de</strong>s financements et<br />

une fragilité sur une base militante.<br />

C’est à ce prix qu’ils ont pu développer<br />

une véritable ingénierie <strong>de</strong><br />

conception <strong>de</strong> réseaux. Si les réseaux<br />

<strong>de</strong>meurent fragiles, il n’existe pas un<br />

plan sans réseaux (cancer, périnatalité)<br />

à commencer par le plan <strong>Psychiatrie</strong><br />

et Santé mentale 2005-2008<br />

car, on le voit bien, les réseaux peuvent<br />

ai<strong>de</strong>r à dépasser les problématiques<br />

d’établissement, combiner médical,<br />

social, médico-social et, au <strong>de</strong>là,<br />

politique <strong>de</strong> la ville, coordonner les<br />

réponses dans le temps et dans l’espace.<br />

Ils peuvent, également, constituer<br />

<strong>de</strong>s laboratoires d’expérience<br />

pour ce qui intéresse :<br />

- les compétences professionnelles<br />

dont on sait qu’elles sont sur le plan<br />

organisationnel souvent paramédicales<br />

et non soignantes,<br />

- la division et l’organisation du travail,<br />

- les possibilités d’échanges entre professionnels<br />

mais aussi et surtout entre<br />

ces <strong>de</strong>rniers et les non professionnels,<br />

- l’évaluation et la formation,<br />

- l’ancrage territorial.<br />

On peut attendre <strong>de</strong>s réseaux qu’ils<br />

explorent et favorisent <strong>de</strong>s réponses<br />

pour le basculement <strong>de</strong> l’intra vers<br />

l’extrahospitalier, le maillage et remaillage<br />

<strong>de</strong> solutions couvrant les<br />

zones blanches sur le plan du soin,<br />

l’articulation sanitaire, médico-social<br />

et social, les complémentarités entre<br />

public et privé, certains thèmes aussi<br />

importants que les urgences, la réhabilitation<br />

et la gérontopsychiatrie<br />

et tout cela, dans l’esprit et la continuité<br />

du secteur. ■<br />

Le classique syndrome<br />

<strong>de</strong> Stockholm<br />

Certaines <strong>de</strong> ces manifestations sont<br />

connues sous le nom <strong>de</strong> « syndrome<br />

<strong>de</strong> Stockholm » dont les critères cliniques<br />

ont été décrit en 1978 par le<br />

psychiatre américain F. Ochberg (1, 2). Il<br />

propose ce diagnostic à partir <strong>de</strong> l’observation<br />

d’un phénomène d’empathie<br />

paradoxale chez les victimes <strong>de</strong> la prise<br />

d’otage du 23 août 1973 lors d’un holdup<br />

au Crédit Suédois <strong>de</strong> Stockholm<br />

pendant lequel, pour échapper à l’intervention<br />

<strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre, le malfaiteur<br />

(un évadé <strong>de</strong> prison) prenait<br />

quatre employés en otage et obtenait la<br />

libération <strong>de</strong> son compagnon <strong>de</strong> cellule<br />

qui est venu immédiatement le<br />

rejoindre. Leur libération se produisit<br />

après six jours <strong>de</strong> négociation. Cette<br />

prise d’otages fut rendue célèbre en raison<br />

d’une part du rôle joué par les<br />

médias, lui donnant un retentissement<br />

important, d’autre part en raison <strong>de</strong> la<br />

place donnée à l’électronique permettant<br />

<strong>de</strong> filmer les comportements <strong>de</strong>s<br />

différents protagonistes, en particulier<br />

celui <strong>de</strong>s victimes. Ces <strong>de</strong>rnières prenaient<br />

la défense <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux ravisseurs,<br />

elles craignaient l’intervention <strong>de</strong> la police<br />

contre leurs ravisseurs. Ce comportement<br />

relève <strong>de</strong> sentiments paradoxaux,<br />

associant une affection et une<br />

compréhension à l’égard <strong>de</strong>s ravisseurs<br />

et une hostilité et une crainte à l’égard<br />

<strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre. Après la prise<br />

d’otages le même type <strong>de</strong> sentiment et<br />

<strong>de</strong> comportement <strong>de</strong>s otages à l’égard<br />

<strong>de</strong> leurs ravisseurs persistait : ainsi par<br />

exemple, ils refusaient <strong>de</strong> témoigner<br />

contre eux au procès, ils continuaient <strong>de</strong><br />

leur rendre visite en prison, et l’une <strong>de</strong>s<br />

otages divorça et épousa un <strong>de</strong>s ravisseurs.<br />

La définition du syndrome <strong>de</strong><br />

Stockholm proposée par Ochberg repose<br />

sur le développement <strong>de</strong> trois types<br />

<strong>de</strong> sentiments : 1- sentiments positifs<br />

<strong>de</strong> confiance et <strong>de</strong> sympathie <strong>de</strong>s otages<br />

à l’égard <strong>de</strong> leurs ravisseurs ; 2- sentiments<br />

positifs <strong>de</strong>s ravisseurs à l’égard<br />

<strong>de</strong> leurs otages ; 3- sentiments négatifs,<br />

d’hostilité, <strong>de</strong>s otages à l’égard <strong>de</strong>s forces<br />

<strong>de</strong> l’ordre. A ces trois éléments <strong>de</strong> définition<br />

plusieurs auteurs ont ajouté <strong>de</strong>s<br />

critères ou conditions concernant le<br />

mo<strong>de</strong> opératoire <strong>de</strong>s ravisseurs, la personnalité<br />

<strong>de</strong>s victimes, les phases du<br />

déroulement <strong>de</strong> la prise d’otages. Ces<br />

ajouts visent à mieux cerner l’évolution<br />

<strong>de</strong> la situation <strong>de</strong> l’otage (notions <strong>de</strong><br />

séquelles post-traumatiques, investissements<br />

dans <strong>de</strong>s activités à caractère<br />

social après la prise d’otage) et les différentes<br />

approches psychopathologiques<br />

proposées pour expliquer les phénomènes<br />

comportementaux et affectifs<br />

observés ainsi que les mécanismes<br />

d’adaptation physio-psychologiques.<br />

Schémas<br />

psychologiques <strong>de</strong>s<br />

situations <strong>de</strong><br />

séquestration<br />

L. Crocq (3) a systématisé le déroulement<br />

d’une prise d’otage selon une<br />

procédure en quatre phases afin d’ai<strong>de</strong>r<br />

la compréhension <strong>de</strong> la psychopathogénie<br />

du syndrome <strong>de</strong> Stockholm.<br />

La phase <strong>de</strong> capture est à l’origine d’un<br />

stress aigu ou « réaction d’effroi » au<br />

cours <strong>de</strong> laquelle la victime est confrontée<br />

brutalement au sentiment d’une<br />

mort proche avec effondrement <strong>de</strong>s<br />

mécanismes <strong>de</strong> défense contre l’angoisse<br />

<strong>de</strong> mort. Cet effondrement du<br />

fantasme d’immortalité représente une<br />

perte <strong>de</strong> protection et un véritable<br />

« basculement <strong>de</strong> la réalité » exprimé<br />

par <strong>de</strong> nombreuses victimes. Cette<br />

réaction douloureuse peut se traduire<br />

par <strong>de</strong>s symptômes neurovégétatifs<br />

(évanouissements, diarrhées) ou <strong>de</strong>s<br />

troubles psychosomatiques (infarctus,<br />

crise d’asthme), <strong>de</strong>s symptômes d’angoisse<br />

(attaque <strong>de</strong> panique, cris, pleurs),<br />

une inhibition motrice majeure à type<br />

<strong>de</strong> sidération voire une torpeur, parfois<br />

une agitation anxieuse ou plus rarement<br />

un état confusionnel. Pendant<br />

cette situation <strong>de</strong> stress aigu, l’otage<br />

peut tenter <strong>de</strong> résister à ses ravisseurs<br />

ou <strong>de</strong> s’enfuir mais, passer ce premier<br />

temps, sa résistance s’épuise et il s’oriente<br />

vers l’idée d’une collaboration.<br />

La phase <strong>de</strong> séquestration est une<br />

phase <strong>de</strong> stabilisation qui suit le temps<br />

<strong>de</strong> frustration et <strong>de</strong> tension. En même<br />

temps qu’il prend conscience <strong>de</strong> la<br />

situation le sujet accepte progressivement<br />

son statut d’otage. Si pour certains<br />

sujets le maintien d’un déni se<br />

traduit par une hypersomnie à valeur<br />

<strong>de</strong> refuge, pour la plupart <strong>de</strong>s victimes<br />

l’acceptation se déroule en trois temps :<br />

premièrement le déni <strong>de</strong> la situation,<br />

<strong>de</strong>uxièmement l’espoir pendant lequel<br />

le sujet pense que tout ceci est temporaire,<br />

et troisièmement la perte d’espoir<br />

qui correspond à l’acceptation <strong>de</strong><br />

la situation d’otage dans tous ses<br />

aspects. Cette reconnaissance du statut<br />

d’otage peut s’accompagner <strong>de</strong><br />

manifestations <strong>de</strong> lutte contre l’angoisse<br />

sous la forme <strong>de</strong> symptômes obsessionnels<br />

comme une arithmomanie<br />

(compter les lames du parquet, compter<br />

les fissures dans le mur, compter<br />

ses doigts « en boucle », etc.), <strong>de</strong>s rituels<br />

(balayer du regard <strong>de</strong> façon stéréotypée<br />

le même coin <strong>de</strong> la pièce), <strong>de</strong>s ruminations<br />

(sur son passé, sur sa façon<br />

d’être). Une thymie dépressive associant<br />

un sentiment <strong>de</strong> culpabilité d’avoir<br />

été pris en otage peut apparaître. La<br />

séquestration est la phase pendant<br />

laquelle se constitue le syndrome <strong>de</strong><br />

Stockholm, phase pendant laquelle sont<br />

présentes <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong> dépendance<br />

à l’égard <strong>de</strong>s ravisseurs : dépendance<br />

pour les besoins vitaux (se mobiliser,<br />

boire, manger, uriner, déféquer, menstruations).<br />

Un sentiment <strong>de</strong> déshumanisation<br />

accompagne ces conditions<br />

souvent dégradantes. Mais, en même<br />

temps, un sentiment <strong>de</strong> sympathie<br />

émerge <strong>de</strong> cette proximité et promiscuité<br />

entre les otages et leurs ravisseurs.<br />

Progressivement s’installe chez l’otage<br />

une tendance à la légitimation <strong>de</strong> cette<br />

situation. La victime peut même entreprendre<br />

<strong>de</strong>s attitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> séduction<br />

envers ses ravisseurs, une affinité s’installe<br />

à l’occasion <strong>de</strong> petits gestes, <strong>de</strong><br />

paroles, lors du passage <strong>de</strong> la nourriture,<br />

d’une <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> couverture ou d’eau<br />

ou d’autres échanges. Cette nouvelle<br />

homéostasie dans le milieu intérieur<br />

que représente le groupe constitué <strong>de</strong>s<br />

otages et <strong>de</strong> leurs ravisseurs génère un<br />

nouveau rapport avec le milieu extérieur<br />

constitué <strong>de</strong>s négociateurs et <strong>de</strong>s<br />

médias. Ce milieu extérieur est alors<br />

perçu comme plus dangereux que le<br />

milieu intérieur. Petit à petit les ravisseurs<br />

prennent aussi le statut d’otage,<br />

étant empêchés d’agir et <strong>de</strong> sortir.<br />

La phase <strong>de</strong> dénouement correspondant<br />

à la libération est caractérisée par<br />

la recru<strong>de</strong>scence d’une angoisse liée<br />

au risque d’une issue dramatique et<br />

une nouvelle proximité avec la mort. A<br />

cette phase, les comportements paradoxaux<br />

<strong>de</strong>s otages peuvent les amener<br />

à protéger leurs ravisseurs contre<br />

l’assaut <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre.<br />

La phase séquellaire dans les jours qui<br />

suivent la libération peut se manifester<br />

dans les jours ou les semaines par<br />

<strong>de</strong>s troubles thymiques, euphoriques<br />

ou dépressifs, associés à <strong>de</strong>s idées <strong>de</strong><br />

culpabilité. Les victimes adhèrent dura-<br />

<br />

LIVRES<br />

FMC ■ 5<br />

100 mots pour comprendre<br />

la psychiatrie<br />

Jean Garrabé<br />

Les Empêcheurs <strong>de</strong> penser en rond,<br />

18 €<br />

La psychiatrie est concernée par <strong>de</strong>s<br />

troubles psychiatriques graves (psychoses,<br />

schizophrénie) mais aussi par<br />

<strong>de</strong>s troubles rencontrés en mé<strong>de</strong>cine<br />

<strong>de</strong> ville (différentes formes <strong>de</strong> dépression,<br />

troubles obsessionnels,<br />

anxiété, troubles <strong>de</strong>s conduites <strong>de</strong>s<br />

enfants et <strong>de</strong>s adolescents, troubles<br />

du comportement alimentaire). Elle<br />

procè<strong>de</strong> avant tout d’une démarche<br />

clinique et empirique et s’élabore à<br />

la croisée <strong>de</strong> différents courants théoriques<br />

(psychanalyse, psychologie,<br />

neurosciences, pharmacologie biologique...).<br />

Jean Garrabé dresse un tableau <strong>de</strong><br />

la discipline et montre comment l’ensemble<br />

<strong>de</strong> ces notions confluentes<br />

qui structurent son champ sont en<br />

cohérence mais font aussi l’objet <strong>de</strong><br />

débats et <strong>de</strong> controverses. Le langage<br />

psychiatrique s’enrichit <strong>de</strong> mots<br />

provenant d’autres branches <strong>de</strong> la<br />

mé<strong>de</strong>cine, <strong>de</strong> la psychanalyse, <strong>de</strong>s<br />

sciences <strong>de</strong> la nature et <strong>de</strong>s sciences<br />

humaines, <strong>de</strong> la philosophie, voire<br />

<strong>de</strong> la religion.<br />

Devant choisir dans cet ensemble<br />

une centaine <strong>de</strong> mots, Jean Garrabé<br />

a retenu ceux que l’on peut, quelle<br />

que soit leur provenance, relier entre<br />

eux pour tisser un réseau, un filet permettant<br />

d’en pêcher d’autres dans<br />

différents courants <strong>de</strong> pensée.<br />

Les phobies<br />

Paul Denis<br />

Coll. « Que sais-je »<br />

PUF<br />

Paul Denis est psychanalyste, membre<br />

titulaire <strong>de</strong> la Société Psychanalytique<br />

<strong>de</strong> Paris. On retrouve dans son ouvrage,<br />

très complet, les qualités <strong>de</strong><br />

synthèse et <strong>de</strong> documentation qui<br />

constituent l’attrait <strong>de</strong> la collection<br />

« Que sais-je ». Il traite ainsi <strong>de</strong>s différentes<br />

manifestations phobiques chez<br />

l’adulte, symptômes ou maladie, et<br />

<strong>de</strong>s phobies infantiles. Des cas cliniques<br />

illustrent cet exposé.<br />

Après s’être interrogé sur le statut du<br />

trouble dans la psychopathologie, il<br />

développe le lien entre phobie et dépression.<br />

L’originalité <strong>de</strong> l’éreutophobie<br />

est mise en valeur. Si on<br />

relève une gran<strong>de</strong> diversité <strong>de</strong>s approches<br />

théoriques, on peut remarquer<br />

que l’auteur privilégie l’abord<br />

psychanalytique et ne cite que brièvement<br />

les thérapies cognitives et<br />

comportementales. A travers sa rédaction<br />

et sa réflexion sur le thème<br />

<strong>de</strong>s phobies, l’auteur réussit un livre<br />

qui s’adresse aux professionnels et à<br />

ceux qui s’intéressent à « leur propre<br />

vie psychique ».<br />

A. Cossin<br />

Sein <strong>de</strong> femme, sein <strong>de</strong><br />

mère<br />

Hélène Parat<br />

Presses Universitaires <strong>de</strong> France,<br />

11 €<br />

Par cette approche anthropologique,<br />

Hélène Parat montre le chemin qui<br />

parcourt les sinuosités <strong>de</strong> la fantasmatique<br />

du lait et rencontre les multiplicités<br />

du sein se confronte au passage<br />

à la nécessité du partage, un<br />

impossible et nécessaire partage, qui<br />

d’emblée a inscrit les dualités préœdipiennes<br />

dans les négociations œdipiennes.<br />

Une femme peut être apparemment<br />

mère sans s’être sentie<br />

femme, et pourtant, comme les enjeux<br />

<strong>de</strong> sa féminité passent par les<br />

multiples facettes <strong>de</strong> son désir d’enfant,<br />

les enjeux <strong>de</strong> la maternité passent<br />

par cette difficile voie qui la détermine<br />

femme pour un autre.


6<br />

LIVRES<br />

■ FMC<br />

Introduction à la<br />

psychopathologie<br />

Alain Braconnier<br />

Avec la collaboration d’Eric<br />

Corbobesse, François<br />

Deschamps, Nathalie Duriez,<br />

Nelly Gaillard-Janin, Catherine<br />

Joubert-Chain, Françoise Laugier,<br />

Catherine Saint-Georges<br />

Masson<br />

Dans les <strong>de</strong>ux premiers chapitres <strong>de</strong><br />

cet ouvrage, sont abordées les questions<br />

soulevées par l’entretien clinique<br />

et les théories qui peuvent le soustendre.<br />

Dans les trois chapitres suivants,<br />

sont présentées les gran<strong>de</strong>s<br />

entités psychopathologiques, en établissant<br />

<strong>de</strong>s ponts avec les classifications<br />

multi-axiales contemporaines<br />

et en résumant pour chaque trouble<br />

les points <strong>de</strong> vue explicatifs théoriques<br />

différents.<br />

Au niveau clinique, la distinction entre<br />

Névroses et Psychoses a constitué,<br />

pendant <strong>de</strong> nombreuses années, la<br />

base <strong>de</strong> la psychopathologie aussi<br />

bien pour l’enfant que pour l’adulte.<br />

Les Etats Limites, les Troubles Narcissiques<br />

<strong>de</strong> la Personnalité, les Perversions,<br />

les Organisations Psychosomatiques,<br />

tous les états psychopathologiques<br />

qui ne peuvent être<br />

classés dans l’une ou l’autre structure,<br />

névrotique ou psychotique, n’ont<br />

vu la découverte <strong>de</strong> leurs caractéristiques<br />

que dans la <strong>de</strong>uxième moitié<br />

du XX e siècle. Plus récemment, les<br />

classifications internationales multiaxiales<br />

ont démembré ces entités<br />

pour en extraire <strong>de</strong> multiples syndromes<br />

relevant <strong>de</strong> l’une ou <strong>de</strong> l’autre<br />

<strong>de</strong>s gran<strong>de</strong>s entités précé<strong>de</strong>ntes mais<br />

voulant apparemment se détacher<br />

<strong>de</strong> tout point <strong>de</strong> vue explicatif.<br />

Esquisses <strong>de</strong> philosophie<br />

morale<br />

Dugald Stewart<br />

Introduction <strong>de</strong> Serge Nicolas<br />

L’Harmattan, 24,50 €<br />

Face au scepticisme <strong>de</strong> David Hume,<br />

les philosophes écossais, avec Thomas<br />

Reid et Dugald Stewart, ont tenté<br />

<strong>de</strong> s’appuyer sur le sens commun,<br />

qui est dans la raison et qui doit fon<strong>de</strong>r<br />

la validité <strong>de</strong>s convictions <strong>de</strong><br />

l’homme <strong>de</strong> la rue et donc aboutir au<br />

bon sens raisonnable.<br />

La philosophie du sens commun suppose<br />

au départ une science <strong>de</strong> l’esprit.<br />

Qu’il s’agisse du mon<strong>de</strong> extérieur,<br />

du moi, d’autrui, <strong>de</strong> la causalité<br />

ou <strong>de</strong> la morale, il est nécessaire <strong>de</strong><br />

déterminer comment nous arrivons<br />

à nos jugements et dans quelle mesure<br />

ils sont fiables. C’est l’esprit qui<br />

se retourne ici sur lui-même, se prend<br />

comme objet pour étudier sa manière<br />

<strong>de</strong> connaître. Il est donc important<br />

d’adopter une métho<strong>de</strong> qui a fait ses<br />

preuves : ce sera la métho<strong>de</strong> inductive.<br />

Reid et Stewart l’utiliseront pour<br />

développer la science ou philosophie<br />

<strong>de</strong> l’esprit.<br />

Cette psychologie eut un grand succès<br />

en France au cours <strong>de</strong> la première<br />

moitié du XIX e siècle après les leçons<br />

<strong>de</strong> Pierre Pont Royer-Collard, puis <strong>de</strong><br />

Victor Cousin, qui ont vu dans cette<br />

philosophie un moyen <strong>de</strong> combattre<br />

le sensualisme condillacien représenté,<br />

alors, à la Sorbonne par Pierre<br />

Laromiguière. Les psychologues éclectiques<br />

français se sont efforcés alors<br />

<strong>de</strong> rendre accessibles au public les<br />

écrits <strong>de</strong> cette école écossaise représentée<br />

alors par la philosophie <strong>de</strong><br />

Dugald Stewart.<br />

Théodore Jouffroy s’est engagé dans<br />

cette voie en traduisant en 1826 les<br />

Esquisses <strong>de</strong> philosophie morale <strong>de</strong><br />

Dugald Stewart, dont la première édition<br />

date <strong>de</strong> 1793, et qui représentent<br />

le résumé <strong>de</strong> son cours <strong>de</strong> philosophie<br />

<strong>de</strong> l’esprit donné à l’Université<br />

d’Edimbourg.<br />

<br />

blement à la cause <strong>de</strong> leurs agresseurs.<br />

Il peut apparaître à cette phase un syndrome<br />

<strong>de</strong> stress aigu post-traumatique<br />

qui constitue une complication fréquente<br />

<strong>de</strong>s prises d’otages. Le caractère<br />

généralement réversible du syndrome<br />

<strong>de</strong> Stockholm ne doit pas faire sous<br />

estimer le risque <strong>de</strong> bouleversement<br />

profond <strong>de</strong> la vie <strong>de</strong>s familles et <strong>de</strong><br />

leur victime. Parmi ces bouleversements<br />

on a pu noter un changement d’attitu<strong>de</strong><br />

et même du sens moral <strong>de</strong> certains<br />

otages dont le jugement <strong>de</strong>venait<br />

permissif à l’égard <strong>de</strong> la délinquance<br />

et critique à l’égard <strong>de</strong> la société. De<br />

nombreuses hypothèses psychologiques<br />

proposent <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> compréhension<br />

<strong>de</strong> ce phénomène paradoxal que<br />

constitue le syndrome <strong>de</strong> Stockholm,<br />

paradoxal au regard <strong>de</strong> la douloureuse<br />

expérience <strong>de</strong> séquestration, d’humiliation<br />

et <strong>de</strong> « chosification » infligée<br />

par la situation d’otage. Ces mo<strong>de</strong>s<br />

explicatifs reposent principalement sur<br />

les apports <strong>de</strong> la psychanalyse, <strong>de</strong> la<br />

psychologie <strong>de</strong>s groupes et <strong>de</strong>s théories<br />

<strong>de</strong> la communication. Les manifestations<br />

affectives et comportementales<br />

observées chez les otages<br />

procè<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> mécanismes <strong>de</strong> défense<br />

complexes en particulier un mécanisme<br />

décrit par Anna Freud isolé sous le<br />

terme d’« i<strong>de</strong>ntification à l’agresseur » (4).<br />

Par ce mécanisme inconscient, le sujet<br />

confronté à un danger s’i<strong>de</strong>ntifie à son<br />

agresseur en reprenant à son compte<br />

l’agression ou en imitant physiquement<br />

ou moralement la personne <strong>de</strong> l’agresseur<br />

ou en adoptant certains symboles<br />

<strong>de</strong> puissance qui le désignent. Cette<br />

i<strong>de</strong>ntification constitue un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

réponse contre l’angoisse <strong>de</strong> mort. L’expérience<br />

<strong>de</strong> totale dépendance <strong>de</strong> l’otage<br />

vis-à-vis du ravisseur a été rapprochée<br />

d’un autre type <strong>de</strong> dépendance,<br />

celle concernant la dépendance <strong>de</strong> l’enfant<br />

à l’égard <strong>de</strong> sa mère, sta<strong>de</strong> précoce<br />

<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> infantile. L’expérience<br />

d’otage produirait, en quelque sorte,<br />

une régression (c’est-à-dire un retour à<br />

<strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> pensée et <strong>de</strong> conduite<br />

ne correspondant ni à l’âge ni à la maturité<br />

psychique du sujet) à un sta<strong>de</strong><br />

préœdipien <strong>de</strong> la vie infantile.<br />

Typologie prédictive<br />

Des facteurs dits prédictifs augmentent<br />

ou diminuent le risque <strong>de</strong> survenue<br />

d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm, ils peuvent<br />

concerner la victime, le mo<strong>de</strong> opératoire<br />

<strong>de</strong>s ravisseurs ou les conditions<br />

<strong>de</strong> détention <strong>de</strong>s otages ainsi que le<br />

rôle <strong>de</strong>s médias. Une typologie <strong>de</strong>s<br />

prises d’otages a permis <strong>de</strong> repérer<br />

quatre situations prenant en compte<br />

les motivations et la personnalité <strong>de</strong>s<br />

ravisseurs (5) : il s’agit parfois <strong>de</strong> malfaiteurs<br />

pris au piège en flagrant délit,<br />

d’autres fois il s’agit <strong>de</strong> terroristes à<br />

motivation politique, ou <strong>de</strong> prisonniers<br />

en révolte ou encore <strong>de</strong> personnes présentant<br />

une maladie mentale (dépression,<br />

personnalité pathologique, état<br />

délirant). Parmi ces quatre formes <strong>de</strong><br />

prises d’otages, celles étant réalisées sans<br />

violence physique, <strong>de</strong> façon non préméditée<br />

et dont les comportements <strong>de</strong>s<br />

ravisseurs peuvent être rationalisés,<br />

constituent <strong>de</strong>s situations favorisant la<br />

survenue d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm.<br />

Dans <strong>de</strong> rares cas, l’existence <strong>de</strong> sévices<br />

corporels peut favoriser le syndrome<br />

d’empathie <strong>de</strong>s victimes à l’égard <strong>de</strong><br />

leurs auteurs en particulier lorsque les<br />

victimes rationalisent ce type <strong>de</strong> comportement<br />

(« il fait cela parce qu’il est obligé<br />

») et se culpabilisent (« c’est à cause<br />

<strong>de</strong> moi qu’il a fait ça »).<br />

Concernant la victime (6) les facteurs<br />

prédictifs sont : le jeune âge et l’immaturité<br />

psycho-affective. Ils favorisent<br />

l’apparition <strong>de</strong> relations <strong>de</strong> confiance.<br />

Les femmes sembleraient plus vulnérables<br />

que les hommes. La durée <strong>de</strong><br />

la prise d’otages favorise aussi l’apparition<br />

<strong>de</strong> relations interpersonnelles<br />

nécessaires à l’émergence d’une cohésion<br />

du groupe otage/ravisseur. La personnalité<br />

<strong>de</strong>s victimes tient une place<br />

importante dans la genèse du syndrome<br />

: il paraît important qu’un système<br />

<strong>de</strong> croyance bien établi (en particulier<br />

sur le plan religieux) ainsi que l’existence<br />

<strong>de</strong> valeurs morales stables et<br />

d’une richesse imaginative (qui tient<br />

un rôle <strong>de</strong> survie psychique <strong>de</strong> l’otage)<br />

sont <strong>de</strong>s conditions importantes<br />

dans la survenue du syndrome <strong>de</strong><br />

Stockholm. De la même façon il<br />

semble que la prédisposition individuelle<br />

d’un otage à transgresser la loi<br />

pour une cause facilite la reconnaissance<br />

inconsciente <strong>de</strong> la victime envers<br />

le « transgresseur ». La capacité <strong>de</strong> la<br />

victime à gérer son angoisse grâce à<br />

<strong>de</strong>s mécanismes psychologiques <strong>de</strong><br />

défense (mécanismes inconscients) est<br />

prise en compte. Côté ravisseurs, les<br />

facteurs prédictifs sont liés aux traits<br />

<strong>de</strong> personnalité. Par exemple, une personnalité<br />

paranoïaque chez l’agresseur<br />

aura plus d’emprise sur les otages avec<br />

un important pouvoir <strong>de</strong> persuasion<br />

permettant d’induire leur adhésion à<br />

sa cause. L’existence <strong>de</strong> traits psychopathiques<br />

(personnalité antisociale)<br />

associant un égocentrisme, une capacité<br />

<strong>de</strong> séduction et <strong>de</strong> manipulation, une<br />

capacité à se mettre en valeur et la tendance<br />

à projeter sur les autorités la<br />

cause <strong>de</strong> ses problèmes sont <strong>de</strong>s facteurs<br />

favorisant l’émergence <strong>de</strong> sentiments<br />

positifs <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s otages.<br />

D’autres facteurs prédictifs <strong>de</strong> la survenue<br />

d’un syndrome <strong>de</strong> Stockholm<br />

consistent dans le mo<strong>de</strong> opératoire <strong>de</strong>s<br />

ravisseurs et les conditions <strong>de</strong> détention<br />

<strong>de</strong>s otages. L’existence d’une agressivité<br />

physique <strong>de</strong>s ravisseurs à l’égard<br />

<strong>de</strong>s otages compromet l’apparition <strong>de</strong>s<br />

sentiments positifs constitutifs du syndrome,<br />

<strong>de</strong> la même façon l’existence<br />

d’un antagonisme ethnique <strong>de</strong> type<br />

raciste avec sentiment <strong>de</strong> haine <strong>de</strong>s<br />

ravisseurs vis-à-vis <strong>de</strong> leurs victimes<br />

empêche la survenue du syndrome <strong>de</strong><br />

Stockholm. En revanche, le risque <strong>de</strong><br />

survenue du syndrome est augmenté<br />

par une motivation reliée à une idéologie<br />

« humanitaire » <strong>de</strong> la prise d’otage<br />

(libération <strong>de</strong> détenus ou appel en<br />

faveur <strong>de</strong> leurs conditions <strong>de</strong> détention,<br />

lutte contre une oppression politique<br />

etc). Dans ce cas, la légitimation<br />

<strong>de</strong> leur propre séquestration est plus<br />

rapi<strong>de</strong> ainsi que leur adhésion à la<br />

cause <strong>de</strong>s ravisseurs. Certains terroristes<br />

politiques redoutant l’apparition<br />

chez eux <strong>de</strong> sentiments et <strong>de</strong> com-<br />

La France a l’un <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> les plus élevés dans<br />

l’Union Européenne pour les femmes <strong>de</strong> 20 à 44 ans<br />

La France a l’un <strong>de</strong>s taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> les plus élevés parmi les 25 pays <strong>de</strong><br />

l’Union européenne pour les femmes âgées <strong>de</strong> 20 à 44 ans, selon une enquête<br />

<strong>de</strong> l’Office statistique <strong>de</strong>s communautés européennes Eurostat*.<br />

Il s’agit d’une enquête sur les causes <strong>de</strong> mortalité dans l’Union européenne,<br />

avec <strong>de</strong>s chiffres donnés en moyenne pour les trois années <strong>de</strong> 2001 à 2003.<br />

Elle montre que la France arrive en quatrième position en ce qui concerne<br />

les taux <strong>de</strong> suici<strong>de</strong> pour les femmes <strong>de</strong> 20 à 44 ans, <strong>de</strong>rrière la Lituanie, la<br />

Finlan<strong>de</strong> et la région flaman<strong>de</strong> <strong>de</strong> la Belgique, avec un taux <strong>de</strong> 8,6 pour<br />

100 000 femmes <strong>de</strong> cette classe d’âge, la moyenne <strong>de</strong>s 25 pays <strong>de</strong> l’Union<br />

européenne se situant à 4,9. En revanche, l’Hexagone présente le taux le plus<br />

faible <strong>de</strong> mortalité <strong>de</strong>s suites <strong>de</strong> cardiopathies ischémiques chez les personnes<br />

âgées <strong>de</strong> 65 à 84 ans, avec 402 hommes <strong>de</strong> cet âge décédant <strong>de</strong> cette cause<br />

sur 100 000 et 169 femmes, contre une moyenne respective <strong>de</strong> 788 et 450<br />

pour les 25 pays <strong>de</strong> l’Union européenne.<br />

B.L.<br />

*Les causes <strong>de</strong> mortalité dans l’Union européenne, statistiques Eurostat.<br />

portements d’empathie paradoxale à<br />

l’égard <strong>de</strong>s otages (sentiments décrits<br />

par Ochberg) qui rendraient difficile<br />

l’exécution d’un otage, maintiennent<br />

les victimes dans un isolement visuel<br />

(pièce sombre, ban<strong>de</strong>au sur les yeux) et<br />

auditif (changements régulier <strong>de</strong>s<br />

« gar<strong>de</strong>s » sans contact verbal). Cet isolement<br />

retar<strong>de</strong> ou compromet l’apparition<br />

<strong>de</strong> sentiments positifs. Les facteurs<br />

<strong>de</strong> groupe jouent un rôle<br />

important dans la genèse du syndrome<br />

Stockholm : l’homogénéité et la cohésion<br />

du groupe diminuent le risque <strong>de</strong><br />

sa survenue ; à l’inverse l’existence <strong>de</strong><br />

tensions au sein du groupe favorise le<br />

risque. Les conditions <strong>de</strong> vie du groupe,<br />

l’exiguïté <strong>de</strong>s lieux et la promiscuité<br />

font naître l’idée d’une incapacité du<br />

milieu extérieur à protéger ses membres<br />

et confortent le sentiment d’être abandonné.<br />

Parallèlement l’établissement <strong>de</strong><br />

relations avec les ravisseurs participe<br />

d’une ré-humanisation <strong>de</strong>s otages ; le<br />

milieu extérieur <strong>de</strong>vient menaçant et<br />

le nouveau groupe otages-ravisseurs est<br />

investi comme un milieu protecteur.<br />

Etat <strong>de</strong> stress posttraumatique<br />

Le syndrome <strong>de</strong> Stockholm n’est pas la<br />

seule modalité évolutive <strong>de</strong> l’expérience<br />

douloureuse <strong>de</strong> la prise d’otage, parmi<br />

les autres modalités une place particulière<br />

peut être faite au diagnostic<br />

d’ « état <strong>de</strong> stress post-traumatique » (7),<br />

dénomination mo<strong>de</strong>rne correspondant<br />

à la classique « névrose traumatique »<br />

décrite par H. Openheim dans les<br />

années 1880-1890 et étudiée attentivement<br />

en France par L. Crocq (8). La<br />

riche symptomatologie <strong>de</strong> ce syndrome<br />

est caractérisée par un ordre d’apparition<br />

<strong>de</strong>s symptômes (un temps <strong>de</strong><br />

latence -<strong>de</strong> quelques heures ou jours ou<br />

semaines- sépare l’événement traumatisant<br />

<strong>de</strong> l’apparition <strong>de</strong>s premiers<br />

symptômes) : le syndrome <strong>de</strong> répétition<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Les jeunes mé<strong>de</strong>cins généralistes aimeraient<br />

recevoir plus d’informations sur la dépression au<br />

cours <strong>de</strong> leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />

Selon les résultats d’une enquête internationale, neuf jeunes mé<strong>de</strong>cins généralistes<br />

(MG) sur dix estiment que la formation donnée en faculté <strong>de</strong><br />

mé<strong>de</strong>cine sur la dépression - et en particulier sur les douleurs corporelles associées<br />

- <strong>de</strong>vrait être plus approfondie. Sur les 500 MG interrogés dans cinq<br />

pays - le Brésil, la France, l’Allemagne, le Mexique et le Royaume-Uni - moins<br />

d’un tiers estiment que leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine les a préparés à diagnostiquer<br />

une dépression lors <strong>de</strong> la première visite d’un patient (30%) ou à traiter<br />

l’ensemble <strong>de</strong>s symptômes <strong>de</strong> la dépression, aussi bien psychiques que<br />

physiques, pour atteindre la rémission (32%). Les MG interrogés avaient tous<br />

une pratique clinique <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong>puis trois à cinq ans et les résultats<br />

étaient relativement similaires d’un pays à l’autre. « Il est important que les mé<strong>de</strong>cins<br />

reconnaissent rapi<strong>de</strong>ment et envisagent certains symptômes physiques -<br />

tels que la fatigue, les douleurs diffuses et <strong>de</strong>s troubles du sommeil comme <strong>de</strong>s<br />

signes possibles <strong>de</strong> dépression » pour Preston Garrison, Secrétaire Général et<br />

Directeur Général <strong>de</strong> la Fédération mondiale pour la santé mentale (WFMH),<br />

l’un <strong>de</strong>s initiateurs <strong>de</strong> l’enquête. Les trois quarts (74%) <strong>de</strong>s MG ont déclaré<br />

que leur formation leur avait appris l’importance <strong>de</strong> prendre en compte à la<br />

fois les symptômes psychiques et les douleurs corporelles <strong>de</strong> la dépression<br />

et plus <strong>de</strong> la moitié (58%) qu’on leur avait enseigné que les patients dépressifs<br />

consultaient souvent d’abord pour <strong>de</strong>s douleurs corporelles. Toutefois, une<br />

fois mis à l’épreuve, les MG ont montré un certain nombre <strong>de</strong> lacunes dans<br />

leurs connaissances et <strong>de</strong> perceptions erronées sur le rôle <strong>de</strong>s douleurs corporelles<br />

dans le diagnostic et le traitement <strong>de</strong> la dépression. Lorsqu’ils ont<br />

été invités à citer cinq symptômes <strong>de</strong> la dépression leur venant à l’esprit, par<br />

exemple, seuls un tiers <strong>de</strong>s MG, ou moins, ont pensé aux douleurs corporelles,<br />

et moins d’un tiers (27%) ont reconnu que les douleurs corporelles<br />

faisaient, la plupart du temps, partie <strong>de</strong>s symptômes <strong>de</strong> la dépression. De<br />

plus, si les MG pensent que les patients dépressifs peuvent parvenir à la rémission<br />

(résolution complète <strong>de</strong>s symptômes), une gran<strong>de</strong> majorité pensent<br />

à tort que le traitement <strong>de</strong>s symptômes psychiques entraînera aussi la résolution<br />

<strong>de</strong>s douleurs corporelles. les recherches cliniques montrent que ceuxci<br />

restent souvent non résolus, même après que les symptômes psychiques<br />

se sont atténués*. Les jeunes MG sont d’accord (48%) ou tout à fait d’accord<br />

(39%) pour dire que la formation reçue pendant leurs étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />

sur la dépression doit être améliorée et une majorité est d’accord (52%) ou<br />

tout à fait d’accord (34%) pour dire que ces améliorations doivent spécifiquement<br />

porter sur les douleurs corporelles <strong>de</strong> la dépression.<br />

L’enquête Testing the Medics s’inscrit dans le cadre <strong>de</strong> la campagne <strong>de</strong> sensibilisation<br />

sur la dépression <strong>de</strong> la WFMH, Breaking through Barriers, une initiative<br />

<strong>de</strong> sensibilisation publique visant à diminuer la stigmatisation <strong>de</strong> la dépression<br />

et à améliorer la qualité <strong>de</strong> la prise en charge <strong>de</strong> la maladie à l’échelle<br />

mondiale. Cette campagne est soutenue conjointement par la WFMH, Eli<br />

Lilly and Company et Boehringer Ingelheim. ■<br />

G.M.<br />

*Greco T. et al., J Gen Intern. M 2004; 19, 813-818<br />

(considéré comme étant pathognomonique)<br />

apparaît comme la répétition<br />

d’un cauchemar dans lequel la<br />

personne revit <strong>de</strong> façon quasi hallucinatoire<br />

la scène traumatisante. Dans<br />

ce syndrome l’angoisse est massive avec<br />

gran<strong>de</strong> douleur psychique, sueurs, palpitations<br />

etc. Une tendance à la somatisation<br />

avec apparition <strong>de</strong> troubles psychosomatiques<br />

(douleurs abdominales<br />

ou autres localisations algiques ou douleurs<br />

diffuses) apparaît dans le décours<br />

du syndrome <strong>de</strong> répétition. Peuvent<br />

aussi apparaîtrent <strong>de</strong>s troubles psychiques<br />

multiples à type <strong>de</strong> phobies,<br />

<strong>de</strong> réactions <strong>de</strong> sursaut exagéré, <strong>de</strong><br />

symptômes comparables aux symptômes<br />

<strong>de</strong> conversion (troubles somatoformes)<br />

<strong>de</strong>s troubles du sommeil etc..<br />

L’installation d’un syndrome dépressif<br />

conditionne le pronostic en raison <strong>de</strong> sa<br />

chronicité, sa résistance aux thérapeutiques<br />

et le risque suicidaire. ■<br />

Serge Tribolet<br />

Psychiatre <strong>de</strong>s hôpitaux, 6ème secteur <strong>de</strong> Paris.<br />

Bibliographie<br />

(1) OCHBERG F., The victim of terrorism, Practioner,<br />

1978, 220.<br />

(2) OCHBERG F., Victim of Terrorism: Psychiatric<br />

Consi<strong>de</strong>rations, Terrorism, 1978, 1,2,<br />

147-168.<br />

(3) CROCQ L., SAILHAN M., BARROIS C.,<br />

Névroses traumatiques (névrose d’effroi, névrose<br />

<strong>de</strong> guerre), Encyclopédie Médico Chirurgicale,<br />

2.1983, 37329, AIO, 12p.<br />

(4) LAPLANCHE J., PONTALIS J.-B., Vocabulaire<br />

<strong>de</strong> la psychanalyse, Ed. PUF, Paris, 1988,<br />

pp 190-192.<br />

(5) BIGOT T., BORNSTEIN S.J., Schème paradoxal<br />

<strong>de</strong> comportement lors <strong>de</strong> prises d’otages<br />

(syndrome <strong>de</strong> Stockholm), Ann Psychiatr, 1988,<br />

3, 3, 196-206.<br />

(6) BIGOT T., Approche victimologique <strong>de</strong> la<br />

prise d’otages : schèmes paradoxaux <strong>de</strong> comportement<br />

<strong>de</strong> comportement, Synapse, 1989,<br />

55, 47.<br />

(7) American Psychiatric Association, DSM-<br />

IV, Manuel diagnostique et statistique <strong>de</strong>s<br />

troubles mentaux, 4ème édition, Ed. Masson,<br />

Paris, 1996, pp. 498-504.<br />

(8) CROCQ L., SAILHAN M., BARROIS C.,<br />

Névroses traumatiques, op. cit.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

évoquée par René <strong>de</strong> Ceccatty concerne<br />

la naissance <strong>de</strong> Pasolini comme<br />

poète, soit le moment <strong>de</strong> son adolescence.<br />

Sa poésie prendra reconnaissance<br />

rapi<strong>de</strong>ment dans le mon<strong>de</strong> littéraire.<br />

La langue poétique <strong>de</strong> Pasolini<br />

sera dès lors frioulane et non pas italienne.<br />

Les premiers poèmes seront<br />

paradoxalement dédiés à son père,<br />

Carlo Alberto Pasolini, d’origine aristocratique<br />

déchue, alors en captivité<br />

au Kenya. L’adresse <strong>de</strong> la création poétique<br />

<strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> guerre<br />

mondiale concerne donc le lien avec<br />

le père et la mère. Le rapport <strong>de</strong> Pier<br />

Paolo avec son père est décrit classiquement<br />

comme haineux.<br />

La biographie écrite par René <strong>de</strong> Ceccatty<br />

apporte <strong>de</strong>s précisions. Evoquant<br />

son père dans un entretien Pasolini<br />

disait : « Dans les premières années <strong>de</strong><br />

ma vie, il a été plus important que ma<br />

mère. C’était une présence rassurante,<br />

forte. Un vrai père affectueux et protecteur.<br />

Puis soudain, quand j’avais environ<br />

trois ans, le conflit a éclaté. Dès lors,<br />

il y a toujours eu entre nous une tension<br />

d’antagonisme, <strong>de</strong> drame, <strong>de</strong> tragédie<br />

entre lui et moi (…)» (3). René <strong>de</strong><br />

Ceccatty insiste pour souligner l’absence<br />

<strong>de</strong> haine <strong>de</strong> Pier Paolo envers<br />

son père, mais que l’enfant perçoit la<br />

mésentente <strong>de</strong> ses parents, les scènes<br />

d’ivresse et <strong>de</strong> violence. Le rapport au<br />

père change donc pour Pier Paolo lorsqu’il<br />

a trois ans. Il est marqué par une<br />

brisure.<br />

En 1974, le père <strong>de</strong> Pasolini est mort<br />

<strong>de</strong>puis plus <strong>de</strong> 15 ans. Le sujet vit avec<br />

sa mère, est célèbre internationalement<br />

pour ses réalisations cinématographiques,<br />

ses romans, ses théories sur<br />

l’art, ses prises <strong>de</strong> position politique,<br />

mais l’amour <strong>de</strong> sa vie, le jeune Ninetto<br />

Davoli prend distance sans jamais<br />

rompre totalement, pense se marier.<br />

Pasolini est confronté à la perspective<br />

du vieillissement. Il a 52 ans.<br />

Dans la réécriture en frioulan en 1974,<br />

le vœu <strong>de</strong> répétition et <strong>de</strong> retour s’affirme<br />

particulièrement au niveau <strong>de</strong> la<br />

forme du poème, cherchant une symétrie<br />

parfaite.<br />

L’ensemble, première forme <strong>de</strong> 1941-<br />

1953 et <strong>de</strong>uxième forme <strong>de</strong> 1974,<br />

sera publié sous le titre La nouvelle jeunesse,<br />

livre qui est « Un et Double »<br />

comme Narcisse, pour reprendre une<br />

expression <strong>de</strong> Philippe Di Méo (4). Cette<br />

tentative <strong>de</strong> restaurer le passé se fait<br />

Danses pasoliniennes<br />

clairement par l’intermédiaire <strong>de</strong> la<br />

forme <strong>de</strong> la poésie : tout se passe<br />

comme si l’écriture revêtait ses anciens<br />

vêtements pour refaire son entrée en<br />

scène en faisant semblant <strong>de</strong> n’en être<br />

jamais sortie. Mais le vêtement avec le<br />

temps s’est usé, a vieilli, n’est plus le<br />

même. Le miroir est troublé, fissuré,<br />

incapable <strong>de</strong> renvoyer autre chose<br />

qu’une ombre informe qui <strong>de</strong> plus,<br />

tend à s’échapper du miroir.<br />

En effet, le paysage frioulan n’est plus<br />

le même, l’histoire, le peuple frioulan<br />

ont changé.<br />

Face à l’impossibilité dans laquelle se<br />

trouve Narcisse <strong>de</strong> retrouver ce miroir<br />

d’antan qui lui permettait d’appréhen<strong>de</strong>r<br />

et <strong>de</strong> faire tenir le réel <strong>de</strong> son corps,<br />

la poésie et son écriture, dans leur fonction<br />

<strong>de</strong> miroir sont amenées à suppléer<br />

à cette défaillance <strong>de</strong> manière plus<br />

intense qu’auparavant.<br />

Ainsi, il s’agirait <strong>de</strong> reconstruire par la<br />

poésie, donc par le signifiant, une forme<br />

capable <strong>de</strong> faire tenir le corps, soit, en<br />

reprenant les formulations <strong>de</strong>s psychanalystes<br />

anglo-saxons, saisir l’écriture<br />

comme contenant, comme enveloppe<br />

corporelle qui viendrait pallier à<br />

la chose sans forme, à l’inconsistance du<br />

corps.<br />

Mais, cette tentative échoue : les <strong>de</strong>ux<br />

versions ne sont pas du point <strong>de</strong> vue<br />

formel tout à fait symétriques et surtout,<br />

le sens change radicalement <strong>de</strong> l’une à<br />

l’autre. Ce qui semblait se lier pour<br />

Pasolini dans le sens <strong>de</strong> la vie dans la<br />

première version se dénoue dans la<br />

secon<strong>de</strong> et va plutôt dans le sens d’un<br />

laisser-tomber voir même d’un pousseà-la-mort,<br />

et il est saisissant <strong>de</strong> rapprocher<br />

cet élément du constat <strong>de</strong> Philippe<br />

Di Méo : « La nouvelle jeunesse est<br />

le <strong>de</strong>rnier recueil <strong>de</strong> vers publié par Pier<br />

Paolo Pasolini <strong>de</strong> son vivant, quelques<br />

mois avant sa mort. C’est en ce sens un<br />

testament poétique ».<br />

Nous proposons <strong>de</strong> travailler <strong>de</strong>ux<br />

poèmes, un <strong>de</strong> l’époque <strong>de</strong> 1944-<br />

1949, inscrit dans la suite frioulane, intitulé<br />

Danses –suite frioulane (I-IV)- (6),<br />

l’autre <strong>de</strong> l’époque <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> forme<br />

<strong>de</strong> La meilleure jeunesse, 1974, ayant<br />

donc le même titre et la même inscription<br />

dans la formalisation poétique<br />

(7).<br />

Nous prendrons l’ordre chronologique.<br />

Première forme<br />

(1944-1949)<br />

I<br />

« Un enfant se regar<strong>de</strong> dans un miroir,<br />

son œil rit noir.<br />

Mécontent, il regar<strong>de</strong> le revers pour voir<br />

si cette Forme est un corps »<br />

Apparaît d’emblée pour le sujet Pasolini<br />

une tentative <strong>de</strong> nouer le scopique,<br />

via le miroir, à un corps pour lui donner<br />

forme « Un enfant se regar<strong>de</strong> dans<br />

un miroir ». Toutefois, cette tentative<br />

<strong>de</strong> nouage échoue : le scopique ne<br />

renvoie pas au vivant <strong>de</strong> la lumière<br />

mais au noir, au trou, au néant. « Son<br />

œil rit noir ». Aucun reflet ne permet au<br />

corps <strong>de</strong> prendre forme dans ce miroir,<br />

laissant le sujet dans un état d’informité.<br />

La tentative d’accrocher à cette<br />

ébauche <strong>de</strong> nouage entre le scopique et<br />

le corps, le signifiant incarné par le rire,<br />

échoue. Cette formulation « son œil rit<br />

noir » est précieuse pour éclairer le<br />

fonctionnement subjectif. Ce rire<br />

indique certes une jouissance <strong>de</strong> l’œil,<br />

un plus-<strong>de</strong>-jouir, mais aussi que le sujet<br />

produit un son, un signifiant, pur réel,<br />

pure jouissance sans symbolisation, qui<br />

fait ainsi heurt dans la tentative <strong>de</strong><br />

nouage signifiant-scopique-corps. Ce<br />

rire, cet air sonore, pur signifiant sans<br />

signification, n’a pas d’écho dans le<br />

corps. Ce rire ne permet pas l’accroche.<br />

Cela a pour effet le décrochage du<br />

nœud et le laisser tomber du corps<br />

réduit par le miroir au noir, à un vi<strong>de</strong>,<br />

donc à une opacité. Le fait qu’il soit<br />

« mécontent » souligne son désir <strong>de</strong> sortir<br />

<strong>de</strong> cet état <strong>de</strong> désêtre, <strong>de</strong> laisser<br />

tomber. Ce désir <strong>de</strong> trouver une solution<br />

se fait par le scopique puisqu’il se<br />

dirige alors vers le « revers » du miroir<br />

pour tenter d’aller vers un au-<strong>de</strong>là du<br />

rejet, témoignant par là même d’une<br />

confusion entre son corps et son image,<br />

entre le réel et l’imaginaire.<br />

« Mais il ne voit qu’un mur lisse<br />

ou la toile d’une araignée méchante.<br />

Sombre, il regar<strong>de</strong> <strong>de</strong> nouveau sa Forme<br />

Dans le miroir, une lueur sur le verre. »<br />

Sa tentative <strong>de</strong> se saisir d’une forme<br />

par le biais du scopique échoue. Il ne<br />

trouve en guise d’accroche qu’un mur<br />

lisse, une surface en <strong>de</strong>ux dimensions,<br />

sans reliefs et <strong>de</strong> laquelle aucun réfléchissement<br />

ne peut émaner. A ce vi<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> l’accroche répond le trop persécuteur<br />

: la toile d’une araignée méchante,<br />

réseau persécuteur dans lequel il pourrait<br />

bien être pris.<br />

Face à l’échec du scopique à donner<br />

forme au corps, il tente dans une répétition<br />

<strong>de</strong> nouer le scopique et la forme<br />

dans l’espoir d’y trouver une issue plus<br />

favorable. Il cherche <strong>de</strong> nouveau du<br />

regard sa forme. Une lueur apparaît. Il<br />

sort donc du néant pour n’être toutefois<br />

qu’une lueur, ce qui vient affliger le<br />

corps d’un certain rabaissement (Erniedrigung).<br />

De même, l’absence <strong>de</strong><br />

réflexion se répète puisque le verre<br />

n’est pas une surface réfléchissante.<br />

Cependant, il est à noter la production<br />

<strong>de</strong> nouveau dans cette répétition : le<br />

syntagme « une lueur sur le verre » vient<br />

tenter d’abolir l’opacité, le noir antérieur.<br />

Ces <strong>de</strong>ux premières strophes montrent<br />

donc le primat du scopique dans la<br />

tentative <strong>de</strong> parer au laisser-tomber et<br />

<strong>de</strong> faire tenir un corps. A cela viennent<br />

se raccor<strong>de</strong>r <strong>de</strong>ux questions : Où est sa<br />

Forme ? Où est son corps ? L’errance<br />

du signifiant qui fait heurt et qui ne se<br />

fixe pas empêche un nouage signifiantscopique-corps.<br />

II<br />

« Enfant, je regar<strong>de</strong> dans le Miroir<br />

et ce souvenir rit léger,<br />

le souvenir <strong>de</strong> ma vie vive<br />

comme l’herbe d’une rive noire. »<br />

Il apparaît alors un moment <strong>de</strong> vie, un<br />

allègement pour Pasolini. De quoi s’agitil<br />

? Il y a un nouage entre le scopique<br />

« je regar<strong>de</strong> dans le Miroir » et le signifiant<br />

« ce souvenir rit léger » qui évoque<br />

une pério<strong>de</strong> antérieure. L’effet <strong>de</strong> cette<br />

accroche est le passage d’un «on»informe<br />

à un « je»qui vit ; cela est plus<br />

parlant en frioulan avec le passage <strong>de</strong><br />

« un frut » à « jo frut », soit le passage <strong>de</strong><br />

« un enfant » à « je enfant ». Cela fait<br />

référence à un avant qui précè<strong>de</strong> le<br />

laisser tomber. Cette jouissance du « je»<br />

est réaffirmée par « ma vie vive » ou<br />

le redoublement du «v», en français<br />

comme en italien et en frioulan vient<br />

faire vibrer le sujet. Cependant cette<br />

élévation, Aufhebung, est altérée par<br />

la survenue d’un « comme », donc d’un<br />

ersatz, qui ôte l’idée d’une abolition<br />

radicale <strong>de</strong> ce qui a produit le laisser<br />

tomber. Ce <strong>de</strong>rnier, témoigne <strong>de</strong> fait <strong>de</strong><br />

sa trace dans le vers « comme l’herbe<br />

d’une rive noire » : l’herbe est une érection<br />

qui n’ a comme pendant que le<br />

vi<strong>de</strong> indiqué par la rive noire : ce qui<br />

bor<strong>de</strong> est noir. Depuis le temps <strong>de</strong> ce<br />

souvenir, <strong>de</strong> cette construction antérieure,<br />

il y a eu effondrement, laisser<br />

tomber et le bord noir est passé à un<br />

noir sans accroche.<br />

« Mais mécontent je regar<strong>de</strong> le revers<br />

pour voir si c’est quelque chose que je<br />

regrette.<br />

Une lueur c’est une lueur,<br />

Rien que le blanc d’une lueur…»<br />

Qu’en est il <strong>de</strong> ce souvenir d’une vibration<br />

du sujet qui avait eu un effet <strong>de</strong><br />

plus-<strong>de</strong>-jouir ? Est ce quelque chose<br />

qu’il doit regretter ? Pasolini doit faire<br />

<strong>de</strong> nouveau appel à l’épreuve et à la<br />

preuve du scopique pour le savoir et<br />

tenter <strong>de</strong> cerner le <strong>de</strong>stin <strong>de</strong> ce<br />

moment pulsionnel antérieur qui l’a<br />

poussé vers la vie. Il constate un<br />

échouement et le vivant lumineux est<br />

rabaissé au blanc d’une lueur. Ce blanc<br />

retranche du signe et <strong>de</strong> la marque liée<br />

à la couleur, la couleur qui l’a poussé<br />

vers la vie.<br />

III<br />

Là, <strong>de</strong>rrière le verre, dans un pays <strong>de</strong><br />

lumière<br />

une cloche, douce à mon cœur,<br />

et éloignée dans le temps s’enflamme<br />

au beau milieu d’une morte campagne.<br />

Face à cet échouement du miroir à<br />

donner forme au corps, il cherche <strong>de</strong><br />

nouveau à aller au-<strong>de</strong>là, à passer à travers<br />

le verre, surface transparente, pour<br />

se diriger vers la terre maternelle, le<br />

Frioul, ce pays <strong>de</strong> lumière qui lui donne<br />

vie et qui vient tenter <strong>de</strong> métaphoriser<br />

le corps. Dans ce champ maternel, il y<br />

a une rencontre avec le signifiant via le<br />

son <strong>de</strong> la cloche dont il tente d’emblée<br />

d’en éloigner l’immédiateté en<br />

signalant son éloignement dans le<br />

temps. Avec ce fond maternel, ce signifiant<br />

résonne sur l’organe <strong>de</strong> l’amour,<br />

<strong>de</strong> l’Eros et provoque un plus-<strong>de</strong>-jouir<br />

avec la chaleur et la lumière <strong>de</strong> la flamme.<br />

Ce plus-<strong>de</strong>-jouir survient dans un<br />

désert <strong>de</strong> jouissance scopique incarné<br />

par la morte campagne, morte campagne<br />

qui est une représentation du<br />

vi<strong>de</strong> signant l’ab-sens <strong>de</strong> symbolisation<br />

<strong>de</strong> l’absence maternelle. De même, le<br />

son <strong>de</strong> la cloche peut représenter un<br />

appel vers Dieu face à cette ab-sens,<br />

un appel qui fonctionne en lien avec<br />

un plus-<strong>de</strong>-jouir qui l’oriente du côté <strong>de</strong><br />

la vie (la lumière et la chaleur <strong>de</strong> la<br />

flamme).<br />

« Lumière est ma vie, et elles sonnent<br />

joyeusement pour moi sous un ciel nu,<br />

lumière est ma mère petite fille et elles<br />

sonnent joyeusement sur son clair<br />

berceau ».<br />

Il souligne dans ce qui le fait vivre le primat<br />

du scopique qui se raccor<strong>de</strong> par<br />

l’instrument <strong>de</strong> la cloche au signifiant<br />

mais aussi en lien avec la strophe précé<strong>de</strong>nte,<br />

au corps et à sa jouissance<br />

dans la mesure où la chaleur est une<br />

sensation <strong>de</strong> peau. Ces cloches sonnent<br />

joyeusement comme <strong>de</strong>s testicules<br />

en fête, l’organe jouit dans un<br />

déchaînement pulsionnel sous un ciel<br />

nu. Le ciel nu met en question le vi<strong>de</strong><br />

<br />

PSYCHANALYSE ■ 7<br />

LIVRES<br />

Lire Michaël Balint<br />

Un clinicien pragmatique<br />

Hélène Oppenheim Gluckman<br />

Campagne Première, 16 €<br />

Michaël Balint, mé<strong>de</strong>cin et psychanalyste<br />

hongrois émigré en Angleterre,<br />

est surtout connu à travers « les<br />

Groupes Balint » qui désignent une<br />

modalité <strong>de</strong> formation <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cins<br />

et <strong>de</strong> thérapeutes à la relation soignants-soignés.<br />

Son apport a également<br />

enrichi la théorie et la pratique<br />

psychanalytiques en élargissant les<br />

indications <strong>de</strong>s cures et en proposant<br />

<strong>de</strong>s psychothérapies brèves.<br />

Hélène Oppenheim Gluckman montre<br />

comment ce clinicien pragmatique<br />

est un précurseur <strong>de</strong>s débats actuels<br />

sur l’éthique médicale, la formation<br />

<strong>de</strong>s psychanalystes et <strong>de</strong>s mé<strong>de</strong>cins,<br />

la psychothérapie. Une notice biographique<br />

et une bibliographie<br />

exhaustive complètent cette étu<strong>de</strong>.<br />

Sigmund Freud - Karl<br />

Abraham<br />

Correspondance complète<br />

1907-1925<br />

Gallimard, 45 €<br />

Cette édition fait suite à une précé<strong>de</strong>nte,<br />

parue en 1969, qui n’était que<br />

partielle, l’édition alleman<strong>de</strong> d’origine<br />

ayant été « caviardée » du fait<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>scendants directs <strong>de</strong> Freud<br />

(Ernst Freud) et d’Abraham (Hilda Abraham),<br />

qui pensaient <strong>de</strong>voir protéger<br />

certaines personnes impliquées dans<br />

cette correspondance.<br />

L’édition actuelle est donc une traduction<br />

<strong>de</strong> l’intégralité <strong>de</strong> cette correspondance.<br />

Elle débute en 1907,<br />

lorsqu’Abraham fait la connaissance<br />

<strong>de</strong> Freud et vient s’installer à Berlin<br />

et se termine en 1925, année où<br />

meurt Abraham à l’âge <strong>de</strong> 48 ans.<br />

C’est une discussion riche, fécon<strong>de</strong><br />

et enthousiaste entre les <strong>de</strong>ux hommes,<br />

échangeant observations cliniques<br />

et hypothèses théoriques,<br />

Freud ayant rapi<strong>de</strong>ment reconnu en<br />

Abraham un élève brillant qui <strong>de</strong>viendra<br />

bientôt un maître à son tour.<br />

M. Goutal<br />

Peut-on vivre sans illusion ?<br />

Imaginaire & Inconscient<br />

Etu<strong>de</strong>s psychothérapiques<br />

2006 n°17<br />

L’Esprit du Temps, 21 €<br />

Ce numéro <strong>de</strong> la Revue du Groupe<br />

International du Rêve-Eveillé en Psychanalyse<br />

(GIREP) se consacre à un<br />

thème qui relève non seulement <strong>de</strong><br />

la psychanalyse mais aussi <strong>de</strong> la sociologie<br />

et <strong>de</strong> la philosophie, à première<br />

vue. Le langage courant, « se<br />

bercer d’illusions » décrit à la fois le<br />

piège que ces <strong>de</strong>rnières peuvent nouer<br />

pour nous et la douce rêverie, la rêverie<br />

créatrice ou réparatrice qu’elles<br />

peuvent amener.<br />

La Revue cherche à présenter un éventail<br />

large <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue et <strong>de</strong> facettes<br />

du sujet traité, à travers <strong>de</strong>s articles<br />

<strong>de</strong> professionnels d’horizons<br />

divers, parmi lesquels ceux que l’imaginaire<br />

fréquente, mais aussi <strong>de</strong> référents<br />

théoriques différents.<br />

Sur « l’illusion », sont réunis <strong>de</strong>s textes<br />

variés, au cœur <strong>de</strong>s problèmes d’aujourd’hui<br />

comme dans l’intemporalité<br />

d’un dire poétique ou littéraire, qui<br />

éclairent la possibilité <strong>de</strong> se construire<br />

grâce aux illusions, l’opportunité <strong>de</strong><br />

les conserver jusqu’au moment où<br />

s’en défaire est une libération et enfin<br />

l’éventualité <strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue différents<br />

où l’illusion concerne la réalité<br />

même, si elle n’est pas l’objet<br />

d’une défiance absolue.


8<br />

LIVRES<br />

■ PSYCHANALYSE<br />

Freud<br />

René Major et Chantal Talagrand<br />

Folio biographies n°15<br />

Gallimard, 6,40 €<br />

René Major et Chantal Talagrand ont<br />

la plus gran<strong>de</strong> conscience que d’éminents<br />

biographes <strong>de</strong> Freud avant eux<br />

ont pris le parti <strong>de</strong> traiter l’archive<br />

freudienne comme l’œuvre écrite <strong>de</strong><br />

son vivant, les écrits posthumes ou<br />

la correspondance. Leur parti aura<br />

donc été d’introduire, avec l’homme<br />

Freud, à ce qu’on pourrait appeler<br />

une biographie analytique. Non pas<br />

au sens où elle appliquerait l’analyse<br />

au sujet répondant au nom <strong>de</strong> Sigmund<br />

Freud. Mais au sens où la métho<strong>de</strong><br />

freudienne change l’écriture<br />

<strong>de</strong> l’histoire, y compris l’écriture <strong>de</strong><br />

l’histoire <strong>de</strong> Freud. Au risque <strong>de</strong> dérouter,<br />

cette biographie ne suit nullement<br />

la chronologie linéaire habituelle.<br />

Elle tient compte <strong>de</strong> la notion<br />

essentielle d’après-coup chez Freud<br />

selon laquelle le sens d’une expérience<br />

ou d’une impression est différé<br />

dans le temps, où ce qui apparaît<br />

à retar<strong>de</strong>ment donne un autre<br />

sens à <strong>de</strong>s empreintes laissées auparavant.<br />

La nuit <strong>de</strong> l’insomnie<br />

Philosophie du nocturne<br />

Illustrations par Marissa-Gayle<br />

Level<br />

Xavier Pietrobon<br />

L’Harmattan, 27 €<br />

La nuit <strong>de</strong> l’insomnie n’est pas la nuit<br />

où l’homme s’endort, c’est-à-dire où<br />

il s’ignore. L’insomnie rompt avec le<br />

sommeil comme évi<strong>de</strong>nce, et le pose<br />

plutôt comme problématique. Aussi<br />

interroge-t-elle ce sur quoi l’homme<br />

s’endort par coutume. Pour l’auteur,<br />

le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’insomnie se donne à<br />

l’homme comme une énigme à résoudre,<br />

énigme dont on est à la fois<br />

sujet et objet. Il ne faut pas dormir, il<br />

faut philosopher et ainsi toucher la<br />

vérité dissimulée dans les ténèbres ;<br />

cet infini divin se découvre paradoxalement<br />

sur le mo<strong>de</strong> d’une souffrance<br />

proprement humaine, marque<br />

<strong>de</strong> finitu<strong>de</strong>...<br />

L’Egypte du rêve<br />

Rêves, rêveurs et Interprètes au<br />

temps <strong>de</strong>s pharaons<br />

Edda Bresciani<br />

Payot, 20 €<br />

Dans la civilisation égyptienne la plus<br />

ancienne, le rêve, qui s’empare <strong>de</strong>s<br />

hommes au moment où ils sont le<br />

plus vulnérables, était considéré<br />

comme le lieu <strong>de</strong> rencontres effrayantes<br />

avec les esprits, les fantômes<br />

et les morts mécontents qu’il<br />

s’agissait d’apaiser au moyen <strong>de</strong><br />

prières et d’offran<strong>de</strong>s, et <strong>de</strong> repousser<br />

grâce à <strong>de</strong>s formules magiques<br />

et <strong>de</strong>s talismans. Il a ensuite endossé<br />

la fonction <strong>de</strong> porte ouverte sur le futur,<br />

<strong>de</strong> présage <strong>de</strong> ce qui arrivera.<br />

C’est au cours du Nouvel Empire que<br />

l’on trouve les premières listes et les<br />

premiers récits <strong>de</strong> rêves. L’intérêt pour<br />

ces récits et pour leur signification se<br />

poursuit et s’enrichit dans l’Egypte<br />

hellénistique et romaine, plus tardive.<br />

Edda Bresciani lit et commente les<br />

textes magiques <strong>de</strong>stinés à protéger<br />

le sommeil et les Livres <strong>de</strong>s songes<br />

égyptiens, véritables manuels et répertoires,<br />

où les rêves sont énumérés<br />

selon leurs significations propices<br />

ou néfastes pour toutes les occasions<br />

<strong>de</strong> la vie. Elle montre que les peurs,<br />

les espoirs, les visions et les obsessions<br />

<strong>de</strong>s anciens habitants <strong>de</strong> la terre<br />

du Nil n’étaient guère différents <strong>de</strong><br />

ceux <strong>de</strong> l’homme d’aujourd’hui, et<br />

que les schémas d’interprétation anciens<br />

ressemblaient fort à ceux <strong>de</strong><br />

nos horoscopes.<br />

<br />

<strong>de</strong> la symbolisation paternelle : le père<br />

nu a-t-il un attribut qui est lié à une<br />

fonction <strong>de</strong> manque. La mère quant<br />

à elle est raccordée à la lumière qui<br />

donne la vie. Le rapport incestuel dans<br />

lequel la mère est ramenée à l’état <strong>de</strong><br />

petite fille, est évoqué par la présence<br />

<strong>de</strong>s cloches. Se dégage ainsi l’objet scopique<br />

comme objet à la fois <strong>de</strong> plus-<strong>de</strong>jouir<br />

et faisant lien, copule. L’adjectif<br />

« clair » qui renvoie au scopique est le<br />

signe <strong>de</strong> la copule entre le signifiant<br />

(« elles sonnent ») et le corps <strong>de</strong> la mère<br />

petite fille incarnée par le berceau.<br />

IV<br />

« Derrière le Miroir, ma mère petite fille<br />

joue dans une ruelle sèche.<br />

Elle respire les yeux <strong>de</strong> la Madone<br />

Entre les figuiers et les chênes frais <strong>de</strong><br />

résine ».<br />

Au-<strong>de</strong>là du miroir il y a donc la mère<br />

et sa jouissance. Dans l’au-<strong>de</strong>là du<br />

miroir qui n’exerce plus sa fonction<br />

réflexive, la jouissance <strong>de</strong> la mère raccordée<br />

à la lumière a pour référence le<br />

tarissement, le vi<strong>de</strong> du flux, <strong>de</strong> l’écoulement.<br />

Ce qui lui reste <strong>de</strong> vie face à ce<br />

vi<strong>de</strong> phallique, ce qui s’insuffle en elle,<br />

émane <strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> la Vierge soit d’un<br />

scopique, qui apparaît entre les arbres<br />

en tumescence. Cette quatrième<br />

strophe indique clairement l’au-<strong>de</strong>là<br />

du narcissisme, le rapport à la jouissance<br />

maternelle.<br />

Son collier <strong>de</strong> corail au cou,<br />

Elle s’en va heureuse, le long <strong>de</strong>s rives<br />

Dans cette lueur <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> mille<br />

Neuf cent <strong>de</strong>ux, dans un soupir…<br />

L’enflammement produit précé<strong>de</strong>mment<br />

par le lien signifiant-scopiquecorps<br />

s’amenuise jusqu’à disparaître.<br />

C’est la mère qui part en même temps<br />

que le scopique et le signifiant se réduisent<br />

à une lueur et à un soupir voué à<br />

s’éteindre. L’évocation <strong>de</strong> la mère,<br />

« petite fille », vient retrancher le temps<br />

et le ramène là encore au temps <strong>de</strong><br />

l’enfance, celui qui précè<strong>de</strong> le dénouage<br />

et le laisser-tomber. Pasolini évoque<br />

en effet ici, une époque où la mère est<br />

heureuse, une pério<strong>de</strong> d’avant le désespoir<br />

où le nouage signifiant scopiquecorps<br />

est soutenu par la suppléance au<br />

phallus comme en témoigne l’avoir<br />

maternel, le collier <strong>de</strong> corail. Notons<br />

en outre, que ce syntagme « son collier<br />

<strong>de</strong> corail au cou, elle s’en va heureuse<br />

» n’est pas sans évoquer la représentation<br />

<strong>de</strong> la mère qui a le phallus, la<br />

mère non castrée. Le temps <strong>de</strong> l’enfance<br />

est pour lui une promesse <strong>de</strong><br />

bonheur. Il s’agit <strong>de</strong> l’enfance d’avant la<br />

puberté comme en témoigne la date <strong>de</strong><br />

1902, date qui peut paraître énigmatique<br />

à une première lecture. En 1902<br />

la mère <strong>de</strong> Pasolini est âgée <strong>de</strong> 11 ans<br />

soit le passage vers l’âge <strong>de</strong> la puberté<br />

et <strong>de</strong> l’adolescence.<br />

Deuxième forme : 1974<br />

I<br />

Je vais me regar<strong>de</strong>r dans le miroir<br />

Pour voir ce que j’ai été,<br />

Mais, comme l’eau, le miroir est changeant<br />

Et ce que je suis <strong>de</strong>venu est changeant.<br />

Ce nouveau recueil <strong>de</strong> poèmes en<br />

1974 se veut symétrique mais introduit<br />

une rupture. Un avant et un après<br />

se dégage alors clairement <strong>de</strong> l’œuvre<br />

pasolinienne. Si le primat du scopique<br />

dans son désir <strong>de</strong> donner forme au<br />

corps est également présent, celui-ci<br />

est marqué par cette rupture temporelle.<br />

Il tente <strong>de</strong> saisir le reflet <strong>de</strong> ce<br />

qu’il a été. Or, se présente à lui, l’image<br />

<strong>de</strong> ce qu’il est <strong>de</strong>venu, une forme<br />

mobile qui ne tient pas et qui émane<br />

d’un miroir changeant tel le miroir <strong>de</strong>s<br />

eaux qui n’est pas sans évoquer le<br />

mythe <strong>de</strong> Narcisse. Le scopique qui<br />

pour lui précè<strong>de</strong> l’être ( c’est le miroir<br />

qui le fait changer et non l’inverse) ne<br />

parvient donc plus à fixer un corps.<br />

Je reviens regar<strong>de</strong>r dans le miroir<br />

Immobile comme un bloc <strong>de</strong> glace :<br />

Dans le miroir, immobile est la Forme<br />

Qui sait qui naît d’elle.<br />

De retour face au miroir, Pasolini per-<br />

çoit ce que cache ce flou scopique :<br />

sa mort, le tranchant mortel du bloc<br />

<strong>de</strong> glace; en effet il ne peut plus bouger,<br />

il est congelé, tout mouvement pulsionnel<br />

se voit suspendu. Un point <strong>de</strong><br />

fixation est donc trouvé, le corps se<br />

noue au scopique <strong>de</strong> façon mortelle.<br />

Face à ce tranchant mortel, la restauration<br />

vient <strong>de</strong> la Forme à laquelle la<br />

toute-puissance du savoir maternel est<br />

attribuée via la fonction <strong>de</strong> la naissance.<br />

Soulignons la majuscule qui vient<br />

systématiquement élever le signifiant<br />

« Forme », et qui n’est pas sans rappeler<br />

La Femme dont parle Lacan, une Forme<br />

Toute donc, qui est dans la toute-puissance,<br />

à savoir qu’elle ne se noue pas<br />

au regard dans une perte. La Forme<br />

est en contiguïté avec la Mère.<br />

« vieux je regar<strong>de</strong> dans le miroir<br />

qui telle une lumière court à travers le<br />

ciel,<br />

une ombre immobile pour toujours<br />

même si elle pouvait claquer comme un<br />

voile ».<br />

En symétrie avec l’introduction du « je»<br />

dans « jo frut » en 1949, apparaît ici<br />

un « jo veciu », un « je vieux » qui renvoie<br />

à une pério<strong>de</strong> d’après le laisser<br />

tomber. Le miroir dans sa fonction est<br />

<strong>de</strong>venu fugitif, il ne renvoie uniquement<br />

et définitivement qu’à une ombre<br />

immobile, l’ombre <strong>de</strong> son enfance perdue.<br />

La promesse <strong>de</strong> bonheur est <strong>de</strong>venue<br />

une ombre éternelle. Même si le<br />

signifiant essaye <strong>de</strong> donner une forme,<br />

cela rate : le « clac ! » <strong>de</strong> l’ombre ne fait<br />

pas voile, mais ersatz <strong>de</strong> voile, laissant<br />

apparaître l’irréversibilité d’une mort<br />

imminente. Le « comme un voile »<br />

montre l’échec <strong>de</strong> ce qui aurait pu alléger<br />

Pasolini par un raccord au manque<br />

symbolique.<br />

« Dans le miroir, immobile comme un<br />

anneau<br />

je vois une lumière s’enfuir, elle disparaît<br />

du mon<strong>de</strong>, si gran<strong>de</strong> est sa vitesse<br />

qu’on ne voit que le vi<strong>de</strong> qu’elle laisse »<br />

De fugitif, le miroir <strong>de</strong>vient à son tour<br />

sans mouvement. La comparaison <strong>de</strong><br />

l’immobile du miroir avec l’anneau qui<br />

unit renvoie à une alliance mortifère<br />

sans retour.<br />

La fonction scopique ne renvoie plus<br />

qu’au vi<strong>de</strong>. Le primat du scopique dans<br />

sa fonction <strong>de</strong> nouage avec la vie<br />

n’aboutit plus qu’au vi<strong>de</strong>. La lumière<br />

signe <strong>de</strong> vie s’enfuit pour laisser place<br />

au vi<strong>de</strong>, au néant, au gouffre.<br />

« Je cours comme un voleur<br />

qui n’a rien volé à son père,<br />

et se tient immobile auprès du foyer<br />

à regar<strong>de</strong>r la pauvre chaire <strong>de</strong> sa mère ».<br />

En contiguïté avec le laisser tomber du<br />

corps réduit au néant, apparaît pour la<br />

première fois un père, un père a qui il<br />

n’a rien volé. Ce père n’est pas perçu<br />

comme le détenteur d’un phallus dont<br />

il aurait à s’emparer. Ce père n’a pas sa<br />

place dans le désir maternel, laissant<br />

le fils dans une dualité mortifère avec la<br />

mère que les flammes du foyer ne parviennent<br />

pas à ranimer puisque celle-ci<br />

n’est déjà plus qu’un amas <strong>de</strong> chair,<br />

soit un corps dépouillé <strong>de</strong> ses signifiants,<br />

que le désir n’habite plus.<br />

« je suis immobile comme un voleur<br />

tout juste arrivé à Rome<br />

et qui sait que le Tribunal<br />

a mis la mer entre son Frioul et lui »<br />

De par la réitération <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntification<br />

au voleur, un ersatz <strong>de</strong> voleur, le<br />

poète donne à entendre sa volonté <strong>de</strong><br />

mettre quelqu’un en position paternelle,<br />

une position <strong>de</strong> celui qui unit le<br />

désir et la loi. En lieu et place du père,<br />

c’est le Tribunal qu’il trouve, celui-ci<br />

venant introduire la mer entre lui et le<br />

corps maternel métaphorisé par le<br />

Frioul, comme pour le lui interdire. Ce<br />

qui aurait pu médiatiser cette union<br />

mortifère s’effectue par un tribunal soit<br />

l’ombre <strong>de</strong> la faute et la condamnation.<br />

De ce fait, cet appel vers la fonction<br />

paternelle ne parvient pas à sortir<br />

Pasolini <strong>de</strong> son état d’immobilisme<br />

morbi<strong>de</strong> pour le pousser vers la vie.<br />

Le Tribunal fait référence à la condamnation<br />

judiciaire et morale qui a touché<br />

Pasolini en 1949-1950 après une plainte<br />

déposée contre lui pour atteinte aux<br />

bonnes mœurs. Cela aura pour effet<br />

le départ du Frioul pour Rome.<br />

« Un jeune homme au fond du miroir<br />

écrit les jours <strong>de</strong> sa vie.<br />

Il efface plus qu’il n’écrit,<br />

Car il n’a pas d’histoire ».<br />

On note <strong>de</strong> nouveau une référence à la<br />

jeunesse. Il utilise pour cela un style<br />

très impersonnel renvoyant à l’absence<br />

d’i<strong>de</strong>ntité qui résonne avec l’absence<br />

<strong>de</strong> corps dans le miroir qui était évoqué<br />

précé<strong>de</strong>mment. Ce jeune homme est<br />

au fond <strong>de</strong> ce miroir et il écrit, tel un<br />

condamné à mort, les jours <strong>de</strong> sa vie.<br />

« Mais il efface plus qu’il n’écrit » comme<br />

si face à cet effondrement et à l’échec<br />

du scopique à restaurer une image <strong>de</strong><br />

soi qui le fasse exister, une rupture, un<br />

gouffre même s’était creusé et avait<br />

emporté avec lui toute l’histoire, tous les<br />

souvenirs <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> Pasolini, ceux<br />

d’avant le laisser tomber, ne lui laissant<br />

plus cette fois aucune prise à laquelle se<br />

raccrocher.<br />

« Sur une photographie, les têtes <strong>de</strong><br />

son père et <strong>de</strong> sa mère se touchaient<br />

encore en mille neuf cent<br />

<strong>de</strong>ux lorsqu’il s’est tué »<br />

Il termine ce poème en se référant à un<br />

scopique particulier qui n’est plus celui<br />

<strong>de</strong> l’image errante du miroir fugitif mais,<br />

une photographie. Cette photographie<br />

qui présente une image fixe, non mobile,<br />

précè<strong>de</strong> sa naissance <strong>de</strong> vingt années<br />

exactement. Qu’est ce qui a pu suici<strong>de</strong>r<br />

Pasolini vingt avant sa naissance ? Le<br />

suici<strong>de</strong> est toujours une question adressée<br />

à l’Autre et à son désir, soit la<br />

construction d’un Autre. In fine, il s’agit<br />

toujours dans le suici<strong>de</strong> du rapport du<br />

sujet à la question énigmatique <strong>de</strong> son<br />

désir. Quel Autre désirant Pasolini a-til<br />

construit ? Qu’ont voulu ses parents<br />

pour lui ? Quel désir les animait avant<br />

la naissance <strong>de</strong> cet enfant particulièrement.<br />

Telle est la construction à<br />

l’œuvre.<br />

Cette <strong>de</strong>rnière strophe nous oriente<br />

ainsi vers ce que fut le drame pasolinien.<br />

Cette photographie représente<br />

ses <strong>de</strong>ux parents tête contre tête. La<br />

11 octobre 2006<br />

Interprétation<br />

et dynamique<br />

<strong>de</strong> la cure<br />

Bernard Penot<br />

8 novembre 2006<br />

L’interprétation<br />

dans le groupe<br />

Pierre Privat<br />

13 décembre 2006<br />

Interpréter<br />

pour un enfant<br />

sans langage<br />

Laurent Danon-Boileau<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

question <strong>de</strong> ce qui a pu unir ou désunir<br />

les parents à son sujet est la question<br />

portée par l’enfant. L’enfant fait copule<br />

désirante pour les parents. L’enfant<br />

met en tension la place du phallus. Le<br />

drame <strong>de</strong> la désunion au sens où, nous<br />

l’avons vu, le père n’a pas <strong>de</strong> place<br />

désirante pour la mère, le père ne crée<br />

pas du moins pour et par la mère, a<br />

touché Pasolini. Et que vient à la place<br />

<strong>de</strong> cette fonction phallique pour lui ?<br />

Le désir pour les jeunes garçons qui<br />

viennent <strong>de</strong> franchir la puberté. L’union<br />

portée par l’Eros concerne ses parents<br />

en 1902 lorsque ces <strong>de</strong>rniers sont<br />

encore pubères. La place du suici<strong>de</strong><br />

concerne directement ce qu’il a considéré<br />

comme sa faute mais aussi son<br />

débor<strong>de</strong>ment <strong>de</strong> jouissance, l’attrait<br />

homosexuel pour <strong>de</strong>s jeunes adolescents.<br />

Le recours à <strong>de</strong>s souvenirs évoquant<br />

la vie reste désormais sans effets,<br />

le scopique n’est plus en mesure <strong>de</strong><br />

parer à la marche vers la mort engagée<br />

par Pasolini, une mort qui est à<br />

présent palpable.<br />

Conclusion<br />

“L’interprétation”<br />

Le travail poétique est une tentative<br />

<strong>de</strong> placer le travail <strong>de</strong> la langue pour un<br />

sujet hors du sens commun. Ce travail<br />

se produit par le nouage pour un sujet<br />

d’un signifiant avec un corps via le scopique.<br />

Un poème naît <strong>de</strong> la voix, un<br />

poème doit être chanté dans sa déclamation,<br />

dans son énonciation. Pour<br />

qu’il soit poème il convient donc qu’il<br />

soit du corps d’abord, jouissance phonatoire<br />

alliant les sons à une contiguïté,<br />

une copule, une rupture, hors sens.<br />

Pour qu’il fasse nouage au signifiant et<br />

à la lettre il convient qu’il y ait création<br />

d’un saut, le saut métaphorique.<br />

Le passage à la lettre, l’écrit se fait via le<br />

scopique. Le résultat, via cette métaphore<br />

qui est toujours réelle et non<br />

symbolique ou imaginaire ainsi que<br />

Lacan l’indique à son insu en utilisant<br />

le terme inapproprié dans son enseignement<br />

<strong>de</strong> 1958 <strong>de</strong> métaphore déli-<br />

10 janvier 2007<br />

Ecoute<br />

et interprétation<br />

Sesto-Marcello Passone<br />

14 mars 2007<br />

Interpréter<br />

le traumatisme<br />

à l’adolescence<br />

Christine Jean-Strochlic<br />

9 mpai 2007<br />

Interprétation<br />

et transferts<br />

en cure d’enfants<br />

Albert Louppe<br />

10 janvier 2007 13 juin 2007<br />

L’interprétation dans le<br />

cadre <strong>de</strong> la consultation<br />

Elisabeth Castex<br />

LIEU DES CONFÉRENCES : UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES<br />

Un mercredi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />

Renseignements : Société Psychanalytique <strong>de</strong> Paris, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tél.<br />

01 43 29 66 70 lundi-mercredi <strong>de</strong> 9h à 13h et mardi-jeudi <strong>de</strong> 13h à 17h. E-mail :<br />

spp@spp.asso.fr. Site internet : www.spp.asso.fr. Inscriptions : secrétariat <strong>de</strong> la Société<br />

Psychanalytique <strong>de</strong> Paris uniquement pour le cycle complet ou sur place, le soir <strong>de</strong> la conférence<br />

pour les conférences à l’unité ou le cycle complet. Cycle complet <strong>de</strong>s conférences du<br />

mercredi : 90 € (60 € pour les étudiants - joindre copie carte), à l’unité : 15 € (10 € pour les<br />

étudiants sur présentation <strong>de</strong> la carte). AUCUNE INSCRIPTION N’EST PRISE PAR<br />

L’UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

rante, est hors sens commun.<br />

Lire un poème <strong>de</strong> Pasolini à la lettre et<br />

en contiguïté permet d’écrire et <strong>de</strong> lire<br />

l’au-<strong>de</strong>là du sens <strong>de</strong> sa création, ce qu’il<br />

y a d’insu pour le sujet dans sa création.<br />

L’intitulé du poème choisi enseigne :<br />

« Danses ». Danser c’est accor<strong>de</strong>r son<br />

corps à un rythme <strong>de</strong> sons, <strong>de</strong> signifiants.<br />

Ce corps doit tenir <strong>de</strong>bout, en<br />

position érigée et mobile au regard <strong>de</strong><br />

l’autre. Qu’y a-t-il au-<strong>de</strong>là du sens commun<br />

sinon ce rapport pulsionnel pour<br />

faire vivre un sujet.<br />

En 1944-49 le drame pasolinien est<br />

que la pureté infantile ne suffit plus à<br />

tenir son mon<strong>de</strong>. L’enfance est pour<br />

lui une promesse <strong>de</strong> bonheur qui est en<br />

contiguïté au désir maternel. Le drame<br />

<strong>de</strong> la puberté le déchire, il a honte <strong>de</strong><br />

son homosexualité envers les jeunes<br />

adolescents. Le primat du scopique<br />

permet pour autant <strong>de</strong> faire tenir le<br />

sujet Pasolini face au gouffre du vi<strong>de</strong><br />

subjectif dans son mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> jouissance<br />

selon le mo<strong>de</strong> d’articulation dynamique<br />

que nous avons décrit entre le<br />

signifiant, le scopique et le corps. Ce<br />

qui prédomine est le rapport à son idée<br />

<strong>de</strong> la jouissance <strong>de</strong> la mère petite fille,<br />

promesse <strong>de</strong> bonheur dans l’enfance<br />

qui fait également son rapport à la<br />

faute.<br />

En 1974 le drame pasolinien est autre.<br />

Rien ne vient parer au vi<strong>de</strong>. La promesse<br />

<strong>de</strong> bonheur dans l’enfance disparaît.<br />

Le scopique dans sa fonction<br />

est <strong>de</strong>venu fugitif, il ne renvoie uniquement<br />

et définitivement qu’à une<br />

ombre immobile, l’ombre <strong>de</strong> son enfance<br />

perdue. La promesse <strong>de</strong> bonheur<br />

est <strong>de</strong>venue une ombre, une forme<br />

qui renvoie à la figure figée <strong>de</strong> la mort.<br />

Le scopique <strong>de</strong>vient bloc <strong>de</strong> glace, obstacle<br />

mortifère. Il a perdu l’élan du<br />

moteur subjectif d’autrefois. Face au<br />

vi<strong>de</strong> un appel vain est fait envers le<br />

père et sa fonction. Ce vi<strong>de</strong> paternel<br />

pouvait déjà être lu en 1949, non par<br />

l’illusoire lecture d’une défaillance <strong>de</strong> la<br />

métaphore paternelle, concept <strong>de</strong>venu<br />

obsolète, mais par l’absence <strong>de</strong> fonc-<br />

“L’interprétation”<br />

19 octobre 2006<br />

Interprétation<br />

et répétition agie<br />

Robert Mancini<br />

16 novembre 2006<br />

Interpréter,<br />

pourquoi ?<br />

Michel <strong>de</strong> M’Uzan<br />

21 décembre 2006<br />

Preocessus<br />

et interprétation<br />

Monique Cournut-Janin<br />

tion <strong>de</strong> création du moins que nous<br />

avons mis en évi<strong>de</strong>nce. La nomination<br />

Danses a-t-elle à voir avec le fait que<br />

Carlo Alberto a dilapidé sa fortune à la<br />

mort <strong>de</strong> son père alors qu’il était très<br />

jeune pour une danseuse ? Ce qui<br />

importe pour Pier Paolo est que la faillite<br />

<strong>de</strong> ce qui unit, la blessure mortelle <strong>de</strong><br />

l’enfance se ravive par la cassure du<br />

lien avec Ninetto Davoli. Ce qui faisait<br />

tenir en 1949 Pasolini, le nouage<br />

envers « la mère petite fille », ne supplée<br />

plus. L’Amour s’est effondré<br />

comme à l’âge <strong>de</strong> trois ans. La photographie,<br />

fictive, puisque ses parents se<br />

sont rencontrés alors que Carlo Alberto<br />

était déjà militaire, représente l’avant<br />

<strong>de</strong> la déflagration qui le pousse au suici<strong>de</strong>.<br />

A la place du scopique qui se<br />

meut sans pouvoir accrocher un nouage<br />

i<strong>de</strong>ntitaire ne se profilent que le réel<br />

<strong>de</strong> l’arête du bloc <strong>de</strong> glace et la photographie<br />

qui met la rupture pubertaire<br />

en place <strong>de</strong> faute subjective.<br />

Ce poème dans ses <strong>de</strong>ux formes d’écriture<br />

peut être lu comme paradigmatique<br />

d’une lecture <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> Pasolini.<br />

Le primat du scopique qu’il recèle<br />

et son <strong>de</strong>stin peuvent également interroger<br />

la bascule subjective provoquée<br />

par le passage vers l’art cinématographique<br />

à partir <strong>de</strong> 1961. ■<br />

Hervé Hubert*,<br />

Caroline Happiette**<br />

*Psychiatre, Psychanalyste, Elan Retrouvé,<br />

Paris,<br />

**Master <strong>de</strong> Psychologie, Paris XIII<br />

Bibliographie<br />

(1) voir HUBERT H., Transsexualisme, du<br />

syndrome au sinthome, Thèse <strong>de</strong> Psychologie,<br />

Université Rennes 2, février 2006<br />

(2) DE CECCATTY R., Pasolini, Folio Biographies<br />

Gallimard, Paris, 2005, p. 22<br />

(3) id, p. 31<br />

(4) in PASOLINI P. P. P. , La nouvelle jeunesse,<br />

NRF, Gallimard, Paris, 2003, p. 311<br />

(5) opus cité, p. 305.<br />

(6) i<strong>de</strong>m, p. 67-70.<br />

(7) i<strong>de</strong>m, p 241-244.<br />

18 janvier 2007<br />

La naissance<br />

<strong>de</strong> l’interprétation<br />

Gilbert Diatkine<br />

22 mars 2007<br />

Interpréter l’Œdipe ?<br />

Michèle Perron-Borelli<br />

24 mai 2007<br />

L’interprétation<br />

selon D. Winnicott<br />

Jean-François Rabain<br />

21 juin 2007<br />

Relance associative<br />

et interprétation<br />

Sylvie Dreyfus-Asséo<br />

LIEU DES CONFÉRENCES : UNIVERSITÉ RENÉ DESCARTES<br />

Un jeudi par mois à 21h15. Conférences ouvertes à tout public - 12 rue <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine 75006 Paris<br />

Renseignements : Société Psychanalytique <strong>de</strong> Paris, 187 rue Saint-Jacques, 75005 Paris. Tél.<br />

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sur présentation <strong>de</strong> la carte). AUCUNE INSCRIPTION N’EST PRISE PAR L’UNIVERSITÉ RENÉ<br />

DESCARTES.<br />

LIVRES ET REVUES<br />

La subjectivation<br />

François Richard, Steven Wainrib<br />

et al.<br />

Dunod, 24 €<br />

L’usage du concept <strong>de</strong> subjectivation<br />

est apparu en psychanalyse pour rendre<br />

compte <strong>de</strong> formes <strong>de</strong> souffrances psychiques<br />

liées à la construction d’un espace<br />

psychique différencié. Son développement<br />

pose la question d’un<br />

concept limite entre l’intra-psychique<br />

et l’inter-subjectit, susceptible <strong>de</strong> relier<br />

la diversité <strong>de</strong> nos pratiques.<br />

Pour R. Cahn le terme même <strong>de</strong> subjectivation<br />

implique qu’il s’agit d’un sujet<br />

processuel, construit à partir <strong>de</strong> ses<br />

liens aux autres. Son actualisation et<br />

sa reconnaissance constituent l’objet<br />

ultime <strong>de</strong> la démarche analytique. S.<br />

Wainrib développe une architecture<br />

<strong>de</strong> la subjectivation, un réseau <strong>de</strong> liens<br />

ouverts, <strong>de</strong> l’association psychosomatique<br />

aux multiples stratégies du désir<br />

qui ont à rencontrer les cadres <strong>de</strong> la<br />

vie avec les autres. R. Roussillon relance<br />

la question vers l’appropriation<br />

subjective, abordant notamment les<br />

problématiques narcissiques en donnant<br />

une extension nouvelle à l’idée<br />

freudienne d’une « ombre <strong>de</strong> l’objet tombée<br />

sur le moi ». Parti <strong>de</strong> la dynamique<br />

<strong>de</strong> la symbolisation et <strong>de</strong> l’appropriation<br />

subjective dans le transfert, le travail<br />

<strong>de</strong> F. Richard mène aux logiques<br />

à l’oeuvre entre désubjectivation psychotique<br />

et création. C. Chabert appuie<br />

sa recherche sur la double lecture d’une<br />

cure analytique, reprise 15 ans après,<br />

en fonction <strong>de</strong> l’émergence <strong>de</strong> la notion<br />

<strong>de</strong> subjectivation. Pour R. Kaës le<br />

sujet est un intersujet, et le groupe est<br />

vu comme un espace psychique commun<br />

et partagé dans lequel se nouent<br />

<strong>de</strong>s alliances inconscientes entre les<br />

sujets qui le constituent. A. Carel traite<br />

d’une intersubjectalisation, mettant<br />

l’accent sur un processus qui change<br />

le bébé et son environnement. S’appuyant<br />

sur son expérience institutionnelle<br />

<strong>de</strong>s adolescents, B. Penot pose<br />

la nécessité d’un détour par l’espace<br />

psychique <strong>de</strong>s soignants pour restituer<br />

au patient les repères signifiants qui<br />

lui ont fait défaut.<br />

Avec la collaboration <strong>de</strong> Raymond Cahn, André<br />

Carel, Bernard Penot, René Roussillon, René Kaes.<br />

Les copains<br />

Liens d’amitié entre enfants et<br />

entre adolescents<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Jean-Philippe<br />

Raynaud, Danièle Guilbert, Jean-<br />

Clau<strong>de</strong> Cébula<br />

Enfances & Psy 2006 n°31<br />

Erès, 15 €<br />

Dans la première partie <strong>de</strong> ce numéro<br />

sur l’amitié, on perçoit qu’ainsi aller<br />

vers l’autre, c’est aussi aller vers soi.<br />

Très tôt, soutenus en cela par les adultes,<br />

les enfants élisent parmi leurs pairs<br />

ceux qui seront leurs copains, pour<br />

quelques jours ou pour la vie (H. Gane,<br />

C. Graindorge, B. Assezat). Les affinités,<br />

les sympathies, le plaisir <strong>de</strong> la réciprocité<br />

<strong>de</strong>s liens et <strong>de</strong> l’attachement<br />

(R. Dugravier, N. Gue<strong>de</strong>ney, A.-S. Mintz)<br />

se mettent en place très tôt et constituent<br />

un véritable théâtre du lien extrafamilial.<br />

Avec plus ou moins <strong>de</strong> satisfaction,<br />

plus ou moins <strong>de</strong> violence,<br />

les enfants découvrent, expérimentent,<br />

mettent à l’épreuve et échafau<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s<br />

amitiés, dans lesquelles ils engagent<br />

leurs assises narcissiques en <strong>de</strong>venir<br />

et qui, en retour, participent à leur<br />

construction (D. Brun, B. Assezat).<br />

Quand vient le temps <strong>de</strong>s copains, tous<br />

les professionnels <strong>de</strong> l’enfance savent<br />

à quel point, même si les émotions, les<br />

sentiments, les joies et les blessures<br />

sont vécus « pour <strong>de</strong> vrai », les amitiés<br />

constituent une sorte d’extraordinaire<br />

terrain <strong>de</strong> construction gran<strong>de</strong>ur nature<br />

du sujet en <strong>de</strong>venir, <strong>de</strong> la qualité<br />

<strong>de</strong> ses relations aux autres, <strong>de</strong> sa différenciation.<br />

Que ce soit à l’école<br />

(E. Go<strong>de</strong>au, F. Navarro, C. Vignes), à<br />

l’occasion <strong>de</strong> confi<strong>de</strong>nces à un journal<br />

« ami » (S. Clochard, B. Carrère, Ch. Metzger)<br />

ou <strong>de</strong> questionnements sur le corps,<br />

la sexualité, l’accès à la parentalité (M.<br />

Prudhomme).<br />

L’influence <strong>de</strong>s pairs, en particulier à<br />

l’adolescence, est <strong>de</strong> mieux en mieux<br />

connue. Dans les actions <strong>de</strong> prévention<br />

visant les adolescents, on sait que<br />

faire passer <strong>de</strong>s messages par les pairs<br />

est bien plus efficace que tous les arguments<br />

<strong>de</strong>s doctes spécialistes. On<br />

sait aussi qu’en matière d’expérimentations<br />

<strong>de</strong> toxiques, le rôle, dissuasif<br />

ou incitatif, joué par les pairs est bien<br />

supérieur à celui <strong>de</strong> l’entourage familial<br />

ou <strong>de</strong>s professionnels. Ainsi, les<br />

mouvements d’i<strong>de</strong>ntification se jouent<br />

largement hors du théâtre familial, par<br />

exemple au sein <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> ou <strong>de</strong> la<br />

tribu (J.-P. Le Run). A l’occasion <strong>de</strong>s rencontres,<br />

la quête du semblable et <strong>de</strong><br />

l’altérité est une aventure à la fois riche<br />

et risquée (J.Ph. Raynaud).<br />

Les relations interpersonnelles nous<br />

nourrissent et nous exposent, nous<br />

ren<strong>de</strong>nt à la fois plus forts et plus vulnérables.<br />

Pierre Bourdieu, théorie et<br />

pratique<br />

Perspectives franco-alleman<strong>de</strong>s<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Yves Sintomer<br />

et Hans Peter Muller<br />

La Découverte, 25 €<br />

Ce n’est pas un livre d’hommage, même<br />

si cette dimension n’est pas absente<br />

dans les contributions réunies. Il s’agit<br />

<strong>de</strong> prendre au sérieux l’œuvre du plus<br />

grand sociologue français <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong><br />

moitié du XX e siècle en s’interrogeant<br />

sur ses apports et sur les tensions<br />

qui parcourent son œuvre, en<br />

jetant sur celle-ci <strong>de</strong>s lumières contrastées,<br />

en la comparant avec d’autres<br />

problématiques. La secon<strong>de</strong> ambition<br />

est d’interroger Pierre Bourdieu dans<br />

une perspective franco-alleman<strong>de</strong>. Par<br />

décentrement, un tel regard permet<br />

<strong>de</strong> jeter <strong>de</strong> nouvelles lumières sur les<br />

sciences sociales françaises et sur les<br />

sciences sociales en général, sur Pierre<br />

Bourdieu et sur les questions qu’il a<br />

travaillées. Les rapprochements et les<br />

comparaisons que l’on trouve en constituent<br />

un exemple, Pierre Bourdieu y<br />

est notamment mis en regard avec<br />

Martin Hei<strong>de</strong>gger, Ludwig Wittgenstein,<br />

Niklas Luhmann ou Jürgen Habermas.<br />

Le double éclairage franco-allemand<br />

propose un mélange entre <strong>de</strong>s approches<br />

plus fidèles à la lettre <strong>de</strong> l’œuvre<br />

<strong>de</strong> Pierre Bourdieu et d’autres plus distanciées.<br />

Il s’agit d’approfondir notre<br />

connaissance <strong>de</strong>s travaux <strong>de</strong> Pierre<br />

Bourdieu et <strong>de</strong> tester leur valeur heuristique<br />

pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> nos sociétés.<br />

Les cinq premiers chapitres portent sur<br />

le cadre théorique général en détachant<br />

certaines notions, en effectuant<br />

<strong>de</strong>s comparaisons ou en étudiant telle<br />

ou telle problématique. Une préoccupation<br />

théorique parcourt les autres<br />

contributions, avec le souci <strong>de</strong> travailler<br />

systématiquement les rapports qu’entretient<br />

la théorie avec les recherches<br />

empiriques. Les six chapitres suivants<br />

permettent <strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s pans <strong>de</strong><br />

la réception <strong>de</strong> Bourdieu en France et<br />

en Allemagne, en sociologie et en histoire.<br />

Ils donnent <strong>de</strong>s points d’appui<br />

pour un regard décentré.<br />

Enfin, les <strong>de</strong>ux <strong>de</strong>rniers chapitres portent<br />

sur les rapports entre le savant et<br />

le politique.<br />

Terrain privilégié <strong>de</strong>s paradoxes et <strong>de</strong>s<br />

mises en tension, alchimie complexe<br />

et fragile entre investissement narcissique<br />

et investissement objectal <strong>de</strong>s<br />

liens, l’amitié, comme toute aventure<br />

humaine, comporte ses risques, ses<br />

mises à l’épreuve, ses impasses. Elle<br />

traverse la vie et est traversée par elle,<br />

avec ses crises et ses violences (S.<br />

Bour<strong>de</strong>t-Loubère, A. Piernikarch), mais<br />

aussi avec ses moments magiques et<br />

le plaisir à « être avec » (F. Hocini, C.<br />

Potel-Baranes).<br />

PSYCHANALYSE ■ 9<br />

L’ennui et l’enfant<br />

La lettre <strong>de</strong> l’enfance et <strong>de</strong><br />

l’adolescence juin 2005 n°60<br />

Erès, 13 €<br />

Ce numéro propose, autour <strong>de</strong> l’ennui<br />

et l’enfant, une réflexion illustrée par<br />

la clinique et par les pratiques professionnelles.<br />

Tâche qui révèle que l’ennui<br />

peut être une passion comme une<br />

autre. Ce qui est la thèse <strong>de</strong> Martine<br />

Menès, à propos du désir du rien.<br />

Mais l’ennui est aussi fatigue et lassitu<strong>de</strong>,<br />

préoccupation et inquiétu<strong>de</strong>, agacement,<br />

attente impatiente, déconvenue.<br />

Le refuser, n’est-ce pas refuser le<br />

manque, l’incomplétu<strong>de</strong> ? C’est ce<br />

qu’évoque un article collectif (I. Chevalier,<br />

M. Matrand, N. Murcier) autour<br />

<strong>de</strong> l’hypothèse du « refus <strong>de</strong> l’ennui<br />

comme défense contre l’impossibilité <strong>de</strong><br />

combler l’autre ». L’enfant du passé s’ennuyait<br />

probablement aussi. Ne seraitce<br />

pas plutôt le regard sur l’ennui, ses<br />

manifestations, ses causes, qui ont<br />

changé ? C’est ce qu’abor<strong>de</strong> Clau<strong>de</strong><br />

Schau<strong>de</strong>r dans sa contribution sur<br />

l’évolution <strong>de</strong> la société et l’ennui <strong>de</strong>s<br />

jeunes. Pourtant les poètes, les écrivains,<br />

en ont souligné la dimension<br />

créative et <strong>de</strong>ssiné les contours incertains,<br />

ce que montrent les poèmes <strong>de</strong><br />

ces jeunes filles d’un atelier d’écriture<br />

d’IMP tels que les a recueillis Françoise<br />

Brossier Mével.<br />

Comment la littérature enfantine, adolescente,<br />

ou les programmes télévisuels<br />

tiennent-ils compte aujourd’hui<br />

<strong>de</strong> l’ennui ? Marina D’Amato s’interroge<br />

sur la télé comme remè<strong>de</strong> à l’ennui<br />

d’enfants captifs <strong>de</strong>s programmes.<br />

L’ennui, « état <strong>de</strong> lassitu<strong>de</strong> involontaire<br />

engendré par la rencontre fortuite d’une<br />

certaine situation et d’un certain individu<br />

», état toujours singulier donc, rappelle<br />

Mathieu Ledoux, fait peur, d’abord<br />

et peut-être surtout aux adultes.<br />

Robert Toboul, avec son « plaidoyer<br />

pour l’ennui » en définit les frontières<br />

avec la dépression pour en souligner<br />

l’aspect constructif dans « le processus<br />

<strong>de</strong> maturation qui fait <strong>de</strong> l’enfant un<br />

adulte ». Véronique Dufour propose un<br />

travail sur l’ennui <strong>de</strong> l’enfant dit surdoué.<br />

Dominique Ottavi interroge cet ennui<br />

contemporain, « absence du sens, au<br />

sens propre, du temps et <strong>de</strong> l’espace qui<br />

débouche sur l’absence du sens <strong>de</strong> l’effort<br />

». Il commence dès la crèche (Irina<br />

Roufidou : les bébés et l’ennui), continue<br />

à l’école (Isabelle Lechevallier :<br />

l’ennui au collège), et s’épanouit le dimanche,<br />

c’est ce qu’Olivier Cadot et<br />

Francine Ferreira illustrent avec une situation<br />

particulière certes : <strong>de</strong>s enfants<br />

en foyer d’accueil.<br />

Dans « l’obscure clarté <strong>de</strong> l’ennui »Tristan<br />

Garcia-Fons invite à voyager jusqu’à<br />

la lumière.<br />

La rubrique Histoire donne la parole à<br />

Berthe Burko à propos d’une enfance<br />

pas comme les autres, prises dans les<br />

impératifs d’une histoire meurtrière qui<br />

a obligé <strong>de</strong>s enfants <strong>de</strong> tous les âges<br />

à être cachés pour survivre. L’on en retrouve<br />

<strong>de</strong>s témoignages dans le livre<br />

Traqués, cachés, vivants, <strong>de</strong>s enfants<br />

juifs en France..., commenté par Françoise<br />

Petitot dans la rubrique Lectures.<br />

De la relation d’ai<strong>de</strong> à la<br />

relation d’êtres<br />

La réciprocité transformatrice<br />

Christophe Gaignon<br />

Préface <strong>de</strong> Guy Ausloos<br />

Postface <strong>de</strong> Jeanne-Marie Rugira<br />

L’Harmattan, 18 €<br />

Ce livre traite <strong>de</strong> la démarche d’un éducateur<br />

au Québec engagé auprès <strong>de</strong><br />

jeunes et <strong>de</strong> familles en situation <strong>de</strong><br />

rupture, <strong>de</strong> crise et <strong>de</strong> transition. Soucieux<br />

d’être présent à lui-même et « lieu<br />

d’accueil pour l’autre », l’auteur cherche<br />

à intégrer sa propre histoire <strong>de</strong> vie et<br />

sa pratique. Il entre par la porte <strong>de</strong>s<br />

compétences et <strong>de</strong>s aspirations pour<br />

mieux vivre la relation comme lieu et<br />

levier <strong>de</strong> transformation.


10<br />

■ ENTRETIEN<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Les représentations sociales<br />

<strong>de</strong> la schizophrénie<br />

Congrès <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> et <strong>de</strong><br />

Neurologie <strong>de</strong> langue Française<br />

Frantz-Samy Kohl<br />

Masson<br />

Cet ouvrage présente une synthèse<br />

sur les représentations sociales (origines,<br />

facteurs, impacts, etc.) <strong>de</strong> la<br />

schizophrénie. Sont ainsi abordés le<br />

concept <strong>de</strong> représentation sociale en<br />

insistant sur le double ancrage individuel<br />

et collectif, puis la représentation<br />

sociale <strong>de</strong> la maladie en général,<br />

les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recherches utilisées<br />

pour saisir leur contenu et leur<br />

organisation, ainsi que leur évolution.<br />

L’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s représentations sociales<br />

<strong>de</strong> la maladie mentale et <strong>de</strong> la schizophrénie<br />

met en évi<strong>de</strong>nce les conséquences<br />

psychologiques et sociales<br />

qu’elles ont sur le patient et leur famille,<br />

la manière dont elles interviennent<br />

dans l’évolution <strong>de</strong> la maladie,<br />

dans le recours au soin, dans<br />

la compliance thérapeutique et l’insertion<br />

sociale <strong>de</strong>s patients.<br />

Enfant surdoué, adulte<br />

créateur ?<br />

Pélagie Papoutsaki<br />

L’Harmattan, 25,50 €<br />

Cet ouvrage met en relation l’autonomie<br />

tout à fait particulière du créateur<br />

avec celle <strong>de</strong> l’enfant surdoué,<br />

traite le processus créatif, et cherche<br />

une enfance <strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier chez l’enfant<br />

surdoué. Les expectatives et exigences<br />

du conformisme socialement<br />

valorisé obligent cependant l’enfant<br />

surdoué <strong>de</strong> renoncer à ce qui est au<br />

coeur <strong>de</strong> son surdouement (l’autonomie<br />

processus créatif) pour appartenir<br />

au social dont il est dépendant,<br />

ou s’impliquer dans une lutte<br />

sans issue pour maintenir autonomie<br />

et appartenance. Une pédagogie/<br />

éducation pour surdoués exige <strong>de</strong>s<br />

sociétés ouvertes au différent et la<br />

délibération <strong>de</strong>s conceptions déterministes<br />

ou <strong>de</strong>scriptives du surdouement.<br />

Problématiques<br />

psychiatriques<br />

Sud/Nord n°21<br />

Erès, 19 €<br />

Devant l’intérêt suscité par les <strong>de</strong>ux<br />

<strong>de</strong>rniers numéros traitant plus particulièrement<br />

<strong>de</strong> certains aspects <strong>de</strong> la<br />

psychiatrie (« Politique et psychiatrie »<br />

et « Pouvoirs »), ce numéro rassemble<br />

plusieurs textes réunis après les journées<br />

<strong>de</strong> psychiatrie <strong>de</strong> Dax <strong>de</strong> 1999,<br />

2001 et 2003, journées auxquelles<br />

pratiquement tous les membres du<br />

comité <strong>de</strong> rédaction ont participé <strong>de</strong><br />

manière régulière ou occasionnelle.<br />

La psychiatrie, dans ses théories, dans<br />

ses pratiques, dans ses objectifs et<br />

dans ses mo<strong>de</strong>s d’organisation, n’est<br />

pas étrangère aux idéologies et à<br />

leurs retombées concrètes dans la vie<br />

<strong>de</strong>s gens, même si ces acteurs s’en<br />

défen<strong>de</strong>nt souvent, soit en se retranchant<br />

<strong>de</strong>rrière la prétendue rigoureuse<br />

scientificité <strong>de</strong> leur discipline,<br />

soit en se réclamant d’une<br />

ineffable spécificité ou d’un savoir<br />

sans égal. De ce fait, la psychiatrie,<br />

comme toute activité humaine est<br />

problématique.<br />

C’est donc <strong>de</strong> certaines <strong>de</strong> ces problématiques<br />

psychiatriques qu’est fait<br />

ce vingt et unième numéro <strong>de</strong> Sud/<br />

Nord : les rapports plus ou moins distants,<br />

plus ou moins conflictuels, <strong>de</strong><br />

la mé<strong>de</strong>cine et <strong>de</strong> la psychiatrie, l’organisation<br />

actuelle <strong>de</strong> la psychiatrie<br />

(particulièrement en France et au Portugal)<br />

et la question <strong>de</strong> la violence<br />

qui agite, aujourd’hui comme hier, le<br />

mon<strong>de</strong> dans lequel nous vivons.<br />

<br />

civilisatrice » du PMSI. Certes, il peut<br />

être utile dans certaines circonstances<br />

<strong>de</strong> mettre en place <strong>de</strong>s intersectorialités<br />

lorsque les moyens nécessaires sont<br />

bien supérieurs aux disponibilités <strong>de</strong><br />

chaque secteur <strong>de</strong> psychiatrie, par<br />

exemple les unités mères-bébés, ou<br />

les hospitalisations à temps complet<br />

en pédopsychiatrie, mais quand il s’agit<br />

<strong>de</strong> choisir, en antagonisme parfait avec<br />

la sectorisation, les seuls patients dont<br />

on souhaite s’occuper et s’en décréter<br />

le spécialiste local, départemental ou<br />

régional, les conséquences en sont aussitôt<br />

incalculables : rigidification <strong>de</strong>s<br />

symptômes d’entrée dans la nouvelle<br />

structure, rejet <strong>de</strong>s patients qui n’appartiennent<br />

pas à sa sur-spécialité<br />

(« Casse toi, t’es pas <strong>de</strong> ma ban<strong>de</strong> ! »),<br />

tendance à la standardisation <strong>de</strong>s diagnostics<br />

et <strong>de</strong>s thérapeutiques sous<br />

couvert <strong>de</strong>s consensus autorisés par<br />

les statistiques... On n’est plus dès lors<br />

dans une logique d’accueil <strong>de</strong> tous les<br />

patients du secteur dont j’ai la charge,<br />

présentant une souffrance psychique<br />

et dont on va <strong>de</strong>voir s’occuper<br />

pour qu’il aille mieux, ce qui<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> beaucoup <strong>de</strong> moyens<br />

humains, on est dans une autre<br />

logique, celle <strong>de</strong> choisir les patients<br />

permis pour sa structure <strong>de</strong> référence,<br />

ce qui peut aisément être « contingenté<br />

» sur le plan budgétaire. Or la<br />

psychiatrie, si elle est évi<strong>de</strong>mment une<br />

branche <strong>de</strong> la mé<strong>de</strong>cine comme les<br />

autres, possè<strong>de</strong> cependant quelques<br />

spécificités incontournables sous peine<br />

<strong>de</strong> retour massif aux pratiques<br />

anciennes. La psychiatrie <strong>de</strong> secteur,<br />

on l’oublie souvent est un dispositif<br />

<strong>de</strong> navigation sur l’océan <strong>de</strong> la folie<br />

qui a été créé par ceux qui en avaient<br />

inventé la boussole méthodique, les<br />

fondateurs <strong>de</strong> la psychothérapie institutionnelle<br />

(Tosquelles, Daumézon,<br />

Bonnafé,...). Ces pionniers avaient ru<strong>de</strong>ment<br />

critiqué les phénomènes asilaires<br />

et abouti à la notion <strong>de</strong> sectorisation<br />

pour proposer une alternative à une<br />

psychiatrie qui ne prenait pas en compte<br />

le sujet, et la relation transférentielle<br />

qu’il instaure avec ceux qui s’occupent<br />

<strong>de</strong> lui. La nécessité <strong>de</strong> la prise en<br />

compte <strong>de</strong> la continuité <strong>de</strong>s soins est la<br />

traduction en langage administratif <strong>de</strong><br />

ce qui est utile pour tenir compte <strong>de</strong> la<br />

relation <strong>de</strong> transfert dans le traitement<br />

<strong>de</strong> la maladie mentale dans la durée.<br />

Aujourd’hui, nous en revenons à une<br />

psychiatrie <strong>de</strong>s comportements, une<br />

psychiatrie sans transfert, et je vous<br />

l’annonce, nous retournons inévitablement<br />

vers (dans le) les murs <strong>de</strong> l’asile<br />

! Ils ne se présenteront peut-être pas<br />

comme auparavant, encore que le projet<br />

<strong>de</strong> prévention <strong>de</strong> la délinquance<br />

peut nous le faire craindre tant la<br />

dimension répressive y est omniprésente,<br />

mais probablement plus sous la<br />

forme <strong>de</strong> multiples asiles périphériques<br />

dans les maisons <strong>de</strong> retraite, les MAS,<br />

les services <strong>de</strong> « sûreté » psychiatriques<br />

départementaux, bref, tous les établissements<br />

qui acceptent d’accueillir la<br />

misère humaine la plus difficile à<br />

prendre en charge parce qu’elle nécessite<br />

<strong>de</strong>s interventions multiples, et l’asile<br />

commence quand un seul intervenant<br />

prétend apporter l’ensemble <strong>de</strong>s<br />

solutions à une personne. Problème<br />

supplémentaire, celui <strong>de</strong> la raréfaction<br />

progressive <strong>de</strong>s psychiatres en formation,<br />

alors que nous le dénonçons<br />

après l’avoir prévu <strong>de</strong>puis au moins<br />

vingt ans. Il nous faudra attendre encore<br />

dix à quinze ans pour que les postes<br />

créés soient pourvus par <strong>de</strong>s personnes<br />

qualifiées. D’ici là, beaucoup <strong>de</strong> nos<br />

jeunes collègues ne passeront même<br />

plus dans <strong>de</strong>s services sectorisés et ne<br />

seront pas formés dans ce sens, en raison<br />

du fait que la sectorisation apparaît<br />

trop souvent comme dépassée. Mon<br />

parcours <strong>de</strong> psychiatre <strong>de</strong> secteur avant<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>venir psychiatre universitaire m’a<br />

prémuni contre cet oubli fâcheux et<br />

je crois indispensable aujourd’hui <strong>de</strong><br />

parler et d’enseigner la sectorisation<br />

et la psychothérapie institutionnelle<br />

pour toutes ces raisons fondamentales.<br />

C’est pourquoi, non seulement j’ai écrit<br />

cet ouvrage sur le soin à la personne<br />

psychotique, mais aussi créé <strong>de</strong>puis, à<br />

la Faculté <strong>de</strong> Mé<strong>de</strong>cine <strong>de</strong> Lille, un<br />

Diplôme Universitaire <strong>de</strong> Psychothérapie<br />

Institutionnelle sur <strong>de</strong>ux ans<br />

(auquel sont déjà inscrites soixantedix<br />

personnes venues <strong>de</strong> toute la France<br />

(1)).<br />

M. S.-C. : Un <strong>de</strong>s aspects très attachant<br />

<strong>de</strong> votre ouvrage est qu’il s’ancre au plus<br />

près <strong>de</strong>s pratiques locales. Vous semblez<br />

connaître un nombre impressionnant <strong>de</strong><br />

praticiens et vouloir les citer tous. Comment<br />

y êtes vous arrivé ?<br />

P.D. : Je crois profondément à l’expérience<br />

<strong>de</strong> la rencontre entre les êtres<br />

humains. Lorsque ces rencontres peu-<br />

vent êtres relatées d’une façon vivante,<br />

elles permettent à ceux qui les lisent<br />

et les enten<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> les harmoniser à<br />

leur tempérament, au sens <strong>de</strong> la<br />

musique, et d’en faire quelque chose<br />

dans leur propre trajectoire vitale. C’est<br />

un peu comme les Cinq psychanalyses<br />

écrites par Freud (à qui je propose<br />

d’ailleurs dans mon ouvrage <strong>de</strong> figurer<br />

parmi les pères fondateurs <strong>de</strong> la<br />

psychothérapie institutionnelle ; rappelez<br />

vous son discours <strong>de</strong> Budapest<br />

en 1918) qui ne peuvent résumer à<br />

elles seules toute la psychanalyse. Il<br />

n’est pas possible <strong>de</strong> les réduire à un<br />

seul cas exemplaire : chaque sujet est<br />

unique et chaque manière <strong>de</strong> le<br />

prendre en compte est également<br />

unique. C’est ce que nous enseigne<br />

Saint-Exupéry quand il écrit : « Tu seras<br />

pour moi unique au mon<strong>de</strong> » (dit le<br />

renard au petit prince à qui il est en<br />

train d’expliquer l’apprivoisement<br />

comme modèle <strong>de</strong> la relation transférentielle).<br />

Comment peut-on penser,<br />

lorsqu’on fait ce métier, qu’un traitement<br />

pourrait être standard ? Bien sûr<br />

les doses <strong>de</strong> neuroleptiques peuvent<br />

être standardisées en fonction du poids,<br />

mais le travail psychothérapique le<br />

peut-il ? Non, bien entendu. C’est<br />

d’ailleurs une <strong>de</strong> nos gran<strong>de</strong>s difficultés<br />

avec l’évaluation. Mais j’espère que<br />

nous y trouverons <strong>de</strong>s réponses pertinentes.<br />

Toujours est-il que dans ma<br />

formation j’ai eu la chance <strong>de</strong> rencontrer<br />

un grand nombre <strong>de</strong> gens qui<br />

m’ont accueilli et qui ont accepté <strong>de</strong><br />

partager leurs expériences subjectives<br />

avec moi, au moins pour une part, et à<br />

partir <strong>de</strong> là, j’ai eu l’idée que je <strong>de</strong>vais<br />

à mes collègues et à ceux que je dois<br />

former, <strong>de</strong> transmettre l’expérience <strong>de</strong><br />

ces maîtres. C’est pourquoi, à chaque<br />

fois que c’est possible j’essaye <strong>de</strong> rendre<br />

à César ce qui est à César et aux praticiens<br />

<strong>de</strong> la Psychothérapie Institutionnelle<br />

ce qui leur est arrivé dans les<br />

rencontres qu’ils ont faites, et ce qu’ils<br />

m’ont transmis dans les rencontres que<br />

j’ai faites avec eux. Ces notions <strong>de</strong> fraternité<br />

et <strong>de</strong> transmission sont pour<br />

moi nécessaires dans l’exercice <strong>de</strong> la<br />

psychiatrie, sans quoi le risque est grand<br />

d’aller vers une psychiatrie vétérinaire,<br />

dans laquelle tout ce qui fait la part<br />

subjective d’un être humain, est considéré<br />

comme un artéfact. Il faut se rappeler<br />

que c’est déjà arrivé à certaines<br />

époques, notamment lors <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong><br />

nazie, et le programme T4 (2) est là<br />

pour en témoigner. Il ne faut pas l’oublier<br />

et donc en transmettre le souvenir<br />

actif aux plus jeunes.<br />

M. S.-C. : « La psychothérapie institutionnelle,<br />

c’est la psychiatrie ! » : c’est le<br />

titre d’un <strong>de</strong> vos chapitres. Vous êtes<br />

connu pour lancer <strong>de</strong>s pavés dans la<br />

mare lorsque cela vous semble justifié.<br />

On peut dire aussi que la psychiatrie<br />

psychanalytique tient le morceau du roi<br />

dans vos pratiques. Comment aimeriezvous<br />

en rappeler vous les grands axes ?<br />

PD : C’est là une phrase <strong>de</strong> Jean<br />

Oury, dont j’aime bien les colères<br />

cathartiques. Quand il a prononcé<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Entretien avec Pierre Delion<br />

celle-là, <strong>de</strong>s gens le cherchaient un<br />

peu sur la psychothérapie institutionnelle,<br />

alors qu’ils n’étaient même pas<br />

foutus <strong>de</strong> faire une psychiatrie digne<br />

<strong>de</strong> ce nom ! Il leur a rappelé l’histoire<br />

<strong>de</strong> la psychiatrie d’après la <strong>de</strong>uxième<br />

guerre mondiale et a essayé <strong>de</strong> leur<br />

démontrer l’impasse <strong>de</strong> l’antipsychiatrie.<br />

Alain Buzaré a d’ailleurs repris<br />

cette phrase pour en faire le titre <strong>de</strong><br />

son livre paru en 2004 aux éditions<br />

du champ social. Je crois en effet que<br />

la psychothérapie institutionnelle est<br />

un courant qui a beaucoup réfléchi à<br />

la question <strong>de</strong>s articulations nécessaires<br />

sur les plans théoriques et pratiques<br />

pour l’organisation <strong>de</strong>s soins<br />

pour les patients, notamment les plus<br />

en déshérence, et plus précisément<br />

encore pour les personnes psychotiques.<br />

Je rappelle souvent que le proverbe<br />

« qui peut le plus peut le moins »<br />

s’applique bien à ce mouvement. Car<br />

si cette manière <strong>de</strong> pratiquer et <strong>de</strong><br />

théoriser a été au départ mise au point<br />

pour pouvoir soigner aussi les personnes<br />

psychotiques, il est évi<strong>de</strong>nt<br />

que les autres pathologies peuvent en<br />

bénéficier « par surcroît ». Tosquelles<br />

disait souvent que cette praxis s’appuie<br />

sur <strong>de</strong>ux jambes : la psychanalytique<br />

et la politique. On le voit bien<br />

tous les jours : si on pratique la psychanalyse<br />

avec les schizophrènes et<br />

les autistes comme avec les « névrosés<br />

occi<strong>de</strong>ntaux poids moyens », avec le<br />

dispositif divan-fauteuil, le ridicule est<br />

au bout <strong>de</strong> la rue ! Il est nécessaire<br />

d’adapter le cadre à ces nouvelles<br />

situations psychopathologiques, au<br />

prix <strong>de</strong> retravailler une nouvelle métapsychologie<br />

pour elles, comme le suggère<br />

par exemple Joyce Mac Dougall.<br />

Freud le premier, nous a montré comment<br />

il pouvait remettre en cause <strong>de</strong>s<br />

pans entiers <strong>de</strong> sa métapsychologie<br />

pour y faire entrer, en authentique<br />

scientifique, ses découvertes récentes.<br />

Mais dès l’instant où l’on s’intéresse<br />

à ces pathologies psychotiques, le<br />

concept d’institution est inévitablement<br />

au ren<strong>de</strong>z vous. Non pas celui<br />

d’établissement où l’on doit les interner,<br />

mais celui d’une équipe soignante<br />

qui doit les accueillir au long <strong>de</strong><br />

leur trajectoire souvent délicate.<br />

Jacques Hochmann par exemple théorise<br />

le concept d’« institution mentale »<br />

à cet usage : une possibilité <strong>de</strong> mobiliser<br />

plusieurs soignants en liens avec<br />

d’autres partenaires <strong>de</strong> la cité et avec<br />

les parents pour les « instituer » en<br />

porteurs <strong>de</strong> ce patient. C’est dans cette<br />

perspective que j’ai décrit la « fonction<br />

phorique », comme ce qui permet à la<br />

personne psychotique d’être portée,<br />

psychiquement, et quelquefois physiquement,<br />

tout le temps qu’elle ne<br />

peut le faire elle-même. A partir <strong>de</strong><br />

cette position <strong>de</strong> base, une sorte <strong>de</strong><br />

proposition d’ouverture et d’accueil<br />

<strong>de</strong> l’autre, c’est l’appareil psychique<br />

<strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s soignants qui <strong>de</strong>vient le<br />

porteur <strong>de</strong>s signes <strong>de</strong> souffrance psychique<br />

<strong>de</strong> ce sujet aliéné, c’est la fonction<br />

« sémaphorique ». Et c’est la<br />

réunion <strong>de</strong> nos contre-transferts singuliers<br />

qui peut aboutir à une fonction<br />

<strong>de</strong> transformation, au sens <strong>de</strong><br />

Bion, que je qualifie <strong>de</strong> « métaphorique<br />

». La notion <strong>de</strong> constellation<br />

transférentielle prend alors tout son<br />

sens en croisant les dimensions subjectales,<br />

groupales et institutionnelles<br />

qui sont à travailler pour le soin <strong>de</strong><br />

ces patients. Mais si Tosquelles insistait<br />

sur le « politique » au sens marxiste du<br />

terme, c’était bien plus pour en travailler<br />

les implications sociales<br />

concrètes que pour en déduire une<br />

quelconque idéologie politicienne. Il<br />

avait assez souffert, pendant la guerre<br />

d’Espagne, <strong>de</strong> l’habituelle « entropie<br />

stalinienne ». C’est ainsi que les opérateurs<br />

du « club thérapeutique », <strong>de</strong> la<br />

sectorisation, <strong>de</strong>s relations complémentaires<br />

(Dupréel), <strong>de</strong> la « hiérarchie


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

subjectale », sont autant <strong>de</strong> concepts<br />

élaborés pour faire <strong>de</strong> la réintégration<br />

dans le socius autre chose<br />

qu’une éviction à rebours. Dans ce<br />

sens, Oury a choisi <strong>de</strong> faire son séminaire<br />

mensuel sur ce thème du « Politique<br />

» <strong>de</strong>puis plusieurs années à Sainte<br />

Anne à Paris. Mais je pense à un<br />

tout autre sujet, celui <strong>de</strong> la périnatalité.<br />

Lorsque j’ai donné mon livre à<br />

Françoise Molénat, qui a été l’inspiratrice<br />

<strong>de</strong>s textes « révolutionnaires »<br />

récents à ce sujet, elle m’a dit combien<br />

elle avait été influencée dans sa<br />

formation par les idées <strong>de</strong> la psychothérapie<br />

institutionnelle. Et quand on<br />

lit ses textes, et qu’on voit les objectifs<br />

qu’elle y expose, il est clair qu’elle en<br />

a intériorisé parfaitement les « invariants<br />

structuraux ». Qui aurait pu penser<br />

une chose pareille ? J’y vois le signe<br />

d’une gran<strong>de</strong> actualité et y retrouve la<br />

pertinence d’une « épistémé » <strong>de</strong> la<br />

relation humaine vulnérable. A ce<br />

titre, la psychothérapie institutionnelle<br />

a <strong>de</strong> beaux jours <strong>de</strong>vant elle !<br />

M. S.-C. : Une autre notion tend à se<br />

perdre, celle qui veut que la psychanalyse<br />

trouve aussi un terrain d’application<br />

dans la psychose. Salomon Resnik est<br />

un personnage qui vous est très cher…<br />

P.D. : Mon maître et ami Salomon<br />

Resnik est une figure impressionnante<br />

<strong>de</strong> la psychiatrie contemporaine,<br />

et je me suis souvent <strong>de</strong>mandé ce qui<br />

aurait pu se passer lorsque Tosquelles<br />

lui a <strong>de</strong>mandé, à l’époque où il hésitait<br />

entre la France et l’Angleterre, s’il<br />

accepterait <strong>de</strong> venir travailler avec lui<br />

à Saint Alban pour la formation psychanalytique<br />

<strong>de</strong> ses collègues. Outre<br />

son premier cursus <strong>de</strong> psychanalyse<br />

en Argentine sous l’égi<strong>de</strong> <strong>de</strong> Pichon<br />

Rivière et <strong>de</strong> ses élèves kleiniens, il a<br />

complété sa formation à Londres avec<br />

Mélanie Klein elle-même, mais aussi,<br />

excusez du peu ! avec Rosenfeld,<br />

Bion, Bick, Winnicott et quelques<br />

autres. Devenu leur ami, il a su explorer<br />

<strong>de</strong>s contrées inhabituelles et<br />

notamment celles <strong>de</strong> la psychose. Il<br />

fait sans doute partie <strong>de</strong>s quelques<br />

personnes qui peuvent comprendre<br />

les personnes psychotiques avec une<br />

intuition et une capacité d’interprétation<br />

proprement époustouflantes. Jean<br />

Ayme le présente comme un génie<br />

<strong>de</strong>s langues, sachant parler aussi bien<br />

l’espagnol, l’anglais, le français, le russe<br />

et l’italien que... « le psychotique » ! Et<br />

non seulement ses talents lui ont permis<br />

<strong>de</strong> soigner <strong>de</strong> très nombreuses<br />

personnes psychotiques, mais <strong>de</strong> plus<br />

il s’est intéressé <strong>de</strong>puis son très jeune<br />

âge à l’art sous toutes ces formes. Et<br />

on voit bien que le domaine <strong>de</strong>s sensations,<br />

que l’étymologie grecque éclaire<br />

puisque ce mot, qui vient <strong>de</strong> « aiesthesis<br />

» qui signifie « sensation », nous<br />

met directement en lien avec celui <strong>de</strong><br />

Revue Santé mentale<br />

au Québec<br />

Revivez la magie du colloque Rencontre<br />

avec quelques Lyonnais qui<br />

a eu lieu le 15 septembre au centre<br />

hospitalier du Vinatier. A travers<br />

le regard <strong>de</strong> cinq Lyonnais (Marcel<br />

Sassolas, Jacques Hochmann,<br />

Francis Maqueda, René Roussillon<br />

et René Kaës), le colloque a réinterrogé<br />

le parcours théorique et<br />

clinique suivi par ceux-ci afin <strong>de</strong><br />

répondre à quatre questions : comment<br />

ont-ils créé leur savoir clinique.<br />

D’où leur sont venues leurs<br />

hypothèses <strong>de</strong> travail ? Comment<br />

les ont-ils modifiées ? Quelle est<br />

l’influence <strong>de</strong>s facteurs personnels<br />

sur ce parcours ?<br />

Prenez connaissance <strong>de</strong> leurs réponses<br />

en visionnant leur conférence<br />

sur le site internet suivant<br />

http://rsmq.cam.org/smq/document/SiteBOA.htm).<br />

L’accès est<br />

gratuit.<br />

l’esthétique. Il y a donc une proximité<br />

logique entre ces mon<strong>de</strong>s <strong>de</strong> la psychose<br />

et <strong>de</strong> l’art et je crois que Salomon<br />

Resnik en a approché les confins<br />

et nous les a rendus accessibles plus<br />

que beaucoup d’autres. Je me souviens<br />

d’un colloque avec lui, Maldiney,<br />

Schotte et Oury au cours duquel<br />

ces notions avaient été exposées d’une<br />

façon très convaincante. Je crois que<br />

cela est paru sous le titre « comprendre<br />

la psychose » dans une <strong>de</strong>s<br />

revues <strong>de</strong> « Psychothérapie psychanalytique<br />

<strong>de</strong> groupe » autour <strong>de</strong> Jean<br />

Clau<strong>de</strong> Rouchy. L’ouvrage <strong>de</strong> Maldiney<br />

Regard, parole, espace est un<br />

<strong>de</strong>s livres les plus passionnants sur ce<br />

sujet, notamment lorsqu’il explicite le<br />

concept <strong>de</strong> « moment pathique ». Nul<br />

doute que les territoires psychiques<br />

en question sont <strong>de</strong> nature à nous<br />

éclairer sur les processus en jeu dans<br />

l’être au mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s personnes psychotiques,<br />

jusques et y compris en<br />

matière d’autisme infantile. D’ailleurs,<br />

ce n’est pas par hasard que Tustin et<br />

Meltzer ont creusé la question <strong>de</strong>s<br />

difficultés <strong>de</strong> « consensuality » (à traduire<br />

plutôt par con-sensation que<br />

par consensualité) chez les sujets<br />

autistes.<br />

M. S.-C. : Quelles sont les perspectives<br />

pour <strong>de</strong>main ?<br />

P.D. : Il me semble très important<br />

aujourd’hui <strong>de</strong> reparler <strong>de</strong> toutes ces<br />

« vieilles choses » <strong>de</strong> la psychothérapie<br />

institutionnelle, parce qu’il s’agit d’une<br />

manière <strong>de</strong> pratiquer la psychiatrie<br />

qui a une cohérence profon<strong>de</strong>. Les<br />

impasses dans lesquelles certains bons<br />

esprits s’égarent sous couvert <strong>de</strong> science<br />

me préoccupent énormément et<br />

je rappelle souvent que la relation<br />

médicale est une <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> la<br />

relation humaine, et que si elle peut et<br />

doit bénéficier <strong>de</strong>s apports <strong>de</strong>s<br />

sciences dites dures, elle ne doit pas<br />

oublier qu’elle ne peut en aucun cas<br />

se réduire à la seule science sous peine<br />

<strong>de</strong> surprises éthico-déontologiques<br />

rapi<strong>de</strong>s. Nous avons tout intérêt à<br />

continuer <strong>de</strong> penser la psychiatrie<br />

comme une discipline installée en<br />

pont entre la mé<strong>de</strong>cine et l’anthropologie,<br />

entre les neurosciences et la<br />

psychopathologie, et à défendre cette<br />

position sur les plans éthiques et épistémologiques.<br />

A ce sujet, j’aime bien<br />

l’expression d’« anthropopsychiatrie »<br />

forgée par mon ami Jacques Schotte<br />

<strong>de</strong> l’université <strong>de</strong> Louvain la neuve,<br />

pour décrire ce projet <strong>de</strong> rencontre.<br />

Dans ce combat qui s’amorce, et qui<br />

peut prendre <strong>de</strong>s tours d’une violence<br />

extrême, le champ <strong>de</strong> la psychopathologie<br />

psychanalytique a une<br />

importance cruciale pour étayer la<br />

question humaine, et il serait incompréhensible<br />

d’avancer sans elle, sous le<br />

prétexte fallacieux qu’elle n’est pas<br />

démontrable. Le sens d’une vie est-il<br />

démontrable ? J’espère participer à<br />

mon niveau à cette aventure aussi<br />

passionnante que vitale pour la psychiatrie<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>main. Et dans cette<br />

aventure, la psychiatrie du bébé , et<br />

tout ce qu’elle porte en elle <strong>de</strong> pistes<br />

novatrices, peuvent nous ai<strong>de</strong>r considérablement<br />

à avancer. ■<br />

Notes<br />

(1) Inscriptions auprès <strong>de</strong> madame Caroline<br />

Debaecker, Service <strong>de</strong> formation<br />

médicale continue, Faculté <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine<br />

<strong>de</strong> Lille2, Pôle recherche, 59045, Lille<br />

ce<strong>de</strong>x. c<strong>de</strong>baecker@univ-lille2.fr<br />

(2) Le programme T4 est le texte réglementaire<br />

écrit par les responsables nazis<br />

pour planifier l’extermination du peuple<br />

Juif. Le film <strong>de</strong> Costa-Gavras, Amen, est à<br />

ce titre très intéressant puisqu’il met en<br />

scène cette horreur dans sa première partie<br />

; les critiques n’ont parlé que <strong>de</strong> la<br />

lâcheté du pape <strong>de</strong> l’époque, en omettant<br />

totalement la mise en place <strong>de</strong> ce<br />

programme monstrueux.<br />

(3) Je recomman<strong>de</strong> la lecture <strong>de</strong> L’êtrebébé<br />

<strong>de</strong> Bernard Golse, paru cette année<br />

aux PUF, dans la collection Le fil rouge.<br />

Une personne hospitalisée parce<br />

qu’elle souffre <strong>de</strong> troubles mentaux,<br />

une fois sur trois, a subi <strong>de</strong>s abus<br />

sexuels ou <strong>de</strong>s violences dans l’enfance.<br />

Devenue adulte et mala<strong>de</strong>, elle a<br />

trois fois plus <strong>de</strong> risque d’être victime<br />

<strong>de</strong> violence qu’un simple citoyen.<br />

Cependant, c’est elle qu’on va montrer<br />

du doigt si un crime est commis ;<br />

et la ficher ? Monsieur le Ministre se<br />

trompe <strong>de</strong> tiroir, c’est dans le fichier<br />

<strong>de</strong>s victimes qu’il doit ranger les<br />

mala<strong>de</strong>s mentaux, pas dans celui <strong>de</strong>s<br />

prédateurs.<br />

La croyance que les mala<strong>de</strong>s mentaux<br />

sont <strong>de</strong>s criminels en puissance est un<br />

travers <strong>de</strong> la pensée qui affecte les<br />

esprits les plus éminents. Un citoyen<br />

sur <strong>de</strong>ux est convaincu que les mala<strong>de</strong>s<br />

mentaux sont dangereux pour les<br />

autres, d’après un sondage réalisé par<br />

l’IPSOS en 2001. Malheureusement,<br />

un Ministre en est convaincu. Il eut<br />

mieux valu qu’il soit en charge d’un<br />

office plus futile mais il est à l’Intérieur.<br />

Cependant, il s’agit d’une croyance<br />

incroyablement banale et, à force d’être<br />

répandue, elle pousse les législateurs<br />

<strong>de</strong>s pays occi<strong>de</strong>ntaux à modifier leurs<br />

législation. C’est le cas du Royaume-<br />

Uni. Sept cents meurtres par an, dont...<br />

71 commis par <strong>de</strong>s personnes souffrant<br />

d’un trouble mental. Cela suffit,<br />

semble-t-il, pour proposer <strong>de</strong> modifier<br />

la législation en vigueur « afin que la<br />

population soit bien protégée <strong>de</strong>s individus<br />

qui peuvent être atteints <strong>de</strong> maladies<br />

mentales et représenter un sérieux<br />

danger pour le public, même s’ils n’ont<br />

pas été accusés d’un crime » (discours<br />

<strong>de</strong> Tony Blair le 20 novembre 2002).<br />

Les étu<strong>de</strong>s menées par les psychiatres<br />

anglais ont pourtant montré que le<br />

nombre <strong>de</strong> crimes perpétrés par <strong>de</strong>s<br />

personnes souffrant <strong>de</strong> maladies mentales<br />

est resté stable <strong>de</strong>puis 38 ans. Et,<br />

le nombre <strong>de</strong> crimes augmentant, la<br />

proportion <strong>de</strong> leurs crimes a continuellement<br />

baissé, au rythme <strong>de</strong> 3%<br />

par an. Une étu<strong>de</strong> britannique récente<br />

sur les violences domestiques montre<br />

que la maladie mentale y joue un rôle<br />

minime. Le principal facteur associé à<br />

cette violence est la prise d’alcool pour<br />

plus <strong>de</strong> 50% <strong>de</strong>s cas <strong>de</strong> violence physique.<br />

Ces préjugés contre la maladie<br />

mentale ont poussé les autorités <strong>de</strong><br />

santé <strong>de</strong> Nouvelle-Zélan<strong>de</strong> à comman<strong>de</strong>r<br />

un rapport sur la question. La<br />

réponse est la même : en dépit <strong>de</strong>s<br />

craintes du public, le nombre <strong>de</strong><br />

meurtres commis par <strong>de</strong>s personnes<br />

atteintes <strong>de</strong> maladies mentales a considérablement<br />

diminué <strong>de</strong>puis 1970 au<br />

rythme <strong>de</strong> 4% par an. En 2000, il<br />

représente 5% <strong>de</strong> tous les meurtres :<br />

95% <strong>de</strong>s meurtres sont accomplis par<br />

<strong>de</strong>s personnes ne souffrant pas <strong>de</strong><br />

troubles mentaux. Une étu<strong>de</strong> danoise<br />

menée sur 340 000 personnes, soit<br />

l’ensemble <strong>de</strong>s sujets nés après-guerre<br />

et suivis jusqu’à l’âge <strong>de</strong> 44 ans, montre<br />

que 5000 hommes ont été arrêtés<br />

pour <strong>de</strong>s actes violents commis au<br />

cours <strong>de</strong> leur vie ; seuls 453 présentaient<br />

un trouble mental sévère.<br />

En restant pru<strong>de</strong>nt, il est possible d’estimer<br />

que 90 à 95% <strong>de</strong>s meurtres sont<br />

le fait <strong>de</strong> personnes normales. 5 à 10%<br />

sont le fait <strong>de</strong> personnes souffrant <strong>de</strong><br />

maladies mentales sévères et, dans ce<br />

cas, la victime est le plus souvent un<br />

membre <strong>de</strong> l’entourage. Les crimes sur<br />

<strong>de</strong>s étrangers sont rarement le fait <strong>de</strong><br />

personnes mala<strong>de</strong>s.<br />

Vous ne risquez pas, en vous promenant<br />

dans la rue ou en allant faire vos<br />

courses <strong>de</strong> vous faire assassiner par un<br />

« mala<strong>de</strong> mental ».<br />

Les facteurs associés aux comportements<br />

violents sont les mêmes chez<br />

les personnes atteintes <strong>de</strong> maladies<br />

mentales que chez les personnes<br />

in<strong>de</strong>mnes : il s’agit <strong>de</strong> la consommation<br />

d’alcool ou <strong>de</strong> drogues et <strong>de</strong> la<br />

précarité. Les comportements violents<br />

sont également plus fréquents chez les<br />

hommes, les sujets jeunes et chez les<br />

personnes qui ont déjà commis <strong>de</strong>s<br />

actes violents. Ces facteurs sont connus<br />

<strong>de</strong>puis longtemps. La population seraitelle<br />

plus rassurée si l’on affichait <strong>de</strong>vant<br />

chaque mairie la liste <strong>de</strong> toutes les personnes<br />

qui ont pris une cuite ?<br />

La stigmatisation <strong>de</strong>s<br />

médias<br />

Malheureusement, il ne sert à rien <strong>de</strong><br />

lutter contre les préjugés sociaux. Plusieurs<br />

expériences montrent que la lecture<br />

<strong>de</strong> faits divers où il est indiqué<br />

que le criminel est atteint d’une pathologie<br />

mentale rend les lecteurs plus<br />

craintifs <strong>de</strong> la maladie mentale, plus<br />

favorables à <strong>de</strong>s traitements sous<br />

contrainte et plus enclins à isoler <strong>de</strong><br />

tels patients du reste <strong>de</strong> la société. Ces<br />

lecteurs évitent également <strong>de</strong> fréquenter<br />

<strong>de</strong>s personnes qu’ils savent<br />

atteintes <strong>de</strong> troubles mentaux et, cela<br />

va sans dire, <strong>de</strong> les ai<strong>de</strong>r.<br />

La télévision offre aussi son pesant <strong>de</strong><br />

stéréotypes qui forgent les attitu<strong>de</strong>s<br />

sociales <strong>de</strong>s citoyens. George Gerbner,<br />

un <strong>de</strong>s chercheurs les plus écoutés sur<br />

la violence dans les medias, a observé,<br />

aux USA, que 45% <strong>de</strong>s personnages<br />

télévisés sont violents et que cette proportion<br />

monte à 72% pour les personnages<br />

décrits comme <strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s<br />

mentaux. Gerbner note également que<br />

la maladie mentale est, dans l’univers<br />

télévisuel, la seule caractéristique qui<br />

suffit à rendre les personnages féminins<br />

aussi violents que les hommes.<br />

Aucune campagne d’information n’aura<br />

assez d’impact pour contrebalancer<br />

une telle propagan<strong>de</strong> <strong>de</strong> stéréotypes<br />

sociaux. Faut-il, pour autant, créer <strong>de</strong>s<br />

lois pour rassurer le consommateur <strong>de</strong><br />

séries policières ainsi apeuré et prévenu<br />

contre la maladie mentale ? Est-il<br />

plus simple <strong>de</strong> ficher <strong>de</strong>s personnes<br />

mala<strong>de</strong>s que <strong>de</strong> donner <strong>de</strong>s recommandations<br />

aux groupes <strong>de</strong> communication<br />

? Est-il si compliqué <strong>de</strong> fournir<br />

en masse une distraction alternative à<br />

la présentation spectaculaire <strong>de</strong> criminels<br />

délirants ?<br />

Une loi trompeuse pour<br />

rassurer les effrayés<br />

Il faut prévenir les citoyens amateurs<br />

<strong>de</strong> télévision que les conséquences <strong>de</strong><br />

ce projet <strong>de</strong> loi vont aggraver leur situation.<br />

En effet, le principal facteur susceptible<br />

d’augmenter la violence d’un<br />

sujet délirant ou halluciné est le fait<br />

qu’il ne soit pas traité. Croyez-vous<br />

que, sachant qu’il sera fiché, cet individu<br />

acceptera d’aller chercher un traitement<br />

? Bien entendu, non. Le résultat<br />

prévisible <strong>de</strong> cette loi est : le patient<br />

refusera les soins, n’ira pas chercher <strong>de</strong><br />

l’ai<strong>de</strong>. Sans traitement, son risque <strong>de</strong><br />

commettre un acte violent augmente,<br />

une fois celui-ci commis, il sera alors<br />

soumis à l’emprisonnement. La conséquence<br />

sera une augmentation <strong>de</strong> la<br />

criminalité. Avec l’augmentation du<br />

nombre <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s mentaux dans les<br />

prisons, ces patients ne pourront pas<br />

être correctement soignés parce que<br />

tout simplement nos collègues <strong>de</strong>s<br />

SMPR ne sont largement pas assez<br />

nombreux pour soigner tout ce mon<strong>de</strong>.<br />

HUMEUR ■ 11<br />

La double-peine en psychiatrie ou<br />

comment le projet <strong>de</strong> loi <strong>de</strong> prévention<br />

<strong>de</strong> la délinquance va augmenter le<br />

nombre <strong>de</strong> « délinquants »<br />

Ces patients, s’ils ne se sont pas suicidés<br />

et s’ils n’ont pas été victimes <strong>de</strong> violence,<br />

sortiront alors en ayant reçu <strong>de</strong>s<br />

soins élémentaires. Pensez-vous sérieusement,<br />

après un tel parcours, que ces<br />

patients maltraités iront avec confiance<br />

poursuivre leurs soins auprès d’un service<br />

médical ? Ce succès prévisible<br />

<strong>de</strong>vrait inciter nos parlementaires et<br />

Monsieur Houillon, rapporteur du projet<br />

auprès <strong>de</strong> la Commission <strong>de</strong>s Lois,<br />

à examiner l’impact <strong>de</strong>s mesures envisagées<br />

sur l’évolution <strong>de</strong> la violence.<br />

Après s’être désolé <strong>de</strong>s dysfonctionnements<br />

<strong>de</strong> certaine institution, il s’agirait<br />

<strong>de</strong> franchir une étape dans le<br />

progrès et <strong>de</strong> prévenir <strong>de</strong> tels dysfonctionnements.<br />

Ainsi, le législateur contribuera<br />

indirectement à alléger la stigmatisation<br />

<strong>de</strong>s mala<strong>de</strong>s mentaux,<br />

victimes dans leur corps et dans leur<br />

esprit, victimes du regard que leur porte<br />

la société, ses représentants et ses communicants,<br />

victimes <strong>de</strong>s cruautés ordinaires<br />

et <strong>de</strong> la négligence <strong>de</strong>s bien-portants.<br />

Dresser la liste <strong>de</strong> toutes ces<br />

personnes - ces Martin, Durand,<br />

Dupont – c’est dresser la liste <strong>de</strong> nos<br />

carences, établir le fichier <strong>de</strong> nos petitesses,<br />

aménager un tiroir pour notre<br />

bonne conscience. ■<br />

Roland Dar<strong>de</strong>nnes<br />

PU-PH, Université Paris Descartes & Centre<br />

Hospitalier Sainte-Anne.<br />

Bibliographie<br />

BRENNAN PA, MEDNICK SA, HOD-<br />

GINS S, Major mental disor<strong>de</strong>rs and criminal<br />

violence in a Danish birth cohort, Arch Gen<br />

Psychiatry 2000, 57, 494-500.<br />

COID J. YANG M, ROBERTS A, ULLRI-<br />

CH S, MORAN P, BEBBINGTON P, BRU-<br />

GHA T, JENKINS R, FARRELL M, LEWIS<br />

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morbidity in the national household population<br />

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J Psychiatry 2006, 189, 12-19.<br />

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mental illness and homici<strong>de</strong> in New Zealand,<br />

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TAYLOR PJ & J GUNN J, Homici<strong>de</strong>s by<br />

people with mental illness: myth and reality,<br />

Br J Psychiatry 1999, 174, 9-14.<br />

La mé<strong>de</strong>cine et les sciences<br />

XIX e -XX e siècles<br />

Jean-Paul Gaudillière<br />

La Découverte<br />

L’auteur part <strong>de</strong> l’idée selon laquelle<br />

la mé<strong>de</strong>cine est, <strong>de</strong>puis le milieu du<br />

XIX e siècle, organisée autour <strong>de</strong> trois<br />

pôles. mé<strong>de</strong>cine clinique, mé<strong>de</strong>cine<br />

sociale et mé<strong>de</strong>cine expérimentale.<br />

Leur particularité est affaire <strong>de</strong> lieux,<br />

d’acteurs, <strong>de</strong> rapports à l’économie<br />

ou à la politique mais aussi <strong>de</strong> manières<br />

<strong>de</strong> savoir. L’ouvrage les présente<br />

en insistant sur les multiples<br />

liens qui unissent expérimentation,<br />

soin, production matérielle et gestion<br />

politique <strong>de</strong> la santé. La <strong>de</strong>rnière partie<br />

confronte cette histoire aux enjeux<br />

<strong>de</strong> la biomé<strong>de</strong>cine contemporaine.


12<br />

LIVRES<br />

■ CLINIQUE<br />

Schizophrénie : l’annonce<br />

du diagnostic<br />

Arnaud Cherrier et Jérôme<br />

Palazzolo<br />

Editions in Press, 12 €<br />

La délivrance d’un diagnostic, notamment<br />

<strong>de</strong> schizophrénie, ne peut<br />

s’effectuer <strong>de</strong> manière irréfléchie. Une<br />

communication pleinement mesurée<br />

s’avère profitable au patient comme<br />

à son entourage et permet d’améliorer,<br />

à la fois, la conscience <strong>de</strong> la<br />

maladie, l’observance du traitement<br />

et la qualité <strong>de</strong> la relation thérapeutique.<br />

Cet ouvrage fait le point sur la question<br />

sous les angles juridique, clinique<br />

et relationnel.<br />

Les phénomènes<br />

d’autoscopie<br />

L’hallucination <strong>de</strong> soi-même<br />

Paul Sollier<br />

Avant-propos <strong>de</strong> Jacques<br />

Chazaud<br />

L’Harmattan, 16 €<br />

Paul Sollier, psychiatre à la jonction<br />

<strong>de</strong>s XIX e et XX e siècles, a été mé<strong>de</strong>cin<br />

au Sanatorium <strong>de</strong> Boulogne-sur-<br />

Mer, Professeur à l’Université nouvelle<br />

<strong>de</strong> Bruxelles et Professeur à<br />

l’Institut <strong>de</strong>s Hautes étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Belgique.<br />

Auteur <strong>de</strong> nombreux ouvrages<br />

<strong>de</strong> psychopathologie sur l’idiotie, l’alcoolisme,<br />

la morphinomanie, la mémoire,<br />

il a été célèbre par son Gui<strong>de</strong><br />

pratique <strong>de</strong>s maladies mentales (Masson,<br />

1893, repris plus tard avec Courbon<br />

sous le titre <strong>de</strong> Pratique sémiologique<br />

<strong>de</strong>s maladies mentales) et<br />

surtout par ses recherches sur la Genèse<br />

et nature <strong>de</strong> l’hystérie (Alcan,<br />

1897) et par son étu<strong>de</strong> sur L’Hystérie<br />

et son traitement partie, chez le même<br />

éditeur, <strong>de</strong>ux ans avant le présent<br />

ouvrage. Quand le sujet d’une confrontation<br />

avec son double <strong>de</strong>vient ainsi<br />

sujet d’une hallucination <strong>de</strong> soi-même,<br />

c’est sous une forme positive : l’autoscopie.<br />

Il existe pourtant une forme<br />

négative <strong>de</strong> l’hallucination : celle <strong>de</strong><br />

l’imperception <strong>de</strong> Soi au miroir. Ces<br />

<strong>de</strong>ux variétés, outre leur existence<br />

consacrée en psychiatrie, ont connu<br />

un <strong>de</strong>stin littéraire.<br />

Paul Sollier, à côté <strong>de</strong> ces formes canoniques,<br />

en rapport avec la pathologie<br />

<strong>de</strong> l’« extériorisation » <strong>de</strong> l’image<br />

<strong>de</strong> notre corps, a isolé une autoscopie<br />

interne lors <strong>de</strong>s états hypno-hystériques.<br />

Cette possibilité, chez les<br />

« vigilambules », d’une représentation<br />

<strong>de</strong>s organes internes objectivant au<br />

<strong>de</strong>dans <strong>de</strong> Soi les impressions qu’ils<br />

envoient à l’écorce cérébrale est, le<br />

plus souvent, restée l’objet d’un scepticisme<br />

critique. Selon leur inventeur,<br />

elle ouvre pourtant « <strong>de</strong>s horizons nouveaux<br />

sur l’inconscient d’abord, et ensuite<br />

sur les mécanismes <strong>de</strong>s fonctions<br />

psychiques. Ils éclairent tout particulièrement<br />

les conditions <strong>de</strong> la conscience<br />

normale et <strong>de</strong> la suggestion ».<br />

Les données neuro-psychologiques<br />

paraissent en mesure <strong>de</strong> justifier, au<br />

moins dans certaines limites, ces<br />

observations.<br />

Le diagnostic en<br />

psychiatrie : questions<br />

éthiques<br />

Congrès <strong>de</strong> psychiatrie et <strong>de</strong><br />

neurologie <strong>de</strong> langue française<br />

Anne Danion-Grilliat<br />

Masson<br />

Les auteurs interrogent plus particulièrement<br />

le spécificité du diagnostic<br />

<strong>de</strong> psychiatrie (poser, transmettre et<br />

recevoir un diagnostic) : sont, entre<br />

autres, abordés le rôle <strong>de</strong>s références<br />

théoriques du psychiatre, l’annonce<br />

du diagnostic <strong>de</strong> pathologies graves<br />

(telles que la schizophrénie ou<br />

l’autisme), le <strong>de</strong>voir d’information, la<br />

prise en charge en réseau et le secret<br />

partagé.<br />

La question <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité<br />

est une question qui ne se pose<br />

pas normalement ; c’est-à-dire que le<br />

sentiment d’i<strong>de</strong>ntité apparaît comme<br />

une certitu<strong>de</strong> intime imprégnant tout<br />

vécu, <strong>de</strong> la sorte que sa mise en doute<br />

n’est ni naturelle, ni spontanée. Le mot<br />

d’i<strong>de</strong>ntité sera prononcé pour la première<br />

fois par Locke. Il fon<strong>de</strong> cette<br />

notion sur la permanence <strong>de</strong> l’organisme<br />

dans le changement matériel : la<br />

continuité du vécu est à l’origine <strong>de</strong> la<br />

conscience <strong>de</strong> soi, avec pour substrat la<br />

mémoire qui permet <strong>de</strong> récupérer ce<br />

vécu comme étant le nôtre. « Aussi loin<br />

que cette conscience peut s’étendre sur les<br />

actions et les pensées déjà passées, aussi<br />

loin s’étend l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> cette personne.<br />

C’est par là que chacun est à lui-même<br />

ce qu’il appelle soi-même » (7).<br />

Le corps apparaît comme le lieu privilégié<br />

où s’inscrit l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> l’individu<br />

dans sa singularité. Merleau-Ponty<br />

considérait le corps comme la structure<br />

stabilisée <strong>de</strong> l’existence, « lieu d’appropriation<br />

du mon<strong>de</strong> » (8). Lui-même<br />

objet particulier en se confondant avec<br />

le sujet, il est ce par quoi il y a <strong>de</strong>s<br />

objets. Il confère l’expérience à l’être<br />

en le faisant naître au mon<strong>de</strong>. Il est<br />

doublement support <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité, en<br />

le liant d’une part au sujet qui le ressent<br />

comme sien, et d’autre part à autrui<br />

qui le reconnaît comme celui du sujet.<br />

La maladie psychique vient mettre en<br />

question ce sentiment d’i<strong>de</strong>ntité en particulier<br />

dans la psychose dont le nœud<br />

s’articule autour <strong>de</strong> cette question fondamentale<br />

<strong>de</strong> l’origine, la problématique<br />

psychotique étant avant tout celle<br />

« d’être quelqu’un ». Le signe du miroir<br />

initialement décrit par Abély et Delmas<br />

dans la fin <strong>de</strong>s années 1920 en<br />

tant que symptôme précoce <strong>de</strong> la schizophrénie<br />

en est l’illustration (1, 3). Ce<br />

trouble <strong>de</strong> l’image <strong>de</strong> soi se caractérise<br />

par une observation répétée et scrupuleuse<br />

<strong>de</strong> son propre visage dans la<br />

glace, comme si le sujet ne se reconnaissait<br />

pas, s’accompagnant <strong>de</strong> réactions<br />

affectives diverses <strong>de</strong>vant le miroir,<br />

et volontiers niée par le patient.<br />

Après un retour sur le cadre théorique<br />

du signe du miroir, nous nous sommes<br />

intéressés à une approche expérimen-<br />

COLLEGE DE PSYCHIATRIE<br />

tale <strong>de</strong> ce « curieux symptôme » tel que<br />

le qualifiait Abély (1), avec l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

la reconnaissance <strong>de</strong> son propre visage<br />

chez <strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets<br />

schizophrènes en tentant d’objectiver ce<br />

symptôme clinique ou du moins d’en<br />

préciser les soubassements cognitifs.<br />

En effet peu d’étu<strong>de</strong>s ont abordé ce<br />

trouble : l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance <strong>de</strong><br />

son propre visage a essentiellement été<br />

réalisée chez <strong>de</strong>s sujets sains (6), alors<br />

que plusieurs étu<strong>de</strong>s se sont intéressées<br />

à l’exploration du traitement <strong>de</strong>s<br />

visages et à la mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s<br />

déficits <strong>de</strong> ce traitement chez le patient<br />

schizophrène, mais aucune précisément<br />

à celle <strong>de</strong> son propre visage ; c’est ainsi<br />

qu’ont été mis en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s déficits<br />

dans les stratégies <strong>de</strong> recherche qui<br />

sous-ten<strong>de</strong>nt la perception <strong>de</strong>s<br />

visages (10), dans la perception globale<br />

<strong>de</strong>s émotions faciales (9), alors que le<br />

signe du miroir a déjà été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />

dans une étu<strong>de</strong> précé<strong>de</strong>nte (4),<br />

bien qu’elle se soit intéressée à une<br />

approche purement clinique.<br />

Description clinique du<br />

signe du miroir<br />

Abély définira le signe du miroir<br />

comme un « besoin qu’ont certains sujets<br />

<strong>de</strong> s’examiner longuement et fréquemment<br />

<strong>de</strong>vant une surface réfléchissante<br />

» (1), ce symptôme se manifestant<br />

avec une gran<strong>de</strong> fréquence à la phase<br />

<strong>de</strong> début <strong>de</strong> la démence précoce. Cette<br />

auto-inspection concerne essentiellement<br />

leur visage mais peut aussi intéresser<br />

l’ensemble <strong>de</strong> leur corps. Il serait<br />

LES MERCREDIS DE HENRI EY 2006/2007<br />

15 avenue <strong>de</strong> la Porte <strong>de</strong> Choisy - 75013 PARIS<br />

Les premiers mercredis <strong>de</strong> chaque mois à partir du 4 octobre 2006<br />

Salle <strong>de</strong>s conférences : 21 h - 22 h 30<br />

(Entrée libre, inscription sur place)<br />

Déclenchement, xénopathie, suppléance<br />

Questions cliniques<br />

Modalités du lien à l’Autre dans les psychoses<br />

Lors du déclenchement <strong>de</strong> la psychose, la xénopathie dévoile la vérité du lien que<br />

le sujet entretient avec l’Autre. Les aliénistes et les psychiatres classiques s’en<br />

étaient préoccupés avec les questions <strong>de</strong> lieu et <strong>de</strong> nosographie posées par la<br />

clinique. Dans ce lien à l’Autre, <strong>de</strong>s suppléances parfois reconnues socialement<br />

ou <strong>de</strong>s inventions plus singulières sont à l’œuvre dans un travail <strong>de</strong> restauration<br />

nécessaire à la survie du sujet. La clinique peut en être alors revisitée. Leurs<br />

lectures, à partir d’observations cliniques, orienteront un travail qui concerne<br />

nos pratiques professionnelles.<br />

Mercredi 4 octobre : Le concept <strong>de</strong> xénopathie dans la psychiatrie<br />

Introduction du séminaire par : Dr Michel DAUDIN, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux,<br />

Dr Clau<strong>de</strong> JEANGIRARD, Psychiatre <strong>de</strong>s Hôpitaux, Fondateur du Collège <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>.<br />

Mercredi 6 décembre : Modalités du lien à l’Autre dans les Psychoses<br />

Dr Michel DAUDIN, Psychiatre, Hôpital Henri Ey<br />

Mercredi 7 février : Le dualisme schrébérien, Dr Michel JEANVOINE, Psychiatre,<br />

Psychanalyste<br />

Mercredi 7 mars : Xénopathie et transfert <strong>de</strong>s lieux dans les Mémoires du<br />

Prési<strong>de</strong>nt SCHREBER, M. Jorge CACHO, Psychologue<br />

Mercredi 4 avril : Xénopathie et érotomanie, Dr Nicole ANQUETIL, Psychiatre,<br />

Psychanalyste<br />

Mercredi 2 mai : Sur le cas Aimée, Dr Gilles DELAPORTE, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />

Hôpitaux<br />

Mercredi 6 juin : Vignettes cliniques, Dr Françoise BLANADET, Psychiatre <strong>de</strong>s<br />

Hôpitaux<br />

LE CALENDRIER DES REUNIONS SERA ETABLI TRIMESTRIELLEMENT<br />

Dr ANQUETIL, (01 45 49 95 32/nicole.anquetil@free.fr) - Dr DAUDIN Hôpital Henri Ey<br />

(01 69 25 43. 90/ secretariat-75gO5@gpspv.fr) -Dr JEANVOINE (01 40 26 47 12/ mjeanv@noos.fr)<br />

Une approche<br />

expérimentale du signe<br />

du miroir : la question <strong>de</strong> la<br />

reconnaissance <strong>de</strong> son propre<br />

visage dans la schizophrénie<br />

contemporain <strong>de</strong>s premiers troubles,<br />

d’apparition insidieuse, associé à<br />

d’autres symptômes peu bruyants bien<br />

que caractéristiques : bizarrerie, indifférence,<br />

automatismes.<br />

Cette tendance commune <strong>de</strong> certains<br />

sujets à contempler leur visage <strong>de</strong>vant<br />

un miroir s’accompagne toutefois <strong>de</strong><br />

manifestations variables face à leur<br />

propre reflet. Un premier comportement<br />

est celui d’un examen attentif <strong>de</strong><br />

son image : ce n’est pas un simple<br />

regard furtif dans une glace mais une<br />

véritable inspection à laquelle le patient<br />

se livre ; il s’approche au plus près <strong>de</strong> la<br />

glace, quasiment à son contact, « recherchant<br />

un point minuscule sur la peau<br />

<strong>de</strong> son visage » (3). L’examen se fait en<br />

général selon différents points <strong>de</strong> vue,<br />

<strong>de</strong> face, <strong>de</strong> profil. Le sujet s’adonne à<br />

<strong>de</strong>s mimiques variées, « fronçant et<br />

défronçant les sourcils, plissant et déplissant<br />

le front, gonflant et dégonflant les<br />

joues, faisant la moue avec les lèvres » (3).<br />

L’inspection visuelle sera complétée<br />

par celle du toucher, en modifiant les<br />

traits <strong>de</strong> son visage à l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa main<br />

en les tirant, les aplatissant et les frottant.<br />

Cette auto-observation sera répétée<br />

à plusieurs reprises, le sujet passant<br />

<strong>de</strong> longs moments <strong>de</strong>vant sa glace, à la<br />

recherche méticuleuse <strong>de</strong> détails physiques,<br />

parfois avec un certain étonnement,<br />

comme si ce n’était pas lui. « On<br />

dirait, quand il se regar<strong>de</strong>, qu’il est étonné,<br />

qu’il ne se reconnaît pas » (1).<br />

La contemplation <strong>de</strong> son propre visage<br />

ne s’accompagne parfois d’aucun affect,<br />

le sujet manifestant une indifférence<br />

froi<strong>de</strong> face à son image. Au contraire,<br />

certains patients présenteront <strong>de</strong>s réactions<br />

affectives intenses, s’amusant <strong>de</strong><br />

leur reflet, riant voire parlant à leur<br />

miroir. Une véritable mise en scène<br />

<strong>de</strong>vant la glace sera jouée, le sujet parlant<br />

à sa propre image, faisant les questions<br />

et les réponses, entretenant même<br />

<strong>de</strong>s propos amoureux à son reflet, jusqu’à<br />

avoir <strong>de</strong>s comportements d’onanisme<br />

face à leur miroir (1).<br />

Diverses tentatives<br />

d’interprétation<br />

Historiquement, Delmas appréhendait<br />

ce symptôme comme la manifestation<br />

d’un acte impulsif, arbitraire, n’ayant<br />

d’autre sens que lui-même (soit celle<br />

<strong>de</strong> sa réalisation motrice), posé par un<br />

sujet chez qui la notion <strong>de</strong> signifiant<br />

n’a pas <strong>de</strong> place. L’agir est sans finalité,<br />

l’acte sans <strong>de</strong>stinataire, la dialectique<br />

n’est plus possible, l’autre n’existe pas.<br />

Abély voyait dans cet acte la réponse à<br />

un vécu d’étrangeté, voire <strong>de</strong> dépersonnalisation<br />

par <strong>de</strong>s sujets envahis par<br />

la maladie psychique. Les assises <strong>de</strong><br />

leur i<strong>de</strong>ntité vacillent <strong>de</strong> par la transformation<br />

<strong>de</strong> leur personnalité, avec<br />

l’irruption du processus morbi<strong>de</strong> dans<br />

leur fonctionnement psychique, générant<br />

un sentiment d’inquiétu<strong>de</strong>, qui luimême<br />

dicte au sujet un contrôle <strong>de</strong><br />

son i<strong>de</strong>ntité par une vérification <strong>de</strong> son<br />

propre visage, tentative <strong>de</strong> réassurance<br />

du sujet <strong>de</strong> son intégrité. Mais cette<br />

auto inspection viserait aussi la<br />

recherche <strong>de</strong> détails physiques qui<br />

témoigneraient du changement intime<br />

survenant en eux, et rendraient compte<br />

alors <strong>de</strong> leur vécu d’étrangeté. Il<br />

considérait également que le terrain<br />

<strong>de</strong> ce « curieux symptôme » était celui<br />

<strong>de</strong> l’hébéphrénie, et comprenait cette<br />

manifestation comme celle <strong>de</strong> la<br />

dimension autistique <strong>de</strong> la démence<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

PRIX PREMIERE COMMUNICATION<br />

BRISTOL-MYERS SQUIBB<br />

OTSUKA PHARMACEUTICAL FRANCE<br />

précoce. Le sujet « trouve dans sa propre<br />

image un interlocuteur docile et muet<br />

qui favorise son évasion imaginative » (1).<br />

La faillite <strong>de</strong> la relation interpersonnelle<br />

trouve sa solution dans la reconstruction<br />

délirante d’un dialogue entre<br />

un sujet et son image, matérialisation<br />

du discours intérieur du patient. L’incapacité<br />

à la relation sociale du schizophrène<br />

est singée dans le signe du<br />

miroir où le sujet recrée un espace relationnel<br />

replié sur lui-même.<br />

Actuellement, il est appréhendé comme<br />

une méconnaissance délirante d’i<strong>de</strong>ntité<br />

appartenant au registre <strong>de</strong>s délires<br />

d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes (5), tels<br />

que le syndrome <strong>de</strong> Capgras ou l’illusion<br />

<strong>de</strong> Frégoli, relevant d’une hypo<br />

i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong> son visage. Il partage<br />

en effet <strong>de</strong>s traits communs aux délires<br />

d’i<strong>de</strong>ntification <strong>de</strong>s personnes, <strong>de</strong> par sa<br />

sélectivité (il concerne essentiellement<br />

le visage du sujet), d’une composante<br />

<strong>de</strong> dissociation (persistance d’informations<br />

concernant son i<strong>de</strong>ntité), son vécu<br />

d’étrangeté, l’existence <strong>de</strong> détails physiques<br />

différenciateurs, bien que le<br />

patient n’aboutisse pas à la conviction<br />

d’un double usurpant son i<strong>de</strong>ntité.<br />

Quoiqu’il en soit le signe du miroir<br />

apparaît comme la manifestation <strong>de</strong> la<br />

difficulté du sujet psychotique à rester<br />

i<strong>de</strong>ntique à lui-même bien qu’il soit<br />

<strong>de</strong>venu radicalement un autre par le<br />

processus morbi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la maladie psychique.<br />

Approche<br />

expérimentale<br />

Elle a consisté en l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />

<strong>de</strong> son propre visage chez<br />

<strong>de</strong>s sujets sains et chez <strong>de</strong>s sujets schizophrènes<br />

en s’appuyant sur <strong>de</strong>s données<br />

comportementales (temps <strong>de</strong><br />

réponse, seuil <strong>de</strong> discrimination). Deux<br />

groupes <strong>de</strong> sujets appariés pour les<br />

variables d’âge et <strong>de</strong> genre ont été évalués,<br />

un groupe témoin (dix sujets) et<br />

un groupe schizophrène (neuf sujets).<br />

Le protocole s’articulait autour <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

conditions expérimentales : l’une implicite,<br />

avec une tâche <strong>de</strong> discrimination<br />

<strong>de</strong> la forme du visage (à choix forcé :<br />

rond ou ovale), et l’autre explicite, avec<br />

une tâche <strong>de</strong> reconnaissance <strong>de</strong> son<br />

i<strong>de</strong>ntité. Il reposait sur un procédé informatique<br />

<strong>de</strong> morphing, avec la présentation<br />

<strong>de</strong> mélanges, <strong>de</strong> combinaisons<br />

<strong>de</strong> visages entre trois catégories (visage<br />

propre du sujet, visages familiers et<br />

inconnus) avec <strong>de</strong>s proportions respectives<br />

différentes <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux catégories<br />

<strong>de</strong> visages impliquées : 20/80,<br />

40/60, 60/40, 80/20 ; ces combinaisons<br />

étaient présentées dans trois ordres<br />

différents, croissant (où les morphings<br />

étaient présentés dans le sens d’une<br />

augmentation du pourcentage du visage<br />

propre du sujet au sein <strong>de</strong> la combinaison),<br />

décroissant (dans le sens<br />

d’une diminution <strong>de</strong> ce même pourcentage)<br />

et aléatoire.<br />

Il a, tout d’abord, été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />

au sein <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux populations un traitement<br />

plus rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> la reconnaissance<br />

<strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité (traitement synthétique)<br />

par rapport à celui <strong>de</strong> la<br />

discrimination <strong>de</strong> la forme du visage<br />

(traitement analytique), corroborant le<br />

modèle <strong>de</strong> Bruce & Young (2), où le<br />

traitement <strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité d’un visage<br />

apparaît plus direct que celui faisant<br />

appel à un traitement analytique. Des<br />

déficits quantitatifs dans le traitement<br />

<strong>de</strong>s visages ont été objectivés chez le


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

groupe schizophrène, avec en premier<br />

lieu la mise en évi<strong>de</strong>nce d’un<br />

effet d’interférence <strong>de</strong> son propre<br />

visage, qui s’est traduit par un ralentissement<br />

du traitement <strong>de</strong>s combinaisons<br />

incluant le visage propre du<br />

sujet, alors que l’on s’attendait au<br />

contraire à une facilitation <strong>de</strong> ce traitement.<br />

Cet effet paradoxal a été<br />

retrouvé dans les <strong>de</strong>ux groupes, mais<br />

<strong>de</strong> manière encore plus manifeste<br />

chez les patients schizophrènes, et<br />

d’autant plus dans <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong><br />

traitement explicite ; on retrouve ainsi<br />

la notion classique <strong>de</strong> la littérature<br />

<strong>de</strong> dissociation avec un traitement<br />

explicite déficitaire et un traitement<br />

implicite conservé dans la population<br />

schizophrène. De plus, alors que l’on<br />

faisait l’hypothèse d’un seuil <strong>de</strong> détection<br />

<strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité plus élevé chez<br />

les patients schizophrènes, un profil<br />

similaire au groupe témoin a été<br />

retrouvé. Toutefois, cette équivalence<br />

<strong>de</strong>s performances a été corrélée à<br />

un coût cognitif plus élevé dans le<br />

groupe schizophrène, les temps <strong>de</strong><br />

réaction s’allongeant avec l’augmentation<br />

du pourcentage du visage<br />

propre du sujet au sein <strong>de</strong> la combinaison.<br />

D’autre part, <strong>de</strong>s secteurs <strong>de</strong><br />

vulnérabilité ont été mis en évi<strong>de</strong>nce<br />

chez les patients schizophrènes, avec<br />

un traitement <strong>de</strong>s visages fragilisé par<br />

rapport aux témoins. En effet, ce traitement<br />

s’est révélé sensible à <strong>de</strong>s<br />

effets d’ordre (diminution <strong>de</strong>s performances<br />

en condition <strong>de</strong> présentation<br />

aléatoire), ou au contraire il<br />

s’est trouvé facilité pour <strong>de</strong>s visages<br />

intermédiaires, à l’i<strong>de</strong>ntité floue, et<br />

ce d’autant plus pour les combinaisons<br />

familier/inconnu.<br />

En conclusion, si le signe du miroir<br />

apparaît comme un symptôme historique,<br />

particulièrement rare, nous<br />

avons pu mettre en évi<strong>de</strong>nce au travers<br />

<strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong> un soubassement<br />

cognitif avec <strong>de</strong>s singularités du traitement<br />

<strong>de</strong> son propre visage dans<br />

le groupe schizophrène, qui pourraient<br />

participer à un déficit <strong>de</strong> la<br />

reconnaissance <strong>de</strong> son i<strong>de</strong>ntité dans<br />

cette population. ■<br />

Docteur Charles Gheorghiev<br />

Assistant <strong>de</strong> psychiatrie, Hôpital d’Instruction<br />

<strong>de</strong>s Armées Percy, 101 avenue Henri<br />

Barbusse, 92140 Clamart.<br />

Texte <strong>de</strong> la communication présentée à la<br />

104ème session du Congrès <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> et<br />

<strong>de</strong> Neurologie <strong>de</strong> Langue Française à Brest,<br />

du 6 au 7 juin 2006 dans le cadre du Prix<br />

Première Communication <strong>de</strong> Bristol-Myers<br />

Squibb - Otsuka Pharmaceutical France.<br />

Bibliographie<br />

(1) ABELY P, Le signe du miroir dans les<br />

psychoses et plus spécialement dans la démence<br />

précoce, Annales Medico Psychologiques<br />

1930, 88, I, 28-36.<br />

(2) BRUCE V, & YOUNG A, Un<strong>de</strong>rstanding<br />

face recognition, British <strong>Journal</strong> of Psychology<br />

1986, 77, 305-327.<br />

(3) DELMAS FA, Le signe du miroir dans la<br />

démence précoce, Annales Médico-Psychologiques<br />

1929, 87, I, 227-233.<br />

(4) HARRINGTON A, OEPEN G, SPIT-<br />

ZER M, Disor<strong>de</strong>red recognition and perception<br />

of human faces in acute schizophrenia<br />

and experimental psychosis, Comprehensive<br />

Psychiatry 1989, 30, 376-384.<br />

(5) JOSEPH AB, Focal central nervous system<br />

abnormalities in patients with misi<strong>de</strong>ntification<br />

syndromes, 68-79, in : CHRISTODOULOU<br />

GN, The Delusional Misi<strong>de</strong>nti- fication Syndromes,<br />

Karger : Bibliotheca Psychiatrica,<br />

n°164, 1986.<br />

(6) KIRCHER TT, SENIOR C, PHILLIPS<br />

ML et al, Recognizing one’s own face, Cognition<br />

2001, 78, B1-B15.<br />

(7) LOCKE J, Essai philosophique concernant<br />

l’enten<strong>de</strong>ment humain, Paris, Vrin,<br />

1972.<br />

(8) MERLEAU-PONTY M, Phénoménologie<br />

<strong>de</strong> la perception, Paris, Gallimard, 1976.<br />

(9) POREH AM, WHITMAN RD, WEBER<br />

M et al, Facial recognition in hypothetically<br />

schizotypic college stu<strong>de</strong>nts. The role of generalized<br />

poor performance, <strong>Journal</strong> of Nervous<br />

and Mental Disease 1994, 182, 503-<br />

507.<br />

(10) SCHWARTZ BL, ROSSE RB, JOHRI S<br />

et al, Visual scanning of facial expressions<br />

in schizophrenia, <strong>Journal</strong> of Neuropsychiatry<br />

and Clinical Neurosciences 1999, 11,<br />

103-106.<br />

Le vol : « Acte <strong>de</strong> prendre ou <strong>de</strong> s’approprier<br />

sans autorisation le bien<br />

d’autrui » est largement répandu. Il fait<br />

partie <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong> l’humanité (Eve<br />

n’at-elle pas volé la pomme ?) Il est<br />

présent dans toutes les cultures, accompli<br />

à tous les âges, indépendant <strong>de</strong> toute<br />

origine, classe ou croyance et implique<br />

une désapprobation morale et sociale.<br />

Conduite fréquente chez l’enfant et<br />

l’adolescent (4), le vol quand il persiste<br />

chez l’adulte est une réaction anti-sociale,<br />

souvent pathologique.<br />

La tolérance dont font preuve certaines<br />

cultures vis-à-vis <strong>de</strong> ces passages à l’acte<br />

à l’adolescence, nous fait penser que<br />

c’est peut-être un phénomène s’inscrivant<br />

dans une phase du développement<br />

humain et que seule sa persistance<br />

a valeur <strong>de</strong> symptôme : le vol<br />

comme solution à un conflit sous-jacent<br />

inconscient qu’il soit utilitaire (occasionnel,<br />

professionnel) ou franchement<br />

pathologique.<br />

C’est un fait juridique puni par la loi (à<br />

<strong>de</strong> rares exceptions près relevant <strong>de</strong><br />

l’article 122-1 et 2 du nouveau Co<strong>de</strong><br />

Pénal) même si on lui reconnaît parfois<br />

<strong>de</strong>s motivations sociologiques.<br />

Nous centrerons cette étu<strong>de</strong> sur la kleptomanie<br />

ou « désir irrationnel <strong>de</strong> voler<br />

pour <strong>de</strong>s motivations distinctes <strong>de</strong> l’utilité<br />

et reliées à l’inconscient chez un individu<br />

dont les autres aspects <strong>de</strong> la personnalité<br />

sont par ailleurs intacts ».<br />

Cette entité nosologique est apparue en<br />

France dans la première moitié du<br />

XIXème siècle. Pinel la distinguait déjà<br />

<strong>de</strong>s autres formes <strong>de</strong> vols pathologiques<br />

: « combien <strong>de</strong> mala<strong>de</strong>s, dit-il, au<br />

retour <strong>de</strong> leur accès ne peuvent s’empêcher<br />

<strong>de</strong> voler et <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s tours <strong>de</strong><br />

filouterie, tandis que dans leurs moments<br />

luci<strong>de</strong>s on les cite comme <strong>de</strong>s modèles<br />

d’une probité austère. Mais dans le cas<br />

dont je veux parler ici, le penchant au vol<br />

est permanent et n’est point accompagné<br />

d’aliénation mentale. La raison<br />

conserve tout son empire, elle résiste<br />

contre cette impulsion secrète ; mais le<br />

penchant l’emporte, il subjugue la volonté<br />

». (6)<br />

« L’impulsion à voler, ou vol sans nécessité<br />

» a été décrite (sous le terme <strong>de</strong><br />

klopémanie) pour la première fois en<br />

1816 par Matthey puis par Marc en<br />

1840 qui lui donna son nom <strong>de</strong> kleptomanie<br />

(du grec « je vole et folie »).<br />

Elle fut d’abord considérée comme une<br />

maladie (monomanie) puis comme un<br />

syndrome, et enfin comme un symptôme.<br />

Elle a parfois été niée, certains en<br />

faisant « une affection mentale fictive au<br />

profit <strong>de</strong>s classes aisées » comme<br />

Anteaume en 1925.<br />

Sa définition première rejoint celle du<br />

DSM IV : impossibilité répétée <strong>de</strong> résister<br />

aux impulsions <strong>de</strong> vol d’objets<br />

n’ayant ni utilité immédiate ni valeur<br />

monétaire avec tension croissante avant<br />

<strong>de</strong> commettre l’acte et gran<strong>de</strong> satisfaction<br />

après sa réalisation.<br />

C’est un acte solitaire qui n’est pas dû<br />

à un trouble <strong>de</strong>s conduites (ex : toxicomanie),<br />

ou le fait d’une personnalité<br />

antisociale. Il n’est pas commis sous<br />

l’influence d’une hallucination ou<br />

d’idées délirantes, ni pour exprimer la<br />

colère ou la vengeance.<br />

Ce vol pathologique doit être distingué<br />

d’un vol utilitaire « conscient et organisé<br />

» et d’un trouble mental organique<br />

(débilité, épilepsie, démence, troubles<br />

post-encéphalitiques etc ... )<br />

On peut y associer les troubles bipolaires<br />

avec le vol du mélancolique (1)<br />

ou du maniaque.<br />

Les discussions actuelles à propos <strong>de</strong> la<br />

kleptomanie s’efforcent d’expliquer le<br />

conduite kleptomaniaque et sa signification<br />

inconsciente plutôt que <strong>de</strong> lui<br />

assigner une place nosographique qu’elle<br />

a eu du mal à reconquérir en 1980<br />

dans le DSM III. C’est une pathologie<br />

très répandue mais difficile à évaluer<br />

car les patients ne viennent pas consulter<br />

spontanément (il s’agit souvent<br />

d’obligations <strong>de</strong> soins suite à <strong>de</strong>s problèmes<br />

judiciaires).<br />

D’autres l’évoquent avec plus ou moins<br />

<strong>de</strong> culpabilité au cours <strong>de</strong> thérapies<br />

Le vol et la<br />

kleptomanie*<br />

comme un phénomène transitoire lié à<br />

<strong>de</strong>s moments difficiles <strong>de</strong> leur vie.<br />

Véritable court circuit <strong>de</strong>s processus<br />

<strong>de</strong> mentalisation et <strong>de</strong>s affects, la kleptomanie<br />

est souvent associée à d’autres<br />

troubles comme l’anxiété, la dépression,<br />

la boulimie ou <strong>de</strong>s troubles<br />

sexuels (2). Les conditions <strong>de</strong> réalisation<br />

transgressives dans le suspens et<br />

la peur permettent <strong>de</strong> dénier l’angoisse<br />

mais aussi d’avoir une réelle fonction<br />

anti-dépressive tant au niveau <strong>de</strong>s<br />

mécanismes <strong>de</strong> défense et <strong>de</strong> la symbolique<br />

du vol qu’au niveau biochimique.<br />

Cette fonction thérapeutique du vol a<br />

été décrite dans le cadre <strong>de</strong> pathologies<br />

dépressives : psychasthénie, psychopathie<br />

: « pour revigorer un élan mental<br />

déficient » ou « comme compensation à<br />

l’auto-dépréciation par la satisfaction du<br />

vol réussi » (5), mais aussi, bien que rarement,<br />

dans le cadre <strong>de</strong> la mélancolie<br />

comme une conduite symbolique compensatoire<br />

<strong>de</strong> la perte d’objet (7).<br />

Pierre Janet rapporte ainsi en 1911<br />

l’observation d’une patiente mélancolique<br />

qui au décours d’un troisième<br />

accès dépressif grave guérit brutalement<br />

en découvrant par hasard le vol<br />

dans les grands magasins.<br />

L’explication <strong>de</strong> celle-ci fut que, en pratiquant<br />

son premier vol, elle avait ressenti<br />

un « bouleversement délicieux » à<br />

l’idée qu’elle était une vraie voleuse,<br />

et qu’elle s’était «sentie guérie en rentrant<br />

chez elle ». Elle recommence par<br />

la suite ces vols dès qu’elle a un nouvel<br />

affaissement <strong>de</strong> l’humeur et cela pendant<br />

plusieurs mois jusqu’à l’arrestation,<br />

qui provoque la rechute mélancolique.<br />

« On peut facilement vérifier, dit P. Janet,<br />

les rapports entre impulsion et dépression,<br />

et constater comment l’impulsion<br />

tire sa force du besoin d’excitation qui<br />

se développe au cours <strong>de</strong> la dépression<br />

par les sentiments d’incomplétu<strong>de</strong> qu’elle<br />

engendre (3) ».<br />

Cette patiente <strong>de</strong>vient en quelque sorte<br />

dépendante <strong>de</strong> sa « thérapie par le vol »<br />

avec une faça<strong>de</strong> <strong>de</strong> kleptomane qui<br />

fait écran quelques temps à la maladie<br />

cyclothymique.<br />

Cela démontre la limite du concept <strong>de</strong><br />

kleptomanie qui n’est en fait qu’une<br />

« impulsion symptôme », la plupart du<br />

temps sans obsession préalable (l’impulsion<br />

kleptomane étant le plus souvent<br />

sollicité par la vue <strong>de</strong> l’objet ce<br />

qui la distingue <strong>de</strong> l’obsession-impulsion<br />

<strong>de</strong> la névrose obsessionnelle.) Il<br />

s’agit plutôt d’une contrainte interne à<br />

laquelle le patient ne peut résister sous<br />

menace <strong>de</strong> rechute dépressive (réelle<br />

ou fantasmée).<br />

Mais il peut aussi prendre un autre<br />

« raccourci » associant recherche <strong>de</strong><br />

sensation et impulsivité.<br />

Ainsi, la boulimie, ou d’autres conduites<br />

addictives dont on connaît la comorbidité<br />

et qui ont pour caractère commun<br />

leur répétition, l’envahissement<br />

<strong>de</strong> la vie psychique et la <strong>de</strong>struction<br />

du champ <strong>de</strong> conscience au moment<br />

<strong>de</strong> l’acte : achats pathologiques, jeux<br />

pathologiques, dépendance à une substance<br />

psychoactive, etc... En effet :<br />

« L’imagination du kleptomane transforme<br />

la réalité en un mon<strong>de</strong> autre où il<br />

peut agir a sa guise. Il atténue les vives<br />

informations <strong>de</strong> la conscience et se transpose<br />

par l’imaginaire en un état hypnoï<strong>de</strong><br />

qui permet la réalisation du désir ».<br />

Stekel (8).<br />

Cette compulsion à se remplir <strong>de</strong> nourriture<br />

ou d’objets nous renvoie à <strong>de</strong>s<br />

carences précoces <strong>de</strong> la petite enfance.<br />

Car, comme nous le rappelle Winnicott,<br />

« L’enfant qui vole ne cherche pas<br />

l’objet volé mais cherche la mère sur<br />

laquelle il a <strong>de</strong>s droits (...). Il réclame à sa<br />

mère et à son père <strong>de</strong>s dommages et<br />

intérêts parce qu’il se sent privé <strong>de</strong> leur<br />

amour ». Il rapproche également cette<br />

boulimie d’objet <strong>de</strong> la gloutonnerie<br />

« précurseur du vol » : « En d’autres<br />

termes si un enfant est glouton il y a<br />

une certaine carence affective et une certaine<br />

recherche compulsive d’une thérapie<br />

par l’environnement en rapport avec<br />

cette carence ». (9)<br />

Le kleptomane ferait donc payer<br />

inconsciemment à la société la faillite <strong>de</strong><br />

l’environnement <strong>de</strong> sa petite enfance,<br />

mais l’impulsivité se limiterait à un territoire<br />

restreint (chez un individu par<br />

ailleurs normal ayant bien repéré la<br />

loi), et ne <strong>de</strong>viendrait pas comme chez<br />

le psychopathe un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> relation<br />

aux autres.<br />

Certains auteurs distinguent ainsi selon<br />

le type <strong>de</strong> kleptomanie, la symbolique<br />

<strong>de</strong>s objets volés, une fixation orale,<br />

anale (collectionneurs) ou phallique (2).<br />

Winnicott associe également vol et<br />

vagabondage à l’adolescence : le vol<br />

étant un geste centripète « ce geste <strong>de</strong> la<br />

main qui se tend vers le fruit mûr »<br />

(Lacan), véritable déplacement <strong>de</strong> l’interdit<br />

sexuel, et le vagabondage une<br />

tendance centrifuge, fuite du mon<strong>de</strong><br />

sexué <strong>de</strong>s adultes et l’acceptation <strong>de</strong><br />

sa propre finitu<strong>de</strong>. Dans les <strong>de</strong>ux cas il<br />

s’agit <strong>de</strong> refuser <strong>de</strong> grandir et <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r<br />

l’illusion infantile du sentiment d’éternité<br />

et <strong>de</strong> la toute puissance. Etre obligé<br />

<strong>de</strong> grandir c’est en quelque sorte<br />

être volé <strong>de</strong> son enfance ; en volant, le<br />

kleptomane se fait ainsi justice et se<br />

réapproprie avec jouissance l’objet <strong>de</strong><br />

ses désirs : sa mère. Cet acte s’accomplit<br />

le plus souvent en public dans les<br />

grands magasins avec le risque d’être<br />

pris, ce qui augmente l’excitation.<br />

On peut ainsi avancer l’hypothèse que<br />

la kleptomanie est un acte quasi incestueux<br />

avec en toile <strong>de</strong> fond la<br />

recherche inconsciente <strong>de</strong> la punition,<br />

<strong>de</strong> la loi du père.<br />

Ce serait donc un aménagement pervers,<br />

une solution permettant au sujet<br />

<strong>de</strong> conserver la mégalomanie primaire,<br />

sans pour cela verser dans la psychose,<br />

l’objet volé étant le fétiche à moins que<br />

ce ne soit l’acte en lui-même.<br />

Mais la signification sexuelle du vol<br />

échappe en règle au kleptomane alors<br />

qu’elle est nettement perçue par le fétichiste.<br />

Il s’agit ici plutôt d’un substitut <strong>de</strong><br />

la satisfaction sexuelle que d’une réelle<br />

jouissance. « L’objet d’amour du kleptomane<br />

est bien plus qu’un simple fait<br />

isolé, c’est le lieu d’invasion et <strong>de</strong> fixation<br />

<strong>de</strong> la réalité amoureuse, sensuelle et érotique<br />

dans un acte qui dépasse ne fusse<br />

qu’un instant très court les limites <strong>de</strong><br />

temps et d’espace » (8).<br />

La kleptomanie permettrait ainsi, <strong>de</strong><br />

manière transitoire à l’adolescence ou<br />

à certains moments <strong>de</strong> la vie, le retour<br />

à l’unité première où le sujet et objet<br />

étaient confondus, où le narcissisme<br />

ne connaissait aucune fissure.<br />

Beaucoup d’auteurs font remarquer sa<br />

plus gran<strong>de</strong> fréquence chez la femme<br />

et le lien avec la vie génitale, véritable<br />

« remè<strong>de</strong> » contre la perte d’objet : stérilité,<br />

décès ou départ d’enfant, ménopause<br />

etc..., d’autres mettent l’accent<br />

sur la crainte <strong>de</strong> la castration, l’envie<br />

du pénis et justifie ainsi sa fréquence en<br />

pério<strong>de</strong> menstruelle.<br />

La kleptomanie se caractérise donc par<br />

<strong>de</strong>ux pôles : d’un côté la révolte contre<br />

l’interdit du vol et <strong>de</strong> l’inceste, <strong>de</strong> l’autre<br />

le désir <strong>de</strong> punition.<br />

C’est dans le sens <strong>de</strong> cette recherche <strong>de</strong><br />

limites que le kleptomane doit être<br />

puni mais avec une « peine atténuée »<br />

car même s’il agit sous la « contrainte »<br />

pulsionnelle, il reste responsable <strong>de</strong> ses<br />

actes et ne peut être totalement exonéré<br />

<strong>de</strong> sa responsabilité pénale.<br />

Nous avons remarqué, au cours <strong>de</strong><br />

notre pratique, que beaucoup <strong>de</strong> « kleptomanes<br />

débutants » arrêtaient dès le<br />

premier procès et d’autres dès qu’ils<br />

CLINIQUE ■ 13<br />

avaient une vie affective satisfaisante. En<br />

effet « les conditions favorables peuvent<br />

avec le temps permettre à l’individu <strong>de</strong><br />

trouver une personne à aimer, au lieu<br />

<strong>de</strong> poursuivre sa quête en jetant son<br />

dévolu sur <strong>de</strong>s substituts <strong>de</strong> l’objet dont la<br />

valeur symbolique est perdue » (9).<br />

Cette étu<strong>de</strong> nous a permis <strong>de</strong> situer la<br />

kleptomanie comme solution dans la<br />

reconquête <strong>de</strong> la complétu<strong>de</strong> narcissique<br />

et <strong>de</strong> démontrer qu’il se joue là<br />

quelque chose <strong>de</strong> la perte <strong>de</strong> l’objet et<br />

<strong>de</strong> la jouissance.<br />

Le péché originel n’est-il pas plutôt<br />

d’avoir (acte sexuel) que d’avoir volé<br />

(sans nécessité)le fruit défendu du jardin<br />

d’E<strong>de</strong>n.<br />

Ce mythe fondateur <strong>de</strong> notre société<br />

ne renvoie-t-il pas simplement à l’insatisfaction<br />

fondamentale <strong>de</strong> l’homme et<br />

à sa crainte d’être dépouillé ou privé<br />

d’affection ? ■<br />

Le lavage <strong>de</strong> cerveau :<br />

mythe ou réalité<br />

Dick Athony<br />

Massimo Introvigne<br />

L’Harmattan, 17,50 €<br />

Régis Airault<br />

CH Mayotte, BP04, 97600 Mamoudzou<br />

* « Nom que l’on donne au vol quand il est commis<br />

par une personne appartenant aux classes dirigeantes<br />

» (Selon un humoriste du début du<br />

XX ème siècle).<br />

Bibliographie<br />

(1) DUBOIS J.Cl., RANCUREL G., Vol et<br />

mélancolie : à propos <strong>de</strong> 5 observations,<br />

Société Médico-psychologique, séance du<br />

20 mars 1967, 572-579.<br />

(2) GOLDMAN M.J., Kleptomania : making<br />

sense of the nonsensical, J. Psychiatry, 148,<br />

1991<br />

(3) JANET P. La kleptomanie et la dépression<br />

mentale, J. <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>, 1911, 97-103.<br />

(4) LAUZEL J.P., Les vols chez l’enfant,<br />

Cahiers <strong>de</strong> l’hôpital Henri Rousselle, 4<br />

octobre 1960.<br />

(5) MARTIMOR E., Contribution à l’étu<strong>de</strong><br />

médico-psychologique du vol. Les états dépressifs,<br />

Annales médico-psychologiques,<br />

124ème année, 5, 635-643.<br />

(6) PINEL Ph, Traité Médico-philosophique<br />

sur l’aliénation mentale ou la manie, Paris,<br />

Richard, Caille et Ravier, an. IX, 318.<br />

(7) RAMELLI E., MAPELLI G., Du vol<br />

mélancolique, Acta. Psychiat. 1979, 79, 56-<br />

74.<br />

(8) SEGUIER H., Revue historique <strong>de</strong> la,<br />

notion <strong>de</strong> Kleptomanie, 1ère et 2ème partie.<br />

(9) WINNICOTT, De la pédiatrie à la psychanalyse,<br />

Petite bibliothèque Payot 1969.<br />

Cet ouvrage résume l’histoire scientifique<br />

et juridique <strong>de</strong> la question <strong>de</strong><br />

savoir si la notion <strong>de</strong> « lavage <strong>de</strong> cerveau<br />

», appliquée à <strong>de</strong>s « sectes » religieuses,<br />

politiques et thérapeutiques,<br />

est une notion utile dotée d’un statut<br />

scientifique, ou bien s’il s’agit d’un<br />

mythe <strong>de</strong> stigmatisation employé à<br />

<strong>de</strong>s fins <strong>de</strong> propagan<strong>de</strong>. Cette question<br />

a fait l’objet d’analyses nombreuses<br />

et exhaustives <strong>de</strong>puis les années<br />

1950.<br />

Ce livre, qui résume l’essentiel <strong>de</strong> la<br />

recherche, retrace l’histoire <strong>de</strong>s conflits<br />

entre les différentes approches du lavage<br />

<strong>de</strong> cerveau, aux Etats-Unis et<br />

plus récemment en France. Comme<br />

il le démontre, l’une <strong>de</strong>s carences <strong>de</strong><br />

l’approche du lavage <strong>de</strong> cerveau dans<br />

la perspective anti-sectes, tient au fait<br />

que, en raison <strong>de</strong> sa nature ambiguë<br />

et peu scientifique, on peut l’appliquer<br />

à n’importe quel mouvement<br />

post-mo<strong>de</strong>rne. De surcroît, elle ne sert<br />

à rien pour déterminer quels groupes<br />

sont véritablement nocifs et quels<br />

groupes ne le sont pas. Un grand besoin<br />

<strong>de</strong> recherche se fait sentir, et une<br />

bonne part <strong>de</strong> celle résumée et mentionnée<br />

ici peut être d’un certain secours.


14<br />

LIVRES<br />

■ ORGANISATION DES SOINS<br />

Le gouvernement <strong>de</strong> la<br />

recherche<br />

Histoire d’un engagement<br />

politique, <strong>de</strong> Pierre Mendès<br />

France à Charles <strong>de</strong> Gaulle<br />

(1953-1969)<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Vincent<br />

Duclerc et Alain Chatriot<br />

La Découverte, 34 €<br />

Ce livre est né d’un programme <strong>de</strong><br />

recherche <strong>de</strong> l’Ecole <strong>de</strong>s hautes étu<strong>de</strong>s<br />

en sciences sociales sur les politiques<br />

scientifiques françaises du second<br />

XX e siècle. Il s’est intéressé à l’époque<br />

considérée comme l’« âge d’or » <strong>de</strong><br />

l’engagement <strong>de</strong> l’Etat, au tournant<br />

<strong>de</strong>s années 1950 et 1960, lorsque<br />

Pierre Mendès France, puis le général<br />

<strong>de</strong> Gaulle, s’investirent dans la<br />

construction d’une puissante recherche<br />

publique et <strong>de</strong> ses structures <strong>de</strong> comman<strong>de</strong>ment.<br />

Au cœur <strong>de</strong> cette étu<strong>de</strong><br />

collective, rési<strong>de</strong> l’enquête inédite<br />

menée sur la Délégation générale à<br />

la recherche scientifique et technique<br />

(DGRST), une administration dite <strong>de</strong><br />

mission créée entre novembre 1958<br />

et avril 1961 pour <strong>de</strong>venir une institution<br />

importante, placée au sommet<br />

<strong>de</strong> l’Etat pour porter l’effort <strong>de</strong> recherche<br />

et organiser son action. Enquête<br />

inédite car, contrairement au<br />

Centre national <strong>de</strong> la recherche scientifique<br />

(CNRS) qui a célébré son cinquantenaire<br />

en 1989, la DGRST aujourd’hui<br />

disparue n’a suscité aucune<br />

recherche spécifique. La première partie<br />

du livre se présente comme un<br />

recueil d’analyses, pour la plupart<br />

inédites, sur les questions <strong>de</strong> politique<br />

scientifique dans la France du XX e<br />

siècle. Réunissant <strong>de</strong>s historiens du<br />

politique, <strong>de</strong>s sciences ou <strong>de</strong> l’économie<br />

et une archiviste, ces contributions<br />

précisent <strong>de</strong>s hypothèses <strong>de</strong><br />

recherche sur un éventuel modèle <strong>de</strong><br />

politique scientifique Mendès France<strong>de</strong><br />

Gaulle. Centrés sur <strong>de</strong>s moments,<br />

<strong>de</strong>s acteurs ou <strong>de</strong>s institutions, ces<br />

textes restitueront une part <strong>de</strong> la complexité<br />

<strong>de</strong>s décisions politiques et <strong>de</strong>s<br />

réalisations institutionnelles, loin<br />

<strong>de</strong> visions faussement linéaires. La<br />

<strong>de</strong>uxième partie regroupe <strong>de</strong> nombreux<br />

textes dont la force rési<strong>de</strong> dans<br />

l’accès privilégié sur les pratiques<br />

concrètes <strong>de</strong>s acteurs, sur leurs projets,<br />

sur leurs réussites et sur leurs déceptions.<br />

Economie politique <strong>de</strong><br />

l’action sociale<br />

Pierre Naves, Hervé Defalvard<br />

avec la collaboration <strong>de</strong> Katia<br />

Julienne et Patrick Petour<br />

Préfaces <strong>de</strong> Marie-Thérèse Join-<br />

Lambert et François Roussely<br />

Dunod, 27 €<br />

Les auteurs <strong>de</strong> cet ouvrage ont mis<br />

en commun leurs expériences et leurs<br />

réflexions, pour considérer conjointement<br />

le social et l’économique. Ils<br />

décrivent la production <strong>de</strong>s règles qui<br />

fon<strong>de</strong>nt l’intervention publique dans<br />

le domaine social et montrent que<br />

cette production répond à une logique<br />

politique qui n’exclut pas le jeu<br />

<strong>de</strong>s acteurs économiques. Ils présentent<br />

l’importance <strong>de</strong>s questions<br />

sociales et <strong>de</strong>s modalités <strong>de</strong> leur prise<br />

en charge dans l’économie française<br />

actuelle et insistent sur l’utilité que<br />

soient faits <strong>de</strong>s choix politiques d’investir<br />

dans l’action sociale.<br />

D’autres disciplines ne sont pas écartées.<br />

En témoignent les nombreuses<br />

références à la sociologie, tant classique<br />

(Weber, Arendt...) que mo<strong>de</strong>rne<br />

(Bourdieu, Castel, Paugam...), à l’histoire<br />

(Hatzfeld), à la philosophie, aux<br />

politiques publiques. Et surtout, l’économie<br />

politique <strong>de</strong> l’action sociale ne<br />

signifie pas pour les auteurs la mise<br />

à l’écart <strong>de</strong> l’humain - je dirais même<br />

bien au contraire -, mais le recours à<br />

la mesure, à la réflexion, à l’analyse<br />

raisonnée <strong>de</strong>s coûts, à la prévision,<br />

à l’évaluation.<br />

Cet arrêté vient concrétiser plus <strong>de</strong><br />

quinze années <strong>de</strong> longs travaux<br />

d’élaboration d’une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription<br />

médicalisée <strong>de</strong> l’activité en psychiatrie<br />

et santé mentale. Il vise à asseoir<br />

un recueil minimum, ayant une validité<br />

nationale, et permettant <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r<br />

à l’analyse médico-économique <strong>de</strong> l’activité<br />

<strong>de</strong> soins réalisée dans les établissements<br />

<strong>de</strong> santé publics ou privés<br />

ayant une activité en psychiatrie.<br />

Les informations recueillies seront transmises<br />

aux ARH, après anonymisation,<br />

chaque fin <strong>de</strong> trimestre. A leur tour, les<br />

ARH transmettront ces données anonymes<br />

aux caisses d’assurance maladie<br />

et à l’ATIH. Deux volets <strong>de</strong> <strong>de</strong>scription<br />

sont <strong>de</strong>mandés par cet arrêté :<br />

- une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s activités <strong>de</strong> séjours<br />

<strong>de</strong>s établissements privés et publics,<br />

sectorisés ou non, les RPS (Résumés<br />

Par Séquence), transformés en RPSA<br />

(Résumés Par Séquence Anonymisés)<br />

avant transmission aux ARH ;<br />

- une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s activités ambulatoires<br />

par actes <strong>de</strong> chaque catégorie<br />

<strong>de</strong>s personnels <strong>de</strong> santé <strong>de</strong>s établissements<br />

psychiatriques publics sectorisés<br />

ou non, les RAA (Résumés d’Activité<br />

Ambulatoire), transformés en R3A<br />

(Résumés Anonymisés d’Activité<br />

Ambulatoire) avant transmission aux<br />

ARH. Quels en sont les effets pour les<br />

établissements <strong>de</strong> santé, pour les personnels<br />

<strong>de</strong> santé (1) et pour le mé<strong>de</strong>cin<br />

responsable du DIM, et que peuton<br />

attendre <strong>de</strong> l’exploitation <strong>de</strong>s<br />

données ainsi recueillies ?<br />

Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />

relatif au recueil et au traitement<br />

<strong>de</strong>s données d’activité médicale sur<br />

les établissements <strong>de</strong> santé<br />

Cet arrêté <strong>de</strong>man<strong>de</strong> un traitement<br />

automatisé <strong>de</strong>s données médicales<br />

(article 1 premièrement) pour lesquels<br />

les établissements ne sont pas tous préparés.<br />

Il est précisé dans le premièrement<br />

<strong>de</strong> l’article 2 que « Ces informations<br />

doivent être conformes au contenu<br />

du dossier médical ». Là aussi, nombre<br />

d’établissements n’ont pas mis en place<br />

<strong>de</strong> dispositif permettant la liaison entre<br />

informations sur l’activité et observations<br />

médicales. La situation actuelle<br />

montre, le plus souvent, <strong>de</strong>s applications<br />

indépendantes : les données administratives<br />

sur les séjours, les relevés<br />

d’activités ambulatoires, les dossiers<br />

informatisés <strong>de</strong>s patients quand ils existent<br />

et concernent également l’ambulatoire.<br />

Les établissements auront donc<br />

souvent un lourd travail à réaliser dans<br />

<strong>de</strong>s délais assez brefs pour permettre ce<br />

qui est prescrit dans le troisièmement<br />

<strong>de</strong> l’article 4 <strong>de</strong> l’arrêté, c’est-à-dire,<br />

« veiller à la qualité <strong>de</strong>s données et les<br />

confronter en tant que <strong>de</strong> besoin aux<br />

dossiers médicaux et fichiers administratifs<br />

». L’arrêté est d’application immédiate<br />

à sa date <strong>de</strong> parution. Toutefois,<br />

connaissant les difficultés <strong>de</strong> mise en<br />

œuvre, notamment pour la <strong>de</strong>scription<br />

<strong>de</strong> l’activité ambulatoire, l’arrêté prévoit<br />

une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> transition jusque fin<br />

2007 au cours <strong>de</strong> laquelle les établissements<br />

pourront transmettre <strong>de</strong>s<br />

fichiers d’activité ambulatoire agrégés,<br />

simplifiant les collectes d’information<br />

sur le terrain. L’inci<strong>de</strong>nce médico-économique<br />

sur l’EPRD et le budget <strong>de</strong><br />

l’établissement n’apparaît pas dans ce<br />

texte législatif. Il est bien cité au premièrement<br />

<strong>de</strong> l’article 1 « Afin <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r<br />

à l’analyse médico-économique <strong>de</strong><br />

l’activité...», mais pas plus d’information<br />

n’est donné dans cet arrêté. C’est<br />

dans le préambule du gui<strong>de</strong> méthodologique<br />

que se trouvent les éléments<br />

<strong>de</strong> réponse. Sous la signature <strong>de</strong> Xavier<br />

Bertrand, Ministre <strong>de</strong> la santé et <strong>de</strong>s<br />

solidarités, on peut lire : « les professionnels<br />

et le ministère sont dans l’attente<br />

d’un financement rénové <strong>de</strong> la psychiatrie,<br />

la VAP, un modèle pluraliste à<br />

plusieurs compartiments, qui assurera la<br />

Valorisation <strong>de</strong> l’Activité en <strong>Psychiatrie</strong><br />

(activité <strong>de</strong> soin, mise en œuvre <strong>de</strong>s MIG<br />

communes ou spécifiques à la psychiatrie,<br />

tarification à l’activité, prise en compte <strong>de</strong><br />

critères géographiques et populationnels).<br />

Les éléments objectifs fournis par le<br />

RIM _ P vont permettre d’asseoir le financement<br />

du compartiment relatif à l’activité<br />

en hospitalisation et en ambulatoire ».<br />

Par ailleurs, la mise en place <strong>de</strong> ces<br />

recueils <strong>de</strong> données ne remplace pas la<br />

fiche par patient mais vient en plus.<br />

L’article 1 commence par : « Outre le<br />

recueil <strong>de</strong> données relatives au patient<br />

instauré par l’arrêté du 24 novembre<br />

1998 ... ».<br />

Que peut attendre l’établissement <strong>de</strong><br />

l’exploitation <strong>de</strong>s données ainsi<br />

recueillies ?<br />

L’arrêté précise au Il <strong>de</strong> l’article 4 : « il<br />

(le mé<strong>de</strong>cin responsable du DIM) assure<br />

la diffusion <strong>de</strong>s informations issues <strong>de</strong><br />

ces traitements auprès <strong>de</strong> la direction <strong>de</strong><br />

l’établissement <strong>de</strong> santé et du prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong><br />

la commission médicale <strong>de</strong> l’établissement<br />

ainsi qu’aux praticiens ayant dispensé<br />

les soins, dans <strong>de</strong>s conditions<br />

garantissant l’anonymat <strong>de</strong>s patients ».<br />

Au II <strong>de</strong> l’article 5 cet arrêté ajoute :<br />

« Le directeur et le prési<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la commission<br />

médicale ou <strong>de</strong> la conférence<br />

médicale <strong>de</strong> l’établissement sont <strong>de</strong>stinataires<br />

<strong>de</strong> statistiques, agrégées par unité<br />

médicale ou tout autre découpage structurel<br />

repérable par les éléments disponibles<br />

dans le système d’information <strong>de</strong><br />

l’établissement et pour l’ensemble <strong>de</strong> l’établissement<br />

». Mais c’est <strong>de</strong> nouveau<br />

dans le préambule du gui<strong>de</strong> méthodologique<br />

que se trouvent <strong>de</strong>s réponses<br />

plus avancées : « Les données recueillies<br />

sont riches, et les possibilités d’exploitations<br />

multiples. Elles peuvent être mobilisées<br />

aussi bien au niveau local, pour la<br />

gestion interne, pour l’amélioration <strong>de</strong><br />

l’efficience et <strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s soins, qu’au<br />

niveau régional, par exemple, pour l’élaboration<br />

<strong>de</strong>s SROS ». Il existe, toutefois,<br />

une certaine note <strong>de</strong> modération<br />

à ajouter à cet enthousiasme. En effet,<br />

si les RPS et RAA peuvent apporter à<br />

la psychiatrie « conventionnelle » une<br />

assez bonne <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s réalités du<br />

terrain, ils ne permettent pas d’être au<br />

niveau <strong>de</strong> ce que <strong>de</strong>vient aujourd’hui le<br />

travail en santé mentale.<br />

L’arrêté ne vise que la <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s<br />

journées d’hospitalisation temps complet<br />

ou partiel et les actes directs ou<br />

indirects relatifs à un patient et réalisés<br />

en « soins externes » (article 2 - 1 -<br />

2°). Il n’y a pas <strong>de</strong> place pour la <strong>de</strong>scription<br />

<strong>de</strong>s actions <strong>de</strong> plus en plus<br />

nombreuses se situant dans la prévention,<br />

les réseaux ou l’ai<strong>de</strong> aux aidants et<br />

qui ne sont donc pas relatives à un<br />

patient. Ces actions peuvent cependant,<br />

en fonction <strong>de</strong> l’organisation <strong>de</strong><br />

chaque secteur, mobiliser une gran<strong>de</strong><br />

part <strong>de</strong>s moyens affectés hors <strong>de</strong> l’hospitalisation<br />

classique ou du CMP.<br />

Le gui<strong>de</strong> méthodologique apporte plus<br />

<strong>de</strong> renseignements : « Les actions pour<br />

la communauté ne relèvent pas du présent<br />

recueil mais seront enregistrées sous<br />

forme d’une mission d’intérêt général<br />

(au sens <strong>de</strong> l’article D 162-6 du co<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> la sécurité sociale) ». Si le gui<strong>de</strong> ne<br />

conseille pas plus sur les métho<strong>de</strong>s à<br />

mettre en œuvre pour expliciter mieux<br />

cette part parfois importante du travail<br />

<strong>de</strong>s secteurs, il est possible <strong>de</strong> penser<br />

qu’un repli sur les activités bien décrites,<br />

se fasse au détriment <strong>de</strong> l’ouverture<br />

vers la santé mentale. (Cette difficulté<br />

est redoublée pour la psychiatrie infanto-juvénile).<br />

Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />

relatif au recueil et au traitement<br />

<strong>de</strong>s données d’activité médicale pour<br />

les personnels <strong>de</strong> santé<br />

Il n’est pas mentionné dans cet arrêté la<br />

notion <strong>de</strong> collecte initiale <strong>de</strong> l’infor-<br />

mation autrement que sous les termes<br />

du premièrement <strong>de</strong> l’article 2 : « Dans<br />

chaque unité médicale <strong>de</strong> soins <strong>de</strong> psychiatrie,<br />

les catégories d’information enregistrées<br />

sur le RPS sont les suivantes :...».<br />

Le gui<strong>de</strong> méthodologique approfondit<br />

un peu cette notion :<br />

« 1.2.1 L’unité médicale<br />

Les informations sont recueillies au<br />

niveau <strong>de</strong> l’unité médicale, définie comme<br />

un ensemble individualisé <strong>de</strong> moyens<br />

matériels et humains, repéré par un co<strong>de</strong><br />

spécifique dans une nomenclature déterminée<br />

par l’établissement. Afin <strong>de</strong> pouvoir<br />

développer une comptabilité analytique<br />

permettant <strong>de</strong> mesurer le coût<br />

d’unités d’oeuvre homogènes, il est souhaitable<br />

que les unités médicales soient<br />

définies <strong>de</strong> telle sorte qu’à chacune ne<br />

correspon<strong>de</strong> qu’une seule forme d’activité<br />

selon la définition donnée au 1. 1.2 ».<br />

L<br />

’interruption du traitement d’un<br />

membre <strong>de</strong> la famille souffrant <strong>de</strong><br />

maladie mentale et l’aggravation<br />

consécutive <strong>de</strong>s symptômes psychiatriques<br />

peuvent avoir <strong>de</strong>s conséquences<br />

sérieuses pour les familles.<br />

Keeping Care Complete (Assurer la<br />

continuité <strong>de</strong>s soins), qui est une<br />

enquête internationale menée auprès<br />

<strong>de</strong> 982 aidants familiaux <strong>de</strong> personnes<br />

souffrant <strong>de</strong> schizophrénie, <strong>de</strong> trouble<br />

bipolaire ou <strong>de</strong> trouble schizo-affectif,<br />

précise les conséquences d’une rechute,<br />

définie comme l’aggravation <strong>de</strong>s<br />

symptômes après un apparent rétablissement,<br />

et le désir <strong>de</strong>s aidants que<br />

les mé<strong>de</strong>cins concentrent leur attention<br />

sur les soins à long terme plutôt<br />

que sur la gestion <strong>de</strong>s situations <strong>de</strong><br />

crise. L’enquête Keeping Care Complete<br />

a été élaborée par la Fédération<br />

mondiale pour la santé mentale<br />

(WFMH) et Eli Lilly and Company.<br />

La société d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> marché indépendante<br />

Ipsos a mené l’enquête<br />

auprès d’aidants en Australie, au Canada,<br />

en Allemagne, en France, en Italie,<br />

en Espagne, au Royaume-Uni et aux<br />

Etats-Unis.<br />

Conséquences et facteurs<br />

déclenchants d’une rechute<br />

Les aidants dont un membre <strong>de</strong> la<br />

famille a connu une rechute ont rapporté<br />

que leur proche s’était retrouvé<br />

dans l’incapacité <strong>de</strong> travailler, avait<br />

été hospitalisé, avait tenté <strong>de</strong> se suici<strong>de</strong>r<br />

et/ou avait été incarcéré. Un grand<br />

nombre <strong>de</strong> ces aidants ont également<br />

déclaré que leur propre santé mentale<br />

et physique, ainsi que leur situation<br />

financière, s’étaient détériorées à<br />

la suite <strong>de</strong> cette rechute. Parmi les<br />

502 aidants dont le proche avait arrêté<br />

<strong>de</strong> prendre ses médicaments, 91<br />

ont rapporté que leur proche avait<br />

fait une rechute suite à cet arrêt <strong>de</strong><br />

traitement. En outre, 56% <strong>de</strong>s 455<br />

aidants qui ont déclaré que le traitement<br />

<strong>de</strong> leur proche avait été modifié<br />

suite à une décision prise en coopération<br />

avec leur mé<strong>de</strong>cin ont affirmé<br />

que la rechute était survenue après<br />

ce changement.<br />

L’efficacité est l’objectif <strong>de</strong><br />

traitement prioritaire pour les<br />

aidants<br />

Neuf aidants sur dix s’accor<strong>de</strong>nt à dire<br />

que l’efficacité est leur principale préoccupation<br />

lorsqu’ils évaluent les<br />

options <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> leurs proches<br />

et qu’un médicament efficace est<br />

nécessaire pour contrôler les symptômes<br />

<strong>de</strong> la maladie avant <strong>de</strong> pou-<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Commentaires sur l’arrêté du 29 juin<br />

2006 et sur le gui<strong>de</strong> méthodologique<br />

paru le 18 août 2006*<br />

Ce qui n’est pas défini est la responsabilité<br />

<strong>de</strong> la qualité <strong>de</strong>s données<br />

recueillies. Il faut faire un détour par<br />

les textes réglementant la tenue du dossier<br />

médical (dossier du patient pour<br />

la HAS) pour approcher cette notion<br />

par laquelle, c’est le praticien responsable<br />

<strong>de</strong> la prise en charge du patient<br />

qui est responsable <strong>de</strong> la collecte initiale<br />

<strong>de</strong>s informations.<br />

Pour les RAA, il faut connaître la nature<br />

<strong>de</strong> l’acte son lieu d’effection et la<br />

nature du ou <strong>de</strong>s intervenants effecteurs.<br />

Une prise en charge, même en<br />

l’absence d’un mé<strong>de</strong>cin reste sous sa<br />

responsabilité. Le praticien chargé <strong>de</strong>s<br />

soins d’un patient <strong>de</strong>vra pouvoir s’assurer<br />

que les activités réalisées par les<br />

membres <strong>de</strong> son équipe ont bien été<br />

relevées et que les informations clinique<br />

nécessaires sont bien présentes.<br />

Enquête auprès <strong>de</strong>s<br />

aidants familiaux<br />

voir agir adéquatement sur le bienêtre<br />

et la santé en général. Les résultats<br />

<strong>de</strong> l’enquête montrentque les<br />

aidants qui déclarent que leur proche<br />

est satisfait <strong>de</strong> son traitement actuel<br />

pensent qu’un traitement efficace lui<br />

a permis d’être plus indépendant dans<br />

sa vie quotidienne, <strong>de</strong> ne pas être hospitalisé<br />

et <strong>de</strong> conserver un emploi<br />

stable ou une activité bénévole.<br />

Outre le traitement médicamenteux,<br />

les aidants ont désigné le soutien<br />

familial et l’accompagnement social,<br />

la psychanalyse, l’exercice, le fait<br />

d’avoir <strong>de</strong>s responsabilités et <strong>de</strong>s<br />

horaires stables parmi les facteurs<br />

essentiels qui ai<strong>de</strong>nt à préserver le<br />

bien-être <strong>de</strong> leur proche.<br />

Désir <strong>de</strong> fixer <strong>de</strong>s objectifs plus<br />

ambitieux et <strong>de</strong> se concentrer sur le<br />

bien-être à long terme<br />

La plupart <strong>de</strong>s aidants ont déclaré<br />

qu’ils souhaitent que les mé<strong>de</strong>cins mettent<br />

en place une prise en charge à<br />

long terme <strong>de</strong> la maladie plutôt que <strong>de</strong><br />

gérer uniquement les situations <strong>de</strong><br />

crise : 66% <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s aidants<br />

ont dit être frustrés par les mé<strong>de</strong>cins<br />

qui fixent <strong>de</strong>s objectifs très limités<br />

d’amélioration à long terme <strong>de</strong> la maladie<br />

<strong>de</strong> leurs proches.<br />

L’ensemble <strong>de</strong>s données <strong>de</strong> l’enquête,<br />

<strong>de</strong>s fiches d’information sur la schizophrénie<br />

et les troubles schizo-affectifs<br />

et bipolaires et le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s<br />

aidants peuvent être consultés sur<br />

www.wfmh.com. ■<br />

F.C.<br />

Bibliographie<br />

(1) Schizophrenia: What You Need to Know,<br />

National Mental Health Association, disponible<br />

sur : http://ww w.nmha.org/infoctr/factsheets/51.cfm<br />

consulté le 7 juin 2006.<br />

(2) Bipolar Disor<strong>de</strong>r, National Institute of<br />

Mental Health, Reprinted September 2002,<br />

disponible sur: http://www. nimh.nih.gov/<br />

publicat/bipolar.cfm, consulté le 7 juin 2006.<br />

(3) WEIDEN P, SCHEIFLER P, DIAMOND<br />

R et al, Breakthroughs in Antipsychotic Medications,<br />

New York, W.W. Norton & Company,<br />

1999.<br />

(4) The World Health Report 2001: Mental<br />

Health - New Un<strong>de</strong>rstanding, New Hope,<br />

World Health Organization, disponible sur:<br />

http://www.who.int /whr/2001/chapter3/<br />

/en/in<strong>de</strong>x1.html, consulté le 6 janvier 2006.<br />

(5) The Global Bur<strong>de</strong>n of Disease, World Health<br />

Organization in 2003, disponible sur :<br />

http://www.who.int/mip/2003/other_ documents/en/globalbur<strong>de</strong>nofdisease.pdf,consulté<br />

le 6 janvier 2006.<br />

(6) Schizoaffective Disor<strong>de</strong>r, National Alliance<br />

on Mental Illness, disponible sur :<br />

http://www.nami.org/Template.cfm?Section=By_Illness&template=/ContentManagement/ContentDisplay.cfm&ContetID=<br />

11837, consulté le 7 juin 2006.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Pour les praticiens, en particulier en<br />

psychiatrie infanto-juvénile, l’apprentissage<br />

d’une bonne utilisation <strong>de</strong> la<br />

CIM 10 sera nécessaire. Le <strong>de</strong>uxièmement<br />

<strong>de</strong> l’article 3 mentionne : « Les<br />

diagnostics les facteurs associés sont<br />

codés selon la classification internationale<br />

<strong>de</strong>s maladies (CIM) <strong>de</strong> l’Organisation<br />

mondiale <strong>de</strong> la santé (OMS), complétée,<br />

le cas échéant, d’extensions<br />

publiées par l’Agence technique <strong>de</strong> l’information<br />

sur l’hospitalisation ».<br />

La CIM 10 n’est pas le DSM, elle ne se<br />

réduit pas aux maladies psychiatriques.<br />

Elle comporte <strong>de</strong>s chapitres décrivant<br />

les recours au système <strong>de</strong> santé pour<br />

d’autres causes que <strong>de</strong>s maladies et il<br />

sera nécessaire <strong>de</strong> savoir utiliser ces<br />

items pour décrire les situations cliniques<br />

rencontrées en particulier en<br />

psychiatrie infanto-juvénile.<br />

La nécessité <strong>de</strong> pouvoir confronter<br />

informations du dossier du patient et<br />

informations sur l’activité <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à ce<br />

que soient mis à disposition <strong>de</strong>s praticiens<br />

et <strong>de</strong> leurs équipes les outils épargnant<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>voir tenir en parallèle, le<br />

dossier du patient et les relevés d’activités.<br />

Il serait ennuyeux que persiste<br />

longtemps la tâche ingrate <strong>de</strong>s secrétaires<br />

médicales qui recherchent<br />

patiemment la concordance entre l’activité<br />

et les observations se fiant à la<br />

bonne connaissance qu’elles ont <strong>de</strong>s<br />

pratiques <strong>de</strong> chacun.<br />

Par ailleurs, il est fait obligation au<br />

mé<strong>de</strong>cin responsable du DIM <strong>de</strong> faire<br />

un retour d’information sur l’activité<br />

vers les praticiens (<strong>de</strong>uxièmement <strong>de</strong><br />

l’article 4) : « il assure la diffusion <strong>de</strong>s<br />

informations issues <strong>de</strong> ces traitements<br />

auprès <strong>de</strong> la direction... ainsi qu’aux praticiens<br />

ayant dispensé les soins, dans <strong>de</strong>s<br />

conditions garantissant la confi<strong>de</strong>ntialité<br />

<strong>de</strong>s données et l’anonymat <strong>de</strong>s patients ».<br />

Il faut donc que ce responsable <strong>de</strong> l’information<br />

médicale dispose <strong>de</strong>s outils<br />

pour le faire et que les praticiens disposent<br />

<strong>de</strong>s moyens pour exploiter ces<br />

informations.<br />

Que peuvent attendre les praticiens<br />

et leurs équipes <strong>de</strong> l’exploitation <strong>de</strong>s<br />

données ainsi recueillies ?<br />

Si au niveau <strong>de</strong> l’unité médicale, du<br />

service ou secteur et <strong>de</strong> l’établissement,<br />

ce sont <strong>de</strong>s données agrégées et synthétiques<br />

sur l’activité qui sont attendues,<br />

au niveau du praticien et <strong>de</strong>s<br />

équipes, c’est le suivi du patient qui est<br />

le plus recherché. La transformation<br />

<strong>de</strong>s RPS et <strong>de</strong>s RAA en « trajectoire <strong>de</strong><br />

soins » est possible, mais <strong>de</strong>man<strong>de</strong> à<br />

ce que ce processus soit correctement<br />

intégré dans la lecture du dossier du<br />

patient.<br />

L’Institut Lilly encourage <strong>de</strong>s projets <strong>de</strong> recherche<br />

clinique<br />

L’Institut Lilly soutient 6 jeunes chercheurs mé<strong>de</strong>cins cliniciens et finance à<br />

hauteur <strong>de</strong> 15 000 euros une année <strong>de</strong> recherche dans le cadre d’une thèse<br />

<strong>de</strong> science ou d’une année <strong>de</strong> post-doctorat.<br />

En 2006, les membres du jury ont retenu 6 projets portant sur :<br />

• L’autisme chez l’enfant ;<br />

• L’impulsivité dans le trouble hyperactif avec déficit <strong>de</strong> l’attention (THADA)<br />

et dans le trouble <strong>de</strong> la personnalité bor<strong>de</strong>rline (TPB) ;<br />

• La schizophrénie ;<br />

• La maladie <strong>de</strong> Parkinson ;<br />

• La sclérose en plaques ;<br />

• Et le syndrome <strong>de</strong> Gilles <strong>de</strong> La Tourette.<br />

Tous s’engagent à mener leurs travaux au cours <strong>de</strong> l’année 2007 et rendront<br />

compte aux membres du jury en 2007 & 2008 <strong>de</strong> leurs résultats.<br />

Le détail <strong>de</strong>s communications <strong>de</strong>s Lauréats est disponible sur www.institutlilly.com<br />

Appel à candidature 2007 ouvert au 1 er février 2007.<br />

Connectez-vous sur www.institutlilly.coml<br />

Ce retour d’information est un facteur<br />

contribuant fortement à l’adhésion <strong>de</strong>s<br />

praticiens et <strong>de</strong> leurs équipes à la vigilance<br />

nécessaire pour obtenir une qualité<br />

suffisante <strong>de</strong>s données. Les praticiens<br />

doivent percevoir <strong>de</strong>s avantages<br />

immédiats en contrepartie <strong>de</strong>s efforts<br />

qu’ils <strong>de</strong>vront fournir pour obtenir l’exhaustivité<br />

et la fiabilité <strong>de</strong>s données<br />

<strong>de</strong>mandées.<br />

Effets <strong>de</strong> l’arrêté du 29 juin 2006<br />

relatif au recueil et au traitement<br />

<strong>de</strong>s données d’activité médicale pour<br />

le mé<strong>de</strong>cin chargé <strong>de</strong> l’information<br />

médicale<br />

Le premier texte législatif présente clairement<br />

le rôle du DIM en psychiatrie.<br />

Ses fonctions sont évoquées aux articles<br />

1, 3, 4, 5 et 6 sur les huit articles que<br />

comprend cet arrêté. L’article 4 est<br />

entièrement consacré à ses obligations.<br />

Son rôle <strong>de</strong> conseil auprès <strong>de</strong>s praticiens<br />

<strong>de</strong> l’établissement est souligné.<br />

Son rôle d’intermédiaire entre les mé<strong>de</strong>cins<br />

inspecteurs <strong>de</strong> santé, les praticiensconseils<br />

<strong>de</strong>s caisses d’assurance maladie<br />

et les données d’activité <strong>de</strong> l’établissement<br />

est précisé.<br />

Outre son rôle <strong>de</strong> conseil, il doit offrir<br />

à l’établissement et à la communauté<br />

soignante sa participation à l’interprétation<br />

<strong>de</strong>s résultats d’exploitation <strong>de</strong>s<br />

données recueillies.<br />

Que peut attendre le mé<strong>de</strong>cin<br />

chargé <strong>de</strong> l’information médicale<br />

Son principal souci sera celui <strong>de</strong> la<br />

transparence <strong>de</strong>s données et <strong>de</strong> la possibilité<br />

<strong>de</strong> suivi du parcours <strong>de</strong> l’information.<br />

Il lui servira peu <strong>de</strong> savoir<br />

conseiller ses collègues ou sa direction,<br />

si l’établissement ne dispose que <strong>de</strong><br />

« boîtes noires » pour amalgamer <strong>de</strong>s<br />

informations cliniques invérifiables et<br />

<strong>de</strong>s données administratives incontrôlables.<br />

Mais plus encore, le mé<strong>de</strong>cin chargé<br />

<strong>de</strong> l’information médicale <strong>de</strong>vra s’inscrire<br />

dans la perspective fixée dans le<br />

préambule au gui<strong>de</strong> méthodologique :<br />

« Le partage <strong>de</strong>s compétences et <strong>de</strong>s expériences<br />

qui s’instaure rapi<strong>de</strong>ment permettra<br />

une analyse pertinente <strong>de</strong>s résultats<br />

et un affinage du recueil... La<br />

démarche est avant tout évolutive : la<br />

parution <strong>de</strong> ce gui<strong>de</strong> n’est que la toute<br />

première étape d’un processus itératif et<br />

c’est l’expérience du terrain qui nous permettra<br />

ensemble <strong>de</strong> l’adapter progressivement<br />

aux divers besoins <strong>de</strong>s professionnels<br />

».<br />

Plus qu’attentiste, le mé<strong>de</strong>cin DIM<br />

<strong>de</strong>vra être moteur dans les progrès à<br />

réaliser pour que ce premier recueil<br />

puisse s’élargir à l’ensemble <strong>de</strong>s actions<br />

menées en santé mentale. ■<br />

Dr. Gaëtan Wagenaar<br />

Psychiatre, Responsable du DIM EPS Barthélémy<br />

Durand - Etampes.<br />

(1) Mé<strong>de</strong>cins, infirmiers, psychologues, assistants<br />

sociaux, rééducateurs, éducateurs, et autres<br />

personnels concourant aux soins.<br />

*Arrêté du 29 juin 2006 relatif au recueil et<br />

au traitement <strong>de</strong>s données d’activité médicale<br />

<strong>de</strong>s établissements <strong>de</strong> santé publics ou privés<br />

ayant une activité en psychiatrie et à la transmission<br />

d’informations issues <strong>de</strong> ce traitement<br />

dans les conditions définies aux articles L.6113-<br />

7 et L.6113-8 du co<strong>de</strong> <strong>de</strong> la santé publique.<br />

Gui<strong>de</strong> méthodologique disponible sur le site<br />

Internet <strong>de</strong> l’ATH et constituant l’annexe II <strong>de</strong><br />

l’arrêté du 29 juin 2006.<br />

LIVRES<br />

Psychothérapie <strong>de</strong>s victimes<br />

Traitements, évaluations,<br />

accompagnement<br />

2e édition<br />

Gérard Lopez, Aurore Sabouraud-<br />

Séguin, Louis Jehel<br />

Préface <strong>de</strong> Philippe Werson<br />

Dunod, 26 €<br />

Dirigé par l’équipe <strong>de</strong>s enseignants<br />

<strong>de</strong>s diplômes universitaires <strong>de</strong> psychotraumatologie<br />

et <strong>de</strong> victimologie<br />

<strong>de</strong> l’université René-Descartes, Paris<br />

5, cet ouvrage complète Psychotraumatologie<br />

paru dans la même collection.<br />

Il fait le point sur les recherches et les<br />

modalités pratiques du traitement <strong>de</strong>s<br />

conséquences <strong>de</strong>s psychotraumatismes<br />

(état <strong>de</strong> stress post-traumatique, comorbidités,<br />

troubles graves <strong>de</strong> la personnalité)<br />

affectant les adultes et les<br />

enfants.<br />

Les traitements pharmacologiques, les<br />

thérapies cognitivo-comportementales,<br />

la thérapie psychodynamique, l’EMDR,<br />

l’hypnose ericksonienne, les interventions<br />

précoces sont évalués comme<br />

étant efficaces. En association au traitement,<br />

d’autres types d’interventions<br />

sont détaillées : l’intervention auprès<br />

<strong>de</strong>s familles, l’hospitalisation en psychotraumatologie,<br />

la réhabilitation<br />

psychosociale, les groupes <strong>de</strong> parole.<br />

Dictionnaire pratique du<br />

Droit Humanitaire<br />

Françoise Bouchet-Saulnier<br />

Nouvelle édition<br />

La Découverte, 30 €<br />

De « Accords spéciaux » à « Zones <strong>de</strong> sécurité<br />

», ce dictionnaire, qui a été conçu<br />

par Mé<strong>de</strong>cins sans frontières et traduit<br />

en sept langues, balise le champ <strong>de</strong><br />

l’action humanitaire et la responsabiolité<br />

<strong>de</strong>s différents acteurs <strong>de</strong> la gestion<br />

<strong>de</strong>s crises et <strong>de</strong>s conflits. Il propose<br />

la définition juridique et l’analyse<br />

<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 300 notions essentielles :<br />

crimes <strong>de</strong> guerre, génoci<strong>de</strong>, maintien<br />

<strong>de</strong> la paix, population civile, secours,<br />

embargo, enfant, prisonnier <strong>de</strong> guerre,<br />

femme, détention, mission médicale,<br />

réfugiés, ONU, Comité <strong>de</strong>s droits <strong>de</strong><br />

l’homme, Agence centrale <strong>de</strong> recherche<br />

<strong>de</strong>s disparus, terrorisme, tribunaux pénaux<br />

internationaux, armes bactériologiques,<br />

etc.<br />

Cette nouvelle édition actualisée et<br />

ORGANISATION DES SOINS ■ 15<br />

augmentée prend en compte les évolutions<br />

juridiques et politiques récentes<br />

liées, notamment, à la guerre contre<br />

le terrorisme et au fonctionnement<br />

<strong>de</strong>s tribunaux internationaux.<br />

Des synthèses <strong>de</strong> jurispru<strong>de</strong>nce internationale<br />

récente sont ajoutées à la<br />

fin <strong>de</strong>s principales rubriques concernées.<br />

Un système <strong>de</strong> renvois, une bibliographie,<br />

les coordonnées <strong>de</strong>s différentes<br />

organisations ainsi que <strong>de</strong>s<br />

in<strong>de</strong>x et une liste, pour chaque pays,<br />

<strong>de</strong>s textes applicables complètent cet<br />

ouvrage.<br />

Liberté d’aller et venir<br />

dans les établissements<br />

sanitaires et médico-sociaux<br />

et obligation <strong>de</strong> soins et <strong>de</strong><br />

sécurité<br />

Actes <strong>de</strong> la conférence <strong>de</strong><br />

consensus <strong>de</strong>s 24 et 25 novembre<br />

2004<br />

Ouvrage coordonné par :<br />

David Causse, Geneviève Arfeux-<br />

Vaucher, Michel Breton, Daniel<br />

Deparcy, Anne Gmblin-Srecki,<br />

Yves Hémery, Roland Lubeigt,<br />

Isabelle Robineau<br />

Editions <strong>de</strong> l’Ecole Nationale <strong>de</strong> la<br />

Santé Publique, 25 €<br />

La conférence <strong>de</strong> consensus <strong>de</strong>s 24<br />

et 25 novembre 2004, organisée par<br />

la Fédération hospitalière <strong>de</strong> France<br />

avec la participation <strong>de</strong> l’Agence nationale<br />

d’accréditation et d’évaluation<br />

en santé, avait pour objectifs <strong>de</strong> permettre<br />

un débat sur ce sujet difficile<br />

et <strong>de</strong> formuler <strong>de</strong>s recommandations<br />

pratiques. Cet ouvrage rassemble la<br />

trentaine <strong>de</strong> contributions <strong>de</strong>s experts<br />

mobilisés pendant la conférence, les<br />

travaux bibliographiques préparatoires<br />

et le texte intégral <strong>de</strong>s recommandations.<br />

Son intérêt est <strong>de</strong> proposer, selon plusieurs<br />

angles <strong>de</strong> vue, une « immersion »<br />

dans la vie quotidienne <strong>de</strong>s personnes<br />

accueillies dans les établissements sanitaires<br />

et médico-sociaux, et notamment<br />

<strong>de</strong>s plus vulnérables d’entre elles :<br />

personnes âgées, personnes handicapées<br />

et personnes souffrant <strong>de</strong><br />

troubles psychiques.<br />

Il s’agit évi<strong>de</strong>mment d’une « plongée »<br />

simultanée dans les questions que<br />

les soins et l’accompagnement <strong>de</strong> ces<br />

personnes posent, tous les jours, aux<br />

équipes soignantes et socio-éducatives.


16<br />

LIVRES<br />

■ TOXICOMANIE<br />

Le psychologue scolaire et la<br />

famille<br />

Dominique Guichard<br />

Retz<br />

Pendant longtemps, la pratique <strong>de</strong><br />

l’entretien dans le cadre scolaire a<br />

été calquée sur le modèle clinique<br />

<strong>de</strong>s entretiens psychologiques en vigueur<br />

dans le champ médical. Dans<br />

le cadre scolaire, l’entretien possè<strong>de</strong><br />

une méthodologie spécifique inspirée<br />

du modèle clinique, ou du modèle<br />

systémique, ou en constituant<br />

une synthèse. Cette méthodologie<br />

permet d’éviter le piège qui consiste,<br />

pour le psychologue, à réagir avec<br />

ses mécanismes <strong>de</strong> défense, issus <strong>de</strong><br />

sa propre histoire, sans le filtre <strong>de</strong> la<br />

distanciation professionnelle qui permet,<br />

<strong>de</strong> faire face aux émotions. Elle<br />

permet <strong>de</strong> fixer un cadre précis sur<br />

lequel le psychologue et l’équipe enseignante<br />

peuvent s’appuyer pour tenir<br />

leur mission éducative.<br />

Illustré d’une vingtaine <strong>de</strong> situations<br />

tirées <strong>de</strong> l’expérience <strong>de</strong> l’auteur en<br />

tant que psychologue scolaire, cet<br />

ouvrage décrit comment élaborer ce<br />

cadre et le respecter. Il propose différentes<br />

techniques (<strong>de</strong>ssin, métaphore,<br />

génogramme...) par lesquelles<br />

l’enfant et sa famille peuvent faire<br />

<strong>de</strong>s liens entre leur histoire et le comportement<br />

qui pose problème à l’école.<br />

Gui<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’éducation<br />

spécialisée<br />

3e édition<br />

Guy Dréano<br />

Dunod, 38 €<br />

Cet ouvrage permet <strong>de</strong> mieux situer<br />

la fonction éducation spécialisée dans<br />

le contexte <strong>de</strong> l’action sociale. Il en<br />

décrit les contours, les savoir-faire,<br />

les principaux questionnements. Conçu<br />

comme une gui<strong>de</strong> professionnel à<br />

l’usage <strong>de</strong>s intervenants du secteur<br />

social, médico-social et paramédical,<br />

il s’articule autour <strong>de</strong> quatre axes :<br />

une analyse <strong>de</strong>s fon<strong>de</strong>ments et <strong>de</strong><br />

l’évolution <strong>de</strong> la fonction d’éducation<br />

spécialisée ; une synthèse <strong>de</strong>s thèmes<br />

d’intervention et <strong>de</strong>s indications (déficiences,<br />

affections à dominante organique<br />

et psychique, etc.) ; une présentation<br />

du cadre réglementaire et<br />

administratif qui structure ce secteur ;<br />

une <strong>de</strong>scription synthétique <strong>de</strong>s contenus<br />

professionnels qui régissent ce<br />

métier (relation éducative, médiation,<br />

évaluation, formation).<br />

Cette nouvelle édition qui a été entièrement<br />

revue et corrigée prend notamment<br />

en compte la loi du 2 janvier<br />

2002 rénovant l’action sociale<br />

et médico-sociale.<br />

Des travaux personnels<br />

encadrés<br />

Témoignages et analyses<br />

Christiane Montandon, Claudine<br />

Peyrotte<br />

L’Harmattan, 25 €<br />

Les TPE, Travaux Personnels Encadrés,<br />

sont un nouveau dispositif pédagogique<br />

mobilisant une équipe <strong>de</strong><br />

plusieurs enseignants et <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s<br />

actives ‘<strong>de</strong> questionnement. Cet ouvrage,<br />

à travers les témoignages <strong>de</strong>s<br />

élèves et les analyses <strong>de</strong>s interactions<br />

et <strong>de</strong>s écrits <strong>de</strong>s groupes <strong>de</strong> travail,<br />

vise à montrer comment <strong>de</strong>s élèves<br />

<strong>de</strong> première S peuvent s’engager <strong>de</strong><br />

manière satisfaisante pour eux et<br />

leurs enseignants, dans les différentes<br />

étapes <strong>de</strong> la démarche expérimentale.<br />

Les différents aspects <strong>de</strong> la<br />

construction <strong>de</strong>s connaissances par<br />

les élèves et les modalités d’organisation<br />

mises en place par les enseignants<br />

sont abordés dans ce livre <strong>de</strong><br />

telle sorte qu’ils peuvent intéresser<br />

autant enseignants et formateurs que<br />

chercheurs et étudiants en sciences<br />

<strong>de</strong> l’éducation.<br />

Les risques <strong>de</strong> la vie quotidienne liés<br />

à l’usage <strong>de</strong> cannabis sont fréquemment<br />

étudiés sous trois angles : les<br />

troubles <strong>de</strong> l’apprentissage scolaire, les<br />

perturbations <strong>de</strong> la conduite automobile<br />

et les modifications du comportement<br />

en situation professionnelle.<br />

Notre réflexion a pour but <strong>de</strong> mettre<br />

l’accent – au moyen <strong>de</strong> vignettes cliniques<br />

détaillées tirées <strong>de</strong> notre pratique<br />

<strong>de</strong> psychologue dans un point-<br />

écoute pour adolescents et parents<br />

(1, 2)<br />

– sur d’autres types <strong>de</strong> risques <strong>de</strong> la<br />

vie quotidienne dont la survenue<br />

potentielle pèse sur les fumeurs <strong>de</strong><br />

« joints », d’autant plus que ces aléas, à<br />

la différence <strong>de</strong>s précé<strong>de</strong>nts, ten<strong>de</strong>nt<br />

à survenir <strong>de</strong> manière brutale et, corrélativement,<br />

imprévisible : être victime<br />

d’une agression, faire l’objet d’une<br />

dénonciation auprès <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong><br />

l’ordre et être surpris par celles-ci.<br />

Le risque d’être agressé<br />

Dans la plupart <strong>de</strong>s cas, se procurer<br />

du cannabis n’a rien d’une mission<br />

impossible. L’offre du produit est abondante<br />

et les ven<strong>de</strong>urs sont à proximité<br />

géographique, « amicale », scolaire et<br />

professionnelle <strong>de</strong>s acheteurs. Pourtant,<br />

cette démarche n’est pas toujours<br />

sans dangers.<br />

Les fumeurs <strong>de</strong> « joints » ne vivent pas<br />

plus en ermites que le restant <strong>de</strong> la<br />

population. Ils partent en week-end,<br />

prennent <strong>de</strong>s vacances et voyagent.<br />

Mais à la différence du citoyen lambda,<br />

quitter leur cadre <strong>de</strong> vie les expose<br />

au risque d’être « accostés » puis<br />

« dépouillés » par <strong>de</strong> soi disant ven<strong>de</strong>urs<br />

<strong>de</strong> cannabis. Certains jeunes<br />

vacanciers n’hésitent pas, notamment<br />

lorsqu’ils séjournent en bord <strong>de</strong> mer, à<br />

suivre d’autres jeunes qui habitent la<br />

localité, les ont repérés et démarchés<br />

sur une plage, une terrasse <strong>de</strong> café ou<br />

un jardin public. Ces individus attirent<br />

en fait leurs « clients » dans <strong>de</strong>s « plans<br />

crapuleux » où ils les délestent <strong>de</strong> leur<br />

argent.<br />

C’est ce qui est arrivé à Moussa.<br />

Moussa s’est fait « dépouiller » en<br />

vacances<br />

Cet étudiant en droit, âgé <strong>de</strong> vingt ans,<br />

nous raconte avec dégoût : « Un job<br />

d’été dans un restaurant venait <strong>de</strong> me<br />

passer sous le nez. Le patron m’a prévenu<br />

<strong>de</strong>ux jours avant <strong>de</strong> commencer<br />

pour me dire que finalement il n’aurait<br />

pas besoin <strong>de</strong> moi. Comme je<br />

n’avais pas encore signé <strong>de</strong> contrat, je<br />

n’ai pas pu contester ce coup tordu.<br />

Mes copains étaient soit en train <strong>de</strong><br />

travailler, soit partis. Je n’avais pas envie<br />

<strong>de</strong> passer le mois d’août à tourner<br />

comme un rat dans la maison. Je suis<br />

donc <strong>de</strong>scendu dans le Languedoc avec<br />

mes parents, comme quand j’étais<br />

môme. A Palavas, l’eau est bonne et<br />

le soleil presque garanti, mais je me<br />

suis très vite ennuyé. Je nage mal et<br />

j’ai passé l’âge <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s pâtés <strong>de</strong><br />

sable. Et puis supporter à longueur <strong>de</strong><br />

journée les « beaufs » et les « pétasses »,<br />

merci bien ! Sans compter les raseurs<br />

qui patrouillent pour vendre <strong>de</strong>s beignets,<br />

<strong>de</strong>s ballons et autres niaiseries<br />

pour gogos. En plus, je n’ai eu le temps<br />

d’emporter qu’une barrette <strong>de</strong> shit. J’ai<br />

été obligé <strong>de</strong> la rationner à mort et<br />

comme je fumais moins, l’endroit me<br />

mettait encore plus les nerfs. Alors<br />

quand trois types <strong>de</strong> mon âge, propres<br />

sur eux, m’ont <strong>de</strong>mandé si « j’en voulais<br />

», je n’ai pas hésité. Ils m’ont expliqué<br />

qu’ils rentraient sur Montpellier et<br />

qu’ils pourraient m’en trouver « <strong>de</strong> la<br />

bonne » si je les accompagnais. J’ai dit<br />

rapi<strong>de</strong>ment à mes parents que j’avais<br />

sympathisé avec eux et que je reviendrais<br />

le soir par le bus. Dans la voiture,<br />

les gars ont mis la musique à fond,<br />

comme s’ils ne voulaient pas tellement<br />

discuter, et ils ont fait tourner un<br />

« pétard », histoire <strong>de</strong> me donner un<br />

aperçu <strong>de</strong> la qualité. Le centre ville<br />

était chouette, mais on a foncé vers le<br />

Nord, beaucoup moins « cool ». Planant<br />

un peu, je n’ai pas prêté attention<br />

au quartier pourri où on s’est arrêté.<br />

J’ai suivi les mecs dans une cave<br />

HLM et là, les boules ! Ils m’ont entouré<br />

et ont sorti <strong>de</strong>s crans d’arrêt et <strong>de</strong>s<br />

bombes lacrymo. J’ai dû leur donner<br />

tout mon fric (<strong>de</strong>ux cents euros), ma<br />

montre et ma gourmette, puis ils se<br />

sont « taillés » en m’insultant et en se<br />

foutant du « parigot » qu’ils venaient <strong>de</strong><br />

« carotter ». J’en ai chialé <strong>de</strong> rage, puis<br />

je suis sorti <strong>de</strong> l’immeuble. Une dame<br />

qui habitait là a vu que je n’allais pas<br />

Confort mo<strong>de</strong>rne, « psy » à tous les étages...<br />

Journée <strong>de</strong> Formation du Secteur <strong>de</strong> psychiatrie générale<br />

du Centre Hospitalier <strong>de</strong> LILLEBONNE<br />

JEUDI 9 NOVEMBRE 2006<br />

CENTRE JULIOBONA - LILLEBONNE<br />

Au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> ce titre un peu provocateur, un constat s’appuyant sur quelques<br />

chiffres :<br />

- battue d’une courte tête par la Suisse, la France a le ratio <strong>de</strong> psychiatres le<br />

plus élevé (23 pour 100 000 habitants contre 9 dans la Communauté Européenne)<br />

- <strong>de</strong> 1980 à 2001, la prescription <strong>de</strong>s antidépresseurs a été multipliée par 15<br />

en France.<br />

Le discours dominant consiste à dénoncer la pénurie <strong>de</strong> psychiatres et l’absence<br />

<strong>de</strong> prise en charge et <strong>de</strong> traitement <strong>de</strong> nombreux patients en souffrance.<br />

Ces <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s d’ai<strong>de</strong> ne seraient-elles pas souvent dévoyées, perverties par une<br />

quête illusoire du bonheur, un refus <strong>de</strong> la conflictualité, une esquive <strong>de</strong>s interlocuteurs<br />

naturels au sein <strong>de</strong> la famille, du quartier, du lieu <strong>de</strong> travail, etc... ?<br />

Comment les acteurs <strong>de</strong> première ligne que sont le généraliste, les équipes <strong>de</strong><br />

secteur psychiatrique peuvent-ils ai<strong>de</strong>r le patient à accepter son humaine condition<br />

?<br />

Est-ce dans la chimie ou le marché <strong>de</strong>s techniques relationnelles que rési<strong>de</strong> la<br />

fin <strong>de</strong> la plainte ?<br />

Quelle place la « talking cure », le soin par la parole prôné par Freud, né il y a tout<br />

juste 150 ans, peut-elle encore avoir dans les structures publiques <strong>de</strong> soins ?<br />

Nous conclurons ces multiples questionnements par un débat avec Elisabeth<br />

Roudinesco sur l’avenir <strong>de</strong> la Psychanalyse.<br />

Rémi Picard<br />

Renseignements : Association « Méandres » (Association <strong>de</strong> formation agréée), Hôpital<br />

Pierre Janet - UCID, 47 rue <strong>de</strong> Tourneville, BP 24, 76083 Le Havre Cé<strong>de</strong>x, Tél : 02 32 73 39 47<br />

bien. Elle m’a montré la loge du gardien,<br />

qui m’a permis d’appeler mes<br />

parents sur leur portable. Le gardien<br />

m’a conseillé d’aller au commissariat<br />

pour porter plainte contre ces<br />

« raclures », mais comment aurais-je<br />

pu expliquer aux policiers ce que je<br />

faisais dans un endroit sans intérêt pour<br />

un vacancier, où je ne connais personne<br />

et situé à quinze kilomètres du<br />

terrain <strong>de</strong> camping ? En plus, impossible<br />

d’i<strong>de</strong>ntifier mes agresseurs. Ils portaient<br />

<strong>de</strong>s lunettes teintées et comme le<br />

« plan » semblait « nickel », je n’avais<br />

pas regardé la plaque d’immatriculation.<br />

Mon père m’a engueulé grave<br />

quand il m’a récupéré. Il sait que je<br />

fume <strong>de</strong>s « joints » et a compris ce qui<br />

s’était passé. J’ai alors presque regretté<br />

que les mecs ne m’aient pas démonté<br />

la tête, histoire <strong>de</strong> l’apitoyer et qu’il se<br />

calme. J’avais déjà assez la honte<br />

comme ça. Sans « thune », j’ai dû me<br />

passer <strong>de</strong> cannabis pendant le restant<br />

<strong>de</strong>s vacances et lire les mêmes romans<br />

à l’eau <strong>de</strong> rose que ma mère (<strong>de</strong>puis,<br />

quand je vois un bouquin <strong>de</strong> Barbara<br />

Cartland, j’ai envie <strong>de</strong> me « mettre une<br />

balle ») pour essayer d’avoir la tête<br />

ailleurs. Une fois rentré, j’ai parlé <strong>de</strong><br />

l’agression à mon meilleur copain. Il<br />

m’a dit que ça n’était pas rare et que<br />

<strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses cousins avaient subi ce<br />

type d’arnaque. La prochaine fois, j’emporterai<br />

<strong>de</strong> quoi fumer pendant toutes<br />

les vacances. Je sais que j’aurai <strong>de</strong> sacrés<br />

ennuis en cas <strong>de</strong> contrôle policier, mais<br />

ça sera moins humiliant et je ne risquerai<br />

pas <strong>de</strong> prendre un coup <strong>de</strong> couteau<br />

».<br />

« Cassé » par le cannabis, Stéphane<br />

n’a pas pu se défendre<br />

Lorsqu’ils sont sous l’effet du produit,<br />

les consommateurs <strong>de</strong> cannabis ont<br />

une vigilance amoindrie et <strong>de</strong>s gestes<br />

ralentis. Même lorsqu’ils se trouvent<br />

dans un endroit familier, ils <strong>de</strong>viennent<br />

alors <strong>de</strong>s proies faciles pour les agresseurs.<br />

Stéphane en a fait l’inquiétante<br />

expérience.<br />

Ce lycéen <strong>de</strong> dix-sept ans se souvient :<br />

« C’était en fin d’après-midi. Je revenais<br />

du foot. J’avais fumé un « joint » en<br />

sortant du vestiaire. L’entraîneur m’avait<br />

dit « Tu joues <strong>de</strong> mieux en mieux.<br />

Vivement les compétitions, pour que tu<br />

puisses concrétiser ». Je me la jouais<br />

en marchant. J’imaginais que je faisais<br />

gagner l’équipe, qu’on remportait plein<br />

<strong>de</strong> championnats. Le soleil s’est couché<br />

plus tôt que je le pensais. Comme<br />

je n’étais pas pressé, j’avais refusé qu’un<br />

autre joueur me ramène en scooter.<br />

Mais j’avais mal estimé la distance et,<br />

surtout, les effets du « pétard ». Je l’avais<br />

trop chargé. Jusqu’ici, je ne pensais pas<br />

que ça pouvait mettre dans le cirage. Je<br />

me suis rendu compte qu’à partir d’une<br />

certaine quantité, ça n’est pas différent<br />

<strong>de</strong> l’alcool ! En passant dans un endroit<br />

peu éclairé, j’ai entendu <strong>de</strong>s mobylettes<br />

arriver et freiner à ma hauteur. C’était<br />

<strong>de</strong>ux « grands », <strong>de</strong>s mecs <strong>de</strong> la ville d’à<br />

côté. Ils n’aiment pas les gars d’ici. Je<br />

leur ai dit « Si vous me cherchez, je<br />

vous envoie à l’hôpital ». J’étais prêt à<br />

sortir mes chaussures <strong>de</strong> foot et à les<br />

« boxer » avec les crampons. Mais ça les<br />

a fait rire : « Tu t’es vu, morveux ? T’as<br />

<strong>de</strong>s yeux <strong>de</strong> martien et tu tiens à peine<br />

<strong>de</strong>bout. On n’aurait qu’à te souffler<br />

<strong>de</strong>ssus pour que tu dégringoles. File<br />

nous ton sac et tu pourras aller pleurer<br />

chez ta mère ! ». Un <strong>de</strong>s types a touché<br />

mon sac et je lui ai donné un coup <strong>de</strong><br />

poing. J’ai tapé <strong>de</strong> toutes mes forces<br />

pour le laisser sur le carreau et que<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

Agressions, dénonciations,<br />

interpellations : <strong>de</strong>s risques<br />

méconnus liés à la<br />

consommation <strong>de</strong> cannabis<br />

l’autre n’insiste pas, mais j’étais si<br />

engourdi qu’il a esquivé facilement et<br />

que je me suis retrouvé par terre. J’ai eu<br />

du bol, car un automobiliste s’est arrêté.<br />

Il pensait que j’étais tombé <strong>de</strong> mobylette.<br />

En le voyant, les « grands » sont<br />

partis, un peu « péteux ». J’ai dit au<br />

conducteur que j’avais glissé mais que<br />

je n’avais rien. J’ai couru en zigzaguant<br />

vers un autobus qui venait d’arriver à<br />

une station proche. Je l’ai pris et je suis<br />

rentré chez moi, pas très « fiérot ». Le<br />

« bédo », c’est « cool » pour se détendre<br />

et faire la fête, mais je n’en fumerai<br />

plus jamais avant d’aller dans la rue.<br />

Les types avaient clairement vu que<br />

j’étais « cassé ». J’ai rarement la trouille<br />

et je sais me battre, mais là ils auraient<br />

pu me « dépouiller » sans problème ».<br />

Le risque d’être dénoncé<br />

La facilité avec laquelle on peut se procurer<br />

du cannabis a pour revers l’absence<br />

d’anonymat qui entoure les acheteurs.<br />

Les ven<strong>de</strong>urs d’héroïne ten<strong>de</strong>nt,<br />

eux, à obéir à une certaine loi du silence.<br />

Lorsqu’un <strong>de</strong>aler <strong>de</strong> cette drogue est<br />

arrêté par les forces <strong>de</strong> l’ordre, il refuse<br />

souvent <strong>de</strong> communiquer l’i<strong>de</strong>ntité<br />

tant <strong>de</strong> ses fournisseurs – ou grossistes<br />

– que <strong>de</strong> ses clients. C’est qu’il risque<br />

gros auprès <strong>de</strong> ces personnes, <strong>de</strong>s règlements<br />

<strong>de</strong> compte musclés <strong>de</strong> la part<br />

<strong>de</strong>s premiers et un boycott <strong>de</strong> la part<br />

<strong>de</strong>s seconds. La plupart <strong>de</strong>s ven<strong>de</strong>urs<br />

d’héroïne vivent <strong>de</strong> cette activité, qui les<br />

occupe à « temps plein » et où <strong>de</strong>s<br />

sommes d’argent considérables sont<br />

en jeu. Un <strong>de</strong>aler d’héroïne qui « parle<br />

trop » lors d’un interrogatoire policier<br />

perd sur le champ sa source <strong>de</strong> revenus<br />

et doit envisager, dès sa sortie <strong>de</strong> prison,<br />

<strong>de</strong> changer <strong>de</strong> région ou <strong>de</strong> « métier »<br />

pour échapper aux représailles <strong>de</strong>s individus<br />

qu’il a dénoncés ou <strong>de</strong>s « gros<br />

bras » missionnés par ces <strong>de</strong>rniers pour<br />

le rosser ou / et recouvrir d’illégales<br />

créances (ce type <strong>de</strong> ven<strong>de</strong>tta peut<br />

même avoir lieu lors d’une incarcération,<br />

par détenus interposés). Les ven<strong>de</strong>urs<br />

d’héroïne évitent <strong>de</strong> vendre du<br />

cannabis et se tiennent également à<br />

distance <strong>de</strong>s <strong>de</strong>alers <strong>de</strong> ce produit.<br />

Ceux-ci pratiquent leur activité « à la<br />

petite semaine ». La vente <strong>de</strong> cannabis<br />

ne constitue pas, loin <strong>de</strong> là, leur principale<br />

source <strong>de</strong> revenus. Surtout, alors<br />

que les ven<strong>de</strong>urs d’héroïne approvisionnent<br />

souvent un groupe circonscrit<br />

d’héroïnomanes « fidélisés » par<br />

leur addiction, les ven<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> cannabis<br />

ont <strong>de</strong>s acheteurs plus inconstants,<br />

volatiles, dont ils ne connaissent pas<br />

toujours le nom. Les sommes d’argent<br />

en jeu ne sont jamais astronomiques.<br />

Les <strong>de</strong>alers d’héroïne arrêtés savent<br />

que <strong>de</strong> toute façon – qu’ils se « mettent<br />

à table » ou non –, ils vont être<br />

condamnés à une sévère peine d’emprisonnement<br />

et à une lour<strong>de</strong> amen<strong>de</strong><br />

calculée à partir <strong>de</strong> la quantité <strong>de</strong><br />

drogue qu’ils possédaient ou / et qu’ils<br />

ont vendue. Par contre, les ven<strong>de</strong>urs<br />

<strong>de</strong> cannabis arrêtés sont fréquemment<br />

sensibilisés au fait qu’un allégement<br />

<strong>de</strong>s sanctions judiciaires pourrait être<br />

envisagé s’ils font preuve <strong>de</strong> « bonne<br />

volonté », c’est-à-dire s’ils communiquent<br />

l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> leurs fournisseurs<br />

et <strong>de</strong> leurs clients. La plupart d’entre<br />

eux sont sensibles à cet argument…<br />

De plus, policiers et gendarmes sont<br />

désormais aidés dans cette investigation<br />

par l’accès aux numéros attachés<br />

aux appels émis et reçus sur le téléphone<br />

portable du <strong>de</strong>aler. Ces informations<br />

permettent aux forces <strong>de</strong>


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

l’ordre d’intervenir au domicile <strong>de</strong>s personnes<br />

soupçonnées d’avoir acheté du<br />

cannabis à tel ven<strong>de</strong>ur interpellé.<br />

« Balancée » par un <strong>de</strong>aler, Linda<br />

subit les foudres <strong>de</strong> son père<br />

Cette lycéenne <strong>de</strong> seize ans, qui<br />

consomme <strong>de</strong>s « joints » <strong>de</strong> manière<br />

pourtant très occasionnelle, a reçu ce<br />

type <strong>de</strong> visite. Arrêté en possession<br />

d’une « savonnette » - c’est-à-dire environ<br />

250 gr <strong>de</strong> résine <strong>de</strong> cannabis -, son<br />

<strong>de</strong>aler venait <strong>de</strong> donner soixante noms<br />

d’acheteurs aux gendarmes <strong>de</strong> son village<br />

! La maréchaussée s’est présentée<br />

à six heures du matin au pavillon <strong>de</strong> ses<br />

parents, en milieu <strong>de</strong> semaine, alors<br />

que toute la maisonnée dormait encore.<br />

Interrogée sur place, la jeune fille a<br />

reconnu fumer <strong>de</strong> temps en temps <strong>de</strong>s<br />

« joints » et avoir été fournie par le<br />

ven<strong>de</strong>ur qui l’a dénoncée. Ignorant jusqu’ici<br />

l’existence <strong>de</strong> cette consommation,<br />

les parents <strong>de</strong> l’adolescente, vues<br />

les circonstances, ont réagi <strong>de</strong> façon<br />

« éruptive ». En vertu d’une convention<br />

passée entre l’institution où nous<br />

travaillons et le Parquet local, les<br />

simples consommateurs <strong>de</strong> cannabis<br />

interpellés sont adressés vers notre<br />

point-écoute, dans le cadre d’une mesure<br />

« d’orientation éducative » dont l’observance<br />

– sous la forme d’un ou <strong>de</strong><br />

plusieurs entretiens – suffit à éteindre<br />

l’action judiciaire. Ce partenariat intelligent<br />

ouvre une porte judicieuse vers<br />

le sanitaire. Il permet d’évaluer le rapport<br />

au cannabis <strong>de</strong> l’intéressé(e) et sa<br />

connaissance <strong>de</strong>s risques idoines, ainsi<br />

que <strong>de</strong> situer l’usage du produit à la<br />

lueur <strong>de</strong> la dynamique familiale, les<br />

parents étant systématiquement associés<br />

à cette démarche quand l’usager<br />

est mineur. Nous avons accueilli Linda<br />

sous la forme d’un projectile évité <strong>de</strong><br />

justesse ! Aussitôt entrée, son père l’a<br />

propulsée violemment et elle a terminé<br />

sa trajectoire dans un présentoir<br />

métallique, heureusement sans se blesser.<br />

Ambiance ! L’entretien a été à l’avenant.<br />

Nous avons dû nous interposer<br />

physiquement pour que ce père,<br />

furieux d’avoir été réveillé à l’aube par<br />

les gendarmes et persuadé que sa fille<br />

était « une camée », ne batte pas cette<br />

<strong>de</strong>rnière comme plâtre. Terrorisée,<br />

Linda n’a pas pu ouvrir la bouche lors<br />

<strong>de</strong> cette rencontre mouvementée,<br />

dominée par l’impulsivité et les vociférations<br />

paternelles. Un second entretien,<br />

où la jeune fille et ses parents ont<br />

été reçus séparément, a permis au père<br />

<strong>de</strong> l’adolescente <strong>de</strong> métaboliser son<br />

ressentiment et d’entendre que la<br />

fumette <strong>de</strong> « joints » <strong>de</strong> l’intéressée<br />

SEMINAIRE DU JEUDI<br />

Rencontres cliniques<br />

ASSOCIATION E.C.A.R.T.<br />

Enseignement. Création.Analyse.Recherche.Transmission<br />

2006-2007<br />

Thème : « Impossible - mais quand même !»<br />

« Il y a trois métiers impossibles - Eduquer, Soigner, Gouverner » Sigmund Freud<br />

12 <strong>Octobre</strong> 2006 : Jean-Pierre WINTER, Psychanalyste, auteur <strong>de</strong> plusieurs<br />

ouvrages dont Les errants <strong>de</strong> la chair éditions Payot, Choisir la psychanalyse<br />

éditions la Martinière, Les images, les mots, le corps entretiens avec<br />

Françoise Dolto éditions Gallimard, interviendra sur le thème : Ou l’éthique ou<br />

la morale.<br />

19 <strong>Octobre</strong> 2006 : Gilda SABSAY Y FOKS, exceptionnellement <strong>de</strong> passage à<br />

Paris, Psychiatre - Psychanalyste, Prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> l’Association d’histoire <strong>de</strong> la<br />

psychiatrie et <strong>de</strong> la psychanalyse en Argentine interviendra sur le thème : Le<br />

mythe dans la clinique psychanalytique.<br />

9 Novembre 2006 : Christine HENNIQUEAU-MARY, Enseignante, Psycho-pédagogue,<br />

auteur <strong>de</strong> L’enfant qui voulait penser aux éditions Fabert, interviendra<br />

sur le thème : Montreurs <strong>de</strong> signes.<br />

21 Décembre 2006 : Clau<strong>de</strong> SAHEL, Philosophe - Psychanalyste, Membre du<br />

Cercle Freudien, interviendra sur le thème : Le désir pédagogique.<br />

Hôpital Esquirol - porte 19 - 1OH30<br />

Florence REZNIK : Fondatrice <strong>de</strong> l’Association ECART y et Responsable du séminaire.<br />

Le programme <strong>de</strong>s séminaires est disponible sur le site www.ecart-psy.org<br />

était en l’état moins catastrophique qu’il<br />

ne le croyait. Il faut dire que la dénonciation<br />

<strong>de</strong> cette lycéenne par son <strong>de</strong>aler<br />

était intervenue à un moment où sa<br />

parentèle était incapable <strong>de</strong> prendre<br />

du recul vis-à-vis d’une telle révélation.<br />

Sa mère avait <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> santé<br />

et son père connaissait <strong>de</strong>s difficultés<br />

professionnelles telles qu’il craignait<br />

d’être licencié. Cet homme déjà stressé<br />

a donc vu rouge lors <strong>de</strong> la visite <strong>de</strong>s<br />

gendarmes, sans compter la crainte du<br />

qu’en-dira-t-on. Sans l’orientation <strong>de</strong><br />

cette famille vers notre structure, les<br />

relations père-fille se seraient certainement<br />

envenimées, vouant peut-être<br />

l’adolescente à augmenter sa consommation<br />

<strong>de</strong> cannabis sous l’effet <strong>de</strong> la<br />

peur, <strong>de</strong> la tristesse et d’un sentiment<br />

d’incompréhension… un peu compréhensible.<br />

Le risque d’être<br />

interpellé par les forces<br />

<strong>de</strong> l’ordre<br />

La législation française sur les stupéfiants<br />

prévoit que l’interpellation par<br />

les forces <strong>de</strong> l’ordre d’un individu en<br />

possession <strong>de</strong> produit soit suivie d’une<br />

gar<strong>de</strong> à vue. Or, dans les faits, <strong>de</strong> nombreuses<br />

interpellations policières ne<br />

donnent lieu qu’à la saisie du « joint »<br />

ou <strong>de</strong> la barrette <strong>de</strong> cannabis, éventuellement<br />

assortie d’une injonction<br />

railleuse à ne pas récidiver : « Que je ne<br />

t’y reprenne pas, petit imbécile ». Nous<br />

ne souhaitons pas faire le procès <strong>de</strong> ce<br />

type <strong>de</strong> dérogation à la loi écrite. Dans<br />

certaines villes, les fumeurs <strong>de</strong> cannabis<br />

interpellés sont si nombreux que les<br />

commissariats <strong>de</strong>vraient doubler ou tripler<br />

leur surface et leurs ressources<br />

humaines pour les interroger et les<br />

mettre tous « au frais ». Nous voulons<br />

simplement attirer l’attention du lecteur<br />

sur le fait que <strong>de</strong> telles réponses en<br />

première ligne n’ai<strong>de</strong>nt pas du tout le<br />

citoyen lambda à intérioriser la réalité<br />

<strong>de</strong> la loi concernant l’usage <strong>de</strong> cannabis<br />

et n’incitent nullement le citoyen<br />

« jointeur » (3) à bien regar<strong>de</strong>r autour <strong>de</strong><br />

lui avant <strong>de</strong> sortir ou <strong>de</strong> rouler un<br />

« pétard ». Se répand ainsi l’idée, surtout<br />

chez les adolescents, selon laquelle on<br />

ne craint pas <strong>de</strong> se retrouver <strong>de</strong>vant<br />

le juge si l’on n’est pas un gros trafiquant.<br />

Carlos, du commissariat au<br />

chômage<br />

Cultivant cette représentation, Carlos,<br />

âgé <strong>de</strong> vingt-cinq ans, a déchanté brutalement.<br />

Deman<strong>de</strong>ur d’emploi <strong>de</strong>puis<br />

près d’un an, ce jeune adulte a voulu<br />

fêter la signature <strong>de</strong> son nouveau<br />

contrat <strong>de</strong> travail. La veille du jour où<br />

il <strong>de</strong>vait entamer sa pério<strong>de</strong> d’essai, il a<br />

contacté ses trois meilleurs amis pour<br />

fumer du cannabis avec eux. Munis <strong>de</strong><br />

plusieurs barrettes, les jeunes gens sont<br />

montés en voiture et ont élu un parking<br />

désert pour rouler et fumer leurs<br />

« joints ». Une voiture banalisée s’est<br />

placée <strong>de</strong>vant la leur, quatre policiers<br />

en civil en sont <strong>de</strong>scendus et leur ont<br />

<strong>de</strong>mandé leurs papiers. L’habitacle<br />

empestant la fumée <strong>de</strong> cannabis, ils<br />

ont ri jaune. Les policiers les ont invités<br />

à leur remettre leurs cigarettes et à<br />

vi<strong>de</strong>r leurs poches. C’est alors que Carlos,<br />

ne sentant pas que la situation était<br />

franchement désavantageuse, a pris <strong>de</strong><br />

haut cette <strong>de</strong>man<strong>de</strong> et a clamé à ses<br />

interlocuteurs : « Ok, prenez notre shit<br />

et partez. Ayez une petite pensée pour<br />

nous quand vous le fumerez ». L’officier<br />

<strong>de</strong> police judiciaire lui a rétorqué<br />

« Puisque monsieur a décidé <strong>de</strong> faire le<br />

malin, nous allons poursuivre cette<br />

conversation dans nos locaux ». Dans la<br />

fourgonnette qui est venue les embarquer,<br />

les copains <strong>de</strong> Carlos l’ont regardé<br />

méchamment et lui ont murmuré :<br />

« Maintenant, tu la boucles ». Mais une<br />

fois arrivés à <strong>de</strong>stination, l’intéressé a<br />

réitéré ses rodomonta<strong>de</strong>s : « Vous<br />

n’avez pas le droit <strong>de</strong> nous enfermer<br />

pour du shit. C’est une bavure. J’irai me<br />

plaindre au tribunal et j’informerai la<br />

presse ». Comme cela était prévisible,<br />

cette diatribe n’a pas eu l’heur <strong>de</strong> plaire<br />

aux policiers <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>. Pour cette<br />

raison, si ses amis sont ressortis rapi<strong>de</strong>ment<br />

après avoir signé une déposition<br />

où ils reconnaissaient avoir été<br />

interpellés en possession <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />

cannabis, Carlos, jugé « agité », a été<br />

placé en gar<strong>de</strong> à vue. Cette mesure<br />

aurait dû le conduire à réaliser la gravité<br />

<strong>de</strong> sa situation. Il a pourtant continué à<br />

jouer les grands citoyens offusqués.<br />

Résultat, il n’est sorti du commissariat<br />

qu’au milieu <strong>de</strong> la journée suivante,<br />

c’est-à-dire bien après le moment où<br />

il <strong>de</strong>vait prendre son poste <strong>de</strong> travail !<br />

Il a fébrilement téléphoné à l’employeur<br />

et prétexté une indigestion, mais ce<br />

<strong>de</strong>rnier n’a pas été dupe et lui a signifié<br />

que cette absence injustifiée augurait<br />

très mal d’une embauche ferme au<br />

terme <strong>de</strong> sa pério<strong>de</strong> d’essai… Me relatant<br />

ces faits, Carlos, à nouveau <strong>de</strong>man<strong>de</strong>ur<br />

d’emploi, conclut : « J’étais tellement<br />

heureux <strong>de</strong> retravailler que je n’ai<br />

pas mesuré les risques. J’aurais dû en<br />

rabattre du caquet quand les « flics »<br />

nous sont tombés <strong>de</strong>ssus. Mais je vous le<br />

jure, j’étais sûr à 200% qu’ils saisiraient<br />

les « bédos » et, éventuellement, qu’ils<br />

nous colleraient une petite amen<strong>de</strong> après<br />

nous avoir laissés repartir. Je me suis fié<br />

à ce que j’avais vécu jusqu’alors. J’ignorais<br />

que la loi était aussi sévère. Avonsnous<br />

eu affaire à <strong>de</strong>s policiers intègres<br />

ou intégristes ? ».<br />

Julien a été menotté au lycée<br />

Cela faisait plusieurs mois qu’une<br />

rumeur courait au lycée selon laquelle<br />

une « <strong>de</strong>scente » <strong>de</strong> police se préparait.<br />

Le proviseur l’avait laissé entendre<br />

en termes à peine déguisés lors d’une<br />

réunion <strong>de</strong> délégués <strong>de</strong> classe. Julien,<br />

âgé <strong>de</strong> seize ans, aurait pu à <strong>de</strong>ux titres<br />

s’inquiéter <strong>de</strong> cette imminence d’une<br />

intervention <strong>de</strong>s forces <strong>de</strong> l’ordre, Non<br />

seulement cet adolescent consommait<br />

régulièrement du cannabis dans l’immense<br />

parc au sein duquel son établissement<br />

scolaire – un ancien château<br />

– était implanté, mais il se livrait <strong>de</strong><br />

plus à la vente plutôt lucrative <strong>de</strong> ce<br />

produit auprès d’une quinzaine <strong>de</strong> ses<br />

condisciples.<br />

Apprenant que le vent menaçait <strong>de</strong><br />

tourner défavorablement pour lui et<br />

quelques autres, il s’était pourtant<br />

contenté <strong>de</strong> hausser les épaules, sur le<br />

mo<strong>de</strong> : « Causez toujours. On est trop<br />

bien organisés pour se faire attraper ».<br />

Julien poursuivait tant bien que mal sa<br />

scolarité. Il s’étonnait presque d’avoir<br />

<strong>de</strong>s notes proches <strong>de</strong> la moyenne, étant<br />

donné le peu <strong>de</strong> soin – effets <strong>de</strong>s<br />

« joints » et temps passé à s’approvisionner<br />

puis <strong>de</strong> « <strong>de</strong>aler » obligent –<br />

qu’il apportait à ses leçons et <strong>de</strong>voirs. Il<br />

est probable qu’il disposait <strong>de</strong> bonnes<br />

capacités intellectuelles ou / et que les<br />

« pétards » gênaient moins sa concentration<br />

et sa mémoire que chez d’autres<br />

fumeurs. Bref, il n’avait selon lui aucune<br />

raison <strong>de</strong> s’inquiéter. Les dix hectares<br />

<strong>de</strong> forêt et <strong>de</strong> buissons ceignant<br />

les bâtiments scolaires constituaient un<br />

« territoire » idéal pour vendre et » jointer<br />

».<br />

Les clients et les compagnons <strong>de</strong><br />

« fumette » <strong>de</strong> Julien étaient si nombreux<br />

que pour satisfaire la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> cannabis <strong>de</strong> tous les élèves du lycée<br />

– au moins un quart <strong>de</strong> l’effectif avaitil<br />

estimé –, une douzaine d’autres adolescents<br />

« officiaient » eux aussi à tour<br />

<strong>de</strong> bras. La végétation et la terre<br />

meuble servaient <strong>de</strong> caches aussi<br />

variées qu’indécelables.<br />

Cet E<strong>de</strong>n pour shitmen était cependant<br />

menacé, même si Julien, les autres<br />

<strong>de</strong>alers et leurs « clients » n’en croyaient<br />

rien. La direction <strong>de</strong> l’établissement<br />

avait décidé <strong>de</strong> « décapiter » ce trafic,<br />

dont elle avait déduit l’existence au gré<br />

<strong>de</strong> plusieurs faits. D’abord, les enseignants<br />

et les surveillants remarquaient<br />

que <strong>de</strong> plus en plus d’élèves somnolaient<br />

anormalement, en cours comme<br />

dans les couloirs, au réfectoire et à l’extérieur.<br />

Les « explications » <strong>de</strong>mandées aux<br />

intéressés ne suscitaient que <strong>de</strong>s<br />

réponses aussi laconiques que fuyantes.<br />

Ensuite, lors <strong>de</strong>s récréations et <strong>de</strong>s<br />

heures creuses, <strong>de</strong> nombreux élèves,<br />

même lorsqu’il faisait froid ou / et pleuvait<br />

à torrents, se rendaient promptement<br />

dans les parties les plus touffues<br />

et les plus reculées du parc. Les surveillants<br />

avaient surtout remarqué que<br />

ces jeunes se scindaient rapi<strong>de</strong>ment en<br />

groupes <strong>de</strong> dix environ et que chacune<br />

<strong>de</strong> ces agrégations se hâtait systématiquement<br />

vers le même endroit.<br />

Immuablement, chaque « bataillon »<br />

comportait un élève qui, <strong>de</strong>vançant les<br />

autres d’une vingtaine <strong>de</strong> mètres, inspectait<br />

les alentours à la manière d’un<br />

éclaireur.<br />

De la même façon, un autre élève, situé<br />

lui en « arrière-gar<strong>de</strong> », se retournait<br />

fréquemment pour vérifier qu’ils étaient<br />

seuls. Les surveillants qui s’étaient risqués<br />

à les suivre avaient systématiquement<br />

été « grillés ». A chaque fois,<br />

le groupe « pisté » s’était éparpillé<br />

comme une voilée <strong>de</strong> moineaux avant,<br />

en toute vraisemblance, <strong>de</strong> se recomposer<br />

un peu plus loin. Ce petit mon<strong>de</strong><br />

se livrait <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce à une activité<br />

prohibée, mais laquelle ? L’absence<br />

<strong>de</strong> filles dans ces groupes avait heureusement<br />

permis d’écarter l’hypothèse<br />

d’une victimisation où <strong>de</strong>s adolescentes<br />

seraient entraînées à l’écart pour être<br />

sexuellement importunées, voire abusées.<br />

Le sourire à peine dissimulé <strong>de</strong><br />

l’ensemble <strong>de</strong>s élèves qui composaient<br />

ces groupes furtifs et, surtout, leur<br />

absence <strong>de</strong> blessures et le bon état <strong>de</strong><br />

leur mise vestimentaire lorsqu’ils revenaient<br />

incitaient également à penser<br />

que leurs pérégrinations sylvestres<br />

n’étaient le théâtre ni <strong>de</strong> rackets ou<br />

d’autres sévices à l’encontre <strong>de</strong> « souffre<br />

douleurs » ni <strong>de</strong> bagarres « rituelles »<br />

entre ban<strong>de</strong>s. Il ne s’agissait donc pas<br />

d’un remake <strong>de</strong> La guerre <strong>de</strong>s boutons<br />

! Enfin, quelques parents d’élèves<br />

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Après l’avis favorable <strong>de</strong>s autorités<br />

sanitairse (J.O. du 4 mai 2006), la<br />

forme <strong>de</strong> Zyprexa ® - olanzapine -<br />

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au même prix que le comprimé.<br />

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quasi instantanée dans la bouche,<br />

offrant ainsi au patient une prise<br />

pratique, facile et discrète.<br />

<br />

LIVRES<br />

TOXICOMANIE ■ 17<br />

Handicapés : tous vos droits<br />

Alain Cabrit<br />

6 ème édition<br />

Editions du Puits Fleuri*, 22 €<br />

Les personnes handicapées ont <strong>de</strong>s<br />

droits. En fonction <strong>de</strong> leur handicap<br />

et selon leur situation familiale, ces<br />

droits ne sont pas les mêmes pour<br />

tous. De plus, aux diverses étapes <strong>de</strong><br />

la vie <strong>de</strong> la personne handicapée, ils<br />

évoluent. Cet ouvrage fait le point<br />

détaillé sur chacun d’eux. A jour <strong>de</strong><br />

la loi du 11 février 2005, il permet<br />

<strong>de</strong> se retrouver dans les méandres<br />

administratifs et <strong>de</strong> mieux appréhen<strong>de</strong>r<br />

les démarches nécessaires.<br />

Des modèles <strong>de</strong> lettres et une importante<br />

liste d’adresses permettent,<br />

entre autre, <strong>de</strong> solliciter une ai<strong>de</strong> ou<br />

saisir une commission.<br />

*22 Avenue <strong>de</strong> Fontainebleau, 77850 Héricy.<br />

Tél. : 01 64 23 6146. www.puitsfleuri.com<br />

La place <strong>de</strong>s jeunes dans la<br />

cité<br />

Tome I<br />

De l’école à l’emploi ?<br />

Cécile Baron, Elisabeth Dugué,<br />

Patrick Nivolle (eds)<br />

Tome 2<br />

Espaces <strong>de</strong> rue, espaces <strong>de</strong>parole<br />

Elisabeth Callu, Jean-Pierre<br />

Jurmand, Alain Vulbeau (eds)<br />

L’Harmattan, 27 € et 28,50 €<br />

Ce recueil fait suite à un colloque qui<br />

s’est tenu à Paris les 27 et 28 février<br />

2004 dont il reprend quelques-unes<br />

<strong>de</strong>s contributions. S’y mêlent <strong>de</strong>s<br />

étu<strong>de</strong>s empiriques et <strong>de</strong>s recherches<br />

plus théoriques issues <strong>de</strong> différentes<br />

disciplines. Les textes portent sur les<br />

mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> vie <strong>de</strong>s jeunes comme sur<br />

leurs aspirations, sur les politiques<br />

qui leur sont <strong>de</strong>stinées mais aussi sur<br />

les présupposés qui orientent ces politiques,<br />

notamment la catégorie « jeunesse<br />

en difficulté ». Les diverses approches<br />

présentes dans les <strong>de</strong>ux<br />

ouvrages montrent <strong>de</strong>s zones d’ombre<br />

et <strong>de</strong> nouvelles interrogations qui interrogent<br />

les politiques sociales en<br />

direction <strong>de</strong> la jeunesse. La recherche<br />

De l’école à l’emploi ? s’intéresse aux<br />

trajectoires <strong>de</strong>s jeunes issus <strong>de</strong>s milieux<br />

populaires et étudie comment<br />

celles-ci sont influencées par les mesures<br />

<strong>de</strong> rattrapage scolaire et par les<br />

dispositifs <strong>de</strong> lutte contre l’exclusion<br />

professionnelle. Les auteurs abor<strong>de</strong>nt<br />

les représentations portées sur la jeunesse,<br />

la nature <strong>de</strong> ses « difficultés »<br />

et leurs traitements. Ils examinent les<br />

enjeux <strong>de</strong>s jugements et <strong>de</strong>s catégorisations<br />

qui sous-ten<strong>de</strong>nt les réponses<br />

politiques aux problèmes <strong>de</strong><br />

l’insertion et <strong>de</strong> l’emploi <strong>de</strong>s jeunes.<br />

L’ ouvrage questionne ainsi la capacité<br />

<strong>de</strong>s politiques publiques à réparer<br />

certaines « injustices », ou encore,<br />

à atténuer certains effets <strong>de</strong>s inégalités<br />

sociales pesant sur les jeunes dans<br />

leur relation à l’école et au travail.<br />

Espaces <strong>de</strong> rue, espaces <strong>de</strong> parole s’intéresse<br />

au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong>s jeunes<br />

issus <strong>de</strong>s milieux populaires et aux<br />

stratégies qu’ils développent pour<br />

faire face à leurs « difficultés ». Les auteurs<br />

tentent <strong>de</strong> restituer l’expérience<br />

<strong>de</strong>s situations sociales auxquelles<br />

sont confrontés ces jeunes : stéréotypes<br />

et stigmatisations, conditions<br />

<strong>de</strong> vie précaires, interventions publiques<br />

« ciblées »... Ils explorent la vie<br />

dans les cités d’habitat social, le quotidien<br />

dès dispositifs socio-éducatifs,<br />

les espaces culturels investis... Les<br />

jeunes <strong>de</strong>s cités savent utiliser les espaces<br />

<strong>de</strong> rue comme « arène <strong>de</strong> socialisation<br />

». Ils se montrent capables<br />

<strong>de</strong> participer à la construction d’espaces<br />

collectifs où leur parole pourra<br />

être prise en compte. En complément<br />

<strong>de</strong> cette analyse <strong>de</strong>s interactions<br />

entre les jeunes et leur environnement,<br />

sont examinés les déterminants<br />

sociaux <strong>de</strong>s « cultures <strong>de</strong> rue » et <strong>de</strong><br />

leur évolution <strong>de</strong>puis une trentaine<br />

d’années.


18<br />

■ THÉRAPEUTIQUE<br />

Ghettos américains,<br />

banlieues françaises<br />

Hérodote 2006 n°122<br />

La Découverte, 19,50 €<br />

Au travers d’étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> cas précises -<br />

New York, villes californiennes, banlieue<br />

nord <strong>de</strong> Paris, région lyonnaise<br />

et nord <strong>de</strong> la France -, les auteurs <strong>de</strong><br />

ce numéro d’Hérodote (qui reprend<br />

les communications d’un colloque<br />

franco-américain à l’université <strong>de</strong><br />

Cergy Pontoise en décembre 2005)<br />

analysent les similarités et les différences<br />

<strong>de</strong>s processus <strong>de</strong> ségrégation<br />

aux Etats-Unis et en France.<br />

L’article <strong>de</strong> Renaud Le Goix, qui retrace<br />

l’histoire <strong>de</strong>s quartiers fermés,<br />

y compris en France, corrige le discours<br />

selon lequel ces quartiers pour<br />

classes aisées seraient une importa-<br />

avaient contacté le proviseur après<br />

avoir trouvé <strong>de</strong>s bouts <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />

cannabis dans le cartable <strong>de</strong> leur progéniture…<br />

Les intéressés ne « traînaient<br />

» guère sur le trajet - effectué<br />

en car – qui séparait le lycée <strong>de</strong> leur<br />

domicile, ne fumaient jamais à la maison<br />

et n’avaient pas la permission <strong>de</strong><br />

sortir après le dîner. Pères et mères en<br />

avaient déduit que le cannabis était<br />

consommé au sein même du lycée et<br />

insisté pour que le chef d’établissement<br />

prenne <strong>de</strong>s mesures adéquates.<br />

Julien et ses « comparses » n’ont rien vu<br />

venir. L’absence totale <strong>de</strong> surveillants<br />

pendant plusieurs jours d’affilée aurait<br />

dû leur mettre la puce à l’oreille. Au<br />

contraire, ils ont en ri et se sont dit : « Ils<br />

se sont rendus compte qu’ils ne pouvaient<br />

pas nous empêcher <strong>de</strong> faire du<br />

business. On les a eu à l’usure. Ils doivent<br />

être tous en arrêt maladie pour<br />

dépression nerveuse ! ». Mauvaise explication<br />

: aucun surveillant ne s’était fait<br />

porter pâle. Se sachant repérés lorsqu’ils<br />

suivaient les groupes <strong>de</strong> fumeurs<br />

<strong>de</strong> cannabis et leurs ven<strong>de</strong>urs et ayant<br />

constaté que le jeu du chat et <strong>de</strong> la<br />

souris qui s’en ensuivait ne tournait<br />

jamais à leur avantage, les surveillants<br />

ont changé leur fusil d’épaule. Ils sont<br />

arrivés au lycée bien avant l’ouverture<br />

<strong>de</strong> l’établissement, puis se sont embusqués<br />

dans les lieux <strong>de</strong> rencontre présumés<br />

– en combinant les directions<br />

précises par chacun <strong>de</strong>s groupes et les<br />

limites du parc – <strong>de</strong>s « jointeurs pèlerins<br />

»… Cette stratégie a été payante.<br />

Les surveillants cachés ont distinctement<br />

vu qui, au sein <strong>de</strong> chaque groupe,<br />

vendait et qui consommait. Ils ont<br />

aussi i<strong>de</strong>ntifié plusieurs endroits où <strong>de</strong>s<br />

quantités assez importantes <strong>de</strong> résine <strong>de</strong><br />

cannabis étaient enterrées, enveloppées<br />

dans <strong>de</strong>s feuilles <strong>de</strong> plastique.<br />

Une fois ces renseignements transmis à<br />

qui <strong>de</strong> droit, le chef d’établissement a<br />

fait illico presto « sonner la charge <strong>de</strong> la<br />

cavalerie ». En substance, une dizaine<br />

<strong>de</strong> voitures <strong>de</strong> police se sont garées<br />

bruyamment <strong>de</strong>vant le lycée, avec<br />

sirènes et gyrophares. Leurs passagers se<br />

sont ensuite rendus directement dans<br />

différentes classes pour, en plein cours,<br />

saisir, menotter et emmener les <strong>de</strong>alers,<br />

parmi lesquels Julien. L’opération<br />

a médusé par son caractère spectaculaire.<br />

Le proviseur, exaspéré par l’intensité<br />

du trafic <strong>de</strong> cannabis qui s’opérait<br />

dans son établissement et par la<br />

difficulté d’y mettre un terme, avait<br />

donné carte blanche aux forces <strong>de</strong><br />

l’ordre au niveau du « style » <strong>de</strong> leur<br />

intervention. Il souhaitait que cette<br />

« visite » soit ostensible et intrusive, <strong>de</strong><br />

façon à ce qu’un message s’imprime<br />

<strong>de</strong> manière durable et dissuasive dans<br />

les jeunes esprits : la loi existe ici<br />

comme sur le restant du territoire national<br />

et nous avons les moyens <strong>de</strong> la<br />

faire appliquer (en l’occurrence, d’en<br />

sanctionner sévèrement la transgression).<br />

Ce but a été pleinement atteint,<br />

mais trop excessivement pour être<br />

« assimilable » sur le plan psychologique.<br />

Peu après, <strong>de</strong>s parents d’élèves et<br />

<strong>de</strong>s personnels du lycée ont contesté<br />

tion récente <strong>de</strong>s Etats-Unis.<br />

Les étu<strong>de</strong>s précises sur les processus<br />

conduisant à la ségrégation urbaine<br />

par le départ <strong>de</strong>s classes moyennes<br />

et par la dynamique du marché immobilier,<br />

commencent seulement en<br />

France. On sait, bien sûr, comment<br />

ça marche, mais il est utile <strong>de</strong> connaître<br />

précisément les quartiers ou les zones<br />

touchés par la ségrégation, choisie<br />

ou subie selon la classe sociale à laquelle<br />

on appartient, si l’on veut<br />

contrôler sinon bloquer ce processus<br />

(voir les articles <strong>de</strong> Didier Desponds<br />

et <strong>de</strong> Martine Berger). Frédérick Douzet<br />

montre, à travers l’exemple <strong>de</strong> la<br />

Californie, comment l’aggravation <strong>de</strong><br />

la ségrégation conduit à une « balkanisation<br />

» politique <strong>de</strong> l’Etat.<br />

C’est là tout l’enjeu <strong>de</strong>s établissements<br />

scolaires et <strong>de</strong> leur réputation.<br />

l’aspect cowboy ou « Starsky et Hutch<br />

» <strong>de</strong> l’intervention policière, même si les<br />

faits, sur le fond, la justifiaient. Ils ont<br />

estimé que les jeunes fautifs ont été<br />

« cueillis » comme <strong>de</strong>s terroristes détenant<br />

<strong>de</strong>s otages ou s’apprêtant à faire<br />

sauter une bombe et ont critiqué fortement<br />

cette « pédagogie » <strong>de</strong> l’humiliation<br />

(vis-à-vis <strong>de</strong>s élèves interpellés) et<br />

<strong>de</strong> la terreur (vis-à-vis <strong>de</strong>s leurs condisciples).<br />

Ils auraient préféré que chaque<br />

élève arrêté ne le soit pas en public,<br />

mais après avoir été préalablement et<br />

discrètement convoqué dans le bureau<br />

du proviseur.<br />

Julien et ses camara<strong>de</strong>s interpellés ont<br />

reconnu les faits. Vus les témoignages<br />

<strong>de</strong>s surveillants et le cannabis ensuite<br />

saisi dans diverses caches, il aurait été<br />

vain et même dangereux <strong>de</strong> nier. Ces<br />

jeunes ont tous fait l’objet d’une comparution<br />

immédiate <strong>de</strong>vant le juge et,<br />

dans le même temps, ont été exclus<br />

définitivement du lycée. Le fait qu’ils<br />

soient tous mineurs, leur franchise et<br />

leur absence d’antécé<strong>de</strong>nts judiciaires<br />

ont joué en leur faveur au tribunal.<br />

Aucune peine <strong>de</strong> prison ferme n’a été<br />

prononcée contre eux. Les sanctions<br />

ont consisté en <strong>de</strong>s peines <strong>de</strong> Travail<br />

d’Intérêt Général (TIG) (4), assorties <strong>de</strong><br />

mesures d’obligation <strong>de</strong> soins (sous la<br />

forme d’un suivi psychologique ou /<br />

et éducatif). C’est dans le cadre <strong>de</strong><br />

celles-ci que j’ai rencontré Julien, <strong>de</strong>ux<br />

mois environ après son arrestation.<br />

L’adolescent oscillait entre le chagrin<br />

et la colère. Il se tenait la tête à <strong>de</strong>ux<br />

mains et ressassait plaintivement : « Les<br />

« flics » n’auraient pas dû nous choper<br />

et nous attacher <strong>de</strong>vant les autres »,<br />

tout en admettant qu’être interpellé<br />

faisait partie <strong>de</strong>s « risques du métier »<br />

<strong>de</strong> ven<strong>de</strong>ur <strong>de</strong> drogue. Julien ne savait<br />

pas que la police avait le droit d’intervenir<br />

à l’intérieur d’un lycée.<br />

Plusieurs entretiens ont été nécessaires<br />

pour que ce jeune puisse s’exprimer<br />

et prendre un peu <strong>de</strong> distance avec<br />

l’impact émotionnel <strong>de</strong>s circonstances<br />

<strong>de</strong> son arrestation. Au début <strong>de</strong> cette<br />

prise en charge, nous avons bien sûr<br />

dit clairement à l’adolescent que le<br />

contenu <strong>de</strong> nos entretiens serait<br />

étanche en termes <strong>de</strong> secret professionnel,<br />

que nos rencontres étaient la<br />

conséquence d’un partenariat bien<br />

compris et non d’une collusion ou d’un<br />

mandat – sur le mo<strong>de</strong> d’une sous-traitance<br />

- avec les services <strong>de</strong> justice. Parallèlement<br />

à cela, l’association <strong>de</strong>s parents<br />

d’élèves du lycée et une partie <strong>de</strong>s<br />

enseignants ont obtenu du chef d’établissement<br />

la tenue d’une réunion <strong>de</strong>stinée,<br />

à la lueur <strong>de</strong> ce qui venait <strong>de</strong> se<br />

passer, à convenir <strong>de</strong> modalités plus<br />

subtiles en cas <strong>de</strong> nécessité <strong>de</strong> recourir<br />

aux forces <strong>de</strong> l’ordre. Judicieusement,<br />

l’assistante sociale et l’infirmière scolaires<br />

ont profité <strong>de</strong> cette rencontre<br />

pour lancer l’idée - dans une optique<br />

d’action sanitaire et non d’ « innocentation<br />

» <strong>de</strong>s élèves interpellés et <strong>de</strong><br />

leurs acheteurs (5) - d’une réflexion avec<br />

les élèves (intéressés) sur les effets du<br />

cannabis et les « motivations » <strong>de</strong>s<br />

jeunes qui en consomment. Ces per-<br />

sonnes ont sollicité notre équipe et la<br />

pâte a pris. Une dizaine <strong>de</strong> jeunes sont<br />

venus dans nos locaux, à plusieurs<br />

reprises. Nous leur avons fourni <strong>de</strong>s<br />

informations et <strong>de</strong> la documentation. A<br />

la fin <strong>de</strong> l’année scolaire, ces élèves ont<br />

installé une exposition dans le hall du<br />

lycée, assortie d’un débat où nous<br />

avons répondu à <strong>de</strong>s questions d’élèves,<br />

<strong>de</strong> parents et <strong>de</strong> professionnels au sujet<br />

<strong>de</strong>s usages et <strong>de</strong>s usagers <strong>de</strong> « joints ».<br />

L’existence <strong>de</strong> cette action <strong>de</strong> prévention<br />

et le fait que l’association où nous<br />

travaillons y soit partie prenante ont<br />

eu <strong>de</strong>s inci<strong>de</strong>nces positives sur le <strong>de</strong>venir<br />

psychologique <strong>de</strong> Julien. L’adolescent<br />

a peu à peu « digéré » la honte<br />

intense qui, selon ses mots, l’avait<br />

« détruit » lorsque les policiers l’ont<br />

menotté en classe. En effet, « on » pouvait<br />

désormais associer le nom <strong>de</strong> son<br />

lycée et le mot « cannabis » sans penser<br />

automatiquement à l’intervention policière<br />

dont il avait, avec quelques autres,<br />

fait les frais. Julien a pu dès lors avancer<br />

dans la compréhension <strong>de</strong> sa consommation<br />

régulière <strong>de</strong> « joints ». S’il en<br />

fumait tous les jours – et <strong>de</strong>puis plus<br />

d’un an -, c’est précisément parce qu’il<br />

souffrait d’une hypersensibilité au<br />

regard (au sens large : oculaire, mais<br />

surtout verbal) que les autres portaient<br />

sur lui. Il redoutait par-<strong>de</strong>ssus tout qu’on<br />

se moque <strong>de</strong> lui, en particulier <strong>de</strong> sa silhouette<br />

chétive, <strong>de</strong> son maniement<br />

médiocre du langage et <strong>de</strong> la situation<br />

sociale mo<strong>de</strong>ste et problématique dans<br />

laquelle se trouvaient ses parents,<br />

ouvriers au chômage. L’idée qu’on puisse<br />

l’humilier – camouflée sous une réelle<br />

facilité à entrer en contact - l’angoissait<br />

en permanence. Il recherchait<br />

les effets calmants du cannabis pour<br />

« gérer » cette crainte, que les conditions<br />

<strong>de</strong> son interpellation par la police<br />

avaient décuplée ! Nous avons suivi<br />

Julien pendant près d’un an, à raison<br />

d’un entretien toutes les <strong>de</strong>ux semaines.<br />

A la fin <strong>de</strong> nos rencontres, il s’était<br />

réinscrit en Secon<strong>de</strong> dans un autre<br />

lycée, où il travaillait correctement. Il<br />

était surtout parvenu à faire face à ses<br />

difficultés psychologiques sans se ruer<br />

sur le shit, dont il faisait à présent un<br />

usage très ponctuel. Conjuguée aux<br />

sanctions judiciaires, cette forte dimi-<br />

Du traitement <strong>de</strong> la crise<br />

au long terme<br />

Les présentations lors du 19e Collège<br />

Européen <strong>de</strong> Neuropsychopharmacologie<br />

qui a été organisé du<br />

16 au 20 septembre 2006 à Paris,<br />

ont été centrées sur la qualité <strong>de</strong> vie<br />

<strong>de</strong>s patients, leur santé physique et<br />

l’observance du traitement.<br />

Plus <strong>de</strong> 70% <strong>de</strong>s patients atteints <strong>de</strong><br />

schizophrénie sont au chômage. Ils<br />

sont significativement moins satisfaits<br />

<strong>de</strong> leur qualité <strong>de</strong> vie dans le domaine<br />

<strong>de</strong> la santé, <strong>de</strong> la situation financière,<br />

<strong>de</strong> l’emploi, <strong>de</strong>s activités quotidiennes<br />

et <strong>de</strong>s relations sociales. Dans<br />

<strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s récentes, les patients sous<br />

antipsychotiques atypiques ont <strong>de</strong><br />

meilleurs revenus. Selon une autre<br />

étu<strong>de</strong>, les patients sous olanzapine<br />

ont plus souvent un emploi que ceux<br />

qui prennent <strong>de</strong> l’halopéridol.<br />

Pour Fernando Cañas, chef d’un<br />

Département <strong>de</strong> psychiatrie à Madrid,<br />

les éléments principaux <strong>de</strong> la gestion<br />

<strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> psychotique aigu comprennent<br />

: l’alliance thérapeutique<br />

(attitu<strong>de</strong> empathique, non critique,<br />

prévisible, parole rassurante, etc), l’évaluation<br />

du risque et la sécurité <strong>de</strong>s<br />

patients et du personnel. La sédation<br />

a été longtemps utilisée comme une<br />

camisole chimique pour maîtriser le<br />

patient agité. Cette approche est<br />

déconseillée dans les recommandations<br />

actuelles. Les effets secondaires,<br />

lors du traitement <strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu,<br />

peuvent altérer le fonctionnement<br />

cognitif, s’accompagner d’un vécu<br />

subjectif assez négatif et, <strong>de</strong> ce fait,<br />

nuire à l’observance du traitement.<br />

C’est pour ces raisons qu’il est nécessaire<br />

<strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong>s préférences<br />

du patient et <strong>de</strong> son état somatique.<br />

Le traitement utlisé en urgence doit<br />

être rapi<strong>de</strong>ment efficace, avoir une<br />

bonne diffusion et peu d’effets secondaires.<br />

Il doit permettre un switch<br />

facile au traitement à long cours.<br />

Actuellement, il est admis qu’il vaudrait<br />

mieux calmer le patient que <strong>de</strong><br />

le sédater. Dans le cas <strong>de</strong> patients<br />

présentant <strong>de</strong>s troubles majeurs du<br />

comportement ou sujets à <strong>de</strong>s crises<br />

d’angoisses importantes, on peut associer<br />

ponctuellement une benzodiazépine.<br />

F. Cañas rappelle que l’association<br />

<strong>de</strong> l’olanzapine IM et <strong>de</strong><br />

benzodiazépine est déconseillée. Il<br />

précise que le passage <strong>de</strong> l’halopéridol<br />

vers l’olanzapine ou l’aripiprazole est<br />

simple et peut se faire 24 heures<br />

après l’administration <strong>de</strong> l’halopéridol.<br />

Andrezina et al. (Psychopharmacology,<br />

in press) ont démontré que dans le<br />

traitement <strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu l’aripiprazole<br />

9,75 mg en IM (cette forme<br />

n’a pas encore obtenu l’AMM en<br />

Europe) est aussi efficace que l’haldol<br />

6,50 mg en IM. Comme les<br />

autres antipsychotiques, l’aripiprazole<br />

est un antagoniste <strong>de</strong>s récepteurs<br />

dopaminergiques D2, mais son originalité<br />

consiste en son activité d’agoniste<br />

partiel <strong>de</strong>s récepteurs dopaminergiques.<br />

L’aripiprazole serait aussi<br />

efficace que l’olanzapine mais moins<br />

sédatif. Il a moins d’effets secondaires<br />

que l’halopéridol, à l’exception <strong>de</strong><br />

nausées et d’insomnies plus fréquentes.<br />

Le Pr. Fagiolini <strong>de</strong> l’Université <strong>de</strong> Pittsburg<br />

a rappelé que les antipsychotiques<br />

provoquent une up-regulation<br />

(une augmentation du nombre <strong>de</strong>s<br />

récepteurs dopaminergiques suite à<br />

leur blocage par les antipsychotiques).<br />

L’aripiprazole pourrait stimuler ces<br />

récepteurs, mais l’effet d’agoniste partiel<br />

paraît significativement moins puissant<br />

que le blocage <strong>de</strong>s récepteurs<br />

dopaminergiques. Lors du switch rapi<strong>de</strong><br />

d’un antipsychotique vers l’aripiprazole,<br />

il faudrait tenir compte du<br />

risque d’effet <strong>de</strong> rebond <strong>de</strong> certains<br />

antipsychotiques à effets anticholinergiques<br />

ou antihistaminergiques.<br />

Cet effet <strong>de</strong> rebond peut être interprété<br />

par le thérapeute comme une<br />

rechute et pousser ce <strong>de</strong>rnier à arrêter<br />

l’aripiprazole. Dans ce cas, un chevauchement<br />

<strong>de</strong> l’ancien traitement et<br />

<strong>de</strong> l’aripiprazole serait préférable.<br />

Le ziprazidone 10 mg per os (cette<br />

molécule n’a pas encore l’AMM en<br />

France) a montré dans le traitement<br />

<strong>de</strong> l’épiso<strong>de</strong> aigu, une efficacité équivalente<br />

à celle <strong>de</strong> l’halopéridol 2,5-<br />

10 mg et moins d’effets extrapyramidaux.<br />

Le ziprazidone a une gran<strong>de</strong><br />

affinité pour les récepteurs D2,<br />

5HT1A et 5HT2A.<br />

La schizophrénie est souvent associée<br />

à une comorbidité et une mortalité<br />

plus fréquentes. Les maladies<br />

cardiovasculaires sont la cause principale<br />

<strong>de</strong> la mortalité élevée chez les<br />

patients chroniques. Le Pr. Cañas met<br />

en avant comme facteurs <strong>de</strong> risque<br />

pour les troubles cardiovasculaires le<br />

tabagisme, l’alcool, la sé<strong>de</strong>ntarité, ainsi<br />

que la surcharge pondérale, les<br />

troubles métaboliques, l’allongement<br />

du QT provoqués par certains antipsychotiques.<br />

Le Pr. Thomas (Université <strong>de</strong> Lille)<br />

explique que l’efficacité du traitement<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

nution <strong>de</strong> sa consommation (et donc<br />

du coût correspondant) avait supprimé<br />

en lui toute envie <strong>de</strong> vendre du<br />

cannabis. ■<br />

Pascal Hachet<br />

Psychologue , Point Ecoute « Le Tamarin » 1bis,<br />

rue Léon Blum, 60100 Creil. Tél. 03 44 64 12 53<br />

Références<br />

(1) HACHET P., Ces ados qui fument <strong>de</strong>s<br />

joints, Paris 2000, Fleurus, 188 p.<br />

(2) HACHET P., Histoires <strong>de</strong> fumeurs <strong>de</strong><br />

joints, Paris 2005, In Press, 164 p.<br />

(3) Il s’agit d’un néologisme.<br />

(4) Ainsi, Julien a dû effectuer huit semaines<br />

<strong>de</strong> travaux d’entretien (peinture, jardinage,<br />

etc.) dans plusieurs associations locales.<br />

(5) Ces <strong>de</strong>rniers, « simples » consommateurs<br />

<strong>de</strong> cannabis, n’ont pas fait l’objet <strong>de</strong><br />

poursuites pénales mais d’orientations éducatives<br />

en alternative à une condamnation<br />

(et non en plus <strong>de</strong> cette <strong>de</strong>rnière comme<br />

dans le cas <strong>de</strong> Julien). Notre équipe a reçu<br />

plusieurs dizaines <strong>de</strong> ces jeunes, souvent<br />

accompagnés par leurs parents. Sur le plan<br />

scolaire, ils furent temporairement exclus,<br />

pendant trois jours, du lycée.<br />

se traduit par la diminution du<br />

nombre <strong>de</strong>s hospitalisations. Il résume<br />

les résultats d’étu<strong>de</strong>s récentes selon<br />

lesquelles les rechutes sous olanzapine<br />

et risperdal sont significativement<br />

moins fréquentes que celles sous halopéridol.<br />

Dans l’étu<strong>de</strong> naturalistique<br />

STAR (Schizophrenia Trial of Aripiprazole,<br />

Kerwin et al. Schizophrenia<br />

Res., submitted) les patients sous aripiprazole<br />

gar<strong>de</strong>nt leur traitement significativement<br />

plus longtemps que ceux<br />

sous olanzapine, risperdal ou quétiapine.<br />

L’aripiprazole améliore significativement<br />

leur qualité <strong>de</strong> vie (Corey-<br />

Lisle et al., 14 e Congrès <strong>de</strong> l’Association<br />

Européenne <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong>, Nice, 4-8<br />

mars, 2006).<br />

Plus <strong>de</strong> la moitié <strong>de</strong>s patients abandonnent<br />

leur traitement. Les raisons<br />

en sont différents : effets secondaires<br />

du traitement (50%), absence <strong>de</strong> critique<br />

(30%) et absence d’efficacité<br />

(15%).<br />

L’étu<strong>de</strong> CATIE (Clinical Antipsychotic<br />

Trials of Intervention Effectiveness)<br />

est indépendante, sponsorisée par la<br />

NIMH (National Institut of Mental<br />

Health). Elle compare, dans <strong>de</strong>s conditions<br />

réelles et sur une pério<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

dix-huit mois, l’efficience et la tolérance<br />

<strong>de</strong> certains antipsychotiques<br />

(olanzapine, quétiapine, risperidone,<br />

ziprazidone) et <strong>de</strong> la perphénazine<br />

(neuroleptique classique <strong>de</strong> référence<br />

aux Etats-Unis) dans la schizophrénie.<br />

A 18 mois, 36% <strong>de</strong>s patients<br />

<strong>de</strong>meuraient sous olanzapine. Ce<br />

pourcentage est respectivement <strong>de</strong><br />

26 pour la rispéridone, <strong>de</strong> 25 pour<br />

le perphénazine, <strong>de</strong> 21 pour le ziprazidone<br />

et <strong>de</strong> 18 pour la quétiapine.<br />

En même temps, l’olanzapine a été<br />

associé à significativement plus <strong>de</strong><br />

prise <strong>de</strong> poids et à <strong>de</strong>s problèmes<br />

métaboliques (hyperglycémie, hypertriglycéridémie<br />

et hypercholestérolémie).<br />

L’aripiprazole n’a pas été inclus à ce<br />

sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong>, mais l’étu<strong>de</strong> STAR a<br />

observé non seulement son efficacité<br />

mais aussi une réduction rapi<strong>de</strong> et<br />

significative <strong>de</strong>s triglycéri<strong>de</strong>s et du<br />

LDL-C, une augmentation du HDL-<br />

C (facteur protecteur contre les acci<strong>de</strong>nts<br />

cardiovasculaires) et une perte<br />

<strong>de</strong> poids (<strong>de</strong> 1,3kg,). 47% <strong>de</strong>s patients<br />

l’ont préféré à leur traitement antérieur.<br />

■<br />

Vesselin Petkov<br />

Symposium Bristol-Myers Squibb/Otsuka -<br />

ECNP du 18/09/2006.


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

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20<br />

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J.-A. Malarewicz relie trois époques qui<br />

se répon<strong>de</strong>nt l’une à l’autre. Trois<br />

époques qui égrènent cette même logique<br />

<strong>de</strong> la possession... donc <strong>de</strong> la dépossession.<br />

C’est, selon le point <strong>de</strong> vue<br />

adopté au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong> l’opposition entre<br />

les <strong>de</strong>ux sexes, plutôt une opposition<br />

dans l’exercice <strong>de</strong> l’emprise sur l’autre,<br />

quelle qu’elle soit. On passe ainsi, dans<br />

la sphère <strong>de</strong> l’Europe occi<strong>de</strong>ntale, <strong>de</strong><br />

la fin du XVI e siècle au XIX e siècle, avant<br />

<strong>de</strong> s’arrêter dans une actualité encore<br />

frémissante. A chacune <strong>de</strong> ces époques<br />

donc, sur la scène <strong>de</strong> la possession, la<br />

femme et un autre. Cet autre, ou plutôt<br />

ces autres, ont d’abord été Dieu et<br />

le diable. En même temps que s’installe<br />

la Renaissance, les sorcières et les<br />

mystiques, surtout <strong>de</strong>s femmes, s’imposent<br />

dans l’espace culturel européen.<br />

L’un et l’autre, le divin comme le diabolique,<br />

se rejoignent dans une même<br />

logique et dans une même ambiguïté.<br />

Quelque <strong>de</strong>ux cent cinquante ans plus<br />

tard, avec l’apparition <strong>de</strong> la psychologie,<br />

l’émergence <strong>de</strong> nouvelles ambitions<br />

classificatoires et l’usage intensif<br />

<strong>de</strong> l’hypnose, les psychiatres du XIX e<br />

siècle inventent l’hystérie et surtout...<br />

l’hystérique ; nouvelle mise en scène<br />

<strong>de</strong> cette emprise.<br />

Au XX e siècle, à partir <strong>de</strong>s années<br />

soixante-dix, une autre épidémie est<br />

apparue en Amérique du Nord, pendant<br />

près <strong>de</strong> vingt ans, celle <strong>de</strong>s personnalités<br />

multiples. Ayant observé le<br />

<strong>de</strong>venir <strong>de</strong> ce diagnostic en France,<br />

l’auteur n’a pas manqué d’être étonné<br />

<strong>de</strong> découvrir <strong>de</strong>s résonances entre le<br />

discours <strong>de</strong>s exorcistes et celui <strong>de</strong>s psychiatres<br />

nord-américains.<br />

Trois époques donc, trois figures <strong>de</strong><br />

possession, trois images <strong>de</strong> possédées.<br />

Des résonances les parcourent tout en<br />

les différenciant. Dans leur analyse,<br />

J.-A. Malarewicz est partagé entre l’évi<strong>de</strong>nce<br />

<strong>de</strong>s rapprochement et la nécessité<br />

d’établir <strong>de</strong>s différences au-<strong>de</strong>là<br />

<strong>de</strong> l’illusion <strong>de</strong> la répétition. C’est entre<br />

ces <strong>de</strong>ux extrêmes qu’il a tenté <strong>de</strong> mener<br />

son écriture. Il s’agit donc d’un périple<br />

centré sur une triple interrogation.<br />

La première concerne la position <strong>de</strong> la<br />

femme, qui semble constamment piégée,<br />

avec sa participation plus ou moins<br />

active, dans l’illusion <strong>de</strong> la possession<br />

<strong>de</strong> l’autre. A la fois perdante et gagnante,<br />

elle donne le sentiment <strong>de</strong> ne<br />

pouvoir échapper à un jeu où la souffrance<br />

pourrait être heuristique. Les hypothèses<br />

s’enchaînent pour tenter <strong>de</strong><br />

discerner ce qu’il en est <strong>de</strong> la victime<br />

ou <strong>de</strong> la coupable. Il n’en reste pas<br />

moins que la femme montre toute la<br />

plasticité dont elle est capable. L’appétit<br />

<strong>de</strong> croyances que partagent entre<br />

eux les hommes, avec plus ou moins<br />

<strong>de</strong> violence, pose problème. Ils en arrivent<br />

à construire le meilleur comme<br />

le pire, tout en se rendant esclaves <strong>de</strong>s<br />

théories dont ils sont les initiateurs. Enfin,<br />

la question <strong>de</strong> ce qui fon<strong>de</strong> l’i<strong>de</strong>ntité<br />

interroge n’importe quel psychothérapeute,<br />

car il y trouve les paradigmes<br />

qui structurent sa pratique. Cependant,<br />

la complexité <strong>de</strong> ces notions, parce<br />

qu’elle le confronte à sa propre réalité<br />

et aux fon<strong>de</strong>ments épistémologiques<br />

<strong>de</strong> son discours, le frappe facilement<br />

d’aveuglement lorsqu’il côtoie <strong>de</strong>s frontières<br />

au-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>squelles il ne <strong>de</strong>vrait<br />

pas s’aventurer.<br />

Etre psychothérapeute<br />

Problématiques, pratiques,<br />

enjeux<br />

Coordonné par Serge Ginger,<br />

Edmond Marc, Armen Tarpinian<br />

Préface <strong>de</strong> Pierre Angel<br />

Introduction <strong>de</strong> Michel Meignant<br />

Dunod, 27 €<br />

Comme le montre Pascal-Henri Keller,<br />

le mé<strong>de</strong>cin généraliste accueille le<br />

simple tracas, tout comme « la déprime »,<br />

voire la souffrance massive. A notre<br />

« société mala<strong>de</strong> » en proie à une crise<br />

<strong>de</strong> l’autorité et du sens, donc à l’effondrement<br />

<strong>de</strong>s certitu<strong>de</strong>s, Charles Rojzman<br />

propose une « thérapie sociale »<br />

et <strong>de</strong>s stratégies <strong>de</strong> prévention. Wïlly<br />

Szafran et Léon From, souhaitent que<br />

les personnes formées puissent répondre<br />

aux critères d’expérience, <strong>de</strong><br />

professionnalité et <strong>de</strong> travail sur euxmêmes.<br />

La formation dans le cadre universitaire<br />

ne saurait se résumer à une<br />

accumulation <strong>de</strong> cours fondés sur un<br />

savoir figé. Défendant une approche<br />

complexe, Max Pagès rappelle que le<br />

risque dogmatique, réductionniste<br />

et d’inadéquation par rapport aux attentes<br />

<strong>de</strong>s stagiaires n’épargne d’ailleurs<br />

aucun cursus, qu’il s’inscrive dans le<br />

cadre <strong>de</strong>s instituts <strong>de</strong> formation ou <strong>de</strong><br />

l’université.<br />

De nombreuses associations <strong>de</strong> psychothérapie<br />

ont développé, <strong>de</strong>puis<br />

longtemps, <strong>de</strong>s formations <strong>de</strong> qualité,<br />

auxquelles s’adressent <strong>de</strong>s personnes<br />

riches d’expériences personnelles et<br />

professionnelles qui les prédisposent<br />

à l’exercice <strong>de</strong> ce métier. Il est souhaitable,<br />

comme y invite Serge Ginger, <strong>de</strong><br />

mettre en œuvre <strong>de</strong>s partenariats entre<br />

<strong>de</strong>s formations universitaires et ces<br />

centres <strong>de</strong> formation en psychothérapie.<br />

La cause <strong>de</strong>s psychothérapeutes<br />

est défendue avec talent par les animateurs<br />

<strong>de</strong> la Fédération Française <strong>de</strong><br />

Psychothérapie et Psychanalyse, en<br />

particulier Serge Ginger et Michel Meignant.<br />

La place <strong>de</strong> la psychopatholo-<br />

Lancement <strong>de</strong> la souscription pour une réédition limitée en <strong>de</strong>ux forts<br />

volumes <strong>de</strong>s 3 tomes <strong>de</strong>s « Etu<strong>de</strong>s psychiatriques » <strong>de</strong> Henri Ey<br />

Une équipe <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> vingt spécialistes sous la ccordination <strong>de</strong> P. Belzeaux,<br />

avec la collaboration exceptionnelle <strong>de</strong> P. Noel, J. Garrabé, RM Palem, M.<br />

<strong>de</strong> Boucaud, ont réalisé la nouvelle présentation avec citations <strong>de</strong> marge et<br />

in<strong>de</strong>x inédits pour cet ouvrage majeur clinique et <strong>de</strong> psychopathologie,<br />

creuset <strong>de</strong> la psychiatrie française et au confluent <strong>de</strong> la psychiatrie mondiale.<br />

Au prix <strong>de</strong> lancement exceptionnel <strong>de</strong> 112 euros pour près <strong>de</strong> 1800p.!<br />

Exemples <strong>de</strong> quelques sous chapitres :<br />

Rêve et psychopathologie • Psychanalyse et thérapeutique • Classification<br />

naturelle ou nomenclatures statistiques • Pour une approche non catégorielle<br />

<strong>de</strong> la catatonie, <strong>de</strong>s impulsions, <strong>de</strong> l’angoisse... • Pour une validation<br />

<strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> passages entre les psychoses... • La subversion du Surréalisme<br />

et <strong>de</strong> Dada n’est pas une perversion • Kierkegaard et l’angoisse du possible<br />

• Hei<strong>de</strong>gger et le rien <strong>de</strong> l’angoisse • Exhibitionnisme, Suici<strong>de</strong>, Délire <strong>de</strong> Négation,<br />

Jalousie morbi<strong>de</strong>, Mégalomanie, etc. • Binswanger et la fuite <strong>de</strong>s<br />

idées dans la Manie. Minkowski et le temps vécu dans la Mélancolie. • Neurophysiopathologie<br />

<strong>de</strong>s émotions, J. Delay et la psychose maniaco-dépressive<br />

• Mayer-Gross et la <strong>de</strong>structuration <strong>de</strong> l’espace du corps dans les Bouffées<br />

délirantes • Dostoïevski et la psychose épileptique du cas Jean-Pierre •<br />

J.P. Sartre et la confusion <strong>de</strong>s espaces vécus • Rencontre d’une patiente <strong>de</strong><br />

Bonneval avec J. Lacan • Husserl et Hei<strong>de</strong>gger.<br />

Renseignements et inscription par internet au http://www.ey.asso.fr<br />

Par écrit au CERCLE DE RECHERCHE ET D’EDITION HENRI EY<br />

2 Rue Léon Dieudé, 66000 Perpignan - Tél.-fax. 04 68 34 34 12 soir<br />

patrice.belzeaux@wanadoo.fr<br />

gie dans l’exercice <strong>de</strong>s psychothérapies<br />

et dans la formation fait l’objet <strong>de</strong> différentes<br />

contributions, comme celle<br />

d’Edmond Marc se référant à Freud et<br />

Jaspers, ou celle <strong>de</strong> Pierre Canouï qui<br />

s’appuie sur l’œuvre <strong>de</strong> Paul Diel.<br />

Les questions du diagnostic, <strong>de</strong>s limites<br />

du DSM-IV ou <strong>de</strong> la Classification internationale<br />

<strong>de</strong>s maladies, <strong>de</strong> l’évaluation<br />

et <strong>de</strong>s stratégies thérapeutiques<br />

sont traitées (Eric Champ, Serge Ginger,<br />

Isabelle Crespelle, Lucien Tenenbaum,<br />

Nicole Attali). En analysant un cas, Alain<br />

Delourme propose plusieurs <strong>de</strong>scriptions<br />

psychopathologiques en se référant<br />

à différents points <strong>de</strong> vue théoriques.<br />

La polémique suscitée par la<br />

publication, en 2004, du rapport Inserm<br />

sur « L’évaluation <strong>de</strong>s psychothérapies<br />

» a montré la nécessité <strong>de</strong> développer<br />

<strong>de</strong>s recherches cliniques et<br />

épidémiologiques faisant appel à <strong>de</strong>s<br />

métho<strong>de</strong>s privilégiant la dimension<br />

qualitative (Edmond Marc).<br />

Les barrières entre les écoles <strong>de</strong> pensées<br />

ont eu tendance à s’abaisser, du<br />

moins sur le plan international. Il en<br />

est <strong>de</strong> même sur le plan <strong>de</strong>s pratiques.<br />

Théoriciens, universitaires, chercheurs<br />

et cliniciens ont écouté et appris les uns<br />

<strong>de</strong>s autres. La prise en compte <strong>de</strong>s données<br />

<strong>de</strong>s neurosciences est <strong>de</strong> plus en<br />

plus fréquente ainsi que la reconnaissance<br />

du bien fondé <strong>de</strong> la chimiothérapie<br />

dans certaines indications, comme<br />

le confirment Willy Szafran et Léon<br />

From. Les recherches menées sur l’efficacité<br />

<strong>de</strong>s psychothérapies mettent<br />

en évi<strong>de</strong>nce l’importance <strong>de</strong> facteurs<br />

communs indépendants d’un système<br />

théorique particulier. Ces facteurs communs,<br />

comme le montre Nicolas Duruz,<br />

incluent la qualité <strong>de</strong> l’alliance <strong>de</strong><br />

travail thérapeutique, les compétences<br />

relationnelles du thérapeute et son expérience,<br />

ou la volonté <strong>de</strong> changement<br />

du patient. Maridjo Graner montre que<br />

les différences <strong>de</strong> terminologie couvrent<br />

une communauté <strong>de</strong> contenu et<br />

<strong>de</strong> sens. Charles Gellman, témoignant<br />

<strong>de</strong> l’évolutivité <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s, Conrad<br />

Lecomte et Annette Richard, espérant<br />

l’émergence d’une psychothérapie pleinement<br />

relationnelle, proposent <strong>de</strong><br />

dépasser les mythes idéalisateurs du<br />

thérapeute expert, neutre et objectif<br />

ou, à l’inverse, celui du thérapeute empathique,<br />

comme celui décrit par Carl<br />

Rogers, pour promouvoir un thérapeute<br />

retrouvant sa subjectivité en puisant<br />

ses ressources dans l’expérience réfléchie<br />

<strong>de</strong> sa propre vulnérabilité. L’accent<br />

est également mis par Armen Tarpinian<br />

sur les retombées culturelles et<br />

sociales, voire anthropologiques, <strong>de</strong> la<br />

psychothérapie, à partir <strong>de</strong> ses concepts<br />

et <strong>de</strong>s pratiques qu’elle inspire.<br />

Freud... en liberté<br />

Yvon Brès<br />

Ellipses<br />

Ce livre n’est ni une présentation <strong>de</strong><br />

Freud, ni une interprétation, ni même<br />

un libre parcours dans son œuvre, mais<br />

une série <strong>de</strong> rencontres. Il n’y est pas<br />

question du freudisme en général, mais<br />

<strong>de</strong> Freud à propos <strong>de</strong> la jalousie, <strong>de</strong>s<br />

amours infantiles, <strong>de</strong> la solitu<strong>de</strong>, ou encore<br />

<strong>de</strong> points précis <strong>de</strong> son œuvre :<br />

son rapport à Robertson Smith, les coupures<br />

tendancieuses <strong>de</strong> l’édition <strong>de</strong><br />

1950 <strong>de</strong>s lettres à Fliess, la lecture lacanienne<br />

<strong>de</strong> la notion <strong>de</strong> « Chose ».<br />

L’école, comment ça marche ?<br />

Maternelle-Elémentaire<br />

Petit gui<strong>de</strong> à l’usage <strong>de</strong>s parents<br />

Fabienne Messica<br />

Nouvelle édition actualisée<br />

La Découverte, 10 €<br />

Ce gui<strong>de</strong> donne une information sur<br />

l’école maternelle et élémentaire : inscription,<br />

règlement intérieur, frais, assurances,<br />

cycles d’apprentissage,<br />

<strong>de</strong>voirs, notes, santé, cantine, étu<strong>de</strong>,<br />

activités extrascolaires... Il se veut également<br />

une ai<strong>de</strong> quand les choses ne<br />

se passent pas aussi bien que qu’on<br />

peut le souhaiter : conflit avec un enseignant,<br />

difficultés <strong>de</strong> l’enfant, violences,<br />

racisme, grèves, etc.<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006


22<br />

LIVRES<br />

De Freud au trauma africain<br />

Les cahiers du GRAPPAF*<br />

L’Harmattan, 20 €<br />

Les sociétés humaines endurent <strong>de</strong><br />

plus en plus <strong>de</strong> chocs psychiques :<br />

horreurs ou traumas. Ces irruptions<br />

du réel dans le cours <strong>de</strong> leurs existences<br />

laissent une marque indélébile<br />

chez ceux qui les subissent. Au<br />

terrorisme aveugle, s’ajoutent <strong>de</strong>s catastrophes<br />

naturelles, industrielles, et<br />

les pandémies, dont les effets co-latéraux<br />

génèrent <strong>de</strong> lour<strong>de</strong>s traces<br />

psycho-sociales, souvent aggravées<br />

d’un trauma chez l’impliqué, pour <strong>de</strong><br />

longues années s’il n’est pas pris en<br />

charge <strong>de</strong> manière adaptée. En Afrique<br />

souvent, comme la langue kinyarwanda<br />

l’indique, le mot « trauma »<br />

n’existe pas. Ici il fallut l’inventer, on<br />

forgea le mot « itsembabatutsi » à partir<br />

<strong>de</strong> celui <strong>de</strong> « itembatsenba » qui<br />

voulait dire « massacre » pour signifier<br />

le génoci<strong>de</strong> <strong>de</strong>s tutsi au Rwanda.<br />

*Groupe <strong>de</strong> Recherche et d’Application <strong>de</strong>s<br />

Concepts Psychanalytiques en Afrique Francophone.<br />

Le sujet<br />

Instance grammaticale selon<br />

Freud<br />

Michèle Bompard-Porte<br />

L’Esprit du Temps, 21 €<br />

Parmi les dix-sept volumes <strong>de</strong>s œuvres<br />

complètes <strong>de</strong> Freud, plus <strong>de</strong> six mille<br />

pages publiées <strong>de</strong> 1892 à 1938, le<br />

mot « sujet », Subjekt, n’apparaît curieusement<br />

que vingt-huit fois. Etant<br />

donné l’extrême fréquence <strong>de</strong> l’utilisation<br />

<strong>de</strong> ce terme en psychologie et<br />

en philosophie, l’évitement est spectaculaire.<br />

Michèle Bompard-Porte<br />

montre que Freud délaisse la notion<br />

<strong>de</strong> « sujet », car il restreint son usage<br />

à la fonction grammaticale et opte<br />

pour le « Je», das Ich, pronom personnel<br />

substantivé, lorsqu’il veut désigner<br />

cette instance psychique pour<br />

l’essentiel inconsciente. Il s’inscrit ainsi<br />

dans le courant <strong>de</strong> pensée fondé par<br />

Aristote, repris par Nietsche, pour qui<br />

l’hétéronomie du psychisme est fondamentale,<br />

en contradiction avec l’option<br />

lacanienne <strong>de</strong>s psychanalystes<br />

actuels <strong>de</strong> langue française qui déci<strong>de</strong>nt<br />

en faveur d’un sujet divisé, inspiré<br />

<strong>de</strong> Saint Augustin et conforme à<br />

la tradition <strong>de</strong> la pensée chrétienne.<br />

La critique du sujet augustinien avait<br />

déjà été formulée par Jean-Jacques<br />

Rousseau qui objectait à l’évêque<br />

d’Hippone qu’un amour <strong>de</strong> soi modéré<br />

rendait le sujet autonome et susceptible<br />

<strong>de</strong> contrat, tout en lui évitant<br />

les <strong>de</strong>stins <strong>de</strong> la division et <strong>de</strong> la soumission.<br />

Freud se serait-il accordé<br />

avec le philosophe genevois, en substituant<br />

le « Je»au « sujet » ?<br />

La machine à exclure<br />

Les faux-semblants du retour à<br />

l’emploi<br />

Noëlle Burgi<br />

La Découverte, 20 €<br />

Noëlle Burgi, dans ce livre, à partir<br />

<strong>de</strong> témoignages recueillis lors d’une<br />

enquête dans un département d’Ile<strong>de</strong>-France,<br />

propose une analyse critique<br />

<strong>de</strong>s critères <strong>de</strong> jugement mobilisés<br />

pour évaluer la situation <strong>de</strong>s<br />

allocataires du RMI. Entre ceux-ci et<br />

les intervenants <strong>de</strong>s dispositifs d’insertion,<br />

un véritable jeu <strong>de</strong> dupes s’est<br />

installé : pour le Rmiste mieux vaut<br />

prétendre croire à l’énième stage proposé<br />

; et pour l’intervenant, il est souvent<br />

plus facile <strong>de</strong> déplacer son impuissance<br />

sur le terrain <strong>de</strong>s difficultés<br />

psychologiques <strong>de</strong> l’allocataire. Un<br />

jeu pas toujours conscient, mais porteur<br />

<strong>de</strong> conséquences graves, individuellement<br />

et socialement.<br />

ANNONCES EN BREF<br />

21 et 22 octobre 2006. Paris. XXXV èmes<br />

Journées <strong>de</strong> la Cause Freudienne sur le<br />

thème : L’envers <strong>de</strong>s familles. Le lien psychanalytique<br />

dans l’expérience psychanalytique.<br />

Renseignements et inscriptions :<br />

Site : www.causefreudienne.org.<br />

<br />

6 et 7 novembre 2006. La Rochelle.<br />

18 èmes Journées Nationales <strong>de</strong>s Secteurs<br />

<strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> en Milieu Pénitentiaire<br />

et Unités pour Mala<strong>de</strong>s Difficiles,<br />

organisées par le SPMP, Centre Hospitalier<br />

Henri Laborit, Poitiers, et l’Association<br />

<strong>de</strong>s Secteurs <strong>de</strong> <strong>Psychiatrie</strong> en<br />

Milieu Pénitentiaire. Inscriptions : EVE-<br />

NYS, 51 bd <strong>de</strong> Courcelles, 75008 Paris.<br />

Tél. : 01 55 200 504. Fax : 01 55 200 509.<br />

E-mail : evenys@evenys.com. Site :<br />

http://congres.evenys.com<br />

9 novembre 2006. Lillebonne. Journée<br />

<strong>de</strong> Formation du Secteur <strong>de</strong> psychiatrie<br />

générale du Centre Hospitalier <strong>de</strong> Lillebonne,<br />

organisée par l’Association<br />

« Méandres » sur le thème : Confort mo<strong>de</strong>rne,<br />

« psy » à tous les étages... Inscriptions<br />

: Association « Méandres », Hôpi-<br />

tal Pierre Janet, UCID, 47 rue <strong>de</strong> Tourneville,<br />

BP 24, 76083 Le Havre Cé<strong>de</strong>x.<br />

Tél. : 02 32 73 39 47.<br />

10 et 11 novembre 2006. Paris. Colloque<br />

International Francophone organisé<br />

par le Groupement pour l’Etu<strong>de</strong><br />

et les Applications Médicales <strong>de</strong> l’Hypnose<br />

(GEAMH) sur le thème : Hypnose<br />

et pensée magique. Jeux d’imagination,<br />

jeux <strong>de</strong> rôles et croyances. Renseignements<br />

et inscriptions : GEAMH, 23 rue<br />

<strong>de</strong> la Rochefoucauld, 75009 Paris. Tél. :<br />

01 49 70 88 52. Fax : 01 42 81 11 17.<br />

E-mail : geamh@hymnosemedicale.com.<br />

Site : www.hypnosemedicale.com<br />

17 et 18 novembre 2006. Colloque<br />

GYPSY VI sur le thème : A quoi servent<br />

les hommes ? Inscriptions : JS Congrès,<br />

39-41 rue Louis Blanc, 92038 Paris La<br />

Défense. Tél. : 01 43 34 76 71. Fax :<br />

01 47 17 68 60. E-mail : jscongres@wanadoo.fr.<br />

Site : www.jpecho.com<br />

25 novembre 2006. Paris. Prochain colloque<br />

du Réseau pour la Psychanalyse<br />

à l’Hôpital sur le thème : Les urgences en<br />

mé<strong>de</strong>cine, psychiatrie et psychanalyse. Informations:<br />

01 47 70 56 02.<br />

25 novembre 2006. Paris. Journée scien-<br />

Centre Hospitalier Saint-Anne<br />

1 rue Cabanis, 75674 Paris Cé<strong>de</strong>x 14<br />

CPOA Tél. : 01 45 65 83 70 - Fax : 01 45 65 82 48<br />

45 €*<br />

pour un an<br />

75 €*<br />

pour 2 ans<br />

Tarif<br />

étudiant et internes<br />

30 €*<br />

*supplément étranger<br />

et DOM/TOM =30 €/an<br />

Le CPOA présente<br />

Entretien et examen en urgence<br />

Annonce du diagnostic<br />

9h - 10h30 - Salle <strong>de</strong> réunions du CPOA<br />

Service du Docteur Marie-Jeanne Guedj<br />

Mardi 14 novembre 2006 : Gilles Vidon, Chef <strong>de</strong> service, Hôpital Esquirol, Schizophrénie<br />

déficitaire. Discutant : Alain Mercuel, Chef <strong>de</strong> service, Equipe santé<br />

mentale et exclusion sociale, CHSA<br />

Mardi 12 décembre 2006 : Christian Spadone, Praticien hospitalier, Hôpital<br />

Saint-Louis, Dépression et affection médicale. Discutant : Alexis Braitman,<br />

Praticien hospitalier, CPOA<br />

Mardi 9 janvier 2007 : Yves Contejean, Chef <strong>de</strong> service, Intersecteur 8, CHSA,<br />

Autisme. Discutant : Bruno Harle, Praticien hospitalier pédopsychiatre<br />

Mardi 13 février 2007 : Alexandra Dürr, Neurologue, Hôpital <strong>de</strong> la Salpêtrière,<br />

Maladie <strong>de</strong> Huntington. Discutant : Gérard Massé, Chef <strong>de</strong> service, S 15,<br />

CHSA<br />

Mardi 20 mars 2007 : Christophe André, Psychiatre SHU, CHSA, Trouble<br />

anxieux. Discutant : Marie-Jeanne Guedj, Chef <strong>de</strong> service, CPOA<br />

Mardi 3 avril 2007 : Christine Foulon, CMME, FHA, Trouble du comportement<br />

alimentaire. Discutant : Pierre Lana, Praticien hospitalier, CPOA<br />

Mardi 15 mai 2007 : Christine Mirabel-Sarron, Praticien hospitalier, CMME,<br />

CHSA, Trouble obsessionnel compulsif. Discutant : Annie Viala, Praticien hospitalier,<br />

S 13, CHSA<br />

Mardi 12 juin 2007 : François Petitjean, Chef <strong>de</strong> service, S 7, CHSA, Dépression<br />

récurrente. Discutant : Eric Gallois, Praticien hospitalier, CPOA<br />

Nom :<br />

Prénom :<br />

Adresse :<br />

tifique organisée par l’AREFFS sur le<br />

thème : Corps et psychanalyse. Quand le<br />

psychanalyste sort <strong>de</strong> son fauteuil... Renseignements<br />

et inscriptions : AREFFS,<br />

11 square <strong>de</strong> Clignacourt, 75018 Paris.<br />

Tél. : 01 42 64 90 17.<br />

25 et 26 novembre 2006. Paris. Prochaines<br />

journées Gisela Pankow sur le<br />

thème : Espace, temps, psychoses. Renseignements<br />

: SPF, 23 rue Campagne-<br />

Première, 75014 Paris.Tél. : 01 43 22 12 13.<br />

AIAGP, secrétariat c/o Dr. Ch. Chaput,<br />

24 bis avenue du Prési<strong>de</strong>nt Wilson,<br />

75116 Paris. Tél. : 01 47 55 61 62.<br />

30 novembre au 2 décembre 2006.<br />

Nantes. Colloque du GRAPE sur le thème :<br />

Mélodrame et melo-dit <strong>de</strong> la séparation.<br />

De l’enfant objet <strong>de</strong>s dysfonctionnements<br />

<strong>de</strong> sa famille à l’enfant objet <strong>de</strong>s idéologies<br />

institutionnelles. Inscriptions : Tél. :<br />

01 48 78 30 88. Fax : 01 40 16 95 92.<br />

E-mail : enfance@grape@wanadoo.fr<br />

1er décembre 2006. Paris. Colloque<br />

Enfances & Psy sur le thème : Les marques<br />

du corps. Renseignements et inscriptions<br />

: E-mail : colloques@enfancesetpsy.net.<br />

08 71 57 99 94 (boîte vocale).<br />

1er décembre 2006. Paris. Colloque organisé<br />

par la Fondation Hôpitaux <strong>de</strong>-<br />

Paris - Hôpitaux <strong>de</strong> France sur le thème :<br />

Les besoins <strong>de</strong> soins <strong>de</strong>s adolescents en<br />

souffrance, quelles réponses à l’hôpital ?<br />

Pour s’inscrire en ligne au colloque ou<br />

en savoir plus sur la Fondation : www.fondationhopitaux.fr<br />

1er décembre 2006. Bor<strong>de</strong>aux. 12 ème<br />

Colloque <strong>de</strong> l’Association ASAIS sur le<br />

thème : Social et <strong>Psychiatrie</strong> face à l’exclusion<br />

: les chemins <strong>de</strong> l’innovation sontils<br />

encore praticables ? Inscriptions : Association<br />

ASAIS, 6 rue Ausone, 33000<br />

Bor<strong>de</strong>aux. Tél. : 05 56 52 60 59. E-mail :<br />

asais.icare@free.fr. Site : www.asaisicare.org<br />

7 décembre 2006. 1 ère Journée Nationale<br />

sur le thème : Douleur et Santé Mentale.<br />

Etat <strong>de</strong>s lieux. Vulnérabilité et handicap<br />

psychique. Renseignements et<br />

inscriptions : Evelyne Rubio, Tél. :<br />

05 57 97 19 19. Fax : 05 57 97 19 15.<br />

E-mail : evelyne.rubio@comm-sante.com<br />

7 et 8 décembre 2006. Arcachon. XXIII ème<br />

Congrès <strong>de</strong> la Société Française <strong>de</strong> Psycho-Oncologie<br />

sur le thème : Le proche,<br />

nouvel acteur du soin : rôles assignés, rôles<br />

assumés. Inscriptions : Société française<br />

<strong>de</strong> psycho-oncologie, Association psychologie<br />

et cancers SFPO-APC, 14 rue<br />

Corvisart, 75013 Paris. Tél. : 01 45 87 86 31.<br />

E-mail : psycho-onco@wanadoo.fr<br />

9 décembre 2006. Boulogne-Billancourt.<br />

Colloque organisé par le Collège<br />

International <strong>de</strong> l’Adolescence et le Laboratoire<br />

<strong>de</strong> Psychologie Clinique et <strong>de</strong><br />

Psychopathologie (paris 5) sur le thème :<br />

Adolescence et éducation. Renseignements<br />

et inscriptions : Tél. : 01 55 20 58 22<br />

(mardi, mercredi, jeudi après-midi). Email<br />

: colloquecila@gmail.com<br />

14 et 15 décembre 2006. Paris. Colloque<br />

organisé par la Ligue Française<br />

pour la Santé Mentale sur le thème : La<br />

Je m’abonne pour : 1 an 2 ans<br />

N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

famille dans tous ses ... états. L’amour au<br />

risque du conflit. Inscriptions : Tél. :<br />

01 42 66 20 70. Fax : 01 42 66 44 89.<br />

E-mail : ifsm@worldonline.fr<br />

27 janvier 2007. Paris. Journée scientifique<br />

organisée par Catherine Chabert,<br />

Dominique Cupa, René Kaës, René Roussillon<br />

sur le thème : Didier Anzieu. Le Moipeau<br />

et la psychanalyse <strong>de</strong>s limites. Renseignements<br />

: Estelle Georges-Chassot,<br />

Carnet Psy, 8 avenue JB Clément, 92100<br />

Boulogne. Tél. : 01 46 04 74 35. Fax :<br />

01 46 04 74 00. E-mail : estelle@carnetpsy.com.<br />

Site : www.carnetpsy.com<br />

9 mars 2007. Paris. Colloque organisé<br />

par le Collège International <strong>de</strong> l’Adolescence<br />

et le Laboratoire <strong>de</strong> psychologie<br />

clinique et <strong>de</strong> psychopathologie<br />

(Paris 5) sur le thème : Alcool et adolescence.<br />

Renseignements et inscriptions :<br />

Valérie Discour, Boîte A 5, 8 rue <strong>de</strong>s<br />

Portes Blanches, 75018 Paris. Tél. :<br />

01 42 23 44 12. E-mail : v.discour@wanadoo.fr<br />

19 et 20 mars 2007. Marseille. Colloque<br />

organisé par l’Association ANTHEA sur<br />

le thème : Quand la sexualité <strong>de</strong>vient délit.<br />

Inscriptions : Association ANTHEA,<br />

7 place <strong>de</strong>s Herbes, BP 219, 83006 Draguignan<br />

Ce<strong>de</strong>x. Tél. : 04 94 68 98 48.<br />

Fax : 04 94 68 28 74. E-mail : anthea@club-internet.fr<br />

31 mars 2007. Boulogne-Billancourt.<br />

Colloque organisé par l’Association « Clinique<br />

<strong>de</strong>s Apprentissages » sur le thème :<br />

Regard clinique sur les troubles dits « instrumentaux<br />

». Renseignemets : Tél. :<br />

01 55 20 58 22 (l’après-midi). Fax :<br />

01 55 20 59 84. E-mail : clinap@univparis5.fr<br />

Bulletin d’abonnement<br />

Le <strong>Journal</strong> <strong>de</strong> <strong>Nervure</strong> + La Revue<br />

CHÈQUE À L’ORDRE DE MAXMED à envoyer avec ce bulletin,<br />

54, boulevard <strong>de</strong> la Tour Maubourg, 75007 Paris<br />

Téléphone : 01 45 50 23 08<br />

Je souhaite recevoir une facture acquittée justifiant <strong>de</strong> mon abonnement.<br />

Le thérapeute en tant<br />

qu’artiste<br />

Joseph C. Zinker<br />

L’Harmattan, 21 €<br />

Dans ce recueil d’articles, Joseph<br />

Zinker s’adresse tout particulièrement<br />

aux Gestalt-thérapeutes qui<br />

y trouveront exposée, dans le<br />

contenu comme dans la forme,<br />

l’une <strong>de</strong>s racines essentielles <strong>de</strong><br />

leur métho<strong>de</strong> et leur philosophie.<br />

La première partie, qui est autobiographique,<br />

révèle les liens entre<br />

l’histoire <strong>de</strong> vie d’un homme et son<br />

travail en tant que thérapeute. Un<br />

dialogue imaginaire avec F. Perls<br />

conduit à la <strong>de</strong>uxième partie qui a<br />

pour sujet la créativité et la posture<br />

du thérapeute. Y sont abordés<br />

<strong>de</strong>s thèmes tels que l’intégrité<br />

et le changement, le saut créatif,<br />

le contexte et la métaphore, la pensée<br />

synthétique, l’intervention processuelle<br />

et sa complexité, la présence<br />

en tant que force évocatrice,<br />

la transformation <strong>de</strong>s systèmes<br />

énergétiques, etc. La troisième partie<br />

traite essentiellement du travail<br />

avec les couples considérés comme<br />

systèmes.<br />


N°7 - TOME XIX - OCTOBRE 2006<br />

LIVRES ET REVUES<br />

Bébé, où crèches-tu ?<br />

Dossier coordonné par Julianna<br />

Vamos et Miriam Rasse<br />

Spirale juin 2006 n°38<br />

Erès, 12 €<br />

Ce numéro <strong>de</strong> Spirale propose un carrefour<br />

<strong>de</strong> points <strong>de</strong> vue, d’approches et<br />

<strong>de</strong> témoignages.<br />

Si les crèches ont été créées pour répondre<br />

à un besoin <strong>de</strong> gar<strong>de</strong> pour les<br />

parents pendant leur temps d’exercice<br />

professionnel, elles ont été aussi un soutien<br />

pour les femmes dans leur démarche<br />

d’émancipation.<br />

Outre cette offre d’un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>,<br />

encore loin d’être accessible à tous, une<br />

crèche « suffisamment bonne » peut être<br />

un lieu exceptionnel d’écoute, <strong>de</strong> partage<br />

et <strong>de</strong> soutien dans la fonction parentale<br />

: dans quel autre lieu un parent<br />

peut-il parler <strong>de</strong> son enfant, et le regar<strong>de</strong>r<br />

avec <strong>de</strong>s professionnelles <strong>de</strong> la<br />

petite enfance qui le connaissent bien<br />

et qui éprouvent le besoin, l’envie et le<br />

plaisir <strong>de</strong> partager avec eux ? Partage<br />

et soutien <strong>de</strong>viennent possibles si <strong>de</strong>s<br />

temps quotidiens d’échange peuvent<br />

se vivre, si « le lien parent-enfant est respecté<br />

» (Maryvonne Le Gall), si les choix<br />

<strong>de</strong>s parents peuvent être pris en compte<br />

et soutenus (témoignage <strong>de</strong> cette mère<br />

qui continuera à allaiter son bébé accueilli<br />

à la crèche), et si peuvent être<br />

écoutées les inquiétu<strong>de</strong>s et les appréhensions<br />

que tout parent éprouve. Dans<br />

certains lieux, <strong>de</strong>s initiatives comme «le<br />

massage bébés » (Evelyne Vergnangeal)<br />

peuvent ai<strong>de</strong>r à la consolidation <strong>de</strong>s<br />

liens avant <strong>de</strong> se séparer, et à la différenciation<br />

<strong>de</strong>s places entre parents et<br />

professionnels. Ce numéro permet d’abor<strong>de</strong>r<br />

l’univers <strong>de</strong> la crèche (Hélène Dutertre,<br />

Denis Mellier) pour s’interroger<br />

sur « ce que le bébé peut attendre <strong>de</strong> sa<br />

journée à la crèche » (Julianna Vamos)<br />

et ce qu’une équipe <strong>de</strong> professionnels<br />

doit penser, réfléchir, mettre en place<br />

pour y répondre. Cet accueil doit être<br />

particulièrement réfléchi et concerté<br />

pour s’ajuster au rythme et aux besoins<br />

encore plus particuliers d’un enfant atteint<br />

<strong>de</strong> handicap comme en témoigne<br />

l’équipe <strong>de</strong>s Cèdres (Jocelyne Roux-<br />

Levrat).<br />

Accueillir ces tout jeunes enfants et leurs<br />

parents suscite <strong>de</strong>s questionnements et<br />

met en jeu <strong>de</strong>s processus plus ou moins<br />

conscients, projectifs, d’i<strong>de</strong>ntification,<br />

qu’il est sûrement nécessaire <strong>de</strong> mieux<br />

connaître et reconnaître pour cheminer<br />

vers la construction d’une relation à<br />

23<br />

trois, parent-enfant-professionnel (Maryvonne<br />

Le Gall). Pour certains enfants,<br />

pour certains parents, la crèche peut<br />

alors <strong>de</strong>venir un véritable point d’appui,<br />

une ai<strong>de</strong>, un lieu possible <strong>de</strong> prévention<br />

précoce (Nicole Simon et<br />

Miriam Rasse). Avec un certain nombre<br />

<strong>de</strong> conditions à garantir et affiner sans<br />

cesse, la crèche peut alors <strong>de</strong>venir un<br />

lieu <strong>de</strong> socialisation, faite d’empathie,<br />

<strong>de</strong> développement <strong>de</strong> soi, <strong>de</strong> sensibilité<br />

(Chantal Grosléziat).<br />

La famille<br />

Sous la direction <strong>de</strong> Jacques<br />

Bouineau<br />

L’Harmattan, 26 €<br />

Ce volume inaugure une nouvelle collection<br />

<strong>de</strong>stinée à remplacer la revue<br />

Méditerranée publiée <strong>de</strong> 1994 à 2004.<br />

La publication <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> cette nouvelle<br />

collection est assurée par le Centre<br />

d’Etu<strong>de</strong>s Internationales sur le Romanité<br />

(CEIR - Université <strong>de</strong> La Rochelle).<br />

Ce premier numéro est consacré à la<br />

famille à partir <strong>de</strong> cinq exemples tirés<br />

<strong>de</strong> cinq civilisations différentes : L’Egypte<br />

ancienne (à travers l’institution du sendjet),<br />

la Mésopotamie (présentation générale),<br />

l’Empire byzantin (réflexion sur<br />

la parenté), la famille en droit musulman<br />

(présentation générale) et une mise<br />

en parallèle <strong>de</strong> la famille romaine avec<br />

la famille chrétienne.<br />

A ces étu<strong>de</strong>s qui forment un ensemble<br />

sur la famille envisagée sous l’angle <strong>de</strong><br />

la romanité méditerranéenne telle que<br />

l’étudie le CEIR, s’ajoute une contribution<br />

sur l’influence <strong>de</strong>s modèles antiques<br />

sur la définition du co<strong>de</strong>, <strong>de</strong> 1680 à<br />

1789.<br />

Directeur <strong>de</strong> la rédaction :<br />

Gérard Massé<br />

Rédacteur en chef : François Caroli<br />

Comité <strong>de</strong> rédaction : Centre Hospitalier<br />

Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75014 Paris.<br />

Tél. 01 45 65 83 09.<br />

Botbol M., Carrière Ph., Dalle B., Goutal M.,<br />

Guedj M.-J., Jonas C., Lascar Ph., Martin A.,<br />

Paradas Ch., Sarfati Y., Spadone C.,<br />

Tribolet S., Weill M.<br />

Comité scientifique : Bailly-Salin P.<br />

(Paris), Besançon G. (Nantes), Bourgeois<br />

M. (Bor<strong>de</strong>aux), Buisson G. (Paris), Caillard<br />

V. (Caen), Chabannes J.-P. (Grenoble),<br />

Chaigneau H. (Paris), Christoforov B.<br />

(Paris), Colonna L. (Rouen), Cornillot P.<br />

(Paris), Dufour H. (Genève), Dugas M.<br />

(Paris), Féline A. (Paris), Ginestet D.<br />

(Paris), Guelfi J.-D. (Paris), Guyotat J.<br />

(Lyon), Hochmann J. (Lyon), Koupernik<br />

C. (Paris), Lambert P. (Chambéry), Loo H.<br />

(Paris), Marcelli D. (Poitiers), Marie-<br />

Cardine M. (Lyon), Mises R. (Paris),<br />

Pequignot H. (Paris), Planta<strong>de</strong> A. (Paris),<br />

Ropert R. (Paris), Samuel-Lajeunesse B.<br />

(Paris), Scotto J.-C. (Marseille), Sechter D.<br />

(Lille), Singer L. (Strasbourg), Viallard A.<br />

(Paris), Zarifian E. (Caen).<br />

Comité francophone : Anseau M.<br />

(Belgique), Aubut J. (Canada), Bakiri M.-A.<br />

(Algérie), Cassan Ph. (Canada), Douki S.<br />

(Tunis), Held T. (Allemagne), Lalon<strong>de</strong> P.<br />

(Canada), Moussaoui D. (Maroc), Romila A.<br />

(Roumanie), Simon Y.-F. (Belgique), Stip E.<br />

(Canada), Touari M. (Algérie).<br />

Publicité<br />

médical<br />

SUPPORTER<br />

promotion<br />

Renata Laska - Susie Caron,<br />

54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris.<br />

Tél. 01 45 50 23 08.<br />

Télécopie : 01 45 55 60 80<br />

E-mail : info@nervure-psy.com<br />

Edité par Maxmed<br />

S.A. au capital <strong>de</strong> 40 000 €<br />

54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris<br />

Maquette : Maëval. Imprimerie Fabrègue<br />

Directeur <strong>de</strong> la Publication :<br />

G. Massé<br />

www.nervure-psy.com

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